3.50 - 29 Octobre 2015
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SOMMAIRE 4 8
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Les Yezidis face à leur destin
Actualités
Edito
La sortie d’un mini LP du Brian Jonestown Massacre Coupe du Monde de est toujours un événement, rugby: Jamais deux sans même compte tenu de la trois pour les All Blacks? productivité effarante de son leader Anton Newcombe. Dépénalisation, Aussi fantasque que capable légalisation: quelles solutions pour le can Les candidats améri - de fulgurances géniales, nabis? cains passent à l’heure ce dernier peut devenir le latino cauchemar des journalistes. Sauf un : Roger de Lille, qui Vers l’écologie ci a rencontré Anton de Berlin. toyenne Highway to Hellfest La COP 21 arrive rapidement et les premières prémisses COP21: l’Inde sauve Bel Zégut de l’échec apparaissent. son charbon L’Inde refuse d’hypothéquer sa croissance en délaissant L’abdication surprise le charbon, qu’elle possède Eco-Quartiers: ce mo de RAF Simons chez et utilise en quantité, mais dèle va-t-il prendre de Dior qui est ravageur en matières l’ampleur d’émission de C02. Les USA et la Chine sont impliqués et Les jeux français ont semblent cette fois afficher Le PS dans l’impasse la cote à la Paris Ga un volontarisme certain, mes Week mais c’est toujours l’Union européenne qui est à la Sur la route migrants pointe de la lutte contre le Une marche de la réchauffement climatique, digité aux revendica- grâce à de très nombreuses «Les tensions dans tions indéterminés initiatives citoyennes. les refuges belges s’accumulent» La nouvelle programmation du Hellfest vue par Francis Zegut, le heavy metal papy d’RTL, l’option militaire prise par les yezidis et la finale de la coupe du monde Directeur de la rédaction : Eric Ouzounian de rugby : bonne lecture ! Rédacteurs en chef : Kessen Ndour & Charles BJM productivité maximum
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Thiefaine Iconographie : Louis Poincignon Maquette : Amandine Piombini & Orianne Vialo Secrétaires de rédaction : Camille Thorin & Edouard Risselet Rédacteurs : Anaïs Schacher, Victoria Putz, Roger de Lille, Edouard Risselet, Maurine Pagani, Estelle Torgue, Inès Van Impe, Samuel Vaslin Fitou, Lucie Touzi, Alexandre Sordet, Vincent Roussel, Nina Nothomb, Pauline Oheix, Yan Peirolo, Antonin Plu, Maëlys Peiteado, Maxime Priou, Justin Raymond, Florian Rocher
Abdelkrim Echatiman
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12 rue Alexandre Parodi 75010 - Paris Dépôt légal : à parution Directeur de la publication : Michel Baldi
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ACTUALITÉS N. Sarkozy, à la rencontre de V. Poutine Nicolas Sarkosy est à Moscou aujourd’hui pour rencontrer le président de la fédération Russe Vladimir Poutine. L’ex président français est accompagné de la député européenne Rachida Dati et du président des député Christian Jacob. C’est la deuxième fois depuis son départ de l’Elysée que N.Sarkosy rencontre Vladimir Poutine. Le président du parti Républicain répondra dans la journée aux questions de politique internationale de Ruth Elkrief, journaliste de BFMTV. Il profitera de cette occasion pour donner une conférence non rémunérée devant des étudiants à l’institut international de l’Université de Moscou. La proposition de loi sur la fin de vie de retour au Sénat Ce jeudi 29 octobre 2015, le Sénat examinera en deuxième lecture la proposition de loi, adoptée avec modifications par l’Assemblée nationale, créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie. Portée par les députés Alain Claeys (PS) et Jean Leonetti (Les Républicains), les sénateurs l’avaient rejetée le mardi 23 juin dernier à 196 voix contre et 87 pour. Cette proposition de loi viserait à donner aux patients en fin de vie le droit à une sédation profonde et continue jusqu’au décès et à obliger les médecins à respecter les directives anticipées des patients. Le prince Charles invite le ministère de l’écologie Ségolène Royal sera à Londres ce jeudi pour soutenir le Prince de Galles dans sa lutte contre la déforestation lors de la rencontre du REDD. Depuis 2008, cette initiative transnationale vise à trouver des solutions face au réchauffement climatique, aux émissions de gaz à effet de serre et à la dégradation et fragmentation des forêts. L’année dernière c’était Londres qui avait accueillie les Invictus Game, cette année les jeux se dérouleront à Orlando, en Floride. Le Prince Harry est à l’origine de cet évènement, qu’il a créé en 2013, en s’inspirant des Warrior Games.
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François Hollande en visite d’Etat en Chine Le chef de l’Etat, François Hollande, sera en Chine les 2 et 3 novembre pour une visite officielle avec son homologue chinois, Xi Jinping, avant la COP21.
François Hollande © CC
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e Président français effectuera une visite d’Etat en Chine les 2 et 3 novembre prochains, ont indiqué lundi les services de communication de l’Elysée. Invité par son homologue Xi Jinping dans l’optique de préparer la 21e conférence de l’ONU sur
le climat (COP21), ce tête-à-tête visera à « lancer avec le Président Xi Jinping un appel pour que nous puissions réussir la conférence sur le climat », avait déclaré François Hollande lors d’une conférence de presse en septembre dernier. Le chef de l’Etat français avait également profité de cette conférence pour rappeler l’importance cruciale de la Chine, pays parmi les plus peuplés du monde, mais aussi l’un des plus soumis à la pollution, afin de faire en sorte que d’autres pays suivent son exemple. Ce sommet international de la COP21 doit en effet aboutir à un premier
accord historique engageant 195 pays dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et ce dans l’objectif de limiter le réchauffement climatique à +2°C. Sans cet accord, les experts prédisent une multiplication d’évènements météorologiques, une accélération de la fonte des glaciers ou la montée du niveau des océans. L’Empire du Milieu, premier pollueur de la planète, confirme ainsi son implication au plus haut niveau, contrairement à son attitude durant la conférence de Copenhague en 2009. Pour les politiques, c’est un facteur de réussite.
Inde: la GPA interdite aux étrangers
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e gouvernement indien a indiqué mercredi la prochaine interdiction de l’utilisation des services de gestation pour autrui (GPA) aux étrangers. « Le gouvernement ne soutient pas le commerce des mères porteuses », a-t-il notamment exprimé à la Cour suprême. Cette déclaration fait suite à l’examen d’une pétition visant à réguler
l’expansion du tourisme procréatif dans le pays. Le commerce des mères porteuses rémunérées a été autorisé en 2002 aux couples indiens et étrangers. Un marché lucratif, à l’image des cliniques spécialisées qui se multiplient dans les grandes villes. Cependant, ses détracteurs dénoncent une exploitation des femmes dans une situation précaire.
La qualité du service médical ainsi que les prix bon marché contribuent à former une image favorable aux demandes de GPA. La Cour suprême a demandé que des mesures soient prises afin de mieux contrôler le marché. Ces services seront réservés aux couples indiens.
ACTUALITÉS
Election régionales 2015 : Le Front National toujours en lice
Le Front National gagnerait deux régions, notamment le Nord-Pas-de-Calais-Picardie © CC
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es élections régionales en France auront lieu les 6 et 13 décembre prochains. À l’heure où les partis de gauche semblent n’avoir jamais été autant divisés, une vague bleue aux tendances bleu marine s’annonce. Selon un sondage du BVA (Institut d’études de marché et d’opinion) publié fin octobre, la droite qui ne dirige l’Alsace que depuis 2010 pourrait remporter jusqu’à sept régions. Le Front National, quant à lui, gagnerait deux régions, notamment le Nord-Pas-de-CalaisPicardie. Marine Le Pen ne devrait pas avoir de mal à s’imposer pour la région Nord-Pas-de-Calais avec pas moins de 46% d’intentions de vote, selon le sondage. Marine Le Pen débattra Mardi à 18 heures sur Europe 1 et iTélé avec ses adversaires Xavier Bertrand pour la liste UDI MoDem et Pierre de Saintignon pour le Parti Socialiste. Le deuxième tour se traduirait donc par une triangulaire entre le FN, la droite et le PS. Gaétan Dussausaye,
Directeur national de Front National de la jeunesse a déclaré : « Nous sommes très confiants pour les régions Nord-Pas-de-Calais, PACA, et pourquoi pas quelques surprises comme la Franche-Comté par exemple ».
Un vote punition ? Ce vote traduit bien évidemment un mécontentement de la politique exercée par François Hollande. Mais, selon ce même sondage, pour 53% des personnes interrogées, il s’agit d’un vote valorisant les enjeux régionaux. Pour Gaétan Dussausaye, « la trahison des gouvernements de François Hollande comme de Nicolas Sarkozy justifie en partie l’augmentation de nos voix, mais pas seulement. Je pense qu’il y a un véritable éveil des consciences du peuple. Les gens se rendent au fait que ça ne fonctionne pas et qu’il faut changer de gouvernement ». Les campagnes électorales vont
bientôt commencer. Pour le parti de Marine Le Pen, aucun doute : « Nous allons bien évidemment axer notre campagne en réaction à l’actualité », explique G. Dussausaye. La question de la crise migratoire aura une place importante dans la campagne du FN, « même si nous n’allons pas régler le problème au niveau régional nous pourrons assurer la sécurité autour des camps de clandestins ». Au programme également, « la question des réformes territoriale et régionale, la fiscalité, la formation professionnelle des jeunes, et bien évidemment de l’emploi basé sur un patriotisme économique », déclare Gaétan Dussausaye. « Nous n’avons pas d’objectif précis mais nous voulons contrôler au moins un exécutif régional », conclut G.Dussausaye. Ce serait en effet un point d’avance pour le but principal de la présidente du parti : les présidentielles de 2017. Pauline Oheix
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ACTUALITÉS Les chefs de la diplomatie de l’Arabie Saoudite, de la Russie, de la Turquie et des Etats-Unis se rencontreront dans la soirée à Vienne à la suite de premiers pourparlers la semaine dernière. Les principaux enjeux de cette réunion sont le conflit syrien mais aussi la participation de l’Iran à celui-ci. La République Islamique, invitée à participer par le gouvernement américain a accepté de se rendre aux discussions. Les représentants de l’Egypte, l’Irak, Liban sont également attendus vendredi selon une source diplomatique russe. 338 personnes dont 192 enfants, retenues en captivité par le groupe terroriste Boko Haram, ont été secourues lors d’une opération menée mardi par l’armée nigériane dans le nord-est du Nigéria. L’information a été communiquée mercredi par l’armée, qui a également affirmé avoir tué une trentaine d’insurgés et récupéré armes et munitions. Selon le chef de l’armée de l’air nigériane, Sadique Abubakar, ces frappes « ouvrent la voie à l’assaut final ». Une position partagée par le président Muhammadu Bhari qui a promis d’éradiquer la menace d’ici décembre. Carine Roitfeld x Uniqlo Ce jeudi 29 octobre, la collection réalisée par Carine Roitfeld, créatrice du magazine CR Fashion Book et directrice mode internationale de Harper Bazaar, sera enfin disponible dans les boutiques parisiennes de la marque et sur internet. Pour cette collaboration avec la marque japonaise Uniqlo, l’ancienne rédactrice-en-chef de Vogue Paris a voulu dessiner les pièces indispensables de son armoire. Sa marque de fabrique y est toujours présente : veste d’homme, chemise en mousseline, jupe fendue, manteau croisé... Des pièces qui s’appliquent à la perfection à sa propre silhouette.
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JO 2024 à Paris : Versailles accueillerait l’équitation d’une contenance de 20.000 spectateurs. »
Parc du Château de Versailles © Gilles Messian
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i Paris aura l’occasion d’organiser les JO 2024, les épreuves d’équitation auraient lieu au sein même du Parc du château de Versailles et dans les environs de Rambouillet. Selon François Lucas, le président du Comité régional d’équitation d’Ile-De-France, le parc semble le lieu idéal pour recevoir cette compétition. Les épreuves de dressage et de sauts d’obstacles auraient lieu dans l’enceinte même du château, dans un stade construit au fond du Grand Canal.
Rien n’est encore décidé Si les fans d’équitation se font déjà une joie d’arpenter les couloirs du Château, le comité de candidature a tout de même précisé que « cela n’est pas encore décidé » mais que « c’est une option qui tient la route ». Le tracé du cross, épreuve la plus populaire, décrirait une boucle entre le stade et le Trianon. Face à l’afflux de visiteurs attendu, François Lucas a tout prévu : « L’Etoile Royale, espace herbacé à l’extrémité ouest du Grand Canal, pourra accueillir des tribunes
De nombreux atouts Lieu culte et chargé d’histoire, le château de Versailles a de quoi séduire les organisateurs. Autre avantages : son accessibilité. L’acheminement des spectateurs pourrait se faire par les gares côté Château (RER et SNCF). Une autre ligne côté Saint Cyr l’Ecole pourrait être réactivée depuis la gare Montparnasse. François Lucas l’assure : « Pour l’ensemble du dossier, le château de Versailles est un argument et un atout supplémentaire ». Le comité international olympique dévoilera l’heureuse gagnante en septembre 2017. Si Paris est retenue pour 2024, la Fédération française d’équitation souhaiterait proposer la candidature du site de Versailles pour les Jeux Equestres mondiaux de 2026.
Bartabas: au théâtre et au cinéma
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’artiste équestre Bartabas revient sur scène au Théâtre de Zingaro dans la pièce « On achève bien les anges ». Ce nouveau spectacle emboite le pas à Caravage, le documentaire d’Alain Cavalier qui dépeint la relation de l’artiste à ses chevaux. C’est son treizième spectacle, et c’est la
première fois depuis 12 ans qu’il remonte sur scène. Bartabas y rendra un hommage au massacre de Charlie Hebdo. Lors de son passage sur le plateau du 13 heures de France 2, il a déclaré : « Je suis un gamin de Tintin, Spirou, Pilote puis Fluide Glacial, Hara-kiri et Charlie Hebdo. C’est une perte très profonde. Ce sont des gens qui m’ont aidé à me construire ».
Le Caravage présente le processus de dressage entamé par le maitre écuyer sur l’un de ses chevaux pour ce dernier spectacle. Le cinéaste entre dans l’intimité de cette relation hommecheval, et devient le témoin exclusif de ce duo touché par une synesthésie qui ne laisse pas indifférent. Sortie en salle le 28 octobre prochain.
ACTUALITÉS
Un rassemblement en la mémoire de Mehdi Ben Barka
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l’occasion de la cérémonie de commémoration du cinquantenaire de la disparition de Mehdi Ben Barka, qui aura lieu le 30 octobre à Rabat (Maroc), un rassemblement est organisé à Paris aujourd’hui. Le rendezvous est donné à 18h devant la brasserie Lipp dans le 7e arrondissement de la capitale, lieu symbolique du mystère Ben Barka.
Rappel des faits Né en janvier 1920 à Rabat, figure du tiers-monde, principal opposant à Hassan II et condamné à mort dans son pays, Mehdi Ben Barka décide de fuir le Maroc pour s’installer à Paris. Le 29 octobre 1965, alors qu’il a
Mehdi Ben Barka lors d’une conférence de presse à Casablanca (Maroc), le 29 janvier 1959 ©
rendez-vous avec deux cinéastes pour discuter de l’éventuel projet du film-documentaire sur la décolonisation, il est enlevé par deux policiers français devant la brasserie Lipp, au cœur de la capitale parisienne. Depuis, le mystère demeure entier sur les conditions de son martyr ainsi que
sur les responsabilités françaises et marocaines. Enlevé en une poignée de secondes, Ben Barka n’est jamais réapparu et sa dépouille demeure à ce jour introuvable. Julia Thierry-Mieg
« The Lobster », la société imaginaire de Yorgos Lanthimos
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écompensé par le Prix du Jury à Cannes, le nouveau film du cinéaste Grec Yorgos Lanthimos est plus qu’étonnant. À la lisière du genre fantastique, à mi-chemin entre la comédie, le drame et la science-fiction, The Lobster (Le Homard) revisite sous un angle biaisé et inattendu une grande question de société : le couple. Durant près de deux heures, Lanthimos dépeint un monde déshumanisé où le
couple est devenu une obligation. Ayant perdu sa femme, David, un architecte interprété par Colin Farrell, est envoyé d’office dans un hôtel luxueux pour un séjour spécial au terme duquel il est tenu d’avoir rencontré l’âme sœur. Sans quoi, il sera transformé en un animal de son choix. David choisit le homard, bête à l’exceptionnelle longévité, pour se réincarner. Dans ce monde absurde, certains résistent tout de même à ce système tyrannique.
Camouflés dans la forêt, ces rebelles fondent une sorte de société secrète où s’organisent une lutte et leur survie. Ils se nomment « Les Solitaires ». Toute relation sexuelle est bannie dans leur camp. Le réalisateur décrit ici deux mondes absurdes, gouvernés par le même conformisme aliénant, métaphore critique d’une société faite de diktats.
Meurtre de Laëtitia : Perpétuité pour Tony Meilhon. Lundi dernier, Tony Meilhon a été condamné en appel à la réclusion criminelle à perpétuité. Il est accusé du meurtre et du démembrement de Laëtitia Perrais, datant du 19 janvier 2011. La jeune fille était alors âgée de 18 ans. A la suite d’un constat concernant son état psychopathique, l’avocat général du présumé meurtrier, Stéphane Cantero, avait réclamé une mesure de rétention de sûreté. Cette dernière permet un placement en centre socio-médicojudiciaire. La requête du magistrat a été déclinée mais Tony Meilhon devra tout de même avoir un suivi psychiatrique durant 22 ans. Marine Le Pen : à Saint Quentin pour les Régionales Afin de poursuivre sa campagne pour les Régionales 2015, Marine Le Pen se rendra samedi 31 octobre à Saint Quentin. La candidate FN à la présidence de la région tiendra un meeting au théâtre Jean Vilar, à partir de 17 heures. Son directeur de campagne assure que la rencontre sera ouverte « à tous ». La tête de liste Front National avait déjà annoncé - lors de sa dernière visite il y a une dizaine de jours-, qu’elle tiendrait une réunion publique.
Bolloré se met au vert avec le Bluetram Le projet tombe à point nommé. La nouvelle création du groupe Bolloré va faire son entrée sur les ChampsElysées à partir du 15 novembre. Le Bluetram est un tramway nouvelle génération électrique à « autonomie infinie ». Sans aucune caténaire et sans rail, il se recharge aux stations à l’aide d’une perche reliée au véhicule. Une vitrine exceptionnelle qui mettra en valeur la technicité des entreprises nationales française devant les caméras du monde entier. Celles-ci venues suivre la COP21, conférence mondiale sur le climat qui s’ouvre le 30 novembre à Paris.
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ĂŠ t i v i t c u BJM Prod
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Rebelote. Le Brian Jonestown Massacre sort un nouvel album le 9 novembre prochain. Ou plutôt un mini album. Sept titres violemment psychédéliques pour un disque sur trois formats. Deux classiques – CD et 33 tours, et un double 10 pouces, rouge, moins conventionnel, probablement pour l’aspect collector de l’affaire. À l’occasion de la sortie de ce nouvel album, qui ressemble dans sa forme à l’EP cinq titres Smoking Acid et reprend les figures mélodiques et rythmiques de la période plus classique du groupe – c’est à dire antérieure à l’album Who Killed Sgt Pepper? Nous avons interviewé la tête pensante du groupe, Anton Newcombe. Alors qu’il nous avait habitué à sortir un album tous les deux ans, cette année 2015 est particulièrement prolifique pour Anton Newcombe. En plus d’avoir sorti « Le Musique de Film Imaginé », album présent de manière limpide dans l’esprit du musicien depuis l’année 2014 - année qui vit apparaître l’album Revelation -, Newcombe a réalisé d’autres collaborations sur lesquelles nous reviendrons. « Je faisais de la musique avec des synthétiseurs, de la musique pour des films imaginaires dans ma tête. (…) Des expériences dans mon studio sans but », déclarait à l’époque le protagoniste de cet article. Si on ajoute à cela le fait qu’il prépare la bande originale d’un film écossais, un album, écrit conjointement avec la délicieuse Tess Parks, qu’il dévoile de temps en temps des streams, ce mini-album est presque un cadeau de Noël avant l’heure et sonne comme un bonus indispensable. Indispensable en effet parce qu’à travers le Mini Album Thingy Wingy, on retrouve le son dont Who Killed Sgt Pepper ? s’était déjà éloigné en 2010.
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C U LT U R E Une sorte de retour aux sources fait d’un son très dense par la multiplicité des nappes sonores qui s’entremêlent, créant différentes strates sonores, mais sans forcément qu’il s’agisse d’un « gros son ». C’est par une douceur presque paradoxale que ce disque saisit aux tripes et emmène l’auditeur dans un univers tout à fait lysergique. L’aspect psychédélique du BJM dans toute sa splendeur. Un peu à la Anemone sur un morceau comme Mandrake Handshake. En fait, cet album est peutêtre l’opposé même du dernier album de Fuzz, dans lequel Ty Segall et Charles Mootheart font un gros son, épuisant à la longue. Là, c’est terriblement moelleux. On ne danse pas avec une femme sublime sur un morceau comme Here comes the waiting for the sun, on l’embrasse. On plonge dans cet océan de volupté, on a cette impression d’être enveloppé dans le son. Une forme de bonheur total qui soulève des interrogations multiples. Aussi j’ai posé quelques questions à Anton Newcombe. ROGER MAGAZINE : Pourquoi avoir appelé cet album Mini Album Thingy Wingy ? Anton Newcombe : J’ai toujours aimé dire « thingy wingy ». Je me suis pas mal inspiré de Georges Harrisson pour ça. Il disait « look, the thingy wingy ».
Quand avez-vous écrit cet album ?
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Qui a collaboré à la réalisation de ce mini album ? C’est écrit sur la pochette. Mais Alex Maas a joué de l’Electric Jug (sorte de bouteille utilisée comme instrument à vent, qu’on peut entendre notamment sur le morceau You Gonna Miss Me du 13th Floor
Je pense que New York est trop folle, trop de choses s’y passent, tu ne peux pas faire de bruit. Si tu veux en faire, il te faut une lourde isolation. Quel que soit l’espace, il peut y avoir un rapport à l’environnement, mais je ne pense pas que vivre à Berlin depuis 2007 ait affecté tant que cela ma musique au niveau de l’inspiration. En revanche, c’est vrai que ça facilite l’enregistrement de titres en français, en allemand, en finlandais, en suédois ou d’autres langues, tu vois ? Ça permet de rencontrer d’autres gens, et je trouve cette approche intéressante. La musique n’a pas de règles. Je veux suivre ma propre voie, parce que j’aimerais voir d’autres gens faire de même. Dans le business, ça marche au succès, quel que soit le groupe, et s’ils ne vendent pas assez de disques on les renvoie d’où ils viennent. C’est bizarre. Je pense que si tu prends ton propre chemin, si tu fais ton propre truc depuis longtemps, l’industrie n’aura pas le pouvoir de dire que c’est fini.
« Si tu fais ton propre truc depuis longtemps, l’industrie n’aura pas le pouvoir de dire que c’est fini»
Tu sais, je travaille sur la musique six jours par semaine donc j’écris toujours de la musique. C’est vrai que je fais beaucoup de projets. L’album avec Tess (Parks, avec qui il a sorti l’album I Declare Nothing en juin 2015 NDLR), les soundtracks (pour la série Boardwalk Empire, mais aussi la bande son d’un film écossais (toujours en préparation, ndlr) mais whatever, je suis productif. Cette année est spécialement prolifique. Je ne pense pas qu’elle soit
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spéciale, je veux juste travailler dur. Souviens-toi que j’ai sorti six albums en environ dix-huit mois dans les années 90.
Anton Newcombe © Katy Lane
Elevator, l’espèce de glouglou que l’on entend en fond, ndlr), j’avais quelqu’un pour prendre la batterie.
As-tu des invités sur ce disque ? Bien sûr ! J’ai invité mon ami Vlad à venir me voir depuis Prague. Il est slovaque. Je crois que la chanson Prší Prší est au départ une comptine pour enfants. En 2012, tu me disais en effet que c’était une des raisons pour lesquelles tu avais préféré l’Europe à New York…
Pourquoi avoir choisi de sortir ce mini album sous la forme d’un double 10 pouces ? Je ne sais pas. Il existe aussi en 12 pouces.
C U LT U R E Adrien Toffolet est cofondateur de DumDum. Il a également été rédacteur en chef adjoint de Voxpop, journaliste pour Slate, Libération, Stereolux et chroniqueur radio sur Le Mouv’ et Radio France. Il suit le Brian Jonestown Massacre depuis une dizaine d’années. Quand as-tu découvert le BJM ? Adrien Toffolet : À part quelques mythos, personne en France ne savait ce qu’était le Brian Jonestown Massacre. La première fois que j’en ai entendu parler, c’était en 2005 à la suite du film DIG ! qu’un ami avait eu en import. À partir du moment où tu découvres un groupe
et que le groupe te parle, que tu arrives directement à t’y identifier, il est certain que tu suis l’évolution de ce qu’il est de près. Je ne l’ai en revanche jamais interviewé. Je n’en avais aucune envie. À l’époque, il était complètement alcoolique parce qu’il avait arrêté la came et était assez pitoyable. Si on rajoute à ça sa défiance naturelle pour l’industrie musicale dans son ensemble et pour les médias, c’était assez compliqué. En revanche,
je les ai rencontrés plusieurs fois après leurs concerts et je fais deux ou trois dates de leurs tournées depuis 2008. Le fait qu’Anton ait arrêté de boire à l’époque était très dur. Il était incapable de tenir une conversation suivie plus de dix minutes et pouvait passer d’un sujet comme la crise économique à la pêche en Islande sans vraiment de transition. Depuis qu’il a une petite vie tranquille avec sa femme et son fils, il s’est bien calmé. Même s’il garde un léger côté excentrique malgré tout, notamment sur un plan politique, où il sera très extrêmegauche/communiste dans ses idées.
Est-il toujours aussi prolifique ? C’est vrai que cette année, il a été très
prolifique dans ses sorties. Maissi tu regardes son compte YouTube, tu te rends compte qu’il produit sans cesse et sort sans cesse de nouveaux morceaux sur le net. Il sort davantage depuis qu’il a son nouveau studio. Avant c’était un genre de cave ou de hangar réhabilité avec un peu de matos mais depuis la série Boardwalk Empire et le fait qu’il gagne bien sa vie il a maintenant son studio où il peut enregistrer proprement et sortir ses groupes. Il contribue sur
des albums d’amis musiciens, il a sorti les Blue Angel Lounge, les Big Byrds l’an dernier, un groupe français un peu anecdotique aussi, il a contribué a des EP notamment pour la tournée australienne. D’ailleurs, depuis 2008, la structure des tournées n’a jamais vraiment changé : il commence par l’Australie – en partie parce que Ricky Maymi habite làbas mais aussi parce que leur fanbase australienne est assez importante -, puis direction les États-Unis autour de mars-avril et vers mai-juin-juillet en Europe. Dans tous les cas, la structure du groupe est variable, le seul bloc immuable c’est Newcombe. Si les autres peuvent jouer et être là, ils jouent. C’est en partie pour ça que Will Carruthers avait remplacé le bassiste pendant un moment. Anton
Anton Newcombe © Katy Lane
a en fait un réseau suffisamment large de musiciens avec qui jouer pour pouvoir se passer de Joël Gion ou de Matt Hollywood. Il est clair, en tous cas, que depuis qu’il a arrêté de boire et de se droguer, il est une toute autre personne. Avec toujours ses excentricités, mais celles qui font vraiment partie de lui, pas les autres dictées par la bouteille. Roger de Lille
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Dépénalisation, légalisation : quelles solutions pour le cannabis ? Ce week-end, un nouveau règlement de compte à Marseille souligne de nouveau la dangerosité du narcotrafic. En première ligne, le cannabis, de plus en plus en voie de dépénalisation.
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Cannabis Sans Frontières et plusieurs associations ont organisé la Marche Mondiale du Cannabis en 2015 © CC
arseille, cité des Lauriers, dimanche dans la nuit. 13, 15 et 23 ans, ce sont les âges des victimes de ce qui semble être un nouveau règlement de compte, malgré un démenti du procureur de la ville. Tous les trois tués par balles dans le hall d’un immeuble. Vers deux heures du matin, quand les tireurs ont déboulé dans l’immeuble, les trois victimes n’étaient pas les cibles. Mais ce sont eux qui ont reçu les balles. « La fusillade de dimanche est sur fond de trafic de stupéfiants, selon Romain Capdepon, chef du service PoliceJustice de La Provence, d’après mes informations, les trois victimes avaient quelque chose à voir avec le trafic, mais comme ils n’ont pas de précèdent à ce sujet sur leur casier, le procureur souhaite calmer les choses». Ce drame qui a une nouvelle fois frappé Marseille fait resurgir un débat sur la dangerosité du trafic et surtout sur celui de la légalisation du cannabis. « Le cannabis, c’est 90% du trafic et donc, des règlements de compte à Marseille », explique Romain Capdepon. Le « stupéfiant illégal » préféré des Français pose aujourd’hui
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de gros soucis à l’État. Car même si le 15 octobre dernier, un décret dans le journal officiel annonçait que les fumeurs de cannabis n’écoperaient plus que d’une simple amende, échappant ainsi aux tribunaux, le marché reste toujours entre les mains des narcotrafiquants. Marseille, avec certains départements de l’Île de France, reste la zone urbaine la plus touchée par le trafic, principalement dans les cités. La police appelle ça le « narcobanditisme », un mélange entre le narcotrafic et le banditisme.
« Une guerre sans fin » Aujourd’hui, la position de la France à l’égard du cannabis est complexe. Si on commence petit à petit à alléger les sanctions envers le consommateur, on ne touche pas au problème principal du marché noir : le trafic. « C’est une guerre sans fin, l’ancien patron de la PJ de Marseille, Christian Sainte (NDLR nouveau patron du 36 quai des Orfèvres), me disait que c’était un combat obligatoire car le cannabis est interdit, explique Romain Capdepon. Au contraire, un membre du Syndicat de la Magistrature me disait que pour contrôler le cannabis à Marseille, il
faudrait légaliser ». Est-ce vraiment la solution la plus efficace pour lutter contre le trafic ? Les clients préféreraient acheter leur produit dans un cadre légal, c’est sûr. Que ce soit dans une pharmacie ou dans des lieux spécialisés. Mais est-ce au gout du jour ? Considéré en mars 2014 comme « lutte nationale » par un rapport de l’Académie Française de la Médecine, le cannabis fait débat en France. Les pro-légalisation prônent le respect des libertés individuelles. Ils ne veulent plus de la prohibition qui pénalise le consommateur. Ils militent pour l’auto-culture : le plaisir de cultiver et consommer son « herbe » chez soi, à usage récréatif ou médical. Farid Ghehioueche, cofondateur de Cannabis Sans Frontières, avait tenté de créer un Cannabis Social Club en France pour faire sa propre récolte : «On était et on est toujours des citoyens responsables, contre une loi qui nous interdit de cultiver chez nous, pour nous, ce qui nous permet de savoir ce que nous consommons ».
La légalisation : ennemie du trafic ? Si la loi du 15 octobre dernier va arrêter d’envoyer les simples consommateurs devant les tribunaux, la situation conflictuelle avec les forces de l’ordre ne va pas s’estomper pour autant. « Le consommateur qu’on trouvera avec du cannabis sur lui va quand même faire de la garde à vue, quand même être traité comme un criminel, un terroriste, puisque on peut rester jusqu’à 96h en garde à vue pour des stupéfiants » ajoute Farid Ghéhiouèche. Le consommateur n’aura plus le droit à un procès en revanche. Un combat que certains militants dont fait partie F. Ghéhiouèche mènent depuis plusieurs années. Pour faire évoluer les choses, les pro-légalisation ont la loi du 31
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Les militants prônent l’auto-culture pour ne plus alimenter le trafic © CC
décembre 1970 en ligne de mire. Cette dernière interdit toute détention et consommation de stupéfiants en France. « Si on était moins dans la répression mais dans la prévention et la santé, on ferait beaucoup d’économie sur les contrôles policiers et les prisons. On aurait plus de moyens pour encadrer l’aspect sanitaire du cannabis » s’indigne l’ancien membre de EELV. Les lois internationales sur les drogues ne « respectent plus les libertés individuelles » pour Cannabis Sans Frontières. L’association se base sur des exemples d’états qui ont pris la situation au sérieux et tenté d’y remédier. L’exemple le plus frappant et récent étant la décision uruguayenne en 2014. Le pays a légalisé l’usage médical, la production et l’auto-culture du cannabis pour éradiquer les règlements de compte.
de 100 000 consommateurs réguliers sur un pays de 3 millions de personnes. On a cherché une alternative aux lois internationales qui n’étaient pas positives chez nous». En France, 1,7 million de la population serait des consommateurs réguliers de cannabis, soit près de 2% des habitants. En Uruguay, c’est 3%. Ce pays est le premier à avoir légalisé l’ensemble des utilisations du cannabis. «Chacun ses caractéristiques sociales, politiques et économiques. On a proposé la solution
mouvements de gauche) ont même été réélus en début d’année pour un troisième mandat. Jimena Lema confie même que la légalisation du cannabis « réjouirait le consommateur et limite les préjugés qui l’encerclent. Il y a quand même des consommateurs qui souffrent de problèmes d’exclusions sociales car ils sont considérés comme des drogués, au sens péjoratif du terme. C’est un quotidien pour beaucoup de personnes, et partout dans le monde». La légalisation n’a pas seulement pour but de stopper la répression envers le consommateur, il y a aussi des forts enjeux de santé publique, d’économie. Pour cela, l’Uruguay a créé un Bureau International des Drogues, qui regroupe plusieurs ministères (économie, intérieur, affaires étrangères, santé). L’ensemble du marché est contrôlé par l’État. L’Uruguay est un vrai exemple pour plusieurs pays en terme de légalisation, comme certains états américains. Le Colorado, en mai 2015, a décidé de redistribuer une part des impôts aux habitants puisque la taxe sur le cannabis rapportait… trop d’argent ! « L’exemple du Colorado est incroyable et c’est affligeant que personne ne le mette en avant. Aujourd’hui, il y a moins de crimes,
«En France, 1,7 million de la population serait des consommateurs réguliers de cannabis»
L’exemple uruguayen Madame Jimena Lema, chargée des Affaires Politiques du pays sur le sol français, vante aujourd’hui le mérite de son pays. «Le cannabis est la drogue la plus consommée en Uruguay, c’est une réalité. Il y a plus
qui s’adapte le plus à notre situation, c’est pareil pour tout le monde» précise Jimena Lima. Divisée par la loi il y a deux ans, la population uruguayenne a plutôt bien bénéficié de la situation avec une chute de la délinquance et des trafics. Le Président Tabaré Vàzquez et son parti Frente Amplio (coalition de divers
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SOCIÉTÉ
32% des jeunes ont déjà consommé du cannabis en France © Louis Witter
plus de tourisme, de nouveaux emplois et des impôts redistribués, s’insurge Farid Ghéhiouéche, comment peut-on encore rester aussi sourd et aveugle face à cette situation ? ». Le président de Cannabis Sans Frontières est également consultant pour l’ENCOD (Coalition Européenne pour une réforme de la législation des Drogues). « Pour devenir un modèle, il faudrait s’engager devant l’ONU, devant le monde entier, comme l’Uruguay l’a fait en 2014 ». En mars 2014, à Vienne, lors de la 57éme Commission sur les Stupéfiants de l’ONU, les pays sud-américains sont montés au créneau contre le système international. Le message a été clair : changer de modèle et ne plus, au nom des droits de l’homme, criminaliser le simple usager. La prochaine commission sera en 2016 à New York. L’Uruguay a prévu d’y aborder une réforme. « On a cherché à faire une loi globale pour ne pas rester dans le sectoriel. L’idée centrale est de lutter contre le trafic, explique Jimena Lima, si ça peut donner des idées à certains, pourquoi pas ?! ».
« La prohibition est un crime organisé » Farid Ghéhiouèche va plus loin pour parler de la situation française : « pour encadrer le marché de la drogue, il faut toutes les légaliser ! À l’État de les encadrer ensuite. Si on connaît tous
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les effets, on comprendra les conduites additives. Il faudrait des programmes d’éducation à la prise des drogues. Le vrai problème, c’est la prohibition. C’est un crime organisé, il faut l’arrêter rapidement ». La France, pour lui, « pourrait avoir un modèle meilleur que l’Uruguay, mais il n’y a pas de manifestation politique ». Il se présentera d’ailleurs en décembre prochain aux Régionales sur la liste F.L.U.O avec l’étiquette Cannabis Sans Frontières en Île-de-France pour faire « bouger les choses ». « Il faut qu’il y ait des pharmacies spécialisées à la distribution de drogues, avec des pharmaciens formés pour que ça marche ». L’enjeu le plus important d’une dépénalisation étant médical. En revanche, aujourd’hui, plusieurs politiques, notamment du côté des conservateurs, incitent le consommateur à alimenter le narcotrafic, tant qu’il n’a pas accès à l’auto-culture ou à une vente régulée. Aujourd’hui, 32% des jeunes en France ont déjà consommé du cannabis contre 25% au Pays-Bas, alors que le cannabis a été dépénalisé et contrôlé par l’État hollandais. « Vendredi j’étais invité sur Radio VL pour parler de cette situation, raconte Farid Ghèhiouéche, plusieurs chroniqueurs, pourtant jeunes, craignaient la légalisation. Ils voyaient en ça un danger qui pousserait les consommateurs vers des drogues plus dangereuses. C’est absurde ! ».
La question d’une légalisation en France se pose de plus en plus, là où la consommation est la plus forte en Europe. Les plaques tournantes augmentent la délinquance dans les zones défavorisées, pouvant entrainer des drames comme celui de dimanche dernier à Marseille. Si on considérait plus les bienfaits médicaux et économiques de la légalisation du cannabis, la classe politique française s’ouvrirait peut-être plus au débat. Samuel Vaslin
Dans une plante de cannabis, il y aurait plus de 400 composants. Aujourd’hui, on sait que 70 d’entre eux ont des vertus thérapeutiques. « Nous sommes devant un trésor », déclarent les médecins spécialisés. Les cannabinoïdes sont de très bons anti-douleurs. « Légalement, l’Etat français est en faute devant les personnes malades qui ont besoin de cannabis pour se soigner » rappelle Farid Ghéhiouèche, d’où l’arrivée du Sativex, qui en contient beaucoup dans son traitement.
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ENVIRONNEMENT
Vers l’écologie citoyenne Plus attendue que jamais et annoncée comme La solution à la crise écologique, la Cop 21 fait sa star dans les journaux depuis des semaines. Dix-sept ans après la signature du protocole de Kyoto aujourd’hui reconnu comme un échec cuisant, la diplomatie mondiale ne semble pas avoir retenu la leçon. Ou ne pas vouloir. Des initiatives énergétiques citoyennes propres, durable et très rentables ont largement fait leurs preuves, mais restent absentes des discussions.
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En 2009, les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de 30% selon l’Agence européenne pour l’environnement © CC
éunir plus de 180 représentants d’états dans le but de trouver une solution pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le monde, l’idée est séduisante. Mais traine comme un sentiment amer de déjà vu. En 1997, lors de la Cop III, 184 états ratifient le protocole de Kyoto, avec pour but de réduire entre 2008 et 2012 de 5 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport au niveau de 1990. En 2009, ces émissions ont augmenté de 30%, selon l’Agence européenne pour l’environnement. Un échec. Les Etats-Unis considèrent que le
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protocole est un frein économique et renvoient la responsabilité de l’échec à la Chine. Le Canada voit ce traité comme un « complot-socialiste qui vise à soutirer les fonds aux pays les plus riches », selon son ex Premier ministre Stephen Harper. De leur côté, les pays en développement concentrent leur regard sur l’économie, relayant les questions environnementales en dernière place au classement des priorités. Pendant que les égoïsmes nationaux discutent, les gaz – comme l’espoir d’une prise de conscience à l’échelle internationalecontinuent de s’envoler. Parallèlement, dans l’ombre
des discussions, des modèles locaux de développement durable économiquement viables émergent. Produire de l’énergie durable sans subventions en remboursant ses factures d’électricité ; un vieux rêve… En créant le premier parc éolien citoyen de France, une association de citoyens bégannais a prouvé le contraire. Depuis juin 2014, quatre éoliennes installées dans la petite ville de 1385 habitants produisent assez d’énergie pour alimenter 8 000 foyers, soit environs 18 000 habitants (18 000 MWh par an). L’idée est née en 2003, quand une poignée d’habitants a eu l’envie « d’investir à plusieurs dans une éolienne pour
ENVIRONNEMENT produire leur propre électricité », explique Romain Ledunois, salarié de l’association Énergie partagée qui mutualise différents réseaux et parcs éoliens de France, dont le Parc éolien citoyen de Béganne. Les Bégannais montent l’association Éoliennes en pays de Vilaine, et des centaines d’investisseurs citoyens rejoignent le projet. Après deux refus dus à des questions de gêne du paysage et de l’espace aérien, ils obtiennent en 2009 les permis de construire. Sur les douze millions nécessaires à la réalisation du projet, deux millions sont rassemblés ; le reste sera emprunté. our soutenir les initiatives de ce genre, l’association Énergie partagée coordonne six réseaux (Réseau Taranis, Parc éolien citoyen de Béganne, Éoliennes en pays de Vilaine, réseau énergétique citoyen en pays de la Loire, Site à Watts Développement), qu’elle représente au niveau national. En France, on compte au total 1 200 parcs éoliens raccordés au réseau ERDF, selon le Commissariat général au développement durable. Écologique, mais surtout rentable, l’éolien est une solution pour alléger sa facture d’électricité. EDF a pour obligation de raccorder à son réseau toute installation éolienne (citoyenne ou non), et de l’acheter au producteur à un prix fixé par l’arrêté du 1er juillet 2014. « Ce prix, c’est ce que l’on appelle tarif d’achat », explique Romain Ledunois. En France, le tarif d’achat est fixé par l’organisme qui distribue l’énergie ; EDF dans la grande majorité des cas. Pour l’éolien, ce tarif d’achat est inférieur au prix de vente de l’électricité par EDF (8,2 c€/kWh pendant 10 ans et entre 2,8 et 8,2 c€/ kWh pendant 5 ans selon les sites). Pour éviter de dissuader d’investir dans l’énergie propre, la contribution au service public de l’électricité (CSPE) compense auprès du producteur la différence entre le tarif d’achat et le prix de vente de l’électricité provenant d’EDF.
Photovoltaïque : l’alternative menacée Mais l’éolien n’est pas compatible partout. « En zone urbaine par exemple, le photovoltaïque est plus
adapté », explique Anne-Claire Faure, salariée de l’association Hespul spécialisée dans l’accompagnement de projets liés au photovoltaïque, à la transition énergétique et à l’écourbanisme. Pour s’équiper, « il est possible d’installer des panneaux sur son propre toit, mais il est aussi possible de le faire sur le toit d’un tiers », explique-t-elle. En Métropole de Lyon, le projet Toits en transition a vu le jour en mai 2015 avec comme objectif de « réaliser localement des projets citoyens d’énergie renouvelable », explique Paul Jean Couthenx de l’association Agence locale de l’énergie qui soutien le l’initiative. Le but ? Poser douze à quinze installations photovoltaïques de soixante mètre carrés à Lyon pour un coût total de 400 000 €. Soutenu par la ville de Lyon, des associations (ALE, Énergie partagée) et des habitants, c’est le projet d’installation photovoltaïque local le plus ambitieux. Le tarif d’achat de l’électricité issue du photovoltaïque est bien supérieur au prix de revente d’EDF (il dépend de la puissance fournie, du mode d’installation sur le bâtiment et de la date de l’installation et varie entre 11,7 c€/kWh et 46 c€/kWh) et assure pendant 20 ans une obligation d’achat. Ce qui en fait la source de production d’énergie la plus rentable pour les particuliers et les petites sociétés. C’est d’ailleurs à EDF que la CSPE est obligée de compenser l’écart entre le tarif d’achat et le prix de vente. Cependant, « il y a de fortes chances pour que l’obligation d’achat et donc les tarifs d’achat disparaissent en décembre pour les gros producteurx», explique Paul Jean Couthenx. Une décision étatique qui va à l’encontre de la volonté de transition énergétique annoncée par le gouvernement à l’approche de la Cop 21, puisqu’elle a de quoi dissuader de nombreuses sociétés d’investir dans le photovoltaïque. Avec sa quinzaine d’installations, Toits en transition sera directement touché par ce changement. « Nous passerons par Énercoop pour redistribuer l’électricité », rebondit Paul Jean Couthenx. Ainsi, le prix de revente de l’énergie produite sera directement négocié avec la Société coopérative d’intérêt collectif Énercoop, et sera bien
inférieur au tarif d’achat actuel fixé par EDF. Cette modification du fonctionnement risque de compliquer la vente d’énergie solaire pour les sociétés. En effet, « les petits producteurs d’électricité issue d’installations photovoltaïque ne seront pas concernés », précise AnneClaire Faure. Mais aujourd’hui, il est fréquent que les particuliers s’associent pour réaliser de tels projets. Quel avenir pour ces petites sociétés citoyennes ? Faute de livrer systématiquement leur électricité à un tarif fixé par un arrêté, elles devront répondre à la demande et aux besoins d’EDF. « Cela va aussi pénaliser les collectivités qui investissent dans le photovoltaïque », glisse l’experte. Mais il y a une autre solution : l’autoconsommation. C’est à dire, « le fait de consommer directement l’énergie que l’on produit. La plupart du temps la consommation et la vente énergétique pour foyer utilisant l’énergie solaire sont sur deux factures EDF distinctes. Au bout d’une quinzaine d’années, l’installation étant remboursée, cela devient un revenu supplémentaire. Mais de plus en plus de résidences optent pour un système d’autoconsommation », argumente Anne-Claire Faure. Selon un rapport EDF de 2013, l’autoconsommation, si elle a des avantages, présente des risques potentiels importants. Comme l’énergie solaire est difficile à stocker et n’est pas renvoyée sur le réseau ERDF dans cette situation, il y a un risque de surtension sur le réseau local en période de sousconsommation.
L’énergie durable au service de la ville Outre les initiatives citoyennes, les collectivités se lancent également dans l’énergie durable. Pendant une dizaine d’années, la ville samarienne de Montdidier a connu de réels changements avec comme objectif l’indépendance énergétique d’ici 2017. « À l’origine, ce n’était pas le but », explique Catherine Quignon, maire de Montdidier jusqu’en 2014, devenue conseillère départementale de la Somme aux dernières élections. Tout a commencé en 2002. « La
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ENVIRONNEMENT situation financière de la commune était mauvaise et il fallait trouver des pistes de développement pour avoir des marges d’investissement. À ce moment, les salaires et les retraites étaient très bas. On a donc dû travailler sur l’ensemble des dépenses de la commune et on a commencé par faire un diagnostic énergétique de l’ensemble du patrimoine communal », se rappelle Catherine Quignon. Le premier pas était fait pour Montdidier. Dès 2003, la ville s’attaque à l’éclairage public, en changeant les lampes et installant des réducteurs de puissance. « Après avoir rajouté trois cent points lumineux, on consommait autant qu’à l’époque », fait remarquer l’élue. Pour aller plus loin, la mairie installe la première chaufferie bois de Picardie pour alimenter l’école municipale. Profitant du soutien de la région, la ville développe un véritable réseau de chaleur. Une société coopérative est alors créée pour « alimenter le réseau en bois prélevé localement et sécuriser les prix », se félicite Catherine Quignon. En quelques années, la population est convaincue du bénéfice qu’apporte la maîtrise des dépenses énergétiques, et qu’il est possible de travailler sur un circuit court. Nait alors l’idée du parc éolien.« Même si on a du vent, le projet n’aurait pas été rentable pour un promoteur privé. Mais pour nous qui possédions une régie d’électricité pour produire notre propre énergie et la revendre à nos habitants, ça l’est », nuance l’ex maire. « Dès la première année, c’est un véritable succès puisqu’on fait des bénéfices », se rappelle-t-elle. Comment partager ces bénéfices ? « Un tiers est revenu à la régie d’électricité pour améliorer son réseau, un tiers pour la commune dans le but réaliser des améliorations sur les bâtiments et les rendre moins consommateurs et un tiers pour les particuliers », explique Catherine Quignon. Grâce à cela, la commune a pu baisser la taxe sur l’électricité de 8,6 % à 5 % et s’est mise à travailler au sein de la cantine scolaire en baissant le prix du repas (environs 2€ pour un repas avec des produits bios). Plus qu’un simple projet éolien, c’est un vent frais qu’a connu cette
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Outre les initiatives citoyennes, les collectivités se lancent également dans l’énergie durable. © CC commune. Sur les 11 millions d’euros qu’a coûté le parc éolien, un million a été prêté par la région, un million a été financé par l’Europe tandis que le département de la Somme a amené 120 000 €. Le réseau de chaleur à 2 millions d’euros a été financé à 80% par des subventions. Aujourd’hui 52% de l’électricité utilisée dans la ville est produite par le parc éolien, le reste est acheté à EDF. À lui seul, il permet de dégager 150 000 € de bénéfices par an. Les réductions de la consommation d’énergie permettent d’économiser 65 000 € par an tandis que le réseau de chaleur couvre 12% des besoins énergétiques de la commune. « Le modèle du développement durable et son économie circulaire permettent d’être économiquement viables, de préserver les ressources pour les générations futures et d’optimiser le site pour la collectivité ; donc tout le monde est gagnant », conclue Catherine Quignon. Et pourtant, tout ceci est possible parce que la commune a pu garder sa régie d’électricité datant de 1925. Depuis la nationalisation de l’électricité en France en 1946, « la loi interdit aux territoires de produire leur électricité
localement ». Mais l’élue reste optimiste et rêve de progrès : « imaginez qu’on travaille sur un bâtiment qui produit plus qu’il ne consomme, et qui alimente les bâtiments alentours, on a moins de frais sur les coups du raccordement électrique ». Et pourtant, ce genre d’initiatives n’est pas représenté lors du plus grand débat mondial pour l’écologie qui aura lieu dans un mois. Si certains se lancent dans l’autoconsommation, investissent dans l’énergie renouvelable et changent leurs habitudes de consommation car ils n’ont plus confiance en une diplomatie dont les choix sont influencés par quelques lobbys agroindustriel, c’est pour tenter de changer les choses localement ; en espérant que cela se développe dans le pays. Catherine Quignon est confiante considérant qu’ « il y a une réelle prise de conscience. Quand on a commencé on nous prenait pour des timbrés. Aujourd’hui on en parle ». Mais selon elle, le plus important reste à faire : « maintenant il va falloir passer à l’action concrète ». Justin Raymond
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ENVIRONNEMENT
COP21 : l’Inde sauve son charbon Dernier pays à avoir déposé sa contribution pour la COP21, l’Inde promet que d’ici à 2030, 40% de sa production électrique proviendra d‘énergies propres. Ambitieux pour certains, le programme annoncé par New Dehli préserve cependant clairement le développement du pays et son exploitation du charbon.
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L’Inde représente 2.4% de la surface de la Terre, mais supporte environ 17,5% de la population mondiale © CC
un mois de la COP21, (Conférence des Nations unies sur les changements climatiques à Paris) qui se tiendra du 30 novembre au 11 décembre 2015, 146 pays ont déposé leur contribution pour réduire les causes du bouleversement climatique. A eux seuls, ils représentent 90 % des émissions mondiales. L’Inde est la dernière à l’avoir rendue public le vendredi 2 octobre, jour de la naissance de Gandhi. Une symbolique forte qui laisserait penser que New Delhi participe à une cohésion Nord-Sud sur la question climatique. Mais en étudiant sa proposition il est clair que le pays, troisième plus gros émetteur de CO2 du monde, n’est pas prêt à sacrifier son développement et ses intérêts économiques, pour une
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politique d’atténuation. Juste derrière les États-Unis et la Chine, l’Inde cumule 2407 milliards de tonnes de CO2 par an. Parmi les mesures proposées, celle d’une reforestation du territoire est envisagée. Ces puits de carbone additionnels offriraient une capacité d’absorption variant de 2,5 à 3 milliards de tonnes de CO2. En misant sur le mix énergétique et notamment l’énergie solaire, l’Inde promet aussi que la part de fabrication d’électricité par le biais d’énergies renouvelables, s’élèvera à 40 % d’ici 2030 au lieu des 30% actuels. Ainsi, presque la moitié de sa production électrique devrait provenir des énergies propres, solaires ou hydrauliques. Le Premier ministre indien, Narendra Modi, entend même multiplier par trente sa capacité de production
d’énergie solaire, à hauteur 100 000 mégawatts d’ici à 2022.
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La croissance avant tout En parallèle, le pays compte réduire l’intensité carbone de son PIB de 33 à 35 % d’ici 2030 par rapport à 2005. « C’est dans ces termes que réside toute l’ambiguïté de la contribution », remarque JeanLuc Racine, directeur de recherche émérite au CNRS et chercheur senior au think tank Asia Centre. L’intensité carbone est calculée par rapport à la production. Dans le cas d’un pays, les émissions de CO2 sont calculées par points de PIB et non pas par leur nombre réel, qui a grimpé de 67 % entre 1990 et 2012. Une méthode de calcul avantageuse pour l’Inde qui affiche sa volonté de légitimer ses émissions pour l’avancée de son pays.
ENVIRONNEMENT « La réduction de l’intensité carbone sera basée sur le niveau de 2005. Or entre cette période et 2030 le PIB va considérablement augmenter », ajoute-t-il. Par contre, rien dans l’INDC (de l’anglais Intended Nationally Determined Contributions) n’évoque clairement une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Pour Bastien Alex, chercheur spécialisé dans les enjeux énergétiques mondiaux à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), « elle est ambitieuse mais ne correspond pas à l’horizon fixé par la COP21. Alors que le Brésil, autre pays en développement, s’est engagé à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 43% d’ici 2030, l’Inde, elle, refuse cette voie à coup d’arguments simples mais convaincants ».
Justice climatique pour un pays surpeuplé Sur l’échiquier international, Narendra Modi brandit le bouclier d’une « justice climatique ». Malgré sa position de gros pollueur, le pays a en effet un très faible niveau d’émission par habitant. « La notion d’équité avancée par l’Inde est compréhensible. En considérant son nombre d’émissions par tête, qui est d’environ 1,5 tonne, elle se retrouve loin derrière les Pays du Golf comme le Qatar (en première position avec 40 tonnes par habitant) ou l’Arabie Saoudite (9eme de la liste avec 18 tonnes). Eux, n’ont à ce jour, pas rendu de contributions ni respecté l’échéance qui était fixée au 1er octobre 2015 », justifie Bastien Alex. Comme le souligne le texte officiel de la contribution indienne, « le pays représente 2.4% de la surface de la Terre, mais supporte environ 17,5% de la population mondiale ». En 2050, l’Inde devrait compter environ 400 millions d’habitants supplémentaires selon une prévision de l’ONU. Cette pression démographique explique en partie la résistance du gouvernement local et la nécessité des progrès industriels. « Il faut comprendre le gouvernement qui doit sortir plusieurs centaines de millions de gens d’une pauvreté extrême, et cela passe par la fourniture énergétique du pays », estime le chercheur de l’IRIS. A noter qu’encore 300 millions d’indiens n’ont pas accès à l’électricité et que
30% de la population vit sous le seuil de pauvreté.
Faites ce que je dis, pas ce que je fais Mais le développement de l’Inde dépend de l’exploitation du charbon, ressource privilégiée du pays bien que très polluante. « Ses ressources en charbon sont énormes et à portée de main, de plus il nécessite une technique d’exploitation qui n’est pas récente et qui est donc relativement bien contrôlée. Pour l’Inde, qui veut rendre son territoire plus attractif, il faut de l’électricité. Se passer du charbon serait alors impensable pour le pays, à l’heure actuelle », assuret-il encore. Pas question de l’endiguer aujourd’hui donc, puisque la situation climatique actuelle résulte en partie des comportements polluants passés des pays désormais développés. Lors de la Révolution Industrielle, ces derniers avaient eux aussi recours au charbon et l’Inde entend bien faire de même. « Les BRICS pointent du doigt les responsabilités des pays industrialisés. C’est la carte qu’ils joueront tous lors de la COP21 », prévoit Jean-Luc Racine. A l’annonce de la contribution, Greenpeace India a quand même souligné que le gouvernement avait fait « un pas dans la bonne direction ». Le tout en regrettant sa logique expansionniste sur le charbon et en confirmant la nécessité des aides financiers et technologiques de la part des pays développés. Pujarini Sen, une responsable de Greenpeace en Inde a d’ailleurs déclaré sur le site de l’ONG que : « L’engagement persistant du pays à vouloir développer sa production d’électricité par le charbon est déroutante ». Thomas Spencer, directeur de programme Climat à l’IDDRI est plus optimiste. Il souligne que l’Inde est déjà en passe de respecter ses engagements de la conférence sur le climat de 2009 à Copenhague : « L’Inde s’était déjà engagée à réduire son intensité carbone de 2025 % d’ici 2020 par rapport au niveau de 2005. A peine trois ans après, l’intensité carbone de son PIB a été réduite de 13 %, à raison de -2,03 % par an. Donc si le pays maintient la cadence, elle pourrait être réduite
de 26% en 2020 ». Il salue aussi la transparence de l’INDC indien qui « expose clairement les objectifs de son mix énergétique ».
Fond vert incertain, une excuse supplémentaire pour New Delhi La présidence de la COP21 au Ministère de l’Ecologie et le secrétariat général de Laurence Tubiana, ambassadrice française chargée des négociations sur le changement climatique, n’ont pas voulu commenter l’ambition de l’Inde; mais le Ministère, lui, ne manque pas de se féliciter de la participation du pays. Même si le gouvernement Modi tient ses objectifs, 40 % de sa consommation dépendra encore du charbon en 2022. Sans pouvoir demander une véritable révolution énergétique de l’Inde, au moins l’urgence de la question du climat est posée et faute de mieux, la communauté internationale devra la soutenir dans sa transition énergétique. Issu de la COP de Durban en 2011, le fond vert est un financement de soutien envers les pays émergents. Il les aide à réaliser des projets d’adaptation et d’atténuation correspondant à leurs objectifs écologiques. Fixé à 100 milliards de dollars par an d’ici 2020, il est constitué de fonds divers, de sources privées ou d’aides bilatérales d’état à état. Mais ce système, bancal, ne rassure pas vraiment les acteurs en pleine émergence. Cette année par exemple, sur les 10,2 milliards de dollars promis par une trentaine de pays, seuls 4 milliards ont été, en réalité, débloqués début juin. La crise qui touche les pays donateurs retarde les dons. Sans visibilité post 2020, la concrétisation de ce fond vert est pourtant indispensable pour l’Inde. Dans son INDC, le Premier ministre réclame des transferts technologiques ainsi qu’une aide de 1000 milliards de dollars pour son passage à l’énergie solaire. En Inde, les émissions de CO2 devraient avoir doublé d’ici à 2030. C’est loin des 20% de réduction visés par la Cop21 pour cette date. Maëlys Peiteado
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ENVIRONNEMENT
ECO-QUARTIERS: CE MODÈLE VA-T-IL PRENDRE DE L’AMPLEUR? Bruno Bessis a participé à la création et à l’essor des éco-quartiers. Chef du projet au Ministère du Logement, il explique comment fonctionnent les labellisations de ces zones et confie ses attentes liées à la COP 21. climatiques. C’était une nouvelle façon de concevoir, de construire et de gérer la ville. On a lancé un deuxième appel à projet et cette foisci, 393 collectivités ont répondu.
Quelles sont les conditions pour répondre aux appels du Ministère?
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Concept d’éco-quartiers ©
n éco-quartier représente une zone plus ou moins grande (pas forcément un «quartier» à proprement parler) dont l’aménagement urbain respecte les principes du développement durable. Le but de ces zones : donner l’exemple et faire preuve d’évolution quant aux techniques de mobilité, de logement et d’industrie. L’économie occupe également une place importante. Pour transformer un milieu, qu’il soit rural ou urbain, il s’agit d’un réel investissement. Mais c’est une transformation durable dont l’avenir économique est censé être certain puisqu’elle doit offrir des emplois, privilégier les circuits courts, lutter contre la fracture sociale, etc. L’économie et l’écologie sont intimement liées. Et l’éco-quartier allie donc modernité et durabilité. Bruno Bessis, chef du bureau Aménagement Opérationnel et Durable au Ministère du Logement,
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s’est chargé de la création de ces zones mais aussi de leur mise en place et de leur labellisations.
Camille Thorin : Comment avezvous mis en place cette notion d’éco-quartier? Bruno Bessis : Tout a commencé lors du Grenelle de l’Environnement, en 2008. L’objectif était de mettre en place des actions économiques au but écologique. On a parlé de l’agriculture, de l’industrie mais aussi de l’aménagement et de l’urbanisme. Il y a donc eu une commande politique pour créer un référentiel d’éco-quartier. En 2009, on a lancé un premier appel à projet, encore très bancal à l’époque, et auquel 160 collectivités ont répondu favorables. En 2011, nous avions une véritable définition de la ville durable: rendre le citoyen acteur de sa propre ville sur les plans social, culturel, économique avec la création de nouveaux emplois techniques et
Il n’y a pas de normes visant à réglementer l’éco-quartier. Bien-sûr, il faut qu’il réponde à des attentes écologiques, mais pas que. Elles doivent être sociales, culturelles, économiques, industrielles. Nous ne voulons pas de modèle. À aucun moment, l’Etat ne dit aux collectivités quoi faire. C’est une façon de faire en sorte qu’il y ait le plus de collectivités investies possible.
Le label peut-il être retiré si les collectivités ne respectent pas leurs engagements ? Le label permet de motiver mais pas de sanctionner. Le but est que les collectivités mettent en place de plus en plus d’éco-quartiers (en milieu rural, certaines sont entièrement catégorisées d’écoquartiers, et le terme « quartier » n’a plus aucun sens), et qu’à terme, la France devienne un éco-territoire. Car, forcément, lorsqu’on voit que la collectivité voisine, qui est labellisée éco-quartier, a des valeurs écologiques tout en ayant de bonnes productivité et économie, cela donne envie de s’investir dans la démarche. En plus, les éco-quartiers attirent du monde, et donc de nouveaux acteurs pour redynamiser la collectivité. Quand les résultats, après une labellisation, ne sont pas à la hauteur de nos attentes, nous ne retirons pas le label, nous essayons, ensemble, de
ENVIRONNEMENT comprendre pourquoi cela n’a pas marché et de trouver des solutions.
Qui se charge d’attribuer ce label ? Les dossiers de chaque collectivité souhaitant obtenir le label sont examinés par des experts qui vont ensuite sur le terrain pour vérifier l’exactitude des données. Ensuite, ils passent devant une Commission régionale composée de 15 personnes provenant du Conseil régional, de l’ADEME, du CAUE, de l’Agence Urbanisme, de la Fédération des Parcs. Si cette commission valide le dossier, il remonte chez nous et nous réexaminons le dossier lors d’une Commission nationale composée d’environ 40 à 50 personnes. Soit nous attribuons la labellisation, soit un diplôme « engagé dans la labellisation » si les opérations sont encore en chantier, soit on n’attribue rien. Cette année, sur quarante demandes, nous avons attribué le label à quinze collectivités. Il y a pas mal de garde-fous.
Qui finance les labellisations et les mises en place d’écoquartiers ? Il y a un budget public qui rémunère les fonctionnaires, comme moi. Mais sinon, les collectivités ne sont pas subventionnées pour entreprendre des mesures visant à donner naissance à des éco-quartiers. Leur engagement est purement volontaire. Ce sont leurs propres caisses qui sont mises à contribution mais il ne faut pas qu’elles s’arrêtent à l’instant T. Elles doivent se projeter dans 10, 15, 20 ans… Sur le long terme, ce sera un gain social,
Bruno Bessi © CC
productif, et économique. L’État ne les subventionne donc pas mais il leur offre des formations gratuites pour devenir des éco-quartiers. C’est une offre de matière grise, si vous voulez.
La COP 21 va peut-être nous permettre de promouvoir le concept d’éco-quartiers. En tout cas, on va tout faire pour tenter d’obtenir un temps de parole même si on ne sait pas encore comment.
Qu’attendez-vous de la COP 21?
Camille Thorin
Le rôle de la COP 21 est de poser des questions climatiques globales pour que chaque pays engagé puisse trouver des solutions locales. Loin d’être la plus innovatrice en matière de développement durable, la France, que ce soit à niveau étatique ou citoyen, tente de rattraper son retard et d’intégrer l’écologie dans le quotidien de foyers, d’entrepreneurs ou encore d’industries. Les éco-quartiers sont l’exemple même d’une transition vers une démarche durable. Mais s’inscrivent-ils dans la démarche de la COP 21? Bruno Bessis est certain qu’ils ont de l’avenir puisqu’ils sont de plus en plus nombreux chaque année. Aujourd’hui, on compte 32 opérations labellisées. Mais il l’est moins quand il s’agit d’obtenir un temps de parole lors de la conférence. Lorsque le monde se rendra compte que l’écologie est le nouveau business, peut-être que des initiatives comme celles que repré-
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POLITIQUE
Le PS dans l’impasse Les élections régionales auront lieu les 6 et 13 décembre prochains. Selon les sondages, la gauche, actuellement présente dans 21 régions sur 22, arriverait en tête dans seulement 3 régions sur 13.
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Jean-Christophe Cabadélis, 1er secrétaire du PS et Jean-Michel Bailet (PRG) © CC
a gauche est actuellement toute puissante au niveau régional. Que ce soit sur l’organisation des transports ferroviaires, sur la formation professionnelle, ou encore sur l’apprentissage et l’orientation. Dans 21 régions sur 22 (découpage territorial actuel), la majorité accumule les compétences ; mais si l’on se fie aux sondages (IFOP 26/10/15 et BVA 23/10/15), il semblerait que l’hégémonie de la gauche soit sur le point de prendre fin. Selon ces mêmes sondages, le parti au pouvoir ne serait réélu que dans 3 régions sur 13 (nouvelle carte du découpage territorial) alors que les Républicains gagneraient, eux, 7 régions. À l’approche de ces élections, la gauche est plus désunie que jamais. Europe Écologie Les Verts et le Front de gauche font soit liste à part, soit s’assemblent contre le PS. Et c’est cette division qui mène à la perte des régions pour le parti. EELV et le Front de gauche ne retrouvent plus les valeurs de la gauche dans la politique menée par le parti
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socialiste. Pour cette raison, ces partis proches de la gauche radicale se liguent contre le PS, pour le premier tour du moins. Les élections intermédiaires avaient montré que toute la gauche était en perte de vitesse. Jean Christophe Cambadélis, lui, semble cependant déterminé à réunir la gauche, allant même jusqu’à organiser un référendum pour une gauche unie. Selon sa chef de cabinet, Karine Gautreau, « la fragmentation est le plus court chemin vers la défaite pour la gauche et le plus beau cadeau fait au Front National et aux soi-disant Républicains. » Mais alors pourquoi continuer à soutenir un parti qui cherche l’unité uniquement en périodes électorales et mène une politique de droite le reste du temps ? C’est la question que se posent les électeurs et les partis de gauche. Prenons l’exemple de la marchandisation du sang par la loi Macron. Le passage du don bénévole au don rémunéré témoigne parfaitement de l’hyper libéralisation de la politique actuelle du gouvernement socialiste.
Comme beaucoup de sympathisants, Marie-Pierre Oprendi, bénévole au Front de gauche affirme que le parti « n’est pas du tout d’accord avec la politique du PS ».
Coup de massue pour la gauche et pour les socialistes Impuissant et plus isolé que jamais, le Parti socialiste est critiqué tant par l’opposition que par l’ensemble de ses ex-alliés. Après l’échec cuisant du référendum de Jean-Christophe Cambadélis et la mise en exergue de son nonsens, l’affirmation de son autonomie par EELV et le Parti Communiste, ainsi que la totale prise d’indépendance du Front de Gauche, sonnent comme le coup de grâce pour les socialistes. « Le Parti Communiste a décidé de partir seul à la bataille, alors même que nous dirigeons ensemble de nombreuses régions. Nous le regrettons. EELV a décidé de garder son « autonomie » au premier tour, de s’allier parfois avec le Front de Gauche. Mais à la différence de ce dernier, EELV et
POLITIQUE le PCF feront alliance avec le Parti socialiste au second tour, leurs dirigeants l’ont déjà annoncé », explique Karine Gautreau.
Une position parfaitement compréhensible compte tenu des nombreux coups de semonce assénés par Jean-Luc Mélenchon, Emmanuelle Cosse et Pierre Laurent depuis le début du mandat de François Hollande. Pour certains, comme le premier secrétaire du PS, la pilule a du mal à passer, et dans ces cas là, la meilleure des défenses devient l’accusation : « Ceux qui s’opposent aux Socialistes se drapent dans le manteau des valeurs de la « vraie » gauche mais se prennent les pieds dedans. […] Pour eux la Gauche au pouvoir ne va jamais assez loin et perd toujours son âme. Bref, la gauche au pouvoir trahit toujours. » Lassés de la gouvernance libérale incarnée par Manuel Valls et Emmanuel Macron et des faux semblants de Bernard Cazeneuve concernant la crise des migrants, Front de Gauche, écolos et communistes ont choisi le camp de l’opposition. « C’est un positionnement profondément préoccupant qui laisse beaucoup trop de marge de manœuvre à l’extrême droite », déplore pourtant Françoise Diehlmann, élue EELV au Conseil régional d’Île-de-France. Force est de constater qu’elle n’a pas tort. En Nord-Pas-De-Calais-Picardie et en région Provence-Alpes-Côte-D’azur, l’éclatement de la gauche porterait la famille Le Pen au pouvoir régional. Selon le sondage BVA, Marine sortirait grande gagnante dans le Nord avec 46% des voix au second tour et Marion Maréchal, 37% dans le sud alors que la gauche sortante, et surtout grande perdante, ne récolterait que que 25% et 27% des suffrages. Plutôt que de se remettre en question, beaucoup préfèrent adopter la politique de l’autruche : « Dans ces régions, la ligne à adopter aurait été de mettre en avant le bon bilan de la Gauche. Les avancées qui y ont été opérée en matière de transports, etc », continue la conseillère régionale. Un positionnement ambivalent qui permettra aux socialistes de se placer en victime en cas d’échec et de se rapprocher du peuple en cas de retournement de situation miraculeux. Dernière échéance avant les présidentielles et les législatives,
À l’approche de ces élections, la gauche est plus désunie que jamais © CC
Jean-Christophe Cabadélis © CC
les résultats de ce scrutin donneront le ton quant à la difficulté des campagnes de 2017. Après la crise et le revirement à gauche de la Grèce derrière Alexis Tsipras et Yanis Varoufakis, celui de l’Irlande derrière Sinn Fenn, l’élection de Jeremy Corbin en Angleterre, le Portugal derrière le Bloc de Gauche, l’Espagne derrière Podemos, et les récents résultats de Die Linke (le
parti antilibéral en Allemagne), l’aile gauche française paraît, elle aussi, enclencher la mutation. Il se pourrait que l’Hexagone soit le prochain Etat européen à être touché par la fièvre radicale et le retour au message originel de la gauche.
Kessen Ndour & Nina Nothomb
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Sur la route des migrants De Nice à Calais, en passant par Paris, depuis janvier 2015, plus de 643 000 migrants ont traversé la Méditerranée pour entrer en Europe. Qu’ils soient éthiopiens, afghans ou syriens, tous ne rêvent que d’une chose : se reconstruire, loin des conflits de leur pays. Pendant des semaines, des mois, ils voyagent, s’arrêtent pour quelques temps en France, avant de reprendre le chemin vers l’Angleterre ou l’Allemagne.
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Pour être sûrs de rejoindre les frontières européennes, les réfugiés peuvent débourser jusqu’à 12 000 dollars © Louis Witter
i les pays traversés par les migrants sont nombreux, de « grands axes » constituent un parcours emprunté par la majorité des réfugiés. Depuis la fin de l’été 2015, la route des Balkans est confrontée à un afflux massif de migrants. Des milliers partent de Syrie, d’Afghanistan ou encore de Serbie et passent par la Slovénie.
Des trajets dangereux Depuis l’installation des barrières anti-migrants en Hongrie en septembre dernier, les réfugiés redoublent de courage et d’attention et passent par d’autres chemins. Si certains tentent la dangereuse traversée par la Méditerranée, d’autres préfèrent affronter le froid en traversant la Russie ou la Norvège. « Par bateau c’était beaucoup
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trop dangereux. Alors je suis parti d’Afghanistan et j’ai traversé plus de six pays en voiture, en train, et à pied », affirme Maluk, réfugié afghan arrivé en France il y a quatre mois. Selon l’ONU, plus de 502 000 personnes ont emprunté la route des Balkans depuis le début de l’année. Face à cette situation, l’Union Européenne va créer en urgence, 100 000 places sur la route, dont 50 000 en Grèce. Pour les plus téméraires, direction l’Europe par la traversée de la Méditerranée. Un périple dangereux, où chacun risque sa vie. Selon l’OIM (organisation pour les migrations), plus de 2 643 personnes sont mortes depuis janvier 2015 dans les eaux de la Méditerranée. Entassés par centaines dans de petites embarcations, ils voyagent pour arriver en Italie, et ensuite passer la
frontière française. Alumini, migrant arrivé du Bangladesh il y a deux mois, a fini par arriver à Paris après un long voyage. « J’ai traversé la Méditerranée avec mon oncle, on était beaucoup sur le bateau. Quand je suis arrivé en Italie, j’ai pris un train pour Nice. Les autorités m’ont attrapé deux fois mais après j’ai réussi. » Une fois sur les côtes françaises, Alumini arrive, « comme il peut », jusqu’à Paris, et décide de rester en France : « J’aime bien la France, surtout Paris. Je m’y sens bien. On verra bien ce que j’y ferai mais je ne veux pas repartir, le voyage était déjà long jusqu’ici. » Si comme Alumini, de nombreux clandestins décident de construire une nouvelle vie en France, d’autres préfèrent ensuite partir vers l’Allemagne ou l’Angleterre. Un départ qui, selon Christian Salomé, président de
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Depuis janvier 2015, 117 filières de passeurs ont été démantelées © Louis Witter
l’association L’auberge des migrants à Calais, se justifie par un meilleur accueil de l’Angleterre « Ils s’y sentent mieux qu’en France, et ils ont souvent de la famille làbas, ça leur évite de rester seul. En plus, ils parlent plus anglais, c’est donc plus facile. Pour les jeunes, l’Angleterre offre plus d’opportunités que la France et leurs diplômes ont plus de valeur. » En attendant de rejoindre leur Terre promise, les clandestins s’installent pour quelques temps dans des campements. Les conditions d’hygiène y sont limitées et il devient difficile d’y être en sécurité. Face à l’augmentation de ces camps provisoires, les autorités prennent les choses en main et évacuent les clandestins. Vendredi 23 octobre, plus de 1300 personnes ont été expulsées du lycée désaffecté de Jean Quarré à Paris. Qualifié du « dernier grand campement », le lycée devenait trop dangereux pour les réfugiés. « J’étais depuis quelques semaines là-bas. Mais ça devenait compliqué et dangereux, beaucoup de drogues circulaient », déclare Alumini. Après avoir manifesté le soir-même devant l’Hôtel de Ville de la capitale, les clandestins se sont frayé un chemin jusqu’à la place de la République. Beaucoup espèrent être relogés, mais d’autres emballent déjà
leurs affaires, direction l’Angleterre.
Les passeurs au cœur des trajets Pour passer « au mieux » les frontières de chaque pays, les migrants font appel à des « passeurs ». Le but : traverser le plus rapidement et sûrement possible. Véritables réseaux internationaux, leur garantie est simple : arriver à bon port. Pour être « sûrs » de rejoindre les frontières européennes, les réfugiés peuvent débourser jusqu’à 12 000 dollars. Une somme folle que l’oncle d’Alumini a dû payer pour leur traversée : « Le passeur nous a demandé 6000 dollars pour aller du Bangladesh jusqu’en Italie. C’est beaucoup, mais on n’a pas le choix. » Pour se faire un maximum d’argent sur le dos de toutes ces personnes, les passeurs n’hésitent pas à proposer des traversées à différents prix. À Calais, c’est un véritable commerce qui se met en place pour relier le nord de la France à l’Angleterre. Pour les plus riches, les passeurs garantissent une arrivée en Angleterre en quelques jours dans un véhicule réservé. Un luxe évalué par les passeurs à 10 000 euros. Des traversées haut de gamme devenues la spécialité des passeurs albanais. Pour les migrants les plus modestes, ils peuvent compter sur un « passage garanti », pour la somme de 1500 euros.
Loin des plateformes de départ habituelles, les passeurs donnent rendez-vous à leurs clients. Ils embarquent alors, recroquevillés dans l’arrière-fond d’une camionnette. Pour le reste, c’est l’inconnu. Ils savent qu’ils arriveront, mais n’ont aucune connaissance de la date. Face à l’afflux de ces passeurs, appelés « petites mains », les autorités de Calais redoublent d’effort : « ces petits réseaux sont simples à attraper pour les policiers. Ils mettent en place des écoutes téléphoniques et
débarquent sur les parkings. Ça permet de les envoyer devant les tribunaux », poursuit Christian Salomé. En mars 2015, deux importants réseaux ont été démantelés à Calais. En quelques mois, le chiffre d’affaires s’élevait à 350 000 euros. Une réussite pour les autorités qui, chaque jour, tentent d’attraper ces trafiquants. Sur le littoral, à Nice, le directeur de la DCPAF (Direction centrale de la Police aux frontières), Jean Philippe Nahon se veut lui aussi intransigeant avec les passeurs : « l’essentiel est de lutter contre ces gens
qui profitent de la misère humaine pour se faire de l’argent. Ils sont nombreux à la frontière et tentent de récupérer le plus de clandestins possible. Ils n’expliquent pas aux migrants les risques encourus lors du voyage. » Une fermeté qui se veut efficace. Depuis janvier 2015, 117 filières
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En mars 2015, deux importants réseaux ont été démantelés à Calais © Louis Witter
de passeurs ont été démantelées. À l’échelle internationale, l’arrestation des gros réseaux reste beaucoup plus difficile, voire « quasi impossible » selon Christian Salomé : « les grosses organisations ne sont pas folles. Elles se mettent aux pays de départ et au pays d’arrivée ; le reste du temps, la personne doit se débrouiller et voyager comme elle peut. C’est quasiment impossible de les stopper. » Un casse-tête que Philippe Nahon et ses équipes connaissent bien : « quand on arrête un clandestin à la frontière, on lui demande le nom du réseau ou du passeur. Mais c’est très compliqué. La majorité ne parle pas un mot de français et les autres ont peur des représailles. » Pour traverser la France, les clandestins sont alors livrés à eux même : « je suis arrivé à Nice et j’ai pris un billet de train pour Paris. En voiture, on passe par pleins de petits endroits et on ne sait pas ce qui peut se passer. » raconte Alumini. Pour Maluk, l’histoire est tout autre : « un passeur m’a pris en charge en Afghanistan et m’a dit qu’il me récupérait en Italie. Après on est allés à Metz en camionnette, je suis
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resté dans un camp quelques jours pour ensuite partir à Paris. » Si certains embarquent dans camionnettes et voitures en tout genre, le moyen de transport privilégié reste le train. « C’est plus simple, on a juste a acheté un billet on s’assoit et on attend », témoigne Alumini. La SNCF assure que les problèmes causés par les clandestins sont peu nombreux. « Ils ont tous des billets, ceux qui fraudent sont verbalisés mais il n’y pas de problème particulier. On ne les remet pas aux autorités, ce n’est pas notre rôle », affirme le service presse de la SNCF. Face à l’augmentation d’arrivée de clandestins, les contrôlent se poursuivent mais les migrants restent eux aussi déterminés : « J’étais dans le train pour arriver à Nice, la police est montée et m’a reconduit en Italie, 2 fois. Mais bon, finalement, je suis passé », raconte Alumini. Avec ou sans passeur, en bateau, en train ou à pied, tous veulent réaliser leur rêve : se construire une vie meilleure. Estelle Torgue
De faux papiers en un clic Vente d’armes, de drogues ou encore de faux papiers, le « deep web » (web profond) est un véritable supermarché illégal du Web. Danc ce marché virtuel, la monnaie, légale elle, est le bitcoin. Aucun compte n’est demandé pour se connecter. Il suffit de télécharger le logiciel Tor. Une fois connectée, la géolocalisation de votre adresse IP sera instantanément modifiée. Se procurer de fausses cartes d’identité ou encore de faux permis de conduire à bas prix est un véritable jeu d’enfant. Le clandestin qui chercherait à se procurer de faux papiers pourrait alors trouver une carte d’identité pour 5 543 bitcoins, soit près de 1 150 €. Un prix très abordable si l’on considère que cette carte d’identité n’est pas une carte volée mais créée de toute pièce : de la confection du papier jusqu’à l’impression de celui-ci.
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« Les tensions dans les refuges belges s’accumulent » Comme partout en Europe, la Belgique connaît une augmentation du nombre de réfugiés. Le gouvernement belge a dû créer plus de places dans les refuges. Désormais surpeuplés, ces espaces d’accueil sont source de tensions entre les migrants.
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u mois de septembre on a dénombré 183 demandes d’asile par jour en Belgique, soit une augmentation de 19,3% par rapport au mois d’août. La plupart des migrants viennent d’Iraq (40%) et de Syrie (27,3%). Fedasil, une agence fédérale qui s’occupe de ces demandeurs d’asile en Belgique, est responsable de 19 refuges dans le pays. Cette agence, ainsi que des autres centres d’accueil et des logements individuels, permettent de se loger à 24 930 personnes en ce moment. Espérant qu’ils peuvent entrer dans le pays légalement, les migrants attendent dans des centres d’accueil.
Hausse des tensions Un de ces refuges de Fedasil est situé à Kapellen, une ville de la province d’Anvers. C’est dans cet endroit qu’une bataille entre des migrants a éclaté le week-end passé. Deux groupes de réfugiés, des jeunes entre 18 et 20 ans, ont commencé à se battre. Le tumulte a continué pendant quatre heures, jusqu’à minuit. La police locale est intervenue dans le conflit, mais a dû demander du renfort auprès de la police fédérale. « Quelques personnes ont été légèrement blessées, parmi eux un employé du refuge », raconte Tine Provoost de Fedasil. Dirk Van Mechelen, le maire de Kapellen, et Fedasil ont décidé de prendre des mesures. « La présence de la police anversoise sera renforcée à partir de cette semaine », assure Tine Provoost. Elle déclare également que quelques migrants ont été transférés vers un autre logement afin que le calme puisse être retrouvé : « Officiellement, les deux groupes se sont réconciliés. Mais pour mieux
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Les conflits dans les asiles ne sont pas une nouveauté. Ils sont de plus en plus fréquents © CC
maintenir l’ordre, les instances ont donc décidé de déplacer quelques réfugiés. » Tom Van Poel, un employé du centre d’accueil à Kapellen, déclare qu’il n’y a plus de problème en ce moment, mais il ne voulait pas dire davantage sur la situation et la cause : « Écoutez, tout est calme ici. Je n’ai rien de plus à vous dire ». Van Poel n’a également pas souhaité communiquer sur d’éventuels petits incidents entre les habitants cette semaine. Il n’a pas non plus voulu s’étendre sur la présence de la police ou sur la réaction des employés du refuge visà-vis de l’incident.
Des refuges surpeuplés Les conflits dans les asiles ne sont pas une nouveauté. Ils sont de plus en plus fréquents. « Le nombre de migrants a fortement augmenté les derniers mois », explique la représentante
de Fedasil. « Les refuges sont surpeuplés. On a dû monter des tentes à des endroits qui ne sont pas destinés à cela. Par exemple, on a hébergé des personnes dans des salles de sports. Vous comprenez que les jeunes hommes réfugiés ont besoin de distraction. S’ils n’ont plus un endroit où ils peuvent se détendre, les tensions s’accumulent ». La Belgique a, cette semaine, décidé d’augmenter le niveau de la protection pour les centres d’accueils en raison des nombreux incidents perpétrés contre des refuges et ses occupants en Allemagne et aux Pays-Bas. Le niveau croissant de la menace implique que la police surveillera davantage les asiles partout dans le pays. Mais en Belgique, cette décision n’est qu’une mesure de précaution. « On n’a pas encore eu d’incidents contre nos refuges ni contre les réfugiés », assure Tine Provoost. Ines Van Impe
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Les Yezidis face à leur destin Les forces kurdes ont lancé une opération de grande envergure le 25 Octobre pour reprendre Sinjar City, au nord de l’Irak. Aux cotés des peshmergas, une nouvelle unité armée s’est formée, le YBS. Un bataillon d’hommes et de femmes Yezidis.
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Projetées soudainement sur les routes sèches et arides, des familles entières laissaient tout derrière eux © Louis Witter
’ultime bataille de Shingal démarre. Les peshmergas, le PKK, les forces armées kurdes de Syrie (YPG) et la nouvelle unité Yezidi (YBS), intensifient depuis le 24 Octobre, l’offensive menée sur le front de Sinjar city dans le nord ouest de l’Irak. Cette intervention se déroule avec l’appui aérien de la coalition internationale, qui bombarde depuis trois semaines des unités tactiques de l’Etat Islamique. Le commandant des peshmergas déclarait dans Basnews « leur moral et leur motivation ont été atteints. Avec la réduction du nombre de terroristes, ils ont moins de forces pour se battre. Nous progressons dans Shingal ». En effet de nombreux villages ont déjà été libérés et les combats se poursuivent dans le centre de Sinjar City. A cette occasion, même le président
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du Kurdistan Irakien, Marsour Barzani, est venu soutenir ses hommes sur le front. L’objectif ? Libérer la route qui mène à Mossoul en renforçant l’offensive militaire en cours depuis le 8 octobre 2015. « Sinjar occupe une place stratégique sur la route qui relie les territoires irakiens et syriens de l’état islamique : transfert de biens, de personnes et de combattants » explique Allan Cavale, reporter au Kurdistan Irakien. Pour le moment, Sinjar City est le théâtre de violents affrontements, et ce, depuis plus d’un an. Le 3 aout 2014, cette ville de 310 000 habitants, tombait entre les mains de Daech alors que les forces kurdes créaient un corridor pour désenclaver le Shingal. L’état islamique a ensuite repris cette route avant de la perdre à nouveau. Depuis, Kurdes et djihadistes se livrent une guerre quotidienne au sud des
montagnes. Les villages servant de champs de batailles.
Les Yezidis prennent leur destin en main 200 000 personnes dont 40 000 Yezidis quittaient Sinjar City, sans eau ni nourriture, après l’assaut de l’Etat Islamique en Aout dernier. La majorité d’entre eux ont fui dans les hauteurs du mont Sinjar pour échapper à la furie meurtrière de l’état islamique. Projetées soudainement sur les routes sèches et arides, des familles entières laissaient tout derrière eux. Mais leur réaction ne s’est pas fait attendre. Repliés dans les montagnes, à l’abri des combats, les Yezidis ont formé l’unité de résistance du Shengal (YBS), en janvier dernier. L’objectif de ce bataillon est de se
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La corruption et la contrebande gangrènent les groupes armés des kurdes irakiens (KRG) © Louis Witter libérer de la tutelle des peshmergas, en se munissant d’une force armée indépendante. En effet, abandonnés par les kurdes, ils se sont retrouvés seuls, face à Daech, à plusieurs reprises. « Le YBS est une force qui s’autofinance. Elle a été crée le 12 janvier avec le soutien des voisins kurdes syriens (YPG) et le parti des travailleurs kurdes (PKK). Contrairement aux peshmergas, les soldats s’engagent pleinement et n’ont aucunes permissions avant la fin de la guerre » explique Anthony Chamon, originaire du Kurdistan syrien et fondateur de l’association des Yezidis de France. « Ils étaient 200 au départ. Aujourd’hui ils sont près de 1500. Et chaque jour d’autres Yezidis les rejoignent. » Parmi les YBS, une unité particulière a vu le jour : « Les filles du soleil » nommé également « les femmes du pays Yezidis ». « 200 d’entres-elles ont repris plusieurs quartiers de Sinjar City cette semaine » déclare Anthony Chamon. « Pourtant certains responsables peshmergas s’approprient les victoires en omettant l’importance des Yezidis »
La corruption et la contrebande gangrènent les groupes armés des kurdes irakiens (KRG). De plus, des luttes intestines réduisent l’efficacité de leurs offensives. La création de ce nouveau bataillon rassure les pays européens, qui entendent répondre aux demandes de ravitaillement en armes. Des représentants du KRG et du YBS se retrouvent en ce moment même Le Consul Général de France au Kurdistan, Alain Guépratte, s’est entretenu le 26 octobre avec la commandante de l’unité militaire féminine yézidie des Peshmergas, Khatoon Ali Kheder. Elle déclarait : “Nous demandons à l’Union Européenne de nous envoyer des armes pour nous aider à battre Daesh”. A l’approche d’une bataille déterminante pour l’issu de cette guerre, une réponse des gouvernements occidentaux s’impose.
pour décider conjointement des stratégies et des tactiques militaires à adopter contre Daech. Les kurdes ont besoin, plus que jamais, de la communauté Yezidis. Charles Thiefaine
Qui sont les Yezidis ? Il s’agit d’une communauté kurdophone en Irak. Ils font partie des populations les plus anciennes de la Mésopotamie, où leur croyance est apparue il y a plus de quatre mille ans. Ni musulmans, ni chrétiens, ils pratiquent une religion monothéiste pré-islamique et vénèrent plusieurs anges. Parmi eux l’archange Malak Raus, appelé parfois Sheitan (Diable en arabe). Pour cela, ils sont considérés par les islamistes radicaux comme des adorateurs du diable et doivent se convertir ou mourir.
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SPORT
Coupe du Monde de rugby : Jamais deux sans trois pour les All Blacks ? L’inévitable finale entre les Wallabies et les All Blacks aura donc bien lieu. Si la majorité des observateurs s’accordent à dire que les All Blacks sont bien partis pour remporter un troisième trophée mondial, ils reconnaissent aussi que les Wallabies sont les plus à même de battre l’ogre néo-zélandais.
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La Nouvelle-Zélande et l’Australie ont tous deux déjà remporté deux fois la compétition © CC
a Coupe du Monde de rugby touche à sa fin. Samedi, à 17h la Nouvelle-Zélande affrontera l’Australie, à Twickenham, en finale de cette édition 2015. Un choc entre deux nations ayant chacune remporté deux fois la compétition. « Entre le tenant du titre, la Nouvelle-Zélande, et son rival de toujours, l’Australie, c’est le classique des classiques. L’énième épisode d’une rivalité entre les deux plus grande nations de l’histoire » explique Geoffroy Garetier, consultant chez Canal Plus. « Les favoris sont clairement la Nouvelle-Zélande. C’est une équipe qui ne s’est inclinée que trois fois depuis la coupe du monde 2011 », ajoute Anthony Bajart,
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joueur espoir du Stade Français. Les Australiens sont les derniers à avoir vaincu les Néo-zélandais le 8 août dernier, à Sydney (27-19). « C’est évident que les néo-zélandais sont favoris. La question est de savoir s’ils vont pouvoir continuer à dérouler comme ils l’ont fait depuis le début de la compétition. Pour moi entre ces deux équipes, il n’y a pas photo. Après, ça reste une finale, donc il est possible et même probable qu’on assiste à un match serré », souligne Laurent Blanchard, journaliste à La Provence. Eddy Ben Arous, pilier des Bleus, présent lors de la défaite du quinze de France face aux All Blacks, ne partage pas cet avis : « L’Australie
est favorite. Leur gros point fort c’est le ruck, c’est ce qui les a fait gagner contre l’Argentine. C’est une force énorme, chez eux, et c’est ce qui va leur permettre, pour moi, de prendre le dessus ». Un avis que partage Geoffroy Garetier : « En Coupe du Monde, les Australiens ont toujours posé beaucoup de problèmes aux All Blacks. Ils connaissent parfaitement les joueurs néo-zélandais, et savent les faire déjouer à des moments-clés. Ce fut le cas lors de la demi-finale en 91 (16-6), ou de la demi-finale 2003 (22-10) où les Australiens font tout ce qu’il faut pour bloquer les Blacks. Ils seront capable de faire déjouer McCaw parce que dans les rucks vous avez un joueur comme Pocock
SPORT
Cette rencontre pourrait bien devenir historique © CC
qui sait parfaitement les bloquer ».
L’Australie, plus qu’un outsider ? Pocock, l’un des joueurs ayant « impressionné » Eddy Ben Arous lors de cette compétition, sera une nouvelle fois au cœur du jeu. « Les clés du match seront la conquête, sur les touches et les mêlées, les zones de ruck, où les Australiens sont d’habitude excellents, avec notamment Hooper et Pocock. Evidemment, la discipline des deux équipes jouera, il faudra faire attention à ne pas être trop pénalisé. Les buteurs auront une carte à jouer eux aussi », explique Anthony Bajart. « La première ligne australienne est un modèle du genre. Ils ont une superbe paire de demis, des centres et des ailiers, à la fois très puissants et très rapides. Drew Mitchell et Adam Ashley-Cooper l’ont prouvé en demi-finale », expose Garetier. L’Australie a proposé un des plus
beaux rugbys lors de cette Coupe du Monde et devra batailler dur pour pousser les All Blacks à la faute. Une tâche ardue, tant les joueurs de Steve Hansen sont puissants : « Ce qui est impressionnant chez les Blacks, c’est leur vitesse de jeu. Contre
« Ces deux équipes se connaissent sur le bout des doigts. Il est évident que chacune d’entre elles analysera les points forts et les faiblesses de chaque équipe. Il est donc possible que l’on assiste à un remake de la finale de 2011 », prédit le jeune espoir du Stade Français. Geoffroy Garetier désapprouve : « On va voir des points. Il est vrai qu’en finale on voit rarement beaucoup de points. A part en 99 (l’Australie avait battu les Bleus 35-12, ndlr). Je ne serai pas étonné que cela se joue sur une marge de 5 à 10 points ». Plus qu’une finale, cette rencontre pourrait bien devenir historique. Si la Nouvelle-Zélande venait à l’emporter, elle serait la première nation de l’histoire à emporter deux Coupe du Monde d’affilée. « Le vainqueur quel qu’il soit, sera le premier à avoir remporté trois fois la Coupe du Monde », complète Geoffroy Garetier. Ou comment faire grandir la légende.
«En Coupe du Monde, les Australiens ont toujours posé beaucoup de problèmes aux All Blacks» nous, c’était impressionnant. Leur organisation est parfaitement huilée, on avait l’impression que chaque joueur savait où se placer, au mètre près, que ce soit en phase offensive ou lorsqu’il devait défendre », se rappelle Ben Arous. Lorsque les Bleus défiaient les coéquipiers de l’intenable Richie McCaw en 2011, le match était fermé. Un tel scénario se reproduira-t-il?
Vincent Roussel
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Les candidats américains passent à l’heure latino A quelques mois de la 58ème élection présidentielle aux Etats-Unis, une partie précise de la population est mise en lumière : les latinos. La minorité hispanique a pour la première fois le pouvoir de faire pencher la balance du côté républicain ou démocrate. Explications.
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La décision de vote des latinos sera synonyme de réussite ou d’échec pour les candidats aux présidentielles © CC nviron 50 millions. C’est le nombre de « latinos » présents sur le territoire des Etats-Unis en 2015. Originaires d’Amérique du Sud, d’Amérique Centrale ou des Caraïbes, ils représentent désormais 16,3% des habitants. Ce nombre croissant de nouveaux citoyens sera un des facteurs essentiels des élections présidentielles 2016 aux Etats-Unis. D’avantage qu’en 2012 et la réélection de Barack Obama, le bulletin déposé dans les urnes par les latinos aura une influence jamais vue dans l’histoire du pays.
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Selon Fréderic Carbone, le correspondant permanent de Radio France à Washington, « le vote latino n’a jamais été aussi important, notamment pour les Républicains. Avec l’éducation, l’immigration est le thème fort de cette campagne. Les présidentielles de 2016 auront clairement l’accent espagnol ». Une étude du site Latino Decisions expose d’ailleurs que pour espérer être élu président, le vainqueur des primaires républicaines devra recueillir au moins 60% de votes des latinos. Pour donner une idée de l’importance du chiffre, Mitt Romney ne disposait
que de 23% de votes en 2012…
Les candidats font tout pour séduire l’électorat latino Pour les républicains d’avantage que pour les démocrates, la décision de vote des latinos sera donc synonyme de réussite ou d’échec pour les candidats aux présidentielles. Afin d’éviter un camouflet, ces derniers multiplient ainsi les paroles et gestes de séduction envers la communauté hispanique du pays. L’exemple le plus marquant est bien entendu celui de Jeb Bush. L’ex Gouverneur de Floride n’hésite pas à s’exprimer
I N T E R N AT I O N A L en espagnol et n’oublie jamais de s’exposer avec sa femme, Columba, d’origine mexicaine. De la même façon, le sénateur de Floride Marco Rubio met régulièrement en avant ses origines cubaines pour séduire encore plus de votants latinos. De facto, les candidats républicains et démocrates n’ont jamais rassemblés autant d’origines différentes. Malgré cette nouvelle diversité, la minorité hispanique attend toujours une personnalité qui représentera d’avantage les latinos. Plus que des déclarations ou des promesses électorales, ils attendent des actes concrets. Pour Deborah Baker, journaliste politique à l’Albuquerque Journal, « il y a une place à prendre pour être la figure des latinos. Il n’y a pas encore eu de déclarations tranchées ou de réelles propositions concernant l’immigration hispanique. La porte est encore ouverte pour une prise de pouvoir ». Une prise de position délicate pour les candidats républicains. En effet, elle pourrait leur coûter cher lors des primaires auprès des votants les plus à droite. A l’image de la Floride, les Etats du Sud des Etats-Unis sont les régions les plus concernées par le choix de la minorité hispanique. « le Nouveau-Mexique est l’Etat avec le plus grand nombre de votants latinos et pourrait devenir un swingstate comme peuvent l’être l’Iowa ou l’Ohio d’habitude » souligne Frédéric Carbone.
Des votes qui devraient engendrer des changements Au-delà des promesses électorales, les candidats se doivent de proposer des solutions à l’immigration illégale qui ne montre aucun signe de ralentissement. Pour Juan Jose German, membre du Département d’Etat (l’équivalent du ministère des Affaires étrangères), « on ne peut plus fermer les yeux sur les problèmes d’immigration aux EtatsUnis. Le prochain gouvernement doit proposer une réforme pour faciliter l’intégration des latinos, cela fait partie de l’ADN du pays ». Une tâche ardue sachant que les latinos constituent désormais la minorité la plus nombreuse
Jeb Bush © CC
aux Etats-Unis devant les afroaméricains. De plus, 30 millions d’entre eux n’ont pas la nationalité américaine. D’origine dominicaine, Juan Jose German ajoute que les latinos « disposent d’un vrai poids et que leur avis comptent enfin pour les politiques ».
décider presque à elle seule, l’issue de la campagne présidentielle américaine.
Même le sulfureux candidat Donald Trump a pris position en affirmant qu’il « trouverait des emplois pour les américains et notamment pour les latinos ». Le magnat de l’immobilier ne cache pas son ambition concernant le vote hispanique et assume de s’inviter sur un des terrains préférentiels des démocrates. Pour Deborah Baker de l’Albuquerque Journal, il ne faut pas pour autant stigmatiser systématiquement les électeurs latinos : « il ne faut pas penser qu’ils voteront pour un candidat parce qu’il parle espagnol ou parce qu’il a juste évoqué le sujet. Ils réfléchissent et décident en tant que citoyens américains, pas seulement en tant que latinos ». Cette part de l’électorat pourraient
Lors des élections présidentielles aux Etats-Unis, les swing-states ou Etats-charnière en français sont les Etats américains où aucun parti ne domine clairement. Contrairement aux régions historiquement républicaines comme le Texas ou démocrates comme la Californie, les swing-states sont susceptibles de changer de côté politique à chaque élection. Le choix des votants dans quelques Etats peut ainsi définir l’issue du vote présidentiel. Ces dernières années, l’Ohio, l’Iowa ou la Floride sont les Etats les plus disputés pour remporter l’élection.
Antonin Plu
Les swing-states
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Highway to Hellfest Après une édition anniversaire au succès historique, le Hellfest s’apprête à dévoiler les premiers noms de son cru 2016. Entre rumeurs alléchantes et habituelles surprises, tout porte à croire que les fans de la première heure ne seront, une fois de plus, pas déçus. Le troisième plus gros festival de France en terme de fréquentation prépare sa déferlante.
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Les dernières 10 000 places risquent de partir vite © CC
’organisation du plus grand festival de musiques extrêmes de France va publier le 30 octobre à 14h sur internet une première vague d’annonce de groupes programmés cette année. Habituellement prévue courant décembre, ce communiqué a du être avancé à cause d’un engouement sans précédent. Ben Barbaud, le créateur du festival, et son équipe avaient anticipé l’ouverture de la billetterie au 15 septembre, le tout sans dévoiler un seul nom. Un simple geste pour les fidèles du festival, qui s’est rapidement transformé en véritable événement. Après moins d’un mois, les organisateurs ont annoncé le 9 octobre dernier qu’ils mettaient
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fin à l’accès précoce aux billets pour 2016, car 75% d’entre eux avaient d’ores et déjà été vendus.
Un succès habituel quelques interrogations
mais
Sans forcément s’attendre à cette déferlante, les organisateurs se font peu de souci quant à la fréquentation de la 11e édition. En effet, en 2015, les 50 000 billets pour les trois jours s’étaient écoulés en seulement trois semaines, et ce avec uniquement une poignée de groupes annoncés. Mais cette fidélité sans faille se transforme en inquiétude pour certains fans déjà possesseurs de leur précieux sésame. On peut notamment lire sur la page Facebook de l’évènement plusieurs
commentaires de festivaliers qui se demandent quelles ont été les vraies motivations du Hellfest dans l’ouverture prématurée de la billetterie et qui attendent impatiemment la première vague d’annonce : « Vous faites quoi les gars la?? Je suis à deux doigts de vendre mon pass... Il serait vraiment temps de nous présenter les horsd’œuvre !! », « 200€ et rien sur les groupes... », ou encore « je préfère attendre et rater ma place que cautionner une façon de faire aussi scandaleuse ». Si les fans se montrent autant impatients, c’est également dû à l’arrivée à Paris en juin prochain de la première édition du Download Festival Français. Le festival britannique, habitué des affiches prestigieuses a déjà fait
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Les organisateurs se font peu de souci quant à la fréquentation de la 11e édition © CC réagir le tout internet en annonçant ses premières têtes d’affiches : Rammstein et Iron Maiden. Pour Alexxx Rebecq, le responsable de la communication, « toute l’équipe a la pression. Plus de 75% des billets ont été vendus et on doit faire plaisir à tous les festivaliers qui nous ont fait confiance. Avec l’arrivée du Download, on mise comme d’habitude sur la qualité, afin que ceux qui nous font confiance puissent comparer les deux événements et apprécier l’expérience que propose notre festival. »
Une programmation hypothétique Si quelques habitués sont inquiets quant à l’affiche de l’édition 2016, il y en a d’autres qui se frottent déjà les mains. Comme chaque année de nombreux amateurs se pressent sur le blog du journaliste Francis Zegut, dont les prédictions font mouche presque à chaque fois. Après avoir réussi à annoncer les têtes d’affiches de l’édition anniversaire de 2015 parfaitement, Francis Zegut a déjà misé sur
plusieurs poulains cette année. Bon Jovi, Black Sabbath, Rammstein, Slayer, Megadeth, Anthrax, Twisted Sister, Within Temptation, Korn, Deftones, Disturbed, Volbeat, King Diamond, Ghost, Foreigner, Sixx:A.M et No One Is Innocent seraient donc de la partie si ses présages se révèlent exacts. Une chose est sûre, la o n z i è m e édition du « festival de l’enfer » risque une fois de plus d’être très rapidement sold out, dan la mesure où très peu de tickets « trois jours » sont encore disponibles. « Les dernières 10 000 places risquent de partir vite, ce qui nous permettra de pouvoir nous concentrer sur les négociations avec les groupes et proposer une affiche de qualité. Après l’annonce du sold out, on pourra également se concentrer sur les améliorations de logistique, comme l’accès à la Warzone qui a été problématique cette année », assure Alexxx Rebecq.
La réputation du Hellfest n’est plus à faire. Ce rendezvous incontournable séduit les aficionados de musiques extrêmes tout comme les groupes eux-mêmes. Le groupe Finlandais Grave Pleasure (ex -B ea s t i m i l k ) , présent lors de l’édition 2015, en garde des souvenirs exceptionnels. « C’était notre premier gros événement depuis notre changement de nom et de lineup, et notre premier Hellfest. Nous avons joué en fin d’après-midi sur la Temple (la scène spécialisée dans le black métal, ndlr) avant des groupes mythiques tels que Alestorm ou encore Triptykon. On a eu droit à une ambiance de folie ! Mais ce qui nous a vraiment marqué, ce sont les décors vraiment travaillés et l’accueil extraordinaire des organisateurs. On a une seule envie, celle de revenir ! », confie Mat McNerney, chanteur de la formation. Pour ceux qui souhaiteraient se procurer une place, la billetterie ouvrira à nouveau ce vendredi.
«Plus de 75% des billets ont été vendus et on doit faire plaisir à tous les festivaliers qui nous ont fait confiance»
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Bel Zégut Pionnier du hard rock à la radio, Francis Zégut n’a pas perdu son amour pour la musique métal. Connaisseur aguerri des musiques extrêmes, il livre aujourd’hui son expérience avec le Hellfest, ses coups de cœur comme ses coups de gueule.
« Quand tu es dans le milieu depuis tout ce temps, tu deviens ami avec d’autres et tu te fais ton réseau » © Louis Witter
ROGER MAGAZINE : Pour du hard rock sur les ondes ? Hellfest ? Qu’est ce qui t’as le commencer, peux-tu nous plus marqué lors de ta première raconter ton parcours ? Le Hellfest, c’est un village gaulois édition ? On va essayer de faire vite ! [Rires] Alors je suis né en 1953, mon premier 45 tours a été Love Me Do des Beatles en 1962. Après je suis tombé dans la guitare électrique avec Jimi Hendrix ou encore Led Zeppelin. J’ai commencé la radio en 76, je précise 1976 hein !, comme standardiste et en 79 ils ont cherché de nouveaux animateurs pour la grille d’été. J’ai fait une maquette assez haute en couleur. En gros, je passais trois disques de métal et j’hurlais des conneries entre. Je ne sais toujours pas comment les programmateurs m’ont fait confiance mais ça a marché. Entre 80 et 90, j’ai donc animé l’émission « Wango Tango, les sculpteurs de menhirs », et j’ai aussi touché un peu à la télé avec « Blah Blah Métal » sur MCM.
qui résiste à plein de choses. Depuis sa création, tu vois de plus en plus de diversité là-bas, des gars de soixante balais, des nanas, des enfants... C’est devenu une grande fête pour les gens qui aiment la guitare électrique. Tu croises des personnes de 18/19 ans à 60 ans, que ce soit chez les festivaliers ou chez les musiciens. Pour résumer, le Hellfest, c’est avant tout l’histoire d’une vie. Il faut louer la passion et l’implication de Ben qui a commencé avec le Fury Fest dans une MJC où il n’y avait pas grand monde. C’est devenu un festival comme on ne voit nulle part ailleurs. Il s’est accroché et a réussi, même dans les moments les plus difficiles. C’est un peu comme la musique, quand t’as pas grand chose à bouffer, t’es obligé de sortir tes tripes pour composer un morceau, c’est une sorte d’urgence.
Quel est ton sentiment visà-vis du Hellfest alors que Depuis quand fréquentes-tu le tu as été le premier à passer
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Ca fait seulement trois ans que je peux m’y rendre, avant c’était compliqué à cause de soucis de calendrier. Ce qui m’a marqué la première fois, ça a été l’ambiance et le décor. Une sorte de petit village à part dans une commune de la LoireAtlantique. Et puis la diversité des scènes ajoute un vrai plus. Tu as les main stages, où tu vois les légendes du hard rock qui défilent, et puis toutes les autres petites scènes, des endroits dédiés aux musiques plus extrêmes qui te font découvrir pas mal de groupes. Mais ce qui m’a le plus frappé, c’est l’ouverture d’esprit que tu trouves là-bas. Par exemple cet été, j’étais avec les Wampas lors de leur concert. Ce n’est pas forcément un groupe auquel on s’attend dans ce genre d’endroit et pourtant, ils ont mis le feu. Au Hellfest, dès que tu es sincère et que tu amènes du jus, ça marche.
C U LT U R E Quelles ont été tes plus grosses claques ? Il y en a eu beaucoup... Aerosmith déjà, Steven Tyler a encore de la voix et de la patate et ça m’a cloué. Marilyn Manson aussi, même si en cours de route ça a faibli, son dernier album est fait pour la scène, c’est incontestable. Et puis Black Sabbath évidemment, même si Ozzy commence à fatiguer, Rob Zombie... Par contre j’ai détesté Deep Purple. Ils n’étaient pas réellement présents, il y avait trop de longues parties instrumentales par rapport à Scorpions par exemple. Eux, ils connaissent leur boulot. Je me suis beaucoup baladé pour aller voir les jeunes comme les anciens et tout le monde avait l’air content. Il y en a pour tous les goûts !
Si tu pouvais choisir le lineup de l’année prochaine, qui voudrais-tu voir ? Dans le désordre AC/DC, Metallica, Rose Tattoo, The Angels et King’s X !
Chaque année, tu dévoiles sur ton blog les têtes d’affiche avant tout le monde. Quel est ton secret ? [Rires] Quand tu es dans le milieu depuis tout ce temps, c’est simple, tu deviens ami avec d’autres et tu te fais ton réseau. Certaines personnes qui écoutaient « Wango Tango » dans les années 80/90 sont devenus directeurs de labels, de maisons de disques.... Pour cette année par exemple, je suis sûr à 100% que Black Sabbath et Rammstein seront là ! Après j’ai aussi entendu parler de Linkin Park. C’est aussi une histoire de déductions. Tu vois, quand certains groupes sortent un nouvel album ou tournent dans le coin, tu te doutes un peu qu’ils vont passer par là.
Le Hellfest ment complet groupe n’a été Qu’est-ce que
est pratiquealors qu’aucun encore annoncé. tu en penses ?
Franchement, ça m’emmerde un peu. C’est le même système que dans certains festivals anglais où ils vendent des tickets deux
« Il n’y a pas de successeurs qui ont l’ouverture médiatique pour devenir des superstars »© Louis Witter ans avant sans le moindre nom. Les places ne sont pas données non plus, 200 euros pour trois jours, ça les vaut mais faut pas abuser avec la confiance des festivaliers. Et puis c’est à double tranchant, si tu déconnes juste pour avoir du pognon mais que tu n’as pas les groupes, l’année d’après les personnes vont attendre les annonces complètes avant d’acheter leur billet. En fait j’ai l’impression que tout le monde a oublié ce qu’on a été et pourquoi on écoutait cette musique. Maintenant, mais c’est dans tous les domaines de la société, le seul dénominateur commun, c’est le blé. J’ai encore en moi une utopie de hippie du vivre ensemble. Avant, les groupes vendaient juste des tee-shirts souvenir. Aujourd’hui, ils vendent les boules de Noël, le flipper, les couches pour bébé à leur effigie. Je comprends que c’est dur, les disques se vendent de moins en moins, mais là ça me gêne pour l’esprit du départ, l’esprit de partage.
Pour toi, comment le Hellfest est-il arrivé à autant de succès ? C’est uniquement grâce à Ben Barbaud, qui a réussi à transmettre sa passion et qui a proposé tous les styles de musique, du heavy au air métal en passant par le hardcore. Il a réussi à
attraper pas mal de monde au passage. J’espère que ça continuera même si je suis un peu inquiet.Parce que je ne vois pas qui va prendre la relève des groupes qui sont en train de s’en aller. Ils sont tous un peu vieux et font des concerts juste parce que ça les éclate d’être sur scène, ils sont loin d’avoir besoin d’argent. Mais il y a une sorte de vide, je ne vois pas qui pourrait devenir les nouveaux Metallica ou AC/DC. Car les jeunes n’ont pas de place dans les médias d’aujourd’hui pour se faire connaître. Depuis le milieu des années 90, ils ont débranchés les guitares. Maintenant tu vois des fesses de gonzesses avec des refrains aseptisés et c’est tout. Du coup on vit dans le passé. Les légendes d’hier commencent à boiter et à avoir de l’arthrose et on ne sait pas ce qu’on aura quand ils auront disparus. Il n’y a pas de successeurs qui ont l’ouverture médiatique pour devenir des superstars.
Pour terminer, tu aurais un message pour Ben Barbaud ? Oui, cette année, je viens avec un pote et mon cousin. On attend nos bracelets pour les accès VIP et pour boire des coups gratos ! Anaïs Schacher
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L’abdication surprise de RAF Simons chez Dior Après trois années passées à la tête de la direction artistique de la maison Dior, Raf Simons rend les ciseaux. Le créateur s’attèlera désormais au développement de son label éponyme. L’identité de son successeur demeure inconnue.
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Raf Simons a décidé de ne pas renouveler son contrat à la tête de la maison © CC l présentait sa première collection Christian Dior haute couture en juillet 2012 et succédait ainsi à John Galliano, dont le règne de 15 ans avait pris fin scandaleusement une année plus tôt. Moins théâtrale et infusée du style minimaliste belge du créateur, la femme Dior par Raf Simons fait alors l’unanimité auprès de la presse internationale qui flatte sa remarquable élégance. Trois ans et demi plus tard, Raf Simons a décidé de ne pas renouveler son contrat à la tête de la maison « pour raisons personnelles », indique un communiqué de la maison Christian Dior. Personne ne l’avait vraiment envisagée, l’annonce de l’abdication de Simons a surpris jeudi soir dernier le monde de la mode : « On ne s’y attendait vraiment pas. Il installait de nouveaux codes et apparaissait vraiment à l’aise dans cet exercice lors de son dernier
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défilé en juillet », réagit Claire Mabrut, chef de rubrique mode pour Madame Figaro. Les finances de Christian Dior Couture ne laissaient rien présager non plus. Les résultats des ventes du premier trimestre 2015-2016 affichaient une progression de 13%, suffisante pour contenter direction et actionnaires et ainsi assurer la pérennité de Simons à la tête de la direction artistique.
L’amour dure trois ans « C’est une décision fondée à la fois sur mon désir de me concentrer sur d’autres centres d’intérêt dans ma vie, notamment ma propre marque, et les passions qui me motivent audelà de mon activité professionnelle », a déclaré laconiquement Raf Simons dans le communiqué. Plus que les raisons invoquées, « il y avait quand même un certain décalage, fait remarquer Claire
Mabrut, le style épuré de Simons et sa personnalité discrète posaient problème avec le sens de la mise en scène et du spectacle de Dior. Il n’a peut-être pas supporté cette schizophrénie ». A ces clivages d’univers respectifs, ajoutez le rythme effréné des collections et c’est le divorce. Entre Dior et Simons, l’amour aura vraiment duré trois ans. Trois années pendant lesquelles il devra produire sans relâche une vingtaine de collections pour la maison française (quatre collections de prêt-à-porter et deux collections de haute couture par an), quand il n’était habitué qu’à deux propositions annuelles pour sa griffe éponyme. Dans un article rédigé pour le magazine Vogue et intitulé « Why Fashion is Crashing » (littéralement, « Pourquoi la mode défaillit »), la critique de mode Suzy Menkes, amie de longue date du styliste belge, s’inquiète. Elle met en garde
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Le trône de Dior devient la position la plus convoitée du sempiternel mercato de la mode © CC l’industrie toute entière envers la frénésie des collections, la pression du chiffre, l’obligation chronophage des réseaux sociaux et finalement l’impossibilité pour les couturiers de mener à bien leur processus créatif. Elle y établit un parallèle avec l’issue ivre et lysergique de la brillante ère Galliano chez Dior, le suicide tragique d’Alexander McQueen ou la démission de Marc Jacobs au sommet de Louis Vuitton.
Qui pour remplacer Raf Simons ? En juillet, Kering et sa maison Balenciaga annonçaient également le départ d’Alexander Wang. Un poste vacant rapidement confié à Demna Gvasalia, fondateur du label rebelle Vetements. Désormais libre, le trône de Dior devient sans attendre et en dépit des avertissements avisés, la position la plus convoitée du sempiternel
mercato de la mode. Le site web américain WWD, à qui Dior a confié l’exclusivité de la nouvelle, suppose la possible nomination de l’actuel directeur artistique de Givenchy Riccardo Tisci. « Il se murmure qu’il serait libre et pourrait donc rejoindre Dior », raconte Paul GuyotSionnest, directeur des relations institutionnelles de Kering. « À l’époque, Dior avait déjà recruté Galliano quand il officiait chez Givenchy, c’est donc absolument envisageable », rappelle la chef de rubrique mode Claire Mabrut. Les noms de Jonathan Anderson (Loewe), Phoebe Philo (Céline) ou même Alber Elbaz (Lanvin) ont également été évoqués. La maison Christian Dior, qui s’est refusée à tout commentaire, devrait annoncer l’investiture d’un nouveau designer dans les prochaines semaines. Edouard Risselet
À qui appartient Dior ? Si la maison est d’ordinaire incluse dans le portefeuille des marques du groupe LVMH de Bernard Arnault, le statut de la holding Christian Dior SA est différent. Cette holding possède 100% de la financière Jean Goujon. Cette société dispose, elle, de 42,42% des parts de LVMH. Christian Dior SA, au travers de cette financière, possède donc 42,42% des parts de LVMH. Mais Christian Dior SA est détenue majoritairement (70,8% du capital) par la financière Agache. Celle-ci est-elle même contrôlée par le groupe Arnault, une holding possédée et dirigée par Bernard Arnault. La famille Arnault est donc l’unique actionnaire majeur de Christian Dior SA.
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Les jeux français ont la cote à la Paris Games Week Pour sa troisième édition au sein de la Paris Games Week, le stand « Jeux Made in France » a mis les petits plats dans les grands pour fédérer les visiteurs autour de créations indépendantes françaises.
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a Paris Games Week démarre en grande pompe le 28 octobre avec un invité prestigieux, le Japonais Sony, créateur de la Playstation 4. Autres stars de cette année, les casques de réalité virtuelle, présentés notamment par HTC ou Valve. Le deuxième plus gros salon du jeu vidéo en Europe accueillera cette année des centaines de milliers de visiteurs qui pourront déambuler à travers les stands des différents éditeurs de jeux jusqu’au 1er novembre. Les bousculades des années précédentes ont conduit le S.E.L.L (Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs), organisateur de l’événement, à choisir une surface de plus de 60 000 m2 pour les exposants, soit 20% d’espace en plus par rapport à 2014. Cette année encore, les célèbres développeurs sont attendus avec impatience par des légions de joueurs. Cependant, le stand « Made in France » qui présente des jeux de studios indépendants français, réussi à séduire et à se démarquer pour sa troisième édition.
Une expérience différente Pour se différencier des grosses licences, chacun sa méthode. Un jeu tel que Games of Glory, RPG (jeu de rôle, ndlr) multijoueurs et compétitif, se détache face aux ténors du genre en prenant soin des détails. « On met les armes d’un jeu type shooter entre les mains de personnages classiques de MOBA (Multiplayer Online Battle Arena) auxquels les joueurs s’attachent vraiment », explique Natacha Concordel, community manager au studio LightBulb Crew. Outre le mélange des genres, la
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Le stand «Made in France» à la Paris Games Week © Victoria Putz
tendance Rogue like suit son chemin chez les indépendants comme le studio Amplitude, fondé en 2011, qui présente cette année le jeu Dungeon of the Endless sur PC et iPad. Ce type de jeu se traduit par sa grande complexité et plus particulièrement par la mort permanente du personnage en cas d’échec. « Ce jeu a une difficulté exécrable […]. C’est vraiment l’univers die and retry, c’est-à-dire, lorsque le personnage meurt, le joueur apprend quelque chose pour la prochaine fois », illustre Francois Hardy, community manager chez Amplitude. Selon lui, l’expérience du joueur tourne autour de la prise de risques permanente. Malgré cet aspect qui pourrait rebuter certains débutants, il affirme que « Dungeon of the Endless » n’est pas réservé aux plus expérimentés, « on prend vite
le coup de main ».
Une communauté très importante La plupart des développeurs s’accordent sur l’importance de fédérer les joueurs. Développer une communauté est aussi une manière de les faire venir vers les jeux indépendants. « Nous avons créé une plateforme, Games Together, un site internent qui permet à la communauté de s’impliquer directement dans la création d’un jeu dès le début. Par exemple, dans « Dungeon of the Endless », les joueurs ont crée un héros qui a rejoint le jeu », explique Francois Hardy. Si de plus en plus d’éditeurs proposent ces modifications dans les phases finales du jeu, un moyen de faire la promotion du jeu, rares sont ceux qui déclinent ce
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Les développeurs sur place pour faire tester leurs jeux vidéos aux visiteurs © Victoria Putz
procédé lors de l’ébauche du jeu. « Le studio n’existerait pas sans la communauté », ajoute t-il. Ce sentiment d’appartenance se poursuit jusque dans le salon ou concepteurs et joueurs se rencontrent. « On a l’habitude d’aller en salon, on y envoie les game designers, les développeurs », indique Stéphanie Yath, responsable du stand Amplitude pendant la Paris Games Week. Une manière de rassembler les passionnés mais aussi de recruter. Ainsi, François Hardy, était un amateur des jeux d’Amplitude, bien avant d’y postuler. Certains jeux comme Games of Glory ont un aspect compétitif en équipe se rapprochant de l’e-sport. Cependant, si ces affrontements obligent les joueurs à performer pour s’illustrer dans le classement en ligne, ils n’oublient pas d’être ludiques. L’important étant de jouer entre amis. « On voit l’importance des aspects sociaux en mode multijoueurs », souligne Natacha Concordel.
Les jeux sur support mobile toujours plus nombreux Le succès grandissant des minijeux sur mobile a encouragé de nombreux studios de développeurs à tenter leur chance dans ce milieu. Le mot d’ordre est la prise en main facile du joueur. Les nouveaux venus doivent adapter leur gameplay à l’écran tactile. C’est dans cette lignée que s’inscrit Celsius Heroes, développé sur smartphone, tablette et PC (via Facebook). Ce jeu de rôle mélange puzzlegame et univers fantastique tout au long d’un scénario qui se renouvelle chaque semaine. Selon Charles-Edouard Garcia, responsable des relations clients du studio Celsius Online, c’est une manière de dévoiler toute la profondeur du jeu sans pour autant perdre le joueur. Cependant certains jeux, notamment basés sur le tir se montrent plus délicats
à la transposition sur mobile. « La complexité de la visée rend l’adaptation difficile », souligne Natacha Concordel. Malgré ces obstacles, les jeux sur supports mobiles se multiplient et s’illustrent notamment dans des compétitions telles que les Ping Awards, créés en 2013 par Philippe Ulrich et qui récompensent chaque année les meilleures créations françaises. « C’est très concurrentiel, il y a beaucoup de studios qui sont tentés de porter leurs jeux sur mobile », explique Charles-Edouard Garcia. Une telle montée pose alors la question d’une concurrence avec les plateformes plus traditionnelles (PC et console). Néanmoins, celles-ci continuent de sortir chaque année des nouveautés en matière de technologie et attirent toujours autant d’adeptes et d’habitués.
« Le studio n’existerait pas sans la communauté»
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Une marche de la dignité aux revendications indéterminées Trente ans après la Marche historique pour l’Egalité et contre le racisme, dite la Marche des beurs, le collectif de femmes, le Mafed, organise, dans la même lignée, une marche de la dignité samedi prochain à 14 heures à partir de Barbès et jusqu’à Bastille. Des dizaines de milliers de personnes sont attendues pour se mobiliser notamment contre les crimes policiers et le racisme d’Etat.
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n réponse à l’islamophobie, la négrophobie et la romophobie galopantes aujourd’hui, « nous organisons une nouvelle marche contre le racisme, qui a les moyens de prétendre à une envergure historique, après celle de 1983 », a expliqué Louisa Youfsi, membre du collectif de femmes le Mafed, organisateur de la marche. Evidemment, outre le problème du racisme d’Etat dans sa globalité, « l’axe principal de ce rassemblement est de lutter contre les violences policières tout en rappelant la L’antisémitisme refait surface ces derniers mois dans l’Hexagone avec l’attaque de mort à Clichy Sous Bois des deux jeunes plusieurs synagogues © Louis Witter mineurs Zyed et Bouna en octobre 2005 », a-t-elle ajouté. Le 27 octobre 2005, la l’Union syndicale Solidaires qui défend réactionnaires avec de nombreux collectifs mort de deux adolescents, électrocutés les travailleurs en France quelle que ou groupes militants qui défendent dans un transformateur EDF après avoir soit leur origine ou leur culture. « C’est respectivement une cause ciblée, mais il voulu fuir un contrôle policier, avait dommage, par exemple, qu’on ne parle y a un manque cruel « de vision global déclenché de violentes émeutes urbaines pas de la discrimination, par la SNCF, et aucune perspective de transformation en France. Dix ans après, les tensions en septembre dernier, des centaines sociale ». À l’heure où le durcissement sont toujours aussi vives et plus que d’employés de nationalité et d’origine du conflit israélo-palestinien ravive les jamais d’actualité avec la relaxe, le 18 mai marocaine, dits chibanis, ou encore du haines communautaires,l’antisémitisme dernier, par le tribunal correctionnel de retour sur le droit de vote des étrangers refait surface ces derniers mois dans Rennes, des deux policiers mis en cause qui faisait partie intégrante du programme l’Hexagone avec l’attaque de plusieurs dans la mort des deux garçons. Selon le électoral de François Hollande, explique- synagogues notamment.Alors, pourquoi Mafed, la stratégie de l’Etat français est t-il, le texte est un peu hors sol ». Alors, l’antisémitisme ne fait l’objet d’aucune loin de chercher à punir les coupables mais à la question « quels sont les résultats évocation dans l’appel au rassemblement plutôt de fuir ses responsabilités, depuis attendus par cette manifestation ? », les samedi prochain ? « L’antisémitisme des décennies, face à la réalité des crimes signataires éprouvent des difficultés à n’est pas un racisme d’Etat car les juifs policiers. En effet, il y a trente ans déjà, répondre au vu de revendications « floues ne sont pas exposés à des discriminations les violences policières étaient déjà au », voire « inexistantes », dans l’appel structurelles et étatiques », a justifié cœur des problématiques. Tout le monde à se mobiliser samedi prochain par le clairement Louisa Youfsi. Cependant, se souvient encore des jeunes issus de collectif Mafed. « C’est un collectif de ce n’est pas pour autant que des l’immigration postcoloniale, descendus femmes venus d’horizons différents groupes militants, défendant les droits dans la rue pour l’égalité en 1983 et alors il est compliqué pour elles de se de la communauté juive, ont refusé de porteurs du slogan « Nous ne sommes pas mettre en accord sur des revendications », participer à la marche. Au contraire, du gibier à flics, nous sommes des êtres justifie Il y a, membre du groupe militant « nous avons répondu à l’appel bien que humains ! ». Juives et Juifs Révolutionnaires tout en nous ne soyons pas signataires, a affirmé espérant que cette marche annonce « le Ilyas, certes les violences policières ne Discrimination et antisémitisme début de quelque chose de puissant avec sont pas tournées vers la communauté une vraie remise au goût du jour ». Il est juive, mais ne voir que les crimes policiers Malgré un nombre de signataires « quasi vrai que, ces dernières années, le constat est une analyse que nous ne partageons historique » au regard de la mobilisation est clair : « la France est en net recul pas avec le Mafed ». en province, « le texte manque clairement comparé à la perspective révolutionnaire de revendications », a tenu à préciser des collectifs dans les années 1980 », Sébastien Pigney, Secrétaire Général de justifie-t-il. Certes, il y a une vague de flux Lucie Touzi
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