Catherine Parks Préface de Anne Herrenschmidt Kohler
11 récits de femmes ordinaires que Dieu a équipées de sa puissance extraordinaire
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Courageuses Catherine Parks
Catherine Parks Préface de Anne Herrenschmidt Kohler
11 récits de femmes ordinaires que Dieu a équipées de sa puissance extraordinaire
Les éditeurs remercient chaleureusement tous les relecteurs et relectrices pour leur précieuse collaboration à cet ouvrage : Claudine, Ludvine et Ruth
Édition originale publiée en langue anglaise sous le titre : Empowered : How God shaped 11 women’s lives (and can shape yours too) © 2019 Catherine Parks Publié par B&H Publishers Group, Nashville, Tennessee, USA Traduit et publié avec permission. Tous droits réservés.
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Édition en langue française : Courageuses : 11 récits de femmes ordinaires que Dieu a équipées de sa puissance extraordinaire Catherine Parks © 2023 BLF Éditions www.blfeditions.com. Rue de Maubeuge, 59164 Marpent, France Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés.
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Illustrations : Breezy Brookshire Traduction : Loanne Procopio Révision : BLF Éditions Couverture et mise en page : NouvelleCreation
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Impression n° XXXXX •••• Sauf mention contraire, les citations bibliques sont tirées de la Bible du Semeur © 1992, 1999, 2015 Biblica, Inc. Reproduit avec aimable autorisation. Tous droits réservés. Les caractères italiques sont ajoutés par l’auteur du présent ouvrage. Les versions alternatives sont indiquées en abrégé de la manière suivante : la Colombe (COL), la Nouvelle Bible Segond (NBS), la Bible Darby (DRB), la Nouvelle Édition de Genève (NEG), la Second21 (S21), La Bible en français courant (BFC), La Nouvelle français courant (NFC), Louange vivante (LVV), La Bible Chouraqui (CHO), Traduction œcuménique de la Bible (TOB), Parole de vie (PDV), Parole vivante (PVV), Prophétie vivante (PPV). Reproduit avec aimable autorisation. Tous droits réservés. ISBN 978-2-36249-831-2 ISBN 978-2-36249-832-9
broché numérique
Dépôt légal 4e trimestre 2023
Table des matières
Préface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 Avant de commencer ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 1. ESTHER AHN KIM La véritable force . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 2. SOPHIE SCHOLL À la recherche de justice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 3. CORRIE TEN BOOM Aimer ceux qui sont « impossibles à aimer » . . . . . . . . . . . . . 45 4. BETSIE TEN BOOM La reconnaissance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55 5. PANDITA RAMABAI Craindre Dieu, pas les hommes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69 6. ELISABETH ELLIOT L’obéissance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83 7. PHILLIS WHEATLEY Utiliser ses dons . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97 8. JONI EARECKSON TADA La vie abondante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 9. FANNY CROSBY La bonté .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119 10. CHARLOTTE FORTEN GRIMKÉ Une ambition qui vient de Dieu .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131 11. ANNIE ARMSTRONG La fidélité dans le travail .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145 Biographies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169
Pour Sophie : Quelle joie immense pour moi d’être ta maman. Ce même Père qui a donné à chacune de ces femmes force et courage œuvre aussi en toi. Je suis profondément reconnaissante d’être témoin de son travail dans ta vie. — Jacques 3.17 —
Préface
Ma chérie, je voudrais te confier un secret, un très grand secret qui pourra t’aider à relever tous les défis de la vie. Promets-moi de ne jamais l’oublier : il faut être courageuse et bienveillante ! … Il y a plus de gentillesse dans ton petit doigt que la plupart des gens n’en possèdent dans tout leur corps, et c’est source de pouvoir, plus qu’on ne le croit. Et de magie ! … Sois courageuse et bienveillante, mon trésor ! Telles sont les dernières paroles laissées à la jeune Ella, alias Cendrillon, par sa mère mourante, dans une adaptation cinématographique du célèbre conte de Charles Perrault. Je suis maman de deux filles, âgées de 9 et 11 ans. En repensant à cette scène très émouvante, je me demande quelles paroles j’aimerais laisser un jour à mes filles… Et avant cela, quelles valeurs vais-je les encourager à acquérir pour qu’elles soient en mesure de relever les défis de la vie : le courage, la bienveillance, le respect, la générosité ? Quelle voie leur indiquer pour qu’elles soient heureuses, qu’elles réussissent dans la vie et changent le monde ? « Il faut être belle, riche, talentueuse, admirée, ambitieuse ! » C’est ainsi que le monde dans lequel évoluent nos filles définit souvent le bonheur et la réussite. De plus, 11
Courageuses
il nous incite à croire que cela ne dépend que de nous : « Écoute ce que dit ton cœur ! », « Sois toi-même ! » ou encore « Tu as tout ce qu’il faut en toi pour y arriver ! » Mais que se passe-t-il lorsque notre cœur nage en pleine confusion ? Lorsque l’image que nous renvoient les réseaux sociaux nous désespère ? Ou lorsque nos plus grands efforts ne suffisent pas pour atteindre l’idéal de vie que nous nous sommes fixé ? Dans ce livre, Catherine Parks brosse 11 portraits de femmes ordinaires, dont les histoires extraordinaires ont eu un impact bien plus important que tout ce qu’elles auraient pu imaginer. Des femmes à bien des égards très différentes les unes des autres, mais dont le point commun était d’avoir une relation personnelle et profonde avec l’extraordinaire Dieu de la Bible. Des femmes qui, au travers de la puissance de Dieu manifestée dans leurs vies, ont eu une influence sur la vie de milliers de personnes. Des femmes qui ont appris que ce qui compte, ce n’est pas la popularité, le confort ou une vie facile… Non, ce qui compte vraiment, c’est de faire preuve de bonté, d’amour et de pardon, c’est de rechercher la justice, c’est de vivre dans l’obéissance à Dieu. Chaque histoire, ainsi que les questions de fin de chapitre, nous amènent à repenser sérieusement notre façon de vivre, à questionner nos motivations et à évaluer notre compréhension de qui est Dieu. Seul Dieu est capable de nous rendre heureux et de donner un sens à nos vies ! Seul Dieu peut accomplir de grandes choses dans ce monde ! Et il le fait souvent en nous associant à son œuvre de rédemption afin d’étancher la soif profonde des gens qui nous entourent… 12
Préface
Que vous soyez parent, grands-parent, oncle ou tante, responsable d’enfants ou de jeunes, je vous encourage à partager la lecture de ce livre avec les jeunes de votre entourage. Je vous souhaite de belles discussions sur ce qu’est une vie réussie selon la Bible ! Je vous souhaite de vous émerveiller ensemble face à la puissance de notre Dieu à l’œuvre dans la vie de chacune de ces femmes ! Et je souhaite, qu’au-delà des paroles que nous laisserons peut-être un jour à ceux qui nous suivent, nos vies soient dès maintenant des exemples pour eux. Que ces 11 histoires nous inspirent à devenir à notre tour des exemples de personnes qui puisent leurs forces chaque jour dans la grâce divine et se confient pleinement en celui qui seul donne la vie abondante, qui forge nos caractères pour sa gloire et qui nous équipe pour briller dans ce monde.
Anne Herrenschmidt Kohler Animatrice du podcast « Legacy » et responsable du ministère de prière de Jeunesse pour Christ
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Avant de commencer !
Je suis tellement contente que tu aies décidé de lire ce livre ! J’ai longtemps étudié les femmes dont il est question dans ces chapitres, afin d’apprendre à les connaître de mieux en mieux. J’ai même commencé à parler d’elles à mes enfants comme si c’étaient des amies proches : « Écoute un peu ce qu’Annie a écrit » ou « C’est incroyable ce que Phyllis a vu en Angleterre, non ? » Aujourd’hui, j’ai la joie de te présenter mes nouvelles amies. Tu as peut-être entendu parler de certaines d’entre elles, mais je parie que d’autres te sont totalement inconnues. Si l’on se souvient de ces femmes encore de nos jours, c’est parce que certains événements de leur vie les ont rendues célèbres ou ont fait parler d’elles. Mais j’aimerais que tu fasses leur connaissance avant que ces événements ne leur soient arrivés. Lorsque Joni Eareckson Tada avait dix-sept ans, son but n’était pas de devenir une conférencière ou une artiste mondialement connue. Avant que les Nazis n’envahissent la Hollande, Corrie et Betsie ten Boom n’avaient pas prévu de sauver la vie de centaines de personnes. Et quand Fanny Crosby était petite, elle ne s’imaginait pas qu’un jour, elle deviendrait l’auteure de milliers de cantiques. Aucune des femmes de ce livre n’avait comme objectif de devenir célèbre ou de changer le monde. Leur existence les a conduites dans différentes directions : missionnaire, 15
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artiste, prisonnière, enseignante, poète, compositrice, martyre, conférencière, mère. Elles vivaient dans des endroits différents et à des époques différentes, parlaient des langues différentes, étaient issues d’arrière-plans ethniques différents. Pourtant, elles avaient une chose en commun : elles connaissaient vraiment Dieu. Quels genres de messages sont imprimés aujourd’hui sur les t-shirts pour ados ? Quels genres de livres sont publiés aujourd’hui pour les jeunes adultes ? Le message est le même un peu partout : le but de ta vie, c’est de réaliser des choses, c’est d’avoir de grands rêves, c’est de changer le monde ! Tu as peut-être même choisi de lire ce livre parce que tu crois qu’il t’aidera à réaliser de grandes choses dans la vie. Après tout, les femmes présentées ici sont connues pour avoir fait des choses extraordinaires, n’est-ce pas ? Il y a peut-être là quelque chose à apprendre et à imiter ? Eh bien, oui, c’est vrai. Il nous faut cependant clarifier certaines choses. La Bible ne dit pas que le but de notre vie est d’accomplir de grandes choses ou de changer le monde. Elle affirme plutôt que nous avons été créés à l’image de Dieu pour montrer au monde la gloire de Dieu ! Comment ? D’abord et avant tout en connaissant Dieu, comme chacune des femmes de ce livre. Lorsqu’elles ont été mises à l’épreuve à travers la souffrance et les difficultés de la vie, ces femmes possédaient déjà les outils nécessaires pour endurer la pression : elles avaient gravé la Parole de Dieu dans leur cœur et elles savaient que Dieu répond aux prières de ses enfants. 16
Avant de commencer !
Elles n’avaient pas juste entendu parler de Dieu ; elles le connaissaient personnellement. Ces femmes sont-elles des héroïnes de la foi ? À vrai dire, elles n’étaient pas très différentes de toi et de moi. En lisant le récit de leur vie, l’une des choses qui m’a le plus encouragée n’était pas de constater combien elles étaient formidables, mais à quel point elles étaient normales. Elles se disputaient avec leurs amis, agissaient parfois de manière égoïste, cherchaient l’approbation des autres, ressentaient de la peur, n’aimaient pas certaines matières à l’école, etc. C’étaient des filles et des femmes tout à fait ordinaires que Dieu a équipées de sa puissance extraordinaire. Et voici la bonne nouvelle : il peut te donner cette même puissance, à toi aussi ! J’espère et je prie qu’en lisant la vie de chacune de ces femmes, tu comprendras que le véritable héros de toutes ces histoires, c’est Dieu ! Tu sais, Dieu t’a créé afin que tu sois en relation avec lui. Il y a juste un petit problème : toi, moi, et tout être humain ayant jamais vécu sur terre a brisé la loi de Dieu (c’est-à-dire son plan pour notre existence). La conséquence, c’est qu’on ne peut plus avoir cette relation avec lui. Mais Dieu avait prévu de réparer tout ce que notre péché avait détruit. Il a envoyé son fils Jésus sur terre sous la forme d’un homme. Jésus a vécu une vie parfaite, il n’a jamais péché. Parce que la punition pour notre péché, c’est la mort, Jésus a pris tout notre péché sur lui, et il est mort à notre place. Mais pour prouver qu’il est victorieux sur la mort, Dieu l’a ressuscité des morts. Après cela, Jésus est retourné dans les cieux jusqu’au jour où il reviendra réunir avec le Père tous ceux qui ont placé leur confiance en lui, tous ceux qui croient qu’il est le seul chemin vers Dieu. Mais Jésus ne nous a 17
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pas laissés seuls : lorsqu’il est reparti au ciel, le Père nous a envoyé le Saint-Esprit. Et donc, si nous avons placé notre confiance en Jésus, le Saint-Esprit vit dans notre cœur, et il nous aide chaque jour à mieux comprendre la Bible et à suivre Jésus. Est-ce que l’Esprit de Dieu vit en toi aujourd’hui ? Il n’y a rien de plus extraordinaire que ça ! Voilà pourquoi le sous-titre de ce livre s’intitule « 11 récits de femmes ordinaires que Dieu a équipées de sa puissance extraordinaire » : jour après jour, Dieu nous donne la puissance nécessaire pour refléter sa gloire, pour l’aimer, et pour aimer les autres – tout comme il l’a fait pour les femmes de ce livre. Parce que cet amour se manifeste de diverses façons, chaque chapitre examine une qualité différente dont ces femmes ont fait preuve. Que signifie aimer Dieu et aimer les autres concrètement ? Cela veut parfois dire se battre pour la justice, ou ne pas penser à soi, utiliser ses dons au service des autres, etc. Mais pour accomplir tout cela, ce n’est pas de notre force dont nous avons besoin, mais de la puissance de Dieu. Nous ne ferons jamais toutes ces choses parfaitement, mais la bonne nouvelle c’est que Dieu pardonne et se sert de gens imparfaits comme toi et moi ! Reconnais et honore la personne unique que Dieu a voulu former en te créant, toi. Tu es exactement la personne qu’il avait en tête. Cela devrait t’encourager ! Tu n’es pas la prochaine Elisabeth Elliot, ou la prochaine Pandita Ramabai, pas la prochaine Charlotte Grimké non plus... Dieu t’a donné des capacités et des désirs spécifiques. Que veut-il pour toi ? Il ne t’appelle pas à devenir l’une ou l’autre de ces femmes, mais à venir à lui et à lui demander comment 18
Avant de commencer !
il veut t’utiliser – pas forcément pour changer le monde de manière radicale, mais pour accomplir tous ces petits actes qui caractérisent une vie de fidélité à Dieu. Le véritable changement dans le monde a lieu lorsque nous accomplissons fidèlement ce qu’il nous demande de faire par sa puissance. Si j’ai écrit ce livre, c’est parce que je voulais bien sûr que ma fille Sophie et mes nièces Liya et Madelyn connaissent l’histoire de ces femmes. Cependant, je voulais surtout que tu saches, toi qui es en train de lire ce livre, que Dieu a un plan pour ta vie, là où tu es, et qu’il t’équipera de sa puissance extraordinaire afin que tu puisses faire, chaque jour de ta vie, ce pour quoi il t’a créé. Ces paroles – que l’apôtre Paul a adressées à ses amis – je te les adresse à toi aussi : Et, j’en suis fermement persuadé : celui qui a commencé en vous son œuvre bonne la poursuivra jusqu’à son achèvement au jour de Jésus-Christ. Philippiens 1.6
Dieu est fidèle : il te viendra en aide et œuvrera en toi et à travers toi. Et maintenant, découvrons comment il l’a fait dans la vie de ces onze femmes !
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Je savais que je serais incapable de garder la foi en comptant sur mes propres forces. Pour que je tienne bon, Dieu devait œuvrer en moi.
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ESTHER AHN KIM La véritable force
Ahn Ei Sook (par la suite plus connue sous son nom de femme mariée, Esther Ahn Kim) naît en 1908, et grandit en Corée. À cette époque, le pays est occupé et dirigé par le Japon. L’armée japonaise oblige les Coréens à adopter les coutumes japonaises, y compris le shintoïsme – une religion qui consiste à adorer les esprits de la nature, les ancêtres, et l’empereur. La famille de Ei Sook est partagée : sa mère est chrétienne, mais la famille de son père vénère des idoles. Enfant, Ei Sook (se prononce « é souk ») fait preuve d’une forte volonté. Comme elle ne supporte pas qu’on lui brosse les cheveux, elle se les fait couper très court. Elle déteste voir sa grand-mère adorer les idoles. Comment peut-on être aussi religieuse et pourtant aussi triste ? se demande-t-elle. Un jour, lors d’une fête, elle se glisse dans une pièce où est entreposée la nourriture servant d’offrande aux idoles et se met à leur crier : ȣ On vous donne les meilleures choses à manger, et pourtant vous rendez ma grand-mère malheureuse ! Pourquoi ? J’espère que vous allez tous mourir quand vous mangerez cette nourriture mélangée à mon crachat ! 21
Courageuses
Puis elle crache sur son doigt et touche tous les aliments devant elle. Mais ce n’est pas assez. Elle prend ensuite du crottin de cheval, en enduit le bout d’une canne, et touche toutes les corbeilles destinées aux idoles en disant : ȣ Espèces de démons ! Pourquoi ne donnez-vous pas le bonheur et la paix ? Pourquoi est-ce que ma grand-mère est fâchée et désagréable quand elle vous adore ? Vous n’avez qu’à manger du fumier de cheval, et mourir ! Un soir avant qu’elle ne s’endorme, sa mère lui explique : ȣ Tu vois bien que les idoles n’ont aucun pouvoir. Le Seigneur Jésus est le seul capable de nous donner la force, la joie, et la paix véritables. Dieu agit à travers la foi de sa mère, et Ei Sook place elle aussi sa confiance en lui. Elle commence à suivre Jésus. Sa mère aimerait qu’Ei Sook aille dans l’école d’une mission religieuse, mais son père insiste pour qu’elle reçoive une éducation japonaise – d’abord au sein d’une école publique en Corée, et ensuite dans une université au Japon. Là-bas, elle apprend à parler le japonais couramment et à aimer les habitants du pays. Néanmoins, jamais elle n’aurait pu imaginer la manière dont Dieu allait se servir de ce savoir et de cet amour plus tard. Ei Sook revient ensuite en Corée pour enseigner la musique dans une école chrétienne. Un jour, les responsables japonais emmènent tous les élèves de l’école et les habitants des environs dans un temple (un lieu « saint ») et les obligent à adorer un faux dieu japonais. S’ils refusent, l’école sera fermée et ils seront tous torturés. Des autels sont dressés dans chaque école, chaque bureau du gouvernement, chaque maison, et chaque église chrétienne. La 22
Esther Ahn Kim : La véritable force
police se rend aussi dans les églises pour s’assurer que tout le monde s’incline bien devant l'un des dieux du shintoïsme avant le début du culte. Alors qu’Ei Sook s’avance vers la statue, elle pense à Shadrak, Méshak et Abed-Nego. La Bible raconte qu’ils avaient refusé de s’incliner devant la statue de Nabuchodonosor, le roi de Babylone. Ils savaient que Dieu pouvait les délivrer ; pourtant, ils ont déclaré au roi que même si Dieu décidait de ne pas intervenir en leur faveur, ils ne s’inclineraient pas devant une idole. Ils préféraient honorer Dieu même s’ils devaient mourir. Ei Sook, décidée à imiter leur comportement, fait cette prière silencieuse : « Aujourd’hui sur la montagne, devant tout le monde, je proclamerai qu’il n’existe aucun autre Dieu en dehors de toi. Je veux le faire en l'honneur de ton saint nom. » On ordonne alors à l’immense foule de s’incliner devant la déesse du soleil. Tout le monde s’incline – tout le monde, sauf Ei Sook. En pensant à la torture qu’elle allait subir comme châtiment, elle se souvient des paroles d’un cantique de Martin Luther lui rappelant que Jésus est à ses côtés : Seuls, nous bronchons à chaque pas, Notre force est faiblesse ; Mais un héros dans les combats, Pour nous lutte sans cesse. Quel est ce défenseur ? C’est toi, divin Sauveur ! Dieu des armées, Tes tribus opprimées Connaissent leur libérateur.
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De retour à l’école, Ei Sook y trouve quatre policiers qui l’attendent de pied ferme. Elle est arrêtée et conduite chez le chef du district, mais Dieu lui donne sa paix. Le chef est très en colère et il lui parle durement, mais brusquement, le téléphone sonne et il quitte précipitamment le bureau. Ei Sook en profite pour s’échapper. Elle se réfugie chez elle, consciente qu’elle ne pourra pas y rester longtemps. Elle se déguise en paysanne et part à la recherche d’un endroit sûr où se cacher. Il fait nuit. Dans le train, Ei Sook regarde les étoiles briller dans le ciel noir. Elle se dit : « C’est à ces étoiles que la foi véritable devrait ressembler : plus le monde s’enfonce dans les ténèbres, plus la foi devrait rayonner avec éclat. » Plus tard, en se souvenant de cette nuit, elle écrira qu’en regardant par la fenêtre, elle espérait devenir un jour « dans le ciel noir de mon cher pays une étoile qui ne cesse de briller. » Ei Sook vit désormais dans la clandestinité ; elle risque d’être arrêtée et emprisonnée à tout moment. Consciente qu’elle ne pourrait pas garder sa Bible en prison, elle apprend par cœur plus d’une centaine de chapitres ainsi que de nombreux cantiques. Elle prend également l’habitude de jeûner pendant plusieurs jours d’affilée et de dormir dans le froid afin de préparer son corps pour les conditions difficiles d’un éventuel emprisonnement. Après avoir passé quelque temps à se cacher à la campagne, le Seigneur la conduit jusqu’à la ville de Pyongyang. Elle n’a aucune idée de ce qui l’attend. À son arrivée, elle aperçoit un train bondé de jeunes soldats japonais en route pour les champs de bataille en Chine. Ei Sook a le sentiment que quelqu’un devrait aller voir les dirigeants 24
Esther Ahn Kim : La véritable force
japonais pour leur dire : « C’est vers la mort et l’enfer que vous envoyez ces jeunes hommes ! » Mais qui ? À Pyongyang, Ei Sook rencontre de nombreux chrétiens. Ils se déplacent dans le plus grand secret. Certains viennent tout juste d’être libérés de prison ; tous savent qu’ils y retourneront probablement un jour. Ils partagent les récits de torture subie par les croyants. En songeant à ce qu’elle pourrait avoir à endurer, Ei Sook fond en larmes. Un jour, un homme nommé Elder Park vient la trouver chez elle. Il lui explique que Dieu lui a dit de venir à Pyongyang pour la voir, avant d’ajouter : ȣ Tout le monde a si peur que personne ne veut avertir le Japon. J'ai été appelé par la voix sainte de Dieu. Toi aussi, tu as été choisie, n’est-ce pas ? Ei Sook, terrorisée, n’ose pas répondre. Elder Park reprend la parole : ȣ Tu parles le Japonais, n’est-ce pas ? ȣ Oui, répond-elle simplement. ȣ Ta maîtrise de la langue japonaise, voilà ce qu’il nous faut ! Dieu m’a montré que tu es une croyante zélée. Et sans ta foi, à quoi te servirait-il de parler parfaitement le japonais ? Dieu m’a conduit jusqu’ici afin qu’il se serve de toi pour accomplir son plan. Ei Sook trouve mille et une raisons de ne pas y aller. Elle écrit : « Elder Park était un soldat courageux pour Christ qui n’avait pas peur d’avertir le gouvernement japonais. Mais moi ? Je n’étais qu’une simple femme – une femme terrifiée, qui plus est. » 25
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Si elle décide de se rendre au Japon, elle pourrait être torturée, voire tuée. Elle aimerait que Dieu lui donne un signe lui confirmant qu’elle doit y aller mais elle n’ose pas le lui demander. En effet, sa mère lui dit que ce n’est pas bien de demander quelque chose à Dieu si la Bible ne nous dit pas de le faire. « Notre guide, c’est la Bible », lui explique-t-elle. Alors Ei Sook jeûne, prie et lit sa Bible pendant trois jours. Elle acquiert la certitude que Dieu l’appelle à se rendre au Japon ; elle sait aussi que les coups, les privations ou la mort valent mieux que de désobéir à Dieu. C’est décidé : elle ira au Japon avec Elder Park. Elle comprend alors que son éducation japonaise et l’amour que Dieu lui a donné pour les Japonais ne sont pas de simples coïncidences. Sa décision ouvre néanmoins la porte sur une multitude de dangers et d’incertitudes. Elder Park a déjà fait de la prison au Japon ; il ne peut donc pas obtenir de passeport pour s’y rendre. C’est ce qui inquiète Ei Sook… mais pas Elder Park. Il est convaincu que Dieu aplanira leur sentier afin qu’ils puissent accomplir la mission que Dieu leur a confiée. Et c’est exactement ce qui se passe : Dieu, miraculeusement, permet que les policiers ne contrôlent pas Elder Park dans le train vers le Japon : ils ne l’ont même pas vu ! Ce scénario incroyable se répète alors qu’ils sont à bord d’un bateau. Dieu aplanit leur sentier. Au Japon, les gens du peuple ainsi que bon nombre de responsables politiques n’ont pas conscience que leurs concitoyens maltraitent les Coréens. Ei Sook et Elder parviennent à rencontrer certains de ces responsables et à les avertir que le jugement de Dieu est imminent. Ils les mettent en garde : à moins de se repentir de son péché 26
Esther Ahn Kim : La véritable force
contre Dieu et son peuple, le Japon subirait le feu du ciel – et ce serait le signe terrible du jugement divin. Un jour, Elder Park et Ei Sook réussissent à se rendre à la Diète impériale. Il s'agit d'un rassemblement des plus grands dignitaires japonais et il est régi par des règles très strictes : rien ne doit troubler cette réunion de la plus haute importance. Mais au beau milieu de la séance, Elder Park déroule une affiche du haut du balcon. Elle appelle le gouvernement japonais à se repentir, à se désengager de la Corée, et à examiner de près le shintoïsme et le christianisme afin de décider quelle est la seule vraie religion. Elder Park et Ei Sook sont immédiatement arrêtés. Durant six années, de 1939 à 1945, Ei Sook est détenue dans une prison japonaise en Corée. On ne l’appelle plus Ei Sook, mais « numéro 57 ». Elle endure les cris des gardiennes de prison qui hurlent sur les détenues. Elle prie : « Le reste du monde n’existe plus pour moi, désormais. Je suis si faible. Je dois m’accrocher à ta main chaque jour, sinon j’ai bien trop peur. Seigneur, tiens ma main fermement afin que je ne sois pas séparée de toi. Je t’aime, Jésus. » Pendant ces six années, Ei Sook traverse des moments de joie et des moments de peine. Comme les autres prisonnières, elle connaît la faim permanente et le froid extrême. La plupart des geôliers et des gardiennes sont cruels et remplis de haine. Mais le Seigneur place aussi dans cette prison des gardiennes qui aiment Ei Sook, et qui vont jusqu’à donner leur vie à Jésus. L’une d’entre elles, Jue, est venue travailler dans la prison afin d’y rencontrer des pasteurs – elle savait en effet que la plupart des pasteurs de la région y étaient détenus. Elle désirait tellement mieux connaître Jésus qu’elle a choisi un emploi dans une prison. 27
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Grâce au témoignage de Ei Sook et à l’amour qu’elle manifeste envers les autres prisonnières, bon nombre d’entre elles placent leur confiance en Christ. Ei Sook aime de tout son cœur toutes les personnes qui sont difficiles à aimer – celles qui sont remplies de colère, qui sont sales ou orgueilleuses, celles qui souffrent de troubles mentaux… Parce qu’elle a conscience de sa propre faiblesse, elle supplie Dieu sans cesse de lui donner la force dont elle a besoin. Parmi les détenues, une femme a la réputation d’être dangereuse. Elle mord et attaque les gardiennes, et ses mains sont en permanence ligotées dans son dos. Ei Sook demande à ce qu’on l’amène dans sa cellule. Tout le monde pense qu’elle a perdu la tête, mais Ei Sook insiste. La femme entre dans la cellule. Ses vêtements sont crasseux. Elle attaque Ei Sook et les deux femmes finissent par rouler par terre. Après un certain temps passé dans la cellule, la prisonnière finit par s’endormir alors qu’Ei Sook lui tient les pieds entre ses mains pour les réchauffer. Elle dormira pendant trois jours d’affilée. Lorsqu’elle ouvre enfin les yeux, elle avale sa nourriture mais continue à regarder méchamment Ei Sook. Quelques temps plus tard, en se remémorant ces événements, Ei Sook écrira : J’ai compris que Jésus lui-même était impliqué dans ce combat. J’étais incapable d’exprimer toute ma reconnaissance tellement elle était immense. Naturellement, j’aurais tout fait pour ignorer cette femme, mais c’est exactement l’inverse qui s’est passé ! Je serrais dans mes bras une femme extrêmement sale. Seule la miséricorde de Jésus a pu me rendre capable d’agir comme j’ai agi.
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Esther Ahn Kim : La véritable force
Jésus savait que naturellement j’étais égoïste, faible, malhonnête, pécheresse – et pourtant, il m’a traitée comme quelqu’un de précieux et d’important. Comment donc aurais-je pu ignorer cette femme simplement parce qu’elle paraissait si sale à mes yeux ? Aux yeux de Jésus, il n’y avait pas de différence entre elle et moi. Lorsqu’un jour, Ei Sook dit à cette femme qu’elle l’aime, un miracle a lieu dans le cœur d’Ei Sook : elle se rend brusquement compte que c’est vrai ! Elle aime véritablement cette prisonnière, elle apprécie même de passer du temps avec elle comme avec une amie ! Ei Sook lui donne ses repas, brosse ses cheveux emmêlés, lui dit qu’elle est belle. Les gardiennes de la prison remarquent un changement chez la détenue 92. Mais un changement encore plus conséquent se produit lorsqu’Ei Sook lui parle de la bonne nouvelle de Jésus. La détenue 92, convaincue de son péché et certaine que seul Jésus peut l’en sauver, donne sa vie à Christ. Elle sera exécutée pour ses crimes, mais elle fera face à la mort sans peur, sachant qu’elle rencontrera enfin son sauveur face à face. Il y aurait bien d’autres choses à dire sur les années qu’Ei Sook passe en prison ! De nombreuses personnes sont touchées et transformées par l’œuvre du Saint-Esprit à travers elle. Mais le 15 août 1945, le Japon capitule et tous les prisonniers sont libérés. Malheureusement, les souffrances de la Corée ne prennent pas fin pour autant. Le pays est en effet partagé en deux : la Corée du Nord et la Corée du Sud. Aujourd’hui, en Corée du Nord, les chrétiens continuent à être persécutés à cause de leur foi. Lorsqu’elle sort de prison, Ei Sook apprend que le feu est effectivement tombé du ciel sur le Japon… sous la forme de bombes. Des villes entières ont été consumées par le feu. Elle pleure les nombreux 29
Courageuses
Japonais morts sans jamais avoir entendu l’Évangile ; elle se demande aussi ce qui est arrivé aux dirigeants qui avaient ignoré ses avertissements et s’étaient moqués d’elle. Aujourd’hui encore, Dieu continue de se servir de la vie et du témoignage d’Ei Sook pour sa gloire. Elle a raconté ses aventures dans un ouvrage qui est rapidement devenu le livre religieux le plus vendu de tous les temps en Corée – avant de devenir aussi un best-seller au Japon. Cependant, Ei Sook ne veut surtout pas que les gens pensent qu’elle est quelqu’un d’extraordinaire : son histoire est celle d’un Dieu fort qui décide d’agir à travers une femme faible. Elle écrit : Quel privilège incroyable pour une personne comme moi – pécheresse, égoïste, prétentieuse, avec tant de défauts – de recevoir un ordre de Dieu, le Seigneur des cieux et de la terre. Cela m’a bouleversée ! Malgré ma faiblesse et mon péché, le Seigneur m’avait fait la grâce de marcher et de travailler avec lui.
La véritable force Il existe différentes manières de se montrer « fort ». On peut être fort physiquement et être capable, par exemple, de soulever une lourde charge. On peut être fort mentalement et résister dans les difficultés, ne pas abandonner même lorsqu’on en a très envie. Parfois, on s’imagine qu’être fort spirituellement consiste à ne pas pécher et à toujours aimer ceux qui nous entourent. L’apôtre Paul évoque le sujet de la force spirituelle dans 2 Corinthiens 12. Alors qu’il traversait une épreuve difficile, 30
Esther Ahn Kim : La véritable force
il avait supplié Dieu de lui donner la force et de l’en délivrer. La réponse de Dieu avait été bien différente de celle à laquelle il s’attendait : [Dieu] m’a dit : « Ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse. » Aussi, je me montrerai bien plus volontiers fier de mes faiblesses afin que la puissance de Christ repose sur moi. C’est pourquoi je me plais dans les faiblesses, dans les insultes, dans les détresses, dans les persécutions, dans les angoisses pour Christ, car quand je suis faible, c’est alors que je suis fort. 2 Corinthiens 12.9-10 – S21
Ei Sook a incarné cette réalité dans sa vie. Elle voyait constamment sa propre faiblesse et savait qu’elle avait besoin d’une force qui ne se trouvait pas en elle : la puissance de Jésus-Christ. Il y a peu de chances que tu sois un jour jeté en prison à cause de ta foi. Dieu ne te demandera peut-être pas d’aller interpeler les dirigeants de ton pays. Mais une chose est sûre : tu auras de nombreuses occasions de voir clairement ta propre faiblesse, à l’école, dans tes relations avec tes amis et ta famille, ou dans ta lutte contre le péché. Sache que c’est une très bonne chose. Car lorsque nous sommes faibles, Dieu est fort en nous ! La puissance qui était à l’œuvre en Ei Sook alors qu’elle se trouvait en prison est à l’œuvre en toi en ce moment même. Pas besoin de faire quelque chose d’extraordinaire pour l’obtenir : demande simplement à Dieu que sa puissance puisse agir au travers de ta vie, et rends-lui gloire lorsqu’il le fait ! 31
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Questions 1. Lis Philippiens 2.13-16. À quoi Paul compare-t-il les chrétiens ? Que sommes-nous censés faire ? Comment peut-on le faire ? 2. En quoi cela ressemble-t-il à ce que Ei Sook pensait dans le train, lorsqu’elle regardait le ciel étoilé ? Comment a-t-elle obéi à l’enseignement de Philippiens 2.13-16 ? 3. Dans quel endroit sombre Dieu t’a-t-il placé afin que ta foi brille ? 4. Lis Jean 8.12. D’où vient notre lumière ? 5. T’arrive-t-il d’être découragé par ton péché et ta faiblesse ? As-tu peur de partager la bonne nouvelle de Jésus avec d’autres personnes ? De quelle manière le récit d’Ei Sook pourrait-il t’encourager à le faire ?
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Je suis la lumière du monde. Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura au contraire la lumière de la vie. JEAN 8.12 – S21
Comment peut-on espérer que la justice triomphe un jour si aussi peu de gens se donnent sans compter à une noble cause ?
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SOPHIE SCHOLL À la recherche de justice
Sophie Scholl naît le 9 mai 1921 et grandit en Allemagne, dans une ville entourée de forêts. Avec ses frères et sœurs, elle passe ses journées à vivre un tas d’aventures, à cueillir des baies, ramasser des champignons et jouer des pièces de théâtre... avec pour seul public les arbres et les buissons de la forêt. Elle aime nager et passer du temps au bord de l’eau. Au printemps, les rues de sa ville sont souvent inondées, et il est alors bien difficile de se déplacer à pied. Son père finit donc par acheter des échasses pour ses enfants, qui s’en servent pour traverser les rues comme des aventuriers. Mais aucune de ces aventures ne prépare Sophie Scholl à affronter ce qu’elle devra endurer quelques années plus tard. Alors qu’elle n’a que douze ans, un nouveau dirigeant arrive au pouvoir en Allemagne. Il s’appelle Adolf Hitler. 35
Courageuses
De nombreux Allemands pensent que leur situation va s’améliorer grâce à ce nouveau responsable politique, mais le père de Sophie n’est pas de cet avis. Il encourage ses enfants à faire bien attention à ce qui se passe : Hitler et ses représentants privent de plus en plus les Allemands de leurs libertés, et surtout de la liberté d’avoir leurs propres opinions, leurs propres idées, leurs propres croyances. Plus le temps passe, plus le gouvernement allemand dicte à ses citoyens ce qu’ils ont le droit de penser et de dire. Comme ses frères et sœurs, Sophie est bientôt obligée de rejoindre les Jeunesses hitlériennes, mouvement au sein duquel on lui enseigne ce qu’elle doit penser et dire. Les enfants sont constamment maintenus occupés de telle sorte qu’ils n’ont pas le temps de discuter entre eux ou de développer leurs propres idées. Dans ces clubs, on leur explique que certaines personnes n’ont pas autant de valeur que d’autres. On leur enseigne donc à mépriser certains groupes de personnes. Sophie voit ainsi plusieurs de ses camarades de classe se faire exclure de ces clubs simplement parce qu’ils sont Juifs. Au début, les gens ne s’inquiètent pas trop de la situation mais bientôt, tous les Juifs sont obligés de porter une étoile de David, cousue sur leurs vêtements, et d'apposer des pancartes sur la devanture de leurs boutiques pour que tout le monde sache qu’ils sont Juifs. Puisque les gens ne sont pas encouragés à penser par eux-mêmes, ils ont tendance à faire pleinement confiance à leurs responsables, y compris quand ceux-ci leur disent de toujours se méfier de leurs voisins juifs… La plupart des Juifs sont finalement contraints de quitter leurs maisons pour aller vivre dans un ghetto, quartier de la ville 36
Sophie Scholl : À la recherche de justice
qui leur est réservé. Ils ont le droit de se promener dans la ville, mais seulement pendant certaines heures de la journée ; des hommes malveillants les surveillent constamment. Dans les rues, adultes et enfants les insultent... Imagine que pendant des années on te dise que ton voisin est quelqu’un de mauvais ! Que tous les jours, tu vois les gens de ton quartier insulter ton voisin et sa famille... Peut-être que toi aussi tu te serais joint aux cris et aux insultes ! Tu penserais peut-être que c’est normal, après tout. Malheureusement, c’est ce que vivaient de nombreux jeunes enfants en Allemagne à cette époque. Finalement, beaucoup de Juifs ont commencé à disparaître. On a alors dit aux Allemands que leurs voisins juifs avaient été déplacés dans des camps de travail, où ils fabriquaient des munitions pour la guerre qui opposait alors l’Allemagne à d’autres pays. C’était la Seconde Guerre mondiale. C’était en partie vrai, mais ce qu’on cachait à la population allemande, c’était que ces camps servaient aussi à tuer des millions de Juifs et autres groupes de personnes dont Hitler et ses dirigeants voulaient se débarrasser. Sophie comprend que quelque chose ne tourne pas rond... Elle en a assez qu’on lui dise toujours ce qu’elle doit penser. Plus elle apprend de choses au sujet d’Hitler et de son équipe, plus elle est convaincue qu’il faut à tout prix l’empêcher de réaliser ses projets. À l’âge de vingt-et-un an, elle rejoint son frère Hans et ses amis au sein d’une organisation secrète : « La Rose blanche. » Ensemble, ils rédigent, impriment, puis distribuent des tracts remettant en question ce que le gouvernement veut faire croire à ses citoyens. Les membres de La Rose blanche encouragent les gens à ouvrir les yeux et à prendre conscience de ce qui 37