TRIMESTRIEL N°73 – JUIL/AOÛT/SEPT 2017 DÉPÔT BRUXELLES X – AGRÉATION P401130 4,00 €
palestine
BULLETIN DE L’ASSOCIATION BELGO-PALESTINIENNE / WALLONIE-BRUXELLES
SOMMAIRE DOSSIER MANDAT BRITANNIQUE 04 / Tournoi d’échecs à Gaza 24 Gaza, « invivable en 2020 » 28 / Réhabiliter le patrimoine 40
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ÉDITO
© Marie-Noëlle van Wessem
Palestine n°73 Comité de rédaction Marianne Blume, Ouardia Derriche, Nadia Farkh, Sophie Feyder, Pierre Galand, Nathalie Janne d’Othée, Gabrielle Lefèvre, Katarzyna Lemanska, Julien Masri, Simon Moutquin et Christiane Schomblond | Ont contribué Lucas Catherine, Paul Delmotte, Catherine Fache, Michael Lynk, Sandrine Mansour| Relecture Ouardia Derriche | Graphisme Dominique Hambye & Élise Debouny | Photo couverture © Une femme de Ramallah dans sa tenue traditionelle (Thobe et Sfadeh). Collection Matson, 1929. Library of Congress. Association belgo-palestinienne Wallonie-Bruxelles asbl Siège social: rue des Palais 154 à 1030 Bruxelles |Tél. 02 223 07 56 | info@abp-wb.be | www.association-belgo-palestinienne.be | IBAN BE35 5230 8083 6037 | Tout don de plus de 40 euros vous donne droit à une attestation qui vous vaudra une réduction d’impôt de 40% du montant de votre don | Avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles
BDS : PARI SUR LE TEMPS LONG
de l’histoire
par Pierre Galand, Président
Ces dernières années, la guerre, l’occupation et la domination étrangère se sont étendues à tout le Moyen-Orient. Il en résulte atrocités, destructions, crimes de guerres et violation des droits fondamentaux des peuples. Ce scénario s’illustre de manière particulièrement dramatique avec le conflit colonial israélo-palestinien. Il se poursuit depuis 70 ans avec le soutien politique, diplomatique et économique des grandes puissances, et particulièrement des États-Unis et de l’Union européenne. C’est dans ce contexte que paraît la déclaration finale de l’initiative de Bilbao « Towards a just Peace in Palestine » qui réunissait du 17 au 19 octobre 2003 au Pays Basque les principales associations, centres de recherches et mouvements sociaux solidaires de la lutte du peuple palestinien pour son droit à l’autodétermination. Faisant le constat de l’échec des diverses initiatives censées conduire à une coexistence entre Israël et la Palestine, dont notamment les différentes résolutions des Nations Unies, le processus d’Oslo, la Feuille de route issue de la conférence de Madrid sur la Paix au Moyen-Orient en 1991, la proposition de paix de la Ligue Arabe à Beyrouth en 2002, les participants à la conférence se sont engagés à relayer et à soutenir l’appel de la société civile unifiée palestinienne pour le BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions). Ils entendaient ainsi donner la primauté de la parole à la société civile palestinienne en lutte depuis tant d’années pour promouvoir justice et paix en Palestine et dans la région. Entretemps, chaque jour, B’tselem nous alerte sur le processus de sociocide et la politique
d’apartheid appliqués par le gouvernement, les colons et l’armée israélienne dans les territoires occupés de Palestine: la colonisation, la répression et les emprisonnements de Palestiniens souvent très jeunes, les assassinats ciblés de civils non armés, les destructions de maisons et des oliveraies comme punitions collectives, les incursions violentes de militaires armés dans les hôpitaux palestiniens comme ce fut encore le cas ce 15 août dernier à Al-Makassed, l’interdiction de passage faite aux ambulances du Croissant-Rouge, le renforcement continuel des check-points, l’ensemble des interdits qui empoisonnent la vie des Palestiniens au quotidien, dont notamment celui de l’accès à la mosquée Al Aqsa, sans parler de la prison à ciel ouvert qu’est Gaza. Les chancellerie occidentales et leurs gouvernements sont parfaitement informés de la dérive criminelle du gouvernement Netanyahou, de son refus de toute négociation de paix respectant le droit à l’autodétermination des Palestiniens et des gages qu’il ne cesse de donner à l’extrême droite sioniste et religieuse, et cela, sans parler de l’accaparement des terres et des ressources naturelles palestiniennes. Par cynisme, électoralisme ou lâcheté, nos gouvernants n’en tiennent aucun compte et placent leurs agendas politiques au-dessus de toute considération éthique. Il nous faut donc, quant à nous, soutenir la résistance palestinienne et les Israéliens anticoloniaux, antiracistes. L’histoire de la lutte de l’ANC de Mandela et de leur syndicat, la Cosatu,contre l’apartheid nous a appris que le boycott était efficace sur le temps long. Poursuivons sans relâche le BDS lancé voici plus de 10 ans à Bilbao.
La Palestine sous le mandat britannique
LES PRÉMICES D’UNE DÉPOSSESSION
/ Démonstration anti-sioniste devant la porte de Damas (Jérusalem), 8 mars 1920. Matson collection, Library of Congress.
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COMPRENDRE L’ÉNORME INJUSTICE QUE SUBISSENT LES PALESTINIENS AUJOURD’HUI NÉCESSITE DE REMONTER LE TEMPS JUSQU’EN 1917, DATE DE LA DÉCLARATION BALFOUR. QUE DIT CETTE DÉCLARATION ET POURQUOI REPRÉSENTE-T-ELLE UN SI GRAND TOURNANT POUR LES PALESTINIENS ? POUR QUELLE RAISON LES BRITANNIQUES ONT-ILS CHOISI DE SOUTENIR LA CAUSE SIONISTE AUX DÉPENS DE LEURS ENGAGEMENTS ANTÉRIEURS AUPRÈS DE LEURS ALLIÉS ARABES ? RETOUR, AVEC PAUL DELMOTTE, SUR LA MONTÉE DU MOUVEMENT SIONISTE ET LES ENJEUX GÉOPOLITIQUES AU LENDEMAIN DE LA FIN DE LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE ET DU DÉMANTÈLEMENT DE L’EMPIRE OTTOMAN (P. 6). LUCAS CATHERINE EXPOSE CLAIREMENT LE MÉCANISME D’ACCAPAREMENT DES TERRES EN PALESTINE MIS EN ŒUVRE PAR L’AGENCE JUIVE AU TOURNANT DU SIÈCLE (P. 12). SANDRINE MANSOUR DÉCRIT POUR NOUS LA GESTATION D’UN PREMIER MOUVEMENT POLITIQUE PALESTINIEN, QUI TENTE TANT BIEN QUE MAL DE FAIRE ÉCOUTER SA VOIX SUR LA SCÈNE DIPLOMATIQUE INTERNATIONALE (P. 13). ENFIN, GRÂCE AUX ARCHIVES PHOTOGRAPHIQUES QUE PRÉSENTE ELIAS SANBAR, NOUS PLONGEONS DANS L’INTIMITÉ DES PALESTINIENS « D’AVANT 1948 » ET D’UNE SOCIÉTÉ QUI S’ADONNE AUTANT À VIVRE QU’À LUTTER CONTRE LA MENACE DE SA DISPARITION, QUI SE PROFILE DÉJÀ EN 1917.
/ Lord Balfour, ca. 1910, Library of Congress.
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Il y a cent ans…
LA DÉCLARATION BALFOUR
Le 2 novembre 1917, le ministre des Affaires étrangères britannique, Arthur J. Balfour, adresse une « lettre d’intention » à Lord Lionel Rothschild. Député conservateur, banquier et sioniste militant, Rothschild est aussi un ami de Haïm Weizmann, leader de la branche britannique de l’Organisation sioniste mondiale (OSM) et futur premier président de l’État d’Israël. Apparemment, le véritable destinataire de la missive. extraits de l’article de Paul Delmotte, professeur retraité de l’IHECS. L’article original est publié dans son intégralité sur le site de l’ABP.
QUE DISAIT CETTE LETTRE « Le gouvernement de Sa Majesté envisage favorablement l’établissement en Palestine d’un Foyer national pour le peuple juif, et emploiera tous ses efforts pour faciliter la réalisation de cet objectif, étant bien entendu que rien ne sera fait qui puisse porter atteinte aux droits civils et religieux des collectivités non juives ou aux droits ou aux statuts politiques dont les Juifs jouissent dans tout autre pays ». Soulignons que les termes foyer national en Palestine témoignent de la prudence du gouvernement britannique quant à un engagement clair au sujet d’un État juif et de son étendue. Notons aussi que par « collectivités non juives », Balfour désignait – par la négative – quelque 700 000 Arabes palestiniens, musulmans et chrétiens 1, vivant à l’époque en Palestine. Enfin, l’assurance que « rien ne sera fait qui puisse porter atteinte aux droits civils et religieux des collectivités non juives » ne dit mot quant aux droits politiques des Palestiniens.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire aujourd’hui, l’adhésion de l’Angleterre à la cause du sionisme n’allait pas forcément de soi. Le nationalisme juif était loin de faire l’unanimité au sein du gouvernement britannique. Les libéraux britanniques étaient hostiles à toute nouvelle expansion de l’Empire. Le libéral Herbert Henry Asquith, le prédécesseur de Lord Balfour, « ne voyait dans les aspirations sionistes qu’un rêve assez extravagant et dans les suggestions selon lesquelles la Grande-Bretagne devait prendre le contrôle de la Palestine qu’une invitation à accepter un surcroît inutile et peu souhaitable de responsabilités impériales » 2. Plus : à l’époque, même ceux qui, au Foreign Office ou au War Office, soupesaient les avantages stratégiques d’une présence britannique en Palestine, dissociaient complètement ceux-ci du sionisme. C’est donc un compromis sémantique qui présida à l’énoncé de la Déclaration : « l’établissement de
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la Palestine comme foyer national des juifs » fut changé en « l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif ». Notons le « en Palestine » : il permettra à Londres de réfréner les ambitions sionistes dites « maximalistes » qui guignaient aussi la rive Est du Jourdain.
ANTISIONISME… JUIF Le texte de la Déclaration est également révélateur des tensions que suscitait à l’époque le mouvement sioniste au sein de communautés juives confrontées à une arrivée massive de réfugiés juifs fuyant les pogroms en Russie tsariste. Au tournant du siècle, quelque 2,5 millions de juifs fuirent la misère et les pogroms. Principalement à destination des États-Unis, certes, mais près de 150 000 s’installèrent en Angleterre, ce qui provoqua en 1902 et 1903 des vagues de violence antisémite. L’establishment juif britannique, rappelle Arno Mayer, craignait que cet afflux ne provoque une recrudescence de la judéophobie. Ainsi, «la communauté anglo-juive bien établie soutint des lois qui limiteraient l’immigration en provenance d’Europe orientale […] tout en mettant sur pied des organisations caritatives » 3. Et il est piquant de constater que ses sympathies pour le sionisme n’empêchèrent pas Balfour lui –même d’édicter, en 1905 en tant que Premier ministre, des mesures anti-immigration (l’Aliens Act) visant les Ostjuden. Ainsi, à Londres, les projets de Weizmann et de Rothschild étaient combattus jusqu’au sein du Cabinet par des représentants de la « bonne société » juive britannique, en particulier par Lord Edwin Samuel Montagu (1879-1924), secrétaire d’État à l’Inde. À l’époque, ces juifs antisionistes dénonçaient une doctrine « qui aurait pour effet de transformer les Juifs en étrangers dans leur
pays natal [et qui] mettrait les Juifs en péril dans tous les pays où ils avaient obtenu l’égalité ». Mais ils rejetaient aussi « la théorie sioniste d’une nationalité [juive] sans patrie ». Le Conjoint Committee, considéré comme la voix de l’establishment juif britannique, considérait que le sionisme « n’apportait aucune solution à la question juive là où elle se posait » et, plus encore, craignait que « la création d’un État juif en Palestine ne nuisît inévitablement à la situation des Juifs de la diaspora et ne mette en péril les droits qu’ils avaient acquis » 4. Ainsi, Lord Montagu estimait que «l’existence d’un État juif soulèverait des doutes au sujet de la fidélité des juifs de la diaspora à leurs pays, et créerait une pression forçant les juifs à émigrer en Palestine contre leur volonté ». Plus généralement, le sionisme était confronté dans un premier temps à des réactions hostiles en Europe de l’Ouest 5. La diaspora juive y était plutôt tournée vers l’accès à l’égalité des Juifs, vers les droits à l’émancipation, l’espoir de l’assimilation au reste de la population. Rappelons que le congrès fondateur de l’OSM s’était tenu à Bâle (1897) plutôt qu’à Munich, comme Herzl l’avait désiré. Et cela du fait de «la vive opposition de la communauté juive munichoise au sionisme [qui] avait envoyé force pétitions à la municipalité pour empêcher la tenue d’un tel congrès dans la ville»…
UN « ÉTAT POUR LES JUIFS » : UNE « AFFAIRE EUROPÉENNE » Les historiens ont vite fait d’interpréter la Déclaration Balfour comme étant la preuve que l’Angleterre fut le terrain à partir duquel le sionisme s’imposa en Europe. Certes, c’est en Grande-Bretagne que s’était affirmé dès la première moitié du XIXe siècle un « sionisme chrétien », fondé à la fois sur les « prévisions »
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de Saint-Paul et sur les visées impériales britanniques. L’on sait que pour l’apôtre, la Rédemption ne se produirait que lorsque tous les juifs seraient rassemblés en Palestine, mais… pour s’y convertir au christianisme. L’on sait aussi que, dès 1838, Lord Shaftesbury, dirigeant évangélique britannique, avait suggéré aux autorités anglaises un établissement juif en Palestine sous la garantie des Puissances. C’est à lui que l’on doit l’expression « une terre sans peuple pour un peuple sans terre » que reprendra Theodor Herzl. Mais il ne faut pas perdre de vue le fait que jusqu’en 1917, le sionisme s’inscrivait plutôt dans une géopolitique allemande 6. Ce n’est pas un hasard si c’est à Cologne que s’était établi en 1905-1906 le bureau central de l’OSM. De même, le siège de l’exécutif sioniste resta à Berlin tout au long de la guerre. Ce n’est qu’après la Déclaration Balfour que Londres devint le centre du mouvement sioniste mondial. Dès le 1er congrès de Bâle, on parlait allemand dans les réunions sionistes, « l’hébreu ne vint que plus tard ». Le Hilfsverein der Deutschen Juden 7 avait souligné dès 1902 que «l’établissement d’un foyer juif en “Palestine” apporterait une solution à toute une série de problèmes communs au Reich et aux juifs : l’antisémitisme allemand en serait atténué, l’immigration de juifs russes [polonais] en Allemagne difficilement assimilables [et] peu souhaitée par les juifs allemands eux-mêmes, serait freinée [et] l’enracinement définitif d’un foyer germanophile dans une région qui intéressait au plus haut point le Reich enrichirait géopolitiquement l’Allemagne » 8. Fait peu connu, le 4 juin 1917, une lettre du secrétaire général du ministère des Affaires étrangères français, Jules Cambon, au leader sioniste Nahum Sokolow exprimait le soutien
officiel de Paris au projet sioniste. De fait, la Déclaration Cambon précipita la Déclaration Balfour 9. Entre les espérances du Reich, la Déclaration Cambon et la Déclaration Balfour, le sionisme était donc moins l’apanage de l’Angleterre qu’un projet européen.
POURQUOI LA DÉCLARATION BALFOUR ? La question des motivations du gouvernement britannique à proclamer son appui au projet sioniste a suscité diverses réponses. Toutes ne sont pas convaincantes, à commencer par l’hypothèse que, de par l’influence (par ailleurs exagérée) des sionistes sur le gouvernement américain, les Britanniques espéraient séduire Wilson et précipiter ainsi l’entrée en guerre des États-Unis (voir encadré). Or celle-ci s’est faite le 6 avril 1917, soit sept mois avant la Déclaration Balfour ! Une autre hypothèse plus probable est que les Britanniques souhaitaient freiner la radicalisation de la révolution russe, dont plusieurs dirigeants étaient d’origine juive, et espéraient empêcher ainsi la défection de la Russie sur le front européen oriental. Ambition du reste peu réaliste, car les bolcheviks rejetaient le sionisme qui « détournait les travailleurs juifs de la lutte sociale aux côtés de leurs camarades non juifs ». En fait, début novembre 1917 – au moment de la Déclaration Balfour – c’est bien la France qui était au centre des préoccupations de Londres. En 1915 déjà, Sir Herbert Samuel, cousin pro-sioniste de Lord Montagu, déclarait lors d’une réunion du Cabinet: «l’établissement d’une grande puissance européenne [la France] si près du canal de Suez serait une permanente et formidable menace pour les lignes de communications essentielles
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de l’Empire ». Dès 1914, Haïm Weizmann ne faisait-il pas valoir aux Anglais que « si la Palestine tombe dans la sphère de l’influence britannique et si la Grande-Bretagne [y] encourage l’établissement des Juifs, en tant que dépendance britannique, nous pourrons avoir d’ici vingt-cinq ou trente ans un million de Juifs ou davantage ; ils […] formeront une garde effective pour le canal de Suez » ? L’on sait aussi, que, dès la victoire des Alliés, les tractations au sujet du Proche-Orient arabe se limiteront rapidement à un dialogue-affrontement entre Français et Britanniques et à la seule question des territoires « syriens ». L’avenir de la « Syrie » constituait en effet la pierre d’achoppement de discussions qui portaient essentiellement sur les limites du territoire revendiqué par la France : quelle frontière entre les zones d’influence française et britannique ? Quelle frontière entre le Liban et la Palestine ? Pour ce qui est de la Palestine – fin 1918, Paris avait renoncé à la Galilée –, on renoncera bientôt à l’internationalisation au profit d’un mandat britannique incluant la Transjordanie. La Conférence de San Remo (19-26 avril 1920) entérinera la création de mandats : la France au Liban et en Syrie, la Grande-Bretagne en Irak et en Palestine, Transjordanie incluse. Et, par conséquent, la trahison des promesses faites aux alliés arabes. Décisions qu’entérinera le traité de Sèvres (10 août 1920). Mais il y a plus : Sèvres confiera aux Britanniques, parmi leurs autres tâches mandataires, celle d’œuvrer à l’établissement d’un « foyer national » pour les Juifs en Palestine. Ce sera là une première consécration de la Déclaration Balfour à laquelle s’ajoutera celle de la Société des
Nations qui votera, en juillet 1922, les dispositions de Sèvres. Le Mandat britannique en Palestine formera une « cage de fer » pour les aspirations des Arabes de Palestine. Un carcan « précisément conçu pour exclure le principe et la mise en œuvre d’un gouvernement représentatif en Palestine, ainsi que toute modification constitutionnelle allant dans ce sens » 10. L’historien Walter Laqueur conclut : « si l’Europe n’avait été le théâtre d’une exacerbation de la haine anti-juive, le sionisme pourrait fort bien n’être encore qu’une petite secte philosophicolittéraire de réformateurs idéalistes. (…) Même la Déclaration Balfour n’obtint pas le succès escompté auprès des masses juives. Après 1918, le nombre d’immigrants juifs venant d’Europe centrale se comptait par centaines et non pas par milliers et il n’en vint pour ainsi dire aucun d’Europe occidentale et des États-Unis ». C’est l’antisémitisme du Vieux continent et son paroxysme nazi qui démultiplièrent les vagues d’immigration juive en Palestine. Ce furent les accords de Munich qui permirent à Londres de dégager d’Europe les forces qui écrasèrent la Grande révolte palestinienne de 1936-1939. Pourtant, décennie après décennie, nos dirigeants européens font preuve vis-à-vis de la tragédie palestinienne d’une timidité délétère et d’une consternante pusillanimité. 1/ Les juifs y étaient quelque 60 000 à l’époque. 2/ Walter Laquer, Histoire du Sionisme, Calmann-Lévy, 1973, p. 215. 3/ Arno Mayer, La solution finale dans l’histoire, La Découverte, 2002, p.72. 4/ Laqueur, op. cit., p. 215. 5/ Catherine Kaminski et Simon Kruk, Le nationalisme juif et le nationalisme arabe, PUF, 1983, p. 71– 80. 6/ Michel Korinman, Le sionisme, une géopolitique allemande, Hérodote, n°53, 2e trimestre 1989. 7/ Le Centre de coopération des juifs allemands, qui avait pour but une régulation de l’émigration juive, en particulier au Proche-Orient. 8/ Laqueur, op. cit., p. 196. 9/ Jean-Christophe Attias & Esther Benbassa, Israël, la terre et le sacré, Flammarion, 2001, p. 91. 10/ Rashid Khalidi, Palestine. Histoire d’un État introuvable, Actes Sud, 2007.
Le sionisme aux USA : entre mythe et réalité L’on connaît la boutade juive : « un sioniste est un juif américain qui envoie de l’argent à un juif britannique pour envoyer un juif polonais en Palestine ». Nombre d’auteurs attestent d’une montée en puissance du mouvement sioniste aux États-Unis pendant la Grande guerre. De 5 000 membres en 1914, ses effectifs auraient atteint les 150 000 membres en 1918 1. Il convient cependant de ne pas antidater le soutien que les États-Unis ont apporté au mouvement sioniste 2. En septembre 1917 – deux mois avant la Déclaration – les Britanniques avaient « sondé » Wilson au sujet d’une déclaration favorable au projet sioniste. Et le refus de ce dernier avait été «une douche froide pour le sionistes». Plus : l’année d’après, Wilson présenta ses Quatorze points dans lesquels il dénonçait la diplomatie secrète de ses alliés européens – les accords dits Sykes-Picot – et se prononçait pour l’autodétermination des peuples du Moyen-Orient. Enfin, lorsque les désaccords franco-britanniques au sujet de la Syrie devinrent manifestes à la Conférence de la Paix, le président proposa la mise sur pied d’une commission d’enquête – la Commission King-Crane – chargée, sous l’égide de la Société des Nations (SdN), de recueillir l’avis des populations locales. Commission à laquelle
Paris et Londres refusèrent de participer et dont les conclusions allèrent totalement à l’encontre des aspirations sionistes. Son rapport mit en effet en garde quant à l’objectif d’un État juif et d’une immigration juive illimitée face à des sentiments antisionistes « intenses » en Syrie et en Palestine. Jugeant que l’imposition de la Déclaration serait « une violation flagrante du principe [d’autodétermination] et des droits de la population » 3, il préconisait par ailleurs le maintien de l’unité de l’ensemble « grand-syrien » et insistait sur la nécessité d’y établir une puissance mandataire unique... Les États-Unis ne reviendront au MoyenOrient qu’à la fin des années 1920, dans le sillage de leurs compagnies pétrolières 4.
1/ Nadine Picaudou-Catusse, La décennie qui ébranla le Moyen-Orient (1914-1923), Complexe, 1992, p. 45. Rappelons-le quand même, sur une communauté juive qui devait avoisiner à l’époque les 4 millions de membres (Georges Bensoussan, Une histoire intellectuelle et politique du sionisme. 1860-1940). 2/ De même d’ailleurs que celui, de plus en plus « inconditionnel », témoigné ensuite à l’État d’Israël à partir des années 1960. Voir mon article L’Oncle Sam et l’État d’Israël. Origines et enjeux d’une « relation spéciale », Contradictions, n° 119-120 (3e et 4e trimestres), 2007. 3/ Noam Chomsky, Israël, Palestine, États-Unis. Le triangle fatidique, Écosociété (Montréal), 2006, p. 123. 4/ Alain Gresh et Dominique Vidal, Proche-Orient, une guerre de 100 ans, Éd. Sociales/Notre Temps/Le Monde, 1984.
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LA CONQUÊTE PAR L’ACHAT DE TERRES :
le cas de Wadi Hawarith
par Lucas Catherine Extrait du livre Palestine : la dernière colonie ?, EPO, 2003
Dès 1920, les Britanniques reconnaissent de facto un gouvernement juif, l’Agence juive, et ils promulguent des lois qui doivent faciliter la conquête du pays par les sionistes. L’objectif est de transformer en propriété privée la propriété traditionnelle des terres, qui étaient commune (musha) et se basait sur la structure du village et de la famille. La Mawat Land Ordinance (1920) stipule que toute personne qui n’a pas travaillé sa terre trois années de suite en perd tout droit à la propriété. De nombreux Palestiniens étaient dans ce cas car, en raison de la guerre, ils n’étaient pas sur place ou n’avaient pas été à même de travailler leurs terres. Trois autres lois, The Land Tenure Law, The Land Transfer Ordinance et The Mahlul Law (1922) suppriment une série de formes de propriété collective des terres agricoles. Dans les faits, une grande partie des terres, propriétés d’un village ou d’une grande famille, deviennent maintenant propriété privée. L’objectif est d’en faciliter la vente à des juifs. (…) En 1929, le Fonds national juif parvient à acquérir la plus grande étendue de terrain jamais achetée
jusqu’alors: la Vallée de Wadi Hawarith, située entre la voie de chemin de fer et la côte, à michemin entre Haïfa et Jaffa. Wadi Hawarith avait une superficie d’environ 30 000 dunam et comptait onze petits villages 1. La vallée était traversée par deux petites rivières, Nahr al Milh (la rivière salée) et Nahr al Mafajar (la rivière ruisselante). Les Palestiniens qui y habitaient, les Bani Hawarith, étaient des Arabes des marais. Ils vivaient dans des huttes en roseaux et avaient développé leur propre culture. Ils élevaient des buffles d’eau et autres bétails et fabriquaient des paniers et des tapis en roseau. Ils cultivaient également des pistachiers et des tamaris. Le 30 novembre 1929, les Palestiniens reçoivent un premier avis d’expulsion. Les paysans refusent de partir. Pendant trois ans, ils essayeront de rester sur place et chercheront à obtenir le soutien du mouvement national palestinien grandissant. De leur côté, les sionistes vont utiliser de nouvelles astuces juridiques. Josef Weitz, le chef du département colonisation de l’Agence Juive, affirme que les habitants ne descendent pas
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de cheikh Amir Nasir al Hawarith, qui avait été reconnu comme propriétaire de la vallée par les Ottomans au 18e siècle, mais des clans liés aux Hawarith, et que donc ils n’ont pas de droits sur ces terres. Le chef des Hawarith, Ismail al Oufi, avance alors à nouveau que le propriétaire absent, Anton Tayan, n’a en fait enregistré que 5 000 des 30 000 dunam à son nom, et que les sionistes ne peuvent donc acheter qu’un sixième de la vallée. Lorsque la police britannique essaie d’expulser les paysans le 6 septembre 1930, ceux-ci s’arment de pierres et de bâtons et attaquent la police et les premiers colons juifs. Les colons peuvent rester sous la protection de la police, mais les paysans restent également. Pendant trois ans, 22 colons juifs habiteront au milieu des paysans dans le premier kibboutz de Wadi Hawarith. Des arbres sont plantés entre les deux groupes afin de protéger le kibboutz. Lentement mais sûrement, les paysans doivent quitter la vallée et cherchent un abri dans les villages voisins. À Naplouse, une grève générale est proclamée en soutien à Wadi Hawarith et les
journaux palestiniens parlent d’une « deuxième Andalousie », en référence à l’expulsion définitive des Arabes de la péninsule Ibérique. Le 2 novembre 1933, anniversaire de la déclaration de Balfour, les habitants de Wadi Hawarith marchent vers Tulkarem, où ils veulent participer à une grande manifestation nationale contre la colonisation. Des avions britanniques les attaquent et les empêchent d’atteindre Tulkarem. En 1934, le Fonds national juif consent à leur accorder de nouvelles terres dans les environs immédiats de leurs villages, un peu au nord, à Jizr al Zarka (Pont sur la Rivière Bleue). De cette manière, la plupart des paysans palestiniens disparaissent quand même de la vallée dans laquelle ils avaient travaillé et habité pendant des siècles. La vallée reçoit un nouveau nom, en hébreu : Emeq Hefer.
1/ Lors de la réforme agraire ottomane, la vallée avait été enregistrée comme la propriété de Anton Bishara Tayan, un chrétien libanais qui avait vécu à Jaffa et avait officiellement donné la vallée en fermage à ses habitants. Les Palestiniens ne l’avaient jamais vu ; plus encore, il n’avait même jamais pris la peine d’encaisser son fermage. Après sa mort, le Fonds national juif achète l’ensemble du territoire à ses héritiers.
/ Un officier britannique gardant la porte d’entrÊe de la Commission Royale Palestinienne, 1936, Library of Congress.
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Les Palestiniens
SOUS LE MANDAT BRITANNIQUE par Sandrine Mansour
RESISTER SOUS L’EMPIRE OTTOMAN Les Palestiniens ont été très tôt investis dans leurs revendications. Ils ont dû faire face à une double menace : celle du partage de l’Empire ottoman par les grandes puissances de l’époque, dont principalement la France et la GrandeBretagne, et celle du mouvement sioniste. La totalité des habitants qui composent la population du Moyen-Orient est en ce début du XXe siècle dans une effervescence politique qui se doit d’être secrète au départ compte tenu des mesures de rétorsion prises par le Sultan ottoman à l’encontre des velléités d’indépendance. Les habitants de Palestine participent par leurs élites à ces mouvements tout en se préoccupant d’un autre projet dont ils sont informés, à savoir la volonté d’un groupe de juifs européens d’installer une colonisation en Palestine mais avec l’objectif d’y devenir dominants et d’en prendre à terme le contrôle politique. Cette volonté d’émancipation arabe générale s’inscrit dans un mouvement que connaît la région, en Égypte et au Levant en particulier, au travers de l’apparition de la Nahda en ce début du XXe siècle, la « Renaissance » : littérature, nationalisme, renforcement de l’arabe, relecture de l’islam. Les idées politiques qui émergent sont portées par des acteurs qui ont souvent fait des études dans différents pays du monde, parlent
plusieurs langues, et souhaitent en finir avec le joug ottoman 1.
PROTESTATIONS CONTRE LA DÉCLARATION BALFOUR L’arrivée des Britanniques en Palestine en 1917, et avec eux de la fameuse Déclaration Balfour, indique aux Palestiniens qu’ils devront se battre pour faire valoir leurs droits. Ils s’organisent donc rapidement pour faire entendre leur voix au travers de manifestations, de distribution de tracts, d’articles dans la presse, de rencontres avec des officiels et d’envois de courriers aux différents consuls présents sur place. Ils veulent accéder à l’autodétermination prônée par le président Wilson. En réalité, le président américain souhaite préserver les intérêts notamment des missionnaires chrétiens dans l’Empire ottoman en affichant une « neutralité » vis-à-vis des Ottomans. Il soutiendra la Déclaration Balfour, dans un premier temps secrètement puis ensuite publiquement. En novembre 1918, une délégation d’une centaine de personnes, musulmans et chrétiens, se rend auprès du gouverneur militaire britannique, le colonel Storrs, pour protester contre les visées sionistes sur la Palestine dans ces termes :
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LA VOIX PALESTINIENNE DANS LA DIPLOMATIE INTERNATIONALE « Dussions-nous verser notre sang, nous nous opposerons à ce que les juifs se rendent maîtres de la Palestine et dominent Jérusalem ». Le Comité islamo-chrétien voit le jour en 1918 et entend rassembler tous les Palestiniens pour faire entendre leurs revendications politiques légitimes. La population palestinienne est consciente que le mouvement sioniste, malgré un discours apparent de collaboration, souhaite accaparer le territoire, sans sa population non juive. Mais l’enjeu est territorial et politique. La Déclaration Balfour, qui est apparue comme une véritable trahison des Anglais face aux promesses qu’ils avaient faites avant la guerre d’indépendance des régions arabes, s’accompagne d’une dégradation de la situation économique. Les Britanniques favorisent les projets sionistes en Palestine, et progressivement, les Palestiniens voient se mettre en place un véritable État dans l’État. En 1919, une requête du Comité islamo-chrétien souligne : « Il n’est pas juste ni humanitaire d’annuler les décisions de la Société des Nations par lesquelles elle dit que le sort des pays doit être laissé au choix de ses habitants ». Tout est dit dans ces mots. La période de 1917 à 1920 confirme la prééminence sioniste sur la volonté de la population locale. Celle-ci n’est d’ailleurs que le reflet du peu de considération accordée par le gouvernement britannique aux populations de la Palestine qui, comme l’indique un témoin de l’époque, le journaliste J.M.N. Jeffries, ne sont considérées que comme des meubles 2.
Les Palestiniens, représentés par une élite politique, souvent constituée de familles de notables, participent à la Conférence de la Paix qui se tient à Paris en janvier 1919 et, outre une analyse très pertinente de la situation politique mondiale et régionale, font part de leur proposition : « Comme les sionistes déclarent actuellement dans leurs réunions qu’ils ont obtenu gain de cause et qu’ils vont fonder un foyer national dans notre pays, la Palestine, nous venons renouveler nos protestations demandant à ce que l’on fasse ni d’une partie, ni de la Palestine entière, un foyer national juif. (…) Nous demandons d’une manière toute particulière à la Puissance chargée du mandat de notre pays de s’engager à ne pas accepter de faire de la Palestine un foyer national juif et de ne pas adhérer à la division de notre pays de n’importe quelle façon ». Malheureusement, il est déjà trop tard dans le sens où la décision de diviser a été préétablie par le biais des accords Sykes-Picot élaborés en 1916 entre la France et la Grande-Bretagne, et renforcée par les engagements des Britanniques auprès du mouvement sioniste. Cependant, les Palestiniens persistent à revendiquer leurs droits, à l’égal des autres populations de la région. Pour cela ils continuent de formuler des projets d’avenir, de construire, nous pourrions dire, leur projet national avec, dans un premier temps, la question du rattachement ou non à la Syrie. Très vite, cette option est abandonnée au profit d’une réalisation autonome sur une entité propre, la Palestine.
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LA DEMANDE ARABE : (…) LES DEUX COMMUNAUTÉS, ARABE ET JUIVE, SERONT REPRÉSENTÉES, À PROPORTION DE LEUR NOMBRE EXISTANT AVANT L’APPLICATION DE LA POLITIQUE SIONISTE.
Dans un autre rapport sur la Palestine adressée aux autorités de la SDN, le Congrès Arabe rappelle l’injustice faite par la Déclaration Balfour mais aussi sa connaissance des objectifs du mouvement sioniste tels que présentés notamment par l’ancien président de l’exécutif sioniste en Palestine en 1921 qui déclare : « Il ne peut y avoir qu’un seul foyer national en Palestine, le foyer juif, et aucune égalité entre les juifs et les Arabes, mais aussi une prédominance juive, dès que le nombre de cette race aura suffisamment augmenté ».
UNE INDÉPENDANCE NIÉE Il faut aussi avoir à l’esprit que ces tractations et protestations se déroulent dans un contexte de guerre et où le choix des Arabes de suivre les Alliés et de contrer l’Empire ottoman va être lourdement puni. De nombreuses personnalités politiques dans l’ensemble du Levant vont être arrêtées, certaines condamnées à mort pour avoir fait alliance avec les ennemis des Turcs. Le mouvement politique palestinien va en être considérablement affaibli. Plusieurs de ces personnalités sont envoyées en exil et l’organisation de la contestation est fragilisée par les combats menés dans la région. Cependant, avec la défaite de l’Empire ottoman, le gouvernement britannique s’est senti libéré des engagements pris envers le Chérif Hussein de La Mecque qui avait mené la révolte arabe aux côtés de la Grande-Bretagne contre les Turcs, en échange d’une future indépendance des pays arabes. Les accords Sykes-Picot qui visaient au partage
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de l’Empire vont êtres remaniés à plusieurs reprises pour servir de base au traité de Sèvres. C’est dans cette dernière version que la Palestine sort du champ des indépendances, malgré les promesses orales faites aux Palestiniens, d’une période mandataire augurant une indépendance à venir. La situation est simple, claire, pour les Palestiniens qui résument le sujet de leur préoccupation ainsi : « L’injustice de la création d’un foyer national pour les juifs en Palestine qui est un foyer bien établi pour les Palestiniens arabes (musulmans et chrétiens) et l’impossibilité de former ses habitants à l’autodétermination qui est le but du système mandataire, tant que progresse la politique du foyer national juif. (…) La demande arabe peut ainsi être résumée par les mots suivants : l’établissement en Palestine d’un Gouvernement Constitutionnel National dans lequel les deux communautés, arabe et juive, seront représentées, à proportion de leur nombre existant avant l’application de la politique sioniste » 4. Les craintes palestiniennes ne cessent de se confirmer et en août 1929, avec ce que l’on a appelé la crise du Mur des Pleurs, cette manifestation de musulmans pour défendre l’esplanade des Mosquées contre les velléités juives, elles se transforment en certitude : le projet d’une prise en main du territoire par le mouvement sioniste est bien avancé, et le voyage de Balfour en Palestine en 1925 a confirmé l’intention des Britanniques de poursuivre leur soutien au projet sioniste.
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L’AUTORITÉ BRITANNIQUE SE FAISAIT CHAQUE JOUR PLUS TYRANNIQUE. La grève générale qui est déclenchée en 1936, et transformée en révolte générale pendant trois ans, marque le tournant d’un sentiment d’injustice que ressentent les Palestiniens. Les pays voisins se transforment petit à petit en entités indépendantes, mais la Palestine se voit transformer en entité sioniste sans que les droits de la majorité de la population ne soient respectés.
LA COMMISSION PEEL La proposition de nommer la Commission royale anglaise Peel en 1936 suscite un nouvel élan d’optimisme chez les Palestiniens. Mais le rapport qui en émerge en juillet 1937 est une déception. S’il met en lumière la réalité du terrain et l’impossibilité de réaliser les projets britanniques de créer un foyer national juif tout en préservant les droits des Palestiniens, il laisse finalement la main au projet sioniste. L’engagement britannique vis-à-vis des sionistes est confirmé, au détriment des promesses faites aux Arabes en général et aux Palestiniens en particulier. Les Britanniques proposent d’établir un plan de partage, plan soufflé par le mouvement sioniste déjà en 1922 comme première mesure avant d’acquérir l’ensemble du territoire. Le plan de la Commission Peel renforce la promesse de Balfour en accordant une portion du territoire plus importante à la minorité juive. Il entraînerait également comme conséquence des déplacements de Palestiniens pour vider les zones sous domination juive. Pour les Palestiniens, cela n’est guère acceptable. La révolte est l’occasion pour les Britanniques de mater les revendications palestiniennes: arrestations massives, peines de mort et contrôle des manifestations en sont des exemples.
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« Les flammes de la révolution se propageaient rapidement à travers les villes et campagnes. L’autorité britannique se faisait chaque jour plus tyrannique. De nombreuses maisons furent dynamitées et bien des villages effacés de la carte. (…) Plus tard dans la journée, nous apprîmes par la radio que d’autres responsables politiques avaient été conduits sur un bateau ancré au large et avaient été exilés aux Seychelles » 5. Ce témoignage résume la situation en quelques lignes : tous les éléments de la mise en place du projet sioniste tel que pensé au début du XXe siècle sont désormais réunis. La population palestinienne sortira très diminuée de ces années de lutte, ses élites exilées, arrêtées ou condamnées à mort. Le départ des Anglais en 1948 et leur aide renforcée, dans les années suivantes pour l’établissement du futur État d’Israël, tout cela n’a été qu’une suite de trahisons et de déni de la réalité palestinienne, encore valable aujourd’hui.
Sandrine Mansour est docteure en histoire (directeur de thèse Henry Laurens) et chercheure au Centre de Recherche en Histoire Internationale et Atlantique (CRHIA) à l’université de Nantes. 1/ Requête du 19 novembre 1919 remise par le Comité islamo-chrétien. MAE, CADN. 2/ J.M.N. Jeffries, Palestine The reality. The inside history of the Balfour declaration 1917-1938, Olive Branch Press, réédition 2017, USA. 3/ Requête des notables de Jaffa et Gaza au Congrès de la Paix. MAE, CADN. 4/ Rapport sur l’État de la Palestine durant les 4 ans d’administration civile. Soumis à la Commission de la Société des Nations par le Comité exécutif du Congrès Arabe. Signé Jamal Husseini, secrétaire général, 6 octobre 1924. MAE, CADN. 5/ Sirine Husseini Shahid, Souvenirs de Jérusalem, Fayard, Paris, 2005.
L’identité palestinienne au début du XXe siècle
entretien avec Sandrine Mansour publié sur le site de la plateforme des ONG françaises pour la Palestine
Pouvez-vous nous décrire la population vivant en Palestine dans la période qui précède la Déclaration Balfour, c’est-à-dire au début du XXe siècle ? SANDRINE MANSOUR > Selon différents recensements de l’époque, on considère qu’en 1914 il y a 750 000 habitants en Palestine. Au sein de cette population majoritairement musulmane, on trouve 11% de chrétiens et environ 5% de juifs. Il s’agit d’une population arabe, toutes religions confondues, assez typique du MoyenOrient, qui compte 60% d’agriculteurs. Les villes principales, concentrant les élites et l’activité économique et journalistique, sont Haïfa, Jérusalem et le port de celle-ci : Jaffa. Aux côtés de la majorité arabe, vivent également des étrangers : des Grecs et des Iraniens notamment. La société est assez cosmopolite car à l’époque il n’y a pas de frontières : l’Empire ottoman est très vaste et découpé en régions administratives mais sans séparations strictes. Le Moyen-Orient, et en particulier le Levant, constitue donc un véritable carrefour pour le commerce et les échanges avec beaucoup de passages. Gaza, par exemple, est un port qui permet de rejoindre d’autres régions et le chemin de fer arrive à Haïfa au début du XXe siècle, en 1901. Les échanges sont également culturels, intellectuels et politiques. (…) Cette dimension cosmopolite est très importante pour bien comprendre la situation à cette période, notamment face à l’image qu’en a donnée le sionisme plus tard. (…)
Aux côtés de la majorité de la population paysanne, les fellahs, il existe une élite bourgeoise de grands propriétaires terriens et une élite citadine. Cette dernière bénéficie du développement des écoles par les Ottomans mais aussi de celles fondées par les étrangers qui lui permettent d’acquérir la maîtrise de plusieurs langues et parfois d’aller étudier à la Sorbonne ou en Angleterre. Devenus journalistes, médecins ou avocats, ceux-là composent une élite intellectuelle et politique pas encore tout à fait organisée mais qui commence à se mettre en place avec des revendications contre le pouvoir ottoman. Ces idées se confondent avec celle, plus large, d’une indépendance arabe que l’on retrouve dans la littérature du mouvement de la Nahda, la « renaissance » en arabe. Cette idée d’indépendance intègre aussi des revendications de langue, le retour à l’arabe pour tous les documents administratifs, et une relecture de l’islam en fonction du monde arabe et non turc. Les élites sont musulmanes mais aussi chrétiennes. Quant aux juifs, ils sont souvent assez pauvres et peu éduqués à l’époque. D’ailleurs les élites de la diaspora juive, comme les Rothschild, auront d’abord comme idée, avant le sionisme, de construire des écoles en Palestine afin de rendre les juifs égaux dans l’éducation. Cela ne marchera pas au début car les juifs préféreront garder leurs méthodes traditionnelles.
/ Autoportrait (Jad Mikhail, Ramallah, 1943).
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UNE HISTOIRE
des regards
Ce texte et ces photos sont extraits du livre Les Palestiniens : la photographie d’une terre et de son peuple de 1839 à nos jours de Elias Sanbar, Éditions Hazan, 2004
COMMENT PHOTOGRAPHIE-T-ON LES SIENS ? (…) Née en Occident, la technique de la photographie n’a été maîtrisée par les amateurs locaux qu’après s’être répandue dans ses sociétés d’origine. Le temps requis pour que l’invention touche les sociétés locales, pour l’apprentissage aussi, pesa indiscutablement. Nombre des photographes arabes débutèrent d’ailleurs comme assistants ou apprentis, puis employés par les studios fondés par des Européens. Cette réalité change néanmoins à partir des années 1880, lorsque des amateurs locaux commencent à leur tour à former certains de leurs concitoyens. En Palestine, la fondation de la photographie autochtone fut l’œuvre de deux religieux arméniens de Jérusalem. Dans les années 1880, le père Yessayi Garabédian installe un studio au monastère arménien Saint-James et forme le séminariste Garabed Krikorian à la photographie. Garabédian puis Krikorian seront ainsi à l’origine de la première génération de photographes palestiniens. Une émergence qui est cependant loin d’être isolée, restreinte à la Palestine. Les nouveaux venus font partie d’un mouvement plus large, celui des « photographes » ottomans, sujets de Constantinople (…).
À l’instar de leurs maîtres, les photographes palestiniens seront eux aussi en phase avec l’envie de Bible et aspireront à répondre aux attentes précises des touristes-pèlerins. Il faudra attendre le photographe Khalil Raad pour découvrir un autre monde, l’univers, réel cette fois, de la vie rurale et des régions palestiniennes. Actif dès le début du 20e siècle, Raad, dont le studio est installé à Jérusalem, n’arrêtera son activité qu’en 1948. Il fixera le vrai visage de son pays et montrera pour la première fois des autochtones qui, tout en continuant de poser comme leurs concitoyens précédents, sourient désormais à l’objectif. Loin d’être anecdotique, ce sourire dit une vérité simple mais essentielle: le photographe palestinien est devenu un vis-à-vis familier et les regards tant de l’artiste que des modèles évoluent dès lors dans un univers partagé, connu d’eux.
UN ALBUM DE PHOTOS SOUS LE MANDAT BRITANNIQUE La Première Guerre mondiale, la conquête par les puissances alliées, l’Angleterre et la France, des provinces arabes de l’Empire ottoman, le
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dépeçage de ces derniers en pays alloués aux deux vainqueurs, l’apparition du mouvement sioniste (…), l’occupation militaire suivie du Mandat britannique imposé au pays par la Société des Nations constituent indiscutablement le grand tournant du siècle qui débute. Désormais, les Palestiniens vivent sous la menace d’une « disparition par remplacement » : une communauté étrangère, aux rangs régulièrement grossis par des vagues d’immigration venues d’Occident, s’apprête à prendre leur place, chez eux. Le pays est voué à l’absence. Comment cela se manifeste-t-il en termes d’images ? Par le fait tout d’abord que les scènes du conflit – jusqu’à sa disparition en 1948, la Palestine alterne, sans répit quasiment, révoltes, maquis, grèves, affrontements, répressions, arrestations – sont omniprésentes, comme exclusives. (…) S’agissant de la Palestine mandataire, celle « d’avant 1948 », la société est certes colonisée, en proie aux affrontements et à la répression, soumise au regard dominateur, méprisant ou raciste. Elle est surtout celle d’un pays menacé, très tôt dépossédé de ses images réelles et abordé comme s’il n’existait que par le conflit qu’il vit. Or cette société a bel et bien existé. Ses images aussi. La Palestine d’avant 1948 s’est beaucoup photographiée et ses photographies –nous en montrerons un grand nombre– innombrables pour peu que l’on se donne la peine de les trouver, dégagent même une étonnante douceur de vivre. (…) Aux antipodes de l’inconscience du danger et de la désinvolture des classes aisées par rapport au malheur des défavorisées, la douceur
qui éclate à l’image est celle des familles. Non au sens étroit biologique, mononucléaire ou élargi, mais large, comme si les liens du destin et des rêves communs supplantaient les liens du sang et de la parenté. Aussi est-ce précisément pour cette raison que les photographes familiaux, c’est-à-dire familiers, sont ceux qui voient et montrent le mieux ce monde. Un monde qui craint la disparition sans pour autant y croire vraiment. En d’autres termes, l’alternative courante, le couple si évident en apparence – la guerre ou la paix, la mort ou la vie – n’existe pas en tant que tel dans la réalité. N’obéissant jamais à un quelconque principe d’alternance, cette dernière, individuelle ou collective, se manifeste ainsi en guerre et paix, mort et vie. Le reste n’est plus qu’une question de dosage, dans une image aussi ? Question de formes également : comment la mort, comment la vie se manifestent-elles ? C’est à ces questions que répondent les photographies des Palestiniens prises par des Palestiniens, celles auxquelles nous avons délibérément choisi de donner la place. Par la vie des familles, les portraits des enfants, les partisans alignés devant l’objectif dans les maquis avec leurs airs de Pancho Villa orientaux, les joueurs d’une équipe de football, les musiciens d’une fanfare, une femme alanguie sur une terrasse, une manifestation réprimée, des photos de martyrs, une cinquantaine d’invités à un bal masqué à Jaffa déguisés en Pierrot lunaires… Autant de situations en principe exclusives les unes des autres, interdites de cohabitation et qui pourtant, parce qu’elles additionnent et ne soustraient pas, sont les seules qui montrent la réelle visibilité d’une société qui tout à la fois vit et se bat.
/ Anonyme, vers 1925
/ Photo de Khalil Raad
/ Art Publishing House, vers 1940.
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/ Samira al-Budeyri, JĂŠrusalem, anonyme, 1943.
Marin, anonyme, vers 1925.
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Tournoi d’échecs À GAZA par Marianne Blume
MÉDITERRANÉE
Gaza
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ZONE DE PÊCHE réduite à 6 miles pour les Palestiniens et à 3 miles lors de la saison de pêche (20 miles prévus par les accords d’Oslo) + attaques récurrentes contre les pêcheurs.
ISRAËL
/ POSTE-FRONTIÈRE DE RAFAH : ouvert 44 jours en 2016, seulement pour des cas humanitaires exceptionnels
/ Khan Younès
Rafah
Égypte
POSTE-FRONTIÈRE D’EREZ : 46% de permis de sortie accordés en 2016 (80% en 2013).
FRONTIÈRE FERMÉE PAR UN MUR EN BÉTON OU DES BARBELÉS ET UNE ZONE D’EXCLUSION de 300 m à 1,5 km de large privant les Gazaouis de 35% des terres cultivables + tirs réccurents contre les agriculteurs palestiniens / POSTE-FRONTIÈRE DE KEREM SHALOM : utilisé pour les marchandises et l’aide humanitaire (import/export restreint par Israël)
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Le dernier rapport des Nations-Unis dénonce une catastrophe humanitaire d’ampleur sans précédent dans son dernier rapport Gaza : 10 ans après. Catastrophe d’autant plus honteuse qu’elle n’est nullement accidentelle mais bien planifiée par la force d’occupation israélienne. Et hélas amplifiée par les luttes intra-palestiniennes.
UNE CATASTROPHE...
... PLANIFIÉE PAR ISRAËL
Le dernier rapport des Nations Unies intitulé Gaza : 10 ans après est très clair : la situation dans la bande de Gaza se détériore à une vitesse telle que Gaza devient invivable plus vite encore que ne l’avaient prévu les experts responsables du rapport Gaza, 20 ans après. « La bande de Gaza a poursuivi sa trajectoire de “dé-développement”, dans certains cas de manière plus rapide que nous ne l’avions prévu à l’origine », a déclaré Robert Piper, le Coordinateur humanitaire et pour les activités de développement dans le territoire palestinien occupé.
Après les élections palestiniennes de 2006, Israël a imposé un blocus quasi total de la bande de Gaza, la déclarant « entité ennemie ». Ce blocus illégal se poursuit depuis 10 ans sans que ni l’ONU, ni l’Europe ne prennent de sanctions. Ce qui se comprend aisément puisque le Hamas, bien que vainqueur d’élections démocratiques, a immédiatement été mis au ban de la communauté internationale, les USA et l’UE l’inscrivant sur la liste des organisations terroristes.
La crise humanitaire est effectivement sans précédent : 80% de la population vit de l’aide humanitaire, 96% de l’eau de l’aquifère de Gaza est impropre à la consommation et depuis plus d’un mois, les Gazaouis ne disposent plus que de 2 à 3 heures d’électricité par 24h, souvent en plein milieu de la nuit. La plupart des infrastructures et services (dont les hôpitaux) ne peuvent plus fonctionner, les égouts sont déversés en masse dans la mer, entraînant des risques environnementaux majeurs. L’économie de la bande est au point mort avec un taux de chômage général de 42% qui s’élève chez les jeunes à 60% (voir infographie).
Le blocus, c’est l’occupation qui continue de manière encore plus féroce. Le COGAT décide de tout ce qui entre et sort de Gaza et des quantités de biens nécessaires à la survie des habitants. Par ailleurs, trois attaques meurtrières en six ans ont complètement démoli les infrastructures et de nombreuses habitations. Le rapport de l’ONU rappelle au monde entier qu’Israël demeure la puissance occupante à Gaza, car il contrôle ses frontières terrestres, maritimes et aériennes, ce qui l’oblige légalement à assurer le bien-être des populations occupées. Ce qu’il ne fait pas. Dans de telles conditions, la catastrophe annoncée par le rapport de l’ONU est bel et bien le résultat d’un acte délibéré de l’occupant israélien.
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... ACCÉLÉRÉE PAR L’ÉGYPTE Depuis le renversement du président Morsi et l’arrivée au pouvoir du général Al Sissi, l’Égypte a adopté la même politique de blocus contre Gaza : fermeture de la frontière (ouverte sporadiquement), inondation des tunnels qui servaient de poumon économique à Gaza, accès souvent refusé à des aides internationales, accusations continuelles contre le Hamas désigné comme complice des terroristes en Égypte, arrestations de Palestiniens, etc. La bande de Gaza est donc complètement isolée au nord comme au sud.
... AMPLIFIÉE PAR LES LUTTES INTER-PALESTINIENNES Depuis que le Hamas a pris la direction de la bande de Gaza en 2007, une lutte intense oppose l’autorité de Ramallah à celle de Gaza. Fatah et Hamas ont tenté à plusieurs reprises de rétablir l’unité sans succès, à torts partagés. L’Autorité palestinienne avec son toujours-président Abbas a depuis le début refusé le pouvoir du Hamas. Elle a joué le jeu des pourvoyeurs de fonds internationaux en isolant le Hamas et en négligeant les habitants de la bande de Gaza. Elle seule reçoit les aides qu’elle est censée redistribuer et use de cette prérogative pour essayer de contraindre le Hamas à abdiquer. De son côté, le Hamas, fort de sa légitimité née des élections, refuse de plier et dirige Gaza d’une main de fer. Or l’enfermement de Gaza et le blocus imposé depuis dix ans ne lui permettent pas de développer son économie ou de créer de l’emploi. Prise entre ces deux contraintes, la population, déjà lourdement affectée par les attaques israéliennes et le blocus, souffre de plus en plus et reste otage de ces luttes intestines.
Jusqu’il y a peu, les attaques contre le Hamas allaient bon train quand, devenant à son tour l’objet de critiques virulentes, le président Abbas a décidé de donner un tour de vis supplémentaire à Gaza. En juin, l’Autorité palestinienne de Ramallah a réduit de 35% le salaire de ses propres employés qui avaient déjà été sommés de ne plus travailler pour le Hamas s’ils voulaient toucher leur salaire. Peu auparavant, la même Autorité avait cessé de financer les médicaments et les équipements des hôpitaux de Gaza et cessé de payer les hospitalisations des patients qui nécessitaient un traitement en Égypte ou en Israël, ce sur quoi elle est revenue par la suite. Par ailleurs, elle a cessé de payer le diesel destiné à la seule centrale électrique de la bande de Gaza et demandé à Israël de réduire encore la distribution d’électricité, arguant que le Hamas ne lui remboursait pas toutes les taxes. Et Israël a bien sûr obtempéré, trop heureux d’affaiblir un peu plus le Hamas et Abbas. Au final, les habitants de la bande de Gaza n’ont plus que deux à quatre heures d’électricité par jour. Les hôpitaux sont affectés (opérations, soins intensifs, couveuse, dialyse), les stations d’épuration d’eau, les commerçants et les particuliers (frigos, téléphones, ordinateurs, machines à laver, repassage, conditionnement d’air, etc.), l’économie en général est presque en état de mort clinique. La décision du gouvernement d’Abbas est officiellement annoncée comme un moyen de chasser le Hamas du pouvoir à Gaza. En dernier ressort, c’est le peuple qui paie et la démarche a tous les aspects d’une punition collective. Qu’Israël pratique déjà…
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LA BANDE DE GAZA A POURSUIVI SA TRAJECTOIRE DE DÉ-DÉVELOPPEMENT.
... EXPLOITÉE PAR DAHLAN ET SES AMIS Dans cette lutte inter-palestinienne, un troisième larron a pointé le nez : Dahlan, membre du Fatah, ex-chef de la sécurité préventive à Gaza, en exil à Abu Dhabi depuis 2014 après qu’une enquête pour corruption ait été lancée contre lui. Son opposition farouche à Mahmoud Abbas est connue. De même que son inimitié profonde contre le Hamas, avant et après la prise de pouvoir de ce dernier. Néanmoins, cet homme, apprécié par les Américains et les Israéliens, a vu dans la situation un moyen de revenir sur la scène. Soutenu en cela par les Emirats Arabes Unis. Il a des relations privilégiées avec l’Égypte. Et – dit-on – avec sa médiation, l’Égypte a fourni un million de litres de carburant à la bande de Gaza pour l’Aïd al-fitr. Alors qu’il s’était désintéressé de Gaza pendant l’attaque israélienne de 2014, il a récemment payé lui-même fournitures et compensations à certaines familles. Dans le but évident d’exploiter la faille entre le Fatah et le Hamas et de s’opposer à Abbas. Il y a peu, il a concocté un accord entre le Hamas – qui a mis de côté sa rancœur contre un de ses principaux ennemis – et l’Égypte. Cet accord prévoirait l’ouverture du passage de Rafah, la construction d’une centrale électrique dans les 8 mois et le retour de Dahlan dans la bande de Gaza. L’Egypte y trouverait son intérêt sécuritaire et Dahlan aurait sa revanche sur Abbas. Qui, de son côté, critique l’Égypte pour cet accord.
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Dernièrement, le principal allié et pourvoyeur de fonds du gouvernement du Hamas, le Qatar, a été mis au ban par ses voisins du Golfe qui lui reprochent (oh! ironie) de financer le terrorisme. Abu Dhabi et l’Arabie Saoudite font pression sur le Hamas pour qu’il se détache du Qatar, ce qui de l’avis d’Omar Shaban, directeur du think tank Pal-Think, approfondirait la crise. L’Arabie Saoudite a demandé au Qatar de cesser de financer le Hamas, qualifiant celui-ci d’organisation terroriste, tout comme Israël. Le Hamas prétend qu’il ne prendra pas parti pour un pays arabe contre un autre. Néanmoins, on pourrait bientôt voir dans la bande de Gaza une guerre silencieuse entre le Qatar et les pays du Golfe, dont les habitants de Gaza feront sans doute encore une fois les frais. Pour Omar Shaban, « Il serait temps pour l’Autorité palestinienne de tendre la main au Hamas au lieu d’essayer de le coincer ». En attendant, début août, dans un long discours sur la situation à Jérusalem, Abbas a déclaré : « Nous continuerons à réduire graduellement les contributions financières vers la bande de Gaza tant que le Hamas ne s’engage pas à la réconciliation ». Israël doit se frotter les mains.
DERNIÈRES NOUVELLES Un ami de Gaza vient de me communiquer le fait que, le 20 août, l’Égypte rejetterait finalement l’accord. Retour à la situation catastrophique de Gaza.
COMMENT GAZA A ÉTÉ RÉDUIT À
une enclave invivable
par Michael Lynk
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Comment peut-on vivre dans un endroit où on a l’électricité seulement quelques heures par jour, et l’eau seulement huit heures tous les quatre jours ?
Article publié sur le site de Al-Jazeera, le 24 juillet 2017. Traduction par Dominique Muselet (Chroniques de Palestine).
Gaza et Tel Aviv se trouvent à seulement 75 kilomètres l’une de l’autre. Les deux villes partagent le même sol sablonneux et les mêmes étés brûlants du Levant. Mais les similitudes s’arrêtent là. Si on prenait la nuit une image satellite de la Méditerranée orientale, on verrait sur Tel Aviv un flamboiement de lumière incandescente, et seulement quelques petites lumières pâles, un peu plus loin, sur le rivage de Gaza. Gaza arrive à son troisième mois de restriction, imposée de l’extérieur, de son accès déjà insuffisant à l’électricité. L’enclave de deux millions de personnes nécessiterait normalement environ 450 mégawatts (MW) d’électricité par jour pour avoir de l’électricité 24 heures sur 24. Cependant, au cours de la dernière décennie, du fait du rigoureux blocus israélien de Gaza, sa fourniture d’énergie est passée à quelque 200 MW, ce qui a entraîné des pannes de courant continuelles. Mais au cours des derniers mois, selon l’organisation israélienne des droits humains Gisha, la fourniture d’électricité de Gaza a varié chaque jour entre 140 MW et 70 MW, rallongeant d’autant les pannes et les souffrances de la population. La première cause de la pénurie d’électricité réside dans le différend entre l’Autorité palestinienne (AP) et le Hamas sur la taxation des carburants. Cela a incité l’Autorité
palestinienne à demander à Israël de réduire les 120 MW, qu’il vendait quotidiennement à Gaza, à environ 70 MW, et Israël l’a fait. Une deuxième source d’électricité est l’unique centrale électrique de Gaza, qui ne peut produire que 50-55MW par jour (et seulement, quand il est possible d’importer du carburant d’Égypte). La centrale électrique a été gravement endommagée par les bombardements israéliens en 2006 et de nouveau en 2014, et Israël a limité l’entrée de pièces de rechange à Gaza. Si l’usine était entièrement opérationnelle, elle pourrait produire environ 140 MW. La troisième source d’approvisionnement en électricité de Gaza provient de l’Égypte, qui fournit environ 28MW par jour, avec actuellement de nombreuses coupures. Et la quatrième source est constituée de panneaux solaires individuels et de générateurs que seuls les plus aisés peuvent s’offrir. Les conséquences sociales de cette terrible pénurie d’électricité sont graves. Les ménages sans générateurs ou sans panneaux solaires – la grande majorité des Gazaouis – ont entre 4 à 6 heures d’électricité par jour dans le meilleur des cas, suivies de 12 à 16 heures de coupure. Les hôpitaux sont obligés d’avoir d’énormes
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générateurs et de rationner l’électricité. Les commerces et les entreprises sont obligés de fermer. Plus de 100 millions de litres d’eaux usées non traitées se déversent quotidiennement dans la Méditerranée, polluent les plages et les lieux de pêche. Il faut acheter la nourriture au jour le jour et la consommer rapidement. Le service Internet – le seul lien de presque tous les Gazaouis avec le monde extérieur – est sporadique. Et il y a peu d’électricité disponible pour la climatisation et les ventilateurs permettant de lutter contre la chaleur étouffante de l’été.
LE CONTEXTE DE LA PÉNURIE À GAZA L’équipe de pays des Nations Unies (UNCT) dans le territoire palestinien occupé a récemment publié un rapport sans concession sur l’impact humanitaire des 10 ans de blocus israélien de Gaza et des divisions politiques internes des Palestiniens. Ses conclusions sont terribles : l’appauvrissement de Gaza est entièrement dû à des décisions humaines, et non à des causes naturelles. L’année 2007 a été le début de la fin pour Gaza. En juillet de cette année-là, Israël a imposé un blocus total à la bande de Gaza en déclarant qu’elle était une « entité ennemie ». La vie avant 2007 à Gaza était déjà très difficile, mais depuis, elle est devenue catastrophique et sans espoir. Gaza, dont on a pu dire autrefois qu’elle était la future « Singapour du Moyen-Orient », est devenue le symbole de la misère la plus horrible.
Selon le rapport de l’ONU, entre 2006 et 2016, le produit intérieur brut (PIB) de Gaza par habitant a diminué de 5,3 %, alors qu’il a progressé de 48,5 % en Cisjordanie occupée. En 2004, 30% de la population vivaient déjà sous le seuil de la pauvreté et il y en a 40% aujourd’hui. Gaza souffre de l’un des taux de chômage les plus élevés au monde, soit 41% fin 2016. Plus de 60% des Gazaouis qui ont entre 20 et24 ans sont sans travail et le taux de chômage des femmes a augmenté de 35% à 64% entre 2006 et 2016. En 2017, plus de 60% de la population dépendent partiellement ou totalement de l’aide humanitaire. Selon d’autres rapports, la violence sexiste, les divorces, les suicides et la consommation de drogues sont en augmentation régulière. Les secteurs économiques traditionnels de Gaza se détériorent. L’agriculture, l’exploitation forestière, la pêche et la production industrielle sont tous en déclin et la principale source de croissance provient, tragiquement, de la reconstruction des quartiers détruits lors des trois agressions israéliennes des neuf dernières années. Israël contrôle tout ce qui rentre et sort de Gaza ; le nombre moyen de camions de marchandises sortant de Gaza au cours des cinq premiers mois de 2017 n’est même pas le tiers de ce qu’il était au cours du premier semestre de 2007. « La dégringolade économique de Gaza au cours de la dernière décennie », indique le rapport de l’ONU, « est le signe incontestable du recul du développement de la bande de Gaza. »
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LES HABITANTS DE GAZA SONT ENFERMÉS DANS UN CERCLE VICIEUX DE CRISE HUMANITAIRE ET DE DÉPENDANCE PERPÉTUELLE À L’AIDE HUMANITAIRE.
L’état de l’eau potable à Gaza est critique. La surexploitation destructrice de l’aquifère côtier a provoqué des irruptions d’eau de mer et 96% des eaux souterraines sont maintenant impropres à la consommation humaine. La moitié de la population a accès à l’eau pendant seulement huit heures tous les quatre jours et 30% des habitants ont de l’eau pendant huit heures tous les trois jours. L’eau des camions citernes est 15 à 20 fois plus chère que l’eau du réseau et elle n’est pas de bonne qualité. Comme pour tous les produits rares, ce sont les pauvres et les personnes en état de faiblesse qui sont les plus touchés. Un nouvel accord sur l’eau entre Israël et l’Autorité palestinienne, annoncé récemment, pourrait soulager un peu la population, mais pour bien faire, il faudrait que Gaza parvienne à l’autosuffisance grâce à des usines de désalinisation et à une production d’électricité sécurisées. Le rapport de l’ONU rappelle au monde entier qu’Israël demeure la puissance occupante à Gaza car il contrôle ses frontières terrestres, maritimes et aériennes, même s’il n’a plus de « bottes au sol ». En tant que tel, il a l’obligation juridique d’assurer la santé, la dignité et le bien-être de la population. Le rapport souligne en particulier, que « les nombreuses restrictions imposées par Israël à la fois sur les mouvements des personnes et sur les biens entrant et sortant de Gaza violent toute une série de droits humains élémentaires tels que le droit à la liberté de mouvement et le droit à la santé, à l’éducation,
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à un travail, à un niveau de vie décent et à une vie de famille. » Les autres acteurs responsables de Gaza – le Hamas, l’Autorité palestinienne et l’Égypte – ont également le devoir légal de respecter les standards humanitaires et les droits humains, ce qui n’a pas toujours été le cas au cours des dernières années. En 2012, l’ONU a publié un rapport intitulé « Gaza en 2020 : pourra-t-on encore y vivre ? » (PDF). Ce rapport était inquiétant, mais le dernier rapport de l’ONU est désespérant. Il conclut que Gaza, en cinq ans, a été victime d’une “spirale descendante de développement” qui a enfermé les habitants de Gaza dans un cercle vicieux de crise humanitaire et de dépendance perpétuelle à l’aide humanitaire. » Il ne reste que trois ans avant 2020 et le rapport souligne que, s’il n’est pas mis fin à la situation actuelle, Gaza deviendra encore « plus isolée et plus désespérée » avec le risque de conflits encore plus dévastateurs et d’une économie encore plus exsangue. Si rien n’est fait, il vaut mieux cesser de nourrir l’espoir d’une réconciliation politique entre les Palestiniens et d’une paix durable entre Israël et la Palestine. Alors, est-ce que les images par satellite de la nuit à Gaza montreront bientôt quelques lumières ?
Michael Lynk est le Rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967.
News BDS
article traduit par BDS France
En juillet 2017, le mouvement BDS entamait sa douzième année de combat contre les violations du droit international commises par Israël. À cette occasion, le Comité BDS national palestinien revenait sur 12 victoires importantes des premiers mois de 2017.
Le 9 Juillet 2017 marque la douzième année du mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS). Cela fait 12 ans qu’une coalition aussi large que diversifiée à travers la société palestinienne a surmonté d’incroyables obstacles pour s’unir autour de trois droits fondamentaux palestiniens et sur un chemin de lutte non violente, inclusive et antiraciste pour les atteindre. Malgré la fragmentation, l’occupation militaire, la ségrégation et la dépossession, nous nous sommes réunis pour affirmer le droit de notre peuple à la liberté, la justice, l’égalité et à la dignité. L’appel au BDS de 2005 incarne un soutien massif palestinien pour exiger la fin de l’occupation militaire israélienne et le démantèlement de son mur illégal, la fin de son système institutionnalisé et légalisé de discrimination raciale, qui correspond à la définition d’apartheid selon l’ONU, et le droit des réfugiés à retourner sur leur terre, comme stipulé dans le droit international.
Inspirés par le mouvement anti-apartheid sudafricain et le mouvement des droits civiques américain, des groupes représentant tous les Palestiniens en appellent aux personnes de conscience à travers le monde à adopter ces moyens de pression en soutien à la lutte pour nos droits. Le BDS demande le boycott et des initiatives de désinvestissement dans les milieux académique, culturel, économique et sportif et à faire pression sur les États afin qu’ils prennent des sanctions significatives contre Israël jusqu’à ce qu’il remplisse pleinement ses obligations devant le droit international.
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3. Une victoire du droit au boycott : VOUS NE NOUS AVEZ PAS LAISSÉ TOMBER BDS fête ses 12 ans cette semaine et voici 12 nouvelles qui montrent l’impact grandissant de notre mouvement en 2017 :
1. Un rapport de l’ONU a établi qu’Israël
impose un système d’apartheid à la totalité du peuple palestinien et appelle à des mesures de BDS pour mettre fin à ce régime d’apartheid.
2. L’Église mennonite aux USA vient de voter
à 98% pour un désinvestissement des entreprises qui tirent profit de l’occupation israélienne. Cela fait suite à l’adoption de pratiques similaires ces dernières années par plusieurs églises protestantes, dont l’Église presbytérienne, l’Église Unie du Christ et l’Église Méthodiste Unie. La résolution des Mennonites encourage aussi les membres de l’Église à boycotter les produits venant des colonies israéliennes illégales construites sur des terres volées aux Palestiniens.
le Parlement espagnol a affirmé que le droit de soutenir les droits des Palestiniens par le BDS est protégé par la liberté d’expression et d’association. Le gouvernement du RoyaumeUni a perdu son procès contre Palestine Solidarity Campaign et ses alliés dans une décision de justice prononçant l’interdiction pour le gouvernement de restreindre le droit des autorités locales à se désengager de sociétés complices des violations par Israël des droits humains des Palestiniens. Le Parlement suisse a stoppé les tentatives du lobby israélien de criminaliser le soutien au BDS.
4. La plus grande fédération syndicale de
Norvège, représentant près d’un million de travailleurs, a adopté un boycott complet d’Israël afin de soutenir les droits des Palestiniens selon le droit international.
5. Le syndicat des médecins libanais ne travaille plus avec G4S, la plus grande entreprise de sécurité du monde, à la suite d’une campagne menée par des militants du boycott au Liban, préoccupés par la complicité de la société dans les violations israéliennes des droits humains palestiniens.
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G4S a également essuyé ses premières pertes en Équateur, où un institut de recherche n’a pas renouvelé son contrat avec l’entreprise à la suite d’une campagne BDS. La direction d’une compagnie californienne de transports n’a pas renouvelé son contrat avec G4S après qu’une coalition pour les droits humains et du travail, dont des militants BDS, ont mis en lumière le rôle de la société dans des violations des droits humains en Palestine et aux États-Unis. Ces avancées font suite à de nombreuses victoires du BDS dans les années passées contre G4S en Jordanie, Colombie, Finlande, Royaume-Uni, Afrique du Sud, au Parlement européen, parmi d’autres pays et institutions, qui ont forcé la société à vendre la plupart de ses marchés israéliens illégaux.
6. Le plus important opérateur de transports publics d’Israël a perdu un contrat de 190 millions d’euros pour la gestion des transports publics en Hollande.
7. Le conseil municipal de la Ville de
Barcelone a adopté un guide des pratiques éthiques qui exclut les entreprises impliquées dans l’occupation militaire israélienne. Dans les années passées, des dizaines de conseils municipaux en Espagne se sont déclarés « zones libres de l’apartheid israélien ».
8. Une coalition palestinienne d’organisa-
tions chrétiennes a appelé le Conseil Mondial des Églises à soutenir le mouvement BDS pour les droits humains palestiniens.
9. Une vague de boycotts a touché le festival international du film LGBT de Tel Aviv : des artistes du monde entier ont respecté la ligne du boycott culturel palestinien. Un réalisateur primé sud-africain, dont le film avait été programmé pour faire l’ouverture du festival, figurait parmi les artistes qui ont annulé leur participation au festival.
10. Deux universités chiliennes ont annulé
des évènements sponsorisés par l’ambassade israélienne, et des conseils d’étudiants dans plusieurs universités des États-Unis et d’ailleurs ont voté diverses mesures BDS.
11. Le gouvernement israélien a subi un revers embarrassant après que six joueurs de la Ligue Nationale de Football (NFL) des États-Unis sur onze ont refusé un voyage de propagande tous frais payés, organisé pour améliorer l’image ternie d’Israël. 12. Les campagnes de BDS prennent de l’ampleur parmi les citoyens palestiniens d’Israël. En coordination avec les partenaires BDS en Corée du Sud, le Comité BDS des Citoyens palestiniens d’Israël (BDS48) a lancé une campagne pour boycotter et se désengager de Hyundai Heavy Industries (HHI) jusqu’à ce que la société mette fin à sa complicité dans les violations israéliennes des droits humains palestiniens, particulièrement à Jérusalem et dans le Naqab (Néguev). Source : Palestinian BDS National Committee, traduit par BDS France.
L’ABP AU CŒUR DES
festivals cet été
36 ÉCHOS DES RÉGIONS
Durant tout l’été, l’Association belgo-palestinienne a parcouru la Belgique à la rencontre de milliers de festivaliers. LaSemo, Esperanzah, Les Solidarités et Manifiesta ont accueilli la Caravane Palestine, ce qui a permis des rencontres et des échanges enrichissants autour de la question de l’occupation de la Palestine.
L’année 2017 commémore 100 ans d’injustice, 70 ans de dépossession et 50 ans de vie sous occupation pour le peuple palestinien. Nous voulions à cette occasion partir à la rencontre d’un nouveau public pour parler « Palestine » sans tabou, montrer ce que signifie l’occupation, informer sur l’oppression que subit le peuple palestinien et donner des pistes d’actions citoyennes pour faire cesser cette injustice. Avec cet objectif de nouvelles rencontres, sillonner la Wallonie à travers les plus beaux festivals de cet été était un défi. Oser parler d’un sujet sensible, au premier abord peu réjouissant dans un cadre musical et festif et apporter une touche d’optimisme joyeux à notre militance. Informer et pourquoi pas convaincre les plus jeunes de l’urgence qu’il y a à se mobiliser pour le peuple palestinien. La Caravane Palestine, notre musée de l’occupation ambulant, a été visitée par des centaines de personnes entraînant des échanges fournis, une prise de conscience de la réalité vécue par les Palestiniens. Des reproductions du mur d’apartheid israélien, des centaines de colonies qui foisonnent en Palestine occupée, des grillages de protection contre les déchets des colons à Hébron et d’une valise d’un réfugié palestinien de 1948 ont permis de discuter des aspects concrets de l’occupation. Une autre façon pour les festivaliers de s’immerger dans la réalité palestinienne était de visionner le documentaire Du fleuve à la mer à l’aide d’un casque en 360°. Produit par SolSoc, l’un des partenaires de la campagne, ce reportage retrace le parcours de deux jeunes Palestiniens en quête de liberté.
Par ailleurs, des centaines de signatures ont été récoltées pour mettre fin à la commercialisation de produits des colonies en Belgique. En effet, autour d’un thé à la sauge « made in Belgium » (selon la recette palestinienne), les festivaliers ont été sensibilisés au boycott nécessaire des herbes aromatiques israéliennes, qui parcourent des milliers de kilomètres et concurrencent nos productions locales dans les grandes surfaces. « Consommez local, pas colonial », « des herbes de Wallonie, pas des colonies ». La justesse et la pertinence de la campagne BDS tout autant que l’enthousiasme ont ainsi occupé une grande part de nos conversations. Mais la présence «Palestine» au cœur des festivals n’a pas été uniquement le stand de l’ABP; les organisateurs des événements estivaux ont voulu marquer eux aussi leur solidarité avec le peuple palestinien : débat sur l’art et la résistance à Esperanzah, sur le droit international avec Richard Falk à Manifiesta, démonstration de Dabkhé et immense espace « Palestine » aux Solidarités, concert « made in Palestine », exposition de Mahmoud El Kurd,… des drapeaux palestiniens lors de concerts, de manifestations d’art et de culture p alestiniens ont marqué les festivals cet été ! Merci aux centaines de festivaliers qui sont passés dans ces espaces « Palestine » et merci aux dizaines de bénévoles de l’ABP qui ont parcouru la Belgique à leur rencontre. Contre l’aigreur et la mauvaise foi de nos détracteurs, assumons une militance joyeuse et positive pour faire connaitre à un public le plus large possible la réalité que vivent les Palestinnien-ne-s depuis des décennies.
38 LE DÉCLIC
Nous vous invitons à nous envoyer un texte décrivant votre déclic personnel, ce moment-clef dans votre vie où vous avez décidé de vous engager pour les droits des Palestiniens. Gardez le texte en-dessous de 2000 signes et envoyez-le à sophie@abp-wb.be
Maurice Pasternak Mon engagement ne s’est pas déclenché à un moment précis. Il vient de mon regard sur l’actualité mondiale. L’engagement est déjà, en soi, une question à définir pour chacun. Les limites entre engagement, engagement frontal et militantisme sont également floues : à savoir à quel moment intervient le sacrifice de soi, de son espace professionnel ou privé. Mon engagement particulier vis-à-vis de la situation des Palestiniens vient de ma conviction que les leçons du passé n’ont jamais empêché le renouvellement des tragédies humaines. Les persécutés du passé peuvent se transformer en persécuteurs. Cela me blesse peut-être plus du fait de mes origines juives, de la persécution et disparition d’une grande partie de ma famille et du témoignage de mon père et de ma mère qui ont lutté activement comme partisans armés contre la barbarie nazie. L’être humain semble irrémédiablement mû par la volonté de pouvoir individuelle, la volonté de pouvoir religieuse, la dictature du profit, l’appropriation de biens et territoires des plus faibles. La répétition infinie des événements tragiques et du malheur humain peut entraîner la tentation de « relativiser » et pis encore, de se distancier, de s’insensibiliser face à une situation particulière, surtout si elle se prolonge. Les situations tragiques et les injustices peuvent disparaître de la diffusion médiatique quand elles sont durables, faisant ainsi l’objet d’une indifférence fataliste ou de l’oubli. L’instantanéité et la rapidité de la diffusion des informations font que l’alerte émerge et se dissout aussitôt, se réduit, se relativise non pas en fonction de l’épaisseur tragique humaine mais de la capacité de fluidité de l’émotion de la conscience humaine.
Cathy Mayer Chanter pour protester
1968. À la suite de la guerre des Six jours, Israël occupe le Plateau du Golan et coupe en deux le village de Majdal Shams. Une barrière de séparation oblige les habitants à communiquer entre eux à l’aide de mégaphones. Le spectacle Shouting Fence, organisé en 2009 par la chorale bruxelloise Brecht-Eislerkoor, part de cette situation. Nous sommes ensuite quelquesuns à nous rendre en Cisjordanie pour témoigner de notre solidarité en chantant aux checkpoints des chants de lutte et de résistance. Première expérience à Bethléem : nous sommes au check-point à cinq heures, moment où déjà se pressent des Palestiniens. C’était un novembre pluvieux, il faisait encore sombre. Postés à l’entrée comme des chiens mouillés, nous commencions à chanter timidement, nous demandant dans quelle aventure nous nous étions lancés. C’est l’étonnement bienveillant des hommes pressés qui nous donna de l’assurance : certains passaient, étonnés, faisant de deux doigts le V de la victoire, d’autres s’arrêtaient quelques secondes en souriant, le marchand de café nous offrit du café chaud. À Qalqilia, un soldat nous menaça : « Reculez de deux mètres. Vous n’avez pas le droit d’être là », nous lança-t-il en pointant son arme vers nous. Notre réponse fusa : « Vous non plus ! », et nous reculâmes de deux mètres en chantant « No, no, we shall not be moved, this is our home, this is Palestinian land … ». D’autres « prestations » furent accueillies par des danses, ou par des Palestiniens qui chantèrent avec nous, ou par des gaz lacrymogènes, ou par le surnom « Checkpoints Singers » que nous avons adopté depuis.
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/ Hosh el Etem, site historique de Birzeit. © Riwaq
un enjeu politique LA RÉHABILITATION DU PATRIMOINE
Les accords d’Oslo, le découpage du territoire qui en résulte, et dans la foulée, la formation d’un gouvernement favorisent l’émergence d’une nouvelle façon d’exprimer l’identité nationale et le récit collectif palestinien. La culture tend à se tourner vers le passé et à le figer dans un folklore. Dans les années qui suivent, le ministère de la Culture met sur pied un vaste programme de réhabilitation du patrimoine, basé sur un « retour à la tradition ». par Catherine Fache « Les inventaires, les projets d’histoire orale, les collections, les musées, la résurgence des traditions populaires, la rédaction d’ouvrages académiques ainsi que la restauration des bâtiments historiques sont quelques-unes des manifestations de cette époque. Elles sont le témoin de la culture riche et variée de la Palestine de la pré-Nakba (désastre) (1948). » 1 C’est dans ce contexte, qu’en 1997, l’Autorité palestinienne prend en charge l’organisation des festivités du mawsim de Nabî Mûsâ 2, près de Jéricho (un des deux seuls pèlerinages musulmans de Palestine), et renforce son caractère politique. L’AP ressuscite également le mawsim de Nabi Saleh, d’autant plus oublié que les habitants étaient plutôt communistes et laïques… Autour du tombeau du prophète Salih, se crée un festival populaire nationaliste. L’objectif est d’une part la création de liens entre la population locale restée sur place et celle, nombreuse, qui revient après l’exode de 1967, et d’autre part l’intégration dans la mémoire officielle de la lutte nationale. Ces interventions se veulent
des actes de résistance contre la colonisation et le morcellement du territoire 3. L’initiative revient à Nimr Sirhan, historien, fonctionnaire au ministère de la Culture, et par ailleurs auteur d’une encyclopédie sur le folklore et d’ouvrages sur la musique, les costumes et les traditions palestiniennes. Ses recherches, parmi d’autres, contribuent à la manifestation d’une identité palestinienne, à la résurgence d’une Palestine originelle, pure, « non contaminée » et à son opérationnalisation comme résistance. Il souligne combien, dès la première Intifada, les chants, les posters, les graffiti, les foulards et les pierres sont de puissants outils de résistance 4. En effet, en plus des traditions religieuses, c’est également l’ensemble du patrimoine populaire qui est valorisé et qui contribue à créer un sentiment national, et est utilisé dans ce sens. À côté du patrimoine immatériel, le patrimoine matériel est également étudié et réhabilité. Riwaq, Centre pour la conservation de l’architecture, naît en 1991. De 1994 à 2007, l’association réalise
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CES INTERVENTIONS SE VEULENT DES ACTES DE RÉSISTANCE CONTRE LA COLONISATION ET LE MORCELLEMENT DU TERRITOIRE.
pour en savoir plus – K. Bshara & J. Barlet, avec R. Saleem, Restauration et réhabilitation en Palestine. Hosh el Etem dans le centre historique de Birzeit. Institut du Patrimoine wallon, Les dossiers de l’IPW 10, 2013. 20 euros. – http://www.riwaq.org – http://riwaqspatialpossibilities.yolasite.com
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un inventaire des bâtiments historiques dans 420 villages à travers la Cisjordanie, Jérusalem et Gaza. En 2009, elle décide de protéger 50 centres historiques, permettant de protéger près de 50% des 50 230 bâtiments répertoriés. Les préoccupations majeures de Riwaq sont la sensibilisation de la population, la création d’emplois et la volonté de faire revenir la vie dans ces lieux au service des communautés. Parallèlement, le ministère palestinien du Tourisme et des Antiquités répertorie 20 sites susceptibles de figurer sur la liste du patrimoine mondial (vestiges préhistoriques, sites naturels, sites hellénistiques et byzantins, Bethléem, villages trône ou palais-forteresses datant de l’époque de l’Empire ottoman). « En adoptant une approche nationale, supranationale et universelle vis-à-vis du patrimoine culturel bâti et du paysage, les lieux de mémoire palestiniens sont remis à l’avant-plan dans un contexte de résistance 5.» Aujourd’hui, plusieurs sites sont inscrits par l’Unesco sur la liste du patrimoine mondial en péril: Jérusalem, la vieille ville et ses murs (1982, proposé par la Jordanie), Bethléem, lieu de naissance de Jésus: l’église de la Nativité et la route de pèlerinage (2012), Battir, terre des oliviers et des vignes, paysage culturel du sud de Jérusalem (2014) et Hebron/Al-Khalil vieille ville (7 juillet 2017). Face à une spoliation létale quotidienne, la Palestine se doit de vivre la préservation du patrimoine au présent. Face à la menace perpétuelle de l’éradication, l’expression de la culture, sous toutes ses formes, est condition de son existence. 1/ K. Bshara & J. Barlet, voir “Pour en savoir plus”. La Fédération Wallonie-Bruxelles a collaboré, avec Riwaq, à la restauration du centre historique de Birzeit. 2/ Emma Aubin Boltanski, Le mawsim de Nabî Mûsâ : processions, espace en miettes et mémoire blessée. Territoires palestiniens (1998-2000), in Sylvia Chiffoleau et Anna Madœuf (dir.), Les pèlerinages au Maghreb et au Moyen-Orient, Presses de l’Ifpo, Damas, 2005. 3/ Falestin Naïli, Emma Aubin-Boltanski, pèlerinages et nationalisme en Palestine: prophètes, héros et ancêtres, Gradhiva, 8, 2008. 4/ David A. McDonald, Performative Politics: Folklore and Popular Resistance during the First Palestinian Intifada, in Moslih Kanaaneh, Stig-Magnus Thorsén, Heather Bursheh, and David A. McDonald, Palestinian music and song : expression and resistance since 1900, Bloomington, Indiana University Press, 2013. 5/ K. Bshara & J. Barlet, ibid.
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Palestine
UN COUP D’ŒIL VERS LE PASSÉ, UN REGARD SUR LE PRÉSENT
Retranscrire les moments clefs du « conflit » israélopalestinien, le tout en quelques planches et sur un ton décalé : voilà le projet ambitieux de Bernardo Vergara.
L’Association belgopalestinienne, à l’initiative de sa régionale du Luxembourg, a traduit de l’espagnol en français cet outil pédagogique désormais accessible à un public francophone. La bande dessinée se vend en format papier au prix de 5 euros. Envoyer mail à info@abp-wb.be pour plus d’informations.
44 LIVRES par C.S.
L’Histoire occultée des Palestiniens (1947-1953) Sandrine Mansour, Éditions Privat, Toulouse 2013, 350 pages L’auteure de ce livre est docteure en histoire et chercheure au Centre de Recherche en Histoire Internationale et Atlantique (CRHIA) à l’université de Nantes. L’Histoire racontée dans ce livre est celle des Palestiniens de la 1re moitié du 20e siècle, celle qu’ils n’ont eu de cesse de faire entendre mais que le très efficace récit officiel sioniste a rendue quasi inaudible aux oreilles occidentales. Cette approche nouvelle est basée sur de nombreuses sources : des archives diplomatiques inédites, des écrits d’historiens en majorité palestiniens, mais aussi des nouveaux historiens israéliens et des témoignages oraux. Contrairement à l’imagerie misérabiliste qui en a été propagée par les mythes fondateurs d’Israël, ces documents révèlent la richesse du développement local (économique, social, culturel, etc.) et l’importance démographique de la population présente en Palestine, bien loin de l’image d’une « terre sans peuple ». Ils témoignent aussi de l’inquiétude croissante des Palestiniens devant l’immigration massive juive. Durant les années du Mandat britannique (de 1920 à 1948), les Palestiniens n’ont jamais cessé de réclamer leurs droits (parfois avec violence) et de dénoncer le non-respect des promesses qui leur ont été faites. Comme il est dit en 4e de couverture, ce livre est un événement à ne pas manquer.
45 LIVRES
Palestine HISTOIRE D’UN ÉTAT INTROUVABLE Rashid Khalidi, Actes Sud, 2007, 368 pages Rashid Khalidi est un brillant historien palestinien, spécialiste du Moyen-Orient et du conflit israélo-palestinien. Il est titulaire de la chaire Edward Saïd d’études arabes à l’Université Columbia où il dirige l’Institut du Moyen-Orient. Cet ouvrage couvre essentiellement la période du Mandat (1920-1948) attribué à la Grande-Bretagne par la Société des Nations après la première guerre mondiale. Khalidi y décrit le processus par lequel la minorité juive nouvellement arrivée en Palestine a, avec l’aide de son allié britannique, ignoré les revendications et les droits de la majorité arabe indigène sur le territoire qui allait devenir Israël et les territoires occupés. Khalidi signale les multiples obstacles que les Palestiniens ont affrontés en tentant de mettre en place leur para-État, et ce, malgré les promesses britanniques d’indépendance arabe et au mépris de l’article 4 du Pacte de la Société des Nations. Pendant le même temps, la minorité juive bénéficiait d’un système biaisé qui a permis le développement de structures pour le futur État israélien, bâti sur l’expulsion violente de plus de la moitié de la population indigène.
46 LIVRES
Le grand mufti et le nationalisme palestinien
HAJJ AMIN AL-HUSSAYNI, LA FRANCE ET LA GRANDEBRETAGNE FACE À LA RÉVOLTE ARABE DE 1936-1939 Louis Denisty, Éditions l’Harmattan (Comprendre le Moyen-Orient), 2006, 220 pages Louis DENISTY a étudié l’Histoire contemporaine du monde musulman méditerranéen à l’Université Paris 1-La Sorbonne. En avril 1936 éclate la première grande révolte des Arabes de Palestine, qui revendiquent la constitution d’un État et l’arrêt de l’immigration sioniste. À la tête de ce mouvement s’impose Hajj Amin al-Hussayni, grand mufti de Jérusalem. Banni par les Britanniques, il trouve refuge au Liban où les Français le laissent développer le point de vue palestinien. La Palestine s’enfonce alors dans des années tragiques et ensanglantées mises en lumière, dans cet ouvrage, via le questionnement des archives diplomatiques françaises et britanniques.
Balfour’s Shadow
A CENTURY OF BRITISH SUPPORT FOR ZIONISM AND ISRAEL David Cronin, Pluto Press, London 2017, 213 pages avec notes David Cronin est journaliste et écrivain ; il a contribué à de nombreuses publications et journaux dont The Guardian. En 1916, les Français et les Anglais concluent les accords secrets Sykes-Picot en vue de se partager les futurs restes de l’empire ottoman. Dans le même temps, les Britanniques promettent au chérif Hussein qui gouverne La Mecque tous les territoires arabes sous occupation ottomane, y compris la Palestine et la Syrie. Enfin, avec la déclaration Balfour (du 2 novembre 1917), destinée à rallier les communautés juives en leur promettant un « foyer national juif » en Palestine, l’hypocrisie est à son comble. Six semaines plus tard, le 9 décembre 1917, le général britannique R. Allenby entre à Jérusalem à la tête de trois bataillons juifs. Pour les Palestiniens, les accords Sykes-Picot et la déclaration Balfour constituent des actes de traîtrise qui ont profondément bouleversé leur existence jusqu’à aujourd’hui.
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ÉVÉNEMENTS
10 octobre à 19h Tina Sherwell, directrice de l’Académie internationale de Beaux-Arts de Ramallah, parlera de l’art palestinien contemporain. Docteure en “Image Studies” de l’université de Kent, Sherwell a été la commissaire de plusieurs expositions et s’est affirmée en tant que critique d’art à travers ses nombreuses publications. Elle a reçu le prix d’Alexandria Biennale en 2001 pour sa série de cartes de la Palestine. L’artiste Jawad al Malhi parlera, lui, de sa pratique artistique de plus de 20 ans. Né en 1969, l’artiste tire son inspiration de sa ville natale, le camps de réfugié de Shufhat, à Jérusalem-Est. « Mon travail artistique prend comme point de départ l’expérience de l’altérité chez moi comme à l’étranger, en tant que Palestinien. À travers la peinture, des techniques mixtes et des oeuvres in situ, j’explore les espaces de marginalité. » Wiels, Centre d’art contemporain Av. Van Volxem 354 à 1190 Bruxelles
samedi 2 décembre de 14h30 à 23h Espace Magh rue du Poinçon, 17 à 1000 Bruxelles en partenariat avec le CNCD-11.11.11, PAC, SOLSOC, MOC, UPJB ainsi que l’ong MUNDUBAT avec le soutien du centre culturel Espace Magh asbl
éditeur responsable – Pierre Galand, rue Stevin 115 à 1000 Bruxelles
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