sommaire Juin 2016 N° 07
04 Editorial 05 Les Buiz de couloirs 06 Leaders - Ibrahim HISSEIN BOURMA, le futur « Dangote » tchadien - Christen Juliana N’GOTTA, ingénieure et princesse des huileries ivoiriennes - Dieudonné BOUGNE, Le nouveau magnat de l’industrie camerounaise
16 In’entreprise
- Canal +, l’offensive africaine - Sotrabus, bienvenue chez le premier constructeur automobile d’Afrique centrale
25 Entretien - Armel Wilfried Mouafouo Kanouo, « Garman a un projet de développement sur le continent étalé sur 05 ans. »
29 Management - Canal 2 Movies, la chaine désormais portée par un professionnel du cinéma - Lancer une start up, le package organisationnel utilisé par les exemples qui ont réussi
35 Cahier thématique - Sport business
56 Focus auto - Moteurs TDI, quelle crédibilité sur le continent africain ?
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59 Tendances Dieudonné BOUGNE, le nouveau magnat de l’industrie camerounaise
- Au féminin, choisir sa robe en fonction de sa morphologie
61 Découverte - Numérique, des applications made in Africa qui vont impacter la vie du continent
Business Management 03 Juin 2016 AFRICA
Édito Egaux au départ, qu’est ce qui fait la différence ?…les risques
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l ne passe de jour sans qu’on n’entende des débats aussi bien dans les médias qu’entre les politiques autour des notions de crise, de pauvreté et de chômage. Les thèses les plus avancées sont structurées autour de l’incapacité des Etats à offrir un emploi et des conditions de vie décentes pour les populations. Ces positions qui peignent un monde idyllique et très éloigné de la vérité sont surtout portées par des pensées néo-marxistes et stigmatisent la société et ses équilibres. Elles s’accrochent sur les notions de justice et d’égalité comme base de leur raisonnement. L’essentiel n’est pas d’où l’on part, mais où on arrive. Que ce soit au travers des exemples des entreprises ou celui des serials entrepreneurs, l’égalité présumée initiale est très vite battue en brèche dans la suite du chemin. Qu’est ce qui justifie cette différenciation des résultats et de niveaux de risques ? La rédaction, ce mois, a pris le pari d’aller rencontrer des profils assez particuliers qui vont en inspirer beaucoup. Ibrahim Hissein Bourma, le jeune Tchadien qui a 27 ans, est déjà à la tête d’une holding de 20 milliards de F CFA. La jeune ivoirienne de 30 ans, Christen N’Gotta, est la première femme à avoir été directrice d’une usine industrielle en Côte d’Ivoire. Ces deux, au-delà du talent et des études réalisées, se sont mis dans des challenges. Loin de facilité, ils ont accepté de braver les étapes et de prendre les risques. Dieudonné Bougne, le PDG du groupe BOCOM, quant à lui, est la preuve que les selfs made men incarnent un modèle qui réussit encore et toujours. Il ne se donne pas de limite et garde sa soif et son envie. L’énergie qui l’anime est alimentée par sa volonté d’apporter des solutions à l’Homme pour mieux vivre. Nos trois leaders du mois nous permettent de comprendre que, bien qu’ayant à la base la même humanité, la réussite se construit d’efforts, de sacrifices et surtout de risques. Si vous ne prenez pas de risques, vous
Management 04 Business Juin 2016
AFRICA
risquez de faire partie de ceux qui racontent et non ceux qui font l’histoire. Carlos Ghosn, le PDG de Nissan Renault, disait : « Si vous faites la même chose tous les jours, vous aurez les mêmes résultats ». Pour réussir, osez changer, devenez un « risqueur ».
Carlos Ghosn, le PDG de Nissan Renault, disait : « Si vous faites la même chose tous les jours, vous aurez les mêmes résultats ». Pour réussir, osez changer, devenez un « risqueur ».
Les risques sont aussi partagés par les grandes réussites entrepreneuriales. En 1984, Canal + a osé se lancer dans la télévision payante, alors que les autres étaient au tout gratuit, un modèle financé par la redevance. Aujourd’hui, sous la pression de la concurrence, la chaîne cryptée a pris le pari de l’Afrique. Et que dire de SOTRABUS qui vient résoudre le déficit de transport des personnes en zone CEMAC en construisant les bus à Douala ?. Fidèles à notre démarche qui est celle de vous apporter chaque mois des réponses aux problématiques posées, votre magazine s’enrichit encore ce mois d’une nouvelle rubrique : « Cahier thématique ». Alors que le monde du sport connaît en cette période deux grands événements majeurs, la Copa America et L’Euro de Football en France, la rédaction s’est intéressée au football-business. Sport roi en Afrique et dans beaucoup de parties du monde, ce sport éprouve d’énormes difficultés à se professionnaliser sous nos latitudes. Il a du mal à nourrir son homme. Au travers de ce cahier, le magazine apporte des pistes concrètes pour en faire une économie viable et rentable. Moïse Katumbi, le milliardaire et visionnaire président du Tout Puissant Mazembe en RDC, en couverture de ce mois, est aujourd’hui un exemple de réussite dans le management du football.
La réussite ne se décrète donc pas, elle se construit et sa base reste et demeure la prise de risques. Martial EBODE, Directeur de Publication
Les buiz de couloirs Cameroun Kribi reçoit la technologie 4 G
CONGO Vérone Mankou lance Elikia HD Les tablettes Elikia HD sont disponibles sur le marché depuis le 30 mai. Verone Mankou, l’inventeur, a procédé à son lancement officiel le 23 mai. Ce terminal mobile coûte 99 900 F cfa. Les étudiants peuvent se procurer cette tablette en payant tous les jours la somme de 500 F cfa. Ce nouveau produit sort 05 ans après les tablettes Way-C. Elikia HD se particularise par le fait qu’il possède un écran de 7, 58 pouces, une mémoire interne de 16 Go, une caméra frontale et une caméra arrière extensible à 05 mégapixels.
L’opérateur de la téléphonie mobile a annoncé, à la mi-mai, l’extension de son réseau 4 G LTE dans la ville de Kribi dans la Région du Sud. Connectée depuis le 29 avril, la ville de Kribi porte à 5 le nombre de cités camerounaises couvertes par cette technologie après celles de Bamenda, Douala, Buea et Yaoundé, rendues opérationnelles depuis décembre 2015. C’est près de 50 % des abonnés de MTN (sur 10 millions d’abonnés) qui sont connectés. C’est près de 60 milliards d’investissement consentis par MTN Cameroun en 08 mois.
Le Cameroun actionnaire d’Afrimedia Group Le Cameroun est actionnaire du groupe Afrimedia à hauteur de 10 %. Le présidentdirecteur général de ce holding, Constant Nemale, a fait cette annonce à l’occasion du forum « Investir au Cameroun » tenu au mois de mai à Yaoundé. Immatriculé au Luxembourg, ce congloméra possède la chaine de télévision Africa 24, le magazine Africa 24 Magazine et l’agence d’information Afrimedia News Agency. Le PDG annonce le lancement dans les prochains mois d’une chaine anglophone à partir du Nigéria, d’une chaine lusophone et hispanophone à partir de Malabo et d’une chaine de sport (Africa 24 Sport).
Nigeria Dangote Cement reçoit un prêt chinois de 02 milliards de dollars Us 02 milliards de dollars US. C’est le montant du prêt accordé à Dangote Cement, leader africain de la production du ciment, par l’International Commercial Bank of China. D’après le PDG de l’entreprise, Aliko Dangote, cet argent va servir à construire deux nouvelles usines au Nigeria. L’une d’elle se trouve à Okpella, dans l’Etat fédéré d’Edo. L’objectif est d’accroître la production de ce matériau de construction sur le continent. Dans l’ensemble des 12 pays africains où il opère, Dangote Cement produit annuellement environ 81 millions de tonnes de ciment.
Arthur Zang annonce une usine de montage des cartes magnétiques à Yaoundé Une usine de montage des cartes magnétiques verra le jour au quartier Nsam-Efoulan à la fin du mois de juillet 2016. L’annonce est du promoteur, l’ingénieur Arthur Zang. Le patron de la société Himore Medical et inventeur du cardiopad précise que l’installation de cette fabrique va coûter 100 millions F cfa et permettre d’employer 300 personnes. Les fonds qui seront dépensés proviennent de la vente du cardiopad. Le camerounais âgé de 28 ans vient par ailleurs de remporter l’Africa prize for engeneering innovation, au terme d’une compétition de la Royal Academy of engeneering du Royaume-Uni. Il a remporté ce challenge auquel ont participé près de 900 personnes. Il a reçu pour cette victoire 25 000 livres sterling, soit 23 millions de F cfa et une médaille en or.
Business Management 05 Juin 2016 AFRICA
Leaders Ibrahim Hissein Bourma, le futur « Dangote » tchadien Il n’a que 27 ans et trône déjà sur un holding qui comporte trois entreprises, emploie 600 personnes et nourrit le rêve d’être un géant de l’industrie du textile en Afrique. Sur les pistes d’un rêveur au pays du Toumaï. Par Hindrich ASSONGO
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maginez un pays où l’entrepreneuriat ne figure pas parmi les priorités de la plupart des jeunes. Imaginez qu’au sein de cet Etat, un jeune homme crée une entreprise opérant dans le génie civil, à…20 ans. Imaginez ensuite que sept ans plus tard, il dirige un groupe dont le chiffre d’affaires dépasse les 30 millions de dollars Us (environ 20 milliards F CFA) et compte 600 salariés. Vous vous dites bien qu’un tel patron, qui a l’avenir devant lui, n’a pas l’intention de s’arrêter aux trois entreprises qu’il possède. En poussant votre imagination loin, vous arrivez, osons-nous prétendre, à une conclusion : ce gars là sera « Dangote ». Son illustre aîné, qui a en fait l’âge pour être son père, n’a
Management 06 Business Juin 2016
AFRICA
donc qu’à tendre l’oreille vers le Tchad. Son futur challenger y est né, peut-être. Les deux partagent d’ailleurs une attitude : la discrétion. Ils ont en commun d’avoir tous les deux bénéficié d’un coup de pouce familial au départ. Ce toumaï a un nom : Ibrahim Hissein Bourma. Son groupe, la Oum Alkheir Holding. Rencontrer celui que la presse tchadienne décrit comme étant très ingénieux, figure parmi les exercices du parcours du combattant. Entre Dubaï, Montréal – villes dans lesquelles il compte ouvrir des boutiques pour les produits d’une de ses entreprises– et N’djamena où est installé son empire, difficile de savoir sous quels cieux il se trouve. Le jeune homme
de 27 ans, déjà marié, est décrit comme étant quelqu’un de timide et qui n’aime pas vraiment s’afficher. Ce qu’il dit lui-même, c’est qu’il vit de temps en temps à Dubaï. « C’est dans l’objectif de me faire des relations dans le milieu des investisseurs internationaux », justifie-t-il. L’Anglais qu’il parle sonne pour lui comme un atout. En réalité, il rêve grand. Il se dit ouvert « à toutes nouvelles idées et aux personnes qui cherchent un investisseur. J’étudie toutes les propositions sérieuses et je fais faire des études de marchés pour chacun de mes projets. J’aime les risques, mais seulement lorsqu’ils sont maîtrisés et calculés ».
Leaders Ligne de départ
L’histoire d’entrepreneur d’Ibrahim Hissein Bourma s’écrit à partir de 2009. De retour de France où il a obtenu un diplôme en finances et comptabilité après deux années d’études post-baccalauréat, il travaille d’abord dans l’entreprise familiale, Oum Alkheir, fondée par son père. L’idée de rester collé à l’empire familial ne le séduit pas vraiment. Il prend sa part d’héritage et décide de mener une aventure solitaire. « Je fais fructifier mon héritage. J’ai eu beaucoup de chance, mais je ne veux pas m’arrêter-là. Je veux être partout où des opportunités se présentent », affirme-t-il. Son premier bébé naît la même année. Il s’appelle Oum Alkheir Construction. L’entreprise nouvellement créée se spécialise dans le secteur des bâtiments et travaux publics, très lucratif au Tchad. De façon concrète, elle fait dans l’aménagement des terrains, la réparation et l’entretien des routes et la construction des forages d’eau. Dans un pays où les sociétés exerçant dans le domaine ne courent pas les rues, elle sous-traite faci-
lement dans les gros marchés gagnés par les multinationales françaises et égyptiennes. Il est vrai que les ressorts du jeune PDG au palais présidentiel – c’est sa belle famille - sont un atout. Sur le terrain, son entreprise fait ses preuves. L’argent entre. Le chiffre d’affaires se multiplie. Le promoteur marche sur les pas de son père, à qui l’on doit la mise sur pied de la toute première entreprise de construction dans le pays dirigé par Idriss Déby Itno. Le succès dans le secteur du génie civil montre à Ibrahim Hissein Bourma qu’il peut envisager une carrière de serial entrepreneur. Le chef de l’Etat tchadien, Idriss Deby Itno, le nomme le 26 juillet 2011 au poste de directeur commercial de la société des hydrocarbures du Tchad. Cela n’empêche pas son ordinateur de grouiller de projets. Tiens, il se souvient qu’il est un passionné d’automobile depuis sa naissance. Une petite étude de marché lui démontre qu’au Tchad, le besoin en voitures de luxe et de tourisme a du mal à trouver une satisfac-
tion certaine. Il crée Iby Motors. « Iby » sonne comme le diminutif de son prénom « Ibrahim ». « Iby Motors, c’est l’importation automobile de plusieurs marques au Tchad. Nous importons les véhicules Nissan, Toyota, Kia, Hyundai, Mercedes et BMW. Iby Motors est ainsi le plus grand garage au Tchad en offrant un maximum de garanties à ses clients, ce qui lui vaut la confiance des administrations, des collectivités publiques, des entreprises pétrolières et des particuliers ». Telle est la carte d’identité de l’entreprise, telle que décrite par son fondateur. Mais Iby Motors ne fait pas qu’importer. Elle assure aussi la maintenance « en suivant à la lettre les exigences des constructeurs et en apportant un suivi efficace au travers de conseils émanant de professionnels du secteur. Nous prenons en charge la réparation automobile directement dans nos ateliers, un garage moderne de haute technologie. » En l’espace de deux années, la société devient le premier concessionnaire automobile et le plus grand garage du Tchad.
Business Management 07 Juin 2016 AFRICA
Leaders
Naissance du holding Pour éviter la dispersion des ressources et se construire une taille respectable sur le plan international, Ibrahim Hissein Bourma décide de créer un holding pour rassembler toutes ses entreprises. Ainsi naît la Oum Alkheir Holding. Oum Alkheir Construction, la boîte consacrée aux travaux de génie civil, intègre le groupe sous le nom de : Impérial Construction. Pour lui, c’était une opération nécessaire. Car, dit-il, « Imperial construction se voit ainsi doté de moyens supplémentaires lui permettant de se développer dans les secteurs qui sont les siens dans la zone CEMAC. Bien que nous conservions le cœur de notre métier axé sur la préparation des terrains, la réparation et l’entretien des routes et les forages d’eau, notre volonté est d’élargir nos activités afin de confirmer notre place d’acteur majeur dans le secteur du BTP. Notre intégration dans Oum - Alkheir Holding nous ouvre de nouvelles portes. Ces
Management 08 Business Juin 2016
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opportunités sont d’autant plus nombreuses que le groupe entend lui aussi diversifier les activités de ses deux filiales tant du point de vue géographique qu’en matière de produits et services ». Imprerial Construction pèse à ce jour pour 80 % dans le chiffre d’affaires du groupe. L’histoire ne s’arrête pas là. Ibrahim Bourma a toujours faim. Il se prend pour le messie du Tchad. Il souhaite en finir avec l’image négative qu’on a sur les capacités des tchadiens à l’étranger. Pour ce faire, il lui faut s’attaquer à un secteur qui fait dans la transformation des matières premières. « J’essaie de relancer l’industrie au Tchad, car tout reste à faire, dans le textile, dans l’agroalimentaire, le cuir. Alors que la matière première est à portée de main, le Tchad n’a pas encore d’industrie textile. Je compte y remédier », affirme-t-il. Il passe de la parole aux actes
en créant Iby Fashion, qui intègre le holding dès sa naissance. Le pays est l’un des plus gros producteurs de coton en Afrique. A son démarrage, Iby Fashion choisit le créneau de la mode de luxe. Elle importe des vêtements des grandes marques pour les distribuer à N’djamena. Mais très vite, elle ouvre ses ateliers pour fabriquer sa propre collection sous la marque « Iby fashion ». Les spécialistes de la mode sur le plan international lui prédisent d’ores et déjà un avenir radieux. C’est pour écouler les produits de cette collection qu’Ibrahim Hissein Bourma veut ouvrir des boutiques à Dubaï et à Montréal. Et dire qu’il n’a que 27 ans. Et si on se projetait dans 32 années, c’est-à-dire quand il aura 59 ans, l’âge actuel d’Aliko Dangote. Parions qu’il aura au minimum la taille que le nigérian présente en 2016.
Leaders Christen Juliana N’GOTTA, ingénieure et princesse des huileries ivoiriennes Elle a 30 ans. Elle est connue en Côte d’Ivoire pour être la première femme à qui est revenue la lourde tâche de diriger une usine de production d’huile de palme. Tout en poursuivant sa carrière chez Palmafrique, l’entreprise qui lui a donné sa chance, elle rêve de lancer des agro-industries en milieu rural dans l’objectif d’autonomiser la femme. Par Hugues EBACKA
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hez Palmafrique, une entreprise agro-industrielle ivoirienne d’économie mixte au capital de 5.714.880.000 F cfa, il y a des employés. Mais il y a surtout Christen Juliana N’Gotta. En octobre 2013, elle n’a que 27 ans, lorsque le top management décide de faire d’elle le chef d’une de ses trois huileries, notamment celle d’Eloka (Bingerville). C’est la première femme à qui revient de telles responsabilités au pays des éléphants. Dès sa prise de fonction, elle sait qu’« être une femme ne donne pas droit à des privilèges particuliers dans le monde du travail ». Elle le pense d’autant plus que ses collaborateurs ne lui donnent pas un chèque en blanc. C’est donc un véritable challenge. Au quotidien, elle doit « coordonner, animer et contrôler toutes les activités de production d’huile de palme et de palmistes dans les meilleures conditions de rendement et de respect des normes définies. » Elle doit surtout manager une équipe de 70 personnes. Chef d’huilerie, Christen Juliana N’Gotta l’aura été pendant 15 mois. Durant tout son bail, elle commence toutes ses journées à 07 heures. Elle fait d’abord le tour de l’usine. Elle s’assure que la quantité des régimes est suffisante, que les machines
fonctionnent normalement et que la réserve d’huile peut approvisionner le marché. Pour se faire accepter par
Le Baccalauréat en poche, Juliana N’Gotta décide de ne pas se détourner de son domaine de prédilection. Elle est admise à l’Institut national Polytechnique Houphouët Boigny de Yamoussoukro. Après cinq années d’études, elle obtient à 25 ans, le diplôme d’ingénieur industriel, avec une option en mécanique et automatismes industriels. Une nouvelle vie commence
ses 70 subalternes, elle évite de donner des ordres. Elle préfère cultiver un esprit de famille, une sorte de groupe où chacun est solidaire de l’autre. Tout le monde se serre la main. Le chef prend les nouvelles de la famille de chaque travailleur. Très vite, l’équipe adhère et les résultats suivent. Quand on lui demande de faire le bilan de son passage à ce poste, cette fille de cheminot indique d’abord qu’il s’agissait d’un défi. « Néanmoins, je peux affirmer avoir démystifié la fonction. J’ai laissé la porte ouverte à toutes les jeunes femmes qui veulent exercer le métier. Dès lors, être chef d’usine n’est plus la chasse gardée des hommes », affirme-t-elle aujourd’hui avec fierté. Depuis janvier 2015, Juliana N’Gotta poursuit sa carrière chez Palmafrique, mais assise sur un autre siège. Elle est responsable des métho-
des et approvisionnements à la direction générale. Au regard de ses nouvelles responsabilités, il ressort que c’est une promotion. « Je suis chargée d’optimiser les process de production (équipements d’installation, méthodes, ressources humaines) dans le respect de la réglementation et des règles d’hygiène et sécurité. Je définis la politique des achats et supervise les opérations d’approvisionnement pour les huileries de l’entreprise. Je travaille en étroite collaboration avec la cellule en charge des achats et les responsables des magasins de nos usines », décrit-elle. Désormais, l’ancienne lycéenne de Bouaké a une vue panoramique sur toutes les usines de son employeur. Elle poursuit chez le géant ivoirien de l’huile de palme, un séjour entamé en janvier 2013. Elle y a été recrutée comme chef de service de la maintenance à l’huilerie d’Eloka. A ce poste, elle a douze personnes sous ses ordres. Elle a la charge de « planifier, coordonner et contrôler tous les travaux effectués par le personnel de la maintenance ; maintenir en bon état tous les équipements de production et installations; assurer les intérims du chef d’huilerie en l’absence de celui-ci ». C’est en s’acquittant de toutes ces tâches qu’elle a mis tout le monde d’accord sur son talent.
Business Management 09 Juin 2016 AFRICA
Leaders Genèse d’un parcours Pour comprendre l’ascension de Christen Juliana N’Gotta, il faut remonter le temps. Elle voit le jour le 27 février 1986 à Bouaké, la grande ville du nord de la Côte d’ivoire. Très vite, ses parents remarquent sa grande passion pour les machines. En 2002, elle décroche le Brevet d’études du premier cycle au lycée des jeunes filles de Bouaké, avec la mention « Très bien ». Comme dans la plupart des pays francophones d’Afrique subsaharienne, le système éducatif ivoirien est calqué sur celui de la France. Il faut faire un choix après l’obtention du BEPC, pour poursuivre en classe de seconde. De l’option de l’impétrant, dépend son avenir. Dans le listing, trois séries : la scientifique, la littéraire et la technique. La der-
nière évoquée est subdivisée en deux : l’enseignement technique industriel et celui qui est commercial. Conseillée par sa famille, éclairée par sa passion, Juliana opte pour la technique industrielle, précisément la F3. Ce choix l’oblige à migrer pour le lycée technique relais de Bouaké. C’est là qu’elle obtient en 2005, son Baccalauréat F3. Celuici correspond à l’électrotechnique, l’électricité, l’électronique et les études d’équipements. Une spécialité dans laquelle les femmes sont plutôt rares. Le Baccalauréat en poche, Juliana N’Gotta décide de ne pas se détourner de son domaine de prédilection. Elle est
Le 09 octobre 2014, Gertal Roubaud, administrateur d’une entreprise industrielle, publie un post pour saluer le talent de cette ingénieure : “Nos contacts ont porté sur des technologies les plus avancées pour aboutir à une optimisation en maintenance préventive, et donc, une meilleure productivité de l’importante usine qu’elle dirige. Durant nos rencontres, Christen N’gotta s’et montrée très à l’aise devant les technologies que nous utilisons. Elle en a d’ailleurs une connaissance développée”. Management 10 Business Juin 2016
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admise à l’Institut national Polytechnique Houphouët Boigny de Yamoussoukro. Après cinq années d’études, elle obtient à 25 ans, le diplôme d’ingénieur industriel, avec une option en mécanique et automatismes industriels. Une nouvelle vie commence. La nouvelle ingénieure a le choix entre plusieurs filières. Dès janvier 2011, elle démarre chez AIS Group, spécialisé dans la distribution des pièces de rechange industrielles. Elle travaille notamment pour WAF-Meta, la filiale de ce holding qui s’occupe
de la fabrication mécanique. D’abord comme ingénieure des projets, ensuite comme chargée du suivi du contrôle et de la qualité. Elle arrête cette aventure en juin 2012. Elle file chez l’African Industrial Services Group à Abidjan. Là, en tant qu’ingénieurconseil, on la charge de commercialiser des équipements de protection individuelle et du matériel électrique. Un pari qu’elle réussit en six mois, avant d’être happée par Palmafrique en janvier 2013.
Leaders L’avenir chez Palmafrique logies les plus avancées pour aboutir à une optimisation en maintenance préventive, et donc, une meilleure productivité de l’importante usine qu’elle dirige. Durant nos rencontres, Christen N’gotta s’et montrée très à l’aise devant les technologies que nous utilisons. Elle en a d’ailleurs une connaissance développée ».
Chez Palmafrique, entreprise créée en avril 1997, l’ingénieure, âgée aujourd’hui de 30 ans, est déjà à 03 années de service, pour trois promotions. De quoi développer un attachement pour l’agro-industrie. Un penchant qu’elle justifie : « Je n’ai pas choisi l’agro-industrie, c’est plutôt elle qui m’a choisie. Elle s’est présentée à moi comme une belle opportunité que j’ai su saisir. Et mon aptitude à toujours vouloir bien faire toutes choses a fait le reste ». Mais pour combien de temps encore cette entreprise industrielle pourra garder ce talent ? La question se pose dès lors qu’on lit le nombre de recomman-
dations dont la native de Bouaké fait l’objet. Par exemple, le 07 septembre 2015, Jacques Nguessabe, General Plant Manager chez Ackees Côte d’ivoire, la contacte via son compte sur le réseau social linkedin. Il écrit : « A la lecture de ton profil, je suis émerveillé par ton cursus professionnel. C’est pourquoi je voudrais te recommander à mon partenaire, Markus Keller, un industriel fabricant des presses pour les huileries ». Bien avant, le 09 octobre 2014, Gertal Roubaud, administrateur d’une entreprise industrielle, publie un post pour saluer le talent de cette ingénieure : « Nos contacts ont porté sur des techno-
Sur son avenir chez Palmafrique, elle dit ne pas être en mesure de se prononcer de façon objective. « En effet, Palmafrique est une entreprise en perpétuel mouvement qui offre de nombreuses occasions d’apprentissage. Et je compte bien mettre à profit ma présence en son sein pour me forger un caractère de grand leader ». Les années à venir vont sans doute révéler une Juliana N’Gotta entrepreneure. Elle dit avoir dans sa tête, plusieurs projets d’agro-industrie « qui visent l’autonomisation de la femme en milieu rural ». Avant d’y arriver, elle a ce message pour les jeunes de l’Afrique : « J’ai pour habitude de dire à mon entourage que rêver fait vivre et que cesser de rêver, c’est se résigner
à mourir ». Et à la fille africaine en particulier, elle demande de « cultiver l’excellence en toutes choses. Que la moindre de ses actions vise l’excellence. Et qu’elle sache que l’excellence passe par l’acceptation de soi et la détermination à apprendre des autres ». Le rendez-vous est pris pour les prochaines années. Car l’avenir d’une Côte d’Ivoire qui ose ne s’écrira pas sans celle qui a des compétences en ingénierie et management des projets. BIO EXPRESS
27 février 1986 : Naissance à Bouaké 2002 : Obtention du BEPC au lycée des jeunes filles de Bouaké 2005 : Obtention du Baccalauréat F 3 au lycée technique de Bouaké-Relais 2011 : Obtention du diplôme d’ingénieur en mécanique et automatismes industriels à l’Institut national Polytechnique Houphouët Boigny de Yamoussoukro Janvier 2011 - Juin 2012 Ingénieure de projet et chargée du suivi du contrôle et de la qualité chez AIS Group Juin 2012 - novembre 2012 : Ingénieure conseil chez African Industrial Services Group Janvier 2013 à aujourd’hui : Ingénieure chez Palmafrique
Business Management 11 Juin 2016 AFRICA
Leaders Dieudonné Bougne, le nouveau magnat de l’industrie camerounaise Il rêve de transformer une bonne partie du fer dont regorge le sous-sol camerounais. Pour cela, il vient de créer une entreprise pour les besoins de la cause. Une société qui vient étoffer son establishment, le groupe Bocom. Lequel est désormais composé de 09 dinosaures au Cameroun et 02 filiales à l’étranger. La rédaction a décidé de retracer l’itinéraire d’un chargeur de sable devenu capitaine d’industrie Par Tazessong KUMBO
La CSMC, localisée à Finfinda, comprendra trois usines reparties sur 10 hectares. Elles vont transformer 164, 9 milliards de tonnes de fer pendant 50 années, soit environ 3,3 milliards de tonnes par an. Cette transformation concerne ainsi 1/10ème du potentiel camerounais en matière de fer. Management 12 Business Juin 2016
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0 décembre 2015. Une matinée ensoleillée à Finfinda, un village situé à 40 kilomètres de Kribi, la ville du sud du Cameroun qui vient d’être dotée d’un port en eau profonde. Dans la localité rurale, le premier ministre, chef du Gouvernement, a dépêché le tout nouveau ministre des Mines, de l’Industrie et du Développement technologique, Ernest Gwaboubou. Il doit inaugurer le chantier de construction du complexe industriel et sidérurgique de la localité. Les villageois présents à la cérémonie n’ont jamais entendu parler d’industrie. Ils en verront un échantillon sur leurs terres grâce à la Cameroon Steel Manufacturing Company (CSMC), une entreprise du groupe Bocom, créée en décembre 2014 et au capital de 10 millions F cfa. Pendant la cérémonie, le président du holding en personne, Dieudonné Bougne, prend la parole. Il proclame la révolution. Ce sera une vraie industrie.
De la bouche de Dieudonné Bougne, l’on retient que la CSMC, localisée à Finfinda, comprendra trois usines reparties sur 10 hectares. Elles vont transformer 164, 9 milliards de tonnes de fer pendant 50 années, soit environ 3,3 milliards de tonnes par an. Cette transformation concerne ainsi 1/10ème du potentiel camerounais en matière de fer. Le minerai viendra des gisements miniers d’Akom II, Bipindi et Lokoundje, des localités situées dans le rayon direct des usines. Pour fonctionner à plein régime, l’entreprise va recruter 3000 personnes. Pour accompagner les riverains des gisements et des usines dans leur lutte contre la misère, 100 de leurs fils vont être recrutés pendant la phase d’installation du projet. Et parce qu’il s’agit d’abord d’une zone rurale, le problème de logements se pose. Pour y apporter une solution, une cité de 200 logements sur 50 hectares est en construction. Le tout, pour produire 500 000 tonnes de fer à béton et de tôles planes noires par an. Tout premier investisseur à développer l’industrie dans le secteur minier au Cameroun, le PDG annonce qu’il travaille sur ce vaste projet avec les sud-africains, les canadiens, les anglais et les américains. Cependant, toute l’entreprise sera pilotée par…300 ingénieurs chinois. Du jamais vu au Cameroun. Il est donc comme cela ce Bougne que « Dieu à donné ». Rien ne l’arrête. L’une de ses dernières grandes sorties remonte au 19 septembre 2015. Ce jour là, le président-directeur général du groupe Bocom, convie les autorités administratives en place dans la ville de Douala, ses partenaires, ses employés et quelques amis à une cérémonie à Yassa, quartier situé à l’entrée Est de la capitale économique du Cameroun. Ce jour là, il inaugure ce qu’il appelle « le complexe Bocom Petroleum – nouvelle dimension. » Celui-ci abrite une station-service, un espace pneumatique, une baie de vidange, un parking d’une capacité d’accueil de 200 véhicules, un bloc de dou-
Leaders ches et de toilettes ultra modernes, un supermarché avec sandwicherie moderne, un salon de thé, une salle de fête sonorisée et meublée, d’une capacité d’accueil de 1000 places assises avec service traiteur au choix et protection canines. C’est le premier complexe du genre au Cameroun, tient alors à préciser Michel Dogmo, directeur général adjoint de Bocom Petroleum. Il emploie 40 personnes d’après le DGA. La société spécialisée dans la distribution des produits pétroliers au Cameroun est par ailleurs « la première opérant dans le secteur du pétrole en Afrique sub-saharienne à acquérir la certification ISO 9001-2008 », se satisfait le DGA. Le PDG, Dieudonné Bougne, affirme quant à lui avoir « toujours choisi de servir les camerounais avec la qualité. C’est la deuxième société du groupe à acquérir la certification. Les autres vont suivre ». Bocom Petroleum S.A. compte à ce jour 60 stationsservice au Cameroun, dont 11 dans la ville de Douala. Elle emploie 1 000 personnes. D’après Jean Bernard Onguene, founder et managing director de Inova Marketing, entreprise qui s’occupe de l’image de cette structure, Bocom Petroleum est à ce jour le numéro 02 de la distribution des produits pétroliers au Cameroun, après Total. Une position, qui d’après le DGA, Michel Dogmo, est la résultante d’une démarche pouvant se résumer en quelques points: « fournir des produits et services de qualité à nos clients, être à leur écoute, accroître en permanence leur satisfaction. » De nouvelles stations sont annoncées sur le territoire national en 2016.
Le groupe Bocom
Si elle est la vitrine du groupe Bocom, Bocom Petroleum n’en constitue pas le seul élément de la chaine. Il y a derrière elle, huit autres mastodontes. La Cameroon Steel Manufacturing Company dont l’objet est la transformation du fer est la dernière née. Sa naissance montre que le PDG ne fait pas les choses à moitié. Car, le fer figure parmi les minerais que peut rechercher et trouver G-Stones Ressources, filiale créée deux ans plus tôt. Son géniteur a en effet assigné à cette dernière une activité : la recherche minière et géologique. Son site internet indique que trois projets de recherche sont en cours dans trois localités différentes : Akom 2, Bipindi (proches de Kribi), Bangangté (à l’ouest du pays). Le capital de G-stones est détenu à 70 % par Mississauga Mining and Exploration Cameroun. Dieudonné Bougne en assure la présidence du conseil d’administration. MME Cameroun est née grâce à une association avec MME, un holding canadien spécialisé dans l’exploration minière. Le chapelet des possessions du groupe Bocom dans les mines ne peut être égrené totalement que si on mentionne Harvest BTP. Celuici se déploie dans le champ de l’exploitation des carrières et agrégats de construction, tout en opérant dans le secteur des ouvrages d’art, le génie climatique, la plomberie sanitaire, et l’électricité. Cette
filiale emploie 200 collaborateurs. Bien avant les mines, le chef d’entreprise originaire de Bansoa - une destination de l’Ouest du Cameroun célèbre pour le nombre d’Hommes d’affaires qui sont originaires - a ses tentacules dans d’autres pans de l’industrie. Il en possède 06 dont les locaux se trouvent dans la zone industrielle de Bonabéri, à Douala. Il y a d’abord le recyclage. Bocom Recycling, filiale créée en 2004, s’occupe des plastiques et des batteries usées. Avec une capacité de traitement annuel de 3600 tonnes de batteries et 5000 tonnes de plastiques par an, elle produit du plomb affiné, des tuiles et pavés, des broyés et granulés de plastique. Bocom International, société mise en place en 2002, traite les déchets et fait de l’analyse des matières industrielles en laboratoire. « Les huiles usées sont collectées et traitées à partir d’une centrifugeuse. Les boues et les eaux issues de ce traitement sont acheminées respectivement à l’incinération et à la station de traitement des eaux. Le produit final appelé huile régénérée est livré dans des industries », précise la direction en charge de la communication de cette entreprise. L’entreprise a déjà glané quatre titres internationaux pour son savoir-faire. Pour clore le chapitre sur l’industrie, c’est dans le domaine de
Business Management 13 Juin 2016 AFRICA
Leaders la chaudronnerie et de la fabrication mécanique. Et cela s’appelle Bocom Industry. Créée le 1er octobre 2009, cette société fabrique les pièces mécaniques suivant le plan ou le modèle, les élingues, les lames de scie circulaires, ordinaires ou à carbure, les broyeurs et larmes de broyeurs, les silos, trémies et cuves, les carrosseries automobiles, les cuves pour stockage des hydrocarbures et autres, les citernes pour transport des produits pétroliers et autres, les auvents pour stationsservice. Dieudonné Bougne a aussi pensé au domaine des transports et de la logistique. D’où la création de International Logistic Provider. Elle exerce ses activités dans le transport des marchandises, la location des engins, la maintenance du matériel roulant, le conseil en solutions logistiques intégrées. On retrouve ses engins de génie civil sur les chantiers routiers. L’entreprise est devenue un fournisseur essentiel pour les sociétés camerounaises qui font dans l’entretien routier. Dans la description du groupe Bocom, on ne parle jusqu’ici que de ce qui existe au Cameroun. Car, le groupe Bocom, dont la direction générale se trouve à Akwa, le quartier des affaires de Douala, a deux filiales à l’étranger : une en Guinée équatoriale et une au Congo. Ce sont des extensions de Bocom International. Au total, ce sont plus 4 500 personnes qui travaillent au quotidien au service des marques Bocom. Et lorsque la CMSC fonctionnera à plein régime, ils seront de 7500 collaborateurs.
Management 14 Business Juin 2016
AFRICA
Motivations
En permanence en réflexion sur de nouvelles entreprises à créer, Dieudonné Bougne est une star sur les réseaux sociaux. Non pas parce qu’il y est actif. Mais par le nombre de commentaires louangeurs que les internautes camerounais écrivent à son endroit. Le 19 septembre 2015, dans la salle des fêtes du complexe Bocom Petroleum S.A. de Yassa, l’homme décontracté comme à son habitude, se trémousse sur la piste de danse sur un titre de samali – rythme folkorique de l’Ouest du Cameroun – composé en son honneur par l’artiste Keng Godefroy. C’est en toute lucidité qu’il affirme plus tard aux journalistes : « Vous me demandez ce qui m’anime. Je vais simplement vous dire que personne ne viendra développer notre pays à notre place. C’est nous qui devons le faire. Je suis habité par la rage du développement du Cameroun. Mon rêve, c’est de contribuer à y diminuer le chômage. Il faut montrer aux yeux du monde que nous sommes capables de transformer nos matières premières. Tout ce que je fais au pays aujourd’hui c’est pour les jeunes. Honnêtement, je n’ai pas faim. Je peux m’arreter là. Mais je me dois de continuer pour ces jeunes enfants qui sortent tous les jours des écoles ». Dieudonné Bougne sait qu’il n’est pas éternel. Mais il souhaite que son groupe lui survive. Il prend quelques dispositions pour cela. Chacune de ses quatre épouses s’occupe du département « finance » de ses entreprises. Les enfants – Il affirme en avoir sans en préciser le nombre – complètent le tableau, l’empire ayant plus de quatre satellites. Par exemple, Gaëlle Bogne tient la direction
financière de Mississauga Mining and Exploration après des études de management en Suisse. En effet, la stratégie du père – qui n’a pas traversé le cycle scolaire secondaire- consiste à envoyer les « petits Bougne » faire des études – dans les meilleures universités du monde qui leur seront nécessaires pour intégrer la gestion des affaires de leur géniteur. Normal que ce soit un des fils qui occupe le poste de président-directeur adjoint du groupe Bocom. Les directions de départements stratégiques des entreprises semblent une case de passage pour arriver à tenir le top management d’une filiale. Car, c’est bien la finalité. L’on comprendra donc que Cameroon Steel Manufacturing Company ait été confiée dès le départ à un certain… Rostand Njontu Bogne. Avec le partage des tâches, Dieudonné Bougne s’assure du pilotage, afin de maintenir le bateau dans la bonne direction. À la différence d’autres hommes d’affaires qui ont fait confiance à un seul de leurs fils, le père Bougne a éclaté les responsabilités dans son empire. Chaque ménage de ce polygame y est donc représenté. D’après nos sources, des réunions de coordination se tiennent une fois par semaine au siège du groupe, sis au Boulevard de la République, à Douala. Tous les directeurs ne sont pas toujours de son sang, à l’instar de Michel Dogmo qui s’occupe de Bocom Petroleum. Autre stratégie, l’entrepreneur voyage à travers le monde pour rechercher des partenaires, soit techniques, soit financiers. C’est ce qui lui permet la création rapide de nouvelles entreprises.
Leaders Itinéraire Mais au fait, comment arrive-t-on à bâtir un tel empire ? Par la foi en Dieu, l’honnêteté, la recherche de la qualité et le travail, répond notre homme. Car, a priori, rien ne prédestinait ce « sableur » à sa position actuelle. À 18 ans, il se retrouve à charger et à décharger des camions de sable pour 200 F cfa / jour. Engagé l’année d’après comme docker au port de Douala, il gagne entre 30 000 et 60 000 F cfa par mois. Des économies lui permettent d’acheter une machine à coudre pour raccommoder les vêtements le soir contre payement. Une activité lucrative, puisque cela permet d’ouvrir un atelier de couture. En 1982, tout en gardant son boulot de docker, il emploie 42 couturiers. La vie de l’entrepreneur commence. Le reste se bâtit au gré des opportunités. D’abord, l’achat d’un taxi et d’un camion benne pour injecter dans le circuit du transport. Ensuite, un moulin à écraser pour lequel des employés sont recrutés. Après 16 ans passés au port, il démissionne. Un homme, c’est aussi et d’abord sa femme. Madame Bougne d’alors épaule son époux dans les affaires. « Entre 1990 et 1992, ma femme effectuait des déplacements au Togo et au Bénin pour l’achat de marchandises qu’elle revendait au Cameroun », indique-til. C’est du « made in China ». Sauf qu’un jour, monsieur décide que les approvisionnements se feront désormais à la source, à Hong-Kong. Un grand voyageur se découvre. L’industrie ne trotte dans son esprit que plus tard. « En 1996, je m’associe à un industriel camerounais pour la création de
Bocam, qui récupère les huiles usagées, les décante avant la revente. Mais suite à un différend, on se sépare et je crée Bocom International en 2002. » Depuis lors, rien ne l’arrête plus. Avant, c’était la galère. Mais aujourd’hui, sa signature seule suffit à lever des fonds. À titre d’illustration, « la Société Générale du Cameroun me prête 1 milliard F cfa sans garantie, et rien qu’avec ma caution personnelle. Plusieurs banques sont à ma porte tous les jours pour proposer des offres de financement », affirme-t-il. Comme quoi, du chargeur de sable qu’il était au capitaine d’industrie qu’il est désormais, il y a eu beaucoup de travail. Sa richesse, il la partage avec ses employés et d’autres personnes issues des couches défavorisées. On lui doit entre autres choses, l’aménagement à ses frais des routes dans le troisième arrondissement de la ville de Douala. Et l’aventure continue.
À 18 ans, il se retrouve à charger et à décharger des camions de sable pour 200 F cfa / jour. Engagé l’année d’après comme docker au port de Douala, il gagne entre 30 000 et 60 000 F cfa par mois. Des économies lui permettent d’acheter une machine à coudre pour raccommoder les vêtements le soir contre payement. Une activité lucrative, puisque cela permet d’ouvrir un atelier de couture. En 1982, tout en gardant son boulot de docker, il emploie 42 couturiers. La vie de l’entrepreneur commence.
BIO EXPRESS
1982 : Docker au port, il emploie 42 personnes dans ses ateliers de couture 1996 : Création de Bocam, avec un autre industriel camerounais 2002 : Création de Bocom International S.A. et du groupe Bocom 2004 : Création de Bocom Recycling S.A. 2007 : Création de Bocom Petroleum S.A. et de Bocom International Congo 2009 : Création de Bocom Industry S.A. 2012 : Création Missauga Mining Exploration Cameroun et de G-Stones 2013 : Création de Harvest BTP et Carrières 2014 : Création de la Cameroon Steel and Manufacturing Company
Business Management 15 Mai 2016 AFRICA
In’entreprise Canal +, l’offensive africaine Bein Sport et Netflix ne font désormais plus aucun cadeau à Canal Plus sur le marché audiovisuel européen. Une situation qui, 32 ans après le lancement par le groupe médiatique de Vincent Bolloré de la première chaine française à péage, impose l’Afrique au cœur des ses nouvelles lignes managériales. Par Landry Pany NANKAP
La marque « Canal + », le produit d’une erreur de frappe C’est à la suite d’une erreur d’impression que le projet appelé Canal 4 donne un nom à une idée de création d’une première chaîne privée à péage d’origine française Canal+. Il est 8 heures, le matin du dimanche 4 novembre 1984, lorsque André Rousselet le premier président de Canal+, ouvre l’antenne. Il permet ainsi aux 186 000 premiers abonnés majoritairement des fondateurs et actionnaires de regarder le film L’As des as, avec JeanPaul Belmondo sur cette chaîne à péage consacrée au cinéma. LA chaine émet tout d’abord grâce au réseau d’émetteurs de la bande TV VHF, que TF1 a abandonné en passant à la diffusion en couleur sur la bande UHF.
D
eux, c’est le nombre de millions d’abonnés que compte la chaine traditionnelle Canal plus (Canal +) et son bouquet Canalsat, devenus les bouquets Canal+ sur le continent africain. Plus de la moitié de ce chiffre a été réalisée au cours des années 2014 et 2015. L’entreprise, par l’entremise de son ancien directeur, Bertrand Meheut, en service jusqu’au 3 septembre 2015, déclarait avoir perdu plus 840 000 abonnés en France métropolitaine en cinq ans. Grâce à l’Afrique, cette baisse de performance n’a pas trop heurté le chiffre d’affaires du groupe, un mastodonte que s’est offert la neuvième fortune française. Vincent Bolloré, puisqu’il s’agit de lui, est un personnage dont personne n’ignore le regard particulier porté sur l’Afrique. Il est devenu l’actionnaire majoritaire du groupe Vivendi, propriétaire de Canal Plus, grâce aux 66 millions de titres, soit 5,01% du capital, qu’il possède depuis septembre 2015.
Management 16 Business Juin 2016
AFRICA
Comme de nombreux secteurs, celui de la télévision payante affiche les feux au vert en termes de croissance sur le continent africain. Le nombre de familles possédant un téléviseur varie selon les pays. Mais de façon générale, on observe une augmentation conséquente de la taille du marché. Par exemple, les câblo-opérateurs approvisionnent plusieurs centaines de milliers de foyers abonnés au Cameroun. C’est la preuve que le marché potentiel est très important dans ce pays où CANAL+ propose plus de 200 chaines de télévision et radio. Une offre repartie en plusieurs formules : Tout Canal+, Evasion+, Evasion et Access. Les abonnés doivent payer entre 5000 et 40.000 F cfa par mois. Opérateur satellitaire majeur pour la partie francophone de l’Afrique, Canal+ veut plus que jamais rassembler et ressembler aux africains. Son créneau, proposer sur le continent un contenu qui met ses fils en
In’entreprise valeur. Une rupture avec les lignes éditoriales des chaines occidentales, elles qui ne s’intéressent qu’au côté chaotique de l’actualité africaine. L’une des stratégies pensées par la filiale du groupe Vivendi, consiste à créer des chaines dédiées uniquement à l’Afrique. C’est le sens à donner à l’avènement de A+, lancée le 24 octobre 2014 et dont les locaux se trouvent à Abidjan. Elle diffuse à longueur de journée des séries réalisées en Afrique, par l’Afrique et sur l’Afrique. On y regarde également
L’une des stratégies pensées par la filiale du groupe Vivendi, consiste à créer des chaines dédiées uniquement à l’Afrique. C’est le sens à donner à l’avènement de A+, lancée le 24 octobre 2014 et dont les locaux se trouvent à Abidjan. Elle diffuse à longueur de journée des séries réalisées en Afrique, par l’Afrique et sur l’Afrique. On y regarde également des programmes de divertissement. Elle est aidée dans sa dynamique par le fait que des pays tels que le Nigeria et l’Afrique du sud ont déjà réussi à prouver leurs capacités à réaliser des contenus de qualité supérieure.
des programmes de divertissement. Elle est aidée dans sa dynamique par le fait que des pays tels que le Nigeria et l’Afrique du sud ont déjà réussi à prouver leurs capacités à réaliser des contenus de qualité supérieure. Pour assurer sa percée en Afrique subsaharienne, Canal Plus diffuse sur le continent une version de sa chaine qui est quasi identique à la version diffusée en France. Dans le pan tropical, il y a plus de sport, de cinéma, de séries
et des programmes sur l’Afrique. Les téléspectateurs ont d’ores et déjà pris goût à Réussite, Talents d’Afrique, + d’Afrique. La multiplication des chaines thématiques réservées au sport participe également de cette conquête, avec une place de plus en plus large accordée aux sportifs qui évoluent sur le continent. Ces deux dernières années, on a vu la Canal + Sport devenir quatre chaines : Canal + Sport 1, Canal + Sport 2, Canal +Sport 3, Canal + Sport 4.
L’Afrique en plus chez Canal Le bouquet proposé par le groupe Canal Plus en Afrique s’est aussi africanisé. Près de 50 chaines de télévision d’Afrique francophone sont disponibles dans tous les packagings. Le groupe déplore tout de même une concurrence déloyale sur le marché africain. Des câblodistributeurs diffusent certains canaux à péages sans aucune autorisation. La chaine Infosport+ en constitue une parfaite illustration. Une opération coup de point se peaufine à l’horizon pour remettre de l’ordre sur le petit écran des téléspectateurs africains. Malgré ces difficultés, Canal + ne compte pas baisser les bras. Le groupe Vivendi, qui est son propriétaire, a crédité sa caisse de 8 milliards d’euros. L’argent va servir aux investissements pour les années 2016 et 2017. Cette initiative vise tout d’abord à reconqué-
rir les deux principaux marchés du groupe : la France et la Pologne. D’après le site internet lesjours.fr, il aurait perdu plus de 200 000 abonnés au cours du premier trimestre 2016. Cette offensive biennale devrait se ressentir en Afrique, mais aussi au Vietnam le numéro français de la télévision à péages a glané respectivement 472 000 et 100 000 nouveaux clients l’an dernier. 7,6 d’euros, soit environ 5000 F cfa par mois, c’est le coût minimum de l’abonnement sur le continent, soit moins de la moitié de ce que les abonnés paient en Europe. Cette option a été pensée par Canal Plus. En fin d’année 2008, elle pense un certain nombre d’initiatives qui visent à démocratiser plus que jamais ses offres. Tout commence par
Business Management 17 Juin 2016 AFRICA
In’entreprise
Pour davantage se rapprocher du consommateur, la simplification est inscrite au cœur de la stratégie commerciale. C’est ainsi qu’il devient possible pour les clients de payer au mois le mois leurs abonnements chez Canal Plus. Ils ont même la possibilité de ne plus seulement le faire par prélèvement bancaire et par cash, mais aussi par l’envoi d’un simple SMS grâce au système de cartes de recharge. En faisant confiance à des revendeurs préposés dans les zones les plus reculées en Afrique, il a réussi à se rapprocher davantage d’une masse de consommateurs. L’opération de séduction ne compte point s’arrêter en si bon chemin.
Management 18 Business Juin 2016
AFRICA
les prix. Ils passent de 20 euros par mois à 8 euros. Les décodeurs et les paraboles voient également leurs prix passer du simple au tiers. Pour davantage se rapprocher du consommateur, la simplification est inscrite au cœur de la stratégie commerciale. C’est ainsi qu’il devient possible pour les clients de payer au mois le mois leurs abonnements chez Canal Plus. Ils ont même la possibilité de ne plus seulement le faire par prélèvement bancaire et par cash, mais aussi par l’envoi d’un simple SMS grâce au système de cartes de recharge. L’exercice s’est lui-même amélioré avec le temps par le biais d’un certain nombre d’accords contractuels signés avec plusieurs établissements bancaires sur le continent. Mieux, Canal Plus a déconcentré ses points de vente. En faisant confiance à des revendeurs préposés dans les zones les plus reculées en Afrique, il a réussi à se rapprocher davantage d’une masse de consommateurs. L’opération de séduction ne compte point s’arrêter en si bon chemin.
En 2015, CANASAT devient les bouquets CANAL +. Cette nouvelle appellation se démarque de la précédente par la qualité, non seulement de ses offres, mais aussi des contenus de ses chaines. Tout cela démontre à suffisance que le nouvel horizon du groupe s’oriente vers le continent. Le public de la filiale de Vivendi est donc devenu plus large et populaire. Il ne se résume plus seulement aux grandes métropoles. On le trouve désormais dans les bidonvilles des capitales africaines, les villes secondaires et certaines zones rurales. Un emplacement qui a exigé un nouveau déploiement sur le terrain. Ils sont des millions de jeunes africains à suivre de bout en bout toutes les rencontres de la champions league et des championnats européens. Pour les satisfaire, Canal + doit sortir le grand jeu face à un concurrent très offensif comme Bein sports, devenu à la limite nocif à l’épanouissement sportif du groupe sur le continent. Pour garder sa place dans
le cœur des africains passionnés de sport, les premiers occupants misent sur le patriotisme de ceux-ci en diffusant dans leur entièreté tous les grands rendezvous sportifs du continent. L’entreprise audiovisuelle française est donc inscrite dans une dynamique africaine avec des offres taillées sur mesure. C’est le cas en ce moment où elle propose dans certains pays d’Afrique des décodeurs à 10 000 FCFA, à l’occasion de l’Euro 2016 de football. L’offensive Canal+ à l’étranger, notamment en Afrique, est sans doute le plus grand défi de Vincent Bolloré. Le magnat français a certainement plus de valeur ajoutée sur ce continent où il mène déjà d’importantes activités. La création des salles de cinéma dans les métropoles africaines, opération en cours menée par l’Olympia, une autre filiale de Vivendi - c’est le deuxième mondial du divertissement- montre que Bolloré veut rester chez les consommateurs africains. Comme quoi, l’Afrique est une terre de conquête.
In’entreprise SOTRABUS, bienvenue chez le premier constructeur automobile d’Afrique centrale
Créée au début de l’année 2015 dans la zone portuaire de Douala, l’entreprise fabrique ces engins des bus de 70, 50 et 45 places, sous la marque « Bus Mickel ». Ses carnets de commande montrent que la demande écrase largement son offre. De quoi lui prédire un bel avenir. Par Tazessong KUMBO, Landry Pany NANKAP
Albert Mbafe Konkou, un sérial entrepreneur La SOTRABUS n’est pas la première entreprise que crée Albert Mbafe Konkou. Le natif de Bansoa, dans la région administrative de l’Ouest du Cameroun, a commencé il y a près de deux décennies sa vie d’entrepreneur. Il y a d’abord le secteur du transport interurbain. Pour ce qui reste de son patrimoine dans ce secteur, on retiendra Trésor Voyages et Princesses Voyages. La première dessert Yaoundé et Douala, à partir de Bafoussam et Dschang. La seconde se concentre sur l’axe Douala et Yaoundé. Kami Auto, dont les locaux abritent provisoirement Sotrabus, fait partie de du giron de cet ingénieur en mécanique. Elle est chargée de commercialiser les produits de la marque National Lube. Impossible de terminer l’énumération sans signaler Transcam. Elle exerce ses activités dans le secteur du transit maritime. Et il se pourrait bien que nous n’ayons pas entièrement parcouru la liste. Car, selon son bras droit, Joseph Ndjie, qui administre également Kami Auto, Albert Mbafe Konkou a « créé de nombreuses entreprises ».
E
n cette matinée du 26 mai très ensoleillée sous le ciel de Douala, la capitale économique du Cameroun, des camions entrent et sortent d’un vaste espace entouré d’une haute barrière en parpaings. Nous sommes dans la zone portuaire. Une fois entrés après un contrôle minutieux des pièces d’identité, on remarque très vite des bruits divers, des allers et retours de techniciens d’usine qu’on reconnaît par la combinaison qu’ils arborent. C’est le signe que quelque chose de particulier se passe ici. En poussant la curiosité, on vous apprend que dans cette usine, on construit les bus, ces voitures qui permettent aux camerounais de se déplacer d’une ville à l’autre. C’est donc vrai cette histoire. En l’absence du président-directeur général, nous ne visiterons pas cet espace
réservé. Mais au moins, on pourra discuter avec Joseph Ndjie, l’administrateur délégué de la Société de transformation des bus (Sotrabus) C’est ainsi qu’on nomme la structure. Après plusieurs heures d’attente, nous parvenons à accrocher un rendez-vous ferme avec l’administrateur délégué de Sotrabus. Son bureau jouxte celui du PDG. Pour nous recevoir, il se fait accompagner par trois de ses collaborateurs. Car, il n’est pas question de mettre à notre disposition des informations approximatives. C’est que, ici, on n’a pas vraiment l’habitude de la communication. Ce qu’on y dit avec fierté cependant, c’est que, les agences de transport interurbain opérant au Cameroun et en Afrique centrale n’ont plus de raison de commander des bus venant de l’Europe. Elles ont leur solution à Douala. La Société de Transforma-
tion de bus (SOTRABUS) leur propose des véhicules de 70, 50 et 45 places sous la marque « Bus Mickel ». L’entreprise a été créée au début de l’année 2015. Il s’agit d’une société anonyme au capital de 900 millions F cfa (environ 1,4 million d’euros), promue par 04 actionnaires, tous camerounais. Albert Mbafe Konkou, né en 1967, ingénieur en mécanique formé à l’École supérieure polytechnique de l’Université de Yaoundé I, se présente comme l’actionnaire majoritaire de ce constructeur automobile. Sa direction générale, ainsi que son usine se trouvent dans la zone portuaire de Douala. Après plusieurs mois de démarches administratives, elle a obtenu toutes les autorisations nécessaires pour la fabrication en série. Elle se présente comme le premier carrossier de bus et d’autobus en Afrique centrale.
Business Management 19 Juin 2016 AFRICA
In’entreprise
Capacité de production La SOTRABUS fonctionne en ce moment avec 95 employés, dont 16 ivoiriens. La constellation ivoirienne – qui comporte les 02 seuls ingénieurs - vient de CARICI, une entreprise de la Côte d’Ivoire qui exerce dans le même domaine. C’est d’ailleurs là bas que la trentaine de techniciens supérieurs qui ont lancé l’entreprise se sont formés. A plein régime, la première industrie de l’automobile au Cameroun aura besoin de 317 travailleurs. Elle annonce d’ailleurs qu’elle est en recrutement
Management 20 Business Juin 2016
AFRICA
Selon l’administrateur délégué de Sotrabus, Joseph Ndjie – comptable de formation et âgé de 50 ans en 2016 -, l’entreprise, depuis sa création, produit 02 bus par mois. Dans ses objectifs, il est prévu qu’elle en produise 04. 19 automobiles sont déjà sorties de son usine, soit 10 dans la série des 70 places, 04 dans celle des 50 places et 05 dans celle des 45 places. A la commande, elle construit des bus climatisés. Jusqu’à présent, les clients sont des agences camerounaises de transport interurbain desservant les villes de Yaoundé, Bamenda, Buea, Bafoussam, Dschang et Limbé à partir de Douala : Finex, National, Moghamo, Trésor, Princesse, Grand Ouest. « Je dois préciser que la plupart de ces clients sont des agences de voyages qui se retrouvaient avec
le PDG de SOTRABUS chez CARICI (Carrosserie industrielle de la Côte d’ivoire) en Côte d’ivoire ou en Europe pour passer des commandes de bus. Ils sont convaincus que, s’il a décidé de se lancer dans la construction des véhicules qu’ils utilisent pour le transport, c’est qu’il en maîtrise tous les contours. Surtout qu’il est ingénieur en mécanique », explique l’AD. Alors que l’entreprise n’a jamais lancé la moindre campagne de communication, elle ploie sous le poids des commandes. « Nous avons en ce moment une commande de 15 bus. Cela nécessite 07 mois de travail dans notre usine. Nous avons des gens qui ont manifesté un grand intérêt pour nos produits, lequel intérêt risque de se concrétiser ces jours ci par
des commandes fermes. Pour dire simplement les choses, la demande est supérieure à l’offre », indique l’administrateur délégué. Quant aux utilisateurs, ils « sont très satisfaits. Ils trouvent que nos véhicules sont impeccables. Ils se demandent simplement si le constructeur qu’est SOTRABUS sera capable de tenir les délais de livraison, étant entendu que nous sommes une jeune entreprise ». On remarque cependant que les « 45 places » constituent la particularité de la marque « Bus Mickel », lequel modèle semble prisé par les passagers des compagnies qui l’utilisent. Félix Etoundi, le directeur général de Finex Voyages, un géant de l’axe Douala – Yaoundé, affirme être « très content de voir qu’un camerounais puisse nous proposer des bus faits sur place ».
In’entreprise
La marque « Bus Mickel » Sur les spécificités de la marque « Bus Mickel », l’administrateur délégué indique que « nos bus sont plus spacieux que ceux qui sont importés. Les passagers ont de la chance de voyager dans un certain confort. En plus, ils offrent plus de sécurité, puisque chaque siège a sa ceinture de sécurité. Enfin, nos véhicules sont équipés d’écrans plasma de dernière génération. Tous les occupants peuvent donc visionner en toute quiétude. Ils sont fabriqués avec des moteurs neufs et sont conçus en tenant compte de l’état défectueux du réseau routier dans la plupart des pays d’Afrique centrale. Si vous ajoutez à tout cela, l’absence des tracasseries qui entourent les opérations d’importation des voitures de ce type d’Europe ou de Chine, vous verrez que nous offrons une réelle alternative ». Le marché visé est dans un premier temps le Cameroun, et secondairement, l’Afrique centrale. Sur la justification du nom de la marque, Joseph Ndjie affirme que « Mickel » est le nom d’un des fils du PDG, Albert Mbafe Konkou. « Je pense qu’il est né au moment où ce projet se concrétisait », lâche-t-il, tout en insistant sur le caractère provisoire de cette réponse. Pour ce qui est de la fiabilité des fournisseurs de Sotrabus, l’on peut retenir
Le marché visé est dans un premier temps le Cameroun, et secondairement, l’Afrique centrale. Sur la justification du nom de la marque, Joseph Ndjie affirme que « Mickel » est le nom d’un des fils du PDG, Albert Mbafe Konkou. « Je pense qu’il est né au moment où ce projet se concrétisait », lâche-t-il, tout en insistant sur le caractère provisoire de cette réponse.
que les moteurs sont importés de chez Mercedes, constructeur allemand. Le suédois Volvo fournit les châssis. Le constructeur camerounais fabrique luimême le squelette et la carrosserie de ses voitures « à partir des barres de fer et des tôles en acier galvanisé, matières que nous importons d’Allemagne. Nous transformons aussi de vielles carrosseries de bus ou de camions que nous adaptons aux schémas conçus par nos ingénieurs », explique Joseph Ndjie. D’après ce dernier, l’entreprise n’envisage pas de fabriquer tous ces composants elle-même à court terme. Car, dit-il, ce n’est pas forcément rentable. Cette option s’appuie sur le fait que les géants du secteur, à l’instar de Mercedes, externalisent une bonne partie la production des composants.
Business Management 21 Juin 2016 AFRICA
In’entreprise
Fiche signalétique Nom de l’entreprise : Sotrabus Année de création : 2015 Statut juridique : Société anonyme Capital : 900 000 000 F cfa Situation géographique : Zone portuaire de Douala (Cameroun) Activité : Construction des bus Marque de bus : Bus Mickel Séries : « 45 places » ; « 50 places » ; « 70 places » Capacité de production : 02 bus par mois Marché ciblé : Cameroun ; CEMAC Clients ciblés : Agences de transport interurbain Président du conseil d’administration : Albert Mbafe Konkou Nombre actuel d’employés : 95 Nombre projeté d’employés : 317
Management 22 Business Mai 2016
AFRICA
Perspectives La SOTRABUS fonctionne en ce moment avec 95 employés, dont 16 ivoiriens. La constellation ivoirienne – qui comporte les 02 seuls ingénieurs - vient de CARICI , une entreprise ivoirienne qui exerce dans le même domaine. C’est d’ailleurs là bas que la trentaine de techniciens supérieurs qui ont lancé l’entreprise se sont formés. A plein régime, la première industrie de l’automobile au Cameroun aura besoin de 317 travailleurs. Elle annonce d’ailleurs qu’elle est en recrutement. « Il nous faut des gens qui maîtrisent l’automobile. Pour être précis, nous recherchons des ingénieurs et des techniciens avec des connaissances pointues en mécanique et construction automobiles, chaudronnerie, soudure industrielle, électricité automobile. Il faut y ajouter les tôliers et les commerciaux. Il n’y a pas de barrière en ter-
mes de nationalité », précise l’administrateur délégué. Sotrabus, au vu de la demande, a pour objectif d’augmenter sa capacité de production. Outre la densification des ressources humaines, elle doit également revoir à la hausse la superficie de son parc foncier. Car, « notre usine actuelle était destinée au départ à la production des prototypes. Nous avons écrit au ministère des Domaines et des Affaires foncières pour demander qu’il nous trouve un terrain dans les zones réservées par l’Etat, afin que nous y bâtissions une grande usine. Au jour d’aujourd’hui, nous n’avons pas déployé le tiers de ce que nous voulons faire », affirme Joseph Ndjie. C’est quand toutes les conditions de production optimale seront réunies que Sotrabus va procéder à un lancement officiel de la marque « Bus Mickel ».
In’entreprise
16 juillet 2015 - Le PDG de Sotrabus, en salle des conférences de l’entreprise, détails les grandes lignes du projet à l’attention du Mintransports.
Une histoire à raconter Avant que nous ne quittions les locaux de Sotrabus, l’administrateur délégué tient à nous raconter une histoire. La scène se déroule le 12 juillet 2015 à Yaoundé. Pour le reste, Joseph Njie raconte : « Nous sommes à Yaoundé pour présenter les prototypes. C’est un jeudi. Le ministre des Transports, autorité chargée d’homologuer les prototypes, n’est pas dans la commission. Nous projetons à l’occasion une vidéo. Les gens n’en croient pas leurs yeux. Ils se demandent si c’est vrai. Le même soir, ils rendent compte au ministre, Robert Nkili à l’époque [Le fauteuil a changé d’occupant entre temps, NDLR]. Ils lui disent qu’il y a une société camerounaise qui a déposé un dossier pour l’homologation des prototypes des bus qu’elle fabrique. Le ministre est étonné et dit qu’on lui raconte des sottises. Il a une visite programmée à Douala le lundi qui suit [16 juillet 2015,
NDLR]. Dès le lendemain, vendredi, il est 09 heures quand un de ses collaborateurs nous appelle. Il nous demande de nous apprêter à recevoir le ministre lundi. Entre temps, le délégué régional de ce ministère dans le Littoral [La capitale est Douala, NDLR] passe pour confirmer que notre usine existe ». L’histoire continue. « Quand le ministre arrive à Douala, certaines autorités lui déconseillent de visiter notre entreprise. Ils pensent que nous sommes une société de transport par bus. Ils nous considèrent comme un concurrent de la SOCATUR qui fait dans ledit domaine. Or, il se trouve que cette boite bénéficie d’un financement d’organismes publics. Dans la matinée de ce jour là, on nous appelle pour que nous réexpliquions ce que nous faisons. Nous précisons aux collaborateurs du minis-
tre que SOTRABUS fabrique les véhicules. Il n’est pas un transporteur. C’est là qu’il descend. Il visite effectivement l’usine et touche du doigt la réalité de l’industrie de l’automobile. C’est pour cela qu’il n’a pas tardé à homologuer nos prototypes. C’est le ministère de l’Industrie, des Mines et du Développement technologique qui nous a délivré la licence de production. Mais nous avons peiné ». Fin de l’histoire. L’AD se dit attristé par le fait que le ministère des Sports et de l’Education physique du Cameroun, se soit engagé à commander cent bus chez un constructeur nord-africain pour les besoins de la Coupe d’Afrique des Nations de football 2019 que le pays organise. Mais la Sotrabus se dit prête à répondre présente si on lui passait une partie de cette commande.
Business Management 23 Juin 2016 AFRICA
Entretien Armel Wilfried Mouafouo Kanouo, « Garman a un projet de développement sur le continent Entretien avec H.A. étalé sur 05 ans. »
A
vant 2014, on ne connaissait pas la marque sur le continent. Depuis deux ans, Garman, équipementier italien, entreprend une percée en Afrique. Le président-directeurgénéral du groupe, Osvaldo Scalvenzi, a effectué le déplacement de Yaoundé en mars 2015, pour parapher lui-même un contrat de 04 années avec la Ligue de football professionnel du Cameroun, alors même que le championnat manque de visibilité. Garman dit vouloir aider l’Afrique sportive à se développer de l’intérieur. Jusqu’ici, les marques qui l’ont devancée ne s’intéressent qu’aux sélections nationales de football et à quelques clubs professionnels sud-africains et d’Afrique du Nord. Pour saisir les intentions du groupe italien, nous avons rencontré le directeur Afrique. Entretien. Business Management Africa : Depuis quelques mois, on voit dans les arènes sportives africaines, des équipes qui arborent des maillots aux couleurs de Garman. En tant que directeur Afrique, comment présenteriez-vous cette entreprise ? Armel Wilfried : Garman Group est une entreprise née en 1985 en Italie, basée à Brescia, dans la région de Lombardie. Garman est une marque qui fait uniquement dans l’habillement sportif. Les disciplines concernées sont : le football, le basketball, le volleyball, le handball, le rugby, l’athlétisme, le karate, le freelanding. Par rapport à d’autres grosses marques sur le continent africain, la nôtre a cette particularité que ses produits sont conçus à 100 % en Italie. C’est une fierté. Garman a le même respect envers tous ses partenaires. Nous n’avons ni de petits, ni de gros clients. Business Management Africa : Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de venir en Afrique ? AW : En réalité, nous sommes en Afrique depuis 2014 avec l’équipe nationale militaire du Cameroun de football. Pour sortir de son continent, il faut déjà s’imposer chez soi. Ayant atteint l’objectif fixé, on peut naturellement se présenter sous d’autres cieux. L’essentiel est que nous soyons là.
Nous voulons apporter désormais à l’Afrique sportive, d’autres manières de faire. Nous voulons aider les organisations sportives à mieux se vêtir et à être plus connues dans le monde.
Business Management Africa : Quel sens devrait-on donner à ce réveil africain de Garman ? Quels en sont les ressorts ? AW : Garman s’est rendu compte de ce que beaucoup d’équipementiers viennent en Afrique juste pour vendre, même si en réalité, on ne produit pas pour partager. Nous avons d’autres visions, d’autres convictions. Nous voulons apporter désormais à l’Afrique sportive, d’autres manières de faire. Nous voulons aider les organisations sportives à mieux se vêtir et à être plus connues dans le monde. Nous voulons que le supporter de club arbore le maillot original, c’est-à-dire exactement le même que celui des joueurs de son équipe sur le terrain. Business Management Africa : La taille du marché intérieur africain peut-elle permettre à un équipementier de tirer son épingle du jeu ? AW : Pour le moment, nous avons un projet de développement sur le continent étalé sur 05 ans. Après cette période, on commencera à faire les comptes. En dehors du Cameroun, Garman se retrouve dans plusieurs autres pays : Tchad, Ghana, Tunisie, Afrique du Sud, Maroc. Bientôt, notre présence sera assurée dans 15 pays africains au minimum. Pour le moment, nous ciblons tous les pays dans lesquels le sport est déjà bien connu. Sur le continent, quels sont les marchés qui vous intéressent particulièrement ? Les compétitions de clubs ? Les équipes nationales ? Quelles disciplines ? AW : Comme je l’ai dit plus haut, nous sommes un équipementier sportif. En principe, toutes les disciplines nous intéressent a prori. Nous ne venons pas en Afrique pour les sélections fanion. Nous venons accompagner le processus du développement des sports locaux. Voilà notre vision. Cela ne nous empêche pas de nous intéresser aux équipes nationales. D’ailleurs, en ce moment, nous sommes en négociation avec 04 équipes nationales de football en Afrique. Mais permettez-moi de taire le nom car les tractations sont encore en cours. Nous espérons en sortir avec des accords mutuellement bénéfiques. Je
Business Management 25 Juin 2016 AFRICA
06 mars 2015 - Signature du contrat entre la Ligue de football professionnel du Cameroun et Garman- Les prĂŠsidents des deux organisations visent le document.
Management 26 Business Juin 2016
AFRICA
Entretien préciserais que nous ciblons particulièrement certaines disciplines : le football, le basketball, le volleyball, le handball, le rugby. Ce dernier sport plait beaucoup à notre président - directeur général, parce qu’il est lui même un rugbyman. Business Management Africa : Au Cameroun, vous avez signé, en mars 2015, un contrat de 04 ans avec la ligue de football professionnel, dans le but d’habiller les clubs qui participent à la Ligue 1 et à la Ligue 2. Qu’est ce qui a motivé ce choix, alors même que ces clubs n’ont pas, pour la grande majorité, des supports de communication et ne développent aucune politique lisible d’écoulement des produits dérivés ? AW : On dit le plus souvent que la bonne charité commence par soi même. Il s’avère que je suis de nationalité camerounaise. Nous avons eu la chance qu’au niveau de la LFPC, ils ont la même vision que nous. Il fallait forcer ces clubs à se structurer. Il faut leur faire comprendre que l’heure est au changement. Il fallait qu’on leur dise qu’un joueur professionnel doit avoir: une paire de godasse, une tenue d’entrainement, une tenue d’apparat, une tenue de sortie personnelle, un sac professionnel, un k-way. Ce matériel doit avoir les couleurs de son équipe. Lorsque c’est ainsi, le joueur sent qu’on le prend au sérieux. Il revient maintenant aux dirigeants de comprendre que, en communiquant, les supporteurs peuvent apporter aux clubs de l’argent concret, via l’achat des produits dérivés. Le club est obligé de s’organiser pour distribuer lesdits produits. Business Management Africa : Avezvous des points de satisfaction par rapport à ce contrat avec les clubs de football camerounais, signé via la LFPC ? AW : Bien évidemment. On a de nombreux témoignages de fans qui estiment que leurs clubs sont mieux habillés que par le passé. Les dirigeants de ces franchises apprécient globalement nos produits. Enfin, on a un retour progressif des camerounais dans les stades. Tels sont nos point de satisfaction. Nous devons aussi tout cela au professionnalisme de la ligue professionnelle de football du Cameroun. Je leur tire d’ailleurs un coup de chapeau pour le grand travail qu’ils abattent, afin que le spectacle soit assuré. Business Management Africa : Garman a habillé les athlètes pendant l’édition 2016 des jeux universitaires au Cameroun. Comment comprendre ce déploie-
ment dans une compétition réservée aux étudiants ? AW : Comme je l’ai dit plus haut, Garman ne regarde pas seulement les grosses pointures, mais toutes les organisations ayant en leur sein un mouvement sportif. Les jeux universitaires sont aussi une bonne vitrine pour les entreprises comme la nôtre. C’est une vitrine pour se faire connaitre. Le changement que nous voulons instaurer passe aussi par les jeunes. C’est pourquoi partout où il y aura un rassemblement de jeunes, vous trouverez toujours Garman.
Nous ne venons pas en Afrique pour les sélections fanion. Nous venons accompagner le processus du développement des sports locaux. Voilà notre vision. Cela ne nous empêche pas de nous intéresser aux équipes nationales. D’ailleurs, en ce moment, nous sommes en négociation avec 04 équipes nationales de football en Afrique.
Business Management Africa : Vous êtes le directeur Afrique, mais vous résidez toujours en Italie. Pourquoi n’optez-vous par pour l’installation en Afrique de la filiale africaine de Garman ? HL : C’est pour bientôt. C’est un point de rupture que nous marquons. Je suis en discussion avec certains opérateurs économiques qui peuvent être des distributeurs officiels de la marque sur le continent. Si un concessionnaire souhaite représenter les produits Garman dans un pays africain, il suffirait qu’il prenne attache avec moi pour qu’on en parle. Business Management Africa : S’il y avait un discours à tenir pour convaincre le monde du sport africain à faire confiance à Garman, ce serait lequel ? HL : Je dirais tout simplement aux amoureux du sport en Afrique qu’il est temps que nous sortions du sport traditionnel pour entrer dans le monde moderne. Garman est une marque 100% italienne. La qualité du made in Italy n’est plus à démontrer dans le monde. Je demande à toute l’Afrique de faire comme le Cameroun qui consomme déjà Garman. Ceci à travers : la ligue de football professionnel, les forces armées et police, les universités le Tonnerre Kalara handball Club. Garman peut se vanter d’avoir eu le privilège d’habiller l’ancien ballon d’or Roberto Baggio ; Pep Guardiola qui est l’un des meilleurs entraineurs au monde, le Ghanéen Stephen Appiah, entre autres. Notre marque bénéficie du soutien d’Albert Roger Milla, le meilleur footballeur africain du siècle dernier. Nous sommes une entreprise citoyenne car, nous écoutons beaucoup nos clients et réalisons toujours leurs désirs. Aidez nous à vous aider à développer votre sport.
Business Management 27 Juin 2016 AFRICA
Management Canal 2 Movies,
la chaine désormais portée par un professionnel du cinéma
Le top management du groupe TV+ a choisi Stéphane Kamdem, jusque là directeur de la Buea Film Academy, pour diriger le premier canal de télévision consacré au cinéma camerounais. Un choix managérial accueilli favorablement par les professionnels. Par Veronique KESSE
S
e Stéphane Kamdem a pris ses fonctions au cours du mois de mai en qualité de directeur opérationnel de Canal 2 Movies, la chaine cinéma du groupe TV+, lequel émet 05 chaines de télévision à partir de Douala. Lorsque le récipiendaire annonce lui-même la nouvelle sur les différents comptes qu’il possède sur les réseaux sociaux, elle fait l’objet de plusieurs
commentaires positifs. A titre d’illustration, Gervais Djimeli Lekpa, fondateur et directeur des Studios DLG, plus habitué à diffuser ses films au Canada et en Europe que dans son propre pays, estime qu’il était tant que la débrouillardise céda la place aux vrais professionnels de la chose cinématographique. Les autres réactions convergent vers le même sens. En nommant cet ancien du CES de Baham à ce poste, le président-directeur général du groupe TV +, Emmanuel Chatue, souhaite discipliner l’antenne de cette chaine, devenue l’une des plus populaires dans les foyers camerounais en seulement deux années d’existence, sans que les contenus ne respectent les standards. Aujourd’hui, elle subit la concurrence de Nina TV, qui diffuse en longueur de journée des telenovelas sudaméricaines et quelques séries africaines. A peine installé, le nouveau
patron a déjà la carte d’identité de son nouvel environnement en main. « Canal 2 Movies se veut l’univers du cinéma camerounais », affirme-til, juste pour rappeler le slogan. Il précise qu’elle « propose de créer un univers où on retrouverait tous les cinéastes camerounais. Seulement, le challenge doit être pour les dirigeants, de faire et de montrer au public la différence entre les bons films et les mauvais films ». Il a donc conscience de ce que ses pairs le jugeront davantage sur la qualité de ce que la chaine va désormais diffuser. En réalité, ceux-ci souhaitent que toutes les productions qui ne respectent pas les canons soient d’office mises de côté. Pour le nouveau directeur, cette option de « la norme ou rien » sonnerait comme une erreur stratégique de la part de la chaine. Car, indique-t-il, en le faisant, « c’est à mon avis à ce moment là qu’elle sera passée à côté de son slogan ». En réalité, « si Canal 2 Movies décidait de ne diffuser que les films [d’un certain, NDLR] acabit, il y aurait moins d’une vingtaine de films à diffuser et cela, en remontant depuis les débuts du cinéma camerounais avec “Aventure en France” de Jean Paul Ngassa, “Tamtam à Paris” de Thérèse Sita-Bella, “Muna Moto
de Dikonguè Pipa” … et plus récemment “Le Cercle des pouvoirs” de Daniel Kamwa ou encore, “Sango Malo” de Basseck Bah Kobhio ». La problématique de Canal 2 Movies consiste davantage aujourd’hui à crédibiliser une marque. Le nouveau patron ne souhaite pas s’engouffrer dans les polémiques à propos de ce qui a pu y empêcher l’avènement d’une dynamique professionnelle avant sa nomination. « La seule chose importante à savoir est que la chaine a décidé de se tourner vers l’avenir et donner d’une certaine façon à César ce qui appartient à César. Aujourd’hui, ce sont les cinéastes qui, à travers moi, dirigent la chaine. C’est donc à nous de décider d’en faire l’univers du cinéma camerounais de la façon qu’il nous plaira, et d’en faire ce que nous voulons que notre cinéma soit. Sinon, comment leur en voudrons-nous s’ils disaient plus tard : On a donné la chaine aux cinéastes et ils ont échoué ? ». Toujours est-il qu’il reconnaît que ceux qui ont créé la chaine « sont des hommes de télévision et des businessmen ». Ce sera donc à ce réalisateur - doublé de l’acteur qu’il est - de réécrire le scénario de Canal 2 Movies.
Business Management 29 Juin 2016 AFRICA
Management Parcours
Cependant, c’est de la production que la Buea Film Academy tire sa notoriété. La chaine de télévision internationale TV5 Monde succombe au charme de la série de 36 épisodes, « Paradis », réalisée par la bande à Stéphane Kamdem. Pour la diffuser en 2012 sur son antenne Afrique, elle débourse un pactole dont le montant n’a jamais été révélé. Deux années plus tard, la BFA remet cela avec le long métrage « Et si c’était vous ? ». TV5 Monde une fois encore sort le chèque.
Le passé du nouveau manager de la chaine cinéma du groupe TV+ justifie les espoirs placés en lui par le microcosme cinématographique du Cameroun. Avant qu’il n’atterrisse à cette position, il dirige la Buea Film Academy, une organisation qu’il co-fonde en décembre 2012, dans la ville anglophone de Buea. Deux personnes l’accompagnent dès la création. D’abord son grandfrère, le Professeur Henri Lucien Kamga. Ensuite, son acolyte de toujours dans le cinéma, Serges Fouamno dont le nom d’acteur est Sergio Marcello. C’est d’ailleurs à ce dernier que revient désormais la tâche de tenir la barque à Buea. Deux activités principales y sont menées : la formation aux métiers du cinéma et la production cinématographique. A travers la première, la BFA a pu inculquer les rudiments du septième art à des centaines des jeunes. Les films nigérians, ghanéens, sudafricains et américains ont déjà fait appel à des acteurs formés à Buea. Cependant, c’est de la production que la Buea Film Academy tire sa notoriété. La chaine de télévision internationale TV5 Monde succombe au charme de la série de 36 épisodes, « Paradis », réalisée par la bande à Stéphane Kamdem. Pour la diffuser en 2012 sur son antenne Afrique, elle débourse un pactole dont le montant n’a jamais été révélé. L’argent n’aime pas le bruit. Quoi qu’il en soit, la diffusion sur la chaine francophone basée à Paris connaît un succès auprès du public. Deux années plus tard, la BFA remet cela avec le long métrage « Et si c’était vous ? ». TV5 Monde une fois encore sort le chèque. Les autres longs métrages, Ntah’napi La petite fille Ba-
Management 30 Business Juin 2016
AFRICA
moun, Insider - film qui existe en français et en anglais - font en ce moment une percée aux Etats-unis. Mieux, à travers un e-commerce agressif sur son site internet, la BFA a pu mettre sur pied une politique de vente de ses produits à l’exemplaire et à bas prix. Surtout, elle diffuse les films camerounais sur Canal Sud, une web tv qu’elle crée elle-même. Le canal du cinéma échoue donc entre les mains d’un réalisateur qui a fait ses classes de manager.
lévision est larguée au second rang dans les études d’audience, l’entreprise à capitaux publics, la Cameroon Radio Television (CRTV), se prépare pour un grand retour sur scène. Son conseil d’administration a, par une décision au mois d’octobre 2015, créé six chaines de télévision thématiques : Crtv Culture, Crtv Entertainment, Crtv Sport, Crtv News, Crtv Culture, Crtv régionale. Une fois la diffusion entamée, les deux groupes vont se livrer la bataille de l’audience. En attendant, le groupe privé continue son opération de séduction vis-à-vis des talents. Outre la généraliste Canal 2 international et la thématique Canal 2 Movies, TV + a Canal 2 Info (information en continu), Canal 2 musique (diffusion de la musique), Canal 2 English (chaine destinée au public anglophone). On y trouve également Sweet FM, laquelle est une chaine de radio émettant de Douala. Les stratégies au sein de l’audiovisuel camerounais ne font donc que commencer.
La réalisation audiovisuelle, Stéphane Kamdem - dans les films, il s’appelle Ousmane Stéphane – l’apprend en France, de 2006 à 2008. Il possède des atouts en communication institutionnelle. Pendant qu’il se forme, il est chargé de la communication à 3AE Paris. Cette expérience lui sera sans doute utile dans une position où la critique ne lui fera aucun cadeau. Après avoir assis sa domination sur le paysage audiovisuel camerounais, notamment avec sa première chaine Canal 2 International, le groupe TV+ a engagé Les chaines du une phase de détection groupe TV + en bref des managers à l’extérieur pour aider ses Canal 2 International : chaines à maintenir leur chaine généraliste leadership. Depuis deux mois environ, l’ancien Canal 2 Movies : chaine chef de service politithématique dédiée au cinéma que au quotidien privé Le Jour, Jean-Bruno TaCanal 2 Infos : chaine gne, coordonne Canal 2 d’information en continu International à partir de Yaoundé. Canal 2 Musique : chaine thématique dédiée à la Le holding construit par musique Emmanuel Chatue, en Canal 2 English : chaine faisant venir les talents généraliste réservée au pour des postes de direcpublic anglophone tion, prend une option managériale anticipative Sweet FM : station sur l’avenir. Alors que généraliste de radiodiffusion son unique chaine de té-
Management Lancer une start up,
le package organisationnel utilisé par les exemples qui ont réussi Facebook, Uber, Airb&b, Whatsapps …Qu’elles sont nombreuses ces stars du numérique qui aujourd’hui devenues des références et des mastodontes de l’économie mondiale. Mais tout à côté, chaque jour, des milliers de start up ne parviennent pas à franchir le pallier et meurt avant d’avoir eu l’âge de la maturité. On peut en tirer quelques leçons pour se repositionner sur les rails de la Par Martial EBODE réussite.
Q
Ne jamais oublier qu’une start up doit utiliser les outils modernes de communication.
uelle est l’idée qui va changer le cours de la vie du monde ? Voilà la bataille et le combat auxquels se livrent chaque jour de nombreux ceux et celles qui se lancent sur les sentiers de l’entrepreneuriat, autant dans les incubateurs que dans les millions de start up dans le monde. Oui, bien que l’idée soit essentielle dans le processus de mise sur pieds de ce type nouveau d’entreprise, la « mère » organisation demeure un levier très important. Ce sont les
contours qu’elle érige qui permettront à la start up d’être innovante, compétitive, orientée clients et surtout avoir des grosses facultés adaptatives. Dans le processus de mise sur pieds de l’organisation, plusieurs choix peuvent se poser : Fautil oui ou non délimiter les rôles de chacun dès le départ ? Doit-on séparer les fonctions R&D et les services pour éviter la confusion des genres? Organiser ses équipes est loin d’être une chose aisée lorsque l’on se lance.
Une spécialisation dès le départ Aucune grande entreprise n’imaginerait recruter un collaborateur sans une description précise de son poste et de son rôle, surtout lorsqu’il s’agit d’un cadre. Pourquoi une start-up devraitelle rester dans le flou ? Bien sûr, en phase de démarrage, chacun devra souvent faire preuve de souplesse, acceptant d’élargir ponctuellement sa mission - et ses horaires ! - pour répondre à un besoin précis. Mais il est essentiel que chacun ait un rôle clairement défini, au sein d’un organigramme soigneusement réfléchi. Les postes-clés seront attribués selon les compétences et affinités de chacun ; même si au démarrage, chaque employéreçoit une fonction secondaire.
• Cette spécialisation garantit la satisfaction et la fidélisation des premiers collaborateurs : sinon, ils risquent de mal accepter de perdre une partie de leurs attributions lorsque les équipes seront renforcées. •
Une organisation solide garantit des responsabilités assumées. Confondre souplesse et flou expose au risque de négliger un point précis (fiscal, réglementaire, en matière de droit du travail, de qualité produit…). En réalité, si tout le monde est censé s’en occuper, personne ne s’en croit responsable !
• Une organisation claire permet d’aborder la croissance de l’entreprise plus naturellement, sans avoir à remettre à plat les missions : l’organigramme existe, les recrutements servent à le remplir ! De plus, la transmission des informations se fait plus facilement à un nouvel arrivant qui sait à qui s’adresser ! Une fois l’organigramme clairement défini, pensez à développer dès le départ une culture du travail collaboratif. Naturelle dans une petite structure, il faudra veiller à la maintenir lorsque l’entreprise grandira ! Business Management 31 Juin 2016 AFRICA
Management Parcours Une organisation « focus clients » L’organisation de la start-up doit placer le client au centre de toutes les préoccupations : c’est un gage de réussite !
• Soyez à l’écoute de vos premiers clients : ils sont à la fois vos ambassadeurs et les « testeurs » de votre offre. Caressez-les et réagissez à leurs remarques, incitez-les à s’exprimer (par exemple via un questionnaire sur votre site Internet, des questions par SMS…). • Apprenez tout ce que vous pouvez sur vos clients : au-delà de leurs réactions à vos produits ou services, essayez de collecter toutes les informations possibles sur eux. Le but est de les connaître collectivement (afin d’identifier votre « clientèle type » ?) et individuellement (pour personnaliser les échanges). • Entrez en contact avec vos clients sur tous les canaux : pensez à créer un blog ou un site internet
vitrine, à être présent sur les réseaux sociaux pour établir une relation plus étroite avec vos prospects et clients.
• Pensez mobile : aussi importante que la présence sur internet – voire plus selon votre activité –, une version accessible en mobilité de votre communication doit être rapidement lancée. Cela peut déboucher par exemple sur une application mobile. • Automatisez toutes les tâches qui peuvent l’être, pour gagner du temps et pouvoir consacrer en consacrer plus à la relation personnalisée lorsqu’un client vous sollicite.
Le management libéré : l’homme au cœur de l’organisation Aujourd’hui, le taylorisme paraît bien démodé. Le mode de management doit être repensé, car la rémunération seule ne suffit plus à garder la motivation des salariés intacte dans le temps. C’est donc par le management lui-même que les patrons doivent rendre attrayant le travail quotidien. Les startups sont pionnières en la matière. C’est la prise en compte de l’homme au sein de l’entreprise qui devient importante. Le système devient horizontal, c’est à dire, que chaque employé, quel que soit son statut hiérarchique, bénéficiera de plus de libertés, d’autonomie, et de confiance vis-à-vis de ses supérieurs pour
Management 32 Business Juin 2016
AFRICA
effectuer son travail. Pour l’entreprise, c’est un réel souffle nouveau. Les salariés sont plus impliqués, donc plus productifs. Le taux d’absentéisme et le niveau de stress diminuent. Cela permet de fédérer l’ensemble du personnel autour de valeurs communes. Une façon de faire, qui à terme, va renforcer la culture de l’entreprise et permettra également de réaliser d’importantes économies financières, afin de gagner en compétitivité. Cet horizontalité fluidifie le schéma informationnel de l’organisation et booste la créativité. Les projets avancent plus vite et les résultats présentent des allures épatantes.
Management
Toujours mûrir les idées à travers les consertations.
Pour des startups libérées Le management participatif ou libéré n’est pas une utopie. De nombreux géants américains -Google, par exemple - utilisent ce style managérial. Cette pratique tend de plus en plus à se généraliser. Quelques exemples impressionnent.
• Le management façon BlaBlaCar :
Pour son entreprise, Frédéric Mazella a choisi un mode de management bien à lui. Sa façon le place beaucoup plus proche de ses salariés. Il a mis en place un tableau reprenant les 10 valeurs de l’entreprise, comme la première « fun & serious », ou encore l’instauration du tutoiement. Plusieurs outils ont été créés et mis en pratique au sein de la société, permettant de chouchouter les employés. Par exemple, les nouveaux entrants sont parrainés par les anciens et il existe le BlaBlaTalk (réunion hebdomadaire mêlant tous les services de la société).
• 1001 menus, aujourd’hui devenu Zenchef, a une culture d’entreprise très forte. Cependant, elle n’a pas été
facile à avoir, la mentalité française étant souvent un frein à la nouveauté. Dans la startup, la diversité et la tolérance sont cultivées, sans jugement d’autrui. La transparence est de rigueur dans l’entreprise. Ce sont les équipes – et non les individus - qui sont généralement récompensées. Un climat de franchise envers tous les membres qui permet que chacun se sente bien à son travail. Comme quoi, le bonheur de l’employé conditionne la réussite de l’organisation.
Business Management 33 Juin 2016 AFRICA
Cahier thématique Sport Business Grand angle
Football-business,
l’internationalisation des capitaux comme piste de décollage des clubs d’Afrique Sur le continent, l’expérience de la professionnalisation du football est en cours de généralisation. Dans la plupart des pays, les capitaux se font rares. En allant chercher des partenaires financiers sur d’autres continents, certaines franchises montrent la voie. Pleins phares sur une stratégie gagnante. Par Hindrich ASSONGO
son simple marché national ». Il lui faut donc faire appel à des partenaires extérieurs.
Un constat s’impose. Les grands clubs européens qui viennent investir en Afrique s’attaquent surtout à la formation, grosse lacune du football sur le continent. Dans les cas énumérés, la mise en place d’une académie constitue la première réforme. Au bout du compte, les meilleurs sont transférés en Europe, l’épicentre mondial du football des clubs.
D
epuis 1998, la solution existe. Dans l’ouvrage collectif « Géopolitique du football » dirigé par Pascal Boniface, Jean-François Nys, en toute simplicité, conseille une piste de croissance aux franchises du football. Des lignes de sa contribution intitulée « Un enjeu économique mondial », on retient que le français recommande une stratégie de développement international pour les clubs professionnels. Il indique en effet qu’ « un club est une petite entreprise qui ne peut se développer sur
L’Ajax Cape Town, club sudafricain, apparait comme un exemple de cette internationalisation des capitaux. La franchise naît en octobre 1998 de la fusion de deux formations : le Seven Stars Football Club et le Cape Town Spurs Football Club. Ce mariage a lieu dans l’optique de créer un bloc solide, pour répondre à l’offre de partenariat proposé par l’Ajax d’Amsterdam. Son capital est aujourd’hui détenu à hauteur de 51 % par le club néerlandais. Ce qui lui assure une stabilité au niveau de ses finances, une professionnalisation dans sa gestion, mais aussi une bonne cote de ses produits sur le marché des transferts. La franchise de la province du Cap se présente désormais comme « le leader de l’industrie du football africain. » D’autres exemples ont suivi en Afrique du Sud. Le Sporting club de Lisbonne, club portugais, et le Bloemfontein Celtic, possèdent ensemble au pays des Bafana Bafana, une académie qui fera parler d’elle : Academia Sporting Africa. Former et vendre apparaît comme un bon business.
Formation, la priorité La mise en place d’un centre de formation, c’est ce qu’a fait le Daring Club Motema Pembe, une des fiertés du football à Kinshasa. Gentiny Ngobila Mbaka (52 ans), homme d’affaires, député et ancien ministre de l’Agriculture en RDC, reprend
le DCMP en 2014. Il est élu au poste de président pour 03 années. En fin de saison 2015, il réussit à attirer un de ses amis dans le capital, Henri Legarda. Ce dernier, aujourd’hui âgé de 68 ans, a dirigé le club français Le Mans, de 2001 à 2013. Donc, le football
professionnel, il le connaît. Conséquence positive, avant le lancement de la saison 2015-2016, le club kinois reçoit une perfusion d’1,6 million d’euros. Le nouveau capital est détenu à 70 % par Henri Legarda, Gentiny Ngobila Mbaka et d’autres actionnaires. L’as-
Business Management 35 Juin 2016 AFRICA
Cahier thématique Sport Business Grand angle
sociation des supporters en détient 30 %. Surtout, la franchise est devenue une société commerciale. Le budget de la saison 2015-2016 - en cours – dépasse le million d’euros (environ 656 millions F cfa), soit largement au dessus du plus capé au Cameroun, le club d’entreprise Coton sport de Garoua. Les résultats sportifs devraient suivre. Un constat s’impose. Les grands clubs européens qui viennent investir en Afrique s’attaquent surtout à la formation, grosse lacune du football sur le continent. Dans les cas énumérés, la mise en place d’une académie constitue la première réforme. Au bout du compte, les meilleurs sont transférés en Europe, l’épicentre mondial du football des clubs. Et là, les montants des transferts plafonnent. Il s’agit d’inverser une tendance qui, jusque là, jouait en défaveur de des franchises africaines. Car, comme le font remarquer Raffaele Poli et Paul Dietschy, deux sociologues du football, « [..] les licences de jeu étant peu répandues en Afrique et la falsification des identités étant facile, l’argent des transferts profite souvent moins aux clubs africains qui se sont occupés de la formation des joueurs, qu’à une série d’intermédiaires organisés
Management 36 Business Juin 2016
AFRICA
en réseaux. » Quoiqu’il en soit, d’après les spécialistes, il est moins onéreux et plus rentable de former un joueur sur place en Afrique, que de l’accueillir dans un centre de formation européen pour lui apprendre les fondamentaux. « Ils arrivent très souvent à 26 ans et plus, en ayant joué la première division au pays. Or, ils n’ont pas les fondamentaux du football dans les jambes. Il faut réduire leur âge parfois de 10 ans et les renvoyer au centre de formation. Plus
tard, rares sont ceux d’entre eux qui sont capables de tenir au haut niveau pendant 07 ans. Donc, l’investissement est moins rentable que l’option de la formation en Afrique. Parce que là, on prend les gamins à 07 ans et on est sûr qu’ils ont leur réel âge et que, dès 17 ans, ils seront prometteurs, à la fois sur les plans sportif et financier. C’est gagnant-gagnant et je dirais que les clubs africains en sortent plus gagnants encore », renseigne un agent de joueurs camerounais, sous anonymat.
Destinations à déceptions Alors qu’on les attendait sur le front de l’internationalisation de leurs capitaux, les clubs populaires et mythiques de certains pays trainent le pas. C’est le cas du Cameroun, grand pourvoyeur de footballeurs professionnels en Europe. En dépit d’une proclamation du professionnalisme à la fin de l’année 2011, la structure des clubs n’a pas beaucoup évolué. Les cas les plus visibles sont le Canon sportif de Yaoundé et l’Union sportive de Douala, deux formations au passé continental glorieux – ils sont tous
anciens vainqueurs de coupes africaines-. Deux clubs communautaires aussi, avec chacun à leur tête, un conseil de sages, structure en déphasage avec le droit des sociétés commerciales. Le Canon voit le jour en 1930, l’Union sportive en 1955. Le premier, constellation des joueurs de l’équipe nationale du Cameroun dans la décennie 80, s’est perdu ces dernières années dans la guerre des identités : les autochtones de Nkoldongo, quartier de la capitale camerounaise, contre les allogènes.
On a oublié de financer le club. Seule, une décision rendue par la chambre d’arbitrage du comité olympique nationale, l’empêche d’aller revoir sa copie en Ligue 2 nationale, à l’issue de la saison 2015. On y parle très peu de business. Les investisseurs ne seraient pas la bienvenue s’ils viennent racheter le club. Ici, c’est d’abord une question de fierté. En attendant, on y paye difficilement les salaires des joueurs. Au sein de l’Union sportive de Douala, formation créée par les Bamiléké
Cahier thématique Sport Business Grand angle
de New Bell - quartier populaire de la capitale économique du Cameroun-, les problèmes d’identité
se posent aussi. Certes, on y observe une certaine offensive vers le sponsoring des entreprises depuis
qu’un connaisseur du footbusiness, Franck Happi, a pris les commandes de la direction générale. Mais le
président du conseil des sages, Ngassa Happi, ne souhaite pas une braderie au capitalisme. Il s’oppose à une transformation du club en société commerciale. « Pourquoi voulez-vous nous imposer une société ? Vous voulez que quelqu’un arrive demain, parce qu’il a deux milliards, qu’il achète l’Union de Douala et se mette à faire ce qu’il veut ? Non ! L’union appartient aux inconnus. Nous nous débrouillerons comme ça », confie-t-il en 2013 à la rédaction du site internet camfoot.com. Les fonds étrangers ne sont donc pas la bienvenue.
Ouest-Cameroun, un gâchis C’est à l’Ouest du Cameroun que l’on retrouve aujourd’hui les clubs les plus populaires du pays : Bamboutos FC de Mbouda, Racing FC de Bafoussam, Aigle Royal de la Menoua, Unisport du Haut-Nkam, Panthère sportive du Ndé. Tous communautaires et pensionnaires de la Ligue I, ils font le plein des stades à chaque match. Mais ils peinent aussi sur le plan financier. Pas question cependant d’évoquer la question d’une implication par des investisseurs allogènes. Alors qu’une possibilité de rachat par un club français existe pour l’Aigle Royal de la Menoua, les dirigeants actuels n’en veulent pas. Samuel Dongmo, le président, indique que « l’Aigle Royal est l’âme de la Menoua. On ne vend pas son âme. » Cette écurie, fondée à Dschang par un administrateur colonial français en 1932, joue pourtant sur la terre battue, n’a pas de siège et peine à payer des salaires à ses joueurs. Ses tribunes sont cependant toujours pleines à craquer. Un gâchis. Originaire de Mbouda, Jean Paul Foundjio, directeur général de Smart Sport, l’ancien équipementier des championnats
professionnels de football du Cameroun, éprouve du dépit quand il parle des clubs communautaires de son pays d’origine. « Ces clubs acceptent l’investissement mais traitent de voleuse toute personne qui essaye d’opérer tout retour sur cet investissement. Généralement, ils sont dirigés par des personnes cupides qui n’ont rien à voir dans le sport. Très souvent, elles s’en servent comme tremplin social et politique. » Il faudra pourtant embarquer dans le train du footbusiness et s’inscrire dans le registre de l’internationalisation. C’est le prix à payer pour devenir un géant. A moins de faire appel à un messie, de la trempe de Moïse Katumbi. Et même là, la révolution aura le même nom : football-business.
Le Canon voit le jour en 1930, l’Union sportive en 1955. Le premier, constellation des joueurs de l’équipe nationale du Cameroun dans la décennie 80, s’est perdu ces dernières années dans la guerre des identités : les autochtones de Nkoldongo, quartier de la capitale camerounaise, contre les allogènes. On a oublié de financer le club. Business Management 37 Juin 2016 AFRICA
Cahier thématique Sport Business Grand angle
Ajax Cape Town,
pur produit d’une internationalisation du capital
La franchise sud-africaine, dont le capital est détenu à 51 % par le néerlandais Ajax d’Amsterdam, a vu le jour à une époque où le football-business avait très peu de résonnance dans la partie subsaharienne du continent. Par H.A.
A
Cape Town, difficile de faire la différence entre l’Ajax d’ici et celui d’Amsterdam. C’est que, le club local engagé dans la première division sud-africaine de football et son aîné des Pays-Bas ont plus que la finance en commun. Ils partagent le nom, le logotype, les couleurs – le fameux rouge et blanc-, le système de jeu et donc, les mêmes valeurs. Face à ces éléments d’identité, des journalistes français, pendant la coupe du monde 2010 jouée en terre arc-en-ciel, en sont arrivés à une conclusion : Cape Town est le dernier comptoir hollandais en Afrique du Sud. Normal, l’actionnaire majoritaire impose sa logique. L’Ajax d’Amsterdam détient en effet 51 % du capital de son homologue.
Management 38 Business Juin 2016
AFRICA
1997. C’est l’été en Europe. C’est aussi la période des transferts. Un attaquant sud-africain intéresse l’Ajax d’Amsterdam. Son nom, Benni McCarthy. Il évolue à ce moment là au Seven Stars Football Club, une formation de Cape Town. Propriétaire de la franchise via l’entreprise Touchline Media, Rob Moore, prend la direction de la capitale néerlandaise pour conclure le transfert. Les deux parties trouvent un accord. Le joueur évoluera chez l’ancien vainqueur de la champions league européenne. A l’issue des discussions, les néerlandais prolongent les débats. Ils font part à leur désormais partenaire, de leur intention de créer en Afrique du Sud une académie de football. Objectif, « former plusieurs Benni McCarthy ». Pour cela, il leur faut des associés sur place.
L’idée séduit Rob Moore. Pendant un voyage à New York, il rédige le projet. Celui-ci reçoit très vite l’approbation des dirigeants du club d’Amsterdam. Pour constituer un bloc intéressant, le président du Seven Stars Football Club propose de fusionner avec un autre club de sa ville, le Cape Town Spurs Football Club, dirigé par John Comitis. Les deux se dissolvent. L’Ajax Cape Town naît. Nous sommes en octobre 1998. Les sud-africains possèdent 49 % du capital. La première réforme est la création d’une académie de football dédiée à la formation des futurs talents. Ici, le crédo sonne : « No youth, no future ». L’équipe première dispute sa première rencontre officielle le 17 juillet 1999.
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Une affaire rentable Le business de la formation à l’Ajax Cape Town tient très vite la promesse des fleurs. D’Amsterdam, on s’occupe du soutien technique en mettant en route les techniciens-formateurs. Le programme de l’académie doit être jumeau à celui de la maison-mère. Le 4-3-3 est imposé à toutes les catégories du club, comme dans la capitale hollandaise. Les dirigeants sur place ont la
responsabilité de détecter de bons éléments à travers toute l’Afrique. Quand un produit est de qualité « supérieure », la direction prioritaire en cas de transfert, c’est l’Ajax d’Amsterdam. L’ancien Bafana Bafana Steven Pienaar, le camerounais Eyong Enow et Daylon Claasen ont suivi cet itinéraire. D’ici, on part toujours pour
une équipe première en Europe, à l’opposé de ce qui se passe dans d’autres pays africains où on voyage pour intégrer un centre de formation. Quand vous passez par Cape Town, on vous parle avec fierté du nigérian John Obi Mikel, actuel joueur de Chelsea. Plus d’une vingtaine de bons éléments ont ainsi déjà déposé leurs valises sur le vieux continent. Et pas pour des prunes. Les
montants des transferts font de la franchise, une entreprise rentable et une destination « économique » pour des joueurs issus des pays dans lesquels la vie du footballeur se conjugue avec la misère. Ces dernières années, les camerounais, par exemple, en ont fait un eldorado. La recette du succès, l’internalisation du capital. Aux autres de s’en inspirer.
Business Management 39 Juin 2016 AFRICA
Cahier thématique Sport Business Grand angle
Rob Moore,
L’entrepreneur de sport à la base de l’Ajax Cape Town Patron d’un puissant groupe médiatique dans les années 90, le sud-africain est l’un des premiers hommes d’affaires africains à avoir fait du football un « business ». Par H.A. dia, un groupe médiatique spécialisé en sport et santé. Très vite, le holding devient une référence. Il se classe au début des années 90 parmi les meilleures entreprises sud-africaines. En plus de collaborer avec des titres américains, l’entreprise a dix magazines sur le marché. La star de ces titres auprès du public, c’est un support créé en 1986 et racheté par Toucheline Media. Il est consacré au sport sud-africain dans un contexte d’apartheid : « South African Sports Illustrated ». Mais le jeune journaliste croit aux publications spécialisées. Suivront alors Kick Off, Runner’s World, Golf Digest, Men’s Health, entre autres.
R
ob Moore, un blanc sudafricain âgé aujourd’hui de 52 ans, a deux
Management 40 Business Juin 2016
AFRICA
passions : le journalisme et le football. Il se présente d’ailleurs à ses interlocuteurs comme un entrepreneur dans le domaine des médias et du
sport. C’est par le journalisme qu’il démarre dans la décennie 80. En 1989, il n’a que 25 ans lorsqu’il crée à Cape Town, Touchline Me-
Le succès des magazines de sport aidant, Touchline Media décide de bâtir un club de football. Ce sera le Seven Stars Football Club. C’est là que l’ancien attaquant des Bafana Bafana, Benni McCarthy, fait ses débuts. C’est en concluant son transfert à l’été 1997 à l’Ajax d’Amsterdam que le club néerlandais lui fait une proposition de partenariat. Quelques mois plus tard, le Seven Stars Football Club fusionne avec le Cape Town Spurs Football Club de John Comitis, pour mettre sur pied l’Ajax Cape Town. Le capital de cette nouvelle franchise est rapidement constitué. La partie néerlandaise prend 51 %. Les sud-africains en détiennent l’autre partie.
Cahier thématique Sport Business Grand angle Le foot et rien que le foot La naissance de l’Ajax Cape Town marque la fin de la carrière de Rob Moore au sein de Touchline Media, le groupe qu’il a créé. Il cède ses parts au géant médiatique sud-africain Naspers. Car, à partir de 1999, le journaliste mordu de football doit gérer la nouvelle franchise, surtout dans son volet commercial. Il fait cela pendant trois années. En fin de saison 2002, il laisse la gestion du club aux mains de son associé, John Comitis. Il s’envole pour Barcelone, l’une des grandes directions footballistiques au monde. Il y fonde en janvier 2003, Extra Time. C’est une entreprise de consulting spécialisée dans le football. La compagnie conseille les entreprises qui souhaitent investir dans le football, assiste les clubs dans leur management et joue le rôle d’agent de joueurs. Ses clients sont majoritairement des joueurs et des franchises sud-africaines. L’aventure dure jusqu’en mai 2015. Car, au fond, le cœur du magnat de Cape Town est en Angleterre, l’épicentre mondial du football-business. En avril 2015, Rob Moore concrétise son vœu de vivre
en Angleterre. Il s’installe à Londres et y crée On Target Football Consultants Ltd, une agence de consulting qui fait exactement ce que faisait la précédente entreprise. Avec cela, il constitue le socle sur lequel s’appuient les footballeurs sud-africains qui souhaitent s’exporter ou bien manager leurs carrières. Visionnaire, Moore se pré-
sente comme « quelqu’un qui fait tout pour que le cap fixé soit atteint ». Il affirme être « une personne de très motivée, qui met beaucoup d’énergie pour atteindre les objectifs, même s’il faut travailler sous la pression ». Ce que le nouveau londonien aime au-delà de tout réside en la conceptualisation et la réalisation de nouveaux pro-
jets. On ne s’étonne pas de ce qu’il soit à sa quatrième vie d’entrepreneur L’on comprend pourquoi, en 1999, il lui a fallu moins d’un mois pour rédiger le projet de partenariat que l’Ajax d’Amsterdam attendait. Si non, l’Ajax Cape Town ne serait peut-être pas né.
Business Management 41 Juin 2016 AFRICA
Cahier thématique Sport Business Grand angle
L’Asie,
une banque liquide à explorer par les franchises du football en Afrique.
De plus en plus, les Hommes d’affaires asiatiques, à travers divers consortuims, rachètent des clubs importants en Europe. L’Afrique gagnerait à susciter leur intérêt. Par HA
Les investisseurs chinois ne cessent de claquer les chèques en Europe en ce moment. En attendant de voir ce qui va se passer pendant les grandes vacances de 2016, signalons que la première action est l’acquisition de 20 % du capital de l’Atletico Madrid par le groupe chinois Dalian Wanda en 2015, pour 45 millions d’euros. Management 42 Business Juin 2016
AFRICA
O
n la regarde désormais comme le guichet mondial des clubs de football. C’est que, ces dernières années, l’Asie investit dans le foot européen – et même américain - rachetant des grands clubs dans plusieurs pays. Si les fonds d’investissements issus du Qatar, de la Thaïlande, de la Malaisie et des Emirats Arabes unis ont dominé l’actualité des acquisitions pendant une demi-dizaine d’années, c’est la Chine qui semble à l’offensive sur ce front ces derniers mois. Normal, depuis son arrivée au pouvoir le 14 mars 2013, son président, Xi Jinping, souhaite
faire de son pays, une super puissance du football. Un plan en 50 points a été concocté. En premier lieu, il y a l’amélioration qualitative du championnat chinois, d’où l’augmentation vertigineuse des capitaux qu’on y observe. Mais il y a surtout les investissements massifs dans le football européen. Les investisseurs chinois ne cessent de claquer les chèques en Europe en ce moment. En attendant de voir ce qui va se passer pendant les grandes vacances de 2016, signalons que la première action est l’acquisition de 20 % du capital de l’Atlético Madrid par le groupe chinois Dalian Wan-
da en 2015, pour 45 millions d’euros. En échange, le club a l’obligation d’effectuer une tournée chinoise chaque été. Le Slavia Prague et le FC Sochaux appartiennent désormais à 100 % aux chinois. Un consortium de cette puissance asiatique a réussi à se saisir du capital de Manchester City, à hauteur de 13,5 %. Chris Atkins, un mordu de l’économie chinoise, explique ce réveil par le fait que « le gouvernement tient à établir une économie plus équilibrée, moins dépendante de l’industrie. De ce point de vue, le sport et le divertissement sont vus comme des secteurs où il faut investir ».
Cahier thématique Sport Business Grand angle Chine Afrique La Chine veut donc devenir un géant du football et a les moyens de sa politique. Depuis une dizaine d’années, elle mène un raid économique sur l’Afrique. Sur le plan sportif, les échanges pour l’instant portent essentiellement sur la construction des infrastructures sur le continent africain. Les franchises africaines de football, pas encore informées des intentions chinoises, ont donc là une opportunité à saisir. Il s’agit de convaincre les patrons des fonds d’investissements sportifs en Chine, de l’intérêt des rachats des clubs de football sur un continent où l’empire du milieu est déjà confortablement installé. Les clubs communautaires pourraient, s’ils le veulent, frapper à l’œil des chinois. Leur popularité constitue un argument de poids, surtout si on a affaire à un pays qui a une réputation établie en matière de football. « Mais il faut que ces clubs se professionnalisent. Ils doivent cesser d’être des associations dans lesquelles on du mal à identifier les dirigeants. Il faut qu’ils deviennent des sociétés commerciales, avec un projet sur une période minimale de dix années devant se décliner en quatre aspects : le projet sportif, le projet financier, le projet de développement (stades, siège, centres de formation, etc.), le projet chinois. Ce dernier aspect fait référence à ce que les vis-à-vis gagneront en faisant affaire avec eux. Les chinois sont pragmatiques et tout le monde le sait », sou-
ligne Diane Ninkeu, entraineur de football, un des piliers d’Apejes de Mfou, une association sportive camerounaise dont les catégories de jeunes ont leurs habitudes dans des tournois en Chine. Surtout, il faut être capable d’aller les stimuler. Et cela demande de la compétence en « sport business development ». Que la course aux milliards chinois commence !
La Chine veut donc devenir un géant du football et a les moyens de sa politique. Depuis une dizaine d’années, elle mène un raid économique sur l’Afrique. Sur le plan sportif, les échanges pour l’instant portent essentiellement sur la construction des infrastructures sur le continent africain. Les franchises africaines de football, pas encore informées des intentions chinoises, ont donc là une opportunité à saisir. Business Management 43 Juin 2016 AFRICA
Cahier thématique Sport Business Initiative
Stad’Afric,
francophone
et le sport africain a sa télévision
Sans grande annonce, la chaine a vu le jour à Paris, au dernier trimestre de l’année 2015. Elle est un produit de Baigom Company, une start up spécialisée dans les prestations de services en communication. Par H.A.
Junior Rengou, Promoteur de Stad’Afric, sur l’un des plateaux de la chaine.
«
C’est quoi cette chaine que je n’ai jamais regardée là ? Stad’Afric…Ne zappez pas encore. Laissez-moi regarder ». La scène a lieu à Bonamoussadi, à Douala. Nous sommes au domicile de Michel Aaron Feugueng, opérateur économique et promoteur d’une université privée au sein de laquelle on trouve une filière « management du sport ». C’est la première fois que cet entrepreneur, dont l’âge avoisine la quarantaine, tombe sur Stad’Afric, la première chaine de télévision francophone dédiée au sport africain. « C’est une bonne initiative. On en avait besoin », affirme-t-il dans un sérieux
déconcertant que ses proches lui reconnaissent. Le 07 janvier 2016 restera dans l’histoire. Ce jour là, la société à responsabilité limitée Baigom Company, lance officiellement dans le 10ème arrondissement de Paris, rue du Paradis, Stad’Afric. En fait, la chaine à ce moment là, est à deux mois d’essai. Son slogan, greffé à son logotype, la présente comme la « première chaine de sports d’Afrique ». Elle est avant tout le premier canal Tv francophone dédié au sport du continent. Elle devance ainsi Africa 24 Sport, petite sœur d’Africa 24, filiale du groupe Afrimedia, dont
l’avènement fait l’objet d’un teasing depuis presque une année. A la manœuvre, Junior Rengou Ourezou, français de nationalité, camerounais d’origine il est vient de chez les Bamoun- , né le 05 mai 1975. Pour lui, il fallait agir. « Nous les africains, on a souvent peur de nous lancer dans de tels projets. Car, on préfère que les autres fassent le premier pas pour les suivre ensuite. Sauf que nous, nous ne voulions pas suivre mais être acteurs de notre propre destin. Et j’assume totalement, que le projet soit une réussite ou un échec », indique-t-il à des confrères d’afrik. com.
Business Management 45 Juin 2016 AFRICA
Cahier thématique Sport Business Initiative
Motivations Des correspondants travaillent d’ores et déjà dans 14 pays. Le matériel de pointe qu’ils utilisent leur permet de rapidement balancer les sujets tournés vers la base parisienne en haute définition. Des recrutements de journalistes reporters d’images sont en cours pour couvrir le Bénin, le Gabon, la Guinée, le Niger, le Mali, le Tchad et le Burkina Faso. Management 46 Business Juin 2016
AFRICA
La naissance de la nouvelle chaine de télévision se résume d’abord en une affaire d’opportunités. Baigom Company, entreprise au capital déclaré de 35 000 euros (environ 23 millions F cfa), « travaille sur la communication depuis sept ans (l’entreprise a démarré le 15 octobre 2008, NDLR). Tous nos partenaires qui achetaient des espaces publicitaires étaient en manque d’un média où ils peuvent annoncer. On s’est alors dit : pourquoi ne pas montrer un média de
chaîne thématique africaine ? D’autant qu’il en manque en Afrique. En clair, nous sommes une petite start-up et nous sommes partis de la communication pour créer la chaîne », précise le Chief Executive Officer. La stratégie qui consiste à partir d’une agence de communication pour arriver à un groupe d’organes médiatiques, semble d’ailleurs une mode sur le continent africain. Reste à comprendre pourquoi Stad’Afric a choisi d’établir sa
base dans la capitale française, au moment où de puissants groupes médiatiques européens installent des antennes sur le continent africain. « Nous sommes basés à Paris pour des raisons surtout pratiques et d’efficacité. Cela nous facilite l’accès aux compétiteurs internationaux de passage dans la capitale. Cela nous permet de les recevoir au cœur de Paris. Il y aura des stars que nous pourrions interviewer », indique Junior Rengou Ourezou, lui qui est également
mandataire d’une autre entreprise, The Smart House. Au fond, Stad’Afric se présente comme un organe médiatique occidental au service de l’Afrique. Elle promeut les valeurs d’intégrité, de rigueur, de fairplay et dépassement de soi. Au quotidien, on retrouve sur son antenne, la vie des stars du sport, l’actualité, les documentaires, les débats, les portraits de légendes africaines du sport, la diffusion ou la rediffusion des grandes compétitions internationales.
Cahier thématique Sport Business Initiative
EN BREF Junior Rengou Ourezou 41 ans 05 mai 1975 Naissance au Cameroun 15 Octobre 2008 Création de Baigom Company à Paris (SARL au capital de 35 000 euros) 03 mai 2016 : Stad’Afric rejoint le bouquet de BBOX en France (Canal 56) En cours : Recrutement des correspondants dans plusieurs pays : Tchad, Bénin, Gabon, Guinée, Niger, Mali, Tchad, Burkina Faso.
Business model Quid du « business model » de la chaine ? Au cœur, une approche locale, l’information en continu et l’achat des droits des compétitions dans des disciplines apparemment pas intéressantes pour les potentiels concurrents. Ici, on veut parler des « compétitions locales, des ligues nationales, de toutes les dis-
ciplines sur le continent ». Car, au fond, J.R.O. précise qu’il a « l’habitude de dire que la jeunesse africaine respire le sport, mange la culture et boit la politique. Les jeunes ne rêvent plus de politique, tout simplement parce qu’ils n’y croient pas. Les politiques n’ont pas répondu à leurs aspirations. Notre
premier combat avec cette chaîne est de faire rêver la jeunesse africaine, lui montrer qu’elle a aussi des opportunités sur le plan sportif sur le continent. On veut qu’elle se rende compte qu’elle a des possibilités d’évoluer aussi en Afrique, et que l’Europe n’est pas la seule option ». Pour la mise en œuvre,
Business Management 47 Juin 2016 AFRICA
Cahier thématique Sport Business Initiative
les dirigeants de Stad’Afric ont choisi de rapidement occuper le terrain. Des correspondants travaillent d’ores et déjà dans 14 pays. Le matériel de pointe qu’ils utilisent leur permet de rapidement balancer les sujets tournés vers la base parisienne en haute définition. Des recrutements de journalistes reporters d’images sont en cours pour couvrir le Bénin, le Gabon, la Guinée, le Niger, le Mali, le Tchad et le Burkina Faso. Pour ce qui est singulièrement des disciplines ciblées, Stad’Afric entend mettre beaucoup d’emphase sur la lutte. Pour le PDG, c’est un sport « qui prend un essor important sur le continent. Il
Management 48 Business Juin 2016
AFRICA
y a tout un lobby autour. Les droits de la lutte sénégalaise y sont plus chers que le football ». Du coup, la chaine pense à acquérir une part des droits TV de ce sport très populaire en Afrique de l’Ouest. Des émissions sont d’ores et déjà diffusées sur l’antenne, à l’instar de « Pépites », consacrée aux portraits de grands sportifs africains. Mais la grande rentrée des programmes aura lieu en juillet 2016. En attendant, la télévision
de sport investit de l’argent pour être visible. On la retrouve déjà sur les bouquets d’Orange, de Bouygues Télécom, Eutelsat et Canalsat. Cette présence lui permet d’arroser l’Afrique et l’Europe. Les premiers fruits n’ont pas tardé à arriver. Le canal de sport fait partie des éditeurs choisis pour accompagner la campagne publicitaire de la compagnie MTN, baptisée « Eto’o peut ». Comme quoi, Stad’Afric peut aussi.
Cahier thématique Sport Business Ça marche
Tout Puissant Mazembe,
une industrie particulière de football à Lumbubashi
Plus que par ses performances sportives, c’est par ses investissements que le club lushois, porté par une entreprise, attire les grands regards. Balade dans un empire construit par Moïse Katumbi et qui fait exception sur plusieurs plans. Par H.A.
«
Faire du Tout Puissant Maz e m b e l’un des meilleurs clubs du monde ». La réponse du président de la franchise de Lumbubashi est la même à chaque fois qu’on lui demande jusqu’où il compte aller. Dans le chef lieu de la lointaine province du Katanga, au sud-est de la République démocratique du Congo, Moïse Katumbi Chapwe ne cesse de claquer les milliards depuis son retour d’exil. Tout cela au profit du football. Pour faire plus précis, au bénéfice du TPM, un club communautaire considéré comme la première religion de la ville. Depuis 2012, celui-ci dispose d’une infrastructure propre, un stade de 18 000 places assises, bâti près de l’église où l’équipe a été fondée en 1939 par les moines bénédictins. Dans l’enceinte, on retrouve un espace de remise à niveau des joueurs, un restaurant et une boutique pour la commercialisation des produits dérivés. Un centre de formation, la Katumbi Football Academy (KFA), est entré en fonctionnement quelques mois avant. Il fait partie du patrimoine du club. Mais le plus sensationnel ici, c’est la possession par le TPM de deux avions pour ses déplacements : un Mac Douglas 80 doté de 140 places et un Dornier. Une curiosité sur le continent africain.
Management 50 Business Juin 2016
AFRICA
Classé 13ème club mondial par la FIFA en 2013, le TPM passe donc pour être un mastodonte financier. 07,3 millions d’euros (un peu plus de 04,5 milliards F cfa), c’est le budget déclaré en 2012. Chez Cotonsport de Garoua, l’écurie qui écrase le championnat camerounais depuis plus d’une décennie, il faut diviser à peu près par dix pour trouver le chiffre correspondant au budget.
Sur le plan sportif, le TP Mazembe figure chaque année parmi les favoris de la ligue africaine des champions, la plus prestigieuse des compétitions de clubs sur le continent. C’est l’ennemi à abattre depuis qu’il a enlevé les éditions 2009 et 2010. Il a d’ailleurs récidivé en 2015. Après le dernier sacre cité, il prend part à la coupe du monde des clubs. Une compétition qu’il achève à la deuxième place, puisqu’il perd en finale contre l’Inter de Milan. C’est la première fois qu’un club africain se hisse à ce niveau. Depuis lors, les bons joueurs africains n’hésitent plus à prendre la direction de Lubumbashi. En 2012, ils sont cinq dans la sélection zambienne, vainqueur de la coupe d’Afrique des Nations, à y évoluer. Le club constitue aussi la colonne vertébrale de la sélection nationale de RDC cette année là. Ce qui fait dire à Hervé Renard, à l’époque sélectionneur de la
Cahier thématique Sport Business Ça marche Zambie, passé aujourd’hui du côté du Maroc, que « le Mazembe, c’est le Manchester city de l’Afrique ». Qui dit Manchester City, dit pompe à finances. Classé 13ème club mondial par la FIFA en 2013, le TPM passe donc pour être un mastodonte financier. 07,3 millions d’euros (un peu plus de 04,5 milliards F cfa), c’est le budget déclaré en 2012. Chez Cotonsport de Garoua, l’écurie qui écrase le championnat camerounais depuis plus d’une décennie, il faut diviser à peu près par dix pour trouver le chiffre correspondant au budget. Eliminé cette année là (2012) en demi-finales de la ligue des champions, l’équipe lushoise a dépensé, d’après son président, 02,5 millions d’euros en primes de matches. Moïse Katumbi affirme d’ailleurs que le budget augmente chaque année. Pour l’exercice 2016 en cours, des journalistes katangais annoncent le chiffre de 15 millions d’euros (environ 10 milliards F cfa). Les salaires ici n’ont rien à voir avec ce qu’on peut voir dans la plupart des clubs africains. D’après le quotidien Le Monde, certains joueurs sont payés jusqu’à 25 000 dollars le mois, soit un peu plus 13 millions F cfa par mois. De quoi leur enlever l’idée d’une immigration en Europe. Puisqu’ici, le stress fiscal n’existe pas. Longtemps courtisé par plusieurs clubs européens, à l’instar d’Arsenal, l’ancien chouchou de Lubumbashi, Trésor Mputu a choisi la fidélité. Après une saison chez les angolais de Kabuscrop - pour 1.5 million de dollars d’émoluments négociés par Katumbi - il est de retour chez les corbeaux pour, semble-t-il, achever sa carrière.
Aux sources de la révolution Pour comprendre ce qui se passe avec le TP Mazembe, il faut remonter à l’histoire de son président. Moïse Katumbi Chapwe, âgé de 51 ans en 2016, a une particularité : il est métis. Né d’un père juif grec exilé au Zaïre et d’une mère katangaise, il s’intéresse très vite au football. A 16 ans, il s’entraine avec les équipes jeunes de Corbeaux FC, un club rival à l’époque. Une blessure brise le rêve de footballeur qu’il caresse. Mais il se plait à ramasser les balles pour les stars du Mazembe. Très vite, il accompagne aussi son grandfrère, Raphaël Katebe Katoto, président du TPM de 1977 à 1982. Entre temps, celui qu’on surnomme « le métis de la brousse », se fait sa richesse. C’est dans les mines qu’il prospère. Sa fortune connue est estimée à 40 millions d’euros. Mais au Katanga, des journalistes estiment que le fric
du président va au-delà de cette somme. Mais lui-même tient à dire qu’il aurait « pu être milliardaire si je n’avais pas investi presque la totalité de ma fortune dans le club. Nous sommes une famille africaine. Mon père me disait qu’on est riche quand on partage ». C’est au début de la décennie 80 que le « prophète Moïse » - il rêve de devenir chef de l’Etat en RDC- commence à financer le football. Au sein de Corbeaux FC, c’est lui le bailleur de fonds, alors qu’il y a un président en place. En mars 1983, les supporters lui demandent de prendre la tête du club. Il refuse d’aller trop vite et préfère la vice-présidence. Mais en mai, celui qui occupe la première place, fonctionnaire de son état, est affecté à Kinshasa. Katumbi n’a plus de choix. C’est désormais lui le nu-
méro un. Dès la première saison, le club accède en première division. L’aventure avec cette formation dure 07 ans. En 1991, face aux difficultés du TPM, les deux clubs fusionnent. De toutes les façons, le vocable « Mazembe » veut dire « Corbeaux ». Membre du comité directeur de la nouvelle entité, il s’exile en Zambie. Le club de Lubumbashi est au plus mal. C’est la disette. Sur le plan continental, il disparaît des écrans radars. Ça énerve le métis. En 1997, tout en étant absent du pays, sans avoir demandé quoi que ce soit, il est porté à la tête du club. Le management à distance, voilà ce que pratique Moïse Katumbi de 1997 à 2003. Son travail, envoyer les fonds pour que le TPM, jusque là association sans but lucratif, puisse exister. Une politique qui ne
Business Management 51 Juin 2016 AFRICA
Cahier thématique Sport Business Ça marche
porte pas vraiment ses fruits. Juillet 2003, l’ange-gardien revient à Lubumbashi. C’est la fête. On sait que quelque chose va se passer. Il fait la promesse de raviver la gloire africaine de Mazembe. Luimême considère qu’il est à la tête de la franchise depuis mars 2002. Premier investissement, la réhabilitation du stade de la Kenya, dans lequel joue jusque là le club. Coût des travaux, 700 000 dollars Us. La CAF homologue l’enceinte qu’elle avait suspendue. Ce n’est que provisoire, puisque le président finit par construire un nouveau stade, cette fois là propre au club. Les travaux démarrent le 29 avril 2010. L’enceinte accueille sa première rencontre le 12 juillet 2012. Pour l’achat de bons joueurs, il cla-
Management 52 Business Juin 2016
AFRICA
que jusqu’à 20 000 dollars Us, une somme à laquelle le championnat congolais n’est pas habitué. Pour professionnaliser son club, il crée une société anonyme. Il va chercher les meilleurs
entraineurs, à l’instar du sénégalais Lamine Ndiaye. Il requiert les services de Jérôme Champagne, ancien secrétaire général de la FIFA, pour la stratégie de développement international. A tou-
tes les ressources humaines, il donne les moyens de réussir. L’avion de ligne devant transporter l’équipe est en retard un jour. Il décide d’en acheter un. Nous sommes en 2011.
Cahier thématique Sport Business Ça marche Le TPM sous Moïse Katumbi 1997 : Cooptation au poste de président et financement du club à distance 2003 : Retour à Lubumbashi 2006 : Transfert de Dieumerci Mbokani à Anderlecht (Le club a déjà touché plus de 10 millions d’euros sur les différents transferts du joueur) 2008 : Tournée européenne du club (Charleroi , Séville, Londres sur invitation d’Arsenal) 2009 : Vainqueur de la Ligue africaine des champions (1.5 millions d’euros de primes encaissées) 2010 : Vainqueur de la Ligue africaine des champions et finaliste de la coupe du monde des clubs ; mutation en société commerciale (Total des primes reversées par la CAF et la FIFA : 18.5 millions d’euros).
Rentabilité Beaucoup d’observateurs pensent que le TPM n’a aucun objectif de rentabilité. Le président quant lui affirme se situer dans la logique du football-business. Il y a d’abord la piste des transferts. La plus grosse opération réalisée est celle autour de Dieumerci Mbokani. « Lorsque nous l’avons vendu chez Anderlecht, dans les clauses du contrat, il était prévu que le TPM bénéficierait de 50% du montant net si le joueur était transféré ailleurs. Il est passé chez Monaco qui l’a acquis à 7 millions d’euro, le TPM a ainsi bénéficié de ses 3,5 millions d’euros. Dans le deuxième mouvement, Mazembe devait toucher 40% du transfert : le joueur a été transféré pour 12 millions d’euros en Russie, et Mazembe a encaissé ses 4.8 millions d’euros », indique l’homme d’affaires. En tout, pour ce seul joueur, le club a récolté près de 10 millions d’euros. Plu-
sieurs clubs français font régulièrement le déplacement de Lubumbashi pour recruter à prix intéressants chez les lushois. A l’issue de la coupe du monde des clubs en 2010, la franchise a touché 17 millions d’euros. On peut y ajouter les recettes de sponsoring : Adidas, Banque commerciale du Congo, Bretton Goods SARL (pour les produits dérivés), Mining Company Katanga, pour ne citer que ceux-là. « Dans le football aujourd’hui, il faut avoir une tête bien faite pour réussir ce qui est devenu du business », conclut le prophète Moïse sur ce chapitre. Dans le football, former et vendre est un business intéressant. La mise sur pied de la Katumbi Football Academy participe de cet objectif. Des techniciens français en tiennent les reines. Les premières pépites se font la main au Cs Don Bosco, un autre club de
Lubumbashi qui bénéficie de l’appui du « métis de la brousse ». Les meilleurs vont directement au TPM. En 2012, la KFA termine 4ème du tournoi Blue Stars de la FIFA, consacré aux jeunes. La meilleure performance africaine de l’histoire de la compétition. Le centre permettra au TPM d’atteindre son équilibre financier. Tel est en effet le vœu de Katumbi, lui qui croit à une possibilité de croissance de l’entreprise sur fonds propres, c’est-à-dire sans emprunts. Il n’est pas le seul à y croire. Son épouse, Carine Katumbi, grande connaisseuse du football, l’accompagne dans cette aventure. L’on comprend la déclaration de Claude Le Roy, faite en 2012 : « Je n’aurais jamais imaginé voir un club aussi structuré en Afrique noire ». L’Est de la RDC se veut donc une source d’inspiration pour les autres franchises de football en Afrique.
2011 : Achat du premier avion du club (MD Douglas 80) 2012 : Inauguration du nouveau stade de 18 000 places assises ; le budget est estimé à 07.3 millions d’euros ; Paiement des primes de match à hauteur de 02.5 millions d’euros 2013 : Finaliste de la coupe de la confédération africaine ; 13ème club dans le classement FIFA 2015 : Vainqueur de la Ligue africaine des champions 2016 : Estimation du budget à 15 millions d’euros
Beaucoup d’observateurs pensent que le TPM n’a aucun objectif de rentabilité. Le président quant à lui affirme se situer dans la logique du football-business. Il y a d’abord la piste des transferts. La plus grosse opération réalisée est celle autour de Dieumerci Mbokani. En tout, pour ce seul joueur, le club a récolté près de 10 millions d’euros. A l’issue de la coupe du monde des clubs en 2010, la franchise a touché 17 millions d’euros. Business Management 53 Juin 2016 AFRICA
Cahier thématique Sport Business Latest news Nomination - FIFA
F
atma Samoura, sénégalaise âgée de 54 ans, prendra à la mi-juin 2016, ses fonctions de secrétaire générale de la Fédération internationale de Football Association. Elle a été nommée à ce poste le 13 mai par le nouveau président de l’instance faitière du football mondial, l’italo-suisse Gianni Infantino. C’est la première femme à arriver à ce poste. Au moment de cet appointement, elle travaillait au Nigeria pour le compte de l’Organisation des Nations unies. Elle a débuté une carrière de diplomate au sein de cette institution en 1995 en tant que responsable logistique du Programme alimentaire mondial à Rome. Elle a ensuite occupé plusieurs autres responsabilités dans les agences onusiennes à Djibouti, au Cameroun, au Tchad, en Guinée et à Madagascar. Etrangère au football, elle est attendue sur le chantier de la poursuite des réformes engagées par la FIFA depuis la suspen-
sion de l’ancien président de l’organisation, Joseph Sepp Blatter. Le président de la FIFA trouve beaucoup de qualités en celle qu’il a choisie pour diriger l’administration de l’organisation. « C’est une femme avec une expérience et une vision internationales. Elle a travaillé sur les problématiques les plus importantes de notre époque. Elle a prouvé qu’elle était capable de construire et de mener une équipe, et d’améliorer les performances d’une organisation. Et, ce qui est aussi important pour la FIFA, c’est qu’elle comprend que la transparence et la responsabilité sont au cœur de toute
organisation responsable », a affirmé Gianni Infantino. Quant à la récipiendaire, elle a affirmé être impatiente d’apporter son expérience « en matière de gouvernance au service de cet important travail de réforme déjà engagé ».
Droits TV - Sénégal Africasports TV, une chaine de télévision de sport basée aux Etats unis d’Amérique, a acquis les droits TV des championnats professionnels de football du Sénégal pour 195 millions de francs cfa par saison. Le chef de département de la communication à la ligue sénégalaise de football professionnel, Ndoffène Fall, a fait cette annonce à l’issue du conseil d’administration de l’instance, tenue le 21 mai 2016. Selon ce responsable, chaque club de Ligue 1 aura droit à 05 millions de francs cfa, contre 04.5 millions de francs cfa par saison pour ceux de Ligue 2. L’exposition télévisuelle leur permettra de majorer leurs gains à travers le sponsoring. Africasports TV, qui attend encore de lancer officiellement ses programmes, mène en ce moment une campagne d’achat des droits TV de plusieurs championnats de football en Afrique.
Management 54 Business Juin 2016
AFRICA
Cahier thématique Sport Business Latest news Sponsoring - Cameroun
Ça bouge chez les managers Sénégal – SGBS. Le camerounais Georges Wega prend la direction de la Société Générale des Banques du Sénégal au mois d’août 2016. Il remplace le français Yann de Banteuil. En ce moment, le récipiendaire est le directeur adjoint de Société Générale Cameroun. Il a rejoint le groupe le 1er juillet 2014, après avoir passé 04 années comme directeur général de la filiale camerounaise d’United Bank of Africa (UBA). Sa nomination obéit à une politique d’africanisation des postes de direction des filiales de la Société Générale en Afrique.
Le président de la Ligue de football professionnel du Cameroun, Pierre Semengue, a rencontré, le 27 mai 2016, les chefs d’entreprises membres du Groupement inter patronal du Cameroun. La réunion a eu lieu au siège du GICAM à Douala, en marge de l’assemblée générale de ce mouvement patronal. Il était question d’intéresser les patrons au sponsoring des championnats professionnels organisés par la LFPC. Ceux-ci souffrent d’un manque criard de financements. Pierre Semengue a notamment parlé des avantages fiscaux dévolus par le code général des impôts aux entreprises qui investissent dans le sport. Dans leur majorité, les clubs professionnels de football du Cameroun font face à de nombreuses difficultés en ce moment. Alors que les championnats de ligue 1 et ligue 2 sont rendus à leur seconde phase, les joueurs d’une vingtaine de franchises disent n’avoir perçu aucun mois de salaire depuis le début de la saison.
Les patrons d’entreprises ont réagi différemment à cet appel. Pour certains, il faut que les clubs soient structurés comme des entreprises, avec une transparence dans la gestion, de façon à pouvoir les accueillir comme actionnaires. D’autres préfèrent d’abord s’occuper de la croissance de leurs structures avant de regarder vers le football. « En tant que patron de société, je crois que le football ne peut pas vivre dans un pays où les entreprises ne sont pas à l’aise. Il faudrait que ça fasse partie du contexte général. Il faudrait redonner vie à nos entreprises, pour permettre de créer la richesse et l’emploi. Et une fois que notre économie connaîtra la vigueur que nous souhaitons, le football fera alors partie de l’une des plus grandes retombées », a affirmé Henri Fosso, un des vice-présidents du GICAM, par ailleurs président du conseil d’administration de Fimex international.
Angola – Sonangol. Isabel Dos Santos, 43 ans, est la nouvelle présidente du conseil d’administration de la Compagnie nationale angolaise des hydrocarbures (SONANGOL). Le chef de l’Etat angolais, Eduardo Dos Santos, lequel est son père, l’a nommée à ce poste le 02 juin 2016. Elle est déjà la femme africaine la plus riche avec une fortune estimée, d’après le magazine Forbes, à 03 milliards de dollars. Quant à la Sonangol, c’est la deuxième plus importante entreprise sur le continent, avec un chiffre d’affaires plafonné à 40 milliards de dollars en 2013. Gabon – La chaine Gabon 24 Mireille Dirat est la toute première directrice de l’information de la chaine d’information en continu Gabon 24, laquelle nourrit une ambition panafricaine. La filiale du groupe audiovisuel à capitaux publics, Gabon Télévisions, a été lancée à Libreville le 24 mai 2016, en présence du chef de l’Etat gabonais, Ali Bongo. Mireille Dirat, avant sa nomination, travaillait chez Teleafrica, une chaine de télévision privée gabonaise. Alex Eboue, transfuge du quotidien Gabon Matin, assumera les fonctions de directeur d’antenne. La direction commerciale est tenue par MarieLéonne Pembe. Mathieu Koumba, PDG du groupe Gabon Télévisions, coiffe toute l’équipe.
Business Management 55 Juin 2016 AFRICA
Focus auto Cette page vous est offerte par Renault
Moteurs TDI, quelle crédibilité sur
le continent africain ?
Présent en général sur certaines marques du constructeur allemand Volkswagen, les TDI sont des moteurs à injection directe. Ils exigent un suivi comparable à celui qu’on accorde à un athlète très performant, mais ô combien fragile.
C
réé par Ferdinand Piëch, petit fils de Ferdinand Porch créateur de la marque Volkswagen, Le moteur TDI (Turbocharged Direct Injection) est monté pour la première fois en 1985 sur l’audi100 avec un cinq cylindres en ligne. Cette technologie injecte directement le carburant dans le cylindre et non dans l’admission en amont des soupapes comme chez les moteurs dits à
« injection indirecte ». Un procédé de pistons à tête creusée permet une augmentation de la puissance à cylindrée proportionnelle à l’alourdissement du volume de la chambre de combustion. La plupart des moteurs diesel sont confrontés aux problèmes pouvant affecter la vanne EGR, les injecteurs ou encore le turbo. Mais de façon spécifique, chez les TDI, il sera prudent de surveiller de très prés le débit-
mètre, le volant moteur et la culasse lorsqu’on rencontre des problèmes tels que : la perte de puissance, les difficultés à passer les vitesses, les vibrations anormalement élevées, le voyant moteur allumé au tableau de bord, le sifflement élevé du turbo. Dans plusieurs pays africains, les carburants se caractérisent par leur mauvais raffinage. C’est en général la véritable source des difficultés que rencontrent
tous les types de moteurs sur le continent. Mais bien d’autres éléments, à l’instar de la faible mobilité des automobilistes, entrent aussi en jeu. Il est important, pour ceux qui ne jurent que par le diesel, de côtoyer régulièrement l’autoroute avec leurs véhicules afin de décrasser non seulement l’ensemble des circuits, mais aussi le turbo. Ceux-ci peuvent en effet finir par s’encrasser. Une bonne connaissance des différentes parties du moteur TDI s’avère utile.
Business Management 57 Juin 2016 AFRICA
Focus auto Le filtre à particules Le filtre à particules se présente comme le cauchemar des automobilistes qui effectuent essentiellement de petits parcours. Dans le principe, le FAP capte les particules et les brûle lorsqu’il est plein. Pour ce faire, une température minimale de 650°C est requise, le moteur passant en mode régénération en injectant plus de carburant pour la faire grimper. Mais en ville, ces cycles sont écourtés à chaque coupure du moteur, ce qui tend à boucher le FAP. Deux solutions s’offrent à vous. Soit, vous procédez à une régénération forcée en atelier, soit vous remplacez le filtre. La bonne qualité de ce composant améliore aussi la consommation en carburant.
Le turbo Essentiel dans la réduction de cylindrée, le turbo est en général victime d’une cascade d’autres défaillances (mauvaise admission ou fuite d’air, défaut de lubrification, encrassement, etc.). Son endommagement peut entraîner une fuite d’huile ou un grippage de la turbine.
La vanne EGR Destinée à réduire les émissions de d’oxydes d’azote, la vanne EGR a pour fonction de recycler les gaz d’échappement en les refroidissant. Puis, il les réinjecte dans les cylindres où ils seront à nouveau brûlés. Or, ce processus engendre des dépôts de particules dans le système d’admission, lesquels se transforment en une couche noire. Et lorsque c’est le cas, ils viennent calaminer la commande, la vanne EGR, le turbo, la culasse, le collecteur, etc.
Management 58 Business Juin 2016
AFRICA
Tendances Au féminin, choisir sa robe en fonction de sa morphologie Comme toutes les femmes, il vous arrive de rêver devant un modèle de robe et de vous dire tout simplement que vous aimeriez bien l’avoir dans votre placard. Mais tenez toujours compte de votre corps. Par Marie Thérèse BITIND
E
nthousiaste à l’idée de la porter, vous hésitez car vous ne savez pas si cette robe est faite pour vous. Que votre silhouette soit androgyne, ronde ou pyramidale, il existe un modèle de robe qui la sublimera. Alors, avant de courir dans les boutiques, lisez ces quelques lignes. Ce sont des conseils mode pour trouver votre forme de robe en fonction de votre morphologie.
Management 60 Business Juin 2016
AFRICA
● La silhouette pyramide Vous avez un buste étroit et des hanches larges. Vous devez choisir un modèle avec un haut ajusté et flottant au niveau des hanches. Vous attirerez ainsi les regards vers le haut de votre corps et éviterez par la même occasion l’effet « bouteille d’Orangina ». Cette image vous déprime-t-elle ? Rassurez-vous, nous sommes nombreuses à avoir une silhouette-pyramide et cela n’empêche ni d’être belle, ni d’être sexy. Alors, pour mettre en valeur votre buste, vous avez l’embarras du choix : emmanchures américaines (comme sur la photo), fines bretelles, petites manches volantes… Osez également les décolletés (en V, carré…). Et si vous avez une petite poitrine, n’oubliezpas votre push-up. Pour dissimuler vos hanches, préférez les matières fluides qui ne vous mouleront pas.
Tendances ● La silhouette en forme de pyramide inversée Vos épaules et votre buste sont larges. Mais vos hanches, taille et jambes sont fines. Vous devez choisir une robe avec des manches, même courtes, un haut un peu loose - surtout si vous avez un peu de ventre- . Vous devez absolument attirer l’attention sur les parties les plus fines de votre corps. Pour cela, n’hésitez pas à montrer vos gambettes en optant pour une longueur au-dessus du genou (en plus, ça allonge la silhouette) et à souligner vos hanches avec une ceinture. Il faut cependant mettre beaucoup d’attention au moment de faire le choix. Vous opterez pour la ceinture taille basse si vous avez un peu de ventre, pour qu’elle ne mette en valeur que vos hanches. Vous ne prendrez la taille haute que si votre ventre est plat.
● La silhouette ronde Vous êtes ronde de partout. Vous devez choisir une robe fluide. Evitez les matières trop élastiques qui moulent le corps et les petits bourrelets. Privilégiez les formes amples, tuniques et pourquoi pas chemisier. Côté longueur, la meilleure reste celle qui vous arrivera au genou. Enfin, si les couleurs sombres permettent d’affiner la silhouette, dites-vous que, vous aussi, vous pouvez oser les couleurs. Faites cependant attention à bien choisir la taille de votre vêtement. Lors de vos essayages, assurez-vous d’être bien à l’aise. Si vous ne vous sentez pas à l’aise en portant juste une robe, mettez un legging. Et misez sur la ceinture sous la poitrine pour une touche glamour et tendance.
● La silhouette rectangulaire
Votre taille et vos hanches sont peu marquées. Vos épaules sont larges, votre poitrine mince… Vous devez opter pour un modèle qui crée l’illusion de courbes avec un haut bien ajusté de type cache-cœur. L’objectif est de mettre votre poitrine en valeur. Vous mettrez également beaucoup de soins pour des détails tels que des fronces, plis et ceintures, dans le but d’affiner la taille. A vous les cols V, les robes coupe empire et les formes trapèze. Nous conseillons d’éviter les encolures rondes. Elles vous feront des tout petits seins. Pour donner une valeur à votre tenue et booster votre féminité, optez pour un sautoir fin, des talons.
● La silhouette sablier Vous êtes voluptueuse avec un buste et des hanches larges. Cependant, votre taille est fine. Vous devez choisir un modèle évasé, bien marqué à la taille et un haut ajusté, de préférence avec un col en V. Il est question de mettre en avant votre beau décolleté. Nous avons choisi cette saharienne car elle souligne les formes tout en donnant une allure naturelle et décontractée. Faites-vous plaisir en portant des bracelets en bois et des chaussures à talons à bouts ronds ou ouverts. Bref, mettez des accessoires sobres pour un look élégant.
Business Management 61 Juin 2016 AFRICA
Découverte Numérique, des applications made in Afrique qui vont impacter la vie du continent Après avoir raté l’étape de la révolution industrielle et toutes les avancées technologiques qui ont suivi, l’Afrique s’accroche, afin de jouer un rôle important dans celle du numérique. Et partout sur le continent, des jeunes pousses viennent bousculer la hiérarchie. La rédaction a entamé dans la précédente parution une série sur ces créations digitales qui ambitionnent de donner un visage positif au berceau de l’humanité. Ceci n’est donc que la suite. Par Lydie ABASSOMBE
● Feem : un réseau local WiFi pour transférer ses fichiers sans peine Dans un contexte où l’on n’a pas toujours les accessoires de son téléphone pour transférer des fichiers vers son ordinateur, ou encore des téléphones dotés de Bluetooth, le camerounais Fritz Ekwoge a développé Feem. L’application mobile permet d’envoyer et de recevoir rapidement des fichiers entre appareils grâce à un réseau wifii local. Originaire de la région du Sudouest, Fritz Ekwoge, qui est le fondateur de l’entreprise Feeperfect, a eu l’idée de concevoir cette solution. Elle
s’adosse sur le faible pouvoir d’achat, lequel empêche encore les détenteurs de téléphones portables de contracter une connexion internet mobile. En d’autres termes, avec Feem, pas besoin de connexion internet pour être connecté et discuter avec les autres utilisateurs de l’application ou avec les autres appareils à proximité. En téléchargement gratuit sur le site www.tryfeem.com, l’application Feem a néanmoins déjà fait l’objet d’une centaine de téléchargements payants depuis l’Appstore d’Apple.
● Njorku : le moteur de recherche consacré aux offres d’emploi Pour ceux qui recherchent du travail en Afrique, Njorku est l’outil idéal. Ce moteur de recherche inventé en 2011 par un groupe de camerounais - Churchil Mambe Nanje, Bertrand Kima, Segue Gontran et Ebot Blaise - est consacré uniquement aux annonces d’offres d’emploi.
Il scanne en continu les sites d’offres d’emploi, afin d’offrir un large éventail aux utilisateurs qui en font la demande. Le site recense les annonces au Nigeria, au Cameroun, en Afrique du Sud, au Ghana, au Kenya, en Ouganda et en Égypte. Il est accessible gratuitement sur le web, et pas besoin d’enregistrement
Management 62 Business Juin 2016
AFRICA
préalable. En 2012, Njorku a connu le grand honneur de figurer dans le classement des 20 start-up qui comptent en Afrique dans le magazine Forbes. Le nombre de
visiteurs a atteint près de 15 000 par jour pour plus de 50 000 annonces d’emploi. Pour visiter le site web, il faut cliquer sur http:// www.njorku.com.
Découverte ● Djoss TV : la télé en communauté Si vous avez marre de regarder des programmes TV tout seul, de ne pas pouvoir partager vos émotions, faites un tour sur Djoss TV. C’est une plateforme web et mobile qui permet aux téléspectateurs qui regardent le même programme TV de discuter en temps réel via web ou SMS. Vous pouvez interagir en temps réel avec les personnes sur le plateau des émissions, tout en découvrant des informations complémentaires sur le programme que tous regardent. Fruit de l’imagination de quatre jeunes camerounais - Patrick Ndjientcheu, Eloge Fokem, Aboubakar Sidiki Kouotou et Hervé Djia - l’application est née en 2011.
Son objectif : changer l’expérience de la télévision en Afrique, lui donner un côté communautaire propre à l’esprit africain. Lauréat du Cameroon Startup Challenge 2012, un événement technologique d’entrepreneuriat, l’application Djoss TV a tellement séduit des chaînes de télévision comme STV2 ou Equinoxe qu’elles ont décidé de l’essayer. Au fil du temps, de nombreux téléspectateurs adhèrent à la plateforme de télévision communautaire Djoss TV depuis l’adresse http://djoss. tv. Cependant, si les contributions aux programmes sont gratuites sur le web, l’envoi des SMS est payant.
● Powertime pour consommer intelligemment l’énergie Powertime est une application créée par la maison du même nom, fondée en 2009, et dont le but initial était d’apporter des réponses en termes de règlement de factures aux ménages et organisations, dans la consommation de l’électricité. Lors de sa création, l’application est destinée à faciliter la relation entre les consommateurs d’électricité et l’opérateur Eskom qui la fournit. Powertime, qui en est aujourd’hui à sa sixième version, a diversifié ses domaines d’intervention et permet de régler des taxes communales, de recharger son crédit de téléphone ou encore de recevoir des alertes sur la baisse d’énergie. Le principe d’utilisation est simple, on
s’inscrit sur le site internet de l’opérateur et on suit la procédure. L’application elle-même est gratuite en téléchargement libre, mais son utilisation ne l’est pas. L’entreprise la considère comme un service à valeur ajoutée et un montant est prélevé en même temps que le règlement effectué. L’entreprise à l’origine du nom de l’application estime qu’en plus d’améliorer le service client, elle permet d’instaurer une consommation responsable de l’énergie, préservant ainsi l’environnement. En 2010, la société qui l’a conçue a reçu une distinction, celle de la meilleure application de la « App factor competition ».
Business Management 63 Juin 2016 AFRICA