HISTOIRE & PATRIMOINE RÉGION
NAZAIRIENNE
PRESQU’ÎLE GUÉRANDAISE
L’histoire locale de la Région Nazairienne et de la Presqu’île Guérandaise
La Soucoupe a 50 ans...
La Soucoupe a 50 ans... René Kerviler, ingénieur, écrivain, historien breton
Marc Hélys, femme de lettres nazairienne
Une journée particulière, à
Les maires de Saint-Nazaire (4
Brefs souvenirs d’un ancien des Chantiers
Tour Rochereau :
e
partie)
Assérac, Mesquer, Piriac, St Molf Une curiosité de la côte sauvage A.P. H.R.N - n° 97 - mars 2020 - 12 €
La salle de l’Alvéole 12 de la base des sous-marins, à Saint-Nazaire, le 26 octobre 2019, lors d’une conférence, pour les 50 ans de l’APHRN. (Photo Alain Silhol)
L
Éditorial
’Histoire universelle est composée de l’histoire de chacun de ceux qui la vivent, en particulier des personnes les plus remarquables. Chaque individu en est un fragment. Ceci apparait nettement en lisant les articles de ce nouveau numéro de notre revue. René Kerviler est un bel exemple. Il fut non, seulement, l’ingénieur qui dirigea la construction du bassin de Penhoët et celle de l’entrée du port, il fut, aussi, un archéologue, un historien et un poète. Saint Nazaire et la Bretagne lui doivent beaucoup. En suivant les actions d’un maire on voit l’évolution d’une ville. La quatrième partie de l’article Les maires de Saint-Nazaire décrit les réalisations des deux maires qui ont administré la cité, avant, pendant et après la Grande Guerre. Cinquante ans plus tard, en 1970, la Soucoupe sortait de terre et devenait l’un des bâtiments emblématiques de la ville. Cinquante autres années se sont écoulées et, en 2020, elle est toujours là, portant en elle une bonne part de l’histoire du sport de Saint-Nazaire. Nous revenons à la guerre de 14-18, avec le témoignage de Marc Hélys, qui décrit, avec précision, la vie quotidienne des Nazairiens, en 19151916, dans une ville, éloignée du front, mais qui vit, en permanence, avec la guerre, à travers l’arrivée des troupes anglaises et les blessés. La biographie de cette femme de lettres nazairienne, dans l’article qui suit, nous révèle, notamment, sa participation active à une supercherie, au détriment d’un fameux écrivain, qui fit grand bruit dans le monde littéraire. Les Mémoires d’un ancien des chantiers navals, sont un autre témoignage, mais, cette fois, sur la période de l’entre-deux guerres et durant la deuxième guerre mondiale. L’extraordinaire aventure de Narcisse Pelletier nous est racontée. Le personnage, célèbre en son temps, qui a fini sa vie à Saint-Nazaire, est totalement tombé dans l’oubli, tout comme sa tombe, au cimetière de La Briandais. Nous remontons, ensuite, très loin dans le temps, en l’an 573, à Besné, quand l’évêque Félix de Nantes, rendait visite à deux ermites. L’article suivant nous donne une vision dramatique, malheureusement, partagée par des milliers d’hommes : la vie et la mort dans les tranchées pendant la Grande Guerre. L’article sur la commission Bignon, 1793/1794, traite des massacres de masse qui ont été perpétrés, après la défaite de l’armée catholique et royale, à Savenay, en décembre 1793. Puis, nous passons à tout autre chose, avec l’évocation d’une curiosité, sur la Côte Sauvage, une tour métallique, érigée à la fin du XIXe siècle et démolie dans les années 50. À Assérac, Mesquer, Piriac et Saint-Molf, le 29 mars 1789, il n’est pas encore question de Révolution. Les habitants se réunissent, dans les églises, pour nommer des députés, chargés de représenter la population lors des États généraux, qui se tiendront, quelques semaines plus tard, à Versailles En fin de revue, la rubrique « L’histoire et l’imaginaire » nous accorde une récréation. Nous plongeons, avec délice, dans la vie antique, à travers un récit qui évoque la maladie de Jules César, peu avant la défaite de la flotte Vénète. Nous sommes en 56 av. J.-C. Christiane Marchocki
1ère page de couverture : La Soucoupe aura 50 ans, en ce mois de février 2020. (Photo Christian Robert-Ville de Saint-Nazaire)
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A . P. H . R . N
Association Patrimoine et Histoire de la Région Nazairienne Agora (case n° 4) 2 bis avenue Albert de Mun - 44600 Saint-Nazaire aphrn.asso@gmail.com - http://aphrn-asso.fr - Tél. 06 07 11 21 88
HISTOIRE & PATRIMOINE n° 97 - mars 2020 ÉÉditeur : A.P.H.R.N Direction de la publication : collégiale (voir dernière page) Maquette/Mise en page/Coordination : Tanguy Sénéchal Impression : Khilim Dépôt légal : 1er trimestre 2020 N° ISSN : 2116-8415 Revue consultable aux Archives de Loire-Atlantique sous la cote Per 145
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SOMMAIRE HISTOIRE & PATRIMOINE n° 97 — mars 2020 01
Éditorial
Christiane Marchocki
René Pocard du Cosquer de Kerviler 04
Ingénieur, archéologue et historien breton Jean de Saint-Houardon
P. 48
P. 74
P. 80
22
Les maires de Saint-Nazaire - Quatrième partie 1909 -1925
Patrick Pauvert
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La Soucoupe a 50 ans
48
Saint-Nazaire en 1915 et 1916
62
Marc Hélys, Femme de lettres nazairienne
74
Brefs souvenirs d’un ancien des chantiers navals nazairiens
80
Nos champions cyclistes récemment disparus
84
Narcisse Pelletier à Saint-Nazaire
88
La visite de l’évêque Félix à l’ermitage besnéen de Friard
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Une famille morbihannaise dans la Grande Guerre
108 P. 84 114
118
Maxence Ponroy
Marc Hélys (annotations de Loup) Loup
Raymond Rivalland (Pages choisies et commentées par Daniel Sauvaget) Paul Correc Loup Claude Thoméré Gilles Alain
La Commission Bignon 1793-1794 Bernard Tabary
La Tour Rochereau - Une curiosité sur la Côte Sauvage
Paul Correc
29 mars 1789 - Une journée particulière… à Assérac, Mesquer, Piriac, Saint-Molf Jocelyne Le Borgne
P. 88
123
Journal d’un aumônier breton - 1850 - 27e partie Christiane Marchocki
L’HISTOIRE & L’IMAGINAIRE 126 126 - César était malade... - Gérard Olivaud À LIVRE OUVERT 142 - Une Riviera bretonne (Jean-Bernard Vighetti) - Daniel Sauvaget 142 144 - Le breton, langue des mères, langue des frères (Marie-Thé Legendre) - Christiane Marchocki
P. 97
SORTIES CULTURELLES 145 145 - Machecoul, fief des seigneurs de Retz - Bernard Tabary 148 L’ASSOCIATION
P. 108
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René Pocard du Cosquer de Kerviler dit René Kerviler ou de Kerviler (1842-1907) Ingénieur, archéologue et historien breton Jean de Saint-Houardon Histoire, ou parcours, d’un érudit et auteur prolifique, qui fut, à Saint-Nazaire, le grand maître des travaux de la construction du bassin de Penhoët et de l’entrée du port.
L’Homme, ses travaux, son œuvre L’Homme
R Portrait de René Mathurin Marie Pocard du Cosquer de Kerviler, dit René Kerviler. (Collection Régis Le Bouteiller des Haries)
ené de Kerviler n’était pas grand, 1 mètre 70, mais quand on l’adosse à son œuvre colossale nous pouvons dire, sans craindre l’exagération, que ce fut un Grand Homme, un homme comme il en existe peu... En parcourant son existence, on est d’abord frappé par le haut niveau d’exigence qu’il s’est toujours imposé dans sa quête de dépassement de soi. On est aussi assez perplexe face à la personnalité complexe et attachante de l’homme. Et si, à l’évidence, il ne se l’était pas avoué, nous pouvons prétendre pour lui qu’il fut un homme accompli, même si certaines de ses études et théories furent parfois contestées. À trop faire sans doute... « Qui trop embrasse, parfois mal étreint », dit l’adage. Peut-être aussi s’est-il laissé parfois dépasser par son enthousiasme. Pour autant, il n’en est pas moins resté un homme exceptionnel et surprenant à maints titres, par sa ferme volonté d’abord, par sa réussite professionnelle ensuite, et par sa très riche production intellectuelle pour finir. Un grand travailleur, curieux et passionné, soucieux d’aboutissement dans ses entreprises et totalement investi dans ses activités, que ce soient celles qu’il ait menées comme ingénieur des Ponts-et-Chaussées, surtout à Saint-Nazaire qui
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lui doit beaucoup, ou comme archéologue et historien. Pugnace en bon Breton. Un humaniste chrétien aussi, ce qu’il ne faudrait pas passer sous silence. On ne peut appréhender l’homme en faisant abstraction de ses origines et sans connaître son environnement immédiat, qui est d’abord familial. Celui-ci aura orienté ses choix professionnels et probablement ses goûts, et lui aura ainsi permis de faire sa place dans un environnement plus large, lui aussi préoccupé à son époque par les mêmes attentes, tant sociétales, culturelles que scientifiques.
1. Sa famille
La famille Pocard, puis Pocard du Cosquer, et enfin Pocard du Cosquer de Kerviler par jugement du Tribunal d’Instance de Vannes du 9 mai 1901, est une famille bretonne d’ancienne bourgeoisie, au moins depuis le XVIIe siècle avec son plus ancien auteur connu, Julien Pocard. Né en 1610, celui-ci aurait pris à bail en 1669 le manoir du Cosquer en Locmaria-Grand-Champ, aujourd’hui localité du Morbihan. Sur huit générations qui précèdent celle de René de Kerviler, les Pocard paraissent s’être succédés comme notaires, greffiers ou négociants. Ils donnèrent aussi des officiers de marine et, au XIXe siècle, ils initièrent une nouvelle tradition familiale : le passage par l’École polytechnique pour les sujets masculins (1). René de Kerviler sera fils, gendre, père, beau-père et cousin de polytechniciens...
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Les maires de Saint-Nazaire Quatrième partie 1909 -1925 Patrick Pauvert 22
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Une borne-fontaine, à Saint-Nazaire, au début du XXe siècle, à l’angle de la rue de Cran (de nos jours, rue Jean Jaurès) et de la rue de Nantes (de nos jours, rue Henri Gautier). (Éditeur : Morel, Saint-Nazaire)
22 - Brichaux Louis 22 août 1909 – 10 décembre 1919
Nous avons arrêté la 3e partie de l’histoire des maires avec l’élection de Louis Brichaux, le 22 août 1909 (Conseiller depuis 1904).
I
l est né à Decazeville, en 1871. Son père, Joseph Brichaux, est marchand de charbon dans cette ville, comme chef de fabrication. Il monte une usine à SaintÉtienne et le directeur de la société des Mines de l’Anjou lui propose de fonder une usine à Saint-Nazaire.
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Portrait de Louis Brichaux, maire de Saint-Nazaire, de 1909 à 1919.
Savait-elle, en surgissant des marais, qu’un jour elle pénétrerait dans l’histoire ? Labellisée « Patrimoine remarquable du XXe siècle », elle fit son entrée aux Monuments historiques, en juin 2019. La Soucoupe fut comble, lors du match de volley-ball France-République Tchèque, en 2019. (Photo Christian Robert-Ville de Saint-Nazaire)
La Soucoupe a 50 ans
Un parfum de madeleine de Proust Maxence Ponroy
Savait-elle, en surgissant des marais, qu’un jour elle pénétrerait dans l’histoire ? Labellisée « Patrimoine remarquable du XXe siècle », elle fit son entrée aux Monuments historiques, en juin 2019.
L Saint-Nazaire fut désignée Ville la plus sportive de France, en 1976, par le journal l’Équipe. L’O.M.S., dans son annuaire, ne pouvait que rendre hommage à la Soucoupe, qui avait grandement participé à cette distinction. (Collection de l’auteur)
a Soucoupe le méritait bien après un parcours chaotique, un accouchement dans la douleur et une mise à mort un instant envisagée avant cette averse de grêle qui, à la fin du mois de mai 2016, faillit donner raison à ses détracteurs. Car la toiture révolutionnaire des années soixante ne résista pas à la colère des intempéries. Paradoxalement, mise en sommeil durant de longs mois, elle retrouva le soutien d’une population qui n’était pas que sportive. Totalement réhabilitée pour la modique somme de 940 000 euros, dont 677 000 euros pour la seule toiture, elle est devenue intouchable dans ce berceau qui est le sien depuis 50 ans, l’aire du Grand Marais. La très emblématique salle nazairienne, panachée à l’origine entre sports et spectacles, vit le jour officiellement le 26 février 1970 lors d’une soirée inaugurale à la mesure de l’événement.
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Blancho la conçut, Caux coupa le ruban Ce fut à l’occasion du match des championnats du monde de handball qui opposa à SaintNazaire les équipes d’U.R.S.S. et la République démocratique allemande. C’était l’époque où le régime soviétique dominait la partie orientale de l’Europe. La RDA allait triompher de son puissant voisin pour ne s’incliner qu’en finale devant la Roumanie. Une autre rencontre eut lieu le même soir à Quimper. Elle aurait pu se dérouler à Saint-Nazaire, mais on prétendit que le Parti communiste, qui avait pignon sur rue autour des Chantiers, n’aurait pour rien au monde abandonné un U.R.S.S.-R.D.A., quelle que soit l’autre affiche proposée. Si la Soucoupe, pour son premier événement majeur, fut comble, ce qui fut sa véritable inau- guration eut lieu, en fait, quelques jours auparavant, le dimanche 22 février dans une relative discrétion lors de la visite traditionnelle des installations municipales.
C’est Étienne Caux qui précédait le petit cortège où figuraient deux des grandes figures nazairiennes ayant participé à cette épopée, Paul Lièvre, adjoint aux sports et personnage incontournable du mouvement sportif depuis la Libération, ainsi que Fernand Millet qui était devenu, trois années auparavant, le premier directeur du nouveau Service des sports de la ville de Saint-Nazaire. Il y avait, en effet, comme une certaine pudeur. Après tout, Étienne Caux qui avait été élu maire en 1968 (il le demeura jusqu’en 1983) n’avait été que le témoin indirect de cette réalisation. Son prédécesseur, à l’origine de ce projet novateur, François Blancho, avait renoncé à ses fonctions après 39 années à la tête de sa cité. L’infatigable baroudeur de la S.F.I.O. qui faisait figure d’invité d’honneur en ce frisquet mois de février 1970 aurait mérité de couper le ruban tricolore. Les travaux qui avaient débuté le 1er juin 1963 auraient dû être achevés en mai 1966. Mais ils ne le furent que quatre ans plus tard…
à un ensemble sportif et un autre, de 23 hectares, au parc paysager. Dès 1950 sont établis les plans d’ensemble des aménagements. Nous sommes 20 ans avant l’inauguration de la Soucoupe. Roger Vissuzaine, architecte D.P.L.G., assurera la mission d’architecte en chef pour le parc des sports et son homologue, Albert Audias, paysagiste D.P.L.G., se chargera de mener l’opération parc paysager. C’est, bien entendu, la future salle des sports qui est au centre des débats. Trois architectes vont diriger l’étude et la mise au point du projet, Roger Vissuzaine, cela va de soi, mais aussi Louis Longuet et René Rivière. Ils bénéficient de l’aide d’un bureau technique, le C.E.T.A.C. animé par deux ingénieurs, René Sarger et Jean-Pierre Batellier.
20 années dans le rétroviseur Petit retour en arrière. Ou plus exactement 20 années dans le rétroviseur. Saint-Nazaire, meurtrie, a perdu la majorité de ses 45 000 habitants de 1935. On en dénombre 2 000 en 1945. C’est là sa population officielle 100 ans plus tôt ! Comme le dira à l’époque François Blancho : « La guerre avait accompli son œuvre destructrice. Il ne restait alors plus un seul bâtiment public, plus une école et 15 % seulement d’immeubles privés étaient encore réparables1 ». Saint-Nazaire se relève. L’accroissement démographique est continu. On arrive très vite au chiffre de 65 000 habitants. Certes, on est loin des objectifs virtuels qui seront ceux d’Étienne Caux dans le Livre Blanc de l’agglomération édité en 1971 par le Ministère de l’Équipement et du Logement dans lequel le maire en poste dira : « 1968 : 64 000 habitants. 2000 : 180 000. Ce ne sont que des prévisions, mais nous devons nous efforcer de les tenir ». On sait ce qu’il advint… François Blancho, son prédécesseur, est plus pragmatique. Il constate, dès les brèves années qui suivent le redressement de Saint-Nazaire, que « la moyenne d’âge est très basse, plus du quart des habitants fréquentant les établissements scolaires de la ville2 ». Au début des années soixante, la cité scolaire compte déjà 4 500 élèves. Un vaste programme socio-éducatif a été mis en place par la municipalité Blancho dès la fin des hostilités. La jeunesse est devenue une priorité. L’espace du Grand Marais concentre l’attention. Un terrain de 18 hectares sera réservé 1 - Nantes-Réalité, n° 11, Troisième trimestre 1966. 2 - Nantes-Réalité, n° 11, Troisième trimestre 1966.
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La Soucoupe, en 1965. Les travaux ont pris déjà du retard. (Photos P. Lemasson Le Moniteur municipal, 1965 Collection de l’auteur)
Saint-Nazaire
en 1915 et 1916 Marc Hélys Annotations de Loup
Nous vous présentons deux articles de Marc Hélys, femme de lettres nazairienne, parus dans la revue Le Correspondant, du 15 aout 1915, sous le titre « La Guerre vue d’un coin de province », à l’occasion de la Journée des Nazairiens au front et en captivité, et le 25 décembre 1916, pour débuter une série d’articles intitulés « À travers les provinces de France ». La Guerre, vue d’un coin de province
Embarquement, à la gare de SaintNazaire, des troupes anglaises pour le front. (© Ville de Saint-Nazaire)
L
a guerre n’a pas seulement changé la physionomie de Paris. Elle a aussi modifié celle de nos provinces ou, du moins, elle a provoqué, çà et là, un afflux inaccoutumé de vie morale et matérielle.
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Il est de très petites villes, insignifiantes hier, ignorées, ou presque dédaignées, qui sont devenues, du soir au lendemain, par leur situation géographique, des points importants du territoire français. Leur transformation dépasse même ce que des yeux étrangers en aperçoivent
tout d’abord. Un choc brutal a rompu le cercle étroit des préoccupations journalières. Par cette brèche, l’horizon s’est subitement élargi, et l’âme tranquille, peut-être un peu somnolente, de la petite ville s’est réveillée en sursaut, sous le coup de l’émotion, et tout étonnée de ne pas se reconnaître. C’est l’histoire de mon pays. Mon pays, Saint-Nazaire, sur les confins de la Bretagne et de la Vendée, ne possède ni l’âpreté pittoresque de la première ni la douceur verdoyante de la seconde. La nature s’est montrée particulièrement avare envers cette région plate et peu boisée. Entre Saint-Nazaire et la pointe du Croisic, où commence la vraie Bretagne, ce ne sont que des landes de bruyères et d’ajoncs, des champs de blé noir, des marais salants, et le long de la mer quelques bois de pins enveloppant de leur ombre chaude et aromatique les casinos et les villas des stations balnéaires de Le Pouliguen, La Baule, Pornichet. Du côté des terres, nous sommes voisins de la Grande Brière, immense plaine parsemée de hameaux et de clochers, où d’innombrables canaux tendent un filet d’argent. Ce sont les routes du pays sillonnées de barques plates. Riche pays. Les moissons faites, on y coupe la motte, sorte de tourbe qui se consume d’un feu lent et doux dans les âtres de nos campagnes. Saint-Nazaire, entre la Grande-Brière et les stations de bains, est, il faut le reconnaître, une laide petite ville. Elle est surtout, abominablement,
désespérément moderne. Il y a moins de soixante ans, elle n’était, à l’extrémité d’une langue de terre, qu’une toute petite bourgade de deux rues et de quelques « venelles » bordées de pignons. Une longue jetée de granit la prolongeait, accueillant les navires ; et sa vieille et vénérable église, toute déjetée, leur envoyait ses appels et ses bénédictions du haut de son clocher. On y vivait de la mer, de la pêche et des voyages. Les chefs des principales familles de ce temps-là étaient presque tous capitaines au long cours. Ils rapportaient de leurs croisières sur des côtes lointaines de l’argent, des cachemires, des épices, des aromates, des bibelots curieux. Leurs récits, qui exhalaient les parfums des îles, ouvraient aux jeunes imaginations les routes du monde ; et quelles autres routes aurait-on pu suivre hors de ce coin perdu, sinon les routes larges et mouvantes de la mer ? Et les garçons se faisaient marins ou missionnaires. Il y en eut de martyrisés en Chine1 ; et le Japon n’était pas plus tôt ouvert aux Européens, qu’un capitaine de Saint-Nazaire en rapportait des porcelaines et des laques. 1 - Marc Hélys affabule, il n’y a pas de Nazairiens entrés en religion qui furent martyrisés en Chine, et si à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle, plusieurs missionnaires ont embarqué depuis Saint-Nazaire en direction des Antilles, de l’Amérique du Sud, ou de Madagascar, ils provenaient de partout en France et ne finirent pas dramatiquement. La seule religieuse martyre catholique en Chine native de Loire-Atlantique est Anne-Françoise Moreau, en religion Sœur Marie de Saint Just, née le 9 avril 1866 à Rouans, décapitée au cours de la révolte des Boxers, le 9 juillet 1900, à Taiyuan, dans la province du Shanxi.
Carte imprimée reproduisant une aquarelle de Georges Eveillard, qui enseignait la peinture à SaintNazaire, faisant partie d’une série éditée à l’occasion de la Journée des Nazairiens au front et en captivité, figurant des tirailleurs, avec l’injonction « Y a bon ! », formule raciste, assimilée aux Sénégalais, et qui servit longtemps de slogan à la marque Banania. (Georges Éveillard Éditions Maison Chantreau et Cie, Nantes Collection particulière).
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Portrait de Marc Hélys, en costume de dame ottomane musulmane de haut rang. (© Musées-municipaux Rochefort -17)
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Marc Hélys
Femme de lettres nazairienne Loup1
Souper à İstanbul : la jeune femme, à ma gauche, me demande d’où je viens. Au nom de Saint-Nazaire, elle me répond : Comme Marc Hélys ! Dans tous les grands ports du monde, j’ai rencontré des gens qui savent situer SaintNazaire sur le globe, mais je suis resté, un instant, surpris qu’une Stanbouliote connaisse Marc Hélys, que les Nazairiens ont oublié.
M
a voisine a lu Kapali Bahçe, traduction turque de Le jardin fermé, Scènes de la vie féminine en Turquie, publié en 1908 en France, republié en Turquie en 2011. Comme toutes les filles de la bourgeoisie kémaliste, elle connait, de Pierre Loti, Les Désenchantées, publié en 1906 en France, en 1940 en Turquie, roman qui se voulait être le témoignage de la condition des femmes dans les harems à travers la correspondance de l’auteur avec une Turque, et que l’on considère, en Turquie, comme un pamphlet contre la société d’alors. Or, ce livre, Les Désenchantées, est né d’une supercherie, orchestrée par une Nazairienne dont fut victime Pierre Loti2 en 1904… 1
Marie-Hortense Héliard Marc Hélys, c’est d’abord Marie-Hortense Héliard, née le 2 juin 1864 à Saint-Nazaire, face au bassin, rue de Montoir, aujourd’hui disparue sous le Building. Elle était l’aînée de François Héliard (Granville, 26 juillet 1829 – Saint-Nazaire, 16 mars 1901), commandant à la Compagnie Générale Transatlantique, et de Marie-Philomène Laborde (Saint-Nazaire, 15 août 1836 - Saint-Nazaire, 2 mars 1918)3, sœur de monseigneur Laborde, évêque de Blois. Le couple eut pour autres enfants : 1 - Loup est l’auteur du blog Chroniques de Saint-Nazaire, consacré à l’histoire nazairienne : saint-nazaire.hautetfort. com. 2 - Pierre Loti, qui n’était pas encore un écrivain, séjourna à Saint-Nazaire en mars 1878, il écrivit notamment dans son journal intime à la date du 15 : « Longue promenade sur la plage du Porcet. […] Dévalisé les jardins pour remplir une caisse de camélias destinée à Sarah Bernhardt ». Une rue de la ville a été baptisée à son nom. 3 - Mariés, à Saint-Nazaire, le 8 juillet 1863.
2° Charles François Heliard, (Saint-Nazaire, 23 juin 1866 – Saint-Nazaire, 30 août 1884) ; 3° Paul-Marie (Saint-Nazaire, 17 mai 1868 Saint-Nazaire, 23 juillet 1868) ; 4° Marie Amélie (Saint-Nazaire, 23 août 1869 – Lorris, 6 décembre 1964) ; 5° Paul-Mari-Alphonse (Saint-Nazaire, 21 décembre 1870 – Berchères-les-Pierres, 16 janvier 1948), marié, le 4 décembre 1908, à Madeleine Marie Zuierkormski ; 6° Pauline Marie (Saint-Nazaire, 30 avril 1872 - Le Conquet, 11 décembre 1971), mariée, à Saint-Nazaire, le 5 septembre 1904, avec Jules-Alexandre Ruel (Choisy-Le-Roi, 6 décembre 1864 - Le Conquet, 22 février 1949), inspecteur principal adjoint des chemins de fer PO ; 7° Alphonse-Marie-Paul (Saint-Nazaire, 30 avril 1872 – Paris 7e, 18 octobre 1951), directeur de succursale de la banque Société Générale, marié, 1er avec Élise-Madeleine-Charlotte Tachard, (d’où postérité), 2e avec Yvonne-Louise-Amélie Mauplin. En 1870, la famille vivait au 34 de la rue Villes-Martin, (aujourd’hui avenue du Général de Gaulle). Leur caveau se trouve au cimetière de La Briandais. Si le père de Marie était Normand, et son grand-père, Charles Laborde, Basque, son arrière-grand-père maternel, Yves-Honoré Tartoué, né à Saint-Nazaire, le 3 décembre 1774, qui fut chargé du ravitaillement des troupes prussiennes cantonnées à Saint-Nazaire, du 12 septembre au 22 septembre 1815, était d’une très ancienne famille nazairienne. Marie, née dans une famille fortunée, appar tenait à ce « premier groupe » des trois qui com posait la société nazairienne. Elle reçut une éducation soignée, baignant dans le respect de la religion catholique. On lui enseigna l’anglais, l’espagnol et l’italien, et sa gouvernante sué doise lui apprit sa langue. Plus tard, elle apprit le polonais.
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Brefs souvenirs d’un ancien des chantiers navals nazairiens Raymond Rivalland Pages choisies et commentées par Daniel Sauvaget
Une lectrice nous en avait informé il y a quelque temps : son père, Raymond Rivalland, ancien ouvrier nazairien, avait écrit un livre de souvenirs, où il était, notamment, question de l’ancien Herbins, où vivait sa famille entre les deux guerres.
S
a description d’Herbins vers 1930 était connue, car reprise dans la pu blication de la Maison de quartier le Chantilly Voyage à travers l’espace-temps de Méan-Penhoët (parution : 1995) : les particularités de ce quartier peu dense y étaient chaleureusement décrites, confirmant ce qu’on avait pu penser à la lecture d’anciens plans montrant que ce quartier abritait bien en effet, entre la Matte (site de l’actuelle gare SNCF) et la Croix-Amisse, des maisons particulières, des granges, des petits ateliers et des écuries, car les chevaux étaient nombreux en ce temps-là. Il a fallu du temps pour trouver, grâce à un bouquiniste nazairien, un exemplaire de ce livre paru en 1988, que l’auteur, né à Saint-Nazaire en 1913, mais vivant alors en région parisi enne, avait probablement autofinancé avec l’apport éditorial des Éditions des Paludiers1. Quelques paragraphes du livre ont été repris par le Chantilly. La lecture de l’ouvrage montre que l’auteur, entre 1985 et 1988, devançait la mode de ce qu’on nomme « livre de vie ». Il évoquait en une soixantaine de pages des éléments personnels et professionnels, le contexte syndical et poli tique, et les conclusions que son expérience lui inspirait. S’agissant de l’ancien Saint-Nazaire, quelques pages méritent d’être reprises, éclai rant une forte personnalité, son militantisme, et témoignant d’anciennes conditions de vie et de travail.
Première page de couverture de l’ouvrage de Raymond Rivalland.
1 - Un exemplaire a pu être acquis après une patiente recherche sur les sites de vente de livres anciens – et c’est un bouquiniste nazairien qui disposait d’un petit lot de l’ouvrage probablement peu diffusé à l’époque de sa parution
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Herbins, faubourg de Saint-Nazaire À sa naissance, en 1913, son père, originaire de la Roche-Bernard, ne travaillait pas encore aux chantiers navals, mais dans les transports. Le père de Raymond Rivalland, était engagé dans l’action collective, il avait cofondé, peu avant la guerre de 1914, une coopérative de consommation nommée La Prolétarienne, dont le siège était situé selon l’auteur avenue de Penhoët, à l’emplacement d’une ancienne fonderie.
Syndicaliste apolitique, M. Rivalland père était aussi membre d’une « coopérative de production », La Fraternelle, qui travaillait au chargement et au déchargement des navires à quai. Des groupements qui exigeraient quelques informations complémentaires. La Prolétarienne, évoquée dans les travaux de l’historien des coopératives Robert Gautier, aurait disparu, selon Raymond Rivalland, du fait de la concurrence des autres coopératives nazairiennes. Auguste Rivalland, le père (1882-1958), participait aussi aux fêtes du quartier d’Herbins, comme le signalent les souvenirs rassemblés par le Chantilly, qui soulignent bien, avec une photo du Comité des fêtes de l’État libre d’Herbins, que le quartier pouvait être une destination de loisirs. « Cette rue d’Herbins s’appelait autrefois le ‘chemin noir’, appellation justifiée, car il n’y avait aucun réverbère et souvent, les soirs de paie, des ouvriers étaient agressés grâce à la nuit complice. Après maintes protestations des habitants, trois réverbères à gaz furent mis en place ; néanmoins, elle restait sombre. Dire qu’elle était peuplée serait exagéré ; elle faisait environ 400 mètres, mais il y avait beaucoup de terrains vagues où des gens du voyage s’installèrent et y restèrent. Autrement, les maisons étaient des maisons individuelles très coquettes avec un jardinet de fleurs. Dans leur majorité, elles étaient occupées par leurs propriétaires. La maison que nous habi tions en tant que locataires possédait un étage. Les propriétaires, M. et Mme Léauté étaient de braves gens […] Le loyer n’était pas très élevé et nous disposions d’un grand jardin, il y avait aussi un très grand étang où je me passionnais pour la pêche à la ligne. Plus tard, M. et Mme Léauté ouvrirent un commerce d’épicerie-buvette, très fréquenté par les gens du quartier ; il y avait aussi un jeu de boules et une tonnelle ».
Il y aura aussi le café-épicerie Lasquellec, siège du Comité des fêtes, et deux autres cafés, signes du rôle de ce petit quartier dans les loisirs nazairiens, comme un faubourg de grande ville.
L’entrée dans le monde du travail Raymond Rivalland avait hâte de quitter l’école, il n’a pas suivi les conseils du directeur, M. Oheix avant même le certificat d’études, qu’il passera tout de même à l’âge de quinze ans alors qu’il était au centre d’apprentissage de Penhoët. Entré à l’usine à treize ans, il sera muté deux ans plus tard de la tôlerie à l’atelier de serrurerie. « J’entre donc aux Chantiers de la Loire, où ma mère travaillait déjà comme magasinière à l’atelier de tôlerie. Je fus présenté au contre maître, puis à mes deux matelots (pour les non-initiés, ouvriers avec qui on travaille), deux Briérons, un poinçonneur, un aide puis moi, le mousse, nous formions une équipe. Nous fai sions des trous dans de grandes tôles servant à l’assemblage des éléments de navire, coque, pont, etc. La poinçonneuse était une machine hydraulique ; à chaque commandement du poinçonneur, j’actionnais une brimballe [une sorte de levier], nous faisions des milliers de trous dans une journée. Aussi je finissais ma journée complètement épuisé, mon bras droit me faisait horriblement souffrir et le lendemain il fallait remettre ça. Peu à peu, je m’habituais à ma vie de jeune prolétaire ; mon salaire était de 70 francs de l’époque par quinzaine. Aussi je fus tout fier d’offrir ma première paie à ma mère. » […] « Aux Chantiers de la Loire, on construisait le paquebot Félix Roussel pour le compte des messageries maritimes de Marseille.
Le paquebot Félix Roussel, construit aux Chantiers de la Loire, à Saint-Nazaire (lancé en 1929). (Éditeur : Messageries Maritimes)
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Nos champions cyclistes récemment disparus Paul Correc Au cours des derniers mois, trois grands champions cyclistes des années 50/60 ont disparu. Parmi ceux-ci, deux Nazairiens et un coureur, très populaire au niveau national, que l’on appelait, familièrement, Poupou, ou l’éternel second.
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Julien Bertho
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’est avec beaucoup de peine qu’en août dernier, les passionnés de cyclisme nazairiens apprenaient le décès de Julien Bertho, notre dernier grand champion cycliste nazairien des années 1950. Né à Saint-Nazaire en 1927, date de l’inauguration du vélodrome du Plessis, Julien Bertho, appelé aussi le « Grand Julien », s’était hissé très vite au premier plan des cyclistes régionaux dès 1946. Doté de grandes qualités de « rouleur », mais aussi de sprinter, il fut très vite remarqué par Paul Le Drogo, directeur sportif de la grande équipe professionnelle nantaise « Stella », laquelle comptait déjà dans ses rangs le grand champion breton : Louison Bobet, son frère Jean, mais aussi les Nantais Armand Audaire, Pierre Barbotin, ainsi que Pierre Molinéris, Jean Malléjac, Y Nédélec… Sélectionné en 1950 pour le Tour de l’Ouest, Julien terminait à la quatorzième place du classement général, après avoir énormément travaillé pour son leader L. Bobet. L’année suivante, il obtenait une superbe deuxième place lors d’une étape derrière le grand champion belge Rick Van Steenbergen, mais remportait surtout la dernière étape de ce tour 1951 à Rennes, en battant ses trois compagnons d’échappée au sprint.
Julien disputa encore de très nombreuses courses nationales et internationales, dont Paris-Roubaix, le Critérium national, le Grand Prix des Nations, le Tour du Maroc, ainsi que Paris-Tours, qu’il termina à deux reprises à la douzième place. En 1951, compte tenu des résultats obtenus par son coureur nazairien, Paul Le Drogo engageait ce dernier dans un grand omnium international sur piste au parc des Princes à Paris. Remportant cette fois encore l’épreuve devant de grands champions réputés tels l’Italien Bevilaqua, Yvon Marrec, André Darrigade..., Julien effectuait un tour d’honneur sous les acclamations du public parisien qui scandait son nom. Comprenant cependant rapidement que son avenir restait limité au rôle ingrat d’équipier dans ce milieu professionnel, il décida de redescendre en catégorie Indépendant en 1953 ; après avoir effectué un dernier Tour de l’Ouest. Engagé par l’équipe bretonne Roold, il courut encore quelques années puis se retira discrètement. Julien Bertho était un grand monsieur tout aussi charmant, qu’il était grand champion.
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Julien Bertho, vainqueur de la dernière étape, Saint-BrieucRennes, du Tour de l’Ouest 1951, entouré des coureurs de l’équipe Stella et de Paul Le Drogo, directeur sportif. (Collection Paul Correc)
Narcisse Pelletier à Saint-Nazaire Loup Narcisse Pelletier n’est pas un inconnu à Saint-Nazaire, et l’exposition qui lui est consacrée, jusqu’au 25 mai 2020, au Muséum d’histoire naturelle de Nantes, a ravivé l’intérêt qu’il suscite chez les Nazairiens1. 1 - Une autre exposition a lieu, actuellement, à Saint-Gilles-Croix-de-Vie, jusqu’en avril 2020.
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ourtant, à Saint-Nazaire, rien n’a été entrepris par la municipalité pour mettre en relief le fait que c’est en cette ville qu’il passa les dix-sept dernières années de sa vie et qu’il y est inhumé, alors que si vous allez vous promener à Saint-Gilles-Croix-de-Vie, commune qui l’a vu naitre, exposition permanente et signalétique touristique lui sont consacrées. Qui est donc ce Narcisse Pelletier inconnu de nos élus ? Nombre d’ouvrages ont été publiés, en français et en anglais, à son sujet, ainsi qu’un documentaire, réalisé par Serge Aillery ; nous nous bornerons ici à résumer son destin, et à raconter ses dernières années à Saint-Nazaire, passage généralement omis des biographes. Alphonse-Narcisse-Pierre Pelletier est né, le 1er janvier 1844, à Saint-Gilles-Croix-de-Vie, premier enfant de Martin-Hélier Pelletier, bottier, et d’Alphonsine-Hyppolite Babin, couturière, issue d’une famille de marins de Saint-Gilles. Le couple eut d’autres enfants, dont deux fils qui atteignirent l’âge adulte : Hélie, né en 1845 ; et Alfonse, né en 1854. À l’âge de 12 ans, sa scolarité étant terminée, il fut obligé de gagner sa vie, et débuta comme mousse à bord du sloop Eugénie, le 12 mai 1856, pour un premier voyage de cinq mois, alors que, comme nombre de marins d’alors, il ne savait pas nager. Débarqué à Luçon, il fut engagé à bord de La Reine des Mers, un navire mouillant à Bordeaux, en partance pour Trieste. À son bord il fut violenté et blessé au couteau, ce qui le fit quitter le bord, à Marseille, le 29 juillet 1857. Il embarqua sur le Saint-Paul, navire venant de Bordeaux à destination de Bombay, commandé par le capitaine Emmanuel Pinard, tenant du pirate et du marchand négrier. Le navire gagna Hong Kong, pour le compte d’une compagnie minière anglaise qui désirait transporter en Australie des ouvriers chinois. Durant l’embarquement de ces hommes, nommés péjorativement, dans la langue de Shakespeare, « coolies », l’équipage n’eut pas l’autorisation de descendre à terre. Les Chinois, au nombre de 317, furent entassés, comme des bêtes, en fond de cale et rationnés, au strict minimum, par Pinard, qui n’avait pas prévu de vivres en suffisance pour tout le monde. Le manque de nourriture et d’eau entraîna des ravitaillements, en saut de puce, entre des côtes habitées de populations qui n’avaient pas grand-chose à vendre. Un jour de brouillard, au large de l’île Rossel, à l’est de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, Pinard confondit une montagne avec un grain avançant au loin. Le Saint-Paul talonna un récif et coula rapidement. On jeta dans les chaloupes quelques vivres déjà gâtés
par l’eau de mer s’engouffrant dans la cale, et l’on gagna un îlot qui affleurait. De la côte de l’île voisine, des indigènes se signalèrent, causant la panique chez les naufragés qui redoutaient leur pratique d’anthropophagie1. Les indigènes se montrèrent, au départ, amicaux, apportant un peu de nourritures, mais, pour une raison inconnue, il y eut un affrontement, durant lequel Narcisse fut blessé à la tête par une pierre. Les marins français employèrent les armes et le peu de poudre qu’ils avaient pu sauver. Le capitaine Pinard décida de partir, avec son équipage, à bord de la chaloupe, en direction des voies de navigation ou d’une côte plus accueillante. L’embarquement se fit de nuit, sans prévenir, et c’est parce qu’il fut réveillé par le bruit des autres se levant que Narcisse et un mousse plus jeune, qu’il réveilla à son tour, purent fuir l’îlot, laissant les Chinois qui campaient plus loin, seuls, contraints de se nourrir de coquillages et de récolter l’eau de pluie2. Les marins français firent un voyage de douze jours à la rame, suivant les courants, en buvant leur urine faute d’eau potable, se partageant quelques boites de conserve. Débarqués au cap Direction, ils cherchèrent de l’eau potable. Après quatre jours d’errance et deux décès par épuisement, ils finirent par trouver de l’eau. Rués sur ce point minuscule, les marins ne laissèrent pas Narcisse s’en approcher, et quand ils le laissèrent enfin, la mare de quelques centimètres de profondeur, pour une circonférence de trois mètres, était à sec. Ils argumentèrent, en désignant un fin filet d’eau qui suintait, que Narcisse n’avait qu’à rester pour remplir son quart, qu’il pouvait rester se reposer là, et qu’ils reviendraient d’ici quelques heures le retrouver, après avoir exploré plus avant la côte. Narcisse resta là, bu ce qu’il put au bout de quelques heures, et s’endormit. Ayant fait provision de quelques fruits, il partit vers la plage où la chaloupe avait accosté. Il erra sur la côte en suivant des empreintes de pieds sur le sable. Des aborigènes de la tribu des Uutaalnganus le découvrirent. 1 - Encore pratiquée par certaines tribus, elle s’accomplit sur les sujets masculins, par des sujets masculins, qui sont guerriers ennemis, ou suspectés d’être habités par l’esprit d’un démon, nommé « Khakhua », responsable des accidents mortels que peuvent subir les gens de la tribu. Les femmes sont, en effet, exclues de la possession, et n’ont droit au régime anthropophage que dans le cas de consommation rituelle du cadavre d’un homme important de la tribu, acte rare, mais ayant la particularité de transmettre le kuru, forme humaine de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. 2 - Deux d’entre eux décédèrent de faim, et furent inhumés sous des coquilles. Au bout de quelques jours, les indigènes les forcèrent à se rendre sur l’île Rossel. Trois mois plus tard, six d’entre eux réussirent à fuir et à se faire sauver par un navire écossais, qui les vit se signaler sur la plage. Deux jours après ce sauvetage, Pinard arriva avec un navire pour récupérer ceux qui étaient, pour lui, une simple cargaison, dont il aurait le payement pour le transport qu’une fois en Australie. Un seul d’entre eux était encore vivant et put être sauvé à son tour.
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Page de gauche Narcisse Pelletier, photographie de Constant peigné, photographe nantais ayant succursale (rue de Nantes) à Saint-Nazaire. (Photo Joseph Constant Marie Peigné [1834-1916])
La visite de l’évêque Félix à l’ermitage besnéen de Friard Claude Thoméré Selon les chroniques de l’époque, l’évêque Félix de Nantes, plus tard sanctifié, visite un ermitage, perdu en Brière, près de Besné. Cette visite est hautement improbable, car l’évêque est un immense personnage – première autorité du diocèse et du comté – et celui qu’il visite, un inconnu, qui sera, aussi, sanctifié des suites de cette visite.
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Le 2 avril 573, à Besné
esné, en 573, n’est pas une paroisse, ni un bourg, ni peut-être un hameau, car il n’y a que très peu d’habitants là, très pauvres pour la plupart, quelle que soit par ailleurs leur origine. La Brière de ce temps-là est une immense étendue d’eau remplie par les marées que traverse un cours d’eau le Brivet en provenance de derrière le Sillon de Bretagne. À cette époque, les reclus et les ermitages ne manquent pas, mais la vie y est très dure et les religieux solitaires disparaissent souvent sans laisser de traces1. À la différence des solitaires volontaires des ermitages, il semblerait que Félix ait confié une mission d’évangélisation à une équipe de reli gieux, dont Friard, dirigée par un abbé tenté par la vie de reclus au désert. Cette mission connaitra plusieurs périodes mais elle se ter minera le jour où l’évêque de Nantes Félix, de l’illustre famille romaine des Nonnechii se rendra dans une île de la paroisse de Besné2 pour rencontrer Friard fébrile et mourant. Celui-ci l’avait attendu depuis un moment déjà, dans l’ermitage qu’il avait partagé avec Secondel. Félix devait d’ailleurs connaître Secundellus du diocèse de Nantes où celui-ci avait été diacre.
Statue de Grégoire 1 - Comme par exemple Saint Victor, de Campbon, à la de Tours. même période. (Jean Marcellin [1821-1884] Musée du Louvre Photo Jastrow - CC BY 3.0)
2 - Une tradition locale évoque la Haumonais comme le site de l’ermitage des deux solitaires, c’est possible, mais dans ce cas ce n’est pas exactement une île et il ne reste qu’une île véritable au nom proche de Vindunitta, Venet.
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Grégoire de Tours, le narrateur de l’histoire de Friard, est le supérieur hiérarchique de Félix en tant qu’archevêque de Tours ; Grégoire écrira une histoire des Francs, principal et seul outil pour inventorier cette époque troublée dévastée par les guerres dynastiques et les conflits religieux. Pour le reste, Grégoire vient du même milieu ultra-riche [comme Didier de Cahors, Rémi de Reims] que Félix, mais il reste cependant extrêmement critique par rapport à celui-ci.
Il avait aussi rencontré l’abbé Sabaudus lors des conciles d’Orléans. L’évêque Félix avait sans doute donné les autorisations pour la création d’un monastère sur le début de la basse Loire, peut-être à Cordemais 3. Cette initiative était dirigée par Sabaudus un abbé qui avait entre autres fréquenté la cour du roi des Francs, Clotaire. On supposera que Félix s’est déplacé à Besné, hameau minuscule avec une suite épiscopale. Félix et Friard ont longtemps parlé ensemble dans la cellule de ce dernier, nous rapporte l’archevêque de Tours, Grégoire. Grégoire a consacré une notice de la Vitae Patrum [vie des pères chapitre X] à la vie de Friard. Celui-ci mourra le lendemain matin, le détail de leurs échanges de cette nuit ne nous est pas parvenu. Friard dont on peut penser qu’il ne savait pas écrire ne nous a laissé aucune trace. On peut légitimement penser que Félix, descendant la Loire et remontant le Brivet en bateau a mis du temps à rejoindre Besné, ce dont Friard lui fera la remarque. Félix avait peut-être emmené avec lui un embaumeur. 3 - À une certaine distance de Nantes, selon les textes.
La chronique de Grégoire nous affirme en effet qu’il n’y avait pas l’odeur lourde (de la mort), mais c’est souvent un chapitre convenu de la vie des saints. Friard et Secondel seront canonisés très tôt par la ferveur populaire4. Leur culte sur place donnera lieu à un pèlerinage à Besné très fréquenté pendant des siècles. Ce pèlerinage ne disparaitra définitivement qu’avec la construc tion du calvaire de Pontchâteau. Il est fort possible que cette ferveur populaire ait débuté avant 573 et que ce soit à cette ferveur qu’on doive la visite de Félix peu habitué à passer dans toutes ces campagnes nantaises encore fort hostiles à la religion chrétienne. En effet pour les paysans de l’estuaire, la religion chré tienne était la religion officielle de Rome, la religion au nom de laquelle on tourmentait les nombreux hérétiques5, les révoltés des Ba gaudes, les esclaves échappés et les nouveaux arrivants du IIIe siècle et des siècles suivants commodément appelés « Saxons ».
Fontaine, érigée, au XVe siècle, 4 - Contrairement à Félix dont la sainteté discutable n’est à Besné, sur le site rapportée qu’au XIIe siècle dans une liste épiscopale semble-t-il ou vécurent Friard 5 - Les hérésies en ce qui nous concerne sont le pélagianisme et Secondel. et l’arianisme dont les contenus restent obscurs.
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(Photo Ph. Saget - CC BY 3.0)
Une famille morbihannaise dans la Grande Guerre Gilles Alain
Ils avaient quatre fils et deux gendres, en âge de combattre, au début du conflit, ainsi que dix petits-enfants. Restait encore à la maison une fille de quatorze ans. Pierre-Marie et Laurence-Marie ont vécu ces durs évènements.
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i l’on explique, souvent, le déclenchement de la Première Guerre mondiale par l’assassinat de l’archiduc autrichien, François-Ferdinand, par le nationaliste serbe Gavrillo Princip, à Sarajevo, le 28 juin 1914, les causes sont, en réalité, plus nombreuses et complexes. Elles tiennent au fort sentiment nationaliste qui agite l’Europe, depuis la fin du XlXe siècle, à la poussée économique allemande et aux jeux subtils des alliances diplomatiques.
En France, il n’est question que de revanche contre l’Allemagne, pour récupérer l’Alsace et la Lorraine, régions perdues lors de la guerre de 1871. Dans les empires austro-hongrois et ottoman déclinants, les différentes populations (hongroises, serbes, tchèques, etc...) revendiquent leur indépendance. Les Italiens réclament les terres irrédentes, majoritairement italophones, à l’empire austro-hongrois.
Photo de mariage de François, grand père de l’auteur, le 6 octobre 1919, à La Roche-Bernard. Au dernier rang, à droite, Eugène, frère du marié, amputé du bras gauche, au front, en mars 1916. (Collection Gilles Alain)
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L’archiduc François-Ferdinand, héritier de l’Empire austro-hongrois, et son épouse, Sophie, à Sarajevo, le 28 juin 1914, peu avant l’assassinat. (Photographe inconnu - humus.livejournal.com - CC0)
Nettoyage d’un boyau de communication inondé. Bois d’Hauzy (Marne) - 02/1916. (La Contemporaine Collection Albums Valois Licence ouverte)
En parallèle, depuis l’unification de l’Allemagne, en 1871, le pays a rattrapé son retard économique sur les grands États européens. Son industrie est particulièrement importante. Les dirigeants allemands veulent donc trouver de nouveaux débouchés pour leurs produits et obtenir des matières premières à moindre coût. C’est ainsi qu’ils lorgnent sur l’Afrique, chasse gardée française et anglaise. Par deux fois, l’empereur Guillaume II tente de prendre le Maroc à la France, en 1905 et en 1912, provoquant des conflits diplomatiques de plus en plus graves.
Le 28 juin 1914, l’assassinat de l’archiduc héritier d’Autriche-Hongrie met le feu aux poudres. Le 28 juillet, l’Autriche-Hongrie déclare une « guerre préventive » à la Serbie, qu’elle accuse de crime. L’Europe bascule alors dans le conflit par le jeu des alliances. Le décret de mobilisation générale, du 1er août 1914, permettant de mettre l’armée et la marine française sur le pied de guerre, rappelait, par le fait, sous les drapeaux, tous les Français aptes au service militaire. En 1914, l’armée française comptait 880 000 hommes. La mobilisation, en comptant les réservistes, doit porter le nombre à 3 580 000 hommes.
Une famille de Marzan dans la guerre… Pierre-Marie et son épouse, Laurence-Marie (mes arrière-grands-parents), parents de quatre fils et trois filles, se trouvent être concernés comme nombre de famille dans le pays. C’est ainsi que trois de leurs fils seront mobilisés et partiront vers le front. Le fils aîné, né le 7 octobre 1876, père de famille de trois enfants, sera maintenu en sursis d’appel. Le deuxième fils, né le 30 août 1880, avait 34 ans et était père de famille de deux enfants. Le troisième fils (mon grand-père), né le 6 mai 1890, avait 24 ans, était célibataire, tout comme le quatrième fils, né le 11 mai 1893, qui avait 21 ans. Au début du conflit, Pierre-Marie, âgé de 63 ans, avait donc trois fils de partis, un qui était maintenu en sursis, et, probablement, ses deux gendres partis également. Il n’y avait pas moins de dix petits enfants à nourrir.J’ajouterai que Pierre-Marie avait une fille, qui n’avait que 14 ans à la même époque. Cette situation peut laisser à penser que le fils aîné était resté travailler, afin de subvenir aux besoins de toute la famille.
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La Commission Bignon 1793-1794
Un complément à : « Savenay - 23 décembre 1793 » (Histoire & Patrimoine n° 92)
Bernard Tabary
Je ne vais pas raconter de nouveau la bataille de Savenay. C’est fait. Par contre, je désire revenir un peu sur la commission militaire Bignon – ses origines, ses attributions, la légalité ou l’illégalité de ses décisions – puis je la montrerai dans une nouvelle situation, en avril 1794 où elle agira de façon encore plus contestable, carrément inadmissible. Le point de départ
Commentaire
out commence le 19 mars 1793 : la levée des 300 000 hommes, pour faire la guerre aux frontières, se passe mal. Les rassemblements de tirage au sort sont prétextes à récriminations, à bagarres, à émeutes. La Convention, qui cumule pouvoir législatif et exécutif (et même judiciaire, puisqu’elle a jugé et condamné le roi), publie alors, dans la hâte, le décret qui suit, proposé par le citoyen représentant Cambacérès : « Ceux qui sont ou seront prévenus d’avoir pris part aux révoltes ou émeutes contre-révolutionnaires (…), ceux qui auront pris ou prendront la cocarde blanche ou toute autre figure de rébellion ne peuvent profiter des dispositions des lois concernant la procédure criminelle et l’institution des jurés. » « S’ils sont pris ou arrêtés les armes à la main, ils seront dans les vingt-quatre heures livrés à l’exécuteur des jugements criminels et mis à mort après que le fait aura été reconnu par une commission militaire formée par les officiers de chaque division employée contre les révoltés. Chaque commission sera composée de cinq personnes prises dans les différents grades de la division soldée ou non soldée... »
1. Cela signifie que tout homme pris, pendant une manifestation, les armes à la main, sera automatiquement condamné à mort et exécuté, la commission militaire ne servant qu’à entériner cette condamnation et cette exécution. 2. C’est la porte grande ouverte à des massa cres de masse. Une telle prise de position est extrêmement étonnante, de la part de Robespierre et Saint-Just, deux des ténors montagnards, qui ont été, jusqu’à la Convention, des adversaires militants et acharnés de la peine de mort. Quelle mouche les a donc piqués ? 3. Au même moment, la Convention est en train de préparer une nouvelle constitution – qui sera votée le 23 juin de cette année 1793 – où on trouve un extraordinaire Article n° 35 « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. » La contradiction est absolue entre cet article 35 et le décret du 19 mars.
T Page de droite Fusillades de Nantes, 1793. Aquarelle réalisée par un témoin. (Aquarelle de E. Béricourt [17..-18..] BNF - CC0)
Portrait de Georges Jacques Danton (1759-1794). (Auteur inconn Musée Carnavalet - CC0)
Étrange logique – schizophrène – de la Convention !
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Correction
Qui est coupable ?
Le 10 mai (près de deux mois plus tard), à la tribune, le conventionnel Danton s’inquiète de la virulence du décret du 19 mars : « Il y a, parmi les révoltés des hommes qui ne sont qu’égarés et contraints. Il ne faut pas les réduire au désespoir. Je demande qu’on décrète que les peines rigoureuses prononcées par la Convention Nationale ne porteront que sur ceux qui seront convaincus d’avoir commencé ou propagé la révolte. » Dans la foulée, la Convention produit le décret suivant : « La Convention décrète que les chefs et instigateurs seront seuls sujets à la peine portée par le décret du 19 mars contre les rebelles. » Un autre décret du 5 juillet viendra confirmer celui du 10 mai. Est-ce le retour à une certaine modération ? Non ! Trop tard ! La Convention est devenue un chaudron bouillant dans lequel on règle à mort des comptes entre montagnards et girondins. Les Envoyés en Mission à Marseille, Toulon, Lyon, Nantes, etc. sont des bourreaux féroces et impitoyables. La guillotine fonctionne à plein régime. Le terme « brigand », employé systématiquement pour parler des Vendéens, sent la poudre et le sang : on veut les exterminer. La Terreur (avec majuscule) est à l’ordre du jour. Le décret appliqué – dans toute son horreur – sera le premier, celui du 19 mars. Les autres seront systématiquement « oubliés » comme s’ils n’avaient jamais existé.
En premier lieu, la Convention Nationale. C’est elle qui a rédigé, voté et publié le décret du 19 mars, voté puis « oublié » ses propres corrections. Elle est prise d’une folie meurtrière. Ce n’est pas acceptable. C’est inique.
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La Tour Rochereau
Une curiosité sur la Côte Sauvage Paul Correc Il est évident qu’aujourd’hui, mis à part un certain nombre de personnes ayant connu Le Pouliguen avant la guerre de 1939/1945, lorsque l’on évoque l’existence d’une haute tour métallique sur la « Côte Sauvage », peu de Pouliguennais sédentaires, et plus assurément encore s’ils ne sont que vacanciers, savent ce qu’était cette tour.
La Tour Rochereau, sur la Côte Sauvage du Pouliguen, au début du XXe siècle. (Éditeur LL)
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I
l faut remonter à cette grande exposition nationale de 1895 d’Angers, au cours de laquelle un millier d’exposants : Industriels, artisans, artistes, agriculteurs… montrèrent leur savoir-faire et leurs spécialités, pour en expliciter son existence.
L’attraction de l’Exposition nationale de 1895, à Angers
En effet, parmi la grande diversité des œuvres exposées, une tour en fer, de 20 m de haut, construite par un certain artisan serrurier : Louis-René-Rochereau, dominait l’exposition. Installée dans le Jardin du Mail de la ville après avoir été rehaussée de 10 m, celle-ci permettait ainsi au public accédant à la passerelle située en son sommet, d’avoir une vue imprenable sur l’ensemble de l’exposition, mais aussi de découvrir la ville d’Angers tout entière. Élevée par son constructeur lui-même en deux mois, le gigantesque mécano d’éléments de fers divers, uniquement boulonnés, prit de la hauteur chaque jour puis, le 11 mai 1895, inaugurée par Monsieur Édouard Cointreau1, Président du comité de la presse, la tour était baptisée du nom de son créateur : Rochereau2. L’érection de cette tour à Angers lors de la grande exposition nationale en 1895, fût un immense succès ; lequel fera dire à la presse : « Du haut de la première plateforme, c’est Angers avec son panorama de monuments et de maisons. À la seconde plateforme, le panorama s’élargit : Épinard, Écouflant, Villevêque, la Pyramide et bien d’autres localités apparaissent, faisant une ceinture de verdure à la ville. À la troisième, le coup d’œil est vraiment merveilleux : la Maine, la Sarthe, la Mayenne sillonnent de rubans d’argent la ville et les campagnes3 ». Le lendemain de l’inauguration, le public se pressa au pied de la tour après que M. le Maire en eut fait l’éloge, félicitant, comme il se devait , son créateur/constructeur. Le soir, diverses activités furent présentées au public et des essais d’éclairage électrique furent effectués avec succès, puis on y sonna la retraite aux flambeaux, au son du clairon.
1 - Je me souviens du superbe yacht de la famille Cointreau, le Mireillo II , qui faisait régulièrement escale dans le port du Pouliguen dans les années 50, et enchantait les jeunes enfants que nous étions alors. 2 - Dans son livre sur Le Pouliguen : Au pays des Korrigans des Éditions Jean-Marie Pierre, l’auteur indique étrangement que cette tour effectivement construite pour l’exposition d’Angers de 1895, avait été achetée par un certain monsieur Rochereau et réédifiée à Pierre-Plate. 3 - Arch. municipales d’Angers.
Louis-René Rochereau On sait peu de chose de Louis-René Rochereau. Artisan serrurier de son état, mais ne faisant pas partie des entreprises de serrurerie et de constructions métalliques les plus connues d’Angers, c’est cependant lui dit-on, qui eut l’idée extraordinaire de construire cette tour ; afin de montrer ce dont son entreprise était capable. Un doute subsiste pourtant encore aujourd’hui : L-R Rochereau était-il simplement le constructeur de cette tour, ou en était-il, aussi, l’inventeur ? Un quotidien de l’époque précisait par ailleurs, que L-R. Rochereau avait réalisé cette structure pour le compte d’un important négociant de fers, M. Thuau, dont l’entreprise avait été créée au XVIIIe siècle.
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La Tour Rochereau d’origine, à l’Exposition nationale d’Angers, en 1895. (Archives municipales Ville d’Angers Tour Rochereau 9 Fi 13098)
29 mars 1789
Une journée particulière…
à Assérac, Mesquer, Piriac, Saint-Molf Jocelyne Le Borgne Le 29 mars 1789, « après la grand-messe, après le son de la cloche », s’est tenue, dans la sacristie de Notre-Dame-La-Blanche, une assemblée de la Généralité de Mesquer, chargée de nommer trois « députés auprès de l’assemblée générale des paroisses du ressort en la ville de Guérande1 ».
L
e même jour, de semblables réu nions eurent lieu dans les églises ou sacristies de Piriac, Saint-Molf, paroisses limitrophes de Mesquer ainsi qu’à Assérac, situé de l’autre côté de l’étier de Pont-d’armes. 1
Retour en arrière… L’édit royal du 24 janvier 1789 contenant le « Règlement des États généraux » s’adressait aux trois ordres : Église, Noblesse et Tiersétat et comportait cinquante et un articles. Une lettre du roi accompagnait ce document, Louis XVI s’y déclarait soucieux de surmonter « toutes les difficultés où nous nous trouvons relativement à l’état de nos finances » et indiquait clairement sa volonté de mettre en place « un ordre constant et invariable dans toutes les parties du gouvernement qui intéressent le bonheur de nos sujets et la prospérité de notre royaume ». L’article XXV du « Règlement des États généraux » prévoyait la marche à suivre dans « les paroisses et communautés, les bourgs ainsi que les villes non comprises dans l’état annexé au présent règlement ». Bien entendu, les paroisses d’Assérac, Mesquer, Piriac et Saint-Molf étaient concernées par cet article qui invitait « tous les habitans composant le tiers-état, nés français ou naturalisés, âgés de vingt-cinq ans, domiciliés et compris au rôle des impositions » à se réunir « dans le lieu ordinaire des assemblées et devant le juge du lieu ou en son absence devant tout autre officier public » pour « concourir à la rédaction des cahiers et à la nomination des députés ». 1 - ADLA C 576 Cahiers de doléances, plaintes et remontrances de Saint Molf. 1789.
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Généralité ou généraux ? Les vocables généralité ou généraux apparaissent, à plusieurs reprises, dans cet article, il est donc indispensable de rappeler ce qu’ils recouvrent. La généralité désignait en Bretagne, l’ensemble des paroissiens. Au XIVe siècle, le gouvernement ducal avait chargé les généraux de paroisse, nommés à la tête des généralités, de la répartition et perception des impôts (fouages). Confronté aux abus de tous ordres, le parlement de Bretagne fixa, au XVIIe siècle, la composition de ces généraux et définit leurs fonctions et attributions par une série d’arrêtés. À Mesquer, « le général était un corps de douze délibérants… [qui] inscrivaient les délibérations sur des registres… » écrivait, en 1910, Georges Tattevin2. Ces registres de délibérations tenus par les généraux sont différents des registres paroissiaux (BMS) que tiennent les prêtres qui consignent les actes de Baptêmes-Mariages-Sépultures. Georges Tattevin estimait les registres de délibérations des généraux « très précieux pour l’histoire d’une paroisse » et regrettait de n’avoir pu consulter ceux de Mesquer lors la rédaction de sa « Monographie », puisqu’ils avaient déjà disparu des archives de « Notre Dame la Blanche » !
Convergences et divergences d’interprétation… Si les généralités des quatre paroisses ont bien reçu la même notification par ordonnance « de la part de mr le procureur du roy, de guerrande et de mr le Senechal du dit lieu en 2 - « Monographie de Mesquer » : manuscrit déposé à la bibliothèque des « Amis de Guérande ».
teste de laquelle sont… une lettre du roy notre sire et un règlement du 26 janvier dernier et un autre réglement du jour 16 du courant… », force est de constater que les recommandations furent différemment interprétées et suivies d’une paroisse à l’autre. Le compte-rendu de l’assemblée de Saint-Molf comporte huit feuillets, quatre à Assérac, trois à Piriac et un seul, à Mesquer, tous les feuillets
étant au même format. Le nombre des participants présents aux assemblées diffère également d’une paroisse à l’autre, ils sont quarante-six « et autres » Asséracois, vingt et « autres » Mendulphins, seize Piriacais et seulement quinze Mesquérais ; pour mémoire, vers 1790, l’estimation de la population était de 1 349 personnes à Assérac, 1 235 à Mesquer, 1 054 à Piriac et 1 047 à Saint-Molf !
Notre Dame la Blanche : dessin publié dans Le Messager de Mesquer. (Henri Guetté (HG) - 1960)
Plan extrait de la Monographie de Mesquer. (Texte et dessin de Georges Tattevin - 1910)
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Journal d’un aumônier breton - 1850 - 27 partie e
Christiane Marchocki Nous partageons avec cet aumônier, non seulement un siècle révolu, avec son savoir, son raisonnement, sa mentalité, mais aussi le monde maritime. Celuici a toujours été particulier. C’est un monde fermé, dans un environnement propice au concept de l’infini.
C
e monde a ses lois propres, son mode de vie, encore de nos jours. Il est presque inaccessible aux profanes, il se vit dans un élément mouvant et incontrôlable, c’est celui de la mer. Dans ce texte, nous sommes à bord de l’un des derniers grands voiliers, bien que celui-ci soit mixte avec ses roues à aubes. Reprenons cette journée du 17 décembre 1850. La rigueur de l’étiquette navale, à laquelle sont fidèles et sensibles les hommes de la mer, peut être cause de problèmes diplomatiques. Au large, les pensées sont bien différentes.
17 décembre 1850 Nous voilà partis de Sierra Leone. Notre dernière étape avant d’arriver à Gorée. Ce pays que je méprisais, si profondément, à mon arrivée de France, et où je retourne, aujourd’hui avec tant de plaisir : un petit malentendu entre notre commandant et le gouverneur de Sierra Leone, a épargné, au moins, quatre à cinq jours de plus sur rade et je ne sais combien de dîners, ce qui est plus terrible encore. Le commandant de la station française, avait été, jusqu’ici assimilé, pour les honneurs, aux contre-amiraux. On avait tiré 15 ou 13 ou au moins 11 coups de canon à leur arrivée sur rade.
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Plage à Freetown, Sierra Leone. En arrière-plan, les montagnes du Lion/Péninsule de Freetown. (Photo Erik Cleves Kristensen – CC BY 2.0)
Vue de l’entrée de la rivière de Sierra-Leone. (Nicolas Ozanne [1728–1811] - BNF - CC0)
Quand ils descendaient faire leur première visite au gouverneur, une garde d’honneur les attendait pour les y accompagner. Cette fois-ci, je ne sais ni comment ni pourquoi, neuf coups de canon seulement, et pas un homme de garde. Le commandant l’eut-il d’ailleurs personnellement méprisé, il ne le pouvait, à cause de son pavillon ne pas s’en apercevoir. La colonie avait dû le remarquer. Qu’y a-t-il de plus public que le coup de canon ? Le consul se base sur les règlements internationaux pour les honneurs à rendre. Il voulait faire de cet incident le sujet d’une correspondance officielle avec le gouverneur. Le commandant l’a prié de n’en rien faire. Le lendemain, quand le gouverneur est venu lui rendre sa visite, il lui a annoncé qu’il ne pouvait pas dîner chez lui, comme il le lui avait promis, obligé qu’il était de précipiter son départ. Le gouverneur n’a pas été dupe. Comme il y avait eu déjà quelques pourparlers entre les officiers des deux nations, il a connu le motif du mécontentement et on a écrit au commandant qui a parfaitement accepté son excuse, mais heureusement n’a pas différé son départ annoncé trop publiquement. Nous avons eu deux coups de canon de plus quand nous avons levé l’ancre. L’incident est terminé et nous aurons nos lettres quatre jours plus tôt. Dieu soit loué !
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18 décembre 1850 Nous naviguons à la vapeur depuis hier midi, filant de six à sept nœuds. La température s’est abaissée. Nous avons le vent contraire et la brise est ainsi augmentée de toute la vitesse de notre marche. L’horizon est chargé, non pas de vapeur, mais d’un sable très fin apporté du désert. Nous n’avons plus cette humidité qui détend les ressorts physiques et moraux. C’est une sécheresse, une aridité irritante dont les habitants de la côte doivent bien souffrir, puisque nous, à une si grande distance sur la mer, nous nous en apercevons encore. Cela avait commencé avant notre départ de Sierra Leone, les habitants s’en plaignaient et redoutaient les fièvres qu’ordinairement il apporte ou développe.
19 décembre 1850 Nous sommes toujours à la vapeur avec un vent contraire jusqu’à Gorée où nous arriverons dimanche, si notre marche ne se ralentit pas. La mer est magnifique. Nous glissons doucement sur elle, sans roulis ni tangage, sans que le bâtiment éprouve autre chose que cette trépidation de vapeur à laquelle je suis maintenant tout à fait habitué. Ce n’est certainement pas ce mouvement qui a pu
L’HISTOIRE & L’IMAGINAIRE
César était malade... Gérard Olivaud
À Guérande, juste après le lycée La Mennais, sur la droite, à flanc de coteau, il existe un chemin de terre, que connaissent bien les propriétaires de chiens, désireux de donner un peu d’exercice à leur animal. C’est à cet endroit qu’est née l’idée de cette nouvelle. De là, on a vue sur les marais salants, les clochers de Batz et du Croisic et il n’est pas difficile de rêver à cette période passée, quand la mer se faufilait jusqu’à toucher les actuels villages paludiers, quand, de Congor, peut-être, ou des alentours de Maison Brulées, partaient ou arrivaient de longues embarcations celtes, remplies de trésors terrestres ou humains.
L Vue sur les marais, prise au bas du coteau de Guérande, avec, au fond, Batz-sur-Mer. (Photo Roland Chevillard)
’ombre des Vénètes et celle de Jules César ont plané, depuis le siècle dernier surtout, dans la Presqu’île. De nombreux érudits auraient bien voulu y voir l’emplacement du mythique affrontement entre la flotte de Crassus et celle des Vénètes en 56 av. J.-C. De nos jours, les historiens la situent plus au nord, entre l’actuel golfe du Morbihan et l’embouchure de la Vilaine, mais après tout, Guérande n’en est pas si éloignée. Il y a quelques années, un ami m’avait demandé de lui retrouver un texte de Strabon, l’historien géographe, natif d’Amasée en Asie Mineure, un Grec donc, qui avait écrit sur la Gaule et sur une île, au large de l’embouchure de La Loire,
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habitée uniquement par un mystérieux collège de femmes, prêtresses de Dionysos. Le traducteur dans une note de bas de page proposait de la situer dans l’actuelle île Dumet. J’ai réussi à m’y rendre, histoire de m’imprégner des lieux, pour m’entendre dire le lendemain par une habitante de Batz-sur-Mer, Madame Prigent, qu’il était plus probable qu’il s’agisse de l’île de Batz, car Batz-sur-Mer, à cette période, était une île. D’ailleurs, des traditions anciennes semblaient confirmer le texte de Strabon. J’avais le lieu, les personnages. Il suffisait de faire se rejoindre, pour une raison qu’il me fallait trouver, le grand Jules et ces femmes thérapeutes et possédées, en certaines circonstances, de la fureur bachique.
Buste, en marbre, de Jules César. (Sculpteur inconnu Musée archéologique national de Naples Photo Andreas Wahra - CC0)
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À LIVRE OUVERT
Une Riviera bretonne
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epuis des dizaines d’années Jean-Bernard Vighetti étudie le tourisme dans la presqu’ile et la région nazairienne, analysant les évènements-clés et les modalités spécifiques de ce secteur économique devenu indispensable, les conséquences urbanistiques et architecturales de la densifica tion, les perspectives d’avenir. Professionnellement, il a multiplié les interventions de terrain dans d’autres secteurs géographiques, en particulier dans le pays de Redon, jusqu’à la création de manifestations culturelles en Bretagne, mais il n’a jamais abandonné le terrain de ses premières recherches. C’est ainsi qu’il a publié successivement plusieurs ouvrages de référence sur la Côte d’Amour : quatre volumes aux Éditions des Paludiers en 1970-1975, puis un re tour sur le sujet aux Éditions Siloë en 2003. Des ouvrages aujourd’hui introuvables sauf en bibliothèque et (rarement) sur les sites de vente de livres anciens – d’où l’intérêt de ce nouveau livre, synthèse de tout un savoir acquis, vérifié et complété au fil des ans, et problématisé avec un œil neuf.
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littoral, elle s’étend aux décisions devenues indispensables à cette économie régionale, la diversification des activités, la vigilance à l’égard des sites naturels, la valorisation d’un patrimoine régional à préserver. C’est à l’Institut de géographie de l’Université de Nantes que l’auteur, ancien élève d’Aristide Briand à Saint-Nazaire, a effectué ses premiers travaux sur la Côte d’Amour. Il s’est orienté ensuite, non vers l’enseignement, mais vers le terrain des études et pratiques de l’aménagement du territoire et de l’animation culturelle, depuis ses premières interventions comme chargé de mi ssion dans le pays de Redon, un territoire rural affecté par l’exode Voici donc la mise à jour dont l’auteur a ressenti la nécessité, mais aussi la redéfinition de problématiques intéressant toute la presqu’île, ville de Saint-Nazaire comprise. D’où, en bref, ce nouvel ouvrage très bien découpé et illustré, où la précision des références archivistiques et le suivi des transformations des sites alimentent une analyse et un questionnement permanent. Toutes les étapes du développement touristique y sont décrites et hiérarchisées conformément aux grandes lignes des ouvrages précédents : les premiers bains de mer qui ont précédé l’arrivée du chemin de fer sur un territoire agraire en déclin (dunes, élevage ovin, anciens marais salants) ; les effets de mode (« l’alliance du romantisme et de la médecine » écrit-il) qui ont profité tout d’abord au Croisic ; l’aménagement des dunes d’Escoublac après la phase d’ensevelissement ; le prestige du Pouliguen et les premiers grands investisseurs ; le rôle moteur de Saint-Marguerite dans le développement de Pornichet ; les timides débuts du nord de la presqu’ile, de Saint-Marc et Saint-Nazaire… L’auteur décrit l’avènement de l’automobile, la crise de 1931, les incertitudes de l’après-guerre, et leurs effets. Sa réflexion ne porte pas que sur l’histoire du tourisme de notre
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rural réparti sur trois départements. Promoteur de nombreuses activités, il est devenu maire de la commune de Peillac (de 1989 à 2014 – cf. OuestFrance du 11 mars 2014) et, entre autres, président du Conseil culturel de Bretagne, puis secrétaire du Comité régional au tourisme.
Daniel Sauvaget
Une Riviera bretonne Saint-Nazaire, La Baule et la presqu’ile guérandaise
Jean-Bernard Vighetti Éditions Coop-Breizh, 2019 237 pages - 27 €
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Le breton
À LIVRE OUVERT
langue des mères, langue des frères
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ne langue dite « vivante » est une langue parlée par toute une société. Écrite, elle survivra dans les mémoires lorsque l’oral aura disparu. On la dénommera alors « langue morte ». Seuls, certains initiés l’apprécieront. Tout près de nous, le breton a failli s’éteindre tout à fait. En octobre 2019, Marie-Thé Legendre, issue des universités de Rennes et de Brest, section sociologie, lui a consacré un ouvrage intitulé : « Le breton, langue des mères, langue des frères ». Ellemême l’a étudié en 2013. Au sein de certaines familles on le parle encore couramment, le transmettant à la génération suivante. Marie-Thé Legendre a enquêté. Pourquoi cette pratique dans ces lignées et pas chez d’autres ? Elle a relevé les points communs, cherchant à en extraire la raison, une logique peut-être ? Une conclusion ? Souvenons-nous qu’en cas d’invasions, de brassages de populations, le meilleur moyen pour détruire une civilisation est de commencer par en éliminer, voir en interdire la langue. Avec sa disparition, c’est une forme de pensée qui meurt. Une cohésion qui n’existe plus entre personnes de même culture. C’est l’oubli. Cet ouvrage, rédigé par Marie-Thé Legendre, est construit autour d’un plan rigoureux. C’est un texte passionnant qui tient de la démonstration, étayé par des exemples empruntés à une enquête. Elle cite les références et les études dont elle se réclame. Le lecteur y complète certains rudiments qu’il possédait. Surgissent alors des recoupements avec des récits ou des réflexions entendues chez les anciens pendant l’enfance. Il apparait que les femmes se sont adaptées à la langue française plus rapidement que les hommes, qui eux, ont conservé le breton, restant ainsi bilingues. L’auteur, Marie-Thé Legendre, aborde cet aspect sous toutes ses formes, elle en recherche les raisons. En conclusion, aucune
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n’est dominante. Cette étude approfondie est riche d’enseignements. On peut s’arrêter sur le fait qu’un statut social supérieur est accessible grâce au changement de langue. La raison serait alors économique. Il est notable que certaines personnes, hommes ou femmes, font preuve de curiosité d’esprit, plus que d’autres, ce qui facilite l’apprentissage de façon ponctuelle. Ce livre original touche toute famille d’origine bretonne. Il étend le sujet en dépassant les frontières et les
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époques, tant il est vrai que les langues et l’Histoire se rejoignent et que la nature humaine se retrouve partout la même.
Christiane Marchocki
Le breton
Langue des mères Langue des frères
Marie-Thé Legendre Éditions Yoran Embanner 143 pages - 13 €
Sortie, à la demi-journée, du vendredi 18 octobre 2019
Bernard Tabary Nous sommes une petite trentaine à braver le ciel menaçant, et à emprunter le pont de Saint-Nazaire, pour pénétrer, sud Loire, dans le Pays de Rais/Retz. Nous allons à la découverte de l’un des fleurons de ce Pays : le château de Machecoul.
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as facile à trouver, ce château. C’est qu’il n’en reste pas grand-chose – une ruine, … mais une ruine remarquable – et qu’il se trouve aujourd’hui dans un grand parc ceinturé d’un long mur. C’est le propriétaire, M. de Grandmaison, qui nous accueille, tout sourire. Ni historien ni architecte – sa spécialité,
c’était la mécanique ! Propriétaire par héritage (le château appartient à sa famille depuis le début du XXe siècle), il aurait pu s’en désintéresser tout simplement, ce qui lui aurait évité beaucoup de soucis et de frais. Mais, au contraire, il s’est passionné pour son « bébé » et son enthousiaste est communicatif.
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SORTIES CULTURELLES
Machecoul, fief des seigneurs de Retz
Une vue des ruines du château de Machecoul et de ses douves. (Photo Geneviève Terrien)
Rien n’est simple, pourtant. Manque le nerf de la guerre : l’argent. Le château, même en ruine, est un « monument historique » répertorié : rien ne peut s’y faire – réparations, mise en valeur, recherches dans le sous-sol... – sans l’aval des Monuments de France. Administration…, paperasses..., interdiction de ceci…, interdiction de cela…, pas beaucoup de subventions, d’autant plus que le château est privé. Bref, le propriétaire rame – avec le sourire quand même, un peu jaune…
Visite virtuelle
Le groupe de l’APHRN, devant le donjon, lors de la visite des ruines, sous la conduite du propriétaire des lieux, Bernard de Grandmaison. (Photo Bernard Tabary)
La première partie de la visite se passe dans une sorte de grange, devant un écran. Et on apprend que dès l’époque romaine, le site se trouvait sur l’une des voies maritimes d’accès à Nantes – par le fleuve Falleron (fleuve, parce qu’il se jette dans l’océan) et le Tenu, qui se jette, lui, dans la Loire, après être devenu l’Acheneau. Un premier château a été construit au XIe siècle pour surveiller le trafic (péage !), bientôt remplacé par l’actuel au XIII e siècle. Celui-ci va vite grandir, complété au XVIIe siècle par des fortifications de type
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vauban. C’est une énorme forteresse des marches (bordures) de Bretagne, comme Montaigu, Clisson et Tiffauges au sud – ou Châteaubriant, Vitré et Fougères à l’ouest. Son occupant le plus célèbre est évidemment Gilles de Rais/Retz (1405-1440), l’un des compagnons de Jeanne d’Arc, maréchal de France (ce n’est pas rien), propriétaire de multiples domaines et châteaux, très dépensier, très dissipé – et très jalousé, inévitablement. Rien de tel, pour s’en débarrasser, qu’un bon petit procès en sorcellerie ; à l’époque, c’est imparable (ce le sera encore deux siècles plus tard, à Paris, lors de la prise de pouvoir par Louis XIII). M. de Grandmaison, qui n’est pas historien mais qui s’est évidemment intéressé de près à la question (le château est son bébé) et qui a du bon sens, fait remarquer que le très célèbre procès (on dirait aujourd’hui médiatique) de Gilles de Rais/Retz était politico-religieux ou religioso-politique (bonnet blanc et blanc bonnet), c’est-à-dire qu’il faut le prendre avec beaucoup de précautions. Gilles de Rais/Retz n’était certes pas un perdreau de l’année ; mais il n’était pas non plus l’archétype du pédophile (jusqu’à
600 victimes déclarées). En haut-lieu (dans l’aristocratie et même au palais royal), Gilles de Rais gênait. On désirait ardemment s’en débarrasser. Qui veut la fin veut les moyens – la fin justifie les moyens – qui veut noyer son chien l’accuse de la rage... Il existe des termes qui, à cette époque-là, sont d’une efficacité absolue dans un acte d’accusation : pacte avec le diable, rites sataniques, alchimie, pierre philosophale, sodomie, meurtre d’enfants… Le piège a fonctionné, Gilles de Rais/Retz est pendu puis brûlé, place du Bouffay à Nantes, le 26 octobre 1440. Détail pratique qui n’a rien à voir avec Gilles de Rais/Retz. Dans un des documents que nous visionnons, le nom de la bourgade (et du château) est écrit « Machecou ». Ceci me conforte dans mon idée que le « l » de l’écriture actuelle ne se prononce pas.
Visite à pied C’est une assez longue visite qui permet de prendre conscience des dimensions gigantesques du château. Il n’en reste hélas que deux tours assez colossales. Le temps est passé par là – et les hommes : démantèlement au XVIIe (suite larvée des guerres de religion) ; incendie en 1792 ; vente à la ville de Machecoul qui n’en fait rien : le château devient une carrière en plein air. Les gens ne se privent pas de se servir. Abondamment. Il faut attendre le milieu du XIXe pour que s’arrête le pillage : on commence à prendre conscience de la nécessité de conserver et de protéger le patrimoine. L’Administration a attendu 2004 pour inscrire le château au titre des monuments historiques. C’est bien tard. Ce n’est pas demain qu’on va pouvoir sonder le sol et mettre au jour les multiples souterrains et les fortifications à la vauban. Le propriétaire fait ce qu’il peut – mais il peut peu, et il est le premier à le regretter. Il y faudrait un ou des mécène(s), (l’APHRN, peut-être ? Non, c’est une blague…) Promenade instructive et impressionnante – autour des douves, dans les salles accessibles – qui laisse pressentir tout ce qu’il faudrait faire (en argent, en temps, en moyens techniques, en personnel) pour mettre en valeur ces ruines remarquables. Monsieur de Grandmaison ne peut pas ; mais le peu qu’il réalise en fait un bienfaiteur du Patrimoine. Bravo !
Abbaye Notre-Dame de la Chaume Pas facile à trouver, cette abbaye, d’autant plus qu’il n’en reste pas grand-chose et qu’elle se trouve en dehors du bourg, ce qui fait que quelques candidats visiteurs se perdent en route (j’en fais partie) ! C’est une ancienne abbaye bénédictine, fondée au XIe siècle (à peu près au même moment que le premier château) et dépendant de l’abbaye Saint-Sauveur de Redon. Ce sont les moines qui ont créé les marais salants de la région. L’abbaye s’est maintenue jusqu’au XVIIIe siècle. Elle a été vendue alors aux seigneurs de Retz puis, pendant la révolution, à des bourgeois de Machecoul – qui n’en ont rien fait. Comme le château, elle est devenue une carrière à ciel ouvert : il suffisait de prendre les pierres pour se construire une maison. On a beaucoup construit. C’est finalement une association qui s’est créée en 1990 pour essayer d’entretenir les (rares) restes : l’ASAC – Association de Sauvegarde de l’Abbaye de la Chaume. Un pigeonnier a été restauré en 2004. Le site a été aménagé en théâtre de verdure pour accueillir des événements culturels (con certs, spectacles…).C’est son président, M. Robert Leroy, qui nous a fait la gentillesse de mener la visite. Merci à lui.
Bernard Tabary
mars 2020
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Le pigeonnier de l’abbaye Notre-Dame de la Chaume, contruit au XVIIIe siècle, restauré en 2004. (Photo Geneviève Terrien)
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mars 2020
Vue sur les marais, au bas du coteau de GuĂŠrande. (Photo Roland Chevillard)
Impression Khilim Réalisation Tanguy Sénéchal
Sculpture, représentant René Kerviler, sur un chapiteau du chœur de l’église de Saint-Nazaire.
HISTOIRE & PATRIMOINE n° 97 - mars 2020 - 12 €
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