Le magazine de Caritas mars 2019

Page 1

CARITAS N° 2 / Mars 2019

Magazine

Syrie : apprendre pour l’avenir Page 6

Actuel

Point fort

Suisse

Page 5

Page 11

Page 13

En Haïti, la faim La difficile survie La tâche exigeante est omniprésente des Rohingyas des interprètes


Lettre ouverte

Chères députées, chers députés, L’évolution économique en Suisse est très bonne. Le nombre de personnes touchées par le chômage est bas. Les bénéfices s’accumulent et les recettes fiscales ont créé des excédents dans les caisses de l’État. La Suisse va bien. Et comme souvent, cette image idyllique a ses zones d’ombre : le nombre de personnes en fin de droits l’an passé s’élevait à plus de 30 000. Ces personnes n’apparaissent plus dans les chiffres du chômage, ce qui embellit la situation sur le marché du travail. Les personnes en fin de droits ont souvent plus de 50 ans. Elles ont perdu leur emploi suite à une restructuration, ou parce que leurs qualifications professionnelles ne sont plus requises sur le marché du travail. La majorité d’entre elles doivent finalement recourir à l’aide sociale, augmentant par là le nombre de personnes pauvres. Il est utile d’observer de plus près les autres raisons expliquant cette augmentation. Caritas a analysé en détail l’évolution des coûts de la santé, et en particulier celle des réductions cantonales individuelles de primes d'assurance-maladie. Les résultats sont impressionnants et parfois effrayants :

« Un salaire mensuel doit suffire pour les primes d’assurance-maladie »

ces dernières années, plusieurs cantons ont notablement réduit les fonds destinés aux réductions de primes. Ces dernières sont loin derrière l’augmentation des primes. De nombreux cantons en effet, pour compenser les déficits fiscaux générés par les réductions d’impôts, ont réduit ces réductions de primes. D’un point de vue sociopolitique, c’est grave. De plus en plus de ménages de la classe moyenne inférieure sont poussés dans la pauvreté à cause des primes d’assurance-maladie sans cesse en augmentation. C’est un véritable effilochage de la classe moyenne inférieure. Caritas en appelle donc aux cantons : il faut d’urgence augmenter les fonds destinés aux réductions individuelles de primes, comme cela se fait avec cohérence au plan fédéral. Le constat est clair : les primes d’assurance-maladie ne doivent pas coûter plus d’un mois de salaire. Quelques cantons remplissent cette exigence aujourd’hui déjà. Nous espérons que notre appel sera entendu dans tous les cantons.

Hugo Fasel, directeur de Caritas Suisse

Photo : Franca Pedrazzetti


Sommaire

L’école qui apaise

5

Les millions de déplacés internes en Syrie ou de réfugiés au Liban et en Jordanie vivent entre l’espoir d’une normalisation et la crainte du lendemain. La survie est une lutte quotidienne pour manger, se loger, s’habiller, se soigner. Après huit ans de souffrance, il est urgent de permettre aux enfants syriens de s’imaginer un avenir. Caritas leur apporte appui scolaire et aide psychosociale en Syrie et au Liban. Page 6

Actuel : la faim omniprésente en Haïti

Dans le nord d’Haïti, la malnutrition menace la moitié de la population. Caritas améliore la sécurité alimentaire de plus de 100 000 personnes.

1 1

Point fort : la situation précaire des Rohingyas

630 000 Rohingyas vivent dans le plus grand camp de réfugiés du monde au Bangladesh. Caritas construit des huttes et répare des puits, des latrines et des lavoirs.

13

Suisse : le rôle capital des interprètes

L’enjeu est particulièrement important dans la nouvelle procédure d’asile. Les interprètes interculturels sont des médiateurs. Caritas a ajouté un nouveau module à sa formation.

IMPRESSUM Le magazine de Caritas Suisse paraît 6 fois par an. Adresse de la rédaction : Caritas Suisse, secteur Communication et Marketing, Adligenswilerstrasse 15, case postale, CH-6002 Lucerne, Courriel : info@caritas.ch, www.caritas.ch, Tél. +41 41 419 24 19 Rédaction : Sabine Schaller (ssc), Lisa Fry (lf) ; Fabrice Boulé (fbo) ; Stefan Gribi (sg) ; Anna Haselbach (ah) ; Vérène Morisod Simonazzi (vm) Abonnement : l’abonnement annuel coûte 5 francs. Il est prélevé une seule fois sur les dons sans affectation. Graphisme : Katrin Ginggen Photo de couverture : Alexandra Wey Imprimerie : Kyburz, Dielsdorf Papier : 100 % recyclé Dons : PC 60-7000-4

3


Écho

Dans les médias RTS, Mise au point, « Petits crédits pourris », 13. 01. 2019 « Chaque année, plus de 120 000 crédits à la consommation sont accordés et les ménages suisses sont parmi les plus endettés au monde. Les instituts bancaires ne sont pas toujours très regardants sur la solvabilité des clients, voire carrément aveugles. C’est ce que dénonce Caritas qui réussit parfois à annuler des dettes. »

Adrienne Fichter (à droite), experte des réseaux sociaux, et Manuela Specker, responsable de la formation à Caritas Suisse, discutent des dangers de la numérisation.

Forum Caritas : la numérisation et ses conséquences sociales Quelque 280 spécialistes de la classe politique, de l’économie et du domaine social ont participé au Forum Caritas le 25 janvier à Berne. Thème : les conséquences sociales de la numérisation. La présidente de Caritas, Mariangela Wallimann-Bornatico, a souligné que la numérisation doit être pilotée par le monde politique pour éviter un affaiblissement de la participation démocratique. Dirk Helbing, professeur à l’EPF de Zurich, a averti que la masse de données collectées per-

met de subtiles manipulations et menace l’autodétermination. La présidente d’Unia Vania Alleva a souhaité assurer le potentiel émancipateur de la technologie en garantissant les droits de participation des salariés. Aurélien Witzig, juriste aux Universités de Genève et de Neuchâtel, a demandé que les employés soient protégés par des conventions collectives ou par le droit international, afin de prévenir le précariat numérique. (lf)

Être de la partie, malgré tout La piscine à moitié prix, le cinéma ou le musée pour pas trop cher : la CarteCulture permet de participer à la vie sociale et culturelle malgré un budget serré. Les utilisatrices et utilisateurs bénéficient dans toute la Suisse de 30 à 70 % de rabais sur plus de 2900 offres dans le domaine culturel, éducatif et sportif. La possession d’une CarteCulture ne favorise pas seulement une saine estime de soi,

4

mais aussi une (ré)insertion professionnelle. Pour les enfants de familles en situation de pauvreté, elle permet de nouvelles découvertes et est une source de motivation pour l’avenir. Desirée Germann Plus d’informations : carteculture.ch

Canal Alpha, « Le projet McPhee : on s’aide entre mamans migrantes », 20. 12. 2018 « Depuis ce printemps, plusieurs migrantes du canton de Neuchâtel bénéficient du projet McPhee de Caritas Suisse. Il propose aux mamans réfugiées de se former dans le domaine de la garde d’enfants, et ainsi d’offrir des places à domicile aux autres réfugiées. Cet échange de garde est une vraie opportunité pour s’intégrer professionnellement et socialement. » Plaidoyer, « Asile : Caritas mandatée en Suisse romande », 03. 12. 2018 « Le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) a attribué les mandats pour les prestations de conseil et de représentation juridique qui seront fournies à partir de mars 2019 aux requérants d’asile séjournant dans les centres fédéraux. Pour la Suisse romande, c’est Caritas Suisse qui assumera ces missions. » 24 Heures, «  Payot riposte au Black Friday au profit de Caritas », 21. 11. 2018 « Le Black Friday fait le bonheur des amateurs de shopping à prix cassés. Certaines enseignes sont décidées à riposter. Les librairies Payot ont ainsi lancé une initiative baptisée Fair Friday, qui retourne le concept pour qu’il profite aux plus démunis. Les 23 et 24 novembre, son réseau de magasins proposera aux clients de payer leurs achats un peu plus cher et reversera le surcoût à l’œuvre d’entraide Caritas. »

Photo : Nique Nager


Actuel

Grâce à une agriculture durable, la population du nord d’Haïti peut faire face à la pénurie alimentaire.

En Haïti, la faim est omniprésente Dans le nord du pays, la moitié de la population est menacée de malnutrition aigüe. Ces quatre prochaines années, Caritas Suisse va améliorer la sécurité alimentaire pour plus de 100 000 personnes dans cette région. Au cours des derniers mois, Judith Binder, responsable de programme en Haïti pour Caritas Suisse, a dû reporter plusieurs fois son voyage en Haïti, pays le plus pauvre des Caraïbes, à cause des violentes émeutes qui secouent le pays. La population souffre beaucoup de l’instabilité politique. En plus, les catastrophes naturelles très fréquentes ne cessent

La moitié de la population est menacée de malnutrition. d’entraver les efforts des habitants pour améliorer leurs conditions de vie. « Travailler pour une œuvre d’entraide en Haïti, c’est combiner l’aide humanitaire et la coopération au développement. Lorsque les personnes souffrent de la faim, il faut commencer par apporter une aide immédiate et sauver des vies, avant de pouvoir mettre en place des perspectives à plus long terme », explique Judith Binder.

Photos : Pia Zanetti

Car la faim est omniprésente en Haïti. Dans le nord du pays, la moitié de la population est menacée de malnutrition. Dans cette région, l’Union européenne a chargé Caritas Suisse de mettre sur pied un projet de quatre ans qui va améliorer la sécurité alimentaire de quelque 108 000 personnes. Un projet à cinq objectifs Les causes de la crise alimentaire sont nombreuses dans cette région et nécessitent des réponses multisectorielles. Le projet de Caritas Suisse améliore donc les conditions de vie de la population grâce à un ensemble de mesures. Un premier objectif est la gestion responsable de l’eau d’irrigation des terres arables dans cette région vallonnée. On aide les autorités haïtiennes à améliorer la gestion de l’eau et les conditions-cadres de la production agricole. En effet, les produits qui sont cultivés ici sont potentiellement à même de réduire la pau-

vreté des paysans de la région. Mais il faut améliorer leur accès aux marchés locaux – c’est là le second objectif du projet de Caritas. Troisièmement, il s’agit de protéger rapidement les terres du Nord de l’érosion. Ces terres sont encore relativement préservées, comparativement à d’autres régions. Un quatrième aspect est la mise en place des « écoles bleues » qui enseignent aux enfants des mesures d’hygiène. Et la cinquième mesure est de distribuer aux familles très pauvres des coupons d’alimentation pour les aider à combattre la malnutrition de leurs enfants. (sg)

Ce document a été élaboré avec l’aide financière de l’Union européenne. Son contenu relève de la seule responsabilité de Caritas Suisse et ne reflète pas les vues de l’Union européenne.

5


Reportage

Pas d’avenir sans éducation pour les enfants syriens Texte : Fabrice Boulé Photos : Alexandra Wey

Intégrer l’école, la suivre, reprendre confiance en soi et en la vie : les enfants syriens – comme Aïcha – doivent retrouver calme et sécurité pour construire leur avenir.


Reportage Leurs parcours de vie sont dramatiques. La guerre les a forcés à fuir ailleurs en Syrie ou au Liban voisin. Des proches sont morts, blessés, malades. Les familles sont éclatées. Des enfants doivent travailler pour aider au quotidien. Les histoires de Shaima* (10 ans), de Rouha (11 ans), d’Aïcha (11 ans) en Syrie, de Mazzin (24 ans) avec ses neveux et nièces à Zahle au Liban, et de Bilal (12 ans) à Beyrouth, illustrent la situation extrêmement difficile de millions de Syriens. L’école permet aux enfants de tenir un fil vers leur avenir. Caritas les aide à avancer. « Ma fille de 13 ans a quitté l’école pour travailler dans une usine », explique, accablé, Mohammed, 42 ans. Ce père de dix enfants s’est réfugié avec toute sa famille en 2013 à Jaramana, dans la banlieue de Damas, la capitale syrienne. Ils

« L’écart est énorme entre ce que nous pouvons gagner et nos besoins. » ont quitté Maskanah, dans le gouvernorat d’Alep, en raison des combats et de l’insécurité grandissante. Il était ouvrier agricole à la journée.

En arrivant à Jaramana, la famille a gagné une sécurité relative. Mais la survie est un combat quotidien. « L’écart est énorme entre ce que nous pouvons gagner et nos besoins », poursuit le père de famille. Un kilo de pommes de terre ne coûte pas loin d’un franc. S’il trouve du travail le matin, il peut espérer gagner quelques francs dans la journée. Tout travail peut faire l’affaire. Mais ça ne marche pas tous les jours. Par contre, c’est tous les jours qu’il se demande comment sa famille pourra manger. Le fils aîné de la famille, 17 ans, arrive au bout de sa scolarité obligatoire et fait aussi des travaux à la journée quand il en trouve.

Mais quand Mohammed et son épouse regardent leurs deux filles Shaima (10 ans) et Rouha (11 ans), de la joie monte dans leurs yeux. Les deux sœurs ont à peine un an de différence d’âge et sensiblement la même taille. On dirait des jumelles. Elles ne se quittent pas. Elles fréquentent depuis plusieurs mois le Centre de jour soutenu par Caritas et que gère JRS, son partenaire local. Elles y vont deux fois par semaine et y reçoivent de l’appui scolaire pour leurs branches principales (maths, arabe, science). L’encadrement psychosocial et pédagogique se fait aussi au travers d’activités variées (dessin, chant, films et discussions, etc.). Élément non négligeable, les enfants y mangent un repas complet à midi. Des progrès visibles L’enthousiasme gagne rapidement Nawar Al Ahmad quand elle évoque les deux sœurs. « Au début, elles étaient timides, elles ne parlaient pas. On aurait dit qu’elles se méfiaient. Après quelques mois, elles participent aux activités,

Shaima, Rouha et leurs frères et sœurs font leurs devoirs. Les enfants syriens ont souvent des retards scolaires.

7


Reportage bané en kurde). Aïcha a perdu sa maman quelques jours plus tard. Elle et ses nombreux frères et sœurs ont fait le chemin vers Damas avec leur grand-mère âgée de 87 ans, malade.

En quelques mois, Shaima et Rouha ont fait des progrès énormes grâce à l’appui qu’elles reçoivent au Centre de jour soutenu par Caritas.

elles se sont ouvertes. Elles expliquent des choses à d’autres enfants. Elles rattrapent dans tous les domaines à l’école. Et le plus important, elles savent qu’elles ont le droit de faire faux. » La jeune éducatrice explique que beaucoup d’enfants

« Je me demande ce qui fait encore tenir les gens. » Une collaboratrice du Centre Alberto Hurtado

qui viennent au Centre de Jaramana arrivent avec des traumatismes importants. La guerre a tué ou blessé des proches, détruit leur maison. Leurs familles sont

éparpillées à travers le pays ou dans les pays voisins. Les privations sont omniprésentes. Leur scolarité a été pour la plupart chaotique. Les enfants n’ont pas confiance en eux, ils éprouvent de la difficulté à apprendre. Pendant quelques heures par semaine, le Centre est une oasis de sérénité. Leurs parents sont étroitement associés à leur parcours. Également au Centre, Aïcha, 11 ans, doit encore apprivoiser ce nouvel environnement. Malgré la bienveillance qui l’entoure, elle demeure sur ses gardes. Sa famille est arrivée plus récemment à Jaramana. C’était en 2015, après la destruction de leur maison à Aïn al-Arab (Ko-

Les enfants syriens ont besoin de votre aide Votre don redonne espoir aux enfants réfugiés syriens et à leurs familles, et les aide à faire face au quotidien.

Faites un don ! Compte pour les dons : 60-7000-4 Mention : « Syrie »

8

Une oasis de sérénité Le Centre Saint Alberto Hurtado, du nom d’un prêtre jésuite chilien, reçoit actuellement 300 enfants. Il devrait déménager sous peu dans des locaux plus vastes et mieux adaptés, toujours dans le même quartier de Jaramana. L’appui que les enfants y reçoivent les aide à rattraper le retard accumulé durant leur scolarité interrompue. Il cherche aussi à atténuer certains traumatismes. Tous les jours, hommes et femmes s’y présentent dans l’espoir de pouvoir y inscrire un ou plusieurs de leurs enfants. Les assistants du Centre rendent alors visite aux familles pour évaluer la situation des enfants ainsi que les besoins matériels, sociaux et médicaux. Il y a un an, beaucoup de familles du quartier recevaient encore une aide financière nationale. Mais cette aide s’est arrêtée. La population de Jaramana n’a cessé de croître depuis le début de la guerre en 2011. La surpopulation est criante. Les gens vivent dans des bâtiments encore en construction. La nourriture et les produits divers n’y manquent pas mais


Reportage

Bilal (12 ans) et sa sœur sur le chemin de l’école Omar Fakhoury à Beyrouth.

les prix sont exorbitants pour la grande majorité des familles. À côté du Centre, une boulangerie d’État fait du pain à prix réduit. Du matin au soir, la foule attend d’être servie. À Beyrouth La famille de Bilal (12 ans) s’est réfugiée à Beyrouth, la capitale du Liban voisin, dès le début du conflit en Syrie. Le père de famille venait déjà régulièrement d’Hassaké, près des frontières avec l’Irak et la Turquie, à Beyrouth pour y travailler dans la construction. Les parents et les quatre enfants s’en sortent à peine financièrement : le père est malade et ne peut

plus travailler et la famille ne touche plus d’aide des agences onusiennes. La mère doit faire des ménages. Bilal fréquente l’établissement scolaire Omar Fakhoury dans le quartier de Jnah. Sa scolarité a été chaotique par le passé mais il s’accroche pour combler son retard. Pour cela, il bénéficie tous les jours de cours d’appui qui sont financés par Caritas. Cet appui s’étale sur plusieurs semaines durant l’année le matin ou l’après-midi, et aussi durant les vacances. Il concerne actuellement 3600 enfants dans douze établissements. C’est aussi un soutien aux enseignants libanais qui ont vu le nombre d’élèves exploser

ces dernières années avec l’intégration de quelque 250 000 écoliers syriens dans les écoles du pays (et 250 000 autres qui devraient aussi être intégrés). Les élèves libanais qui ont besoin de cet appui en bénéficient également. *  En dehors des collaborateurs du projet, nous désignons les personnes rencontrées par leur seul prénom. Celui-ci a été changé pour la protection de leur personnalité.

Plus d’informations : caritas.ch/syrie

Aide financière d’urgence au Liban et en Syrie Au Liban, à Zahle, dans la plaine de la Bekaa, Mazzin, 24 ans, bataille pour envoyer son neveu et sa nièce à l’école. Son mari est retourné en Syrie depuis plusieurs mois et elle est sans nouvelles de lui. Elle vit dans ce qui s’appelle une « installation informelle », c’est-à-dire un camp ouvert, constitué de tentes de bâches consolidées avec des planches, sur un terrain qu’un propriétaire a accepté de louer. En hiver, la boue rend tout déplacement délicat. Mazzin s’occupe des quatre enfants de son frère

dont la santé ne lui permet plus de les élever. Elle bénéficie d’une aide financière de la part de Caritas pour une durée de cinq mois. Elle pourra rembourser quelques dettes et cela l’aidera à se former en couture et en coiffure pour trouver du travail. Cela pourra aussi l’aider à envoyer un neveu et une nièce à l’école. Mais l’essentiel partira dans la nourriture et les soins. Une telle aide d’urgence, que les bénéficiaires retirent avec une carte bancaire à un distributeur, permet aux

familles de ne pas s’enfoncer plus profondément dans les dettes et les difficultés. Elle leur redonne aussi autonomie et dignité, car elles peuvent décider de la façon d’utiliser cette aide de façon prévisible. Une même aide financière a déjà été apportée dans un passé récent aux habitants d’Homs et de Jaramana (Damas). Elle est sur le point de reprendre avec une distribution électronique.

9


Solidaires Regard

Monisha Lodhi (30 ans), Inde

« Je peux nourrir ma famille sainement » Puspa Kartika est à l'écoute de ces femmes qui ont presque tout perdu.

Protéger les victimes des catastrophes Les habitants de Sulawesi, en Indonésie, dépendent de l’aide d’urgence de Caritas Suisse. Ils ont tout perdu lors du tremblement de terre. Puspa Kartika connaît leurs souffrances. Un groupe de femmes nous attend dans le village de Lambonga, sur l’île de Sulawesi. Toutes ont perdu leur maison et presque tous leurs biens lors du tremblement de terre qui a dévasté l’île en octobre 2018. Elles ont besoin aujourd’hui de biens de premier secours, notamment de couvertures et d’articles d’hygiène. Puspa Kartika, qui travaille depuis quinze ans dans l’aide d’urgence et la coopération au développement, les écoute avec compréhension. Grâce à son emploi, Puspa Kartika connaît très bien son pays – le plus grand État insulaire du monde, avec ses quelque 250 millions d’habitants. « Mon travail m’a permis de connaître toutes les régions de l’Indonésie. Chaque île et chaque région possède sa propre langue et culture », explique-t-elle. Mi-octobre 2018, elle s’est rendue pour la première fois à Palu pour coordonner l’aide d’urgence de Caritas Suisse. Après le tremblement de terre et le tsunami, Palu était une ville fantôme. Tous les commerces étaient fermés, les habitants campaient dans les rues. Au

10

début, il y a eu des répliques incessantes. Malgré les risques, Puspa Kartika aime beaucoup son travail : « Bien sûr, c’est risqué de se rendre sur les lieux des catastrophes. Mais j’aime voir de mes propres yeux l’utilité de mon travail. J’aime quand

« J’aime voir l’utilité de mon travail » j’entends des enfants rire dans les tentes que nous avons apportées. Ou lorsque je vois que les gens comprennent comment ils peuvent se prémunir contre les catastrophes. » Les habitants de Sulawesi sont sans cesse touchés par des catastrophes. En novembre, d’intenses précipitations ont provoqué des inondations dans le district de Sigi où Caritas Suisse soutient 3000 familles. « Des gens qui avaient déjà perdu leur maison lors du tremblement de terre ont encore perdu le peu qui leur restait dans ces inondations. Ils ont un besoin urgent de notre aide ! » Patricia Kröll

Qu’est-ce qui vous a posé des difficultés jusqu’ici ? Avant, nous n’avions pas assez à manger. La récolte de nos champs et du jardin suffisait tout juste pour six mois. Mon mari devait ensuite travailler dans la construction pour que nos enfants ne se couchent pas le ventre vide. Qu’est-ce qui vous rend heureuse ? Je suis heureuse de pouvoir désormais nourrir ma famille en exploitant ma terre et mon propre jardin. De quoi êtes-vous fière ? Je suis fière de pouvoir aider les femmes les plus pauvres du village, et leur offrir une partie des graines de mes légumes. De plus, je peux leur transmettre ce que j’ai appris dans le projet Caritas, et les conseiller pour cultiver les légumes et les fruits. Quelle est votre activité préférée ? J’aime beaucoup cuisiner. C’est un bonheur de faire plaisir à ma famille pour les repas. Quel est votre plat préféré ? Ma famille et moi, nous aimons particulièrement les aubergines farcies à la chair d’aubergine, de tomates et d’épices Masala. Nicole Lehnherr

Photos : Patricia Kröll, Alexandra Wey


Point fort

La difficile survie des Rohingyas Le plus grand camp de réfugiés au monde, le camp de Kutupalong-Balukhali au sud-est du Bangladesh, abrite 630 000 Rohingyas, soit 40 000 personnes au kilomètre carré. La densité de population y est donc énorme, cela dans une zone très vallonnée et partiellement inhabitable. La vie des réfugiés s’organise dans des conditions difficiles. « La situation est précaire, car il est très difficile de permettre à toutes ces personnes de vivre dans la dignité », souligne Nicola Malacarne, responsable des programmes de Caritas Suisse au Bang­ ladesh. La plupart des plus de 900 000 Rohingyas sont arrivés dans la région

« La densité de population est énorme » de Cox’s Bazar dans la deuxième moitié de 2017, fuyant les attaques d’une violence extrême dont ils ont été victimes au Myanmar. L’aide à la survie des débuts de la crise se transforme peu à peu aujourd’hui en aide à plus long terme. Les réfugiés sou-

haitent mener autant que possible une vie normale : les enfants doivent aller à l’école, les familles veulent travailler. Et cela pose bien sûr de nouveaux défis. Travaux d’infrastructures Caritas Suisse a démarré dans le camp de Kutupalong-Balukhali des projets en collaboration avec Caritas Bangladesh et avec le soutien de la Chaîne du Bonheur. Quelque 12 000 bouteilles de gaz ont été distribuées pour permettre aux Rohingyas de préparer leurs repas, car il n’y a pas assez de bois de chauffage. Caritas répare puits, latrines et lavoirs, et apprend aux habitants du camp à les entretenir. Le terrain est amélioré avec la construction de canaux et d’escaliers, et

les pentes sont renforcées. Ces travaux, nécessaires en prévision de la mousson, sont effectués si possible par les réfugiés qui gagnent ainsi un revenu. Caritas prépare par ailleurs la construction de 408 huttes d’une durée de vie d’environ trois ans et qui peuvent résister à des tempêtes de force moyenne. Une vingtaine ont déjà été construites. Ces diverses mesures bénéficient à quelque 50 000 réfugiés. « Il est clair que les Rohingyas dépendent toujours de l’aide internationale, affirme Nicola Malacarne. Et, malheureusement, les fonds diminuent. » En effet, la crise des réfugiés ne bénéficie plus d’une grande couverture médiatique, et la communauté internationale a de la peine à mobiliser les ressources nécessaires. Les Rohingyas resteront probablement au Bangladesh un certain temps encore. Les perspectives d’avenir sont donc très difficiles. (vm)

« Die Bevölkerungsdichte ist mit 40 000 Menschen pro Quadrat­kilometer enorm.  »

Caritas apporte son aide à 50 000 Rohingyas réfugiés dans le camp de Kutupalong-Balukhali.

Photos : Mahmud Rahman, Fabian Berg

Les Rohingyas resteront au Bangladesh un certain temps encore.

11


Monde

Aujourd’hui, Marisol est prise en charge psychologiquement par ENDA, partenaire de Caritas à El Alto, et accompagnée vers une vie autonome.

Parce que je suis une fille … En Amérique latine, la Bolivie est un pays où il ne fait vraiment pas bon naître de sexe féminin. Une femme sur deux y est victime de violences domestiques. Des organisations comme Caritas aident ces victimes à se protéger et à faire valoir leurs droits. Lorsqu’à l’école, on a demandé à Marisol*, 15 ans, de raconter une anecdote sur ses parents, elle a éclaté en sanglots. C’est ainsi qu’on a appris son terrible secret depuis des années : son père a abusé d’elle pendant des années. Et il l’a tenue pour responsable de ces abus. Marisol est une survivante.

80 pour cent des jeunes gens considèrent la violence masculine comme « normale ». En Bolivie, des milliers de jeunes filles partagent le destin de Marisol, avec le silence et le sentiment de culpabilité. Et il est statistiquement probable qu’à l’âge adulte, ces filles continueront d’être victimes de violences. En Bolivie, les trois quarts des femmes de plus de 15 ans vivent des violences relationnelles, et plus de la moitié des violences sexuelles ou

12

physiques. Aucun pays d’Amérique latine n’affiche un taux de violence aussi élevé. On trouve une explication dans les structures de cette société conservatrice, profondément patriarcale, basée sur la soumission des femmes et un idéal masculin très machiste. Une étude d’Oxfam Intermón réalisée en 2018 dans huit pays d’Amérique latine, dont la Bolivie, montre que 80 % des jeunes gens considèrent la violence masculine comme « normale ». Grandes inégalités sociales À cela s’ajoutent des inégalités sociales criantes, une grande pauvreté – la Bolivie est l’un des pays les plus pauvres du continent – et l’absence de perspectives.Les lois progressistes ne servent à rien dans un pays où l’inégalité entre femmes et hommes est si profondément ancrée dans les mœurs. Et souvent, les actes de violence restent impunis. « Les

agresseurs ne sont pas seuls. Ils ont des complices dans les institutions – la police, la justice, la magistrature », explique Richard Haep, directeur de Caritas Bolivie. On se tait, on regarde ailleurs. L’État ne prend pas le problème au sérieux. Ensemble contre la violence C’est pourquoi les jeunes filles et les femmes ont tant de peine à se défendre. Et pourtant, un grand nombre d’organisations civiles s’engagent pour elles. Ces organisations œuvrent à renforcer les droits et la confiance en soi des femmes, s’occupent des victimes et les soutiennent dans les procédures pénales. Aujourd’hui, Marisol est prise en charge psychologiquement par ENDA, partenaire de Caritas à El Alto, et elle est accompagnée vers une vie autonome. Son père est en prison. Mais il reste un long chemin à faire pour les femmes de Bolivie. (ah) * Le prénom a été modifié

Plus d’informations : caritas.ch/enfants/bolivie-rue

Photo : Alexandra Wey


Suisse

Les interprètes interculturels aident à surmonter les malentendus culturels ou sociaux entre les différentes parties.

Asile : la tâche exigeante des interprètes Pourquoi mon interlocuteur ne me serre pas la main, ou ne me regarde pas dans les yeux ? À quelles règles dois-je me conformer, et comment ? Les interprètes interculturels font en sorte que les personnes de différentes cultures puissent se comprendre. Cette tâche importante dans la procédure d’asile l’est plus que jamais dans la procédure accélérée en vigueur depuis mars. À l’hôpital, au contrôle des habitants, dans les entretiens de parents à l’école, les interprètes interculturels lancent des ponts entre les cultures. Ils transmettent ce qui est dit, et aident aussi à surmon-

Les interprètes interculturels sont les seuls qui comprennent tous les intervenants. ter les non-dits sociaux et culturels. Ils assurent ainsi l’égalité d’accès de tous aux services publics et évitent les malentendus. L’exercice, très exigeant, implique de grandes responsabilités : les interprètes sont les seuls qui comprennent tous les intervenants.

Photo : Makus Forte/Ex-Press

L’enjeu est particulièrement important dans la procédure d’asile. La réussite de la procédure peut dépendre du fait que la personne requérante se fasse bien comprendre. Avec la procédure accélérée, toute personne demandant l’asile a droit, dès son arrivée dans un centre, à un représentant légal et un conseiller. Caritas Suisse s'acquitte de cette tâche sur mandat de la Confédération en Suisse romande, au Tessin et en Suisse centrale. Les interprètes interculturels font donc office de médiateurs entre les différents intervenants et les requérants. Personne de référence Par exemple, les conseillers et les représentants légaux peuvent s’adresser à l’interprète interculturel pour obtenir des

informations sur le pays du requérant. L’interprète est également une personne de référence supplémentaire, il parle la langue du requérant et peut lui expliquer la vie de tous les jours, ce qui permet de favoriser l’adaptation. Caritas a mis au point un module de formation permettant aux interprètes d’accomplir leurs tâches de manière professionnelle en matière de conseil et de représentation juridique dans les procédures d’asile accélérées. Depuis 2017, cela fait partie de la formation des interprètes interculturels, reconnue par la communauté d’intérêts Interpret. Outre la partie pratique, on y apprend les caractéristiques fondamentales du droit d’asile et du droit des étrangers, et on y discute des possibilités et des limites du rôle de l’interprète. Au cours de l’année 2019, ce module obligatoire fera partie intégrante de la formation dans les trois principales régions linguistiques – une étape importante vers une procédure d’asile juste et équitable. (ah)

13


Bon à savoir

Renforcer l’esprit d’équipe Depuis peu, Caritas Suisse propose aux entreprises la possibilité de s’engager comme bénévoles auprès de paysans de montagne. Il s’agit de vivre une journée dans une ferme d’altitude. Là-haut, on ne peut pas toujours utiliser les machines, et le travail à la main est souvent requis. L’objectif est donc de travailler ensemble à de gros travaux. Bonne condition physique Aucune connaissance particulière n’est requise. Le plus important, c’est la volonté de le faire et de vivre une journée de travail en plein air. Cela nécessite seulement une bonne condition physique et un équipement adéquat, des vêtements adaptés aux conditions climatiques et des chaussures de montagne ou de randonnée robustes adaptées aux terrains

escarpés. Accomplir ensemble une tâche inhabituelle, cela soude une équipe. Le changement de perspective est souvent aussi un terreau fertile pour de nouvelles idées. En outre, les équipes apportent une contribution précieuse au maintien des cultures et du paysage des régions de montagne. Caritas Suisse a lancé son programme en 2018, et déjà, onze entreprises et 151 collaboratrices et collaborateurs ont pris part à l’expérience. Pour 2019, Caritas cherche de nouvelles entreprises qui souhaitent vivre une journée inoubliable en équipe. (lf) Plus d’informations : montagnards.ch

Agenda 28 mars 2019 à 17 h 30 « Climat, la sonnette d’alarme » Séance d’information aux donatrices et donateurs OMM, Genève 12 juin 2019 à 17 h 00 Remise du Prix Caritas KKL, Lucerne Ce prix honore des personnalités pour leur engagement dans les domaines de la coopération au développement, de l’entente interculturelle ou dans le secteur social. 16 juin 2019 Dimanche des réfugiés

Nouveau départ dans une famille d’accueil Certains enfants, adolescents et jeunes adultes vivent des situations difficiles. Souvent, la seule solution est un placement dans une famille d’accueil. Caritas Suisse est une organisation certifiée à même de trouver les familles d’accueil pour ces jeunes. Les familles d’accueil suivent régulièrement des formations sociopédagogiques continues, et disposent de l’expérience nécessaire dans l’encadrement de ces jeunes en crise. De plus, les professionnels de Caritas collaborent étroitement avec elles.

Caritas sélectionne les familles avec soin, pour le bien de l'enfant.

14

Environnement valorisant Les enfants et jeunes placés en famille d’accueil vivent dans un environnement valorisant dans lequel ils peuvent trouver leur place. Mais cela reste une expérience difficile. Caritas veille donc à ce que les familles soient soigneusement

sélectionnées et adaptées aux enfants et adolescents. En 2018, 175 enfants et adolescents ont été placés dans 70 familles d’accueil. (lf)

Appel : nous recherchons des familles d’accueil Caritas Suisse cherche de nouvelles familles d’accueil qui voudraient accueillir un enfant ou un adolescent. Souhaitez-vous accompagner un jeune en difficulté ? Inscrivez-vous par courriel (placementfamilial@caritas.ch) ou par téléphone (021 311 11 14). Plus d’informations : placementfamilial.ch

Photo : Franca Pedrazzetti


Ensemble

Voilà pourquoi je m’engage De nombreux bénévoles accompagnent des réfugiés :

Regula G. (43 ans), Schwyz

la gauche) ont gagné pfe et Lea Schmid (depuis Carol Tanner, Jolyne Loe r enfants. pou livre rd 2018 avec leur le prix youngCaritas-Awa

« Je suis marraine de Nemat, 17 ans, qui vient d’Afghanistan. Je veux dire merci à Nemat, car il m’ouvre constamment de nouveaux horizons. »

« Fennek » : du désert au cœur des enfants En décembre 2018, le prix youngCaritas a été remis, pour la quinzième fois déjà, pour honorer l’engagement de jeunes filles et jeunes gens. Le premier prix a été remis aux auteures du livre pour enfants « Fennek findet ein neues Zuhause » (« Fennec trouve une nouvelle maison »). Comment explique-t-on aux enfants des questions complexes et difficiles comme l’exil, la migration, l’intégration ? Les trois jeunes lauréates Jolyne Lœpfe, Carol Tanner et Lea Schmid l’ont fait en écrivant un livre charmant pour enfants qui raconte l’histoire de Fennec, renard du désert. Il doit fuir le désert et atteindre la Suisse et, après quelques péripéties, il se trouve un nouvel ami en Linus, le renard roux. Des entretiens avec les personnes concernées ont permis au trio de créer une histoire vécue qui montre avec sensibilité les différentes réalités de la fuite et de l’exil. « Fennek » véhicule des valeurs telles que la tolérance et l’amitié. L’histoire, très bien structurée, les illustrations pleines de sensibilité et le message tout en finesse touchent au cœur les enfants comme les adultes.

Photos : Angelika Annen/youngCaritas

L’automne prochain, les trois lauréates partiront pour le Kosovo pour visiter les projets de Caritas Suisse sur place. Chantal Zimmermann

Camp d’été interculturel 2019 L’amitié et l’accueil sont aussi au cœur du camp d’été interculturel organisé du 27 juillet au 3 août à Oeschseite (Zweisimmen). Des requérants d’asile mineurs non accompagnés et de jeunes Suisses passent ensemble une semaine inoubliable de sport, jeux et loisirs. Inscription pour les jeunes Suisses sur : youngcaritas.ch/sommerlager

Barbara Seydoux (60 ans), Posieux

« J’accompagne une famille tibétaine dans son parcours d’intégration en servant de pont entre elle et la société suisse. Cette relation basée sur l’échange et le partage m’enrichit le cœur et l’esprit ! »

Bernadette Anderes (66 ans), Fribourg

« J’aide les réfugiés à trouver un logement. Ils acquièrent ainsi plus vite un chez-soi et peuvent s’intégrer. C’est important de vivre notre diversité culturelle. »

15


AĂŻcha (11 ans), Syrie, a perdu sa maman dans un bombardement

Agir, tout simplement

Quand la pauvretĂŠ montre son visage Apprenez-en plus sur AĂŻcha : www.agirtoutsimplement.caritas.ch


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.