"Demain" N° 09 - Décembre 2020

Page 6

DEMAIN 12-2020

ACTUALITÉ PENSER L’ENTREPRISE POUR DEMAIN

6

Le sport mondial va devoir se réinventer La pandémie de Covid-19 a bouleversé le monde du sport : compétitions annulées, matches à huis clos, clubs en sursis. Pour Jean-Loup Chappelet, spécialiste en management sportif, c’est l’occasion pour ce secteur de se renouveler. Le numérique aura un rôle à jouer.

et des droits TV. Le championnat de football anglais s’en sort malgré les matches sans spectateurs, car les clubs touchent des droits TV considérables, et la visibilité des panneaux publicitaires disposés autour du terrain permet de contenter annonceurs et sponsors.

Jean-Loup Chappelet, professeur honoraire à l’Unil, n’hésite pas à parler d’« annus horribilis pour le sport mondial ». Une année 2020 évidemment marquée par la pandémie, avec ses effets dévastateurs sur l’économie. « Les manifestations sportives ont beaucoup souffert, observe-t-il. Le canton de Vaud devait vivre une année extraordinaire avec les Jeux Olympiques de la jeunesse, les Mondiaux de hockey sur glace en mai, ceux de pétanque en juillet et ceux de cyclisme dans le Chablais en automne. Seul le premier événement a pu se dérouler. » Le sport-spectacle a beaucoup souffert, car les recettes des spectateurs sont absentes et les frais fixes demeurent.

« La baisse du sponsoring impacte tous les sports, poursuit le professeur de l’Unil. Certains grands événements bénéficient de contrats de longue durée (3, 4 ou 5 ans), mais pour les sponsors, la situation est et sera aussi difficile. » La publicité ne se porte pas mieux. Les entreprises qui sponsorisent et qui font de la pub vont probablement réduire leurs engagements dans le sport. Ce seront sans doute les premiers budgets qu’elles couperont. Les grands événements vont en subir les conséquences. Les événements de sport de masse (marathon de Lausanne, 20 km, etc.) reposent en revanche sur des droits de participations et des subventions publiques. Le spécialiste pense que le nombre d’évènements sportifs pour l’élite va sans doute fortement diminuer. « Ce n’est peut-être pas plus mal, poursuit-il, car beaucoup sont devenus des prétextes à monétiser le spectacle sportif et ne sont pas très durables. » Il pense notamment à l’Adria Tour, ce tournoi de tennis organisé par Novak Djokovic cet été, qui a été un cluster de la pandémie.

TEXTE JEAN-FRANÇOIS KRÄHENBÜHL JEAN-FRANCOIS.KRAHENBUHL@CVCI.CH PHOTOS DR

Jean-Loup Chappelet est d’avis que l’événementiel virtuel va beaucoup se développer.

Tous les amateurs de compétitions sportives en sont meurtris : voir des stades vides, des clubs en quarantaine et menacés de faillites n’augure rien de réjouissant. Comment le sport professionnel peut-il se relever de la crise actuelle ? Pour Jean-Loup Chappelet, il y a sports et sports. La situation du tir à l’arc ou du taekwondo n’est ainsi pas la même que celle du football ou du hockey sur glace. Le sport organisé dans les clubs et orienté compétition, dont certaines spectaculaires, souffrent énormément. « Le Conseil fédéral a débloqué 50 millions de francs, puis 150 à fonds perdus, et 350 millions de prêts pour le sport professionnel. La question est de savoir si cela sera suffisant. » Le professeur ajoute que certains sports dépendent énormément de la présence de spectateurs et d’autres pas du tout. Le tournoi de tennis de Roland-Garros, qui s’est tenu cet automne à Paris à huis clos, n’a pas trop souffert financièrement dans la mesure où la billetterie ne représente que 15 % de son budget. Le 85 % restant émane des sponsors

SPONSORING ET PUBLICITÉ EN BERNE

Les fans de sport ont bu le calice jusqu’à la lie cet été avec le report des Jeux Olympiques de Tokyo et de l’Eurofoot à 2021. Grand spécialiste de l’olympisme, Jean-Loup Chappelet estime que ces décisions étaient judicieuses, car cela donne le temps aux responsables de se réorganiser. « La situation en été 2021 sera, je l’espère, bien meilleure qu’aujourd’hui. Elle est d’ailleurs déjà bonne actuellement au Japon. En un an, beaucoup de choses peuvent se passer. Je reste optimiste, les JO auront lieu d’une façon ou d’une autre. Le CIO a constitué au gré des années des réserves, et n’a donc pas trop de souci d’argent. La FIFA et l’UEFA en disposent elles aussi, ce qui leur permet de maintenir les emplois. »


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.