Olivier Kaeppelin, auteur de nombreux essais et textes sur l’art, a été délégué aux Arts plastiques au ministère de la Culture et directeur du projet du Palais de Tokyo. Il est actuellement directeur de la Fondation Marguerite et Aimé Maeght.
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DANIEL COULET Texte d’Olivier Kaeppelin
Les Arches
OLIVIER KAEPPELIN
DANIEL COULET
« L’arche réunit, ici, des contraires. Ses règnes, ses rythmes génèrent des “formes monstres” semblables à celles de la poésie. En passant sous l’arche, ne sommes-nous pas d’ailleurs entraînés dans un espace immense, plus grand que nous, comme celui de la baleine de Jonas ? La sculpture nous avale et nous enveloppe dans le volume qu’elle crée. En ce sens, l’arche est une porte vers l’inconnu, vers un autre territoire. Les sculptures de Daniel Coulet se construisent par cet acte : franchir le seuil. »
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© Daniel Coulet © Somogy éditions d’art, Paris, 2017
Ouvrage réalisé sous la direction de Somogy éditions d’art Directeur éditorial : Nicolas Neumann Responsable éditoriale : Stéphanie Méséguer Coéditions et développement : Véronique Balmelle Conception graphique : Nelly Riedel Contribution éditoriale : Françoise Cordaro Fabrication : Béatrice Bourgerie et Mélanie Le Gros ISBN 978-2-7572-1258-5 Dépôt légal : juin 2017 Imprimé en Union européenne
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Les accolades mystérieuses J’ai découvert la première arche de Daniel Coulet dans un jardin de Toulouse, le jardin des Abattoirs. Si vous vous y rendez, vous observerez d’abord une ligne dans l’espace. La sculpture semble légère, le haut de sa courbe se mêle au bleu du ciel. Elle génère une élévation, mais cette élévation n’est tributaire que du seul regard. Si je confronte mon corps au bronze de l’ouvrage, en passant à travers sa forme, je suis sollicité par une tension, une déformation qui rompt l’équilibre et qui, par le mouvement m’oblige à prendre conscience de l’instabilité de ma position et de mon assise. Je ne suis plus cet homme, levant les yeux vers la lumière, mais un marcheur à qui la sculpture rappelle sa nature ambivalente, entre terre et air, accentuée par l’élargissement des pieds de l’arche, par l’état de la patine qui nous livrent à un règne animal déroutant, à une étrange peau de monstres ou de chimères. Les arches de Daniel Coulet sont profondément physiques. Elles sont des corps dont nous ne pouvons préciser l’origine. Si elles acceptent l’héritage de la pensée scolastique et son aspiration à la lumière, elles le conçoivent sans oubli de la chair, de la substance qui nous attache au sol. Elles n’abandonnent jamais la fragilité de la station debout et la souffrance qu’éprouve l’humanité à concevoir son arrachement à la pesanteur. Ses arches ne jouent pas avec l’illusion d’une assomption. Elles soulignent, au contraire, l’enlacement complexe de la matière et de l’esprit. S’il y a « chimère », celle que j’ai devant moi est faite d’immatériel, de « corps sans corps » et de créatures impressionnantes surgies de la nuit des temps. L’arche réunit, ici, des contraires. Ses règnes, ses rythmes, génèrent des « formes monstres » semblables à celles de la poésie. En passant sous l’arche, ne sommes-nous pas d’ailleurs entraînés dans un espace immense, plus grand que nous, comme celui de la baleine de Jonas ? La sculpture nous avale et nous enveloppe dans le volume qu’elle crée. En ce sens, l’arche est une porte vers l’inconnu, vers un autre territoire. Les sculptures de Daniel Coulet se construisent par cet acte : franchir le seuil. Par leur déploiement, elles exercent leur emprise sur le vide qui les entoure « avant et après » la traversée. Elles peuvent être fines, fragiles comme une branche souple et pliée ou, au contraire, se dresser comme les portes de l’enfer ou du paradis. Il leur arrive de porter des corps torturés qui sont peut-être ceux de damnés ou, au contraire, ceux qui, après l’apocalypse, libérés de leur poids, trouvent la vie nouvelle. Elles prennent parfois l’allure de divinités sombres et cruelles, de cerbères exhibant, à leur portail, les têtes de ceux qui n’ont pu accéder à l’univers « au-delà ». Ces sculptures se dressent, accueillantes ou hostiles. Elles permettent l’expérience ambiguë de l’espace, de ses réversibilités. Elles créent ainsi une scène où nous sommes conduits, au bord d’une frontière, à faire « le pas au-delà ». Il y a l’envers et l’endroit, le 5
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Arche Mur no 01-2015 Bronze, 43 x 32 x 18 cm Collection particulière
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Mémorial no 03-2016 Bronze, 80 x 30 x 20 cm Courtesy galerie Mézières, Auvers-sur-Oise
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Grand Arc 2010 Bronze 51 x 90 x 15 cm
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2007 Composite, 31 x 175 x 83 cm Courtesy galerie MÊzières, Auvers-sur-Oise
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Arche double 2000 Composite, 380 x 180 x 120 cm Galerie LibĂŠral Bruant, Paris
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Cinq Éléments d’un cloître 2004 Bronze, 48 x 93 x 30 cm Collection particulière
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CloĂŽtres
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Cinq Éléments d’un cloître 2017 Composite, 300 x 650 x 100 cm Parc du château de Laréole
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Arche Peirabruna Composite, 458 x 800 x 168 cm
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Entretien avec Olivier Kaeppelin Comment as-tu imaginé et conçu ta première arche ? Jeune sculpteur je n’ai pas voulu, peut-être par instinct, m’inscrire dans ce que je voyais dans les musées, galeries d’art ou ce que je lisais dans les revues. Il ne s’agissait pas de prétention mais de sincérité. Je ne m’y reconnaissais pas. Comment créer ? Comment s’exprimer sincèrement dans son propre univers ? Ce que l’on nomme rapidement son style ? J’ai donc voulu dans un premier temps, par simple modelage, disloquer le volume dans l’espace et, dans un deuxième temps, afin qu’il devienne aérien et traduise la verticalité que je recherchais, je l’ai traversé d’axes métalliques rigides. J’ai pu ainsi à la fois satisfaire mon désir d’utiliser le modelage qui me permettait d’obtenir la matière que je cherchais et mon intention d’une élévation spirituelle. J’ai constaté alors qu’en croisant ces deux désirs, des arches se révélaient !
Que retiens-tu de plus important dans tes arches : la forme, le symbole, le rythme ou la ligne ? Comment vis-tu ou comprends-tu ces différentes dimensions ? Mes arches ont une efficacité visuelle qui découle de la force d’un modelage « massif », né d’un mouvement, d’une torsion. Rodin parle très bien de cela. Ce mouvement engendre la forme, la ligne et la surface dans le même temps. C’est pour cela qu’il est si difficile à réaliser. La symbolique qui en naît ne dépend pas de moi, mais de la lecture de ceux qui regardent l’arche. C’est certes une forme riche de sens et de liens, dont la signification ne m’appartient pas. La forme crée le sens.
Peut-on dire que ces arches sont une porte, un chemin ou encore un « passage » ? Chacun définit les choses à partir de son expérience. L’idée d’une élévation et d’un passage est très présente dans mon atelier. Je nomme certaines de mes arches aussi « portes ».
Fais-tu une relation entre tes formes plastiques et certaines cultures religieuses, à travers un thème ou un type d’architecture ? Pour comprendre l’évolution de la sculpture, j’ai dû partir à la découverte des chefsd’œuvre du passé dans les églises, les cloîtres et les couvents, dans toute l’Europe et au-delà. Il y a une influence de ces sources dans mon travail. Toutefois, s’il a une dimension spirituelle, mon travail n’est pas religieux de mon fait. Je ne nie pas que mes créations puissent, parfois, concerner le sacré. Un sacré par exemple qui s’oppose à la trivialité du commerce ou de la communication. Il est ce qui met les objets et les idées « ailleurs » et, sans doute, au-dessus de notre condition ordinaire. Où ? Personnellement, je ne le sais pas. 119
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Biographie Né le 6 mai 1954 à Montpellier, Daniel Coulet vit à Paris et dans le Lauragais. De 1961 à 1972
Études secondaires à Nîmes où il découvre les sculptures et les grands monuments antiques (amphithéâtre, Maison carrée, temple de Diane…). Dans le Languedoc familial, il grandit au contact des édifices romans de Saint-Martin-de-Londres et Saint-Guilhem-le-Désert.
1985 Installation de son atelier dans le Lauragais. « Moments d’une démarche », Réfectoire des Jacobins, musée d’Art moderne, Toulouse. 1987 Patrimoine Art Contemporain 87, Château de Peyrepertuse Département de l’Aude. 1987-1988 Série Souches de Salzmann. Le maquis méditerranéen devient source d’inspiration. 1988 Centre régional d’art contemporain Labège. Les Ateliers des Arques, exposition dans le cadre de l’ouverture du musée Zadkine-les Arques. 1990 Dessins du cloître de Saint-Guilhem et des arches croisées de Saint-Martin-de-Londres. 1991 Galerie Éric Dupont, Toulouse. Série des Arches monumentales et des Iris. 1992 Premier atelier de sculptures à Paris à la Cité internationale des arts. Commande publique du Mémorial de Rennes-les-Bains et mobilier liturgique. 1993 Galerie Éric Dupont, Toulouse. Commande publique pour la station de métro Mirail-Université (Toulouse). 1994 Musée d’Art moderne, Lerida (Espagne). Chonqing Art Museum (Chine). 1995 Musée Paul-Dupuy, Toulouse. Galerie Éric Dupont, Toulouse. 1996 Création de sculptures monumentales (Architecture en mouvement, Porte cendrée et Mémorial Peira Bruna, hommage à la Résistance et la Guerre d’Espagne…) Découverte du sculpteur roman dit « le Maître de Cabestany » (œuvres dans l’Aude, Pyrénées-Orientales, Espagne et Italie). Création des premières versions des Portes pour le Maître de Cabestany. Relevé de dessins des rochers et d’arbres du maquis méditerranéen. 1996-1997 Musée des Beaux-Arts Denys-Puech, Rodez. 122
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1998 Carré Sainte-Anne, Montpellier. 1998-2001 Commande publique de vitraux pour les baies Sud de l’église Notre-Dame d’Aubin. 1999 Les Olivétains, Saint-Bertrand-de-Comminges. 2000 Le Caveau, Rivesaltes. 2001 Commandes publiques : Arche, musée d’Art contemporain, Les Abattoirs, Toulouse et Dix Sculptures archéologiques, musée Fenaille, Rodez. 2001-2004 Commande publique des vitraux des baies Nord et Ouest de l’église Notre-Dame d’Aubin. 2005 Galerie Libéral Bruant, Paris. 2006 Réalisation à Barcelone et présentation d’un mât d’éclairage public né de la série des Iris, Foire internationale de la lumière, Francfort (Allemagne). 2007 Galerie Libéral Bruant, Paris. 2008 Galerie Franck Pagès, Baden-Baden (Allemagne). Réalisation de la Jambe de cheval, de 8 mètres de haut, Shanghai (Chine). Art Paris et Grand Palais, Paris. 2009
Galerie Franck Pagès, Baden-Baden ; Art Paris, Grand Palais, Paris.
2010 Ludwig Museum, Coblence (Allemagne). Musée Paul Dupuy, Toulouse. Galerie Franck Pagès, Baden-Baden (Allemagne). Présentation de dessins aquarellés et lampadaires sculptés au Technopali à Milan (Italie). 2011 Commande publique : Jambe de cheval, Blagnac. Commande publique : Retable de Bordes et mobilier liturgique. 2012-2013 Série de dessins des arènes de Nîmes, de l’église de Saint-Martinde-Londres et du cloître de Saint-Guilhem-le-Désert. Réalisation de variations sur le thème du cloître et d’arches (sculptures et dessins). 2013
Monument aux morts 1914-1918, Noueilles.
2013-2016 Voyages en Chine pour la réalisation de modelages en terre (5 Arches, Éléments d’un cloître et 3 Thorax de jeunes hommes ). 2017 Château de Laréole. Galerie Le Confort des Étranges, Toulouse. Galerie Mézières, Auvers-sur-Oise. 123
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« L’arche réunit, ici, des contraires. Ses règnes, ses rythmes génèrent des “formes monstres” semblables à celles de la poésie. En passant sous l’arche, ne sommes-nous pas d’ailleurs entraînés dans un espace immense, plus grand que nous, comme celui de la baleine de Jonas ? La sculpture nous avale et nous enveloppe dans le volume qu’elle crée. En ce sens, l’arche est une porte vers l’inconnu, vers un autre territoire. Les sculptures de Daniel Coulet se construisent par cet acte : franchir le seuil. »
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