Yves Gagnon
La culture écologique
des plantes légumières
Colloïdales
Photographies Yves Gagnon sauf lors d’indication contraire Calibrage des photographies Olivier Lasser Révision Diane Mackay, Nicole Gagnon Infographie Pierre Foisy Tous droits réservés pour tous pays. La culture écologique des plantes légumières est publié par Les Éditions Colloïdales. Il est imprimé sur du papier Gusto satin issu de fibres vierges provenant de forêts certifiées FSC (Forest Stewardship Council). Les Éditions Colloïdales Saint-Didace (Québec) J0K 2G0 Canada www.jardinsdugrandportage.com Diffusion Canada Prologue inc. 1650, boul. Lionel-Bertrand, Boisbriand (Québec) J7H 1N7 Téléphone : 450 434-0306, 1 800 363-2864 Europe Librairie du Québec à Paris 30, rue Gay Lussac 75005 Paris, France 43 54 49 02 www.librairieduquebec.fr La culture écologique des plantes légumières Troisième édition Dépôt légal Bibliothèque nationale du Canada 2012 Bibliothèque nationale du Québec 2012 ISBN 978-2-9810274-3-6
Table des matières
Avant-propos
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Profession jardinier
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Mode d’emploi
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Chapitre 1
Les apiacées La carotte Le céleri Le céleri-rave Le fenouil à bulbe Le panais Le persil Le persil racine
17 18 26 31 34 36 39 42
Chapitre 2
Les astéracées L’artichaut La chicorée La laitue Le salsifis Le topinambour Le tournesol
45 46 49 56 62 64 67
Chapitre 3
Les brassicacées Le brocoli Le chou pommé Le chou chinois Le chou de Bruxelles Le chou-fleur Le chou-rave Le collard Le cresson Le kale La moutarde Le navet Le radis La roquette Le rutabaga
71 72 77 86 90 94 98 101 104 108 111 115 118 124 126
Chapitre 4
Les chénopodiacées La bette à carde La betterave L’épinard
131 132 134 138
Chapitre 5
Les cucurbitacées Le concombre La courge d’été La courge d’hiver et la citrouille Le melon
143 144 153 156 164
Chapitre 6
Les fabacées L’arachide La gourgane Le haricot Le pois
171 172 174 178 182
Chapitre 7
Les liliacées L’ail L’asperge L’échalote L’oignon Le poireau
189 190 195 200 202 211
Chapitre 8
Les poacées Le maïs
215 216
Chapitre 9
Les solanacées L’aubergine La cerise de terre Le piment Le poivron La pomme de terre La tomate
225 226 230 233 236 241 252
Chapitre 10
Quelques autres espèces Les aizoacées La tétragone Les amarantacées L’amarante feuille Les malvacées L’ocra Les polygonacées La rhubarbe L’oseille Les valérianacées La mâche
267 268 268 270 270 272 272 276 276 278 281 281
Chapitre 11
Les semis intérieurs
285
Chapitre 12
Le contrôle des ravageurs
291
Chapitre 13
Le contrôle des maladies
297
Creuser la terre
301
Qu’est-ce qu’on mange ?
305
Bibliographie
309
Adresses utiles
311
Index des noms anglais
315
Index des noms latins
319
Index des noms français
321
Chapitre
1
Les
apiacées Les apiacées, qu’on appelait autrefois les ombellifères, constituent une famille homogène dont on reconnaît les membres à leurs inflorescences en ombelles. Plutôt rares sous les tropiques, elles se trouvent principalement dans l’hémisphère nord. Dans ce chapitre, il est question de 7 plantes légumières membres de cette famille : n n n n n n n
La carotte Le céleri Le céleri-rave Le fenouil à bulbe Le panais Le persil Le persil racine
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Carotte
Carotte Carrot Daucus carota var. sativus
Les apiacées
et la sélection ont permis l’apparition d’une carotte à racine jaune qu’on cultivait tout d’abord comme plante médicinale, puis comme plante fourragère. Une carotte à racine orangée est apparue au xvie siècle ; cette mutation allait permettre de nouvelles sélections et d’autres croisements. Ce sont les Hollandais qui se sont intéressés les premiers à la carotte orange pour sa texture délicate et son goût sucré. Puis, des généti ciens français tel Vilmorin-Andrieux ont sélectionné l’espèce, créant des lignées améliorées tant sur le plan nutritif que gustatif. Depuis ce temps, la racine s’est peu à peu ennoblie au point qu’elle fait aujourd’hui souvent figure d’aliment fin. On cultive maintenant la carotte sur tous les continents ; elle constitue un aliment de base pour la plupart des peuples de la Terre.
Propriétés et valeur nutritive
Historique
Q
uoiqu’on trouve des carottes à l’état spontané partout sur le continent européen, on croit que l’espèce est originaire du Moyen-Orient, probable ment d’Afghanistan. La racine indigène originale était violacée, presque noire. Les mutations génétiques
Une teneur de 10 à 12 mg de bêta-carotène par 100 g fait de la carotte le légume le plus riche qui soit en cet élément. On a remarqué que plus la carotte est oran gée, plus elle en contient. C’est d’ailleurs de la racine latine carota que provient le nom carotène. Aux 100 g, la carotte compte 1,5 g de protéines, 0,3 g de matières grasses, 9,2 g de glucides et 39 calo ries. Elle contient aussi du phosphore, du potassium, du calcium, du magnésium, du cuivre, du fer, de l’iode, du manganèse, du nickel, du soufre, du sodium et du brome, ainsi que les vitamines B1, B2, B3, B5, B6, C, E et K. On la dit adoucissante, alcalinisante, apé ritive, antianémique, dépurative, diurétique, nutritive et rafraîchissante ; on prétend également qu’elle aide à maintenir une bonne vision. Enfin, elle est excellente pour le foie. On la consomme en jus, en crudité, en salade, en potage, dans les ragoûts ou comme légume d’accom pagnement.
Les apiacées
La carotte, lorsque cultivée avec des quantités excessives d’engrais azotés, contient des taux élevés de nitrates, néfastes pour la santé (voir la page 57). Aux États-Unis, le département de l’Agriculture (USDA) a décelé en 2007 jusqu’à 26 pesticides différents sur les carottes ; les cinq plus importants sont dans l’ordre le linuron, la trifluraline, la pyraclostrobine, le DDE et l’azoxystrobine.
Catégories et cultivars On trouve aujourd’hui des centaines de cultivars de carotte qu’on peut regrouper en 6 grandes catégories. La carotte miniature Baby carrot, Oxheart carrot, Paris Market carrot Les carottes miniatures sont hâtives et développent rapidement leur taux de sucre. Elles mesurent de 3 à 8 cm. Certains cultivars sont courts et effilés alors que d’autres sont courts et trapus donc mieux adaptés aux sols lourds et argileux. Très appréciées pour leur saveur et leur texture délicates, les carottes miniatures sont employées comme carottes de fantaisie. . Cultivars recommandés : Mignon (carotte nantaise de 5 à 7 cm), Paris Market # 4 (carotte courte et trapue, presque ronde). La carotte nantaise Nantes carrot La carotte nantaise est la plus populaire auprès des jardiniers. De forme cylindrique, mesurant de 12 à 18 cm, tendre et très sucrée, elle fait une excellente carotte d’été. Elle développe rapidement un taux de sucre élevé qu’elle conserve quelques mois en chambre froide ; c’est pourquoi la majorité des nantaises ne
Carotte
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constituent pas des carottes de conservation idéales, à moins d’être équipé d’une chambre froide très per formante. Les cultivars dénommés Amsterdam et Touchon sont des sous-catégories de nantaises. Cultivars recommandés : Scarlet Nantes, Touchon de Luxe, Forto Selection, Berlicummer (pour conservation), Napoli (H), Nelson (H), Yaya (H), Bolero (H). La carotte Chantenay Chantenay carrot La carotte Chantenay est une ancienne catégorie de carotte de forme courte et trapue, avec de larges épaules. Sa taille atteint rarement plus de 15 cm. Peu sucrée en été, elle développe cependant, en automne, un fort taux de sucre qu’elle conserve en chambre froide, ce qui en fait une excellente carotte de con servation. À cause de sa forme trapue, elle est bien adaptée aux sols lourds, argileux ou peu profonds. Cultivars recommandés : Chantenay Royale, Red Cored Chantenay, Hercules (H). La carotte Danvers Danvers carrot Nommée d’après la ville de Danvers au Massachusetts où on l’a développée, cette carotte se distingue par sa forme conique et ses larges épaules. Très productive, son feuillage est abondant et sa racine atteint de 18 à 24 cm. Plus lente que les nantaises à développer son taux de sucre, elle constitue une bonne carotte de conservation. Elle produit bien dans les sols argileux. Cultivars recommandés : Danvers Half Long, Danvers 126.
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Carotte
La carotte Imperator Imperator carrot La carotte Imperator est la carotte longue et effilée qu’on trouve dans tous les supermarchés. Elle est très feuillue et elle atteint facilement 25 cm de longueur. Développée pour la production industrielle et pour la récolte mécanique, elle est plus coriace, plus fibreuse et moins savoureuse que celles des autres catégories. Attrayante lorsque bottelée, elle est toutefois peu chérie des jardiniers. Elle nécessite des sols légers et profonds. Cultivars recommandés : Imperator # 58, Sugarsnax 54 (H). La carotte de couleur Colored carrot Depuis quelques années sont apparues dans les cata logues des carottes rouges, violacées, jaunes et blanches. Très populaires chez les restaurateurs et chez les enfants, ces carottes séduisantes sont de plus en plus en demande. Elles permettent de créer des assiettes de crudités irrésistibles. Cultivars recommandés : Atomic Red (cultivar rougeâtre), Cosmic Purple (cultivar violacé à l’extérieur et orange à l’intérieur), White Satin (hybride blanc), Yellow Sun (hybride jaune), Rainbow Hybrid (hybride donnant des carottes blanches, jaunes et oranges), Purple Haze (hybride violacé à l’extérieur et orange à l’intérieur), Deep Purple (hybride violacé).
Les apiacées
Culture Description La carotte est un légume racine bisannuel. Elle forme la première année de sa croissance une rosette de feuilles molles, plusieurs fois pennées, pouvant atteindre de 30 à 60 cm de hauteur. La racine pivotante et charnue est plus ou moins longue selon le cultivar et les condi tions de culture. La deuxième année se développe une hampe florale fortement ramifiée pouvant atteindre 1 m de hauteur ; elle porte des fleurs blanches réunies en ombelles délicates, parfumées et très décoratives. Conditions de culture La carotte tolère de faibles gelées ; on peut donc la semer tôt au printemps. Il lui faut un emplacement ensoleillé, un sol léger et profond, frais et riche en humus. On la cultive de préférence sur des planches ou sur des billons. Dans les sols argileux, on choisira des cultivars adaptés, par exemple des carottes miniatures, des Chantenay ou des Danvers. Les sols pierreux donnent des carottes fourchues, alors que les sols compacts ne permettent pas aux racines d’atteindre leur pleine taille. Comme la carotte est une espèce frugale, on n’a généralement pas à amender le sol si la culture pré cédente a reçu un bon apport de compost. On peut toutefois amender un sol pauvre avec 500 kg de com post mûr aux 100 m2. On ne devrait employer aucun engrais azoté, car ils donnent des carottes poilues et amères. Le pH idéal pour la culture de la carotte se situe entre 5,5 et 6,8. Multiplication On compte pour la carotte de 600 à 900 semences au gramme, selon les cultivars. Le temps de levée varie
Les apiacées
entre 7 et 20 jours selon les conditions d’humidité et de température. On sème les carottes de 3 à 4 semaines avant la dernière date de gel prévue et jusqu’à 2 semaines après cette date dans les régions tempérées. On sème les carottes à 1 cm de profondeur sur des rangs distants de 20 à 25 cm, à raison de 1 semence aux 2 à 5 cm, selon les cultivars, les cultivars à épaules larges nécessitant plus d’espace. Ainsi, sur une planche de 1 m de largeur, on pourrait établir 3 rangs aux 25 cm. Il est recommandé d’effectuer un semis de pré cision de façon à éviter l’éclaircissage, qui accroît la ponte de la mouche de la carotte, attirée par l’odeur du feuillage qu’on froisse lors de l’intervention. La récolte des carottes se fait de 60 à 140 jours après le semis selon les cultivars et l’usage qu’on désire en faire.
Carotte
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Densité recommandée Distance entre les rangs : de 20 à 25 cm Distance entre les plants : de 2 à 5 cm selon les cultivars Rotation On cultive la carotte en fin de rotation après la cul ture des plantes exigeantes. Elle se retrouve souvent la troisième année de la rotation, avant la culture des engrais verts. Compagnonnage On peut cultiver la carotte en association avec des betteraves, des panais, du chou-rave, du navet, du rutabaga et des radis. Malgré des recommandations courantes en ce sens dans la littérature, il faut éviter un compagnonnage intime avec l’oignon ce qui réduit
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la circulation d’air autour des feuilles de la liliacée favorisant ainsi l’apparition des maladies fongiques. On peut toutefois avantageusement faire voisiner les planches de carotte et d’oignon. La coriandre chinoise exerce un effet répulsif sur la mouche de la carotte. On peut la semer sur le rang à tous les 50 cm ; on devrait idéalement effectuer 2 semis de coriandre, un en même temps que les carottes et l’autre 1 mois plus tard. Des graines de radis semées sur le rang à tous les 10 cm permettent de marquer le rang et ainsi d’effectuer le premier binage sans nuire aux semences en germination. Le pois et le haricot constituent également de bons voisins pour la carotte. Entretien Environ 2 semaines après sa levée, la carotte forme une fine racine principale longue de 15 à 30 cm ; cette racine, qui donnera à la carotte sa forme définitive, se développera alors à partir du collet vers le bas. Si on désire obtenir des carottes de belle forme, le sol doit être ameubli en profondeur de façon à permettre à la racine primaire de bien se développer. Si les carottes ont été semées trop densément, elles n’atteindront pas la dimension souhaitée ; on doit donc les éclaircir. Certaines études démontrent cependant que l’éclaircissage des carottes accroît la présence et la ponte de la mouche de la carotte. En effectuant un semis de précision, on évite cette inter vention fastidieuse. Si on doit éclaircir les rangs de carotte, on renchaussera immédiatement les plants après l’intervention. On recommande de butter légè rement les carottes afin que leurs épaules ne soient pas exposées à la lumière, ce qui les fait verdir et leur confère une légère amertume. L’irrigation est importante durant les premières semaines de croissance, mais par la suite, grâce à sa
Les apiacées
racine profonde, la carotte arrive à puiser l’eau dont elle a besoin pour sa croissance. L’irrigation n’est donc nécessaire qu’en cas de sécheresse sévère. L’irrigation avec de l’eau froide est à proscrire, car elle encourage le développement de maladies fongiques. On contrôlera les plantes adventices par un binage régulier aux 10 jours ; une fois que le feuillage s’est bien développé, la compétition devient alors presque inexistante.
Parasitisme et désordres physiologiques Ravageurs Le ver gris peut, certaines années, causer des domma ges sévères aux jeunes plants de carotte, car une seule larve peut consommer plusieurs plantules par nuit. La récolte manuelle des larves permet de minimiser le problème. L’établissement de parcelles pièges peut aussi réduire les dommages (voir la page 81). La lar ve du taupin (ver fil-de-fer) et celle du hanneton (ver blanc) peuvent aussi à l’occasion causer des ravages aux carottes (voir les pages 246 et 247). Mais, c’est sans contredit la mouche de la carotte qui constitue le principal ravageur de la carotte. La mouche de la carotte Carrot rust fly Psila rosæ
SEC
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La mouche de la carotte est une mouche noire de 5 à 6 mm de longueur à tête rougeâtre et à pattes jaunes qui produit 2 ou 3 générations par année selon les régions. Si on ne prend pas les précautions nécessaires, cette mou che importée cause des
Les apiacées
ravages importants aux cultures de carotte et dans une moindre mesure à celles de céleri, de panais et de persil. Au Québec, on compte 2 générations par année. Les adultes hivernent sous forme de pupe à 10 cm de profondeur. La première génération, qui coïncide avec la floraison des lilas, est la plupart du temps inoffensive ; si elle est sévère, elle peut causer le développement de carottes difformes ; cependant, elle est à l’origine de la génération suivante qui survient la plupart du temps en août ou au début de septembre. Les œufs qui éclosent de 6 à 12 jours après la ponte donnent des larves qui consomment d’abord les radicelles puis, un mois après la ponte, s’intro duisent dans les racines pivotantes et s’en nourrissent en y creusant des galeries. Les carottes infestées se conservent mal et perdent leur valeur commerciale. Le compagnonnage avec des oignons et de la coriandre chinoise diminue la ponte du ravageur. La rotation, un sol de qualité et une absence de fumure fraîche préviennent également les infestations. Il faut s’assurer à l’automne d’éliminer tous résidus d’apiacées de façon à réduire le nombre de pupes qui hiverneront. On recommande aussi d’effectuer un semis de précision afin de ne pas avoir à éclaircir les rangs, car l’éclaircissage accroît la sévérité des infestations. Comme mesure préventive, on peut aussi saupou drer de la cendre de bois et/ou du phosphate minéral sur le rang quelque temps avant la période de ponte. Des feuilles fraîches de tanaisie, d’absinthe ou de sauge placées au pied des rangs réduisent également la ponte du ravageur, tout comme des vaporisations au sol de purin ou de décoction préparés avec ces mêmes plantes. Un arrosage avec du lessis (une macération de cendres de bois) permet de contrôler partiellement les larves. En répétant à 2 ou 3 reprises ces interven tions durant la période de ponte, on s’assure d’un plus grand succès. Une récolte effectuée à la fin de
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septembre limite les dommages à la racine pivotante. Un agrotextile placé sur les rangs de carotte au moment de la ponte constitue la seule technique de contrôle à toute épreuve. Pour bien identifier la période de ponte de la mouche dans sa région, on peut installer des plaquettes jaunes engluées de Tangle Trap au-dessus des planches de carotte ou encore s’informer auprès d’un service de dépistage local. Maladies Une fonte des semis peut survenir en période fraîche et humide. Des segments entiers de rangs périssent alors. Pour prévenir ce problème, il faut éviter la fumure fraîche et l’irrigation avec de l’eau froide. Une infection hâtive par le champignon Alternaria dauci, responsable de l’alternariose, peut aussi provoquer une fonte des semis. On peut réduire la sévérité du problème ou le contrôler partiellement en vaporisant le sol avec une décoction de prêle. Les principales maladies de la carotte sont sans conteste l’alternariose et la cercosporose qui causent la brûlure des feuilles. L’alternariose Alternaria leaf spot Alternaria dauci
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L’alternariose est une mala die fongique du feuillage de la carotte caractérisée par des taches noires cer nées de jaune se dévelop pant sur les plus vieilles feuilles. Avec le temps, les taches s’unissent et les feuil les s’assèchent, ce qui leur donne une apparence de
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brûlure. Les taches ont une forme plus irrégulière que celles causées par la cercosporose et elles apparaissent plus tard en saison. Les racines ne sont pas affectées par la maladie, si ce n’est leur taille qui s’en trouve réduite à cause de l’infection. Un climat humide combiné à une mauvaise circulation d’air favorisent l’apparition de cette maladie assez répandue. Une infection hâtive peut causer la fonte des semis. La cercosporose Cercospora leaf spot Cercospora carotæ
SEC
La cercosporose est une maladie fongique du feuil lage très répandue au Qué bec ; les symptômes sont très similaires à ceux de l’alternariose, mais ils appa raissent plus tôt en saison. Les premières manifesta tions de la maladie con sistent en des lésions qui apparaissent en bordure des feuilles qui s’enroulent. Puis on observe sur le feuillage des mouchetures qui se transforment pro gressivement en taches foncées cernées de jaune. Les taches s’étendent, puis causent l’assèchement du feuillage. La cercosporose infecte les jeunes feuilles alors que l’alternariose infecte les plus vieilles feuilles. La carotte elle-même n’est pas affectée, si ce n’est sa taille qui est réduite à cause de l’infection. Pour prévenir ou contrôler ces 2 maladies fon giques, on peut, dès l’apparition des symptômes, vaporiser sur le feuillage des produits antifongiques préparés à partir de bicarbonate de sodium, de prêle ou de soufre. On doit éviter l’irrigation par asper
Les apiacées
sion avec de l’eau froide. Certains cultivars sont artiellement résistants à ces maladies, entre autres p les nantaises Napoli et Bolero et les carottes Danvers. Désordres physiologiques Un excès d’azote dans le sol ainsi que des tempéra tures irrégulières en début de croissance peuvent cau ser le développement de carottes poilues. Dans un sol pierreux, les carottes deviennent fourchues alors que dans un sol compact, elles n’atteignent pas leur pleine taille. Enfin, pour obtenir des carottes de bonne dimension, leurs collets ne doivent pas se toucher. La fente verticale des carottes est due à un taux d’humidité élevé en période automnale. Ce problème survient lorsque des carottes matures restent trop longtemps en terre avant la récolte.
Récolte et conservation Les carottes d’été développent rapidement leur taux de sucre. C’est le cas des carottes miniatures et de plu sieurs cultivars de nantaises. Lorsqu’elles sont rendues à maturité, ce taux commence à décliner ; on devrait donc les récolter dès qu’elles sont prêtes, moment qui varie selon la date du semis. On comprend l’impor tance d’un calendrier de production bien planifié. Les Chantenay et les Danvers, des cultivars tardifs aptes à la conservation, développent leur taux de sucre en fin de saison, celui-ci étant accru par le gel automnal. On récoltera donc les carottes de conservation le plus tard possible en saison, avant le gel définitif du sol. Pour une conservation de longue durée, on optera pour des cultivars développés pour la conservation. Buttées, les épaules des carottes sont protégées du gel et de la lumière ; les carottes peuvent alors demeurer en terre pratiquement jusqu’au gel définitif du sol. On récolte les carottes par temps sec. Le feuillage sera sectionné à la main, puis on entreposera les carottes
Les apiacées
Carotte
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dans des poches de jute ou de nylon tressé, des bennes ou des boîtes de bois qu’on rangera dans une chambre froide où la température se maintient entre 0 et 1 ºC et l’humidité entre 90 et 95 %. On peut utiliser des feuilles d’érable, de la vermiculite ou du sable légère ment humides pour stratifier les carottes. Ce mode de rangement demande beaucoup de temps et n’est utile que lorsque le taux d’humidité est trop bas. On n’en treposera en chambre froide que les sujets sains. Les carottes de conservation se gardent facile ment 6 mois en chambre froide si les conditions sont adéquates. On peut aussi recouvrir, avant le gel définitif du sol, les rangs de carotte de 30 cm d’un paillis de feuilles et/ou de paille. On pourra alors durant l’hiver venir récolter des racines au besoin ou tout simplement attendre au printemps.
Production de semences Les fleurs de carotte sont hermaphrodites, mais elles ne sont pas autofécondes ; elles nécessitent donc pour leur fécondation l’intermédiaire des insectes. Les dif férents cultivars de carotte peuvent donc se croiser entre eux ; ils peuvent même se croiser avec la carotte sauvage, ce qui donnerait, la génération suivante, des carottes à racine blanche. Pour produire des semences de carotte, il faut tout d’abord conserver en chambre froide les plus beaux sujets d’un cultivar donné. Le printemps suivant, on replante un minimum de 6 racines à 1 m de distance les unes des autres dans une terre fertile. Pour éviter les croisements, on recommande de garder une distance de 1 km entre les cultivars. Les hampes florales forte ment ramifiées doivent être soutenues par un support à pivoine ou par des piquets et une corde. La récolte des ombelles se fait graduellement ; on les récolte individuellement lorsque leurs graines sont dodues et
ont pris une couleur brune. Il faut être très vigilant pour la récolte car, une fois les semences mûres, elles se détachent de l’ombelle et tombent au sol. Ce sont les semences produites sur les 2 premières ombelles qui sont de meilleure qualité. Une fois les ombelles récol tées, les semences s’en détachent facilement. En les frottant entre ses mains, on les débarrasse de la barbe qui les entoure. Pour terminer, on élimine les débris de l’ombelle en passant les graines dans un tamis de dimension appropriée. On conserve les semences dans un endroit frais, sec et à l’abri de la lumière. Dans ces conditions, elles se conservent pendant 3 ans.
Avec cette troisième édition de La culture écologique des plantes légumières, Yves Gagnon nous livre le fruit de plus de trente années de recherche et d’expérimentation en culture écologique de légumes. Une révision complète du contenu et une nouvelle présentation riche de 240 photos couleur caractérisent cet ouvrage qui traite avec rigueur et simplicité de la plupart des légumes cultivés dans les jardins o ccidentaux. Historique, propriétés et valeur nutritive, catégories et cultivars, mode de culture, parasitisme et désordres physiologiques, récolte et conservation, production de semences, telles sont les sept rubriques retenues pour présenter chacune des 56 espèces déclinées dans cet ouvrage qui se veut un outil d’autonomie et de liberté. Yves Gagnon est avant tout jardinier. Il a aménagé avec sa compagne, Diane Mackay, les Jardins du Grand-Portage de Saint-Didace. Chroniqueur horticole réputé, il enseigne la culture écologique depuis plus de 25 ans. Il est aussi l’auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet dont La culture écologique pour petites et grandes surfaces, Le jardin écologique et il est coauteur avec Marie-Louise Vallée du livre pour enfants Un jardin avec Aristott. Il a aussi signé Un seul jardin et le recueil de poésie Terre cuite [ambiances climatiques].