ENRICO CAMPAGNOLA. Sculpteur et Peintre (extrait)

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© Somogy éditions d’art, Paris, 2015 Ouvrage réalisé sous la direction de Somogy éditions d’art Coordination éditoriale : Anna Bertaccini Tadini Contribution éditoriale : Anne-Claire Juramie Conception graphique : Nelly Riedel Fabrication : Béatrice Bourgerie et Mélanie Le Gros ISBN 978-2-7572-0975-2 Dépôt légal : septembre 2015 Imprimé en République tchèque (Union européenne)

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Enrico Campagnola SCULPTEUR ET PEINTRE

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Sommaire Introduction

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EMMANUEL BRÉON

L’ami Campa, une rencontre capitale

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SUZANNE BRET

Le double engagement d’Enrico Campagnola

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EMMANUEL BRÉON

Catalogue

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Le sculpteur Le peintre

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Les expositions et la fortune critique

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Les galeries de la reconnaissance

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EMMANUEL BRÉON

La fortune critique

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EMMANUEL BRÉON

Chronologie

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Apparition

Vers 1975-1976, gouache sur carte à gratter, 20 × 13,5 cm, collection particulière.

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Introduction Un deuxième livre sur Enrico Campagnola était nécessaire ! Le premier, édité dans une collection dédiée aux sculpteurs par le musée des Années 30 que je dirigeai alors, n’avait que partiellement rendu compte de son prolifique travail. Imprimé presque exclusivement en noir et blanc, faisant la part belle à la sculpture, il avait été une étape nécessaire mais, à cet artiste d’origine italienne, il fallait absolument en venir à la couleur pour me¤re en lumière et magnifier plus largement son Œuvre peint. Dans ce premier ouvrage, nous nous interrogions déjà sur l’opportunité d’un travail d’édition : « Raconter, décrire l’Œuvre de toute une vie, celle d’un artiste que l’on n’avait pas connu intimement, ne tenait-il pas véritablement de la gageure. Quelques notes éparses, de vieux articles de journaux, des photographies plus ou moins bonnes, était-ce suffisant pour amorcer une étude ? Avait-on le droit d’aller plus avant dans notre tentative d’écriture ? Quelle forfanterie n’allait-on pas comme¤re ? » Mais c’était sans compter sur le mystère de la Vie ! Une personne qui l’avait aimé et admiré nous l’avait remis tout doucement et délicatement en scène. Par petites touches régulières, l’image initialement floue s’était faite de plus en plus ne¤e. L’artiste, ou plus exactement l’homme, renaissait alors à la vie grâce à l’amour des siens et parce qu’il n’avait pas manqué d’en donner au travers de son travail. Suzanne Bret, puisqu’il s’agit d’elle, compagne de route et muse influente, a décidé d’aller plus loin. Courageusement, depuis des années, elle a sauvé des œuvres de la dispersion et en a consciencieusement établi le catalogue. Nous lui avons conseillé d’en publier le résultat. À ceux qui n’ont pas la chance de pouvoir admirer des toiles et des sculptures d’Enrico Campagnola, ce livre et le DVD joint, rassemblant sculptures et peintures, perme¤ront enfin de prendre connaissance de sa création dans toute sa plénitude. Son Grand Œuvre, tentative universelle, extraordinaire et émouvante à la fois de tout créateur, aux fins de dire : « vous voyez bien que j’étais immortel ! Mon travail est là que vous contemplez et par lui je communique encore avec vous. Regardez la trace de mes doigts dans la glaise, ces digitales empreintes, le sillon de la gouge dans le bois choisi, ce coup de ciseau dans le marbre de Carrare, ces premières pensées sur le papier, ces esquisses préparatoires, ces dessins ou ces toiles abouties ; mon talent voire mon génie, il vous appartient de les juger. Plus ils seront grands à vos yeux et plus je me survivrai ». La Vie et l’Œuvre d’un homme sont, bien sûr, inséparables. Aujourd’hui reconstituée plus complètement, l’histoire de ce¤e vie éclairera d’un autre jour les créations de l’artiste en les rendant davantage intelligibles car plus humaines et personnalisées. Maintenant recensé et rassemblé, par la magie de l’édition et de l’apport de nouvelles technologies, l’Œuvre, comme en écho, reflétera la Vie de l’homme, allègre et mélancolique, sereine ou révoltée.

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EMMANUEL BRÉON

Conservateur en chef du patrimoine

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Le jeune professeur Enrico Campagnola, 1934.

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L’ami Campa, une rencontre capitale SUZANNE BRET Jour de farces passagères, le 1er avril 1954 a été pour moi le début d’un itinéraire imprévu et inachevé. Ce jour-là, la petite fabrique de rubans de machines à écrire de Châtillon pour laquelle je suis secrétaire depuis deux ans déménage mon bureau, mon Olive¤i et l’indispensable armoire métallique dans quelques mètres carrés loués à l’Office central de l’imagerie (OCI), 16 place du Havre à Paris. Près de la fenêtre sur cour d’un vaste hall d’accueil, cet endroit stratégique, où flo¤e l’odeur d’acétate de butyle mêlée à celle du parquet ciré, est le passage obligé pour se rendre d’un bureau à l’autre et de l’atelier de dessin au laboratoire. L’ambiance est joyeuse et les trois dessinateurs-graveurs passent et repassent devant moi en me gratifiant d’un sourire pour me signifier qu’ils apprécient l’unique présence féminine. Je les entends discuter, rire et chanter, surprise par la voix de ténor du plus âgé qu’ils appellent « Campa ». La quarantaine épanouie, cheveux d’un noir brillant, bouclés, tombant presque sur les épaules, il porte une longue blouse ouverte, qui en voletant autour de lui au rythme de ses vocalises diffuse jusqu’à moi son parfum « H pour homme ». Dès le premier jour, il se présente : Enrico Campagnola, Vénitien originaire de Possagno, en insistant sur les qualités ancestrales de ses compatriotes dont il est l’héritier. Petit à petit, il se dévoile, et avec une émotion retenue, il parle de son enfance misérable à Possagno, de sa mère tant aimée. Pour gagner quelques lires, il doit désherber l’esplanade du Temple construit par le célèbre sculpteur Antonio Canova pour accueillir sa sépulture. Il parle de son inclinaison pour le modelage qui le conduit à réaliser des figurines avec la terre dérobée à la tuilerie du village. Ce¤e émouvante Sainte Anne apprenant à lire à Jésus, brisée par sa maman agacée de le voir s’amuser, est le seul témoignage de ses dons précoces. Pressé de vivre, souvent pieds nus pour courir plus vite, avide de connaissance, il délaisse les enfants de son âge pour les adultes, dont l’expérience lui permet d’être toujours en avance sur ses camarades. Il accompagne dans ses promenades un jésuite en retraite qui lui dispense une éducation parallèle enrichissante. Distinguant chez ce petit garçon une volonté farouche de s’épanouir, il lui déclare en lui donnant quelques lires pour l’acquisition d’une petite sculpture : « Rico, rappelle-toi que c’est le premier argent que tu gagnes avec le métier qui sera le tien. » Sécher les cours, « parce qu’il a autre chose à faire de plus important », c’est donc du temps en plus pour s’adonner à son art. En 1928, après le bachot, fuyant le fascisme, il se fixe avec sa famille à Besançon, où il suit les cours de sculpture du professeur Georges Laethier. Un élève retrouvé raconte : « Son talent et ses capacités de travail le plaçaient

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Sainte Anne apprenant à lire à Jésus Vers 1921, plâtre, 26 × 23 cm, collection particulière.

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La Mare

Vers 1953-1954, aquarelle vernie, 14 Ă— 9,9 cm, collection particulière.

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La Fillette en robe rouge

1960, huile sur toile, 61 Ă— 50 cm, succession de Cyd Charisse et Tony Martin en 2012.

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La Paix

1971, fer soudé, 146 × 55 × 17,5 cm, Ville de Deauville. Donation Bret-Campagnola.

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Le double engagement d’Enrico Campagnola EMMANUEL BRÉON

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De Possagno à Besançon, en passant par Rome, Paris et Saint-Martinde-Brômes, Enrico Campagnola a mené plusieurs vies de front. Italien de naissance et français de cœur, il fut en tout premier lieu un sculpteur de talent reconnu de ses pairs, puis, au gré des circonstances de sa vie de labeur, un peintre créatif, sensible et convaincant. Ces belles toiles seront appréciées à Paris et jusqu’aux Amériques. Très cultivé, il s’est servi des leçons des grands maîtres du passé ou modernes car il n’était pas homme à renier ses racines ni à s’enfermer dans le passé. L’Italien sait mieux que quiconque ce qu’il doit à sa culture : le respect des anciens certes, mais aussi et surtout la simple imitation étant à ses yeux stérile, ce désir d’inventivité et de créativité, à chaque génération renouvelé. Le sculpteur Enrico Campagnola a passé son enfance et son adolescence en Vénétie. Voilà une affirmation qui pourrait paraître bien banale à celui qui n’a pas la chance de connaître ce pays et pourtant elle éclaire toute une vie, toute sa vie. Une fois découverte, on n’échappe pas à l’Italie « vieille maîtresse, ou mieux épouse affectionnée qui ne déçoit jamais », selon le mot de Maurice Denis. À ceux qui disposent d’une heure ou deux après avoir visité l’incontournable Venise, nous conseillerons la poursuite de leur route vers le nord jusqu’à Possagno. Ils reconnaîtront de loin ce village, grâce à un monument surprenant qui émerge du flanc des collines : temple antique ? Ossuaire ? Rien d’autre qu’une église élevée à la gloire de Dieu mais aussi du grand sculpteur néoclassique Antonio Canova (1757-1822), natif de ce village. C’est précisément à Possagno, à l’ombre amicale de ce grand aîné, qu’Enrico Campagnola va faire ses premières armes. Tout gamin, avec les enfants du village, il est chargé de désherber, contre quelques lires, l’esplanade du monument de Canova faite de galets disjoints disposés en étoile. La légende familiale veut qu’il s’adonne très tôt au plaisir du modelage. On ne me¤ra pas en doute ce¤e pieuse affirmation, non pas qu’elle soit une constante de toutes les biographies d’artistes, mais parce que chez un jeune Italien, elle est loin d’être une exception tant l’art, dans son pays, fait partie de la vie quotidienne. Au touriste perdu dans l’une des nombreuses capitales de l’Italie, demander le chemin du musée est chose aisée : l’adulte ou l’enfant saura toujours vous répondre. Le jeune Campagnola choisit la sculpture car c’est aussi l’art des pauvres ; la terre permet de s’exprimer à bon compte. À l’âge de dix-sept ans, l’artiste suit sa famille qui s’expatrie à Besançon afin d’échapper au fascisme naissant ; autre qualité de l’Italien que celle de s’adapter rapidement à toutes les situations nouvelles, parfois brutales.

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À ma mère

Vers 1930, marbre, D. 45 cm, Boulogne-Billancourt, musée des Années 30. Donation Bret-Campagnola.

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Catalogue

La Palette

Vers 1977-1978, huile sur panneau, 81 Ă— 100 cm, collection particulière.

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Le sculpteur

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Femme à la mandoline

Vers 1934-1938, plâtre, 110 × 100 cm, collection particulière.

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L’Offrande

Vers 1933, bois, 136 × 36 × 44 cm, Boulogne-Billancourt, musée des Années 30. Donation Bret-Campagnola.

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Femme galet

Vers 1955, terre cuite, 24,5 × 18 cm, Meudon, musée d’Art et d’Histoire. Donation Bret-Campagnola.

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Maternité

1974, bois, 117 × 36 × 24 cm, collection particulière.

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Vierge

1975, bois, 100 × 20 × 25 cm, Ville de Deauville. Donation Bret-Campagnola.

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Le Messager de la Paix

1971, fer soudé, 61 × 10,5 × 15 cm, Ville de Deauville. Donation Bret-Campagnola.

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Maternité debout

Vers 1973, fer soudé, 48 ×9 × 10 cm, Roubaix, La Piscine - musée d’art et d’industrie André Diligent. Donation Bret-Campagnola.

Robe de laine

Vers 1973, fer soudé, 29 ×5,2 × 2,8 cm, Roubaix, La Piscine - musée d’art et d’industrie André Diligent. Donation Bret-Campagnola.

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Robe de laine

Vers 1971, fer soudé, 35,5 ×6,5 × 4,5 cm, Roubaix, La Piscine - musée d’art et d’industrie André Diligent. Donation Bret-Campagnola.

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Le Supplicié

1977, soudure, H. 58 cm, Besançon, musée de la Résistance et de laDéportation. Donation Enrico Campagnola.

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Le peintre

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Les Buveurs

Vers 1936, huile sur panneau, 26 × 27 cm, Boulogne-Billancourt, musée des Années 30. Donation Bret-Campagnola.

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Tête à tête

Vers 1950, aquarelle, 13,9 × 9,8 cm, collection particulière.

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Le Compotier

Vers 1950-1952, aquarelle, 13,7 × 9,8 cm, collection particulière.

Vénus verte au cactus

Vers 1950, vernis sur papier, 14 × 9,9 cm, collection particulière.

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Leda

1954-1955, aquarelle, 14 Ă— 11 cm, Ville de Deauville. Donation Bret-Campagnola.

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La Hussarde

Vers 1950, huile sur panneau, 61 Ă— 50 cm, collection particulière.

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Cosette

Vers 1950, aquarelle, 13,5 Ă— 11 cm, Ville de Deauville. Donation Bret-Campagnola.

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L’Usine

1956, huile sur toile, 50 × 61 cm, collection particulière.

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Les Cerises noires

1955-1956, huile sur toile, 50 Ă— 61 cm, collection particulière.

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Les Merlans

Vers 1959, huile sur toile, 61 Ă— 50 cm, Ville de Deauville. Donation Bret-Campagnola.

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La Dame au chardon

Vers 1958, huile sur toile, 92 Ă— 73 cm, Ville de Deauville. Donation Bret-Campagnola.

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Le Homard

1967-1968, huile sur toile, 60 Ă— 73 cm, collection particulière.

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Gigi

Vers 1973, huile sur panneau, 85 Ă— 105 cm, collection particulière.

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Le Bikini

1955, dessin stylo-bille, 14 Ă— 5,5 cm, collection particulière.

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Croquis

Vers 1957, mine de plomb, 18 Ă— 15 cm, collection particulière.

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Papotages

1972-1975, huile sur toile, 41 Ă— 33 cm, Ville de Deauville. Donation Bret-Campagnola.

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Femme dévoilée

Vers 1975-1976, gouache sur carte à gratter, 23 × 16,5 cm, collection particulière.

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Tableau d’une exposition/8

Vers 1972, gouache sur papier, 11,4 × 15,5 cm, collection particulière.

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Compotier, verre et bouteille

1973-1974, aquarelle, 27 Ă— 35 cm, collection particulière.

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Concerto

Vers 1977, huile sur panneau, 60 Ă— 73 cm, collection particulière.

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Abstrait-56

1979, gouache sur papier, 17,5 Ă— 13 cm, collection particulière.

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Le Violoncelliste

Vers 1978, vernis sur papier, 18 Ă— 12 cm, collection particulière.

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Femme assise aux nuages

1983, dessin aquarellé, 7,3 × 9,8 cm, collection particulière.

La Séparation

1981, dessin aquarellé, 9,5 × 7 cm, collection particulière.

Étude

1981, dessin aquarellé, 10,4 × 8 cm, collection particulière.

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Abstrait-89

1982, aquarelle, 10 × 7,5 cm, collection particulière.

Abstrait-97

1982, aquarelle, 10 × 7,5 cm, collection particulière.

Pastèque

1981, aquarelle, 7,3 × 9 cm, collection particulière.

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Les expositions La fortune critique

Mr Edward Badsford, Enrico Campagnola, Mrs Gloeckner et un peintre.

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Les galeries de la reconnaissance EMMANUEL BRÉON

De 1945 à 1975, durant les « Trente Glorieuses1 », plus que les salons annuels (Salon des artistes français ou Salon d’automne), il reviendra aux galeries de la rive droite ou de la rive gauche2 d’assurer la présentation et le succès des artistes qui vivent alors un véritable âge d’or dans la capitale. La seconde école de Paris, mêlant français et étrangers, a¤ire le monde entier. Paris, dans cet après-guerre qui panse ses plaies, résiste bien à New York quoi qu’en dise la critique. On se presse aux vernissages des gloires de l’époque (Derain, Utrillo, Laurencin, Vlaminck, Dunoyer de Segonzac, Waroquier, Balthus…), comme à ceux qui révèlent de nouveaux talents, peintres et sculpteurs, abstraits ou figuratifs. Du côté de « l’envolée lyrique » se regroupent Wols, Bissière, Beaudin, Estève, de Stael, Le Moal, Manessier, Da Silva, Lanskoy, Mathieu, Zao Wou-ki. Ils sont abstraits lyriques ou géométriques. Ceux qui sont restés a¤achés à la figure rassemblent Rohner, Humblot, Jannot, Buffet, Carzou, Toffoli, Dalí, Tasslitsky,

Exposition à Paris, galerie Bruno Bassano, 1956.

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Segal, Marchand. Ils sont réalistes, surréalistes ou expressionnistes. Dans la presse et les revues qui sont nombreuses à éclore, les critiques soutiennent leurs poulains. Les combats d’idées enflamment ce retour à la paix où tout est de nouveau possible. C’est dans ce¤e effervescence qu’Enrico Campagnola, la quarantaine assurée, fait ses premiers pas et son entrée remarquée dans un marché de l’art prome¤eur. La première galerie parisienne qui s’intéressera à Enrico Campagnola est celle de Bruno Bassano, sise 9 rue Grégoire-de-Tours, dans le quartier Latin, non loin de l’Odéon. L’artiste y sera invité à exposer aux printemps 1955, « Peintures récentes », et 1956, « Peintures et sculptures ». Pour une première sortie officielle à la conquête d’un public, c’est plutôt réussi. Le succès est immédiat et les toiles trouvent aussitôt des amateurs éclairés. Bruno Bassano, qui représentait également les intérêts d’André Marchand ou de Simon Segal, apprécia d’emblée les figures hiératiques aux yeux noirs de Cam-

À propos d’une exposition bisontine et de L’Offrande, 1936.

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pagnola, ses paysages arides et ses opulentes femmes galets. Les deux hommes, aux tempéraments entiers et passionnés, se brouilleront très vite pour se retrouver des années plus tard et tomber dans les bras l’un de l’autre. Les relations entre un galeriste et son artiste sont fréquemment tumultueuses et les histoires d’argent n’arrangent pas les choses. C’est un classique du genre que ce¤e confrontation entre la sensibilité d’un artiste et les réalités économiques d’un galeriste souvent peu comprises par le premier. Auparavant, Bruno Bassano avait déniché un contrat américain prestigieux à la galerie Seventy-Five de New York, dirigée par Rudolph Gloeckner. Le 1er novembre 1956, ce galeriste bien introduit pouvait présenter Enrico Campagnola à un aéropage de célébrités américaines : le tout jeune et nouveau sénateur John F. Kennedy, la jeune sœur de Peggy Guggenheim, le jazzman et peintre Oscar de Mejo, mari de la célébrissime et glamourissime Alida Valli3 . De très belles photographies du vernissage nous présentent Enrico Campagnola conversant avec des messieurs en smoking et des femmes « hitchcockiennes » portant visons, colliers de perles et bibis à la dernière mode. Sans doute impressionné, bien que les clichés ne le montrent pas, l’artiste, qui ne goûtait pas les mondanités, ne renouvellera pas l’expérience d’un voyage en Amérique du Nord, bien qu’il y fût invité et exposé de très nombreuses fois par la suite. Ce qu’il mesura, sans doute, c’est que sa carrière était désormais lancée, même si ce¤e monstration de son travail lui pesait. Ayant qui¤é Bruno Bassano, Enrico Campagnola fut li¤éralement « happé » par Raymond Madsen qui désirait travailler avec lui depuis un long moment. D’origine danoise, Raymond Madsen démarre son parcours, en 1929, dans une galerie de la rue de Rivoli. Il y propose des reproduc-

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Le Déjeuner de l’enfant

1954, huile sur toile, 92 x 73 cm. Acquisition par l’État (6 septembre 1955) pour l’Institut d’études françaises de Touraine.

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La fortune critique EMMANUEL BRÉON « La critique est aisée et l’art est difficile. » Philippe Destouches, 1732 La presse quotidienne ou « magazine », dans les années 1950 et 1960, a un rôle considérable. À une époque où la télévision balbutie et où le multimédia n’existe pas, elle est la première source d’information et est très populaire. Le critique d’art y a donc une influence importante et peut faire ou défaire un artiste. On court à la galerie si l’article est bon, on la dédaigne si l’article est mauvais ou si le critique a tout simplement omis d’en parler, ce qui est pire. En fait de critique, pour Enrico Campagnola, elle fut a¤entive et plutôt tendre, voire louangeuse à son égard. De 1955, son entrée sur la scène des galeries parisiennes, à sa disparition en 1984, les journalistes et historiens de l’art parlèrent de son œuvre d’artiste avec bienveillance, se risquant, de temps en temps, à de simples remarques ou suggestions sur l’exécution de son travail. Ce¤e reconnaissance et ce¤e appréciation de ce monde de la critique contribuèrent à la mise en valeur d’un artiste qui n’avait pas encore été vraiment confronté à ce¤e « médiatisation ». Les principales signatures ayant consacré des textes à l’artiste sont : Jean Chabanon, Jean-Paul Crespelle, Barne¤ D. Conlan, Pierre Mornand, Bernard Fali, Jacqueline Claude, Raymond Charmet, C. J. Gros et J. Mery. Certains sont inconnus et d’autres ont fait de belles carrières. Le plus fameux est sans doute JeanPaul Crespelle (1910-1994) qui fut l’auteur de nombreux livres, notamment sur les maîtres de la Belle Époque et l’histoire

artistique du Montparnasse des Années folles. En 1947, il était devenu le rédacteur en chef de France Dimanche, et de 1948 à 1968, responsable des informations et critique d’art à France–Soir et au Journal du Dimanche. Sa rubrique « Prenez garde à la peinture » était très lue et c’est dans ce¤e dernière, entre autres, qu’Enrico Campagnola fit des apparitions successives. Les papiers du journaliste sont conservés aux Archives de la critique d’art à Rennes. Pierre Mornand (conservateur à la Bibliothèque nationale, conteur et romancier), Raymond Charmet (qui suivait les artistes de la galerie de Bruno Bassano), Jean Chabanon, sont des signatures qui reviennent à plusieurs reprises sur le travail d’Enrico Campagnola.

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Il est impossible d’être exhaustif et de tout reproduire, mais les archives conservées perme¤ent d’évoquer les supports et les titres dans lesquels les critiques d’art opérèrent. C’est ainsi qu’articles importants ou simples brèves communiquées par L’Argus de la presse font état de parutions dans : Pictures on Exhibit (novembre 1958), New York Herald Tribune (novembre 1958, juin 1963, février 1964), Revue moderne des arts et de la vie (novembre 1954, janvier 1955), Journal du Dimanche (mars 1956), L’Information artistique (février 1956), Carrefour (mars 1956), Masques et Visages (avril 1956), Les Le res françaises (mars 1956), Le Peintre (mars 1956, novembre 1958), France–Soir (mars 1955, mars 1956), Vigie marocaine (mars 1955, Arts (mars 1955, février 1961), La Presse de Tunis (mars 1955), L’Œuvre nouvelle (avril 1955), Le Provençal (juillet 1972). France-Soir, mars 1956.

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Jean Chabanon était le spécialiste de courtes monographies, toutes dédiées à des artistes figuratifs, comme Pierre Palué, André La Vernède, Jacques Defradat, Maurice Mazo, Hervé Dubreil. Il écrivait dans Le Peintre ou à la demande des galeristes, pour les catalogues accompagnant les expositions. Le ton d’un texte donne aussi celui d’une époque et c’est pourquoi nous avons tenu à reproduire précisément celui que Jean Chabanon écrivit pour le catalogue de l’exposition d’Enrico Campagnola à la galerie Madsen en 1958 :

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Campagnola par Jean Chabanon […] Présenter un artiste n’est pas facile entreprise. Le critique ne peut rien ajouter à la grandeur d’un univers nouveau surgi de l’esprit, sa plume s’autorise seulement à fixer le cheminement du peintre et retracer humblement les actes de l’homme qui semble ici agir comme le sculpteur dégage du marbre le corps d’une œuvre. Campagnola, né en Suisse en 1911, ne séjourne pas longtemps en territoire helvétique, ses parents rejoignent l’Italie et précisément leur sol d’origine, Possagno, petite cité de la Vénétie, rendue célèbre par le sculpteur Antonio Canova, qui mourut en 1822 à Venise après avoir acquis une notoriété considérable. Ce¤e auréole glorieuse pour un enfant du pays garde tout son prestige et Campagnola admirait la légende, sa force et sa grandeur. Avide de connaissance, il parcourt, tout jeune encore, ce¤e Vénétie pour connaître les lieux où Giorgione, Titien, Véronèse, tous ces maîtres, ces magiciens de la couleur ont vu le jour et laissé des œuvres immortelles. Campagnola évolue dans ce climat créé par la présence de tant d’artistes dont les témoignages visuels l’entourent. France-Soir, mars 1962.

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N’avait-il pas eu dans ses ancêtres des sculpteurs, des peintres qui avaient connu une juste renommée ? Campagnola, sa vocation suscitée par une adresse naturelle et une compréhension du domaine de l’Art, le plus merveilleux avec celui de l’Amour, quémandait à la tuilerie voisine la glaise nécessaire à ses premiers exercices. Il trouvait refuge et solitude dans un grenier où il passait des heures à modeler, à dessiner. La figure humaine le fascinait et déjà il pensait : « Qui sait construire une figure saura bâtir n’importe quoi. » Ses jouets étaient toutes ces choses qui lui perme¤aient de manifester sa passion. Ce n’était pas un enfant paisible et déjà en lui tout devait éclater avec force. Puis, ce fut le départ pour Besançon où ses parents, pour des raisons de travail, avaient dû émigrer, et l’inscription à l’École des beaux-arts qu’il fréquenta pendant un an. Mais bientôt, il éprouvait le besoin de partir, de vivre dans ces lieux qui perme¤ent de vous épanouir. Paris l’a¤endait, mais un Paris inaccessible encore, les moyens pécuniaires des parents étant menus et Rome, la ville des villes pour un artiste, le fascinait. Campagnola gagne, dans le sens le plus complet du mot, la capitale italienne ; y séjourne cinq ans, grâce à une bourse ; étudie l’art, les œuvres bâties par les plus grands génies, s’acharne à la besogne, est sollicité par toutes les richesses, ces legs immortels de l’esprit. La vivacité de son esprit le porte à admirer l’Art ancien comme le nouveau. Les études et les fréquentations enrichissent son savoir et la beauté l’a¤ire sous des aspects les plus divers. Il acquiert les connaissances indispensables pour s’exprimer librement, pour agir totalement.

Page de droite : Journal de l’Amateur d’Art, 10 octobre 1958.

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Portrait de Campagnola, 1958, Paris, Studio Harcourt.

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Chronologie 1911 1er août, lors d’un bref voyage en Suisse, naissance d’Enrico, quatrième enfant de Raimondo Campagnola et de son épouse Maria Zalunardo, originaires de Possagno, village de Vénétie où Antonio Canova (1757-1822) est né, a vécu et a fait ériger un temple pour y accueillir sa sépulture. 1914 Mobilisation du père et exode à pied en Sicile, de Maria et de sa famille. 1918 Retour à Possagno. 1921 Réalise de nombreux sujets modelés dans la terre de la tuilerie voisine, notamment Sainte Anne apprenant à lire à Jésus. 1925 Suit les cours de l’Institut des frères Cavanis à Possagno. 1928 Après le baccalauréat s’expatrie et se fixe à Besançon (Doubs) où sa famille a trouvé du travail. Suit les cours de sculpture du professeur Georges Laethier à l’École des beaux-arts de la ville. 1929 Obtient le prix Jean-Petit, sculpteur bisontin (1819-1903). 1930 Prix du concours de sculpture a¤ribué par l’Académie des sciences et belles le¤res et arts de Besançon. Admis sur concours à l’École des beauxarts de Rome.

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Besançon, Salon comtois : envoi une tête de jeune fille en bois et un médaillon de marbre à l’effigie de Léon Brédillot, syndicaliste socialiste du Doubs. Obtient une bourse qui lui permet de suivre les cours de l’Académie royale des beaux-arts à Rome. Son ami Petorossi, neveu de l’écrivain Luigi Pirandello, réalise son buste.

1940 Déclaration de guerre de l’Italie à la France et à l’Angleterre. Campagnola saisira toutes les possibilités offertes par sa situation en Franche-Comté pour faire de la résistance au risque de sa vie.

1933 Besançon, Salon comtois : envoie un médaillon de marbre qu’il dédicacera plus tard À ma mère.

1946 Réalise deux monuments aux morts dans le Doubs, au Lomont à Montécheroux et à Laire.

1934 Rome. Obtient le diplôme de professeur, section sculpture. Besançon. Enseigne son art pendant un an. Collabore avec Louis Dufay, l’inventeur du procédé « héliophore ».

1947 Depuis le décès de son inventeur en 1936, l’héliophore est exploité par son gendre. Campagnola accepte de le suivre à Paris et devient dessinateur-graveur à l’Office central de l’imagerie (OCI), 16 place du Havre, où il loge dans une chambre de bonne. Sans atelier pour sculpter, il est autorisé à utiliser les lieux de travail pendant les heures de fermeture. Il modèle des sujets en terre cuite et peint de nombreuses œuvres sur papier au format carte postale. Se rend fréquemment à Besançon.

1936 Besançon. Mariage avec Jeanne Gentil (1913-1986). Se lie d’amitié avec Fred Lip et Gérard Weil, deux industriels bisontins mondialement connus. Décès de Louis Dufay. Besançon, galerie Steuber-Gleizes : expose L’Offrande, sculpture en bois, La Légende de saint Hubert, bas-relief en plâtre patiné, deux têtes en terre cuite et deux aquarelles de Rome. Besançon, galerie Demenge : expose Sainte face et Masque de Dante en marbre. 1939 Paris, Salon des artistes français, Grand Palais : L’Offrande obtient une médaille « mention honorable ».

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1944 Décès de sa mère le jour du printemps.

1950 Fréquente Jean Cocteau et Cole¤e. Aide et encourage un jeune peintre et poète de talent, Charles Mine¤i. 1952 Décès de son père en Italie. 1954 1er avril, rencontre Suzanne Bret. Deauville : 5e Grand Prix international de peinture, obtient la mention spéciale catégorie « nu » avec le Nu aux coquillages.

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