CDIS Cesson-Sé Cesson-Sévigné PDC1
FRAB 12 avenue des Peupliers, 35510 CessonSevigné Déposé le 5 septembre 2016
CPPAP : 0417 G 89163
N˚ 215 | www.agrobio-bretagne.org | Septembre 2016
Philippe Hamelin
Fier d'accueillir le salon sur ses terres L'ENTRETIEN
LE PORTRAIT
L'OBSERVATOIRE
Jean-Jouzel
Erwan & Marie henry
Conversion
Le monde agricole a beaucoup à faire pour le climat
« Passer en bio, nous a permis d'arrêter d'avoir peur »
2016, vers l'année de tous les records
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L’
Le mensuel des Agrobiologistes de Bretagne | Septembre 2016
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Venons très nombreux à Retiers Depuis les années 2000, la bio a toujours connu des phases de croissance importante mais nous vivons, aujourd’hui, une période inédite du développement de la bio en France. Des vagues de conversions sans précédent, une demande des consommateurs qui s’est amplifiée en début d’année 2016, des distributeurs de magasins spécialisés et de grandes surfaces qui veulent développer leurs approvisionnements en produits bio locaux, montrent les prémices du changement d’échelle de la bio. Jamais nous n’avons connu un tel dynamisme et on ne peut que s’en réjouir. Notre réseau, les GAB, les GRAB et la FNAB, est tout entier mobilisé sur ce changement d’échelle : ACCUEILLIR les nouveaux convertis pour qu’ils réussissent leur passage en bio et s’en sortent techniquement et économiquement alors qu’ils arrivent d’une situation conventionnelle parfois très compliquée, [SymBIOse n°215] Le mensuel des agrobiologistes de Bretagne Réseau GAB-FRAB-FNAB π Prix du numéro : 5 euros π Directeur de la publication : Patrick Guillerme. π Comité de rédaction : symbiose@agrobio-bretagne.org. π Rédacteur en chef : Antoine Besnard (Frab) symbiose@agrobio-bretagne.org. π Dessin : Alain GOUTAL (22). π Crédit photo : GAB-FRAB, Matthieu Chanel. π Imprimeur : Edicolor (35), imprimé sur Papier Recyclé avec encre végétale. π N° CPPAP: 0417 G 89163. π N° ISSN : 1253-4749. π Annonces et Abonnements : FRAB, 12, avenue des Peupliers 35510 Cesson-Sévigné cedex. Tél. 02 99 77 32 34 symbiose@agrobio-bretagne.org
Stéphanie PAGEOT Éleveuse laitière bio en Loire-Atlantique • Présidente de la FNAB
CONTINUER D’AIDER les « anciens bio » à progresser (autonomie fourragère, énergétique, recherche de semences adaptées aux territoires, d’animaux rustiques, santé animale, etc…) ÉVOLUTION de nos pratiques avec une meilleure implication pour le bien être animal (abattage notamment) CONSTRUCTION de filières relocalisées, équitables en partenariat avec les organisations économiques de producteurs bio : travail sur la contractualisation, gestion de volumes, de prix… Ce sont des défis très importants car il ne s’agit pas de reproduire les erreurs des filières conventionnelles : il faut changer d’échelle sans perdre nos valeurs et notre éthique. Garder une bio cohérente, exigeante, équitable même si on passe à de 5 à 10 % de SAU en quelques années. Le salon La Terre est Notre Métier sera un moment fort de notre réseau pour faire le point sur tous les défis à relever et les atouts et forces en notre possession pour y parvenir. Conférences, réunions, démonstrations, tout est fait : • Pour mettre en avant l’expertise toujours plus grande des productrices et producteurs bio mais également des salarié-es du réseau • Pour montrer l’innovation dans les fermes et les filières partout en France, • Pour échanger sur les coopérations grandissantes avec les pays européens, notamment l’Allemagne…
Les articles parus dans les pages listées ci-dessous font partie de la mission d’information générale, filière, technique et réglementaire du réseau GAB/FRAB aux producteurs bio bretons sur leur filière et ses évolutions. La convention de financement passée entre le Ministère de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche et le réseau FRAB reconnaît et intègre cette mission. Pages : 3, 4, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 20, 21, 22
• Pour partager nos expériences, donner son avis et repartir avec plein de nouvelles idées. Réservons les 28 et 29 septembre 2016 et venons très nombreux pour échanger lors de notre salon professionnel, à Retiers. Par ces rencontres, nous deviendrons toujours plus autonomes et libres de nos décisions et avancerons vers une agriculture biologique toujours plus viable, vivable et enviable !
Dans ce numéro un peu spécial de Symbiose vous ne trouverez pas toutes vos rubriques habituelles, mais ce qui fait le sel de ce salon un peu spécial. Spécial parce qu'il est organisé par un réseau de producteurs bio, et spécial parce qu'il s'agit cette année d'une toute nouvelle formule, enrichie, sur un nouveau lieu, mais toujours au cœur des attentes des paysans bio. Vous souhaitant une bonne lecture et souhaitant vous voir nombreux sur votre salon. Antoine BESNARD • Rédacteur en chef de Symbiose
INFOS
Le mensuel des Agrobiologistes de Bretagne | Septembre 2016
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POLITIQUE AGRICOLE Stéphane Le Foll demande à l'Agence bio d'accompagner l'essor de la bio
LE 2
Éditorial
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Infos nationales
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Infos région
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Le Billet d'humeur
6
Les formations
7
Politiques agricoles
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Mesures SPE et aides bio. de nouveaux changements dans les montants
L'observatoire
Conversion bio. 2016, vers l'année de tous les records
10 REPORTAGE Philippe Hamelin • Fier d'accueillir le salon sur ses terres
12 LA Terre est notre métier
Le programme complet des 28 et 29 septembre
14 L'entretien
Jean Jouzel. « Le monde agricole a beaucoup à faire pour le climat »
16 Savoir-faire
Lors d'un entretien mercredi 24 août, avec le directeur de l’Agence BIO, Florent Guhl, Stéphane Le Foll lui a demandé de lancer un travail associant tous les acteurs sur l’évolution de la Bio dans les prochaines années et sur la façon d’en accompagner l’essor. Ce travail sera lancé lors des Assises de la Bio le 14 novembre 2016 et vise à permettre, selon le communiqué de presse du Ministère, de pérenniser la dynamique impulsée depuis 2013 par le Programme Ambition Bio 2017 et pourrait se conclure par la poursuite de ce Programme au-delà de 2017, une fois amendé si nécessaire. L’agriculture biologique connaît actuellement un essor sans précédent avec notamment une croissance du marché national des produits bio de 14,7 % en 2015 (5,76 mil-
PESTICIDES Un million de professionnels de l'agriculture exposés L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a publié, fin juillet, un rapport sur les expositions professionnelles aux pesticides. Résultat, « plus d’un millions de professionnels du secteur agricole sont potentiellement exposés aux pesticides ». Après cinq ans de travaux, le rapport révèle les nombreuses lacunes sur l’évaluation de l’impact des pesticides et notamment dans le processus d’homologation.
Des risques sous-estimés
20 Le Portrait
L’Anses fait le triste constat d’un manque important de données sur ces expositions aux pesticides. En 2014, elle avait d’ailleurs lancé un appel à contribution pour en récolter davantage de la part des agences européennes, des associations, des scientifiques etc. De nombreuses données existent mais proviennent d’études effectuées par des industries ayant un intérêt économique en jeu avec la vente de ces produits chimiques. En plus des connaissances, l'agence constate également des lacunes dans la réglementation et dans le port d'équipements de protection bien souvent absent.
24 Tout est bon dans
Cette pénurie de données est révélatrice de la façon dont on sous-estime les effets néfastes des produits phytosanitaires sur l’homme. Pourtant, en 2012, la maladie de
• Aggrozouk. le désherbage à coup de pédales • Cultures sous couverts. Dynamique de conception participative en maraîchage • Circuits courts. Mutualiser ses outils de comm', ça a du bon • Internet. Un outil pour lier authenticité et technologie Erwan & Marie Henry. « passer en bio, nous a permis d'arrêter d'avoir peur ».
l'cochon
liards d’€) et une augmentation de 23% des terres cultivées en mode biologique. De plus, le baromètre Agence BIO/CSA montre que la demande sera de plus en plus importante dans les années à venir « avec 9 Français sur 10 qui ont consommé bio en 2015, dont 65% bio réguliers ».
Parkinson avait été reconnue comme maladie professionnelle liée à l’usage des pesticides et en 2014, une étude américaine avait établi un lien entre l’exposition aux pesticides, l’autisme et les troubles du comportement. En 2013, une étude de l’Inserm avait mis en évidence le lien entre l’exposition aux pesticides et de nombreuses pathologies (cancers, maladies neurodégénératives, malformations du fœtus etc.) et en 2015, 5 pesticides (le glyphosate et des insecticides) étaient officiellement classés cancérogènes par l’OMS.
Des millions de personnes touchés L’Anses rappelle qu’en 2010, plus d’un million de personnes avait une activité professionnelle régulière dans le monde agricole, sans compter les travailleurs non permanents et les stagiaires. En plus des professionnels, ce sont aussi les familles des travailleurs et les riverains des zones traitées qui sont touchés. Outre l’impact environnemental, l’Anses souligne les enjeux de santé de l’exposition aux pesticides. L’agence recommande donc la poursuite des travaux, le renfort des formations professionnelles liées à l’utilisation des pesticides et la transparence sur les conséquences de cette utilisation pour les travailleurs.
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MANGER BIO ET LOCAL, C'EST L'IDÉAL
Une semaine d'animations bio en Bretagne
Biozone : 10 & 11 septembre Cette année, la Foire bio de Mûr-de-Bretagne se met en quatre pour présenter le jardin sous toutes ses boutures ! Programme complet et infos pratiques sur www.foire-biozone.org
TRiptolème fête ses 30 ans : Du 23 au 25 septembre L'association de promotion des semences paysannes fête 10 de biodiversité. Au programme : conférences, animations, jeux, etc. Du 23 au 25 septembre, 44 route des Forges, à Saint-Nazaire Contact et infos : contact@triptoleme.org 06 38 05 49 95
Mois de l’installation : 6, 13 et 20 octobre Le collectif Paysan 22, dont le GAB d'Armor fait partie, organise pour la 4e année consécutive le Mois de l'installation. Trois Portes Ouvertes pour promouvoir des trajectoires d'installation et de transmission, s'adressant aux élèves des établissements agricoles des Côtes d’Armor, aux candidats à l’installation et aux agriculteurs qui se posent la question de transmettre leur exploitation. Début des portes ouvertes à 14h (fléchage depuis le bourg). • S’installer en élevage porc sur paille en bio : jeudi 6 octobre chez Gilles Le Marchand (porcs bio) à Saint-Caradec • S’installer en production laitière aujourd’hui : jeudi 13 octobre chez Jeanne et Dominique Le Calvez (Bovin lait bio) à Plédéliac • S’installer en circuits courts… et si vendre en filière longue au début pouvait sécuriser le projet ? : jeudi 20 octobre chez Manu Louail (ovin viande et poulets label) à SaintMayeux
Le réseau FNAB organise pour la 6ème année une campagne nationale intitulée « Manger Bio et local, c'est l'idéal », avec le partenariat du réseau Biocoop. Comme l’année dernière les GAB bretons proposent vingt à trente animations durant cette semaine. Dans le Morbihan, le GAB 56 a décidé de valoriser cette année les Défis famille à alimentation
positive et de mener un travail de sensibilisation autour du prix des produits bio, notamment à travers trois conférences. Cette semaine sera également l'occasion de portes ouvertes, marchés... Retrouvez le programme complet sur bioetlocalcestlideal.org
FINISTÈRE Les actu du GAB 29 en Bref Commission restauration collective de la MAB29 Elle a eu lieu le 13 juin avec la présentation par Ludovic De Beaurepaire de l'outil « panier local ». Ce logiciel a suscité l'intérêt de tous, avec le souhait émis de travailler sur un projet collectif de mise en valeur de l'offre bio finistérienne pour les collectivités. Pour ceux qui souhaitent donner suite à cette réflexion autour d'une organisation collective, prenez vos agendas : nous vous proposons une rencontre le lundi 12 septembre à 17h à l'écopôle de Daoulas. Plus d’infos : Florence Busson 02 98 25 16 73
Étude pour l'abattoir de Pont Croix La Chambre d'Agriculture va être mandatée pour une étude « offre et débouchés » auprès de l'abattoir de Pont Croix pour l'accompagnement à la création d'une filière viande locale sur l'Ouest Cornouaille. Un groupe d’éleveurs - dont des bio du territoire - va être constitué
afin de suivre les différentes missions. La MAB et le GAB sont associés au projet notamment pour quantifier et qualifier l’offre disponible mais aussi étudier les débouchés. Plus d'infos auprès de Cathy Pichon: 02 98 25 16 79
La MAB veut s’appuyer sur les consommateurs Lors de son assemblée générale, la MAB29 a validé l’idée de créer une association de consommateurs bio. Les membres de cette association pourraient être formés et dotés d’outils et devenir des ambassadeurs de la bio sur leur territoire auprès des élus et des collectivités. Lors d’un premier appel lancé sur facebook plusieurs consommateurs ont répondu positivement, il semblerait que ce projet suscite de l’intérêt. La MAB29 a en projet l’embauche d’un salarié en service civique courant octobre, ce dernier aura pour mission l’accompagnement de la création de l’association.
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MORBIHAN Haricots conserves bio. 20 agriculteurs présents au rendez-vous technique C’est sous une chaleur torride que s’est déroulé mardi 19 juillet le point technique sur le haricot conserve. Ce rendez-vous a rassemblé 20 agriculteurs venus découvrir la conduite culturale du haricot en bio par 35°C, c’est plutôt pas mal ! Avec 4 années d’expérience, Bruno Jehanno a intégré le haricot dans sa rotation pour diversifier l’assolement. « C’est une culture qui demande une forte technicité. Ce n’est jamais gagné d’avance mais c’est une culture qui peut être économiquement intéressante ». Une rotation à base de 2-3 ans de dactyle luzerne permet d’appréhender dans de meilleures conditions les étapes du désherbage mécanique. En général, 2 passages de herse étrille, 1 ou 2 coups de bineuses et 1 passage manuel sont nécessaires pour maîtriser les adventices. La démonstra-
LE
Un revenu qui ne manque pas de sel
tion de hersage avec la herse étrille Treffler a convaincu les agriculteurs conventionnels en leur montrant qu’elle n’arrache pas tout sur son passage…. Pour les intéressés, l’itinéraire technique détaillé et le compte-rendu sont disponibles au GAB. Merci à Bruno pour son accueil et sa disponibilité dans une période pourtant chargée.
Porte ouverte commercialiser ses légumes en collectif, le 12 octobre Comment approvisionner un même point de vente à plusieurs maraîchers ? Question que s’est posée Dominique Dubreuil, dès son installation en maraîchage en 2012. Ayant fait le choix d’entrer dans la démarche collective des producteurs du pays de Ploërmel, Clic ta berouette - site de commande en ligne, il a dû très vite apprendre à s’organiser pour la production et la vente à plusieurs. En s’inscrivant dans un collectif multi-production, cette démarche lui a permis de proposer une gamme large en plus de ses légumes. Et puisque quatre maraîchers approvisionnent le site Internet, ils ont ainsi sécurisé les approvisionnements en légumes. Découvrez la ferme, les techniques de production, l’organisation de vente, du travail sur la ferme, les résultats économiques et l’organisation entre maraîchers dans le détail le mercredi 12 octobre prochain à 14 h. Enfin, pour aller plus loin dans les échanges d’expériences de commercialisation à plusieurs, d’autres maraîchers témoigneront sur les magasins de producteurs les étals de marché et les sites de commande en ligne. Nous avons besoin de vous pour faire connaître l’information, n’hésitez pas à en parler au-
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Avez vous entendu parler du revenu universel? En juin dernier, les Suisses ont rejeté l'idée de le mettre en place (77% contre). En gros, il s'agit de remplacer le système d'aides sociales actuelles (RSA, chômage, allocations diverses) par le versement d'une somme à chaque citoyen sans conditions. Cette idée, qui date déjà des années 70, revient au goût du jour dans la Silicon Valley en Californie, non via des Babas-cool utopistes mais par des cerveaux des nouvelles technologies persuadés que la robotique va encore détruire rapidement énormément d'emplois, et qu'il faut donc changer totalement de paradigme social et sociétal. En France, étonnamment, c'est un député de droite (Frédéric Lefèbvre, LR) qui a tenté de lancer le débat à l'Assemblée nationale. Si l'idée est contestée autant à droite qu'à gauche, elle rassemble aussi des partisans dans tous les partis pour des raisons bien différentes. Pourquoi écrire cela dans Symbiose? Parce que dans nos métiers, les revenus peuvent être aléatoires, se faire attendre des années (voire interview de Françoise Louapre dans Symbiose n°213), décourager des vocations et pourrir des situations. En instituant un revenu universel, on peut se permettre de galérer un moment sans mettre en péril la vie familiale (bien sûr il faut trouver un moyen de bien séparer l'activité agricole de la partie privée, ne pas pouvoir se servir de cette allocation pour combler un éventuel déficit d'exploitation.) En tous cas, cela permettrait de démarrer son activité avec un petit filet de sécurité, du coup dans une ambiance plus sereine. Évidemment, c'est aussi une formidable occasion de changer le regard des gens, personne ne pourra plus dire que les allocataires du RSA sont des profiteurs. Puisque tout le monde touchera la même chose, cela deviendra un vrai choix de bosser ou de se consacrer à des passions diverses comme la contemplation du monde qui nous entoure, de la musique de la Nature, de la peinture, de l'archéologie, mais pas des matchs de foot. Et peut être que la société découvrira enfin que les vrais profiteurs de notre système sont les personnes qui ont tellement de fric qu'ils ne savent même plus dans quel paradis fiscal ils ont légalement évité de payer leurs impôts.
tour de vous (tract disponible sur demande auprès GAB 56). • Mercredi 12 octobre, à 14 h, Ferme de Gourhert, lieu dit gourhert à Ploërmel
Retrouvez-nous aussi sur
www.agrobio-bretagne.org
Avons nous réfléchi à ce sujet et pouvons nous avoir une position à soumettre aux politiques? Le métier serait quand même plus chouette si on n'avait un peu moins à se soucier sans arrêt de rentabilité, non? Le Greencheux
Le mensuel des Agrobiologistes de Bretagne | Septembre 2016
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Groupe élevage Est Croisement de races Objectif : Améliorer le potentiel génétique de son troupeau
Piloter le parasitisme chez les jeunes bovins
Construire sa stratégie commerciale en circuits courts et élaborer son plan d’actions commercial
Connaître le risque parasitaire sur sa ferme • Avoir des outils pour évaluer la menace • Connaître les modalités de traitement Intervenant : Jean Marie Nicol – vétérinaire Dates. 2 jours : Jeudi 8 septembre et jeudi 12 janvier – lieu à définir dans le Morbihan Contact : Christophe Lefevre 02 97 66 88 35
1ère journée d'une session de 2 jours le lundi 10 octobre - lieu à définir selon les participants.
Envisager l’agriculture biologique
Contact : Agathe PERRIN 02 96 74 75 65
Objectif : Connaître les spécificités des techniques en agriculture bio et les démarches pour une conversion réussie. Deux sessions de trois jours programmées sur l’automne 2016
Transmettre sa ferme Proposée par le collectif paysan 22, cette formation permet, sur 4 jours, d’aborder les différentes questions qui se posent dans le cadre d'un projet de transmission et donc d’appréhender plus sereinement la recherche d’un repreneur et la transmission de votre exploitation. Réflexion sur son projet, échange avec des futurs cédants, apports sur les sujets de la retraites, les aspects fiscaux et juridiques... Jour 1 : mardi 11 octobre Jour 2 : mardi 15 novembre (Intervenant François Berrou, AFOCG 53) Jour 3 : lundi 12 décembre (Intervenant à préciser) Jour 4 : en cours de calage Contact : Sarah CHOUPAULT 02 96 74 75 65
Mélanges céréaliers innovants Date : Mardi 6 septembre Contact Agrobio 35 : 02 99 77 09 46
Contact : Christophe Lefevre 02 97 66 88 35
Comprendre son sol pour adapter ses pratiques culturales (Méthode Hérody) Objectif : Appréhender le sol dans sa globalité pour pouvoir adapter son travail du sol et la gestion de ses apports organiques et calciques. Intervenant : Yves Hardy J1 : Les fondamentaux de la méthode Hérody J2 : Les leviers agronomiques Dates : 6 octobre et 24 novembre de 9h30/17h30
2ème session : 8 novembre, 22 novembre, 8 décembre.
Contact : Maëla Peden – 02 97 66 39 99
Contact : Véronique Jardin - 02 97 66 37 77
Gérer le parasitisme ovin Connaître les différents parasites et leurs cycles • Savoir réaliser une analyse coprologique (distribution de kits, analyses gratuites pour les adhérents du GDS) • Savoir interpréter les résultats d’analyse et les confronter à ses pratiques • Connaître les moyens de lutte et de prévention efficaces
Contact : Valerian Lebon 07 68 89 47 27
Contact Agrobio 35 : 02 99 77 09 46
Lieu : Rosnoen (29)
Lieu : à déterminer en fonction des participants
Dates. 2 jours : 20 septembre et 18 octobre – lieu à définir dans le Morbihan
Date : Le mercredi 14 septembre.
Date : 4 octobre de 10h - 18h
1ère session : 20 septembre, 18 octobre, 15 novembre.
Intervenant : François Guillaume (vétérinaire GDS Bretagne) et Catherine Roffet (vétérinaire)
Quels moyens pour développer une ferme en permaculture?
Intervenant : Erwan Le Roux
La biodiversité au service des cultures Inventaire des espèces et des habitats sur une ferme • Interactions positives sur les cultures • Propositions d’actions à mettre en œuvre pour conserver et valoriser l’existant ou restaurer ce qui est dégradé Intervenant : Luc Guihard FormateurChargé d'études Bretagne Vivante Date : Mardi 27 septembre de 10h à 18h Lieu : Saint-Martin-sur-Oust Contact : Christophe Lefevre 02 97 66 88 35
Finistère. A la recherche de salariés ? Besoin d’être formés pour assurer votre rôle d’employeur ? L’AEF, association emploi formation de Quimper, propose un service gratuit pour les employeurs et les futurs salariés agricoles à la recherche d'un emploi. Pour les employeurs : Recherche de candidats, diffusion de vos offres d'emploi, infos sur les aides à l'embauche et les dispositifs publics préparatoires à l'emploi, info sociale. Pour les salariés agricoles : accès à une bourse de l'emploi (www.anefa-emploi. org). Plus d’infos : Gilles BUREL : 02.98.64.67.96 • aef29@wanadoo.fr ≈ Le GAB29 propose d’organiser une formation employeur avec l'AEF, n'hésitez pas à nous contacter si cela vous intéresse.
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Mesures SPE et Aides bio
De nouveaux changements dans les montants
LES
Par Louise LE MOING (Chargée de mission politiques publiques à la FRAB)
N
ous vous avions livré, au printemps dernier, les éléments discutés au niveau régional visant à faire concorder les engagements MAE et aides bio avec l’enveloppe disponible. Plusieurs hypothèses avaient été envisagées, certaines fortement (remise en cause partielle de la transparence GAEC notamment, comme nous l'avions évoqué dans notre édition du mois de mai). De nouveaux éléments ont amené la région Bretagne à abandonner certaines de ses propositions. Nous vous livrons ici de nouveau les informations en notre possession à ce jour.
Ce feuilleton à rebondissements nous le confirme : il convient d’être particulièrement prudent sur le montant attendu au regard d’un engagement, et plus encore sur la date de paiement. Vous l’avez constaté cette année, qu’il s’agisse d’une mesure SPE ou d’une aide bio. Rien de vraiment fixé avant la parution des arrêtés, et plus encore avant le paiement. L’arrêté fixant officiellement les règles pour les engagements 2016 n’est pas encore paru au moment de l’impression. L’arrêté modificatif concernant les engagements 2015 a été publié cet été. Au rang des nouvelles réjouissantes, le plan lait du mois de mai a renforcé les moyens financiers alloués aux MAE, moyens fléchés sur les campagnes 2016 et 2017. Malgré tout, les mesures SPE continuent de susciter un
grand intérêt de la part des éleveurs, et les conversions en bio ont continué de progresser en 2016. Un dépassement d’enveloppe n’est donc pas à exclure. Il imposerait à la Région de prioriser de nouveau les dossiers déposés, peut-être dès la campagne 2016.
Le point sur les montants attendus Rappel : des plafonds sont appliqués sur les aides bio comme sur les SPE, et ce dès la campagne 2015. Voir le tableau ci-dessous. La région avait en outre proposé de ne plus appliquer la transparence GAEC linéairement, mais de multiplier le plafond par un coefficient qui diminuait avec le nombre d'associés. Cette proposition est abandonnée. S’agissant des aides bio (CAB et MAB), les montants à l’hectare restent inchangés.
Formation azote obligatoire pour les signataires SPE : des formations des groupements bio départementaux adaptées aux systèmes bio Le cahier des charges de la SPE contient un élément de formation obligatoire, le « suivi azote ». Cette formation, qui pourra se faire dans un format collectif, sera constituée de deux demies journées, en début et en fin d’engagement. En parallèle, la Région souhaite renforcer
l'accompagnement des signataires de SPE et crée pour cela un « Pass MAEC », formation collective également, optionnelle (financée par le Vivéa), axée en priorité sur la sécurisation du cahier des charges. De nouveau, votre GAB proposera des formations au contenu spécifiquement adaptées aux systèmes bio.
Bon à savoir Vous aurez la possibilité de candidater pour recevoir une Avance de Trésorerie Remboursable (ATR), correspondant à 90% du montant des aides du premier pilier de la PAC 2016 (paiement de base, paiement vert, paiement redistributif) au lieu de l’avance de 50% habituelle. Cette demande sera à faire dès le 8 septembre, pour un paiement au 15 octobre. Contactez votre DDTM.
Les plafonds sur les aides bio et les SPE (appliqués dès la campagne 2015) Aides bio CAB
Mesure SPE Système Polyculture Elevage MAB
SPE1 et SPM1
SPE2 et SPM2
SPE3 et SPM3
Objectif 12% de maïs dans Objectif 18% de maïs dans Objectif 28% de maïs dans la SFP, niveaux maintien la SFP, niveaux maintien la SFP, niveaux maintien et évolution et évolution et évolution
20 000 €
12 000 €
11 000 €
10 000 €
Pour les GAEC, la transparence GAEC s’applique : multiplication du plafond par le nombre d’associés
9 000 €
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Le mensuel des Agrobiologistes de Bretagne | Septembre 2016
L’
CONVERSION BIO
2016. vers l'année de tous les records
L
a consolidation des chiffres issus des notifications de l’Agence Bio réalisée par l’Observatoire de la production bio en Bretagne confirment les impressions de terrain.
La dynamique des conversions laitières franchit un record historique : + 25% de fermes laitières bio en 6 mois (+310 fermes). 2009 était jusqu’à présent l’année qui avait marqué les esprits avec 90 conversions laitières. En l’espace de 6 mois, l’année 2016 en compte déjà 134.
Par Michaël DESPEGHEL (Chargé d'études à la FRAB)
Évolution du nombre de fermes bio en Bretagne 2308 2032
1682
1770
540
1837 1880
1529
Production laitière mise à part, le nombre de nouvelles fermes bio a progressé de 10% en 6 mois (contre 7% en 2015, 2,5% en 2014). Il s’agit donc bien d’une tendance de fond du développement de la bio.
586
1288 1050 917 948
622
Mor b i han Ille-et-Vil aine
Les chiffres clés Chiffres au 30 juin 2016
Fi n i stè r e
560
C ôtes d'Ar mor 2006
2008
2010
2012
2014
2016_S1
2016_S1 = Chiffres du 1er semestre 2016
Évolution des installations et conversions bio en Bretagne (En nombre de fermes)
2308
fermes engagées en bio
6,7 %
259
des fermes bretonnes
148
129
Depuis le 1er janvier 2016
nouvelles fermes bio
229
210
74
310
310
305
+ 14 %
de fermes engagées en bio
142
137
70
2006 2007 2008 2009 2010 2011
2012 2013 2014 2015 2016-S1
Détails des nouvelles fermes bio par production 134
Fermes en bovins lait
90 70
35
arrêts de certification
63
+ 25% de fermes laitières engagées en bio
7
communes sur 10 ont au moins une ferme bio sur leur territoire
7
25
18
13
19
17
2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016-S1
Fermes en légumes 46 25
54
61
61
59 45
38
40
41
2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016-S1
9
Le mensuel des Agrobiologistes de Bretagne | Septembre 2016
Activités dominantes des fermes bio et en conversion au 30 juin 2016
Bovins lait
646
28% Bovins viande 8%
179
Porcs 2%
55
Volailles 7%
162
Activités dominantes des fermes nouvellement engagées en bio entre le 1er janvier et le 30 juin 2016 Bovins lait
43% Bovins viande 5% Porcs 1%
134 14 2
Volailles 4%
12
Ovins 3%
76
Ovins 4%
11
Caprins 2%
48
Caprins 1%
3
Grandes cultures 8%
201
Cultures fourragères 2%
50
Légumes
566
25% Fruits
140
6%
Grandes cultures 10% Cultures fourragères 1% Légumes
13% Fruits 4%
31 3 41 12
PPAM 2%
55
PPAM 3%
9
Apiculture 1%
17
Apiculture 1%
2
Aquaculture et produits de la mer 2%
38
Aquaculture et produits de la mer 1%
4
Autres systèmes ou non renseignés 3%
75
Autres systèmes ou non renseignés 10%
% du nb de fermes bio total
Nb de fermes bio
Sources : • Observatoire de la production bio en Bretagne, chiffres au 30/06/2016, actualisation au 04/07/2016 • Notification Agence bio, en date du 30/06/2016 En tant qu’Observatoire Régional de la production bio, la FRAB dispose des données des notifications de l’Agence Bio. Afin de consolider ces données, la FRAB réalise en propre des enquêtes auprès des producteurs bio. De plus, grâce à l’accompagnement des projets d’installations et conversions par les GAB, un niveau de précision supplémentaire est apporté par cette connaissance fine de terrain.
% du nb de fermes bio total
32 Nb de fermes bio
Une enquête de l'Observatoire de la production bio est en cours auprès des nouveaux engagés en bio en 2015 et 2016, ainsi qu'auprès des désengagements bio. Dans le prochain numéro de Symbiose, vous trouverez les principaux résultats de cette étude. Quelle part d'installations et de conversions parmi les nouvelles fermes engagées ? Quelle part des départs à la retraite, des déconversions ou encore des difficultés économiques parmi les arrêts bio ? Sont les principales questions auxquelles nous apporterons des éléments d'analyse dans notre prochaine édition d'octobre 2016.
Le mensuel des Agrobiologistes de Bretagne | Septembre 2016
LE
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Philippe Hamelin
Fier d'accueillir le salon sur ses terres Antoine BESNARD (Rédacteur en chef de Symbiose) - Photo Matthieu CHANEL (Agrobio 35)
E
n 2014, Philippe a perdu son troupeau de 220 chèvres suite à l'ingestion d'un aliment contaminé au clostridium perfringens. Soutenu par Agrobio 35, il a décidé de s'y investir à la hauteur du soutien qu'il a reçu. C'est en partie sur sa ferme, à Retiers (35) qu'aura lieu le salon La Terre est Notre Métier nouvelle formule. Et il n'en est pas peu fier.
Quand on passe le champs de foire de Retiers, et qu'on laisse derrière soi une parcelle de démonstration aux dessins et contours géométriques, un chemin de terre mène vers la ferme de Philippe Hamelin. Un bastion familial, vert et boisé, où il a repris la ferme familiale de 47 ha en 1986. « J'ai planté beaucoup d'arbres depuis que je me suis installé. Je pense qu'au fond de moi, j'étais déjà un peu écolo », rigole l'agriculteur. A l'époque, Philippe, qui préfère les petits animaux, décident d'abandonner la production de vaches laitières. Il monte d'abord un atelier de moutons reproducteurs, mais n'étant pas dans une région ovine, il fallait aller les vendre dans le Centre de la France, sans compter que la conjoncture n'était favorable à l'époque. « Triballat cherchait des producteurs de lait de chèvre, je me suis dit que c'était une opportunité », relate Philippe. Il s'associe alors avec un voisin, qui reprend une ferme attenante et monte en parallèle un atelier veau de boucherie. L'association va durer jusqu'en 2000. En 2012, Philippe saisit une nouvelle opportunité offerte par Triballat, qui cherche des producteurs de lait de chèvre bio. Il converti ses 47 hectares et son troupeau de 220 chèvres. « J’avais un industriel en face qui m’assurait un débouché, donc c’était confortable. C’est une société de producteurs et je m’inscrivais en local. Je n’avais pas à investir dans des bâtiments, et puis ça m’intéressait. » S'il avait déjà une idée des techniques bio, il fallait passer à la pratique, avec l'atout pour lui d'avoir un parcellaire regroupé qui se prête parfaitement au pâturage. Il entame sa
conversion. « Avant la conversion, je levais beaucoup le pied par rapport aux traitements. Je suis plus un éleveur qu’un cultivateur. En bio, c'est intéressant, tu es obligé d’aller dans ton champ voir comment ça se passe, observer. Mais on observe avec un oeil neuf, car on est de nouveau au cœur du système. La chèvre, c'est un animal très sensible au niveau de l’alimentation. Si tu es bon dans l’alimentation et que tu ne les pousses pas trop, ça se passe bien », explique Philippe.
La bio, un état d'esprit En juin 2014, il commence à livrer son lait bio. Il faut produire, il donne du correcteur azoté à ses bêtes. Alors que tout se passe bien, Philippe voit ses bêtes tomber une à une. Après analyse, on retrouve du clostridium perfringens dans l'aliment des chèvres. Cette toxine est mortelle et fulgurante pour les petits ruminants. Philippe perd 147 chèvres en un mois et demi. « Je voyais les bêtes mourir les unes après les autres, trois un matin, quatre le lendemain. Je n'avais pas le temps de les voir malades. On a fini par euthanasier le reste du troupeau qui était dans un état pitoyable », se remémore Philippe. A l'époque, il se retrouve seul, démuni, avec les difficultés financières et morales qui en découlent. « Les éleveurs autour de moi m'ont soutenu ; Heureusement que Laurent, mon compagnon, ainsi que mes frères et soeurs ont été présents pour me soutenir. Dans la vie les valeurs qui me sont chères sont avant tout humaines, et pour ma part je sais les reconnaître ». Une fois ce cap passé, c'est une longue procédure qui s'enclenche.
Philippe a décidé de se faire accompagner par Agrobio 35 et des administrateurs lors des tables rondes pour conciliation devant les représentants de la société d'aliments (table rondes auxquelles participent également : l'expert de la compagnie d'assurance de Philippe, sa vétérinaire, un représentant de Triballat, du contrôle laitier, de la Chambre d'agriculture, sa compagnie d'assurance, une association agriculteurs en difficulté et son compagnon Laurent). « Ca fait du bien de se sentir épauler dans ces moments », remarque Philippe. « A ce jour les négociations n'ont toujours pas avancé. Je continue le combat, mais je pense que la voie judiciaire se rapproche ». Pour Philippe, en bio, l'état d'esprit entre agriculteurs permet d'échanger sur les façons de travailler, et de se soutenir mutuellement au quotidien. « Suite à cette épreuve, il est certain aujourd'hui que je suis convaincu de l'agriculture biologique, et la notion d'autonomie. C'est un moyen de devenir acteur et maître de notre outil de travail. Il y a un respect de l'homme, des sols, des animaux... Elle est également gage de qualité et synonyme d'une juste rémunération de travail tout en étant porteuse de valeurs fortes. Nous pouvons être fiers d'être agriculteurs Bio », insiste Philippe.
Savoir donner pour recevoir A Agrobio 35, Philippe s'est senti soutenu et écouté. En 2015, lors de l'AG, il se lève et prend la parole, ému, pour faire part de sa gratitude. Le GAB cherche de nouveaux administrateurs, et Philippe rejoint alors le bureau. « Il faut savoir donner pour rece-
Le mensuel des Agrobiologistes de Bretagne | Septembre 2016
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participe à la mise en place du Pôle Démonstration. « J’ai regardé ce qui s’était fait au salon de l’herbe, à Nouvoitou (35). J’avais trouvé ça super dans la mise en scène. Je me suis inspiré de ça pour faire le plan du Pôle démo avec Gaëtan ». A Retiers, le salon a la place pour s'épanouir, grandir, à sa manière, humainement et humblement, comme il la déjà fait jusqu'ici. Philippe, lui, est « très fier » d'accueillir le salon sur ses terres. « Je crois à la bio. Et si ça peut donner une impulsion à certains qui sont en train de se poser la question... C’est bien d'amener le salon ici. La Foire de Retiers, c’est déjà un repère pour le monde agricole. Là, le salon arrive. Il va y avoir des curieux. Si on montre une belle vitrine, on ne pourra être que fiers ».
Relancer la machine Depuis la perte de son cheptel, Philippe a aussi pris le temps de se poser, de réfléchir à son avenir. « J’ai eu un an et demi où je me suis posé beaucoup de questions. Comme je n’avais plus d’animaux, je me suis mis à fond dans les cultures. J'ai fini par me dire qu'il fallait repartir. J’ai encore 10 belles années devant moi, si je veux transmettre mon exploitation à un jeune, il faut au moins qu’il y ait un outil de production qui tourne. C'est pour ça que je me suis dit : allez, je relance la machine.» Son engagement à Agrobio 35 lui a permis de nombreuses rencontres et ouvert des opportunités. Depuis mai, il remplace sur sa ferme, pour quelques mois Marie, une administratrice d'Agrobio 35. « C'est un moyen de gagner de l'argent d'une part. D'autre part, c’est intéressant, parce que ça m’a permis de voir le fonctionnement des AMAP, les livraisons, de rencontrer des gens. Ca m’ouvre plein d’horizons. Ca me donne des idées et des perspectives pour savoir comment moi je veux travailler demain. »
voir. Dans cette mésaventure, je me suis retrouvé à plus m’investir dans le réseau et sans regret, parce que ça permet justement de rencontrer les producteurs, de connaître la filière, tous ces processus… Je me suis senti accueilli. Le côté humain, la motivation des équipes, c'était très réconfortant de voir toutes ces énergies.» Alors qu'il rejoint le bureau d'Agrobio 35, le salon La Terre est Notre Métier se cherche un nouveau lieu. Philippe fait le lien. A Retiers, il y a une foire agricole historique hébergée sur un grand champ de foire, qui ne demande qu'à vivre le reste de l'année. Philippe a une parcelle de 11 ha, en bio, qui jouxte le champ
de foire et qui pourrait accueillir le Pôle démonstration. « Je me suis dit qu'à la porte d’ici il y avait une infrastructure en place et je sais que le Comité de la foire et la Comcom cherchait à dynamiser le lieu pour le faire vivre. Il y a un truc fort ici ». Le lieu et l'accueil des personnalités locales séduisent les organisateurs, qui décident d'installer le salon nouvelle formule dans ce lieu. « Une dynamique s’est montée avec les paysans bio du coin avec l’appui et la motivation de Gaëtan (technicien à Agrobio 35). Ca m’a permis aussi de rencontrer des producteurs du secteur. Tout le monde est motivé pour que ça se passe bien ». Philippe
Preuve qu'une page se tourne pour l'éleveur, il a repris des chevrettes. « J'ai 76 chevrettes. Mon objectif c'est de rentrer en production en mars 2017, et de faire de la transformation pour fabriquer des glaces au lait de chèvre. Il faut que je monte un laboratoire et que je continue à me former, mais je me dis que la glace à l'avantage d'être un produit qui se garde et les pics de production laitiers correspondent au mois du printemps, ce qui permet d'être prêt pour l'été. » Philippe a également dans l'idée de proposer des produits innovants et haut de gamme, notamment des parfums peu communs à base de plantes pour les restaurants gastronomiques. Quand on fait le parallèle on se dit qu'à Retiers, un salon renaît en même temps qu'un producteur bio.
Le mensuel des Agrobiologistes de Bretagne | Septembre 2016
A
près deux ans d'absence, La Terre est Notre Métier revient les 28 & 29 septembre prochains à Retiers (35). Vous trouverez dans cette double page le programme complet du salon, fier et fort de ce qui a toujours constitué son ADN : des conférences, des démonstrations, des animations et la mise en valeur des savoir-faire des paysans bio du réseau FNAB. Toutes les informations sont à retrouver sur www.salonbio.fr
• Les paysans bio au cœur de la recherche
π Thierry MERCIER (ITAB), Nadou MASSON (présidente d’Agriculture Biologique en Picardie), INRA (sous réserve) • Quelles semences pour demain ?
π Cyriaque CROSNIER MANGEAT (Agrosemens), René LEA (SCEA bio de Kergoarat), Benedikt HAUG (Agronome), Philippe JOUANNEAU (SA Pinault-Bio) • Maladies et prédateurs sous abris,
des solutions concrètes à la portée de tous
16h00 17h30
Le programme complet
• élevage bio, comment passer de la médecine
à la santé
• Microfermes et permaculture :
des rêves à la viabilité
π Marie-Christine RALISON-YON (éleveuse caprins bio), Jean-Noël DESBOIS (éleveur bovins lait bio, administrateur du GAB44), Catherine EXPERTON (ITAB), Catherine ROFFET (vétérinaire)
π Kevin MOREL (INRA) • Nouvelles techniques de modifications
génétiques : quels enjeux pour l’agriculture biologique ?
11h00 12h30
π Henri DAUCE (cédant), Sylvain BEDFERT (repreneur), François BERROU (AFOC 53), Nadou MASSON (présidente d’Agriculture Biologique en Picardie - Sous réserve) • Livrer les restaurations collectives :
quelles structurations pour les producteurs ?
π Patrick CREAC’H (cogérant et responsable d’études SCIC KEJAL), Julie PORTIER (FNAB), Alain ROUAULT (coordinateur technique du groupement d’achats bio de l’agglomération de Saint-Brieuc Sous réserve), Pascal DOUSSINAULT (productrice bio de pommes bio (22) - Sous réserve), Sophie JEANNIN (Manger Bio 35) • Changement d’échelle de la bio :
on y est, qu’est-ce qu’on fait ?
π Stéphanie PAGEOT (présidente de la FNAB), Ronan LE VELLY (Montpellier Supagro, UMR Innovation), Représentants de la distribution spécialisée et généraliste 14h00 15h30
conférences des exposants 11h00 11h45
• Les plantes au secours des plantes
12h00 12h45
• les systèmes d’élevages professionnels en
13h15 14h00
• transmission-reprise en agriculture
14h00 14h45
• Importance du bien-être animal en élevage laitier pour l'animal, l'éleveur et Le consommateur π Eil yps
15h00 15h45
• Comment engager son entreprise dans une démarche de certification ? π Bureau Véritas
16h00 16h45
• Se former à la biodynamie, par un cursus professionnalisant, par la formation continue
π J3C Agri races locales π Fédération des Races de Bretagne biologique ou durable : brèves rencontres cédants-repreneurs ! π FD CIVAM 35 - Agrobio 35
π Mouvement de l’Agriculture Bio-Dynamique
jeudi 29 septembre Conférences Recherche, Techniques et filières
• lait biologique : une filière en essor
• L’agriculture bio, une chance pour le climat
π Éric GUIHERY (FNAB), Marc BELHOMME (Triballat - Sous réserve), Patrick CHEVRIER (OP Seine et Loire), Christophe BARON (Biolait), Daniel FORTIN (Agrial), Eric TEILLET (Système U - Sous réserve), Jean-Marie PAUTARD (filière grandes cultures bio - Sous réserve)
π Jean JOUZEL (climatologue, Vice-président du groupe scientifique du GIEC | 2002-2015 ) • Conduire des rotations en grandes cultures
sans élevage : l’importance de la rotation
• Trajectoire d’installation en maraîchage
π Jean-Martial POUPEAU (agriculteur bio journaliste pour Biofil), Yves VANHOECKE (agriculteur bio dans l’Eure)
π Maëla PEDEN (GAB56)
• Microfermes et permaculture :
• L’abattage, une étape à part entière de la vie
d’un animal bio
14h00 15h30
• La filière céréales et oléoprotéagineux bio,
un cap à franchir avec l’implication de tous
Conférences Recherche, Techniques et filières
• Ma transmission, je l’anticipe !
π Loïc ROBICHON (Symbiose)
π FRAB, Coop de France Ouest, Chambre régionale d’agriculture de Bretagne, Initiative Bio Bretagne, Greniers Bio d’Armorique
Mercredi 28 septembre
π Daniel EVAIN (producteur FNAB, mandaté au HCB), Éric MEUNIER (Inf’OGM), Éric GALL (IFOAM EU)
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π François MOSSET et Guylain PAGEOT (éleveurs bio en Loire Atlantique), Syndicat des transporteurs d’animaux vivants (sous réserve), Abattoir municipal de Craon (sous réserve) • Emploi et métier en agriculture biologique
sur 4 pays bretons
π Emmanuelle MARCHAND (Maison de l’Emploi, de l’Insertion et de la Formation profesionnelle de Rennes), Bénédicte ROUSVOAL (FRAB), Anne-Laure SIMON (Agrobio 35)
11h00 12h30
des rêves à la viabilité
π Kevin MOREL (INRA) • Les clés de l’installation en petits
ruminants
π Vincent BELLET (Institut de l’élevage), Catherine EXPERTON (ITAB) la coopération logistique face au changement d’échelle de la bio
π Mathieu LANCRY (Président de Norabio), Francis COUILLARD (Gie Biodiversité - Sous réserve), Pierrick LEFEUVRE (AB Nutriment) et Yohann GOUARY (L’orgé)
Bénéficiez d’un accès prioritaire aux conférences qui vous intéressent en réservant en ligne depuis le site avant le 20 septembre :
Remise des prix mercredi 28 septembre de 11h à 13h Salle La roche aux fées
www.salonbio.fr rubrique « conférences »
Le mensuel des Agrobiologistes de Bretagne | Septembre 2016
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• Le développement des marques privées
biologiques : enjeux et perspectives pour le développement d’une filière bio de qualité
π Jan PLAGGE (président de BIoland), Alain DELANGLE (président de Biocohérence), Elisabeth LAVILLE (cabinet Utopie) • Envisager et réussir sa conversion en lait
biologique
14h00 15h30
π Guillaume MICHEL (GAB 22), David ROY (Agrobio 35), Stéphanie SABIN et Cyrille GUILLOTEAU (producteurs bio d’Ille-et-Vilaine)
Mercredi 28 septembre
• Vendre au juste prix
π Richard LAIZEAU (Paysan bio et formateur) • La biodiversité fonctionnelle
en arboriculture
11h00 11h45
π Laurence ALBERT (IFPC), conférence suivie du lancement du groupe technique inter-régional arboriculture • Réussir une alimentation 100% biologique des
monogastriques avec des matières premières locales : résultats et travaux en cours
π Stanislas LUBAC (IBB), Antoine ROINSARD (ITAB), Florence MAUPERTUIS (CRA PL) • La production et la transformation des
16h00 17h30
13h00 13h45
17h00 17h45
plantes à parfum aromatiques et médicinales
π Thierry THEVENIN (Syndicat des Simples), Joël LABBE (sénateur), Isabelle CHAILLOU (productrice PPAM bio et administratrice GAB 29) • Agroforesterie et agriculture biologique
11h00 11h45
• L’utilisation des Préparations Naturelles Peu
Préoccupantes en agriculture biologique
π Patrice MARCHAND (ITAB : pôle Biosolutions et Résidus)
Des perspectives en auto-construction : échanges entre paysans Trier et stocker ses céréales bio à la ferme
Séchage mobile, nettoyage avant stockage… savoir-faire de paysans Pâturage : les paysans bio innovent
Regards paysans sur le pâturage hivernal et le pâturage tournant dynamique
jeudi 29 septembre
π Yves GABORY (Mission Bocage) 16h00 17h30
Quel matériel pour la meunerie paysanne ?
13h00 13h45
Trier et sécher des Plantes Aromatiques et Médicinales à la ferme
Présentation d'un séchoir auto-construit et de savoir-faire paysans Gérer des adventices en cultures biologiques
Eleveurs, polyculteurs, céréaliers : 3 systèmes, 3 approches.
• envisager et réussir sa conversion en grandes
cultures biologiques
π Agriculture Biologique en Picardie conférences des exposants 11h00 11h45 12h00 12h45
16h00 16h45
L'innovation commerciale en circuits-courts
Témoignages sur la communication numérique et la mutualisation d'outils de communication entre paysans
• Boom des distributeurs automatiques de
produits fermiers : en Bretagne aussi ?
π Filbing Distribution • Augmenter vos performances économiques en
17h00 17h45
Ergonomie en maraîchage
Savoir-faire paysans pour ne pas attendre d'en avoir plein le dos pour agir
valorisant vos matières organiques grâce aux technologies Marcel Mezy π SOBAC
14h00 14h45
• Agriculture biologique : l’intérêt du régime fiscal micro BA π Icoopa
15h00 15h45
• la méthode Obsalim
16h00 16h45
• Les nouvelles méthodes de protection des
π Bruno Giboubeau
100 exposants retrouvez la liste des exposants sur : www.salonbio.fr rubrique «exposants»
cultures contre les nuisibles π AgriProTech
≈ écimeuses ≈ Travail du sol : Charrues déchaumeuses ≈ Destruction de couverts végétaux
→ Fourrages ↓ Récolte / fauchage ≈ Faucheuse 6m groupeur d’andain ≈ retourneur d’andain ≈ récolte autochargeuse
→ Légumes ↓
↘ Animations
Observation d’animaux ≈ Méthode Obsalim ≈ manipulation d’animaux ≈ démonstrations de drônes au service de l’agriculture
↘ Démonstrations → Cultures ↓ Désherbage mécanique (sur maïs, céréales) ≈ houe rotative ≈ herses étrilles ≈ bineuses
Désherbage mécanique de choux ≈ avec Robot désherbeur ≈ avec nouveaux porteoutils électriques ≈ Destruction de couverts végétaux
↘ Présentations variétales
20 variétés de maïs (hybrides et population) ≈ 20 mélanges prairiaux ≈ courges ≈ tomates ≈ navets ≈ couverts végétaux en extérieurs et sous abris ≈ soja ≈ Betterave ≈ sarrasin
Le mensuel des Agrobiologistes de Bretagne | Septembre 2016
L’
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Jean Jouzel, climatologue
« le monde agricole a beaucoup à faire pour le climat » Antoine BESNARD (Rédacteur en chef de Symbiose)
D
irecteur de Recherche Emérite au CEA (Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives), Jean Jouzel a fait dans cet organisme l'essentiel de sa carrière scientifique largement consacrée à la reconstitution des climats du passé à partir de l'étude des glaces de l'Antarctique et du Groenland. Il a participé au titre d’auteur principal aux deuxième et troisième rapports du GIEC (colauréat du Prix Nobel de la Paix en 2007), dont de 2002 à 2015 il a été vice-président du groupe de travail scientifique. Il sera présent jeudi 29 septembre, à Retiers, pour une conférence dédiée aux rapports bénéfiques que peuvent entretenir agriculture biologique et climat.
•On entend de plus en plus parler de réchauffement climatique, qu'y a-t-il derrière cette notion ? Le réchauffement climatique est là, il est perceptible. Il n’est pas encore dangereux, mais pour reprendre la conclusion du rapport du GIEC : le réchauffement climatique est sans équivoque. On ne peut pas être plus clair pour la communauté scientifique. Et, le deuxième point important, c'est qu'on confirme la responsabilité des activités humaines à travers l’augmentation de l’effet de serre due, en premier lieu, à l’utilisation des combustibles fossiles. Du point de vue de la communauté scientifique, même si on voit quelques climato-sceptiques, qui ont tout à fait le droit de s’exprimer, le diagnostic est assez clair. Le réchauffement climatique est là, il se traduit dans l’atmosphère, mais aussi dans l’océan, par exemple avec l’élévation du niveau des mers. Donc, la communauté scientifique a d'une part des arguments très convaincants concernant cette réalité. D'autre part, il y a des risques de réchauffement important d’ici la fin du siècle. •Y'a-t-il une réelle prise de conscience, notamment politique, du réchauffement climatique? La convention climat, signée en 1992, s’appuyant d’ailleurs sur les travaux successifs du GIEC, avait déjà l’objectif de stabiliser les émission de gaz à effet de serre. C’est vrai qu’il y a une dualité entre le diagnostic des scientifiques et la prise de conscience des décideurs politiques, en particulier à travers les conventions climat, les COP successives. Néanmoins, le réchauffement climatique
est aujourd'hui une réalité bien comprise du monde politique au sens large. Mais, quand on parle de réchauffement climatique, les gens imaginent que c’est ce qu’on vit aujourd’hui, alors que ça n’a rien à voir. Celui dont on parle, c’est celui auquel on va faire face si rien n’est fait pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre : 4 à 5 degrés à la fin du siècle, c’est quasiment inimaginable, c’est un monde complètement différent. Et c’est l’action d’aujourd’hui qui doit empêcher d’en arriver là. •Justement, on parle de ce fameux seuil de 2° à ne pas dépasser d’ici 2050... Que se passerait-il si on le dépassait ? Par exemple, si on passait ce seuil, la production agricole mondiale serait affectée négativement. Si on regarde les productions des 4 cultures vivrières principales (blé, maïs, riz et soja), des régions vont gagner en productivité et d’autres vont perdre en productivité. Mais dans un contexte de réchauffement climatique important, les régions qui perdent prennent largement le pas sur les régions qui gagnent. Donc, c’est une réalité extrêmement tangible. La productivité agricole, en cas de réchauffement climatique important baisserait. C’est déjà vrai en France, où on voit que les rendements du blé stagnent. L’INRA attribue ça au réchauffement climatique. •L’agriculture a un rôle majeur à jouer pour limiter ce réchauffement climatique. En France, c'est la deuxième activité la plus émissive de CO2. Il va falloir qu’elle apprenne à se
passer des substances chimiques ? C’est peut être un peu simple, mais quand je parle d’agriculture, j’aime bien parler des 3 volets : causes, conséquences et solutions au réchauffement climatique. Sur les causes, il est clair que les pratiques agricoles contribuent aux émissions de GES (gaz à effet de serre), personne ne le conteste, même si ça varie d’une région à l’autre. En Bretagne ça peut être jusqu'à 40% sur certains territoires, dans d’autres c’est plutôt 20 %. C’est vrai aussi à l’échelle mondiale. Ca c’est le premier aspect : la contribution. Ensuite, c’est clair que la productivité agricole, forestière également, dépend du climat. Il y a des risques d’impact dû au réchauffement climatique. Si on prend par exemple la viticulture, c’est une production très sensible aux aléas climatiques. On sait très bien qu’un degré de plus aura un impact sur la production. La profession viticole se pose des questions très claires d’adaptation. Même en Bretagne, les cidriers ne savent plus comment faire parce que les pommes sont prêtes trop tôt ou sont trop riches en sucre. Il y a déjà des conséquences qui sont là, et un degré de plus va les rendre effectivement plus présentes pour la profession agricole. Le troisième point concerne les solutions. Le monde agricole peut participer de plusieurs manières aux solutions. Les solutions, c’est diminuer les émission de GES ; on peut travailler sur l’alimentation du bétail avec des émissions moins importantes. On peut aussi favoriser le stockage du carbone dans les sols, notamment avec le sans labour. Les
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ça veut dire maximiser le pâturage, avoir un recours minimum aux intrants, ne pas faire venir du soja d’Amérique du sud, etc. J'étais, il y a peu, invité à un débat avec des agriculteurs bretons, il y a un vrai débat entre producteurs. Pas forcément entre bio et non bio, mais entre ceux qui ont pris conscience qu’il fallait changer et ceux pour qui le réchauffement climatique n’est pas un problème. Il y a un vrai enjeu de les confronter aux conséquences de leurs pratiques et l'angle climatique fonctionne bien. •Il y a beaucoup de sols qui sont en friche dans le monde, Monique Barbut, Secrétaire exécutive de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification explique que la restauration de 500 millions d'hectares en friche permettrait de contenir le réchauffement climatique à moindre coût d'ici 2050 (100 $.ha)... C'est une bonne solution selon vous?
Jean Jouzel, Conférence, jeudi 29 septembre, à 11 h, salle La Roche aux Fées
territoires agricoles sont les premiers territoires d'expérimentation. Quand on regarde le développement des énergies renouvelables, c'est dans ces territoires qu’on parle d’éolien, de solaire, de méthanisation… D’un autre côté, le monde agricole au sens large, doit participer aux solutions par rapport à la lutte contre le réchauffement climatique.
qui devrait permettre au monde agricole de prendre le phénomène à bras le corps, qu’on soit bio ou non bio. Je pense notamment à l’agriculture sans labour… ce qui est bien je pense pour le piégeage du carbone. Mais, il y a beaucoup à faire dans le monde agricole par rapport au réchauffement climatique, c’est extrêmement clair.
•On entend parler d’agriculture climato-intelligente, ça veut dire quoi ?
•En bio, il y a un concept fondamental qui est l’autonomie. C’est une des clés aussi d’une agriculture climatointelligente selon vous ?
On dit aussi agroécologie. Dans le monde agricole, il y a eu très longtemps une négation du problème, en disant, ça n’existe pas, ce n’est pas lié aux activités humaines, et puis là, le monde agricole se réveille et commence à prendre conscience que finalement ce changement climatique, c’est aussi leur problème. Il y a eu du retard à l’allumage et vous avez raison de dire que le monde agricole a une responsabilité face à ça. Donc on va parler d’agroécologie, d’agriculture climato-intelligente, c’est celle qui s'inscrit sur les trois volets déjà cité : essayer de diminuer les émissions de GES ; essayer de s’adapter, parce qu’il y a possibilité d’adapter les cultures au changement climatique ; de participer aux solutions, à travers le piégeage du carbone... Il y a tout un ensemble d’actions
Oui, c’est un peu ce qu’e j’ai dit précédemment. Si on se limite à l’effet de serre, le bio a beaucoup d’intérêt, puisque les avantages en cas d'émission de GES sont liés à la proximité des lieux de production et de distribution. L’autonomie oui, si bio est aussi synonyme d’essayer de limiter la consommation d’énergies sur la ferme. Il faut aussi regarder la stratégie qui sous tend le bio : les stratégies de proximité, d’autonomie, d’économie circulaire sont des aspects qui sont intéressants. Donc, ce sont ces valeurs d’autonomie, de proximité qui peuvent faire la valeur de l’agriculture biologique en terme de lutte contre le réchauffement climatique. •Par exemple, en terme d’autonomie, la Bretagne est une région d’élevage,
Oui, c’est dans cette optique qu’est née l’initiative 4 pour 1000 de l’INRA, qui a pour objectif d’augmenter le stockage du carbone dans les sols de 4 pour 1000 par année. Tout ça se crée aussi via des changements de pratiques (Sans labour, biochar…). Ce n’est pas si simple de ramener du carbone dans les sols sur 500 millions d’hectares. Donc il faut y aller progressivement. Il faut stocker plus de carbone dans les sols, faire attention au destockage. C’est une voie à prendre, parce qu’on comprend que stocker du carbone dans le sol, ça permet d'ôter du CO2 de l’atmosphère, du carbone qui a de plus l'avantage de ne pas se redécomposer rapidement. Et puis, je comprends que ça joue de façon importante sur la productivité des sols. Effectivement, c’est une approche gagnantgagnant, même si son application n’est peut être pas si évidente à mettre en œuvre. Mais je suis d’accord avec cette initiative, qui peut s’appliquer concrètement. •Comment chacun peut se mobiliser, faire bouger les politiques, notamment face au poids des lobbies ? En mobilisant, en parlant, en donnant des exemples, comme vous le faites à Retiers. Je pense que du point de vue bio, ce qui est important, c’est de montrer ce qui marche, les succès, montrer des gens qui le font et s’en tirent la tête haute. C’est un effet d’entraînement. Je ne crois pas qu’il faille opposer bio et non bio. Il faut aussi intégrer ces aspects réchauffement climatique dans les stratégies agricoles. Et c’est important pour l’agriculture en général. Il faut effectivement poursuivre dans cette dynamique, parce qu'on est loin des objectifs du Grenelle.
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Aggrozouk SAVOIR
le désherbage à coup de pédales Par Nicolas SINOIR (Atelier Paysan)
E
t si, au lieu de se casser le dos dans les champs, les paysans se faisaient les cuisses ? C’est un peu la promesse de ce vélo couché des champs, nouvel arrivé sur quelques fermes en maraîchage bio, et qui dépareille au milieu des bineuses, cultivateurs et autres butteuses : épargner au maraîcher certaines tâches qui mettent son corps à rude épreuve, et limiter les passages de tracteur superflus, donc la compaction des sols. Ce « véloculteur » n’est pas une idée nouvelle, mais sa pertinence s’est construite (et se construit encore) au fil des versions successives et de l’implication des paysans dans son évolution. Revue de la jeune histoire et des intérêts d’un outil qui en fait rêver beaucoup.
Qui a vu le vélo des champs ? Debout, couché ? Avec ou sans assistance électrique ? Pour quelles opérations de culture ? Avec quel système de direction ? Des premières versions réalisées au sein du réseau américain Farm Hack (notamment sur la Green Tractor Farm de Tim Cook), à celle qui roule pour l’instant sur cinq fermes françaises (Vaucluse, Haute-Savoie, Dordogne, Indre-et-Loire, Ile-de-France), autant de questions auxquelles il a fallu trouver des réponses appropriées pour arriver au prototype actuel, dont les plans déjà libérés sur les sites de l’Atelier Paysan et de Farming souldoivent encore évoluer. Le collectif Farming Soul travaille sur ce projet depuis quelques années, et a pu profiter en 2015 du cadre de la POC 21 (POC, pour proof of concept, qu'on pourrait traduire par la preuve du concept) pour livrer une copie léchée, forcément améliorable ; les membres du collectif ont alors sollicité l’appui de l’Atelier Paysan pour la suite du processus (appui à la R&D, mise en plans) et l’implication forte de maraîchers pour s’assurer de la pertinence de l’engin, dans l’idée plus tard d’accompagner des maraîchers pour le construire plutôt que d’en vendre des copies. Objectif : courant 2017, disposer
de suffisamment de certitudes pour diffuser une proposition définitive de plans, et accompagner les maraîchers qui souhaitent le construire en formation.
Parlons technique : un outil efficient Écartons la confusion la plus courante, l’aggrozouk n’est pas un tracteur à pédales : c’est d’abord un bon moyen de mécaniser « léger » certaines tâches parfois manuelles des fermes maraîchères sur petites surfaces (travail superficiel, désherbage des cultures, semis,...). C’est un porte-outils polyvalent (socs patte d’oie, doigts bineurs, semoirs,...) à pédales et à assistance électrique, permettant la plupart des travaux agricoles de surface (jusqu’à 10-15cm). Son énergie : un paysan pédalant dans la position confortable du vélo couché, pour tirer de ses jambes le maximum de puissance sans abîmer son dos. Son ratio poids/efficacité de travail lui permet de s’inscrire dans une démarche de réduction du tassement du sol tout en effectuant des travaux sur une largeur de planche. L’outil est encore jeune, et c’est l’objectif des prototypes fabriqués à Valence en février 2016 que de construire sa légitimité
et sa pertinence au champ. Au-delà des modules évoqués et encore à construire pour enrichir la palette de l’aggrozouk (semoir, désherbage thermique, possibilité d’atteler une remorque,…), il faudra patienter une ou deux saisons pour considérer l’outil comme une proposition validée par suffisamment d’heures au champ.
Et pour la suite L’unique outil à pédales pour l’instant mis en plan et libéré par l’Atelier Paysan et Farming Soul n’a pas vocation à le rester : des projets sont en démarrage dans les Hauts de France (en lien avec le GABNOR) et dans le Vaucluse (en lien avec l’ADEAR 84) pour plusieurs versions de lits de désherbage. Si l’affaire vous intéresse, n’hésitez d’ailleurs pas à nous solliciter pour rejoindre un des groupes de travail ! • Contact Atelier Paysan : Grégoire Wattinne (g.wattinne@latelierpaysan.org) • Contact Farming Soul : farmingsoul@riseup.net
Articles en partenariat avec l'Atelier Paysan
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Cultures sous couverts : dynamiques de conception participative en maraîchage Moins travailler le sol, c’est dans l’air du temps, en intégrant notamment dans les plans de culture des couverts pour passer de la structuration mécanique du sol (avec des outils) à une structuration plus biologique, racinaire, respectueuse de la vie du sol et de son fonctionnement naturel. Avec les objectifs suivants : réduire le temps de travail important dans les systèmes biologiques dédié au travail du sol et à la gestion de l’enherbement, et ce afin préserver le potentiel agronomique des sols. Faire avancer cette question, c’est réfléchir aux espèces, aux mélanges, aux successions, et au matériel nécessaire pour permettre d’implanter des cultures au sein de couverts végétaux. Si ces questions sont avancées en grandes cultures, la réflexion en légumes est plus récente. L’occasion pour l’Atelier Paysan et les géo-trouvetout des campagnes de contribuer à concevoir du matériel à la fois simple de conception, pointu techniquement, totalement approprié aux besoins des paysans et libre pour que quiconque qui souhaite progresser techniquement sur le sujet et s’équiper sans se ruiner puisse le faire.
Implanter des légumes dans des couverts végétaux : l’épineuse question du matériel On ne présente plus l’intérêt des couverts végétaux, relayés par les tenants des TCS et de l’agriculture de conservation : réduction de l’érosion par la couverture du sol, augmentation de sa vie biologique, de sa stabilité structurale, meilleure gestion de l’eau, apport de matière organique,… Ces systèmes reposent sur l’utilisation de couverts adaptés (espèces, mélanges pour la rotation, le créneau cultural, production de biomasse suffisante,…), ainsi que sur leur destruction (hivernale, mécanique, par bâchage) qui précède l’implantation dans le mulch constitué des cultures que l’on veut faire suivre. La question du matériel est donc primordiale, car elle conditionne aussi les espèces à privilégier en couverts, au-delà de critères « classiques » dans le cadre de pratiques plus traditionnelles. Implanter des légumes dans un couvert végétal (qu’on aura semé au préalable), c’est d’abord détruire ce couvert, à l’aide d’un rouleau crêpeur à ailettes (dit « faca ») par exemple, puis implanter (semer, planter) une culture dans ce mulch ainsi
constitué, en travaillant le sol le moins possible sur une ligne étroite (« strip-till »). Avec au final, cette question : comment s’équiper d’outils appropriés, peu coûteux et en acquérir la maîtrise suffisante pour pouvoir y apporter des modifications et les réparer si nécessaire ? On a bien une réponse…
Atelier Paysan et couverts végétaux : des outils libres pour des maraîchers autonomes La SCIC L’Atelier Paysan, justement dédiée à l’accompagnement des paysans sur ces questions, s’est penchée sur le côté mécanique de ces techniques, dans la lignée des travaux du collectif quels que soient les outils : toujours co-conçus en lien avec un groupe de paysans ou les expérimentateurs d’une station, toujours prototypés avec le groupe, et toujours validés par l’usage au champ, sur plusieurs saisons de production, dans l’optique de les enrichir constamment. Des outils forcément low-tech (reproductible à la ferme avec un matériel accessible : poste à souder, meuleuse, perceuse à colonne) puisque destinés à être autoconstruits à la ferme, forcément libres, « communs », et dont les variantes sont réellement l’expression des pratiques des paysans, de leur ingéniosité et de la variabilité de leurs contextes pédo-climatiques.
Si, à 50 ans, on n’a pas son Roloflex,… … On a raté son semis (sous couvert) ! C’est ce que ce sont dit le GRAB (projet SoilVeg), le lycée des Sillons de Haute Alsace à Pflixbourg (projet SEFER Sol : Mise au point de
Stratégies innovantes d’Entretien de la Fertilité du Sol en maraîchage biologique), et les maraîchers du groupe : l’Atelier Paysan accompagne aujourd’hui ces trois projets sur la destruction de couverts végétaux, volet machines, pour deux versions d’un outil flexible (en Rhône Alpes et en Alsace au sein du projet SEFER Sol) pour usage en terrain non nivelé, et deux versions d’un outil rigide, pour le maraîchage à plat (GRAB) et pour les planches bombées (Bretagne). Les prototypes fabriqués par le groupe de maraîchers du Finistère seront en démonstration au salon La Terre est notre métier les 28 et 29 septembre, ce sera l'occasion pour les producteurs de présenter les résultats des expérimentations qu'ils ont pu mener sur leurs fermes durant l'année 2016.
L’aggrozouk ainsi que les différents outils de l'Atelier Paysans seront présent sur le salon La Terre est notre Métier, les 28 et 29 Septembre 2016, à Retiers en Ille-et-Vilaine : venez essayer et discuter avec Farming Soul et l’Atelier Paysan sur le Cabaret des savoir-faire paysans. ≈ Retrouver le programme complet du Cabaret des savoir-paysans page 13.
www.salonbio.org
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Innover en circuits courts SAVOIR
Mutualiser les outils de comm', ça a du bon Par Lise ALLAIN (Animatrice Filières, circuits courts et communication au GAB 56)
C
’est dès son installation, en 2012, que Dominique Dubreuil a pensé collectif pour sa commercialisation. Et son projet en maraîchage tombe à pic puisque sur son territoire un groupe de paysans bio est en pleine gamberge pour lancer le premier site de commande en ligne bio du département : plus connu sous le nom de « Clic ta Berouette ». Bref Dominique s’installe, produit puis commercialise une partie de sa production à plusieurs mais en tant qu’ancien conseiller de gestion nous sommes curieux de savoir ce qu’il envisage pour sa communication ? Découvrez son parcours, ses choix et surtout ce qui l’a guidé vers la mutualisation d’outils de communication le JEUDI 29 SEPTEMBRE À 16H sur le Cabaret des savoir-faire paysans de la Terre est Notre métier mais avant cela, voici aperçu de son témoignage en quelques questions. •Quelle place donnes-tu à la communication sur ta ferme ? As-tu vu une évolution sur ce poste depuis ton installation ? Le métier de maraîcher est très prenant en terme de temps de travail et quand on ajoute les deux élevages, autant dire que le temps disponible pour la communication est quasi nul. Pour moi il était important de multiplier les supports de com pour toucher un public le plus large possible et faire savoir qu'on existait. Lors de mon installation, j'avais installé quelques panneaux signalétiques aux abords de la ferme. A ma demande, les jour-
naux locaux ont bien couvert l'ouverture du magasin. Et le bouche à oreille à fait le reste. L'association des passeurs de son et d'image m'a sollicité pour faire un portrait dans le cadre d'un petit documentaire. Naturellement j'ai accepté. On a profité de sa diffusion pour organiser un buffet ciné à la ferme. La ferme figure dans le panier des campagnes et sur bonplanbio.fr, et nous ouvrons régulièrement nos portes (portes ouvertes, petits dej’ bio…). •Faire partie d’un collectif de commercialisation t’as t-il boosté pour communiquer ? C'est clair que ça donne une autre dimension et ça démultiplie l'efficacité. Depuis son ouverture, notre site Internet a beaucoup fait parler dans la presse locale. Nous avons investi collectivement un temps considérable pour assurer la communication et la promotion de Clic ta berouette : foires, marchés d'été, forum des associations, animations diverses... on n'a pas ménagé nos efforts. A 8 fermes c'était possible, alors que seul... Mais au-delà de la communication pour notre propre site, nous voyons collectivement plus large et essayons de consacrer chaque année un budget et du temps à la recherche de nouveaux consommateurs et au développement de la bio. Dans ce cadre, nous avons accueilli tour à tour la Fête du lait bio sur nos fermes (dont la nôtre en 2014) avec le soutien des collègues pour l’organisation.
FERME DE GOURHERT Légumes, oeufs, agneaux 56800 Ploërmel
Exemple d'outils de communication développés par le réseau GAB-FRAB et qui seront présentés lors du salon La Terre est Notre Métier
Et cette année nous avons soutenu financièrement le déploiement d’un défi familles sur notre territoire. •Pourquoi as-tu envisagé des outils communs ? Quand il a fallu refaire notre signalétique, on s'est tourné naturellement vers le GAB. L’aspect financier était appréciable bien sûr mais ça nous permettait surtout de montrer notre appartenance au réseau et de l'afficher à l'entrée de la ferme. On est fiers d'être des paysans bio au sein du GAB, on ne va pas se cacher ! •Tu es maraîcher sur la ferme de Gourhert, membre du collectif Clic ta Berouette, et membre du réseau GAB/ FRAB de producteurs bio locaux et tu communiques sous ses trois identités. Est-ce que tu utilises une échelle plus qu’une autre ? Ma commercialisation étant exclusivement locale, je privilégie cette échelle pour la communication. Notre site Internet est une vitrine pour nos produits et notre ferme et aide à booster nos autres points de vente, nous faire connaître. Appuyer notre communication avec le GAB et mettre en avant le logo AB permet au public de cerner tout de suite notre identité et nos valeurs. •Comment fais tu pour garder l’identité de ta ferme dans tout ca ? Au début, il y avait un peu de confusion dans l'esprit des clients. Aujourd'hui, ils ont bien compris que notre magasin et le site Internet étaient bien distincts. Ils reconnaissent la dynamique de groupe de clic ta berouette. Nous avons énormément développé l'achat revente et le dépôt vente des produits des collègues dans notre propre magasin à la ferme. Tout cela se fait dans la plus grande transparence et les clients apprécient le service et la gamme qui leur est proposée. Au final, ce n'est pas si grave qu'il y ait un peu d'amalgame entre le collectif et la ferme, ce qui compte, c'est qu'on parle des producteurs bio locaux, et en positif !
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Internet. UN outil qui permet de lier technologies et authenticité
L
eur ferme, c’est «Carotte et Feijoa», une exploitation agricole atypique née sur l’idée audacieuse de cultiver des fruits exotiques en Bretagne. Expérimenter, innover, sortir des sentiers battus, c’est un leitmotiv pour Lèna et Thomas, maraîchers bio à Vendel (35). Pour leur commercialisation, ils utilisent au quotidien les outils numériques (un site collectif de commande en ligne, un compte Facebook) avec là encore des idées novatrices comme des paniers recettes type qui fonctionnent très bien.
•Comment s’est faite l’évolution de votre communication, notamment vers les réseaux sociaux ? Nous commercialisons toute notre production en circuits courts, notamment dans une Amap. Au départ nous avons mis en place une lettre mensuelle pour les Amapiens, mais assez vite nous avons eu du mal à tenir ce rythme car cela nous prenait trop de temps. A la fin elle ne sortait plus que tous les 3 mois, voire tous les 6 mois ! Il fallait donc changer de méthode. Dans le même temps, nous avons décidé d’être plus présents sur Internet pour mieux maîtriser les informations qui étaient diffusés sur notre ferme. Plusieurs sites donnaient en effet des informations erronées et on ne pouvait pas nous joindre. Nous avons donc voulu augmenter notre référencement avec les bonnes informations Nous avons d’abord créé une page Facebook et nous avons invité les gens de l’Amap à aller sur notre page en nous engageant à y noter la composition des paniers la veille de la distribution. Du coup nous avons définitivement arrêté la lettre. Facebook a été un bon moyen de gagner en efficacité et en régularité, sans y passer trop de temps. Le blog est arrivé ensuite parce que les réseaux sociaux, c'est bien, mais le flux est trop rapide, et ça devient difficile au bout de plus de 4 ans de retrouver les informations que l’on recherche : c’est le mauvais côté de l'immédiateté. Le blog permet cet archivage classifié : les recettes proposées, des infos pratiques remises à jour, notamment les photos (nous avons par exemple une page «C'est quoi ce truc? », pour aider à reconnaître les « légumes bizarres » que les gens ne reconnaissent pas dans leur panier !). C’est là que ma formation des métiers de la documentation refait surface.
•Comment évaluez-vous le temps passé pour cette communication ? et quel est pour vous l’intérêt d’être présent sur ces réseaux sociaux ? Notre page Facebook est notre canal principal maintenant. J’y passe en gros 5 minutes par jour, 20 à 30 minutes par semaine, selon les questions ou les demandes, c’est rapide. Quand les gens nous posent des questions, que ce soit sur le marché ou à l’Amap, on leur dit : « Vous pouvez nous lire là ». Nous mettons des photos, des vidéos, cela permet de montrer comment nous travaillons, les gens aiment bien. On essaie aussi de nouveaux outils, comme les photos des serres sur lesquelles on peut se promener à 360 degrés. Nous voulons montrer le travail qu’il y a derrière les légumes, que les gens comprennent comment c’est fait et les prix pratiqués. J’ai mis une vidéo où je récolte des radis pour qu’ils voient que c’est manuel, pas comme dans l’industrie. Pour moi, on peut lier technologie et authenticité. Tous ceux qui sont intéressés par des paniers peuvent regarder sur la page ce que l’on y met et faire une commande en fonction de ce contenu, chez nous en direct ou via le site collectif « Saveurs au gallo» (www.saveursaugallo.fr). Je pense que le fait de pouvoir expliciter l’offre est très apprécié par les consommateurs, cela les rassure. Certains consommateurs sont plus à l’aise pour poser des questions par téléphone, d’autres par mail et d’autres enfin sur les réseaux sociaux. Du coup, quand on y est présent, on cumule les canaux. L’objectif est d’être visible et accessible, que les gens puissent facilement nous trouver. En termes de retours c’est difficile à dire, on est dans l’expérimentation. Je gère aussi la page de « Saveurs au gallo », et lorsque je mets des infos sur tel ou tel producteur, cela amène un petit plus, ça se voit sur les visites. Nous travaillons avec des restaurateurs sur Rennes et là aussi, on fait de la communication croisée. Eux parlent de nous sur leur page et vice-versa. •Vous proposer également des paniers recettes, cela consiste en quoi ? Au marché, je passe beaucoup de temps à expliquer aux gens comment cuisiner nos fruits et légumes qui sont souvent moins ou peu connus. Donc on s’est dit que pour les vendre sur Internet, où on ne peut pas discuter avec
les consommateurs, le plus simple serait de les intégrer dans des paniers recettes. Les paniers sont donc livrés avec la fiche recette. Tout d’abord cela donne des idées et permet de changer un peu des repas habituels. Ensuite pour nous c’est pratique, on met ce que l’on veut dedans et cela peut se refaire. Et puis surtout, ils ont tous les ingrédients nécessaires et avec les quantités adéquates, il n’y a donc pas de gâchis. •Et d’où viennent les recettes ? C’est moi qui les écris. J’ai travaillé en restauration et je connais les produits, c’est plus facile. J’en invente la moitié et pour l’autre moitié, je m’inspire de la cuisine traditionnelle, de livres… Mais bien sûr avant je fais des tests pour tout ce que je propose, 2 ou 3 fois, pour ajuster la cuisson, les quantités… Les réseaux sociaux nous permettent là aussi de faire participer les clients, on peut publier leurs recettes, c’est interactif et ça leur plaît beaucoup. •Quels sont vos projets ? Nous venons de faire notre logo*, au bout de 5 ans ! On voulait d’abord se faire reconnaître par nos produits. Mais là on est vraiment content du résultat ! L’autre projet est de faire notre propre site Internet, avec pourquoi pas un espace de vente en ligne, c’est en cours de réflexion. *Logo réalisé par Agrobio35 - Studio Graphique
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Erwan et Marie Henry
« Passer en bio nous a permis d'arrêter d'avoir peur»
LE
Antoine BESNARD (Rédacteur en chef de Symbiose)
LOUaRGAT Côtes d'Armor
Erwan et Marie Henry Bovins lait Installation : 2007 Conversion : 2014
2 UTH
55 Vaches laitières
SAU 82 ha
5 truies Naissage
Commercialisation
U
n atelier laitier au point mais une ferme plombée économiquement par un atelier porc qui perd de l'argent. C'est à partir cette situation tendue qu'Erwan et Marie Henry, installés à Louargat (22), ont envisagé de passer en bio. En cette période de turbulences agricoles fortes, les agriculteurs en situation financière complexe sont de plus en plus nombreux à réfléchir à l'agriculture biologique. L'expertise du réseau amène souvent à recommander d'assainir la situation économique avant de passer en AB. L'expérience d'Erwan et Marie pose un certain nombre de questions auxquelles le réseau n'a pas de réponse toute faite et prouve que chaque cas est unique et nécessite des réponses qui lui sont propres.
•Vous êtes passés officiellement en bio le 1er juillet 2016. A quoi ressemblait votre ferme avant conversion et à quoi ressemble-t'elle aujourd'hui? Marie : On s'est installé en 2007, sur 82 ha, avec 50 à 55 vaches laitières, et un atelier naisseur-engraisseur de 80 truies en conventionnel. On avait deux sites, dont les génisses et le naissage porc à 6 km, à Pédernec, sur la ferme des parents d'Erwan qu'on avait reprise. Et ici, à Louargat, les vaches laitières, et le post sevrage–engraissement de porcs sur paille. Aujourd'hui, on a toujours deux sites, il n'y a plus que les génisses à Pédernec. On a arrêté l’atelier naisseur-engraisseur. Les deniers charcutiers sont partis en août 2015, mais comme on aimait bien ça, on a gardé 5 truies, en naissage bio. •Comment se passait la cohabitation entre les systèmes lait et porcs en conventionnel ? Erwan : On est parti sur un système pâturant à 360 000 litres de lait et un atelier naisseurengraisseur avec travaux pour faire du porc Label Rouge. Donc, on a investi sur le cochon, plus que sur le lait. On a transformé un ancien poulailler de 1200 m2 en porcherie.
Biolait ≈ Vente des porcelets Sevrés
Marie : On a été dans les travaux pendant 2 ou 3 ans. On a perdu beaucoup de plumes avec le cochon. •Qu'est-ce qui s'est passé ?
A Noter • Conférence • Envisager et réussir sa conversion en lait biologique Jeudi 29 septembre, à 14 h Programme complet des conférences p. 12
Marie : Une fois qu'on a été aux normes pour livrer Kermené, il n’y avait plus que des places Label Rouge sous conditions de Label Triskallia Opal, avec prise d’aliments, etc. On ne voulait pas d'un système intégré, donc on a
décidé de rester en dehors du circuit label. On a fait le choix de la liberté. •Cette décision vous a-t-elle fragilisés ? Marie : On n’a jamais réussi à caler le porc techniquement. Il y avait peu de références en post-sevrage sur paille, et on ne s'est pas tellement senti aidé au début par les techniciens. On ne gagnait pas d’argent. On était pris par les allers-retours entre les sites. Les cultures étaient à Pédernec, le naissage aussi. Pendant les mises bas, Erwan pouvait y aller jusqu’à 4 fois par jour. 6 km ce n'est pas loin, mais quand tu le fais 4 fois par jour… Erwan : N'étant pas bien financièrement, on n’avait rien pour réajuster quelques trucs qui ne collaient pas : les lumières, la machine à soupe... •A quel moment vous êtes vous intéressés à la bio? Erwan : On a abordé le bio par le porc, parce que notre atelier ne collait pas du tout avec ce qu’on voulait en faire. En lait, on travaillait bien. On était en MAE phyto depuis 5 ans, on avait commencé à faire du désherbage mécanique, et Marie pratiquait l’homéopathie depuis un moment. On était déjà dans un système à 7000 ou 7500 litres en cherchant l’autonomie par le fourrage, on ne cherchait pas le concentré. On trouvait que ce qu’on faisait c’était bien, on était contents, sereins. Alors que nos cochons… En 2013, après un clash sanitaire, on a sollicité le GAB 22 pour trouver une solution sur le porc. A ce moment-là, toutes les filières étaient fermées, donc on n’avait pas poussé
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Erwan : Économiquement on était dans le rouge. On a fait une étude économique sur la conversion avec le CER. Ca passait, mais on ne les sentait pas trop chauds pour qu'on franchisse le pas, la banque non plus. On a finalement décidé de passer l'atelier lait en bio, et de conserver notre atelier porc en conventionnel, sans avoir pris de décision quant à son avenir. On s’est dit : « On démarre la conversion, on verra après ». Marie : Le problème du porc, c’est qu'on perdait des sous à chaque cochon vendu, on perdait 30 000 € par an. Le comptable nous disait d’arrêter depuis des années, sauf que quand c’est la merde, il n'y a pas d’autre mot, c’est plus facile d’être la tête dans le guidon, de ne pas réfléchir. Quand tu es avec tes cochons, tu n’es pas en train de cogiter. Erwan : On ne voulait pas arrêter le porc et nous retrouver avec un étalement de l’installation de 10 ans supérieur à celui en cours. Le fait de démarrer la conversion en 2014, nous a permis d’envisager d’arrêter le porc en 2015 et d’avoir des perspectives financières. En restructurant les dettes, les factures fournisseurs et les prêts, on arrivait à lisser nos remboursements sans en prendre pour 15 ans. •Concrètement, comment ça a pu se faire? Vous vous êtes faits aider? Marie : On s'est fait aider par Solidarité Paysan. Ils ont d’abord été là pour nous soutenir moralement, puis juridiquement face à la banque. On avait 100 000 € de dettes fournisseurs et 48 000 € d'emprunt à court terme à la banque.. la démarche. Marie : On réfléchissait à rapatrier les truies à Louargat, on voulait simplifier les choses, en faire moins pour être plus autonome, faire notre l’aliment, quitte à baisser le nombre de truies s’il le fallait. On était de moins en moins dans une démarche conventionnelle. •Quel a été le déclic pour passer en bio du coup? Erwan : En avril 2014, on est allé à un colloque lait bio organisé par le réseau GABFRAB, à Ploufragan. Là, on a vu Jacques Chiron de Biolait, des éleveurs bio, Guillaume Michel, technicien du GAB 22... Comme on n‘était pas tant que ça d’éleveurs non bio dans la salle, des gens du réseau sont venus nous voir pour discuter. On s'est senti pris sous l’aile. Et puis les échanges étaient riches ; tu vois une dynamique, des gens qui croient en leur métier. Ca changeait des AG de Triskallia.
Marie : On a croisé que des gens qui étaient contents d’être éleveurs, ça faisait du bien. C’est le cochon qui nous a fait penser au bio, mais quand on l'a envisagé pour le lait, on n’avait pas de freins. Notre troupeau était en bonne santé, mais j’avais un peu la trouille pour les cultures. Comme ce n’est pas moi qui m’en occupe, je me suis dit : « Si Erwan se sent serein là-dessus, c’est OK, on y va ». •Derrière, vous avez entamé la conversion rapidement... Erwan : Au niveau politique laitière, on était déjà impliqués dans l'Apli, j’étais au conseil lait de Triskallia. Les choses finissent toujours par tourner en rond là-dedans. On s’est dit qu'il valait mieux partir tant que le lait conventionnel était cher. On est partis en conversion au 1er juillet 2014. •C'est le lait qui vous a décidé, mais quel était l'avenir de l'atelier porc à l'époque ?
On a changé de banquier à ce moment-là ; on est passé avec un banquier qui s’occupe des dossiers litigieux. La première fois qu'on l'a vu, il n'était pas question de discuter, il voulait tout balancer en RAJ (règlement judiciaire amiable). C’est-à-dire, qu’à un instant T, tu fais une photo des dettes fournisseurs, tu passes au tribunal, tout est listé et les paiements réétalés sur du long terme, mais avec des taux plein pot, entre 5 et 6 %. Pendant la période de redressement, un tuteur vérifie tous tes paiements, et à la moindre dépense hors du plan, tu dois avertir tous les fournisseurs concernés. Erwan : Dès le début en porcs, quand ça n’allait pas, il était hors de question qu’on joue à ça. Pendant 5 ans, on s’est battus contre ça, avec les élastiques qui se tendaient. A partir du moment où on a commencé à vider la porcherie, on ne pouvait pas solder à la fois le crédit bancaire et la dette aliment fournisseur. En conventionnel, tu es toujours à chercher
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les limites du fonctionnement. Parce qu’économiquement ça ne marche pas, tu vas tout mettre sur les limites, et tu te retrouves toujours coincé à un moment. Quand tu fais un peu moins, ça se passe mieux. •Quel rôle a joué Solidarité Paysan? Marie : Solidarité Paysan nous a permis d'obtenir un différé d’un an. Leur idée, c’était qu'on se retape pendant un an. Si financièrement tu repars à payer des dettes alors que tu n’es pas requinqué, tu ne fais rien. Il y a un an, on a signé de bloquer les dettes des 4 principaux fournisseurs liés au porcs. Il y en avait pour 100 000 € qu’on a étalé sur 5 ans et on a restructuré le prêt avec la banque. Là, avec la première paye en bio, on commence à payer les dettes liées aux porcs pour les 5 années à venir. Pour autant, vous n'avez pas abordé la conversion que par le côté économique? Marie : Avec la vague de conversion actuelle, beaucoup de gens s’intéressent à la bio, en prenant les choses par tous les bouts : l’économique, l’agronomie... Alors, oui, le bio c’est payé plus cher, mais c'est dangereux de l'aborder que par l'économique. Si tu ne peux pas soigner tes vaches sans le véto, que tu ne maîtrises pas ton alimentation... ça me semble compliqué. On part du principe qu'être en bio c'est être autonome, c'est surtout ça qui nous plaît.
de traire le dimanche soir depuis 4-5 ans. On savait qu’on laissait 6 à 7% de lait derrière. En janvier 2015, on a décidé de reprendre la traite du dimanche soir le temps de la conversion. Maintenant qu'on y est, on va relâcher ça, parce que ça nous fait une sacrée soupape. Marie : Quand on a arrêté les cochons, qui nous prenaient énormément de temps, on a repris la livraison de lait en direct à une crêperie industrielle. Ca nous prenait 1 h 30 à 2 h par jour, mais à 450 litres/jour, ça faisait entre 70 et 80 000 litres, à 450 € les 1000 litres. C'était une grosse charge de travail, mais ça nous a aidé à passer ce cap. On vient tout juste d'arrêter, donc on va pouvoir sentir les effets de la conversion sur le temps de travail •Passer en bio, ça a nécessité de lever des a priori? Marie : Les principaux verrous à faire sauter, c’est arrêter d’avoir peur. Arrêter d’avoir peur de faire un truc qui n’est pas comme le voisin, pas comme partout. Par exemple, les antibiotiques pour le tarissement : on le met de peur qu’il y ait une mammite ; sauf qu’à l’instant ou tu mets l’antibiotique pour la tarissement, la vache n’en a pas besoin. Petit à petit, tu as moins peur, les verrous sautent. Erwan : C’est aussi important d'être encadré, de trouver des personnes ressources.
•Techniquement, comment s'est passé la conversion?
•Vous avez rejoint un groupe d'échanges?
Erwan : On a démarré en juillet 2014, avec un assolement conventionnel. On était parti sur un pâturage de printemps, mais avec des vêlages étalés, et du fourrage de qualité pendant l’hiver, donc du lait étalé sur toute la saison. Le premier hiver, c’était un peu compliqué, parce qu’on était avec du correcteur sur une base de ration maïs. On a limité le correcteur bio, mais on l’a fait. On a passé l’hiver comme ça, et puis ça s’est bien enquillé, puisque les premières récoltes de fourrage en 2105 se sont bien passées. L'hiver 2015 aussi. On a vu qu’on pouvait encore mieux caler les rations. Et puis, plus on avance, mieux ça se passe avec les vaches.
Erwan : On a intégré un groupe d’échanges qui s’est monté avec le GAB sur le COB. Sur la commune, on est trois couples dans les mêmes âges à être passés en bio en même temps. Ca créé une dynamique et ça rassure. Il faut qu’il y ait des gens qui te poussent, par des échanges ou par l’expérience, qui te disent : « Essaye, ça se fait, tu verras bien, t’as rien à perdre ». Des gens qui t’aident à dédramatiser. On a eu pas mal d’échanges avec Guillaume Michel, le réseau a bien marché. Sans ça, on se serait senti seul.
Il y a trois ans, si on m'avait dis que je passerai en zéro ensilage, j’aurais fait les gros yeux, mais au bout de trois ans, ça s’intègre. Une fois que tu as fait une année de ration, avec une ration hivernale, certes le rendement de tes vaches baisse, mais tu n’as aucun intrant extérieur. •Il y a eu des difficultés, des doutes, pendant cette période de transition ? Erwan : Avant la conversion, on avait arrêté
Marie : Même si au quotidien tu ne travailles pas ensemble, tu sais que tu peux appeler, quelqu’un pour échanger, demander un avis, un coup de main. Tout le monde est dans les mêmes questionnements. Il y a des matins où c’est très clair, et d’autres où pfff.. •Et avec les autres voisins, en conventionnel, ça se passe comment? Erwan : On est passé de 14-15 ha de maïs ensilés à 3 ha, mais de 4-5 ha de prairie de fauche à 18 ha. On est complètement sous équipé pour la gestion de l'herbe. Vu qu’on n’a pas le matériel, et qu’on ne peut pas se permettre d’en acheter, les gars qui venaient m’aider
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sur les remorques d’ensilage, aujourd’hui ils viennent pour m’aider à andainer, à faucher. On s’arrange bien comme ça. C’est sympa, tu gardes le contact avec les conventionnels, sinon tu peux vite te couper de ton voisinage. Marie : Et puis c’est sympa aussi d’échanger de la fauche contre de la herse étrille. Ca leur fait voir autre chose. •Et pour finir, vous avez quand même gardé des cochons ? Marie : On a arrêté les cochons en 2015. Quand les derniers charcutiers sont partis, on les a regardé partir et on a décidé de garder 5 femelles issues de nos meilleures portées. On les a même baptisées. Comme on avait commencé à faire sauter des verrous, on a décidé de faire de la mise bas en liberté et de mettre nos porcs sur litière accumulée. Erwan : En faisant du naissage pour des gens qui sont en circuits courts on se dit qu'on est un maillon de la chaîne. On n’est pas dans un système circuit long où tu ne sais jamais où ton produit part réellement. En porc on est parti là-dessus avec le but d’aller jusqu’à 1015 truies max, de valoriser les céréales comme ça. On n'a rien à perdre. C'est quand on voit tout le chemin parcouru, qu'on se dit que finalement, la conversion, ça se fait !
Face aux difficultés, faire réseau Un des constats récurrents dans l’accompagnement des personnes en difficulté est leur isolement . Ce fait explique pour partie leurs difficultés à pouvoir imaginer d’autres façons de faire et être en capacité de négocier face aux créanciers. La force d’Erwan et Marie est d’avoir gardé cette capacité à aller vers les autres à chercher dans les différents collectifs (GAB, Biolait, Solidarité paysans) des solutions à leurs problèmes. Ces 3 réseaux qui les ont accompagnés ont en commun de porter un regard différent sur l’agriculture, son évolution, son rapport à la société. Elles ont également su inventer d’autres modes de fonctionnement plus respectueux des personnes et de leurs projets. Il faut être honnête, tous les paysans qui envisagent une reconversion n’ont pas les capacités d’Erwan et Marie,mais beaucoup avec l’appui de notre réseau des groupements de producteurs bio, de Solidarité paysans , peuvent envisager un autre avenir. Patrick Guillerme i Président de la FRAB
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La lutte contre les adventices en maraîchage diversifié est un enjeu de taille, autant en terme de productivité qu’en terme de temps de travail sur les fermes. Depuis 2014, la commission Légumes Grand Ouest FNAB* a initié une réflexion méthodologique globale sur les stratégies de gestion des adventices selon les systèmes maraîchers. En effet, si de nombreuses ressources techniques sont disponibles par outil ou par culture, peu d’approches globales existent à l'échelle du système d'exploitation, permettant aux porteurs de projet en maraîchage diversifié bio de réfléchir l’ensemble de leur stratégie de désherbage : investissements matériels, choix techniques, temps de travaux,…. Ce guide propose donc une approche méthodologique inédite, illustrée sur 84 pages par de nombreux témoignages et savoir-faire de maraîchers biologiques du Grand-Ouest. ≈ N’hésitez pas à contacter votre GAB pour obtenir plus d’informations sur ce guide.
Nord-Ouest 44 (Blain) exploitation laitière à reprendre avec 360 000 l de lait sur 80 ha pour début 2017. Système herbager et bio, 40 ha autour des bâtiments, troupeau mixte montbéliardes et holsteins.
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* La commission Légumes Grand-Ouest est animée par la FRAB Bretagne et regroupe des maraîchers et techniciens des groupements FNAB de Bretagne, Pays de la Loire, Basse-Normandie, Haute-Normandie, Centre et Poitou-Charentes
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Cohabitation n'est pas raison Parmi le flot continu d'informations qui nous submerge chaque jour, il est parfois difficile de repérer celles qui nous touchent de près. En voici deux, piochées au hasard dans la presse. La première concerne un paysan bio de Montélier, dans la Drôme. Suite à un épandage d'herbicide mal maîtrisé sous un vent un peu trop fort, le verger de notre collègue a été détruit. Cela lui a coûté une grande partie de sa production (préjudice estimé à 20 000 euros) et aussi son label bio. Ce n'est pas la première fois que ce genre de pollution nous arrive, mais au delà de la réponse classique des assurances « qui sont là pour ça », cela repose la question de la cohabitation de nos systèmes toujours entourés par la pollution globale de notre environnement. Les chiffres du développement de la bio nous rassurent un peu, nous sommes de plus en plus nombreux et donc ils sont moins en face pour nous empoisonner... Maigre consolation.
Leclerc a un coup de foudre pour la bio L'autre info, qui n'a pas de lien direct (quoi que?), C'est l'ouverture du plus grand supermarché bio de France, à Nîmes, et c'est l'enseigne Leclerc qui en est le propriétaire. L'hebdo « Marianne » s'en est fait le relais dans un numéro récent, avec un article fouillé posant de bonnes questions sur cette initiative et ses éventuelles conséquences. La devise de Leclerc « acheter le moins cher possible pour vendre le moins cher possible » a déjà fait des ravages dans nos campagnes. Les paysans devenus des exploitants perdus dans d'énormes groupes internationaux ont toujours été poussés à produire plus, et à utiliser plus de pesticides dont le prix n'a aucune relation avec les dégâts occasionnés. Leclerc est toujours un acteur majeur dans ce mécanisme, et qu'il ouvre aujourd'hui un tel magasin doit nous faire réfléchir à notre
Déjà, environ la moitié des produits bios vendus en France transitent par les supermarchés, y compris bien souvent par des marques de distributeurs. C'est apparemment indispensable pour toucher des nouveaux clients et le « grand public », mais de là à se voir mis en avant par un champion de la baisse des prix, cela laisse rêveur.... En tous cas, il est bien loin le temps où quelques pionniers de la bio imaginaient certes une nouvelle agriculture, mais aussi une nouvelle société plus équitable, plus solidaire, plus juste. Nous sommes vraiment dans le temps du capitalisme triomphant, réalisant des bénéfices grâce à leurs adversaires d'hier, ces temples de la surconsommation maintenant estampillés « bio » vont ils devenir la norme? Nous avons le devoir d'y réfléchir, et de donner des bonnes réponses! Coïncidence ou pas, Paysan Breton, dans son édition du 22 août, rapportait les propos de Michel Edouard Leclerc : « je mange diététique et bio ». Pas une raison pour proposer des produits bio à des prix un peu trop light.
Les Pesticides peuvent rendre muet Dans son édition du 20 août dernier, Ouest
France consacrait un dossier aux pesticides. Reportage au Landreau dans le vignoble nantais, où des parents d'élèves se battent pour faire en sorte que le pulvé cesse de balancer ses cochonneries aux abords de l'école. Un combat en partie gagné. Parmi ces parents d'élèves témoigne le père de deux enfants atteints d'une aplasie médullaire idiopathique (maladie orpheline qui fait que la moelle osseuse ne produit plus assez de cellules sanguines), maladie apparue lorsque la famille a déménagé dans le vignoble. Si le lien avec les pesticides n'est pas prouvé, la famille a fait parvenir un courrier à l'Inserm, qui lui est revenu. « L'enveloppe, visiblement ouverte, nous est revenu sans aucun commentaire...» rapporte le père de famille. Il a également sollicité l'ARS (Agence régionale de santé) pour mieux cerner la dangerosité des produits, « mais nous n'avons rien obtenu de compréhensible ». Alors que l'Anses (lire page 3) vient de sortir en catimini un rapport sur l'exposition des professionnels de l'agriculture aux pesticides, que la France est le premier pays utilisateur de pesticides en Europe et le quatrième dans le monde, et que la dangerosité du glyphosate ne fait guère de mystère, ce silence des autorités publiques sonne aussi faux qu'une cornemuse au milieu d'un orchestre symphonique.
L'oeil de Goutal