Magazine de Caritas Suisse: «Planète solidaire » 1/2016

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No 1 mars 2016 www.caritas.ch

Planète solidaire

Suisse Enfants seuls en exil Page 18

Jeunes réfugiés à l’école Des enfants syriens sont scolarisés au Liban Page 6

Philippines La reconstruction avance Page 21


Sommaire

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Actuel

Agir, tout simplement

4 Écho Georg Fischer étend son aide

18 Suisse Enfants seuls en exil

4 Forum sur la pauvreté des familles

6 Reportage Liban : une nouvelle patrie grâce à l’école du village

4 Un cœur pour les enfants pauvres

8 Liban : 25 % de réfugiés

4 Dons pour les jeunes en détresse

12 Surmonter les blocages qui empêchent d’apprendre

20 Dans le monde Ouganda : une nouvelle chance après la prison

14 Tout faire pour éviter une génération perdue

20 Roumanie : renforcer les communautés roms

5 À vrai dire Hugo Fasel : « Nous soutenons des écoles afin que les enfants réfugiés puissent avoir une formation. »

19 Renforcer la prévention de l’excision

21 Philippines : la reconstruction avance

16 Regard Tonny Okilla, Ouganda

22 Point fort 34 écoles Caritas pour le Népal

17 En image

25 Perspectives À l’origine de chaque art, il y a l’être humain

Ce symbole indique que des informations intéressantes sont disponibles sur Internet.

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Photos : Alexandra Wey


Éditorial

L’école, pour un nouveau départ

27 Caritas et moi 26 Bon à savoir 26 Ce qui motive notre travail bénévole à l’Épicerie Caritas 26 Ordinateurs & Cie : efficace, sain et équitable

« Ils viennent volontiers à l’école, ils ont envie d’apprendre. » Sœur Georgette, qui dirige une école au Liban parle ainsi des dizaines d’enfants syriens arrivés ces derniers mois dans le village de Qartaba. Ils sont des centaines de milliers à avoir fui le chaos dans leur pays pour trouver refuge au Liban voisin. Yara, 11 ans, n’est plus allée en classe depuis deux ans. Elle a quitté son village du nord de la Syrie avec sa mère et ses frère et sœurs à cause des bombardements qui se rapprochaient. Mais pour les enfants, il y a cette lumière dans leur vie que représente la fréquentation de l’école. Le système d’enseignement public au Liban fait ce qu’il peut pour absorber des centaines de milliers d’enfants réfugiés. A Qartaba, c’est une école gérée par la congrégation des Sœurs de Don Bosco que Caritas Suisse et Autriche soutiennent (lire dès page 6). Les jeunes Syriens ont cette envie d’apprendre, de vivre à nouveau. Il leur manque souvent de quoi payer le bus pour l’école, ou des vêtements. Les besoins sont multiples. Nous exprimons notre reconnaissance aux donateurs qui permettent à ces enfants de la guerre d’apprendre et de s’amuser presque comme des enfants normaux. Au Népal, les écoles repoussent aussi. Le tremblement de terre d’avril 2015 en a détruit 8000. Caritas Suisse en reconstruit actuellement 34, dans un des districts du pays les plus touchés par la catastrophe (page 22). C’est l’occasion de bâtir selon les normes antisismiques, mais aussi avec une architecture qui donne plus de place aux enfants, plus de lumière, plus de couleurs et une meilleure hygiène. Les villages se réorganisent autour de la nouvelle école. La vie reprend. Fabrice Boulé Rédaction

27 Fribourg : nouveau service de prévention du racisme 27 Almanach social 2016 27 La saison commence en montagne !

IMPRESSUM « Planète solidaire ». Le magazine de Caritas Suisse paraît

29 Énigme

4 fois par an ( mars, juin, septembre, décembre ).

30 Solidaires « Nous sommes tous des réfugiés »

Adligenswilerstrasse 15, case postale, CH-6002 Lucerne.

31 youngCaritas Migration et exil à l’école

Adresse de la rédaction : Caritas Suisse, secteur Communication et Marketing, Courriel : info@caritas.ch, www.caritas.ch, tél. : +41 41 419 22 22 Rédaction : Dominique Schärer (dos), responsable ; Jörg Arnold (ja) ; Fabrice Boulé (fbo) ; Stefan Gribi (sg) ; Vérène Morisod Simonazzi (vm) ; Odilo Noti (on) ; Ulrike Seifart (use) Traduction : Nicolas Couchepin, Sabine Dormond Abonnement : l’abonnement annuel coûte 6 francs. Il est prélevé une seule fois sur les dons sans affectation. Tirage : 65 331 français et allemand (REMP) Graphisme : Evelyne Bieri Photo de couverture : Alexandra Wey Imprimerie : Kyburz, Dielsdorf Papier : Carisma Silk, 100 % recyclé Dons : CCP 60-7000-4

Photos : Franca Pedrazzetti ; Pia Zanetti

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Actuel  Écho

Georg Fischer étend son aide Caritas Suisse et l’entreprise Georg Fischer (GF) ont renouvelé leur partenariat dans le domaine de l’approvisionnement en eau potable pour les quatre prochaines années. La fondation Clean Water de GF met de nouveau à disposition un montant d’un million de francs. Les deux partenaires ont conclu un accord de collaboration en 2012, à l’occasion des dix ans de la fondation. Plus de 40 000 personnes ont déjà bénéficié de cet accord et d’un approvisionnement en eau potable durablement amélioré. L’approvisionnement en eau potable est un énorme défi au plan mondial, souligne Yves Serra, CEO de Georg Fischer. « C’est pourquoi nous sommes heureux de contribuer avec Caritas à rendre cette ressource accessible à celles et ceux qui en ont le plus besoin. » (dos)

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Un cœur pour les enfants pauvres Collecte de Migros L’action de Noël de Migros en faveur des enfants pauvres de Suisse a dépassé tous les espoirs : les clients de Migros ont offert plus de 5,1 millions de francs, dans un mouvement fort de solidarité. Migros pour sa part a ajouté un million de francs et a ainsi offert à Caritas, l’EPER, Pro Juventute et le Secours d’hiver Suisse un chèque de 6,12 millions de francs. À Sapahaqui, en Bolivie, les villageois ont accès à l’eau potable.

(dos)

Forum sur la pauvreté des familles Fin janvier, près de 200 spécialistes ont discuté de la pauvreté des familles au Forum de Caritas. Leur constat : si personne ne conteste la valeur individuelle de la famille, sa valeur sociétale est en revanche très controversée. En Suisse, les familles sont exposées au risque de pauvreté et 223 000 enfants et adultes vivent dans la pauvreté. Esther Alder, maire de la ville de Genève a montré dans sa conférence comment faire face à ce problème avec des instruments politiques efficaces, par exemple les prestations complémentaires pour les familles sur le plan cantonal, les allocations pour frais de scolarité en ville de Genève, ou encore les activités de loisir gratuites pour enfants. (dos)

Dons pour les jeunes en détresse

200 spécialistes ont participé au Forum 2016 de Caritas.

Chaque centime compte L’action « Chaque centime compte » de la Radio Télévision Suisse et de la Chaîne du Bonheur a été un grand succès : plus de quatre millions de francs ont été réunis durant les sept jours qu’a duré l’action. Ces dons serviront à des projets pour des jeunes en détresse en Suisse et à l’étranger. (dos)  www.caritas.ch/ccc2015

www.caritas.ch/forum/f

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Photos : Alexandra Wey ; DR ; Nique Nager


À vrai dire  Actuel

Chères donatrices, chers donateurs,

Hugo Fasel, directeur de Caritas Suisse

Il est abondamment question des réfugiés et ce sujet prend beaucoup de place dans le débat public. Mais la réflexion commence généralement là où il y a déjà des réfugiés. Or, ceux-ci ne viennent pas de nulle part. Ce sont des gens qui ont quitté leur pays parce qu’ils ne voyaient pas d’autre solution. Ils étaient confrontés à des viols, à des enlèvements d’enfants avec rançons, à la traite des femmes et aux bombardements. Concernant la Syrie, on peut dire avec un certain cynisme qu’elle a vécu au quotidien les attentats de Paris. Et pourtant, sur les 19 millions de Syriennes et de Syriens, ils ne sont que quatre millions à avoir à ce jour quitté leur pays : 2,2 millions pour la Turquie, 700 000 pour la Jordanie et plus d’un million pour le Liban qui ne compte lui-même que quatre millions d’habitants. À titre de comparaison, un bon million de réfugiés sont arrivés l’an dernier

« Nous soutenons des écoles afin que les enfants réfugiés puissent avoir une formation. » en Europe qui totalise plus de 650 millions d’habitants. L’affirmation récurrente selon laquelle tous les Syriens veulent venir chez nous est donc absolument fausse. De même que l’idée qu’ils menacent notre identité. Les principales influences qui ont modifié nos sociétés ces dernières années sont les nouvelles technologies de communication, la pensée économique et l’éloignement par rapport à l’Église et à la religion. Dans les débats politiques, une exigence revient sans cesse : que les réfugiés de Syrie soient en premier lieu hébergés dans les pays voisins. Or, c’est déjà le cas. Ces pays sup-

Photo : Pia Zanetti

portent une énorme charge. Malgré la demande réitérée d’aider en premier lieu les gens sur place, la Suisse n’a engagé à ce jour que 50 millions de francs par an dans ce but. Les politiciennes et les politiciens qui revendiquent avec véhémence l’aide sur place n’ont à l’heure actuelle pas soumis la moindre proposition visant à augmenter ces moyens. Grâce à vous, chères donatrices, chers donateurs, Caritas est à même d’apporter une aide directe sur place : nous soutenons des écoles afin que les enfants réfugiés puissent avoir une formation. Plus nous en faisons pour ces enfants, plus leurs parents sont heureux, leur grand désir étant généralement que leurs enfants puissent avoir une meilleure vie qu’eux-mêmes en ces temps dramatiques. Pour cela, ils sont prêts à tout donner. Aider ces parents à réaliser leur souhait est l’une des plus belles choses qu’il m’ait été donné de vivre : ces parents ont repris espoir pour leurs enfants. Au nom de ces parents, je remercie ici chaleureusement toutes les donatrices et tous les donateurs qui nous aident efficacement dans notre programme d’enseignement aux enfants réfugiés.

Hugo Fasel Directeur

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Agir, tout simplement  Reportage

Une nouvelle patrie grâce à l’école du village

Des centaines de milliers d’enfants réfugiés syriens ne peuvent pas aller à l’école – il y a un risque de génération perdue. Grâce à un projet de Caritas, Yara, 11 ans, a une chance de repartir du bon pied car elle peut retourner à l’école. Stefan Gribi (Texte), Alexandra Wey (Photos)

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Agir, tout simplement  Reportage

H

uit heures moins le quart, le soleil pointe juste au-dessus des sommets enneigés du Mont Liban, un minibus bringuebalant souffle et pétarade sur l’étroite route et vient s’arrêter devant le portail en fer forgé. Le chauffeur ouvre la porte et les filles et garçons, leurs cartables sur le dos, et plus ou moins chaudement vêtus, s’égaillent dans la cour d’école. « Bonjour, Sœur Georgette », crient-ils à la directrice avant de s’engouffrer dans le bâtiment. Une nouvelle journée d’école commence. Au début de cette année scolaire, dans l’école du village de montagne de Qartaba, à 1200 mètres d’altitude, un nouveau chapitre s’est ouvert. Aux enfants du lieu se sont joints des enfants de réfugiés syriens âgés de 3 à 12 ans. Le nombre d’élèves a doublé d’un coup, ils sont maintenant plus de 200 à s’asseoir sur les bancs de l’école. « Cela a posé quelques problèmes au début », explique Sœur Georgette. Elle appartient à la congrégation des Sœurs salésiennes de Don Bosco qui dirigent cette école depuis plus de 30 ans. « Nous avons engagé de nouvelles enseignantes, agrandi les salles de classe, acquis des pupitres, transformé la

salle des ordinateurs en salle de classe », explique la directrice de plus de 70 ans. « Il a fallu commencer par inculquer aux nouveaux arrivants quelques règles de base : le comportement à l’école, l’hygiène, un langage correct et deux ou trois autres choses. Mais on voit bien que les enfants de réfugiés syriens sont très motivés à venir à l’école, ils ont envie d’apprendre, et leurs parents veulent ce qu’il y a de mieux pour eux. » En fait, il n’y a pas eu de difficultés majeures

tème d’enseignement à deux niveaux, qui se fait ailleurs, pour ne pas séparer les deux groupes. 125 enfants des familles les plus pauvres

L’école de Qartaba dirigée par la congrégation de Don Bosco est reconnue par l’État. Contrairement aux écoles publiques que le gouvernement libanais a rendues entièrement gratuites et ouvertes à tous les enfants,

« Nous avons engagé de nouvelles enseignantes et agrandi les salles de classe. » entre les enfants de réfugiés et les enfants du lieu. La directrice y a veillé, comme elle le souligne : « tous les enfants sont traités de la même manière, ils ont tous le même uniforme, les mêmes livres, le même soutien. Ils font tous partie de l’école ! » Le fait que les familles de réfugiés soient toutes musulmanes et que les enfants du lieu soient en majorité chrétiens maronites n’y change rien. L’école a même renoncé à introduire le sys-

y compris les enfants réfugiés syriens, l’État ne couvre dans les écoles privées comme celle-ci que la moitié des frais de scolarité. Les parents paient 500 francs d’écolage de

change. Des tensions se font jour, les gens commencent à se plaindre de cet afflux massif de réfugiés. Les problèmes d’approvisionnement sont importants, et pas seulement à l’école. L’électricité est de plus en plus souvent coupée. À Beyrouth, le trafic est devenu complètement chaotique, et les déchets s’accumulent à tous les croisements. Chrétiens maronites, chiites, sunnites, Druzes et autres groupes religieux cohabitent au Liban. La guerre civile a fait rage ici de 1975 à 1990. Sa situation stratégique dans le Moyen-Orient en fait le centre des intérêts des puissances régionales. L’armée libanaise ne contrôle qu’une partie du pays. Le sud est sous le contrôle du Hezbollah, luimême soutenu par l’Iran. Malgré tous ces problèmes, Beyrouth est une ville en plein essor ; les gratte-ciels surgissent du sol, la vie nocturne est trépidante. Il y a un riche patrimoine culturel et histo-

rique, mais depuis le début de la guerre en Syrie, les touristes ont déserté le Liban et l’avenir est de plus en plus incertain.

Photo à droite : Nina El-Khoury, assistante sociale de Caritas, connaît les préoccupations et les besoins de Yara (à gauche), de ses camarades d’école et de leurs familles, tous réfugiés syriens au Liban.

Liban : 25 % de réfugiés Le Liban compte environ 4,5 millions d’habitants. Ces cinq dernières années, l’ONU a enregistré ici plus d’un million de réfugiés, sans compter ceux qui sont arrivés sans être enregistrés. Contrairement à la Jordanie, le gouvernement libanais n’a officiellement pas ouvert de camps de réfugiés pour accueillir l’afflux de personnes fuyant la Syrie. La raison en est historique : des camps de réfugiés palestiniens ouverts voilà des dizaines d’années sont encore là, une situation « provisoire » qui s’éternise. Les réfugiés syriens doivent donc trouver des lieux de vie informels. Il y a dans la plaine de la Bekaa, à l’est du Liban, plus de 1500 camps non officiels dont les habitants dépendent complètement des organisations d’entraide internationales. Depuis un an, la situation de tolérance qui prévalait au Liban

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Le Liban en chiffres Superficie 10 452 km² Capitale Beyrouth Nombre d’habitants 4,5 millions env. Réfugiés syriens 1,07 million (enregistrés) Appartenance religieuse musulmans 54 % (pour moitié chiite et sunnite), chrétiens 40 % (dont la moitié appartiennent à l’Église catholique maronite), Druzes 6 % Langues arabe, langues de l’école : français et anglais



Agir, tout simplement  Reportage

« Tous les enfants sont traités de la même manière, qu’ils soient ou non réfugiés », souligne Sœur Georgette, la directrice de l’école.

leur poche par an. Mais à Qartaba, il n’y a pas d’école primaire publique. Dans le cadre de ses projets scolaires en Jordanie et au Liban, Caritas prend donc en charge les frais de scolarité de 125 élèves des familles les plus dé­favorisées (pour des informations sur le projet, voir page 14). Nonante d’entre eux sont des enfants syriens, 35 viennent de familles libanaises défavorisées. Il ne serait pas adéquat de n’aider que les enfants de réfugiés, car cela pourrait entraîner des sentiments de frustration dans la population locale. Ce principe de base est appliqué non seulement à Qartaba, mais dans tous les projets impliquant des réfugiés. C’est une garantie que les gens considèrent que l’aide est équitable. Vivre dans une remise à outils

Yara et ses trois frère et sœurs font partie des réfugiés qui ont fui la Syrie et des enfants qui bénéficient de ce projet de scolarisation. Ils vivent avec leur mère dans une remise à ou-

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tils en haut du village, au milieu d’un verger de pommiers et autres arbres fruitiers plantés sur des terrasses escarpées. « Il nous faut marcher environ une demi-heure pour nous rendre à l’école. C’est plus long pour rentrer,

et le sol. Il n’y a pas de toilettes, pas de cuisine digne de ce nom, le petit poêle chauffe assez bien, mais la chaleur s’échappe par les ouvertures des fenêtres seulement couvertes de tôle et de tissu. « Je vais chercher l’eau à

« Je suis très heureuse que mes trois filles et mon fils puissent aller à l’école. » parce que ça monte », dit Yara en riant. Les enfants vont à pied à l’école pour éviter les coûts de bus scolaire à leur mère. Malgré cela, la famille manque de tout. Le père les a abandonnés, le loyer de la cabane coûte exactement les 150 francs que l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) verse chaque mois à cette mère et ses quatre enfants. Et ce logement est complètement inadapté à la vie avec des enfants. Lorsqu’il pleut ou qu’il neige, l’eau traverse les parois

un robinet public à un quart d’heure de marche », raconte la maman de Yara. Ici, la plupart des réfugiés vivent dans des conditions semblables. Peu à peu, les cauchemars disparaissent

Les enfants, assis sur un mince tapis devant le poêle ronflant, sont plongés dans leurs livres d’école. « Je suis très heureuse que mes trois filles et mon fils puissent aller à l’école.


Pour les enfants traumatisés, l’apprentissage ne passe pas uniquement par la tête, mais par l’expérience sensorielle.

Cela leur donne un équilibre. Avant, ils s’ennuyaient à mourir, et n’arrêtaient pas de demander quand l’école allait recommencer », raconte la maman en riant. Elle s’est fait beaucoup de souci pour sa fille aînée : « Cela fait trois ans qu’on a fui la Syrie. Ce n’était pas possible d’y rester. Notre village était constamment bombardé, le village voisin a été entièrement détruit. Les enfants ont été témoins de tout cela. Aujourd’hui encore, quand on entend le bruit d’un avion, Yara cède à la panique. Récemment, l’armée est venue faire un contrôle des papiers. Yara s’est mise à trembler de tout son corps, et j’ai dû demander aux soldats de laisser leurs armes dehors, ce qu’ils ont accepté, heureusement. Avant, c’était normal que les enfants fassent des cauchemars toutes les nuits. Cela s’est calmé un peu depuis qu’ils retournent à l’école. » Cela n’a pas été tout simple de retourner à l’école. Au début, les enfants avaient peur de ne pas être acceptés parce qu’ils étaient étrangers. Mais ils ont trouvé des amis et ils aiment leurs enseignantes et les religieuses qui sont très gentilles avec eux. « Beaucoup de réfugiés vivent dans des conditions précaires, mais la situation de cette mère seule avec quatre enfants est vraiment désolante. Il ne faisait aucun doute que cette famille devait bénéficier du projet de scolarisation », explique Nina El Khoury. Cette assistante sociale de Caritas Liban soutient l’école pour les questions sociales et organisationnelles et rend visite aux familles à domicile. La situation n’est pas toujours aussi évidente que dans le cas de la famille de Yara. Parfois, la visite à domicile montre que les parents peuvent payer eux-mêmes l’écolage, et que d’autres familles en revanche auraient plus besoin de cette aide. Mais lorsque la situation est aussi difficile que dans la famille de Yara, l’assistante sociale trouve des soutiens supplémentaires dans d’autres programmes de Caritas Liban. La famille a ainsi reçu deux mois de loyer et un conseil juridique permettant de répondre à certains problèmes spécifiques à la situation de la mère de Yara qui est divorcée. La langue de l’école, c’est le français

Compter avec ses doigts est ici permis.

Yara a 11 ans, sa sœur Alia en a 10, mais elles fréquentent la première année primaire. Même si toutes les deux sont allées à l’école en Syrie, elles ont perdu deux ans d’école à cause de la guerre et de leur fuite. Les souve-

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Agir, tout simplement  Reportage

Surmonter les blocages qui empêchent d’apprendre Que ce soit en Tchétchénie, au Kosovo, en Roumanie ou à Gaza : voilà des années que la pédagogue Beatrice Rutishauser travaille avec des enfants dans les régions en guerre. Elle apportera aussi ses expériences dans le cadre du projet scolaire pour les enfants de réfugiés au Liban. 700 000 enfants réfugiés qui vivent dans les pays voisins de la Syrie ne vont pas à l’école. Qu’est-ce que cela signifie ?

C’est une grande tragédie. Quand une crise dure aussi longtemps qu’en Syrie, les enfants ne peuvent pas être scolarisés en continu. Les camps de réfugiés sont conçus comme des installations temporaires dans un no man’s land. Bien que beaucoup deviennent des lieux permanents, ils ne comportent pas de véritables structures scolaires. Pourtant, ce serait nécessaire pour permettre aux enfants d’apprendre et réduire le taux de décrochage. Le gouvernement libanais a ouvert les écoles aux enfants de réfugiés. Quels sont les problèmes ?

Il n’y a pas assez de place pour intégrer autant d’enfants dans le système scolaire ordinaire. En réponse à cela, les gouvernements libanais et jordanien ont introduit un système de roulement. Une partie des enfants vont à l’école le matin et les autres l’après-midi. Comme les élèves passent moins de temps à l’école, il faut aussi condenser le programme, d’une part en transmettant plus de matière en moins de temps, d’autre part en supprimant des branches comme le sport, les branches artistiques et les travaux manuels. Or, celles-ci seraient particulièrement importantes pour des enfants traumatisés. Les enfants réfugiés connaissent un état de stress négatif permanent. Ils ont des la-

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« L’apprentissage formel demande aux enfants réfugiés un prodigieux effort », affirme la pédagogue Beatrice Rutishauser.

cunes et de la peine à mémoriser, deux points qui les prétéritent. L’apprentissage formel leur demande un prodigieux effort. Le projet de Caritas comporte, aussi au Liban, des cours pédagogiques. Que souhaitez-vous transmettre ?

Des enseignant(e)s du Liban m’ont dit qu’ils n’avaient souvent aucune idée de la manière dont il fallait s’y prendre pour inculquer des connaissances aux enfants réfugiés. J’aimerais leur montrer comment surmonter ce problème. Un message important est que l’enseignement ne passe pas uniquement par la tête, mais aussi par l’expérience sensorielle. Un des problèmes que peut rencontrer un enfant traumatisé est que, dans un premier temps, les chiffres abstraits ne lui disent absolument rien. Les enfants disent alors : « Les chiffres me sortent de la tête. » Si on peut les représenter par des objets, par exemple des capsules de bouteilles en pet, cela aide à surmonter des blocages. Les enfants ont alors la possibilité de transposer cette stratégie positive à d’autres matières. À Gaza, ils composent des boîtes individuelles dans le cadre d’un projet de Caritas. Cet outil

les aide à mieux comprendre la matière grâce à des moyens sensoriels simples. Les enfants me disent qu’ils ont de nouveau du plaisir à aller à l’école. Voilà des années que vous travaillez avec des enfants dans les régions en crise. Quel est votre principal objectif ?

Dans les situations de crise, les enfants font preuve de beaucoup de résilience et d’une grande capacité de résistance pour surmonter un quotidien difficile. C’est très important que nous les aidions à expérimenter des stratégies positives adaptées à leur âge et à leur stade de développement. Ils peuvent alors aussi travailler à surmonter leurs traumatismes.

Photo : YEC


Yara et ses trois frère et sœurs se concentrent sur leurs devoirs dans leur logement insalubre.

nirs sont douloureux. Alia se demande souvent si son enseignante en Syrie est encore en vie. « J’aimerais tant qu’elle vienne nous rendre visite ici », dit-elle. L’entrée à l’école libanaise n’a pas été toute simple, notam-

dans une classe d’enfants de deux ou trois ans plus jeunes qu’elles, à cause de ce handicap. Pourtant, quand on leur demande quelle est leur branche préférée à l’école, les deux sœurs répondent d’une seule voix : « le fran-

Il n’est pas rare que les adolescentes ne continuent pas l’école. ment à cause de problèmes linguistiques. On parle arabe au Liban, comme en Syrie, ce qui facilite évidemment la compréhension. Mais ici, le programme scolaire exige que la langue de l’école soit le français. Les enfants ont donc dû apprendre d’abord une langue qui leur était complètement étrangère pour pouvoir suivre les cours. Omar, le petit frère de 5 ans, a de la chance, il commence à apprendre le français au tout début, au jardin d’enfants. Mais Yara et Alia ont été intégrées

çais ! ». Leur enseignante loue leurs progrès. Elle est consciente que les deux sœurs ont d’autres besoins que leurs camarades de classe plus jeunes qu’elles. « Je leur donne des tâches particulières et je les encourage à organiser un travail de groupe. » Les deux sœurs ont soif d’apprendre, et elles sont très autonomes. C’est justement là le problème : le fait qu’elles soient dans une classe d’enfants moins avancés qu’elles pourrait représenter un oreiller de paresse. Yara est encore

une enfant, mais quand elle entrera dans l’adolescence, on peut penser que cette différence ne sera pas un bien. Il n’est pas rare que les adolescentes ne continuent pas l’école. L’alternative est alors un mariage précoce au sein de la communauté des réfugiés syriens. Et les problèmes sociaux passent ainsi d’une génération à l’autre. Le risque est grand que les enfants des familles fondées dans ces conditions difficiles vivent toute leur vie dans la pauvreté. L’agriculture, source de revenus

Sœur Georgette a mis à disposition une caisse de pommes. Durant la récréation, les enfants peuvent se servir. « Les pommes viennent du jardin de ma sœur qui vit au Canada et n’est pratiquement jamais ici », explique Sœur Georgette. Elle a grandi à Qartaba, a travaillé comme enseignante et est entrée ensuite dans l’ordre des Sœurs salésiennes de Don Bosco. C’est par ce biais qu’elle est finalement reve-

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Agir, tout simplement  Reportage nue à Qartaba. « Les fruits, particulièrement les pommes, sont une spécialité de notre village. Ici, dans la montagne, l’agriculture demande beaucoup de travail, les paysans ont besoin de forces de travail bon marché », explique-t-elle. Déjà avant la guerre, des saisonniers syriens venaient gagner un peu d’argent ici en été. Lorsque la guerre a éclaté, ils sont venus avec leurs familles, d’autres ont suivi. Le village de montagne qui souffrait de l’exode de la jeunesse a ainsi doublé d’un coup sa population. Les hommes continuent de travailler pour un salaire journalier, mais l’offre de travail est devenue plus grande que la demande. Un grand nombre de familles n’arrivent pas à couvrir leurs besoins. Sans le projet de Caritas, beaucoup d’entre elles n’arriveraient pas à envoyer leurs enfants à l’école. Le projet scolaire est encore en cours de construction. Le samedi, il y a des cours de

rattrapage en français pour les enfants syriens, au début de l’été, un projet de cirque va être monté avec une organisation partenaire. Les enseignantes et enseignants peuvent participer à des cours portant sur les besoins particuliers des enfants traumatisés. Caritas travaille également avec les parents des enfants soutenus, avec l’objectif de les rendre attentifs à l’importance de l’école pour l’avenir de leurs enfants.

un vœu en commun : ils voudraient que la guerre prenne fin, ils voudraient enfin pouvoir retourner chez eux. Mais pour l’instant, c’est Qartaba, leur maison – en grande partie grâce à l’école.  www.agirtoutsimplement.caritas.ch www.caritas.ch/syrie

Souhaits pour l’avenir

L’assistante sociale Nina El Khoury demande à Yara ce qu’elle voudrait pour l’avenir. « Je voudrais devenir comme vous », répond la petite. Sa sœur voudrait quant à elle devenir enseignante. La maman voudrait « un logement moins froid et humide, installé pour que les enfants puissent faire leurs devoirs dans de bonnes conditions, un lieu qui permettrait de vivre dignement. » Et tous, ils ont

Photo à droite : les quatre enfants sur le chemin de l’école.

Tout faire pour éviter une génération perdue La guerre en Syrie pousse de plus en plus de gens à la fuite. La plupart des réfugiés syriens vivent aujourd’hui dans l’un des pays voisins ; ils étaient 4,6 millions fin janvier 2016. Plus de la moitié de ces réfugiés sont des enfants et des jeunes de moins de 18 ans. 700 000 enfants réfugiés au Liban, en Jordanie, en Turquie et en Irak ne vont plus à l’école. Même si, un peu partout, un système d’enseignement en deux équipes a été installé et que l’on a ouvert des salles de classe provisoires, on est loin de pouvoir couvrir les besoins. On manque d’enseignants et de salles de classe. Les parents ne peuvent pas payer les coûts scolaires et de transport. Souvent, ils préfèrent que leurs enfants cherchent un travail pour contribuer à la survie de la famille.

larité en couvrant leurs frais scolaires et de transport. 70 % d’entre eux sont des enfants de réfugiés, 30 % des enfants autochtones défavorisés. Le projet cherche aussi à favoriser la capacité de ces enfants à suivre les cours et à assimiler l’enseignement, malgré les trau­ matismes. Les enseignants sont formés spécialement pour s’adresser à des enfants traumatisés par la guerre. En outre, les écoles encouragent de manière ciblée la cohésion sociale entre les réfugiés et les enfants autochtones afin de limiter durablement les tensions sociales. Les parents sont impliqués : ils ont eux aussi la possibilité de suivre des cours qui leur permettent de faire face au quotidien, ou parfois leur ouvrent une source de revenus. Il s’agit aussi de les convaincre de l’utilité pour leurs enfants de suivre l’école.

Projet scolaire pour 2500 enfants

Projet scolaire au nord de l’Irak

Le projet scolaire commun de Caritas Autriche, Caritas Liban, Caritas Jordanie et Caritas Suisse cherche à lutter contre cette terrible situation. Pendant trois ans, le projet permet à 2500 enfants par année au Liban et en Jordanie de suivre une sco-

Dans le nord de l’Irak, Caritas Suisse en­ courage aussi la scolarité d’enfants réfugiés. Dans cinq écoles de langue arabe de la ville kurde d’Erbil a lieu un programme d’intégration de 5000 enfants de réfugiés syriens et irakiens. Pour pouvoir surmonter leurs ex-

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périences traumatisantes, les enfants ont un accompagnement psychosocial et, si nécessaire, un soutien thérapeutique.

Projets scolaires pour les enfants réfugiés syriens TURQUIE

SYRIE LIBAN 2 écoles

JORDANIE 5 écoles

IRAK 5 écoles



Actuel  Regard

Tonny Okilla, Ouganda À quoi ressemblent vos journées ?

Les enfants se lèvent à six heures pour aider ma femme. L’école commence à sept heures et demie. À midi, ils mangent à la maison, puis font leurs devoirs et rencontrent des amis. De mon côté, je me lève à sept heures et travaille toute la journée comme chauffeur. Après, je vais à l’église, puis je soupe en famille à huit heures et demie. Enfin, je vends des boissons avec ma femme jusqu’à dix heures. Quel est votre revenu ?

Tonny Okilla (35 ans) habite à Arua et travaille comme chauffeur pour plusieurs organisations, dont Caritas. Sa première femme est morte à la naissance de leur troisième enfant. Il a trois autres enfants avec sa seconde femme Acaya (27 ans). Celle-ci travaille comme couturière et s’occupe des six enfants âgés de 2 à 17 ans. Propos recueillis par Pia Käch

Je gagne 50 000 schillings ougandais (environ 14 francs suisses) par jour. Comme mon salaire de chauffeur est malheureusement irrégulier, nous avons encore besoin d’autres sources de revenu. Nous louons donc trois des six pièces de notre maison à des petits commerces et, le soir, nous vendons encore des boissons. Quelles ont été vos dernières dépenses ?

J’ai payé les frais de scolarité de mes enfants, la radio et le vélo de mon fils cadet.

Pour vous, qu’est-ce que le bonheur ?

Je suis heureux quand j’ai un mandat de chauffeur, parce que je peux alors faire des projets pour moi et ma famille. Ça me rend très heureux de pouvoir prendre soin de nous tous et résoudre moi-même nos problèmes. Ou de passer du temps avec des gens que j’aime bien. Et j’aime la musique – surtout le gospel qui signifie beaucoup pour moi. Que souhaitez-vous pour vous-même ?

J’ai beaucoup de souhaits ! J’aimerais surtout que notre famille reste unie et que tous les enfants terminent l’école et trouvent un emploi. Que ma femme et moi-même puissions subvenir nous-mêmes à nos besoins quand nous serons vieux. J’aimerais en outre suivre un cours d’informatique, parce que je n’ai pu terminer aucune formation. Je pourrais alors travailler dans cette branche et j’aurais un revenu régulier.

Qu’aimez-vous particulièrement dans votre pays ?

La paix et la sécurité. Le développement du pays progresse. J’aime les paysages, les gens, mes amis et les membres de ma famille. Pour quoi devez-vous vous battre ?

Je regrette que ma femme et moi devions vendre des boissons locales jusqu’à dix heures du soir pour survivre. J’aimerais bien avoir un revenu régulier. Qu’est-ce qui fait votre fierté ?

Je suis très fier de m’être payé moi-même l’école secondaire. Mon père ne prenait plus en charge mes frais d’écolage, parce qu’il pri-

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vilégiait mes frères et sœurs. Chaque soir, j’ai travaillé de cinq à sept heures sur les chantiers. Je suis aussi fier de pouvoir offrir à mes enfants une bonne vie dans la foi chrétienne.

L’Ouganda en chiffres Capitale Kampala Nombre d’habitants 35 millions Monnaie schilling ougandais (UGX) Prix d’un sac de charbon 20 000 UGX (env. 6 fr.) Prix d’un kilo de riz 4000 UGX (env. 1 fr.) Prix d’une livre de bananes matoki 20 000 à 30 000 UGX (env. 6 à 9 fr.)

Photo : Pia Käch


En image  Actuel

Dans la région de San Lucas, les enfants qui travaillent peuvent malgré tout aller à l’école, grâce à Caritas. Nicaragua, juillet 2015.

« La lumière a jailli de l’autre côté du vaste océan », déclare Antonio Aragón Renuncio (44 ans). Il vit au Nicaragua et travaille comme photographe indépendant pour plusieurs agences internationales. Couronné de nombreuses distinctions, Antonio Aragón Renuncio enseigne aussi la photographie et organise des projets d’échange. www.antonioaragonrenuncio.com

Photos : Antonio Aragón Renuncio ; DR

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Agir, tout simplement  Suisse

Préparer ensemble les repas aide à structurer les journées.

Enfants seuls en exil En Suisse, quelques centaines d’enfants et adolescents sont en cours de procédure d’asile. Ils ont fui seuls et se trouvent dans une situation précaire. Mineurs non accompagnés « Un de mes frères a été recruté de force, un autre est mort à la guerre », explique un requérant d’asile érythréen (17 ans) qui souhaite garder l’anonymat. « J’avais tout le temps peur que les soldats viennent un jour me chercher. C’est pourquoi j’ai arrêté l’école et suis parti en Éthiopie, de l’autre côté de la frontière. » Il est arrivé dans un camp de réfugiés. Mais les protestations d’une partie des occupants ont débouché sur des éclats de violence et des policiers ont tiré sur des réfugiés. « Tout ce que je voulais, c’était vivre dans le calme et la paix et travailler quelque part », ajoute l’adolescent. Au terme d’une longue

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fuite, il est ainsi arrivé en Suisse où sa demande d’asile est en cours. En Suisse, il y a chaque année quelques centaines de mineurs non accompagnés (MNA) en cours de procédure d’asile. Certains ont perdu leurs parents pendant la guerre, d’autres ont été envoyés au loin dans l’espoir qu’ils pourraient soutenir la famille de l’étranger. Beaucoup ont vécu des fuites traumatisantes, subi des violences ou des abus sexuels. En Suisse, ceux qui ont de la chance arrivent dans des centres pour mineurs bien encadrés. Les autres se retrouvent dans des centres d’hébergement collectif qui abritent surtout des hommes.

dans les contraintes du droit d’asile », Caritas Suisse demande que les enfants et adolescents soient hébergés conformément à leur âge et puissent acquérir des connaissances, faire un apprentissage et organiser leur temps libre. Pour tenir compte des besoins particuliers des mineurs non accompagnés, Caritas Suisse propose, à partir de 2016, un placement dans des familles d’accueil appropriées de Suisse alémanique. Les enfants et adolescents concernés doivent pouvoir se sentir en sécurité dans un environnement adapté à leur âge ; ils peuvent ainsi s’intégrer et aller à l’école. Caritas Suisse organise des placements depuis plus de 20 ans. (dos)

Besoins particuliers

Les mineurs non accompagnés doivent bénéficier de mesures spécifiques à la protection des enfants. Or ces mesures sont souvent négligées durant la procédure d’asile. Dans sa prise de position « Enfants et adolescents

www.caritas.ch/prisesdeposition www.caritas.ch/platzierung-uma (en allemand)

Photo : Pia Zanetti


Dans son travail de prévention de l’excision, Caritas veille à ce que les communautés des pays concernés soient intégrées et puissent dialoguer dans un espace protégé.

Renforcer la prévention de l’excision Un nouveau réseau doit permettre de regrouper et de renforcer les activités contre l’excision en Suisse. Caritas Suisse effectue depuis plus de dix ans un travail de prévention. Prévention Par une chaude journée au centre de transit de Tramelan, un groupe de jeunes femmes, principalement originaires d’Érythrée et de Somalie, écoute attentivement les considérations de la conseillère en santé sexuelle Félicienne Villoz Muamba. « Savezvous ce qu’est l’excision ? », demande la spécialiste de la prévention de Bienne, tandis que ses collègues traduisent en arabe et en

Photo : Heike Grasser/Ex-Press

tigrigna. Félicienne Villoz Muamba explique images à l’appui ce que signifient les muti­ lations génitales féminines, quels sont les motifs de cette pratique et où résident les risques. Les femmes présentes sont âgées de 15 à 35 ans, il y a parmi elles beaucoup de très jeunes mères. La discussion s’anime lorsque la conseillère précise que l’excision est interdite en Suisse. On dénombre actuellement en Suisse près de 15 000 filles et femmes touchées ou me­ nacées par l’excision. Avec l’augmentation du nombre de migrantes et de requérantes d’asile originaires de pays comme la Somalie et l’Érythrée, le sujet revêt un caractère de plus en plus urgent. Caritas Suisse accomplit un travail de prévention sur mandat de l’Office fédéral de

la santé publique et du Secrétariat d’État aux migrations : elle propose des conseils à des spécialistes et institutions et soutient le transfert de connaissances dans les cantons. Agir ensemble

Le Conseil fédéral veut, par de nouvelles mesures, rassembler et renforcer les activités contre l’excision. Grâce à un nouveau réseau, institutions, spécialistes et groupes de migrants seront mieux interconnectés. Caritas soutient ce réseau qui permettra de couvrir une plus grande surface du territoire suisse. (dos)  www.caritas.ch/mgf

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Agir, tout simplement  Dans le monde

Les anciens détenus sont accompagnés par des agriculteurs expérimentés lors de leur apprentissage de la culture du manioc ou du maïs.

Dans les centres de jour, Caritas offre une aide pour les devoirs aux enfants roms.

Une nouvelle chance après la prison

Renforcer les communautés roms

Au nord de l’Ouganda, un projet de réinsertion aide de jeunes délinquants à monter une petite entreprise. Il s’agit de leur assurer un revenu, tout en faisant baisser le taux de criminalité. Ouganda Après des décennies de privations liées au conflit entre le gouvernement et les rebelles, la jeunesse du nord de l’Ouganda est face au néant. Les jeunes qui ont presque tous grandi dans des camps de réfugiés n’ont ni formation ni perspectives. La petite criminalité est élevée et les prisons bondées. Trois quarts des détenus, garçons et filles, ont entre 18 et 35 ans. L’organisation Advance Afrika, partenaire de Caritas, veut leur offrir des perspectives. Dans les régions d’Acholi et Lango, des projets commerciaux sont conçus avec 800 détenus. La transmission des connaissances théoriques requises pour monter et diriger une entreprise commence déjà en prison. Après leur libération, les jeunes peuvent

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réaliser leur projet en ouvrant un salon de beauté, un atelier de réparation ou une petite entreprise spécialisée dans la culture de manioc ou l’élevage de porcs. Les anciens détenus sont accompagnés par des commerçants ou des agriculteurs expérimentés. « Mais il est important de ne pas perturber l’équilibre social, déclare la responsable du projet de Caritas Suisse, Kathrin Wyss. Les détenus ne doivent pas être favorisés par rapport aux autres jeunes. Le projet veut surtout compenser les déficits provoqués par l’incarcération. » (use)  www.caritas.ch/ouganda-prisonniers

Roumanie Le 8 avril est la Journée interna­ tionale des Roms. Cette minorité compte toujours parmi les groupes de population les plus pauvres et les plus discriminés d’Europe. Dans ses projets, Caritas met l’accent sur la formation, la santé, le revenu et le logement. Par exemple en Roumanie, où elle soutient avec Caritas Satu Mare trois centres de jour pour les communautés roms. Il s’agit d’améliorer leurs perspectives par des offres dans le domaine de la formation et de la santé. À Baia Mare, 60 enfants roms vont ainsi à l’école primaire et 30 autres enfants sont intégrés à des classes où ils retrouvent le goût d’apprendre après un décrochage scolaire. Dans tous les centres de jour, Caritas propose en outre des jardins d’enfants et des devoirs surveillés. Des médiatrices spécialisées dans le domaine de la santé sensibilisent la communauté aux questions de prévention médicale. Les préoccupations de la communauté rom sont prises en compte et l’initiative personnelle encouragée. (dos)  www.caritas.ch/projet-roms

Photos : Advance Afrika ; Pia Zanetti


Lorsque les sept écoles seront terminées en été, 4000 enfants pourront en profiter.

La reconstruction avance En novembre 2013, le typhon Haiyan a détruit de nombreuses maisons et écoles aux Philippines. Caritas reconstruit sept écoles et plus de 1000 maisons. Philippines Nous sommes le 11 décembre 2015. À Pili, sur l’île de Bantayan aux Philippines, les visages des invités sont rayonnants. Des enfants, des enseignants, des parents et des représentants du gouvernement attendent la cérémonie d’inauguration de la nouvelle école primaire de Caritas. Là où il ne restait plus qu’un tas de décombres suite au passage du typhon Haiyan en novembre 2013 se dressent maintenant des bâtiments scolaires clairs et aérés. Les nouvelles salles de classe aux couleurs lumineuses donnent sur une cour arborisée. Enfin, le prêtre du lieu, le directeur de l’école et un représentant de Caritas coupent le ruban rouge et blanc. L’école est officielle-

Photo : Stéphanie Bouaziz

ment inaugurée. Beaucoup de paroles de remerciements succèdent aux intermèdes de danse, discours et poésies. « Nous remercions de tout cœur Caritas et tous les donateurs d’avoir choisi notre école pour la reconstruction, déclare ainsi la présidente de l’association parents-enseignants Marina Acorda. Soyez certains que nous prendrons grand soin de ce cadeau. » « Nous n’y serions jamais arrivés sans votre aide, renchérit Zhaira Tajanlangit du conseil des étudiants. Il n’y a pas assez de mots pour exprimer notre gratitude. » Résister aux séismes et aux ouragans

L’école de Pili est l’une des sept que Caritas reconstruit à Bantayan. Quatre d’entre elles ont pu être terminées pour la fin 2015. Elles comportent en tout seize bâtiments et 36 salles de classe. Deux écoles ont été remises à la population, les cinq autres seront inaugurées au cours de l’été 2016. Au total, 4000 enfants pourront y être scolarisés. À

côté de l’enseignement, les bâtiments serviront désormais aussi de centres d’évacuation en cas de nouvelle catastrophe. Le mode de construction est conçu pour résister aux séismes et aux ouragans. Comme plus de 300 ouvriers locaux sont impliqués dans les travaux, le projet assure aussi des emplois. Il est complété par des ateliers sur l’entretien et les plans d’urgence. Caritas est aussi active dans la reconstruction de maisons privées. Plus de 1000 maisons seront construites d’ici l’été 2017 sur les îles de Bantayan et Kinatarkan. Les matériaux proviennent de la région et les bénéficiaires sont impliqués dans les travaux. (use)  www.caritas.ch/reconstruction/philippines

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Agir, tout simplement  Point fort

34 écoles Caritas pour le Népal Le tremblement de terre dévastateur d’avril 2015 a détruit 8000 écoles au Népal. Caritas Suisse en reconstruit maintenant 34 qui doivent contribuer à l’amélioration de l’enseignement dans cet État de l’Himalaya.

D

e l’ancien bâtiment scolaire il ne reste que la porte en fer. Derrière se dresse une gigantesque montagne de décombres où l’on discerne des cahiers délavés par la pluie. Nous sommes à Gyalthum dans le district de Sindhulpalchok, au centre du Népal, devant l’un des 8000 bâtiments scolaires effondrés. Les conséquences du tremblement de terre touchent presque tous les aspects de la vie quotidienne. Les chutes de pierres et de rochers du haut des versants érodés menacent les élèves qui habitent dans des localités retirées parfois à plus de quatre heures de marche de l’école. Beaucoup de parents ont peur d’envoyer leurs enfants à l’école. Classes immenses

Avant le séisme déjà, 1,2 million d’enfants en âge de scolarité n’avaient encore jamais mis les pieds à l’école. Celle-ci jouit d’une assez mauvaise réputation. « Dans ses écoles publiques, le Népal cultive encore dans la plupart des cas un modèle d’instruction très traditionnel, relève Anil Sapkota directeur au Népal de l’ONG « Fair Education ». L’enseignant lit des textes, debout devant la classe. Les enfants doivent les répéter et les apprendre par cœur. Souvent sans savoir ce qu’il y a derrière. » Les classes sont souvent immenses. Selon Marilyn Hoar qui dirige le Département de l’instruction à Unicef Népal, elles comptent

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Plus de 70 élèves par classe – ce ne sera plus le cas dans les nouvelles écoles de Caritas.

souvent plus de 70 élèves. Il n’y a ni travail de groupes, ni d’apprentissage interactif. La taille des classes empêche un suivi individuel des élèves. Selon Anil Sapkota, 90 % du corps enseignant n’a jamais entendu parler de didactique et de méthodique : « L’État

devrait investir beaucoup plus dans la formation des enseignants. ». Dans certaines écoles, on se croirait encore au temps de Pestalozzi. L’architecture des établissements scolaires y est pour beaucoup : des salles de classe sombres et étroites avec des bancs où

Photos : Peter Jaeggi


se serrent cinq à six élèves, pas assez de fenêtres et un éclairage sombre avec des pannes d’électricité quotidiennes qui durent souvent plusieurs heures. Les enfants n’ont pas assez de place pour jouer à l’extérieur, les toilettes sont mal entretenues, souvent sans eau. Bref, le contraire d’une ambiance propice aux études et agréable pour les enfants. Contribuer au système éducatif

Le tremblement de terre amorce-t-il un tournant ? Caritas Suisse prévoit maintenant 34 nouveaux établissements scolaires pour un budget de 10,9 millions de francs dans le district de Sindhulpalchok très touché par la catastrophe. Nouveaux bâtiments – meilleure école ? Marilyn Hoar est d’avis qu’une

suffisamment de portes et de fenêtres. On compte 1,5 mètre carré par élève (voici peu, l’État n’en accordait que la moitié). Les nouveaux établissements comportent des salles des maîtres, des bibliothèques et des salles de séjour, des toilettes séparées, ainsi que des places de jeu et de récréation. Khagendra Nepal, directeur du Département népalais de l’instruction publique, voit même dans les écoles de Caritas une construction type qui pourrait servir de modèle dans tout le pays. « L’école est le centre d’un village, déclare Peter Eppler, délégué en chef de Caritas au Népal. Dans ce pays encore très tourné vers l’autorité, un enseignant jouit d’un statut important dans la société. » Peter Eppler considère les nouveaux bâtiments scolaires

« L’école est le centre d’un village. Un enseignant jouit d’un statut important. » architecture favorable aux études et aux enfants a une influence très motivante. Des locaux assez spacieux, des classes pas trop immenses et un mobilier réglable favorisent un enseignement moderne. Or, ce sont précisément les objectifs de Caritas Suisse. Plus de place pour apprendre et jouer

Les nouveaux bâtiments scolaires sont construits avec des structures en béton armé, naturellement selon des normes antisismiques. L’architecture traditionnelle avec des briques et du mortier d’argile n’a pas résisté au séisme d’avril. Les écoles de Caritas disposeront de locaux vastes et clairs, avec

comme un investissement important dans l’avenir du Népal. Anil Sapkota de « Fair Education » associe ces constructions à des programmes de développement des villages : « Je le redis sans cesse aux gens d’ici : ne soyez pas trop tristes de ce tremblement de terre. Il nous donne la chance de construire un nouveau Népal. » Peter Jaeggi

Reconstruction ardue Après la catastrophe d’avril 2015, Caritas Suisse peut maintenant commencer la mise en œuvre de son programme de reconstruction. Dans le district de Sindhulpalchok, l’organisation bâtit selon des normes antisismiques 34 écoles adaptées aux besoins des enfants pour 6000 élèves de six communes. Elle aide aussi les autorités scolaires à améliorer la qualité de l’enseignement. L’œuvre d’entraide suisse Helvetas participe également au programme de reconstruction et prend en charge le volet approvisionnement en eau et hygiène. L’aide à la reconstruction est également soutenue financièrement par la Chaîne du Bonheur, les Caritas de Grande-Bretagne, de Tchéquie, du Luxembourg et de Belgique, ainsi que par la fondation Clean Water de l’entreprise Georg Fischer et la ville d’Adliswil. Hygiène précaire

Au Népal, 23,8 % de la population vit en-dessous du seuil de pauvreté et à la campagne, les conditions d’hygiène sont précaires. À peine 20 % des ménages disposent de latrines et près de la moitié seulement ont accès à l’eau potable. Quelque 13 000 enfants de moins de cinq ans en meurent chaque année. Le programme de reconstruction a subi des retards à la fin de l’année, suite à des manifestations contre le projet de nouvelle Constitution jugée discriminatoire par les minorités. Comme les principales voies de transport en provenance d’Inde ont été bloquées, il y a eu une pénurie de carburant, de gaz, de fer et de béton. Les prix des matériaux de construction ont doublé. Mais Caritas Suisse a pu finalement démarrer les travaux en mars. (Peter Jaeggi/ dos)  www.caritas.ch/nepal-f

Une architecture favorable aux études et aux enfants, des locaux lumineux et un mobilier réglable favorisent un enseignement moderne.

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En cas de catastrophe, chaque minute compte.

Aidez-nous à agir vite – avec le fonds catastrophe de Caritas Lorsque la terre tremble, lorsque les fleuves débordent ou que la sécheresse sévit, il faut agir. Le fonds catastrophe permet à Caritas de réagir immédiatement et d’apporter une aide d’urgence. Engagez-vous pour le fonds catastrophe de Caritas ; avec un franc par jour, vous nous aidez à sauver des vies. Plus de carte ? Vous pouvez aussi vous inscrire sur : www.caritas.ch/fonds_catastrophe


Perspectives  Agir, tout simplement

À l’origine de chaque art, il y a l’être humain Le théâtre a échoué dans son projet de sensibiliser le public au sort des réfugiés. Tel est l’avis exprimé récemment par Claus Peymann, metteur en scène allemand et directeur du « Berliner Ensemble » dans l’hebdomadaire « Die Zeit ». Les mises en scène avec des nazis vociférants et les réfugiés repoussés – parfois même avec de vrais réfugiés jouant leur propre rôle – sont selon lui trop précautionneuses. Le génial metteur en scène admet qu’il est lui-même démuni. C’est un aveu. Mais pourquoi ? La tragédie des réfugiés en Europe est le thème urgent du moment. Aucun artiste ne peut y rester indifférent, les artistes étant toujours, de par leur activité et leur vocation, les sismographes de la société. Durant mon enfance dans la Roumanie communiste, l’art et la littérature avaient une valeur particulière : les livres interdits circulaient de famille en famille sous forme de manuscrit – sous le nom de code Samisdat – et étaient une fenêtre sur le monde. Comme ils abordaient, comme toute la littérature, les grands thèmes de l’amour et de la mort, ils étaient considérés comme un havre d’humanité dans un régime dictatorial arbitraire. Au-delà de cette sombre période de communisme, je suis plus que jamais convaincue que la littérature nous éduque à l’empathie, parce qu’elle nous pousse à plonger dans

L’auteure et journaliste Dana Grigorcea (36 ans) vient de Roumanie. Elle vit aujourd’hui à Zurich avec sa famille.

J’ai initié dans le 4 e arrondissement de Zurich un cycle de lectures dont le bénéfice est directement destiné à l’aide aux réfugiés sur l’île de Lesbos. Deux fois par mois, quatre à six auteurs connus lisent des extraits de leurs livres récents ou des textes qu’ils ont écrits pour l’occasion. Il n’y est pas toujours

« Je suis convaincue que la littérature nous éduque à l’empathie. » d’autres mondes, à suivre d’autres cheminements de pensée. Mais qu’est-ce qu’une écrivain et mère de famille de Zurich peut faire dans un premier temps pour les réfugiés qui arrivent par la Méditerranée au péril de leur vie ?

Photo : Ayşe Yavas

Après les lectures, les auteurs et les participants prennent le temps de discuter. Ces soirées sont très prisées parce qu’elles répondent à un besoin. Des sommes importantes sont collectées et les événements incitent les personnes présentes à prendre d’autres initiatives, du don en nature à l’aide sur place en Méditerranée. Car précisément en ces temps précaires, l’être humain et l’humanité doivent se trouver à l’origine de chaque art. Dana Grigorcea

question de migration, mais toujours d’humanité et de ce qui nous rassemble en tant qu’artistes et êtres humains. Comment écrit-on dans la situation actuelle, qu’est-ce qui nous empêche d’écrire et qu’est-ce qui nous y incite ?

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Caritas et moi  Bon à savoir

Ce qui motive notre travail bénévole à l’Épicerie Caritas

Francesca Scannapieco (51 ans)

« Je me suis engagée à l’Épicerie Caritas de Lausanne parce que j’aime le contact avec les personnes et j’ai une forte envie d’aider les autres. »

Rösli Geiger (67 ans)

« J’ai une famille en bonne santé et des enfants diplômés qui ont de bons emplois. J’en suis reconnaissante. À l’Épicerie Caritas, j’espère donner quelque chose à des gens moins gâtés par la vie. »

Ordinateurs & Cie : efficace, sain et équitable Économe en énergie, moderne et pas trop cher : tels sont généralement les critères d’achat d’un ordinateur, d’un téléviseur ou d’un téléphone portable. Mais il y aurait aussi d’autres points à prendre en considération. Car qui aimerait travailler face à un ordinateur préjudiciable à la santé ? Qui ne voudrait pas avoir un smartphone équitable ? Nous avons recensé les critères.

Efficacité Source : WWF Nom : test de l’efficacité des appareils Sujet : réparer ou remplacer ? Bon à savoir : dans un ménage de quatre personnes, l’éclairage de tous les appareils électriques est ce qui consomme le plus d’énergie. Si les ménages suisses optaient pour une technique économe en énergie, on économiserait jusqu’à 6 TWh d’électricité par année – soit deux fois la production annuelle de la centrale nucléaire de Mühleberg. Remplacer les vieux appareils se justifie souvent sur le plan écologique aussi bien que financier. C’est le cas pour la télévision et les écrans. Il en va autrement des ordinateurs et des smartphones qui contiennent de précieuses ressources et dont la fabrication consomme plus d’énergie que l’utilisation. Cela ne vaut pas la peine de les remplacer : en cas de défauts, une réparation est généralement la meilleure solution. Le test de l’efficacité des appareils du WWF vous aide à décider. Dans le top ten, vous trouvez les appareils qui se caractérisent par leur efficacité et un bon rapport prix-prestation. www.caritas.ch/wwf-test www.topten.ch

Santé et environnement Joe Stucki (62 ans)

« Même dans un pays aussi riche que la Suisse, il y a des gens socialement défavorisés. Ici, je peux contribuer un peu à les aider. Et chaque sourire m’est rendu. »

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Source : Office fédéral allemand de l’environnement Nom : Blauer Engel (Ange bleu) Sujet : évaluer des produits par rapport à l’environnement et à la santé Bon à savoir : Les téléviseurs à haute définition doivent être particulièrement économes en énergie et ne peuvent pas contenir de mercure.

La fabrication et le transport des appareils nuisent à l’environnement. Leurs émissions sont néfastes pour la santé. Ceux qui privilégient les labels « Ange bleu » et « TCO » minimisent ces charges. L’Ange bleu garantit de hautes exigences par rapport à l’environnement et à la santé. Quant au label TCO, il est décerné à des produits qui remplissent des exigences définies par rapport aux émissions, à l’ergonomie et à l’environnement. www.tcodevelopment.de www.blauer-engel.de

Équitable Source : Pain pour le prochain et Action de Carême Nom : classement des marques de haute technologie Sujet : à quel point les principaux produits informatiques sont-ils équitables en Suisse ? Bon à savoir : éviter d’acheter un nouveau smartphone chaque année ! Sous « réparation de portables », on trouve de nombreux prestataires sur Internet. L’extraction des matières premières et la production des appareils sont souvent problématiques. Ainsi par exemple, les minerais utilisés, comme l’étain et le tungstène, proviennent de la région du Congo en crise. En Chine, les travailleurs sont exposés sans protection à des substances cancérigènes et, en Indonésie, il n’est pas rare que les ouvriers travaillent quatorze heures par jour, six jours par semaine. Pain pour le prochain et Action de Carême ont enquêté sur les droits du travail, l’environnement et la provenance des minerais des plus grands fabricants. Conseil d’achat : le Fairphone est le premier smartphone à contenir des minerais de régions sans conflit et dont la production s’est faite dans des conditions de travail équitables. www.hightech-rating.ch www.faircostumer.ch (Acheter des téléphones équitables)

Photos : DR


Fribourg : nouveau service de prévention du racisme

Le but est de pouvoir cohabiter paisiblement, indépendamment de l’origine ou de l’appartenance culturelle.

Sur mandat du canton de Fribourg, Caritas Suisse ouvre un service de consultation et de prévention du racisme dont le siège est à Fribourg. Comme son nom l’indique, « se respecter » aimerait renforcer le respect mutuel et promouvoir la cohésion sociale. Il offre la possibilité de déposer des témoignages écrits et propose des conseils personnalisés à ceux qui ont été confrontés à des situations de discrimination raciale. Le nouveau service développe en outre des projets de prévention

des discriminations avec des institutions publiques et privées. Il ouvre ses portes le 21 mars. (dos)  Contact : « se respecter », Caritas Suisse Boulevard de Pérolles 55, Case postale 11 1705 Fribourg Courriel : serespecter@caritas.ch Téléphone 026 425 81 00 www.serespecter.ch

Almanach social 2016 Pauvreté des familles L’Almanach social 2016 de Caritas Suisse est centré sur le thème de la famille. Car la famille n’est pas seulement un lieu de bien-être individuel, elle est aussi soumise à de nombreuses tâches et prestations sociétales. C’est dans la famille que se forme le sens de la communauté et de la solidarité, c’est là que les malades et les personnes âgées sont pris en charge. La famille assure la subsistance économique de chacun de ses membres. Toute la société profite de ses prestations. Du point de vue de Caritas, rien ne justifie donc le fait que 223 000 parents et enfants en Suisse soient touchés par la pauvreté. Pour Caritas, il faut que la haute importance individuelle de la famille se répercute dans une politique familiale qui prévienne la pauvreté. L’Almanach social 2016 allie essais et articles sur la famille, ses besoins et prestations, mais aussi et surtout sur la pauvreté des familles et les moyens de l’empêcher. (dos)  Almanach social 2016 : « La famille n’est pas un luxe » (en allemand), éditions Caritas Lucerne, décembre 2015, 220 pages www.caritas.ch/almanach-social

La saison commence en montagne !

Vous profiterez de l’air frais des montagnes.

Photos : Georg Hofer ; Franca Pedrazzetti

Pour les familles de paysans de montagne, le printemps est une période chargée. Il faut réparer étables et clôtures, désherber les pâturages, etc. Si un imprévu tel qu’une maladie ou un accident survient, il devient im­ possible de réaliser ces tâches. Engagez-vous bénévolement et soutenez pendant au moins cinq jours une famille en difficulté. Votre travail sera récompensé par des rencontres enrichissantes et la satisfaction de faire quelque

chose d’important tout en profitant de l’air frais des montagnes. Il est aussi possible de faire un don. (dos)  www.montagnards.ch

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Photo : Franca Pedrazzetti

S’engager autrement avec Caritas-Montagnards Votre engagement bénévole pour aider les familles de paysans de montagne. Intéressé ? Informations sur les lieux d’engagement sur www.montagnards.ch


Énigme  Caritas et moi

Où ces enfants vont-ils à l’école ?

Dans cette école libanaise, des enfants réfugiés de Syrie et des enfants autochtones étudient sous le même toit dans une atmosphère paisible. Comment s’appelle ce village évoqué dans le reportage qui débute à la page 6 ?

Concours Gagnez un sac en tissu de Caritas !

Envoyez la bonne réponse avec la mention « devinette » d’ici au 30 avril 2016 à info@caritas.ch ou à Caritas Suisse, Rédaction du Magazine Caritas, Adligenswiler­ strasse 15, case postale, 6002 Lucerne. Un tirage au sort sera réalisé parmi les bonnes réponses et trois gagnants recevront chacun un sac en tissu de Caritas (voir carte de commande). La solution et les noms des gagnants figureront dès mai 2016 sur www.caritas.ch/fotoraetsel et dans le numéro de juin du magazine « Planète solidaire ». Solution de la devinette parue dans le magazine 4/2015 : réponse B : concerts, cinéma, théâtre, cirque, musée, zoo

Photo : Alexandra Wey

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Caritas et moi  Solidaires

« Nous sommes tous des réfugiés » Maria Taliani est chauffeur sur l’île grecque de Lesbos. Elle conduit les réfugiés particulièrement éprouvés vers l’offre d’hébergement de Caritas, un hôtel qui assure pour un temps chaleur et sécurité. Quand il y a trop de travail dans l’hôtel que Caritas utilise pour héberger des réfugiés sur l’île de Lesbos, Maria Taliani (47 ans) est vite sur place pour apporter son aide. À côté de son travail de chauffeur, elle aide à distribuer des habits, joue avec les enfants, mobilise des donateurs ou invite les collaborateurs à prendre de temps en temps une pause. Maria Taliani, à Caritas Grèce depuis novembre, est l’épouse du réceptionniste de cet hôtel trois étoiles. Là, les nouveaux arrivants ont à disposition une chambre chauffée, une salle de bain et de la nourriture pour trois nuits au maximum, avant qu’ils ne poursuivent leur route vers Athènes. Maria Taliani va chercher dans le camp de réfugiés des personnes âgées et particulièrement vulnérables, des familles avec enfants en bas âge, des femmes enceintes et des personnes handicapées, afin de leur éviter de devoir passer comme tant d’autres la nuit

Maria Taliani, chauffeur pour Caritas, donne un sentiment de sécurité aux nouveaux arrivants.

coup d’autres, fuir la Turquie en 1922 et dormir sous tente pendant quatre ans. « Je vois ma grand-mère dans chaque enfant », explique Maria Taliani, elle-même mère de deux fils adultes. « Dans l’idéal, je les conduirais tous à l’hôtel. » Son nouveau rôle de chauffeur convient très bien à cette femme qui jouit d’une longue expérience dans le tourisme et d’une forma-

« Dans l’idéal, je les conduirais tous à l’hôtel. » dehors au froid ou dans de simples tentes. Et quand la situation l’exige, Maria Taliani conduit des malades à l’hôpital ou des migrants de l’hôtel au port. « Ici à Lesbos, nous sommes tous des réfugiés et nous savons ce que c’est », déclare Maria Taliani qui a pourtant grandi à Lesbos. Mais sa grand-mère a dû, comme beau-

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tion de spécialiste de la sécurité. « Ma tâche consiste à donner un sentiment de sécurité aux nouveaux arrivants. Quand la police nous refuse l’accès au camp, je dois rester diplomate. Je dois aussi m’imposer face aux chauffeurs de taxi de l’île qui perçoivent notre offre comme une concurrence. » (dos)

Un hébergement provisoire En Grèce, Caritas Suisse et Caritas Grèce aident les réfugiés en transit qui ont particulièrement besoin de protection. Jusqu’au printemps, elle met à disposition 450 lits dans trois hôtels de Lesbos et d’Athènes pour une à trois nuits. Les réfugiés peuvent y puiser la force de poursuivre leur route et y obtenir toutes les informations nécessaires. Le projet crée aussi des emplois pour la population locale pendant les mois d’hiver sans touristes.  www.caritas.ch/migrants

Photo : Fred Lauener


youngCaritas  Caritas et moi

Migration et exil à l’école oyaggeuis… v ques n e r i t Par issances lin ti

youngCaritas visite chaque année 30 à 40 écoles en Suisse alémanique et rencontre des élèves de 13 à 20 ans. Les thèmes abordés vont du commerce équitable à la pauvreté en Suisse, en passant par la coopération au développement. Les demandes touchant le thème des migrants et des réfugiés ont particulièrement augmenté l’an dernier.

onna s les c . . . san s ereux nomie saires e dang es éco s néces s a te r it êtr u r u u to o ie r p d e iss un a yage . . . y la e le vo ut-être u e q p t ir s o e c’e . . . sav dire qu ort . . . se u la m rture o to if it la n , défi prison uer la . . . risq

C’est avec ces idées de voyage que nous commençons nos visites de classes sur le thème des migrants et des réfugiés, car qui ne voudrait pas entreprendre un nouveau voyage ? Dans n’importe quelle classe, il y a naturellement toujours des têtes brûlées prêtes à affronter les dangers, mais l’idée de « l’adieu définitif » et ce qui suit les arrête pratiquement tous. Les visites scolaires de youngCaritas incitent à la réflexion ; elles sont toujours interactives et doivent motiver les jeunes à agir. Il n’est pas rare que youngCaritas gagne par la même occasion plusieurs nouveaux acteurs et actrices de la solidarité. Et que les classes particulièrement motivées organisent encore, dans l’élan, une action de collecte. Que prends-tu avec toi ?

Pour des raisons de temps, et en général, les jeunes réfugiés vont eux-mêmes à l’école, youngCaritas ne propose pas de rencontres avec des réfugiés dans le cadre des visites régulières dans les écoles. Pour nos acteurs et actrices de la solidarité, les visites dans les centres de requérants d’asile débouchent, comme nos autres activités, sur des

Photo : youngCaritas

rencontres et de nouvelles amitiés. Dans un groupe de travail, les élèves se glissent dans la peau de personnes en fuite et doivent prendre plusieurs décisions. Qu’emporter ? Comment payer la fuite ? Quel itinéraire choisir ? Combien suis-je prêt à payer pour un passeur ? Suivant la décision, la fuite se termine bien, mais elle peut aussi s’achever en prison ou par la mort. Les discussions partent dans toutes les directions et il est impressionnant de voir que pratiquement tout le monde pense à emporter son téléphone. Celui-ci peut sauver la vie des personnes en fuite, leur indiquer la route à suivre et leur permettre de rester en contact avec leur famille et leurs amis.  Andreas Lustenberger www.youngcaritas.ch/school

youngCaritas grandit Depuis l’automne, youngCaritas a d’un coup doublé de volume, car Caritas Zurich vient elle aussi d’ouvrir une section jeunesse. Nous nous réjouissons de cette collaboration, car une jeunesse engagée est l’avenir de demain.  www.youngcaritas.ch/zh

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Yara Shuja (11 ans), une enfant réfugiée de Syrie

Agir, tout simplement

Quand la pauvreté montre son visage Découvrez l’histoire de Yara et de sa famille sur : www.agirtoutsimplement.caritas.ch


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