Comblés de toutes bénédictions • DEMARS & MCKINLEY

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PRÉFACE DE BENJAMIN EGGEN

SANTÉ, RICHESSE, SÉCURITÉ ET LA VRAIE PROSPÉRITÉ SELON DIEU

SEAN DEMARS &

Ce livre est pour vous si vous voulez comprendre ce qu’est l’évangile de prospérité. Il se lit facilement, car il est rempli d’histoires provenant de l’expérience des auteurs. Sa logique biblique vous permettra de comprendre en quoi cette mouvance est en réalité à l’opposé de l’Évangile.

Florent Varak

Pasteur, conférencier, professeur d’homilétique à l’Institut Biblique de Genève, auteur de plusieurs livres dont Le Manuel du prédicateur et L’Évangile.net : La grande histoire

Le tandem Sean DeMars et Mike McKinley a osé toucher du doigt ce qui, dans l’évangile de la prospérité, est toujours sous-entendu et jamais revendiqué comme tel : l’effacement de « la limite entre la créature et le créateur ». Les auteurs, en se basant sur des faits historiques vécus, permettent à chaque lectrice et lecteur d’accroître sa vigilance ou de renforcer ses propres capacités de discernement. C’est au regard de la profondeur des analyses de l’ouvrage que je le recommande au public chrétien de la francophonie, espace où cet « autre évangile » a pignon sur rue. Telle est ma prière : que ce livre soit un instrument entre les mains de Dieu pour délivrer ou faire prendre conscience de la dangerosité d’un tel enseignement.

Daniel Nassa

Pasteur-évangéliste à Ouagadougou Burkina Faso

J’apprécie particulièrement Mike et Sean. Ce sont aussi les personnes les plus fidèles et les plus drôles que je connaisse. Donc, quand j’ai appris qu’ils allaient s’associer pour écrire un bref livre sur l’évangile de la prospérité, j’ai été enthousiaste ! Maintenant que j’ai lu le livre, je sais que j’ai eu raison de l’être ! Ce livre est instructif, drôle, plein de sagesse, agréable à lire, franc, mais aussi plein de tact. Je prie pour que Dieu accorde à votre âme de prospérer en lisant ce livre.

Mark Dever

Pasteur principal à l’Église baptiste du Capitol et président de 9marks.org à Washington DC

C’est une évidence  : l’Évangile progresse en Afrique. Mais quel Évangile ? Il y a comme une confusion généralisée aujourd’hui dans les milieux évangéliques, surtout en Afrique francophone. Les prédicateurs de l’évangile de la prospérité font beaucoup de bruit à travers les réseaux sociaux, les chaînes de télévision par satellite et une abondante littérature. Les fidèles sont troublés et les pasteurs sont tentés. C’est un évangile agréable aux oreilles. Les promesses de richesse, de bonne santé et de bonheur pour des populations souvent illettrées et pauvres ne peuvent que recevoir une réponse favorable. Mais est-ce cela l’Évangile ? Ce livre de Sean et Mike est le bienvenu par sa simplicité, son pragmatisme et sa fidélité à la saine doctrine biblique. Je recommande vivement sa lecture dans les écoles de formation pastorale, dans les différents groupes de l’Église locale et surtout à tous ces chrétiens qui veulent vivre pieusement leur foi, mais qui sont troublés par ce faux enseignement.

Keo Kognon Pasteur et responsable du Réseau Actes 29 pour l’Afrique de l’Ouest francophone

Chaque chrétien africain devrait lire Comblés de toutes bénédictions. En effet, il rappelle avec force que les véritables bénédictions de Dieu ne se trouvent pas dans la richesse matérielle ou la santé, mais dans les richesses spirituelles qui découlent de la connaissance du Christ. Sur un continent où l’évangile de la prospérité a causé beaucoup de confusion et de tort, ce livre offre clarté, espoir et un retour au véritable Évangile. Je recommande de tout cœur cet ouvrage aux pasteurs, aux responsables d’Église et aux croyants de toute l’Afrique. Il s’agit d’une ressource opportune et nécessaire qui aidera l’Église à relever les défis posés par l’évangile de la prospérité et guidera les croyants vers une foi plus profonde et plus authentique en Jésus-Christ.

Dieudonné Tamfu Pasteur de l’Église baptiste Bethlehem à Yaoundé au Cameroun, professeur et directeur du Bethlehem College & Seminary et directeur de Yaoundé

Je n’aime pas du tout utiliser l’expression « évangile de la prospérité », car cet enseignement n’est pas l’évangile (il n’y a aucune bonne nouvelle dans ce qui est proclamé). De plus, il n’emmène pas à la vraie prospérité. Le continent africain a été empoisonné par cette plaie. Par contraste, le livre dit : « Mais l’Évangile de Jésus, celui que la Bible nous enseigne, est vraiment une bonne nouvelle. Il existe un vrai trésor qui nous est accessible. » Je recommande vivement ce livre court, mais rempli de sagesse : il nous aide à identifier les erreurs du mouvement de prospérité et à aider ceux qui sont pris dans ses griffes. La contribution principale de ce livre est de nous aider à sonder nos cœurs : le Seigneur Jésus est-il celui qui a le plus de valeur à nos yeux ? Je prie que chaque lecteur soit libéré des griffes des faux enseignants et fasse de l’Évangile son trésor et de la crainte, la confiance et l’obéissance à Dieu le désir de son cœur.

Faly Ravoahangy Pasteur de l’Église baptiste biblique Ankadivato à Antananarivo et fondateur de 3M, un ministère qui s’efforce d’identifier, de former et d’équiper la prochaine génération de responsables d’Églises à Madagascar

Dieu guérit-il toujours ? Dieu veut-il que nous soyons riches ? Voilà des questions auxquelles les évangélistes de la prospérité répondent sans nuance : oui, absolument ! Mais est-ce vraiment l’enseignement de la Bible ? Quelle joie pour moi de découvrir ce livre, simple, accessible et agrémenté de témoignages, destiné aux chrétiens francophones. En tant que pasteur et enseignant charismatique, je peux témoigner que le faux évangile de la prospérité est l’une des pires séductions de ce siècle, en particulier dans nos milieux. Il faut du courage et du discernement pour dénoncer cette hérésie. Précisément, les auteurs possèdent ces deux qualités ! Je prie que ce petit ouvrage, bien fondé bibliquement, soit diffusé le plus largement possible afin que l’Évangile de JésusChrist, « notre seul trésor » comme l’écrivait Jean Calvin, soit le seul confessé par ceux qui se disent chrétiens.

Rémi Gomez Apologète, pasteur de Église Confluence à Lyon, directeur et professeur à l’Institut de théologie réformée charismatique et co-fondateur de la plateforme d’apologétique apologia.fr

Sean et Michael ont écrit un livre honnête et éclairant. Ce livre utilise les Écritures (dans leur contexte) pour remettre en question les principes fondamentaux de l’évangile de la prospérité. Cette illusion déforme la Bonne Nouvelle en plaçant l’homme au centre. Si l’un de vos proches est pris au piège de cette tromperie, ce livre pourrait bien être un outil pour corriger cette aberration. Le cœur de ce livre prend sa source dans l’expérience personnelle des auteurs qui ont été les témoins directs des dégâts que cette doctrine empoisonnée peut infliger à notre foi en Christ. Écrit dans un style oral, ce livre annonce la vérité de manière directe, mais toujours avec amour. Je prie pour que le Seigneur utilise ce travail pour révéler, avec grâce, la gloire du véritable Christ à ceux qui sont bercés d’illusions.

Brandon Kimber

Directeur de American Gospel : Christ Alone

Inventé aux États-Unis, l’évangile de la prospérité est maintenant devenu le visage de la chrétienté dans la majeure partie du monde. C’est vraiment notre pire exportation. Je suis si reconnaissant pour ce livre écrit par Sean DeMars et Michael McKinley. Il se lit facilement et présente la Bible de manière approfondie. Je vous le recommande et vous encourage à le partager avec ceux de vos amis et de vos familles qui sont pris au piège de cette supercherie de la prospérité.

Justin Peters

Fondateur de Justin Peters Ministries

Les éditeurs remercient chaleureusement tous les relecteurs et relectrices pour leur précieuse collaboration à cet ouvrage : Martine, Nelly, Viviane et Vincent.

Édition originale publiée en langue anglaise sous le titre :

Health, wealth and the (real) Gospel • Sean DeMars et Mike McKinley © 2022 Sean DeMars et Mike McKinley

Christian Focus Publications Ltd, Geanies House, Fearn, Ross-shire IV20 1 TW • Écosse • Royaume-Uni

Traduit et publié avec permission. Tous droits réservés.

Édition publiée en langue française :

Comblés de toutes bénédictions • Sean DeMars et Mike McKinley © 2024 • BLF Éditions • www.blfeditions.com

Rue de Maubeuge, 59164 Marpent • France

Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés.

Traduction : Claire Romerowski

Couverture : Dan Vencatachellum

Mise en page : Laurianne Hirschler

Sauf mention contraire, les citations bibliques sont tirées de la Bible du Semeur Texte copyright © 1992, 1999, 2015 Biblica Inc. Avec permission. Reproduit avec aimable autorisation. Tous droits réservés. Les caractères italiques et gras sont ajoutés par les auteurs du présent ouvrage. Versions alternatives employées dans cet ouvrage : Segond21 (S21) et Nouvelle Français

Courant (NFC). Reproduit avec aimable autorisation. Tous droits réservés.

ISBN 978-2-38657-006-3 broché

ISBN 978-2-38657-007-0 numérique

Imprimé en France par Evoluprint

Dépôt légal 4 e trimestre 2024

TABLE DES MATIÈRES

1. Le message de l’évangile de la prospérité

2. Une théologie sens dessus dessous

3. Et les promesses de santé et de bonheur formulées

4. Et les promesses d’abondance formulées

5. Ceux qui adhèrent à l’évangile de la prospérité sont-ils sauvés ?

6. Devrions-nous prier ensemble ?

7. Tous concernés

PRÉFACE

« Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus-Christ, car il nous a comblés de toute bénédiction » (Éphésiens 1.3). C’est avec ce verset que s’ouvre la lettre aux Éphésiens. Paul affirme qu’en tant que chrétiens, nous sommes bénis. Bien plus, nous sommes « comblés de toute bénédiction » ! À quoi ressemble cette bénédiction ? Où la trouver ? Certains semblent en avoir percé le secret, en affirmant que cette abondance doit se voir dans la richesse de notre compte en banque et la santé de notre corps. Si nous ne vivons pas cette abondance, c’est que notre foi n’est pas assez forte.

Le titre de ce livre est un peu provocateur ! Il se fait le miroir de ces prédicateurs qui déforment les propos de la Bible pour présenter leur propre message. Ce message, qui met en avant leur réussite sociale et financière tout en lui donnant un vernis religieux, s’appelle communément « l’évangile de la prospérité ».

L’évangile de la prospérité se repérerait donc facilement. En tout cas, c’est ce que l’on croit. Promesses de s’enrichir en étant fidèle à Dieu, prédicateurs bling-bling, discours centrés sur l’argent ou le bonheur : il est facile de détecter ces choses, n’est-ce pas ? Nous ne sommes pas assez naïfs pour nous laisser tromper !

Pourtant, l’évangile de la prospérité est bien plus subtil que cela. Il ne se trouve pas simplement dans des mega-church où un prédicateur promet richesse, santé, sécurité, mais aussi dans nos

Églises, dans les vidéos YouTube que nous regardons, et dans les livres que nous lisons.

Vous n’entendez peut-être pas de véritables promesses de prospérité financière, mais c’est le même mécanisme qui est à l’œuvre. C’est ce que j’appelle « l’évangile du bien-être » ou « l’évangile du confort » : l’idée selon laquelle le but de Dieu serait mon confort personnel. Dans cette version de l’évangile, Dieu est centré sur les besoins de l’homme. Il devient un distributeur automatique : si nous lui sommes fidèles, alors nous connaîtrons le succès, la guérison, et peu d’épreuves.

Ce type d’enseignement a envahi le monde évangélique. Je suis surpris de voir tant de chrétiens évangéliques penser ainsi, même involontairement. Bien plus, je suis choqué de voir cette manière de penser grandir… dans mon propre cœur.

Vous en doutez ? Voici quelques indices qui prouvent que nous croyons en une certaine version de l’évangile de la prospérité :

Ì Lorsque nous pensons qu’un frère ou une sœur souffrant irait mieux s’il ou elle priait davantage.

Ì Lorsque nous pensons que Dieu n’est pas juste ou bon quand il nous fait passer par des difficultés.

Ì Lorsqu’en pensant aux bénédictions de Dieu dans notre vie, nous pensons prioritairement à des choses matérielles plutôt qu’à des réalités spirituelles.

Ì Lorsque nous avons plus de joie dans les choses de ce monde que dans la bonne nouvelle du pardon des péchés.

Ì Lorsque nous pensons que si quelqu’un n’est pas marié ou qu’un couple n’a pas d’enfants, c’est probablement qu’il y a un problème spirituel dans leur vie.

Ì Lorsque nous trouvons qu’il est presque normal que Jésus soit mort sur la croix pour payer pour nos péchés.

Ì Lorsque nous ne sommes pas prêts à renoncer à un peu de notre confort pour suivre Jésus.

Doutez-vous encore que cette manière de penser se rapproche de l’évangile de la prospérité ? Alors, je vous encourage à lire ce livre. Les auteurs dénoncent l’évangile de la prospérité à sa racine. Ils montrent que ce faux enseignement est la source de telles pensées.

J’ai apprécié l’argumentation des auteurs de ce livre : elle est claire, basée sur la Bible, et accessible à tous. C’est le livre que je compte désormais offrir à quiconque qui se pose des questions sur l’évangile de la prospérité. C’est aussi le livre à lire si vous souhaitez aider un ami ou un membre de votre famille qui est attaché à l’évangile de la prospérité, quelle qu’en soit la forme.

Voici ce que j’ai le plus apprécié dans ce livre ! Le but des auteurs n’est pas simplement de dénoncer une fausse doctrine, mais aussi de réorienter nos cœurs. Que ce soit l’évangile de la prospérité, l’évangile du bien-être, ou tout autre faux enseignement, l’effet produit est le même : ils détournent nos regards de la gloire de Dieu et nos cœurs de l’attachement à l’Évangile biblique. Alors que les auteurs démasquent l’évangile de la prospérité, ils prennent aussi soin d’amener nos cœurs à comprendre combien Jésus est plus précieux que tout.

C’est en Jésus que nous trouvons ce que l’évangile de la prospérité ne pourra jamais offrir : le pardon des péchés et une relation rétablie avec le Dieu de l’univers, qui devient, alors, le bien suprême de nos cœurs. Cela a bien plus de valeur que toutes les promesses de prospérité, de guérison, et de succès ! À la lumière du véritable Évangile, les promesses de l’évangile de la prospérité pâlissent. Je prie que la lecture de ce livre vous aide

à vous détourner de tout enseignement qui n’est pas conforme à l’Évangile biblique, et à vous attacher à Dieu plus que tout.

La lettre aux Éphésiens poursuit en disant qu’en Christ, les croyants ont « entendu la Parole de la vérité, l’Évangile qui […] sauve » (Éphésiens 3.31, S21). Sachons donc nous attacher ardemment à cette Parole de vérité qui seule nous offre le salut.

Benjamin Eggen. Benjamin Eggen est pasteur adjoint de l’Église protestante évangélique de Bruxelles-Woluwe, enseignant à l’Institut Biblique de Bruxelles, et auteur de plusieurs livres, dont Qu’est-ce que tu crois ?.

INTRODUCTION : JÉSUS

CONDAMNERAIT-IL CE LIVRE ?

Moi, c’est Sean. Je suis pasteur en Alabama, dans le sud-est des États-Unis d’Amérique. Je suis un rescapé de l’évangile de la prospérité. Et voici mon histoire.

Je n’ai pas grandi dans l’Église. Pendant que la plupart de mes petits camarades chrétiens s’efforçaient de mémoriser des versets bibliques pour gagner des bons points, moi, je regardais pour la 900e fois Delirious, le one-man show d’Eddie Murphy. Quand le Seigneur m’a sauvé de mon péché à l’âge de dix-huit ans, j’avais beaucoup de retard à rattraper. Moïse, Abraham, Samson, Élihou… autant vous dire qu’ils étaient tous inconnus au bataillon. Peut-être que j’aurais pu rapidement combler mes lacunes si j’avais reçu un accueil chaleureux dans une Église centrée sur la Bible et prêchant l’Évangile. Mais je n’ai trouvé ma place dans aucune de ces assemblées. D’ailleurs, je n’y suis jamais resté assez longtemps pour découvrir l’essentiel de ce que je devais savoir.

Il faut que vous sachiez qu’avant d’être sauvé, je me baladais constamment avec mon pistolet. J’en avais toujours un à la ceinture, sous le siège conducteur de ma voiture ou sous mon oreiller pendant la nuit. J’étais trafiquant de drogue et je devais toujours avoir une arme à portée de main.

Un trafiquant doit correspondre à l’idée qu’on se fait d’un trafiquant, c’est la base ! Il faut qu’il ait la tête de l’emploi.

Et c’était bien mon cas. Je portais un marcel et un short en mode « sagging ». J’arborais une cicatrice à l’arcade sourcilière. J’avais un bandana dans la poche arrière et j’étais aussi agressif et violent que possible.

Quand Dieu m’a délivré de ce mode de vie, mon cœur a changé, mais pas ma garde-robe. J’étais toujours très agressif, mais à présent, j’étais agressif pour Jésus. J’étais Nicky Cruz (le gars de La Croix et le Poignard ), mais en moins classe. Des responsables jeunesse des quatre coins du nord de l’Alabama m’invitaient à venir partager mon témoignage avec leurs jeunes. Plus mes histoires étaient sombres, mieux c’était. Les Églises que je visitais étaient bien contentes que je vienne dissuader leurs ados de s’écarter du « droit chemin ». Pourtant, je sentais qu’elles n’avaient pas trop envie de me voir m’attarder, une fois l’événement terminé. Et qui pourrait leur jeter la pierre ? Après tout, je portais toujours un bijou dentaire évoquant deux crocs de vampire en or. Ce genre de trucs, ça fait flipper.

Cela voulait dire que je ne bénéficiais d’aucun suivi de type discipulat. Et c’était dramatique, parce que j’avais désespérément besoin d’aide. Vous vous souvenez de ce que Paul dit des gens qui ont du zèle pour Dieu, mais qui manquent de discernement (Romains 10.1-3) ? Eh bien, j’étais exactement comme ça. J’annonçais l’Évangile à quiconque voulait bien m’écouter, et parfois même aux gens qui ne m’écoutaient pas. L’une de mes principales stratégies d’évangélisation, c’était d’escalader le toit d’un fast-food et d’annoncer la Bonne Nouvelle aux personnes qui s’arrêtaient au drive. En réalité, je n’avais aucune idée de ce que j’étais en train de faire. Tout ce que je savais, c’était que Jésus m’avait sauvé et que je voulais que d’autres le soient aussi. Je voulais être ambassadeur pour Christ et annoncer à tous en son nom : « Soyez réconciliés avec Dieu » (2 Corinthiens 5.20).

Après avoir tâtonné ainsi pendant quelques mois sans guide pour me conduire sur le chemin, j’ai croisé un homme de mon quartier. En me voyant me balader, Bible en main, il m’a invité chez lui, m’a offert un repas et a fini par me demander si je comprenais vraiment ce que disait ce livre. J’ai affirmé que j’en comprenais la majeure partie… à peu près. La vérité, c’est que la Bible était pour moi comme une notice de réfrigérateur rédigée en allemand.

Je ne parle pas l’allemand, et je ne connais rien aux réfrigérateurs.

Pendant les douze ou quinze mois qui ont suivi, cet homme m’a aidé à comprendre et à mettre en pratique la parole de Dieu. Du moins, c’est ce que j’ai cru. J’étais tout jeune chrétien et mes capacités de jugement en matière de doctrine étaient égales à ce que les physiciens comme les théologiens appellent le zéro absolu. Je vais vous donner un exemple : un jour, pendant une étude biblique, j’ai traité quelqu’un d’idiot parce qu’il a dit que Jésus était juif. « Comment ce type peut-il ne pas savoir que Jésus était chrétien ? » ai-je marmonné dans ma barbe. Si vous ne le saviez pas, ce n’est pas grave, mais je vous assure que Jésus était bien juif.

Alors, quand on m’a dit que la maladie était la conséquence de notre péché ou d’un manque de foi, comment aurais-je pu savoir que c’était faux ? On m’a dit qu’aller consulter un médecin était un péché, puisque la cause de la maladie n’est pas physique, mais spirituelle. C’est ainsi que j’ai failli mourir d’empoisonnement au mercure. Et quand quelqu’un m’a prouvé, Bible à l’appui, que nous étions censés réprimer la pauvreté par de puissantes paroles, j’ai commencé à parler avec force à mon compte en banque (dont le solde était parfois négatif).

Ce n’est que plus tard que j’ai compris que ces enseignements étaient à la fois ridicules, dangereux et spirituellement toxiques.

Ce que cet homme m’avait enseigné était une version fausse et corrompue de l’Évangile. À l’époque, je n’ai pas su discerner que cet « évangile de la prospérité » n’avait rien d’une bonne nouvelle. J’ignorais que c’était en fait un mensonge qui ne pouvait sauver qui que ce soit. Aujourd’hui, je me rends compte que ce que nous croyons au sujet de la foi, de la croix, de la guérison physique et de la victoire spirituelle est d’une importance capitale. Une mauvaise compréhension et une déformation du message de l’Évangile engendrent des conséquences graves et douloureuses… dans cette vie et dans la vie éternelle.

Moi, c’est Mike. Je suis pasteur dans l’État de Virginie et je n’ai jamais dealé ni parlé avec force à mon compte en banque (même si son solde est parfois négatif). Quand moi et ma famille, nous avons commencé à aller à l’Église, nous avons choisi une assemblée solidement ancrée dans la Parole et qui prêchait clairement l’enseignement biblique. J’ai quand même eu plus d’une fois affaire à l’évangile de la prospérité. En tant que pasteur, j’ai rencontré des personnes en souffrance qui avaient l’impression d’être, par un manque de foi ou de sainteté, responsables de leur situation. J’en ai vu d’autres s’éloigner de la foi, séduites par la promesse d’une longue vie et de bénédictions matérielles.

Le danger de l’évangile de la prospérité s’est imposé à moi en 2006, quand le diagnostic de sclérose en plaques a été posé à Karen, ma chère épouse. Comme vous vous en doutez, nous étions troublés, tristes et nous avions peur. Pourquoi cela nous arrivait-il ? Quelles conséquences cette maladie aurait-elle sur notre avenir ? Que ferions-nous si Karen tombait vraiment malade ? Ce genre d’épreuves nous pousse à rechercher soutien et force auprès de la famille de l’Église locale. Et beaucoup de chrétiens ont dit à Karen des choses très encourageantes, c’est vrai. Ces frères et sœurs nous ont

fortifiés en nous rappelant l’amour et la puissance de Dieu, ainsi que ses bons projets pour la vie de Karen.

D’autres chrétiens nous ont avertis des risques de boire dans des bouteilles en plastique et nous ont vanté les bienfaits des plantes. Nous avons haussé les épaules et essayé de recevoir ces conseils avec le sourire. Mais certaines de nos connaissances ont tenu à Karen des propos malheureux au sujet de la foi et de la guérison. Elles lui ont dit que Dieu ne voulait pas qu’elle soit malade et qu’elle pourrait chasser sa maladie si elle avait assez de foi. Ces personnes prêchaient l’évangile de la prospérité et ça me mettait hors de moi. Karen figurait parmi les disciples de Jésus les plus fidèles et les plus dévoués que je connaissais. Elle souffrait suffisamment comme ça et n’avait pas besoin de devoir gérer une fausse culpabilité et des accusations mensongères.

C’est en voyant beaucoup de gens blessés et trompés par de faux enseignements que j’ai voulu écrire ce livre. J’ai voyagé en Inde et en Afrique, là où ceux qui prêchent l’évangile de la prospérité attirent des milliers de personnes en leur promettant richesse, santé et bénédiction (et qu’importe si leurs promesses ne s’accomplissent jamais !). J’ai vu la douleur et la frustration sur le visage des pasteurs fidèles, lorsque ces faux enseignants trompent et éloignent leurs troupeaux. Par ce livre, je voudrais vous aider à comprendre ce qu’est l’évangile de la prospérité, en quoi il est si dangereux et pourquoi la Bonne Nouvelle, la vraie, est tellement meilleure !

Nous avons écrit ce livre à l’intention de deux lectorats. Tout d’abord, il s’adresse à vous si vous faites partie d’une assemblée fidèle à l’Évangile, mais que vous avez des amis ou de la famille qui adhèrent à l’évangile de la prospérité, ou si vous pensez que c’est le cas. Ils vous ont raconté les prédications de leur pasteur et vous sentez que quelque chose cloche, mais vous n’arrivez pas à mettre le doigt dessus. En plus, ils ont un tas de versets

bibliques pour soutenir leur argumentation. Vous les aimez et vous vous inquiétez pour eux. Notre but, c’est de vous aider à mettre le doigt sur ce qui ne va pas dans leur théologie.

Ce livre est aussi pour vous si vous faites partie ou pensez faire partie d’une assemblée qui prêche l’évangile de la prospérité. Nous voulons vous aider à vous poser les bonnes questions au sujet de l’enseignement que vous recevez. Non, notre but n’est pas de former une armée de détracteurs. Notre objectif, c’est de nous assurer que vous comprenez bien ce qu’est l’Évangile et ce qu’il n’est pas. L’Évangile est la plus importante nouvelle qu’on ne vous annoncera jamais, à vous, mais aussi à ceux que vous aimez. Alors un conseil : assurez-vous de l’avoir bien compris !

L’apôtre Paul lui-même avertit les membres des Églises de Galatie : si quelqu’un leur annonce un autre évangile, c’est à eux, aux Galates, de mettre ces faux enseignants dehors. Et qu’importe si cette personne leur présente sa carte d’apôtre ou descend du ciel avec des ailes d’ange (Galates 1.6-9). C’est pourquoi nous avons tous les deux dit aux membres de notre assemblée de ne pas hésiter à nous mettre dehors si nous leur prêchons un jour un faux évangile.

Et en même temps, vous vous demandez peut-être pourquoi nous remettons en cause des pasteurs qui, à l’évidence, conduisent des millions de personnes à Jésus. Ne devrions-nous pas nous réjouir de ce que la Bible soit enseignée et de ce que Jésus soit adoré, même si nous avons des réserves quant au contenu de ces enseignements ? Ces pasteurs se trompent sans doute sur quelques points, c’est vrai. Mais n’est-ce pas plus grave d’être si critique et si négatif ? Jésus ne nous a-t-il pas ordonné de ne pas juger (Matthieu 7.1 — S21) ? Et n’a-t-il pas dit que celui qui n’est pas contre lui est pour lui (Marc 9.40) ? Bref, que penserait Jésus de ce livre ? Le condamnerait-il ?

Nous pensons que non. C’est vrai, Jésus nous a ordonné de ne pas juger les autres (c’est bien ce qu’enseigne Matthieu 7.1). Mais tout le monde exerce son jugement pour choisir quel médecin consulter ou dans quel restaurant manger. Si vous constatiez qu’un chirurgien se voit régulièrement retirer son droit d’exercice, vous jugeriez (à raison) qu’il n’est pas sage de lui confier votre santé. Si un restaurant a fermé temporairement pour non-respect des règles sanitaires, vous jugerez qu’il vaut mieux désormais aller dîner ailleurs.

Ceux qui prêchent l’évangile de la prospérité sont bien plus dangereux qu’un chirurgien incompétent ou qu’un restaurant infesté de cafards. Ces derniers peuvent vous rendre malade, voire écourter votre vie. Mais si vous avez une vision faussée de Jésus, si vous ne comprenez pas ce que signifie être sauvé et vivre en disciple de Christ, vous courez un grave danger dont les conséquences sont éternelles.

En règle générale, laisser aux autres le bénéfice du doute, c’est faire preuve de sagesse. L’amour que le Saint-Esprit met dans notre cœur nous pousse à toujours présumer des bonnes intentions des autres. Il est fort possible que la plupart des prédicateurs de l’évangile de la prospérité croient sincèrement à leur propre enseignement et pensent aider leurs assemblées. Lire un livre qui remet en question et condamne ces prédicateurs vous met peut-être mal à l’aise, et nous le comprenons.

Mais Jésus nous a mis en garde à plusieurs reprises contre l’évangile de la prospérité. Pour lui, c’était un enseignement inacceptable. S’il l’a dénoncé avec tant de virulence, c’est parce qu’il nous aime et qu’il veut nous vacciner contre cette maladie spirituelle mortelle.

C’est vers la fin du Sermon sur la montagne que Jésus l’explique le plus clairement. Peu après nous avoir exhortés à ne pas juger

les autres, Jésus évoque deux sujets en Matthieu 7. Jetons-y un œil ! D’abord, Jésus nous dit :

Entrez par la porte étroite ; en effet, large est la porte et spacieuse la route qui mènent à la perdition. Nombreux sont ceux qui s’y engagent. Mais étroite est la porte et resserré le sentier qui mènent à la vie ! Qu’ils sont peu nombreux ceux qui les trouvent !

Matthieu 7.13-14

Jésus est très clair : le chemin qui mène à la vie est un chemin difficile. Si nous replaçons cet extrait dans son contexte, nous comprenons que ce chemin difficile, c’est celui que Jésus nous a décrit plus haut dans son Sermon sur la montagne. C’est le chemin où nous pardonnons nos ennemis (Matthieu 5.44), où nous pleurons sur notre péché (Matthieu 5.4), où nous avons soif de justice (Matthieu 5.6). C’est un chemin de fidélité dans le mariage et de pureté sexuelle (Matthieu 5.27-30), un chemin de douceur et d’humilité (Matthieu 5.5), un chemin de vérité (Matthieu 5.37). Sur ce chemin, nous tendons l’autre joue (Matthieu 5.39) et nous marchons deux kilomètres au lieu d’un (Matthieu 5.41). Rien de tout cela n’est ni facile ni agréable. C’est pourquoi on ne se bouscule pas sur cette voie.

La route qui mène à la perdition spirituelle, au contraire, est une route facile. C’est la voie des indifférents, des hypocrites et de ceux qui se sont laissés tromper. Le chemin de ceux qui veulent vivre à leur manière, en évitant les difficultés, les sacrifices et le renoncement. Si vous voulez faire ce qui vous semble bon, si tout ce que vous désirez, c’est le confort et le plaisir immédiat, alors ce chemin facile est pour vous.

L’essentiel de ce que Jésus enseigne dans son Sermon sur la montagne se résume dans l’importance de la récompense future. Si vous voulez vivre le meilleur tout de suite, empruntez la route large et facile. Au bout du compte, ce ne sera pas si incroyable,

et vous vous sentirez bien seulement pendant un petit moment. Les béatitudes (Matthieu 5.3-11), au contraire, enseignent que si vous voulez être consolé un jour, si vous voulez voir Dieu, si vous voulez hériter de la terre et être finalement comblé, si vous voulez une grande récompense dans les cieux, alors votre vie, aujourd’hui, sera difficile.

Vous commencez peut-être à comprendre le rapport avec l’évangile de la prospérité. Mais ce n’est pas tout. Lisez la suite des paroles de Jésus : « Gardez-vous des faux prophètes ! Lorsqu’ils vous abordent, ils se donnent l’apparence d’agneaux mais, en réalité, ce sont des loups féroces » (Matthieu 7.15).

Il est difficile de surinterpréter les paroles de Jésus. Tout de suite après nous avoir avertis de l’issue fatale de la voie facile, Jésus nous met en garde contre les faux prophètes. Le faux prophète est celui qui conduit les gens sur le mauvais chemin. Il appelle ses victimes à emprunter la voie facile qui mène à la perdition. Pour ce faire, il leur promet qu’elles peuvent avoir le beurre et l’argent du beurre dans cette vie et dans la suivante.

Imaginez deux portes ; chacune s’ouvre sur un chemin différent. Maintenant, imaginez que devant chaque porte se trouve un guide. Tous deux possèdent une carte détaillant leur chemin respectif. Tous deux affirment que c’est leur chemin qui mène à la vie. Et tous deux déclarent que, si vous vous laissez embobiner par l’autre, ça vous coûtera très cher. Jésus explique qu’il est crucial de bien choisir votre guide. Si vous vous laissez entraîner sur le mauvais chemin, vous subirez de graves conséquences.

Voilà pourquoi Jésus nous recommande de prendre garde. Il veut nous rendre attentifs, exigeants et prudents concernant ceux que nous écoutons. En effet, les faux enseignants ne viennent en général pas à nous toutes griffes dehors, montrant les crocs, un filet de bave au menton. Non, ils ont l’air d’agneaux, de brebis comme les autres. C’est ainsi qu’ils parviennent à

infiltrer le troupeau et à procurer aux brebis un faux sentiment de sécurité pour finalement s’en prendre à elles.

Les faux enseignants ne nous abordent pas en disant : « Bon, pour que les choses soient bien claires, sachez que je suis un faux prophète. En m’écoutant, vous mettez votre âme en danger. Bien, et maintenant, je vous propose de vous adonner au mal. »

S’ils agissaient ainsi, personne ne s’y laisserait prendre ! Mais les faux prophètes nous attirent par un mélange de vérité, de spéculations et de nouveauté. Ce qu’ils affirment a du sens, mais seulement si l’on choisit de fermer les yeux sur d’autres vérités bibliques. Et peut-être enseignent-ils quelque chose que vous auriez bien aimé entendre Jésus enseigner. Seulement, vous êtes à peu près sûr qu’il n’a jamais dit cela. Nous devons rester très vigilants pour repérer les enseignants qui semblent appartenir au troupeau, mais qui sont en réalité les guides du chemin qui mène à l’enfer.

Ceux qui prêchent l’évangile de la prospérité n’enseignent pas ce que Jésus a enseigné. C’est pour cela que nous ne pouvons en aucun cas nous permettre de les ménager ou de tolérer leur message. Au fond, il vous faut juger de tout ce que vous entendez et lisez (y compris de ce livre !) à la lumière des vérités des Écritures. Notre objectif, c’est de prouver que l’évangile de la prospérité est un mensonge dangereux qui doit être démasqué et combattu. Alors, commençons…

CHAPITRE 1

LE MESSAGE DE L’ÉVANGILE

DE LA PROSPÉRITÉ

Pour commencer, il faut définir les termes de notre sujet et expliquer ce que nous entendons par « évangile de la prospérité ». Pourtant, définir ce terme est plus compliqué qu’il n’y paraît. En effet, il n’existe ni credo officiel ni autorité centrale universellement reconnue par les Églises, les prédicateurs et les médias de l’évangile de la prospérité.

Peut-être pourrions-nous comparer l’évangile de la prospérité à l’eau. L’eau est toujours composée de deux atomes d’hydrogène et d’un atome d’oxygène. Cependant, son aspect change selon les conditions de son environnement. Que ce soit sous forme solide, gazeuse ou liquide, de l’eau reste de l’eau.

De même, l’évangile de la prospérité peut se manifester de nombreuses manières, mais toutes ces manifestations partagent des points communs. En voici quatre des plus caractéristiques.

L’ÉVANGILE DE LA PROSPÉRITÉ DIT : « DIEU VEUT TE BÉNIR FINANCIÈREMENT ! »

Problème : focaliser davantage sur le don plutôt que sur le donateur

Souvenez-vous de la dernière fois où vous avez offert un cadeau à quelqu’un qui compte vraiment pour vous. C’était peut-être un cadeau de Noël pour un de vos amis, ou un cadeau pour votre conjoint à l’occasion de votre anniversaire de mariage ou pour votre enfant. Dans tous les cas, vous l’avez sans doute offert pour exprimer votre amour et votre attachement.

Il y a quelques années, ma femme a confectionné pour moi une couverture avec mes vieux T-shirts à l’effigie de mes groupes de musiques préférés1. Chaque fois que mes yeux se posent sur cette couverture, que je garde dans mon bureau, je pense au temps, aux efforts et à l’application qu’il a fallu à ma femme pour me confectionner ce cadeau. C’est un cadeau qui a beaucoup de valeur pour moi. Pas seulement parce que cette couverture a la taille et le poids idéals, mais parce que Karen l’a fabriquée pour me témoigner son amour.

Qu’en serait-il si j’aimais bien ma couverture, mais que je ne faisais jamais le lien avec Karen ? Et si j’appréciais ce cadeau chaque fois que je lis un livre et qu’il fait un peu froid dans mon bureau, sans pour autant penser à ma femme, à son amour et à sa gentillesse ? À votre avis, remplirait-il toutes ses fonctions ? D’un côté, la couverture me tient chaud, c’est vrai. Mais ce n’est pas sa seule fonction. Elle a aussi pour but de me rappeler combien ma femme m’aime.

Il en va de même avec les dons de Dieu. Dans son discours aux Athéniens, l’apôtre Paul dit que Dieu « donne à tous les

1 Mike qui parle.

êtres la vie, le souffle et toutes choses » pour une raison : « Par tout cela, Dieu invitait les hommes à le chercher, et à le trouver, peut-être, comme à tâtons » (Actes 17.25 b, 27a). Pour résumer, les dons de Dieu ont pour but de diriger nos pensées et notre cœur à lui, comme un cours d’eau conduit à sa source.

L’évangile de la prospérité parle beaucoup de recevoir, de garder et même de maximiser les dons de Dieu (la santé, la richesse, les privilèges, la puissance). Pourtant, il est peu question de Dieu lui-même. Soyons clairs : aucun prédicateur de l’évangile de la prospérité n’affirmerait de but en blanc qu’il faut aimer les dons de Dieu plus que Dieu lui-même. Et si vous leur posiez la question, ces pasteurs n’avoueraient jamais que c’est ce qu’ils enseignent. Il s’agit plutôt de se demander sur quoi ils mettent l’accent et quelle est leur préoccupation première. Si vous entrez dans une Église qui vous parle des dons de Dieu, mais qui consacre assez peu de temps à enseigner qui est Dieu et notre besoin de croire et de nous repentir, alors vous pouvez être à peu près sûr d’avoir affaire à l’évangile de la prospérité.

Nous allons vous donner un exemple. Voici ce qu’écrit Benny Hinn 2 :

L’histoire biblique, y compris l’histoire d’Israël, contient beaucoup d’exemples de transferts de richesses. Vous souvenez-vous de l’Égypte, cette superpuissance de l’Ancien Testament ? La nation égyptienne avait plus d’or et d’argent que n’importe quelle autre nation sur la planète. Et pourtant, Moïse était en exil dans le désert pendant que les enfants d’Israël ployaient sous le joug de l’esclavage. Les choses continuaient de se passer comme elles s’étaient toujours passées depuis des années, mais un jour, elles ont commencé à changer. Dieu a parlé à Moïse du milieu d’un buisson ardent

2 Benny Hinn, « Greatest wealth transfer » [Le plus grand transfert de richesses], Benny Hinn Ministries , URL : <https://www.bennyhinn.org/enewsletter/ greatest-wealth-transfer/> [consulté le 05 juillet 2024] (trad. libre).

et il lui a dit de retourner en Égypte. Non seulement il lui a promis de délivrer son peuple de l’esclavage, mais il a aussi dit : « Quand vous partirez, vous ne partirez pas les mains vides. »

Ce que Hinn dit n’est pas faux ; ce n’est pas là que se situe le problème. Le problème, c’est qu’il met l’accent au mauvais endroit. C’est vrai, l’Éternel a béni le peuple d’Israël financièrement quand il a quitté l’Égypte. Mais ce n’est pas du tout le message que cette histoire transmet. Au bout du compte, le peuple de Dieu a gagné bien plus que de l’or et quelques bijoux. Le titre de ce récit n’est pas « Dieu transfère les richesses de l’Égypte à Israël », mais plutôt « Dieu accomplit sa promesse et délivre avec puissance son peuple de ses ennemis ». Dans la Bible, la façon dont Dieu délivre Israël de son esclavage est encore et toujours la représentation la plus évocatrice du salut de Dieu dans l’Ancien Testament. L’Exode était l’ombre de la délivrance que Christ apporterait bientôt (Exode 20.2 ; Ésaïe 11.16 ; Luc 9.30-31). Pendant l’Exode, Dieu manifeste toute sa puissance et son amour, et cela doit nécessairement pousser son peuple à l’adorer. Réduire ces événements à un simple transfert de richesses, c’est montrer qu’on a mal compris le sens de ces événements. C’est accorder plus de valeur au don qu’au donateur.

Si vous voulez un exemple d’une vision juste de Dieu et de ses dons, lisez le psaume 73 d’Asaph. Pas besoin de chercher plus loin. Après avoir avoué qu’il était tenté de convoiter la prospérité des autres (en particulier celle des méchants), Asaph conclut :

Qui ai-je au ciel, si ce n’est toi ? Et que désirer d’autre sur cette terre car je suis avec toi ? Mon corps peut s’épuiser et mon cœur défaillir, Dieu reste mon rocher, et mon bien précieux pour toujours.

PsauMes 73.25-26

Asaph est désemparé face à la souffrance du juste et à la prospérité du méchant. Finalement, il se console en se rappelant que

son plus grand trésor, ce n’est pas ce que Dieu lui donne, mais Dieu lui-même. Cette idée soulage ses frustrations et calme sa souffrance : sa vraie joie et son véritable plaisir sont en Dieu.

L’évangile de la prospérité, au contraire, voit Dieu comme le moyen de parvenir à nos fins. Dieu est un peu comme une personne que nous aurions épousée pour son argent. Nous ne l’aimons pas vraiment ; nous l’aimons seulement pour ce qu’elle peut nous apporter. Le problème, c’est que venir à Jésus pour obtenir ce qu’on veut de lui, ce n’est pas l’adorer. C’est adorer la chose que nous espérons obtenir. C’est de l’idolâtrie.

Si vous vous demandez si votre Église est influencée par l’évangile de la prospérité, soyez très attentifs pendant les prédications, les études bibliques et les réunions de prière. Si votre pasteur, votre moniteur d’école du dimanche ou encore votre auteur favori parle peu de la personne de Dieu et beaucoup de ce que Dieu peut vous donner, alors c’est que vous avez sans doute affaire à l’évangile de la prospérité.

L’ÉVANGILE DE LA PROSPÉRITÉ DIT : « DIEU

VEUT QUE TU PARLES AVEC AUTORITÉ ! »

Problème : confondre la créature avec son Créateur

Dieu est notre créateur et nous sommes ses créatures. C’est une des vérités les plus importantes de toutes les Écritures. Ça a l’air évident et pourtant, Dieu juge bon de nous le répéter encore et encore. Il n’est pas comme nous et nous ne sommes pas tout à fait comme lui. Voici quelques exemples :

Ì Dieu a tout créé à partir de rien (Hébreux 11.3 ; Apocalypse 4.11). Nous pouvons nous aussi créer (vive l’art et la créativité !), mais nous sommes incapables de produire quoi que ce soit à partir de rien.

Ì Dieu n’a besoin de rien (Psaumes 50.8-15 ; Ésaïe 40.14 ; Actes 17.24-25). Nous, au contraire, sommes des êtres dépendants ; nous ne pouvons pas survivre sans la provision de Dieu (Matthieu 6.11).

Ì Dieu n’a pas de commencement (Ésaïe 57.15 ; Apocalypse 1.8). Nous, si, évidemment !

Ì Dieu peut faire absolument tout ce qu’il désire (Daniel 4.34 ; Psaumes 115.3). Nos capacités et notre pouvoir sont limités.

Ì Dieu sait tout et ne se trompe jamais (Romains 11.33 ; Psaumes 147.5). Nous savons certaines choses, mais de loin, pas tout. Et nous nous trompons souvent.

Nous sommes faits à l’image de Dieu, c’est pourquoi nous pouvons refléter un grand nombre de ses qualités (l’amour, la sagesse, la force, la sainteté). Mais nous ne devons pas oublier que Dieu est infiniment plus aimant, plus sage, plus fort et plus saint que nous.

Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant les voies que je vous ai prescrites sont élevées au-dessus de vos voies, et autant mes pensées sont élevées loin au-dessus des vôtres.

Ésaïe 55.9

Ceux qui prêchent l’évangile de la prospérité ont tendance à gommer ces distinctions. Ils encouragent ceux qui les écoutent à croire qu’ils peuvent accomplir des choses que seul Dieu est en mesure de faire. Peut-être reconnaîtront-ils que Dieu agit à plus grande échelle et avec beaucoup plus de puissance. Toujours est-il que ces enseignants tordent le sens des Écritures en poussant des êtres humains à se prendre pour Dieu.

Voici un exemple tiré du ministère de Kenneth Copeland :

Que ça vous plaise ou non, notre monde est un univers qui a été créé par la parole et qui est contrôlé par la parole. Dieu l’a décidé dès le commencement. Il a tout créé en appelant « à l’existence ce qui n’existe pas » (Romains 4.17). Il a mis tout le système en route en parlant au milieu des ténèbres. Il a dit : « Que la lumière soit ! » Et la lumière fut (Genèse 1.3).

De la Genèse à l’Apocalypse, la Bible est très claire : nous vivons dans un système régi par la parole. Le monde a toujours été comme ça et il sera toujours comme ça. Nous ne pouvons rien y changer. Ce que nous pouvons faire, par contre, c’est bien choisir les mots qui régissent notre vie. Nos paroles peuvent changer nos circonstances […]

Dieu vous a délégué son autorité. Vos paroles ont une puissance créatrice, pas seulement quand vous priez, mais à chaque fois que vous ouvrez la bouche. Si vous faites des prières positives, mais que vous tenez des propos négatifs le reste du temps, ce sont vos paroles négatives qui s’accompliront […]

Proclamez au nom de Jésus tout ce que vous désirez voir s’accomplir. Prenez autorité sur l’argent dont vous avez besoin et ordonnez-lui de venir à vous. Si vous avez besoin d’être guéri, parlez à votre corps. Ordonnez-lui d’être guéri au nom de Jésus. Ordonnez-lui de fonctionner correctement. Proclamez ce que vous désirez. Tout ce que vous direz s’accomplira 3 .

Voyez-vous comme la limite entre créature et créateur devient floue ? Encore une fois, tout ce que dit Copeland n’est pas faux. Dieu a créé le monde à partir de rien par sa Parole puissante et créatrice. Et il est vrai que nos paroles peuvent faire beaucoup de bien et beaucoup de mal (Jacques 3.1-12). Mais nulle part, la Bible ne suggère que nous avons le pouvoir d’accomplir tout ce que nous voulons par nos paroles. Dieu seul est en mesure de faire cela. Contrairement à ce qu’affirme Copeland, la Bible

3 Kenneth Copeland, « Words—The start button to everything you’re believing for » [Vos paroles : le bouton « On » pour atteindre tout ce que vous croyez], Kenneth Copeland Ministries, 22 août 2022, URL < https://blog.kcm.org/wordsstart-button-everything-youre-believing/>, [consulté le 05 juillet 2024] (trad libre), c’est nous qui soulignons.

n’enseigne absolument pas que Dieu nous a délégué une telle puissance et une telle autorité.

« Une seconde ! protesterez-vous peut-être, et Proverbes 18.21, on en fait quoi ? Après tout, ce passage dit bien que “la mort et la vie sont au pouvoir de la langue”. » Les partisans de l’évangile de la prospérité aiment beaucoup ce verset et le citent souvent pour prouver que nous pouvons accomplir tout ce que nous voulons par nos paroles. Mais est-ce vraiment ce que ce passage signifie ? Eh bien, non !

À l’époque où j’étais4 complètement adepte de l’évangile de la prospérité, on m’a dit une fois que je devais réprimander mon découvert de quarante dollars. Si je prononçais les bons mots avec foi, alors la réalité se conformerait à mes désirs. C’est ce que j’ai fait : « Je refuse ce solde négatif et les frais de découvert qui viennent de Satan ! » J’étais plein de foi et de confiance, et pourtant je n’ai jamais réussi à faire apparaître le moindre centime sur mon compte bancaire.

Proverbes 18.21 est tout à fait vrai, et ce que dit Kenneth Copeland absolument faux. Ce passage des Proverbes s’apparente à Jacques 3, car il nous instruit sur les conséquences, bonnes ou mauvaises, que nos paroles ont sur les autres. Il ne parle en aucun cas d’une puissance (au sens propre) créatrice ou destructrice que pourraient avoir nos paroles. Dieu seul est capable de donner la vie et de la reprendre ; en effet, il est l’unique Créateur du monde et c’est lui seul qui maintient toute chose. « Reconnaissez-le donc : c’est moi seul qui suis Dieu, il n’y en a pas d’autre ! C’est moi qui fais mourir et moi seul qui fais vivre, c’est moi qui ai blessé, c’est moi qui guérirai, et de ma main, nul ne peut délivrer » (Deutéronome 32.39).

4 Sean qui parle.

Certains prédicateurs prennent l’exemple de la vie et du ministère de Jésus pour appuyer leur propos. Mais là aussi ils font fausse route : nous ne sommes pas Dieu. Dieu le Père a conféré au Seigneur Jésus-Christ une autorité toute spéciale, car Dieu le Fils est une personne toute spéciale (Matthieu 11.27 ; 28.18). Voilà pourquoi Jésus pouvait faire des miracles, chasser des démons et ressusciter des morts par la puissance du Saint-Esprit. Par deux fois, Jésus confère une partie de son autorité à ses disciples pour une mission précise (Matthieu 10.1 ; Luc 10.19). De plus, nous lisons dans le livre des Actes que les apôtres ont accompli des signes et des miracles (y compris des résurrections). Mais le Nouveau Testament n’affirme absolument pas que la même puissance et la même autorité sont conférées à quiconque s’exprime avec foi.

L’ÉVANGILE DE LA PROSPÉRITÉ DIT : « DIEU NE VEUT PAS QUE TU SOUFFRES ! »

Problème : Dieu dit que son peuple aura à souffrir dans le monde

Un dimanche matin, j’étais 5 au culte et j’écoutais le pasteur prêcher. Vous auriez dû le voir, avec son sourire parfait et sa veste en cuir sans doute faite sur mesure. Il avait pris l’hélicoptère depuis l’autre site de notre Église pour pouvoir être avec nous en personne. Nous nous sentions tellement chanceux d’avoir cet homme de Dieu béni parmi nous ! La prédication de ce dimanche portait sur un seul sujet : Dieu déteste la souffrance. Je me souviens encore de la façon dont il a fait passer le message : « Dieu est notre père, et un père ne veut pas que ses enfants souffrent. Les pères terrestres n’ont

5 Sean qui parle.

pas le pouvoir de sauver leurs enfants de la souffrance, mais notre Père céleste, lui, le peut. »

Son raisonnement était le suivant : Dieu ne permet pas que nous souffrions. Si nous souffrons, c’est que nous ne marchons pas selon sa volonté. Si notre vie est difficile, c’est pour une bonne raison : soit nous avons péché, soit nous manquons de foi dans les promesses de Dieu. Je l’écoutais prêcher et tout ça me paraissait logique.

Cette théologie est très répandue chez les partisans de l’évangile de la prospérité. Bill Johnson, qui est à la tête de l’Église de Bethel, a répondu sur son site web à la question : « La volonté de Dieu est-elle toujours de guérir ? ». Il affirme que oui, puis donne une série de conseils à ceux qui cherchent à accomplir des guérisons miraculeuses. En cas d’échec, dit Johnson, nous devons nous rappeler que « Dieu n’est jamais impuissant, et que son alliance, sa compassion et ses promesses ne sont jamais défaillantes. S’il y a un souci, il vient forcément de nous […] Si vous n’arrivez pas à guérir quelqu’un, dites-vous que le problème ne vient pas de Dieu et recherchez sa face pour savoir quoi faire et pour recevoir une révélation personnelle (une onction plus grande pour la guérison des malades). »

Costi Hinn (le neveu de Benny Hinn, qu’il a souvent accompagné dans son ministère), a écrit un témoignage dans lequel il explique comment il a quitté l’évangile de la prospérité. Dans ce livre, il raconte la façon dont l’annonce du cancer de sa mère a chamboulé toute la confiance qu’il avait dans la théologie de la maladie que prêchait sa famille :

Les Hinn n’étaient jamais malades. Ou, du moins, lorsque nous l’avions été, nous n’en avions jamais parlé…

La maladie, censée rester à bonne distance de notre foyer, l’avait finalement frappé en plein cœur : elle avait touché ma mère […] Durant toute cette période, mon père a minimisé la maladie. Il déclarait

depuis la chaire que nous étions tous destinés à vivre en bonne santé, alors que sa propre femme était assise en silence au premier rang et qu’une tumeur faisait la guerre à son cerveau. Les visites des médecins avaient lieu lorsqu’il était en déplacement. Ma mère cachait ses rapports médicaux négatifs et, si jamais elle faisait allusion à la tumeur, il la réprimandait et s’opposait à ce mot au nom de Jésus. Cependant, au bout du compte, toute la puissance de l’évangile de la prospérité du monde s’est avérée inefficace. N’ayant d’autre choix que d’opter pour une intervention chirurgicale, mes parents se sont rendus à l’évidence. Ma mère serait soignée par les mains d’un chirurgien 6 .

Ce genre de raisonnement est mortellement dangereux. Il nie le fait que Dieu utilise la médecine pour nous guérir et, en plus, il charge d’un fardeau de honte, de peur et de culpabilité les épaules de ceux qui souffrent.

Ah, et il semble aussi ignorer complètement ce que dit la Bible au sujet de la souffrance.

Du début à la fin du récit biblique, le peuple de Dieu souffre. Parfois, leur souffrance est la conséquence de leurs péchés (2 Samuel 12.14 et Psaumes 32.3-4). Mais les Écritures nous montrent aussi que des gens innocents peuvent vivre des circonstances douloureuses parce que Dieu a pour eux un projet plus grand que leur confort et leur santé (Genèse 50.20 ; Job 1 ; Jean 9.1-3 ; 2 Corinthiens 12.7-10). C’est d’ailleurs tout à fait vrai du Seigneur Jésus : il était parfaitement innocent et fidèle, et ses souffrances étaient clairement conformes à la volonté de Dieu (Ésaïe 53.10 ; Actes 4.27-28).

Et il est tout aussi clair que pour les auteurs du Nouveau Testament, la souffrance fait partie intégrante de la vie chrétienne. Ils ne pensaient pas qu’elle était réservée aux « héros » de la foi. Méditez ces versets :

6 Costi W. Hinn, Les coulisses de l’évangile de prospérité, Romanel-sur-Lausanne : Ourania, 2021, p. 161.

Heureux serez-vous quand les hommes vous insulteront et vous persécuteront, lorsqu’ils répandront toutes sortes de calomnies sur votre compte à cause de moi. Oui, réjouissez-vous alors et soyez heureux, car une magnifique récompense vous attend dans les cieux. Car vous serez ainsi comme les prophètes d’autrefois : eux aussi ont été persécutés avant vous de la même manière.

Matthieu 5.11-12

Car en ce qui concerne Christ, Dieu vous a accordé la grâce, non seulement de croire en lui, mais encore de souffrir pour lui.

PhiliPPiens 1.29

Mais si c’est comme « chrétien » qu’il souffre, qu’il n’en éprouve aucune honte ; qu’il fasse, au contraire, honneur à Dieu en se montrant digne de ce nom.

1 Pierre 4.16

Malheureusement, ceux qui prêchent l’évangile de la prospérité poussent les chrétiens à avoir honte de leurs souffrances. Ils affirment que Dieu désire les guérir de toutes leurs maladies et que leur souffrance va à l’encontre de la volonté de Dieu.

Ce que la Bible enseigne est bien plus complexe. Parfois, Dieu montre son amour et sa puissance en guérissant son peuple et en lui épargnant la souffrance. À d’autres moments, il permet que celui-ci traverse des souffrances et des difficultés. Dans tous les cas, il manifeste sa gloire, qu’il nous guérisse de notre maladie ou pas. Pourquoi Dieu décide-t-il de sauver untel et pas un autre ? Qui connaît la pensée du Seigneur et qui peut être son conseiller (Romains 11.34) ? Quelles que soient ses décisions, il demeure tout-puissant et parfaitement bon.

Si vous avez l’impression que c’est paradoxal, c’est que vous avez bien compris les Écritures. L’évangile de la prospérité, lui,

cherche à lisser cette tension et à simplifier à l’excès un sujet difficile. Sa vision de la souffrance est à la fois simpliste et non biblique. En général, quand on vous parle ainsi de la souffrance, c’est que l’évangile de la prospérité n’est pas loin.

L’ÉVANGILE DE LA PROSPÉRITÉ DIT :

« DIEU VEUT POUR TOI UNE VIE

PROSPÈRE ET VICTORIEUSE ! »

Problème : La Bible enseigne que la véritable vie de disciple ne se résume pas en deux ou trois thèmes

Dans son excellent ouvrage, Blessed, Kate Bowler présente un historique de l’évangile de la prospérité. Elle remarque que cette théologie met en général l’emphase sur quatre grands thèmes :

1. La foi

2. La richesse

3. La santé

4. La victoire7.

Si, dans votre Église, chaque lecture biblique se clôt par un enseignement sur l’un de ces quatre thèmes, vous pouvez être à peu près sûr que cette dernière prêche l’évangile de la prospérité. Vous remarquerez aussi que la plupart des prédicateurs de l’évangile de la prospérité reviennent sans cesse aux mêmes versets. Ils les sortent de leur contexte et évitent soigneusement un certain nombre de textes bibliques comme ceux que nous avons lus plus haut.

7 Kate Bowler, Blessed : A history of the American prosperity Gospel [Bénis : Une histoire de l’évangile de la prospérité aux États-Unis], Oxford : Oxford University Press, 2013, p. 7 (trad. libre).

Que les choses soient claires : il n’y a rien de mal à prêcher sur la foi, la richesse, la santé et la victoire. Mais il faut savoir que la Bible ne parle pas que de ça. Un véritable prédicateur de l’Évangile devrait pouvoir déclarer avec Paul qu’il est « dégagé de toute responsabilité » envers ses auditeurs, parce qu’il leur a annoncé sans rien leur dissimuler tout le dessein de Dieu (Actes 20.26-27). Les brebis du Seigneur doivent se nourrir de la parole de Dieu dans son entièreté. Nous avons tout autant besoin de savoir ce que Dieu dit de la souffrance que de la prospérité. Dieu utilise les deux pour nous rendre un peu plus semblables à Jésus, son Fils.

Les prédicateurs de l’évangile de la prospérité utilisent souvent les mots « foi », « richesse », « santé » et « victoire », mais ils leur donnent rarement leur signification biblique. En fait, c’est comme ça qu’ils font pénétrer leurs faux enseignements dans l’Église. Ils utilisent des termes bibliques dont ils changent la signification. C’est ce qui s’appelle « déformer le sens » de l’Écriture (2 Pierre 3.16).

C’est un peu comme si les adeptes de l’évangile de la prospérité parlaient un patois différent. Pensez à toutes les façons de parler qui existent dans le monde francophone. En Suisse, on appelle un sachet un « cornet ». Les Belges passent la serpillière avec un « torchon » ou une « loque » et les Québécois appellent leur voiture un « char ». Quelles variations de vocabulaire ! Nous utilisons souvent les mêmes mots, mais pas pour désigner les mêmes choses.

Imaginez deux chrétiens, l’un issu d’une Église évangélique et l’autre d’une Église qui prêche l’évangile de la prospérité. Et imaginez qu’un dimanche matin, chacun décide d’aller dans l’Église de l’autre. Peut-être que tous deux entendront parler de la foi, de l’amour, de la grâce et du salut. Mais le sens attribué à ces termes dépendra beaucoup de l’Église dans laquelle ils se trouveront.

Prenons le mot « foi ». Dans la Bible, ce mot désigne l’espérance, la confiance et la dépendance. C’est l’action de croire et de s’accrocher aux promesses de Dieu, même quand nos circonstances nous poussent à tout abandonner. Hébreux 11 nous rappelle que des saints comme Noé, Abraham et Rahab se sont confiés dans la parole de Dieu, même quand ils ne voyaient pas ses promesses s’accomplir. Ils croyaient que Dieu tiendrait parole : c’est pourquoi ils se sont soumis à sa volonté. Rien que dans le chapitre 11, l’auteur de la lettre aux Hébreux nous dit vingt fois que ces hommes et ces femmes de Dieu ont marché « par la foi ». Et de terribles souffrances les attendaient sur le chemin.

Dans les Évangiles, nous constatons que c’est la foi qui conduit à Jésus ceux qui n’ont plus d’espoir. Voilà pourquoi Jésus a si souvent dit aux gens que leur foi les avait sauvés (Marc 10.52 ; Luc 7.50). Ce que Jésus veut dire, ce n’est pas que leur foi possède en elle-même la puissance de les guérir, s’ils en manifestent assez. Non, si leur foi les a sauvés, c’est parce qu’elle les a conduits à celui qui avait le pouvoir de les guérir. N’oubliez jamais que ce n’est ni la grandeur ni la sincérité de notre foi qui nous sauve ; ce qui compte, c’est l’objet de notre foi.

Ceux qui prêchent l’évangile de la prospérité parlent de la foi comme si elle était une force autonome, indépendante de Dieu. Voici encore ce que dit Copeland : « La foi est la matière première à partir de laquelle l’Esprit de Dieu a façonné l’univers8. » Réfléchissez à ce que cela implique. La foi serait une matière première, elle posséderait donc par nature une sorte de pouvoir créateur. Dans ce cas, les chrétiens qui mettent leur foi en action devraient pouvoir façonner la réalité et accomplir leurs désirs, exactement comme le Seigneur l’a fait à la création. Or, ce n’est

8 Jeff Klutz, Apostasy ! The word-faith doctrinal deception [Apostasie ! La tromperie doctrinale du mot foi], Jeff Lutz : Returningking.com, 2012, p. 60 (trad. libre).

absolument pas ce que nous lisons dans la Bible ; et c’est ce genre de raisonnement qui nous entraîne, comme nous l’avons vu, à confondre la créature avec son créateur.

Nous pourrions encore vous donner beaucoup d’exemples. Les Écritures nous enseignent que c’est Christ qui a remporté la « victoire » pour nous ; nous ne pouvons pas la remporter nous-mêmes (1 Corinthiens 15.55-57). Pourtant, l’évangile de la prospérité affirme que nous pouvons obtenir la victoire, à condition d’avoir assez de foi et d’éradiquer toute trace de péché ou de doute dans notre cœur. Quand ils prêchent au sujet des dons que Dieu accorde à son peuple, les prédicateurs de l’évangile de la prospérité ne parlent presque que de bénédictions matérielles : la richesse et la santé. Cependant, la Bible veut diriger l’attention du chrétien vers des bénédictions qu’il recevra non pas sur cette terre, mais « dans les cieux » (Éphésiens 1.3). Elle parle plus souvent de bénédictions spirituelles que de bénédictions matérielles (Philippiens 3.10, Colossiens 1.24).

Il est bien difficile de définir notre vocabulaire quand nous parlons d’évangile de la prospérité. Il existe de nombreux courants et variantes, et aucun glossaire officiel. Ce mouvement porte même des noms variés : la « parole de foi » ou encore la « semence de foi ». Ses adeptes sont à la fois les plus riches parmi les riches et, malheureusement, les plus pauvres parmi les pauvres. Il rassemble les célébrités et les plus parfaits inconnus.

Alors, chaque fois que vous entendez une de ces affirmations — Dieu veut te bénir financièrement, Dieu veut que tu proclames ce que tu désires voir s’accomplir, Dieu veut que tu sois heureux, il ne veut pas que tu souffres, Dieu veut que tu sois prospère — c’est que vous avez sans doute affaire à l’évangile de la prospérité. Ces affirmations n’ont rien à voir avec le véritable Évangile.

Pour que tout soit vraiment clair, sachez que l’Évangile, le vrai, peut être résumé par les mots « Dieu », « hommes », « Christ » et « répondre ». Dieu est bon, il est créateur de tout et souverain sur toute chose. Les hommes ont été créés à son image pour qu’ils l’adorent, mais nous nous sommes rebellés contre Dieu, c’est pourquoi nous méritons sa juste colère. Christ, le Fils de Dieu, est venu sur terre vivre la vie que nous aurions dû vivre et mourir à notre place, payant la sanction qu’encourt le péché. Mais il est revenu à la vie, obtenant la victoire sur la mort et sur le péché. Maintenant, quiconque répond à son appel en se repentant de ses péchés pour le suivre par la foi sera pardonné et recevra la vie éternelle.

Mes amis, c’est ça, l’Évangile dont vous avez besoin, dont nous avons tous besoin sur cette terre ! Et non pas d’une contrefaçon qui diluerait ce message.

CHAPITRE 2

UNE THÉOLOGIE SENS DESSUS DESSOUS

Nous sommes dimanche matin et Joel Osteen monte sur la scène de sa mégachurch à Houston. Il s’apprête à prêcher devant plus de dix millions de personnes, si l’on ajoute à l’auditoire présent l’audience en ligne. Mais avant de commencer sa prédication, Osteen brandit sa Bible au-dessus de lui et récite ces paroles devenues emblématiques :

Voici ma Bible. Je suis ce qu’elle dit que je suis. Je peux faire ce qu’elle dit que je peux faire. Aujourd’hui, la parole de Dieu va m’être enseignée. Je confesse ceci avec assurance : mon esprit est à l’écoute, mon cœur est ouvert. Je ne serai plus jamais le même. Je m’apprête à recevoir la semence incorruptible, indestructible et éternelle de la parole de Dieu. Je ne serai plus jamais le même. Jamais, jamais, jamais. Je ne serai plus jamais le même. Au nom de Jésus, amen1 .

Cette profession de foi ne pose pas problème et ne fait pas polémique. Au contraire, elle semble à première vue tout à fait

1 Joel Osteen , URL : <https://www.joelosteen.com/downloadables/Pages/ Downloads/ThisIsMyBible_JOM.pdf> [consulté le 12 octobre 2019].

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