HISTOIRE & PATRIMOINE RÉGION
NAZAIRIENNE
PRESQU’ÎLE GUÉRANDAISE
L’histoire locale de la Région Nazairienne et de la Presqu’île Guérandaise
Les maires de Saint-Nazaire La construction aéronautique à Saint-Nazaire
Les grandes figures dongeoises
À Mesquer, une chapelle St-Marc multi-séculaire
Émile Brosseau, ouvrier Trignacais et musicien
Collégiale de Guérande : les piliers romans
Carnet de voyage au Pouliguen, août 1889 A.P. H.R.N - n° 94 - mars 2019 - 10 €
Un cortège de mariage, à la sortie de l’ancienne mairie de Saint-Nazaire. (Collection Patrick Pauvert)
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Éditorial
e numéro 94 d’HISTOIRE & PATRIMOINE nous fait découvrir, comme les précédents, d’est en ouest, de nouveaux aspects, fort variés, de l’histoire de la presqu’île. Nous assistons à la naissance de la commune de Saint-Nazaire, avec l’élection, le 3 février 1790, du premier maire : la séance est ouverte par… le curé de la paroisse et le scrutin a lieu, faute de salle adaptée, dans… l’église paroissiale ! Nous découvrons les noms, et l’essentiel de l’action, des quinze premiers maires de la ville, jusqu’à René Guillouzo, élu en 1848, dont les mandats successifs s’étaleront, au total, sur une longue durée de 22 ans. En 1926, à Saint-Nazaire, une nouvelle activité industrielle voit le jour, la construction aéronautique, lancée par les Ateliers et Chantiers de la Loire. Nous suivons son histoire mouvementée (regroupements d’entreprises, fusions, nationalisations, Occupation…), sur vingt ans, jusqu’en 1946. La transition avec l’article suivant vient naturellement, car il contient le récit autobiographique d’un Trignacais, qui se présentait, lui-même, comme « batteur et ajusteur ». Il était, en effet, durant la semaine, ouvrier à la « CASO » (c’est ainsi que l’on appelait, communément, à l’époque, l’usine de construction aéronautique SNCASO), et, le weekend, musicien dans un orchestre de bal. Bien avant que Donges ne devienne, à son tour, commune industrielle, plusieurs personnages célèbres y ont séjourné, durablement, ou simplement de passage, comme la célèbre romancière George Sand, venue, au milieu du XIXe siècle, y chercher l’inspiration et respirer, nous dit-on, « le bon air de Donges »… Dans un tout autre domaine, nous découvrons, à travers l’Armorial général de 1696, les armes et blasons, très colorés, des familles nobles et bourgeoises de la presqu’île, ainsi que des communautés, ou confréries, laïques et religieuses. Un autre article nous donne le détail des familles propriétaires du manoir de Kercabus, au nord de Guérande, sur une période de 600 ans. La cité médiévale de Guérande a inspiré plusieurs auteurs. Notre attention se porte sur la collégiale, ses piliers et chapiteaux romans. Nous sommes invités au plaisir de la découverte, sur place, simplement en levant la tête, ou bien en suivant des interprétations, qui nous entrainent fort loin, dans des temps reculés et incertains, à la manière de Fernand Guériff, notamment, avec un sujet sur le culte de SaintMichel. De la collégiale de Guérande à la modeste chapelle Saint Marc, à Mesquer, il n’y a qu’un pas. L’histoire de cette chapelle a, elle aussi, donné lieu à bien des interprétations et l’époque de sa fondation reste, encore aujourd’hui, une énigme. Petite énigme, également, mais d’un tout autre genre, que ce carnet de voyage au Pouliguen, écrit par une jeune Parisienne anonyme, en villégiature dans la presqu’île, avec sa famille, en 1889. Enfin, ce numéro s’achève par des sujets qui nous mènent au-delà de la région nazairienne et de la presqu’île, avec, d’une part, une étude sur le retour, en France, via la Bretagne, des Acadiens, expropriés de leurs terres du Nouveau Monde, puis déportés par les Anglais, au milieu du XVIIIe siècle, et, d’autre part, un nouvel épisode du voyage de l’abbé Fouchard, aumônier breton, le long des côtes africaines, un siècle plus tard. L’histoire de notre région est explorée, relatée et illustrée, non seulement grâce à des recherches approfondies, mais aussi par le récit d’évènements vécus dans un passé récent. L’Histoire n’en finit pas de se dérouler, chaque jour, et plus tard. Les moyens d’exploration, d’investigation, se perfectionnent, avec les techniques permettant de nouvelles découvertes, qui modifient, parfois, notre vision des faits et des hommes. La vérité devient relative, sujette à précisions, c’est pourquoi elle est si passionnante et sans fin. Sans fin comme peut l’être toute science et tout art.
Christiane Marchocki Présidente de l’APHRN 1ère page de couverture : La première mairie de Saint-Nazaire, construite, en 1855, sous la municipalité René Guillouzo (Collection Patrick Pauvert).
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A . P. H . R . N
Association Préhistorique et Historique de la Région Nazairienne
Agora (case n° 4) 2 bis avenue Albert de Mun - 44600 Saint-Nazaire aphrn.asso@gmail.com - http://aphrn.fr - Tél. 06 62 58 17 40 HISTOIRE & PATRIMOINE n° 94 - mars 2019 ÉEditeur : A.P.H.R.N Directrice de la publication : Christiane Marchocki Maquette/Mise en page/Coordination : Tanguy Sénéchal Impression : Pixartprinting Dépôt légal : 1er trimestre 2019 N° ISSN : 2116-8415 Revue consultable aux Archives de Loire-Atlantique sous la cote Per 145
Contribuez à la revue HISTOIRE & PATRIMOINE Vous vous intéressez à l’histoire, et, en particulier, à l’histoire de notre région ? Vous souhaitez apporter votre témoignage sur une époque, aujourd’hui révolue ? Vous possédez des documents, ou objets, anciens (écrits, photos, dessins, peintures, tableaux, sculptures, objets divers), qui pourraient faire l’objet d’une publication ? Vous aimez écrire, raconter, transmettre, ce qui vous intéresse, ou vous tient à coeur, et qui a trait à l’histoire locale ? L’APHRN vous propose de publier vos écrits, ou documents, ou de transcrire vos témoignages, dans la revue HISTOIRE & PATRIMOINE. Téléphonez-nous, au 06 62 58 17 40, ou écrivez-nous, à l’adresse ci-dessous, ou, tout simplement, adressez-nous, directement, votre texte, sous forme numérique. Vos propositions seront examinées avec la plus grande attention et soumises au conseil de direction de l’APHRN, qui vous répondra dans un délai d’un mois, maximum. Adresse électronique : aphrn.asso@gmail.com - Adresse postale : APHRN – Agora (case n° 4) – 2 bis av. Albert de Mun - 44600 Saint-Nazaire
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SOMMAIRE HISTOIRE & PATRIMOINE n° 94 — mars 2019
01 04 P. 42
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Éditorial
Christiane Marchocki
Les maires de Saint-Nazaire (1e partie - 1790-1848) Patrick Pauvert
La construction aéronautique à Saint-Nazaire
de 1926 à 1946 - Un exemple de redressement industriel Paul Correc
P. 60
24
Bouclette, ouvrier trignacais et musicien
34
Yves Horeau nous a quittés
36
Les grandes figures dongeoises
42
Émile Brosseau
Jean-Claude Chemin Jean Auzuret
L’Armorial général en pays de Guérande 1696-1700 - Première partie Loup
P. 70
P. 78
52
Collégiale de Guérande : Les piliers romans
60
Guérande et le culte de Saint-Michel
70
Étimacie royale en terre guérandaise
78
La Seigneurie de Kercabus, 600 ans d’Histoire
84
Une Chapelle multi-séculaire : La Chapelle Saint Marc
96
Voyage au Pouliguen - août 1889
108 P. 108
120
Bernard Tabary
Fernand Guériff Michel Barbot
Josselin Beunon
Jocelyne Leborgne Anonyme
Des Acadiens en Bretagne Jean de Saint-Houardon
Journal d’un aumônier breton - 1850 - 24e partie
Christiane Marchocki
À LIVRE OUVERT 122 - À table - De la Révolution à l’Empire - 1789-1815 (Alain Pigeard) - Christiane Marchocki 122 122 - Le silence de l’argile (Martine Hidoux-Roussel) - Christiane Marchocki 123 - Récits au coin du sel (Transcription de Jacques Péneau) - Christiane Marchocki 124 L’ASSOCIATION P. 120
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Les maires de Saint-Nazaire Première partie 1790 -1848 Patrick Pauvert L’histoire des maires et des municipalités commence avec la Révolution, puisque c’est le 14 décembre 1789 que la première loi municipale est votée. Désormais, toutes les assemblées d’habitants ont la même organisation, avec un maire et des conseillers élus à leur tête. C’est la plus petite division administrative.
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e 22 décembre 1789, 44 000 municipalités sont mises en place (autant que de paroisses). C’est la fin de l’Ancien Régime avec le « général » de la paroisse (le recteur ou curé, le sénéchal, les notables, les marguillers et les égailleurs). Saint-Nazaire dépend du département de la Loire inférieure et du district de Guérande.
Il est une qualité qui n’est pas mentionnée, car à l’époque la question ne se pose pas : être de sexe masculin ! Le droit de vote accordé aux femmes ne date que de 1944. (Et celui des militaires, le 17 août 1945)
Premières élections à Saint-Nazaire : 3 février 1790
Le 3 février 1790, le recteur de la paroisse (curé) ouvre la séance. Sont élus : »» Jean-Pierre Dufrexou, avocat, par 272 voix sur 274. La commune compte 3 365 habitants. Ce premier maire est né à Saint-Nazaire, le 4 septembre 1749, petit-fils et fils de médecin. Il est décrit comme un homme pondéré d’une extrême droiture et d’un dévouement absolu. »» Est élu procureur de la commune, chargé de l’exécution des lois : M. Lorieux par 269 voix.
Les premières élections de notre commune sont fixées le 3 février 1790. Pour être électeur, il faut : »» »» »» »» »»
être Français ou devenu Français être majeur de 25 ans être domicilié dans le lieu au moins depuis 1 an ne point être serviteur à gage (domestique, valet) payer un impôt au moins égal à 3 journées de travail (20 sols par jour)
1 - Dufrexou Jean-Pierre
3 février 1790 - 24 mai 1790
Ci-contre La vieille église de Saint-Nazaire, à la fin du XIXe siècle (elle a été rasée en 1896). Elle a abrité, le 3 février 1790, les premières élections, de Saint-Nazaire.
Par cette dernière mesure, les plus pauvres sont écartés, ce qui signifie que dans les communes relativement petites comme Saint-Nazaire, il y a peu de votants. Avant la Révolution, une douzaine d’œufs valait 5 sols, soit 0,25 livres, soit 2,40 euros (1 livre = 20 sol). Pour un ménage français moyen en 1789, le poste alimentation représente 80 à 90% du budget. Aujourd’hui, il représente environ 20%. Lorsque vous réunissez toutes les qualités citées ci-dessus, vous êtes un citoyen « actif ». Ceux qui ne votent pas sont les passifs.
(Collection Patrick Pauvert)
Page de gauche La première mairie de Saint-Nazaire, construite, en 1855, sous la municipalité René Guillouzo. Elle a été détruite par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale. (Collection Patrick Pauvert)
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La construction aéronautique
à Saint-Nazaire de 1926 à 1946
Un exemple de redressement industriel Paul Correc
Qualifiée très justement de capitale de la construction navale, Saint-Nazaire est, peut-être, moins connue pour son activité aéronautique, laquelle mérite pourtant de figurer parmi les grands centres industriels français.
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urieusement, ce sont les Ateliers et Chantiers de La Loire qui, en décembre 1926, décidèrent de se lancer dans la construction aéronautique.
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Cette société spécialisée dans la construction navale, fît tout d’abord l’acquisition d’un terrain, à Escoublac, destiné aux essais des futurs aéronefs, puis construisit un atelier spécifique à cette nouvelle activité aéronautique, près de l’embouchure de l’estuaire.
Dès 1927, associés à la société Gourdou-Leseurre, les Ateliers et Chantiers de La Loire créent une nouvelle société Loire-Gourdou et construisirent un premier avion de chasse : le LGL 32 C- I, commandé par l’État français, lequel sera finalement construit en 257 exemplaires. Cependant, c’est véritablement en 1929 que cette nouvelle société se développa, créant des bureaux d’études et administratifs. Durant environ cinq années, l’effectif de ces bureaux n’excéda pas 50 personnes. Ce n’est qu’après la nationalisation de l’entreprise, devenue la SNCAO1, décidée par le tout nouveau gouvernement, en août 1936 (par absorption, en 1941, la SNCAO deviendra, ensuite, SNCASO2), que les effectifs progresseront régulièrement, afin de faire face aux nouvelles études qui leur furent rapidement confiées. De la même façon que pour le personnel des bureaux d’études, il fallut, dès lors, augmenter le personnel des ateliers et développer le parc machines, ainsi que les divers équipements industriels.
1 - Société Nationale de Construction Aéronautique de l’Ouest. 2 - Société Nationale de Construction Aéronautique du Sud Ouest.
L’implantation de l’usine en bordure de Loire facilitant les essais des appareils, c’est vers la construction d’hydravions que la jeune société aéronautique choisit de s’orienter tout d’abord en priorité. Dès les premières réalisations, grâce à une étroite collaboration entre les études et les ateliers d’une part, mais aussi en raison de la simplicité de conception des appareils construits, l’usine fut performante. C’est ainsi que sur 14 prototypes commandés et réalisés, 8 d’entre eux furent comme prévu des hydravions, dont 4 construits en série. Deux appareils ne purent être réalisés, suite à l’entrée en guerre de la France contre l’Allemagne.
Les 14 appareils étudiés dans les bureaux d’études de l’usine et construits dans ses ateliers, de 1926 à juin 1940 Poids
Vitesse
2
1 820
160
Loire 50
7
2 100
165
Trimoteur de reconnaissance
Loire 50
1
3 990
205
Avion de chasse
Loire 43
1
1 725
360
Avion de chasse
Loire 45
1
1 785
365
Hydravion école
Loire 60
1
2 200
165
Avion de chasse
Loire 46
1
2 000
389
11 000
218
Types d’appareils
Nom
Nbre
Avions coloniaux
Loire 10
Avions amphibies école
(kg)
(km/h)
Hydravion d’exploration
Loire 70
8
Hydravion catapultable de surveillance et de bombardement en semi-piqué
Loire 130
105
Hydravion de chasse
Loire 21
21
2 150
280
Obs. (a)
(b) (c)
Hydravion transatlantique sud
Loire 102
1
18 640
310
(d)
Hydravion école
CAO 30
2
1 815
195
(e)
Hydravion de combat
LN 10
1
13 800
350
(f)
Avion de bombardement
CAO 700
1
18 000
535
(g)
(a) (b) (c) (d) (e) (f) (g)
Cet appareil est le premier hydravion étudié par le bureau d’études de l’usine. Il a été l’objet d’une commande de série. La série de 40 a été exécutée à Issy-les-Moulineaux. Programme de guerre. Bien que ce prototype n’ait pas été suivi de série, il a été utilisé sous le nom de “ Bretagne ” par la base de Brest comme appareil de l‘amiral. La mise en série de cet appareil, dont les qualités furent reconnues, a été empêchée uniquement par la guerre. Ce prototype, qui a réalisé des performances nettement supérieures au programme, s’est classé en tête des cinq appareils concurrents. il a été sabordé à Hourtin, en juin 1940. Grâce à sa simplicité de construction, ce prototype a été réalisé en moins de dix mois, à dater du premier dessin. A été détruit à Istres, par les occupants, après sa première ligne droite.
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Ci-dessus Monoplan monospace de chasse « Loire-Gourdou-Leseurre 32 C-I (LGL 32 C-1) ». (L’Aéronautique, Janvier 1926).
Page de gauche Hydravion transatlantique géant, « Latécoère 631 ». Plusieurs exemplaires ont été montés et équipés dans l’usine SNCASO de Saint-Nazaire, dans les années d’aprèsguerre. (Collection particulière)
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Bouclette
ouvrier trignacais et musicien Émile Brosseau
Émile Brosseau (1918-2011), dit Bouclette, bien connu pour sa participation régulière aux bals populaires dans la région, se présentait lui-même comme « batteur et ajusteur » et portait fièrement le surnom de Bouclette.
T
rignacais et fier de l’être, ayant travaillé à Penhoët dès l’âge de douze ans, il fut batteur et chanteur dans les orchestres qui ont ravi les fidèles de la Salle Marceau et de la Mutualité1 dans le Saint-Nazaire d’après-guerre, animateur jusqu’aux années 1970 des festivités populaires très nombreuses à l’époque. Une jeune journaliste enquêtant à Montoir-de-Bretagne où il habitait à la fin de sa vie a recueilli ses souvenirs peu avant son décès. Ce qui a permis de disposer d’une véritable biographie dont la famille a conservé la copie, soit une quarantaine de pages dont nous publions ici des extraits, privilégiant ce qui est révélateur des époques qu’il a traversées, tout en respectant certains épisodes propres à cette personnalité indomptable.
Une famille ouvrière
Page de droite Émile Brosseau, dit Bouclette, à la batterie de son orchestre : Armoric Jazz:
24
Je suis né le 15 novembre 1918 à Trignac. Mon père s’appelait Émile et ma mère Marthe, native de Saint-Joachim. Je suis fils unique et je n’ai pas été malheureux, car ma mère me couvait. Elle m’appelait Mimile. Mon premier souvenir, c’est certainement un moment passé en compagnie de ma mère, qui me bichonnait. J’étais privilégié par rapport à des copains à moi ; quand j’allais jouer chez certains, leurs mères m’offraient en guise de goûter une tartine de pain et un cornichon, tandis que chez moi, ils avaient du pain et de la confiture. Mes copains étaient très contents de venir jouer à la maison, et moi d’avoir de la compagnie, car ma mère aimait leur faire plaisir. 1 - Cf. Les Bals populaires à Saint-Nazaire dans les années 50.- Histoire et Patrimoine n° 88, janvier 2017, pp. 4-15 et numéro hors-série n° 9, sur les loisirs populaires.
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C’était un vrai cordon-bleu et d’ailleurs, je tiens d’elle, car quand je fais à manger même mes petits enfants ne font pas de restes… Ma mère était demandée pour les mariages, les baptêmes. Et quand les gens tuaient le cochon, elle y allait pour faire les boudins, les pâtés. Ma mère était pâtissière aussi, elle pouvait passer une journée entière à faire à manger ainsi que des gâteaux. Quand elle était jeune, elle portait le pain dans une boulangerie de Montoir dans une voiture traînée par un cheval. Décédée en 1969, elle était ce qu’on peut appeler une « maman-gâteaux », avec ses spécialités : les comtesses Marie, des gâteaux coupés en deux avec au centre une crème au café ou au chocolat, et agrémentés d’un glaçage au sucre quelle faisait elle-même. Mon père a été blessé et gazé pendant la guerre 14-18. Mais il n’en parlait jamais. Il touchait une pension de guerre à cause de sa blessure. Il a travaillé dans une entreprise de maçonnerie où il était roulier : il fournissait le matériel aux maçons à l’aide des chevaux. C’était un gros travailleur. Bien que mutilé, il avait un morceau de pied en moins, il s’est crevé au travail. Il a travaillé aux Forges [de Trignac], même avec son handicap. À l’époque, la plupart des Trignacais travaillaient aux Forges, ou à Penhoët. Trignac, la nuit, était illuminée, c’était quelque chose de formidable, on y voyait comme en plein jour quand on vidait les fourneaux, quand les déchets étaient évacués.
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Yves Horeau nous a quittés
Jean-Claude Chemin
La tintinologie a perdu l’un de ses plus éminents savants et ceux qui l’ont connu un ami magnifique. Yves Horeau s’est éteint, le 24 novembre 2018, vaincu par la maladie. Notre peine est immense.
Y
ves Horeau avait rejoint Les 7 Soleils au début des années 1990 alors que l’association nazairienne préparait le retour de Tintin, du capitaine Haddock et de Milou sur les quais du port de Saint-Nazaire, là où Hergé les avaient fait passer dans l’album Les 7 Boules de Cristal. Yves apportait une connaissance inégalée et précise de l’oeuvre du créateur de Tintin enrichie d’une grande érudition dans de nombreux domaines. Et il y avait l’homme : chaleureux, passionné, pédagogue, intellectuellement exigeant avec ce qu’il fallait de fantaisie dans sa façon de traiter sérieusement des sujets qui, au premier abord, pouvaient passer pour ne pas l’être.
La mer
C’est ainsi qu’il a animé plusieurs conférences organisées par l’association Les 7 Soleils sur des thèmes aussi divers que l’égyptologie dans les aventures de Tintin -l’égyptologie dont il regrettait ne pas en avoir fait son métier-, l’énigme policière de L’Oreille cassée, la représentation des déserts, et, bien sûr, nombre de sujets à connotation maritime dont, dernier en date, Tous les secrets de la Licorne qui a donné lieu a un très beau livre publié l’an dernier et, bien sûr, le best-seller Tintin, Haddock et les bateaux, paru en 1999 à l’occasion de l’exposition éponyme créée à Saint-Nazaire par Les 7 Soleils avec l’accord et le soutien de Moulinsart et de la Fondation Hergé.
Alcazar
Traduit en cinq langues, l’ouvrage d’Yves Horeau a accompagné l’exposition présentée par la suite au musée national de la marine de Paris en 2001, puis sous différentes formes dans les musées de Barcelone, Greenwich, Stockholm et, en 2007, à Ostende pour le centenaire de la naissance de Hergé. Et c’est sur un soupçon, solidement étayé, d’Yves Horeau, qu’avait été conduit en novembre 2001 le procès du général Alcazar. Yves Horeau était convaincu de la complicité du fameux général dans l’enlèvement du professeur Tournesol. Une partie des faits qui lui étaient reprochés ayant été commis à Saint-Nazaire, il y avait bien compétence de la cour d’assises de Loire-Atlantique pour le juger. Et c’est lui qui endossa le rôle du coupable présumé au cours de ce procès organisé avec l’accord du président du Tribunal de Grande Instance et le concours d’avocats et de comédiens. Le général Alcazar fut acquitté.
Syldavie
Toujours soucieux de démêler avec délices l’entrelacs de la réalité et de la fiction, Yves Horeau est intervenu à plusieurs reprises sur le thème de l’Europe imaginaire chez Hergé, en particulier pour préciser les ascendances historiques du pacifique royaume de Syldavie, la Syldavie qui, avec nous, pleure aujourd’hui celui qui était son consul honoraire à Nantes. L’association Les 7 Soleils adresse à Édith Horeau, son épouse, et à sa famille, ses profondes condoléances.
Jean-Claude Chemin
Président de l’association Les 7 Soleils
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(Photos DR)
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Les grandes figures dongeoises Jean Auzuret Extrait de sa brochure « Donges, son histoire, son passé, sa raffinerie » (septembre 1990).
" Aux bords frais de la Loire, il est un grand village " Évariste Boulay-Paty
Évariste Boulay-Paty (1804-1864) Neveu de l’amiral Emmanuel Halgan, il fut, plusieurs fois, désigné comme lauréat par l’Académie Française. Ce poète, séduit par le charme de sa terre natale, donne dans ses œuvres, une description intéressante de Donges, dans la première moitié du XIXe siècle : « Que j’aime mon vieux bourg, mon vieux bourg de Bretagne Avec sa grève aride et sa rude campagne, Lui que la grande mer berce de son bruit sourd Et qu’endorment les vents ! Je l ’aime, mon vieux bourg ! Je m’asseyais aux murs du prieuré désert Pauvre cloître en débris à tous vents ouverts ; Je contemplais longtemps les pierres druidiques L’une dormant parmi les blonds sillons rustiques L’autre debout encor malgré le long affront Du flot qui bat ses pièces, du vent qui bat son front J’aimais ta solitude, ô verte Vacherie » Évariste était souvent attiré par le sonnet, qu’il choisit pour exprimer ses sentiments, sa pensée, sa tristesse aussi. Il dira en parlant du sonnet, c’est le plus difficile des moules poétiques. Il en résulte un pénible effort, qui se trahit trop fréquemment par le sacrifice du fond à la rime. En 1837, il publie une ode sur l’Arc de Triomphe de l’Etoile et en symbolise tous les génies, ode qui fut couronnée par l’Académie Française.
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« Salut ô piédestal de notre renommée Salut, représentant de notre vieille armée ! La foudre tomberait sans épargner ton front ! Ta masse indestructible, édifice sublime, Fatiguera du temps, l’infatigable lime, Sur toi, les siècles s’useront. » Sainte-Beuve, qui fut son ami, ainsi que Lamartine et Victor Hugo, ne partagea pas toujours sa façon d’écrire et il déclara en parlant de lui1 : «Il a fait de charmants sonnets dont je comparais quelques-uns à des salières ciselées ; mais les salières n’étaient pas toujours remplies ; il y avait plus de sentiment que d’idées. Sa poésie, expression fidèle de sa manière d’être, est trop directe ou trop linéaire, si je puis dire : elle ne passe point par une création. C’est une poésie qui a du nombre, un certain éclat, mais qui ne se transforme et ne se transfigure jamais à travers l’imagination »2. En 1851, Evariste publie les sonnets de la vie humaine : «Vivant, déjà marcher dans ton éternité, Ecraser, sous ses pas, la jalouse vipère, Ce sort, par les travaux dont le génie est père, Plusieurs de mes amis l’ont déjà mérité.» 1 - Xe volume des Nouveaux Lundis (Sainte-Beuve). 2 - La poésie bretonne au XIXe siècle (J. Rousse, 1895).
C’est à Donges, après un long séjour à Paris, qu’il écrivit des odes à son épouse Toussainte Jeanne Françoise Laurent, odes qui ne furent jamais publiées. Après sa mort, survenue à Paris le 7 juin 1864, son cousin, Lambert, a rassemblé ses œuvres inédites, sous le titre de « Poésies de la dernière saison ».
Les Boulay-Paty D’après Kerviler, le nom de famille avait la prétention de se rattacher à Imbert Boulay, premier abbé de Prières, en 1457. Le second nom de Paty fut pris, vers la fin de XVIIIe siècle, par le père du sénéchal de Paimboeuf. Il s’appela Boulay du Paty, pour se distinguer des autres Boulay.
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Évariste Boulay-Paty. (Huile sur toile, par Gabriel Lefébure [né à Falaise, en 1820] - Musée des beaux-arts, Rennes)
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L’Armorial général en pays de Guérande 1696-1700 - Première partie Loup
La France de Louis XIV était un pays en perpétuel déficit. Ayant besoin de renflouer le Trésor, sans avoir la possibilité de lever de nouveaux impôts, le Roi institua des taxes particulières sous prétexte d’enregistrement divers.
P
L’Édit de novembre 1696
ar son Édit de Versailles de novembre 1696, Louis XIV institua « une grande maitrise générale et souveraine et l’établissement d’un Armorial général à Paris, ou dépost publique des armes et blasons du Royaume ; et création de plusieurs maitrises particulières dans les provinces ». Ainsi naquit l’Armorial Général, dit Armorial d’Hozier, car Charles d’Hozier fut nommé Garde de l’Armorial Général le 18 décembre 1696. Afin de pouvoir encaisser immédiatement 7 millions de livres, le Roi fit affermer la perception des droits d’enregistrement par un arrêt du Conseil d’État du 20 novembre 1696, à un traitant parisien, Adrien Vanier, qui était le prête-nom d’un groupe de financiers. Un sixième de la somme affermée devait revenir à Vanier. À charge pour lui d’organiser une administration pour récupérer son investissement. Tout excédent devait revenir au Trésor. Il était prévu que l’inscription à l’Armorial devait s’accompagner d’un versement supplémentaire, de 2 soldes d’enregistrement et de 30 soldes par brevet, destiné à payer les peintures et envois, sommes devant revenir à Vanier qui disposa dès janvier 1697 de 150 000 livres devant servir aux gages annuels à répartir entre les officiers des maîtrises. Il ouvrit immédiatement ses bureaux dans les 28 généralités des états de la Couronne. Le montant de la taxe fut établi comme suit : une personne devait payer 20 livres (soit le prix de deux cochons gras) ; une province 300 liv., l’écu du duché de Bretagne furent enregistrées pour cette somme à Nantes ; une ville ayant archevêché 100 liv. ; une autre ville 50 liv. ; les fiefs laïcs étaient taxés entre 50 et 15 liv. suivant
leur importance ; les fiefs religieux entre 100 et 15 liv. ; les corps et compagnies entre 100 et 25 liv., les communautés laïques (corporations), entre 25 et 20 liv. suivant leur importance. On demanda aussi aux héritiers des personnes mortes après la promulgation de l’Édit de régler faire enregistre les armes dudit défunt et de payer l’enregistrement.
Le texte stipula qu’il fallait présenter son sceau à enregistrer, c’était là garantir une multiplicité des enregistrements, car certains seigneurs laïcs et religieux employaient différents sceaux armoriés en fonction de leur administration féodale, mais aussi de taxer plus de personnes qu’on ne pouvait taxer directement, faute de possession d’un écu par celle-ci, à travers les corporations. Les villes franches furent dispensées, ce qui explique pourquoi les armes de Guérande n’ont pas été enregistrées1. 1 - Au total 13 villes du duché firent enregistrer leurs armoiries : Brest ; Châteaubriant ; Dol ; Hédé ; Hennebont ; Lannion ; Lesneven ; Malestroit ; Nantes ; Pontivy ; Quimperlé ; Quintin ; Redon.
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Page de gauche Page de l’Armorial général de France, dressé, en vertu de l’édit de 1696, tome illustré IX, Bretagne, partie II, conservé à la Bibliothèque Nationale de France.
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Collégiale de Guérande
Les piliers romans
Bernard Tabary
L’histoire de la collégiale Saint-Aubin à Guérande n’a rien d’un long fleuve tranquille. Pas plus que l’histoire de Guérande. L’une et l’autre sont d’ailleurs absolument liées. Il semble même que Guérande soit né de l’implantation d’un baptistère, par Waroc’h II, au VIe siècle.
L
Les débuts
’arrivée dans le bourg naissant des reliques de saint Aubin (évêque d’Angers) provoque la construction d’une basilique. Les reliques de saints, au Moyen Âge, sont extrêmement recherchées ; toutes les paroisses en veulent – vraies ou… (hélas) fausses –; d’où un trafic énorme, juteux, où tous les coups sont permis, où l’honnêteté est loin d’être la préoccupation essentielle. Cette basilique, dédiée évidemment au saint patron du village, est probablement détruite lors du premier sac (rien à voir avec un sac à main ! beaucoup plus avec un saccage ou un pillage ou une dévastation) de Guérande par les Normands en l’an de disgrâce 919, début Xe siècle. Bien sûr, la légende (dorée) veut qu’un chevalier de lumière – saint Aubin lui-même, évidemment – ait, un peu trop tardivement hélas ! (ah ! le timing !), fait se carapater les envahisseurs ; ceux-ci ne laissaient tout de même qu’un champ de ruines… Mais l’homme est un bâtisseur compulsif et un incurable optimiste. Guérande renaît de ses cendres et se construit – pour accueillir les reliques de son saint patron victorieux – une grandiose église romane : on est au XIIe siècle. Le chantier est colossal et va durer des dizaines d’années, deux siècles peut-être. Il faut ce qu’il faut. Tu vas me dire que j’exagère ; me demander sur quoi je m’appuie… Je vois ça venir, mais je t’expliquerai plus loin ; un peu de patience. On élève donc une grandiose église romane.
Il en faut, de la pierre ; de la belle pierre de taille, du granit ! Mais en plus, second chantier gigantesque, on se préoccupe déjà de construire des remparts. Non seulement on s’en préoccupe (pour éviter que se réitère la tragédie de 919 et que soit saccagée la merveille), mais on en commence les fondations ; et même, début XIVe, on en est déjà à bâtir une première porte, au nord – la vannetaise.
Succession de Bretagne
Hélas ! Voilà qu’arrive la guerre de Cent Ans (13371453, 116 ans !), avec sa problématique : la France restera-t-elle française ou deviendra-t-elle un morceau de l’Angleterre ? En même temps, à côté, se déroule la longue guerre de succession de Bretagne (1341-1381, 40 ans !), dont la problématique est : la Bretagne restera-t-elle bretonne ou deviendra-t-elle un morceau de la France – la France qui deviendra peut-être elle-même un morceau de l’Angleterre... ? La guerre n’est jamais très bonne ni pour la santé d’un pays ni pour celle de ses habitants. C’est une calamité. Sale temps pour la France et sale temps pour la Bretagne ! En ce qui concerne les Guérandais, le ciel leur tombe sur la tête dès 1342. Les remparts, à l’état embryonnaire, ne protègent pas la ville, qui est exécutée en très peu de temps. Un massacre, un carnage, une immolation, un anéantissement. On égorge à tour de bras – c’est une boucherie. On se défoule sur tout ce qui est bâti ; on casse, on fracasse, on brûle, on incendie : il ne doit pas rester pierre sur pierre. Guérande n’existe plus. C’est son deuxième sac – bien pire que le premier. On s’est vraiment acharné sur Guérande.
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Page de gauche Collégiale de Guérande, façade ouest (celle qui s’est écroulée 3 fois). (Photo Bernard Tabary)
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Guérande et le culte de Saint-Michel Fernand Guériff
Explorer une ville ancienne, c’est décoder les symboles inscrits dans sa topographie, signes toujours vivants qui transmettent les battements de son cœur lointain et les échos de sa voix d’outre-tombe. Toute ville de ce genre n’est que le reflet imparfait de l’utopique « cité solaire » que prônait Eschyle dans son Prométhée, et où les hommes vivraient comme des Dieux ! Cité de l’Idéal, bâtie sur le mythe du Paradis perdu et sur le désir du paradis possible... 60
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D
ans un article des Cahiers des Amis de Guérande (1977), « Guérande et le Zodiaque », nous avons essayé de montrer que les Anciens construisaient leurs villes et leurs temples selon des rites bien définis, basés sur l’astronomie et la géomancie. Il existait tout un art, ou plutôt une science sacrée du paysage que les Chinois nommaient « feng hui », mais connue de toutes les antiques civilisations1. La Guérande primitive respectait ces données structurelles : par son orientation cardinale, par sa forme ronde, figure parfaite, univers matriciel, mandala magique... Par son environnement mégalithique aussi. 1 – Les Yorubas du Dahomey, par exemple, n’établissent pas autrement leurs cités royales. Voir là-dessus les ouvrages de Léo Frobénius, et celui de Douglas Fraser : « Village planning in the primitive World » – Londres, 1698. C’est pourquoi il ressort des sites antiques une impression de beauté et d’harmonie qui jure souvent avec l’environnement moderne que nous leur infligeons. Voir encore « Le symbolisme des rues et des cités » par Colette Gouvion et François Van de Mert (Berg, 1974) et Laurence Talbot : « Le souffle du norrois ».
Les travaux récents de L. Laborde, entrepris sur les conseils d’A. Varagnac, montrent que les mégalithes jalonnent souvent d’anciens chemins, à des distances visiblement calculées en droite ligne ou en triangle. Des feux allumés devaient permettre d’obtenir ces positions rectilignes. Pour Guérande, un exemple frappant suffira. Le village d’Arbourg, avec ses cinq rangées de menhirs et son cromlec’h disparus, formait un centre important situé « devant le bourg », tandis que Kerbourg, « le village du bourg », formait un autre ensemble préhistorique, situé exactement à mi-chemin, en ligne droite, entre Arbourg et Guérande. Car le « bourg », ici, ne peut être que Guérande, ville principale et sacrée du pays. L’alignement Guérande-Kerbourg-Arbourg présente aussi la même inclinaison N-E/S-0 que les lignes de menhirs paradant naguère dans la lande vers Herbignac. La porte Saint-Michel, à Guérande, et les remparts. (Photo Olga.Mach - CC BY-SA 4.0)
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Étimacie royale en terre guérandaise Michel Barbot
La Collégiale Saint-Aubin de Guérande offre au regard des visiteurs de magnifiques piliers romans dont les huit tableautins affirmeraient, pour Fernand Guériff, une origine templière. Dans son livre de référence, « La Collégiale Saint-Aubin de Guérande » (Éditions Jean-Marie Pierre), l’historien du Pays de Guérande s’attarde longuement sur ces piliers.
L
a scène 6 du pilier III, représente la Gourmandise (en latin Gula) que Thomas d’Aquin dans ses travaux présentait comme le dernier en liste des 7 péchés capitaux. La représentation de Gula, caractéristique de la gloutonnerie, fut associée par le clergé resté dans la droite ligne, comme l’image des Gouliards, ou Fils de Goulia, clercs itinérants ou escholiers qui avaient choisi de croquer la vie à pleines dents. Derrière ces Gourmands de la vie se cachaient les véritables Fils de Goulia, qui sous couvert de Gula, créèrent une association secrète devenue très puissante du XIe au XIIIe. L’archéologue et épigraphe Grasset d’Orcet publia en décembre 1880 dans la Revue Britannique une étude titrée
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« Les Gouliards ». Cette association des Goliardi ou clerici vagantes, ainsi que rapporté par cet érudit, fut dissoute au XIXe siècle « après avoir pleinement atteint le but qu’elle s’était proposé depuis plus de mille ans, et qui était de substituer la souveraineté du peuple à celle de l’Église et de la noblesse. » Longtemps proches du pouvoir royal dont ils furent les plus fermes soutiens, les fils de Goulia finirent par adhérer à l’idée républicaine, et c’est ainsi qu’ils renversèrent « le trône en même temps que l’autel. » L’Europe médiévale se partageait en deux factions politiques que la guerre de Cent Ans porta au grand jour. Il y avait la Faction des Bourguignons et la Faction des Armagnacs.
Les premiers étaient alliés aux Anglais et partisans de Jean sans Peur. Les seconds soutenaient la famille d’Orléans, mais furent chassés de Paris, livré aux Bourguignons. Mon ami Patrick Berlier, dans le TII de son livre « La Société Angélique » (Arqa Éditions), poursuit : « Officiellement réconciliées après la mort de Jeanne d’Arc pour déloger les derniers Anglais, les deux factions continuèrent pourtant leurs luttes occultes. Ils s’affrontèrent sous le nom de Guelfes et de Gibelins, en particulier en Italie, et sous des noms beaucoup moins connus que l’on découvre en lisant Rabelais ou Grasset d’Orcet : parti solaire et parti lunaire. […] Chaque parti se doublait d’un ordre secret, lui-même composé de puissantes corporations de métiers, auquel il était affilié par le biais de ses Ménestrels. Du côté des Guelfes, l’Ordre des Gouliards ou Gaults… » L’un des emblèmes de l’ordre solaire des Gouliards, à l’instar de l’Ordre des Templiers, suivant Grasset d’Orcet, était le SOLMONT ou SOLeil MONTant auquel ils donnaient le nom symbolique et royal de SALMON ou SALOMON. Leur Connaissance ou Sagesse se résumait par deux Piles (piliers) qu’ils nommaient le Boire et le Manger et dans lesquelles ils reconnaissaient les deux colonnes du Temple de Salomon : Jakin la colonne de droite et Booz, la colonne de gauche, l’une et l’autre couronnées par des lys royaux. Fernand Guériff dans sa description du tableautin figurant Gulia, la Gourmandise indique : « Un homme coiffé d’un grand bonnet de paysan (qui ressemble aussi à une sorte de casque), porte sur le dos une outre emplie d’excellent vin vieux, et tient par leur cou deux oies bien grasses qu’il présente à un homme assis sur un escabeau. Peut-être estce un seigneur, sur sa chaise curule, qui reçoit les redevances en nature de ses sujets : du bon vin, des oies. Il regarde ces offrandes avec des yeux exorbités par l’envie et la gourmandise. Derrière lui, un grand animal (genre lion), debout, appuie ses pattes de devant sur les épaules de l’homme. » Les deux piles symboliques du Boire et du Manger dans le tableautin de Gulia sont représentées par l’outre de vin et par les oies. Notons que l’homme, qui apporte ces deux piles, apparaît placé entre les deux piles, image des deux colonnes du Temple. Les magistrats romains jouissant du privilège de magistrature curule étaient assis sur la chaise curule ivoirine dont l’origine remontait aux Étrusques. Agnès-Hélène Grange apporte dans son article « Guérande entre marais salants et Brière, pour une traversée traditionnelle » (Atlantis, n° 413), des éléments assurément complémentaires.
Le siège serait une chaise curiale. Ainsi le personnage assis, suivant cette seconde hypothèse pourrait être un prêtre… Le roi-prêtre de l’Antiquité n’est pas loin ! En posant ses pattes antérieures sur les épaules du personnage assis, tout en lui chuchotant à l’oreille quelques mots, le lion orienterait, suivant l’auteur, notre vision vers les clavicules de Salomon qu’il convient d’entendre ici, uniquement dans le sens d’épaules de Salomon… Avec cette chaise curule ou curiale, associée au lion, symbole royal et aux clavicules de Salomon, se dessine l’idée d’un trône de Salomon ? La vision proposée par ce chapiteau, résume en fait, avec moins de faste, mais l’image est là, la vision du trône de ce roi proposée par la Bible : « Ce trône avait six degrés, un dossier à sommet arrondi, et des bras de part et d’autre du siège ; deux lions étaient debout près des bras. » (1 Rois, 10:19)
Une cité du Trône en presqu’île de Guérande, dans l’Antiquité ?
Pierre-Aristide Monnier prétendait reconnaître dans certains noms de lieux et de cours d’eau, une origine chananéenne. Il est vrai que les Phéniciens avaient établi des comptoirs le long de nos côtes. C’est ainsi que cet érudit reconnaissait dans le Nabe, cours d’eau entre Piriac et La Turballe, le souvenir d’une vénération locale du dieu oriental Nabo (Nabou, Nabû), dieu de la Sagesse et de la Connaissance et gardien des secrets de l’écriture. À la fin du VIIe ou au début du VIIIe siècle, l’Anonyme de Ravenne dit aussi le Géographe de Ravenne, rédige en cinq livres un traité géographique sous le titre de Cosmographie du Ravennate.
Ci-contre Britania in paludibus (La Bretagne dans les Marais). Détail de la carte, dressée, en 1898, par le Dr Konrad Miller, d’après le traité de géographie, réalisé par l’Anonyme de Ravenne. Page de gauche Scène 6 du pilier III roman de la collégiale de Guérande, représentant la gourmandise. (Collection particulière)
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La Seigneurie de Kercabus
600 ans d’Histoire Josselin Beunon
En sommeil pendant près de vingt ans, le manoir de Kercabus reprend vie et nous raconte son histoire, à travers les familles qui l’ont traversée. Aujourd’hui, le manoir de Kercabus se compose de deux corps de bâtiments principaux parallèles, orientés sud-ouest et ceints de murs, entourant une cour. L’un des deux portails étant toujours pourvu de deux lions sculptés (peut-être liés aux Kerpoisson). Il s’agit d’un manoir typique de la région guérandaise. La partie centrale de l’aile nord est la partie la plus récente et la plus remaniée. Elle doit dater du XVIIe siècle et se compose de deux pavillons.
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Ces derniers semblent plus anciens et font face à un autre bâtiment qui pourrait correspondre à des communs. La propriété comprend également du côté nord un jardin clos où l’on peut toujours voir l’entrée de l’ancienne chapelle qui a peut-être fait office de chapelle pour les habitants de Bouzaire. Il y a aussi deux puits, un four à pain, un bois, d’anciennes fermes en ruine et un moulin en bordure d’étang. Un pigeonnier est aussi référencé, mais n’existe plus.
Manoir de Kercabus Époux
Épouse
1420
Jean
de Kercabus
1460
Jean
de Kercabus
Guillaume
de Kercabus
1464, 1471, 1485
Guillemette Perrine
Lien
de Bazvalan Jollan de Crenigan
Jean
de Kercabus
Marie
Hay
fils
François
de Kercabus
Gillette
de Brecel
fils
1527, 1540, 1543
Jacques
de Kercabus
1540, 1559,1575
Pierre
de Kercabus
Marie
d’Ust
fils de François
tuteur
Jean
de Kercabus
Marguerite
de La Bourdonnaye
fils
1606
Jean
de Kerpoisson
Jeanne
de Kercabus
sœur
1639
Isaac
de Rohan
Aliénor
de Kerpoisson
fille
1678
Jean Baptiste
de Rohan
Pélagie
Martin
fils
1711
Marie Louise
de Velthoven
fils
Jean Baptiste
de Rohan
1737, 1747
Jean Louis
de Rohan
frère
1751
Emmanuel
de Rohan
neveu
1755
Joseph
de Monti
Jeanne Emilie
de Berthou
propriétaire
1 tiers
1755
Arthur
de Kercabus
Louise Jeanne
de Rochereul
propriétaire
2 tiers
1776
René Jean Augustin
de Kercabus
Marie Françoise
de Sécillon
usufruitier
Anonyme
de Martel
Marie Renée
de Kercabus
fille
Don (pour 1 tiers) et Vente (pour 2 tiers)
1787, 1824
Vente 1828
Julien
Bigaré
Catherine
Dubois
1841
Jean Pierre
Bigaré
Françoise Séraphine
Lequitte
fils
1866
Edmond Antoine
Bigaré
Marie Victorine
Yviquel
fils
1933
Joseph Marie Dominique
Bigaré
Suzanne
Grange
fils
1938
Yves
Bigaré
Anne
Ferronnière
fils
Propriétaires Je vous propose de plonger dans l’histoire de cette seigneurie à travers les différentes familles qui l’ont possédée. Mais d’abord, voici, dans le tableau ci-dessus, un rapide résumé de ces seigneurs que nous détaillerons par la suite.
1418 - 1639 : Famille de Kercabus (Branche aînée) Dans le cartulaire de Saint Nicolas de Guérande, on trouve un premier Jean de Kercabus en 1350. Nous trouvons les premières traces de la seigneurie de Kercabus en 1418 à travers Jean de Kercabus sieur de Kercabus dans un acte concernant sa femme Isabeau de Musillac. Jean doit être le père ou le grand-père de Guillaume de Kercabus. Ce dernier, par ses deux mariages, a créé une branche aînée ainsi qu’une branche cadette. Pour ce qui est de la branche aînée, la filiation est assez sûre :
Guillaume transmet la seigneurie à son fils Jean aux alentours de 1500 qui, à son tour, la laisse à son fils François avant 1560. Puis Kercabus est transmis à Pierre (f i ls de Fra nçois) après une période de tutorat de Jacques de Kercabus chanoine de Guérande qui pourrait être son oncle.
Ci-dessus et ci-contre Les propriétaires du manoir de Kercabus. Armes de la famille de Kercabus. Signature de Pierre de Kercabus, sur un acte. (AD44 : B1480)
Premières traces de la seigneurie de Kercabus, en 1418, dans un acte concernant Isabeau de Musillac, épouse de Jean de Kercabus. (AD44 : B1484)
Page de gauche Vue aérienne du manoir de Kercabus, depuis le nord, de nos jours. (© Région Pays de la Loire – Inventaire Général, ADAGP, 2010 - Photo Denis Pillet)
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Une Chapelle multi-sĂŠculaire
La Chapelle Saint Marc L’histoire de la Chapelle Saint Marc a prêté à bien des interprétations et l’époque de sa fondation, signalée dans un « aveu » du 25 mai 1560, reste encore aujourd’hui une énigme. Située à quelques mètres du port historique de Mesquer, l’antique chapelle maritime, blottie dans la dune, fut entièrement détruite en juillet 1944 ; présente dans la vie sociale des Mesquérais et en particulier des marins avec leurs familles, elle le fut aussi dans leur imaginaire. Puisse ma modeste participation, fondée sur des écrits ou des témoignages, servir à démêler ce qui ressort de la réalité ou du mythe… Jocelyne Leborgne
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Voyage au Pouliguen août 1889
Anonyme C’est dans le grenier d’une cousine, Marie-Thérèse Girard, demeurant au Croisic, et après son décès, que j’ai découvert ce journal d’un « Voyage au Pouliguen - août 1889 ». Je ne sais rien de la personne qui l’a rédigé, je suppose qu’il s’agit d’une jeune parisienne, venue avec sa famille deux semaines en villégiature au Pouliguen. Le style enlevé, la précision des descriptions, la curiosité et le caractère enjoué et quelquefois moqueur de cette jeune personne, m’ont fait aimer ce texte que je suis heureuse de partager avec d’autres amoureux de la presqu’île guérandaise et de Saint-Nazaire. Evelyne Rochedereux
Jeudi (1er août 1889)
Départ à onze heures vingt par la gare d’Orléans, grande chaleur et surtout grande poussière. Nous apercevons le château d’Amboise et traversons Tours, Angers. Très jolie ville avec ses maisons d’une architecture recherchée et élégante. Nous arrivons ensuite à Nantes où nous côtoyons la Loire que nous suivons presque continuellement depuis Tours. Elle est du reste très large à cet endroit et l’on y voit des bateaux de tous genres, des petits à voile pour la pêche, des yachts de plaisance et de magnifiques trois-mâts. Notre train passe là au milieu de la ville et la ligne du chemin de fer n’étant séparée de celle du tramway à air comprimé que par une petite barrière on croirait lorsque l’on est dans le wagon que rien ne nous sépare des autres voitures. Le train s’arrêtant même au milieu de la ville à la station de la Bourse. Nous avons ensuite aperçu le château qui est magnifique et ensuite le pont d’Ancenis, mais la nuit étant venue nous n’avons rien pu voir jusqu’à Pornichet où nous avons aperçu pour la première fois la mer grâce à la phosphorescence des vagues qui venaient se briser sur la plage. Nous sommes enfin arrivés à onze heures au Pouliguen où nous avons trouvé dans une petite maison propre le plus joli paysage qu’on puisse nous offrir, c’est à dire, des lits que nous n’avons pu faire autrement que de trouver excellents après la chaleur de la journée et la quantité incalculable de poussière que nous avions absorbée.
Vendredi (2 août 1889)
Matin temps superbe, visite à la mer, après bien des essais à peu près satisfaisants pour nous débarrasser de la poussière qui se croit chez elle sur nous. La mer étant basse Georges en profite pour aller à la pêche et nous rapporte une dizaine de jolies crevettes roses. Après-midi promenade dans le petit bois très ombreux et rempli de bancs où l’on peut travailler quand le soleil est trop ardent pour permettre de rester sur la plage dont le sable est toujours brulant ou glacé sans milieu, cure excellente pour les personnes ayant les pieds sensibles. Vers cinq heures la mer étant haute c’est le temps des bains. Maman prend son premier ainsi que Georges qui nage comme un poisson et est heureux comme un roi.
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Page de gauche Reproduction de la première page, ou page titre, du présent journal de voyage. Ci-dessous Le Pouliguen : vue générale des quais.
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Des Acadiens
en Bretagne Jean de Saint-Houardon
Beaucoup d’historiens se sont montrés émus par le sort des Acadiens d’origine française, expropriés et déportés par les Anglais quarante ans après le traité d’Utrecht, un traité « de paix et d’amitié » signé en 1713 entre les royaumes de France et de Grande Bretagne par lequel Louis XIV cédait à ce dernier une bonne partie de ses terres du Nouveau Monde, dont l’Acadie.
Ci-dessous Détail de la fresque du Mémorial des Acadiens, réalisée, rue des Acadiens, à Nantes, représentant le séjour des Acadiens en déportation, de 1775 à 1785, à Chantenay, aujourd’hui quartier de Nantes. (Robert Dafford -
Photo Jibi44 - CC BY-SA 3.0)
C
ertains y ont même vu une opération de nettoyage ethnique, mais peu se sont attardés à les suivre dans leur exil. Il est vrai que, disséminés, ils se sont beaucoup déplacés avant d’achever leur parcours et de s’établir enfin. Nombre de ces derniers débarquèrent en Bretagne, à Morlaix, à Saint-Malo, à Saint-Servan, à Brest. Certains de ces réfugiés n’ont fait qu’un bref séjour en Bretagne, quand d’autres s’y sont installés plus ou moins durablement pour y avoir été convenablement accueillis, à défaut d’avoir été vraiment désirés, et ne pas savoir où aller.
C’est donc de leur sort en particulier dont il sera question, après avoir fait l’historique de ce qui en a décidé. On qualifie d’Acadiens les descendants des immigrants venus de France au tout début du XVIIe siècle en Acadie, un territoire que recouvrent aujourd’hui au Canada les provinces du Nouveau-Brunswick situé sur le continent, de la Nouvelle-Écosse, territoire péninsulaire qui lui est contigu, et de l’Île du Prince Édouard qu’un étroit bras de mer sépare de ce dernier.
Les premiers colons arrivent en 1604 sur l’Île Sainte-Croix (aujourd’hui américaine et située sur la frontière entre l’État du Maine et la province du Nouveau-Brunswick), lors de la fondation de l’Acadie par le « lieutenant-général en Amérique septentrionale » Pierre Duga de Mons, mandaté par Henri IV. Ils s’établiront rapidement à Port-Royal, au Sud-Ouest de ce qui deviendra la Nouvelle-Écosse, localité fondée en 1605 et capitale de l’Acadie jusqu’en 1710. Cette nouvelle place était en effet à même de leur offrir de meilleures conditions d’existence. La colonisation fut d’abord timide. Dans les années 1630, une vingtaine de familles originaires pour la plupart du « Loudunais » en Poitou y prennent pied. S’adjoignent à eux des soldats et la population acadienne atteindra 400 âmes en 1670. Le peuplement se poursuivra progressivement quand, dans le même temps, le territoire de l’Acadie sera disputé régulièrement par les Britanniques (1). Par le traité d’Utrecht (2), l’Acadie est cédée par la France à l’Angleterre, à l’exception de l’Île SaintJean (Île du Prince Édouard) et de l’Île Royale (auparavant nommée l’Île du Cap-Breton) et 1 700 Acadiens de langue française deviennent de facto sujets
de Sa Majesté britannique. Ceux-ci revendiqueront leur neutralité pour ne pas devoir affronter les Français lors des conflits armés éventuels entre ces derniers et les Anglais. Et ce sont 400 soldats britanniques qui prendront position pour y rester. Après ce changement de statut, des Écossais, des Irlandais et des Anglais arrivent pour s’établir sans devoir remettre en cause la prépondérance de la communauté de langue française. Aussi, c’est un gouvernement militaire qui sera mis en place pour éviter de créer une législature à majorité française et catholique. Cependant, la paix franco-britannique déclarée en 1713 est toute relative dans cette région de l’Amérique. Aussi, en 1749, la nomination d’Edward Cornwallis comme nouveau gouverneur de la Nouvelle-Écosse provoque une profonde inquiétude chez les Acadiens « français » dont un grand nombre décide alors d’émigrer vers l’Île SaintJean, ce que l’on observera avec leur déplacement massif vers elle en 1750. En effet, ils avaient tout à craindre de cet homme en raison de son profil, puisqu’il était issu d’un groupe d’officiers militaires menés par le duc de Cumberland et formés durant la répression
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Ci-dessus Carte de l’Acadie, entre 1604 et 1607, montrant les différentes expéditions de Samuel de Champlain et de Pierre Dugua de Mons. (Dr Wilson - New England and South-East of Canada topographic map)
Ci-contre Monument à Pierre Dugua de Mons, érigé, en 2007, sur l’avenue Saint-Denis, près de la Citadelle de Québec. (Hamilton MacCarthy Photo Jean Gagnon CC BY-SA 3.0)
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Journal d’un aumônier breton - 1850 - 24 partie e
Christiane Marchocki Le journal de bord du Père Fouchard, en réalité journal personnel, écrit pour lui-même, non destiné à être lu, encore moins publié, nous relate aujourd’hui, ce 9 décembre 1850, une forme d’exploration qui n’est pas purement géographique, mais, humaine.
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n sondant les esprits qu’il côtoie, il se révèle à nous. Il ne manque pas d’humour, un peu féroce, parfois, discrètement, alors qu’il étudie la possibilité d’envoyer et implanter des missionnaires catholiques sur la côte d’Afrique, ceci, non sans difficultés. Théologie mise à part, quel est le rôle de la conquête religieuse ? Précède-t-elle la conquête politique ? En a-t-il toujours été ainsi ? L’exploration de cette question est à approfondir.
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8 décembre 1850 (suite) Nous sommes entrés aussi dans une autre maison, chez une espèce de factotum parlant assez bien français, et, quoiqu’il nous ait caché l’origine de son espèce d’éducation, je ne serais pas étonné d’apprendre qu’il a porté autrefois livrée, ou, qu’il a fait le commis voyageur, tant il est souple, sans raison, et plie avec facilité son épine dorsale, il a la parole obséquieuse. Mais ce n’était qu’un farceur qui voulait nous exploiter.
Nous avons vu chez lui deux caféiers énormes, ce sont de vrais arbres, tellement chargés, que les branches ployaient sous le poids de leurs fruits. En rentrant du jardin, nous avons trouvé chez lui, le président de la République (j’ai oublié de vous dire que le monsieur en question est un grand dignitaire : c’est le colonel, ou général en chef. J’ajouterai même qu’il fait profession d’être très humain, et qu’il ne conçoit pas qu’on puisse aimer la guerre : il a fait une petite expédition sur la côte pour détruire des baraques de traite. Il en parle avec épouvante. Je vois bien, malgré cela, qu’il se croit au moins l’égal de Napoléon dont il a le portrait chez lui et dont les sœurs ont donné son nom à toutes les filles. C’est une sorte de Robert Macaire1. Je ferme ma parenthèse). Le président2 : il ne m’a pas semblé mal. Il est même bien. Il a quelque dignité. C’est un sang mêlé dont les cheveux d’une teinte presque blonde sont crépus comme ceux des nègres. C’est le sang anglais et le sang africain à la seconde ou troisième génération. Il nous a gracieusement reçus, et invités à aller le voir. Il nous restait une demi-heure, nous la lui avons consacrée. Je n’étais pas fâché de voir la résidence et son salon. J’y ai trouvé un luxe de bon goût auquel j’étais loin de m’attendre. Nous avons été introduits dans une pièce garnie de belles tapisseries, de fauteuils, de chaises en laque, deux grandes glaces et le portrait de sa femme et de son enfant, quelques gravures républicaines, et même un piano en mauvais état dont personne peut-être n’a jamais joué. Nous avions sous les pieds un tapis de je ne sais quelle fabrique, mais qui était très beau, deux tables de marbre et d’acajou au milieu, et deux lustres de cristal. J’ai remarqué dans toute la construction, même dans le plan, une grande intelligence du besoin du pays : il n’y a pas de rez-de-chaussée à cause de gaz qui se dégageant à la saison des pluies, rendent le pays malsain. Nous avons aussi visité une église méthodiste. Nous ne savions pas tout d’abord si ce n’était pas une école. Rien ne la distinguait par un signe religieux, mais nous n’avons plus eu de doute quand nous avons vu le peuple s’y rendre pour les vêpres. Il y a ici, déjà quatre sectes qui se tolèrent dans les rapports ordinaires de la vie, mais qui ont chacune leur église, 1 - Robert Macaire, personnage de « l’Auberge des Adrets », voir les tableaux de Frédérick Lemaître et les caricatures de Daumier. Il personnifie la perversité, l’impudence, la friponnerie, le fanfaron du vol et de l’assassinat. 2 - Joseph Jenkins Roberts (1809-1876). Né aux États-Unis, il a émigré au Libéria, en 1829 et est devenu le premier président du pays, en 1848, après l’indépendance.
leur mission. Le président est méthodiste, mais, comme le disait notre homme, il n’y tient pas et accepte tout le monde. C’est un grand esprit qui s’élève au-dessus de toutes ces misérables arguties, il s’offrit à Monseigneur pour lui servir d’interprète et d’intermédiaire s’il voulait établir quelques missionnaire, bien qu’il sût que cela n’était pas possible et que la constitution, selon les blancs, sans distinction : ils ne peuvent pas posséder d’immeubles.
9 décembre 1850
Nous sommes encore aujourd’hui, Monseigneur et moi, descendus, voir les catholiques que nous avions su trouver dans le pays et pour savoir si le baptême qu’ils recevaient de la main du Méthodiste, était bien valide. Nous avons trouvé deux catholiques qui ont pu répondre à nos questions. Un article de la constitution interdit
à un blanc toute acquisition sur le territoire de la république, et tolère seulement leur séjour temporaire. Nous avons agi comme si nous avions quelque espoir et si nous n’avions pas été pressés par l’heure et un orage qui nous menaçait d’un déluge. Nous avons commencé à entrer dans les bonnes grâces de cet honorable, chez lequel nous nous trouvions, en lui achetant un cent d’oranges (riez tant que vous voudrez). Nous avons eu à dîner le capitaine d’un brick américain et son second. Nous avons causé anglais comme si nous y avions entendu quelque chose, à haute voix, sans aucune espèce de vergogne. À la fin nous nous sommes aperçus que le capitaine entendait aussi bien le français que nous l’anglais. Nous avons continué cependant. Nous avons été généreux, et nous avons sacrifié tout amour propre en face du second qui ne savait pas un mot français et avait l’avantage de parler anglais et sans lever le doute que nous ne pouvions rien y comprendre. Nous nous sommes quittés de fort bonne humeur.
Christiane Marchocki mars 2019
Ci-dessus Photo de Joseph Jenkins Roberts, premier président du Libéria. (Daguerreotype d’Augustus
Mc Carty - United States Library of Congress’s Prints and Photographs division)
Lithographie de la maison de Joseph Jenkins Roberts. (Documenting the American South [DocSouth])
Page de gauche À Monrovia, monument à la mémoire de Joseph Jenkins Roberts. (Photo blk24ga - CC BY 3.0)
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À LIVRE OUVERT
Le silence de l’argile
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À table - De la Révolution à l’Empire - 1789-1815
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n livre original, une vision de la vie de nos ancêtres, leur histoire sous un aspect plus sérieux qu’il y paraitrait : la cuisine et les arts de la table. L’auteur en a fait le sujet d’une étude allant de 1789 à 1815. Ce texte, hors des sentiers battus, a une saveur particulière. Alain Pigeard, historien, professeur de droit, chercheur et conférencier, chevalier de la Légion d’honneur en 2009, s’est attaché à l’étude du Premier Empire. On lui doit une soixantaine d’ouvrages traitant de cette période. Les « grandes tables » sont décrites, celles de Napoléon, Murat, Talleyrand…. non seulement celles des grands de ce monde, mais aussi celles de différentes classes de la société, les plus modestes ne sont pas oubliées. On peut prendre connaissance de menus les plus luxueux et lire comment se nourrissaient les plus pauvres, les anonymes. On rencontre des cuisiniers aussi célèbres que les généraux qui leur sont contemporains, leurs vies sont relatées. Il est vrai que la table : les mets, leur présentation, la vaisselle, la tenue des convives sont
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révélateurs d’une civilisation. C’est la gastronomie française qui est à l’honneur. Elle, qui a fait école. Moi ns présente da ns l’a r mée, nous approchons la vie des soldats parcourant l’Europe, à pied pour la plupart, nous entrons chez les paysans, leur famille. Le sujet est vaste. Les lecteurs amateurs de reconstitutions, peuvent, à nouveau, goûter différents plats : potage à la Cambacérès, soupe d’Austerlitz, sole Murat, aubergines Masséna, pommes de terre impératrice Marie-Louise, potage Marengo… Les recettes authentiques sont données à la fin de ce livre consacré à l’Histoire, remarquablement documenté. Partager un repas gastronomique entre amis est toujours un plaisir. Cette fois, il serait historique. Christiane Marchocki
À table
De la Révolution à l’Empire - 1789-1815
Alain Pigeard Éditions de la Bisquine 20 rue des Acacias - 75 017 Paris www.editions-labisquine.com
237 pages - 18 €
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itre étonnant, un double silence, l’argile qui inhume. Mais aussi l’argile qu’on pétrit en donnant naissance à des œuvres artistiques, évocatrices situées dans le temps et l’espace. Elles sont présentes au long des pages. L’Algérie et la Bretagne curieusement se croisent et se rencontrent dans ce livre. Martine Hidoux-Roussel originaire de Pornichet, demeure dans les monts d’Arrée. La guerre d’Algérie, comme toute guerre, a entrainé des exils, et laissé des traces. C’est l’une d’elles et ses conséquences que Martine Hidoux-Roussel nous peint autant qu’elle l’écrit. On y voit la Kabylie, on y voit Saint Nazaire. Les couleurs, engendrées de palettes nées sous des climats éloignés se marient. On y entend des mélodies différentes venues d’âges lointains, étrangers les uns aux autres. On y entend deux langues obscures l’une à l’autre. On y ressent la peur, la haine, le dégoût, le désespoir pour tous, et, pour tous, l’instinct de survie. Elle nous fait vivre dans les paysages des monts d’Arrée, tout en suivant le parcours quotidien d’un facteur, lien entre les vies, entre les aventures humaines, jusqu’à nous entrainer en Kabylie au pied d’autres monts. La vie, l’atmosphère des monts d’Arrée, l’intimité familiale bretonne, précèdent celles vécues en vue du mont Djurjura. Chaque acteur vit
alternativement l’exotisme puis sa propre vie, chez lui, dans son environnement. Tous guettent les points communs qui les rassemblent. Martine Hidoux-Roussel, d’une grande sensibilité esthétique, toujours proche de la nature, nous fait plonger dans différentes racines, avec, toujours, ce besoin de trouver un lien avec les ancêtres et la terre natale. Christiane Marchocki
Le silence de l’argile Martine Hidoux-Roussel Éditions des Montagnes Noires 51-53 rue Joseph Le Fur - 56110 Gourin edmontagnesnoires.weebly.com 172 pages - 16 €
Récits au coin du sel
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e langage ne reflète pas seulement la pensée de celui qui parle, il laisse aussi deviner l’époque, la vie, l’environnement de celui-ci. C’est ce que le lecteur entrevoit en lisant cet ouvrage, « Récits au coin du sel », transcrit par Jacques Péneau. Pour qui est curieux de se plonger dans un passé récent, mais révolu, en un lieu qui nous est familier, aussi familier que les patronymes cités, ces récits au coin du sel sont évocateurs et vivants. Les paludiers, à la fois paysans et pêcheurs pour survivre, menaient une vie de labeur continuel. Le nombre d’heures ne comptait pas, les saisons, les soins dus aux animaux, la météorologie dont dépend la récolte dans les marais et dans les champs, étaient des obligations sévères non répertoriées. On apprend beaucoup dans ce livre : les expressions et les mots disparus, le patois imagé, marié à notre langue ordinaire, on devine, on entend certaines intonations qui nous rendent présents les acteurs de ces récits. Un glossaire dans les dernières pages enrichit notre compréhension, notre savoir. Les différents aspects de cette vie particulière sont évoqués, les habitudes, les superstitions, la nourriture l’inconfort, c’est un panorama qui nous fait découvrir l’existence sous un angle difficile, pour nous, désor-
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mais, à imaginer. Cependant, il en était ainsi il y a deux générations, et, pas uniquement chez les paludiers. La population avait un style de vie d’apparence primitive en comparaison de nos habitudes de confort. En lisant que les animaux, vaches, chevaux, traversaient « la pièce à vivre » pour se rendre à l’étable, on mesure la distance qui maintenant nous sépare. La dernière guerre, et la manière dont elle fut vécue, est aussi abordée de façon très personnelle et inattendue. En un mot comme en dix, lire cet ouvrage écrit dans un style de connotation locale, apporte beaucoup à notre vision des hommes et de ceux qui nous ont précédés. Nous sommes rapidement emportés au fil des lignes dans un autre univers. Nous nous attachons à différents personnages, les anecdotes rapportées sont très parlantes, comme des portraits. C’est un moment étonnant, attachant, que nous offre là Jacques Péneau. Christiane Marchocki
Récits au coin du sel de Jeannne et Henri Transcription Jacques Péneau Éditions Mémoria- 6, chemin du Bas Village Mesquéry - 44410 Assérac francmallet.wixsite.com/memoria
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A . P. H . R . N
Association Préhistorique et Historique de la Région Nazairienne
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Illustration : Huile sur contreplaqué, peinture naïve de la pointe de Merquel, vers 1910, non signée. (Collection privée)
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La chapelle Saint Marc, près de la pointe de Merquel, à Mesquer, au début du XXe siècle. (Collection particulière)
Impression Pixartprinting - Réalisation Tanguy Sénéchal
L’ancienne chapelle Notre-Dame d’Espérance, dans le vieux Saint-Nazaire.
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