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1. PLANIFICATION DE LA PLANTATION

Première étape : le plan d’intervention

Qu’il s’agisse d’implanter une nouvelle parcelle de pommiers ou de renouveler une parcelle existante, ce chapitre fournit les divers éléments à prendre en considération afin de réussir la plantation. Par où commencer pour s’assurer de bien démarrer? Par un plan d’intervention!

La première étape d’une plantation réussie consiste en effet à préparer un plan. Ce plan comprend toutes les étapes qui mènent à la création d’une nouvelle parcelle de verger. De préférence, ces étapes sont énumérées chronologiquement, ce qui aide à visualiser le déroulement des opérations dans le temps. Les opérations agricoles, le matériel et la maind’œuvre nécessaires à chaque étape sont ensuite ajoutés. Ce plan doit être réalisé de 2 à 4 ans avant la plantation. Le plan d’intervention s’avère aussi un outil indispensable à la planification financière qui accompagne la plantation.

Le plan d’intervention devrait cadrer avec une vision à long terme de l’entreprise. On doit chercher à maximiser l’efficacité des travaux pour générer la meilleure profitabilité possible. L’uniformité des plantations est un élément important à prévoir dès le début de l’implantation ou du renouvellement d’un verger de façon à éviter les pertes d’espace et de temps causées par un arrangement de parcelles mal planifié.

L’objectif de ce chapitre est d’orienter la réflexion du producteur afin qu’il soit en mesure de préparer un bon plan d’intervention. Les chapitres subséquents apportent les références et les conseils techniques nécessaires à toutes les étapes de la plantation.

À chacun sa situation, à chacun ses choix

Chaque exploitation possédant ses particularités, il revient donc au producteur de juger et de décider de ce qui convient le mieux à son projet. Afin d’effectuer des choix éclairés, il importe de réfléchir avec réalisme et lucidité à de nombreux éléments.

Quelles sont la qualité du site et la préparation requises?

Avant toute chose, le site doit être propice à la production de pommes. Une analyse de la qualité du site devrait être la première étape à réaliser. Quel est le type de sol? Le site estil en pente? Quelle est l’orientation de la pente et comment influencera-t-elle la production? Quel est le nombre de jours sans gel sur le site? Etc. Tous ces éléments doivent être évalués avant d’investir de l’énergie dans le projet. Il faut aussi savoir qu’une parcelle de pommiers qui, jusque-là, pouvait convenir à une production extensive nécessitera des améliorations avant de pouvoir accueillir un verger intensif. Quelle que soit la densité de plantation, les pommiers exigent par ailleurs un drainage parfait du sol. Le site doit aussi posséder une source d’eau suffisante pour irriguer à n’importe quel moment pendant la saison. L’irrigation est essentielle pour les vergers de 1000 arbres et plus à l’hectare, car les pommiers nains possèdent un système racinaire superficiel et peu étendu. Il faudra probablement épierrer et niveler le terrain. L’installation d’une clôture de protection contre les chevreuils devra également être complétée avant la plantation des arbres dans les zones à risques. Conséquemment, il peut arriver qu’il soit impossible ou trop coûteux de replanter sur certains sites.

Il est pertinent de procéder à cette analyse avec un conseiller spécialisé en pomiculture (un conseiller de club ou privé, ou un conseiller du MAPAQ).

 Voir les chapitres Choix du site, Préparation du terrain et Irrigation.

Quel est le type de mise en marché souhaité?

Le type de mise en marché principal doit être réfléchi en amont de la planification technique. En effet, ce choix a une influence sur l’aménagement de la ferme, et notamment sur la décision d’intensifier ou non la production.

Le producteur qui écoule sa production à la ferme directement aux consommateurs ou qui en fait lui-même la transformation (incluant le cidre) ressent peut-être moins le besoin d’intensifier sa production que le producteur qui vend ses fruits aux emballeurs. Or, la haute densité n’augmentera pas nécessairement ses ventes au kiosque, mais la clientèle adepte de l’autocueillette appréciera peut-être d’avoir accès à de beaux fruits sur des petits arbres. Aussi, les exigences de qualité sont telles sur le marché de gros que pour rester compétitif le pomiculteur se doit d’intensifier sa production. Pour survivre dans ce marché, il lui faut produire mieux à un prix moindre. La haute densité, grâce à la précocité de la mise à fruit des pommiers, permet de profiter des primes offertes sur certaines variétés nouvellement introduites sur le marché.

 Voir le chapitre Mise en marché des pommes au Québec

Produire des pommes pour la transformation (incluant le cidre)

Lorsque l’on choisit de transformer en partie ou en totalité sa production, il faut sélectionner et implanter des cultivars qui correspondent aux activités de transformation et de mise en marché.

 Voir le chapitre Cultivars.

La planification inclura donc aussi toutes les étapes propres au plan d’affaires d’une entreprise de transformation agroalimentaire, ainsi que des éléments très spécifiques dans le cadre de la fabrication de cidre.

 Voir le chapitre Mise en marché des pommes au Québec et l’annexe Outils, ressources et références générales qui comporte de nombreuses références (organismes, sites Web, documentation et règlementation) utiles dans cette démarche.

Implanter un verger biologique demande-t-il une préparation particulière?

Bien qu’encore jeune, la production biologique de pommes au Québec est en plein essor. Il reste beaucoup de recherche et développement à faire dans ce domaine. Ce mode de production implique souvent l’utilisation de plusieurs techniques - ou encore l’expérimentation de nouvelles méthodes - pour relever les mêmes défis qu’en production non biologique. L’essentiel est de se renseigner et de s’assurer d’être bien outillé pour entretenir un verger biologique. Un suivi étroit et une bonne connaissance de la culture sont essentiels. Pour une culture pérenne, les erreurs commises au début ont souvent des répercussions sur plusieurs années, voire sur la totalité de la vie de la plantation.

On doit notamment porter une attention particulière aux points suivants :

• la préparation du sol : temps et techniques nécessaires afin d’atteindre des conditions optimales (structure, pH, teneur en éléments nutritifs);

• le choix des cultivars : cultivars peu sensibles aux maladies ou aux insectes, peu sujets à l’alternance;

• l’usage de techniques particulières : méthodes de lutte physique (piégeage, filets, etc.) contre les ravageurs ou les maladies;

• l’entretien et l’aménagement du verger : diminution de la prévalence de certains insectes ou maladies;

• la planification de la récolte : étalement de la cueillette et main-d’œuvre suffisante, car les régulateurs de croissance utilisés pour retarder la chute des fruits ne sont pas homologués en pomiculture biologique.

 Des éléments d’information propres au mode de culture biologique sont discutés dans les chapitres Préparation du terrain et Cultivars.

Quels cultivars implanter?

La première question que se pose le pomiculteur est : « Quels cultivars devrais-je planter? ». Le choix des cultivars est primordial, car il est en relation directe avec les marchés visés. C’est d’abord la variété de pomme qui est vendue. Le pomiculteur doit bien connaître son marché pour choisir les cultivars qu’il souhaite offrir.

 Voir le chapitre Cultivars

À quelle densité de plantation?

Parallèlement au choix des cultivars, le pomiculteur doit choisir la densité de plantation qui lui convient, c’est-à-dire le nombre de pommiers par hectare de verger. La densité de plantation exerce une influence sur presque tous les autres éléments du verger, une réflexion globale s’impose donc. La densité de plantation et le cultivar orientent la sélection du porte-greffe, du système de tuteurage et de la conduite. La densité de plantation influence le choix des équipements, la main-d’œuvre et le financement requis. Le choix de la densité de plantation doit donc s’intégrer à une vision à long terme de l’entreprise.

Faible, moyenne, haute ou très haute densité?

Le potentiel de production d’un verger est d’abord et avant tout influencé par la fertilité du sol et par le climat. Toutefois, toutes choses étant égales par ailleurs, la productivité d’un verger augmente avec la densité de plantation. Au Québec, les vergers étaient traditionnellement plantés à basse densité (80 à 400 pommiers/ha). Les pommiers étaient greffés principalement sur des porte-greffes issus de semis de McIntosh ou des clones tels que Robusta 5. Aujourd’hui, il n’est plus recommandé d’implanter des vergers à basse densité, car ceux-ci ne génèrent pas suffisamment de revenus pour couvrir les coûts d’exploitation. De plus, les pommes produites ne remplissent pas les critères de qualité actuels et peuvent difficilement concurrencer les pommes disponibles sur le marché. ll est plutôt conseillé de s’orienter vers les vergers à haute densité (> 1000 pommiers/ha) et d’utiliser des porte-greffes plus performants.

Toutefois, pour le bénéfice de la présente réflexion, il convient de préciser que plus on augmente la densité de plantation, plus les interventions horticoles doivent être précises et ciblées.

Tableau 1.1 Les différentes densités de plantation1

Densité du vergerNombre de pommiers/ha

Basse densité Moins de 700

Moyenne densité

Haute densité

Très haute densité

700 à 1600

1600 à 3500

Plus de 3500

1.L’espacement exact entre les arbres sur le rang et entre les rangs s’établit en fonction du cultivar, du porte-greffe, du type de sol et de l’équipement disponible (machinerie).

Un avantage important du verger à haute densité repose sur le fait qu’en augmentant le nombre d’arbres à l’hectare, on augmente le rendement en fruits de qualité. Chaque arbre doit produire, le plus tôt possible, un maximum de fruits de qualité et occuper un minimum d’espace en verger. C’est par la conduite, le contrôle de la charge, le tuteurage, l’irrigation et le désherbage des pommiers que le producteur atteindra les résultats escomptés. Un pommier nain atteint sa taille maximale et produit des fruits plus rapidement. Sa vigueur réduite et sa forme favorisent un ensoleillement optimal des feuilles et des fruits qui résulte en une production de haute qualité.

À maturité, les rendements à l’hectare des différentes densités de plantation sont assez comparables. Des études montrent cependant que le rendement cumulé sur plusieurs années des parcelles à plus haute densité est supérieur, surtout en raison de la production plus rapide de celles-ci.

Les pommiers nains facilitent grandement les travaux horticoles (taille d’hiver ou d’été, éclaircissage, récolte), car ceux-ci peuvent être mécanisés et réalisés en grande partie sans utiliser d’échelle. Une production de fruits précoce, une meilleure qualité des fruits et des coûts de production réduits constituent les avantages d’une augmentation de la densité de plantation. Par contre, la très haute densité demeure exigeante du point de vue technique et financier et constitue une façon relativement nouvelle de produire des pommes au Québec.

Une réticence à planter des pommiers nains persiste encore chez certains pomiculteurs parce que certaines parcelles n’ont pas donné les résultats escomptés par le passé. Les densités de plantation étaient souvent trop basses pour obtenir de bons rendements et les premières plantations de pommiers nains étaient trop souvent effectuées là où il restait de l’espace disponible ou pour remplacer des parcelles d’arbres peu productifs. Ces endroits correspondaient souvent à des sites peu propices (bas de pente, terrains plats, sols mal drainés, accumulation importante de neige, etc.). Des sites avec une accumulation de neige importante ont également donné de mauvais résultats, car les arbres étaient ébranchés lors de la fonte de la neige. On ne peut pas non plus s’attendre à de bons résultats sur un site qui, historiquement, a donné de piètres résultats. Avant de replanter, il importe d’identifier la cause des mauvais résultats et de corriger le problème, sinon planter ailleurs. Le choix du site revêt une importance capitale peu importe la densité de plantation choisie.

 Voir le chapitre Choix du site.

La gestion du verger à moyenne densité, pratiquée depuis plus longtemps au Québec, exige moins d’interventions et son implantation s’avère moins coûteuse. L’utilisation d’un système de tuteurage et d’irrigation est recommandée, mais n’est pas indispensable comme pour les plantations à haute densité. Par contre, la période qui précède la mise à fruit des arbres est plus longue, la qualité des fruits est souvent moindre et les coûts de production sont supérieurs.

L’expérience montre que les vergers qui réussissent le mieux sont ceux où les producteurs effectuent des plantations régulièrement, cultivent un assortiment de cultivars adaptés au climat, au site et au marché visé et pratiquent un contrôle efficace de la charge de fruits afin de s’assurer d’une production annuelle de fruits de qualité.

 Voir les chapitres Modes de conduite et espacement, Plantation,Tuteurage et Formation des pommiers

Quels sont les équipements requis?

Les équipements nécessaires à l’implantation et à l’entretien d’un verger peuvent différer de façon importante selon la densité choisie. Il est important de prendre en considération tous les éléments du projet, soit la plantation, le tuteurage, l’irrigation, les outils mécaniques (tracteur, pulvérisateur, outils de désherbage et d’éclaircissage), l’équipement requis pour la taille ainsi que l’organisation de la récolte.

Implantation du verger

La première étape est la préparation du sol. Une large gamme d’équipements de travail du sol peut être utilisée. Les équipements lourds tels que les sous-soleuses permettent un travail en profondeur (environ 50 cm) tandis que les chisels travaillent dans les 15 à 20 premiers centimètres. Les équipements légers tels que les herses et les déchaumeuses travaillent le sol en surface. Pour faciliter les opérations subséquentes, une ramasseuse de pierres peut devoir être utilisée sur un terrain très rocheux et l’utilisation d’un broyeur de souches peut s’avérer judicieuse dans le cas d’une replantation. Les travaux de préparation du sol peuvent être exécutés à forfait par un contractant.

L’équipement requis pour la plantation dépend fortement de la densité visée. Généralement, pour les plantations à faible densité, une tarière manuelle à essence ou hydraulique est utilisée pour former la cavité accueillant le

Cultivars

Melba

Variété cultivée depuis longtemps au Québec. Bien adaptée à notre climat et bien connue des consommateurs. Le fruit se récolte vers la mi-août et doit être mis en marché sur-le-champ; il est très sensible aux meurtrissures. De plus, l’arbre alterne fortement.

Cultivar d’été très sensible à la tavelure et de courte conservation. L’arbre est moyennement vigoureux, très productif et de rusticité moyenne. Par contre, il nécessite un bon contrôle de la charge pour obtenir un fruit de bon calibre. Qualité des fruits passable.

C’est un semis de McIntosh, découvert à Ottawa. Bien connu au Québec, ce cultivar de maturité vers la miseptembre est généralement cueilli trop tôt pour ne pas nuire à la mise en marché de la McIntosh. Le fruit est de calibre moyen à gros. Chair blanche, très croquante, d’un goût acide et sucré. L’arbre est rustique, de vigueur moyenne et très productif. Alternance marquée. La Lobo est une variété populaire au Québec, mais elle a beaucoup été plantée. Son marché est limité. À diminuer.

Vieille variété très appréciée pour ses qualités cidricoles grâce à son contenu en sucre très élevé, mais bonne aussi pour la consommation en frais. Le fruit est de calibre petit à moyen, jaune verdâtre et son épiderme est recouvert partiellement de roussissure. L’arbre est peu rustique et très sensible à la brûlure bactérienne. Faible sensibilité à la tavelure; d’intérêt pour le marché bio. Récolte à la fin d’octobre et durée de conservation de 2 mois.

Jonamac

Beau type McIntosh. Le fruit est de calibre moyen. L’arbre est très productif et demande un éclaircissage sévère pour obtenir des fruits de qualité. Rusticité comparable à McIntosh. Conservation plus courte que McIntosh. Cette variété entre en compétition avec la McIntosh.

Autres cultivars pour verger biologique - variétés semi-hâtives

Geneva

Époque de maturité Fin août

Rusticité Résistant au froid

Maladies Résistant à la tavelure

Entreposage 4 semaines

Britegold

Époque de maturité Mi-septembre

Fruit

Maladies

Sensible aux meurtrissures. Calibre moyen à gros.

Résistant à la tavelure, au blanc et à la brûlure bactérienne. Sensible à la rouille et à la rouille du cognassier.

Entreposage 1-2 mois

Redfree

Époque de maturité Fin août début septembre

Fruit

Bicolore avec un rouge vif à maturité. Chair blanche, croquante et acidulée. Se détache difficilement à la cueillette.

Arbre L’arbre alterne fortement

Maladies

Résistant à la tavelure, à l’oïdium (modérément), à la rouille, à la rouille du cognassier (modérément)

Entreposage 4 semaines

Autres cultivars pour verger biologique - variétés tardives

Crimson Crisp

Développée dans le cadre du programme PRI (Purdue University, Rutgers University, University of Illinois) aux États-Unis, cette pomme est issue d’un croisement multiple impliquant entres autres Délicieuse jaune, Red Rome, Melba et Jonathan.

Époque de maturité Fin septembre

Fruit

Arbre

Coloration rouge vif. Calibre moyen. Chair très croquante, sucrée et modérément acidulée.

Productivité moyenne, faible alternance

Rusticité Moyenne

Maladies

Résistant à la tavelure (oïdium et brûlure bactérienne jamais observés). Sensible au froid et à la brûlure bactérienne (source : Penn State Tree Fruit Production Guide)

Entreposage 5 à 6 mois en chambre réfrigérée

Autres cultivars pour verger biologique - variétés tardives

Cette variété a été développée au Québec.

Époque de maturité Début octobre

Fruit

Arbre Port dressé, forte alternance

Rusticité Sensible au froid

Maladies La tache amère est souvent observée

Liberty

Cette variété a été développée au Québec.

Époque de maturité Fin septembre

début octobre

Calibre moyen à gros. Sa coloration rouge foncé ressemble à celle de la Spartan. Chair blanche, très croquante et acidulée.

Topaz (voir fiche page 17)

Golden Russet (voir fiche page 19)

Fruit

Calibre moyen. Coloration rouge foncé assez uniforme. Chair blanche, croquante et très acidulée à la récolte. Son goût s’améliore au cours de la conservation

Arbre L’arbre est productif et alterne moyennement

Rusticité Rustique

Maladies

Belmac Nova Easy Grow

Résistant à la tavelure, à l’oïdium, à la rouille et à la rouille du cognassier (modérément). Peu sensible à la brûlure bactérienne. Sensible à la moucheture. Ce cultivar figure parmi les cultivars résistants à la tavelure les plus connus.

Entreposage 3 mois

Époque de maturité Fin septembre

Fruit

Calibre moyen. Couleur 80 % rayée rouge, sur fond jaune verdâtre, à points peu visibles.

Arbre Modérément vigoureux et productif, à port étalé

Rusticité Rustique

Maladies

Résistant à la tavelure, à l’oïdium, à la brûlure bactérienne (modérément) et à la rouille. Sensible à la rouille du cognassier.

Entreposage 2-3 mois

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