Aider les plus pauvres à s’adapter à la crise climatique

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« Face à l’imminence de la catastrophe climatique, la Suisse doit agir de ­ manière décisive et donner l’exemple en matière de politique climatique internationale. Caritas demande au Conseil fédéral et au Parlement de promouvoir la protection du climat, et de soutenir plus fortement les mesures d’adaptation dans les pays en développement. »

Prise de position de Caritas sur le changement climatique

Aider les plus pauvres à s’adapter à la crise climatique


Du changement climatique à la crise climatique En bref : La Terre se réchauffe. En conséquence, les glaces polaires fondent, et les fortes inondations, les sécheresses mortelles et les tempêtes catastrophiques se multiplient. Les populations les plus démunies des pays en développement en sont les premières victimes. Leurs espaces vitaux sont les plus fortement touchés par les catastrophes environnementales et climatiques. Or ce sont justement ces populations qui manquent des capacités et des ressources nécessaires pour s’adapter aux changements néfastes du climat. De ce fait, leur pauvreté s’aggrave. Pour faire face à l’imminence de la catastrophe climatique, deux approches doivent être adoptées. Premièrement, la protection du climat et l’adoption de systèmes d’énergie renouvelable, pour ralentir les mutations climatiques (approche d’atténuation). Deuxièmement, l’adaptation aux conséquences du réchauffement de la Terre, tels les évènements météorologiques extrêmes et l’élévation du niveau de la mer (approche d’adaptation). Tandis que cette dernière approche est prioritaire dans de nombreux pays en développement, les pays plus aisés tels la Suisse doivent investir plus dans la protection du climat. Avec une empreinte carbone par habitant élevée, la Suisse s’est aussi engagée, avec d’autres pays industrialisés, à soutenir plus fortement l’adaptation climatique des pays les plus pauvres, qui en ont un besoin vital. Au moyen par exemple de semences résistantes à la sécheresse et de méthodes d’irrigation adaptées, afin que l’agriculture reste productive et fournisse une alimentation suffisante. Ou au moyen de digues côtières et de réservoirs d’eau, afin que les habitants puissent se protéger contre les inondations et la sécheresse. Ou encore au moyen du reboisement et d’autres mesures d’adaptation, afin de prévenir l’érosion des sols et les glissements de terrain. Caritas demande au Conseil fédéral, à l’administration et au Parlement de promouvoir une stratégie de développement climatique prévoyante, équitable et efficace pour le Sud global. Cela comprend une augmentation significative des fonds dédiés aux mesures d’adaptation des personnes les plus vulnérables et des régions les plus exposées au climat, tout comme un engagement résolu, au niveau local, en faveur de la réalisation et de la mise en œuvre de projets climatiques.

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Le réchauffement climatique s’est accéléré au cours des quatre dernières décennies. Avec les températures plus élevées, ce sont aussi les événements météorologiques extrêmes qui se sont multipliés dans le monde entier : périodes de canicule et de sécheresse, fortes pluies et inondations, ouragans et tempêtes. La canicule de l’été 2018 prouve que la Suisse est aussi concernée par ces phénomènes. Mais les pays du Sud global sont de loin les plus touchés. Tandis que nous minimisons les conséquences du changement climatique, de nombreux pays en développement se trouvent déjà au beau milieu d’une crise climatique qui menace leur survie. Les sociétés pauvres n’ont pas le choix. Elles doivent s’adapter le plus vite possible aux nouvelles conditions climatiques. Cela nécessite la mise en place de digues côtières, de barrages et de citernes ; l’agriculture doit utiliser des espèces végétales résistant à la sécheresse et aux grandes chaleurs, et implanter des techniques d’irrigation économes en eau. Les villages ont également un besoin urgent de greniers à céréales et de potagers communs, et de systèmes d’alerte précoce en cas de tempêtes ou d’inondations. La communauté internationale a reconnu ces besoins il y a déjà plusieurs années. La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) de 1992 a créé les conditions préalables pour un soutien accru des pays en développement en matière de changement climatique. Outre un développement qui respecte les ressources et le climat (approche d’atténuation), la première préoccupation des pays du Sud global consiste à s’adapter à de nouvelles conditions de vie et aux événements météorologiques extrêmes (approche d’adaptation). En vertu du droit international, les pays industrialisés se sont engagés à allouer de nouveaux fonds pour le climat, qui doivent s’ajouter aux moyens consacrés à la coopération au développement. Malgré leur responsabilité incontestée en matière de réchauffement, et malgré les engagements de politique climatique qu’ils ont pris devant la communauté internationale, les pays riches du Nord ne soutiennent pas assez les régions les plus exposées et les personnes les plus touchées par les changements climatiques. La Suisse fait partie de ces États. D’une part, les fonds consacrés aux mesures d’adaptation dans les pays en développement sont insuffisants. D’autre part, les projets ne répondent pas encore assez aux besoins des populations pauvres concernées. Dans le même temps, les organisations non gouvernementales (ONG) locales ont encore beaucoup de mal à accéder aux financements climatiques internationaux.


Livrés aux aléas du climat, sans les moyens de s’adapter Après l’été record de 2003, l’été 2018 fut à nouveau extrêmement chaud et sec. La Suisse a connu, sur la période avril-juillet, les précipitations les plus basses depuis presque 100 ans. Les températures de juin et de juillet ont dépassé celles de l’été record de 2003. Prairies brunies, champs desséchés, ruisseaux asséchés, poissons morts et incendies de forêt en ont été les conséquences. Daté d’octobre 2018, le rapport spécial sur « le réchauffement planétaire de 1,5 °C » du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de l’ONU insiste sur le fait suivant : en raison de l’activité humaine, la Terre s’est déjà réchauffée de 1,2 degré par rapport à la période préindustrielle. À ce rythme-là, le réchauffement global atteindra 1,5 degré entre 2030 et 2052. Dans notre pays, le réchauffement a déjà atteint près de 2 degrés. La Suisse connaît un réchauffement supérieur à la moyenne, mais ce sont les pays pauvres du Sud global qui sont confrontés aux plus gros défis en matière d’adaptation climatique. De nombreux pays en développement sont particulièrement ­exposés aux aléas du climat, parce qu’ils sont essentiellement agricoles, parce qu’ils ont de longues bandes côtières, ou parce qu’ils sont affectés par des précipitations irrégulières. En même temps, ils manquent des moyens nécessaires pour pouvoir financer les mesures d’adaptation appropriées. De plus, les pays en développement n’ont souvent pas accès à l’information, aux technologies ou aux crédits. La Suisse réussira peut-être, à l’aide d’investissements financiers toujours plus importants, à s’adapter au réchauffement qui pèse de plus en plus sur les villes, à la sécheresse estivale croissante, au risque accru d’inondations, à la dégradation de la stabilité des pentes ou à la dégradation de la qualité

L’Accord de Paris sur le climat donne les lignes directrices pour l’adaptation Afin d’éviter un dangereux « point de bascule » du système climatique, aux effets imprévisibles, la communauté internationale s’est engagée dans l’Accord de Paris de 2015 à contenir la hausse de la température planétaire moyenne « bien en dessous de 2 degrés par rapport aux niveaux préindustriels », et à « poursuivre les efforts pour la limiter à 1,5 degré ». La communauté internationale a également affirmé qu’elle fournirait un soutien financier aux pays pauvres du Sud, pour les aider à faire face aux coûts supplémentaires découlant des mesures d’atténuation et d’adaptation au changement climatique. Les pays riches s’étaient déjà engagés, lors de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques de 2009, à fournir un total de 100 milliards de dollars par an, à partir de 2020, pour les mesures climatiques. Mais tandis que les efforts internationaux en matière de protection du climat avancent au ralenti, un grand nombre de personnes souffrent déjà des conséquences du réchauffement. Puisque de nombreux effets négatifs ne peuvent plus être évités, l’approche d’adaptation aux conséquences du changement climatique prend de plus en plus d’importance, à côté de la protection climatique et de la réduction mondiale des gaz à effet de serre ­(approche d’atténuation).

de l’eau et des sols ; par exemple au moyen d’une utilisation agricole optimisée des ressources en eau, ou grâce à des aménagements et des mesures de protection contre la multiplication des glissements de terrain, des chutes de pierres et des coulées de boue. De nombreux pays en développement manquent tout simplement des ressources et des moyens nécessaires.

Faire face à l’inévitable : l’adaptation aux changements climatiques Différentes approches permettent de prévenir les événements climatiques extrêmes, tels les inondations, les vagues de chaleur, les fortes précipitations ou les glissements de terrain. La préservation et le renforcement des récifs coralliens ou des forêts de mangrove stabilisent les bandes côtières et protègent des inondations. Les prévisions météorologiques et les systèmes d’alerte précoce peuvent servir à optimiser les dates d’ensemencement, et permettre de constituer des réserves de nourriture pour surmonter les sécheresses ou les inondations annoncées. Et grâce aux systèmes d’alerte aux catastrophes, les populations peuvent se mettre à l’abri à temps pour échapper aux intempéries et autres désastres climatiques.

Dans les deltas des fleuves, par exemple au Bangladesh ou au Myanmar, les potagers, les rizières ou les piscicultures sont régulièrement détruits par des crues extrêmes ou des inondations. Durant ces périodes, lorsqu’il est impossible de cultiver quoi que ce soit sur la terre ferme, il reste possible de produire des denrées alimentaires vitales sur des « jardins flottants » : à l’aide de plantes aquatiques, on construit un radeau sur lequel on peut faire pousser des légumes ou d’autres plants. À la fin de la saison des cultures, le radeau sert de compost pour l’agriculture à terre. Ce genre de procédés aide les familles à planifier leur avenir, sans vivre dans la crainte de perdre leurs moyens de subsistance à chaque mousson.

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Mais les populations les plus pauvres sont loin d’avoir la possibilité de se prémunir contre les conséquences économiques des événements climatiques extrêmes. Elles sont souvent incapables de payer des primes d’assurance. Des solutions d’assurances prises en charge à l’échelle internationale peuvent être d’un grand secours dans ces situations d’urgence. Le plus souvent, l’État ou la région sont alors assurés, afin que les mesures nécessaires puissent être rapidement mises en place en cas de catastrophe. Les micro-assurances cofinancées et les microcrédits à taux réduits permettent également aux personnes concernées de faire face aux risques et aux dommages d’un climat extrême. Dans les pays en développement, l’expérience montre que c’est la combinaison de mesures prospectives, localement adaptées, et d’une aide d’urgence bien préparée, complétée par des solutions d’assurances gouvernementales ou internationales, qui garantit la meilleure adaptation à de nouvelles réalités climatiques. On voit aussi que dans le contexte de ces pays, il n’y a guère besoin de faire appel à de nouvelles technologies complexes et coûteuses, et que les connaissances et les pratiques adaptées

sont déjà disponibles localement – par exemple lorsqu’il s’agit de se protéger de l’érosion des pentes et des sols, de préserver la fertilité des sols et la qualité de l’eau, ou d’utiliser des variétés de plantes résistantes à la sécheresse et à la chaleur. Le tableau « Exemples de mesures pour une adaptation communautaire » décrit quelques bonnes pratiques. Les autorités, les ONG et les autres acteurs concernés développent et mettent en œuvre des stratégies d’adaptation locales, avec la participation des personnes touchées. Ces stratégies doivent être adaptées à la situation régionale et aux risques climatiques associés. Elles doivent toujours tenir compte des opportunités de développement économique et des besoins des plus faibles. Le changement climatique a des impacts régionaux et locaux divers. Ses conséquences sont également variables : épuisement des stocks de poissons, perte de biodiversité, effets néfastes sur l’agriculture, accès réduit à l’eau, altération d’écosystèmes entiers, mise en danger des villes et des agglomérations en raison de l’élévation du niveau de la mer. Certaines régions et certaines zones souffriront tout particulièrement : on les appelle les « hotspots » du changement

Exemples de mesures pour une adaptation communautaire Risque climatique

Mesures d’adaptation

Description

Crues et inondations

Alerte précoce et protection civile

Mise en place de systèmes d’alerte précoce en langue locale, faciles à comprendre ; création de comités locaux de gestion des risques de catastrophe

Culture hydroponique

Culture de légumes ou autres en milieu humide ou dans des ­ « jardins flottants », lorsque les crues rendent impossible la culture sur la terre ferme

Légumes et céréales ­résistants au sel

Culture et production de différentes variétés de légumes et de céréales résistants au sel

Protection des deltas

Investissements dans la protection des bassins versants et des deltas des grands fleuves, contre la salinisation provenant de la mer

Gestion de l’eau

Irrigation, terrassement, aménagements biologiques ou ­physiques ; construction de réservoirs artificiels, citernes ou bassins de rétention

Optimisation de l’utilisation des sols

Diversification des cultures ; optimisation de la production grâce à des semences adaptées, à la fertilisation, à la protection des cultures et au travail du sol

Amélioration des ­constructions

Rénovation simple visant à renforcer les structures des maisons existantes, notamment les toitures ; respect et application stricte des codes de construction

Construction d’entrepôts résistants aux intempéries

Construction de lieux de stockage communautaires pour les biens les plus précieux et les denrées de première nécessité

Intégration du changement climatique dans la formation

Formation continue formelle et informelle pour les enseignants ; élaboration de programmes éducatifs sur le changement ­climatique, la vulnérabilité et la gestion des risques

Réhabilitation des habitats côtiers

Reforestation et reboisement des forêts de mangroves, intégration de l’aquaculture et de l’agriculture (création de revenus pour les ménages)

Salinisation croissante

Sécheresse et ­précipitations irrégulières ou décroissantes

Cyclones et tempêtes

Dégradation des zones côtières

Source : GIEC (adapté et étendu)

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climatique, parce qu’elles sont menacées par toute une série d’événements extrêmes. Il est à craindre que certains pays en développement soient dépassés par les conséquences et les dangers du climat, et qu’il leur soit impossible de se préparer suffisamment. Vers la fin de ce siècle, certaines zones devront adopter des solutions plus radicales. Les habitants des îles, des côtes, des régions montagneuses ainsi que ceux qui vivent le long de rivières insuffisamment alimentées en eau devront changer leur mode de vie et réorganiser leur approvisionnement. Peut-être devront-ils même quitter leur région d’origine pour s’installer dans des zones moins touchées. Le GIEC estime que le nombre de personnes déplacées en raison d’événements environnementaux atteindra 150 millions d’ici à 2050. Avec son ratio élevé d’émissions de gaz à effet de serre par habitant, la Suisse contribue de manière significative au réchauffement planétaire. Elle doit donc assumer une responsabilité proportionnée en matière de protection des réfugiés climatiques et de défense de leur dignité (voir à ce sujet la prise de position de Caritas « Protection et perspectives pour les réfugiés climatiques », 2017).

Principes de bonne pratique en matière d’adaptation Lors de la Conférence de l’ONU sur le climat de 2010, au Mexique, la communauté internationale a adopté le « Cadre de l’adaptation de Cancún ». Cette convention indique les principes de base et les critères d’une bonne pratique en matière d’adaptation. Ces éléments ont été complétés et renforcés par l’Accord de Paris sur le climat de 2015. Lorsqu’il est question d’adaptation, deux aspects sont particulièrement importants. D’une part, les mesures d’adaptation doivent viser d’abord les besoins des personnes les plus vulnérables. D’autre part, ces groupes de population doivent pouvoir participer de façon significative à ces projets. Le soutien en matière de lutte contre le changement climatique doit être fourni avant tout aux pays et aux régions particulièrement vulnérables. Selon la Convention-cadre de l’ONU, ces derniers comprennent les pays les moins avancés, qu’ils s’agissent de petits États insulaires ou de pays africains. Dans le même temps, les projets doivent s’adresser aux segments de la population qui sont particulièrement touchés par le changement climatique, et qui manquent des capacités nécessaires pour s’adapter. Il s’agit des familles de petits paysans, des habitants d’agglomérations (urbaines) informelles, des minorités défavorisées, des peuples indigènes, des femmes, des enfants ou des personnes en situation de handicap. Pour garantir que les mesures d’adaptation soient mises en œuvre de manière efficace et qu’elles soient durablement implantées dans le contexte local, il faut s’assurer d’une large participation de la population. Les organisations de la société civile et les associations communautaires doivent donc être suffisamment impliquées dans l’adaptation. Il faut également s’assurer que des groupes potentiellement défavorisés ne soient pas

Appliquer les principes d’adaptation de façon exemplaire Le Cambodge, un des pays les plus pauvres du monde, est particulièrement touché par les effets négatifs du changement climatique. Les inondations sont plus fréquentes, les phases de sécheresses durent plus longtemps. Caritas aide les communautés rurales à mieux s’adapter à ces nouvelles conditions. Barrages, étangs et canaux permettent de réguler les masses d’eau pendant la saison des pluies, et de les accumuler en prévision de la saison sèche. Une irrigation plus efficace accroît les rendements. L’approvisionnement et le revenu des familles s’améliorent. À l’aide de systèmes d’alerte précoce et d’entrepôts pour les denrées alimentaires, il devient possible de résister aux inondations. Grâce à une gestion globale des risques, de nombreuses régions sont mieux préparées aux événements météorologiques extrêmes. Au lieu de réagir a posteriori aux catastrophes naturelles en palliant les dommages les plus graves par une aide d’urgence, on peut travailler de façon préventive et limiter les pertes. Cela augmente la résilience des communautés, des autorités et des réseaux de protection civile. Au Mali, également l’un des pays les plus pauvres du monde, des milliers de personnes dépendent des ressources du lac Wegnia, au nord de Bamako, pour la pêche, l’élevage ou l’agriculture. Sous l’influence du changement climatique, le volume de ce lac se réduit. Caritas aide les habitants à s’adapter à cette nouvelle situation, à préserver le lac comme habitat productif et à poursuivre son développement économique. Au moyen de l’agriculture irriguée, d’un stockage et d’une conservation appropriés, on peut réaliser de bons rendements même en l’absence de pluie ou en périodes de précipitations faibles. Les femmes sont soutenues afin qu’elles puissent s’organiser en coopératives ; celles-ci leur donnent un meilleur accès aux marchés locaux et leur permettent de vendre leurs produits à un meilleur prix. Des plans de réhabilitation de la région du lac Wegnia sont élaborés en collaboration avec les conseils communaux et les autres acteurs locaux. Les interventions favorisent une exploitation durable des ressources naturelles, et un développement économique local et inclusif de l’espace rural.

exclus, tels les femmes, les peuples autochtones ou les minorités ethniques et religieuses. Internationalement reconnus, les principes directeurs relatifs aux droits de l’homme – tels que le droit à l’information et la nécessité d’une approbation préalable des projets sur les territoires des peuples autochtones – doivent impérativement être respectés. Les mesures d’adaptation devraient enfin permettre de ­développer et renforcer les capacités locales et nationales. Celles-ci comprennent les agences gouvernementales concernées, les autorités locales et les communautés, ainsi que les enseignants et autres membres de la société civile. Cela permet d’augmenter la durabilité des projets et leur efficacité, tout en favorisant la compréhension des risques climatiques et des possibilités d’adaptation.

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Les pays riches esquivent leurs ­responsabilités Une base importante du financement de l’adaptation avait déjà été mise en place lors du sommet climatique de l’ONU à Marrakech en 2001, avec la création de fonds multilatéraux visant à soutenir, en priorité, les pays pauvres et vulnérables. En 2009 à Copenhague, les pays riches ont convenu de fournir, à partir de 2020, 100 milliards de dollars par an pour le financement climatique ; une moitié en serait dédiée à la protection climatique et l’autre aux mesures d’adaptation dans les pays en développement. Un an plus tard, au Mexique, on adopte le « Cadre de l’adaptation de Cancún », qui accroît l’importance de l’adaptation en lui donnant un cadre global. L’Accord de Paris de 2015 souligne encore cette importance, tout en insistant sur la double nécessité de l’atténuation et de l’adaptation, en fixant les objectifs mondiaux en matière de « décarbonisation » et de « résilience climatique ». Entre autres tâches, tous les pays sont invités à initier un processus permettant une meilleure adaptation aux conséquences du réchauffement, en fonction du contexte national. L’Accord de Paris complète les principes d’adaptation énoncés dans le « Cadre de l’adaptation de Cancún » et réaffirme les obligations internationales des pays industrialisés concernant le soutien des pays pauvres en matière de protection climatique et d’adaptation. Ce soutien doit être renforcé au moyen de ressources nouvelles et supplémentaires.

La Suisse aussi n’en fait pas assez Caritas soutient depuis des années que la contribution de la Suisse devrait atteindre – relativement à son poids économique et à sa responsabilité climatique effective – près d’1 % du financement climatique international, soit 1 milliard de francs suisses par an (voir la prise de position de Caritas de 2017 intitulée « Financement climatique : la Suisse doit en faire plus »). Dans un rapport officiel sur le financement climatique international paru en 2017, le Conseil fédéral considère pourtant que la participation suisse ne dépassera pas 450 à 600 millions de dollars à partir de 2020. Par ailleurs, contrairement à son engagement international, le Conseil fédéral n’a pas l’intention de consacrer de ressources nouvelles et supplémentaires à cette action climatique ; les contributions correspondantes devraient au contraire être imputées sur le budget du développement. Pour la période 2017–2020, la coopération internationale prévoit environ 300 millions de francs annuels pour les programmes de lutte contre le changement climatique. La différence par rapport à la somme mentionnée dans le rapport du Conseil fédéral devrait être mobilisée principalement par des canaux privés non précisés.

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En 2016, les pays industrialisés ont déclaré à la Convention-­ cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et au Comité du développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), que leur contribution s’élevait déjà, pour cette même année, à 48 milliards de dollars – et qu’ils s’approchaient ainsi de l’objectif des 100 milliards de dollars qu’ils s’étaient fixé. En réalité, le transfert effectif de fonds spécifiquement consacrés au climat ne dépassait pas 16 à 21 milliards de dollars. D’une part, outre les subventions (soit les contributions à fonds perdu pour des projets spécifiques), le calcul incluait aussi tous les prêts remboursables. D’autre part, on a souvent pris en compte le coût global des projets, même si la réduction des émissions ou l’adaptation ne faisaient pas partie de leurs objectifs principaux, ni même de leurs objectifs secondaires. L’Accord sur le climat prévoit en fait que la moitié des moyens mobilisés pour la protection climatique (atténuation) et pour l’adaptation aboutisse dans les pays en développement. Différentes études montrent toutefois que la part mondiale consacrée à des mesures d’adaptation souvent vitales ne s’élève qu’à 20 % environ. De plus, les pays les moins avancés ne bénéficient même pas d’un cinquième des fonds climatiques publics, car la majorité des programmes sont mis en place dans des pays à revenu moyen.

Un financement climatique aux frais de la coopération au ­développement Au lieu de mobiliser des fonds supplémentaires pour le climat, les donateurs prélèvent leur contribution climatique nationale sur le budget de la coopération au développement. Les projets liés au climat sont donc doublement pris en compte, c’est-à-dire revendiqués deux fois : ils sont imputés à la fois à l’aide publique au développement (APD) et au financement climatique prévu par le droit international. Par voie de conséquence, le financement climatique s’élève déjà à plus d’un cinquième de l’APD mondiale. Il s’opère donc au détriment des programmes spécifiquement consacrés au développement, qui visent par exemple à renforcer les systèmes de santé, à améliorer l’hygiène, à développer l’éducation et la formation professionnelle, à lutter contre l’exploitation et la traite des êtres humains ou à promouvoir l’égalité des chances, la démocratisation et les droits humains. Avec une contribution climatique avérée de 306 millions d’euros (chiffre 2016), l’engagement de la Suisse est lui aussi bien insuffisant. Nous sommes bien loin du milliard de francs attendu.


Une politique climatique sans ambition nuit à la coopération au développement Dans un communiqué de presse de 2017, le Conseil ­fédéral a écrit que les catastrophes naturelles et les risques climatiques mettaient en péril les progrès de développement chèrement acquis dans le Sud global. Et qu’au cours des dernières années, le nombre de personnes déplacées en raison de catastrophes climatiques avait fortement augmenté. Il était donc nécessaire de reconnaître les liens étroits entre le changement climatique, la prévision des catastrophes et la coopération au développement. Or, bien que le Conseil fédéral connaisse ces liens, il s’oppose à une révision ambitieuse de la loi sur le CO2 pour la période 2021–2030. À l’heure actuelle, ce projet de révision est en passe d’être édulcoré encore davantage par les commissions parlementaires. Il est pourtant déjà évident qu’il ne répond pas aux exigences de l’Accord de Paris sur le climat : les ambitions suisses en matière de réduction des gaz à effet de serre sont insuffisantes, l’objectif général des 2 degrés n’est pas ancré. Il y manque également un financement climatique de type « pollueur-payeur » pour aider les pays les plus pauvres.

Et le projet de révision ne contient enfin aucune proposition quant à la responsabilisation climatique des banques, des assurances et des fonds de pension, en vue d’une politique d’investissement et de placement durable. Une étude fédérale montre pourtant que la place financière suisse alimente un scénario de changement climatique de l’ordre de 4 à 6 degrés – au travers d’investissements dans l’industrie du charbon, du pétrole et du gaz naturel. Une protection climatique sans ambition et un manque de responsabilité en matière de politique climatique sur la place financière suisse sapent l’engagement de la ­politique de développement. La Confédération maintient le budget de la coopération au développement à un niveau tout juste égal à 2 milliards de francs par an. Et dans le même temps, la Suisse porte atteinte aux pays qu’elle est censée aider, à travers le refus du Conseil fédéral et du Parlement d’adopter une stratégie climatique durable. Celle-ci aurait besoin d’une loi ambitieuse et efficace sur le CO2, d’une refonte de la politique d’investissement n ­ ocive de la Banque nationale suisse, et d’une place financière « verte » qui prenne ses responsabilités en matière de placements et de climat.

Par ailleurs, la Suisse prélève elle aussi les contributions climatiques sur le budget du développement (alors même qu’actuellement celui-ci stagne, voire se réduit). Ce faisant, d’importants programmes de lutte contre la pauvreté doivent être annulés. Il faut certes se réjouir du fait que la moitié des moyens alloués soient dédiés à l’adaptation, et que la Confédération octroie des subventions non remboursables plutôt que des prêts. Mais il est regrettable que la Suisse fasse encore trop peu pour les personnes vulnérables des pays les plus pauvres. Alors qu’au moins un quart du financement public de la lutte contre le changement climatique est nécessaire pour les pays les moins avancés, la part de la Suisse n’est que de 16 %.

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La vision de Caritas : étendre l’adaptation au climat et renforcer le niveau local Les quatre dernières années ont été les plus chaudes depuis le début des relevés météorologiques, c’est-à-dire depuis 1880. Le changement climatique ne concerne pas un vague et lointain futur : c’est désormais une réalité. Les événements climatiques extrêmes tels les sécheresses, les inondations, les canicules et les crues se multiplient et touchent notamment les pays en développement. Leurs conséquences menacent la survie des sociétés pauvres. Face à l’imminence de la catastrophe climatique, la Suisse doit agir de manière décisive et donner l’exemple en matière de politique climatique internationale. Caritas demande au Conseil fédéral et au Parlement de promouvoir la protection du climat, et de soutenir plus fortement les mesures d’adaptation dans les pays en développement. Il est essentiel de donner une priorité claire aux régions les plus exposées et aux personnes les plus vulnérables, et d’inclure les acteurs locaux dans la conception et la mise en œuvre des projets climatiques.

Soutenir l’adaptation au changement climatique d’une manière plus forte et ciblée Le changement climatique en cours entrave la lutte contre la pauvreté, il menace la sécurité alimentaire et l’accès à l’eau, et engendre de nouvelles spirales de pauvreté. Il est donc nécessaire de donner plus de moyens aux mesures d’adaptation dans les pays en développement – pour une agriculture ajustée au climat, des méthodes d’irrigation économes, des réservoirs d’eau et des digues côtières, des aménagements contre les inondations, des systèmes d’alerte précoce et des relocalisations. La contribution équitable de la Suisse à l’objectif international des 100 milliards s’élève à 1 milliard de francs par an. Comme auparavant, la Direction du développement et de la coopération (DDC) doit veiller à ce qu’au moins la moitié du financement climatique suisse soit attribuée aux mesures d’adaptation. Puisque la participation actuelle des pays riches au financement climatique international est loin d’être suffisante, la Suisse doit définir deux priorités pour ses contributions. La DDC doit d’abord soutenir les régions vulnérables qui n’ont pas été suffisamment prises en compte par le financement climatique. Ensuite, la Confédération doit utiliser les fonds supplémentaires pour étendre l’adaptation au changement climatique. Ce faisant, la Suisse peut contrebalancer la tendance mondiale qui consiste à allouer davantage de moyens à la réduction des émissions et aux énergies renouvelables (atténuation) dans les pays industrialisés et les pays émergents.

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Introduire un financement pollueur-payeur des mesures d’adaptation La participation au financement climatique international est prescrite par le droit international. Elle doit être assurée indépendamment de la coopération au développement. En Suisse, le Parlement et le Conseil fédéral, ainsi que le Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC), doivent s’attacher à mettre en place des systèmes de financement in­ novants, conçus sur le principe pollueur-payeur. On pourrait par exemple étendre la taxe CO2 sur le carburant, introduire une taxe sur les billets d’avion ou sur le kérosène, ou imposer les entreprises qui sont aujourd’hui exemptées de la taxe sur le CO2. Les fonds publics nécessaires aux projets climatiques pourraient donc être mobilisés au moyen de nouvelles taxes énergétiques et climatiques, sans alourdir le fardeau fiscal général et le budget fédéral. Forte de ses nombreuses années d’expérience en matière de coopération internationale, la DDC joue un rôle clé dans l’adaptation (et le développement) des pays pauvres. Elle a toutefois besoin de moyens supplémentaires pour pouvoir promouvoir des mesures urgentes et souvent vitales pour les pays en développement – conformément à l’Accord de Paris sur le climat. Même si la mise en œuvre des projets relève de la responsabilité de l’agence fédérale qui s’occupe du développement, les mesures climatiques doivent être financées séparément, par des taxes et des prélèvements de type pollueur-payeur.

Promouvoir la participation au niveau local Dans les pays en développement les plus pauvres, la DDC doit s’engager en faveur des personnes les plus touchées par le changement climatique, et qui ont le plus besoin de protection : familles de petits paysans, minorités défavorisées, habitants des bidonvilles. La mise en place des mesures d’adaptation doit toujours prendre en compte et respecter les standards sociaux et écologiques, ainsi que ceux qui relèvent des droits humains. Les acteurs locaux – organisations d’entraide, organisations communautaires, groupes défavorisés, minorités, femmes – doivent être impliqués dans la conception et la mise en œuvre


des projets climatiques. Cela permet d’une part de prendre en compte et de promouvoir le savoir local. D’autre part, une participation significative des acteurs locaux garantit que les mesures soient bien ancrées sur le terrain, qu’elles soient largement défendues et qu’elles puissent, par conséquent, atteindre des résultats durables sur le long terme. Faire naître une véritable participation est un défi, mais elle en vaut la peine.

Reconnaître la migration due au climat De plus en plus de personnes doivent quitter leur domicile en raison de catastrophes naturelles (inondations, ouragans, ­vagues de chaleur) et de changements environnementaux insidieux (salinisation des eaux souterraines, sécheresses persistantes ou récurrentes). La plupart d’entre elles deviennent des déplacés dans leur propre pays, ou trouvent refuge dans un pays voisin. Dans le cadre de sa coopération internationale, la Confédération doit aider les pays d’accueil du Sud global à intégrer les personnes déplacées et à donner de nouvelles perspectives à leurs sociétés – au moyen d’investissements durables dans l’emploi, l’éducation et la santé. La Confédération doit en outre s’engager pour les droits et la dignité des réfugiés climatiques, dans le cadre de la Plateforme sur les déplacements liés aux catastrophes naturelles et dans celui du Pacte mondial sur les migrations. La Suisse devrait enfin se prononcer en faveur d’un « passeport climatique » qui permette aux personnes ayant perdu leur domicile suite à des bouleversements climatiques inévitables d’obtenir des droits civiques égaux à ceux des habitants de régions plus sûres.

Novembre 2018 Auteur : Patrik Berlinger, Secteur Études, Politique du développement Courriel : pberlinger@caritas.ch, tél. : 041 419 23 95. Cette prise de position peut être téléchargée sur www.caritas.ch/prises-de-position

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