L'Amitié au féminin • Dee Brestin

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— Rachel, 20 ans, étudiante

Dee Brestin

« J’ai littéralement dévoré ce livre ! Il m’a beaucoup aidée à comprendre comment je fonctionnais et pourquoi j’avais besoin de l’amitié des autres. Il m’a aussi montré l’avantage d’avoir des amies plus âgées. Après l’avoir lu, j’avais envie de l’offrir à toutes mes amies ! »  « L’auteur développe trois merveilleux modèles bibliques d’amitié. Ils m’ont ouvert les yeux sur l’importance de devenir une amie fidèle pour les autres ».  — Julie, 42 ans, mère au foyer

« Mon mari pense souvent que je suis trop tournée vers l’extérieur, car il n’éprouve pas, comme la plupart des hommes, le besoin d’avoir des amis. J’ai été soulagée de mieux comprendre les différences entre hommes et femmes à ce niveau. Ce livre m’a rapprochée de Christ ».

Dee Brestin

« C’est la deuxième fois que je lis ce livre et j’en apprends encore ! Chaque femme devrait le lire ! »  — Élisabeth, 51 ans, missionnaire

Dee Berstin

• Auteure américaine de best-sellers et conférencière internationale, Dee encourage les femmes à approfondir la Parole de Dieu et à développer une relation intime avec Jésus. Ses messages, agrémentés de nombreuses anecdotes et d’humour, ont déjà touché des milliers de femmes. Mère de cinq enfants, elle a perdu son mari en 2004 des suites d’un cancer.

9 782362 491375 ISBN 978-2-36249-137-5

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— Marie-Claire, 29 ans, enseignante

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féminin



Dee Brestin

L’amitié au

Éditions BLF • Rue de Maubeuge 59164 Marpent • France


Édition originale publiée en langue anglaise sous le titre : The Friendships of Women © 1988 Victor Books Cook Communications Ministries • 4050 Lee Vance View • Colorado Springs • Colorado 80918 • USA Traduit et publié avec permission. Tous droits réservés. © 2005 Dee Brestin Édition en langue française : L’amitié au féminin • Dee Brestin © 2006 BLF Europe • Rue de Maubeuge • 59164 Marpent • France Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés. Couverture et mise en page : Éditions BLF Impression nº 93589 • IMEAF • 26160 La Bégude de Mazenc Les citations bibliques sont tirées de la Bible du Semeur © 2000, Société Biblique Internationale. Avec permission. ISBN 978-2-36249-137-5 Dépôt légal 3e trimestre 2012 Index Dewey (CDD) : 241.676 Mots-clés : 1. Femmes – Psychologie. 2. Amitié entre femmes. 3. Relations interpersonnelles.


à ma fille Sally À onze ans, ton aptitude à nouer des liens de tendresse a béni et rempli notre famille d’une joie incommensurable. Sois forte, ma chérie, ouverte à l’intervention de Dieu ; et puisses-tu t’enraciner si fort en Christ que ce don s’épanouisse et qu’il apporte chaleur et espoir dans un monde froid et hostile*.

*Sally avait onze ans quand ce livre fut publié pour la première fois. Dieu répondit puissamment à la prière ci-dessus, puisqu’elle est maintenant une jeune femme qui use de ses dons relationnels et artistiques dans notre société inamicale.



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Remerciements Je suis infiniment reconnaissante aux précieuses amies qui m’ont autorisée à sonder leur cœur et leur âme, sur le thème de leurs amitiés avec d’autres femmes. Elles ont éveillé un écho auprès des lectrices de tous âges et cultures qui m’écrivent en grand nombre. Ces femmes ont enfin compris qu’il est normal d’éprouver les sentiments qui sont les leurs.

J’adresse des remerciements tout particuliers à mes compagnes qui restent fidèles saison après saison : Luci Shaw à qui je dois mes premiers pas dans l’écriture et Julie, Sally, Beth et Annie, mes filles, adultes maintenant, qui tirent si bien parti de leurs dispositions pour les relations humaines. Merci aussi à mon défunt mari, Steve, qui a toujours cru en moi et m’a accordé la liberté de voler de mes propres ailes. Quel bonheur, chéri, que l’impact de ce livre sur les femmes d’une nouvelle génération ! Autorisation de publier des extraits de :

• « Perfect Love Banishes Fear » et « Salutation » de Polishing the Petoskey Stone, de Luci Shaw en 1990. Réimprimé avec l’autorisation de Harold Shaw Publishers, Wheaton, Illinois.

• Being a Christian Friend de Kristen Ingram (1985), autorisation accordée par Judson Press.


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• The Unexpected Gift d’Isabel Anders, tirés de Partnership (Jan/Fév. 1984), autorisation accordée par Madame Anders.

• Just Friends, de Lillian Rubin (1985), autorisation accordée par Harper and Row


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Introduction La première édition de ce livre en 1988 reçut un accueil inespéré. Les femmes écrivaient que Dee avait touché la corde sensible d’un besoin essentiel, et les avait aidées à mieux cerner des relations si importantes pour elles. Elles en achetèrent de nombreux exemplaires à l’intention d’amies et de parentes. Des centaines de milliers d’entre elles l’étudièrent en petits groupes.

Les principes qu’aborde cet ouvrage sont éternels, puisque Dee les a découverts dans les amitiés que relate l’écriture. Mais leurs applications peuvent varier, parce que chaque génération en rencontre de nouvelles dans un contexte culturel spécifique et doit faire face à de nouveaux défis. Parmi les changements qui ont affecté les relations amicales de cette génération, nous pouvons distinguer entre autres : le téléphone portable, le courriel, la prolifération des « mean girls » (méchantes filles) et une propagande homosexuelle agressive. Ainsi, et bien que les préceptes de la Parole de Dieu soient identiques hier, aujourd’hui et demain, il faut en adapter l’usage à la société actuelle. Ce livre est destiné à une lecture personnelle, mais il peut aussi être apprécié au sein d’un club littéraire féminin, d’un groupe d’étude biblique pour dames, ou dans le cadre de discussions entre mères et filles. À la fin du livre, des questions aideront à susciter des échanges. Vous pouvez consulter le site Internet de Dee Brestin (en anglais) à l’adresse suivante : www.deebrestin.com



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C h a p i t r e   1

Un don inné pour l’intimité Témoin des adieux de son épouse à sa meilleure amie, juste avant un déménagement à la campagne, Elliot Engel les jugea si déchirants qu’il dut se détourner pour, finalement, quitter la pièce : « J’ai toujours été émerveillé, explique-t-il, de ce soutien émotionnel réconfortant que ma femme recherche et retourne à ses proches amies… Trois heures de discussion avec ses copines la détendent et la revigorent bien plus que ne me régénèrent mes cinq kilomètres de jogging ! » 1

Le radio-réveil s’allume et diffuse une chanson douce, au lieu d’aboyer les cours du marché du porc et du maïs au Nebraska. Je me blottis sous la couverture électrique et colle mes pieds éternellement glacés contre le corps tout chaud de mon mari. Je devine les chiffres lumineux du cadran :


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6 heures 55. J’entends notre nouveau petit chien pleurnicher, impatient que quelqu’un s’occupe de lui, et la cafetière préprogrammée qui glougloute doucement. Bientôt nous serons tous debout, nous prendrons une douche, et nous nous habillerons en vue du travail ou de l’école. Mais pour le moment, je me pelotonne, espérant jouir encore quelques instants de l’agréable pénombre matinale. La sonnerie stridente du téléphone me rappelle soudain à la réalité. Espoir et couverture abandonnés, je me rue afin de faire taire cet appel obstiné. Ce n’est certainement rien de grave, ce doit être Michèle, l’amie de ma fille de dix ans. Je ne suis pas déçue. – Comment Sally est-elle habillée aujourd’hui ? interroge Michèle.

– Elle a sorti un jean et son pull rose, dis-je dans un souci de coopération.

– Oh ! répond Michèle, désappointée, j’allais mettre un survêtement. Et est-ce que Sally apportera son déjeuner ? – Elle ne l’a pas prévu.

– Mais le plat chaud, c’est du poisson avec des betteraves ! s’exclame-t-elle plaintivement.

Je demande à Michèle de rester en ligne, pendant que je débats de ces questions existentielles avec ma fille encore toute somnolente. C’est décidé : Sally emportera son repas et Michèle enfilera un jean.

Les petites filles sont plus intimes que les petits garçons Quand nos fils étaient petits, ils avaient bien sûr des amis, mais ils paraissaient plus passionnés par leurs activités


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que par les uns et les autres. Un ami, s’il aimait faire vrombir son scooter en sillonnant l’allée ou jouer au football, leur semblait aussi bon qu’un autre. Je n’ai jamais subi d’inquisition, à l’aube, concernant ce que mon fils portait ou s’il se chargeait de son casse-croûte. Il y avait beaucoup plus de chances de trouver Sally assise sur son lit, en tête-à-tête avec une amie, chuchotant et gloussant. Elles étaient accaparées l’une par l’autre. Quand Sally et Gwen avaient six ans, elles se tenaient souvent par la main. La sociologue Janet Lever atteste que de telles dissemblances entre filles et garçons sont typiques : les filles ont tendance à se sentir plus à l’aise avec une unique et meilleure amie ; les garçons préfèrent former une équipe. Voici ce qu’elle rapporte : Il y a couramment extériorisation de l’affection entre les filles, tout autant physiquement, en se donnant la main par exemple, que verbalement à travers des « billets doux » réaffirmant qu’elles sont spéciales l’une pour l’autre. Bien que les garçons puissent aussi avoir de bons amis, leurs amitiés tendent à être moins intimes et démonstratives que celles des filles. Main dans la main et billets doux sont pratiquement inconnus des garçons, et les confidences qu’ils partagent sont plutôt du genre « secrets de groupe » que l’expression de pensées et de sentiments d’ordre privé 2.

Vous souvenez-vous de ce temps-là ? Moi, oui.

Quand Donna Rosenow et moi avions dix ans, nous nous raccompagnions tour à tour à la maison après l’école, bien que nos maisons fussent distantes d’un kilomètre et demi. La sempiternelle plaisanterie revenait quand nous atteignions la porte : « Maintenant, je vais te raccompagner chez toi ! » Alors nous riions et rebroussions chemin sur 1 500 mètres,


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tout au long des rues bordées d’arbres de notre petite ville du Wisconsin. Quand finalement nous nous séparions, nos fous rires et nos bavardages reprenaient sitôt après le repas du soir, mais par téléphone cette fois.

Les filles sont plus quémandeuses, empathiques et confiantes dans leurs amitiés que les garçons. Elles sont plus intimes. Zick Rubin, auteur de Children Friendships (Les amitiés d’enfants), a noté : « Non seulement les filles ont un besoin beaucoup plus fort d’amitié que les garçons, mais elles exigent une intensité dans l’amitié dont les garçons préfèrent s’abstenir » 3.

Quand notre fille avait neuf ans, son amie Gwen lui fit passer le mot suivant à l’école :


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Je montrai le questionnaire de Gwen à notre fils de dixhuit ans, John. Je souhaitais une opinion masculine. Le front plissé, il le relut plusieurs fois. Mais la pensée de Gwen lui était si étrangère qu’il avait du mal à en saisir le sens. Quand enfin il y parvint, il s’exclama : « Et alors ? Qui pourrait s’intéresser à ce genre de choses ? » Eh bien, nous. Si en devenant femmes, nous avons gagné en douceur et en finesse, nous demeurons pourtant solidaires des questions de Gwen. Nous nous inquiétons de nos sentiments mutuels.

Les services marketing de deux fameuses carteries American Greeting et Hallmark apprécieraient la note de Gwen. Pendant des années, ils ont étudié en profondeur le comportement féminin. Leur enquête a mis en évidence le fait que les femmes comme les petites filles nourrissent intensivement leur complicité. Suite aux conclusions de cette étude, ces papeteries ont développé des collections de cartes destinées aux femmes, étendues aux cartes sur Internet. Elles permettent d’exprimer à une amie ou à une copine tout ce qu’elle représente, de l’encourager si elle est abattue, de la féliciter pour une promotion ou de la soutenir en cas de divorce. On ne trouvera pas d’assortiment de ce style à l’intention des messieurs. Des cartes d’amitié pour hommes seraient un véritable fiasco financier.

Ces petits mots d’amitié ne se limitent pas aux fillettes. Sally en reçoit toujours, ce qui est typique aux femmes ! Voici celui qui lui fut envoyé par son amie Audrey alors que toutes deux étaient déjà à l’université. Audrey l’avait composé à l’aide de cinq marqueurs de couleurs vives et ma fille l’exposa fièrement dans sa chambre. Je ne peux tout simplement pas imaginer semblable interaction entre des garçons inscrits en faculté !


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Chère Sally, « Un ami aime en tout temps » (Proverbes 17 : 17). Je remercie Dieu pour ton amitié tellement particulière (Philippiens 1 : 3). Merci pour tes encouragements constants, c’est vraiment une bénédiction (1 Thessaloniciens 5 : 11). Merci pour ton cœur joyeux, et pour les prières assidues de ton cœur (1 Thessaloniciens 5 : 16-17). Je suis motivée pour que notre amitié croisse encore (Hébreux 10 : 24-25). Affectueusement en Christ, Audrey

Petites ou grandes, les filles sont plus proches. Mais elles sont également plus cruelles.

Les petites filles sont plus cruelles que les petits garçons Notre don pour le rapprochement a son revers parce que notre aspiration à des relations amicales profondes peut nous conduire à protéger notre territoire. Des études ont démontré que les petites filles ont tendance à évincer sans détour, en donnant souvent à leur victime le sentiment de ne plus exister. « Martine et moi étions très populaires en classe à l’âge de onze ans, et nous savourions l’impact de notre popularité sur les autres », se remémore une femme d’une quarantaine d’années. « Linda voulait désespérément faire partie de notre groupe. Elle nous écrivait de petits mots pour nous demander si elle pouvait jouer à cache-cache avec nous à la récréation. Martine et moi échangions des signes de connivence, après quoi nous donnions notre réponse à Linda en levant ou baissant le pouce ».

La plupart d’entre nous peuvent évoquer des expériences, et témoigner d’incidents extrêmement douloureux


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survenus à l’école primaire. Rosalind Wiseman rapporte l’anecdote suivante dans un de ses livres : Mme Clarke est un professeur d’éducation physique de dernière année d’école primaire. Elle est pétrie de bonnes intentions, mais elle ne sait rien de rien. Lors d’un jeu, si elle commande aux filles de former un cercle, elle se demande pourquoi c’est si long de faire simplement la ronde. La raison devrait pourtant lui sauter aux yeux ! Pour ses élèves, la question est : qui donnera la main à qui ? Pendant que les filles se disputent les places qui détermineront leur statut du jour, Mme Clarke s’impatiente et leur crie de se rassembler immédiatement ! C’est alors qu’une chose horrible se produit : Natacha, l’élève la plus populaire de la classe, se retrouve à côté de Cindy, la laissée-pour-compte. L’impossible aura-t-il lieu ? Natacha permettra-t-elle à Cindy de tenir sa main ? à la seconde où le contact s’établit, Natacha frôle les doigts de Cindy et fait alors un bond en arrière, comme si elle avait touché un poisson pourri. Les autres éclatent d’un rire bébête tandis que Cindy fait semblant, elle aussi, de trouver ça drôle 4.

À l’issue de ses premières années d’enseignement dans une école primaire, un jeune instituteur m’a raconté à quel point il était choqué en observant de l’intérieur ce monde « tout sucre et tout miel » des filles : Je rencontre des difficultés dans la cour de récréation, aussi bien avec des garçons qu’avec des filles, mais elles sont de nature très différente. Les désaccords entre garçons relèvent de la compétition ; ils impliquent une contestation des règles, ou un équipier qui ne joue pas franc jeu. J’interviens, j’arbitre et, en principe, la discussion est close. Les querelles entre filles, par contre, prennent une tournure hautement personnelle. Celles qui, la veille encore, marchaient bras dessus, bras dessous, m’effarent en se retournant soudainement l’une contre l’autre et en vociférant des insultes bien ciblées au vu et au su de tout le


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monde. Les blessures mettent des mois à se refermer. Les filles me lessivent complètement. Pour ma part, je préfère avoir des problèmes avec les garçons, tous les jours s’il le faut !

Les filles, plus que les garçons, manifestent une certaine propension à tracer un cercle d’intimes très fermé et à en exclure les autres, qu’elles froissent alors amèrement.

Je vous dépeindrai les mauvais aspects de notre don pour l’intimité au chapitre 3, en explorant l’univers des jeunes filles et des femmes, parfois même chrétiennes. Adultes, nous sommes devenues plus discrètes que lorsque nous étions enfants, et nous préférons les commérages et la trahison aux cris dans la cour de récréation.

Je me rappelle une certaine dame ayant réussi professionnellement qui entendit dire que j’écrivais un livre sur l’amitié et les femmes. Elle me déclara avec un profond cynisme : « Ces deux mots ne vont pas ensemble ! » Certaines femmes ont été si offensées par d’autres qu’elles ont rompu tout lien affectif avec leur propre sexe.

Notre perfidie est tenace, notre désir de tendresse impérieux, et nous avons besoin de la sagesse et de la puissance de Dieu pour nous affranchir de nos mauvaises habitudes. Mais en Christ, nous pouvons surmonter les dissensions, briser les chaînes, et manifester un don qui soit non seulement une bénédiction pour nous-mêmes mais aussi pour les générations à venir.

D’autres femmes se tiennent à l’écart de leurs semblables parce qu’elles refusent de supporter le déchirement d’un départ ; et la séparation est de plus en plus commune de nos jours. Sylvie l’a exprimé en ces termes : « Chaque fois que je me rapproche d’une femme, elle déménage ou elle trouve un emploi. Je me sens trahie ».


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User de notre don pour l’intimité peut apporter du chagrin dans nos vies. Mais l’étouffer n’est pas la solution. Isabelle a bien essayé, quand elle a changé de région. Elle s’est dit : « C’est décidé. Je ne me ferai plus d’amie, parce que c’est trop douloureux quand il faut s’en aller. Et cette année-là, devait-elle commenter plus tard, fut la pire de ma vie ». Les modèles bibliques repris dans ce livre vous aideront à éviter les pièges et supporter les épreuves attachées à ce cadeau qu’est l’amitié. Quand Dieu nous accorde un don, c’est pour que nous en fassions bon usage. Et nous avons un don. Il est manifeste aussi bien chez les petites filles que chez les femmes.

Femmes et hommes Nous attendons de nos amies qu’elles nous ouvrent leur cœur, nous entretiennent de leur affection et nous chérissent. Et nous sommes déçues quand une amie intime n’atteint pas à cet idéal. Pourtant, nous ne sommes pas du tout surprises que deux hommes soient incapables d’accéder à ce degré de familiarité. Naturellement, il y a des exceptions. Il existe des hommes dotés d’un hémisphère cérébral droit prédominant, et d’autres spirituellement matures qui sont bénis de posséder un tel don. Inversement, il existe des femmes avec une prédominance cérébrale gauche, et d’autres tellement blessées qu’elles ne sont pas à l’aise dans l’intimité.

Des études démontrent que les hommes, comme les petits garçons, s’accordent pour faire des choses ensemble – chasser, repeindre l’église ou participer à un jeu – mais qu’ils ne se rapprocheront pas souvent au point de se prendre pour confidents 5. Engagés dans une quelconque activité, les


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hommes sont plutôt côte à côte, et les femmes face à face. Les hommes peuvent confondre la quantité du temps qu’ils passent ensemble avec la notion d’intimité.

Pendant quinze ans, Francis joua au golf avec la même petite équipe masculine. Quand il cessa de pratiquer ce sport, il fut déçu de constater qu’il ne voyait plus que rarement ses anciens partenaires. « Je suppose que tout ce que nous avions en commun, c’était le golf ». Après réflexion, il ajouta : « Nos conversations, et je crois que c’est typique des hommes, étaient d’ordre cérébral et non cordial ».

Non seulement la plupart des hommes estiment qu’il leur est difficile de s’ouvrir aux autres, mais ils sont souvent embarrassés, ensemble, s’ils ne peuvent focaliser leur attention sur une occupation déterminée. Un pasteur m’a dit que, pour eux, une réunion réussie doit comporter une activité. Être ensemble pour être ensemble les rend mal à l’aise. Richard Cohen, un chroniqueur du Washington Post, publia les amères constatations suivantes : Mes amis n’ont pas d’amis. Ce sont des hommes. Ils pensent qu’ils ont des amis et si vous leur demandez s’ils ont des amis, ils répondront que oui ; mais ce n’est pas vrai. Ils croient, par exemple, que je suis leur ami, mais je ne le suis pas. D’accord, ils ne sont pas mes amis non plus. La raison, c’est que nous sommes tous des hommes, et les hommes, j’en suis venu à le croire, ne peuvent pas ou ne veulent pas avoir de véritables amis. Ils ont autre chose : des compagnons, des camarades, des copains, des compères, quelqu’un avec qui boire un verre, quelqu’un avec qui courir le jupon et quelqu’un avec qui déjeuner, mais ils n’ont personne lorsqu’ils ont besoin de confier ce qu’ils ressentent – particulièrement quand ils sont blessés… Les femmes vous diront tout le temps qu’elles ne connaissent pas les hommes avec qui elles vivent. Elles parlent de longs silences, d’échappatoires, de dissimulation chro-


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nique de leurs sentiments et d’impassibilité quand ils sont préoccupés, tracassés ou quel que soit leur état. Si cela peut les consoler, qu’elles sachent qu’il n’y a rien là de personnel. Les hommes traitent les autres hommes de la même manière 6.

Dans le monde séculier, la plupart des hommes n’ont pas d’ami intime. Une fois l’ami défini comme « quelqu’un de qui vous vous sentez proche, que vous rencontrez souvent, sur lequel vous pouvez compter quand vous avez besoin de lui », quatre hommes sur cinq avoueront vivre sans ami.

Une femme a trois fois plus de chances qu’un homme de posséder une confidente 7. Si un homme cite une personne de confiance, c’est généralement une femme 8. Une jeune épouse commentait : Mon mari me dit que je suis « le seul ami » dont il a besoin. J’en suis flattée mais, en toute honnêteté, je ne peux pas en dire autant à son sujet. J’ai besoin du soutien que me prodiguent mes amies.

Dans le milieu chrétien, les hommes associés dans la prière, les études bibliques ou les responsabilités, ont plus de chance de trouver un ami, mais ils parviennent très rarement au niveau d’intimité des femmes.

Ladd Wheeler, professeur de psychologie à l’université de Rochester, a constaté que les individus des deux sexes sont moins renfermés lorsqu’ils passent du temps en compagnie féminine. Son étude a montré que chaque fois qu’une femme est impliquée dans une interaction, autant les hommes que les femmes se livrent bien davantage et les relations prennent un tour nettement plus intimiste 9. Une autre recherche confirme que, si on leur donnait le choix, les personnes des deux sexes passeraient plutôt leur temps avec des femmes 10.


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En bavardant avec mes plus proches amies, je sens mon âme baignée de soleil et rafraîchie par leurs questions qui atteignent les eaux profondes de mon âme. Je suis touchée lorsqu’elles sympathisent, se réjouissant lorsque je me réjouis et pleurant lorsque je pleure. Je ne saurais dire combien de fois mon cœur fut ranimé par les petites attentions provenant de femmes : un petit mot d’encouragement, une étreinte sincère, mon chocolat préféré aux noisettes et au lait (avec les bonnes proportions, exactement comme je les aime !) ou une plante verte robuste dont la croissance symbolise celle de notre amitié. Dieu s’attend à ce que nous nous servions des dons qu’il nous a faits ! Et la plupart des femmes ont reçu la capacité de prodiguer des gestes affectueux et familiers. J’ai vécu quelques belles amitiés féminines ; et pourtant, quand je les regarde à la lumière de celles qui apparaissent dans l’écriture, je me sens bien petite.

L’amitié selon le cœur de Dieu Un trou dans un tissu paraît insignifiant jusqu’à ce qu’il soit exposé au soleil. Quand les rayons lumineux le traversent, vous découvrez à quel point la déchirure est importante. De même, les manquements dans nos amitiés féminines semblent dérisoires en comparaison de celles des hommes. Mais si nous les examinons à la lumière des exemples de la Bible, nous voyons combien nous sommes loin du but.

Nous allons découvrir trois beaux exemples d’amitié, vécus à des époques très différentes : • Ruth et Noémi

• David et Jonathan

• Marie et Élisabeth


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Dans ce livre dédié aux amitiés féminines, j’ai inclus David et Jonathan pour deux raisons : d’abord parce que Jonathan est l’un des rares hommes capables d’enseigner aux femmes elles-mêmes quelque chose sur l’amitié. Mais, plus important encore, j’avais besoin de David et de Jonathan pour compléter les modèles d’amitié de la Parole de Dieu. En juxtaposant les trois époques concernées, vous percevrez des vérités qui vous avaient peut-être échappé auparavant. C’est comme si une toile de maître vous était dévoilée peu à peu. Si vous avez déjà posé du papier peint ou travaillé sur un métier à tisser, vous connaissez le plaisir de voir un motif apparaître. Dieu travaille de la même manière par sa Parole : lorsque vous étudierez ces trois exemples, il imprimera peu à peu en vous le « motif » de l’amitié dans votre cœur. Dieu pourra déclencher et canaliser votre disposition naturelle à l’intimité. Il vous aidera à vous servir du don de l’amitié comme d’une puissance de guérison grâce à laquelle vous pourrez faire du bien autour de vous. Bien que je me sois considérée moi-même comme une amie attentionnée, depuis que j’applique mes découvertes concernant Ruth, Jonathan et Élisabeth, mes amitiés se sont accrues d’une richesse que je n’aurais jamais soupçonnée. L’écriture m’a aussi permis d’acquérir le discernement des faiblesses liées à ma condition de femme. Le discernement peut être un outil puissant pour arracher les mauvaises herbes qui asphyxient notre don.

Ce livre traitera également de l’ivraie de la jalousie, de la trahison et du lesbianisme. (J’ai conscience de ce que certaines se sont procuré ce livre parce qu’elles désirent ardemment être libérées des chaînes de l’homosexualité. Si vous êtes l’une de ces femmes, je suis persuadée que l’histoire de mon amie Rachel vous apportera espoir et clairvoyance.)


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Comme un avant-goût des prochains chapitres, je vais vous donner un aperçu de ces modèles d’amitiés provenant de l’écriture. Pour chacun de ces trois exemples, notre Seigneur a choisi de se focaliser sur les rencontres et les séparations de ces amis. Puisque ces scènes forment le fil conducteur d’une grande partie de ce livre et qu’elles ont été jugées dignes d’être incluses dans le texte biblique, méditons un moment sur leur valeur.

Scènes d’adieux et scènes de rencontres Quand j’ai l’occasion d’observer autour de moi les départs et arrivées dans un aéroport, j’éprouve une joie paisible à la vue de certains tableaux : amoureux qui prolongent leurs embrassements doux-amers, grands-parents émerveillés qui voient pour la première fois leur petit-enfant nouveau-né, sœurs réunies qui s’étreignent en versant des larmes sans fausse honte… Tandis que je les regarde, à l’abri de mon siège dans la salle d’attente, mon cœur se réchauffe.

Mais il est infiniment plus bouleversant d’être soimême partie prenante de ces scènes. C’est dans ces derniers instants, les plus pathétiques, que l’émotion latente au sein d’une amitié éclate au grand jour. Si nous sommes vraiment attachées à une amie, alors, c’est un déchirement. Ça fait mal. Mais ce peut aussi être étonnamment apaisant. Comme Roméo le dit à Juliette : « De cet adieu, si douce est la tristesse ». Il y a une satisfaction douce-amère à réaliser que ce ne serait pas aussi douloureux si la relation n’était pas si fusionnelle. Je fus surprise par la profondeur de ma peine quand je mis notre aîné dans l’avion pour l’université. Alors que je m’abandonnais à mes larmes, mon père me téléphona de


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Californie. Il appelait pour me souhaiter un bon anniversaire (ce n’était pas le bon jour) et il s’inquiéta en remarquant que je pleurais. Mais dès qu’il connut la raison de mon chagrin, il se mit à rire ! Avec sagesse, il commenta : « Eh bien, ma chérie, n’est-ce pas merveilleux que tu te mettes dans cet état ? Ne serait-il pas regrettable que cela ne te fasse ni chaud ni froid ? » Chaque fois que mon mari et moi étions amenés à déménager, il y avait des scènes d’adieux déchirantes entre mes sœurs en Christ et moi-même. Et bien que nous, les femmes, soyons fières de pouvoir exprimer notre affection, il m’est arrivé à plusieurs reprises de ne pas vraiment sentir à quel point mes amies se souciaient de moi, jusqu’à ce que nous fussions séparées. Tandis que nous chargions le camion au départ d’Akron, Steve, mon mari, m’interpella dans les escaliers : « Dee, tu as de la visite ! » Je fus étonnée de trouver Lucie, une participante à mes études bibliques, paisiblement perchée sur une grosse boîte dans le salon. Elle n’était jamais venue me voir auparavant. Ma surprise grandit quand, silencieusement, elle me tendit une magnifique tapisserie. Pendant des mois, elle avait passé ses soirées à broder cette preuve d’amour. Lucie, incontestablement le membre le plus réservé de notre cercle… Lucie m’aimait ! Spontanément, je la serrai dans mes bras. Tout d’abord, elle resta les bras ballants mais, ensuite, elle me rendit mon étreinte. Les larmes roulaient sur nos joues, sans que nous pussions les réprimer.

Un autre jour, celui où nous quittâmes Indianapolis, j’appelai Barbara pour lui dire au revoir. J’admirais et j’aimais Barbara, mais je ne m’étais jamais sentie très sûre d’être quelqu’un d’unique à ses yeux, parce que c’est le genre de personne incroyablement chaleureuse et dévouée envers tout le monde. Comme j’étais incertaine quant à la


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profondeur de ses sentiments, je décidai que ce serait moins dramatique de lui téléphoner que de s’arrêter en passant. Pour être honnête, je ne voulais pas prendre le risque de révéler que je lui étais plus attachée qu’elle à moi. Mais, au bout du fil, Barbara commença à balbutier des mots gentils : « Tu ne peux pas savoir ce que tu représentes pour moi », dit-elle en sanglotant. (C’est vrai que je n’en savais rien !) En dépit de la tristesse, j’appréciai ces marques d’intérêt qui resteront gravées dans ma mémoire.

Deux des passages les plus poignants de toute l’écriture résident dans la séparation de Ruth avec Noémi, et de David avec Jonathan. Depuis qu’ils m’ont aidée à peser tout le prix des départs (et j’espère qu’il en sera de même pour vous), mon attitude envers ces moments douloureux a changé. Je ne me déroberai plus, par exemple, à l’idée d’accompagner un bien-aimé à l’aéroport. Je suis si sincèrement reconnaissante pour la sagesse glanée au travers de ces modèles ! J’ai pu l’appliquer lorsque j’ai dû dire adieu à mon père mourant. Je suis restée assise à son chevet pendant dix jours à chanter des cantiques et à lui répéter pourquoi je l’aimais. Quand j’écrivais le texte pour la première édition de ce livre, mon mari et moi étions jeunes, et nous avions trois enfants. Mais vingt années supplémentaires nous ont apporté deux autres filles, une belle-fille, et quatre petits-enfants. En 2004, mon bien-aimé mari de cinquante-neuf ans est allé rejoindre le Seigneur, perdant son courageux combat contre le cancer du colon. Quand Steve était près de mourir, il a appelé près de lui chacun de nos cinq enfants et notre inestimable belle-fille afin de leur dire au revoir. Il connaissait toute l’importance des « scènes d’adieux », et il a prononcé des paroles qu’on n’oublie pas. Annie, notre benjamine, raconte :


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J’ai grimpé sur son lit et il m’a juste serrée contre lui, longtemps. Nous ne pouvions que rester silencieux ensemble, et j’ai aimé cela. Il m’a dit que tout irait bien si je n’avais pas trop de chagrin après sa mort. (Bien sûr, tiens ! Je serai malheureuse pour le reste de ma vie !) Il m’a dit qu’il voulait être enterré dans son pyjama et sa robe de chambre pour que les choses soient un peu plus légères au moment des funérailles. Après, il a juste continué à me tenir contre lui en pleurant : « Annie, je regrette tant de devoir te laisser. Je suis tellement désolé. Mais je suis si heureux d’avoir pu être ton papa. Annie, je serai toujours ton papa. Toujours. Je serai toujours ton papa. Je t’aime ».

Ces mots se sont gravés dans la mémoire d’Annie pour toujours, lui offrant un apaisement. Aussi douloureux qu’ils furent à entendre, aussi douloureux qu’il m’est de les lire, je suis infiniment heureuse qu’il les ait dits.

Bien que la séparation puisse être dure, bien que la peine puisse être profonde, ce n’est pas une tristesse stérile. Votre présence peut apporter du réconfort. Et les expressions intimes de l’amour peuvent être source de consolation pendant les années à venir. Plus définitif est l’« au revoir », plus la plaie de notre cœur saigne, et plus le souvenir nous est cher.

Même des petits « au revoir » peuvent garder une place dans nos cœurs. En tant que maman, je chéris encore ces moments bénis où je bordais une tendre petite fille sous sa couverture préférée, après un dernier câlin de maman ours. Son sourire sucré, ses bras grands ouverts voulant dire « Je t’aime gros comme ça ! », s’attardent comme autant de doux souvenirs d’une enfance déjà lointaine.

J’ai également appris que lors de la visite d’une amie, l’instant le plus significatif se produit souvent au moment où je prends la peine de marcher avec elle jusqu’à sa voiture.


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Là, une confidence ou un geste affectueux prolonge notre tête à tête et devient le point culminant de notre rencontre. Si j’évite ces scènes d’adieux, je me prive de souvenirs précieux.

Les scènes de salutation peuvent comporter le sentiment que Dieu est à l’origine de votre rencontre. Marie se précipita chez Élisabeth, parce qu’elle reconnut que Dieu la lui donnait pour amie compréhensive. Il est tout aussi fascinant de constater avec quel empressement Jonathan s’accrocha à David dès leur première rencontre. Dieu connaissait les épreuves que l’avenir réservait à ces hommes, aussi « tricotat-il » les mailles de leurs cœurs quasiment sur le champ. Je n’avais pas trente ans lorsque je rencontrai Luci Shaw. Poète de renom, elle avait fondé, avec son mari Harold, une maison d’édition chrétienne. Je publiai avec elle mon premier livre, et nous sommes devenues amies. J’ai la plus haute estime pour elle, non seulement pour ses immenses talents de poète et d’auteure, mais aussi parce qu’elle aide et se lie d’amitié avec les auteures qui font leurs premiers pas dans le milieu littéraire.

Je l’interviewai, alors que je résidais dans sa maison, et lui fis subir un interrogatoire serré concernant ses liens étroits avec des écrivains comme Madeleine L’Engle, aussi controversée qu’elle est douée. Luci a parlé ouvertement avec moi – comme elle le fait toujours – et je relate plusieurs de ses anecdotes dans ce livre. J’étais intriguée, par exemple, par son amitié profonde avec Margaret D. Smith, une femme poète assez jeune pour être sa fille. Voici comment Luci décrit leur « scène de la rencontre » : À la minute où nous nous sommes vues, nous avons eu des atomes crochus. C’était incroyable. Je n’avais jamais vécu semblable expérience… Comme par magie, elle m’a délié la langue jusqu’à me faire dire des choses dont j’ignorais


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même que je les connaissais. Elle était un catalyseur pour moi, et je l’étais pour elle. Nous pouvons converser au moyen d’une sorte de sténo verbale. Nous n’avons pas besoin d’explications ni de complément d’informations.

Être toujours attentive à l’éventualité que Dieu place quelque personne sur notre chemin changera notre comportement lors des premières rencontres. Nous pourrons lier de magnifiques amitiés qui nous auraient échappé autrement. De même, il est fondamental d’être sensible à l’esprit, le laissant toucher nos yeux aveugles quand quelqu’un croise notre route. Quand j’emménageai au Nebraska, je désespérais de me faire une amie. Un beau matin, en me rendant à un café offert aux mères des nouveaux venus au jardin d’enfants, je priai pour que Dieu me conduise vers une âme sœur. En entrant dans la salle, bruissante du bavardage des jeunes mamans, je priai encore : Guide-moi, Seigneur ! Une jolie femme me sourit ; il y avait une chaise vide à côté d’elle. Me sentant la bienvenue, je la rejoignis, m’assis, et me présentai. Elle s’appelait Shelly et, comme moi, venait d’inscrire sa fille à l’école maternelle. Nous rions toutes deux, maintenant, au souvenir de notre « scène de la rencontre » quelque peu maladroite.

En déballant mes cartons dans notre nouvelle maison, j’avais l’habitude d’écouter des cassettes d’évangélisation de Paul Little. Aussi, dès que ma conversation avec Shelly marqua une pause, je décidai d’essayer une des entrées en matière que ce prédicateur conseillait. C’était horriblement artificiel, mais je me lançai : « Je suis passionnée par tout ce qui est d’ordre spirituel, parce que j’ai fait une expérience avec Jésus qui a changé ma vie. Si vous êtes intéressée, Shelly, nous pouvons en parler. Sinon, bien sûr, ce n’est pas grave ».


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J’étais abasourdie… Shelly ne s’enfuyait pas ! Au contraire, après ce qui me parut un silence interminable, elle sourit. Tranquillement, elle dit : « Il fut un temps où cela ne m’aurait pas intéressée du tout. Mais mon père est mort l’année dernière, et j’ai un voisin qui m’a fait écouter un pasteur du nom de Chuck Swindoll à la radio. Eh bien, oui ! Racontez-moi comment Jésus a transformé votre vie ».

Je remarquai rapidement que Shelly était une chrétienne toute récente à tel point qu’elle ne pouvait pas encore exprimer ce qui lui était arrivé. Depuis, elle est devenue l’une de mes plus chères amies, et nos filles sont également devenues très proches. Vingt-cinq ans plus tard, nos filles sont adultes, et nous sommes toutes les quatre promptes à nous confier et à prier les unes pour les autres.

Se rendre davantage compte de l’importance de ces « scènes de rencontre » nous permettra d’engranger de précieux souvenirs. Christina Rossetti a écrit : « Je souhaite pouvoir me souvenir de ce premier jour, cette première heure, ce premier instant de notre rencontre ».

Scènes de rencontres : il est essentiel de voir vraiment comme Dieu voit. Scènes d’adieux : il est essentiel de saisir les dernières paroles, les dernières pensées, les derniers regards.

Ce sont juste deux des fils tirés du modèle de l’amitié selon Dieu.

Cependant, vous pouvez vous interroger : les femmes ont-elles vraiment un don pour l’intimité ? Les femmes sontelles vraiment plus amicales que les hommes ?


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C h a p i t r e

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Les femmes sont plus amicales Nous avons découvert que l’amitié entre femmes était plus profonde, plus solide, et plus riche que celle qui unit les hommes 11. Joël Block et Diane Greenberg

Le soleil de juillet se couchait enfin, ce qui annonçait le déclin de la chaleur. Mon mari, notre fille Sally et moimême étions tranquillement assis à l’abri de la véranda. Tout en écoutant le craquettement ininterrompu des cigales, nous nous amusions des cabrioles d’Effy, notre chiot de six mois. Insensible à la chaleur, Effy poursuivait avec enthousiasme une balle que Sally lui lançait. Il la rapportait fièrement, en remuant la queue, les yeux remplis de l’espoir d’un mot gentil ou d’une caresse affectueuse. Cela me rappela des souvenirs et je racontai : « Quand j’étais petite, je croyais


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que les chiens étaient tous des femelles et les chats tous des mâles, parce que les chiens sont beaucoup plus sociables ».

Pour la plus grande joie de son papa, Sally répliqua : « Maman, tu oses dire ça en présence d’un homme ? » Nous avons d’autant plus ri à cette réaction protectrice que notre fille apportait inconsciemment de l’eau à mon moulin. Des études démontrent que les femmes ont une plus grande perception des émotions d’autrui. C’est l’une des nombreuses raisons pour lesquelles elles ont tendance à être plus ouvertes à l’amitié que les hommes. Elles ont beaucoup plus qu’eux la liberté d’être proches des personnes de leur propre sexe : les femmes vont se confier l’une à l’autre, se prendre dans les bras et exprimer leur affection l’une pour l’autre.

Interrogeant des hommes dans le cadre de son étude sur l’amitié, la psychothérapeute Lillian Rubin demanda pourquoi ils n’arrivaient pas à entourer de leurs bras un homme en train de pleurer. L’un d’entre eux répondit : « Vous plaisantez ? Comment pourrait-on faire une chose pareille ? » Elle l’assura qu’elle était sérieuse. Il s’agita nerveusement sur son siège et déclara : « C’est juste que les hommes ne font pas cela, voilà tout. C’est terriblement embarrassant… Je pense qu’on doit toujours ressentir une certaine réticence à se rapprocher d’un autre homme. Comment dire ? On est trop crispé, trop maladroit. Entre mecs, on ne se laisse pas aller ! » 12

Les femmes redoutent moins que leurs relations d’amitié soient mal interprétées En organisant les entrevues qu’exigeait la rédaction de son livre Men and Friendship (Les hommes et l’amitié), Stuart Miller s’aperçut qu’il devait continuellement expliquer aux hommes que son thème n’était pas l’homosexua-


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lité 13. De même, C. S. Lewis remarqua qu’il était « devenu nécessaire, de nos jours, de réfuter la théorie selon laquelle toute amitié durable et sérieuse serait en fait homosexuelle ». Les amis proches s’épuisent à justifier que leur relation n’a rien de malsain 14.

Il existe des similitudes frappantes entre les amitiés de Ruth avec Noémi et de David avec Jonathan. Cependant, David et Jonathan risquent davantage d’éveiller des soupçons. Il paraît tout naturel que Ruth s’accroche à Noémi, verse des larmes et proteste de son indéfectible attachement lors de la scène des adieux. Par contre, les messieurs sont particulièrement mal à l’aise lorsque David et Jonathan en font autant à l’heure de la séparation.

Même le traducteur Kenneth Taylor éluda la séquence dans son édition originale de The Living Bible (La Bible vivante), qui est pourtant impartiale et directe dans son ensemble. Il transforma la traduction initiale : « Les deux amis s’embrassèrent et pleurèrent ensemble, David surtout fondit en larmes » (1 Samuel 20 : 41 – Segond) en cette paraphrase : « Ils se serrèrent tristement la main, les joues ruisselantes de pleurs, jusqu’à ce que David n’ait plus de larmes ».

Lors des éditions suivantes, Taylor remania cette interprétation pour refléter plus exactement l’hébreu. Mais j’ai souri de constater son malaise initial à l’évocation d’hommes se prenant dans les bras ou s’embrassant, même dans des circonstances aussi puissamment porteuses d’émotion.

Bien qu’ayant perdu en partie la liberté d’exprimer publiquement leur attachement l’une pour l’autre, les femmes sont toujours beaucoup mieux disposées que les hommes à s’enlacer, compatir, extérioriser leurs sentiments pour le même sexe. Que je suis reconnaissante de cette liberté !


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Combien de fois ai-je eu besoin de ce contact ou des paroles chaleureuses d’une amie !

Quand mon mari était si malade et ensuite après sa mort, à chaque fois que je rencontrais une amie, je voyais des larmes jaillir spontanément de ses yeux. Comme celle qui me vit dans une épicerie et qui me demanda comment j’allais : je me mis à pleurer et, avant de nous en apercevoir, nous sanglotions dans les bras l’une de l’autre devant les laitues et les tomates. Des femmes de l’église m’ont réconfortée par des courriels quotidiens, des petits plats, de menus cadeaux pour nos enfants et des marques de solidarité. Un jour, au cours de cette période éprouvante, Kathy Troccoli et moi avons accompagné quelques connaissances à un concert de l’association féminine Women of Faith (Femmes de foi), où nous avions réservé six places. Lorsque Babbie Mason commença à chanter une chanson d’amour pour son mari, je m’effondrai. Kathy s’en aperçut du coin de l’œil et immédiatement, comme un chat, elle escalada les accoudoirs de nos compagnes jusqu’à m’atteindre. Rien qu’à la voir s’approcher de moi avec des larmes dans les yeux, je me sentis revigorée. Comme Babbie passait au morceau suivant, Kathy en fredonna les paroles pleines d’espoir à mon oreille, tandis que je pleurais toujours sur son épaule.

Je ne peux imaginer qu’un homme puisse se sentir à l’aise dans aucune des situations décrites plus haut, alors que la plupart des femmes réagissent spontanément, en prenant à peine le temps de réfléchir. Que ce serait triste si nous ne pouvions plus dispenser cette forme d’amour et d’assistance !

Je n’ai jamais ressenti la nécessité de justifier auprès d’une amie intime que je ne suis pas une lesbienne, ni hésité à la prendre dans mes bras ou lui écrire un petit mot cordial quand elle a besoin de consolation. Il manquerait quelque


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chose d’essentiel à ma vie si les femmes étaient réticentes à se montrer affectueuses avec moi.

À la table, par exemple, où en tant qu’auteure je signe des autographes, je place toujours une deuxième chaise afin que toutes celles qui désireraient prier puissent s’asseoir à côté de moi. Tant de femmes ont le cœur brisé ! Et je suis tellement heureuse de leur offrir un réconfort de façon physique, tandis que nous intercédons. Je peux les étreindre, leur caresser les cheveux, laisser les larmes venir, et les embrasser sur la joue avant que nous nous disions au revoir. Je ne peux imaginer un conférencier américain agissant ainsi mais, moi, je le fais et je m’en réjouis. Récemment, notre fille Annie reçut son petit ami de vingt et un ans à dîner. Je lui demandai si lui et ses copains se montraient toujours aussi peu expansifs, de crainte qu’on les suspecte d’être gays : – Oh ! oui ! s’exclama-t-il.

– Peux-tu me donner un exemple d’une telle situation ? – Eh bien, quand Éric et moi entrons dans un magasin, nous veillons à ne pas tenir la porte à l’autre. En fait, nous la lui claquons presque à la figure.

– Vraiment ? dis-je, amusée. Et si Éric était réellement malheureux, le serrerais-tu dans tes bras ? D’un air ahuri, David s’étonna : – Le serrer dans mes bras ? ! Je ris de plus belle :

– Dis-moi, tu t’assiérais à côté d’un copain, au cinéma ?


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– C’est certain que nous mettrions un fauteuil entre nous ! – Mais si tu voulais lui parler ?

– Parler, en regardant un film ? Pourquoi parler pendant un film ? – Ben, pour faire un commentaire, pour communiquer… – C’est hors de question !

Pourquoi les gars, entre eux, sont-ils tellement moins démonstratifs que les filles ? Une théorie convaincante (adoptée par Carol Gilligan, de Harvard, et la psychothérapeute Lillian Rubin) avance ceci : puisque, dans la plupart des cultures, la mère est presque toujours la première dispensatrice des soins aux enfants en bas âge, les filles ressentent une tendresse profonde de la part d’une personne du même sexe durant leurs jeunes années ; ce qui n’est pas le cas pour les garçons. Il nous semble donc tout à fait normal d’être proches d’une autre femme, alors qu’il ne semble pas normal à un homme d’être proche d’un homme.

Si cette théorie se révèle exacte, il y a peut-être un espoir pour que les amitiés masculines se bonifient du fait que, dans de nombreux pays, il devient plus acceptable pour des pères de tenir un rôle actif dans l’éducation parentale. Il est réconfortant d’entendre un témoignage comme celui provenant de cet homme, marié pour la seconde fois : Je n’avais jamais raconté d’histoires à mes enfants durant mon premier mariage. Je n’avais jamais changé les couches ni donné leur bain à des bébés. Je rentrais à la maison seulement après que mon épouse les eut tous fait manger et mis en pyjama. Je les embrassais simplement pour leur souhaiter une bonne nuit. Ce n’était pas très viril de les


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cajoler. Maintenant, les règles ont changé. Les hommes s’occupent vraiment de leurs gosses. Et j’aime ça 15.

Les femmes savent renvoyer la balle dans la conversation Une femme s’interrogeait : « Comment se fait-il qu’il n’y ait pas de répondant dans une conversation avec un homme ? Parfois, c’est comme essayer de jouer au tennis sans qu’il y ait personne de l’autre côté du filet ! 16 »

La linguiste Deborah Tannen, auteure du best-seller You just don’t understand : Women and Men in Conversation (On ne se comprend pas : quand les hommes et les femmes parlent ensemble) déclare que, quand des hommes et des femmes bavardent ensemble, ils s’engagent dans une « communication interculturelle ». Les hommes excellent à ce que D. Tannen appelle un discours explicatif dans lequel ils monologuent alors que les femmes triomphent dans le discours relationnel, où elles renvoient la balle dans la conversation. L’essence des amitiés féminines, soutient D. Tannen, est d’entretenir un langage relationnel : une manière d’établir des contacts et d’entretenir les liens. La plupart des hommes parlent dans le but de préserver leur indépendance, de négocier et de maintenir le statut d’une hiérarchie sociale, par la démonstration de connaissances et de compétences. Ils apprécient d’être le centre de l’attention avec leurs anecdotes, leurs plaisanteries, et ils aiment exposer leurs connaissances 17.

Samantha, brillante fillette de douze ans, m’a beaucoup amusée par cette réflexion : « Si je veux avoir une discussion qui ne soit pas d’un bout à l’autre à sens unique, je parle avec des filles, parce que les filles savent écouter et répondre. C’est une très grande qualité que les garçons n’ont pas ».


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Phillip, le mari de ma fille Sally, est un agent du FBI. Quand ils étaient fiancés, Sally aspirait à plus d’échanges verbaux, surtout lorsqu’ils étaient séparés et que leurs relations se limitaient presque exclusivement à des communications téléphoniques à longue distance. Elle se demandait parfois s’il était réellement attentif. Elle implorait :

– Tu sais, Phillip, ça me ferait très plaisir que tu me poses davantage de questions. Ou, à défaut de questions, que tu manifestes au moins ta présence.

– Est-ce que tu pourrais me donner un exemple de ce que je devrais faire ?

– Tu pourrais dire quelque chose de ce genre : « Hem, hem », « Ouais », ou juste une onomatopée quelconque, pour que je sache que tu es toujours là ! Du coup, Phillip interrogea deux de ses collègues masculins du FBI pour savoir ce qu’ils ressentiraient s’il se comportait avec eux de cette façon dans leurs échanges : – Je penserais que tu n’écoutes pas, affirma l’un. – Je penserais que tu es gay, ajouta l’autre. Que nous sommes différents !

Il y a certains hommes qui, sans recevoir de leçons particulières, savent comment renvoyer la balle, comment questionner, et comment répondre aux sentiments. Jonathan, l’ami de David, était un de ceux-là. Mon mari Steve en était un autre. Voici comment je l’ai décrit à mes copines d’université après notre première rencontre : « C’est la première fois que j’ai pu communiquer avec un gars exactement comme je le fais avec mes bonnes copines ! » Quand notre fils John était au lycée, je me suis efforcée de lui apprendre comment avoir de vrais échanges avec


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les autres. John était charmant, beau garçon, sportif, et les lycéennes s’agglutinaient autour de lui. Je m’entends encore le taquiner parce que j’avais remarqué que les filles étaient en train de l’écouter la plupart du temps et qu’il ne rendait pas la pareille. Je sais que c’est courant dans les rapports entre hommes et femmes. La majorité des femmes vous diront que, lorsqu’elles ont une relation amicale avec des hommes, c’est elles qui écoutent, qui relancent la conversation avec des questions, qui rassurent et encouragent. Je voulais que John échappe à ce stéréotype masculin afin d’être en mesure, comme le Christ, de faire sortir les autres de leur coquille en s’intéressant à eux. Je lui citai le verset : « Les projets que forme l’homme dans son cœur sont comme des eaux profondes, mais l’homme intelligent sait y puiser » (Proverbes 20 : 5). J’engageai aussi notre fils dans un jeu, auquel il participa à contrecœur. – John, commençai-je, on va faire comme si j’étais nouvelle dans ton école. Pose-moi des questions qui exigent autre chose que des réponses monosyllabiques. Il me dévisagea avec méfiance, mais commença, coopérateur par nature : – Salut, ma jolie !

Il passa son bras autour de mes épaules en faisant un clin d’œil : – Comment tu t’appelles ?

– Alice, répondis-je en me raidissant. – Et où habites-tu, Alice ?

– 902, rue Elm.


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Me lançant un regard exaspéré qui signifiait que mon laconisme ne lui facilitait pas la tâche, il fit une ultime tentative : – Quelle est ta matière préférée ? – Maths.

– Maman ! Tu me fais passer un mauvais quart d’heure !

– Ne laisse pas tomber ! Cette fois, on sent que tu vas quelque part, plaidai-je. Alors, poursuis sur ta lancée. Demande à Alice pourquoi elle aime les mathématiques, ce qui l’attire dans ce domaine… – Je ne suis pas sûr que ça m’intéresse vraiment, de savoir pourquoi Alice aime les maths… dit John en souriant. – Nous y voilà ! tranchai-je catégoriquement.

Bien que l’attitude de John ait ici motivé ma conclusion prévisible, je crois qu’à l’évidence et dès la petite enfance, les femmes sont mieux équipées pour se soucier des autres.

Le cerveau des femmes fonctionne différemment Les scientifiques ont découvert des différences entre les fonctionnalités d’un cerveau masculin et celles d’un cerveau féminin. De toute évidence, nous pensons autrement. (Entendant cette considération, ma mère, âgée de quatrevingt-treize ans, a ironisé : « ça, j’aurais pu le leur dire ! ») Les neurologues ont pressenti cela les premiers, quand ils notèrent que les hommes étaient plus sérieusement affectés que les femmes après une attaque cérébrale. Au cours des années qui suivirent la première impression de ce livre, la conviction que la biologie jouait un rôle


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considérable dans nos disparités fut confortée de toutes parts. Un article scientifique a constaté ceci : « Durant les dernières décennies, il était idéologiquement en vogue de soutenir que ces différences comportementales étaient minimes et qu’elles résultaient des disparités dans les expériences vécues avant et après l’adolescence » 18. « Cependant, poursuit le communiqué, l’accumulation de preuves indique au contraire de grandes dissemblances entre les sexes dès la petite enfance, ces dissemblances étant mieux expliquées par des « cerveaux différemment programmés » 19.

À la fin du vingtième siècle, il était politiquement correct de croire que les sexes étaient androgynes et donc que les hommes et les femmes étaient également intéressés et doués pour les mêmes tâches. À cette époque, la Suède s’investit dans une campagne publicitaire massive pour encourager les pères à s’occuper de leurs enfants. Le congé de maternité devint congé parental. Mais la plupart des pères n’y souscrivirent pas et, parmi ceux qui l’acceptèrent, les modèles éducatifs traditionnels émergeaient toujours. « Les mères affichaient un comportement affectueux, elles s’exprimaient verbalement, souriaient, soignaient, soutenaient, disciplinaient et apaisaient l’enfant en bas âge plus et mieux que les pères » 20.

Quand il se révéla plus difficile de maintenir que les pères maternaient exactement comme les mères, le politiquement correct incrimina notre culture, responsable de notre style de vie. Pourtant, les études révèlent une différence flagrante dans la dispensation des soins, et ce dès le plus jeune âge. Les petites filles de deux ans aiment leurs poupées et jouent au papa et à la maman plus souvent que les garçons du même âge 21. Les garçons de quatre ans qui souhaitent approcher un bébé restent près de lui passivement, tandis que les filles du même âge ont tendance à s’en


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occuper activement 22. (Tout autour du monde, les mamans de bambins doivent penser : avons-nous vraiment besoin de telles observations pour prouver que Dieu a programmé différemment les garçons et les filles ? Il suffit de passer juste une heure dans ma maison, ma case ou mon igloo !)

Comme une noix, notre cerveau comporte une moitié gauche et une moitié droite ; c’est presque comme si nous possédions deux esprits : chaque partie peut fonctionner indépendamment de l’autre. Chaque côté a ses propres facultés, distinctes. De manière simpliste, l’hémisphère gauche est logique et s’intéresse aux détails. L’hémisphère droit est créatif et s’intéresse aux aspects non quantifiables du monde tels que les individus et les émotions. Hommes et femmes, sans distinction, ont tendance à posséder un hémisphère gauche dominant ; mais des preuves scientifiques en nombre croissant établissent que les femmes seraient moins handicapées dans l’utilisation de l’hémisphère droit 23. C’est parce qu’elles semblent penser au travers des deux hémisphères, alors que le cerveau des hommes est plus latéralisé ; c’est-àdire que lorsqu’ils pensent, ils utilisent soit le côté gauche, soit le côté droit, (mais plus fréquemment le gauche) 24.

Une certaine théorie qui explique cette différence implique le lien de communication (le corpus callosum). Le Dr Donald Joy, dans une interview avec le Dr James Dobson, expliquait que ce cordon central – constitué de tissus nerveux et qui transmet les « messages » au cerveau – pourrait avoir subi des dommages prénataux, chez l’homme, par une action chimique d’androgènes. « Chez les hommes, les deux hémisphères ne peuvent tout simplement pas communiquer entre eux de la même manière que ceux des femmes » 25. Puisqu’une femme tend à utiliser les deux hémisphères, l’un peut compenser la perte de l’autre.


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Je n’essaye certainement pas de déprécier le cerveau masculin ! Il y a quelques avantages bien définis quand un hémisphère ne gêne pas l’autre. L’hémisphère gauche, orienté vers des buts précis, entreprend de résoudre les problèmes. Et souvent, il le fait très bien parce qu’il n’est pas distrait par l’hémisphère droit tourné vers le relationnel. Il n’en demeure pas moins que nos différences sont à l’origine de frustrations entre les sexes.

Le conseiller matrimonial Gary Smalley illustre ceci en nous racontant comment se sont passées des emplettes avec son épouse. Celle-ci lui dit qu’elle voulait acheter une robe. Immédiatement, le cerveau gauche de Gary se concentra sur le problème : « Je voulais partir à la conquête de la fameuse robe ! » explique-t-il. Mais, alors qu’ils parcouraient les rayons du magasin, Madame Smalley ne semblait pas vraiment s’intéresser à cet achat. Elle examinait d’autres articles et alla même jusqu’à suggérer que son mari et elle s’assoient pour prendre un café ensemble ! Elle interrompait continuellement « la chasse » 26.

En ce qui concerne le petit pourcentage d’hommes orientés « cerveau droit » (parfois ce sont des gauchers férus de musique, d’arts ou de sciences humaines), ils sollicitent beaucoup l’hémisphère droit de leur cerveau : ils sont sensibles et ouverts aux sentiments et aux gens. Plus loin, j’exposerai le cas de David et Jonathan ; dotés d’un hémisphère droit prédominant, ils étaient prédisposés à nous instruire, nous les femmes, de quelques subtilités concernant l’amitié. Mais la plupart des hommes sont défavorisés dans l’utilisation de cet hémisphère droit et, par conséquent, dans la perception des émotions et des personnes, les deux points forts de cet hémisphère 27.


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Lors de l’une de mes conférences, un pasteur me présenta de cette façon : « Voici la femme qui prétend qu’en tant qu’homme, j’emploie la moitié de mon cerveau ! » Certainement pas ! Je crois que Dieu a merveilleusement fait autant les hommes que les femmes ! C’est une grande force que de penser globalement, comme la plupart des femmes ; et c’en est une autre que de penser latéralement, comme la plupart des hommes. Une des capacités que possèdent les hommes « au cerveau gauche » est celle de résoudre aisément les problèmes. Les hommes orientés « cerveau droit » semblent avoir d’autres atouts, comme celui d’être des tireurs d’élite exceptionnels. En Juges 20 : 16, il est écrit : « Dans cette troupe, il y avait sept cents soldats d’élite gauchers, tous capables de toucher un cheveu sans le manquer ». Loin de moi d’être en désaccord avec le Créateur de l’univers, quant à la façon dont il nous a conçus ! L’écriture précise que les deux sexes sont créés à l’image de Dieu, mais qu’ils sont différents en tant qu’homme et femme (Genèse 1 : 27).

Les femmes perçoivent mieux les émotions Le côté droit du cerveau perçoit les émotions. De ce fait, les femmes, parce qu’elles utilisent les deux hémisphères, sont plus en harmonie avec les sentiments. Le magazine Parents a cité une étude affirmant : « Au berceau, les bébés de sexe féminin se laissent plus facilement entraîner à pleurer (comme par sympathie) que ceux de sexe masculin quand ils entendent d’autres bébés crier » 28. Claire m’a fait cette réflexion : « Mon mari est formidable, mais lorsque nous déménageons dans une autre ville, je me mets en quête d’une amie, parce qu’une femme est mieux en phase avec moi ». Un homme est susceptible d’apporter de multiples


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solutions à un problème, alors qu’une femme manifeste son empathie.

Il est tout aussi évident que le côté droit du cerveau aide à l’expression de l’émotion. Le neurologue Elliot Ross, de l’Université du Texas, a découvert que les dommages causés à une région particulière de l’hémisphère droit altèrent nos facultés d’extériorisation ou d’interprétation du ressenti, produisant ce qu’on appelle une aphasie croisée 29. Nous avons toujours supposé que la raison pour laquelle les hommes ne pleurent pas est culturelle, mais elle pourrait, en fait, dériver de facteurs biologiques fondamentaux.

Les femmes perçoivent mieux les personnes Une autre propriété de l’hémisphère droit est la perception des êtres. Le médecin suisse Paul Tournier l’appelle « un sens de la personne ».

Peut-être cette perception est-elle à l’origine du geste de Marie de Béthanie qui vint à Jésus avec un flacon de parfum de grand prix. Elle en oint sa tête, dans une compatissante préparation à son enterrement. Les hommes étaient choqués de ce « gaspillage », mais Marie valorisait la personne. C’est pourquoi Jésus déclara : « Vraiment, je vous l’assure, dans le monde entier, partout où cette Bonne Nouvelle sera annoncée, on racontera aussi, en souvenir d’elle, ce qu’elle vient de faire » (Matthieu 26 : 13). Quand je pense à ce parfum qui continuait à s’exhaler du corps de Jésus pendant toute la semaine suivante – sous les coups, sous le poids de sa croix et dans son agonie sur le bois –, je remercie Marie d’avoir usé de son don d’intimité, dans l’obéissance à la conduite de l’Esprit.


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« Qui se souvient des anniversaires ? Les femmes, bien plus que les hommes » remarquait Paul Tournier 30. Il raconte comment son épouse Nelly, grâce à son « sens de la personne », transforma les séminaires de médecine qu’il dirigeait : C’était le soin extrême et l’intérêt qu’elle manifestait envers chaque participant qui aidait à créer l’atmosphère particulière… Dans les autres symposiums, seules comptent les idées, et les congressistes ne sont estimés qu’en fonction de leur contribution scientifique. Mais aux conférences de Bossey, chacun se sentait bienvenu et considéré en tant que personne 31.

Après le décès de Nelly, son influence a persisté. Les colloques « ont presque entièrement renoncé à la vieille tradition des leçons magistrales, afin de consacrer du temps aux expériences et aux problèmes personnels des délégués ». Le don pour l’amitié de Nelly continue à répandre ses effets positifs 32.

Le genre de petit groupe de discussion que je préfère est celui dans lequel chacun des intervenants se sait apprécié. Je tente sérieusement d’incorporer chaque participant au groupe en étant particulièrement attentive à ce que l’animateur tempère sa propension à trop parler. Je souhaite qu’il reste attentif aux expressions des visages de chacun, et qu’il passe de temps à autre parmi eux pour s’enquérir des impressions et des applications personnelles.

Je suis profondément frustrée quand un groupe – et cela se produit beaucoup plus fréquemment lorsqu’un homme est à la barre – semble ignorer les membres et se concentrer exclusivement sur la leçon. Je veux approfondir la leçon (et j’avoue avoir constaté que de nombreux groupes féminins ne le font pas), mais je ne veux pas que l’étude supplante de légitimes attentes humaines. Quand je me trouve dans cette


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situation, je dois réprimer une forte envie de me lever et de crier : « Ces gens-là ne se sentent pas valorisés ! Ils vont quitter cette pièce avec le sentiment que leur présence ne compte pas ! »

De nombreuses études démontrent que le sens de la personne, chez les femmes, est évident dès la plus tendre enfance. Réalisées sur des bébés âgés seulement d’un jour, elles ont mis en évidence que les filles fixent plus longuement les visages que les objets, tandis que les garçons font exactement le contraire 33. À l’école maternelle, les garçons préfèrent dessiner des objets et les filles des personnes 34. Selon des chercheurs de Harvard, « les bébés filles reconnaissent les visages et distinguent les voix plus rapidement que les bébés garçons du même âge » 35. Une autre étude a observé : « À quatre mois, un garçon réagira aussi bien à un objet inanimé qu’à une personne. Si on lui donne le choix entre le visage de sa mère et un objet brillant de forme géométrique suspendu au-dessus du berceau, à la différence de la fille, il babillera aussi souvent en direction de l’objet qu’en direction de sa maman » 36. Quand nos fils étaient tout petits, nous prenions plaisir à les contempler couchés sur le dos, pédalant avec enthousiasme et battant l’air à tour de bras sous un mobile aux teintes éclatantes. Tout en les amusant, ce jouet me laissait du temps libre ! Pourtant, quand Sally naquit, il ne produisit pas le même effet sur elle. À l’époque, je fus déçue. Mais maintenant je comprends. Sally, comme la plupart des filles, trouvait les humains plus intéressants que les gadgets.

L’institutrice Carrie Danforth rapporte que, si elle interroge des garçons de dix ans sur ce qu’ils ont fait durant le week-end, elle a de fortes chances de recueillir une liste d’activités. Les filles, elles, parleront de grasses matinées, de vernis à ongles et de menus potins 37.


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Je demandai à notre petit-fils de sept ans, Siméon, s’il préférait jouer avec son ami Grégory ou avec son ami Tom. Il répondit : « C’est pareil ! » Jessa, sa sœur de neuf ans, rétorqua : « Pour les filles, ce qui est important, c’est avec qui on est. Pour les garçons, la seule chose qui compte, c’est ce qu’ils ont. Siméon aime autant Grégory que Tom parce qu’ils ont les mêmes trucs, comme des consoles de jeux ». Pas le moins du monde offensé par les commentaires de sa sœur, Siméon opina de la tête en guise d’accord. Je souris…

Mon amie Jeanine m’a raconté ceci : quand son mari part pour le golf, si elle lui demande : « Avec qui joues-tu aujourd’hui ? », il répondra : « N’importe qui, le premier qui se présente ! » Jeanine, elle, ne ferait jamais un parcours de cette façon. « Moi, je veux choisir ma partenaire ! » affirmet-elle.

L’intuition féminine Le cerveau droit est aussi l’hémisphère de l’intuition. Le Dr Donald Joy a comparé l’esprit d’une femme à un gigantesque ordinateur : elle lâche la bonne réponse, mais il n’existe aucun moyen d’expliciter sa logique, et elle-même est incapable de dire comment elle est arrivée à ce résultat 38. La justesse de nos premières impressions tend à surpasser celle des hommes.

Le Dr Dobson affirme que, lorsque lui et son épouse rentrent à la maison après avoir rencontré quelqu’un pour la première fois, son épouse Shirley en aura déjà correctement cerné la personnalité et le caractère. Et il constate : « Moi qui suis pourtant détenteur d’un doctorat d’État en psychologie, j’ai besoin de rester des semaines ou des mois en relation avec cette personne pour parvenir à la même conclusion » 39.


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Les observateurs s’accordent à établir que les femmes ont plus de facilité que les hommes à reconnaître les indices non verbaux qui font partie de la communication 40. Elles sont plus douées pour interpréter et répondre à ces petits signes qui trahissent l’humeur et notre tempérament.

Notre intuition nous confère également une promptitude à discerner les mystères d’ordre spirituel. Peut-être estce pour cette raison que Dieu a laissé des femmes se tenir les premières devant le tombeau vide de Jésus. Quand elles ont couru annoncer aux hommes que le Christ était ressuscité, ils ne les ont pas crues parce qu’ils ont trouvé « leurs propos absurdes » (Luc 24 : 11). Il fallait des faits tangibles pour satisfaire leur cerveau gauche si logique.

De même, je crois que Marie et Élisabeth ont su intuitivement que l’ange avait raison, alors que Joseph et Zacharie devaient attendre davantage de signes concrets pour arriver à la même conclusion. Quand Gabriel informa Zacharie que sa femme stérile allait avoir un enfant, celui-ci répondit, sous l’emprise de son cerveau gauche : « à quoi le reconnaîtraije ? » (Luc 1 : 18). Quant à Joseph, « il se proposa de rompre ses fiançailles sans en ébruiter la raison » (Matthieu 1 : 19). Dans ces conditions, quel réconfort Marie et Élisabeth ont dû puiser au moment de leurs retrouvailles ! Elles se sont encouragées mutuellement dans la foi. Élisabeth a inondé de joie le cœur de sa jeune cousine en s’écriant : « Tu es heureuse, toi qui as cru ! » (Luc 1 : 45).

En découvrant les divergences des fonctions cérébrales masculines et féminines, nous prenons aussi conscience de notre interdépendance. Gary Smalley exposait que l’une des raisons pour lesquelles Dieu dit : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul » (Genèse 2 : 18), réside dans le fait que l’homme a besoin de la femme pour l’aider à développer le


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côté droit de son cerveau 41. Mon mari, Steve, possédait un grand atout : son cerveau gauche était étonnamment développé (c’était un as en maths, dans le domaine de la chirurgie, et dans l’organisation de notre vie). Mais il me disait souvent que je renforçais son hémisphère droit : « J’apprécie de plus en plus, m’a-t-il un jour confié, les attraits de la vie que sont les enfants, les chiots, et la poésie ».

Les femmes sont, par nature, maternantes Il me semble évident que le Dieu qui nous a créées avec la capacité de porter des bébés près de notre cœur et de les allaiter tendrement contre notre poitrine, nous favorise également dans le désir et l’aptitude à répondre aux besoins des plus vulnérables. La plupart des femmes ont tendance à semer des pétales de roses sur les durs chemins de la vie, tandis que les hommes ont besoin d’apprendre à consoler. Quand notre fille Sally était petite, je la laissai aux soins de Steve car je devais m’absenter pour une nuit. À mon retour, elle se roula en boule près de moi sur le divan et me confia d’un ton plaintif : « Papa ne sait pas comment me réveiller. Il ne met pas de musique, il ne me masse pas le dos et il ne m’embrasse même pas pour me dire bonjour. Il appuie juste sur l’interrupteur en annonçant : « C’est l’heure de se lever ! » Ce n’est pas une bonne mise en train pour la journée. Tu le lui diras, pour la prochaine fois ? » (Je l’ai fait et il s’est repenti.)

Notre culture décourage la cordialité masculine Dans le champ fertile de l’amitié, innée chez une femme, roule la boule de neige de la culture. Le papa rouge-gorge, en brandissant des vers de terre frétillants pour sa couvée, ne


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redoute pas de porter atteinte à sa réputation de mâle ; mais l’humain est rongé par de semblables craintes.

Pendant que les petites filles jouent à la poupée, mettant en pratique leurs notions d’éducation, les petits garçons forment des équipes… concurrentes. Elliot Engel a remarqué que lorsque deux hommes se retrouvent ensemble, ils sont portés « davantage au combat qu’à se donner du réconfort ». Sur le court de tennis comme en cour de justice, on s’attend à ce que les hommes s’affrontent. « Voilà qui nous assure pratiquement, note Elliot, que notre relation ne glissera jamais vers l’intimité, mais stagnera toujours à un prudent niveau superficiel. La vulnérabilité n’est pas considérée comme un composant sain dans les rapports masculins » 42.

La culture s’ajoute à l’hérédité en ce qui concerne le charme et les expressions d’approbation. Il est prouvé que même dans la petite enfance, les filles sourient davantage que les garçons 43. en vieillissant, nous nous apercevons que l’on associe les sourires au féminin, mais la rigueur et l’impassibilité au masculin.

L’auteure Marian Sandmaier souligne que notre monde est rempli de modèles attrayants, propres à stimuler l’imagination des petites filles, « des Miss France aux stars du show-biz ». Par contre, on offre en exemple aux petits garçons des modèles ténébreux qui vont du « Poor lonesome cow-boy (Lucky Luke) aux vedettes de rock à la dégaine négligée » 44.

Peu après avoir parlé à mon mari de cette étude qui attribue les sourires et les épanchements plutôt aux femmes, il en eut une démonstration pleine d’humour par un de ses patients et sa famille. Steve avait justement décrit Max comme « un type fort et silencieux », avare de compliments et d’amabilités. Il l’avait opéré, le soulageant ainsi de douleurs lombaires


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qu’il endurait depuis des années. Mais pourtant, c’est son épouse qui avait rattrapé Steve dans le couloir de l’hôpital pour le remercier. Souriant chaleureusement, elle lui avait assuré : « Docteur, Max ne peut tout simplement pas croire que sa souffrance a définitivement disparu. Il est infiniment reconnaissant, mais il n’est malheureusement pas du genre à vous le dire en face. Alors, j’ai voulu le faire pour lui ».

Plus tard, au cours d’un examen de routine, Max, accompagné de son épouse et de sa mère, montrait une mine renfrognée. Steve, qui avait mieux pris la mesure du personnage, ne put résister à la tentation de le taquiner avant qu’ils se séparent. Comme il se dirigeait vers la porte, il lança : « Max, mon épouse écrit un livre sur les amitiés féminines. Elle a constaté que, tout au long de leur vie, les femmes sourient davantage que les hommes ». Les deux femmes éclatèrent de rire, tandis que le visage de Max se déridait en une ébauche de sourire.

Il y a ceux qui prétendent que si nous voulons faire carrière sur cette terre, nous aurions intérêt à effacer les sourires de notre visage. La sévérité, semble-t-il, accroît notre ascendant. Franchement, je pense qu’il serait préférable d’amener les hommes à se montrer plus amicaux, plutôt que de nous efforcer à le devenir moins nous-mêmes. « Un cœur joyeux est un excellent remède », affirme Salomon, « mais l’esprit déprimé mine la santé » (Proverbes 17 : 22).

Les mots et les sourires aimables illuminent incontestablement le monde. Qu’une amie attire mon attention dans l’église et me sourie, aussitôt je ressens un courant de sympathie qui me transporte ! Notre lien a bien été reconnu et affirmé. Au cours de mes conférences, ce sont généralement les femmes qui me sourient, hochent la tête en signe d’assentiment, me soutiennent et apaisent mes craintes. Je récolte des petits mots d’encouragement pratiquement chaque semaine,


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alors que mon mari n’en glanait que rarement de la part d’un autre homme. Les lettres de remerciement de ses malades émanaient presque invariablement des femmes.

Cow-boys et détectives font certainement de parfaits durs à cuire à la télévision, mais je ne voudrais pas d’eux pour amis. Je me tiens à distance de ce genre de personnes, exactement comme d’un chat qui fait le gros dos. Les gens – hommes et femmes – au rire contagieux, aux propos stimulants, aux chaleureux et affectueux sourires sont ceux qui attirent les autres comme des aimants. J’ai le désir d’aller vers eux de la même manière que je m’approche d’un chien qui remue la queue en me voyant.

Les femmes sont liées les unes aux autres Carol Gilligan, professeur associé au département d’éducation de l’université de Harvard, émet la pénétrante remarque suivante : Puisque la masculinité est définie par le détachement, tandis que la féminité est définie par l’attachement, la gent masculine est menacée par l’intimité, tandis que la gent féminine est menacée par la séparation 45.

Les femmes se considèrent comme des éléments d’une toile de relations. Mon mari et moi avons dirigé un groupe d’études bibliques pour adultes. Lors de la première rencontre où hommes et femmes étaient réunis, nous avons demandé aux participants de se présenter. Nous avons remarqué que les femmes mentionnaient souvent leurs relations aux autres, alors que les hommes parlaient simplement d’eux-mêmes. Les uns comme les autres éprouvent le désir et le besoin d’être réconfortés. Mais les femmes, plus facilement que les hommes, expriment à la personne qui les a encouragées combien elle leur a fait du bien, propageant ainsi les bienfaits


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du soutien mutuel. À la fin de la première année passée au sein d’un groupe biblique de dames, Betty dit à son équipe féminine : Vous m’avez transformée. Quand je suis arrivée ici, mon cœur était dur, je le comprends maintenant. Mais la manière dont vous m’avez accueillie, la sensibilité envers Dieu dont témoigne chacune de vos vies, les larmes, les étreintes… tout cela a rendu mon cœur plus tendre. Je n’aurais vraiment pas imaginé que cela fût possible. Je me sens complètement restaurée.

En lisant les dialogues de Ruth et Noémi, puis, dans le Nouveau Testament, ceux de Marie et d’Élisabeth, je perçois entre elles une grande ouverture, un réconfort mutuel, et une réceptivité à l’autre. Les étincelles voltigent de l’une à l’autre, dans une chaleur croissante, comme le fer aiguise le fer ! (voir Proverbes 27 : 17). (C’est tout aussi vrai de David et Jonathan mais, comme je le montrerai, David et Jonathan étaient exceptionnels et, probablement, des hommes « au cerveau droit ».)

Prenons, par exemple, la scène de la rencontre entre Marie et Élisabeth, relatée au premier chapitre de l’Évangile selon Luc. Marie a parcouru une centaine de kilomètres rien que pour être avec Élisabeth ; et Élisabeth la fortifie, lui faisant clairement savoir qu’elle est « bénie plus que toutes les femmes ». Marie reçoit cette affirmation avec joie et loue Dieu, nous offrant ainsi l’un des morceaux choisis les plus aimés de l’écriture : le magnificat.

Si notre lien avec le Seigneur est puissant, les « eaux paisibles » déborderont en ondes bienfaisantes autour de nous et la « fluidité » de nos rapports aura une merveilleuse influence les unes sur les autres. Comme des courants s’unissent paisiblement pour former une rivière, nous arrondirons ensemble


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les angles aigus de la vie, nous tonifiant mutuellement, et « arrosant » les autres d’une eau fraîche en abondance.

Ceci fait partie de la beauté des amitiés de femmes, mais en est aussi le danger. Nous avons peur de voyager vers l’océan en solitaire. Nous succombons à la panique dans la solitude. L’ironie du sort, c’est que nous attachons tant de valeur à nos relations que nous sommes tentées, parfois, d’être infiniment cruelles. C’est encore plus évident dans l’enfance. Vous en souvenez-vous ?



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C h a p i t r e

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Le côté sombre des amitiés « colle forte » Par une chaude et humide après-midi d’août, Émilie avait trouvé refuge avec son amie Laura dans la fraîcheur du sous-sol de sa maison. Les tresses brunes d’Émilie s’envolaient, tandis que son amie tournait en cadence la corde à sauter, dont l’autre extrémité était fixée à la poignée d’une porte. Le téléphone sonna, et la mère d’Émilie apparut en haut des escaliers, les interrompant au milieu d’une rime : « Émilie, c’est Roxane. Elle voudrait venir. Elle pourrait rencontrer Laura. Ce serait amusant, non ? »

Émilie gravit les marches à mi-chemin, et regarda sa mère en fronçant les sourcils d’un air inquiet. Puis, doucement, elle chuchota : « Maman, tu sais bien que trois n’est pas un bon chiffre pour les filles ! »

En tant qu’amie de la mère de Roxane, la mère d’Émilie argumenta : « Chérie, sauter à la corde, c’est plus facile à trois. Tu aimes tellement Laura et Roxane ! Je pense qu’elles s’entendraient bien, elles aussi ».


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Force fut, pour Émilie, de s’avouer vaincue. Et, oui, les deux fillettes s’entendirent. Si bien même que, de retour chez elle, Laura envoya à Roxane la lettre suivante : Chère Roxane, Comment vas-tu ? Moi, je vais très bien. Voudrais-tu être ma meilleure amie ? Je te préfère à Émilie. D’ailleurs, je ne l’aime plus du tout. Mettons-nous ensemble pour mettre Émilie de côté. Ta meilleure amie, Laura

Le vendredi soir arriva, et Émilie alla passer la nuit chez Roxane… qui lui montra la missive traîtresse. La mère de Roxane entendit des cris de colère et des pleurs en provenance de la chambre des filles. Elle ouvrit la porte et découvrit le billet offensant en morceaux sur le plancher et Émilie, recroquevillée en position fœtale sur le lit, qui sanglotait désespérément. Je présume que les petites n’avaient pas été motivées par le désir de blesser, mais par celui d’assurer leurs situations respectives. Quand Émilie suppliait sa mère de ne pas permettre à Roxane de les rejoindre pour sauter à la corde, elle protégeait sa relation avec Laura. Quand Laura rédigeait le courrier adressé à Roxane, elle s’efforçait de s’introduire dans le cercle de leur amitié naissante. Et quand Roxane montra à Émilie le cruel message de Laura, elle essayait de lui prouver qu’elle était l’amie la plus digne.

Si les besoins d’amitié d’une fillette sont comblés par une amie ou un groupe d’amies, elle ne veut pas voir ces relations menacées par une personne étrangère. Parce que l’identité féminine est étroitement liée au relationnel, il est tout à fait normal de vouloir protéger nos relations en maintenant notre cercle fermé, même si la trahison peut en résulter.


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Un homme aura sans doute quelque difficulté à compatir aux tourments des protagonistes de l’histoire ci-dessus. Mais la plupart d’entre nous, les femmes, ne les comprenons que trop bien parce que nous avons vécu ce genre de fourberie, au moins dans notre enfance.

Elles ont tracé un cercle et m’ont laissée dehors Quand Sally avait huit ans, elle rentra un jour de l’école en larmes. Elle escalada les marches quatre à quatre et claqua la porte de sa chambre derrière elle. Je la trouvai roulée en boule dans un coin, et en pleurs. Émue tout autant qu’elle, je tentai de me charger un peu de la douleur de ma fille, en l’attirant sur mes genoux et en appuyant sa tête sur ma poitrine. Je lui caressai les cheveux et j’attendis. Finalement, reprenant son souffle, elle raconta son histoire en sanglotant. Ses meilleures amies avaient fondé un club dont elles l’avaient exclue.

J’exposai le chagrin de Sally à son institutrice lors de la réunion des parents d’élèves cette semaine-là. Elle secoua la tête, consternée. « Ces groupes de filles posent de perpétuels problèmes. C’est un véritable crève-cœur. Chaque année, je dis : Plus de clans ! Je menace. Je punis. Mais elles continuent en cachette ».

Quelques jours plus tard, l’alliance fut dissoute. La semaine suivante, une autre se forma. J’en eus la preuve en vidant ma corbeille à papiers dans laquelle je trouvai le billet suivant : Les filles qui ont le droit d’être dans le club secret de Sally : Sally Michèle Julie Myriam


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Jusqu’à ce que les petites filles apprennent à trouver leur sécurité en Dieu seul, les affiliations exclusives perdureront.

Des études démontrent, à notre grande honte, que le sexe féminin mérite sa réputation de poignarder dans le dos. Eva Margolies, dans The Best of Friends, the Worst of Enemies (Le meilleur des amis, le pire des ennemis), remarque : « Pratiquement toutes les recherches sur le sujet aboutissent à cette conclusion que, pour mauvais que les garçons puissent être, ils ne seront jamais aussi méchants et cruels que les filles entre elles » 46.

J’écoutais avec intérêt notre fille de dix ans et son amie Léa débattre de la facilité avec laquelle les garçons de leur classe avaient enrôlé un nouveau dans leur partie de foot, à la récréation. Léa soupirait : « C’est bien plus dur d’être nouveau si on est une fille. Eux, ils acceptent n’importe qui ; mais les filles sont vraiment exclusives ».

Une étude menée par le Dr Norma Feshback dans des classes de première année d’école primaire corrobore les observations de Léa. Elle a constaté que les garçons sont beaucoup plus gentils avec un nouveau venu. La réponse initiale des filles à un nouveau membre « a toutes les chances d’être l’exclusion et le rejet 47.

Le désir intense qu’une fille ressent pour l’intimité la rend presque automatiquement plus cruelle. Les nouvelles arrivantes mettent en péril la relation qu’elle forme avec une amie. Parce que les garçons préfèrent jouer en équipes, un partenaire de plus est davantage bienvenu. En outre, leur notion des valeurs étant souvent rattachée à leurs activités, ils se demandent : ce gars est-il bon en maths, au rugby, au football ?


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Bien que ce ne soit pas dénué d’intérêt pour une fille, la notion des valeurs est plus naturellement rattachée à la vie privée. A-t-elle déjà une meilleure amie ? Est-elle populaire ? s’interroge-t-elle. Une fille, plus qu’un garçon, sera soucieuse de quiconque viendrait bouleverser les relations qui assurent sa sécurité et son estime de soi. Si elle doit se tourner vers une autre pour assurer sa position, elle le fera.

L’adolescence L’école primaire, aussi stimulante qu’elle puisse être en ce qui concerne les relations entre filles, semble une étincelante piscine bleue surveillée par un maître nageur amical, comparée au marais infesté de crocodiles du collège. Maintenant, il faut naviguer dans un labyrinthe de salles de classe, de professeurs, et d’élèves. L’agressivité des adolescentes tend à être dissimulée, à la différence des agressions physiques, au vu de tous, des garçons. Une fille sait que ramer à bord de son propre radeau dans ce ténébreux marécage peut se révéler dangereux. Chaque jour, un alligator peut dresser ses mâchoires menaçantes hors de l’eau glauque et boueuse, ce qui signifie qu’elle risque : • de devenir soudainement indésirable à la table où elle s’assied d’habitude à la cantine • d’être trahie par sa meilleure amie

• de devenir la cible d’une petite peste

• d’être calomniée au sein de son propre cercle,

• d’être la seule à ne pas être invitée à une fête d’anniversaire.

Dans Odd Girl Out (La drôle de fille mise à l’écart), Rachel Simmons écrit : « À première vue, ces histoires de filles qu’on n’autorise pas à se joindre à table avec les autres,


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qu’on écarte d’une soirée, ou qu’on ne laisse pas étaler leur sac de couchage au milieu des autres, peuvent sembler puériles 48. Mais elles peuvent plonger l’adolescente dans l’effondrement le plus complet. Se trouver mise en quarantaine est très effrayant pour une fille, et nous ne devons ni minimiser ses émotions ni supposer qu’elle sera en mesure de s’en sortir toute seule. Elle se débat dans des sables mouvants et souhaite désespérément que quelqu’un l’aime assez pour lui tendre la main. »

Nous possédons d’immenses ressources en Christ. Dieu nous exhorte à solliciter la sagesse, et l’Écriture est remplie de conseils pratiques. La Parole précise que nous n’avons pas parce que nous ne demandons pas, et que nous devons prier (Jacques 1 : 5 ; 4 : 2).

Je me rappelle avoir imploré la direction du Seigneur lorsque Sally intégra sa nouvelle classe à l’âge de treize ans. Dès la première semaine, un groupe de filles plus âgées ne cessa de la taquiner, sous la conduite de Juliette qui, ironiquement, était membre de notre église. Un jour, en classe d’espagnol, alors que Sally longeait son pupitre, Juliette étendit la jambe et la fit tomber. Ses amies gloussaient tandis que notre fille se relevait péniblement, et toutes chuchotaient quand elle regagna sa place. Dès lors, Sally redouta la classe d’espagnol, le groupe de jeunesse, et tous les lieux et occasions de rencontrer Juliette. Quand elle se confia à moi, je fus tentée d’appeler la maman de Juliette, mais ma fille craignait que cette initiative versât de l’huile sur le feu. Mieux valait prier pour que Sally elle-même puisse trouver le meilleur moyen de redresser la situation. Un verset s’imposa alors à mon esprit : « Sois vainqueur du mal par le bien » (Romains 12 : 21).


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Je conseillai à notre fille de se montrer aimable avec Juliette, et de lui dire bonjour quand elle entrerait en classe. – Maman ! Comment veux-tu que je fasse une chose pareille ?

– Ce sera dur. Mais si Juliette est jalouse ou si elle t’en veut pour une raison que nous ignorons, l’Écriture affirme qu’une parole douce peut détourner la colère. Et si ses motifs sont malveillants, l’Écriture nous commande de surmonter le mal par le bien. La Parole de Dieu détient vraiment la sagesse et la puissance. De toute façon, tu n’as rien à perdre ! Deux fois, Sally salua Juliette et, deux fois, Juliette l’ignora. La semaine suivante, l’anniversaire de Juliette s’afficha sur le calendrier de l’église. Je suggérai à Sally de lui envoyer une carte. – Maman !

– Ce serait une merveilleuse occasion. Et c’est difficile de résister à quelqu’un qui s’obstine à se montrer aimable envers soi. Il est possible, après tout, que Juliette n’ait pas imaginé que cela prendrait de telles proportions ; elle a pu te faire un croche-pied juste comme une mauvaise blague ; mais comme ses amies l’ont poussée à continuer, elle s’est retrouvée piégée. La bonté peut briser le cercle vicieux. Tes vœux d’anniversaire la feraient sûrement réfléchir. – C’est la dernière fois que j’essaye. Et si elles se moquent de moi, justement parce que je suis gentille ?

– Je ne crois pas. 1 Pierre 3 : 16 affirme que ta bonne conduite peut les amener à rougir. Je pense que tu as déjà


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fait fondre la glace ; et ce pourrait être l’ultime souffle d’air chaud…

Sally se rendit à la carterie où elle resta un long moment. Elle choisit une carte ornée de jolies tulipes avec, à l’intérieur, la mention toute simple : « Joyeux Anniversaire ». En revenant de l’école ce soir-là, Sally nous raconta tout excitée :

– Quand je suis arrivée en cours d’espagnol, Juliette était déjà assise à sa place. En passant à côté d’elle, j’ai posé la carte sur son bureau en murmurant : « Bon anniversaire ! » Elle n’a rien dit, mais j’ai vu qu’elle ouvrait l’enveloppe pendant le cours. Après la classe, je lui ai souri et j’ai répété : « Je te souhaite un excellent anniversaire ! » Et, Maman, tu sais quoi ? Elle a répondu : « Merci ! »

Par la suite, Juliette a commencé à sourire à Sally, et à lui dire : « Salut ! » Les sarcasmes cessèrent. Deux ans plus tard, quand les filles jouèrent toutes deux dans l’équipe de tennis du lycée, elles firent ensemble une bonne saison.

Les petites brutes Nous constatons une escalade de la violence à chaque génération, parce que les abusés deviennent des abuseurs. Et la maltraitance n’est pas l’apanage exclusif du sexe masculin. Votre fille peut hésiter à vous dire qu’elle est victime d’intimidation et en arriver à de graves troubles avant de « tâter le terrain » pour savoir quelle action vous – en tant que mère ou conseillère – allez décider d’intenter. Si elle est terrorisée, elle peut craindre que vous vous précipitiez chez le professeur ou les parents de son bourreau et qu’elle ait à en subir les conséquences.


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Les seuls signes que vous pourriez détecter sont une subite répugnance envers l’école ou un repli sur elle-même de plus en plus affirmé. Il y a davantage de chances pour qu’elle s’en ouvre à quelqu’un qui soit à la fois disponible et compréhensif. Si elle consent à aborder le sujet, il faudra lui donner l’assurance que vous choisirez avec elle la façon de solutionner efficacement le problème. Ce dont elle a besoin en tout cas, c’est d’un conseiller chrétien.

Vous pourriez vous dire : « J’ignore si je peux vraiment l’aider ; certaines situations me semblent tellement inextricables… » Rosaline Wiseman, fondatrice de Empower (une organisation qui aide les jeunes à surmonter la violence), use de la stratégie du pas à pas. Elle raconte l’histoire de Laurie, cette jeune fille de 11 ans qui était nouvelle dans un collège et qui représentait apparemment une menace pour la meneuse d’un clan.

Une rumeur fut lancée par la meneuse et son acolyte comme quoi Laurie était une « traînée » (même à onze ans, à notre époque, on peut employer ce mot-là). Une pétition signée circula confirmant donc que Laurie était bien une traînée. Du jour au lendemain, la jeune fille n’eut plus le droit de s’asseoir avec les autres à la cantine, nulle part où se sentir en sécurité et personne à qui parler à l’école. Heureusement, elle ouvrit vraiment son cœur à sa mère, qui la prit très au sérieux. Celle-ci lui vint en aide au moyen du plan A : un affrontement direct avec la meneuse. Sa maman tenant dans les coulisses le rôle de conseillère, Laurie se rendit en classe bien préparée. Voici le scénario, tel qu’il s’est déroulé : – Est-ce que je peux te parler une minute ? demanda Laurie à la meneuse. – À quel sujet ?


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– Je suis au courant pour la pétition, et elle m’a vraiment blessée. J’ignore pourquoi c’est arrivé, mais je veux que ça s’arrête, et je sais que tu as le pouvoir de tout arrêter. – Bof, tant pis pour toi ! lança la meneuse. Et d’ailleurs, les autres sont d’accord avec moi, puisqu’elles ont signé aussi. – Je veux que ça s’arrête, insista Laurie. Je ne sais pas pourquoi tu me détestes tellement, mais je n’y peux rien. Je voudrais que nous restions polies toutes les deux et qu’on se respecte. – N’importe quoi ! – Si jamais tu veux m’expliquer pourquoi tu as fait ça, j’aimerais l’entendre. Encore une fois, je te demande d’arrêter, et je pense sincèrement que tu en as les moyens 49.

En agissant ainsi, Laurie faisait passer le message qu’elle ne se laisserait pas faire. Elle offrait aussi à la meneuse le meilleur prétexte pour couper court à la rumeur : affirmer son pouvoir. Si cette tactique n’avait pas fonctionné, la prochaine étape eût été de rapporter les faits au professeur. Rosaline Wiseman conseille des stratégies pour ce plan B et s’il ne marche pas, il existe les plans C et D.

Afin d’aider les jeunes filles à prendre de l’assurance, mieux vaut leur donner des conseils que de chercher à intervenir. C’est d’autant plus crucial quand il s’agit de faire face à de petites brutes. Un article, dans Psychology Today (Psychologie aujourd’hui), a retenu mon attention : « Les [vrais ou faux] durs ne harcèlent pas n’importe qui. Ne pas exprimer votre malaise à propos des agissements d’un tyran, c’est émettre un signal évident que vous ne vous défendrez pas, et c’est lui laisser libre cours pour qu’il vous manipule et vous humilie » 50. Cela dit, nous devons apprendre à nos filles non seulement à se dégager des perversités des autres, mais aussi à s’affranchir de celles qu’elles remarquent en elles-mêmes.


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Lors d’un séminaire d’approfondissement de la Bible au Tennessee réunissant des mères et leurs filles, les mères prirent brusquement conscience de l’immoralité et de la perversion de leurs propres filles. Hayley DiMarco, l’auteure de Mean Girls (Méchantes filles), monta au micro expliquant ce qui s’était passé dans l’atelier qu’elle avait animé pour les filles âgées de quatorze à dix-neuf ans. Quand elle avait demandé combien parmi elles avaient déjà eu affaire à une « vilaine fille » dans leur vie, la plupart avaient levé la main. Par contre, quand elle avait demandé combien l’avaient été elles-mêmes, non seulement la plupart des mains s’étaient levées, mais des acclamations bruyantes accompagnèrent leurs gestes. Hayley parla aux filles ouvertement et avec amour. Ensuite elle s’adressa à leurs mères et le Seigneur répandit la repentance sur le groupe des filles. Comment aider nos filles à surmonter leur penchant pour la méchanceté ? Leur conseiller d’être gentilles ne peut pas être efficace, parce que cela ne traite pas le fond du problème. Quand des filles (et des femmes) ne sont pas ancrées dans une profonde relation d’amour avec Jésus, quand elles ne savent pas ce que signifie réellement le fait d’être comblées par Jésus dans leurs besoins d’identité et de sécurité, elles persistent à se montrer impitoyables.

Nous devons aider nos filles à tomber sincèrement « amoureuses » de Jésus. Comment ? Priez pour qu’elles aient vraiment soif de lui. Enseignez-leur à le voir (parce que le voir, c’est l’aimer) et dépeignez la réalité d’une passionnante histoire d’amour entre Jésus et elles. Quand la relation verticale avec le Seigneur est merveilleuse, les relations horizontales avec les autres deviennent alors tout aussi passionnantes. Angela, qui a élevé trois filles qui se sont attachées à Dieu, raconte ce qu’elle leur a souvent conseillé : « Vous


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connaîtrez forcément des périodes de solitude. Il se peut que votre réticence à adopter certains comportements qui ne plaisent pas à Dieu vous exclue d’un groupe de filles. Vous vous sentirez parfois seule, mais gardez la tête haute. Et Jésus sera satisfait de vous ! »

Que vous soyez mère, enseignante, ou représentante de l’autorité, vous pouvez faire quelque chose pour combattre les intimidations. Il est de votre responsabilité que votre maison, votre salle de classe ou votre équipe reste un lieu sûr, tant émotionnellement que physiquement. Vous devez vous impliquer, discipliner et trouver également des moyens d’aider l’oppresseur qui a lui aussi ses propres meurtrissures. Les êtres blessés sont aussi ceux qui blessent, mais Christ peut nous aider à surmonter le mal par le bien.

Les commérages Il y a deux mots hébreux pour « commérage » dans l’Ancien Testament. Le premier est rakiyl, et il signifie « transfert de confidences ». C’est une forme de trahison, puisque vous partagez un secret qui aurait dû rester celé dans votre cœur. Parce que les femmes n’hésitent pas à s’ouvrir les unes aux autres, elles détiennent davantage d’informations à colporter. Un pasteur m’a dit : « C’est une bonne chose que les femmes soient ouvertes entre elles, sinon vous n’auriez pas autant d’intimité. Malheureusement, les femmes ne sont pas toujours dignes de recevoir des confidences ». Qu’est-ce qui peut bien nous pousser à nous montrer déloyales ? Notre soif de communication. Quand une femme chuchote : « Ne le dites à personne, mais… », il s’établit un lien de confiance ; vous êtes une privilégiée, et vous vous réchauffez à l’étincelle d’amitié autant que vous goûtez aux


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nouvelles juteuses. Même une requête en prière peut servir de couverture spirituelle au « transfert des confidences » que vous étiez censée garder pour vous.

Une dame remarquait qu’elle faisait honnêtement attention de ne rien divulguer au cours de ses conversations entre femmes, mais qu’elle se sentait libre de tout partager avec son mari : « Bien que je sache que cela risque de l’influencer défavorablement à l’égard de cette personne, je n’y peux rien, c’est plus fort que moi. Je dois m’en décharger sur quelqu’un, et je pense que c’est un des privilèges du mariage ».

« Hé, minute ! rétorqua une célibataire. C’est facile de dire que l’on n’en parle qu’à son mari ! Et moi, qu’est-ce que je fais alors ? Les gens qui vivent seuls n’ont-ils pas besoin de se décharger eux aussi ? »

Quand, dans ma vie, j’ai traversé des moments douloureux causés par d’autres, j’ai ressenti la nécessité d’en parler avec mon mari ou quelqu’un de confiance. Combien je me suis débattue avec ça ! Est-ce que c’est du commérage ?

L’autre traduction du mot « commérage » est chargée d’une connotation plus sombre que « transfert ». C’est nirgan, qui vient d’une racine hébraïque signifiant « tomber en morceaux ». Si mes propos font « tomber quelqu’un en morceaux », alors oui, je cancane. Je crois qu’il nous faut nous sonder : si nous recevons l’assurance que nous cherchons la sagesse dans une situation donnée – et non pas à réduire un être en pièces –, c’est une raison pour aller se confier à une personne spirituelle capable de garder les confidences. Mais l’attitude la plus noble consiste à attendre et voir si le temps apportera la guérison. Je dois me garder de la vengeance et de ce désir intense de m’assurer que je suis bien vue de mon amie.


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Une femme a expliqué son comportement de cette manière : « J’ai envie d’imprimer dans l’esprit de mes confidentes qu’elles devraient penser davantage à moi qu’à telle ou telle qui a été injuste envers moi ».

Sonia, professeur de chimie à l’université, me disait qu’elle était ravie d’être la seule femme d’une unité intégralement masculine, parce qu’on y trouve un minimum de querelles et de potins. Par contre, dans la faculté de musique de son mari, les commères sont nombreuses. Même si les hommes racontent des choses entre eux, les femmes le font bien davantage. Jusqu’à ce que nous apprenions à trouver notre sécurité en Dieu seul, nous aurons une tendance au commérage.

Les réunions bibliques de dames La plupart des cercles d’études bibliques féminins tissent des liens précieux au fil des semaines. Les femmes partagent leur fragilité, leurs larmes, leurs rires, et s’encouragent mutuellement, démontrant ainsi leur don pour l’intimité. Chacune s’épanouit dans cette confortable chaleur sécurisante. Sortir de chez soi dans le but de se lier d’amitié avec d’autres et de les inviter à rejoindre son groupe, exige une grande maturité. En effet, quand nos propres exigences affectives sont satisfaites, nous glissons aisément dans l’autosatisfaction et nous négligeons les besoins d’autrui. Quand une nouvelle arrive dans un groupe, elle se sent comme étrangère à l’intimité qui y règne. Les invitations à déjeuner, appels téléphoniques et messages ne sont peut-être pas aussi fréquents qu’ils devraient l’être. C’est pourquoi, trop souvent, la nouvelle venue ne revient pas. Tant que les femmes du groupe biblique n’ont pas appris à trouver leur


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sécurité en Dieu seul, les réunions risquent d’être teintées d’exclusivisme.

Un soutien mutuel pour puiser la force en Dieu La différence entre les amitiés laïques et chrétiennes est énorme… à la condition que les amies croyantes soient ouvertes aux merveilleuses ressources qui se trouvent en Christ. Vous découvrirez le modèle de ce qu’est une véritable amitié dans les trois exemples bibliques que nous allons considérer. Nous commencerons par Noémi et Ruth que nous étudierons dans le chapitre suivant. Au lieu de puiser leur force en elles-mêmes, elles se sont entraidées à chercher la force en Dieu. Des femmes d’une église du Minnesota ont organisé une étude biblique sur l’hospitalité, suite à quoi elles ont décidé de se rendre compte mutuellement de leurs efforts d’aller vers les autres, sans exclure quiconque. Au lieu de bavarder avec leurs intimes ou leurs proches à l’église, elles se sont entretenues avec les visiteurs, les enfants, ou les gens qu’elles ne connaissaient pas très bien. Jésus a souligné l’importance d’être généreux non seulement envers nos amis, nos parents, et « nos riches voisins » qui pourraient nous inviter à leur tour et nous payer ainsi de notre peine, mais aussi envers ceux du dehors, qui n’ont pas la possibilité de rendre la pareille. « Et Dieu te le revaudra lorsque les justes ressusciteront » (Luc 14 : 12-14).

Chaque semaine, ces femmes débutaient leur réunion par le recensement de ceux à qui elles avaient parlé ; ensuite, durant le moment de prière, elles intercédaient pour ces personnes et demandaient également au Seigneur le courage et la sagesse nécessaires pour obéir encore le dimanche suivant. Une femme a confié : « Cela me faisait peur parce que


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je suis sensible et timide. J’ai dû m’appuyer sur le Seigneur en lui demandant de me guider pour que je sache à qui adresser la parole, et de laisser son amour filtrer à travers moi. Et vous savez quoi ? Il a vraiment répondu ! Je sais que j’ai permis à des hôtes de passage de se sentir bien accueillis, je me suis liée avec quelques petits et par-dessus tout, j’ai ressenti la satisfaction de Dieu. Et maintenant, les moments de rencontre du dimanche que je redoutais le plus sont devenus ma petite aventure hebdomadaire ».

Le Christ peut complètement modifier notre approche de l’amitié. Un jour, l’auteure Win Couchman m’a dit : « Quand je rencontre pour la première fois une femme intéressante, j’éprouve le désir de l’« acquérir » pour m’en faire amie ; c’est comme si je voulais l’avoir pour moi seule. Mais, si je prie, Dieu a le pouvoir de changer complètement mon attitude, et mes motivations deviennent plus saines… ou alors, je m’aperçois que mon attention est attirée par une autre femme ! »

Au fur et à mesure que nous grandissons en Dieu, et tandis que nous nous entraidons à puiser la force en lui, nous sommes préservées de ce péché que les femmes sont prédisposées à introduire dans leurs amitiés : l’idolâtrie relationnelle. J’ai reçu plus de courrier à propos du chapitre suivant, qu’en ce qui concerne le livre tout entier ; et je prie pour que vous puissiez en retirer du positif.


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L’idolâtrie relationnelle Je crois qu’au sein de n’importe quelle relation, même celle au sein d’un couple, on entre dans le rouge lorsqu’on attend de l’autre la satisfaction qu’on devrait trouver en Christ. Rachel

Parfois, une amie est un « cadeau surprise » de Dieu. Il en fut ainsi de Rachel, énergique et pleine d’esprit. Au départ, je m’étais rapprochée d’elle parce que sa vie dénotait une obéissance radicale. Elle et son époux, bien que jeunes mariés, pratiquaient régulièrement l’hospitalité telle que la Bible l’enseigne. Ils s’étaient liés d’amitié avec leurs voisins et avaient commencé une étude biblique dans leur quartier. Ils avaient aussi convié un adulte mentalement retardé à habiter avec eux. Et le dimanche, à l’église, ils étaient toujours les premiers à inviter les nouveaux venus pour un repas. J’étais curieuse de savoir comment Rachel, une jeune


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femme de vingt-cinq ans qui n’avait pas grandi dans un foyer chrétien, pouvait être si mature. Je l’invitai donc à déjeuner en ville.

Bien souvent, avec le Seigneur, quand vous mettez votre main dans la sienne et le laissez vous conduire à l’amitié, vous récoltez infiniment plus que vous n’auriez imaginé. Et ce fut précisément le cas avec Rachel. Je n’avais pas la moindre idée de ce qu’elle avait été libérée de la pratique de l’homosexualité, ni qu’elle contribuerait de manière essentielle à l’écriture de ce livre.

Son histoire me fit comprendre comment une personne peut être tentée par l’homosexualité. De plus, elle m’a aidée à mettre le doigt sur cette étonnante vérité, à savoir que la racine du problème des lesbiennes est similaire à celui avec lequel se débattent la plupart des femmes : l’idolâtrie relationnelle. C’est le culte de la personne ou, autrement dit, une dépendance à un être humain plutôt qu’à Dieu.

Rachel Comme nous nous dirigions vers mon restaurant favori – un endroit douillet, cloisonné, illuminé aux chandelles, et sur lequel planait le fumet du potage fait maison – Rachel me demanda, en passant, ce que j’étais en train d’écrire. Quand je lui dis qu’il s’agissait d’un livre sur les amitiés féminines, elle sursauta. Je la dévisageai avec curiosité. Tout d’abord, elle esquiva : « Ce livre répond à un réel besoin, et je le lirai certainement ». Je n’étais pas satisfaite. Je savais, intuitivement, que sa réaction instinctive dissimulait bien davantage. Mes yeux suppliants rencontrèrent les siens. Au bout d’une minute, elle reprit : « Accordez-moi juste le temps de rassembler mon courage, et je vous raconterai ». Elle prit une profonde ins-


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piration et me confia : « Je pense que c’est le Seigneur qui a voulu ce tête-à-tête, c’est pourquoi je vous dirai tout, c’est promis ».

Elle était terriblement nerveuse. Quant à moi, je n’arrivais pas à imaginer ce qu’elle allait me révéler. Nous attendîmes encore d’avoir toutes les deux commandé et, enfin, Rachel se lança : « J’avais une relation homosexuelle à l’université ».

Je sentis qu’elle épiait ma réaction. Je me rappelai la réflexion d’une autre amie, délivrée de ces mêmes chaînes. Elle m’avait informée qu’elle prenait grand soin de ne pas se confier à n’importe qui parce que les églises manifestent rarement de la compassion envers ceux qui ont combattu ou combattent ce péché-là. Je saisis les mains de Rachel et la remerciai de me faire confiance si rapidement. Ses yeux se remplirent de larmes, et elle déclara : « Je dois être fidèle au vœu que j’ai fait à Dieu. Quand j’étais emprisonnée dans ces terribles chaînes, je lui ai promis : « Libère-moi, et j’aiderai celles qui sont dans la même situation ». Quand vous m’avez cité le titre de votre livre, j’ai compris que – pour être obéissante – je devais vous raconter mon histoire. Il m’a libérée, et c’est peut-être ici ma chance d’en assister d’autres ».

Je sortis mon carnet de notes et, sans essayer de se justifier, Rachel tenta d’exposer pourquoi tant de femmes tombent dans ce piège. Elle commença son récit doucement, avec hésitation : « Je ne sais pas comment c’est arrivé. Mais ce que je sais, c’est que j’avais un profond besoin d’être rassurée. La nature des rapports homosexuels entre femmes est fondamentalement différente de celle entre hommes ». Elle marqua une pause, jaugeant ma réaction. « À mon avis, les hommes ont de tels besoins physiques que leur priorité est


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souvent d’ordre sexuel. Tandis que les femmes sont naturellement portées à donner de la tendresse. Mais celle-ci peut être d’une beauté trompeuse ».

Mais, avant de poursuivre cette confession, je crois utile de jeter un coup d’œil à quelques avis autorisés que des conseillers chrétiens renommés ont émis sur le sujet.

L’homosexualité vue par les conseillers chrétiens Les conseillers ont répertorié un certain nombre de raisons susceptibles de rendre une femme sensible à la tentation de l’homosexualité. La vulnérabilité de Rachel à ce péché fut, pour le moins, alimentée par des abus sexuels infligés dans son enfance. Une petite fille qui a été violentée par un homme sera tout naturellement répugnée plus tard par les avances sexuelles masculines. Elle se sentira beaucoup plus en sécurité avec une femme. Par ailleurs, la détérioration des valeurs familiales et la facilité d’accès aux sites pornographiques sur Internet encouragent les abus sexuels. Quand une de mes filles était à l’école primaire, elle nous amena un jour une nouvelle amie après la classe. Mon premier signal d’alarme fut la réplique de cette enfant, qui estimait inutile de solliciter la permission maternelle de rester chez nous pour jouer. Plus tard, je la raccompagnai chez elle, espérant rencontrer sa mère. En ouvrant la porte, la fillette cria : – Maman ? Rodney ?

– Qui est Rodney ? demandai-je. – Le petit ami de ma maman.

– On dirait qu’ils ne sont pas là. Tu sais quand ils vont rentrer ?


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– Je ne sais pas. Mais ce n’est pas grave, je suis souvent seule.

Je remarquai des canettes de bière, des mégots de cigarettes et de la littérature porno qui jonchaient le plancher. Quelle proie facile elle ferait ! Par cette situation, je prenais la mesure des conditions de vie de tant de fillettes, partout dans notre pays. Le concubinage, comme l’essor effréné du porno, constituent des risques additionnels aux abus sexuels sur mineurs. Et les femmes, autrefois victimes d’abus sexuels, ont souvent une certaine propension à éviter les hommes et à être attirées par les femmes.

Un traumatisme dans l’enfance peut augmenter les risques d’homosexualité. Dans leur excellent livre Child Sexual Abuse (Les abus sexuels chez les enfants), Maxime Hancock et Karen Mains citent des chiffres établissant un lien possible entre les abus, subis à l’âge tendre, et le lesbianisme 51. Dans cette étude menée par Karen Meiselman, ils ont constaté que sept des vingt-trois filles victimes d’inceste « sont devenues gays, ou ont fait des expériences significatives, ou se sont trouvées mêlées à des conflits ciblés sur des sentiments d’ordre homosexuel » 52. Le Dr Jane Flax estime que le facteur le plus fréquent qui attire une femme vers l’homosexualité est d’avoir grandi auprès d’une mère froide et indifférente 53. (N’hésitez pas à manifester de l’affection à votre fille, de crainte qu’elle n’essaie un jour de compenser ce manque par des rapports lesbiens.) Un père passif associé à une mère dominatrice est une autre combinaison fatale pour une fillette : d’un côté elle ne respecte pas les hommes et de l’autre, elle ne peut se conformer à un modèle féminin positif. Combien d’épouses déprécient leurs maris ! Elles n’ont jamais appris à leur rendre l’honneur qui leur est dû, ni à parler avec amour et vérité au lieu de les insulter.


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Pour promouvoir leurs idées, les gays ont une stratégie qui ne doit pas être sous-estimée. Ils ont produit des programmes d’étude, des films et des émissions télévisées. Ceux qui dénoncent l’homosexualité comme un péché ou la qualifient de nocive sont dépeints comme des fondamentalistes étroits et d’horribles bigots.

Enfants et adolescents sont invités à considérer la question, voire à faire des expériences, afin de découvrir s’ils pourraient être gays. Il existe une période dans l’adolescence durant laquelle les filles et les garçons ressentent une attirance naturelle vers les deux sexes. Beaucoup de jeunes gens qui, dans le passé, n’auraient jamais envisagé d’expérimenter une relation avec quelqu’un du même sexe, n’hésitent pas à franchir le pas aujourd’hui. Aujourd’hui, cette relation initiale entre partenaires du même sexe peut leur paraître agréable au même titre que la masturbation. Ils décrètent alors qu’ils doivent être nés homosexuels.

La Bible dit que la pratique de l’homosexualité est une abomination (voir Lévitique 18 : 22 ; 20 : 13 ; Romains 1 : 2627 ; 1 Cor. 6 : 9-10). Il y a de soi-disant églises gays qui, aveuglées par le péché, s’évertuent à tordre et à refuser la clarté des Écritures. On y prêche, par exemple, que l’iniquité de Sodome n’était pas l’homosexualité mais le manque d’hospitalité (voir Genèse 19 : 1-5). Ces églises ignorent délibérément l’épître de Jude (verset 7), qui met clairement en évidence que le péché de Sodome était bien la perversion sexuelle 54.

À l’issue de conférences sur les amitiés entre femmes, j’en ai vu se déplacer jusqu’à moi pour me dire qu’elles ne jugeaient nullement incompatibles leur pratique du lesbianisme et celle du christianisme. Satan est le père du mensonge ; il en est trois qu’il profère le plus fréquemment à ceux qui sont prisonniers de cette pratique : « Tu ne commets pas


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vraiment un péché », « Tu ne pourras jamais changer » et « Tu ne seras jamais heureux si tu abandonnes ce style de vie ».

Alors, faut-il penser que personne ne vient au monde avec une tendance à l’homosexualité ? Pas nécessairement. Ce point n’a pas été tranché, mais il se pourrait que, juste comme on a « le gène » de l’alcoolisme ou de la violence, certains aient une tendance génétique à l’homosexualité. Cela ne signifie pas, néanmoins, que ces penchants soient insurmontables, parce que Dieu ne donne jamais de commandements auxquels il est impossible de se conformer. C’est bien entendu plus difficile, quand on y est prédisposé, de ne pas tomber dans la dépendance de l’alcoolisme ; mais on n’y est pas pour autant obligé. On peut participer, par exemple, aux réunions des Alcooliques Anonymes, avec l’espoir d’en réchapper. En fait, la prédétermination au péché est solidement ancrée en chacune d’entre nous. Nous naissons avec une propension à l’avarice, au mensonge, à l’égoïsme et à toutes sortes de vices. Je mentais avant de savoir marcher, je volais dans le porte-monnaie de ma mère quand j’avais six ans et mon sujet de conversation préféré était (et est encore souvent) moi-même.

Pourtant, je n’imagine pas une seule personne qui accepterait que je me justifie de cette façon : « Je suis née comme ça. Il faut m’accepter telle que je suis. Ne me demandez pas de renier ma nature. Je suis menteuse, voleuse, et continuellement centrée sur mon ego. Prenez-moi en l’état ! » Je sais que je dois, au contraire, renoncer – et mourir chaque jour – à moi-même, pour que le Saint-Esprit s’épanouisse en moi. Parce que c’est mon seul espoir. Je refuse d’être maintenue dans les liens du péché.


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Rédacteur au magazine World (Le monde), Andrew Seu écrit : « Le péché nous souille bien plus que nous le pensons. Comme le tissu, moisi par la lèpre, que la loi mosaïque vouait au bûcher ». « Malheureux que je suis ! » s’écrie Paul qui prend conscience de son état, « Qui me délivrera de ce corps voué à la mort ? Dieu soit loué : c’est par Jésus-Christ, notre Seigneur » (Romains 7 : 24 – 25) 55. Dieu nous fortifie abondamment pour que nous résistions au mal, même à celui qui est ancré en nous dès le ventre maternel. L’histoire de Rachel et de sa compagne Laura est une porte d’espérance.

Tout a commencé comme une belle amitié Bon nombre d’homosexuels affichent les caractéristiques inhérentes à leur propre sexe : les hommes paraissent virils et les femmes, féminines. Très fréquemment, ces individus ne s’approprieront pas les particularités du sexe opposé dans les tenues vestimentaires, les sujets de conversation ou pôles d’attraction, à moins qu’ils ne choisissent un style de vie homosexuel. Rachel et Laura, elles, ne répondent pas au stéréotype des lesbiennes. Bien que dégingandée et à l’aise en jeans, Rachel dégage une certaine fragilité avec ses manières douces, ses boucles blondes et son teint de porcelaine. Laura est minuscule, brune et bien faite. Ses cheveux se déploient sur ses reins en vagues douces. En passant près d’un chantier de construction, c’est certain qu’elle s’attirerait des sifflements d’admiration.

Quand elle était petite, Rachel fut sexuellement abusée par un oncle à plusieurs reprises et de façon traumatisante. « Il m’a poussée à faire ce que je n’oserais pas faire avec mon mari » m’a-t-elle confié. Plus tard, il lui fut donc bien difficile de ressentir une attirance pour les hommes.


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Mais Rachel et Laura sont toutes les deux convaincues que ce qui leur est arrivé – leur relation lesbienne – peut arriver à quiconque ne donne pas à Dieu la première place dans sa vie. Rachel m’a raconté comment tout a commencé entre elles : C’était complètement innocent au début. Nous avons ressenti une entente immédiate, que je crois être un cadeau de Dieu. Laura est l’une des personnes les plus sensibles que j’aie jamais rencontrées. Elle a le cœur tendre, elle s’émeut volontiers des maux des autres. Mais la conséquence malheureuse de cela, c’est qu’elle est facilement meurtrie. Elle se nourrissait de ma force, de mon tempérament de battante. Je me nourrissais de sa sensibilité. Nous allions super bien ensemble. Et il y avait en Laura quelque chose qui m’intriguait, quelque chose qui m’appelait à la connaître mieux.

Quand le problème est-il apparu ? lui demandai-je. Et pourquoi ?

La pente savonneuse des âmes sœurs vers la dépendance Il y avait un vide dans ma vie, poursuit Rachel. Je ne comprenais pas que ce vide avait été créé en moi dans le but que Dieu le remplisse ; aussi me suis-je tournée vers Laura. Nous avons commencé par passer trop de temps ensemble, à nous balader, à boire et nous amuser, à bavarder jusqu’aux petites heures du matin. Nous avons pris l’habitude de compter l’une sur l’autre en tout et pour tout. Maintenant, je vois que Satan avait choisi ce moment pour s’infiltrer dans la brèche. Nous nous sommes retrouvées complètement déboussolées, parce que nous nous focalisions entièrement l’une sur l’autre : l’université, nos études, nos projets, les diplômes,


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les copains, plus rien de tout ça n’avait d’importance. Tout ce qui comptait, c’était l’autre… Mon amour pour Laura croissait. Le jour où je me suis surprise à vouloir la tenir serrée contre moi, j’ai été choquée. Je désirais seulement l’entourer de mes bras. Mais je ne l’ai pas fait.

Romains 1 : 21-25 nous apprend que le premier pas vers l’homosexualité, c’est d’adorer et de servir la créature au lieu du Créateur. Nous nous abîmons dans des sables mouvants, quand nous regardons une autre personne avec les yeux que nous devrions avoir pour Dieu.

Dans son manuel Emotional Dependency : A Threat to Close Friendships (La dépendance émotionnelle : une menace pour l’amitié), Lori Thorkelson Rentzel écrit : « Qu’il existe ou non une liaison physique, le péché prend le dessus quand une amitié devient un rapport de dépendance » 56. Dans une relation saine, nous désirons voir notre amie accomplir son potentiel ; c’est une amitié faite de réciprocité dans laquelle nous l’édifions, l’encourageons à s’ouvrir aux autres, et trouvons des moyens de servir Dieu. Bien que la plupart d’entre nous ne soient pas attirées par l’homosexualité, je crois à l’évidence que nous sommes tentées par la dépendance. Une relation de dépendance émotionnelle produit l’esclavage. Si vous avez une meilleure amie, entendez-vous Lori Thorkelson tirer la sonnette d’alarme ?

• Vous éprouvez fréquemment de la jalousie, de la possessivité et une soif d’exclusivité, allant jusqu’à considérer les autres comme autant de menaces pour votre relation.

• Vous préférez passer tout votre temps seule avec cette amie, et vous vous sentez frustrée lorsque ce n’est pas possible.


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• Vous devenez, de façon irrationnelle, irritable ou dépressive quand elle s’éloigne imperceptiblement 57.

Ces signes transparaissaient dans l’amitié de Rachel et Laura. Le terrain était prêt pour un rapport lesbien. Je n’oublierai jamais cette nuit-là, continue Rachel. Nous avions bu et joué aux cartes, dans un total abandon. Soudain, j’ai levé les yeux sur Laura, et nous avons échangé un regard pénétrant qui m’a déchiré le cœur. J’ai pressenti la beauté de l’amour et la douleur de la passion. Je savais ce qui allait arriver.

Rachel m’a avoué combien, après cette première nuit d’intimité physique avec Laura, elle a eu honte. C’était dur de regarder Laura en face le jour suivant, une fois que nous étions toutes les deux redevenues sobres. Nous nous sommes mutuellement présenté des excuses, en attribuant ce qui s’était passé aux vapeurs de l’ivresse. Je voulais croire que cela ne se produirait jamais plus mais, en même temps, j’avais envie que cela recommence.

Il en allait de même pour Laura. John White écrit : « Une fois que l’on a goûté au plaisir physique avec une personne de son propre sexe, il est plus que probable que l’on veuille s’y abandonner encore. Et plus l’expérience se reproduira, plus cela deviendra obsédant » 58.

J. White observe également que l’alcool est souvent un dénominateur commun dans l’homosexualité féminine 59. Parce que ni Rachel ni Laura ne pouvait affronter la dure réalité de ce qu’elles faisaient, elles prenaient la boisson comme excuse. Elles faisaient la fête, s’enivraient, puis elles avaient des relations physiques. À la fin, nous n’avions plus besoin d’alcool pour devenir intimes, explique Rachel. Le plus étonnant, c’est que je n’avais


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pas vraiment l’impression de pratiquer l’homosexualité. Parce que je savais instinctivement que l’homosexualité, c’était mal. Je me demandais : « Comment quelque chose d’aussi beau que ce que nous vivons pourrait-il être mal ? » L’orgasme n’était pas le but : je ne l’ai jamais éprouvé ni recherché. Sans lui, l’expression de notre amour semblait plus pure, moins égoïste. « Nous ne sommes pas des lesbiennes, me disais-je encore et encore. Nous sommes juste des amies très spéciales, extériorisant notre amour ». Mes sentiments évoluèrent de la félicité à la misère la plus totale. Ce n’était pas seulement la crainte d’être découverte, mais la conscience de ce qu’en dépit de mes efforts de rationalisation, j’avais conscience que ce que nous faisions était mal, très mal.

Je trouve intéressant que Rachel ait su, au fond de son cœur, que sa conduite était coupable. On ne le lui avait pas enseigné, parce qu’elle avait grandi dans une église libérale qui n’ouvrait pas souvent la Bible. On lui avait inculqué que notre Dieu est amour, un Dieu qui ne condamnera jamais quiconque pour quoi que ce soit. Mais le Saint-Esprit la poussait du coude, en lui murmurant : Attention, danger !

Dans l’épître aux Romains, nous trouvons un avertissement solennel, à l’intention de ceux qui pratiquent l’homosexualité en ignorant la douce petite voix du Saint-Esprit : « C’est pourquoi Dieu les a abandonnés aux passions de leur cœur qui les portent à des pratiques dégradantes, de sorte qu’ils ont avili leur propre corps » (voir Romains 1 : 24-28). Ainsi que Rachel en a témoigné, elle éprouvait un peu de cette confusion. Mais, avant de la livrer à « des passions avilissantes », Dieu cria la vérité à Laura. Un soir, nous avions énormément bu, poursuit Rachel, quand Laura s’est effondrée soudainement, sanglotant de façon irrépressible. Elle m’a complètement atterrée, lorsqu’elle m’a dit que notre relation allait avoir pour consé-


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quence les peines éternelles de l’enfer. Je ne savais que dire. J’étais abasourdie.

Ce que Laura ne lui avait jamais raconté, c’est qu’au cours d’un rassemblement de jeunes, alors qu’elle était encore collégienne, elle avait donné sa vie au Seigneur. Rachel croit que c’est la lumière du Christ brillant en Laura, bien que faiblement, qui l’a tout d’abord attirée vers elle : Laura était tellement compatissante et attentionnée ! Mais je ne savais pas pourquoi. Mon attention a été attirée par elle lorsque je l’ai vue sa Bible à la main. Jamais elle ne m’avait parlé des vérités spirituelles… jusqu’à cette nuit où elle m’a parlé de l’enfer. Alors, elle m’a donné son témoignage et m’a ouvert les Écritures.

Un kaléidoscope d’émotions Un kaléidoscope d’émotions m’a envahie : la crainte intense de perdre Laura, la honte du péché, et l’espoir de la délivrance. J’ai su qu’elle était sérieuse dans son désir de changer, quand elle a réservé un vol pour Sarasota à la fin des vacances de printemps. Un couple de chrétiens affermis qui vivaient là-bas avait offert de l’assister. « J’espère, m’a-t-elle dit en pleurant, qu’ils m’aideront à remettre ma vie dans la bonne voie, parce que je ne peux pas y arriver moi-même ».

Laura partit pour Sarasota. La plupart des conseillers chrétiens conviendraient qu’elle a pris les deux mesures indispensables pour briser ses chaînes : elle a admis que son style de vie homosexuel était impur, et elle a effectué la démarche de rencontrer des chrétiens matures. Les plans de Dieu sont surprenants ! Durant ses vacances de printemps, Rachel avait justement prévu de participer à un séminaire de journalisme… à proximité de Sarasota. Et quand les amis chrétiens de Laura apprirent que Rachel


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séjournait dans les environs, ils l’invitèrent dans le but de lui prodiguer également des conseils. Au cours de ce séjour, Rachel remit sa vie à Christ et Laura renouvela son engagement. Le jour où je suis tombée à genoux, explique Rachel, j’ai promis à Jésus que s’il me tirait de la confusion dans laquelle je me trouvais, j’opérerais un retour sur moi-même et je le glorifierais. Et j’ai fait ce vœu : un jour, j’aiderai d’autres femmes qui sont tombées dans la même servitude.

Pour l’une comme pour l’autre, la route vers la guérison ne se fit pas sans peine. Elles ne furent pas instantanément délivrées de leur désir mutuel. Elles trébuchèrent, tombèrent plusieurs fois, mais elles n’éprouvaient désormais plus aucune joie dans le péché.

Libération Des conseillers leur préconisèrent un temps de séparation, et elles obéirent. Laura déménagea dans une autre région. En dépit de la douleur provoquée par cette discipline, toutes deux aspiraient à un plein affranchissement. Elles voulaient sincèrement une vie normale, avec un mari et des enfants. Pendant cette période, elles gardèrent le contact par courrier et par téléphone. Se remémorant ces deux années d’éloignement physique, Rachel confia : Il y avait des moments où je pensais ne jamais pouvoir guérir de Laura. Il y avait des moments où je pensais que je pourrais rechuter avec quelqu’un d’autre. Mais lentement, parce que j’avais choisi d’obéir, j’ai vu que Dieu effectuait un travail dans mon cœur. Petit à petit, j’appris à remettre à Christ ces sentiments envahissants que je ressentais pour Laura.


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Rachel et Laura sont maintenant toutes les deux mariées et heureuses dans leur couple ; elles servent le Seigneur, et restent de bonnes amies. Rachel a tenu parole, elle aide d’autres femmes victimes du lesbianisme. Voici comment elle voit les choses : Si les femmes ont vécu longtemps ce genre d’existence, les chaînes sont tenaces. Elles doivent simultanément résister à la pression énorme de leur partenaire et à celle de la communauté gay qui refuse qu’elles changent. C’est la raison pour laquelle un déménagement peut être salutaire. Je veux donner de l’espoir à ces femmes. Christ peut briser les chaînes, si vous êtes déterminée à obéir. Je sais maintenant que notre amitié a basculé quand nous avons commencé à tabler l’une sur l’autre, afin de nous accomplir. Chaque jour, je dois choisir de placer Christ en premier et au centre de ma vie. Je crois qu’au sein de n’importe quelle relation, même celle au sein d’un couple, on entre dans le rouge lorsqu’on attend de l’autre la satisfaction qu’on devrait trouver en Christ.

Dans son livre The Long Road To Love (Le long chemin qui mène à l’amour), Darleen Bogle raconte ses dix-sept années de culture gay, avant la délivrance 60. Parce qu’elle fermait son cœur à l’exhortation de l’Esprit, elle sombra dans d’autres iniquités : pratiques occultes, vol, et même meurtre. Elle dut être libérée de la possession de démons. C’est une chose terrible que de tourner le dos à Dieu. Il est important de répondre à son premier appel et de ne pas s’endurcir. Même si vous ne vous sentez pas concernée par l’homosexualité, si vous discernez en vous une tendance à rechercher votre épanouissement dans une personne plutôt qu’en Dieu, reconnaissez que c’est un péché et repoussez-le. (Vous pouvez bénéficier d’aides appropriées. Pour celles qui connaissent l’anglais, voir note 61.)


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Il est tout aussi vital d’admettre que l’hétérosexualité n’évite pas les pièges de l’idolâtrie relationnelle.

L’idolâtrie relationnelle Caroline est une professionnelle très compétente qui a développé une relation personnelle avec le Seigneur depuis son plus jeune âge. Pourtant, comme c’est le cas pour beaucoup de chrétiennes, ses amitiés n’étaient pas saines. Elle m’a raconté : J’avais l’habitude de m’accrocher trop étroitement à mes amies. Quand j’ai commencé à prendre conscience que j’avais ce problème, j’étais centrée sur Murielle. Nous communiquions beaucoup par courriels et elle m’en envoyait régulièrement durant ses pauses au travail. Je connaissais bien son emploi du temps. Aussi, si je n’entendais pas mon ordinateur bourdonner : « Vous avez un courriel ! » à l’heure de sa pause, je devenais anxieuse. Je me demandais : « Est-ce que j’ai fait quelque chose de mal ? » Je lui envoyais un courriel et je n’étais pas tranquille tant que je n’avais pas reçu une réponse. Mon inquiétude s’aggravait quand un tiers, comme un petit ami, débarquait dans le tableau. Il me semblait que notre relation était menacée, et ça me rendait malade. On aurait réellement dit que j’avais la grippe. Je souffrais d’ailleurs fréquemment de nausées.

Parce que Caroline était impliquée dans le corps du Christ, elle avait de fidèles amies chrétiennes qui se sont inquiétées à son sujet. Je me rappelle, explique Caroline, quand Kathy Troccoli a raconté qu’elle était boulimique et ne se rendait pas compte qu’elle était malade. Un jour, son amie Allyson lui a fait ôter tous ses vêtements, et l’a plantée devant un miroir en lui disant qu’elle avait besoin d’être aidée. En un sens, c’est ce que des amies équilibrées ont fait pour


L’idolâtrie relationnelle moi. Elles m’ont déclaré : « C’est une attitude ancrée, chez toi. La façon de te comporter avec tes relations n’est pas saine. Tu as besoin d’aide. S’il te plaît, va consulter un spécialiste ».

C’est ce que Caroline a fait. Elle poursuit : C’est grâce à ma conseillère que j’ai compris pour la première fois qu’il y avait une frontière appelée « idolâtrie relationnelle ». Dès qu’elle a utilisé l’expression, j’ai su que son diagnostic était juste ; il m’aidait déjà à comprendre que je péchais contre Dieu. J’idolâtrais un être humain. Je me rappelle m’être plongée dans un ouvrage de Beth Moore, Breaking free (Libération), dans lequel il est question de rois (aux temps bibliques) qui ne voulaient pas détruire les hauts lieux. Ils vénéraient des idoles. J’ai pensé : c’est moi ! J’ai écrit à Murielle : « Je ne peux pas l’expliquer maintenant, mais je sais que j’ai besoin d’aide. Je ne peux ni t’envoyer de courriel ni en parler avec toi tant que je serai en thérapie ». Elle a essayé de l’accepter, mais c’était difficile pour elle. Plus tard, j’ai pu lui expliquer ; et non seulement elle a compris, mais elle était reconnaissante. Aujourd’hui, notre amitié est parfaitement saine et restaurée. J’ai aidé Murielle à effectuer un montage de diapositives destinées à être projetées le jour de ses noces. Nous avons passé de délicieux instants à discuter de son prochain mariage et à établir des plans pour que je leur rende visite. Après avoir été suivie pendant six mois, j’ai encore consacré un an et demi à la lecture des Écritures et aux études bibliques traitant de l’interdépendance. Maintenant, je suis vraiment libre. Mes amitiés sont ouvertes et régénérées. J’ai une joie, une paix et une relation beaucoup plus profonde avec le Seigneur. Il est venu remplir ce vide que je m’efforçais vainement de combler avec les rapports humains.

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Meilleure amie ou réseau d’amitiés ? « Pour moi, dit Caroline en souriant, meilleure n’est plus qu’un mot de neuf lettres. Ce serait dangereux si je recommençais à cultiver une amitié exclusive ».

Tandis que j’écris, un groupe de femmes occupe mon chalet du Wisconsin. Et Caroline en fait partie, de même que sa chère (pas meilleure !) amie Ellen qui fut missionnaire en Roumanie mais qui travaille actuellement dans son église aux États-Unis. Ellen a, elle aussi, connu l’assujettissement à l’idolâtrie relationnelle. Elle fut amenée au Seigneur par Clara, une étudiante d’un an plus ancienne dans la même université. Vues de l’extérieur, leurs relations paraissaient parfaites : Ellen était le disciple zélé et Clara, le mentor attentionné. Toujours ensemble, elles partageaient beaucoup de leur temps côte à côte dans le ministère. Je demandai à Ellen ce qu’il y avait de mal à cela : Je n’avais jamais expérimenté tant de sollicitude de la part d’une femme, répondit-elle pensivement, et cette prévenance me remplissait d’émotion. De son côté, Clara ressentait le besoin de se savoir utile, et elle vivait la même soif de relations. Tout cela nous a menées à une dépendance qui n’était ni saine ni sainte. Cette amitié qui semblait si belle n’était en réalité qu’égoïste.

Par la grâce de Dieu, Clara saisit le problème. Dans un acte d’obéissance, elle suspendit un certain temps leurs rencontres. Chacune se tourna vers le Seigneur, qui satisfit les besoins de leur cœur. « Ce fut un long processus, soupira Ellen, mais il fut salutaire pour toutes les deux ». Alors qu’Ellen, Caroline et moi devisions, assises sur un banc, je demandai à Ellen :


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« Toi et Caroline semblez très proches en ce moment, n’est-ce pas ? »

Comme elles hochaient la tête, je poursuivis : « Alors, expliquez-moi comment il se fait que votre amitié est saine ».

Elles riaient nerveusement, s’agitant un peu, embarrassées d’être sondées ainsi. Mais, au bout d’un moment, Ellen exposa sérieusement : Bien que j’apprécie à sa juste valeur toute l’affection fraternelle de Caroline, je ne me fourvoie plus dans des pensées du genre : « C’est vital ». Je me rappelle avoir entendu Larry Crabb au cours d’une conférence sur les liens affectifs. Il exposait que, dans ce monde déchu, nous associons de façon erronée certains éléments comme donnant la vie ou la mort à notre âme. La dynamique de certaines amitiés peut être ressentie comme une « source de vie ». De ce fait, si l’amie en question prend un peu de recul, nous éprouverons une sensation de mort. En réalité, c’est de l’esclavage. Seul Jésus est notre source de vie. Et quand il est au centre d’une relation, il apporte la liberté. C’est ce que Caroline et moi possédons, et c’est pourquoi notre amitié est saine.

Moi-même j’ai aussi appris qu’il est bénéfique de se constituer un réseau d’amitiés, plutôt que d’avoir une seule « meilleure amie » de laquelle je dépends pour tous mes besoins d’amitié.

En considérant le problème de la dépendance féminine dans sa globalité, je me souviens d’avoir observé notre fille Sally, lorsqu’elle avait dix ans, avec son amie Patricia. Elles étaient pratiquement aussi unies que des siamoises. Elles attachaient la fermeture éclair de leurs sacs de couchage ensemble, partageaient leur crème glacée – et même une fois, parce qu’elles étaient pressées, elles se prêtèrent mutuel-


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lement leurs sous-vêtements et leur brosse à dents. Quand elles étaient séparées, je sentais de l’anxiété chez Sally. Elles m’annoncèrent que si elles ne se trouvaient pas dans la même classe l’année suivante, elles en mourraient. Face à une telle amitié, je questionnai :

– Pensez-vous être dépendantes l’une de l’autre ?

– Qu’est-ce que ça veut dire : dépendantes ? demanda Patricia.

Cherchant rapidement à leur rendre ce mot plus compréhensible, j’expliquai : – Croyez-vous avoir besoin l’une de l’autre ?

À l’unisson, elles claironnèrent : « Oui ! »

Devant mon silence embarrassé, Sally s’inquiéta : – Ce n’est pas bien ?

– Disons, répondis-je, que nous devrions dépendre de Jésus.

– Est-ce que je ne peux pas dépendre de Jésus et de Patricia ? s’étonna ma fille.

Je méditai cette remarque. (Moi qui disais tout récemment à mon mari si expert à remplir les déclarations d’impôts, à mettre en route le détecteur de fumée et à ôter les échardes, que si quelque chose devait lui arriver, j’espérais qu’une maison de retraite pour personnes totalement dépendantes voudrait bien accepter une femme de quarante-deux ans avec ses trois enfants !) Finalement, je dis à Sally, qui restait dans l’expectative : Je pense que, toi et moi, nous avons toutes deux à grandir si nous voulons y parvenir. Il est important de chérir nos amies, de les entourer et d’être proche l’une de l’autre. Les filles et les femmes sont douées pour cela, et c’est


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L’idolâtrie relationnelle une merveilleuse facette de nos amitiés. Mais nous devons apprendre à dépendre de Dieu et à nous appuyer sur lui, car il est le seul qui jamais ne mourra, ne nous trahira ni ne nous abandonnera.

Sally me dévisagea d’un air interrogatif. Elle n’imaginait même pas que de tels événements pussent survenir et détruire son amitié avec Patricia.

Moi non plus, je n’aurais jamais envisagé le décès de Steve à la cinquantaine, ni la vie sans lui. Quand j’entends les paroles de cette chanson : « Comment puis-je vivre sans toi, comment puis-je respirer sans toi… » j’adhère tellement ! Mais je sais que ce genre de réflexion doit exclusivement s’adresser à Jésus. Dieu connaissait mon avenir et savait que je devrais vivre sans Steve. Aussi m’a-t-il enseigné la vérité avec douceur : « Dépends de moi, Dee. C’est moi seul qui suis le rocher des siècles ». C’est une dure réalité, mais Dieu désire profondément que nous l’acceptions.

Je pense que c’est la raison, parmi tant d’autres, pour laquelle il nous a donné le livre de Ruth. Commençons donc par étudier le personnage de Noémi, la belle-mère. Elle ressemble tellement à bon nombre d’entre nous !


— Rachel, 20 ans, étudiante

Dee Brestin

« J’ai littéralement dévoré ce livre ! Il m’a beaucoup aidée à comprendre comment je fonctionnais et pourquoi j’avais besoin de l’amitié des autres. Il m’a aussi montré l’avantage d’avoir des amies plus âgées. Après l’avoir lu, j’avais envie de l’offrir à toutes mes amies ! »  « L’auteur développe trois merveilleux modèles bibliques d’amitié. Ils m’ont ouvert les yeux sur l’importance de devenir une amie fidèle pour les autres ».  — Julie, 42 ans, mère au foyer

« Mon mari pense souvent que je suis trop tournée vers l’extérieur, car il n’éprouve pas, comme la plupart des hommes, le besoin d’avoir des amis. J’ai été soulagée de mieux comprendre les différences entre hommes et femmes à ce niveau. Ce livre m’a rapprochée de Christ ».

Dee Brestin

« C’est la deuxième fois que je lis ce livre et j’en apprends encore ! Chaque femme devrait le lire ! »  — Élisabeth, 51 ans, missionnaire

Dee Berstin

• Auteure américaine de best-sellers et conférencière internationale, Dee encourage les femmes à approfondir la Parole de Dieu et à développer une relation intime avec Jésus. Ses messages, agrémentés de nombreuses anecdotes et d’humour, ont déjà touché des milliers de femmes. Mère de cinq enfants, elle a perdu son mari en 2004 des suites d’un cancer.

9 782362 491375 ISBN 978-2-36249-137-5

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— Marie-Claire, 29 ans, enseignante

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