Belba le cave

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Belba le cave n째1 ******************************************************************************************

HI MONKEY AAAAAAA A AA MY HEAD IS ON FIRE FULL OF FUN AND LOVE AND MUD


Contact : belbalecave@yahoo.fr


Edito *

Ceci n’est pas une revue

Sommaire * Page 1 : Z’êtes en plein dedans bande de caves ! Page 2 : Deux yeux Page 3 : Mwanzana ya Nzuani _ ça y est ! Page 6 : rAdio Toulouse _ les cahiers de l’été Page 18 : Interlude sans intérêt… (1) Page 21 : Mwanzana ya Nzuani _ tempête sous les cocotiers Page 22 : La faim de l’histoire Page 26 : rAdio Toulouse _ les feuilles d’automne Page 37 : Interlude sans intérêt… (2) Page 39 : Mwanzana ya Nzuani _ vert, verre et vers Page 42 : An engineer in Hell Page 44 : ébats d’idées

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Deux yeux

Lecteur, lectrice, Belba le cave est un patchwork de ce qui anime nos sociétés et alimente nos débats. Un œil curieux et cynique sur le fatras indigeste dont les médias te nourrissent (ou te bouffent peut-être). Mais, sans guide, Belba peut devenir un labyrinthe alors qu’il se veut une promenade … Donne-moi la main. Tout commence l’hiver dernier. Tu as froid ? Je t’emmène en Afrique. Ca y est ! Mwanzana ya Nzuani (l’ami d’Anjouan) est arrivé. Il découvre son quotidien des prochains mois. On avance jusqu’à l’été, pendant lequel l’Europe de ce début de siècle posait pour une photo en négatif. Un sourire crispé et c’est dans la boîte. Le tube de l’été : un mix de Bomb’n Roll et de salsa hongroise. Tu reprendras bien un petit verre de brut avant de déguster Les Cahiers de l’été sur rAdio Toulouse ? Tu étais un élève appliqué et curieux, sinon ferme les yeux. Tu dois maintenant connaître la vérité … C’est à toi de changer la donne et d’avoir un as dans ta manche. Fonce ! Et retiens bien les conseils de Frère Adam SMITH dans son Interlude sans intérêt (1). La panique s’est emparée de la ville. Entre incompréhension et incompréhension, notre Mwanzana ya Nzuani mène une enquête parsemée de fausses pistes. Qui connaît la vraie raison de cette tempête sous les cocotiers ? Flashback. Cet hiver, pour réchauffer ses doigts engourdis, notre gouvernement écrivait les programmes scolaires de nos chères têtes blondes parce que : rien ne vaut une jolie histoire avant de s’endormir … Tu crois que quelqu’un te manipule, si tu veux connaître La faim de l’histoire, éteins ta télé ! Retour Puis les feuilles ont jauni et il a recommencé à faire vraiment froid. Heureusement, les plus motivés entretenaient une lueur d’espoir dans nos quartiers. Même Ankara l’a aperçu ! La Terre frissonnait sans son pull Cachemire. Quelques feuilles d’automne à ses pieds et le printemps sera vite de retour. Je vais p’t’être demander un job pour Noël ?! Voici le vestiaire des esprits. Tu es le bienvenu, Inconscient. Je te donne un ticket, tu te plonges dans l’Interlude sans intérêt (2) et je te rends tes esprits en sortant. Attention aux conséquences de tes actes … Et garde les yeux ouverts ! Un moment de vie empli de souci de son prochain et de légèreté nous est conté par le, désormais célèbre, Mwanzana ya Nzuani. Un son à prononcer au pluriel : Vert, Verre et Vers. La maison brûle, tout ça, ouais je sais tu connais. Et si tu mettais un peu d’eau (contaminée) sur ce brasier ? Je te vends les conseils de notre expert à un prix imbattable. Achète, achète ! An engineer in Hell en un seul volume sans le DVD ! Ca t’a plu ? Une dernière question t’attend si tu te mêles aux ébats d’idées. A moins que tu n’aies d’autres questions en suspens? C’est bon maintenant, lâche-moi la main, y’en a d’autres qui attendent !

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Mwanzana ya Nzuani _ ça y est ! ******************************************************************************************

* 1 Décembre 2004, 150 heures après le collier de fleurs J'ai pris l'avion mercredi dernier à Orly. Orly c'est déjà un peu l'Afrique. Dans la queue pour l'embarquement il n'y avait que des Comoriens, avec toute la panoplie : la langue souple et chantante, les habits colorés, le sourire aux lèvres et 40 kilos de bagage par tête minimum. Bantous africains, marchands arabes, explorateurs polynésiens et colons portugais ont laissé leur marque dans le sang et les visages du peuple de l'archipel. Les hommes ont souvent le visage fin, sec, négroïde, aux formes lisses. Leurs oreilles surtout sont remarquables, petites, rondes et décollées. Les femmes sont potelées ou bien fines et élancées selon que leur aïeul était africain ou arabe. Elles portent souvent des boucles dorées dans les oreilles ou une narine. Elles ne sont pas voilées à proprement parler mais elles portent un shiromani, une sorte de châle léger dont elles s'entourent la tête ou le corps, derrière lequel elles se dissimulent pour se remaquiller parfois. Les Comoriens ont un physique agréable et comme tout le monde est à peu près de bonne humeur, pour entamer la conversation il suffit d'un sourire. Air bourbon ça sent déjà bon la vanille. C'est la compagnie aérienne avec laquelle je suis parti – et elle a fait faillite au moment où j'écris ces lignes. Dans l'avion c'est un bordel joyeux et calme où moutonne un babil incessant en shinzuani, shikomor ou shimweli, de toute façon c'est à peu près la même langue. Un moteur est en panne, le décollage a deux heures de retard. C’est surtout ennuyeux parce que ma voisine et moi avons faim, et que le repas est retardé d’autant. Une fois la panne réparée c’est l’accélération le décollage, la nourriture plastifiée. Neuf heures plus tard le soleil se lève sur un duvet de nuages roses. Tout en bas trône le Kilimandjaro, étalé, massif, couronné de neiges éternelles et cerné par la forêt équatoriale ; le roi de l’Afrique nous ignore superbement. Encore quelques heures et l'avion se pose en une secousse à Moroni, la capitale de la Grande Comore. Là c'est la carte postale : les cocotiers, le tarmac brûlant, la police et l'armée. L'aéroport est minuscule. A l'intérieur c'et la calme pagaille qui servira de toile de fond à toute cette histoire. Les douaniers, la police et les porteurs de valises. Je suis le seul mzungu du coin. Le mzungu c'est l'européen, le gringo. Les formulaires à remplir en trois exemplaires, les contrôles de passeport tous les dix mètres. Le billet pour l'avion suivant est coincé dans une autre ville mais on ne le répètera jamais assez, ici les gens sont gentils. Quatre heures plus tard je me trouve dans un coucou grinçant d'une trentaine de places qui gigue dans les trous d'air, direction Ouani, sur l'île d'Anjouan. Re-carte postale, les plages de sable blanc, les pentes abruptes des montagnes couvertes de forêt, les oiseaux qui volent au-dessus de la mer bleue. Re-aéroport minuscule, re-formulaires en trois exemplaires (les mêmes), un coup de tampon sur le passeport et je suis accueilli par un collier de fleurs, du Jasmin. Nils, le volontaire du programme agro est le premier mzungu depuis une demi-journée, et pour le coup il est blond aux yeux bleus. Là s'écoule un quart d'heures de quasi-silence. Nous sommes dans une voiture, il fait 27°, le ciel est bleu, quelques nuages moutonnent, la route suit le bord de la mer. Dans mon sac j'ai encore un blouson de ski, une écharpe et un bonnet, séquelles de la vie grenobloise. La route est un peu défoncée, les voitures aussi d'ailleurs. Il y a assez peu de véhicules, par contre on peut se faire doubler par des chèvres de temps en temps. Il y a aussi des vaches qui mangent des ordures, des enfants qui jouent dans des bidons éventrés vêtus de loques crasseuses. Des hommes attendent, assis sur les rebords en béton, d'autres portent des... choses sur la tête ou poussent des charrettes métalliques. Les nombreux taxis toussent une fumée noire et collante. Ils ont le volant à gauche ou à droite, ça dépend. Certains portent des inscriptions en chinois sur les portières. Des femmes portent des jerricans d'eau sur la tête, de temps en temps il y a un militaire. Les bâtiments sont délabrés. Certains ont du être beaux jadis. Le gris sale est moucheté de portes et de fenêtres colorées. Partout de petits commerces débordent de pacotille, presque tous arborent des affiches Coca Cola. Au bout du silence il y a la maison de Christophe, le responsable du programme, parti en vacances. C'est une grande maison, mais toutes les maisons sont grandes ici - presque sans meuble ou décoration. La

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cuisinière a préparé du poisson avec une sauce coco, des légumes aux épices, du riz. Papaye, manioc et sorte de tubercule bizarre et mollasson complètent le menu disponible sur l'île. Exotique mais pas très varié. C'est vers la tarte à la papaye que j'ai rencontré Nicolas. Nicolas c'est un grand maigrichon de végétarien avec des bouclettes et des lunettes. Cultivé, ironique, un peu théâtral mais doux et agréable. Il est relativement dépourvu de cynisme, ce qui est surprenant quand on connaît son travail : il est chargé d'aider à la création de comités villageois de gestion de l'eau, autrement dit de faire s'entendre des gens dont le sport national est la lutte de clocher... enfin, de minaret. A peine le jus de mangue terminé, on part en balade, direction Moimoi. A la sortie de Mutsamudu, la grande ville dont il est question depuis deux pages, il y a Pagé, petit quartier intéressant car il y a une pompe à essence. En effet l'essence est devenue rare sur l'île depuis que la société des hydrocarbures est en cessation de paiement et que les tankers ne s'arrêtent plus pour vendre du carburant. Depuis Pagé on monte à pied jusqu'au petit village de Moimoi, dernier village d'Anjouan à ne disposer d'aucun réseau d'eau, même pourri ou insalubre. Les gens, les femmes surtout, descendent à pied jusqu'à Pagé pour remonter des jerricans de 20 litres, soit ce qu'il faut pour une personne pour une journée. Sur le chemin, des gosses en guenilles, des capsules de Coca, des piles et des écorces de bananier. Quelques mille cinq cent âmes peuplent Moimoi. Les cases sont faites en feuilles de coco tressées. Beaucoup ont commencé à s'effondrer depuis un moment. Des baobabs, des cocotiers, des arbres à pain entourent le village. Les enfants suivent les mzungus, les hommes nous saluent et les femmes gloussent dans leur shiromani. Sur la place centrale la terre rouge et argileuse a été battue par les milliers de pieds nus des habitants. Peu à peu le village se rassemble. Halibou, l'ancien avec son bob noir sur la tête arrive, essoufflé par la rude montée – il l'a faite en courant. Des chaises en plastique apparaissent comme par magie. Une vingtaine pour les femmes de statut, trois pour nous. Nous sommes accompagnés par Nadjmat (l'étoile), un joli brin de Comorienne qui est la seule fille vraiment voilée que j'ai vu jusqu'à présent. Le soleil cogne, tout le monde est là, la réunion peut commencer. Nicolas me présente, explique pourquoi je suis là, raconte comment je vais faire l'étude du cas de Moimoi et suivre les travaux. Rastamin, un type du village en chemise de soie, pantalon repassé et chaussures cirées fait la traduction. Je pense que j'ai réussi à montrer que je n'avais pas la moindre idée de ce dont Nicolas était en train de parler. Ensuite il a fait un baratin sur la nécessité de cotiser régulièrement un peu d'argent pour l'entretien du futur réseau, de coopérer entre quartiers voisins et de partager l'eau. Son boulot, c'est aussi d'y croire. A la fin, celui que je pense être l'imam du village s'est levé, s'est planté devant moi et nous a parlé en shinzuani en me regardant dans les yeux. Nadjmat a fait la traduction simultanée. « Soyez remerciés parce que grâce à vous nous allons avoir de l'eau au village, la vie va être possible et la misère va nous quitter. Nous allons loin chercher de l'eau pour vivre et maintenant nous allons pouvoir exister dignement. Merci d'avoir parcouru un si long chemin pour nous venir en aide, de nous regarder comme des êtres humains vous qui êtes des maîtres de l'eau » Là j'ai du avoir l'air con, j'ai probablement incliné la tête en haussant les sourcils et je me suis dit que j'avais la pression. Après la fatiah, la prière rituelle, les femmes ont chanté et nous, nous sommes descendus sous le soleil écrasant. Nicolas aussi a une grande maison avec peu de meubles et de décoration. En revanche il a un grand jardin assez exubérant avec du manioc, des arbres à pain, des cocotiers, des frangipaniers, des trucs rouge, des lézards verts, des oiseaux flamboyants, des chauve-souris des escargots et des mille-pattes. J'ai oublié un putain de gros tas de moustiques qui ne connaissent pas la pitié. Je fais cible dès la tombée de la nuit. Le produit répulsif marche assez bien à condition de ne pas oublier un brin de peau. La Savarine, l'antipaludéen à prendre chaque jour passe assez bien, ce qui est une heureuse surprise. La cuisinière de Nicolas a préparé à peu près la même chose qu'à midi. Le soir, nous sommes allés à un spectacle. Ca se passait dans un stade. Les stades ici sont entourés de hauts murs gris et servent à tous les sports en même temps. Les routes anjouanaises la nuit, c'est encore plus mouvementé que la journée : les chèvres, les trous et les enfants apparaissent au dernier moment. Pour dire un mot sur le spectacle : un concert de femmes costumées, un demi morceau de rap interrompu par la coupure d'électricité et à la reprise du courant vingt minutes plus tard, du théâtre avec un type qui trompe sa femme sourde. Evidemment j'ai pas compris un mot de ce qui se disait, mais, on l'aura compris, les gens sont gentils et on me racontait au fur et à mesure. Enfin, après onze pages manuscrites et une crampe à la main, j'ai dormi chez Nicolas. En caleçon sous la moustiquaire, bercé par la musique du voisin et les aboiements du chien dans ma chambre inondée de lune. Première nuit au Sud de l'équateur.

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-Petit à petit je prends mes marques. En ce moment chaque personne est une rencontre, chaque chose une découverte, chaque geste une aventure. J'ai commencé à travailler, ça ne change pas tant que ça du syndicat : Kangoo pourave, ordinateur d'un autre âge, personnel coloré aux méthodes expérimentales, retard perpétuel sur tous les fronts. Les bureaux sont hébergés à l'école de pêche de Mirontsy, pourquoi pas. Je m'aventure chaque jour un peu plus loin dans la ville ; je vais bientôt aller faire le marché, dès que j'ai le temps en fait. J'ai commencé à prendre des cours de shinzuani, certaines personnes connaissent mon nom. Je vais partager la maison de Nicolas, j'ai pris collocation à perpétuité. Coté déplacement, j'espère bientôt apprendre à conduire les motos. En attendant j'ai passé avec succès le test de la conduite à Mutsa : tout au klaxon. La vie est agréable ici. Nous mangeons sur la terrasse, face au jardin et à la mer. Nous avons un pouvoir d'achat énorme mais il n'y a rien à acheter. Je n'ai pas parlé de l'ambiance dans les rues mais les expressions de chaos tranquille, de calme bordel et de joyeuse décharge la qualifient assez bien. Pour conclure cette chronique des 150 heures, retour à Moimoi. Nous sommes montés jusqu'à la source qu'ils veulent capter avec Hassan, le technicien que je vais épauler. Nous étions guidés par Halibou, 52 ans, avec son bob et ses tongs. Evidemment on n'arrivait pas à le suivre. On a grimpé trois kilomètres de montagne verticale dans la forêt tropicale avec des chauve-souris suspendues la tête en bas, et Halibou qui nous attend toujours devant. Là-haut les villageois avaient défoncé la moitié de la montagne à la pelle et à la pioche pour dégager la source. Plus tard ils monteront le ciment sur leur tête pour faire le captage. Je suis bien content d'être le gars qui a fait des études et qui dit « voilà, posez tout ça là ». Y comme Ylang

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rAdio Toulouse _ les cahiers de l’été ******************************************************************************************

Les nouvelles plus trop neuves du dedans. Avec tout d’abord, l’EUROPE : *Une constitution qui n’en finit pas d’en finir L’actualité brûlante de l’Europe au début de l’été c’était bien sûr les spasmes post-mortems du ‘traité établissant une constitution’. Après le non national-socialiste français et le nee national-monétariste de la hollande ; la Grande-Bretagne avec son bon goût british, a décidé de ne pas dire no à l’Europe. Elle a donc gelé le processus (jusqu’au calendes galloises ?) référendaire initialement prévu en 2006. Malgré l’adoption du texte le 6 juillet par l’assemblée de la République de Malte, ainsi qu’au Luxembourg, le 10 juillet par processus référendaire (à 56.52%), on peut donc considérer que celui-ci est mort. Heureusement, une bonne plaisanterie à l’italienne a considérablement détendue l’atmosphère. Des députés italiens on proposés de revenir à la lire. Mieux vaut en rire. Mention spéciale à la France qui est redevenue, le temps de quelques semaines, un pays de dialogue, de débat populaire et politique sur l’avenir de la race humaine. On applaudira ainsi le retour de méthodes (chantage, menaces, pots de vin…) et de termes (peuple, élites, France d’en haut, France d’en bas, ennemi de la France…) qui ont déjà sut marquer les heures les plus glorieuses de la démocratie participative. * Waterloo Il y a eu ensuite le sommet de Bruxelles, un fiasco lui aussi. Aucun accord n’a put être trouvé. En cause ? Le ‘rabais anglais’, un retour d’argent à la Grande-Bretagne sur le budget de l’Union. En effet, la G-B refuse de financer la PAC (Politique agricole commune), dont elle ne bénéficie pas (« We want our monney back » disait à ce sujet Margareth Tatcher en 1984). Au début des années 1980 la G-B est morose, et obtient ce chèque. La France, arguant de la bonne santé de l’économie Britannique, souhaite que l’on mette maintenant fin à ce ‘rabais’. Mais la Grande-Bretagne ne souhaite toujours pas financer la PAC, qui représente tout de même encore environ 45% du budget de l’Union. Elle propose donc de revoir les objectifs de l’Union. Elle souhaite donner une ‘nouvelle impulsion’ à l’Europe. « Je veux bien payer [Nous dit Mr Blair] , mais pas pour une Europe de l’agriculture. Pourquoi 45% du budget européen irait à 5% de la population active européenne ? Pourquoi ne pas favoriser la recherche, les infrastructures, la compétitivité de l’Europe ? » Et Jacques Chirac ne dispose pour l’heure d’aucune crédibilité (à l’étranger non plus) pour défendre (ce qu’il considère comme) le modèle français. D’autant moins que celui ci est morose, alors que le modèle anglais fait l’admiration de beaucoup en ce moment (un espèce d’hybride bizarre, mâtiné de libéralisme et de néokeynesianisme post-tatchérien). Le président espagnol, Jose Luis Zapatero, pourtant socialiste et moins libéral que son prédécesseur, s’aligne sur Londres et l’axe franco-allemand est mangé par les deux bouts, puisque Gerhart Schröder n’est plus chancelier, et il est fort possible que la nouvelle coalition au pouvoir soit plus sensible aux arguments anglais (une coalition a néanmoins moins de chance qu’un parti d’opter pour une politique de rupture). Enfin, détail amusant, c’est la Grande Bretagne qui a prit en juillet la tête de l’Union pour une durée de 6 mois. Un duel qui achève d’enterrer l’Europe telle qu’on la connaît. Pas forcément une mauvaise chose donc, mais bizarrement je ne suis pas particulièrement optimiste. Mais qu’est-ce qui peut déchaîner autant les passions ? Les thunes bien sûr, l’enjeu c’est le budget de l’Union pour la période 2007-2013. Une partie des nouveaux entrants ont proposés de revoir l’aide à l’unification à la baisse, pour alléger le budget et trouver une issue. Juncker, alors à la tête de l’Union (la présidence était belge) a fulminé devant l’égoïsme des poids lourds de l’Europe : « J’ai honte ! Honte ! ». Jacques Chirac, lui, a trouvé l’offre très élégante : « attitude émouvante » . Il avait par contre traité les pays qui ne s’était pas alignés sur l’axe franco-allemand au sujet de la guerre en Irak de « pas très bien élevés » . Ils ont certainement appris les bonnes manières depuis. Sûr que si les nouveaux entrants proposent de financer la PAC eux-mêmes, le grand Jacques saura trouver les mots pour exprimer son admiration. Un p’tit geste, messieurs dames… En fait de sommet de Bruxelles, on atteint les bas-fonds…

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* PACman La PAC, c’est quoi ? La Politique Agricole Commune voit le jour en 1962, un avatar de la théorie Ricardienne de division des taches. La France laisse rentrer les produits industriels allemands sur son territoire, et ceux-ci subventionnent l’agriculture française (et toujours selon la théorie des avantages comparatifs, la perfide Albion se dirigera vers les services - délit d’initié ?- et l’Irlande vers la pharmacie et l’informatique…). Bon, c’est bien, tout le monde a son pré carré, tout le monde devrait être content. Pas si facile. La PAC, c’est tout de même 45% du budget de l’Union, qui va à 5% de sa population active. Premier point. Il y aurait peut être d’autres postes de dépenses plus acceptables. Ensuite, la PAC, en subventionnant massivement les produits agricoles européens, pousse à la surproduction et au dumping. Il est beaucoup de pays du Sud, exportateur de produits agricoles (souvent au détriment même de leur population, qui n’a rien à manger, mais que voulez vous, il faut des devises pour payer le FMI et le Banque mondiale) qui ne pourront sortir la tête de l’eau que si l’Europe et les Etats-Unis cessent de subventionner massivement une agriculture intensive. Enfin, la PAC subventionne une agriculture intensive donc (20% des exploitants - les plus gros – touchent 80% des subventions) et productiviste, qui détruit l’environnement bien plus qu’elle n’entretient les paysages. La France est le troisième utilisateur de pesticides au monde (derrière les Etats-Unis et la Chine), et la pollution de l’eau et des sols en France a déjà été montrée du doigt à de nombreuses reprises par la commission européenne. On résume : la PAC, ça paralyse la France et l’Europe, ça pourrit la France, et ça asphyxie les pays du Sud. Et c’est qui PACMAN ? Chirac. Pourquoi ? Pour rien. * C’est la faute à l’Europe ! Dans un article nommé « plus royaliste que le roi », Alternatives Economiques de juin fait l’autopsie d’un crime. En juin, l’Assemblée devait se prononcer sur une loi concernant les droits d’auteurs, la transposition en droit français d’une directive européenne. Cette loi permet pour la première fois aux distributeurs de placer des dispositifs anti-copie sur les CD/DVD. La directive européenne prévoit des exceptions pour cause d’enseignement et de recherche, mais le gouvernement français a décidé que non, tout le monde doit payer, y compris les bibliothèques, pour le chargement de documents sous formats audiovisuels ou électronique. Y compris pour les documents gratuits en lignes, comme les rapports officiels de la documentation française. C’est aussi cela l’exception culturelle française… *Et si l’Europe servait à quelque chose ? Avec l’aval de la Commission européenne de sécurité alimentaire (En juillet 2004, celle-ci décrétait que les Organisme génétiquement modifiés [OGM] sont sans dangers sanitaires ou environnementaux), le moratoire sur la commercialisation des OGM et leur mise en culture, décrété en 1999, a été levé depuis un an en Europe. Cependant certains pays font de la résistance ; la France, l’Allemagne, la Grèce et le Luxembourg font jouer la ‘clause de sauvegarde’ sur le maïs et le colza, contre l’avis de la Grande-Bretagne, de la hollande et… de la commission européenne. Or, ce vendredi 24 juin, les ministres de l’environnement européens ont rejetés à la majorité qualifiée (22/25) la levée des interdictions aux OGM dans certains pays de l’Union (cette interdiction ne concerne pas la présence des OGM, mais leur culture en vue d’être vendus, et régule leur vente). Mais les OGM gagnent du terrain sur le marché mondial, avec une superficie totale de 81 millions d’hectares en 2004, contre 67.7 millions en 2003, soit une croissance de 20%. Contre cette flagrante entorse à la liberté des échanges, l’OMC a donc été saisie par les Etats-Unis (59% de la superficie mondiale de culture d’OGM), l’Argentine (20%) et le Canada (6%). A la rédaction, on est toujours sans nouvelles du verdict, pourtant annoncé pour la rentrée. *PACman 2 A l’évidence, cette levée de bouclier serait impossible sans la PAC (et très improbable si l’Allemagne lui ôtait son soutien). Un commentaire d’un ami m’a quelque peu refroidi dans mon ardeur anti-Pac. En effet, la PAC est avant tout un outil pour que l’Europe garde sa souveraineté alimentaire ; en clair, qu’elle puisse se nourrir elle même sans que personne n’ai son mot à dire (autant que faire se peut). Il faut pour cela protéger les agriculteurs européens contre l’afflux des produits alimentaires à bas prix du Sud (et pourquoi si ceux ci sont pauvres et ont parfois faim, ont-ils tant de nourriture et de produits manufacturés à nous procurer à si bas prix ?). Très bien, je suis pour que, dans une certaine mesure, ce secteur si essentiel ne soit pas soumis aux impératifs du marché. Malgré cela, ce vœux ne correspond ni aux institutions et aux règles internationales que les pays européens ont participés à mettre en place (comme l’OMC), ni à l’attitude de ces même pays européens (la France en

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premier lieu) sur le marché mondial : On protège chez nous, pour mieux vendre chez vous. Cette attitude qui a si bien servie les grandes puissances (nous) jusqu’à maintenant ne marche tout simplement plus. Un autre objectif de la PAC est l’entretien des paysages, des terroirs. Malheureusement, le bilan écologique de la PAC n’est guère plus brillant. Certes, notre agriculture est productive (si productive en fait, que depuis la fin des années 80, on essaye de découpler les subventions de la production, au moyen de systèmes de quotas, de valorisation de la jachère…), mais à quel prix ? Je ne peut pas me permettre de rentrer ici en détail sur la pollution du sol et des eaux, ainsi que sur l’émission des gaz à effets de serre (méthane et protoxyde d’azote), et l’appauvrissement de la biodiversité inhérents à la culture intensive et à l’usage d’une multitude d’intrants ; mais il semblerait que ce mode de production soit pour le moins sujet à débat (malheureusement fort peu probable dans une économie intégrée). A l’évidence, la politique agricole de l’Europe est à refondre, mais que veut on mettre à sa place ? Veut-on privatiser même ce secteur, au risque de dépendre de l’étranger sur le plan alimentaire ? Ou veut-on soutenir une population agricole au sein de l’Europe ? En ce cas, qui produirait quoi ? Pour qui ? Bien des questions restent en suspend dans ce dossier, qui est l’un des plus chaud sur lesquels l’Europe devra ce prononcer dans les mois et les années à venir (on peut bien sûr y ajouter, entre autre, les politiques de la Banque centrale, ou la question de l’Europe de la Défense). *La victoire du ouin Entre l’échec du référendum concernant le projet de constitution et le blocage du budget 2007-2012, on a eu le droit à bien des larmes et des lamentations. ‘L’Europe au point mort’, ‘l’Europe bloquée’ ; « vraiment je ne comprend pas, et ça me fait de la peine », on a même put entendre que c’était l’échec de l’Europe. Deux petites crises pourraient mettre en l’air 50 ans de travail me suis-je dit ? C’est qu’ils ont dû bâtir un ouvrage bien branlant. Puis j’ai regardé autour de moi. Il est possible de voyager, de travailler (dans la mesure des stocks disponibles), on a pas eu de guerre interne depuis plus de 50 ans et on partage (presque) tous la même monnaie (pour autant qu’il y ait des coups de pieds qui se perdent du côté de la Banque centrale, j’aime le fait de la monnaie unique) ; l’Irlande et l’Espagne ne s’en sont pas si mal sortis… Et aussi, l’idée européenne avance, puisqu’elle est portée par toujours plus d’européens. Car il ne faut pas s’y tromper, en ce qui me concerne, l’Europe, c’est avant tout les européens. Et l’Europe, c’est d’autant moins les institutions que les européens ne se sentent pas représentés par celles-ci. A travers toutes les débâcles de l’Union européenne, celle-ci n’a jamais su se mettre en question. Elle pourrait se mettre en question, par exemple, sur le fait qu’elle a toujours donnée la priorité à l’économie, en considérant que ce domaine est trop sérieux pour être soumis à l’avis des européens. INTERNATIONAL : *Lamy Ricorée et les maîtres de l’univers Un Français à la tête de l’OMC. Pascal Lamy, coloration politique rose-bleu (socialiste-libéral). Cette nomination arrive très peu de temps après la nomination à la Banque mondiale d’un américain, mr Paul Wolfowitz (ex-secrétaire à la Défense pour mr G.W. Bush junior), ce qui n’a absolument aucun rapport (loin de nous l’idée d’un accord Franco-Américain). On ne peut que se réjouir de l’évolution de ces institutions, que l’on a trop longtemps considérées opaques et pilotées par les intérêt économiques de leurs pays fondateurs. D’autant plus que mr Lamy est socialiste, libéral, bien rasé et ardent défenseur du développement durable, qu’il commente aisément (et il aime les enfants). On voit mal à qui il pourrait déplaire. Peut être arrivera-t-il a trouver le chemin du ‘commerce durable’ ? Une autre bonne nouvelle aussi chez les maîtres de l’univers, pour ceux qui s’inquiétaient de la dégradation des rapports Franco-Etasuniens. Ces deux pays ont réussis à s’accorder sur un point, il soutiennent tout deux la candidature de Alain Madelin pour prendre la direction de l’OCDE. Le Brésil, la Chine, l’Inde ou l’Afrique du Sud, qui après tout ne participent que très peu à l’économie mondiale, apprécieront. *Eglise 1 _ démocratie 0 En juillet, il y a eu un vote en Italie concernant la réforme d’une loi qui empêche de créer in vitro des embryons humains (je doit avouer que je n’ai pas tout compris). Elle interdit de facto l’insémination d’embryons fécondés dans la matrice des femmes stériles, ainsi que la recherche scientifique sur les cellules souches. Un référendum nécessitant en Italie un minimum de 50% de participation pour être validé, l’église (soutenue par le Vatican) a largement prêchée l’abstention. Victoire ! Environ 25% des électeurs se sont rendus aux urnes, et la loi est maintenue en l’état. Affirmer que c’est l’église qui en est la cause serait toutefois un raccourci, les référendums en Italie ayant régulièrement des taux d’abstention autour des 70%. La nouvelle église anarchiste italienne ne peut être considérée responsable, c’est plutôt la désaffection politique italienne, tout va bien donc.

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*Bolivie, où es tu ? Silence à peu près total des médias sur la situation en Bolivie. Et pourtant, la situation est (encore) critique. Petit rappel des faits. Ces dernières années, la privatisation de l’eau dans ce pays (le plus pauvre d’Amérique du sud) avait rapidement multipliée le prix de l’eau potable par 4, provoquant des émeutes dans lesquelles périrent plusieurs dizaines de personnes, et forçant le gouvernement à reculer. Cette année, c’est à propos du gaz, privatisé en 1997, qu’il y a eu des émeutes. Affrontements avec la police, blocage de la capitale administrative (La Paz) et finalement, démission du président Carlos Mesa en juin. C’est le chaos et pourtant quasiment rien ne filtre dans les journaux. Pourquoi ce silence ? J’ai trop confiance dans la presse de mon pays pour croire que c’est parce que Total, qui dépense des millions dans la pub, possède 23% du gaz bolivien. Comme le fait remarquer Jean-Luc Porquet dans le canard enchaîné du 22 juin, « la Bolivie a toujours été pillée : avant le gaz, c’était l’or, l’argent, l’étain », et après tout, c’est un pays à très forte « instabilité politique (189 coups d’Etat en 2 siècles) ». On peut dès lors comprendre que la raison pour laquelle les journaux ne s’intéressent pas à la Bolivie, c’est qu’il ne s’y passe rien de nouveau. Pas de News en somme… * CubAmerica Le Time en date du 20 juin publie des rapports de Guantanamo Bay, affectueusement surnommé « Gitmo » On peut par exemple y lire une note, datée du 21 décembre 2002 et rédigée par un fonctionnaire du Pentagone chargé des interrogatoires : « Avons dit au détenu qu’il était moins respectable qu’un chien, parce qu’un chien fait la différence entre le bien et le mal et qu’un chien sait protéger les gens sans défense contre les méchants. Avons commencer à enseigner au détenu quelques leçons telles que : aboyer et se déplacer comme un chien pour qu’il puisse élever son statut social jusqu’au statut social d’un chien » . Une prison avec ascenseur social ? Rien n’est trop bon pour numéro 063. *Terror.uk Petit rappel des faits qui ont causés la mort de 54 personnes, et fait plus de 200 blessés à Londres ce jeudi 7 juillet. 8h47 : 3 bombes explosent dans le métro de Londres : 2 sur la circle line (entre Aldgate et Liverpool street et à Edgware) et 1 sur la Piccadilly line (entre King’s cross et Russell square). 9h47 : une bombe explose dans un ‘bus rouge’ à Tavistock square. Cet attentat a été revendiqué le jour même par ‘l’organisation Al-Qaeda pour le Jihad en Europe’ Suite à cet attentat, sur les 2060 ‘policemen’ qui portent une arme dans la ville de Londres, 350 (les membres du S019) se sont vus attribués la fameuse ‘licence to kill’, avec pour consigne de tirer dans la tête des gens qu’ils considèrent comme ‘dangereux’ et qui ne répondent pas à leurs sommations. Le résultat de cette politique ne s’est pas fait attendre ; puisqu’un brésilien de 27 ans, Jean Charles de Menezes, un électricien qui se rendait à son travail et qui n’a pas répondu aux sommations (ses amis ont affirmés qu’il s’était fait agresser la semaine précédente par des anglais), s’est fait descendre de sept balles dans la tête alors qu’il s’apprêtait à monter dans le métro. Tout va bien cependant, puisque les autorités ont fait savoir qu’elles s’excusaient… *Rebelote Autre triple attentat dans la nuit du 22 au 23 juillet, en Egypte cette fois, à Charm el-Cheikh. Le directeur de l’hôpital international sur place fait état de 88 morts. Une bombe a explosé dans le hall d’un hôtel, une autre à l’entrée d’un souk et une dernière enfin dans un parking à proximité de centres commerciaux. Le choix de Carm el-Cheik ne doit rien au hasard. C’est une station balnéaire extrêmement protégée, « symbole du pouvoir du président Hosni Moubarak » (Le Monde du 26/7). Une ville bâtie en vingt ans à un endroit auparavant désert. Un symbole donc. Malheureusement les victimes de ces attentats ne sont pas des symboles, mais des travailleurs égyptiens pour la plupart. *Pendant ce temps Un rapport du pentagone, révélé par le canard enchaîné du 29/6 fait état de 470 attentats par mois en Irak sur l’année écoulée. Mais ces attentats intéressent peu (très certainement, notre pouvoir d’indignation s’émousse avec le temps). Si on dénombre plus d’une vingtaine de morts, ils ont tout juste droit à 2mn dans un ‘flash’ info. A croire que la vie n’a pas la même valeur partout… Pour information, on estime qu’il y a eu entre 20000 et 40000 civils irakiens tués depuis le début de la guerre. Commentaire éclairé de Donald Rumsfeld : « La révolte pourrait encore durer un certain temps ». Un bel exemple de transparence.

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*Ya toujours des amateurs pour ces délicats instruments, je suis marchand de canons, venez me voir pour vos enfants… Tout les ans, l’Institut international de recherche pour la paix de Stockholm (SIPRI) publie un rapport sur la situation mondiale. Cette année, dans le rapport paru le 7/6, on peut lire que les dépenses d’armements dans le monde sur l’année écoulée se montent à environ mille treize milliards (1.013.000.000.000) de dollars. Les armes dites ‘de destruction massives’ reculent, mais les armes ‘conventionnelles’, surtout légères, se sont vendues comme des petits pains (de C4). Les 100 plus grandes entreprises d’armements ont ainsi réalisés un chiffre d’affaire égal au P.I.B. des 61 pays les plus pauvres. A quelque jours du salon du Bourget, ce rapport était du plus mauvais goût, il aurait peut être put empêcher certains invités de finir leur troisième toast au caviar. Heureusement, 2 jours après le rapport du SIPRI, et quelques jours avant le Bourget, l’OTAN déplorait publiquement que seuls 7 des 26 pays membres consacrent plus de 2% de leur PIB aux dépenses militaires : « … les budgets de défense sont dans de trop nombreux cas toujours insuffisants pour répondre aux besoins… » (cité par CQFD du 15/6). Allons, messieurs, vous reprendrez bien quelques bombes ? *Engagez vous, rengagez vous qu’ils disaient Le très sérieux New-York Times a présenté en début d’année à l’Amérique le « manuel de recrutement dans les lycées » de l’armée U.S.. En effet devant l’embourbement en Irak et le départ de la plupart des forces alliées, le gouvernement à plus que jamais besoin de chair à canon… euh… de vaillants soldats de la liberté. Et n’hésite pas à aller les chercher au sein même des lycées (défavorisés bien sûr, que peut-il offrir à des jeunes qui ont un avenir ?). On peut ainsi lire dans ce manuel : « Notre objectif : prendre possession des lieux afin d’augmenter le nombre de jeunes qui s’engagent » ou encore : « Certains élèves –comme le délégué des élèves ou le capitaine de l’équipe de football- ne vont peut être pas s’engager, mais ils pourront vous orienter vers des recrues potentielles », ou bien même : « …mettez vous en contact avec les scouts. Les chefs scouts sont généralement ravis de se voir offrir un coup de main. La plupart d’entre eux sont des lycéens et donc des recrues potentielles, et ils peuvent convaincre les autres. » Cette démarche, que l’auteur de l’article, Mr Bob Herbert, qualifie de « racolage intempestif », n’est qu’un début. En effet, on apprend dans le non moins sérieux Washington Post (ces articles de presse sont cités dans le Courrier International du 7/7) que pour améliorer le recrutement, « le Pentagone vient de commencer à travailler avec une société de marketing privée pour créer une base de données des lycéens âgés de 16 à 18 ans ». Qui a dit que le gouvernement américain se désintéressait des jeunes défavorisés ? *Merci qui ? C’est l’histoire d’une élection présidentielle qui surprend. Contre toute attente, les deux candidats en tête après le premier tour sont : « l’homme politique le plus crapuleux des 27 dernières années » (avec 21% des suffrages exprimés), et le « candidat populiste ultraconservateur » (avec 19,47% des suffrages) (les citations sont tirés du journal ‘Gooya News’, qui édite depuis Bruxelles, et sont citées dans le Courrier International du 23/6). Cela vous dit quelque chose ? Perdu ! Cette fois ci, c’est en Iran que ça se passe. Le premier s’appelle Hachemi Rafsandjani, il a déjà été président de l’Iran de 1988 à 1997, période qu’il a mis à profit pour piller le pays, « du pétrole au métro de Téhéran » (le canard enchaîné du 6/7). Affectueusement surnommé « le Requin », il proposait cette fois de libéraliser quelque peu le pays et de tenter l’apaisement des relations avec les Etats-Unis (sous réserves). Le deuxième, qui s’appelle Mahmoud Ahmadinejad, était maire de Téhéran. Aussi intègre qu’intégriste, il met un point d’honneur à montrer à qui veut sont humble demeure et sa modeste voiture (il a renoncé à ses indemnités de fonction de conseiller municipal, puis de maire, pour se contenter de son salaire d’ingénieur). Exemplaire. Intègre, d’accord, mais pourquoi intégriste ? Outre le fait qu’il a dit pendant la campagne qu’il allait « balayer les rues de la nation » (lce 6/7), assurément les propos d’un homme dangereux, Mahmoud est considéré comme « une sorte d’enfant modèle de la révolution islamique. Si rien ne prouve qu’il ait lui-même mis la main à des opérations sanglantes, bien des détails amènent ses opposants à penser qu’il n’a jamais été très loin des grands exploits du régime. » (lce 6/7) Et contre toute attente (« l’élection de Rafsandjani au second tour ne fait pas de doute » peut-on lire dans un commentaire du Courrier International du 23/6), c’est bel et bien Mahmoud Ahmadinejad, soutenu par le ‘guide suprême’ de la révolution islamique, l’Ayatollah Khamenei, et par le sentiment anti-américain soulevé par l’attitude des Etats-Unis (cela vous plairait-il d’être sur la liste noire du plus gros budget militaire du monde ?), qui a été élu au second tour.

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*Them bellyfull but we’re hungry Cet été on a parlé (finalement assez peu) de la famine qui sévit au Niger et, dans une moindre mesure, au Mali. Les opinions publiques se sont émues et les chefs de gouvernements, la larme à l’œil, se sont indignés et ont fait parvenir de l’aide. Un grand geste ? En fait, peut être pas. Alors que durant l’année qui vient de s’écouler, les chefs d’Etats des pays ‘riches’ n’ont cessé de se féliciter du traitement qu’ils réservent aux pays pauvres (notamment à travers les aides versées aux victimes du tsunami, les Objectifs du millénaires et les annulations de dettes d’un certain nombre de pays pauvres très endettés –PPTE-), la situation au Niger était prévisible (elle a d’ailleurs été prévue, au moins deux ONGs on tirées la sonnette d’alarme, Helen Keller Int. en janvier et MSF en juin) et rien n’a été fait, du moins avant que la crise arrive. Et d’ailleurs, cette crise, à quoi est-elle due ? On a beaucoup parlé des invasions de crickets et de la sécheresse, ce qui est bien pratique, les catastrophes naturelles n’étant imputables à personne (encore que). Ce dont on a beaucoup moins parlé néanmoins, c’est de la situation structurelle du pays. En effet, outre le fait que « la croissance de la production vivrière n’a pas été suffisante par rapport à celle de la population », on apprend dans la chronique de Rony Brauman, dans le numéro de septembre d’Alternatives Internationales, que « le marché des céréales est contrôlé par un petit nombre de grands commerçants ayant partie liée avec l’administration et le pouvoir nigériens » et que « la spéculation y est la règle ». Tout ceci, plus le dispositif de ‘sécurité alimentaire’, qui interdit les distributions gratuites de nourriture pour ne pas ‘déstabiliser les marchés locaux’, ainsi que la rareté des soins médicaux, explique la fragilité structurelle du pays. La sécheresse n’est que la ‘goutte d’eau’… Une bonne nouvelle néanmoins, pour la population du Niger : en tant que bon élève des institutions financières internationnales (et on a vu avec quels résultats), leur pays fait partie du programme d’effacement de la dette décidé au sommet du G8 de Gleneagles. Une excellente nouvelle en vérité. En effet, ils auront bien besoin du cash, puisqu’au 10 août, il n’était toujours pas question d’annuler les Ve jeux de la francophonie, qui doivent se dérouler à Niamey du 7 au 17 décembre, et que pour l’organisation des jeux, la ville hôte (la capitale du Niger, donc), doit débourser la moitié des frais globaux, qui s’élèvent en tout à 10 millions d’euros. *Le saviez-vous ? On en apprend de belles dans Alternatives Economiques. Dans son numéro de juillet-août, on apprend que le prix Nobel d’économie n’existe pas. Il y a bien un prix d’économie, remis chaque année par l’Académie royale des sciences de Suède (celle là même qui attribue les prix Nobel de physique et de chimie), et géré comme les prix Nobel de science, mais celui-ci s’appelle en fait le « prix de la Banque centrale de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel », et l’argent versé ne provient pas de la fondation Nobel, mais de la Banque centrale de Suède. De plus, ce prix n’a pas été instauré en 1901, comme les autres, mais a été introduit en 1969. Mais alors, l’économie ne serait-elle pas une science exacte ? Chronique de ces voyous qui nous gouvernent, on passe à l’actualité de la FRANCE : * Raffarin menteur ! On nous avait promis le chaos au lendemain de la victoire du non, et la France s’est massivement rendue aux urnes « pour un non punk avec Raffarin », et tout ce qu’on a eu depuis, c’est le bordel. ‘wins, the yes needs the no future to Raff’… *« Français, françaises, je vous ai compris …» A la suite du désaveu massif de l’électorat français lors du référendum sur le ‘traité établissant une constitution pour l’Europe’, en particulier des couches pôpulaires (employés et ouvriers en tête du non), le grand Jacques a lancé une nouvelle impulsion sociale et proche des gens en nommant Dominique Galouzeau de Villepin premier ministre. Celui-ci a fait savoir qu’il se donnait cent jours pour mettre en place un plan de lutte contre le chômage (on se demande alors ce que ses prédécesseurs ont bien put faire à Matignon, jouer au Bridge ?). Et comme on sait bien que mr de Villepin n’est pas un grand fanatique des consultations, il a décidé de faire passer les éléments de son plan par ordonnances, c’est à dire que ceux-ci n’ont pas a être votés par le Parlement Et pour ceux qui sont pas contents : extraball ! Un deuxième ministre premier (d’Etat et de l’Intérieur), mr Nicolas Sarkozy (accessoirement toujours à la tête de l’ump). A part cela, rien de bien nouveau, un gouvernement resserré à 31 ministres (dont, fait nouveau, une demidouzaine de proches de Sarkozy), et on a finit par donner 3 cacahuètes et deux pistaches à Borloo pour ses plans de cohésion sociale.

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*« Saint Borloo » invente la misère à deux vitesses En France, on a pas le droit de loger un pauvre dans moins de 9m². Qu’a cela ne tienne, Jean Louis a proposé cet été que les super-pauvres, eux, tiennent dans 7m². Après tout, c’est mieux que rien… *Raffarin reviens parmi les siens Après son licenciement, Mr Raffarin a prit des vacances (bien méritées). Il nous a manqué quand même, celui-là. Et puis c’est tellement plus facile de rire à ses vannes maintenant qu’il n’est plus chef du gouvernement. A son retour, interrogé sur ce qu’il comptait faire désormais, il a répondu qu’il allait tout d’abord soutenir son successeur, « parce que dans successeur, il y a succès » (et ta sœur) et qu’il allait s’occuper de son fief de Poitou. *Mange ta soupe L’INSEE prévoyait en début d’année une croissance de 2 à 2.1% pour l’année 2005. J.P. Raffarin, dans un élan mystique, nous promettait du 2.5%. Les nouvelles prévisions du début de l’été, qui prenaient en compte l’activité économique du début de l’année, posaient alors le plafond à 2%. Mais les nouvelles nouvelles prévisions de la fin de l’été, qui elles prenaient en compte la hausse du prix du pétrole, annonçaient un plafond plus près de 1.5%. Et le sol se dérobe… *Plan pour l’emploi (ministériel), premiers résultats Et tout d’abord un grand merci pour Philippe Douste-Blazy, qui n’avait, le pôvre, que Toulouse pour se recaser. On lui a trouvé un CES (contrat emploi-solidarité) : ministre des affaires étrangères. Comment ça il n’y connaît rien ? Oui, bon, c’est vrai, il n’y connaît rien, mais il est bien entouré. Et puis c’est pas forcément handicapant de ne rien connaître au sujet d’un ministère pour s’y faire parachuter. Un regard neuf sûrement. Cela tombe plutôt bien, parce que suite au remaniement ministériel de début juin, Gilles de Robien (assureur de profession), passe des Transports à l’Education, Christian Jacob (exploitant agricole) passe de l’Artisanat et le Commerce à la Fonction Publique, et Nelly Olin de Feu la Lutte contre la précarité… à l’Ecologie (on veut Nicolas Hulot !). Truffle shuffle *Valse à 3 temps, deux pas en avant, un pas en arrière Durant l’été, le gouvernement a lâché la pression. Les réformes Fillon ont été gelées, on a arrêté d’installer des radars, puis abandonné l’Idée des 7 m²… Vu qu’il dispose de très peu de marge de manœuvre, le gouvernement est revenu sur quelques unes de ses mesures les plus impopulaires. Et la hausse de 70% des salaires des ministres ? La baisse de l’impôt sur la fortune (ISF) ? La vente à la découpe du patrimoine français ? Non. Ca, non. *La cité des 4000 Un enfant de 11 ans, Sidi Hamed Hammache, est mort. Victime d’une balle perdue dans un règlement de compte. Il nettoyait la voiture de son père en bas de son immeuble. Une belle occasion pour Mr Nicolas Sarkozy de venir faire le cow-boy à la télévision (lui qui est en pâmoison devant le modèle anglo-saxon, comprend fort bien les vues de Condoleeza Rice, qui expliquait que le tsunami de 2004 avait été une ‘occasion formidable’, en cela qu’il avait permit aux Etats-Unis d’étaler leur miséricorde et leur pouvoir d’intervention). Le premier flic de France s’est rendu sur le lieu du drame, accompagné d’une cohorte de journalistes. Et il y a fait des déclarations, déclarations reprises depuis, au Sénat ou dans Le Monde. « On va nettoyer la cité des 4000 au kärcher » (Le Monde du 22/6). Réponse des intéressés : « Maintenant ils veulent nous nettoyer, ça dit bien pour quoi on nous prend » (Le canard enchaîné du 22/6). En fait, lors de son premier passage, il a prévenu qu’il reviendrait le lendemain avec des groupes d’intervention armés. Le lendemain, les dit groupes rappliquent, et passent la cité au peigne fin (Fouille des caves, de certains appartements, des halls…). Rien ! Un échec ? Absolument pas, puisque tous les médias (y compris votre serviteur) n’ont parlé que de lui, alors que les chiracquiens et les socialistes, après la débâcle référendaire, essayaient de se faire le plus discret possibles. Quel bête de scène ce petit Nicolas, on attend le DVD du discours unplugged à l’Olympia avec impatience. *Police et Justice sont dans un bateau… A Coquelles, dans le Pas-de-Calais, on innove. Une salle de tribunal qui doit statuer sur le sort des étrangers en situation irrégulière a été installée en plein milieu des locaux de la police des frontières, un lieu pas

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particulièrement accessible. Ce choix fait grincer quelques dents, de gens qui remettent en cause la transparence et l’indépendance d’un tel tribunal. Mais le raisonnement est sans faille. L’ancien tribunal se trouvait à pas moins de 20mn des locaux de la police des frontières, et tout ces allers et retours coûtent du temps à la police, ainsi que de l’argent au contribuable. De reste, on a cruellement besoin de tous les effectifs disponibles pour « nettoyer la France ». *Nicolas Sarko dit « Ils croient tous que je suis très nerveux. C’est le contraire : je n’ai jamais été aussi zen. Mais j’ai gardé ma capacité d’indignation. Je suis le seul a avoir le courage de le faire publiquement. » (le canard enchaîné du 29/06) « Mon travail, c’est de débarrasser la France des voyous » (un peu partout) « On va nettoyer la cité des 4000 au kärcher » (Le Monde du 22/06) « Sur les trois criminels présumés de La Courneuve, les deux frères âgés d’une vingtaine d’années étaient déjà connus pour viol sur mineur et trafic d’armes et de drogues » (Le Figaro du 30/06). Faux. Si les 4 présumés coupables étaient déjà connus des services de police, c’est pour : vol aggravé, conduite sans permis, excès de vitesse, recel, rébellion avec arme et trafic de stupéfiant. Pas des anges donc, mais aucune trace d’un viol sur mineur ou d’un trafic d’armes. « Aujourd’hui, un étranger en situation irrégulière a plus de droit aux soins qu’un smicard qui paye ses cotisations, ce n’est pas acceptable ! Nous allons revoir tout cela par des décrets et s’il le faut, par la loi » (Le Figaro du 30/6). Faux. L’aide médicale d’Etat, instaurée en 1999 et qui permet aux hôpitaux de se faire rembourser les soins donnés aux étrangers en situation irrégulière, reste un dispositif d’urgence, et ne couvre ni les prothèses, ni les équipements. Les smicards ont bel et bien accès à plus de soins. Tous sont pris en charge par la sécurité sociale et, selon une statistique du Ministère de la santé, près de 90% d’entre eux disposent d’une mutuelle. (le canard enchaîné du 6/7) « Je ne vise pas l’électorat du FN, je l’ai déjà. De toute façon les journalistes se sont toujours trompés dans leur analyse politique. » (Libération du 1/7). No comment. « Il n’y a pas deux vies. Comme si la part de soi la plus intime et la plus intéressante il fallait l’abandonner jusqu’au samedi matin et au dimanche soir inclus [?]. Le domaine de la vie privée n’a pas de sens. C’est le domaine de la vie tout court. » (allocution du 20/06, devant des religieux de diverses confessions réunis à Neuilly par l’association Bible, cité par Charlie Hebdo du 6/7). Brazil, papapapapapapapaaammmmmm… « Mes idées avancent » (Le Figaro du 30/6). Malheureusement, il dit la vérité (pour une fois). Avec le soutien d’une partie de la population, d’une bonne partie : de la police, des différentes confessions religieuses, des médias (même le Figaro a lâché Chirac) et des chefs d’entreprises, le petit Nicolas est une valeur qui monte (sur un tabouret pour faire son discours peut être). Comme toute les bulles spéculatives, celle ci est vouée a se craquer ; la seule chose qui nous reste a espérer est que ceci arrive avant mai 2007. *Ils ont des chapeaux ronds… Le 27 juin 2005 restera dans les annales de la Vè république. En effet, pour la première fois, le bureau d’un ministre de l’économie et des finances à Bercy (Mr Thierry Breton) a fait l’objet d’une perquisition. Le même jour, les bureaux de Rhodia et de quelques uns de ses dirigeants sont également perquisitionnés, le lendemain, ce sera le tour du siège de Canal+ ; en tout, c’est une grosse douzaine de perquisitions qui auront lieu dans la semaine. Petit rappel des faits : Entre 1998 et 2002, Mr Thierry Breton était à la fois administrateur de Rhodia (en 1998, Rhône-Poulenc se scinde en deux groupes : Sanofi-Aventis, qui garde les activités pharmaceutiques, et Rhodia, qui s’occupera désormais de la chimie) et président du comité d’audit de l’entreprise (avec comme mission d’ «accroître la transparence des informations émanant du groupe » et de « vérifier ses rapports financiers périodiques »). Or, pendant cette période, l’entreprise perd une grande partie de sa valeur (elle vaut aujourd’hui 5% de sa valeur de 1998), suite non pas à des difficultés conjoncturelles, mais à des ‘maladresses’ répétées qui frisent la malversation. Deux actionnaires et spéculateurs, MM Edouard Stern et Hugues de Lasteyrie portent plainte, en 2003 et en 2004, pour : « présentation de comptes inexacts, diffusion d’informations boursières fausses et mensongères, délit d’initié et recel de délit d’initié ». L’autorité des marchés financiers (AMF) s’empare alors de l’affaire et publie en mars dernier un rapport édifiant, on y parle, entre autre, de « comptes insincères », de « communication inexacte et trompeuse », en bref, il n’y a « pas d’image fidèle de la situation financière de la société ». Et, détail amusant, alors que son travail était justement de s’assurer de la « transparence des informations émanant du groupe », Mr Breton est mis hors de cause par l’AMF (autre détail amusant, l’AMF dépend de Bercy !). Les juges en charge de l’affaire, MM Jean-Marie d’Huy et Henri Pons ont malgré tout décider d’aller faire un tour dans les ordinateurs de Mr Breton. Assurément, il s’est montré très distrait en tant que président du comité d’audit de Rhodia, peut être qu’une autre distraction lui fait oublier des pièces à ajouter au dossier.

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Car s’est bien de cela dont il s’agit. Mr Breton a été formellement dégagé de tout soupçon concernant le délit d’initié, il n’a pas touché un seul cent occulte dans l’affaire Rhodia. On lui reproche uniquement sa distraction en tant qu’administrateur et président du comité d’audit. On se demande néanmoins comment des gens aussi ‘distraits’ peuvent survivre dans la jungle des affaires ; en effet, Mr René Fourtou, qui était à la tête de Rhône-Poulenc, puis de Sanofi Aventis, revendra plus tard à Mr Breton une filiale de Vivendi, Canal+ Technologies, pour 190 millions d’€ ; filiale que Mr Breton revendra aussitôt 300 millions. Certainement une ‘distraction’ ; assurément sans rapport avec l’affaire Rhodia. *MEDEF(once moi ce code du travail !) Laurence Parisot, qui dirige depuis 1990 l’IFOP, le doyen des instituts de sondage français (où elle a fait preuve de trésors d’ingéniosité dans la chasse aux syndicalistes), a été intronisée le 5 juillet ‘patronne des patrons’ de France. C’est en effet elle qui succède à Ernest-Antoine Seillière à la tête du MEDEF. Facétie du calendrier, c’est en ce même jour du 5 juillet, que devait se tenir un procès aux Prud’hommes, où une de ses ex-employée de maison, mme Corinne L., poursuivait Laurence Parisot pour « rupture abusive de contrat ». Au début de l’audience et à la grande surprise de ses défenseurs (dont la CGT), mme Corinne L. retirait sa plainte, « et ces persifleurs d’interpréter son revirement de dernière minute comme la conséquence d’un chèque reçu en dédommagement » (le canard enchaîné du 6/7). La plainte est donc annulée, mais les pièces du dossier subsistent et sont accablantes. Mme Corinne L., qui travaillait au domicile de mme Parisot comme « gouvernante, maître d’hôtel et cuisinière » était en fait payée par une filiale de l’IFOP, Phone City, officiellement comme assistante dans cette société de sondages par téléphone. Faux contrat de travail, fausses fiches de paie et fausse lettre de licenciement ; on a ici a faire à un cas d’école : c’est ce qu’on appelle un ‘abus de bien social’. Le Baron est mort (de rire), vive la Baronne ! *Rapport 2004 sur la concurrence Un rapport rempli de gros mots : « ententes sur les appels d’offres, abus de position dominante, abus de dépendance économique, entraves à l’entrée d’un concurrent sur le marché, discrimination, dénigrement, menaces d’exclusion, boycott ». En 2004, c’est 91 entreprises qui se sont vues infligées des amendes par le Conseil de la concurrence. On retrouve bien évidemment les usuals suspects : des filiales de Vivendi, Bouygues Eiffage, JC Decaux, Décathlon, SFR ou France Telecom (groupe contrôlé par l’Etat !) ; mais aussi des PME et des artisans, il y en a pour tout les goûts. Concurrence libre et non faussée, hein ? Et mon cul, il est faussé mon cul, peut être ? La plupart des fraudeurs sont récidivistes, voir multi-récidivistes pour les plus gros. A l’évidence, les amendes du Conseil de la concurrence leur coûtent beaucoup moins cher que ne leur rapportent leurs pratiques mafieuses. La tolérance zéro, c’est tout juste bon pour les ‘personnes’ qui ne sont pas considérées comme ‘morales’ *Les entreprises ont une âme ! Et pour mieux coller à la sienne, EDF a changé son logo, son « identité visuelle ». Pour la bagatelle de 10 millions d’euros. C’est le prix. Parfaitement normal comparé aux 2.4 millions d’euros déboursés par l’ANPE (mais c’était il y a longtemps, 2003, vous pensez… l’inflation, vous savez…) ou au 10 millions de la SNCF. A quoi ressemble-t-il ? Cinq tâches qui s’éloignent les unes des autres. C’est volontairement flou, pour que chacun puisse y voir ce qu’il veut. Pour certains, c’est une éolienne (à 5 pales ! ?), pour d’autres, une fleur, pour Charb, sa mère à poil dans la salle de bain. J’y vois plutôt le cul en chou-fleur du contribuable, lorsque l’on dépense 10 millions d’euros de cosmétiques dans une entreprise publique juste avant d’ouvrir son capital.

*Vente à la découpe du patrimoine français Quand un secteur publique rapporte, c’est bien connu, il faut le vendre. Les autoroutes rapportent. Et beaucoup même, puisque c’est une manne annuelle de 650 millions d’euros de profits, répartie comme suit : 402 millions pour les autoroutes du sud (ASF), 148 millions pour le Rhône et l’est (APRR) et 100 millions pour le nord (Sanef) ; et que Mr Villepin a décidé de vendre. En effet, celui-ci veut céder les concessions, qui courent jusqu’ en 2030, pour un total de 12 à 13 milliards d’euros. Les grandes entreprises du bâtiment et de la logistique sont dans les starting-blocks, 18 entreprises en tout se sont proposées. En considérant même que de nouveau péages n’apparaissent pas et que les prix restent stable (ce qui est douteux), je suis bien incapable d’actualiser les rentes que ces géants vont toucher, d’autant moins que je ne

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connais pas vraiment les mécanismes économiques en jeu. Des chiffres ont été avancés par les détracteurs de cette mesure (François Bayrou à leur tête, puisque c’est un centriste qui a mené l’opposition cet été[ ! ?]), tous autour de 40 milliards d’euros. Le commissariat au plan, peu accusé de marxisme, a estimé ces concessions à 26 milliards d’euros (avant d’être dissous !). Sans vouloir ramener une science que je ne possède pas, il me semble que l’on brade une entreprise particulièrement lucrative, et ce, uniquement pour pouvoir boucler le budget 2005. C’est une opinion d’ailleurs assez partagée, le fait que l’on soit en train de se faire mettre. Un dernier point, d’importance toutefois : à travers un organisme, l’agence de financement des infrastructures, mis en place au 1 janvier 2004 par mr Gilles de Robien, la manne financière dégagée par les autoroutes devait servir à moderniser et étendre les infrastructures ferroviaires, en vue d’un ré-équilibrage entre le rail et la route pour le transport de personnes et de marchandises. Cette organisme ne touchera qu’une maigre part sur la vente des concessions (au début de ‘l’affaire’, cet organisme ne devait toucher qu’un seul milliard, mais face au tollé déclenché par celle-ci, sa part a progressivement augmentée pour atteindre 3 milliards). Bien profond. Durablement profond. Tout a l’air d’aller mal, mais c’est parce qu’on a fait que les sujets qui fâchent, il est plus que temps d’aller sauver le monde, avec le DEVELOPPEMENT DURABLE : *Bouygues nous montre la voie Nicolas Hulot a lancé juste avant l’été ‘le livre vert pour la Terre’ un manuel pour sauver le monde en trois E-Z leçons. Pas laisser couler l’eau quand on se lave les dents, trier nos déchets, baisser quelque peu la température ou la vitesse, tout un tas de conseils pratiques pour l’écologie au quotidien. Le livret est donné gratuitement, dans les supermarchés et hypermarchés, ainsi que certains points de vente de téléphonie mobile. On est rassurés. * « 2025, le futur en face » C’est le nom d’une émission ‘choc’ de Jean Luc Delarue, diffusée le mardi 7 juin sur France 2. Une docudrama-fiction sur les perturbations climatologiques en 2025, suivie d’un débat sur l’environnement. On croyait Jean-Luc exhibitionniste et préoccupé par les déséquilibres mentaux. Il n’en est rien, l’homme étend son œuvre à toutes les pathologies de notre société moderne. Un nouveau Freud en somme. Avec une équipe comme ces deux-là, on peut dormir tranquille, non ? *Tribulations de pleins de ‘Tinois en ‘Tine « Le miracle économique va bientôt prendre fin car l’environnement ne peut plus suivre. Un tiers de notre territoire reçoit des pluies acides, la moitié de l’eau de nos 7 grandes rivières est désormais inutilisable, alors qu’un quart de nos citoyens n’ont pas accès à l’eau potable. (…) Déjà maintenant, il y a une surcharge de pollution dans les régions où les écosystèmes sont les plus dégradés. Dans le futur, nous aurons à reloger 186 millions d’habitants issus des 22 provinces et des villes les plus polluées. Mais les autres régions ne peuvent absorber que 33 millions d’habitants. Cela signifie que la Chine va avoir dans les années à venir plus de 150 millions d’émigrés écologiques, ou si on veut, de réfugiés environnemental. (…) Nous avons fait l’erreur de croire que la croissance économique et les ressources financières qu’elle apporte allait nous permettre de répondre aux crises environnementales et à l’augmentation de la population. » Petite devinette : qui a dit ça ? Le Serge Latouche chinois, ou Greenpeace Chine ? Non, le ministre de l’environnement chinois, dans une interview à un journal allemand, le Spiegel du 007/04 (cité en partie par le journal la décroissance de juin-juillet, dans lequel votre serviteur l’a déniché). Sûr qu’il dispose d’un pouvoir énorme au sein de son gouvernement. Bon, ben, euh… excusez nous en fait, pas durable le développement. *Quand j’entend « développement durable », je sors mon flingue. J’ai laissé mon courrier s’entasser pendant une semaine, et en plus de mon courrier et des nombreuses publicités, dans ma boite à lettre j’avais du développement durable. Midi-Pyrénées - notre région titre, en gros titre : « Développement durable c’est maintenant » (pour deux pages à l’intérieur). Gros titre aussi, pour tisséo (Connex) info : « Le développement durable dans les transports » (à l’intérieur, un ‘dossier’ de 2 pages intitulé « le développement durable, tisséo – SMTC montre la voie »). Le mois dernier, c’était un ‘dossier’ eau dans la gazette de la MGEN, avant ça c’était Nicolas Hulot dans télé 2 semaines… Alors, le développement durable, c’est quoi ? Une orgie de papier, comme on a l’occasion de le constater tout les jours ? Des recherches sur le pétrole non-conventionnel, pour pouvoir en cramer toujours plus, comme l’affirme TOTAL ? Pour ceux que cela intéresse, il y a beaucoup mieux à faire que d’écouter les Rhône Poulencs à ce sujet. Voici donc une petite sélection de points de vue sur la question. ;

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Dominique Bourg, Quel avenir pour le développement durable ? ; collection ‘les petites pommes du savoir’, édition ‘Le Pommier’, 63 pages, 4,50 €. Un petit pamphlet plutôt acerbe mais qui fait un tour des principales problématiques en peu de pages. Très accessible, à mettre entre toute les mains (un peu cher pour sa taille). • Assen Slim, Le développement durable ; collection ‘idées reçues’, édition ‘Le Cavalier Bleu’, 125 pages, 9€. La démarche est très bonne, s’attaquer aux idées reçues du développement durables, qui sont légions. Elle permet de s’adresser à une grande variété d’issues. On peut regretter néanmoins que le livre soit parfois un peu approximatif (sur les dates notamment). Peut être lu pour éviter les impasses les plus fréquentes (encore un peu cher pour sa taille). • Karen Delchet, Qu’est ce que le développement durable ? ; collection ‘à savoir’, édition AFNOR, 59p, 9€. Ce livre aurait pût s’appeler : ‘le développement durable et les entreprises’, c’est le sujet qu’il traite. Un livre un peu spécialisé donc mais on y trouve des informations sur le cadre législatif en vigueur, et sur la place que pourrait tenir le développement durable au sein des entreprises. Un livre pas du tout indispensable mais qui pourrait intéresser certaines personnes (à 9€ pour 59 pages, c’est néanmoins de la tonte). • Sylvie Brunel, Le développement durable ; collection ‘Que sais-je ?’, édition ‘puf’, 127 pages, 8€. Un ouvrage qui revient en fait assez peu sur le concept de développement durable, ses applications et son histoire ; mais qui s’intéresse plus au développement en général, ce qu’il implique et son vécu… Le livre reviens aussi sur l’aide au développement et la collaboration internationale. Un livre plus spécialisé mais très intéressant, Qui conteste l’ordre établi sans se mettre dans une position de rupture ou de conflit. • Collectif, sous la direction de Marie-Claude Smouts, Le développement durable, les termes du débats, collection ‘compact civis’, édition ‘Armand Colin’, 289 pages, 15€. Animés par des collaborateurs de tous horizons (géographiques et disciplinaires), c’est un des ouvrages les plus complets sur la notion de développement durable, et dans quelle mesure et de quelle façon celle ci pénètre dans notre société. Pas toujours accessible, c’est néanmoins un ouvrage des plus intéressants. • Alternatives Economiques, hors-série n°63, Le développement durable, 66 pages, 5.30€. Il revient plus particulièrement sur les aspects politiques et économiques du développement durable, ainsi que sur l’histoire des sociétés et le rapport de l’homme à la nature. Dans ce hors série figure une petite historique de l’apparition du terme, un topo sur les enjeux, de nombreux conseils de lecture et des liens internet. Un bon outil de travail. • Manière de voir/Le monde diplomatique n°81, Ecologie, le grand défi, 100 pages, 7€. Tout en constat et en conflit, comme à son habitude. Pointu sur l’économie et la politique, et parfois difficilement accessible, comme à son habitude. Il est préférable de connaître quelque peu les problématiques du développement durable au préalable (et parfois même l’actualité internationale) pour mieux en profiter, mais le monde diplomatique reste une référence en matière de contre pouvoir/culture. La section ‘des sites et des livres’ est très bien fournie. • Sciences Humaines, hors série n°49, Sauver la planète, les enjeux sociaux de l’environnement, 100 pages,7.50€. Comme son nom l’indique, ce numéro s’occupe des enjeux sociaux de l’environnement, mais ne s’arrête pas là. Il revient en détail sur l’histoire, non du développement durable, mais de la prise de conscience autour de l’environnement au cours du 20ème siècle, sur les forces en présence et leurs relations. Pas trop de détails techniques donc, mais une mine d’informations, dont bon nombre ne sont pas trouvables ailleurs et plusieurs interventions des acteurs clefs du développement durable plutôt que des articles de journalistes. Si vous voulez l’avis des institutions internationales sur le sujet, essayez leurs sites, comme le site de l’ONU : ‘un.org’ qui doit contenir des liens vers le PNUD et le PNUE, ou encore le site de l’OCDE : ‘oecd.org’ En vitesse et en vrac, pour ceux qui veulent des critiques plus virulentes du développement, qui soit malgré tout sérieuses, on a : Ivan Illich, œuvre complète, Fayard ; François Partant, La fin du développement chez ‘Babel’ et Que la crise s’aggrave ! chez ‘Parangon’ ; ATTAC, Le développement a-t-il un avenir ? chez ‘mille et une nuits’ ; Survivre au développement de Serge Latouche et Une économie de rêve ! de René Passet, tout deux aux édition ‘mille et une nuits’ de poche (les bouquins à 10 balles à 20 balles). Et sur la question de l’énergie, on pourra lire avec profit : Paul Mathis, Les énergies renouvelables ont-elles un avenir ? et Bernard Laponche, Maîtriser la consommation d’énergie aux édition ‘Le pommier’, Jacques Vernier, les énergies renouvelables dans la collection ‘que sais-je ?’ ; et enfin l’excellent L’avenir climatique de Jean-Marc Jancovici aux édition ‘Points’ Bonne lecture !

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CULTURE : * Charb ? C’est qui lui ? Charb est partout (ahem. mouais. presque). Charlie hébdo, fluide glacial, la gazette de l’Utopia (! ?). Qui c’est ? Boah, un espèce de dessinateur de B.D. plutôt minimaliste, trash, et adhérent à la LCR. Il fait rire ou vomir, selon le lecteur et l’humeur. Et aussi, du journalisme, avec une chronique dans Charlie. C’est par exemple de ses articles que sont tirés les « pour un non punk avec Raffarin » et « saint Borloo » de l’actualité française. A suivre… En attendant, je ne peu pas m’empêcher de vous donner un avant goût, avec des morceaux choisis des dialogues d’une de ses BD, Maurice et Patapon (tome 3, hors-série de Charlie Hebdo) : M : vendre de la drogue aux enfants, c’est dégueulasse ! P : ouais mais… si on leur donne, après, ils croient que tout leur tombe tout cuit dans le bec… P : la sodomie, ça fait pleurer le petit jésus ! M : c’est de sa faute… il ne serrerait pas tant les fesses, ça lui ferait moins mal… P : les chinois exécutent les condamnés à mort d’une balle dans la tête et ils envoient la facture de la balle à la famille… M : ils ont moins de tact que n’en avaient les soldats français en Algérie… Quand ils torturaient à l’électricité, ils n’envoyaient pas la facture à la famille ! *Véridique Un américain a sauté la grande muraille de Chine en Skate-Board, à l’aide d’une rampe de 30 mètres… Non, rien… *« La cause du peuple » Je sais que c’est pas beau de copier ses petits camarades, mais j’ai tellement rit en lisant cette article du PLPL (le journal qui mord et qui fuit) de juin, que je vous le recopie mot pour mot : « Parmi les administrateurs du quotidien ex-maoïste Libération, on trouve Edouard de Rothschild (39% du capital), Guillaume Hannezo (ancien directeur financier de Vivendi), Agnès Touraine (ancienne dirigeante de Havas et Vivendi), Simone Harari (PDG de Télé-images), Eduardo Malone (Pathé), Valérie Bernis (Suez, exprésidente de Paris Première, ex-porte parole de Giscard) et Philippe Bourguignon (président de Carat et administrateur de 3i). Enfin un quotidien anticapitaliste ! » *Journées Mondiales du Joug L’événement le plus important de cet été c’était, bien sûr, les journées mondiales de la jeunesse. Cents jours après son intronisation, c’était la première grande sortie publique du nouveau pape, Benoît XVI. Lui qui n’apprécie pas trop les bains de foule s’en est plutôt bien sorti. Certains ont cependant pût déceler un petit couac, non lors de l’événement, mais au cours des préparatifs. En effet, comme argument promotionnel, le pape a promis aux « pieux participants » des « indulgences spéciales » (Le canard enchaîné du 17/08). On s’étonne qu’aucun chrétien n’ait protesté, certains savent pourtant que c’est le genre de pratiques contre lesquelles il faut Luther… *Santo subito ! Bientôt des réductions famille nombreuses pour Dieu et les siens, Jesus s’est vu offrir un petit frère cet été. « En France, tout le monde réalise que Dieu existe et qu’il est de retour en équipe de France » (Thierry Henry, Le Parisien), sur ordre de Papa : « Une nuit à trois heures du matin, je me suis soudain réveillé et là j’ai parlé à quelqu’un (…). Cette personne existe mais ça vient de tellement loin. » et il précise, « ce qui m’arrive, en réalité, est assez mystique. » (Zinedine Zidane, France Football, 9/8) Mécréants ! Ne vénérez pas Benoît XVI, pape apostat, mais mettez vous à genoux devant Orange-Adidas Ier, seul et unique représentant de Dieu sur Terre.

Et maintenant, pour quelque chose de légèrement différent, pas de pub :

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Interlude sans intérêt…(1) ******************************************************************************************

… j’ai une question… Comment peut-on croire, au XXIème siècle, qu’il est possible de freiner la marche du progrès? Mais permettez moi tout d’abord de me présenter. Je suis ici dans le cadre des mobilisations étudiantes, pour vous montrer les erreurs de vos voies. Je suis le frère Adam Smith, de l’ordre du très saint dogme de la perfection du marché. J’ai entendu différentes personnes sur ce campus se plaindre des lois … comment ça?lopri, fillon, et plus généralement des réformes qui visent à l’entrée de l’entreprise et du marché de plein pied dans l’école. Mais cette peur n’est pas justifiée, bien au contraire. Car cela nous permet d’avoir une école à forte valeur ajoutée et de disposer de travailleurs qualifiés, indispensables pour lutter contre la montée en puissance des pays émergents (au fait, dit on des travailleurs de ces pays qu’ils sont pas qualifiés, peu qualifiés ou disqualifiés ?) et cela dans un but entièrement philanthropique : nous assurer une meilleur insertion socio-professionnelle (et bien sûr alléger la situation macro-économique de la France, qui est catastrophique). La complexité et le coût des technologies dans les pays développés sont sans cesse croissants (que ce soit la médecine, l’armée ou l’éducation). Nous nous devons d’être toujours plus compétitifs pour ‘rester au niveau’ (on parle bien sûr d’économie, n’en déplaise aux rêveurs, la seule organisation mondiale qui puisse se targuer d’un pouvoir coercif est celle du commerce, avec l’Organe de Règlement des Différents ; et la santé d’un pays est indexée à son P.I.B.). Et c’est pour cela qu’il nous faut soutenir l’effort des forces vives dans leur ‘course vers le futur’ (j’ai entendu quelqu’un dire fuite vers avant ! tsk, tsk, du mauvais esprit ça, pas de saines valeurs républicaines). Qui peut décrocher de la lutte pour la croissance dans une économie intégrée? Et puis, il est urgent que tout les étudiants disposent de perspectives d'avenir, ainsi que de l'accès à un vrai travail pendant leurs études, sinon il pourraient leur venir des idées bizarres ou malsaines, surtout s'ils écoutent les fauteurs de troubles. Et oui, car ils sont là, parmi nous! Je les ai vus! En effet, certaines personnes, obtuses ou mal intentionnées (mais l'oisiveté peut provoquer ce genre de dégénérescence physique et mentale), certaines personnes donc, pensent que l'on peut échapper aux lois économiques! Dans notre société il est bien plus facile de faire fi de la gravité ou de casser l'atome que d'échapper à la loi économique! C'est pour cela que si l'on veut investir dans le futur (et nos enfants sont notre futur), il faut s'associer avec ceux qui possèdent les capitaux. Ce qui, comme nous l'avons déjà souligné, ne peut qu'assainir la situation macro-économique; puisque les étudiants, étant plus tôt en contact avec le monde (et le travail) de l'entreprise, leur affectation à un poste de travail en sera grandement facilitée; affectation choisie par l'entreprise, au mieux des capacités de production de chacun (c'est ça l'égalité des chances). Mais je vois que mon auditoire décroche... Je vais donc plutôt parler d'organe. D'organe de reproduction (ça va plaire aux étudiants). D'organe de reproduction sociétal. En quoi peut on dire de l'école qu'elle est un organe de reproduction sociétal?

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En ce qu'elle inculque à chacun les valeurs de notre société, afin qu’elles soient gardées vivantes, tel un flambeau olympique, par la succession des générations. Les schémas de pensée, les modes de production et de consommation, les hiérarchies sociales (surtout les hiérarchies sociales)... Assurément, l'école n'a pas pût assurer ce rôle dès sa création. Si l'école de Charlemagne (qui avait lieu dans son château) était sûre d'inculquer aux bambins les valeurs du seigneur, elle n'avait pour la société dans son ensemble qu'une faible valeur d'exemple. Puis vinrent les écoles, disséminées un peu partout en France, les 'écoles de grammaire'. Un savoir relativement neutre était transmis aux élèves (lire écrire, compter...). Heureusement ce savoir était le plus souvent transmis par des religieux, qui veillaient aux bonnes mœurs de la pupille. Il faut attendre la révolution pour institutionnaliser l'école. Le 29 Vendémiaire de l'an II: « La commission des 9 établit le texte sur l'instruction nationale, supprime toutes les écoles existantes et crée l'école nationale dans laquelle tout individu sera inscrit dès l'âge de 6 ans ». L'Etat détient alors le monopole de la transmission de la connaissance. Sous la monarchie de juillet en 1833, Guizot contribue à normaliser l'école. Tout d'abord en répandant les écoles normales (les professeurs eux même doivent maintenant passer par la matrice de l'éducation). Et surtout en donnant un programme, un sens à l'école: « apprendre aux enfants l'instruction morale et religieuse, la lecture, l'écriture, les éléments de calcul, le système des poids et mesures » pour l'instruction primaire. C'est tellement bon, on se le refais un p'tit coup ? « apprendre aux enfants l'instruction morale et religieuse... ». Cela fait plaisir de voir que l'on a sût profiter de l'enseignement de nos ancêtres puisqu'on lit dans la loi Fillon que « la Nation fixe comme mission première à l'école de faire partager aux élèves les valeurs de la république » (morales et laïques, celles-ci). Puis, plus tard, Jules Ferry fait voter la gratuité, l'obligation et la laïcité de l'école. Tout le monde passe alors par le même moule... Euh... la même institution et l'organe peut formater. Euh !.. fonctionner (pardonnez moi, je ne sais pas ce que j'ai ce soir...) Un organe de reproduction sociétal dans lequel on apprend les saines valeurs de la république (respect, laïcité, tout ça), des valeurs utiles et formatrices, comme: l'obligation, ou encore ne pas poser de questions impertinentes ou hors sujet (nous avons un but à atteindre, ne l'oublions pas; que ce soit la fabrication ou la vente d'un bien ou d'un service ou bien même l'obtention d'un diplôme, nous ne pouvons pas nous permettre de disgresser.), ou alors, cette notion phare, la compétition (la vie est une jungle; que ce soit au niveau international ou intranational, il y a des perdants et des gagnants et par l'école - Quel doux mot que la méritocratie! - ceux qui sont 'adaptés' au système sont sélectionnés et ceux qui ne sont pas adaptés - pas adaptés! - sont rejetés et se disqualifient tous seul - ils sont mauvais ils sont mauvais, c'est tout de même pas de notre faute! - Et tout cela au nom de l'égalité républicaine), compétition au niveau du sport, du cool, et bien sûr, des notes. Merveille des merveilles, un score. On peut alors enfin faire comprendre à nos chères têtes blondes que la réussite est quantifiable. Ils sont désormais prêts pour: 'le grand rêve de l'homme blanc'. L'école reproduit la société, très bien; mais les temps changent et nous devons changer avec eux si nous ne voulons pas être les laissés pour compte de la course au développement. L'école et la France sont en danger, parce que notre compétitivité internationale est en danger! Alors, fi des archaïsmes! Des facultés de philosophie! De recherche fondamentale! Et pourquoi pas des facultés de théologie pendant qu'on y est! Que commence enfin une nouvelle ère, rationnelle, l'ère du quantifiable! Une ère qui ne laisserait aucune place à l'imaginaire et aux autres formes d'oisiveté (mères de la déviance) mais qui reconnaisse la suprématie de l'utile. C'est pourquoi nous devons redoubler nos efforts et avancer sur la voie unidirectionnelle du progrès en compagnie de nos frères et modèles anglo-saxons. Attention! On nous accuse, à tort, de vouloir la fin des idéaux. C'est faux.

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Nous chérissons les idées de liberté, de pureté et de perfection. LES CAPITAUX DOIVENT ETRE LIBRES ET LE MARCHE PUR ET PARFAIT! LES CAPITAUX DOIVRENT ETRE LIBRES ET LE MARCHE PUR ET PARFAIT! LES CAPITAUX...

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X-MASSY MESSY SONG Pretty lights on the castel Pretty lights on the Gap n’ Topshop buy buy by it’s christmas soon buy buy by n’ buy some more

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« …les idées, justes ou fausses, des philosophes de l’économie et de la politique ont plus d’importance qu’on ne le pense en général. A vrai dire le monde est presque exclusivement mené par elles. » John Maynard Keynes, Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie

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Mwanzana ya Nzuani _ tempête sous les cocotiers ******************************************************************************************

Aujourd'hui, c'était une matinée un peu molle, deux voitures scotchées au garage, pas d'urgence absolue, plein de problèmes de fond mais rien de bien croustillant. J'ai pris la 306 de Mireia, celle qui a un problème d'eau (il faut en mettre un demi litre tous les cinq kilomètres) pour aller à Bandrani Mtsangani voir la maire et le brieffer sur de la gestion. Dès Mirontsy pourtant, il y avait quelque chose de louche, des gens massés le long de la route qui avançaient tous dans la même direction, tendus mais pas agités, on ne saurait dire ce qui n'allait pas, mais il y avait une couille qui flottait quelque part dans le potage. A Mutsamudu, ça c'est précisé, l'agitation était de plus en plus perceptible, et près de la place Mroni, sur la marché au poisson, c'est devenu parfaitement net : c'était la panique. Les enfants couraient poussés par leur mère affolée, les hommes rentraient à toute vitesse leurs étals à l'intérieur des magasins pour tout barricader, les taxis étaient pris d'assaut, ne prenant plus le temps de s'arrêter et laissant les gens sauter dedans. La panique gagnait la ville à la vitesse du taxi (c'est à dire pas très vite), mais personne n'était capable de me dire ce qui se passait. Un moment quelqu'un a semblé se diriger vers moi pour me renseigner, mais je n'ai pas compris ce qu'il disait. En fait il voulait juste me vendre du thon rouge. J'ai vu le front de panique avancer trente mètre devant moi, c'est à dire que d'un coté du front tout était parfaitement normal, et que d'un coup, c'était la panique. J'ai pris des grands mères en stop, mais elles n'ont pas pu me renseigner. A la station de Pagé en revanche, on m'a dit ce qui s'était passé : le président a été attaqué. Ca explique. Je me suis dit que c'était le mauvais jour pour pas avoir ses papiers, mais j'ai poursuivi ma route. A Bandrani la nouvelle a mis du temps à arriver, mais surprise, le président n'a pas été attaqué, il a été enlevé. Par qui ? Comment ? Personne ne peut le dire. Sur le retour j'ai croisé Alex, le fils de la femme du consul (?). Il était furieux parce qu'il avait perdu une heure pour rien. motif : le président a oublié un truc chez lui et sa voiture a brusquement fait demi-tour. Une seconde après, c'était la panique. J'ai aussi entendu qu'en fait son pneu avait crevé et qu'il avait changé de véhicule, bon... Voila Anjouan, franchement... Sans commentaire. Y.

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fundi ya shinzuani yaho wangu : le mien waho : le tien wahe : le sien watru : le notre wagno : le votre waho : le leur

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La faim de l’histoire ******************************************************************************************

*exaction culturelle française « La Nation exprime sa reconnaissance aux femmes et aux hommes qui ont participé à l’œuvre accomplie par la France dans les anciens départements français d’Algérie, au Maroc, en Tunisie et en Indochine ainsi que dans les territoires placés antérieurement sous la souveraineté française. » Est-ce là le discours d’un élu nationaliste, victime d’une crise de ‘nostalgérie’ ? Non, il s’agit en fait de l’article 1 de la loi votée le 23 février 2005 à l’assemblée nationale, sans que les élus ait fait grand bruit autour de l’affaire. Vous trouvez que cet extrait va trop loin ? Le meilleur est à venir, en particulier dans l’article 4 : « Les programmes de recherche universitaire accordent à l’histoire de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, la place qu’elle mérite. Les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, et accordent à l’histoire et aux sacrifices des combattants de l’armée française issus de ces territoires la place éminente à laquelle ils ont droits. » (La partie soulignée l’a été par mes soins.) Les chercheurs, qui connaissent un peu trop bien l’histoire pour laisser passer ce genre d’énormité, ont lancés une pétition (bloquée symboliquement à 1001 signatures) dans le monde du 25 mars, intitulée : « colonisation, non à l’enseignement d’une histoire officielle ». Les enseignants ont eux-mêmes lancés une pétition en avril, accompagnée d’un appel à « ne pas enseigner cette histoire officielle et révisionniste, à continuer d’utiliser les travaux des historiens pour présenter aux élèves le bilan le plus proche possible de la réalité de la colonisation ». Enfin, la protestation a été relayée (toujours en avril) par la ligue des droits de l’homme. Devant ce tollé général (mais relativement peu médiatisé) des plus grands spécialistes de la question, quelle a été la réaction du gouvernement ? Celui-ci s’est exprimé (dans le Monde toujours, du 8 mai) à travers Mr Hamlaoui Mekachera, ministre délégué aux Anciens combattants : « Je ne vois vraiment pas au nom de quoi les représentants de la nation ne pourraient pas s’exprimer sur ces sujets qui devraient être réservés à des spécialistes plus ou moins autoproclamés. » Les chercheurs et les enseignants apprécieront (détail piquant, le 8 mai 1945 avaient lieu les massacres de Sétif en Algérie). Comme le fait remarquer Gerard Vindt dans le numéro de juillet-août d’Alternatives Economiques (l’article que vous êtes en train de lire est largement tiré de celui-là, ainsi que du numéro de juillet-septembre d’Hommes & libertés , la revue de la ligue des droits de l’homme), ce n’est pas la première fois que l’on légifère sur les faits historiques et leur sens (condamnation du négationnisme nazi, condamnation de la traite ainsi que de l’esclavage comme ‘crimes contre l’humanité), mais dans les cas précédents il y avait toujours un large consensus de la société dans son ensemble ; alors qu’il est pour le moins douteux qu’il y ait un consensus de la communauté des historiens et de la société française autour du rôle ‘positif’ de la colonisation. Il est même douteux qu’un tel consensus existe au sein de la communauté politique puisque Hubert Colin de Verdière, ambassadeur de France en Algérie parlait en février, dans un discours à l’université de Sétif, d’ « événements tragiques », des « dérives du système colonial », de « tragédie inexcusable » et prônait alors une « connaissance lucide du passé » Mais pourquoi certaines personnes s’obstinent à ne pas considérer la colonisation comme ‘positive’. Qu’y trouvent-elles de condamnable ? - La proclamation de supériorité qu’implique ‘l’œuvre civilisatrice’, mission que se donnait la France. A ce sujet, laissons la parole à Jules Ferry (plus connu comme Ministre de l’instruction publique que comme Ministre des Affaires étrangères). Il s’exprimait ainsi devant la Chambre en 1885 : « Il faut le dire nettement : oui, les races supérieures ont un droit vis à vis des races inférieures. Comment justifier, sinon, notre présence aux colonies : elles ne nous demandent pas ! » - La dépossession des pays et des peuples colonisés. Dépossession des meilleures terres, des ressources naturelles, de la force de travail, ainsi que de la possibilité même de se choisir un mode de vie ou un futur en propre. En fait d’œuvre civilisatrice, le résultat fût tout autre. Ainsi, Tocqueville remarquait au XIXème siècle que : « nous avons rendu la société musulmane beaucoup plus misérable, plus désordonnée, plus ignorante et plus barbare qu’elle n’était avant de nous connaître » - Les camps de travail, les massacres et les tortures. Sans être le quotidien des peuples colonisés (sauf les camps de travail forcé), ils n’était pas rares, aussi bien pendant l’occupation (Sétif, Guelma…), que lors du processus de décolonisation (guerre d’Algérie, d’Indochine…). Mais alors comment, avec de tels éléments, peut-on aboutir à une loi qui soit tellement à contre courant de la réalité historique ? Tout d’abord, cette loi est l’aboutissement d’un intense lobbying de la part des anciens de

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l’Organisation armée secrète (OAS), les officiers qui s’opposaient à l’indépendance de l’Algérie, ainsi que des pieds-noirs (il est à noter que l’article 18 de la loi du 23 avril prévoit des indemnisations pour ces messieurs). Mais cela ne suffit pas à expliquer une telle loi. Malgré les protestations de bonne foi, seule une cécité – volontaire – sur l’histoire de la France est en mesure d’expliquer un tel comportement. Mais pourquoi, alors, la France ne serait-elle pas capable de regarder son passé en face ? Peut être parce que celui-ci ne correspond pas à l’image que la France a d’elle même : comment un tel pays, celui de la Déclaration universelle des droits de l’homme, aurait-il pût agir ainsi ? En cela, je partage l’avis de Gilles Manceron, vice-président de la ligue des droits de l’homme : « pourquoi l’histoire collective est elle devenue un point aveugle de la conscience française ? D’abord parce qu’elle suscite une gêne profonde par rapport à l’image que le pays a de lui-même et de ses valeurs. » Certains avancent également qu’il est inutile de rouvrir de vieilles blessures, et que cela ne peut servir qu’à entretenir le ‘ressassement mémoriel’ et la ‘victimisation par héritage’. Mais ces blessures se sont-elles jamais fermées ? Et le pourront-elles, tant que régneront l’oubli et le mensonge ? Bien au contraire, et elles pourrissent même et donnent lieu à un ressentiment sourd et réel, qui lance un éclairage blafard sur la situation actuelle. Comme le remarque Jean Pierre Dubois, le président de la ligue des droits de l’homme : « le risque est réel d’une communautarisation de révoltes fondants sur des griefs légitimes des combats qui ne le seraient en rien. » Le seul moyen de vivre avec un passé dramatique sans sombrer dans la démence, c’est de le regarder en face. C’est a ceci que sert le savoir historique, un savoir que cette loi bafoue. *Homo mobilis Cet été à Toulouse la cinémathèque, qui fonctionne par thème, avait choisie celui du ‘road movie’. Le thème du ‘road movie’ est particulièrement riche. Pour partie, on y retrouve la quête, avec ou sans succès ; cette approche est souvent abordée et l’a été fort bien par la cinémathèque, notamment à travers des films comme My own private idaho de Gus Van Sant ou encore Paris, Texas de Wim Wenders. Mais la cinémathèque a également mis en avant un autre aspect du ‘road movie’, tout aussi fondamental mais plus souvent oublié : la transitivité. Avec des films classiques comme Easy rider de Dennis Hopper ou plus méconnus comme 2-Lane Blacktop de Monte Hellman, il ne s’agit plus de bouger vers un but, mais de bouger, simplement. Un certain vertige s’empare du spectateur qui ne dispose d’aucun repère dans le mouvement (dans 2-Lane…, les personnages – même principaux - restent anonymes). Hasard du calendrier ou signe des temps , le festival de rue de Ramonville, qui se déroulait cette année du 8 au 10 septembre avait lui-même pour thème les « machines à rêves [qui] posent les questions de mobilité et de transport ». « Du solex art brute à la fusée humaine, de la voiture excroissance de notre logis au camion cercueil de l’exil, du tricycle musical au bus en partance pour un grand voyage, (…) laissez vous tenter , le temps du voyage ». Alors, faut-il voir dans ces programmations qui se répondent une simple coïncidence ? Assurément non puisque la mobilité, qu’elle soit informationnelle ou physique, est à la base de nombreux phénomènes modernes, dont la plupart sont regroupés sous le terme normatif de mondialisation. Il s’agit donc d’un enjeu majeur de notre temps. Cependant on a parfois le sentiment que la mobilité, qui est une des causes de la mondialisation, tout autant qu’une de ses conséquences, serait devenu bien plus que cela : un état d’esprit, voire même une idéologie. A en croire Pierre-Andre Taguieff, philosophe et historien des idées, il s’agit de bien plus qu’une impression. Il affirme ainsi dans un essai de 2001, Du Progrès, qu’ « à la faveur de la mondialisation – à la fois comme fait de la globalisation économico-financière et comme idéologie donatrice de normes -, une nouvelle variante de la religion du progrès s’est constituée en utopie messianique faible, que j’ai baptisée ‘bougisme’ ou mouvementisme, soit le culte du mouvement pour le mouvement, l’exaltation de la fuite en avant dans ce qu’il est convenu d’appeler la ‘modernisation’, l’impératif catégorique de ‘bouger avec ce qui bouge’. Dans cette récente figure du néo-progressisme, ce qui est conservé de l’idée de progrès, c’est la simple valorisation exclusive du mouvement comme tel, de la successivité : on peut y voir le stade final de la décomposition du progressisme. Ce qui est valorisé dans cette forme ultra-simplifiée du néo-progressisme, c’est le changement perpétuel, sans horizon de sens, sans fin dernières (disparaissent ainsi la visée d’une émancipation, celles de la réalisation de la justice, du bonheur, etc.), le changement couplé avec la vitesse. Degré zéro de l’idéologie du progrès, absence de projet érigé en pseudo-projet, à droite comme à gauche. Car le chant de sirène de la ‘mondialisation heureuse’ ne rencontre pas de résistance dans la classe politique, pas plus que dans la classe médiatique. Les fronts de résistance apparaissent ailleurs, à partir d’expériences collectives – et douloureuses – de la rebarbarisation du monde, que l’utopie mondialisatrice voile et transfigure à la fois. L’individu idéal qu’elle projette sur tout les écrans, c’est l’individu de nulle part, sans mémoire ni instruction historique, réduit à sa faculté d’adaptation, et de plus en plus par son aptitude à la sur-consommation. Capable de se conformer à toutes les normes, de s’adapter de plus en plus vite à tous les contextes, de varier avec toutes les variations conjoncturelles. L’être planétaire ultra-mobile et jubilatoire, heureux dans l’instabilité et l’insécurité perpétuelles. L’accélération du mouvement est la loi et la norme uniques de l’existence globalisée. Comme si la

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mondialisation communicationnelle, technologique et économico-financière représentait la voie du salut, à la portée de tous. Après l’utopie de ‘l’homme nouveau’ surgit donc celle de ‘l’homme mobile’, l’utopie de l’individu sans héritage ni appartenances, sans mémoire et sans histoire, mais ultra-mobile, hyper-malléable et indéfiniment adaptable. Il est sans famille, sans ascendance ni descendance, il n’est responsable que de luimême, de sa vitesse et de sa flexibilité. Il n’a d’identité que provisoire, éphémère ; il rêve même d’en changer comme de chemise. Il s’idéalise, dans le discours publicitaire contemporain, en ‘nomade’ et en ‘métissé’, il se célèbre comme un ‘hybride’ toujours ‘en mouvement’. Le ciel de la publicité propagandiste (j’entends par là ‘engagé’ en faveur du globalisme) est étoilé de termes incitatifs : change, échanges, mélanges. Voilà ce qui serait l’avenir de l’humanité, ce qui déterminerait la voie unique du futur. Comme la conception classique du progrès, l’idéologie ‘mouvementiste’ de la ‘mondialisation heureuse’ opère une fatalisation de l’histoire. Elle transforme à son tour le devenir en destin, à travers son discours unique et répétitif sur les ‘contraintes inévitables’ et les ‘évolutions irréversibles’, que résume la formule favorite du nouveau terrorisme intellectuel globaliste : « il n’y a pas d’alternative. » La nécessité qu’elle met en avant se réduit à un ensemble de contraintes naturalisées. » Cette fièvre idéologique est d’autant plus remarquable qu’elle s’accompagne d’une montée parallèle du communautarisme à laquelle elle n’est peut être pas étrangère. Privées de repères, les personnes se rattachent à ce qu’elles peuvent pour garder quelques certitudes dans un monde en perpétuel changement. Mais le changement est-il si manifeste que cela ? On a parfois l’impression que ‘tout fout le camp’ ou que ‘tout va trop vite’. Les décors changent, mais les rapports de force et les représentations qui sous-tendent la société sont-ils tellement bouleversés ? Ce qu’il y a de pratique avec la ‘fin de l’histoire’, c’est qu’il n’y a plus rien à faire. Un présent perpétuel, c’est la fin de l’avenir autant que du passé. Bien que plus optimiste quant à la réactivité des personnes, je partage en partie l’analyse de Guy Debord sur les causes et les moyens de l’escamotage de l’histoire. Dans les Commentaires sur la société du spectacle, en 1988, il écrit : « La construction d’un présent ou la mode elle-même, de l’habillement aux chanteurs, s’est immobilisée, qui veut oublier le passé et qui ne donne plus l’impression de croire à un avenir, est obtenue par l’incessant passage circulaire de l’information, revenant à tout instant sur une liste très succinte des mêmes vétilles, annoncées passionnément comme d’importantes nouvelles ; alors que ne passent que rarement, et par brèves saccades, les nouvelles véritablement importantes, sur ce qui change effectivement. Elles concernent toujours la condamnation que ce monde semble avoir prononcée contre son existence, les étapes de son autodestruction programmée. La première intention de la domination spectaculaire était de faire disparaître la connaissance historique en général ; et d’abord toutes les informations et tous les commentaires raisonnables sur le plus récent passé. Une si flagrante évidence n’a pas besoin d’être expliquée. Le spectacle organise avec maîtrise l’ignorance de ce qui advient et, tout de suite après, l’oubli de ce qui a pu quand même en être connu. Le plus important est le plus caché. Rien, depuis vingt ans, n’a été recouvert de tant de mensonges commandés que l’histoire de mai 1968. D’utiles leçons ont pourtant été tirées de quelques études démystifiées sur ces journées et leurs origines ; mais c’est le secret de l’Etat. (…) Le domaine de l’histoire était le mémorable, la totalité des événements dont les conséquences se manifesteraient longtemps. C’était inséparablement la connaissance qui devrait durer, et aiderait à comprendre, au moins partiellement, ce qu’il adviendrait de nouveau : « une accumulation pour toujours » dit Thucydide. Par là l’histoire était la mesure d’une nouveauté véritable ; et qui vend la nouveauté a tout intérêt à faire disparaître le moyen de la mesurer. Quand l’important se fait socialement reconnaître comme ce qui est instantané, et va l’être encore l’instant d’après, autre et même, et que remplacera toujours une autre importance instantanée, on peut aussi bien dire que le moyen employé garantit une sorte d’éternité de cette non-importance, qui parle si haut. Le précieux avantage que le spectacle a retiré de cette mise hors la loi de l’histoire, d’avoir déjà condamné toute l’histoire récente à passer à la clandestinité, et d’avoir réussi à faire oublier très généralement l’esprit historique dans la société, c’est d’abord de couvrir sa propre histoire : le mouvement même de sa récente conquête du monde. Son pouvoir apparaît déjà familier, comme si il avait depuis toujours été là. Tous les usurpateurs ont voulu faire oublier qu’ils viennent d’arriver. » Je ne suis pas adepte de ‘la théorie du complot’, et n’imagine pas des réunions de société secrètes dans lesquelles se déciderait ce que la société doit penser. Mais penser que les représentations qui participent à asseoir le pouvoir de certains acteurs ne sont pas utilisées et préservées par ceux-ci me semble tout aussi naïf. Les idéologies ne sont pas créées par des groupes, elle correspondent en général à des mouvements de fonds sourds et puissants que l’on subit plus qu’on ne les façonne. Mais elles peuvent être utilisées, entretenues et glorifiées ; en cela elles peuvent servir des intérêts. Seulement ces mouvements de l’inconscient collectifs sont bien plus profonds, sourds et puissants que ne le pensent la majorité des personnes, y compris les personnes qui les détournent, et peuvent conduire en des lieux inattendus. En cela, ceux qui croient façonner des idéaux ressemblent « au sorcier qui n’est plus capable de maîtriser les puissances infernales qu’il a invoquées. »

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*Souvenons nous La révolution industrielle est vieille de seulement 3 siècles, et la mondialisation marchande, quelle que soit les critères retenus, n’a guère plus de 5 siècles d’existence. Historiquement, ce sont des phénomènes récents. La social-démocratie et la gestion sociale du capitalisme n’ont pas toujours été l’alpha et l’oméga du Parti Socialiste (PS). En effet, lors de sa fondation en 1905, ce qui allait devenir le PS (Il s’agissait alors de la SFIO, la section française de l’internationale ouvrière, qui se donnait pour but de rassembler tous les socialistes [-smes ?] sous une même bannière) approuvait un texte au caractère légèrement plus combatif, qui précisait que le parti « n’est pas un parti de réforme, mais un parti de lutte de classe et de révolution ». De plus, on s’y appelait ‘camarade’ et y chantait ‘l’Internationale’. Puis vinrent Millerand, Mitterrand et la chute du ‘socialisme réel’ (bien qu’on puisse se demander ce qu’il y avait de réellement socialiste dans l’URSS – si ce n’est, il est vrai, l’accès aux soins et à l’enseignement). En 1983, quand Mitterrand installe un premier ministre ‘socialiste de marché’ (Mr Fabius) au pouvoir, le rêve est déjà mort. Mais il faudra attendre le congrès de l’Arche de la Défense de décembre 1991 pour qu’il soit enterré, avec une petite prière de circonstance : « le capitalisme borne désormais notre horizon historique ». En 1945, au lendemain de la seconde guerre mondiale (qui a fait environ 50 millions de morts, dont la moitié étaient russes), « 57% des français considéraient l’Union soviétique comme le principal vainqueur. En 2004, ils n’étaient plus que 20% » (Annie Lacroix-Riz, Manière de voir, 08-09/05). Mais ! Se pourrait-il alors que la façon dont on aborde l’histoire soit évolutive ? C’est en 1987 que fut privatisée TF1. A qui la vendre ? Deux candidats se dégagent alors : Francis Bouygues et Jean-Luc Lagardère. Pour les départager, la Commission nationale de la communication et des libertés (CNCL) organise des ‘auditions’ retransmises sur la première chaîne française. Lors de l’audition de Mr Bouygues et de son équipe, Franky nous expose son « grand projet ». Celui-ci « repose sur des idées simples : informer, divertir, cultiver. En bref, servir le téléspectateur » (Les citations, sauf indications contraires sont tirées du PLPL de février 2005). Puis c’est au tour de Patrick Le Lay de nous exposer son approche de la culture : « La culture exprime le besoin et le plaisir de vivre ensemble. Elle exprime une vraie communauté de projet ».Interrogée sur la présence d’ « émissions culturelles ambitieuses de haut niveau et donc pour un temps encore de faible audience, pas seulement à titre exceptionnel », l’équipe des maçons de la TV répond : « Nous serons une chaîne de culture ». Pourquoi croire le consortium Bouygues, peu connu pour son altruisme ? C’est là qu’intervient ‘l’arme fatale’ de Francis Bouygues, le troisième membre de l’équipe, Bernard Tapie (réputé pour sa probité à toute épreuve) : « Francis Bouygues a une vertu devenue rare : il dit ce qu’il fait et il fait ce qu’il dit (…) il faut savoir de temps en temps oublier l’audimat ». Pourquoi ressortir ces vieux fantômes ? Parce qu’il permettent d’apprécier à leur juste valeur les commentaires postérieurs de Mr Le Lay. En 1987, à peine quelques mois après avoir obtenu la chaîne : « Il faut avoir le respect du goût du téléspectateur, ne pas le forcer à regarder ce qu’il n’a pas envie de voir (…) Passer une émission culturelle sur une chaîne commerciale à 20h30, c’est un crime économique ! » (Libération 21/07/87, cité par PLPL). Ou encore plus récemment, en 2004 : « A la base, le métier de TF1, c’est d’aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit. Or, pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c’est à dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau disponible » (Les dirigeants face au changement, édition ‘Huitième jour’) Les lecteurs se souviendrons sûrement qu’en 2001 les pouvoirs en place aux Etats-Unis décidaient d’attaquer l’Afghanistan. Ce dont on se souvient peut être moins, c’est des promesses de ceux-ci pour calmer les esprits de ceux qui s’opposaient à cette guerre illégitime. En effet, les Etats-Unis promirent alors des frappes ‘chirurgicales’. Et qu’ont-ils réellement employé ? Des B-52, des avions qui utilisent la méthode dite du ‘Carpet bombing’ (bombardement moquette), une technique qui crée des ondes de choc sur plusieurs kilomètres carrés d’un coup. Un conseil donc, si vous voulez vous faire opérer de l’appendicite, mieux vaut éviter les Etats-Unis. En 2002 Philippe Val, rédacteur en chef de Charlie Hebdo, nous donnait son opinion sur les prolétaires : « S’ils n’aimaient pas se faire niquer, ils ne seraient peut-être pas si pauvres » (Charlie Hebdo, 23/01/02). « Entre le printemps 2004 et l’été 2005, les trois principaux quotidiens français ont boulversé leur actionnariat dans une relative indifférence : Le Figaro racheté par Dassault, Libération recapitalisé par Rothschild, Le Monde renfloué par Lagardère. » Pierre Rimbert, Libération de Sartre à Rothschild.

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rAdio Toulouse _ les feuilles d’automne ******************************************************************************************

On ne va pas perdre les mauvaises habitudes, on commence donc par l’EUROPE : *C’est reparti Malgré leur gros chagrin référendaire, certains chroniqueurs politiques se sont remis à l’Europe. Timidement et sans trop d’entrain pour beaucoup. Un agenda national bien chargé (Sécu, EDF, présidentielle[!?], émeutes…) est une valeur sûre, bien plus sûre que cette Europe pour laquelle on ne semble pas pouvoir trouver de mode d’emploi. Mais l’Europe continue de se faire (le plus souvent sans que la majorité des européens soit mis au courant des enjeux), et de passionner, tant dans le camp du OUI : « Certes, tous ceux qui attendaient de la victoire du non la mise en œuvre d’un plan B doivent aujourd’hui être déçus. Mais l’honnêteté oblige à dire que si le oui l’avait emporté, le tableau ne serait guère plus glorieux, nos dirigeants étant ce qu’ils sont ! Il faut donc laisser du temps au temps. Sans renoncer à l’idée que dans le monde actuel, il est plus que jamais besoin d’une Europe plus forte et plus démocratique » (Philippe Frémeaux, Alternatives Economiques, 11/05), que dans le camp du NON, qui sait bien que si un plan B est en préparation, ce n’est certainement pas à Bruxelles. *Fait tourner Qui a dit que l’Union européenne ne fonctionne pas, et que les différents gouvernements concernés n’arrivent pas à s’entendre ? Le 5 juillet, les ministres de l’Intérieur allemand, britannique, espagnol, français et italien se sont mis d’accord pour organiser des « vols groupés » afin d’expulser les étrangers en situation irrégulière ; à peine 2 mois plus tard (dans la semaine du 19 au 25 septembre), ce grand projet européen voyait déjà le jour : un charter d’expulsion décollait de Madrid, puis passait chercher des passagers à Paris puis à Rome. On envie les sanspapiers expulsés d’Espagne qui ont eu droit, les chanceux, à un mini-tour d’Europe. *Alors, il vous plaît le pallier ? 42 ans que la Turquie patiente sur le pallier de l’Europe. Une longue histoire de ‘je t’aime, moi non plus’. Le premier accord d’association fut signé en 1963 et depuis, les jalons se succèdent. Il faut attendre 1987 pour que la Turquie pose officiellement sa candidature, puis 1999 pour que le statut de candidat à l’adhésion lui soit attribué. En 2004, finalement, l’Union européenne considère qu’elle satisfait les critères démocratiques dits de Copenhague. Les 25 fixent alors la date du 3/10/05 pour le début des pourparlers à l’adhésion. Jusqu’au dernier moment, l’Autriche a semblé vouloir faire échouer le processus ; elle met deux conditions au début des pourparlers : #que la voie d’un partenariat privilégié reste ouverte si les négociations échouent, et # que la Croatie, en froid avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et l’Europe, soit réhabilitée et accède elle aussi au statut de candidat. La moitié de ces vœux sera remplie puisque la Croatie est devenue immédiatement plus fréquentable, accédant au statut convoité de candidat, mais on abandonne (pour l’heure) l’idée du partenariat privilégié. La Turquie a fait de gros efforts ces dernières années, est n’est aucunement dans une position de mendiante. En fait, pour certaines personnes, c’est l’Europe qui aurait besoin de la Turquie (même si l’inverse reste vrai). « La Turquie peut devenir le Viagra de l’Europe. » La population du pays est jeune (une aubaine alors que la population de l’Europe est vieillissante et que le taux de natalité de certains pays [comme l’Allemagne et l’Italie] est en chute libre) et le pays connaît une forte croissance économique (surtout à l’Ouest). Alors pourquoi la Turquie ne fait-elle pas l’unanimité ? Plusieurs reprochent se dégagent : # Tout d’abord, la Turquie ne ferait pas partie de l’Europe géographique. La première réponse qui vienne à l’esprit c’est que l’Europe géographique n’est que ce que l’on en fait. Mais la protestation reste recevable. On ne peut cependant s’empêcher que si la Turquie ne fait pas (plus) partie de l’Europe, elle en fut le creuset (au moins en partie). Avant la deuxième guerre du Péloponnèse, la côte Ouest de la Turquie s’appelait la Ionie. C’est selon toute vraisemblance là que s’est déroulé le siège de Troie et cette région a amplement contribuée à façonner la civilisation Hellénistique dont la civilisation occidentale contemporaine (à tort ou à raison) se réclame (quand la Grèce a été intégrée à l’Europe en 1981, c’était plus par attachement culturel que pour ce qu’elle avait à nous offrir). Si l’Europe s’est depuis déplacée vers l’Ouest, il semble que le mouvement soit désormais inverse.

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#Ensuite il y a le problème de l’intégration. Ce problème est double La part d’européens qui déclarait vouloir reconnaître les ‘racines chrétiennes’ défrise de la raie à la seule mention de la place forte ottomane au sein de la ‘sainte alliance’. Si cette critique religieuse est facile à contourner, les réticences d’une large partie des couches populaire est une toute autre affaire. L’ouverture des pourparlers d’adhésion tombe au plus mauvais moment : en effet l’Angleterre, la France et les Pays-Bas, présentés comme des exemples d’intégration, se remettent profondément en cause ; de plus les ‘modèles’ sociaux des traditionnels ‘moteurs’ de l’Europe (comme la France ou l’Allemagne) s’effritent (s’assouplissent diraient les libéraux), ce qui amène une réaction de repli sur le territoire national. Cette réaction est exacerbée par de grandes campagnes de propagande qui propagent toutes sortes d’amalgames (originaire de x_migrants_étrangers_Afrique du Nord_Moyen-Orient_islam_islamiste_intégriste_terroriste). On se retrouve dans une situation ou les européens craignent autant le concurrent que l’adversaire. Je ne vois pas vraiment comment sortir de cette crise si ce n’est en travaillant à calmer les esprits. C’est en cela que l’adhésion me plaît le plus : c’est un formidable pied de nez au ‘choc des civilisation’. Un autre problème d’intégration se pose. L’Est de la Turquie est plus proche de la Géorgie et de l’Arménie que de la Bulgarie ou de la Grèce (même si la Turquie a des frontières à l’Est avec la Syrie et l’Iran, qui sont des puissances régionales). Il faut se souvenir que l’Allemagne continue de payer (cher) l’intégration de l’ex-RDA et que le budget de l’Europe pour la période 2007-2012 n’est pas encore décidé, mais que les aides à l’intégration des pays nouveaux adhérents de l’Europe de l’Est ne risque pas de crever le plafond. L’Est de la Turquie, au niveau économique et culturel, est un défi bien plus formidable, et si les Etats-Nations continuent à ne pas fournir à la fédération les moyens de son ambition, il se pourrait que cette région soit le ‘parent pauvre’ de l’Europe (surtout si celle-ci décide de libéraliser son agriculture – ressource principale de la région). #Un autre problème se pose, l’histoire. On a parlé du génocide arménien, mais l’empire ottoman s’est aussi étendu dans le passé jusque dans les Balkans, à la frontière de l’Europe occidentale. Même si ces événements (et quelques autres) ne sont pas à minimiser, c’est peu dire que tout les pays d’Europe n’ont pas été exemplaire dans l’histoire contemporaine. L’Europe s’est bâtie sur ses propres cendres, avec pour objectif de transcender les déterminations historiques tragiques. Un dernier point, cependant déterminant en ce qui me concerne. Pour ne dire ni oui ni non à l’adhésion de la Turquie, on lui a demandé l’impossible, pensant acheter des années et des années de paix à bas prix. Mais la Turquie s’est débrouillée pour réaliser cet impossible en un temps record. Lui refuser l’adhésion après tout ce qu’elle à fait pour satisfaire l’Europe serait du plus mauvais goût. Oh ! Et encore une mention spéciale pour la France, qui a réussie en quelques années à passer du rôle de meilleure alliée de la Turquie à son plus stupide adversaire en ce qui concerne l’adhésion. *Les Britts n’aiment pas la PAC Mais qu’est-ce qu’il lui prend à Peter Mandelson, le ministre britannique, à taper sur la PAC comme cela. Le 10 octobre, il a déclaré vouloir réduire de 70% les aides attribuées aux agriculteurs européens. Ne sait-il pas pourtant que les accords de financement de la PAC ont été décidés jusqu’en 2012 ? Ce qu’il lui prend, c’est qu’il n’est pas seulement ministre du gouvernement britannique, il est aussi commissaire européen du Commerce et c’est à ce titre qu’il a fait une proposition à l’OMC. Car s’est bien de cela dont il s’agit, l’enjeu n’est pas européen mais mondial. C’est en effet le ‘cycle de Doha’ de l’OMC, dont la prochaine réunion doit avoir lieu cet hiver. Ce cycle a pour thème le développement et la pauvreté. Le sujet tout particulièrement abordé est l’agriculture, et que peut elle en ce qui concerne ces deux éléments. Les pays occidentaux (les Etats-Unis et l’Europe) sont montrés du doigt, parce qu’ils se font les champions de la libéralisation, alors qu’ils subventionnent massivement leur agriculture (les gros malins ne subventionnent plus leurs exportations, c’est maintenant interdit, mais leur [sur-] production). Alors que certains petits pays sont compétitifs sur certains produits, et que les pays émergeants sur beaucoup (dans le cas du coton on peut citer des pays africains et le Brésil), ils ne peuvent pas écouler leurs productions à cause du dumping occidental. Si l’on est obligé de jouer, que tout le monde joue au moins avec les mêmes règles. Mais est on vraiment obligé de jouer ? Ma maman m’a pourtant toujours dit qu’on ne joue pas avec la nourriture. D’autres pays ne sont compétitifs dans aucun domaines et dépendent malgré tout de l’exportation de leur production agricole pour disposer de devises. Les meilleures terres d’un pays sont alors réquisitionnées pour d’autres pays. Qu’est ce qu’il lui prend alors à Mr Mandelson de proposer de baisser les aides agricoles de la PAC ? Il lui prend qu’il répond aux avances des Etats-Unis. En effet, le 14 septembre Mr Bush a annoncé vouloir « éliminer toutes les barrières douanières, les subventions et autres obstacles pour libérer les flux de biens et de services au fur et à mesure que d’autres pays en font de même ». Le 10 octobre, avant que Mr Mandelson ne fasse son offre, le représentant américain au commerce, Rob Portman, a proposé de réduire de 60% les aides directes aux agriculteurs américains. Mais la France, qui pense que quitte à jouer, autant avoir des règles différentes pour les petits et pour les gros, a tout de suite réagi. Dès le 11 octobre, Mr Philippe Douste-Blabla, le ministre des affaires qui lui sont étrangères, a rappelé Mr Mandelson à l’ordre, en lui disant de s’en tenir aux limites de son mandat, et le 27 octobre au sommet de Hampton Court, le grand Jacques a menacé d’utiliser son veto. Le commissaire

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européen a présenté une offre le 28 octobre de réduction des droits de douanes encore existants entre 35 et 60%. On souhaite bien du courage a tout ce petit monde pour la 6ème conférence ministérielle de l’OMC le 13 décembre. *Fortress Europe « Le mécanisme économique est presque toujours invisible et enfermé comme sont les changements de vitesse dans l’automobile. Il fallait donc deviner. Mais voici que la boîte s’entrouvre par accident et qu’une partie du mécanisme apparaît à nu (…). Mais déjà, soyez en sûr, on boulonne solidement la boîte autour du mécanisme ; nous n’en verrons pas plus… » Alain, propos impertinents. Tout au sud de l’Europe on trouve les villes de Ceuta et Melilla, deux enclaves espagnoles sur la côte marocaine. C’est en s’introduisant dans ces enceintes que les migrants d’Afrique sub-saharienne espèrent rentrer en Europe. Parfois discrétement, parfois en force. Durant les nuits ou la ‘force’ est employée, ce sont des centaines d’hommes et de femmes qui se jettent sur la double rangée de barbelés. Le 29 septembre était un de ces jours où des hordes de miséreux se jettent sur les frontières grillagées de l’Europe. Plusieurs centaines ont ainsi tentés leur chance et on estime qu’environ 200 ont réussi a entrer sur le territoire européen. Mais à quel prix ? Les chiffres officiels parlent de 11 morts. Même si on les croît, comment ne pas penser également aux dizaines, voire aux centaines de personnes qui ont été plus ou moins grièvement blessés ? En l’espace d’un seul jour. Mais cet événement aura eu au moins un bon côté, porter nos regards sur le sud de l’Europe. Et que n’a-t-on alors pas vu ! Le samedi 8 octobre au soir, Médecins sans frontières nous révélait jusqu’où peut allez l’horreur, en dévoilant qu’elle a prit connaissance de 500 (encore une fois, ce sont les chiffres officiels) migrants attrapés à la frontière de l’Europe et déportés dans le Sahara, le long de la frontière entre l’Algérie et le Maroc, sans eau ni nourriture. L’opinion publique s’est émue et des transports vers les pays d’origine des migrants ont été mis en place. « Mais déjà, soyez en sûr, on boulonne solidement la boîte autour du mécanisme ; nous n’en verrons pas plus… » *REACH ! Pour Registration, Evaluation Authorization and restriction of Chemicals, un nouveau système de régulation des substances chimiques en Europe. Ce système impose : - L’enregistrement des substances dont la commercialisation dépasse une tonne (30000 substances seraient concernées) - L’évaluation des substances enregistrée et dont la commercialisation dépasse 10 tonnes par ans par l’agence européenne des produits chimiques, à partir d’un dossier transmis par les industriels (10000 substances seraient concernées) Le tonnage n’est pas le seul critère pris en compte, 1400 substances à haut risque, catégorisées CMR (cancérigènes, mutagènes, toxiques pour le système reproductif) ou bioaccumulatives et persistantes devront être enregistrée dans les 3 ans suivant l’entrée en vigueur de REACH, et leur autorisation pourrait dépendre de leur nocivité et des possibilités de remplacement. C’est assurément un succès, mais le texte, approuvé au parlement enropéen le 17 novembre (il doit passer devant le conseil des ministres le 13/12), n’est pas aussi bon que le projet original, à cause d’un intense lobbying de l’industrie chimique. Celle ci a fait valoir son importance pour l’économie européenne et s’est exclamée que le texte tel qu’il était aurait coûté jusqu’à 12 milliards d’euros et 1,7 millions d’emplois (sortez les violons). Les tests seront donc moins nombreux et les industriels pourront plus facilement utiliser le secret professionnel. Une victoire mais sans chanson donc. *Balkin On se souvient que l’Autriche avait obtenue le statut de candidat pour la Croatie avant de donner le feu vert pour la Turquie ce 3 octobre. C’est au tour de la Macédoine d’accéder au statut de candidat à l’adhésion à l’Union Européenne. Même si les négociations peuvent durer de nombreuses années, on a encore jamais vu un pays officiellement candidat se faire refuser l’adhésion. Selon Jean Quatremer, c’est l’ensemble des Balkans qui est appelé à faire partie de l’UE. « L’exécutif européen ne cache pas que son agenda comprend l’ensemble des Balkans, avec l’Albanie, la Bosnie, la Serbie et même, lorsque son statut définitif sera réglé, le Kosovo. » (Libération 10/11) Si l’Europe se donne les moyens de l’intégration, on aura peut être l’occasion d’apprendre la géographie à coup de bonnes nouvelles, pour une fois.

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INTERNATIONAL : *Katrina L’ouragan Katrina, qui a frappé les Etats-Unis le 29 août, a fait plus de 1300 morts, mais ce n’est pas tant sur lui que je souhaite revenir que sur son traitement. On a tout d’abord pu voir que les autorités ont été très lentes à réagir, pour deux raisons : la décomposition de la police locale, mais aussi pour « avoir une supériorité écrasante » sur les pillards (Stephen Blum, lieutenant de la garde, cité par Le Monde, 6/9). L’ampleur de la catastrophe a du faire regretter à Mr Bush de n’avoir pas une partie de ses ‘boys’ sur place (d’ailleurs, comme nous l’apprend Libération du 6/9, 2800 soldats originaires de la Nouvelles Orléans seront rapatriés), mais interrogé par les médias, ils leur a rappelé leur mission : « votre devoir est d’appeler à la lutte contre le terrorisme » (le canard enchaîné, 7/9) G.W. a toutefois reconnu que : « les résultats ne sont pas acceptables » (ibid). Devant le spectacle de la Nouvelle Orléans après l’ouragan, il s’est même exclamé : « Profonde et ancienne, cette pauvreté a ses racines dans une histoire de discrimination raciale qui a exclu plusieurs générations des chances qu’offre l’Amérique » (le canard enchaîné, 21/9) Waow. Très bien, parlons en des noirs. Pourquoi les personnes laissées sur place pendant et après la catastrophe sont elles noires ? Tout d’abord parce que les gens qui sont restés sur place malgré l’appel à l’évacuation étaient bien souvent les gens qui n’ont pas eu les moyens de sortir de la ville. Il n’est pas très difficile pour un noir d’être pauvre là bas. Ce sont au moins 2000 autocars qui ont manqués pour évacuer les 125000 laissés sur place (Le Monde, 6/9) Et manque de bol « le cyclone est intervenu en fin de mois, à un moment ou des milliers de personnes attendaient le chèque de l’aide sociale ». Lorsque Mr Bush nous dit « je ne pense pas que qui que ce soit ait anticipé la rupture des digues » (cette citation, comme celles qui suivent, provient du canard enchaîné du 14/9), on ne peut que lui conseiller d’apprendre à lire, puisque en 2004 un article du National Geographic avait pour thème ce qui ce passerait en cas d’ouragan majeur sur la Louisiane. Selon cette publication, l’Agence fédérale pour la gestion des cas d’urgence avait déjà classé « un ouragan dévastateur sur la Nouvelle Orléans aux nombres des toutes premières menaces qui pèsent sur ce pays ». En 2002, dans le Wall Street Journal, 1 page entière était consacrée aux « urbanistes et ingénieurs municipaux [qui] continuent de travailler sur les moyens d’améliorer le plan d’évacuation d’un million trois cent mille habitants et d’atténuer les effets d’une énorme tempête ». Enfin, le malheur des uns fait le bonheur des autres, puisque « Halliburton, qui a déjà reçu 9 milliards de dollars en Irak, a selon Reuters, reçu en fin de semaine dernière 29,8 millions de dollars du Pentagone, afin de reconstruire les bases navales endommagées en Louisiane après le passage de Katrina. » (détail amusant, le vice-président américain, Mr Dick Cheney, touche encore un salaire différé de la part d’Halliburton). Mais Katrina n’était qu’un ouragan parmi d’autres. Cette année a posé un nouveau record : 23 tempêtes tropicales et ouragans, 2 de mieux qu’en 1933, le précédant record. A quoi cela est ce du ? On met en avant le fait que les eaux du golfe du Méxique étaient particulièrement chaudes (28-29°C au lieu de 26-27°C en moyenne à la même date les étés précédents), mais de nombreux facteurs rentrent en considération, et beaucoup de scientifique émettent des doutes sur le fait que ces phénomènes soit uniquement dus au réchauffement climatique. Mais bon, ça peu aider. *Joyeux a-nni-versaire, machin ! Du 14 au 16 octobre avait lieu une réunion de l’Assemblée générale de l’ONU à New-York. L’occasion était particulière, non seulement l’ONU fête cette année ses 60 ans, mais en plus le Secrétaire général (Kofi Annan) comptait profiter de cette date pour réformer l’organisation, un projet à l’étude depuis plusieurs années. Le chantier est fort imposant (certains mettent l’accent sur la part du PIB des pays industrialisés qui devrait être allouée à l’aide au développement [0,7%], d’autres pointent du doigt la Commission des droits de l’Homme et arguent qu’elle devrait se resserrer autour des pays qui respectent effectivement ces droits. Les plus gros fournisseurs de troupes [Pakistan, Bangladesh, Inde et Ethiopie] ne disposent d’aucune voix au Conseil de sécurité. C’est d’ailleurs autour du Conseil de sécurité que la controverse est la plus intense. La réforme la plus évidente serait d’y rajouter des pays. Les pays pressentis étant le Brésil, l’Inde, le Japon, l’Allemagne et l’Afrique du Sud ; cet élargissement n’est pas du goût de tout le monde, et surtout pas du goût des pays déjà membres qui gardent leur veto sous le coude. On peut néanmoins regretter qu’aucun pays d’Amérique du Sud ou d’Afrique ne siège au conseil) et les échecs, les scandales et les épreuves de l’organisation ont fortement ternis sa réputation (elle n’a pas put éviter Srebrenica ou le Rwanda, s’est faite doubler par les Etats-Unis dans la gestion du dossier irakien et les scandales touchent tant les casques bleus, dont certains ont été accusés de viols, que les dignitaire et diplomates de l’organisation dont plusieurs [parmi lesquels Kojo Annan, le fils] sont accusés d’avoir détourné de l’argent dans le cadre du programme ‘pétrole contre nourriture’). Tout cela, à quoi l’on pourrait ajouter la mort en 2003 de Sergio Vieira de Mello, sorte de bras droit de Kofi Annan, fait que l’ONU traverse une crise profonde.

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Mais malgré ce contexte chargé, l’Assemblé générale s’est contentée de répéter les habituelles platitudes sur le terrorisme et la pauvreté (c’est pas bien. C’est mal). Une mesure a néanmoins été adoptée à cette réunion, la « reconnaissance d’une obligation collective de protection des populations face à des génocides, nettoyages ethniques et crimes contre l’humanité à venir » (Libération, 19/09). Bien sûr cela semble une très bonne nouvelle, mais je ne peut pas m’empêcher de me poser des questions sur cette dérive de l’organisation vers un droit d’ingérence toujours renforcé, alors qu’elle fut bâtie sur les principes de souveraineté et de ‘tout sauf la guerre’. *Kashmere Le tremblement de terre du 8 octobre au Cachemire à fait plus de 73000 morts et a privé 3 millions de personnes d’un abri alors que l’hiver himalayen approche, et que la température dans certaines zones peut atteindre –25°C. Un drame. *Mauvais timing pour le Malawi « Sur la seule Afrique australe, on estime que 8,5 millions de personnes ont besoin d’une aide alimentaire d’urgence, dont plus de 4 millions au Malawi ». « Nous essayons depuis des mois d’alerter l’opinion mondiale, mais sans grand succès » (Simon Plues du Programme Alimentaire Mondial, cité dans Sud-Ouest, 28/10) Mauvais timing donc pour le Malawi, qui s’est déclaré en état de catastrophe nationale depuis le 17/10. Trop tard, on a donné pour le tsunami, pour le Cachemire (et même là on s’est montré pingre), l’Afrique attendra. Encore. L’ONU a demandé 88 millions de dollars d’aide, et n’en a perçu que 28 millions. Des centaines de milliers de personnes vont mourir, qui du sida, qui de faim. En fait, on remarquera que c’est rarement l’heure pour l’Afrique. Des millions de personnes meurent chaque année, mais elles ont rarement le bon goût de faire dans le spectaculaire, elles meurent à petit feu. On a parfois l’impression que ce qu’il faudrait envoyer à l’Afrique, ce n’est pas de la nourriture, mais des conseillers en comm’. *Alerte verte Selon l’ENAPU (l’organisme portuaire péruvien), le fleuve Amazone a atteint début octobre à Iquitos au Nord-Est du Pérou son plus bas niveau depuis 1969 (date à laquelle on a commencé à le mesurer), 3 mètres environ de moins que la moyenne des années précédentes. En Amazonie, région qui comprend 70% du fleuve, la sécheresse est encore plus flagrante : à Tabatinga, Près de la frontière colombienne, le fleuve n’a par endroit plus que 1 mètre de profondeur, contre 12 en temps normal. De plus, toutes les communes du territoire, à l’exception de la capitale, sont en état de ‘catastrophe naturelle’. La situation est grave : raison de plus pour réfléchir à ses causes profondes. A l’évidence, la déforestation (pour des causes diverses : feux, scieries, routes, élevages…) en est une ; on sait que 17% de la plus grande forêt du monde on disparu ces 30 dernières années. Les grands incendies qui ont ravagés récemment les forêts boliviennes sont également mis en cause. Mais le réchauffement climatique (encore lui), pourrait bien être un des principaux coupables. Pour des raisons évidentes (la chaleur favorise la sécheresse), mais aussi pour d’autres qui le sont moins. Selon certains climatologues (qui expriment néanmoins des réserves), la cause de cette sécheresse pourrait être la même que celle des cyclones qui ont frappés les Etats-Unis cet été : la chaleur inhabituelle des eaux de l’Océan Atlantique, en particulier dans le golfe du Mexique. Non seulement les masses humides qui se déplacent habituellement à l’intérieur des terres se sont précipitées directement dans l’Océan, mais de plus, une partie de l’humidité qui s’est abattue de façon violente sur les Etats-Unis aurait du se diriger vers l’Amérique du Sud. *Travailler tue 2,2 millions de personnes par an meurent d’accidents du travail, c’est le chiffre (officiel, il est néanmoins douteux que tous les accidents du travail soient reportés avec transparence à travers le monde) rendu publique par le Bureau international du travail (BIT, organe exécutif de l’OIT, organisme qui fait partie du système des Nations-unies) à l’occasion du Congrès mondial sur la sécurité et la santé au travail, qui se déroulait à Orlando du 18 au 22 septembre. Chiffre auquel il faut ajouter 160 millions de maladies causées par le travail, ainsi que 270 millions d’accidents du travail entraînant une incapacité de plus de trois jours. Comme le fait remarquer Emmanuelle Veil dans un article du Charlie Hebdo du 28/09, le nombre de morts dus aux accidents du travail est presque deux fois supérieur au nombre de morts dus aux accidents de la route (1,2 millions par an selon le rapport 2004 de l’Organisation mondiale de la santé [OMS]), mais beaucoup moins médiatisé (en fait, on en entend pratiquement jamais parler), même à l’occasion d’événements à caractère mondial, comme le congrès d’Orlando ou la Journée des accidentés du travail qui avait lieu partout dans le monde ce 28 avril. Allez savoir pourquoi…

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*La police nuit gravement à la santé Début octobre, Mr Robert Davis, un instituteur à la retraite de 64 ans (qui affirme n’avoir pas bu une goutte d’alcool depuis un quart de siècle), est interpellé pour ébriété dans une ruelle du quartier français de la NouvelleOrléans. Petit détail, il est noir. Deux policiers lui passent les menottes et sans que l’on sache pourquoi, la scène dégénère et un troisième policier lui assène des coups (par derrière et sur la nuque). On le sait car malgré un quatrième policier à cheval qui tente de faire écran, un cameraman filme la scène. Alors que Mr Davis est à terre, en train de se faire rouer de coups, un deuxième journaliste, de l’APTN, tente de s’interposer : il est plaqué contre une voiture, et menacé. Mr Davies a finalement été inculpé pour ébriété, ainsi que pour rébellion ! Les trois policiers ayant participés à l’interpellation ont été suspendus, malgré une défense en béton : ils ont déclarés avoir travaillé 20 heures par jours pendant les semaines qui ont suivi Katrina. Maintenant, on en a la preuve : le travail rend con ! *UNESpOir Le 21 octobre, au cours de la conférence général de l’UNESCO, a été adopté (148 pour, 4 neutres et deux contre [les Etats-Unis et Israël]) la ‘Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles’. Elle entrera en vigueur si elle est ratifié par 30 Etats en moins de 2 ans. Concrètement, qu’est ce que cela signifie ? Il y a des clauses dans cette convention qui sont susceptibles de prendre le pas sur les dispositions d’autres institutions internationales ; ce qui veut dire qu’au moins théoriquement, on devrait pouvoir mettre des pans de cultures nationales ou ethniques en dehors du cadre de l’AGCS (accord général sur le commerce des services, le volet ‘libéralisation des services’ de l’OMC). Il ne faut pas se faire d’illusion, ce n’est pas une convention, même internationale et même dépendant d’un organe de l’ONU, qui lissera les rapports de force au sein du commerce international ; mais le fait qu’on reconnaisse que certains biens et services puissent échapper à la libéralisation représente une jurisprudence formidable. *New-Delhi Un triple attentat à intervalles rapprochés a causé la mort de 62 personnes et fait plus de 200 blessés à NewDelhi ce samedi 29 octobre. Une première bombe a explosé dans le centre de la ville, sur le principal marché du quartier de Paharganj. Une deuxième quelques minutes plus tard au Sud, près d’un marché de Sarajini Nagar. Une troisième presque immédiatement dans un bus du quartier de Govindpuri. « Un groupe peu connu du nom d’Inquilab (révolution), lié à la guérilla islamiste opérant au Cachemire, a revendiqué dimanche la paternité des attentats » (AFP, 31/10). L’homme qui se présente comme le porte parole du mouvement, Ahmed Yar Gaznavi, a déclaré : « De telles attaques se poursuivront jusqu’à ce que l’Inde retire ses troupes du Cachemire et y cesse ses activités inhumaines. » (l’Humanité, 31/10) Ces attentats sont intervenus alors que l’Inde et le Pakistan finalisaient un accord visant à ouvrir leur frontière commune pour faciliter l’aide aux sinistrés. Même si le gouvernement pakistanais a qualifié les attentats d’ « actes terroristes criminels » et s’est dit choqué par « cet acte barbare » (Sud-Ouest, 30/10) ; il est à parier que ces événements ne vont pas jouer pour la paix entre les frères ennemis. *Jordanie aussi 3 attentats quasi-simultanés à Amman ont fait 57 morts et plus de 300 blessés le jeudi 9 novembre vers 21h. Ces attentats ont tous frappés des hôtels, dont deux ‘5 étoiles’, le Radisson SAS et le Grand Hyatt, où résident principalement des occidentaux, tandis que le dernier, le Days Inn, est un ‘3 étoiles’ qui reçoit principalement des juifs et dans lequel avait lieu une cérémonie de mariage. C’est la première fois que des attentats d’une telle ampleur se déroulent en Jordanie (dont les services de sécurité sont par ailleurs réputé pour leur efficacité). Ceux-ci ont été revendiqués par la branche irakienne d’Al Quaeda. *Effervescence en Bolivie On se rappelle que suite aux émeutes du début de l’année en Bolivie, le président avait du démissionner en juin. En attendant une élection présidentielle prévue le 4 décembre, c’est à monsieur Eduardo Rodriguez Veltzé d’assurer l’intérim. Evo Morales, le candidat en tête dans l’opinion publique, est remarquable. Tout d’abord c’est un indigène, un indien Aymara (un indigène n’a jamais été au pouvoir dans une démocratie [?] sud américaine), ensuite il était déjà connu comme dirigeant syndical avant de créer en 1999 le Mouvement vers le socialisme (MAS). Sur le plan politique, le MAS s’est distingué cette année en faisant approuvé par le parlement en mai une loi sur les hydrocarbures qui donne à l’Etat un plus grand contrôle sur le secteur et élève les impôts pour les pétroliers. « Cela ne signifie pas expulser, ni confisquer, ni exproprier les biens des entreprises qui travaillent » (AFP Infos Economiques, 18/11). « L’Etat, comme n’importe quel Etat, doit exercer son droit de propriété sur ses ressources naturelles » (ibid).

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Alors quand le 28 octobre, à cause d’une vague embrouille de représentation des provinces, l’élection a été annulée, les gens étaient quelque peu tendus. Heureusement, le président intérimaire a stoppé la polémique (il a accordé 3 sièges supplémentaires à Santa Cruz, +1 à Cochabamba, -2 pour La Paz, -1 pour Oruro et Potos) et rétabli des élections pour le 18 décembre. *Vue sur gravats Début novembre, ouverture du premier hôtel ‘5 étoiles’ en Afghanistan. Le prix des chambres monte jusqu’à 5000 $ la nuit, seulement 100 fois le salaire mensuel moyen sur place (pour ceux qui disposent d’un salaire). Les chefs ; d’états, d’entreprises et des mafias du monde entier pourrons s’y réunir pour régler leurs petites affaires. Assurément une priorité. FRANCE : *Rue de la fraternité Face aux incendies de logements insalubres qui ont fait plus de 40 morts cet été, Nicolas Sarkozy a décidé de faire évacuer les squatts ‘dangereux’ (Quel humaniste !). Et il a commencé par un coup d’éclat ! C’est en effet le vendredi 2 septembre (jour de rentrée scolaire) qu’il a commencé ses rafles dans la Rue de la Fraternité (!) ; les policiers sont arrivés à l’aube pour déloger la soixantaine de squatters qui s’abritaient sur place (et qui n’avaient bien sûr pas été prévenus, contrairement aux journalistes), en toute fraternité, bien sûr. Et le canard enchaîné (comme d’hab’) du 07/09, en la personne de Jean-Luc Porquet, de nous révéler le détail qui tue : « Ceux qui sont bien attrapés aussi, ce sont les gens de la mairie PS du XIXe. Après médiation entre représentants des squatters, de la Fondation Abbé Pierre, et de la préfecture, ils avaient monté un projet de relogement pour la plupart des familles, lesquelles devaient trouver un toit correct dès mars prochain. Ils avaient privilégié le dialogue, le travail de fond, la concertation. Bande d’amateurs ! Ils avaient oublié les caméras. » Après un mois bien rempli par des expulsions à répétitions (sur le même mode : les trois familles expulsée le 17/09 étaient en cours de relogement), Mr Sarkozy nous prouve que dans le gouvernement, le plus poète n’est pas celui que l’on pense. Pour sa 11e expulsion, ainsi que pour finir le mois de septembre en beauté, il a fait fermer l’hôtel de l’Espérance. *Déontoloquoi ? 510,77 euros, c’est ce qu’il restait en septembre à la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) pour finir l’année. Selon Marc Jeanjean, représentant de la ligue des droits de l’Homme des Bouchesdu-Rhône et membre de l’Observatoire départemental sur les violences policières illégitimes, cette « haute autorité indépendante qui produit un rapport annuel faisant apparaître les mêmes dysfonctionnements que ceux relevés par les associations de terrain » est d’une « importance (…) évidente » (Charlie Hebdo, 28/09), puisqu’elle permet entre autres choses aux magistrats qui instruisent des plaintes pour ‘manquement à la déontologie policière’ de disposer d’autres rapports que ceux de la police. Alors pourquoi n’a-t-elle pas les moyens de travailler ? Non pas à cause d’une mauvaise gestion, mais à cause d’un gel de crédit de 20% de son budget (environ 100000€) intervenu en avril. Un gel de crédit d’autant plus étonnant que créée en juin 2000, la CNDS a connue depuis 2001 une hausse de ses saisines d’environ 80%. *République Française de Moldavie Cocorico ! Après un tour d’Europe (géographique) des prisons de 32 pays, Mr Alvaro Gil-Robles, commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, a remis la médaille de merde à la France : « Sauf en Moldavie, je n’ai pas vu de prison pire que ça ! » (Libération 22/09) Une surprise ? Pas vraiment, puisqu’en 2000 déjà, un rapport d’une commission d’enquête de l’Assemblée qualifiait les prisons de « honte pour la République ». Bon, déjà ils sont logés, en France c’est pas si mal. *Bernie & Clyde Le jeudi 22 septembre, la justice (?) annonçait un non-lieu dans l’affaire des ‘frais de bouches’ des époux Chirac (on allait pas commencer à chipoter pour deux petits millions d’euros). Un nouvel horizon libre de poursuites judiciaires s’ouvrait devant notre adorable petit couple. Ou pas. Puisque depuis les années 80 et jusqu’en 1999, les époux Chirac voyageaient gratuitement (on appelle cela un abus de bien social) sur la compagnie Euralair, dirigée par un vieil ami du grand Jacques, Alexandre Couvelaire. Jusque là, on est dans le domaine des petites magouilles entre amis (et il est bien connu qu’en France on inquiète pas un homme politique pour si peu). Mais les choses se gâtent bientôt puisqu’en 1999 l’entreprise

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fait faillite, et qu’en 2003 un ancien employé porte plainte pour « abus de biens sociaux et banqueroute frauduleuse ». On aurait alors pu penser que l’affaire aboutirait devant les tribunaux. Il n’en est rien. Aucun juge d’instruction n’a encore été saisi et par un astucieux système de magouilles (dont la loi Perben 2) le parquet en est à sa troisième enquête préliminaire et ne semble pas décidé à ouvrir une information judiciaire. Et ce malgré le fait qu’une perquisition en date du 20/09/05 réalisé par la brigade financière a trouvé des preuves que le premier drame de France (qui ne dispose d’aucune immunité), a bénéficié d’au moins 6 jets privés entre 98 et 99. *Les gauches Le 22 septembre, Ségolène Royal annonçait sa candidature à la candidature – en clair, elle souhaite représenter le PS aux élections présidentielles de 2007. Dans un parti au sein duquel le pugilat est devenu l’activité première (moins fatiguant que la politique), on pouvait s’attendre à de petites phrases assassines. Comme celle d’Henri Emmanuelli, pour qui Mme Royal est le 9e ego présidentiel du PS (personnellement je n’en compte pas autant, tout au plus 7 : Aubry, Fabius, Jospin, Kouchner, Lang, Royal, Strauss-Kahn, mais à l’évidence Mr Emmanuelli est mieux placé pour savoir, on apprécierai néanmoins qu’il nous fasse bénéficier de ses lumières) qui s’est exclamé : « jusqu’alors, je pouvais offrir des After Eight, mais After Nine, ça n’existe pas ». Mais ce qui a surpris et choqué, c’est la teneur profondément sexiste de plusieurs des réactions au sein du PS (un parti qui se veut celui du progrès social), comme : « L’élection n’est pas un concours de beauté », ou encore « mais qui va garder les enfants ? ». Bien sûr, ces propos sont choquants. Mais passé le premier choc, il est bon de se poser des questions. Une, en particulier, me semble plutôt pertinente. Pourquoi la candidature de Martine Aubry (une femme elle aussi), n’a-telle déclenchée aucun propos de cet acabit ? Mathieu Lindon, dans un article de Libération du 1/10, nous apporte un début de réponse sur ‘Ségo’ : « Elle est la maman de fer du paysage électoral. Elle a accouchée dans Paris Match ». Sans excuser, ça explique. Je m’imagine assez mal Ségolène Royal en présidente de la République. En revanche, je l’imagine très aisément à la tête du PS. Une Mme Royal, pour un cirque ça sonne bien, non ? *La crise ? Pas pour tout le monde Le CAC40 se porte bien. Très bien même. Alors que les profits de l’année 2004, dévoilés au printemps, était déjà conséquents (57 milliards d’euros, plus du double par rapport à 2003), si conséquents en fait qu’ils ont fait jaser au début de l’année. D’autant plus à cause de la façon dont ils ont été employés : rachat d’action, fusionsacquisitions, consolidation boursière ; très peu pour la masse salariale ou l’investissement. L’année 2005 s’annonce encore bien meilleure : « le premier semestre de cette année a été d’un juteux niagaresque. Plus de 40 milliards de profits ! Un geyser de bénéfices ! Jamais nos pédégés n’ont autant engrengé ! Total, par exemple, notre roi du pétrole national, a empoché plus de 1 milliard par mois. Et les banques : les coffres-forts de BNP-Paribas débordent de cash. L’acier : Arcelor double carrément sa marge. L’hôtellerie (Accor), le béton (Bouygues), les missiles (EADS), la pub (Publicis), les bagnoles (Renault), jamais ces secteurs n’ont été aussi rentables, jamais les majors n’ont autant cartonné. » Et toujours rien pour les salariés. « Mais pourquoi ceux-ci y auraient-ils droit ? Une bonne partie des profits des multinationales, on le sait, provient de leurs activités à l’étranger, là où il y a des nouveaux marchés à conquérir, et des salariés à payer au lance-pierre. La France, avec ses charges sociales scandaleuses, son ISF confiscatoire, son Code du travail qui a le toupet de protéger le travailleur, n’est plus qu’un fruit sec. Pas rentable, pas compétitif. C’est par pur bonté que les majors du CAC40 paient encore des impôts chez nous. » (les citations sont tirés du canard enchaîné du 28/09). Ouais, merci ! Alors prosternez vous ! Non, mieux encore : tous à vos portables ; commandez un taxi pour aller au supermarché. A genoux et à poil devant le PIB. *Emploi Dans une chronique sur l’emploi parue dans Alternatives Economiques de novembre, Mr Jacques Freyssinet discerne une certaine « cohérence » dans la politique de l’emploi de Mr de Villepin, malgré « l’extrême fractionnement des dispositions adoptées ». Au travers de 6 ordonnances : #les contrats nouvelle embauches #les jeunes de 26 ans exclus des effectifs pris en compte pour la création d’institutions de représentation du personnel #un décret qui durcit les conditions de maintient de l’indemnisation du chômage #l’extension du ‘forfait jour’ et les nouveaux statuts de #‘temps partagé’ et du #‘collaborateur libéral’ , qui bien que limitées ; enfoncent un coin dans le droit du travail. Et de conclure : « La multiplicité et la complexité des textes, tous adoptés en juillet et août, ont pu contribuer à masquer leur cohérence potentielle. Ils constituent une mise en œuvre fractionnée, limitée d’abord à certaines catégories de salariés, d’éléments jusqu’alors considérés comme piliers du droit du travail : la cause réelle et

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sérieuse du licenciement, le droit de tout salarié à la représentation, le pouvoir du seul ministère du travail pour sanctionner les demandeurs d’emploi. Peut être n’est ce qu’un début ? » *Chômage Le taux de chômage en France est laborieusement passé en dessous de 10% et on tente de faire passer cela pour une réussite : « Le chômage baisse pour le cinquième mois consécutif » proclamait Le Figaro au début de l’automne. Puis un peu plus tard, ce fut le tour de Les Echos (30/11/05) : « le nombre de demandeurs d’emploi poursuit sa décrue pour le septième mois d’affilée ». En vérité c’est un plus mauvais résultat qu’on ne pourrait le penser, alors que le solde entre les arrivées sur le marché du travail et les départs en retraite se fait de plus en plus petit. C’est parce que « les babys-boomers d’hier [deviennent] des papys-boomers. Eux qui étaient venus gonfler les rangs des actifs à partir du milieu des années 60 vont commencer à prendre leur retraite. Au même moment, les enfants des années 80, beaucoup moins nombreux que leurs aînés, entreront dans la vie professionnelle. On peut donc prévoir, sans grand risque de se tromper, une stabilisation, puis une diminution de la population en âge de travailler, après plus de quarante ans de hausse très soutenue » (Alternatives Economiques, 02/05). Et avec le vieillissement de la population française en cours, la tendance ne risque pas de s’inverser dans l’immédiat puisqu’on estime qu’entre « 2005 et 2010, 650000 personnes devraient partir à la retraite chaque année, contre 480000 entre 2000 et 2005 » (Selon les travaux du groupe Prospective des métiers du Commissariat général au plan, cités dans Alternatives Economiques de février). Reste que si le départ à la retraite massif du papy-boom dégage une marge de manœuvre appréciable en matière de chômage et dégonfle les chiffres, en matière d’emploi la politique prime sur la démographie. Et en l’occurrence, malgré une « tonitruante politique de ‘réformes’ libérales » et le « recours aux radiations massives » ainsi que de « multiples sucreries offertes aux entreprises » (le canard enchaîné, 28/09), les résultats de Mr Villepin sont loin d’être impressionnants. *HaHaHaHaHaHaHaHaHaHaHaHa Ha Cela n’a pas l’air comme ça, mais des fois on rit bien en lisant Alternatives Economiques. Dans une brève du numéro de novembre, on apprend que : « Le deuxième train de marchandises privé à circuler en France depuis l’ouverture à la concurrence est tombé en panne lors de son premier trajet le 4 octobre dernier. Il a été dépanné par une locomotive… de la SNCF. » *Le retour de Nostradamus On se souvient que contre les estimations des experts (en l’occurrence l’INSEE), Mr Raffarin tentait en début d’année d’épater la galerie avec ses talents d’haruspice. Cette fois ci c’est messieurs Villepin et Breton qui ont décidés de tirer le chiffre de la croissance économique française de leur chapeau. Ils sont tombés sur 2,25% (pourquoi pas…), une croissance qui pourrait éviter que le déficit public français ne passe la barre critique de 3% du PIB en 2005, et permettre de le faire baisser à 2,9% en 2006. Seulement les experts pour l’Europe du FMI (Michel Deppler à leur tête) tablent plutôt sur 1,5% de croissance, ce qui aurait des conséquences sur la maîtrise du déficit : « selon les informations à notre disposition, le déficit français sera équivalent à 3,5% du PIB en 2005 et 3,7% en 2006 » (Le Figaro, 30/09). Ce qui serait fâcheux puisque ces chiffres sont bien supérieurs à ceux prévus par le pacte de stabilité européen, ce qui signifierait que la France devraient encore payer de lourdes amendes à l’Europe (c’est une vieille tradition politique de la France, qui préfère payer des pénalités que de se plier au Conseil de l’Europe). Et le canard enchaîné (05/10) de remarquer que « les informations à la ‘disposition’ du FMI étant celles fournies par Bercy dans les instances internationales, soit Deppler ne sait pas faire ses additions, soit Villepin et Breton ont ‘arrangé’ les leurs ». Impossible. Ce n’est pas le genre de la maison. *Vive la France qui ose ! Début Octobre Mr Pascal Clément, garde des Sceaux, a proposé la rétroactivité d’une loi sur le port du bracelet électronique pour les délinquants sexuels. Juriste, ancien président de la commission des lois de l’Assemblée nationale, il sait exactement ce qu’il fait lorsqu’il déclare aux députés : « Le texte que je propose d’adopter est susceptible de violer les règles les plus fondamentales de notre ordre juridique, je vous demande cependant de le voter et de faire en sorte que cette violation ne puisse être sanctionnée par le juge constitutionnel. » En clair : aidez moi à m’asseoir sur la constitution et offrez moi l’impunité ! A côté de cela, quand Mr Baroin, ministre de la France pas vraiment française, propose de révoquer le droit du sol, il a l’air d’un aimable réformiste…

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*Clichy-sous-bois « Il y a 20 ans déjà, on se disait : ça va péter. Aujourd’hui, ça pète. » (CQFD, 17/11) Trois semaines d’émeutes dans les banlieues ont secoués la France. La mèche ? La mort de deux jeunes hommes, Bouna et Zyed, qui aurait du être évitée. Les causes profondes de ses émeutes sont évidemment à chercher ailleurs, peut être bien dans la rupture du contrat social. *Pétrole contre pourriture La France joue dans la cour des grands. En produisant ses propres accusés dans le scandale pétrole contre nourriture (c’est à dire depuis que l’on sait que Pasqua et Chirac sont intouchables) : messieurs Jean-Bernard Mérimée et Serge Boidevaix, rien moins qu’ « ambassadeurs de France à vie ». Ses messieurs ont détournés de l’argent au cours d’une mesure censément humanitaire de l’ONU, destinée à soulager la population irakienne victime d’un embargo international. Jean-Bernard Mérimée, qui fut ambassadeur de la France à l’ONU est accusé d’avoir détourné 165000$ à son profit, tandis que Serge Boidevaix, qui a été secrétaire général du Quai d’Orsay, aurait détourné 200000$. Même si Mr Villepin est intervenu pour défendre le Quai d’Orsay, récusant : « l’amalgame entre la diplomatie française, la politique de la France et les comportements individuels », c’est un coup dur pour la diplomatie française (qui n’avait franchement pas besoin de cela), qui se désolidarise totalement de ses anges déchus. On se réjoui néanmoins de les savoir entre de bonnes mains, puisqu’à partir d’octobre ils doivent s’expliquer devant le juge Courroye, « adepte de la détention préventive et virtuose de l’interrogatoire (…), qui n’a jamais été très diplomate. » (le canard enchaîné, 26/10) CULTURE : *Vade Retro satanistes ! Pour lutter contre la tendance gothique que Benoît XVI interprète comme une montée du satanisme, de très officiels cours d’exorcisme sont donnés à Rome depuis le 13 octobre. On s’amuse comme on peut. *MONEY$hot Eclectic hip-hop with reaaaaal chunks o’ hit in it. Un des meilleurs DJ du Pays de Galles propose une bonne partie de ses mix-tapes à télécharger ou à écouter à partir de son site : www.djmoneyshot.co.uk (ainsi que les dates de ses résidences à Cardiff – comme le Hustler Showcase - ou ses dates de tournées, pour ceux qui voyagent). Money$hot, c’est beaucoup de hip-hop et de funk, avec un peu de trip-hop, de rock et une touche d’électro. Si vous ne le connaissez pas encore malgré sa tournée avec l’équipe de streetball AND-1, ses 3 showcases sur le show radio de Ninja Tune, Solidsteel ; ou sa nomination comme ‘meilleur DJ au Pays de Galles’ au Welsh Music Awards 2004 et que vous appréciez le hiphop, précipitez-vous (je vous recommande particulièrement Roboplegic, mais c’est tout bon). *25 ans d’alternatives 25 ans qu’Alternatives Economiques s’efforce d’explorer « les marges de manœuvre existantes au sein même de notre système social, montrer les enjeux de société cachés dans les débats économiques et sociaux, et s’intéresser aux conséquences sociales des choix effectués autant qu’à leurs effets économiques. Parce que, pour nous, les choix politiques étaient plus ouverts que ne le disaient, à l’époque Raymond Barre, le premier ministre français ou, au Royaume-Uni, Margaret Thatcher avec son fameux ‘there is no alternative’. Il s’agissait donc d’abord de montrer que, même si tout n’est pas possible, l’économie est forcément politique et ne se réduit pas à déterminer ‘la seule bonne solution’. » Pari difficile à tenir, pour Denis Clerc et tous les collaborateurs d’Alter Eco, de faire de la pédagogie sans « chercher à être un laboratoire d’idées ni une revue d’élaboration théorique ». Le résultat est une boîte à outils plutôt qu’un programme. Stimulant. *PLanbPLanb PLPL, le journal de résistance sardon auquel je fais allusion dans les cahiers d’été et la faim de l’histoire (que je pille honteusement en fait), fait peau neuve. Ce journal trimestriel combat depuis juin 2000 le PPA, le parti de la presse et de l’argent. « Autant dire les médias qui mentent, les patrons qui plastronnent, la gauche qui capitule, les intellectuels à gages ». Il s’offre désormais une petite interruption et organise une souscription pour lancer le PLAN B. L’équipe de PLPL et du Fakir – un périodique d’Amiens – vont se rejoindre pour éditer tout les mois la critique du PPA avec laquelle ils nous ont régalés jusqu’à présent, accompagnée désormais d’une enquête sociale et de reportages.

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PLPL, qui travaille en étroite collaboration avec Acrimed, action critique médias, dispose d’une incroyable ‘Base de données délicieuses’, qui lui permet de ressortir ce qui a été dit ou écrit dans un large panel de médias ces 20 dernières années. Jouissif. Si vous êtes intéressés par les dessous pas toujours affriolants des médias, vous pouvez aussi consulter le dossier la presse en crise dans le numéro de mars 2005 d’Alternatives Economiques, ou Manière de voir/Le monde diplomatique d’avril-mai 2005 : combats pour les médias, ou encore le hors-série de novembre-décembre des Casseurs de pub, en collaboration avec le journal de la décroissance, sur les médias et la pub. A consulter également, Les nouveaux chiens de garde de Serge Halimi, Sur la télévision de Pierre Bourdieu et Libération de Sartre à Rothschild de Pierre Rimbert, tous trois aux éditions ‘Raison d’Agir’, La fabrication de l’information, par Florence Aubenas et Miguel Benasayag, aux éditions ‘LaDécouverte’, ou encore l’Almanach critique des médias, aux éditions ‘Les Arènes’, une collaboration entre PLPL et les Casseurs de pub (ouvrage rédigé sous la direction de Olivier Cyran & Mehdi Ba). Et bien sûr, sur internet : www.acrimed.org, mais aussi, ceux qui disposent d’un accès à europresse (comme certaines Médiathèques) peuvent se brancher sur une base de donnée qui rassemble une bonne partie des articles de la presse quotidienne ‘de référence’ des années 80 à nos jours, classés par mots clefs et par date de parution. Pratique. *Encore un p’tit pour la route C’est à dire un autre extrait d’une BD de Maurice et Patapon (Coupables, forcément coupables, aux éditions hoëbeke) M : Avant une chenille était sûre de devenir un papillon… maintenant, avec le chômage et la flexibilité… P : Elle peut très bien finir rhinocéros dans une boîte d’intérim.

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Et maintenant, pour quelque chose de complètement pareil, pas de pub :

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Interlude sans intÊrêt‌ (2) ******************************************************************************************

some people, knowing me for the finely-balanced young boy i sure am (yep), might wonder the reason why i am writing from the 'resty pine sanatorium', a well known highlight of the finest in switz psychotherapy resort. Welll, 'They' tell me it all started with the visits, but i know it really didn't. At the time i managed to get the little grey men to conduct their hideously painfull tests on my parents rather than on me (if i remember well i pointedout that there was more of them apiece and two of them + i had cooties n'they didn't like the sound of those) and exceept from a little chronic guilt (or iss it gas?) i wasn't troubled further. (to be honest i didn't even recall the incident before 'They' started putting electricity through my skull. funny to say that i didn't realise being Julius Caesar up until that point either. It only goes to show, memory can be tricky sometimes...) Point is, i was feeling a bit shaky after some travelling on an island of which i can barely remember a thing....reminiscence flickering on the edge of consciousness... getting publicly buttrapped by a local monkey (my spine will never be the same again)... that beautifull girl who took me to a party where i was fed fruits and hallucinogenic paste and all they wanted was 66,6 pints of my blood (an' maybe a little organ or two)... being handcuffed to somebody's heater... and a succession of getting kicked out of places (always and never quite the same)... Ssooooooooooooooooooooooooooo, anyway i somehow managed to make it back to the homeland. There i tried to restore my health and sanity best as i could, and started taking it easy, working to sustain a decent living. It was still in this 'back to the roots' attitude (and because i always valued chance), that i signed up to go learn farming in the south of France. Knowing that it was a mere two hours ride from Toulouse me and the other students should have wondered why we were loaded aboard plane secretly and at night. I guess the cold, the late hour and the machineguns aimed at us sorta cooled our wits. After long hours of flight (especially as there was 4,76 of us per cubic meters), we finnaly arrived at a place which looked like a playcamp for demons of the 4th and 5th circles of hell. 250 pounds puppies were to be our 'nurses' while we would be doing our homework. I soon noticed a coupla things 'bout those. First, they didn't like being called 'good boys' and second, they could swallow a man in 3 gulps (of course, they liked it better to chew, what with the fun n' the blood and all, but they really didn't like being called 'good boys') Fortunately we were soon assigned to farming, in charge of 473 hectares of poppy fields I must say it really wasn't all that bad for me, specially as i had previous experience of sleep and water deprivation + i really got on well with our 'hosts' (i only lost one ball and half my left leg to the nurses) It was not long after they started training us to jump on landmines and swallow medium-sized atomic silos to pass frontiers with that the camp was assaulted. bim badda boum ...........next thing i knew, i was in another summer camp, wearing orange pyjamas. Life there was really nice comparing to the other camp, as our jailors were very friendly, taking photos with us and all (even if i'd like to get back the one on which i'm licking some G.I.'s dog's balls).

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Then it's all going a bit fluffy again, i just remember undergoing some medical tests (like swallowing my wheigh in speed, riding a tank on acid or 73 days with no light or sound...). But then i do very clearly remember Georges Clooney (who's really undercover master of the universe) asking me to kill the black pope, who's none other than Britney 'satanovitch' Spears, Witch-King of the dark realms. So, ever since, i killed every chearleading squad members i saw, and i still ain't got throu' to him! Oh! Georges! Georges! Why hast thou forsaken me! Mommy mommy! make hit stop! hmmmmmmmmmm! is that blood i smell in your urine? Anyway, it's ever so nice talking to y'all people, specially as i won't be able to do so for some time cos i'm changing room now. They say they need me to cover a shortage of good lab monkeys for cosmetic testing. gotta go, my ass is beeping again... see ya all in hell! I LOVE YOU (insert smoochy kissy sound effects) Dumboy, the flying lord of itchy groins

in smellly loins

WIN YOUR WEIGHT IN DEAD CATS! The offer of a lifetime: anyone who can tell me which genuine authors i shamelessly ripped of to write this piece of junk will receive the aforementioned gift, so kids, get ready to play (if you read this, you probably went through my lil' 'piece'. why? go get a life!)

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« Dans la production sociale de leur existence, les hommes engagent des rapports déterminés, nécessaires, indépendants de leur volonté, rapports de production qui correspondent à un degré déterminé du développement de leurs forces productives matérielles. L’ensemble de ces rapports de production constitue la structure économique de la société, c’est à dire la base réelle sur laquelle s’élève une superstructure juridique et politique et à laquelle correspondent des formes déterminées de la conscience sociale. Le mode de production de la vie materielle conditionne le processus social, politique et spirituel de la vie en général. Ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur être, mais au contraire leur être social qui détermine leur conscience. » Karl Marx, Contribution à la critique de l’économie politique

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Mwanzana ya Nzuani _ vert, verre et vers ******************************************************************************************

Trois points à aborder dans cet épisode : les déchets, les déchets et les déchets. A Ouani la journée du 31 approche à grands pas. L'idée est de mobiliser la population pour nettoyer la rivière qui sert de dépotoir, de lavoir, de baignoire et de piscine. Au cours des semaines passées les gens ont nettoyé leur rue et les enfants ont ramassé des sacs en plastique. Il n'y a pas de stress apparent chez les organisateurs, ce qui est probablement pas un bon signe vu qu'il n'y a pas encore d'organisation. On a quand même fait un essai aujourd'hui : on est partis brûler des sacs de sacs en plastique. On a trouvé un site à coté du lit d'une rivière asséchée (par le déboisement soit dit en passant). On a éventré les sacs et balancé du pétrole dessus. Il faut quand même une grosse demi-heure pour transformer 400 litres de sacs en un petit tas dégueulasse, puant et mollasson. Le 31 on espère aussi avoir un tractopelle pour dégager des buttes de déchets agglomérés depuis 30 ans avec de la terre : les agriculteurs récupèrent cet espèce de compost gris : il ne reste qu'à prévoir un endroit pour qu'ils jettent les bouts de plastique ou les boites en ferraille extraits indésirés. On rigole bien quoi. A Mutsamudu la ville vibre au rythme de la seconde édition de la... Star Academy. Et oui. Ici aussi, ça cartonne, sauf que c'est un poil différent. Il y a deux ans la première édition avait déchaîné les passions et vu deux des membres du jury (mzungus) être évacués en urgence vers la France sous protection militaire. Et comme le clament les affiches tendues près du rond-point de la Mairie : « La Star Academy : c'est reparti ! ». En gros, ça ressemble à quoi ? Les sélections se font à l'Alliance Franco-Comorienne, une assez grande salle. En deux montées de larsen, le présentateur essaie laborieusement d'appeler sur scène les quelques quarante candidats de cette années, jeunes et beaux dans leur petit haut rose ou leur T-shirt de basket. Les candidats passent ensuite les uns après les autres en play-back sur des chansons qui passent sur TF1 généralement, ça donne le niveau. Pour ceux qui chantent (parfois bien, parfois pas bien, parfois pas bien du tout) le type du son baisse la musique et monte le micro, mais alors on n'entend plus du tout la musique. Quand il essaie de mettre et la voix et la musique, ça fait du larsen pas possible. Tous les deux candidats il y a un happening avec des gens qui dansent pas trop mal sur de la musique afro-hip-hop matinée de on ne sait quoi de commercial et qui finalement est un peu pénible. Dans l'ensemble on se marre bien, on encourage, on siffle, on crie à la coupure du courant, on crie à l'arrivée du groupe électrogène, c'est plutôt sympa. Vivement la finale au stade de Missiri. Dans mon estomac les Ascaris sont à la fête. Ou peut-être pas. J'ai appris très récemment que c'était super important de traiter l'eau. En général je bois l'eau qui sort d'un filtre dans la cuisine, et en gros, ça va. En gros. Mais je fais parfois des exceptions et j'ai du choper un truc parce que je suis franchement pas très très en forme. Le plus souvent c'est des vers. les vers, c'est super fort. Le type avale les œufs en buvant de l'eau, ils se développent dans ses tripes (parfois ils remontent jusqu'à la gorge et ça fait tousser, d'ailleurs je tousse), ils font des œufs, et après ils dégage une substance qui fait Dieu sait quoi aux muscles de la partie médiane de l'anatomie du type qui va aux toilettes toutes les trois minutes : pour évacuer les œufs. C'est bien foutu quand même. Ensuite chaque ver à son cycle propre, qui peut passer par plusieurs animaux, plusieurs stades et tout et tout. C'est super intéressant. Par contre, c'est pas très sympa à avoir. Cela dit, je ne suis pas sûr d'avoir ça, pour le savoir il faudrait faire des analyses de selles à l'hôpital mais le personnel est en grève : les salaires ne sont pas versés depuis six mois. Voilà, amusez vous bien, et lavez vous les mains en sortant des toilettes. Y.

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Caché ******************************************************************************************

*Le prix de la victoire « On a mal observé la vie, tant qu’on a pas vu aussi la main qui, froidement – tue. » Nietzsche Le dernier film de Michael Haneke, Caché, est entièrement centré sur une maison. Toute maison est un authentique monde, bâti à l’intérieur du monde extérieur. Celle de Georges et Anne, c’est le monde des ‘bobos’ (bourgeois-bohème), autrement dit de l’élite culturelle parisienne ; le monde de la culture, la France-culture. On le sait, la ‘culture’ est avant tout une ouverture sur le monde extérieur (sa diversité, son changement, sa nouveauté). Mais où trouver cette ouverture dans la maison de caché, à l’intérieur de laquelle le spectateur éprouve vite, au contraire, une impression de confinement, d’étouffement, à la limite de la claustrophobie ? En fait, elle se trouve au centre même de la maison, dans sa pièce principale ; elle y est omniprésente, emplissant constamment le champ visuel : dans les centaines de livres qui s’étalent sur les étagères de la monumentale bibliothèque, et dans l’immense télévision qui en occupe le centre. Par les livres et la télé, le monde extérieur se déverse au centre même de cette ‘maison de la culture’, qui devient par là un modèle d’ouverture. Mais d’où vient alors ce fait que l’on s’y sente enfermé ? Ou bien – et surtout - pourquoi les gens qui la peuplent mènent-ils une vie si morne et répétitive, aux antipodes de l’incessante activité qui caractérise essentiellement le monde extérieur ? En effet, quand sa mère demande à Georges des nouvelles de lui et de sa famille, ce dernier est embarrassé : « non, vraiment, je ne sais pas quoi te dire… » : Georges, Anne et leur fils Pierrot mènent une vie étriquée, entre travail et repas de famille, soumise à l’habitude, radicalement exempte de nouveauté, d’évènementiel. Un événement est quelque chose d’inattendu, d’imprévisible, de nouveau, car il advient du dehors, il est une intrusion de la différence du monde extérieur. Or on doit se demander quel monde extérieur, quel dehors peuvent entrer dans cette maison dont l’ouverture est médiatisée ? Si les médias – livres et télévision – sont ce qui permet au dehors de pénétrer à l’intérieur de la maison, force est de constater que c’est sans jamais perturber le train-train des gens du dedans, sans que ce dehors fasse jamais événement dans leur vie. Les ‘médias’ sont, étymologiquement, des intermédiaires entre le monde extérieur et la maison : leur rôle est de rendre ces deux mondes commensurables. Mais cette opération est à sens unique, puisque les habitants de la maison et les gens qui organisent cette médiatisation sont les mêmes personnes : Georges dirige une émission littéraire à la télévision, et Anne travaille en haut de l’échelle d’une grande maison d’édition. Dès lors, la modification que font subir les médias au dehors pour qu’il puisse pénétrer à l’intérieur de la France-culture est fatalement réglée sur les normes de cette dernière : le monde extérieur est façonné jusqu’à être exempt de toute nouveauté, de toute différence par rapport au monde dans lequel il entre, bref jusqu’à ne plus être un monde extérieur. Ainsi voit-on Georges, lors du montage de son émission, couper une intervention sur Rimbaud. Rimbaud, la révolte, l’adolescence, la jeunesse : tout cela doit rester au dehors, caché. A travers la rencontre de Pierrot et du fils de Magid, le plan final du film révèlera précisément la jeunesse comme le lieu privilégié de la rencontre non médiatisée de la différence, de la compénétration immédiate de deux mondes étrangers – de la véritable ouverture. Mais chez les adultes cultivés, ce qui se cache derrière l’ouverture affichée du monde de la culture, c’est un système de médiatisation qui clôt ce monde sur lui même, qui le ‘coupe du monde’. C’est pourquoi cette maison, ce monde, est constitué par la répétition de l’habitude. C’est pourquoi il est toujours identique à soi, absolument uniforme, ce qui est symbolisé à l’écran par l’omniprésence de sa couleur, le blanc. Mais on ne doit pas s’arrêter à voir là un symbole ; peut-être ne doit-on même pas en voir du tout : ce serait complexifier inutilement le langage cinématographique de Haneke, dont la simplicité lui interdit de recourir à toute forme de médiatisation, fût-elle symbolique. Si les murs, les plafonds, les meubles, les objets, etc…, sont tous blancs, la blancheur est avant tout la couleur de la peau de ses habitants. Et – surtout - de la totalité des gens qu’ils fréquentent : là encore, on ne se mélange pas, on choisit ses amis relativement à soi. Seuls des gens de même couleur de peau et de même catégorie socio-professionnelle que notre couple ont le droit d’entrer dans leurs maison, dans leur monde ; il y a même une scène où leur couple de meilleurs amis (le patron d’Anne et sa femme) ne pourront en sortir – tandis que le lendemain, une femme, une infirmière, n’osera y entrer, et restera sur le seuil. Dans ce monde, c’est la ressemblance, l’identité, qui dicte les relations humaines. La différence – le noir – doit rester à l’extérieur, cachée : Rimbaud n’est-il pas aussi cet homme blanc parti vivre en Afrique, parmi les noirs ? Le monde de la culture apparaît ainsi comme un monde autoréférentiel et autonome (étymologiquement : qui se donne à lui même sa propre loi, ses propres normes), donc autosuffisant : une intériorité pure. Cela ne signifie pas qu’il ne soit pas borné par un dehors, mais que - c’est du moins l’apparence qu’il se donne - il se déploie sans aucune relation au monde extérieur. Mais cela est-il seulement possible ? Non,

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bien entendu, et c’est à l’art (en l’occurrence le septième) qu’il revient de dévoiler l’apparence, de révéler ce qui est caché derrière elle. Le constat est simple et bien connu, mais si vite oublié, caché par la machine médiatique, qu’il faut sans cesse le répéter, avec toujours plus de force, par exemple en l’étalant sur les écrans de cinéma : le monde de la minorité bourgeoise doit son existence et sa perpétuation au massacre du reste du monde. Non seulement au massacre du 17 octobre 1961, où l’on jetât dans la Seine des dizaines de maghrébins venus assurer la production des usines des grands patrons de leur ‘terre d’accueil’ ; mais encore au massacre au quotidien qu’est le mode de vie imposé aux habitants des cités des banlieues françaises ; enfin au massacre inqualifiable des populations du tiers monde. La bourgeoisie est au plus haut point dépendante des classes avec lesquelles elle se leurre de n’entretenir aucune relation ; cette dépendance prend la forme d’un massacre. Notre film ne s’occupe que de la France, et révèle au spectateur cette réalité cachée de ses conditions d’existence, le laissant sortir de la salle dans la solitude de sa culpabilité. Car qui va voir un film français primé à Cannes et au réalisateur étiqueté ‘art et essai’, sinon la classe de la population française dont le modèle est ce couple incarné par Daniel Auteuil et Juliette Binoche ? Ce couple, c’est nous – un modèle, et non un idéal : là encore, il ne saurait s’agir d’une représentation (comparative, métaphorique ou symbolique). Dans le film, un agent extérieur introduit dans la maison des cassettes vidéos, média d’un type particulier, en ce qu’il qui donne à voir à la télévision quelque chose qui a échappé à la censure télévisuelle : le dehors de la maison. Les cassettes forcent l’entrée de la maison, par elles le dehors véritable y fait intrusion, générant un authentique événement dans la vie de ses habitants, alors confrontés à l’autre, au différent – l’arabe, le noir – et à leur part totale de responsabilité dans sa misère, la violence faite à son corps, sa souffrance, sa mort, tous ces termes s’incarnant dans le personnage de Magid. De même, dans la réalité, un étranger, l’autrichien Haneke, introduit à l’intérieur du monde bourgeois français – dans ses salles de cinéma - des bobines qui en montrent l’extérieur atroce comme ce sur et par quoi il peut s’édifier et perdurer. Ainsi, à la question que se pose inévitablement le spectateur – qui envoie les cassettes ? -, l’histoire du film n’apporte aucune réponse, nous laissant le soin de la trouver dans notre réalité : c’est Haneke, bien sûr. Dans ce recouvrement exigé entre film et monde réel, dans cette adéquation entre fiction et réalité, les bobines du film Caché perdent leur caractère de média ; Caché n’est pas plus un symbole qu’une métaphore : le monde de Georges et Anne est notre monde ; le couple visionnant ces cassettes, c’est nous même regardant Caché ; leur malaise à la vue de leur contenu est le malaise qu’éprouve inévitablement le spectateur ; Georges se débattant pour ne pas voir ce qu’elles révèlent, allant jusqu’à s’enfermer dans un sommeil artificiel, c’est le spectateur qui sort de la salle et oublie vite son malaise par une conversation avec un ami blanc, la lecture d’un livre, ou en allumant sa télévision. Ce film, comme toute authentique œuvre d’art, ne représente pas le réel, il est ce réel mis à nu, débarrassé de ses apparences. Dans la rue – dehors donc - Georges manque de se faire renverser par un cycliste noir qui « déboule comme un fou à contresens » : le noir – l’altérité, la différence - assume dès lors tous les caractères essentiels de l’extériorité : mouvement, vitesse, changement, violence, folie ou anormalité, dérogation à l’habitude, aux normes garantes de la stabilité de l’intérieur blanc (ici le code de la route) ; il génère la peur, qui trouve sa contrepartie dans la sécurité (la scène se passe devant un poste de police) ; il s’exprime enfin, à la limite, comme souffrance et mort (dans la scène du suicide de Magid). Quand le noir a la rare occasion de pénétrer à l’intérieur la maison, ce qui ne se produit qu’une seule fois dans le film, c’est pour révéler la cachotterie fondamentale, essentielle, du couple et du monde qu’il incarne. Quand l’un des amis invités à dîner raconte une histoire où il laisse croire qu’il est un chien, tout le monde éclate de rire. Son amie, noire, l’interroge avec une naïveté enfantine : « et alors, c’est vrai ? ». Les adultes blancs ne lui répondent pas, et leur silence engendre le malaise, y compris chez le spectateur. C’est encore l’occasion de souligner le caractère simple, direct, immédiat, du langage de Haneke : oui, cette histoire est vraie, ces gens sont des chiens – donc nous aussi. Le chien est d’une part servilité, l’animal qui obéit aveuglément à la voix de son maître – comme nous obéissons machinalement aux ordres des médias (Achète ! Sois blanc, riche et beau ! Bats-toi pour l’être plus que les autres !) ; d’autre part chien de chasse, animal prédateur. Les proies, ce sont bien sûr les noirs et les arabes, quotidiennement sacrifiés comme ce coq que Magid enfant égorgea d’après le mensonge du petit Georges : « il est méchant, il embête tout le monde ». Comme c’est écrit sur une affiche de la chambre de Pierrot : « La victoire a un prix ». Le prix de notre victoire – être blanc, beau et riche – c’est, en France, comprimer les maghrébins banlieusards, une tuerie organisée d’après le mensonge des médias : ‘ils sont la racaille à traquer et à exterminer’. L’humanisme que nous affichons comme notre premier principe ( « Tous les hommes naissent libres et égaux… ») ne sert qu’à dissimuler notre nature de prédateurs, principe véritable de notre activité quotidienne, laquelle n’est rien d’autre qu’une grande compétition – aujourd’hui on dit compétitivité – que nous avons gagné d’avance. Caché est un film qui nous fait subir le même traitement que cette femme noire inflige à ses convives : en nous réfléchissant notre animalité essentielle, il nous destitue de notre humanité, ou plutôt la problématise : qu’est-ce que l’humanité ? A-t-elle seulement une réalité positive ? Ou n’est-elle qu’un masque, comme le suicide de Magid est le masque de son meurtre par Georges ? Réduire la vie de l’ennemi intérieur jusqu’à ce qu’elle se tue elle même – nous avons les mains propres. O.

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An engineer in Hell ******************************************************************************************

Attention : cet article peut heurter la sensibilité du lecteur et ne se veut en aucun cas l’avocat de l’industrie. Tout le monde est plus au moins conscient qu’il existe un réel phénomène de pollution lié aux activités humaines, et que celui-ci engendre des troubles nuisibles à l’homme, à la nature et à la planète. Il est clair que la pollution est, dans des proportions plus ou moins importantes, responsable des biens des maux au sein de notre monde : dérèglement hormonaux, mutations génétiques, disparition d’animaux de végétaux, érosion de la biodiversité, troubles climatiques… Certes nous ne disposons pas d’outil fiable à 100% permettant de prédire les retombées de nos activités. Cependant les équilibres naturels sont déjà altérés et se révèlent beaucoup plus fragiles que ce que les hommes semblaient penser depuis des décennies mais par inconscience, égoïsme ou simple inertie du système dans lequel on vit, les hommes refusent d’ouvrir les yeux. Quand on demande quels sont les acteurs qui génèrent cette pollution, certains répondront que ce sont les activités industrielles (chimie, pétrochimie, métallurgie, plasturgie, pharmaceutique...) et agricoles (pesticide, engrais…) qui sont en causes. D’autres plus sensible, diront que chaque homme, de part ses activités, pollue en se servant de sa voiture, en fumant sa cigarette ou bien encore en jetant ses papiers par terre. D’autres encore plus avisés diront que chaque homme, au quotidien, par la consommation d’énergie – sous forme électrique ou thermique – l’utilisation de la ressource naturelle ‘eau’, ou bien encore la production de déchets ménagers est un acteur de ce phénomène de pollution. Mais qui a conscience que le consommateur, par sa demande et sa consommation, engendre la production au niveau industriel et agricole ? Et par conséquent, la pollution inhérente a cette production qui est tant critiquée. En effet, chaque produit de consommation implique une production au niveau industriel ou agricole et donc les pollutions induites par cette fabrication. Les industries fortement critiquées du point de vue de la pollution par l’opinion publique répondent en réalité à une demande de la part de chaque consommateur. Par conséquent, le consommateur peut-être considéré comme un pollueur dans la mesure où c’est sa volonté, son pouvoir d’achat qui influe sur l’émission de pollutions diverses. Prenons l’exemple de l’« or noir » et des différentes industries dédiées à la transformation de dérivés du pétrole en produits intermédiaires et finis, prêts à la consommation. On n’oubliera pas d’y associer toutes les pollutions que nous savons si bien imputer aux industriels concernant l’extraction et la transformation du pétrole. Le pétrole subit premièrement une étape appelée raffinage qui permet la production d’essence, gasoil, ciments, bitumes, et de combustible pour la production d’énergie primaire mais aussi la production d’intermédiaires nécessaires à la pétrochimie. Cette première étape de raffinage nous permet donc de nous déplacer en voiture, avion, bateau ce qui, notons le, génère son lot de pollution… Elle permet aussi la gestion de notre système routier en assurant le développement et l’aménagement induits par le nombre croissant de nos véhicules ainsi que les besoins nécessaires pour la réfection permanente des routes occasionnée par nos déplacements massifs. Les matières premières dérivées du pétrole nécessaires à la pétrochimie permettent la fabrication de matières plastiques, de produits cosmétiques et pharmaceutiques, de teintures, de détergents. Il suffit de regarder pour se rendre compte de la quantité de matières plastiques présente autour de nous, de la dépendance des consommateurs pour les cosmétiques et les produits pharmaceutiques, de l’attrait que représente pour nous les nouveaux textiles possédant des teintes, des nuances, des reflets toujours innovants. Tout ceci dans un but unique : assurer l’assise de la qualité de vie moderne, soit notre vie. L’agriculture elle aussi utilise du pétrole et fournie l’alimentation dont nous avons besoin au quotidien et ce en suivant l’augmentation démographique. L’agriculture nécessite une quantité importante de pétrole, d’une

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part en tant que fuel pour les machines agricoles, et d’autres part en tant que matières premières pour la fabrication d’engrais, de pesticides et herbicides via la pétrochimie. Notons que l’épandage, d’engrais, d’herbicides et pesticides, réalisé de façon abusive et démesurée est aussi une cause de pollution. En effet, seul une infime partie des quantités épandues est utile, le reste autant dire la majorité se retrouve comme polluant dans des compartiments cibles tels que les fleuves et les nappes phréatiques dans des concentrations très élevées. Ajoutons que cette agriculture intensive orientée sur une production maximale ne laisse pas le temps aux sols de se régénérer naturellement ce qui cause un appauvrissement généralisé des sols – nécessitant un ajout d’engrais toujours, plus important pour assurer la production ciblée – voir dans certain cas à la désertification du sol considéré. Une fois de plus dans un seul but : assurer notre alimentation tachée par un gaspillage démesuré sachant que nous produisons des déchets ménagers inhérents à cette alimentation, qui sont eux aussi sources de pollution. L’agriculture utilise aussi le pétrole en tant que combustible pour chauffer des serres qui assurent la production de denrées alimentaires saisonnières, tels certains fruits et légumes, tout au long de l’année. L’on peut considérer ceci comme une source directe de pollution, et surtout comme un gaspillage énergétique de la ressource naturelle pétrole – qui rappelons le est en cours d’épuisement …- induit par notre volonté futile et inutile de manger des cerises en hiver ! Malheureusement d’autres cas similaires de consommation futile existe. On pourrait prendre l’exemple de l’or, mais le vrai, celui que nous utilisons pour fabriquer des bijoux. L’or est utilisé dans la bijouterie, la passementerie (broderies, tapisseries), l’orfèvrerie (vaisselle), l’industrie (composants électroniques) et aussi en dentisterie (couronnes). La bijouterie, a elle seule, représente les trois quarts de la production annuelle tandis que les applications industrielles – celles qui nécessitent réellement l’utilisation de cette matière pour ces qualités physico chimiques – en représente un dixième. Ce qui parait normal…et oui qui de nos jours qui peut se passer d’acheter des bijoux en or ?? Et bien il faut savoir que pour l’extraction de l’or, il faut utiliser des composés hautement nocifs pour l’environnement et même directement pour l’homme. Ces composés toxiques sont essentiellement de l’arsenic, du mercure, du cyanure et de l’acide chlorhydrique. On retrouve ces produits largués dans la nature dans les effluents post extraction qui n’ont pas été ou mal traités, et ce dans concentrations supérieures à celles fixées par l’OMS ! Et comme la plupart des gisements sont dans des pays peu développés, très intéressés par la manne que représente l’or et donc très peu regardant d’un point de vue environnemental, des animaux, des végétaux, des hommes meurent. Et ceci une fois de plus pour assouvir notre besoin de s’embellir, de posséder un bijou qui n’est finalement d’aucune utilité vitale pour son possesseur mais qui causera pour sûr beaucoup de dégâts ! Tout ceci semble montrer que le consommateur a une influence directe sur les pollutions qu’il critique à partir du moment où il peut contrôler la production et par voie de conséquence la pollution. Un dernier exemple, celui de la production d’énergie nucléaire où le gaspillage atteint des proportions effarantes. En effet il existe une solution simple et efficace de réduire la production d’énergie nucléaire pour combattre les pollutions et diminuer les risques technologiques qui nous font si peur : réduire la demande. Malheureusement le nucléaire est en perpétuelle surproduction pour faire face à un éventuel pic de demande dont l’opinion publique ne comprendrait pas qu’il ne soit aussitôt satisfait. L’offre est donc supérieure à la consommation normale et devant l’incapacité technologique de stocker de l’énergie électrique on assiste à un énorme gaspillage… A l’heure où un homme politique, désireux d’assurer les objectifs de son parti et d’assouvir les changements demandés par son électorat – et ce sans lui en faire payer le tribu ! – est fragile et dispose d’une marge de manœuvre proche de zéro l’obligeant à agir sur du court terme…à l’heure où les industriels sont dirigés par un patronat d’actionnaires souhaitant doper les actions sur du court terme une fois de plus, seul le consommateur semble capable d’agir ! On ne peut pas pour autant arrêter de s’alimenter, de se déplacer, de consommer de l’énergie mais on peut au moins tenter de rationaliser nos activités vitales. En prenant conscience que l’on a un rôle à jouer, en ayant un œil critique sur notre consommation, en limitant la surconsommation et le gaspillage, en diminuant notre production de déchets ménagers – liée au suremballage par exemple – en se fixant un seuil d’utilité pour un produit donné, et finalement en se servant de notre droit de veto de consommateur, on peut devenir acteur - consommateur et non plus simplement consommateur ‘innocent’. Ainsi en revendiquant haut et fort nos aspirations de consommateur acteur conscient du rôle qu’il peut jouer, il est envisageable de faire plier les industriels et les politiques vers un développement durable éthiquement responsable et volontaire et non plus exclusivement un développement durable économiquement viable comme celui mené à l’heure actuelle !

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ébats d’idées ******************************************************************************************

Ebats d’idées, c’est nos pensées qui copulent. Euh ?.. A partir d’une question simple mais lourde de sens (ainsi que volontairement floue et ambiguë), en l’occurrence pour le premier numéro :

Pragmatisme ou radicalisme ? Nous vous invitons à partager vos commentaires. Nous les ferons paraître (inch’Allah) dans un numéro à venir (a priori pas le prochain, ceci pour des questions de délais).

Merci de venir jouer avec nous !

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Contact : belbalecave@yahoo.fr


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