Enfants
Mars 2016
Rapport pour les marraines et parrains
Enfants à l’école : sortir de la pauvreté
Enfants des rues : Shanny trouve un nouveau soutien
Force de vie : des cours pour enfants différents
Sommaire 4 ■ Bosnie-Herzégovine Sortir de la pauvreté 6 ■ H aïti « Quand il pleut, je vais à l’école à dos d’âne » 8 ■ Ouganda Dans la rue, le danger guette 10 ■ Bangladesh « Pour moi, c’est la clé du bonheur » 11 ■ Éthiopie Le long et dangereux parcours de Birhan 12 ■ Nicaragua Entre école et travail 14 ■ Bernadette Schürmann (57 ans) : marraine « Nous devons prendre soin des enfants » 15 ■ Brésil Adieu la décharge 16 ■ Bolivie Shanny trouve un nouveau soutien 18 ■ Rwanda « Dans la rue, il n’y a pas de vie » 20 ■ Interview d’Ellen Ringier « Les enfants ont besoin de force et de joie de vivre » 22 ■ Tadjikistan Des cours pour enfants différents 24 ■ Cuba Daniel n’est pas seul 26 ■ Philippines Protéger les enfants contre les enlèvements 27 ■ Bolivie Gabriel en sécurité 28 ■ Palestine Guérir les enfants de la tristesse 30 ■ Colombie Sortir les enfants du cycle de la violence 32 ■ Questions des parrains – réponses des enfants 2 Caritas « Enfants » 2016
« Même si nous sommes complètement différents, nous devons partager des choses et cohabiter en paix. » Le monde vu par Laura Cardona, 9 ans, Colombie.
Photo de couverture : Antonio Aragón Renuncio ; rédaction : Dominique Schärer, Jörg Arnold ; graphisme : Evelyne Bieri ; papier : Carisma Silk, 100 % recyclé
Un monde plus ju ste pa s à pa s Chère marraine, cher parrain, « Où qu’ils vivent, les enfants ont droit à une protection, à la sécurité et à l’affection. La force de vie et la joie de vivre sont toujours les fondements d’une bonne existence. » Dans ce magazine, Ellen Ringier formule très justement l’objectif qui sous-tend tous les projets de parrainages de Caritas : chaque enfant doit connaître la sécurité, aller à l’école et pouvoir puiser une nouvelle force de vie dans des situations difficiles. Chaque enfant doit devenir un adulte capable de prendre son avenir en main dans un esprit positif et renforcé. Par exemple Ahmed qui apprend à laisser derrière lui les horreurs de la guerre qui l’ont traumatisé. Ou Juliano qui a grandi sur une décharge et peut maintenant aller à l’école. Ou encore Shanny qui retourne pas à pas à une vie normale après avoir connu la rue, la violence et les viols. C’est magnifique, chère marraine, cher parrain, de savoir que vous comptez parmi les personnes qui n’hésitent pas à aider les enfants blessés. Vous savez que l’avenir est entre leurs mains. Et surtout vous croyez qu’on peut réussir à rendre le monde meilleur. C’est beau qu’il y ait des personnes comme vous. Merci d’être là pour nos enfants.
Pia Käch Parrainages Caritas
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« Enfants » 2016 Caritas
Enfants à l’école ■ Bosnie-Herzégovine
So rtir de la pauvreté Les Roms sont l’un des groupes de population les plus discriminés d’Europe. Rares sont ceux qui peuvent offrir une formation scolaire à leurs enfants. Il faut une assistance et un travail de persuasion auprès des parents. Comme pour Dževad qui est allé à l’école pour la première fois à l’âge de 9 ans.
Il fait froid et le vent siffle autour du baraquement qui abrite la famille Ramic´. Sept personnes se partagent 25 mètres carrés. Il n’y a pas de raccordement d’eau. Les fenêtres sans vitres sont munies de simples bâches en plastique et une couverture en laine tient lieu de porte. L’endroit se trouve au cœur de l’Europe, dans une colonie rom de Bosnie-Herzégovine. Ici, la pauvreté est palpable et rares sont les gens qui perçoivent un revenu. La plupart tentent de garder la tête hors de l’eau en triant des déchets. Comme les enfants doivent contribuer d’une manière ou d’une autre à la survie de la famille, les parents ne se soucient souvent pas de leur formation scolaire.
Dževad fréquente l’école du lieu depuis août 2014. Il assure avoir beaucoup de plaisir à y aller et s’est visiblement épanoui. Le dessin est sa branche préférée. Caritas lui a fourni cartable, affaires d’école et vêtements. Parfaitement équipé, il part chaque matin le sourire aux lèvres. Ses journées sont structurées et un repas lui est servi à l’école. « Pour ses parents, c’est aussi un des arguments qui les a convaincus », déclare la travailleuse sociale. Bien que le père ait récemment trouvé un travail, ils n’ont pas pour autant les moyens de nourrir suffisamment leurs enfants. L’entrée à l’école de Dževad a changé beaucoup de choses pour la famille Ramic´. Pas seulement la vie quotidienne, mais aussi la disposition des parents vis-à-vis de l’école. « Nous devons accomplir un travail de persuasion et montrer aux familles concernées qu’avec une formation scolaire, les enfants ont de bonnes chances de briser le cercle de la pauvreté », estime Berina Husika. Mission accomplie dans ce cas-là. Maintenant, deux des frères et sœurs de Dževad vont aussi à l’école. ■
Dževad s’épanouit
C’était aussi le cas de Dževad, 10 ans, avant-dernier enfant de la famille Ramic´. « Nous avons rendu visite à la famille à plusieurs reprises pour tenter de les convaincre de l’importance de l’école », explique Berina Husika. Cette travailleuse sociale au projet de parrainages d’enfants de Caritas a fait leur connaissance au centre social où la mère s’était rendue à cause de leur benjamin, le petit Anes de 3 ans, atteint d’un handicap. « Les discussions ont été difficiles ; les parents ont fini par accepter après avoir eu l’assurance que nous mettrions tout le matériel scolaire à disposition de Dževad. » 4 Caritas « Enfants » 2016
Grâce à Caritas, Dževad a tout ce qu’il faut : cartable, affaires d’école et vêtements. Texte : Ulrike Seifart ; photo : Velija Hasanbegović
Bosnie-Herzégovine : votre part d’un monde plus juste
Une formation pour les enfants roms Onze écoles de Bosnie-Herzégovine tiennent des classes spéciales pour l’intégration des enfants roms selon un modèle de Caritas. Les familles reçoivent du matériel scolaire, des repas et des denrées alimentaires et sont suivies par des travailleurs sociaux. Des enfants d’autres familles socialement défavorisées sont aussi intégrés au projet. Dans le canton de Sara jevo, des jeunes sont préparés à l’école professionnelle.
Bon à savoir : – Depuis 2013, 433 enfants ont reçu 7037 heures d’enseignement supplémentaires dans 11 écoles primaires. – 178 enfants ont pu être scolarisés. – Près de 20 000 repas ont été distribués. – La cantine scolaire coûte 200 francs par année et par enfant. ■ www.caritas.ch/enfants/bosnie-herzegovine
« Quand il pleut, je vais à l’école à do s d’ân e » Enfants à l’école ■ Haïti
Sherley Chrismy, 10 ans, vit dans le petit bourg de Deslatres avec ses parents et ses quatre frères et sœurs. Sa vie évolue entre travail à la maison, aide dans les champs et travail à l’école. Elle fréquente l’école Saint Martin de Tours, l’un des cinq établissements scolaires reconstruits par Caritas Suisse en Haïti après le tremblement de terre de janvier 2010.
«
Je m’appelle Sherley Chrismy Pétion et j’ai 10 ans. Je vis à Deslatres avec mes parents, mes deux frères et mes deux sœurs. Très tôt le matin, je me lève avant tout le monde, je prépare le petit déjeuner avec ma sœur et je donne à manger aux porcs avant de me préparer pour l’école. Ma journée est plus longue que celle de mes
frères, parce que ma mère, mes sœurs et moi, nous nous occupons des tâches ménagères. Je fais chaque jour entre cinq et six kilomètres à pied pour aller à l’école. Quand c’est la saison des pluies, je vais à l’école à dos d’âne avec mes deux petites sœurs. Je suis en cinquième année fondamentale. L’école commence à huit heures du matin et se termine à une heure de l’après-midi. La journée de classe débute avec la montée du drapeau, suivie de la prière. Ces exercices se répètent tous les jours. Une fois arrivés en classe, nous démarrons les apprentissages. Tous les lundis, on commence la journée avec les mathématiques. Mes matières préférées sont la communication française et les sciences expérimentales. Notre école est un nouveau bâtiment qui a été reconstruit après le tremblement de terre. Il a été inauguré en
Les matières préférées de Sherley Chrismy sont la communication française et les sciences expérimentales.
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Texte : Vérène Morisod ; photos : Paolo Charles, Rafaëlle Castera
avril 2015 et compte aujourd’hui environ 450 élèves. Le premier jour de classe dans le nouveau bâtiment a été un peu particulier : on nous a fait faire le tour des nouveaux locaux et on nous a communiqué des consignes sur l’utilisation des toilettes. Les salles de classe sont grandes et bien aérées. Avant, les enfants devaient aller en classe sous des bâches et des tentes, à cause du tremblement de terre, ou dans des salles de la paroisse. Il faisait très chaud sous les tentes. Aujourd’hui c’est beaucoup mieux, mes camarades et moi, nous nous réjouissons des nouveautés. Par exemple, je n’ai pas toujours tous mes livres, mes camarades non plus. Mais cette année, nous avons pu avoir accès à tous
« Le premier jour dans le nouveau bâtiment a été un peu particulier. » les livres grâce à la location de manuels. Ce qui est nouveau aussi, ce sont les activités parascolaires. Ce sont mes moments de distraction. J’aime beaucoup les activités du club de santé et je rêve d’avoir d’autres activités. Après la journée de classe, je rentre à la maison. Une fois arrivées, ma sœur et moi, ou moi toute seule, nous allons chercher l’eau. Ma mère est cultivatrice et mon père est cultivateur et instituteur. Comme les autres enfants du bourg, mon frère et moi, nous aidons aux travaux des champs. Ici, on cultive des haricots et des tubercules. Les soirées sont toujours un peu pareilles et ma journée se termine vers 19 heures. ■
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Haïti : votre part d’un monde plus juste
Améliorer la gestion des écoles Lacunes de gestion, conditions de scolarisation précaires : le système scolaire haïtien fait face à de nombreux défis. Caritas Suisse apporte son aide pour renforcer les capacités institutionnelles des cinq écoles reconstruites après le séisme. Le but est d’introduire des outils de gestion et de les rendre opérationnels. Il s’agit également d’améliorer la qualification professionnelle des enseignants et les conditions d’apprentissage des élèves. Les écoles de Caritas devraient ainsi offrir le meilleur enseignement possible aux 2500 élèves qui les fréquentent. Bon à savoir : – Avec 100 francs, vous contribuez à l’installation d’infrastructures de bureau pour les directions des cinq écoles. – Une contribution de 50 francs permet de financer une partie du matériel didactique des enseignants. – Avec 20 francs, vous participez à l’acquisition de matériel pédagogique pour la planification de l’enseignement. ■ www.caritas.ch/enfants/haiti
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« Enfants » 2016 Caritas
Enfants à l’école ■ Ouganda
Dans la rue, le dang er guette
La Nwoya Girls Academy est pour beaucoup de filles du nord de l’Ouganda la seule chance d’obtenir une formation scolaire et professionnelle. L’éducatrice spécialisée Monica Oyet, responsable du projet, explique pourquoi cette école est si importante sur l’un des principaux axes de circulation en direction du Soudan du Sud.
Pour quelles raisons y a-t-il moins de filles que de garçons à l’école au nord de l’Ouganda ?
Les écoles publiques sont en principe ouvertes à tous les enfants. Le problème vient des parents. Ceux-ci privilégient les garçons quand il s’agit de payer les frais d’écolage. Beaucoup de filles sont astreintes à des travaux de jardinage et à la garde de leurs frères et sœurs cadets. Les parents ne voient pas l’utilité de les scolariser.
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Pourquoi beaucoup de filles quittent-elles l’école prématurément ?
C’est surtout au moment de la puberté que les filles décrochent pour éviter de devoir utiliser les mêmes latrines que les enseignants et les garçons. Les parents veulent marier leurs filles rapidement, dans bien des cas déjà à l’âge de 14 ou 16 ans. Les grossesses précoces sont fréquentes. Le fait que Nwoya se trouve sur l’un des principaux axes routiers en direction du Congo et du Soudan du Sud comporte un risque. Il y a beaucoup de passage. Les filles cherchent des hommes fortunés, dans l’espoir qu’ils subviennent à leur entretien ou même qu’ils les épousent. Mais ces hommes ne s’intéressent qu’au sexe. Ils profitent des filles, leur transmettent des maladies et les abandonnent. Beaucoup de filles doivent renoncer à l’école à cause d’une grossesse. Qu’est-ce que cela signifie pour elles ?
Au nord de l’Ouganda, aucune école publique n’autorise les jeunes femmes à venir aux cours avec leurs bébés. Texte : Stefan Gribi / Pia Käch ; photos : Joseph Kitsha Kyasi
Ouganda : votre part d’un monde plus juste
L’école est ouverte C’est pourquoi il y a beaucoup d’avortements illégaux. Certaines y laissent leur vie. D’autres sont contraintes de se marier, faute de quoi les jeunes mères et leurs enfants sont perçus comme une charge et chassés de la maison de leurs parents. La Nwoya Girls Academy permet aux jeunes mères de poursuivre leur carrière scolaire. Quelles perspectives d’avenir cela leur ouvre-t-il ?
L’école renforce la confiance en soi des filles et améliore considérablement leurs perspectives d’avenir. Les intéressées acquièrent le bagage nécessaire pour suivre une formation secondaire et apprendre un métier comme enseignante ou infirmière ou pour fonder leur petite entreprise de restauration ou de couture. Nos élèves en sont conscientes et en tirent une grande motivation. ■
La Nwoya Girls Academy a ouvert ses portes en février 2015. À moyen terme, près de 600 jeunes filles et jeunes mères auront ainsi accès à une formation de base et professionnelle. Il y a une école secondaire, une école professionnelle et une crèche où les enfants sont pris en charge toute la journée. Les mères peuvent ainsi emmener leurs enfants à l’école et loger à l’internat. Bon à savoir : – 200 jeunes filles ont déjà suivi l’école secondaire, et l’école professionnelle peut actuellement accueillir elle aussi 200 jeunes femmes. – Équiper une classe de livres de mathématiques et de cahiers d’exercices coûte l’équivalent de 250 francs. – L’achat de tableaux noirs se monte à 60 francs la pièce. ■ www.caritas.ch/enfants/ouganda
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« Po ur moi, c’es t la clé d u bo nheu r » Enfants à l’école ■ Bangladesh
Des T-shirts bon marché. Un travail dur. Un mauvais salaire. Les fabriques d’habits du Bangladesh sont connues pour cela. C’est là que travaillent les parents de Shifa, 5 ans, et Shetu, 3 ans. Leur mère explique que le bonheur pour elle est de savoir ses deux filles à la crèche soutenue par Caritas. Je m’appelle Shahida Begum et j’ai 23 ans. Je viens «d’une famille pauvre. Mon père était conducteur de rickshaw. Il gagnait peu et nous, les enfants, devions souvent aller nous coucher le ventre vide. J’avais 13 ans quand on m’a mariée à un conducteur de rickshaw. Un an plus tard, j’ai donné naissance à notre premier enfant qui n’a vécu que quelques jours. Peu après, mon mari Saïful et moi avons commencé à travailler dans une fabrique d’habits. Notre fille Shifa est venue au monde en 2010, suivie à peine deux ans plus tard par Shetu. Je suis alors restée à la maison pour m’occuper des enfants. Mais le revenu de Saïful ne nous suffisait plus pour vivre.
Nous avons sombré toujours plus dans la misère. Voici deux ans, mes filles ont été admises à la crèche de Caritas. J’étais si heureuse. Notre vie a changé. J’ai pu recommencer à travailler et gagne maintenant 67 francs par mois. Cet argent nous a permis de rembourser nos dettes. Pour moi, il est très important de savoir mes filles en de bonnes mains. À la crèche, elles sont stimulées et encadrées avec amour. Elles peuvent jouer et les plus grands apprennent même à lire. Le plus important est qu’elles deviennent des enfants conscientes de leur valeur et préparées au mieux pour l’école. ■
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Bangladesh: votre part d’un monde plus juste
Protéger les enfants des ouvriers Dans les familles pauvres du Bangladesh, les mères doivent travailler pour pouvoir nourrir leurs enfants. D’où la nécessité de les placer en un lieu sûr. Soutenues par Caritas, les crèches de l’organisation locale MATI proposent une prise en charge des enfants en âge préscolaire. Elles créent des conditions positives pour la formation et l’apprentissage et permettent ainsi aux familles de s’extraire durablement de la pauvreté.
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Bon à savoir : – Les parents paient 2,50 francs par mois pour une place dans une crèche. – Caritas aide l’organisation locale MATI à construire 4 crèches pour 80 enfants en âge préscolaire. – Un petit-déjeuner pour 20 enfants coûte 7,50 francs. – Nous formons du personnel spécialisé et sensibilisons les autorités et la population à la nécessité de mettre en place d’autres crèches. ■ www.caritas.ch/enfants/bangladesh
Texte : Jörg Arnold ; photo : Caritas Bangladesh
Enfants à l’école ■ Éthiopie
Le lo ng et dang ereux parcou rs de Birhan En Suisse, une élève de primaire effectue en moyenne un trajet de treize minutes pour se rendre à l’école. Pour la jeune Birhan Dorri, d’Irob en Éthiopie, ce serait un rêve. Cette fillette de 11 ans est en cinquième année à l’école Saint Jacob d’Adaga. Quand je vais à l’école, « je pars très tôt le matin. Parfois, il fait encore nuit. Notre ferme se trouve tout en bas de la vallée et je dois monter dans la montagne à deux heures de marche. Souvent, je chemine seule et j’ai un peu peur. Le sentier est Birhan, 11 ans, a déjà un trajet fatigant dans les jambes quand abrupt et caillouteux ; il y a des serpents et d’autres elle commence l’école. animaux dangereux. Les cours commencent à neuf heures. De temps en temps, j’arrive en retard, parce que le trajet est pénible et que j’ai faim et soif. Le pire, c’est quand il y a beaucoup de vent et que le soleil tape fort. Alors je me repose un peu sous un arbre. J’aime bien l’école et j’ai du plaisir à apprendre. Par exemple l’anglais ou les maths. Mais je suis souvent très fatiguée et j’ai de la peine à suivre. La maîtresse dit alors que je dois me réveiller si je veux passer les examens. Les cours durent jusqu’à 14 heures. Je suis toujours contente de redescendre à la maison. C’est plus facile que le trajet du matin. Et j’aime bien quand ma mère m’aperçoit en haut sur le sentier et qu’elle me fait un signe. ■
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Texte : Jörg Arnold ; photos : Caritas Adigrat
Éthiopie : votre part d’un monde plus juste
Qualité des écoles des campagnes En Éthiopie, Caritas soutient des écoles pour que les enfants des campagnes reçoivent une instruction malgré les longs trajets et le travail auquel ils sont astreints. Grâce à Caritas, ils sont chaque année 2560 à être scolarisés. Caritas promeut la qualité de l’enseignement, l’infrastructure des écoles et la scolarisation des filles pour éviter les mariages trop précoces. Bon à savoir : – Dans la province du Tigré au nord-est du pays, Caritas soutient trois écoles publiques pour un total d’environ 725 élèves. – Les parents d’élèves doivent payer en tout entre 160 à 230 birrs éthiopiens (entre 7,50 et 10,70 francs) par année scolaire et par enfant. Cette somme inclut les frais d’écolage, les cahiers et les crayons, ainsi que les contributions à l’infrastructure. – Avec 1150 francs, on peut équiper une école d’une petite bibliothèque. ■ www.caritas.ch/enfants/ethiopie
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Nicaragua : votre part d’un monde plus juste
Aller à l’école à côté du travail Limiter la durée du travail des enfants, éviter les travaux dangereux et garantir leur scolarisation : ce sont les objectifs des projets de Caritas à Posoltega, San Lucas et Managua. Le travail est nécessaire pour la survie des familles, mais les enfants doivent aussi bénéficier d’une instruction. Les parents et autres responsables de leur encadrement sont activement intégrés au projet.
Bon à savoir : – D’après une étude nationale, 118 000 enfants et adolescents du Nicaragua se trouvent dans une situation à risque à cause de leur travail. – Un nécessaire pour entrer à l’école coûte 8 francs. Il comprend un cahier, des crayons, des gommes et une équerre. – 700 enfants suivent les ateliers sur les droits de l’enfant et la protection du travail des enfants. ■ www.caritas.ch/enfants/nicaragua
Enfants à l’école ■ Nicaragua
Entre école et travai l Deymon Dilan Martínez est l’un des plus de 140 000 enfants contraints de travailler au Nicaragua. Le projet de Caritas lui garantit la possibilité d’aller à l’école et de vivre malgré tout une vraie enfance. Je m’appelle Deymon Dilan Martínez et j’ai 10 ans. « Je vis avec ma mère et mes cinq frères et sœurs. Deux oncles et ma grand-mère habitent aussi avec nous. Dans notre famille, presque tout le monde travaille comme vendeur de rue. Notre vie est dure, mais nous nous entraidons. Je me lève tous les matins à cinq heures et demie. Je commence par déjeuner et faire ma toilette. L’école commence à sept heures moins vingt. Ensuite, je vais au marché où je vends des bonbons et de l’eau. À deux heures, mon frère prend la relève. Je vais alors au projet pour les enfants qui travaillent. C’est l’un de mes grands frères qui m’y a amené. Là-bas, on apprend à connaître nos droits, on peut faire nos devoirs, bricoler et on reçoit surtout des affaires d’école qu’on ne pourrait pas s’offrir autrement. J’aime beaucoup apprendre et je me donne beaucoup de peine pour les devoirs. En fin d’après-midi, je retourne travailler au marché. Les soirées, je les passe avec mes frères et sœurs et amis. Nous nous amusons bien ensemble surtout quand nous jouons au loup. Malheureusement, je ne peux pas courir longtemps, parce que j’ai vite mal aux os. Ma mère n’a pas pu se nourrir sainement quand j’étais dans son ventre ; elle a dû travailler dur, parce que mon père nous
avait quittés. Elle dit que ça a été une grossesse difficile et que c’est pour ça que j’ai maintenant les os malades. La mort de mon frère aîné m’a beaucoup attristé. Il a eu un accident et il est tombé dans le fleuve. Il a encore réussi à rentrer à la maison, mais ensuite, il a eu très mal et ne pouvait plus bouger. Il est mort à l’hôpital le 10 décembre 2014. Mon frère était pour moi comme le père que je n’ai jamais eu. Il m’aidait à faire mes devoirs, ramenait du bois à la maison et nous donnait à manger. Je suis resté toute la nuit à côté de son cercueil, la douleur était indescriptible. Ce qu’il y a de plus beau dans ma vie, c’est les fêtes, quand nous célébrons Noël ou mon anniversaire en famille. Nous ne pouvons pas nous faire de cadeaux, mais nous passons de bons moments ensemble, nous sommes joyeux et nous mangeons du poulet frit. ■
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À 10 ans, Deymon a déjà connu de durs coups du sort, mais reçoit aussi beaucoup d’affection au sein de sa famille. Texte : Dominique Schärer ; photo : Antonio Aragón Renuncio
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« No us devo ns prendre so in de s enfants »
Pour Bernadette Schürmann, le parrainage d’enfants est un moyen de compléter son propre travail créatif avec les jeunes. Professeure de musique et de théâtre, réalisatrice et kinésiologue : Bernadette Schürmann, 57 ans, cumule plusieurs métiers avec beaucoup de conviction et d’énergie. Le travail créatif avec les enfants a toujours été au centre de sa vie professionnelle. « Par leur esprit ludique et leur imagination, mais aussi par leur vulnérabilité, les enfants me sont proches », déclare-t-elle dans son appartement lumineux de la vieille ville de Sursee. « Contrairement à nous qui sommes axés sur la performance, les enfants ne
« Les histoires aident à comprendre le monde. » sont pas sans arrêt à la poursuite d’un but. » Son travail de professeure de théâtre permet une approche ludique. « Les histoires aident à comprendre le monde. Au théâtre, les enfants peuvent surmonter des expériences, tester de nouvelles choses et apprendre à se mettre à la place des autres. » Il s’agit toujours de s’unir autour d’un projet commun : « Chacun, du technicien à la couturière, participe à la réussite. » Et de ne pas oublier que « le théâtre, c’est simplement du plaisir. »
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Caritas comme « exécutante »
Dans son travail, Bernadette Schürmann s’attache à transmettre des valeurs comme le respect, la solidarité et l’empathie. « Je suis convaincue qu’un enfant peut mieux développer ces valeurs si on les lui témoigne », affirme-t-elle en connaissance de cause, puisqu’elle a elle-même deux fils adultes. « Nous devons prendre soin des enfants, car ils sont notre avenir. » Raison pour laquelle Bernadette Schürmann parraine des projets de formation de Caritas. « Avec mon travail, je ne peux pas directement contribuer à la satisfaction de besoins aussi primordiaux que la nourriture, la sécurité ou la formation pour les enfants défavorisés. C’est pourquoi je m’engage sous la forme d’un parrainage. » Bernadette Schürmann attend de Caritas que celle-ci partage ses valeurs et les défende avec professionnalisme en tant qu’« exécutante ». C’est le départ de son fils aîné qui l’a décidée à parrainer le projet de formation : « Je me suis dit que le moment était venu d’aider à nouveau des enfants plus petits. » ■
Texte : Dominique Schärer ; photo : Markus Forte / Ex-Press
Enfants des rues ■ Brésil
Ad ieu la décharge Juliano, 10 ans, collectait auparavant des déchets sur la décharge de Palmeira dos Índios avec sa mère et ses frères et sœurs. Sa vie s’est améliorée grâce à Caritas.
« Nos conditions de vie sont très difficiles. Mon père n’a pas de travail fixe et ma mère ne gagne que quelques centimes par jour en collectant des déchets », explique Juliano. Ce garçon de 10 ans vit avec ses parents et ses six frères et sœurs à Lagoa Nova, un village de la banlieue de Palmeira dos Índios au nord-est du Brésil. « Avant, j’accom pagnais souvent ma mère à la décharge. J’y ai rencontré un enseignant qui m’a une fois invité au projet de Caritas PIAJ. Ça a complètement changé ma vie », témoigne fièrement le garçon. « Chez Caritas, Aujourd’hui, Juliano, 10 ans, j’ai appris à lire et qu’il connaît mieux ses droits. n’est pas sain pour les enfants de travailler à la décharge. Aujourd’hui, je suis en troisième. Mon grand rêve, c’est de devenir policier. » À Lagoa Nova, les familles vivent de la collecte de déchets et du peu qu’elles récoltent dans leurs jardins. Les enfants aident à chercher des déchets récupérables et contribuent ainsi à l’entretien de leur famille. Ils n’ont pas le temps de jouer, beaucoup interrompent leur scolarité. Ces enfants n’ont pas de perspectives d’avenir. Leur quotidien est marqué par la violence et la drogue. Caritas leur donne la chance de connaître une vie meilleure. ■
Texte : Katja Remane ; photos : PIAJ, Suane Melo Barreirinhas
Brésil: votre part d’un monde plus juste
Éviter aux enfants de finir à la rue Le programme PIAJ (Programa Infância, Adolescência e Juventude) de Caritas aide les enfants et adolescents pauvres du nord-est du Brésil à briser le cercle vicieux de la pauvreté et leur évite de finir à la rue. Dans les ateliers, les jeunes apprennent à connaître et à revendiquer leurs droits. En 2014, le programme a permis de réduire de 55 à 15 % la proportion d’enfants qui collectent des déchets. Bon à savoir : – Le programme PIAJ de Caritas soutient actuel lement 403 enfants et adolescents âgés de 7 à 14 ans (206 filles et 197 garçons) dans trois communautés du nord-est du Brésil. – Un repas coûte 1 franc par enfant. – Le matériel scolaire pour un atelier destiné à 50 enfants coûte 15 francs. ■ www.caritas.ch/enfants/bresil
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Bolivie : votre part d’un monde plus juste
Un refuge pour les enfants des rues Comme la problématique des enfants des rues s’est déplacée du centre de La Paz à El Alto, la ville satellite, Caritas collabore désormais avec l’organisation ENDA (Environment and Development in Action). Celle-ci héberge temporairement les enfants des rues et les filles victimes de violence dans deux centres. Elle place les enfants et les jeunes particulièrement menacés dans des écoles, propose des ateliers de sensibilisation aux parents et réalise des programmes de formation professionnelle. Bon à savoir : – 54 % de la population d’El Alto sont des jeunes de moins de 25 ans. – Les deux centres prennent en charge 250 enfants des rues et filles victimes de violence par année. – Avec 30 francs, on peut acheter un petit-déjeuner pour 30 enfants dans l’un des centres. ■ www.caritas.ch/enfants/bolivie-rue
Enfants des rues ■ Bolivie
Shanny trouve un no uveau so utie n Dans son enfance, Shanny, 14 ans, était battue par son père. Elle a fui dans la rue – pour se retrouver dans l’impasse.
« C’est ma mère qui m’a amenée ici pour que j’aie une chance de changer », a expliqué Shanny, 14 ans, en février de l’an dernier, quand elle est arrivée au centre pour les enfants des rues de l’organisation ENDA (Environment and Development in Action), partenaire de Caritas. « J’aimerais bien arrêter les drogues. J’espère que ce n’est pas trop tard. » Shanny était battue par son père dès sa plus tendre enfance : quand elle ne voulait pas manger ou qu’elle n’obéissait pas. Quand elle est entrée à l’école, son père attendait d’elle d’excellents résultats. À la moindre faute, il la rouait de coups avec tout ce qui lui tombait sous la main. Chaque soir, Shanny redoutait le retour du père, le contrôle sévère des devoirs et l’inévitable punition. Sa mère, elle aussi victime de violence domestique, ne pouvait pas la protéger.
mise à boire pour oublier la situation à la maison. Peu après, elle passait toute la journée dehors, à traîner dans la rue, à consommer des drogues et à se faire entretenir par des hommes plus âgés. Elle s’est jointe à une bande de jeunes qui la protégeaient de la famille, mais faisait à nouveau régner la violence. Malgré les coups, les viols et le harcèlement, Shanny n’a pas réussi à se détacher du groupe ; elle s’est enfuie chaque fois que sa mère a tenté de la ramener à la maison. Enfin de l’aide
La mère de Shanny a fini par demander conseil au tribunal des mineurs. L’adolescente a été amenée au centre pour les enfants des rues et y a enfin trouvé l’aide dont elle avait tant besoin : un toit sûr et des repas chauds, un sevrage de drogues et d’alcool, une thérapie et des journées bien structurées. Au bout de quelques mois, on lui a proposé de retourner dans sa famille, mais Shanny a refusé : « J’ai peur que mes amis m’entraînent de nouveau dans la rue. Ici, je me sens bien et j’ai repris l’école. » ■
La descente aux enfers
Quand Shanny a eu 7 ans, sa mère a fui le domicile avec les trois enfants et entretenu la famille avec la vente de beignets préparés par ses soins. Elle n’a pas tardé à faire la connaissance d’un autre homme. Shanny ne s’est pas entendue avec lui, ce qui a dégradé la relation avec sa mère. Lorsque son père biologique est mort dans un accident en 2014, elle a définitivement perdu la maîtrise de sa vie. Dès l’âge de 12 ans, elle a commencé à passer la nuit dans des discothèques avec d’autres jeunes et s’est
Grâce à sa grande volonté et au soutien du centre pour les enfants des rues, Shanny reprend pied. Texte : Dominique Schärer ; photo : Jules Tusseau
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Enfants des rues ■ Rwanda
« Dans la rue, il n’y a pa s de vie » Encore enfants ou déjà adultes, ils ont tous connu la rue à Kigali. Ils ont repris leur scolarité avec l’aide des trois centres Abada cogora-Intwari. Ils racontent leur histoire.
Réinsertion à l’école
« Je suis arrivé dans la rue à 11 ans, car ma mère ne pouvait plus nous aider et nous avions une vie très malheureuse. Je ramassais dans les poubelles des s an 13 , bouteilles en plastique et Paul* je les revendais. Le centre m’a beaucoup aidé, j’ai quitté la rue cette année et je fais des cours d’alphabétisation pour être réinséré à l’école. Nous vivons avec un peu d’argent que ma mère gagne. »
Nouvelle vie
« Je suis contente, car ma vie a changé, je ne savais pas que je pourrais regagner l’école. J’avais quitté l’école à l’âge de 10 ans, car les enseignants ne recevaient pas un salaire Jeannette *, 13 ans suffisant. Je restais alors dans la rue toute la journée, je ramassais des déchets et je les revendais à bas prix. J’aidais ma mère à trouver de la nourriture et à payer le loyer de la maison. Grâce à Caritas, j’ai pu quitter la rue, je suis aujourd’hui en 3e primaire et j’aime bien étudier. Mais la situation reste difficile, car ma mère est malade, mon père est décédé et nous sommes six frères et sœurs. »
Reconnaissance de la société
Études d’infirmière
« J’avais dû suspendre mes études parce que je ne pouvais pas payer les frais de scolarité. J’ai alors vécu du commerce de légumes. Une animatrice m’a renDiane *, 25 ans contrée au marché et m’a invitée au centre Abadacogora-Intwari. J’ai pu reprendre ma scolarité et aujourd’hui, j’étudie à l’Université pour devenir infirmière. Le centre est une deuxième famille pour moi et aujourd’hui, il finance mes études. »
18 Caritas « Enfants » 2016
« J’ai grandi dans un village du sud du pays. Un jour, ma grand-mère m’a envoyé auprès de ma mère partie en ville. Mais comme ma mère ne parvenait pas à me nourrir, j’ai dû mendier. Un jour, un animateur m’a invité au centre et j’ai repris ma scolarité. J’étudie aujourd’hui l’agronomie à l’Université. Je souhaite aider la population rwandaise à améliorer sa sécurité alimentaire. Antoine *, 27 ans Ma joie, c’est d’être considéré dans la société et de faire des études universitaires. Un tel parcours n’est pas facile pour un enfant des rues. »
Texte : Vérène Morisod ; photos : Joseph Kitsha Kyasi
Futur incertain
« Je me suis retrouvé dans la rue avec mon frère après avoir abandonné l’école quand j’étais en 4e primaire. Il y avait de gros problèmes à la maison, mon père buvait. Je travaillais en revendant des morceaux de bois que je ramassais et je mendiais. C’est comme ça que j’ai rencontré d’autres enfants qui fréquentaient le centre. Là, j’ai reçu de l’aide et en 2014, j’ai repris l’école. J’aimerais devenir électricien, mais le futur est incertain. La vie est devenue de plus en plus difficile : notre père nous a abandonnés, notre maman est allée se remarier, et mon petit frère et moi nous vivons seuls en ce moment. J’essaie de trouver de l’argent pour payer le loyer en travaillant après l’école. Mais si je n’arrive pas à payer le loyer, je ne sais pas si je vais retourner dans la rue. Je vais voir comment je peux aider mon frère, parce que dans la rue, il n’y a pas de vie. Ce que Julien*, 17 ans j’aime, c’est jouer au football et je rêve de devenir un grand footballeur comme Cristiano Ronaldo. »
Diplôme avec distinction
« J’étais dans la rue, je vendais des déchets ramassés au marché de Nyabugogo Jeanne *, 23 ans et Kimisagara. C’est comme ça que je nourrissais ma famille, je vivais avec ma sœur et mon petit frère, ma grand-mère qui a des problèmes psychiques et ma mère qui est alcoolique. Grâce au projet, j’ai pu reprendre l’école. Aujourd’hui encore, c’est moi et mon frère qui nous débrouillons pour trouver de la nourriture, je gagne un peu d’argent pendant les vacances. Mon frère est devenu footballeur et gagne un petit montant. En 2014, j’ai terminé l’école secondaire, j’ai obtenu un diplôme avec distinction. L’État m’a offert une bourse qui me permet de continuer mes études à l’Université Nationale du Rwanda. »
Rwanda : votre part d’un monde plus juste
Réintégration dans la société Le projet d’enfants des rues soutenu par Caritas, Abadacogora-Intwari (« les courageux et les héros »), travaille dans trois centres qui s’occupent d’environ 500 enfants et jeunes de 6 à 15 ans. Les enfants reçoivent une prise en charge médicale et des conseils. Ils mangent et jouent dans un environnement sûr et prennent part aux activités de loisir. Le projet intègre les enfants dans les écoles et fournit aux jeunes des apprentissages dans des entreprises.
* Les prénoms ont été modifiés
Bon à savoir : – Avec 130 francs, vous financez durant une année le repas de midi d’un enfant dans l’un des trois centres. – L’assurance maladie d’un enfant coûte 4 francs par an. – Les frais de scolarité s’élèvent à 17,50 francs par année et par enfant au niveau primaire. ■ www.caritas.ch/enfants/rwanda
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« Enfants » 2016 Caritas
« Le s enfants ont be so in de fo rce et de jo ie de vivre »
Ellen Ringier s’engage depuis des années pour que le droit à un développement sain devienne une réalité pour tous les enfants. Ellen Ringier, de quoi les enfants ont-ils besoin pour pouvoir grandir en bonne santé ?
Cette question appelle en principe une réponse toute simple : les enfants ont besoin de force et de joie de vivre. Ce sont les principales compétences nécessaires pour un développement sain. Et quelles sont les principales conditions pour y parvenir ?
Il faudrait compléter les droits des enfants par un article intitulé « sécurité émotionnelle et affection ». Car un enfant ne développe de la confiance en soi et le sentiment de sa propre valeur que quand il se sent en sécurité sur le plan émotionnel et qu’il reçoit de l’affection. Il doit prendre confiance en ses propres capacités et pouvoir ensuite développer ses talents de son propre chef. Quelle valeur a selon vous la formation et qu’est-ce qu’une bonne formation ?
La formation est la clé d’une vie responsable et dotée de sens ! Et une bonne formation va chercher les élèves là où ils en sont. L’école est clairement limitée pour ce qui est de l’encadrement individuel. Chaque enfant est pourtant un individu ; le changement de cap de l’école vers 20 Caritas « Enfants » 2016
une promotion des forces de chaque enfant représente certainement un important pas en avant. C’est bien préférable que d’insister sur les lacunes, car cela favorise la confiance en soi. En tant que présidente de la fondation qui édite le magazine pour les parents « Fritz+Fränzi », vous vous engagez concrètement pour la promotion de la compétence parentale dans les questions d’éducation. Pourquoi y tenez-vous particulièrement ?
Je suis d’avis que, de nos jours, les parents arrivent souvent aux limites de leurs possibilités éducatives. Par exemple, quelle attitude avoir face à des jeunes dépendants des drogues ou d’Internet ? Comment réagir en cas
« Les droits des enfants devraient être complétés par un article intitulé ‹ sécurité émotionnelle et affection ›. » d’absentéisme ou de décrochage scolaire ? Que faire quand des enfants se fourvoient dans des troubles alimentaires ou d’autres troubles psychiques graves ? Ou encore en cas de mobbing ou de violence à l’école et à la maison ? Notre magazine veut apporter une contribution Texte : Jörg Arnold ; photo : Sandro Bäbler / Ex-Press
à la gestion des problèmes éducatifs de plus en plus nombreux et de plus en plus graves. Nous voulons aussi sensibiliser le public à cette réalité. De quelles conditions-cadres les parents ont-ils besoin pour pouvoir bien élever leurs enfants ?
Dans notre pays, on pourrait en faire beaucoup, beaucoup plus (et plus rapidement) pour rendre la famille plus compatible avec la vie professionnelle. La timidité avec laquelle on tente d’institutionnaliser l’école publique à plein temps avec des devoirs surveillés m’exaspère. Faut-il vraiment chaque fois réinventer la roue ? Toute la société doit être derrière la famille en tant qu’institution à protéger et à soutenir. Si c’était le cas chez nous, plus d’une famille ne serait pas tombée dans la pauvreté !
Par bonheur, les enfants suisses n’ont pas besoin d’être protégés contre la guerre. Ils ne sont pas des centaines de milliers à vivre dans la rue sans installations ludiques, sportives ou éducatives. Dans les pays en développement, les enfants souffrant de traumatismes, de handicaps ou de maladies ne bénéficient pas comme chez nous d’une aide dans les meilleures institutions. Mais il y a une chose à ne pas oublier : où qu’ils vivent, les enfants ont droit à une protection, à la sécurité et à l’affection. La force de vie et la joie de vivre sont toujours les fondements d’une bonne existence. ■
Ellen Ringier
Juriste de formation, elle est née à Lucerne en 1951. Épouse de l’éditeur Michael Ringier, elle s’engage dans de nombreuses organisations sociales et caritatives. Il y a quinze ans, elle a participé
Y a-t-il des différences entre les besoins des enfants en Suisse et dans les pays en développement ?
à la création du magazine pour parents suisses « Fritz+Fränzi ».
Je pense qu’il est inadmissible de comparer la situation des enfants en Suisse et dans les pays en développement.
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« Enfants » 2016 Caritas
Force de vie ■ Tadjikistan
De s co urs po ur enfants d iffére nts Les enfants handicapés doivent pouvoir aller à l’école. Au Tadjikistan, ce n’est possible que s’ils sont intégrés à l’école ordinaire. Mais il faut un soutien et des soins spéciaux. Grâce aux marraines et parrains de Caritas, Zamira, 12 ans, peut maintenant déployer son potentiel à l’école.
était débordée. Pour les parents, le monde s’est écroulé. « Nous étions tellement tristes en songeant à son avenir et avions perdu tout espoir », se souvient la mère. Dès lors, ils ont instruit leur fille à domicile, mais tous deux tenaient à son intégration. Ils voulaient que leur enfant puisse apprendre avec d’autres. De bonnes chances d’avenir
Zamira, 12 ans, est entièrement plongée dans le jeu avec sa poupée. Elle la berce en chantonnant. Comme n’importe quel enfant partout dans le monde. Pourtant le jeu de Zamira a quelque chose de spécial : ses mouvements sont incontrôlés, ses mains molles et la chanson difficilement compréhensible. Zamira souffre d’une paralysie cérébrale. Zamira est entourée de ses parents. « Ses camarades de classe l’apprécient beaucoup », déclare la mère. Son visage s’éclaire d’un sourire ; on sent de la fierté dans sa voix : « Nous avons souvent de la visite à la maison. Il se passe vraiment quelque chose. » Pratiquement plus d’espoir
« Mais ça n’a pas toujours été le cas », précise le père. À l’âge de 7 ans, Zamira devait entrer à l’école. Les parents ont cherché un établissement approprié, mais c’était peine perdue. Impossible de trouver des institutions spécialisées pour enfants handicapés au Tadjikistan. La pauvreté est grande et l’éducation a fait les frais des mesures d’économie. La tentative de placer Zamira dans une école ordinaire a échoué au bout de quatre mois. L’école 22 Caritas « Enfants » 2016
En 2013, ils ont entendu parler du projet de Caritas qui intègre les enfants handicapés à l’école ordinaire. L’espoir a ressurgi et ils y ont inscrit leur fille. D’abord juste pour quelques heures par semaine, mais grâce aux progrès qu’elle a faits, Zamira a rapidement pu passer toute la journée à l’école. Spécialistes, enseignants et parents lui ont préparé un plan d’étude individuel, adapté à ses besoins. Tous considèrent l’avenir de Zamira d’un œil positif : « Elle est maintenant en mesure de terminer l’école et d’apprendre un métier. Un métier qu’elle aime », assure le père. Pour Zamira, les choses sont déjà claires : « J’aimerais devenir couturière », déclare-t-elle en riant. « Le rire est revenu à la maison », constate la mère qui ajoute : « Zamira aime l’école. Tous les matins, elle quitte la maison le sourire aux lèvres. » ■
Tous les matins, Zamira est heureuse de se rendre à l’école. Texte : Ulrike Seifart ; photo : Vladimir Umarov
Tadjikistan: votre part d’un monde plus juste
Intégration des enfants handicapés La promotion des enfants handicapés est au cœur de ce projet. Elle se fait notamment au jardin d’enfants et à l’école. Des plans d’études individuels, des mesures de promotion avec des psychologues, des logopédistes et des ergothérapeutes, l’implication des parents et des activités communes avec des enfants non handicapés contribuent à la réussite du projet.
Bon à savoir : – 5 écoles et 4 jardins d’enfants intègrent des enfants handicapés d’après le modèle de Caritas. – Depuis 2009, plus de 200 enfants handicapés ont pu être intégrés à l’école ordinaire. – 91 enseignants ont reçu une formation méthodologique et didactique. – Avec 40 francs, on peut proposer aux parents un cours sur les besoins spécifiques de leurs enfants. ■ www.caritas.ch/enfants/tadjikistan
Force de vie ■ Cuba
Daniel n’es t pa s seul Daniel est un petit garçon autiste de 5 ans. Effrayé par le monde qui l’entoure, il a de la peine à entrer en contact avec son entourage. Depuis que la famille fréquente un projet de promotion précoce de Caritas, son état s’est considérablement amélioré.
Les premiers signes d’autisme sont apparus à l’âge de 2 ans : Daniel ne progressait pas dans l’acquisition du langage, répétait mécaniquement certains mouvements et s’intéressait presque exclusivement aux objets, mais pas aux gens. Daniel n’était pas le seul à se sentir isolé et livré à lui-même avec son handicap : c’était aussi le cas de ses parents. « Nous ne savions pas pourquoi Daniel se comportait de façon si étrange, pourquoi il n’arrivait pas à se concentrer, d’où venait son hyperactivité, ni comment nous y prendre avec lui », explique sa mère Lilian Mendieta. « Nous ne sortions presque jamais en famille par peur des accès de colère irrépressibles de Daniel dès que quelque chose ne lui convenait pas ou qu’il avait peur. »
24 Caritas « Enfants » 2016
Garderies et école des parents
Tout ceci s’est amélioré depuis que la famille a trouvé du soutien au projet de Caritas pour les enfants handicapés : les familles concernées sont accompagnées dans la gestion de leur quotidien et apprennent à s’adapter aux besoins spéciaux de leurs enfants. Dans les garderies, les enfants profitent ainsi de psychothérapies et d’art-thérapies (peinture, danse), pendant l’école des parents. Des excursions communes à la plage ou au zoo donnent confiance aux familles et les encouragent à participer à la vie sociale malgré le handicap de leur enfant. Car la
« Nous formons une meilleure équipe qu’avant. » situation économique difficile de Cuba se répercute tout particulièrement sur les familles socialement défavorisées avec enfants handicapés. On ne trouve du matériel pédagogique qu’à des prix exorbitants et les écoles manquent de personnel qualifié. Caritas Cuba comble cette lacune avec ses offres de promotion précoce. Les enfants handicapés de familles pauvres doivent aussi pouvoir déployer leur potentiel.
Texte : Dominique Schärer ; photos : DR, Pia Zanetti
Meilleure cohésion au sein de la famille
« Depuis que nous participons au projet, nous savons à quel point nous comptons tous pour Daniel, même s’il ne peut pas nous le dire. Nous organisons notre quotidien et sommes moins stressés », assure Lilian Mendieta. Bien sûr, elle doit encore aider Daniel dans presque toutes les activités telles que manger, s’habiller ou bricoler – mais aujourd’hui, elle sait comment s’y prendre au mieux. Le matin par exemple, Daniel peut s’appuyer sur des photos pour savoir tout ce qu’il a à faire à la salle de bain. « Nous formons une meilleure équipe qu’avant », explique sa maman. Et d’ajouter que son fils est moins isolé, qu’il a une meilleure relation avec ses parents. Désormais, il réclame de lui-même une étreinte ou un baiser quand il a fait quelque chose de bien. Daniel aime écouter de la musique, s’asseoir sur la balançoire ou s’occuper avec tout ce qui est en papier. Il est très proche de son frère David. Souvent, c’est David qui le prend par la main et qui l’invite à jouer. Daniel accepte avec plaisir. « Je crois qu’il est heureux maintenant. Nous sommes tous si contents qu’il puisse profiter de la promotion ciblée au cœur du projet de Caritas », assure sa mère. ■
Aujourd’hui, la famille est plus unie et a plus confiance en elle-même : quelques étapes de la vie de Daniel et de son frère
Cuba : votre part d’un monde plus juste
Promouvoir les enfants handi capés dès leur plus jeune âge À Cuba, Caritas soutient la promotion précoce des enfants handicapés. Les parents apprennent à accompagner au mieux leurs enfants au quotidien. Des garderies spéciales proposent des cours de peinture, de danse et de physiothérapie, ainsi qu’un accompagnement psychologique et médical. D’innombrables bénévoles soutiennent le projet, dont de nombreux spécialistes. Bon à savoir : – Le projet touche 290 enfants et adolescents, ainsi que 425 proches. – Avec une vingtaine de francs, on peut financer 20 boîtes de crayons de couleur. – Un atelier pour 25 familles coûte environ 40 francs, y compris le matériel de bricolage et un petit en-cas. ■ www.caritas.ch/enfants/cuba
jumeau David.
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« Enfants » 2016 Caritas
Force de vie ■ Philippines
Protég er le s enfants co ntre le s enlèvem ents Regner, 11 ans, a appris tôt quels sont ses droits. Maintenant, les voisins observent aussi de plus près ce qui se passe dans le quartier.
aux autres parents comment protéger leurs enfants contre les abus. » L’information protège
La traite des êtres humains prospère sur le terreau de la pauvreté. Notamment aux Philippines, où des enfants contraints de contribuer au revenu familial tombent souvent entre les mains de trafiquants. Les enfants des régions pauvres de la campagne sont particulièrement menacés. Leurs parents migrent dans les villes et les enfants attirés par de fausses promesses sont réduits en esclavage ou contraints de se prostituer. L’association TSACMI, partenaire de Caritas, a commencé à lutter contre le travail des mineurs et la traite des enfants dans huit agglomérations de la région de Cebu. Des réseaux de voisins se constituent, afin de signaler les agissements suspects aux autorités. Ils sont dirigés par des habitants formés à cet effet, comme par exemple Vilma Alcantara, mère de dix enfants : « La formation m’a beaucoup apporté », assure-t-elle. « Maintenant, je peux assumer ma responsabilité et montrer
Dans les écoles, les enfants sont informés de leurs droits et se confrontent au thème de la traite des êtres humains par la peinture, l’écriture et toute forme d’expression artistique. Regner, un des fils de Vilma, y a également participé : « Avec le cours de dessin, j’ai réalisé un rêve », affirme le garçon de 11 ans, et sa mère ajoute : « J’aimerais aussi permettre ça à mes autres enfants. » Car elle sait maintenant que la formation et l’information protègent les enfants contre les abus et l’esclavage. ■
Philippines: votre part d’un monde plus juste
Stop à la traite des enfants À côté de l’association TSACMI, un autre projet de parrainages est actif aux Philippines. L’organisation FORGE, partenaire de Caritas, agit aussi contre la traite des enfants. Elle apprend aux collaborateurs des entreprises de transport et de tourisme à la reconnaître et à signaler les cas. Il s’agit d’empêcher les enlèvements d’enfants dans d’autres régions.
26 Caritas « Enfants » 2016
Bon à savoir : – Par ses mesures, l’association TSACMI atteint 360 enfants dans huit agglomérations. – Avec 50 francs, l’association TSACMI peut sensibiliser 40 enfants à leurs droits dans un atelier. – Une formation sur les droits des enfants et la traite des êtres humains dispensée par l’organisation FORGE coûte 3000 francs pour 300 collaborateurs du secteur des transports et du tourisme. ■ www.caritas.ch/enfants/philippines
Texte : Ulrike Seifart ; photo : TSACMI
Force de vie ■ Bolivie
Gabriel en sécu ri té Le petit Gabriel a été abandonné par ses parents dès sa naissance. Grâce au soutien de Caritas, il a trouvé un nouveau foyer.
Gabriel a maintenant 3 ans. Il a eu un début difficile dans la vie. Peu après sa naissance, ses parents ne sont simplement plus réapparus à l’hôpital. Avec l’aide de l’organisation Infante, partenaire de Caritas, il a été possible de lui trouver une famille d’accueil. Mais deux jours plus tard, celle-ci a dû ramener le nouveau-né à l’hôpital, car il ne respirait pas correctement. Grâce à la famille d’acAbandonné par ses parents, cueil, Gabriel a rapideGabriel, 3 ans, a trouvé une ment reçu l’assistance nouvelle famille. médicale qui lui a sauvé la vie. Malgré un rétrécissement congénital des voies respiratoires, le nourrisson s’est rétabli et a pu, contre toute attente, retourner dans sa famille d’accueil. De la chance dans son malheur
De son côté, l’organisation Infante, partenaire de Caritas, a tenté en vain d’inciter les parents biologiques de Gabriel à reprendre leur enfant. Le père est alcoolique et la mère rejette toute responsabilité. C’est pourquoi il a fallu trouver une famille adoptive : depuis août, Gabriel a des nouveaux parents et une sœur. C’est notamment grâce à l’accompagnement adéquat des spécialistes d’Infante qu’il s’est bien intégré dans sa nouvelle famille. ■
Texte : Dominique Schärer ; photos : DR, Infante
Bolivie : votre part d’un monde plus juste
Des familles pour les enfants abandonnés Troisième plus grande ville de Bolivie, Cochabamba a connu une croissance fulgurante ces dernières années. La pauvreté aussi. L’organisation Infante, partenaire de Caritas, veille à ce que les enfants abandonnés et exposés à divers dangers puissent grandir en sécurité. Elle informe aussi les enfants, les adultes et les fonctionnaires de l’importance des droits des enfants. Bon à savoir : – Environ 300 fonctionnaires par année sont formés sur les droits des enfants. – Chaque année, 80 enfants sont placés dans des familles d’accueil. – Un nécessaire pour bébé (langes, biberons, lait) coûte environ 250 francs par mois. ■ www.caritas.ch/enfants/bolivie-force
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« Enfants » 2016 Caritas
Force de vie ■ Palestine
Guérir le s enfants de la tr is te sse Après trois offensives militaires en sept ans, la bande de Gaza est presque entièrement détruite. Triste résultat: plus de la moitié des enfants sont si blessés moralement qu’ils ont besoin de soutien.
Ahmed, 12 ans, a soif de connaissances. Anglais ou mathématiques, il aimerait tout apprendre. Ses frères et sœur cadets doivent eux aussi tirer profit de ses dons et connaissances. Avec des capuchons de bouteilles en plastique, Ahmed leur enseigne le calcul ; des compétences qu’il a acquises au centre d’apprentissage de l’organisation Youth Enhancement Center (YEC), partenaire de Caritas. « Ce qui me plaît ici, c’est que les cours sont fa-
ciles et qu’on s’amuse bien », déclare le garçon en montrant fièrement les avions qu’il a bricolés avec beaucoup de soin. Beaucoup d’attention requise
« Ahmed est un garçon fort et résistant qui a appris à s’occuper de lui-même », constate Beatrice Rutishauser, experte de la pédagogie d’urgence chez Caritas Suisse. Quand elle l’a rencontré au centre de l’organisation YEC et qu’elle lui a demandé combien il avait de frères et sœurs, Ahmed n’a toutefois pu retenir ses larmes. « Son frère est mort quand leur maison a été attaquée ; il m’a demandé s’il fallait aussi le compter », explique Beatrice Rutishauser. « Même les enfants forts ont besoin de beaucoup d’attention, car ils portent aussi beaucoup de
Le bricolage aide Ahmed à faire son deuil. Ce garçon de 12 ans construit des avions avec des bouteilles en plastique et enseigne le calcul à ses frères et sœurs avec des capuchons.
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Texte : Stefan Gribi ; photos : YEC
chagrin au fond de leur cœur », assure la pédagogue. Les activités créatives encouragées au centre de l’organisation YEC aident Ahmed à faire son deuil. Si le garçon se débrouille bien à l’école, la plupart des enfants du centre ont énormément de peine. Les écoles tentent d’inculquer un maximum de choses aux élèves, malgré la violence et la destruction qui sévissent tout autour. L’intention est bonne, mais c’est peu utile. « Dans les régions dévastées par la guerre, on voit partout des enfants transporter leurs livres et leurs cahiers dans de lourds sacs à dos. Ils sont complètement dépassés par l’ampleur de la matière à traiter. Les enfants traumatisés sont beaucoup moins réceptifs », relève Beatrice Rutis hauser. Travail manuel
La petite Rawan a par exemple beaucoup de peine avec les fractions : « Je n’arrive pas à me les représenter et j’oublie vite comment ça marche », déplore la fillette de
« Même les enfants forts ont besoin d’attention, car ils portent eux aussi beaucoup de chagrin au fond de leur cœur. » 10 ans. Au centre de l’organisation YEC, elle les a notées et peut maintenant y recourir quand elle en a besoin. Le travail manuel lui fait aussi du bien. Avec ses nouvelles copines, elle coud des poupées au centre. « J’aime bien venir ici », déclare Rawan, rayonnante. Beaucoup d’enfants contribuent au revenu familial par un travail. La charge qui pèse sur leurs épaules est énorme. Les parents, eux-mêmes traumatisés, ne peuvent pas aider leurs enfants. Souvent, les enfants se présentent d’eux-mêmes à l’organisation YEC et demandent s’ils peuvent y passer leur temps libre. Les portes sont ouvertes à tous, car tous les enfants de cette région marquée par la violence et la destruction ont besoin d’être stimulés dans un environnement plein de douceur. ■
Palestine : votre part d’un monde plus juste
Centres pour enfants traumatisés L’organisation YEC, partenaire de Caritas, tient six centres pour enfants traumatisés à Gaza. Elle change les emplacements de ces centres quand la plupart des enfants d’un quartier en ont profité. Cette façon de procéder lui permet d’atteindre un très grand nombre d’enfants de 6 à 12 ans, mais les besoins sont immenses. Les enfants y reçoivent un soutien psychosocial et scolaire. Ils jouent avec des matériaux recyclés et créent des jouets de leurs propres mains en se servant de matériel didactique, ce qui les aide à surmonter leurs terribles expériences. Bon à savoir : – Chacun des six centres de l’organisation YEC encadre 90 enfants pendant 10 semaines. – Un mois d’encadrement psychosocial coûte 32 francs par enfant. – 26 écoles ont été complètement détruites et 122 fortement endommagées pendant les attaques israéliennes de 2014. ■ www.caritas.ch/enfants/palestine
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« Enfants » 2016 Caritas
Colombie : votre part d’un monde plus juste
Les enfants apprennent à se protéger de la violence Caritas s’engage dans la prévention de la violence dans les quartiers pauvres de Medellín. Combos apprend aux enfants et à leurs familles à se protéger des bandes armées de jeunes et à ne pas se laisser enrôler. Les assistants sociaux connaissent très bien les quartiers et la situation des familles. Tous les acteurs, y compris les gangs, connaissent leur travail. Les éducateurs et psychologues accompagnent les enfants et les adolescents à exprimer et gérer leurs émotions à travers des activités artistiques.
Bon à savoir : – En 2015, la coopérative Combos s’est engagée dans la prévention de la violence dans 60 quartiers de Medellín. Elle a accompagné 4500 enfants et adolescents âgés de 6 à 18 ans, 70 % d’entre eux sont des garçons. – 170 enfants vont à l’école de Combos, où ils peuvent faire neuf années de scolarité. – Un repas pour un enfant coûte 1,50 franc. ■ www.caritas.ch/enfants/colombie
Force de vie ■ Colombie
So rtir le s enfants d u cycle de la violence Les 50 années de conflit meurtrier ont profondément marqué la Colombie. Combos, le partenaire de Caritas, aide les enfants victimes de la violence dans la ville de Medellín. Interview de Gloria Amparo Henao Medina, 48 ans, membre fondatrice et directrice de Combos.
Quelles sont les conséquences du conflit armé et du processus de paix pour les enfants de Colombie ?
Il y a deux contextes. D’une part, les négociations entre le gouvernement et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) : la signature d’un accord de paix historique conduirait au dépôt des armes et permettrait aux FARC de s’engager en politique. D’autre part, il y a les conflits armés urbains associés aux bandes criminelles et au trafic de drogue sur lesquels les accords de paix n’auront aucun impact. Dans les quartiers où sévissent les groupes armés illégaux, les enfants qui refusent de livrer des armes ou des drogues, de se laisser enrôler et ceux qui veulent quitter les gangs sont menacés.
comme normale et légitime, alors qu’elle ne l’est pas. Notre travail pédagogique consiste à corriger cette perception et à leur offrir des outils pour transformer leurs relations interpersonnelles en vue de prévenir la violence. Des centaines de milliers de familles sont victimes du conflit armé. Nombre d’enfants grandissent dans des familles qui ont vécu beaucoup de traumatismes. Combos accompagne aussi les familles qui désirent parler de ces évènements et chercher des solutions. Quels enfants sont les plus vulnérables et comment Combos les rencontre-t-elle ?
Nos assistants sociaux et psychologues vont à leur rencontre dans les rues, en portant une attention particulière sur les plus jeunes enfants, à ceux qui font les travaux les plus dangereux, comme le travail nocturne, la vente dans la rue ou qui risquent d’être exploités sexuellement. Ils ont, par exemple, rencontré une fillette de 8 ans qui transportait des armes en moto. Nos éducateurs font un suivi émotionnel à l’aide d’activités artistiques. Nous avons des projets de prévention. Nous travaillons aussi avec les chefs de quartiers et nous aidons les enfants et leurs familles à identifier les risques et à se protéger. ■ L’interview a été réalisée le 17 novembre 2015.
Comment les enfants perçoivent-ils la situation et que fait Combos pour eux ?
Combos suit plus de 4500 filles et garçons dans 60 quartiers de Medellín. Une des graves conséquences des conflits armés est que les jeunes perçoivent la violence Combos soutient les enfants et les adolescents afin qu’ils ne soient pas enrôlés dans des bandes armées et qu’ils ne considèrent pas la violence comme normale. Texte : Katja Remane ; photos : María José Casasbuenas / Corporación Educativa Combos, Esperanza Cadavid
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« Enfants » 2016 Caritas
Ques tions des parrains – réponses des enfants Qu’aimerais-tu faire quand tu seras adulte ?
Rhea Arnold, étudiante de 21 ans, veut savoir à quel métier les enfants se destinent.
Elvira Crnović, 7 ans, Bosnie-Herzégovine « J’aimerais devenir coiffeuse et faire de belles coiffures, des queues de cheval et des tresses. »
Kenny Mark R. Abadilla, 12 ans, Philippines « Je rêve d’apprendre un métier dans la marine pour pouvoir aider ma famille. »
Claribel Adelaida Tarquino Alarcón, 12 ans, Bolivie « Je rêve de devenir cheffe cuisinière, parce que j’aime préparer de délicieux gâteaux. Si je m’applique maintenant, je pourrai bientôt suivre un cours dans une boulangerie et commencer ensuite un apprentissage. »
Que souhaitez-vous savoir au sujet des enfants des projets de parrainages de Caritas ? Posez vos questions par courriel à parrainages@caritas.ch ou envoyez-nous une carte postale. Caritas Suisse, Parrainages Adligenswilerstrasse 15 Case postale CH-6002 Lucerne
Téléphone : +41 41 419 22 22 Téléfax : +41 41 419 24 24 Courriel : parrainages@caritas.ch
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