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Ghiwa Sayegh

Créer nos archives, transmettre nos histoires de lesbiennes et queers raciséEs

Un dialogue avec Paola Bacchetta et Nawo Crawford GHIWA SAYEGH

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Ghiwa : Quelles sont les multiples histoires derrière Fireflies: Lesbian of Color Archival Enactments in France, 1980s to Present (à paraître), l’anthologie sur laquelle vous travaillez actuellement, Paola et Nawo ? Paola : Fireflies (Lucioles) a plusieurs généalogies. Politiquement, le livre représente une résistance contre l’effacement des lesbiennes racisées en France, une absence qui se produit comme un effet de nombreux rapports de pouvoir simultanés : colonialisme, colonialité, racisme, capitalisme, sexisme, lesbophobie, queerphobie.

Je suis venue à ce travail en tant qu’activiste et universitaire. Dans les années 1980, lorsque j’étais étudiante, j’avais co-fondé à Paris le Collectif féministe contre le racisme et l’antisémitisme, et le Collectif lesbien contre le fascisme et le racisme, qui comprenaient tous deux d’autres lesbiennes racisées. CertainEs d’entre nous avaient écrit des textes qui ont été diffusés entre amies et camarades de luttes mais non publiés. A l’époque, soit on travaillait dans les groupes féministes et lesbiennes ou queers mixtes, soit on avait une double ou parfois triple militance. En tant qu’universitaire, j’ai lu toutes les historiographies des mouvements féministes, lesbiens, LGBT, queer, antiracistes, d’immigration et décoloniales que j’ai pu trouver. Pas une seule que j’ai lu ne fait mention de lesbiennes racisées. C’est comme si nous n’existions pas.

Avec Nawo nous avons décidé de créer notre propre anthologie après plusieurs décennies de conversations sur l’effacement – parfois spectaculaire, parfois subtil – des vies, théorisations, activismes et artivismes de lesbiennes racisées. Avec la publication de Fireflies, nous espérons inscrire d’autres histoires, et inscrire autre chose à l’Histoire. Nawo : Fireflies montre que les lesbiennes racisées ont toujours été là même si elles ont été invisibilisées dans des groupes mixtes où elles ne pouvaient que parler au nom du groupe. Donc on a cherché ces textes, ces écrits, où elles parlaient en leur nom propre. Elles étaient aussi à l’initiative d’actions concernant les femmes lesbiennes racisées. Grâce aux recherches de Paola, nous avons pu trouver quelques-uns de leurs textes des années 80. P. : Il y a environ 20 ans, CL (une lesbienne blanche), MC (une lesbienne racisée) et moi-même avons commencé à travailler sur une anthologie de textes de lesbiennes en France. Je pensais que MC et moi pourrions ensemble assurer une présence centrale des lesbiennes racisées dans le livre. Mais à un moment donné, MC n’a plus pu mettre d’énergie dans ce projet. CL et moi avons continué. J’ai passé des heures et des heures à l’ARCL (Archives de recherches et de créations lesbiennes), à la Maison des Femmes de la rue de Charonne à Paris, à chercher spécifiquement des textes, photos, poésies et autres documents d’archives par des lesbiennes racisées. J’ai trouvé qu’il n’y avait pas un seul dossier qui nous était dédié. La catégorie n’existait pas au sein des archives. J’ai donc parcouru toute la collection pour reconstituer les matériaux. J’en ai parlé avec les féministes qui travaillaient à la Maison des Femmes. Elles ont reconnu le problème et elles ont commencé à compiler quelques dossiers. En plus de ce travail d’archives, j’ai contacté des amies et des camarades pour trouver d’autres travaux très anciens. CL et moi avons terminé l’anthologie mais je n’ai pas souhaité le publier dans l’état où il était; à la place, la collection de textes existe sous forme de disque. Il y avait peu de textes de lesbiennes racisées. Les textes en question traitaient presque invariablement du racisme des lesbiennes blanches, replaçant ainsi les lesbiennes blanches au centre de tout alors que nous avons toujours eu bien d’autres préoccupations, sujets d’analyse, expressions. Nous avons des rêves ensemble, des créations ensemble. Mais de cela il n’y avait pas de

trace. J’aurais eu besoin de beaucoup plus de temps pour faire le travail minutieux que Nawo et moi avons fini par faire. J’ai donc senti que la collection était incomplète. Deuxièmement, et c’est très important, la division de l’anthologie en sections avait un sens pour les blanches, mais je voyais qu’elles effaçaient les préoccupations de lesbiennes racisées.

Par exemple, un des moments historiques majeurs pour les lesbiennes politiques racisées s’est produit lors d’une rencontre de la Coordination Lesbienne Nationale : les lesbiennes racisées ont essayé de poser des questions sur l’impact du racisme sur leur vie, mais leurs préoccupations ont été écartées. On leur a dit qu’il ne s’agissait pas de problèmes de lesbiennes. Ainsi, lors de cette rencontre, les lesbiennes racisées ont formé un groupe de travail autonome de lesbiennes racisées où elles ont pu discuter de ce dont elles voulaient en toute tranquillité. Mais quand elles sont revenues à nouveau rejoindre le groupe plus large, leurs analyses et questions ont été écartées. En conséquence, de nombreuses lesbiennes racisées qui étaient là ont rédigé des textes, des prises de position. Pour nous, il s’agit d’un moment absolument critique pour toutes les lesbiennes en France. Il fait partie des évènements qui ont conduit à la création du Groupe du 6 Novembre, le premier groupe autonome de lesbiennes racisées (de cette vague actuelle) en France. Pourtant, il ne figurait pas dans la division entre sections de cette première anthologie lesbienne mixte. De cette expérience, j’ai appris à quel point il est vital que nous reconnaissions, réimaginions et inscrivions nos propres temporalités. G. : On continue de retrouver cet effacement : les lesbiennes ou queer raciséEs ressentent cette rupture historique de la/notre mémoire. On ne connaît pas trop votre histoire, qui est aussi la nôtre, et on a toujours l’impression de la réinventer.

P. : Nous sommes loin d’avoir rassemblé les archives nécessaires pour même commencer à réfléchir sur un sujet aussi vaste. Je peux cependant dire que notre histoire remonte à toujours. Nous avons toujours existé. Pour commencer à écrire une telle histoire à nous, il faudra d’abord comprendre l’histoire, la vie et les enjeux des lesbiennes du sud global, dans les lieux à partir desquels les lesbiennes racisées convergent en France.

À propos de la transmission : les lesbiennes racisées font déjà ce travail de manière non structurée depuis longtemps. Certaines transmissions ont été éphémères et fugaces; d’autres s’inscrivent au sein des représentations qui peuvent circuler. Il y a aussi nos commémorations plus formelles, comme par exemple l’hommage en l’honneur de Dalila Kadri – cinéaste, poète, théoricienne lesbienne racisée – lors d’une soirée de fête organisée par le groupe Lesbiennes of Color (LOCs) il y a quelques années à la Maison des Femmes de Paris. Un exemple d’expressions inscrites est bien sûr la collection entière de textes et d’œuvres d’art dans Fireflies. Le livre comprend environ 100 voix de lesbiennes racisées en France.

La transmission est un processus vital pour nos communautés. On nous dit que nous n’avons pas d’histoire, que nous sommes entrées tardivement dans les mouvements lesbiens (blancs) et queer (présupposés déjà constitué, donc faisant de nous un simple élément additif). La notion de notre retard n’est pas neutre. Elle reproduit les récits coloniaux de progrès et de sauvetage, selon lesquels les raciséEs sont toujours en retard (par rapport aux blancs) et auraient besoin d’être sauvéEs par eux. Cela renforce notre effacement. Malheureusement, en l’absence de nos propres archives, nous finissons par intérioriser cela. Jouer un rôle plus actif dans la transmission intergénérationnelle est un moyen de lutter contre ces conditions et contre cette répétition ad infini. N. : Grâce à internet et aux réseaux sociaux, la possibilité de transmettre notre histoire est plus facile. On peut promouvoir une anthologie et la faire connaître à un plus grand nombre dans des podcasts créés par des personnes LGBT, chose qui n’était pas possible il y a 20 ans quand on a sorti l’anthologie Warriors/Guerrières (Groupe du 6 Novembre, 2001). À cette époque, il fallait pratiquement faire du porte à porte pour faire connaître ce travail. Je pense que cette anthologie sera diffusée bien au-delà des frontières françaises grâce à internet. Donc, si on sait se servir de cet outil, on pourra mieux garder notre mémoire. Avec un plus grand choix du médium, on peut plus facilement s’auto-publier, transmettre notre savoir, filmer... Je pense que depuis 2010 les groupes dominants ont plus de difficultés à nous effacer. Il y aura toujours une trace quelque part. Les blancHEs ne pourront plus narrer l’événement en faisant croire qu’iels étaient les seulEs à être présentEs ou à apporter une contribution. G. : Petite anecdote, quand j’ai découvert l’anthologie Warriors/Guerrières, je me suis tout de suite précipitée sur internet pour essayer de l’acheter (rires). N. : On peut toujours essayer de la republier un jour, mais l’anthologie que Paola et moi préparons est une manière de sauver Warriors/Guerrières. P. : Tout à fait. En tout cas, notre intention est que ça ne disparaisse pas. Dans Fireflies, nous avons pris la décision consciente de ne pas imposer de structure thématique ou autre. Nous avons adopté une organisation chronologique des documents pour plusieurs raisons.

C’est d’abord une manière de reconnaître précisément les multiples temporalités possibles et d’éviter d’imposer l’une d’entre elles comme grille d’intelligibilité dominante ou exclusive. Ensuite, la chronologie est devenue un mode pour reconnaître l’incomplétude de chaque instant. Nous savons que malgré tous nos efforts à chaque instant, il manque des documents. Nous espérons que le livre incitera d’autres lesbiennes racisées à s’ajouter à la collection. Nous espérons que les futurs travaux donneront plus de traces sur les périodes d’avant, pendant et après celles que nous inscrivons dans Fireflies. G. : En ce qui concerne la contextualisation, Nawo, nous avons discuté toi et moi sur le passage de la mixité à la non-mixité, qui accompagne presque un passage à l’autonomie. Tu as appelé ça un tournant. Est-ce le contexte dont on parle, et qu’est-ce qui a informé ce désir de se retrouver entre lesbiennes racisées ? Cette forme d’organisation avant le Groupe du 6 Novembre se faisait par « moments » selon toi, alors que le Groupe est clairement un mouvement qui se détache de ce faire et agir. N. : C’était suite à un événement à Cineffable, le festival de film lesbien, le 6 Novembre 1999, d’où le nom du groupe. Elula Perrin était venue avec ses amies de Lesbia Magazine. Elle était connue sur la place de Paris parce qu’elle était propriétaire de boîtes de nuit pendant plus de 20 ans. Bien qu’elle soit eurasienne, elle refusait l’entrée aux lesbiennes racisées dans ses boîtes si elles n’étaient pas accompagnées de lesbiennes blanches. Quand elles l’ont vu arriver, elles ont bien évidemment piqué la quinte en criant haut et fort qu’elle était une raciste, alors que les lesbiennes blanches considéraient Elula Perrin comme la reine de la vie lesbienne nocturne. Je n’ai jamais été dans les cercles des boîtes de nuit, mais nous sommes allées soutenir les copines. On s’est retrouvées ensemble à discuter, à se dire qu’on en avait marre. Et on a décidé de se retrouver le samedi suivant et de créer un groupe, et comme on n’arrivait pas à trouver un nom au bout de plusieurs mois, on a gardé le nom de la date où on s’était créé. Donc c’est devenu le Groupe du 6 Novembre. D’autres évènements s’étaient déjà produits cette année-là. Pendant le week-end de la Pentecôte, plusieurs lesbiennes racisées ont dénoncé des propos et évènements racistes au sein de la Coordination Lesbienne Nationale. Le ras le bol et le besoin d’autre chose étaient déjà dans l’air, à Paris et dans d’autres villes, comme à Marseille. Au mois de Novembre, c’était la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, d’autant que durant ce festival, il y avait des lesbiennes qui venaient de toute la France avec des récits de ce qui se passait dans leur ville. On ne voulait plus être dans des groupes à majorité blanche où on n’était pas écouté. Dès qu’on disait qu’il y avait quelque chose de raciste, on recevait les mêmes réponses : « tu exagères, tu es trop sensible, ça ne va pas ». On voulait un espace où on était libre de penser et de parler, entre nous. G. : Si on ne cherche pas les traces, si on ne va pas vraiment dans les archives dont Paola parlait, cette histoire est racontée par/dans les archives dominantes. Le magazine Lesbia par exemple a publié un article scandaleux sur les actions antiracistes des lesbiennes racisées au festival lesbien en 1999. Mais sans ça, on ne peut presque pas savoir que tout ce mouvement existait. Le seul moyen de trouver autre chose est de dénicher la réponse à cet article que le magazine a refusé de

On s’est retrouvées ensemble publier, et qui a été à discuter, à se dire qu’on en autopublié autre part. avait marre. Et on a décidé de se retrouver le samedi suivant et de créer un groupe, et comme on n’arrivait pas à trouver un Cette histoire est donc monopolisée pas uniquement par les personnes aux attitudes racistes, mais nom au bout de plusieurs mois, par un effacement on a gardé le nom de la date systémique qui existe où on s’était créé. Donc c’est partout. devenu le Groupe du 6 Novembre. P. : Dans une période antérieure, les lesbiennes racisées étaient complètement contraintes à s’autopublier. Aucune maison d’édition s’y intéressait. Lorsqu’elles essayaient de se faire publier, c’était une catastrophe. Je pense, Nawo, que tu as beaucoup à dire sur ce sujet comme tu l’as vécu avec le Groupe du 6 Novembre. C’est en raison de cette expérience du Groupe que nous avons cherché à publier Fireflies d’abord en anglais, aux Etats-Unis, chez une maison d’édition qui accepte de rendre les voix de lesbiennes racisées audibles. Nos temporalités-spatialités sont en effet différentes de celles des lesbiennes blanches, et des autres blancs. Mais aussi, nous ne sommes pas une masse homogène. Je pense que nous devons être très prudentEs lorsque nous écrivons nos propres histoires de lesbiennes racisées pour ne pas reproduire chez nous la violence épistémique coloniale, raciste et sexiste qui nous détruit. Donc il s’agit pour nous de travailler avec d’autres présupposés,

Illustration : Zohra Khaldoun

catégories de pensée, logiques et conclusions. Cela est possible si nous nous souvenons continuellement et aidons les autres à se souvenir que notre histoire est loin d’être complète. N. : Certains thèmes ont pu peut-être évoluer et changer, mais pour beaucoup d’autres sujets, c’est exactement le même problème qui réapparaît tous les cinq ou dix ans. Le vocabulaire ou la façon de voir change peut-être, mais en gros le nœud du problème de la visibilité et du racisme est toujours là. G. : Tu veux dire la visibilité au sein du savoir dominant ou la visibilité en tant que concept général et absolu ? N. : Je parle de la visibilité au sein du mouvement LGBT, pas dans le sens où on nous dit « merci, asseyez-vous là », mais dans ce qu’on apporte, dans notre contribution. Et aussi, une fois l’événement terminé, qu’il y ait toujours cette visibilité lorsqu’on veut documenter ce qui s’est passé. On peut très bien être présente et intervenir, mais celleux qui documentent l’événement peuvent très bien nous évacuer et faire comme si nous n’avions rien à dire. Donc ces luttes-là continuent, même sous forme

différente. La reconnaissance de notre parole en tant que lesbiennes racisées ne va pas de soi. G. : Il me semble que la seule visibilité permise dans les milieux LGBT en Europe, aux ÉtatsUnis, mais aussi dans un régime global des identités LGBT rigides, c’est l’injonction au coming out. Toute autre forme de visibilité, politique ou de lutte, est complètement effacée, et ce récit du coming out est celui qui prime. P. : Oui, le problème de la visibilité est qu’on est effacé de la scène des luttes. Et nos analyses, et c’est le plus important, sont effacées aussi. Cela dit, nous – lesbiennes et queers raciséEs – avons un rapport diffèrent des blancHEs à la visibilité et surtout à l’exigence blanchecentrique du coming out. N. : Leur visibilité n’est acceptée, comme tu disais Ghiwa, que si elles entrent dans un certain moule. Si elles veulent avoir une parole, ou une façon de filmer, peindre, etc. différente, ça ne va pas être reconnu comme de l’art. Si je reviens au Groupe du 6, c’était au même moment où il y avait toute cette discussion autour du foulard. Fallaitil interdire le foulard à l’école ou pas ? Maintenant c’est chose faite, mais pas à l’époque. Et il y avait énormément de féministes blanches qui étaient contre le foulard au nom de la liberté de la femme. Au niveau du Groupe, on n’a jamais refusé une lesbienne qui voulait porter le foulard. Quand on organisait des fêtes et qu’il y avait des lesbiennes blanches qui venaient, elles disaient : « il y en a une avec le foulard ! » Et alors ? À elle de s’exprimer comme elle l’entend. Nous n’allons pas en faire un problème. Une femme devrait être libre de s’habiller comme elle veut. Elles n’ont jamais été en grand nombre, mais elles savaient qu’elles pouvaient venir dans un espace safe si elles le désiraient. Ça a donné lieu à des débats houleux, haineux même, de la part de certaines lesbiennes blanches qui nous ont attaquées et traitées d’intégristes. On en a vu de toutes les couleurs sous prétexte qu’on ne voulait pas s’inscrire dans ce débat complètement politisé à l’époque.

Pour reprendre ce que tu disais, Ghiwa, sur la façon d’être visible, une lesbienne racisée qui décide de porter le foulard n’est plus visible en tant que lesbienne. On voit autre chose, parce qu’on considère qu’une lesbienne ne peut que se vêtir d’une certaine façon, ou fréquenter certains lieux. Si elle sort de ce cadre-là, les blanches disent qu’elle n’est pas lesbienne. En fait, elles ont vachement besoin d’être rassurées sur leur identité. Si une personne sort du cadre, tout à coup, panique à bord. Qui suis-je en tant que lesbienne, si toi, tu peux être lesbienne en-dehors du cadre/des normes que je nous impose ? À vous de voir comment vous construisez votre identité; nous on s’occupe des nôtres. Et la nôtre est nettement plus forte, parce que nous avons beaucoup plus de barrières à surmonter pour pouvoir dire « je suis ». P. : Depuis, il y a des personnes que nous connaissons qui ont évolué grâce aux débats qu’on a eu, mais au début c’était d’une terrible violence. N. : Ces années-là étaient terribles. Ça a été salutaire dans la mesure où ça nous a donné la possibilité de voir qui était qui. Comme je disais et que je continue à dire à certaines lesbiennes racisées qui pensaient avoir des alliées, c’est jusqu’à un certain point. Et il faut savoir où se situe ce point pour ne rien attendre au-delà. Jusqu’à ce point on peut les utiliser mais au-delà de ce point, on devient ennemiEs. Le

Mais nous, nous foulard, c’était carrément ça. Leur solidarité s’arrêtait là. ne voulons pas l’inclusion. Nous voulons la révolution. G. : Je me demande si on peut parler de solidarité au sens propre du terme, parce qu’elle présuppose sortir de sa zone de confort. L’affirmation de l’identité lesbienne blanche accepte « tout le monde » jusqu’à ce qu’elle se sente menacée dans sa vision de soi. Or, cette vision est avant tout politique. N. : Oui, elles ne veulent absolument pas remettre en cause le système, contrairement à ce qu’elles disent. Nous les lesbiennes raciséEs les poussons dans leur retranchement, et elles se rendent compte au bout d’un moment qu’elles n’ont pas envie que le système change. Elles ont juste envie que ça se modifie pour qu’elles aient leur place. Tant qu’elles en sont là, on sait très bien qu’elles vont se retourner contre nous. Soit on avance et ça veut dire que le système va radicalement changer, soit elles se rebiffent pour que le système ne change pas. Et on voit régulièrement où se trouvent leurs limites. La révolution n’est peut-être pas ce que vous décrivez. Ce qu’elles veulent c’est un petit changement qu’elles appelleront révolution. G. : Et qu’elles ont déjà eu d’ailleurs. N. : Oui, elles ont eu leur petite révolution périodique. P. : Elles sont déjà incluses; l’homonationalisme, ça marche très bien. Mais nous, nous ne voulons pas l’inclusion. Nous voulons la révolution.

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