6 minute read

Politique en matière d’environnement et activités CAB

Next Article
Paul De Genst

Paul De Genst

L’été nous a rappelé combien la situation climatique et environnementale est critique, pour ne pas dire catastrophique. Nos sports sont impactés, dont, en première ligne, l’alpinisme estival qui subit de plein fouet le réchauffement du climat, avec pertes humaines à la clé.

En même temps, nos pratiques et notre mode de vie contribuent aussi à cette situation. Se déplacer 2 x 1000 km en voiture, avec tout notre attirail, consommer et profiter des aménagements touristiques de la montagne et puis partager le tout en photos et vidéos via les réseaux sociaux, tout ça pour constater et se plaindre que les glaciers disparaissent ou que la biodiversité s’érode, entre autres parce que justement nous sommes venus le constater, relève d’une forme de trouble dissociatif de l’identité. Nos sports, notamment du fait des déplacements et de l’intrusion dans les milieux naturels qu’ils nécessitent, contribuent inévitablement à la dégradation de la situation.

Advertisement

Celui qui n’a pas compris le problème et à quelle dissonance cognitive nous sommes confrontés en allant grimper ou randonner en montagne et ne ressent pas (encore) d’éco-anxiété face à cette situation n’a probablement pas encore pris la pleine mesure du problème.

Au sein du Cercle Escal’pades, nous avons choisi d’y faire face. Nous avons tenté, à notre échelle, de proposer quelques pistes de réflexion dans un premier temps, puis d’actions dans un deuxième temps.

Ainsi, le conseil d’administration, avec quelques moniteurs, s’est réuni pour une journée de réflexion sur le sujet. Après avoir dessiné une fresque du climat (https://fresqueduclimat.org), les participants ont élaboré une politique en matière d’environnement. Cette politique a été validée par les membres en Assemblée générale en juin dernier. Le texte est accessible en ligne (https://users.escalpades. euescal3/polenv ou sur le site « escalpades.eu », via le menu « Escal’pades »  « Politique en matière d’environnement »).

Cette politique a pour ambition de cadrer les activités du Cercle en matière de respect de l’environnement. Elle s’impose donc aux moniteurs qui proposent des activités, et aux membres qui

L’astuce

Prendre le train avec son vélo est parfois difficile : le nombre de places avec vélo est limité (surtout en TGV) et il y a un supplément de prix. Par contre, en plaçant son vélo dans une housse après avoir retiré les deux roues, également placées dans la housse, on peut le prendre en train comme un simple bagage, sans réservation et sans supplément. Avec un peu d’entraînement, c’est rapide et facile. Les housses sont disponibles dans le commerce ou le bricoleur pourra la faire lui-même.

déplacements aisés vers les sites de grimpe ou de randonnée, matériel toujours plus rutilant, refuges alimentés en électricité et en chauffage et saucissons d’alpages pour tous… Pas marrant de se dire qu’il faudra se priver de tout ça. Pourtant, se passer d’une addiction offre des perspectives vers une nouvelle et belle vie. De même qu’un fumeur peine à entamer le combat contre son addiction, quelle belle perspective s’offre à lui lorsqu’il gagne sa lutte. Une nouvelle vie est à inventer, y compris pour la pratique de nos activités. Peut-être celle-ci sera-t-elle aussi belle, voire plus ?

participent à ces activités ou à des rassemblements organisés par le Cercle. Bien entendu, les membres, lors de leur pratique personnelle en dehors du Cercle, restent libres. Mais par leur validation de cette politique, ils sont fortement encouragés à s’en inspirer dans leur vie sportive, fut elle extérieure au Club (haha : pour éviter d’accentuer encore cette fameuse dissonance cognitive). La politique est évolutive : elle est donc amenée à s’adapter à l’évolution des situations et des contraintes.

Évidemment, Escal’pades ne prétend aucunement être pionnier ou innovateur en la matière. Nous présumons (et espérons) que d’autres Cercles ont déjà réfléchi, voire pris des mesures. Il en va de même pour la Fédération. D’autres pays d’Europe sont déjà bien avancés sur le sujet. La Fédération Allemande, la DAV, notamment, est bien engagée en la matière et a fixé des objectifs clairs et contraignants à tous ses clubs (www.alpenverein.de/ Natur-Klima/). Leur objectif est d’aller vers une neutralité carbone avant 2030. Au niveau de l’IFSC Europe également, un groupe de travail est déjà constitué et soyons sûr que des actions seront prises. Espérons qu’elles soient à la hauteur.

Nous souhaitons que la dynamique enclenchée par ces différentes initiatives permettra de faire évoluer nos politiques respectives par enrichissement mutuel. Et, on peut rêver, peut-être arriverons nous, ensemble, à enclencher une dynamique qui inverse la tendance.

Si la situation n’est pas du tout réjouissante, nous pouvons néanmoins tenter de voir les choses positivement. Le grand responsable du problème est notre addiction aux énergies fossiles et à tout ce qu’elles nous procurent : déplacements rapides, logements confortables, biens de consommation en quantité, nourriture à profusion, outils de communication… Et en ce qui nous concerne :

Choisir dès maintenant un chemin vers la sobriété nous épargnera de subir une pauvreté inéluctablement imposée par la situation, avec tous les troubles qui l’accompagneront.

Nous sommes à un stade où les « petits » efforts ne suffisent plus, nous sommes contraints à revoir tout notre fonctionnement. Et il y a urgence !

Suggérer, par exemple, aux membres de venir au CABaret sans voitures est bien gentil et le minimum. Mais quand sur place on constate qu’il y a des centaines de voitures garées sur plus d’un kilomètre de chaque côté de la route, on voit combien le message passe mal et que l’effort effectué par quelques uns venus en train ou à vélo reste du domaine du symbolique et ne suffit plus du tout.

Tout en étant bien conscients que les changements individuels ne résoudront pas le problème, et ne constituent qu’un levier vers une réforme nécessaire du système sur le plan institutionnel, nous devons passer à une autre dimension, que ce soit individuellement ou lors des activités de groupe. On partira moins loin, moins vite, moins souvent, moins facilement… Mais pourquoi ne serait-ce pas mieux ?

Quelques exemples de moins-moins qui ont donné « plus mieux » : Eric a testé le train + vélo pour Fontainebleau. Quelle expérience amusante. L’aventure a commencé dès le pas de la porte : rejoindre la gare à vélo, prendre, confortablement, un train puis un TGV, traverser Paris embouteillé à toute vitesse à vélo pour changer de gare, reprendre un train pour Fontainebleau et 1/2h après commencer à grimper, le tout en autant de temps que si le trajet avait été fait en voiture. Bon, il faut reconnaître que rouler à vélo avec un crashpad sur le dos n’était pas des plus agréable : il faudra trouver un truc pour résoudre ce petit détail. Mais pour l’ensemble, quel plaisir. Et se déplacer d’un coin à l’autre de la forêt à vélo est un avantage.

Serge guide des randonnées en autonomie. Il a expérimenté avec quelques groupes des repas zéro déchets : exit les lyophilisés chimiques polluants (et rarement bons), bonjour les polentas aux tomates séchées et autres raclettes revisitées : un délice. Bon, il y a encore de la marge de progression au niveau culinaire, mais quel plaisir de cuisiner ensemble au bivouac, de partager les tâches et les réchauds, puis de consommer le résultat face au coucher du soleil.

Corinne a entrepris la traversée des Pyrénées en plusieurs fois (combi Haute Route, GR11 et GR10). A chaque séjour, elle s’y rend en train depuis Arlon. Pour ceux qui prétendent que l’aventure n’est plus possible en Europe, qu’ils tentent l’aventure SNCF à travers toute la France : péripéties et problèmes garantis depuis la recherche des trains jusqu’à destination ! Beaucoup de souvenirs en perspective.

Et bien entendu, comme présenté dans les A&A précédents, on peut citer Sébastien et son groupe qui ont traversé à la voile, en aller-retour, l’Atlantique pour grimper au Yosemite ou Pablo et son tour de France à vélo à la recherche du plus beau 8a.

Des expériences similaires peuvent se répéter pour chacune de nos activités, pour tous nos déplacements et deviennent une part de l’aventure que nous cherchons. Nous pouvons, comme Fédération, membres d’un Cercle et pratiquants de nos activités, nous réinventer et conserver le plaisir qui est le nôtre de grimper et randonner.

Nous invitons les membres, les Cercles et la Fédé, à relayer dans les prochains A&A, des expériences, évolutions positives et démarches entreprises pour mieux situer notre pratique à ce niveau. Via une rubrique « climat et environnement » dans chaque A&A ?

Et, tant qu’on y est, pourquoi pas aussi dans notre vie au quotidien ?

Par exemple, on s’aperçoit rapidement que notre chère et indispensable voiture ne l’est plus tant que ça. Il en va de même pour les autres aspects de nos vies : biens de consommation qui deviennent moins utiles qu’on ne le pensait, outils et réseaux numériques qui nous volent plusieurs heures de nos vies chaque jour, plaisir du temps consacré à une cuisine végétarienne, réappropriation de la gestion de notre chauffage par isolation de nos logements… Dans chaque cas, c’est une chaîne que l’on brise et le plaisir sans cesse renouvelé d’une victoire que l’on croyait impossible.

Pour conclure, un petit message personnel à tous les jeunes : les générations qui vous précèdent et dont nous faisons partie ont complètement disjoncté en installant ce mode de vie destructeur qui nous emprisonne, basé sur les énergies fossiles. Vous comprenez très bien les problèmes, enjeux ainsi que le changement radical de société et le démantèlement du système qui s’imposent. Les vieux qui nous gouvernent ou gèrent nos sociétés ne changeront pas ! Éjectez-les des organes de décisions à tous les niveaux de la société et, par tous les moyens, prenez le pouvoir !

This article is from: