Followed #19

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Followed - art de vivre - sport et loisirs -

10 nouveautés horlogères de Baselworld Châteauneuf-du-Pape Les secrets de Beaucastel

Aston Martin Vantage De Pétra au Wadi Rum Voyage en Jordanie Heroes Motors Le rêve américain

L 11742 - 19 - F: 5,50 € - RD

LES TROIS VIES DE

GUY

FORGET Numéro 4 mondial - Capitaine de l'équipe de France - Directeur de Roland-Garros








ÉDITO

Perspectives

P

eut-on échapper à la voiture autonome ? Au sortir du Salon de l’auto de Genève, il y a un peu plus d’un mois, j’en étais persuadé. À part Volkswagen et Renault, aucun constructeur ne semblait véritablement obsédé par elle, dévoilant davantage de voitures à conduire que de tristes transportoirs. Je sais, l’expression n’est pas française. Mais elle est imagée. Ancien journaliste automobile, avec plus d’essais au compteur que de jours dans une année, utilisateur au quotidien d’un petit roadster aux roues arrière motrices, je ne pouvais me résigner à me ranger des volants dans un futur annoncé proche. Puis j’ai eu deux discussions. La première avec mon médecin, à qui je quémandais un certificat pour renouveler mon permis de conduire. Avec l’âge, je fête quarante-six demain, ma vue baisse... « Rien de grave, ne vous inquiétez pas. De loin, tout va bien. Je ne vais pas vous empêcher de conduire, je suis soulagé, m’a dit mon médecin ; moi aussi. Quand je dois persuader un senior de vendre sa voiture car il voit ou entend mal, c’est dur, croyez-moi. » Proche, le futur ? La seconde fut pire, quand un jeune homme d’à peine 20 ans m’a asséné qu’il n’avait pas de permis de conduire car ça ne servait à rien. Pire, qu’il n’en voyait pas l’utilité puisque les voitures allaient un jour conduire pour lui. Lui qui n’a jamais pris de plaisir en voiture, comment pourrait-il souffrir de ne plus tenir le volant ? La voiture autonome, qu’on soit jeune ou vieux, on va l’avoir, et dans un futur proche. Heureusement, elle ne ressemblera pas obligatoirement à un cube à quatre roues, à ce « transportoir » qu’on déteste imaginer. Un designer nous l’a assuré. Me voilà rassuré. Christophe Boulain

Couverture : Guy Forget photographié par Bernard Rouffignac

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SOMMAIRE

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16 ➜ C ontributeurs : retrouvez les personnalités que nous avons rencontrées pour réaliser nos sujets Événement 18 ➜ B aselworld : c’est le rendez-vous horloger de l’année, l’événement à ne pas manquer quand on aime les montres. Visite Futur 22 ➜ D essine-moi une voiture autonome : rencontre avec Marc Girard, designer, pour parler de nos voitures du futur Tendance 24 ➜ H igh-tech : sélection assumée de quatre produits « tech » qui peuvent changer votre quotidien Art de vivre 26 ➜ V in : visite guidée des vignes et des caves du domaine de Beaucastel, à Châteauneuf-du-Pape, avec César Perrin. Et explication par le détail des fabuleuses capacités de garde des vins du domaine

32 ➜ C outeaux : rencontre avec Benoit Mijoule, forgeron et artisan coutelier de Laguiole qui, tout en préservant les traditions locales, réinvente l’art de la coutellerie

Culture 40 ➜ S axo : depuis qu’il a électrifié son instrument, Guillaume Perret peut tout faire tout seul. Une vraie Sax Machine 48 ➜ R oland Grivelle : vous ne le connaissez pas, mais lui connaît tout le monde. Portrait par Alain Gardinier Mode et objets 54 ➜ M ontres : sélection non exhaustive mais totalement assumée des plus belles nouveautés de Baselworld 64 ➜ P arfum : rencontre avec Jean-Claude Ellena, le nez historique de la maison Hermès

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SOMMAIRE

Sport & Loisirs 74 ➜ G uy Forget : l’ancien numéro 4 du tennis mondial, qui a guidé les équipes de France masculine et féminine à la victoire, 84

est maintenant le directeur des tournois de Bercy et Roland-Garros. Portrait d’un sportif pas comme les autres ➜J ordanie : du nord au sud, de Jerash au Wadi Rum en passant évidemment par Amman et Pétra, visite d’un pays magnifique aux voisins turbulents

Mécanique 96 ➜ A ston Martin Vantage : on ne parlera pas de sa devancière tellement la nouvelle Aston enterre son aïeule.

Nouveau châssis, nouveau moteur né chez AMG et nouveau tempérament : contrat rempli 108 ➜ I nfiniti : visite de Los Angeles au volant du dernier SUV Infiniti, le QX50 au moteur révolutionnaire 116 ➜ H eroes Motors : rencontre avec le fondateur de Heroes Motors, dans l’atelier où il crée les plus belles motos de Californie

Bien-être 124 ➜ S auna : toutes les règles pour mieux profiter de votre séance de sauna 126 ➜ C ontacts : retrouvez ici les coordonnées des personnes et sociétés citées dans nos sujets 130 ➜ R endez-vous : dans le prochain numéro de Followed, retrouvez l’essai du SUV Alfa Romeo Stelvio, rouge comme il se doit, la rencontre avec Régis Mathieu, lustrier génial aux quatre activités, et notre road trip en Citroën C3 Aircross au Costa Rica, pays du café, des forêts luxuriantes et des plages paradisiaques

Abonnement 72-73, 127-128 ➜ Recevez Followed directement chez vous, dans votre boîte aux lettres. C’est facile ! Suivez les indications

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Lafite Rothschild 1945 Format impériale, 6 litres Pièce de la collection privée Marquet Pas d’autre exemplaire connu Mis en bouteille par Monsieur Revelle, maître de chai au Château Lafite Rothschild, en 1947 Fut la propriété du Général Montgomery du début des années 1950 jusqu’en 1976 Acquise par Jordi Marquet, créateur de Marquet, en 1977 Rebouchée au Château par Monsieur Revelle en 1981, contre-étiquette signée de sa main Cette bouteille n’a pas de prix

Spécialistes en vins d’exception depuis 1974 marquetandorra.com Expéditions partout en France

L’abus d’aLcooL est dangereux pour La santé. a consommer avec modération




CONTRIBUTEURS

Serge Bueno Installé en Californie, à Los Angeles en l’occurrence, Serge est le Français qui fait rouler les amateurs de belles motos de la côte ouest américaine. Nous l’avons rencontré dans son atelier de La Brea Avenue en mars dernier.

Jean-Claude Ellena Même s’il ne travaille plus pour la maison Hermès dont il a signé les plus belles créations, il en est resté le parfumeur historique. JeanClaude nous a reçus à Grasse, pour un déjeuner et une visite guidée du Musée international de la parfumerie.

Guy Forget Après avoir fait rêver des générations de joueurs de tennis, comme numéro 4 mondial ou capitaine de l’équipe de France de coupe Davis, Guy dirige le tournoi de RolandGarros. Rencontre juste avant le début de l’épreuve.

Benoit Mijoule Pour cette photo, Benoit voulait avoir le clocher de Laguiole juste derrière lui. Logique, c’est l’un des derniers forgerons de la ville, un artisan coutelier qui nous a tout raconté de son métier.

Guillaume Perret Surnommé le Sax Machine, Guillaume est un artiste étonnant. Avec son instrument électrifié, il tient la scène à lui tout seul. Et vient de signer la BO du film tiré du voyage de Thomas Pesquet dans l’espace. Une rencontre musicale.

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César Perrin Le vin est souvent une histoire de famille. Surtout chez les Perrin. César, le plus jeune, est en charge du domaine de Beaucastel, à Châteauneuf-duPape. Il nous en a raconté tous les secrets lors d’une visite des vignes et des caves.


CHÂTEAU

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Photo : Mathieu Garçon

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ÉVÉNEMENT

Bâle, la fête de l’horlogerie et du luxe

Il y a deux Salons de l’horlogerie par an, le premier en janvier à Genève, le second à Bâle en mars. Même si l’édition 2018 de Baselworld a rassemblé près de deux fois moins d’exposants que l’an dernier, la foire reste un événement incontournable de l’horlogerie. Immersion. Textes et photos C. Boulain

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e serait un abus de langage de dire que la Foire de Bâle a plus de cent ans, même si la première édition eut lieu en 1917. À l’époque, c’était la Foire suisse d’échantillons de Bâle, consacrée aussi bien à l’industrie chimique que bancaire ou au transport maritime et à l’horlogerie. Suisse, évidemment. Seulement 29 sociétés sur plus de 800, dont Longines et Ulysse Nardin, étaient du secteur horloger à cette époque. Ce n’est qu’en 1973 que la foire se consacre entièrement à l’horlogerie, puis en 2003 qu’elle devient Baselworld. La foire est devenue mondiale, regroupe de plus en plus d’exposants et accueille plus de 100 000 visiteurs. Le record s’établit en 2016, avec 1 500 exposants et 145 000 visiteurs. Mais l’émergence du Salon international de la haute horlogerie de Genève

(SIHH) en début d’année partage les marques. Bâle est toujours incontournable, mais Genève grandit. Cette rivalité traduit celle qui oppose deux mastodontes du secteur, le groupe Richemont et le Swatch Group, avec Genève pour le premier et Bâle pour l’autre. Le partage des exposants se confirme en 2018, avec toujours plus de marques à Genève, et de moins en mois à Bâle. De 1 300 exposants en 2017, la foire est passée à 700 cette année. Ce n’est pas un phénomène de vases communicants puisque le SIHH ne les récupère pas automatiquement, mais une certaine désaffection se précise. Reste que le nombre ne fait pas la réussite et, dans l’univers du luxe, la qualité a toujours été privilégiée sur la quantité. Et, sur ce point, Bâle fait le plein. Il suffit de passer les portiques de


Véritable messe de l’horlogerie et de la bijouterie, Baselworld accueille quelque 100 000 visiteurs en six jours. La plupart sont des professionnels qui viennent acheter les montres de l’année. Les autres, des journalistes et des amateurs.

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ÉVÉNEMENT

Bâle est l’occasion de venir voir les nouveautés exposées par les marques, mais aussi de les prendre en main ou de les passer au poignet, car c’est la meilleure façon de s’en faire une idée. Mais dans ce cas, il faut prendre rendez-vous. Ici tout est codifié. C’est la Suisse.

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l’entrée pour s’en persuader. Larges allées, moquette épaisse et stands plus luxueux et élégants les uns que les autres vous attendent. Certes, cela a un prix. Pour les visiteurs qui ne sont pas accrédités, l’entrée est tarifée 60 francs suisses, soit environ 52 €. Et ça, c’est sans compter le prix du parking qui, dans cette ville, peut monter beaucoup plus haut. Mais ça les vaut. Au rez-de-chaussée, on retrouve les plus grandes maisons, avec évidemment tout le Swatch Group, qui joue à domicile, Omega, Blancpain, Jaquet Droz, Tissot, Longines ou Hamilton en tête, mais aussi des indépendants comme Rolex et Tudor, Patek Philippe et les plus grandes enseignes du groupe LVMH, Hublot, TAG Heuer et Zenith pour ne pas les citer. Et à l’étage du hall principal, des faiseurs plus exclusifs et des artistes comme MB&F ou Ferdinand Berthoud, tous regroupés dans l’espace baptisé « les ateliers ». Mais attention, si

les vitrines sont remplies des plus belles montres jamais inventées, il n’est pas évident de les toucher. À Bâle, on prend rendez-vous ou on fait du lèche-vitrines, même avec une carte de presse. Ce n’est pas un Salon automobile ! On ne va pas se bousculer sur ces stands, tout de même. Du coup, son statut de foire professionnelle où les distributeurs viennent voir, toucher puis acheter les montres qu’ils mettront dans leurs vitrines à Los Angeles, Dubaï ou Londres prend tout son sens. Ce n’est pas un Salon de l’horlogerie, où l’amateur peut venir passer au poignet la nouvelle Anonimo Epurato, la Rolex GMT Master II ou la superbe réédition de l’Omega Seamaster 1948, célébrant les 70 ans de cette icône de l’horlogerie, c’est une foire commerciale, une vitrine sublime du savoir-faire suisse en la matière. Heureusement, la vitrine est sublime, le savoir-faire aussi.

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FUTUR

DESSINE-MOI UNE

voiture autonome

Sur tous les Salons automobiles, on ne parle plus que de ça, de cette voiture autonome qui va révolutionner l’usage automobile de nos années futures. Nous avons récemment croisé Marc Girard, responsable des concept-cars de BMW et auparavant en charge du design intérieur de la marque. Qui de mieux placé pour nous dire ce que la voiture autonome va changer dans notre manière de vivre sur quatre roues ? Entretien. Propos recueillis par C. Boulain

On prédit que la voiture autonome va changer notre vie. Mais qu’est-ce qu’une voiture autonome ? C’est une voiture qui peut faire tout ou partie des manœuvres liées à la conduire toute seule. Il est entendu, aujourd’hui, qu’il existe cinq niveaux d’autonomie, du premier où l’on ne parle que de fonctions d’assistance à la conduite comme un simple régulateur adaptatif, au cinquième qui concerne une autonomie totale, autrement dit une voiture qui conduit pour vous, même sans personne à l’intérieur. Sur la route, actuellement, on a des véhicules de niveau trois, capables de remplacer un court instant le conducteur, en suivant les lignes de la chaussée ou le trafic, permettant, dans un embouteillage par exemple, au conducteur de laisser faire la voiture. On sait fabriquer des voitures niveau quatre, capables de rouler toutes seules pour aller se garer par exemple, et même niveau cinq (véhicule sans conducteur à bord), mais la réglementation ne nous permet pas encore de les commercialiser. Mais ça va venir... Quels changements ces voitures vont-elles engendrer pour les utilisateurs ? Vaste question. Déjà, tout dépend si l’on parle de

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l’utilisateur dans la voiture ou de son propriétaire. Avec un véhicule de niveau quatre ou cinq, on va voir arriver des cas où la voiture va évoluer sans nous. Aller se garer, mais aussi pourquoi pas aller chercher les courses préalablement commandées, ou se rendre aux entretiens toute seule. Ça va changer notre manière de consommer l’automobile. On pourra aller quelque part en voiture, puis prendre un métro et récupérer sa voiture à destination pour finalement rentrer à la maison. Et puis notre manière de vivre dans la voiture va changer. Chez BMW, on regarde beaucoup ce qui se passe en avion. Aujourd’hui, quand vous vous installez dans votre siège business ou première, vous commencez par vous mettre à l’aise, enlever vos chaussures, vous allonger... En fonction des marques, du positionnement des produits plus ou moins haut de gamme, on va attendre des choses différentes. En fonction des continents aussi. Dans presque tous les cas, la première chose qu’on veut faire en voiture si on ne conduit pas, c’est se divertir. Mais en Chine, par exemple, ils ont aussi comme priorité... d’y dormir. Avec la voiture autonome, le conducteur va se retrouver passager.


Est-ce que les habitacles de nos voitures vont beaucoup évoluer ? Pour moi, les choses vont évoluer, mais cela va prendre du temps. Il va y avoir une mutation du siège conducteur, ça c’est évident. Les deux premiers changements vont concerner la multimodalité, la multiplication des écrans autour du conducteur, et son assise. On va avoir plusieurs écrans ou un écran suffisamment grand pour y afficher plusieurs choses, comme à la télévision en Chine où, en plus du film, vous avez deux, trois ou quatre bannières en permanence. Dans l’optique de proposer lors des phases de conduite autonome une vraie expérience de divertissement, recherchée par beaucoup de clients, on devra proposer des solutions nouvelles. Et puis comme je le disais avant, la façon de s’installer dans la voiture va devoir changer. L’amplitude de réglages du siège va devoir s’étoffer pour offrir le confort qu’on est en droit d’attendre. En tout cas dans une BMW. On pourrait imaginer un habitacle comme un salon, avec des fauteuils ou un canapé, sans volant ni pédales ? On peut imaginer beaucoup de choses à partir du moment où on ne conduit plus. Mais les vraies métamorphoses, celles que vous imaginez, n’arriveront

qu’après quatre à cinq générations de voitures autonomes. Quand ces véhicules ultra-sûrs ne côtoieront plus les vieilles voitures... d’aujourd’hui. Avant cela, il faudra toujours protéger les passagers en cas d’accident, les maintenir en place pour garantir le déploiement des airbags et le fonctionnement des zones de déformation. Et puis chaque marque aura à cœur de préserver son identité. Aujourd’hui, quand j’entends parler de voiture autonome, j’ai toujours l’impression qu’on imagine des cubes sur quatre roues, sans identité ni caractère. Mais, j’en suis sûr, BMW ne fera pas des voitures autonomes comme cela. L’idée d’une voiture autonome, c’est de pouvoir enlever la contrainte de la conduite dans des conditions de roulage où on ne prend aucun plaisir, laissant alors au conducteur du temps pour faire autre chose, mais de le laisser derrière le volant quand il le souhaite. J’ai longtemps habité à Los Angeles, où je faisais 160 km par jour pour aller et revenir du travail. Les jours où je prenais l’autoroute 101, complètement bouchée, je rêvais d’une voiture qui roule toute seule. Mais quand je prenais Malibu Canyon Road, je n’aurais laissé mon volant à personne. Sur la 101, je perdais mon temps. La voiture autonome va nous en faire gagner. Et aujourd’hui, le luxe, c’est d’avoir du temps...

LE CONDUCTEUR SERA PASSAGER Followed Magazine 23


TENDANCE

High-tech

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ans le high-tech, les nouveaux produits ne cessent de se multiplier. C’est sans doute pourquoi, à Followed, nous avons décidé de vous en faire une sélection assumée. Du beau, du pratique et du nouveau.

Allez, on oublie les téléphones dans la poche ou sous l’oreiller, on arrête de se dire qu’on va remplacer sa sublime montre mécanique par une de ces montres connectées modernes – et moches – et on regarde ce que fait Motiv, une société basée en Californie, à San Francisco. Ring, ça s’appelle comme ça, est une bague proposée en deux couleurs et sept tailles, qui intègre un capteur de pulsations cardiaques, un accéléromètre... et une connexion sans fil. Ainsi, elle remplace le téléphone ou le bracelet connecté pour surveiller votre activité ou votre sommeil. Elle se recharge via USB (tous les deux ou trois jours) et dialogue avec votre smartphone (sous iOS pour l’instant). La société envisage l’exportation, mais Ring n’est actuellement vendue que sur Internet aux États-Unis au prix de 199 $ (environ 180 €) sur www.mymotiv.com

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FOCAL Utopia LA RÉFÉRENCE Difficile de faire mieux pour l’écoute audiophile en société. Et, en plus, il est français. Techniquement, le plus remarquable est la présence dans un casque audio de haut-parleurs large bande, ouverts sur l’arrière et dotés de dômes en béryllium. Pour résumer, cela permet d’avoir une qualité d’écoute fabuleuse sur une bande de fréquence allant de 5 à 50 Hz. L’autre caractéristique exceptionnelle est son confort, grâce à des coussins de 20 mm d’épaisseur à mémoire de forme recouverts de cuir d’agneau et microfibre, une armature en fibre de carbone épousant parfaitement la forme du crâne et un arceau lui aussi gainé intégrant le système de réglage de taille et de rotation des écouteurs. Les câbles et connecteurs sont blindés, comme le prix : 4 000 €.

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Ring 7/24


SAMSUNG S9 et S9+ TOUT EN DOUBLE Pour remplacer son S8, Samsung vient de dévoiler le S9. Une fois de plus, ce smartphone haut de gamme existe en deux versions pour deux tailles d’écran. Ce n’est pas la seule chose qui soit double. On observe rapidement les deux objectifs au dos. C’est une des évolutions du nouveau S9, un appareil photo à deux objectifs, possédant chacun son diaphragme (f1,5 pour la nuit, f2,5 pour le jour). L’amélioration de la qualité photo, une des promesses du petit nouveau, est bien là dès les premiers clichés. On note aussi la possibilité de filmer à 1 000 images par seconde... mais sur un très court laps de temps. Enfin, autre amélioration, le déverrouillage par empreinte digitale (avec un capteur mieux placé) et par reconnaissance faciale doublée d’un capteur d’empreinte... rétinienne. Prix du bijou : 959 €.

FUJIFILM XH-1 STABILITÉ AVANT TOUT Dans dix ans, on se dira que les appareils « mirrorless » auront tout changé. La manière de prendre des photos... et peut-être celle de choisir son appareil. Depuis quelques années déjà, deux acteurs longtemps oubliés de la scène photo émergent, Sony et Fujifilm. Ce sont les premiers à avoir cru à ces boîtiers sans miroir, des appareils dotés d’excellents capteurs qui ne sont pas des reflex. Les historiques Canon et Nikon ayant tardé à s’y mettre le paient aujourd’hui. Avec son XH-1, Fujifilm enfonce le clou, proposant un superbe boîtier à objectifs interchangeables doté d’un capteur APS-C 24,3 millions de pixels entièrement stabilisé. Autre caractéristique notable, il intègre un mode film « Eterna » qui simule une image cinéma. Il est vendu 1 899 € (sans objectif).

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ART DE VIVRE

Bien vieillir n’est pas un

hasard

S’il est une région viticole française réputée pour la garde de ses vins, c’est bien la vallée du Rhône. Pour comprendre d’où vient ce potentiel mondialement reconnu, Followed s’est rendu sur place, visiter l’un des domaines les plus réputés, le château de Beaucastel de la famille Perrin.

Textes D. St Aubin, photos Mitchell

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ne question taraude toujours l’amateur de vin : quand dois-je boire telle ou telle bouteille, est-ce un vin de garde ? Même si de plus en plus de vignerons délivrent des vins à boire tout de suite, il est admis que la majorité des grands vins se bonifie avec l’âge, et qu’il est péché de les ouvrir trop tôt. Les échanges gazeux avec l’extérieur, au travers du bouchon en liège (les bouchons techniques, que beaucoup appellent en plastique, ne laissent pas passer l’air de la même manière) modifient les jus, assouplissent les tanins et, souvent, améliorent un vin. Pour comprendre ce qui fait un vin de garde, il faut comprendre comment il est fait. Rendez-vous pris en vallée du Rhône, au château de Beaucastel, l’un des domaines de Châteauneuf-du-Pape les plus reconnus pour ses vins de garde, avec César Perrin, le plus jeune des frères en charge aujourd’hui du

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domaine. « Trois choses influencent grandement la capacité d’un vin à se bonifier avec le temps : l’âge de la vigne, les cépages qui le composent et la manière de l’élever. Ici, à Beaucastel, nous avons la chance d’avoir tout ça... » Que ce soit les rouge ou en blanc, ces derniers ne représentant qu’un faible pourcentage de la production maison, les vins du domaine ont en effet la chance de profiter de vieilles vignes. Historiquement, le domaine est passé dans les mains de la famille Perrin dès 1909, date à partir de laquelle Pierre, le grand-père, commence à planter des vignes qu’on retrouve encore aujourd’hui parmi les 70 hectares du domaine. « Il nous reste quelques vignes de cette époque, mais la plupart ont été replantées avec une meilleure connaissance des sous-sols. Aujourd’hui, l’âge moyen des pieds est de 70 ans pour Beaucastel. Cela fait des gros ceps, plus épais et plus compliqués à travailler, mais qui vont donner plus de tanin aux raisins. Le tanin vient du bois, or le meilleur ne provient pas des tonneaux mais des pieds de vigne. En plus, ces vieilles vignes vont donner des raisins plus complexes qu’il faut élever souvent plus longtemps, en leur donnant du temps, à la vinification comme au vieillissement. » Malheureusement, l’âge des vignes n’est que rarement connu du consommateur final. Il peut, parfois,


L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. À consommer avec modération.

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ART DE VIVRE César Perrin dans les vignes de Beaucastel, avec les galets caractéristiques de la région. À droite, le domaine, cerné de parcelles aux différents cépages. En bas, un pied du genre âgé.

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L’âge de la vigne influence le vieillissement, Les cépages aussi : certains s’améliorent vraiment avec le temps

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César Perrin, vigneron de père en fils

lire la mention « vieilles vignes » sur sa bouteille. Et encore, ça ne dit pas depuis combien elle est plantée. Ce n’est pas le cas des cépages utilisés, une autre composante d’un vin de garde. On retrouve souvent le détail sur les étiquettes des bouteilles. Ici, à Châteauneuf, il existe treize cépages différents, huit pour le rouge, cinq pour le blanc. On est bien loin des grands crus de Bourgogne qui n’emploient que du pinot noir en rouge et du chardonnay en blanc.

Treize cépages différents

« Tous ces cépages apportent des choses bien différentes. Si l’on parle des rouges, on sait que la grenache, que certains domaines utilisent à 100 %, est un cépage facile à cultiver dans la vigne mais aussi à vinifier. Mais si elle donne d’excellents vins, ce n’est pas le cépage qui apporte le plus de garde. Le mourvèdre, en revanche, est reconnu pour bien vieillir. Nous l’utilisons largement, puisqu’il est à 35 % dans notre rouge, suivi par la grenache à 30 %, la syrah à 15 % et les cinq autres cépages entre 2 et 5 % [cinsault, muscardin, counoise, terret noir et vaccarèse, NDLR]. Nous avons les huit cépages autorisés dans nos vignes, mais avec une dominante de mourvèdre, ce qui est rare. Dans les blancs, nous avons aussi les cinq cépages autorisés, clairette, bourboulenc, roussanne, picpoul et picardan. Et, cette fois, avec une dominante de roussanne, une variété très intéressante. » Mais cultiver treize cépages implique beaucoup de contraintes. D’abord pour le travail dans les vignes, sachant que chaque pied

nécessite sept passages successifs durant l’année. Il y a la taille, en gobelet dans cette région viticole, comme un petit arbuste et non comme une liane qu’on tire sur des fils de fer comme dans le Bordelais ou en Bourgogne, les coups de picole (drôle de nom donné au travail du sol) peu aisés à cause des galets roulés qui jonchent le sol, puis les vendanges. « C’est vrai que les galets n’aident pas le travail dans les vignes, mais ils garantissent une faible évaporation des sols en faisant de l’ombre à la terre et une moindre prolifération de la flore auxiliaire. Comme nous sommes en biodynamie depuis les années 1970, tout ce qui nous permet de moins traiter est apprécié. Entre les galets et le mistral, on n’est pas mal... » Selon César, deux jours de mistral consécutifs lui évitent un traitement. Ce vent fort, en venant sécher les vignes, les débarrasse des champignons et des maladies. Mais quand vient le temps des vendanges, il peut aussi abîmer les grappes. Justement, les vendanges, comment se passent-elles avec treize cépages ? « Elles durent plus longtemps, car chaque variété va arriver à maturation à des moments différents. Ici, les vendanges vont durer de trente à quarante-cinq jours tous les ans. Mais au moins, comme cela, tout n’arrive pas en même temps sur les tables de tri... » Cela tombe bien car, à Beaucastel, on vinifie séparément chaque cépage. Tous les ans, César et ses équipes font donc treize vins. Quand on visite les chais de Beaucastel, on est surpris par l’alternance de cuves en ciment et de foudres en chêne. Comment un domaine aussi

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ART DE VIVRE

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Si vous avez de vieilles vignes et que vous prenez le temps d’élever votre vin, de le laisser évoluer à son rythme, il vieillira bien

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César Perrin, vigneron de père en fils

coté peut-il vinifier dans le ciment ? « Tout dépend des cépages. Il en existe des oxydatifs et des réducteurs. Si l’on veut en tirer le meilleur, il faut pouvoir vinifier en cuves ciment pour les oxydatifs et ainsi limiter les échanges gazeux, ou en foudres bois pour les autres. C’est l’avantage de vinifier séparément les cépages. L’expérience est primordiale... mon père en est à son quarantième millésime cette année. » Avoir de vieilles vignes et les bons cépages est primordial. Mais aussi donner du temps à l’élevage. Pour chaque cépage, les fermentations alcooliques vont durer de cinq jours à cinq semaines, en fonction de l’année, solaire ou pas, à leur rythme. Puis viendra le tour de la transformation malolactique, qui peut prendre jusqu’à un an. « Il faut laisser le temps aux raisins, ne pas les brusquer. Ce n’est qu’après la malo, une fois que c’est un vin, que nous débutons les assemblages. En fonction des années, on peut avoir une syrah incroyable et une grenache décevante. Ou l’inverse. On n’a que ce que la nature nous donne... Le cépage le plus compliqué à travailler est sans doute le muscardin, très fragile. Seul, il ne donne pas le meilleur vin. Je dis souvent que c’est le triangle dans l’orchestre. Si on l’écoute tout seul, ça ne ressemble pas à grand-chose. Mais avec les autres instruments, ça ajoute toujours un truc intéressant. C’est pareil dans nos assemblages. On goûte, on dose, on déclasse. Parfois, un cépage ne donne pas ce qu’il faudrait. Dans ce cas on le retire de la composition pour le passer en vin de table. Ou parfois, on n’a pas les volumes, tout dépend des années. En 2002, par

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exemple, on n’a pas fait de châteauneuf-du-pape, on n’avait ni les quantités, ni la qualité. On a mis en vente les vieux millésimes, car on garde toujours 20 % de chaque année en cave, au cas où... » Une fois les assemblages réalisés, les vins vont encore rester plusieurs mois en foudres avant la mise en bouteilles. Pour se mélanger, se stabiliser. César ne craint pas de trop les oxyder car il y a moins d’échanges gazeux en foudre qu’en barrique (moins de surface de bois rapportée au volume de vin).

Une bonne cave est essentielle Et, surtout, il n’emploie que de vieux foudres, n’en remplaçant qu’un par an sur les quarante-huit de la cave. « Nous ne voulons pas donner trop de bois à nos vins. Quand on fait ça, avec des tonneaux neufs par exemple, c’est du maquillage, pour aller chercher dans les planches le tanin qu’on n’a pas dans le pied de vigne. Quand on a un beau raisin sur la table de tri, on aura un bon vin. » Douze à seize mois après les vendanges pour les blancs, jusqu’à vingt-quatre pour les rouges, les châteauneuf-du-pape de Beaucastel sont mis en bouteille. Puis encore gardés quelques mois en cave, sous le domaine où la température est presque constante toute l’année. « C’est un problème aujourd’hui, quasiment aucun client n’a de bonne cave. Avant, elles étaient creusées sous les maisons, comme ici. Dorénavant, on a des caves électriques au mieux, ou pas de cave du tout. Cela aussi joue un rôle dans la capacité de vieillissement. » On est prévenu.


L’élevage en foudre et non en tonneau permet de conserver les vins longtemps avant la mise en bouteilles, sans leur donner trop de bois « à manger ». Le meilleur tanin vient du pied de vigne, pas de la planche. En ce début 2018, la famille Perrin vient de mettre en vente les blancs 2016 et les rouges 2015. À boire tout de suite (modérément) ou à mettre en cave...

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ART DE VIVRE

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Remis

audugoût jour Apparu au XIXe siècle, le couteau de Laguiole existe encore, toujours fabriqué par des artisans passionnés, dans le village éponyme de l’Aveyron. Pour tout comprendre de l’art de la coutellerie, un art réputé dans le monde entier, Followed est allé rendre visite à l’un des derniers forgerons de Laguiole, Benoit Mijoule. Textes et photos F. Montfort

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ART DE VIVRE La mouche, que beaucoup appellent l’abeille, peut adopter toutes les formes. Ici une croix de Malte, mais ce peut être un insecte, un animal ou un accessoire. L’important est qu’elle soit forgée avec le ressort et non soudée. À droite, des lames de damas et une brute de forge.

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n pourrait appeler cela le triangle d’or de la coutellerie artisanale en France, l’aire délimitée par Montézic à l’ouest, Espalion au sud et Laguiole à l’est. C’est dans ce petit coin d’Aveyron de vingt kilomètres de côté qu’une poignée d’irréductibles – ils seraient deux cent cinquante à tout casser – travaillent encore à produire les fameux couteaux de bergers de Laguiole. Mais défendre les traditions et préserver le savoir-faire d’une région n’empêche pas de faire évoluer son métier. Dans cette poignée de couteliers se trouve Benoit Mijoule, l’un des quatre forgerons de Laguiole encore en activité. Lui et sa quinzaine de salariés fabriquent encore à la main les couteaux de bergers des siècles derniers, mais proposent aussi des modèles plus contemporains, aux matériaux rares et exclusifs. « On a dans notre gamme des laguioles de bergers, avec juste lame et poinçon, comme les modèles historiques. Le poinçon servait aux bergers à lutter contre la météorisation des bêtes, quand elles avaient mangé trop d’herbe verte et qu’elles gonflaient. Il fallait leur percer la panse pour les sauver de l’asphyxie. Et pour éviter que le trou ne se referme trop rapidement, le poinçon avait cette forme triangulaire. On l’a conservée, bien sûr. » Force est de constater qu’on trouve dans la vitrine du magasin de Benoit l’Artisan des laguioles deux pièces, plein manche comme avant, avec des lames brutes de forge rugueuses qu’on croit déjà patinées par le temps. Il y a aussi des couteaux trois pièces, avec un tire-bouchon, une version arrivée plus tard, au XXe siècle, quand les Aveyronnais poussés par l’exode rural montaient à Paris travailler

dans les bistrots familiaux. Mais ce qui attire le plus les rétines, sans offense pour l’histoire de la coutellerie de Laguiole, ce sont ces modèles exclusifs au manche en carbone, en résine, en bois rare ou en matière animale, avec des lames aux reflets magiques, en damas, et aux motifs ciselés sur les parties métalliques. Des œuvres d’art signées de Benoit et assemblées dans l’atelier voisin. « Tous nos couteaux sont fabriqués ici, à Laguiole. Pour les versions les plus simples, avec des lames en acier inoxydable 12C27 poli et une mouche soudée, nous achetons la plupart des pièces chez des fabricants locaux, à Montézic ou Thiers [dans le Puy-de-Dôme voisin, NDLR] puis nous les assemblons à la main. Pour les modèles plus spécifiques, avec des lames en acier carbone, brutes de forge ou damas, et des mouches forgées et ciselées à la main, tout est produit ici, à Laguiole, dans mon atelier. » Malheureusement pour les couteliers du coin, il n’existe pas d’AOC pour ces couteaux. Et les copies importées de divers pays ont dégradé, pour ne pas dire détruit la réputation des laguioles. C’est pourquoi Benoit et d’autres travaillent à une IGP Couteaux de Laguiole, une certification géographique qui serait bénéfique aux derniers artistes du triangle d’or. Mais, du coup, qu’est-ce qu’un laguiole, Benoit ? « C’est un couteau de berger, proposé en différentes tailles, de 9 à 13 cm une fois la lame repliée, doté d’un mécanisme d’arrêt pour éviter qu’il ne se referme accidentellement (mais ce n’est pas une bague d’arrêt comme sur un Opinel), et avec un manche rond. On a sur les modèles les plus fidèles à l’histoire une croix de berger représentée par des pointes d’acier plantées dans le manche, comme Un laguiole bien particulier, sorti tout droit de l’imagination de Benoit. Un manche en fibre de verre teintée rouge et noir, une lame en acier VG10 japonais et une mouche forgée en croix de Malte. On le dit plein manche car il n’a pas de mitre, ni en tête, ni en pied.

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ART DE VIVRE

À l’origine, au XIXe siècle, le laguiole était le couteau des bergers Benoit l’Artisan

de petits clous. Quand les bergers plantaient le couteau dans l’herbe, ou dans le pain avant de manger, ils voyaient une croix sur le manche. Mais plus que les caractéristiques même du couteau, l’IGP doit préserver les méthodes de fabrication et le savoir-faire local. » À moins de trois cents mètres du magasin se trouve l’atelier de Benoit, à Laguiole bien évidemment. Ouvert au public, avec de grandes vitres pour voir le travail des artisans, il est l’endroit idéal pour comprendre ce fameux savoir-faire. Ici on forge les lames, on cisèle les platines et on assemble les couteaux. Ils sont toujours composés d’une lame, d’un ressort terminé d’une mouche, de deux à quatre platines et d’un manche en deux parties. Il existe différentes finitions de lame, qui vont dépendre de la qualité de l’acier employé et de la manière de le travailler. Dans sa forge, Benoit ne produit que les lames en damas et les brutes de forge. « Ce sont des lames qu’on va laisser dans l’état en sortie de forge, avec du relief. On réalise ensuite la trempe puis l’affûtage. Elles sont sensibles à l’oxydation mais ont vraiment un cachet particulier. Et puis je fais aussi ici les damas. Dans ce cas, je prends deux barreaux d’acier de qualité distincte, je les monte à plus de 1 000 °C puis les martèle pour les souder entre eux. Ensuite, toujours à chaud, je vais plier le barreau, le ressouder, le marteler à nouveau pour obtenir une barre d’acier dans laquelle on va découper des lames. Ces motifs, foncés et clairs, ce sont les deux aciers qui se révèlent... Faire une seule lame prend une journée complète à la forge. » L’émouture, qui va donner le tranchant de la lame, n’est réalisée qu’ensuite, toujours dans l’atelier. L’autre gros travail manuel est consacré au ressort et à sa mouche. Sur les modèles haut de gamme, la mouche est forgée avec le ressort puis finie à la main. Pour beaucoup, un laguiole doit avoir une abeille en bout de ressort. Mais Benoit propose différents modèles, allant de l’abeille au casque

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Benoit, devant sa forge, avec son tablier en cuir. Avec au moins 70 °C dans la pièce, il faut avoir l’habitude d’y travailler pour y rester plus de quinze minutes de suite. Nous avons abdiqué après seulement dix...


Benoit est l’un des derniers forgerons de Laguiole, en Aveyron. Il réalise lui-même ses lames brutes de forge, mais aussi de damas en travaillant son acier dans sa forge chauffée au gaz, le pliant, le tordant et le martelant sans relâche. Ces lames si particulières s’oxydent avec le temps et réclament de l’entretien. Toutes les opérations d’assemblage sont faites à côté, dans l’atelier, entièrement à la main.

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ART DE VIVRE

Ci-dessus, des mouches de différentes sortes, toutes forgées et ciselées dans la même pièce que le ressort. Ci-dessous, un set de couteaux Tribal de table, avec manche en carbone.

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de moto ou à la croix de Malte, selon les goûts. Sachez juste que le terme exact est mouche et que l’histoire ne sait dire pourquoi ce furent surtout des abeilles gravées sur les laguioles. Une légende parle de Napoléon, mais rien n’est sûr... Le travail de guillochage du ressort (et parfois aussi du dos de la lame) est souvent prolongé sur les platines. Ce sont ces platines qui tiennent lame, ressort et manche. On en a une de chaque côté, mais parfois deux par côté, pour épaissir le manche et donner plus de possibilités de motifs. Si ces platines se terminent par des bouts métalliques (les mitres), le couteau n’est pas « plein manche ». Si, justement, le manche, composé de deux pièces arrondies, en bois, en corne d’Aubrac ou dans toutes sortes de matières (il existe aussi de la molaire de mammouth, du corail fossilisé ou même du carbone ou de la pomme de pin noyée dans la résine), bref si le manche court sur toute la longueur du couteau, on le dit « plein manche ». « J’ai repris les mêmes techniques et matériaux en 2007 pour lancer un nouveau couteau, plus masculin : le Tribal. Pour moi, un Laguiole est un couteau de berger, un Tribal un couteau de chasse. Mais dans les deux cas, j’ai gardé la même forme de lame... » Benoit propose, comme d’autres artisans de Laguiole, des modèles à lame fixe pour la table, des services à fromage ou même des limonadiers. Avec toujours une idée en tête, préserver le savoir-faire des aînés et rendre ces couteaux de bergers toujours plus séduisants.

L’un des best-sellers de Benoit, le laguiole à lame inoxydable, mouche en forme d’abeille, double platine ciselée et mitres brossées. Ici avec un manche en bois clair, mais on peut aussi le choisir avec de l’os, de la molaire de mammouth, du bois de cerf ou du corail fossilisé.

L’importance de la lame Même si le manche, le guillochage des platines ou la présence de mitres donnent un cachet particulier à un couteau de Laguiole, le plus important restera toujours la lame. LA PLUS CLASSIQUE : acier XC75. C’est une lame qui peut être brillante (polie) ou mate (brossée), offrant un tranchant correct mais sensible à l’oxydation. Elle est réservée aux couteaux d’entrée de gamme. LA PLUS RÉPANDUE : acier 12C27. Comme la précédente, cette lame est proposée en deux finitions (polie ou brossée) mais résiste à l’oxydation. On la dit d’ailleurs inoxydable. Elle est disponible sur quasiment tous les types de couteaux de Benoit. LA PLUS AUTHENTIQUE : brut de forge. Cette lame n’est pas inoxydable (on ne passe pas à la forge un acier traité inox), révèle des reliefs et des couleurs qu’on croit réservés aux couteaux du siècle dernier et donne un cachet particulier aux couteaux qui en sont dotés. LA PLUS RECHERCHÉE : damas. C’est un acier fait de deux qualités différentes, forgé et martelé à chaud pour se souder. Il existe deux types : oxydable, forgé par Benoit, et inoxydable, acheté à un artisan de Montézic. L E S P L U S RA R E S  : Benoit travaille aussi avec des aciers étrangers, comme le VG10 japonais qu’on retrouve sur les couteaux de cuisine des chefs.

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CULTURE

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GUILLAUME PERRET

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CULTURE Le saxophoniste fou, qui présente la particularité d’avoir électrifié son instrument, signe la BO du long-métrage 16 levers de soleil, réalisé autour d’images de l’extraordinaire voyage de Thomas Pesquet qui sera présenté en avant-première à Cannes (pour une sortie en salles le 6 juin 2018). Nous l’avons rencontré en marge de son actuelle tournée solo. Textes et photos A. Bloch

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ncore plongée dans la pénombre, la scène est tout juste animée par la danse des lumières multicolores d’une boîte à rythmes. Alors qu’on croit entendre au loin la corne de brume d’un énorme paquebot rentrant au port, on distingue un halo lumineux virevoltant dans l’air, depuis les coulisses. Celui-ci provient du pavillon du saxophone ténor de Guillaume Perret, qui entre justement sur scène. Grâce à un pédalier sur mesure regroupant des dizaines d’effets sonores, à un looper, mais aussi à une grosse « mixette » faisant office de baguette de chef d’orchestre (ou d’homme-orchestre, en l’occurrence), Guillaume forme un groupe à lui tout seul. Des trois précieux kilogrammes de laiton qu’il tient entre les mains, il extrait ainsi alternativement lignes de basse, riffs de guitare, percussions, voire à l’occasion de virtuoses solos de violoncelle. Et Guillaume de détailler : « L’une des pédales essentielles dans le dispositif permet de jouer au choix une ou deux octaves audessus ou en dessous du son direct. Comme un saxophone en couvre en principe deux et demie, mais qu’on peut en tirer quatre quand on joue vraiment bien, j’arrive à huit octaves en tout. Autant qu’un piano ou un orchestre symphonique ! » En fait, un piano compte le plus souvent 88 touches, ce qui donne sept octaves un tiers, mais ne chipotons pas, on a bien compris l’idée. Sur l’opus qui sert de base à cette tournée (Free, sorti fin 2016), il a fait le choix de jouer seul, pour pousser à l’extrême un concept qu’il expérimentait jusqu’alors dans le cadre plus rassurant d’un quartet (avec guitare, basse et batterie) : Electric Epic. La collaboration a fini par tourner au vinaigre, mais avait déjà donné naissance à deux albums (et un EP) entre 2012 et 2014. Pour se faire une idée de ce que ça donnait à l’époque, on peut notamment écouter Shoebox, le tube du groupe, sur lequel le saxo de Guillaume se muait comme par magie en bonne grosse guitare archi-saturée qui tache.

Helvète underground

Si l’on reprend l’aventure depuis le début, Guillaume a grandi à Annecy, en Haute-Savoie, entre un piano et les disques de ses parents : au programme, beaucoup de classique, mais aussi du rock progressif et pas mal de vieux 78-tours de jazz. Il entre au conservatoire du coin à tout juste 6 ans, mais doit patienter un an de plus avant de jouer du saxo : « C’est le bon âge pour commencer, même si on doit pouvoir trouver sur Youtube un Chinois de 3 ans qui démonte à toute blinde un morceau de Rimsky-Korsakov ! » Mais au conservatoire, on joue du saxo classique, naturellement, ce qui restreint considérablement la palette de jeu : « C’est un instrument trop moderne, et accessoirement moins beau qu’une clarinette ou un hautbois dans le répertoire. On doit jouer coincé, alors qu’un saxo doit exploser pour révéler toute sa richesse sonore. » On ne peut pas dire qu’il révise des masses entre deux cours (lui se définit même rétrospectivement comme un authentique « branleur »), alors il s’entraîne par la force des choses à déchiffrer en catastrophe, au dernier moment : une excellente formation ! Il bascule progressivement dans des cours plus jazzy, tout en suivant des cours d’harmonie et d’arrangement pour orchestre. Il accompagne

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Pour suggérer qu’un orchestre l’accompagne, Guillaume a conçu cette machine à lumières à partir de chutes des usines Selmer.

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CULTURE Une diode réagissant au son permet d’illuminer le pavillon, ou de créer un halo lumineux lorsque les régisseurs balancent la fumée.

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également des cours de danse africaine, où il découvre toutes sortes d’instruments fabuleux : « Doum-doum, balafon, n’goni.. De temps en temps, on avait même un griot [sorte de barde-conteur d’Afrique de l’Ouest] qui passait une tête. » Première grosse claque musicale, avant la musique indienne ou le métal. Il ne fera jamais, par la suite, de conservatoire supérieur. Au lieu de cela, il commence à traîner ses guêtres dans les clubs de Genève ou de Lausanne où, contre toute attente, la scène musicale est, à l’en croire, particulièrement enthousiasmante. Puis il entame une bonne tournée de tout ce que Londres ou Berlin, notamment, comptent de jam-sessions, tournée qui le mènera finalement jusqu’à New York. Lui qui ne baragouine alors que quelques mots d’anglais se met à consigner soigneusement sur une carte de la Grosse Pomme tous les clubs sympas et les horaires des jams : il commence souvent à 18 heures, puis bascule ailleurs à 21 heures... pour parfois terminer autour de 8 heures du mat’. « Dans les jams, on se met d’accord pour partir d’un morceau. Si tu ne connais pas, on t’en propose un autre, mais si tu ne le connais pas non plus, c’est vraiment la loose, alors tu rentres et tu travailles pour la fois d’après. En plus, il y a vraiment des gardiens du temps, qui ne jurent que par telle ou telle obscure version, qui n’est pas celle du Real Book que tout le monde se refile sous le manteau. » Il obtiendra d’ailleurs plus tard une bourse du French-American Cultural Exchange pour revenir aux États-Unis, dont il n’a semble-t-il pas fait grand-chose d’autre que de mémorables barbecues.

Casse-tête technique

Guillaume se rend alors compte que, de collaborations amicales en projets semi-pros, il n’a jamais vraiment joué en France. C’est ainsi qu’il débarque à Paris, en coloc’ avec un peintre : « On habitait dans une vraie boîte à chaussures, grande comme le fauteuil sur lequel je suis assis, et un peu crado. J’allais m’entraîner dans le parking souterrain de l’immeuble. » Il n’a pas encore de groupe « à lui », mais commence à prendre les choses en main, en remplissant des dossiers de demande de subventions, en trouvant des résidences... Bref, tout ce qui constitue le job de leader, et qui n’a souvent pas grand-chose à voir avec la musique elle-même. En parallèle, il écume les clubs parisiens, comme le Baiser salé ou le Caveau des oubliettes. Il y joue en acoustique, mais continue dans le même temps à perfectionner son système d’électrification. Il en a eu l’idée un peu auparavant, en tombant chez un ami musicien sur deux pédales d’effets pour guitare, en particulier une wah-wah, dont l’exemple d’utilisation le plus emblématique reste sans doute pour l’éternité le célébrissime Voodoo Child de Jimi Hendrix. Avec un bricoleur de génie d’un magasin de musique de la rue Victor-Massé, pas loin de Pigalle, Guillaume se creuse la tête pour résoudre beaucoup de problèmes techniques, et notamment, comment envoyer la bonne impédance dans le pédalier avec autre chose qu’une guitare ou un clavier. Il se fait ainsi fabriquer sur mesure un premier pédalier, et trouve des astuces pour se faire installer convenablement les micros, et tout le toutim :

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CULTURE

ce sont aujourd’hui les fameuses usines Selmer (que nous avions explorées dans Followed #5) qui s’en chargent. Il installe par la même occasion ce qui constitue aujourd’hui une sorte de signature visuelle : une diode multicolore réagissant au son, et pouvant à la demande illuminer le pavillon du saxophone. C’est à partir de gimmicks réalisés avec à peu près tout ce qui fait du bruit et lui tombe sous la main, et enregistrés dans son téléphone, que Guillaume compose. Le tout premier album est illico signé chez Tzadik, le mythique label new-yorkais de John Zorn, sur lequel les musiciens français sont rarissimes : « La classe, mais pas vraiment le deal du siècle, puisque je crois que j’ai vendu mon master pour 5 000 dollars... peut-être même 1 000, je ne sais plus ! Il a été super mal distribué en plus, mais je crois que ça a donné une impression de rupture de stock. Les critiques ont été super bonnes et, à notre premier concert, au New Morning, il y avait genre 200 mètres de queue ! »

Un nouveau groupe

On pourrait penser que l’album suivant a été plus reposant, mais pas franchement : « Je l’ai super mal vécu, j’avais la grosse pression, et il y a eu en même temps les premières tensions avec les autres musiciens, parce que le truc commençait à se préciser autour de mon nom. Après l’enregistrement, j’ai même fait un genre de burn-out. » Lorsqu’il se rend compte que Guillaume a beaucoup (mais alors vraiment beaucoup) édité les pistes, le guitariste, qui ne se reconnaît plus dans la version finale, tape un scandale, puis le bassiste lui emboîte le pas... le grand classique. D’où l’album solo, grand classique également. Guillaume a toujours beaucoup travaillé sur des accompagnements de spectacles de théâtre ou de danse (il collabore d’ailleurs en ce moment avec la chorégraphe Carolyn Carlson). Il a aussi toujours conçu les albums comme des sortes de bandes originales de films : « Parce que, pour composer, je pars toujours d’idées visuelles, une course-poursuite dans une ruelle sombre, un désert de sel sous le soleil écrasant. » Rien d’étonnant donc à ce qu’on le retrouve aujourd’hui comme compositeur de la BO d’un long-métrage construit à partir de rushs exclusifs de l’aventure scientifico-cinématographique de notre astronaute national, Thomas Pesquet, lui-même saxophoniste. « J’ai bossé avec l’image, à partir d’un genre de cahier des charges. Pour le décollage de la fusée, par exemple, j’ai fait un pur morceau qui monte vachement bien en pression, je trouve. Là, j’ai même dépassé le timing qu’on m’avait donné, parce qu’il me semblait évident qu’il fallait que ça déborde un peu sur la séquence suivante. J’ai un peu mis le brief à ma sauce. » Il s’est entouré pour l’occasion de nouveaux musiciens, dont on ne saura pas grand-chose, si ce n’est qu’ils sont tous « dans le circuit », plus ou moins issus du jazz, et, comme lui, particulièrement branchés par les instruments électroniquement « augmentés ». De cette collaboration naîtra un nouveau groupe (avec des claviers à la place de la guitare, mais toujours basse et batterie), qui s’appellera Elevation. Pour continuer dans les scoops, un album devrait suivre à l’automne 2018, qui reprendra certaines musiques du film (lesquelles devraient dans l’intervalle être jouées en live au cours de certaines projections), et comportera aussi plusieurs autres morceaux exclusifs. On n’a pas réussi à en savoir beaucoup plus pour le moment, mais une chose est sûre : ça va envoyer du bois... et du cuivre.

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En plus du pédalier sur mesure regroupant des dizaines d’effets, Guillaume s’est adjoint récemment les services d’une boîte à rythmes.

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Rock and roll

Roland 48 Followed Magazine

Photos DR

CULTURE


Look totalement improbable, moustache et lunettes double foyer assorties, il ne paie pas de mine. Roland Grivelle est pourtant le meilleur ami des superstars du rock. Jamais Rod Stewart, Duran Duran, James Brown ou B. B. King n’auraient démarré une tournée sans le Frenchie. Son pote Bob Dylan le surnomme même Mister President ! De New York à Budapest en passant par le Plaza Athénée et l’Olympia, voyage au pays des coulisses du vrai rock and roll en compagnie de Roland Grivelle et de ses potes, Otis Redding, Santana, les Rolling Stones, Chuck Berry ou Freddie Mercury. Textes A. Gardinier

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inq décennies à traîner dans les coulisses, à trimballer les stars ou leurs valises dans les couloirs, à faire l’interprète, le chauffeur, l’éclairagiste, le serveur, le faux garde du corps... Cinquante ans, ça use. Alors Roland Grivelle ne quitte plus trop Beaubourg et son quartier de l’Horloge qu’il sillonne chaque matin. C’est ici qu’il est né d’une mère allemande et d’un père hongrois qui avait effectué son apprentissage d’horloger à Budapest chez Vilmos Gabor, le père des sœurs Zsa Zsa, Eva et Magda. Fuyant la guerre, le patriarche s’installe comme horloger à Strasbourg avant de rejoindre l’armée française via la Légion étrangère. Capturé, il est fait prisonnier et survit dans les camps en se rendant indispensable par son talent de réparateur de montres et horloges. Libéré, il arrive à Paris et monte sa propre horlogerie dans le quartier qui deviendra celui de... l’Horloge. C’est là que naît Roland Grivelle, ou plutôt Roland Gerö : « Mon père réparait donc des montres, en particulier pour les policiers affectés au commissariat du troisième arrondissement, qui était également situé rue Beaubourg. Comme il avait servi la France, le commissaire a proposé de l’aider pour accomplir ses formalités afin de devenir citoyen français. Son nom hongrois étant quelque peu typé, le policier lui a demandé s’il en avait un plus français en tête. Il n’en connaissait pas, alors le commissaire a proposé celui de son propre chapelier, un certain M. Grivel. Il a ajouté un l et un e, et c’est devenu Grivelle, un nom totalement fabriqué. » ROLAND GRIVELLE A GRANDI LÀ, entre les étals des maraîchers ou des bouchers-tripiers et les cafés-bars-PMU qui composaient l’essentiel des commerces du quartier. Pas vraiment doué pour l’école, pas plus que pour les activités physiques. Alors le petit Roland, à qui ses parents ont payé quelques semaines de cours d’anglais à l’école Berlitz, va devenir coursier pour une agence de voyages, puis groom et chasseur dans de grands hôtels parisiens. Le voici en septembre 1964, à l’âge

de 17 ans, se présentant pour un poste de groom au Plaza Athénée. Vu qu’il n’y a pas le téléphone dans l’appartement familial, il reçoit quelques jours plus tard un pneumatique lui annonçant qu’il est engagé. L’anglais a joué en sa faveur, merci Berlitz ! Il y accueille Ursula Andress, Martine Carol, Natalie Wood ou encore Barbra Streisand qui venait pour la première de Funny Girl. Il serre aussi la main de Quincy Jones. Surtout, il se découvre un intérêt certain pour le show-business. Déjà le show. Le business viendra plus tard.

L’OLYMPIA

Son truc de l’époque, ce sont les divas. Il réussit même, en amadouant le concierge de l’hôtel, à aller écouter Maria Callas à l’Opéra dans Norma et Tosca. Il apprécie aussi le jazz et se fait souvent remplacer pour aller entendre les artistes américains amenés salle Pleyel par le tandem Frank Ténot-Daniel Filipacchi. L’un de ses premiers concerts de rock est celui que les Beatles donnent à l’Olympia en février 1964 avec, sur la même affiche, Pierre Vassiliu, Sylvie Vartan et Trini Lopez. Puis, il ne sait plus par quel hasard, il rencontre Catherine Félix, animatrice de Musicorama sur Europe 1. Elle le fournit régulièrement en places pour assister aux émissions qu’elle enregistre à l’Olympia chaque lundi : « Je n’ai ensuite jamais oublié de lui faire porter un bouquet de roses à la Sainte-Catherine ! » Parmi ceux qui se sont produits à Musicorama : The Rolling Stones, The Who, Stevie Wonder puis, en 1966-1967, Otis Redding, Bob Dylan, Chuck Berry, Jimi Hendrix... Le jeune Roland est assez groupie, demandant des autographes, faisant des photos, entrant par une porte et sortant par l’autre, jusqu’au moment où les dirigeants de l’Olympia s’aperçoivent

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CULTURE qu’il parle anglais. C’est tellement rare à l’époque. Petit à petit, il va devenir celui à qui on fournit la fiche technique, à qui on demande de traduire tel papier et qui doit être présent lorsque les artistes déboulent en coulisses afin de satisfaire toute demande de leur part. L’Olympia n’étant pas équipé en triphasé comme aux États-Unis, il devient le gars qui doit expliquer le fait à chaque équipe technique anglo-saxonne puis leur montrer comment brancher leur matériel. Durant les concerts, il se pose le plus souvent dans la cabine de régie située sur un côté de la scène avec Roger Morizot, le responsable technique, afin de donner les tops et effectuer la liaison entre les deux équipes techniques. Tout cela s’est fait très naturellement jusqu’au moment où Jean-Michel Boris, le directeur de la salle, le convoque dans son bureau pour l’officialiser et l’enregistrer comme employé occasionnel, en parallèle à son activité de chasseur dans les hôtels. Grivelle jongle avec les horaires, ce qui lui permet d’assister à énormément de concerts vu que cette collaboration a duré plus de quinze ans. THE BAND, LE GROUPE DE DYLAN, avec qui il allait ensuite passer deux jours, les deux premiers concerts de Leonard Cohen à Paris, un samedi à 17 heures puis à 0 h 30, et aussi Frank Zappa et les Mothers of Invention, Janis Joplin avec sa bouteille de whisky à la main, Ike and Tina Turner, le premier show de Santana en avril 1971, Stephen Stills et son groupe Manassas à la gare de la Bastille (l’Olympia s’étant alors délocalisé). Polnareff, également. Et quand quelqu’un passe quinze jours ou trois semaines sur place, Roland se met à son service comme avec Liza Minelli ou encore Ginger Rogers et Jerry Lewis, pour qui il fut aussi interprète durant leurs interviews : « Jerry est venu deux fois, dont la première en 1971 avec son batteur et son pianiste-chef d’orchestre, les autres musiciens étant français. Le show était génial. Quand les artistes et les groupes me demandaient où aller dîner, je les envoyais le plus souvent au Grand Café, boulevard des Capucines, car il restait ouvert toute la nuit et les menus étaient en anglais. La plupart du temps j’étais invité et j’y allais avec eux. Sinon, comme pour le groupe Alice Cooper, je les emmenais au Studio, un tex-mex situé rue du Temple. C’était pratique car j’habitais juste à côté, rue Rambuteau, et je pouvais rentrer me coucher rapidement ! »Comme tant d’autres de ses compatriotes, Roland rêve d’Amérique. Entre ses jobs dans les hôtels et sur les concerts, il trouve toujours du temps pour aller se balader sur le continent nord-américain. EN 1967, ÂGÉ DE 20 ANS, il y reste plus d’un an, principalement au Canada avec pas mal de virées à New York pour voir les Platters, les vrais, ou encore Chuck Berry, avec qui il avait sympathisé lors de ses passages à l’Olympia : « Parmi tous les concerts de Chuck, je me souviens de celui du Madison Square Garden en octobre 1975 quand je suis allé lui porter sa serviette-éponge sur scène. Sinon, par exemple, j’avais dégoté en 1972 un billet round trip aux États-Unis vraiment pas cher et j’ai commencé par aller assister à un concert d’Elvis

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Presley à San Antonio, au Texas. Je ne voulais pas mourir avant d’avoir vu Elvis sur scène ! [Ce show d’avril 1972 est considéré comme l’un des trois meilleurs concerts de toute la carrière d’Elvis avec Jackson en Floride en 1956 et Hawaï en janvier 1973, NDLR]. Ensuite, je suis parti à Milwaukee retrouver le groupe Chicago que j’avais connu à Paris puis j’ai continué ainsi à aller assister à pas mal de concerts un peu partout à travers le pays. »

DYLAN ET MISTER PRESIDENT

Il y a les rock-stars et il y a Bob Dylan. Grivelle est son fan numéro 2 en France, juste derrière le chanteur Hugues Aufray. Quand il est annoncé pour un seul concert à l’Olympia le 24 mai 1966, Roland apprend qu’il y aura la veille une conférence de presse à l’hôtel George V. Il tente de s’y introduire et, après avoir été viré deux ou trois fois, il réussit finalement à entrer avec, sur l’épaule, un projecteur qui traînait, servant à l’équipe technique du cinéaste D. A. Pennebaker, qui suivait alors l’artiste partout pour son documentaire Dont Look Back. À la fin, le responsable de la maison de disques vient le féliciter pour la manière dont il est arrivé à s’incruster et l’invite à venir boire une coupe de champagne dans le salon attenant. Comme il connaît toutes les issues de l’hôtel, Roland se retrouve devant la suite de Bob au moment ou ce dernier y pénètre, Pennebaker filmant la scène. Les deux discutent, Grivelle faisant subir le questionnaire de Proust à l’Américain, tandis que Françoise Hardy patiente dans le couloir. Île de Wight 1969, une semaine après Woodstock : Roland est bien sûr présent et, tandis qu’il arrive à se glisser dans une sorte d’enceinte pour invités sur le côté de la scène, à défaut d’avoir pu intégrer les coulisses, quelqu’un de l’équipe de Dylan lui montre de loin une route qui rejoint le site en lui précisant que la Rolls de Bob prendra ce chemin après une chanson précise. Sitôt le morceau entamé, il part s’y poster et, quand la voiture arrive à son niveau, elle ralentit. La légende veut qu’il se soit accroché au coffre mais il assure que non. En fait, Grivelle pique un sprint, la Rolls s’arrête et Dylan l’apostrophe : « Qu’est-ce que tu veux, Mister President ? – Moi ? Rien. – Bon, alors monte. »


La soirée en fait que commencer : « On s’est retrouvés dans une grande maison que Bob avait louée et où il y avait beaucoup de monde : les Stones, les Who, Lennon et Yoko... Mais j’étais trop crevé et, après avoir mangé et bu quelques verres, je me suis endormi sur un canapé. » Le lendemain, au réveil, on vient le chercher pour aller prendre un petit bateau privé qui le ramène à Southampton d’où il prend un ferry pour Le Havre puis un train pour Paris. LA RELATION QU’IL ENTRETIENT AVEC DYLAN va perdurer au fils des années et des rencontres. En 1978, le journaliste Philippe Adler (décédé en mars 2017) part rencontrer l’artiste à Londres en amorce de ses concerts parisiens à venir. Lors de l’interview, Dylan lui annonce que la seule personne qu’il est certain de vouloir rencontrer en France se nomme Mister President. Dylan a surnommé Roland ainsi car ce dernier lui avait proposé de devenir le président de son fan-club français. À côté de l’article principal publié juste après l’entretien, il y a un encart titré Mister President Roland Grivelle expliquant qui est ce personnage totalement inconnu du grand public. Tout d’un coup, le chasseur des grands hôtels devient lui-même une petite star ! Il se rend évidemment aux quatre concerts début juillet au Pavillon de Paris et retrouve plusieurs fois Mister Dylan dans sa suite de l’hôtel Meurice. Lors de la tournée suivante, en juin 1981, il est engagé par la promotrice Jackie Lombard pour lui donner un coup de main lors des trois concerts français de Bob à Toulouse, au stade de Colombes puis à Avignon. Grivelle est bien sûr dépêché à Roissy pour accueillir son ami. À L’ÉPOQUE, DYLAN AIMAIT SE DÉPLACER EN TRAIN et Grivelle ira le réceptionner, ainsi que son groupe, à la gare de Lyon-Part-Dieu pour les amener, toujours en train, à Avignon qui était la dernière date européenne de sa tournée. Puis ils rejoindront Marseille et prendront ensemble l’avion pour Paris où le Français à lunettes accompagne l’Américain chevelu jusqu’à son long-courrier suivant. Quelques mois plus tard, début novembre, alors qu’il se balade aux États-Unis, il débarque à Cincinnati sur la seconde partie du Dylan World Tour. Il pense juste assister à ce show mais il restera trois semaines, dormant dans le bus des musiciens. Il y aura ensuite West Lafayette dans l’Indiana, Ann Arbor dans le Michigan puis deux jours à La Nouvelle-Orléans. Entre les deux shows, il va traîner dans Bourbon Street avec le pianiste, le fameux Al Kooper. Pennebaker est encore là avec sa caméra et lui achète des baskets blanches : « Il m’a filmé partout avec ces baskets, des images que je n’ai jamais vues. Aux concerts de La Nouvelle-Orléans, j’ai présenté Bob sur scène en français, ce qui était assez marrant. Puis à Nashville on s’est rendus chez le grand Leon Russell que j’avais vu au Gaumont Palace, la grande salle de cinéma qui se situait rue Caulaincourt et qui a aujourd’hui disparu. Il s’y était produit en première partie du film Mad Dogs and Englishmen autour de la tournée américaine 1971 de Joe Cocker sur laquelle il était pianiste et chef d’orchestre.

Pour l’anecdote, j’ai ensuite remplacé un éclairagiste malade sur une tournée européenne de Cocker. Quant au Gaumont Palace, j’y avais vu les Beach Boys, tout en m’occupant également d’eux en décembre 1970. » Avec Grivelle, rien n’est jamais terminé. Resté en contact avec le road manager de Dylan, il rejoint la tournée européenne Dylan-Santana en 1984 en tant que responsable des bagages personnels des artistes et assistant pour les contacts locaux. Cette très grosse tournée, organisée par le célèbre promoteur américain Bill Graham, s’effectue en avion privé d’une cinquantaine de places, le tout dans un grand secret, sans road book, tout fonctionnant avec des petits papiers distribués à l’arrivée de l’avion avec les infos et le nom de l’hôtel : « Le premier concert était à Vérone, en Italie. Ça a commencé par une conférence de presse de Bob et Carlos, chapeautée par Bill Graham. Ensuite, le plus souvent, on partait juste après le show pour le concert suivant. C’était tellement secret qu’un jour, on m’envoie en Allemagne pour aller chercher les grandes bottes en cuir de Bob qui étaient restées dans sa valise dans la soute de l’avion. Après les avoir récupérées, je tombe sur un type de l’équipe que j’avais déjà rencontré lors de la tournée 1981 et qui me propose d’assister au show du soir en tant qu’invité. J’ai dû lui expliquer que moi aussi je travaillais sur cette tournée ! » Il y a eu pas mal de guest-stars durant cet European Tour comme Mick Taylor, Joan Baez à Nice et au parc de Sceaux, également Hugues Aufray qui viendra chanter une chanson sur scène avec Bob à Sceaux et à Grenoble... À LONDRES, NICK LOWE ET UB40 rejoignent les artistes sur la scène de Wembley : « Avec l’équipe de Santana, je te confirme qu’il y avait de l’ambiance dans l’avion ! C’était une expérience incroyable. Je suis d’ailleurs remercié dans les crédits de l’album de Bob Real Live qui fut enregistré durant cette tournée. »

JAMES ET NINA

Avec Grivelle, on part sur des grands noms ou on reste chez soi. Un autre de ses amis s’appelle James Brown. Déjà, en 1966, Roland était allé l’accueillir avec d’autres fans au Bourget. Il existe une photo de ce jour où il pose avec tous les jeunes qui sont venus souhaiter la bienvenue à Mister Dynamite. Puis, juste avant les concerts du Godfather of Soul à l’Olympia en septembre 1967, Jean-Michel Boris, le directeur artistique du lieu, lui demande de se rendre un jour ou deux à Anvers en Belgique où Brown se produit, afin d’être certain que la troupe et tout le matériel suivent sans problème jusqu’à Paris, date du

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CULTURE

prochain concert. L’année suivante, en balade à Toronto, au Canada, Grivelle rend visite à James et assiste à son concert. C’était le lendemain de la mort de Martin Luther King, le 5 avril 1968. Un show explosif [qui a été filmé et existe en DVD, NDLR]. Puis, à chaque fois que le pape de la soul vient à Paris, il le retrouve, pour le travail ou comme simple invité avant qu’il ne soit engagé sur la tournée suivante de Brown en France et en Allemagne. Grivelle partira également sur une tournée américaine où il va assister à d’excellents concerts mais malheureusement manquer le tout dernier, à l’Apollo de Harlem : «  C’était le jour de mon retour à Paris. James voulait que je reste avec lui mais je n’ai pas pu changer la date de mon billet d’avion. » SI JAMES BROWN EST BIEN LE ROI DE LA SOUL, la reine s’appelle Nina Simone. Et qui trouve-t-on à ses côtés lors des années remuantes avant sa disparition ? Grivelle ! « J’ai rencontré Nina à Cannes où on m’a demandé de m’occuper d’elle lors du Midem. Elle y a donné un concert assez hard, traitant tous les professionnels de la musique, soit la salle entière, d’escrocs et de voleurs. Puis on m’a demandé de venir gérer l’intendance pour un show de Nina en Italie suivi de deux ou trois autres. Je me suis ensuite installé pour quelques semaines dans la maison qu’elle venait d’acheter à Bouc-Bel-Air sur la Côte d’Azur. Comme Nina n’était pas une personne très facile, c’est le moins qu’on puisse dire, il me fallait quelques moments de “décompression” à Paris et j’ai fini par ne rester chez elle que lors de séjours ponctuels. » La mission première de Roland ? S’occuper des transports et des bagages de la superstar... C’est avec Nina qu’il se rend pour la première fois au Brésil pour deux concerts à Rio et à São Paulo. Au retour, la maison de Bouc-Bel-Air prend feu ! Roland est à Paris mais il descend dans le Sud afin de recevoir les experts des assurances et autres tâches pratiques. « On a parlé d’un feu provoqué mais je pense plutôt que c’était accidentel : Nina fumait beaucoup, en particulier au lit. En tout cas, c’était quelqu’un de difficile à vivre, c’est certain. » ROLAND LE BINOCLARD n’a pas été que le porteur de valises de l’intelligentsia du rock et de la soul. Il organisera des charters proposant tickets et transports en bus à des fans français. Le premier, c’était l’île de Wight en 1970. Après s’être acoquiné avec les promoteurs du festival, il emmènera une cinquantaine de personnes écouter The Who, The Doors, Hendrix, Miles Davis, Free, Emerson Lake and Palmer, Leonard Cohen et autres monstres de l’époque. Puis ce sera le festival de Knebworth où il entend parler du fameux concert de réunion que Crosby, Stills, Nash and Young vont donner au Wembley Stadium. Il décroche un train spécial pour Calais, un ferry et vingt-cinq bus de Douvres à Wembley, cela pour 1 200 personnes. Il devient ensuite le coordinateur français pour Edwin Shirley Trucking, la société anglaise qui louait alors ses camions pour quasiment toutes les tournées rock.

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Cela lui permet de devenir spécialiste des douanes, en particulier celles des aéroports. Il finit par connaître tous les douaniers et les policiers qui, parfois, lui permettent d’aller chercher l’artiste sur le tarmac aux portes de l’avion. En échange, il leur offre des places pour les spectacles. « Les douaniers sont des gens charmants, mais attention : il faut toujours jouer cartes sur table. Si tu leur mets le couteau sous la gorge, tu es foutu. Je me suis ainsi occupé d’un grand monsieur, Miles Davis, que je suis allé accueillir à l’aéroport, avec qui j’ai eu ensuite un très bon contact et que j’ai suivi en tournée. Après son concert au Printemps de Bourges en 1982, il a fait attendre sa limousine un quart d’heure, le temps que je range mes affaires, et nous avons terminé la soirée en dînant dans sa chambre d’hôtel. » Il lui est arrivé d’attendre Simon et Garfunkel vingt-quatre heures durant à l’aéroport de Roissy avant d’apprendre qu’ils avaient atterri au Bourget ! Le voici en tout cas le plus grand spécialiste des formulaires de douanes tous formats, de passages de VIP par la piste et d’importation de matériel non dédouané.

FREDDY, B. B. ET LES AUTRES

Il est clair que notre homme n’est ni un manuel ni un physique. D’ailleurs, il a de l’asthme. Sa véritable fonction, c’est coordinateur, le genre de type qui peut rester assis quarante-huit heures devant un téléphone dans un bureau ou une chambre d’hôtel, quitte à ne manger que des sandwichs. Cependant, il n’a jamais totalement quitté son travail dans l’hôtellerie, ce genre de job dans la musique étant quand même assez précaire. Il collabore alors fréquemment avec les gros promoteurs de concerts comme KCP ou encore Alias avec qui il travaille sur leurs premières grosses tournées comme celles d’Eurythmics et de Phil Collins. IL EST SUR LES CONCERTS DES ROLLING STONES puis de David Bowie à Auteuil, d’AC/DC au Bourget, de Duran Duran quand ils étaient au top pour un grand tour dans toute


l’Europe et aux États-Unis. Pantalon pattes d’eph en Tergal et tee-shirt troué, cheveux en pétard et lunettes à double foyer, le Parisien au look on ne peut plus anti-fashion navigue sans souci au milieu des dandys du rock sapés comme jamais. « Ce furent encore six mois de ma vie sans un temps mort. On faisait les premières parties de Bowie au Canada, c’était assez sympa. Durant une petite période off, je suis parti à Las Vegas assister au show commun de Jerry Lewis et de Sammy Davis Jr. J’ai été super bien accueilli en coulisses par Jerry et son manager. Sammy était très agréable et ce fut un très bon moment. Je suis également passé dire bonjour à Barry White chez lui à Los Angeles. On a bu un verre au bord de sa piscine, c’était pas mal. » En général, surtout en France, Roland s’occupe de plus en plus d’aller chercher les artistes à l’aéroport, de leurs bagages, de vérifier que les loges soient bien aménagées, du contact entre l’équipe locale et les Anglo-Saxons, etc. Ce n’était pas encore vraiment bien organisé comme aujourd’hui, pas très professionnel et plutôt, c’est le cas de le dire, rock and roll. À l’époque, l’occasion faisait souvent le larron. Il était ainsi chargé de réceptionner Queen à l’aéroport : « Freddie Mercury était un amour, un type facile, sympa, toujours OK pour une photo ou un autographe avec un fan. » Mi-juin 1986, il va voir le groupe à Bruxelles en tant qu’invité lors de leur énorme Magic Tour et apprend que, fin juillet, ils seront au Nepstadion de Budapest. IL SORT ALORS SA BOTTE SECRÈTE : il parle hongrois, langue que son père lui a transmise quand il n’était qu’un gamin de la rue Beaubourg. Le voilà engagé pour la date ! Arrivé au stade où le groupe va se produire, le fils de l’horloger hongrois se retrouve dans une salle en compagnie des douaniers locaux à qui il s’adresse en hongrois. Il faut encore remplir les fameux carnets ATA de dédouanement du matériel et cela prend toujours des heures. Tout sera réglé en dix minutes. Grivelle, ou le couteau suisse du rock ! Entre-temps, il est allé voir Rod Stewart début juillet à Wembley où l’Anglais démarrait sa grande tournée de 1986. Son road manager, avec qui il avait été en contact lors d’une tournée précédente, lui parle des concerts français que Rod The Mod va donner début août à Montpellier, Annecy et Nice. Un nouveau boulot pour lui, engagé pour s’occuper, comme il sait désormais si bien le faire, des bagages et de la coordination pour la star et ses musiciens. À Nice, au moment de régler sa note de frais, le manager lui demande de rester avec eux pour la suite de la tournée. « Comme ce n’était pas du tout prévu, je n’avais pas emporté assez d’affaires de rechange et le lendemain, jour off, nous voilà partis avec Tom Mooney, le road manager de Rod [ainsi que de Bob Dylan et des Rolling Stones, NDLR] dans les boutiques de Nice afin de faire du shopping pour m’habiller aux frais du groupe ! J’ai ensuite téléphoné à ma mère pour qu’elle me prépare une valise que la société américaine Robin Cargo, qui gérait les bagages de la

tournée, est allée chercher chez moi rue Rambuteau et que j’ai récupérée à Hambourg ! » CET EUROPEAN TOUR a finalement comporté une soixantaine de dates et Roland ne rentrera chez lui à Paris que minovembre. « Mais ce fut un plaisir : Rod est un mec génial et ses musiciens étaient également très sympas. C’était vraiment super et j’ai d’ailleurs travaillé sur la tournée suivante. » Dans le CV qu’il n’a jamais rédigé, beaucoup de noms anglo-saxons mais peu de groupes et artistes français. Mais notre personnage s’est quand même frotté au rock hexagonal en travaillant pour le groupe Bijou durant deux ans, y compris pour les deux shows de mars 1979 à la Bourse du travail de Lyon, deux concerts très chauds avec la participation de Gainsbourg. Il y aura également la Frenchrockmania au Palais des sports de Paris en 1979 avec d’autres groupes français et encore Gainsbourg, qui était revenu pour un duo. Grivelle est préposé à la régie et s’occupe aussi de l’éclairage de Bijou, ce qui s’avère assez simple vu que le groupe ne voulait que du blanc ! SI DYLAN ET JAMES BROWN furent deux rencontres déterminantes dans sa vie hors norme, il est impossible de ne pas y adjoindre B. B. King. La majeure partie de la fin de la carrière du moustachu de Paris-centre se passera en compagnie du bluesman du Mississippi. « J’avais croisé B. B. à l’Olympia au début des années 1970 et à chaque fois qu’il venait à Paris, soit assez souvent, le bureau de New York m’appelait. Je restais avec B. B. et son manager, je m’occupais de leurs transferts. » Puis, en 1997, Roland reçoit un fax lui proposant de partir en tournée avec eux afin de cogérer la logistique : bagages, hôtels. Quand il demande au manager pourquoi il l’a choisi, ce dernier lui répond : « You serve the purpose », ce qu’on pourrait traduire par : tu sers le but. B. B. King tournait beaucoup et ils avaient besoin de quelqu’un qui connaissait bien l’Europe. Mister President sera leur homme ! « Par exemple, quand on se déplaçait dans de gros bus, je savais quels hôtels pouvaient les accueillir et, inversement, ceux devant lesquels on ne pouvait pas se garer. » Roland travaillera ensuite sur toutes les tournées de B. B. hors États-Unis, car il était trop difficile pour un Français d’y obtenir un visa de travail. Le vieux bluesman emmènera Roland quatre fois au Brésil, en Nouvelle-Zélande ou encore en Australie. À Adélaïde, B. B. et sa fameuse guitare Lucille se retrouvent en première partie de Dylan, ce qui permet au Frenchie de pouvoir retrouver son vieil ami et de papoter avec lui. Grivelle accompagnera le vieux B. B. jusqu’à son tout dernier concert : « Notre collaboration a duré jusqu’à son ultime show à São Paulo en octobre 2012. Il était de notoriété publique dans le milieu que B. B. était un super patron et s’occupait vraiment bien de ses musiciens, contrairement à beaucoup d’autres. Je suis fier d’avoir tourné avec lui et triste de ne pas l’avoir revu avant sa mort en mai 2015. Depuis, je suis à la retraite de l’hôtellerie et du rock ! » À 70 ans, Roland peut désormais contempler et classer son inestimable collection de tee-shirts de tournées. Grivelle rocks !

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Foire de Bâle D

epuis cent ans, les horlogers suisses se donnent rendezvous à Bâle pour y exposer leurs nouveautés. Si la foire évolue, en intégrant des marques étrangères, françaises, allemandes ou japonaises, et en subissant la montée en puissance du salon genevois de début d’année, elle reste l’événement horloger incontournable. En voici la preuve en dix modèles.

TUDOR

Black Bay GMT Est-ce que 2018 sera l’année Tudor ? Alors que la marque cousine de Rolex file vers ses 90 ans (l’an prochain), elle semble depuis quelques mois enfin prête à sortir de l’ombre de son encombrante aînée (et propriétaire). Preuve en est, cette Black Bay GMT « Pepsi », rapport à la couleur bleu et rouge de sa lunette, qui débarque à Bâle au moment ou Rolex dévoile la sienne, la GMT-Master II « Pepsi ». Même fonction de double fuseau horaire, même code couleur, mais quelques différences quand même avec des mouvements maison bien distincts, un bracelet aux vis apparentes sur Tudor, qui propose aussi des versions sur cuir ou tissu Nato... et un positionnement prix moins élitiste. Cette Black Bay GMT coûte en effet, sur bracelet acier, 3 350 €.

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OMEGA

Speedmaster Apollo 8 The dark side of the moon, c’est à la fois la face cachée de la Lune, le huitième album du groupe Pink Floyd et une gamme de Speedmaster chez Omega. Cette nouvelle montre, en hommage à la mission Apollo 8 qui était, pour la première fois, passée de l’autre côté de la Lune en 1968, adopte une boîte en céramique noire, un cadran et un mouvement squeletté (ajouré) et un mélange de noir et de jaune inspirant à la fois l’espace et la vitesse. Dans cette boîte de 44,25 mm de diamètre bat un mouvement 1861 redécoré au laser pour figurer la surface de la Lune, rebaptisé 1869 pour l’occasion. On peut l’observer au travers de glaces saphir des deux côtés. L’ensemble est monté sur un bracelet cuir noir perforé et surpiqué et caoutchouc jaune. Avec, sur le fond de la boîte, l’inscription « we’ll see you on the other side », phrase que l’astronaute américain Jim Lovell déclama juste avant de disparaître derrière l’astre. Prix de vente : 9 000 €.

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BREITLING

Navitimer Super 8 Hommage aux aviateurs de la Seconde Guerre mondiale, cette Navitimer Super 8 reprend le design des instruments que les pilotes attachaient... sur leur cuisse, le fameux chronomètre 637. Une fois cette précision donnée, la démesure de l’objet, avec sa boîte de 46 mm, soit 50 mm de diamètre lunette comprise, semble alors moins importante. Proposée en boîte acier ou titane (ici avec cadran kaki), cette Breitling bat à la cadence d’un calibre mécanique à remontage automatique B20 (sur base Tudor) offrant 70 heures de réserve de marche. Évidemment, la montre est certifiée COSC et étanche, à 30 m de profondeur. L’ensemble, doté de verres saphir sur les deux faces, est monté sur un bracelet en cuir vieilli marron de type Nato. Prix de vente non communiqué.

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ROLEX

Oyster Perpetual Deepsea blue Avec 44 mm de diamètre, la Deepsea est une Rolex à part. Massive, lourde et imposante, c’est la plongeuse extrême et iconique de la marque, étanche à 3 900 m de profondeur. Pour cette nouvelle version, outre un cadran d’un magnifique bleu dégradé au noir, la Deepsea se dote du tout dernier mouvement manufacture maison 3235, à remontage automatique, 70 heures de réserve de marche, et aux propriétés antimagnétiques très poussées. Elle bénéficie aussi d’une glace saphir de 5,5 mm d’épaisseur et d’un nouveau bracelet, élargi et muni d’un fermoir de sécurité revu. Cela dit, la boîte est elle aussi nouvelle avec des cornes et des flancs redessinés. La lunette tournante unidirectionnelle est toujours en céramique noire avec des chiffres en platine, et le tarif toujours aussi coquet : 11 350 €.

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ORIS

Divers Sixty-Five L’une des dernières maisons indépendantes est aussi l’une des seules à ne faire que du mouvement mécanique, bannissant le quartz de ses gammes. Cette maison, c’est Oris. Pour Bâle 2018, la marque suisse a dévoilé une évolution de sa Divers Sixty-Five, en hommage à la première plongeuse Oris, sortie en 1965. Avec une touche de bronze sur le rehaut de la lunette tournante, qui s’accorde parfaitement aux aiguilles et index dorés, cette Divers a ce qu’il faut d’exotisme. Elle est proposée en deux tailles de boîte, 40 mm avec la date à 6 heures (ici) ou 36 mm avec la date à 3 heures. L’autre subtilité de cette déclinaison est la présence d’une glace saphir bombée qui ajoute une petite touche vintage séduisante. À l’intérieur, on retrouve un calibre Sellita SW200-1 modifié par Oris. L’ensemble, étanche à 100 m, est monté sur des bracelets cuir, Nato ou acier. Prix de vente : 1 950 €.

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ANONIMO Epurato

La petite marque suisse, née italienne, n’arrête pas de nous surprendre. Après ses Militare et Nautilo, elle présentait à Baselworld cette Epurato... qui se veut épurée comme son nom l’indique. Elle fait mouche avec son design minimaliste, sa boîte en acier ou en bronze (ici) en forme de coussin de 42 mm de diamètre, ses fonctions heures, minutes, secondes et date et son bracelet interchangeable sans outil. Ses bracelets sont accordés aux cadrans, vert (ici), mais aussi bleu, blanc, crème, noir ou marron soleillé. Le mouvement mécanique à remontage manuel est encore le Sellita SW200, éprouvé et précis, que l’on retrouve dans les autres modèles de la marque. Prix de vente : 1 190 € (acier) ou 2 850 € (bronze).

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SINN 103 Sa B E Connue seulement des amateurs de montres éclairés, Sinn est une marque allemande, basée à Francfort. Pour Baselworld, elle dévoilait son nouveau chronographe 103 Sa B E dont la principale caractéristique est l’adoption d’un bleu électrique sur le cadran et la lunette tournante. Autre point remarquable, la glace saphir bombée, taillée dans un bloc de 5 mm d’épaisseur pour donner cette courbure si particulière. Dans la boîte de 41 mm de diamètre sur 16 mm d’épaisseur se trouve un mouvement mécanique à remontage automatique Valjoux 7750 réputé pour sa robustesse. L’ensemble, étanche à 200 m, est proposé sur bracelets cuir, silicone ou acier en série limitée à 500 pièces, avec chaque masse oscillante gravée « XX sur 500 ». Prix de vente : 2 590 € sur cuir (ici en photo).

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TISSOT

Héritage Petite Seconde Sur l’endroit, c’est le mot « antimagnétique » qui attire l’œil, alors qu’elle ne l’est pas totalement d’ailleurs. Mais sur l’envers, grâce au fond saphir de grand diamètre, c’est le mouvement mécanique ETA 6498-1 à remontage manuel qui monopolise l’attention. Il y a fort à parier que les propriétaires de cette Tissot Héritage la détacheront régulièrement pour faire admirer son mouvement. Pour le reste, cette montre d’un diamètre de 42 mm cultive les traditions maison, reprenant les lignes d’un modèle de 1943 dont le guichet des secondes à 6 heures est la signature. Montée sur un bracelet cuir et boucle ardillon, elle est étanche à 50 m et offre 42 heures de réserve de marche. Prix de vente : 990 €.

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MICHEL HERBELIN Newport Chronographe auto Pour célébrer les 30 ans de son modèle iconique, la marque française Michel Herbelin dévoilait à Bâle cette version magnifique en série limitée à 300 exemplaires. Mêlant le design original de 1988 à celui de la dernière Newport Connect, ce chronographe de 43,5 mm de diamètre dispose d’une boîte recouverte de PVD gris anthracite sur bracelet caoutchouc bleu. Le cadran carbone unilatéral brut s’accorde aux aiguilles noires. L’ensemble est animé par le tout nouveau mouvement chronographe Sellita SW510, mécanique à remontage automatique proposant 42 heures de réserve de marche. Il s’expose sur l’envers, au travers d’un fond saphir avec comme pièce maîtresse la masse oscillante gravée Michel Herbelin et côtes de Genève. Une bien belle pièce vendue 2 350 €.

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SEIKO

Prospex SLA025 C’est la plongeuse de ceux qui ne veulent pas frimer. Sur le papier, c’est une montre étanche à 300 m, dotée d’un mouvement mécanique à remontage automatique offrant 55 heures de réserve de marche et proposée en série limitée à 1 500 exemplaires pour le monde. Mais quand on y regarde de plus près, on voit que cette réédition d’un modèle de 1968 est une drôle de plongeuse, avec une boîte monobloc en acier de 44,8 mm sur 15,7 mm (sans fond démontable pour le confort), montée sur un bracelet caoutchouc noir à boucle ardillon et animée par un mouvement « haute fréquence » battant à 36 000 alternances (que l’on retrouve aussi chez Grand Seiko, la marque de luxe du géant nippon). De quoi en faire une référence pour les amateurs de montres étanches. Prix de vente : 5 500 €.

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Jean-Claude Ellena

UNE VIE DE PARFUMS Parfumeur emblématique de la maison Hermès pendant quatorze ans, il a aussi signé des créations pour Bulgari, Cartier ou Rochas. Alors qu’il vient tout juste de prendre sa retraite, nous sommes allés à sa rencontre à Grasse, capitale mondiale du parfum. Textes A. Bloch, photos J. Limbes

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G

rassois et fils de parfumeur, comme beaucoup de parfumeurs d’ailleurs, Jean-Claude Ellena a commencé comme ouvrier d’usine, à récurer les cuves des alambics, en slip et en espadrilles. Puis à apprendre le métier de parfumeur, à tenter de le réinventer et, bien plus tard, depuis Genève ou New York, à créer chez l’industriel Givaudan des jus pour le compte de Van Cleef & Arpels, Cartier, Yves Saint Laurent, Christian Lacroix et bien d’autres. De fin 2003 à début 2018, il a surtout été le parfumeur exclusif de la célèbre maison Hermès, où il a relancé la mode du « parfumeur intégré ». Connu pour travailler avec une palette restreinte d’essences (environ 200 contre 1 500 possibles), et pour détester cordialement les études marketing et autres « évaluateurs », il a contribué sur la même période à multiplier le chiffre d’affaires de la branche parfum par dix. Comme quoi ! On lui doit également, outre le dernier « Que sais-je ? » en date sur le sujet, des ouvrages comme Journal d’un parfumeur (2011) ou Écrivain d’odeurs (2017). Une passion inspirée par son mentor, Edmond Roudnitska, parfumeur pour Christian Dior, Hermès ou Rochas, de la Libération au milieu des années 1980 (« On n’était d’accord sur rien, on s’est beaucoup engueulés »). Mais aussi par Jean Giono : « Je trouvais sa littérature d’un profond humanisme, et j’avais remarqué qu’il avait un imaginaire absolument flamboyant pour décrire les odeurs. Plus tard, j’ai découvert que son dernier écrit s’appelait De certains parfums : un texte extraordinaire ! Il n’était pas parfumeur, et pourtant il avait mieux compris la parfumerie que moi. » Mais reprenons tout cela depuis le début...

Vous êtes fils de parfumeur... Oui, et d’ailleurs, ma fille est elle-même parfumeuse ! Mon père ne parlait jamais de parfumerie à la maison : parce que c’était son univers, et parce que ma mère ne s’intéressait pas à ce qu’il faisait. Je n’étais pas du tout fait pour l’école, alors il m’a trouvé du travail dans une usine grassoise, comme ouvrier. J’avais à peine 17 ans, et j’ai tout fait : analyse, extraction, distillation, chimie... C’est comme cela que je suis devenu intelligent. Après mon service militaire, je me suis retrouvé chez Givaudan, à Genève, comme élève parfumeur. Mais j’avais un professeur avec lequel ça ne marchait pas trop, alors je suis allé voir le chef parfumeur pour lui demander de me trouver directement du travail. Au bout de neuf mois, alors que les études devaient durer trois ans, il m’a pris comme assistant. Comment vous êtes vous lancé en solo ? J’ai d’abord beaucoup travaillé sur la « parfumerie du futur » avec deux copains : nous voulions pousser vers la sortie ceux qui nous semblaient être des « vieux cons » de parfumeurs. Nous avons proposé notre idée à la direction générale, et nous nous sommes fait jeter avec cette phrase terrible : « Les idées viennent d’en haut, pas d’en bas ! » Ça ne nous a pas plu du tout, alors nous avons commencé à taper à la porte d’autres parfumeries industrielles. Nous avons finalement trouvé une annonce dans Nice-Matin : « société grassoise cherche parfumeur »... sans s ! Nous nous sommes présentés tous les trois, et en réduisant nos salaires, nous avons été embauchés. La société avait cinquante ans de retard ! Comme nous étions au début des chaînes Yves Rocher et compagnie, nous avons décidé de nous lancer dans le marché de masse. Puis nous avons été rachetés par une boîte américaine, j’ai négocié mon départ et je suis retourné chez Givaudan. Mais cette fois comme chef parfumeur, à New York. Comment êtes-vous arrivé chez Hermès ? Chez Givaudan, j’ai fait Déclaration pour Cartier. Et quand la présidente de Cartier a été débauchée par Hermès, elle m’a contacté. Rapidement, nous avons envisagé d’installer un « parfumeur intégré », comme chez Chanel (sans interruption depuis 1921). J’avais plusieurs conditions : que le marketing n’ait pas son mot à dire, que la décision finale se prenne uniquement entre la présidence et moi, et que je puisse travailler où je voulais, loin du centre de décision, pour ne pas être emmerdé tous les jours. Ils ont accepté !

Le nez est un simple instrument de contrôle : c’est le cerveau qui travaille Jean-Claude Ellena, parfumeur

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Son best-seller, Terre d’Hermès (2004), s’est vendu à 3 millions d’exemplaires.

Voyage d’Hermès (2010) est son flacon préféré : il s’est mis la pression pour être à la hauteur.

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MODE & OBJETS

Patchouli, benjoin, badiane, myrte... Jean-Claude décrit les odeurs comme personne.

Les « orgues à parfums » ne servent plus, car les essences se contaminaient mutuellement.

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Avez-vous déjà travaillé en binôme avec un « évaluateur » ? Non. La naissance des évaluateurs remonte aux années 1960, quand on a commencé à faire de grands rayonnages, dans lesquels étaient classés les parfums (floraux, boisés, épicés...), et où l’on allait piocher quand les clients n’étaient pas assez importants pour avoir droit à un « vrai » parfumeur. Ça permet sûrement de gagner du temps et de l’argent, mais c’est un système que je trouve complètement absurde, et que j’ai toujours refusé. Quel fut le point de départ de votre première création chez Hermès ? Nous voulions partir d’un jardin, dans le sud de la France. Nous sommes tous allés y passer quelques jours, mais je n’avais aucune idée, et j’accumulais les nuits blanches. Finalement, le jour du départ, la propriétaire nous a offert des coupes de champagne, qui étaient présentées sur des feuilles de figuier. Une jeune femme en a coupé une pour la sentir, et elle a eu un joli sourire : j’avais trouvé mon idée. C’est tout con, hein ! Elle aurait été édentée, ça n’aurait sans doute pas marché, mais elle était très jolie. Et votre plus gros succès ? Assurément Terre d’Hermès : il s’est vendu à trois millions d’exemplaires, et la courbe ne plafonne toujours pas douze ans après, elle continue à monter ! Au départ, je n’avais que le nom : « Terre ». Pour trouver des associations d’idées, je me suis mis à relire les Métamorphoses d’Ovide... il faut être fada, d’ailleurs ! Je suis parti sur un accord de terre, de bois et... de lait (parce que Gaïa, la Terre Mère, ce genre de choses). Le résultat était intéressant, mais beaucoup trop élitiste : on m’avait demandé « un grand masculin » (ce qui voulait dire grand volume, grand public...), et on n’y était pas du tout ! Mais j’ai fini par sortir ce parfum plus tard, dans une collection plus exclusive, distribuée uniquement en boutique. Comment vous en êtes-vous sorti ? Heureusement, pour Terre, j’avais une solution de rechange. Je suis aquarelliste, et je revenais justement d’Irlande, qui est un paradis pour les peintres : de magnifiques landes, de gros nuages, une humidité qui fait que ça ne sèche pas trop vite... Et je me suis rendu compte qu’au milieu de ces paysages sauvages, la présence de l’homme se matérialisait par des piquets. Il me fallait donc quelque chose de vertical, planté dans le sol et orienté vers le ciel : je suis parti sur une odeur de bois de cèdre, nerveuse et sèche... Mais toutes les odeurs de bois ne sont pas verticales. Le santal, par exemple, c’est alangui, et même franchement mou : c’est typiquement une odeur horizontale.

Il ne faudrait jamais voir le flacon avant de créer le parfum, pour ne pas être influencé

Choisissiez-vous également les flacons ? Non, mais j’avais le « pouvoir du non », pouvoir dont je n’ai pas abusé, d’ailleurs. En principe, je ne le voyais jamais à l’avance, pour ne pas être influencé. Mais, une fois, je me suis fait piéger, je suis allé voir ce qui se tramait : c’était pour Voyage d’Hermès. Le flacon, inspiré par une loupe de voyage sortant d’un étui en cuir, était vraiment superbe. Je me suis mis la pression : je me demandais comment le parfum pourrait tenir la promesse, comment il pourrait être à la hauteur du flacon. D’autant qu’industriellement, il était vraiment compliqué à fabriquer, ce flacon. Et du côté des normes, de la réglementation ? Alors là, c’est coton : il y a même plus de contraintes que pour des arômes ou des colorants alimentaires ! C’est un casse-tête pour les groupes qui veulent industrialiser partout dans le monde, parce que chaque pays a ses propres interdits. Chez Hermès, qui est une maison française fabriquant en France, j’avais pris le parti de ne respecter que la loi française : pas moins, mais pas plus... Surtout pas plus ! Faut-il mettre un parfum sur sa peau ou sur ses vêtements ? L’avantage sur les vêtements, c’est que ça ne « détériore » pas l’odeur. Sur la peau, on ajoute sa propre odeur (cent peaux, cent réactions différentes), mais c’est bien aussi ! Dans les deux cas, il y a un paramètre à prendre en compte : le musc synthétique. Comme il est bon marché, n’est pas soluble dans l’eau et tient

Jean-Claude Ellena, parfumeur

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MODE & OBJETS

longtemps, les industriels ont commencé à en mettre dans nos lessives. Nos vêtements se sont donc mis à sentir le musc et, peu à peu, nos peaux ont fixé les molécules qui se trouvaient dans le linge. Si je vous fais sentir du musc, vous allez me dire, comme tout le monde : « Ça sent moi. » Et tout le monde veut que son parfum lui rappelle un peu son odeur... Ça marche à tous les coups ! Donc tous les parfums contiennent beaucoup de musc, jusqu’à 30 % ! Sauf Terre d’Hermès : il n’y a pas un gramme de musc. Je l’ai fait exprès. Et si les industriels de la lessive changent de parfum... C’est ce qui est en train de se passer ! On utilise de plus en plus des molécules de santal : elles sont moins chères et plus persistantes. Donc, dans dix à vingt ans, nous sentirons tous le santal, et les parfumeurs en mettront de plus en plus dans leurs parfums, pour la même raison. Moi, le santal de synthèse, je déteste ! Justement, comment vos goûts influent-ils sur vos créations ? Quand on est parfumeur, il faut faire abstraction de ce que l’on n’aime pas : j’ai déjà mis dans des compositions des trucs que je détestais, voire qui puaient franchement, mais qui fonctionnaient combinés à autre chose. Prenez la civette, qui est obtenue en curant une glande parasexuelle du chat musqué : ça sent tout simplement la merde ! Mais dans un parfum, ça peut être une merveille, et je l’ai beaucoup utilisée. Combinée à la rose, par exemple, ça la rend souple, voluptueuse. Quelle est votre signature ? Je travaille avec peu de produits, je suis connu pour ça : ma collection, c’est 200 matières, sur environ 1 500 existantes. Je n’utilise jamais de bases (ou « sous-formules »), qui sont des mélanges tout prêts de dix à vingt composants. Et mes formules en elles-mêmes sont très courtes : vingt à trente lignes au maximum. Utilisez-vous des parfums naturels ou synthétiques ? Sur les 200 matières, 60 environ sont naturelles, et 140 sont synthétiques. Mais les opposer n’a aucun sens : il n’y a pas un seul parfum sur le marché qui soit 100 % naturel. Avec le synthétique, on peut faire beaucoup plus de choses. Par exemple, si vous mettez du jasmin dans un parfum, ça sent le jasmin, mais seulement le jasmin, et c’est chiant. Alors que vous pouvez prendre de l’alcool phényléthylique, qui est la synthétisation de l’une des 400 molécules de l’essence de rose. Tout seul, ça sent un peu le riz cuit ou le saké, mais en le combinant avec un autre produit, vous pouvez faire du jasmin, de la jacinthe, de la rose, du lilas... Toute une palette d’odeurs. Ce qui est terrible, c’est que si je fabrique une odeur de rose, elle sentira plus la rose que l’essence de rose pure ! Pour quelle raison ? Parce que les parfums naturels impliquent une distillation, donc de chauffer à au moins 120 °C. Ça provoque des cuissons, mais aussi des « artefacts », produits par réaction chimique avec l’eau. L’odeur de l’eau de rose n’est donc pas celle d’une fleur fraîche. Or, c’est cette dernière que les gens recherchent ! Les parfums ont-ils un sexe ? Pour moi, non : c’est d’ailleurs pour cela que j’ai choisi une femme pour me succéder chez Hermès. La notion du masculin/féminin est artificielle, et ne remonte qu’au début du XIXe siècle. J’ai fait disparaître la notion de genre de la plupart des flacons de Cologne et autres... et ça marche : on voit des parfums qu’on pourrait croire féminins portés par des hommes, et inversement. Je trouve ça beaucoup plus intelligent. Le genre ne subsiste que sur certains produits de « grande consommation », comme Terre d’Hermès, justement, parce que c’est une demande des distributeurs. Je ne sais pour quelle raison, ces gars doivent absolument nous ranger à gauche ou à droite dans leurs rayons : je leur ai plusieurs fois dit qu’ils n’avaient qu’à nous mettre au milieu. Finalement, ils nous mettent des deux côtés !

Je travaille avec peu de matières. Sur mon bureau, il y en a 200 alors qu’on peut en utiliser jusqu’à 1 500 Jean-Claude Ellena, parfumeur

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LES TROIS VIES DE

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FORGET Joueur Capitaine Directeur

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Dans la dernière ligne droite des préparatifs du tournoi de Roland-Garros, qui se déroulera du 27 mai au 10 juin, nous avons croisé son emblématique directeur, Guy Forget. Une occasion parfaite de revenir avec lui sur sa troisième vie... mais aussi sur les deux précédentes ! Textes A. Bloch, photos B. Rouffignac

A

ujourd’hui, il est là, posé, élégant et bronzé, à discuter du prochain tournoi de RolandGarros avec les médias. Bonjour, Monsieur le directeur. Mais qui ne se souvient pas de Guy Forget en short, polo et raquette Lacoste, bracelets en éponge blancs aux poignets, convoitant le filet ? C’était Monsieur le joueur. Entré dans le monde du tennis professionnel en 1982, avec déjà dans la poche un titre de champion du monde junior, Guy Forget se classe troisième mondial en double seulement quatre ans plus tard. En 1991, il prend la quatrième place du classement ATP, pulvérisant au passage le record de victoires en tournoi pour un Français. Il remporte notamment deux des neuf manches des Masters 1000, à Cincinnati puis à Bercy... dans les deux cas face à son meilleur ennemi du moment, l’Américain Pete Sampras, qui n’a jamais aimé jouer les gauchers. Il retrouve (et bat) dans la foulée le même Sampras en finale de la coupe Davis. Il raconte : « Bercy et Cincinnati furent deux moments forts, assurément. Mais cette coupe Davis 1991 est véritablement mon meilleur souvenir de joueur, parce que

rien ne vaut une victoire collective. Remporter la coupe avec les copains, face à d’excellentes équipes et dans une super ambiance, c’est forcément une victoire qui a une saveur toute particulière. » Pour l’ambiance, justement, il faut noter que le tour d’honneur de l’équipe de France se fait au son de... Saga Africa, le tube de son capitaine d’alors, Yannick Noah. La veille, Guy avait déjà créé la surprise en double (car, oui, la coupe Davis comprend des simples, mais aussi un double). Il avait évidemment sorti des Américains, cette fois en tandem avec Henri « Riton » Leconte, lequel était à ce moment de sa carrière classé... 159e joueur mondial ! Mais ils faisaient la paire. Dans le même genre, Guy Forget reste d’ailleurs le joueur le moins bien classé de l’histoire à avoir réussi (il faut dire que c’était sur retour de blessure) à atteindre le quart de finale d’un tournoi du Grand Chelem, en l’occurrence Wimbledon 1994 : il pointe alors... en 1 130e position au classement ! Il remporte ensuite une nouvelle coupe Davis, en 1996, puis remise sa raquette l’année suivante, avec un beau palmarès au compteur : 11 tournois remportés en simple, et pas moins de 28 en double.

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Débute alors sa seconde vie, comme capitaine de l’équipe de France de coupe Davis, mais aussi un temps de la Fed Cup, considérée comme son pendant féminin : «  La seconde vie professionnelle d’un joueur commence au moment où il arrête sa carrière, peu importe ce qu’il décide de faire après ! Ce qui est sûr, c’est qu’être tennisman professionnel est d’une grande exigence, il faut s’entraîner en permanence et faire le plus de tournois possible, parce que dès qu’on joue moins, les résultats chutent instantanément. Alors, forcément, quand on arrête, qu’on n’a plus la pression des résultats, ça change la vie du tout au tout. » À ce poste de capitaine, il succède donc à l’inoxydable Yannick Noah... lequel l’occupe de nouveau depuis 2015 ! Sous la direction de Forget, l’équipe de France remporte encore une coupe Davis, en 2001 (avec Arnaud Clément, Nicolas Escudé, Sébastien Grosjean, Cédric Pioline et Fabrice Santoro), en sortant les Australiens sur leurs terres de Melbourne. « En tant que capitaine, j’ai tout de même deux défaites particulièrement douloureuses qui me restent toujours en travers de la gorge, toutes les deux en finale. La première contre les Russes à Bercy, en 2002 : on était à deux points du match... deux coups gagnants et nous repartions avec la coupe Davis ! La seconde à Belgrade, en 2010, quand on a perdu contre les Serbes. Nous ne devions pas la perdre. » En 2012, après 20 « campagnes », en comptant celles avec les filles, cinq finales

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jouées et deux coupes remportées (dont une Fed Cup), il cède finalement la place à Arnaud Clément. Commence alors sa troisième vie. Non pas comme consultant et commentateur (pour Canal+, Europe 1 ou France Télévisions, notamment), car il se refuse à mettre cette « carrière » sur le même plan que les autres, mais comme directeur de tournois. Avec, tout d’abord, en 2012, celui de Bercy (qu’il a lui-même remporté en 1991). Puis, en 2016 et en parallèle, lui qui est toujours resté sur le pas de la porte des tournois du Grand Chelem (quart de finale au mieux) prend la tête de la manche parisienne, à savoir les Internationaux de France, plus connus sous le nom du stade qui les abrite : Roland-Garros. Avec pour mission de continuer à rivaliser avec les trois autres monuments du tennis mondial : l’open d’Australie (à Melbourne), Wimbledon (à Londres) et l’US Open (à New York). Forget a d’ailleurs un souvenir particulièrement douloureux sur le court central : « Une défaite en huitième de finale contre l’Argentin Guillermo Vilas, en 1986, après avoir eu une balle de match ! » Ce même court qui, désormais, après une interminable passe d’armes juridique sur fond de renouvellement de la concession (les terrains appartiennent à la ville de Paris) puis de contestation des permis de construire, est en passe d’être couvert. Mais Roland-Garros, c’est encore son patron qui en parle le mieux...


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SI LA TERRE BATTUE EST

PARFAITE, LE JOUEUR

DIT JUSTE

QU’ELLE EST BIEN.

EN REVANCHE, S’IL Y A TROIS

GRAVIERS QUI TRAÎNENT...

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ENTRETIEN

Quel est votre meilleur souvenir comme directeur de Roland-Garros ? Sans doute la finale de rêve de 2016 (Novak Djokovic contre Andy Murray), avec ce rayon de soleil qui est sorti de nulle part juste après la balle de match ! Pourtant, à y repenser, cette édition dans son ensemble reste pour le moment mon pire souvenir !

pour cette édition, un autre de 5 000 places verra le jour en 2019. Quant au fameux toit du central, il arrivera en 2020. C’est une sacrée bonne nouvelle, notamment pour les retransmissions !

À cause de la météo ? Oui, parce que des gens venaient du monde entier, dont certains n’avaient des billets que pour une seule journée, et que beaucoup sont repartis sans avoir vu un seul coup de raquette ! J’imagine, quand je suis monté à Roland-Garros pour la première fois, tout jeune, depuis Marseille, la déception qui aurait été la mienne dans un tel cas !

Et pour la terre battue ? Bien sûr ! C’est une surface vivante, qui change en fonction du vent, de la chaleur, de l’humidité... Les équipes d’entretien gèrent tous ces paramètres au quotidien, tout le temps, matin, midi et soir. Le soir notamment, il faut « noyer » les courts, mettre du sel, ajouter du rouge, et évidemment les couvrir. Le joueur qui trouve une surface parfaite dit simplement : « Le court est bien », point barre. En revanche, le jour où il y a trois gravillons qui traînent...

D’où la couverture du court central ? Oui, parce que, désormais, tous les autres tournois du Grand Chelem ont ce genre de structure. Melbourne fut le premier à avoir un stade couvert : désormais, les Australiens en ont trois, Wimbledon en a deux... Chez nous, le premier n’est même pas encore fait ! Mais nous sommes actuellement en pleins travaux : un tout nouveau court de 2 200 places est d’ores et déjà opérationnel

Quand on est un sportif, comment passe-t-on dans un bureau ? Comme quand on est joueur, il faut tout simplement apprendre ! Heureusement, il y a des gens qui sont là depuis des décennies, qui connaissent la maison mieux que personne, et nous évitent de tomber dans des pièges. On arrive souvent avec de nouvelles idées, et eux seuls se souviennent qu’elle a déjà été tentée à une époque, et qu’on

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n’a pas pu la mettre en pratique pour telle ou telle raison. Rien ne remplace l’expérience ! La pression commence-t-elle à monter ? Ça ne fait pas que commencer : c’est un stress permanent ! Comme pour un grand orchestre qui doit jouer une partition sublime, il faut que tout soit parfait, et l’on se doit notamment d’avoir les meilleurs courts en terre battue du monde ! Naturellement, sur tous les secteurs, avec le risque terroriste, la sécurité est notre priorité absolue. Il faut aussi accueillir les joueurs dans les meilleures conditions possible : ce sont des garçons et des filles qui jouent toute l’année dans des stades formidables, qui passent leur vie dans des hôtels de rêve. Et je ne parle pas de l’accueil des journalistes, qui sont la voix de notre événement à travers le monde ! Bref, on est conscient en permanence que le moindre détail peut tout faire dérailler. Avez-vous le temps de... voir des matchs ? Non, je n’ai jamais le temps de m’asseoir pour un match entier : je suis toujours accaparé par autre chose à un moment ou un autre ! Disons que sur la quinzaine entière, je dois voir trois ou quatre sets complets. C’est assez frustrant, pour moi qui aime le beau jeu, mais c’est une pression que je trouve formidable. Le meilleur moment, à RolandGarros, ça reste quand même... quand ça s’arrête. Quand on se retrouve tous ensemble le dernier dimanche soir, et qu’on peut enfin se dire qu’on a livré un beau tournoi. Mais ça ne dure jamais très

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longtemps : l’été est une période plus calme, c’est vrai, mais il faut rapidement commencer à aller observer ce qui se passe dans les autres tournois ! Votre scénario idéal en 2018, c’est sans doute de voir un Français gagner... Bien sûr, ça fait tellement longtemps qu’on attend ça ! La finale rêvée, ce serait un Français contre un Rafael Nadal ou un Novak Djokovic. Mais lequel ? Aujourd’hui, Lucas Pouille est le mieux classé, mais Gaël Monfils est sans doute celui qui a été le plus performant à Roland-Garros de manière globale... Je crois surtout que les tournois sur terre battue qui vont arriver dans les prochaines semaines seront riches d’enseignements. Yannick Noah, l’année où il a remporté Roland-Garros, puisque c’est le dernier Français à l’avoir fait, avait gagné juste avant plusieurs tournois de préparation. Je ne crois pas qu’on puisse débarquer comme un cheveu sur la soupe... On ne crée donc jamais la surprise à Roland-Garros ? On a rarement vu un jeune joueur inconnu exploser d’un seul coup aux yeux du grand public. Tous les Français auxquels je pense ont une assez grande expérience : je ne vois pas de joueur français tout jeune, disons de 16 ou 17 ans, qui puisse créer la surprise. Ou même de 18 ans, comme ce fut le cas de Rafael Nadal (en 2005) ou Michael Chang (en 1989) !

Propos recueillis par J.-F. Béchu


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Jordanie Trésors du Moyen-Orient

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Coincé entre de bien turbulents voisins, la Jordanie est un pays facile et passionnant à visiter. Découvrez ces trésors antiques à seulement quatre heures d’avion de Paris.

Textes et photos A. Poupin


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SPORT&LOISIRS Amman, qui serait la ville la plus ancienne encore habitée, abrite près de la moitié des Jordaniens. Ici vue de la citadelle, où se trouve encore le temple d’Hercule, construit sous le règne de l’empereur romain Marc Aurèle, avec, au premier plan, le théâtre antique, datant de 138 après Jésus-Christ.

Dans l’une des très nombreuses églises d’Amman, des fresques en pleine restauration. Il en existe des centaines.

Amman effervescente

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ême si Amman n’est la capitale du royaume hachémite de Jordanie que depuis 1921, la ville n’est pas toute jeune. Bien au contraire. Les premières traces datent du XIIIe siècle avant Jésus-Christ, avant l’invasion des Assyriens, des Perses puis des Grecs, qui la renommèrent Philadelphia. Les Nabatéens, qui façonnèrent la Jordanie (on leur doit les constructions monumentales de Pétra) s’y installèrent jusqu’à ce que les Romains s’en emparent, en 106 après Jésus-Christ. Chrétienne avec les Romains à partir de 324 après Jésus-Christ, Philadelphia vit ensuite sous l’ère byzantine. Puis, plusieurs siècles plus tard, ce sont les Ghassanides qui en prennent le contrôle et qui fonderont un royaume préislamique en Jordanie. Ce sont eux qui rebaptisent la ville Amman. Ces différentes civilisations et quelques tremblements de terre plus tard, la ville se dévoile architecturalement riche, avec des églises, des mosquées et même un théâtre romain adossé à l’une des dix-neuf collines sur laquelle Amman repose aujourd’hui (historiquement, il y en avait sept, comme à Rome). On y donne encore des spectacles. Mais on peut se contenter de monter sur la colline voisine pour l’admirer.

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Les croisades, liées à l’histoire du pays, ont laissé des traces, comme ces innombrables églises, et de très nombreux châteaux dans le désert.

La Jordanie est une monarchie constitutionnelle avec l’islam pour religion d’État.

Non loin du vieux souk, l’animation bat son plein dans les quartiers anciens du centre-ville.

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Pétra, un autre monde

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n a tous en tête l’image du Khazneh, cette façade taillée dans le grès, tombeau nabatéen datant d’un siècle avant Jésus-Christ. C’est le symbole de Pétra, cette cité antique qu’il faut absolument voir lors d’un voyage en Jordanie. Le site est à 200 kilomètres environ au sud de la capitale, facile d’accès en voiture. Et une fois sur place, dans la ville qu’on appelle Wadi Musa, on est aux portes de Pétra. Ici, on circule à pied. Pour s’économiser, on peut aussi monter dans une des carrioles louées par les bédouins qui gèrent le site, pour dévaler le wadi Moussa, ce sentier serpentant dans le Siq, de plus d’un kilomètre de long, mais parfois à peine plus large que deux mètres. Puis enfin accéder au Khazneh, premier tombeau de cette cité nabatéenne qui a compté jusqu’à 25 000 habitants. Sur la route des épices, Pétra fut prospère, dotée d’un système de prélèvement des eaux de pluie, de constructions dont on se demande encore comment elles ont été édifiées, directement taillées dans la pierre, un grès compact et dur. Mais c’est justement ce type de construction, où l’on a enlevé de la matière à la roche plutôt que d’en ajouter, qui a préservé ces monuments du temps et des tremblements de terre. D’ailleurs, les constructions attribuées aux Romains, comme une vaste voie de circulation bordée de colonnes, ne sont plus que des ruines. Pour faire le tour des presque 700 monuments du site, prévoir deux journées complètes. Avec, si vous le pouvez, une soirée à découvrir le site à la lueur de 1 800 bougies. Cela relève un peu du folklore, mais c’est tellement beau. Dernier conseil : organisez votre voyage à l’avance. Il y a, tous les ans, près de 4 000 touristes par jour à Pétra.

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Il ne faut pas réduire le site de Pétra au Khazneh, situé à l’entrée. Cette cité qui abrita jusqu’à 25 000 habitants recèle des trésors qui nécessitent au moins deux jours de découverte. Et encore, pour les bons marcheurs, car les escaliers ne manquent pas.


Les plus courageux grimperont les 800 marches jusqu’au monastère, le Deir, dont la façade mesure 42 mètres de haut sur 45 mètres de large. Il aurait été édifié un siècle avant Jésus-Christ.

On peut se rendre à pied sur le site, en empruntant le Siq qui serpente d’est en ouest. Ou préserver ses forces en montant dans une de ces charrettes tirées par des ânes que les bédouins louent – trop – cher.

Le Khazneh, monument le plus connu de Pétra, n’est exposé au soleil que le matin. Le reste de la journée, il est dans l’ombre. Les photographes sont prévenus.

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SPORT&LOISIRS Le mont Nébo, au sud-ouest d’Amman, une colline culminant à 817 mètres depuis laquelle on aperçoit la mer Morte. Il abriterait le mausolée de Moïse.

La Jordanie a des voisins turbulents. L’Irak, la Syrie, Israël, la Cisjordanie et l’Arabie saoudite.

En montant vers le nord, direction la Syrie, on trouve Gérasa, ou Jerash. Une antique cité romaine qui mérite qu’on s’y attarde, pour l’arc d’Hadrien et son forum ovale (ici).

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La mer Morte, vue du côté jordanien. Outre sa teneur en sel élevée, qui rend la baignade délicate, elle a la particularité d’être en dessous du niveau de la mer (– 429 mètres).

Une situation compliquée

C’

Le Jourdain alimente la mer Morte en eau claire et sépare la Jordanie d’Israël (à droite sur la photo). Ci-dessous, l’un des hôtels de luxe bordant la mer Morte. Il fait bon y passer quelques jours.

est ce qu’on appelle avoir des voisins turbulents. La Jordanie est coincée entre, à l’ouest, Israël et la Cisjordanie, juste séparée par le fleuve Jourdain et la mer Morte, au nord la Syrie et, sur ses dernières frontières, à l’est et au sud, par l’Irak et l’Arabie saoudite. On a fait plus calme... Pourtant, le royaume hachémite bénéficie d’une belle stabilité politique et économique, sous la coupe de son roi Abdallah II et de la reine Rania depuis 1999. De quoi profiter de tous les sites du pays sans arrièrepensée, de prendre la route vers l’est en direction des châteaux du désert, vers l’Irak, puis de bifurquer vers le nord, la Syrie mais surtout Jerash, magnifique. On sera quand même parfois choqué par ces immenses camps de réfugiés, en plein désert. La Jordanie en accueille des milliers tous les ans. De quoi encore tendre les relations avec Israël, qui prélève depuis des années plus que sa part d’eau potable dans le Jourdain qui les sépare, asséchant toujours plus la mer Morte. Il se dit que la Jordanie commence à manquer d’eau, sa population croissant tous les ans. Assécher la mer Morte est une chose, assoiffer les Jordaniens en est une autre. Cela ne doit pas gâcher le plaisir d’aller « piquer une tête » dans cette mer. L’eau est chaude et si salée qu’on ne peut y nager. C’est un effort que de conserver les bras et les jambes sous le niveau de l’eau.

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Bienvenue sur Mars

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lus encore que Peter O’Toole, c’est le désert du Wadi Rum la star du film Lawrence d’Arabie, relatant les aventures de cet officier de liaison britannique durant la grande révolte arabe, entre 1916 et 1918. Direction plein sud depuis Amman pour rejoindre le désert le plus filmé par Hollywood, à hauteur de la ville balnéaire d’Aqaba, fenêtre jordanienne sur la mer Rouge. Depuis le film de David Lean en 1962, Matt Damon dans Seul sur Mars, Val Kilmer dans Planète rouge ou encore Michael Fassbender dans Prometheus et Liev

Quand on aperçoit quelques dromadaires au lever du soleil, comme ici, on sait que des bédouins ne sont pas loin. Les animaux sauvages sont rares... et toujours plus petits.

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Schreiber dans The Last Days on Mars ont foulé le sable ocre du Wadi Rum. C’est l’endroit rêvé pour simuler la planète rouge justement, avec ses reflets ocre, sa lumière chaude même à midi et son sable brun, parfois rouge. Depuis des années, l’endroit est devenu le paradis des réalisateurs, mais aussi des randonneurs, pour aller visiter la source de Lawrence (sans le moindre intérêt même si elle fait partie de tous les tours organisés), les sept piliers de la sagesse, ces rochers ainsi surnommés par Lawrence d’Arabie, ou encore la plus monumentale

des arches rocheuses, le Burdah Rock Bridge. Prenez le temps de passer une nuit dans ce désert, dans les tentes louées par les bédouins, souvent assez confortables, pour assister au coucher du soleil... et à son lever. La lumière rasante dévoile alors tous les reliefs de la roche, créant des ombres derrière les bosses, modifiant le paysage de la journée. Roches, dunes, tout arbore soudain un nouveau visage, plus expressif. Et une fois reposés, les plus courageux pourront même aller pratiquer l’escalade sur le mont Jabal Ram, culminant à 1 734 mètres d’altitude.


Les couleurs ocre si caractéristiques du Wadi Rum ont attiré les plus grands réalisateurs de films. Dès qu’il s’agit de simuler la planète Mars, par exemple, ils viennent ici. On les comprend.

Le Wadi Rum est caractérisé par ses canyons, ses grottes et ses arches naturelles. Ici, le Burdah Rock Bridge. Pour vous faire une idée de sa taille, regardez en haut à droite de l’image.

De plus en plus fréquenté par les touristes, ce désert est devenu le paradis des marcheurs. Mais grâce aux bédouins, on peut aussi le visiter en 4x4 et en découvrir bien des secrets.

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Y aller, se loger Seules deux compagnies aériennes relient Paris (CDG) à Amman sans escale, Air France et Royal Jordanian. Avec pour chacune un vol par jour, dans l’après-midi. Une fois à l’aéroport d’Amman, on peut louer une voiture pour pas très cher ou, moins risqué, passer par une agence de voyages et circuler en bus. Conduire en Jordanie n’est pas donné à tout le monde. Le Code de la route y est appliqué souplement. Grand choix d’hôtels à Amman, pour toutes les bourses. La mer Morte est moins accessible, les grandes enseignes ayant annexé les plus beaux endroits. Notre choix : Kempinski Ishtar.

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Que faire ? Traîner dans le souk puis aller prendre un thé avec des pâtisseries orientales chez Habibah Sweets, Al Hazar St 2, Marwan Madi Complex. Prendre un bain dans la piscine terrasse du Quattro Relax Hotel après une journée de marche dans le site de Pétra, Wadi Musa’s city center, 71810 Wadi Musa Emprunter la route du Roi vers le sud, depuis la mer Morte. Et s’arrêter dans la réserve de Dana pour immortaliser l’instant sur la carte mémoire de votre appareil photo. Si possible en fin de journée, avec le soleil couchant.


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MÉCANIQUE

ASTON MARTIN VANTAGE

Mission impossible

Remplacer une icône de l’automobile n’est jamais évident, même quand on s’appelle Aston Martin. Surtout quand on s’appelle Aston Martin et que sa Vantage a le statut de sculpture roulante. Aussi, quand il a fallu songer à donner à l’icône une descendance, la décision fut prise de tout changer, la ligne, le châssis, mais aussi le moteur. Table rase du passé ? Pas tout à fait... Textes K. Thomas, photos M. Earey

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MÉCANIQUE

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e n’est pas faire offense à Aston Martin de dire que son entrée de gamme, si toutefois on peut appeler la Vantage comme cela, n’a jamais pu soutenir la comparaison avec ses rivales directes, 911 en tête. « Ça tombe bien que vous disiez cela, car c’est justement la Porsche que nous avons dans le viseur avec cette nouvelle génération. »

Sûr de lui, le garçon, quand on sait que depuis des années l’anglaise n’arrive pas à la cheville de l’allemande quand il s’agit de dévorer de l’asphalte. Le type sûr de lui, c’est Matt Becker qui, après avoir squatté pendant de nombreuses années le quartier général de Lotus à Hethel, est désormais responsable de la mise au point chez Aston, à Gaydon. La 911 est l’adversaire toute désignée. Mais ce n’est pas la seule. Jaguar F-Type et Corvette sont aussi en ligne de mire. Et l’AMG GT ? Sourire poli de notre hôte. Pour cause : le prestigieux constructeur britannique et l’ex-préparateur de Mercedes ont signé un accord pour le partage des ressources. Bref, l’allemand est désormais fournisseur officiel de moteurs à Gaydon, si bien qu’on retrouve le V8 4 litres biturbo de l’AMG GT dans la nouvelle Vantage. Un concurrent de choix pour le flat six Porsche. Dans sa configuration 510 ch, ce moteur transforme l’AMG en dragster. Mais convient-il à un coupé prestigieux qui a toujours préféré mettre en avant ses qualités esthétiques plus que sa rigueur sportive ? « Nous voulons vraiment trois personnalités distinctes dans notre gamme, intervient Sam Holgate, le génial auteur du

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La ligne, signée de Sam Holgate, est toujours aussi réussie. Mais dorénavant, sous le capot, l’Aston a du répondant, avec un V8 biturbo d’origine allemande signé, lui, AMG. ici dans sa déclinaison 510 ch.

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MÉCANIQUE

coup de crayon de la nouvelle Vantage. Avant, on n’arrivait plus à distinguer tel modèle d’un autre dans notre gamme. C’est désormais fini. » En effet. En attendant de voir à quoi ressemblera la remplaçante de la Vanquish, il faut bien admettre que la DB11 tranche radicalement avec la DB9 et que la Vantage est encore bien différente. Mais est-ce en bien ? La face a de faux airs de Mazda MX-5 ; une nippone pas vilaine en soi, nous en convenons, mais ce n’est pas une Aston. Le parti pris à l’arrière est plus réussi, avec ce bandeau optique dont la courbure semble être le reflet du diffuseur d’air. La voiture est belle, mais sa devancière était sublime. Dedans aussi le cœur balance. La position de conduite n’est pas parfaite, les petits gabarits auront probablement du mal à apercevoir le bout du capot à cause d’une planche de bord, élégamment vêtue de cuir certes, mais tellement imposante. Les grands ne seront pas mieux lotis avec leurs cheveux époussetant le ciel de toit. Mais ne caricaturons pas : la Vantage est agréable à vivre avec cette peausserie foisonnante et ces inserts en fibre de carbone. Dommage que la partie basse de la console centrale soit occupée par une armada de boutons qui nécessiteront quelques heures pour s’habituer. Le volant à double méplat offre une excellente préhension mais l’unique levier à gauche, commandant à la fois les clignotants et les essuieglaces, génère quelques ratés. Comme dans les Mercedes, dont l’AMG cousine de V8 fait partie. La structure en aluminium collée, marque de fabrique d’Aston Martin, est reprise de la DB11. Grâce à ce nouveau châssis (bye bye la plate-forme

VH), la Vantage serait 30 % plus rigide que par le passé. Elle reprend aussi le couple moteur-boîte de sa grande sœur. À un détail près : le rapport de pont est raccourci sur la Vantage. Elle va donc moins vite (314 km/h quand même) mais accélère plus fort (0 à 100 km/h en 3’’7). Comme la Vantage est une baby DB11 et que cette dernière est proposée aussi avec un V12 biturbo maison, on a demandé à Simon Croft, qui assure la liaison entre les ingénieurs et la presse, si cette noble mécanique débarquera prochainement dans la nouvelle venue. « Techniquement, le berceau moteur de la Vantage peut accueillir le 5,2 litres biturbo sans aucun problème. Cela n’a rien à voir avec la précédente génération où nous avons forcé pour faire entrer le 6 litres. Mais je peux vous dire que pour l’instant, sur notre plan produit, une Vantage V12 n’est pas d’actualité. » La mine amusée du Britannique nous fait croire que c’est une élégante façon de botter en touche. Et quid d’une Vantage à boîte manuelle ? « Andy Palmer [le patron d’Aston Martin] l’a annoncé : cette version sera commercialisée. Nous sommes déjà en phase de finalisation. » Voilà une excellente nouvelle. Non pas que la transmission automatique à 8 vitesses d’origine ZF soit une punition, c’est tout l’inverse, mais comme par le passé la Vantage était autrement plus probante et délectable avec une boîte à poigne qu’en robotisée (heureusement abandonnée), c’est une bonne nouvelle. Voici pour cette présentation théorique, place à la pratique. Même s’il n’y a plus le beau pavé en cristal qui servait de clé à insérer sous l’écran, la mise en route demeure un moment solennel. On ne lance pas le

NOUVEAU CHÂSSIS, NOUVEAU MOTEUR, MAIS TOUJOURS UNE ASTON 100 Followed Magazine


Profusion de boutons en pied de console et un seul Commodo, à gauche, pour les essuie-glaces et les clignotants ; il faut un peu de temps pour se sentir bien dans la Vantage. Mais après... quel pied.

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MÉCANIQUE

MAINTENANT, LA VANTAGE N’A PLUS RIEN À ENVIER À UNE 911 102 Followed Magazine


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MÉCANIQUE

Les plus téméraires se feront fort d’aller taquiner de la piste en Vantage. Elle s’y sentira comme un Britannique sur un green, à l’aise. Et alerte.

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V8 d’une Aston tous les jours. Le biturbo éructe mais ne râle pas comme dans une AMG GT. Aston, pour ne pas se voir taxer de vil copieur, a développé un échappement sur mesure, avec des tubulures en inox dont les notes jouées sont censées se situer à mi-chemin entre les grognements sourds et sauvages du dragster allemand et une partition plus harmonieuse, aérienne et sensuelle. Plus Aston, quoi... Et c’est réussi. Il y a bien deux échappements disponibles sur la Vantage, dont une version sport qui se démarque par ses quatre sorties noires, mais le récital est le même : sobre et élégant, comme de la musique classique. Toutefois, Mozart et surtout Beethoven n’ont pas écrit que de la musique de chambre. La Vantage aussi. Pour changer de registre, il faut basculer en mode Track. La Vantage n’étant plus considérée comme une petite GT mais comme une vraie sportive, les programmes de conduite évoluent par rapport à la DB11. Exit le mode GT, c’est désormais Sport, Sport+ et Track. Et il en va de même pour la suspension pilotée et l’échappement. Moins pétaradant au lever de pied que dans l’AMG, le V8 nous gratifie quand même de quelques bons coups de fusil en phase de décélération ou lors des changements de rapport. Mais ce bloc ne se contente pas de chanter juste, il est plein comme une outre. Avec deux turbos, facile, nous direzvous. Certes, mais comme le coup de pied aux fesses ne faiblit jamais, même à l’approche de la zone rouge (à 7 000 tr/min), il faut le signaler. Dès lors, les chronos annoncés par le constructeur paraissent crédibles et la Vantage devrait bel et bien se situer sous les 4 secondes pour exploser les 100 km/h. Mais le secteur dans lequel le nouveau

coupé enterre son aïeul, c’est celui du dynamisme. Oubliés les soucis de rigidité, les pneus arrière qui fument à la remise des gaz, le comportement « touchy » sur le mouillé : la Vantage est devenue sportive, une vraie, une rigoureuse. Oui, et sans oublier sa polyvalence s’il vous plaît. Le train avant, reposant sur des doubles triangles, fait preuve de mordant et de constance, même dans le cadre d’une utilisation sur circuit. La direction électrique manque encore de feeling par rapport aux meilleures, si bien qu’il est parfois difficile de savoir ce qui se passe réellement entre les roues et le goudron, mais il faut reconnaître que c’est aujourd’hui son principal défaut. Il y a pire. Paradoxalement, c’est sur autoroute que la Vantage est le moins à l’aise. Déjà parce qu’il sera compliqué d’y respecter la vitesse limite, mais aussi car, quel soit le programme d’amortissement sélectionné, l’auto rebondit beaucoup. Pas grave : la Vantage est faite pour se faire plaisir, dixit Aston Martin, alors le réseau secondaire est plus approprié. Elle s’y sent comme un poisson dans l’eau. Mieux qu’une 911 ? Différemment. La Vantage pivote davantage autour de son axe central sans pour autant se montrer délicate à conduire. Et son assiette, en phase d’accélération, est mieux conservée que dans la Porsche, qui conserve cette fâcheuse habitude de se cabrer à la moindre sollicitation. Merci la répartition des masses quasi parfaite (49/51), obtenue grâce à l’implantation de la boîte entre les roues arrière et non collée au moteur avant. Ces dernières ont d’ailleurs un nouveau petit copain, le E-Diff, autobloquant électronique jugé plus pertinent que son homologue mécanique en raison de sa réactivité et de sa faible masse.

ASSOCIÉ À UNE BOÎTE AUTO., LE V8 BITURBO EST UNE MERVEILLE Followed Magazine 105


MÉCANIQUE

DIFFICILE DE CROIRE QU’IL Y AVAIT UNE ASTON MARTIN VANTAGE AVANT CELLE-CI Il permet une régulation vectorielle du couple à l’arrière et ce n’est pas une mince affaire avec 685 Nm à tempérer. Cette fonction, qui consiste à accélérer la roue extérieure au virage pour aider la voiture à tourner, sert autant la stabilité que l’agilité. Et ça marche. De GT ayant du mal à passer sa puissance au sol, la Vantage est devenue une teigne – bien éduquée – homogène, agile, précise et performante. A-t-elle perdu de sa personnalité ? Vocalement peut-être, même si sa signature sonore spécifique est l’un de ses points forts. La transmission automatique, préférée à la double embrayage d’AMG pour des raisons de compacité et de marché (les ÉtatsUnis trouvent que les robotisées manquent de souplesse), ne souffre que d’un modeste défaut : celui de ne pas pouvoir rétrograder trop haut dans les tours. Pour le reste, elle est rapide, génère juste l’à-coup qu’il faut pour faire plaisir au conducteur, et son dernier rapport, sans fin, permet de tenter un economy run sur un ParisGenève. Bref, la Vantage assure. Elle ne fait pas oublier sa devancière pour la simple et bonne raison que les différences entre les deux générations sont trop nombreuses. Il y aura eu une Vantage avant AMG, et une après, une autre voiture, tellement différente C’est ainsi une véritable nouvelle sportive qui débarque dans la gamme Aston Martin. Avec son patronyme prestigieux, elle ne devait pas décevoir. C’est réussi...

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Données constructeur

ASTON MARTIN VANTAGE Moteur : V8 biturbo, 4 litres Transmission : roues AR, boîte auto., 8 vitesses Puissance (ch à tr/min) 510 à 6 000 Couple (Nm à tr/min) 685 à 2 000 Masse à sec (kg) 1 530 Long.xlarg.xhaut. (m) 4,46x1,94x1,27 Empattement (m) 2,70 Volume du réservoir (l) 73 Vitesse maxi (km/h) 314 0 à 100 km/h 3’’7 Pneus de série AV 255/40 ZR 20 Pneus de série AR 295/35 ZR 20 Prix de base en France 155 294 €


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MÉCANIQUE

Future star des villes INFINITI QX50

Un design fort, une rareté qui tire vers l’exclusivité et un moteur essence révolutionnaire, le nouvel Infiniti QX50 pourrait bousculer le marché des SUV. En tout cas pour ceux qui ne sont pas prêts pour l’hybridation. Textes et photos C. Boulain

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MÉCANIQUE Le QX50, avec son moteur essence révolutionnaire, ne sera pas qu’un SUV urbain. La route et les longs voyages ne lui font pas peur.

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UNE RÉVOLUTION SOUS LE CAPOT AVEC UN TAUX DE COMPRESSION VARIABLE

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e hasard fait bien les choses, on peut le croire. Ou alors, ce n’est pas un hasard... Si Infiniti a décidé de nous présenter son nouveau SUV à Los Angeles, ce n’est pas pour rien. La marque de luxe du géant Nissan, comme Lexus l’est à Toyota, le sait bien : son nouveau QX50 est aussi paradoxal et pragmatique que la cité des anges. Avec son design puissant et élégant, le QX vient taquiner les Audi Q5, BMW X3, Mercedes GLC et Lexus NX. Mais alors que tous ses rivaux offrent – façon de parler car dans ce milieu rien n’est gratuit – des versions hybrides, l’Infiniti joue la carte de l’essence sans assistance. Ni diesel ni hybride, et encore moins de version rechargeable ne sont proposés au lancement. Un « petit » tour dans Los Angeles, là où l’écologie est devenue une sorte de priorité alors que l’électricité n’est toujours pas produite de façon renouvelable et que chaque habitant parcourt plus de 80 km par jour en moyenne, souvent seul dans sa voiture, va nous permettre de comprendre la raison d’être du nouveau QX50 essence. Rouler électrique a un but : réduire les émissions de CO2. Et si nous pouvions les réduire directement dans le moteur, sans avoir à traîner une lourde batterie difficile à fabriquer et recycler ? C’est l’idée de base des ingénieurs Nissan-Infiniti, celle qui a présidé à la naissance d’un tout nouveau moteur essence 2 litres turbo. Pour réaliser la rupture souhaitée en termes de consommations, il fallait apporter quelque chose de nouveau, quelque chose que des centaines d’ingénieurs tentent de créer depuis des années : la compression variable. Ne décrochez pas tout de suite, c’est intéressant. En faisant varier le volume des chambres de combustion en fonction de la demande de puissance, on modifie le taux de compression. Plus il est élevé, plus le moteur est sobre mais peu puissant, et inversement. Un peu comme si nous avions un 1.4 litre tous les jours et un 2.2 litres quand on veut rouler vite ou dépasser sans lambiner. Le rêve de l’ingénieur motoriste en quelque sorte, qui devient réalité avec ce nouveau 2.0 VC-T. Grâce à un embiellage innovant, ce moteur adopte un taux de compression variable sans peser plus lourd que le V6 qu’il remplace et, sans doute, mais Infiniti ne l’a pas confirmé, sans coûter bien cher à industrialiser. De l’écologie pas chère... le rêve. Et comment se comporte ce moteur révolutionnaire ? Car dans ce segment des SUV haut de gamme, un bruit désagréable ou des à-coups du moteur seraient mal perçus. Pour le bruit, difficile de savoir si le 2.0 VC-T ne sait pas se tenir, car un générateur de « contre-bruit »

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MÉCANIQUE

LE QX50 PEUT PRATIQUEMENT CONDUIRE TOUT SEUL AVEC LA FONCTION PROPILOT développé par Bose et intégré au système audio veille en permanence au confort sonore des passagers. Même quand la hi-fi est coupée. Bref on entend le 2.0, un peu seulement, et c’est tout. Pour l’agrément, c’est un peu pareil : associé à une transmission automatique à variation continue, les reprises et accélérations sont franches mais douces. Rien à redire non plus de ce côté. Les performances sont à l’avenant, largement suffisantes, surtout qu’elles ne s’accompagnent pas d’un gros appétit. Donc, contrat rempli ! Dans le trafic de Los Angeles, la douceur et la discrétion du QX50 font merveille. La fonction ProPilot aussi ! Comme tout SUV haut de gamme qui se respecte, le QX dispose d’une fonction d’assistance à la conduite, ce que beaucoup appellent la voiture autonome niveau 2. Pour des raisons de réglementation, ce n’est pas encore tout à fait autonome puisqu’il faut conserver les mains sur le volant et une certaine attention à la circulation. D’ailleurs, si la voiture détecte que vous n’avez plus au moins un doigt sur le volant pendant trop longtemps, elle vous alerte avant de stopper si vous ne réagissez pas. Pour l’anecdote, ce n’est pas la pression des doigts sur la jante du volant qui est surveillée mais la résistance que vous appliquez, sans vous en rendre compte, sur le volant. La voiture vous teste en permanence, envoyant de minuscules secousses et vérifiant que vous vous y opposez. S’il n’y a plus de résistance, c’est que vous ne tenez plus le volant... Sentir la voiture suivre la route en longeant les lignes de côté, adapter sa vitesse à la circulation et freiner seule quand ça ralentit devant est une expérience extraordinaire. Qui sera notre ordinaire à n’en pas douter dans quelques années. Mais qui s’en plaindra, quand cela permettra de lire ses courriels ou de regarder une série sur une I-405 embouteillée, entre Santa Monica et Inglewood ? Le ProPilot, qui profite aussi d’une direction entièrement électronique, sans la moindre liaison mécanique, n’est pas le seul équipement du QX50. Caméras, détecteur de présence dans les angles morts, radar anticollision et autres systèmes de parking automatique sont de rigueur. Ça, c’est pour le côté conduite-sécurité. Le confort, rassurez-vous, n’est pas oublié. Dans la finition haute essayée au lancement, tout est inclus. Ainsi, sièges électriques chauffants, système audio Bose fabuleux (même si d’habitude ils sont critiquables, avec beaucoup trop de basses), espace intérieur plus que suffisant, pour les passagers comme pour les bagages dans un coffre immense, et confort de roulement satisfaisant malgré les grandes jantes et l’absence de suspension pilotée sont au programme. Et si le design extérieur

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Dans cette finition haute, l’habitacle se pare de trois couleurs de cuir différentes. Un beige clair, un marron et un bleu nuit qui vient casser les lignes et donner une autre vision des surfaces. En plus, on retrouve des habillages d’aluminium gris mat. Certains adorent, d’autres trouvent que ça fait un peu beaucoup...

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MÉCANIQUE

Pourquoi un taux de compression variable ? L’enjeu est simple : réussir à faire fonctionner un moteur essence comme un diesel. Pour schématiser, un essence fonctionne avec un taux de compression faible, souvent compris entre 8 et 11:1, alors qu’un diesel adopte un taux plus élevé de l’ordre de 18 à 20:1. Le taux de compression, c’est le rapport entre les volumes mini et maxi de la chambre de combustion, là où le piston va et vient. La différence entre le volume

La troisième vitre latérale, avec sa forme caractéristique, est la signature Infiniti. Les flancs sculptés et le capot très bombé aussi.

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piston en bas puis piston en haut. Plus cette différence est grande, plus le taux est élevé et meilleur est le rendement au profit des consommations. Faire fonctionner un moteur essence avec un taux de compression variable permet d’approcher les rendements des moteurs diesels sans risquer d’exploser les valeurs d’émissions de NO2 comme ces derniers. Avec un taux variable, Infiniti réussit à délivrer un moteur

capable de basse consommation aux régimes usuels, mais aussi capable d’excellentes performances si on le sollicite davantage, tout cela sans polluer plus qu’autorisé. Et sans avoir recours à des artifices pour tromper les cycles de pollution comme tous les constructeurs vendant des véhicules diesels aux États-Unis devaient le faire pour respecter les normes américaines, plus strictes que les européennes.


Données constructeur

INFINITI QX50 Moteur : quatre-cylindres essence, turbo, taux de compression variable de 8:1 à 14:1, 1 997 cm3 Puissance maxi (ch à tr/min) 268 à 5 600 Couple maxi (Nm à tr/min) 380 à 4 400 Transmission 4x4, auto. à variation continue Masse (kg) 1 659 Long.xlarg.xhaut. (m) 4,70x1,90x1,67 Vitesse maxi (km/h) 230 0 à 100 km/h (s) 6˝3 Capacité du réservoir (l) 60,5 Consommation durant l’essai (l/100 km) 9,5 Prix de base (2WD) (estimation) 39 000 € Prix version Essential (estimation) 47 000 €

UNE DIRECTION « BY WIRE » QUI OFFRE BEAUCOUP DE FONCTIONNALITÉS marque les esprits, l’habitacle en fera tout autant, avec ici une combinaison de trois couleurs de cuir étonnante... et pratique. Pratique car elle permet de casser certaines lignes, comme sur l’accoudoir central ou les contre-portes, réduisant les habillages de plastiques foncés qu’on a tendance à vite détester. On appréciera aussi les sièges arrière, inclinables et coulissants pour privilégier, au choix, le confort des passagers ou le volume de chargement. Ou encore le double écran, qui permet de laisser les instructions du GPS affichées pendant qu’on ajuste la climatisation par exemple. Il ne faut pas se mentir, le QX50 ne sera pas le best-seller des SUV haut de gamme en France. Mais dans une catégorie où Volvo et Lexus réussissent à se faire de belles places face aux mastodontes allemands, un modèle différent peut briller. À condition d’avoir un design fort, il l’a, une proposition de motorisation propre, il l’a à sa manière avec son moteur révolutionnaire, des équipements innovants, il les a avec par exemple sa direction électronique, et un prix attractif... qu’il a aussi. Reste à convaincre des clients qui ne connaissent pas tous cette marque atypique, à les faire venir dans un réseau plus petit que ceux de ses rivaux, et à leur faire comprendre que l’hybridation, c’est bien quand c’est bien fait, mais que le fond du problème est de réduire les consommations de carburant fossile. Et qu’il y a plein de bonnes manières d’y arriver.

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MÉCANIQUE

LE RÊVE AMÉRICAIN À Los Angeles, les passionnés de belles motos vintage vont se mettre au français. Depuis déjà quelques années, les plus belles réalisations à deux roues de Serge Bueno s’échangent à prix d’or. Portrait d’un Frenchie venu en Californie pour faire rêver les stars d’Hollywood et réaliser le sien, son rêve américain. Textes et photos C. Boulain

À

l’entrée, sur la gauche, un canapé en cuir, profond et marron. Avec, tout autour, des pièces de motos et une hélice d’avion. Sur la droite, à côté du bureau, un vaste espace où sont exposées quelquesunes de ses œuvres, sur la béquille ou accrochées au mur. Et avec, juste à côté, l’atelier. Quand on arrive chez Heroes Motors, au 1210 South La Brea Avenue, on comprend rapidement que ce n’est pas un garage comme les autres. « J’avais tout en tête, l’espace détente pour boire un coup en fumant une cigarette, avec des motos tout autour et une vue sur l’atelier. Quand j’ai récupéré ce local, l’ancien de l’artiste Thierry Guetta, Mr Brainwash, je savais exactement ce que je voulais en faire. » C’est une constante chez Serge, de savoir où il va. À 10 ans il

116 Followed Magazine

découvre la moto, car son grand-père s’adonne au motocross. Neuf années plus tard, il part à l’aventure, explorer le sud de la France au guidon de son XT600, et découvre ce sentiment de liberté que seule une moto peut procurer. À 21 ans, en sortant des Beaux-Arts juste diplômé, il débarque à Los Angeles pour faire un break et comprend vite que sa vie est là. Il ne sait pas encore de quoi elle sera faite, mais elle sera là. Quatre ans plus tard, alors qu’il s’apprête à terminer ses études d’architecture, il tombe amoureux pour la seconde fois de sa vie, en pleine brocante à Vincennes. La première fois, c’était de Muriel, sa femme, la mère de ses quatre enfants. La seconde, d’une Peugeot 350 de 1936. Sa passion pour les motos anciennes, les historiques, avec un passé et parfois sans avenir, débute ainsi.


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MÉCANIQUE Ge Targino, le mécanicien de l’atelier, travaille sur la Harley de Serge, assortie à la vieille Amilcar grise.

L’atelier de Heroes Motors, sur La Brea Avenue, est à la fois un workshop, un lieu d’exposition et un salon de détente.

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“ Au premier plan, l’Amilcar de 1926, qui sera assortie à la Harley derrière. Serge met encore souvent les mains dans le cambouis, mais Ge Targino, ici en photo, aussi.

Ici c’est Los Angeles, en Californie. On a une créativité, un style bien à part. Nos clients veulent retrouver ça dans nos motos

Elle ne s’est jamais tarie. À partir de ce moment, il va commencer à collectionner, à acheter des motos, à les restaurer, et même à les mettre en caisse. « Je disais à mes potes : tu vois celle-là, je la mets en caisse ici, en Normandie. Mais je l’en sortirai en Californie. Je le sais, j’en suis sûr... » Il avait raison. Cela a juste pris un peu plus de temps que prévu. Dès 2008, la famille Bueno avait envisagé de partir s’installer à Los Angeles. Mais le déménagement n’aura lieu finalement qu’en 2013. « Tout était prêt, on avait même signé pour une maison ici. Le rêve américain était à portée de main, mais j’ai reçu une de ces propositions qu’on ne peut pas refuser, un challenge professionnel énorme mais passionnant. On a tout repoussé de cinq ans, finalement. Mais ça n’a pas changé grand-chose : ma femme et moi savions qu’on viendrait s’installer à Los Angeles, tôt ou tard. »

La dernière moto de Johnny En août 2013, les Bueno débarquent donc en Californie. En France, Serge avait monté un véritable atelier, d’abord chez lui à Paris. Il avait appris à redessiner des motos, à les démonter totalement, les modifier et les restaurer. Et il avait à la fois un stock incroyable de motos à pedigree et un carnet d’adresses de collectionneurs. Mais ça, c’était en France. « À Los Angeles, la première année, j’ai constitué un réseau, j’ai rencontré des gens. En fonction d’où vous allez, vous ne croisez pas les mêmes personnes, ici et là. Il y a des quartiers où il faut être. Et quand vous y êtes, vous avez tout. » Il rencontre l’acteur Olivier Martinez, avec qui il devient ami, puis l’artiste français Thierry Guetta, qui lui cède son ancien atelier. Il s’y isole près de huit mois pour en faire ce qu’il veut : un atelier où les clients auront envie de traîner, qu’ils s’appellent Mickey Rourke ou Johnny Hallyday. « Johnny, c’était un mec en or, avec un cœur énorme. Il venait de temps en temps à l’atelier me rendre visite. Je lui préparais une moto

Followed Magazine 119


MÉCANIQUE

Nous faisons aussi bien des motos pour tous les jours, capables de rouler, que des displays, comme je les appelle, des motos de décoration

exclusive, totalement inédite... qu’il n’aura jamais vue finie. Je pense que je ne la vendrai jamais. » Avec sa french touch, un goût certain pour le luxe, les beaux matériaux et les accessoires léchés, Serge séduit les amateurs de customs, d’autant que sa créativité grandit sous le soleil de Californie. « Je suis comme ces vieilles montres calculatrices solaires. Je peux faire plein de choses, à condition d’avoir du soleil... c’est vraiment vital pour moi. C’est un peu ce que je venais chercher ici, avec cette sensation que tout est possible si on s’en donne la peine. » Mais les amateurs de customs sans suspension qui aiment rouler au ras des pâquerettes ne sont pas ses uniques clients. Au contraire. Sa spécialité, s’il en a une, ce sont les displays, comme il dit, ces motos anciennes dont les faits d’armes en course allongent le pedigree autant que la valeur.

Un record de vente

« J’aime ces vieilles motos, elles ont une histoire. J’en ai acheté beaucoup, parfois à des prix délirants, mais ce sont à chaque fois des placements, des investissements J’ai des clients ici qui préfèrent accrocher au mur une moto des années 1930 superbement restaurée qu’une toile de maître. Et je les comprends. » Derrière lui, au moment où il nous le dit, trois motos personnelles, pas à vendre, sont exposées, dont une accrochée au mur via des chaînes et des équerres. Il paraît que de riches acteurs américains aiment ce genre de déco, jusque dans leur garage. Encore une fois, on les comprend. Dans le genre, en décembre dernier, Serge a vendu une moto à un prix record... qu’il ne préfère pas donner. Sa plus belle vente si l’on considère le prix, mais pas

120 Followed Magazine

Peinture, pièces sur mesure, en cuir ou en métal, accessoires haut de gamme, les modifications sont infinies... tant que c’est beau. La législation californienne est bien moins stricte qu’en France.


Ici, deux HarleyDavidson prêtes à prendre la route. Pas très pratiques, mais magnifiques.

À gauche, une BSA 500 cm3 de 1972, parfaitement restaurée et prête à être accrochée au mur d’un passionné.

Followed Magazine 121


MÉCANIQUE Au premier plan, la moto que Serge a créée pour Johnny Hallyday. Un display doté d’un moteur Triumph et de pièces faites sur mesure.

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“ La boutique Heroes Motors, sur Melrose Avenue, regorge d’œuvres d’art sur deux roues, comme cette Confederate chevauchée par Mark Wahlberg dans Transformers. C’est la vraie, certificat à l’appui.

Ces motos accrochées au mur, c’est quand même plus beau qu’un tableau ! En plus, elles ont toutes une histoire, un palmarès

sa préférée. « Dans mon esprit, la plus belle, c’est la prochaine. Mais j’ai un souvenir particulier d’une Majestic de 1923, dessinée par Georges Roy. Je l’ai achetée l’an dernier, j’ai mis plus de cinq mois à la restaurer avant de l’exposer dans mon showroom de Melrose Avenue. Elle est partie en moins d’une semaine à un riche collectionneur. Là, c’est clairement un investissement en même temps qu’un coup de cœur. Mais ça n’est pas tous les jours. » Dans l’atelier, le jour de notre passage, Targino se partageait entre une Harley de client à customiser et la vieille Amilcar que Serge a ramenée de France et qu’il veut pouvoir exposer dans son showroom. À côté d’une moto pareillement décorée, bien sûr, il aime quand c’est assorti. Il a bon goût, il faut l’avouer.

Des exemplaires uniques Ce goût se retrouve dans le showroom Heroes de Melrose Avenue, ouvert en décembre dernier. « Être à Melrose, au bon endroit à quelques centaines de mètre de Melrose Place, c’est s’assurer d’avoir les bons clients, ceux qui peuvent craquer pour une moto historique à 200 000 $ juste parce qu’ils en ont envie. Mais on ne fait pas que des ventes comme cela, je vous le disais. Nous avons aussi des exemplaires uniques, parfois des motos qui ont joué dans des films comme la Confederate de Mark Wahlberg dans Transformers, avec certificat et tout... là encore de beaux objets qui prendront de la valeur. Mais j’ai aussi des accessoires, tout ce qu’un motard peut désirer. » Dans un coin, des blousons en cuir frappés du logo Heroes Motors, dans un autre des casquettes ou des tee-shirts, et même des montres Rolex customisées. Et puis quelques motos accrochées aux murs, des sculptures de son ami Xavier Parent et la moto de Johnny. Un moteur Triumph dans un cadre sur mesure. Une moto sur mesure, en fait, que Serge lui réservait. Mais c’est une autre histoire.

Followed Magazine 123


BIEN-ÊTRE

Profiter au mieux de son sauna

Ce bain de vapeur sèche bienfaisant n’est plus réservé aux pays scandinaves où il est né. De plus en plus répandu en France, il doit toutefois être pratiqué sous certaines conditions.

L

e principe du sauna est simple : proposer à ses utilisateurs un bain de vapeur sèche, à l’inverse du hammam où l’atmosphère est saturée en humidité, qui va les détendre, relaxer leurs muscles grâce à la chaleur et évacuer leurs toxines par sudation. Mais dans cet environnement extrême, où l’humidité est comprise entre 3 et 20 % pour une température allant de 75 à 90 °C, on ne doit pas faire n’importe quoi. Il existe des règles à respecter pour profiter au mieux de ces instants.

de bain va gêner l’évacuation de la sueur, voire parfois la circulation du sang. L’idéal est d’avoir une simple serviette-éponge qu’on disposera sur le banc, sous soi. Mais avant même d’entrer dans le sauna, il faut absolument se doucher à l’eau chaude et bien se savonner. Pour deux raisons : enlever bactéries et germes et aussi se réchauffer les extrémités pour éviter les chocs thermiques dans le sauna. Pensez à bien vous sécher pour à la fois retarder le processus de sudation et empêcher le corps de se refroidir.

Avant

La séance de sauna se passe en deux ou trois passages, de quinze minutes maximum chacun. Il faut savoir que la chaleur monte et que plus on

Même si c’est difficilement admis chez nous, le sauna se pratique nu. Même un simple maillot

124 Followed Magazine

Pendant


s’installe en hauteur, plus il fait chaud. Il est aussi admis qu’on ne parle pas dans un sauna, on ne fait rien, on profite. Dans les pays scandinaves, cela se passe dans un silence quasi religieux. Enfin, il est préférable de respirer par la bouche pour ne pas risquer de se brûler les muqueuses du nez. Pour le reste, c’est toujours la même chose : dès l’apparition de sueur, il faut penser à sortir. Pour le premier passage, cela prend de 8 à 12 minutes en moyenne. Il faut alors sortir, se doucher à l’eau fraîche, mais pas glacée, pour faire redescendre la température corporelle et se reposer de 10 à 15 minutes. On peut alors faire un second passage, qui peut être un peu plus long, quelques minutes après les premières gouttes de sueur. Il ne faut toutefois jamais dépasser les 15 minutes et toujours rester à l’écoute de son corps. En cas de fatigue, sortez. Puis renouvelez le protocole, douche, séchage et repos. Pensez à bien vous couvrir lors de cette phase de repos. Le corps doit redescendre en température (il atteint facilement les 40 °C dans le sauna), mais pas se refroidir. Il est alors temps de penser au dernier passage, le troisième. Il ne faut jamais dépasser les trois passages lors d’une séance de sauna. Pour celui-ci plus que pour les précédents, soyez bien à l’écoute de votre organisme. S’il dure normalement de 10 à 15 minutes, il doit être écourté à la moindre sensation de fatigue. Avec l’élévation de la température, le rythme cardiaque augmente et les vaisseaux sanguins se dilatent. La pratique du sauna est d’ailleurs déconseillée aux personnes souffrant d’hypertension, de troubles cardiaques ou d’insuffisance veineuse. Et carrément interdite aux femmes enceintes.

Après

Comme pour les deux premiers passages, il faut se doucher à l’eau tiède ou fraîche après le troisième, bien s’essuyer, se couvrir et se reposer. Au moins vingt minutes cette fois, le temps pour le corps de retrouver sa bonne température. Il faut aussi s’hydrater en buvant de l’eau. Lors d’une séance de sauna de 1 heure 30 à 2 heures, il est courant de perdre un litre d’eau par sudation. Il faut d’ailleurs s’enlever du crâne que le sauna fait maigrir, la seule perte de masse étant la sueur, qui sera remplacée dès réhydratation. Pour autant, une séance de sauna a bien des avantages, comme d’éliminer les toxines emmagasinées, de nettoyer la peau, de réduire les tensions physiques et mentales et d’apaiser l’esprit. À condition de respecter certaines règles. Textes L. Clef, photos DR

JAMAIS PLUS DE TROIS PASSAGES SUCCESSIFS Followed Magazine 125


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Rédaction

A. Bloch, S. Clef, A. Gardinier, F. Montfort, A. Poupin, D. Saint-Aubin, K. Thomas

Photographes

A. Bloch, M. Earey, J. Limbes, Mitchell, F. Montfort, B. Rouffignac

Conception

M. Souday, L. Hériau

Fabrication

SIB Imprimerie, Boulogne-sur-Mer. Imprimé en France Dépôt légal à parution ISSN : 2427-0881 Diffusion presse et pro Axiome group, France MLP

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Publicite@followed.fr Tél. +33 (0)6 62 46 64 72 Followed Magazine est édité par Followed SAS SIREN : 808 701 569 Capital de 20 000 € Président C. Boulain Tél. +33 (0)6 62 46 64 72

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Nous étions début mars au Salon de l’automobile de Genève. Nous avions publié les plus belles nouveautés en direct.

Deux semaines plus tard, nous étions à Baselworld. Et entre les deux, en Islande pour un road trip à paraître en fin d’année.

Découvrez en avant-première et en photos nos prochains reportages


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C’est un Costa Rica en pleine élection présidentielle que nous avons traversé au volant d’une Citroën C3 Aircross. Mais entre le volcan Arenal, le parc de Tortuguero, les plages de Quepos et les plantations de café d’altitude, la vie politique locale n’était qu’un détail de ce road trip en Amérique centrale.

Régis Mathieu aime les voitures anciennes, les Porsche principalement, mais aussi les vielles Cox, les livres et surtout les lustres. En fait, Régis aime les beaux objets, avec une histoire et un passé, mais aussi avec un avenir. Rencontre avec celui qui restaure les lustres des plus beaux musées du monde et invente ceux des plus beaux palais, dans son atelier-bureau-musée du Luberon.

Rien de plus branché que de rouler en Alfa Romeo Stelvio en Californie. Essai du premier SUV du constructeur italien entre Venice Beach et les canyons de Malibu, à l’heure des surfeurs.

Et beaucoup d’autres surprises

dans le numéro 20

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Sac : CABINE I Photographie : Yves Mourtada


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