IMMIGRATION AFRICAINS CONTRE AFRICAINS
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 48e ANNÉE • N° 2488 • du 14 au 20 septembre 2008
www.jeuneafrique.com
TUNISIE
Les hommes de Ben Ali CÔTE D’IVOIRE
Économie: Gbagbo et les nouveaux patrons RELIGION
La France a-t-elle un problème avec l’islam? Le chef de l’État José Eduardo dos Santos.
ANGOLA
Naissance d’un géant?
Él ti Élections, pétrole, ét l croissance i record, d ambitions diplomatiques… Voyage à l’intérieur d’un pays qui rêve de grandeur, mais qui suscite de nombreuses interrogations. Spécial 14 pages.
ÉDITION INTERNATIONALE ET AFRIQUE SUBSAHARIENNE M 01936 - 2488 - F: 3,00 E
3:HIKLTD=[UXUUU:?c@o@i@i@k; JA2488p001IA.indd 1
France 3 € • Algérie 150 DA • Allemagne 4 € • Autriche 4 € • Belgique 3 € • Canada 5,25 $ CAN • DOM 3 € • Espagne 3,60 € Finlande 4 € • Grèce 4 € • Italie 3,60 € • Maroc 20 DH • Mauritanie 1000 MRO • Norvège 35 NK • Pays-Bas 3,60 € Portugal cont. 3,60 € • Royaume-Uni 3 £ • Suisse 5,90 FS • Tunisie 3 DT • USA 5,75 $ US • Zone CFA 1600 F CFA • ISSN 1950-1285
12/09/08 12:08:18
FA B R I C A
Š Benetton Group S.p.A. 2008 - www.benetton.com
Fra_JeuneAfrique_195x270_S17.qxp 26-07-2008 9:45 Pagina 1
CE QUE JE CROIS
3
BÉCHIR BEN YAHMED bby@jeuneafrique.com
Vendredi 12 septembre
Un continent, vingt partenaires
ÉVOLUTION DES ÉCHANGES COMMERCIAUX DE L’AFRIQUE AVEC SES PRINCIPAUX PARTENAIRES Total des importations et exportations de marchandises, en milliards de dollars
100 80 60 40 20 0
2000 01
02
AUGMENTATION DU VOLUME DES ÉCHANGES AVEC L’AFRIQUE ENTRE 2000 ET 2006 en pourcentage
03
04
05
06 2008*
0
LES 20 PREMIERS PARTENAIRES DE L’AFRIQUE Import et export en milliards de dollars États-Unis Chine Italie France Allemagne Espagne Japon Royaume-Uni Pays-Bas Brésil Belgique Turquie Inde Canada Portugal Russie Suède Autriche Grèce Finlande
Chine Brésil Canada Turquie Russie États-Unis Portugal Pays-Bas Espagne Japon Autriche Finlande Inde Italie Suède Grèce Allemagne Royaume-Uni Belgique France
États-Unis Chine Italie France Japon Brésil Inde * Projections pour 2008
120
à celle de la Chine, ont avec l’Afrique des échanges annuels trois fois plus élevés que cette dernière : 300 milliards de dollars, contre 100 milliards. L’UE est de très loin le premier partenaire commercial du continent africain: elle fait plus à elle seule que les Amériques et l’Asie réunies! 3- Le continent africain réalise 80 % de ses échanges avec vingt pays partenaires. Chacun de ces pays est important pour l’Afrique. Hélas, cette dernière, avec son milliard d’habitants, pèse fort peu pour chacun de ses vingt partenaires : elle ne représente en général que 1 %, 2 % ou 3 % de leurs échanges extérieurs (graphique n° 3). ✷ La dépêche citée ci-dessus annonce que les échanges sino-africains connaissent une expansion spectaculaire parce que la Chine a de plus en plus besoin, pour s’industrialiser, des ressources naturelles de l’Afrique – pétrole et produits miniers, principalement. Il en va de même, à des degrés divers, des autres partenaires du continent : pour le moment, l’Afrique n’a à leur vendre que ce qu’ils tirent de son sous-sol, qui… s’appauvrit de chaque tonne extraite. Les Africains s’enrichissent-ils, eux, de cet échange? Une minorité, dans quelques pays… Les autres survivent, en attendant une meilleure gouvernance. ■
50
100 150 200 250 300 350
2000 2006
0
20
40
60
80
100
SOURCES : CNUCED, J.A.
U
ne petite dépêche Reuters de cinq lignes, datée à Pékin, capitale de cette Chine encore frémissante de ses succès olympiques, nous donne une grande nouvelle: « Les échanges entre la Chine et l’Afrique, qui ne devaient atteindre le seuil de 100 milliards de dollars que dans deux ans, dépasseront ce chiffre dès cette année. Le premier responsable de ce boom est la fringale chinoise pour les ressources naturelles africaines. » C’est l’occasion pour nous de jeter un nouveau regard sur les chiffres et les courbes: comment ont évolué, depuis l’an 2000, les échanges entre l’Afrique et ses principaux partenaires? Que dit cette évolution à l’observateur attentif? ✷ Les trois graphiques présentés ci-dessous sont éloquents. Mais ils appellent commentaire et complément d’information. ✷ 1- Les échanges entre la Chine et l’Afrique augmentent à une allure vertigineuse (ils ont doublé en moins de trois ans). Mais, partis de (presque) zéro, ils demeurent inférieurs de 20 milliards de dollars par an à ceux des États-Unis! 2- Nos graphiques ne le montrent pas, mais sachez que les vingt-sept pays de l’Union européenne (UE), dont la population est deux fois et demie inférieure
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p003-004.indd 3
12/09/08 18:45:22
4
CE QUE JE CROIS Samedi 13 septembre
Que fera Colin Powell?
I
l ne s’est pas exprimé en public depuis qu’il a quitté son poste de secrétaire d’État, il y a près de quatre ans. On l’a donc un peu oublié, mais il devrait se rappeler bientôt à notre souvenir. Né aux États-Unis (en 1937, à Harlem) de parents noirs immigrés de la Jamaïque, le général Colin Powell a été, avant l’irruption de Barack Obama, la personnalité noire la plus populaire des États-Unis. Chef d’état-major en 1991 et secrétaire d’État en 2001, républicain bon teint, il s’est mis au service des deux Bush, le père et le fils. Il a essayé, en vain, de dissuader ce dernier d’envahir l’Irak. Constatant ses désaccords avec son président, ce militaire discipliné a exclu de démissionner mais a fait savoir qu’il n’irait pas au-delà de la fin du premier mandat de G.W. Bush. En janvier 2005, il a donc laissé son poste à Condoleezza Rice. ✷ Lors d’un conclave récent, il s’est laissé aller, devant un auditoire choisi, à une savoureuse confidence que je me fais un plaisir de partager avec vous: « Je pense qu’il faudrait parler avec la Syrie et avec l’Iran. Lorsque j’étais secrétaire d’État, j’ai parlé aux Syriens, je suis allé deux fois à Damas et j’ai rencontré le président Bachar al-Assad. On m’a reproché ces voyages, mais si je suis allé à Damas c’est parce que je pensais que c’était important. Un jour, j’étais à Jérusalem, et le Premier ministre Ariel Sharon m’a dit: “Colin, il faut que je vous parle.” Nous sommes allés dans son bureau et il m’a dit: “Je ne veux pas que vous alliez à Damas. Je ne pense pas que cela
serve les intérêts de la paix, et nous n’apprécions pas ici, en Israël, que vous alliez à Damas.” J’ai répondu: “Ariel, je suis désolé, mais j’irai quand même. Je suis le secrétaire d’État des États-Unis d’Amérique, pas le ministre des Affaires étrangères d’Israël. Je vais à Damas.” Il s’est mis à rire et m’a dit: “Alors rendez-moi un service. [On pilonnait alors le nord d’Israël avec des roquettes depuis le Sud-Liban.] Dites au président Assad que la situation est très explosive ici et qu’il devrait user de ses bons offices pour stopper ces roquettes.” À Damas, j’ai eu une longue conversation avec le président Assad. Les conversations avec lui et avec ses ministres sont difficiles, mais, à la fin de l’entretien, je l’ai pris à part et lui ai fait passer le message. Il a hoché la tête, n’a rien dit, mais les tirs de roquettes ont cessé le soir même. Le lendemain, M. Sharon m’a remercié. La diplomatie ne se fait pas toujours au grand jour. Et elle est difficile. » ✷ Vous le voyez, ce républicain est en désaccord flagrant avec G.W. Bush et ne pense pas comme le candidat de son parti à la présidence: John McCain. Il est peu probable qu’il le soutienne, mais ira-t-il jusqu’à dire publiquement que les États-Unis seraient mieux avec Barack Obama? Dans l’entourage de ce dernier, on espère que Powell se départira, pour une fois, de sa légendaire prudence pour dire à ses concitoyens – avant le 4 novembre – ce que lui dictent son expérience et sa conscience. ■
HUMOUR, SAILLIES ET SAGESSE Pour vous faire sourire, grincer des dents – ou réfléchir –, ici, chaque semaine, une sélection subjective, la mienne, de ce qui a été dit ou écrit au cours des siècles par des hommes et des femmes qui avaient des choses intéressantes ou drôles à nous dire. B.B.Y. ■ Le désespoir est un manque d’imagination. DUMÉZIL ■ Les femmes ne sont jamais désarmées par les compliments. Les hommes toujours. Voilà la différence entre les sexes. OSCAR WILDE ■ Gandhi est le végétarien qui sur terre a mangé le plus de vache enragée ! BRÈVE DE COMPTOIR ■ Seuls les muets envient les bavards. KHALIL GIBRAN ■ Un bon croquis vaut mieux qu’un bon discours. NAPOLÉON IER ■ L’amour fait perdre le repas et le repos. ANONYME
Plus les boulots sont nuls, plus on leur donne des noms ronflants! « Agent diéséliste responsable du secteur gestion des hydrocarbures polyinsaturés » en clair, c’est pompiste. « Agent affecté à la maintenance du réseau superficiel de communication urbaine », c’est balayeur. Pour le salaire, pareil: une Super Mensualité Indexée sur le Capital, en clair, c’est le Smic. JEAN-FRANÇOIS DEREC ■ À mesure que l’on a plus d’esprit, on trouve qu’il y a plus d’hommes originaux. Les gens du commun ne trouvent point de différence entre les hommes. PASCAL ■
■ Quand le foin manque au râtelier, les chevaux se battent. SAGESSE POPULAIRE FRANÇAISE ■ Nous sommes tous seuls. Le monde n’est qu’un désert peuplé. HENRI JEANSON ■ Pourquoi lave-t-on une injure alors qu’on essuie un affront ? ALPHONSE ALLAIS ■ « Aide-toi et le Ciel t’aidera », dit-on. On pourrait aussi bien dire : « Aide-toi et la Bourse t’aidera ». Mais la Bourse ne pardonne pas à ceux qui ne savent pas ce qu’ils font. WARREN BUFFETT
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p003-004.indd 4
12/09/08 18:45:28
Document :final far east ad.pdf;Page :1;Format :(195.00 x 270.00 mm);Date :11. Sep 2008 - 09:41:54;SpeedFlowCheck
SOMMAIRE
ÉDITORIAL
Quand l’Afrique se prend en main
Après la Côte d’Ivoire (Gbagbo-Soro) et le Kenya (Kibaki-Odinga), le Zimbabwe constitue donc le troisième théâtre de conflits politiques gérés par les Africains eux-mêmes avec un certain succès. Davantage, en tout cas, que lorsque la communauté internationale s’en est mêlée. C’est une bonne chose que le continent résolve seul ses problèmes. Point commun de ces trois cas épineux: la solution adoptée, le partage du pouvoir. Ce n’est certes pas une panacée et il ne faudrait pas que, à chaque crise, on brandisse cette « moins mauvaise solution pour éviter le pire ». Mais cela vaut mieux, mille fois mieux, qu’une guerre civile. Il fallait trouver une sortie honorable à Comrad Bob, père légitime de la nation, icône des indépendances africaines qui s’est mué avec le temps en despote solitaire, violent et pas franchement éclairé. Avec cet accord, il sauve la face, c’est-à-dire l’essentiel à ses yeux. Morgan Tsvangirai, lui, a remarquablement manœuvré: il a su refuser de faire des concessions trop importantes, se placer en position de force puis tendre la main. Le grand gagnant, c’est lui: le pouvoir ira très progressivement mais inexorablement vers son camp, le temps joue en sa faveur. Et pour Mbeki, c’est un beau succès. L’homme semble avoir de sérieux dons pour les médiations… Tsvangirai gagne, Mugabe ne perd pas, chapeau l’artiste! Tony Blair puis Gordon Brown, George W. Bush et Condi Rice ont tout fait pour avoir la peau de Mugabe. Hérauts de cet Occident jugé arrogant, volontiers donneurs de leçons et accusés de parti pris – au point d’embarrasser considérablement un Morgan Tsvangirai soupçonné d’être leur cheval de Troie au Zimbabwe –, ils ont échoué dans leur croisade anti-Mugabe. Pis, leur obsession leur a joué des tours: plus ils s’acharnaient sur le vieux Bob, plus les chefs d’État du continent affichaient leur répugnance à céder à leurs injonctions. De là à dire que c’est grâce aux Britanniques et aux Américains que les Africains ont décidé de se prendre en main… ■
14 PETIT BLANC, NOIRS DÉSIRS
PHOTOS DE COUVERTURES : FRANCISCO LEONG/AFP PHOTO ; LUDOVIC/REA, FETIH BELAÏD/AFP, AGOSTINO PACCIANI/J.A., MARIANNE CATZARAS, HICHEM. MONTAGE PHILIPPE MARTIN/J.A.
ENFIN! Robert Mugabe et Morgan Tsvangirai ont signé, le 11 septembre, un accord pour le partage du pouvoir sous les yeux du médiateur sudafricain Thabo Mbeki. Quels que soient les problèmes qui ne manqueront pas d’intervenir dans l’application de cet accord MARWANE et les nombreux écueils qui se BEN YAHMED dressent encore sur le chemin d’une paix définitive, il faut se féliciter de cette issue que plus personne ou presque n’attendait.
Dans Jeune Afrique et nulle part ailleurs
En temps ordinaire, Didier Bourguet était un honorable père de famille. Quand il débarquait en Afrique, le fonctionnaire onusien se transformait en prédateur. Le 11 septembre, à Paris, il a été condamné à neuf ans de prison pour viol sur mineures de moins de 15 ans.
40
LA GALAXIE BEN ALI Présidence, parti, gouvernement... À un an de la présidentielle, le chef de lʼÉtat tunisien redistribue les rôles dans son entourage. Voyage au cœur du système.
03 08
CE QUE JE CROIS Par Béchir Ben Yahmed CONFIDENTIEL
14
FOCUS
14 16 16 18 19 20 22 22 23
Justice Petit Blanc, noirs désirs Analyse Mauritanie: grands principes et Realpolitik Algérie Ramadan à la bougie Togo Retrouvailles bruxelloises Niger Semaine décisive pour Moussa Kaka Afrique Salée, la facture alimentaire ! Santé Le palu recule... mais pas assez vite Kenya Sarah Obama et les quatre voleurs Afghanistan Les drôles de vacances du Petit Futé
24
LʼENQUÊTE
24
Afrique Rêves et déboires des immigrés de lʼintérieur
32
AFRIQUE SUBSAHARIENNE
32 34 35 36 37
Afrique du Sud LʼANC face au cas Zuma Mali Miliciens contre rebelles Profil François Muamba Ghana Lʼaprès-Kufuor en ligne de mire Togo Gilbert Fossoun Houngbo, un expert au pied du mur J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p006-007.indd 6
12/09/08 20:13:58
SOMMAIRE 7 LE PLUS DE JEUNE AFRIQUE
ANGOLA À pas de géant
AGOSTINO PACCIANI / J.A.
Le pays vient dʼorganiser ses élections législatives dans un climat apaisé. Depuis la fin de la guerre en 2002, il affiche la plus forte croissance économique au monde. De quoi devenir un acteur majeur du continent?
L’ENQUÊTE
24
RÊVES ET DÉBOIRES DES IMMIGRÉS DE LʼINTÉRIEUR LʼAfrique doit apprendre à gérer les mouvements de ses quelque 17 millions de migrants. Dʼoù viennent-ils et où vont-ils ? Comment sont-ils accueillis ? J.A. décrypte le phénomène.
61
PLUS ANGOLA Le pays, qui vient dʼorganiser ses législatives, affiche la plus forte croissance au monde. Spécial 14 pages.
46 MISSION IMPOSSIBLE POUR LAGHDAF Ce qui attend le Premier ministre mauritanien, nommé par le général putschiste Ould Abdelaziz.
52
RÉPUBLIQUE ET ISLAM En France, quatre affaires liées au respect des règles du culte musulman viennent de déchaîner les passions. Analyse.
75
LʼÉCONOMIE FAÇON GBAGBO Le président ivoirien veut développer un puissant secteur privé local. Et place ses hommes aux commandes.
Le devoir d’informer, la liberté d’écrire 38 39
Guinée Fausse drogue et vrai poisson séché Tchad-Banque mondiale Le divorce est prononcé
75
ECOFINANCE
75
40
MAGHREB & MOYEN-ORIENT
40 44 46 48 49 50 51
Tunisie La galaxie Ben Ali Algérie À gauche toute ! Mauritanie Mission impossible pour Laghdaf Ce jour-là 16 septembre 1982 : massacre de Sabra et Chatila Maroc Une éducation à refaire 11 septembre « La faute aux Américains » Iran Quand Ahmadinejad fait les yeux doux à Israël...
78 80
83 84 85
Côte dʼIvoire Les hommes de Gbagbo prennent le pouvoir économique La semaine dʼEcofinance Bourse LʼAfrique sur les radars de la finance internationale Environnement des affaires Bons et mauvais élèves de la Banque mondiale Cosmétiques Un parfum de Maroc aux États-Unis Marchés Ecobank veut se renforcer à lʼinternational Internet Google lance ses satellites sur lʼAfrique
86
LIRE, ÉCOUTER, VOIR
52
INTERNATIONAL
52 55 56 58 60 60
France La République a-t-elle un problème avec lʼislam ? Sida Apobec 3 contre les rétrovirus Parcours Osvalde Lewat Football Tous pourris, vraiment ? Russie-Otan Gesticulations en haute mer États-Unis Palinomania
86 89 90 92
Musique Keziah Jones, dandy funky Le nouveau monde de Natacha Atlas Cinéma Haïlé Gerima : le sacre dʼun militant Livres En direct des geôles nigériennes
61
L E P L US D E J E U N E AF R I Q U E
61
Angola À pas de géant
82
103
VOUS & NOUS
103 104 105 106
Forum La Chine, lʼAfrique et les donneurs de leçons Courrier des lecteurs Science Post-scriptum
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p006-007.indd 7
12/09/08 20:14:32
8
CONFIDENTIEL
POLITIQUE
OACI BRAS DE FER AU SOMMET
RAVEENDRAN/AFP
LE CONSEIL EXÉCUTIF DE 36 membres), le premier ne L’ORGANISATION DE L’AVIAcache pas son souhait de voir TION CIVILE INTERNATIOle second quitter l’Oaci au plus NALE (OACI), institution spévite, sans attendre la fin de son cialisée du système des Nations second mandat (juillet 2009). unies dont le siège est à MonEn poste depuis cinq ans, Taïeb tréal, examinera, le 24 sepCherif, 67 ans, ancien secrétaitembre, un rapport interne très re d’État à l’Enseignement supéattendu. Cette enquête devrait rieur dans son pays et spécialisdéterminer les conséquences te du transport aérien, compte pour l’administration de l’Oaci bien, lui, demeurer en place. Il de l’implication de deux de ses bénéficie pour cela du soutien Taïeb Cherif, secrétaire général de l’Organisation de l’aviation civile employés dans l’affaire Nordes groupes africain et arabe, internationale. bourg, le plus gros scandale de la Chine, de l’Inde et de la financier de l’histoire du Québec. Ce dossier sur- Russie. La position des États-Unis et de la France vient au plus mauvais moment pour une institu- – laquelle avait soutenu la réélection de Cherif en tion en proie à de vives dissensions au sommet. 2006 et retiré son propre candidat sous la presLes rapports entre le président du Conseil, le sion d’Alger – est considérée comme déterminante Mexicain Roberto Kobeh González, et le secré- pour l’avenir du secrétaire général. Très remonté, taire général, l’Algérien Taïeb Cherif, sont en effet Kobeh González envisage en effet d’avoir recours exécrables. Soutenu par la majorité des membres à l’article 14 des règles de procédure du Conseil européens, latino-américains et représentants qui permet, après motion et vote à la majorité, la du groupe Asie-Pacifique du Conseil (qui compte révocation du secrétaire général.
La secrétaire d’État américaine Condoleezza Rice est rentrée de sa tournée maghrébine (5-7 septembre) à la fois rassasiée, épuisée et quelque peu humiliée. La faute à Kaddafi et… au ramadan. Accueillie le 5 septembre en fin d’après-midi à Tripoli par un simple secrétaire d’État (chargé des deux Amériques), elle a attendu pendant soixante-cinq minutes d’être reçue par le colonel, lequel ne lui a même pas serré la main. À peine installé, Kaddafi a exigé qu’elle rompe avec lui le jeûne avant d’entamer les discussions. Résultat: c’est bien après minuit que Condi a atterri à Tunis, où elle n’a
dormi qu’une petite poignée d’heures, son audience avec le président Ben Ali étant fixée pour la fin de la matinée. Aussitôt repartie pour Alger, la secrétaire d’État avait prévu de sacrifier au rite du ftour (repas de rupture du jeûne) le soir même à Rabat, dernière étape de sa tournée, où elle était attendue en début de soirée. Mais le président Bouteflika ne l’entendait pas de cette oreille: « Vous avez dîné en Libye et dormi en Tunisie, vous allez passer la nuit au Maroc et vous ne prendriez même pas le ftour en Algérie? Ce n’est pas envisageable. » Condi a donc dû modifier son programme. Arrivée à
NASSER NASSER/AP PHOTO
MAGHREB CONDI ET LE RAMADAN
Condi Rice reçue par Kaddafi, le 5 septembre, à Tripoli.
Rabat tard dans la soirée après avoir rompu le jeûne, elle y a été accueillie par… un deuxième ftour, auquel elle a dû également consentir. Dur, la vie de secrétaire d’État…
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p008-009.indd 8
12/09/08 19:54:58
BALLET DE MINISTRES À PARIS Pas moins de cinq ministres camerounais sont arrivés à Paris le 6 septembre à bord du vol Air France en provenance de Yaoundé. Parmi eux, Zacharie Perevet (Emploi et Formation professionnelle), Robert Nkili (Travail et Sécurité sociale) et Luc Magloire Mbarga Atangana (Commerce). Un voyage qui a coïncidé avec la présence dans la capitale française de leur chef, Paul Biya, en visite privée depuis deux s e m a in e s . C e r t a in s y ont vu le prolongement « ex traterritorial » des consultations que le président mène depuis des semaines en vue de la formation d’un nouveau gouvernement. MALI
L’INTRUS LIBYEN Fruit des pourparlers, à Alger, les 29 et 30 août, entre les autorités de Bamako et les représentants de l’Alliance démocratique pour le changement (ADC, vitrine politique des rebelles), la libération, le 9 septembre, de 44 soldats maliens détenus par la rébellion touarègue depuis près d’une année a été polluée par l’intrusion de Kaddafi. Le communiqué du gouvernement malien a officiellement remercié le « Guide » libyen, qui a revendiqué la paternité de cet élargissement. Alger n’a pas réagi. Le Quai d’Orsay, lui, s’est félicité de ce dénouement, tout en rappelant qu’il résulte du seul accord d’Alger (voir p. 34), un document qui ne prévoit aucun rôle pour Kaddafi.
UNION DES JOURNALISTES IVOIRIENS GUERRE DE SUCCESSION La bataille pour le poste de président de l’Union nationale des journalistes ivoiriens, dont l’élection est prévue lors des assemblées des 14, 15 et 16 décembre, est lancée. Quatre candidats, Asse Alafe, patron de L’Intelligent d’Abidjan, David Mobio, de la RTI, Criwa Zeli, de L’Inter, et Inza Kigbafory, du journal Le Patriote, se sont portés candidats. Alafe semble déployer le plus d’efforts. Il a rencontré récemment les journalistes ivoiriens installés en France pour les sensibiliser à son programme : amélioration des conditions de travail, ouverture à l’international et renforcement du prix Ebony récompensant chaque année le meilleur journaliste du pays.
ONU JOURNÉE SPÉCIALE SUR L’AFRIQUE Plusieurs chefs d’État et de gouvernement et des centaines de personnalités du monde des affaires et de la société civile participeront aux réunions de « haut niveau » que l’ONU consacrera à l’Afrique le 22 septembre, à New York. Sur le thème générique « Les besoins de développement de l’Afrique », responsables politiques et économistes feront le point sur la mise en œuvre des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), les engagements des bailleurs de fonds et les perspectives d’ici à 2015. Outre la cérémonie officielle qui marquera cette 63e session de l’Assemblée générale, quinze conférences et forums parallèles traiteront de tous les aspects liés au développement du continent.
REUTERS
CAMEROUN
Jean-Pierre Bemba.
RD CONGO
BEMBA REÇOIT MUAMBA Fr an ç o i s M ua mb a, s e crétaire général du Mouvement de libération du Congo (MLC), a rendu visite à Jean-Pierre Bemba au quartier pénitentiaire de la Cour pénale internationale (CPI), le 5 septembre, à La Haye. L’entrevue entre les deux hommes, qui ne s’étaient pas vus depuis l’arres t ation du patron du MLC, le 24 mai, a duré près de quatre heures (voir p. 35). Sujets abordés : la procédure déclenchée par la CPI, l’actualité à Kinshasa, mais aussi la santé du prévenu. Depuis qu’il est derrière les barreaux, Bemba a perdu quelques kilos, comme le préconisaient ses médecins.
MAURITANIE L’UMA DE LA DISCORDE ALORS QUE L’ALGÉRIE, qui a condamné le coup d’État du 6 août contre le président mauritanien Sidi Ould Cheikh Abdallahi, campe sur une position dure vis-à-vis de la junte au pouvoir à Nouakchott et milite pour son isolement, le Maroc fait preuve de neutralité à l’égard du général Ould Abdelaziz et de ses collègues. Même si, en dépit des rumeurs, Rabat n’est strictement pour rien dans le coup d’État – bien que les Marocains s’y attendaient, comme tous les observateurs –, la non-ingérence dans les affaires du voisin mauritanien est à l’ordre du jour. C’est ce que l’émissaire du roi Mohammed VI, Yassine Mansouri, est allé dire dès le 11 août au nouveau chef de l’État dans le cadre d’une visite d’information au cours de laquelle, contrairement à ce qui a été dit, il n’a pas exigé la libération du président renversé. Cette attitude prudente de ni soutien ni ostracisme concernant un pays réputé fragile et volatil est également celle de la Tunisie et – si l’on en juge par l’absence de réaction officielle – de la Libye.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p008-009.indd 9
12/09/08 19:55:30
10
CONFIDENTIEL
ÉCONOMIE
BAD KABERUKA À LA RECHERCHE D’UN BRAS DROIT
ULF ANDERSEN/GAMMA/EYEDEA
L E PR ÉSIDE N T DE L A actionnaires (78 pays, BANQUE AFRICAINE DE dont 53 en Afrique), les DÉVELOPPEMENT (BAD) exigences du métier (mova prochainement nombilisation des ressources, mer un directeur opévisites de projets) et les rationnel en chef (Chief conférences internatioOperating Officer), avec nales. En son absence, la rang de vice-président. direction par intérim des Approuvée par le conseil affaires courantes de la d’administration, cette Banque était assurée, à créat ion de poste perce jour, par le vice-prémettra d’alléger l’emploi sident dont la nominadu temps du président. tion dans cette fonction Depuis sa prise de foncest la plus ancienne. La tions, en 2005, Donald Banque compte cinq viceK aber uka, qui aura présidents opérationnels Donald Kaberuka, président de la Banque 57 ans le 5 octobre, n’a originaires de trois pays africaine de développement. pas arrêté de voyager. régionaux (A f rique du Soucieux de rapprocher la Banque de ses Sud, Nigeria, Soudan) et de deux pays non clients et partenaires, il est sollicité par les africains (France, États-Unis). FILIÈRE CAFÉ-CACAO
CAMEROUN FIN DE MISSION DU FMI La sixième et dernière revue du programme triennal du Fonds monétaire international (FMI), dans le cadre de la Facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC) au Cameroun, s’est achevée, le 11 septembre, à Yaoundé, sur une note plutôt négative. L’équipe du FMI a jugé préoccupante la gestion non maîtrisée des finances publiques. Des dépenses plus fortes que prévu, des engagements non respectés, cela en dépit d’un surplus de recettes pétrolières. « Le Cameroun a donc encore clairement des efforts à faire pour prouver que, sans le FMI, il peut s’autogérer de façon efficace », a déclaré un membre de la mission.
ALGÉRIE OUYAHIA RASSURE LES PATRONS Les nouvelles mesures adoptées par le gouvernement en matière d’investissements étrangers (voir pp. 44-45) inquiètent le patronat. Sa principale représentation, le Forum des chefs d’entreprise (FCE), a déploré un manque de visibilité. Réda Hamiani, président du FCE, a demandé et obtenu, le 11 septembre, une audience auprès du Premier ministre, Ahmed Ouyahia. Ce dernier a rassuré les patrons en leur expliquant qu’il ne s’agit pas d’une remise en cause de l’ouverture économique mais d’un réajustement de la législation qui tient compte de l’intérêt national et de la situation financière de l’Algérie. Les patrons ont quitté le Palais du gouvernement plutôt rassurés. Ouyahia a balayé leurs inquiétudes avec un argument imparable : « Vous serez les premiers bénéficiaires du patriotisme économique et de la préférence nationale qui caractérisent notre nouvelle approche. » Réda Hamiani était tout sourires à la fin de l’entretien.
UNE STRUCTURE TRANSITOIRE À ABIDJAN
Pour gérer la campagne de commercialisation 2008-2009 du café-cacao, qui sera officiellement lancée le 1er octobre, et surtout permettre le fonctionnement des organes de la filière, bloqués depuis l’arrestation de plusieurs de leurs dirigeants, les autorités ivoiriennes s’apprêtent à créer une structure de gestion provisoire. Illa Donwahi, ex-présidente du Groupement des exportateurs (Gepex), est pressentie pour prendre la tête de ce nouvel organe, dont la première mission sera de gérer les exportations. Opposés à cette mesure, les associations et les groupements des planteurs organisent déjà la riposte.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p010.indd 10
12/09/08 19:49:26
NOUVELLE PEUGEOT 308.
Document :308-AP-JAI.pdf;Page :1;Format :(195.00 x 270.00 mm);Date :07. Aug 2008 - 14:56:17;SpeedFlowCheck
Elle va changer le monde qui vous entoure.
www.peugeot.com Changez votre vision du monde. Appréciez la parfaite ergonomie et l’extraordinaire luminosité de son habitacle. Admirez ses lignes élégantes et dynamiques. Jouissez de sa tenue de route exemplaire. Bénéficiez de sa garantie 2 ans, kilométrage illimité. Confort, fiabilité, esthétisme, plaisir de conduire, sans oublier la tropicalisation d’origine*, rien n’a été laissé au hasard lors de la conception de cette nouvelle Peugeot. Résolument moderne et innovante, la nouvelle Peugeot 308 va changer le monde qui vous entoure. * motorisations adaptées aux différents types de carburant, suspensions renforcées et rehaussées, filtrations renforcées, protection sous moteur.
12
CONFIDENTIEL
CULTURE & SOCIÉTÉ
FOOTBALL AFRICAIN
SÉRIE TÉLÉ
LA SAGA D’« AKÉBÉ VENEZ-VOIR »
Bonne nouvelle pour les internautes passionnés de football. Conçus dans le cadre du projet « Gagner en Afrique avec l’Afrique » et réalisés sous la direction de Jérôme Champagne, directeur des relations internationales de la Fifa, les cinq DVD consacrés aux « 50 ans du football africain » (voir J.A. n° 2483-2484), offerts à toutes les associations nationales et non commercialisés, pourront bientôt être consultés sur le site officiel de la Fifa. KORA MUSIC AWARDS
ET LES NOMINÉS SONT…
C’est le 27 septembre, à Nairobi, que le fondateur des Kora Music Awards, le Béninois Ernest Coovi Adjovi, présentera la liste des nominés de l’édition 2008, qui aura lieu les 27 et 28 décembre à Lagos. Parmi les invités d’honneur, R. Kelly, la star américaine de R’n’B. La chanteuse béninoise Angélique Kidjo, le comédien Will Smith et le rappeur Wycleaf Jean sont pressentis pour présenter la cérémonie de remise des prix.
Le bassiste camerounais Richard Bona.
CONCERT RICHARD BONA À YAOUNDÉ LE 27 DÉCEMBRE, le célèbre bassiste camerounais Richard Bona se produira, pour la première fois, à Yaoundé, dans le cadre de la deuxième édition du MTN Yafe Music Festival. Organisé par la Fondation Interprogress et l’opérateur de téléphonie mobile MTN Cameroon, l’événement, libre d’accès, aura lieu en plein air, boulevard du 20-Mai. Richard Bona sera accompagné de musiciens vivant, comme lui, aux États-Unis et d’artistes locaux pour un moment que les organisateurs annoncent comme « magique ».
D.R.
EXPRESS2TEMPS TOURNÉE AFRICAINE Express2temps, la nouvelle création de Héla Fattoumi et Éric Lamoureux, du Centre chorégraphique national de Caen (France), sera présenté en Afrique subsaharienne entre octobre et décembre. La troupe se produira dans les Centres culturels français de Brazzaville (4 octobre), Yaoundé (le 7), Libreville (le 10), Bangui (le 13) et Kinshasa (le 17). Une création de Héla La tournée se poursuivra entre le 15 et le 20 déFattoumi et Éric Lamoureux. cembre à Ouagadougou, dans le cadre du festival Dialogues de corps, au Centre de développement chorégraphique La Termitière, avant de se conclure au Centre culturel français de Bamako.
D.R.
DVD EN LIGNE
Le réalisateur gabonais Marcel Sandja est à Koulamoutou (dans l’OgoouéLolo, province du sud du Gabon) pour le tournage d’une nouvelle série télé. Akébé Venez-voir, du nom de deux quartiers populaires emblématiques de Libreville, est le titre et le sujet de cet te saga, qui devrait compter une douzaine d’épisodes. La production – assurée par le réalisateur gabonais Henri Joseph Koumba Bididi – a déployé d’impor tants moyens techniques afin de recréer l’ambiance de ces rues réputées de Libreville… à Koulamoutou. EXPOSITION
FEMME, FEMME, FEMME Dédié à l’art africain, le musée privé Dapper, à Paris, organise une grande exposition, « Femmes dans les arts d’Afrique », qui se tiendra du 10 octobre 2008 au 12 juillet 2009. Cent cinquante œuvres, par fois vieilles de plusieurs siècles et provenant de collections privées ou publiques (dont celle du musée du Louvre), seront présentées au grand public. D’origine égyptienne, ivoirienne, congolaise ou tanzanienne, elles ont pour particularité de magnifier la grossesse et la maternité. Une série de rencontres et de débats sur la parole et le droit des femmes dans les sociétés modernes seront organisés en marge de l’exposition, dans l’enceinte du musée.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p012.indd 12
12/09/08 19:49:58
Untitled-2 1
29/03/2008 10:00:45
14 FOCUS
LES DERNIÈRES NOUVELLES DU MONDE
JUSTICE PETIT BLANC, N En temps ordinaire, cʼétait un honorable père de famille. Quand il débarquait en Afrique, le fonctionnaire onusien se transformait en prédateur. Le 11 septembre, à Paris, il a été condamné à neuf ans de prison pour viol sur mineures de moins de 15 ans. NICOLAS MICHEL
V
«
ous privez un enfant de friandises pendant toute son enfance, puis vo u s l e l â c h e z dans un magasin de bonbons. Imaginez ce qui se passe… » Cette métaphore douteuse – au regard des faits – on la doit à Didier Bourguet, un ancien fonctionnaire des Nations unies qui comparaissait, du 9 au 11 septembre, devant la cour d’assises de Paris pour répondre, entre autres, d’accusations de viol sur mineurs de moins de 15 ans. Les « bonbons » s’appellent en réalité Gisèle, Blandine, Sandra, Habiba, Élysée, Jocelyne, Solange, Sifa, Titi, Rébecca, Espérance ou Gabriella. Ce sont de jeunes Centrafricaines et Congolaises âgées, pour certaines, d’à peine 12 ans au moment des faits. Ces faits, Didier Bourguet ne les nie pas. Dès son arrestation à Goma, dans l’est de la RD Congo, en octobre 2004, le responsable du parc automobile de la Monuc, la force onusienne de maintien de la paix, a avoué avoir eu des relations sexuelles tarifées avec vingt-trois jeunes filles, pour la plupart mineures. En dépit d’aveux circonstanciés, la police française n’a pu en retrouver que trois. Né en 1963 au Creusot, Bourguet est d’origine modeste. Fils d’infirmiers, il a tôt quitté l’école pour passer un CAP de mécanicien. Domicilié chez ses parents jusqu’à 27 ans, peu à l’aise avec les filles, il travaille quelques années durant comme chauffeur routier avant d’être embauché par l’ONG Équilibre pour conduire ses véhicules en ex-Yougoslavie. C’est là que le hasard des rencontres lui permet d’intégrer les Nations unies, en 1994. Trois
ans plus tard, il se marie, et sa femme donne naissance à une petite fille. Le basculement se produit en 1998. Envoyé à Bangui, en République centrafricaine, pour rejoindre la Minurca, autre mission onusienne, il part seul. Son couple bat de l’aile, et, au bout de quelques mois, il s’installe avec une Centrafricaine. La situation du pays, la pratique répandue de la prostitution et les facilités d’accès aux femmes emportent barrières morales et tabous. « Lorsque Bourguet a rencontré l’Afrique, il s’est transformé en prédateur », explique Me William Bourdon, avocat de l’Association contre la prostitution des enfants. Par l’intermédiaire d’un collègue de travail, Bourguet entre en contact avec des jeunes filles de 14 ans ou 15 ans. Jusqu’à son arrestation, six ans plus tard, sa dérive va l’entraîner vers des adolescentes de plus en plus jeunes, à Bangui, Goma, Mbandaka, Kindu, Kinshasa… DATES, LIEUX, PRÉNOMS…
Bourguet se dit être soulagé par son arrestation. « J’aurais pu m’en prendre à ma propre fille », avoue-t-il. Il se souvient de tout avec précision : dates, lieux, prénoms, circonstances… Dans un dis que dur externe retrouvé à son domicile, les enquêteurs ont découvert 250 photos pornographiques soigneusement archivées dans des dossiers aux titres aussi évocateurs que « Pipes » ou « Les miennes ». Bon nombre ont été prises à l’aide d’un retardateur par Bourguet lui-même. Quatre ans plus tard, après 1 377 jours passés en cellule d’isolement, celui-ci ne conteste toujours pas les faits. Crâne rasé, veste anthracite sur chemise rayée et jeans, il reste
calme et soucieux du détail face à la cour. Quand le président l’interroge sur son absence visible d’empathie pour les victimes, il répond : « Du fait de mon éducation, j’ai du mal à extérioriser mes sentiments. » S’il finit par craquer et fondre en larmes, ce n’est qu’en présence de ses proches – son père, sa mère –, à l’évocation de sa petite fille de 11 ans. Le récit de Sifa, 16 ans aujourd’hui, 12 au moment des faits, ne semble en revanche guère l’émouvoir. C’est la seule, parmi les trois victimes identifiées, à pouvoir témoigner à la barre. Elle s’exprime en swahili, d’une voix à peine audible. Ce qu’elle raconte illustre la façon de procéder de Didier Bourguet, qui faisait généralement appel à des « intermédiaires » locaux – voisins ou relations de travail nommés Feza, Mlle Kadi, « Tonton », etc. – pour lui trouver des filles « un minimum formées », « avec un peu de poitrine et des poils pubiens ». « Le muzungu [Blanc, NDLR] a apporté une tasse avec un liquide qui ressemblait à du thé. J’ai bu, c’était tiède. Après, j’ai senti une sorte de vertige. Le
En 1998, il part seul pour Bangui et intègre la Minurca. Soudain, sa vie bascule... muzungu et Feza ont commencé à me déshabiller. J’ai pleuré. Feza essayait de me persuader de ne pas avoir peur. Je me suis calmée. Le muzungu a aussi enlevé ses habits et il a mis son sexe dans ma bouche, puis ses doigts dans mon vagin. » Ce témoignage, Bourguet le conteste. « Je lui ai seulement touché la poitrine à travers sa blouse, dit-il. Je suis
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p014-015.indd 14
12/09/08 20:00:46
FOCUS 15
, NOIRS DÉSIRS quelques dollars contre une fellation ou une sodomie, ce n’est pas un acte de philanthropie! » Pour les experts psychiatres, Didier Bourguet n’est pas malade. C’est un « adolescentophile » pour qui les filles sont « des objets sexuels interchangeables ». « Organisé et méticuleux », il a profité de son statut de fonctionnaire blanc payé 2600 dollars par mois – et de l’insondable fossé économique qui le séparait de ses victimes – pour les soumettre à ses pulsions. Au terme du procès, l’accusé a été condamné à neuf ans de prison et huit ans de suivi sociojudiciaire. Les jurés n’ont pas suivi les recommandations
BENOÎT PEYRUCK/AFP
Pour lui, les filles sont « des objets sexuels interchangeables », jugent les experts.
Didier Bourguet devant la cour d’assises de Paris.
tombé dans un traquenard! » Accompagnée du père de la victime, la police congolaise a en effet débarqué chez lui avant qu’il n’aille plus loin. Et aussitôt tenté de le faire chanter. L’affaire s’est vite ébruitée et la Monuc a décidé de remettre l’accusé, alors couvert par son immunité, à l’ambassade de France à Kinshasa. Qui l’a confié à la justice française. Prolixe sur les faits, Bourguet conteste la notion de contrainte exercée sur les jeunes filles. Selon lui, elles étaient d’accord puisqu’elles acceptaient l’ar-
gent. Son leitmotiv : « Elle est venue seule au rendez-vous, je présumais qu’elle était consentante. » Jamais il n’a usé de violence physique. CONSENTANTES OU PAS ?
« L’une des choses qui était claire dans mon esprit, dit-il, c’était de rendre service, d’apporter quelque chose aux jeunes filles. » Disant cela, il n’évoque pas les 10 ou 20 dollars qu’il leur remettait, mais « l’initiation » qu’il permettait… Ce à quoi Me Bourdon répond sans ambages : « Échanger
de l’avocat général qui demandait une peine de douze ans. Sans doute parce que seuls deux témoignages ont étayé la thèse du viol. Sans doute aussi parce qu’il s’agissait de juger un homme, non d’en faire un bouc émissaire. Avec le jeu des remises de peines, il devrait sortir de prison courant 2009. Plusieurs fois mise en cause, la Monuc s’efforce difficilement, depuis des années, de contrôler ses troupes. Selon M e Emmanuel Daoud, avocat du Comité des observateurs des droits de l’homme, 166 enquêtes pour abus sexuels auraient été diligentées depuis 2004. Dans 77 cas, les faits seraient avérés. Dernier en date, celui de ces cent Casques bleus indiens accusés, en août, d’abus sexuels sur des mineurs, garçons et filles. Comme si, même parmi des hommes chargés de la protection des populations et du maintien de la paix, certains pensaient encore qu’au Congo, en République centrafricaine ou ailleurs en Afrique il est possible de tout se permettre. ■
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p014-015.indd 15
12/09/08 20:00:54
16 FOCUS
Ramadan à la bougie ALGÉRIE
Analyse MARWANE BEN YAHMED
Mauritanie : grands principes et Realpolitik
«
J
GEORGES GOBET/AFP PHOTO
e suis contre les coups d’État, bien entendu […]. Malheureusement, les erreurs en politique, il faut les payer. Sidi Ould Cheikh Abdallahi en a commis un certain nombre. La plus grave a été de vouloir dégager d’un seul coup tous les chefs militaires. » C’est ce qu’a déclaré Abdoulaye Wade, à l’issue d’un entretien avec Nicolas Sarkozy à l’Élysée, le 10 septembre. À en croire le président sénégalais, « la junte militaire est sur la bonne voie pour organiser des élections libres et démocratiques qui permettront aux Mauritaniens de choisir leurs dirigeants ». C’est ce que lui aurait assuré le général Mohamed Ould Abdelaziz en personne… Quelle mouche a donc piqué Abdoulaye Wade? On le sait adepte des sorties médiatiques fracassantes, mais comment, lui qui s’est si longtemps battu pour la démocratie dans son pays, peut-il justifier un putsch contre un chef d’État démocratiquement élu par le fait que ce dernier a limogé ceux qui convoitaient sa place et tentaient de l’acculer à la démission ? « Sidi » a commis des erreurs ? Oui, mais méritait-il pour autant d’être déposé par un quarteron de Sidi Ould Cheikh Abdallahi et Abdoulaye Wade, militaires avides de en juillet 2007, à Dakar. pouvoir ? Assurément pas. Ou alors, nombre de chefs d’État africains – à commencer par Wade lui-même – auraient de sérieux motifs de s’inquiéter pour la suite de leur carrière. Le temps passe et la crise mauritanienne donne l’impression de s’enliser. L’Union européenne, l’ONU, la France, les États-Unis et, dans une moindre mesure, l’Union africaine campent sur des positions de principe et exigent – comment pourraient-ils faire autrement? – le retour à l’ordre constitutionnel. Voilà pour le discours officiel. Mais, en coulisses, toutes les solutions sont envisagées. Reste à trouver la plus acceptable. Personne ne peut croire que les putschistes accepteront de réinstaller Abdallahi dans son fauteuil présidentiel. Celui-ci n’a pas assez d’atouts dans son jeu. Il manque de soutiens de poids. Bref, tout le contraire de ce qui s’est passé en juillet 2003 à São Tomé e Príncipe, quand la Cemac, avec l’appui du Nigérian Olusegun Obasanjo, rendit le pouvoir à Fradique de Menezes, qu’une poignée de militaires venaient de débarquer. Seule issue acceptable aux yeux du général Abdelaziz comme de la communauté internationale: la libération de Sidi Ould Cheikh Abdallahi et l’organisation, dans les plus brefs délais, d’élections auxquelles ni lui ni eux n’auront le droit de se présenter. Dans ce cadre, Ely Ould Mohamed Vall fait figure de recours idéal. Pour sortir de cette crise, la Realpolitik a de bonnes chances de l’emporter, une fois encore, sur les grands principes… ■
A
la veille des vacances d’été, la Société nationale d’électricité et de gaz (Sonelgaz) avait promis à ses clients de leur épargner tout délestage et toute coupure de courant inopinée pendant les grandes chaleurs. À peine ce communiqué était-il diffusé qu’une centrale à cycle combiné (gaz et thermique), propriété de Sharikat Kahraba Skikda (SKS), filiale de Sonelgaz et de Sonatrach, tombait en panne à deux reprises. D’une puissance de 825 MW, elle représente près de 10 % des capacités de production du pays. Et comme un malheur n’arrive jamais seul, la température a été, en juillet et en août, caniculaire. Résultat, des pics de consommation vertigineux : près de 6 400 MWh début juillet, et près de 7 000 MWh en août. La démocratisation du climatiseur a également joué son rôle. Fruit d’un partenariat entre le coréen LG et le groupe public Eniem, un nouveau type d’appareil produit localement inonde le marché. Et le secteur privé n’est pas en reste… Bien sûr, la perte de production de l’unité de Skikda a été compensée par les autres centrales, mais à force de tirer sur la corde elle a fini par casser. Le réseau étant de plus en plus saturé, Sonelgaz se trouve dans l’impossibilité de tenir son engagement d’éviter les délestages. À la fin d’août, le mercure s’affole et les incendies de forêt mettent à mal le réseau de transport moyenne et haute tension. Les délestages s’étendent à la quasi-totalité du nord du pays. La distribution d’eau potable, très tributaire de l’électricité (pompes et autres équipements), est affectée et l’industrie frappée de plein fouet. En ce début de ramadan, les Algériens sont donc contraints d’apprendre à rompre le jeûne à la lueur des bougies et à passer les longues soirées du mois sacré dans le noir. Beaucoup ne cachent pas leur exaspération. Les responsables de Sonelgaz jurent qu’ils ont joué de malchance. Peut-être, mais tout cela est du plus mauvais effet pour une entreprise qui envisage d’exporter des milliers de mégawatts vers l’Europe. ■ CHERIF OUAZANI
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
16 FOCUS 2488.indd 16
12/09/08 19:50:38
Document :Nasuba-JA-28-05.tif;Page :1;Format :(195.00 x 270.00 mm);Date :30. May 2008 - 10:32:56;SpeedFlowCheck
18 FOCUS
CHIFFRES QUI PARLENT
10 milliards
de dollars: la somme réclamée aux compagnies d’assurance américaines après le passage de l’ouragan Gustav. Il y a un an, Katrina leur avait coûté 41,1 milliards.
8 milliards
de dollars: le coût de l’accélérateur de particules géant inauguré au Cern, à Genève, le 10 septembre. Il permettra d’étudier pendant vingt ans les origines de l’univers.
363 millions
de litres de vin exportés par l’Afrique du Sud entre juillet 2007 et juillet 2008 (+ 27 %).
8053391
élèves attendus le 13 septembre, lors de la rentrée scolaire en Algérie (+ 5,45 % par rapport à l’année dernière).
28,7 milliards
de dollars: l’excédent de la balance commerciale de la Chine, au mois d’août. Le précédent record remontait à octo bre 2007 (27,1 milliards).
1 047 millions
de dollars : le chiffre d’affaires de la compagnie pétrolière Total-Gabon au premier semestre (+ 48 %).
2,2 milliards
de dinars (1,85 milliard de dollars) : le montant des transferts financiers réalisés par les émigrés tunisiens (1,01 million de personnes) en 2007 (+ 9 % en un an). L’équivalent de 5 % du PIB.
Côte d’Ivoire, d’améliorer l’accès aux « NOUS AVONS BESOIN D’ARGENT soins de santé et à l’eau potable. FRAIS pour faire reculer la pauvreLes responsables togolais veulent té. Les Togolais doivent savoir que aussi montrer à Bruxelles le nouveau la reprise progressive de l’aide est, visage de leur pays, où, le 14 octopour l’instant, insuffisante. Et que bre 2007, a eu lieu un scrutin législadite aide est largement absorlatif jugé « régulier » par la plupart bée par le paiement des arriérés des observateurs internationaux. de la dette. Cela contrarie nos proIls présenteront aux bailleurs de jets de développement. » Ce cercle fonds rameutés par Louis Michel, le vicieux, Gilbert Bawara, ministre commissaire européen au Dévelopde la Coopération et principal artipement et à l’Aide humanitaire, les san de la reprise de la coopération acquis des réformes économiques avec la communauté des bailleurs et financières lancées au cours des de fonds, entend bien le briser. C’est derniers mois. même la raison de la table ronde qui Les partenaires au développement se tiendra les 18 et 19 septembre, à seront invités à emboîter le pas à la Bruxelles. Commission européenne, qui a déjà À l’issue de ces discussions, les normalisé ses relations en signant, au dirigeants togolais espèrent parvenir mois de mai, une convention de finanà la finalisation du Document intéricement au titre du Xe Fonds européen maire de stratégie pour la réduction de développement (FED). Ainsi le de la pauvreté (DSRP), qui décrit les Togo devrait-il bénéficier d’une prepolitiques et les programmes macromière enveloppe de 98,5 millions économiques, structurels et sociaux d’euros, susceptible d’être compléqu’un pays doit mettre en œuvre tée par une « tranche incitative » de pendant plusieur s années pour 25 %, allouée en fonction des progrès favoriser la croissance et réduire la accomplis dans le domaine de la goupauvreté. Ce DSRP, qui recense égavernance. (Voir aussi p. 37) ■ lement les besoins de financement GEORGES DOUGUELI extérieur et les sources de financement connexes, est le sésame qui ouvre la voie à l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) mise en place par le FMI et dont le Togo espère atteindre le point de décision d’ici à la fin de l’année. Selon les experts, les annulations qui en résulteraient permettraient à une économie togolaise exsangue de mieux supporter le fardeau d’une dette extérieure estimée à la fin de 2006 à 1,8 milliard de dollars, soit 81 % du PIB. Après plus d’une décennie de sanctions économiques, Lomé veut donc pleinement renouer avec la communauté des bailleurs de fonds. En raison de la hausse récente des prix des denrées alimentaires, il est urgent de moderniser l’agriculture, de réduire la Gilbert Bawara, ministre togolais de dépendance énergétique la Coopération et grand artisan de la reprise à l’égard du Ghana et de la de la coopération avec les bailleurs de fonds.
VINCENT FOURNIER/J.A.
CES
TOGO Retrouvailles bruxelloises
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p018.indd 18
12/09/08 19:51:07
KYODO/REUTERS
FOCUS 19
ARRÊT SUR IMAGE
UN SEUL ÊTRE VOUS MANQUE…
Il y avait beaucoup, beaucoup de monde le 9 septembre à Pyongyang lors du défilé militaire commémorant le 60e anniversaire de la fondation de la République populaire démocratique de Corée. Le ban et l’arrière-ban du régime communiste étaient là. À une notable exception près : Kim Jong-il. Apparemment, le « cher leader », qui est âgé de 66 ans, a été victime, en août, d’une attaque cérébrale. Opéré par des médecins étrangers (chinois et/ou français), il se rétablit lentement mais souffrirait de convulsions périodiques. Le dernier dictateur stalinien, qui a lui-même reçu le pouvoir de Kim Il-sung, son père, a trois fils, mais n’a jamais désigné officiellement de successeur.
NIGER Semaine décisive pour Moussa Kaka LA JOURNÉE DU 16 SEPTEMBRE s’annonce cruciale pour Moussa Kaka, le correspondant de Radio France internationale à Niamey (et directeur de la radio nigérienne Saraounia) poursuivi pour « complicité d’atteinte à la sûreté de l’État » et collusion avec les rebelles touaregs du Nord-Niger. C’est en effet ce jour-là que son cas sera examiné par la chambre d’accusation de la cour d’appel de Niamey. Laquelle devra statuer sur le non-lieu prononcé le 23 juillet par le juge d’instruction chargé de l’affaire, le procureur de la République ayant fait appel de la décision. Si l’ordonnance est confirmée, toutes les poursuites engagées contre Moussa Kaka seront abandonnées et il sera libéré. Dans le cas contraire, il risque de croupir longtemps encore en prison. Dans cette dernière hypothèse, « la cour a deux possibilités, estime Me Moussa Coulibaly, l’avocat du journaliste. Soit elle se prononce pour la poursuite de l’instruction, ce qui revient à reprendre l’enquête à zéro. Soit elle renvoie
Moussa aux assises, et celui-ci devra patienter plusieurs mois avant d’être jugé. » Compte non tenu d’un éventuel pourvoi en cassation. « Nous restons sereins, confiait l’avocat à la veille de l’audience. Le juge d’instruction a fait son travail. Ses conclusions sont un chef-d’œuvre judiciaire. Même en prenant en compte les écoutes téléphoniques, pourtant illégales [déclarées telles par le précédent magistrat instructeur, elles ont ultérieurement été réintégrées au dossier, NDLR], il n’y a pour lui aucune infraction. » Échaudés par une décision de cette même cour d’appel qui, le 19 août, a rejeté une demande de remise en liberté provisoire, les partisans de Moussa Kaka se montrent plus circonspects. Craignant une nouvelle désillusion, ils préfèrent se préparer à célébrer un bien triste anniversaire: c’est en effet le 20 septembre 2007 que notre confrère a été jeté en prison. ■ JEAN-BAPTISTE MAROT
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p019.indd 19
12/09/08 16:55:03
20 FOCUS
AFRIQUE
ILS ONT DIT ANITA CORTHIER
« Les chefs d’État d’aujourd’hui ont beaucoup de chance : il est moins facile qu’hier de prendre les armes pour les renverser. » ÉMILE DERLIN ZINSOU Ancien président du Bénin
« Les Africains ont raison de s’enthousiasmer pour Barack Obama. À condition de ne pas oublier que leurs problèmes ne peuvent être résolus que par eux-mêmes. » PAUL KAGAMÉ Président du Rwanda
« Si Barack Obama perd, je quitte Los Angeles pour aller vivre ailleurs ! Peut-être en Afrique du Sud. Ou en France. » SAMUEL L. JACKSON Acteur américain
« Je participe à d’innombrables réunions au département d’État et j’y vois rarement quelqu’un qui me ressemble [qui soit noir, NDLR]. C’est inacceptable. » CONDOLEEZZA RICE Secrétaire d’État américaine
« J’ai redoublé ma seconde, ma première, j’ai été viré de deux lycées. Ça ne m’a pas empêché de devenir ministre, mais je ne vous conseille pas d’en faire autant ! » HERVÉ MORIN Ministre français de la Défense
« Nous sommes un peuple digne, allez en enfer, yankees de merde ! Allez-y cent fois ! » HUGO CHÁVEZ Président du Venezuela (après l’expulsion de l’ambassadeur des États-Unis à Caracas)
LE DESSIN DE LA SEMAINE PL ANTE
Salée, la facture alimentaire! EN CINQ ANS, les importations céréalières des pays africains ont triplé. À en croire le rapport publié le 15 septembre à Genève par la Cnuced*, le montant de la facture avoisine 18 milliards de dollars pour la campagne qui vient de s’achever (2007-2008). Cet te dégradation, qui touche 4 8 pays afric ains sur 5 3, s’explique pour une part par le doublement des prix des principales denrées (blé, riz) depuis trois ans. Mais cette inflation a été aggravée par la hausse des prix des carburants et la baisse concomitante de la production locale. Alors qu’en Afrique subsaharienne les rendements sont quasi inchangés depuis 1961 (1 tonne de céréales à l’hectare), ils ont quadruplé en Asie (de 1,2 à 5) e t t r i p l é e n A m é r i q u e l a t in e (de 1,1 à 3,5). La faute à l’insuffisance des investissements dans l’agriculture, à la disparition des of f ices de commercialisation (qui garantissaient un prix aux produc teurs) et à la politique de dumping des pays développés, qui incitent leurs paysans à produire davantage en leur ve r s an t d e s s ub ve n t ion s , c e qui leur permet d’écouler leurs excédents à bas prix dans les pays pauvres. Résultat, la plupart des pays africains qui étaient expor tateurs nets de produits alimentaires dans les années 1960 sont aujourd’hui importateurs nets. La Cnuced les encourage donc à diversifier leurs cultures et à accroître leur of fre pour faire face à la demande et réduire leur vulnérabilité. ■ SAMIR GHARBI
Oussama Ben Laden et la commémoration des attentats du 11 Septembre.
* Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, Rapport 2008 sur le développement économique en Afrique : résultats à l’exportation après la libéralisation du commerce (117 pages).
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p020.indd 20
12/09/08 17:36:51
z-vous avec vos Vivez pleinement votre vie. Amuse phonie mobile, amis ! Zain, votre opérateur de télé s à la pointe de vous offre des produits et service en contact avec l’innovation et vous aide à rester z-vous guider vers ceux qui comptent le plus. Laisse de nouveaux horizons !
Ton monde, ta liberté… www.zain.com 195x270 Jeune Afrique2.indd 1
Un monde merveilleux 9/2/08 3:35:16 PM
FOCUS
Démonstration de moustiquaire imprégnée d’insecticide dans un village burkinabè.
SANTÉ Le palu recule...
mais pas assez vite IL EXISTE DÉSORMAIS des moyens de lutte contre le paludisme qui, pour la première fois, laissent espérer une mise sous contrôle de la pandémie. La mobilisation organisée à Paris du 9 au 28 septembre à l’initiative des Amis du Fonds mondial Europe, en liaison avec le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, et le partenariat Faire reculer le paludisme, entend être « un moment décisif » dans le succès de ce combat. Grâce aux combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine (ACT) et aux moustiquaires durablement imprégnées d’insecticide, le palu « recule » en effet dans de nombreux
pays. Il a par exemple pratiquement disparu au Vietnam, où la mortalité a diminué de 60 % entre 1992 et 2006. En Afrique, des résultats prometteurs ont été obtenus en Éthiopie, en Érythrée, en Zambie, au Rwanda, en Afrique du Sud, au Swaziland, au Mozambique, au Burundi, etc. Pourtant, Psalmodium falciparum et le moustique anophèle continuent de menacer 3,2 milliards de personnes en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Et de tuer en Afrique subsaharienne un enfant de moins de 5 ans toutes les trente secondes. Pour « vaincre le paludisme », il importe donc de mobiliser les décideurs nationaux et
WILLIAM DANIELS
22 de multiplier les efforts au plan local. Par ailleurs, le partenariat et le Fonds mondial travaillent au développement d’un nouveau système d’accès aux médicaments, l’AMFm (Affordable Medicines Facility – malaria), qui réduit considérablement le coût de l’ACT (de 5 dollars à 20 cents). Enfin, il est indispensable de distribuer une centaine de millions de moustiquaires, en plus des 110 millions déjà en service, afin d’atteindre un taux de couverture de 80 % dans les pays endémiques. Parallèlement, un effort d’éducation s’impose. Il faut notamment expliquer qu’il est très dangereux de récupérer l’eau de pluie dans des pots, qui deviennent nécessairement des nids à moustiques. Et de bavarder pendant des heures le soir, quand l’anophèle est le plus actif… Les financements internationaux sont passés de 60 millions de dollars en 2002 à plus de 1 milliard en 2007. Sur les 11,6 milliards investis par le Fonds mondial depuis 2002, 35 % sont allés au paludisme. Mais, pour assurer aux populations exposées, d’ici à la fin 2010, une couverture universelle en matière de prévention et de traitement, un triplement de l’aide internationale est indispensable. Ce serait là un investissement rentable, puisque le palu coûte chaque année 12 milliards de dollars de PIB à l’Afrique subsaharienne. Soit 1,3 % de croissance en moins dans les pays impaludés. ■ RENÉ GUYONNET
KENYA Sarah Obama
TROISIÈME FEMME DU GRAND-PÈRE du candidat démocrate à l’élection présidentielle américaine (mais pas la mère de son père), Sarah Obama, 86 ans, est aujourd’hui une sorte de star dans son village de Kogelo, dans l’ouest du Kenya. Du coup, bien qu’elle continue de vivre comme elle l’a toujours fait, modestement, certains de ses compatriotes ont tendance à fantasmer: ils la croient devenue millionnaire. Dans la nuit du 10 septembre, Sarah a entendu des bruits de pas sur le toit (en zinc) de sa maison. Quatre jeunes vauriens projetaient apparemment de s’emparer du panneau solaire qui y est installé. Kogelo n’étant pas relié au réseau électrique, quelqu’un lui a récemment fait ce cadeau pour lui permettre de suivre à la télévision les péripéties de la campagne de son petit-fils. Chassés par la maisonnée aidée de quelques voisins, les voleurs ont été arrêtés peu après.
PETTERIK WIGGERS/PANOS-REA
et les quatre voleurs
L’épouse du grand-père d’Obama, 86 ans.
Depuis, des policiers patrouillent en permanence dans le quartier et ont dressé des tentes sur la pelouse qui s’étend devant la maison. Il est même désormais question de construire un commissariat. C’est dur la vie de star! ■ J.-M.A. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p022.indd 22
12/09/08 17:33:51
FOCUS 23
AFGHANISTAN Les drôles de
EN HAUSSE VINCENT FOURNIER/J.A.
vacances du Petit Futé
UN ENFANT SOURIANT EN COUVERTURE, des paysages grandioses, des mosquées bleu azur… Les photographies qui illustrent le nouveau guide du Petit Futé veulent-elles vraiment nous faire croire que l’Afghanistan est une destination touristique comme les autres ? Jeune journaliste installée à Kaboul depuis bientôt deux ans, l’auteur, Constance de Bonnaventure, nous invite dès la première page à « dépasser les clichés » et à nous « aventurer dans cette variété d’ethnies et de paysages ». Pas question, donc, de « réduire ce pays aux talibans, au terrorisme, à la burqa et à l’opium ». Il faut attendre la page 123 pour apprendre que depuis 2001 « l’insécurité règne dans tout le pays » – ce qui, certes, ne surprendra personne. Suivent quelques conseils pratiques. Du genre : évitez de vous lever à l’aube car « les attentats ont généralement lieu tôt le matin ». Ou encore : gardez-vous de « stationner trop longtemps à côté d’un char ». Voire : attention aux mauvaises chutes, « les égouts ne sont pas toujours fermés ». Dans l’hypothèse improbable où le touriste vraiment très, très futé aurait échappé aux talibans et aux pièges de la voirie, il lui resterait à se méfier comme de la peste des chiens errants, souvent enragés. Bonnes vacances ! B o n , c ’e s t v r a i , l e Petit Futé ne s’adresse pas là au touriste lambda : « Je ne crois pas en avoir vu plus d ’un ou deux en un an, des marginaux », admet Bonnaventure. Mais aux é tranger s Tiré à 4000 exemplaires, obligés de vivre en le guide est destiné à la Afghanistan : humacommunauté expatriée. nitaires, journalistes, diplomates… « Nos ouvrages permettent aussi de découvrir un pays sans forcément se rendre sur place », plaide Jean-Paul Labourdette, l’un des fondateurs. La meurtrière embuscade du 18 août contre des soldats français a failli retarder la sortie du guide, le 7 septembre. « J’ai hésité et, finalement, j’ai décidé de le sortir quand même », explique Labourdette. Coup de pub ? Officiellement, l’Afghanistan reste une No Go Zone. Le Quai d’Orsay l’a classé destination « absolument déconseillée » et a demandé aux ONG désireuses de s’y rendre de différer leur départ. ■
Le président camerounais de l’Union panafricaine des avocats (UPA) a été porté à la tête du Conseil économique, social et culturel (Ecossoc) de l’Union africaine, lors de la première assemblée générale permanente de cette instance.
D.R.
CHRISTOPHER ROSS
Ancien ambassadeur américain en Syrie et en Algérie, il coordonnait jusqu’ici la lutte antiterroriste au département d’État. Il vient d’être nommé envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU dans le dossier très sensible du Sahara occidental.
DAVID LEWIS/REUTERS
APOLLINAIRE MALU MALU En compagnie de l’opposant zimbabwéen Morgan Tsvangirai, l’abbé congolais, président de la Commission électorale indépendante de RD Congo, est l’un des deux nominés africains pour le prix Sakharov 2008 du Parlement européen.
WITT/SIPA
MICHÈLE ALLIOT-MARIE
UPI PHOTO/ETHAN MILLER/POOL
WWW.PETITFUTE.COM
FABIENNE POMPEY
AKERE MUNA
Rentrée difficile pour la ministre française de l’Intérieur. Après la polémique suscitée par la mutation du chef des forces de sécurité en Corse, elle fait face à de nombreuses critiques à propos de la mise en place du fichier policier Edvige.
O.J. SIMPSON
Déjà poursuivi dans une affaire de (double) meurtre en 1995, l’ex-star du football américain comparaît de nouveau devant la justice. Cette fois, il est soupçonné de vol à main armé et d’enlèvement dans un casino de Las Vegas.
EPA/RUNGROJ YONGRIT
SAMAK SUNDARAVEJ
Le très impopulaire Premier ministre thaïlandais a été démis de ses fonctions. Après sa nomination, il avait poursuivi la chronique culinaire télévisée qu’il présentait depuis sept ans. Infraction à la loi de non-cumul, a jugé la cour constitutionnelle.
EN BAISSE
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p023.indd 23
12/09/08 17:31:07
24 L’ENQUÊTE
AFRIQUE
RÊVES ET DÉBOIRES DES IMMIGRÉS DE LʼINTÉRIEUR Le continent compte au moins 17 millions de migrants. Si la plupart vivent
paisiblement dans leur pays dʼaccueil, les situations de rejet sont fréquentes. LʼAfrique doit apprendre à gérer ses propres mouvements de populations si elle veut être crédible dans son combat contre le repli européen.
L
SOPHIE BOUILLON
e monde ent ier l’a v u mourir. Arrosé d’essence, mains et genoux à terre, un immigré zimbabwéen a été i m molé da ns un tow n ship sud-a f r ica i n avec pour seul tort de ne pas vivre chez lui. Il était « étranger » et donc responsable de tous les maux. Les violences xénophobes ont fait soixante morts en mai dernier en Afrique du Sud et ont terni pour longtemps les couleurs métissées de la nation Arcen-Ciel. De nombreux chefs d’État africains se sont indignés et ont obtenu des excuses du président Thabo Mbeki, d’autant que cette f lambée de violence était prévisible. En 1998, une enquête menée par le Southern African Migration Project, un groupe d’études sur les migrations en Afrique
australe, dénonçait « un sentiment hostile vis-à-vis des étrangers », principalement les immigrés d’Afrique francophone et lusophone, ostracisés à cause de la barrière de la langue et de la différence culturelle. Mais la xénophobie n’est malheureusement pas rare sur le continent. Quant aux traitements infligés aux populations immigrées par les autorités en place, ils versent souvent dans l’arbitraire. Pas de quoi, en tout cas, donner des leçons de morale à l’Europe. Tout récemment, le gouvernement angolais a voulu faire « place nette » à la veille des élections du 5 septembre en expulsant plus de 72 000 Congolais. Selon le der nier rappor t de l’Ocha (Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU), ils seraient plus de 140 000 à avoir rega-
gné la RD Congo entre 2003 et 2007 « dans un état de grande vulnérabilité ». Bien que panafricaniste affiché, le « Guide » Mouammar Kaddafi a lui aussi décidé de limiter la présence subsaharienne, qui représente plus de 20 % de la population libyenne. La méthode est radicale. Tripoli lance régulièrement des « chasses aux étrangers » et bénéficie depuis 2000 du soutien financier de l’Union européenne pour les renvoyer chez eux (voir p. 30). « La Libye n’est pas un pays sûr pour les migrants, les demandeurs d’asile et les réfugiés », estime l’organisation Human Rights Watch, qui dénonce de graves violations des droits de l’homme. Plus généralement, au Maghreb, que dire du sort réservé aux Subsahariens en partance pour l’Europe ? Le refou-
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p024-030.indd 24
12/09/08 14:48:49
MIKE HUTCHINGS/REUTERS
25
« Nous sommes tous des Africains », tel était le slogan des Zimbabwéens victimes de violences en Afrique du Sud, en mai dernier.
lement en plein déser t marocain – « pratiquement sans vivres et sans eau », selon Amnesty International – des clandestins après les assauts contre les deux enclaves espagnoles de Melilla et Ceuta, en octobre 2005, est encore dans toutes les mémoires. En Algérie, les candidats à l’exil, déjà épuisés par la traversée du Sahara, v ivent le plu s souvent da n s de s conditions déplorables, à l’instar de ceux qui s’entassent dans le camp de Maghnia, en plein Sud, le long d’un oued asséché. AFRIQUE NOMADE
L’A f r ique cent ra le n’est pas en reste. En 1995, Libreville avait exigé le départ de 150 000 immigrés. Des « boat people » avaient erré le long des côtes béninoises, attendant que
Cotonou accepte de les accueillir. Dans la capitale gabonaise, on s’attristait de ne plus trouver de pain frais le matin : tous les boulangers ca merouna is ou équatog ui néens étaient partis ! Pour sa part, Malabo a bien du mal à intégrer une maind’œuvre étrangère attirée par ce qui fait figure de nouvel eldorado pétrolier. À un degré moindre, au Congo, les Ouest-Africains du quartier de Poto-Poto de Brazzaville ont parfois le sentiment, à juste titre, de ne pas être vraiment de la famille. Les expatriés de l’Union africaine sont, eux, accueillis avec froideur par une partie des habitants d’Addis-Abeba, en Éthiopie. Venus des pays voisins, les réfugiés au Kenya parqués dans les bidonvilles autour de Nairobi craignent constamment d’être renvoyés
sans ménagement. Décidément, la liste est longue. Et non exhaustive. L’A frique ne serait donc plus ce g ra nd cont i nent nomade ? Nel ly Robin, chercheuse à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), basée à Dakar et spécialiste des migrations, veut encore y croire. Elle a parcouru toute l’Afrique de l’Ouest à la rencontre de ces migrants et de leur famille. « Je demandais à des mères combien de leurs enfants étaient partis à l’étranger. Elles me répondaient aucun, raconte-t-elle. Et puis, un jour, j’ai compris que tant que les enfants n’étaient pas en Europe, ils n’étaient pas à l’étranger, c’était normal ! » La population africaine est la plus mobile au monde. Avec les échanges encouragés par la mondialisation,
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p024-030.indd 25
12/09/08 14:48:55
26 L’ENQUÊTE
Tunisie
Mer Méditerranée
MAGHREB
Maroc
Libye
Algérie
GuinéeBissau Sierra Leone
Mali Niger
Tchad
AFRIQUE DE L'OUEST
Sénégal Gambie Guinée
ge ou rR Me
Mauritanie
Égypte
Liberia Côte d’Ivoire
Bénin Nigeria Togo Ghana Guinée Cameroun équatoriale Gabon
Océan Atlantique
Érythrée
Soudan
Burkina Faso
Congo
Djibouti Éthiopie
Centrafrique
Somalie
Ouganda Rwanda
République démocratique du Congo
Kenya
Burundi Tanzanie
Migrations économiques Principaux pays émetteurs
Angola Zambie
Principaux pays récepteurs
Malawi Zimbabwe
Principaux flux migratoires Botswana
Mozambique
Namibie
Madagascar
Swaziland Afrique du Sud
Lesotho
Océan Indien
Source : ONU/OCDE
l’explosion démographique et l’instabilité politique sur le continent, le phénomène s’est intensifié. Ces migrations sont loin d’être orientées uniquement du Sud vers le Nord. L’image d’une Europe « forteresse assiégée » doit être largement nuancée si l’on s’attarde sur les chiffres. La seule Afrique de l’Ouest compte 7,5 millions d’immig rés. Ils sont officiellement plus de 1 million en Afrique australe mais, selon des estimations englobant les clandestins, il y en aurait 3 millions dans la seule Afrique du Sud. Les pays riches de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)
ne c ompte nt of f ic ie l le me nt que 7,2 millions de ressortissants africains. On en recense 17 millions sur l’ensemble du continent. À chacun son histoire et son parcours. LIBRE CIRCULATION IMPARFAITE
« Il y a encore quelques années, les f lux migratoires étaient très figés, explique Laurent Bossard, directeur adjoint du Club du Sahel de l’OCDE. Aujourd’hui, les flux sont mouvants et les personnes se déplacent en fonction des nouvelles routes vers l’Europe ou des crises politiques, sans que l’on puisse clairement les identifier. »
D’anciennes terres d’émigration comme le Sénégal ou le Burkina sont devenues des pays d’accueil pendant la crise ivoirienne. Grande terre d’immigration, la Côte d’Ivoire (voir p. 28) est désormais aussi touchée par le départ d’une partie de sa jeunesse, attirée par « l’eldorado européen ». Le Zimbabwe, dans les années 1990, accueillait des ressortissants zambiens et malawites. Aujourd’hui, plus d’un quart des Zimbabwéens vivent à l’étranger, essentiellement en Afrique du Sud. « À long terme, les violences de mai dernier n’auront pas d’impact sur le nombre de personnes qui arrivent », assure Frans Cronje,
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p024-030.indd 26
12/09/08 14:49:00
RÊVES ET DÉBOIRES DES IMMIGRÉS DE L’INTÉRIEUR 27
« Tant que mes enfants ne sont pas en Europe, ils ne sont pas à l’étranger. » régional commence à devenir une réalité. Les tracasseries administratives aux frontières n’ont pas toutes disparu, loin s’en faut, mais le passeport de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) se généralise. MENACES EUROPÉENNES
Mais cet héritage des empires et royaumes africains, ce prolongement naturel des échanges commerciaux sont aujourd’hui menacés par la politique restrictive du Nord et le recours à une approche bilatérale. En 2006, la France et le Sénégal ont par exemple signé un accord « pour une gestion concertée » des flux migratoires. Depuis, Dakar, sous la pression exercée par Paris, participe au dispositif européen pour la sécurité aux frontières extérieures (Frontex) : plus de 4 200 clandestins ont été interpellés. « Si ce phénomène s’amplifie, cela r isque d’engendrer des tensions, dénonce Nelly Robin. Le Sénégal se
retrouve à faire le gendarme de l’Europe sur son propre territoire. » Avec le risque que Dakar décide un jour de fermer ses frontières, fragilisant ainsi l’ensemble du processus d’intégration régionale. « Les migrations en A f rique de l’Ouest sont pourtant un facteur de stabilité », soutient Nelly Robin. Les exemples ne manquent pas. Cela va de la croissance ivoirienne en partie due aux travailleurs burkinabè
dans les plantations de café et de cacao à la construction du Transgabonais, dans les années 1970, assurée par une main-d’œuvre nigériane, camerounaise et ouest-africaine. Pas sûr que ces arguments pèsent lourd da n s le s négo c iat ion s e n cou r s. L’Afrique pointée du doigt comme terre d’émigration se retrouve bien seule pour gérer sa propre immigration. Avec le risque du repli identitaire et de la xénophobie. ■
3 QUESTIONS À...
IBRAHIM AWAD Directeur du programme des migrations au Bureau international du travail (BIT)
D.R.
de l’Institut des relations raciales à Johannesburg. « Mais si le gouvernement ne contrôle pas le phénomène, il ne faudra pas s’étonner si ça éclate à nouveau ! Le Botswana et l’Afrique du Sud ne peuvent pas absorber à eux seuls les flux de population du Zimbabwe ou du Mozambique », conclut-il. Plus inquiétant, une étude révèle que 84 % des Sud-Africains pensent qu’il y a trop d’immigrés dans leur pays. En théorie, les pays de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) ont signé des accords de libre circulation. Mais, en pratique, ils ne sont pas appliqués. De ce point de vue, nous retrouvons une situation analogue au sein de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). Le passeport régional est officiellement entré en vigueur, mais il est encore très loin du sésame espéré. En Afrique de l’Ouest en revanche, s’il est encore trop tôt pour parler de parfaite intégration, l’espace sous-
JEUNE AFRIQUE : Quelle est l’ampleur de l’immigration en Afrique ? IBRAHIM AWAD : Il n’existe pas de données chiffrées exactes, mais on estime qu’il y a deux fois plus de migrants internationaux en Afrique de l’Ouest qu’en Europe. Seuls 3 % des émigrés maliens sont en Europe ! En Afrique, le nationalisme va à l’encontre de l’histoire du continent. Avant la colonisation, n’oublions pas qu’il n’y avait pas de frontières ! Les frontières sont validées au niveau international, mais souvent elles n’ont aucun sens au niveau local. Lorsqu’on appartient au même groupe ethnique, les déplacements sont naturels même s’ils doivent passer par une frontière. D’ailleurs, ces frontières souvent très larges sont difficilement contrôlables. Maintenant qu’elles existent, on ne peut plus les supprimer, il faut bien faire avec…
1
Est-il souhaitable de les contrôler ? Non. On pourrait très bien imaginer une région déterminée avec des mouvements de population réguliers, légaux. Ils participeraient d’ailleurs au développement d’une région commune. Les migrations permettraient de renforcer la coopération régionale, dans un premier temps, puis continentale. L’immigration peut être un vecteur de stabilité régionale.
2
D’ailleurs, toutes les organisations régionales (Cedeao, SADC…) prévoient la libre circulation des personnes. Comment expliquer que cette disposition ne soit pas appliquée partout ? La totale circulation des personnes n’est pas appliquée en Afrique, comme partout dans le monde, car les revenus entre pays sont différents. Il y a une contradiction entre la volonté des États de construire un marché du travail à un niveau national, tout en s’intégrant dans une logique régionale. Un État a pour vocation de favoriser ses citoyens, particulièrement dans des conditions de pénurie de travail. L’immigration devient un problème, elle crée des déséquilibres dès lors qu’il y a une inégalité de développement entre deux pays, de la concurrence sur le marché du travail, des disparités en termes de pauvreté et des conditions de vie difficiles pour les autochtones. Il faut privilégier des approches régionales pour réduire la pression sur un seul marché national. ■
3
Propos recueillis par S.B.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p024-030.indd 27
12/09/08 14:49:02
28 L’ENQUÊTE
Quand lʼétranger dérange...
GEORGES GOBET/AFP
Les pays les plus confrontés à lʼafflux dʼimmigrés sont parfois tentés par la fermeture des frontières. Avec souvent des discours populistes et des méthodes condamnables.
La plupart des travailleurs burkinabè chassés en 2002 sont revenus.
CÔTE DʼIVOIRE
L
Lʼivoirité nʼa pas triomphé
es Burkinabè sont revenus en Côte d’Ivoire, mais avec un mot d’ordre : « profil bas ». « On ne se compor te plus comme avant, on n’élève pas la voix, on calme le jeu à la moindre friction », explique Étienne Compaoré, vice-consul burkinabè. Chassée avec violence en 2002, la plus importante des communautés étrangères de Côte d’Ivoire n’a pas tardé à revenir. Une toute petite minorité des quelque 365 000 personnes évacuées par bus à l’époque est restée au Burkina. Et, selon
le Conseil supérieur des Burkinabè de l’étranger (CSBE), ils seraient pas moins de 3,5 millions en Côte d’Ivoire, soit au moins autant qu’avant la crise. « La Côte d’Ivoire reste pour nous une terre d’accueil », commente Michel Ouédraogo, secrétaire permanent de l’organisation. La première grande vague migratoire remonte à l’ère coloniale. L’administration française a organisé le déplacement de milliers de travailleurs vers les forêts ivoiriennes pour défricher, construire et aménager. À la tête d’un
pays prospère et peu peuplé, le président Houphouët-Boigny a ensuite laissé les portes ouvertes. La loi en matière de propriété foncière se limitait à un principe édicté par « le Vieux » : « la terre appartient à celui qui la met en valeur ». Il semait ainsi sans le vouloir les graines de la discorde. L’ouest de la Côte d’Ivoire, devenu la grande zone cacaoyère, était exploité essentiellement par des planteurs baoulés et burkinabè. La crise économique et la pression démographique aidant, les revendications des autochtones se sont multipliées et les accrochages ont commencé. La politique, avec le développement du concept d’ivoirité, et la polémique autour de la nationalité d’origine de l’ancien Premier ministre Alassane Ouattara ont ajouté de l’eau au moulin de la xénophobie montante. Avant même le coup d’État de 1999, des planteurs burkinabè, des pêcheurs maliens et ghanéens avaient subi des violences. La coupure du pays en deux à partir de septembre 2002 a marqué un tournant. Les Burkinabè, assimilés aux rebelles du Nord, ont été des cibles. La confiance et le respect qui avaient généralement prévalu étaient brisés. La médiation réussie de Blaise Compaoré et la signature de l’accord de Ouagadougou en mars 2007 ont nettement changé la donne. Les Burkinabè sont redevenus fréquentables tandis que les autorités ivoiriennes
CAP-VERT : LA ROUTE DE L’OUEST AU LARGE DES CÔTES SÉNÉGALAISES, l’archipel du Cap-Vert est situé sur la principale route maritime des clandestins qui projettent d’entrer en Europe via les Canaries. Depuis l’île de Sal, dans le nord du Cap-Vert, il faut parcourir 750 milles (1 500 km environ) pour atteindre celle de Hierro et ainsi pénétrer en Europe, soit cinq jours de voyage en moyenne. De ce fait, le pays est une escale pour des milliers de clandestins, suscitant l’inquiétude des autorités. D’autant plus que le Cap-Vert, peuplé de 400 000 habitants, n’a pas les moyens de contrôler ses immenses eaux territoriales. Confronté à l’afflux des illégaux, l’Espagne, qui
a ouvert une ambassade à Praia en 2006, souhaite couper la route des Canaries en renforçant sa coopération avec le Cap-Vert. Le gouvernement de Praia a pour sa part demandé, à plusieurs reprises, l’aide de l’Union européenne pour pouvoir contrôler sa zone maritime et combattre en même temps le trafic de drogue. Il souhaite également bénéficier d’un statut spécial auprès de l’UE pour bénéficier de fonds européens. Auprès de la Cedeao enfin, il revendique la suspension de la libre circulation des personnes et souhaite réintroduire le visa pour les ressortissants de la sous-région. ■ GEORGES DOUGUELI J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p024-030.indd 28
12/09/08 14:49:06
RÊVES ET DÉBOIRES DES IMMIGRÉS DE L’INTÉRIEUR 29 ont facilité la réintégration de ces populations. Symbole de ce retour à la normale, la fermeture, le 31 juillet dernier, du dernier camp de déplacés, à Guiglo, qui accueillait en moyenne 7 000 à 8 000 personnes. Cela ne se fait pas sans anicroches. Beaucoup des terres avaient été réattribuées à de jeunes autochtones. « On négocie maintenant au cas par cas, on trouve des arrangements », assure Étienne Compaoré. Le plus souvent, l’ancien exploitant burkinabè devient locataire de « sa » terre et paie un loyer annuel fixé par l’administration. « La question foncière reste une bombe à retardement », assure Christian Bouquet, universitaire, spécialiste de la Côte d’Ivoire. Jacques Seurt, de l’Office des migrations internationales (OMI), est également inquiet. « La crise alimentaire va accentuer le mouvement migratoire des Sahéliens vers la côte et la pression sera forte dans les années à venir », estime-t-il. ■
BOTSWANA : REFUGE POUR LES EXILÉS DU ZIMBABWE DÈS SON INDÉPENDANCE EN 1966, cette enclave de l’Afrique australe a fait appel à une migration qualifiée afin d’assurer son développement économique. Des médecins ghanéens, zimbabwéens, des ingénieurs kényans sont ainsi venus en renfort. Mais Eugène Campbell, professeur de sociologie à l’université de Gaborone, constate que « les migrants qualifiés préfèrent désormais l’Afrique du Sud ou l’Europe » aux grands plateaux désertiques du Kalahari. « Aujourd’hui, ceux qui arrivent sont ouvriers, domestiques ou employés agricoles, et 85 % d’entre eux sont des Zimbabwéens », précise-t-il. Ils seraient 80 000 à avoir franchi la frontière depuis 2002. L’économie du Botswana, concentrée sur le commerce du diamant et le tourisme, ne peut pas absorber un tel flux. D’autant que le pays ne compte que 1,8 million d’habitants. Ces immigrés sans diplômes sont devenus un enjeu politique pour le nouveau président. Élu en avril, Ian Khama a sorti le Botswana de sa neutralité et se pose en opposant farouche à son voisin Robert Mugabe. Il mène une campagne contre la xénophobie, en partenariat avec la Croix-Rouge et les Nations unies. En se voyant attribuer le statut de réfugiés, les ressortissants zimbabwéens sont ainsi perçus comme des « victimes » et non comme des clandestins. ■ S.B.
FABIENNE POMPEY
Les fantasmes du brut
L
les à franchir. Tout comme Libreville, Malabo se montre réticente à l’ouverture pure et simple de son territoire aux ressortissants de la Communauté économique et monétaire des États de l’Afrique centrale (Cemac), comme c’est déjà le cas entre les pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), où la libre circula-
Un cordonnier ghanéen dans son atelier de Libreville, au Gabon.
▲ ▲ ▲
ongtemps les Librevillois ont recruté leurs gardiens et femmes de ménage parmi la communauté équatoguinéenne. Toujours perçu comme un véritable émirat africain, le Gabon reste une terre d’immigration. Pour les ressortissants des pays voisins en premier lieu, mais aussi pour beaucoup de personnes venues d’Afrique de l’Ouest tenter leur chance sur les rives de l’Ogooué. Toutefois, la production de brut gabonais décline et Libreville n’est plus le dernier eldorado à la mode. Les temps changent. Aujourd’hui, c’est Malabo qui alimente tous les fantasmes. Pays souspeuplé, la Guinée équatoriale exploite depuis un peu plus de dix ans ses ressources pétrolières avec un certain succès : taux de croissance à deux chiffres et pétrodollars à gogo, que le régime investit dans de gigantesques chantiers d’infrastructures. De quoi susciter le vif intérêt des travailleurs nigérians, camerounais et même gabonais, qui s’installent massivement sur l’île de Bioko. Conséquence de ce subit engouement, les frontières équatoguinéennes deviennent de plus en plus diffici-
tion des personnes est effective depuis 2004. Maintes fois annoncée, l’entrée en vigueur du passeport Cemac se fait toujours attendre. Si bien que les fermetures inopinées des frontières, les expulsions et les incidents diplomatiques entachent encore régulièrement les relations communautaires. En 2004, à la suite de l’arrestation au Zimbabwe d’un groupe de mercenaires qui préparaient un coup d’État contre le régime équatoguinéen, Malabo décide d’expulser sans ménagement
DÉSIRÉ MINKHO
GABON- GUINÉE ÉQUATORIALE
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p024-030.indd 29
12/09/08 14:49:08
30 L’ENQUÊTE ▲ ▲ ▲
plusieurs centaines d’étrangers de son territoire, dont près de 1 500 Camerounais, provoquant une crise diplomatique avec Yaoundé. En décembre 2006, la Guinée équatoriale ferme à nouveau sa frontière continentale avec le Cameroun. Celle-ci ne rouvrira que quatre mois plus tard. Aujourd’hui encore, la méfiance persiste. Dernières cibles de cette relative suspicion, les Libanais. Le gouver-
JOBARD/SIPA
LIBYE
nement équatoguinéen a décidé à la mi-août de restreindre le nombre de ressortissants du pays du Cèdre pour « raisons de sécurité ». Une décision liée à l’implication d’hommes d’affaires libanais dans la tentative de coup d’État de 2004 contre Teodoro Obiang Nguema. Lequel a reçu au début de septembre Fawzi Salloukh, le ministre des Affaires étrangères du Liban. ■ JEAN-DOMINIQUE GESLIN
Sous-traitante zélée de lʼEurope
Tripoli exige à présent un visa pour tous les ressortissants subsahariens.
C
ôté pile : le chantre de l’unité africaine. Côté face : le sous-traitant des barrières de l’Europe. Décidément, le colonel Kaddafi joue toujours de l’ambivalence. Davantage encore depuis que la communauté internationale l’a réadmis en son sein et que l’Europe compte sur Tripoli pour retenir les
candidats à l’exode. Avec 1 700 km de côtes et 4 000 km de frontières terrestres, le pays, qui compterait 1,7 million d’étrangers en situation irrégulière pour 5,5 millions d’habitants, est devenu l’une des principales routes migratoires. La fermeture des enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla en 2005 et le renforcement des contrôles
au Maroc ont accentué le phénomène. Chaque mois, ce sont des centaines de personnes qui, partant des côtes libyennes, tentent d’atteindre Malte ou l’Italie. Sans compter ceux que la mer engloutit. Depuis le début de l’année, plus de 16 000 personnes – hommes, femmes et enfants – ont ainsi déjà débarqué sur les côtes italiennes. Et, depuis 1988, 12 000 clandestins ont péri et près de 5000 sont portés disparus dans la seule zone du canal de Sicile, selon l’association Fortress Europe (basée en Italie). Un afflux que Kaddafi lui-même avait appelé de ses vœux quelques années plus tôt. Septembre 1999 : il déclare ouvrir grandes les portes à ses « frères » africains. Constituant une maind’œuvre à bas coût dans un pays sous boycott international et qui manque de cadres et d’ouvriers, les Subsahariens sont alors les bienvenus. Depuis, la donne a changé. De 2003 à 2005, la Libye a expulsé près de 145 000 ressortissants africains, selon l’organisation Human Rights Watch, qui reprend des chiffres officiels et qui dénonce des « passages à tabac, des arrestations arbitraires et des retours forcés ». Le mouvement se poursuit avec semblet-il la même férocité. Ultime étape, franchie en janvier 2007 : le visa est devenu obligatoire pour tous les étrangers, Maghrébins et Subsahariens compris. L’expulsion est promise à tous ceux qui n’auront pas régularisé leur situation. Le panafricanisme libyen a fait long feu. En décembre dernier, à l’occasion de sa venue en France, le « Guide » avait critiqué vertement la façon inhumaine dont l’Europe traitait ses immigrants clandestins. Il n’est décidément plus à un paradoxe près. ■ FAÏZA GHOZALI
COMORES-MAYOTTE : LE CASSE-TÊTE DE PARIS MAYOTTE : SON LAGON, SA DOUCEUR DE VIVRE, ses lémuriens… et ses clandestins ! La quatrième île de l’archipel des Comores, restée française à l’issue du référendum d’autodétermination de 1975, détient le record des reconduites à la frontière, avec 13 000 expulsions en 2007. Soit autant que sur l’ensemble du territoire de France métropolitaine. Malgré un traitement de plus en plus coercitif – le nombre des éloignements forcés a été multiplié par trois en sept ans –, les clandestins sont de plus en plus nombreux, et on estime que près d’un tiers des 180 000 habitants que compte cette collectivité territoriale sont sans papiers. Travaillant comme maçons, ouvriers agricoles, manutentionnaires ou
encore domestiques, pour des salaires misérables, s’entassant dans des habitations sommaires en tôle ondulée à la périphérie des villes, ces illégaux sont en butte aux vexations et à la xénophobie. Ils sont presque tous originaires d’Anjouan, l’île voisine distante de seulement 80 km, avec laquelle Mayotte vivait étroitement imbriquée jusqu’à l’indépendance comorienne. Sinistrée économiquement, ruinée par la crise séparatiste, Anjouan est surpeuplée, avec une densité de population dépassant, par endroits, les 600 habitants au km 2 . L’arrivée de clandestins à Mayotte n’est pas près de se tarir. ■ SAMY GHORBAL J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p024-030.indd 30
12/09/08 14:49:16
DÉCOUVREZ LA NOUVELLE FORMULE DE JEUNE AFRIQUE
ABONNEZ-VOUS
'% (%*&% )$#!"*%
',")*!%"
#)* +8/5.9'9,) .95" 3%52 +) 3/ ,"3"-5/.9%( +* 6& /((9:)52/95) +) 389(+"$)(+/(,)! 3) 01 7*9( 0&&14
◗ Le magazine qui donne du sens à l’actualité africaine. 98 L A S E M A I N E D ’ EC O F I N A N C E
($ &#+
"%#+$ !$, &',,*()$,
63
42
LES MYSTÈRES DʼALGER À qui profite lʼargent du pétrole ? Comment se porte le président Bouteflika ? Que se passera-t-il en 2009, après son second mandat ? Entre luttes de clans dans la classe politique et interrogations sur lʼavenir, enquête au pays des rumeurs.
L A S E M A I N E D ’ E C O F I N A N C E 99
CÔTE DʼIVOIRE
LE PLUS DJIBOUTI Il y a trente ans, le pays devenait indépendant. Voyage au cœur dʼun État entre deux mondes.
AFRIQUE-EUROPE
Réunification fiscale dès 2008
DANS LA PERSPECTIVE postconflit (AUPC), lancé de la loi de finances 2008 en août 2007 par les parteen Côte d’Ivoire, baptisé naires de la Côte d’Ivoire, 32 « budget de réunification », une mission conjointe de la le président Laurent GbagBanque mondiale, du Fonds LʼAFFAIRE bo a adressé une note aux monétaire international MACKY SALL bailleurs de fonds leur en(FMI) et de la Banque afriLʼex-Premier joignant de l’aider à « élarcaine de développement ministre sénégalais gir l’assiette fiscale » dans (BAD) s’est justement renpourrait être le nord du pays, où l’État due les 17 et 18 novembre contraint de 56 112 BEYALA VERSUS DRUCKER quitter le perchoir SOCIALISME À LA CHÁVEZ ne collecte plus d’impôts à Bouaké et Korhogo. Pa26 LE « JʼACCUSE » DE SOYINKA de lʼAssemblée OYINKA Dirigeants africains, Le président vénézuélien veut La romancière franco-camerounaise l’ depuis septembre 2002. rallèlement, l’État multinationale. droits de lʼhomme,, racisme, démocratie bafouée... sʼoctroyer les pleins pouvoirs. raconte sa relation passée et ses Les services du ministère plie les signes en direction Décryptage. Le Prix Nobel nigérian est en colère. re. Entretien exclusif. Dictature ou démocratie populiste ? déboires présents avec lʼanimateur. de l’Économie et des Finandes populations du Nord. ces ont élaboré un budget Laurent Gbagbo a lancé le 22 FOCUS FOCUS 23 22 Lancement des travaux de l’oléoduc Abidjan-Bouaké bidjan-Bouaké l zone estimatif à 2 138 milliards novembre, dans la par le président Gbagbo, le 22 novembre. d’A de F CFA en recettes. EnviVridi du port d’Abidjan, la 95 ECOFINANCE EN HAUSSE 3 CE QUE JE CROIS Par Béchir Ben Yahmed 36 Tcha Tchad T d Déby Itno, Sarko et le magistrat d’u oléoduc ron 100 milliards de F CFA construction d’un 8 CONFIDENTIEL 38 Rwanda-France Désaccords parfaits 95 Transport aérien Turbulences dans le ciel reposent sur un redéploiement effectif de l’administration longROYAL de 350 km reliant la capitale économiqu économique à Bouaké L’Ashera, un improbable SÉGOLÈNE 40 Côte dʼIvoire Lʼœil et le bras de lʼONU sénégalais croisement de chat fiscale dans la zone contrôlée par les ex-rebelles. En 2007, en passant par Yamoussoukro. D’un coût total de 110 milRetour gagnant sur la scène poli14 F O C U S léopard, de semaine serval dʼEcofinance 41 Zimbabwe « Bon débarras ! » 98 La liards de la F CFA, ce projet de la Société nationale des opéle budget était de 1 961 milliards de F CFA. Les Forces noutico-médiatique pour candidate et100 de chat domestique. 14 Centrafrique Une visite entre chien et loup Téléphonie T Té léphonie Wana affiche ses ambitions face à velles ont mis en place en 2003 la Direction de ladumobilirationsà la pétrolières ont commencé dès 1985, explique le « LES MENTALITÉS ONT ÉVOLUÉ. Parti socialiste présiden-de Côte d’Ivoire (Petroci) – qui a déjà 42 MAGHREB & MOYEN-ORIENT 16 Sénégal La révolte des colporteurs olporteurs Maroc Télécom sation (Dirmob), rebaptisée en 2004 « La centraletielle ». Selon mobilisé 65 milliards quantité docteur Nabiha Gueddana, directrice Aujourd’hui, je parle plus facilement française, qui publie, sous le – permettra de doubler la quanti 16 Hommage Maurice Béjart, chorégraphe de du ma maladie, je n’ai plus honte 42 », Reportage Les mystères dʼAlger 102 Services Le boom tunisien de la sécurité produits pétroliers transportés, soit 1,6 million de m3 les chiffres de cet organe, les taxes prélevées s’élèvent générale de l’Office national de la titrechaMa plusde belle histoire, c’est 46 En vérité M6et etde le la « parti du roi »(ONFP). Par métissage high-tech an.campagne. Le chantier doit durer dix-neuf mois et des invesinves que année à 20 milliards de F CFA, dont 12 milliards famille population explique Mehdi, un jeune Tunisien vous, géle récitpar de sa Non 48 Libye-France quia vient dînerde à lʼÉlysée... 18 Irak Quelques vérités sur Al-Qaïda 103 Perspectives Pour une expertise économique L État ivoiriensans de 600 millions F CFA à caractère social seront nérés par la production cacaoyère. L’ L’État estime, la suite, Devine décision été prise fourporteur du VIH, lors de la cinquième écornertissements les éléphants du PS. Irak rak «nir Lagratuitement mère de toutesdes les trithérapies ambassades aux » 19 Israël-Palestine La politique du compte-gouttes africaine réalisés dans les localités traversées. ■ lui, ses pertes annuelles à 90 milliards. Dans la perspecréunion organisée par le Fonds50 mon54 et Arabie saoudite LʼorÉgypte, noir sous surveillance 20 La femme de la semaine Benazir Bhuttodial contre le sida, la tuberculose 104 Finance BMCE veut devenir un grand argentier LES CHIFFRES DONNENT LE VERTIGE. BAUDEL AIRE MIEU, À ABIDJAN tive deLes l’évaluation malades. » En enhaute revanche, le cent entre-du programme d’urgence d’assistance 22 Sida Toujours lʼAfrique ue subsaharienne le paludisme (Tunis, 3-6 décembre). 55 Mauritanie-Libye Ça se réchauffe sommet 106 Internet Fenêtre africaine sur le Web 2.0 sujet reste tabou. « Il n’y a au pratiqueprises les plus performantes des pays émergents MICHAEL MCCONNELL ment pas de campagnes nationales ont réalisé en 2006 un chiffre d’affaires d’environ Dès le mois d’août, le chef du rentes à Marrakech Longtemps, les autorités des pays 22 Cinéma Stars et paillettes IN T Ed’information R N AT I O N A L et très peu d’aide aux 56 de INTERNATIONAL 108 L I R E , É C O U T E R , V OI OIR de la région se sont contentées 1 200 milliards de dollars. Le montant de leurs acquiseignement américain avait averti 23 Médias Liberté, égalité,, diversité malades. Les responsables politiques et de sitions avoisine 500 milliards. C’est EN ce qui ressort de le président Bush que l’Iran avait BREF Venezuela Le socialisme au nom de Dieu 24 Russie « Une démocratie en trompe lʼœilnier » l’existence de l’épidémie 56 108 Photographie Fosso réinvente Fosso comptent sur que la foituetnous les valeurs stigmatiser les malades. La situation probablement suspendu son pro59 Humeur Quʼest-ce chantesmoralà ? 112 People Beyala-Drucker : amour, haine et argent l’enquête sur « les nouveaux challengeurs mondiaux » 26 L A G R A N D E I N T E R V I EW EW les pour sanitaire s’aggravant, elles ont60 enfin publiée le 5 décembre par le Boston Consulting Group gramme nucléaire militaire depuis Parcours Makaprotéger Kotto la population », s’in114 Cinéma Quand le passé ne passe pas... CAMEROUN qui estpublié parvenu LIBERIA modèle2003. brésilien, digne Rudy Samir, s’est résigné à cacher décidé de réagir. (BCG), un cabinet américain de conseil en stratégie et Le rapport le 3àdécem62 États-Unis lequi terrible 26 Wole Soyinka « Jʼaccuse » consommation nafaire grimper sa séropositivité. L’ensemble Moyen-Orient/Afrique en organisation. bre parlases services l’a confirmé. 124 V O U S & N O U S tionale de 8 millions à 16 millions de inanc du Nord (Mena) est la deuxième Et ce n’est qu’un début ! Le chif fre d’af faires GÉNÉTIQUE ENNE 63 L E P L ULe S Dmontant E J E U N E des A F R IfQ U E ements 32 A F R I Q U E S U B S A H A R I E NNE 124 Courrier des lecteurs sacs en dix ans en investissant dans alloués par le des Fonds mondial à la région du monde où l’épidémie du Top 100 des pays émergents devrait atteindre SEYOUM TSEHAYE (RSF) 63 de Djibouti 30 ans, lʼâge possibles 32 Sénégal Lʼaffaire Macky Sall 126 Science la promotion et la transformation. région Mena pour lutter contre les sida progresse le plus vite (70 000 3 300 milliards de dollars en 2010 etLe 11constat 800 milliards L’Érythréen Seyoum Tsehaye a Le 20 novembre à Tel-Aviv, le Liberia est impitoyable pour la fi34 Congo-Brazzaville Le baobab de Mikalou 128 Droit de réponse... à lʼambassadeur des trois maladies s’élève à 651 millions nouvelles infections et 25 000 décès en 2015. « La croissance des groupeslière sélectionnés necafé. Sa part dans reçu le prix du journaliste de l’anafricaine du et Israël ont signé un accord de coocoo 35 Ce jour-là 30 novembre 1989 : décès du président États-Unis en Tunisie et au journal LʼExpression TOGO de dollars, dont 269 millions pour en 2007, 380 000 personnes infectées se fait pas au détriment de leur rentabilité », souligne née 2007 décerné par Reporterspération sur le diamant à l’occasion le marché mondial a chuté de 50 % l’occa camerounais Ahmadou ou Ahidjo 130 Post-scriptum le sida. Mais l’argent ne suffit pas. au total), juste après le bloc Europe Pascal Cotte, responsable du bureauentre parisien duetBCG. sans frontières et la Fondation de la visite de la présidente Ellen 1989 2007, passant de 22 % « Il est indispensable d’impliquer de l’Est-Asie centrale. « On ne peut Leur rentabilité opérationnelle s’est àélevée 17 %que en la demande proA PRÈS LE NAIN DE JA RDIN, de France. Emprisonné depuis Johnson-Sirleaf. Cet accord inter 11 %, àalors inter7 ' 8 / ' 3 % ; 9 & 8 ' / ! " 5 5 1 . ) 8 " 4 / + 6 ' 2 0 ; ' 3 8 #ER ) : , ' 2 0 ; ' " $ $ les chefs religieux, dont l’influence plus attendre, ni sur le plan humain ni 2006, contre 14 % pour les entreprises qui composent voici le léopard de salon : on septembre 2001, il témoigne de vient la après la levée de l’embargo l’embarg sur gresse de 2 % par an et que les cours est considérable », souligne Khasur le plan économique », commente l’indice Standard & Poor 500 (Wall Street) et 8 % pour n’arrête pas le progrès ! Issu du situation de la libertéde de déla presse La Banque ouest-africaine la vente de pierres précieuses libél mondiaux sont à nouveau rémunédidja Moalla, du Programme des Michel Kazatchkine, directeur exécucelles du Nikkei japonais. Avec 72 fusions-acquisitions croisement entre un chat léopard sous le(BOAD) régime d’Issayas veloppement a accordé,Afewerki. le riennes en avril dernier et l’ad rateurs. « Il faut mettre un terme à l’adhésion Nations unies pour le développement tif du Fonds. à l’étranger en 2006 (21 en 2000), leur poidsqui internad’Asie, un serval africain et un 20 novembre, un prêt de 4 milliards de Monrovia au processus de Kim l’apathie se manifeste, principaleKim(Pnud). ■ Certains pays comme la Tunisie ont tional ne cesse de s’accroître. Leur ment pointpar faible : des de promotion du chat domestique européen, l’anide F CFA (plus de 6 millions d’euros) berley en mai 2007. En 2001, la com l’absence comdéjà réagi. « Les contrôles sanguins investissements mal est, paraît-il, doux comme un SONIA MABROUK munauté internationale avait interdit int au Togo. L’enveloppe servira à financafé africain et la quasi-inexistence insuffisants agneau. Il en a d’ailleurs les menFRANÇOIS des rues de au Liberia d’exporter ses diaman cer un projet de pavage HOLLANDE de structuresdans de transformation », a diamants, la recherche etInoni, le surations : un Ashera, puisque tel premier secrétaire du PS a verAfrique du Nord/ Moyen-Orient qui finançaient le conflit. Avec A près deLe 3 km à Lomé, et à améliorer lancé Ephraïm le Premier miAndéveloppement. est le nom de cette nouvelle race tement livre dans de Ségo-vers, Israël est l’une des principales eaux delepluie le drainage descritiqué nistre camerounais, qui a accueilli L’ÉPIDÉMIE EN CHIFFRES Le cimentier conçue par des généticiens de la lène Royal, son ex-compagne, à qui places diamantaires de la planèt la capitale togolaise. L’aménageà Yaoundé, du 19 au 23 novembre planète. Nouveaux cas Décès dus Taux de prévalence mexicain Cemex société californienne Lifestyle il reproche « d’imputer aux autres Ses exportations de pierres taill ment de 11 km de caniveaux et la 2007, l’assemblée générale de l’Orgataillées d’infection au sida chez les adultes (15-49 ans) (18,25 milliards Pe t s , m e s ur e à l ’â g e a d u l t e la responsabilité » de son échec ont atteint 6 milliards de dol réalisation d’un bassin de rétention nisation interafricaine du café (Oiac). dollars dede dollars de 1,20 m (redressé sur ses pattes face à Nicolas Sarkozy. Un règle2006 0,2 % 68 000 36 000 puis le début de l’année. sont, notamment, au programme. Objectif de cette réunion: calquer le chiffre d’affaires arrière) et pèse au moins 15 kg. ment de comptes pas très élégant. 2007 0,3 % 70 000 25000 en 2006) arrive Mais s’il est parfaitement inof7 ' 8 / ' 3 % ; 9 & 8 ' / ! " 5 5 1 . ) 8 " 4 / + 6 ' 2 0 ; ' 3 8 #ER ) : , ' 2 0 ; ' " $ $ Source : Onusida et Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme en tête. Sans surprise, 41 entreprises chinoises et 20 fensif pour l’homme, l’animal a indiennes figurent au palmarès, aux côtés de grouun prix qui donne envie de fuir HUGO CHÁVEZ pes brésiliens, mexicains et russes. Et l’Afrique ? Seul à toutes jamb es : 22 0 0 0 dolAprès sa défaite au référendum l’égyptien Orascom se glisse dans ce top 100 ! Guère lars l’unité ! Une somme que constitutionnel du 2 décembre, le surprenant au regard de la méthode utilisée. d’aucuns jugent astronomique, président vénézuelien se révèle AFRIQUE Le BCG a en effet retenu quatorze pays émergents d’autant qu’une race semblable, très mauvais perdant. Bien que « en développement rapide », en fonction de critères le Savannah, coûte environ cinq désavoué par 51 % des électeurs, il LE TAUX DE MORTALITÉ DUE À LA ROUGEOLE EN AFRIQUE a baissé de 90 % macroéconomiques (PIB, exportations, etc.). Aucun fois moins cher. On l’aura coma annoncé qu’il allait proposer une entre 2000 et 2006, annonce l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Le n’est africain. Ensuite, il a, dans chacun de ces pays, pris : l’Ashera est un chat de luxe, version simplifiée de sa réforme. nombre des décès est passé de 396 000 en 2000 à 36000 en 2006. L’objectif que sélectionné les entreprises réalisant un chiffre d’affai« fabriqué » en nombre limité l’OMS s’était fixé pour 2010 est donc atteint avec quatre ans d’avance. C’est la res supérieur à 1 milliard de dollars. Or le classement (cent spécimens par an) et réserpremière fois que l’organisation enregistre une telle réussite. ABDELMALEK ROUKDEL 2008 des 500 premières entreprises africaines établi vé à une clientèle de nouveaux L’Afrique n’est plus désormais l’épicentre de ce fléau qu’est la rougeole. Les par Jeune Afrique en recense pas moins de 93 ! On riches américains, russes ou deux pays les plus atteints sont l’Inde et le Pakistan. En 1999, les trois quarts Tout va mal pour l’émir d’Al-Qaïda veut bien admettre que toutes ne sont pas suffisamasiatiques. En Europe, son acquides décès étaient recensés en Afrique. On en dénombre aujourd’hui 74 % en au Maghreb. Ses maquisards sont ment internationalisées pour figurer dans l’enquête du sition nécessite une autorisation Asie du Sud-Est. Ce qui explique que, globalement, le recul de la mortalité ne encerclés en Kabylie, son étatBCG, mais comment expliquer l’absence de la Sonaspéciale. La concurrence n’a dépasse pas 68 %. major est décimé par les forces de trach, numéro un africain avec 61 milliards de dollars donc rien à craindre : caniches, Cette victoire sur la rougeole était aussi l’un des dix Objectifs du millénaire sécurité et l’administration améride chiffre d’affaires en 2006? Le BCG n’a aucun bureau hamsters et autres animaux de pour le développement (OMD) défini par l’ONU, en 2000. Il a été atteint grâce caine vient de décider de geler ses en Afrique. Est-ce l’explication ? Si tel est le cas, elle compagnie ont encore de beaux à une campagne de vaccination qui a coûté 475 millions de dollars et permis (éventuels) avoirs aux États-Unis. n’est pas satisfaisante. ■ jours devant eux. ■ d’immuniser près de 5 millions d’enfants, dans quarante-six pays. ■
Négociations par étapes
D.R.
SIDA Fin dʼun tabou
Le Top 100 des challengeurs
LE CAFÉ À LA RELANCE
Un mini-léopard de salon
SIPA
ENTREPRISES
ACCORD RD AVEC ISRAËL ISRAË ISRAË SUR LE DIAMANT DIA IAM MANT NT
4 MILLIARDS DE F CFA DE LA BOAD
◗ Plus d’infos,
Le Français Michel Barnier ne croit pas au libre-échange dans l’agriculture.
RÉUNIS LE 20 NOVEMBRE à Bruxelles, les ministres européens du Développement « ont endossé l’approche en deux étapes » proposée par la Commission européenne, le mois dernier, pour parvenir à un « arrangement intérimaire » sur les accords de partenariat économique (APE), qui devaient être signés avant le 1er janvier 2008. Les discussions vont à présent porter exclusivement sur le commerce des marchandises, laissant pour plus tard les services et les investissements. Objectif: dresser une liste de produits sensibles pour lesquels les protections douanières seront maintenues. Si un accord est en vue avec les zones Pacifique, Caraïbes, Afrique australe et de l’Est, les pourparlers sont bloqués avec la Cedeao et la Cemac. Par ailleurs, la France et l’Espagne demandent que leurs bananes en provenance des Canaries et des Antilles soient considérées comme des produits sensibles face aux importations de bananes ACP, qui profiteraient d’une ouverture complète du marché européen. « Je ne crois pas que la libéralisation des échanges agricoles soit bénéfique », a récemment déclaré le ministre français de l’Agriculture, Michel Barnier.
ALGÉRIE Sonelgaz
choisit Alstom et General Electric LE GROUPE FRANÇAIS Alstom, menant un consortium avec l’égyptien Orascom Constructions Industries (OCI), a été sélectionné le 21 novembre pour la construction d’une centrale électrique en Algérie d’un
montant de 1,4 milliard d’euros. « Le contrat n’a pas encore été signé », précise toutefois Alstom. La société nationale d’électricité et du gaz algérien (Sonelgaz) confirme avoir choisi cette offre. Cette centrale située à Terga, à 600 km à l’ouest d’Alger, devrait être opérationnelle en 2011. Elle sera dotée d’une puissance totale de 1200 mégawatts. Par ailleurs, Sonelgaz a annoncé le même jour avoir attribué à l’américain General Electric associé à l’espagnol Iberdorla la construction d’une seconde centrale, dans la région d’El-Tarf, dans l’extrême-est du pays, pour un montant de 1,45 milliard d’euros. Elle devrait être livrée dans quarante-huit mois.
MAROC Nouvelle exploitation de phosphate en 2008 LE COMPLEXE PHOSPHATIER de Jorf Lasfar, dans l’ouest du Maroc, exploité par le groupe brésilien Bunge, doit démarrer sa production au début de l’année 2008, selon un dirigeant de l’Office chérifien des phosphates (OCP). Ce projet, qui a nécessité un investissement global de 1,8 milliard de dollars, a été lancé en 2005 avec la création d’un joint-venture. La production doit atteindre 375000 tonnes d’acide phosphorique et 300000 tonnes d’engrais par an. Bunge – gros client de l’OCP – est le premier importateur, producteur et distributeur d’engrais en Amérique du Sud, un marché en forte croissance. Plus de 6000 tonnes de phosphate brut sont extraites quotidiennement du site de Jorf Lasfar, la plus grande plate-forme mondiale intégrée de production d’acide phosphorique.
Céréales subventionnées BURKINA
LE GOUVERNEMENT BURKINABÈ a commencé à mettre en vente, le 17 novembre, 1600 tonnes de maïs et de mil à prix réduit pour enrayer la spéculation provoquée par un déficit de production. Les sacs de 100 kg sont vendus à 9000 F CFA (13,70 euros), contre 16000 F CFA chez les commerçants. Pour le moment, cette opération concerne uniquement les régions de Ganzourgou, Kourittenga, Boulgou et Koulpélogo, même si, selon les autorités, le déficit céréalier concerne quinze des vingt-cinq provinces du pays. Le ministère de l’Agriculture espère ainsi ramener à un « juste niveau » le prix des denrées alimentaires.
AGENDA
30 NOVEMBRE Tunis, TUNISIE
EUROPE-AFRIQUE Forum consacré aux partenariats publicprivé, initiant une série de conférences de très haut niveau devant se tenir en Afrique (Johannesburg, Alger, Luanda, Accra, etc.) jusqu’en 2012, à raison de deux par an. www.premiercercle.com
1ER DÉCEMBRE
Paris, FRANCE
GRANDES ÉCOLES 12e forum Horizons Maroc, favorisant les échanges professionnels entre étudiants et entreprises, organisé par l’Association des Marocains des grandes écoles (AMGE). www.amge-caravane.com
4-5 DÉCEMBRE Dakar, SÉNÉGAL
MED-IT Édition Afrique de l’Ouest des Med-IT 2007, journées d’exposition professionnelle, conférences et rencontres d’affaires sur les technologies de l’information. www.medit.eu.org
6 DÉCEMBRE
Paris, FRANCE
FINANCE ISLAMIQUE Premier forum français de la finance islamique, organisé par la Chambre de commerce francoarabe et le groupe Secure Finance. www.ccfranco-arabe.org
7 ' 8 / ' 3 % ; 9 & 8 ' / ! " 5 5 1 . ) 8 " 4 / + 6 ' 2 0 ; ' 3 8 #ER ) : , ' 2 0 ; ' " $ $ -
La rougeole vaincue
SIPA
◗ Une nouvelle identité visuelle.
D.R.
plus d’analyses, d’enquêtes et de reportages.
SIPA
Beaucoup de firmes chinoises et indiennes. Mais une seule africaine : Orascom.
COURTOIS/SIPA
LA GRANDE INTERVIEW
D.R.
Retrouvez François Soudan sur son blog « Courrier Sud » (http://soudan.blog.jeuneafrique.com)
SOMMAIRE 7 !" %!$#
REUTERS
NI TOUT À FAIT LE MÊME, NI TOUT À FAIT UN AUTRE. Alors que J.A. est entré depuis deux mois dans sa 48e année, votre hebdomadaire modifie en profondeur son identité visuelle tout en restant fidèle aux valeurs, FRANÇOIS aux engagements et aux SOUDAN nécessités qui ont présidé à sa fondation par Béchir Ben Yahmed, un jour d’octobre 1960, en terre africaine. Donner du sens à l’Afrique, être le porte-voix et la conscience d’un continent, lui offrir la place qu’elle mérite sur la grande scène mondiale de l’information : ces exigences d’il y a un demi-siècle sont toujours d’actualité. Elles sont même plus impérieuses que jamais. Mais pourquoi changer, au juste ? Après tout, nous aurions pu nous contenter de notre situation de quasi-monopole : unique hebdomadaire panafricain et seule publication de cette catégorie certifiée par l’OJD, J.A. est depuis sa création le leader incontesté sur son marché. Outre le fait que l’autosatisfaction n’est pas le genre de la maison, nous avons voulu, avec cette nouvelle formule, prendre en compte l’évolution des habitudes induite, y compris en Afrique, par ce phénomène majeur de communication globale qu’est Internet. Plus de dynamisme dans la forme donc, plus de niveaux de lecture, plus de photos, mais aussi plus de sujets abordés, plus de place pour l’économie et les affaires, plus de débats, plus de rubriques, et une meilleure interactivité avec un lectorat à la fois rajeuni et de plus en plus mondialisé à travers les diasporas. Ces éléments de fond seront progressivement mis en place tout au long de l’année 2008, en parallèle avec le développement continu de notre site Internet et avec le renforcement de notre présence dans le monde anglophone, via notre périodique The Africa Report. Si J.A. s’écrit en français, en effet, ce n’est pas par choix mais par hasard historique. Et ce n’est absolument pas un hasard si nous avons voulu que le premier « grand interviewé » de ce nouveau J.A. soit, justement, un Africain anglophone dont le message transcende les clivages linguistiques hérités de la colonisation : le Prix Nobel nigérian Wole Soyinka. Bonne lecture... ■
SOMMAIRE
Dans J.A. et nulle part ailleurs
RUETERS
ÉDITORIAL
« Jeune Afrique » change
RENÉ GUYONNET
PIERRE-FRANCOIS NAUDÉ
7 ' 8 / ' 3 % ; 9 & 8 ' / ! " 5 5 * . ) 8 ( 3 8 #4 ) : , ' 2 0 ; ' " $ $ -
JEAN-MICHEL MEYER
EN BAISSE
7 ' 8 / ' 3 % ; 9 & 8 ' / ! " 5 5 * . ) 8 ( 3 8 #4 ) : , ' 2 0 ; ' " $ $ -
L’Offre Intégrale
LES 3 HORS-SÉRIES INCONTOURNABLES DU CONTINENT AFRICAIN
1 an d’abonnement + les 3 hors-série
119 € au lieu de 177 € *
soit une économie de 58 € Disponibles également sur www.jeuneafrique.com
BULLETIN D’ABONNEMENT
À compléter et à retourner à COM&COM - Groupe Jeune Afrique 20 Avenue Edouard Herriot, 92350 Le Plessis-Robinson France - Tél. +33 1 40 94 22 22
❒
Oui
je souhaite m’abonner à l’Offre Intégrale : 1 an d’abonnement : 44 n° + 4 n° doubles + 3 hors-série
pour
119 € au lieu de 177 € *
❒ Europe 149 €
J’indique mes coordonnées Nom
Prénom
Société
Fonction
Adresse Code postal
Ville
Pays
Tél.
.
@
❒ Maghreb / Zone CFA 169 € ❒ Reste du Monde 219 € * Tarif France métropolitaine par rapport au prix de vente en kiosque.
Retrouvez cette offre sur www.jeuneafrique.com Offre valable jusqu’au 31/08/2008. Conformément à la loi informatique et liberté (art.34) vous disposez d’un droit d’accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant auprès du groupe Jeune Afrique 20 avenue Édouard Herriot - 92350 LE PLESSIS ROBINSON • CIDCOM SA au capital de 24 600 000 e - 57 bis rue d’Auteuil 75016 PARIS - SIRET : 337 655 682 00033 - Code Activité : 221E - TVA FR 35 337 655 682
Pages ABO NJA.indd 1
Je joins mon règlement par ❒ Chèque bancaire en euros libellé à l’ordre de CIDCOM ❒ Carte bancaire n° ❒ Visa
❒ Mastercard
❒ Amex
Date de validité Signature obligatoire :
❒ À réception de facture (pour les sociétés uniquement)
PJNF8
❒ USA / Canada 209 €
4/09/08 18:02:20
32 AFRIQUE SUBSAHARIENNE
AFRIQUE DU SUD LʼANC FACE AU CAS ZUMA
Accusé de corruption, le président de lʼANC a finalement bénéficié dʼun non-lieu. Ses démêlés avec la justice ont toutefois mis en lumière de profondes divisions au sein du parti au pouvoir.
D
FABIENNE POMPEY
ZAPIRO/SUNDAY TIMES
écembre 2007, Jacob Zuma gagne la bataille pour le contrôle du Congrès national africain (ANC). Thabo Mbeki quitte la scène la tête basse et laisse à son ancien bras droit un parti en charpie, marqué par des mois de luttes intestines. À quelques mois de l’élection présidentielle, à laquelle Zuma est désormais le candidat naturel, le mouvement de libération, qui fêtera son centenaire en 2012, ne se porte guère mieux qu’il y a un an. L’ANC continue d’étaler au grand
jour ses divisions et de laver son linge sale sur la place publique. La principale source de discorde reste le président de l’ANC lui-même, et les soupçons de corruption qui ont miné sa réputation et entâché l’image du parti. Les principaux soutiens de Zuma, le Congrès des syndicats sud-africains (Cosatu), le Parti communiste et la bouillante Ligue des jeunes de l’ANC (Ancyl) ont mené pendant des semaines une campagne tonitruante. Non pas pour clamer l’innocence de leur mentor, mais pour que celui-ci échappe à la justice. Leur argumentaire n’a pas changé: Zuma étant victime d’un complot politique, il ne doit pas être jugé pour cor-
Caricature publiée par le Sunday Times représentant Jacob Zuma prêt à violer une femme incarnant la justice, maintenue par les syndicats et les partis de sa majorité.
ruption, racket et blanchiment d’argent, mais doit bénéficier d’une « solution » politique. « Que l’on me juge ! Et que l’on mette un terme aux calomnies », proclamait Jacob Zuma, au début de ses démêlés judiciaires, en 2005. Voyant l’étau se resserrer, il a adopté une autre tactique: éviter un procès, quitte à laisser pour toujours planer le doute sur sa culpabilité. « PRÊT À MOURIR POUR ZUMA »
Le 12 septembre, le juge Chris Nicholson a décidé d’abandonner les poursuites contre Zuma pour vice de forme. Mais, même si le président de l’ANC a échappé à un procès, ni lui, ni son parti ne sortent grandis de cette affaire. Quelques jours avant que le juge prenne sa décision, l’ANC avait estimé qu’il n’était pas « dans l’intérêt du pays que l’affaire poursuive son cours devant la justice ». On peut se demander en quoi le fait de laisser la justice faire son travail aurait été dommageable à la jeune démocratie sud-africaine. Le camp Zuma avait la réponse : « Si le président de l’ANC est condamné, le pays risque de basculer dans le chaos. » Au mois de juillet, déjà, Julius Malema, le président de l’Ancyl, se disait « prêt à mourir pour Zuma, prêt à prendre les armes et à tuer pour lui ». On aurait pu croire qu’il s’agissait d’un malheureux dérapage, imputable à la fougue d’un jeune leader tout juste élu. Mais les aînés n’ont pas réprimandé, en tout cas pas immédiatement, le trublion. Le secrétaire général du Cosatu, Zwelinzi-
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
032-033 ASS OUV 2488.indd 32
12/09/08 18:08:11
AFRIQUE SUBSAHARIENNE 33 qu’il est meilleur que nous tous », se plaint un membre de la direction du parti. À bientôt 70 ans, Kgalema Motlanthe fait en effet figure d’élément modérateur. Sa barbiche blanchissante, sa longue histoire au sein de l’ANC, ses dix années de prison à Robben Island, son expérience comme secrétaire général du parti de 1997 à 2007, en font un homme d’expérience, dont la conception de la politique dépasse les querelles intestines.
Zuma, avec le vice-président du parti, Kgalema Motlanthe, à l’issue du congrès de l’ANC, le 18 décembre 2007, à Polokwane.
ma Vavi, a même renchéri, se déclarant lui aussi « prêt à tuer ». Plus récemment, il a également brandi la menace d’une grève générale. Pour éviter le procès, les alliés ont évoqué de multiples scénarios : amnistie, commission vérité, abandon pur et simple des charges et même modification de la Constitution pour empêcher le jugement d’un chef d’État en exercice. Une attaque directe contre les institutions qui a soulevé l’indignation de l’opposition. Le caricaturiste Zapiro a résumé cet outrage à la justice par un dessin qui a fait scandale dans le camp Zuma (voir ci-contre). Au milieu de cette charge tonitruante, une voix s’est élevée dans les rangs de l’ANC pour ramener les troupes à l’ordre, celle du vice-président du parti.
Kgalema Motlanthe a rappelé quelques principes simples, comme l’obligation de respecter l’indépendance de la justice et les institutions du pays. Sans manifester le respect habituellement dû aux aînés, la Ligue des jeunes est revenue à la charge, demandant à Motlanthe « de ne pas se comporter comme si Zuma n’était déjà plus là ». « Se balader en défendant l’indépendance de la justice dans le cas Zuma, c’est inquiétant », lâchait le porte-parole de l’Ancyl, Floyd Shivambu, au moment où toute une partie de la classe politique, des milieux d’affaires et de la société civile s’inquiète des attaques contre le système judiciaire. « Il donne l’impression que nous ne sommes qu’une foule hors de contrôle, qu’il est le sauveur, la voix de la raison,
JEROME DELAY/AP/SIPA
CHASSE AUX SORCIÈRES
Aujourd’hui, ses adversaires lui reprochent de ne pas participer à la chasse aux sorcières qui a suivi la victoire des « Zumistes » sur les « Mbekistes ». Il a ainsi choisi Kader Asmaal, ancien ministre de l’Éducation, comme conseiller. Ce dernier s’est vivement élevé contre les dérives verbales des pro-Zuma et défend avec ferveur les institutions. Motlanthe a aussi agacé en nommant Trevor Manuel, actuel ministre des Finances, et Valli Moosa, deux hommes étiquetés pro-Mbeki, dans le stratégique comité de l’ANC chargé des nominations aux postes clés dans le service public. Discret, mesuré, Motlanthe a travaillé au cœur de l’ANC aux côtés de Thabo Mbeki pendant dix ans. Dès l’élection de Zuma à la tête du parti, reconnaissant que la bataille MbekiZuma avait empoisonné les relations dans le parti à tous les niveaux, il prévenait : « Si nous ne sommes pas vigilants, nous pourrions facilement glisser dans un abysse sans fin où nos convictions révolutionnaires se perdraient dans une politique opportuniste réduite aux manœuvres électorales. » Pour le moment, le parti peut se permettre de glisser sur cette pente savonneuse ; l’ANC règne encore sans conteste sur la scène politique, rien ne l’empêchera de remporter les prochaines élections, et rien, pas même les soupçons de corruption qui continuent à peser malgré le non-lieu, n’empêchera Zuma d’être le futur président de la République. Cependant, dans cette tempête, le parti que les Nelson Mandela, Govan Mbeki et Walter Sisulu avaient élevé au rang de modèle pour l’Afrique perd peu à peu de son aura et de son crédit. À travers l’ANC, c’est l’image de l’Afrique du Sud, de sa démocratie et de ses institutions qui est en péril. ■
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
032-033 ASS OUV 2488.indd 33
12/09/08 18:08:17
34 AFRIQUE SUBSAHARIENNE
MALI
Miliciens contre rebelles Une mystérieuse milice dʼautodéfense sème un vent de panique au sein de la population touarègue et arabe... et inquiète les autorités.
D
epuis le 23 mai 2006, début ALGÉRIE de la troisième rébellion touarègue de l’histoire du Mali MALI indépendant, jamais la cohésion nationale n’a paru aussi MAURITANIE ANSONGO menacée. Le 1er septembre, dans la région d’Ansongo (à 950 km au nord-est de Bamako NIGER Bamako), quatre Touaregs BURKINA ont été enlevés par des homFASO mes encagoulés lors d’une paisible foire aux bestiaux. Ils ont ensuite été exécutés Les corps de quatre Touaregs assassinés ont été retrouvés le 1er septembre près d’Ansongo. d’une balle dans la tête. Pourquoi un fait divers a-til déclenché une telle panique chez les À la suite de la reprise de la rébellion autorités civiles et militaires de la septouarègue, le 23 mai 2006, emmenée tième région du pays? par Ibrahim Ag Bahanga et le lieuteLe crime d’Ansango n’a pas été revennant-colonel Hassan Fagaga, le président diqué, mais toutes les pistes mènent vers Amadou Toumani Touré (ATT) veut un mystérieux groupuscule armé se faiprivilégier un règlement politique de sant appeler Gandaïzo, « les Fils de la l’affaire. Les multiples tentatives de diaterre ». Cette organisation revendique logue ayant échoué, il donne alors son l’héritage du Mouvement patriotique du feu vert à une médiation algérienne. Un Ganda Koye (MPGK). De triste mémoiaccord de paix est signé le 4 juillet 2006 re, cette milice d’autodéfense composée à Alger, mais ce texte va rester lettre d’éléments de l’armée malienne s’est morte. L’intrusion de la Libye en 2007 illustrée par les nombreux massacres dans le dossier ne permet pas, non plus, commis au début des années 1990 de faire de progrès significatifs. contre les « populations blanches » du septentrion malien – tamacheks et araOFFICIERS EXCÉDÉS bes. Le Ganda Koye – les Propriétaires Pendant ce temps, sur le plan militaide la terre – a été dissous en mars 1996, re, la rébellion marque des points. Elle dans la foulée de la dissolution des orgamine les axes routiers, multiplie les attanisations rebelles touarègues avec, à la ques contre les positions de l’armée et clé, une amnistie générale. Ses éléments grossit le nombre de soldats prisonniers. ont été réadmis au sein des forces de Si l’armée malienne affiche un authentisécurité. Quant à ses dirigeants, ils ont que esprit républicain, certains officiers, été intégrés dans la fonction publique. excédés par « l’excessive prudence des
PUB PROMOTION D’AUTOMNE VOYAGEZ ENTRE L’EUROPE ET L’AFRIQUE À PRIX D’AMI
RÉSERVEZ AVANT LE 30 SEPTEMBRE, VOYAGEZ JUSQU’AU 30 NOVEMBRE 2008
JA2488p034.indd 34
politiques », réfléchissent à la possibilité de recréer le Ganda Koye. Informé de ce projet par la Sécurité d’État, l’entourage d’ATT ne panique pas, et maintient sa confiance dans le commandement. Le 10 avril 2008, le commandant Barka Cheikh, un officier touareg loyaliste, est assassiné à Kidal par des militaires en uniforme. L’enquête diligentée par ATT se noie dans les sables de l’Adrar des Ifoghas. Le spectre du Ganda Koye refait surface. Reste à savoir qui est à l’origine de ce subit retour de flamme. Ancien cadre de la milice d’autodéfense, le lieutenant Amadou Diallo a quitté l’armée en 1996 à la suite de la dissolution du Ganda Koye, pour être affecté aux Entrepôts maliens au Sénégal, une entreprise gérant les importations maliennes transitant par le port de Dakar. Curieusement, il y a quelques mois, l’ex-officier abandonne son poste de travail. Il se rend alors dans la région de Gao et fait campagne pour le recrutement de jeunes Peuls désirant faire barrage aux rebelles touaregs. Il monte un camp d’entraînement près de la frontière entre le Mali et le Niger. Amadou Diallo baptise son organisation Gandaïzo. L’assassinat, le 1er septembre, des Touaregs d’Ansongo est sans doute l’acte fondateur des héritiers du Ganda Koye. Prenant la mesure du danger, ATT a aussitôt mobilisé la Sécurité d’État pour neutraliser les activistes. En une semaine, les forces de l’ordre ont arrêté vingt-deux personnes liées à l’affaire. Avec pour objectif prioritaire d’arrêter les meurtriers avant le déclenchement d’une incontrôlable vendetta entre Maliens. Pour Bamako, il s’agit de calmer le jeu alors que le chef touareg Ibrahim Ag Bahanga a fait libérer le 9 septembre les 44 militaires encore détenus par la rébellion. Ce qui constitue un progrès majeur vers un règlement du conflit. ■ CHERIF OUAZANI
brusselsairlines.com 1/8 page
format total : L = 205 x H = 45 surface utile : L = 185 x H = 25
12/09/08 14:47:27
AFRIQUE SUBSAHARIENNE 35
PROFIL
François Muamba
Depuis lʼarrestation de Jean-Pierre Bemba à Bruxelles le 24 mai dernier, il assure lʼintérim à la tête du Mouvement pour la libération du Congo. Peut-il espérer lui succéder ?
LES DEUX HOMMES SE SONT RENCONTRÉS pour la première fois à Kinshasa, en novembre 1991. À l’époque, Muamba est ministre de l’Économie. Il vient de rentrer au Zaïre, après avoir claqué la porte de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), qu’il représentait à Paris – où vit son épouse et où il possède une résidence. Mobutu vient de promettre la « démocratisation »… Muamba ne reste pas ministre plus d’un mois et finit en conseiller du maréchal jusqu’à sa chute, en 1997. Il rencontre à cette époque Jean-Pierre Bemba, alors homme d’affaires. Tous les deux sont diplômés de l’Institut catholique des hautes études commerciales (Ichec), à Bruxelles. Entre Bemba,
VINCENT FOURNIER/J.A.
D
epuis que Jean-Pierre Bemba réside au quartier pénitentiaire de la Cour pénale internationale (CPI), à La Haye, c’est François Muamba, secrétaire général du Mouvement pour la libération du Congo (MLC), qui assure la présidence par intérim du parti. Âgé de 57 ans, le numéro deux du MLC joue son rôle d’intermittent avec loyauté. Trois semaines après l’arrestation de Bemba à Bruxelles pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, il s’insurge, au cours d’une conférence de presse, contre la justice belge. « Cette façon de le faire passer pour un bandit en cavale, c’est inadmissible ! » Entouré des avocats de la « victime », il relève les incohérences du dossier. Message implicite: Bemba est la cible d’un complot politique. Pour lui, le sénateur de l’Équateur est encore le chef. Et, même dans une cellule, il le restera tant que son empêchement n’est pas jugé définitif et que court son mandat de cinq ans. Un mandat qui expire en 2011. Grand, robuste, à l’aise en costume cravate, père de deux filles, Muamba ne laisse pas transparaître l’ambition de prendre la place du calife. Il est vrai qu’il serait malvenu de se ruer trop vite sur le trône… Mais, à l’entendre, c’est lui qui, de tous les cadres du MLC, est le plus proche de Bemba. « J’ai avec lui un rapport de confiance d’homme à homme », assure-t-il, avant de se comparer au dernier des Mohicans. Une allusion à Olivier Kamitatu, secrétaire général du parti dès sa création, qui l’a quitté en 2005. Muamba, fidèle serviteur de Bemba, son homme lige, serait donc… le mieux placé pour lui succéder? Difficile de croire que l’idée ne taraude pas le président par intérim.
le fils de l’Équateur, et Muamba, celui du Kasaï oriental (il en est député et il vient d’y passer ses vacances), pas de fraternité régionale, mais la camaraderie des anciens élèves d’une même école. ILS SE RETROUVENT EN 1999. Bemba a fondé le MLC un an plus tôt, et Muamba, qui veut entrer dans la lutte contre Kabila père, va le rejoindre à Gbadolite. Le chef de guerre a besoin de techniciens. Muamba est nommé secrétaire national chargé de l’Économie et des Finances, puis changera plusieurs fois de poste pour finalement succéder à Olivier Kamitatu, en 2005. En dix ans, leur relation est restée avant tout politique. « Muamba ne fait pas partie des intimes de Jean-Pierre », assure un proche de Bemba. « Entre eux, le lien est fonctionnel », renchérit Yves Kisombe, député de Kinshasa, radié du MLC en mars dernier. En fait, Jean-Pierre le guerrier et François le technocrate sont complémentaires. « Bemba, c’est un homme qui sait commander des troupes, estime Roger Lumbala, ancien de l’UDPS. Il a du caractère, il sait faire peur aux gens. À côté, François est un homme de dossiers. » Régionalisme oblige, Muamba n’est guère populaire auprès des membres du MLC originaires de l’Équateur, majoritaires. D’autres dénoncent son chauvinisme. « Au siège du parti, certains l’appellent le président du MLK, le mouvement de libération du Kasaï », ironise Yves Kisombe. Autre handicap souvent relevé: son manque de charisme. « Il n’est pas un tribun comme Jean-Pierre », confie un proche qui veut garder l’anonymat. Mais pour les dix ans du MLC, qui seront célébrés en octobre à Kinshasa, c’est Muamba qui sera là, au milieu des partisans. Tandis que Bemba, lui, attendra seul à La Haye sa première audience, prévue le 4 novembre. ■ MARIANNE MEUNIER
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p035.indd 35
11/09/08 18:14:36
36
Nana Akufo-Addo, candidat du New Patriotic Party (au pouvoir depuis 2001).
GHANA
Lʼaprès-Kufuor en ligne de mire La campagne pour la présidentielle du 7 décembre est lancée. Les meetings se déroulent dans un climat relativement serein, sur fond dʼembellie économique.
D
émocratie stable, économie en plein essor, afflux des investissements étrangers… A pr ior i, tout plaide en faveur d’une élection sans problème le 7 décembre prochain, lorsque les Ghanéens devront choisir un successeur au président John Kufuor et renouveler l’Assemblée nationale. Pourtant, John Atta Mills (64 ans), ancien vice-président de 1997 à 2001 et candidat à la présidentielle sous les couleurs du National Democratic Congress (NDC), le principal parti d’opposition, agitait au début de l’année l’épouvantail d’un
scénario « à la kényane », prédisant « des élections truquées débouchant sur une guerre civile ». Simple épouvantail électoraliste, ou mise en garde à l’adresse du pouvoir contre la tentation de tricher ? Kofi Konadu Apraku, le directeur de campagne du candidat Nana Akufo-Addo, du New Patriotic Party (NPP, au pouvoir depuis 2001), ne voit dans ces déclarations alarmistes que « des palabres pour anticiper une probable défaite et détourner l’attention de l’opinion des véritables enjeux ». Pourtant, la commission électorale, réputée pour sa compétence et son indépendan-
CKWESSI/APA
L’opposition évoque malgré tout le spectre d’un scénario « à la kényane ». ce, s’est plainte de n’avoir reçu que tardivement les fonds devant servir aux opérations d’enregistrement des nouveaux votants. Les actes de violence recensés dans certaines régions du pays renforcent les craintes de l’opposition, selon laquelle « plus d’un million de personnes en âge de voter n’auraient pas pu obtenir leur carte d’électeur », affirme Papa Kwesi Nduom, candidat du Convention People’s Party (CPP), le parti de Kwame Nkrumah, premier président du Ghana. Ce dernier aimerait jouer les trouble-fête dans le duel annoncé entre Atta Mills et Akufo-Addo. Malgré les bonnes performances de Kwesi Nduom en tant que ministre de l’Économie puis de l’Énergie entre 2001 et 2007, son parti ne devrait se contenter que d’un rôle de force d’appoint, pour faire basculer la majorité d’un côté ou de l’autre. Dans la capitale, Accra, l’effervescence est palpable. Les partis rivalisent de slogans sur d’immenses panneaux d’affichage et débattent, parfois avec virulence, sur les plateaux des chaînes de télévision. Bref, la campagne est bel et bien lancée. Arrivé au terme des deux mandats de quatre ans, comme l’autorise la Constitution, le président Kufuor peut se prévaloir d’un bilan honorable. Aidé par la hausse des cours des matières premières, notamment l’or et le cacao, dont le Ghana est l’un des principaux producteurs, le taux de croissance moyen a atteint 5,7 % entre 2003 et 2007. Cette expansion a permis la réalisation de nombreux chantiers d’infrastructures, notamment le désenclavement routier des régions déshéritées du Nord, bastion de l’opposition. Par ailleurs, la construction d’une nouvelle usine d’aluminium dans l’Ouest et la découverte de pétrole offshore en 2007 ont permis de jeter les bases d’une diversification de l’économie. La production pétrolière devrait avoisiner les 200 000 barils par jour d’ici à 2012, et les compagnies présentes, l’irlandaise Tullow Oil et les américaines Kosmos Energy et Anadarko, n’excluent pas de nouvelles découvertes. Du coup, les investisseurs se bousculent au
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p036-037.indd 36
11/09/08 19:31:04
AFRIQUE SUBSAHARIENNE 37 portillon. Ainsi, l’obligation d’État de 750 millions de dollars lancée en septembre 2007 a été souscrite pour plus de quatre fois son montant. Les géants bancaires nigérians – United Bank for Africa (UBA) en tête – ont débarqué dès 2006 et contribué à la modernisation du secteur. Quant aux télécoms, la vente de 70 % de l’opérateur public Ghana Telecom au britannique Vodafone pour 900 millions de dollars, et l’acquisition par le koweïtien Zain et par le nigérian Globacom des cinquième et sixième licences de téléphonie mobile (montants respectifs des transactions: 120 millions et 50 millions de dollars) font du Ghana l’un des marchés les plus concurrentiels du continent. Enfin, la construction en cours, dans le centre d’Accra, d’hôtels
cinq étoiles Hilton et Mövenpick, témoigne de l’attractivité du pays, qui jouit d’une bonne image à l’étranger. LE CÉDI DÉPRÉCIÉ
Pourtant, le NDC, de sensibilité sociale-démocrate, qui fut au pouvoir sous Jerry Rawlings (1981-2000), accuse Nana Akufo-Addo et le gouvernement dans lequel il a été successivement ministre de la Justice et des Affaires étrangères de ne pas avoir amélioré le quotidien des 24 millions de Ghanéens, dont 45 % vivent avec moins de 1 dollar par jour. L’opacité des contrats pétroliers, la corruption grandissante et l’implication présumée de certains barons du pouvoir dans le trafic de drogue sont les autres thèmes de cam-
pagne que l’opposition entend utiliser pour attaquer l’équipe sortante. Alors que depuis le début de 2008 l’économie montre des signes de faiblesse – le cédi a perdu 20 % de sa valeur en six mois – et que la situation budgétaire reste tendue, le gouvernement affiche néanmoins sa confiance. « Pourquoi les Ghanéens reviendraient-ils en arrière alors que nous leur proposons d’aller de l’avant? » demandent les partisans du NPP, qui se targuent d’avoir restauré la liberté d’expression après la répression des années Rawlings. Quel que soit le résultat de l’élection, tout le monde s’attend à un scrutin serré entre les deux poids lourds de l’échiquier politique. ■ FODÉ TRAORÉ,
envoyé spécial à Accra
TOGO
Gilbert Fossoun Houngbo, un expert au pied du mur Lʼancien directeur régional du Programme des Nations unies pour le développement a été nommé le 7 septembre à la primature. Sa mission : relancer lʼéconomie.
L
D.R.
e nouveau Premier ministre dent d’apports extérieurs, le nouveau togolais, Gilbert Fossoun Premier ministre a donc le profil de Houngbo, 47 ans, a eu à l’emploi. peine le temps de rejoindre En revanche, pour avoir fait l’esla primature qu’il est déjà sollicité sentiel de sa carrière à l’étranger, sur un sujet crucial : la réunion des c’est aux réalités de la politique intébailleurs de fonds qui a lieu du 18 rieure togolaise que cet ancien Newau 19 septembre à Bruxelles. FamiYorkais d’adoption, amateur de jazz lier de la communauté des experts et de blues, devra s’adapter. Prenant en développement, dont il est issu, la suite d’un poids lourd de la politiLe président Faure Gnassingbé recevant l’ancien directeur régional du Proque locale, chef d’un gouvernement le nouveau Premier ministre. gramme des Nations unies pour le d’union nationale, sa qualité d’homdéveloppement (Pnud) va, pour la me neuf est susceptible d’améliorer première fois, être de l’autre côté de la table des discussions. la collaboration avec les ministres de l’opposition. Originaire Nommé le 7 septembre, Gilbert Houngbo est fort heureude la région centrale, qui vote traditionnellement pour le Rassement rompu aux arcanes de la coopération internationale semblement du peuple togolais (RPT, au pouvoir), Houngbo et ne devrait pas avoir de difficultés à s’adapter. Familier des n’a pour autant jamais exercé de mandat électif, ni appartenu politiques d’aide publique au développement, il a pour mission à aucun parti politique. de « faciliter et accélérer » l’attribution des fonds. Avec un chef de l’État diplômé de gestion et un Premier À deux ans de la prochaine présidentielle, Faure Gnassingbé ministre expert-comptable, l’exécutif togolais a tout les atouts attend aussi de lui qu’il améliore un bilan du gouvernement pour relever le défi de la compétence sur les dossiers éconojusqu’ici médiocre. Le Togo, qui se relève de près de quinze miques. Il faudra cependant à Gilbert Houngbo une bonne années de sanctions économiques imposées par la commudose de volontarisme politique, qui semble avoir fait défaut au nauté internationale pour cause de déficit démocratique, veut Premier ministre sortant, le très discret Komlan Mally. Avec relancer l’activité, favoriser l’émergence d’un secteur privé pro61 % de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté, ducteur de richesses et s’attaquer au chantier d’infrastructures. il y a urgence. ■ GEORGES DOUGUELI Alors que 80 % des investissements publics du pays dépenJ E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p036-037.indd 37
11/09/08 19:31:22
38
JUSTICE
Indemniser les femmes violées
L
ALIOU MBAYE/PANAPRESS
e 10 septembre, le conseil de direction du « Fonds au profit des victimes », rattaché à la Cour pénale internationale (CPI), a lancé un appel. Objectif : récolter 10 millions d’euros pour venir en aide au 1,7 million de victimes de violences sexuelles dans les quatre pays où la Cour a entamé des procédures judiciaires (Soudan, RD Congo, Centrafrique et Ouganda). Comme l’a expliqué Simone Veil, présidente du fonds, la somme collectée financera notamment la fourniture de matériel sanitaire, la création de centres de dépistage du sida, l’organisation de programmes de formation professionnelle… Autant de projets qui seront mis en œuvre par des ONG locales. L’appel s’adresse avant tout aux États qui ont signé le « statut de Rome » – le texte fondateur de la CPI –, mais les dons des particuliers sont aussi les bienvenus. L’aide aux victimes est un pan important de la mission de la CPI. L’institution de La Haye, active depuis 2003, s’est donné pour but de juger, mais aussi de réparer. Pourtant, en 2008, c’est une toute petite part de son budget qui est affectée au « Fonds au profit des victimes » : 900 000 euros, sur 90 millions au total… Opérationnel depuis 2007, celui-ci est surtout financé par des dons. ■
AFRIQUE DE L’OUEST 130000 SINISTRÉS Inondations dans les rues de Dakar… mais aussi au Togo, au Ghana, au Bénin, au Niger, au Burkina et au Mali. Les inondations ont affecté plus de 130 000 personnes, estime le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (Ocha) de l’ONU. De nombreux villages et quartiers ont été submergés, des récoltes détruites… Toutefois, les mécanismes de prévention ont permis de limiter les dégâts. En 2007, 800 000 personnes avaient été touchées. Et l’on avait dénombré plus JEAN-DOMINIQUE GESLIN de 200 morts, contre 30 cette année. ■
GUINÉE
Fausse drogue et vrai poisson séché
I FRANÇOIS BOUCHON / LE FIGARO
MARIANNE MEUNIER
Simone Veil, présidente du conseil du « Fonds au profit des victimes ».
l n’est que 6 h 30, ce 4 septembre, quand les policiers de Ratoma, en banlieue de Conakry, interceptent un camion soupçonné de convoyer de la cocaïne et du chanvre indien. Informés, les « bérets rouges » de la garde présidentielle et les gendarmes arrivent sur les lieux. Le camion est conduit au PM3, le centre de détention de la gendarmerie. Les autorités réagissent vite. Peut-être trop. Le Premier ministre Ahmed Tidiane Souaré fait un aller-retour à Wawa, le village du président Lansana Conté, pour un entretien. De retour à Conakry, accompagné des ministres des Affaires étrangères et de la Sécurité, il rejoint au PM3 le corps diplomatique et les journalistes pour assister à l’incinération de la drogue. Et là, surprise! La prise se résume à du poisson séché et quelques draps made in China. Selon un spécialiste de la lutte contre la drogue, « cette histoire ridicule » renforce les soupçons pesant sur les militaires, qui auraient cru avoir affaire à l’un de leurs convois. « Ils doivent toujours s’assurer que la marchandise arrive à bon port. À moins
qu’ils n’aient fait diversion pendant que le vrai chargement disparaissait. » Quant à la décision de convoquer les diplomates, cet expert l’explique par « la volonté de faire croire à la communauté internationale que les forces de sécurité sont vigilantes ». Le tapage autour de l’affaire du camion est survenu deux jours après les révélations sur un débarquement suspect opéré dans la nuit du 30 au 31 août à l’aéroport de Boké (à 300 km de Conakry). Le maire et le gouverneur de la localité seraient actuellement retenus au PM3, et le chef de zone militaire a été entendu par la justice. Ils auraient donné l’autorisation de se poser à un avion qui, selon des journalistes, a déchargé de la drogue. L’affaire du « poisson séché » serait-elle une simple coïncidence ou un coup médiatique raté? Au final, elle embarrasse les autorités alors que Conakry s’apprête à accueillir, les 25 et 26 septembre, la rencontre des services africains chargés de la lutte contre les drogues organisée par Interpol. ■ CÉCILE SOW
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p038-039.indd 38
11/09/08 21:09:53
AFRIQUE SUBSAHARIENNE 39
TCHAD -BANQUE MONDIALE
Le divorce est prononcé
Lʼinstitution internationale se désolidarise de NʼDjamena, les autorités nʼayant pas respecté leur promesse dʼaffecter les pétrodollars à la lutte contre la pauvreté.
SÉNÉGAL
B
en juillet 2006. Apparemment, c’était encore trop pour le régime d’Idriss Déby Itno, en butte à une rébellion et dans l’obligation de s’armer pour résister. Au final, cette opération en faveur des pauvres aura juste permis à la
Banque mondiale de redorer son blason. Les Tchadiens, qui sont encore 64 % à vivre avec moins de 1,25 dollar par jour, n’y ont rien gagné. « La société civile a toujours estimé que, si les mécanismes de bonne gouvernance n’étaient pas en place au Tchad, il était hasardeux de se lancer dans ce processus, explique Delphine Djirabe, avocate et coordinatrice du Comité de suivi de l’appel à la paix et à la réconciliation. La Banque n’a fait que gérer son image, et l’argent du pétrole finance la guerre. » Avec une production de 53 millions de barils par an, les recettes pétrolières sont passées de 14 % du PIB en 2006 à 45 % en 2007, et devraient se stabiliser autour de 20 % en 2008. Pour ce qui est des compagnies, le projet de Doba a été échafaudé alors que le baril atteignait péniblement les 20 dollars, contre 100 dollars actuellement. Au final, Déby Itno peut se frotter les mains. Certes il est en froid avec la Banque mondiale, mais, en contrepartie, il peut gérer sans contrainte et quasiment sans contrôle une manne inespérée. ■ TEUN VOETEN/HH-REA
À
vrai dire, ce n’est pas une surprise. Cela faisait longtemps que les relations entre le Tchad et la Banque mondiale étaient tumultueuses. À présent, les choses sont claires. Le 9 septembre, l’institution internationale a annoncé « qu’elle ne pourrait plus continuer à soutenir le projet pétrolier », puisque N’Djamena n’a « pas alloué des ressources adéquates » à la réduction de la pauvreté. C’est la fin d’un partenariat qui se voulait « exemplaire » et qui était appelé à être dupliqué dans d’autres pays. En 2001, pour accélérer l’exploitation du champ de Doba et ses 300 puits disséminés dans la région du Logone offrant des réserves estimées à 1 milliard de barils, la Banque apporte un financement de 400 millions de dollars sur les 4 milliards d’investissements. Cette enveloppe permet la construction du pipeline conduisant le brut au port camerounais de Kribi, soit 1 000 km. En échange, N’Djamena s’engage à utiliser 80 % de ses revenus pétroliers à des secteurs prioritaires (santé, éducation et infrastructures). Après un premier bras de fer, ce pourcentage tombe à 70 %
PHILIPPE PERDRIX
Des multiples vertus du cure-dent
âtonnet aigre ou sans saveur, sec ou tendre, le sothiou, cure-dent traditionnel, est depuis le 2 septembre, date du début du ramadan au Sénégal, quasiment dans toutes les bouches. On dit de lui qu’il blanchit les dents et rafraîchit l’haleine, il serait aussi un signe apparent de piété. « Je suis un gros fumeur, alors le sothiou me permet de ne pas trop penser à la cigarette », explique un consommateur assidu, tandis que, pour cet autre, « mâchouiller quelque chose trompe la faim ». Certains affirment même que l’utilisation du cure-dent est une recommandation de l’islam car il permet de garder la bouche propre. Le siwak, bâton de bois d’araq, arbre qui provient d’Arabie saoudite, est considéré comme le meilleur, notamment pour ses propriétés antalgiques. Car
tous les bâtonnets ne se valent pas, même si leur prix reste modeste, de 25 à 100 F CFA. Les vendeurs vanteront les vertus de plus de trente essences sans se lasser. Du myrobalan au tamarinier en passant par le cola et le mate xewël (« mord la chance » en wolof), qui attirerait… l’argent ! Mais, pendant le ramadan, le nep nep est roi. « C’est le plus sec. Il ne fait pas trop saliver. Il empêche la mauvaise haleine, soigne les maux de dents, apaise les gencives sensibles et guérit les infections grâce à son pouvoir antibiotique », explique un jeune vendeur. Du côté des professionnels de la santé, on reconnaît qu’un sothiou bien utilisé a de nombreux bienfaits. Les vendeurs ne diront pas le contraire. Pendant le carême, ils gagnent entre 4 000 et 5 000 F CFA par jour grâce aux C.S. cure-dents. ■
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p038-039.indd 39
11/09/08 21:10:12
40 MAGHREB & MOYEN-ORIENT
TUNISIE LA GALAXIE B À un an des élections législatives et présidentielle, le chef de lʼÉtat redistribue les rôles au sein de son équipe et sʼappuie sur de nouveaux venus. Enquête.
À
ABDELAZIZ BARROUHI, à Tunis
nouvelle étape, nouvelles têtes. La Tunisie est à un an des élections législatives et présidentielle de 2009. Pour le président Zine el-Abidine Ben Ali, 71 ans, assuré de l’emporter et d’accomplir ainsi un cinquième – et dernier – mandat de cinq ans, le chômage des jeunes constitue une source de préoccupation majeure, compte tenu surtout des incertitudes qui pèsent sur la conjoncture économique européenne. Sans doute ces considérations ontelles pesé lorsque le président a mis en place sa nouvelle équipe en cette période de rentrée politique. Une installation conduite en trois temps : le renouvellement du Comité central du parti, lors du congrès du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD, au pouvoir) qui s’est tenu du 28 juillet au 2 août, le remaniement partiel du gouvernement le 29 août et la recomposition du Bureau politique du RCD le 5 septembre. Si cette redistribution des rôles obéit au credo du « changement dans la continuité » cher au président, elle n’en a pas moins abouti – une première depuis v ingt ans – à la désignation d’un numéro deux du régime – le Premier ministre Mohamed Ghannouchi –, au rajeunissement d’une partie de l’équipe gouvernementale et à l’envoi de signaux laissant présager que la prochaine étape sera celle d’une plus grande ouverture. Voyage dans la nouvelle galaxie Ben Ali. Dans le régime présidentiel tunisien, le chef de l’État est seul maître à bord. Tout procède de lui. C’est lui qui compose le gouvernement, orchestre les nominations, préside, outre le
Conseil des ministres, qui se tient chaque mois, les conseils interministériels sectoriels (au moins une fois par semaine). Autour de lui gravite une équipe de collaborateurs dévoués que l’on peut répartir en quatre cercles. Le premier se compose de membres du Bureau politique du RCD, le parti-État présidé par Ben Ali. Le deuxième est constitué des membres du staff de la présidence. Le troisième regroupe les valeurs sûres ou prometteuses dans la technostructure gouvernementale. Le quatrième cercle, enfin, hétéroclite et plus informel, rassemble des hommes d’affaires et, bien sûr, des proches. « LES QUATRE MOUSQUETAIRES »
Dans le premier cercle figurent ceux que l’on pourrait appeler « les quat re mou squet a i r e s » : Mohamed Ghannouchi, Premier ministre depuis 1999, qui devient le numéro deux du parti-État après sa désignation comme unique vice-président du bureau politique du RCD (il remplace à ce poste Hamed Karoui, 80 ans, sur le départ pour raisons de santé) ; Abdelaziz Ben Dhia, ministre d’État, conseiller spécial auprès du président de la République et porte-parole de la Présidence, qui jouait jusque-là le rôle de Premier ministre-bis pour les affaires politiques ; Abdelwahab Abdallah, ministre des Affaires étrangères, qui dispose d’un atout de poids : il a longtemps été un pensionnaire du palais présidentiel et, de ce fait, sait aller au-devant des attentes du chef de l’État ; enfin, Mohamed Ghariani, ancien conseiller spécial auprès du président Ben Ali, dont il a été le communicant et qui s’est vu confier le secrétariat général du RCD,
une mission qui prend tout son sens à un an des élections. Les quatre hommes font partie du bureau politique, composé de 9 personnes, toutes choisies par le chef de l’État parmi les 350 membres du Comité central, dont 80 sont désignés par lui-même. Les membres du cabinet présidentiel, qui constituent le deuxième cercle, gardent généralement un profil bas. N’ayant théoriquement pas de pouvoirs de décision, ils ont pour rôle de préparer celles du président et d’en assurer le suivi selon leur compétence. Leurs noms ne sont souvent connus du grand public que lorsqu’ils quit tent le Pa la is pour un poste
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p040-043.indd 40
11/09/08 21:23:14
MAGHREB & MOYEN-ORIENT 41
E BEN ALI Idem pour Rafik Hadj Kacem, 58 ans, ancien ministre conseiller du président, nommé, en 2002, ministre de l’Intérieur et du Développement local, et, plus récemment, pour Slim Tlatli, 57 ans, qui, après avoir dirigé l’unité présidentielle chargée du suivi des grands projets des investisseurs du Golfe, est passé au rang de ministre de l’Emploi et de l’Insertion professionnelle des jeunes, avec pour mission de remettre à niveau ce secteur, qui est l’une des priorités du gouvernement. Plusieurs ministres, par leur présence dans les gouvernements successifs, peuvent être rangés dans la catégorie des valeurs sûres. C’est le cas de Afif
Le président Zine el-Abidine Ben Ali, au palais de Carthage.
ministériel. Ahmed Iyadh Ouederni, 55 ans, ministre-directeur du cabinet présidentiel, est un universitaire dont on sait qu’il a pour principale charge de coordonner la préparation des discours du président. Parmi les neuf ministres conseillers, chefs des départements qui couvrent la quasitotalité des secteurs et qui fonctionnent sous la houlette de Ben Dhia, les plus connus sont l’universitaire Mongi Safra, 58 ans, chargé des Affaires économiques, Hamed Mlika, 69 ans, pour les Affaires politiques, Abdelhamid Slama, 66 ans, pour les Sports et la Culture, Slaheddine Cherif, 71 ans, secrétaire général de la présidence chargé des Affaires juridiques, et
Taoufik Cheikhrouhou, 63 ans, pour les Affaires sociales, dont il a été auparavant le ministre. LES VALEURS SÛRES
Le passage de la pépinière présidentielle au troisième cercle, qui regroupe plusieurs membres du gouvernement, est fréquent. Ainsi de Nouri Jouini, 47 ans, qui, après des études à HEC Tunis et un PhD aux États-Unis, a connu une ascension fulgurante, passant de l’enseignement universitaire aux fonctions de conseiller économique à la Présidence, puis de secrétaire d’État à la Privatisation et, depuis 2002, de ministre du Développement et de la Coopération internationale.
JEAN MICHEL TURPIN
Grande nouveauté : le régime a désormais un numéro deux. Chelbi, 54 ans, ministre de l’Industrie, de l’Énergie et des Petites et Moyennes Entreprises, dont les performances sont remarquables. C’est aussi le cas de deux ministres qui accompagnent Ben Ali depuis son arrivée au pouvoir, en 1987 : Mondher Zenaidi, 57 ans, qui, après un passage remarqué aux ministères du Transport, du Tourisme et surtout du Commerce, est aujourd’hui chargé de la modernisation du secteur de la santé, et Abderrahim Zouari, 63 ans, qui s’est bien adapté au ministère, technique, des Transports, se débarrassant du même coup de l’étiquette de « ministre politique » qui lui a longtemps collé à la peau. Plusieurs ministres clés peuvent compter dans ce cercle : c’est le cas de Béchir Tekkari, 56 ans, ministre de la Justice et des Droits de l’homme, de Kamel Morjane, 60 ans, ministre de la Défense, ancien haut-commissaire adjoint de l’ONU pour les réfugiés et ancien représentant spécial du secrétaire général de l’ONU en République démocratique du
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p040-043.indd 41
11/09/08 21:23:22
42 MAGHREB & MOYEN-ORIENT Congo, qui passe pour être un ami du président, et Rachid Kechich, 57 ans, ministre des Finances. Gouverneur de la Banque centrale, Taoufik Baccar, 58 ans, est également apprécié en haut lieu pour son rôle dans la restructuration et l’assainissement du secteur bancaire, ainsi que dans la libération du change extérieur. COMME SARKOZY
Dernière recrue en date au sein du troisième cercle, Samir Labidi, 46 ans, nouveau ministre de la Jeunesse, des Sports et de l’Éducation physique. Sa
promotion s’inscrit dans le cadre de la politique d’ouverture de Ben Ali qui consiste, comme celle de Sarkozy, à débaucher les meilleurs éléments de l’opposition, comme il l’a fait avec Moncer Rouissi, l’un de ses plus proches collaborateurs dès 1987, et, par la suite, avec feu Daly Jazi et feu Mohamed Charfi. Avocat de profession, Labidi a été un contestataire lorsqu’il était secrétaire général de l’Union générale des étudiants de Tunisie (Uget), avant d’être sollicité par le chef de l’État, qui le nomme représentant permanent de la Tunisie auprès de l’Office de l’ONU,
MOHAMED GHANNOUCHI 67 ans, Premier ministre
à Genève, où il a défendu le dossier des droits de l’homme. La galaxie Ben A li s’étend à un quatrième cercle comprenant des chefs d’entreprise comme Aziz Miled, 72 ans, Moncef Mzabi, 56 ans, qui ont fait partie de ses comités de campagne lors des précédentes présidentielles, Hédi Djilani, 60 ans, patron des patrons, ainsi que Belhassen Trabelsi, 45 ans, et Sakhr Materi, 28 ans, par ailleurs des proches par alliance – le premier est son beau-frère, le second son gendre – et membres du comité central du RCD. ■
dernier est hautement apprécié par les grands investisseurs étrangers, dont il est l’interlocuteur privilégié. 75 % à 80 % des échanges extérieurs de la Tunisie se faisant sur les marchés de l’Union européenne, Ghannouchi garde en permanence un œil sur les indicateurs des économies de ses pays membres. Libéral, gestionnaire prudent, homme d’équilibre, sensible au langage des chiffres, il est égal à lui-même depuis qu’il est entré au gouvernement, en octobre 1987, lorsque Ben Ali, à l’époque Premier ministre de Bourguiba, l’avait désigné comme ministre délégué en charge du plan de développement. ■
AGOSTINO PACCIANI/J.A.
AZ.B.
ABDELAZIZ BEN DHIA 72 ans, ministre d’État, conseiller spécial auprès de la présidence de la République
PREMIER MINISTRE DEPUIS 1999, Mohamed Ghannouchi se plaisait à dire, il y a quelques années, sur le ton de la plaisanterie, qu’il n’était que le premier des ministres. Il avait tout simplement compris qu’il était dans un système présidentiel. Grand serviteur de l’État, simple, plein d’humilité, efficace et effacé, son profil est exactement ce que le président Ben Ali apprécie le plus. Ghannouchi aime travailler à l’ombre du chef de l’État, en bonne intelligence avec lui. Invariablement, chaque lundi, il se rend au palais présidentiel pour lui rendre compte des activités du gouvernement et de « son programme de travail pour les prochains jours ». Les dossiers politiques étant généralement traités à la présidence par Abdelaziz Ben Dhia, cet économiste de carrière se consacre plus particulièrement à la mise en œuvre de la politique socio-économique, dont les secteurs font l’objet, au moins une fois par semaine, de conseils interministériels présidés et animés par le chef de l’État, qui, en matière économique, ne s’en laisse pas conter. Un signe qui ne trompe pas: les bailleurs de fonds, dont les institutions de la Banque mondiale, se bousculent pour financer les plans de développement successifs que Ghannouchi est chargé de mettre en œuvre. Ce n’est pas un hasard si ce
HICHEM
À l’ombre du chef
Le théoricien IL ÉTAIT À LA TÊTE DU COMITÉ DE CAMPAGNE de Ben Ali lors de la dernière élection présidentielle, en 2004. Abdelaziz Ben Dhia est en fait en campagne perpétuelle pour le chef de l’État. Il suffit de le voir à l’arrière d’une tribune donner, avec des gestes de mime, le signal pour déclencher ou arrêter les applaudissements tout au long des discours J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p040-043.indd 42
11/09/08 21:23:26
MAGHREB & MOYEN-ORIENT 43 que Ben Ali prononce en public dans les grandes occasions. Mais il n’est pas qu’ordonnateur. Il est le seul ministre d’État du gouvernement, et son bureau à la présidence est un back office de « cuisine politique ». Professeur de droit privé formé à l’université de Toulouse, il s’est imposé comme spécialiste de droit constitutionnel en tant que cheville ouvrière de la réforme de la Constitution, en 2002. Malgré ses allures d’universitaire tout en rondeur, cet homme est un apparatchik dont la seule ambition a pour nom Ben Ali. Fils d’une figure de la lutte pour la libération nationale, doyen d’université, il avait été nommé par Bourguiba ministre de l’Enseignement supérieur. Lorsque Ben Ali est arrivé au pouvoir, il l’a placé à la tête du parti, puis de la Défense, avant de l’appeler au palais présidentiel de Carthage en 1999, où il a fait montre d’un loyalisme sans faille. ■
nique dans le montage d’une actualité présidentielle, a fait croire à ceux qui l’accusent de tous les maux de la presse tunisienne qu’il était tombé en disgrâce. Ils se sont trompés. Abdallah cède formellement le titre de porte-parole à Ben Dhia, mais reste à son poste. Au début de 2005, il est nommé ministre des Affaires étrangères et devient le porte-voix de la Tunisie et de… Ben Ali. ■ AZ.B.
MOHAMED GHARIANI 46 ans, secrétaire général du RCD
AZ.B.
MARIANNE CATZARAS
ABDELWAHAB ABDALLAH 68 ans, ministre des Affaires étrangères
FETHI BELAID/AFP
Génération Ben Ali
La voix de la Tunisie et du président LORSQUE LE PRÉSIDENT BEN ALI est arrivé au palais présidentiel de Carthage en 1987, Abdelwahab Abdallah était déjà un familier des lieux depuis de nombreuses années. Après avoir été chef de cabinet du ministre-directeur du cabinet présidentiel, il dirige l’agence de presse nationale, puis le quotidien francophone La Presse, avec accès libre au Palais, où il lui arrive de lire les journaux à un Bourguiba vieillissant. On ne se sépare pas d’un homme du sérail au profil si peaufiné et à la tête bien faite, si l’on en juge par son couffin de diplômes décrochés dans des universités françaises : droit public, gestion des entreprises et doctorat en sciences politiques. Ben Ali l’a d’abord maintenu dans ses fonctions de ministre de l’Information, qu’il occupait sous Bourguiba, avant de l’envoyer, en 1988, parfaire sa formation auprès des Anglo-Saxons comme ambassadeur à Londres. De retour en 1990, il devient ministre-conseiller et porte-parole de la présidence de la République. Le poste de ministre de l’Information est presque devenu superflu, Abdallah tenant bien en main le secteur. En 2003, une retraite de quelques jours, consécutive à un incident tech-
JEUNE, MODESTE, PEU PORTÉ SUR LA LANGUE DE BOIS, c’est l’homme que personne n’attendait, surtout pas à la direction du parti au pouvoir, le RCD. Un bon point pour l’image de ce dernier. Jusque-là, Ben Ali avait nommé à sa tête des hommes politiques hérités de l’ère Bourguiba. Le voilà maintenant qui dispose d’un homme entièrement formé politiquement sous son ère et qui était encore étudiant en 1987. Un pur produit Ben Ali. S’il a rejoint les rangs du parti quatre ans plus tôt, ce sociologue, donc bien outillé pour comprendre les transformations sociétales, s’est formé à la politique en devenant, en 1989 et sous Ben Ali, secrétaire général du bureau national des étudiants du RCD. Jusqu’à cette date, rares étaient les étudiants qui se déclaraient liés au parti au pouvoir sur un campus dominé par les marxistes. Avec Ghariani, ils vont regagner le terrain perdu et même supplanter la gauche. Il poursuit sa carrière au RCD, fait une plongée dans le pays profond en tant que gouverneur de la région centrale de Sidi Bou Zid, alors réputée pauvre, puis se hisse au rang de secrétaire général adjoint du RCD en 2001-2002, chargé de la jeunesse, de l’éducation et de la culture, puis des relations avec les organisations et les associations. En 2005, Ben Ali le nomme ambassadeur à Londres. Deux ans plus tard, en janvier 2007, il le rappelle à ses côtés en tant que conseiller principal chargé notamment de la communication. C’était encore pour lui confier une mission plus importante : préparer le RCD pour gagner les élections de 2009 et ouvrir la voie à la génération montante. ■ AZ.B.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p040-043.indd 43
11/09/08 21:23:32
44 MAGHREB & MOYEN-ORIENT
ALGÉRIE
À gauche toute! Création dʼun commissariat à la planification, adoption dʼune batterie de mesures visant à encadrer les investissements étrangers... LʼÉtat régulateur est de retour. Louisa Hanoune, présidente du Parti des travailleurs (PT, d’obédience trotsk iste et principale force d’opposition au Parlement), exulte. Devant ses militants, réunis en conseil national, elle s’est félicitée de la prise de conscience des gouvernants à propos des enjeux et des dangers de la mondialisation. La mise à l’index des investisseurs qui transfèrent leurs bénéfices sans créer de richesses comble toutes les forces de gauche. Houari Boumedienne ressuscité ? L’ancien président disparu en 1978, compagnon de lutte et mentor d’Abdelaziz Bouteflika, a longtemps incarné l’option socialiste de l’Algérie indépendante, engageant un bras de fer avec les multinationales pétrolières, qu’il a fini par nationaliser en 1971. « La situation est totalement différente, s’emporte un proche collaborateur de Bouteflika. Diriez-vous que Berlusconi est subitement devenu un adepte de Gramsci parce qu’il a décidé que l’Italie conserverait une part majoritaire dans le capital d’Alitalia, dont le sauvetage passe nécessairement par un partenariat avec un opérateur étranger ? » Et d’enfoncer le clou : « Pourquoi D.R.
Q
uand, le 26 juillet, le président Abdelaziz Bouteflika a avoué son échec en matière de choix économiques (voir J.A. n° 2482) devant des élus locaux ébahis, on ne savait pas qu’il avait déjà pris des mesures drastiques pour corriger le tir. Son discours devant les 1 541 maires d’Algérie n’était sans doute pas encore écrit qu’il signait un décret portant création d’un Commissariat général à la planification et à la prospective (CGPP). Par définition, une telle structure suppose un État interventionniste. Or le corpus des réformes économiques mises en œuvre durant les deux mandats du président tournait principalement autour du désengagement de l’État avec, à la clé, la privatisation des grandes Sid Ali Boukrami, patron du nouveau Commissariat entreprises publiques, la général à la planification et à la prospective (CGPP). libéralisation du commerce extérieur et l’incitation à l’investissement étranger. C’est dire si cielle annonce la nomination à la tête le mea culpa de Bouteflika devant les du CGPP de Sid Ali Boukrami, 61 ans, élus locaux a pris de court l’assistance, économiste de renom, ancien vice-recles opérateurs économiques, publics et teur de l’université d’Alger, ex-présiprivés, nationaux ou étrangers. dent de la Commission d’organisation Trois jours après son discours, le et de surveillance des opérations de chef de l’État sort une nouvelle botte Bourse (Cosob), réputé plus proche de secrète. Le 29 juillet, une dépêche Marx que d’Adam Smith. Le virage à laconique de l’agence de presse offigauche se confirme.
LA MISSION DE BOUKRAMI COMME À CHAQUE RAMADAN, Boutef a repris les auditions annuelles pour l’évaluation de ses ministres. Cette année, il a commencé par Karim Djoudi, ministre des Finances. Au cours de cette réunion, le président a défini les objectifs du Commissariat général à la planification et à la prospective (CGPP) : « renforcer notre visibilité sur l’avenir à moyen et à long terme, rationaliser la dépense publique ». Le patron du CGPP, Sid Ali Boukrami, qui a pris ses fonctions le 29 juillet, devra donc s’atteler à rendre les
décisions économiques plus cohérentes, évaluer le programme d’investissements et d’équipements réalisé entre 2000 et 2009, participer à l’élaboration du programme quinquennal (2010-2014) et organiser la formation en prospective. Cette dernière tâche ne devrait pas être la plus difficile pour cet ancien professeur d’économie politique à l’université d’Alger. Quelques jours après sa prise de fonctions, un Conseil national de la statistique a été mis en place. La planification est désormais CH.O. en marche.■ J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p044-045.indd 44
11/09/08 21:26:57
MAGHREB & MOYEN-ORIENT 45 stigmatiser notre protectionnisme quand les marchés financiers applaudissent l’attitude du Trésor américain lors de la nationalisation, il n’y a pas d’autre mot, des organismes de refinancements hypothécaires Fannie Mae et Freddie Mac ? » Conclusion de notre homme : « Il n’y a ni virage à gauche, ni retour aux années 1970. Le président a fait une évaluation d’étape, constaté des carences et des dysfonctionnements en matière d’investissements étrangers et pris un certain nombre de mesures. » Ces dernières ont été inscrites dans la loi de finances 2009 adoptée le 31 août en Conseil des ministres : création d’une taxe de
« Diriez-vous que Berlusconi est subitement devenu un adepte de Gramsci ? » 15 % sur les bénéfices transférés, droit de préemption au profit de l’État en cas de cession d’entreprises de droit algérien entre opérateurs étrangers, remise en question de tous les actes de cession de foncier, industriel ou non, transformés en concessions sur une durée que déterminera une loi à venir. Bref, un vrai tour de vis. Dans l’entourage de Boutef lika, on ne semble pas redouter une fuite massive des investisseurs. « Certains nous avaient annoncé la désertion de tous les groupes pétroliers quand nous avions imposé, en 2006, une nouvelle taxe sur les superprofits engrangés par les sociétés d’hydrocarbures, reprend notre interlocuteur. Personne n’est parti, et le Trésor public a engrangé près de 1 milliard de dollars de recettes supplémentaires. » En fait, matelas de devises aidant – 130 milliards de dollars –, le président semble avoir compris que l’Algérie n’a pas besoin d’investisseurs en quête de placements hautement rentables (7 milliards de dollars transférés par les opérateurs étrangers en 2007) non créateurs de richesses ou d’emplois. Les réserves dont dispose le pays sont un atout supplémentaire : elles lui permettent de choisir ses partenaires et de leur imposer ses conditions. Pourquoi s’en priver ? ■
KIOSQUE
HAARETZ
Quotidien, Israël
La carte Barghouti
L
e président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, 73 ans, dont le mandat s’achève l’an prochain, a annoncé qu’il ne se représenterait pas. Mais même s’il reste en fonctions, il faut préparer l’avenir. Les Palestiniens doivent remettre de l’ordre parmi les partisans, chez eux, de la solution de deux États. L’ancien chef des Tanzim (branche armée du Fatah), Marwane Barghouti, 50 ans, a déjà fait savoir qu’il serait candidat à la succession d’Abbas, qu’il soit en prison ou pas – il a été condamné en 2004 à cinq peines d’emprisonnement à vie pour sa participation à la seconde Intifada. Selon un sondage réalisé en juin par le Centre palestinien d’opinion publique, 42,8 % des Palestiniens le préféreraient à Ismaïl Haniyeh – le chef du Hamas, qui n’a recueilli que 18,1 % d’opinions favorables – comme président de consensus. AU MOMENT OÙ LE SOLDAT ISRAÉLIEN GILAD SHALIT A ÉTÉ ENLEVÉ,
nombre de Palestiniens défendaient un document négocié entre des prisonniers membres du Hamas et du Fatah qui demandait la création d’un État palestinien voisin d’Israël sur la base des frontières d’avant 1967. C’est Barghouti qui a négocié ce texte avec les prisonniers du Hamas. C’est le premier document de cette nature demandant la mise en place des deux États et signé par des personnalités importantes du Hamas en plus de Barghouti et d’autres dirigeants du Fatah. Depuis lors, Barghouti est resté l’interlocuteur clé aux yeux des responsables israéliens et palestiniens. Benyamin Ben Eliezer, ministre des Infrastructures et ancien ministre de la Défense, déclarait à Haaretz, l’an dernier : « Il faut que nous trouvions un bon prétexte pour libérer Barghouti : ce doit être la libération de Gilad Shalit. Je sais que ce sera difficile. Mais il faut que nous nous placions dans une perspective de dix ans, et que nous nous demandions où nous voulons en être à ce moment-là. »
Benyamin Ben Eliezer : « Nous devons lier sa libération à celle du soldat Gilad Shalit. »
NUL N’IGNORE QUE LE PLUS FIDÈLE ALLIÉ DE BARGHOUTI dans la jeune
garde du Fatah est Kadoura Fares, qui a signé l’Initiative de Genève en faveur des deux États après avoir rencontré Barghouti. Le Premier ministre du Fatah, Salam Fayyad, est lui aussi en rapport avec Barghouti et l’aurait rencontré avant de former le gouvernement palestinien actuel. Barghouti est le seul qui puisse conseiller Israël dans des négociations avec un partenaire palestinien capable d’instaurer la paix, parce qu’il peut parler à la rue au nom de Mahmoud Abbas et du Fatah, contribuer à la reconstitution d’un camp national favorable à la solution de deux États et faire adopter un accord final. Sa remise en liberté pourrait donner la possibilité à un autre président potentiel – américain, cette fois – d’imposer enfin un règlement du conflit israélo-palestinien. ■
CHERIF OUAZANI
JO-ANN MORT
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p044-045.indd 45
11/09/08 21:27:02
46 MAGHREB & MOYEN-ORIENT
MAURITANIE
Mission impossible pour Laghdaf Le général putschiste Ould Abdelaziz a chargé le Premier ministre de plaider sa cause auprès de la communauté internationale... qui lui dénie toute légitimité. deur auprès de la Commission – importe peu. Qu’il ait pris la place de Yahya Ould Ahmed el-Waghf, débarqué par l’armée et actuellement en résidence surveillée, non plus. Adoubé par le chef autoproclamé du pays, il est « le Premier ministre ». Un fonctionnaire de la primature qui a travaillé avec Zeidane puis « Yahya » reconnaît déjà les mérites d’un « homme moderne dans ses méthodes de travail et ses relations avec les autres ». Mais les puissances occidentales, elles, ne veulent pas entendre parler de cet « usurpateur ». Dès l’annonce de la composition du gouvernement, le 1er septembre, le Quai d’Orsay a jugé que la décision de former une nouvelle équipe était « dénuée de toute légitimité ». L’Union africaine (UA) a rappelé ses exigences : la libération de « Sidi » et le retour à l’ordre constitutionnel. Message implicite : « Moulaye » et ses hommes sont illégitimes. « Pour nous, ce ne sont pas des ministres », affirme, de son côté, une source proche de l’Élysée. Tant que la junte n’aura pas pris l’engagement de rétablir Sidi dans ses fonctions, l’homme d’Aziz ne peut espérer être officiellement reçu à Paris. Et si les menaces de sanctions individuelles agitées par la France le 28 août, déjà en WATT ABDEL JELIL
L
e premier jour, Moulaye Ould Mohamed Laghdaf, 51 ans, s’est réjoui. Il a vite appelé ses proches pour les informer. Être nommé Premier ministre, la nouvelle se partage… C’était le 14 août. Rapidement, son enthousiasme a cédé la place à la lucidité. « Moulaye découvre les difficultés », reconnaît un membre de sa famille. Il a réalisé que la mission que lui a confiée le général putschiste Ould Abdelaziz, pourtant un ami de « longue date », est une gageure : convaincre tout à la fois ses compatriotes et la communauté internationale que le coup d’État qui a renversé Sidi Ould Cheikh Abdallahi le 6 août est une bénédiction pour la Mauritanie. Ingénieur des Mines, diplômé de l’École Mohammadia Moulaye Ould Mohamed Laghdaf, Premier (Maroc), « Moulaye » va peut-être ministre de la junte au pouvoir. finir par regretter le début des années 1990, quand il planchait sur « la combustion des gaz dans un lit Ould Zeidane, avait refusé –, il a mis le fluidisé » dans la bibliothèque feutrée doigt dans un engrenage qui pourrait de l’Université libre de Bruxelles. Pour aboutir au naufrage de la Mauritanie. l’amour de la science, sans risque ni Sur le front intérieur, les partisans du obligation de résultat… Vingt ans plus putsch sont acquis à sa cause et lui partard, le chercheur est descendu dans donnent sa méconnaissance du terrain. l’arène politique. En raflant la primatuQue « Moulaye » ait fait toute sa carrière – en 2007, son ami « Aziz » avait déjà re à Bruxelles – comme expert scientifisuggéré son nom à Sidi pour ce poste, que auprès de l’Union européenne (UE) mais ce dernier, engagé auprès de Zeine et, à partir de 2006, comme ambassa-
CALENDRIER INTERNATIONAL CHARGÉ FIN SEPTEMBRE, Moulaye Ould Mohamed Laghdaf devrait s’envoler pour Bruxelles avec une délégation. Objectif: négocier avec l’Union européenne (UE) dans le cadre de l’accord de Cotonou. Ce texte, signé en 2000, fixe les règles de la coopération entre le Vieux Continent et les pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique). Et prévoit, en cas de violation des « éléments essentiels » – notamment les principes démocratiques –, une renégociation de la coopération. À la fin du mois, le scénario pourrait donc être le suivant : l’UE, premier bailleur de la Mauritanie, suspend son aide (156 millions d’euros entre 2008 et 2013), et Nouakchott prend une série d’engage-
ments (lutte contre la corruption, rétablissement de l’État de droit…). De leur mise en œuvre dépendra la reprise de la coopération. À la condition sine qua non, toutefois, que Sidi Ould Cheikh Abdallahi soit libéré et rétabli dans ses fonctions. Dans la foulée, il sera de nouveau question de la Mauritanie à Bruxelles. Cette fois lors d’une réunion conjointe entre la Commission européenne et celle de l’Union africaine (UA), pour fixer de nouvelles sanctions en cas de blocage. En marge de l’Assemblée générale de l’ONU, qui se tiendra du 23 septembre au 1er octobre, le Conseil de paix et de sécurité de l’UA aura auparavant examiné M.M. le dossier mauritanien. ■ J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p046-047.indd 46
11/09/08 20:15:00
MAGHREB & MOYEN-ORIENT 47 partie effectives – des fonctionnaires du ministère de la Défense se sont vu refuser leur visa –, étaient totalement appliquées, il pourrait même être empêché de s’y rendre tout court. Globalement, l’UE observe la même ligne : le 10 septembre, elle a rappelé que « l’ensemble des mesures prises par les responsables
une Mauritanie moderne, débarrassée des réflexes de partage du pouvoir entre membres d’un même groupe. De la poudre aux yeux pour la communauté internationale. Gênant pour Ould Mohamed Laghdaf qui, dans une première déclaration d’intention, le 6 septembre, a promis aux Mauritaniens « une lutte sans merci contre la faim », « l’amélioration des moyens de transport et le développement des infrastructures de base ». Ces engagements, il ne peut les tenir qu’avec l’aide des bailleurs de fonds. Or les caisses de l’État accusent déjà un déficit de 40 millions d’euros, sur un budget de 650 millions pour l’année 2008. Et elles ne se rempliront pas de sitôt, Bruxelles bloquant le versement des 86 millions dus par la Commission européenne dans le cadre de l’accord de pêche. « Sa tâche est impossible car il n’a pas d’argent », résume un parent. Selon une source à Nouakchott, il n’est pas exclu que le gouvernement puise,
Il a mis le doigt dans un engrenage qui pourrait conduire le pays au naufrage. militaires [et donc la nomination d’un Premier ministre, NDLR] constituent une violation flagrante de la Constitution ». Pourtant, le choix d’Aziz était calculé. En optant pour un ambassadeur auprès de Bruxelles, le général espérait bénéficier de son entregent. Cet homme affable, courtois, qu’un journaliste mauritanien dit « détribalisé » – bien qu’appartenant à une tribu, celle des Tejekanet –, doit également incarner
Stock
Support Technique
Power Generation ®
Service Après-Vente
11 à 3300 kV A
Maintenance
en désespoir de cause, dans les caisses de la Société nationale industrielle et minière (Snim). Mais combien de temps l’État pourra-t-il utiliser cet expédient pour payer les fonctionnaires, et tout particulièrement les militaires, tombeurs traditionnels du pouvoir en Mauritanie? Déjà, une trentaine de colonels n’apprécient guère le fait que le général Ould Abdelaziz, pourtant leur cadet, se soit arrogé les pleins pouvoirs. Portefeuille vide, aucune légitimité à l’extérieur, Ould Mohamed Laghdaf n’aura pas les moyens de sortir la Mauritanie de l’impasse si la junte ne cède pas aux exigences de la communauté internationale. Et quand bien même… À Paris, on propose que, une fois Sidi libéré et rétabli dans ses fonctions – deux conditions « intangibles » –, un Conseil national de sécurité soit créé pour donner un rôle institutionnel à l’armée et un Premier ministre « de consensus » nommé. Et ce n’est pas vers Moulaye que les regards se tournent, mais plutôt vers Ely Ould Mohamed Vall, jugé « parfaitement crédible ». ■ MARIANNE MEUNIER
Formation
• Groupes électrogènes insonorisés et ouverts • Réalisation de centrales électriques
Contact: Avenue Pasteur, 6 • Belgique – 1300 Wavre • Tel +32 10 47 15 11 • Fax +32 10 47 15 00 info@biaoverseas.com • www.biaoverseas.com
JA2488p046-047.indd 47
11/09/08 20:15:15
48 MAGHREB & MOYEN-ORIENT
CE JOUR-LÀ
16 septembre 1982 Massacre de Sabra et Chatila
MINGAM ALAIN/GAMMA
contraints, sous la pression d’Israël, de quitter Beyrouth quelques semaines plus tôt pour prendre le chemin de l’exil. Deux jours durant, les phalangistes vont se livrer à un carnage : mitraillage collectif, égorgements, exécutions sommaires, viols, dynamitage, rien ne sera épargné aux habitants des deux camps. « Ils ont mis les hommes à part, les ont alignés contre les murs, puis les ont arrosés de balles devant leurs familles, témoigne un survivant. Ensuite, tout le monde y est passé : femmes, vieillards, bébés… » Aveuglés par la haine, les miliciens ligotent parfois leurs victimes avant de les tuer. À l’hôpital Akka, à Chatila, les escadrons de la mort font feu sur le personnel médical ainsi que sur les malades. Parmi les victimes, on dénombre cinq handicapés Le 18 septembre, le monde découvre avec effroi les images du carnage. et cinq nourrissons. Des infirmières sont violées avant d’être exécutées. Les animaux ne sont pas épargnés : les ânes servant à eudi 16 septembre 1982. Des chars de Tsahal, l’artransporter des marchandises sont abattus. Pour poumée israélienne, se positionnent devant les camps voir se déplacer de nuit dans les dédales des camps, les palestiniens de Sabra et Chatila, à Beyrouth-Ouest, phalangistes demandent à l’armée israélienne de tirer afin d’en bloquer toutes les issues. Peu de temps après, des fusées éclairantes. Ce qui est fait. deux bataillons de phalangistes libanais sont acheminés par les militaires israéliens vers le rond-point de l’aéroSAMEDI 18 SEPTEMBRE, À 8 HEURES DU MATIN, port international de la ville, non loin des deux camps. les tueurs de Hobeika se retirent enfin de Sabra et Chatila, Deux bataillons de trois cents hommes, fous de rage et laissant derrière eux des centaines de cadavres gisant assoiffés de vengeance. C’est que, deux jours plus tôt, dans des mares de sang. Pour tenter d’effacer les traces le 14 septembre, leur chef, le président libanais Béchir de leurs crimes, les phalangistes commencent à ensevelir Gemayel, avait trouvé la mort dans un attentat qui a les corps à l’aide de bulldozers, mais l’opération échoue: totalement soufflé ses bureaux à Beyrouth-Est. Le crime les cadavres sont trop nombreux. Dans l’après-midi, des porte-t-il la signature des Syriens ? Des Israéliens ? Ou celle des Palestiniens ? Peu importe l’identité des commanditaires. Pour les phalangistes, emmenés par Elie Hobeika, 28 ans, chef du Deuxième Bureau (service de renseignements) des forces chrétiennes libanaises, les journalistes arrivent sur les lieux pour constater l’horreur. réfugiés palestiniens doivent payer la dette de sang. InsLe lendemain, le monde entier découvre avec effroi les tallé sur le toit d’un poste de commandement de Tsahal, photos de Sabra et Chatila. Hobeika dirige ses sicaires par téléphone. Il est à peine Combien de personnes ont péri dans ce massacre ? 18 heures lorsque la boucherie commence. Pour les services secrets israéliens, le nombre de morts À Sabra et Chatila, deux camps miséreux faits d’haoscillerait entre 700 et 800. Pour les Palestiniens, ils bitations de fortune, ne vivent plus désormais que des seraient entre 3000 et 4500… ■ femmes, des vieillards, des enfants et des hommes inapFARID ALILAT tes au combat. Les combattants de l’OLP, eux, ont été
J
Hommes, femmes, vieillards, bébés... Les miliciens phalangistes n’épargnent personne.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p048.indd 48
11/09/08 18:15:09
ALEXANDRE DUPEYRON
MAGHREB & MOYEN-ORIENT 49
L’accès au primaire et au collège s’est démocratisé, en ville comme à la campagne.
MAROC
Une éducation à refaire Les indicateurs du royaume sʼaméliorent et consacrent la quasi-généralisation de lʼaccès à lʼenseignement primaire, pour les filles comme pour les garçons. Pourtant, le taux dʼéchec scolaire reste désespérément élevé...
L
e Maroc est à la traîne. C’est ce qu’indique la Banque mondiale dans son dernier rapport sur la réforme de l’éducation dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (Mena). Le royaume y est classé 11e sur 14 (devant Djibouti, le Yémen et l’Irak) en termes d’accès à l’éducation, d’efficacité et de qualité de l’enseignement, et d’équité. Pour le Conseil supérieur de l’enseignement du Maroc, le bilan de la réforme lancée en 2000 est mitigé. Certes, l’accès à l’éducation s’est démocratisé et les disparités entre zones urbaines et rurales se sont estompées. Au niveau du secondaire, l’amélioration est spectaculaire dans les collèges en milieu urbain. Cependant, les dysfonctionnements demeurent, liés principalement à la mauvaise qualité de l’instruction. Les taux de redoublement et d’abandon sont impor-
tants: sur une même classe d’âge, 70 % des élèves terminent effectivement leur cycle primaire, dont 37 % sans redoublement, et seuls 13 % parviennent à obtenir leur baccalauréat. « Aux conditions économiques difficiles des familles, facteur classique d’abandon du système éducatif, on peut ajouter une certaine déficience dans la qualité des apprentissages et, plus généralement, la crise de l’école, qui n’est plus perçue comme un vecteur de mobilité sociale ni comme la garantie d’une intégration professionnelle », explique Sobhi Tawil, spécialiste du programme éducation pour la région Maghreb auprès de l’Unesco, à Rabat. Quant aux enseignants, ils sont mal formés, mal payés, démotivés et peu reconnus socialement. Dans la presse marocaine francophone et parmi les dirigeants d’entreprise, le
débat sur l’arabisation de l’enseignement fait rage. Dans le primaire et le secondaire, le système actuel veut que l’enseignement soit dispensé en arabe. Un parti pris coupé des réalités économiques et du marché local de l’emploi, alors que le tourisme et les secteurs clés du plan Émergence (offshoring, aéronautique, etc.), qui jouent la carte de la mondialisation, recrutent à tour de bras… Un système critiqué pour sa piètre qualité et son inadéquation avec le cycle de l’enseignement supérieur. Ainsi, « près de la moitié des bacheliers en sciences expérimentales poursuivent leurs études dans les filières où l’enseignement est dispensé en arabe – droit, économie ou lettres – parce qu’ils ne peuvent pas suivre les cours en français de la faculté des sciences », explique Mohamed El Farissi, président de l’université d’Oujda. Paradoxalement, la question de la langue, cruciale car au cœur du processus d’apprentissage, n’est pas abordée frontalement par la réforme. Terrain glissant… Les logiques culturelles, identitaires, idéologiques, politiques, pédagogiques s’affrontent. En attendant, le débat au niveau national n’a pas lieu. Les écoles privées marocaines et la mission française continuent, elles, de former les enfants des élites et des classes aisées marocaines. La marge de manœuvre est réduite. Aujourd’hui, le Maroc consacre près de 25 % de son budget à l’éducation. Ce qui est déjà beaucoup. « Difficile de mobiliser encore plus de financements publics. Se posent donc la question du financement privé et celle de l’implication accrue des collectivités locales », souligne Sobhi Tawil. L’objectif est de porter la part de l’enseignement privé à 20 %, contre 7,1 % actuellement. Se poserait alors une autre question: celle de l’équité. ■ CHRISTELLE MAROT,
à Casablanca
GROS MOYENS, PETITS EFFETS Alphabétisation chez les plus de 15 ans (%)
Scolarisation au primaire (%)
Scolarisation au secondaire (%)
Dépenses publiques par élève du primaire
(en % du PIB par habitant)
Maroc
52,3
86
35
23
Algérie
69,9
97
66
11,5
Tunisie
74,3
97
65
21
Afrique subsaharienne
59,3
72
26
13
États arabes
70,3
83
59
13,3
Monde
82,4
87
59
ND
Sources : Rapport Pnud 2007-2008 (Données 2005), Unesco. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p049.indd 49
11/09/08 18:16:13
50 MAGHREB & MOYEN-ORIENT
11 SEPTEMBRE
« La faute aux Américains » Sept ans après les attentats de New York et Washington, le monde arabe reste persuadé quʼil sʼagit dʼun complot ourdi par les États-Unis et Israël.
L
e grand reporter du New York Times n’en revient pas. En sillonnant le monde arabe, il a entendu partout la même incroyable certitude. Sept ans après les attentats du 11 septembre 2001, nul ne croit qu’ils aient été l’œuvre d’Oussama Ben Laden et d’Al-Qaïda. D’Alger au Caire en passant par Riyad, on est persuadé que ce sont les Américains eux-mêmes et leurs amis israéliens qui ont tout manigancé. Un ingénieur syrien qui vit aux Émirats a lancé au journaliste : « Écoutez, je ne crois pas ce que disent votre gouvernement et vos médias. Ce n’est tout simplement pas vrai. Et d’ailleurs, pourquoi diraient-ils la vérité ? C’est clair : ce sont les États-Unis qui ont organisé les attentats pour justifier l’invasion de l’Irak et mettre la main sur son pétrole. » Les certitudes inébranlables quant aux « véritables » auteurs du « 9/11 » ne reposent pas sur quelque enquête sérieuse. Elles n’en sont pas moins étayées par des arguments qui reviennent sans cesse dans les conversations. Le premier concerne l’identité ethnique des terroristes incriminés : Ben Laden, Mohamed Atta et les autres. Ce sont des Arabes comme vous et moi, et chacun sait que les Arabes sont incapables de mener avec succès des opérations aussi sophistiquées, qui plus est contre une superpuissance telle que les États-Unis. Second argument : à qui profite le cri-
ÉTATS-UNIS/MOYEN- ORIENT
P
me ? La politique des Américains au Moyen-Orient depuis le « 9/11 », en particulier la mainmise sur l’Irak, prouve que ce sont eux qui ont fomenté les attentats. Après les arguments, les « faits ». Le plus récurrent : tous ceux qui travaillaient dans la tour de New York et qui sont de confession juive n’auraient pas mis les pieds, ce jour-là, dans leurs bureaux. Un chauffeur de taxi du Caire invoque ce fait. Mais comment le sait-il ? « Tout le monde le sait. Je l’ai entendu à la télé et tout le monde le dit. » Et puis, le sort de Ben Laden… Comment expliquer que les Américains ne l’ont jamais capturé et qu’il continue à se pavaner sur Al-Jazira ? La réponse est évidente : ils ne l’ont pas fait parce qu’ils ne voulaient pas le faire. Bien sûr… Que les chefs d’État arabes accusent le chef d’Al-Qaïda ne fait que renforcer le brevet d’innocence que l’opinion octroie à ce dernier. Un commerçant énonce cette évidence : « Moubarak dit ce que les Américains lui disent de dire, et il ment pour leur rendre service. » Au Centre d’études politiques et stratégiques d’Al-Ahram, on assène une autre évidence au confrère américain : la position des États-Unis dans le conflit israélo-arabe n’arrange pas les choses, et c’est seulement lorsqu’ils adopteront une politique plus équilibrée que l’opinion arabe pourra évoluer. ■ HAMID BARRADA
Petraeus: de Bagdad à Kaboul
MAYA ALLERUZZO/AP PHOTO
romu, en mai 2008, à la tête d’élaborer des rapports d’étape pour charge de trouver les mots « technidu Centcom, commandement la commission défense du Sénat. Les ques » pour convaincre les sénateurs. central des forces américaiconclusions des enquêtes de Petraeus Et quand Dick Cheney assure que le nes au Moyen-Orient (Afghaen ont fait un quasi-porte-parole de front irakien est en voie d’apaisement, nistan compris), le général d’armée la Maison Blanche. George W. Bush le général exhibe cartes d’état-major (4 étoiles) David Howell Petraeus veut-i l envoyer des t roupes sup et statistiques pour confirmer les prodevrait, le 16 septembre, transmettre plémentaires en Irak ? Petraeus se pos du vice-président. le relais au général RayÀ 55 ans, Petraeus peut mond Odierno. Les mautout de même se prévaloir vaises langues assurent d’un certain nombre de sucqu’il doit cette promotion cès. Son idée de créer les non pas tant à ses états de Sahwa, ces milices sunnites service qu’à sa loyauté enfinancées et armées par les vers les faucons de l’équiAméricains pour contrer l’expe Bush. Après avoir assupansion d’Al-Qaïda dans les ré, entre 2003 et 2005, le provinces centrales d’Irak, commandement militaire est incontestablement une de la région de Mossoul, réussite. Ses nouvelles foncPetraeus hérite de celui tions lui attribuent un autre de la coalition en 2006. À front: l’Afghanistan. Bientôt, ce titre, il est chargé, avec une Sahwa à la sauce pachl’ambassadeur américain toune? ■ Le général David Howell Petraeus, commandant des forces CHERIF OUAZANI à Bagdad, Ryan Crocker, américaines au Moyen-Orient.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p050-051.indd 50
11/09/08 20:15:56
MAGHREB & MOYEN-ORIENT 51
ABDELHAK SENNA/AFP PHOTO
IRAN
Saïd Aouita, directeur technique national de l’athlétisme.
MAROC
Le come-back dʼAouita
S
aïd Aouita va vite, très vite… Moins d’une semaine après sa nomination à la tête de l’athlétisme marocain, le nouveau directeur technique national (DTN) a affiché, le 9 septembre, des objectifs très ambitieux : former de futurs champions olympiques dans l’optique des Jeux de Londres en 2012 pour faire oublier la déception de Pékin (seulement deux médailles, une d’argent et une de bronze). Prenant exemple sur la Jamaïque, qui a décroché six médailles d’or, l’ancien champion de demifond veut miser sur la détection précoce au sein des clubs, des ligues et des établissements scolaires. Il compte renforcer les moyens humains et financiers pour repérer les talents de 14 à 17 ans à même de venir grossir les rangs des sélections nationales. Réussira-t-il ce nouveau défi après une première expérience ratée aux mêmes fonctions en 1993 et une tentative infructueuse d’entrée en politique quatre ans plus tard ? Par le passé, son franc-parler lui a valu un certain nombre d’inimitiés dans le monde de l’athlétisme. Ses échecs l’avaient poussé à s’exiler en Australie, au Qatar et aux ÉtatsUnis. Il travaillait dernièrement comme consultant pour Al-Jazira. Il affirme aujourd’hui avoir « les coudées franches » et « tous les moyens » de la Fédération royale marocaine d’athlétisme. ■ PASCAL AIRAULT
Quand Ahmadinejad fait les yeux doux à Israël... Le président iranien obligé de sʼexpliquer sur des amabilités prononcées par lʼun de ses proches collaborateurs à propos de lʼÉtat hébreu.
C
’est le monde à l’envers : le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, obligé de se justifier sur des amabilités prononcées à propos d’Israël ! Les « incroyables » déclarations de l’un de ses vice-présidents, Esfandiar Rahim-Mashaei, à la mi-juillet, n’ont pas cessé de susciter des remous. Plus de quarante députés ont apposé leur signature à une motion réclamant la convocation du président devant le Majlis (Parlement) pour s’expliquer. C’est la première fois depuis 1981 que cette disposition constitutionnelle est invoquée. Il suffit de réunir 75 noms (sur 290 députés) pour rendre effective la convocation. Q u ’a d i t a u j u s t e M a s h a e i ? « Aujourd’hui, l’Iran n’a que des sentiments d’amitié à l’égard des peuples américain et israélien. Aucun pays au monde n’est notre ennemi. Et nous en sommes fiers. » Comme le vice-président est chargé du tourisme et de la sauvegarde du patrimoine, il a ajouté: « J’attends le jour où aucun touriste n’aura besoin de visa pour se rendre en Iran. » De telles considérations apparemment anodines ont scandalisé la classe politique. La doctrine officielle ne reconnaît en effet à l’État hébreu aucune légitimité et préconise l’organisation d’un référendum pour déterminer l’avenir des populations de la Palestine historique, référendum auquel participeraient musulmans, juifs et chrétiens, ainsi que les réfugiés installés dans les pays avoisinants. Les propos de Mashaei jurent donc avec la rhétorique habituelle d’Ahmadinejad. Pour autant, les déclarations du viceprésident ne sont nullement improvisées. Elles font partie, dit-on, d’un plan
minutieux destiné à améliorer l’image du président iranien à l’intérieur et à l’extérieur du pays, et ce dans la perspective de la présidentielle du 12 juin 2009. Selon un observateur cité par le Financial Times, « Ahmadinejad essaie au cours de la dernière année de son mandat de se présenter davantage comme un politique, alors que pendant les trois années précédentes il s’était surtout positionné à travers ses discours radicaux contre les États-Unis et Israël ». Mashaei, réputé très proche d’Ahmadinejad, a cherché à limiter les dégâts. Il s’est longuement expliqué, le 8 septembre, devant un groupe de députés. « Plus de mille fois, a-t-il plaidé, j’ai hurlé “Mort à Israël !” » Il a encore assuré que les convictions du président sur la question demeurent inchangées. En vérité, les débats sur les propos de Mashaei ne sont qu’une occasion pour ses adversaires de s’en prendre à Ahmadinejad. Hassan Rouhani, conseiller du Guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, est monté au créneau pour dénoncer « une politique qui, depuis trois ans, fait plus de mal que de bien ». Malgré l’augmentation du prix du pétrole, les Iraniens sont plus pauvres et l’inflation a atteint un niveau historique, flirtant avec les 28 %. On relève cependant que Khamenei lui-même s’est abstenu d’intervenir dans la polémique. Le mois dernier, il avait donné sa bénédiction à Ahmadinejad pour un nouveau mandat. S’adressant à lui publiquement, il avait déclaré : « Il ne faut pas penser que tu accomplis ta dernière année au gouvernement. Non ! Agis comme si tu avais devant toi cinq ans de plus. » ■ H.B.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p050-051.indd 51
11/09/08 20:16:09
52 INTERNATIONAL
FR ANCE LA RÉPUBLIQUE
A-T-ELLE UN PROBLÈME AVEC
LʼISLAM?
Quatre affaires liées au respect des règles du culte musulman ont récemment déchaîné les passions. Appelée à se prononcer, la justice semble hésiter. Et le camp laïc sʼenflamme.
Y
SERGE FAUBERT
aurait-il deux poids deux mesures, en France, lorsqu’on est croyant ? Depuis quelques mois, les polémiques se multiplient autour de situations – souvent inattendues – qui ont pour point commun d’avoir un lien avec la pratique de l’islam. Alors que, dans le même temps, aucune querelle ne s’est nouée autour du culte catholique, juif, protestant ou même bouddhique. Il y a d’abord eu l’annulation par un tribunal de Lille d’un mariage entre deux musulmans au motif que la mariée avait caché qu’elle n’était plus vierge. Puis, le refus du maire de Vigneuxsur-Seine de prêter un gymnase à une association musulmane qui entendait organiser un tournoi féminin de basket auquel les hommes ne pouvaient assister. Presque au même moment, le Conseil d’État confirmait la décision du gouvernement de ne pas accorder la nationalité française à une Marocaine portant le niqab, bien qu’elle réside en
France depuis plusieurs années et soit mariée à un Français. Enfin, plus récemment, à Rennes, des avocats ont réclamé et obtenu le report d’un procès d’assises parce qu’un de leurs clients, qui observe le jeûne du ramadan, aurait été trop affaibli pour se défendre. Quatre affaires, donc. Dans deux d’entre elles, à Lille et à Rennes, la justice française s’est vu accuser – bruyamment – par les médias et une bonne part de la classe politique d’avoir cédé aux pressions de l’islam. En revanche, la décision du Conseil d’État et le refus du maire de Vigneux-sur-Seine ont été largement salués. DEUXIÈME RELIGION
Qui ne connaît l’histoire de la laïcité en France pourrait croire que la République a un problème avec l’islam. Qu’elle ne parvient pas à s’accommoder d’une religion qui est pourtant devenue la deuxième du pays en nombre de fidèles. Et certains, déjà, instruisent le procès des institutions, traquant ici ou là des relents colonialistes ou racistes dans l’inconscient collectif. C ’est oublier qu’en France la laïcité est avant tout un compromis entre l’État et les cultes. Un armistice conclu au terme de plus d’un siècle de déchirements, au regard desquels les affaires récentes font figure de débats policés. Un texte, la fameuse loi de 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État, a scellé une paix qui reste fragile.
Une paix à laquelle l’islam n’a pas participé, parce qu’il n’avait pas, à l’époque, l’importance qu’il a acquise depuis. Rien d’étonnant, par conséquent, à ce que des ajustements soient nécessaires pour que l’exercice du culte musulman trouve ses marques dans la société française. Somme toute, cette cascade de décisions judiciaires et administratives participe d’un mouvement de sécularisation et doit être apprécié comme tel. En revanche, il est permis de s’interroger sur la ligne de conduite des pouvoirs publics. Peut-on ainsi invoquer l’appartenance religieuse d’une ressortissante marocaine pour lui refuser la nationalité française et s’offusquer de ce que, à Rennes, des avocats usent du même argument pour reporter un procès d’assises? Quand on convoque Dieu dans les prétoires, il ne faut pas s’étonner qu’il prenne l’habitude de s’y inviter. Si le voile islamique devient un obstacle à l’acquisition de la
La laïcité est avant tout un compromis entre l’État et les cultes. Tous les cultes. nationalité française, pourquoi le ramadan n’ouvrirait-il pas droit à un report d’audience? Certes, dans l’arrêt du Conseil d’État, ce sont simplement les conséquences de l’appartenance religieuse de l’intéressée qui sont pointées : Faiza Silmi, expliquent les juges, « a adopté une pratique
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p052-054OK.indd 52
11/09/08 19:18:37
INTERNATIONAL 53 TROIS MOIS DE POLÉMIQUE
MYR MURATET/PICTURE TANK
31 MAI 2008. La presse révèle qu’un mariage entre deux musulmans a été annulé par le tribunal de Lille, le 1er avril, pour « erreur sur les qualités essentielles du conjoint ». L’épouse avait menti sur sa virginité. Féministes, associations laïques et partis de gauche tempêtent. Patrick Devedjian, secrétaire général de l’UMP, proteste, tandis que plusieurs membres du gouvernement (Roselyne Bachelot, Martin Hirsch, Fadela Amara, Nadine Morano) s’émeuvent publiquement. 19 JUIN 2008. L’Association culturelle des musulmans de Vigneux (ACMV) avait déposé, le 30 mai, une demande auprès de la mairie afin de disposer du gymnase municipal pour y organiser un tournoi féminin de basket intermosquées, sans préciser que l’accès en serait interdit aux hommes. Lorsqu’il découvre cette disposition, le maire UMP refuse de prêter l’installation. Bernard Laporte, le secrétaire d’État aux Sports, se rend sur place pour lui apporter le soutien du gouvernement. Le code civil rassemble l’ensemble des lois définissant le statut personnel des citoyens français. Datant de 1804, il a déjà été maintes fois amendé.
Dans ce registre, il faut le savoir, rien n’est définitif. En février dernier, l’imam de Créteil (Val-de-Marne), Ilyes Hacène, un Algérien naturalisé français, a été déchu de sa nationalité en raison de ses prêches radicaux. Menacé d’une expulsion du territoire national, il a vu la décision être rapportée in extremis, sans toutefois redevenir Français. L’ARTICLE OUBLIÉ
Quant à l’annulation de Lille, l’affaire déborde la seule dimension musulmane. Le jugement a mis sur le devant de la scène un dispositif juridique – prévu par l’article 180 du code civil – dont l’opinion française ignorait l’existence : la possibilité de réclamer l’annulation d’un mariage pour tromperie sur les « qualités essentielles » du conjoint ou de la conjointe. Stupéfaits, les citoyens ont découvert l’abondante jurisprudence suscitée par cet article. Ainsi, mari et femme sont fondés à réclamer l’annulation du mariage si leur a été caché, par exemple, l’existence d’une relation extraconjugale que le conjoint
▲ ▲ ▲
radicale de sa religion incompatible avec les valeurs essentielles de la communauté française et notamment le principe d’égalité des sexes ». Pourquoi donc faire référence à la pratique religieuse? On entre aussitôt dans un débat sans fin: que dire, par exemple, de la robe et des règles de vie des sœurs carmélites, pourtant détentrices d’une carte d’identité tricolore? Là aussi, le principe d’égalité des sexes est bafoué. Là encore, les convictions affichées sont aux antipodes des valeurs essentielles de la communauté française. Pourtant, le législateur n’a jamais envisagé de fermer le Carmel. Pour la bonne raison que la République considère que cet engagement relève de la seule liberté de conscience de l’individu. Et que, tant qu’il ne contrevient pas à l’ordre public, la justice n’a pas à intervenir. Cette référence à la pratique religieuse cacherait-elle alors un soupçon? Celui d’un quelconque activisme salafiste auquel pourrait s’adonner Faiza Silmi ? Aurait-on redouté, dans cette hypothèse, de ne plus pouvoir l’expulser, une fois devenue française?
JUILLET 2008. La presse se fait l’écho d’une nouvelle affaire: mariée à un Français et mère de trois enfants, Faiza Silmi a demandé la nationalité française en 2005. Une enquête est diligentée pour évaluer son assimilation et sa maîtrise du français. Après avis du préfet, son dossier est transmis au gouvernement, qui donne une réponse négative. Le 27 juin 2008, le Conseil d’État confirme le refus et rappelle que le gouvernement peut s’opposer à la naturalisation « pour défaut d’assimilation autre que linguistique ». 27 AOÛT 2008. Procès de sept braqueurs devant la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine. Les avocats d’un des prévenus demandent le renvoi du procès en raison des « contraintes diététiques et des obligations cultuelles qui s’imposent » à leur client, de confession musulmane. Le parquet général émet un avis favorable et, le 2 septembre, le procès est renvoyé au mois de janvier. La polémique enflant, Léonard Bernard de La Gatinais, le procureur général de la cour d’appel de Rennes, dément, le 4 septembre, le renvoi pour cause de ramadan et jure que la décision a été prise « au vu de plusieurs [autres] éléments ».
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p052-054OK.indd 53
11/09/08 21:03:52
54 INTERNATIONAL
« LAÏCITÉ OUVERTE »
Et justement, parmi ces motifs d’annulation, il en est un qui fait tout autant sursauter que celui invoqué devant le tribunal de Lille. Par le passé, des mariages civils ont été annulés parce que l’un des époux avait caché à l’autre sa qualité de divorcé, ce qui écartait définitivement la possibilité d’un mariage religieux chrétien. Autrement dit, les magistrats de Lille, même s’ils n’ont pas été très avisés d’ajouter la virginité à la longue liste des « qualités essentielles » ne devant pas être dissimulées, ont emprunté un chemin déjà balisé par les impératifs d’une autre religion. Pourquoi, alors, cette hyperréactivité de l’opinion et, au premier chef, du camp laïc ? Jamais l’annulation d’un mariage civil de deux catholiques n’avait provoqué pareille bronca.
JA2488p052-054OK.indd 54
Le procureur général de la cour d’appel de Rennes, Léonard Bernard de La Gatinais, dément qu’un procès d’assises ait été reporté pour cause de ramadan.
La réponse est très certainement à rechercher dans les discours prononcés par Nicolas Sarkozy au palais du Latran (cité du Vatican), en décembre 2007, et lors du dîner annuel du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), en février dernier. En martelant que la morale du rabbin, de l’imam ou du curé était « supérieure » à celle de l’instituteur, il a incontestablement réveillé bien des craintes. Car le président de la République n’a jamais fait mystère de sa volonté de promouvoir une « laïcité ouverte » s’inspirant largement du modèle anglo-saxon. Une
THOMAS BREGARDIS/MAXPPP
▲ ▲ ▲
n’avait nullement l’intention de rompre; la qualité d’ancien condamné ; la qualité de prostituée ; la nationalité ; l’aptitude à avoir des relations sexuelles normales ; la stérilité ; la maladie mentale…
laïcité qui, loin de ne reconnaître aucun culte, comme aujourd’hui, les reconnaîtrait tous, indistinctement. Il n’en fallait pas plus pour que l’opinion se crispe à la première décision judiciaire semblant s’inscrire dans ce mouvement. Et que se déploient les étendards. Le 22 septembre, la cour d’appel de Douai examinera à nouveau la demande d’annulation, après que Rachida Dati, la garde des Sceaux, s’est résolue à interjeter appel. Les magistrats devront à la fois dire le droit et rassurer un front laïc particulièrement vigilant. La tâche s’annonce délicate… ■
11/09/08 19:18:55
INTERNATIONAL 55
SIDA
Apobec 3 contre les rétrovirus La découverte chez la souris dʼun gène capable de produire des anticorps relance les espoirs de mise au point dʼun vaccin.
D
DIX ESSAIS, DIX ÉCHECS
Une étude publiée le 4 septembre aux États-Unis dans la revue Science signale la découverte chez la souris d’un gène appelé Apobec 3, qui contrôle sa capacité à générer des anticorps capables de neutraliser les rétrovirus – et pourrait jouer le même rôle chez les humains. Une piste ouvrant la voie à un vaccin stimulant la production de ces indispensables anticorps. En revanche, l’usage des microbicides, ces pommades appliquées dans le vagin ou le rectum pour empêcher la contagion, se heurte pour l’instant à de sérieuses difficultés : dix essais, dix échecs. Mais là encore, les chercheurs ne renoncent pas. Des progrès considérables ont été accomplis avec les traitements dits « de première ligne », prescrits en début de
1985
PRÉVALENCE DU VIH-SIDA CHEZ LES ADULTES DE 15 ANS À 49 ANS 0%
0,1 %
0,5 %
1%
5%
15 %
34 %
2005 SOURCE : OMS
epuis 1981, le sida a fait au moins 25 millions de morts dans le monde. On estime aujourd’hui à 33 millions le nombre des personnes vivant avec le virus. Et à 2,7 millions le nombre annuel des nouvelles contaminations. Comme le montre la carte ci-contre, l’Afrique reste le continent le plus touché, avec une prévalence maximale en Afrique australe. Lors de la conférence mondiale de Mexico, au début d’août, la tonalité générale était moins optimiste qu’il y a deux ans à Toronto. Grâce aux antirétroviraux, le sida est devenu depuis la fin des années 1990 une maladie chronique. On peut vieillir avec lui, mais, pour l’instant, on n’en guérit pas. En vedette, cette année, à Mexico : le vaccin. Malgré le milliard de dollars investis annuellement, aucune piste n’a encore abouti. Tout le monde a à l’esprit l’échec, en septembre 2007, de Step, l’essai de vaccin mené avec une préparation du laboratoire Merck… « La mise au point d’un vaccin est davantage un art qu’une science. Aucun pays, aucune équipe, aucun savant n’y arrivera seul », estime Tadakata Yamada, de la Fondation Bill et Melinda Gates.
maladie : ils coûtent vingt fois moins cher qu’il y a dix ans. Mais de nombreux patients doivent aujourd’hui être soignés « en deuxième ligne », avec des molécules nouvelles qui, elles, coûtent très cher : pas moins de 10 % d’augmentation chaque année. Au-delà même de ces complications, un gros effort reste à faire concernant le traitement de base. Par rapport à Toronto 2006, 2 millions de malades supplémentaires reçoivent des antirétroviraux. Hélas, dans le même temps, 5 millions de personnes ont été infec-
tées. La lutte contre l’épidémie réclame décidément une longue patience… Des essais doivent, par exemple, débuter en 2009 en vue de la mise au point d’une pilule qui, prise quotidiennement, pourrait protéger contre le virus. Mais il ne faut surtout pas relâcher l’effort concernant l’accès à la thérapie antirétrovirale dans les pays pauvres, ni les campagnes de dépistage et de prévention, au Sud comme au Nord. La circoncision ne peut remplacer le préservatif. ■ RENÉ GUYONNET
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p055.indd 55
11/09/08 17:45:14
56 INTERNATIONAL
ILS VIENNENT D’AFRIQUE, ILS ONT RÉUSSI AILLEURS
PARCOURS
Osvalde LEWAT
Documentariste née à Yaoundé, elle vit dans la région parisienne. Son premier long-métrage, Une affaire de nègres, a été présenté au dernier Festival de Cannes.
I
l y a longtemps qu’elle ne se formalise plus lorsqu’on orthographie son prénom, il est vrai peu courant, de manière fantaisiste. Elle a même pris le parti d’en rire. Sur une feuille de papier, Osvalde Lewat s’amuse à recenser les différentes façons de la « rater » : « Oswalde », « Hosvald », « Ausvalde »… À 31 ans, cette réalisatrice camerounaise n’est pourtant pas du genre à rire de tout. Elle s’est même fait une spécialité de faire pleurer. À l’instar d’Au-delà de la peine (2003), d’Un amour pendant la guerre (2005) ou d’Une affaire de nègres, son premier long-métrage documentaire sorti sur les écrans en juin, ses films sont souvent sombres. Et toujours engagés. Ils traitent de l’injustice, des traumatismes provoqués par les conflits armés, des crimes d’État… Alors, promis juré, son prochain sera une comédie. Histoire de changer de registre et de prendre du champ après les remous suscités par sa dernière enquête. Le film a été projeté en avant-première le 26 juin, au Club de l’Étoile, à Paris. Quatre mois auparavant, une version télévisée de cinquante-deux minutes intitulée Les Disparus de Douala avait été diffusée sur la chaîne publique France 5. La réalisatrice y raconte l’histoire de neuf jeunes Camerounais enlevés en janvier 2001 par une unité spéciale des forces de sécurité camerounaises chargée d’éradiquer le grand banditisme dans les bidonvilles de la métropole côtière. Ont-ils été exécutés avec près d’un millier d’autres personnes, comme le pensent les ONG ? Seule certitude : sept ans après leur arrestation, personne ne les a revus. Et rien n’a changé dans ce cloaque.
Née à Yaoundé, au Cameroun, Osvalde a grandi dans une famille marquée par les fréquentes absences de son père, Jean-Charles Lewat, directeur chez Alubassa, une filiale du groupe français Péchiney spécialisée dans la transformation de l’aluminium, à Douala. Lorsqu’elle a 13 ans, sa mère décède et l’adolescente trouve refuge dans les livres, qu’elle dévore, et les films : de Ben Hur, le chef-d’œuvre de William Wyler, à La Jeune Fille et la mort, de Roman Polanski, en passant par La Liste de Schindler, de Steven Spielberg… Comme il lui faut quand même prendre sa vie en main, Osvalde décide de devenir psychothérapeute. Mais son père, guère enthousiaste, finit par l’en dissuader. Alors, après le baccalauréat, elle intègre une école de journalisme et, à l’issue de sa formation, en 2000, est recrutée par Cameroon Tribune, le quotidien d’État. Mais la jeune reporter prend très vite conscience des limites du métier. Aux contraintes éditoriales d’un journal où elle se sent à l’étroit, elle préfère la liberté du documentariste. « J’étais très sensibilisée à toutes les questions relatives aux violations des droits de l’homme », explique-t-elle.
En 2007, lors de l’assaut contre la résidence de Bemba à Kinshasa, un obus pulvérise sa maison.
EN 2005, CETTE JEUNE FEMME GRACILE a fait une courte dépression après un tournage de plusieurs mois dans l’est de la RD Congo, au plus fort de la guerre. Elle a fini par en faire des cauchemars: « Mes nuits étaient peuplées de villages du Kivu dévastés, de vieilles femmes racontant avoir été violées par des miliciens armés et drogués », racontet-elle. On comprend qu’Osvalde ait aujourd’hui besoin de respirer. De penser à autre chose qu’à des calamités. Depuis 2003, elle vit dans une paisible commune des Yvelines, dans la grande région parisienne. Loin, très loin du cauchemar congolais.
Après avoir renoncé au journalisme et avant de s’orienter définitivement vers la vidéo, Osvalde s’était familiarisée avec le documentaire, au hasard d’un stage à l’Institut national de l’image et du son (Inis), à Montréal. En 2000, elle tourne son premier court-métrage, Le Calumet de l’espoir, tourné au Canada avec des Amérindiens. Puis, deux ans plus tard, Au-delà de la peine, un film retraçant la vie de Léppé, le plus vieux prisonnier du Cameroun, condamné à quatre ans de prison en novembre 1969 et qui n’en sortira que… trente-trois ans plus tard, en août 2002. À cause d’une erreur administrative ! C’est à cette époque que, lors d’un reportage sur la coopération au Cameroun, elle rencontre l’amour en la personne d’un jeune diplomate français, Luc Hallade. Un mariage et deux enfants plus tard, la petite famille navigue entre sa maison des Yvelines et les diverses capitales où Luc est affecté. En 2004, leur première destination n’a rien d’une sinécure… J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p056-057.indd 56
11/09/08 17:46:43
INTERNATIONAL 57
1977 Naissance à Yaoundé 2000 Travaille pour le quotidien Cameroon Tribune et réalise son premier documentaire, Le Calumet de l’espoir 2004 S’installe en RD Congo, où elle réalise Un amour pendant la guerre 2008 Réalise son premier long-métrage, Une affaire de nègres, présenté au Festival de Cannes et primé au festival Vues d’Afrique, à Montréal
À Kinshasa, leur villa est mitoyenne de celle du chef de guerre Jean-Pierre Bemba, devenu, l’année précédente, l’un des quatre vice-présidents de la République. Est-ce ce voisinage qui lui donne l’idée de réaliser Un amour pendant la guerre ? « Peut-être, je n’en sais trop rien », élude-t-elle. Seule certitude, elle n’a jamais envisagé une seconde de se mettre au tricot ni de jouer les ménagères avec ses « collègues » expatriées. Son plus mauvais souvenir congolais ? Ce jour de mars 2007 où, pendant l’assaut des forces gouvernementales contre la résidence de Bemba, un obus pulvérise par erreur une partie de sa maison. Par chance, la famille Hallade avait été évacuée un peu plus tôt. REVENUE EN FRANCE AU LENDEMAIN de cette mésaventure, elle court les festivals, multiplie les conférences et engrange les prix. Cette année, elle a notamment bénéficié d’une belle exposition au pavillon « Cinémas du Sud » du dernier Festival de Cannes, où Une affaire de nègres a été projetée le 19 mai. La motivation de la réalisatrice tient en quelques mots : « Tant que les lions ne raconteront pas eux-
mêmes leur histoire, on n’entendra que la version du chasseur », sourit-elle. De l’information au militantisme politique, il n’y a parfois qu’un pas… qu’Osvalde s’abstient soigneusement de franchir. « Je ne sais pas si mon dernier film est politiquement orienté. Il traite d’un sujet social et se veut une réflexion sur la manière dont nos pays s’approprient et pratiquent la démocratie », explique-t-elle. Malgré ce succès, qu’elle savoure sans exubérance, la jeune femme n’est pas du genre à s’endormir sur ses lauriers. Ses journées sont hyperchargées, mais elle ne s’en plaint pas. Sa soif de connaissance la pousse en permanence à se fixer de nouveaux défis. Elle devait entamer, cette rentrée, la deuxième année d’un master en management des industries culturelles, option audiovisuel et cinéma, à Sciences-Po Paris. Mais peut-être sera-t-elle contrainte d’y renoncer, au moins provisoirement : elle risque de devoir prochainement plier bagage pour s’installer à l’autre bout de la planète, à Moroni, dans l’archipel des Comores, où son époux vient d’être nommé ambassadeur de France. ■ GEORGES DOUGUELI
Photo : ANTOINE TEMPÉ
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p056-057.indd 57
11/09/08 17:46:47
58 INTERNATIONAL
FOOTBALL
Tous pourris, vraiment? Matchs truqués, joueurs, arbitres et dirigeants achetés... Un livre dʼun journaliste canadien révèle lʼampleur de la corruption dans le monde du ballon rond. Convaincant, hélas !
D
forme d’avenantes créatures de sexe féminin. Il écopera de dix ans de travaux forcés et mourra peu après. GUERRE DES GANGS
SIPA
eclan Hill attaque bille en tête : le football est corrompu, des matchs sont truqués, des résultats arrangés. Pour écrire The Fix, Soccer and Organized Crime, son dernier livre, dont la traduction française vient de paraître à Paris, le journaliste canadien a enquêté pendant quatre ans aux quatre coins du monde, interviewé plus de deux cents personnes – parieurs illégaux, tueurs à gages, flics en civil, joueurs de foot internationaux, arbitres, dirigeants de clubs, etc. – et découvert ce qu’il faut bien appeler de véritables mafias. Car le trucage des matchs est un business qui brasse des milliards de dollars et n’épargne aucun continent, même si ses places fortes sont en Asie : Bangkok, Singapour, Kuala Lumpur, Hong Kong, Shanghai, Pékin et Djakarta. Des exemples ? En 1989, les associations malaisienne et singapourienne créent une ligue professionnelle. Les gouvernements fédéraux des deux pays participent au financement, des stades sont construits, des contrats de retransmission télévisuelle signés et des vedettes étrangères recrutées. Quatre ans plus tard, les autorités découvrent que 80 % des matchs sont truqués, et l’opération tourne au fiasco. En 2004, l’Association chinoise de football (CFA) lance une Super Ligue réservée à l’élite. Pour en
L’affaire Hoyzer dans la presse allemande: l’arbitre avait « arrangé » des matchs de la Bundesliga!
faire partie, un club doit disposer d’un capital d’au moins 10 millions de dollars. Six mois plus tard, ladite Super Ligue se trouve totalement « polluée par de faux matchs, de faux arbitrages et des paris illégaux » et doit cesser ses activités. Ce n’est pas une première dans l’histoire du foot chinois. En 2001, Song Weiping, un magnat du bâtiment propriétaire d’un club, jette l’éponge : il en a marre de payer les arbitres. La CFA intervient et propose « une amnistie et aucune exposition publique de son cas » à tout arbitre acceptant de passer aux aveux. Président de l’association des arbitres, Gong Jianping se dénonce, en effet, et mal lui en prend : il est arrêté et jugé. Son procès révèle que les arbitres sont « rémunérés » sous
TRUQUER UN MATCH EN SIX LEÇONS • Contacter directement un joueur influent qui sera le « maître d’œuvre » de l’opération ; • l’approcher quand il est vulnérable, l’isoler psychologiquement ; • lui faire une offre pour le convaincre de débaucher plusieurs de ses coéquipiers (entre trois et cinq) ; • l’offre acceptée et le trucage accompli, le payer rapidement en cash ou en billets de loterie gagnants, voire en lui reversant une partie des gains réalisés sur les paris délictueux. Ne pas omettre d’entretenir l’amitié par quelques cadeaux (prostituées, etc.) ; • ne cibler qu’un seul joueur et le laisser constituer seul son « réseau » ; • recourir si nécessaire aux services d’un « coursier » (un ancien footballeur de préférence) afin de « louer l’accès » au joueur ciblé. ■ F.M.
En Europe, la palme revient à la Russie. Au sein de la ligue nationale existe un étrange système de « paiements de motivation » destiné à convaincre les équipes adverses de ne pas prendre part à un match truqué et à jouer honnêtement ! En 1993, Boris Eltsine avait fait de son ancien professeur de tennis, Shamil Tarpischev, son ministre des Sports. Celui-ci s’était empressé d’autoriser les clubs à importer de l’alcool et des cigarettes hors taxes. Une aubaine pour la mafia russe. Des bandes organisées prirent le contrôle de plusieurs clubs et se livrèrent une guerre sanglante. Depuis, la violence s’est apaisée, mais les liens entre la mafia et le foot sont loin d’être rompus. En Angleterre, les pots-de-vin et le trucage des matchs sont apparus dès les années 1950 et 1960. Il faut dire que les joueurs étaient, à l’époque, mal payés et exploités. Vingt ans plus tard, l’essor des coupes d’Europe des clubs et l’augmentation des enjeux financiers donnent aux arbitres une importance décisive : ne sont-ils pas les mieux placés pour « arranger » le résultat d’un match ? D’où la multiplication des sollicitations. Pour corrompre un arbitre, la recette est simple, confie le Croate Ljubomir Barin, dont ce f ut le « métier » Comment dans les années 1980 truquer un et 1990, au ser v ice match de (n o t a m m e n t ) d e s foot ?, de G i r o n d i n s d e B o rDeclan Hill, deaux et de l’Olyméd. Florent pique de Marseille. Massot, Ses « arguments » ? Paris, 444 pages, « Jolies filles, argent 21,99 euros. et gadgets élec t ro -
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p058-059.indd 58
11/09/08 18:18:55
AFP PHOTO/HOANG DINH NAM
INTERNATIONAL 59
Un ancien international arrive au tribunal d’Hô Chi Minh-Ville, en janvier 2007 : le football vietnamien n’est pas épargné par la mafia des paris.
niques. » Arrêté en 1995, puis jugé à Marseille, Barin a été condamné à une simple amende de 76 000 euros. Ni la Fédération française de football (FFF) ni l’Union des associations européennes de football (UEFA) n’ont enquêté sur les autres équipes citées par lui lors de son procès. Dix ans plus tard, l’arbitre allemand Robert Hoyzer est tombé à son tour pour avoir truqué des matchs de la Bundesliga avec un groupe de parieurs croates. Ses aveux ont entraîné l’ouverture d’enquêtes en Autriche, en Turquie et en Grèce. Plusieurs arbitres ont été suspendus, mais seul Hoyzer a fini en prison. Grâce à Internet, la corruption est désormais mondialisée, et le marché européen largement ouvert aux « spécialistes » asiatiques. La première incursion a été l’œuvre du Chinois Zehun Ye, qui, à partir de décembre 2004, a régulièrement truqué des rencontres du championnat de Belgique pour le compte de parieurs extrême-orientaux. Aujourd’hui, la mafia asiatique réalise un chiffre d’affaires de l’ordre de 450 milliards de dollars. Bien entendu, le football africain
n’échappe pas au phénomène. Surnommé Pal, le Sri Lankais Rajendran Kurusamy est, à Singapour, le chef d’orchestre d’une organisation spécialisée dans le trucage. Il a confié à Declan Hill s’être intéressé aux Lions indomptables du Cameroun dès la Coupe du monde 1994, par l’intermédiaire du « coursier d’un réseau de footballeurs camerounais corrompus ». Ce « coursier », Pal le rencontrera de nouveau en 1998, au Cameroun. En échange d’une somme d’argent et de l’installation de canalisations dans son village, il lui demandera de se mettre d’accord avec ses coéquipiers pour fausser le résultat d’un match de la Coupe du monde 1998 ! Plus fort que Pal, le Chinois Lee Chin (pseudonyme d’un dangereux malfaiteur installé à Bangkok) a lui aussi accepté de se mettre à table devant notre confrère canadien. En guise de hors-d’œuvre, il se vante d’avoir, lors des jeux Olympiques d’Atlanta (1996), truqué un match Tunisie-Portugal. Comme, explique-t-il, son « coursier
tunisien ne voulait pas recevoir d’argent », il l’aurait récompensé avec… une jolie Mexicaine payée 50 000 dollars pour toute la durée du tournoi. « Les Tunisiens ont perdu 2 à 0 et j’ai gagné plein d’argent », commente l’escroc. Le plat de résistance est constitué par le Mondial 2006, en Allemagne. Lee Chin aurait informé Hill du résultat de quatre matchs avant qu’ils ne soient joués. Pour trois d’entre eux (Italie-Ghana, Angleterre-Équateur et Italie-Ukraine), le journaliste reconnaît n’avoir d’autre preuve que la parole de Lee Chin. Pour le quatrième, BrésilGhana, il n’a pas non plus de preuves irréfutables, mais de fortes présomptions acquises lors d’un séjour au Ghana, où il a rencontré deux participants au match, Stephen Appiah, le capitaine du Black Star, et le gardien de but Richard Kingson, ainsi que le « coursier » de Lee Chin, l’ancien joueur Abukari Damba (voir J.A. no 2487). RÉDUITS AU SILENCE
« Je ne crois pas que ce soit vrai, répond Joseph S. Blatter, le président de la Fédération internationale de football association (Fifa). Si quelque chose est arrivé, cela n’a pas influencé le résultat final. Dans le cas contraire, cela signifierait que tout le travail accompli depuis trente ans pour développer le football et en faire une école de la vie serait un échec. » Il insiste : « Un échec. » Au cours de ses voyages, Hill a rencontré des gens qui ont essayé de nettoyer « le plus beau sport du monde ». « La plupart, écrit-il, ont été marginalisés, écrasés, réduits au silence. Journalistes mis à l’écart, arbitres morts, joueurs ignorés. » Il conclut sa pas-
Un « business » qui brasse des milliards de dollars et n’épargne aucun continent. sionnante enquête par une citation de l’avocat antiesclavagiste William Wilberforce, qui, en 1789, dénonçait en ces termes les atrocités commises sur les navires négriers : « Maintenant que vous avez entendu tout cela, vous pouvez choisir de détourner votre regard, mais vous ne pourrez plus jamais dire que vous ne saviez pas. » ■ FAOUZI MAHJOUB
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p058-059.indd 59
11/09/08 18:19:00
60 INTERNATIONAL Sarah Palin en Marge Simpson (de la célèbre série américaine).
RUSSIE- OTAN
Gesticulations en haute mer
Les deux camps regroupent des navires de guerre dans la mer Noire. Intox ou vraie menace ?
L
’Otan a remporté la première manche en reconnaissant contre vents et marées l’indépendance du Kosovo, en février. La Russie a contre-attaqué en août, dans le Caucase, en avançant des pions fort menaçants dans les provinces géorgiennes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie. Après la guerre de mouvement, voici le temps des tranchées. Si l’on peut dire, puisque le front se stabilise dans la mer Noire, où les deux camps rassemblent de petites armadas. Dix navires de guerre pour l’Otan, dont le destroyer USS McFaul, avec d’importants soutiens navals et aériens en Méditerranée, dans la mer Rouge, le golfe d’Aden et l’océan Indien. Douze navires pour la flotte russe de la mer Noire, stationnée dans la base de Sébastopol que lui loue, non sans réticences, l’Ukraine. Le porteavions Admiral Kuznetsov (52 avions
et 15 navires d’accompagnement) a reçu l’ordre de quitter les brumes arctiques et de mettre le cap sur le port syrien de Tartous. Le 5 septembre, l’arrivée dans le port géorgien de Poti, attaqué par les Russes en août, de l’USS Mount Whitney, le vaisseau amiral de la Ve flotte américaine – officiellement pour une « mission humanitaire » –, a suscité l’ire de Moscou, qui a répliqué en annonçant l’envoi prochain dans les Caraïbes d’un croiseur à propulsion nucléaire. Quatre navires russes devraient participer à des manœuvres avec la flotte vénézuélienne, en novembre. Bien entendu, comme au temps de la guerre froide, personne ne cherche l’affrontement ouvert. Après avoir montré sa force, l’Otan a replié en Méditerranée la flottille qui venait de participer à des manœuvres en Bulgarie et en Roumanie. ■ M.Z.
Avec la crise, les immigrés ne sont plus les bienvenus ESPAGNE
L
e temps est loin où l’Espagne accueillait les immigrés à bras ouvert. Loin ? Trois ans, une éternité. En 2005, le gouvernement du Premier ministre socialiste, José Luis Zapatero, avait en effet régularisé quelque 600 000 sans-papiers. Depuis, la crise économique est passée par là et l’envolée du taux de chômage – 10,7 % au mois d’août, soit 2,5 millions de personnes – relance le débat, pour ne pas dire la polémique, sur l’utilité des travailleurs étrangers. Le 3 septembre, Celestino Corbacho, le ministre du Travail et de l’Immigration, a évoqué la possible suppression en 2009 du recrutement « à la source » de ces derniers – disposition qui toucherait en premier lieu les Marocains, les Mauritaniens et les Sénégalais. Les 6 et 7 septembre, Roquetas de Mar, une ville d’Andalousie proche d’Almería, a été le théâtre d’affrontements entre la police et des immigrés sénégalais révoltés par le meurtre d’un des leurs, âgé de 28 ans, par un membre de la communauté gitane. Les autorités s’efforcent de présenter ce drame comme « un cas isolé » lié au trafic de drogue. Mais certains syndicats et associations de défense des étrangers y voient la conséquence directe de la dégradation des conditions de vie des populations les plus précarisées, premières victimes du ralentissement de l’activité économique. ■ J.-B.M.
ÉTATS-UNIS
Palinomania
S
arah Palin s’était publiquement comparée à « un pitt-bull avec du rouge à lèvres ». Barack Obama lui a répondu en montrant les crocs: « Vous pouvez mettre du rouge à lèvres à un cochon, il restera un cochon. » On l’aura compris: la campagne présidentielle américaine tourne, sur fond de métaphores animalières, au combat de rue. Contre toute attente, en effet, la désignation de l’ultraconservatrice gouverneure de l’Alaska comme colistière de John McCain a fait décoller celui-ci dans les sondages. La dame de Wasilla, bourgade dont elle fut maire, a beau ne pas être une personnalité flamboyante et sa carrière être jalonnée d’affaires embarrassantes (quoique apparemment pas très graves), rien n’y fait: une partie des Américains blancs – et des Américaines de même couleur! – se reconnaissent en elle. Les sondages reflètent cette « palinomania » naissante. Le ticket républicain arrive désormais en tête non seulement au plan national – ce qui, le système électoral étant ce qu’il est, ne prouve pas grand-chose –, mais dans certains swing states, ces États clés où se jouera le scrutin du 4 novembre, Ohio et Virginie notamment. Ailleurs (Floride, Michigan, Pennsylvanie), il a refait l’essentiel de son retard. Même les indépendants lui accordent leurs faveurs. À un peu plus d’un mois de l’échéance, Obama a J.-M.A. de quoi s’inquiéter. ■
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p060.indd 60
11/09/08 19:34:14
de JEUNE AFRIQUE
angola À pas de géant
Le pays vient d’organiser ses élections législatives dans un climat apaisé. Depuis la fin de la guerre en 2002, il affiche la plus forte croissance économique au monde. De quoi devenir un acteur majeur du continent ?
Agostino Pacciani / J.A.
LE PLUS
62 LE PLUS ANGOLA
POLITIQUE LA DÉMO C Pour les premières législatives organisées depuis seize ans, les électeurs se sont mobilisés. Un test crucial passé avec succès par le chef de lʼÉtat et le parti au pouvoir.
L
PIERRE-FRANÇOIS NAUDÉ, envoyé spécial
UN PAYS PHARE DU CONTINENT
Grand comme deux fois la France, situé à la charnière de l’Afrique centrale francophone et de l’Afrique australe anglophone (frontalier des deux Congos, de la Zambie et de la Namibie), l’Angola est le septième pays du continent par sa superficie. Ancienne colonie portugaise, il est le troisième pays lusophone par sa population (après le Brésil et le Mozambique). Ses terres, parmi les plus fertiles du continent, et ses fabuleuses richesses
paix qu’à de rares intervalles. En 1992, l’Unita n’avait pas accepté le résultat de la présidentielle et des législatives, entachées de soupçons de fraudes, et avait repris les armes. Mais aujourd’hui, le contexte est différent. DES ÉLECTIONS JUGÉES IMPARTIALES ET CRÉDIBLES
En réussissant sa première consultation démocratique dans un contexte politique pacifié, le pays fait un pas déterminant pour sa stabilité. Les résultats, partiels à l’heure où nous mettons sous presse, donnent le MPLA grand vainqueur, avec plus de 81 % des suffrages exprimés. De 129 sièges sur 220 à l’Assemblée nationale avant le scrutin, le parti au pouvoir aura donc désormais une majorité des deux tiers, qui lui permettra de faire adopter une Constitution définitive, institutionnalisant le caractère présidentiel du régime. De son côté, l’Unita ne recueille que 10 % des voix. Un résultat apparemment sans appel. Mais non exempt de quelques accrocs. À Luanda, qui compte près d’un tiers des 8,3 millions d’électeurs du pays, des problèmes d’organisation ont eu lieu dans environ 10 % des bureaux de vote: files interminables, retards du personnel et du matériel électoral… Et le scrutin a dû être prolongé d’une journée. Tout en pointant ces incidents, les observateurs de l’Union européenne et ceux de l’Union africaine ont qualifié les élections d’« impartiales et crédibles », la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et celle des pays de langue portugaise (CPLP) les jugeant « pacifiques et transparentes ». Isaias Samakuva, président de l’Unita, a, dans un premier temps, déploré leur
La réussite de ce scrutin, dans un contexte pacifié, est un gage déterminant de stabilité. minières (notamment pétrole et diamants, qui ont été l’une des raisons de la durée de la guerre civile postcoloniale) expliquent son dynamisme économique actuel (voir p. 70). De 1964 (date du début de la guerre pour l’indépendance, proclamée en 1975) à 2002, l’Angola n’a connu la
GIANLUIGI GUERCIA/AFP
«
e 5 septembre, c’est l’élan démocratique qui a triomphé ! » s’exclame Céleste, étudiante en droit à l’Université catholique d’Angola (UCA), à Luanda. Un élan libéré en 2002 par la fin de la guerre civile et qui se concrétise enfin avec la tenue de ces élections législatives maintes fois reportées. Pour Céleste, le Mouvement populaire pour la libération de l’Angola (MPLA, au pouvoir depuis 1975) et l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (Unita, opposition) « ont eu tout le temps pour se transformer en partis politiques ».
« manque de crédibilité ». Avec quelques autres des 14 partis et coalitions en présence, il a demandé un nouveau vote dans les bureaux où il y avait eu des difficultés. Une requête aussitôt rejetée par Caetano de Sousa, président de la Commission nationale électorale (CNE). Et, dès le 8 septembre, l’Unita a pris acte de sa défaite et annoncé qu’elle ne contesterait pas les résultats définitifs du scrutin. « Est-ce que nous avons vraiment le choix ? Pouvons-nous descendre dans la rue? » demande avec fatalité Alcides Sakala, l’ancien président du groupe parlementaire de l’Unita. De son côté, le MPLA ne se montre pas surpris du recul de son ennemi d’hier. « Politiquement, l’Unita paie le
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p062-064.indd 62
11/09/08 16:20:16
LE PLUS 63
O CRATIE EN MARCHE ? REPÈRES
11 novembre 1975 Indépendance (du Portugal). Début de la guerre civile opposant le Mouvement populaire pour la libération de l’Angola (MPLA) et l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (Unita). 10 septembre 1979 Décès du chef de l’État Agostinho Neto, le « père de l’indépendance ». José Eduardo dos Santos lui succède à la présidence, le 21 septembre. « L’Angola change pour le meilleur », slogan des supporters du MPLA lors d’un meeting électoral le 30 août, près de Luanda.
29-30 septembre 1992 Premières élections multipartites (présidentielle et législatives) gagnées par le MPLA. La guerre reprend quelques mois plus tard à l’initiative de l’Unita, qui en contestait les résultats. 20 novembre 1994 Signature des accords de paix de Lusaka (Zambie). Décembre 1998 Reprise de la guerre civile.
L’UNITA ET LE FANTÔME DE SAVIMBI
Une faiblesse qui s’explique peutêtre par le difficile renouvellement des cadres de l’Unita depuis la mort au combat de son fondateur, Jonas Savimbi, en 2002 – et celle de nombre de ses « frères ». La plupart des figures qui ont marqué la campagne électorale de 2008 n’ont vraiment émergé que
PIB en milliards de dollars 13,9
19,8
30,6
88,4 45,1
Taux de croissance en % 3,3
11,2
2003
2004
20,6
18,6
2005
2006
61,3
23,4 2007
28,4
2008*
SOURCE : Banque Mondiale - 2006, FMI
cause de la stratégie de Samakuva dans les prochains mois. Confirmé en 2007 à la présidence du parti du Coq noir (symbole de l’Unita) par les délégués des hauts plateaux et du centre du pays, le leader de l’Unita n’a pas réussi à incarner avec suffisamment de force le changement espéré par de nombreux électeurs.
▲ ▲ ▲
prix de tous les crimes qu’elle a commis pendant la guerre », affirme Rui Pinto de Andrade, directeur du département de l’information et de la propagande du MPLA. « L’Unita n’a pas su modifier son image de parti issu de la campagne, alors que la population angolaise, elle, est majoritairement urbaine », analyse Lopo do Nascimento, député MPLA et ancien Premier ministre, qui avait violemment critiqué l’arrogance de son propre parti en 2005. « Le rival de Samakuva à la tête de l’Unita, le député Abel Chivukuvuku, aurait pu transformer plus rapidement l’Unita en un grand parti moderne », continue-t-il. De fait, les résultats décevants de l’Unita devraient amener une remise en
Superficie 1 246 700 km2 Population 16,8 millions d’habitants Croissance démographique 2,8 % Taux d’alphabétisation 67,4 % Indice de développement humain 0,446 (162e rang sur 177) Langue officielle Portugais Monnaie Kwanza (AOA) Parité au 01/09/2008 1 euro = 110,4 AOA ; 1 $ = 75,16 AOA PIB par habitant 3 757 $ Répartition du PIB Primaire : 6,7 % – Secondaire : 59,5 % – Tertiaire : 33,8 % Inflation 11,7 %
SOURCES : FMI, BANQUE MONDIALE, PNUD (DONNÉES POUR 2007)
22 février 2002 Le chef de l’Unita, Jonas Savimbi, meurt au combat. Le 30 mars, l’Unita et le gouvernement angolais signent des accords de paix, et, le 4 avril, le conflit prend fin.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p062-064.indd 63
11/09/08 16:20:18
64 LE PLUS ANGOLA ▲ ▲ ▲
depuis peu. Au début des de vue de l’espérance de vie, de 200 km RÉPUBLIQUE Cabinda années 1990, Isaias Samakuva, l’éducation et de la richesse: les DÉMOCRATIQUE DU CONGO son président actuel, gérait à deux tiers des Angolais vivant Londres les représentations en dessous du seuil de pauextérieures du parti. Son rival à vreté (avec moins de 2 dollars Luanda Océan la tête de l’Unita, Abel Chivukupar jour). Alors que Luanda se Atlantique vuku, était à peine plus connu modernise et se reconstruit, les ANGOLA quand il a participé à l’organisaprix de l’immobilier s’envolent tion des élections dans la capiet les musseques (bidonvilles) tale angolaise en 1992. Quant grossissent dans les quartiers à l’actuel secrétaire général du périphériques. ZAMBIE parti, Abilio Camalata Numa, La lutte contre l’affairisme il avait un rôle essentiellement et la corruption est un autre militaire. Parmi les personnalichantier de taille pour le gouNAMIBIE tés aujourd’hui en vue au sein vernement, qui déploie de de l’Unita, on compte aussi Alciréels efforts de transparence des Sakala (ancien président du groupe et voté pour le MPLA. Auquel ils demandans sa gouvernance. « Le MPLA n’a de parlementaire de l’Unita) et Adalberto dent davantage de changements dans le toute façon pas le choix, commente le da Costa Junior (secrétaire de l’informadomaine social et un meilleur partage révérend Luis Nguimbi, qui préside le tion du parti), qui, pendant la guerre, des richesses. puissant Conseil des Églises chrétiennes étaient tous deux délégués en Europe. d’Angola. L’opposition va s’organiser et Tout ce petit monde devrait désormais L’IMPÉRATIF SOCIAL se renforcer, surtout si rien n’est fait au prendre une part active dans la délicate Malgré les progrès réalisés depuis niveau social. Au Zimbabwe, Mugabe question du leadership de l’Unita. Pour 2003 dans la reconstruction du pays aussi croyait tenir son opposition ! La le moment, l’unique référence de l’Uni(voir p. 70), le vrai défi des autorités reste balle est désormais dans le camp du ta demeure… le fantôme de Savimbi. l’amélioration des conditions de vie de MPLA, qui n’a plus d’excuse, conclutBeaucoup d’électeurs ont donc largesa population, qui continue à concentrer il, pour ne pas réussir à améliorer les ment associé l’Unita à la guerre civile les indicateurs les plus faibles du point conditions de vie des Angolais. » ■
JA2488p062-064.indd 64
11/09/08 16:20:24
LE PLUS 65
PORTRAIT
José Eduardo dos Santos, un animal politique Par nature plutôt discret, le chef de lʼÉtat angolais sʼest mué en star des médias pendant la campagne des législatives. Et sʼest positionné pour la présidentielle de 2009.
D
FRANCISCO LEONG/AFP
epuis quelques mois, celui tel un joueur de poker, à dissimuler ses jeunesse du parti. En 1963, ce dernier qu’on disa it, au m ieu x, émotions. Pour mieux grimper l’échelle l’envoie étudier en URSS, à Bakou, effacé et, au pire, sans chadu pouvoir… d’où il revient sept ans plus tard avec risme, a réussi à surprenNé en 1942 à Luanda d’un père un diplôme d’ingénieur spécialisé dre tous les observateurs politiques, maçon et d’une mère employée de dans les hydrocarbures et les télécomfaisant taire au passage les spéculamaison, il devient d’abord, selon ses munications. L’éducation soviétique tions sur sa santé. En mai, a renforcé en lui les qualités après la 3e conférence natioqui vont le faire remarquer : nale du Mouvement populaire rigueur et organisation, sangpour la libération de l’Angola froid et discrétion. (MPL A), José Eduardo dos Santos a en effet lancé une SA DERNIÈRE BATAILLE ? véritable offensive de charme Après l’indépendance, envers la jeunesse, dont le en 1975, il est très proche vote est toujours incertain, d’Agostinho Neto (fondateur et envers les femmes, qui du MPLA et premier président composent désormais plus de l’Angola), qui lui confie de 60 % de l’électorat angoplusieurs postes ministériels lais. Ce qui a le plus surpris, importants (Relations étrany compris dans l’opposition, gères, Plan…). À la mort de c’est la rapidité et la radicace dernier, en 1979, il est prolité de la transfiguration prépulsé à la tête du MPLA et de sidentielle. l’État par le numéro deux du « Je suis le joueur d’une équiparti, Lucia Lara, qui refuse le pe qui gagne! » s’est-il exclamé poste suprême parce qu’il est le 29 août, devant des milliers « métis et que ce n’est pas le de militants à Lubango. Entre moment ». De fait, une partie l’homme taciturne, introverti, de l’élite blanche et métisse du peu coutumier des grands gesnouveau parti-État pense que Propulsé à la tête du MPLA et du pays en 1979, tes théâtraux – tout le contraile technicien dos Santos n’est « Zédu » est toujours en place vingt-neuf ans plus tard. re de feu Jonas Savimbi, fonqu’une éphémère solution de dateur de l’Union nationale transition. Vingt-neuf ans plus pour l’indépendance totale de l’Angola propres mots, une « vedette locale » en tard, l’avènement du multipartisme a (Unita) – et la star médiatique que l’on jouant du violon et du tambour dans eu lieu (1991), Jonas Savimbi est mort a vue pendant la campagne courir le son quartier. À 19 ans, révolté par la (2002), l’Angola est devenu la clé de pays au gré des inaugurations d’infraviolence coloniale, il abandonne l’école voûte de l’équilibre régional… Et dos structures publiques, il y a un monde. et ses instruments de musique pour Santos est toujours en place. Prêt à Mais il faut se rappeler que celui qu’on rejoindre, en exil, le MPLA. Il se rend recevoir l’onction démocratique de a surnommé « Zédu » (contraction de d’abord à Brazzaville, puis à Kinshasa, l’élection présidentielle de 2009. ■ P.-F. N. José Eduardo) a dû très tôt apprendre, où il s’occupe de l’organisation de la
JA2488p065.indd 65
11/09/08 16:29:22
66 LE PLUS ANGOLA
INTERNATIONAL
Ambitions diplomatiques LʼAngola sʼaffirme comme une puissance majeure du continent. Par son engagement dans les structures de coopération multilatérales et les liens de son président avec les autres dirigeants dʼAfrique australe.
«
L
a stabilité de l’A ngola passe obligatoirement par une diplomatie ambitieuse et efficace, souligne Lopo do Nascimento, député du Mouvement populaire pour la libération de l’Angola (MPLA) et ancien Premier ministre, lors d’un entretien accordé à Jeune Afrique. De même, l’intégration économique régionale est vitale si on ne veut pas que des problèmes comme ceux qu’on a vus en Afrique du Sud ou au Zimbabwe se reproduisent. » Luanda a en effet peu apprécié l’impuissance du président sud-afri-
JA2488p066-067.indd 66
cain Thabo Mbeki à résoudre la crise zimbabwéenne. « Le MPLA défend les valeurs d’un monde métis, tolérant et progressiste », explique Lopo do Nascimento, dont le parti a été scandalisé par les violences contre les étrangers en Afrique du Sud. Et il ne s’est pas privé de le faire savoir à T habo M bek i, considéré comme un traître par nombre de « camarades », car celui-ci s’était rapproché, à la fin de l’apartheid, de son ennemi d’alors, l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (Unita, dirigée à l’époque par
Jonas Savimbi). À Luanda, on se félicite donc de l’ascension à la tête du Congrès national africain (ANC) de Jacob Zuma, qui a d’ailleurs été reçu par José Eduardo dos Santos, en mars dernier, avec tous les honneurs dus à un chef d’État. OBJECTIF : DEVENIR LE LEADER POLITIQUE DE LA SOUS-RÉGION
En route pour l’élection présidentielle de 2009 comme dos Santos, Zuma n’est que le dernier en date des leaders de la sous-région sur lesquels le président angolais exerce une forte ascendance. C’est lui qui, en 1997, a aidé Laurent-Désiré Kabila à renverser le régime mobutiste, allié de l’Unita, puis à se maintenir au pouvoir en RD Congo. La même année, au Congo, les forces armées angolaises ont aidé Denis Sassou Nguesso à reprendre
11/09/08 16:33:03
Le chef de l’État sud-africain Mbeki (à g.) reçu le 13 août par le président dos Santos.
Brazzaville à Pascal Lissouba, lui aussi soutien de Savimbi. De quoi garder des liens étroits avec les deux voisins congolais… Depuis, l’Angola a poursuivi son of fensive diplomat ique avec des
moyens plus politiquement corrects, en renforçant notamment sa présence dans les structures multilatérales africaines. En 2007, l’Angola a été nommé pour trois ans au Conseil de paix et de sécu-
EPA/PEDRO MAGALHAES
LE PLUS 67 rité de l’Union africaine et devrait prendre une part croissante dans les opérations de maintien de la paix sur le continent. Sa présence s’est renforcée au sein de la Communauté économique des États d’Afrique centrale (CEEAC, dont le secrétaire exécutif adjoint est angolais depuis 1999). Et il fait désormais partie du comité permanent de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), dont il est le deuxième contributeur après l’Afrique du Sud (avec 2,8 milliards de dollars pour 2008-2009). Sans compter que l’Angola est l’un des piliers de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), ce qui lui permet de maintenir un haut degré de coopération militaire et économique avec le Portugal et de se rapprocher de plus en plus du Brésil (sur les plans social et économique). Tout en faisant bénéficier ses partenaires de ses liens privilégiés avec la Chine (voir p. 70). C’est désormais une évidence : l’Angola n’a plus rien d’un nain diplomatique… ■ P.-F. N.
L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ. À CONSOMMER AVEC MODÉRATION.
JA2488p066-067.indd 67
11/09/08 16:33:04
68 LE PLUS ANGOLA
PORTFOLIO
Sur le tournage de la prochaine telenovela de la télévision publique angolaise, Crime et punition, réalisée par le Brésilien Aloísio Filho.
Mannequins habillés par le styliste angolais Lena Ma-Nuel.
Champion mondial de la croissance, le pays change et se modernise à grande vitesse. À commencer par sa capitale, devenue cette année la ville la plus chère du monde, détrônant Tokyo. Le boom économique s’accompagne aussi de l’émergence d’une classe moyenne qui ne se prive plus de consommer. Mode glamour, déco design, équipements high-tech, bars à cocktails et soirées branchées… La ville bouge avec eux.
© SANDRA ROCHA/KAMERAPHOTO
Le nouveau visage de Luanda
Le grand hall de la Banque d’Angola.
Le centre commercial Belas, au cœur du très chic quartier de Luanda Sul, urbanisé ces dernières années. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p068.indd 68
11/09/08 16:40:49
Sans titre-1.indd 1
11/09/08 17:04:15
70 LE PLUS ANGOLA
ÉCONOMIE
La reconstruction comme moteur Portée par les pétrodollars, la croissance du pays est la plus élevée au monde : 23,4 % en 2007. Une relance qui attire les investisseurs du monde entier et doit permettre une nécessaire diversification.
«
L
a logique du gouvernement est de construire les infrastructures sans lesquelles rien ne peut se faire, explique Michel Gélénine, conseiller économique de la mission économique française à Luanda. Les paiements se faisant en dollars, l’Angola garde une monnaie forte et ne dépense pas ses pétrodollars dans l’économie locale, pour ne pas relancer l’inflation. » De fait, le pays a réussi à stabiliser son économie en ramenant l’inflation de 44 % à 11,8 % entre 2004 et 2007, même si les produits agroalimentaires (dont la plupart sont importés) se sont appréciés de près de 20 % depuis le début de 2008. Quant à la dette extérieure, « elle est passée de 33 % à 16 % du PIB, un des taux les plus bas du monde. Le temps des crédits gagés sur le pétrole est désormais révolu », se félicite le ministre des Finances angolais, José Pedro de Morais (auquel le magazine britannique The Banker, publié par le Financial Times, a remis fin juillet le trophée du « meilleur ministre africain des Finances » de l’année). Au sortir de la guerre civile, l’Angola avait en effet eu recours à ce genre de
prêt pour financer ses infrastructures. La ligne de crédit de 9 milliards de dollars accordée en 2003 par la Chine (auxquels s’ajoutent les 2,9 milliards du China Fund) a permis jusqu’à présent l’injection d’environ 4,5 milliards de dollars dans l’économie. DES CHANTIERS PAR MILLIERS
Menée par le général Hélder Vieira Dias, dit Kopelipa, homme de confiance du président dos Santos, la reconstruction nationale a pris u n bon dépa r t. « E n six ans de paix, nous avon s con st r uit plus de 2 400 kilomètres de routes, 230 ponts, 223 postes de santé, 30 000 salles de classe, et formé au moins 90 000 professeurs ! Tout cela va nous permettre de relancer l’économie », martèle Rui Pinto de Andrade, le directeur de l’information et de la propagande du MPLA. L’Angola est en effet un immense chantier. Les projets à l’étude ou en cours de réalisation ne se comptent plus : ports (notamment à Luanda, où le temps d’attente avant déchargement est estimé à quarante jours, mais aussi
à Namibe, Cabinda, Lubango, Soyo, Lobito), aéroports (400 millions de dollars sont prévus pour leur réhabilitation dans l’ensemble du pays), lignes ferroviaires (réseaux de Luanda, Malanje, Benguela, Moçamedes)… De même, l’immobilier public et privé se développe. Favorisant l’émergence d’une classe moyenne, l’État commence à financer des programmes de logement. Lesquels jouxtent des projets plus spéculatifs comme celui, pharaonique, de Kilamba Kiaxi, dans la banlieue de Luanda, où China International Trust and Investment Corporation (Citic) va construire d’ici à 2010 une ville entière de 710 immeubles et 20 000 appartements, pour un investissement de 3,5 milliards de dollars !
« En six ans, nous avons construit 2 400 km de routes… et 30 000 salles de classe ! »
L’EXPANSION SELON SONANGOL Fonctionnant à la manière d’un fonds souverain, la société pétrolière nationale Sonangol est au centre d’une stratégie qui vise à délocaliser, de Lisbonne à Luanda, les centres de décision de grandes sociétés portugaises. Elle pourrait ainsi bientôt prendre le contrôle de Galp Energia, dont elle contrôle déjà 15 %, en achetant la part de 7 % que l’État portugais a décidé de vendre le 1er août. Le géant angolais possède déjà, dans le secteur bancaire, 49,9 % de Millenium BCP Angola (filiale de BCP, la plus grande banque privée portugaise, dont Sonangol est le plus gros actionnaire avec 10 % des parts), 49 % de BPI et 25 % de Totta-Angola. Entre autres… Déjà propriétaire d’une compagnie aérienne, Sonair (qui possède une flotte de 52 appareils), la Sonangol entend aussi investir dans la compagnie nationale portugaise TAP, que le gouvernement portugais a l’intention de privatiser. ■ P.-F. N.
La Chine se taille bien sûr une part de lion dans la construction d’infrastructures. Environ 70 % des travaux de reconstruction financés par la Chine sont réalisés par des entreprises chinoises. « Il est très difficile de trouver des places sur le vol PékinShanghai-Luanda. Nous sommes au moins 80 000 dans le pays », commente M. David, restaurateur chinois à Luanda et importateur agroalimentaire. « Entre 80 000 et 100 000 », confirme un conseiller du ministre du Pétrole. Un chiffre qui équivaut à celui des Portugais travaillant en Angola. LES NOUVEAUX PARTENAIRES SE BOUSCULENT
Le Portugal reste le premier partenaire commercial, dont les exportations vers l’Angola ont atteint 1,9 milliard de dollars en 2007. Les banques portugaises sont très présentes à Luanda à travers des filiales dans lesquelles l’État angolais (voir encadré) prend de plus en plus d’importance. Les groupes portugais de BTP ne sont pas en reste, comme Teixera Duarte, Mota Engil, Soares da Costa… Tou-
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p070-071.indd 70
11/09/08 16:46:53
LUSA
LE PLUS 71
Vue imprenable sur Luanda, en plein mouvement.
tefois, l’ancienne puissance coloniale est aujourd’hui très concurrencée par le Brésil, dont les exportations vers l’Angola ont augmenté de 66,9 % dans les cinq premiers mois de 2008, pour atteindre 606 millions de dollars. On le voit, l’Angola tente de diversifier au maximum ses partenariats. Sa stratégie de multiplication des jointventures entre sociétés nationales et étrangères se traduit par la multiplication des accords de protection (et souvent de promotion) des investissements avec de nombreux pays européens : le Portugal bien sûr (1997), mais aussi le Royaume-Uni (2000), l’Italie (2002), l’Allemagne (2003), l’Espagne et la France (2008). Du coup, les banques européennes se bousculent pour ouvrir des lignes de crédit à l’investissement, qui concernent des centaines de millions de dollars (Caixa Geral de Depositos, Fortis, Société générale, etc.) Un mouvement que la bancarisation
www.cegelec.com Groupe international de services technologiques aux entreprises et aux collectivités
de l’économie ne fait que favoriser : le nombre des dépôts a augmenté de 82 % en 2007, et les prêts nationaux, « qui étaient de l’ordre de 2 millions de dollars en 2006, portent désormais sur des montants de 50 millions », explique Gélénine. DES CRÉNEAUX PORTEURS
Conséquence : une diversification, encore timide mais bien réelle, s’amorce. Outre les richesses minières déjà en exploitation – le diamant et le pétrole (voir p. 72) ont rapporté respectivement 1,3 et 16,1 milliards de dollars aux caisses de l’État en 2007 –, le secteur parapétrolier et les matériaux de construction constituent le fer de lance de cette diversification. Réhabilitation ou construction de raffineries (Luanda, Soyo, Lobito), distribution de carburant (avec, notamment, Sonangalp, le jointventure entre Sonangol et la société portugaise Galp Energia), développe-
ment des cimenteries à Luanda et Lobito, etc. Deux unités produisent déjà près de 2 millions de tonnes par an, sur un besoin estimé à 5 millions de tonnes, et une troisième doit s’établir à Benguela. Et ce n’est pas tout. L’Angola compte bien favoriser des investissements dans le tourisme, alors que la Coupe d’Afrique des nations (la CAN), organisée par l’Angola en 2010, se rapproche. Une série d’hôtels luxueux sont, par exemple, prévus sur le front de mer de Luanda où sont actuellement réalisés des travaux d’embellissement pour un montant de 110 millions de dollars. Mais le secteur qui aiguise au premier chef les appétits des investisseurs, c’est celui de l’agroalimentaire. L’Angola se situe, en termes de terres arables sans irrigation (hors Chine), à la quatrième place mondiale avec 92,6 millions d’hectares (derrière le Brésil, l’Inde et la RD Congo). ■ P.-F. N.
Une véritable relation de partenariat en Angola
CONTACT : Cegelec S.A. (Sucursal Angola) Rua Lourenço Mendes da Conceiçao ,#$%-/ ) 6;98 *93<;90. + 1:8508 ) /5!398 Tel: + 244 222 44 32 51 Fax: + 244 222 44 27 05 (78;9 & ;5"324.!.9.4)83'437
JA2488p070-071.indd 71
11/09/08 16:46:53
72 LE PLUS ANGOLA
HYDROCARBURES
É
ternel deuxième producteur de brut d’Afrique subsaharienne, l’Angola a raflé, en juin dernier, la première place du palmarès au Nigeria. Une victoire symbolique, conséquence de la montée en flèche de sa production : multipliée par deux entre 2003 et 2007, elle a atteint 1,9 million de barils par jour au premier semestre 2008. Soit le niveau du quota fixé à Luanda lors de son entrée, en mars 2007, dans l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). La stabilisation politique, à partir de 2002, est la principale raison du « boom pétrolier » angolais. Malgré de mirifiques réserves offshore – les réserves dites prouvées sont estimées à 12 milliards de barils –, le pays n’a guère bénéficié d’investissements directs étrangers (IDE), y compris dans le secteur pétrolier, pendant les vingt-sept années de guerre civile qu’il a traversées. La
paix signée, l’or noir angolais a de nouveau attiré les IDE, qui ont atteint, sur la période 2002-2004, le niveau le plus important du continent (7,2 milliards de dollars). ExxonMobil, Total, C he v r on : le s t r oi s majors constituent le Le pays est devenu le 1er producteur de brut trio de tête des opérad’Afrique subsaharienne. teurs dans le pays. Derrière elles, le chinois Sinopec croque lui aussi sa part du brut, liards de dollars (hors compagnie pour le plus grand bonheur de Pékin, nationale Sonangol). Restera à en premier acheteur du pétrole angolais faire profiter les 17 millions d’Angoavec les États-Unis. La Société nationale lais – dont près de 70 % vivent en desdes hydrocarbures (Sonangol, concessous du seuil de pauvreté (moins de sionnaire) dispose également d’une 2 dollars par jour) – avant que le pic filiale active dans la production. de production, prévu pour 2011, soit Les recettes de l’or noir devraient atteint. ■ MARIANNE MEUNIER atteindre, à la fin de 2008, 19,8 mil-
IMAGEFORUM
Nouvel eldorado
Une vision globale, une sensibilité locale
Acergy Angola SA - Angolan branch
Avenida 4 de Fevereiro nr. 31, 1 andar - apt B - Prédio Patria Codigo Postal 5822, Luanda - Rep. Angola T: +244 222 310 305 - F: +244 222 310 123
JA2488p072.indd 72
www.acergy-group.com
11/09/08 17:17:16
Document :MONTE ADRIANO.pdf;Page :1;Format :(195.00 x 270.00 mm);Date :03. Sep 2008 - 12:04:38;SpeedFlowCheck
Construire, agrandir, moderniser les carrefours internationaux que sont les ports et leurs infrastructures, c'est participer concrètement au développement des pays émergents. Leader du génie civil africain depuis un demi-siècle, Somagec est fière d'être un des acteurs majeurs du dynamisme économique en Afrique. Créer de nouveaux ports à Malabo, à Annobon ou à Kogo, c'est contribuer à la construction de la Guinée Equatoriale, de son commerce, de ses ressources énergétiques. C'est accompagner le développement humain et technique. Forte de sa connaissance du continent africain, Somagec a développé une expertise alliant innovation, confiance, sécurité et rentabilité.
Document :JA2488PXXX Somagec 10-09-08-JA.pdf;Page :1;Format :(195.00 x 270.00 mm);Date :11. Sep 2008 - 10:16:35;SpeedFlowCheck
Bâtir aujourd'hui la richesse de demain
75
ECOFINANCE MARCHÉS
|
INDUSTRIE
|
SERVICES
|
FINANCE
|
MANAGEMENT
|
COMMUNIC ATION
FALONNE
Chocodi, principal chocolatier du pays, racheté au suisse Barry Callebaut par le groupe ivoirien CKG Holding.
CÔTE DʼIVOIRE
Les hommes de Gbagbo prennent le pouvoir économique TRANSPORT AÉRIEN, AGROALIMENTAIRE, BANQUE, ASSURANCE… L E PRÉSIDENT RECONSTRUIT PEU À PEU L’ÉCONOMIE DU PAYS EN FAVORISANT L’ÉMERGENCE D’UN PUISSANT SECTEUR PRIVÉ LOCAL. PAR PASCAL AIRAULT et BAUDELAIRE MIEU, à Abidjan
R
ien ne semble enrayer la marche conquérante des nouveaux entrepreneurs ivoiriens. Dernier fait d’armes, à la fin d’août : le rachat à l’État de 50,5 % du capital de la compagnie aérienne Air Ivoire par le groupe Atlantique, dirigé par l’ancien minis-
tre de l’Enseignement technique, Koné Dossongui, reconverti dans les affaires. Une opération à 5,7 milliards de F CFA (8,6 millions d’euros), négociée en haut lieu. À défaut d’avoir réglementé la nationalisation des activités stratégiques du pays, Laurent Gbagbo facilite l’émergence d’hommes d’af-
faires du sérail, souvent issus de son parti ou proches de lui, dans les secteurs clés de l’économie. Charles Kader Goré, directeur de campagne locale du candidat Gbagbo à Bédiala, est une autre grande figure de la nouvelle économie ivoirienne. Président du groupe CKG Holding, il a pris au début de juin le contrôle d’Ivoire logistique, filiale du manutentionnaire belge Sea-Invest Group, puis celui de la Société nouvelle Chocodi, l’un des leaders de la chocolaterie, racheté au groupe suisse Barry Callebaut. Deux opérations pour lesquelles il a obtenu un prêt de 6 milliards de F CFA de l’établissement financier de
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
ja2488p075-077.indd 75
12/09/08 17:30:19
l’État, la Banque nationale d’investissement (BNI), dirigée par Victor Silué Nembelessini, ami de longue date de Paul Antoine Bohoun Bouabré, l’exgrand argentier devenu ministre du Plan, et de Simone Gbagbo. Quelques mois plus tôt, Kader Goré avait pris la majorité du capital de Yara West Africa, qui opère la plus importante usine d’engrais de la région. Son groupe, CKG Holding, créé en 2004, est doté d’un capital de 1 milliard de F CFA (1,5 million d’euros). Il compte huit filiales et emploie 6 000 personnes dans l’agroalimentaire, le recouvrement, la gestion immobilière ou encore la sécurité (gardiennage et transfert de fonds). « C’est une logique réaliste, les Ivoiriens doivent contrôler les secteurs phares de l’économie. Nous avons échafaudé ces scénarios lorsque nous étions dans l’opposition : d’abord la souveraineté politique et ensuite la souveraineté économique », affirme un conseiller du président ivoirien. Beaucoup feignent néanmoins aujourd’hui de tomber des nues et parlent de dé-
Victor Silué Nembelessini dirige la BNI, bras financier de l’État.
publiques (pétrole, mines, banque, agro-industrie…) ou à s’assurer de la loyauté de ceux qui les dirigeaient. Il a également repris en main la filière café-cacao en s’inféodant les leaders paysans et en nommant des proches à la tête des organes de gestion. Les refondateurs iront jusqu’à faire racheter, en août 2004, Dafci, la filiale de négoce cacao du groupe Bolloré par la Cofimap, holding financier créé pour l’occasion par le Fonds de régulation et de contrôle du café-cacao (FRC), la BNI et le Fonds de garantie des coopératives café-cacao (FGCCC). « Après trois récoltes, la société n’exporte guère plus de 38 000 tonnes, contre des objectifs initiaux de 200 000 tonnes, explique un diplomate occidental. Sifca Coop, autre entreprise rachetée par les producteurs, a carrément arrêté ses exportations. On ne s’improvise pas négociant international de cacao. » L’ASSUREUR NSIA REPREND BIAO
Les initiatives des entrepreneurs privés ont eu plus de succès. Ainsi, le groupe d’assurances et réassurance NSI A , la ncé en Côte d’Ivoire en 1995 pa r Jea n K a kou D i agou, puissant président de la Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI), est aujourd’hui présent dans la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest et centrale. Conseillé par Phoenix Capital Management, une société de gestion de patrimoine créée par Michel Abrogoua, spécialiste du capital investissement, Diagou a même pris le contrôle en 2006 de la Banque internationale de l’Afrique de l’Ouest
Les parts de marché des entreprises françaises sont passées de 20 % à 17 %. colonisation économique en référence à la perte d’influence des entreprises françaises, dont les parts de marché sont passées de plus 20 % avant la crise à 17 % en 2007. Dès son élection, en octobre 2000, le président ivoirien s’est appliqué à placer « ses hommes » à la tête des principales entreprises
KARIM/APA
Charles Kader Goré, patron d’Ivoire logistisque et de Chocodi.
D.R.
VINCENT FOURNIER/J.A.
76 ECOFINANCE
Eugène Diomandé, président de l’opérateur KoZ Côte d’Ivoire.
(BIAO), ex-filiale de Fortis-Belgolaise. Ses responsables se targuent de posséder aujourd’hui la quatrième banque du pays. Et l’on pourrait multiplier les exemples dans d’autres secteurs. Comme l’assurance, activité autrefois dominée par les Français, où une multitude d’Ivoiriens se sont lancés et viennent jouer sur les terres des opérateurs historiques comme Axa et AGF. Les pouvoirs publics espèrent aussi l’essor de sociétés nationales dans les nouvelles technologies. Laurent Gbagbo a chargé l’un de ses conseillers, Vincent Gadou Kragbé, d’attirer les investisseurs au sein du Village des technologies de l’information, de la communication et de la biotechnologie de Grand-Bassam. Eugène Marie Diomandé, proche du couple présidentiel, est l’un des actionnaires en vue de KoZ Côte d’Ivoire, dont il préside le conseil d’administration. Cette filiale du groupe libanais Comium International est devenue en mai 2007 le quatrième opérateur de téléphonie mobile du pays. Autre domaine qui a le vent en poupe : la construction. La société Sibagec, l’un des leaders du génie civil et des BTP, est désormais présidée par Raymond Gnan, maire FPI de la ville de Kouibly, près de Man. L’État fait également travailler les nationaux pour les grands marchés publics. L’entreprise Kuyo Pipeline de Jean Kuyo Késsié, cousin du président, s’est vu attribuer en novembre 2007 l’imposant contrat de 110 milliards de F CFA pour la pose de l’oléoduc Abidjan-Bouaké, long de plus de 300 km. Implanté de longue date en Côted’Ivoire, l’architecte libano-ivoirien Pierre Fakhoury s’est, quant à lui, vu
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
ja2488p075-077.indd 76
12/09/08 17:30:21
ECOFINANCE 77 réseau à Abidjan ; et Continental Beverage Company (CBC) dispute le marché de l’eau minérale à la Sadem, filiale du français Castel. CBC a investi 2 milliards de F CFA dans une unité de production d’eau minérale Olgane, inaugurée en avril 2007 par Simone Gbagbo à Bonoua, sa ville natale.
Koné Dossongui, du groupe Atlantique, va relancer Air Ivoire.
confier la réalisation de la nouvelle ville de Yamoussoukro pour qu’elle joue enfin son rôle de capitale administrative du pays. Il assure également les travaux d’extension du Port autonome d’Abidjan (PAA) sur l’île Boulay et s’est lancé dans l’exploration pétrolière en fondant Yam’s Petroleum. Autre figure de proue des nouveaux patrons, le Sénégalais Habib Yérim Sow. Il avait créé Telecel Côte d’Ivoire, revendu en 2005 à MTN. Désormais, son groupe, le holding Teylium, multiplie les investissements dans le pays : Teylium Properties acquiert des terrains pour réaliser des projets immobiliers d’envergure ; Bridge Bank développe son
FRATERNITÉ MATIN
REGROUPEMENT PETROCI-SODEMI
Preuve que le marché ivoirien est ouvert aux entreprises sud-africaines, chinoises, indiennes, iraniennes…, les refondateurs cherchent à introduire de la concurrence dans les secteurs sous monopole. Le 21 juillet, Laurent Gbagbo a inauguré la seconde minoterie du pays, les Moulins de Côte d’Ivoire, qui s’attaque déjà au marché des Grands Moulins d’Abidjan détenus par le groupe Mimran. Un investissement de 5 milliards de F CFA décidé par JeanMarie Ackah, un proche de la première dame, également président-directeur général de Coquivoire (productions agricoles). Dans la métallurgie, Stéphane Kipré, gendre du président, a monté la société Mecaf, spécialisée dans la mécanique industrielle, l’électricité, la chaudronnerie et la réparation des navires pour concurrencer la Carena, filiale du français Bolloré et
jusqu’à présent seul chantier naval de la côte ouest-africaine. D’autres pans de l’activité pourraient demain tomber dans l’escarcelle de sociétés ivoiriennes. Les refondateurs prospectent actuellement le secteur des importations de riz, autrefois aux mains de golden boys comme Patrick Bédié ou François Bakou, aujourd’hui tenu par des expatriés suisses, français, libanais et indiens. Dans les mines et l’énergie, un consortium ivoirien mené par la Petroci et la Sodemi est en cours de constitution pour gérer directement des blocs pétroliers et des contrats miniers. La nouvelle génération d’entrepreneurs n’a pas encore son « cercle ».
L’État brise les monopoles et fait travailler les nationaux sur les contrats publics. Mais les patrons se retrouvent dans les réunions des organisations professionnelles ou, en plus petits comités, au « Club à cigares » d’Abidjan… Contesté par l’opposition, mis sous pression par la communauté internationale pour qu’il respecte le calendrier électoral, le président Gbagbo compte bien utiliser leurs réseaux pour conserver son fauteuil. ■
L’ÉPOPÉE GLORIEUSE DES GOLDEN BOYS proches des barons de l’ancien régime PDCI (Parti démocratique de Côte d’Ivoire) semble avoir pris fin avec le changement de pouvoir, en même temps que les positions monopolistiques détenues par de nombreuses entreprises. Les enfants de l’ancien président Bédié, Jean-Luc, Patrick et Lucette, grands patrons de la Compagnie générale de Côte d’Ivoire (Cogeco), deuxième importateur de riz, et de l’Abidjanaise d’assurances ont fermé boutique. François Bakou, le roi du négoce à travers la société Jean Abile Gal (JAG), a mis la clef sous le paillasson pour se relancer via la Société ivoirienne de télécommunications (Sitel), concessionnaire des cartes d’identité au début des années 2000. L’expérience a tourné court en septembre 2002. L’actuel président de la Chambre de commerce et d’industrie, Jean-Louis Billon, a été contraint de vendre les activités de Sifca dans le cacao pour se concentrer sur l’agro-industrie, la distribution et les matières premières (canne à sucre, palmier à huile et hévéa). Delbau, société de négoce du cacaocafé, dirigée par Alain et Illa Donwahi, a disparu du paysage économique. Enfin, Sidi Mohamed Kagnas-
LOUGUE
QUE SONT DEVENUS LES GOLDEN BOYS DES ANNÉES 1990 ?
Versus Bank, l’un des fleurons du groupe L’Aiglon, est aujourd’hui en redressement judiciaire.
si, le dandy jet-setter, a fait péricliter les activités de L’Aiglon en Côte d’Ivoire, y compris la Versus Bank, aujourd’hui en redressement judiciaire, et s’est reconverti en lobbyiste pour le compte de Sagem-Sécurité, concessionnaire du contrat des cartes d’identité et B.M. d’électeur. ■
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
ja2488p075-077.indd 77
12/09/08 17:30:23
78 L A S E M A I N E D ’ EC O F I N A N C E
INDUSTRIE
Airbus met le cap sur la Tunisie MARC DE TIENDA/BLOOMBERG NEWS/LANDOV
AIRBUS VA S’IMPLANTER EN TUNISIE et créer près de 2000 emplois. L’annonce de l’implantation a été faite le 10 septembre, à l’occasion du lancement du plan d’économie « Power8 Plus » du groupe aéronautique européen EADS, auquel appartient l’avionneur. Pour lui, ce sera une première hors OBJECTIFS zone euro. Interrogé après cette déclaration, Airbus MISE EN SERVICE FIN 2009 a refusé de la commenter. 2 000 EMPLOIS À TERME Et de confirmer le nombre d’emplois concernés. Mais le président français l’avait promis lors pour ouvrir un site en Tunisie et lui de sa visite à Tunis, en avril 2008 : la racheter ses deux usines françaises compagnie Tunisair s’étant engagée (Saint-Nazaire Ville et Méaulte). Mais à acheter 16 Airbus, il avait garanti le projet a avorté. Du coup, la solution « l’installation d’une usine de 2000 pera été trouvée: Airbus reprend lui-même sonnes dans l’aéronautique ». Au nom le projet initial de Latécoère. de la compensation industrielle exigée Selon nos informations, l’usine tunipar ses hôtes, qui veut que le vendeur sienne se verra confier la réalisation développe une activité industrielle sur de sous-ensembles de l’aérostructure. le sol tunisien. Latécoère, important « Au-delà des emplois créés, ce projet sous-traitant d’Airbus, était alors en va favoriser et accélérer le développepleines tractations avec l’avionneur ment de l’industrie aéronautique en
Tunisie, se réjouit Philippe Cussonnet, président du Groupement des industries tunisiennes aéronautiques et spatiales (Gitas). De nouveaux métiers et de nouvelles compétences vont se développer ». Une certitude : le faible coût et la qualité de la main-d’œuvre tunisienne séduisent Airbus, qui vise le doublé « low cost et high quality ». Autres atouts : la zone de libre-échange avec l’Union européenne, entrée en vigueur le 1er janvier 2008, lui apporte une franchise douanière, outre la nontaxation des bénéfices issus de l’exportation. Reste à régler la logistique: il y a peu de chances, par exemple, que soient fabriquées en Tunisie des pièces lourdes et encombrantes, difficiles à rapatrier ensuite en Europe. Quant au calendrier, on parle – officieusement – du second semestre 2009 pour la production des premiers ensembles. ■ FAÏZA GHOZALI
EN BREF CÔTE D’IVOIRE NOUVEAU RECORD POUR L’ANACARDE Dopée par une forte demande indienne, la production ivoirienne d’anacarde a battu en 20072008 un nouveau record avec une récolte atteignant 297 000 tonnes. En revanche, la culture du coton ne se relève pas de la crise avec seulement 120 000 tonnes récoltées, contre près de 400 000 tonnes avant septembre 2002.
MAROC L’OCP MODERNISE SES ACHATS L’Office chérifien des phosphates (OCP) revoit sa politique d’achat (délais, prix, gestion des stocks) pour accélérer la mise en œuvre de son plan d’investissements. Le groupe a prévu d’injecter 22 milliards de DH d’ici à 2012 pour moderniser les sites existants (Khouribga, Youssoufia…) et créer de nouvelles unités, notamment à Jorf Lasfar.
CAMEROUN UN PRÉSIDENT INTÉRIMAIRE AU GICAM Olivier Behlè, 54 ans, président de la Commission juridique et fiscale du Gicam et patron d’un cabinet fiscal, présidera le Groupement interpatronal du Cameroun, « à titre intérimaire », après le départ d’André Siaka. L’élection d’un président à part entière est reportée à la prochaine assemblée générale, en décembre.
CIMENT DANGOTE INVESTIT EN ÉTHIOPIE L’industriel nigérian Aliko Dangote, notamment présent dans l’agroalimentaire, le textile, les opérations portuaires et le ciment, va investir 250 millions de dollars dans l’industrie cimentière éthiopienne. La nouvelle unité de production, située dans l’État d’Oromia, sera la plus importante du pays. Elle pourra produire 2,5 millions de tonnes de ciment par an.
FINANCE FONDS AFRICAIN POUR L’AGRICULTURE Sanlam Private Equity et Spaktif, deux groupes sudafricains de capital investissement, ont lancé Agri-Life, un fonds destiné à investir dans l’agriculture en Afrique subsaharienne. Doté de 100 millions de dollars, il vise d’abord l’Afrique australe mais pourrait élargir son champ d’action si d’autres investisseurs rejoignent les fondateurs.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p078-079.indd 78
12/09/08 16:45:21
L A S E M A I N E D ’ EC O F I N A N C E 79
Contrat en vue pour Sidi Abdallah ALGÉRIE
L’ENTREPRISE CHARGÉE DE L’ÉTUDE et des travaux de viabilisation des infrastructures de la future ville nouvelle de Sidi Abdallah (25 km d’Alger) a été choisie. Il s’agit d’un groupement sud-coréen mené par la société Keangnam. Mais « l’avis d’attribution est provisoire », précise son directeur marketing, M. Wjang. Keangnam a fait une offre de base de près de 40,5 milliards de DT (479 millions d’euros). Le contrat devrait être signé d’ici à dix jours, après examen du dossier par la Commission nationale des marchés (CNM). D’autant que les ambitions ont été revues à la hausse, via un projet de décret adopté cet été : de 1 800 hectares à l’origine, l’assiette foncière de la ville a été élargie à 7 000 ha. Et au lieu des 150 000 habitants prévus, Sidi Abdallah devra en accueillir 200 000.
CÔTE DʼIVOIRE
MSC remporte la mise à San Pedro OPPOSÉE AU GROUPE FRANÇAIS Bolloré et à l’ivoirien Sivom dans le cadre d’un appel d’offres lancé en février dernier, la Mediterranean Shipping Company (MSC) a remporté le contrat de concession pour la construction et l’exploitation pour quinze ans d’un terminal à conteneur à San Pedro, deuxième port du pays. Désiré Dallo, directeur général de MSC, affiche l’ambition de multiplier les investissements pour faire de San Pedro un hub concurrent de celui d’Abidjan. La première phase de développement, portant sur 2007-2009, est en chantier.
De lʼargent frais pour AES-Sonel CAMEROUN
LE GROUPE AES, gestionnaire depuis 2001 de la Société nationale d’électricité (Sonel), vient de mobiliser, avec le gouvernement camerounais, la somme de 13,64 milliards de F CFA (20 millions d’euros) pour le démarrage de leur structure commune, la K ribi Power Development Company (KPDC). La société est chargée de construire, en urgence, deux centrales électriques. La première, de 88 MW, au fioul, à Yassa-
Dibamba, près de Douala (coût : 62 milliards de F CFA). La seconde, située à Kribi, sera d’une capacité comprise entre 150 et 330 MW, coûtant 137 milliards de F CFA. Le conseil d’administration pour engager la phase opérationnelle de KPDC s’est tenu le 8 septembre dernier, réunissant les parties américaine et camerounaise. À terme, KPDC doit recueillir au total 49,8 milliards de F CFA des deux parties.
Durcissement des conditions dʼaccès aux mines MALI
LE GOUVERNEMENT DU MALI s’apprête à dévoiler un nouveau code minier qui, selon le ministre Hamed Sow, a pour objectif de « simplifier le code actuel, tout en garantissant au mieux les intérêts du Mali ». Il permettrait aux Maliens de détenir jusqu’à 33 % du capital des exploitations, dont 13 % réservés aux privés et 20 % à l’État. Autre nouveauté, l’introduction de restrictions pour l’attribution des permis, notamment la capacité d’investissement de l’opérateur, qui devra atteindre au moins 500 millions de dollars. Si l’or est actuellement le principal minerai exploité (entre 45 et 50 tonnes par an d’ici à 2012), le ministère des Mines envisage de diversifier la production avec le fer et la bauxite, dont d’importants gisements ont été identifiés dans la région de Kayes. En attendant, la production d’or devrait se maintenir, grâce à la mise en service de trois nouvelles mines en 2009.
Un Indien dans lʼhôtellerie MAROC
BERGGRUEN INDIA, l’un des leaders indiens de l’hôtellerie de moyenne gamme, compte investir 75 millions de dollars dans la construction de six à sept établissements de cent chambres en catégorie trois et quatre étoiles. Le projet sera réalisé dans les deux ans à venir et devrait conduire par la suite à un investissement supplémentaire de 25 millions de dollars dans le pays. Le groupe a signé à Bombay un accord avec la société marocaine Filacom, qui sera chargée de ses plans d’expansion au Maroc et dans les pays voisins. Deux sociétés devraient être créées, une pour le patrimoine, dont Berggruen détiendra 51 %, et une autre pour la gestion des établissements, qu’il possédera à 75 %. Berggruen India est la seule filiale étrangère de Berggruen Holdings, une société d’investissement américaine.
AGENDA
7-8 OCTOBRE
PARIS, FRANCE
PMI-PME 2e Forum du commerce international, organisé par la CICP, organisme d’accompagnement des PMI-PME françaises à l’international. www.cicp.biz
14 OCTOBRE
LONDRES, ROYAUME-UNI
FINANCE ISLAMIQUE Conférence sur la finance islamique et les opportunités qu’elle représente, organisée en liaison avec l’Institute of Islamic Banking & Insurance (IIBI) de Londres. www.efinancialnewsevents.com
14-15 OCTOBRE LE CAIRE, ÉGYPTE
TÉLÉCOMS Édition pour l’Afrique du Nord de GSM>3G, rendez-vous des professionnels de la téléphonie mobile (équipementiers et opérateurs). http://nafrica.comworldseries.com
14-15 OCTOBRE CASABLANCA, MAROC
PEINTURE North African Coatings Congress 2008, salon de la peinture professionnelles. www.northafricancoatingscongress.com
15-17 OCTOBRE TUNIS, TUNISIE
MARKETING Marcom, salon des métiers du marketing, de la communication et des médias. www.exposium.com.tn
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p078-079.indd 79
12/09/08 16:45:28
80 ECOFINANCE
BOURSE
LʼAfrique sur les radars de la finance internationale L A CRÉATION D’INDEX INTERNATIONAUX CONFIRME L’INTÉRÊT DES INVESTISSEURS ET DES ANALYSTES POUR LES PLACES BOURSIÈRES AFRICAINES.
L A CONCURRENCE S’ACCROÎT ENTRE LES LEADERS MONDIAUX DE LA PROFESSION.
M
ieux que de beaux discours ou de jolis rapports sur les performances économiques, un bon indicateur se révèle toujours plus précis pour évaluer ces dernières. Partant de ce principe, les places boursières ont élaboré des outils permettant aux analystes et aux investisseurs de suivre l’activité à travers leurs valeurs phares. Parmi les indices les plus connus figurent le CAC 40 de Paris, qui suit les 40 premières capitalisations de la place; le « Footsie », ou FTSE 100, de Londres; le Dow Jones de New York; et le Nikkei de Tokyo. Si l’on ajoute à ces vedettes les index composites, sectoriels, régionaux ou encore mondiaux… élaborés par des cabinets d’analyse financière ou des médias, ce sont plus de 40000 indices qui sont utilisés dans le monde. Décortiqués par les analystes financiers et les banques qui paient très cher pour avoir accès aux données les plus fines, ces outils sur mesure leur permettent d’optimiser les placements et les rendements. « Le nombre d’indices est proportionnel aux idées et aux stratégies d’investissement », explique Christopher O’Brien, vice-président de Global Business Development, du département Index Services de Standard & Poor’s. Le S&P 500, que produit sa société sur la Bourse de New York, fait partie des plus suivis par les professionnels. Mais il ne dit pas, et ses confrères le taisent également, que les indices constituent une valeur marchande pour des sociétés comme la sienne. Elles se font rémunérer pour la fourniture de leurs services, généralement par abonnement. Standard & Poors, dont l’activité se partage entre la notation d’entreprises et les indices boursiers, emploie 8 000 personnes et affiche un chiffre d’affaires de 2,75 milliards de dollars.
Dans ce domaine, comme dans ceux du capital investissement et, plus généralement, de la finance internationale, l’Afrique récupère son retard. Mieux, elle se met aux normes. Depuis leur origine, ses places boursières ont établi leurs propres index. Masi à Casablanca, Tunindex à Tunis, BRVM Composite à Abidjan ou encore All-Share à Lagos en sont autant d’exemples. S’y ajoutent désormais une série d’indices mis au point par des intervenants privés, dont la liste s’allonge rapidement. Pionnier en la matière sur le continent et l’un des leaders mondiaux, Standard & Poor’s a acquis en 2000 le premier indice panafricain, qui avait été lancé en 1975 par la Société financière internationale (SFI, filiale de la Banque mondiale). OUTILS D’ANALYSE STRATÉGIQUES
Depuis, l’agence de notation a développé S&P Africa Frontier et S&P Pan Africa, qui englobent les principales places boursières, soit onze pays à ce jour (Afrique du Sud, Botswana, Côte d’Ivoire, Égypte, Ghana, Kenya, Maurice,
Maroc, Namibie, Nigeria et Tunisie). En raison des distorsions qu’il provoque, le Zimbabwe en a été exclu, le 9 septembre. Standard & Poor’s propose également le S&P Africa 40, composé des 40 plus grosses sociétés opérant exclusivement en Afrique, soit une capitalisation avoisinant les 206 milliards de dollars (MTN, Impala Platinum Holdings, Sasol, BMCE Bank, Orascom Construction, Attijariwafa Bank, Maroc Télécom…). « Il s’agit pour nous d’un service stratégique car il y a de plus en plus de capitaux à investir dans le monde, et ces capitaux cherchent continuellement de nouveaux axes d’investissement », commente Christopher O’Brien. Autre acteur, Africa Investor – spécialisé dans la communication et la documentation économiques – a développé en 2005 deux indices panafricains : AI40 et AI100. Comme leur appellation le laisse supposer, ils regroupent respectivement les 40 et les 100 plus grosses capitalisations africaines. Fin 2007, l’AI100 présentait une capitalisation de 640 milliards de dollars. Africa Investor organise son sommet annuel, le 15 septembre à New York, en association avec la Bourse de New York (NYSE) et Euronext. Au cours de cette rencontre, des awards (récompenses) seront remis aux principaux acteurs de la finance africaine. Parmi eux, le fonds d’investissement
LÉGÈRE BAISSE DE FORME EN 2008 AU 9 SEPTEMBRE 2008, la performance cumulée depuis le début de l’année de l’index SGI Pan Africa de la Société générale est de - 4,3 %. Les autres indices panafricains reflètent ce léger tassement après une euphorie sur les trois dernières années. Entre 2005 et 2007, la performance des Bourses africaines avait atteint les 200 % ! Si la correction est réelle, elle n’a rien à voir avec la dégringolade des principales places occidentales, qui ont perdu entre 15 % et 25 % de leur valeur. Exemple avec le CAC 40 de Paris, qui a chuté de 23,7 % depuis le 1er janvier. « Les opérateurs financiers se sont tout d’abord intéressés aux pays émergents de l’Amérique latine et de l’Asie. Mais leur corrélation avec les Bourses occidentales est remontée à plus de 85 % ces dernières années. Celle des places africaines, dits pays frontières, n’est que de 40 % à 60 %. De ce fait, le continent permet de diversifier les risques et constitue une nouvelle source de rendement », conclut Christopher P.P. O’Brien, de Standard & Poor’s. ■ J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p080-081.indd 80
12/09/08 16:44:52
HOWARD BURDITT/REUTERS
81
Pour un nombre croissant d’investisseurs, le continent permet de diversifier les risques et les sources de rendement.
AI100 (Africa Investor)
S&P Africa 40 (Standard & Poor’s)
RC SSA 50 (Renaissance Capital)
100 plus grandes capitalisations africaines
40 plus grandes sociétés opérant en Afrique
50 valeurs sur onze places boursières africaines
640 milliards de dollars
206 milliards de dollars
n.c.
d’origine russe Renaissance Capital. Lui aussi très présent en Afrique – il est notamment actionnaire d’Ecobank –, il a créé, en octobre dernier, son indice RC SSA 50, qui englobe 50 valeurs, soit plus de 60 % de l’ensemble de la capitalisation subsaharienne. Elles sont réparties sur onze des quatorze places boursières (Côte d’Ivoire, Maurice, Botswana, Kenya, Nigeria, Ouganda, Ghana, Namibie, Zambie, Malawi et Zimbabwe). Dans un souci de cohérence, ces entreprises doivent en effet être à la cote de marchés boursiers comptant entre 2 et 20 titres. Dernier acteur significatif, la Société générale a créé en 2007 le SGI Pan Africa (Afrique du Sud, Maghreb, et zone subsaharienne) et composé de 30 valeurs. FOOTSIE VEUT SE LANCER
« Cet engouement traduit l’intérêt grandissant pour les places financières africaines, qui offrent une diversification des portefeuilles et de bons rendements par rapport aux turbulences des places
occidentales. Mais pour faciliter la tâche des opérateurs, il leur faut les outils pour orienter en temps réel des opportunités de placement », rappelle Romain Geiss, du think-tank CapAfrique. Ces outils sont-ils pour autant totalement fiables? De ce point de vue, S&P semble avoir une longueur d’avance. « Nos clients sont habilités à utiliser nos données pour créer des produits dérivés destinés aux investisseurs et faire du trading », explique Christopher O’Brien. S&P va devoir néanmoins compter avec la montée en puissance d’un redoutable adversaire. Le Footsie de Londres, émis par le groupe Financial Times, FTSE (Financial Times Stock Exchange), est déjà partenaire de la Bourse de Johannesburg. Il travaille au lancement de son indice panafricain, qui viserait dans un premier temps sept ou huit pays. En Afrique du Sud, FTSE prévoit de développer des indices sectoriels. « Si
SOURCE : LES SOCIÉTÉS
PRINCIPAUX INDICES PANAFRICAINS
Footsie vient, cela permettra d’attirer encore plus de capitaux. Les fonds les plus importants, aux États-Unis principalement, disposent de gros volumes, mais ils connaissent mal l’Afrique. Ils ont donc besoin d’un indice fiable et font davantage confiance à une grande signature », avance Gabriel Fal, PDG de CGF Bourse, société d’intermédiation boursière basée à Dakar. « Ce qui dynamise les marchés boursiers, ce n’est pas uniquement l’observation et les outils d’analyse, c’est l’activité. Or, en Afrique, il y a encore peu de liquidités et peu de transactions », relativise Romain Geiss. Il n’empêche, les Bourses africaines ont bel et bien la possibilité de renforcer leur attractivité en misant sur l’ingénierie
Des indices sectoriels sont en cours d’élaboration en Afrique du Sud. financière, venue de Londres, New York ou bien encore Paris. Certes, la folie de la titrisation sur les crédits immobiliers américains a montré les excès d’une trop grande complexité, doublée d’une avidité non maîtrisée. Mais, pour l’heure, il s’agit avant tout de placer le continent au cœur de la « planète finance » et non plus en périphérie. ■ PHILIPPE PERDRIX
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p080-081.indd 81
12/09/08 16:44:59
82 ECOFINANCE
ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES
Bons et mauvais élèves de la Banque mondiale LE SIXIÈME RAPPORT DOING BUSINESS PUBLIÉ PAR L’INSTITUTION DE WASHINGTON SALUE
LES RÉFORMES ENGAGÉES PAR QUATRE PAYS POUR AMÉLIORER LA VIE DE LEURS ENTREPRISES. les conditions du licenciement économique, pour lequel il était auparavant nécessaire d’obtenir l’autorisation de l’État. Au Botswana, les actionnaires minoritaires sont mieux protégés. En Égypte, le capital minimum pour créer une société a baissé de plus de 80 %. Pays du continent le plus favorable aux entreprises en 2007-2008 (comme dans le classement précédent), Maurice a continué d’améliorer l’environnement des affaires : les conditions de création d’entreprise, d’accès au crédit et d’enregistrement de la propriété ont Bénin 169e été allégées. En queue de classement, la Sierra Leone et le Liberia n’ont pas pour autant négligé les entrepreneurs, ayant respectivement - 12 gagné 7 et 10 places par rapport à l’année dernière. Une progression salutaire pour deux pays qui sortent d’une guerre civile (en 2002 et 2003 respectivement). Elle est due à d’« importants programmes de réformes », selon Michael Klein, viceprésident de la Banque mondiale, qui explique que, à Freetown, « l’information sur les débiteurs a été améliorée, ce qui élargit le spectre de l’accès au MARIANNE MEUNIER crédit ». ■ SOURCE : BANQUE MONDIALE
D
e tous les pays d’Afrique, 2007. Au contraire, le Sénégal faisait c’est le Sénégal qui, entre partie des États n’ayant accompli juin 2007 et juin 2008, a le aucune réforme. Mais en 2007-2008, plus réformé l’environneil a mis en place un guichet unique ment des affaires. Au Mali, le commerpermettant d’effectuer en un seul lieu ce transfrontalier a connu une légère la création d’une entreprise. Le comamélioration. En Côte d’Ivoire, ce sont merce transfrontalier est également les démarches pour le paiement de devenu plus rapide, grâce à l’instaul’impôt qui ont été simplifiées et, au Ghana, celles pour la RWANDA, BURKINA ET SÉNÉGAL EN HAUSSE Rangs gagnés ou perdus et classement général, « Doing Business 2009 » création d’une société. Autant d’indications sur l’arsenal + 19 réglementaire qui encadre la vie des entreprises dans 181 + 16 pays, contenues dans Doing +9 business 2009, rapport réalisé Côte chaque année par la Banque d’Ivoire Cameroun 161e 164e mondiale et sa filiale dédiée 0 au secteur privé, la Société Rwanda Burkina Sénégal 139e 148e 149e financière internationale -6 -6 (SFI). Publié le 10 septembre, il propose un classement des États en fonction du nombre de réformes qu’ils ont réalisées dans dix domaines, de l’accès au ration de systèmes électroniques qui crédit à la protection des investisseurs, diminuent les délais de contrôle des en passant par l’emploi et le commerce marchandises. Au Burkina, les conditransfrontalier. tions de l’installation d’usines ou de Le groupe des dix premiers réforbureaux se sont améliorées dans deux mateurs – emmené par l’Azerbaïdjan – domaines, l’obtention du permis de compte quatre africains : le Sénégal, construire et le transfert de propriété. le Burkina, le Botswana et l’Égypte. À De plus, les impôts sur les bénéfices l’exception de ce pays, aucun ne figuet les dividendes ont été abaissés, et rait dans le peloton de tête en 2006un nouveau code du travail assouplit
ALGÉRIE, BURUNDI ET RD CONGO : RIEN NE CHANGE EN ALGÉRIE, AU BURUNDI ou en République démocratique du Congo (RDC), l’environnement des affaires n’a connu aucune réforme en 2007-2008. À Alger, il faut toujours passer par 14 procédures avant de créer une société, ce qui prend 24 jours. À Kinshasa, il faut faire 13 démarches mais, en revanche, attendre 155 jours avant de démarrer ses activités, contre 43 au Burundi. Ces trois pays ne sont pas les seuls. Aux Comores, en Éthiopie, en Guinée-Conakry, en Guinée-Bissau, au Malawi, au Niger, au Soudan, en Tanzanie et en Ouganda, rien n’a changé non
plus. « Pour un pays producteur de pétrole comme l’Algérie, la flambée des prix des matières premières peut être une explication », avance Michael Klein. La perspective rassurante des recettes pétrolières ne rend pas urgente l’amélioration de la compétitivité du système. Pour les autres, les pesanteurs administratives sont le principal facteur. Mais l’Afrique n’a pas l’apanage de l’immobilisme. Afghanistan, Australie, Qatar, Pérou, Espagne : les pays du « 0 réforme » sont nombreux, et pas seulement dans le monde en M.M. développement. ■ J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p082.indd 82
12/09/08 14:46:57
Les exportations représentent aujourd’hui près de 40 % du chiffre d’affaires.
COSMÉTIQUES
Un parfum de Maroc aux États-Unis EN TRENTE ANS, LA SOCIÉTÉ FAMILIALE AZBANE S’EST D’ABORD FAIT UNE PLACE DANS SON PAYS. C’EST VERS L’EXPORT QU’ELLE SE TOURNE AUJOURD’HUI, DE LA C ALIFORNIE À LA CHINE.
A
u rez-de-chaussée de l’usine Azbane de Casablanca s’entassent des dizaines de palettes impeccablement rangées. Ici, des shampoings en partance pour le Sénégal. Là, des savons qui finiront dans la salle de bains d’un grand hôtel parisien. Plus loin, des produits de beauté à l’huile d’argan destinés au marché espagnol. En trente ans, la société familiale créée par Mohamed Azbane s’est imposée parmi les grands noms des cosmétiques. Profitant des accords de libreéchange avec les États-Unis, elle vient d’ouvrir une filiale en Californie pour s’attaquer au marché américain. « Mon père a com mencé pet it, explique Saïd Azbane. Au départ, il importait des produits d’Europe pour le marché local. Puis il a commencé à fabriquer lui-même ses flacons avant de se lancer dans la conception des produits. » Aujourd’hui, Azbane maîtrise toute la chaîne de production, emploie 450 personnes et exporte un peu partout dans le monde. Elle possède son propre laboratoire de recherche et développement, élabore et fabrique elle-même ses packagings. Chaque année, des dizaines de nou-
veaux produits sortent de l’usine pour rejoindre le marché local et, surtout, international. Au Maroc, Azbane s’est imposée sur le marché des produits d’accueil utilisés dans l’hôtellerie, dont elle détient près de 90 %. Une activité portée par le développement du tourisme dans le royaume et qui s’est élargie aux marchés étrangers (Maghreb, Moyen-Orient, Afrique de l’Ouest et Europe). « Nous exportons également des produits d’hygiène corporelle dans toute
ALEXANDRE DUPEYRON
ECOFINANCE 83 l’Afrique de l’Ouest et au Maghreb, poursuit Saïd Azbane. En Europe, nous travaillons pour des marques comme Kaeline ou Amalia, spécialisées dans les produits à base d’huile d’argan, mais nous avons aussi notre propre ligne de cosmétiques, Azbane Beauté. » La part à l’export représente aujourd’hui près de 40 % du chiffre d’affaires et devrait s’élargir encore un peu plus dans les années à venir. La société, qui a déjà commencé à exporter en Asie (Japon, Corée du Sud, Taiwan), espère bien s’imposer sur le marché chinois grâce à alibaba.com, cinquième acteur mondial du commerce électronique. L’objectif étant de trouver par ce moyen des distributeurs compétents. Outre les États-Unis, elle a également établi des contacts avec des distributeurs en Russie et en Ukraine. Réunie autour du patriarche, la petite équipe familiale continue de mener sa barque et anticipe les besoins du marché. Chacun des quatre enfants Azbane a un rôle à jouer dans la société : de Khalida, la directrice générale, à Saïd, qui gère la direction technique. Un laboratoire de veille stratégique surveille minutieusement chaque nouveauté lancée sur le marché local ou international. La société collectionne également les certifications. Avant même la mise en place d’une législation sur les cosmétiques au Maroc, Azbane s’alignait sur les normes françaises et américaines en matière de qualité et de traçabilité. Ce souci permanent d’améliorer les processus de production porte ses fruits : le chiffre d’affaires dépasse les 15 millions de dollars et affiche un taux de croissance annuelle de près de 20 %. ■ JULIEN FÉLIX, à Casablanca
À L’ÉTROIT SUR SON MARCHÉ LES MAROCAINS DÉPENSENT chaque année 7,5 milliards de dirhams (DH, 950 millions de dollars) en produits cosmétiques. Un marché encore restreint (vingt fois plus petit qu’en France), dont la croissance annuelle flirte avec les 15 % (2 % en France) et qui souffre d’une grande désorganisation : distribution anarchique, prix disparates, contrebande… Sur le marché formel, les grandes marques étrangères se taillent la part du lion. Peu de produits made in Morocco s’en sortent. Bien sûr, de nombreuses marques sont fabriquées ou conditionnées dans des unités locales, mais quasi-exclusivement par des multinationales. Seul Azbane a réussi à s’imposer, en misant sur des produits de qualité mais moins cher que les grandes marques. Dans les produits d’accueil de l’hôtellerie, par exemple, la société a signé avec les plus grandes chaînes hôtelières internationales telles que Sheraton, Hyatt J.F. Regency, Holiday Inn, Accor, Hilton… ■
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p083.indd 83
12/09/08 14:46:19
84 ECOFINANCE
CHRISTOPHER W. HARTLAND-PEEL
Directeur de l’analyse financière, Exotix Ltd, Londres
D.R.
Marchés Ecobank veut se renforcer à lʼinternational
E
SOURCE : EXOTIX LTD
normes internationales cobank TransnaRÉSULTAT NET EN FORTE PROGRESSION IFRS et sont audités par tional Inc. (ETI), Résultat net, part du groupe, en millions de dollars l’un des cabinets les plus groupe bancairéputés dans le monde, re présent dans 120 PricewaterhouseCoopers. vingt-cinq pays 100 Ecobank est par ailleurs d’Afrique subsaharienne, 80 engagé dans un processus a lancé une offre publique de cotation sur des places visant à lever 2,5 milliards 60 boursières internationales de dollars pour appuyer 40 via l’émission de GDR (Glosa stratégie d’expansion. 20 bal Depository Receipts). Il L’opération est ouverte aux 0 s’agit d’une démarche parinvestisseurs privés à hau1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 ticulièrement innovante de teur de 1,5 milliard de dolsa part, lui permettant de lars, le reste étant réservé marcher sur les traces des plus importantes banques aux actionnaires à raison de 5 actions nouvelles pour 9 nigérianes, qui ont initié un processus GDR l’année anciennes. L’action est proposée au public à 0,29 dollar, dernière. soit une décote de 14,5 %. À l’issue de l’offre, qui sera close le 3 octobre, les fonds propres d’ETI s’élèveront à QUANT À L’UTILISATION DES FONDS, ETI pré3,1 milliards de dollars et le groupe présentera un ratio voit dans sa documentation de consacrer 1,4 milliard CAD (Capital Adequacy, ratio d’adéquation des fonds de dollars au renforcement de ses activités actuelles, propres) de l’ordre de 20 %, particulièrement élevé au 0,5 milliard à de nouvelles acquisitions et 0,3 milliard regard des normes de Bâle II. L’assise financière acà l’implantation sur de tuelle du groupe constitue un handicap à la poursuite nouveaux marchés. de sa croissance. Ses ressources lui ont jusqu’à Mais l’opération doit présent permis d’assurer une rapide expansion, être considérée dans mais elles se révèlent aujourd’hui insuffisantes d’autres perspectives. pour maintenir le même rythme. Les pays d’Afrique de LES RÉSULTATS FINANCIERS D’ECOBANK donl’Ouest où Ecobank est nent de bonnes raisons de s’intéresser à cette émission implanté affichent une de titres. ETI est profitable et distribue des dividendes. croissance économique Le résultat net, part du groupe, n’a cessé de progresde 3 % à 6 % par an et leur secteur bancaire ser, pour atteindre 107 millions de dollars en 2007 (voir doit être renforcé. Il infographie), soit une profitabilité record de 21 % (ROE, Return on Equity), largement plus élevée que celle de existe par ailleurs des pays où ETI n’est pas n’importe quelle autre banque en Afrique subsahaencore installé et qui rienne. Si c’est au Nigeria, au Ghana et en Côte d’Ivoire présentent d’imporqu’ETI réalise ses opérations les plus profitables, chatantes opportunités de cune de ses filiales est bénéficiaire. Le groupe présente un PER de 14,4 (à la fin du premier semestre) et le rencroissance, notamment dement des actions est de 1,6 %. Le résultat net, part du des producteurs de pégroupe, a encore progressé de 52 % sur le premier setrole comme l’Angola ou l’Éthiopie. À la fin de 2007, les mestre 2008 et, selon nos estimations, il devrait atteinfonds propres d’ETI s’élevaient à 513 millions de dollars. L’augmentation de capital en cours de souscription perdre 245 millions de dollars sur l’exercice 2009, compte tenu de l’augmentation de capital en cours et de son mettra de les multiplier par six, donnant au groupe la utilisation prévisible. Si cela se confirme, ETI serait la possibilité d’envisager des acquisitions de plus grande plus performante des banques africaines. Autres points envergure, de surcroît moins risquées, compte tenu de d’importance aux yeux des investisseurs : ETI établit la dimension des projets et des partenaires qui seront ses comptes en dollars américains, qui respectent les à sa portée à l’issue de l’opération. ■
Le groupe affiche une rentabilité record de 21 %, la plus élevée de toutes les banques d’Afrique subsaharienne.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p084.indd 84
12/09/08 16:48:00
ECOFINANCE 85
INTERNET
Google lance ses satellites sur lʼAfrique LE LEADER MONDIAL DE LA RECHERCHE SUR LE WEB MULTIPLIE LES PROJETS AFIN DE S’IMPOSER COMME UN ACTEUR GLOBAL DE L’ÉCONOMIE NUMÉRIQUE, Y COMPRIS SUR LES MARCHÉS ÉMERGENTS.
C
omme pour célébrer dignement son 10 e anniversaire, fêté le 7 septembre dernier, Google multiplie les annonces. Il a tout d’abord renouvelé pour trois ans le partenariat qui le lie à Mozilla, éditeur de Firefox. Grâce à quoi Google reste la page d’accueil par défaut du navigateur libre. Un moyen d’élargir son audience et donc d’augmenter ses revenus publicitaires, actuellement sa principale source de profit. Deux jours plus tard, Google a lancé son propre navigateur. Nommé Chrome, il entend dans un premier temps prendre des parts de marché à Internet Explorer de Microsoft. Selon Net Applications, spécialiste de la mesure d’audience, vingt-quatre heures après son lancement, Chrome disposait déjà de 1 % du marché, soit 12 millions d’utilisateurs. À terme, Chrome pourrait s’imposer comme une alternative à Microsoft en facilitant l’accès aux applications « maison » telles que Gmail, Picasa (album photo) et autres gDocsBar, qui fonctionnent de plus en plus comme n’importe quel logiciel installé sur le disque dur de l’ordinateur. Un bon moyen d’éviter de faire appel aux produits Microsoft… Mais le numéro un mondial de la recherche veut aller encore plus loin. Il vient d’annoncer, en partenariat avec la première banque européenne, HSBC, et le câblo-opérateur américain Liberty Global, un ambitieux projet destiné à fournir un accès Internet à haut débit
ja2488p085.indd 85
par satellite aux 3 milliards d’internautes vivant en Afrique, au MoyenOrient, en Asie et en Amérique latine. Baptisé O3b Networks (Other 3 billion Networks, « réseaux des 3 autres milliards de personnes »), le système utili-
à leurs calculs. La technologie ADSL permet des débits comparables à un coût raisonnable, mais son déploiement à grande échelle nécessite l’existence de lignes téléphoniques fixes fiables. O3b Networks estime à 500 dollars par mois le futur tarif de sa fourniture pour l’opérateur de télécoms qui fera appel à ses services, à comparer aux 4000 dollars par mois pratiqués sur les satellites géostationnaires actuellement en service au-dessus de l’Afrique. Ces derniers nécessitent en outre la mise en place d’infrastructures assez lourdes, qui augmentent d’autant le prix facturé à l’utilisateur final. Reste à financer les ambitions d’O3b Networks, à commencer par les seize satellites, dont la première commande a été passée le 9 septembre à Thales Alenia Space, le numéro un européen du secteur. À un coût estimé de 35 millions
45° Nord
45° Sud
Dès 2010, seize engins en orbite basse pour desservir 3 milliards d’internautes.
sera une constellation de seize satellites de télécommunications en orbite basse pour proposer une liaison Internet aux opérateurs, qui pourraient la relayer à leurs clients à un prix représentant seulement 5 % des tarifs actuels. COÛT: 750 MILLIONS DE DOLLARS
Google et ses partenaires affirment avoir calibré leur réseau pour délivrer un signal à 2,5 mégabits par seconde (Mbits/s) à chacun des 3 milliards d’internautes qui servent de référence
l’un, ils représentent les deux tiers d’un budget évalué à 750 millions de dollars. HSBC, Google et Liberty Global apportent un total de 65 millions de dollars et ont annoncé qu’ils pourraient monter jusqu’à 180 millions, misant sur le capital investissement et sur certains opérateurs pour compléter le tour de table. Il leur faudra faire vite s’ils veulent tenir tous leurs engagements techniques… et la date de mise en service, annoncée pour 2010. ■ CLAUDE CADELU
12/09/08 14:45:51
86 LIRE, ÉCOUTER, VOIR
Musique
Keziah Jones, dandy funky Lʼinventeur du blufunk revient avec un cinquième album, Nigerian Wood, aux airs de pop. Et ambitionne de devenir ainsi « la » superstar africaine mondiale. Interview.
C
Propos recueillis, à Lyon, par JEAN BERRY
’est le tube « Rhythm Is Love » qui avait propu lsé sur le deva nt de la scène, en 1992, Keziah Jones, cet artiste nigérian qui a grandi en Angleterre et a été repéré dans le métro parisien (voir encadré p. 88). Un hit mondial qui lui a valu également une image de dandy funky et sensuel, qu’il entretient savamment depuis. Un esthète, élégant, toujours paré de son chapeau. Son style si particulier à la guitare, son goût pour le funk et la syncope en ont fait l’inventeur du blufunk, qu’il définit lui-même comme un alliage de blues et de funk. Cinq ans après le dépouillement de Black Orpheus, un disque très acoustique qui avait su reconquérir le cœur de ses fans (300000 copies écoulées en France après les déconvenues relatives d’African Spacecraft et de Liquid Sunshine, vendus respectivement à 70 000 et 50 000 exemplaires), il a préféré une production à l’américaine pour son dernier album Nigerian Wood. Du coup, on tombe parfois un peu dans la guimauve, avec un disque très pop et une ambition avouée « de devenir la première superstar africaine mondiale ». Rien que ça.
Une légère déception, donc, malgré des morceaux réussis (« Nigerian Wood », « Pimpin’ », « Lagos vs New York », « 1973 »), et une édition spéciale agrémentée d’une douzaine d’inédits estampillés « funk nigérian ». Et toujours cette classe naturelle et féline qui n’appartient qu’aux grands, ce style inimitable de funambule mélodique et cette présence scénique, énergique et magnétique, soulignée par une formation en trio. Jeune Afrique lui a posé quelques questions lors de son passage à Lyon, en France, au festival Woodstower. JEUNE AFRIQUE : Que pensez-vous de la nouvelle vague de musiciens africains, à qui vous avez en quelque sorte ouvert la voie? KEZIAH JONES: J’apprécie tout particulièrement Nneka, Patrice, Asa. Ayo, aussi. Ils sont tous bons. Nneka est très intéressante, sa musique très politique, sa production intelligente. C’est vraiment la musique africaine contemporaine. Quand j’ai sorti Blufunk Is a Fact, il n’y avait presque rien de similaire, seulement de la musique world traditionnelle. Ces nouveaux artistes intègrent de
multiples influences. On peut considérer leur musique comme grand public. Si l’Afrique est présente dans vos albums, elle paraît moins au centre de vos préoccupations qu’auparavant. Vous êtes moins politique que Fela, l’un de vos mentors. Vous évoluez plutôt comme un esthète, non? Vous savez, j’ai fait mon temps avec ça… African Spacecraft, Black Orpheus et même Blufunk Is a Fact ont dit des cho-
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p086-088.indd 86
11/09/08 18:35:44
Keziah Jones, à Paris, le 3 septembre.
ses très claires. Mais le temps est venu pour une musique moins polémique, car chanter, ce n’est pas dire à quelqu’un ce qu’il doit faire ou penser. La musique est plus puissante que ça. En tant qu’Africain, pour trouver des gens avec qui travailler, il faut s’ouvrir, inclure des éléments extérieurs. J’adore la musique et le personnage de Fela, mais il a fait des erreurs fondamentales dans sa manière de mêler musique et politique.
En Occident, il est devenu une caricature : le chanteur qui a épousé vingt-sept femmes, qui fume de l’herbe et se balade en sous-vêtements… Alors qu’au Nigeria c’est l’inverse, sa musique est partout, mais personne ne se concentre sur son message. Il est connu, bien sûr, mais combien de personnes ont vraiment compris ce qu’il a essayé de dire ? C’est terrible. C’est une erreur que je ne veux pas faire et que les artistes de la nouvelle
VINCENT FOURNIER/J.A.
LIRE, ÉCOUTER, VOIR 87
génération souhaitent également éviter. Notre approche est différente pour éviter d’être coincés dans ce genre de musique engagée, polémique, et de stagner, alors qu’autour de nous les choses bougent si vite. Notre génération est aussi au fait du système médiatique mondial, qui cherche toujours à mettre en avant un nouveau héros africain. Ça nous fait rire. Mais je ne pense pas que l’Afrique ait besoin d’un héros.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p086-088.indd 87
11/09/08 18:35:46
88 LIRE, ÉCOUTER, VOIR
TICKET GAGNANT
VINCENT FOURNIER/J.A.
Votre musique swingue davantage qu’auparavant… Travaillez-vous dans l’optique de toucher un public le plus large possible? Oui, c’est de ça qu’il s’agit : sortir du ghetto de la musique world et devenir la première superstar africaine, mondiale, avec ce concept de blufunk. Il n’y a pas vraiment de superstar africaine pour l’instant. Fela a essayé, mais il ne l’est vraiment devenu qu’à la fin de sa vie. La question que je pose, c’est pourquoi Jay-Z ou Beyoncé peuvent venir en Afrique, être payés des millions dans un festival qui coûte tellement cher qu’il n’y a pas grand monde, puis repartir le lendemain sans avoir rien vu du pays ? Alors qu’il y a des tonnes d’excellents musiciens africains et qu’on pourrait faire de bonnes choses avec eux. C’est parce qu’ils sont des superstars internationales, relayées par les médias américains, et que leur musique est distribuée massivement. Il faut commencer à créer des événements, des maisons d’édition, des studios, des choses plus solides sur le continent. Et éviter les ghettos idéologiques.
Lors du concert dans le métro parisien à la station Olympiades.
RETOUR AUX SOURCES POUR KEZIAH JONES. C’est dans le métro parisien que l’inventeur du blufunk a lancé son cinquième album, Nigerian Wood. Là même où il a fait ses débuts à la fin des années 1980. Né à Abeokuta, près de Lagos, en 1968, Olufemi Sanyaolu, de son vrai nom, a grandi dès l’âge de 8 ans en Angleterre. Après ses études, le jeune Nigérian rêve d’une vie faite de notes et de décibels. Et traverse la Manche pour rejoindre la capitale française. Guitare en bandoulière, il joue dans le métro, où il se fait remarquer, en 1991, par le directeur artistique de Delabel, qui lui permet de sortir l’année suivante son premier album. Jackpot ! Blufunk Is a Fact s’écoule à plus de 400 000 exemplaires en France. Seize ans plus tard, Keziah Jones boucle la boucle devant quelque deux mille voyageurs lors de quatre concerts gratuits. La RATP n’a communiqué qu’au dernier moment le lieu et l’heure de ces happenings qui ont eu lieu les 1er, 3, 4 et 6 septembre dans la chaleur étouffante des couloirs des stations Miromesnil, Olympiades, Montparnasse et Auber. L’événement avait tout de la parfaite opération commerciale… mais l’artiste, ému, a enchaîné, pendant une heure, morceaux inédits et tubes incontournables, tel « Rhythm Is Love »… repris en chœur par des spectateurs ravis. Un tour de chauffe réussi avant une tournée européenne. ■ SÉVERINE KODJO-GRANDVAUX
Vous habitez maintenant New York. Cela se ressent dans ce nouveau disque, notamment avec les musiciens qui vous entourent… Il fallait que j’aille à l’Electric Lady Studios [fondé par Jimi Hendrix, NDLR] pour regarder, pour voir. Nous y avons passé trois mois très intenses, il y a deux ans. Puis j’ai travaillé avec le producteur de l’album, Karriem Riggins, à Los Angeles. C’est un batteur et percussionniste génial du monde du jazz. Il est aussi proE n t a nt qu’A f r ic a i n ducteur de hip-hop et vivant aux États-Unis, Nigerian Wood, de Keziah travaillait pour J Dilla croyez-vous aux chanJones (Because Music/ [décédé en 2006, NDLR], ces de Barack Obama Wagram). Erykah Badu et d’autres. de remporter la proUn mec d’un peu plus de chaine présidentielle ? 30 ans, issu de la nouvelle génération. Bien sûr, je pense qu’il va gagner. J’aimerais tourner avec lui l’an proVou s c r oyez v r a i me nt que Joh n chain… Mais il est cher [rires]. Mc C a i n e s t u ne b on ne idé e ? I l Il y a aussi un jeune génie de la a env iron… 105 ans [rires]. Et il basse de 21 ans, Stephen Bruner, fera les mêmes choses que George surnommé Thundercat. Et puis Jason W. Bush. Vous avez vu sa manière de Yarde, qui a fait les cuivres sur Black parler ? Il n’a aucun charisme ni idée Orpheus, et Kevin Armstrong, qui a nouvelle. produit Blufunk Is a Fact, qu’on retrouBarack Obama est quelqu’un de ve pour des arrangements de claviers plus jeune, qui a une expérience et guitares. Que des gens bien ! internationale, c’est-à-dire qu’il a
vécu et travaillé dans d’autres pays. C’est une chose normale, mais aux États-Unis, c’est assez rare. Il a une vision plus ouverte. De plus, il mène une meilleure campagne que les candidats démocrates précédents. Et, enfin, après huit ans de George W. Bush, tout le monde devrait comprendre qu’il faut s’éloigner des républicains. D’ailleurs on le savait déjà avant qu’il ne soit réélu. Encore huit ans de guerre en Irak, en Afghanistan, de dégâts environnementaux ? On est dans une merde profonde, mon frère, et on le serait encore plus… Franchement, on ne peut pas élire McCain ! ■
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p086-088.indd 88
11/09/08 18:35:48
89
Le nouveau monde de Natacha Atlas
Ana Hina, de Natacha Atlas & The Mazeeka Ensemble (World Village/Harmonia Mundi).
E
t revoici Natacha Atlas ! La diva orienta le so br it i sh sor t son septième album, Ana Hina (« Je suis ici »). Celle qui fut la grande prêtresse de l’électro-fusion dans les années 1990 (avec le collectif Transglobal Underground, notamment) confirme, deux ans après Mish Maoul (« Incroyable »), un Natacha Atlas, une voix de soprano qui évolue entre retour plus marqué aux sources jazz, bossa-nova et classiques arabes. orientales. Natacha Atlas a toujours joué artistes convoqués : Frida Kahlo dans un des rencontres et des métissages culturels. chant dialogué, « La Vida callada », et Nina Une démarche qui lui est naturelle. Née à Simone, à laquelle elle emprunte « Black Is Bruxelles, en 1964, d’un père juif égyptien the Colour », dans une superbe reprise qui à l’ascendance palestinienne et d’une mère enrichit le piano solo originel d’un quatuor anglaise, elle a ensuite grandi en Angleterde cordes et voix. re. Et, pour ce premier disque sur le label Natacha Atlas s’est entourée du musicien World Village, lui aussi au confluent des britannique Harvey Brough, qui a arrangé cultures et des musiques qu’elles drainent, et composé toutes les orchestrations, de la chanteuse a choisi de jouer la carte du l’Espagnole Clara Sanabras qui joue de tout acoustique. son oud et de sa voix, du bassiste écossais Une performance réussie grâce à un Andy Hamill, du percussionniste Aly elensemble orchestral composé de cordes, Minyawi (son cousin) et de l’accordéoniste accordéon, ney (flûte orientale), darbouka Gamal al-Kordy (qui a joué sur les versions (tambour arabe), violoncelle, basse, riq originales de certains des morceaux), tous (tambourin à cymbalettes), clarinette… et deux égyptiens. de quatorze musiciens, européens et égypRythmes et tonalités se croisent donc tiens réunis, baptisé Mazeeka Ensemble – un et se réfléchissent dans un jeu de miroirs clin d’œil à une chaîne égyptienne de musisonores : un petit air de bossa-nova (« Ana que, Mazzika. Hina »), une version roots et afro-jazz Natacha Atlas a une voix époustouflan(écoutez la contrebasse !) de « Hayati te. Une voix pleine de soprano. Qui n’héInta » – reprise de son précédent album site pas, outre des compositions originales Mish Maoul –, un duel accordéon-ney qui (« A n a H i n a », rythme le muwashah (poème arabe clas« El Nowm »), à sique pour l’enseignement du chant) avec reprendre des « Lammebada » et un écho quasi gothique c h e f s - d ’œ u v r e avec les chœurs de « El Nowm » à l’inspirades monstres tion soufie… sacrés de la Entre nostalgie orientale et impulsions c h a n son ég y p jazz-rock, Natacha Atlas continue d’être là t ien ne, tels les où on l’espère. ■ frères Rahbani, Fairouz (« Ya Laure HobouFAÏZA GHOZALI ki ») et Abdel Halim Hafez, « le Rossignol brun », qui a en son temps revivifié le jeel Natacha Atlas sera en concert le 22 septembre à (pop égyptienne) et auquel elle avait déjà l’Alhambra, 21, rue Yves-Toudic, Paris 10e. consacré un album en 1997, Halim. Autres
BANJEE
Avec son septième album, Ana Hina, la chanteuse anglo-égytienne continue à transgresser les frontières musicales. Et sʼaventure davantage en terres orientales.
Rythmes et tonalités se croisent et se réfléchissent dans un jeu de miroirs sonores.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p089.indd 89
12/09/08 14:34:45
90 LIRE, ÉCOUTER, VOIR
Cinéma Haïlé Gerima Le sacre dʼun militant Le cinéaste éthiopien a reçu, le 6 septembre, le Prix spécial du jury de la 65e Mostra de Venise et le prix du meilleur scénario pour Teza. Retour sur le parcours dʼun homme engagé.
H
eureuse surprise ! Alors que le Festival de Cannes n’a pas sélectionné de films africains depuis plus de dix ans, la 65e édition de la Mostra de Venise qui avait retenu Teza, de l’Éthiopien Haïlé Gerima, et Gabbla, de l’Algérien Tariq Teguia, a décerné, le 6 septembre, le Prix spécial du jury et le prix du meilleur scénario à Haïlé Gerima. Double consécration, donc, pour ce cinéaste né en 1946, à Gondar, en Éthiopie, dans une famille d’intellectuels engagés contre le colonialisme italien. À 22 ans, Gerima part étudier le théâtre et le cinéma à la Goodman School of Drama de Chicago en 1968, puis à l’université de Los Angeles en 1970, avant de s’installer, en 1975, à Washington. Il y enseigne le cinéma à Howard University, l’université noire de la ville. Dès ses premiers films réalisés en pleine période de la black exploitation, notamment avec Bush Mama (1979) et son documentaire Wilmington 10 (1979), Haïlé Gerima fait siens la cause des Noirs américains et leur combat contre le racisme et la discrimination. En 1972, Child of Resistance (titre qui pourrait symboliser l’ensemble de son œuvre) met en scène une femme noire qui, derrière les barreaux de sa prison, rêve d’un peuple libre,
capable de briser les chaînes de l’oppression. Filmant dans les années post-1968, alors que le cinéma engagé a le vent en poupe, Haïlé Gerima se définit comme un militant de gauche, qui assigne au septième art un rôle « révolutionnaire » et didactique. ENVOLÉES POÉTIQUES
Pour autant, le cinéaste ne s’interdit pas quelques envolées poétiques comme dans son premier long-métrage africain, le très beau Harvest: 3000 Years (1975) tourné dans son Éthiopie natale, dans lequel il dénonce la situation des paysans exploités depuis trois millénaires par le système féodal. Gerima appelle implicitement à une révolution marxiste. Ce film, sans doute le plus réussi, sera restauré trente ans plus tard par Martin Scorsese, pour être présenté, en 2006, au Festival de Cannes. Grande gueule, Haïlé Gerima est un tribun emporté et véhément. L’image même de l’intellectuel colonisé de Franz Fanon dans Les Damnés de la terre : celle d’un exilé en mal d’identité, qui, parce qu’il se sent coupable de ne pas être rentré pour « construire son pays » et vit dans le confort en Occident, ne cesse de dénoncer le néocolonialisme et d’idéaliser la tradition africaine.
À L’AFFICHE par Renaud de Rochebrune MANDARIN CINEMA PRESENTE
UN FILM DE
MICHEL
BENOIT
HOUELLEBECQ MAGIMEL
VISA 18 376
LA POSSIBILITÉ D’UNE ÎLE
BENOIT MAGIMEL
LA POSSIBILITÉ D’UNE ÎLE de Michel Houellebecq (sorti à Paris le 10 septembre)
MANDARIN CINEMA PRESENTE UN FILM DE MICHEL HOUELLEBECQ D’APRES SON ROMAN (EDITIONS FAYARD) PATRICK BAUCHAU RAMATA KOITE ANDRZEJ SEWERYN JORDI DAUDER JEAN-PIERRE MALO SERGE LARIVIERE
?*%.2A<) 2(2'=2=<). ! (<24)@;%? 1<*>%4 >);%44%/%*B <12@% :%2..% 42')<A<% "!%&%'( %A<* @;<*>2A( "!%&%'( (%*)A? (<%@) 1)(<.) (<A%*=<). 2A=<?=<B;% 72=<2 60?-7)' *)?=;1%? 4%.2 1)??;1 12B;<442@% 12A<4) )?;.2 'A%1<%A 2??<?=2.= >;/%A= %.@2112A% ?). 1<@;%4 ')4) A2'>2%4 ?)><%A /A;.) A%<42.( =>)12? @2;(%A 1).=2@% *21<44% *)==% "$%#%!( (<A%*=<). (% 'A)(;*=<). '><4<''% (%4%?= '<42A A)/42 1;?<B;% )A<@<.24% 12=><? /$ .<=?*>7% 'A)(;*=<). %3%*;=<9% (% '242*<) 'A)(;<= '2A %A<* 24=120%A ! .<*)42? 24=120%A ;.% *)'A)(;*=<). 12.(2A<. *<.%12 1)A%.2 #<41? /42*7 #)A%?= #<41? 62= 'A)(;*=<).? 2A=% #A2.*% *<.%12"6(A 42@2A(%A% ?=;(<) 8+ 1<*>%4 >);%44%/%*B 4=( %. 2??)*<2=<). 29%* 2A=%"*)#<.)92 8 %= *)#<.)92 5 <*22 #<41?=<#=;.@ .A6 1)=<). <.9%?=1%.= @A);' '<*=)A<). '<*=;A%? ?)#<*<.%12 8 29%*42 '2A=<*<'2=<). (% *2.24, 29%*4% ?);=<%. (; 'A)@A211% 1%(<2 (% 42 *)11;.2;=% %;A)'%%..%
(<?').</4% 2; 4<9A% (% ')*>%
666$42')??</<4<=%(;.%<4%&4%#<41$*)1
Même si Michel Houellebecq s’est souvent illustré par des déclarations provocatrices, l’écrivain reste l’un des meilleurs portraitistes des sociétés occidentales. Mais pourquoi quitter la plume pour la caméra? Les échanges pseudo-philosophiques entre les personnages de cette fable, inspirée de son dernier ouvrage qui avait déjà déçu, plombent le film.
PARLEZ-MOI DE LA PLUIE d’Agnès Jaoui (sortie à Paris le 17 septembre)
Une fois de plus, Agnès Jaoui et son coscénariste Jean-Pierre Bacri ont écrit (les deux), réalisé (elle) et joué (encore les deux) un film choral plein de répliques drôles et bien senties pour parler sur un mode pessimiste de ce qui fait la vie de tous les jours. On pourrait se lasser, mais l’irruption d’un personnage atypique magistralement joué par Jamel Debbouze sauve ce qui peut l’être de cette formule qui commence à être usée. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p090-091.indd 90
12/09/08 16:49:00
LIRE, ÉCOUTER, VOIR 91
DENIS BALIBOUSE/REUTERS
acquis en Occident et enfin accepté, il ose dénoncer avec lucidité les aspects négatifs de la tradition ou de l’actualité politique de son pays. De fait, brûlant ce qu’il avait adoré, Gerima montre comment la révolution marxiste de Mengistu (qu’il appelait de tous ses vœux) a abouti à une répression et à une dictature bien Haïlé Gerima après la cérémonie de remise des prix de la 65e pires pour la popuédition de la Mostra de Venise, en Italie, le 6 septembre. lation que le système féodal précédent, en Gerima fréquente tous les festivals afridisloquant les structures socio-économiques cains, depuis les Journées cinématogradu pays et en annihilant toutes les libertés. phiques de Carthage jusqu’au Fespaco de Battant sa coulpe, le militant anticoloniaOuagadougou, manifestations où il est liste fait enfin la part des choses. fréquemment membre du jury. Il est également de tous les congrès de la Fédération VERDICT AFRICAIN panafricaine des cinéastes (Fepaci) où il se Le personnage principal de Teza, Anberplaît à déclarer qu’il tient son savoir essenber, un médecin éthiopien formé en Eurotiellement des contes africains que lui narpe, revient s’installer dans son village pour rait sa grand-mère et non pas seulement de participer à son développement. Et ne peut « l’École des Blancs ». que constater le désastre. Instrumentalisé par la junte militaire, confronté à sa propre RÉVOLUTION MARXISTE impuissance, le refuge dans les souvenirs Son film Sankofa (1993), tourné en Afriidéalisés de son adolescence ne suffit plus que et coproduit avec le Ghana et le Burpour l’aider à décider ce qu’il doit faire. kina, ainsi que le documentaire Adoua, une Avec cette confession sincère frisant victoire africaine (1999) célèbrent successil’autobiographie, Haïlé Gerima a été consavement la résistance africaine à l’esclavage cré par le jury de Venise. Prochaine étape? et la victoire remportée par les troupes du Le verdict des Africains lors de la première roi Menelik II contre l’armée de l’occupant projection sur le continent, à l’occasion italien. des 22es Journées cinématographiques de Avec Teza (2008), Gerima semble avoir Carthage, qui auront lieu du 25 octobre au atteint aujourd’hui la troisième phase de 1er novembre, où le film est sélectionné en l’intellectuel colonisé décrite par Fanon : compétition officielle… ■ celle de la « synthèse » où, armé du savoir FÉRID BOUGHEDIR
C’EST DUR D’ÊTRE AIMÉ PAR DES CONS de Daniel Leconte
FILM EN STOCK présente
(sortie à Paris le 17 septembre)
un film de DANIEL LECONTE
« C'EST DUR D'ETRE AIME
PAR DES CONS » FILM EN STOCK présente en co-production avec DOC en STOCK un film réalisé par Daniel LECONTE Image Xavier LIBERMAN, David QUESEMAND, Thomas RISCH Montage Laurent ABELLARD, Grégoire CHEVALIER-NAUD Musique Cyril de TURCKHEIM Producteur Exécutif Raphaël COHEN Produit par Daniel LECONTE Avec la participation de CANAL + Avec la participation du CENTRE NATIONAL DE LA CINÉMATOGRAPHIE PYRAMIDE Ventes à l’étranger PYRAMIDE INTERNATIONAL © PYRAMIDE - illustration : CABU - Imp. LEVILLAIN RCS Créteil B 332 482 710 visa en cours
Distribution
www.pyramidefilms.com
Un film sur le procès intenté à Charlie Hebdo par des associations musulmanes pour avoir publié les « caricatures de Mahomet ». Voilà qui aurait pu donner l’occasion de réfléchir sur l’islam et l’islamisme, la censure, l’humour… Mais quand on filme de manière partiale, on évite tout questionnement un tant soit peu subtil. Et on ne sert pas la cause de la liberté que l’on prétend défendre.
REPÉRAGES ■ Coco Chanel va bientôt se retrouver trois fois en haut de l’affiche. On pourra comparer la performance d’Audrey Tautou, choisie par Anne Fontaine, avec celle d’Anna Mouglalis, engagée par Jan Kounen. Et toutes deux auront pu voir Barbara Bobulova dans un téléfilm déjà tourné et diffusé prochainement sur France 2. ■ Tapez www.slackeruprising.com à partir du 23 septembre sur votre ordinateur et vous pourrez voir gratuitement le prochain documentaire de Michael Moore, Slacker Uprising, qui raconte son tour des États-Unis pour présenter son long-métrage anti-Bush Fahrenheit 9/11 lors de la dernière élection présidentielle. ■ Tous ceux qu’inquiète le grand retour du nationalisme russe apprécieront: l’État, a annoncé le ministre de la Culture, entend passer commande à de grands réalisateurs du pays, large financement à la clé, d’une série de films « au contenu plus patriotique » que les productions actuelles. ■ Auteur de trois longs-métrages seulement, le cinéaste algérien Rabah AmeurZaïmeche aura droit à une rétrospective de son œuvre en octobre à la cinémathèque de Paris à l’occasion de la sortie française de son nouveau film, Dernier maquis, le 22 octobre.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p090-091.indd 91
12/09/08 16:49:12
92 N’avez-vous pas l’impression d’avoir sacrifié à un exercice imposé auquel se livrent la plupart des journalistes ayant été détenus en zone de conflit? Peu importe. Nous avons d’abord raconté aux gens ce qu’ils avaient envie d’entendre en répondant à la presse. Maintenant, nous voulons relater notre histoire dans son intégralité, car nous n’avons pas pu témoigner.
Le journaliste français Thomas Dandois.
STÉPHANE RÉMAEL
Livres En direct des geôles nigériennes Arrêtés pour sʼêtre rendus dans le Nord-Niger où sévit la rébellion touarègue, les reporters Thomas Dandois et Pierre Creisson reviennent sur leur détention.
N
euf mois après leur arrestation au Nord-Niger où ils s’étaient rendus illégalement pour réaliser un documentaire sur la rébellion touarègue du Mouvement des Nigériens pour la justice (MNJ), les journalistes français Thomas Dandois et Pierre Creisson cosignent un ouvrage intitulé En territoire interdit, qui paraît le 17 septembre. Dans un livre à michemin entre le reportage et le récit de voyage, ils racontent le périple qui les a conduits à fréquenter pendant plusieurs semaines les rebelles du MNJ… et les geôles du pénitencier de Kollo, pour « intelligence avec les bandes armées ». Entretien.
JEUNE AFRIQUE : Comment concevez-vous ce livre : travail journalistique ou exercice littéraire pour tourner la page de votre détention ? THOMAS DANDOIS : Pierre et moi le vivons différemment : je l’ai écrit, lui l’a relu. Si je l’ai vécu comme un exutoire, lui l’a pris en pleine figure, car il lui a fait revivre les événements. Toutefois, ce livre est bien le fruit d’un projet commun : nous voulions vrai-
ment témoigner de ce que nous avions vu au Niger, même si nos rushs et nos photos ont été saisis. C’est donc un moyen de mettre un point final à cette mission? En partie seulement, car nous vivons toujours comme un échec notre arrestation. Nous ramenions un film très fort, et nous n’avons pas pu le réaliser! C’est hyperfrustrant. Ce livre est plus une façon de faire le point sur les proportions prises par l’affaire et de nous demander où nous nous sommes trompés.
Vous livrez de nombreux détails sur votre rencontre avec les Touaregs. Avez-vous réussi à ramener des documents ? Nous avons tout jeté dans les toilettes ou sur la route quand nous avons été arrêtés. Mais le fait d’être deux nous a permis de nous remémorer beaucoup de choses. Quand je lui racontais l’histoire, Pierre me disait « Mais rappelle-toi, il y avait ça, et puis ça aussi ! » En prison, nous avons, certes, fini par obtenir papier et crayons. Mais nous n’avons pas écrit sur notre rencontre avec les Touaregs, car nous pensions que cela pouvait compliquer notre situation. On découvre également dans votre l iv re vot re v ie quot id ien ne en prison… C’est la partie qui a été la plus douloureuse à écrire, car l’expérience était traumatisante. Derrière les barreaux, nous n’avions rien à faire, nous avons eu le temps de refaire 500 fois le scénario de notre arrestation! Après, nous avons obtenu du papier et un crayon. Pour nous occuper, nous prenions des notes. Mais comme nous ne voulions pas écrire sur les Touaregs, nous nous sommes cantonnés à raconter notre quotidien en prison.
Si les choses étaient à refaire, que changeriez-vous? J’éviterais d’essayer de recueillir le point de vue des N’est-ce pas, aussi, une autorités. Connaissant les façon de répondre à ceux lieux de passage, j’entrerais qui vous ont considérés au Nord-Niger en prenant un comme des têtes br ûminimum de risques et reslées? En territoire interdit, de Thomas sortirais de la même façon. L’objectif n’est pas de Dandois et Pierre Le gouvernement a beau régler des comptes. Il s’agit Creisson, Arthaud, avoir de nombreux argude mettre les choses en pers300 pages, 20 euros. ments à faire valoir dans ce pective. Beaucoup nous ont conflit, c’est à ça qu’il nous reproché d’avoir accumulé amène : faire un reportage totalement les erreurs. Nous en avons sans doute partial, malheureusement. ■ fait, mais certainement pas toutes celles Propos recueillis par JEAN-BAPTISTE MAROT qu’on nous attribue! J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p092.indd 92
12/09/08 14:31:08
JA2488P93-102
12/09/08
17:34
AC
Page 93
93
ANNONCES CLASSÉES Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre Tél. : 01 44 30 18 76 – Fax : 01 44 30 18 77 – f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique - 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 Paris –France
COMMISSION SOUS REGIONALE DES PECHES (CSRP) SECRETARIAT PERMANENT
Projet Régional des Pêches en Afrique de l’Ouest (PRAO) SOLLICITATION DE MANIFESTATIONS D’INTERET POUR LA SELECTION DE CONSULTANTS POUR L’ETUDE SUIVI/CONTROLE/ SURVEILLANCE DE LA PECHE DANS LES PAYS COUVERTS PAR LE PRAO : Cap Vert, Gambie, Guinée, Guinée Bissau, Mauritanie, Sénégal, Sierra Léone, Libéria, et Ghana
La Commission Sous Régionale des Pêches (CSRP) a reçu un don du Japon pour financer des activités du PRAO, et a l’intention d’utiliser une partie de ces fonds pour effectuer les paiements au titre du contrat suivant : Sélection de consultants pour l’Etude Suivi/Contrôle /Surveillance (SCS) de la Pêche dans les Pays couverts par le PRAO (Cap Vert, Gambie, Guinée, Guinée Bissau, Mauritanie, Sénégal, Sierra Léone, Libéria et Ghana). Les services compr ennent : • L’analyse de l'effectivité et de l'efficacité des stratégies SCS existantes, en regard des pratiques de pêches illégales les plus préjudiciables ; • La proposition de solutions pour l’amélioration de la situation actuelle à travers une meilleure performance du système SCS, en termes de rapport coût-efficacité de la surveillance d’une part, et de coût-bénéfice pour les Etats de la région d’autre part ; • La mise en place d’un plan d’action sous régional de lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée en conformité avec le plan d’action international de la FAO ; • L’élaboration d’un projet d’intervention global intégrant une approche individuelle pour chaque pays. Le consultant évaluera l’organisation, le coût, l’effectivité, l’efficacité et les bénéfices des systèmes SCS dans les états cibles. Il qualifiera et quantifiera les différentes activités et les avantages en découlant tant aux niveaux national que régional. Le consultant suggérera, d’une part, les voies d’intervention sur l’effectivité et l’efficacité des systèmes de SCS pour une amélioration des coûtsefficacité et des coûts-bénéfices pour les pays de la région et d’autre part, les indicateurs de mesure des effets d’une dissuasion améliorée : coûts directs, bénéfices sur la ressource, son exploitation, l’économie de la filière et les recettes de l’état. Le consultant devra déterminer les voies de coopération entre Etats participants assurant l’amélioration des régimes de gestion et le cadre réglementaire pour le contrôle de pêcheries spécifiques en vue de rendre les activés de surveillance plus efficaces et moins onéreuses. La Commission Sous Régionale des Pêches (CSRP) invite les candidats admissibles disposant de l’expertise avérée et d’une expérience pertinente dans le domaine à manifester leur intérêt à fournir les services décrits ci-dessus. Les consultants intéressés doivent fournir les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exécuter les services (brochures, références concernant l’exécution de contrats analogues, expérience dans des conditions semblables, qualification du personnel, etc.). Les consultants peuvent s’associer pour renforcer leurs compétences respectives. Une liste restreinte de consultants sera établie à l’issue de l’appel à manifestation d’intérêt. La consultation se fera en accord avec les procédures en vigueur de la Banque Mondiale définies dans les Directives : Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale éditées en Mai 2004 et révisées en Octobre 2006. Les consultants intéressés peuvent obtenir des informations complémentaires aux documents de référence à l’adresse ci-dessous aux heures suivantes : Du lundi au jeudi de 8 heures à 14 heures, Le vendredi de 8 heures à 13 heures. Les manifestations d’intérêt doivent être déposées en trois exemplaires sous pli postal fermé portant la mention « Manifestation d’intérêt pour l’Etude Suivi/Contrôle /Surveillance (SCS) de la Pêche dans les Pays couverts par le PRAO » à l’adresse ci-dessous au plus tard le L u n d i 2 9 s e p t e m b r e 2008 à 12 heur es. S e c r é t a r i a t P e r manent de la Commission Sous Régionale des Pêches (CSRP) Amitié 3, villa 4430 B.P. : 25 485 Dakar/Sénégal - Tél. : 221 33 864 04 75, Fax: 221 33 8640477 - Dakar – Sénégal - E-mail : spcsrp@gmail.com Le Secrétaire Permanent K a n e C i r é A m a d o u
JEUNE AFRIQUE N° 2488 – DU 14 AU 20 SEPTEMBRE 2008
Manifestation d’intérêt
Project ID: P106063
JA2488P93-102
12/09/08
17:34
Page 94
94
AC
REPUBLIQUE DU CONGO
MINISTERE DE L’AGRICULTURE ET DE L’ELEVAGE Unité – Travail – Progrès CABINET PROJET DE DEVELOPPEMENT AGRICOLE ET DE REHABILITATION DES PISTES RURALES (PDARP) UNITE DE COORDINATION DU PROJET (UCP) N°__000293/MAE-CAB/PDARP-UCP.-
AVIS DE SOLLICITATION DE MANIFESTATION D’INTERÊT POUR LE RECRUTEMENT DES BUREAUX DEVANT MENER LES ETUDES DE FAISABILITES DES PISTES DE DESSERTE AGRICOLE A REHABILITER PAR ZONES DE PROJET COUVERTES PAR LE PDARP Le Gouvernement de la République du Congo a sollicité auprès de l’Association Internationale de Développement (IDA/Banque Mondiale) un don pour le Projet de Développement Agricole et de Réhabilitation des Pistes Rurales (PDARP), et a l’intention d’utiliser une partie du montant dudit Don pour financer les services de consultants ci-après :
Manifestation d’intérêt
Recrutement des bureaux devant mener les études de faisabilité pour la réhabilitation des pistes de desserte agricole par zone de projet dans les départements couverts par le PDARP. Le projet est composé de quatre Antennes Départementales de Suivi et sa durée de vie est de cinq (5) ans. Le bureau d’études intéressé ne peut choisir qu’une zone et une seule. Les zones du pr ojet, dans lesquelles les bur e a u x d e v r o n t i n t e r v e n i r a u choix sont : Antenne de Pointe-Noire : • Zone 1 : Pointe-noire, Kouilou ; • Zone 2 : Niari ; Antenne de Nkayi : • Zone 3 : Bouenza, lékoumou ; Antenne de Djambala : • Zone 4 : Plateaux, Cuvette ; • Zone 5 : Brazzaville, Pool ; Antenne de Ouesso : • Zone 6 : Sangha Les activités du pr ojet et sa structur e s’articulent comme suit : • Composante 1 : renforcement des capacités du ministère de l’Agriculture et de l’Elevage qui a pour objectif d’accroître la capacité technique et institutionnelle, ainsi que l’efficacité du MAE dans la formulation, la programmation et l’exécution de sa politique sectorielle ; • Composante 2 : réhabilitation des pistes et infrastructures rurales qui a pour objectif d’améliorer la qualité du transport local/réseau routier en vue de diminuer les difficultés qui paralysent l’expansion de la production agricole et offrir aux producteurs une facilité d’accès aux services et infrastructures de commercialisation (marchés, centres de collecte et de stockage, et.) ; • Composante 3 : appui aux activités productives et génératrices de revenus en milieux ruraux qui a pour objectif de fournir un appui technique, organisationnel et financier aux producteurs (agriculteurs, pêcheurs et éleveurs) et à leurs organisations afin de les aider à accroître leur productivité et à diversifier leurs moyens d’existence durables ; • Composante 4 : gestion et coordination du projet qui a pour objectif de soutenir les arrangements institutionnels et de mise en œuvre du projet, afin d’assurer la coordination des activités du projet en conformité avec les règles et procédures de la Banque Mondiale (y compris les aspects fiduciaires) et le respect du chronogramme des activités et résultat du projet. Ces études de faisabilité per m e t t r ont de définir et d’évaluer : 1- Les points critiques identifiés et la nature des travaux, qui pourront prendre la forme d’une remise à niveau des pistes rurales à travers les opérations localisées de débroussaillage, de déforestation, d’abattage d’arbre de diamètre> 50 cm, de décapage, de traitement de bourbiers, de reprofilage, de rechargement et d’assainissement (mise en place des fossés divergents).
2- Les travaux dits d’Entretien de la 1ère année, qui consistent à la remise en état du drainage latéral de l’axe retenu. Cette activité inclut aussi le drainage transversal (buse dalots) lorsque jugé nécessaire et pouvant entraîner un point de rupture du trafic. 3- Les ouvrages de franchissement et/ou de traversée, soient à reconstruire ou à construire avant la prochaine saison d’entretien. Les bur eaux d’études aur ont comme tâches spécifiques à réaliser : a) les études techniques devant permettre de concevoir et de dimensionner les travaux à exécuter, avec détermination du niveau d’aménagement nécessaire pour la remise à niveau de 1321 km en 2 lots (un lot de 623,29 km et un lot 697,71 km) ; b) l’étude des ouvrages de franchissement et/ou de traversée, soit à reconstruire ou à construire ; c) les études de travaux dits d’Entretien de la 1ère année, qui consistent à la remise en état du drainage latéral de l’axe retenu. Cette activité inclut aussi le drainage transversal (buse dalots) lorsque jugé nécessaire et pouvant entraîner un point de rupture du trafic. Ceci per m e t t r a d e d é f i n i r l a n a t u r e et la localisation des travaux n é c e s s a i r es. L’Unité de Coordination du Projet (UCP) invite donc les bureaux d’études intéressés à manifester leur intérêt à remplir les services décrits ci-dessus, de fournir les informations indiquant leur plaquette ou dossier de présentation du bureau, les travaux analogues exécutés avec référence (pays, année, client…), La sélection sera faite conformément aux Directives de la Banque mondiale « Sélection et Emploi des Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale, Mai 2004, revissées octobre 2006. La méthode de sélection utilisée est la Qualité Technique et Coût. Les intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires, à l’adresse ci-dessous, les jours ouvrables, de 9H00 à 14H00. Les manifestations d’intérêt peuvent être transmises par voie électronique ou déposées sous pli fermé à l’adresse ci-dessous, au plus tard, le lundi 29 s e p t e m b r e 2008, à 12H30 à : PROJET DE DEVELOPPEMENT AGRICOLE ET DE REHABILITATION DES PISTES RURALES (PDARP) UNITE DE COORDINATION DU PROJET. SECTION PASSATION DES MARCHES sis Ex Caisse de Stabilisation, Quartier Mpila, en face de la station TOTAL Tel : (242) 538 55 52. E-Mail : pdarp_maep@yahoo.fr Brazzaville, le 10 septembre 2008 Le Coordonnateur, Pierre-Claver OBOUKANGONGO
JEUNE AFRIQUE N° 2488 – DU 14 AU 20 SEPTEMBRE 2008
JA2488P93-102
12/09/08
17:34
Page 95
95
REPUBLIQUE DU SENEGAL Un Peuple – Un But – Une Foi
AC
Comité d’Orientation et de Suivi de la Stratégie de Croissance Accélérée Comité technique SCA
PRIMATURE
Avis d’Appel à Manifestation d’Intérêt
RELANCE
Recrutement d’un Consultant pour l’Elaboration d’un Programme d’Appui à la Mise en œuvre de la Stratégie de Croissance Accélérée 6. L’intégralité de cette mission devra être réalisée sur une durée de trois (3) mois au maximum à compter de la notification du marché, au Sénégal et à l’étranger si nécessaire. 7. Les candidats intéressés sont invités, à partir de ce présent appel, à manifester leur intérêt pour la soumission à la réalisation de la mission décrite ci-avant, en justifiant : (i) les expériences capitalisées dans la réalisation de missions similaires avec les indications sur les références : nom de la mission, commanditaire, bailleur, les principales caractéristiques du projet, (ii) le nombre d’années d’expérience, (iii) les qualifications du candidat ainsi que le nombre et les profils des experts qui seront engagés dans la réalisation de cette mission. 8. Une liste restreinte de candidats sera sélectionnée parmi les candidatures reçues à la suite de cet appel. Ces candidats présélectionnés seront ensuite invités à présenter leurs dossiers de soumission comprenant une proposition technique et une proposition financière. Enfin un candidat sera sélectionné sur la base de la qualité technique et du montant de la proposition. 9. Les dossiers de manifestation d’intérêt doivent être présentés au plus tard le 2 9 o c t o b r e 2008 à 17 heur es locales aux adresses ci-après : a. Soit par voie de courrier électronique à l’adresse suivante : cepod@cepodsn.or g b. Soit en cinq (05) exemplaires à l’adresse suivante : S e c r é t a r i a t P e r manent du Comité d’Orientation et de Suivi de la SCA 14 bis, Rue Car not X Bér enger Ferraut - Dakar - Sénégal Tél: (221) 33 889 09 69 - Fax: (221) 33 821 01 69 N.B: Le présent avis annule et remplace celui paru dans Jeune Afrique n° 2485 du 24 au 30 août 2008. Il est également publié sur le site web de l’Agence française de Développement: http://afd.dgmarket.com.
RÉPUBLIQUE DU BÉNIN Fraternité-Justice-Travail
MINISTERE DE LA PROSPECTIVE, DU DEVELOPPEMENT ET DE L'EVALUATION DE L'ACTION PUBLIQUE MINISTERE DE LA PROSPECTIVE, DU DEVELOPPEMENT ET DE L'EVALUATION DE L'ACTION PUBLIQUE
AVIS A MANIFESTATION D'INTERET POUR LE RECRUTEMENT D'UN CONSORTIUM DE CONSULTANTS DANS LE CADRE DE L'OUVERTURE DU CAPITAL DE BENIN TELECOMS SA 1 . Le Gouvernement de la République du Bénin a obtenu un crédit de l'Association Internationale de Développement (Crédit IDA n° 44240-BEN - Projet de Compétitivité et de Croissance Intégrée (ProCCI», et envisage, dans le double cadre de sa politique de libéralisation du secteur des télécommunications et de l'accélération des réformes structurelles nécessaires à la promotion du secteur privé et à l'émergence économique, d'utiliser une partie du montant de ce crédit pour financer les services de consultation d'un consortium de consultants, dont l'assistance est nécessaire à la préparation et à la réalisation de l'ouverture stratégique du capital de Bénin Télécoms SA au secteur privé. 2. Le consortium aura pour mission d'assister le Gouvernement dans la préparation, l'organisation et la mise en œuvre de l'opération d'ouverture du capital social de Bénin Télécoms SA au secteur privé. A cet égard, le consortium doit notamment: - assister le Gouvernement dans l'élaboration d'un plan d'action et d'un calendrier global pour la conduite du processus d'ouverture du capital de Bénin Télécoms SA ; - réaliser un audit technique, comptable et financier de Bénin Télécoms SA ; - assister le Gouvernement béninois dans la formulation d'une stratégie d'ouverture du capital de la société ; - préparer le dossier complet d'appel d'offres international comprenant notamment le règlement, la documentation d'information, les documents juridiques de la transaction ainsi que tous autres documents nécessaires; - aider le Gouvernement à la conduite de l'ensemble de la procédure. 3 . Pour ce faire, le Gouvernement de la République du Bénin, représenté par le Ministre d'Etat chargé de la Prospective, du Développement et de l'Evaluation de l'Action Publique, lance un avis à manifestation d'intérêt pour sélectionner, par appel à la concurrence, le consortium de consultants. Il invite par conséquent, les candidats admissibles à manifester leur intérêt à fournir les services décrits ci-dessus. 4. Les consultants pouvant soumettre une proposition doivent être des banques d'affaires associées à un cabinet d'audit international et à un Conseiller juridique spécialisé dans le
JEUNE AFRIQUE N° 2488 – DU 14 AU 20 SEPTEMBRE 2008
domaine des télécommunications. Ils doivent justifier d'une expérience pertinente dans le domaine de l'ouverture de capital de sociétés de télécommunications. 5. Le consultant sera sélectionné en accord avec les procédures définies dans les Directives : Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale, édition Mai 2004 révisée en octobre 2006. 6 . Les consultants intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence à l'adresse ci-dessous, tous les jours ouvrables, aux heures suivantes: de 8 heures à 12 h30 et de 15 h à 18 h 30 (heure locale). 7 . Les consultants intéressés doivent fournir les informations indiquant qu'ils sont qualifiés pour exécuter les services (présentation de chacun des membres du consortium, les curricula vitae actualisés, les références concernant l'exécution de missions analogues, l'expérience dans des domaines similaires, la disponibilité des compétences nécessaires parmi le personnel, etc.). 8. Les manifestations d'intérêt doivent être rédigées en français et être déposées ou expédiées en cinq (5) exemplaires à l'adresse mentionnée ci-dessous, avec la mention «Manifestation d'intérêt pour le recrutement d'un consortium de transaction pour l'ouverture du capital de Bénin Télécoms SA» au plus tard le 2 9 s e p t e m b r e 2008 à 12 heur e s p r é c i s e s (heure locale). S e c r é t a r i a t P e r m a n e n t d e l a C o m m i s s i o n Technique de Dénationalisation (SP-CTD) Ex-Galerie Mar chande d'Akpakpa, Office des Habitations Economiques (OHE) 02 BP 8140 - COTONOU (Rép. du Bénin) Téléphone: (229) 21 377026 - Télécopie: (229) 21 377023 - E-mail: ctdcod@yahoo.fr
Fait à Cotonou le 8 septembre 2008 Pour le Ministre d'Etat chargé de la Prospective, du Développement et de l'Evaluation de l'Action Publique, Le Directeur de Cabinet Antonin S. DOSSOU
Manifestation d’intérêt
1. Le Gouvernement du Sénégal a obtenu de l’Agence française de Développement un accord de principe pour le financement d’une étude de faisabilité d’un programme d’appui à la mise en œuvre de la Stratégie de Croissance accélérée. 2. Le présent appel à manifestation d’intérêt entre dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’action de la Stratégie de croissance accélérée (SCA) validé par le comité national de pilotage en janvier 2007. 3. Au plan politique, la SCA a fait l'objet de la loi d'orientation n° 2008-03 du 08 janvier 2008 sur la Stratégie de Croissance accélérée, ce qui en fait le fondement des politiques publiques de l’Etat sénégalais pour les années à venir en matière de promotion de la création de richesses. L’application de cette loi s’appuie sur (i) un document de référence présentant la démarche stratégique globale, ii) un plan d’action articulé autour, d’une part de la mise en œuvre de réformes transversales pour un environnement des affaires de classe internationale, d’autre part de la promotion de grappes de croissance, et iii) un plan de financement de la SCA. 4. L’objet de la prestation est de définir un programme d’appui au gouvernement sénégalais pour la mise en œuvre et le pilotage de la SCA permettant d’optimiser le dispositif institutionnel de mise en œuvre de la SCA à la fois dans son architecture et son fonctionnement, et d’identifier les points d’affectation des ressources qui seront mises à disposition par l’Agence française de Développement en appui à la SCA. Ce programme viendra compléter les programmes directs de soutien aux plans d’action des grappes sectorielles. 5. Cette prestation nécessite des compétences internationalement reconnues en matière de définition de politique publique, d’organisation stratégique et de coordination des mécanismes de mise en œuvre de politique de développement économique et de gestion des ressources humaines.
JA2488P93-102
12/09/08
17:34
Page 96
96
AC RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO
MINISTERE DE L’INTERIEUR, DECENTRALISATION ET SECURITE PROJET DE RENFORCEMENT DES CAPACITES DE GOUVERNANCE (PRCG)
Avis de passation des marchés
AVIS GENERAL DE PASSATION DES MARCHES 1. Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo a sollicité et obtenu de l’Association Internationale de Développement (IDA) un don de 50 millions de dollars américains en vue de financer le «Projet de Renforcement des Capacités en Gouvernance, PRCG» et se propose d’utiliser une partie de ces fonds pour acquérir les fournitures, réaliser les travaux et bénéficier des services des consultants dans le cadre de ce Projet.
provincial ; - Suivi des indicateurs de performance ; - Service de renforcement des capacités pour les initiatives provinciales ; - Mise en place du cadre de concertation des bailleurs pour le suivi efficace du processus de décentralisation ; - Activités d’échange d’informations et de pratiques entre les provinces.
2. Le projet est fondé sur la décentralisation administrative, financière et territoriale identifiées comme point d’encrage de la réforme de la Gouvernance en RDC. Il comprend les composantes suivantes :
• Composante 3 : Renforcement des capacités de mise en œuvre du projet (7.640.000 $US). - Mise en œuvre du Projet ; - Renforcement des capacités dans le suivi et évaluation de service de gouvernance par l’administration de la Présidence de la République ; - Renforcement des capacités dans le suivi et évaluation de service de gouvernance par l’administration de la Primature ; - Appui à la conception et à la mise en œuvre d’une politique de communication gouvernementale ; - Etudes régulières de tableaux de bord prospectifs.
• Composante 1 : Renforcement de la gestion des finances publiques et de la gestion de la fonction publique au niveau du Gouvernement central, y compris l’installation d’un système opérationnel des relations fiscales intergouvernementales (20.740.000 $US). Les principales activités se rapportant à cette composante sont les suivantes : - Préparation et élaborations des principaux décrets et lois sur la décentralisation ; - Mise en œuvre des instruments juridiques pour étendre la décentralisation, y compris jusqu’au découpage des provinces prévu en 2010 ; - Formation et diffusion de la législation et des politiques ; - Amendements à la législation sur la fonction publique ; - Conception et mise en œuvre de la réforme de la masse salariale et des pensions du secteur ; - Amélioration et extension du système de paie automatisé et, Création et gestion des Registres de la Fonction Publique ; - Evaluation complète des besoins en formation ; - Appui à la restructuration et à l’adaptation de six ministères directs les plus concernés par le processus de décentralisation ; - Réforme et renforcement du cadre légal et institutionnel pour la gestion du budget ; - Conception et mise en œuvre d’un cadre de dépenses à moyen terme, et Appui au renforcement des capacités dans les ministères directs et l’appui à la gestion des changements ; - Réforme de la politique et de l’administration publique ; - Soutien du système à la gestion des finances publiques. • Composante 2 : Renforcement des systèmes de gestion de la fonction publique et des finances au niveau provincial (22.620.000 $US) à travers les principales activités ci-après : - Procédures budgétaires provinciales ; - Renforcement des capacités de gestion des Gouvernements provinciaux - Renforcement des capacités des Régies financières au niveau provincial ; - Appui du système à la gestion des finances publiques au niveau provincial ; - Conception et installation d’un système simplifié de base de données pour la fonction publique provinciale, avec un lien aux systèmes centraux et extension du système de paie automatisé aux provinces ; - Mise en œuvre des programmes complets de formation dans la gestion des ressources humaines et la gestion des finances publiques ; - Renforcement des capacités pour la planification du développement
3. Les marchés des travaux et fournitures financés par le Projet seront passés conformément aux procédures spécifiés dans les Directives de la Banque Mondiale pour la « Passation des marchés financés par la BIRD et les crédits de l’IDA, mai 2004 » et à l’annexe 2 de l’Accord de Don du Projet, et seront ouverts à tous les candidats qui remplissent les conditions stipulés dans les Directives. Les Consultants seront choisis conformément aux Directives « Sélection et emploi de consultants par les emprunteurs de la Banque mondiale, Mai 2004 révisé en octobre 2006 » et à l’annexe 2 de l’Accord de don du Projet. 4. Les Avis spécifiques de passation des marchés seront publiés dans Development Business (UNDB), dans dgMarket, dans les journaux locaux et dans d’autres publications internationales et diffusés auprès des représentations diplomatiques accréditées auprès de la République Démocratique du Congo. 5. Les soumissionnaires potentiels satisfaisant aux critères de provenance souhaitant figurer sur la liste des destinataires de Demandes des propositions et d’Appels d’offres dans le cadre des procédures d’appel à la concurrence, ou ayant besoin de renseignements complémentaires devront s’adresser à :
Cellule Pour la Décentralisation P r o j e t d e R e n f o r cement des Capacités de Gouver n a n c e Av e n u e C o l o n e l T s h a t s h i Commune de la Gombe, Ville de Kinshasa République Démocratique du Congo Email : prc g rdc@gmail.com Téléphones : (+ 243) 81 039 13 16 ; (+ 243) 81 186 71 13 (+243) 99 836 53 36 ; (+243) 99 536 24 95
LE COORDONNATEUR NATIONAL Albert ETCHUMBA ONYEMBO
JEUNE AFRIQUE N° 2488 – DU 14 AU 20 SEPTEMBRE 2008
JA2488P93-102
12/09/08
17:34
Page 97
97
AC
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
PROJET DE DEVELOPPEMENT DES MARCHES D’ELECTRICITE POUR LA CONSOMMATION DOMESTIQUE ET A L’EXPORTATION (PMEDE) SECTEUR D’ELECTRICITE
AVIS GENERAL DE PASSATION DES MARCHES
www.comsystems.com
Professional Digital Two-Way Radio System
PROMO SPECIALE 30 Radios achetées 1relais Digital Gratuit Validité Limitée Fax :+1 239 236 0886 ou Fax :+ 33 1 53 01 34 71
sales@comsystems.com JEUNE AFRIQUE N° 2488 – DU 14 AU 20 SEPTEMBRE 2008
Retrouvez toutes nos annonces sur le site : www.jeuneafrique.com
Avis de passation des marchés - Divers
Don IDA N°. H296 - DRC - ID N° du projet ID : P097201 Le présent Avis général de passation des marchés est une actualisation de celui publié le financés par les prêts de la Banque et les crédits de l’IDA et Sélection et Emploi des 12 avril 2007. Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale (édition mai 2004, révisée en La République Démocratique du Congo a obtenu un don de l’Association internationale octobre 2006). Et tous les fournisseurs, entrepreneurs et consultants répondant aux critères de développement (IDA) d'un montant équivalant à 196.1 millions de DTS, soit environ de provenance définis dans lesdites directives sont admis à soumissionner. 300 millions de dollars américains, pour financer le Projet de développement des marchés Les avis spécifiques aux différents marchés qui doivent être passés conformément aux d’électricité pour la consommation domestique et à l’export, PMEDE en sigle, et se proprocédures d'appel à la concurrence internationale de la Banque mondiale seront publiés, pose d'utiliser les fonds de ce don pour régler des fournitures, travaux et services devant dès leur communication, dans Development Business (UNDB), dgMarket, les journaux être acquis dans le cadre de ce projet. locaux et autres publications internationales. Ce projet comprend les composantes suivantes : Il sera procédé à une présélection pour les marchés suivants : 1 . la Réhabilitation des centrales d’Inga et ses ouvrages connexes qui inclut la réhabilita1. la Réhabilitation des turbines de Inga I et Inga II 2 . la Construction de la deuxième ligne de transport d’électricité HT entre Inga – Kinshasa tion des turbines d’Inga I et II ainsi que des travaux de génie civil relatifs au dragage et à l’élargissement du canal d’amenée d’eau. (financement BEI) 2 . la Réhabilitation et l’extension du réseau de distribution de Kinshasa notamment l’imLes soumissionnaires potentiels satisfaisant aux critères de provenance ayant besoin de plantation d’un injecteur 220/20 kV à Kimbanseke, l’électrification de Kimbanseke (réseau renseignements complémentaires, devront s'adresser au : BUREAU CENTRAL DE COORDINATION (BCECO) MT et BT), l’élimination de poches noires dans la ville de Kinshasa, plus précisément à Pour le compte de la Société Nationale d’Electricité (SNEL) Mpasa 1,2 et 3, Malweka et Kisenso, et l’acquisition et l’implantation de nouvelles cabines A l’attention de Monsieur MATATA PONYO, Dir e c t e u r G é n é r a l MT/BT pour l’extension et la décharge. Avenue Colonel Mondjiba, n°3 7 2 3 . le Renforcement des capacités et gouvernance du Ministère de l’Energie et de la SNEL, Concession UTEXAFRICA - KINSHASA / NGALIEMA notamment en matière d’activités commerciales, qui comprendra l’acquisition des compREPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO teurs pour la SNEL, l’amélioration du système de gestion commerciale de la SNEL, le renTEL. : + (243) 99 99 40 301 & + (243) 81 99 99 180 forcement des capacités du Ministère et l’appui à l’élaboration d’études et d’analyse pour Email : bceco@bceco.cd avec copie à dpm@bceco.cd, le développement du site Inga III. d p m b c e c o @ y a h o o . f r, d a n p _ k 2 0 0 0 @ y a h o o . f r 4 . Autres études. MATATA PONYO Mapon Les marchés financés par le don susmentionné seront passés conformément aux procéDirecteur Général du BCECO dures spécifiées dans les Directives de la Banque mondiale : Passation des marchés
JA2488P93-102
12/09/08
17:34
Page 98
98
AC RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO
Avis d’appel d’offres Date de lancement : 11 septembre 2008
PROJET D’URGENCE D’APPUI A L’AMELIORATION DES CONDITIONS DE VIE (PUAACV) Composant B
SOCIETE DE GESTION DE REHABILITATION URBAINE (SGRU) Marché de fourniture de Produits de Traitement de l’Eau Potable de la REGIDESO (sulfate d’aluminium, chaux et chlore) pour une période de trois mois dans la Ville de Mbandaka, Chef-lieu de la Province de l’Équateur reparti en un lot unique et indivisible.
Don N°H164 RDC Appel d’Offres National N°003/PUAACV/SGRU/AON/2008/MF
Appel d’offres
1 . Le présent Avis d’appel d’offres fait suite à l’Avis général de passation de marchés du projet paru dans Development Business du 07 septembre 2004. 2 . Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo a obtenu un don de la l’Association Internationale de Développement (IDA) pour financer le coût du projet d’Urgence d’Appui à l’Amélioration des Conditions de Vie. Il se propose d’utiliser une partie du montant de ce don pour effectuer les paiements autorisés au titre du marché relatif à la « Fourniture de Produits de Traitement de l’Eau Potable de la REGIDESO (sulfate d’aluminium, chaux et chlore) pour une période de trois mois dans la Ville de Mbandaka, Chef-lieu de la Province de l’Equateur reparti en un lot unique et indivisible » en République Démocratique de Congo (RDC). 3 . La SOCIETE DE GESTION DE REHABILITATION URBAINE (SGRU), Maître d’Ouvrage Délégué, invite par le présent avis d’appel d’offres, les soumissionnaires éligibles et qualifiés à présenter leur soumission cachetée en vue de fournir : • 25 tonnes de sulfate d’aluminium • 50 tonnes de chaux • 5 tonnes de chlore à la Direction Provinciale de la Régidéso de la Ville de Mbandaka, Chef-lieu de la Province de l’Equateur en République Démocratique du Congo. 4 . L’Appel d’offres se déroulera conformément aux procédures d’Appel d’offres national spécifiées dans la publication de la Banque « Directives: passation des marchés financés par les prêts de la BIRD et les crédits de l’IDA », et est ouvert à tous les soumissionnaires des pays qui répondent aux critères d’éligibilité tels que définis dans le Dossier d’appel d’offres.5 5 . Les soumissionnaires intéressés éligibles peuvent obtenir de plus amples renseignements auprès de : SOCIETE DE GESTION DE REHABILITATION URBAINE
(SGRU), Att. M. Jean Charles Moriondo, Chef de Pr o j e t Av e n u e d e l a G o m b e , 7 2 , K i n s h a s a - G o m b e , République Démocratique du Congo Tél. +243814607798; +243991762150; +243992931328; +243899698181 E-mail : SGRU@techniplan.it et examiner le Dossier d’appel d’offres à l’adresse ci-dessous à partir de 09h30’ à 16h00’, du lundi au vendredi 7. Le Dossier d’appel d’offres complet en langue française peut être acheté par les soumissionnaires intéressés à l’adresse cidessous à partir de 09h30’ à 16h00’ du lundi au vendredi, contre paiement d’un montant non remboursable de [200 usd]. 8. Les Soumissions devront être déposées à l’adresse ci-dessous au plus tard le 15 Octobr e 2008 à 15h00’ heur e locale. Les dépôts électroniques ne seront pas admis. Les soumissions présentées hors délais seront rejetées. Les Soumissions seront ouvertes physiquement en présence des représentants des soumissionnaires qui souhaitent y assister à l’adresse ci-dessous le même jour à 15h10’ heure locale. 9. Toutes les Soumissions doivent être accompagnées d’une Garantie de Soumission pour un montant de 1.000 dollars américains. Cette garantie peut être constituée d’une garantie bancaire ou d’un cheque certifié. Tous les coûts relatifs à la préparation de la soumission seront à la charge du soumissionnaire. 10. L’adresse mentionnée ci-dessus est: SOCIETE DE GESTION DE REHABILITATION URBAINE (SGRU), Att. M. Jean Charles Moriondo, Chef de Pr o j e t Av e n u e d e l a G o m b e , 7 2 , K i n s h a s a - G o m b e , République Démocratique du Congo JEUNE AFRIQUE N° 2488 – DU 14 AU 20 SEPTEMBRE 2008
JA2488P93-102
12/09/08
17:34
Page 99
99
AC AVIS DE PRESELECTION DE CABINETS D'AUDIT OU D'EXPERTISE COMPTABLE 1. L'Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) est un Établissement Public Inter n a t i o n a l doté de la personnalité morale et jouissant de l'autonomie financière. L'ASECNA comprend actuellement 18 Etats membres : Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Congo, Comores, Côte d'Ivoire, France, Gabon, Guinée Bissau, Guinée Equatoriale, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Tchad, Togo. 2. L'ASECNA lance un appel à manifestation d'intérêt pour la présélection de cinq (5) cabinets d'audit ou d'expertise comptable en vue d'une consultation pour la révision de son système comptable.
4. En outre, le dossier de manifestation d'intérêt doit nécessairement comprendre une lettre de soumission, les copies certifiées conformes des pièces administratives et fiscales en cours de validité (l'agrément et/ou l'enregistrement au registre du commerce, la carte d'identification fiscale, le quitus fiscal, le certificat de non faillite) et tout autre document de références techniques. 5. Une présélection de cinq cabinets sera faite pour une future consultation restreinte.
6. En cas de groupement ou d'association de cabinets, chaque membre devra fournir les informations requises ci- dessus mentionnées au point (4) et le dossier comprendra le protocole ou convention d'association ou de groupement dûment signée par tous les membres et désignant le chef de file qui sera le répondant unique et signataire de la lettre de soumission. 7. L'avis détaillé de cet appel public de candidatures en langue française peut être consulté gratuitement sur le site web de l'Agence (www.asecna.aer o). Pour toute information complémentaire ou demande de renseignement, les cabinets pourront s'adresser à l'Agence Comptable de l'ASECNA, à l'adresse cidessous ou à la représentation nationale de l'ASECNA dans les pays membres. 8. L'enveloppe cachetée contenant les dossiers de soumission devra comporter en haut au coin gauche la mention suivante : « Soumission pour la présélection de cabinets d'audit ou d'expertise comptable — à n'ouvrir qu'en séance de dépouillement ». 9. Les manifestations d'intérêt écrites, en langue française, doivent être envoyées à l'adresse ci-dessous, en quatre exemplaires, au plus tard le 1 6 o c t o b r e 2008 à 9 heur es GMT. Direction Générale de l'ASECNA, à l'attention de l'Agent Comptable, 32-38 Av. Jean Jaurès B.P. 3144 Dakar – SENEGAL . Tel : (00 221) 33 849 67 26, (00 221) 33 823 82 65 Fax : (00 221) 33 823 44 12 . Le Directeur Général de l’ASECNA
AVIS D'APPELS D'OFFRES
Suite à des appels d'offres déclarés infructueux, l'Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) lance à nouveau deux (2) Appels d'Of f r e s I n t e r n a t i o n a u x o u v e r t s p o u r : - la fourniture d'équipements complémentaires du simulateur du système centre de l'EAMAC, au Niger, projet 4500-4522, - la construction d'un bloc technique et d'une vigie à NDjaména, au Tchad, projet 3500.3541 Les avis détaillés d'appels d'offres en français pourront être consultés gratuitement sur le site web de l'Agence (www.asecnaaero), et chaque dossier d'appel d'offres pourra être retiré à partir du 0 5 S e p t e m b r e ( N d j a m é n a ) o u d u 1 5 S e p t e m b r e (EAMAC) 2008 auprès de : - la Direction des Etudes et Projets à Dakar (Sénégal) et à la Délégation de l'ASECNA à Paris (France), pour les deux dossiers, - à l'Ecole Africaine de la Météorologie et de l'Aviation Civile (EAMAC) à Niamey au Niger ou à la Représentation de l'ASECNA au Tchad, pour le dossier approprié contre paiement d'une somme non remboursable de :
JEUNE AFRIQUE N° 2488 – DU 14 AU 20 SEPTEMBRE 2008
ASECNA
- pour le dossier de four n i t u r e d'équipements à l'EAMAC, • zéro (0) FCFA pour les entreprises ayant participé à la première consultation, • un million (1 000 000) FCFA pour les autres ; - pour le dossier bâtiment du bloc technique de Ndjaména, • zéro (0) FCFA pour les entreprises ayant participé à la première consultation et pour les équipementiers ayant retiré le dossier volet équipements objet d'un précédent appel d'offres, ou qui se proposent de le faire, • cinq cent (500 000) FCFA pour les autres. La date de remise des offres à la Direction des Etudes et Projets à Dakar (Sénégal) est prévue pour le 20 Octobr e 2008 (dossier Ndjaména) et le 31 Octobr e 2008 (dossier EAMAC) à 12 h e u r es GMT ; l'ouverture des plis aura lieu en séance publique en présence des soumissionnaires qui le désirent à la date indiquée dans chaque dossier d'appel d'offres. Le Directeur Général de l’ASECNA
Avis de présélection - Appel d’offres
3. Les cabinets intéressés doivent fournir les informations indiquant qu'ils sont qualifiés pour réaliser la prestation (brochures, références concernant l'exécution antérieure de prestations similaires, disponibilité des compétences nécessaires en ressources humaines, matérielles, etc.).
ASECNA
JA2488P93-102
12/09/08
17:34
Page 100
100
AC
AVIS D’APPEL D’OFFRE INTERNATIONAL N°01/FM-PALU/FY 09 POUR L’ACHAT DE COMBINAISONS THERAPEUTIQUES A BASE DE DERIVE D’ARTEMISININE (CTA)
Lancé par l’ONG C A R E I n t e r n a t i o n a l C ô t e d ’ I v o i r e dans le cadre de la mise en œuvre du programme de « R e n f o r cement de la lutte antipaludique en situation de post-conflit chez les femmes enceintes et les enfants de moins de cinq ans dans 19 Districts de la Côte d ’ I v o i r e » financé par le F o n d s M o n d i a l d e L u t t e c o n t r e le Sida la Tu b e r culose et le Paludisme, le présent appel d’offres porte sur la sélection d’un fournisseur pour la fourniture de 1 7 2 3 5 4 t r a i t e m e n t s de CTA p o u r l e s e n f a n t s d e 0 à 1 1 m o i s e t 6 8 9 4 1 5 t r a i t e m e n t s d e C TA p o u r l e s e n f a n t s d e 1 à 5 a n s . Les personnes morales ou physiques intéressées sont invitées à retirer gratuitement le dossier d’appel d’offres à partir du L u n d i 1 5 S e p t e m b r e 2008, et ce, jusqu’au M a r d i 3 0 S e p t e m b r e 2008 à 16H30 GMT, au bureau de CARE International Côte d’Ivoire sis à l’adresse suivante : II Plateaux Derrière l’ENA Lot 189, îlot 19 Tel. : + 225 22 40 97 25 Fax : + 225 22 41 25 16
Recrutement
Ou en envoyant un e-mail avec comme objet « demande de dossier d’appel d’offre pour la fourniture de CTA » à s i m p l i c e @ c a r e c i . o r g La date limite de soumission des of fres est fixée au Vendredi 31 Octobre 2008 à 12 H 00 GMT.
LA BANQUE AFRICAINE DE DÉVELOPPEMENT Créée en 1964, la Banque africaine de développement est la première institution panafricaine de développement qui œuvre pour la croissance économique et le progrès social en Afrique. L’objectif premier de la BAD est de réduire la pauvreté et d’améliorer les niveaux de vie des populations en mobilisant des ressources tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du continent africain et en apportant une assistance financière et technique aux projets et programmes de développement en Afrique. La Banque compte 78 Etats membres dont 53 pays régionaux (africains) et 25 non régionaux. La BAD offre actuellement les opportunités suivantes : Expert en Gouvernance en Chef, lutte contre la corruption, département de la gouvernance et de la gestion économique et financière (ADB/08/027* - poste republié) Diriger, définir et piloter les programmes de la Banque en matière de lutte contre la corruption. Fournir des conseils aux pays membres dans ce même domaine, ainsi que des études diagnostiques pour appuyer les stratégies de réforme nationale et les interventions de la Banque. Coordonner les travaux d’analyse effectués en amont pour améliorer la qualité des opérations de la Banque et renforcer la base de connaissance dans le domaine de la lutte contre la corruption en Afrique. La connaissance du portugais et de SAP constituerait un atout. Date de clôture : 26 septembre 2008. Expert en Gouvernance Financière et Gestion des Recettes, département de la gouvernance et de la gestion économique et financière (ADB /08/118) Contribuer aux efforts de la Banque visant à promouvoir la bonne gouvernance financière dans les pays membres régionaux, en fournissant des données et des orientations aux chefs de projets en matière de gestion des recettes et d’administration fiscale. Promouvoir les priorités de la Banque en matière de lutte contre la corruption dans l'administration fiscale et la gestion des ressources. Élaborer les projets de déclaration et les contributions techniques sur la gouvernance des recettes et des ressources destinés aux différents rapports du Groupe de la Banque. Date de clôture : 25 septembre 2008. Spécialiste en Chef, Education, département du développement humain (ADB/08/119) Conseiller la direction et le personnel sur la stratégie et les interventions à long terme concernant la politique et les questions opérationnelles en matière d'enseignement scientifique, technique et professionnel, en particulier dans le perfectionnement des compétences. Promouvoir le développement des connaissances sectorielles à travers l'élaboration, la publication et la diffusion de documents techniques, l'animation et la participation aux réseaux sectoriels au sein de la Banque et à l'extérieur. Développer et renforcer la relation client et promouvoir le lancement de nouvelles activités pour la Banque. Date de clôture : 26 septembre 2008.
Pour connaître les critères de sélection précis (y compris les études, qualifications, connaissances et expérience) pour chacun des postes ci-contre, les candidats sont invités à consulter les avis de vacance de poste publiés sur notre site web : http://www.afdb.org La Banque offre une égalité de chances aux hommes et aux femmes et encourage la candidature des femmes. Seules les demandes complètes (curriculum vitae détaillé et à jour, indiquant la date de naissance exacte et la nationalité, accompagné de la fiche de renseignements personnels - disponible sur le site web de la Banque - dûment remplie) transmises de préférence par voie électronique à l’adresse recruit@afdb.org seront examinées. Vous pouvez aussi envoyer votre candidature par courrier à : Directeur, Département de la gestion des ressources humaines Banque Africaine de Développement Agence Temporaire de Relocalisation (ATR) Angle des trois rues : Avenue du Ghana, Rue Pierre de Coubertin, Rue Hedi Nouira BP 323 - 1002 TUNIS BELVEDERE TUNISIE FAX : (216) 71 831 472 Les candidat(e)s ne seront contacté(e)s que s’ils (elles) remplissent toutes les conditions requises et si une interview est envisagée.
www.afdb.org
JEUNE AFRIQUE N° 2488 – DU 14 AU 20 SEPTEMBRE 2008
JA2488P93-102
12/09/08
17:34
Page 101
101
www.sai2000.org COURS INTENSIFS D’ANGLAIS École Commerciale Privée fondée en 1955 THIS SCHOOL IS AUTHORIZED UNDER FEDERAL LAW TO ENROLL NONIMMIGRANT ALIEN STUDENTS
Comptabilité sur ordinateur Gestion de bureau sur ordinateur dBase Management® Microsoft Office Suite - Windows Traitement de texte Microsoft® Lotus Suite - (T1) Internet access • Membre accrédité du “ACICS” • Établissement reconnu par le Département d’Éducation de l’État de New York • Commence dès ce mois-ci • Cours offerts le matin, l’après-midi et le soir. Tél. (212) 840-7111 Fax (212) 719-5922
IFC
MICROFINANCE
AC
Dakar-Sénégal
IFC, the private sector arm of the World Bank Group, is the largest multilateral provider of financing for private enterprise in emerging markets. As a global investor in microfinance, IFC has completed more than 130 microfinance transactions in 50 countries. The Corporation is today one of the industry’s largest investors and indirectly supports financial services to 4.5 million low-income entrepreneurs. IFC recruits:
Senior Investment Officer
Operations Officer
10+ years experience
5+ years experience
to join IFC’s regional microfinance team and actively originate, appraise, structure and supervise microfinance projects in Sub-Saharan Africa. Requirements: • Strong financial, analytical and project structuring skills • Superior knowledge of international and African microfinance • Masters’ degree in business administration, economics, or other relevant field • Excellent skills in English and high level of French • Motivated and enthusiastic about the opportunities and challenges of working in Sub-Saharan Africa to achieve sustainable development. IFC offers a challenging, multicultural environment and attractive conditions. For detailed job descriptions and to apply on-line, please go to www.ifc.org/careers. Deadline is October 15, 2008.
APPEL GRATUIT SUR INTERNET PAR NET MEETING 166.84.191.135
IFC’s vision is that people should have the opportunity to escape poverty and improve their lives.
info@sai2000.org
www.ifc.org
Regional Director Dakar, Senegal (Oxfam GB) £32,930 – £40,790 net pa £45,694 – £59,016 gross pa
Le Centre Technique de Coopération Agricole et Rurale (CTA) est un organisme international dont le siège est basé à Wageningen, aux Pays-Bas, qui travaille dans le domaine de l’information et de la communication pour le développement agricole et rural des 78 pays ACP (Afrique, Caraïbes et Pacifique) signataires de l’Accord de Cotonou. Le Centre lance un appel à candidature pour le poste de :
Comptable
(Additional benefits depending upon individual circumstances)
West Africa is a dynamic, challenging part of the world striving to flourish and develop, and it will take inspirational and authentic leadership to bring about lasting change for around 270 million people. Oxfam is supporting this ambition for lasting change. As Regional Director you will lead on building trust and forging strong relationships from day one. And with your experience in bringing about change, you will be used to dealing with large teams, distance and financial management. That’s around 375 staff and a budget of £13 million. You will have strategic leadership experience ideally within the International development sector, and an understanding of the culture, politics and potential of the West Africa region. You will want to influence institutions at every level therefore the ability to speak conversational French and fluent English is required. To find out more and apply online, please visit our website quoting ref: INT2950. Closing date: 28 September 2008.
www.oxfam.org.uk/jobs Nous vous renvoyons au site Web du CTA – h t t p : / / a n n o u n c e m e n t s . c t a . i n t / f r - pour le texte complet de l’annonce et les conditions
JEUNE AFRIQUE N° 2488 – DU 14 AU 20 SEPTEMBRE 2008
Oxfam in West Africa works to support people’s rights to security and livelihoods in a context of rich natural and human potential held back by inequality, conflict, weak institutions and unaccountable governments. Oxfam is a registered charity in England and Wales (no 202918) and Scotland (SCO 039042). Oxfam GB is a member of Oxfam International.
Recrutement
SPANISH-AMERICAN INSTITUTE 215 W 43 St. (Times Square) Manhattan, NY 10036-3913
JA2488P93-102
12/09/08
17:34
Page 102
102
AC ATTIRER LES MEILLEURS TALENTS CELTEL NIGER S.A. opérant sous la marque Zain, Leader sur son marché – (Filiale du Groupe Zain)
Recrutement
RECRUTE : Votre formation (BAC + 5) en Télécommunications, Electronique ou équivalent et votre expérience professionnelle de 2 à 3 ans en tant qu’Ingénieur de Télécommunication opérant dans un environnement télécoms en général et GSM en particulier, font de vous un candidat idéal. Vo t r e p r i n c i p a l e m i s s i o n : Contribuer au développement et à l’optimisation du réseau afin d’assurer à tout moment une qualité de service conformément aux recommandations du Groupe Zain, de l’autorité de régulation ARM et UIT. Assurer également la gestion des statistiques du réseau GSM. Résumé de vos r esponsabilités : Le titulaire du poste doit : • Analyser les statistiques radios, transmission et core tout en proposant des solutions pertinentes ; • Etablir à temps et correctement les rapports quotidiens, hebdomadaires et mensuels sollicités par la direction des opérations ; • Faire les drives tests et analyser les résultats • Produire les plans de fréquence dans les bandes GSM et DCS
• Suivre et proposer la mise à jour des logiciels et des outils d’optimisation et de performance du réseau, des fonctions liées à l’OMC-R et de l’OSS • Identifier et conseiller les nouvelles versions des logiciels BSS, NSS et indiquer les paramètres utiles à l‘amélioration des KPI • Prendre en charge l’exploitation du Business Object, Astellia, Optima et OMNIX et leur mise à jour • Appuyer les opérations de maintenance et de Planification en cas de besoin • Assurer une relation de travail permanente avec le NOC et le service client avec des rapports sur la qualité du réseau. Vous parlez couramment le français et l’anglais ; vous possédez d’excellentes compétences en analyse statistique et une bonne aptitude en communication, alors ADRESSEZ-NOUS VOTRE CANDIDATURE (CV et lettre de motivation) avant le 28 /O9/ 2008 à : Zain NIGER – BP 11922 – Niamey Rép. Du Niger ou par e-mail à c a n d i d a t u r e s @ n e . c e l t e l . c o m
Executive Director: Greenpeace Africa – JHB Greenpeace, acknowledged globally as a pioneer of international environmental activism, drives positive change through action by investigating, exposing and confronting environmental abuse around the world. Greenpeace Africa seeks an A f r i c a n N a t i o n a l with an unshakeable commitment to its core values. The Executive Director will lead the newly-established Greenpeace Africa at the forefront of environmentalism to enhance its position as an active catalyst for positive responses to global environmental threats. Key Responsibilities: • Develop and execute the strategic vision for Greenpeace Africa • Overall accountability for policy, people and administration management • Oversee operations in South Africa, Democratic Republic of Congo and one West African country • Drive campaigns and fund raising initiatives • Spokesperson for Greenpeace Africa
• A successful track record of inspirational leadership at a senior level within a complex International organisation (pref. NGO, activist, human rights or aid organisation) • A deep understanding of African and global politics and the ability to influence those in positions of commercial and political power. • Experience in developing strategic plans and long term financial and business policies • Substantial knowledge of campaigning and advocacy, and a strategic understanding of how to generate change. This is a fantastic opportunity to drive environmental and social change in Africa, as part of the leading NGO in environmental activism and one of the world’s most credible voices in effecting change across the globe. Please send a CV and motivational letter to info@jhammer.co.za by 30 September. Yo u r c o n f i d e n t i a l a p p l i c a t i o n will be r esponded to within 30 days of application. Please do not contact Gr eenpeace dir ectly.
Experience and Qualifications: • A tertiary degree (masters level or above) • Strong communication skills in English and French essential JEUNE AFRIQUE N° 2488 – DU 14 AU 20 SEPTEMBRE 2008
VOUS & NOUS 103
Forum JEAN-PAUL NGOUPANDÉ
Essayiste, ancien Premier ministre de Centrafrique
La Chine, lʼAfrique et les donneurs de leçons
P
lus de trois heures de spectacle féerique, aux qualités esthétiques unanimement appréciées. Comme ils savent le faire, les Chinois ont utilisé le langage des symboles. Avec, désormais, les moyens technologiques (en l’occurrence pyrotechniques) qu’ils maîtrisent à la perfection. Objectif : délivrer un message aux Occidentaux, qui, avant l’ouverture des XXIXe Olympiades modernes, avaient mis la pression sur le pays organisateur. Les Chinois (pas seulement leurs dirigeants) ont en effet modérément goûté les manifestations violentes et hostiles qui se sont déroulées lors du passage de la flamme olympique, à Londres et à Paris notamment. D’où ce message simple et sans détour : la Chine, ce n’est pas seulement un milliard et demi d’humains – un quart de la population mondiale. C’est aussi et surtout cinq mille ans d’histoire qui, à travers des inventions techniques (papier, poudre), intellectuelles et artistiques, ont apporté une contribution essentielle au développement de l’humanité. L’empire du Milieu, a-t-on voulu nous faire comprendre, n’a plus de leçons à recevoir. Appelons cela, si l’on veut, du nationalisme à fleur de peau. Mais il s’agit surtout de l’expression constante, depuis le début de la révolution chinoise, de la volonté de réhabilitation à laquelle aspire une grande nation, humiliée et affaiblie par les fameux « traités inégaux » du XIXe siècle. Lesquels ont favorisé l’occupation ultérieure de la Chine par les troupes japonaises (1931-1945), un épisode de sinistre mémoire. AVEC DES ÉTUDIANTS CENTRAFRICAINS et gabonais
représentant l’aile « maoïste » de la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France (FEANF), j’ai été invité il y a longtemps par la Fédération nationale des élus de Chine pour un voyage de deux mois. Pendant tout notre séjour, nous avons été frappés par la présence obsessionnelle du thème de la résistance antijaponaise : films, pièces de théâtre, littérature… Tout était fait pour nous faire partager et ressentir les horreurs de l’occupation. En 2005, j’ai pu vérifier à nouveau le caractère très difficile des relations sino-japonaises. La Chine s’est en effet violemment opposée à la perspective de voir un jour le Japon siéger au Conseil de sécurité de l’ONU
comme membre permanent, selon une réforme voulue par Kofi Annan. Par ailleurs, ceux qui, en Occident, prétendent impressionner la Chine en donnant des leçons sur le Tibet oublient souvent l’intransigeance de Pékin sur la question de Taiwan. Le nouveau poids de l’économie chinoise ne fait que renforcer cette attitude. Tout le contraire de nous, Africains, qui n’avons que la protestation à opposer aux donneurs de leçons ! Ayant aliéné notre indépendance de jugement et doutant de nos forces, nous ne voyons pas que notre salut viendra uniquement de notre capacité à tracer notre propre chemin vers le développement. POURTANT, EN CINQ MILLÉNAIRES D’HISTOIRE, de Carthage au royaume zoulou de Chaka, en passant par la prestigieuse civilisation de la vallée du Nil, par les royaumes du Mali, du Ghana, et par les empires songhaï ou kongo, pour ne citer que ceux-là, la terre africaine, berceau de l’homme, n’a-t-elle pas laissé dans les consciences un peu de la créativité de « l’homme africain », pour parler comme le président français ? À chaque défi posé à nos civilisations nous avons su inventer une réponse adaptée en puisant dans notre génie propre. Il n’y a aucune raison de ne pas retrouver notre confiance en nous pour éclairer des voies nouvelles. Et affronter, avec succès, les difficultés de notre temps. À c eux qui disent q u e n o u s n ’a v o n s même pas inventé la roue (Stephen Smith, Négrologie), je répondrai que nous avons fait mieux que cela. Nous avons inventé la station debout et la marche, qui ont permis à l’homme de se développer de manière considérable : accroissement du volume du cerveau, communication sophistiquée, possibilité de se déplacer sur des grandes distances… Des avancées qui, en définitive, ont permis le peuplement de toute la planète ! ■
À chaque défi posé à nos civilisations nous avons su inventer une réponse adaptée en puisant dans notre génie propre.
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p103.indd Sec1:103
12/09/08 14:27:23
104 VOUS & NOUS
COURRIER DES LECTEURS
Constat dʼéchec
■ L’Afrique est mal partie (René Dumont), L’Afrique malade d’elle-même (Tidiane Diakité), Et si l’Afrique refusait le développement ? (Axelle Kabou). Ces quelques ouvrages, et bien d’autres analogues, ont suscité de vives polémiques dans les milieux africains. Pourtant, le constat est là : près de cinquante ans après les indépendances, l’Afrique ne compte en son sein aucun pays dit émergent ! Le monolithisme n’a pas été l’occasion pour les « guides éclairés » de jeter les bases du développement. Le pluralisme n’a pas libéré les énergies individuelles et collectives. Au contraire, on assiste à l’exode des cerveaux et des bras. Les facteurs endogènes de développement ne sont pas mis en valeur, et, dans ces conditions, il est illusoire de compter sur l’aumône étrangère, fût-ce celle des Chinois, pour amorcer le décollage économique. L’Union africaine regroupe des pays en majorité invalides et sous perfusion, dirigés par des gens pour la plupart sans vision politique ni ambition patriotique. Il n’est donc pas étonnant que le fameux Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad), qui a suscité quelque espoir, ne soit qu’un plan fantôme, rongé par des rivalités de leadership. Ce qui se porte le mieux, en Afrique, ce sont les tripatouillages constitutionnels, les manipulations de résultats électoraux, l’instrumentalisation des différences ethniques et régionales, l’opacité de gestion de deniers publics et, évidemment, les violations des droits humains. MOTOMBI KOLI, LONGJUMEAU, FRANCE
Ni Kouyaté ni Souaré
■ L’ex-Premier ministre guinéen Lansana Kouyaté n’était pas la bonne personne pour dénouer la grave crise que traverse la Guinée. Dans un pays qui accuse cinquante ans de dictature, en cherchant obstinément à restaurer les symboles du régime dictatorial de Sékou Touré, Kouyaté s’est aliéné le soutien d’une frange importante de la population guinéenne. À preuve : une fois son limogeage annoncé, les médias ont applaudi, les opposant se sont frotté les mains et la jeunesse n’a pas bougé. Bien sûr, il y a aussi le coût de la vie, qui ne s’est guère amélioré avec son arrivée à la primature, ce que Conté et son clan ont su exploiter. Concernant Tidiane Souaré, qui vient de fêter ses cent premiers jours à la primature, comme avec Cellou Dalein Diallo, Lamine Sidimé et d’autres, c’est le statu quo. Ces hommes, que tout le monde sait proches de Lansana Conté, portent une lourde responsabilité, car ils n’ont jamais osé – et n’oseront jamais – s’attaquer à des « faits de mauvaise gestion si précis et à des auteurs si nettement identifiés », comme le dit l’article « Guinée : l’audit explosif des années Conté » (J.A. n° 2471). BARRY SADIGOU, UNIVERSITÉ LAVAL, QUÉBEC, CANADA
Églises et sans-papiers
■ Devant les occupations répétées des églises catholiques, en France, par les immigrés « sans papiers », je m’interroge. Le Dieu des chrétiens catholiques serait-il plus généreux et plus à l’écoute des sans-papiers que celui des musulmans ou des juifs ? Pourquoi les sans-papiers ne font-ils pas aussi le pied de grue dans les mosquées et les synagogues ? Est-ce parce que Brice Hortefeux, « ministre des Reconduites à la frontière », est catholique pratiquant (comme le révèle l’hebdomadaire français L’Express) ? Si oui, pourquoi assistait-on également aux « invasions d’églises » du temps de Jean-Louis Debré ou même de Jean-Pierre Chevènement ? Ou, enfin, est-ce par ignorance de la loi sur la séparation de l’Église et de l’État ? PATRICK TCHICAYAT, SEVRAN, FRANCE
Un miracle pour Obama
■ Barack Obama a peu de chances d’être élu premier président noir des États-Unis. Le vaste mouvement de sympathie et de rêve de changement qu’il soulève paraît pittoresque. Les idées reçues ont la vie dure, et il est plus aisé à un Américain médiocre, de souche européenne, latino-américaine ou asiatique de devenir président, qu’à un noir bardé de diplômes ou pétri d’expériences. En Amérique, les plus pauvres sont noirs. Et les pauvres font
YOUNG MEDITERRANEAN LEADERS FORUM 16-18 OCTOBRE 2008, TUNIS
200 jeunes leaders des deux rives de la Méditerranée seront réunis autour d’orateurs prestigieux (Anas Alami, Issad Rebrab, Emmanuel Todd, Mario Monti, Salaheddine Mezouar, etc.) pour construire un réseau et mettre en oeuvre l’Euro-Méditerranée concrètement. Pour plus d'information: www.yml-forum.org
Partenaires :
Sponsors : Invest in Med , BIAT, Tunisiana, Ernst&Young, BCG
Inscrivez-vous à ce Forum exclusif ! contact contact :: yml@regards-events.fr yml@regards-events.fr tél.:+33(0) tél.:+33(0) 1 1 45 45 78 78 36 36 12 12
JA2488p104-105.indd 104
12/09/08 14:25:29
VOUS & NOUS 105
Afewerki, le mystérieux
■ La personnalité du président érythréen Issayas Afewerki ne m’a jamais laissé indifférent. Au contraire, elle m’a toujours étonné, intrigué, voire fasciné. Depuis l’indépendance de son pays, libéré de la tutelle éthiopienne en 1993, il n’a jamais cessé de faire la guerre à ses voisins, l’Éthiopie et Djibouti. Il ne peut pas rester longtemps tranquille, comme si c’était plus fort que lui ! Pourtant, le président éthiopien, Mélès Zenawi, était son compagnon d’armes dans le maquis. Mais le plus étonnant est qu’Afewerki a refusé l’adhésion de son pays à la Ligue arabe, alors que le tigrigna et l’arabe sont les langues parlées par ses compatriotes. Est-ce l’arrogance du pauvre ? Ou monnaye-t-il la situation stratégique de son pays sur la mer Rouge, situé à un jet de pierre des puits arabo-persiques de pétrole et contrôlant l’issue du canal de Suez ? A-t-il le soutien des puissances occidentales pour agir ainsi en rebelle et en orgueilleux ? MAHER MZIOU, HAZOUA, TUNISIE
Vive lʼopposition !
■ Étudiant en fin de cycle de la faculté de sciences économiques et de gestion de Bamako, je vous écris pour vous remercier du travail vraiment remarquable et, à plus d’un titre, salutaire que vous faites. J’admire surtout la réflexion de Béchir Ben Yahmed dans son éditorial « Ce que je crois ». J’ai cependant une petite suggestion à faire. J.A. pourrait-il davantage faire connaître les partis d’opposition et les opposants en Afrique, parce qu’on dit que l’Afrique est malade du sida, du paludisme… mais nous pouvons aussi dire que l’Afrique est malade de ses dirigeants! AMADOU TOURE, BAMAKO, MALI
RECTIFICATIF
Aubert Zohoré, conseiller économique du président Laurent Gbagbo, nous précise que, contrairement à notre information publiée dans J.A. n° 2482 (« Côte d’Ivoire. Le FBI et le cacao », en p. 8), il n’a jamais été entendu début juillet par le Bureau fédéral d’investigation (FBI) dans le cadre de l’enquête sur les conditions du rachat de l’usine de transformation de Fulton, aux ÉtatsUnis. Et ajoute qu’il n’a jamais participé, ni de près ni de loin, aux négociations concernant son acquisition. Dont acte, avec nos excuses pour cette erreur.
SCIENCE
Poisson et bonne santé Selon une étude italienne publiée par la revue britannique The Lancet, les acides gras insaturés oméga 3 (contenus en grande quantité dans les poissons gras tels que le saumon, le hareng ou le maquereau) auraient des effets bénéfiques contre l’insuffisance cardiaque chronique. Réalisée sur plus de 6 000 personnes atteintes de cette maladie, l’étude révèle que le taux de décès et d’hospitalisation parmi les patients ayant reçu, pendant quatre ans, des oméga 3 est inférieur de 2 % (une différence statistique significative) à celui d’un groupe auquel un placebo a été administré.
Ô vieillesse ennemie Des chercheurs des universités de Nouvelle-Galles du Sud (Australie) et du Nebraska (États-Unis) ont observé qu’un groupe de mouches vivant à l’état sauvage présente un taux de vieillissement plus important (jusqu’à deux fois chez les mâles) qu’un autre élevé en laboratoire. Or ces insectes sont fréquemment utilisés dans les travaux portant sur le vieillissement. Résultat : les chercheurs appellent à interpréter avec beaucoup de précautions toutes les études menées en laboratoire sur la longévité…
Traque de lʼinfiniment petit Un anneau de 27 km de circonférence enfoui à 100 mètres d e p r o f o n d e ur, 70 000 tonnes de matériel utilisées, 5 000 chercheurs et ingénieurs mobilisés, le tout pour la bagatelle de… 3,9 milliards d’euros ! Inauguré le 9 septembre à la frontière franco-suisse, le nouveau jouet du Centre européen pour À 100 mètres de la recherche nucléaire profondeur, le cœur (Cern) est un accélémagnétique de la bête. rateur de par ticules géant (Large Hadron Collider, LHC, en anglais) qui doit permettre des avancées majeures dans la connaissance de l’univers et de la matière. ■
MARTIAL TREZZINI/AP/SIPA
peur. Au moment décisif, il est donc plus probable que les suffrages des Latinos et des Asiatiques aillent massivement au candidat républicain: ces deux groupes minoritaires constituent près de 20 % de la population américaine et se posent en concurrents économiques directs des Noirs. Cependant, même non élu, Obama aura donné du baume au cœur d’un pays en proie aux doutes sur les plans politique et économique. Mais s’il est élu, les États-Unis justifieront vraiment leur réputation de terre des miracles en matière d’ascension sociale. TEDEBAY, NʼDJAMENA, TCHAD
SÉVERINE KODJO-GRANDVAUX
J E U N E A F R I Q U E N ° 2 4 8 8 • D U 14 A U 2 0 S E P T E M B R E 2 0 0 8
JA2488p104-105.indd 105
12/09/08 14:25:44
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL
POST-SCRIPTUM
P O L I T I Q U E , É C O N O M I E , C U LT U R E Fondé à Tunis le 17 oct. 1960 par Béchir Ben Yahmed (48 e année)
Édité par CIDCOM / LE GROUPE JEUNE AFRIQUE S.A., au capital de 24,6 millions d’euros – TVA : FR 35 337 655 682 000 33 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS Tél. : 01 44 30 19 60. Télécopieurs : Rédaction 01 45 20 09 69 Ventes : 01 45 20 09 67 ; Courriel : mailbox@jeuneafrique.com
Un scandale herbivore LES COMPAGNIES D’ASSURANCE rivalisent d’ingéniosité pour attirer de nouveaux clients. Elles développent sans cesse ce qu’elles appellent des « produits » inédits, censés créer des niches jusque-là inconnues ; des niches où des cabots un peu naïfs – les clients – se précipiteront en jappant de joie. Tout cela est de bonne guerre. L’innovation qui fait fureur en ce moment aux Pays-Bas, c’est une police FOUAD LAROUI d’assurance réservée aux végétariens. L’idée, c’est que ces derniers mènent une vie plus saine et qu’ils vivent donc plus longtemps. Ils évitent toutes sortes de maladies plus ou moins graves qui n’affectent, paraît-il, que les mangeurs de viande. Ergo, les végétariens peuvent souscrire des polices d’assurance moins coûteuses que les carnivores. Entre nous, je ne comprends pas très bien comment on peut vérifier si quelqu’un est végétarien. Sont-ce le teint terreux ou la peau diaphane qui font office de preuve ? Ce serait étonnant… Rien ne vous empêche de dévorer un mouton entier, comme Obélix le ferait avec un sanglier, puis de vous présenter, la bouche en fleur, aux guichets du courtier en jurant que vous ne mangez que du cresson, des lentilles et du zaâlouk. Mais il faut croire que les compagnies d’assurance, qui ne sont pas nées du dernier ouragan, ont les moyens de débusquer les escrocs. Un teint trop fleuri, ô paradoxe, dénoncerait le « viandophage ». En tout cas, cette histoire d’assurance à prix réduit pour les brouteurs d’herbe a profondément choqué une partie de la population des Pays-Bas : les Marocains. Ceux-ci ne conçoivent pas qu’on puisse être récompensé parce qu’on vit de salade, comme un lapin. Les plus énervés d’entre eux, ou les plus paranoïaques, affirment qu’il s’agit d’une discrimination déguisée. En privilégiant les herbivores, les assureurs excluent de façon tout à fait consciente les Marocains. Du coup, ceux-ci ont protesté en disant qu’il s’agissait de leur culture. Si vous invitez un enfant du Maghreb chez vous et que vous lui servez des carottes cuites à l’eau, une touffe de gazon et un radis pour dessert, c’est un outrage, c’est un affront ! C’est la brouille assurée jusqu’à la dixième génération. Le Marocain, comme le lion de l’Atlas ou le tigre du Bengale, ne peut pas être végétarien. Cette histoire d’assurance n’est donc qu’une façon déguisée d’exclure les ressortissants du royaume chérifien. Et les plus excités de brandir la menace d’un recours au Conseil d’État. On en est là. Je vous tiendrai au courant. En attendant, je m’en vais dévorer une pastilla aux pigeonneaux et un tagine d’agneau… ■
Direction Président-directeur général, dir. de la publication : BÉCHIR BEN YAHMED (bby@jeuneafrique.com) Directeur général délégué : Danielle Ben Yahmed Vice-présidents : Aldo de Silva, Danielle Ben Yahmed, François Soudan, Amir Ben Yahmed RÉDACTION Directeur de la rédaction : François Soudan Directeurs exécutifs : Marwane Ben Yahmed, Amir Ben Yahmed Rédacteur en chef central : Serge Faubert Rédacteur en chef exécutif : Cyril Petit Rédacteurs en chef adjoints : Jean-Dominique Geslin, Dominique Mataillet, Tarek Moussa, Jean-Michel Aubriet ; conseiller artistique : Aldo de Silva ; secrétariat : Chantal Lossou et Dominique Nobécourt LES PLUS - LES DOSSIERS - LES HORS-SÉRIE Direction : Marwane Ben Yahmed ; rédacteurs en chef : Jean-Dominique Geslin, Patrick Sandouly, Cécile Manciaux, avec Jérôme Besnault Rédacteurs en chef délégués : Hamid Barrada, Abdelaziz Barrouhi, Jean-Dominique Geslin, Samir Gharbi, Dominique Mataillet, Tarek Moussa, Renaud de Rochebrune, Patrick Sandouly ; rédacteurs en chef adjoints : Jean-Michel Aubriet, Joséphine Dedet, Cherif Ouazani, Philippe Perdrix, Jean-Michel Meyer ; Cécile Manciaux, Fabienne Pompey ; rédaction générale : Pascal Airault, Sophie Bouillon, Georges Dougueli, Samy Ghorbal, Faïza Ghozali, Séverine KodjoGrandvaux, Frédéric Lejeal, Tshitenge Lubabu M.K., Jean-Baptiste Marot, Marianne Meunier, Pierre-François Naudé, Cheikh Yérim Seck, Fawzia Zouari ; conseillers : René Guyonnet, Zyad Limam, Mathilde Rieussec ; collaborateurs : Farid Alilat, Edmond Bertrand, Christophe Boisbouvier, Tirthankar Chanda, Xavier Chimits, Chedli Klibi, Fouad Laroui, André Lewin, Sonia Mabrouk, Faouzi Mahjoub, Patrick Seale, Cécile Sow (à Dakar) ; accords spéciaux : FINANCIAL TIMES, FOREIGN POLICY, NEW YORK REVIEW OF BOOKS RÉALISATION Rédaction graphique : Zigor Hernandorena (directeur artistique), avec Stéphanie Creuzé, Valérie Olivier, Christophe Chauvin, Émeric Thérond ; rédaction technique : Nathalie Bedjoudjou, Philippe Guillaume, Alexandra Roy ; informatique : Grégory De Carolis ; prépresse : Philippe Martin ; Internet : Jérémy Fiori, Claire Labat ; iconographie : Dan Torres (directrice photo), Claire Vattebled, Vincent Fournier, Nathalie Clavé, Mathilde Manaud ; documentation : Anita Corthier (chef de service), Angéline Veyret, Sylvie Fournier, Florence Turenne
VENTES ET ABONNEMENTS Direction de la diffusion : Thibaut David ; ventes au numéro : Sandra Drouet, Caroline Rousseau ; abonnements : Fatiha Koutabi (ventes@jeuneafrique.com), avec : COM&COM, Groupe Jeune Afrique 18-20, Avenue Édouard-Herriot, 92350 Le Plessis-Robinson Tél. : 33 1 40 94 22 22, Fax : 33 1 40 94 22 32 Courriel : jeuneafrique@cometcom.fr Club des actionnaires : Dominique Rouillon ; Principal actionnaire : Fincom S.A.
■ COMMUNICATION ET PUBLICITÉ
DIFCOM
AGENCE INTERNATIONALE POUR LA DIFFUSION DE LA COMMUNICATION
S.A. au capital de 3 millions d’euros – Régie publicitaire centrale de CIDCOM / GROUPE JEUNE AFRIQUE 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 Paris Tél.: 01 44 30 19 60 Fax: 01 45 20 08 23/01 44 30 19 86. Courriel: difcom@jeuneafrique.com
Président-directeur général : Danielle Ben Yahmed ; directeur général adjoint : Amir Ben Yahmed ; direction centrale : Christine Duclos ; direction relations extérieures : Danielle Ben Yahmed ; secrétariat : Chantal Bouillet ; gestion et recouvrement : Pascaline Brémond ; service technique et administratif : Chrystel Carrière, Mohamed Diaf RÉGIES Directeur de publicité Florian Serfaty avec Sophie Arnould, Céline Levillain et Catherine Weliachew, assistés de Patricia Malhaire ; annonces classées : Fabienne Lefebvre, assistée de Sylvie Largillière COMMUNICATION Directeur général : Danielle Ben Yahmed ; directeurs adjoints : Mahamadou Camara, Marie Dugas ; chargés de mission : Balla Moussa Keita, Ekanga Shungu, David Alvarez, Arisoa Razafitrimo, Francielli Mates Cadoret
REPRÉSENTATIONS EXTÉRIEURES MAROC CIDCOM, NABILA BERRADA. Centre commercial Paranfa, Aïn Diab, Casablanca. Tél. : (212) (0) 22 39 04 54 Fax : (212) (0) 22 39 07 16 TUNISIE SAPCOM, M. ABOUDI. 15-17, rue du 18-Janvier-1952, 1001 Tunis. Tél. : (216) 71 331 244 Fax : (216) 71 353 522
■
FINCOM SIFIJA
SOCIÉTÉ DE FINANCE ET DE COMMUNICATION INTERNATIONALE
S.C.A. au capital de 9,7 millions d’euros Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS | RCS PARIS B 784 683 484
Gérant commandité : Béchir Ben Yahmed ; vice-présidents : Aldo de Silva, Danielle Ben Yahmed, François Soudan, Amir Ben Yahmed ; secrétariat : Dominique Rouillon ; finances, comptabilité : François Veyrac, assisté de Michèle Guérard et Fatiha Maloum-Abtouche ; juridique et administration : Sylvie Vogel et Karine Deniau ; personnel : Dominique Gaudefroy IMPRIMEUR SIEP - FRANCE. COMMISSION PARITAIRE : 1011C80822. DÉPÔT LÉGAL : SEPTEMBRE 2008. ISSN 1950-1285.
JA2488p106.indd 2
12/09/08 14:24:20
CONFERENCE INTERAFRICAINE DES MARCHES D’ASSURANCES SECRETARIAT GENERAL
APPEL A MANIFESTATION D’INTERET N° 000678 SG/CIMA/2008 Pour la confection des tables de mortalité pour les Etats membres de la Conférence Interafricaine des Marchés d'Assurances (CIMA) Le Secrétariat Général de la Conférence Interafricaine des Marchés d'Assurances (CIMA), sis à Batterie IV – BP 2750 Libreville (République Gabonaise), lance un avis d’appel à manifestation d’intérêt international pour la confection de tables de mortalité pour les Etats membres de la CIMA, à savoir le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, la Côte d’Ivoire, le Gabon, la Guinée Equatoriale, le Mali, le Niger, le Sénégal, le Tchad et le Togo.
• être constitué sous la forme d’un cabinet d’actuariat : (a) disposant de solides références en matière de construction ou de certification de tables de mortalité (travaux réalisés, prospectus, site web, etc.) ; (b) ayant une connaissance profonde du contexte économique et sociologique des Etats membres de la CIMA ; (c) disposant d’une parfaite connaissance des questions liées au développement de l’assurance vie dans ces Etats.
I – CONTEXTE Les tables de mortalité en usage dans la zone CIMA sont basées sur les statistiques de mortalité de la population française observée entre 1960 et 1964. Ce qui induit une sous-estimation de la mortalité réelle des populations concernées, confrontées aux effets désastreux de multiples fléaux dont le SIDA, la recrudescence des maladies infectieuses et la pauvreté.
En outre, l’équipe chargée des travaux sera dirigée par un expert de haut niveau, spécialiste en actuariat et totalisant une expérience d’au moins cinq (5) ans en actuariat vie ou en statistique appliquée à la construction des tables de mortalité.
Dans ce contexte, la Conférence Interafricaine des Marchés d'Assurances (CIMA), en partenariat avec la Fédération des sociétés d'Assurances de droit National Africaine (FANAF) et les bailleurs de fonds, ont décidé d’élaborer des tables de mortalité prudentielles basées sur les statistiques de mortalité propres aux Etats membres de la CIMA. II – OBJECTIFS Par le présent avis, le Secrétariat Général de la CIMA se propose d’arrêter une liste restreinte de Cabinets ou de Consultants qui seront appelés à soumission pour la confection des tables de mortalité des populations de l’UEMOA et de la CEMAC. L’instauration de nouvelles tables de mortalité s’inscrit parmi les actions retenues par l’ensemble des acteurs du secteur pour la redynamisation de l’assurance vie. Elle devra permettre son développement et le renforcement de sa solidité sur la base d’instruments de tarification fiables en adéquation réelle avec les risques couverts. Elle mettra ainsi des moyens adéquats à la disposition des compagnies d’assurances vie pour effectuer une tarification plus juste du risque viager, à l’aide d’outils techniques appropriés, permettant un provisionnement suffisant des contrats en portefeuille. III – PROFIL REQUIS Les Consultants intéressés pour effectuer ces travaux devront justifier des critères ci-après :
Sans titre-2.indd 1
IV – MANIFESTION D’INTERET Le dossier de manifestation d’intérêt à transmettre avant le 3 0 o c t o b r e 2008 au Secrétariat Général de la CIMA devra contenir les pièces suivantes : • une lettre de manifestation d’intérêt ; • une fiche technique faisant état des références professionnelles du Cabinet ou du Consultant présentant : • sa qualification et celle de son équipe éventuellement ; • les CV de son personnel-clé signés et référencés ; • les prestations similaires réalisées en indiquant les sources de financement, le montant et l’objet des prestations ; • les états financiers du Cabinet des trois (3) derniers exercices. Une invitation à soumettre des propositions sera adressée à une liste restreinte de Cabinets ou de Consultants présélectionnés. Le partenaire stratégique sera retenu sur la base de critères de sélection objectifs par le Comité de suivi des recommandations des états généraux de l’assurance vie composé des différents partenaires et des bailleurs de fonds potentiels au projet. Pour toute autre information, bien vouloir s’adresser à Monsieur le Secrétaire Général de la CIMA à l’adresse suivante : BP 2750 à Libr eville (République Gabonaise) – Tél. (241) 44 37 79 – Fax (241) 73 42 88 – E - m a i l : c i m a @ c i m a - a f r i q u e . o r g.
Le Secrétaire Général Jean-Claude NGBWA.
12/09/08 11:12:06
20 ANS, 25 PAYS ET TOUJOURS EN EXPANSION A l'occasion de notre 20ème anniversaire, nous tenons à remercier nos clients, nos fondateurs, nos actionnaires, les organes de contrôle et les communautés au sein desquelles nous opérons. Grâce à votre soutien et à votre confiance, nous sommes aujourd'hui la banque régionale leader en Afrique et présente dans plus de pays africains, que toute autre banque. B E N I N • B U R K I N A FASO CÔTE D'IVOIRE • GAMBIE
CENTRAFRIQUE • CONGO • • KENYA • L I B E R I A • MALAW I M A L I • N I G E R • N I G E R I A • R E P U B L I Q U E D É M O C R AT I Q U E D U C O N G O • R WA N D A SA O TO M E e P R I N C I P E • S E N E G A L • S I E R R A L E O N E • T C H A D • TO G O •
B U R U N D I • CA M E R O U N • CA P V E R T GHAN A • GUINEE • GUINEE BISSAU
•
www.ecobank.com Sans titre-5.indd 1
30/07/08 10:31:24