DÉSIR D’AIMER Lisa ARAGON
Lisa ARAGON - 2011
DÉSIR D’AIMER Lisa ARAGON
Emma rencontre Paul et décide de l’aimer. Aimer et être aimée, cela devient obsessionnel. Elle va passer toutes les étapes de la souffrance. Ira-t-elle au bout de sa folie ? Atteindra-t-elle le point de non retour ? Ou bien aura-t-elle la force de se faire face ? Née en 1962 à Orléans, malade dès son plus jeune âge, elle découvre l’écriture, poèmes, slam, textes,… Sans cesser jusqu’à aujourd’hui.
C’était le 3 mai 2011 ! CHAPITRE I
C’était le 3 mai 2011 ! Son énième rendez-vous ! Emma en avait marre de ces rencontres sordides. Bien sûr ! Elle était inscrite sur ces sites de rencontre, parce que son ego était en berne, parce qu’elle était trop seule et parce qu’elle pensait que cela l’amuserait quelque peu. Elle avait quitté, quelques mois de cela, son vieil amant et avait réglé son Oedipe compliqué avec cet homme de 23 ans de plus qu’elle. Cette relation avait été toxique et l’avait fait souffrir. Alors ! Pour véritablement tourner la page, elle eut envie de le tromper, de partager des moments de sensualité avec un autre. Pour voir. Au fur et à mesure de ses rencontres, elle s’aperçut qu’elle avait bien changée. Elle ne pouvait plus se perdre dans les bras d’un homme, juste pour le plaisir des sens. Le sexe pour le sexe, ça n’était plus pour elle et c’était pour cela que ce rendez vous serait le dernier. Tous ces clubs de rencontre, Emma en avait fait le tour. Il ne le savait pas, mais il était pour elle le dernier homme virtuel à qui elle accorderait un moment bien réel. Elle était blasée finalement. Il y avait tant à faire dans sa vie décousue ! Alors l’amour ! Elle n’y pensait même plus. Comme à chaque fois, elle était en avance. Observer la démarche de cet homme quand il arriverait était important pour elle. Bien installée à la terrasse du « tilleul » bar ou elle avait fixé la rencontre, elle eût le temps de siroter son déca et de fumer 3 cigarettes. Avant que celui-ci arrive, elle prit soin de se débarrasser de deux mégots, pour qu’il n’en reste qu’un dans le cendrier. Histoire qu’il ne pense pas qu’elle se sentait nerveuse en l’attendant. Enfin ! Elle le vit apparaître. - Il ne ressemble pas à sa photo se dit Emma. Quand à sa démarche, elle lui parue nonchalante. - Trop cool, pour l’être réellement. Elle eût envie de sourire, car lui non plus, ne semblait rien attendre de cette rencontre. Comme elle, il était là, c’est tout ! Physiquement, il n’était pas son style, mais avait-elle un style ? L’important pour Emma, c’était l’être lui-même. Quant à l’enveloppe charnelle, évidemment, elle avait bien quelques limites, mais rien d’exagéré.
Cela la dépassait que le monde ne soit que paraître, jugements et faux semblants. Mais revenons à cette rencontre! Il était aussi grand qu’elle était petite. Il s’est assis à côté d’elle et pas en face! -Quelle assurance, encore un type trop sûr de lui. -Il envahit déjà tout mon espace vital! Dans un premier temps, l’avoir juste à côté la mettait mal à l’aise. Puis, étrangement, elle n’eût plus envie de se défendre. Elle laissât faire, elle verrait bien! Cet homme, de toute façon, dégageait de bonnes choses et lui donnait le sourire. Petit à petit, elle éprouvât le besoin de rester là! Tout près de lui. C’était trop tard! Elle était bien. Paul (c’était son prénom) ne lui sortit pas le refrain habituel du style. - Tu es plus jolie que sur ta photo du site. Ou - A quand remonte ta dernière rencontre ? Ce qui pour Emma voulait dire. - Tu me plais et je te le fais savoir au cas où tu voudrais coucher. Elle connaissait les hommes et les trouvaient prévisibles. A 49 ans, les compliments ne lui faisaient plus perdre la tête. Dans ce genre de rencontre, les hommes t’envisagent très souvent sexuellement. Ils croient qu’on ne voit rien, mais ils regardent ta bouche et imaginent. Ou bien tes fesses et imaginent encore. Ils viennent en mâle parce qu’une femelle leur accorde un instant. Avec Paul, ce fût très différent. Emma ne ressentît rien d’immédiat mais elle était étonnée d’avoir baissé sa garde. Il semblait lui correspondre intérieurement. Quant à ce qu’il était aux yeux de tous ? Elle n’en avait strictement rien à faire. Elle lui trouvât du charme cependant. Elle eût l’impression qu’elle le connaissait déjà, que cette rencontre avait eu lieu. Il y a longtemps. Ailleurs. Il ne lui fit aucun numéro de charme et s’abstint de mièvreries. Paul lui parla de lui, de ce qu’il faisait, il s’intéressa à elle et était à l’écoute. Une paix et une sérénité c’était installé chez Emma. Elle savourait chaque mot, chaque rire. Elle était bien. La conversation de Paul était claire et intelligente, elle remarqua son regard bleu clair et elle aima ses cernes pâles. Elle eut envie de poser ses doigts dessus et de les effleurer. Elle eut envie aussi de se blottir tout contre lui.
Rien de sexuel non ! Juste un refuge. Une confiance. Ou un début d’amour ? Elle ne comprenait rien! Il l’apaisait. Après une heure de conversation, ils prirent congé l’un de l’autre. Ces deux là seraient bien restés ensemble ! Pour Emma c’était sûr. Quelques mails et quinze jours plus tard, ils se retrouvèrent pour un resto. Emma était heureuse, certains messages de Paul lui laissaient présager qu’il n’était pas indifférent. Le dîner ce soir-là était empreint de rire et de complicité et du plaisir d’être ensemble. Ni l’un ni l’autre n’abordèrent autre chose. Quand elle rentra chez elle, sur son visage, un grand sourire béat s’était installé. Elle venait de le quitter mais ne pensait qu’à lui. C’est donc naturellement qu’elle lui laissa un mail. Juste pour lui dire, qu’elle avait eu envie de prolonger cette soirée. Une réponse similaire la transporta de joie. - « Merde » ! Je suis accroc et je ne maîtrise rien ! Cela la perturba ! Ce soir ! Troisième rendez vous, Emma attendait celui qui allait la modifier génétiquement, son capitaine OGM ! Pour un écolo militant, ce surnom était parfait. Donc elle l’attendait en se demandant qui il était ? Parfois ses mails lui faisaient penser que peut-être il ressentait pour elle le même intérêt et le fait qu’il lui consacre aussi peu de temps (cela faisait un mois qu’elle ne l’avait pas vu) la faisait s’interroger. Mais bon ! Surtout ne pas se torturer. D’un autre côté, elle se défendait en se disant, qu’elle n’était pas sûre qu’un écolo militant ne l’entraîne dans une cause qui était bonne mais qui n’était pas celle pour laquelle elle avait envie de se battre. Bientôt 18 heures et pas de Paul. Tout au fond d’elle, Emma désirait qu’il n’en puisse plus d’avoir envie de la voir. Elle s’était hâtée pour être à l’heure, il y avait tellement longtemps qu’il lui manquait ! Ha ! Un texto ! Il allait être en retard et lui demandait de l’attendre. Attendre ! Emma ne voulait plus jamais attendre et pourtant. Le simple mot «attendre» la mettait en panique et la stressait. Quand on lui disait attends ! C’était viscéral, elle ne supportait pas. Attendre ! C’est ce qu’elle faisait quand elle était cette petite fille, elle attendait recroquevillé dans sa chambre, qu’on vienne lui faire du mal. Mal à son corps. Mal à son cœur. Mal à son âme. Attendre lui faisait mal.
Peu de temps après, Paul arriva alors ! Avant, après, qu’importait ! Seul comptait pour Emma, le moment présent. Et près de lui, elle se sentait vivante. C’est à ce moment précis, qu’elle eût conscience de ce qui se passait en elle. Elle chassa cela. Elle y penserait plus tard. Mais c’était sûr! Il était l’âme qui comblerait la sienne. Il lui semblait aussi que du côté de Paul, quelque chose se passait. Très bonne soirée encore, pleine de rire et de complicité, malheureusement écourté par sa fille Marion qui avait raté son bus et qu’elle devait aller chercher. Une fois rentré chez elle Emma n’entendait même pas ce que sa fille lui disait. Elle semblait attentive, mais elle était envahie de partout. Paul était là! Dans sa tête et elle sentait encore ce grand sourire béat sur son visage. Emma était guimauve et elle ne connaissait pas! Il fallait qu’elle lui laisse un mail, pour lui faire part de toutes ces choses qu’elle ressentait. Oh! bien sûr! Elle ne prononça pas le mot amour, elle ne le pouvait pas, impossible ! Elle n’avait jamais dit je t’aime en l’éprouvant vraiment. Et puis, au bout de trois rencontres, c’était complètement dingue ! Elle jeta sa panique d’amour très maladroitement, dans un mail qu’elle lui adressa. Elle parla d’attirance et autres termes assez mal choisis. Pour elle ça voulait dire. - Je t’aime et je ne respire pas sans toi. Son impulsivité ne lui fit pas envisager que ce qu’elle éprouvait, pouvait ne pas être réciproque. Elle n’y pensa pas une seconde. Quelques minutes plus tard, la réponse a son mail d’amour désordonné, lui parvînt. Celle-ci fut suffisamment cinglante pour calmer ses ardeurs. Il lui disait, qu’il avait bien senti son envie, mais que lui n’était pas sûr et n’avait pas eu de déclic. Il disait aussi qu’il n’était pas complètement désengagé d’une autre relation, qu’il aimait bien la voir comme cela et qu’il n’avait pas d’impatience. Il ajoutait qu’il ne voulait pas s’embrouiller ni embrouiller personne. Trop tard ! Une bonne baffe plutôt qu’un baiser. - Quel « con » ! Pourquoi venir sur un site de rencontre quand on n’est pas prêt ? Et pourquoi pas de déclic ? Ça n’était pas l’impression qu’elle avait eu. Elle le détesta et elle se dit : - Je ne suis pas une embrouille, sinon peut-être une belle embrouille d’amour. Qu’allait-elle faire de cet amour, qu’elle ne pouvait avoir que pour lui ? C’était lui l’embrouille, pour une fois que son cœur s’éveillait ! Elle n’avait pas envisagé d’aimer et encore moins d’aimer toute seule. Elle avait été pas mal égocentrique sur ce coup là, en pensant
que Paul puisse l’aimer en retour. Il faut dire que si elle s’était permise de tout déballer, c’était aussi parce qu’elle avait sentie qu’elle le pouvait et que la porte était ouverte. - Pas de déclic? Mon œil! Emma avait de l’empathie et se trompait rarement et ce soir-là, elle n’était pas la seule à être bien. En revanche Paul lui proposa son amitié. Elle aurait pu dire non, que cela était impossible et qu’elle ne l’aimait pas ainsi et qu’enfin, elle choisissait de ne plus le revoir. Au lieu de cela, elle laissa cette petite fille maso prendre la place de la femme qu’elle allait devenir. Elle accepta et n’eut plus d’autre choix que de l’attendre. ATTENDRE qu’on lui fasse mal. Encore. Paul était un véritable coup de foudre pour Emma, mais pour cette dernière, la foudre avait quelque chose de violent et d’inquiétant non! Ce qu’elle ressentait près de lui, c’était plutôt comme une belle journée ensoleillée, un jour de printemps avec une légère brise qui vous caresse le visage et vous fait soupirer d’aise. Mais là ! Tout de suite, c’était un orage qui la traversait, une douche bien froide, de la glace sur son cœur. Après une nuit agitée et pratiquement blanche, elle se leva, se regarda dans le miroir et se sentie très laide. Un masque qui faisait la « gueule » la regardait. Elle lui tira la langue. Elle avait mal au ventre ses tripes s’agrippaient et ses jambes ne la soutenaient guère. Elle était anéantie et elle pensait à lui, à chaque instant. Elle lui avait révélé ses sentiments, il aurait pu en profité pour prendre congé d’elle. Mais il n’arrêtait pas le truc pourquoi ? Emma pensa que si un homme lui faisait une déclaration et que de son côté, elle n’éprouvait rien, elle ne ferait pas de mal à cet homme et choisirait de ne pas le revoir. Paul était ambigu. Emma s’en était rendue compte. Elle méritait quelqu’un qui l’aime et qui ait plein d’étoiles dans les yeux en la regardant. Il fallait, qu’elle cesse de l’attendre et d’espérer qu’il l’aime un jour. Mais, c’était mal connaître la petite fille maso qui se nichait tout au fond d’elle et l’empêchait de prendre certaines décisions. De son côté, Paul répondait à ses mails et gardait le contact et elle, en attendant, souffrait. - C’est fou ! Quand je l’ai rencontré, il a été une évidence se dit Emma. Cette rencontre, elle le savait, n’était pas un hasard et cette impression de le connaître ? Il ne pouvait pas avoir croisé son chemin pour rien ? Dans sa détresse, elle pensa à Lolo ! Son meilleur ami et son ami d’amour qui lui manquait tellement ! Il l’avait abandonné, pour aller dans les étoiles et les nuages il y a 5 ans. Elle avait tant
besoin de lui, pour qu’il l’a console ! Il l’aurait prise dans ses bras et lui aurait dit : - Viens ma minette et pleure. Sans lui Emma ne savait plus pleurer. Elle sentait encore son odeur et pouvait entendre sa voix, elle pouvait également sentir ses bras tout autour d’elle. Toutes ces sensations restaient en elle depuis 5 ans. Elle se sentie bien trop seule ce matin-là! Elle hurla son prénom. Lolo! J’ai tant besoin que tu sois là! Elle se sentait désespérée, Paul qui ne répondait pas à son amour, Lolo qui ne serait plus jamais là, c’était trop dur. Dans la semaine qui suivi, le sentiment qu’elle éprouvait pour Paul, avait ouvert des portes. Emma s’était remise à peindre et à écrire. Cet amour-là bousculait bien des choses. Certains de ses souvenirs d’enfance qu’elle avait occultés, avaient refait surface. Et elle comprit pourquoi elle était si bavarde. Elle se souvenait maintenant ! Elle avait passée plusieurs années de mutisme, elle avait été muette de désespoir. Sa grande sœur à qui elle devait la vie lui confirma. Celle-ci l’avait retrouvée prostrée. Elle n’avait que 4 ans. Ce jour-là, une chose horrible lui était arrivé. Emma ne savait pas encore ce que c’était, mais elle se rapprochait de la mémoire complète. Elle avait froid et peur. De la colère grandissait en elle et l’étouffait, cette colère qu’elle nourrissait envers Lolo parce qu’il l’avait abandonné, pour aller voir les anges. Cette colère se libéra et elle craqua. Elle n’était plus que rage et désespoir. - Je vous déteste tous ! Lolo. Paul et tous ceux qui m’ont fait mal, je vous hais et je vous emmerde. Elle brisa tout ce qu’elle trouva sur son chemin. Encore. Et encore. Elle hurla et son cri n’avait rien de très humain, c’était celui d’un animal blessé ! A bout de force, elle s’effondra. Sa fille était absente et cela lui avait permis de pouvoir se libérer de cette colère qui l’empêchait de vivre, depuis bien trop longtemps. Après plusieurs jours difficiles, Emma refit surface. Elle était comme cela cette nana! Toujours debout, à chaque épreuve, elle se relevait. Son écolo ne quittait plus sa tête et il était en elle, tout le temps. Elle pensait que cette rencontre venait du ciel et c’était sûrement vrai! Il y a quelques années quand elle était enfant, elle avait essayé d’emménager là-haut mais Saint-Pierre avait refusé son dossier et elle était revenue sur cette planète qu’on appelait la terre. Depuis elle restait connectée avec ce ciel, elle le savait. La tête dans les étoiles, les deux pieds dans la terre. C’était ce qu’elle était ! Toute ces épreuves et cette souffrance passée et à venir, la
guidaient vers quelque chose d’heureux, elle l’avait toujours su. Emma avait la foi. Pour elle, Paul était comme un chat sauvage qui aurait bien aimé se laisser caresser mais qui ne le pouvait pas, parce qu’il avait trop peur. C’était évident! Le ciel les avait envoyés l’un pour l’autre. Le fait que cet homme soit toujours occupé, lui permettait de croire qu’il était heureux et qu’il avait un but. Il réussissait ainsi à n’avoir que peu de temps pour mieux se fuir et ne pas s’affronter. C’était flagrant! Leurs mails continuaient de se croiser, rien de profond, un lien qu’elle entretenait et que lui acceptait. De son côté Emma n’aborda plus les sentiments d’amour qu’elle éprouvait. Elle devenait ainsi, l’amie que lui aurait voulu. Juste pour l’apprivoiser et lui montrer qui elle était. Elle avait beau tenter de ne rien attendre de lui, elle n’y parvenait pas. Il ne quittait plus sa tête. Pourtant et à travers cet amour solitaire Emma se libérait et commençait à se construire. Elle choisit finalement de ne plus refuser ce qui lui arrivait. Une dizaine de jours s’étaient écoulés depuis sa dernière rencontre avec Paul. Il l’énervait aujourd’hui avec sa réserve, il ne lui donnait rien d’amical. Il n’avait jamais de temps pour boire un verre. Même l’amitié, lui faisait peur. Emma supportait mal d’éprouver tant de choses pour lui. Ce matin, elle en avait marre d’être gentille et de comprendre. Marre que lui n’essaie pas de comprendre. Elle en avait assez et ne voulait pas se détruire. Marre de ranger ses papiers et d’être raisonnable. Marre d’évoluer et que ce soit si lent. Elle en avait assez de tout analyser et d’être aussi lucide. Sa tête était trop pleine. Elle étouffait! Elle eut envie de s’enivrer ou de fumer une cigarette qui rend heureuse. Elle était bien trop correcte pour cela, elle aurait pu coucher avec son pote David, qui ne demandait que cela ou alors! Être égoïste et pleurer dans les bras de Charlotte sa meilleure amie, sa sœur de cœur. Boire ou fumer ne la soulagerait que temporairement, coucher avec David, elle n’en aurait jamais envie et pleurer dans les bras de Charlotte serait lui envoyer de mauvaises ondes. Elle devait apprendre à souffrir seule, à être un bon petit soldat. Pourtant ce soir, elle aurait adoré être une petite pute alcoolique qui se perd dans les bras de son « pote » et qui décharge toute sa détresse. Paul lui manquait, c’était insupportable. Que lui avait-il fait ? Il avait suffit qu’il arrive, avec ses un mètre quatre vingt trois, sa barbe et ses cigares et paf ! Il l’a mettait devant ellemême.
Sans rien faire ni rien dire. Comment pouvait-elle être si faible et si forte en même temps? Elle aurait aimé savoir s’il pensait à elle. Etait-elle dingue? Etait-elle tellement seule pour que Paul l’obsède autant? C’était comme ça l’amour? Le lendemain soir, il y avait un barbecue au club d’aviron de sa fille. Emma avait envie de ne voir personne et les gens l’emmerdaient, mais elle allait être une bonne maman pour sa fille et y aller. Tout ce qu’elle désirait, c’était être près de lui ! Ce soir, elle allait sourire, car elle aimait sa fille. Contre toute attente, la soirée fut excellente. Elle avait discuté avec trois nanas assez délirantes et s’était amusée, les gens ne l’avaient pas rasé. Elle avait pensé à Paul mais pas avec détresse. Elle comprit que sa solitude, la rendait dingue et altérait ses raisonnements. En rentrant, elle répondit au mail de Paul sans égoïsme ni rancœur en oubliant de se regarder le nombril et de pleurer sur son amour non partagé. Paul devait cesser de l’obséder, ça n’était plus vivable! Emma devait cesser de croire que son instinct n’était que sa folie. Se faire confiance et rester sur ce qu’elle avait perçu en lui. Elle avait conscience que ce serait difficile à mettre en pratique, elle y arriverait. Elle était assez forte pour le réaliser. A deux heures du matin Emma ne dormait plus, sa nuit était finie, impossible de se rendormir. Elle alluma l’ordi au cas où il y aurait un mail. Il n’y eut rien, bien entendu ! Elle repartie dans un délire. Paul l’énervait. Pour qui se prenait-il? Pour elle 24 heures sans mails équivalait à 24 jours. Un peu obsessionnelle notre petite Emma! Elle lui en voulait de ne rien éprouver et eut besoin de le dénigrer. - Il est barbu, il pue le cigare et c’est un trouillard ! Pas de chance car cela ne fonctionnait pas. Elle trouvait que Paul était beau et puis sa barbe, il la portait si bien. En plus, elle adorait son odeur de cigare. Quand elle avait rendez-vous avec lui, son cerveau enregistrait cette odeur qui restait en elle et elle s’endormait avec. Elle avait l’impression ainsi de dormir avec lui. En l’occurrence Paul était bien un trouillard et Emma lui faisait peur. Il avait sûrement souffert, mais ça n’excusait rien. Elle était lasse d’entendre les autres dire : - J’ai trop souffert, j’en ai pris plein la « gueule », maintenant je me méfie! Pour se protéger eux, ils préféraient faire souffrir les autres. Elle
aussi en avait pris plein la « gueule » pourtant, elle ne réagissait pas comme eux. Pour elle quand on en prenait plein la « gueule » c’était parce qu’on avait laissé faire et elle était bien placé pour le savoir! - On met toujours, sur le dos des autres nos propres faiblesses. C’est fou ! - Comment évoluer sans se regarder et nous regarder tel que nous sommes ? C’est tellement facile de dire, je suis victime ! Emma était lucide et au quotidien, cela n’était pas toujours facile à gérer. Malgré ces belles pensées, elle avait besoin de détester son écolo, parce qu’il ne répondait pas à ses attentes. Tout au fond d’elle, elle savait bien qu’elle était seule responsable de sa douleur. Si elle avait besoin d’en vouloir à cet homme, c’était seulement pour ne pas se faire face et continuer ainsi à mieux se mépriser. Elle préférait souffrir que d’affronter. C’était une trouillarde tordue, elle aussi! Sur toutes ces réflexions qui se croisaient, s’enchevêtraient et s’emmêlaient, elle allait consulter sa boite mail et chouette un message de lui ! La veille, elle lui avait fait parvenir, via Internet, sa dernière toile et il lui répondait, qu’il trouvait cela « drôlement pas mal » cette expression, la fit sourire. S’il aimait ses toiles, forcé!, il aimait ce qu’elle était. Et ce fut repartit pour un nouveau délire de femme éprise. À nouveau, elle était sûre qu’il était attiré par elle, qu’elle n’avait pas été dingue, qu’elle avait bien sentie que. Etc. Dans son message, il semblait heureux, plein de projets pour lui, un autre film. Elle adorait cet homme et ne pouvait imaginer qu’il ne l’aimerait jamais. Il finissait son mail par à bientôt ! Mais pour Emma ses bientôt n’étaient que des bien tard. Elle eut le droit à un gros bisou virtuel mais un bisou quand même! - Comme je suis pathétique, avec ce sentiment que je ne sais pas gérer. Il fallait qu’elle apprenne à ne plus en souffrir! Aujourd’hui nous étions le 21 juin, l’été enfin ! La saison préférée d’Emma. Elle était en terrasse et écrivait comme très souvent. Elle était épuisée d’émotions et de remise en question et elle mélangeait tout. L’amour. L’amitié. Et tant de choses encore. Paul lui manquait toujours autant et puis, elle avait eut une conversation d’amour avec sa fille. Elle parvenait à être une bonne mère, elle faisait ce qu’elle pouvait avec ce qu’elle avait mais il lui arrivait pourtant de se montrer maladroit quelques fois. Elle ne se pardonnait pas grand-chose et se demandait trop. Elle culpabilisait en oubliant qu’elle avait le droit de ne pas être parfaite. Beaucoup de choses dans sa tête, Marion. Paul. Tout était en désordre. Emma aimait