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Claudine Amstein passe le relais Durabilité : « Il faut s’y mettre
Claudine Amstein va quitter la CVCI à fin mai après avoir dirigé l’association pendant dix-sept ans. Pour «demain», elle revient sur les principales étapes de sa riche carrière et sur le développement de la Chambre au sein d’un canton qui s’est largement internationalisé.
Une page importante de l’histoire de la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie va se tourner à la fin de ce mois de mai avec le départ de sa directrice, Claudine Amstein, après dix-sept ans passés à la tête de l’association. En poste depuis 2005, elle va transmettre le témoin à Philippe Miauton, actuel secrétaire général.
Venue du droit, Claudine Amstein est tombée très vite dans le monde des associations économiques. En 1993 déjà, à l’âge de 33 ans, elle est devenue la première directrice d’une chambre immobilière (la CVI), puis la première femme à diriger une Chambre de commerce en Suisse. « Mon intérêt pour l’économie vient de ma fibre profondément libérale et des valeurs qui y sont rattachées, explique-t-elle. Je crois en la responsabilité individuelle, à l’esprit d’entreprise et à une société prospère au bénéfice de l’ensemble de sa population. » Au-delà des frontières vaudoises, elle s’est engagée au sein des associations faîtières latines et suisses avec le souci de défendre les intérêts de l’économie de cette région. Claudine Amstein admire les chefs d’entreprise et les créateurs de startup dans leurs prises de risque et leur volonté d’innover : « Le fait qu’ils soient toujours orientés solution au lieu de se plaindre des problèmes m’impressionne, c’était pour moi un sacré moteur pour exercer ce métier avec passion. »
ABSENCE DE MODÈLES FÉMININS
Son entrée dans un monde jusqu’alors presque exclusivement masculin s’est plutôt bien déroulée. Elle a bénéficié du soutien d’hommes qui souhaitaient son accession à la direction de la CVI. « Mes difficultés venaient surtout du fait, poursuit-elle, qu’il me manquait des modèles féminins pour affirmer mon autorité et prendre ma place au quotidien. J’ai ainsi appris avec la pratique, comme les hommes d’ailleurs, qui n’avaient pas l’habitude de travailler avec des femmes à ce poste. Ce n’est plus un souci pour moi depuis des années. »
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Elle regrette que les médias ne valorisent pas suffisamment le parcours des femmes dirigeantes de l’économie. Ce sont des exemples pour montrer qu’il est possible d’accéder à des responsabilités. «Pendant des années, les médias ont d’ailleurs eu la fâcheuse tendance de ne me solliciter que pour des questions liées à l’égalité salariale. Il m’a fallu me battre pour parler d’économie et des entreprises.»
Avec l’arrivée de Claudine Amstein à la tête de la Chambre, le comité de la CVCI a voulu mettre l’accent sur la défense des conditions-cadres. Comme députée et active en politique, elle a pu rapidement travailler pour faire mieux comprendre les besoins de l’économie. «Et ils étaient grands à la sortie de la crise des années 1990», rappelle-t-elle. Dans le même esprit, elle s’est engagée pour que la CVCI assure les campagnes de votations qui ont un impact pour que l’économie vaudoise puisse poursuivre sa diversification et son ouverture. Et il faut bien l’avouer, elles ont été nombreuses ces années, que ce soit celles sur la fiscalité, les accords de libre-échange, nos liens avec l’Europe notamment. Pour y parvenir, la directrice a créé un service de la communication et donné les impulsions pour que la CVCI publie des études économiques et fiscales.
A la tête de la CVCI, Claudine Amstein a travaillé principalement avec deux présidents successifs : Bernard Rüeger et Aude Pugin (3e et 4e sur la photo de gauche).
Depuis 2007, elle a eu des contacts très réguliers avec le conseiller d’Etat Philippe Leuba, ici à sa droite, notamment à l’occasion du PVEI de 2017. (photo de droite).
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DE NOMBREUX DÉVELOPPEMENTS
« J’ai également eu à cœur de développer les services, notamment le service juridique, les formations et le réseautage pour accompagner les entreprises dans leur développement. Créé en 2005, le Business Club a pris son ampleur. International Link est venu le compléter avec pour objectif de mêler les réseaux locaux et ceux des collaborateurs étrangers issus de l’internationalisation de notre canton afin de les ancrer dans notre région. En 2008, la rénovation du bâtiment a permis de créer le Centre de réunion. Et en temps normal, la CVCI y organise près de 200 événements annuels. »
La digitalisation des services de l’export, la volonté de travailler en réseau avec les Chambres de commerce latines et le soutien à l’accueil de jour des enfants font aussi partie des priorités qu’elle a mise à son action. « Mon prédécesseur a été à l’origine de la création de la FIT et de Genilem. Grâce à eux, et plus particulièrement à la FIT, nous avons pu accompagner l’éclosion d’un nouvel écosystème d’entreprises innovantes généré par le développement extraordinaire de l’EPFL. Complété par les effets bénéfiques de l’arrivée des multinationales rendue possible par l’arrêté Bonny, nous avons vécu un véritable ‹miracle vaudois› avec une économie renouvelée, diversifiée, plus résiliente aux difficultés. Je ne suis pas certaine que tout le monde ait pris conscience de cette réalité et de cette chance. » Toutes ces réalisations font que la Chambre est devenue un acteur reconnu et un partenaire apprécié.
QUELQUES MOMENTS DIFFICILES
Y a-t-il eu des moments, des dossiers difficiles? «La pandémie, par sa soudaineté, en a été un. Mais je retiendrai surtout que Vaud a été d’être le premier canton de Suisse à réformer la fiscalité des entreprises avec l’appui de plus de 80 % des citoyens. Un travail de longue haleine, de conviction, d’explications, mais qui doit être repris aujourd’hui de manière différente, avec la réforme de l’OCDE. Le propre de cette fonction est qu’il faut toujours remettre l’ouvrage sur le métier.» Ce qui est le plus marquant, à ses yeux, c’est la rapidité et l’enchaînement des changements ainsi que la complexification des problèmes. Les crises se sont succédé, comme le relève notre étude « De la crise des subprimes à celle du Covid, le miracle vaudois ». « C’est passionnant, mais aussi usant. Pour les chefs d’entreprise, la liste est infinie : il faut à la fois développer son business, régler les problèmes d’approvisionnement, assurer sa cyberprotection, songer au développement ESG, tenir compte des aspirations des collaborateurs, etc. Il faut cependant rester confiant. Je me souviens de la crise des années 1990-2000, particulièrement difficile pour notre canton. Les Alémaniques étaient condescendants à l’égard des Romands. Nous avons su saisir les opportunités de cette crise. Et depuis plus de dix ans, l’arc lémanique a connu une croissance supérieure à la moyenne suisse.» Et l’avenir, dans tout cela? «Je me réjouis tout d’abord de voir Philippe Miauton me succéder. Nous partageons les mêmes valeurs et le même intérêt pour les dossiers politiques, comme la fiscalité, l’importance de nos relations avec l’Europe, mais aussi sur l’ouverture sur le monde, ce qui fait partie de l’ADN de la Chambre. Quant à moi, il est certain que je vais rester active dans un certain nombre de mandats et du bénévolat, avec un œil toujours passionné pour la politique. »
PROPOS RECUEILLIS PAR JEAN-FRANÇOIS KRÄHENBÜHL JEAN-FRANCOIS.KRAHENBUHL@CVCI.CH PHOTOS ZUZANNA ADAMCZEWSKA-BOLLE