Indicateur > p.1
Production > p.2
Taille moyenne d’une exploitation agricole
Diminution de la surface agricole utile entre 1955 et 2010
54 ha
Savoir > p.3
BAC
-19 %
73,5 % Des jeunes agriculteurs (- de 40 ans) ont au moins le baccalauréat.
Economie > p.4
Part de l’agriculture française en Europe
- 0,4 % 18,4 % 2009
Observatoire Alptis de la protection sociale Lettre n°34 - février 2013
www.observatoire-alptis.org
Le nouveau visage de l’agriculteur Du paysan au chef d’entreprise
La terre, un outil de production
Le portrait de l’agriculteur de 2013 a peu de choses en commun avec celui de 1955, date de création du premier Code rural. En 60 ans, l’agriculture a profondément évolué, passant notamment de la petite exploitation vivrière au productivisme des années 80. Aujourd’hui, tandis qu’un certain nombre d’exploitants met déjà en œuvre des pratiques plus respectueuses de l’environnement, l’Europe érige l’agriculture en « gestionnaire de l’espace naturel ». Radiographie d’un secteur et de ses acteurs dont la mutation est loin d’être achevée. Part d’agriculteurs dans la population active
26,8 %
2,7 %
Nbre d’exploitations agricoles
2,3 millions
490 000 1950
2010 Observatoire Alptis de la protection sociale - 12, rue Clapeyron 75379 Paris cedex 08
1950
Les différentes lois d’orientation agricole ont peu à peu transformé l’exploitation familiale en une activité entrepreneuriale, la terre devenant un outil de production géré par un chef d’exploitation. A tous les niveaux, statutaire, juridique, socioprofessionnel, le métier s’est professionnalisé. Si cette évolution a permis une explosion des rendements (multipliés par 3, aussi bien pour les céréales que pour la production laitière), elle est aussi devenue un enjeu politique national et européen. Protégés par la Politique Agricole Commune, les agriculteurs (une population estimée entre 700 000 et 1,2 millions de personnes selon les modes de recension) vont devoir s’adapter à sa nouvelle version prévue en 2014.
2010
Publication éditée par
Direction de la publication : Georges Coudert
L’OBSERVATOIRE ALPTIS DE LA PROTECTION SOCIALE
Coordination éditoriale : Pascal Geneyton
www.observatoire-alptis.org
Rédaction /Maquette : In Medias Res ISSN : 1627-97-83. Dépôt légal en cours.
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La lettre de l’Observatoire > Le nouveau visage de l’agriculteur
1955 / 2012 La totale mutation de l’agriculture Entre 1950 et 2012, le nombre d’exploitations a diminué de 78,8 %. Cette mutation inéluctable a été accompagnée par les pouvoirs publics tant au niveau national qu’européen : le foncier agricole a très rapidement fait l’objet d’une régulation grâce à la création de sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER). Des statuts juridiques séparant le patrimoine de l’exploitation de celui de l’exploitant, un système de quotas et de subventions ont contribué à sécuriser l’agriculteur et ont donné une assise financière propice à des exploitations importantes, de l’ordre de 54 ha de surface en moyenne. Les exploitations sont donc moins nombreuses (- 30 % entre 2000 et 2010, passant de 663 800 à 489 977), mais sont plus grandes car même si l’espace agricole a diminué de 19 % en 60 ans (à cause de l’urbanisation), la France possède encore la plus grande surface agricole européenne.
Les nouvelles formes juridiques L’exploitation individuelle a comme inconvénients de lier le patrimoine personnel de l’agriculteur à l’exploitation et de limiter la capacité à lever des fonds pour investir. Les pouvoirs publics ont ainsi créé plusieurs formes juridiques : groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC en 1962), société civile d’exploitation agricole (SCEA en 1978) et entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL en 1985). La forme individuelle reste toutefois la norme jusqu’à l’orée du XXIè siècle qui verra un bond de 18 % des EARL en 10 ans. n
L’augmentation par vache de la production laitière
Dénombrement des actifs agricoles Le ministère de l’agriculture (recensement agricole) compte les travailleurs permanents des exploitations agricoles (sans distinguer activité principale ou secondaire). L’Insee se base sur son étude statistique et sur le métier en tant qu’activité principale tandis que la Mutualité Sociale Agricole intègre les « membres de la famille des chefs d’exploitation ».
Part d’agriculteurs dans la population active
1 220 773 966 296
Recensement agricole 1 (2010)
707 128
Recensement MSA 2 (2010)
Répartition des exploitations en fonction de leur surface L’agriculture a changé, elle s’est professionnalisée au fil du temps. En 1955, les exploitations de moins de 20 ha représentaient presque 80% des structures, elles n’en constituent plus que 43% aujourd’hui. Les équilibres en termes de taille des exploitations sont assez stables depuis 10 ans. L’agriculture regroupe des activités extrêmement diverses. Rien de commun entre la surface nécessaire pour vivre de la céréaliculture et du vignoble ou pour vivre du maraîchage et de l’élevage.
100% 90%
100 ha et plus 50 à 100 ha
80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0%
20 à 50 ha 5 à 20 ha moins de 5 ha
1955
1970
1924 litres
6446 litres
2013
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1979
1988
2000
2010*
Les agriculteurs travaillent majoritairement en famille
70 % 1955
Recensement de la population 3 (2009)
du travail au sein d’une exploitation est fourni par les actifs familiaux.
17 %
du travail au sein d’une exploitation est fourni par des salariés permanents.
12,5 %
des actifs ne sont pas permanents (saisonniers, salariés d’entreprises ou de coopératives agricoles).
Observatoire Alptis de la protection sociale - Lettre n°34 - février 2013
La lettre de l’Observatoire > Le nouveau visage de l’agriculteur
Agriculteurs : une véritable rupture générationnelle L’âge de 40 ans constitue une « rupture » professionnelle dans le monde agricole. En-deçà de cette limite artificielle, l’agriculteur fait partie de la jeune génération. Elle se caractérise par des aides financières à l’installation, un niveau d’instruction élevé et un statut juridique marqué.
Des nouveaux agriculteurs jeunes et diplômés Si l’âge moyen d’un chef d’exploitation agricole est de 46,7 ans, identique à celui d’un patron de PME de plus de 10 salariés, les jeunes agriculteurs, de moins de 40 ans, représentent le nouveau visage de l’agriculture. Chaque année voit l’installation de 12 600 agriculteurs. L’influence de la législation est à souligner grâce à la dotation jeunes agriculteurs (la DJA est une prime à l’installation octroyée aux agriculteurs diplômés). Si à l’origine, 200 heures de formation étaient requises, il faut aujourd’hui un niveau IV, soit le baccalauréat. Le système a parfaitement fonctionné, car 73,5 % des jeunes agriculteurs en sont titulaires.
Le statut juridique, une question de génération La fracture entre plus et moins de 40 ans s’observe également au niveau du statut juridique des exploitations. Ainsi, 43 % des exploitations dirigées par des moins de 40 ans sont des sociétés, alors qu’elles sont moins de 10 % pour les plus de 60 ans. Les jeunes agriculteurs ont la double volonté de créer une véritable entreprise capable de diversification (activité commerciale, hébergement…) et d’investissement. Cette part de risque demande une forme de protection de ses biens personnels que seuls les statuts juridiques assurent. Pour preuve, 54,4 % des EARL ne comptent qu’un seul associé, l’exploitant.
Vieillissement et féminisation Si 45 % des chefs d’exploitation ont plus de 54 ans (à 38,8 % âgés de plus de 65 ans), 26% sont des femmes (à 55 % âgées de plus de 65 ans). Cette féminisation procède d’une double logique. Les femmes continuent à exploiter la structure agricole après le décès de leur époux notamment pour des raisons financières compte tenu de l’absence de cotisations sociales. L’obligation, faite aux femmes à partir de 2006 d’adhérer au statut de conjoint non salarié de l’exploitation, les associe statistiquement au statut de chef d’exploitation et assimilé.
Enfin des avantages sociaux agricoles L’acquisition de droits sociaux, pour la famille de l’agriculteur (actifs familiaux) est relativement récente. L’agriculteur travaille en effet, encore principalement avec ses proches. Ainsi, 70 % des équivalents temps plein de l’agriculture française sont des actifs familiaux. En moins de 20 ans (1988/2007), le taux de salarisation de cette population a augmenté de 36 %. Depuis 2005, le conjoint participant à la mise en valeur de l’exploitation est dans l’obligation d’opter pour un statut de conjoint collaborateur, salarié ou associé. n
Observatoire Alptis de la protection sociale - Lettre n°34 - février 2013
Paroles d’agriculteurs 1 – Producteur laitier
« Je travaille 60 à 70 heures par semaine ». « J’ai 31 ans et je travaille depuis 2002 avec mon père et mon oncle dans une exploitation de production laitière dans la famille depuis trois générations. La forme juridique est celle d’un GAEC familial créé en 1980 par mon père. L’exploitation compte 300 bêtes environ sur une surface de 170 ha dont 120 de pâturage. Nous vendons la totalité de notre production laitière à Lactalis pour la fabrication de fromage. J’ai passé un Bac Pro agricole pour pouvoir reprendre l’exploitation. J’effectue entre 60 et 70 heures par semaine. En 2012, j’ai vendu le litre de lait à 34 cts d’euros… ». Mickaël Moulin, producteur laitier à La Chapelle devant Bruyère (88), 170 ha
1 litre = 34 cts d’euros 2 – Grand exploitant céréalier
« Je suis plus un entrepreneur qu’un agriculteur » « J’ai repris l’installation de mon grand-père maternel depuis 2007. J’ai passé un bac STAE (Sciences et Technologies Agronomie et Environnement) puis un BTS Technologie végétale. Je me considère avant tout comme un entrepreneur bien plus que comme un agriculteur. J’ai diversifié les sources de profit de l’exploitation. En plus du blé, de l’orge, du colza, je cultive des betteraves et des pommes de terre. La réforme de la PAC en 2014 m’effraie car les subventions sont intégrées dans les revenus des exploitations. La PAC permet de lisser les risques liés aux aléas climatiques ainsi que ceux des cours des matières premières. En 2009 par exemple, je vendais la tonne de blé 110 €, aujourd’hui elle est aux alentours de 230 €. Aujourd’hui, il est aussi important de passer du temps au bureau à trouver des débouchés que d’être sur un tracteur ». Antoine Souazé, céréaliculteur à Autarville (45), 180 ha, 30 ans
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La lettre de l’Observatoire > Le nouveau visage de l’agriculteur
L’agriculture française, quelle place en Europe ? Peu à peu, aides et quotas européens ont fortement impacté la production agricole française et la vie des exploitants. Alors que la Politique Agricole Commune (PAC) est en pleine redéfinition, quel sera le rôle donné aux agriculteurs ? Et quels sont les atouts de la France ?
La France, un poids lourd européen L’Hexagone est le premier producteur agricole d’Europe. Les 2,7 % de la population qui vivent de la terre génèrent un excédent de la balance du commerce extérieur de 4,6 milliards d’euros et pèsent plus de 18,4 % de la puissance européenne en la matière. Autre statistique impressionnante, le travail agricole en France rapporte 88 600 euros par équivalent temps plein alors que la moyenne en Europe est seulement de 36 900 euros. Efficace, structurée, performante, l’agriculture française doit néanmoins compter sur les aides européennes pour équilibrer son exploitation. La Politique Agricole Commune, mise en place en 1962, est devenue un levier essentiel de la modernisation des structures et des méthodes de production. n
Face à la redéfinition de la PAC et à l’avenir Les orientations de la PAC ont évolué au fil des années. Du soutien à la production dans les années 70, les enjeux environnementaux vont présider à la mouture qui doit être présentée en 2014, faisant des agriculteurs « les gestionnaires de l’espace naturel ». L’impact des subventions européennes sur les revenus d’une exploitation a énormément fluctué. Elles représentaient 16% du résultat d’une exploitation avant la réforme de 1992, 50 % avant 2002 et jusqu’à 75 % après 2002. Ces chiffres sont tout de même à relativiser car en 2009 (année post crise), 27 % des exploitations agricoles en France étaient en déficit. A l’heure où la PAC se redéfinit, d’autres questions impactent également l’avenir de l’agriculture, comme la capacité des pouvoirs publics à préserver les espaces agricoles dans les territoires marqués par une forte pression foncière et à lutter dans le même temps contre la désertification rurale dans certains secteurs. Sans oublier la capacité des agriculteurs à adapter leur production au réchauffement climatique, à la raréfaction de la ressource en eau et au besoin de protéger la biodiversité. n
L’Observatoire Alptis de la protection sociale Créé en 1996, l’Observatoire Alptis de la protection sociale fait partie du groupe associatif Alptis, spécialiste de l’assurance de personnes. Véritable centre de recherches, animé par un réseau d’universitaires et de représentants socio-professionnels, l’Observatoire scrute les grandes tendances à l’œuvre dans le monde des travailleurs indépendants et des
petites entreprises. Ses travaux font l’objet de publications et notamment d’une lettre paraissant de 2 à 4 fois par an. Observatoire Alptis de la protection sociale 12, rue Clapeyron 75379 Paris cedex 08 www.observatoire-alptis.org
Découvrez la nouvelle étude de l’Observatoire sur le thème de l’agriculture Ce numéro de la Lettre de l’Observatoire présente la synthèse de l’étude «Les agriculteurs, des travailleurs en perpétuelle évolution» de l’économiste Stéphane Rapelli. Elle est consultable et téléchargeable sur le site www.observatoire-alptis.fr.
Observatoire Alptis de la protection sociale - Lettre n°34 - février 2013
Paroles d’agriculteurs 3 – Petite exploitation familiale
« 13 heures de travail quotidien, une semaine de vacances par an » « J’ai commencé une activité agricole à 19 ans, en 1993, en reprenant la ferme de ma grand-mère (1 ha) pour élever et commercialiser de la volaille. Je suis resté double actif jusqu’en 2009. La société (EARL) a été créée seulement fin 2012. J’ai un Bac S et un BTS Production animale, analyse et conduite d’exploitation. En plus de la volaille, les bovins, caprins, ovins, porcins ont peu à peu fait leur apparition avec la transformation et la vente, directe en boutique et au marché de fromages, produits laitiers, viande. 20 ans après, l’exploitation représente 35 ha. Je travaille avec mon épouse sur l’exploitation à raison de 13 h par jour. Nous employons trois salariés à temps partiel ». Arnaud Clerc, Vente directe de produits de la ferme à Jouvencon (71), 35 ha, 38 ans
Plage de travail
5h à 22h
4 – Polyculture périurbaine Amap + maraîchage bio
« Je gagne 1200 euros par mois pour 45 heures hebdomadaires » « A 30 ans, j’ai entamé une formation (Brevet Professionnel Responsable d’Exploitation Agricole) durant un an, financée par la Région et par l’Etat (dispositif d’Aide au retour à l’emploi). J’ai pu m’installer grâce aux adhérents d’une Amap (Association pour le maintien de l’agriculture paysanne). Ils avaient obtenu un terrain auprès de la mairie de Cran-Gevrier mais ne trouvaient pas l’agriculteur pour s’en occuper. J’ai obtenu le fermage sur une parcelle de 1,66 ha pour un loyer de 170 € par an. Je vends ma production en direct sous la forme de paniers hebdomadaires. Je travaille seul sous un statut d’exploitant agricole, je gagne 1200 euros net par mois pour environ 45 heures de travail par semaine ». Sébastien Vasmer, maraîcher bio à Cran-Gevrier (74), 1,66 ha, 33 ans
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