![](https://static.isu.pub/fe/default-story-images/news.jpg?width=720&quality=85%2C50)
6 minute read
Vérifi ez si vous n’excédez
À combien peut s’élever votre pension complémentaire?
Le capital de pension complémentaire que les entreprises constituent pour leurs travailleurs, gérants ou administrateurs est plafonné. Les données de base utilisées pour calculer cette limitation et la manière dont elle est traitée par le fisc sont parfois remises en question.
Advertisement
Dirk Selleslagh
De nombreuses entreprises en Belgique investissent des fonds dans un plan de pension complémentaire pour leur personnel. Environ 4 millions de Belges disposent d’une telle épargne destinée à compléter leur pension: 3,36 millions sous le statut de salarié et 360.000 sous le statut d’indépendant. Ensemble, ils ont ainsi épargné 91,5 milliards d’euros.
Tant pour l’entreprise que pour le salarié ou le dirigeant d’entreprise, un plan de pension d’entreprise est fiscalement plus intéressant que le paiement du salaire. L’entreprise paie les primes et peut les déduire fiscalement comme frais professionnels. Le salarié ou le dirigeant d’entreprise paie moins d’impôts sur le capital-pension constitué que sur son salaire.
Au début des années 1980, il était devenu de plus en plus courant pour les hauts salaires, par souci d’optimisation fiscale, de faire verser une part toujours plus importante de leur salaire dans un plan de pension. Pour le fisc, cela représentait une baisse de rece es.
Limite des 80%
Pour contrer ce phénomène, la limite de 80% a été introduite en 1985. Depuis, les entreprises doivent veiller à ce que la somme de la pension légale et de la pension complémentaire ne dépasse pas 80% de la dernière rémunération annuelle brute. Il ne s’agit pas d’un plafond forfaitaire identique pour tous, mais d’un maximum proportionnel au salaire du travailleur, du gérant ou de l’administrateur. Les montants qui dépassent 80% ne sont pas déductibles fiscalement.
Dans le cas des salariés, le risque de dépasser la limite de 80% est moins fréquent. C’est donc surtout un élément à prendre en compte pour les plans de pension des gérants et des administrateurs.
Il est donc conseillé de vérifier régulièrement si la limite des 80% n’est pas dépassée. Cela permet aux entreprises de prendre en compte d’éventuelles augmentations de salaire. Pour éviter les excès, les dirigeants d’entreprise peuvent ne prendre dans le calcul de la limite que les rémunérations régulières qui doivent en outre être payées mensuellement. Les bonus uniques ou la participation annuelle aux bénéfices (tantième) ne peuvent entrer en ligne de compte.
Salaire et montant de la pension
Divers éléments sont pris en compte dans le calcul des 80%. «Mais ces éléments n’ont que peu ou pas de rapport avec la réalité», précise Steven Cauwenberghs, conseiller juridique chez Aon Belgium. «Le calcul repose en grande partie sur des hypothèses.»
Légalement, la limite de 80% doit être calculée sur la base du dernier salaire annuel brut normal. «C’est là que réside le premier problème», relève-t-il. «Le dernier salaire normal n’est connu qu’en fin de carrière, donc après le versement de toutes les primes.»
De même, le montant de la pension qui doit être repris dans le calcul est également une inconnue. «Un travailleur constitue 1/45 de sa pension légale par année de travail. Le montant exact de la pension légale n’est donc connu qu’en fin de carrière», constate Steven Cauwenberghs. «En cas de contrôle de l’administration fiscale en cours de carrière, une estimation sera utilisée pour le montant de la pension. En d’autres termes, le montant utilisé ne sera presque jamais exact.»
Carrière
Le calcul inclut également les années qui ont déjà été prestées et qui doivent encore l’être au sein de l’entreprise. «À première vue, il s’agit d’une valeur connue. L’on vise en effet à me re un chiffre sur la carrière d’une personne», explique-t-il. «Mais le régime permet également de reprendre dans le calcul un certain nombre d’autres années de carrière. Les années prestées en dehors de l’entreprise, pour un autre employeur. Ce sont alors des années prestées antérieurement. Cela entraîne à nouveau des variations possibles dans le calcul.»
Et puis il y a la discussion possible sur le nombre d’années que contient une carrière normale. Parce que ces années sont également incluses dans le calcul. «Ici cependant, le fisc a fixé la durée à 40 années», explique le spécialiste. «Mais notez qu’une carrière normale, pour la détermination de la pension légale, est de 45 ans et non de 40.»
Correction pour les participations bénéficiaires
Dans de nombreux plans de pension, la prestation de pension complémentaire est encore augmentée des participations bénéficiaires accordées par l’assureur. Ce e situation se produit avec les assureurs qui offrent des plans de type branche 21, et non pour les plans de type branche 23 ou pour les fonds de pension. Dans ces cas, le montant maximal de la pension complémentaire, selon la règle des 80%, est donc le capital, en ce compris les participations bénéficiaires.
Ces participations bénéficiaires peuvent être déduites du montant total. Mais elles ne sont pas connues à l’avance, car elles dépendent des résultats de l’assureur. L’administration fiscale autorise donc une déduction forfaitaire de 20% du capital assuré.
«Ces 20% peuvent jouer en faveur du client», note Steven Cauwenberghs. «C’est le cas si le montant formé par les participations bénéficiaires à la date de la pension est supérieur à 20%. Mais ces dernières années, les bénéfices des assureurs ont subi une pression croissante, ce qui a entraîné une forte diminution des participations bénéficiaires. Une estimation forfaitaire de 20% ne correspond plus du tout à la réalité et est beaucoup trop élevée.»
Coe icient de conversion
La grande majorité des plans de pension complémentaire actuels prévoient une prestation sous la forme d’un capital. Toutefois, l’idée de base de la limite de 80% est un contrôle sur la base d’un revenu annuel, ou, en d’autres termes, sur la base d’une rente (viagère) à percevoir.
Afin de convertir le capital en rente lors de son versement, un coefficient de conversion est utilisé. Les coefficients actuels utilisés pour ce e conversion ont été établis il y a des années par le fisc. Aujourd’hui, force est de constater qu’ils sont basés sur des tables de mortalité dépassées et sur un taux d’intérêt technique trop élevé.
En résumé, «on peut dire que les coefficients de conversion utilisés actuellement font que le montant de la pension complémentaire déductible est structurellement sous-estimé», déclare Steven Cauwenberghs.
Nouvelle approche fiscale
Outre ce e utilisation peu rigoureuse pour le calcul de la limite de 80%, la pension complémentaire se trouve également dans une zone floue d’un point de vue fiscal. En règle générale, la limite de 80% était appréciée par entreprise. Mais depuis l’an dernier, les contrôleurs fiscaux reme ent en cause ce e pratique courante. Selon le fisc, les pensions du deuxième pilier constituées dans l’entreprise précédente doivent être prises en compte dans le calcul de la limite de 80% dans l’entreprise actuelle. La conséquence directe de ce e interprétation pèse surtout sur la société. Le fisc refusera la déductibilité fiscale des primes. Mais de manière plus indirecte et à plus long terme, la démarche du fisc affecte surtout le bénéficiaire du plan de pension. Par ce e nouvelle approche du fisc, seuls les dirigeants d’entreprise qui ont été actifs dans la même entreprise pendant toute leur carrière peuvent utiliser pleinement leur limite de 80%. Ceux qui travaillent dans différentes entreprises au cours de leur carrière pourront en principe se constituer un capital de pension beaucoup plus faible. «Ce e distinction a fait l’objet d’une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle à la fin de l’année dernière», commente Steven Cauwenbergh. «Reste à voir si ce e nouvelle approche trouvera grâce aux yeux de la jurisprudence.»
4 millions
Près de 4 millions de Belges disposent aujourd’hui d’un plan de pension complémentaire: 3,36 millions salariés et 360.000 indépendants.