Recueil de nouvelles

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Recueil de nouvelles

Š Jean-Marc Perron, Recueil de nouvelles, 2014.

Jean-Marc Perron

Receuil de nouvelles

PRÉFACE

Né au Québec, au cœur du Témiscamingue plus précisément à Nédelec, en 1959, j’ai dû attendre comme tous les autres enfants de mon âge pour faire mon entrée à l’école du village et là, bien sûr, j’ai appris à lire, à écrire et à compter petit à petit.

Je n’ai que quelques souvenirs de cette époque, c’est ma mère qui m’a raconté le reste.

Un, je n’ai jamais fait de devoir à la maison, car comme j’étais un hyperactif, je faisais tous mes devoirs avant même de quitter la classe.

Et surtout, je me souviens aussi que dès que je recevais un examen, je le complétais avant même que la madame retourne s’asseoir à sa place.

Je ne me rappelle plus si j’étais dérangeant, mais je me souviens très bien que j’étais appliqué et j’écoutais attentivement seulement ce qui m’intéressait. Pour le reste, difficile à savoir.

Deux, ce dont je suis sûr par contre, c’est que la maîtresse, « la madame en question », elle me faisait lire en avant de la classe, toutes les rédactions que je lui écrivais, seulement mes textes, comme si j’étais le seul dans sa classe. Et à chaque fois, j’obtenais des applaudissements de tous les élèves.

Je détestais cela au plus haut point.

Bon… OK… je faisais beaucoup de fautes d’orthographe et de grammaire et elle me le reprochait abondamment, mais elle ne cessait jamais de m’encourager dans cette démarche d’écriture, puisqu’elle constatait bien que cela était facile pour moi de faire le récit d’événe-

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ments vrais ou présentés comme vrais et d’y inclure des conneries même à cet âge-là.

Je n’ai pas été à l’école aussi longtemps que je l’aurais souhaité, la vie en a décidé autrement pour moi. Je dois admettre que j’ai d’une façon ou d’une autre influencé largement cette vie, qui me propulsa très rapidement dans un monde adulte ainsi que ma mère qui ne cessa jamais de participer à mon éducation en tant qu’adulte incompris. Elle m’a fourni une quantité impressionnante de livres de développement personnel et de psychologie, ce qui m’a finalement servi à améliorer mon foutu caractère ainsi que mon français écrit. Le travail de camionneur toutes catégories m’a permis d’écrire mes expériences personnelles.

Comme tout le monde, j’ai vécu des hauts et des bas, mais comme je tiens à me concentrer sur ce qui est positif dans ma vie je vais laisser de côté les points négatifs majeurs de mes multiples aventures.

J’ai fait durant toutes ces années des rencontres de gens exceptionnels, et j’ai bien l’intention d’en faire d’autres encore et encore et je pourrai ainsi écrire pendant des siècles et des siècles… WHO !

Du calme, pour les quelques dizaines d’années qui me reste, après on verra.

Si tu en es rendu là, à lire mon avant-propos, c’est que probablement tu es bien décidé à lire le reste et que plus rien ne pourra t’empêcher d’aller jusqu’au bout, donc j’imagine que tu sais déjà qui je suis, car tu fais sûrement partie soit : de ma famille, de mes amis(e) personnels, de mes amis(e) Facebook ou même de mes futurs amis(e). Et pourquoi j’ai écrit ce recueil de nouvelles ne devrait pas te surprendre, j’ai une grande gueule, je parle tout le temps, de tout et de rien et comme j’étais bien tanné de parler tout seul, j’ai pris la décision un jour d’écrire tout ce que je n’avais pas eu le temps de te raconter à toi en particulier. Il y en aurait encore bien plus à raconter, mais je me suis dit qu’il fallait bien débuter quelque part et c’est ici que cela commence, pour moi et pour toi.

Je suis toujours aussi farouche aux applaudissements et je n’en attends aucun bien sûr, mais j’apprécie volontiers les p’tits commentaires constructifs, donc ne te gêne surtout pas, laisse-moi un mot sur mon cell, sur mon ordi ou alors tu me donneras tes impressions lorsque l’on se rencontrera.

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Comme je suis sans complication, j’ai écrit dans un style familier suffisamment clair pour que tu comprennes tout ce que j’avais à te raconter de mes aventures qui ont nourri ma raison d’écrire et l’importance pour moi de les partager avec toi.

Le Colibri

Il y a des matins comme ça !

Tu te lèves pour te rendre compte, tout d’un coup, que ton petit moi est désespérément de très mauvaise humeur et sans que tu saches pourquoi.

Quand tu demeures à la campagne, alors il te suffit d’aller rêver dehors quelques instants pour apprécier la chance que tu as d’être entouré de toute cette merveilleuse nature.

Pas de béton, pas de fleurs artificielles ou d’arbres peints sur les murs des jardins privés de ton voisin, celui-là même qui vit vraiment très proche de toi et que tu ne connais même pas.

Ici, il n’y a que de vrais oiseaux, de vrais rongeurs, et puis toutes sortes de petites bestioles très voraces qui essaient de te manger sur place constamment.

Vivre en pleine nature vous assure un calme, une paix intérieure durable qui vous aident à traverser les dures épreuves de la vie moderne.

Le contact réel avec les petits animaux vous rapproche de votre état premier.

Vos instincts primitifs enfouis par des années de civilisation guerrière et destructrice maintenant dirigés par des gouvernements véreux qui n’ont aucun scrupule à faire des gains exorbitants, même s’il est prouvé qu’ils sont en train de tuer notre planète avec un régime polluant. Ils sont uniquement attirés par une ascension gravitationnelle basée sur les bénéfices pour toujours plus d’argent.

(Suis-je en pleine déprime là ?)

Bon, OK on arrête ça maintenant Ce matin-là, comme d’habitude un nombre impressionnant de petits oiseaux de toutes sortes, tous bien décidés à ravager mon jardin

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se sont finalement rendu compte que j’avais installé des mangeoires à grains de céréales juste pour eux.

(Moi, des graines à moineaux, je n’en mange pas) Les plus intelligents étaient déjà à picorer tout ce que le vent avait fait jaillir des plats suspendus aux arbres.

Les écureuils noirs et les gris se font une chasse continuelle, une sorte de poursuite inutile acceptée de tous. Tout le monde se court après tout le temps et dans toutes les directions, ça c’est le quotidien, mais quand un écureuil roux se pointe, la situation se détériore très rapidement. Un enragé complètement incontrôlable, un psychopathe diabolique assoiffé de sang. Probablement que dans une de ses vies passées, le petit rouquin aurait été un vampire, mais ça, personne ne peut le prouver. De plus, je suis bien convaincu que même mes gros chats ont peur de lui.

C’est la vraie vie de campagne, ça !

Pour faire différent là, j’ai reçu de la visite… Bien, pour commencer, j’ai vu une tache passer, revenir, repartir, réapparaître et stopper à six pouces de mon nez. Je me retrouve face à face avec une minuscule bestiole grosse comme mon pouce avec des ailes tout le tour du corps. Elle est en mouvement continuel, accompagnée d’un vrombissement de type hélicoptère miniaturisé ou d’un bourdon amplifié. Elle a des yeux mini-minuscules d’un noir profond et elle est probablement équipée d’un cerveau microscopique avec juste deux neurones qui se touchent de temps à autre pour changer de direction.

Là, j’ai tout de suite remarqué que quand elle fait du surplace, elle a besoin de quatre pouces carrés parce qu’elle bouge tout le temps.

De haut en bas, de gauche à droite, d’avant en arrière. La stabilité totalement déficiente d’un plan de vol constamment réévalué, dur à savoir, probablement propulsée par un turbo réacteur nucléaire au plutonium. Non, non, oublie ça, là j’hallucine.

Deux ailes, juste deux petites ailes avec cinquante battements par seconde en surplace, deux cents battements seconde en pleine accélération, il paraît que ça va encore plus vite que ça, si tu arrives à lui faire peur. Quel magnifique phénomène volant !

J’ai devant moi une petite femelle colibri très curieuse, elle me fixe avec beaucoup d’attention.

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Elle part, revient, puis descend, se rapproche et regarde maintenant dans mes trous de nez.

C’est une situation extrêmement embarrassante pour moi.

Est-ce que ça veut dire qu’elle se cherche un nid ?

Oups, je n’aurais pas dû bouger, elle revient, me tourne autour, exécute quelques acrobaties qu’aucun pilote aérien ne serait en mesure de réaliser. Voilà qu’elle s’intéresse désormais à mes trous d’oreilles.

Malgré tout l’émerveillement engendré par cette rare rencontre exclusive, là elle commence à m’allumer, pis moi, j’ai la mèche courte.

(Suis-je supposé être encore de mauvaise humeur moi là ?)

Vas-y « go » insistant avec ma main pour la faire fuir.

Tu ne pourrais pas aller socialiser avec les butineurs de ta catégorie ?

Les abeilles, les bourdons…

Elle a compris, elle est partie et s’est arrêtée pour me montrer que son pot à jus était vide.

Je l’ai rempli avec empressement, la survie d’un petit rejeton en dépendait peut-être. Quand je suis ressorti pour lui apporter sa dose de jus, il n’y avait plus de colibri, parti le colibri !

Intéressant ça !

Je m’en fous de toute façon. Sur une branche pas très loin, il y a une tache colorée, c’est sûrement le mâle.

C’est bizarre comme il brille d’un beau vert/bleu lustré avec du rouge flamboyant dans le cou, du noir/gris pour conserver son élégance et juste un peu de blanc sur le ventre pour compléter sa palette de couleur.

– Hey, le moineau-mouche, c’est pour toi que j’ai rempli le truc à jus, vas-y ! As-tu peur ? Monsieur est gêné peut-être ?

Avec les meilleures intentions du monde, il est toujours possible d’atteindre avec succès un but non recherché. Puis, c’est de même que ça commence un conflit, un seul mot de trop et ça y est, c’est la guerre.

Il m’a carrément foncé dessus, jusqu’à ce que je me penche pour l’éviter de justesse.

– Hey ! Le mongol qu’est-ce qui te prends ?

Puis, il a recommencé à m’attaquer instantanément, comme si j’étais devenu l’ennemi à abattre.

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Un moment de réflexion s’impose. Vivre dans un monde civilisé, ça implique que tu dois te défendre avec classe ou que tu essaies juste de sauver ta peau avec les moyens du bord ?

J’ose croire qu’il y a juste ceux qui se sont déjà fait agresser par une bête sauvage qui peuvent sincèrement mesurer la complexité et la gravité du dit moment.

Que faire ? Comment réagir devant un animal féroce, un prédateur acharné et probablement sanguinaire, non déclaré. Avant de paniquer, je vais analyser en détail les raisons de cette attaque. Peut-être va-t-il attraper le virus de la rage ? Peut-être est-il tout simplement débile dans sa tête, il n’a pas remarqué que j’étais plus gros que lui. Peutêtre se cherche-t-il quelqu’un pour l’accompagner dans sa démarche de suicide assisté ? La liste pourrait s’allonger considérablement, mais je n’ai pas beaucoup de temps.

Lui il charge comme s’il voulait me pousser à bout. Moi, j’étais déjà d’une humeur massacrante, donc, je n’ai pas eu beaucoup de travail à faire pour déraper psychologiquement.

– Hey, l’emplumé ! As-tu les hémorroïdes piquantes ? Vu, que tu ne sais pas vivre le minus, ramène ton ti-cul par icitte, je vais t’éduquer, t’apprendre à socialiser !

Là, il est disparu, il a fini par comprendre que j’étais bien plus gros que lui. L’hypocrite, il est revenu à la charge par-derrière, en pleine phase d’agressivité intensive.

Il m’a attaqué d’un contact direct. J’ai senti mes cheveux se faire tirer légèrement.

Une autre question me traverse l’esprit, possèdes – tu des serres affilées d’un aigle sur le bout des pattes une bestiole de même ?

C’est drôle, mais moi, ça ne me tente pas de me faire décapiter sur place. J’en ai plein le cul, de ces conneries-là. Je vais lui montrer que je suis bien plus fou que lui moi Après quelques secondes de recherches, j’ai réussi à trouver de quoi me défendre. Non, non, pas de quoi me défendre, de quoi l’éliminer définitivement.

– C’est chez moi icitte J’ai récupéré mon pistolet à eau, plein de poussière, quelques égratignures justifiées par un dur passé, mais il était toujours fonctionnel.

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Je l’ai rempli d’eau froide, bien froide, très froide et j’ai longé le mur, plus déterminé que jamais à me faire respecter.

J’aimerais bien profiter d’un effet de surprise (la surprise c’est la victoire assurée) user d’une stratégie de camouflage et être déguisé en courant d’air pour me pointer juste au bon moment. Exercice totalement manqué, il n’est pas fou le petit, il m’a vu venir de loin.

– Hey le déficient mental, tu veux te faire péter les dents peut-être ?

Effronté comme ça ne se peut pas, il m’a frôlé le nez à trois ou quatre pouces, là je dois dire que tout d’un coup, il est devenu un peu plus gros et le son qu’il faisait, quel son ! Tout à fait impressionnant. J’ai même senti le déplacement d’air provoqué par le battement excessif de ses deux petites ailes.

Mais là, c’est quand je me suis mis à lui tirer dessus, tu aurais dû voir la face, la surprise toi ! Le pitbull mouche, le butineur, l’aspirateur de jus sucré s’est subitement transformé en maringouin mouche et s’est enfui. Pour me narguer encore un petit brin, il est revenu aussitôt.

– Pousse-toi pas le morveux, je n’ai pas fini avec toi C’est à ce moment-là que ma mère a décidé de s’impliquer – Qu’est-ce que tu fais à mes colibris toi ?

– C’est lui qui a commencé, y avait juste à pas m’attaquer, y me fonce dessus sans arrêt, c’est un agressif-compulsif. Je te jure ce moineau-là c’est un tueur.

– Pis c’est quoi toute l’eau qu’il y a sur le balcon ?

– Vu, qu’il ne sait pas vivre le frustré, ben moé, j’ai vidé son bol de jus par terre, y en aura pu de jus, y va sécher et bientôt être déshydraté le moineau. Crois-moi, y va me supplier dans pas très longtemps – Pis c’est quoi ça ? Qu’est-ce que tu as dans les mains ?

– Un mini pistolet à eau, totalement inoffensif. Un petit peu d’eau en pleine face, ce n’est pas si grave que ça.

– Ce n’est pas très gentil ce que tu fais là.

– Regarde m’man, la petite femelle me tourne autour pis elle m’attaque pas elle. Pis je me suis retenu pour ne pas sortir la batte de baseball. Je trouvais ça un peu exagéré vu que je suis bien plus gros que lui Je savais que le combat ne serait pas équilibré et je veux juste lui montrer que je suis bien plus fou que lui, moi.

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– Ça, tu n’avais pas besoin de le dire, juste à te voir aller, c’est suffisant pour tout comprendre mon gars.

– Tout comprendre, y a rien à comprendre, y veut la guerre, y va l’avoir, c’est tout. En plus, ça pratique mes talents de chasseur. Ça prend pas mal de visu pour attraper ça, une bestiole de même ça bouge tout le temps.

– J’ai justement une question pour toi. Du colibri braisé, ça se manges -tu ? C’est tu ça qu’on appelle un plat raffiné, un met exotique faible en gras saturé ?

Ma mère semblait intriguée, c’était pourtant une question adéquate vu les circonstances. Lui, comme il avait envie d’en finir au plus vite, il continu à me tourner autour.

– Regarde, il me fonce dessus, regarde-le aller. Je te l’avais dit, c’est lui qui me cherche. Peut-être qu’il a vu un film d’action dernièrement, pis que là y se prend pour un chasseur aérien de la dernière guerre.

– Reviens le modèle réduit, qu’est-ce que tu vas faire là pour m’impressionner ?

Tirer sur lui c’est facile, l’atteindre c’est comme moins évident, puis lui à chaque descente, il se rapproche un peu plus quand soudain…

– L’esti de mongol coloré, il m’a pissé dessus, l’enfoiré de butineur m’a pissé dessus. Peux-tu croire ça m’man ?

– L’as-tu vu faire ? L’as-tu vu au moins ? Il m’insulte là, c’est volontairement qu’il l’a fait, j’en suis certain.

– C’est juste une petite goutte, énerve-toi pas comme ça… me dit ma mère.

– C’est de la pisse quand même, c’est de la pisse de jus, pis c’est moi qui l’ai reçue J’ai tiré sans arrêt jusqu’à ce que le pistolet soit vide, totalement vide.

Tu sais quand y reste juste un peu de bave au bout du canon. Impossible de toucher à cette bestiole volante. Ça prendrait toute une armée de fantassins pour tirer dans toutes les directions en même temps Se faire niaiser au Québec par un moineau qui vient des Antilles, c’est pas facile à prendre pour un adolescent qui est déjà aux prises avec sa montée hormonale négative du matin.

Ma mère, qui s’est appuyée sur le mur pour ne pas s’écrouler par terre, tentait maladroitement de cacher à quel clan elle appartenait.

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C’est à ce moment, que j’ai décidé de prendre les grands moyens. Le boyau d’arrosage, jet beaucoup plus gros, vingt pieds de frappe directe, cinquante pieds de déplacement multidirectionnel, l’arme idéale quoi.

Dès que je relâche mon attention, le butineur tente une approche éclaire, puis une autre.

J’ai pour adversaire, un être totalement obstiné qui abuse de son pouvoir de mobilité extrême. Un bouffeur de nectar qui se prend pour un as du combat aérien.

J’ai tiré sur lui, dans tous les sens, à toutes les hauteurs possibles, sans réussite apparente. Quel enfoiré ! Après plusieurs minutes de furieux combat, extrêmement désappointé, épuisé, à bout de force et dans un état semi-lunatique, mes nerfs ont craqué J’ai retourné l’arme contre moi, en braquant le pistolet juste sous ma mâchoire, puis les yeux fermés, j’ai appuyé sur la détente. Avec la pression engendrée par le coup, mes dents se sont entrechoquées et machinalement mon bras a compris que ce n’était pas une idée brillante et il s’est retiré de lui-même.

Comme j’étais bien décidé à aller jusqu’au bout de ma folie, j’ai levé le fusil du boyau d’arrosage directement au-dessus de mon bras, j’ai dirigé le jet vers le haut et j’ai tiré.

Finalement, j’ai ouvert les yeux puis, j’ai regardé les milliers de petites gouttelettes qui montaient très haut dans les airs et retenues par la gravitation terrestre, elles me sont toutes retombées dessus.

Là, j’ai senti un froid intense me traverser tout le corps suivi d’une sensation d’euphorie enfantine. Je tenais le bras bien haut et pour rien au monde je n’aurais lâché ce pistolet à fontaine thérapeutique qui me glaçait le corps tout en entier.

Douce folie passagère, je suppose. Le soleil qui m’aveuglait n’était pourtant pas assez puissant pour me réchauffer. En l’espace de quelques secondes, je me suis mis à grelotter de partout. Je crois qu’il y a toujours quelque chose de positif à conclure d’une expérience improvisée.

Là, je viens d’entrer en classe personnelle d’anatomie, étude pratique sur les capteurs des muscles dorsaux qui spontanément réagissent au froid intense.

Bon, on n’est pas encore rendu à l’hypothermie profonde, mais ça surprend.

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Par alternance, j’ouvrais un œil à la fois. Peut-être me reste-t-il encore des choses à découvrir. Précisément, je regardais une grosse goutte qui se dirigeait directement dans mon œil ouvert pour y exploser librement.

Profitant d’une seconde d’accalmie, j’ai entrevu mon redoutable adversaire qui en était rendu à se servir de ma fontaine pour se faire un brin de toilette à mes frais. En effectuant de très rapides passages sous la pluie pour aller lisser ses plumes sur une branche sans attendre d’invitation, la petite femelle en a profité elle aussi, tant qu’à y être.

Soudainement, j’ai l’impression d’être le gars qui essaie de faire fuir un gorille en lui lançant des bananes mûres.

Dans tous les arts de combat connus, toutes les techniques disponibles sont valables. Mais moi, j’ai toujours pensé que démoraliser son adversaire était une façon de faire, totalement déloyale Mon assurance personnelle, mon intégrité, mon futur rôle de macho, tous anéantis en quelques minutes par un super moineau multicolore de deux onces et quart. Avec beaucoup d’humilité, j’ai accepté la défaite. Plus jamais je ne ferai la guerre avec ces bestioles-là, c’est trop démoralisant, et impossible à atteindre avec un simple jet d’eau Le moineau mouche était beaucoup trop fort pour moi. Il me restait l’espoir, l’espoir de me faire peut-être un jour un ami.

J’ai rempli son bol de jus, tous les jours et cela durant tout l’été.

Mais lui, il m’a délibérément ignoré sans tenir compte de ma sensibilité intérieure, de mon amour pour tous les petits animaux aussi petits soient-ils.

La servitude m’a rendu de bonne humeur, c’est bien mieux ainsi

Baseball

Personnellement, j’ai toujours pensé que le baseball professionnel était un sport tout à fait insignifiant. Jamais au grand jamais je ne payerai pour assister à une de ces parties, qui pour moi n’a pas d’intérêt Voir une bande de grands tarlas millionnaires, lancer, attraper ou battre une petite balle, en se poignant le paquet toutes les deux minutes, courir ou se précipiter par terre sur le ventre pour saisir un petit coussin qui n’essaie même pas de se pousser… C’est bien de valeur pour eux, mais moi, ça ne m’excite pas du tout Le pire dans cette histoire, c’est qu’ils ont le culot d’appeler cela un jeu, alors pourquoi se plaindre sans arrêt, pourquoi tant de brailleurs, de mécontentements pour une petite erreur voir une victoire non méritée ? J’en ai même vu se battre pour tenter d’afficher leur supériorité. À mon avis, l’arbitre est le seul qui devrait être bien payé, car il est le seul à être crédible Si les hommes ont inventé le baseball, ce sont les femmes qui m’ont réconcilié avec cet extraordinaire sport de plein air. Pourquoi ? Parce qu’elles ont probablement inventé le mot Plaisir, avoir du plaisir, ou juste être là pour le plaisir Un lundi soir, en plein été, soirée de canicule, je prends une marche pour aérer mon cerveau qui me semble être en pleine ébullition dans un crâne pas assez isolé, vu ma calvitie frontale. Quand dans un parc, près de chez moi, j’entends des cris des plus stridents. Plus je me rapproche et plus ça hurle, comme si ces exclamations tentaient de m’appeler.

Tout au moins, ont-elles éveillé ma curiosité Comme une grosse tortue en pleine sécheresse, je m’y dirige lentement À ma grande surprise, ils jouent au baseball ou plutôt, elles jouent au baseball. Intrigué par cette nouvelle attraction, je décide de prendre

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