Nick Tucker
Préface de Florent Varak
Nick Tucker
Préface de Florent Varak
Et comment elles vous aideront à mieux dormir
Quelles gloires nous découvrons non seulement dans les capacités de notre Dieu, mais aussi dans ses parfaits « ne peut pas ». De quoi en effet nous aider à trouver la vraie sécurité et à dormir sur nos deux oreilles ! Je prie que Dieu se plaise à étendre, approfondir et renforcer la vision que vous avez de lui à travers ses précieux « ne peut pas ». Et qu’il vous rapproche de lui dans son éblouissant amour, lorsque vous contemplerez les merveilles qu’il a ajoutées en Christ.
David MATHIS
Rédacteur en chef de desiringGod.org, pasteur et auteur de Trouver sa joie en Dieu
12 Choses que Dieu ne peut pas faire est un merveilleux exemple de l’importance de la théologie, de l’importance de la théologie orthodoxe et de l’importance d’avoir des professeurs de théologie doués. La richesse du contenu, dont nous avons désespérément besoin pour nous nourrir, nous maintenir à flot et même − oui − nous aider à dormir (!), s’équilibre à merveille avec la délicatesse et la sensibilité pastorale de Nick. Le résultat n’est autre qu’un exposé théologique à la fois pertinent et intense sur le plan émotionnel. Hautement recommandé !
Dan STRANGE
Auteur de La Force d’attraction de la foi chrétienne (Excelsis)
Je recommande vivement cet ouvrage. Nous avons besoin de livres accessibles sur les grands enseignements de la Bible. M. Tucker nous présente une introduction aux doctrines chrétiennes au sujet de Dieu à la fois claire, captivante et très appliquée. J’espère que ce livre sera largement utilisé dans les Églises.
Peter JENSEN
Ancien archevêque de Sydney et ancien directeur du Moore Theological College en Australie.
Nick Tucker
Préface de Florent Varak
Et comment elles vous aideront à mieux dormir
Les éditeurs remercient chaleureusement tous les relecteurs et relectrices pour leur précieuse collaboration à cet ouvrage : Laurence, Myriam, Ludvine et Nelly.
Édition originale publiée en langue anglaise sous le titre :
12 Things God can’t do • Nick Tucker
© 2022 Nick Tucker
The Good Book Company Limited
Blenheim House, 1 Blenheim Road
Epsom, Surrey, KT19 9AP, Royaume-Uni
Traduit et publié avec permission. Tous droits réservés.
Édition publiée en langue française :
12 Choses que Dieu ne peut pas faire • Nick Tucker
© 2025 • BLF Éditions
Rue de Maubeuge, 59164 Marpent, France
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés.
Traduction : Claire Romerowski
Couverture & mise en page : NouvelleCreation
Sauf mentions contraires, les citations bibliques sont tirées de la Bible du Semeur. Texte copyright © 1992, 1999, 2015 Biblica Inc. Avec permission. Les caractères italiques ou gras sont ajoutés par l’auteur de cet ouvrage. Les autres versions employées sont indiquées en lettres abrégées et concernent la Bible Segond 21 (S21).
Reproduit avec aimable autorisation. Tous droits réservés.
ISBN 978-2-38657-013-1 broché
ISBN 978-2-38657-014-8 numérique
Imprimé en France par Evoluprint
Dépôt légal 1er trimestre 2025
Michael John Ovey
J’aime les auteurs qui abordent des vérités éternelles avec un regard innovant ou décalé. C’est le genre d’approche qui renouvelle nos compréhensions et vivifie notre vision.
Nick Tucker livre un portrait bienfaisant et unique – décalé –de Dieu. Nous touchons là au cœur de la théologie. Tucker nous présente avec simplicité la puissance, la personne et l’œuvre de Dieu. Il en dessine les contours en détaillant certains de ses attributs qui semblent pourtant le « restreindre ». Est-ce même approprié de le dire ainsi ? En réalité, c’est aux frontières de ce que Dieu peut et ne peut pas faire que l’on découvre les perles de son être. L’auteur nous emmène dans une contemplation merveilleuse de notre Seigneur infiniment extraordinaire.
Au fil des pages, nous découvrons la grandeur de Dieu. Nous découvrons sa puissance, sa connaissance, la stabilité de son dessein, l’immensité de son être, ce que nous pouvons connaître de lui et ce qui restera à jamais au-delà de toute investigation exhaustive. Nous découvrons les mots pour le décrire avec précision. Non pour se faire un portrait « clinique » ou stérile. Bien au contraire. Tucker emploie beaucoup d’images et de références à la culture contemporaine qui rendent ce livre très abordable. Il nous conduit dans des implications édifiantes pour notre quotidien.
L’image que dessine l’auteur nourrit notre admiration de Dieu. En ouvrant ce livre, vous entrez dans une exposition magistrale pour en sortir apaisé, émerveillé. Ce Dieu aux contours immenses s’est incarné. Il a révélé son visage en rejoignant notre humanité. Il nous a pris avec lui. Pour l’éternité. Nous pouvons dormir en paix – Dieu est aussi stable que son projet de rédemption !
Florent Varak
Pasteur des Églises Charis, enseignant à l’Institut Biblique de Genève
Vous allez avoir des ennuis !
Je ne savais pas trop si je devais la croire. Mes expériences passées, dont je gardais un goût amer, m’avaient appris que quand quelqu’un me dit que je vais avoir des ennuis, alors c’est sans doute vrai. Et pourtant, une étincelle dans ses yeux me laissait penser que tout n’était peut-être pas perdu.
Est-ce que j’ai dit quelque chose qu’il ne fallait pas ?
En général, c’est ça la raison de mes ennuis…
J’ai failli ne pas pouvoir venir ce matin, m’a-t-elle répondu.
Les battements de mon cœur se sont soudain calmés. J’avais été invité à prêcher lors d’un week-end de retraite et j’étais à peu près sûr que les problèmes de transport de cette dame ne pouvaient pas être de ma faute.
C’est de votre faute, a-t-elle ajouté.
Oh, j’en suis vraiment désolé, ai-je répondu (mais je n’avais toujours pas compris de quoi elle parlait !)
Il se trouve que cette dame avait perdu son mari plusieurs années auparavant et qu’elle n’avait plus fait de nuit complète depuis. D’habitude, elle passait des heures allongée dans son lit en attendant que le jour se lève. Or, ce matin-là, elle s’était fait réveiller par quelqu’un qui frappait à sa porte. C’était la
personne qui passait la prendre pour l’emmener à la rencontre d’Église. Bien plus qu’une nuit complète… elle avait eu une panne d’oreiller !
Mais comment cela pouvait-il être de ma faute ? Eh bien, elle mettait son profond sommeil sur le compte des prédications que j’avais données la veille. Alors, c’est vrai, il arrive que les gens s’endorment pendant que je prêche mais, en général, ils se réveillent quand je m’arrête de parler. Là, c’était différent. À ma grande surprise, il s’était passé exactement ce que le titre de ma prédication annonçait : Douze choses que Dieu ne peut pas faire et comment elles vous aideront à mieux dormir.
J’espère qu’en lisant ce livre qui porte le même titre, vous ferez la même expérience que cette dame. Mieux connaître Dieu devrait réellement nous permettre de passer des nuits plus sereines.
Vous ne me croyez pas ? Demandez au roi David.
Au début du psaume 3, il décrit une situation de stress épouvantable : « Ô Éternel, mes ennemis sont si nombreux ! Oui, si nombreux mes adversaires qui se sont dressés contre moi » (v. 2). La situation est si dramatique que tout le monde prétend qu’« il n’y a plus aucun secours pour [lui] auprès de Dieu » (v. 3). David écrit ce psaume pendant qu’il fuit son fils Absalom, qui a conspiré pour prendre son trône (voir 2 Samuel 15 à 18). David parvient à lui échapper, mais il est désormais recherché.
Cependant, le psaume 3 nous réserve une surprise tout à fait remarquable : « Quand je me couche, je m’endors ; je me réveille car l’Éternel est mon soutien » (v. 6). Aux yeux de David, c’est sans doute la partie centrale de ce verset qui est la plus extraordinaire : « je me réveille. » En effet, il avait beaucoup d’ennemis qui faisaient tout leur possible pour empêcher cela.
Personnellement, je n’en reviens pas qu’il ait même réussi à s’endormir !
En général, nous arrivons à nous endormir seulement lorsque nous nous sentons en sécurité. Il paraît que lors de notre première nuit dans un nouvel environnement, la moitié de notre cerveau reste en alerte toute la nuit, prêt à répondre aux menaces1. Quand on y réfléchit, dormir est un véritable acte de confiance. Nous sommes si vulnérables quand nous dormons ! Nous n’avons aucune idée de ce qui se passe autour de nous et nous ne pouvons pas nous défendre. Quand nous nous sentons stressés ou menacés, les mécanismes de défense de notre corps se mettent en marche et le précieux sommeil réparateur nous glisse alors entre les doigts pour le reste de la nuit.
Si des gens en voulaient à votre vie, comme c’était le cas de David, vous auriez beaucoup de mal à trouver le sommeil. Un soldat en territoire ennemi ne va pas s’endormir simplement parce que c’est l’heure d’aller se coucher. C’est uniquement quand un camarade monte la garde d’un œil vigilant que dormir devient à peu près envisageable. Mais si David a pu dormir même pendant cette période de terrible angoisse, c’est parce que celui qui veillait sur lui valait bien plus qu’un camarade : « Ô Éternel, tu es pour moi un bouclier qui me protège » (v. 4).
Sûr de cela, il affirme : « Je ne craindrai donc pas ces multitudes qui sont postées autour de moi » (v. 7). Comme le dit le psaume suivant : « Dans la paix, je me couche et m’endors aussitôt ; grâce à toi seul, ô Éternel, je demeure en sécurité » (Psaumes 4.9).
David connaissait la puissance de Dieu et il savait que Dieu est fidèle à ses promesses. Ce livre a pour but de vous donner la même assurance. Ce que je désire, c’est vous communiquer un aperçu de la grandeur de Dieu qui changera votre façon de voir le monde… et qui vous aidera à dormir sur vos deux oreilles.
Quand nous réfléchissons à la grandeur de Dieu, nous avons tendance à penser à ce qu’il peut faire. Mais dans ce livre, nous nous intéressons à douze choses que Dieu ne peut pas faire.
Et quand vous comprendrez ce qu’il ne peut pas faire, sa grandeur pourrait bien vous laisser sans voix.
Tant que nous sommes dans le thème du sommeil, je vous propose de réfléchir à ceci : Dieu ne peut pas dormir. Cette vérité se trouve dans le psaume 121, qui fait partie d’une série de psaumes appelés « Chants des montées ». Ces psaumes étaient chantés par les pèlerins qui montaient à Jérusalem. Lors de ce voyage périlleux, ils chantaient des chants de louanges à Dieu pour s’encourager et se réconforter les uns les autres.
Il te gardera des faux pas, celui qui te protège ne sommeillera pas. Non, jamais il ne dort, jamais il ne sommeille, celui qui protège Israël.
Psaumes 121.3-4
Dieu ne se laisse jamais distraire ; il ne s’assoupit jamais, ne manque jamais de veiller sur son peuple et de prendre soin de lui. Son peuple peut se reposer, car Dieu, lui, ne se repose jamais. Victor Hugo l’exprime très bien :
Courage pour les grandes douleurs de la vie, et patience pour les petites. Et puis, quand vous avez laborieusement accompli votre ouvrage de chaque jour, endormez-vous avec sérénité. Dieu veille2
Nous dormons parce que nous en avons besoin. Dieu, lui, n’en a pas besoin. Voilà exactement le fil rouge que nous suivrons tout au long de ce livre : Dieu n’est pas comme nous. Les pages qui suivent prendront tout leur sens si nous parvenons à saisir cette réalité.
Nous avons tendance à tout considérer de notre propre point de vue. C’est pourquoi nous imaginons souvent que Dieu est à peu près comme nous, mais en beaucoup, beaucoup plus grand.
Et pourtant, l’une des choses les plus importantes que Dieu veut nous faire comprendre à son sujet, c’est qu’il est sans pareil dans la création. Nous aurions tort de penser autrement. Ainsi, nous dormons, mais pas lui.
Ésaïe 40 est l’un de mes passages bibliques préférés. Ce chapitre commence par annoncer que Dieu vient au secours de son peuple (v. 1-5). Pourtant, le peuple d’Israël vit des circonstances désastreuses et la situation est sur le point d’empirer. Comment peuvent-ils être certains que Dieu va venir à leur secours ?
Voici l’Éternel, le Seigneur ; il vient avec puissance et son bras lui assure la souveraineté. Voici : ses récompenses sont avec lui, et le fruit de son œuvre va devant lui. Comme un berger, il paîtra son troupeau et il rassemblera les agneaux dans ses bras. Sur son sein, il les porte et conduit doucement les brebis qui allaitent.
Ésaïe 40.10-11
Ensuite, pour nous permettre de mieux saisir la puissance de ce Dieu dont « le bras lui assure la souveraineté », Ésaïe demande : « Qui a mesuré l’océan dans le creux de sa main ? Qui a déterminé les dimensions du ciel avec la largeur de sa main ? » (v. 12). La réponse est évidente : seul Dieu en est capable. Lui seul est capable d’accomplir tout ce qu’il désire. Une fois que nous nous rendons compte de ce qui se trouve au bout du bras de Dieu (une main capable de contenir toutes les eaux de l’univers), nous n’avons plus tellement de raisons de nous inquiéter : Dieu est bel et bien capable de nous sauver.
Ésaïe emploie ce procédé de question-réponse tout au long du chapitre 40. Si vous en avez le temps, je vous conseille de lire tout le chapitre en vous posant cette question : à quoi ressemble Dieu ? En fait, pourquoi ne pas le faire tout de suite, avant de poursuivre votre lecture ? Alors, à quoi ressemble le Dieu d’Ésaïe 40 ?
Vous pourriez répondre qu’il est fort, qu’il est sage, qu’il est bon et infatigable. Vous auriez parfaitement raison. Mais voici la réponse qu’Ésaïe donne à plusieurs reprises : Dieu ne ressemble à personne. Ésaïe insiste encore et encore en posant des questions qui ont toutes la même réponse : personne ! « De qui Dieu a-t-il pris conseil ? » (v. 14). De personne. « À qui comparerez-vous Dieu ? » (v. 18). À personne. « Qui serait [son] égal ? » (v. 25). Personne. Vous avez compris l’idée : Dieu est incomparable.
Il est incomparable en termes de taille : il est assez grand pour mesurer le ciel avec sa main et peser la poussière de la terre sur une balance. Il est incomparable sur le plan de la connaissance : personne ne lui a jamais rien appris. Sa sainteté aussi est incomparable.
Dans l’Ancien Testament, le système des sacrifices dans le temple servait à rappeler au peuple d’Israël la sainteté de Dieu. Tous les jours, on tuait et on immolait des animaux sur l’autel. Le message était clair : s’approcher du Dieu saint, c’est une affaire sérieuse, coûteuse et sanglante. Ésaïe reprend l’image du sacrifice pour l’amplifier (v. 16). Il prend l’exemple du Liban, un pays célèbre pour ses immenses cèdres : « Imaginez que vous abattiez tous les arbres du Liban, que vous empiliez les troncs pour en faire un autel en l’honneur de Dieu et que vous y mettiez le feu. Jamais le monde n’a vu pareille fournaise. Et pourtant, nous dit Ésaïe, cela ne serait pas suffisant. Vous pourriez sacrifier tous les animaux de ce pays fertile que cela ne serait pas suffisant. »
Ce n’est pas que Dieu ait un ego monstrueusement surdimensionné. Une telle image pourrait presque nous faire croire que Dieu est comme la grande chanteuse d’opéra Jenny Lind dans le film The Greatest Showman. Son insatiable désir d’être reconnue et adulée se manifeste lorsqu’elle chante : « All the shine of a thousand spotlights […] will never be enough » (traduction : « Même l’éclat d’un millier de projecteurs ne pourra jamais
suffire »). Le fait est que même en sacrifiant à Dieu l’univers tout entier, nous ne lui rendrions jamais toutes les louanges et toute la gloire que sa sainteté mérite. Le personnage de Jenny Lind ressent un profond besoin d’être admiré qui ne pourra jamais être satisfait. Mais Dieu, lui, n’a aucun besoin.
Notre louange, notre service, notre dévotion, notre argent : il est bon d’offrir toutes ces choses à Dieu. Mais Dieu n’en a pas besoin. Dieu n’est pas à court d’argent ; il ne souffre pas d’un manque de confiance en lui. Il a créé l’univers par sa parole, il n’a donc absolument pas besoin de notre aide. Dieu n’est pas en manque de main-d’œuvre. Il est pleinement autosuffisant.
Si nous pouvons entrer en relation avec Dieu, ce n’est pas parce qu’il a besoin de nous, mais, aussi étonnant cela soit-il, c’est parce qu’il nous aime. Il ne nous bénit pas à cause de ce que nous faisons ou de ce que nous pourrions lui apporter, mais parce qu’il le désire.
Prenez le temps d’y réfléchir. Dieu n’a pas besoin de vous, mais il vous aime. Et plus vous vous rendrez compte de l’ampleur de sa puissance, de sa gloire et de sa sainteté, plus vous comprendrez que c’est la seule façon possible d’entrer en relation avec lui. Dieu est si grand qu’il nous resterait complètement inconnu s’il n’avait pas entrepris de se révéler à nous. Ce qui est merveilleux, c’est qu’il s’est justement fait connaître par de nombreux moyens différents. Entre autres, il a choisi de nous révéler son nom.
Certains noms possèdent dans une culture une signification qui ne se traduit pas forcément dans une autre. Ma sœur a enseigné quelque temps en Afrique et l’un de ses élèves s’appelait « Innocent Badger3 ». Pour nous en Angleterre, ce nom nous faisait rire chaque fois qu’il apparaissait dans les e-mails remplis d’humour où ma sœur nous racontait ses aventures. Il peut arriver la même chose quand nous lisons la Bible. Si nous négligeons de porter attention à la signification des noms bibliques,
nous risquons de passer à côté de quelque chose d’important ! Car ces noms sont souvent chargés de sens. En effet, Dieu choisit à maintes reprises de changer le nom d’une personne dans le but de façonner son identité. Ainsi, Abram devient Abraham, le père de nombreuses nations. Simon le pêcheur, devient Pierre, le rocher sur lequel Jésus bâtira son Église. Dans la Bible, Dieu donne des nouveaux noms à beaucoup de gens, mais personne ne donne jamais de nom à Dieu. C’est Dieu qui révèle son nom : « Je suis celui qui est », ou simplement « Je suis » (Yahvé) pour ses amis (Exode 3.14).
Qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie que Dieu est entièrement et parfaitement indépendant. Il n’existe que pour une seule et unique raison : à cause de qui il est. Rien ni personne d’autre que lui ne peut en dire autant. J’existe en partie grâce à mes parents, qui existent grâce à leurs parents, etc. Mon existence n’est pas indépendante ; je ne serais pas sur cette terre si des milliers et des milliers d’autres personnes avant moi ne s’étaient pas rencontrées et n’avaient pas eu des enfants. Mais Dieu, lui… eh bien, Dieu « est ». Tout simplement.
Les théologiens, qui aiment les mots latins, appellent cela l’aséité de Dieu. Cela désigne « le fait que, par sa nature, Dieu existe par lui-même » (on comprend pourquoi ils préfèrent le latin !). Mais quelle que soit la langue dans laquelle nous l’exprimons, il s’agit là de la chose la plus fondamentale à savoir sur Dieu : si nous ne savons pas cela, nous ne pourrons pas comprendre Dieu. Dieu est « auto-existant » : il existe par lui-même. Il est le Créateur de toutes choses, et n’a lui-même pas été créé. Sans lui, la création n’existerait pas, mais sans la création, Dieu existerait. Je ne sais pas pour vous mais, personnellement, j’ai de la peine à imaginer un monde où je n’existerais pas. Pourtant, la science semble prouver que l’univers s’est très bien débrouillé sans moi pendant un bon bout de temps. Mais pour Dieu, c’est différent. Il fallait qu’il existe. C’est dans sa nature même.
Comme nous allons le voir, cela entraîne pas mal de conséquences. Mais gardez en tête l’objectif de ce livre : nous permettre de voir le Dieu invisible un peu plus distinctement. Cela pourrait faire bien plus que révolutionner nos cycles de sommeil. Chacune des douze choses que Dieu ne peut pas faire reflète un aspect de sa nature et de son caractère qui peut apaiser notre cœur, nous réjouir et nous remplir d’adoration pour notre Créateur ! Et je crois bien qu’elles pourront aussi nous aider à dormir un peu mieux la nuit.
Avant de nous intéresser aux douze choses que Dieu ne peut pas faire, j’ai un dernier mot à dire en guise d’introduction. Vous trouverez tout au long de ce livre des « interludes » comme celui-ci. Ils sont là pour montrer comment Dieu, par son incarnation, a accompli les choses qu’il ne peut habituellement pas faire.
Reprenons notre premier exemple : Dieu ne dort pas. Cette expérience lui est absolument étrangère. Et cette vérité rend l’une des histoires racontées par Matthieu, Marc et Luc au sujet de Jésus pour le moins surprenante.
Vous connaissez sans doute déjà cette histoire. Jésus et ses disciples sont pris dans une terrible tempête, le genre de tempêtes qui
pouvaient éclater sans prévenir sur le lac de Tibériade. Les disciples, dont plusieurs sont des marins habiles et expérimentés, demandent désespérément à Jésus (qui, en comparaison, n’est qu’un jeune moussaillon !) : « Maître, nous sommes perdus, et tu ne t’en soucies pas ? » Alors, Jésus se lève, ordonne au vent et aux vagues de se taire, et la tempête se calme.
Le récit de Marc fait apparaître des parallèles qui ne sont pas nécessairement visibles dans la traduction du texte en français : le calme que produit Jésus est comparé à la fureur de la tempête (Marc 4.35-41). Un « méga » vent se met à souffler, et lorsque ce vent tombe, c’est un « méga » calme qui revient. Mais Marc utilise une troisième fois le mot méga dans son récit : pour décrire la réaction des disciples face aux actes de Jésus. Ils sont saisis d’une « méga » crainte et se demandent : « Qui est donc cet homme pour que même le
vent et le lac lui obéissent ? » (v. 41). Il n’y a qu’une seule réponse possible à cette question. Voilà pourquoi ils ont si peur. Dans la Bible hébraïque, seul Dieu est capable de commander ainsi aux éléments.
Les disciples ont encore plus peur à la fin de l’histoire qu’au début. Avant, c’était la quantité d’eau présente dans leur bateau qui les inquiétait. Ce qui les terrifie maintenant, c’est la présence de Jésus avec eux dans le bateau, parce qu’ils sont conscients qu’ils sont en présence du Dieu vivant.
Mais ce n’est pas vraiment cela qui nous surprend le plus dans cette histoire. Le plus curieux, c’est que les disciples doivent réveiller Jésus pour lui demander son aide, parce que Jésus « à l’arrière, dormait, la tête sur un coussin » (v. 38).
Dans cet épisode des Évangiles, nous voyons Jésus sous deux angles différents. D’un côté, il apparaît comme un homme fatigué, dont les capacités physiques sont limitées, comme les nôtres.
De l’autre, il manifeste la puissance et les attributs que seul Dieu possède. Comment est-ce possible ? En fait, c’est ce que nous pouvons voir tout au long du Nouveau
Testament : Jésus est à la fois Dieu et homme.
C’est cette rencontre de la divinité et de l’humanité en une seule personne qui a suscité le plus de confusion et de division au sein de l’Église primitive. Le
Nouveau Testament est clair : Jésus est pleinement Dieu et doit être adoré au même titre que le Père et que le SaintEsprit. Pourtant, certaines personnes rigides sur le plan intellectuel n’arrivaient pas à l’accepter. Comme nous le verrons, certaines vérités au sujet de Dieu ne collent pas tout à fait avec ce que nous savons de Jésus. C’est pour cela qu’Arius, un responsable important de l’Église du IIIe siècle, a refusé de croire que Jésus était de nature divine. Pour lui, le Fils n’était que la première et la plus grande de toutes les créatures.
Ses arguments, qui ont divisé l’Église pendant une génération entière, illustrent un danger qui menace les chrétiens depuis toujours : celui de s’accrocher à un concept biblique au détriment de tous les autres. Nous déduisons de ce concept une série de conclusions qui semblent logiques mais qui contredisent d’autres passages des Écritures. Hilaire de Poitiers, évêque au IVe siècle, s’est opposé à la doctrine de l’arianisme durant toute sa vie. Dans son livre La Trinité, il met le doigt sur le principal problème de cette doctrine :
Voilà pourquoi tout manque de foi [en la divinité du Fils] est une folie : car la sagesse humaine se sert de sa perception imparfaite, mesure tout selon une pensée limitée, et juge inexistant ce qu’elle ne connaît pas. Le manque de foi est donc fondé sur un jugement débile, puisqu’on n’accorde aucune réalité à ce dont on a présupposé l’existence impossible4 !
Voilà qui est provocateur ! Pas étonnant qu’il ait reçu le surnom de « marteau des Ariens ». Mais si Hilaire emploie des mots si forts, c’est parce que l’idée que Jésus est à la fois Dieu et homme est capitale. Notre salut en dépend ! Nous verrons pourquoi un peu plus tard, mais pour l’instant j’insiste sur ce point : Jésus est à la fois l’un des nôtres, capable de partager nos limites humaines, tout en étant le Dieu qui ne connaît aucune limite. C’est dans ce mystère que se cache toute la profondeur de l’Évangile.
Pour saisir la portée colossale de l’Évangile qui nous
sauve, nous devons accepter les choses que Dieu ne peut pas faire. C’est seulement ensuite que nous pourrons vraiment nous émerveiller devant ce que Dieu a fait pour nous accorder le salut. C’est pourquoi de courts interludes seront intercalés entre certains chapitres. Ils seront l’occasion d’examiner comment, en Jésus, Dieu a « dépassé » ses « incapacités » (si j’ose m’exprimer ainsi) afin de nous sauver. Nous verrons que nos nuits deviennent bien plus paisibles quand nous connaissons le Dieu qui ne peut pas dormir et qui, pourtant, s’est endormi pour nous.
ne peut pas apprendre
« Mon Dieu est si grand, si fort et si puissant, rien n’est impossible à mon Dieu. »
Il est si facile de gâcher ce beau chant pour enfants. J’ai un ami qui s’amuse à chanter : « Mon chien est si grand, si fort et si puissant, rien n’est impossible à mon chien (ouaf-ouaf). » Outre le fait que son chien est plutôt maigrichon, cette parodie est malheureusement des plus efficaces… Une fois que vous avez entendu cette version, il est difficile de ne pas la chanter sans le vouloir.
Si personne ne vous avait jamais gâché ce chant auparavant, je suis désolé, mais le pire est encore à venir. Nous avons sans doute l’habitude de chanter à tue-tête que rien n’est impossible à notre Dieu, sauf que… ce n’est pas tout à fait vrai. Et, en fait, c’est une bonne chose, parce que le Dieu qui ne peut pas faire certaines choses est bien plus grand que celui qui est véritablement capable de tout faire.
Cela vous surprend peut-être. En effet, pouvoir tout faire semble être la définition même de qui est Dieu. Après tout, l’un des termes théologiques dont nous qualifions Dieu est celui d’« omnipotent », qui est formé de deux mots latins : potentia,
qui signifie puissance, force ou capacité, et omnis, qui veut dire tout. « Omnipotent » veut donc dire « qui a tous les pouvoirs », « qui est capable de tout faire ».
Il s’agit là d’une très bonne explication, mais qui manque de précision. Pour en voir les limites, je vous propose de nous poser une question que les sceptiques utilisent parfois : « Dieu peut-il créer un rocher qui serait trop lourd pour qu’il puisse le soulever ? » Si nous répondons « non », alors Dieu ne peut pas tout faire, donc il n’est pas omnipotent. Mais si nous répondons « oui », Dieu n’est pas non plus omnipotent, puisqu’il existe la possibilité d’une chose qu’il ne pourrait pas faire. « Voilà pourquoi votre Dieu omnipotent ne peut pas exister », disent les sceptiques. Et c’est vrai, dans la mesure où un Dieu « omnipotent » signifie « un Dieu qui peut tout faire », sans exception. Or, ce n’est pas ce que cela veut dire.
Après tout, la Bible elle-même contient l’expression « Dieu ne peut pas ». En 2 Timothée 2.13, nous lisons que Dieu « ne peut se renier lui-même ». Nous verrons ce que cela signifie à la fin de ce livre, mais pour l’instant, cela prouve qu’il y a au moins une chose que Dieu ne peut pas faire. Ceux qui se sont creusé la tête pour trouver cette histoire de rocher trop lourd à soulever n’ont donc fait que perdre leur temps. Ni la Bible ni la tradition chrétienne n’ont jamais prétendu que « rien n’est impossible à Dieu » au sens strict.
Ok, pensez-vous peut-être, mais c’est de la triche. Tout ça, ça ne compte pas. Après tout, dans la Bible, ceux qui nient l’existence de Dieu sont des insensés (Psaumes 14.1), et qui voudrait d’un Dieu insensé ? La Bible affirme que Dieu « ne peut pas se renier lui-même » (ou qu’il ne peut pas mentir ou être tenté par le mal), et c’est une bonne chose. Comme le dit Anselme, archevêque de Cantorbéry au XIe siècle :
Serait-ce que pouvoir ces choses n’est point puissance, mais impuissance ? Qui les peut, peut en effet ce qui n’est pas bon pour lui, et qu’il ne doit pas. Plus il les peut et plus l’adversité, la perversité peuvent sur lui, moins lui-même peut sur elles 5 .
En fait, ce qu’Anselme dit, c’est que certaines capacités ne sont tout simplement que des faiblesses. Être incapable de faire le mal est une force, même si nous l’exprimons verbalement comme une incapacité.
Pourtant, il existe aussi des choses que Dieu ne peut pas faire alors que nous les considérons comme de bonnes choses. Prenons le thème de ce chapitre : Dieu ne peut pas apprendre. En quoi est-ce une bonne chose ? Si mes professeurs avaient écrit « Nick est incapable d’apprendre » sur mon bulletin scolaire, je ne crois pas que j’aurais eu très envie d’aller le montrer à mes parents ! Mais je suis convaincu qu’en réfléchissant à la raison pour laquelle Dieu ne peut pas apprendre, nous aurons un meilleur aperçu de sa gloire.
Prenons un exemple. Imaginez un tonneau d’eau de pluie comme on en voit parfois dans les jardins. Si on vous dit que ce tonneau ne peut pas contenir plus d’eau qu’il n’en contient déjà, cela peut être pour un tas de raisons. Il se peut que le tonneau soit déjà plein et donc qu’il soit physiquement impossible d’y ajouter une quantité supplémentaire de liquide, car il n’y a tout simplement plus de place à l’intérieur. Il se peut que le tonneau soit fendu, de sorte que l’eau qu’on pourra y verser ne fera qu’en ressortir. Il se peut aussi que quelque chose bloque l’unique ouverture du tonneau et empêche tout liquide d’y entrer.
Maintenant, si nous considérons le cerveau comme un tonneau et l’information comme de l’eau, nous pouvons imaginer des raisons similaires pour lesquelles quelqu’un serait incapable d’apprendre. Quand j’étais à l’école, j’avais parfois l’impression
que mon cerveau était plein à craquer. Il ne pouvait tout simplement plus recevoir de nouvelles informations. Un jour, pendant la récréation, je me suis cogné la tête si fort que je n’arrivais même plus à me rappeler quel jour on était : c’était comme si mon cerveau avait une fuite et que l’information ne cessait de m’échapper. Et la plupart du temps, j’étais trop préoccupé par le sport pour être attentif à ce qui m’entourait : l’information ne passait pas, comme si le tuyau était bloqué. Dans ces trois exemples, mon incapacité à apprendre était due à mes limites. Mais quand nous disons que Dieu ne peut pas apprendre, cela n’a rien à voir avec une question de limites.
Gardons l’exemple du tonneau. Essayez d’imaginer un tonneau si grand qu’il ne tiendrait même pas dans votre jardin. Imaginez que ce tonneau contienne toute l’eau du monde… mieux encore : il contient toute l’eau de l’univers. Il est donc impossible que ce tonneau contienne plus d’eau, et ce, non parce que sa capacité serait limitée, mais parce qu’il n’existerait tout simplement plus aucune goutte d’eau qui ne se trouve pas déjà à l’intérieur. Voilà ce que cela signifie quand nous disons que Dieu ne peut pas apprendre. Ce n’est pas parce qu’il n’est pas assez puissant, mais parce qu’il n’existe aucune sorte de connaissance ou d’information qu’il ne possède déjà.
Dans le psaume 139, David donne une description à couper le souffle de la parfaite connaissance que Dieu a de chacun d’entre nous. Avant de continuer ce livre, je vous encourage à prendre le temps de lire ce psaume en gardant trois questions à l’esprit : Que sait Dieu ? Comment le sait-il ? Quel effet cela produit-il sur David ?
À présent, parcourons ce psaume ensemble :
1 Éternel, tu me sondes et tu me connais.
2 Toi, tu sais quand je m’assieds et quand je me lève. De loin, tu discernes tout ce que je pense.
3 Tu sais quand je marche et quand je me couche, et tous mes chemins te sont familiers.
Le premier verset énonce la thématique du psaume : « Éternel, tu me sondes et tu me connais ». Ce psaume est centré sur la connaissance de Dieu et, plus spécifiquement, sur la connaissance qu’il a de l’auteur, le roi David.
Les choses commencent de manière assez anodine. C’est le genre de connaissances que tout détective privé à peu près compétent est censé détenir sur son sujet : « Tu sais quand je m’assieds et quand je me lève. »
La phrase suivante semble un peu plus intrusive : « De loin, tu discernes tout ce que je pense. » Et encore, cela ne paraît pas tout à fait hors du commun. La plupart d’entre nous sommes capables de deviner l’état émotionnel de quelqu’un d’autre en observant ses expressions faciales et son langage corporel. D’autant plus quand il s’agit de quelqu’un que nous connaissons bien. Peut-être que la phrase « tu discernes tout ce que je pense » traduit donc simplement une grande compréhension de l’autre, voire une connaissance intime et profonde.
Au verset 3, nous retrouvons notre détective privé : « Tu sais quand je marche et quand je me couche, et tous mes chemins te sont familiers. » Il est tout de même impressionnant de disposer d’une telle connaissance pour les huit milliards d’êtres humains de notre planète. Il s’agit là d’une quantité inimaginable de données (même si elle ne dépasse pas les ambitions de Google !). Mais là encore, nous parlons de connaissances que les êtres humains sont capables de posséder. La seule différence, c’est qu’il s’agit de connaissances en très, très grande quantité. Cependant, les versets suivants placent la connaissance de Dieu dans une tout autre catégorie.
4 Bien avant qu’un mot vienne sur mes lèvres, Éternel, tu sais déjà tout ce que je vais dire.
5 Tu m’entoures par-derrière et par-devant, et tu mets ta main sur moi.
6 Merveilleux savoir hors de ma portée, savoir trop sublime pour que je l’atteigne.
Nous voici soudain transportés dans une nouvelle dimension, vers un tout nouveau système de connaissance. Si l’on en croit le verset 4, Dieu sait non seulement ce qui est mais aussi ce qui sera. David reprend cette même idée aux versets 15 et 16 :
15 Mon corps n’était pas caché à tes yeux quand, dans le secret, je fus façonné et tissé comme dans les profondeurs de la terre.
16 Je n’étais encore qu’une masse informe, mais tu me voyais et, dans ton registre, se trouvaient déjà inscrits tous les jours que tu m’avais destinés alors qu’aucun d’eux n’existait encore.
Bien avant qu’il y ait un David à connaître, Dieu connaissait David. Plus extraordinaire encore, Dieu connaissait déjà tout ! La vie de David était pour lui un livre ouvert bien avant sa première respiration (v. 15).
Prenez le temps de méditer sur cela. Dieu sait tout de vous ; il vous connaît parfaitement, et il connaît votre vie du début à la fin. Il n’est pas en train d’apprendre à vous connaître. Il ne se construit pas de souvenirs et n’est pas en train de constituer un dossier sur vous. Il sait déjà tout dans les moindres détails, même votre avenir.
Par nature, notre esprit refuse de voir Dieu ainsi. Une telle conception de Dieu est difficile à concilier avec notre perception du temps. Si la connaissance de Dieu est si absolue, nous pouvons nous demander si nous sommes réellement libres ou si nous sommes vraiment responsables de nos actes. Nous
reviendrons sur cette question dans les chapitres à venir, mais ce n’est pas ce qui nous intéresse pour l’instant. Nous avons demandé au psalmiste : Que sait Dieu ? Et la réponse qu’il nous donne, c’est « tout ». Mais ce faisant, l’auteur a redéfini ce « tout » pour y inclure des choses que nous ne plaçons pas d’habitude dans la catégorie de ce qui peut être connu.
Cela ne concerne pas seulement l’avenir, Dieu connaît aussi notre cœur. Quand David dit au verset 4 que l’Éternel sait « tout » ce qu’il va dire (certaines traductions disent que Dieu « connaît entièrement » la parole de David), je crois que cela signifie que Dieu comprend toutes les nuances des paroles de David. En plus de la signification des mots et du ton employé, Dieu perçoit les motivations du cœur et de l’esprit de David bien avant que ses paroles ne lui viennent en tête.
Cela nous amène à notre deuxième question : comment Dieu sait-il cela ? Comment quelqu’un peut-il avoir accès à ce genre de connaissance ? Cela sort tellement du cadre de notre expérience que cela paraît… invraisemblable.
Pourquoi ? Sans doute parce que nous avons tendance à imaginer Dieu comme nous, mais en plus grand : assis dans les cieux, en train de recevoir et de traiter les informations à peu près de la même manière que nous le faisons. Certaines de nos connaissances nous viennent intuitivement, mais la majeure partie de ce que nous savons (quel jour nous sommes, quelle odeur ont les vaches, où se trouve le supermarché), nous l’apprenons par l’expérience. C’est pourquoi nous pensons qu’il en va de même pour Dieu. Nous imaginons qu’il reçoit, comme nous, des données sensorielles (des sons, des odeurs, etc.) puis qu’il traite ces informations.
Bien sûr, nous admettons aussi que Dieu possède des « sens » surnaturels que nous n’avons pas. Je pense que tous ceux qui ont déjà prié dans leur tête croient que Dieu peut lire dans les pensées.
Et c’est vrai, Dieu le peut… mais pas tout à fait comme nous avons tendance à le croire. Nous imaginons que Dieu « entend » la voix dans notre tête, et donc nous pensons que Dieu perçoit le contenu de nos pensées d’une manière ou d’une autre.
Mais cela ne nous dit pas comment Dieu peut connaître les paroles de David avant qu’elles viennent sur ses lèvres (v. 4).
La connaissance que Dieu a du « futur David » est totalement inconnue, voire inconnaissable, pour David. Cela va bien plus loin qu’« entendre » ou prédire le monologue intérieur du psalmiste. Ce qui nous ramène à notre question : comment Dieu sait-il cela ?
C’est le verset 13 qui nous donne la réponse. Dans les versets qui précèdent, David se demande s’il est possible de se cacher de Dieu en exploitant l’immensité de la création : « Si je monte au ciel […] et si je descends au séjour des morts […] et que j’aille demeurer aux confins des mers » (v. 8-9), ou en brouillant ses sens : « Et si je me dis : “Du moins les ténèbres m’envelopperont” » (v. 11). Pourtant rien de tout cela ne peut limiter la connaissance de Dieu, car partout où David va, Dieu est là (v. 8) et pour lui « même les ténèbres ne sont pas obscures » (v. 12). À la fin de ces vaines tentatives, David nous donne enfin la réponse à notre question (la version Darby nous l’indique par le mot « Car » au début du verset 13). Voici pourquoi et comment Dieu sait tout ce qu’il sait, indépendamment de ce que ses « sens » pourraient percevoir :
13 Tu m’as fait ce que je suis, et tu m’as tissé dans le ventre de ma mère.
14 Je te loue d’avoir fait de moi une créature aussi merveilleuse : tu fais des merveilles, et je le reconnais bien.
15 Mon corps n’était pas caché à tes yeux quand, dans le secret, je fus façonné et tissé comme dans les profondeurs de la terre.
16 Je n’étais encore qu’une masse informe, mais tu me voyais et, dans ton registre, se trouvaient déjà inscrits tous les jours que tu m’avais destinés alors qu’aucun d’eux n’existait encore.
Comment Dieu peut-il savoir ? Il sait par création. Autrement dit, il sait d’une manière diamétralement opposée à la nôtre. Augustin, le grand théologien africain, formule très bien cela dans La Cité de Dieu :
Ce monde ne pourrait être connu de nous s’il n’existait pas, mais […] s’il n’était pas connu de Dieu, il ne pourrait être6 .
C’est en fin de compte la raison pour laquelle Dieu ne peut pas apprendre. Il connaît déjà tout ce qui est parce qu’il l’a créé ; il n’existe donc aucune information qu’il ne possède déjà. Cela comprend l’infime mouvement de chaque molécule, de chaque atome et de chaque particule subatomique d’un bout à l’autre de l’univers, ainsi que chaque interaction et chaque relation de cause à effet entre ces différents éléments. Il les connaît parfaitement ; son savoir est instantané et ne dépend pas de leur existence. Dieu n’est pas comme nous. Sa grandeur est inimaginable.
Cela signifie que nous ne pourrons jamais comprendre parfaitement qui est Dieu. Ce Dieu-là dépasse notre entendement. Nous avons été créés à son image, c’est pourquoi nous sommes dotés d’une capacité spéciale : celle de le connaître et de le comprendre. Et pourtant, même les plus grands esprits de notre monde doivent renoncer à saisir pleinement sa grandeur et se contenter de l’adorer.
C’est là que notre troisième question entre en jeu : quel effet cela produit-il sur David ? Pour faire court, David est absolument bouleversé par la grandeur de Dieu :
17 Combien tes desseins, ô Dieu, sont, pour moi, impénétrables, et comme ils sont innombrables !
18 Si je les comptais, ils seraient bien plus nombreux que les grains de sable sur les bords des mers. Voici, je m’éveille, je suis encore avec toi.
À votre avis, combien de grains de sable peut contenir une seule cuillère à café ? Et combien de cuillères faudrait-il pour remplir ne serait-ce qu’un bac à sable ? Imaginez la quantité de grains de sable qui se trouvent sur une plage entière. Et maintenant, dans un désert. Lorsque, comme David, nous contemplons la majesté bouleversante de toute la connaissance de Dieu, nous ne pouvons faire autrement que de l’adorer.
La véritable adoration, c’est considérer quelqu’un ou quelque chose comme le bien suprême ; et, à l’inverse, considérer tout ce qui s’oppose à ce bien suprême comme mauvais et menaçant. Nous savons tous ce que c’est que de vouloir prendre la défense d’une personne que nous aimons lorsque d’autres s’en prennent à elle. C’est un peu ce qui se passe aux versets 19 à 22 :
19 Puisses-tu, ô Dieu, faire mourir le méchant ! Que les hommes sanguinaires partent loin de moi !
20 Ils se servent de ton nom pour leurs desseins criminels, eux, tes adversaires, l’utilisent pour tromper.
21 Éternel, comment donc ne pas haïr ceux qui te haïssent, et ne pas prendre en dégoût ceux qui te combattent ?
22 Eh bien, je leur voue une haine extrême, et les considère comme mes ennemis mêmes.
David est si émerveillé par Dieu que, pour lui, tout gravite autour de Dieu. De ce fait, il ne peut s’empêcher de considérer le péché selon le point de vue de Dieu. Il voit donc le péché pour ce qu’il est : une attaque à tout ce qui est bon, une alliance vide et obscure avec le mal. Et cela le révulse. En cet instant, il considère que seul le juste jugement de Dieu peut l’apaiser.
Ces versets peuvent évoquer chez certains d’entre nous les jugements moralisateurs qui ont caractérisé l’Église dans les pires moments de son histoire. Mais ici, le désir de David de voir les méchants jugés le mène à l’introspection. En voyant le péché pour ce qu’il est, David voit aussi son propre péché pour ce qu’il est et supplie d’en être purifié :
23 Sonde-moi, ô Dieu, pénètre mon cœur, examine-moi, et pénètre les pensées qui me bouleversent !
24 Considère si je suis le chemin du mal et dirige-moi sur la voie prescrite depuis toujours !
Dans le psaume 139, David suit un cheminement qui devrait marquer la vie de tout croyant : il contemple la bonté de Dieu, reconnaît l’horreur du péché dans son cœur et admet son besoin du remède divin. Pour nous qui nous trouvons après la croix, ce cheminement est d’autant plus parlant. Le corps brisé du Fils de Dieu nous montre, mieux que ne le ferait tout autre exemple, à quel point Dieu hait le péché. Il nous rappelle que le jugement réclamé par David se serait abattu sur nous, à juste titre, si Jésus n’était pas intervenu pour le subir à notre place. Si un chrétien est prompt à juger les autres, non seulement il ne se comprend pas bien lui-même, mais il ne comprend pas non plus l’Évangile.
Prenez le temps de réfléchir à ce que cela implique : le Dieu qui ne peut pas apprendre connaît déjà les profondeurs de votre cœur. Rien ne lui a jamais été caché et rien ne pourra jamais lui être caché. Ainsi, les recoins les plus secrets de votre cœur, les misérables zones d’ombre que vous cherchez à dissimuler aux autres comme à vous-même, sont comme un livre ouvert devant le Dieu qui vous a créé. Dans son excellent ouvrage 12 Raisons de ne plus croire au christianisme, Rebecca McLaughlin remarque que « toutes nos relations dépendent, dans une certaine mesure, de notre capacité de dissimulation7 ». Ce qui est génial, c’est qu’il existe une relation qui n’est pas concernée par cette règle.
La personne pour laquelle Jésus est mort n’est pas une version « endimanchée » de vous-même, édulcorée et bien propre. Jésus est mort pour vous, version intégrale. Il n’existe en vous rien de nouveau qui pourrait le repousser une fois qu’il l’aurait découvert. Dieu vous connaît vraiment et, sachant tout de vous, il vous aime vraiment. Quelle splendide liberté que de savoir que quelqu’un nous connaît parfaitement et nous aime malgré tout. Quel soulagement !
Tout ceci nous amène à une autre réponse à la question : quel effet la connaissance de Dieu produit-elle sur David ? Au verset 18, quand le psalmiste s’émerveille de l’immensité de la connaissance de Dieu, il dit : « Voici, je m’éveille, je suis encore avec toi. »
Alors, que fait David en apprenant à mieux connaître Dieu ?
Oui, c’est ça. Il s’endort.
« Le festival de voyance est annulé pour cause de circonstances imprévues. »
Cette vieille plaisanterie prouve bien que les mystères de l’avenir suscitent en nous des sentiments partagés. D’une part, l’idée de pouvoir entrevoir l’avenir nous fascine. Nous avons l’intuition qu’il existe un futur à découvrir et nous sautons sur n’importe quelle occasion de le connaître. Nous nous délectons des fictions qui mettent en scène des futurs dystopiques sinistrement réalistes et nous jetons un œil timide sur l’horoscope parce que… « on ne sait jamais ». Et d’autre part, nous sommes sceptiques dès que quelqu’un se prétend capable de voir l’avenir. Parce qu’au fond, si l’avenir n’existe pas encore, comment pourrions-nous le connaître ?
Mais Dieu, lui, connaît l’avenir. Comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, Dieu n’a pas besoin qu’une chose existe pour la connaître. C’est en réalité le contraire : il faut que Dieu la connaisse pour qu’elle existe. Quand j’affirme que « Dieu ne peut pas être surpris », je veux dire que Dieu possède une connaissance de l’avenir aussi parfaite que sa connaissance du passé ou du présent.
Cela devrait nous réconforter ! Je m’explique. Lorsque nous faisons des promesses, rien ne garantit qu’elles se réaliseront. Au printemps 2020, mon agenda était rempli. J’avais convenu de me rendre à tel endroit à telle heure pour retrouver telle ou telle personne avec la ferme intention d’honorer mes rendez-vous. Je m’étais même engagé à célébrer le mariage d’un couple d’amis. Mais en raison de circonstances imprévues (une pandémie mondiale), je me suis retrouvé dans l’incapacité de tenir ces engagements qui m’avaient pourtant semblé tout à fait raisonnables au moment où je m’étais engagé. En revanche, le Dieu qui connaît l’avenir ne voit jamais ses projets perturbés par des événements inattendus. Tout ce qu’il promet, il le promet en sachant parfaitement qu’il peut tenir sa promesse. Il ne peut pas être surpris et donc il ne nous décevra pas.
Jusqu’ici, pas de problème. Mais si on y réfléchit, le fait que Dieu connaît l’avenir n’est pas si rassurant. Cela fait même un peu froid dans le dos. Si Dieu connaît parfaitement l’avenir, cela implique-t-il que l’avenir est déjà entièrement déterminé ? Dans ce cas, ni vous ni moi ne sommes libres. Je peux penser que j’ai choisi d’écrire ce paragraphe pendant la petite heure qui précède le lever de mes enfants, et peut-être pensez-vous avoir choisi de le lire… mais en réalité, nous ne faisons que suivre aveuglément un scénario rédigé avant la nuit des temps. Nous ne possédons ni liberté ni volonté. Nous ne sommes rien de plus que les passagers d’un train de fête foraine ; le volant devant nous n’est qu’un jouet. Nous pouvons faire semblant d’être maîtres de la situation, mais le fait est que nous ne contrôlons rien.
Voilà une manière bien pessimiste de voir les choses. Après tout, un des éléments qui confèrent à la vie humaine sa dignité est justement notre pouvoir d’action (c’est-à-dire notre capacité individuelle à agir et à prendre des décisions). Cela semble également être un élément important dans la Bible, car la capacité
d’agir est une condition préalable à la responsabilité morale. Ce n’est pas la hache qui est condamnée pour meurtre, mais la personne qui s’en est servie. Une hache n’a pas de volonté, elle ne peut donc pas être coupable. Mais la Bible enseigne que les êtres humains, eux, sont coupables de leurs mauvaises actions. Puisqu’ils possèdent une volonté, ils sont donc coupables (Romains 1.18-23).
Mais alors, comment concilier cela avec le fait que Dieu connaît parfaitement l’avenir ? Certains théologiens résolvent le problème en affirmant que Dieu ne connaît pas l’avenir. Parmi eux, Greg Boyd avance que Dieu possède une connaissance parfaite de ce qui peut être connu, mais que, puisque l’avenir n’existe pas encore, il ne peut être connu :
Ayant reçu la liberté, nous appelons nos décisions à l’existence au moment où nous les prenons. Tant que nous ne les avons pas prises, elles n’existent pas. Ainsi, il n’existe tout simplement rien à connaître, selon moi, tant que nous n’avons pas fait en sorte qu’il y ait quelque chose à connaître. Dieu ne peut donc pas connaître à l’avance les bonnes et les mauvaises décisions des personnes qu’il crée tant qu’il ne les a pas créées et qu’elles n’ont pas, à leur tour, créé leurs décisions8
Cela semble être une bonne façon de résoudre le problème. Mais ne serait-elle pas un peu trop simple ?
Prenons l’histoire de Joseph (Genèse 37 à 50). Jaloux de lui, ses frères le vendent comme esclave, mais suite à un parcours extraordinaire, celui-ci devient premier ministre de la superpuissance mondiale de l’époque, l’Égypte. Il met alors en place un programme de stockage des récoltes qui permet à l’Égypte de surmonter une famine sans précédent. Ce faisant, il sauve également la vie de ses frères venus chercher de la nourriture en Égypte. À la fin de l’histoire, après la mort de leur père Jacob,