ministresse-culture-2-12-2013

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José VALVERDE Madame Aurélie FILIPPETTI Ministre de la Culture LETTRE OUVERTE le 2 décembre 2013 Chère Madame le Ministre, Chère petite fille de Villerupt, L’âge m’a rendu suffisamment lucide pour ne pas m’imaginer que ma nouvelle lettre viendrait se poser entre vos mains comme un oiseau qui se serait trompé de nid. Quand on a comme vous, sans doute, ambition d’être un jour la première femme Présidente de la République Française, l’on n’a pas le temps de lire ce gazouillis de vieillard. Vous ne me lirez pas mais moi, j’ai le privilège de vous lire et souvent avec délectation et tout particulièrement ce fut le cas en découvrant la première phrase de l’avant-propos que vous avez signée, pour une brochure éditée par « Building a better working world » et qui se veut le « 1er panorama des industries culturelles et créatives », françaises, je suppose. Cette première de vos phrases m’a semblé si belle que je ne, résiste pas au plaisir de vous la rappeler ici, afin que vous en puissiez féliciter votre « nègre » de service qui l’a pondu pour vous avec un indiscutable talent de langue de bois raffinée: « J’ai une conviction forte : la culture est un espace d’émotion individuelle et d’émancipation collective mais c’est aussi pour la France un atout majeur car c’est un formidable vecteur de croissance générant des retombées économiques infiniment supérieures aux investissements mobilisés. » Enfin ! La Culture est considérée à l’égale des autres marchandises ! Comme le pain, le raisin et son jus, les bicyclettes et les avions, le tourisme et le PMU, les activités de divertissement, vulgairement nommées : « Culture » alors qu’elles sont indispensables à la reconstitution de la force de travail sur le plan psychologique et prennent leur juste place dans l’économie nationale. Grâce à vous, madame le ministre, les histrions, main dans la main avec les fabricants de jeux vidéo, nous avons gagné la dignité économique et nous pouvons joyeusement remplacer ces vilaines mines où votre papa a parait-il travaillé, les aciéries, par exemple celle de Villerupt, devant laquelle j’ai joué une pièce qui n’a pas fait un sou et c’est sans doute pour cela que nous avons passé une nuit dans la gendarmerie de la ville qui vous vit naître. Désormais usines, mines peuvent devenir des musées pour participer ainsi à notre nouveau choix industriel stratégique. André Malraux, votre prédécesseur, s’interrogeait stupidement : « Ce que recouvre pour nous le mot si confus de culture, l'ensemble des créations de l'art et de l'esprit, c'est à la Grèce que revient la gloire d'en avoir fait un moyen majeur de formation de l'homme. » Quelle stupidité ! C’est maintenant à la Grèce à l’économie chancelante de nous imiter et cela grâce à vous, la petite fille de Villerupt*, dont les retraités, les licenciés des mines et tous les chômeurs de Lorraine peuvent être désormais bien fiers ! C’est à nouveau avec compassion pour votre personne et la stupidité de votre tâche, madame le Ministre, que je vous prie d’accepter mes salutations citoyennes attristées. Jose VALVERDE *Cf Lettres précédentes ata.valverde@bbox.fr


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