1 au 12 septembre 2021
ART ROCK Dossier pédagogique
Expositions
CRÉDITS : GINA KIEL X JARDIN GRAPHIQUE
L’AFFICHE Gina Kiel Gina Kiel est une artiste basée à Te Whanganui-a-Tara, Aotearoa (Wellington, Nouvelle-Zélande). Elle crée des images fortes qui respirent la sensualité et explorent l’expérience humaine à travers la vie, la mort, la spiritualité et la culture pop en utilisant des lignes, des formes fluides et des compositions audacieuses et minimales, avec une palette psychédélique. Gina peint des fresques murales, autant qu’elle crée des pochettes d’album ou des affiches ! Elle est également tatoueuse et fait partie d’un collectif d’artistes féminines : The Dream Girls Collective. Répondant à notre invitation, elle crée le visuel de l’édition d’Art Rock 2021, souhaitant partager à travers cet avatar, sa conception de l’énergie créatrice s’élevant vers le monde extérieur. Le visage est serein et sort enfin la tête de l’eau. Image positive et réconfortante de ce que nous souhaitons pour cette année si particulière… Pour aller plus loin : L’artiste voyait dans cette flamme s’échappant de l’oeil du visage coloré, la flamme créatrice d’un artiste qui continue de brûler perpétuellement, quoi qu’il arrive (elle a créé son oeuvre, à la demande du festival, en décembre 2020, en pleine crise du Covid-19). Dans un parcours de médiation, on pourra demander aux visiteurs leurs propres interprétations de ces deux visages, ou de ce masque coloré sur un visage noir. La partie colorée est-elle en train de recouvrir le visage ou, à l’inverse, le visage sort-il de cette vague ? ginakiel.com
EXPOSITION FORUM - 3 > 5 SEPTEMBRE Ines Alpha Ines Alpha est une artiste 3D basée à Paris qui aime créer des versions enchantées et fantastiques de la réalité. Elle a commencé à expérimenter la 3D tout en travaillant comme directrice artistique en publicité, spécialisée dans la beauté et le luxe. Puis elle a collaboré avec Panteros666 pour réaliser des vidéos comme le clip d’OMG! de Yelle. Son travail principal s’illustre dans la série « Maquillage 3D », où elle repousse les limites de la beauté à l’aide de logiciels 3D et de réalité augmentée pour créer des masques surréalistes, véritable maquillage du futur. Pour aller plus loin : Le travail de cette artiste pourra servir à sensibiliser le regard des différents publics sur l’utilisation à tout-va des filtres sur les réseaux sociaux comme Instagram ou Snapchat. S’ils sont souvent critiqués pour fausser la vision qu’ont les plus jeunes d’eux-mêmes, favorisant une vision idéaliste et sans défaut de soi, ils peuvent aussi être une nouvelle manière de se maquiller, comme on met du mascara ou du rouge à lèvres. Une révolution du makeup qui redéfinit les canons de beauté en proposant une version augmentée, digitalisée et trans-humaine d’une personne physique. Futuriste, virtuelle ou fantastique, Ines Alpha invente un monde proche du réel... mais pas tout à fait ! Et vous, quel élément virtuel ajouteriez-vous à votre reflet ? Niveau technique, l’artiste française utilise le tracking facial pour que chacun de ses maquillages 3D puisse aller à tous types de visages tandis qu’elle crée, à l’aide de son ordinateur et de crayons numériques, des éléments aux textures, tailles, matières et visuels différents en 3D, souvent inspirés de créatures subaquatiques. inesalpha.com
BRITTNEY SCOTT X ANAÏCK MORICEAU La Galerie du Forum va se transformer en aquarium l’espace d’un week-end. La vie sousmarine de la baie de Saint-Brieuc, illustrée par l’artiste californienne Brittney Scott, connaîtra une interprétation spontanée et colorée, nous promettant un voyage saturé de minimalisme pour mieux percuter nos rétines. Anaïck Moriceau, artiste sérigraphe briochine de talent qu’on ne présente plus, mettra la main à la peinture, pour rendre justice à l’harmonie de la nature. Une rencontre entre deux amies, dont Brittney Scott qui a notamment crée un des logos de Yelle ! Pour aller plus loin : Brittney Scott a d’abord développé son travail sur Paint, le logiciel de dessin bien connu de Microsoft. Puis, munie de peintures colorées et de pinceaux, elle est revenu à la peinture IRL (in real life), tout en continuant d’embrasser cette esthétique qui rappelle les images créées numériquement. Elle partage avec la sérigraphe Anaïck Moriceau son amour pour les formes franches, les couleurs vives et nettes. Entre sérigraphies, peinture, créations digitales et inspiration à partir du réel, cette exposition permettra d’aborder le processus créatif des artistes ainsi que la liberté de médium qui s’offrent à eux. brittneys.club editionsanaickmoriceau.bigcartel.com
OÙ VA LE MONDE ? MUSÉE DE SAINT-BRIEUC - 1 > 12 SEPTEMBRE
Comment définir le monde dans lequel nous vivons ? De quel monde parle-t-on : du monde pré-Covid, pendant-Covid, post(espérons-le)-Covid ? Ceux-ci sont-ils les mêmes ? En quoi cette crise a-t-elle redéfini notre vision du monde ? Est-elle l’unique source de nos questionnements ou ces interrogations remontent-elles à notre « mise au monde » à chacun, sorte de plongée dans un espace en perpétuel changement, fascinant et inquiétant à la fois ? Partons à la découverte de cet inventaire de nos peurs, nos doutes, nos fantasmes, nos espérances comme nos frayeurs vis-à-vis de ce monde, dans un futur qui pourrait être bien plus proche que nous ne le pensions. L’incertitude semblant être le nouveau maître-mot de l’humanité, plongeons-nous dans l’exposition au musée de Saint-Brieuc : Où va le monde ?
WAVE INTERFERENCE ROBYN MOODY / Canada
Les ondes nous entourent : qu’elles viennent d’une station radio, de la lumière que l’on perçoit à l’œil nu, d’un émetteur 5G nous abreuvant de données sur nos smartphones ou d’un caillou lancé dans l’espoir de faire un ricochet, elles nous englobent et nous ne pouvons pas y échapper facilement. Wave Interference est une sculpture cinétique, composée de 88 tubes fluorescents qui réalisent une chorégraphie hypnotique et troublante. Ce lent mouvement de sur-place crée également une partition infinie composée par un orgue placé à proximité. La peur ou l’inconfort généré par la musique émise par cet orgue du XIXème siècle, rappelant la B.O. de films d’épouvante, s’opposent à la douceur visuelle de la cascade lumineuse, mystérieuse et onirique. Robyn Moody met ainsi en avant la dichotomie actuelle entre un certain discours anti-scientifique, exploitant une ignorance des faits au profit de la peur et de la suspicion, devant certaines beautés du savoir et de la vérité. Pour aller plus loin : L’artiste canadien a créé cette oeuvre alors qu’il s’agaçait des discours de plus en plus sceptiques, voire conspirationnistes, de certaines personnes. Pour lui, ces gens qui ne cessent de
douter et de remettre en cause la science par des idéologies diverses, ont tout simplement peur de l’inconnu. Et dans la nature, l’inconnu est roi. Ainsi, ici on oublie la beauté de ce que l’on regarde, cette vague de lumière ondulante, si l’on se laisse perturber par la mélodie troublante jouée par l’orgue. Cette bande son ajoute de la peur et du doute à quelque chose qui, seul, est magnifique. Robyn Moody exploite cette idée sur le thème des ondes. Ces derniers temps, on a beaucoup parlé de l’arrivée de la 5G en France, alors que nous sommes déjà entourés d’ondes de toutes sortes. Même si nous éteignons notre poste de radio, ou que l’on n’utilise pas son smartphone, le wifi, le bluetooth, les ondes radios, etc continuent d’émettre tout autour de nous, malgré le fait que nous ne puissions pas les sentir ou les voir, contrairement aux ondes sonores et lumineuses présentes ici. Ainsi, si l’onde sonore créée par l’orgue change la perception que nous avons de la beauté de l’onde visuelle de la structure lumineuse, quelle perception aurions-nous si nous pouvions voir toutes les autres ondes traversant cette pièce ? robynmoody.ca Construction : Rachael Chaisson, Ann Thrale, Rita McKeough et Tristan Zastrow Réalisée avec le soutien du Conseil des Arts du Canada
SOLAR WALK
Réka Bucsi / Hongrie-Danemark Des personnages fantasques, des formes géométriques hallucinantes, des interactions psychédéliques, des paysages merveilleux : tout va très vite dans ce courtmétrage d’une vingtaine de minutes et pourtant on en ressort comme changé, à la manière de spationautes ayant exploré un nouveau monde. Et c’est là tout le génie de cette jeune réalisatrice qui nous fait voir la création d’un nouvel univers, entre éléments familiers et pures abstractions. Petit bijou de surréalisme, Solar Walk nous plonge dans une science-fiction magique mise en musique par le Aarhus Jazz Orchestra.
Ce qui ressort de la vision de ce film c’est une philosophie, un concept, un nouvel univers créé devant nos yeux. Les personnages, plutôt en retenue, voire parfois introvertis, ne parlent pas. Leur absence de réaction émotionnelle permet à Solar Walk d’évoluer à un niveau entre comique et dramatique. vimeo.com/rekabucsi
Pour aller plus loin : Née en Allemagne, vivant entre le Danemark et la Hongrie, Réka Bucsi est un mélange de cultures à elle seule. Pourtant, la réalisatrice ne s’en suffit pas et crée ses propres univers dans ses court-métrages fascinants. Passionnée de dessin, et plus particulièrement de BD, elle se lance dans la réalisation de court-métrages d’animation dans sa vingtaine. Elle se plaît à faire évoluer toutes sortes de créatures fantastiques dans des environnements réels, apportant une touche de réalisme dans une science-fiction magique.
Trash animals « Light mouse »
A l’origine, Solar Walk a été créé en 2017 à l’occasion d’une performance live du Aarhus Jazz Orchestra. Le film durait 47mn et accompagnait en images le concert de l’orchestre. À partir de cette création, elle en a extrait un courtmétrage d’une vingtaine de minutes qui a dorénavant une existence à part entière, et qui n’a pas besoin que l’orchestre de plus de 20 musiciens tourne de par le monde pour que le public découvre son travail.
Crédits : Réalisation : Réka Bucsi – Story board : Réka Bucsi – Montage : Jason Reicher, Réka Bucsi – Décors : Réka Bucsi – Animation : Nicole Stafford, Jason Reicher, Cyrille Chauvin, Pernille Kjaer – Generalist : Lars Hemmingsen – Compositing : Lars Hemmingsen, Asger Kjaerholm – Sons et mixage : Péter Benjàmin Lukàs – Musique : Mads Vadsholt – Directeur de production : Lorène Lescanne – Producteur : Morten Thorning (The Animation Workshop / VIA University College), Claus Toksvig (Norlum)
THE PUNISHMENT
FILIPE VILAS-BOAS / Portugal- France I must not hurt humans (Je ne dois pas blesser les humains). Inlassablement, le robot réécrit cette simple phrase sur sa feuille, tel un écolier puni. Avec The Punishment, Filipe Vilas-Boas nous présente un robot industriel exécutant une punition préventive, au titre de son éventuelle désobéissance future. L’œuvre nous interroge avec ironie sur les relations homme-machine au moment même où l’avènement des nouvelles technologies réactive le mythe de la créature qui échappe à son créateur. En soulevant les peurs que l’intelligence artificielle engendre, le dispositif cherche à mieux les déconstruire et à questionner la place de cette dernière dans nos sociétés. A quel point souhaitons-nous automatiser nos vies ? Quel cadre physique, moral et juridique donner à cet usage ? Pour aller plus loin : Au-delà de la boutade que de mettre un robot industriel au coin, Filipe Vilas-Boas interroge l’usage qu’on a de l’automatisation et de sa place dans la société actuelle. Le fait que le robot répète à l’infini qu’il ne s’attaquera pas aux humains soulève les peurs dans l’imaginaire collectif du pouvoir qu’ont les machines aujourd’hui. D’un autre côté, il effectue une tâche répétitive qu’on aurait toutes et tous adoré lui déléguer lorsqu’on était petits. Entre angoisse et opportunités, risques et chances, la figure du robot nous libère de nos tâches ingrates mais sans que l’on connaisse la limite de ce pouvoir qu’on lui accorde en le créant. Finalement, la fascination de l’humain face à un robot industriel est également mise en avant dans cette oeuvre : malgré qu’ils soient nos propres créations (en tant qu’humain), la figure de la créature se retournant contre son créateur, tel Frankenstein, effraie.
The Punishment, 2017 – Artiste : Filipe Vilas-Boas – Programmation : Jean-Marie Ollivier, Bertrand Manuel, Marc Olasek. – Reproduction réalisée en 2021 avec Jean-Marie Ollivier, ingénieur et collectionneur de robotique Penvénanais.
CLAMS
MARCO BAROTTI / Italie-Allemagne Dans la nature, les coquilles Saint-Jacques sont de véritables détecteurs de polluants : elles servent de petits filtres naturels et peuvent purifier jusqu’à deux litres d’eau par jour. Leur tissu absorbe ainsi une partie des produits chimiques et des agents pathogènes présents dans la mer. En s’inspirant de ce phénomène naturel, Marco Barotti a créé ses CLAMS : un banc de coquillages, imprimés en 3D à partir de plastiques recyclés, qui traduit des données recueillies par un capteur de qualité de l’eau, en sons et mouvements. Le paysage sonore diffusé par de petites enceintes installées à l’intérieur de ces vraies-fausses coquilles Saint-Jacques les place en constante évolution, créant des mouvements répétitifs d’ouverture et fermeture très réalistes.
polluants endommagent gravement nos écosystèmes aquatiques, mais ils se retrouvent également dans notre alimentation voire dans nos habitations sous forme d’eau contaminée. Cette pollution est principalement causée par les déchets industriels et le rejet des eaux usées des villes, mais aussi par les résidus des pratiques agricoles humaines qui s’écoulent dans l’océan via la pluie. Dans un parcours de médiation, l’œuvre pourra servir à établir des liens entre l’art cinétique (œuvres en mouvement), la sonification des données (transformer des données en notes de musique à l’aide d’un ordinateur et de logiciels) et la pollution de l’eau. Une discussion pourra ensuite être lancée sur ce que dit l’œuvre sur notre surconsommation de plastique.
Collant le plus possible à la réalité de son territoire, l’installation présentée par Art Rock repose sur une collecte de données réalisée dans le port de Saint-Quay-Portrieux en mai 2021. Ainsi, les coquilles se meuvent exactement comme si elles étaient immergées dans la Baie de SaintBrieuc.
marcobarotti.com
Pour aller plus loin : À travers son travail, Marco Barotti exprime son désir d’inventer un langage artistique dans lequel une ère post-futuriste fictive est imaginée par des interventions sonores cinétiques dans des environnements naturels. Le capteur de la qualité de l’eau a mesuré l’évolution de la température, la pression, la conductivité, le pH, le potentiel rédox, l’oxygène dissous (RDO, Rugged Dissolved Oxygen), la turbidité, la résistivité et le taux de solides dissous dans la mer du 18 au 30 mai 2021 à Saint-QuayPortrieux, 22). Puis ces données ont été envoyées à un ordinateur qui les a transformées en notes micro-tonales pour créer une mélodie de musique drone qui actionne les 64 sculptures de coquilles Saint-Jacques. Celles-ci ont été réalisées en plastique recyclé thermoformé sur de vraies coquilles ramassées sur la plage. Chaque année, on estime que 8 millions de tonnes de plastique pénètrent nos océans et forment des îlots de déchets. Une partie se décompose en micro-plastiques, particules plus fines qu’un cheveu. Non seulement ces
CLAMS est un projet créé et réalisé par Marco Barotti, développé au centre d’art WRO dans le cadre d’une résidence EMAP / EMARE, en partenariat avec Creative Europe, C-Takt, Oerol Festival, Transnatural, et parrainé par Dayton Audio, pour le système de mesure acoustique des niveaux de qualité de l’eau in situ. Le festival Art Rock tient à remercier la Direction Départementale des Territoires et de la Mer, le Comité Départemental des Pêches Maritimes et Élevages Marins des Côtes d’Armor, la ville de Saint-Quay-Portrieux et Arnaud De Clerck, propriétaire de l’Azur.
BONNE NUIT LES PETITS PIERRE ARDOUVIN / France
Utilisant les codes visuels des enseignes et des manèges forains, cette phrase reprend le titre de la célèbre émission de télévision des années 1960, invitant les enfants à aller se coucher avec ce slogan devenu mythique pour des générations entières. L’œuvre fait allusion, de façon détournée, au pouvoir des médias, et à leur potentielle capacité d’endormir notre réflexion. Au regard des deux années écoulées, la pièce pourrait désormais être aussi vue comme un clin d’œil aux confinements et couvre-feu successifs que nous venons de subir.
Pour aller plus loin : L’oeuvre de Pierre Ardouvin réactive notre mémoire d’enfance, en convoquant des souvenirs propres à l’imaginaire collectif et populaire. En effet, l’expression « bonne nuit les petits » fait référence à un programme télévisé, série de courtes fictions de cinq minutes animées par des marionnettes, diffusée à partir de 1962. Elle était destinée à marquer une coupure signifiant aux enfants qu’il était l’heure pour eux d’aller se coucher, avant que les parents puissent regarder le journal télévisé. Si certains redoutaient de voir apparaitre Nounours, Pimprenelle et Nicolas à l’écran par peur du coucher et de tout l’univers auquel il renvoie pour un enfant (la peur du noir, les cauchemars…), l’oeuvre de Pierre Ardouvin fait également un clin d’oeil aux adultes sur leur propension à se laisser endormir par le discours des médias. Ainsi, l’artiste explique son oeuvre ainsi : « J’ai repris cette phrase avec des lettres clignotantes en volume, comme une enseigne publicitaire. J’ai voulu parler des médias, du pouvoir et de leur manière de nous endormir. ». Présentée dans l’exposition Où va le monde ?, après deux ans d’une crise du Covid-19 sans précédent, l’oeuvre peut nous rappeler également les privations de libertés que nous avons subies dans le cadre des dispositifs légaux mis en place pour faire face à cette pandémie. Ainsi, le couvre-feu instauré en France pendant 8 mois pouvait être perçu comme une infantilisation du pouvoir demandant aux citoyens de rentrer chez soi à 18h (puis 19h, 21h et 23h). Finalement, on peut également entendre cette expression d’une manière plus ironique et inquiétante, presque comme un memento mori (locution latine qui signifie « souviens-toi que tu vas mourir », l’oeuvre rappelant aux hommes qu’ils sont mortels). pierre-ardouvin.com
Le festival remercie le Fonds régional d’art contemporain Alsace pour le prêt de l’œuvre.
THE WAITING
Margriet van Breevoort / Pays-Bas Il a le regard vide, l’air un peu idiot, la bedaine qui déborde, les mains croisées de celui qui ne sait plus s’il attend ou si, justement, il n’attend plus grand chose : la posture du bienheureux pas méchant mais un peu brave. Et, soudain, en le regardant, on se rend compte qu’il est un miroir. Et oui, c’est bien nous ce gros-plein de soupe qui attend, qui observe, qui voit le monde partir à vau-l’eau sans faire grand chose, attendant patiemment que quelqu’un s’en occupe pour lui. À travers l’utilisation de techniques de sculptures hyperréalistes, le travail de Margriet van Breevoort, à la frontière entre l’exceptionnel et l’impossible, invite le spectateur à expérimenter un monde fait de contradictions, incluant la dialectique entre l’homme et la nature, l’organique et la technique, la culpabilité et l’innocence. Elle pose la question d’une nature qui ne peut exister uniquement sous la main de l’homme, et essaie de refléter le doute de ce qu’est vraiment la nature à l’ère de l’Anthropocène, « l’Ère de l’humain ». La première approche : Cette créature hybride, moitié éléphant de mer, moitié humain, à l’air absent, attend, attend, attend… Quoi, qui, pourquoi ? On ne le sait pas. Devenu un véritable mème sur Internet, la photo de cette sculpture a été partagée des milliers de fois sur les réseaux sociaux assortie de commentaires humoristiques, de tweets de Booba à la pochette du dernier album du groupe Balthazar. La statue, re-baptisée Jdoun (qui se rapproche de « Jdou », « j’attends » en russe) est devenue un véritable symbole en Russie comme si leur société, réputée passive et résiliente, s’identifiait à lui au point que des politologues ont commencé à se pencher sur le phénomène : « Ce personnage bizarre remplit un vide, la société attend quelque chose sans savoir quoi exactement », analyse de son côté le sociologue Alexeï Rochine, interrogé par Le Monde. Pour lui, la statue traduit un malaise profond : « C’est le signe d’un appauvrissement général de la situation intellectuelle et spirituelle, car il ne se passe rien d’intéressant en Russie ». Le personnage sert aussi de critique contre la justice impuissante face au pouvoir
du Kremlin : l’opposant Alexeï Navalny avait partagé un photomontage de l’un de ses procès en 2017, remplaçant le juge par ce drôle de Jdoun. Placide et sympathique, The Waiting est finalement un symbole d’impuissance, de passivité. Margriet van Breevoort joue également avec notre sens de l’empathie. L’apparence hyperréaliste nous invite à nous rapprocher de la statue, et peut-être même à s’asseoir sur le banc avec elle et avoir une conversation avec la créature. En même temps, l’apparence presque humaine de la sculpture a une qualité effrayante, presque repoussante. L’artiste hollandaise travaille une technique de sculptures hyper-réalistes, à partir de résine synthétique époxy. Elle sculpte d’abord de l’argile à base d’huile dans un moule fait de silicone et de polyester. La sculpture en argile est ensuite recouverte d’époxy et peinte à la laque. margrietvanbreevoort.com
Alexeï Nalvany Le festival remercie le centre d’arts Buitenplaats Doornburgh à Maarssen (Pays-Bas) pour le prêt de l’oeuvre.
EXHAUSTING A CROWD KYLE MCDONALD / USA
Inspiré du livre Tentative d’épuisement d’un lieu parisien écrit par Georges Perec, installé sur un banc pendant 3 jours pour observer une place de la capitale (1974), Kyle McDonald décide d’automatiser cette tâche d’une description complète d’un évènement pendant douze heures dans une place fréquentée de Londres (Piccadilly Circus). L’œuvre nous renvoie au sujet controversé d’un futur où la surveillance serait parfaitement automatisée, grâce au travail combiné de l’intelligence humaine et des machines. On y découvre ainsi un enregistrement exhaustif de l’énergie présente dans l’espace public, mais elle nous donne aussi à voir le potentiel inquiétant de contrôle d’un environnement, façon dystopie qui aurait mal tourné. Génie américain de l’art numérique, Kyle McDonald a ajouté au fil des années plusieurs versions de son œuvre : après Londres, il est parti à la découverte de grandes villes comme Rotterdam (Pays-Bas), Birmingham (Angleterre) ou Gwandju (Corée du Sud)… et c’est à SaintBrieuc qu’il continue son exploration, depuis la place Du Guesclin ! Pour aller plus loin : En se connectant sur le site internet www. exhaustingacrowd.com, le spectateur peut se balader entre Londres et Birmingham (Royaume-Uni), Amsterdam et Enschede (Pays-Bas), Gwandju (Corée du Sud) et Pékin (Chine) - et bientôt Saint-Brieuc, et observer l’activité de ces villes à travers un point de vue fixe, comme une caméra de surveillance. Le spectateur devient acteur en ajoutant des commentaires sur tous les éléments de la vidéo. Ainsi, on lit des commentaires en anglais, en chinois, en grec, en arabe, en français, en onomatopées universelles : du PINPONPINPON ajouté à l’image d’un camion de pompier traversant Picadilly Circus, à l’injection de ralentir « not so fast ! » apposée sur la vidéo d’un vélo sur les quais d’Amsterdam, en passant par un petit rigolo qui fait parler toutes les poubelles d’un « give me food » (donnez-moi de la nourriture) c’est une mise en commun fabuleuse et fascinante auquel on peut
avoir accès au musée de Saint-Brieuc, comme partout dans le monde grâce à Internet. Observer l’activité d’une ville tel un pigeon ou une petite souris c’est une opportunité rare, mais en ajoutant cette possibilité de commenter tout ce qu’il s’y passe Kyle McDonald questionne également le jugement des humains les uns envers les autres. Mis en avant par le rôle des réseaux sociaux ces dernières années, les commentaires, bien que généralement bienveillants, se font plus critiques parfois : ainsi, un couple flirtant sur un banc de Birmingham voit son rendez-vous galant décrypté et commenté par des internautes du monde entier. Le pauvre jeune homme semble ennuyer sa partenaire ? Aïe, on le fait parler en « prout » et autre « blablabla ». Exhausting a crowd, littéralement « Épuiser une foule », nous donne l’opportunité de tout commenter, tout observer jusqu’à plus faim : on devient Big Brother, personnage omniscient qui a le pouvoir inquiétant de tout contrôler dans un environnement donné. Le potentiel dystopique d’une société perpétuellement sous caméras de surveillance est mis en avant tel un film d’horreur pas si improbable. exhaustingacrowd.com
Oeuvre de Kyle McDonald, aidé par Jonas Jongejan pour le développement du site internet. Vidéo réalisée par Spoon Productions.
PLAN
CONTACT & RÉSERVATION Réservation obligatoire pour tous les groupes auprès de l’association 02 96 68 46 23 billetterie@artrock.org Festival Art Rock 12 rue Poulain Corbion, 22000 Saint-Brieuc info@artrock.org www.artrock.org Direction : Carol MEYER Programmation et commissariat d’exposition : Alice BOINET
HORAIRES & ACCESSIBILITÉ Exposition au Forum de La Passerelle, Scène Nationale de Saint-Brieuc : Place de la Résistance, 22000 Saint-Brieuc Vendredi 3 septembre - Dimanche 5 septembre 2021 : 14h-18h GRATUIT Exposition au Pavillon des expositions temporaires du musée d’art et d’histoire de Saint-Brieuc : Cour Francis Renaud, rue des Lycéens Martyrs, 22000 Saint-Brieuc Mercredi 1er septembre – Dimanche 12 septembre 2021 Mardi au Samedi : 10h – 18h, Dimanche : 14 h - 18h GRATUIT / 1h de visite
Retrouvez toute la programmation du festival sur le site www.artrock.org