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DE LA

PLACE FINANCIERE SUISSE

Banque & Finance N° 103

LE MAGAZINE

N°103

Mai / Juin 2010

CHF 12.– / 8€

BRADY DOUGAN – CREDIT SUISSE L’art de surfer sur les vagues

ELIE COHEN – ECONOMISTE «L’autorégulation des marchés est une utopie!»

Exposition Edward Burne-Jones – Kunstmuseum Berne

HINDUJA BANQUE (SUISSE) SA La banque indienne fait sa révolution

FONDS DE PLACEMENT

C’est le printemps!



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ÉDITORIAL Rédacteur en chef: Olivier Vacherand o.vacherand@promoedition.ch

Banques, je vous aime!

Conseiller éditorial: Marian Stepczynski

L

Rédaction: Véronique Bühlmann, Mohammad Farrokh, Odile Habel, Hélène Koch, Pierre Marquis, Didier Planche, Jaona Ravaloson. Ont collaboré à ce numéro: Me Jean-Yves de Both, Jean-Gabriel Attali, Marc Barbezat, Richard Brun, Yann Cornil, Ingo Kellnar, Charles Soulignac, Jean Schneider, Alexandre de Senarclens, Jérôme Soller, Jean-Luc Spinardi. Edition: Promoédition SA Editeur délégué et Directeur de publication: Roland Ray

OLIVIER VACHERAND Rédacteur en chef

Responsable du développement: Maxime Khedoud Production: Maryse Avidor Maquette: Dominique Berthet Mise en page: Ursula Brugger Photos: François Filliettaz Relecture: Viviane Cattin Impression: Atar Roto Presse SA Site internet: www.banque-finance.ch Rédaction et administration: Banque & Finance 35, rue des Bains Case postale 5615 1211 Genève 11 Tél. +41 22 809 94 60 Fax +41 22 781 14 14 E-mail: info@banque-finance.ch Publicité: Médiapresse Pub SA 3, rue de la Vigie Case postale 1119 1001 Lausanne Tél. +41 21 321 30 77 Fax + 41 21 321 30 69 Responsable: Roye Yarden Abonnements: E-mail: abo@banque-finance.ch Ccp: 12-17931-5 1 an d’abonnement (6 numéros) CHF 60.2 ans d’abonnement (12 numéros) CHF 90.Banque & Finance paraît six fois par an et publie un numéro hors-série. © Promoédition SA, Genève, 2010

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Fait particulièrement marquant cette année, les personnes interrogées affichent une véritable défiance face à l’action politique en matière de secret bancaire.

a lecture du sondage annuel de l’Association suisse des banquiers, réalisé par l’institut M.I.S. Trend, a dû remettre un peu de baume au cœur à la communauté bancaire helvétique. Malgré deux années qui comptent parmi les plus sombres et difficiles qu’ait connu la place financière, la confiance de la population suisse envers le système bancaire conserve un niveau étonnement élevé. Après une baisse d’une douzaine de points en 2009, la situation semble s’être stabilisée cette année avec 45% de l’échantillon qui affichent une opinion positive ou très positive du secteur. Les niveaux de satisfaction explosent dès qu’il s’agit de juger sa banque principale. 87% des sondés (85% en 2009) jugent leurs relations avec leur banque principale positives ou très positives.

Un véritable plébiscite! Que ce soit en matière de solidité, de confiance, de compétence du personnel, d’innovation et de dynamisme, de transparence ou d’intérêt manifesté aux clients, tous les indicateurs affichent des niveaux jusqu’alors inégalés depuis la création de l’enquête. Même les clients des grandes banques qui ont été en première ligne dans les turbulences, notamment en ce qui concerne UBS, regardent leur établissement avec une bienveillance supérieure à celle qu’ils lui accordaient avant le déclenchement de la crise. Près de trois quarts d’entre eux se disent satisfaits. Pour autant, on note une très sensible érosion de la position d’UBS, qui draine 12% de la population suisse en tant que banque principale contre 15% l’an passé! Autre motif de satisfaction pour la communauté bancaire, l’attachement des citoyens à la protection de la sphère privée. Fidèle à la longue tradition helvétique, 89% de l’échantillon interrogé par M.I.S. Trend pense qu’il faut protéger les données financières des clients visà-vis des tiers. Malgré une petite érosion ces deux dernières années

due, sans doute, à la pression exercée par l’étranger, les menaces de sanctions ou encore les concessions annoncées par le Conseil fédéral, près des trois quarts de la population (73%) estiment toujours que le secret bancaire doit être conservé contre 21% qui attendent sa suppression. Désaveux de l’action politique Sur ce volet du secret bancaire, nos autorités seraient bien inspirées de prendre la température de l’opinion du pays. 70% des citoyens suisses sont d’avis qu’on ne devrait pas céder encore davantage à la pression européenne sur le secret bancaire, et ils s’expriment clairement contre l’échange automatique d’informations (70%) avec les autorités fiscales étrangères. Seul un quart de l’échantillon est prêt à cette concession. Fait particulièrement marquant cette année, les personnes interrogées affichent une véritable défiance face à l’action politique en la matière. Elles ne sont que 40% à considérer que les autorités en font assez pour la protection du secret bancaire contre encore 64% l’an passé. Les rédacteurs de l’étude précisent que «c’est la première fois depuis le début de ces enquêtes qu’une courte majorité s’exprime insatisfaite de l’engagement politique en faveur du secret bancaire». Face à la forte pression internationale et aux insuffisances des responsables politiques, les sondés semblent afficher une certaine résignation: 57% d’entre eux (contre 35% en 2009 et 21% en 2008) pensent qu’il est improbable que le secret bancaire existe encore sous sa forme actuelle dans cinq ans. Pour autant, les sondés ne sont pas particulièrement inquiets quant à l’évolution de la compétitivité de la place financière. En la matière, la moitié d’entre eux s’attend à un statu quo pour les cinq prochaines années, un quart anticipe une amélioration de la compétitivité et seulement un sur cinq craint une détérioration de la position compétitive de la place financière. Si seulement cet optimisme pouvait suffire! ■

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SOMMAIRE ÉDITORIAL 1

Banques, je vous aime! par Olivier Vacherand, rédacteur en chef

NEWS 5

L’actualité de la place financière

MANAGER 8 P. 8

MANAGER A. Classen – Morgan Stanley Rayonner à l’international depuis la Suisse

Alexander Classen – Morgan Stanley Rayonner à l’international depuis la Suisse

58 Sciences affectives Les décisions d’investissement sous l’influence des émotions 60 Emplois bancaires Les gagnants et les perdants de la crise 62 Gestion de la performance Investir dans l’humain, une option gagnante! 64 Veille stratégique et réglementaire Un nouveau défi pour les banques

INTERVIEW 12 Elie Cohen «L’autorégulation des marchés est une utopie!»

DOSSIER FONDS DE PLACEMENT 16 Le palmarès Morningstar Repères du marché de la gestion collective 18 Nouveaux fonds C’est le printemps! 28 Fonds en actions internationales La croissance par la qualité

SOLUTIONS BANCAIRES 66 Financement du négoce international Quels outils informatiques pour gérer les risques? 68 News L’actualité des solutions bancaires en bref

HISTOIRE 70 Crise de 1973 Une attaque frontale contre la Suisse

LIVRES P. 35

FONDS DE PLACEMENT Ch. SOULIGNAC – Fondinvest Capital Private Equity: quelle place pour les fonds de fonds?

30 Caceis Fastnet (Suisse) L’industrialisation ne peut plus être un tabou

72 Bibliographie financière

32 Fidelity Suisse Parés pour l’inflation?

88 «Délocaliser» les bonus? par Marian Stepczynski

35 Private Equity Quelle place pour les fonds de fonds?

P. 62

ENJEUX F. Revillard – AAA + COACHING Gestion de la performance: investir dans l’humain, une option gagnante!

74 VOYAGE

41 Alexandre Finance Les détenteurs de parts ont des droits

76 VOYAGE

GESTION DE FORTUNE

78 PEINTURE

42 Matières premières Investir autrement! 44 Association des stratégistes d’investissement de Genève Un repère pour votre allocation d’actifs

46 Risques juridiques transfrontières La FINMA monte au créneau 50 Devoir d’information Les obligations de la banque sont vastes et multiples

ENJEUX

SOLUTIONS BANCAIRES Négoce international Quels outils informatiques pour gérer les risques?

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52 Stratégie Credit Suisse: l’art de surfer sur les vagues 56 Hinduja Banque (Suisse) SA La banque indienne fait sa révolution

FONDS DE PLACEMENT C’est le printemps! Après une période de flottement au plus fort de la crise, l’activité de lancement de nouveaux fonds est repartie de plus belle. Sur le segment des ETFs, la concurrence s’intensifie et les promoteurs se ruent sur les matières premières ou tout autre microsegment susceptible de devenir à la mode. Les investisseurs continuent d’espérer davantage de transparence et les sélectionneurs de fonds habillent leurs portefeuilles en «boutique».

ART DE VIVRE

38 Gamma Finance De la liquidité pour les hedge funds

JURIDIQUE

P. 66

OPINION

À LA UNE

Maldives Beach House, entre luxe et décontraction. The Residence Etre ou bien être? La réponse est tunisienne Le paradis retrouvé de Burne-Jones

80 GOLF Golf synthétique pour sensations authentiques

82 AUTOMOBILE Saab 9-3X, BMW Série 5 et Honda CR-V Tout-chemin selon Saab, nouvelle Série 5 et CR-V restylé.

84 TENTATIONS Les nouveautés

86 LIVRES

L’art dans B&F – Ce numéro de Banque & Finance présente l’exposition Edward BurneJones, actuellement au Kunstmuseum de Berne, et ce jusqu’au 25 juillet. En couverture Edward Burne-Jones, Persée et les nymphes, 1877–1898, huile sur toile, 153,5 x 127 cm, Staatsgalerie Stuttgart © Photo: Staatsgalerie Stuttgart

L’information financière et bancaire sur www.banque-finance.ch avec B3B Le site www.b3b.ch, partenaire de Banque & Finance, vous propose un accès simple et rapide à l’information bancaire qu’il vous faut. B3B propose des flux d’information continus, personnalisables en fonction de vos centres d’intérêt, et des newsletters thématiques.

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NEWS Reyl poursuit ses recrutements Le groupe Reyl & Cie est dans une phase de développement intense avec une multiplication des embauches à haut niveau. Dernier arrivé en date, Nicolas Duchêne a pris la direction générale de Reyl Private Office, la filiale du groupe dédiée à ses clients les plus fortunés. Ce spécialiste des questions juridiques, fiscales et financières internationales a vécu et travaillé à Paris, Luxembourg, Genève, Monaco, Hongkong et Singapour pour Arthur Andersen, la banque Ferrier Lullin et, plus récemment, pour BNP Paribas Private Banking pour qui il a dirigé les activités de conseil fiscal et de planification patrimoniale internationale en Asie de 2007 à 2009. Quelque temps avant l’arrivée de Nicolas Duchêne, Reyl s’était offert les services de Jean-Marie Formigé en tant que gestionnaire senior pour la gestion onshore suisse. Jean-Marie Formigé a commencé sa carrière dans le commerce et le trading de matières premières chez Sucafina SA, puis Addax et Oryx Group. Dès 2004, il a poursuivi son parcours dans la banque privée en rejoignant LODH puis Credit Suisse à partir de 2006.

Sarasin se renforce à Hongkong La Banque Sarasin & Cie SA vient d’inaugurer officiellement sa succursale de Hongkong. Il s’agit de la première succursale hors de Suisse du groupe Sarasin et son troisième centre de comptabilisation international. L’établissement est placé sous la direction d’Enid Yip, CEO pour l’Asie. La succursale de Hongkong propose toute la palette des prestations bancaires et offre aux clients du monde entier la possibilité de comptabiliser désormais leurs actifs à Hongkong plutôt qu’en Suisse. Les bureaux de Hongkong ont été ouverts par Rabobank en 1995 et faisaient partie de son réseau international d’unités de private banking. La représentation de Hongkong a été rebaptisée Sarasin Rabo Investment Management Ltd. à l’occasion de la conclusion d’une alliance stratégique entre Rabobank et la Banque Sarasin. Le groupe Sarasin a considérablement développé sa présence en Asie depuis 2002, les effectifs de Hongkong ayant doublé à la fin 2009. Au cours de l’année dernière, en Asie et au Moyen-Orient, le volume des actifs sous gestion a progressé de 60%, tandis que les apports nets de fonds ont bondi de 70%.

Banque Arner SA ouvre à Genève Banque Arner SA étend sa présence en Suisse avec l’ouverture d’une structure propre à Genève, au 29, quai des Bergues. Cette nouvelle structure s’inscrit dans la stratégie de l’établissement qui vise, outre l’extension territoriale, à offrir de nouveaux services d’advisory soit aux particuliers, soit aux investisseurs institutionnels, et de renforcer les desks spécialisés par zone géographique et typologie de client. Le développement du bureau genevois sera focalisé dans le développement des clients suisses et internationaux, en particulier ceux issus de zones telles que le MoyenOrient ou encore l’Afrique du Nord. Banque Arner, est la société chef de file du groupe financier suisse Arner constitué en 1984, spécialisé dans les services de banque et d’asset management pour les clients privés particuliers, familles et investisseurs institutionnels. Le groupe, qui a son siège principal à Lugano, est présent également à Milan, Nassau, Dubai, São Paulo et, désormais, Genève. Au 31 décembre 2009, le groupe Arner annonçait une masse administrée de 3,4 milliards de francs suisses et employait 230 collaborateurs.

EN BREF HSBC Private Bank (Suisse) SA va ouvrir une nouvelle succursale à Gstaad. Celle-ci sera opérationnelle d’ici mi-2010 et comptera rapidement huit collaborateurs. Cette nouvelle structure confirme la volonté de la banque de se renforcer dans le business du private banking onshore. EFG Capital, la principale filiale d’EFG International en charge de la gestion de fortune aux Etats-Unis, ouvre un bureau à Key Biscayne, en Floride. La nouvelle équipe collaborera étroitement avec le bureau principal d’EFG Capital à Miami. Le bureau de Key Biscayne sera géré par Mario E. Fernández. EFG poursuit son développement rapide aux Etats-Unis. Le groupe compte désormais 145 salariés dans le pays, c’est 65% de plus qu’en 2007. Le groupe Stonehage, qui se présente comme le leader international dans le

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conseil en gestion de fortune pour les familles high net worth, ouvre un bureau à Genève afin de compléter l’offre actuelle de Stonehage Investment Partners à Londres. Craig Anderson, qui rejoint le groupe en provenance de JP Morgan, dirigera cette nouvelle structure dédiée aux portefeuilles de plus de 10 millions de dollars. En Suisse, Stonehage était déjà présent à Zurich et Neuchâtel.

basé aux Emirats arabes unis. Auparavant, Christopher Urwick était responsable du département Moyen-Orient au sein de la Lloyd’s Bank. La banque a également créé un département «clientèle russe» en recrutant huit conseillers répartis entre Zurich et Genève. Ces équipes sont placées sous la responsabilité de Jean-Gabriel Arqueros, directeur de la «Ligne client russe», basé à Genève.

Société Générale Private Banking ouvre un département Moyen-Orient à Genève, en recrutant cinq conseillers privés exclusivement dédiés à la clientèle fortunée de cette zone. Composée de Christopher Urwick, nommé directeur du département, et des conseillers privés Claude Tendon, Amr Barakat, Sandra Bavaud et Nathalie Wyss, cette équipe est placée sous la responsabilité d’Eric Lorentz, directeur de la clientèle Moyen-Orient et

East Capital, société de gestion indépendante spécialisée sur les marchés financiers d’Europe de l’Est, vient d’acquérir Asia Growth Investors (AGI), une société de gestion suédoise spécialisée sur la Chine, avec 240 millions d’euros d’encours sous gestion en Europe du Nord. AGI a été créée en 2004 par le gérant de portefeuille Gustav Rhenman.

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L’ACTUALITÉ DE LA PLACE FINANCIÈRE CARRIÈRES Omar Shokur a été nommé responsable du département des intermédiaires financiers au Crédit Agricole Suisse Private Bank. Il remplace ainsi Thomas Wittlin, qui élargit ses responsabiOmar Shokur lités au sein de la banque. Ce dernier supervisera dorénavant l’ensemble des relations avec les intermédiaires financiers en Suisse, ainsi que l’activité de la filiale de Crédit Agricole Suisse à Nassau, Thomas Wittlin où il a été nommé membre du Conseil d’administration. Omar Shokur a commencé sa carrière au sein de Crédit Agricole Suisse en 2001. Il était, depuis 2009, responsable adjoint du département des intermédiaires financiers. Lukas Gähwiler est nommé CEO d’UBS Suisse et co-CEO de Wealth Management & Swiss Bank. Il fait, en outre, son entrée au directoire du groupe. Il succède à Franco Morra. Auparavant, Lukas Gähwiler était en poste au Credit Suisse, où il était dernièrement Chief Credit Officer du secteur du private banking, responsable des activités de crédit à l’échelle mondiale de la division. Walter P. Arnold a été nommé responsable du private banking à Zurich auprès d’EFG Bank, filiale d’EFG International en Suisse. Auparavant, il a travaillé chez Credit Suisse, puis à UBS depuis 2004. Walter P. Arnold a occupé plusieurs fonctions de dirigeant au sein d’UBS Wealth Management, secteur dont il a plus récemment assumé la responsabilité en Suisse.

Philippe Gougenheim vient d’être recruté par Unigestion au poste de Managing Director, Head of Hedge Funds. Il était auparavant gérant de portefeuille senior chez Man Investments, où il a également occupé les postes de président du comité d’investissement et de responsable de la recherche stratégique et de la gestion. Il dirigera le développement de l’équipe funds of hedge funds, qui compte 37 professionnels basés à son siège de Genève et dans ses bureaux de Londres, New York, Paris, Guernesey et Singapour. Jean-Pierre Roth, l’exprésident de la direction générale de la Banque nationale suisse, n’aura pas goûté bien longtemps sa retraite. Il vient d’être nommé président du Conseil d’administration de la Banque Cantonale de Genève en remplacement de Michel Mattacchini. Cécile Eberhard Baur vient d’être recrutée comme responsable de la Suisse alémanique par SPFS, société spécialisée dans le financement du secteur public suisse. La nouvelle directrice adjointe sera principalement basée à Zurich, dans les locaux de la BCGE. SPFS est la filiale du groupe BCGE (actionnaire à hauteur de 50%) en Suisse et le groupe français des Caisses d’Epargne, représenté par le Crédit Foncier de France (40%) et la Caisse d’Epargne Rhône Alpes (10%). Cécile Eberhard Baur est, depuis plus de dix ans, CEO de Finarbit, une entreprise commune des banques cantonales suisses.

Michael Hobmeier prendra la tête de Valiant Holding SA le 20 mai prochain. Le Conseil d’administration l’a désigné comme successeur de Kurt Streit, qui a dirigé Valiant Holding de 1997 à 2009. Rolf Beyeler sera le CEO adjoint. L’équipe de direction de Valiant Holding reste inchangée. Elle est composée de Michael Hobmeier, Rolf Beyeler, Martin Gafner et Eduard Zgraggen. Michael Hobmeier est membre de la direction du groupe depuis 2003 et CEO de la Banque Valiant SA depuis 2005. Christian Boissonnard rejoint Invesco Asset Management (Schweiz) AG en qualité de responsable commercial senior. Basé à Genève, il est en charge du développement commercial en Suisse romande. Avant de rejoindre Invesco, il occupait, depuis 2006, le poste de responsable du développement commercial des investissements alternatifs au sein de la Banque Heritage. Daniel Jaedig a été nommé nouveau président de la Swiss CFA Society, l’association professionnelle des analystes financiers, lors de l’assemblée annuelle 2010 à Zurich. Il succède à Giuseppe Ballocchi, CFA. Daniel Jaedig travaille comme gestionnaire de portefeuille à la M.M. Warburg Banque (Suisse) SA à Zurich. Il est actif depuis 2005 au sein de la Swiss CFA Society.

L’information financière et bancaire sur www.banque-finance.ch avec B3B Le site www.b3b.ch, partenaire de Banque & Finance, vous propose un accès simple et rapide à l’information bancaire qu’il vous faut. B3B propose des flux d’information continus, personnalisables en fonction de vos centres d’intérêt, et des newsletters thématiques.

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MANAGER ALEXANDER CLASSEN – MORGAN STANLEY

Rayonner à l’international depuis la Suisse Alexander Classen, responsable du private wealth management de Morgan Stanley pour l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique du Sud, ne cache pas son ambition: accroître le nombre de clients de la gestion de fortune privée et gagner des parts de marché dans les pays émergents. Pour sa part, la banque Morgan Stanley SA en Suisse, avec ses filiales à Genève et Zurich, a reçu pour mission de drainer une nouvelle clientèle locale et internationale. Didier PLANCHE

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ême si la banque d’affaires américaine Morgan Stanley a essuyé des pertes importantes, aujourd’hui effacées, à la suite de la débâcle du système financier mondial en 2008, son activité de private wealth management (PWM) n’a pas subi une érosion massive de la clientèle. Quelques retraits ont certes été effectués au cours du quatrième trimestre 2008 et des premiers mois de 2009, puis ce mouvement a cessé et s’est même inversé, dès que le groupe bancaire a confirmé avoir une situation financière saine et une structure de capital robuste. «Dès l’été 2009, d’anciens clients restés dans l’expectative ont rapatrié leurs fonds dans nos établissements et de nombreux nouveaux comptes ont été ouverts. Il faut dire qu’entre-temps, Morgan Stanley est devenu le premier gérant d’actifs au monde avec 1,6 trillion de dollars, grâce à sa participation majoritaire à hauteur de 51% dans Smith Barney, qui appartenait à Citigroup. Ce joint-venture avec l’autre groupe bancaire américain de référence favorise l’avancée stratégique de Morgan Stanley dans l’activité de courtage et, par la même occasion, redonne entière confiance à la clientèle existante et potentielle de la gestion de fortune privée. Sur sa lancée, Morgan Stanley a encore conclu un partenariat avec l’établissement japonais Mitsubishi UFJ», argumente le Genevois Alexander Classen, depuis 2006

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«Morgan Stanley est devenu le premier gérant d’actifs au monde avec 1,6 trillion de dollars, grâce à sa participation majoritaire dans Smith Barney qui appartenait à Citigroup» ALEXANDER CLASSEN – MORGAN STANLEY

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ALEXANDER CLASSEN Ses deux plus proches collaborateurs CEO de Morgan Stanley AG en Suisse depuis mai 2007 et Chairman du Swiss Management Committee, François Andriot dirige ses deux filiales à Genève à Zurich. Il est le responsable de la réorganisation de la plateforme helvétique du groupe américain. En 1990, François Andriot a commencé sa carrière bancaire à Londres chez Goldman Sachs, à la division fixed income currencies & commodities. En 2005, il a été nommé CEO de la filiale de François Andriot Genève du même établissement. C’est chez Goldman Sachs que François Andriot a rencontré et collaboré avec Alexander Classen, qui l’a ensuite invité à le rejoindre pour relever un nouveau défi professionnel.

responsable du private wealth management de Morgan Stanley pour l’Europe, le MoyenOrient et l’Afrique du Sud. Cette assise retrouvée et confortée du groupe bancaire américain a permis à Morgan Stanley PWM de repartir à l’offensive de la clientèle privée européenne, y compris suisse, et internationale originaire tant d’Amérique latine que d’Asie, ainsi que de se positionner durablement sur des marchés en pleine effervescence, tels les pays émergents où de nouvelles fortunes se créent au quotidien.

Dirigeants d’entreprises et family offices Morgan Stanley PWM délivre ses ressources d’une manière holistique, afin d’apporter des conseils en investissement pointus, sophistiqués et personnalisés à des clients fortunés (en général, pas de comptes en dessous de 10 millions de francs). «Dans cette optique, chaque gestionnaire se concentre sur vingt à trente clients au maximum. Il est considéré comme un CFO virtuel, censé offrir une réelle valeur ajoutée à sa clientèle, tout en ayant une vision d’ensemble des caractéristiques de ses différents segments. Comme il s’agit souvent de dirigeants d’entreprises et de family offices, dont les exigences se situent au-delà d’une gestion classique de portefeuilles, les gestionnaires travaillent en osmose avec les autres activités du groupe, comme le capital market, le corporate finance, l’investment banking, etc., afin de répondre parfaitement à leurs besoins et attentes», commente Alexander Classen, qui était précédemment responsable des opéra-

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Dr Patrick Fuerer est COO de Morgan Stanley AG à Zurich depuis septembre 2009 et membre du Swiss Management Committee. Il maîtrise les rouages opérationnels et de régulation d’une banque suisse, tout en possédant une expérience éprouvée de l’international. Auparavant, Patrick Fuerer a travaillé pour plusieurs établissements bancaires, dont l’UBS à Zurich et à Londres (Project Manager, Project Controller, Head Controlling, Chief of Staff Investment Banking), la Société Générale Bank & Trust à Patrick Fuerer Zurich (CFO, Head of Accounting and Controlling), la WestLB AG à Düsseldorf et à Londres (CEO Equities, COO, CFO) et le groupe Raiffeisen à St-Gall (COO, membre du directoire).

tions de Pictet & Cie en Asie, puis directeur général de Goldman Sachs en Suisse, dès 2001. Morgan Stanley PWM applique une gestion discrétionnaire en architecture ouverte pour les fonds de placement et les produits alternatifs, notamment. Soumis aux mêmes critères de sélection que ceux de tiers, les produits internes ne représentent d’ailleurs que 10 à 15% des investissements placés dans les portefeuilles. «Notre processus d’investissement s’effectue à travers tous les comités de sélection d’actifs du groupe qui sont situés aux Etats-Unis, en Asie, en GrandeBretagne et, bien sûr, en Suisse. Il se distingue toujours par une coloration locale selon le lieu d’ouverture du compte, y compris pour l’activité d’advisory. De plus, Morgan Stanley collabore étroitement avec les départements de recherche d’autres établissements bancaires, de même qu’avec leurs plateformes d’exécution selon leurs spécificités et compétitivité», précise Alexander Classen, indiquant que Morgan Stanley suit les récentes directives des instances de régulation en matière de bonus, donc les recommandations du G20. Jusqu’à 60% des bonus sont ainsi versés en actions sur une période de trois ans. Cette politique de rémunération permet d’optimiser l’alignement des intérêts des collaborateurs avec ceux de Morgan Stanley.

Une carte à jouer pour la clientèle suisse

Zurich, étoffe ses effectifs de banquiers privés, en recrutant des spécialistes des marchés, en particulier des pays émergents. L’objectif vise clairement à faire rayonner la plateforme bancaire helvétique à l’international par le biais de ses activités de gestion de fortune, mais aussi de banque d’affaires et de gestion institutionnelle, toutes deux menées par les équipes de Zurich. «Il s’agit également de drainer une nouvelle clientèle suisse, dont le potentiel s’avère important en raison de sa déception des prestations offertes par les banques locales. Morgan Stanley AG en Suisse a donc une carte à jouer pour ces clients onshore, surtout qu’ils semblent apprécier le mixte d’une banque d’affaires américaine qui conseille sur toutes les classes d’actifs, dans le respect de la stricte confidentialité, et d’un dépôt en Suisse. Les family offices s’établissant en Suisse sont également très intéressés par nos prestations», estime Alexander Classen, qui est basé à Londres mais visite régulièrement les filiales étrangères de Morgan Stanley PWM. «Je me rends aussi fréquemment à Genève et à Zurich pour suivre la dynamique des affaires de nos équipes locales. Il m’arrive de séjourner plus longtemps dans la Cité de Calvin, où je retrouve mes racines et mes attaches familiales», précise-t-il. Pour Alexander Classen, l’art du management passe par l’exemple appliqué à soi-même, l’écoute, la disponibilité et le partage d’une vision à long terme. ■ D.P.

Dotée du statut de banque, Morgan Stanley AG en Suisse, qui emploie déjà 140 collaborateurs, avec ses deux filiales à Genève et

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INTERVIEW ELIE COHEN

«L’autorégulation des marchés est une utopie!» A la fois provoquée par des déséquilibres globaux, des prises de risques incontrôlées et une carence en matière de régulation, la crise financière de 2008 n’a pas fini de faire parler d’elle, surtout que ses enseignements n’ont pas été tirés. Les acteurs financiers semblent repartis dans les mêmes erreurs et les mesures préventives et régulatrices apparaissent comme insuffisantes. Un constat sans appel de l’économiste Elie Cohen1. Propos recueillis par Didier PLANCHE

Banque & Finance: Avec un certain recul, avez-vous identifié les causes véritables de la crise financière d’automne 2008, au-delà du florilège d’analyses parues? ELIE COHEN: A la base, il s’agissait clairement d’une crise de l’économie réelle provoquée par des déséquilibres globaux accumulés au cours des vingt dernières années de mondialisation. Comme, d’un côté, il y avait des pays systématiquement excédentaires dans leur balance courante en raison de leur capacité exportatrice et de leurs faibles coûts, ainsi que de leur consommation intérieure limitée, et, de l’autre côté, des Etats éternellement déficitaires à cause de leur consommation exagérée et de leur endettement trop élevé, ces déséquilibres globaux devenaient ingérables. Face à une telle situation déstabilisante, les autorités des pays déficitaires cherchent habituellement à pallier les déséquilibres et même à les résorber en agissant sur l’activité économique pour la refroidir, en subissant des hausses de taux d’intérêt à long terme et une dévaluation de facto de leur monnaie. B&F: Mais ce n’est pas ce qui s’est passé… E.C.: Malheureusement, cette orientation n’a effectivement pas prévalu. La Chine a tout fait pour éviter la réévaluation de sa monnaie et l’abondance d’épargne disponible sur certains marchés globalisés a

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empêché la hausse des taux d’intérêt à long terme. Comme les mécanismes classiques de l’économie n’ont pas fonctionné, les déséquilibres globaux ont ainsi persisté. L’industrie financière moderne est alors venue s’intercaler entre les pays excédentaires et déficitaires, en recyclant les surplus d’épargne des premiers dans des investissements à risques des seconds, alors qu’ils devaient être investis dans des placements sûrs. La fameuse machine à titrisation s’est donc mise en marche et a

«Cette crise est, au départ, une crise de l’économie réelle mondialisée, transformée en crise financière majeure à cause des techniques de couverture du risque, et aggravée en raison du laxisme des organes de régulation» privilégié des produits dérivés pour couvrir les risques, en les faisant passer pour des innovations financières. Les CDS ont ainsi été utilisés pour couvrir les risques de défaut, alors qu’ils représentaient une prise de risque extrême sans couverture même basique ni régulation. L’industrie financière s’est donc développée en générant un marché du risque instable, puisqu’il permettait surtout à des preneurs de risques

mal couverts, comme les institutions financières occidentales, de convertir les excédents d’épargne des pays émergents en investissements risqués aux Etats-Unis, qui voulaient pourtant les placer sans risque. Cette crise de 2008 est donc, au départ, une crise de l’économie réelle mondialisée, transformée en crise financière majeure à cause des techniques de couverture du risque développées par les acteurs de la finance de marché, et aggravée en raison du laxisme des organes de régulation des marchés qui ont démontré leurs failles. B&F: Les banques centrales ont-elles commis des erreurs? E.C.: Comme leur objectif majeur était la lutte contre l’inflation et qu’en plus, aux Etats-Unis, la Fed avait la phobie de la récession et du chômage, les banques centrales injectaient massivement de la liquidité lorsque les indicateurs d’activité passaient au rouge, afin de stimuler l’économie. Mais cette liquidité a créé des bulles spéculatives d’actifs spécifiques, comme les obligations, l’immobilier, etc. De surcroît, comme l’exmaestro des banques centrales, Alan Greenspan, a mené une politique monétaire permissive et de régulation des marchés trop libérale, avec l’appui total des autorités américaines, il a accéléré l’émergence de ces bulles spéculatives. Le responsable de la Fed les a ensuite laissées grandir jusqu’à ce qu’elles envahissent l’espace économique américain, avec le risque effec1 Elie Cohen est docteur en gestion et en sciences politiques, économiste, directeur de recherche au CNRS, professeur à l’Institut d’études politiques de Paris.

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ELIE COHEN tif que leur éclatement provoque une crise financière ingérable par les banques centrales. Le paradoxe Greenspan est simple. Il luttait contre une inflation mesurée par l’indice des prix qui avait disparu et s’avouait impuissant à combattre l’inflation réelle, celle des actifs, qu’il nourrissait même par sa politique de liquidités abondantes. Il a ainsi été condamné à purger les excès de sa politique, dès que les bulles d’actifs ont éclaté. B&F: Pourquoi les banques centrales ont-elles volé aussi rapidement au secours des établissements bancaires? E.C.: Les banques centrales sont intervenues avec leurs techniques traditionnelles, lors de la phase la plus aiguë de la crise financière. Puis, dès la faillite de Lehman Brothers, elles se sont inquiétées de la santé des banques et ont recouru à des techniques quantitatives d’injection de liquidités, qui ont permis de sauver le système avec l’allongement des maturités, la monétisation d’actifs, l’élargissement des critères d’éligibilité, etc. Ben Bernanke, le nouveau responsable de la Fed, qui a étudié les mécanismes de la crise de 1929, a donc su éviter sa répétition. Les banques ont ainsi accumulé d’énormes liquidités, puis les ont utilisées non pas pour allouer des crédits aux entreprises afin de dynamiser l’économie, mais, dans un premier temps, pour les déposer dans les coffres des banques centrales, avant de recommencer à spéculer sur les marchés financiers. En 2009, elles ont ainsi reconstitué leurs marges confortables en prêtant de l’argent à des taux élevés, hors de proportion avec la hausse du coût du risque, et ont réalisé des bénéfices élevés sur les marchés financiers.

«Aucune leçon n’a été tirée, car les déséquilibres globaux n’ont absolument pas été résorbés»

Elles ont ensuite remboursé leurs prêts aux Etats et annoncé un début de retour à la normalité… en matière de dividendes et de bonus. Ce comportement a engendré des sentiments de révolte à l’égard des banquiers, que les hommes politiques tentent

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«En menant une politique monétaire trop permissive et une régulation des marchés trop libérale, Alan Greenspan a accéléré l’émergence des bulles spéculatives» ELIE COHEN

de calmer en inventant de nouvelles réglementations et de nouveaux impôts. B&F: Certaines banques ont-elles encore des actifs toxiques dans leur bilan? E.C.: Absolument. Dans le seul cas de la France, la Société Générale ou Natixis ont provisionné leurs portefeuilles d’actifs toxiques pour des dizaines de milliards d’euros. D’une part, elles ont participé aux mécanismes de titrisation et ont conservé, malgré elles, des actifs toxiques impossibles à céder. D’autre part, elles étaient fortement engagées dans des opérations de LBO aux sorties désormais irréalisables, à cause de leviers d’endettement devenus insupportables pour les entreprises concernées et de l’assèchement du marché des IPO. En outre, le provisionnement des actifs toxiques pour lisser les résultats des banques dans la durée nécessite l’accord des autorités de régulation, mais ces dernières rechignent à leur octroyer cette autorisation en raison de

leur attitude arrogante en matière de dividendes et de bonus. La question de l’existence d’actifs toxiques dans les bilans ressurgira fréquemment, surtout que le Comité de Bâle travaille sur de nouvelles règles prudentielles. L’enjeu de la nouvelle régulation financière risque ainsi d’avoir des effets majeurs sur les structures des bilans comme sur la qualité et les niveaux des fonds propres de nombreux établissements bancaires, car il s’agit de mieux sécuriser leur ratio d’endettement.

Aucune leçon retenue B&F: Les mesures prises en matière de régulation financière sont donc pertinentes? E.C.: Pendant la crise financière, la volonté de régulation financière était manifeste et s’est traduite par les importants catalogues de réformes du G8 et du G20, à réaliser d’urgence. Des débats politiques ont

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INTERVIEW ensuite eu lieu avec une fixation sur les paradis fiscaux, les agences de notation et les bonus des traders. Quant aux régulateurs, ils ont disserté en parallèle sur de nouvelles normes prudentielles, l’encadrement des innovations financières et la transparence du contenu des opérations financières. Puis l’heure est venue du travail législatif, notamment aux Etats Unis. Mais la technicité des débats, la pression des

«Nous avons devant nous la perspective d’une crise de la dette souveraine»

lobbies et le caractère contradictoire des options prises par les deux chambres du Congrès ont retardé le travail législatif. Lorsqu’ensuite les autorités de régulation et le gouvernement se sont rendu compte de la poursuite de la politique irresponsable des banques, la tonalité de la régulation financière a brusquement changé pour proposer des mesures radicales de réformes, telles des taxations sur les transactions financières et sur les banques, la séparation entre les activités de banque d’affaires et de dépôt, l’interdiction de pratiquer le trading pour compte propre afin de limiter les prises de risques financiers, etc. L’avenir nous dira ce qui restera des projets aujourd’hui évoqués. Dans leur forme actuelle, nombre de propositions seront férocement combattues au nom de la croissance à retrouver, du financement de l’activité à assurer et de la concurrence des places financières. B&F: Les enseignements de la crise ont-ils été tirés? E.C.: Non, aucune leçon n’a été apprise, car les déséquilibres globaux, dont j’ai parlé précédemment, n’ont absolument pas été résorbés. Les déséquilibres commerciaux et les excédents de réserves de la Chine existent toujours, de même que les déficits des Etats-Unis, ces derniers ayant de plus accru leur endettement. En outre, il n’y a eu ni flottement ni appréciation du renminbi et aucune intervention sur les taux d’intérêt longs. Les mêmes causes pourraient donc produire les mêmes effets. B&F: La réforme financière opérée a-t-elle été suffisante?

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ELIE COHEN E.C.: Elle n’a pas encore vu le jour. De plus, les banques recommencent à spéculer, comme je l’ai aussi précisé auparavant, et de nouvelles catégories d’actifs spéculatifs, donc à hauts risques, servent leur dessein. Les Etats-Unis vont instaurer une nouvelle loi de régulation financière alors que l’Europe connaît une situation dramatique, car aucun mécanisme intégré de prévention du risque systémique n’a été mis en place. L’Europe, qui aurait pu montrer l’exemple avec sa longue expérience de l’élaboration multilatérale de normes, a accouché d’un système de supervision qui laisse le dernier mot à chaque pays pour des raisons de souveraineté fiscale.

d’une moindre ampleur que celle de 2008, car certains enseignements de la crise de 1929 ont heureusement été retenus. La bonne nouvelle, c’est qu’en effet, 2008 n’a pas été une réédition de la crise de 1929, car la leçon a été retenue. Il fallait éviter à tout prix la cascade des faillites bancaires et l’effondrement de l’économie ainsi que de sombrer dans le protectionnisme. Il n’empêche que la trajectoire économique mondiale reste très chaotique avec des risques réels de brusques tensions ainsi que d’emballements spéculatifs et dépressifs.

B&F: Autrement dit, les risques d’une nouvelle crise financière existent réellement? E.C.: Oui, nous avons devant nous la perspective d’une crise de la dette souveraine. Ces risques proviennent des déficits publics qui se traduisent par l’aggravation des dettes publiques, aboutissant à des crises de dette

B&F: Dans ce contexte, quelle est la question la plus urgente à résoudre? E.C.: Durant ces vingt dernières années, la logique de la libéralisation, de la déréglementation, des privatisations et des innovations financières semblait bien fonctionner, car elle était un vecteur de croissance pour l’économie réelle avec une sphère financière qui semblait capable de s’autoréguler. Malheureusement, cette hypothèse d’autorégulation s’est révélée erronée et la régulation publique est toujours prise de vitesse par les innovations financières. La récente crise financière a encore démontré ce phénomène. Il s’agit donc de savoir si des mécanismes de régulation, qui préviennent les excès, les risques et les crises, seront inventés et mis en place. A défaut, il faudra réduire l’activité financière, interdire certaines innovations et séparer les activités selon les spécialisations. Mais personne ne peut dire aujourd’hui si en bridant l’industrie financière, l’économie en pâtira ou non. C’est la vraie question à se poser, à savoir quelle est la bonne combinaison entre l’innovation financière et la régulation. ■ D.P.

«Une prochaine crise financière se révèle presque inéluctable, mais elle devrait être d’une moindre ampleur que celle de 2008» souveraine, auxquelles se greffent des déséquilibres globaux et les nouveaux comportements à risque de la finance. Les risques de défaut de l’Irlande, de l’Islande, actuellement de la Grèce et demain du Portugal, voire de l’Espagne, en forment la parfaite illustration. Une prochaine crise financière se révèle presque inéluctable, mais elle devrait être

Interdire les innovations financières

Trouver la taille optimale d’un système bancaire Interrogé sur le système bancaire suisse, Elie Cohen considère qu’il est surdimensionné par rapport à la capacité économique du pays, puisque le total des bilans des banques s’élève au-dessus du PIB du pays. «Il s’agit donc de s’interroger sur la taille optimale d’un système bancaire par rapport à celle d’un pays. Cette question d’actualité va de pair avec celle du niveau supportable de création de produits à risques par l’industrie financière d’un pays», observe-t-il. Elie Cohen remarque également que le système bancaire suisse, largement ouvert sur le monde, a pleinement bénéficié de la globalisation financière. «Mais, à la suite de la crise de 2008, un mouvement inverse de déglobalisation pourrait prendre le pas, c’est-à-dire le démantèlement de certaines institutions financières et une moindre ouverture à l’extérieur. Quant au secret bancaire suisse, il souffre des mesures prises par les Etats européens pour endiguer la fraude fiscale de leurs citoyens. La crise ayant fragilisé leurs finances publiques, ils sont contraints d’augmenter leurs recettes fiscales par tous les moyens», relève-t-il. ■

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FONDS DE PLACEMENT REPÈRES DU MARCHÉ DE LA GESTION COLLECTIVE Palmarès sur 1 an des catégories de fonds avec au moins 5 fonds Moyennes des catégories MORNINGSTAR

Perf. en % sur 1 an

Perf. en % annualisée sur 3 ans

Volatilité annualisée sur 3 ans

Perf. en % annualisée sur 5 ans

MEILLEURES PERFORMANCES DES CATÉGORIES MORNINGSTAR - FONDS ACTIONS & MIXTES Actions Russie Actions Turquie Actions Israel Petites Cap. Actions Europe Emergente Actions Inde Actions Brésil Actions Suède Petites et Moyennes Cap. Actions Asie-Pacifique Autre Actions Israel Moyennes et Gdes Cap. Actions Pologne

131.88 122.24 107.13 99.98 95.24 95.12 94.46 92.50 89.79 86.61

-11.18 -1.98 -2.88 -12.41 2.54 6.76 -7.62 2.23 1.80 -17.06

42.52 48.43 35.27 36.34 38.50 38.97 30.49 29.83 29.17 31.68

13.69 10.48 7.91 6.98 16.27 20.16 7.99 12.08 9.87 5.03

MOINS BONNES PERFORMANCES DES CATÉGORIES MORNINGSTAR - FONDS ACTIONS & MIXTES Mixtes Dollar Taiwan Prudent Mixtes Euro Modéré Mixtes Dollar Prudent Mixtes Euro Prudent Actions Secteur Immobilier (direct)

14.46 14.19 10.83 6.72 -0.55

-4.21 -6.49 -3.55 -3.92 -9.38

-1.32 0.55 1.24 0.55 -0.05

12.78 11.40 9.26 8.64

MEILLEURES PERFORMANCES DES CATÉGORIES MORNINGSTAR - FONDS OBLIGATAIRES Obligations à Haut Rendement Euro Obligations à Haut Rendement Livre Sterling Obligations à Haut Rendement Dollar Obligations Marchés Emergents Obligations Privées Livre Sterling Obligations Convertibles Etats-Unis Obligations et Liquidités Dollar Australien Obligations Convertibles Euro Obligations Convertibles Asie / Japon Obligations Europe Emergente

48.51 47.61 35.80 26.00 25.99 23.99 23.94 22.73 21.54 20.92

-1.82 -8.12 -1.93 -0.08 -9.57 -3.50 4.66 -4.50 -2.92 0.44

18.92 21.07 17.09 14.74 15.91 13.78 13.68 15.30 13.90 12.61

2.43 -1.18 2.31 4.31 -3.10 2.28 5.92 2.03 4.24 3.53

MOINS BONNES PERFORMANCES DES CATÉGORIES MORNINGSTAR - FONDS OBLIGATAIRES Obligations à CT Dollar Obligations Globales Islamiques Obligations Taiwan Obligations d’Etat Dollar Obligations en Yen

-0.73 -2.00 -5.05 -5.59 -8.58

-13.33 -9.53 -11.40 -4.02 14.01

12.50 10.90

-4.31 12.70 -7.57 4.08 3.55

11.07 12.77

FUND PROFILE: ANALYSE DE FONDS: CARMIGNAC PATRIMOINE - FR0010135103 Dans un contexte de marché difficile, la souplesse a payé A peine plus de 14% sur un an… Y a-t-il de quoi être mécontent dans le cadre d’un investissement dans un fonds mixte modéré? Certes, cette performance arrive en queue de classement, mais quoi de plus normal pour une stratégie «modérément» exposée aux actions et qui n’en subit ni toute la baisse ni, évidemment, toute la hausse! Dans cet univers, l’approche opportuniste du fonds Carmignac Patrimoine se traduit par un positionnement très différent de ses concurrents. Ainsi, l’exposition nette au marché actions, qui était tombée à zéro en décembre 2008, a été graduellement remontée à partir de mars pour représenter 25% des actifs à fin août 2009. Avec, parmi les domaines privilégiés, les banques anglo-saxonnes, les ressources naturelles et les marchés émergents. Ces thèmes étaient contrebalancés par l’or et des valeurs défensives de la pharmacie et de la consommation. Le strict respect des critères de liquidité se traduit, par ailleurs, par un biais marqué vers les grandes capitalisations. Sur la partie obligataire (54% des actifs à fin août

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2009), les emprunts privés avaient les faveurs de la gérante, expliquant la baisse de la note moyenne de crédit du portefeuille de AA à A. Cette partie était très bien diversifiée avec plus de 100 positions, afin d’éviter une trop grande concentration sur un seul émetteur. Le reste du portefeuille était composé d’obligations américaines indexées sur l’inflation et de dette émergente, incluant des lignes en direct sur certaines devises (réal brésilien, livre turque, etc.) Enfin, 18,7% du fonds était maintenu en liquidités. Cette structure de portefeuille s’explique par le mandat du fonds, qui poursuit un objectif de performance absolue sur le long terme. La seule véritable contrainte est de détenir en permanence au moins 50% en obligations ou produits monétaires. L’exposition aux actions internationales varie, de ce fait, de 0 à 50%, ce qui est inférieur à la moyenne de la catégorie. Fidèle au style de gestion de la maison, les décisions d’investissement, tant en termes d’allocation que de sélection d’actions ou d’obligations, revêtent une très forte dimension «topdown». Basée sur l’analyse des fon-

damentaux macroéconomiques, celle-ci permet également d’identifier des thèmes de moyen terme, au sein desquels Carmignac sélectionne les actions de façon opportuniste. Compte tenu de la taille du fonds, cette sélection s’opère essentiellement parmi les moyennes et grandes capitalisations. Pour la poche obligataire, la gérante bénéficie également d’une très grande latitude. Les sources de valeur ajoutée sont multiples: duration, crédit, dette émergente (max. 25%) et convertibles (max. 10%). L’allocation entre les différentes classes d’actifs est dynamique, les gérants ayant recours aux liquidités ainsi qu’à des instruments de couverture. Ceux-ci consistent essentiellement à vendre à découvert des futures sur indices globaux et, plus marginalement, à tenir des positions «short» sur un panier de valeurs pour couvrir un risque spécifique. Enfin, le risque de change est, lui aussi, géré activement.

Carmignac Patrimoine vs Catégorie Morningstar Time Period: 01/04/2005 to 31/03/2010

155 150 145 140 135 130 125 120 115 110 105 100 95 90 85

2005

2006

Carmignac Patrimoine A

2007

2008

2009 2010

147.27

Europe OE Euro Moderate Balanced

101.69

Frédéric Lorenzini 09/04/2010 Calcul de la performance en CHF, dividendes réinvestis, arrêté au 31/03/2010 Source © 2010 MORNINGSTAR, Inc. Tous droits réservés.

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REPÈRES Les plus grandes catégories de fonds passées au crible du 1er quartile Time Period: 01/04/2005 to 31/03/2010

230

Asia-Pacific ex-Japan Equity

158.99

220

Europe Large-Cap Blend Equity 103.52

210 200

Global Large-Cap Blend Equity 103.13

190

U.S. Large-Cap Blend Equity

180

96.01

170 160 150

CHF Aggressive Balanced

109.93

CHF Cautious Balanced

111.86

140 130 120 110 100 90 80 70 60

2005

2006

2007

2008

2009

2010

Le graphique ci-contre indique l'évolution des catégories de fonds sur cinq ans. Dans chaque numéro, Banque & Finance vous présente également une sélection de fonds. Découvrez avec nous les rares produits qui réussissent à se hisser dans le premier quartile sur toutes les périodes analysées. Nous publions au maximum les dix premiers fonds sur un an.

Sur 96 fonds de la catégorie MORNINGSTAR «Actions Suisse Gdes Cap.», 5 fonds restent dans le 1er quartile sur 6 mois, 1 an et 3 ans. Actions Suisse Gdes Cap. Nom du fonds

Promoteur

Code ISIN

SVM Value Falcon Swiss Equity SL iFunds (CH) Equity CH (CHF) ZKB IF A - Aktien Schweiz enhanced UBS (CH) IF Eqs Switzerland IB Moyenne

SIF Swiss Investment Funds SA Falcon Fund Management (Switzerland) Ltd Swiss Life Funds AG Zürcher Kantonalbank UBS

CH0013610248 CH0000828076 CH0023989467 CH0027382966 CH0012966674

Perf. en % sur 6 mois

Perf. en % sur 1 an

9.98 10.35 14.21 12.09 10.88 8.89

58.83 49.38 48.97 46.97 46.63 43.91

Perf. en % annualisée sur 3 ans -5.57 -5.36 -5.88 -5.80 -4.95 -7.17

Volatilité annualisée sur 3 ans 19.09 18.96 18.00 17.44 17.19 18.13

Etoiles MORNINGSTAR ★★★ ★★★ ★★★★★ ★★★★★ ★★★★★

Sur 36 fonds de la catégorie MORNINGSTAR «Actions Suisse Petites & Moy. Cap.», 2 fonds restent dans le 1er quartile sur 6 mois, 1 an et 3 ans. Actions Suisse Petites & Moy. Cap. Nom du fonds

Promoteur

Code ISIN

Valartis Swiss S/M Cap Selection BGF Swiss Small & Mid Cap Opps A2 CHF Moyenne

LB(Swiss) Investment AG Blackrock (Luxembourg) S.A.

CH0021864977 LU0376446257

Perf. en % sur 6 mois

Perf. en % sur 1 an

13.06 12.24 8.91

76.58 66.16 56.71

Perf. en % annualisée sur 3 ans -1.68 1.41 -6.72

Volatilité annualisée sur 3 ans 25.24 21.60 23.44

Etoiles MORNINGSTAR ★★★★ ★★★★★

Sur 119 fonds de la catégorie MORNINGSTAR «Actions Europe Gdes Cap. Mixte», 6 fonds restent dans le 1er quartile sur 6 mois, 1 an et 3 ans. Actions Europe Gdes Cap. Mixte Nom du fonds

Promoteur

Code ISIN

Echiquier Major ING (L) Invest Europe Opp I UBS (CH) IF Eqs Europe (ex CH) IX Cadmos Mgmt Guile EU Engagement A Reyl (LUX) GF European Equities B BL-Equities Europe B Moyenne

Financière de l'Echiquier ING Investment Mgmt Luxembourg UBS Pictet Funds (Europe) S.A. Reyl & Cie (France) Banque de Luxembourg

FR0010321828 LU0262019002 CH0023761494 LU0269642889 LU0160155981 LU0093570330

Perf. en % sur 6 mois

Perf. en % sur 1 an

7.85 4.92 4.93 4.72 5.34 7.51 2.26

62.84 60.65 54.84 48.97 48.87 47.28 42.02

Perf. en % annualisée sur 3 ans -6.55 -6.62 -11.18 -10.66 -10.80 -9.00 -12.61

Volatilité annualisée sur 3 ans 24.33 29.52 25.25 23.87 23.14 20.43 23.95

Etoiles MORNINGSTAR ★★★★★ ★★★★★ ★★★★★ ★★★ ★★★★★ ★★★★★

Sur 115 fonds de la catégorie MORNINGSTAR «Actions Etats-Unis Gdes Cap. Mixte», 8 fonds restent dans le 1er quartile sur 6 mois, 1 an et 3 ans. Actions Etats-Unis Gdes Cap. Mixte Promoteur Nom du fonds

Code ISIN

Gutzwiller ONE Harris Associates US L-C Val Fd I/A USD CONNECT Equity USA GREEN I DB Platinum IV Croci US R1 CIF US Growth and Income B Fidelity Instl America JPM US Select Eq A (acc)-USD Reyl (LUX) GF North Amer Equities B Moyenne

CH0012453558 LU0130102931 CH0027988838 LU0194164702 LU0157028936 GB0003367504 LU0070214290 LU0160156013

Gutzwiller Fonds Management AG Natixis Global Associates Credit Suisse Asset Management DB Platinum Advisors S.A. Capital International (Switzerland) Fidelity (FIL Investment Svcs (UK) Ltd) JPMorgan Asset Mgt (Europe) S.à r.l. Reyl & Cie (France)

Perf. en % sur 6 mois

Perf. en % sur 1 an

17.51 15.44 14.20 14.96 14.23 13.64 14.03 17.81 11.83

54.41 52.91 46.30 44.40 42.82 40.69 39.62 39.47 36.84

Perf. en % annualisée sur 3 ans -6.79 -5.61 -3.89 -5.91 -6.83 -7.30 -6.89 -8.36 -10.14

Volatilité annualisée sur 3 ans 24.76 23.74 25.30 21.76 21.49 23.74 21.80 21.92 21.95

Etoiles MORNINGSTAR ★★★★ ★★★★ ★★★★★ ★★★★★ ★★★★ ★★★★ ★★★★ ★★★

Sur 117 fonds de la catégorie MORNINGSTAR «Actions Asie-Pacifique hors Japon», 6 fonds restent dans le 1er quartile sur 6 mois, 1 an et 3 ans. Actions Asie-Pacifique hors Japon Nom du fonds

Promoteur

Code ISIN

T. Rowe Price Asian ex-Japan Eq I Templeton Asian Growth A YDis $ Aberdeen Global Asian Smaller Cos D2 Fidelity Instl South East Asia Aberdeen Global Asia Pacific Equity A2 UBS (CH) IF Eqs Emerging Mkts Asia IX Moyenne

T. Rowe Price Global Inv. Services Ltd Franklin Templeton Investment Funds Aberdeen Asset Managers Limited(Lux) Fidelity (FIL Investment Svcs (UK) Ltd) Aberdeen Asset Managers Limited(Lux) UBS

LU0266341725 LU0029875118 LU0231459958 GB0003371407 LU0011963245 CH0023760694

MAI - JUIN 2010

Perf. en % sur 6 mois

Perf. en % sur 1 an

14.43 17.68 18.69 11.85 11.02 11.85 9.49

94.69 87.92 78.62 73.23 68.53 65.79 58.71

Perf. en % annualisée sur 3 ans 3.55 5.04 3.54 5.96 0.36 2.45 -2.67

Volatilité annualisée sur 3 ans 37.28 35.28 23.34 29.43 26.97 29.92 29.45

Etoiles MORNINGSTAR ★★★ ★★★★ ★★★★★ ★★★★★ ★★★★★ ★★★★

B&F

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FONDS DE PLACEMENT NOUVEAUX FONDS

C’est le printemps! L’activité de lancement de nouveaux fonds est repartie de plus belle. Sur le segment des ETFs, la concurrence s’intensifie et les promoteurs se ruent sur les matières premières ou tout autre microsegment susceptible de devenir à la mode. Les investisseurs continuent d’espérer davantage de transparence et les sélectionneurs de fonds habillent leurs portefeuilles en «boutique». Véronique BÜHLMANN

L

a fièvre créative a repris les promoteurs de fonds, mais les critiques se font plus acerbes. «Chaque année, à grand renfort de roadshows, les gérants présentent sur le marché le dernier-né de leurs élucubrations backtestiques (i.e. résultat des simulations). Et, au bout d’un an ou deux, le produit disparaît, sans que personne – en dehors de quelques investisseurs déçus – ne s’en inquiète», commente un spécialiste de la gestion des matières premières. Le foisonnement est, en effet, une donnée du marché, mais il n’est pas perdu pour tout le monde. Comme l’écrit BlackRock1: «Dans un monde où les véhicules de placement surgissent et disparaissent en un clin d’œil, les ETFs peuvent être considérés comme le produit financier le plus innovant de ces deux dernières décennies. Il a fondamentalement changé le mode de construction des portefeuilles, tant pour les investisseurs privés que pour les institutionnels.»

Alpha vs bêta Au point que les ETFs ont toutes les caractéristiques d’une pandémie. Ainsi, en Allemagne, Sasa Perovic, responsable de l’analyse ETF auprès de l’agence de notation Scope, parle d’une «explosion» du secteur. Cependant, il constate que les nouveaux produits n’ont plus rien à voir avec leurs prédécesseurs, ni sur le plan de la simplicité ni sur celui de la transparence. La concurrence entre émetteurs étant forte, ils cherchent à se distinguer, allant sur des indices toujours plus exotiques tels que ceux portant sur les entreprises actives dans le nucléaire ou même la dentisterie. En

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conséquence, le risque d’illiquidité et de manque de diversification s’accroît. Par ailleurs, avec la fièvre en faveur des matières premières, on est passé des ETFs aux ETCs (Exchange Traded Commodities) ou aux «Exchange Traded Notes», qui présentent des risques différents des ETFs traditionnels et, notamment, un risque émetteur. Malgré cette explosion des instruments passifs, les gérants actifs persistent à croire en leur modèle. Alfred Strebel, directeur exécutif pour la Suisse de Fidelity Inter-

«Les ETFs ne sont pas sans danger, il ne faut pas négliger le risque de contrepartie et surtout bien étudier leur construction. Rappelez-vous des produits structurés» ALFRED STREBEL – FIDELITY

national, auquel nous avons demandé en quoi l’évolution des ETFs avait affecté la gestion active, répond: «Depuis le début 2010, c’est-à-dire en deux mois et demi, les afflux nets d’argent se sont élevés à 500 millions et l’année 2009 a également été positive. Nous ne sommes donc pas touchés. Je pense que les flux qui se sont dirigés vers les ETFs viennent davantage des déceptions causées par les hedge funds et les fonds de hedge funds ainsi que par les produits structurés. A l’avenir, le secteur des ETFs va certainement continuer à croître, dans la mesure où la demande institutionnelle pour des produits de type bêta est croissante, la gestion

active étant cantonnée aux positions satellites sur des segments spécialisés. Cependant, les ETFs ne sont pas sans danger; il ne faut pas négliger le risque de contrepartie et surtout bien étudier leur construction. Rappelezvous des produits structurés!» Malgré cet optimisme en faveur de la gestion active, il paraît significatif que les annexes d’une récente brochure de présentation d’un fonds actions de Fidelity incluent une critique des ETFs et, notamment, celle des risques que représentent certains indices, du fait des très grosses pondérations qu’ils peuvent contenir, ou encore celle des risques liés aux ETFs à levier «qui ne se comportent pas toujours comme on pouvait s’y attendre».

La rotation du personnel: un moins L’offre continue donc d’être surabondante, comment va-t-on la distribuer? A cette question, RBC Dexia Investor Services répond dans sa récente enquête intitulée Tendances du secteur de la distribution de fonds2. En ce qui concerne la demande, RBC constate que les investisseurs «aspirent désormais à plus de franchise et de transparence, tant en ce qui concerne les produits qu’ils achètent qu’au niveau de ceux qui en assurent la promotion et la distribution». Ce résultat est parfaitement corroboré par le dernier sondage effectué par Metrinomics auprès des sélectionneurs de fonds européens. Il constate que l’industrie tout entière ayant perdu de son lustre, les clients ne se satisfont plus

ETF Landscape, A review of the Exchange Traded Funds (ETFs) and Exchange Traded Products (ETPs) Industry. Industry Review from BlackRock, Year End 2009. 2 Tendances du secteur de la distribution de fonds – Synthèse des résultats de l’enquête sur la distribution de fonds – Février 2010 – RBC Dexia Investor Services. 1

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NOUVEAUX FONDS Happy birthday La fortune des ETFs a dépassé le cap du trillion de dollars à fin 2009, en progression de 45,7% par rapport à 2008. Sur les dix dernières années, le taux de croissance moyen des ETFs a été de 56,3% dans le monde et même de 90,5% en Europe où ils fêtent leur 10e anniversaire en avril. A fin 2009, la fortune des 829 ETFs européens provenant de 34 émetteurs s’élevait à 227 milliards de dollars. A 59%, la croissance de leurs actifs était nettement supérieure à celle de l’indice MSCI Europe (30,6% en dollars). Sur la même période, leur nombre a augmenté de 31% (215 lancements). Les 50 principaux ETFs représentaient 54% des actifs totaux et la part de marché des trois plus gros émetteurs était de 74%. Le ratio des coûts totaux (TER) des ETFs sur actions s’élevait à 37 points de base (PB) par an contre 87 PB pour les fonds indiciels et 175 PB pour les fonds actions ayant une stratégie active. Pour les onze premiers mois de 2009, les ventes nettes de parts de fonds, hors ETFs, se sont élevées à 230,1 milliards de dollars alors que celles des ETFs domiciliés en Europe étaient de 40,3 milliards, représentant environ 17% des ventes totales de fonds. Il est intéressant de relever qu’aux Etats-Unis, selon les chiffres de Strategic Insight, sur les neuf premiers mois, les ventes nettes de fonds (hors ETFs) étaient négatives de 131,5 milliards (il y a donc eu plus de demandes de remboursement de parts de fonds qu’il n’y a eu d’achats) alors que les ventes nettes d’ETFs s’élevaient à 64 milliards de dollars. Croissance de la fortune des ETFs en Europe Pour 2010, BlackRock table sur un taux de croissance de 20-30%. Il prévoit un élargissement de l’offre émanant des gérants alternatifs, dont les produits deviendront accessibles à la grande majorité des investisseurs grâce aux structures standardisées et réglementées du type OPCVM: «Les hedge funds ont pris conscience de la croissance et de l’attractivité des ETFs simples et faciles d’accès… Nous prévoyons donc une augmentation du nombre de hedge funds qui vont créer des ETFs répliquant les expositions sousjacentes de leurs propres portefeuilles, ceci dans le but d’élargir leur réseau de distribution.» ■

d’un nom ou d’une marque. Le service à la clientèle compte parmi les principaux facteurs de succès. A cet égard, le commentaire d’un participant à l’enquête, publié par Metrinomics, paraît très significatif: «J’aimerais que nos fournisseurs gardent leur personnel et qu’ils valorisent les gérants qui ont travaillé dans leur entreprise pendant des années. Tous les changements (de personnel) auxquels nous assistons aujourd’hui diminuent la qualité du service et cassent des relations établies depuis longtemps. Disant ceci, je ne pense pas seulement aux gestionnaires, mais aussi aux commerciaux ainsi qu’au service à la clientèle.»

Des boutiques pleines d’atouts Sur le plan de la concurrence, RBC constate que la compétition entre fonds d’investisse-

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ment étrangers et nationaux est appelée à s’accroître, d’autant plus que les investisseurs accordent plus d’importance à la protection, à la transparence et au rendement qu’au domicile ou à la juridiction du fonds et que l’architecture ouverte demeure une tendance importante. En Suisse, ce constat paraît confirmé puisque, comme l’écrit l’Association des banques étrangères en Suisse, la croissance des fonds étrangers en Suisse est continue. Au cours des trois dernières années, leur part de marché est passée de 57 à 59,7%, les fonds de promoteurs étrangers augmentant de 30,2% contre16,5% pour les fonds de promoteurs suisses (en particulier les fonds d’origine française ont connu, en nombre, une poussée spectaculaire). Dans ce cadre de concurrence accrue, les «boutiques» pourraient tirer leur épingle du

jeu, comme le montre une enquête réalisée par Citywire auprès des sélectionneurs de fonds. Elle conclut, en effet, que les principales raisons de leur préférence pour les «boutiques» sont leur spécialisation, leur concentration sur une seule activité et une meilleure adéquation des intérêts des gérants avec ceux des investisseurs. L’accès plus facile aux gérants de portefeuille, la liberté d’action de ces derniers ainsi qu’une meilleure transparence comptent également au nombre de leurs atouts. Même si, comme le montre presque quotidiennement l’actualité, chacun est amené à se montrer beaucoup plus critique dans l’évaluation du risque opérationnel. ■

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Les résultats des simulations effectuées avant le lancement du premier fonds quantitatif de Swissquote ont démontré que le contrôle rigoureux des risques réduisait les pertes en cas de conditions de marché défavorables et que le modèle de gestion offrait d’excellentes performances sur des marchés à la hausse lorsque les VaR de l’indice et celle du fonds étaient proches. Les résultats depuis les quinze premiers mois d’existence du Quant Swiss Equities confirment les conclusions des simulations. Comme le montre le schéma des performances mensuelles comparées du fonds et de l’indice (cf. graphique performance mensuelle), le premier s’est bien défendu dans la phase initiale de baisse. «En effet, explique Serge Kassibrakis, le modèle exigeait que nous ayons une part importante de cash pour maintenir le niveau de VaR.»

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GÉRANT: Quantitative Asset Management, Swissquote Bank SA. L’équipe quantitative, dirigée par le Dr Serge Kassibrakis, compte six personnes. Elle est composée de mathématiciens, de physiciens et d’un spécialiste en éconophysique – une nouvelle discipline qui applique les principes de la physique à l’économie. Cette équipe travaille en collaboration étroite avec l’EPFL, où Swissquote finance une chaire en finance quantitative dont le titulaire, Damir Filipovic, mathématicien, est connu internationalement pour son modèle d’analyse des taux d’intérêt. POLITIQUE DE GESTION: Surperformer l’indice DJ Eurostoxx, avec un niveau de value at risk (VaR) hebdomadaire contrôlé dans le temps à 3%, grâce à une gestion dynamique basée sur des algorithmes développés par Swissquote. La principale caractéristique de cette gestion est de sélectionner, selon un modèle quantitatif, des titres possédant une tendance haussière robuste tout en contrôlant le niveau de risque global du portefeuille, mesuré par la VaR. Il s’agit donc d’une gestion conservatrice au vu de la VaR de l’indice DJ Eurostoxx qui, entre octobre 2008 et la période actuelle, a évolué entre –12% et –5%. Aucune position ne peut représenter plus de 5% des actifs du fonds, qui en détient en moyenne une quarantaine. Par rapport aux titres constituant l’indice, un premier filtre quantitatif est appliqué afin d’éliminer les titres présentant un historique ou une liquidité insuffisants pour permettre un calcul de risque pertinent. Par exemple, sur les 220 titres du SPI, 100 à 150 passent ce filtre et ce sont eux qui constituent l’univers réel d’investissement du fonds. Pour le fonds européen, sur les 320 titres de l’indice, l’univers réel devrait être de l’ordre de 220 titres.

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Swissquote Quant European Equities

Le fonds n’a pas suivi au même rythme la hausse de l’indice. De fait, le niveau élevé de la VaR (cf. graphique évolution de la VaR) du marché impliquait que le fonds, limité dans sa possibilité à prendre des risques, maintienne une part significative de liquidité. Le fonds était alors dans cette situation où son risque de marché était bien inférieur à celui de l’indice, alors que celui-ci entamait son rebond. Vu la violence de la hausse de l’indice – de l’ordre de 20% en trois mois –, cette sous-exposition a entraîné une sous-performance, accentuée ensuite par les mouvements très marqués de l’été. «Ce comportement du fonds n’a rien d’étonnant puisque nous l’avions déjà observé lors des simulations. Il correspond au profil de risque recherché par les investisseurs», précise le directeur de la recherche quantitative. Au final, le fonds a réalisé une performance de 9,4% contre 21,2% pour l’indice, mais avec un drawdown maximal de 9,7% (contre 23,9% pour l’indice) et une volatilité de 6,2%, soit plus de trois fois inférieure à celle de l’indice, de l’ordre de 18% sur la même période. COMMISSION DE GESTION: 1% p.a. au maximum (Cette commission est utilisée pour la direction, la gestion et la commercialisation du compartiment.) DATE DE LANCEMENT: 1er avril 2010 Le prospectus du fonds prévoit le lancement d’autres segments gérés selon le même modèle quantitatif, l’un sur le marché américain (S&P 500) et l’autre sur le marché mondial.

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FONDS DE PLACEMENT ACTIONS MARCHÉS ÉMERGENTS Baring Mena Fund NOM DE LA GÉRANTE: Dr Ghadir Abu Leil-Cooper, responsable de l’équipe (six personnes) de gestion actions pour la zone Europe Moyen-Orient, Afrique et gérante du fonds Baring Eastern Europe (lancé en 1996, ce fonds de 3,4 milliards de dollars a dégagé une performance annuelle moyenne de 19,6%). La gérante est notée A par Citywire et investit depuis quatorze ans dans les marchés émergents. POLITIQUE D’INVESTISSEMENT: Gestion active de titres d’entreprises du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (MENA), une région qui, outre sa richesse en hydrocarbures (deux tiers des réserves mondiales de pétrole et 45% des réserves de gaz naturel), est très diversifiée. Sa population se monte à 324 millions. Les principaux secteurs d’investissement sont: Koweït: pétrole (4es réserves mondiales) et services financiers; Emirats arabes unis: centre commercial et financier de la région avec Dubai et Abu Dhabi, émirats leaders pour le développement des services et du tourisme; Quatar: premier exportateur de gaz naturel liquéfié, pétrochimie, services financiers, commerce et tourisme; Bahreïn: secteur bancaire; Oman: tourisme; Jordanie: potasse, phosphates, tourisme. Pour l’Afrique du Nord: Egytpe: investissements élevés des pays du Golfe dans les télécommunications, le secteur bancaire et l’immobilier, tourisme; Maroc: phosphates, tourisme. La gérante doit investir au moins 70% de ses actifs dans la zone MENA, 30% pourront être placés de manière opportuniste sur d’autres marchés émergents. Elle se concentre sur «les titres de croissance à un cours raisonnable». Selon la gérante, «l’idée est d’analyser les entreprises et les pays et de trouver des positions différentes du consensus. Notre style “croissance à un cours raisonnable” signifie que nous ne cherchons ni des valeurs extrêmement bon marché ni des sociétés de très forte croissance… Nous nous concentrons sur cinq facteurs – la croissance, la liquidité, la devise, le management et la valorisation – en vue de tirer parti des changements dans les entreprises ou les pays.» La qualité du management est très importante: «Nous voulons un management capable d’atteindre les buts stratégiques de l’entreprise.» Sur le plan des risques, à la volatilité élevée de la région et le risque politique s’ajoute la faible liquidité. L’exposition à la Bourse saoudienne sera réalisée à travers des titres de participation émis par les banques d’investissement, l’investissement direct étant actuellement limité aux seuls résidents des pays du Golfe. Ces

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Ghadir Abu Leil-Cooper est notée A par Citywire et investit depuis quatorze ans dans les marchés émergents. titres présentent donc des risques supplémentaires et, notamment, un risque de contrepartie. En ce qui concerne les perspectives de la région, la gérante est très positive du fait de la rapidité de l’industrialisation et de l’urbanisation. Les populations jeunes et en forte croissance ainsi que des consommateurs sous-endettés lui font tabler sur une explosion de la demande domestique. A plus long terme, la libéralisation de ces économies est également un facteur très positif. En ce qui concerne les valorisations, elle les qualifie de «très attrayantes», au vu du terrain perdu au 4e trimestre 2009 suite aux problèmes de Dubai. NOMBRE DE POSITIONS: 20 à 50 INDICE DE RÉFÉRENCE: MSCI Arabian Markets (ex Saudi Arabia) Index (début février 2010, cet indice se situait à 47,6% au-dessous de son niveau de juin 2008. A titre de comparaison, pour la même période l’indice marchés émergents était à –22,7%). DATE DE LANCEMENT: 29.03.2010

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FONDS DE PLACEMENT DIVERSIFIÉ F&C Active Return Fund NOM DES GÉRANTS: Stephen Crewe et Chris Childs de F&C Alternative Investments. Société de gestion indépendante cotée à Londres, F&C affiche des actifs sous gestion de 110,2 milliards (chiffres au 31.12.2009). Stephen Crewe, qui travaille au sein de F&C depuis 1993, gère également le F&C Sapphire Fund ainsi que le F&C Blue Fund, un fonds destiné au marché anglais mais qui utilise également des stratégies similaires à celles du fonds Active Return. Il est aussi cogérant du fonds High Income et participe en tant que backup au F&C HVB-Stiftungsfonds. Chris Childs, également chez F&C depuis 1993, a rejoint Stephen Crew en 1995 pour former l’équipe de dérivés de la société. Il est gérant principal du HVB-Stiftungsfonds et cogérant des autres fonds gérés par Stephen Crew. Pour le fonds Active Return, les gérants sont entourés d’une équipe d’analystes et développeurs IT, d’une équipe indépendante de gestion du risque ainsi que de deux professionnels de l’investissement. FORTUNE: EUR 73 millions (03.2010) POLITIQUE D’INVESTISSEMENT: Le fonds vise un rendement annuel (net de commissions et frais) de 2 à 4% supérieur au taux du marché monétaire et ce, avec une faible volatilité. Son objectif est de dégager des performances positives quels que soient les marchés. Il investit dans un portefeuille de dérivés sur actions de marchés développés, en Europe et aux Etats-Unis principalement, le tout avec un biais en faveur d’indices de grandes capitalisations dont la liquidité est la plus importante. Le fonds privilégie les dérivés simples et les plus liquides tels que les options sur indice. Le portefeuille mise sur trois stratégies principales pour tirer parti des anomalies de valorisation du marché: market neutral, trading de volatilité et autres «second order trades» (dispersion, corrélation et dividendes implicites). L’allocation entre ces stratégies varie en fonction des convictions des gérants. INDICE DE RÉFÉRENCE: performance absolue PERFORMANCE DEPUIS LANCEMENT: 8,17% (02.2010) DATE DE LANCEMENT: 08.10.2008

Performance depuis lancement (part institutionnelle en EUR)

Les fonds de placement

GAM Star Pharo Emerging Market Debt & FX NOM DU GÉRANT: Pharo Global Advisors Limited. Fondé et dirigé par Guillaume Fonkenell, Pharo a lancé son premier fonds en décembre 2000 (fonds dans lequel GAM a investi dès son lancement). La société se spécialise dans le segment liquide des devises, des taux d’intérêt, du crédit et des indices boursiers au sein des pays émergents. Pharo intervient également sur les thèmes mondiaux du G10 par le biais d’instruments traditionnels. Guillaume Fonkenell, CIO, qui a vingt ans d’expérience du négoce sur les marchés développés et émergents, était auparavant responsable du groupe de trading sur les marchés locaux d’Amérique latine et du groupe de dérivés de crédit chez Merrill Lynch. Les autres partenaires fondateurs sont Michael Skarbinski et Jeff Hanlon, CFO. Le nouveau fonds est proposé par GAM dans le cadre de son architecture ouverte (actifs sous gestion de GAM au 31.12.2009: 49,4 milliards de francs suisses). POLITIQUE D’INVESTISSEMENT: Le fonds investit la majorité de ses actifs dans des obligations d’Etat et quasi étatiques des marchés émergents, ainsi que dans des futures et forwards sur devises. Il vise un rendement annuel de 5 à 10% au-dessus de l’indice JP Morgan EMBI Global Diversified Composite Index. Le gérant applique une approche top down pour identifier les thèmes et la sélection d’opportunités dans les secteurs les plus liquides du segment obligataire des marchés émergents. INDICE DE RÉFÉRENCE: n.d. DATE DE LANCEMENT: mars 2010

Global Multi-Asset Fund EUR (Hedged) NOM DES GÉRANTS: Mohamed A. El-Erian, Vineer Bhansali, Curtis A. Mewbourne, Pimco FORTUNE: USD 995,1 millions (28.02.2010) POLITIQUE D’INVESTISSEMENT: Fonds d’allocation d’actifs «trois en un» qui intègre un portefeuille diversifié par classe d’actifs, des stratégies en valeur relative visant à offrir des rendements supplémentaires et des stratégies de couverture qui permettent de se protéger contre le risque systématique. Le fonds détient notamment d’autres fonds de Pimco. L’objectif est d’offrir à l’investisseur une solution d’allocation d’actifs complète ainsi qu’une diversification par rapport à tous les facteurs de risques globaux. L’objectif de rendement annuel se situe à 8%. En février, le fonds a battu son indice. Les principaux facteurs de performance ont été la décision de surpondérer les matières première et l’or, la duration de la zone euroland, l’exposition aux obligations émergentes. En revanche, la sous-pondération des actions américaines par rapport à l’indice s’est avérée négative. INDICE DE RÉFÉRENCE: 60% MSCI World Index/40% USD Hedged Barclays Capital Global Agg. Index; All EUR Hedged PERFORMANCE YTD AU 28.02.2010: –0,5% vs –1,04% (indice) DATE DE LANCEMENT: 10.07.2009 NB. En janvier, Pimco a également enregistré le Pimco Funds: Global Investors Series plc. – Unconstrained Bond Fund.

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NOUVEAUX FONDS PROTECTION CONTRE L’INFLATION Pioneer Funds – Inflation Plus NOM DES GÉRANTS: Christian Frischauf et Emre Tuncer, Pioneer Global Investments Ltd. FORTUNE: EUR 20,2 millions (15.03.2010) POLITIQUE D’INVESTISSEMENT: Le fonds vise à dégager un rendement supérieur au taux d’inflation sur le moyen et le long terme. Le gérant investit au moins 50% de ses actifs dans un portefeuille diversifié d’obligations de qualité investissable et d’autres titres de créance, y compris des obligations indexées à l’inflation émises par des débiteurs étatiques ou privés. INDICE DE RÉFÉRENCE: pas d’indice de référence DATE DE LANCEMENT: 02.12.2009

RealUnit Schweiz (CHF) NOM DU GÉRANT: Reichmuth & Co, Privatbank, Lucerne POLITIQUE D’INVESTISSEMENT: Le fonds vise à conserver la valeur de l’investissement en l’adossant à une contre-valeur, en l’occurrence l’ensemble des biens produits par une économie. Aussi, la répartition des actifs se base-t-elle sur le PNB (représentant la production), dont la consommation représente les deux tiers et les investisse-

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ments le tiers restant. Utilisant la même clef de répartition, le fonds sera investi en valeurs de consommation et en valeurs d’investissement. Les premières reflètent la fonction d’échange de l’argent et comprennent des valeurs nominales telles que les obligations, des placements liés aux prix à la consommation, des liquidités et des matières premières. Les secondes représentent des valeurs réelles comme les entreprises (actions) et l’immobilier. Pour tenir compte de l’orientation mondiale de l’économie suisse, le fonds investira 30% de ses actifs à l’étranger. Afin de minimiser les coûts, la plupart des positions seront prises à travers des ETFs. Depuis sept ans, Karl Reichmuth a investi un million de francs selon cette stratégie et obtenu un rendement supérieur à celui des comptes d’épargne ainsi qu’à ceux de la très grande majorité des fonds de diversification d’actifs ou fonds de stratégie. Ces résultats, alliés à une crainte de la reprise de l’inflation, ont amené la banque à proposer ce nouveau fonds: «Un véhicule d’investissement liquide et largement diversifié, qui doit protéger les épargnants de la dépréciation monétaire en les faisant participer à la croissance.» (En 2001, Karl et Remy Reichmuth ont présenté cette stratégie dans leur ouvrage intitulé Der RealUnit – Zur Quelle der Geldwertstabilität. I NDICE DE RÉFÉRENCE: n.d. COMMISSION DE GESTION: 0,7% max. p.a. (y compris direction de fonds, dépositaire, gestion) DATE DE LANCEMENT: 01.03.2010

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FONDS DE PLACEMENT Swiss Life Funds (LUX) – Bond Inflation Protection R EUR Cap NOM DU GÉRANT: Dimitri Andraos, Swiss Life Asset Management (France) FORTUNE: EUR 60 millions (26.02.2010) POLITIQUE D’INVESTISSEMENT: Le fonds vise à offrir une couverture réelle contre le risque inflationniste. En outre, il permet de tirer profit des anticipations de hausse sur l’inflation grâce une exposition pure au breakeven inflation. Le gérant construit un portefeuille exclusivement exposé au risque d’inflation. Cette exposition peut-être recherchée directement à travers des instruments adaptés (swap d’inflation). Elle peut également être obtenue de manière synthétique à partir d’obligations indexées sur l’inflation, couvertes contre le risque de taux et, le cas échéant, contre le risque de change. L’univers d’investissement est limité aux titres d’Etat de notation supérieure ou égale à A –. La gestion du fonds associe approche fondamentale et quantitative. La première consiste à sélectionner les zones géographiques où le gérant anticipe une accélération de l’inflation. La seconde vise à construire un portefeuille qui tirera le meilleur parti de ces anticipations, compte tenu des contraintes de risques encadrant la gestion du fonds. INDICE DE RÉFÉRENCE: Breakeven Inflation Monde COMMISSION DE GESTION: 0,9% max. PERFORMANCE DEPUIS LANCEMENT: –2,01% vs –1,14 (indice) (26.02.2010) DATE DE LANCEMENT: 10.11.2009

Global Advantage Fund NOM DES GÉRANTS: Mohamed A. El-Erian et Ramin Toloui, Pimco FORTUNE: USD 41 millions (28.02.2010) POLITIQUE D’INVESTISSEMENT: Géré de manière active sur tout l’univers obligataire, y compris celui des marchés émergents, le fonds vise à battre l’indice Global Advantage pondéré par le PNB (GLADI). Cet indice Pimco est un indice diversifié qui couvre un large spectre de titres à taux fixes allant jusqu’aux actifs tangibles, au cash et aux instruments dérivés. Contrairement aux indices traditionnels, généralement composés d’obligations pondérées en fonction de leurs capitalisations boursières, l’indice GLADI utilise une pondération fonction du PNB. Celle-ci permet de mettre l’accent sur les régions du monde en forte croissance et confère ainsi à l’indice un caractère tourné vers l’avenir. En février, le fonds a battu son indice. Les principaux facteurs de performance ont été la surpondération de la zone euro (core) et de la duration US, la sous-pondération de la duration RoyaumeUni, la surpondération du real brésilien ainsi que du dollar australien. Pour l’avenir, les gérants se montrent relativement réservés, même s’ils croient à une croissance soutenue des marchés émergents et en particulier de la Chine. INDICE DE RÉFÉRENCE: Pimco Global Advantage Bond Index (GLADI) PERFORMANCE YTD AU 28.02.2010: 0,64% vs 0,2% (indice) PERFORMANCE SUR 6 MOIS: 3,57% vs 3,36% (indice) DATE DE LANCEMENT: 09.06.2009

ACTIONS EUROPÉENNES Leonardo Invest – MIURA

OBLIGATIONS Ethical High Yield Value Bonds NOM DU GÉRANT: Sune Højholt Jensen, Sparinvest Fondsmaeglerselskab A/S FORTUNE: EUR 35,79 millions (28.02.2010) POLITIQUE D’INVESTISSEMENT : Obligations d’entreprises dans le monde entier. La sélection des débiteurs est effectuée sur la base d’une analyse valeur et privilégie les meilleurs. L’accent est mis sur la minimisation du risque de défaut et non sur le rendement potentiel des titres. En outre, la société Ethix SRI procède à deux screenings (l’un basé sur des normes, l’autre sectoriel) pour s’assurer que seuls entrent dans le portefeuille les titres corrects d’un point de vue éthique. INDICE DE RÉFÉRENCE: Merrill Lynch Global High Yield (EUR Hedged) DATE DE LANCEMENT: 01.02.2010

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NOM DES GÉRANTS: Cyril Freu et Mathieu Picard, DNCA Finance, société de gestion indépendante créée en 2000. Son leitmotiv: développer une gamme de fonds «simple, lisible et performante». Dans l’idée de se développer en Europe, DNCA Finance a noué, en 2006, un partenariat avec Gruppo Banca Leonardo. Les deux gérants ont rejoint DNCA mi-2009. Ils étaient auparavant en charge du portefeuille long/short pour compte propre de IXIS (Natixis). Leurs performances ont été positives chaque année: 19% en 2006, 10% en 2007 et 5% en 2008. FORTUNE: EUR 53,3 millions (28.02.2010) POLITIQUE D’INVESTISSEMENT: Fonds diversifié long/short actions européennes (grandes et moyennes capitalisations). La stratégie s’appuie sur l’analyse financière fondamentale. L’exposition brute (long + short) est fixée à 200% et l’équipe de gestion n’utilise ni levier ni produits dérivés complexes. Avec une exposition nette limitée à +/–20% de l’actif sous gestion, le fonds est peu dépendant de l’évolution des marchés actions. Sa performance repose essentiellement sur la capacité des gérants à effectuer les bons choix de longs et de shorts (vente d’une action à travers des contrats CFD en vue de profiter de son potentiel de baisse). Les gérants ont développé leurs propres modèles de prévision et de valorisation sur plus de 50 sociétés européennes. Les secteurs les plus travaillés sont la consommation au sens large, les industrielles et les TMT. Le fonds vise à dégager des performances annuelles positives et supérieures au taux sans risque, quelle que soit l’évolution du marché et ce, avec une volatilité inférieure à celle de l’Eurostoxx 50. INDICE DE RÉFÉRENCE: EONIA PERFORMANCE DEPUIS LANCEMENT: 0,66% vs 0,10% (indice) (28.02.2010) DATE DE LANCEMENT: 16.11.2009

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FONDS DE PLACEMENT FONDS EN ACTIONS INTERNATIONALES

La croissance par la qualité Scotché au 1er quartile, le fonds actions globales de M&G se concentre sur les entreprises «vertueuses» en termes de croissance à long terme. Greg Aldridge, son gérant, pense au-delà de l’horizon habituel des cinq ans, se méfie profondément de la mathématique pure et traque les actifs intangibles qui défient les lois de l’économie. l’une répondra que le prix est fixé par le marché alors que la seconde déterminera son prix de vente en fonction de la plusvalue qu’elle estime apporter à la clientèle. Je ne citerai pas de noms, mais il s’agit d’un exemple réel et il est évident que ma préférence ira à la seconde. Le pricing n’est qu’un exemple des multiples avantages intangibles que peut présenter une entreprise par rapport à une autre. Je cherche des entreprises dont le succès repose sur plusieurs avantages de ce type, de manière à ce que si l’un de ces derniers venait à disparaître – et l’on sait que ce qui marche est rapidement copié – elle en garderait toute une palette d’autres. L’idée, c’est de trouver des sociétés capables de défier les lois de l’économie sur le long terme. Carnival, leader dans le domaine des croisières, est un exemple de ce type.

Propos recueillis par Véronique BÜHLMANN

«N

ous pensons que le M&G Global Growth représente un excellent choix pour l’investisseur qui cherche une exposition diversifiée aux marchés actions du monde entier», écrivent les analystes de Morningstar en tête de leur dernier rapport d’analyse datant de février 2010. Pur portefeuille de sélection de titres, le fonds est concentré sur les entreprises de qualité disposant d’actifs rares et sous-évalués par le marché, qui dégagent des rendements élevés et soutenus, couplés à une croissance à long terme. La spécificité de la stratégie repose dans la capacité du gérant à identifier les intangibles souvent négligés par l’analyse traditionnelle et qui représentent pourtant de véritables avantages compétitifs pour les entreprises. Citons, à titre d’exemple, l’expertise commerciale ou la culture organisationnelle. Corollaire de cette stratégie, l’horizon d’investissement retenu dépasse les cinq ans car, comme l’explique Greg Aldridge, les entreprises sélectionnées sont toutes dans un cercle vertueux de création de valeur: des bénéfices durablement élevés permettent d’augmenter les cash-flows qui, à leur tour, peuvent être réinvestis pour alimenter la croissance de l’entreprise et donc des bénéfices. Aussi, bien que qualifié de «croissance», le fonds ne représente ni l’opposé d’un fonds de type «substance» ni les caractéristiques d’un véhicule axé sur les entreprises connaissant une hausse momentanée de leurs bénéfices. Dans l’entretien qui suit, Greg Aldridge présente sa stratégie plus en détail.

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«L’idée est de trouver des sociétés capables de défier les lois de l’économie sur le long terme» GREG ALDRIDGE – M&G

Banque & Finance: Comment comparer et mesurer l’intangible de deux entreprises concurrentes et, par exemple, comment évaluer une notion aussi vague que son «expertise commerciale»? GREG ALDRIDGE: Prenons, par exemple, la politique de fixation des prix; c’est un facteur essentiel, dans la mesure où une faible majoration de prix permet d’augmenter une marge bien plus facilement qu’une réduction des coûts. Or, la politique de fixation des prix de deux entreprises par ailleurs identiques sur le plan compétitif, peut fortement varier. A la question, pensez-vous que vous pourriez hausser vos prix de vente,

B&F: Outre cette approche qualitative, vous utilisez également le modèle Holt. A quelles fins? G.A.: Ce modèle donne, à partir de l’évolution des cours sur vingt ans, les attentes implicites du marché pour un titre à un horizon de cinq ans. Par mon analyse, je me demande si l’entreprise peut soutenir sa croissance au-delà de ces cinq ans (i.e. si l’entreprise est dans un cercle vertueux durable ou non). Si oui, et en fonction du cours actuel, cela peut être un signal d’achat. B&F: N’est-il pas bien difficile de prévoir ce qui pourra arriver à un horizon supérieur à cinq ans? G.A.: Bien sûr, mais les grands changements imprévisibles qui affecteront les entreprises les toucheront plus ou moins toutes de la même manière. Par conséquent, leurs positions concurrentielles respectives tendront à rester inchangées, surtout si l’on se place

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ACTIONS INTERNATIONALES Performance sur cinq ans Données au 28.02.2010

Performances calendaires Données au 28.02.2010

du point de vue de leurs capacités à générer durablement des résultats supérieurs à la moyenne. Les grandes entreprises d’aujourd’hui ont été petites et leur position actuelle vient du fait qu’elles demeurent dans un cercle vertueux qui peut parfois durer depuis cent ans et plus. Evidemment, une telle approche est difficile à appliquer dans le domaine de la technologie: qui aurait pu prévoir à l’époque que Google prendrait largement le pas sur Yahoo? Cependant, même dans ce secteur, des entreprises comme l’allemand SAP, qui a établi des relations durables avec sa clientèle, sont difficiles à concurrencer. B&F: Le taux de rotation de votre portefeuille est assez faible. Néanmoins, pouvezvous nous parler de titres que vous avez été forcé de vendre? G.A.: Cette situation est plutôt rare, mais j’ai dû effectivement vendre AIG et ING car, dans les sociétés financières, le hors bilan comporte des risques difficiles à analyser. C’est d’ailleurs un secteur dans lequel nous sommes généralement sous-pondérés. Cela dit, mon équipe et moi-même avons tiré les leçons de la crise et affiné notre compréhension du secteur, en particulier sur le plan du contrôle et de l’appréhension des risques. B&F: En termes de style de gestion, comment vous définiriez-vous? G.A.: Il est fréquent d’assimiler titre de qualité à titre défensif. Selon ma conception, la qualité signifie également entreprise capable de dégager des rendements élevés de manière durable; j’ai donc une partie du portefeuille de qualité et défensif investi dans des valeurs du type Nestlé, ainsi qu’une autre partie plus cyclique mais néan-

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moins capable de maintenir les flux de bénéfices. Cette structure permet au fonds de dégager des performances régulières en dépit des variations cycliques. Par exemple, en 2009, l’essentiel de la performance émane des cycliques. B&F: Vous travaillez en étroite collaboration avec l’équipe d’analyse des risques de M&G. Vous est-il arrivé de devoir modifier votre portefeuille à partir de considérations de risque pur émanant de cette équipe? G.A.: Elle n’est pas chargée de faire la police! Son rôle consiste à nous faire prendre conscience des risques qui auraient pu nous échapper du fait de notre approche de pure sélection de titres, laquelle peut aboutir à un portefeuille agrégé présentant des risques non intentionnels. Les analystes nous poseront donc des questions du type: êtes-vous bien conscient de l’importance de

telle ou telle sous-pondération sectorielle? Cela a été le cas, par exemple, pour la technologie. Suite à cette remarque, j’ai analysé de plus près le secteur et l’ai renforcé avec des entreprises de qualité du type SAP, Cisco ou Ericsson. Ou encore, à la mi-2009, ma position sur Wallmart, qui avait beaucoup sous-peformé, était devenue très petite. L’équipe m’y a rendu attentif et j’ai renforcé cette position. Cela dit, l’analyse du risque est essentiellement quantitative, mais je ne me satisfais pas de simples données chiffrées. Je veux comprendre pour quelles raisons les nombres sont ce qu’ils sont, car je veux absolument éviter de prendre des décisions sur la seule base quantitative. Ce qui est mathématiquement vrai n’est pas forcément la réalité. Il faut se méfier de la puissance du raisonnement mathématique. ■ V.B.

Le fonds en bref Au bénéfice de 5 étoiles Morningstar, le fonds possède une notation qualitative «supérieure», juste au-dessous de la note maximale «élite». Fortune: 757,05 millions d’euros Indice de référence: FTSE World Nombre de positions: 64 (les dix premières représentent 22,6% des actifs) Taux de rotation annuel attendu: 30% Performance douze mois: 33,9% vs 30,2% (indice) Performance trois ans: –11,2% vs –21,7% (indice) TER: 1,91% Fondée en 1901, la société britannique M&G (qui fait partie du groupe Prudential) affiche 185 milliards d’euros sous gestion, dont 102 milliards investis en obligations et 60,4 milliards en actions (données au 30.09.2009). Sa gamme de fonds est relativement performante par rapport à la concurrence puisque la proportion de ses fonds situés dans les 1er et 2e quartiles varie entre 80 et 90% sur les périodes de un, trois et cinq ans. Greg Aldridge gère le Global Growth depuis 2007 mais, en tant que membre de l’équipe actions globales de M&G, il a travaillé en étroite collaboration avec le gérant précédent Graham French. Il est noté AA par Citywire. Depuis qu’il est gérant du fonds, soit depuis mai 2007, ses performances sur des périodes glissantes de trois ans placent le fonds dans le 1er quartile de la catégorie Morningstar des fonds investis en actions internationales. ■

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FONDS DE PLACEMENT CACEIS FASTNET (SUISSE)

L’industrialisation ne peut plus être un tabou Relativement jeune sur le marché suisse de la direction de fonds, Caceis Fastnet (Suisse) pourrait séduire les gérants en quête d’économies de coûts, de support à la distribution transfrontalière ainsi que de structures et de contrôles adaptés à un paysage réglementaire caractérisé par la mouvance et l’incertitude. Véronique BÜHLMANN

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ffet secondaire de la crise, les coûts de la gestion d’actifs ont pris l’ascenseur. Méfiance et durcissement réglementaire sont les deux mamelles de cette tendance perverse qui risque de perdurer. Dans un tel contexte, les gérants n’ont guère d’autre solution que d’augmenter leurs masses sous gestion ou de réduire leurs coûts. Pour Philippe Bens, directeur de Caceis Fastnet (Suisse) SA, il existe cependant un potentiel d’industrialisation important dans

Un bref historique 2004: Crédit Agricole SA et Caisse Nationale des Caisses d’Epargne annoncent leur intention de rapprocher leurs activités de services financiers aux institutionnels et aux entreprises en France et à l’étranger. 2005: Création de CACEIS 2006: Acquisition de Fidfund et création de Caceis Fastnet (Suisse). Acquisition de Olympia Capital International, groupe américain spécialisé dans l’administration de fonds alternatifs. 2007: Acquisition des activités de clearing et de conservation de HypoVereinsbank et création de Caceis Bank Deutschland. 2009: Création de Caceis Hongkong Ltd dans les activités d’administration et de support à la distribution de fonds. Création de Caceis Fastnet Deutschland dans l’administration de fonds. Le 30 juin 2009, Crédit Agricole SA acquiert 35% de Caceis, portant sa participation à 85%. ■

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le domaine de la gestion d’actifs, en particulier dans les entités suisses de petite et de moyenne taille. Nombre d’entre elles travaillent encore largement sur la base de mandats de gestion alors qu’elles pourraient rationaliser leur offre en créant leurs propres véhicules de placement collectifs. Les coûts de constitution étant inférieurs en Suisse à ce qu’ils sont au Luxembourg, Philippe Bens estime que le seuil de rentabilité d’un fonds peut être atteint dès que la masse sous gestion atteint 20 à 30 millions de francs. Selon lui, dans la mesure où elle consiste à gérer de la manière la plus efficace possible un portefeuille, «l’administration (des fonds) est au cœur du problème». Et, dans ce domaine, le groupe Caceis, grâce à sa taille et son implantation internationale (cf. encadré), a pu pousser très loin l’industrialisation de tous ses processus. Il est donc en mesure d’offrir une palette de services très compétitifs dans l’administration de fonds. Philippe Bens souligne, en particulier, ses avantages en matière de pooling, de création de véhicules à classes multiples ou encore la mise en place de structures de type master-feeder (fonds maître-nourrissiers). Habitué à servir des promoteurs/distributeurs de fonds dans différents pays, le groupe dispose de toutes les capacités pour résoudre aisément les problèmes fiscaux ou de mise aux normes locales. En outre, son implantation européenne lui permet d’avoir, au niveau de la structuration des produits, «une vision qui correspond à celle des clients locaux».

Vers un reporting délégué Selon le directeur de l’entrerpise en Suisse, un autre atout de Caceis réside dans la com-

«La réglementation évolue si rapidement qu’en deçà d’une certaine taille, il devient indispensable de déléguer la surveillance des portefeuilles» PHILIPPE BENS – CACEIS FASTNET

pliance et la gestion du risque. «C’est un service qui va intéresser la nouvelle génération de gérants», explique-t-il, citant, parmi les services proposés, la valorisation, le suivi et le contrôle des dérivés OTC, la capacité à élaborer des rapports adaptés aux diffé-

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CACEIS FASTNET (SUISSE) Caceis dans le monde Présent dans onze pays, le groupe occupe 3500 personnes. Il est noté AA-/A-1+ par S&P (au 25/06/2009). Il est au bénéfice des certifications ISO 9001 et SAS 70 type II pour la fiabilité des contrôles sur les traitements opérationnels et l’organisation. Pour ses principales activités, ses positions sont les suivantes: Conservation: 2330 milliards d’euros, 9e rang mondial et 1er rang européen Administration de fonds: 1060 milliards d’euros, 1er administrateur en Europe, 3e au Luxembourg et parmi les dix premiers pour les produits alternatifs Banque dépositaire: 665 milliards d’euros, n°1 en Europe et en France, n°4 en Allemagne (chiffres au 31.12.2009) En Suisse, il est le 7e administrateur de fonds par le nombre de fonds autorisés avec 60 fonds suisses administrés représentant 1,21 milliard d’actifs et sept fonds étrangers représentés en Suisse. Caceis Fastnet Suisse occupe actuellement 26 personnes. A travers sa participation dans Fidfund, direction de fonds immobiliers, il administre également 840 millions de francs d’actifs nets (1,15 milliard de francs d’immeubles) à travers cinq fonds autorisés, dont trois cotés à la Bourse suisse. ■

rentes normes, les rapports de mesure et d’attribution de performance ou encore les mesures de VaR. Pour tous ces services, Caceis a développé une plateforme unique, destinée aux clients externes. «Cette offre s’adresse à tous ceux qui sont appelés à valoriser un portefeuille, qu’il s’agisse de caisses de pension ou autres institutionnels… Au Luxembourg comme en France, Caceis offre déjà ce service aux compagnies d’assurances pour lesquelles la société effectue également le reporting réglementaire. Ce n’est pas leur métier et, dans la gestion également, nous constatons que les sociétés délèguent de plus en plus ce type d’activités. La réglementation évolue si rapidement qu’en deçà d’une certaine taille, il devient indispensable de déléguer la surveillance des portefeuilles.» Signe des temps, en décembre dernier, Deloitte a lancé au Luxembourg un service de conformité pour le secteur des fonds, un service qui comprend trois «hotlines» pour l’investissement, le marketing et les affaires.

duits paraissent particulièrement intéressantes, en particulier dans un contexte de remise en question de la gestion active par rapport à la gestion passive; remise en question qui augmente la pression sur les coûts. Et, sur ce chapitre, les auteurs appellent à une définition harmonisée dans toute l’Europe des frais imputés aux fonds. Ils plaident en faveur d’une vérité des coûts, laquelle impliquerait de tenir compte des coûts de distribution ainsi que des coûts de transaction. Enfin, ils proposent d’envisager une «rémunération à l’objectif»: la rémunération du gérant d’un fonds dépendrait de sa capacité à atteindre l’objectif de rendement ajusté au risque qu’il s’est assigné. L’étude s’interroge également sur le bienfondé de la prolifération des produits et souligne l’inadéquation fréquemment obserL’ART

vée entre les impératifs de liquidité des fonds, la stratégie des gérants ou les intérêts des investisseurs à long terme et ceux des tacticiens (par exemple, le «swing pricing» utilisé par certains fonds permet de protéger les avoirs des investisseurs à long terme des coûts engendrés par les flux d’entrée et de sortie des fonds). Ces propositions mettront certes du temps à se matérialiser, mais la volonté réglementaire pourrait accélérer les choses. Comme le soulignait Noël Amenc, responsable de la chaire de recherche sur les risques et la réglementation de l’industrie des fonds en Europe, chaire créée conjointement par EDHEC-Risk et Caceis en septembre dernier: «Jusqu’à présent, les crises financières n’avaient de conséquences négatives que pour les chiffres d’affaires des acteurs de l’industrie en impactant le volume des actifs gérés pour le compte d’investisseurs, ces derniers étant les seuls à supporter les risques de leur investissement. La crise récente a eu un impact non seulement sur les chiffres d’affaires, mais également sur les frais de fonctionnement des gérants pour le compte de tiers. Les entreprises de gestion de fonds et leurs prestataires de services ont eu à assumer certains coûts liés aux risques des investissements qu’ils gèrent, conservent, valorisent ou auditent. Plus spécifiquement, cette crise est synonyme d’un transfert d’une partie du risque des investisseurs vers les prestataires de services d’investissement et de services connexes.» Dans le domaine des fonds, le temps du «business as usual» est bien révolu. ■ V.B.

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La baisse des coûts est en marche Grâce à cette position diversifiée internationalement et par type d’instruments – fonds traditionnels, mais également hedge funds ou encore fonds de private equity (cf. brochure A thourough understanding of private equity, janvier 2010), Caceis se situe au cœur de l’industrie des fonds et peut donc en analyser efficacement les dysfonctionnements. Ainsi, dans son étude intitulée Le fonds idéal, une étude réalisée en partenariat avec PricewaterhouseCoopers, diverses propositions se rapportant aux coûts des fonds ainsi qu’à la conception des pro-

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Edward Burne-Jones, La Belle au Bois Dormant, 1894/95, huile sur toile, 126 x 237 cm, Dublin City Gallery The Hugh Lane

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FONDS DE PLACEMENT FIDELITY SUISSE

Parés pour l’inflation? L’inflation est encore rampante mais pourrait connaître des poussées très brutales. C’est la raison pour laquelle Alfred Strebel, le directeur exécutif de Fidelity Suisse, invite les investisseurs à se mettre en alerte et à envisager des stratégies susceptibles d’immuniser partiellement leurs portefeuilles. A côté des obligations indexées sur l’inflation, les actifs tangibles peuvent offrir une bonne protection. Véronique BÜHLMANN

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ême s’il n’est pas immédiat, le risque d’inflation ne doit pas être ignoré car les moyens de se protéger se renchériront au fur et à mesure de sa matérialisation. Les mesures de stimulation de l’économie adoptées par les gouvernements ont atteint une ampleur jamais connue jusqu’ici et, à lui seul, cet élément peut expliquer les faibles consensus des analystes quant au risque d’une poussée inflationniste. Cependant, tôt au tard, les banques centrales devront agir pour résorber les excédents. Trois scénarios seront alors possibles. Soit elles cessent trop rapidement de stimuler l’économie et cela entraînerait une dépression qui se traduirait par de la déflation. Soit elles instaurent une politique plus restrictive au bon moment, mais, comme le souligne Alfred Strebel, «cela tiendrait du miracle», tant le timing de ce type de décision est délicat. Soit les banques centrales retardent leur action et cette lenteur débouchera inévitablement sur des poussées inflationnistes, lesquelles pourraient se manifester dès 2011.

Encore un potentiel de hausse Entre-temps, les marchés actions recèlent encore un certain potentiel et ce, pour plusieurs raisons. A l’heure actuelle, le sentiment des investisseurs est encore très négatif. Les institutionnels, comme les privés, sont encore faiblement exposés aux actions. Ils leur préfèrent encore les obliga-

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«Il faut envisager une réorientation des portefeuilles et mettre en place une stratégie d’immunisation contre l’inflation, aussi bien pour les titres à revenus fixes que pour les titres à revenus variables» ALFRED STREBEL – FIDELITY SUISSE

tions, voire les papiers monétaires, et ce, alors que les résultats des entreprises sont meilleurs que ce qui avait été anticipé. Un changement de leur humeur se répercuterait donc favorablement sur les actions. Par ailleurs, la totalité des sommes prévues par les programmes de stimulation de l’économie n’est pas encore investie dans les entreprises. Grosso modo, on peut estimer qu’un tiers seulement de ces 4350 milliards de dollars l’a déjà été. Au fur et à mesure de leur investissement, ces montants iront soutenir, en priorité, les dépenses d’infrastruc-

ture, que ce soit dans les marchés développés comme les Etats-Unis, où les besoins de modernisation sont énormes, ou dans les marchés émergents comme la Chine. Enfin, la création de papier-monnaie a été telle qu’elle équivaut à une destruction des actifs. Cela signifie que les investisseurs se tourneront de plus en plus vers les actifs réels de type immobilier, métaux précieux et autres matières premières, soutenant ainsi les titres de ces secteurs. L’un dans l’autre, ces facteurs conduisent à penser que, malgré sa forte progression depuis son point bas atteint en mars 2009, le marché recèle encore un potentiel de hausse de l’ordre de 10-15%. Sur la base de ces anticipations, Alfred Strebel recommande d’envisager une réorientation des portefeuilles et de mettre en place une stratégie d’immunisation contre l’inflation, aussi bien pour les titres à revenus fixes que pour les titres à revenus variables. Concernant les premiers, dès que poindront les premiers frémissements d’un serrement de vis de la part des banques centrales, il paraîtra opportun de sortir des obligations d’Etat pour se positionner en titres indexés sur l’inflation.

Une période propice à la protection En effet, ce marché a, aujourd’hui, atteint une taille tout à fait respectable. Le marché global des obligations gouvernementales indexées sur l’inflation représente 1,5 billion de dollars, les trois principaux émetteurs étant, dans l’ordre, les Etats-Unis, la GrandeBretagne et la France (notons que le marché de la dette privée s’est, lui aussi, étoffé mais reste encore très marginal du point de vue de sa taille). En outre, depuis 2009, la liquidité du marché s’est améliorée. Dans ce

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FIDELITY SUISSE Performance du fonds depuis son lancement

Le point mort d’inflation se situe à un niveau historique attrayant New Zealand

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contexte, une stratégie globale – hedgée contre le risque de change – paraît la mieux adaptée. Elle offre à la fois un élément de diversification et la possibilité de tirer parti des opportunités d’arbitrage entre les différents marchés. Comme l’écrivait Andy Weir, gérant du Global Inflation Linked Bond Fund de Fidelity, dans son commentaire de février 2010: «Je m’attends à ce que l’inflation devienne un sujet de préoccupation important en 2011. C’est un facteur que le marché n’a pas encore intégré dans ses prix. Sur le marché américain, le point mort d’inflation à dix ans se situe à 2,3% (au 18.02.2010) et je crois que cela représente un niveau attrayant d’un point de vue historique1. La période actuelle est donc propice à la constitution de protections contre l’inflation…» Plus tard, les obligations indexées pourraient devenir trop chères, avertit le gérant. Côté actions, la stratégie de protection consiste à détenir des actifs qui profitent des causes, voire même constituent la cause des pressions inflationnistes: globalement, ce sont les actifs tangibles tels que les matières premières, l’immobilier commercial ou encore les infrastructures. Pour mettre en œuvre une telle stratégie, Fidelity propose, depuis septembre dernier, le FF Global Real Assets Securities Fund. Guidé par trois thèmes, à savoir les capacités de production d’énergie limitées des pays hors OPEP, la hausse des actifs tangibles et un prochain cycle de dépenses d’investissement alimenté par les pouvoirs publics, le fonds se concentre sur les secteurs suivants: les matériaux et les matières premières (y compris les métaux précieux), l’immobilier commercial, les biens d’inves-

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tissement, les services aux collectivités et les infrastructures.

Du tangible de conviction Malgré cet univers relativement large, le portefeuille est concentré sur 40 à 60 titres et le gérant peut dévier assez largement de son indice (+/–10% pour les positions par titre), la sélection des titres étant notamment fonction du pouvoir de fixation des prix des entreprises tout au long de la chaîne de production/consommation. L’exposition sectorielle n’est pas prédéterminée; elle est fonction de l’évolution du cycle économique. Ainsi, à l’heure actuelle, le gérant surpondère assez fortement les valeurs industrielles qui représentent près de 30% de ses actifs (20% dans l’indice de référence) et ce, au détriment de tous les autres secteurs, l’immobilier étant le secteur le plus fortement sous-pondéré, à 12,5% des actifs (contre 20% dans l’indice). L’historique de performance du fonds est court. Mais, sur ses cinq premiers mois d’existence, il a réalisé une progression de 11%, supérieure de 3% à celle de son indice et les résultats d’un compte pilote géré selon la même stratégie ont donné, pour la période janvier-septembre 2009, une performance de 62% contre 17,5% pour l’indice. Par ailleurs, le gérant du fonds, Amit C. Lodha, précédemment analyste sur le secteur des matériaux de base, gère également le FF Global Industrials Fund depuis avril 2008. Depuis cette date, il a réalisé une performance de –10,7% contre –18,7% pour l’indice (+46,2% en 2009 vs 32,6% pour l’indice). A la différence du Global Real Assets, le Global Industrials est moins un fonds de conviction (100 à 140 positions) et

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il n’englobe ni les infrastructures ni l’immobilier. Mais, compte tenu de l’importance des équipes d’analystes et de gérants dont dispose le groupe, cette extension de l’univers d’investissement de Amit Lodha ne devrait guère poser de problèmes. L’inflation étant un phénomène global, les corrélations des différents indices de prix à la consommation des principaux marchés sont très élevées. Il paraît judicieux d’y répondre par une stratégie globale, insiste Alfred Strebel. Et parmi tous les véhicules de placement, il privilégie les actions, surtout pour ce qui concerne le secteur des matières premières: «Lors de la forte correction intervenue en 2008, les instruments indirects de type certificats ont fortement souffert du fait qu’il n’y avait plus de liquidité sur le marché. Cela n’a jamais été le cas des actions. Même si elles se négociaient à des prix peu favorables, du moins était-il toujours possible de procéder à des transactions. La liquidité est un critère essentiel.» Visiblement les investisseurs privés peinent à réorienter leurs portefeuilles puisqu’à fin février, la fortune du fonds Global Real Assets n’était que de 39 millions de dollars. ■ V.B.

La comparaison entre le rendement de référence des obligations d’Etat «normales» et le rendement des obligations indexées sur l’inflation (hors hypothèse d’inflation, c'est-àdire sur la base du coupon courant et du prix), contient le «break-even» rate, c'est-à-dire le rendement qui inclut l’anticipation «courante» de l’inflation, désigné également par «le point mort d’inflation». Si le niveau actuel de l’anticipation d’inflation actuelle est de 2,3%, il y a de bonnes raisons de penser que les obligations indexées sur l’inflation sont «peu chères», puisque l’inflation effective sera probablement, au moins pour un temps, plus élevée. Le niveau moyen en Occident, sur les trente dernières années, est plus proche de 3% que de 2% (p.a.).

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FONDS DE PLACEMENT PRIVATE EQUITY

Quelle place pour les fonds de fonds? Connu pour ses performances et son absence de corrélation avec les marchés boursiers, le private equity est désormais une classe d’actifs à part entière. Les fonds de fonds sont l’un des moyens d’y accéder et connaissent depuis quelques années un engouement certain. Comment expliquer cette évolution? Charles SOULIGNAC, P.-D.G. de Fondinvest Capital

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e concept de fonds de fonds est apparu en Europe au début des années 90 sous l’impulsion d’équipes assurant la gestion d’actifs pour le compte d’investisseurs institutionnels. L’activité consistait alors simplement en une extension du rôle de «gatekeeper», auquel s’ajoutaient des responsabilités discrétionnaires d’investissement et de suivi des investissements. Ces équipes d’investissement étaient alors de taille très limitée (une ou deux personnes). Certaines d’entre elles se sont progressivement renforcées pour offrir à des tiers investisseurs ce service initialement fourni à un seul institutionnel. Le nombre de gestionnaires de fonds de fonds de private equity a connu une forte croissance au cours de la dernière décennie, passant d’une dizaine d’acteurs à plus de 250 au niveau mondial.

Optimiser le rapport risque/rentabilité Malgré la récente crise financière et un contexte économique difficile, la classe d’actifs du private equity suscite toujours l’intérêt des investisseurs institutionnels. Si certains choisissent de constituer une équipe en interne dédiée à la sélection des fonds, une grande majorité opte pour l’investissement dans des fonds de fonds. Hormis de permettre aux investisseurs de bénéficier d’une stratégie définie par des professionnels de l’investissement, un des

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atouts majeurs des fonds de fonds est de leur offrir une diversification significative en termes de géographie, segment d’intervention, secteur et millésime. Pour une allocation de 25 millions d’euros par exemple, un investisseur agissant seul n’accéderait pas à plus de trois ou quatre fonds et obtiendrait difficilement la forte diversification recherchée en private equity pour afficher régulièrement des performances élevées. Autre argument en faveur de l’utilisation des fonds de fonds: l’investissement dans des fonds auxquels les investisseurs ne pourraient pas avoir accès. La plupart des gestionnaires de fonds de private equity, notamment les plus performants, déterminent le montant minimal que les investisseurs doivent engager dans leurs fonds, lequel peut s’avérer dissuasif pour certains, notamment si leur allocation au private equity n’est pas significative ou s’ils souhaitent diversifier les risques en investissant dans plusieurs fonds.

Du néophyte à l’investisseur expérimenté Traditionnellement utilisés par des investisseurs novices ou par ceux ayant une allocation au private equity peu significative, les fonds de fonds sont aussi souscrits par des investisseurs expérimentés allouant des sommes importantes à la classe d’actifs du private equity. Les fonds de fonds constituent une première étape logique pour tout investisseur désirant s’initier à la classe d’actifs et possédant des ressources financières et humaines limitées. Les fonds de fonds leur offrent, dans ce cas, une compétence métier adaptée à la nature de l’investissement.

«Un des atouts majeurs des fonds de fonds est d’offrir aux investisseurs une diversification significative en termes de géographie, segment d’intervention, secteur et millésime» CHARLES SOULIGNAC FONDINVEST CAPITAL

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FONDS DE PLACEMENT Mais les fonds de fonds peuvent également être utilisés par des investisseurs plus aguerris souhaitant diversifier davantage leur portefeuille, par exemple en accédant à des marchés géographiques ou sectoriels spécifiques dont ils n’ont pas encore une bonne connaissance ou auxquels leurs ressources internes ne sont pas suffisamment adaptées. Les fonds de fonds peuvent aussi répondre à des problématiques de taille de frappe dans le cas d’investisseurs ayant des montants d’investissements unitaires conséquents ne correspondant pas aux prérequis de fonds de petite taille ou situés dans des niches spécifiques.

Les apports d’un gestionnaire de fonds de fonds Les fonds de fonds cumulent leurs propres frais de gestion à ceux de leurs fonds sousjacents. Au-delà de la rémunération d’un service, ils présentent différents avantages pour l’investisseur pour autant que quelques conditions soient remplies. En premier lieu, ils doivent offrir une gestion professionnelle. L’investissement dans un

L’ART

fonds est, en effet, un métier qui exige un investissement humain et un savoir-faire significatif en matière d’analyse, de suivi et de support, et requiert, en outre, une connaissance spécifique des marchés locaux et des équipes de gestion. En deuxième lieu, ils doivent offrir une sélection des fonds les plus performants. Alors que les gestionnaires de portefeuilles cotés affichent, généralement, des performances reflétant plus ou moins l’indice, celles affichées par les gestionnaires de fonds de private equity peuvent varier considérablement d’une équipe à l’autre. Cela souligne ainsi le caractère essentiel de la sélection individuelle des gestionnaires. La sélection d’un fonds va, toutefois, au-delà de la simple étude des performances passées. De nombreux critères tels que la qualité de l’équipe, la stratégie déployée au regard de l’évolution des marchés, l’alignement des intérêts, les termes et conditions des fonds ou encore la concurrence doivent être pris en compte pour s’assurer du maintien de la performance sur le long terme.

DANS

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PRIVATE EQUITY

Enfin, ils doivent offrir un accès aux meilleures équipes. Il peut être difficile pour certains investisseurs d’accéder aux fonds les plus performants du marché, faute d’une connaissance préalable des équipes de gestion ou d’une ouverture très limitée à de nouveaux souscripteurs. De par leur ancienneté dans le métier, leur réputation établie et les relations entretenues avec les gérants de fonds directs, les gestionnaires de fonds de fonds peuvent, quant à eux, se positionner très tôt, lors des levées de fonds.

Le mandat de gestion, un dérivé du fonds de fonds Contrairement à un fonds de fonds qui propose une seule et même allocation à tous ses souscripteurs, le mandat de gestion propose une allocation personnalisée et adaptée au profil de l’investisseur. Il constitue ainsi une alternative intéressante pour tout investisseur souhaitant définir sa propre stratégie d’investissement et bénéficier de l’expertise d’un gestionnaire de fonds de fonds. L’investisseur se trouve ainsi déchargé de tout suivi administratif et de la difficile tâche d’évaluation des actifs. Cependant, un montant minimum est requis et s’avère être plus important que lors de la souscription à un fonds de fonds. Les fonds de fonds sont un excellent véhicule pour investir en private equity, dans la mesure où ils répondent à la demande de différentes catégories d’investisseurs. Ces derniers se doivent néanmoins de sélectionner un gestionnaire de fonds de fonds répondant à leurs attentes en termes de stratégie et capable de démontrer une performance prouvée sur le long terme. ■ C.S.

A propos de Fondinvest Capital

Edward Burne-Jones, Persée et les Grées, vers 1878–1892, huile sur toile, 153,5 x 170 cm, Staatsgalerie Stuttgart, © Photo: Staatsgalerie Stuttgart

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Fondée en 1994, Fondinvest Capital est une société de gestion indépendante, spécialisée dans les fonds de fonds de private equity, ayant pour cible le segment particulièrement attractif du mid-market européen. Avec plus de 2 milliards d’euros d’actifs sous gestion depuis sa création, la société, à travers son équipe de professionnels du private equity, vise à offrir à ses investisseurs un accès privilégié aux fonds les plus performants du marché. Depuis 1994, Fondinvest Capital a lancé et géré quatre fonds fonds de primaires, quatre fonds secondaires et trois mandats pour le compte d’investisseurs français et internationaux. ■

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FONDS DE PLACEMENT

De la liquidité pour les hedge funds La crise financière a profondément modifié le marché secondaire des hedge funds. De réduit, peu animé et caractérisé par des échanges de parts qui se traitaient avec des agios importants, il s’est élargi, en volume et en nombre d’intervenants, et les parts s’y traitent avec des décotes qui peuvent atteindre plus de 70% de leur valeur nette d’inventaire. La jeune société londonienne Gamma Finance fait partie des rares spécialistes de ce marché. Véronique BÜHLMANN

F

ondée à Londres en novembre 2009, Gamma Finance se consacre à la négociation de gré à gré de parts ou de portefeuilles de hedge funds, un marché dont la taille a brutalement augmenté avec la multiplication des actifs illiquides. Sur les quelque 1400 milliards de dollars d’actifs que représentent les hedge funds, on peut estimer que 8 à 9% étaient illiquides en 2009, une proportion qui revient progressivement à 6-7% actuellement. Ceci représente néanmoins un volume de 70 à 90 milliards d’actifs peu ou très illiquides, estime Florian de Sigy, cofondateur de la société aux côtés de Javier Rodriguez. Cette croissance brutale des actifs illiquides est une conséquence directe de la crise. Pour protéger leurs investisseurs, c’est-à-dire ne pas vendre à des prix sacrifiés certains de leurs actifs, les gérants de hedge funds ont, dans un premier temps, instauré des «gates», à savoir des restrictions aux remboursements de parts puis, dans un second temps, certains ont regroupé leurs actifs illiquides dans des «side pockets». A ces actifs gelés sont également venus s’ajouter ceux des hedge funds en liquidation. Cependant, tous les investisseurs n’étaient ou ne sont pas en mesure «d’attendre le dégel». «En 2009, explique Florian de Sigy, certains d’entre eux se sont vus forcés de liquider leurs positions en hedge funds et l’ont fait à des cours très en dessous des VNI. Mais, depuis le dernier trimestre 2009, la situation a évolué: aux ventes panique ont succédé des

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«Toute la difficulté de faire correspondre ventes et achats réside dans le fait que, comme souvent en économie, 80% des acheteurs veulent les mêmes 20% de l’offre» FLORIAN

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SIGY – GAMMA FINANCE

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HEDGE FUNDS ventes plus raisonnées. Les vendeurs veulent tourner la page et sortir de positions encore illiquides mais à des prix plus raisonnables.»

Une intermédiation difficile C’est le cas d’un certain nombre de fonds de hedge funds qui sont vendeurs de «side pockets» ou encore de fonds de hedge funds en liquidation. L’autre moitié du marché vendeur est constituée de banques privées, family offices ou encore d’institutionnels. Côté acheteurs se trouvent les banques pour une partie de leurs fonds propres dédiés à ce type d’actifs ou pour couvrir certaines de leurs positions, des clients privés de type «very high net worth individuals» et, représentant environ la moitié des acheteurs, des fonds de hedge funds spécialisés dans les actifs illiquides et qui cherchent à tirer parti des décotes. «Toute la difficulté de faire correspondre ventes et achats réside dans le fait que, comme souvent en économie, 80% des acheteurs veulent les mêmes 20% de l’offre. Notre tâche consiste à élaborer des porte-

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feuilles qui peuvent convenir aux uns et aux autres et donc à bien connaître leurs besoins respectifs. Javier Rodriguez possédant une expérience de gestion de fonds à rendement absolu et moi-même une expérience de vente de produits dérivés sur hedge funds, nous maîtrisons suffisamment les deux aspects du problème pour parvenir à jouer notre rôle d’intermédiaire entre acheteurs et vendeurs», explique Florian de Sigy.

Une large fourchette de décotes Quelle est la décote moyenne à l’heure actuelle? C’est une question qui n’a que peu de sens étant donné l’extrême dispersion des cours auxquels sont effectuées les transactions. Cependant, Florian de Sigy estime qu’elle est de l’ordre de 5 à 10% pour les grands fonds qui ont dégagé de bonnes performances mais qui ont encore bloqué partiellement leurs remboursements (30 à 40% du fonds illiquide). La décote descend à 2030% lorsque la proportion d’actifs illiquides augmente, que la raison de cette illiquidité

fait que la sortie possible est encore lointaine et qu’il existe des incertitudes quant à la valorisation de ces actifs illiquides. Pour les «side pockets» qui ne contiennent donc, par définition, que des actifs illiquides, la décote se situera aux alentours de 50% et pourra descendre jusqu’à 70% s’il existe, en outre, des inconnues juridiques (du type possibilité de recours contre le gérant du fonds, le risque juridique étant particulièrement élevé sur le marché américain). De ce qui précède, il paraît évident que le «grand nettoyage» va durer bien au-delà du printemps, notamment parce qu’un important travail de valorisation doit être effectué pour les stratégies les plus illiquides. Mais, conclut Florian de Sigy, «le périmètre des acheteurs s’élargit et, côté vendeurs, les prix progressent. En ce qui nous concerne, nous sommes en phase de recrutement et envisageons de nous étendre géographiquement. Genève peutêtre et l’Europe du Sud, car dans ce métier la proximité de la clientèle, tout comme la confidentialité, est essentielle». ■ V.B.

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FONDS DE PLACEMENT ALEXANDRE FINANCE

Les détenteurs de parts ont des droits Ils ont le droit à la transparence, à l’égalité devant l’information et, plus fondamental encore, à la pérennité de la société de gestion auprès de laquelle ils investissent. Et, sans une infrastructure solide ni une formalisation des droits et des devoirs des associés de la société de gestion, les dérives sont fréquentes. C’est la raison pour laquelle Alexandre Finance, faisant œuvre de pionnier, recourt à la notation extrafinancière pour sa gouvernance.

«S

i l’on ne fait pas évoluer notre manière de travailler, la réglementation s’en chargera», affirme Michel Peronne, président et fondateur de la société de gestion française Alexandre Finance. Cet ex-gérant du fonds Toqueville Dividende qui, lorsqu’il l’a quitté en novembre 2006, pesait 1,3 milliard d’euros, est un fervent défenseur de la bonne gouvernance car, selon lui, «il est impossible de déconnecter la performance des produits du mode de fonctionnement d’une société de gestion». En conséquence, il a mandaté l’agence BMJ Ratings pour noter la qualité de la gouvernance de sa société. Pour cette évaluation, quatre critères ont été pris en compte: 1. la composition, les attributions et les règles de fonctionnement des organes de direction et de contrôle; 2. la qualité et l’accessibilité des informations aux actionnaires; 3. la transparence et la lisibilité de la communication financière et extra-financière; 4. les procédures d’audit interne et de reporting, ainsi que la prise en compte des risques extrafinanciers. Au terme de cette analyse de deux mois, BMJ ratings a attribué une note AA+ à Alexandre Finance, soit pratiquement la plus haute note, notamment parce que «la répartition des pouvoirs, le partage de la valeur – formalisé par une charte d’associés – place la société très au-dessus de la moyenne du secteur».

Des tigres dans une 2 CV Concrètement, comment cette attitude se traduit-elle dans la gestion et, par exemple, dans celle du fonds «Alexandre» géré par

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Frank Hennin et Michel Peronne? La gestion y est de type 2 CV, du moins sur le plan de la simplicité mécanique: les gérants cherchent à dégager de la plus-value à partir d’une sélection de 60 à 70 entreprises sousévaluées (potentiel de valorisation de 30% en moyenne) en France et en Europe. Ils travaillent totalement indépendamment des indices – le CAC 40 avec dividende réinvesti n’est donné que pour des raisons réglementaires – et visent à construire un portefeuille contenant au moins 40% de valeurs défensives, à savoir capables de résister mieux que le marché en cas de baisse brutale de celui-ci. Le fonds s’interdit de recourir aux marchés à terme, y compris dans un but de couverture. La raison: «Je crois que les marchés fonctionnent plutôt selon la théorie du chaos (imprévisibilité) que selon celle des systèmes et, par conséquent, je ne peux pas avoir de scénario précis quant à son évolution future, explique Michel Peronne, qui poursuit: Nous nous limitons à ce que nous savons faire, c’est-à-dire identifier les sociétés possédant des actifs tangibles et évaluer leur potentiel de valorisation.»

Des coûts justifiés Le gérant ne passe jamais en zone rouge et maintient un volant de liquidités de l’ordre de 8-10%. Il ne veut pas avoir à dénouer de positions en cas de rachats de parts et souhaite surtout garder une certaine marge de manœuvre pour pouvoir bénéficier des occasions lorsqu’elles se présentent (achats de blocs importants à des prix intéressants). En cas de souscriptions, le gérant ne pratique pas le «saupoudrage» (renforcement de toutes les positions) et préfère attendre que se présente l’opportu-

nité d’une entreprise réellement sousévaluée. Selon lui, cette politique de liquidités ne pénalise pas la performance à long terme, comme l’a prouvé sa gestion de Toqueville Dividende, fonds dans lequel il détenait en moyenne 12 à 15% de cash.

«Je crois que les marchés fonctionnent plutôt selon la théorie du chaos que selon celle des systèmes et, par conséquent, je ne peux pas avoir de scénario précis quant à son évolution future» MICHEL PERONNE – ALEXANDRE FINANCE

Côté coûts, le gérant se situe dans la moyenne du marché français avec un TER variant entre 2,40 et 3%, un coût qu’il estime largement justifié: «Les coûts d’organisation dont dépend la qualité de gestion sont élevés… Les commissions de gestion servent à investir dans l’outil de travail de manière à assurer la maîtrise du risque.» Avec 125 millions d’euros d’actifs sous gestion, Alexandre Finance, qui compte six associés détenteurs de 85% de son capital (les 15% restants étant détenus par un family office suisse actif dans le private equity), est encore petite, mais Michel Peronne estime avoir mis en place une infrastructure capable de gérer 2 à 3 milliards. ■ Véronique BÜHLMANN

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GESTION DE FORTUNE MATIÈRES PREMIÈRES

Investir autrement! Les matières premières sont devenues des actifs incontournables dans la gestion de portefeuille. De nouvelles approches d’investissement apparaissent pour en extraire tout le potentiel de diversification et de performance. Explications. Jean-Gabriel ATTALI, analyste quantitatif, PhD, Exane Derivatives En collaboration avec Yann CORNIL, Exane Derivatives

D

ans un contexte encore incertain sur les grandes classes d’actifs, les matières premières pourraient prendre une place de plus en plus importante dans les portefeuilles. Une allocation de 5 à 10% n’est pas rare aujourd’hui, et les investisseurs témoignent d’une attention croissante pour ces supports d’investissement «à part», très diversifiants… mais aussi très volatiles. Les ETFs sont sans doute les véhicules les plus simples pour investir dans les matières premières, à condition d’être suffisamment expérimenté pour réaliser sa propre sélection. D’où l’intérêt de faire appel aux sociétés de gestion qui interviennent via des fonds dits «long only», c’est-à-dire positionnés à l’achat uniquement. Leurs performances et leur volatilité historique sont souvent proches de l’indice de référence (GSCI). Or, ce dernier n’a progressé que de 3% par an sur les dix dernières années, reflétant la forte dispersion des performances des matières premières. Il semble que l’approche long only ne soit pas optimale pour capter la prime de risque des matières premières, véritable rémunération de l’investisseur. En effet, la prime de risque est liée aux contrats à terme et peut rémunérer tantôt son acheteur (approche long), tantôt son vendeur (approche short). Comment expliquer cette particularité? Comment une approche d’investissement long/short permet-elle d’en profiter?

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«Les ETFs sont sans doute les véhicules les plus simples pour investir dans les matières premières, à condition d’être suffisamment expérimenté pour réaliser sa propre sélection» JEAN-GABRIEL ATTALI – EXANE

Rouler gagnant Rappelons d’abord que les marchés des matières premières sont organisés différemment des autres grandes classes d’actifs. En effet, dans la grande majorité des cas, les investisseurs financiers n’accèdent pas aux marchés au comptant (spot): c’est là où

interviennent producteurs et industriels qui attendent la livraison – et donc la détention physique – de la matière première. Hormis le cas exceptionnel de l’or, l’investisseur accède à des contrats à terme sur les matières premières. De tels contrats, échangeables sur les marchés à terme, ont, à l’origine, été créés pour que les acteurs industriels ou agricoles puissent se couvrir contre les variations des prix. Mais, aujourd’hui, ces contrats sont également utilisés par les acteurs financiers. Pour s’exposer au prix de la matière première sous-jacente, l’investisseur achète un contrat à terme dont la maturité est la plus proche et le revend avant la date d’expiration (pour éviter la livraison physique). Cette position vendeuse est accompagnée d’une position acheteuse sur le contrat de maturité suivante et ce, tant que l’on souhaitera être exposé au prix. Ce «roll» s’avère être une stratégie gagnante si la structure des prix des contrats à terme est en backwardation: le prix de la matière première sous-jacente augmente à mesure que l’échéance diminue. Une telle situation arrive, par exemple, en cas de pic de demande: les stocks s’amenuisent et les prix sur échéances courtes augmentent davantage que ceux sur échéances longues. A l’opposé, si la matière première se trouve en situation de contango (plus la maturité est éloignée, plus le prix est élevé), le roll aura une performance négative. Dans ce cas, l’investisseur financier aura tout intérêt à vendre (adopter une position short) le contrat. Ce fut, par exemple, le cas, début 2009, sur le marché du pétrole brut. La demande pour cette matière première était alors si faible que les réserves étaient pleines. Les compagnies pétrolières ont alors commencé à stocker le pétrole à l’étranger, augmentant ainsi les coûts de stockage. Dès lors, le prix des contrats à terme surpassait largement le prix au comptant.

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MATIÈRES PREMIÈRES

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cherche à déterminer si la matière première amorce un cycle haussier ou un cycle baissier.

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Un nouvel indice long/short

Performance de la stratégie long/short sur les commodities (en EUR)

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Saisir la prime de risque La différence entre le prix au comptant et le prix à terme traduit ainsi le «service d’assurance» que rend le contrat à terme. Il peut rendre service à l’acheteur du contrat, soit au producteur de matières premières qui cherche à sécuriser ses revenus futurs.

«L’approche long only n’est pas optimale pour capter la prime de risque des matières premières, véritable rémunération de l’investisseur»

Mais il peut aussi rendre service au vendeur du contrat, soit à l’industrie consommatrice de matières premières qui cherche à contrôler ses coûts. Et ce service d’assurance, ou prime de risque, l’investisseur financier va chercher à l’encaisser. En effet, contrairement aux actions et aux obligations qui versent des revenus (dividendes et coupons), les matières premières ne peuvent rémunérer l’investisseur que par le biais de la hausse des cours. Mais c’est sans compter sur cette prime de risque, qui, d’un point de vue financier, participe à la rémunération des investisseurs. Il s’agit donc d’une véritable opportunité, à condition de bien identifier les situations dans lesquelles

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la prime de risque rémunère positivement l’achat du contrat à terme, et celles dans lesquelles elle rémunère la vente. Sur le long terme, la meilleure approche d’investissement sur le marché des contrats à terme sur matières premières est donc une approche systématique d’achat/vente. La vente finançant l’achat, cette approche a aussi le mérite d’être neutre sur les tendances globales du marché. Quelques fonds long/short de matières premières existent déjà sur le marché. Ces fonds adoptent une gestion quantitative «passive», par laquelle les rebalancements périodiques, tant pour la poche d’achat (long) que pour celle de vente (short), se décident en fonction de signaux de trading. Et, pour la plupart de ces fonds, les signaux d’achat ou de vente sont déterminés en fonction d’un momentum: à partir des performances passées, on

Cependant, ce type de signaux ne prend pas en compte la particularité des contrats à terme sur matières premières. En effet, la forme de la courbe du contrat, qui peut traduire une situation de contango ou de backwardation, donne également de précieux signaux sur la configuration de marché (par exemple, l’état des stocks), autant d’indicateurs pertinents de l’évolution des cours. Les analystes quantitatifs d’Exane Derivatives ont ainsi développé un indice long/ short (investissable via un fonds ou un certificat) géré à partir des deux types de signaux de trading: le momentum de performance et la courbe du contrat. Sur un univers de 19 matières premières, l’indice, rebalancé périodiquement, est investi en long dans les matières premières présentant le meilleur potentiel sur les deux plans, et en short dans les matières premières les moins bien notées. Sur les dix dernières années, alors que l’indice global GSCI progresse de 3% par an, l’indice de stratégie achat/vente d’Exane Derivatives progresse de plus de 20% par an selon les simulations. Si la volatilité de cet indice, en ligne avec l’indice de référence (de 20 à 25%) décourage certains investisseurs, des solutions de structuration peuvent être proposées pour allouer, de manière dynamique, le capital entre l’indice long/short et des actifs monétaires, et ainsi maintenir une volatilité inférieure à 10%. ■ J.-G.A. & Y.C. NB: les intertitres sont de la rédaction.

Du long/short absolu en «live» En juillet-août 2007, Banque & Finance publiait un article consacré à Tiberius Asset Management, société spécialisée dans la gestion d’actifs sur matières premières. Parmi les quatre fonds consacrés aux matières premières qu’elle propose, le Tiberius Absolute Return Commodity OP vise «à dégager des rendements stables et peu volatils en utilisant des stratégies long/short ainsi que des stratégies avec levier». Destiné à des institutionnels tels que caisses de pension et compagnies d’assurance, il s’agit d’un véhicule très conservateur du point de vue des risques et l’accent y est mis sur les stratégies en valeur relative (par exemple long maïs/court soja) plutôt que sur les stratégies directionnelles. Depuis son lancement en décembre 2007, ce fonds de 252 millions et dont la monnaie de référence est l’euro, a dégagé une performance de 14,8% (contre 7,1% pour l’Euribor trois mois) assortie d’une volatilité de 5,19%. Ainsi, malgré la forte baisse de l’indice matières premières en 2008, ce fonds est parvenu à tenir sa promesse de «dégager des rendements positifs quelle que soit la direction des marchés», un fait suffisamment rare pour être souligné! ■ V.B.

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GESTION DE FORTUNE ASSOCIATION DES STRATÉGISTES D’INVESTISSEMENT

Un repère pour votre allocation d’actifs Créée fin 2009, l’Association des stratégistes d’investissement de Genève (l’ISAG) regroupe les stratégistes des principaux établissements de la place. Elle publie chaque mois un consensus en quatre points, issu de la réflexion de ses membres: le scénario économique, les prévisions financières, le portefeuille équilibré type et les questions du mois. Une première en Suisse.

S

i la publication de consensus d’investissement est chose courante sur la plupart des grandes places financières internationales, Genève ne disposait d’aucun équivalent jusqu’à la fin de l’année dernière. Ce manque est aujourd’hui comblé grâce à l’Association des stratégistes d’investissement de Genève, qui publie désormais un baromètre mensuel, véritable synthèse des avis de ses membres actifs dans les principales banques de la place. «L’idée de départ était d'enrichir le débat au sein de notre profession à Genève tout en assurant la promotion de l’expertise en matière de stratégie d’investissement. Notre démarche vise également à renforcer la crédibilité de notre place financière», explique Mourtaza Asad-Syed, responsable de la recherche chez SG Private Banking (Suisse) SA et président-cofondateur de l’association. Avec ses deux confrères, Fabrizio Quirighetti, chef économiste à la Banque Syz & Co, et Emmanuel

Allocation d’actifs – portefeuille équilibré en euros (mars 2010) Alternatifs 16%

Monétaire 8% Obligations publiques 11%

Matières premières 6%

Obligations privées 21% Actions 38%

Source: ISAG

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Ferry, directeur des investissements de la Banque Pâris Bertrand Sturdza, ils ont réussi à fédérer une vingtaine de professionnels représentant une masse sous gestion supérieure à 400 milliards de francs. «Nos membres disposent d’une véritable expertise et exercent des responsabilités opérationnelles dans les comités d’investissement de leurs établissements respectifs», souligne le président de la jeune association.

Un baromètre inédit à Genève Le cœur de l’activité de l’ISAG se joue lors du petit déjeuner mensuel, au cours duquel chacun expose sa vision des marchés et les conséquences qui en sont tirées en matière d’allocation d’actifs. «Chaque mois, tous nos membres renseignent un questionnaire en plusieurs points. Nous en faisons la synthèse pour publier notre consensus et le rendre public», explique Mourtaza Asad-Syed, qui se réjouit de la richesse des échanges. «Ces discussions, qui restent off-the-record, nous permettent parfois d’élargir nos perspectives grâce au profil différent de nos membres», ajoute Emmanuel Ferry. Au programme de chaque deuxième mercredi du mois: le scénario économique (croissance, inflation, etc.), les prévisions financières (taux de change, cours du pétrole, variation des indices boursiers, taux directeurs, etc.), les questions du mois (en mars dernier, la probabilité d’une réévaluation du yuan, d’un relèvement des taux de la Fed ou le cours attendu de l’euro face au dollar). Enfin, la partie la plus visible de ces débats est la publication de l’allocation d’actifs pour un portefeuille équilibré type, représentant la moyenne des stratégies des participants. «Cette allocation permet aux établissements

Les trois fondateurs de l'ISAG: Mourtaza Asad-Syed, président entouré d’Emmanuel Ferry, vice-président (à gauche) et Fabrizio Quirighetti, trésorier. de la place de se situer par rapport à cette moyenne. C’est aussi une indication précieuse pour les investisseurs», souligne Emmanuel Ferry. A terme, l’association entend élargir ses activités en invitant des personnalités internationales renommées ou encore créer un prix valorisant des travaux académiques en finance. Un moyen de bâtir des ponts avec le monde universitaire, une aspiration partagée par les trois membres fondateurs de l’ISAG, qui entretiennent des relations assez étroites avec les milieux académiques. ■ Olivier VACHERAND

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JURIDIQUE RISQUES JURIDIQUES TRANSFRONTIÈRES

La FINMA monte au créneau Le 23 mars 2010, l’autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) a publié son rapport de gestion pour l’année 2009. Il est accompagné de plusieurs allocutions de ses dirigeants sur les risques juridiques dans les relations transfrontières. Il s’agit du premier rapport de gestion de cette nouvelle autorité, mise en place le 1er janvier 2009 et regroupant la Commission fédérale des banques, l’Office fédéral des assurances privées et l’Autorité de contrôle en matière de lutte contre le blanchiment. crise financière et son ampleur. L’organe de régulation suisse entend ainsi s’activer au niveau national et international afin d’améliorer les capacités de détection et d’analyse macroéconomiques des autorités de surveillance. C’est ainsi que la FINMA a renforcé sa collaboration avec la Banque nationale suisse dans le domaine de la stabilité financière et est très active au sein du Financial Stability Board, sous l’égide des pays du G20.

Jean-Yves DE BOTH, avocat Schellenberg Wittmer, Genève, Zurich www.swlegal.ch

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e rapport de gestion 2009 est peut-être moins technique que les anciens rapports de gestion de la Commission fédérale des banques, qui cristallisaient plus largement les décisions et pratiques de l’autorité de surveillance. Ce rapport est très axé sur la politique de surveillance. La FINMA y détaille ses thèmes «principaux» et son positionnement sur chacun d’eux. Nous en traiterons deux dans la présente contribution, à savoir les enseignements de la crise financière (en particulier les mesures visant à limiter les risques liés aux banques d’importance systémique) et les risques juridiques liés aux activités transfrontières.

Les enseignements de la crise financière La crise financière se retrouve de manière transversale dans le rapport de gestion. Les autorités de surveillance n’en sont, certes, pas responsables; la FINMA met en avant les déséquilibres économiques, l’endettement accru et des pratiques opaques en matière de titrisation. Cela étant, il s’agit d’en tirer les enseignements. A l’instar des autorités étrangères, la FINMA n’a pas été en mesure de prévoir la

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Les banques d’importance systémique

«La FINMA veut pouvoir clairement séparer des entités d’un groupe en cas de crise, ce qui suppose moins de flux de capitaux au sein d’un même groupe et moins d’engagements croisés» JEAN-YVES DE BOTH SCHELLENBERG WITTMER

Pour assurer la stabilité et la pérennité du secteur financier suisse, la FINMA souhaite une modification du cadre légal pour les banques d’importance systémique (too big to fail). Pour ces établissements, il existe une obligation de fait de l’Etat de les sauver. Cette obligation de sauvetage peut dépasser ses capacités financières et avoir des conséquences désastreuses. Heureusement, la crainte d’un effondrement de l’UBS ne s’est pas matérialisée, mais l’angoisse est palpable. La FINMA souhaite une modification de la Loi sur les banques. Premièrement, cette modification concerne les exigences de fonds propres et de liquidités. Si la FINMA dispose déjà des moyens juridiques pour accroître les exigences de fonds propres et de liquidité de certains établissements, la loi devrait rendre obligatoire des exigences accrues de fonds propres et de liquidités et ce, progressivement en fonction du niveau d’importance systémique. Pour être précis, ces changements législatifs sont indépendants du renforce-

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RISQUES JURIDIQUES ment des normes de Bâle II, sur lesquelles le Comité de Bâle travaille actuellement. Deuxièmement, la FINMA souhaite disposer d’un cadre légal lui permettant d’intervenir dans la structure des groupes. Il s’agit de créer «un cadre légal clair dans lequel s’inscriraient les mesures concernant le gouvernement d’entreprise, l’assouplissement de la séparation ou de la répartition des entités du groupe en cas de crise, ainsi que la limitation des flux de capitaux et des engagements conditionnels au sein du groupe». Il s’agit là, évidemment, de la démarche la plus incisive lancée par la FINMA. Elle s’inscrit dans une réflexion internationale plus large, en vue de maîtriser les risques systémiques liés aux grands groupes.

«Si la Suisse ne parvient pas à réduire les risques juridiques grâce à des solutions durables et d’entente avec les principaux pays cibles ou si les risques juridiques s’accroissent, la FINMA sera contrainte de renforcer ses mesures de contrôle, le cas échéant drastiquement» Cela étant, on est loin d’un consensus au niveau international sur les mesures adéquates. On rappellera notamment la – bien différente – proposition Vockler aux EtatsUnis, visant à limiter les activités de négoce et d’investissement pour les banques acceptant des dépôts du public. A ce stade, la FINMA ne va pas dans les détails. Cependant, elle veut pouvoir clairement séparer des entités d’un groupe en cas de crise, ce qui suppose moins de flux de capitaux au sein d’un même groupe et moins d’engagements croisés (par exemple des garanties sur produits émis par d’autres entités du même groupe). Sur cette problématique, la FINMA n’est pas en mesure d’agir seule. Elle peut exprimer des vœux de changements, mais note qu’elle a besoin d’un soutien politique: «Si la Suisse entend aborder sérieusement la thématique “too big too fail”, elle ne pourra pas faire l’économie de changements drastiques.

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Cette responsabilité incombe au Conseil fédéral et au Parlement.» En collaboration avec une commission d’experts, la FINMA souhaite que des solutions législatives puissent être soumises rapidement au Conseil fédéral.

Risques juridiques et relations transfrontières Dans son allocution, Urs Zulauf, directeur adjoint et responsable de la division Ser vices stratégiques et centraux, s’attarde longuement sur les activités transfrontières des établissements suisses. La FINMA constate que de nombreux événements ont généré une incertitude persistante chez les clients privés étrangers d’établissements financiers suisses. On peut citer le cas UBS, la pression de l’OCDE et les modifications des conventions de double imposition ou la volonté affichée des autorités fiscales étrangères d’acheter des données volées. Cette incertitude nuit à la place financière. On rappellera ici que de nombreux Etats étrangers ne partagent pas la vision libérale de la Suisse s’agissant des services bancaires transfrontières. Alors que toute banque étrangère peut librement offrir ses services à des personnes domiciliées en Suisse, le droit réglementaire d’autre pays peut restreindre l’accès des établissements étrangers sur leur territoire. Selon la FINMA, un examen objectif de la situation permet de conclure qu’en vertu des règles en vigueur dans de nombreux Etats, les activités transfrontières allant au-delà de simples contacts sociaux et de la mise à disposition d’informations générales (non spécifiques à un produit) sont déjà délicates. Un but de protection des investisseurs est mis en avant par les législations étrangères concernées, mais il en résulte également des effets de nature protectionniste. Un deuxième facteur de risque réside dans le droit fiscal étranger. Selon la FINMA, un intermédiaire financier ou ses employés peuvent être considérés comme complices de délits fiscaux commis par des clients étrangers et sont punissables en vertu du droit étranger. De son point de vue, le risque de commettre une infraction punissable et d’être appelé à rendre des comptes est tout à fait réel et d’en conclure, sous la forme d’un conseil direct aux établissements, «en raison de risques accrus, il convient d’éviter tout conseil aux clients concernant les fonds non déclarés. Ces

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JURIDIQUE risques ne pèsent pas seulement sur les banques ou les assurances, mais aussi sur les conseillers, fiduciaires et avocats.»

Des solutions internationales Finalement, la FINMA mentionne expressément, et c’est la première fois – les produits d’assurance qui se développent dans le domaine du private banking. Sans vraiment détailler ses propos, elle considère que ces couvertures d’assurance «enveloppe» pour des dépôts de clients existants peuvent s’avérer problématiques au plan fiscal. On peut certes regretter le tableau peint «en très noir» par la FINMA. A lire l’organe de régulation, les établissements financiers et bancaires suisses ne pourraient quasiment plus offrir le moindre service bancaire à des clients résidant à l’étranger. Dans ce L’ART

RISQUES JURIDIQUES domaine, chaque législation a ses particularités et les nuances sont de rigueur. De même, les restructurations de patrimoine – en tout ou en partie – sous forme de produits d’assurance sont, certes, à la mode, mais sont avant tout guidés par des soucis de planification fiscale (imposition réduite des prestations d’assurance) et successorale. Cela étant, la FINMA exprime aussi le besoin de protéger les intérêts de la place financière suisse. Dans ces temps délicats, elle évite pour l’instant de réglementer plus en la matière. Il y avait, en effet, des rumeurs que la FINMA allait émettre une circulaire sur les activités transfrontières des banques. Par contre, l’organe de régulation attend que les banques adoptent des mesures adéquates en vue de limiter leurs risques juridiques

DANS

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à l’étranger. Si ce n’est déjà fait, les établissements ayant des relations transfrontières doivent soumettre leur modèle d’affaires à une analyse globale des risques au regard de chaque marché cible, puis prendre les mesures appropriées. Celles-ci doivent tenir compte de leurs circonstances propres. Selon l’exposition, la FINMA mentionne une approche axée sur les risques ou une approche axée sur une stricte conformité aux règles étrangères. Chaque établissement doit aussi déterminer comment appliquer et faire appliquer les mesures en interne. La FINMA attend des autorités politiques qu’elles parviennent à trouver des solutions pérennes, via un cadre interétatique satisfaisant. A défaut, elle devra intervenir de manière plus intrusive: «Si la Suisse parvient à réduire les risques juridiques grâce à des solutions durables et d’entente avec les principaux pays cibles, la FINMA pourra s’abstenir de formuler des exigences supplémentaires relatives au contrôle de ces risques. Si la Suisse n’y parvient pas, ou si les risques juridiques s’accroissent […], la FINMA sera contrainte de renforcer ses mesures de contrôle, le cas échéant drastiquement.»

2010, une année clé

Edward Burne-Jones, La réalisation du destin, 1885–1888, huile sur toile, 155 x 140,5 cm Staatsgalerie Stuttgart © Photo: Staatsgalerie Stuttgart

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L’année 2010 s’annonce intense pour la FINMA, surtout au niveau politique. Si la FINMA a, avant tout, une fonction de surveillance des marchés financiers, elle devra convaincre sur les modifications législatives et les impulsions politiques esquissées dans son rapport. La discussion au Parlement sur la modification du cadre légal pour les grandes banques sera certainement difficile. Sur ce point, il serait judicieux qu’un consensus international se mette en place. Cela assurerait une meilleure chance de succès aux mesures adoptées, tout en évitant une distorsion de concurrence pour les établissements suisses. C’est finalement une bonne nouvelle que la FINMA renonce – en tout cas pour l’instant – à une réglementation propre sur les activités transfrontières des établissements suisses. Que chaque établissement, si ce n’est déjà fait, conduise une revue de ses activités sous l’angle de la gestion des risques est, par contre, raisonnable. Bon nombre d’établissements s’y sont déjà attelés, pour certains depuis quelques mois, pour d’autres depuis quelques années déjà. ■ J.-Y.D.B.

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JURIDIQUE DEVOIR D’INFORMATION

Les obligations de la banque sont vastes et multiples Lorsque le client ne signe ni mandat de conseil ni mandat de gestion, la banque doit, en principe, se limiter à exécuter des opérations décidées seul par le client. Elle a, cependant, un devoir d’information et, dans certains cas, un devoir exceptionnel de mise en garde. En outre, dès que s’établit une relation suivie avec la banque, la jurisprudence peut considérer qu’il existe un contrat tacite de conseil qui impose des obligations d’information plus étendues. Alexandre DE SENARCLENS, avocat, LL.M. AH Legal, Genève www.ah-legal.com

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ans le domaine de la gestion de fortune, on différencie généralement trois types de relations entre un client et sa banque: la relation compte/dépôt (exécution uniquement, execution only), le conseil en placement et le mandat de gestion de fortune. Le premier type de relation bancaire relève, en principe, de la commission de vente ou d’achat pour laquelle l’article 425 al. 2 CO renvoie aux règles du mandat. La banque se doit d’exécuter précisément les ordres donnés par le client. Elle ne prendra ainsi aucune initiative et ne procédera donc pas à des actes de gestion qui n’auraient pas été requis par le client. Elle ne doit pas non plus surveiller l’évolution du portefeuille ou avertir le client de l’évolution du risque de telle ou telle position. Selon la formule du Tribunal fédéral, la banque n’est pas le tuteur de son client.

Devoir d’information La banque a néanmoins un devoir d’information qui lui impose d’expliquer à son client les risques liés à un type de transaction donné en tenant compte – cela est

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essentiel – de l’expérience de son client et de l’état de ses connaissances dans les domaines concernés. Il s’agit d’un devoir d’information limité, car il n’existe pas d’obligation de renseigner le client sur l’adéquation (suitability) entre l’opération envisagée et ses objectifs en termes de rendement et de risque (profil client). Cette information doit répondre à un certain nombre de critères précis. Elle doit être compréhensible pour le client et peut être orale, écrite ou sous forme standardisée. Les Règles de conduite pour négociants en valeurs mobilières de l’Association suisse des banquiers, reconnues par la FINMA comme standard minimum, précisent qu’il est nécessaire, afin de pouvoir en apporter la preuve, de documenter cet avertissement, par exemple sous la forme d’une note au dossier. Bien que ces mêmes règles ne l’imposent pas, la banque serait bien avisée d’obtenir une confirmation signée du client afin d’éviter une contestation par la suite. La forme standardisée est, en principe, vala ble et il ne faudra individualiser l’avertissement qu’en présence de produits complexes ou spéculatifs. La délivrance d’une brochure contenant l’information standardisée ne libère pas la banque, qui doit s’assurer que le client a compris cet avertissement dans les grandes lignes. Il est également accepté que la banque remplisse son devoir d’information par renvoi aux prospectus, aux annonces, aux documents contractuels de vente ou à

d’autres documents d’information équivalents, accessibles au public lors de l’émission ou du placement initial, dans la mesure où ils renseignent sur le potentiel de risque lié à ce type d’opérations. Aussi, le client peut valablement renoncer à toute information supplémentaire en confirmant par écrit qu’il connaît les risques liés à certains types d’opérations. L’information doit être délivrée avant l’exécution de la transaction et être mise à jour lorsque le client veut effectuer des transactions présentant une structure de risque substantiellement différente ou lorsqu’il y a des indices concrets que le client n’a pas l’expérience nécessaire en la matière. Cet avertissement devra même être renouvelé si le gérant constate que le client ne connaît pas le risque lié à un type d’opérations. En outre, l’information doit évidemment être complète et matériellement correcte sur les risques essentiels du type de transaction en question. Cependant, pour autant qu’il n’y ait pas d’indices concrets attestant de l’inexpérience totale du client, la banque peut partir de l’idée que le risque de solvabilité pour les obligations et le risque de fluctuations de cours, en matière d’actions, d’obligations et de fonds de placement, est connu. Selon l’ASB, la banque ne doit pas informer son client sur les «risques ordinaires» qui sont, outre ceux mentionnés ci-dessus, les risques pays, d’exécution, de conservation des instruments financiers et de liquidité.

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DEVOIR D’INFORMATION Par ailleurs, l’information doit aller croissant avec l’augmentation potentielle du risque et la complexité de la structure de l’investissement. Le Tribunal fédéral a jugé que les exigences d’information sont plus élevées lorsque le mandant ne spécule pas seulement avec sa propre fortune, mais également aussi avec des crédits accordés par la banque. A noter, pour finir, que la banque n’est tenue à aucun devoir d’information lorsque le client a confié à un gestionnaire externe à la banque le pouvoir de gérer sa fortune. En pratique toutefois, il est recommandé de déléguer formellement le devoir d’information au gestionnaire externe afin d’éviter tout débat subséquent.

Devoir de mise en garde Sans mandat de gestion ou de conseil, un devoir de mise en garde n’existe que dans des cas exceptionnels, par exemple lorsque la banque doit reconnaître, en faisant preuve de l’attention nécessaire, que le client n’a pas identifié un risque particulier lié aux placements. Ce devoir a été retenu par le Tribunal fédéral dans le cas de deux retraités, qui avaient été carreleur et femme au foyer dans leurs vies actives. Avec les économies de toute une vie professionnelle, ces retraités avaient investi dans des actions Vivendi Universal 13% du total de leurs avoirs, ce qui correspondait à plus de 40% de la part «actions et fonds actions». Notre Haute Cour constate que la banque aurait dû alerter les clients sur les risques liés à une concentration excessive des placements sur une seule et même action. Le Tribunal reconnaît ainsi une obligation d’avertir le client du risque d’un placement, non seulement relatif à son genre (action, obligation, fonds alternatif, etc.), mais encore à son volume, à savoir la répartition des risques par la diversification des investissements.

Mandat de conseil tacite Le Tribunal fédéral a récemment reconnu que le conseil en placement pouvait résulter d’actes concluants. En effet, selon les juges fédéraux, lorsque, dans le cadre d’une relation d’affaires durable entre le client et sa banque, une relation de confiance particulière s’est nouée, le client peut, de bonne foi, s’attendre à recevoir des conseils et des avertissements même s’il ne les a pas sollicités. Il n’est alors pas nécessaire d’avoir un

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«Lorsqu’une relation de confiance durable s’est nouée entre le client et son conseiller, il naît tacitement un contrat de conseil en placement» ALEXANDRE DE SENARCLENS – AH LEGAL

accord écrit pour qu’un contrat de conseil en placement naisse entre les parties. Dans un de ses arrêts, le Tribunal fédéral a retenu qu’il y avait un contrat de conseil dans le cadre d’une relation contractuelle de deux ans et demi, période durant laquelle le client a entretenu des contacts téléphoniques intensifs et fréquents avec le collaborateur de la banque. Ainsi que nous l’avons vu, dans le cas d’une activité d’exécution uniquement, la banque doit informer son client sur les risques liés à un type de transactions donné, devoir qui s’apprécie in concreto, en gardant à l’esprit les connaissances et l’expérience du client. Dans des situations particulières, le banquier

devra mettre en garde son client contre des risques dont il ne serait pas conscient. Enfin, lorsqu’une relation de confiance durable s’est nouée entre le client et son conseiller, il naît tacitement un contrat de conseil en placement. Bien que le Tribunal fédéral se plaise à répéter que la banque n’est pas le tuteur de son client, la jurisprudence et la réglementation suisse tendent à accroître les obligations d’information et de conseil qu’un établissement financier doit à son mandant. Ainsi, en cas de doute sur la bonne compréhension du client sur les risques qu’il prend, le gérant serait bien avisé de compléter son avertissement. ■ A.D.S.

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Credit Suisse: l’art de surfer sur les vagues Sans conteste, la crise financière a provoqué des ravages sur les cours de Bourse des banques d’investissement. La profession qui est à l’origine de cette crise et se retrouve, de fait, aussi sa principale victime. Cependant, à l’aune des évolutions enregistrées entre le pic du précédent cycle atteint en mai 2007 et la fin du premier trimestre 2010, Credit Suisse est plutôt bien placé comparativement à ses pairs. Jaona RAVALOSON (31/03/10)

E

ntre mai 2007 et la fin du premier trimestre 2010, le titre Credit Suisse n’a baissé «que» de 43%, le mettant en deuxième position derrière la star mondiale du secteur (Goldman Sachs) et au premier rang des banques d’investissement européennes. A croire que le groupe est contrariant, au sens où, en période de stabilité ou de hausse des marchés, il ne brille guère et attend d’être face à l’adversité et à des conditions nettement plus défavorables pour faire montre de résistance et d’ingéniosité. Cette bonne performance boursière toute relative s’appuie sur une profitabilité qui, dès l’exercice 2009, a retrouvé le niveau d’avant-crise.

Au diable la crise Le groupe a dégagé l’année dernière un profit net de 6,7 milliards de francs suisses, venant d’une perte de 8,2 milliards en 2008. Ceci tient à une augmentation de 183% de ses produits, des charges d’exploitation en progression de seulement 6% et des provisions sur pertes de crédits en recul de 38%. Son rendement des fonds propres (ROE) est revenu à 18,3% et son ratio de capital Tier 1 caracole à 16,3% contre 13,3% fin 2008. Credit Suisse apparaît ainsi comme un des «happy few» miraculés de la débâcle financière qui sont

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sortis de celle-ci renforcés, non seulement en termes de profit mais aussi de solidité du bilan. Credit Suisse était en restructuration permanente avant la crise financière. Il en est résulté une flexibilité de sa structure ainsi qu’une prise de risques modérée qui lui ont permis d’absorber plus facilement que ses pairs le choc du retournement des marchés et de rebondir plus lestement par la suite. Le business model du groupe a été modifié avec un accent mis sur les activités clientèle (aux dépens des opérations de trading pour compte propre), sur un usage plus efficient du capital et sur les métiers aux revenus plus stables et moins volatils. La taille de son bilan a été réduite de 24% depuis fin 2007 et les encours pondérés de 32%. Pendant toute la période de tension, Credit Suisse n’avait aucun problème de liquidité, pourvoyant même en cash les banques centrales (32 milliards de francs en moyenne et 70 milliards au plus fort de la crise). Le groupe a été l’un des rares à ne

Evolution boursière comparée depuis

-80%

-70%

-60%

-50%

-40%

-30%

pas subir l’humiliation des quasi-nationalisations à travers les aides financières et les fonds d’urgence mis en place un peu partout par les Etats. Il a préféré faire une levée de fonds sur les marchés, sans pour autant diluer de manière excessive son actionnariat. Une augmentation de capital de 10 milliards de francs a eu lieu en automne 2008 auprès d’investisseurs du Moyen-Orient. L’ensemble de ces initiatives lui ont permis non seulement de tenir, mais surtout de renforcer sa compétitivité face à ses rivales, en particulier UBS, le grand perdant de la crise. Dans la foulée du retournement drastique de 2009, l’année 2010 a bien démarré pour le groupe. Les analystes de la Société Générale anticipent d’ores et déjà un ROE de 20% qui ferait du Credit Suisse le seul établissement à inscrire sa rentabilité dans la fourchette moyenne de 17%-22% enregistrée par les banques d’investissement au cours du précédent cycle. Brady Dougan est l’architecte de ce retour rapide à meilleure fortune de Credit Suisse. Cet expatrié amédébut mai 2007 ricain, anciennement patron de la division banque d’investisseGoldman Sachs ment et de Credit Suisse Americas, a été nommé directeur Crédit Suisse général du groupe en 2007. Au vu des performances du groupe, Deutsche Bank il a été gratifié de la rémunération la plus élevée parmi les Morgan Stanley banquiers européens, voire globaux, pour 2009. En touchant un package (fixe + bonus + titres) UBS de 19,2 millions de francs suisses, le numéro 1 du Credit Suisse retrouve en très peu de -20% -10% -0% temps le niveau des salaires pré-

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CREDIT SUISSE Résultats comparés des banques d’investissement 2009 Profit/(Perte) $13,4Mds CHF6,72Mds €5Mds $1,1Mds CHF1,21Mds

2010e ROE 16% 20% 10% 12% 12%

Source: sociétés et prévision Société Générale Cross Asset Research

crise et dépasse de loin les appointements de Lloyd Blankfein chez Goldman Sachs (9,8 millions de dollars) ou de Joseph Ackermann chez Deutsche Bank (12,6 millions de dollars). Quand on aime, on ne compte pas… Brady Dougan bénéficie, en outre, de l’échéance du plan d’incitation à la performance mis en place en 2004, qui lui rapporte personnellement l’équivalent de 70 millions de francs en titres valeur fin avril 2010. Ce plan est d’autant plus généreux que Credit Suisse se classe bien face à huit de ses pairs suivant différents critères sur une période de cinq ans. Comme la plupart de ses homologues ont été terrassés par la crise, Credit Suisse se retrouve en deuxième position, tous critères confondus, derrière JP Morgan, d’où, pour les principaux dirigeants du groupe, un bonus spécial. Credit Suisse peut, en effet, se permettre ces joyeusetés, quoi que puissent en penser le G20 ou la FINMA. C’est l’avantage d’avoir fait face avec brio à la crise, sans faire appel à l’argent des contribuables. La traversée de la crise paraissait d’autant plus aisée pour le groupe que sa banque privée a affiché une forte résistance et sa banque d’investissement une grande faculté d’adaptation.

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2500 2000 1500 1000 500 Deutsche Bank**

BNP Paribas***

HSBC

JPMorgan

Credit Suisse

Wells Fargo*

UBS

0 Morgan Stanley Smith Barney

Pourtant, le métier de banquier privé n’est pas en odeur de sainteté. En jetant l’anathème sur les paradis fiscaux, nombre de gouvernements occidentaux ont mis à mal une profession qui ne prospère que dans la discrétion et le secret. Comme ses homologues dans la gestion de fortune offshore, Credit Suisse est dans l’œil du cyclone concernant le bras de fer entre les banques et les gouvernements

Rebond de la banque d’investissement

Classement mondial 2009 des banques privées (actifs sous gestion en US$ millions)

Bank of America Merrill Lynch

Résistance de la banque privée

soucieux de traquer les évasions fiscales et les avoirs de leurs citoyens à l’étranger. Par exemple, le parquet de Düsseldorf a annoncé, le 19 mars, avoir ouvert une enquête à l’encontre de 1100 clients de Credit Suisse, soupçonnés d’avoir fraudé le fisc allemand, et à l’encontre des collaborateurs de la banque. Ses soupçons font suite à l’acquisition d’un CD-ROM contenant jusqu’à 1500 noms de contribuables allemands détenteurs de comptes en Suisse, pour un montant estimé à 1,2 milliard d’euros. Il n’empêche que les flots d’argent frais vers les coffres du groupe, bien orientés en 2009, se poursuivent au premier trimestre 2010 et se trouvent même, d’après la direction, à leur meilleur niveau depuis la crise. Il faut reconnaître que le groupe a su capitaliser sur sa solidité relative et, de plus, a profité de la désaffection de la clientèle à l’égard de sa compatriote et concurrente UBS. L’afflux net de nouveaux capitaux a atteint 42 milliards de francs l’année dernière, en dépit de l’effet «Scudo», l’amnistie fiscale italienne, qui a entraîné, au quatrième trimestre, une sortie de 5,6 milliards de francs pour la banque privée du Credit Suisse. Fin 2009, la

Goldman Sachs

Goldman Sachs Credit Suisse Deutsche Bank Morgan Stanley UBS

2008 Profit/(Perte) $2,3Mds (CHF8,2Mds) (€3,9Mds) ($807Mn) (CHF20,7Mds)

fortune sous gestion s’élèvait ainsi à 803 milliards de francs, en hausse de 16% par rapport à l’exercice précédent. L’augmentation se prolonge au même rythme, au cours des premiers mois de 2010, grâce notamment à des gains de part de marché. Credit Suisse parvient à renforcer et à maintenir son rang dans une activité qui fait l’objet d’une consolidation de plus en plus rapide et d’une recomposition des acteurs en raison des regroupements opérés depuis 2009: le rachat de Merrill Lynch par Bank of America, de Smith Barney (anciennement branche gestion de fortune de Citigroup) par Morgan Stanley, de Wachovia par Wells Fargo, de Fortis par BNP et de Sal. Oppenheim par Deutsche Bank. Autant UBS a été pénalisée par ces bouleversements, autant Credit Suisse tient le haut du pavé. Les décisions prises par le numéro 2 suisse, il y a trois ans, d’intégrer la gestion de fortune au niveau mondial en exploitant les synergies avec la banque d’investissement et la gestion d’actifs expliquent le bon comportement et la percée du groupe. Outre l’aspect quantitatif mesuré sous l’angle des actifs sous gestion, la qualité des prestations de Credit Suisse a été saluée par les professionnels. Dans le classement d’Euromoney de février 2010, mixant les données quantitatives avec des résultats de sondages, Credit Suisse est numéro 1 mondial devant HSBC et UBS. Il venait de la quatrième place l’année précédente. Bank of America Merrill Lynch n’arrive qu’en 9e position, en dépit de son leadership en actifs sous gestion.

La banque d’investissement aussi a été un métier sinistré. D’un côté, le retournement de marché et, de l’autre, les scandales et les plaintes concernant les produits toxiques non digérés par les clients. Credit Suisse, lui-même, a récemment été condamné par la cour fédérale du district de New York à verser une indemnité de 413 millions de dollars à STMicroelectronics, suite à une plainte déposée en août 2008. Credit Suisse avait fait un placement de trésorerie de 450 millions de dollars (en titres municipaux à taux variable

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ENJEUX

CREDIT SUISSE

déterminé par enchères, ARS) pour le compte de cette entreprise, placement qui s’est avéré illiquide et non conforme au contrat passé, à cause du déclenchement de la crise financière. Ce genre de recours, qui n’a pas encore épuisé tout son potentiel d’effet à retardement, pèse sur tous les acteurs du secteur. On se souvient que, pour les mêmes raisons, Citigroup, Merrill Lynch, UBS, JP Morgan, Morgan Stanley, Goldman Sachs, Wachovia et Deutsche Bank ont eu à rembourser leurs clients au prix nominal des titres. Cela étant, le redressement de la banque d’investissement de Credit Suisse n’en est pas moins réel. Credit Suisse est retombé très vite sur ses pattes après avoir subi, comme l’ensemble du secteur, les premiers chocs frontaux avec la crise et a adapté son dispositif à l’ère des turbulences. Une politique d’ajustement en trois phases a été mise en œuvre. La première étape a été enclenchée en été 2007, dès les premières manifestations de la crise. L’exposition aux risques a été considérablement diminuée et les classes d’actifs les plus dangereuses ont été bannies. La structure de coûts a été également rabaissée par une réduction des effectifs, tout en renforçant les investissements en infrastructure et logistique. La deuxième étape, appliquée tout au long de 2009, a vu l’abandon de certaines activités (l’équivalent de 2,7 milliards de francs de revenus, comprenant, notamment, les produits dérivés hautement structurés, l’origination de crédits hypothécaires, les transactions financières

Classement 1er trimestre 2010 des banques d’investissement globales Top 10

Commissions ($m)

T1 2010 vs T1 2009

1119 958 896

24% 61% 23%

768 739 625 575 550 515 301 7046

42% 13% 26% 74% 21% 2% 16% 34%

JP Morgan Goldman Sachs Bank of America Merrill Lynch Morgan Stanley Citi Deutsche Bank Credit Suisse Barclays Capital UBS RBS Total Source: Thomson Reuters

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compte propre. Evolution qui sera d’autant plus positive que la reprise des marchés se confirme. Les activités clientèle et le pipeline de transactions sont bien fournis au premier trimestre 2010. Parmi les dix plus grandes banques d’investissement globales, Credit Suisse, en septième position, est celle qui a enregistré le record de taux de croissance des honoraires par rapport à la même période de l’année dernière (plus du double de la croissance moyenne de ses principaux compétiteurs). En banque d’investissement, comme en banque privée, la consolidation au niveau mondial ainsi que la concentration des parts de marché s’accélèrent au profit des plus aptes. Credit Suisse semble avoir prouvé sa capacité à en faire partie.

«Nous sommes très confiants sur le nouveau modèle d’entreprise de Credit Suisse et sur sa capacité à affronter la concurrence» BRADY DOUGAN – CREDIT SUISSE

intensives en capital), le repositionnement d’opérations (5,4 milliards de francs de revenus portant, en particulier, sur le trading d’actions très liquides, les obligations convertibles répondant à la demande de la clientèle, le financement à effet de levier aux Etats-Unis mais avec des opérations de plus petite taille et qui se dénouent rapidement) et la focalisation sur des produits moins consommateurs en capital et générés par une demande de la clientèle (soit 18,2 milliards de francs suisses en termes de revenus, incluant les activités de cash equities, de trading électronique, de dérivés actions, d’émissions d’obligations, de trading sur le marché secondaire de crédits hypothécaires US, de fusions-acquisitions et de conseil stratégique dans les émissions de titres). Il s’en est suivi un gain rapide de parts de marché. La phase 3 est en cours et devrait se traduire par un renforcement des franchises du groupe dans ses métiers-clés: marché actions, marché de taux, marchés émergents, avec toujours un accent sur les opérations clientèle et non de trading pour

Après la crise, les menaces réglementaires Brady Dougan se dit «très confiant sur le nouveau modèle d’entreprise de son groupe et sa capacité à affronter la concurrence». D’après lui, «si les marchés restent constructifs, Credit Suisse sera capable d’entretenir son élan». Les difficultés et la baisse de réputation de ses compétiteurs constituent, par ailleurs, un facteur d’attraction indéniable pour le groupe. Au-delà des aléas de la reprise économique et de leur impact sur les activités, le plus grand défi pour les prochains trimestres concerne les modifications du cadre réglementaire et des normes prudentielles. La tendance est, pour les gouvernements et les régulateurs, de renforcer les exigences de fonds propres, de limiter les effets de levier et de restreindre les degrés de liberté pour certains types d’opérations. Les normes prudentielles Bâle III seront arrêtées et appliquées à partir de 2012. Credit Suisse ne devrait pas trop en souffrir. Selon son directeur général, c’est parce que le groupe «entre dans cette période de changement sans précédent pour la profession dans une position robuste, après avoir réalisé des avancées considérables dans son plan d’adaptation». Quelle menace pourrait effectivement affecter un établissement qui a superbement survécu à la crise et qui se trouve doté, dès le lendemain, d’un ratio d’adéquation du capital de 16%, d’un ROE de près de 20% et d’une part de marché enviable sur toutes les grandes places d’Europe, des Etats-Unis et d’Asie Pacifique? ■ J.R.

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ENJEUX Le recrutement n’est pas une activité sans risques !

chasseurs de talents info@job-selection.ch

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ENJEUX HINDUJA BANQUE (SUISSE) SA

La banque indienne fait sa révolution Une véritable petite révolution. Voilà ce qu’a vécu la banque Hinduja Banque (Suisse) SA, ex-Amas, au cours des trois dernières années. Nom, management, modèle d’affaires, identité visuelle, activités, tout ou presque a changé par la volonté de la famille Hinduja, qui tient les commandes du groupe multinational éponyme depuis une centaine d’années. Et l’établissement genevois ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Olivier VACHERAND

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n an après son changement de nom, il ne reste plus rien ou presque de la banque genevoise Amas. Celle qui s’appelle désormais Hinduja Banque (Suisse) SA, pour marquer l’engagement de la famille propriétaire de l’établissement, n’a effectivement plus grand-chose à voir avec l’établissement fondé en 1978 à Genève, titulaire d’une licence bancaire depuis 1994. En fait, le grand chambardement a débuté en 2007 avec le remplacement d’une bonne partie du management et la volonté de tirer un trait sur le passé pour prendre un nouveau départ. A la manœuvre depuis 2007, Ivan Schouker a été recruté pour mettre en œuvre cette véritable petite révolution. Fort d’une solide expérience dans les services financiers internationaux en tant que, notamment, dirigeant d’une filiale d’American Express mais aussi comme associé au cabinet Booz Allen & Hamilton, il a orchestré la transformation profonde et rapide de ces trois dernières années. Et ce n’est pas terminé…

Modèle d’affaires intégré «Un pan entier du modèle d’affaires classique genevois, basé sur le secret bancaire et la clientèle européenne, est mort depuis bien longtemps. La crise depuis deux ans en est le révélateur», souligne Ivan Schouker. Pour faire simple, la mission qui lui a été confiée par la famille Hinduja est de transformer

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«Un pan entier du modèle d’affaires classique genevois basé sur le secret bancaire et la clientèle européenne est mort depuis bien longtemps» IVAN SCHOUKER HINDUJA BANQUE (SUISSE)

une banque privée traditionnelle orientée family office, en banque diversifiée à travers un modèle d’affaires intégré regroupant des services de banque privée, de trade finance, de banque d’affaires et d’intermédiation pour l’accès aux marchés des capitaux. Un mix particulièrement bien adapté pour couvrir les besoins des entrepreneurs, notamment pour ceux qui sont actifs dans le «corridor» Inde, Moyen-Orient, Europe.

Pour se mettre en ordre de marche dans cette nouvelle configuration, la banque se bat sur tous les fronts, multipliant les recrutements et les opérations de croissance externe. «Nous avons doublé nos effectifs globaux en 2009. Les effectifs genevois ont augmenté de 30%», souligne Achille Deodato, responsable de la communication et du marketing du groupe bancaire. En mars 2008 déjà, la banque demandait et obtenait une licence bancaire de catégorie 3 pour sa nouvelle entité de Dubai – Hinduja Bank (Middle East) Ltd. – afin de combler le chaînon manquant entre l’Europe et l’Inde et couvrir le juteux marché du Moyen-Orient. En mars dernier, la Dubai Financial Services Authority délivrait une autorisation de catégorie 1 qui permet à la filiale d’Hinduja Bank aux Emirats arabes unis de fournir une palette complète de services bancaires. Mi-juin 2009, la banque genevoise signait un accord avec Bridge Group International pour la reprise des comptes individuels de la société en faillite, ACH Securities. Peu de temps après, les grandes manœuvres se sont encore intensifiées au siège avec l’obtention d’une licence pour le lancement des activités de trade finance. Un département qui monte en puissance cette année avec l’arrivée de Pierre-Yves Blanc, un spécialiste reconnu du crédit documentaire, ainsi que d’autres collaborateurs provenant des grandes maisons de la place en financement du commerce international. «Le trade finance étant une activité particulièrement gourmande en capitaux, nous envisageons de procéder à une augmentation de capital dans un futur proche. Il nous faudra doubler rapidement nos fonds propres pour développer nos activités de financement du

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HINDUJA BANQUE (SUISSE)

La Banque Hinduja opère des développements tous azimuts. négoce international. Nous n’excluons pas également de procéder à des acquisitions dans ce domaine car le marché est assez difficile à pénétrer», précisait Ivan Schouker en début d’année. «Le timing nous a beaucoup aidé pour le lancement de cette activité. Avec la crise des liquidités, les acteurs du commerce international ont eu la nécessité de se tourner vers d’autres banques, car leurs fournisseurs habituels ont eu tendance à resserrer les lignes de crédit. Nous avons pu compter également sur des flux en provenance d’entrepreneurs clients de notre banque privée.» Une réalité qui tendrait à valider la stratégie intégrée de la banque. Parallèlement aux développements opérés dans le financement du négoce international, la banque créait un service d’investissement pour clients privés, chargé de délivrer du conseil pour les marchés asiatiques, et indiens en particulier. En fin d’année, Hinduja Banque (Suisse) a finalisé l’acquisition de la société indienne Paterson Securities Pvt Ltd., une agence de courtage disposant de 30 bureaux à travers le pays et membre fondateur de la Bourse de Madras. «Cette acquisition est importante pour intervenir sur le marché indien, qui reste très fermé aux investisseurs étrangers. Nous détenons une Foreign Institutional Investment Licence qui nous permet de fournir des services d’exécution sur le marché indien à la fois pour les clients privés et les institutionnels. D’ailleurs, certaines banques de renom de la place suisse utilisent nos services en la matière», explique Ivan Schouker.

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opérerons aux îles Caïmans pour fournir des services de trade finance mais aussi l’accès aux marchés du Moyen-Orient et du sous-continent indien où notre expertise est largement reconnue», explique Ivan Schouker. Profitant des opportunités d’expansion, le directeur général d’Hinduja Banque (Suisse) SA ne semble pas décidé à ralentir la cadence malgré les difficultés qu’on imagine quant à l’intégration de ces nouvelles entités. «La puissance capitalistique du groupe Hinduja va nous permettre de continuer à grandir. Nous sommes toujours à l’affût pour absorber de nouveaux établissements ou acquérir de nouveaux portefeuilles», explique-t-il. Cette quête effrénée de la taille critique nécessaire au développement du nouveau modèle d’affaires de l’établissement s’accompagne, bien entendu, d’un renforcement des opérations et du back office du groupe bancaire, centralisés à Lucerne.

Croissances externes successives

Architecture ouverte

Cette acquisition en Inde ne semble pourtant pas avoir satisfait l’appétit de l’établissement genevois qui annonçait, mi-février, une nouvelle opération de croissance externe avec le rachat de la Banca Commerciale Lugano (BCL), un petit établissement fondé en 1963 et spécialisé dans le private banking et le trade finance. Cette opération permet ainsi de rapidement renforcer les fonds propres du groupe bancaire unifié comme annoncé plus tôt. Sur la quarantaine d’employés de BCL, une dizaine devrait être conservée par Hinduja après l’intégration et la transformation en succursale. «Cette acquisition nous permet de construire notre offre intégrée sur la troisième place financière de Suisse», précise le directeur général d’Hinduja Banque (Suisse). Dans le panier de la mariée, Hinduja trouve également une banque de plein exercice située dans les îles Caïmans. Une occasion d’élargir l’horizon de la banque vers la clientèle des Amériques. «A l’instar de ce que nous proposons à nos clients européens, nous

En matière de private banking, Hinduja Banque (Suisse) propose différents types de mandat, mais tient à se focaliser avant tout sur le conseil. «Nous ne sommes pas des vendeurs de produits maison, mais plutôt des bâtisseurs de solutions sur mesure et aujourd’hui de solutions globales grâce à notre modèle d’affaires intégré. D’ailleurs, nous offrons, à l’heure actuelle, qu’un seul fond: le Amas USD Bond Fund, un fonds noté AAA pendant plus de dix ans. Nous travaillons en architecture ouverte», insiste Achille Deodato. Ce modèle est renforcé par des recrutements de haut niveau, comme celui d’Andreas Luethi, ancien de Sarasin, et d’autres qui seront annoncés très prochainement. Autant de développements qui font d’Hinduja Banque (Suisse) l’un des établissements les plus en vue et les plus prometteurs de la place financière suisse. Un exemple particulièrement intéressant de sortie par le haut dans le contexte de crise du private banking traditionnel à la mode genevoise. ■ O.V.

Le groupe Hinduja Le groupe Hinduja a été fondé en Inde en 1914 par Parmanand Deepchand Hinduja, un jeune entrepreneur originaire de Shikarpur. Près de cent ans plus tard, l’entreprise, dont les commandes sont toujours aux mains de la famille, compte parmi les plus importantes multinationales indiennes. Initialement spécialisé dans le commerce international, le groupe s’est diversifié tout au long de son histoire. Il est actif désormais dans une dizaine de secteurs dont l’automobile, l’énergie, la chimie, l’informatique, les médias, le commerce international, la santé, l’éducation et la banque. Le groupe Hinduja opère dans 32 pays et compte plus de 30 000 employés. Outre Hinduja Banque (Suisse) SA, le groupe a contribué à la création d’un autre établissement bancaire en Inde, Indusind Bank Ltd., spécialisé dans la banque commerciale et de détail. ■

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ENJEUX SCIENCES AFFECTIVES

Les décisions d’investissement sous l’influence des émotions Champ de recherche empirique interdisciplinaire, les sciences affectives étudient les émotions et leur impact sur le comportement des individus et de la société. Dans ce contexte, elles analysent les mécanismes psychologiques qui dictent la prise de décision, contrecarrant ainsi le choix logique et rationnel. Application au domaine de la finance avec Benoît Bediou du Pôle de recherche national en sciences affectives de l’Université de Genève. Propos recueillis par Didier PLANCHE

Banque & Finance: Quelles sont les principales différences entre les sciences affectives, la neurofinance et la finance comportementale? BENOÎT BEDIOU: Il s’agit essentiellement d’une nuance de terminologie, car les recoupements sont nombreux entre ces trois approches. La finance comportementale, qui relève de l’économie comportementale, se situe à la frontière entre la finance et la psychologie. Contrairement à la finance traditionnelle, basée sur un fonctionnement rationnel des mécanismes de prise de décision, elle s’intéresse aux biais cognitifs et de jugement influençant les choix. Son approche consiste à décomposer le processus de prise de décision en une série de processus psychologiques. Pour sa part, la neurofinance, qui relève de la neuroéconomie, étudie la représentation cérébrale des facteurs influant sur la décision. Située à la frontière entre la finance et les neurosciences, elle cherche à appliquer les outils de neuroimagerie à des tâches financières. Ces deux disciplines témoignent de l’essor relativement récent des recherches interdisciplinaires et leurs travaux démontrent que de nombreux comportements considérés auparavant comme irrationnels, comme l’aversion à la perte ou au risque par exemple, rendent compte de l’influence des émotions sur la décision. La finance comportementale et la neurofinance s’intè-

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grent ainsi aux sciences affectives, qui se focalisent également sur la façon dont les émotions sont générées, exprimées et perçues. B&F: Quels outils utilisent les sciences affectives? B.B.: Elles utilisent l’ensemble des outils existants pour l’étude des émotions, comme les méthodes de leur induction au moyen d’images, de vidéos, de sons, voire d’odeurs – par exemple corporelles –, ceux de mesure des émotions au niveau physiologique, à l’instar du rythme cardiaque et respiratoire, de la conductance cutanée ou de la dilatation pupillaire, et, au niveau physique, comme l’électromyographie, l’expression faciale et corporelle, etc. L’impact des émotions sur le comportement se mesure, entre autres, au moyen de tâches d’attention, de mémoire ou de prise de décision. Elles peuvent se combiner avec d’autres outils comme ceux de la neuroimagerie ou de la

biologie moléculaire permettant l’analyse microscopique du fonctionnement des cellules, par exemple pour étudier l’impact d’agents pharmacologiques ou du polymorphisme de certains gènes. B&F: Quel lien existe-t-il entre les sciences affectives et l’activité de gestion financière? B.B.: Au cours des dernières années, les recherches ont clairement mis en évidence l’influence de facteurs émotionnels sur la décision. Ces constats ont donné naissance à des disciplines transversales comme la finance comportementale ou la psychologie appliquée à la finance, ainsi que la neurofinance qui associe, en plus, les outils des neurosciences. Même si le lien entre cette recherche dite fondamentale et le secteur financier n’a pas été immédiat, des rapprochements se mettent désormais en place. B&F: Quelle est leur utilité sur les choix et les décisions d’investissement?

Plus de 100 chercheurs analysent les émotions Fondé le 1er septembre 2005, le Pôle de recherche national (PRN) en sciences affectives a pour mission la recherche interdisciplinaire sur les émotions et autres phénomènes affectifs, tels les sentiments ou les humeurs. Il est organisé sous la forme de programmes thématiques ou transversaux axés sur la recherche empirique et appliquée. Plus de 100 chercheurs travaillent actuellement sur les mécanismes de déclenchement et d’expression des émotions avec des éthologues, des psychologues et des informaticiens qui développent des méthodes d’analyse automatisée et de simulation des comportements expressifs. De même, des philosophes tentent de définir l’émotion et ses fonctions en collaboration avec des juristes, des psychologues et des linguistes qui se penchent sur la distinction conceptuelle entre honte et culpabilité. Le PRN en sciences affectives s’occupe aussi d’enseignement et de sensibilisation du grand public, en organisant des conférences, des expositions, des émissions TV et radio, ainsi qu’en participant à des manifestations culturelles ou sportives. Son budget s’élève à 12 millions de francs par période D.P. de quatre ans. ■

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SCIENCES AFFECTIVES B.B.: Les sciences affectives offrent des outils pour étudier et mieux comprendre des phénomènes comme l’aversion à la perte et au risque, qui ont un impact important sur les décisions financières des investisseurs privés et professionnels. La connaissance de certains biais existants permet parfois de les éviter, sans pour autant pouvoir évaluer leurs effets bénéfiques ou non. La peur et l’anxiété créent bien une aversion au risque qui n’est pas bénéfique en temps de crise, car l’économie a besoin d’investissements pour redécoller, donc d’une certaine prise de risque. A l’inverse, les émotions positives créent un biais d’optimisme susceptible d’amener à sous-estimer le risque, donc à prendre des décisions inappropriées. B&F: Pourquoi l’interaction entre les sciences affectives et la gestion financière n’a pas été découverte plus tôt? B.B.: L’étude du lien entre les émotions et les décisions financières n’est pas nouvelle. Les premiers travaux remontent aux années 70-80 avec la théorie des perspectives, pour laquelle les psychologues Amos Tversky et Daniel Kahneman ont obtenu le Prix Nobel d’économie en 2002. Leurs études ont marqué le point de départ de l’économie comportementale. Puis, les avancées récentes des neurosciences, et notamment des outils de neuroimagerie, ont donné un nouvel essor à ce champ de recherche, en offrant une vue sur les corrélats cérébraux des phénomènes comportementaux. Comme les approches collent de plus en plus au monde réel et que leurs résultats sont davantage compréhensibles, le rapprochement entre les sciences affectives et la gestion financière est facilité. Par ailleurs, la médiatisation de certaines recherches et de leurs résultats a contribué à populariser la neuroéconomie, voire la neurofinance.

Déjà des changements comportementaux B&F: Comment appliquer concrètement les sciences affectives aux comportements des gérants, afin d’optimiser leurs choix et décisions d’investissement? B.B.: Elles offrent des pistes pour mieux comprendre le développement de certains comportements comme la prise de risque, qui se caractérise par d’importantes différences intra- et interindividuelles. Les sciences affectives s’intéressent, par exemple, à

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«De nombreux modèles commencent à intégrer les émotions dans la compréhension des décisions financières» BENOÎT BEDIOU – UNIGE

la façon dont le cerveau perçoit et réagit au risque, lorsqu’il est décidé ou imposé par une tierce personne, et aux réactions du sujet concerné. Après avoir identifié les régions cérébrales impliquées dans certains types de décisions financières, des chercheurs ont démontré la possibilité de modifier les comportements sur la prise de risque en agissant sur l’activité de ces régions cérébrales, au moyen de techniques aussi variées que le cadrage, l’inhalation de substances comme l’oxytocine, ou encore la stimulation magnétique transcrânienne. De nombreux modèles commencent donc à intégrer les émotions dans la compréhension des décisions financières. Mais comme les mécanismes émotionnels sont hautement subjectifs et soumis à une importante variabilité à la fois intra- et interindividuelle, l’émotion reste complexe à modéliser et ses conséquences difficiles à prédire. B&F: Les gérants reconnaissent-ils le bien-fondé des sciences affectives sur leurs activités? B.B.: Ces dernières années ont été marquées par un certain regain d’intérêt des

institutions financières et de leurs gérants pour la recherche fondamentale, qui s’est encore accentué depuis la crise. En outre, même si les attentes et les implications ne sont pas toujours du même ordre, l’évidence scientifique accumulée permet de convaincre les plus sceptiques et cartésiens! Il faut toutefois patienter pour que la recherche apporte des réponses aux questions concrètes et parfois éloignées du domaine purement scientifique. B&F: Constatez-vous certains changements dans leur fonctionnement cognitif? B.B.: Effectivement, il existe déjà des changements importants d’attitude vis-à-vis de l’argent, puisque d’aucuns évoquent la moralisation du capitalisme. Plus concrètement, certains des comportements constatés depuis la crise confirment les observations de la recherche, à savoir que des considérations sociales, morales ou éthiques – comme la confiance, l’égalité, l’honnêteté ou encore la justice – ont plus de valeur que les profits financiers. ■ D.P.

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RESSOURCES HUMAINES EMPLOIS BANCAIRES

Les gagnants et les perdants de la crise Après quatre années fastes sur le front de l’emploi bancaire à Genève grâce à une conjoncture très porteuse depuis 2004, les pertes d’emplois se sont multipliées dès l’été 2008 pour encore s’intensifier en 2009. Outre l’effet conjoncturel lié à la crise, les nouveaux modèles d’affaires qui commencent à émerger pour s’adapter à la suppression du secret bancaire devraient entraîner une mutation assez profonde de la structure de l’emploi. Point de la situation et prospective avec Bernardo Aronowicz, fondateur de B-Aron Conseil, un cabinet spécialisé dans le recrutement pour le private banking à Genève.

Comme on pouvait s’y attendre, la crise financière a eu des conséquences importantes sur le front de l’emploi dans le secteur de la banque et de la finance. Selon les chiffres de l’Office cantonal de la statistique de Genève, le nombre de chômeurs inscrits issus du secteur atteignait 1161 personnes, soit une augmentation de près de 70% sur un an (688 personnes inscrites en décembre 2008). A observer la courbe de l’évolution du chômage, le point d’inflexion se situe à l’été 2008, date à laquelle le nombre de chômeurs a commencé à croître, avec une accélération très sensible en 2009. Auparavant, la tendance n’avait été qu’en s’améliorant à partir de début 2004, période qui signe la véritable sortie des années noires post-2001. Notons, par exemple, qu’en janvier 2004, on retrouve des chiffres équivalents à ceux que l’on observe aujourd’hui, soit un peu plus de 1000 demandeurs d’emplois. ■

Evolution du chômage dans les activités financières et d’assurances Chiffres mensuels

1200

1000

800

600

400

200

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B&F

Avr il Juil let Oc t obr e Jan vier 200 9 Avr il Juil let Oc t obr e

let Oc t obr e Jan vier 200 7 Avr il Juil let Oc t obr e Jan vier 200 8

Avr il

Juil

Avr il Juil let Oc t obr e Jan vier 200 6

Juil let Oc t obr e Jan vier 200 5

4

Avr il

0

Jan v

B&F: Ce n’est pas pour autant la fin de la place financière et des emplois qui y sont liés…

Canton de Genève

1400

ier

Banque & Finance: Avec la suppression du secret bancaire pour la clientèle européenne offshore, le private banking est à un tournant de son histoire. Comment cela va-t-il se traduire en termes d’emplois? BERNARDO ARONOWICZ: Ces changements structurels devraient, évidemment, avoir des conséquences sur le front de l’emploi. Il est fort probable que le mouvement de concentration du secteur s’accélère au cours des prochains mois. Avec les économies d’échelle occasionnées par ces regroupements, on devrait, mécaniquement, observer une diminution du nombre de postes de travail. On peut également se poser la question de la pérennité, à Genève, de certains établissements étrangers spécialisés dans la clientèle européenne offshore. Les gestionnaires de fortune indépendants visant la même clientèle devraient également souffrir. Si, comme on peut s’y attendre, on observe une baisse de l’activité dans la gestion privée, cela devrait également toucher l’ensemble des fournisseurs du secteur et, en particulier, les sous-traitants dépendant du volume, comme les services IT ou… les recruteurs.

2009, année noire sur le front de l’emploi

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Propos recueillis par Olivier VACHERAND

Source: Octstat

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EMPLOIS BANCAIRES B.A.: Non, bien sûr, même si les choses vont devenir plus difficiles et la concurrence avec d’autres places de plus en plus exacerbée. Certains acteurs devraient tout de même parvenir à tirer leur épingle du jeu pour autant qu’ils ne soient pas trop dépendants d’un modèle d’affaires basé sur la clientèle européenne offshore. Les grands acteurs de la gestion privée qui disposent de représentations en Europe ou dans d’autres zones géographiques porteuses ne devraient pas trop souffrir pas plus que certaines banques de niche positionnées sur des marchés non concernés par les conventions de double imposition comme l’Asie, le Moyen-Orient ou encore l’Amérique latine. Certaines sociétés d’asset management à forte valeur ajoutée, et avec elles leurs salariés, ne devraient pas trop souffrir non plus. On peut penser également que certains tiers gérants de type family offices, les avocats financiers ou encore les consultants en stratégie pourraient s’en sortir mieux que les autres. B&F: Au-delà des ajustements structurels encore à venir, nous avons déjà assisté à de nombreux ajustements conjoncturels… B.A.: Effectivement, un certain nombre d’établissements ont licencié afin de réduire leurs coûts. Les gestionnaires «à l’ancienne», qui géraient quelques centaines de millions d’actifs de ressortissants européens, ont fait les frais de ces ajustements par manque de rentabilité ou à la suite des retraits de clients. Globalement, les Client Relationship Managers spécialisés dans la clientèle européenne ne sont pas dans une position très confortable étant donné les incertitudes nées de la suppression du secret bancaire. Mais c’est surtout dans le secteur des hedge funds que les ajustements ont été les plus violents. Dans ce domaine, les estimations parlent de 40 à 50% d’emplois perdus. Tous les profils dépendant du volume d’affaires

ont également été touchés, que ce soit aux opérations, au middle ou au back-office. B&F: A l’inverse, quels sont les profils qui ont tiré leur épingle du jeu ces derniers mois? B.A.: Pour l’heure, la plupart des établissements sont dans l’expectative. Mais certains profils commencent à être demandés. Ce qui donne des indications sur la stratégie mise en place par les banques. Depuis plusieurs années, les Risk Managers ou les spécialistes de la compliance sont très recherchés. Mais il s’agit là d’une tendance lourde que la crise n’a fait qu’amplifier. A part cela, on observe une reprise des embauches dans les hedge funds mais en direct, c’est-à-dire avec la volonté d’insourcer la gestion. Jusqu’alors, les établissements de la place se limitaient, le plus souvent, à faire de la sélection de hedge funds et de fonds de fonds. On note, pour certains grands établissements, un changement de business model dans ce domaine avec la création de hedge funds pour les uns ou le rapprochement avec des gestionnaires chevronnés pour les autres. L’arrivée de Londres de hedge funds tels que BlueCrest ou Brevan Howard – en attendant d’autres – apportera également un bol d’oxygène sur le marché de l’emploi local. Si, en principe, ils arrivent avec leurs «cerveaux», ces nouveaux acteurs recruteront des profils opérationnels et d’exécution. B&F: Quels sont les autres profils qui devraient être recherchés à plus long terme? B.A.: Comme on l’a dit, la place financière devrait continuer à recruter directement des gestionnaires de hedge funds et non plus seulement des sélectionneurs de fonds. On peut penser aussi que les assembleurs de produits devraient être recherchés, en particulier dans les plus petits éta-

«Certains acteurs devraient parvenir à tirer leur épingle du jeu pour autant qu’ils ne soient pas trop dépendants d’un modèle d’affaires basé sur la clientèle européenne offshore» BERNARDO ARONOWICZ – B-ARON CONSEIL

blissements. La demande commence à se faire sentir aussi pour les spécialistes des opérations, pour se prémunir notamment des fraudes ou des vols de données. Pour compenser la baisse tendancielle prévue dans la gestion privée, on doit s’attendre également à une montée en puissance de la gestion institutionnelle avec la nécessité de recruter des vendeurs. Enfin, je pense que les spécialistes de certains marchés comme le Moyen-Orient et l’Amérique latine vont voir leur cote augmenter sensiblement. ■ O.V.

Le nombre d’emplois dans le secteur de la banque et assurance Entre 2001 et 2005, le nombre d’établissements et d’emplois dans le secteur de la banque et de l’assurance est resté, crise oblige, relativement stable avant de littéralement s’envoler dans la seconde moitié de la décennie 2000. Une augmentation très rapide qui n’est pas étrangère à la très bonne santé affichée par les activités financières jusqu’à l’effondrement dû à la crise des subprimes et ses effets collatéraux. ■

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Emplois par nationalité Année Etablissements 2008 1’473 2005 1’174 2001 1’053

Suisses 19’239 17’219 17’837

Etrangers 9’191 6’751 5’982

Emplois par sexe Hommes 16’922 14’225 13’683

Femmes 11’508 9’745 10’136

Total 28’430 23’970 23’819

Source: Octstat

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ENJEUX GESTION DE LA PERFORMANCE

Investir dans l’humain, une option gagnante! Le contexte économique globalisé, la pression des actionnaires ou encore la concurrence accrue sur le marché du travail ont fait augmenter la pression ressentie en matière de performance, qu’elle soit individuelle ou au niveau d’une équipe. Fabienne Revillard1, qui exerce en tant que coach au sein du cabinet qu’elle a créé, nous livre les ressorts de la performance et quelques pistes à explorer pour l’améliorer. Interview. seurs existent, ainsi que combien de temps nous sommes capables de tenir à des niveaux de performance aussi extraordinaires. Le coaching de performance assume qu’il est possible de réveiller notre potentiel intrinsèque en dehors d’une situation extrême, probablement pas de manière aussi prodigieuse mais cependant à un niveau bien plus élevé que notre standard habituel, et ce de manière durable.

Propos recueillis par Richard BRUN

Banque & Finance: Comment définissezvous la performance? FABIENNE REVILLARD: Il existe plusieurs définitions de la performance. Cependant, au-delà de synonymes courants comme «accomplir, exécuter ou encore mener à bien», il est intéressant de la considérer comme «dépasser ce qui est attendu, se surpasser». En ce sens, il s’agit de la pleine expression de notre propre potentiel. La performance peut être envisagée aujourd’hui comme présente dans tous les domaines de notre vie. Elle apparaît dès lors que nous désirons passer d’un état présent (que nous jugeons plus ou moins satisfaisant, voire insatisfaisant) à un état futur désiré (ressenti comme pleinement satisfaisant), que ce soit au niveau professionnel ou personnel (relationnel, social, physique, sportif, etc.) En général, il est admis que nous sommes tous capables d’accomplir des choses extraordinaires en cas de crise extrême, voire de situation de survie. Le cas notamment de cette femme toute menue qui avait réussi à soulever une voiture tombée sur la cage thoracique de son mari et qui menaçait de l’étouffer définitivement. Cet exemple est exceptionnel. Cependant, il illustre le fait que nous avons en nous des capacités insoupçonnées, déclenchées en l’occurrence par une crise.

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B&F

«Le coaching de performance assume qu’il est possible de réveiller notre potentiel intrinsèque en dehors d’une situation extrême, à un niveau bien plus élevé que notre standard habituel, et ce de manière durable»

B&F: Comment procéder pour réveiller ce potentiel? F.R.: Il va s’agir, en général, de définir un objectif, vérifier s’il est réaliste, explorer les options permettant de l’atteindre, identifier les obstacles ainsi que les possibilités de les surmonter et s’engager concrètement en faveur du but défini. B&F: Tout cela paraît plutôt simple, non? F.R.: En effet, il est parfaitement possible de «s’autocoacher» et d’obtenir d’excellents résultats! Cependant, il peut être parfois difficile de prendre de la distance, de trouver le temps de se pencher sur la question ou de s’empêcher de remettre au lendemain! De même, sortir seul de son cadre de pensée habituel pour trouver de nouvelles options, réussir à identifier de manière

FABIENNE REVILLARD – AAA + COACHING Fabienne Revillard dispose d’une expérience de haut niveau dans le domaine de l’entreprise (direction d’entreprise et membre de comités de direction, plus de dix ans de management en multinationales), qu’elle utilise aujourd’hui en tant que coach et maître praticien PNL certifiés; elle a fondé AAA + COACHING www.aaaplus.ch, ainsi que la manifestation mensuelle «Les Samedis du Coaching» www.coachinggeneve.ch

1

B&F: Est-il possible de reproduire à la demande ces niveaux de performance hors du commun? F.R.: La question est effectivement de savoir si, en dehors de la crise, d’autres cataly-

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GESTION DE LA PERFORMANCE

Le manque de confiance en soi est très souvent en cause dans les problématiques de perfomance. © Yuri Arcurs - Fotolia.com autonome ses comportements, raisonnements ou croyances autolimitants, tenir sur la longueur ou encore oser poser un objectif semblant trop éloigné ou trop beau peut se révéler laborieux. Il est vrai que la réaction souvent inconsciente consistant à s’interdire tout simplement de penser à une situation future de «rêve» pour se protéger de la souffrance de la déception en cas d’échec est extrêmement courante et, malheureusement, bien limitante également. Ces limitations sont internes par opposition aux obstacles externes qui peuvent se présenter et parfois se révéler en dehors du ressort de la personne. B&F: Quels peuvent être ces freins internes? F.R.: Parmi les principaux cités, nous retrouvons des problèmes de confusion, de motivation, de focalisation, de gestion des priorités, de difficultés à déléguer, ainsi que, très souvent et de manière sous-jacente, les doutes sur ses propres capacités, le manque de confiance en soi, la peur de l’échec et le manque d’estime de soi. B&F: La confusion, notamment, est clairement un frein à la performance… F.R.: En effet, il nous est possible d’agir uniquement sur ce dont nous avons conscience. Augmenter la clarté, appréhender la réalité telle qu’elle est, agrandit notre champ de conscience et ainsi, notre possibilité d’avoir prise sur les choses. De plus, il nous est difficile de nous engager pleinement si nous sommes confus. A ce niveau, il n’est pas rare de trouver des conflits de valeurs qui paralysent l’action, voire démotivent complètement.

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B&F: Justement, qu’en est-il de la motivation? F.R.: En ce qui concerne la motivation, trois éléments ressortent: il faut se sentir engagé personnellement, responsable du processus aboutissant à la réalisation de l’objectif, ainsi qu’en contrôle de l’objectif (idéalement l’avoir soi-même fixé). Ce point est à souligner, car la vraie motivation, celle que l’individu ressent profondément, est essentielle et c’est souvent l’un des principaux obstacles rencontrés en management d’équipe visant une augmentation de la performance. En effet, en général, lorsque nous acceptons et prenons sincèrement la responsabilité de nos pensées et de nos actions, notre engagement à leur égard croît et par conséquent notre niveau de performance augmente également. Il est, bien sûr, également important d’être clair sur la hauteur de l’investissement que nous sommes prêts à accorder pour atteindre l’objectif fixé. B&F: Prenons maintenant la problématique de la focalisation… F.R.: Il est vrai que la plupart d’entre nous avons la faculté de performer assez bien en pilote automatique, c’est-à-dire sans grande focalisation. Cependant, une performance élevée demande une attention complète et une concentration intense. Au-delà du fait de clarifier les éléments de distraction, certaines techniques visant à renforcer les capacités de concentration se révèlent très efficaces (entre autres, le «Nasa Game» développé par John Grinder, l’un des fondateurs de la PNL – Programmation NeuroLinguistique – par exemple).

F.R.: Bien entendu, la confiance en soi, vaste sujet, est fondamentale et le manque de confiance en soi se révèle être l’une des difficultés les plus courantes en arrière-plan des problèmes de performance. S’autoriser à reconnaître ses succès, les accumuler et savoir qu’ils sont dus à nos propres efforts aide à construire la confiance en soi. A l’inverse, se fixer des objectifs impossibles à atteindre et échouer détruit cette confiance. De plus, se focaliser sur les échecs tend à induire une systématique au niveau des pensées et des comportements conduisant à l’échec, et, par conséquent, à un cercle vicieux infernal. B&F: Dès lors, comment sortir de cet engrenage? F.R.: Recadrer l’échec en le considérant comme une expérience d’apprentissage, en analysant précisément quels éléments seraient à améliorer pour atteindre le succès la fois suivante aide à sortir du cercle infernal. De la même manière, ces constatations s’appliquent également au niveau du management d’équipe, afin d’augmenter progressivement la performance personnelle de chacun des membres et, dès lors, la performance globale de l’équipe. B&F: Tout n’est donc pas perdu… F.R.: Non, bien au contraire ! Réviser notre façon de considérer les autres, croire aux capacités dormantes en chacun de nous et voir les personnes en fonction de leur potentiel futur, plutôt que par rapport à leur performance passée, est déjà un bon début. Cette attitude aide à construire la confiance en soi de chacun et, ainsi, à accroître la performance générale. ■

B&F: La confiance en soi est aussi un élément primordial…

R.B.

Les Samedis du Coaching Il s’agit d’une manifestation à but non lucratif, ouverte à tous, permettant de s’informer et de faire une séance d’essai avec un coach facilement, gratuitement et sans engagement aucun, le tout dans un cadre convivial! L’objectif visé est de démocratiser le coaching et, en temps de conjoncture difficile, d’en faire profiter tout un chacun! Des thèmes régulièrement abordés: difficultés professionnelles et/ou personnelles, réorientation de carrière, recherche d’emploi, confiance et estime de soi, motivation, gestion émotionnelle, accompagnement au changement ou encore démarrage de son activité propre. Des spécialistes sont régulièrement invités sur des thèmes précis, dont, notamment, la performance, le marketing de soi, l’hypnose ericksonienne, les problématiques couple/famille/enfant, etc. Les Samedis du Coaching ont lieu les derniers samedis de chaque mois à la Brasserie des Halles de l’Ile de 10 h à 18 h. Prochaines dates: 29.05, 26.06, 31.07, 28.08, etc. Plus de détails sur www.coachinggeneve.ch, tél. 022 321 89 79, info@coachinggeneve.ch ■

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ENJEUX VEILLE STRATÉGIQUE ET RÉGLEMENTAIRE

Un nouveau défi pour les banques

La veille: pourquoi? En Suisse, le corpus réglementaire ne mentionne pas formellement qu’une institution bancaire ou financière doit disposer d’un

Internet: un puits sans fond? A propos de l’auteur Marc Barbezat est le créateur et l’éditeur de la cellule de veille et d’intelligence économique pour la banque et la finance www.b3b.ch, proposant des publications régulières sur l’actualité et les nouvelles tendances (réglementaire, juridique, technologie, sécurité, risque). Marc Barbezat est également un expert dans les domaines de la sécurité informatique et des risques opérationnels bancaires. ■

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Aujourd’hui, s’il est possible d’extraire l’information depuis de nombreuses sources, il n’est plus possible d’ignorer la plus grande base de données universelle: Internet. Mais attention, pour trouver les trésors que recèle ce puits d’informations, il est nécessaire préalablement d’en comprendre ses contours et de savoir utiliser ses outils. La veille ne peut être réduite à une simple recherche sur Google ou à la surveillance ponctuelle de quelques pages Web.

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u latin «vigilia», la veille est associée à la surveillance et à l’absence de repos. Dans l’antre de l’entreprise, il s’agit donc de monter la garde sans discontinuité afin d’assurer le développement du savoir et, en conséquence, la pérennité de l’organisation. La veille juridique et réglementaire, la veille financière, la veille concurrentielle, la veille technologique, la veille environnementale, la veille médiatique sont autant de domaines de recherche participant à la construction de la connaissance et du savoir au sein de l’entreprise.

environnement de veille. Cette notion est, néanmoins, implicitement incluse dans le principe d'«organisation adéquate» qui rappelle que les collaborateurs responsables se doivent de disposer des connaissances professionnelles nécessaires. Sous cet éclairage, le principe de garantie d’une activité irréprochable doit être également considéré lorsque l’on parle de responsabilité juridique. En France, la notion de «veille» est davantage explicitée par l’AMF, l’Autorité des marchés financiers. Même si ce terme n’existe pas directement dans son règlement de plus de 1500 pages, des références annexes contribuent à rappeler l’importance de cette activité. Ainsi, par exemple, dans son rapport intitulé Le dispositif de contrôle interne: cadre de référence, issu des recherches d’un groupe de travail en 2007, la notion de veille y est mentionnée à de multiples reprises, en particulier pour la dimension réglementaire et la surveillance des meilleures pratiques en matière de contrôle interne.

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Marc BARBEZAT www.b3b.ch

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L’actualité ne cesse de nous rappeler l’importance de l’information pour les banques et les institutions financières à l’instar de chaque organisation. Pourtant, par-delà la notion de confidentialité des données se cache une valeur stratégique: celle du savoir. Au sommet de la pyramide, elle symbolise sa capacité à connaître et comprendre ses informations et, ultimement, elle reflète sa capacité à évoluer et anticiper les défis de demain. Spécialiste de la veille sur Internet, Marc Barbezat nous livre les secrets d’une veille efficace.

savoir

connaissance information donnée

Sur Internet, il n’existe pas qu’un seul environnement à considérer. La zone la plus connue est, bien entendu, le Web, où se situent la plupart des sites et des pages. Mais l’information d’Internet peut encore être stockée en d’autres lieux et sous d’autres formes comme, par exemple, dans les groupes de discussion (newsgroup), les courriers électroniques (email), les sites de partage d’information (peer-to-peer) et le Web invisible (non accessible via les outils standards ou non indexé dans les moteurs de recherche publics). Pour pêcher la bonne information, il est nécessaire d’adapter son matériel et ses outils: un filet aux mailles trop larges ou une ligne trop fine ne peuvent répondre aux mêmes besoins. Ainsi, il est clair qu’il n’existera pas un unique outil pour couvrir tous les domaines de veille simultanément et, logiquement, pas un seul processus de

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VEILLE STRATÉGIQUE recherche ne permettra de capter toutes les nouveautés sur l’ensemble de ces domaines.

Extraire l’intelligence du Web Le moyen historique le plus souvent proposé pour capter l’information est la newsletter. Dans ce cas, une alerte est envoyée par la source de l’information. Vous êtes donc averti des nouveautés selon des critères prédéfinis (fréquence, nombre de nouveaux articles par exemple) via un courriel. Depuis quelques années, un autre principe se généralise sur les sites Web pour proposer un flux de données automatiquement mis à jour et appelé RSS (Really Simple Syndication). Comme pour un flux d’informations financières, le site originel propose un flux actualisé des changements qui peut être directement capté par chaque internaute via son navigateur ou un lecteur dédié. Identifiable par un logo carré habituellement orange, cette disposition se généralise, comme, par exemple, sur le site de la FINMA qui propose les cinq dernières nouvelles par ce biais. Malheureusement, ces deux principes ne suffisent pas pour capter l’information sur Internet. En effet, certains sites n’offrent ni l’une ni l’autre de ces possibilités ou la partie d’information que l’on souhaite analyser ne compte pas parmi les informations diffusées. Dans ce cas, des outils spécialisés (trackers) peuvent être appelés à la rescousse. Ils permettent de tracer les modifications selon des critères prédéfinis comme, par exemple, le nombre de modifications sur la page, l’ajout d’une nouvelle image, etc.

La bonne information à la bonne personne L’étape suivante ne revêt pas moins d’importance dans le processus de veille. Il s’agit maintenant d’organiser les informations et données collectées, de les classifier, les enrichir, les formater, sélectionner certaines d’entre elles, les traduire éventuellement, etc. L’objectif de ces traitements est de rendre les informations cohérentes et comparables entre

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elles, et spécifiquement adaptées aux besoins des destinataires finaux. Pour ce faire, plusieurs modes opératoires sont possibles. Le plus économique s’appuie sur une combinaison d’outils informatiques dont dispose chacun d’entre nous, comme des tableurs ou même des services en ligne spécialisés. Il s’agit alors de trouver les meilleurs outils pour répondre à chacune des problématiques d’analyse. Une autre variante consiste à organiser sa veille sur des plateformes spécialisées couvrant toutes les étapes du processus, de la collecte à la diffusion, comme celles proposées par Digimind, KeyWatch, AMI Entreprise Intelligence et d’autres. Mais, même si ces outils proposent intrinsèquement des solutions de diffusion, il faut être conscient que les règles de transmission des informations ne sont pas triviales. Il est nécessaire d’avoir préalablement clarifier le «Quoi» (quelle information?), le «Qui» (quel destinataire?), le «Où» (depuis Internet, sur un réseau interne…), le «Comment» (papier, courriel, flux RSS, portail, blog, wiki…) et le «Quand» (à la demande, à chaque nouveauté,

une fois par semaine…) Il est nécessaire de prendre en considération qu’un destinataire aura, a priori, des préférences différentes en termes de format ou de fréquence selon la nature de l’information reçue.

«Il n’existe pas un unique outil pour couvrir tous les domaines de veille simultanément et, logiquement, pas un seul processus de recherche qui permette de capter toutes les nouveautés sur l’ensemble de ces domaines»

Ainsi, si l’on combine les exigences relatives aux traitements et à la diffusion, il est facile de comprendre qu’une solution de veille «clés en main» n’existe pas.

La veille pour assurer le lendemain Dans la nature, un pêcheur analyse les cours d’eaux, repère les courants, surveille la météorologie et adapte son matériel au poisson qu’il souhaite hameçonner. A la pêche à l’information sur Internet, cette maxime est toujours vraie. Il n’existe pas une solution de veille unique et même si celle-ci existait, un processus de veille ne peut rester immobile. Il doit rester «éveillé». Il doit prendre en considération les nouvelles sources, faire évoluer ses méthodes d’analyse et ses principes de diffusion afin de répondre constamment aux besoins. Il faut également être conscient qu’un outil ne va pas être le remède miracle à toutes les problématiques d’information de l’organisation. Pour relever ce défi, il est nécessaire d’établir une culture de construction d’un savoir commun, celle de l’intelligence collective. ■ M.B.

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SOLUTIONS BANCAIRES FINANCEMENT DU NÉGOCE INTERNATIONAL

Quels outils informatiques pour gérer les risques? Les activités du commerce international nécessitent des financements particulièrement lourds et génèrent des risques multiples dont la gestion demande le suivi d’un nombre important d’indicateurs. Le plus souvent, ces derniers sont compilés dans de simples tableurs Excel alors que des solutions beaucoup plus performantes sont désormais disponibles sur le marché. Jean-Luc SPINARDI MIT (Micro Informatique & Technologies SA)

L

e négoce de matières premières est une activité historique très importante du bassin lémanique. Elle a commencé à se développer de manière très importante durant la période d’après-guerre. Aujourd’hui, on estime qu’entre Lausanne et Genève, le tiers, voire la moitié, des ventes mondiales de grains, de sucre, de jute ou de pétrole passe par les bords du Léman. Par ailleurs, Genève, grâce au trading de pétrole, est devenue aujourd’hui la première place mondiale de vente et d’achat de pétrole russe, et talonne de près Londres pour le négoce de l’or noir mondial. Dans ce contexte, une forte activité bancaire de financement de négoce international s’est développée dans la région lémanique. D’ailleurs, rien qu’à Genève, des banques telles que BNP Paribas, le Crédit Agricole, la Banque Cantonale de Genève et la Banque de Commerce & de Placements, entre autres, sont très actives dans ce domaine. On peut distinguer deux approches ou «écoles de pensée» relatives au mode de financement de cette activité. Primo, un mode de financement basé sur le bilan de l’entreprise. Ce type de financement dit «corporate» vise principalement des sociétés au bénéfice d’une certaine assise financière, mais nécessitant un fond de roulement confortable pour financer leur activité. Ce genre de financement qui se

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base essentiellement sur la capacité de la compagnie à rembourser, requiert, en principe, moins de contrôle de la part de la banque une fois le financement octroyé. En d’autres termes, c’est l’analyse du bilan qui constitue la pierre angulaire de ce type de financement. Secundo, un financement de type transactionnel qui, à l’inverse du précédent, ne se base pas sur le bilan, mais sur la marchandise financée. En effet, une des caractéristiques principales des sociétés de négoce de matières premières, mise à part les grandes compagnies, en est leur faible

«La mesure efficace la plus évidente consiste en la mise en place d’outils informatiques performants pour sécuriser l’activité tout en étant capable de prendre des décisions rapides basées sur des données fiables» JEAN-LUC SPINARDI – MIT

capitalisation. Dans ce type de financement, on comprend aisément qu’il est fondamental pour une banque de suivre le cheminement de la marchandise physique sachant qu’elle représente le gage de son financement. La notion de collatéral et d’évaluation du risque prend donc toute sa dimension.

Plusieurs types de risques Ce deuxième type de financement demande une grande connaissance des marchés, mais également une grande connaissance des clients à qui l’on va avancer ces fonds. Les risques sont limités dans certains types de transactions par la possession de documents tels que les connaissements (Bill of Lading), qui représentent un droit de gage sur la marchandise financée. Cependant, la complexité des transactions conduit les banques à se diriger vers des types de financement toujours plus particuliers et risqués, mais également plus lucratifs. Néanmoins, les banques pratiquant cette activité doivent toujours mettre en balance plusieurs indicateurs afin d’assurer un suivi optimal, plus particulièrement le respect des limites de financement octroyées par la banque en faveur d’un client donné, le niveau et le type de ses engagements, l’évaluation de ses collatéraux et, surtout, une grande maîtrise et connaissance des différents risques liés à cette activité. On distingue, en général, plusieurs types de risques: • Le risque client ou «KYC – Know your Customer». Il incombe au gestionnaire de bien connaître son client et de savoir si ses compétences et son professionnalisme représentent déjà une garantie suffisante pour lui prêter des fonds; la notion de réputation et de confiance jouant un rôle prépondérant. • Le risque pays. Le risque est évalué différemment selon qu’une marchandise se trouve dans tel ou tel pays. Le fait qu’une marchandise puisse transiter par différents pays aura un impact certain sur le calcul du risque et sur son évaluation.

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NÉGOCE INTERNATIONAL © HERBERT RUBENS - FOTOLIA.COM

Les insuffisances d’Excel

Les risques liés à une transaction commerciale sur les commodities sont nombreux. • Le risque du marché ou risque prix. La marchandise étant le seul gage pour la banque, il lui incombe donc de suivre l’évolution de son prix. Plus le prix d’une matière première est volatil, plus le risque est élevé pour la banque. • Le risque de contrepartie. La banque doit évaluer le risque lié aux contreparties des transactions qu’elle finance. On entend par contrepartie le second volet d’une transaction au cours duquel la marchandise est revendue à une contrepartie et dont le paiement servira à rembourser les fonds avancés. • Le risque opérationnel. La banque doit mettre en place des procédures internes très strictes quant à la gestion de cette activité et veiller au respect de ces dernières par ses collaborateurs. La définition du cadre de travail et son suivi scrupuleux demeurent un souci constant du management étant donné la nature même de l’activité. La mesure efficace la plus évidente consiste en la mise en place d’outils informatiques performants pour sécuriser l’activité tout en étant capable de prendre des décisions rapides basées sur des données fiables.

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C’est sur ce dernier point, entre autres, que les banques sont en train d’évaluer si leurs outils informatiques sont toujours en phase avec les prérequis actuels du marché et des demandes toujours plus exigeantes des auditeurs. En effet, cette activité étant très particulière, il devient fondamental pour les auditeurs d’obtenir, d’une part, des données fiables et, d’autre part, pour les managers qui ne sont pas du sérail, d’avoir une certaine maîtrise sur ces financements toujours plus complexes. Dans le climat de crise financière que nous traversons, force est de constater que les banques et les éditeurs de logiciels bancaires n’ont qu’une seule phrase à la bouche depuis dix-huit mois: «Comment améliorer la gestion du risque?» et le financement des matières premières n’échappe pas à ce débat. De plus, les réglementations Bâle II actuellement en vigueur contraignent les banques à se pencher de manière précise et efficace sur la question de l’évaluation d’un risque lié à une activité pour la banque. En effet, celle-ci aura des répercussions sur l’allocation de fonds propres nécessaires à cette activité.

S’il s’avère qu’à l’heure actuelle, les banques sont, en général, plus ou moins bien équipées avec des outils informatiques éprouvés pour la saisie et la comptabilisation de leurs opérations liées à des instruments financiers tels que le crédit documentaire, la garantie bancaire ou encore l’encaissement documentaire, il n’en est pas de même pour le suivi proprement dit de ces financements et des lignes de crédit y relatives. En effet, l’outil bureautique le plus fréquemment utilisé dans les banques pour le suivi transactionnel est une feuille de calcul Excel. Le fichier Excel offre une grande flexibilité au gestionnaire de la banque pour suivre l’évolution de ses transactions tout en calculant la position économique globale de son client à un moment donné. La position s’établit en consolidant manuellement de l’information provenant, en général, de plusieurs sources hétérogènes. Cette position économique sert de «baromètre» à la prise de décision d’un gestionnaire ou d’un comité de crédit en ce qui concerne le financement d’une transaction pour son client. Nonobstant la flexibilité d’une feuille Excel, cette dernière présente un sérieux risque en termes de sécurité et de fiabilité de l’information présentée, alors que cette information sert de support à des décisions de financement pour des montants à sept ou huit chiffres. D’où la nécessité croissante de proposer de nouveaux outils informatiques innovateurs s’intégrant aisément au sein d’une infrastructure bancaire existante. La finalité étant d’automatiser l’extraction de données provenant de différents systèmes hétérogènes en vue de les synthétiser dans un outil à même de présenter une analyse précise de la position économique de son client en temps réel. ■ J.-L.S.

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SOLUTIONS BANCAIRES Avaloq: cinq mises en service simultanées Belles opérations pour Avaloq, le leader suisse des logiciels bancaires standardisés. En janvier 2010, cinq banques ont parachevé la mise en service simultanée de l’Avaloq Banking System: NBAD Private Bank (Suisse) SA, NZB Neue Zürcher Bank, Baloise Bank SoBa, Bank Linth LLB AG et la banque liechtensteinoise LGT Group. La banque de la famille princière du Liechtenstein est la première à utiliser le logiciel informatique en Allemagne. L’occasion de prendre pied sur ce marché – qualifié d’attrayant par le groupe – un an après l’implémentation du système en Suisse et dans la Principauté. LGT vient également d’étendre l’utilisation d’Avaloq dans sa filiale de Singapour. D’autre part, Avaloq renforce également ses positions en Suisse avec l’implémentation de son système à la Baloise Bank SoBa et au sein de la Bank Linth LLB AG. La maisonmère du groupe LLB à Vaduz ainsi que LLB (Suisse) suivront début 2011. Enfin, Avaloq poursuit son partenariat avec la société tessinoise B-Source, spécialiste de l’outsourcing des opérations bancaires. Début 2010, en l’espace de neuf mois, NBAD Private Bank (Suisse) SA et NZB Neue Zürcher Bank ont mis en service avec succès l’Avaloq Banking System en tant que prestation de service proposée par B-Source. Grâce à ce système, B-Source propose ses propres prestations de service. Cette stratégie repose sur la Banque Modèle complète B-Source Master, qui a été développée avec l’aide des deux partenaires Avaloq et Orbium. Grâce à son partenaire, l’Avaloq Banking System peut donc être proposé également aux banques de plus petite taille. Le groupe Avaloq se présente comme le leader suisse des logiciels bancaires standardisés, avec une quarantaine de banques utilisatrices à travers le monde et environ 35 000 utilisateurs. Dans une logique d’internationalisation, Avaloq possède des succursales à Luxembourg, Francfort, Vienne, Moscou, Dubai et Singapour. D’autres ouvertures de bureaux à l’étranger devraient suivre dans les prochains mois. Enfin, Avaloq vient d’annoncer la conclusion d’un partenariat avec le groupe PMC pour intégrer sa solution d’archivage inboxx hyparchiv. ■

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NEWS

EN BREF La société lausannoise MIT (Micro Informatique & Technologies SA) annonce le lancement d’un nouveau logiciel baptisé TRAC (Trade Risk Active Control), dédié aux banques pour la gestion des opérations de financement du commerce international. Ce nouveau produit, qui sera dévoilé officiellement en mai à l’occasion de la 12e édition de la Journée des solutions bancaires à Genève, est destiné aux Trade Commodity Finance Relationship Managers, aux Credit Risk Managers ou encore au top managment. Une alternative très puissance à la très répandue feuille de calcul Excel. TRAC a été conçu pour s’intégrer facilement aux différents logiciels bancaires. AIM Software, le fournisseur suisse de logiciels de management de données pour l’industrie financière, annonce que Privatbank IHAG Zürich, utilisateur de la solution GAIN Data Management, vient d’adopter l’interface Ambit Apsys pour une mise à jour quotidienne des données. Cette opération permet une automatisation accrue avec une récupération automatique des données dans le logiciel bancaire général de la banque. Dans les prochains mois, la société informatique prévoit d’implémenter le même type d’interface chez ses clients utilisant la plateforme bancaire Sungard. AIM annonce également l’implémentation de sa solution Golden Copy à la Deutsche Postbank Financial avec, pour objectif, l’optimisation de la délivrance de données via SIX Telekurs pour le logiciel Decalog de Sungard. Covadis, société genevoise spécialisée dans la sécurité et la protection des données, vient de lancer Auriga, son nouveau lecteur combinant biométrie, encryptage et carte à puce. Ce nouveau lecteur est aussi bien destiné à l’authentification des employés et au contrôle de l’accès aux ressources informatiques des entreprises, banques ou administrations publiques, qu’à l’identification de personnes désirant accéder à certains bâtiments ou laboratoires. Conçu pour contrôler des certificats PKI (Public Key Infrastructure) destinés à la signature de documents, à l’authentification ou à la vérification, Auriga peut stocker jusqu’à 50 000 patrons d’empreintes digitales et sa vitesse lui permet de comparer 20 000 empreintes par seconde. Teleinvest Group, le fournisseur lausannois de solutions de trading, vient d’être certifié pour les nouvelles connexions UTP direct et UTP MD d’Euronext Paris. Figurer sur cette liste officielle des éditeurs de logiciels agréés témoigne de la dimension internationale du groupe. Récemment, Teleinvest a également intégré la nouvelle SWXess Maintenance Release 1, afin de garantir un service optimal pour les clients de Predator – sa plateforme de trading en ligne.

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HISTOIRE

1973: une attaque frontale contre la Suisse En plein choc pétrolier, une émission de NBC lance la première salve d’une série d’attaques contre la place financière suisse. En première ligne déjà, le sociologue Jean Ziegler, devenu depuis lors la véritable bête noire en Suisse des milieux économiques et financiers. Mohammad FARROKH

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il est un livre emblématique d’une époque, c’est bien celui de Denis de Rougemont, La Suisse ou l’histoire d’un peuple heureux, paru en 1970. Une époque de plein-emploi et de prospérité sans précédent dans l’histoire d’un peuple qui, jusqu’au tournant des années 1950, n’avait pas été si heureux que cela. En 1973, se souvenait dans les années 1990 encore le directeur de l’Office cantonal genevois de l’emploi, le canton ne comptait que 13 chômeurs reconnus comme tels. Ces temps allaient prendre fin par un beau jour d’automne 1973, avec le début de la guerre du Kippour, suivie d’un embargo pétrolier arabe qui suscita une onde de choc dont on ne devait pas tout de suite mesurer les conséquences. On a peine à retrouver aujourd’hui l’émotion et le sentiment d’incertitude qui se sont emparés des esprits. Au Parlement, une interpellation cosignée par une quinzaine de conseillers nationaux faisait état de la «crainte largement répandue dans le monde que les mesures appliquées par certains Etats producteurs de pétrole ne deviennent un facteur permanent de troubles et d’insécurité dans les relations entre les Etats et les peuples».

Lutte contre la surchauffe économique L’effet inflationniste de ce premier choc pétrolier renforça, dans un premier temps, une politique axée sur la lutte contre la «surchauffe économique». Encouragé par la libéralisation des flux de capitaux, le phénomène avait été précédé, en 1958, par le

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rétablissement de la convertibilité des principales monnaies européennes. Les conséquences pour la Suisse, d’abord favorables, devaient l’être moins par la suite, comme le rappelait le Conseil fédéral en 1976, dans son Message sur l’article conjoncturel de la Constitution: la convertibilité des monnaies «a coïncidé avec le début d’une évolution fiévreuse de la conjoncture, d’une accélération de la croissance et du renchérissement». Le 20 décembre 1972, le Conseil fédéral adoptait cinq arrêtés fédéraux urgents, «relatifs à des mesures complémentaires visant à combattre la surchauffe économique». Ceux-ci étaient acceptés par le peuple suisse en votation du 2 décembre 1973, preuve que, six semaines après la guerre du Kippour, personne ou presque n’en anticipait encore les retombées.

«Entre 1950 et 1970, la place financière suisse s’était hissée au 3e rang, derrière New York et Londres» Au contraire, une année plus tard, le Conseil fédéral soumettait à l’Assemblée fédérale son rapport «sur les mesures complémentaires visant à combattre la surchauffe économique». Malgré un ralentissement de la croissance et certains signes avant-coureurs d’une récession prochaine, notamment une baisse de 12% de livraisons de ciment durant les huit premiers mois de 1974, le Conseil fédéral continuait de privilégier une politique monétaire restrictive pour résoudre les problèmes suscités par l’inflation. Des tensions aggravées par le dynamisme du marché financier helvétique, combattues par une politique de limitation des crédits destinée à freiner l’activisme

des banques. Le nombre et le montant des émissions de débiteurs suisses étaient contingentés en 1974 encore, alors que le marché donnait des signes de saturation, un emprunt de 200 millions de francs pour le compte des CFF n’ayant pas pu être entièrement placé.

La Suisse concurrente des Anglo-Saxons Entre 1950 et 1970, la place financière suisse s’était hissée au 3e rang, derrière New York et Londres. Ce développement avait été favorisé par le monopole accordé aux banques de droit suisse sur les émissions d’obligations en francs suisses, y compris pour des débiteurs étrangers. D’où la création de filiales suisses par certaines banques désireuses d’avoir pleinement accès au marché des émissions en francs suisses. Le mouvement s’était fortement accru après le 5 mai 1971, date de la fin du système des changes fixes. La hausse du franc suisse s’était encore accélérée après la guerre du Kippour, pour atteindre quelque 30% en octobre 1974. Les inquiétudes suscitées par l’impact possible de cette «revalorisation» du franc sur la situation concurrentielle des entreprises suisses s’avéraient pourtant excessives: sur les huit premiers mois de 1974 encore, la croissance des exportations suisses atteignait toujours 8,5% en termes réels. Cet âge d’or l’était plus encore pour la place financière: en 1973, pas moins de 99 banques étrangères étaient présentes en Suisse, dont 84 avec le statut de filiales. Ensemble, celles-ci représentaient 11% du total de bilan du secteur bancaire. Mais c’est surtout les grandes banques qui profitaient de l’essor de la place financière suisse: de 1960 à 1970, leur part au total cumulé des bilans de l’ensemble des banques passait de 31,3% à 47,9%, tandis

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CRISE DE 1973 que celle des banques cantonales régressait de 35,3% à 24,2%. Les grandes banques occupaient, à elles seules, 54% de l’ensemble des 60 000 personnes actives dans le secteur bancaire. La prépondérance des grandes banques était à peine relativisée par les banques étrangères en Suisse qui parvenaient à se tailler une part de marché de 28% dans les affaires internationales de crédit.

de fixer l’inflation à un taux élevé, tournée en dérision, elle paraît d’autant plus absurde qu’un taux élevé de renchérissement se retrouve dans l’ensemble de la zone OCDE, en ce début des années 1970. Bien entendu, les grandes banques n’étaient pas non plus responsables du quadruplement du prix du pétrole, dont les effets ne devaient cependant pas pleinement se faire sentir avant l’automne 1974.

La première salve

La crise s’abat sur la Suisse

Le succès insolent des grandes banques commence à susciter la jalousie et les critiques, à l’étranger mais aussi en Suisse. La première salve est tirée par Jean Ziegler qui, au Conseil national, pose une «petite question» mettant en cause l’autorisation donnée à l’UBS d’élever un bâtiment administratif à la place Cornavin à Genève. «Des milliers de logements manquent à Genève», accuse le sociologue, dont l’offensive contre la place financière suisse n’en est encore qu’à ses débuts. Plus grave, le 19 décembre 1973, la Neue Zürcher Zeitung publie un article consacré à «la légende des gnomes de Zurich» qui se base sur un reportage de la National Broadcasting Company, diffusé aux Etats-Unis trois jours plus tôt. Parmi les personnalités invitées à s’exprimer dans ce cadre figuraient les conseillers nationaux James Schwarzenbach, sur le déclin après l’échec de ses initiatives xénophobes, et surtout Jean Ziegler, lui-même en pleine ascension. Plusieurs parlementaires fédéraux s’en émeuvent, dénonçant une émission tendancieuse, reprenant des interviews «tronquées». Il s’agit, peut-on lire dans le bulletin du Conseil national, d’une «attaque perfide contre les grandes banques suisses et notre pays… Bref, ce reportage distille le venin avec la technique de gens rompus à ce genre d’exercice». Mais le compte rendu réserve sa plus grande sévérité à Jean Ziegler qui est largement cité: «Les grandes banques corrompent véritablement le système politique suisse grâce à leur puissance financière qui représente plus de trois fois le revenu national suisse. Si les cinq grandes banques disent “le taux d’inflation en Suisse sera de 10% en 1973”, eh bien, le taux d’inflation sera de 10%!» Au Conseil national, on tente de contrecarrer l’effet de ces déclarations: non, le total des bilans des grandes banques ne représente pas trois fois le PNB, mais à peine plus d’une fois. Quant à l’accusation

La cassure allait se marquer en octobre, coup d’envoi d’une crise qui, comme devait le relever encore des décennies plus tard un spécialiste de la conjoncture aussi averti que le professeur genevois Beat Bürgenmeier, paraissait encore pouvoir être évitée au début de l’automne. Subite comme une tempête, la récession allait être ressentie dans toute sa violence inédite, après un quart de siècle de prospérité pratiquement ininterrompue. De janvier à mai 1975, les exportations de la Suisse reculaient de 8,7% en valeur nominale, une baisse qui attei

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L’ART

zgnait 14% en termes réels. Le commerce extérieur de la Suisse était frappé par la récession mondiale, mais aussi par la hausse du franc. La solidité de la monnaie et l’attractivité de la place financière sont les caractéristiques d’une crise qui, malgré sa sévérité au vu d’une baisse de 7% du PIB en 1975, ne s’accompagnait d’aucune déstabilisation. Un sentiment de sécurité qui s’explique largement par la solidité des banques et du franc suisse… Devant la résilience de la place financière, l’acharnement des socialistes allait encore redoubler. Un scandale tout frais, celui de Chiasso, allait permettre de relancer l’offensive contre «les activités commerciales illicites de certaines banques», comme le demandait un postulat déposé aux Chambers fédérales le 2 mai 1977. Déjà, le secret bancaire était remis en cause et, à partir de 1978, il allait cesser d’être quasi absolu, comme il l’avait été durant un bref âge d’or d’une durée symbolique, à peine plus de sept ans. ■ M.F.

DANS

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Edward Burne-Jones / Morris & co., Le pèlerin jardin d'oisiveté ou le cœur de la rose, créé vers 1890, tissé en 1901. Tapisserie, laine et soie sur caneva de coton, 150 x 201 cm, Badisches Landesmuseum Karlsruhe

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LIVRES PRO Le secret bancaire est mort, vive l’évasion fiscale L’adieu de la Suisse au secret bancaire pour les fortunes offshore n’a pas sonné le glas de l’évasion et de la dissimulation fiscale dans le monde. Loin de toutes considérations sociales ou morales, les attaques des Etats-Unis, puis de l’OCDE et de l’Union européenne contre le secret bancaire suisse n’ont fait que renforcer les paradis fiscaux sous contrôle américain et britannique. Londres, l’Etat américain du Delaware, Miami, Jersey ou encore les Caraïbes règnent désormais sur ce gigantesque marché des fortunes non déclarées, estimé à 13 700 milliards de dollars US. Voilà la thèse développée par notre consœur Myret Zaki dans son dernier ouvrage. Si nombre de contribuables moyens devraient régulariser leur situation fiscale sous la pression de leur Etat, les utlrariches, quant à eux, disposent d’outils particulièrement fiables pour contourner l’impôt. C’est le cas notamment du trust, qui s’avère beaucoup plus «fiscalement étanche» que ne l’était le secret bancaire à la mode helvétique. Au terme d’une minutieuse enquête, l’auteur de UBS, les dessous d’un scandale, démonte les mécanismes et explique comment cette part non négligeable de la richesse mondiale échappe au fisc en toute impunité. ■ Le secret bancaire est mort, vive l’évasion fiscale, Myret Zaki, éditions Favre, Genève, 2010, CHF 30.–

PME: le marketing n’est pas un luxe Nombre d’acteurs du secteur financier se refusent à investir dans le marketing au prétexte qu’il s’agirait d’un «produit de luxe» réservé aux grandes entreprises. Aussi, leurs efforts de commercialisation se limitent au strict minimum: une enseigne, l’impression de cartes de visite et la création d’un site Web. Résultat, les petites et moyennes structures peinent à développer leurs affaires. En Allemagne, l’auteur affirme que la moitié des courtiers en assurance dégagent un revenu annuel brut qui atteint à peine 45 000 euros! Pour remédier à cette situation, Claudia Hilker, consultante en stratégie de communication/marketing auprès de PME, notamment dans le secteur financier, propose une démarche marketing systématique. Très pratique, son ouvrage est émaillé de nombreux conseils et check-lists. Dans cette deuxième édition, il traite, en outre, de sujets actuels tels que l’établissement de relations de confiance en temps de crise, ou encore les nouvelles possibilités de la vente en ligne. ■ Kunden gewinnen und binden – Mehr verkaufen durch innovatives Marketing, Claudia Hilker, 2. Auflage, Verlag Versicherungswirtschaft GmbH, Karlsruhe 2009, 187 pages.

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De l’expérience à l’expertise S’arrêter et réfléchir. Telle est la démarche entreprise par Thierry Lombard, associé-gérant de Lombard Odier. Objet de la réflexion: son métier de banquier privé et plus particulièrement son cœur, l’investissement. Avec l’aide de deux collaborateurs de la banque, Arnaud Apffel et Anne Aeschlimann, Thierry Lombard tente de transmettre sa passion de l’investissement dans un ouvrage didactique qui croise l’expérience du banquier genevois avec celle de quelques-uns des plus grands maîtres internationaux de l’investissement. Avec un côté «guide pratique», ce petit ouvrage explore différents thèmes au fil des chapitres: «se préparer à investir», «sélectionner ses investissements» et «construire et faire vivre son portefeuille». Thierry Lombard conclut sur l’objectif qui l’a accompagné toute sa carrière dans la grande tradition de la gestion privée genevoise: préserver et faire croître les patrimoines financiers de ses clients sur le long terme. S’il n’évite pas toujours les lieux communs, l’ouvrage donne toutefois quelques bases utiles et dresse de petits portraits instructifs sur les plus grands investisseurs de notre temps. On aurait néanmoins apprécié un style un peu plus fluide. ■ De l’expérience à l’expertise, Anne Aeschlimann, Arnaud Apffel et Thierry Lombard, éditions Lombard Odier, Genève, 2009.

Paradis fiscaux: suivez le guide! Les paradis fiscaux abritent plus de 60% des affaires mondiales. Et ils ne sont pas morts, considère Warren de Rajewicz, l’auteur du Guide des nouveaux paradis fiscaux à l’usage des sociétés et des particuliers. «Les paradis fiscaux évoluent, s’adaptent et permettent une utilisation légale dans le cadre d’une optimisation fiscale réfléchie», estime Warren de Rajewicz. Sans complexe, ce spécialiste du conseil financier international livre les clés des paradis fiscaux modernes, leur attribue des notes et révèle quelles sont les nouvelles juridictions dont peuvent faire usage les sociétés et les particuliers. Tous les points sont traités: changement de résidence fiscale, créations de sociétés, de trusts ou de fondations, comptes bancaires, etc. ■ Guide des nouveaux paradis fiscaux, Warren de Rajewicz, éditions Favre, Genève, 2010, CHF 45.–

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VOS PARTENAIRES

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Art de vivre VOYAGER, DéGUSTER, ACHETER, SORTIR, SE DéTENDRE

BEACH HOUSE – MALDIVES

Entre luxe et décontraction

C’est par hydravion ou par un bateau que l’on accède à l’hôtel Beach House, aux Maldives. Dernier-né à rejoindre la collection Waldorf Astoria, l’hôtel a été inauguré par le président des Maldives, Mohamed Nasheed. Une adresse exclusive et cosy.

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ue fait-on aux Maldives? Rien, diront certains. Tout, diront d’autres. D’un côté, le plaisir de la plage, du spa et du yoga; de l’autre, la plongée, le snorkelling, le jet-ski, la pêche, les excursions… Un art de vivre entre décontraction et raffinement que l’hôtel Beach House cultive à merveille. Situé dans l’atoll Haa Alifu, le plus au nord de l’archipel des Maldives, le Beach House s’étend sur une île privée de 14 hectares entourés de plages

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ART DE VIVRE

Un art de vivre raffiné dans les villas.

de sable blanc, tandis qu’à l’intérieur règne une jungle luxuriante. C’est dans cet écrin de nature préservée que se nichent deux grandes piscines et 83 superbes villas de style maldivien au toit de chaume avec piscine privée, salle de bains extérieur et décoration contemporaine. Ici, la simplicité se décline avec élégance, créant une atmosphère intimiste. A l’intérieur, le mobilier en bois foncé se marie à des couleurs naturelles – blanc, beige, ocre… –, à des tentures aussi légères qu’un souffle et à

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Art de vivre 2000 bouteilles et 450 références pour une cave hors du commun sous ces latitudes.

des tableaux d’artistes contemporains jouant sur les effets de textures. A l’extérieur, sur le sundeck privé des villas sur pilotis, les chaises longues recouvertes de coussins moelleux cohabitent avec un hamac, oscillant doucement au rythme de la brise. Une invitation à la méditation, les yeux perdus dans les dégradés de bleus et de turquoise de l’océan indien.

Labyrinthe d’exubérance tropicale Le chemin en noir et blanc qui conduit aux petits pavillons cosy du Shui Spa est un labyrinthe d’exubérance tropicale, ponctué de fleurs dont les couleurs explosent sous le soleil. Un univers de «zenitude» en parfaite harmonie avec les produits de la marque anglaise Aromathérapie Associates dont les soins sont élaborés à partir de 12 huiles essentielles aux senteurs toniques ou gour83 villas de style maldivien dans un écrin de verdure.

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mandes. La carte propose différents rituels, dont d’exceptionnels massages intenses pour détendre tous les muscles, des soins ayurvédiques et maldiviens, ainsi que le Veli Modun, un gommage du corps à base de sable suivi d’un massage à l’huile de coco pure. A découvrir: le massage signature, le Great Escape, 90 minutes de voyage sensoriel au cœur de l’aromathérapie où se rejoignent les philosophies d’Orient et d’Occident, ou encore le Sirodhara, un massage du corps utilisant de l’huile chaude à base d’herbes. Le tout dans l’atmosphère paisible d’un pavillon habillé de panneaux de bois sculpté et de tons crème et rouges. Des plaisirs du corps à ceux de la table, il n’y a que quelques pas dans le sable qui conduisent à l’un des restaurants dont la cuisine gourmet rivalise avec celle des grandes tables. Aux fourneaux, le chef italien Marco Alban, un adepte du bio, prépare avec la même dextérité poissons des îles et plats d’inspiration asiatique tels que le bœuf de Kobe et les truffes blanches d’Alba. Aux restaurants avec vue sur l’océan – les plus beaux couchers de soleil s’admirent depuis l’Infiniti en dégustant un cocktail – répond l’étonnant The Cellar. Une volée de marches raides, en pierre brute, conduit à une cave où trônent, dans une lumière dorée, quelque 2000 bouteilles, allant des grands bordeaux, bourgogne et champagne à des vins coups de cœur comme le shiraz d’Australie ou un cabernet de Californie. Au total: 450 références. Le must: un dîner dans The Cellar.

Une eau toujours cristalline dans cet archipel de rêve.

Artistes locaux Le tea time est un moment privilégié au Beach House. Servi dans à l’Art Gallery, qui présente les œuvres d’artistes locaux, le tea time mèle la plus pure tradition anglaise à une touche tropicale avec un breadfruit cake et des scones maldiviens aux pignons et noix de coco. Aux thés classiques s’ajoutent des boissons aux vertus holistiques comme le

Kulhifenu Sai, un thé épicé connu notamment pour son pouvoir régénérant, et le Gandhakoalhi Oshu Fani, une boisson à base de graines de basilic qui ravive les sens. Entre chaise longue, plongée dans l’eau transparente et gastronomie, le Beach House flirte avec le paradis. ■ Odile HABEL Infos: Beach House www.waldorfastoria.com

Comment y aller? Edelweiss Air offre un vol direct, tous les samedis depuis Zurich pour Male. Le vol est effectué avec un airbus A330, l’un des avions long-courriers les plus appréciés et les plus confortables de la génération actuelle. Mieux voler: c’est cette devise qui définit l’engagement de la compagnie charter suisse d’offrir des prestations optimales à ses passagers. A bord, on apprécie le programme de divertissement et le service attentionné et vraiment souriant. Au cours des dernières années, Edelweiss Air a reçu de la branche du voyage plusieurs distinctions en tant que meilleure compagnie de vols charter. Tél. 043 816 50 60 - www.edelweissair.ch

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Art de vivre VOYAGE THE RESIDENCE

Etre ou bien-être? La réponse est tunisienne © ROBERT SIRDEY

A deux heures et demie de Genève existe une oasis en prise directe sur le ressac méditerranéen. The Residence Tunis relève le défi de concilier ambiance Mille et Une Nuits et modernité. Avec une maestria au parfum de néroli, il marie détente, santé et efficacité.

Une architecture arabo-andalouse très chaleureuse.

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ART DE VIVRE

vers de Baudelaire: «Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.» Un tel cadre ne peut que favoriser le bien-être. Un centre de thalassothérapie intégré à l’hôtel répond au nom évocateur de Thermes marins de Carthage, cité qui n’est d’ailleurs éloignée que d’une quinzaine de minutes en voiture.

Efficace et durable Ce régime est fondé sur le constat que l’échec de la lutte © ROBERT SIRDEY

L’

établissement jouit d’une situation exceptionnelle. Situé à une demi-heure de voiture de l’aéroport de Tunis, ce palais araboandalou, bâti à la manière d’une casbah, s’ouvre sur un vaste horizon de palmiers et une plage de plusieurs kilomètres. Ce sentiment d’espace se retrouve à l’intérieur du bâtiment: ses cours intérieures, agrémentées de plans d’eau, sont conçues avec une grande sobriété de lignes et de matériaux. Mais la sobriété n’exclut pas le souci du détail: l’hôtel a choisi de se doter d’une signature olfactive. Le néroli, nom donné au parfum de fleurs d’oranger et connu pour ses vertus apaisantes, embau-me discrètement l’atmosphère, jusque dans les chambres. A croire que l’architecte a cherché à donner corps à ce

Tout en puisant dans les savoirfaire traditionnels, The Residence Tunis n’en est pas moins moderniste. Il est le seul hôtel tunisien appartenant au club très fermé des Leading Hôtel of the World et possède, en outre, un centre d’affaires très apprécié de la clientèle d’affaires locale et internationale. Son attrait est encore renforcé par la proximité immédiate d’un golf. Récemment ouvert, ce golf 18 trous, dessiné par Robert Trent Jones II, est le premier du continent nord africain. Enfin, last but not least, depuis la fin 2009, l’hôtel propose un programme minceur high-tech1, une cure très performante qui s’appuie sur le régime du médecin français Pierre Dukan.

contre le surpoids n’est pas la difficulté de maigrir mais la quasi-impossibilité de ne pas regrossir. Pour éviter cet effet rebond, le régime est donc articulé autour de quatre phases (attaque, croisière, consolidation, stabilisation). La phase d’attaque, courte, vise à perdre le plus de poids possible en n’ingérant que des protéines. Pour atténuer ce choc, l’hôtel a donc mis en place «une autre approche de la restauration minceur». Elle concilie plaisir et diversité avec régime: ces menus Dukan sont accessibles dans les six restaurants et concoctés par un chef qui compte parmi des meilleurs pâtissiers au monde! Outre le régime alimentaire, la cure comporte des traitements spécifiques conçus par des experts de la cellulite et du remodelage corporel. Elle prévoit l’accès à des machines (VIP, CelluM6 ou encore Power plate) ainsi que des soins minceur ciblés. La Tunisie revendique aujourd’hui la place de première destination méditerranéenne du tourisme de bien-être. The Residence Tunis tient ce qu’il promet: «Take refugee out of the norm», un dépaysement total à une encablure du quotidien! ■ Hermann SATZ La cure high-tech est distribuée en Suisse en exclusivité par Destinations Santé (www.destinations-sante.ch)

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The Residence Tunis, un palace érigé sur un site privilégié en bordure de mer.

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Art de vivre PEINTURE Le paradis retrouvé de Burne-Jones Pour la première fois, les œuvres de l’artiste Edward Burne-Jones sont exposées en Suisse, au Kunstmuseum de Berne jusqu’au 25 juillet. Cette présentation montre, d’une part, le reflet d’une Angleterre victorienne où le mouvement des préraphaélites a révolutionné l’esthétique et, d’autre part, le parallèle possible avec Ferdinand Hodler, proche de cette sensibilité.

L’

univers d’Edward Burne-Jones est indissociable de la Confrérie préraphaélites, qui est fondée en 1848 par les peintres John Everett Millais, William Holman Hunt, James Collinson, Dante Gabriel Rossetti, le sculpteur Thomas Woolner et les critiques d’art William Michael Rossetti et Frederick George Stephens. Par un traitement esthétisant des sujets et un choix de thématiques inspirées du Moyen Age et de la Bible, ces artistes désiraient s’opposer à l’académisme victorien en retrouvant la pureté des peintres italiens de la Renaissance, dont Raphaël notamment. Edward Burne-Jones rejoint ce mouvement alors que certains des membres de la confrérie s’en dissocient. Il est accompagné de son ami William Morris, dont il fait la connaissance à Oxford où les deux jeunes gens s’étaient inscrits en théologie. Les écrits du théoricien John Ruskin l’initient à la sensibilité préraphaélite, tandis qu’un voyage à travers le nord de la France pousse les deux amis à devenir artistes.

Le monde du rêve Hors du temps, les œuvres de Burne-Jones sont à comprendre comme une manière d’échapper à une réalité marquée par l’industrialisation et dans laquelle le rêve tient peu de place. Cette échappée dans le

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Barbara Leighton, (Edward Burne-Jones à l’œuvre sur «L’Etoile de Béthléem»), 1890, photographie sur papier platine, 32,8 x 27,5 cm, Victoria and Albert Museum, Londres, © V & A Images/Victoria and Albert Museum, Londres

mythe touche d’ailleurs tous les arts, de la musique à la littérature, si l’on pense aux poésies et romans des romantiques. L’originalité de ce peintre consiste notamment dans sa diversité – puisqu’il touche également au vitrail, à la faïence, la broderie, les bas-reliefs et la

mosaïque – et aussi dans son intérêt pour les cycles: Amour et Psyché, Persée, Pygmalion, Saint George, etc. Son immersion dans le monde imaginaire des légendes était pourtant ancrée dans sa propre histoire, puisque, à travers les histoires de preux chevaliers et d’épreu-

ves à accomplir, ce sont ses propres interrogations qu’il cherchait à assouvir. Le sens de l’existence, la fragilité de la beauté, la recherche du bonheur, l’expiation possible de la faute sont autant de thème que l’on peut lire en filigrane dans ses œuvres. Organisée en collaboration avec la Staatsgalerie de Suttgart, cette exposition est une première en Suisse, puisqu’avant ce jour, l’artiste anglais n’avait que peu intéressé l’Europe continentale. De plus, le musée des Beaux-Arts de Berne possédant d’importantes peintures de Ferdinand Hodler, il a été possible de montrer l’influence de Burne-Jones sur l’artiste suisse. Cela est évident, par exemple avec le tableau Eurythmie, pour lequel Hodler a certainement puisé son inspiration dans l’œuvre du Britannique, La princesse Sabra tirant au sort. La parenté entre deux artistes qui ne se sont jamais rencontrés montre le rayonnement des œuvres préraphaélites à cette époque, influence qui pourrait bien renaître aujourd’hui dans une société qui est avide d’évasion dans le monde du rêve. ■ Nicole KUNZ Edward Burne-Jones – Le paradis terrestre, Kunstmuseum de Berne, jusqu’au 25 juillet. Plus d’infos sur www.kunstmuseumbern.ch

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Art de vivre GOLF Golf synthétique pour sensations authentiques Longtemps décriés, les greens synthétiques bénéficient de matériaux plus évolués et offrant un confort de jeu réaliste. Expérience pilote aux portes de Genève.

Le golf du Jiva Hill Hotel est situé à quelques minutes de Genève, au Crozet dans le Pays de Gex.

C’

est le rêve du golfeur alpestre. Jouer au golf en extérieur toute l’année sans devoir prendre l’avion vers l’Afrique du Nord ou la Floride. C’est dorénavant possible à proximité de Genève, au Jiva Hill Hotel, situé au Crozet dans le Pays de Gex. L’établissement 4 étoiles de Ian Lundin (de la compagnie pétrolière du même nom) vient d’ouvrir un golf compact peu ordinaire: les greens et les tees de départ sont en gazon synthétique. Le monde golfique regorgeant de récits plus ou moins légendaires sur les méfaits des greens artificiels, il s’agissait d’en avoir le cœur net, fers et putter en mains, un jour d’hiver pluvieux et froid comme la région en a le secret, après quatre jours de déluge ayant nécessité un sérieux balayage

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des surfaces vertes. C’est dire la détermination de votre serviteur! «La plupart des pros du circuit américain s’entraînent sur des greens synthétiques au bord de leur villa», assure le responsable pour l’Europe du fabricant de greens, Southwest Greens. Et alors?

engendrerait stupeurs et tremblements jusqu’au sommet de la colonne vertébrale. Le club traverse la surface sans accroc, même si une trace plus foncée laisse un souvenir éphémère du geste physique mais gracieux qui vient d’être produit (ou pas). Un souvenir éphémère, car les fibres de plastique entrelacées qui constituent ces greens ont la mémoire courte. Ou plutôt la mémoire de leur forme initiale. Une fois passé le coup de fer, la surface retrouve son état précédent en quelques secondes. Même chose sur les greens: la couche superficielle de polyuréthane extrêmement dense ne reste marquée que quelques secondes par des marques de pitch après une approche haute. Car ici, les pitchs se relèvent tout seuls. Fini de râler en arrivant sur un green meurtri

Surpris en bien Verdict: surpris en bien. Les tees de départ, tout d’abord, inspirent la sérénité. D’une platitude irréprochable, où aucun brin d’herbe récalcitrant (ce serait le comble!) ni aucun divot malencontreux ne viennent troubler la concentration, hélas, souvent frivole du golfeur enthousiaste mais toujours amateur. Pendant le swing, le contact de la tête du club avec le sol artificiel n’a rien d’artificiel, justement. Aucune impression de heurter un sol en béton, qui

Des professionnels qui ne semblent pas perturbés par les surfaces synthétiques.

par des impacts de balles non réparés ou des traces de crampons. C’est toujours ça, mais ce ne n’est pas tout non plus… Les conditions de frappe et de rebond sur le green étant satisfaisantes, restait à tester le putting. Les pros invités à donner leur avis ce jour-là par Jiva Hill, Raphaël Jacquelin (l’un des tout meilleurs Français et régulier du Top 30 européen) et Raphaël De Sousa (l’enfant du Golf club de Genève, pensionnaire du Challenge Tour), n’exagèrent pas dans l’extase commercialisée, mais reconnaissent la solidité du concept et la franchise des trajectoires. Sans parvenir à putter comme eux, malheureusement, on partage néanmoins leur avis sur la régularité des trajectoires et le réalisme au niveau de la vitesse. L’ambition du Jiva Hill n’est cependant pas de concurrencer un parcours traditionnel de 18 trous, mais d’offrir une alternative pour jouer toute l’année. Chacun des neuf trous possède deux zones de départ, en direction de greens configurés dès leur construction avec trois positions de drapeau possibles. Avec des longueurs de 3088 m pour 18 trous et 1519 m pour 9 trous, le parcours peut être joué en fin de journée. Pour un entraînement en conditions idéales et en grandeur (presque) nature. Ouverture au public le 15 juin prochain. ■

Jérôme SOLLER

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Art de vivre SAAB 9-3X, BMW SÉRIE 5 ET HONDA CR-V

Tout-chemin selon Saab, nouvelle Série 5 et CR-V restylé

«E

fficiente comme une chaussure de randonnée.» Voilà l’un des slogans concoctés par l’équipe marketing de la marque suédoise pour qualifier son dernier modèle, qui répond au «doux» nom de Saab 9-3X. Comme le laisse entendre la formule, l’élégant allrounder affiche de véritables qualités

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ART DE VIVRE

outdoor grâce à une garde au sol importante et une transmission intégrale efficace, qui en font une alternative crédible aux gros crossover ou SUV. A l’usage sur les routes de campagne ou de montagne, le 9-3X remplit à merveille son rôle, avec une tenue de route impressionnante sur neige. Idéal pour les escapades week-end en station, d’autant que l’habitacle a été spécialement conçu pour le chargement de matériel de sport ou de loisir. Basé sur la 9-3 SportCombi, cet allrounder reprend l’équipement intérieur très complet de sa grande sœur. Il est disponible dans trois versions de motorisation avec un 2.0 litres de 210 CV qui avale le 0-100 km/h en 8,5 secondes, un diesel 1.9 litres de 180 CV et

le très innovant 2.0 litres BioPower qui fonctionne invariablement à l’essence ou au bioéthanol. Une option qui ravira les défenseurs de l’environnement. Le modèle de base diesel en deux roues motrices est facturé 54 400 francs. On lui préférera la traction intégrale disponible à 57 600 francs tout équipée.

essence de 204 à 306 CV ainsi que trois 6 cylindres diesel de dernière génération, dont la puissance va de 184 à 245 CV. La 535i de nos essais sur le circuit d’Estoril était équipée du premier 6 cylindres en ligne essence au monde bénéficiant,

Exit l’ère du styliste Chris Bangle, la nouvelle BMW Série 5 retrouve un dessin qui sera plus familier et classique à l’œil du puriste de la marque. A bord, luxe et high-tech sont au rendez-vous avec des matériaux raffinés, et la possibilité de personnaliser l’intérieur. Pour son lancement, la nouvelle Série 5 reçoit un V8 biturbo de 407 CV, trois 6 cylindres

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AUTOMOBILE TABLEAU DE BORD ■ Du changement chez Ford

entre autres, du TwinPower Turbo. Ce groupe offre un rapport performances/consommation inégalé dans sa catégorie de puissance. Avec un 0 à 100 km/h franchi en 6 secondes, la 535i se contente d’une consommation moyenne de 8,5 l/100 km et émet moins de 200 g/km de CO 2. Côté équipements, de série ou en option, la liste est plus que longue… Citons les vraies nouveautés que sont la boîte automatique à huit vitesses et les roues arrière directrices. Cette Série 5 «2010» marque sa catégorie en se montrant plus dynamique qu’une Classe E et plus confortable qu’une A6. De plus, sur le plan des émissions de CO 2, elle est tout simplement sans concurrence. Le CR-V de Honda, version 2010, présente de nombreuses modifications et innovations. Extérieu-

rement, ce nouveau millésime se remarque à son museau plus effilé et à ses pare-chocs. A bord, on remarque une belle qualité perçue et une finition cossue. Sans être très nombreux, les espaces de rangement sont bien pensés. Dès le premier niveau de finition, l’équipement proposé est très complet. De plus, la version haut de gamme ajoute l’éclairage actif, un régulateur de vitesse adaptatif, un système anticollision alertant le pilote à l’approche d’un obstacle. Côté moteur, l’ancien i-CDTi est remplacé par un 2.2 i-DTEC fort de 150 CV. Une puissance utile pour animer un véhicule de plus de 1700 kg. On apprécie le couple diesel/boîte automatique pour sa douceur, ses passages sans à-coups et des rétrogradages opportuns. Le conducteur bénéficie d’une direction précise et d’un freinage efficace. Sur routes enneigées, l’électronique gère la transmission, qui devient intégrale si besoin est. Ce nouveau CR-V reprend les qualités de confort, de polyvalence et d’efficacité de ses aînés en y ajoutant des solutions de sécurité uniques dans sa catégorie et un comportement routier encore amélioré. ■ O.V. et P.M.

Oliver Stegmann, ancien directeur des ventes, a été promu directeur général de Ford Motor Company (Switzerland) SA au 1er janvier 2010, après le départ de Bernhard Soltermann. La nomination d’Oliver Stegmann a déclenché un jeu de chaises musicales: son poste est désormais occupé par David Frey, ancien directeur de l’organisation des services, et le nouveau directeur de ce département est Michel Ballistreri. La directrice du marketing, Sandra Grau, ayant quitté l’entreprise fin février, a été remplacée par Danijel Dzihic.

■ Lancement de la voiture électrique Mitsubishi Mitsubishi Motors Corporation, l’importateur MM Automobile Schweiz et le fournisseur de courant Alpiq ont signé une déclaration d’intention afin de favoriser l’introduction sur notre marché de véhicules électriques. Les trois partenaires définiront et optimiseront les conditions de l’introduction et de la mise en service de ces véhicules. C’est le modèle City Car i MiEV, lancé au Japon mi-2009 et se rechargeant sur prise électrique 220 V normale, qui fera ses premiers tours de roue en Suisse en décembre 2010. Les personnes ou entreprises intéressées peuvent d’ores et déjà s’enregistrer auprès de Mitsubishi: www.mitsubishi-motors.ch

■ BMW et le respect de l’environnement Au récent Salon de Genève, le Dr N. Reithofer, président du directoire de BMW, a souligné le bilan intermédiaire très positif en termes de rejets de l’ensemble des modèles BMW. En effet, la consommation moyenne de la gamme des modèles de BMW Group n’est plus que de 5,9 l/100 km. Cela correspond à des émissions de C0 2 de 150 g/km. Aucun autre constructeur premium ne fait mieux, et ce malgré une puissance moteur et une sportivité plus importantes.

■ Infiniti, partenariat avec le Cirque du Soleil Ce nouveau partenariat permet à Infiniti de mieux se faire connaître grâce à une tournée de 180 spectacles sous de grands chapiteaux et dans des salles de concert aux EtatsUnis, au Canada, en Europe de l’Ouest et en Russie. Ryan Sandilands, souligne que le Cirque du Soleil, qui ne collabore qu’avec des marques partageant les mêmes valeurs et principes, est très enthousiaste de développer sa relation avec Infiniti. Il précise: «Nous avons hâte de nous associer aux clients passionnés d’Infiniti partout dans le monde et d’inspirer à chacun créativité et émotions fortes.»

■ Skoda dans le Top 10 suisse Ce sont 11 611 véhicules et une part de marché de 4,4% qui ouvrent pour la première fois les portes du Top 10 à Skoda. L’Octavia s’est affirmée comme un best-seller absolu avec la 2e place au hit-parade annuel et règne dans les domaines des diesel et tout-terrain. Elle est également le break le plus vendu de Suisse et le véhicule de flotte le plus populaire.

■ Pneus d’été Le TCS a mis à l’épreuve 36 pneus d’été dans deux dimensions. Seuls les produits de grande marque (dix au total) ont eu des résultats réellement convaincants. 16 autres pneus ayant été jugés recommandables, l’acheteur dispose donc d’un grand choix de bons produits. Une fois de plus, souligne le TCS, les fabricants à bas prix ont fait piètre figure dans les disciplines déterminantes pour la sécurité. Le TCS déconseille l’achat de sept marques, dont six originaires de Chine.

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Art de vivre Nouveautés Briquet marin

Air pur

Du fond de la mer, dans son paisible royaume, Neptune, dieu des mers et des océans règne sur tout ce qui se passe à la surface des flots. Avec son édition limitée Neptune, le fabricant de briquets et stylos S.T. Dupont rend hommage à l’eau, élément crucial, et à son dieu romain. Cette collection représente des vagues et évoque la sérénité grâce à sa garniture en laque de Chine bleu plaquée. Cette édition limitée et numérotée est composée d’un briquet Ligne 2 et de trois stylos Olympio Large: plume, roller et bille/mine. ■

A la maison ou au bureau, offrezvous le luxe d’un air pur, sans odeur, ni pollen, ni poussière avec Viktor, le purificateur d’air de Stadler Form. Discret, en noir

Edition limitée Neptune, S.T. Dupont Prix: briquet € 850.–, plume € 850.–, roller € 700.–, bille/mine € 650.– www.st-dupont.com

ou en blanc, Viktor est équipé d’un filtre spécialement développé pour ce nouveau produit. Il est capable d’assainir près de 100% de l’air d’écoulement pour une pièce allant jusqu’à 50m2 et peut, à la demande, diffuser un parfum d’ambiance. Et comme toujours chez Stadler Form, le design a été particulièrement soigné. ■ Viktor, Stadler Form Prix: CHF 395.– www.stadlerform.ch

Weston cool Cool, confortables mais toujours dans l’esprit de la marque, le célébrissime chausseur français J.M. Weston présente ses deux derniers modèles de la collection printemps/été 2010 issus de sa ligne Casual. Un mocassin et une bottine courte qui résument l’esprit de la ligne Casuals, aux peausseries confortables et à l’élégance intemporelle. Le mocassin est disponible en nubuck marine, nubuck marron et veau foulonné noir. La bottine courte se décline, quant à elle, en nubuck marron et veau foulonné noir. ■ Ligne Casual, J.M. Weston Prix: CHF 525.– pour le mocassin CHF 555.– pour la bottine www.jmweston.com

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TENTATIONS

Trois ans d’autonomie

Réveil en musique Les amateurs de musique et de réveil en douceur qui ne peuvent pas se passer de leur iPod ou de leur iPhone peuvent se réjouir. Sony vient de concocter une toute nouvelle station d’accueil spécialement dédiée aux produits mobiles Apple. Non seulement cette station recharge votre appareil, mais elle distille en plus un son stéréo étonnant pour une taille si réduite. Le système Bass Reflex et les haut-parleurs avec sortie RMS de 3,5 W + 3,5 W assurent des basses profondes et fidèles. Le tout est livré avec une télécommande. ■

Un kit clavier-souris sans fil pour ordinateur portable, on connaît. Il n’empêche que le dernier-né du fabricant helvétique est particulièrement innovant avec une autonomie de batterie pouvant aller jusqu’à trois ans pour le clavier et la souris. Un record! Autre innovation: l’utilisation de la technologie sans fil 2,4 GHz qui allie les avantages du wireless et la fiabilité du filaire. Une alternative très performante au système classique à 27 MHz… avec l’ergonomie Logitech en plus. ■ Wireless Desktop MK710, Logitech Prix: CHF 139.– www.logitech.ch

ICF-DS11iP, Sony Prix: CHF 149.– www.sony.ch

Toujours plus grand Fort du succès commercial de sa version 40 pouces, la marque premium Bang & Olufsen lance un nouvel écran plat BeoVision de 46 pouces. D’un point de vue design, ce nouvel écran parvient, comme c’est de coutume pour la marque, à se démarquer nettement de la concurrence. Avec un plus non négligeable: un cache enceintes disponible dans plusieurs coloris pour se marier avec la décoration de la pièce. Question technique, tout y est et même plus, notamment au niveau des enceintes intégrées qui délivrent un son hors du commun pour un écran plat. Allumé ou éteint, l’effet est assuré! ■

Haute définition compacte

BeoVision 10-46, Bang & Olufsen Prix: 9590.– http://www.bang-olufsen.com

Puissance, élégance et flexibilité. Voilà comment Canon définit l’un des derniers-nés de ses ateliers, le PowerShot SX210 IS. Des qualificatifs loin d’être usurpés si l’on se réfère aux caractéristiques techniques de l’appareil. Disponible en trois couleurs branchées, le SX210 dispose d’un vrai zoom grand-angle optique permettant d’accéder à des focales allant de 28 mm à 392 mm en équivalent 24 x 36. Son capteur de 14,1 millions de pixels assure la précision des prises de vue et la réalisation de vidéos HD 720p avec son stéréo. Un niveau de qualité peu coutumier dans ce genre de format. ■ PowerShot SX210 IS, Canon Prix: CHF 548.– www.canon.ch

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ART DE VIVRE

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Art de vivre LIVRES Châteaux en pays de Vaud Du château fort médiéval à la maison de campagne du XVIIIe, cet ouvrage met magnifiquement en lumière l’étonnante richesse du patrimoine architectural vaudois. Le canton recèle des richesses méconnues avec près de 200 châteaux, tours, maisons fortes et résidences seigneuriales. En texte et en images, Brigitte Pradevand, historienne des monuments et historienne de l’art, et un collectif de photographes invitent le lecteur à la découverte d’une partie de cet héritage fort de mille ans d’histoire. En mettant l’accent sur les sites ouverts à la visite, sans toutefois oublier les demeures privées que l’on peut admirer du dehors à l’occasion d’une balade, cet album nous guide aux quatre coins du canton pour des découvertes toutes plus intéressantes les unes que les autres. L’ouvrage, édité par les éditions Favre, a été réalisé en collaboration avec les Retraites Populaires dans le prolongement de leur 100e anniversaire et de leur action «Mécénat & Patrimoine». ■ Châteaux en pays de Vaud, Brigitte Pradevand (texte), éditions Favre, Genève, 2010, CHF 49.–

La grande mascarade A 30 ans, Sydney Hughes, qui mène sa vie tambour battant, reçoit une lettre étrange signée par ellemême alors qu’elle n’avait que 10 ans. L’enfant d’alors lui confie que pour se protéger et être à même d’affronter les dures réalités de l’existence, elle a dû transformer sa personnalité. Sydney n’est donc pas la personne qu’elle croit être. Le monde si prometteur et si bien organisé de la jeune femme s’effondre. En s’appuyant sur les indices révélés dans la lettre, Sydney se lance dans une chasse au trésor à l’allure initiatique qui la conduira aux quatre coins du monde. Du Canada à la France, en passant par la Roumanie et les Etats-Unis, elle élucide, une par une, les énigmes laissées par elle-même, enfant. Un roman étrange, qui s’insinue dans l’esprit du lecteur, bouleversant doucement O.H. ses convictions et, qui sait, le regard qu’il porte sur sa propre vie. ■ La grande mascarade, A.B. Winter, éditions First, Paris, 2010.

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ART DE VIVRE

Malaisie, suivez le guide Les éditions Olizane viennent de publier un nouveau guide découverte sur la Malaisie. Comme à son habitude pour cette magnifique collection de guides de voyage, l’éditeur propose un ouvrage à la fois didactique, pratique et richement illustré. Un vrai régal. Situé sur la route maritime entre les deux grands empires qu’ont été la Chine et l’Inde, la péninsule malaise s’est d’abord développée par ses établissements portuaires – dont Malacca – servant de points de relâche, qui ont rapidement éveillé la convoitise des puissances coloniales. Géographiquement, la Malaisie présente une étonnante dualité entre les péninsules qui s’étend du sud de la Thaïlande à Singapour, et l’île de Bornéo, qu’elle partage avec l’Indonésie et la petite monarchie de Brunei. Elle est aussi un paradis naturel à nul autre pareil, et ses forêts tropicales menacées sont le refuge de nombreuses espèces animales et végétales rares ou en voie de disparition. Les sites de plongées comptent parmi les plus fabuleux de la planète. Forte d’une histoire riche qui a donné naissance à un melting-pot d’une richesse culturelle incomparable, la Malaisie est une destination à découvrir… ou redécouvrir. En tout cas, l’auteur du guide, Jérôme Bouchaud, a l’art de donner envie d’aller à la rencontre de ce pays attachant. ■ Malaisie, Jérôme Bouchaud, éditions Olizane, Genève, 2010, CHF 38.–

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OPINION

«Délocaliser» les bonus?

L

es rémunérations extravagantes auxquelles, bonus aidant, les dirigeants de nos grandes banques ont eu contractuellement droit pour 2009 provoquent de légitimes explosions de colère dans l’opinion. Non seulement les montants octroyés défient l’imagination (puisque le salarié suisse moyen, pourtant correctement payé, devrait travailler sept siècles d’affilée avant d’espérer atteindre l’équivalent de la rétribution versée cette année au P.-D.G. – il est vrai le mieux payé – de l’une d’entre elles), mais encore, ils suivent immédiatement le gros d’une crise financière à laquelle l’une de ces banques en tout cas n’aurait pas survécu sans l’aide de l’Etat – et donc des contribuables que nous sommes tous.

petit marché domestique. Mais il se trouve qu’elles ont leur siège social en Suisse, qu’elles y tiennent leurs assemblées d’actionnaires, et qu’elles y publient leurs comptes avec force détails exigés des règles de bonne gouvernance, y compris en matière de rémunérations aux organes dirigeants. D’où la colère déclenchée par la publication des sommes attribuées, cette année, aux membres de la direction générale de la plus généreuse des deux.

En mains étrangères

Il n’y a pas de solution miracle. La liberté contractuelle et a fortiori les engagements pris antérieure«Il s’est produit quelque chose d’incompréhenment doivent être respectés. Et sible et d’inadmissible, qui risque, dans ce même lorsque les obligations liées climat quasi prérévolutionnaire, d’entraîner des au sauvetage sont fortes, comme dans le cas d’UBS, il n’est pas enviréactions aussi dangereuses qu’imprévisibles, sageable de supprimer les bonus à commencer par l’adoption de réformes sans exposer du même coup la Rémunérations abusives législatives susceptibles de nuire gravement à banque au risque de perdre ses Il s’est donc, tout simplement, meilleurs talents, et donc de comproduit quelque chose d’incomla compétitivité de la place bancaire suisse» promettre ses chances de redrespréhensible et d’inadmissible, MARIAN STEPCZYNSKI sement. qui risque, dans ce climat quasi Il n’y a pas de solution miracle, prérévolutionnaire, d’entraîner mais il existe, au moins en théorie, des réactions aussi dangereuses une solution praticable: celle qui consistetoute la gamme imaginable des moyens qu’imprévisibles, à commencer par l’adopmoins radicaux mais plus efficaces de redition de réformes législatives susceptibles de rait à admettre que nos grandes banques mensionner les institutions bancaires «too nuire gravement à la compétitivité de la passées (déjà?) en mains étrangères déplabig to fail». Aucune des méthodes envisaplace bancaire suisse. C’est ainsi que, lors de cent leur siège à l’étranger et qu’elles ne gées n’apparaît cependant, à la réflexion, la session de printemps des Chambres fédéconservent en Suisse qu’une filiale, active rales, au mois de mars dernier, le Conseil dans tous les domaines de la banque dite susceptible d’être mise en œuvre sans national s’est prononcé, à une courte majouniverselle, y compris, par conséquent, ouvrir du même coup un espace béant à dans celui de la gestion de fortune où elles l’arbitraire. Car sur la base de quel critère rité il est vrai, en faveur de l’initiative Minder ont fait jusqu’ici leur miel. UBS deviendrait objectif démembrer une grande banque? A «contre les rémunérations abusives» qui peut-être S (comme Singapour) BS, CS restepartir de quelle somme de bilan en réduire sera, si le Conseil des Etats suit la Chambre la taille? Comment en assurer la liquidation basse, soumise au peuple en même temps rait peut-être CS, car C (comme China) et S ordonnée sans ameuter aussitôt les dépoqu’un contre-projet direct concocté par ses (comme Singapour)… Mais les investissants? Bref, qu’il est difficile en la matière de soins. Le texte en question n’interdit pas seurs, y compris nos fonds de pension, passer de la parole aux actes! purement et simplement les bonus, mais en pourraient continuer d’acheter des actions C’est que, si l’on y réfléchit bien, nos subordonne l’octroi à des procédures statuUBS ou CS, comme ils en achètent régulièretaires (vote des actionnaires) qui pourraient ment à d’autres grands groupes bancaires grandes banques ne sont pas «suisses», ou internationaux. Les bonus astronomiques en tout cas ne le sont plus véritablement. limiter dangereusement la marge de manœuseraient alors leur problème à eux, et eux Elles jouent désormais aux côtés des vre des organes dirigeants des entreprises en seuls. ■ Citicorp, HSBC et autres Bank of America général et des banques en particulier. dans la cour des grands, où les règles du Ce n’est pourtant pas faute, de la part des Marian STEPCZYNSKI jeu ne sont pas les mêmes que sur notre régulateurs, d’avoir exploré de sang-froid

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