MUSÉES///ART CULINAIRE///FESTIVALS///MODE///ARCHITECTURE///PHOTOgraphie
Dossier de rentrée
Le Renouveau des Musées
Mode
Deux jeunes stylistes Niçoises sortent leurs Griffes !
Atelier d’artiste
Bernard Pagès Le Mariage des contraires Littérature
Mouans-Sartoux Une ville à la page SAG'ART : La Galerie Ferrero
Supplément culturel des Petites Affiches des Alpes Maritimes
Jean Ferrero, Curieux de Tout
Making of
MERCI !
Ardoise et autres histoires (Petits contes aléatoires d’arts et d’hommes)
Art Côte d’Azur Supplément culturel des Petites Affiches des Alpes Maritimes Numéro 3418 du 12 au 18 septembre 2008 Bimestriel. ISSN 1962- 3569 Place du Palais 17 rue Alexandre Mari 06300 NICE Ont collaboré à ce supplément culturel : Rédacteurs Florence Canarelli Olivier Marro Direction Artistique François- Xavier Ciais Création Graphique Maïa Beyrouti Photographe Jean-Charles Dusanter Photo de Couverture Courtesy de l’artiste photographe
Hugues Lagarde « On my way » Nice, La Réserve Décembre 2007 Contacter la Rédaction : Valérie Noriega Tél : 04 92 47 21 81 Fax : 04 93 80 73 00 valerie@artcotedazur.fr www.artcotedazur.fr Art Côte d’Azur est imprimé par les Ets Ciais Imprimeurs/ Créateurs labellisés « Imprimeur Vert », sur un papier répondant aux normes FSC, PEFC et 100% recyclé.
La rédaction décline toute responsabilité quant aux opinions formulées dans les articles, cellesci n’engagent que leur auteur. Tous droits de reproduction et de traductions réservées pour tous supports et tous pays.
Saison solaire, l’été finissant proclame la rentrée. Pas question pour autant de cesser de cligner des yeux devant les aplats de sable fin, les accumulations hasardeuses de galets, les ondulations marines et montagneuses de notre département ! Car c’est souvent de ces beautés éclectiques et mouvantes que naît l’inspiration fugace. Les artistes d’ici l’ont bien compris - eux qui toujours lèvent le nez et regardent ailleurs que dans leurs listes de fournitures de rentrée – pour trouver aux détours de chemins inattendus leurs sources inépuisables de créations, de questionnements. Suivons leurs pas, osons inviter l’art à envahir notre quotidien, notre ville, détournons les traditions et les objets de leur fonction usuelle, pour cultiver les connivences, appréhender et
apprivoiser le rare : comme Ema tricopathe, jeune styliste, qui dans les embouteillages choisit de tricoter les feux rouges en attendant qu’ils passent au vert, ou Bernard Pagès, artiste immense, qui transfigure la nature en œuvres d’art déterminées en lui associant des éléments industriels contraires. Faisons appel à la créativité de ces artistes réfléchis et un brin farfelus pour créer une vie multidimensionnelle qui déborde de ses contingences et abreuve notre soif d’apprentissages inédits : Alain Llorca, Chef étoilé du Moulin, s’affranchit d’une certaine tradition culinaire et invite l’art et le design à revisiter sa gastronomie, le Festival Sept Off à Nice devient In, l’Avocat Jean-Jacques Ninon revêt sa robe d’artiste-plasticien et « croque » avec jubilation les ardoises pour
régler son compte à la surconsommation, le photographe Hugues Lagarde change d’objectif et zoome de l’architecture baroque au nu le plus épuré, Daniel Benoin, Directeur du Théâtre National de Nice s’enflamme pour le cinéma, Emmanuelle Esther et Alexandra Ferrarini détournent la mode en mode de vie et Guy Rottier réinvente l’habitat en créant une maison en carton qu’on brûle après usage… Saison sous influence, l’automne débutant annonce les vendanges. Ces histoires et d’autres vous attendent au coin du bois, au coin de la rue, au bout de ces pages ! Vous l’avez compris aux grains de raisins nous préférons les grains de folies artistiques et nos récoltes culturelles seront millésimées « engagées et inspirées » !
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LE SITE INTERNET EST ARRIVÉ : www.artcotedazur.fr Toute l’équipe est heureuse de vous annoncer officiellement la mise en ligne du site www.artcotedazur.fr ! Le magazine papier et le site web se répondent mutuellement en nourrissant un rapport proche avec les artistes, acteurs culturels locaux et habitants du Département, tout en œuvrant pour une ouverture internationale de l'art azuréen! Vous retrouverez bien sûr les articles du magazine papier enrichis de photos inédites, un agenda culturel mis à jour quotidiennement, une newsletter : bref le véritable panorama des pratiques artistiques et des artistes qui font notre région ! Ensemble, nous nous donnons l’ambition de promouvoir l’art à destination du plus grand nombre, de soutenir le meilleur de la création
de la région et de vous présenter des artistes ou mouvements qui ne vous sont pas encore familiers, mais dont le positionnement s’affirme déjà comme décisif ! Au-delà de cette fonction initiale de diffusion et d’informations artistiques et culturelles, nous souhaitons également que ce site devienne grâce à vous un lieu d’expérimentation à part entière : des espaces de présentations librement modulables sont à votre disposition (galeries virtuelles) pour proposer de nouvelles ouvertures dans le champ des questionnements sur l’art, et offrir aux amateurs des œuvres (performances) fortes de sens et de qualité plastique ! Venez nous rejoindre sans attendre et agrandir la communauté « Art Côte d’Azur » !
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MONACO
Vers un Musée National d’envergure internationale
© J-C Dusanter
Grasse
Un Parfum de Renouveau
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Antibes
Picasso Revient à Antibes © Le Moulin de Mougins
Mougins
Une Affaire de Goût
Nice
Un « Sept Off » devenu « In »
Cannes Frédéric Ballester, Excessivement Passionné © Robert Matthey
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FOCUS Mouans-Sartoux Une Ville à la Page !
© M.I.P.
La Vie des Arts 22 24 26 28
Ninon « Une Erreur d’Aiguillage » Artiste
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© H. Lagarde
Guy Rottier, L’Enfance de l’ArTchitecture Architecture
Hugues Lagarde, Le Plus Simple Appareil Dans l’Objectif
Filles à Fil : Alexandra Ferrarini & Emmanuelle Esther Sortent leurs Griffes
© F. Elalouf
MODE
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SAG’ART : La Galerie Ferrero (partie 1) Jean Ferrero, un curieux personnage Figure de l’Art
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Bernard Pagès, le mariage des contraires
Atelier d’Artiste
© J-C Dusanter
Daniel Benoin Quand le TNN Sort de ses Gonds EN SCène
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Cinémix : Danse avec les loops En Musique
© J-C Dusanter
En Ville
M O NA C O
N o u v e a u M u s é e N at i o n a l d e M o n a c o
Vers un Musée National d’envergure internationale
Initié par le Prince Rainier III, le projet du Nouveau Musée National de Monaco (NMNM) monopolise depuis 2003 l’Etat et les instances culturelles. L’enjeu est de taille : faire de la Principauté une nouvelle grande destination culturelle.
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© J-Ch Dusanter
Dessus et ci-contre : Jean-Michel Bouhours Conservateur du NMNM
ans son discours d’avènement, S.A.S le Prince Albert II avait confirmé que la création du Musée National serait inscrite aux grands travaux de son nouveau règne. Est-ce le brillant parcours du Forum Grimaldi qui depuis 2001, au travers de ses événements estivaux connaît une fréquentation expo-
nentielle, qui aurait réveillé cette soif de reconnaissance culturelle amorcée par l’Opéra et Les Ballets de Monte-Carlo ? Il est vrai que l’exposition « Les Années Grace Kelly » sous le Commissariat de Frédéric Mitterrand y a pulvérisé en 2007 son record d’affluence (135 000 visiteurs) et fut accueillie encore en juin der-
nier en grandes pompes à Paris ! Toujours est-il que ce projet ambitieux qui devrait conférer à la Principauté la grande institution qui lui fait défaut depuis la fermeture en 1958 du Musée des Beaux-Arts, est entré dans sa phase active en 2004.
Jacques Monory Opéra glacé n°7 (erotico Gustave Moreau) 1975, Huile sur toile, 195 x 388 cm Collection du Nouveau Musée National, n°2003.9.1 Crédits photo : Marcel Loli
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De Van Dongen à Rebecca Horn Trois objectifs ont été définis : l’élaboration d’un projet culturel, la mise en place d’une politique d’acquisitions et l’organisation d’expositions de préfigurations. Afin de coordonner ces différentes missions qui devraient permettre de voir poindre à l’horizon 2015 ce navire amiral aux ambitions internationales, Jean-Michel Bouhours a été nommé en 2003 Conservateur du NMNM. Un mandat qui devrait s’achever pour lui à l’automne prochain. Dès sa prise de poste, l’ex-Conservateur du Centre Georges Pompidou à Paris, a du mettre en place une stratégie cohérente ! En héritant du fond de l’ancien Musée des Beaux-Arts, d’une collection de 4500 costumes des Ballets de MonteCarlo et de prestigieuses pièces contemporaines (Picasso, Mathieu, Monory, Villeglé) Jean-Michel Bouhours a dégagé un fil d’Ariane : les arts et le spectacle devraient servir d’axe thématique au futur Musée. Depuis 2004 il a également initié une importante politique d’acquisitions soutenue par les collectionneurs et les d’amateurs d’art résidant sur le rocher, qu’une telle annonce n’a pas
laissé insensibles. Les mises en dépôts d’œuvres contemporaines, les donations ont ainsi élargi un spectre reposant initialement sur l’Ecole néo-classique, les tableaux lumineux du XIXème, un fond de peintures néo-impressionnistes ainsi que celui des Ballets russes. « Un ensemble unique d’œuvres «fauves» de Kees Van Dongen qui résida à Monaco (1949-68) s’en dégage aujourd’hui, qui devrait permettre de faire du NMNM le plus beau musée Van Dongen ayant jamais existé ». Une vingtaine d’œuvres ont été acquises dans ce sens dont 7 toiles comme les rarissimes « Lutteuses de Tabarin ». Les autres acquisitions réalisées grâce aux dotations de l’Etat (près de 3,5 millions d’euros de 2006 à 2008) ont servi à combler une lacune dans le registre contemporain. Le fond s’est ainsi enrichi d’œuvres d’Alberto Magnelli, Valerio Adami, d’Ange Leccia, de Rebecca Horn ou plus récemment de Gabriel Basilico. « Une politique d’acquisitions qui a permis de multiplier par 20 depuis 2004 la valeur de la collection » précise Jean-Michel Bouhours.
M O NA C O
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Kees Van Dongen Dame au Lévrier Bleu, 1919 Collection Palais Ruspoli Romes
Rebecca Horn Weisser – körperfacher 1, 1972 Photographie noir et blanc – tirage argentique (2000), 80 x 60 cm Collection du Nouveau Musée National, n°2003.11.2 Crédits photo : Rebecca Horn
Un Musée Phare sur le Larvotto ?
© J-Ch Dusanter
Le flou n’étant pas, pour une fois, artistique la collection en attendant de trouver ses murs se présente au public à travers des expositions temporaires qui permettent 4 fois par an de dévoiler ses enrichissements, ses champs d’activité et de réflexion. Ainsi le dernier accrochage au Quai Saint Antoine donnait à découvrir cet été toute l’étendue du talent de Kees Van Dongen. Toujours dans le cadre de ses missions de préfiguration, le NMNM investira en 2009 la Villa Paloma, « 600 m2 sur 4 niveaux », la Villa Sauber continuant, elle, d’abriter de plus petites expositions comme « la Scène Moderne » qui dévoilait en 2007 les acquisitions faites depuis 3 ans. « Il s’agit de lieux transitoires, de marchepieds vers la phase d’édification du futur Musée ! », tient à souligner Jean-Michel Bouhours au moment où l’on planche encore sur le choix définitif de l’implantation du NMNM. « L’édifice requiert une surface de 12 000 m² pour abriter les espaces d’expositions et toute la logistique. Sur le Rocher, cela ne se décrète pas du jour au lendemain ! ». Début 2008 une commission a été mise en place afin de départager les sites pressentis avant de pouvoir lancer le concours d’architecte. La future extension du Larvotto sur la mer semble réunir aujourd’hui tous les suffrages. L’endroit s’avérant particulièrement propice à recevoir cet édifice ainsi qu’une grande bibliothèque comme cela a pu être évoqué, créant en bout de jetée le grand phare culturel dont rêve la Principauté ! « Construire un Musée, c’est transmettre la plus haute idée de l’homme » disait Malraux, pas une mince affaire pour Monaco où l’on est pourtant rompu à l’art de poser les premières pierres. Et si l’on prend son temps, c’est que le challenge est d’importance y compris au niveau des retombées économiques : «Une grande métropole d’affaire se doit d’être aussi une grande métropole culturelle. La Principauté qui en a pris conscience s’apprête à franchir un nouveau cap, voire à redéfinir une identité qui s’est nourrie jusqu’ici de ses casinos et de son aura glamour ». Un virage à négocier aussi délicat pour Monaco que ceux qui jalonnent son célèbre Grand Prix automobile ? Pour son conservateur tout l’enjeu est là : « la Principauté est aujourd’hui au pied du mur. Ce nouveau Musée, c’est l’étape décisive si elle souhaite rivaliser avec le Gotha des destinations culturelles que sont Barcelone, New-York ou Paris ! » www.nmnm.mc OM
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En Ville
G R ASS E
Musée
un parfum de renouveau Passé de la ganterie à l’artisanat, puis à l’industrie aromatique, le parfum sera-t-il spirituel au XXIème siècle ? La renaissance du Musée International de la Parfumerie (M.I.P) devrait y concourir dès le 18 octobre.
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© J-Ch Dusanter
Marie-Christine Grasse
arie-Christine Grasse est le Conservateur en charge de ce défi. Bien que née à Paris, il lui était difficile avec un tel patronyme de ne pas postuler dans le berceau historique de la parfumerie. C’est ce qu’elle fit avec succès en 1990. En parallèle de son cursus elle a suivi les BeauxArts, et même opté pour une spécialisation dans le verre. Mais le parfum ne se réduisant pas au flaconnage et fédérant une cinquantaine de métiers autour d’une filière grassoise qui réalise prés de 10% de la production mondiale, le Conservateur en chef
Le nouveau M.I.P semble être dans l’air du temps et s’émanciper du poids de l’héritage que Grasse représente en matière de parfum ? Dès le départ le cahier des charges était de renforcer le rayonnement international du Musée. La collection avait le potentiel, il suffisait de changer le discours, de décloisonner. En 2008 on a le droit de s’amuser dans un musée tout en apprenant ! Tous les publics y trouveront leurs marques y compris les moins de 10 ans pour lesquels ont été prévus une garderie, un audio book et des ateliers. Désormais au lieu de parler de l’antiquité on y par-
Ce nouveau lieu polysensoriel ouvert sur le vivant, via les nouvelles technologies et l’art actuel a pour mission de sortir le parfum de son flacon, pour en diffuser plus largement toute sa magie… des musées de Grasse a décidé de placer le nouveau M.I.P au centre de la profession et de l’ouvrir à l’international en utilisant tous les moyens de la muséologie actuelle. Aussi la réalisation d’un nouvel écrin de 3400 m2 a-t-elle été confiée à l’architecte Frédéric Jung qui, en quatre ans, a doublé la surface de l’ancien Musée inauguré en 1989, en annexant trois bâtiments historiques reliés par une grande nef de verre. Coût total de l’opération 14 millions d’euros. Un parfum de folie flotte sur Grasse, mais quelle en est la composition ?
lera des antiquités et au lieu du XXème siècle on parlera de tous les XXème siècles. Comment se parfume-t-on au Mali, à Tunis ou à New York ? Ce nouvel outil adapté à son siècle et à l’ère de la mondialisation a séduit d’emblée les industriels et partenaires.
Comment avez-vous réussi à concilier la partie « conservatoire » avec ce souci d’ouverture ? Le M.I.P se devait d’être le témoin de notre société car derrière la parfumerie il y a l’hygiène, la thérapeutique, la beauté, le désir de plaire, de communiquer. La muséographie s’est dégagée d’une
chronologique scolastique en créant des passerelles entre les périodes. A chaque âge est rattachée une thématique intemporelle. Le jardin des simples (plantes médicinales) par exemple est à la base de l’aromathérapie actuelle, l’élégance permet de présenter certaines fragrances de Chanel, l’antique Kouros ou la préciosité du XVIIIème siècle des créations de Lolita Lempika. La cerise tient parce qu’il y le gâteau dessous, mais on n’est pas forcer de le déguster couches par couches ! L’autre intention était d’aborder la discipline à travers tous les modes d’expression : les arts décoratifs, le design, l’industrie et de tracer un circuit d’art contempoVue exterieure du M.I.P
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rain qui donne la chance à des artistes vivants d’enrichir le Musée. N’oublions pas que sur la Côte, il y a une forte tradition dans ce domaine de la Fondation Maeght, à l’Espace de l’Art Concret via le MAMAC ou la Villa Arson.
Comment l’art contemporain entrera-t-il dans ce nouveau parcours ? Un musée n’est pas un lieu de culte, mais de culture, il doit poser des questions. Nous avons commencé par faire des acquisitions dont une installation picturale de Peter Downsbrough. Nous avons confié à Gérard Collin-Thiebaut le soin de créer à partir d’un lot d’étiquettes de parfumeurs un faux papier-peint qui sera présenté dans la partie XIVème siècle dédiée à la mécanisation et à la réclame. Jean-Michel Othoniel, qui a participé à l’accompagnement artistique du Tramway à Nice, réalisera une fontaine bijou en verre soufflé blanc et rouge sur le thème de la frivolité, au sein du jardin des XVIII et XIXème siècles (jardin où est exposé le coffret de voyage de Marie Antoinette). Dominique Thévenin dont une œuvre habille le parvis du MAMAC
a travaillé lui sur la récupération des cuves de l’industrie de la parfumerie. L’artiste niçoise Brigitte Nahon sur des structures en verre olfactif. Le M.I.P pourra donc se visiter en dehors de son fond patrimonial ou scientifique avec les artistes contemporains tout comme avec les odeurs créées par l’école des parfumeurs (SIPCA). Plusieurs niveaux de lecture seront proposés, le but étant de revenir plusieurs fois.
Des animations viendrontelles ponctuellement enrichir cet écrin ultramoderne ? Le M.I.P. ne sera pas seulement un musée olfactif et interactif équipé d’un auditorium, d’écrans vidéo, d’audio-guides en quatre
langues, il sera en prise directe avec notre époque. Dans cet esprit des expositions temporaires seront organisées permettant à des créateurs tels Michel Blazy, Pierre & Gilles ou Bettina Rheims de confronter leurs univers avec celui du parfum. Les parfumeurs étant encore bien vivants, nous accueillerons des colloques, des conférences, permettant de mieux cerner qui sont ces personnes qui font vivre cette formidable industrie économique et culturelle.
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Le Musée présente une belle collection de flacons et de vaporisateurs de multiples périodes historiques.
Le M.I.P, un nouveau tournant pour l’avenir de Grasse? En effet et si le discours évolue, le M.I.P demeure le seul musée de la parfumerie existant sur la planète. Grasse au cœur du Pole PASS* ne peut pas rater ce virage pour lequel nous avons obtenu le soutien de nombreux partenaires comme les syndicats, les industriels et des marques aussi prestigieuses que Guerlain, Hermès, Chanel, Dior ou Yves Saint Laurent. Nous avions 50 000 visiteurs par an, nous en attendons au moins le double avec toutes les retombées que cela induit !
Rendez-vous le 18 octobre prochain pour 48 heures d’inauguration festives qui permettront au public d’entrer de plain pied dans la nouvelle ère du Musée International de la Parfumerie. * Le Pole de Compétitivité Parfums, Arômes, Senteurs et Saveurs réunit toute la filière et siège à Grasse depuis sa labellisation en 1995.
www.museesdegrasse.com
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ANTIB E S
Musée
Picasso revient à Antibes Le château-musée Grimaldi est devenu le symbole du Vieil Antibes. Un site magique et tellement méditerranéen … Pas étonnant que Picasso ait pu s’y sentir comme chez lui. Il serait heureux aujourd’hui de voir le magnifique espace que l’on vient d’inaugurer pour lui au deuxième étage. Visite guidée.
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(Détail) Picasso assis sur un matelas à côté du Centaure et le navire, 1946.
Photographie noir et blanc 17,9 x 24,3 cm, Musée Picasso, Antibes Photo © Michel Sima / Rue des Archives © Succession Picasso, 2008. © imageArt, Antibes, Claude Germain
Picasso devant sa table chargée de bouteilles, 1946. Photographie noir et blanc 18 x 24,4 cm Musée Picasso, Antibes. Photo © Michel Sima / Rue des Archives © Succession Picasso, 2008
’est une énorme bâtisse carrée en pierres de taille surmontée d’une tour médiévale devenue le symbole du Vieil Antibes. De la terrasse qui domine les remparts, la vue est éblouissante sur la mer. Un site magique et tellement méditerranéen… Sur lequel fut élevée dans l’Antiquité une acropole grecque, puis un castrum romain. Avant de devenir la résidence des évêques durant près de dix siècles, puis d’être achetée par une branche génoise de la famille Grimaldi en 1385. A cette date, Luc et Marc de Grimaldi, capitaines d’arbalétriers, étaient au service de la Reine Jeanne. Trois siècles plus tard, c’est le Roi Henri IV qui en fait la demeure du gouverneur de la ville, jusqu’à la Révolution où le « château Grimaldi » se transforme en hôtel de ville. Pour finir en caserne à l’époque (1820) où Antibes était une ville frontière fortifiée italienne, avant son rattachement à la France en 1860. Ensuite, le château est laissé à l’abandon… jusqu’à ce qu’un professeur de français, Romuald Dor de la Souchère ne s’y intéresse. Nous sommes dans les années 1920, il est féru d’histoire antique, et convainc la ville de le racheter pour en faire un musée d’archéologie, allant jusqu’à lancer une souscription pour trouver les fonds. En 1925, le château devient le Musée Grimaldi avec pour premier Conservateur… juste récompense,
Romuald Dor de la Souchère ! Trois ans plus tard, le bâtiment est classé monument historique.
Et Picasso entra au château … Le 17 septembre 1946, le Maître entre au château Grimaldi, reçu par le Conservateur. Il est venu pour une petite visite en voisin, depuis la villa qu’il loue à Golfe-Juan avec sa jeune compagne Françoise Gilot. Voyant que le lieu l’enchante, Dor de la Souchère propose de mettre à sa disposition une salle du deuxième étage. Aussitôt, Picasso enthousiaste se met au travail, commençant par dessiner sur les murs trois têtes de faunes qu’il intitule « Les Clés d’Antibes ». « Je ne vais pas seulement peindre pour moi ici. Je vais vous décorer le musée ». Le 10 novembre, il repart pour Paris : l’aventure aura duré deux mois à peine, pendant lesquels le génie du XXème siècle a réalisé 23 peintures et 44 dessins qu’il laisse en dépôt, parmi lesquels son chef d’œuvre « La Joie de vivre », gigantesque bacchanale au bord de la mer. Citons parmi les autres peintures les plus célèbres, le Nu assis sur fond vert, Satyre, Faune et Centaure au trident, La Femme aux oursins, Nature morte à la chouette et aux trois oursins, La Chèvre… Picasso revient un an plus tard peindre « Ulysse et les sirènes », juste
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© O. Marro
Vues Exterieures et plans par niveau du Musée Picasso
© Musée Picasso Antibes 2008
avant l’inauguration officielle de la salle Picasso au premier étage. Peu après, Picasso lègue au musée 78 céramiques, pièces originales qu’il vient de réaliser dans l’atelier Madoura de Vallauris : Taureau debout, Chouette ovoïde, Échassier, Condor, Cabri couché… Le 27 décembre 1966, le château Grimaldi devient officiellement le Musée Picasso. A ce jour, le musée conserve 275 œuvres de l’artiste.
Aujourd’hui, il retrouve son atelier Béton brut et bois blond pour les matériaux, séparation du circuit d’entrée et de sortie, climatisation flambant neuve, réfection de l’accueil, vestiaires, sanitaires, librairie, mobilier, éclairage… Fermé depuis mars 2006, le Musée Picasso ouvre à nouveau ses portes, après une profonde rénovation. Dans ce lieu qui n’était pas destiné à être un musée, et qui reçoit quelques 200.000 visiteurs par an, il a fallu repenser la muséographie, explique Jean Louis Andral, son Conservateur depuis 2001.
D’où l’idée de réserver les deux salles voûtées du rez-de-chaussée à la donation récente de la Fondation Hartung, le premier étage aux expositions temporaires ainsi qu’à l’importante collection Nicolas de Staël et le second étage à Picasso. Trente ans après sa disparition, Picasso retrouve son atelier, dans la grande salle toute blanche qui a retrouvé ses dimensions d’origine. Un espace idéal pour accueillir les grands formats, comme le triptyque intitulé « Ulysse et les sirènes » (360cm de long). Le musée possède également une collection d’art moderne, commencée en 1951 par Dor de La Souchère et poursuivie par les conservateurs qui lui ont succédé, Danièle Giraudy et Maurice Fréchuret : Modigliani, Calder, Miro ou Picabia ainsi que les Nouveaux Réalistes et le groupe Supports/Surfaces… Sans oublier Nicolas de Staël, dont les oeuvres témoignent de son séjour à Antibes en 1954-55. Picasso au Château Grimaldi, un monument de l’histoire de l’art dans un monument historique : une visite s’impose ! FC
Travaux pratiques Les travaux de rénovation ont été supervisés par Pierre-Antoine Gatier, l’architecte des monuments historiques, avec Lætitia Morand, architecte. Coût : 2,60 M€ pour l’intérieur du château, 4 M€ pour l’ensemble du projet. Christine Albanel, Ministre de la Culture et de la Communication, a inauguré le nouveau Musée Picasso à Antibes, le samedi 19 juillet 2008.
Visites château Grimaldi 06600 Antibes Tél : 04 92 90 54 20 www.antibes-juanlespins.com
Taureau debout, 1947/1948
Terre de faïence blanche 37 x 40 x 30 cm, Musée Picasso, Antibes © Succession Picasso, 2008. © imageArt, Antibes, Claude Germain
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Art Culinaire
une affaire de goût ! Cannes brille par ses étoiles du grand écran, Mougins par ses étoilés des grandes tables. Et ce n’est pas le fruit du hasard si le village anobli par Roger Vergé dans les années 60 est pris d’assaut depuis trois ans par une armée blanche dont la seule langue commune est celle du palais !
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© Moulin de Mougins
© Moulin de Mougins
ougins, c’est ce petit village au sud de la Gaule qui fait encore de la résistance. Résistance à la mal bouffe, résistance au mauvais goût ! Mais sur ces hauteurs l’envahisseur n’est pas romain mais bien cosmopolite ! Quant à sa potion magique, après que Roger Vergé l’eut servi avec un succès exponentiel pendant plus de trente ans en son célèbre Moulin, c’est au tour d’Alain Llorca de jouer depuis 2004 les druides inspirés dans l’antre sacrée. Cette potion magique qui a donné des ailes à Mougins, c’est bien sûr la gastronomie avec un grand G. Et, non content de rassembler dans sa campagne parfumée le fleuron des chefs au point d’avoir fait briller en 1992 sept étoiles à son firmament, la ville de Mougins a initié depuis 2006 son Festival International de la Gastronomie et de l’Art de vivre. Avec plus de 10.000 visiteurs et 120 chefs réunis en 2007, ce festival « Les Étoiles de Mougins » est devenu l’événement majeur de la gastronomie française et étrangère. La troisième édition s’ouvrira du 19 au 22 septembre. Ouvrez vos papilles, vos yeux et tous vos sens, le spectacle gourmand descend dans la rue !
© Moulin de Mougins
investira les ruelles du vieux village par espaces thématiques. « Le stade des pianos » remportant tous les suffrages : une arène où les chefs se livrent aux fourneaux à des démonstrations face à un public de fans digne d’un concert live (Voir photos ci-contre). Parmi eux des étoilés installés en Riviera, d’autres venus de Rio ou New York comme, cette année, une brigade de chefs venus tout spécialement d’Amérique du Nord mais aussi tous ceux qui redorent le blason de nos terroirs. Sans oublier les fous cuisinant de « Génération C ». Cette relève qui fait feu de tout bois dans les médias, afin de dévoiler les nouvelles tendances qui habilleront nos papilles : des mets déstructurés revalorisant les légumes oubliés ou bio et fusionnant des saveurs aux antipodes qui se partagent la cuisson à la plancha, au wok, à la vapeur ou à l’azote liquide. Le collectif « Génération C » comme Cuisine, Communication et Culture, qui rassemble une centaine de chefs, sera d’ailleurs au cœur de l’exposition du Musée de la Photographie André Villers. Quant au concours des « Es-
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Le goût des autres Mougins a toujours noué des liens étroits avec l’Art. En 1924, Francis Picabia, peintre surréaliste décide de s’y établir attirant dans son sillage sulfureux les plus grands de ce monde. Parmi eux, Pablo Picasso qui y passera les quinze dernières années de sa vie. Un séjour immortalisé par André Villers qui a donné son nom au Musée de la Photographie de Mougins. Depuis son baptême par Roger Vergé en 2006, « Les Etoiles de Mougins » a drainé dans la nouvelle capitale du goût plusieurs milliers de visiteurs venus de tous horizons afin de découvrir dans la partie tendre de l’été une centaine de toques toutes générations, styles ou nationalités confondus. Cette 3ème édition - parrainée par Alain Llorca et Serge Gouloumès, un autre étoilé qui officie au Mas Candille -, accueillera comme invité d’honneur Marc Veyrat : « D’un coup de fourchette magique, notre village à l’accent méditerranéen se métamorphose durant quatre jours en un vaste théâtre à ciel ouvert » commente Richard Galy, Maire de Mougins. Ainsi ce troisième millésime
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poirs de la gastronomie », il tient lieu de bouquet final à la manifestation au Moulin de Mougins qui abritera une fois de plus le dîner de gala orchestré par les chefs « Relais et Châteaux » américains et azuréens sous l’égide d’Alain Llorca.
Llorca succède à Vergé De son premier macaron au Haut de Cagnes, à son deuxième au Negresco, où il imposa à la vénérable institution sa ronde de tapas, jusqu’à sa reprise du Moulin en 2004, l’ascension de Llorca fut irrésistible. L’ex-fief de Vergé, indétrônable bastion des gourmets de la jet-set a pris sous son impulsion un véritable bain de lumière : de sa table prolongée dans le jardin par une verrière à ses restanques plantées de bambous et de sculptures signées Louis Cane ou Sosno, Llorca aime bousculer, Llorca aime l’Art. Celui qui a fait dessiner sa propre demeure par le regretté Yves Bayard est le premier à marier avec autant d’audace les plaisirs de la table avec ceux de l’art plastique. Sa cuisine nourrie de « sudismes » et d’avant-gardisme et sa créativité irradient tout le moulin jusqu’au 11 chambres relookées dans l’esprit « art & tech » : le chef d’origine ibérique convie ainsi au fil des saisons un artiste à revisiter sa propre collection culinaire via une œuvre créée sur mesure. C’est le designer Peter Larsen qui ouvrit le ban au printemps avec le « BarreOmètre », une subtile rythmique de bandes colorées sublimant le « Loup de Méditerranée en compression de légumes ». Cet été Henri Olivier, sur un concept 100% nature, a effectué un travail sur le bois dans les jardins. « Pour cet hiver j’ai même demandé à Sosno de travailler sur une oblitération de bûche ! » avoue l’étoilé en quête perpétuelle
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Alain Llorca devant le « BarreOmètre » du designer Peter Larsen
d’ailleurs comme en témoigne sa sensuelle alchimie des saveurs. Et la griffe Llorca qui a vu éclore à Vallauris, face au « Mouton » de Picasso, un Café Llorca dessiné par Jean-Michel Wilmotte et décoré de verreries artisanales et de clichés vintage d’André Villers n’en est qu’à ses prémices : « Il y aura d’autres bébés, l’idée est de recentrer la table du Moulin sur une gastronomie d’excellence avec seulement 40 à 50 couverts et de développer les Cafés en France et à l’étranger » commente le chef qui poursuit - aux cotés de son frère, chef pâtissier et avec plus de 90 employés - la voie étoilée ouverte par le père spirituel de la « Mougins attitude ». www.lesetoilesdemougins.com www.moulindemougins.com OM
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Fe s t i va l P h oto g r a p h i q ue
Un « Sept off » devenu « in » Donner un panorama de la photographie régionale - faite par des professionnels ou des amateurs de bon niveau, graphistes, plasticiens voire fonctionnaires urssaf - susciter des rencontres en exposant dans des lieux vivants, fréquentés par un large public … C’est l’objectif du « Sept Off », qui fête cette année ses dix ans.
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n beau jour de l’été 1999, trois photographes indépendants - Robert Matthey, Jean-Claude Fraicher, et Laurent Colonna - se retrouvent dans un bar niçois. L’un d’eux revient du Festival de la photo de Perpignan, où est organisé parallèlement un « Visa off ». L’idée fait tilt et quinze jours après, le premier festival « Sept off » était monté, l’association créée sous la présidence de Robert Matthey, les bénévoles recrutés et les exposants choisis grâce aux carnets d’adresses des trois associés. Un premier festival très niçois, où les trois amis exposent avec leurs copains (Alain Legendre, Frank Follet ou Jean-Marc Pharisien entre autres), entre le Bar des Oiseaux, la Galerie Art 7, le Manoir Café, le Forum Fnac ou le restaurant le Vendôme. Et même au Château Valrose, passé en quelques jours du statut de débarras à celui de superbe salle d’expo, grâce à la réactivité de Geneviève Gourdet, la présidente de l’université de l’époque. Ensuite, le festival décolle : 70 photographes en 2001, d’abord régionaux puis « méditerranéens » (2004), qui s’étend au département puis à la Ligurie, dans des lieux somptueux comme le vieux monastère Santa Maria di Castello de Gênes. Avec désormais une thématique pour chaque édition : les « carnets de voyage », « identité méditerranéen Hopital Mopti éleves CAMM/ENSAD Marco Corongi La Défense Collectif Terzo Occhio
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ne »…Il faut dire qu’entre-temps, le « Sept Off » a obtenu le soutien de la Caisse d’Epargne Côte d’Azur, qui remet depuis 2000 un prix « Coup de cœur » de 1500 euros. Sans oublier l’aide du Conseil Général, et même du Conseil Régional cette année. Au final, sur dix ans, cinq cents expositions, plus de trois cents photographes, dix catalogues, quelques 40.000 visiteurs par an. Cette année, le thème choisi, « De la chambre au téléphone » permet de faire le point sur les bouleverse-
Robert Matthey 61 ans Photographe humaniste
Né à Nice en 1947 avec un père d’origine suisse, Robert Matthey est venu à la photo par des voies détournées. Après des études scientifiques et un diplôme en « signaux et systèmes » à la Faculté de Valrose, il est d’abord prospecteur de pétrole dans le Sahara durant deux ans. De retour à Nice, il se met à la vidéo - c’était le début de la vidéo dite « légère » … pour l’époque (50kg !) - et travaille à la commande pour diverses entreprises, à Paris et dans la région. Bientôt formateur multimedia, il se met aussi à la photo d’auteur en noir et blanc - armé d’un petit Nikon FM2 discret, argentique et entièrement manuel bien sûr - admiratif qu’il est des Cartier-Bresson, Salgado, et autre Depardon. En 1996, rencontre déterminante avec JeanClaude Fraicher, infographiste et photographe indépendant. Et trois ans plus tard, création du « Sept Off de la Photographie ». Robert Matthey aime le travail de fond, sur la durée, qui nécessite un contact avec les gens et a une prédilection pour les sujets « identitaires » : le Nice de son enfance, qu’il retrouve aussi en Ligurie, entre traditions d’hier et d’aujourd’hui, dans une série intitulée « les rivages méditerranéens » (2002). Ou encore, les « Pénitents de France et d’Italie » (2001), ces laïcs animés par une
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ments intervenus en dix ans : comme le souligne Robert Matthey, « en dix ans, tous les grands labos de photo ont fermé à Nice, ne restent que quelques « tireurs » individuels. Et presque tous les photographes sont passés au numérique ». Tous, sauf une minorité restée au « noir et blanc argentique tiré sur papier baryté » à l’image de Robert Matthey, qui a signé quelques superbes séries de clichés « à l’ancienne » dignes des plus grands.
foi quelque peu anachronique et qu’il suit durant dix ans, de rassemblements en pèlerinages, « pour l’intérêt visuel surtout », n’étant lui-même « ni croyant ni pénitent ». Sans oublier ses premiers travaux personnels, qui furent exposés lors du premier « Sept Off » en 1997 : des « portraits de rue », pris sur le vif lorsqu’il sortait la nuit dans les rues niçoises avec Méde-
cins du Monde. Le Ministère de l’intégration vient d’ailleurs de lui passer commande d’une série sur les « Gitans du camp des chênes blancs, à l’Ariane », dans le but de faire connaître les cultures minoritaires. Même s’il travaille désormais en couleurs et en numérique, parions que ses photographies sauront rendre leur vérité humaine à cette communauté méconnue.
Dix ans de « Sept Off » 10 septembre - 5 novembre
www.sept-off.org
Robert Matthey, Menton -
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Robert Matthey Portrait de rue -
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Au programme cette année : une cinquantaine d’expos, pour le même nombre de photographes, disséminées entre Marseille et la Ligurie (dans un monastère de Taggia par exemple) - entre autres au Fort Napoléon de La Seyne, au théâtre Toursky de Marseille, au Museaav de Nice … Une rue de l’image à Vence, dans la vieille ville, avec projection rétrospective sur les murs de la cathédrale, accompagnée en musique par Serge Pesce. Et un marathon photographique de 12 heures organisé à Nice : 200 concurrents sont attendus. Vernissage le mardi 23 septembre, L’Avant Scène, faculté de saint Jean d’Angely, avec exposition rétrospective.
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Centre d'Art l a Malmaison
Frédéric Ballester, excessivement passionné
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Excessif mais ne supportant pas les extrémismes, démocrate virulent et profondément croyant, fanatique de la chaine Arte mais détestant les romans… Entre un père catalan et une mère suisse, Frédéric Ballester ne pouvait être que compliqué, tiraillé entre deux mondes. Un bonheur pour le portraitiste.
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e suis un démocrate virulent, aime à dire Frédéric Ballester. « Mon père m’a légué sa virulence catalane. Comme lui, je suis républicain, sa profondeur révolutionnaire est toujours en moi ». Originaire de Gerone, en Catalogne, et issu d’une famille bourgeoise, le père de Frédéric Ballester, de son vrai nom Delgado Ballester, était destiné à être prélat... il choisit le commerce et s’engagera bientôt dans le camp des républicains durant la guerre d’Espagne, quittant le pays en 1939 lors de la victoire des nationalistes pour se réfugier en France. Farouchement engagé pour la liberté, il est aussitôt récupéré par le réseau Frédéric Joliot Curie (d’où le prénom donné plus tard à son fils) et devient résistant. C’est ainsi que naît Frédéric Ballester, à Paris dans le XIème en 1950, d’une mère d’origine suisse, elle aussi issue d’une « famille bourgeoise révolutionnaire ». Bientôt, ses parents s’installent dans la région de Toulon : son père monte une affaire dans l’électroménager, gagne beaucoup d’argent, fait
Frédéric Ballester 58 ans Directeur de la Malmaison Se définit comme un montreur d’images
construire une maison et - on ne se refait pas - se lance dans la politique, jusqu’à sa mort en 1962. Drame, sa mère se retrouvant seule avec 5 enfants, Frédéric est mis en pension : il y restera jusqu’à 18 ans. Déjà, il aime l’art mais, pour se montrer sérieux, il commence par un bac technique dans le but de devenir ingénieur en céramique. Avant de choisir finalement de faire les Beaux-Arts de Paris : un premier cycle en architecture, suivi d’un diplôme national, avant d’étudier droit et histoire de l’art à la faculté d’Aix en Provence. De fil en aiguille, il est devenu expert en œuvres d’art contemporain auprès de la Cour d’Appel. Avec sa première femme, danseuse, il s’installe à Sanary, dans un vieux moulin à huile, un bel endroit où il reçoit des enfants pour des « cours d’expression libre », alors à la mode dans les années 70 : ça marche si bien qu’il est un jour filmé par FR3… Ce qui lui permet de se faire remarquer par Danièle Giraudy - c’est elle qui a inventé la pédagogie dans les musées - qui le convoque et lui propose un poste au Musée Cantini de Marseille. Nous sommes en 1973 : c’est là que commence vraiment sa carrière, il est chargé de mission au service pédagogique. Il y restera neuf ans, à « travailler comme une bête à la scénographie d’exposition ». En 1983, il arrive à Cannes,
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appelé par Jean-Roger Soubiran, pour créer les Salons de la Malmaison, d’où il est expulsé quatre ans plus tard par un changement politique. Il se fait alors Commissaire d’expositions à son compte, monte de nombreuses expositions à Paris, Berlin ou en Corée, travaille comme expert auprès de la Cour Européenne, et crée (en 1989) la première Biennale de la jeune peinture, regroupant 150 artistes, sur le thème « humour et révolution ». Bientôt, il ouvre sa propre galerie, qu’il fermera en 1996 à la mort de son fils Mathieu, un drame intime dont il ne s’est jamais remis. En 2000, la ville de Cannes lui commande l’exposition « d’un rivage à l’autre » : à cette occasion, il rencontre David Lisnard, alors adjoint à la culture qui l’embauche comme Directeur du Centre d’art de la Malmaison... ce qu’il est toujours aujourd’hui.
« Je ne suis pas un mec facile » Frédéric Ballester se définit comme un montreur d’images, qui aime « donner du plaisir ou des questionnements » : « Je ne suis pas un extrémiste en art contemporain ». A la Malmaison, où il a carte blanche, il a exposé des artistes connus, reconnus, et (relativement) grand-public : Miro
et Picasso, Masson le surréaliste ou Combas... « J’aime les créateurs, sans doute par masochisme. Moi-même, je ne suis pas un mec facile, mais je crois être généreux dans mon métier ». Car Frédéric Ballester est un « gros bosseur », qui a derrière lui 150 expositions montées, et pas un jour de vacances ces sept dernières années. Dans son bureau de la Malmaison (devenu sa deuxième maison !), il a besoin d’être entouré de ses gris-gris, pour soigner sa « passion, sa maladie de la collection », voire son « fétichisme de l’objet ». Même si ses goûts sont extrêmement éclectiques, depuis la gravure du XVIIème jusqu’aux masques de Cote d’Ivoire en passant par une Marionnette Moya ou un dragon chinois. Eclectique autant que passionné, « combattant au quotidien, excessif, méditerranéen », capable de courir 24 kilomètres dans une journée car il en a « besoin », Frédéric Ballester ne fait pas les choses à moitié. Il adore ou déteste avec la même force : il a la passion du livre, qu’il pioche parmi les 30.000 que contient sa bibliothèque, est un fanatique d’Arte mais déteste lire des romans, même s’il a en ce moment « envie d’écrire un roman pour démystifier ses mensonges ». Sa grande passion actuelle va au surréalisme, André Breton et Paul Eluard, son champ de lecture de 1900 à 1940 : c’est ça, précisément, et pas autre chose. Mais qu’est-ce donc qui pousse Frédéric Ballester ? Qu’est-ce qui le motive pour déplacer des montagnes ? La foi bien sûr : conscient de la brièveté de la vie, il en apprécie d’autant plus la « chance de vivre ». Profondément croyant, très mystique, intéressé par toutes les religions et proche du bouddhisme, il se dit « attiré par la force que véhiculent les hommes qui croient » : « Dieu créateur, le mystère de l’univers, j’y crois. Dieu me ramène à ma petite existence. Je crois à l’esprit. Même quand je marche, je prie, je remercie la nature de me donner la vie… Ma religion, c’est Dieu ». Mais qu’on ne s’y méprenne pas : Frédéric Ballester ne supporte pas les extrémismes. Passionné… mais réfléchi ! FC
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A. Saint Sylvestre Marie Antoinette avec Collier
A voir « Le monde est fou, j’adore ! », Antonio Saint Silvestre, jusqu’au 30 novembre 2008, La Malmaison T : 04 97 06 44 90
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Marie-Louise Gourdon engagée volontairE
Engagement et citoyenneté sont les deux « amours » de Marie-Louise Gourdon. Portrait d’une idéaliste active.
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on premier militantisme, fut d’enseigner et mettre en valeur la langue occitane ». Née à Nice dans une famille niçoise parlant le niçois, Marie-Louise Gourdon a toujours été « curieuse de cette langue », au point de l’étudier à la faculté. Doctorat de lettres occitanes et françaises en poche, elle choisit l’enseignement pour « être au service des autres, apporter son savoir », ce qui lui donne « de vraies satisfactions ». Militante dans l’âme, elle crée en 1977, avec son mari Michel alors employé dans le socio-culturel, le premier festival de langue d’Oc… à MouansSartoux déjà, où elle ne connaît personne ! Devant le succès rencontré, suite à un « travail de pédagogie fait avec les habitants du village », ils décident de rester et de chercher un appartement : ils n’en repartiront plus. En même temps que son métier de professeur, Marie-Louise Gourdon mène une carrière politique : en 1983, elle est élue au Conseil Municipal, sous le mandat d’André Aschieri, et déléguée à la culture. Un titre qu’elle a encore aujourd’hui. Le Festival du livre est son premier « bébé », né en 1988. D’abord régional puis national, il se veut « engagé dans le monde contemporain avec l’objectif de mettre le livre à la portée de tous et de défendre des idées ». Car Marie-Louise Gourdon est avant tout une femme engagée. C’est elle qui décide du thème de chaque manifestation : l’avenir de la planète, les discriminations et inégalités, le rôle des médias… Ou, comme cette année, « les résistances »… à la mondialisation, par exemple. Sans oublier son combat féministe de toujours : les droits des femmes dans le monde la concernent, elle lance des pétitions pour appeler à la vigilance, et veille à ce que le festival respecte l’égalité des sexes, en nommant un président et une présidente.
La médiathèque, son plus beau bébé Mais au final, le bébé dont elle est la plus fière, dont elle préparait la naissance depuis 1995,
c’est la médiathèque regroupant salle de cinéma et bibliothèque, qui, depuis son ouverture en 2001, connaît « une réussite au delà de ses rêves ». Financée essentiellement par l’Etat et la Région, la médiathèque a coûté très peu à la commune, tout en répondant aux besoins de lecture nés du Festival du livre. De même que, depuis lors, le festival a pu s’ouvrir à l’écriture cinématographique grâce aux projections faites dans sa superbe salle de 300 places. Et ce, malgré un cahier des charges - fixé par elle - ambitieux, qui demandait à la société exploitante une participation financière à la construction, une programmation sérieuse, éclectique et de qualité, et des tarifs attractifs pour les jeunes ou les familles nombreuses. Une association de cinéphiles s’est créée - 6000 adhérents pour une population de 10.000 personnes ! - et les familles viennent volontiers dans ce bel espace ouvert, transparent (entièrement vitré), de plain pied dans la ville, que ce soit pour lire ou écouter des concerts retransmis en direct depuis la Cité de la Musique de Paris. Toujours professeur de français à Grasse, Marie-Louise Gourdon trouve encore le temps de pratiquer la randonnée… et d’écrire des livres sur la vie des bergers ou le patrimoine des vallées du Mercantour. Exigeante envers elle même mais consciente de ses « devoirs envers les autres », elle nous livre ici le secret d’une pédagogie bien comprise : « donner envie ! ». © Vladimir Melnikov
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Marie-Louise Gourdon Femme engagée et citoyenne Conseillère Générale du canton de Mougins Sa pédagogie : donner l'envie ! Créatrice du Festival du Livre
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Une ville à la page ! Pour tout savoir sur le Festival du livre de Mouans-Sartoux, suivez notre guide de A à Z ! Ados Un espace Bande DessinéeAdos-Mangas destiné aux 1216 ans existe depuis 2006.
Chiffres 50 000 visiteurs… pour 10.000 habitants 8 500 mètres carrés d’espace d’exposition 350 auteurs 200 éditeurs et libraires 22 éditeurs et 50 auteurs jeunesse 14 dessinateurs/auteurs BD 8 500 élèves accueillis de la maternelle au lycée 3 salles de cinéma et de conférences 50 débats et conférences 100 entretiens aux cafés littéraires 240 bénévoles
Cinéma Hommage à Tati ou rétrospective Mocky … Dans sa salle de cinéma « La Strada » classée Art et Essais, des projections de films et documentaires liés au thème de la manifestation, sont suivis de débats : les invités cinéma ont en commun leur « engagement et leur citoyenneté appliqués à leur art » et s’entretiennent sur leur travail
Mondialisation, écologie, citoyenneté et cyberculture, bioéthique et liberté, blessures de la colonisation, liberté des femmes… Les thèmes abordés lors de ce rendezvous littéraire et cinéma tographique sont ouvertement « engagés ». But : réfléchir sur notre société.
d’écriture cinématographique. Parmi les personnalités invitées, retenons Bernard Giraudeau (2001), Jean-Pierre Mocky (2002), Bertrand Tavernier (2004), Amos Gitai (2005) Georges Lautner, Robert Guédiguian, Serge Moati (2006), Serge Toubiana, Jeanne Labrune (2007).
Concert Chaque année depuis 2006, un concert littéraire est offert au public dans le parc du château. La musique et les textes lus par les auteurs sont choisis en fonction du thème. Avec l’Orchestre Régional de Cannes ProvenceAlpes-Côte d’Azur et ses 43 musiciens, sous la direction de Philippe Bender.
Forum Ce sont des débats, publics et gratuits, où se côtoient des dizaines d’auteurs de toutes disciplines - philosophes, sociologues, historiens, scientifiques, écrivains du texte et de l’image - dans le but d’avoir une « réflexion en profondeur sur le monde tel qu’il vit aujourd’hui ».
Imprimerie Depuis plusieurs années, les Ets Ciais Imprimeurs/Créa-
teurs installent une imprimerie numérique sur leur stand, où ils impriment des livres à la demande, ainsi que le journal du Festival réalisé par des étudiants de l’IUT de journalisme. Sans oublier, l’impression en direct, devant les enfants, du livre qui a remporté le prix spécial des écoles.
Inédit Le « Prix de l’Inédit » met en lumière de nouvelles plumes. Les éditions Actes Sud publient un roman inédit, choisi par un jury sur concours d’écriture ouvert à tous. Cette année, ce sera « En espérant la guerre » de Dominique Conil.
Invités de marque Parmi les invités de marque venus à Mouans-Sartoux depuis 20 ans, citons au hasard Fadela Amara, Guy Bedos, José Bové, Michel Butor, Boris Cyrulnik, Max Gallo, Benoîte Groult, Gisèle Halimi, Nancy Huston, Albert Jacquard, Axel Kahn, Jean-François Kahn, Marc Levy, Danielle Mitterrand, Edgar Morin, Taslima Nasreen, Amélie Nothomb, Erik Orsenna, Ernest Pignon-Ernest, Alain Touraine, Didier Van Cauwelaert, Jacques Ferrandez, Georges Wolinski …
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Cette année les présidents sont : Maïssa Bey et John Berger. Citons également de grands invités : Pierre Michon, Patrick Chamoiseau, pour le cinéma : Jean-Claude Carrière, Coline Serreau, Pierre Carles...
Jeunesse Des ateliers d’animation sont offerts aux élèves de la ville : contes, illustration, calligraphie, marbrure, poésie, cinéma, rencontres avec des auteurs et des éditeurs
Organisation A la tête d’une équipe de 300 bénévoles passionnés et dévoués, Michel Gourdon !
Pitchoun Le « Prix des Pitchouns », récompense un ouvrage imaginé, écrit et illustré par des enfants pour des enfants.
Publication Chaque année, le texte d’une des conférences est édité à 35.000 exemplaires, aux éditions de l’Aube - qui l’imprime à prix coûtant - et en partenariat avec Télérama qui le diffuse à ses abonnés du sud-est. Le texte de 2008 sera militant pour les droits des femmes : « Est-ce ainsi que les femmes vivent ? ».
Questionnements Mondialisation, écologie, citoyenneté et cyberculture. Les grandes crises technologiques, humanitaires et sociales qui bouleversent notre monde. Progressons-nous ou l’être
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humain est-il au fond toujours le même ? Les hommes et les femmes qui résistent pour changer la marche des choses . Bioéthique et liberté, blessures de la colonisation, liberté des femmes, quête des libertés, libertés sous contrôle. Le Festival a-t-il permis concrètement ou symboliquement d’ébranler quelques murs, ceux qui entravent Liberté, Solidarité et Humanité ?
Une des conférences données au Festival est publiée dans la collection Voix libres, grâce à un partenariat avec les éditions de l’Aube, le Conseil Régional et Télérama : Être humain ?, Albert Jacquard, 2005; La Part du colibri, Pierre Rabhi, 2006; Toujours la vie invente, Gilles Clément, 2007.
Résistances
XXIème édition
C’est le thème de la XXIème édition du Festival : les résistances d’aujourd’hui portent-elles les germes du monde de demain ? Résistances « face aux accommodements, aux renoncements, à la défaite de la pensée, au triomphe des égoïsmes dans l’économie mondialisée ».
Maisons d’édition invitées d’honneur : L’Olivier, Un éditeur à contre-courant Editeur BD invité d’honneur : 6 Pieds sous Terre Editeurs jeunesse invités d’honneur : Autrement et JEDI PACA Au programme par exemple : les films « Le monde selon Monsanto » de Marie-Monique Robin et «Freedom from fear» de Milena Kaneva, suivi du débat sur L’évolution des résistances bouddhistes, avec Vaclav Havel, Info Birmanie, le Vénérable U Uttara, Jean-Claude Carrière… Une rencontre littéraire avec Olivier Cohen, le fondateur de la maison d’édition L’Olivie. Une conférence de Jean-François Kahn sur « Hugo, Zola, De Gaulle : 3 résistants », des débats sur « La Résistance allemande » avec Nella Bielski, « Le rire de résistance », avec Christophe Alévêque, Xavier Gorce, Fellag; ou encore « Les Femmes dans le Droit » avec Gisèle Halimi.
Sponsors et soutiens L’Etat et la Région, et aussi des sponsors privés comme la Caisse d’Epargne Côte d’Azur ou l’imprimerie CIAIS, ainsi que de nombreux médias locaux et nationaux.
Thèmes Toujours des thèmes engagés socialement et culturellement : L’illettrisme (1996), Le livre en République (97), Littératures du sud (98), Les défis du deuxième sexe (99), Jeunes écritures, rap, tag, slam (2000), Moi et les autres (2001), Visionnaires, vos papiers (2002), Le monde, parlons-en (2003), Qui a éteint les Lumières ? (2004), Penser la Terre, décrocher la lune (2005), Hommes, femmes en quête de libertés (2006), Au-delà des murs, l’humanité (2007)
Voix libres
Les 3, 4 et 5 octobre 2008 Programme complet sur : www.lefestivaldulivre.fr FC
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Jean-Jacques Ninon 63 ans Avocat et artiste plasticien Publivore et biker
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Le fusil à tirer dans les coins pour faire couler la peinture, c’est le credo de Jean-Jacques Ninon. D’abord enseignant, puis avocat et artiste plasticien, il aurait été, bien sûr, le candidat idéal pour une partie de… ni oui, Ninon. Que nenni, même un portrait suffit à peine à cerner les multiples facettes de ce personnage atypique.
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e cas Ninon : dès le début un vrai casse-tête pour conseillers d’orientation ? Car c’est à la suite d’une succession de chassés-croisés que seule une cartomancienne aurait pu anticiper, que Jean-Jacques Ninon partage aujourd’hui sa vie à Nice entre son atelier et le Palais de justice. Jean-Jacques Ninon est né à Madagascar en 1945. « J’étais adolescent quand mes parents, comme beaucoup de familles expatriées, ont regagné la Côte d’azur après la décolonisation ». S’il change d’horizon le dessin lui n’a plus quitté son paysage quotidien depuis les bancs de l’école où il croquait dans la marge
de ses cahiers. Contre la volonté de ses géniteurs qui n’envisagent pas vraiment pour lui une carrière d’artiste, il intègre les Beaux-Arts à Paris mais dans la section architecture ! « On était à milles lieues de ce que je m’imaginais, les cours étaient très axés sur les mathématiques et le bâtiment industriel, un registre pour lequel je n’étais pas franchement doué » Faux départ ? Il embrasse alors la carrière d’enseignant et passe avec brio un doctorat d’histoire qui l’amène à professer un temps au Gabon. Mais une fois de plus l’aventure tourne court. Il quitte le giron de l’Education Nationale qu’il juge
trop sclérosant pour celui de la justice et devient avocat à Nice : « Max Gallo fut à Nice l’un de mes professeurs, je l’ai retrouvé beaucoup plus tard quand je suis devenu son assistant parlementaire. »
Signaux indiens et écrans de fumée Rendez-vous manqués, contretemps… Jean-Jacques Ninon n’a pas pour autant abandonné ses premières amours. Et c’est dans la marge des « Clairefontaine » que son avenir semble avoir été tout tracé ! Dès la fin des années 1970 il commence à s’adonner à l’acrylique sur toile puis utilise l’ardoise. Quoi de plus
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« Une erreur d’aiguillage ! »
naturel pour cet ex-professeur dont la mère était elle-même institutrice que de réanimer ce séculaire ustensile scolaire ! « C’est une matière avec laquelle j’ai pu m’exprimer en toute liberté, elle s’avère plus ludique, on peut y mêler sans complexe images et textes. En ce moment je me consacre aux ardoises littéraires » . Un exercice de style qui a été dévoilé l’an dernier au Festival du Livre de Nice et pour lequel l’artiste a nourri une telle production qu’il projette de l’accrocher bientôt aux cimaises d’une galerie. Ses inspirations majeures : le Pop art, la Bande Dessinée et la publicité. Un médium qu’il aime détourner de son objectif pour mieux dénoncer les dérives d’une société post-industrielle sourde et muette souvent contrainte à communiquer par signes ou pictogrammes. Haro sur le Bibendum Michelin, les logotypes des consortiums pétroliers et multinationales, même les hommes d’Etat y passent (Chirac, Berlusconi). Ninon s’empare de tout ce qui lui donne matière à poser un regard décapant sur notre époque. D’autres avant lui, de Léger à Warhol, se sont servis de cette arme à double tranchant, mais la jubilation de Ninon, son plaisir à produire du sens comme à révéler l’absurdité de nos modes de vie à travers ces figures de proues consuméristes est compulsif : « Mon truc, c’est la narration, mais ce que je préfère par dessus tout c’est le bouillon de contreculture qui émane des grandes fresques
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de Erró ». Car la Bande Dessinée, et plus particulièrement les comics de l’âge d’or américain (Tarzan, Dick Tracy, Flash Gordon, Superman), c’est l’autre carquois où ce portraitiste avoue puiser la plupart de ses traits acérés.
Une Harley Davidson sous la robe ! De la sociologie à l’histoire il n’y a qu’un pas que ce professeur a franchi en publiant en 1995 aux Editions niçoises « Z », une chronique illustrée de Nice, puis deux ans plus tard, une autre sur Madagascar. Souvenirs, souvenirs ! « A l’époque on me retournait mes manuscrits avec la mention : Ce n’est pas de la Bande Dessinée, il y a trop de textes ! Aujourd’hui ce genre fait rage sous le nom de roman graphique » . Mais comment Dr Jekyll trouve t-il donc le temps de se changer en Mister Hyde ? « Quand on veut on peut ! Max Gallo se levait à 4h00 du matin pour écrire. Pour ma part, je ne mange pas à midi, le soir je travaille. Je ne pars pas en vacances et rarement en week-end ! ». Il faut au moins cela, car en dehors de son talent de plasticien qui lui valut plusieurs expositions mémorables chez Alexandre de La Salle, à la galerie de la Marine ou encore chez Ferrero où il est artiste permanent, Jean-Jacques Ninon, dessine pour la presse, et rédige le bulletin de l’Ordre des Avocats du Barreau de Nice. Bref une vie bien remplie ! Une vie qu’il traverse à cent à l’heure sur une vrombissante Harley Davidson customisée par ses soins. Sur le haut du réservoir jaune, l’emblème du Conseil de l’Ordre, juste à coté - ça pourrait faire désordre- en lettres colorées : « Ninon » comme un dernier pied-de-nez à une erreur d’aiguillage qui semble l’avoir mis, tout compte fait, sur la voie royale ! plus d’ardoises sur : www.j-j-ninon.com
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ARCHITECTE
Guy Rottier 86 ans AnarTchitecte Inventif sans limites
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Guy Rottier l’enfance de l’arTchitecture
« Je suis né en bonne santé. Et puis un jour, chez Le Corbusier je suis tombé malade. C’était la maladie de l’architecture… ». Né en 1922 en Indonésie de parents hollandais, Guy Rottier est lié à la Côte d’Azur pour avoir fait sa scolarité à Grasse. C’est durant ses études aux Beaux-Arts de Paris qu’il eut l’occasion de participer au projet de la Cité Radieuse au sein du cabinet de Le Corbusier : « Depuis, je vois la vie autrement. Car quand on quitte Le Corbusier, on est influencé, on s’y réfère pour construire… et on met ensuite des années à s’en défaire ». Les quelques rares villas que Rottier a signées sur la Côte lui doivent beaucoup, il le reconnait. Mais Guy Rottier préfère l’idée à sa réalisation, même s’il a eu un bureau à Nice dans les années 60 avec son frère François (devenu architecte lui aussi à l’âge de 50 ans). En tout cas, la malchance a toujours été au rendez-vous quand il a été question de construire en vrai : les permis de construire ont été en général refusés, le client décède entre-temps ou le crédit bancaire fait défaut …Guy Rottier le raconte aujourd’hui sans amertume, l’œil rieur : son prototype de cabanon de vacances en bois, réalisé avec Charles Barbéris, le menuisier de Le Corbusier et exposé à la foire de Nice : permis refusé. La maison construite pour Barbéris : laissée dix sept ans à l’abandon. L’usine à café fonctionnant à l’énergie solaire : les trois propriétaires belges, morts l’un après l’autre. Le Théâtre de Verdure étudié pour Aimé Maeght, où le public était sur scène et les musiciens partout : abandonné à la mort de ce
Petit blouson bleu pétrole sur t-shirt blanc, démarche alerte et oeil malicieux… Quand Guy Rottier descend de sa montagne, on croit voir arriver un jeune homme. Jeune, il l’est resté, l’esprit toujours en éveil, même s’il est aujourd’hui - à 86 ans ! - retiré dans le petit village perché de Belvédère, où il continue à rêver et inventer l’habitat du futur. dernier. L’hôtel à Peillon, où le restaurant vitré était agrandi par un jeu de miroir grâce à un kaléidoscope : permis accepté au bout de six refus mais c’est le propriétaire qui ne réussit pas à obtenir les crédits… Le comble de la malchance est sans doute atteint avec la pharmacie Soulier, qui fut bel et bien construite dans les années 60 à Nice sur l’avenue Jean Médecin : un petit local tout en longueur, avec une porte en aile d’avion, un plafond agrandi par deux disques clignotants formant un kaléidoscope et une enseigne tournante. Elle a été démolie voici quelques années pour être remplacée… par une banque ! Heureusement, Guy Rottier est d’un naturel libertaire : « j’avais une liberté totale de pensée mais les gens ne suivent pas ». C’est pourquoi il choisit « l’architecture buissonnière ».
AnarTchitecte « Ce qui m’a permis d’inventer, c’est que je ne me rattache pas au passé mais à l’avenir ». Sa première invention marquante, et son premier succès dans les médias internationaux, sera sa « maison volante » ou du moins à hélice, en forme d’hélicoptère, qui fut exposée au salon des Arts Ménagers de 1964 : plus besoin de permis de construire, ni d’être propriétaire, c’est la maison qui se pose où elle veut. A la suite de quoi il rencontre Michel Ragon, qui l’admet dans son GIAP (groupe international d’architecture prospective) et lui consacrera vingt pages dans son « Histoire mondiale de l’architecture prospective ».
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C’est à cette époque également qu’il rencontre Bernar Venet et se retrouve mêlé à l’aventure de l’Ecole de Nice. Il connaît déjà César pour l’avoir côtoyé aux Beaux-Arts et participe bientôt aux réunions du groupe à Nice au café Le Félix Faure, où se retrouvent Arman, Gilli, Ben… C’est ainsi qu’il proposa à Arman un projet de maison enterrée qui séduisit le Maître. Sur un terrain en pente douce, Rottier fait creuser pour enterrer la maison « comme un sous-marin ». La pièce principale comporte plusieurs piliers recouverts de miroirs pour agrandir l’espace, et les chambres d’amis sont de petits modules extérieurs qui se transportent grâce à un treuil. L’histoire finira « en catastrophe » suite à l’intervention d’autres architectes. Car Guy Rottier part pour la Syrie, puis au Maroc, où il enseignera l’architecture durant 18 ans. Un statut qui lui permet de poursuivre ses projets novateurs, poétiques, un brin farfelus, pleins de fantaisie mais toujours réfléchis : la maison en forme d’escargot qui s’agrandit à la demande, la maison qui se transporte sur des câbles, la maison en carton qu’on brûle après usage, la maison de terre dont l’extérieur est un jardin, la maison qui roule, la maison éolienne … Et encore le village-autobus, la ville-maison où des capteurs solaires répartissent la lumière où elle est nécessaire…
Il n’est abonné à aucune revue d’architecture pour ne pas être influencé, il trouve ses idées en regardant autour de lui, dans la rue ou à la télévision. La conquête de la lune et l’idée qu’un cosmonaute habite 100% de l’espace, lui inspirera par exemple la maison qui roule, un cylindre habitable reposant sur un peu d’eau. Et si au final, il a peu construit, il a participé à ce jour à 130 expositions et ses maquettes voyagent encore, de New York à Taiwan en passant par Paris ou Nice : le FRAC d’Orléans, spécialisé en architecture prospective, en possède 22 et le MAMAC de Nice une, visible dans la salle Ecole de Nice. « Pour moi, tout ce qui est fait pour l’homme est de l’architecture, même un paquebot… Trop souvent, l’urbanisme moderne oublie l’humain ». Humain, très humain, tel est Guy Rottier, un architecte-artiste qui voudrait humaniser notre futur.
A lire absolument Guy Rottier, ArTchitecte, avec la complicité de Véronique Willemin, aux éditions Alternatives : 126 pages de textes, dialogues, témoignages richement illustrés de dessins, croquis, maquette, BD, photos, qui retracent son parcours et ses rêves (2008, 25 euros).
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Hugues Lagarde 49 ans Né à Monaco par accident Objectifs : le nu et l'architecture
Photographe
Hugues Lagarde le plus simple appareil ! Tombé sous le charme de Nice, Hugues Lagarde s’y est établi voilà 13 ans. Après avoir abordé la photographie sous tous les angles, il braque son objectif sur l’architecture et les nus féminins, histoire de garder la ligne tout en changeant de peau !
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© Hugues Lagarde
© Hugues Lagarde
ugues Lagarde aime à dire qu’il est né par accident à Monaco suite à la déficience des amortisseurs de la 4 CV de son père qui a contraint sa mère à accoucher d’urgence à l’hôpital Princesse Grace : « Pour l’anecdote, je naquis le jour où le Shah d’Iran offrit deux lions à Grace Kelly ». A 13 ans, au grand dam de ses parents, il préfère s’acheter un appareil photo au lieu d’une mobylette. C’est le drame ! Trois ans plus tard, le mal empire, il gagne les Beaux-arts de Nantes puis l’ESRA à Paris. Les coulisses du rêve il les pénètrera d’abord en tant que photographe de plateau, puis comme assistant de photographes de mode au sein de deux grands studios parisiens « Pin Up » et « Clic-Clac » - tout un programme ! A son tour, il embrasse la carrière en intégrant à 27 ans « Figaro Madame » où il œuvrera à un rythme d’enfer pendant 4 ans. Pas son meilleur souvenir ! C’est sur l’entremise d’un ami de son père qui est architecte qu’il contractera le virus qui le poursuivra au fil de ses pérégrinations.
« Le seul projecteur, c’est le soleil ! »
© Hugues Lagarde
Quelques doubles pages dans Vogue, la récompense suprême, ça se mérite ! C’est à Nice que Hugues se pose en 1995 un
peu lassé du nomadisme imposé par la photo de presse et de publicité qu’il pratique intensément de 1990 à 2003. Comme beaucoup il est séduit par la lumière du sud et cite volontiers Jean-Lou Sieff : « le seul projecteur c’est le soleil ! ». Les sunlight rangés aux placards, pour ce grand voyageur, collectionneur d’éphémère, il est plus que temps de revenir à Ithaque : « La lumière est ici bien particulière. Après toutes ces années, j’ai enfin compris pourquoi. Le soleil ne se couche pas dans la mer, mais derrière. Exactement comme à Marrakech. De plus, Nice m’inspire en boucle. On peut se sentir ici au Maroc, aux Etats-Unis, parfois même en Autriche, en Australie ou en Afrique. Cette ville semble vraiment douée d’ubiquité ! ». Parmi les lieux qui l’ont marqué : « la Réserve » qu’il a immortalisée non sans avoir fréquenté assidument son plongeoir-restaurant. « Un vrai vivier que cette ancienne réserve à poissons où j’ai rencontré des gens merveilleux comme le dessinateur Jean-Marc Eusébi et parfois de jolies méduses qui ne vivent pas que dans l’eau ! ». Hugues a également participé à la résurrection du Palais de la Méditerranée, une autre figure de proue de la Baie des Anges « La réalisation des photos pour la communication du Palace fut un vrai Paris-Dakar dont
je garde un excellent souvenir ». Quant aux galets et au ressac bedonnant qui anime son rivage il leur a dédié une série de clichés. Tout en continuant à honorer des commandes parisiennes, il aime attarder son regard sur Nice qui même en pleine mutation ne se coupe jamais de ses racines.
Le nu, pour se débarrasser du reste ? A l’approche de la cinquantaine, Hugues sent le besoin de faire le point et d’explorer désormais autant le fond que la forme. La série de portraits de célébrités, commandée par France 2 et parue dans Libération, lui aurait-elle redonné le goût du face à face avec ses contemporains ? Sur les 365 portraits publiés par le journal, il en réalise à lui seul 180, dont Isabella Rossellini, Alberto Moriava, Philippe Stark, Gérard Depardieu, Andrée Puttman etc. Sur cette lancée, il vient d’immortaliser à Nice Matali Crasset, l’architecte du Hi Hôtel, et la designer Stéphanie Marin à l’origine des emblématiques coussins-galets. Mais chassez l’architecture, elle revient au galop : « Je veux la traiter cette fois sous un angle plus affiné, y mettre de l’émotion, des sentiments » affirme celui qui a glissé de l’univers de la décoration pour se rapprocher des architectes, et cela dès 2005, via une commande pour la Fon-
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© Hugues Lagarde
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© Hugues Lagarde
Betty Bop Collection Hiver 2008/2009
Page de gauche :
Domaine des Andéols
David Halliday et Philippe Stark vus par Hugues Lagarde
et Hugues Lagarde
Papillon de Nuit Travail personnel
Nu Féminin, 2008
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dation Le Corbusier. « Un nouveau projet doit m’amener l’an prochain à explorer la symbiose entre culture islamique, africaine et développement durable ». Parallèlement, l’art du nu s’impose à lui. Il se sent prêt cette fois à s’investir dans cet exercice qu’il avait déjà abordé mais sans en cerner vraiment toutes les contingences : « J’ai commencé le yoga en même temps, par hasard. Il faut apprendre à contrôler ses émotions, ne pas se laisser envahir par l’instinct. Seulement dans ces conditions on peut capturer la quintessence des sentiments que le corps peut dévoiler ». Rien ne vaut la peau ? Elle habille en tous cas l’âme comme la pierre abrite la vie des hommes. Une sorte d’épure où les lignes, et les courbes féminines, qui évoquent au passage les rondeurs chères à Matisse, en disent plus qu’un long discours.
Et si Hugues Lagarde voit en Nice une muse et « parfois une garce au grand cœur », il ne peut s’empêcher de regretter que le potentiel de la cinquième Ville de France ne soit pas plus exploité : « Il y a ici un nombre impressionnant de photographes talentueux, presque autant qu’à Paris ! Je rêve d’un événement autour de la photo qui fédère vraiment toutes ces individualités ». Si l’an dernier ses photographies sur le Maroc ont été exposées à la Note Bleue à Monaco, il souhaite réaliser son prochain accrochage à Nice : une quinzaine de nus en noir et blanc qui s’émancipent du diktat de la chair à l’image d’un artiste qui semble se débarrasser aujourd’hui de tout ce qui a accompagné le premier chapitre de sa carrière.. www.hugueslagarde.com OM
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Filles à fil Deux jeunes stylistes niçoises ont sorti leurs griffes. Alexandra Ferrarini et Emmanuelle Esther n’ont pas encore 30 ans et font naître dans un cocon de soie ou de laine les lolitas du nouveau millénaire. Deux parcours qui se croisent comme des mailles, deux filles, nées en même temps que la génération punk, qui puisent aujourd’hui avec un zeste de provocation et beaucoup de gourmandise, dans la matière brute toute leur fantaisie couturière !
Alexandra Ferrarini et Emmanuelle Esther sont nées à Nice à deux jours d’intervalle - l’une le 11, l’autre le 13 juin 1979 - au moment où l’Angleterre montait sa nourrice en épingle et où les crêtes hérissées narguaient le traditionnel melon gris-muraille. Si leurs cursus sont différents, l’ombre d’une grand-mère rivée à la machine à coudre plane encore dans leurs bagages de stylistes. L’une tricote, l’autre coud. Emmanuelle n’a pu résister à l’appel de la laine, Alexandra au cri de la soie ! Et comme si cela ne suffisait pas, nos deux modélistes « mono-matière» dont les créations sont suivies à Nice par la boutique « Les Fées de la création » quittent parfois leurs ateliers, l’une pour le « Street art » l’autre pour l’illustration… Filature de deux petites mains décidément insaisissables !
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D’Emmanuelle Esther à E m a T r i c opat h e
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Pelotes, aiguilles à tricoter, dés à coudre, on croyait ces biens paraphernaux définitivement tombés pour la France avec la révolution sexuelle… Pas si vite ! Emmanuelle Esther dépoussière la quenouille pour redonner à la laine une seconde jeunesse. Contre sa fonction vitale, elle joue l’esthétique et la dérision. A tout prix se rendre inutile…et si, en 2008, le superflu était devenu plus que jamais l’essentiel ?
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’est grâce à un père tapissier décorateur et une mère diplômée en couture qu’Emmanuelle Esther découvre dès le plus jeune âge les mystères de la Singer. Au sortir d’une école de couture, elle crée une collection de sacs à mains avant de céder à l’appel de la laine. C’est dans une grande mercerie niçoise franchisée « La Droguerie » où elle travaille, qu’elle redécouvre toute la magie de ce monde fait de pelotes girondes et moelleuses et d’écheveaux de mohairs entrelacés. Une obsession héritée de sa grand-mère. Et comme envoutée par cette matière à rêver qu’elle aime toucher comme on caresse un chat, elle se met à l’ouvrage ! Point mousse ou jersey, elle signe d’abord « Emmanuelle Esther » des vêtements à taille unique. Puis des plastrons, ceintures, des robes dos nus pour des petites filles modèles qui sont souvent ses propres copines, des accessoires décalés pour « chat beauté », des nœuds papillons pour gentleman « border line », qui se changent en mini-bagues douillettes ou en gros
nœuds à cheveux malicieux pour quelques Alice égarées entre le pays des Merveilles et un épisode de « Sex in the city ». Mais plutôt que d’ouvrir une boutique et de subir les contraintes financières et créatives, elle décide d’installer sa vitrine sur « My Space » : « L’univers du tricot, ce n’est pas très commercial, mais en vendant mes pièces uniques sur commande et en ligne et certains accessoires chez Les Fées de la création, ça marche. En tous cas je partage avec Alexandra le fait que l’argent ne soit pas une priorité, nous ne sommes pas des working girls cousues d’or ! ». Et pourtant les demandes affluent sur le net en même temps que le cercle de ses fans s’élargit… Dans le même temps Emmanuelle va se changer en Ema Tricopathe en découvrant, via une bande de jeunes américaines énervées, le mouvement « Knitta Please ». L’idée est simple. Ces dernières s’emparent de l’espace public en tricotant clandestinement son mobilier urbain : « Bergère de France
© E. Esther
© E. Esther
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Collection Hiver 2008/2009
FIL DE PAS DI
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les avait invitées pour une performance à Paris ». L’appel de la rue est le plus fort ! Ema Tricopathe ne peut y résister. A ce jour elle a maillé plus d’une centaine de spots en ville avec une préférence pour les feux tricolores : « C’est ce que l’on voit le plus ! ». Pour ces commandos laineux, elle devient Tricopathe après les douze coups de minuit. Ce n’est pas du vandalisme lui a confirmé à potronminet un employé municipal : « Vous n’abîmez rien et ça s’enlève d’un coup de cutter !». Trop vite à son goût « la plupart ne tiennent pas plus d’une semaine voire trois jours, regrette-t-elle, mais c’est la règle du jeu !». Ema Tricopathe a-t-elle inventé le nouveau tag urbain ? C’est en tous cas un tag de nanas tout en douceur qui vient de naitre avec succès à Nice, au point même que certains « graffers »
lui aient demandé de revêtir de laine leurs bombes de peinture ! www.emmanuelle-esther.com et myspace.com/emmanuelleesther
La route de la soie © J-Ch Dusanter
d’Alexandra Ferrarini
C’est à partir de tissus vintages des seventies ou de l’Inde traditionnelle qu’Alexandra Ferrarini renouvelle le « sex appeal » des jeunes filles modernes. Revival ? Pas vraiment car sa ligne de vêtements O+ wear se contente de sampler ce patrimoine culturel comme n’importe quel Dj, l’esprit est ailleurs !
«E
st à la mode que ce qui a été oublié ! » disait Marie-Antoinette, cette maxime Alexandra l’a faite sienne pour insuffler un zeste de subculture dans une mode qui ressuscite la lolita en version sexy, zen et minimale. « Ma grand-mère confectionnait tous mes vêtements et je l’aidais. Dès l’âge de 21 ans j’ai été rattrapée par la couture, mais je voulais réaliser mes vêtements de A à Z, ne pas être techniquement dépendante ». Alors à 19 ans la jeune niçoise s’offre une échappée belle dans la Capitale. Sept ans plus tard elle revient au bercail pour y lancer sa propre griffe : « Quand je suis partie de Nice, je maudissais cette ville. Aujourd’hui je la
redécouvre, les choses ont évolué ici et puis il y a cette lumière qui inonde mon atelier. Même à l’intérieur, j’ai l’impression d’être à l’extérieur, c’est l’idéal pour travailler, loin des pollutions parisianistes de la mode ». Mais de la furie de « Panam » elle ramène une formation de modéliste et un séjour chez la styliste « Vanessa Bruno ». Un savoir-faire qui, grâce à une bourse et un parrainage - qu’elle obtient en décrochant en 2006 le « défi jeune » - lui permet de lancer le concept O+ wear. Une première collection est présentée en mars 2007 au « Volume » à Nice, lors d’un défilé- concert qu’elle organise avec Emmanuelle Esther alors en
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stage dans son atelier. Les deux stylistes niçoises partagent en commun l’amour de la matière : « Je puise l’inspiration de mes modèles à partir de tissus chinés. En ce moment je travaille sur de longs saris ramenés des Indes. Comme ils font 7 mètres sur 1, 60 mètre je ne peux pas couper n’importe où. Là encore, c’est le tissu qui dicte sa loi ! ». Jersey poids plume, voiles de coton, tissus éponge façon lichen lui inspirent des vêtements à géométrie variable aussi près du corps que faciles à vivre. Quant aux imprimés fleuris ou psychédéliques, ils sont utilisés en contrepoint ou en léger patchwork « juste pour donner du rythme aux lignes épurées
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Les illustrations d'Alexandra s'inspirent souvent du Japon, un pays qui la fascine depuis sa plus tendre enfance.
qui plaisent aujourd’hui ». La ligne, tirée en édition limitée, reste évolutive et se décline ainsi sur une dizaine de thèmes grâce à des accessoires amovibles : capuches, cols ou manches. Côté influences, Alexandra qui a goûté à ses débuts aux planches du théâtre (de L’Alphabet à l’Actor’s Studio à Paris) parle volontiers de littérature, d’art plastique ou de cinéma et avoue être incapable de coudre sans écouter de la musique. Passionnée par le dessin, elle enseigne également la technologie du textile et de l’infographie à l’école Pro Artigraph à Nice où Emmanuelle fut d’ailleurs l’une de ses élèves. Sa passion du dessin l’a amenée à concevoir également des pochettes pour des albums rock. Et puis il y a le Japon ! Un pays qui la fascine depuis sa plus tendre enfance : « J’ai étudié la langue à 19 ans, et me suis immergée dans cette culture pleine de paradoxes via ses mangas et sa littérature ». Sa collection puise d’ailleurs toute son essence spirituelle dans le Nanga : « Un mouvement pictural nippon du XVIIème siècle qui vise à s’affranchir des écoles pour privilégier l’interprétation libre de la nature » explique-t-elle. Et c’est libre comme l’air que la ligne O+ wear a investi depuis deux ans des boutiques à Londres, Paris, la Hongrie, et Nice. Mais Alexandra garde la tête froide, elle veut continuer à réaliser son travail ici, tout en continuant à tisser des liens au plan national ou international. Parallèlement à ses créations, elle vient de développer pour une autre marque une ligne de vêtements fabriqués au Népal à partir de tissus autochtones. alexandraferrarini@hotmail.com http://s94.photobucket.com/ albums/l114/alexandraferrarini/ oplus/ OM
Quelques pièces de la collection été 2008 O+ wear. Le Collier de Perles, illustration d'Alexandra.
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S A G ’ A RT : L A G A L E R I E F E R R E RO ( pa rt i e 1 )
Jean Ferrero, un curieux personnage Voix haut perchée teintée d’accent du sud et moustache virile, faconde méditerranéenne et curiosité intellectuelle toujours en éveil. Rusé et manipulateur pour les uns, attachant et désopilant pour les autres. Parlant sans relâche de son passé sans être passéiste, un ancien pauvre devenu riche et qui s’en moque … Jean Ferrero est un personnage unique, inimitable. Totalement atypique dans le monde de l’art contemporain.
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uand il reçoit chez lui dans son « bric-à-brac », il joue le modeste : « Je n’ai rien ici ! ». Rien, juste quelques broutilles, un petit Basquiat, un grand Arman, un vieux César : le personnage est tout entier dans ce contraste. Sa vie est-elle vraiment un roman, ou est-ce lui qui en est le romancier imaginatif ? En tout cas, comme il est extrêmement bavard, nul besoin de lui tirer les vers du nez : « j’ai une mémoire photographique, je n’ai qu’à ouvrir le livre, ça sort… ».
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Jean Ferrero tient dans ses mains la palette de Marc Chagall, artiste qu'il a portraituré au milieu des années 50.
Le romancier imaginatif de sa propre vie Une mère « très grande » originaire de Clans, un père de petite taille, immigré italien de fraiche date, un frère « très grand » et lui tenant de son père… C’est, si on l’en croit, cette équation qui a forgé sa personnalité et sans doute son destin. Né à Antibes en 1931 dans une chambre meublée, au hasard des pérégrinations de son père « boxeur, puis larbin pour finir maitre d’hôtel », Jean Ferrero a connu une enfance difficile où il ne mangeait pas toujours à sa faim : « ma mère faisait des ménages, mon père était
Jean Ferrero 77 ans Brocanteur de l’art Voudrait initier un large public à l’art contemporain
joueur, amateur de femmes, il n’avait jamais un rond… ». Réfugié à Clans pendant la guerre, il a 14 ans à la Libération : « c’était très dur mais on s’amusait, on était libres. On ramassait tout ce qu’on trouvait, par exemple le cuivre des robinets volés dans les villas, qu’on échangeait contre des tickets de pain… C’est là que j’ai appris à me démerder. Je suis devenu riche ensuite mais je peux vivre avec un quignon de pain ». De cette époque datent ses débuts en tant que collectionneur ou plutôt « accumulateur de n’importe quoi ». En parfait autodidacte - il a juste le certificat d’études - il dévore tous les livres qui lui tombent sous la main : « je lisais Gide ou Saint Simon en gardant les moutons … J’ai tellement lu que je serais bientôt aveugle ! ». Car Jean Ferrero a une énorme qualité : la curiosité. Curieux de tout, du « pourquoi des choses », il lit, rêve en lisant, se saoule de mots, se construisant au fil des ans une biblio-
thèque énorme, depuis la BD d’avant-guerre (Bibi Fricotin, les Pieds Nickelés, Pim Pam Poum, Pipo) jusqu’aux périodiques comme Science et Avenir ou Connaissance des Arts auxquels il est abonné aujourd’hui. Par ailleurs, sans doute pour compenser sa petite taille, il devient un fervent adepte de la boxe et de l’haltérophilie. C’est là que lui vient l’idée de « photographier ses copains musclés » mais - riche inspiration de sa part - nus en pleine nature, au milieu des pins. C’est nouveau, totalement inédit : il met quelques publicités dans la presse … Et aussitôt, le succès est immense, en particulier auprès de la communauté gay. Il en vient à vendre en Europe puis dans le monde entier par correspondance : « moi, je suis amateur de femmes mais ça ne se vendait pas » ! Anecdote croustillante : Jean Ferrero eut même un temps un assistant chargé de « gouacher » les sexes sur les photos destinées aux États-Unis. Un peu d’eau et les attributs virils cachés aux yeux des douaniers réapparaissaient comme par miracle à ceux de l’acheteur !
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Avec son 6x6, il se déplace dans toute l’Europe en camping-car pour suivre les concours du style Monsieur Univers, accumulant en 15 ans plus de 50.000 négatifs. En 1954, il est photographe indépendant avec une carte de presse, travaille pour les quotidiens la Stampa et NiceMatin, et commence à recevoir des amis artistes à son studio-domicile de l’avenue Sainte Agathe dans le quartier de Riquier à Nice. Car il a entre-temps rencontré pour les portraiturer les grands artistes de l’époque - Chagall, Miro, Fontana, Moore - et quelques débutants comme César, Arman, Farhi, Gilli ou Venet… dont il acquiert les oeuvres, difficilement monnayables à cette époque. Mais c’est grâce à ses photos de nu masculin qu’il gagne beaucoup d’argent, s’achète des maisons, des voitures de sport … et ses premiers tableaux : « d’abord du figuratif… je marche à l’instinct, au coup de cœur, j’aime le beau, la couleur, ce que l’homme fait avec ses mains et son esprit ». En 1970, il ouvre sa première vraie galerie, dans le grand appartement qu’il loue juste à côté de l’église du port. Bien que située au 4ème étage, les expositions qu’il y organise connaissent un grand
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succès : « Je voulais en faire un show-room comme en Amérique ». Bosseur, « marié avec le travail », il fait de sa galerie - qui se déplacera ensuite rue de France puis rue du Congrès - un lieu célèbre : César et Arman viennent y travailler, tandis que lui les filme. Puis s’y succédèrent Ben, Venet, Gilli, le groupe Supports/ Surfaces, plus tard Moya… Mais bizarrement, cette époque n’est pas son meilleur souvenir, même s’il se rappelle quand même ce collectionneur monégasque qui acheta pour 700 millions de francs en une heure : « j’aurais jamais dû ouvrir une galerie : c’était la fin de ma jeunesse… ». D’ailleurs, au mot de galeriste, il préfère celui de « brocanteur d’art » ou même de « mauvais marchand », rongé par le virus de la « collectionnite ». Car l’art n’est pas son seul domaine de prédilection : il collectionne également les poupées chinoises et les plaques émaillées, les vieilles caméras et les personnages de Walt Disney entre mille autres choses… Volontaire, un brin teigneux,
il se force, à 77 ans, à faire ses exercices de musculation dès qu’il ne peut « plus voir ses plaques de chocolat ». Ce qui ne l’a pas empêché d’être objecteur de conscience dans sa jeunesse, et qui lui avait valu « six mois de taule à Bordeaux Pessac » : « Je ne veux pas porter d’armes, je suis citoyen du monde - J’aime l’art car il est sans frontières ». Sous des dehors hyper-virils, Ferrero serait-il un tendre ? Ce qui est sûr, c’est qu’il a « vécu intensément » et ne regrette rien. Aujourd’hui, il lui reste son projet de fondation, actuellement en pourparlers : « c’est mon plus cher désir, cette fondation. Je n’ai pas envie de m’embêter à la construire, je cherche un lieu de plusieurs milliers de mètres carrés. L’idéal serait une construction légère, comme une usine, avec un éclairage au nord, des cloisons sans fenêtres. J’y réserverais une aile pour Arman, une aile pour César…Elle servirait à initier les gens, un large public, même les gosses, à l’art contemporain ».
Merci à Christophe CysDebeir pour ses précieuses et précises informations
www.galerieferrero.com
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Bernard Pagès © J-Ch Dusanter
le mariage des contraires © J-Ch Dusanter
Des avant-bras noueux de travailleur de force mais le regard concentré du penseur, une moustache gauloise d’origine paysanne mais le cheveu mi-long du marginal des seventies… tel apparait Bernard Pagès à qui tente de percer son mystère. Car ne comptez pas sur lui pour se confier ni faire de l’introspection : l’homme est dans l’action, seul le travail l’intéresse. Et d’ailleurs, son oeuvre parle d’elle-même, toute seule, et au plus grand nombre. Bravo l’artiste.
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’acier industriel associé à la paille campagnarde, le tronc d’arbre créé par la Nature au plexiglas issu de mélanges chimiques, le mélèze de nos montagnes au grillage de nos clôtures, le métal rouillé et tordu au galet poli par le temps … Entre ville et campagne, nature et culture, bon grain et ivraie, Pagès ne choisit pas : il oppose, confronte, fait dialoguer des éléments contraires, incompatibles. Et le miracle se produit : entre ces éléments contradictoires, un équilibre se fait malgré tout, fragile, émouvant, poétique … artistique. Bien sûr, on se prend à se demander si Bernard Pagès fonctionne ainsi dans sa vie, forcé de cohabiter avec son contraire - selon le principe des pôles opposés qui s’attirent - ou si c’est juste
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une méthode créative, une logique interne à son oeuvre ? Mais l’homme est discret, secret, sans états d’âme. Fidèle au lieu en bon terrien qu’il est, il vit depuis plus de 35 ans au même endroit, dans la même modeste maison du côté de la Pointe de Contes. Et travaille sous le même hangar ouvert à tous les vents, confrontant ses oeuvres au même paysage tourmenté de pins parasols. Apparemment peu soucieux de confort matériel, on l’imagine affrontant avec délectation le soleil cuisant aussi bien que le froid mordant. Et c’est quand il parle, avec son accent légèrement rocailleux, que se dessine le parcours d’un artiste qui réfléchit et qui sait où il va !
Trois ans de gestation silencieuse Bernard Pagès est né en 1940 dans une ferme des bords du Lot dans le Quercy. Une origine paysanne relative car, même si ses grands-parents cultivaient la terre, son père fut inspecteur pour les assurances et voyageait beaucoup. C’est cependant dans cette ferme qu’il vécut durant sept ans, entouré de ses trois frères et sœurs. Une vie campagnarde mais une sensibi-
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Bernard Pagès 68 ans Sculpteur Transfigure la laideur en beauté
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lité à la chose artistique, qui le poussera vers la Capitale, avec l’idée de se perfectionner en peinture. Mais, sans doute pas assez « beau parleur », il se fait recaler à l’oral aux Beaux-Arts de Paris… et « trouve refuge dans l’atelier d’art sacré, place Furstenberg, où enseigna auparavant Maurice Denis, et où un prof enthousiaste lui ouvre des horizons ». C’est donc par la peinture qu’il commence sa vie d’artiste, avant de se marier à 24 ans, et de venir s’installer dans le Midi, la région natale de sa femme. D’abord dans le petit village perché de Coaraze, où, comme il a de l’espace, il peut démarrer la sculpture. Car entretemps, il a découvert Brancusi, ou du moins son atelier parisien reconstitué après sa mort : une sculpture « faite dans la matière » qui lui parle, lui semble moins conventionnelle et plus accessible. Et surtout car il a reçu, dès son arrivée sur la Côte, le choc des Nouveaux Réalistes, lors d’une exposition aux Ponchettes à Nice fin 1966. Et s’il juge les accumulations d’Arman un peu « scandaleuses », c’est Martial Raysse qui l’éblouit et le réconcilie avec la Côte d’Azur. Et surtout Yves Klein, avec sa façon si novatrice d’utiliser les éléments de la nature, l’air, le feu … Bien lui en a pris de s’établir à Coaraze, car c’est là qu’il rencontre le critique d’art Jacques Lepage puis, tous les grands noms du mouvement Supports/Surfaces (Saytour, Viallat, Dezeuze, Dolla…), avant de participer à l’historique exposition de 1969 dans le village. Bientôt, il quitte Coaraze pour La Pointe de Contes, « un endroit plus commode d’accès pour les semi-remorques » et où il est encore aujourd’hui. S’ensuivent trois années de travail acharné et d’expérimentations à l’abri des regards : période féconde où il collecte des matériaux, tente des expériences, expérimente des combinaisons, des séries, des classifications, des agencements… Par exemple, il récolte des morceaux de fils de fer puis les nomenclature selon les différents types de ruptures, de jonctions, de ligatures. Ou encore combine des éléments « identiques en quantités, formats et volumes mais faits de matériaux opposés ». Bref,
il s’impose des « règles indispensables » qui lui serviront ensuite de « canevas de travail ». Toute son oeuvre en découle, même si ces principes se sont par la suite assouplis. Lors de l’été 1975, et après avoir fait beaucoup de petits boulots pour vivre, il décide de « ne plus jamais travailler pour quelqu’un ». C’est de cette année que date sa première exposition personnelle importante à Paris, qui sera suivie de beaucoup d’autres. Parmi les plus mémorables, celle de Beaubourg (hiver 1982-83), celle du CAPC de Bordeaux (1984-85), puis du MAMAC tout récemment, qui lui a demandé pas moins de deux ans de travail. Dès 1976, il se fait remarquer par la critique : Pierre Gaudibert dans Art Cahiers, puis Lamarche-Vadel, Yves Michaud, Xavier Girard … Grâce à la loi Lang du milieu des années 80, les commandes publiques affluent : université de droit d’Aix, lycée de Menton ou de Vence, palais de justice d’Epinal, BMVR de Marseille … sans oublier, en avril 2007, « Vent debout », rond-point des Baraques sur la commune de Nice …
Un atelier à la campagne Aujourd’hui, ses convictions esthétiques n’ont pas varié. Son oeuvre reste « hantée par la mémoire du monde rural », selon la belle expression de Xavier Girard. Mais avec une ligne directrice, une « épine dorsale » forte, à l’image de cette oeuvre gigantesque réalisée par l’artiste en 1984 et pièce maitresse de la rétrospective du MAMAC en 2007. Car Bernard Pagès ne laisse rien au hasard, aime l’ordre. Si ses outils sont « rudimentaires », il les veut bien rangés, alignés, faciles d’accès, à l’abri de la pluie. Même s’il est aujourd’hui aidé par un assistant, et qu’il s’agit souvent de restaurer des pièces anciennes (dévisser, démonter, remonter), le travail reste pénible, difficile, physique. On l’imagine passant toutes ses journées sous son hangar en plein air, dimanches compris, à scier, forger, meuler, percer, poncer, tordre, enduire de peinture … Sans oublier de « réfléchir, trouver des solutions » car « c’est un travail qui se régénère constamment, qui n’est pas entaché par l’usure ou l’ennui ». D’autant plus que, se fiant à la logique des matériaux - des matériaux bruts, prélevés dans notre environnement naturel ou industriel - il improvise, sans savoir à l’avance comment la sculpture va finir. De même, le titre de l’œuvre ne vient qu’après coup : les trois Grâces, la Torse, L’échalier, l’Echappée, la Matrone, les Cariatides, l’Acrobate, les Houppes, les Fléaux, les Surgeons et les Flamberges, le Dévers, le Pal … Entre références à la figuration ou à la ruralité, Bernard Pagès transfigure la laideur en beauté, le plomb en or. Comme un alchimiste… Existe-t-il une plus belle définition de l’artiste ? http://www.documentsdartistes.org/artistes/pages/repro.html
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Quand le TNN
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en scène
Daniel Benoin
sort de ses gonds ! Daniel Benoin est metteur en scène, auteur, comédien et depuis le 1er janvier 2002 directeur du Théâtre de Nice. Il est à l’origine de la création de la Convention Théâtrale Européenne et du Centre Européen de la Jeune Mise en Scène, Vice-Président de l’ACID (Agence pour la Création et l’Innovation dans la Décentralisation dramatique). Il a fondé l’Ecole Nationale d’Acteur de la Comédie de Saint-Etienne et plus récemment le Forum du Théâtre Européen. Un parcours aussi brillant qu’atypique pour celui qui est venu tardi-
Vous êtes depuis 6 ans à la tête du TNN. Avez-vous atteint les objectifs que vous vous étiez fixés ? Nous sommes passés de 2700 abonnés à 12 000, de 110 représentations à 350, de 16 spectacles à 70 et enfin de 1 à 7 créations par an. Cette révolution quantitative et qualitative participent au rayonnement du TNN à Paris ou ailleurs. De plus en venant ici je voulais combattre l’ostracisme dont est victime Nice, une ville étonnante qui mérite que l’on ait pour elle des ambitions internationales ! Théâtre, cinéma, télévision, écriture, comment expliquez-vous votre parcours ? En fait je n’ai jamais suivi aucun cours artistique, sauf en musique classique, où j’étais nullissime, et la peinture que j’ai abandonnée à 16 ans. Je suis arrivé au théâtre en désespoir de cause. N’ayant pas eu de formation spécifique, je me suis ouvert rapidement à tout, étant très visuel et onirique cela a influencé mon approche du théâtre qui repose sur l’interpénétration des formes artistiques. Les nouvelles technologies n’ont-elles pas creusé l’écart avec le monde du théâtre ? J’étais résolument contre la présence d’images vidéo ou d’un micro sur scène. Aujourd’hui, l’envahissement est tel que l’on doit s’en servir si l’on veut rendre compte du monde. Pendant vingt ans, je trouvais que le théâtre ne devait géné-
Daniel Benoin Homme de théâtre passionné de cinéma Rock-star contrariée
vement au théâtre. Quand il quitte la direction de la Comédie à Saint-Etienne, sa soif de découvrir le Sud de l’Europe le fait d’abord hésiter entre la Cité phocéenne et la Baie des Anges. En optant contre toute attente pour le TNN il crée la surprise. Une décision qui repose selon lui sur un constat très simple : « le potentiel de développement à Nice était énorme, celui de Marseille quasi nul, et l’avenir m’a donné raison, la Criée est en régression et le TNN est devenu depuis 2004 le premier théâtre de France ».
rer que des images frontales, désormais c’est un rapport plus subtil entre le spectateur et l’acteur qui m’intéresse. Tout ça a commencé avec mon adaptation du film Festen… A ce propos vous avez adapté à la scène de nombreux films. D’où vient cette envie ? Je trouve que le cinéma qui est un art du réel suscite des sujets ou des prises de positions plus engagés qu’au théâtre. Que le 7ème Art m’inspire aujourd’hui ce n’est qu’un juste retour des choses, car pendant longtemps il s’est inspiré lui même du théâtre que ce soit avec Carné, Guitry ou Renoir. Depuis la nouvelle vague le phénomène s’est inversé. Le déclic est venu lorsque l’on m’a proposé d’adapter « Autant en emporte le vent » au théâtre Marigny avec Alain Decaux qui a travaillé sur les spectacles de Robert Hossein. L’adaptation ne m’a pas emballé mais en relisant le roman j’ai accepté et repris mot à mot les dialogues du film. Ce ne fut pas un succès international mais cela a fonctionné. Comment passe-t-on de l’un à l’autre tout en respectant l’intégrité de l’œuvre ?
Il n’y a pas de recettes. « Faces » était au départ une pièce écrite par Cassavetes mais elle était moins intéressante que le film dont je suis parti pour faire mon adaptation. Dans ce même esprit je vais confier à des réalisateurs le soin de monter à Nice leur première pièce, Christophe Baratier réalisateur des Choristes ouvre le ban cette saison, c’est un ami de longue date, je joue un rôle dans son prochain film Faubourg 36. Y a-t-il des œuvres cinématographiques qui vous séduisent particulièrement ? J’ai revu récemment « Lost Hightway » de David Lynch, on ne peut pas faire plus cinématographique, mais cela ne m’a pas empêché de penser que cela ferait une belle pièce. Je voulais m’attaquer à une œuvre de Kaurismäki il y a quelques années mais mon travail n’était pas abouti. « Reservoir Dogs » eût été plus facile mais ce qui m’intéresse dans cet exercice, c’est aussi le challenge… La mise en scène cinématographique, ça vous tente ? J’ai déjà fait un film, j’adore ça mais le problème c’est que ça m’a pris deux ans et qu’il vaut mieux faire ça à 28 ans qu’après 55 ans. Mais il n’est pas exclu
en scène
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Nous accueillons ainsi une quarantaine de spectacles qui vont du plus populaire comme celui avec Fabrice Luchini au plus pointu tel Kliniken ou Marie Stuart. Et puis il a des spectacles non théâtraux. Je mets moi-même en scène de l’opéra et des chanteurs de rock depuis longtemps.
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que je m’y remette, j’ai un scénario sous le coude. En fait je rêve depuis toujours de mener de front théâtre et cinéma, mais pour cela il faudra certainement attendre que je ne sois plus directeur de théâtre ! Quel est la différence entre le théâtre et le cinéma ? Le cinéma est un art du réel, le théâtre celui de la transposition. Alors que le cinéma est moderne et multiple, le théâtre est lui unique, archaïque et éphémère, c’est pourquoi il est vital de trouver des formes de modernité pour ne pas être enfermé par ces contraintes. Comment attirer la nouvelle génération vers le théâtre ? Pour la nouvelle génération le théâtre, c’est quasiment de l’exotisme. Moi qui n’aime pas les publics univoques, j’ai accepté de créer des séances l’après-midi
pour les lycéens. Et ça marche sur dix élèves ont en convainc un, mais trente ans plus tard il revient ! C’est un antidote au tsunami d’images dont les premières victimes sont les plus jeunes. J’ai compris qu’il y avait urgence quand mon fils de 4 ans qui est un fan de PlayStation, m’a demandé un jour que nous étions en voiture, en troisième position dans une file, à quel niveau du jeu j’en étais ?… Aujourd’hui vous lancez le Forum du Théâtre Européen, vous hébergez Le Festival d’Art russe depuis huit éditions, collaborez avec L’Opéra, Le Printemps des Arts, le Festival Manca, accueillez même des concerts de rock, vous semblez vouloir repousser les murs du théâtre ? Un Centre Dramatique National tel que celui de Nice est un formidable outil de culture. Il faut fédérer de toutes parts.
Le rock dans un Théâtre National ce n’est quand même pas banal ? C’est ma génération, d’ailleurs, rock-star ça m’aurait bien tenté aussi ! C’est ce que je me suis dit en montant « Cache ta joie », un spectacle sur le rock que j’avais commandé à Jean-Patrick Manchette. Cette saison j’ai la chance de monter « Rock’n roll » d’après Tom Stopard qui raconte la chute du communisme en Europe de 1968 à 1990 et en parallèle l’évolution de cette musique sur la même période. On la jouera trente fois dans la salle puis ensuite au Théâtre du Rond-Point à Paris. Cette pièce fait partie de nos sept créations actuelles avec L’Iliade, Macbeth et les 3 pièces inspirées par des auteurs niçois, un nouveau concept inauguré cette saison. C’est ce type de production 100% made in Nice, qui valorise le TNN au-delà de son territoire. L’avenir du TNN ? Faire de Nice une plateforme du théâtre en Europe. Dans ce sens nous avons décidé avec la ville de créer le Forum du Théâtre Européen. Il y aura des intervenants prestigieux comme Umberto Eco, la venue de nombreux critiques internationaux. Je pense que d’ici quatre ou cinq ans on aura réussi ce pari. Alors peut-être qu’à ce moment là, je pourrais faire mon film (rires) ! Programmation 2009 du TNN : www.tnn.fr OM
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E N M USIQU E
Cinémix Danse avec les loops :
Godard, Truffaut, Tati, Oury réunis au même générique, Fantômas, Rabbi Jacob, Monsieur Hulot et Pierrot le fou invités à la même « party » ! C’est le pari lancé par un jeune niçois, Frédéric Elalouf à la ville, Vj Oof à la scène, Monsieur Cinémix pour tout le monde ! Frédéric Elalouf est Dj (Disc jockey) comme son frère, David, fondateur du Festival Nuziq dont la cinquième édition s’est déroulée en juin dernier au Théâtre de Verdure et à la Villa Arson. Dans la Capitale, où il débarque il y a quelques années, Frédéric s’occupe de la promotion de labels pour l’association Ping-Pong lorsqu’Universal Jazz lui propose en 2004 de superviser la production d’un album d’un genre particulier. Mission : revisiter avec les meilleurs performers électro du moment la collection « Ecoutez le cinéma » : 40 Bandes Originales de films français des années 196070 inscrites au prestigieux catalogue de la maison.
Le boum de la B.O.F Après avoir été séquestrée dans les bacs spécialisés des disquaires, la musique de film sous l’impulsion des disques de « trip hop » dont ceux de Portishead a brisé ses chaînes pour devenir un genre avec pignon sur rue. Ironie du sort, c’est grâce à ce saucissonnage savant que les originaux ont fini par prendre le pas sur leurs samples et que le génie de compositeurs tels qu’Ennio Morricone, John Barry ou Nino Rota a pu venir à la rencontre du plus grand nombre et sensibiliser toute une génération pour qui Pierre Tchernia ou Frédéric Mitterrand ne sont que d’aimables dinosaures. Universal qui a flairé le filon décide alors de mettre au régime cinématique ces grands compositeurs français qui ont su marier l’écriture pop aux contingences de la dramaturgie fictionnelle. Michel Magne, Serge Gainsbourg, Charles Dumont, François de Roubaix, dont le thème de « Dernier domicile connu » a déjà été samplé par Robbie Williams, n’échappent pas à la cure de jouvence. Un coup de jeune qu’une dizaine de compositeurs de la scène électro convoqués par Frédéric Elalouf (dont Sporto Kantes,
Troublemaker, Rubin Steiner ou les Sofa Surfer) donneront aux Bandes Originales de Films de Pierrot le fou, de Trafic, de La folie des grandeurs ou de Fantômas. Mais une autre surprise l’attend ! Lors de la soirée de lancement de l’album, il réalise un remix en live des extraits de ces films sur leurs B.O.F revisitées. Et là, ô Miracle ! : le cocktail images & sons, passé au tout numérique, accouche d’une nouvelle mixture aussi rafraîchissante que revigorante : le Cinémix !!!
«Disco-Cinérama » De directeur de production, Frédéric Elalouf devient alors l’artiste de «Ciné Oof-Cinémix « une sorte de « ciné-rave party » de 90 minutes projetée parfois sur 3 écrans simultanément et avec laquelle il taille la route de clubs en salles obscures : Berlin, Paris, Belfast, Copenhague, New York, Mexico, la Chine, la Thaïlande, le Japon. « La musique, n’occupait alors que 10% du film, au Cinémix elle passe à 50 %, ce n’est plus du papier peint, c’est de la sculpture ! ». Sur le même concept le Dj devenu Vj (Vidéo jockey) creuse le sillon en créant une quinzaine de « cinéclips ». Des bandes annonce traitées « Found Footage » et synchronisées comme une comédie musicale sous acide sur leurs B.O.F revitalisées. Belmondo et Omar Sharif dans « Le casse », Louis de Funès en homme orchestre, Lino Ventura dans « Dernier domicile connu » retrouvent tout leur punch…De quoi ébranler la cinémathèque de papa tout en jetant une passerelle entre les générations. Car Vj Oof vient d’offrir sur un plateau aux enfants du web un patrimoine réservé jusqu’alors aux « baby boomer ». Alerté par cette résurrection providentielle, le 7ème Art lui fait les yeux doux. Il est contacté par les enfants de Robert Enrico, de José Giovanni, la famille de François
de Roubaix lui demande de réaliser un « cinéclip » pour le 30ème anniversaire de la disparition du compositeur. Puis l’Office National du Film Canadien lui donne carte blanche afin de remixer l’œuvre de Norman Mac Laren (1914-1987), l’un des pionniers de l’animation. Une sorte de Méliès américain couronné d’un oscar en 1952 : « Le cinéma sans caméra, c’est lui ! Il peignait sur les rushes, grattait les bandes son, ce qui produisait des blancs et des effets électro avant l’heure ». Pendant quatre mois, reclus dans son laboratoire tel le Dr Frankenstein, Frédéric découpe, monte, remixe avec des samples d’Aphex Twin, Wagon Christ ou Noze pour accoucher du nouveau monstre : 14 « cinéclips » qui depuis 2007 tournent de l’Australie à la Nouvelle Zélande via le Canada, du Centre Pompidou au Festival Nemo en passant par ici : Le Hi hôtel, le Théâtre de Verdure et le Short Film Corner du Festival de Cannes L’accueil est tel pour ce « Disco cinérama » qui se joue des frontières linguistiques, que, son géniteur a fait depuis 5 ans plus de 300 dates aux antipodes, soit 1 par semaine ! « A Roskilde nous avons fait danser 150 000 danois de 7 à 77 ans ! Cet été j’étais en Serbie, au Mexique et en Israël. En septembre au Château de Fontainebleau en partenariat avec le Palais de Tokyo ». Le secret de Vj Oof ? Le cinéma avait une tête, il lui a donné des jambes !
Se renseigner sur les dates de « CinéOof-Cinémix » en contactant l’association 49, Rue de Rochechouart 75009 PARIS Tel 01 48 78 12 79 www.myspace.com/cinemix
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Depuis 3 ans, “C’est pas classique ! “, organisé par le Conseil général des Alpes-Maritimes, offre pendant 3 jours à Nice Acropolis une programmation gratuite de concerts, ateliers et spectacles sur le thème de la musique classique.
Quand Quand les les
musiques actuelles s’invitent s’invitent àà
“C’est pas classique !”
Pour cette 4e édition, le Conseil général propose un concours ouvert à tous les DJ et musiciens. L’objectif : créer 20’ de mix original à partir d’une matière première musicale issue de 30 œuvres classiques. Les candidats devront intégrer à leur mix au moins 5 extraits d’œuvres différentes de cette liste. L’utilisation et la longueur de ces extraits sont libres. Pour participer à ce concours, il vous suffit d’entrer en contact dès à présent avec la mission des musiques actuelles de l’ADEM 06 qui vous fournira les 30 morceaux classiques utilisés pour cette manifestation. Le dépôt des projets se fera au plus tard le 24 octobre 2008 et un jury se réunira le 27 octobre afin de sélectionner jusqu’à 4 projets qui seront présentés dans le cadre de “C’est Pas Classique !”. Les lauréats retenus recevront une somme de 750 euros TTC. Contact : ADEM 06 Mission Musiques Actuelles 455, Promenade des Anglais Immeuble Arénice - 06299 Nice cedex 3 Tél : 04 93 72 47 60 - Fax : 04 93 72 31 95 vcorbier@adem06.com