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mai-juin 2017
TRANSITION ÉCOLOGIQUE
L’HYMNEcouv DE NOS CAMPAGNES
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CLERMONT-FERRAND Belgique 7,20 € Suisse 10,40 CHF
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Édito
Magazine bimestriel numéro 32 Mai-juin 2017 Imprimé sur papier certifié PEFC Fondateurs Cyril Dion, Yvan Saint-Jours, Patrick Baldassari et Pascal Greboval Directeur de la publication Patrick Oudin Directrice d’EKO LIBRIS Françoise Vernet Rédacteur en chef Pascal Greboval Rédactrice en chef adjointe Sabah Rahmani Secrétaire de rédaction Diane Routex Éditeur Web Simon Beyrand Abonnements et commandes Camille Gaudy abonnement@kaizen-magazine.fr Tél. 01 56 03 54 71 (de 14 h à 18 h) 19, rue Martel - 75010 Paris Comptabilité Patricia Lecardonnel Stagiaires pour ce numéro Gaëlle Coudert et Marine Samzun Direction artistique, maquette et mise en pages • hobo@hobo.paris Tél. 06 12 17 87 33 Illustration de couverture © Julie Graux Prépresse Schuller-Graphic 18, rue de l’Artisanat 14500 Vire Tél. 02 31 66 29 29 Impression Via Schuller-Graphic Corlet Roto (imprim’Vert) ZA Les Vallées 53300 Ambrières-les-Vallées SIRET : 539 732 990 000 38 • APE : 5814Z Commission paritaire : 0317 k 91284 Numéro ISSN : 2258-4676 Dépôt légal à parution
Jardinons édito nos territoires Vous connaissez à présent le nom des deux derniers prétendant-es à la location du palais de l’Élysée (ce n’est pas le cas au moment d’écrire ces lignes), voire du ou de la locataire. Alea jacta est. Quelle politique mènera-t-il ou mènera-t-elle ? Une politique de transition écologique ou un énième plan de restructuration économique ? Avec le dossier de ce numéro, nous l’invitons à suivre la première option. Car la France recèle de véritables laboratoires de transition écologique performants. Ce sont ces villages ou petites villes qui, portés par une dynamique citoyenne, ont mis en place des choix énergétiques, urbanistiques, économiques et culturels différents, et qui fonctionnent ! Le propos est moins de savoir s’il est plus écologique de vivre à la campagne qu’en ville, que de signifier que, portés par des valeurs communes, les Français-es sont en capacité de vivre autrement sur un territoire. Le mécanisme est bien connu : on se mobilise plus facilement pour aider les personnes que l’on croise quotidiennement que pour empêcher la fonte des glaces au pôle Nord ; on met plus d’énergie à sauver l’école du coin qu’à repenser le mix énergétique français. Certes, ce n’est pas systématique, mais la proximité favorise en général l’action. Et, bonne nouvelle : nous vivons tous sur un territoire, que ce soit un village ou un quartier d’arrondissement. Il ne s’agit donc pas de reproduire, d’importer un modèle rural en ville, à l’échelle nationale, mais d’être acteurs de notre territoire, là où nous habitons. Tel est le levier essentiel. Ne plus être spectateur, mais acteur de la cité. Donc, peu importe le ou la gagnant-e de cette grande téléréalité qui vient de s’achever, fabriquons ensemble avec nos voisins, amis, familles ces micro-sociétés plus humaines et plus vivables. Par capillarité, elles deviendront le modèle de demain.
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Régie de publicité et distribution dans magasins spécialisés AlterreNat Presse • Tél. 05 63 94 15 50 Distribution Presstalis
Pascal Greboval Rédacteur en chef
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Kaizen est un mot japonais signifiant littéralement « changement bon ».
Les Jardins de Gaïa vous donnent rendez-vous pour l’arrivée: celle desduPrimeurs dupar Darjeeling ! Mais c’est également une méthode changement les petits pas. La perspective de changer brutalement, passer tout au tout, réveille Issus de petits producteurs, tous nos thés du Darjeeling sont sélectionnés à lade main etdutravaillés avec toute la passion Aucun texte ni aucune illustration nos peurs et attise nos résistances. Commencer par un petit pas, prendre et le savoir-faire nécessaires pour vous offrir des thés d’une finesse exemplaire. ne peut être reproduit-e sans courage, en faire un deuxième puis toute une multitude, chaque jour, avec l’autorisation du magazine. Merci.
régularité, peut nous conduire aux plus grandes transformations. Cela s’est déjà vu dans l’histoire et c’est ce que nous espérons, à nouveau.
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Z.A. - 6, rue de l’Écluse - FR-67820 Wittisheim - Tél. +33 (0)3 88 85 88 30 - courriervpc@jardinsdegaia.com - www.jardinsdegaia.com
Sommaire • Kaizen n
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ELLES-ILS PENSENT DEMAIN 6
Rencontre Rokia Traoré : « Ayez des rêves élevés ! »
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ELLES-ILS FONT LEUR PART
JE SUIS LE CHANGEMENT
sommaire 32 Portraits Le crieur public redonne la parole aux habitants 34
Dossier Transition écologique : l’hymne de nos villages
66 Je vais bien, le monde va mieux Le kyudo ou la quête de sa cible intérieure 70 Do It Yourself Une chevelure éblouissante grâce aux hennés
75 Je passe à l’acte 10 excellentes raisons de s’engager dans une Amap 11
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76 Nos bonnes adresses Clermont-Ferrand
Les pièces du puzzle Chiens, chats, lapins... Nos meilleurs amis ?
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Portfolio
Cuisine La consoude
L’art au bout des mains
50 Vent d’ailleurs Le premier écovillage d’Irlande devient un modèle de transition 55 Politisons ! Cyril Dion 24 Créateurs de culture La philosophie à la portée de tous
56 Et si on le faisait ensemble ? Adopte un détenu
28 La voie du Kaizen Florence Servan-Schreiber
60 Le goût de l’enfance Élèves et enseignants à l’école du savoir-être
89 Les rendez-vous Kaizen
65 Écologie intérieure Gilles Farcet
94 La chronique de Pierre Rabhi
30 Une nouvelle Cochon qui s’en dédit par Sylvie Hampikian
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87 Le sourire d’Yvan Saint-Jours
92 Paroles de Colibris
rencontre
Rencontre
rencontre
Rokia Traoré « Ayez des rêves élevés ! » La chanteuse malienne Rokia Traoré, figure emblématique des métissages, a dédié son nouvel album, Né So (2016) – « chez moi » en bambara –, à tous les réfugiés. Elle nous explique comment elle agit pour que les jeunes artistes maliens puissent vivre de leur travail dans leur pays. Entretien réalisé par Carole Testa - Photos : Daniel Roblin Vous avez grandi entre le Mali, l’Algérie, l’Arabie saoudite, la France et la Belgique. Que vous a ap‑ porté cette culture plurielle ? Le brassage culturel est une réalité. Dans tous les pays où nous avons vécu, mes parents souhaitaient que l’on découvre la culture locale. On peut décider de rester dans la facilité et le familier. Pour ma part, j’ai appris à aller vers le différent et à saisir le monde qui m’entoure. Écrire, lire, communiquer à travers l’expression artistique sont des manières de rencontrer ceux qui sont très éloignés de nous, et de toucher ce qu’il y a de plus humain en chacun. En 2013, avec d’autres chanteurs du monde entier, vous avez enregistré la chanson One woman pour promouvoir les droits des femmes, à l’initiative d’ONU Femmes. À cette occasion, vous avez dit : « Je ne pense pas être la moitié ni le quart d’un homme, je pense être une femme, je suis forte comme une femme doit l’être. » Comment voyez‑vous la force au féminin ? Une femme est forte quand elle réalise ses envies, ses projets, quand elle mène sa vie librement ! Les différences entre les hommes et les femmes ne devraient pas impliquer une supériorité. La vie qu’on a envie de mener est un choix libre et un droit, quels
que soient le milieu social et le sexe. Pour ma part, j’ai dû me battre pour faire accepter certains de mes choix, comme celui de mon métier. Enfant de diplomate, je ne suis pas issue d’une famille de griots. Ma mère fait partie de la première génération de femmes instruites, puisqu’elle a obtenu un diplôme d’infirmière à la fin des années 1960. Pour elle, la musique comme choix délibéré était inconcevable. Pourquoi faire de la musique quand on n’est pas griot et quand on est instruit ? Autre exemple : je me rase le crâne au lieu de porter des tresses de cheveux artificiels, comme le font beaucoup de femmes africaines. Se raser est une coutume animiste qui est très mal perçue depuis que l’islam a pris plus de place. Pourtant, je le fais, j’affirme qui je suis. Parfois, l’obligation de lutter me fait apparaître comme féministe, alors que ce n’est pas mon but, car je conçois les relations dans la fraternité plutôt que dans l’opposition. Le titre « Sé Dan » (« respect »), tiré de l’album Né So et composé en anglais, a pour leitmotiv le mot respect : est‑ce pour vous la seule réponse possible aux radicalismes ? C’est la réponse non seulement aux extrémismes religieux, mais aussi aux radicalismes de tous genres que notre époque connaît. Notre capacité kaizen • mai-juin 2017 • 7
portfolio
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Portfolio
portfolio
L’art au bout des mains
© Walter Hodges/Flirt/Photononstop
Grâce à elles, le bois, la terre, le cuir ou le verre se transforment en objets à la croisée du beau et de l’utile. Qu’elles empoignent, compriment, coupent, rabotent, frottent, déchirent ou caressent, les mains sont l’outil précieux qui relie l’artisan à la matière.
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créateur de Créateurs de culture culture
La philosophie à la portée de tous Depuis 2009, la mairie de Romainville (Seine-Saint-Denis) fait philosopher ses habitants. Afin d’éveiller les adultes comme les enfants à la sagesse, la Maison de la philo organise gratuitement des ateliers, des cafés-philo et des projections de films suivies de débats. Texte : Aude Raux - Photos : Jérômine Derigny
L
e générique de fin défile sur l’écran du cinéma Le Trianon. Les spectateurs essuient leurs larmes, salées comme l’océan qui encercle l’île de La Tortue rouge. Un dimanche après-midi de janvier, dans le cadre d’un ciné-philo consacré à la question « L’homme a-t-il sa place dans la nature ? », Johanna Hawken, responsable de la Maison de la philo de Romainville (Seine-Saint-Denis), les invite à réfléchir ensemble à la portée philosophique de ce film d’animation. Réalisé par Michael Dudok de Wit, ce récit édénique conte l’histoire d’un naufragé sur une île déserte tropicale qui se reconnecte avec la nature. Une nature des origines, alternativement 24 • kaizen • numéro 32
bienfaisante et menaçante, comme dans un éternel recommencement. « Qu’est-ce que la nature ? », demande Johanna Hawken après avoir précisé qu’il n’y avait pas de mauvaise réponse en philosophie. Parmi la trentaine de spectateurs qui sont restés pour participer au débat, essentiellement des parents avec leurs enfants, deux petites mains se lèvent. Un garçon propose cette définition : « Ce qui, au départ, a formé le monde. » Une fillette évoque « les choses qui nous entourent : l’eau, les arbres, les animaux ». Un troisième enfant ajoute, à la liste, « les tortues » ! Et un quatrième la clôt avec « les humains ».
(ci-contre) Johanna Hawken, responsable de la Maison de la philo de Romainville, anime un atelier philosophie à la Maison des retraités. (ci-dessous) Au tour des enfants de philosopher : les élèves de CM1 de l’école primaire Langevin sont invités à cogiter sur le temps qui passe.
La responsable de la Maison de la philo intervient d’une voix douce : « Est-ce que tout est la nature ? » Et de s’appuyer sur l’exemple du pantalon que le naufragé se confectionne avec la peau d’un phoque échoué sur la plage. L’un des jeunes participants constate que « les vêtements, ce n’est pas naturel, parce qu’entre-temps, il y a eu une transformation ».
Johanna Hawken amène ensuite le public à réfléchir à une deuxième question : « L’humain fait-il partie de la nature ? » Les avis des enfants sont partagés : « Non, parce qu’on transforme les choses plus que les animaux. » « Oui, parce qu’on
climatique, alors elle provoque des catastrophes naturelles. » Quand Johanna Hawken demande si, « à l’inverse, l’homme est l’ami ou l’ennemi de la nature », un enfant fait intuitivement référence à la sobriété heureuse : « À un moment, il faut que l’homme arrête d’abuser. Il peut cueillir des mangues, mais pas raser la forêt. » Le ciné-philo se termine sur ce point d’interrogation : « La nature a-t-elle des choses à nous apprendre ? » Un parent remarque que les hommes s’inspirent de la nature : « Regardez notamment les avions qui imitent le vol des oiseaux. » Pour une maman, « les catastrophes naturelles sont un message sans paroles ». Tel un écho nous invitant à ne pas essayer de dominer la nature, mais à vivre en harmonie avec elle.
a les mêmes besoins naturels que les animaux – boire, manger – et que, comme eux, on vit et on meurt. » Ou encore : « Si notre corps est naturel, nos gestes et nos pensées ne le sont pas. » Cette dernière idée sonne comme une évidence aux oreilles d’un jeune spectateur. Il en veut pour preuve « qu’un lion ne va pas tricoter » ! S’ensuit un échange sur la culture, l’instinct et la raison. Les réflexions des uns cheminant avec celles des autres, jusqu’à la troisième question : « La nature est-elle notre amie ou notre ennemie ? » Parmi les réponses glanées chez les enfants : « C’est notre amie, parce que sans elle, comment ferait-on pour vivre ? » « Elle est plus que notre amie : tout ce qu’on pollue, elle le purifie. » « Mais, parfois, elle en a marre de nos bêtises, comme le dérèglement
C’est l’idée que retiendra Nino. Du haut de ses 10 ans, il raconte son premier ciné-philo avec une impressionnante maturité : « Ça m’a épanoui. Pendant le film, je ne comprenais pas tout. Après, comme j’ai réfléchi et j’ai écouté les autres, j’ai mieux ressenti. Et je me suis rendu compte que des choses m’étaient passées par dessus la tête, comme quand le personnage décide de vivre avec et pas contre la nature. » À ses yeux – pétillants –, la philosophie est « un moyen génial pour parler de façon complètement libre. Pour exprimer, à force de creuser, ce qu’on a tout au fond de soi. » Nino comprend que, petit, il philosophait déjà sans le savoir : « Je posais des questions à ma maman, par exemple : “Est-ce que ce que je vois, c’est vrai ?” » Avec un beau sens de la métaphore, il dit : « La philosophie, c’est comme
créateur de culture
Cheminer ensemble dans la réflexion
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Dossier
TRANSITION ÉCOLOGIQUE L’HYMNE DE NOS VILLAGES Loin de la mondialisation chaotique et énergivore, la transition écologique renoue avec la terre. Du global au local, c’est en milieu rural que les initiatives portent les fruits les plus mûrs. Décidés à agir, des femmes et des hommes
dossier
se mobilisent au quotidien pour incarner le changement dans l’agriculture, l’énergie, l’emploi, la démocratie, l’habitat ou encore la culture : revalorisant ainsi notre écosystème, trop longtemps maltraité. De plus en plus nombreux dans nos campagnes, des élus et des citoyens génèrent des dynamiques innovantes qui défient nombre d’obstacles. Rencontre avec ces pionniers qui sèment les graines de la transition.
Argentat-sur-Dordogne, où a lieu le festival Histoires de passages © Sylvain Golvet
1 • Faux-la-Montagne 2 • Loos-en Gohelle 3 • Loubressac 4 • Trémargat 5 • Septfonds 6 • Corbigny 7 • Boitron 8 • Sexcles 9 • Correns
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dossier 1
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Et si on le faisait ensemble ?
Adopte un détenu En Pays de la Loire, des familles accueillent chez elles des détenus pour des courts séjours en vue de préparer leur sortie. Un dispositif unique en France, qui fonctionne depuis vingt ans et peine à se dupliquer faute de moyens.
et si on le faisait ensemble ? Texte : Sophie Boutboul - Photos : Jérôme Blin/bellavieza
«
A
près avoir vidé une brouette de bûches, il lance un feu de cheminée et se réchauffe face au bois crépitant. À Saint-Mars du Désert (Loire-Atlantique), dans la maison d’Edwige, Jérémy 1 se détend. Quelques heures plus tôt, en ce matin glacial de janvier, le jeune homme de 26 ans poussait la porte métallique du centre de détention de Nantes pour rejoindre son éducatrice, venue le chercher pour sa permission. Pendant trois jours, et pour la deuxième fois, Jérémy s’installe chez Edwige, 67 ans. Venant de La Réunion, il a très peu de proches en métropole. Il a donc demandé à son conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation (CPIP) s’il pouvait entrer dans le Dispositif d’accueil en famille proposé par l’association nantaise L’Étape, qui œuvre notamment pour l’insertion des sortants de prison.
Jérémy arrivera fin 2017 à la fin de sa peine de six ans. Après plusieurs rencontres avec des éducateurs voulant s’assurer qu’il n’était pas dans le déni de ses actes passés, et des discussions autour de son projet de maçonnerie, il a été accepté dans le programme. « Ça m’a fait bizarre d’arriver chez quelqu’un que je ne connaissais pas. Aujourd’hui, je suis plus à l’aise, se félicite Jérémy, cheveux frisés et barbe courte. À la fin de ma première peine à La Réunion, je me suis senti abandonné. Les gens comme Edwige nous montrent qu’on n’est pas complètement des oubliés de la société, qu’on est toujours vivants. » En vingt ans d’existence, grâce à une vingtaine de fa m i l l e s , L’ É t a p e a a cco m p a g n é p l u s d e deux cents détenus. Edwige en a hébergé trente-neuf depuis 2000. Elle continue de correspondre avec certains par lettre ou téléphone. Un ancien prisonnier lui rend même visite une semaine par an. Un problème ne s’est posé qu’une fois depuis tout ce temps : un détenu n’était pas rentré dormir chez Edwige et L’Étape avait dû prévenir la gendarmerie. « L’Étape offre une sécurité, qui permet ce don de moments partagés, souligne le conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation Bruno Fritel, du syndicat Insertion 44. Les détenus voient qu’il y a des gens prêts à les pardonner et qu’il est possible de se reconstruire dehors. »
Donner une deuxième chance Comme lors de son précédent séjour il y a trois mois de ça, Jérémy va prendre son premier déjeuner chez Edwige avec l’éducatrice Myriam. C’est le moment choisi pour la signature du contrat entre L’Étape, 56 • kaizen • numéro 32
et si on le faisait ensemble ?
Ayant peu de proches en métropole, Jérémy passe ses quelques jours de permission chez Edwige, qu’il ne connaissait pas avant.
le détenu et la famille, qui établit les objectifs de la permission. « J’ai envie d’improviser, de respirer l’air et d’évacuer tous ces barreaux de ma tête », annonce Jérémy, avec son accent créole chantant. Myriam prend note sur la table napée d’un tissu rouge, à côté du poulet rôti, tout en donnant un reçu à Jérémy pour son règlement de 1,50 euro par nuit, une participation symbolique dont doit s’acquitter le détenu. Un des autres objectifs de Jérémy est de reprendre contact avec sa sœur – ce qu’il fera. L’éducatrice reviendra le chercher après trois jours, puis dressera un bilan avec Edwige et lui. Une fois Myriam partie, Edwige et Jérémy fument une cigarette en discutant de cuisine réunionnaise, avant de sortir acheter un manteau pour Jérémy, frigorifié sous son pull fin. Lors du premier séjour, le motif de l’incarcération est abordé. « Je ne juge pas, je peux tout entendre, insiste Edwige, qui a commencé l’accueil en 2000 avec son mari, décédé depuis. Ça peut faire glauque quand on nous raconte des histoires de meurtre, mais quand on me demande si j’ai peur, je dis non ! Je fais confiance à L’Étape, qu’on peut joindre 24 heures sur 24. Si venir ici peut aider des personnes à reprendre le bon chemin, c’est le minimum que je puisse faire. » L’éducatrice Myriam analyse : « Les enfants des accueillants, eux-mêmes parents [la plupart des accueillants sont des retraités ayant des petits-enfants], ne sont pas toujours du même avis, et certains voisins les prennent pour des fous, comme ils logent parfois des personnes ayant des interdictions de contact avec les mineurs. Mais eux agissent avec cette volonté de donner une deuxième chance. » Après une nuit dans sa chambre aux murs boisés, Jérémy, parka noire neuve sur le dos, est prêt pour
une escapade à Pornic, à une heure de route de Saint-Mars-du Désert. Même s’il a peur de la voiture, il défie sa crainte aux côtés d’Edwige en scrutant les vaches et le paysage défilant au bord du bitume. « J’avais jamais vu la mer en métropole, ça fait du bien, je capte le soleil », sourit-il. L’iode titille les narines. « Tu veux aller toucher l’eau ? », questionne Edwige, alors que les mouettes crient. « C’est autorisé ? », s’enquiert-il. « Oui, bien sûr ! La mer est à tout le monde », rigole Edwige. Le ressac des vagues sur la plage déserte accompagne les sauts de Jérémy à travers les rochers. « Je vais t’aider à descendre, Edwige, j’ai l’impression d’être un superhéros », lance-t-il, le torse bombé, en lui tendant la main. « J’ai l’impression d’être une vieille », s’amuse la truculente Edwige.
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diy DIY
Do It Yourself
Une chevelure éblouissante grâce aux hennés Les colorations chimiques représentent encore un quart des ventes de produits capillaires, et ce n’est pas la mode du turquoise qui va arranger les choses. Pourtant, il est avéré que ces produits sont toxiques. Une bonne raison pour leur préférer les teintes naturelles du henné ancestral, qui, associé à d’autres plantes colorantes, va non seulement embellir les cheveux et leur donner de la vigueur, mais aussi préserver votre santé. Texte : Sylvie Hampikian Photos : Olivier Degorce & Amandine Geers
S
ur le plan botanique, le véritable henné colorant est appelé « henné naturel », en latin Lawsonia inermis ¹. Riche en lawsone, un pigment naturel, il colore les cheveux de nuances cuivrées et orangées plus ou moins intenses. Là où ça se complique, c’est que d’autres plantes se voient attribuer abusivement le nom de henné. Il s’agit du « henné noir » ou 70 • kaizen • numéro 32
indigotier (Indigofera tinctoria), qui colore la cheve‑ lure en noir bleuté, et du « henné neutre » (Cassia obovata), qui est non colorant ou très légèrement sur cheveux clairs. Mais les risques de confusion ne s’arrêtent pas là : des mélanges colorants, provenant souvent d’Inde ou du Maroc, portent eux aussi le nom générique de henné : henné brun, henné blond,
je change
henné noisette, henné marron, etc. Il s’agit d’asso‑ ciations de plantes colorantes, avec ou sans henné naturel : brou de noix, amla, jatropha, bhringaraj, garance, sauge, indigo, carthame, rhubarbe, camo‑ mille allemande, etc. Il convient d’être vigilant vis‑à‑vis de ces mélanges, car certaines préparations peuvent contenir un additif qui facilite la prise (picra‑ mate de sodium), voire des sels métalliques, qui ne sont pas forcément indiqués sur l’emballage. Il est plus prudent d’opter pour des marques vendues dans les boutiques ou salons de coiffure bio (Khadi, Logona, Hennés de Shiraz, K pour karité, Aroma‑Zone, Terre de couleur, Gaïa, Marcapar…). Par chance, de‑ puis quelques années, l’offre ne cesse de s’enrichir et les coloris de se diversifier, du blond au brun en passant par toute la gamme des roux et châtains. Mais, pas encore jusqu’au turquoise ! Hormis pour les teintes blondes, le henné naturel est omniprésent dans ces teintures végétales. Il confère aux cheveux des nuances cuivrées reconnaissables entre toutes, mais qui seront atténuées ou modulées par le bleu nuit de l’indigo, le marron du brou de noix, le noir du katam, le jaune du carthame, etc. La provenance géographique du henné naturel est aussi un facteur déterminant pour la teinte obtenue. Ainsi, au fil de ses recherches et de ses expériences, la coiffeuse Alexandra Perrogon (Saintes, 17) a montré que le henné naturel d’Égypte donne un blond véni‑ tien ou un orange clair, le henné du Pakistan ou du Sahara un orange plus intense, le henné du Rajasthan un brun rouge, le henné du Maroc un auburn et le henné du Yémen un roux cuivré plus doux. Bien entendu, le rendu final dépend aussi de la couleur de base des cheveux et du temps de pose. Par exemple, un même henné posé 30 minutes pourra donner un blond vénitien sur cheveux blonds et des reflets cuivrés sur cheveux bruns. Mais, posé 60 mi‑ nutes sur cheveux blancs, il les rendra orange fluo ! En raison de cette variabilité des résultats, pour se lancer dans la coloration végétale, mieux vaut com‑ mencer par employer un mélange du commerce (marques ci‑dessus). Parfois, une pose en deux temps est nécessaire. C’est le cas notamment lorsque l’on veut appliquer une teinte soutenue sur une chevelure avec beaucoup de cheveux blancs. La méthode consiste à appliquer dans un premier temps du henné naturel seul (henné d’Égypte par exemple), pendant 30 à 40 minutes environ, ce qui prépare les cheveux blancs à bien fixer la coloration végétale définitive. On rince cette « pre‑ mière couche » et les cheveux blancs apparaissent transitoirement orange vif. On applique ensuite la coloration définitive pendant le temps nécessaire.
Il était une fois... Lakshmi, déesse de la beauté et de la prospé‑ rité dans le panthéon hindouiste, est née de la mer, comme la Vénus romaine. Le henné est l’un de ses attributs et fait partie des plus pré‑ cieux des présents qu’elle nous ait légués. En Inde, la poudre de henné (mehndi) est associée à la chance et à la prospérité. Elle est encore aujourd’hui supposée contenir une partie de l’essence de Lakshmi. Quand on l’applique sur le corps ou les cheveux, elle apporte un peu de la présence sacrée de la déesse et attire sa protection. Le henné tient également une place m a j e u re d a n s l a t ra d i t i o n m u s u l m a n e. Surnommé « plante du paradis », on l’emploie autant pour colorer et embellir les cheveux que pour réaliser des tatouages traditionnels. Mais, s’il est profondément ancré dans les cultures orientales, le henné fut longtemps ignoré des Occidentaux. C’est dans les années 1970, grâce au « hippie trail » qui passait par Marrakech ou Katmandou, qu’il fut découvert et reconnu comme un merveilleux substitut aux colorations chimiques. Quelques décennies plus tard, la méfiance des consommateurs vis‑ à‑vis des produits industriels toxiques ne cesse de s’amplifier. Aujourd’hui, le succès du henné ne se limite plus au microcosme « baba cool », et les colorations végétales connaissent un développement croissant.
diy
Les shampooings doux bio conviennent parfaite‑ ment aux cheveux colorés « végétalement ». Toutefois, les shampooings non moussants aux plantes en poudre (shikakai et sidr) ont l’avantage de renforcer et de fixer les couleurs. Il est aussi conseillé de pratiquer un rinçage au vinaigre après chaque shampooing : rincez vos cheveux, puis malaxez‑les avec 1 verre de mélange de vinaigre de cidre et d’eau tiède. Par ailleurs, pour éviter que vos cheveux colorés ne deviennent à la longue secs au toucher, à cause des tanins des plantes, n’hésitez pas à réaliser 1 ou 2 fois par mois un masque gras, par exemple avec un avocat finement mixé. Les Indiens pratiquent le « bain d’huile », qui consiste à enduire toute la chevelure de matière grasse, huile de coco par exemple. Mais il faudra ensuite laver les cheveux et les rin‑ cer soigneusement. n ¹ Parfois remplacé par son synonyme Lawsonia alba.
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je change
Je passe à l’acte
10 excellentes raisons de s’engager dans une Amap
je passe à l’acte
Les bonnes raisons de créer ou de s’engager dans une Amap (association pour le maintien d’une agriculture paysanne) ne manquent pas ! Avec, en premier lieu, la possibilité de tisser à nouveau quelques brins de ce lien qui nous unit à la terre et aux paysans. Au Japon, un foyer sur quatre serait déjà adepte de ce modèle synonyme d’agriculture biologique et locale, mais aussi de lien social retrouvé… Alors, à vos paniers, et en route vers une alimentation saine, éthique, gourmande et pleine de sens !
ELLE NOUV ON CTI COLLE
ACTES SUD | KAIZEN
POUR ALLER PLUS LOIN • Françoise Vernet et Marie-Noëlle Himbert, S’engager dans une Amap, Kaizen/Actes Sud, 2017
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Nos le bonbonnes plan adresses
Clermont-Ferrand Gonflé à l’air bio
Texte et photos : Pascal Greboval - Dessin : Manu Thuret
BOIRE ET MANGER Le chocolat, vous l’aimez un peu, beaucoup, passionnément ? Quelle que soit la dose dont vous avez besoin, vous trouverez à L’ARMOIRE À CUILLÈRES l’excellence. Dans ce bar à chocolat, Mallorie cultive le bon goût. « Tout n’est pas bio, assume-t-elle, mais de qualité. Pour le chocolat, je travaille avec des producteurs du monde entier qui peuvent garantir notamment la traçabilité, car ce n’est pas un secteur très éthique [lire Kaizen n o 30]. Pour les autres aliments et boissons, je m’approvisionne en bio ou localement. » Dans ce lieu confortable, vous apprécierez de boire, manger ou croquer le chocolat sous toutes 76 • kaizen • numéro 32
ses formes. L’Armoire à cuillères recèle d’autres saveurs. En plus des concerts et soirées contes, Mallorie propose des animations originales : le speed-booking (vous avez quatre minutes pour présenter et défendre votre livre), la choco-sophrologie et le macramé. Et si LE TEMPS D’UN VERRE vous testiez un vin naturel ? Après leurs études de sommellerie, trois amis découvrent la biodynamie par l’intermédiaire du vigneron Jean-Pierre Frick, pionnier du bio en Alsace. En 2015, Amélie et les deux Alexandre ouvrent un bar à vin qui privilégie les vins naturels et biodynamiques. « Contrairement à une cave, le bar à vin permet d’avoir un échange, de créer du lien. » Dans ce bar à la décoration originale, il est agréable de boire un verre accompagné d’une planche de produits locaux ou bio.
je change LA BERGAMOTHÉE, « c’est un lieu engagé sur des valeurs humanistes, où l’on prend son temps et où on se fait plaisir », garantit Nathalie, créatrice de ce restaurant-salon de thé végétarien. À la carte : des plats de saison composés de produits locaux ou bio. Et au sous-sol, une petite salle conviviale avec une programmation culturelle éclectique : concerts, théâtre, conférences… Bref, un bon endroit pour faire une pause !
Sur la place du marché Saint-Pierre, au café MYRTILLE, Marie-Laure propose depuis 2015 une cuisine locale, bio et végétarienne, avec des options véganes. Avec une carte qui change chaque jour, l’expression « cuisine de saison » prend tout son sens ici. Marie-Laure a même réussi à convaincre son maraîcher de cultiver des pois chiches made in Auvergne. Le circuit court, ça marche dans les deux sens ! Alors, pour un thé ou un déjeuner, c’est assurément une bonne adresse.
le bon plan
BIEN DANS SON CORPS Dans sa BOUTIQUE NATURELLEMENT, Claire propose des vêtements et des chaussures « écologiques, équitables et confortables », en privilégiant les marques allemandes. Vous trouverez ici lin, chanvre et bambou pour vous couvrir de la tête aux pieds. Et même quelques bijoux de créateurs locaux recyclant les capsules de café ou travaillant l’ivoire végétal. Après une formation d’ayurvéda et d’herboristerie, Floriane a naturellement ouvert HERBULA, « un lieu pour favoriser le bien-être à travers l’alimentation. Je conseille aux clients d’intégrer certaines épices ou herbes à leur alimentation selon leur profil. » Ici, épices et plantes sont 100 % bio. « Conjuguer création et produits bio est une grande satisfaction », témoigne Emmanuelle dans son beau salon HAIRATORIUM. « J’allais arrêter la coiffure quand j’ai découvert les couleurs végétales. » Pour autant, pas question pour la créatrice de rester terne : « J’aime bien conserver un état d’esprit espiègle, le bio doit être joyeux et rock’n’roll ! » Pour atteindre cet objectif, la jeune femme conjugue deux ingrédients : des produits naturels et du temps. « S’il le faut, les gens restent deux à trois heures. Comme les colorations végétales tiennent mieux, au final, sur un an, le budget n’est pas plus élevé que pour des traitements capillaires classiques. » kaizen • mai-juin 2017 • 77
Cuisine
La consoude cuisine Pour nous consolider Elle en impose, avec sa tige robuste, ses grandes feuilles pointues et ses jolies fleurs blanchâtres, roses ou bleu intense. À l’image de sa carrure d’athlète, la consoude est la plante qui soigne aussi bien les petits bobos que les fractures. Tendre et savoureuse, elle apporte une vague iodée qui ne laisse pas indifférent. Textes et photos : Linda Louis
SAUVAGE & DÉLICIEUX !
C
ousine de la bourrache, du myosotis et de la vipérine, la consoude fait partie d’une famille de plantes ayant toutes une caractéristique peu glamour… Du poil aux pattes ! En effet, Mesdames les Borraginacées sont recouvertes d’un duvet, plus ou moins rêche selon les espèces. Mais cet inconvénient comporte un avantage, et pas des moindres : 80 • kaizen • numéro 32
il facilite leur identification. Ainsi, on ne confondra pas les feuilles rêches de la consoude avec celles de la digitale pourpre, très douces… mais toxiques ! Le goût plus ou moins iodé de la consoude rappelle celui du concombre ou de l’huître, surtout pendant la floraison. Les beignets que l’on réalise avec sont d’ailleurs appelés « sole végétale », car leur texture
je change IDENTIFICATION DE SYMPHYTUM OFFICINALE (BORRAGINACÉES)
croustillante en surface et moelleuse à cœur rappelle celle de la sole meunière. C’est le mucilage (substance visqueuse présente dans les algues ou les graines de lin) qui donne cette étonnante sensation en bouche. L’oreille d’âne (ou langue de vache, au choix !) est aussi bien connue des amateurs de cuisine sauvage que des jardiniers. Comme avec l’ortie, on prépare avec un purin stimulant la croissance et la floraison des plantes. Riche en potasse, elle est complémentaire de l’ortie connue pour sa haute teneur en azote. Ce purin agit également en tant que répulsif contre les parasites et comme activateur de compost. Toxicité ? L’agence américaine Food and Drug Administration indique que la consoude ingérée à haute dose (surtout ses racines) serait hépatotoxique (foie) à cause de ses alcaloïdes pyrrolizidiniques. Les herboristes évoquent une injuste chasse aux sorcières… Par précaution, consommez-en sans en abuser, et de préférence les feuilles de la grande consoude (fleurs blanches) contenant moins d’alcaloïdes que les consoudes à fleurs roses.
• Plante vivace de 30 à 120 cm de hauteur, robuste, munie d’une tige épaisse, de grandes feuilles et, à son sommet, de fleurs en forme de clochettes tubuleuses et poussant en colonie. • Feuilles de 10 à 15 cm de large et jusqu’à 25 à 30 cm de longueur, ovales, lancéolées, aux nervures bien visibles, pétiolées (avec une « tige » en forme de gouttière) pour les inférieures, non pétiolées pour celles situées en haut de la tige, vert foncé mat, épaisses, recouvertes d’un duvet de poils plus ou moins rêches. • Fleurs blanc jaunâtre, rosées ou violet clair *, à corolle tubuleuse d’environ 2 cm de long, enroulées en spirale avant leur ouverture (floraison de mai à juillet). • Racine ramifiée, recouverte d’une peau brunâtre et à la chair blanche, de 1 à 2 cm d’épaisseur (récolte au printemps ou en automne). • Habitat au bord des chemins humides, des rivières, dans les fossés, au pied des peupliers, là où le sol est gorgé d’eau.
cuisine
À ne pas confondre avec… La digitale pourpre (Digitalis purpurea), très toxique, aux feuilles vert plus clair, veloutées au toucher, aux nervures peu visibles au-dessus et bien visibles rosées en dessous, présente en forêt parmi les fougères. La consoude tubéreuse (Symphytum tuberosum) de 20 à 40 cm de hauteur, à fleurs jaune clair, aux feuilles inférieures plus petites que les supérieures, aux propriétés médicinales moins intéressantes que la grande consoude.
* La consoude hérissée (Symphytum asperum) et la consoude de Russie (Symphytum × uplandicum) souvent présentes dans les jardins, comportent des fleurs rose vif ou bleu violacé.
En cuisine
Les feuilles de consoude se cuisinent en beignets ou comme des épinards : en soupe, en poêlée, dans des quiches ou cakes salés, les omelettes, les soufflés au fromage. Elles peuvent être ébouillantées et remplacer les feuilles d’algue nori pour confectionner des makis. Ne les consommez pas crues, car elles irritent les muqueuses de la bouche. En revanche, les fleurs sont comestibles crues et décorent les salades ou les tartines de fromage. n
Vertus thérapeutiques et médicinales C’est l’une des meilleures plantes cicatrisantes, consoude venant du latin consolidare, « consolider, affermir ». Vulnéraire (guérit les blessures), astringente (resserre et assainit les tissus), émolliente et adoucissante (apaise les parties enflammées), la consoude est la plante antibobos par excellence. Elle contient de l’allantoïne, substance qui stimule la multiplication cellulaire. Pour les gerçures, les plaies suppurantes, les brûlures ou coups de soleil, les dermatoses, les piqûres d’insectes, réalisez une décoction : 100 g de racines sèches concassées bouillies à couvert et à feu doux pendant 20 minutes dans 500 ml d’eau ; à appliquer avec une compresse 3 ou 4 fois par jour.
Pour traiter les troubles osseux, articulaires, tendineux et de calcification, réalisez un cataplasme : mixez des feuilles fraîches bien lavées avec un peu d’eau et faites bouillir cette pâte 1 minute. Enveloppez-la encore chaude entre deux compresses et serrez avec un bandage sur la zone à traiter (à changer toutes les 4 heures) ; ou imbibez une compresse avec la décoction et maintenez-la avec un bandage pendant 30 minutes, 4 fois par jour. Pour tous ces maux, vous pouvez également préparer la recette de baume donnée page suivante. En usage interne, la consoude était autrefois indiquée pour les maladies des voies respiratoires, les diarrhées et les ulcères. kaizen • mai-juin 2017 • 81