Évaluer la maturité des pommes

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Évaluer la maturité des pommes

Évaluer la maturité des pommes Test de l’amidon Jollin Charest, M.Sc., P.Ag. Roland Joannin, d.t.a.


Avant-propos

Ce feuillet se veut un outil de référence pour la réalisation du test de maturité des pommes par révélation de l’amidon à la solution d’iode, communément appelé « test d’iode » ou « test de l’amidon ». Jusqu’à présent, l’industrie pomicole québécoise utilisait plusieurs chartes provenant de diverses sources. Il en résultait des interprétations différentes de la maturité des pommes en raison de la piètre qualité des chartes en circulation et du nombre de stades qui variait d’une charte à l’autre. La charte de maturité présentée dans ce feuillet permettra d’uniformiser et de standardiser l’interprétation du test de l’amidon entre les divers intervenants de l’industrie pomicole. Cet ouvrage permettra également à un plus grand nombre de producteurs d’effectuer un suivi rigoureux de la maturation de leurs pommes. En suivant l’évolution de la maturation, un maximum de fruits peuvent être cueillis au stade de maturité approprié et entreposé de façon adéquate selon leur potentiel de conservation. De plus, les nouveaux régulateurs de maturation qui permettent de retarder la récolte ou d’améliorer le potentiel de conservation des pommes requièrent un suivi précis de la maturation des fruits pour en retirer tous les bénéfices. La charte de maturité présentée dans ce feuillet deviendra donc un outil précieux pour le producteur et l’entrepositaire. Des pertes réduites à la récolte et à la suite de l’entreposage ainsi que des fruits de meilleure qualité sur les tablettes représentent des avantages économiques importants pour toute l’industrie québécoise de la pomme.

Pourquoi une charte universelle? Interpréter la maturité des pommes soumises au test de l’amidon n’est pas chose facile, car les patrons de coloration diffèrent selon les variétés. Il existe deux approches pour interpréter les tests de l’amidon. La première propose des chartes spécifiques pour chacune des variétés. Celles-ci illustrent l’avancement de la maturité sur une même échelle, c’est-à-dire que les stades corres­ pondent à des degrés de maturité déterminés, mais ils prennent une apparence différente selon les variétés. Par exemple, le stade 4 correspond au stade le plus avancé permettant l’entreposage en atmosphère con2

Photo : Jollin Charest

Pour demeurer compétitif, le secteur pomicole québécois doit non seulement produire des fruits de première qualité, mais également tout mettre en œuvre pour maintenir la qualité pendant tout le processus de mise en marché. À cet égard, l’évaluation de la maturité des fruits lors de la récolte est un élément essentiel pour déterminer le type et la durée d’entreposage les plus appropriés en vue d’offrir aux consommateurs des pommes de haute qualité.

trôlée à long terme pour toutes les variétés, mais la chair de la McIntosh montre une décoloration de 50 % alors que celle de l’Empire ne présente pratiquement aucune décoloration. La difficulté de cette méthode consiste en l’interprétation différente de la décoloration pour chaque variété. De plus, les chartes ne sont pas disponibles pour toutes les variétés et selon les sources, le nombre de stades varie, modifiant ainsi l’interprétation des résultats du test. La deuxième approche consiste à utiliser une seule charte dite « universelle » pour tous les cultivars. Une telle charte a été publiée par G.D. Blanpied et K.J. Silsby de l’Université Cornell en 1992. Les stades de maturité correspondent toujours au même degré de coloration par l’iode. Ainsi, l’évaluation du stade de maturité des pommes est plus facile à réaliser. Par contre, pour un même stade, la maturité physiologique sera variable selon les variétés. Chaque cultivar a donc sa propre échelle qui permet d’établir le stade de la maturité optimale pour le type d’entreposage souhaité. Par exemple, pour l’entreposage en atmosphère contrôlée à long terme, les stades vont de 3,5 à 5,0 pour le cultivar McIntosh et de 2,5 à 3,5 pour l’Empire.


Évaluer la maturité des pommes La charte universelle est celle dont l’usage est recom­ mandé. Elle est de plus en plus utilisée en Ontario et dans les États américains voisins du Québec. De plus, tous les résultats de recherche sur la maturité et les recommandations des fabricants de produits agissant sur la maturation des fruits (p. ex. : SmartFreshSM) se basent maintenant sur cette charte. L’industrie pomicole québécoise l’utilise encore peu, mais en l’adoptant, il deviendra possible d’obtenir une interprétation uniforme de la maturité des fruits entre les intervenants d’ici ainsi qu’avec les intervenants d’ailleurs.

Introduction À partir du moment où les pommes commencent leur maturation, la respiration des fruits augmente et s’accom­ pagne de toute une série de changements biochimiques initiés par l’hormone naturelle du mûrissement, l’éthylène. L’amidon accumulé dans les fruits immatures commence à se transformer en sucre au centre de la pomme. La maturité des fruits au moment de la cueillette et les conditions d’entreposage sont des éléments clés qui affectent l’apparence, le goût et la conservation des fruits. La maturation des pommes est influencée par de nombreux facteurs et varie de façon notable d’un endroit à l’autre et d’une saison à l’autre. Il est donc important de réaliser un suivi annuel de chacune des parcelles du verger. Les tests de maturité effectués systématiquement avant la récolte de chacun des lots de pommes permettent la cueillette de fruits à l’intérieur d’une plage précise de maturité. Ils permettent éga­ lement d’ajuster le type et la durée de l’entreposage selon le stade de maturité des fruits et de réduire ainsi les mauvaises surprises lors de la mise en marché.

Les méthodes d’évaluation de la maturité Il existe plusieurs méthodes pour évaluer la maturité des pommes. Les évaluations portant sur la coloration de l’épiderme, la saveur, le brunissement des pépins ont l’avantage d’être simples, mais elles manquent d’objec­ tivité. La mesure de la production d’éthylène est reconnue comme la méthode la plus précise pour évaluer la maturité, mais elle demande un appareillage complexe et dispendieux.

Le « test de l’amidon » La mesure de régression de l’amidon par l’iode ou « test de l’amidon » est une méthode pratique pour évaluer la maturité des pommes au verger, car elle est simple à réaliser et elle offre une précision satisfaisante. La transformation graduelle de l’amidon en sucres solubles peut être observée en trempant les fruits coupés dans une solution d’iode. L’amidon contenu dans la chair prend une teinte bleu foncé suivant un motif caractéristique du degré de maturité des fruits. Ce motif peut alors être comparé à une charte de maturité (voir la charte uni­verselle de maturité des pommes aux pages centrales).

La préparation de la solution d’iode La solution d’iode est disponible chez les fournisseurs de produits horticoles. Il est aussi possible de préparer soi-même cette solution. La méthode de préparation est la suivante : 1. Dissoudre 8,8 g d’iodure de potassium dans environ 30 ml d’eau chaude, remuer doucement jusqu’à la dissolution du sel. 2. Ajouter 2,2 g de cristaux d’iode et agiter jusqu’à ce que les cristaux soient complètement dissous. 3. Diluer avec de l’eau jusqu’à ce que le volume de la solution d’iode atteigne 1 litre puis agiter pour mélanger parfaitement. Note : Pour se conserver, la solution d’iode doit être entre­ posée dans un contenant de verre teinté ou enve­loppé de papier d’aluminium, car la solution est sensible à la lumière. Attention : La solution est très toxique et devrait être identifiée et entreposée comme telle. Les pommes testées devraient être mises à la poubelle de manière sécuritaire pour éviter que des enfants ou des animaux puissent en manger. Si des pommes contaminées étaient ingérées accidentellement, provoquez le vomissement et consultez un médecin.

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Les premiers tests devraient débuter 1 à 2 semaines avant la récolte et être effectués à une fréquence d’une à deux fois par semaine. Pour chaque cultivar, prélevez au hasard une pomme par arbre sur un minimum de 10 arbres différents par échantillon. Il est très important de choisir des arbres et des fruits représentatifs de la parcelle à évaluer pour ce qui est de la vigueur, de la charge de pommes ainsi que du calibre et de la coloration des fruits. Si plusieurs cueillettes sont envisagées, choisissez l’échantillon parmi la catégorie de pommes que vous prévoyez récolter sur un même passage. Prélevez des fruits des deux côtés des rangées sur des branches faciles à cueillir et évitez les branches ombragées au centre des arbres. Porter attention à ne pas prendre de fruits endommagés (piqûres, pourriture du calice, tavelure, etc.), car leur degré de maturité est généralement plus avancé que celui des autres pommes. Un prélèvement de 12 fruits permet d’écarter, lors du test, les fruits endommagés qui auraient passé inaperçus durant l’échantillonnage.

Le traitement des échantillons À la suite du prélèvement, les échantillons doivent être testés la journée même, le plus tôt possible. L’échantillon est valide au moment de la récolte. Par la suite, il perd rapidement toute signification, même si les fruits ont été conservés au frais, car la vitesse de régression de l’amidon augmente rapidement et de façon variable selon les variétés. 1. Versez la solution d’iode dans un contenant à fond plat jusqu’à obtenir environ 5 mm d’épaisseur. 2. Tranchez chacune des pommes en deux parties dans le plan équatorial (égale distance entre le pédoncule et le calice). Une seule moitié de pommes est nécessaire pour le test. 3. Trempez ensuite les surfaces coupées des demi-fruits dans la solution d’iode pendant environ 5 secondes en agitant délicatement. Notez que le trempage peut être remplacé par une vaporisation de solution d’iode à l’aide d’un vaporisateur manuel ou une application à l’aide d’un pinceau. 4. Retirez les moitiés de pommes de la solution et placez-les sur une table côté trempé vers le haut puis attendre pendant une minute pour laisser la réaction de coloration se faire. 5. Alignez les demi-fruits en les plaçant par ordre d’intensité de la coloration. 6. Comparez les motifs de chaque fruit avec la charte universelle de maturité pour évaluer le stade de maturité de chacun. 4

7. Notez les stades de maturité et regroupez les fruits de même stade. 8. Notez l’amplitude des stades de maturité de l’échan­ tillon, c’est-à-dire la plage de maturité des pommes allant des moins au plus matures. Par exemple, un échantillon peut avoir une amplitude de 1,0 à 2,5 ou 4,0 à 6,0. Voir l’analyse des résultats pour les détails. 9. Comparez l’amplitude de l’échantillon avec les amplitudes présentées au tableau 2 afin de choisir le type d’entreposage et la période de mise en marché selon le cultivar. 10. Une fois terminé, jetez la solution d’iode utilisée, car celle-ci doit être renouvelée régulièrement, c’est-àdire au moins tous les jours.

L’interprétation de la coloration Lorsque l’amidon entre en contact avec une solution d’iode, il se forme un complexe amidon/iode très coloré. Ce complexe résulte de la fixation de l’iode à l’intérieur de la chaîne de molécules de sucres qui composent l’amidon. Cette fixation n’est plus possible lorsque la chaîne de l’amidon est brisée en sucres solubles. Ainsi, plus la chair contient d’amidon, plus elle prend une couleur foncée. À mesure que l’amidon se transforme en sucres solubles durant la maturation, la coloration foncée diminue. Cette transformation s’effectue d’abord à proximité du cœur, puis graduellement vers l’extérieur. Les premiers changements dans la coloration constituent les premières indications de l’approche de la fenêtre de récolte.

Photo : Roland Joannin

Le prélèvement d’un échantillon


Évaluer la maturité des pommes

Tableau 1. Répartition générale de la coloration de l’amidon selon le stade de maturité des pommes pour un test de l’amidon 1

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Stade de maturité 4 5

6

7

8

100 % 50 % 0 % Coloration des carpelles 100 % 80 %

60 % 40 % Coloration de la chair

20 %

0%

Adapté de : Blanpied et Silsby, 1992

Au stade 3, la décoloration débute dans la chair alors que celle des carpelles est pratiquement complétée. Dans la pratique, les patrons de coloration ne sont pas exactement les mêmes pour toutes les variétés. Pour la majorité des variétés, la régression de l’amidon est concentrique, c’est-à-dire que la décoloration débute au centre et progresse vers l’extérieur ou vers l’épiderme. D’autres variétés, comme la Cortland, présentent une régression radiale de l’amidon, ce qui signifie que la décoloration s’observe plus uniformément dans le cœur et la chair (Figure 2). Les deux types de patron de régression sont présentés dans la charte universelle.

Photo : Jonathan Rodrigue

La figure 1 illustre les éléments internes de la pomme. De façon générale, les trois premiers stades de maturité se caractérisent par une décoloration des carpelles (à intérieur de la ligne du cœur). Les stades 3 à 8 correspondent à la décoloration graduelle de la chair (Tableau 1).

Figure 2. Décoloration radiale de la Cortland entre les stades 3 et 4; les carpelles sont encore partiellement colorés et la décoloration est bien amorcée dans la chair

L’analyse des résultats La récolte marque le début du processus inévitable et à sens unique vers la perte de qualité du fruit. Afin d’optimiser la fermeté des fruits au terme de l’entreposage, on choisira les fruits les moins matures pour l’entreposage à plus long terme. Ainsi, la cueillette des fruits doit être effectuée le plus tôt possible pour l’entreposage en atmosphère contrôlée à long terme. Les pommes doivent toutefois avoir commencé leur processus de maturation pour développer leurs caractéristiques variétales (saveurs, arômes). Les fruits cueillis trop tôt auront tendance à subir des désordres physiologiques pendant l’entreposage comme l’échaudure superficielle et la tache amère.

Figure 1. Noms communs des parties d’une pomme en coupe équatoriale

Le tableau 2 présente le type d’entreposage recommandé selon l’indice d’amidon, la fermeté des fruits, la durée de l’entreposage ainsi que la période visée de mise en marché.

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