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Emploi et formation
La marmite gauloise
POURQUOI LE MONDE NE VEUT PAS TRAVAILLER AVEC LES FRANÇAIS ET COMMENT Y REMÉDIER Les entreprises ne veulent pas engager de Français. C’est du moins le constat dressé par la formatrice en communication interculturelle Marie-José Astre Démoulin au terme de trente années de vie professionnelle passées dans des milieux internationaux.
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ue pensent les étrangers des Français et de leur culture ? Dans 8 clés pour travailler à l’international (éd. Diateino), Erin Meyer rapporte le témoignage de Sabine Dulac, une Française fraîchement débarquée à Chicago. « Je siégeais avec des collègues américains à la commission d’organisation d’une convention. Ce fut un désastre. Pourtant, lorsque l’organisateur nous demanda ce que nous en avions pensé, les participants dressèrent la liste des points positifs. Je n’en revenais pas. Quand mon tour arriva, je partis au quart de tour : l’orateur n’avait aucun charisme, le repas était infect, les ateliers en groupes ennuyeux... Tandis que je parlais, je voyais mes collègues américains se décomposer. » Perçue comme donneuse de leçons et insolente, Sabine Dulac ne s’est pas fait beaucoup d’amis ce jour-là. Cette anecdote n’est pas un cas isolé. « Les Français ont acquis une réputation d’arrogance, note Marie-José Astre Démoulin, auteure de La marmite gauloise, pourquoi le monde ne veut pas travailler avec nous, les Français (éd. La boîte à Pandore). C’est la raison pour laquelle les dirigeants, que ce soit dans la
Certains peuples trouvent leur adrénaline dans l’ivresse du jogging, les Français trouvent la leur dans le plaisir de polémiquer.»
Marie-José Astre Démoulin fonction publique internationale ou dans le secteur des multinationales, sont réticents à les embaucher. » Elle ajoute que de nombreux patrons sont d’avis que la propension des Français à tout contester insuffle une mauvaise ambiance dans les équipes. « Certains peuples trouvent
leur adrénaline dans l’ivresse du jogging, nous trouvons la nôtre dans le plaisir de polémiquer. » Problème : le plaisir n’est pas partagé par tous. « Les Suisses, en particulier, cherchent le consensus et sont moins enclins à formuler des avis tranchés. » Michel Sauquet et Martin Vielajus, auteurs de L’intelligence interculturelle (éd. Charles Léopold Mayer) soutiennent la même idée. « Les Français provoquent, ne laissent rien passer » et se montrent très parcimonieux sur les félicitations, des traits de caractère qui font d’eux des persona non grata au sein de nombreuses entreprises. En même temps, celles-ci leur reconnaissent des qualités. Ils font preuve d’esprit critique et d’une logique cartésienne redoutable qui leur permet d’identifier les failles d’un raisonnement. Leur âme révolutionnaire questionne le consensus et leur goût pour la connaissance les incite à comprendre les choses en profondeur. « Mais toute qualité, poussée à l’extrême, devient un défaut, avertit Marie-José Astre Démoulin. Elle cite Niels, un employé de la Silicon Valley. «En Californie, les dirigeants ont conscience de l’importance de la présence d’une personne qui voit tous les défauts. Ils ne