Cybèle Desarnauts
AU CŒUR DU MISTRAL LES ÉDITIONS DU GOLFE
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AU CŒUR DU MISTRAL
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20 © © 2009 Les éditions du Golfe, 1 rue Maréchal-Ornano — 20000 Ajaccio Diffusion : www.leseditionsdugolfe.com © Cybèle Desarnauts pour les illustrations, tous droits réservés pour tous pays.
Cet ouvrage a été édité avec l’aimable autorisation du SIRPA Marine, ainsi que celle des personnages reproduits dans cette édition. « Toute représentation ou reproduction, intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur, ou de ses ayants droit, ou ayants cause, est illicite » (article L.122-4 du code de la propriété intellectuelle). Cette représentation ou reproduction, par quelques procédés que ce soit, constituerait une contrefaçon sanctionnée par l’article L.335-2 du code de la propriété intellectuelle. Le code de la propriété intellectuelle n’autorise, aux termes de l’article L.122-5, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective, d’une part, et, d’autre part, que les analyses et courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration.
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Préface
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Cet ouvrage est écrit non pas avec des mots mais avec des images. Son auteur manie son objectif comme un grand écrivain le fait de sa plume. Rien ne doit au hasard, chaque expression est saisie avec à propos. Chaque attitude, lors d’exercices ou du travail de tous les jours, en dit beaucoup plus qu’un long discours. L’imposante masse flottante de 22 000 tonnes, qui impressionne toujours ceux qui rencontrent le Mistral , n’est plus un monstre froid, bourré de technologie. Photographié plus souvent de l’intérieur que de l’extérieur, il est vu à travers les hommes et les femmes, marins et soldats qui servent à son bord. Ainsi l’œuvre créatrice de Cybèle Desarnauts lui donne une personnalité. Cette personnalité a du caractère et du cœur. Alors qu’on ne lui demandait que du courage et de l’abnégation. Que l’auteur en soit ici remercié… du fond du cœur.
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« Au Cœur du Mistral » est un recueil de photographies, mais il se lit comme un roman d’aventures. Mais, à la différence d’un roman, il ne raconte que des aventures vécues. Avec de vrais personnages. Ce sont celles de l’équipage du Mistral en action, dans son quotidien. Le marin à bord n’a pas toujours conscience qu’il en vit une, au quotidien, du moins sur le moment. Car il est concentré sur sa tâche, attentif à ses équipiers, à sa mission et aux éléments météorologiques qui constituent un impératif catégorique. C’est la loi de la mer. Cybèle Desarnauts a pu embarquer à bord du Mistral et partager durant plusieurs jours la vie de son équipage. Grâce à son talent, chaque marin du bord prend de la distance et, paradoxalement, peut mieux percevoir ce qu’il vit. Plus encore, il peut désormais faire partager cette vie si peu ordinaire à son entourage, proches et amis restés à terre, tant ces images sont évocatrices. Les mots seuls peinent souvent à décrire la vie en mer.
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Par le Capitaine de Vaisseau Didier Piaton, Commandant du Bâtiment de Projection et de Commandement Mistral
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Cybèle Desarnauts, la mer à voir
Un navire – vous êtes à bord du « Mistral » — c’est un monde clos, une société réduite à 177 personnes, dont 20 femmes. L’homme, la femme dans son milieu, l’un et l’autre seulement préoccupés par la tâche qui leur est assignée. En face d’eux, l’appareil à déclic, la photo qui est l’instant capturé. Tout commence là, à la seconde où tout se fige : la vie présente, vibrante. Immobilisée. Il y a – comment l’appeler autrement – la part de miracle, le pouvoir de la magie. L’image va s’imposer, c’est sûr, reste à la capter vive.
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L’aventure photographique de Cybèle commence tôt. À 14 ans, son père lui offre son propre Pentax. Débute alors pour l’adolescente l’apprivoisement, une incroyable histoire d’amour peuplée d’images disparates. C’est le temps de l’argentique. De son passage à l’École Supérieure d’Arts Graphiques, elle se souvient de son sujet de thèse : « Illustrez un poème de Rafaël Alberti »… Le poète espagnol dont, curieusement, (mais peut-être l’ignorait-elle alors ?) l’une des œuvres s’intitule « Marin à terre ».
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qui marque les traits. Rien de vraiment spectaculaire, seulement l’émotion saisie : le portrait brut, sans aucun artifice photographique. Les marins qu’elle surprend sont attentifs, concentrés sur leur tâche, déconnectés de ce monde frénétique qui est le nôtre. Derrière leurs visages fermés, on devine une vie intérieure qui affleure. La photographe nous les restitue sans apprêt, de dos, de face, dans l’ombre. En silhouette.
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Il faut l’intuition, la spontanéité, l’inconscience aussi de cette jeune femme pour se confronter à cet univers marin. La marine, non pas conquérante, non pas mythifiée, sanglée dans son uniformité, mais, à l’inverse, active, remuante et dont, sans complexe, elle casse l’image d’Épinal.
Avec l’expérience, son œil devient plus affûté, il ne cadre que ce qui lui convient. Ne s’encombre pas, gomme l’esthétique, efface toute trace de paysage. Cybèle fait le choix d’images physiques, le corps, les mains en mouvement, la fatigue
Elle avoue aimer être surprise. La preuve, elle n’aime rien tant que se trouver confrontée à l’inattendu. Elle refuse systématiquement les images toutes faites, les clichés convenus qui se situent loin de la vérité. Son ambition n’est pas de créer une composition photographique mise en scène qui fait l’image séduisante et rien de plus, d’autant qu’il y a un mystère dans la photo, on ne force pas l’image, c’est elle qui vient à vous. Cybèle, désarmée, n’entend rien aux techniques militaires, elle a retenu, qu’à bord, il existe de vraies valeurs qui font que les hommes demeurent soudés. De la vie des uns dépend la vie des autres. Elle a découvert aussi la diversité des tâches, car il y a une foule de métiers sur un navire et des hommes animés par la passion de ce qu’ils font. Leur satisfaction, au bout du compte, n’est rien d’autre qu’un salaire moral : le service rendu. La photographe porte un regard différent, le regard d’une femme qui met en évidence l’humanité des marins du « Mistral », tout à coup débarrassés de leur légende bleue Royale et qui, ainsi, page après page, nous deviennent plus proches. Jérôme Camilly
Cybèle Desarnauts Photographe
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m’a renseignée sur certaines coutumes marines et m’a même enseigné les mots interdits à bord. La richesse de cet échange a incontestablement contribué à la sensibilité des clichés pris à ce moment-là. Finalement ce qui m’a le plus déroutée, c’est le décalage entre mes attentes et la réalité de cette semaine; je ne m’attendais pas à recevoir un tel choc esthétique. J’ai été stupéfaite par la beauté des lumières et des couleurs : l’atmosphère rouge et saisissante des ravitaillements, aux couchers de soleil lors des manœuvres des hélicoptères, j’ai découvert plus de couleurs qu’il m’était possible d’imaginer. Ensuite, j’ai mesuré la difficulté et la complexité de métiers que le commun des mortels sous-estime. Ces hommes sont comme les danseurs d’un corps de ballet : ils travaillent en équipe et exécutent des manœuvres techniques, parfois dangereuses, en rythme avec l’enchaînement des scenarii imaginés par le Commandant, le tout en parfaite symbiose avec les éléments. La mer, le vent sont ainsi parties intégrantes de la chorégraphie qui se joue à bord. Enfin, je remercie infiniment ces hommes, solidaires et animés par une même passion, celle de la mer, de m’avoir autorisée à pénétrer dans leur univers, leur intimité. Ils m’ont ouvert leurs cœurs et c’est le plus beau cadeau que l’on puisse recevoir. C’est cette expérience humaine inoubliable, loin des clichés et des uniformes de parade, que je souhaite aujourd’hui partager à travers mes photos. Cybèle Desarnauts
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LE PHOTOGRAPHE EST UN CHASSEUR D’IMAGES bien sûr, mais aussi et surtout d’émotions : il capture les expressions sur le vif et met en boîte la spontanéité d’un regard, d’un sourire ou d’un geste. Aussi, doit-il se fondre dans le paysage, se rendre invisible, tel un caméléon qui change de couleur en accord avec son environnement ou un militaire qui revêt sa tenue camouflage. Ne disposant pas de ce genre d’équipement, j’étais un peu inquiète quant à mes capacités à disparaître, femme, civile et embarquée sur un navire de la Marine nationale. D’ailleurs, ma présence en a intrigué plus d’un, certains se demandaient quel pouvait bien être mon rôle à bord. Je me suis donc démasquée et ai expliqué ma démarche. Je souhaitais saisir le véritable visage de la Marine, celui qui se cache derrière le cliché, sous l’uniforme, l’Homme. Je voulais également révéler la diversité des métiers et des activités exercés à bord d’un navire qui finalement s’apparente à une véritable ville. Dès lors, j’ai reçu un accueil très chaleureux, loin de la rigueur à laquelle je m’étais attendue. L’équipage, qui s’est montré d’une grande disponibilité, a accepté de jouer le jeu et m’a laissé entrer dans son quotidien. Car c’est bien de cela qu’il s’agit, inscrire les jeux de regard, les moments de complicité voire d’intimité, sur la pellicule. J’ai par exemple passé trois jours à poursuivre le boulanger qui finalement, tout en pétrissant sa pâte et préparant ses croissants a partagé avec moi ses anecdotes,
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20 © Toulon dort. Le Mistral s’éveille, l’équipage se prépare
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Découverte de la vie en passerelle. Appareillage, entre chien et loup, pluie battante…
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Les couleurs au lever du jour créent une atmosphère particulière et fascinante.
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5 h 30, il fait nuit. Tout est noir : le ciel, la mer, les zodiacs, les combinaisons des Commandos. Ambiance mystérieuse. Je suis totalement invisible et j’aime me fondre dans l’obscurité.
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Les bateaux appareillent. Découverte de la complexité des manœuvres dans le radier.
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Retour des Commandos et plongeurs démineurs en plein milieu de la nuit, avant l’opération de débarquement. Le silence, la fatigue et le charisme de ces hommes nous submergent.
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Ce manœuvrier gère la logistique de l’armée de Terre tel un chef d’orchestre.
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L’antre du Mistral. Seul à la manœuvre. La tension est palpable.
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Ne pas gêner aux manœuvres. Je suis au fond de la passerelle et j’essaye de me rendre invisible auprès de l’équipage.
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Je découvre cet univers mystérieux… L’équipage ne s’est pas encore habitué à moi. Je sens leurs regards interrogateurs.
Amusée, je m’aperçois que les navires sont équipés d’essuie-glace. Détails auxquels on ne s’attend pas. Ce détail me renvoie dans un imaginaire… Le Mistral au cœur d’une tempête.