EXCLUSIF RÈGLEMENTS DE COMPTES À ECOBANK N° 2751 • du 29 septembre au 5 octobre 2013
Hebdomadaire international indépendant • 53e année
jeuneafrique.com
DOSSIER CIEL AFRICAIN
ALGÉRIE BOUTEFLIKA FOREVER ?
Spécial 16 pages
Les mystères
de Tunis
• Dans les coulisses d’une crise qui n’en finit plus • Ghannouchi-Essebsi: les dessous d’un rapprochement • Qui pèse quoi ? ÉDITION INTERNATIONALE ET MAGHREB & MOYEN-ORIENT France 3,50 € • Algérie 180 DA • Allemagne 4,50 € • Autriche 4,50 € • Belgique 3,50 € • Canada 5,95 $ CAN • Danemark 35 DKK • DOM 4 € Espagne 4 € • Éthiopie 65 birrs • Finlande 4,50 € • Grèce 4,50 € • Italie 4 € • Maroc 23 DH • Mauritanie 1 100 MRO • Norvège 45 NK • Pays-Bas 4 € Portugal cont. 4 € • RD Congo 5,50 $ US • Royaume-Uni 3,50 £ • Suisse 5,90 FS • Tunisie 3,30 DT • USA 6,50 $ US • Zone CFA 1 700 F CFA • ISSN 1950-1285
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Ce que je crois Béchir Ben Yahmed • bby@jeuneafrique.com
SAMEDI 28 SEPTEMBRE
Ce que nous avons appris
À
PARTIR DU 17 SEPTEMBRE, leschefsd’Étatdes pays membres de l’Organisation des Nations unies ont presque tous convergé vers le siège de l’ONU, à New York, pour la session annuelle de l’Assemblée générale, 68e du nom. Tous ont la possibilité de prononcer « leur discours à l’ONU », un texte préparé avec soin dans lequel ils font part à leurs citoyens – qui peuvent écouter le discours dans son intégralité – et au monde de ce qui les préoccupe ou de ce qui leur arrive. n
C’est « un moment » de l’année politique : chacun des chefs d’État veut montrer qu’il existe, qu’il a voix au chapitre et que son pays compte. Ils sont accompagnés d’une délégation plus ou moins nombreuse selon l’ego du chef de l’État, l’importance de son pays et la richesse de son gouvernement. Ils se rencontrent et se parlent, ou se snobent et s’évitent. Les avantages de ce salon politique mondial où il faut avoir été vu sont multiples, dont celui de nous permettre de répondre à ces deux questions : 1- Que s’est-il passé d’important dans les semaines qui ont précédé l’Assemblée générale ? 2- Quelles perspectives immédiates découlent du climat dans lequel elle se sera déroulée, des discours qui y auront été prononcés et des échanges qu’elle aura permis ? n
S’agissant de l’Afrique, plusieurs allocutions nous ont confirmé qu’au cœur du continent un État qui s’appelait la République centrafricaine s’était éteint avec la chute, en mars, de son président, François Bozizé. À vrai dire, l’État centrafricain était menacé de ce funeste sort depuis plus de deux décennies : pour affligeant qu’il soit, ce qui lui arrive était prévisible et, quoi qu’on fasse désormais, la Centrafrique mettra une génération à sortir du fossé où l’ont précipitée ses hommes politiques. L’exemple de la Somalie est là pour montrer qu’il est presque impossible de remettre en place et de redresser un État qui s’est défait. Déjà cassé en deux (ou trois) morceaux, l’immense et malheureux Soudan est menacé du même sort : cela JEUNE AFRIQUE
fait plus de cinquante ans qu’il est gouverné aussi mal que possible et cela va finir par craquer. Plus au nord, l’Égypte vit une contre-révolution (ou un ersatz de révolution). Les Frères musulmans ont conquis le pouvoir en 2012 après avoir enduré huit décennies de répression et de semi-clandestinité. Ils l’ont si mal exercé qu’au bout d’un an, à la demande des autres Égyptiens ou avec leur accord, l’armée les en a chassés sans ménagement et les a condamnés à une exclusion encore plus complète que les précédentes. Plusieurs signes laissent à penser que le général Abdel Fattah al-Sissi, commandant en chef des forces armées, sera le prochain président de l’Égypte et son nouveau Nasser… n
Mais la bonne nouvelle nous est venue du Mali : en mars 2011, un coup d’État avait mis la République en suspens ; des jihadistes venus d’ailleurs en avaient profité pour conquérir le nord du territoire et menacer la capitale. L’ancienne puissance coloniale a volé au secours du Mali en danger, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), l’ONU et l’Union africaine ont conjugué leurs efforts pour aider les Maliens à sauver leur nation, à se donner, par les urnes, une nouvelle République et un nouveau président : Ibrahim Boubacar Keïta. Bien élu en août, investi en septembre, il a dit, d’abord à Bamako puis à l’ONU, qu’il était déjà à pied d’œuvre et a expliqué comment il allait s’y prendre pour que le Mali retrouve la place de choix qu’il avait en Afrique et l’aura qui était la sienne. n
À l’ONU, nous avons aussi vu en action, pour la première fois, Hassan Rohani, le nouveau président de l’Iran : quel changement par rapport à Mahmoud Ahmadinejad ! Plus spectaculaire encore que le changement qu’ont connu les États-Unis lorsqu’ils sont passés, au début de 2009, de George W. Bush à Barack Obama. Bien qu’élu au suffrage universel, ce qui lui donne une assise, Hassan Rohani n’est en fait que le Premier ministre d’un pays dont le chef de l’État est le Guide suprême, Ali Khamenei. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Ce que je crois Des discours prononcés à la tribune de l’ONU, des interviews données à la presse, des déclarations faites dans les couloirs et des confidences recueillies, nous avons appris ceci, qui éclaire ce qui va se passer au cours des six prochains mois. n
C’est Hassan Rohani lui-même qui a fixé à la négociation sur le nucléaire iranien (et, par voie de conséquence, à la solution politique qu’il faut donner à la guerre civile syrienne) un délai limite de six mois. Ce faisant, il a introduit le facteur temps dans l’équation ! Et, surtout, a indiqué que l’Iran ne cherche pas à faire traîner les choses, comme on l’a cru, mais veut, au contraire, aboutir rapidement à une solution qui lui permette de retrouver sa place au Moyen-Orient et un rôle à sa mesure sur la scène internationale. Les forces qui s’opposent à ce come-back de l’Iran sont nombreuses et puissantes. Il est prudent de ne pas exclure qu’elles prévalent. Dans ce cas, la guerre civile syrienne redoublera d’intensité et déstabilisera les pays voisins. Quant à l’Iran, il retombera entre les mains des plus conservateurs et des plus sectaires de ses dirigeants : écartés du pouvoir par l’irruption de Rohani, ils n’attendent pour revenir que de le voir essuyer un cuisant échec. Les Gardiens de la révolution se hisseront alors au centre du pouvoir, transformant ce pays de vieille civilisation en un nouveau Pakistan, pauvre mais doté de l’arme nucléaire.
C’est donc en Iran même que se trouvent d’abord ceux qui s’opposent à la réconciliation entre leur pays et les États-Unis (avec, derrière ce « Grand Satan », le RoyaumeUni, la France et le reste de l’Occident). Ali Khamenei lui-même a le plus grand mal à croire que les États-Unis, Israël et ceux qui se situent dans leur orbite acceptent de traiter avec son régime plutôt que de s’échiner à le changer. Il a dit à Rohani : « Puisque vous le croyez, vous, montrez-moi que vous n’êtes pas dans l’erreur. » n
Les meilleurs alliés de ces jusqu’au-boutistes iraniens sont, paradoxalement : • le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, obsédé par l’Iran, qu’il veut bombarder, • l’Aipac, ce lobby qui le soutient à Washington, notamment auprès du Congrès des États-Unis, • l’Arabie saoudite, qui utilise ses moyens humains et financiers pour empêcher Rohani et Obama de sceller la réconciliation entre leurs deux pays. Si la France suit l’instinct d’indépendance de François Hollande plus que l’activisme de Laurent Fabius – qui soutenait de manière déraisonnable que l’Iran devait être exclu de la conférence de Genève sur la Syrie –, si le Royaume-Uni et l’Allemagne font, eux aussi, preuve d’indépendance et de responsabilité, ils donneront à Rohani et à Obama une chance sérieuse d’éviter que la guerre de Syrie n’échappe à tout contrôle et que l’Iran ne demeure dans « cet axe du mal » où George W. Bush a cru pouvoir l’enfermer. l
Humour, saillies et sagesse Pour vous faire sourire, grincer des dents – ou réfléchir –, ici, chaque semaine, une sélection subjective, la mienne, de ce qui a été dit ou écrit au cours des siècles par des hommes et des femmes qui avaient des choses intéressantes ou drôles à nous dire. B.B.Y. u L’existence précède l’essence. Jean-Paul Sartre u L’argent, c’est comme les femmes, pour le garder, il faut s’en occuper, sans cela il va faire le bonheur de quelqu’un d’autre. Édouard Bourdet u On n’a jamais autant besoin de vacances que lorsqu’on en revient. Ann Landers u Les choses peuvent en arriver à un point où un homme (ou une femme) doit refuser de suivre son ou ses dirigeants parce qu’il (ou elle) doit suivre sa conscience. Hartley Shawcross N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
u Celui qui se hâte ne sait pas, celui qui sait ne se hâte pas. Proverbe chinois
u Si un homme offre à sa femme des fleurs sans raison, c’est qu’il y a une raison. Marguerite Duras
u En amour on plaît plutôt par d’agréables défauts que par des qualités essentielles. Ninon de Lenclos
u L’exagération est la forme la moins chère de l’humour. Elizabeth Peters
u Le tourisme est l’industrie qui consiste à transporter des gens qui seraient mieux chez eux, dans des endroits qui seraient mieux sans eux. Jean Mistler u Dans la vie, tout est possible, mais déjà, faut naître. Les Nouvelles Brèves de comptoir
u L’Amérique est le seul pays qui soit passé de la barbarie à la décadence sans passer par la civilisation. Oscar Wilde u Le sot a un grand avantage sur l’homme d’esprit : il est toujours content de lui-même. Napoléon Bonaparte u Dieu n’est qu’un mot rêvé pour expliquer le monde. Alphonse de Lamartine JEUNE AFRIQUE
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Éditorial François Soudan
PHOTOS DE COUVERTURES : ÉDITION INTERNATIONALE ET MAGHREB & MOYEN-ORIENT : ONS ABID POUR J.A. ; AFP PHOTO/FETHI BELAID ÉDITION SUBSAHARIENNE : MARK CHILVERS POUR J.A. ; VINCENT FOURNIER/J.A. ; BRUNO LEVY/JEUNE AFRIQUE
L’affaire Marafa
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U FOND DE SA CELLULE du secrétariat d’État à la Défense chargé de la gendarmerie à Yaoundé (depuis quand, dans un État dit de droit, loge-t-on une prison dans les bureaux d’un membre du gouvernement ?), Marafa Hamidou Yaya a fait parvenir, le 23 septembre, sa septième lettre ouverte aux Camerounais. Comme les six précédents, ce long message au ton mesuré ne comporte ni plaintes ni récriminations, mais une réflexion de qualité sur les grands défis qui attendent le Cameroun. Comme les six précédents, il est lu et commenté avec passion par les compatriotes d’un homme beaucoup plus populaire aujourd’hui qu’il ne l’était lorsqu’il était au pouvoir. Ce Peul de Garoua, ingénieur en pétrochimie, a été, de 1993 à 2011, l’un des piliers du régime Biya, secrétaire général de la Présidence puis ministre d’État chargé de l’Administration territoriale. Je l’ai bien connu à cette époque avant que nous nous éloignions sans que je comprenne vraiment pourquoi, un peu peiné tout de même qu’il ait pu prêter oreille à cette maladie camerounaise dont il a souvent été lui-même victime: la rumeur malveillante. Ne l’ayant ni revu ni entendu depuis cinq ans, je n’en suis que plus à l’aise pour dire que sa condamnation il y a tout juste un an à vingt-cinq ans de prison ferme, dans le cadre d’une affaire où seules sa relation amicale et sa « complicité intellectuelle » avec l’un des coaccusés ont pu lui être reprochées, fut et demeure une aberration judiciaire. L’un des cas les plus flagrants, relevé par tous les observateurs et toutes les chancelleries, où l’opération anticorruption Épervier, cette forme de justice extrême proche de l’extrême injustice, a pu donner corps aux soupçons d’instrumentalisation politique. Si la raison ne finit pas par l’emporter (et si Dieu lui prête vie jusque-là), Marafa Hamidou Yaya sera libéré à l’âge de… 85 ans ! Un scandale, mais surtout un assez formidable gâchis tant il est indéniable que cet homme est l’un des très rares politiciens camerounais à réfléchir sereinement sur la problématique taboue de l’après-Biya en posant les vraies questions: celles de la transition démographique, du post-pétrole, des crispations identitaires, de la légitimité des institutions, de la fin de l’immobilisme et de l’avènement de cette « société de confiance » qu’il appelle de ses vœux. Certes, celui qui était avant sa disgrâce le favori des ambassades américaine et française (et l’une des victimes collatérales de WikiLeaks) n’a jamais caché son ambition, et la prison n’a fait que renforcer sa conviction d’être promis à un destin national. Ce qui, on l’imagine, n’a pu qu’entériner la détermination de ses adversaires à l’envoyer, puis à le maintenir, en détention. Mais je puis témoigner, pour en avoir souvent parlé avec lui, qu’il n’a jamais envisagé d’autres méthodes pour parvenir à ses fins qu’une élection démocratique, ni songé à s’y présenter contre celui qui fut son mentor en politique : Paul Biya. Lui qui aurait pu choisir l’exil quand l’étau se resserrait a préféré faire face, avec dignité, au verdict couperet d’une machine judiciaire devenue folle. « Certains voudraient que je me taise, mais au nom de quoi ? Nul n’est maître de ma conscience », écrit Marafa dans sa septième lettre. On a envie d’ajouter, à l’intention du président Biya, qu’il s’honorerait à gracier un homme qui apparaît de plus en plus comme un embastillé de conscience. Et de citer, à l’intention de ceux qui rêvent de lui faire porter un masque de fer, ce petit proverbe bamiléké : « Le geôlier est un autre prisonnier. » l N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
10 KENYA LENDEMAINS D’APOCALYPSE Passé le choc de l’attaque des Shebab dans un grand centre commercial de Nairobi, plusieurs protagonistes clés se retrouvent sous les projecteurs.
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CENTRAFRIQUE À QUI LA FAUTE ? Il en aura fallu du temps avant que des voix s’élèvent à l’ONU pour s’inquiéter du sort du pays. Pas sûr que cela suffise à briser l’indifférence de la communauté internationale.
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Ce que je crois Par Béchir Ben Yahmed Confidentiel
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L A SEM A IN E D E J EU N E A F RIQ U E
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Kenya Lendemains d’apocalypse Rama Yade Dallas à l’Élysée Amine Erbate Contre son camp Soudan Un quarteron de fidèles Iran Mollah mollo Niger Areva, au rapport ! Tunisie Première de la classe Égalité Obéis à ton mari ! Tour du monde
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G RA N D A N G L E
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Les mystères de Tunis
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A F RIQ U E SU BSA H A RIEN N E
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Centrafrique À qui la faute ? Côte d’Ivoire KKB, l’homme qui voulait « tuer » le père Rwanda À bout de souffle
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JEUNE AFRIQUE
Dans Jeune Afrique et nulle part ailleurs GRAND ANGLE
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LES MYSTÈRES DE TUNIS Crises politique et économique, luttes de pouvoir et angoisses sociales… Depuis la révolution, le pays apprend la démocratie.
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DOSSIER AÉRIEN Les aéroports africains décollent-ils ?
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FINANCE ECOBANK A MAL À LA TÊTE
Tensions au plus haut niveau, accusations de conflits d’intérêts et luttes de pouvoir : le premier groupe bancaire panafricain est dans la tourmente.
ÉDITION FELWINE SARR Avec Boubacar Boris Diop et Nafissatou Dia Diouf, cette figure intellectuelle sénégalaise reprend en main la librairie Athéna de Dakar. Rencontre.
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ALGÉRIE BOUTEFLIKA FOREVER… Après être parvenus à retourner la situation à leur avantage, les partisans du président semblent en ordre de bataille pour assurer la réélection de leur champion en 2014.
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S PÉCIAL ÉTATS - U N I S H AFR I Q U E
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Diplomatie Africa is beautiful
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M AGHREB & MOY E N - O R I E N T
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Algérie Bouteflika forever… Égypte Constituante bis Football Amrouche, plein Sud Syrie Anissa al-Assad, la mère du crime
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Entrepreneuriat PME africaines, qui êtes-vous ? Maroc Najib Boulif aux avant-postes Nigeria Oando dévisse mais reste optimiste Baromètre
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D O SSIER
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Infrastructures Les aéroports africains décollent-ils ?
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E UROPE, AMÉR I Q U E S, A S I E
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France Anne Hidalgo, l’improbable héritière États-Unis The Big Apple vire à gauche Bangladesh La révolte des petites mains Parcours Karamba Diaby, le défricheur Allemagne Chancelière cherche partenaire
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É CON OMIE
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Finance Ecobank a mal à la tête Les indiscrets
JEUNE AFRIQUE
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C U LT U RE & MÉD IA S Édition Felwine Sarr, un libre penseur vivifiant Musique Opération séduction pour Magic System Médias AITV au bord du gouffre Photographie Ensemble malgré tout La semaine culturelle de Jeune Afrique VOUS & NOUS Le courrier des lecteurs Post-scriptum
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Guinée Alpha, Hollande et le diamantaire
MICHEL EULER/AP/SIPA
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p Les présidents guinéen et français, en juillet 2012, sur le perron de l’Élysée.
GABON GUERRE DES CHEFS EN PERSPECTIVE ?
À l’approche des municipales du mois de novembre, Jean Eyéghé Ndong, vice-président de l’Union nationale (UN) et ancien Premier ministre, a annoncé son intention de briguer la mairie de Libreville. Problème: il n’a pas le soutien
lpha Condé, le président guinéen, a profité de la cérémonie d’investiture d’IBK, le 19 septembre à Bamako, pour s’entretenir avec François Hollande du conflit qui l’oppose depuis des mois au diamantaire franco-israélien Beny Steinmetz à propos du gisement ferrugineux de Simandou. En termes un peu vifs, Condé a demandé pourquoi, alors qu’Américains et Britanniques le soutiennent dans ce bras de fer, les Français « ne font rien » pour l’aider. Et pourquoi aucun ministre, aucun haut responsable ne lui a rendu visite à Conakry depuis des lustres. Ébranlé (et mis au courant des liens supposés entre Steinmetz et plusieurs dirigeants de l’UMP au premier rang desquels Nicolas Sarkozy), Hollande a convié son interlocuteur à poursuivre la discussion à Paris, en octobre. Alpha Condé a par ailleurs attiré l’attention de son homologue sénégalais Macky Sall sur la présence à Dakar de l’un de ses opposants les plus radicaux, Bah Oury, fondateur de l’Union des forces démocratiques de Guinée, qu’il soupçonne de chercher à le déstabiliser. l
de l’ensemble de son parti. Les proches d’André Mba Obame, le secrétaire exécutif (John Nambo et Michel Ongoundou, notamment),ontconstituéune tendance favorable au boycott du scrutin, comme lors des législatives de décembre 2011. Les frondeurs ont été rejoints par le mouvement Ça suffit
commeça,deMarcOna,latendance « loyaliste » de l’Union du peuple gabonais (UPG), et par Pierre-André Kombila, du Rassemblement national des bûcherons(RNB).Touscesresponsables considèrent que, en dépit de la mise en place de la biométrie, les conditions d’un scrutin transparent ne sont
toujours pas réunies. Soutenu ouvertement par Zacharie Myboto,leprésidentdel’UN,et tacitementparl’ancienPremier ministre Casimir Oyé Mba, Eyéghé Ndong va donc s’opposer frontalement à un Mba Obame que l’on n’entend plus guère. Le début d’une guerre des chefs dans la perspective de la présidentielle de 2017?
Congo-Brazza « Touche pas à mon président! »
ALGÉRIE GOUVERNEMENT CLÉS EN MAIN
EN VISITE AU CONGO du 4 au 6 octobre,Yamina Benguigui, la ministre française déléguée à la Francophonie – qui est désormais le canal privilégié de Brazzaville à Paris –, aura de quoi alimenter la conversation. Après Brazzaville et Pointe-Noire, en effet, c’est à Dolisie que le Parti congolais du travail (PCT), au pouvoir, devait tenir, le 28 septembre, son troisième mégameeting sur le thème « Touche pas à mon président! ». L’objectif est de dénoncer les « pressions intolérables » et les « violations de la souveraineté nationale » exercées par la justice et les ONG françaises contre le Congo et son chef de l’État, Denis Sassou Nguesso, dans le cadre des affaires dites des biens mal acquis et des disparus du Beach. Cette campagne a fini par inquiéter l’ambassadeur de France, qui s’en est ému auprès des autorités. Mais elle est en réalité soigneusement cadrée pour éviter tout débordement. Lors des meetings, les orateurs ne s’en prennent ni au gouvernement ni aux intérêts de la France, et pas davantage aux ressortissants de ce pays établis au Congo. Faisant d’une pierre deux coups, le PCT profite de ces rassemblements populaires pour inciter les électeurs à s’inscrire dans le cadre du recensement administratif spécial, lequel a pris beaucoup de retard. Conséquence: les élections locales prévues depuis trois mois n’auront sans doute pas lieu avant la fin de l’année. l
Confidence d’Abdelmalek Sellal, le Premier ministre algérien, à l’un de ses collaborateurs à propos du remaniement ministériel du 11 septembre : « Je n’ai été consulté ni sur les nominations ni sur les limogeages au sein de mon propre gouvernement ! » Établie sous l’autorité de Saïd Bouteflika, frère cadet et conseiller du président, la composition de lanouvelleéquipen’aétécommuniquée au chef de l’exécutif quequelquesheuresavantson
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JEUNE AFRIQUE
Retrouvez en page 80 notre rubrique « Les indiscrets », consacrée aux informations confidentielles économiques
Politique, économie, culture & société
MALI DOUBLE JEU AU MNLA? D’après des sources proches du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), une importante délégation autonomiste a rencontré des membres d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) le 3 septembre dans la localité malienne d’Infara, à 30 km de la frontière algérienne. Il s’agissait de poser les bases d’éventuelles négociations concernant la gestion du Nord-Mali. Aqmi envisagerait de laisser le MNLA prendre en charge l’essentiel des trafics (cigarettes, armes et logistique de ravitaillement, notamment), à condition de pouvoir se servir du mouvement autonomiste comme d’une « couverture » lui permettant de se fondre parmi les populations et d’utiliser ses camps d’entraînement. Interlocuteur de circonstance de la France, le MNLA est divisé entre une branche radicale, qui n’hésite pas à discuter avec Aqmi, et une branche plus « présentable », qui ne goûte guère ce rapprochement. Et encore moins d’être ainsi utilisée pour ce qui ressemble à un véritable double jeu.
RENSEIGNEMENT IMPRUDENCE À TUNIS
À en croire une source au ministère de l’Intérieur, les agents de renseignements tunisiens opérant en Libye, sous couverture et non armés, JEUNE AFRIQUE
AQMI Pourquoi Abou Saïd? SIX MOIS APRÈS L’ÉLIMINATION d’Abdelhamid Abou Zeid, chef de la katiba (brigade) Tarik Ibn Ziyad, par un détachement franco-tchadien dans le massif deTigharghar, Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a fini par désigner son successeur : Abou Saïd el-Djazaïri, un Algérien d’une quarantaine d’années originaire de la région d’Oued Souf qui n’occupait jusqu’ici qu’un poste subalterne (responsable du matériel). Pourquoi un aussi long délai ? Parce que, pour Abdelmalek Droukdel, le chef de l’organisation, cette succession a été un vrai casse-tête. D’abord parce que l’opération Serval a décapité la katiba : la plupart de ses dirigeants ont été tués en même temps qu’Abou Zeid. Ensuite parce qu’elle a totalement désorganisé les liaisons entre les combattants du Sahel et la maison mère, en Kabylie. Spécialiste des transmissions, Abou Saïd a réussi à rétablir la communication entre les survivants réfugiés aux confins de la Libye et leur hiérarchie. Mais davantage qu’un excellent informaticien, le jihadiste p La photo d’Abou est, à en croire les services algériens, un rude combattant Saïd el-Djazaïri qui a notamment piloté, en septembre 2010, le rapt mise en ligne par de Français à Arlit, au Niger. Droukdel a sans doute estimé l’agence de presse mauritanienne ANI. qu’il était le mieux placé pour négocier leur libération. l
ANI
annonce parl’agence de presse officielle. Une livraison clés en main, en somme. Certains ministres ont donc appris leur départ ou leur arrivée par téléphone, ou en lisant la presse électronique où des informations avaient fuité.
ne sont plus en sécurité. En annonçant le 24 septembre qu’Abou Iyadh, le chef salafiste d’Ansar al-Charia – réfugié en Libye depuis que son groupe a été classé parmi les organisations terroristes –, avait été localisé (alors qu’Interpol Tripoli est en veilleuse) et qu’il allait être exfiltré, les autorités ont involontairement révélé l’existence d’une antenne du renseignement tunisien en territoire libyen. Et mis en danger le réseau patiemment mis en place. GRANDS LACS BERLIN, FIDÈLE À KIGALI
Alors que ses partenaires occidentaux durcissent le ton vis-à-vis du Rwanda depuis les accusations de soutien aux rebelles du Mouvement du 23-Mars dont ce pays fait l’objet, l’Allemagne ne s’associe pas à cette escalade verbale. Elle a certes officiellement suspendu son aide budgétaire générale, en juillet 2012, mais pour la convertir très vite en aide sectorielle, explique un diplomate européen. « J’incite le Rwanda à continuer de jouer un rôle constructif pour la paix et la sécurité », a ainsi déclaré
Dirk Niebel, le ministre allemand de la Coopération, lors d’une visite à Kigali, en juin. De bonne source, Peter Fahrenholtz, l’ambassadeur d’Allemagne à Kigali, serait, à titre personnel, convaincu de la bonne foi du Rwanda en RD Congo. LE CHIFFRE
81 C’est le nombre d’éléphants qui, selon les autorités du Zimbabwe, ont été tués ce mois-ci dans le parc national Hwange – l’un des derniers grands sanctuaires de pachydermes en Afrique – par des braconniers en quête d’ivoire. Ces derniers ont empoisonné au cyanure un point d’eau où les animaux avaient coutume de boire.
BURKINA LE PÉRIL JEUNE
Plus que l’intrusion, jugée « peu probable », de jihadistes venus du Mali, du Niger ou d’ailleurs, ce que craignent les responsables burkinabè de la sécurité ce sont… les
jeunes. Alors que la tension est montée de plusieurs crans ces derniers mois à l’université, le pouvoir n’exclut pas une extension du mouvement dans les lycées et les collèges qui risquerait de déstabiliser le régime, comme il y a deux ans. Depuis quelques semaines, Jérôme Bougouma, le ministre de l’Administration territoriale et de la Sécurité, prend donc soin de rencontrer les responsables administratifs provinciaux. Il les exhorte à ne pas réprimer trop violemment d’éventuelles manifestations. Et à éviter à tout prix toute bavure policière de nature à mettre le feu aux poudres. Depuis deux ans, il a entrepris de doter la police des moyens de faire face à des troubles internes. Le gouvernement a investi 10 milliards de F CFA (15,2 millions d’euros) pour réorganiser et équiper la police (avec l’aide de la France et des États-Unis). Un important programme de recrutement (2600 hommes et femmes d’ici à quelques années) a par ailleurs été engagé. Enfin, une unité de forces spéciales est en cours de création avec le soutien du Raid français. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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La semaine de Jeune Afrique
KENYA
Lendemains d’ Passé le choc de l’attaque des Shebab dans un grand centre commercial de Nairobi, plusieurs protagonistes clés de cette tragédie se retrouvent sous les projecteurs : le président kényan, le « cerveau » somalien de l’opération et les membres de ce commando international. PIERRE BOISSELET, ANNE KAPPÈS-GRANGÉ, NICOLAS MICHEL, BENJAMIN ROGER
O
et triomphé. » Des accents victorieux qui ne suffiront pas à faire croire à un succès. Le camouflet infligé par les Shebab aux forces et aux services de renseignements kényans est indéniable. Ils n’avaient pas prévu l’attaque, et le bain de sang a duré quatre jours. Plusieurs parlementaires ne se sont d’ailleurs pas privés de dénoncer les failles du système de sécurité, ainsi que l’ampleur de la corruption qui gangrène la police et les services chargés du contrôle aux frontières. Mais si un homme sort renforcé de ce drame, tant sur le plan national qu’international, c’est bien Kenyatta. « Cette tragédie a renforcé notre détermination à vivre dans une République forte, tolérante, stable, démocratique, prospère, où des hommes d’origines, de cultures et de fois différentes recherchent le bonheur ensemble », a-t-il déclaré. Le président aurait-il changé du tout au tout ? À partir du 12 novembre, il doit répondre devant la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye de cinq chefs de crimes contre l’humanité. L’accusation lui reproche d’avoir jeté de l’huile sur le feu pendant la crise postélectorale de la fin 2007, en s’appuyant sur la secte kikuyue des Mungikis pour répliquer l l l
UHURU KENYATTA, renforcé par l’épreuve C’EST LES YEUX ROUGIS et le ton grave que le président Uhuru Kenyatta (qui a perdu son neveu et la fiancée de celui-ci dans l’attaque) s’est adressé à son pays, le 24 septembre. « Nous avons vaincu et humilié nos assaillants, a-t-il assuré. Le Kenya a défié le mal N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
TYLER HICKS/THE NEW YORK TIMES-REDUX-REA
npourraitégrenerunàunlesnoms des morts (près de 70) et celui, au moins aussi élevé, des disparus. On pourrait rendre hommage à ce policier en civil qui, au péril de sa vie, sauva cette mère et ses enfants tétanisés de peur. À cette animatrice vedette de la télévision, enceinte de six mois, tombée sous les balles. À ce père qui n’osait appeler son fils, prisonnier à l’intérieur du bâtiment, de crainte que la sonnerie du téléphone ne signale sa présence aux preneurs d’otages. On pourrait se souvenir aussi que ce n’est pas la première fois que les Shebab sèment la mort hors des frontières somaliennes. Qu’en 2010, ils ont tué 76 personnes en Ouganda. Que ce n’est pas la première fois non plus que le Kenya est la cible d’Al-Qaïda (dont se revendiquent les Shebab) et qu’en 1998, déjà, le sang a coulé à Nairobi et Dar es-Salaam (Tanzanie). Mais rien ne peut décrire l’horreur qui s’est abattue le 21 septembre sur le centre commercial de Westgate. Surtout, il est d’autres personnes que cette folie a placées sous les feux des projecteurs. Des protagonistes qui, chacun à leur manière, ont joué un rôle décisif dans ce drame et que le monde ne regardera plus jamais de la même façon : le président du Kenya, qui en retire un bénéfice politique direct (bien qu’involontaire) ; le chef des Shebab, dont les propres compagnons d’armes redoutent le fanatisme ; enfin, ces étrangers, Américains ou Britanniques, parmi lesquels, peut-être, la célèbre Veuve blanche, que la haine a poussés à commettre le pire. Portraits. l
JOHN MUCHUCHA/AFP
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JEUNE AFRIQUE
L’événement
d’apocalypse q Évacuation du Westgate Mall, à Nairobi, le 21 septembre.
JEUNE AFRIQUE
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La semaine de J.A. L’événement l l l aux attaques des Kalenjins – dont l’un des chefs n’est autre que William Ruto, l’actuel vice-président, qui, lui, comparaît à La Haye depuis le 10 septembre. Mais en se posant en père de la nation et en champion delaluttecontreleterrorismeenAfriquedel’Est,Kenyatta gagne en respectabilité aux yeux des Occidentaux, qui tiennent à leur glacis défensif face au chaos somalien. Que pèse la CPI face à des États-Unis qui n’ont jamais ratifié le statut de Rome? Ou face à des États africains qui, dans leur majorité, dénoncent sa partialité? Fatou Bensouda, sa procureure, a eu beau jeu de se dire prête à travailler avec Nairobi pour « traduire en justice » les responsables du massacre de Westgate, le Kenya semble décidé à se retirer du statutdeRome, et la Cour aurabien du mal à juger un présumé bourreau devenu victime… et garant de l’unité nationale. l
AFP
AHMED ABDI GODANE, le terroriste qui terrorise les terroristes DES DOCUMENTS DÉCLAS SIFIÉS par l’armée américaine l’attestent: même Oussama Ben Laden lui avait conseillé de faire preuve de plus de modération ! Ahmed Abdi Godane, chef des Shebab et « cerveau » de l’attaque du 21 septembre, est considéré commeunfanatiquejusquedans les rangs jihadistes. Cet homme de 36 ans plutôt chétif quitte rarement ses refuges, dans le sud et le centre de la Somalie, derniers territoires encore contrôlés par sa milice. Mokhtar Abou Zubaïr (son nom de guerre) y a pourtant peu d’attaches. « Il vient du clan Isaaq et du Somaliland, dans l’extrême nord du pays, explique Gérard Prunier, spécialiste de l’Afrique de l’Est. Dans le Sud, où il est arrivé vers 2003 pour rejoindre l’Union des tribunaux islamiques, il est considéré comme un étranger. » Lorsque cette organisation éclate, en 2007, Godane choisit sa faction la plus dure, les Shebab. Décrit comme le « plus intelligent » d’entre eux, il succède un an plus tard à Adan Hashi Ayro, abattu par un missile américain. Mais dans ce mouvement décentralisé, où les clans gardent de l’importance, ses méthodes ne plaisent pas à tous. Sa stratégie est contestée depuis l’attentatsuicide du 3 décembre 2009 à Mogadiscio (24 morts), qui a suscité une forte hostilité populaire. Certaines de ses ouailles lui reprochent sa proximité avec les combattants étrangers au détriment de la lutte contre le gouvernement central. Car, attiré par le prestige du jihad mondialisé, Godane a prêté allégeance à Ben Laden en 2008. En juillet 2010, il revendique une série d’attentats qui font 74 morts à Kampala (Ouganda). C’est alors la plus spectaculaire opération des Shebab hors de Somalie. « Ce n’est qu’un début », prévient-il. Il écarte tous ses rivaux ou les supprime, à l’instar du célèbre Abou Mansour Al-Amriki, dont il fut proche, et qui affirmait sur Twitter, N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
en mai dernier, qu’il était « devenu fou ». Aujourd’hui à la tête d’une organisation affaiblie, Godane a malgré tout enfin réussi, à Nairobi, à se faire un nom sur la scène mondiale. Washington offre pour sa capture une récompense de 7 millions de dollars. l
SAMANTHA LEWTHWAITE et le syndicat du crime
REX/SIPA
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L’ENQUÊTE SERA LONGUE, mais, pour les autorités kényanes, pas de doute : la quinzaine de terroristes du Westgate Mall sont de nationalités différentes. Alors que tirs et explosions résonnaient encore dans le centre commercial, le général Julius Karangi, le patron de l’armée, a été le premier à évoquer la piste d’un commando international, sans donner plus de détails sur l’identité des assaillants. Quelques heures plus tard, Amina Mohamed, la ministre des Affaires étrangères, se montrait plus loquace. Selon elle, plusieurs Américains « âgés de 18 et 19 ans, d’origine somalienne ou arabe, mais qui vivaient dans le Minnesota et ailleurs aux États-Unis », faisaient partie du groupe. Les villes de Minneapolis et de Saint-Paul ont été citées à de nombreuses reprises dans les médias. Les services américains, qui estiment à une vingtaine le nombre de leurs ressortissants s’entraînant dans les camps somaliens, prennent cette piste très au sérieux. Selon le New York Times, plus de vingt agents du FBI ont été dépêchés à Nairobi pour participer à l’enquête. Plusieurs rescapés ont indiqué que les assaillants communiquaient en anglais plutôt qu’en somali. Lors de l’attaque, un compte Twitter revendiquant sa proximité avec les Shebab (mais dont l’authenticité est sujette à caution) a publié une liste des jihadistes qui auraient participé à l’attaque. Y figurent des ressortissants américains, canadiens, britanniques, scandinaves, somaliens et kényans, aux noms pour la plupart à consonance somalie. MalgréledémentidesShebab,lesKényanssuspectent également la Britannique Samantha Lewthwaite, alias la Veuve blanche, d’avoir fait partie du commando. Convertie à l’islam à l’adolescence, cette femme de 29 ans était l’épouse de Germaine Lindsay, l’un des auteurs de l’attentat-suicide du métro de Londres, en juillet 2005. Après le passage à l’acte de son mari, elle aurait fui en Somalie et se serait rapprochée des Shebab. Selon Pretoria, elle a acquis frauduleusement, en 2008, un passeport sud-africain au nom de Natalie Faye Webb, et aurait vécu à Johannesburg avant de s’évanouir dans la nature en février 2011. La même année, la police kényane la recherchait pour son implication présumée dans un attentat et dans la planification d’autres actes terroristes contre des sites touristiques. La semaine dernière, Interpol a émis un mandat d’arrêt à l’encontre de la Veuve blanche. Sa participation à l’attaque du Westgate Mall demeurait toutefois l’une des principales zones d’ombre de l’enquête. l JEUNE AFRIQUE
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La semaine de J.A. Les gens
Rama Yade Dallas à l’Élysée L’ancienne secrétaire d’État publie ses Mémoires. Bienvenue en Sarkozie, un univers impitoyable où se côtoient quelques brutes et beaucoup de courtisans.
A
ujourd’huiencartéeaucôtéde son nouveau patron, le centriste Jean-Louis Borloo, avec un œil sur les municipales à Paris, Rama Yade, 36 ans, sacrifie à cette maniequ’ontlespolitiquesdepublierleurs Mémoires (courtes) en feignant de croire qu’ils nous offrent là, et presque à contrecœur, un témoignage historique. N’est pas Mme de Sévigné qui veut, et ces Carnets du pouvoir de l’ancienne secrétaire d’État de Nicolas Sarkozy, puisés dans le journal de bord quotidien qu’elle a tenu entre février 2006 et mai 2012, valent avant tout parlesanecdotessouventtrèspersonnelles qu’y relate celle qui fut l’une des stars les plus médiatisées de la galaxie Sarko. Sous le candide couvert de notes écrites sur le vif, mais qu’elle a tout de même conservées, puis exhumées « par hasard » au cours d’un « nettoyage de printemps » avant de les relire scrupuleusement, Rama Yade balance allègrement sur ses collègues d’une sarkozie à mi-chemin entre Dallas, Châteauvallon et Desperate Housewives. Rachida Dati en courtisane zélée et jalouse, prête à tout pour plaire au président, Bernard Kouchner en parano bavard, Nadine Morano « Castafiore, la bave aux lèvres », Roselyne Bachelot « comme un nuage noir, menaçante jusque dans ses silences, au-dessus de ma tête », Claude Guéant en exécuteur onctueux des basses œuvres, Jean-David Levitte en invertébré policé, Brice Hortefeux et ses blagues douteuses, toujours limite, Alain Juppé glacial et méprisant, Nathalie Kosciusko-Morizet et Jeannette Bougrab qui l’ignorent dès lors que Sarko lui bat froid…
Carnets du pouvoir, de Rama Yade, Éditions du Moment, 435 pages, 22 euros
LEA CRESPI/PASCO
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p « Sarkozy était mon héros », confesse-t-elle.
On ressort inquiet de cette explication de gravure au sein de laquelle Rama Yade apparaît – mais c’est la règle du genre – comme la victime expiatoire et innocente des traîtrises, des manigances et des petits complots de ses collègues. Inquiet pour elle surtout : qu’était-elle allée faire dans cette galère ? MIDINETTE. La réponse est simple : l’ambition et l’admiration. Rama Yade ne nous cache rien de son désir quasi obsessionnel de devenir secrétaire d’État puis de conserver sa place au Conseil des ministres. Et rien de la fascination de midinette que lui inspire Nicolas Sarkozy, même si ce dernier la traite souvent comme une gamine et a la fâcheuse tendance à l’exhiber comme un trophée devant ses interlocuteurs. « Sa tendresse infinie me touche », écrit-elle, comme la touche Carla Bruni-Sarkozy, qui, un jour de mars 2009, lui parle de Cécilia ex-Sarkozy en ces termes : « Je n’ai jamais vu une femme aussi illettrée. »
De l’Afrique, où Ramatoulaye est née, il est assez peu question dans le livre, si ce n’est pour relater les quelques voyages que la secrétaire d’État a effectués sur le continent. On y croise Nelson Mandela, qui s’obstine à la prendre pour une SudAfricaine et qu’elle décrit avec beaucoup d’émotion, Joseph Kabila (« tout petit, avec une voix de jeune homme »), Bouteflika, qui lui parle de Senghor, Sassou Nguesso, qu’elle refuse de rencontrer, ce qui lui vaut un savon de la part de Guéant, Kaddafi, qui la piège en lui levant le bras devant les photographes et, bien sûr, le trop fameux discours de Dakar rédigé dans l’avion par Henri Guaino et que Sarkozy n’avait pas lu avant de le prononcer. À propos de la célèbre phrase « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire », Rama Yade a ce commentaire : « Tout le sens de mon engagement politique est de prouver l’inverse! » Oui, décidément: qu’était-elle allée faire dans cette galère ? l FRANÇOIS SOUDAN
NOMINATIONS
MAMADOU NAMORY TRAORÉ MALI L’ex-ministre de l’Économie du précédent gouvernement, qui fut aussi ministre de la Fonction publique, a été nommé conseiller spécial auprès du Premier ministre, OumarTatam Ly, par un décret daté du 17 septembre. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
JAVIER CLEMENTE LIBYE Cet ancien coach de l’équipe espagnole de football entraînera la sélection libyenne, a annoncé la fédération nationale, le 25 septembre. Son prédécesseur, Abdelhafid al-Rabich, a échoué à la qualifier pour le Mondial 2014. JEUNE AFRIQUE
EN HAUSSE 15
TONY PARKER
Amine Erbate Contre son camp DR
L’ancien capitaine du Raja de Casablanca accuse le club d’avoir acheté plusieurs matchs du dernier championnat marocain de football.
À 31 ans, le meneur de l’équipe de France de basket-ball, sacrée championne d’Europe le 22 septembre, a été élu meilleur joueur du tournoi, son titre personnel le plus important depuis celui de meilleur joueur de la finale 2007 de la NBA. HAMAN ADAMA
L
DR
SALIMA OTMANI
ROBERT SIRLEAF
JEUNE AFRIQUE
DR
DR
Sous la pression des accusations de népotisme, le fils d’Ellen Johnson-Sirleaf, la présidente libérienne, a dû renoncer à ses fonctions de président de la National Oil Company of Liberia et de conseiller à la présidence le 17 septembre. BANK OF AMERICA Le 24 septembre, le groupe a été condamné à verser l’équivalent de 1,6 million d’euros à plus de 1 100 Africains-Américains qui s’étaient vu refuser une embauche entre 1993 et 2005. Des pratiques « injustes et illégales », selon les autorités. BART DE WEVER
WOUTER VAN VOOREN
YOUSSEF AÏT AKDIM
La députée algérienne de Boumerdès a été désignée vice-présidente de l’Assemblée populaire nationale le 23 septembre. Elle est la seule femme issue du Front de libération nationale à faire partie du nouveau bureau de l’APN. EN BAISSE
LUCARNE. Avec ces décla-
rations, Amine Erbate a shooté en pleine lucarne. Mais contre son propre camp. Curieux de la part d’un joueur qui a passé presque toute sa carrière au Raja. Il y a fait ses débuts de professionp La carrière du joueur nel en 2000, à la fin de de 32 ans semble finie. la période faste du club (six titres successifs de champion de 1996 à 2001). Ses passages (en prêt ou sous contrat) à l’étranger, en Libye, à Abou Dhabi, au Qatar et, brièvement, à l’Olympique de Marseille (en 2008), n’ont pas toujours convaincu. Mais, revenu au Raja, c’est en tant que capitaine qu’il y a remporté le doublé, l’année dernière. Un sacre entaché par une suspension en fin de saison, pour gestes obscènes. Insulté par le public, Erbate s’était empoigné les parties intimes. À l’intersaison, le club n’a pas souhaité prolonger son contrat, et sa carrière semble finie. L’affaire est désormais devant les tribunaux. Le président du Raja, Mohamed Boudrika, a porté plainte pour diffamation contre Erbate et contre Al Massae. Une première audience est prévue à Casablanca le 28 octobre. l
Détenue depuis 2010, l’exministre camerounaise de l’Éducation de base a été libérée après l’abandon des poursuites pour détournement de fonds dont elle faisait l’objet. Elle avait restitué l’équivalent de 324 000 euros en février.
DR
e football marocain est plus que jamais en crise. Après l’élimination précoce du onze national lors des dernières Coupes d’Afrique des nations (CAN) et son récent échec à se qualifier pour le Mondial 2014, c’est le Raja de Casablanca, le club le plus titré du pays ces dernières années, qui est dans la tourmente. Alors qu’il s’apprête à disputer la Coupe du monde des clubs, organisée dans le royaume en décembre, le Raja est accusé par l’un de ses anciens joueurs d’avoir acheté des matchs. « Notre doublé [coupe-championnat, en 2013] a été truqué », a affirmé Amine Erbate, 32 ans, au quotidien arabophone Al Massae, le plus lu au Maroc. Et l’ancien capitaine des Verts d’ajouter : « Je suis moi-même allé proposer de l’argent à certains joueurs adverses pour lever le pied. Mais ils ont refusé. » Le défenseur prétend détenir des preuves et cite au moins trois clubs qu’il aurait approchés. Depuis qu’il a lâché cette véritable bombe, il ne répond plus au téléphone et a disparu de la circulation.
Le leader nationaliste flamand a proposé la construction d’une prison au Maroc pour accueillir les Marocains détenus en Belgique. « Rien qu’avec eux, vous pouvez remplir une prison entière », a-t-il déclaré le 24 septembre. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
La semaine de J.A. Décryptage
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t Le président dans la zone pétrolière de Heglig, en 2012, après des combats contre l’armée sud-soudanaise.
ASHRAF SHAZLY/AFP
de ses revenus pétroliers. Comme les puits sont dans le Sud et que l’oléoduc transite par le Nord, Khartoum garde encore quelques gages financiers. Mais en janvier 2012, Djouba a décidé d’arrêter sa production pétrolière. Sur le coup, tout le monde a cru que Salva Kiir, le président sud-soudanais, se tirait une balle dans le pied. En réalité, son calcul était machiavélique. Il a deviné que son voisin du Nord, en perdant les bénéfices de son droit de passage, ne pourrait plus subventionner les produits de première nécessité et serait fragilisé. Aujourd’hui, les émeutes de Khartoum ravissent Djouba… CONFIANCE AVEUGLE. Sur qui El-Béchir
Soudan Un quarteron de fidèles Face à la contestation populaire, Omar el-Béchir compte dur comme fer sur son armée. Problème : sa cohésion s’effrite.
L
e Printemps arabe, les émeutes de ces derniers jours contre la vie chère… Le cocktail est détonant, mais, à l’heure où nous écrivons, Omar el-Béchir, le président soudanais âgé de 69 ans, tient toujours. Son secret ? L’alliance du glaive et du Coran. Après son putsch de juin 1989, le parachutiste a ouvert les allées du pouvoir aux islamistes. C’était un pacte de sang. En avril 1990, El-Béchir a fait exécuter 28 officiers pour complot et a radié 3 000 autres cadres de l’armée (un tiers du corps des officiers). Aujourd’hui, celle-ci est très largement islamisée. Et d’autant plus fidèle au régime qu’elle s’est enrichie. Omar el-Béchir a cédé aux militaires des pans
entiers de l’économie (secteurs parapétrolier, automobile, etc.). Comme en Égypte, ils ne veulent perdre leurs privilèges pour rien au monde. HUMILIÉS. Le fait nouveau, c’est que l’armée est divisée. Depuis l’indépendance du Soudan du Sud, en juillet 2011, beaucoup d’officiers se sentent humiliés. Cinquante ans de conflit et des milliers de martyrs pour en arriver là ? Omar elBéchir, l’ancien combattant de la guerre du Kippour – aux côtés de l’armée égyptienne –, y a laissé une bonne partie de son prestige. Pour ne rien arranger, la sécession a fait perdre au régime les trois quarts
peut-il encore s’appuyer ? D’abord sur un compagnon de toujours, le général Bakri Hassan Saleh. Complice du putsch de 1989, tour à tour à la Défense et à l’Intérieur, Bakri est aujourd’hui ministre des Affaires présidentielles. Omar elBéchir a en lui une confiance aveugle. En décembre, à l’issue d’une conférence nationale réunissant quelque 5 000 islamistes, il l’a même imposé au poste clé de numéro deux du Mouvement islamique, partenaire du Parti du congrès national (au pouvoir). Autre fidèle, le général Abdelrahim Mohammed Hussein, ministre de la Défense. « Mais c’est un technocrate, pas un ancien soldat commando comme Bakri, précise Rashid Saeed Yagoub, le rédacteur en chef soudanais de la lettre d’information TTU Monde arabe. Quand une crise éclate dans l’armée, c’est Bakri qui s’en occupe. » Combien de temps El-Béchir va-t-il tenir? Sans doute jusqu’à ce que l’armée lui trouve un remplaçant… dans ses propres rangs. l CHRISTOPHE BOISBOUVIER
À SUIVRE LA SEMAINE PROCHAINE
OCTOBRE 40e anniversaire de la guerre du Kippour. Surpris par l’attaque des Syriens et des Égyptiens, les Israéliens finirent par l’emporter au bout de dix-huit jours, le 24 octobre 1973. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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OCTOBRE À Paris, 13e Forum économique sur l’Afrique, organisé par l’OCDE. Thème choisi : « Tirer parti des ressources naturelles pour la transformation économique. »
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OCTOBRE Attribution du Nobel de la Paix 2013, à Oslo. Parmi les 259 candidats en lice, la jeune Pakistanaise Malala Yousafzai, l’ONG russe Memorial, le président birmanThein Sein… JEUNE AFRIQUE
La semaine de J.A. Décryptage
Iran Mollah mollo Souple et débonnaire, le président Hassan Rohani fait une entrée très remarquée sur la scène internationale.
O
n le surnomme « mollah modéré » ou « cheikh diplomate ». Hassan Rohani, le nouveau président de l’Iran, a été la vedette de l’Assemblée générale des Nations unies qui s’est ouverte le 24 septembre à New York. Sa tenue – turban blanc et aba noir des clercs chiites – contrastait avec le costume sombre porté par Mahmoud Ahmadinejad à la même tribune en 2012. Et son discours, conciliant et réaliste, était à mille lieues de celui, provocateur et mystique, de son prédécesseur. « J’apporte la paix et l’amitié des Iraniens aux Américains », a-t-il déclaré de manière totalement inédite, passant du farsi à l’anglais. Une page est tournée, et l’Iran veut ouvrirunnouveauchapitredesesrelations avec la communauté internationale, a signifié le religieux débonnaire. Depuis son élection en juin, il a multiplié les gestes d’ouverture, faisant libérer Nasrin Sotoudeh, une avocate défenseure des droits de l’homme, présentant ses vœux de bonne année aux Juifs du monde entier à l’occasiondeRochHachana,condamnant, LE DESSIN DE LA SEMAINE
SETH WENIG/AP/SIPA
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p Devant l’Assemblée générale de l’ONU, à New York, le 24 septembre.
sur CNN, « les crimes commis [envers eux] par les nazis », souhaitant enfin, dans le Washington Post, que la question du nucléaire soit réglée d’ici à trois mois. Objectif stratégique : obtenir la levée des sanctions « inhumaines et contraires à la paix » imposées à l’Iran par l’Occident. FRÉNÉTIQUEMENT. À la tribune de marbre vert, Rohani a voulu convaincre que son pays, « ancre de stabilité » du Moyen-Orient, « ne présente aucune menace, ni pour le monde ni pour la région ». Bien sûr, Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, qui s’agitait
frénétiquement l’an dernier devant le dessin d’une bombe prête à exploser figurant le programme nucléaire iranien, s’est empressé de dénoncer un discours « cynique et totalement hypocrite ». Mais sonallié,leprésidentaméricain,asaluéces signes d’ouverture. À New York, beaucoup ontcruqueRohanietObamaseserreraient la main de manière impromptue, mais ce « hasard diplomatique » n’a pas eu lieu. Le mollah réformateur doit en effet ménager les ultraconservateurs du régime qui le verraient d’un bien mauvais œil tendre réellement la main au « Grand Satan ». l LAURENT DE SAINT PÉRIER
Glez JUSTICE QUI VEUT DE CHARLES TAYLOR ?
IL A DÉJÀ PASSÉ sept années en prison, où purgera-t-il les quarantetrois prochaines? CharlesTaylor, l’ex-président du Liberia, qui a vu sa peine confirmée par leTribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL), est actuellement détenu à La Haye. Mais le Royaume-Uni, la Suède, la Finlande et le Rwanda, qui ont passé des accords avec leTSSL, sont disposés à l’accueillir dans leurs geôles. La top-modèle Naomi Campbell, à qui l’ancien homme fort de Monrovia avait offert des diamants, lui rendra-t-elle visite? N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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ABIDJAN
FORUM INTERNATIONAL DES INVESTISSEMENTS EN CÔTE D’IVOIRE Le premier rendez-vous économique international pour les acteurs du renouveau ivoirien.
Partagez le nouvel élan économique de la Côte d’Ivoire Sous le haut patronage de Monsieur Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire
La semaine de J.A. Décryptage JEUNEAFRIQUE.COM
PHILIPPE LEMIRE/PANORAMIC
VIDÉO Youssou Ndour, chanteur et ancien ministre sénégalais : « Je connais l’État comme une chanson. »
LE TWEET Pascal Canfin @pcanfin
« Plus de 10 % des pays membres de l’ONU risquent de disparaître sous la montée des eaux. » Pascal Canfin, ministre délégué français, chargé du Développement
CARTE INTERACTIVE Conakry 2009
Quatre ans après le massacre du stade de Conakry, le 28 septembre 2009, la justice guinéenne peine à faire avancer le dossier. J.A. revient sur les faits et sur le profil des différents accusés.
À LIRE AUSSI Handisport en Afrique : la longue lutte pour la reconnaissance
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DARIUS JF/NEWS PICTURES
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p Sur le site d’Imouraren, dans le nord du pays.
Niger Areva, au rapport! Les mines d’uranium exploitées par le groupe nucléaire français vont faire l’objet d’un audit. L’occasion pour le président Issoufou de rééquilibrer un partenariat pas assez avantageux à son goût.
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e pu i s s o n é l e c t i o n e n mars 2011 à la présidence du Niger, Mahamadou Issoufou, qui fut dans les années 1980 un cadre de la Somaïr, l’une des filiales nigériennes d’Areva, a fait sienne la règle établie par ses prédécesseurs : souffler le chaud et le froid avec le géant français du nucléaire. Dernier épisode en date : le 20 septembre, Omar Hamidou Tchiana, le ministre des Mines, a annoncé que les mines d’uranium exploitées par Areva feraient l’objet d’un audit. La presse française y a vu un nouvel exemple des pressions exercées par Niamey sur le groupe basé à Paris en vue d’en retirer des avantages supplémentaires, et les ONG ont applaudi l’initiative. « C’est du jamais vu. Nous saluons cette démarche, même si nous attendons de voir les résultats », explique Moustapha Kadi Oumani, du Collectif pour la défense du droit à l’énergie. TIRAILLEMENTS. Cette annonce tombe il
est vrai à point nommé, puisque le contrat de dix ans liant le Niger au groupe français arrive à son terme dans trois mois. Le gouvernement entend bien profiter de sa renégociation pour accroître ses recettes
fiscales et obtenir de la firme qu’elle s’engage à investir dans les infrastructures. Voilà des mois que Tchiana répète, avec l’aval d’Issoufou, le même discours: « Nous respectons Areva, mais nous voulons un partenariat plus équilibré. Les recettes tirées de l’uranium représentent 5 % du budget de l’État nigérien. C’est insuffisant: 20 % est un minimum. » Niamey souhaite notamment que les Français financent en partie la réhabilitation de la « route de l’uranium », qui relie Tahoua à la région minière d’Arlit via Agadez, et qu’ils disposent enfin d’un siège digne de ce nom dans la capitale. Deux points sur lesquels Areva est prêt à négocier. Mais les apparences sont trompeuses. Cet audit, qui pourrait passer pour un énième tiraillement entre le Niger et le groupe français, marque au contraire leur rapprochement après plusieurs mois de tensions. L’enquête sera ainsi menée « de concert avec Areva », assure le ministre. Mieux, selon une source interne du groupe, c’est Luc Oursel, le patron du géant du nucléaire, qui en est à l’origine : « Lors de sa dernière visite à Niamey, il avait émis l’idée de recourir à une autorité indépendante pour établir un bilan en toute transparence. » l RÉMI CARAYOL JEUNE AFRIQUE
ILS ONT DIT
La semaine de J.A. Décryptage
BERNARD TAPIE Homme d’affaires français, ex-patron de l’OM et ancien ministre de la Ville
« Les optimistes ont inventé l’avion. Les pessimistes, le parachute. Il faut donc rester dans l’avion ! » JACQUES SÉGUÉLA Publicitaire français
« Angela Merkel est comme une vieille tante radine qui garde son sac sur ses genoux pour qu’on ne lui prenne pas son argent, mais les Allemands aiment ça. » SIGMAR GABRIEL Président du Parti social-démocrate allemand
« Jésus a été la première personne au monde à tweeter, avec des phrases essentielles et comprenant moins de 45 caractères, comme “Aimez-vous les uns les autres”. » CARDINAL GIANFRANCO RAVASI Président du conseil pontifical pour la Culture
«
Naturelle ? Quand j’entends ce mot, je pense à des légumes, pas à une femme ! » DONATELLA VERSACE Styliste italienne
Tunisie Première de la classe
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« J’étais la maîtresse préférée de Mitterrand. Souvent, à la fin du Conseil des ministres, on allait casser la croûte tous les deux. Cela avait le don d’exaspérer mes collègues. »
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À L’OCCASION de la rentrée les droits de l’homme ou la des classes, les écoliers tunijustice. Candide et curieuse, siens ont fait la connaissance elle s’interroge aussi sur leur d’une nouvelle camarade, applicationparfoisparadoxale. Lahlouba. Rigolote et haute Chaque thème abordé comme trois pommes, cette s’appuie sur un exemple tiré héroïne de bande dessinée de la vie quotidienne, desa été créée par l’association sins et textes étant imméTouensa à l’occasion du diatement intelligibles pour Forum social mondial, en un enfant. « Parée de son mars. Sa mission : sensibiliinnocence, Lahlouba défie le comportement cynique ser la société civile aux grands de certains adultes », résume enjeux de la démocratie, de Selima Abbou, fondatrice de manière ludique et didacTouensa. Six mois de travail tique. « Réveille-toi, citoyen! », et 50 000 euros de exhorte ainsi budget ont permis Lahlouba en arabe à l’association de dialectal. Après avoir insisté sur diffuser4000exeml’importance d’acplaires de cette BD céder à une inforauprès des enseimation pluraliste gnants. Les avenet transparente, tures de Lahlouba la fillette évoque vont se poursuivre: aujourd’hui, de elle va maintenant bulle en bulle, s’intéresser au prod’autres principes cessus électoral et à démocratiques tels la violence. l p Lahlouba, que la bonne gouFRIDA DAHMANI, héroïne de BD et vernance, l’égalité, à Tunis de la démocratie.
Égalité Obéis à ton mari! LES FEMMES À LA MAISON, les hommes au travail ! » Ce schéma, que l’on pourrait croire dépassé, a décidément la vie dure. Selon un rapport de la Banque mondiale intitulé « Les femmes, l’entreprise et le droit » et publié le 24 septembre, au moins quinze pays interdisent encore à la gent féminine de travailler sans l’accord de leur mari. Parmi ceux-ci, la Bolivie, l’Iran, la Jordanie et la Syrie… Et huit pays africains: Cameroun, Gabon, Guinée, Mauritanie, Niger, RD Congo, Soudan et Tchad. Sur le continent, d’autres, comme le Maroc (en 1996), l’Afrique du Sud (1998) ou la Côte d’Ivoire (2013), ont abrogé cette disposition. FOYER. « Il y a eu des évolutions sociétales, mais beaucoup
reste à faire », souligne Jim Yong Kim, le président de la Banque mondiale. Le rapport rappelle ainsi que, dans plusieurs pays, une femme ne peut, sans l’autorisation de son époux, se rendre à l’étranger (Arabie saoudite, Oman, Soudan, Syrie), ouvrir un compte bancaire (Niger, RD Congo) ou créer une entreprise (RD Congo, Pakistan) et même signer un contrat (RD Congo encore). Pendant ce temps, au Japon – troisième puissance mondiale –, une étude du ministère de la Santé révèle que 34 % des Japonaises célibataires souhaitent devenir femmes au foyer, une large majorité d’entre elles ne considérant pas le travail comme un lieu d’épanouissement… l HABY NIAKATE JEUNE AFRIQUE
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La semaine de J.A. Tour du monde PAKISTAN
BOLIVIE
Sang pour sang
Morales, encore!
Q
PREMIER CHEF D’ÉTAT BOLIVIEN d’origine amérindienne, Evo Morales brigueraunenouvellefois–latroisième–la présidence de son pays en octobre 2014. C’est ce qu’il a annoncé aussitôt après son investiture par le Mouvement vers le socialisme, son parti, sans attendre la validation de sa candidature par le Tribunal suprême électoral. Cette lacune a depuis étécomblée,maisiln’empêche:unjugede la Cour constitutionnelle a sauté sur l’occasion pour juger sa candidature anticonstitutionnelle. Et l’opposition fait chorus.
uatre-vingt-une personnes, dont 37 femmes et 7 enfants, sont mortes dans un double attentatsuicide contre l’église de Tous-les-Saints à Peshawar, dans le nord-ouest du Pakistan, fief des insurgés talibans. La tuerie a été revendiquée par l’un des groupes qui se réclament de cette mouvance, le Junood ul-Hifsa. « Nous continuerons de frapper des étrangers et des nonmusulmans tant que dureront les attaques de drones », a fait savoir son porte-parole. Depuis près de dix ans, les frappes lancées par des avions sans pilote américains – auxquelles Barack Obama n’a apparemment nulle intention de renoncer – ont fait quelque 3 000 victimes, parmi lesquelles beaucoup d’insurgés et pas mal de civils innocents. Mais on voit mal en quoi le massacre de femmes et d’enfants à la sortie d’une messe pourrait contribuer à y mettre fin. Les chrétiens du Pakistan (environ 3,5 millions de fidèles) sont périodiquement victimes de discriminations et de violences, mais n’avaient jamais été visés par une attaque d’une telle ampleur. l
Le mot
PEUR Le 22 septembre à New York, à l’issue d’une réunion en marge de l’Assemblée générale de l’ONU, Barack Obama a confié à son voisin : « Non, je n’ai pas fumé de cigarette depuis six ans. C’est parce que j’ai peur de ma femme. » Il plaisantait, bien sûr. Mais son micro était resté ouvert. Et CNN n’a rien perdu de la scène…
CHINE
M. Bo en sa prison dorée
MOHAMMAD SAJJAD/AP
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p Devant l’église de Tous-les-Saints, le 22 septembre, à Peshawar.
VENEZUELA
Drôles de narcos LE 22 SEPTEMBRE À CARACAS, vingt-deux personnes, parmi lesquelles huit membres de la garde nationale bolivarienne – des militaires, donc – et le directeur adjoint de l’agence locale d’Air France, ont été arrêtés après N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
la saisie à l’aéroport Roissy-Charlesde-Gaulle de 1,3 tonne de cocaïne dissimulée dans une trentaine de valises embarquées dans un avion de la compagnie française en provenance du Venezuela (valeur estimée à la revente : 200 millions d’euros). Y a-t-il eu complicité entre les employés d’Air France et les autorités militaires vénézuéliennes ? À Caracas, l’enquête bat son plein.
Ex-étoile montante de la politique chinoise, Bo Xilai a été condamné le 22 septembre à la prison à vie pour corruption, abus de pouvoir et détournement de fonds. Une lourde sentence qui met fin à une incroyable saga qui tient la Chine en haleine depuis des mois. Mais Bo, qui a toujours nié les faits qui lui sont reprochés, a fait appel. Dans l’immédiat, il est incarcéré à Qincheng, une prison 5 étoiles de Pékin, où il a droit à une « cellule-suite » de 30 m2 et à des menus préparés par de grands chefs. RUSSIE
La bataille de l’Arctique L E S TREN TE MEMBRE S de l’équipage de l’Arctic Sunrise, un navire de l’organisation écologiste Greenpeace, qui tentaient de se hisser JEUNE AFRIQUE
ARRÊT SUR IMAGE
AFP
ASIE DU SUD-EST
Ô temps, suspend ton vol! LE TERRIBLE TYPHON USAGI qui vient de dévaster le Sud-Est asiatique a fait au moins vingt-cinq morts, plongé les réseaux de communication dans le chaos et bloqué plusieurs dizaines de milliers de personnes à l’aéroport de Hong Kong. On ignore si l’homme qui tente désespérément d’échapper à l’énorme vague qui, dans un instant, va balayer le port de Shantou, dans la province chinoise du Guangdong, figure parmi les victimes.
à bord d’une plateforme gazière russe dans l’océan Arctique ont été capturés par un commando héliporté, transférés à Mourmansk et placés en détention provisoire. Greenpeace dénonce les projets d’exploitation des hydrocarbures du Grand Nord sibérien lancés par les géants Gazprom et Rosneft. Une enquête pour piraterie, crime passible en Russie de quinze ans de réclusion, a été ouverte contre les militants écologistes. RUSSIE-CORÉE DU NORD
54 km qui changent tout APRÈS DES ANNÉES D’IN TERRUPTION, les autorités russes ont officiellement rouvert la ligne ferroviaire longue de 54 km reliant la ville de Khasan au port nord-coréen de Rajin, dans la zone dite des trois frontières, aux confins de la Russie, de la Chine et de la JEUNE AFRIQUE
Corée du Nord. Ce tronçon est crucial pour l’approvisionnement de la « nation ermite » en charbon russe, mais aussi en denréesdeconsommationsud-coréennes et chinoises. C’est la première étape d’un ambitieux projet visant à relier l’Europe à la Corée du Nord autrement que par la voie maritime. BRÉSIL
Chaude ambiance à l’ONU! ENOUVERTUREdela68e Assemblée générale des Nations unies, le 24 septembre, la Brésilienne Dilma Rousseff a violemment critiqué les écoutes téléphoniques illégalement pratiquées dans son pays par la NSA, l’agence américaine de renseignements. Une « violation du droit international », a-t-elle estimé. Peu convaincue par les explications fournies par Barack Obama, elle a annulé la visite
d’État qu’elle devait faire à Washington le 23 octobre. Les négociations en vue de l’achat par le Brésil d’avions multirôles américains ont par ailleurs été suspendues. SRI LANKA
La revanche des Tigres EN 2009, la victoire de l’armée cinghalaise sur les Tigres tamouls avait mis fin à près de trente années de guerre civile. Le 21 septembre dernier, la Tamil National Alliance (TNA), le parti tamoul du nord de l’île, a remporté les premières élections organisées depuis le déclenchement des hostilités. Ce « vote massif en faveur de l’autonomie des Tamouls », comme dit le leader de la TNA, est une défaite cinglante pour le parti au pouvoir. Les optimistes préfèrent y voir les prémices d’une réconciliation générale… N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Grand angle
Les mystères Crises politique et économique, luttes de pouvoir et angoisses sociales… Depuis la révolution de 2011, le pays apprend la démocratie. S’il s’en sort plutôt mieux que ses voisins libyen et égyptien, il doit cependant rompre le statu quo à tout prix. MARWANE BEN YAHMED , envoyé spécial
L
«
es chemins les plus longs ne sont pas forcément les plus mauvais. » L’adage est signé RachedGhannouchi,leprésidentd’Ennahdha, rencontré en cette fin septembre dans son bureau du siège du parti islamiste, à Tunis. Ses éternelles lunettes vissées au bout du nez, le « cheikh », qui avait peu goûté notre couverture intitulée « L’homme qui a trahi la révolution » (voir J.A. no 2719), nous a tout de même reçu pour répondre à nos questions (lire encadré p. 29). Lui le centre névralgique supposé du pouvoir en Tunisie, mentor des islamistes et de leurs partisans, bête noire de l’opposition et premier rôle de la pièce qui se joue depuis le 14 janvier 2011. Une véritable tragédie grecque que n’aurait pas reniée Euripide, passé maître dans l’art de la dénonciation des faiblesses humaines… Tenter de comprendre la Tunisie d’aujourd’hui et sa trajectoire, c’est s’échiner à vouloir remplir le tonneau des Danaïdes. Mission impossible ou presque. La vérité du jour n’est jamais celle du lendemain. À chaque crise majeure succède une période de retour à la raison qui nourrit les espérances de tout un peuple. Pour ensuite, de manière systématique, buter sur un nouvel écueil et donner l’impression de repartir de zéro. Ainsi de la situation actuelle, conjugaison a priori apocalyptique de crises: politique, économique, sociale, sécuritaire… L’assassinat de Mohamed Brahmi fin juillet a succédé à celui de son collègue Chokri Belaïd en février. Mêmes causes, mêmes effets : l’opposition, ragaillardie et enfin unie par un objectif commun, accule Ennahdha dans les cordes, réclame la démission du gouvernement, la finalisation de la Constitution (en retard d’un an !) et l’organisation d’élections définitives (présidentielle et législatives). C’est toujours le même scénario : manifestations, mise en cause d’Ennahdha et de la troïka au pouvoir, menaces en tous genres (souvent sans effet), discussions et négociations directes et indirectes, un camp fait un pas en arrière, l’autre avance avant de céder de nouveau du terrain et de voir son adversaire reprendre des positions que l’on pensait définitivement perdues. En attendant, Ennahdha gagne du temps. Situation ubuesque tant le parti a démontré son incapacité à diriger un État, à régler les problèmes économiques ou sécuritaires. Sa zone de confort, c’est l’opposition, pas le pouvoir. Sa principale erreur a été de répondre immédiatement à ses lll sirènes plutôt que de se préparer pour plus tard.
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u Avenue Bourguiba, mars 2013. Contesté par la société civile et les partis d’opposition, le gouvernement se retrouve dans une impasse.
NICOLAS FAUQUE/ABACAPRESS.COM
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de Tunis
Grand angle
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Grand angle lll Sarabande infernale qui voit se multiplier les discussionsdedétails,lesargutiestechniquesoujuridiques, les guerres d’ego qui ne pèsent pas toujours autant qu’ils le pensent ou le voudraient. Une foire d’empoigne permanente, vaste agora politique où l’onretrouvetouteslesforces–vivesounon–dupays. Les poids lourds? D’un côté les islamistes et leurs supplétifs, le Congrès pour la République de Moncef Marzouki et Ettakatol de Mustapha Ben Jaafar, qui forment avec eux la troïka qui dirige le pays depuis près de deux ans; de l’autre Nida Tounes, présidé par Béji Caïd Essebsi, allié à la gauche. Et dans le rôle d’arbitres, pas toujours neutres, l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), l’Utica (patronat), la Ligue tunisienne des droits de l’homme et l’ordre des avocats (lire encadré p. 30). Pour ajouter à la confusion, Ghannouchi, contrairement à ce que certains pensent, ne contrôle pas son parti, loin de là. Il est même de plus en plus contesté depuis qu’il a entamé des discussions mi-août à Paris avec Caïd Essebsi. Les faucons d’Ennahdha, Sadok Chourou, Habib Ellouze, Sahbi Atig ou Abdellatif Mekki, ne manquent d’ailleurs pas une occasion de rappeler que le pouvoir réel est entre les mains du Majlis el-Choura, l’instance décisionnelle du parti, et non entre celles de leur leader, qu’ils enverraient bien à la retraite. Les oppositions idéologiques ou stratégiques sont multiples: parti politique ou religieux? Lâcher le pouvoir pour se consacrer aux prochaines élections ou ne rien céder ? Diriger seuls la Tunisie ou partager les responsabilités? Quoi qu’il fasse, Ghannouchi est donc contraint de composer, de négocier ou de nouer des alliances en interne. Ainsi, après s’être gravement fâché avec Hamadi Jebali lors de la démission de ce dernier du poste de Premier ministre tente-t-il aujourd’hui de renouer avec lui, comme avec Habib Mokni, pour contrecarrer les durs du parti, réputés intransigeants avec l’opposition. Béji Caïd Essebsi rencontre peu ou prou les mêmes difficultés au sein de sa propre formation (où chacun sait bien que le chef aura bientôt 87 ans et où les ambitieux doivent préparer l’avenir dès maintenant et se montrer), mais surtout avec le Front de salut national, coalition pour le moins hétéroclite qui regroupe l’ensemble de l’opposition. Ce qu’il négocie avec Ghannouchi, il doit le vendre à ses troupes et à ses partenaires, qui n’ont guère goûté, eux non plus, sa rencontre parisienne avec le cheikh. Bref, le dialogue à la tunisienne ressemble à unevastechakchouka(platmaghrébinauxmultiples ingrédients qui diffèrent d’une région à une autre).
QUI PÈSE QUOI ? Qu’elles sont loin les élections
du 23 octobre 2011! Depuis, le paysage politique a considérablement évolué, de même que les rapports de forces en son sein. L’offre, si l’on peut dire, s’est rationalisée. La constellation de partis – plus d’une centaine–nésaprès la révolution devient plus lisible. Les plus faibles ont, comme prévu, disparu ou ont N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
Une économie fragile Croissance du PIB (en %)
3,6
3,1
4
0
-1,9 2010 11
12
13
Inflation (en %) 5,6
6
4,4 3,5 2010 11
12
13
Investissements directs étrangers (en milliards de $)
1,5
2010
1,9 1,1 2011
2012
Taux de chômage (en %)
18 17,6 14 2010 2011 2012
SOURCES : FMI, CNUCED, INS, CIA WORLD FACTBOOK
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été absorbés par ceux qui reposaient sur des bases plus solides. Sans parler des « transhumants », phénomène classique au Maghreb, qui passent d’une formation à une autre, par déception ou en fonction de leurs intérêts. Il en résulte la consolidation de trois blocs principaux: les islamistes, les destouriens et la gauche. Les différentes enquêtes d’opinion qui font florès depuis le début de la transition, et dont la dernière a été réalisée début septembre par l’institut 3C Études, permettent d’y voir un peu plus clair en termes de poids électoral. Dans l’optique des législatives, c’est Nida Tounes (destouriens) qui occupe la première place, avec près de 34 % de la moitié des intentions de vote – suivi évidemment d’Ennahdha (30,6 %), dont la base électorale demeure d’une fidélité absolue. Loin derrière, le Front populaire (gauche,prèsde10%).Après,ontombesouslabarre des 5 %… Des résultats somme toute relativement logiques – Nida Tounes, créé tardivement, a le vent en poupe, Ennahdha est contestée mais conserve un important noyau dur de fidèles – qu’il convient cependant de relativiser: 43 % des électeurs potentiels sondés demeurent indécis! Du côté des personnalités et, donc, des intentions de vote à la présidentielle, c’est Béji Caïd Essebsi qui occupe la première place, avec environ 15 % des voix, suivi de… Kaïs Saïed (près de 5 %), ce professeur de droit constitutionnel qui n’appartient à aucun parti mais qui occupe le devant de la scène médiatique et dont les interventions télévisées plaisent visiblement à l’opinion publique. Puis le chapelet des supposés ténors : Hamadi Jebali (3,9 %), Moncef Marzouki (3,5 %), Ali Larayedh et Hamma Hammami (2,6 %). Pas brillant… C’est surtout le signe que les Tunisiens n’accordent qu’une confiance très relative à leurs dirigeants politiques, qui peinent, décidément, à s’adapter aux mutations d’une société qui a bien changé. Davantage, en tout cas, que ceux qui rêvent d’être un jour élus. LES DEUX TÉNORS. Les protagonistes de la crise qui secoue la Tunisie ont décidé de se rapprocher pour entamer des discussions directes. Rached Ghannouchi et Béji Caïd Essebsi, qui ne s’appréciaient guère, ont bien conscience du fait que leurs formations respectives écrasent toutes les autres. Et s’ils ne l’avaient pas compris tout seuls, certains se sont mis en tête de les asseoir autour d’une table. Ainsi du très médiatique Slim Riahi, président de l’Union patriotique libre et riche homme d’affaires qui a fait l’essentiel de sa fortune en Libye à l’époque où Kaddafi y régnait, mais aussi de Nabil Karoui, patron de la chaîne de télé privée Nessma et proche de Caïd Essebsi. Après plusieurs tentatives, c’est finalement la cinquième qui a marché. « Ghannouchi a demandé à me voir début août, nous explique l’ancien Premier ministre de transition. Je lui ai alors répondu que j’avais des engagements en France et que nous nous verrions JEUNE AFRIQUE
JEAN-CLAUDE COUTAUSSE/DIVERGENCE POUR LE MONDE
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QUAND GHANNOUCHI REÇOIT J.A. COMPTETENU DES RELATIONS entre Jeune Afrique et Rached Ghannouchi, qui n’a pas dû apprécier les prises de position de notre hebdomadaire et, en particulier, notre couverture « L’homme qui a trahi la révolution » (J.A. no 2719), l’auteur de ces lignes ne pensait pas obtenir un rendez-vous avec le patron d’Ennahdha. Rendez-vous fut pourtant pris le 18 septembre à 15 h 30 dans son bureau, au cinquième étage du siège du parti, à
Montplaisir, quartier cossu deTunis. Trente minutes d’entretien filmé par ses équipes (une règle avec tous les visiteurs du « cheikh »). Reconnaît-il que lui et son parti ont commis des erreurs ? « Nous ne sommes pas des anges », nous a-t-il répondu. Les critiques sur l’accaparement du pouvoir par Ennahdha et le placement de ses ouailles au sein de tous les rouages de l’État ? « Les gens transposent sur Ennahdha les pratiques passées, comme si nous
à mon retour. Il m’a répondu que c’était urgent et qu’il viendrait donc me rencontrer à Paris. Nous nous sommes vus le 15 août au Bristol pendant près de trois heures. » Pour quels résultats? « C’était une discussion utile. Aucun de nous n’a fait de concessions, certes, mais nous avons abordé tous les problèmes du pays, sommes convenus de tout mettre en œuvre pour sortir de cette crise et de le faire ensemble. Car Ennahdha doit participer à cette réflexion. Ce parti n’est pas ma tasse de thé, tout le monde le sait, mais il est au pouvoir. On ne peut pas faire comme s’il n’existait pas. » Depuis l’entretien parisien, les deux hommes ont été reçus – séparément, ainsi que l’a exigé Béji Caïd Essebsi – par Abdelaziz Bouteflika. Le message du chef de l’État algérien, qui les connaît de longue date, surtout Essebsi depuis l’époque de la lutte pour l’indépendance, est simple : entendez-vous pour sortir de cette impasse et nous vous aiderons, y compris financièrement. En filigrane, la situation sécuritaire et les difficultés que rencontre l’État tunisien, sans véritables moyens et affaibli, pour JEUNE AFRIQUE
Depuis le 15 août, Ghannouchi et Caïd Essebsi discutent quasi quotidiennement, souvent par émissaires interposés.
étions le RCD, un parti-État. C’est faux. » Les couacs de la justice transitionnelle, les règlements de comptes avec les ex du système Ben Ali ? « Les ex-RCD, ce n’est pas nous qui les avons mis en prison, c’est Béji Caïd Essebsi quand il était Premier ministre. Quant à leur libération, la justice est indépendante… » Sa vision de l’avenir, enfin : « Il faudra une décennie pour construire notre démocratie. » À ce train, c’est sûr… l M.B.Y
assumer sa mission de lutte contre le terrorisme et de contrôle de sa frontière avec l’Algérie. Pour rappel, onze Tunisiens faisaient partie du commando responsable de la sanglante prise d’otages d’In Amenas, en janvier dernier… Depuis, les négociations se poursuivent, le plus souvent de manière indirecte. Notamment à travers le discret Mohamed Sahbi Basly, ex-ambassadeur en Inde, en Espagne ou en Chine et président du parti Al-Mustakbal (destourien), qui jouit de la confiance des deux leaders et d’une certaine crédibilité aux yeux, entre autres, de l’UGTT. Nouveau gouvernement – d’« union nationale » pour Ghannouchi, « indépendant » pour Essebsi –, finalisation de la Constitution avant fin octobre, rôle de l’Assemblée nationale constituante, élections : les points de discussion – toujours les mêmes depuis l’assassinat de Chokri Belaïd en février! – ne manquent pas entre les deux leaders. Qui semblent s’être entendus sur une répartition future du pouvoir : à Essebsi la présidence de la République, Ennahdha se concentrant sur les législatives et ne N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Grand angle présentant donc pas de candidat contre lui. Tous deux sont également d’accord sur le cas Moncef Marzouki, dont ils aimeraient bien se débarrasser, surtout Essebsi, qui multiplie les piques à son endroit : « Moi, si j’étais à la place du chef de l’État, je partirais de moi-même, je n’attendrais pas qu’on me montre la porte de sortie », juge-t-il. Il a d’ailleurs un temps été envisagé de faire déposer une motion de censure contre lui, qui aurait eu toutes les chances d’aboutir à l’Assemblée. « IT’S THE ECONOMY, STUPID! »* Pendant que les politiques s’agitent stérilement, l’économie du pays n’en finit plus de plonger. Une situation inquiétante, qui devrait inciter les protagonistes de la crise à s’entendre, et vite. « Le déficit budgétaire est de 5 milliards de dinars [2,2 milliards d’euros] aujourd’hui et l’année n’est pas terminée, explique un chef d’entreprise à la tête d’un grand groupe familial. On s’attend à ce qu’il atteigne 8 milliards de dinarsen2014,peut-êtremêmeplus.L’inflation,elle, est officiellement de 6 % [selon le Fonds monétaire international],maisonestcertainementplusproche des 10 %. Nous nous dirigeons tout droit vers une catastropheàlagrecque:comptetenudelasituation, ceuxquidevrontvenirausecoursdupayspourl’aider à éviter la faillite, comme la Banque mondiale ou le FMI, nous dicteront leur loi et nous mettront sous tutelle. Ils nous imposeront des coupes drastiques dans tous les budgets, la privatisation d’un grand nombred’entreprisespubliques,voirenosdirigeants politiques, comme Mario Monti a été imposé, par exemple, en Italie. Nos politiques ont donc tout intérêt à comprendre que, s’ils ne s’entendent pas rapidement, ils n’auront plus grand-chose à discuter entre eux ni à se partager… » Même son de cloche
La crise économique et les pressions extérieures pourraient avoir raison de l’entêtement des politiques.
LES ARBITRES À L’ŒUVRE OCTOBRE 2012, LA CONSTITUANTE dépasse le mandat de un an qui lui était assigné. Et la légitimité du pouvoir devient l’objet d’une âpre controverse. Historiquement au-dessus de la mêlée, bien que traversée par différents courants politiques, l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) anticipe la crise et lance alors un premier dialogue national. Seuls les partis au pouvoir lui tourneront le dos. L’entêtement de la troïka, les difficultés politico-économiques, les assassinats politiques poussent l’UGTT à relancer et à renforcer sa médiation. La centrale ouvrière est rejointe par N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
le patronat, à travers l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica), qui n’a pas intérêt non plus à ce que les entreprises périclitent. Au-dessus de tout soupçon pour leur position contre la dictature de Ben Ali, la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH) et l’ordre des avocats complètent ce quartet et apportent une caution démocratique et non partisane à un arbitrage. Ensemble, ils sont assez représentatifs des Tunisiens pour être une force de proposition, mais leur influence grandissante commence à inquiéter la majorité… l FRIDA DAHMANI
chez le patron d’une grande banque publique : «Nousn’allonspaspouvoircontinuerlongtempsàce rythme-là.Nousavonsbesoindedirigeantscrédibles, capables de convaincre les Tunisiens et d’imposer des mesures économiques indispensables même si elles ne sont pas populaires. Sans sacrifices, nous ne nous en sortirons pas. Or plus nous attendons, plus ces derniers seront lourds. » Avant de préciser, plus optimiste, qu’il est encore temps de réagir : « La Tunisie est un petit pays dont l’économie peut repartir très vite si l’horizon politique se dégage et si syndicats et patronat conviennent d’une trêve le temps de relancer la machine. » Pragmatiques, les patrons tunisiens ne croient pas au scénario catastrophe,c’est-à-direlemaintienindéfinidustatuquo. La situation économique, conjuguée aux pressions extérieures (Union européenne, institutions de Bretton Woods, agences de notation, Algérie, etc.) devrait finir par avoir raison de l’entêtement des politiques. En attendant, les caisses sont vides et une loi de finances complémentaire semble impérative. Mais le gouvernement peine à lever des fonds, compte tenu des taux appliqués à une Tunisie qui ne parvient pas à rassurer. Voilà qui promet sur le front social… Depuis le début des révoltes arabes, la Tunisie fait figure de laboratoire. Elle donne aujourd’hui l’impression d’être empêtrée dans un inextricable entrelacs de difficultés, pour la plupart inhérentes à son apprentissage démocratique et à la bataille pour le pouvoir qui fait rage depuis les élections du 23 octobre 2011. Comparée à l’Égypte ou à la Libye, elle fait pourtant figure de bon élève. À vrai dire, même au plus fort des multiples crises qu’elle affronte, elle a toujours su raison garder, et le dialogue entre les principales forces n’a jamais été rompu. Rached Ghannouchi n’a d’ailleurs peut-être pas tort. Le chemin emprunté depuis la chute de Zine el-Abidine Ben Ali est long, très long, car les Tunisiens ont fait un choix difficile : tout reprendre de zéro, commencer par du provisoire qui dure, revoir de fond en comble une Constitution qui n’avait besoin que d’un lifting, poser tous les problèmes sur la table, en ajouter de nouveaux liés à la déliquescence d’un État qui n’ose plus jouer son rôle, etc. Un choix qui n’est pas forcément le plus mauvais. Car au moins se seront-ils posé toutes les bonnes questions dès le départ. Une transition bâclée et une démocratie construite sur des fondations instables ne sont évidemment pas une meilleure solution. Last but not least, la matière grise des Tunisiens n’a jamais été autant mise à contribution. Pour ceux qui se souviennent de la fin des années Ben Ali, c’est peut-être cela la véritable révolution… l * Phrase célèbre de James Carville, conseiller de Bill Clinton, adoptée par le candidat démocrate lors de sa campagne victorieuse de 1992, face à Bush père qui, lui, s’enorgueillissait de ses succès en politique internationale. JEUNE AFRIQUE
Les mystères de Tunis Je ne suis pas candidat, mais j’ai dit et je répète que si mon pays a besoin de moi je ne me déroberai pas. Maintenant, je préfère être élu à l’issue d’élections normales. En tout cas, je ne peux pas être un président au rabais.
MOISES SAMAN/THE NEW YORK TIMES-REDUX-REA
Rached Ghannouchi et vous-même vous êtes vus à Paris au mois d’août. Que vous êtes-vous dit ?
INTERVIEW
Béji Caïd Essebsi, président de Nida Tounes « Le gouvernement devrait partir de lui-même » L’ancien Premier ministre réclame la démission de l’équipe Laarayedh et la finalisation, au plus vite, de la Constitution par l’Assemblée nationale constituante. Il répond sans détour aux questions de J.A. Jeune Afrique: La Tunisie est enlisée dans une crise sans précédent, à la fois politique, économique, sociale et sécuritaire. Selon vous, comment en sortir? Béji Caïd Essebsi: Il faut d’abord que ceux
qui gouvernent le reconnaissent. Parce qu’à les entendre c’est plutôt « tout va très bien, Madame la marquise »… Ce sont des irresponsables. Si Ennahdha continue, nous ne serons pas loin d’un scénario à l’égyptienne. Nous savons par exemple aujourd’huiquelegouvernementaétéprévenu par des services de renseignements, notammentaméricains,desrisquessérieux qui pesaient sur Mohamed Brahmi, tué en juillet. Il n’a rien fait. Ni pour le protéger ni même pour le prévenir! Face à un tel scandale, nous ne devrions même pas demander ladémissiondugouvernement, il devrait partir de lui-même! Concrètement,quelles sont vos demandes pour sortir de cette phase de blocage? JEUNE AFRIQUE
D’abord, il faut que le gouvernement démissionne et qu’on le remplace par une équipe constituée de personnalités indépendantes qui s’engagent à ne pas se présenter aux élections. Ensuite, réduire la voilure de l’Assemblée nationale constituante [ANC], avec des objectifs précis : terminer la Constitution et préparer les élections en s’occupant de l’instance indépendante [l’Isie] et du code électoral. Et les élections, justement ?
Si on veut les organiser aux normes internationales, difficile d’imaginer pouvoir tenir scrutin avant mars ou avril pour la présidentielle et mai pour les législatives. Accepteriez-vous d’assumer la présidence de la République pendant la dernière phase de la transition si on vous le demandait ?
Nous avons discuté pendant trois heures et j’ai trouvé que c’était une discussion utile et positive. Nous avons égrené tous les problèmes, avons changé le climat de nos relations. Je lui ai également demandé d’ouvrir la discussion avec l’Union générale tunisienne du travail [UGTT], ce qu’il a accepté. Nous ne sommes pas d’accord sur tout, mais au moins sur les grandes orientations. Le chef de l’État algérien, Abdelaziz Bouteflika, vous a reçus tous les deux, séparément, à la mi-septembre. Une sorte de médiation…
Ça, c’est une autre histoire… L’Algérie a intérêt à ce que ses frontières soient sécurisées. Son souci, c’est que la Tunisie soit un pays stable et que les problèmes sécuritaires liés au terrorisme ne se posent plus. Le président Bouteflika, que je connais depuis longtemps, a donc émis le souhait de rencontrer les deux principaux personnages politiques tunisiens. Pour comprendre et nous aider à trouver une solution. Si votre parti, Nida Tounes, gagne les prochaines élections, comme le laissent présager les sondages, gouverneraitil seul ?
Aucun parti ne peut gouverner seul. Ce n’est d’ailleurs dans l’intérêt de personne. La gouvernance de la Tunisie, pendant un certain temps, doit être le résultat du consensus le plus large possible. Avec le recul, comment jugez-vous la révolution tunisienne ?
Elle a été l’œuvre de la jeunesse de ce pays, qui n’était ni encadrée ni motivée par des idéologies religieuses ou politiques. Malheureusement, cette révolution a été court-circuitée par ceux qui gouvernent actuellement et qui n’y ont pas participé. Voilà où nous en sommes. La démocratie ne se décrète pas, elle se construit et se pratique. l Propos recueillis à Tunis par MARWANE BEN YAHMED N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Ministère de l’Économie et des Finances du Burkina Faso
Une situation économique porteuse Saluée par la communauté financière internationale, la réforme des finances publiques menée par le gouvernement du Burkina Faso contribue, sur le terrain, à de meilleures performances de l’économie. Elle permet au pays de diversifier ses sources de richesses et de mieux lutter contre la pauvreté
© Nyaba Leon Ouedraogo
L’inflation est sous contrôle, comme les déficits. Mieux géré, le pays récolte les fruits de son travail.
Le Mémorial des héros nationaux surplombe le nouveau quartier de la capitale, Ouaga 2000.
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ays enclavé de 17 millions d’habitants, situé au cœur de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), le Burkina Faso a entrepris depuis 2007 une série de réformes structurelles ambitieuses et courageuses. L’engagement ferme des autorités en la matière et les résultats obtenus sont d’ailleurs salués par les autorités financières internationales. À l’instar du Fonds monétaire international (FMI) qui, dans un rapport de juillet 2013 consacré à l’évaluation de l’application de programmes sur la période 20072012, note : « Malgré une conjoncture extérieure défavorable, ces programmes ont permis d’atteindre des objectifs clés. » De son côté la Banque mondiale, dans La Revue des dépenses publiques 2009, indique que « Le Burkina Faso fait office de COMMUNIQUÉ
leader de la GFP (Gestion des finances publiques) en Afrique ». Avec un « score EPIN » de 3,8 en 2012, il est le troisième d’Afrique subsaharienne, et premier francophone, à l’aune de ce classement par l’indice d’Évaluation de la politique et des institutions nationales (EPIN), établi par la Banque mondiale.
CROISSANCE EN HAUSSE Sur le terrain, cette politique économique et la stabilité macroéconomique qu’elle a créée se traduisent par de bonnes performances en termes de croissance et de réduction de la pauvreté. Malgré des chocs multiples, l’économie du Burkina Faso affiche depuis cinq ans une croissance supérieure à la moyenne régionale. Entre 2007 et 2012, son PIB a progressé de
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5,3 % par an en moyenne. Les efforts déployés pour réformer l’agriculture et renforcer les investissements ont atténué l’impact des conditions climatiques défavorables (faible pluviométrie en 2007, inondations en 2009 et sécheresse en 2011). Grâce à quoi, et malgré un ralentissement en 2009-2011 attribuable à la crise mondiale et à la crise ivoirienne, le PIB par habitant est passé de 449 dollars en 2007 à une estimation de 603 dollars en 2012 (+ 35 %).
INTENSIFICATION DE LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ Tout cela a pour conséquence une augmentation des dépenses sociales, qui ont atteint 7,5 % du PIB en 2012, contre 4,8 %
CLIMAT DES AFFAIRES EN AMÉLIORATION Depuis 2006, la croissance du secteur privé au Burkina Faso est plus rapide que celle du secteur public. Cette nouvelle vitalité économique résulte de plusieurs initiatives prises par les autorités pour améliorer le climat des affaires. Il s’agit en particulier de réformes – à la fois des changements réglementaires et des améliorations de coûts – en matière de création d’entreprise, d’octroi de permis de construire et de transfert de propriété. Cela se traduit par une progression de dix places dans le classement annuel de la Banque mondiale, « Ease of Doing Business » (simplification de l’environnement des affaires). Le pays passe de 163e en 2007 à 153e en 2013, en meilleure position que d’autres pays de l’UEMOA. Il est deuxième dans la région en 2013 alors qu’il était avant-dernier en 2007. En poursuivant les réformes et grâce, notamment, à l’informatisation de l’administration fiscale, le pays va maintenant s’attaquer aux procédures administratives et aux coûts qui entravent le commerce transfrontalier.
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STABILITÉ MACROÉCONOMIQUE De plus, l’inflation est restée faible sur la période 2007-2012, à un niveau moyen de 3 %. Le déficit courant a été ramené à 1,1 % du PIB en 2011, et le déficit budgétaire global s’est contracté, de 5,7 % du PIB en 2007 à 3,2 % en 2012, ce qui aligne le Burkina Faso sur les pays de l’UEMOA et de l’Afrique subsaharienne. Ces bons résultats s’expliquent en grande partie par une progression rapide des recettes fiscales, qui sont passées de 12,5 % du PIB en 2007 à une estimation de 15 % en 2012, conséquence des mesures de réforme de la politique et de l’administration fiscales : adoption d’un impôt sur les sociétés, relèvement des redevances sur l’or de 3 % à 5 %, lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, restructuration des administrations fiscale et douanière.
L’avenue Kwame-Nkrumah, principale artère de la capitale burkinabè.
en moyenne sur la période 2000-2006. Le Burkina Faso a intensifié les mesures anti-pauvreté à travers d’importants programmes tels que la mise en place de cantines scolaires, un soutien financier aux personnes âgées et des programmes de sécurité alimentaire. La Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD, lire l’encadré pages suivantes) consacre une grande attention au développement agricole, qui joue un rôle clé dans la réduction de la pauvreté.
COMMERCE EXTÉRIEUR EN HAUSSE Les exportations sont passées de 11,4 % du PIB en 2006 à une estimation de 26,9 % du PIB en 2012, atteignant la moyenne de l’UEMOA. Des mesures ont été prises pour appuyer le secteur cotonnier, comme le subventionnement des engrais, l’utilisation de semences génétiquement modifiées ainsi que l’adoption de nouvelles pratiques d’irrigation et d’un nouveau mécanisme de prix à la production. Les importations ont suivi une tendance similaire à celle des exportations, grimpant de 25,3 % du PIB en 2006 à 36,6 % du PIB en 2012, selon les estimations du FMI. Les biens d’équipement et les biens intermédiaires représentent plus de 50 % des importations, ce qui atteste du niveau élevé de l’investissement dans le pays, notamment dans le secteur minier.
DE NOUVELLES RESSOURCES MINIÈRES Malgré les progrès réalisés jusqu’ici, le Burkina Faso fait encore face à d’énormes défis, particulièrement en ce qui concerne la réduction de la pauvreté. Il se trouve aussi face à un important challenge. Son secteur minier se présente depuis peu comme une source de richesse potentiellement considérable. Les études de prospection et d’exploitation de ressources comme le cuivre, le manganèse, le zinc ou le clinker sont prometteuses. Il faut en tirer parti, comme ce fut le cas pour l’or, aujourd’hui une importante source de recettes et de croissance. Le Burkina Faso se prépare maintenant à transformer ses ressources minières en un portefeuille d’autres actifs physiques, humains et financiers, qui permettront d’entretenir un développement durable pour les générations actuelle et futures. ■
COMMUNIQUÉ
Ministère de l’Économie et des Finances du Burkina Faso
Au cœur de la réforme des finances publiques Une volonté politique forte et durable et la qualité des ressources humaines forment la base du succès.
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EFFICACITÉ DE LA COLLECTE DE L’IMPÔT Dans le cadre de la mobilisation des recettes, les autorités ont continuellement amélioré leurs structures, notamment l’administration fiscale, la TVA, l’impôt sur les sociétés et les incitations fiscales. Les résultats sont très parlants. Le produit de l’impôt sur le revenu s’est amélioré, passant de 2,8 % du PIB en 2005 à 4,2 % en 2011, et celui de la TVA a progressé de 6,4 % du PIB à 7,6 % dans le même temps. La période a d’ailleurs été marquée par une baisse de la part de la consommation dans le PIB et cette progression de la TVA illustre la plus grande efficacité de la collecte de l’impôt. En 2011, le Burkina Faso a adopté une nouvelle série de mesures, comprenant notamment l’informatisation du recouvrement des droits de douane et la révision du code minier.
« LEADER DE LA GFP EN AFRIQUE » Des progrès importants ont été réalisés depuis 2009 en matière de Gestion des finances publiques (GFP). En 2009, dans La
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epuis une décennie, le Burkina Faso déploie des efforts importants pour améliorer les recettes publiques et la gestion des finances publiques (GFP). À chaque étape, il s’est assuré l’appui des organisations internationales, notamment du Fonds monétaire international (FMI) et de son Centre régional d’assistance technique pour l’Afrique de l’Ouest (Afritac Ouest). Pour la seule gestion des finances publiques, le coût des réformes entre 2001 et 2011 est évalué entre 60 et 70 millions de dollars, pour moitié financé par les partenaires au développement du Burkina Faso, l’autre moitié provenant de ses fonds propres. Les principales réalisations portent sur : • l’introduction progressive d’un système complet d’information de gestion financière, appelé Circuit intégré de dépenses (CID), • la réforme du système de gestion des recettes, • et l’introduction de la budgétisation programmatique au travers du Cadre de dépenses à moyen terme (CDMT) et de budgetsprogrammes.
Immeuble principal du Ministère de l’Economie et des Finances.
COMMUNIQUÉ
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SCADD : VERS LES 10 % DE CROISSANCE
Le développement agricole joue un rôle clé dans la réduction de la pauvreté.
En haut du classement en matière de gestion des finances publiques, à égalité avec le Kenya et devant le Nigeria ou encore l’Éthiopie. Revue des dépenses publiques, la Banque mondiale indiquait que « le Burkina Faso fait office de leader de la GFP en Afrique ». À l’époque, le Burkina était, avec Maurice, le seul pays francophone d’Afrique subsaharienne à présenter un indice d’Évaluation de la politique et des institutions nationales (score EPIN) supérieur à 2,5 (1 étant la note la plus faible, 6 la plus élevée). Ce score atteint 3,8 en 2012, plaçant le Burkina Faso en troisième position en Afrique subsaharienne, à égalité avec le Kenya et devant des géants comme le Nigeria (3,5), l’Éthiopie (3,4) ou encore la Côte d’Ivoire (3,1).
PRINCIPALES ÉTAPES DE LA RÉFORME Parmi les améliorations du système de gestion des finances publiques figure la mise en place de plusieurs outils et mesures nécessaires à la budgétisation par programme notamment le cadre budgétaire à moyen terme et la stratégie de renforcement des finances publiques (SRFP). En parallèle, la documentation nécessaire au paiement des dépenses a été simplifiée et un nouveau plan de trésorerie a été adopté. En outre, les audits organisationnels et financiers des systèmes d’engagement des
Chiffres clés • Population 17 millions d’habitants
• Croissance 2007-2012 5,3 % par an
• PIB par habitant 600 dollars
• Croissance 2012 9,2 %
Sources : données gouvernement et Banque africaine de développement .
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La poursuite des réformes structurelles est indispensable pour diversifier l’activité économique et accroître la compétitivité. Le renforcement des dimensions économique, politique et administrative de la gouvernance figure d’ailleurs en bonne place dans la Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD) du Burkina Faso pour la période 2011-2015. La SCADD consacre le développement de « piliers de croissance », qui sont des secteurs et localités à soutenir dans la production de biens et services à forte valeur ajoutée. Elle veille également à la consolidation du capital humain (emploi, éducation, formation, santé) et à la protection sociale. Outre la gouvernance, la SCADD prend en compte des priorités transversales comme la parité hommesfemmes, l’environnement, l’aménagement du territoire et l’économie verte. L’objectif est de mener à bien une transformation économique accomplie et de parvenir à une croissance inclusive de 10 % par an.
dépenses ont été renforcés. La création d’une Cour des comptes fonctionnelle et indépendante vient couronner ces efforts de transparence.
L’INDISPENSABLE ENGAGEMENT POLITIQUE Pour les experts du Fonds monétaire international (FMI), trois facteurs principaux sont à la base du succès des réformes de la GFP au Burkina Faso : • un engagement politique clair et durable pour le processus de réforme, • un cadre solide pour la mise en œuvre des réformes et leur coordination technique, • et un cadre structuré pour la coordination de l’appui des partenaires techniques extérieurs, le suivi des progrès et la gestion du dialogue avec toutes les parties prenantes.
QUALITÉ DES RESSOURCES HUMAINES Deux autres facteurs ont largement participé au succès. Premièrement, les capacités techniques et les qualités managériales des fonctionnaires chargés de la GFP. « Elles sont substantiellement supérieures à la moyenne de l’Afrique subsaharienne », note le FMI. Cela est en partie dû au fait que le programme de réformes de la GFP accorde une place importante à la formation et au renforcement des capacités. C’est également dû à l’École Nationale des Régies Financières (ENAREF), créée voici vingt-cinq ans à Ouagadougou et qui a produit depuis plus de 9 000 diplômés venus de treize états d’Afrique francophone en gestion financière, en fiscalité et en comptabilité publique. ■ COMMUNIQUÉ
Ministère de l’Économie et des Finances du Burkina Faso
© Bruno Levy
« Face à de mauvaises performances, il faut avoir le courage d’engager des réformes porteuses de résultats et d’efficacité. »
Lucien Marie-Noël Bembamba, Ministre de l’Économie et des Finances du Burkina Faso.
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ommé en 2008, confirmé en 2013, le « grand argentier » du Burkina Faso a débuté sa carrière à la Direction du crédit, puis à la Direction des relations internationales de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), à Dakar, au Sénégal. En 1993, il devient Directeur général du trésor et de la comptabilité publique, poste qu’il occupe jusqu’à sa nomination comme ministre délégué, chargé du budget en 2007. Fin connaisseur des rouages de l’administration des finances, il est l’un des principaux artisans des réformes et de leur succès. COMMUNIQUÉ
Des institutions internationales comme la Banque africaine de développement et le Fonds monétaire international saluent les réformes menées par le Burkina Faso en matière de gestion des finances publiques. Comment expliquez-vous un tel résultat ? Lucien Marie-Noël Bembamba : Il y a plusieurs raisons. D’abord l’engagement politique et au plus haut niveau pour la mise en œuvre des réformes. Ensuite, la constance et la régularité de ces réformes avec une capacité d’adaptation en cas de besoins. Il y a aussi la qualité et l’engagement du personnel qui a bénéficié par ailleurs de
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formations de bon niveau et d’encadrement. Sans oublier les questions d’organisation, de modernisation des outils et des procédures de travail. C’est la combinaison de tous ces facteurs qui nous ont permis ces bons résultats, en insistant surtout sur l’engagement politique. Quelles sont les conséquences d’une telle appréciation ? L. M.-N. B. : Il est clair que cela renforce notre crédibilité auprès de ces institutions, leur confiance en notre capacité à bien gérer. Cela facilite le dialogue et nous met dans une position où nous pouvons bénéficier davantage de leur appui, lequel est indispensable pour poursuivre nos différents projets de développement. Dans quel contexte socio-économique ces réformes ont-elles été entreprises ? L. M.-N. B. : Vous savez que notre pays fait partie des pays à faibles revenus, aux ressources limitées. Dans ce contexte, il faut être ingénieux pour bien gérer le peu que nous avons. L’environnement défavorable et les multiples chocs exogènes nous ont amené chaque fois à anticiper pour limiter les effets de ces conditions défavorables sur notre économie et nos populations. Face à de mauvaises performances, il faut avoir le courage d’engager des réformes, mais des réformes porteuses de résultats, d’efficacité. Quelles sont les principales actions qui ont été menées ? L. M.-N. B. : Les réformes engagées ces dernières années concernent en particulier le domaine des recouvrements des recettes. Elles s’imposaient vraiment, dans un contexte de diminution de l’aide extérieure et au moment où les besoins de financement pour notre développement sont de plus en plus importants. Il fallait assurer une base sûre, durable, pérenne pour le financement de notre développement et cela passe par la consistance de nos recettes propres. Pour y parvenir, nous avons misé en priorité sur l’organisation et la modernisation des services et sur la motivation des agents. Parallèlement, nous nous sommes attaqués aux fléaux de la fraude et de la corruption par des actions de sensibilisation et par
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des sanctions, mais aussi grâce à une amélioration des méthodes de travail et à l’informatisation. Que reste-il à faire ? L. M.-N. B. : Il faut d’abord tout faire pour préserver les acquis, ce qui n’est pas toujours facile. Mais aussi poursuivre les efforts parce que les défis sont permanents. Il y a toujours de nouvelles contraintes à affronter. L’essentiel pour nous est de préserver et de consolider le dispositif notamment organisationnel qui nous a permis ces performances. En ce moment, l’économie burkinabè est contrariée par la baisse du cours de l’or, premier produit d’exportation avant le coton. Que comptez-vous faire pour parer à la situation ? L. M.-N. B. : Cette situation pose le problème de la nécessaire diversification des sources de notre croissance et de nos revenus. Il nous faut poursuivre dans ce sens à travers notamment l’expérience des pôles de croissance.
« Avec 9,2 % de croissance en 2012, nous sommes sur la bonne voie et les indicateurs sociaux ne cessent de s’améliorer. » Le Burkina Faso parviendra-t-il à une croissance à deux chiffres ? L. M.-N. B. : Nous sommes sur la bonne voie. En 2012, nous avons fait 9,2 % de taux de croissance. Si nous maintenons nos efforts d’investissement dans les secteurs porteurs de croissance et surtout en attirant davantage d’investisseurs privés, nous pouvons faire encore mieux. D’autant plus que notre pays regorge d’énormes potentialités. Nous faisons en sorte d’améliorer notre environnement des affaires et d’assainir notre cadre macroéconomique pour mieux en tirer parti. Quel bilan faites-vous à ce jour de la mise en œuvre de la Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD) ? L. M.-N. B. : Nous sommes à mi-parcours et le bilan donne de l’espoir. Déjà, nous tendons vers la forte croissance souhaitée et les indicateurs sociaux ne cessent de s’améliorer. Ces bonnes tendances sont malheureusement parfois freinées par les effets des chocs notamment la crise mondiale qui perdure. Mais nous restons confiants. ■ COMMUNIQUÉ
DIFCOM/FC
L’engagement politique, au plus haut niveau, et celui de l’ensemble du personnel ont été déterminants.
Afrique subsaharienne
Il en aura fallu, du temps et des morts, avant que des voix s’élèvent, le 25 septembre à l’ONU, pour s’inquiéter du sort de la Centrafrique. Et il n’est même pas sûr que cela suffise à briser l’indifférence de la communauté internationale. FRANÇOIS SOUDAN
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a scène, surréaliste, rappelle les épisodes tragicomiques du « Dadis Show » en vogue du côté de Conakry, à l’heure du prime time, il y a quelques années. Le 19 septembre, Michel Djotodia, président autoproclamé de la Centrafrique, convoque dans sa villa du camp de Roux, à Bangui, une vingtaine de journalistes et de diplomates pour assister à un exercice magistral de justice régalienne. La tête basse, entourés d’une escouade de militaires, un Sri-Lankais et un Camerounais présentés comme des trafiquants de diamants et de saphirs subissent les foudres du chef de la Séléka. « Vous êtes venus acheter illicitement nos diamants, vous êtes venus nous piller ! » tonne Djotodia. Maladroitement,leSri-Lankaissedéfendenexpliquant que les pierres proviennent du Cameroun et qu’il n’a fait que transiter par Bangui. Michel Djotodia l’interrompt, promet des « sanctions pénales » et ordonne dans la foulée le transfèrement des deux hommes à la très redoutée section de recherche et d’investigation de la gendarmerie. Il aurait pu les envoyer en prison, mais il y a longtemps qu’il n’y en a plus en Centrafrique. Il aurait pu aussi les faire interner à côté de chez lui, au camp de Roux, comme son ancien compagnon de rébellion Mohamed-Moussa Dhaffane, prestement arrêté sur son ordre il y a trois mois au sortir d’un tête-à-tête houleux, mais cela aurait fait désordre devant tous ces témoins. Nul n’a eu ce jour-là le mauvais goût de rappeler au président que la Séléka s’est largement financée sur le trafic de diamants et chacun a compris le message véhiculé par cette mise en scène : le Titanic centrafricain a bien un capitaine.
EXSANGUE. Il est vrai qu’en cette fin septembre le calme semble enfin être revenu à Bangui après dix mois de tempête qui ont profondément traumatisé ses habitants. Annoncée par Michel Djotodia le 13 septembre, la « dissolution » de la Séléka a eu pour effet la quasi-disparition dans les rues de la capitale des pick-up tagués « S’en fout la mort », qui terrorisaient la population et multipliaient les exactions, en même temps qu’elle a fourni une base juridique à un désarmement jusqu’ici purement symbolique des ex-rebelles (130 fusils N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
CENTRAFRIQUE
BORIS HEGER/POLARIS/STARFACE
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À qui récupérés en deux semaines, soit une infime fraction des armes en circulation). Reste que les « sélékistes » (lire p. 42) ne se sont pas évaporés. Pour beaucoup, ils ont quitté Bangui, où il n’y a plus grand-chose à piller, pour se redéployer en province, dans cet hinterland exsangue, depuis toujours zone de non-droit. Deux rapports récents de Human Rights Watch (HRW) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) permettent d’en savoir un peu plus sur l’ampleur des dévastations causées par les hommes de la Séléka à l’intérieur du pays depuis le début de la rébellion JEUNE AFRIQUE
la faute? en décembre 2012*. Le résultat de ces enquêtes partielles (elles ne concernent qu’une partie du Nord-Ouest et l’on ne sait encore que très peu de chose des violences commises ailleurs) est accablant. Dispensaires, écoles, églises, missions, bâtiments administratifs, entreprises, tribunaux, centres antisida, domiciles : tout a été dévalisé, détruit, incendié. Le listing de la razzia de la communauté catholique de Markounda, sur laquelle des pillards se sont abattus telle une nuée de criquets, ressemble à un inventaire à la Prévert. Les bancs de la chapelle, les sachets d’hosties, le linge et les chaussures des bonnes sœurs, le stock JEUNE AFRIQUE
p Patrouille dans les rues de Bangui, début septembre. Il n’y a que dans la capitale qu’un calme très relatif semble être revenu.
de Vache qui rit, les savons, les machines à coudre, les parapluies et les bouteilles de vin de messe… Rien n’a échappé à la vigilance de rebelles dont certains n’avaient pas 12 ans. Tout a été entassé dans la benne d’un semi-remorque volé qui a pris la direction des confins du Tchad et du Soudan. Ce siphonnage de la Centrafrique vers ses voisins du Nord, fruit d’un pillage d’anthologie à l’échelle d’un pays, dure depuis des mois, faisant au passage le bonheur de certains nationaux. Petite localité de la Vakaga, non loin de la frontière tchadienne, Boromata, où l’on circulait hier à dos d’âne, est ainsi devenue une bourgade l l l N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
BORIS HEGER/POLARIS/STARFACE
Afrique subsaharienne Centrafrique
p Dans la région de Bossangoa, des milices chrétiennes dites anti-balakas (à g.) se sont constituées en réaction aux exactions commises par les sélékistes. l l l prospère où 4x4, motos, Thuraya, matériel hi-fi et groupes électrogènes, tout droit issus du grand déménagement de Bangui, s’achètent et se vendent au marché central. Précision utile : Boromata est la ville de naissance de Michel Djotodia.
septembre. Atrocités contre atrocités. Alors que les commandants de la Séléka faisaient procéder à des exécutions sommaires précédées de séances de torture publiques, les anti-balakas incendiaient une mosquée avec ses fidèles, massacraient des villageois peuls et jetaient aux cochons les cadavres de leurs ennemis.
SECTAIRES. Les bonnes sœurs de Markounda ont
eu de la chance. Elles n’ont été ni violées ni tuées. Ce qui n’a pas été le cas ailleurs, à Bangui bien sûr, dans la Lobaye plus à l’ouest, mais aussi tout le long de cet arc de cercle le qui va de Bouar à Bouca en passant par Batangafo, fo, Dekoa, Mbrès et bien sûr Bossangoa. Ici, dans cette ceinture du coton à cheval sur trois provinces et à la population mélangée (on y trouve aussi bien des Gbayas, l’ethnie de l’exprésident Bozizé, que des Kabas, des Bayas ou des Korés), l’affrontement sanglant entre les hommes de la Séléka et les cultivateurs locaux a pris un tour ouvertement sectaire taire et religieux. Face aux exactions multiples commises par les petits seigneurs de la guerre sélékistes et leurs alliés éleveurs peuls mbararas aras – tous musulmans – se sont constituées des milices chrétiennes dites anti-balakas (« anti-machettes achettes »), avec à leur tête d’anciens chefs rebelles lles de l’Armée populaire pour la restauration de la démocratie (APRD), active dans la région jusqu’en 2011. Ce sont ces groupes d’autodéfense défense et non pas, comme on l’a dit, d’anciens anciens militaires fidèles à François Bozizé (même si certains d’entre eux se qualifient de « rebelles de Bozizé ») qui sont à l’origine des violents combats de Bossangoa début N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
TCHAD
Bossangoa Bouar
Boromata
Batangafo
SOUDAN Région de la Vakaga
SOUDAN DU SUD
Dekoa Bouca
Région de la Lobaye
Bangui 200 km
CAMEROUN RD CONGO
De ce trône branlant, Michel Djotodia n’a jamais réellement voulu. Le président, qui n’a plus aucun contrôle sur ses hommes, se sait très exposé.
CORENTIN FOHLEN DIVERGENCE
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JEUNE AFRIQUE
PHOTOS : BORIS HEGER/POLARIS/STARFACE
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p Le 9 septembre, toujours près de Bossangoa. Cet homme qui s’effondre en pleurs est musulman. Il vient d’échapper à un massacre qui a coûté la vie à six personnes.
À Bangui, dix-sept hors-la-loi sélékistes ont été condamnés, le 11 septembre, à huit ans de prison. Un premier pas sur la voie hasardeuse de la lutte contre l’impunité? Un geste symbolique plutôt, et vraisemblablement sans lendemain, tant il apparaît impossible pour Michel Djotodia, qui de l’avis généraln’anipolitiqued’ensemblenivisiond’avenirpour son pays au-delà de sa propre survie, de contrarier ceux qui l’ont fait roi. Sans doute faut-il lui rendre justice : de ce trône branlant, de ce pouvoir sous surveillance exposé à la moindre balle perdue, il n’a jamais réellement voulu, ainsi qu’il le confiait récemment à un visiteur. Rébellion identitaire portant les revendications des populations oubliées de la Vakaga (ces Goulas et Roungas frustrés de ne pas être considérés comme de « vrais » Centrafricains), la Séléka n’a jamais été un mouvement de libération nationale. C’est Éric-Neris Massi, le fils adoptif de Charles Massi, qui depuis Paris, où il faisait le tour des médias, a donné à ce mouvement un habillage et une ambition politiques totalement artificiels. Et ce sont des politiciens centrafricains opposés à Bozizé et à son régime qui ont convaincu Djotodia que Bangui devait être son objectif final. La griserie des villes qui tombaient les unes après les autres, l’écoute des radios étrangères qui relataient leurs victoires en décomptant le nombre de kilomètres qui les séparaient de la capitale, l’odeur du pillage reniflée jusqu’au Darfour et au Ouaddaï par tout ce que la région compte de porteurs de kalachnikovs ont fait le reste. Le 24 mars 2013, c’est un Michel Djotodia poussé par une rébellion composée à 80 % de Soudanais et de Tchadiens et sur laquelle il n’avait presque aucun contrôle qui est entré au Palais de la renaissance sur les talons d’un Bozizé en déroute. JEUNE AFRIQUE
À l’abandon Sur les
3 600 hommes initialement prévus,
la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (Misca) a déployé
1 400
soldats et policiers congolais, camerounais, gabonais et tchadiens Il faudrait
195
millions de dollars pour aider la Centrafrique,
37 %
et seulement ont été mis sur la table
De ce drame, qui, en marge de l’Assemblée générale de l’ONU à New York, semble enfin mobiliser une partie de la communauté internationale, l’Histoire retiendra que tous les acteurs ont failli par irresponsabilité, calcul ou passivité. Excédés par les atermoiements de François Bozizé et ce qu’ils percevaient comme une volonté de sa part de saboter les accords léonins de Libreville, les chefs d’États d’Afrique centrale ont ordonné à leurs troupes de ne pas s’opposer à l’assaut final sur Bangui. Trois semaines plus tard, à N’Djamena, les mêmes octroyaient à Djotodia une reconnaissance formelle et lui assignaient une feuille de route ne comportant aucune disposition relative au rétablissement de l’État de droit et au respect des libertés fondamentales. Mobilisés sur le front malien, gênés aux entournures par les complexités passées, souvent peu reluisantes, d’une relation incestueuse avec la Centrafrique, les Français ont eux aussi péché par indifférence. La mise à sac de Bangui s’est déroulée sans que leur contingent sur place n’intervienne, et il a fallu attendre le 22 août pour que François Hollande, choqué par le récit que lui a rapporté une délégation d’ONG reçue à l’Élysée, reconnaisse que Paris avait sous-estimé la gravité de la situation. PROFANATIONS. Pourtant, pour qui savait lire et
écouter, le vrai visage de la Séléka était connu dès janvier 2013 puisque chaque prise de localité par la coalition rebelle s’accompagnait de violences, de pillages, de profanations de lieux de culte, de viols et souvent de meurtres, ainsi que le rapportaient déjà les évêques centrafricains et certains médias – dont Jeune Afrique. Beaucoup moins complexe et onéreuse que celle menée par l’ONU N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
Afrique subsaharienne Centrafrique dans l’est de la RD Congo, une opération lancée par les Français et la Force multinationale des États de l’Afrique centrale (Fomac), conjointement à de fortes pressions exercées sur François Bozizé pour l’amener à partager son pouvoir avant la prochaine élection présidentielle dont il aurait été exclu, était tout à fait possible. Or elle n’a jamais été envisagée et, en laissant tomber Bozizé comme une mangue mûre, voisins, protecteurs et ex-puissance coloniale ont troqué le mal pour le pire puisqu’il n’est plus question aujourd’hui dans leurs discours que des risques d’une « somalisation » de la Centrafrique. Quant aux leaders politiques locaux qui ont cru bon de soutenir la Séléka en escomptant qu’elle tirerait pour eux les marrons du feu, ils le paient déjà d’un lourd discrédit auprès des futurs électeurs. Dans ce pays failli, où ce qui reste d’État survit grâce à la générosité du président congolais Sassou Nguesso (puisque aucun impôt, aucune taxe ne rentre plus et que les « généraux » de la
En laissant tomber Bozizé comme une mangue mûre, voisins, protecteurs et ex-colons ont troqué le mal pour le pire.
Séléka ont la haute main sur le diamant, le bois et tout ce qui passe à leur portée), il reste quand même une certaine forme d’optimisme décalé. Le 18 septembre, le ministère du Tourisme annonçait la tenue à Bangui d’un séminaire de formation de ses cadres et agents sur le thème « faire de la RCA une destination touristique par excellence ». La Centrafrique, que François Hollande a qualifiée de « petit pays ravagé » dans son « cri d’alerte » du 24 septembre devant l’ONU, bien que sa superficie soit presque équivalente à celle de la France, est certes une contrée superbe aux richesses naturelles insoupçonnées, mais la perspective d’y voir atterrir un charter de touristes est pour l’instant aussi probable, hélas, que l’installation d’un Club Med sur le sable blanc de Mogadiscio Beach. l * « Je peux encore sentir l’odeur des morts » (HRW) et « Un pays aux mains des criminels de la Séléka » (FIDH), tous deux parus en septembre 2013.
t Dans leurs rangs, beaucoup de ralliés de la dernière heure, incontrôlables.
PATRICK FORT/AFP
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Sans foi ni loi Les anciens rebelles ne respectent rien ni personne. Pas même l’homme qu’ils ont installé au pouvoir.
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epuis sa création en août 2012, la composition et les rapports de force au sein de la Séléka, cette alliance de circonstance, ont évolué. Au moment des premières offensives de décembre 2012, la Séléka « originelle » était composée principalement de trois factions rebelles : l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR), de Michel Djotodia, la Convention des patriotes pour la justice et la paix (CPJP), de Nourredine Adam, N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
et la Convention patriotique du salut kodro (CPSK), de Mohamed-Moussa Dhaffane. Pour parvenir à leurs fins, les deux premiers ont recruté des centaines de mercenaires tchadiens et soudanais. SEIGNEURS DE GUERRE. Il y avait alors
un peu plus de 5 000 hommes. Comment est-on arrivé au chiffre de 25 000 éléments avancé par les nouvelles autorités? Selon la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH),
« cette croissance s’explique par le ralliement d’individus désœuvrés appâtés par l’argent et le pouvoir […] au moment où la Séléka acheminait le fruit de son pillage dans ses villes et villages au Tchad, au Soudan, au Soudan du Sud et au nord de la Centrafrique ». Trait d’union entre les différentes entités rebelles, désigné chef parce que son mouvement était le plus puissant, le président de la transition, Michel Djotodia, a rapidement perdu la main. Nommé à la tête des services de renseignements fin août, Noureddine Adam est le seul historique à avoir gardé une véritable emprise sur les seigneurs de guerre. Sur le terrain, ces rebelles autoproclamés « colonel » ou « général » font la loi. Ils s’organisent par zone ou district, contrôlent des groupes allant d’une dizaine à une centaine d’hommes, établissent des barrages, rackettent la population. Leurs liens de subordination avec les leaders de l’ex-rébellion sont plus ou moins lâches. « Le tout ne forme pas un ensemble uniforme. Il y a un contraste entre la Séléka historique principalement centrafricaine et ses membres étrangers qui, aujourd’hui majoritaires, se comportent comme en pays conquis », confie un diplomate. Au point que la tension entre les deux entités est, par endroits, palpable. l VINCENT DUHEM JEUNE AFRIQUE
Afrique subsaharienne CÔTE D’IVOIRE
KKB, l’homme qui voulait « tuer » le père Ambitieux, Bertin Konan Kouadio a fini par se retourner contre son mentor en politique, Henri Konan Bédié. Jusqu’à lui disputer la tête du parti, le PDCI, lors du congrès de début octobre.
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l s’y voit déjà. « Je gagnerai ce congrès, fanfaronne Bertin Konan Kouadio, dit KKB. Si je n’en avais pas la certitude, je n’aurais jamais été candidat. » À bientôt 46 ans, le président des jeunes du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) et député de PortBouët brigue la présidence de son parti, quitte à s’opposer frontalement à l’ancien président Henri Konan Bédié. Ni plus ni moins. Ce matin de septembre, KKB est à Paris. Entouré de quatre membres « de son équipe », il parle avec entrain et parle beaucoup. En un peu plus de un an, lui l’outsider que personne n’avait vu venir est devenu une sorte de bête médiatique qui enchaîne les interviews et multiplie les déplacements. Chaque fois, il distille phrases-chocs et formules qui font mouche. Le PDCI, répète-t-il, « n’est plus que l’ombre de lui-même et a perdu tous les combats : la présidentielle de 2010, les législatives de 2011 et les municipales et les régionales de 2013. Les dirigeants actuels doivent passer la main ». Comprendre : Bédié, 79 ans dont vingt à la tête du parti, doit prendre sa retraite. POIDS LOURDS. « Courageux »,
« audacieux » pour les uns, « agitateur », « ingrat » pour les autres (Bédié lui-même l’a qualifié de « soldat perdu »), KKB divise. Il y a encore quelques mois, peu le prenaient vraiment au sérieux. Il agaçait. Les avis se sont faits plus tranchés encore lorsqu’il a paru ouvrir la voie à la contestestation. En janvier, c’est Kouassi Yao, ex-secrétaire général de la présidence de la République sous Bédié, qui a annoncé sa candidature. En août, Alphonse Djédjé Mady, secrétaire général du parti, a fait de même lors d’une conférence de presse à laquelle assistaient plusieurs poids lourds du PDCI, dont Georges Ouégnin, ancien directeur du protocole d’État. Quelques jours plus tôt, une vingtaine de députés PDCI avaient publié une lettre ouverte invitant Bédié à s’effacer. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
congrès du parti. Revenant alors d’un exil de deux ans en France, Bédié avait tout de même réussi à s’imposer. À l’époque, un homme s’était battu pour lui : Bertin Konan Kouadio. « J’étais le petit chouchou de Bédié, reconnaît-il. Pendant son exil, à son retour et jusqu’à très récemment, il m’écoutait. » Les observateurs de l’époque se souviennent d’une relation presque filiale entre les deux hommes. Leur rencontre remonte au milieu des années 1990. Bédié a succédé à Félix
« Ce n’est pas nous qui lui demandons de partir, ce sont les statuts du parti, qui fixent la limite d’âge à 75 ans », s’emporte KKB. Oui, mais la volonté du « Sphinx de Daoukro » de changer les statuts lors du congrès du PDCI, prévu du 3 au 5 octobre à Abidjan, est un secret de Polichinelle. Et rares sont les observateurs de la vie politique Il y a quelques mois, rares étaient ivoirienne à ne pas parier ceux qui le prenaient au sérieux, sur sa reconduction. lui l’ancien chouchou du chef. « Bédié n’est pas né de la dernière pluie. Il maîtrise mieux que quiconque les textes et les Houphouët-Boigny à la tête du pays tandis rouages du parti », dit l’un d’eux. « Les que KKB étudie l’allemand à l’univerbarons du PDCI, ceux qui vont voter lors sité de Cocody (Abidjan). Sur les camdu congrès, sont acquis à sa cause, avance pus, il est de ceux qui s’opposent à la un autre. Beaucoup lui doivent d’être au Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (Fesci), dirigée successiposte qu’ils occupent aujourd’hui. » vement par Martial Joseph Ahipeaud, La « machine » Bédié a déjà montré son efficacité en 2002, lors du dernier Guillaume Soro puis Charles Blé Goudé. « Nous étions adversaires, raconte KKB. Et s’ils avaient le dessus, c’était toujours par la violence. Nous, nous privilégiions le combat d’idées. » KKB milite au sein de la Cellule estudiantine de réflexion et d’action concrète (Cerac, pro-PDCI) puis à la Jeunesse du PDCI, créée en 1991 – une organisation dont il prendra la tête en 2003. TRAHISON. Duranttoutescesannées,KKB
VINCENT FOURNIER/J.A.
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a toujours soutenu Bédié. Même au plus fort du débat sur l’ivoirité ? « À l’origine, c’était un concept culturel destiné à rassembler les Ivoiriens. C’est ensuite qu’elle a été galvaudée, avec les conséquences que l’on connaît. Il nous faut refermer cette triste parenthèse de notre histoire. » Il ajoute: « Si nous avions été habiles et avions admis dès 1993 qu’Alassane Ouattara devait participer au jeu démocratique, il n’aurait pas eu l’audience qu’il a eue par la suite. C’est le PDCI qui a créé Ouattara. » Critique, KKB ne l’est en réalité que depuis peu. Certains militants parlent de frictions avec Bédié apparues en 2007, au moment de la formation du JEUNE AFRIQUE
NABIL ZORKOT POUR J.A.
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p Peut-être y a-t-il là une part d’autopersuasion, mais, à bientôt 46 ans, il se dit certain de l’emporter.
nouveau gouvernement. KKB aurait peu apprécié que son nom ne soit pas proposé au Premier ministre Guillaume Soro. Mais lui a une autre version : « Depuis la défaite de Bédié à la présidentielle de 2010, je considère que ma mission à ses côtés est terminée. Sa campagne électorale a été une démission totale. Bédié a trahi les militants, il a trahi la mémoire d’Houphouët, il m’a trahi. » Peut-être. Mais en 2011, cela ne l’a pas empêché de se faire élire député sous la bannière du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), une coalition où l’on retrouve le PDCI et le Rassemblement des républicains (RDR) de Ouattara.
À la veille du congrès, l’alliance avec le RDR était dans toutes les têtes. La reconduction de Bédié rendrait peu probable une candidature PDCI à la présidentielle de 2015, alors que Ouattara a déjà annoncé qu’il chercherait à être réélu. Mais ce scénario, ni KKB, ni Djédjé Mady, ni Kouassi Yao ne veulent en entendre parler. « La vie du PDCI doit-elle s’arrêter là où s’arrête Bédié ? S’il ne veut pas être candidat, on peut trouver quelqu’un d’autre », lâche KKB. L’histoire classique du fils qui veut tuer le père ? L’affiche est alléchante. Mais un homme d’appareil comme KKB croit-il vraiment pouvoir l’emporter avec si peu d’appuis de cadres du parti ? Pense-t-il,
IL LEUR FAUDRA METTRE LA MAIN À LA POCHE RÉUNI LE 19 SEPTEMBRE, le bureau politique du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) a fixé à 18 millions de F CFA (27 000 euros), non remboursables, la somme nécessaire pour pouvoir être candidat à la tête du parti. Cette JEUNE AFRIQUE
participation, expliquet-on, doit servir à l’organisation du congrès, mais les candidats dissidents y voient une volonté de les empêcher de se présenter. « C’est une décision hallucinante, s’indigne Alphonse Djédjé Mady, secrétaire général du
PDCI. Il faut à peine plus pour pouvoir se présenter à la présidentielle ! Et encore, c’est remboursable si vous obtenez 10 % des voix ! » Dans le camp de Bertin Konan Kouadio, on assure que la somme sera H.N. payée. l
dans cette partie de billard à trois bandes, pouvoir se présenter en 2015 ? Roule-t-il pour quelqu’un d’autre ? À Abidjan, les suppositions vont bon train. On avance le nom de Charles Konan Banny, l’ancien Premier ministre, qui vient de se prononcer pour la présence d’un candidat PDCI dans la course à la magistrature suprême, ou celui de Guillaume Soro, le président de l’Assemblée nationale, qui viserait lui 2020… INSOLENT. Lorsqu’on lui pose la question,
l’intéressé esquive. Il préfère parler de ses atouts de candidat, de son admiration pour Houphouët-Boigny et de ses attaches familiales… Né dans le sud de la Côte d’Ivoire d’une mère dida et d’un père baoulé (planteur de cacao), il parle volontiers de sa demi-sœur bétée et de sa femme mi-apollo, mi-agnie. « Je suis le fruit d’un métissage ivoirien et j’ai des liens très fort avec ce pays », dit-il. Profession de foi en main, il détaille les premières mesures qu’il mettrait en place s’il était élu, comme « l’association plus grande des militants à la prise de décision ». « Je ne serai pas un président rancunier, mais rassembleur », promet-il. Avant d’ajouter, un brin insolent: « J’entretiendrai la chaîne des générations au sein du parti, car c’est elle qui fait notre force. » l HABY NIAKATE N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
PIERRE BOISSELET
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p Des ex-combattants dansent en attendant le couvre-feu au camp de Mutobo. RWANDA
À bout de souffle Épuisés par deux décennies de guerre, traqués au fin fond des forêts congolaises, près de 10 000 anciens rebelles des FDLR sont rentrés dans leur pays depuis 2001. Reportage.
À
la vue du dictaphone, Claude s’inquiète. « Est-ce vraiment nécessaire ? » demande-t-il. Ce jeune homme de 19 ans, né en RD Congo de parents rwandais, a pourtant connu des situations autrement plus dangereuses. Pendant plus de un an, il a combattu aux côtés des rebelles hutus rwandais des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), dans le Nord-Kivu. Un jour, il s’est échappé à moto et a trouvé refuge dans un camp de Casques bleus, dans le territoire de Masisi, avant d’être rapatrié. C’était en juin 2013. Il voyait son pays pour la première fois. Trop nouveau, trop frais pour oublier ce que lui avaient appris les FDLR. C’est toujours pareil, raconte Jean Sayinzoga, le président de la Commission de démobilisation et de réintégration à Kigali. « On leur dit que s’ils se rendent, s’ils rentrent au Rwanda, on va leur faire enregistrer une interview avant de les exécuter. Et que cet enregistrement sera diffusé à la radio pour faire croire qu’ils sont vivants. » En cette fraîche soirée, dans le centre de Mutobo, sur les hauteurs de l’Ouest N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
18 ans lorsqu’il a quitté le Rwanda pour se réfugier à Bukavu. C’est là qu’il a été recrutéparl’anciennearméerwandaiseen déroute. « C’était en 1995, se souvient-il. On appelait ça la “mobilisation civile”. Le but était de reconquérir le pays. » Mais pour lui, rien ne se passera comme prévu.
rwandais, 80 ex-rebelles interprètent BROUILLE. Soutenus par le FPR, les danses traditionnelles et chants patriorebellesdeLaurent-DésiréKabila,quin’est tiques en attendant le couvre-feu de pas encore président, pénètrent dans l’est 20 heures. Comme presque 10000 anciens du Congo. Jean-Paul Mbabazi s’enfonce combattants avant eux (des FDLR à plus dans la forêt, combattant l’armée rwande 80 %), ils suivent un stage de « réintédaise « en cours de route ». Tingi-Tingi, Kisangani, Mbandaka… En deux mois, gration » : deux mois pour ceux qui sont il parcourt plus de 2 000 km à pied, avec ici de leur plein gré, trois mois pour les autres. Le temps de leur inculquer les des milliers de réfugiés, et finit par gagner valeurs du nouveau Rwanda (bannisseBrazzaville. Jusqu’à ce qu’un nouveau ment des divisions ethniques, discipline, rebondissement de la politique régionale travail, amour de la patrie…) et quelques le ramène au cœur du conflit : la brouille conseils de base: comment se entre Kinshasa et Kigali. servir d’une carte bancaire ou « En 1998, Kabila À deux, se protéger du sida. nous a demandé c’est mieux Dans leur immense majode nous battre … rité, ils ont fui un pays à feu contre les Rwandais. Le programme de réintégration es et à sang, en 1994, devant Nous étions trois t lancé en 2001. En un l’avancée des troupes du brigades [plus de an, près de 2 400 ex-com ba Front patriotique rwandais 7 000 hommes]. Après déposent les ar ttants mes. Jamais (FPR, aujourd’hui au pouune formation de un un tel chiffre ne sera plus voir). Le récit de ces années mois, certains sont mois égalé. Toutefoi s, entre mars 2009 et m d’errance dans le chaos partis par dans la Province ars que Kinshasa et 2010, après d’un Congo déchiré par les orientale, d’autres au or Kigali se sont unis pour leur donner guerres tient, le plus souKasaï. Moi, j’étais au Ka la chasse, 1 200 hommes vent, de l’épopée tragique. Katanga aux côtés des Ka acceptent d’êt re démobilisés. Jean-Paul Mbabazi avait Zimbabwéens. » Zi JEUNE AFRIQUE
Coulisses
PRESSIONS. Selon Jean Sayinzoga, la réintégration est un succès dans 75 % des cas. Et les autres ? Ce sont ceux qui, parfois traumatisés par les années de guerre, ne parviennent pas à subvenir à leurs besoins. Une poignée d’entre eux ont même été accusés de complicité dans les attentats à la grenade qui touchent périodiquement le pays depuis 2010. « Les ex-FDLR sont vulnérables à toutes sortes de pressions et de manipulations, s’inquiète Carina Tertsakian, chercheuse à HumanRightsWatch.Certainssontmême recrutés par des militaires rwandais qui les renvoient au Congo rejoindre les rebelles du Mouvement du 23-Mars », affirmet-elle, ce que Kigali dément. D’autres décident d’eux-mêmes de retourner dans le pays voisin. « Parfois, ils y ont encore de la famille, affirme Jean Sayinzoga. Et puis certains n’arrivent pas à se passer de la vie de combattant. » l PIERRE BOISSELET, envoyé spécial JEUNE AFRIQUE
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TOGO LA PLUME DANS LA PLAIE Kofi Yamgnane n’a pas sa langue dans sa poche. Dans Afrique, introuvable démocratie, à paraître le 24 octobre aux éditions Dialogues, l’ancien maire socialiste de la petite ville de Saint-Coulitz, en Bretagne, n’épargne personne. Ce pamphlet trahit le désenchantement de cet ancien ingénieur de 68 ans qui a mis fin à sa carrière politique en France en 2008 pour pouvoir se présenter à la présidentielle auTogo. À l’époque, il disait vouloir « payer sa dette », lui qui a quitté son pays natal avec une bourse de l’État en 1964. Empêché d’être candidat pour des motifs qu’il juge fallacieux,Yamgnane règle ses comptes avec les politiques, les compagnies minières et pétrolières et même avec ses compatriotes qui ont renoncé à tout sens critique pour s’abandonner aux Églises évangéliques… C’est sûr, il va encore se faire des amis. l Kofi Yamgnane (ici en 2008) sortira fin octobre un livre intitulé Afrique, introuvable démocratie.
VINCENT FOURNIER/J.A.
En 2001 est lancé le programme rwandais de réintégration. Un premier contingent de 1 750 ex-rebelles rentre cette année-là. Mais, dans les forêts de l’est du Congo, les FDLR continuent de croire en la possibilité d’une reprise du pouvoir par les armes. « Nous avions une stratégie pour retourner la population du Rwandaennotrefaveur,expliqueMbabazi. Et puis nos chefs disaient être en contact avec des sponsors étrangers. Des Blancs. Je n’ai jamais su de qui il s’agissait. » En fait, les FDLR s’affaiblissent, en particulier au cours de l’opération Umoja Wetu, lancée conjointement en 2009 par Kinshasa et Kigali. Les anciens rebelles arrivent alors par centaines à Mutobo. Depuis, le rythme s’est ralenti. Ces trois derniers mois, il a même été au plus bas, la collaboration entre la RD Congo et le Rwanda ayant cessé. Et puis ils ne seraient plus que 1 500 hommes, selon le dernier rapport des experts de l’ONU. « Dans la forêt de Walikale, nous menions une vie misérable, explique Mbabazi. Pour survivre, le seul moyen était de nous “ravitailler” auprès de la population locale. » À Mutobo, ils sont donc rééduqués. On les forme à un métier, on leur remet un « kit de démarrage » qui leur permettra de débuter leur nouvelle vie professionnelle et 180 000 francs rwandais (200 euros)… Mais les éventuelles poursuites et condamnations pour génocide, suspendues pendant leur séjour au camp, peuvent être réactivées dès leur sortie.
Afrique subsaharienne
LIBERIA SANS APPEL LeTribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) n’a rien voulu entendre. Le 26 septembre, Charles Taylor, l’ex-président du Liberia, a été condamné en deuxième instance à cinquante ans de prison pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre – une confirmation de la peine prononcée en avril 2012. Il a été reconnu coupable d’un soutien aux auteurs d’exactions commises pendant dix ans en Sierra Leone. À 65 ans,Taylor a peu de chances de sortir un jour.
NIGERIA IL COURT, IL COURT… Les autorités ont sans doute bien fait de n’apporter qu’une confiance relative aux déclarations de l’armée selon lesquelles le chef de la secte
islamiste Boko Haram avait été tué début août. Le 25 septembre, une vidéo montrant Abubakar Shekau bien vivant a été publiée au Nigeria. Ladite vidéo n’est pas datée, mais Shekau y fait allusion à plusieurs attaques meurtrières perpétrées récemment dans l’État de Borno.
Précision À la suite de la publication, dans J.A. no 2750, de notre article intitulé « Karim, Bibo et le magot de Monaco », et afin d’éviter toute confusion, il convient de préciser qu’Ibrahim Aboukhalil (dit Bibo Bourgi) n’est apparenté que par son côté maternel à la très vaste famille Bourgi, honorablement connue au Sénégal. Cette dernière ne saurait, de près ou de loin,être concernée parcequelui reproche la justice sénégalaise.
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Spécial États-Unis
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Afrique
DIPLOMATIE
Africa
is beautiful
AFP PHOTO / SAUL LOEB
Longtemps délaissé, le continent éveille peu à peu l’intérêt de la Maison Blanche. Pour des raisons avant tout commerciales et sécuritaires.
p Le président Barack Obama, à Dakar, le 27 juin. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
JEUNE AFRIQUE
Spécial États-Unis PASCAL AIRAULT,
B
envoyé spécial à Washington
Afrique
en matière de santé, de réforme des systèmes de sécurité et d’émancipation des femmes », a soutenu, devant le Sénat en juillet, Linda Thomas-Greenfield, la secrétaire d’État adjointe pour les affaires africaines (lire « Tribune » p. 50), avant d’évoquer les success-stories des pays anglophones comme la Tanzanie, le Ghana, le Lesotho… Lors de son périple africain, Obama a proposé deux nouvelles initiatives. La première, « Power Africa », vise à apporter l’électricité à 20 millions de foyers en offrant un appui technique et en aidant les gouvernements à mobiliser des investissements du secteur privé. Ce plan, dont l’enveloppe prévue est de 7 milliards de dollars (environ 5 milliards d’euros), devrait bénéficier à l’Éthiopie, au Ghana, au Kenya, au Liberia, au Nigeria et à la Tanzanie. Le second programme, « Trade Africa », concerne les pays de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC). Il porte sur l’intégration régionale des procédures douanières destinées à stimuler le commerce. Il se fixe pour but d’accroître de 40 % les échanges avec cette région dynamique.
arack Obama accueillera un sommet des chefs d’État africains en 2014. On n’en connaît encore ni la date, ni le lieu, ni la liste des participants. Mais c’est, en tout cas, une première dans l’histoire des relations de la grande Amérique avec l’Afrique. Si le continent ne figure toujours pas parmi les priorités de la politique étrangère des États-Unis – Obama y porte une attention limitée –, la Maison Blanche ne s’en désintéresse pas pour autant, surtout depuis que cette région du monde affiche une croissance pérenne. Après tout, la France, le Japon, la Chine, l’Inde, la Turquie, l’Europe et l’Amérique du Sud ont déjà, eux, leurs sommets avec le continent. Les Américains commencèrent à s’y intéresser lors de la décolonisation. En 1959, une sous-commission sur l’Afrique était créée au sein de chacune des deux commissions des Affaires étrangères du Congrès. Un an plus tard, la CIA se dotait d’une division spécialisée et les premières ambassades furent ouvertes. Les FRAGMENTÉ. Les questions e États-Unis jouèrent un rôle non sécuritaires restent une priorité, négligeable dans les conflits qui avec 250 millions de dollars (sans déchirèrent le continent pendant compterl’AfriqueduNord)consadu 8 au 11 octobre 2013, à Chicago la guerre froide. Il fallait absocrés chaque année à la coopélument éviter que certains pays ration militaire. Le Partenariat Sommet d’affaires États-Unis-Afrique, organisé basculentdanslegironsoviétique. transsahariencontreleterrorisme par le Corporate Council À la suite des attaques du 11 sep(TSCTP),crééen2005etdotéd’un on Africa (CCA) tembre 2001, Washington a accru budget de 8 millions de dollars, sa coopération militaire pour des a pour objectif d’aider tous les raisons sécuritaires… et économiques. Les majors pays de la bande sahélo-saharienne à lutter contre pétrolières texanes ont notamment pris pied dans les organisations terroristes. Le volet militaire du le golfe de Guinée, ce qui leur a permis d’être moins TSCTP est placé sous le Commandement des forces dépendantes du Moyen-Orient. américaines en Afrique (Africom), basé à Stuttgart, en Allemagne. Washington organise régulièrement HOLLYWOODIEN. Lors de son premier mandat, des exercices réunissant les forces américaines, Obama ne s’est déplacé que deux fois sur le contiafricaines et de pays de l’Otan comme la France et nent: en Égypte, au Caire, en juin 2009, et au Ghana, l’Espagne, et garde une forte présence à Djibouti afin de renforcer la lutte contre les Shebab et la à Accra, un mois plus tard. Une déception pour les Africains, qui attendaient mieux d’un président aux piraterie. Les forces spéciales sont positionnées dans le Sahel, où elles traquent Joseph Kony, le origines kényanes. Il a corrigé le tir en effectuant, du chef de l’Armée de résistance du seigneur (LRA). 26 juin au 3 juillet 2013, sa première tournée dans des pays – Sénégal, Afrique du Sud et Tanzanie – Les États-Unis envoient aussi des Peace Corps où les dirigeants ont été démocratiquement élus. (plusde8000hommesparan,dont45%enAfrique). Desvolontairesquiserventaussiderelaisd’informaLes storytellers avaient concocté un scénario très tion,permettantdeprendrelepoulsdespopulations hollywoodien, organisant des visites à la Maison des esclaves de l’île de Gorée, au Sénégal, haut lieu et des tensions ethnico-politico-sociales. Enfin, la de la déportation vers l’Amérique, puis à Robben MaisonBlancheattribuedenombreusesboursesaux Island, le bagne où fut incarcéré Nelson Mandela. hommes politiques, officiers, journalistes et leaders d’opinion. Objectif : promouvoir une génération Sur le fond, pas de révolution. Les piliers de la politique africaine des États-Unis restent le soutien de dirigeants convertis aux idéaux américains. À à la sécurité régionale, la démocratie, la bonne Washington,uneimpressionnantemachinesuittous gouvernance, la réforme de la justice, la lutte contre les dossiers africains. Toutefois, cette organisation la corruption, la promotion des droits de l’homme, reste très fragmentée, et les querelles internes sont l’émergence de la société civile, le renforcement fréquentes. En fait, peu de dossiers franchissent le des libertés individuelles. « Nos actions ont permis cap de l’administration pour arriver sur le bureau du secrétaire d’État et, a fortiori, du président. l d’améliorer les conditions de vie sur le continent,
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LIRE AUSSI L’interview de Florizelle Liser, chargée du commerce extérieur avec l’Afrique
INTERVIEW
Michael J. Bittrick « Sans sécurité, l’Afrique ne décollera pas » Crises, appui militaire au long cours, dialogue avec Pékin : le directeur adjoint chargé des affaires régionales et sécuritaires au bureau Afrique du département d’État intervient sur tous les fronts. JEUNE AFRIQUE: En quoi la politique africaine de l’administration Obama a-t-elle évolué depuis cinq ans? MICHAEL J. BITTRICK : Le continent a
connu des bouleversements avec l’avènement du Printemps arabe, des changements de régime au sud du Sahara, de nouvelles menaces sécuritaires: piraterie, terrorisme… Notre politique s’adapte évidemment à ces évolutions, mais repose toujours sur quatre piliers - la démocratie et la bonne gouvernance, l’appui à la croissance des économies et à l’essor des marchés,lapaixetlasécurité,l’aideaudéveloppement: des domaines indissociables les uns des autres, car sans sécurité il est difficile de promouvoir les investissements et le commerce. Et il sera donc très difficile pour l’Afrique de décoller. Quelle est votre stratégie à l’égard des nouvelles menaces sécuritaires?
Nousattachonsbeaucoupd’importance à la gestion des questions sécuritaires par les gouvernements pour qu’elles ne soient pas du seul ressort des dirigeants, mais puissentêtrecontrôléesparlasociétécivile et les parlementaires. Nous appuyons la mise en place de forces professionnelles, sous l’égide de l’ONU, de l’Union africaine ou de la coopération bilatérale, et sommes trèsprésentsdansledomainedelaréforme des armées, de la professionnalisation de la police et dans la formation des Casques bleus. Notre budget consacré à l’Afrique subsaharienneestde250millionsdedollars [185 millions d’euros] pour l’assistance militaire, de 60 millions pour la police, et de8milliardspourl’ensembledenosautres domaines d’intervention sur le continent. Entre le Pentagone, Africom, les agences et le département d’État, comment coordonnez-vous votre action en Afrique?
C’est une grosse machine qui nécessite de nombreuses réunions de concertation. En cas de crise comme celle qu’a connue le Mali, on organise des vidéoconférences au moinsdeuxfoisparsemainepourrépondre à l’évolution de la situation. Nous participons aussi à toutes les rencontres sur N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
les Grands Lacs, la question des deux Soudans ou la Somalie. On dispose d’une large palette d’options pour intervenir au niveau politique, diplomatique ou des projetsdeterrain,etlesdéfissontmultiples. Il faut résoudre les questions de police locale, de sécurité des frontières, endiguer les menaces terroristes, sans oublier les dimensions économiques, sociales et humanitaires. Car la réponse sécuritaire doit être appuyée par des programmes plus larges de développement. La situation dans le nord du Mali vous inquiète-t-elle toujours?
C’est un gros défi pour le président Ibrahim Boubacar Keïta. La question des Touaregs et des groupes armés arabes du nord du pays a aussi une dimension politique. Nous sommes prêts à aider les autorités pour réintégrer les différentes forces dansl’arméenationale.Celanécessiterade la formation, de l’assistance technique. Et detravaillersurlesaspectsderéconciliation nationale, de cohésion sociale, de décentralisation, pour réinstaurer un dialogue constructif entre les communautés.
donne raison. Le nouvel exécutif a certes encore du travail: il lui faut procéder au retour de l’administration, de l’armée et de lapoliceendehorsdeMogadiscio,appuyer ce processus par des programmes locaux de santé et d’éducation… Mais il sera alors plus difficile pour les Shebab d’engager de nouvelles recrues. Autre enseignement de cette crise: il faut consolider l’architecture de sécurité africaine en mettant en place la Force en attente et en travaillant avec les autresforcesrégionales,afinqu’ellessoient plus opérationnelles et puissent répondre rapidement, dans un délai d’une semaine à un mois, à toute menace potentielle. Pourquoi la RD Congo a-t-elle tant de mal à reconstruire une armée crédible?
Ce n’est pas qu’une question sécuritaire. Il faut reconstruire un État. Notre appui aux Casques bleus, au gouvernement, aux programmes économiques et sociaux doit permettre d’atteindre cet objectif. Il faut accentuer les efforts de sensibilisation en direction du Rwanda et de l’Ouganda. Le déploiement récent de la brigade d’Afrique australe à l’est du pays permet de mieux
Le problème de la RD Congo n’est pas que sécuritaire. Il faut reconstruire un État. Vous traquez Joseph Kony et les tueurs de la LRA depuis des années. En vain…
Celas’expliquenotammentparlanature du terrain. Le Pentagone et le département d’État travaillent en partenariat avec les forces de sécurité ougandaises. Nous menonsaussiuneactionaveclaRDCongo, le Soudan du Sud et la Centrafrique. Nous avons enregistré quelques succès, avec la baisse des attaques et les défections de rebelles de la LRA. Nous ne cessons pas de lespoursuivre.C’estunequestiondetemps. Êtes-vous optimiste pour la Somalie?
Raisonnablement. Beaucoup ont douté de notre stratégie d’appuyer l’Amisom, la forceafricaine,etlegouvernementdetransition, mais l’évolution de la situation nous
contrôler ce qui se passe aux frontières et d’empêcher que les ressources locales ne servent à alimenter des milices. Que change la montée en puissance des intérêts chinois sur le continent?
Nous souhaitons que Pékin s’implique davantage avec la communauté internationale et africaine sur les questions sécuritaires. Les entreprises chinoises ont intérêt à ce que leurs activités ne soient pas pénaliséesparcesproblèmes.SilesChinois ont eu l’habitude de travailler seuls par le passé, ils évoluent, puisqu’ils participent à l’opérationdemaintiendelapaixdel’ONU au Mali. Nous leur disons: rejoignez-nous autour de la table de discussion! l Propos recueillis à Washington par PASCAL AIRAULT JEUNE AFRIQUE
Photo: JHU • CCP COMMIT Project 2010
Des milliers de vies ont été sauvées par les programmes de lutte contre le paludisme. A chacune des plus de 115 entreprises africaines qui luttent contre le paludisme chaque jour aidant ainsi à réduire le fardeau de cette maladie sur l’économie du continent, nous souhaitons vous dire
MERCI. Accra Brewery, Ltd (ABL) and Voltic Water (part of SABMiller) * Achellis (Tanganyika) * Anglo American* AngloGold Ashanti* Atlas Copco* A-Z Textile Mills, Ltd* Azalai Hotels Group* Banque Internationale pour le Commerce et l’Industrie de la Cote d’Ivoire* Barrick Gold Corporation * Benso Oil Palm Plantations (BOPP) * Bestnet * Bidco* British Gas (BG Group)* Caisse Nationale de Prévoyance Sociale* Cape Union Mart* Century Bottling Company (Coca Cola) * Chirano Gold Mines, Ltd (part of Kinross Gold Corp)* Coalition des Entreprises de Cote d’Ivoire (CECI) * Coca-Cola South Africa* Compagnie Ivoirienne d’ Electricite* Computer Point, Ltd * DHL * East Africa Breweries, Ltd * Emirates * Esprit d’Ebene* GBCHealth* General Electric* Ghana Business Coalition* Ghana Chamber of Mines * Ghana Cocoa Farmers Association-Abrabopa* Ghana Revenue Authority* Graphic Corporation of Ghana* Graphic Systems, Ltd* Grummet Hotel * Hotels Association of Tanzania (HAT) * Illovo Sugar* Kagera Sugar, Ltd and Mtibwa Sugar Estates, Ltd (part of Super Group)* Kampala Pharmaceutical Industries, Ltd (KPI)* Kobil* Let’s Go Travel * Librarie de France* Local Authority Pension Fund (LAPF)* Malaria Africa Rotary* Manzi Valley Ltd* Marathon Oil Corporation* Margins Security Printers* Massmart Holdings, Ltd* Media World Productions * Medical Stores Department (MSD)* Momentum Health Partnership (Part of Momentum Ghana)* MTN Group, Ltd* MTN Uganda* MTN-CI* Nando’s Chickenland, Ltd* National Housing Corporation (NHC)* National Microfinance Bank (NMB)* National Sports Authority* Nets for life partnership (Standard Chartered Bank, Coke and Church of Uganda) * Nigeria Protea* Novotel Hotels* NSSF* Number 10 Magazine* ONE* Pharmaceutical Manufacturers Association of Ghana – The AMFm companies / Chemical Sellers Association of Ghana* PPF* Private Sector Foundation Uganda (PSFU)* Private Sector Penson Fund-PSPF* PRORAY Investments * Pulse Uganda, Ltd * Roofings* Rwenzori Bottling Company, Ltd (part of SABMiller)* SAAFI Meat* SABMiller* Said Salim Bakhresa, Ltd (SSB) (part of Bakhresa Group)* Schlumberger, Ltd* Serengeti Breweries (SBL)* Sheraton Kampala* Shoprite * Songas* Stanbic Bank* Stanbic Bank Ghana* Standard Bank* Standard Chartered Bank* The SIFCO Group* Sumitomo Chemical* SuperSport and MNET* Tanzania Breweries (TBL)* Tanzania Coffee Board* Tanzania Telecommunication Company (TTC)* Tanzania Tourist Board* TAPAMA* Tata Uganda* Tigo Tanzania Company * Total* TOTAL Tanzania * Tourism Confederation of Tanzania (TCT)* Toyota Uganda, Ltd * Tusker Breweries (part of East African Breweries, Ltd)* Twiga Cement* Uganda Baati* Uganda Clays, Ltd* Uganda Fishnet Manufacturers, Ltd* Uganda Safari * Unilever* Unilever Ghana (Member of Ghana Business Coalition)* Unilever Uganda, Ltd* USAID/Keneya Ciwara Project* Vestergaard Frandsen* Vision Group* VODACOM Tanzania* Volta River Authority (VRA)* Volta River Estates, Ltd* Zantel Tanzania * Zoom Lion Ghana, Ltd. United Against Malaria (Unis Contre le Paludisme) est une alliance d’équipes de football, de célébrités, d’organisations de santé et de plaidoirie, de gouvernements et d’entreprises qui se sont unis contre le paludisme. L’alliance a été fondée en partenariat avec le Center for Communication Programs de Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health. Plus d’infos sur www.malariafreefuture.org.
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Spécial États-Unis
Afrique
TRIBUNE
Opinions & éditoriaux
Un couple qui marche
L
’
LINDA THOMASGREENFIELD Secrétaire d’État adjointe chargée des Affaires africaines depuis août 2013
AFRIQUE PREND SON ENVOL. Certaines de ses économies sont aujourd’hui parmi les plus dynamiques du monde et, avec une classe moyenne émergente et des investissements étrangers en hausse, ses nations sont en train de vivre une véritable période de transition. La visite de Barack Obama en juin au Sénégal, en Afrique du Sud et enTanzanie a montré que les États-Unis s’engageaient de manière pérenne à renforcer leurs relations économiques avec le continent et à collaborer avec les Africains afin de les aider à construire une nouvelle ère de prospérité dans tous les domaines. Le président a annoncé un certain nombre de projets pour stimuler le développement : l’initiative Power Africa, qui vise à étendre l’accès à l’électricité à 20 millions de foyers et d’entreprises, ainsi que Trade Africa, qui part du principe que la dynamisation des échanges régionaux intercontinentaux est une condition indispensable au développement des échanges et des investissements au-delà du continent. Il a également annoncé un partenariat qui, à partir de 2014, permettra chaque année à 500 jeunes leaders de venir aux États-Unis pour y bénéficier de conseils et de formation. Ce programme dotera la prochaine génération de décideurs africains de nouvelles compétences et de réseaux, afin qu’ils contribuent à la croissance économique et à la stabilité de leurs pays.
contribuent à ce que les élites africaines investissent dans leurs pays. Le President’s Emergency Plan for AIDS Relief (Pepfar), lancé par George W. Bush et renforcé par Barack Obama, a fourni des traitements contre le sida à plus de 5 millions d’Africains, permis à 1 million d’enfants de naître sans en être atteint, et aidé à lever l’un des plus grands freins à la productivité économique du continent. À travers le programme Feed the Future, nous améliorons la production agricole. À travers la New Alliance for Food Security and Nutrition, nous prêtons main-forte aux pays du continent afin qu’ils attirent davantage d’investisseurs responsables dans leurs filières
Nous formerons chaque année 500 futurs décideurs africains.
Chacune de ces initiatives illustre bien l’objectif recherché par l’administration Obama : que cette collaboration aide les pays africains à renforcer leurs capacités et à maximiser le potentiel de leurs citoyens. Ce partenariat s’inscrit dans la longue histoire de notre aide au développement du continent. Un soutien global, qui fait l’objet d’un consensus entre républicains et démocrates. L’Agence américaine pour le développement international (USAID) a accompagné nos partenaires africains chaque fois qu’ils ont été confrontés aux défis du développement. Combinées à cette aide extérieure, des initiatives continentales telles que le Programme détaillé de développement de l’agriculture africaine (PDDAA) marquent une étape importante, et N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
agricoles. Enfin, ces derniers sont de loin les plus grands bénéficiaires du Millennium Challenge Corporation (MCC), qui leur alloue plus des deux tiers de son budget pour les aider à faire des investissements stratégiques destinés à renforcer la croissance, créer des emplois et améliorer les revenus des plus pauvres. Cette administration s’est aussi engagée à renouveler l’African Growth and Opportunity Act (Agoa), qui s’est révélé un outil capital pour stimuler les exportations africaines vers les États-Unis. Nous encourageons les entreprises américaines à étudier les possibilités d’implantation en Afrique, pour notre bénéfice mutuel, en même temps que nous soutenons les entrepreneurs africains. Ayant passé la plus grande partie de mes trente ans de carrière à travailler sur les questions africaines pour le département d’État, je suis fière de poursuivre ces efforts pour resserrer nos liens économiques et aider les Africains à exploiter tout leur potentiel. Cette politique a permis d’accomplir de réels progrès, mis en lumière par le renforcement de nos relations sur le continent – du Ghana à laTanzanie et du Liberia à la Namibie. Les États-Unis sont optimistes. L’Afrique prend son envol. Et notre pays compte bien l’accompagner dans ce voyage. l JEUNE AFRIQUE
Africa is beautiful AGOA
Obama veut jouer les prolongations Depuis 2000, la loi sur la croissance et les opportunités économiques en Afrique a largement stimulé les exportations. Il est question de la reconduire au-delà de 2015, mais aussi de l’étendre à l’Asie.
E
ncettepériodederestrictionbudgétaire, les démocrates vont tenter de convaincreleCongrèsetlesrépublicains de proroger la loi sur la croissance et les opportunités économiques en Afrique (Agoa, African Growth and Opportunity Act) au-delà de 2015. C’est du moins la promesse faite par Barack Obama à l’occasion du Forum Agoa qui s’est tenu les 12 et 13 août à Addis-Abeba, en Éthiopie. L’utilité de ce programme qui bénéficie aujourd’hui à 39 pays du sud du Sahara est facileàdémontrer.Depuissapromulgation en 2000 par Bill Clinton, le commerce bilatéral entre les États-Unis et l’Afrique subsaharienne a plus que doublé (voir p. 55), les exportations hors hydrocarbures ont triplé, et près de 43 millions d’emplois
ontétécrééssurlecontinent.Mais,comme l’explique Florizelle Liser, représentante adjointe pour le commerce extérieur avec l’Afrique, « certains pays ont besoin de plus de temps pour améliorer leur compétitivité ». Par ailleurs, des études sont en
cours pour voir si le mécanisme pourrait être étendu à certains pays asiatiques et en examiner l’impact, sachant que certaines industries manufacturières, comme celles du Bangladesh et du Cambodge, sont déjà très compétitives. l PASCAL AIRAULT
Importations depuis les pays bénéficiaires en 2012 ➜ 34,9 MILLIARDS DE DOLLARS, 4 fois plus qu’en 2001, soit 30,1 milliards (86,25 %) de produits pétroliers et 4,8 milliards de produits non pétroliers (13,75 %, 3 fois plus qu’en 2001) ➜ Premiers postes d’importations : pétrole brut (30,1 milliards), équipements de transport (2,1 milliards), minéraux et métaux (865,5 millions), textile et habillement (815,3 millions), produits agricoles (520,8 millions), produits chimiques (428,8 millions)
LE CORPORATE COUNCIL ON AFRICA S OUVRE AU SECTEUR PRIVÉ AFRICAIN Plus importante organisation professionnelle de promotion du commerce et des investissements entre les États-Unis et l Afrique, le Corporate Coucil on Africa (CCA) s ouvre au secteur privé africain. Trois patrons africains ont fait leur entrée au conseil d administration du CCA : Tony Elemelu, Président de Heirs Holdings, Aliko Dangote, Président du Groupe Dangote, et Jabu Mabuza, Vice-Président of Telkom Afrique du Sud. Paul Hinks, Président du conseil d administration du CCA, et Stephen Hayes, CEO, encouragent les entreprises du continent à rejoindre le Corporate Coucil on Africa. Leur participation suscitera de nouveaux partenariats avec les entreprises américaines membres du CCA et favorisera une montée en puissance des investissements des États-Unis en Afrique.
JEUNE AFRIQUE
Le CCA offre des opportunités uniques de rencontres d affaires lors des nombreux événements qu il organise régulièrement. Décideurs africains et américains au plus haut niveau y participent. Cette année, du 8 au 11 Octobre à Chicago, le CCA organise la 9 e édition de son sommet biannuel « US-Africa Business ». C est l événement USA-Afrique le plus fréquenté aux États-Unis.
Email : summit@africacncl.org Tél. : + 1 202-835-1115
http://www.africacncl.org/
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Spécial États-Unis
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Afrique
GETTY IMAGES
t Chorégraphie organisée par McDonald’s, en Afrique du Sud.
BUSINESS
Oncle Sam a la fringale La croissance du continent aiguise l’appétit des investisseurs américains. Grandes enseignes et banques d’affaires veulent leur part du gâteau. Et ce n’est qu’un début.
L
es Américains ont gardé longtemps en mémoire le titre choc que l’hebdomadaire britannique The Economist avait consacré à l’Afrique en 2000 : « Le continent sans espoir ». C’est dire s’ils ont laissé la Chine, l’Inde et le Brésil découvrir avant eux que l’Afrique subsaharienne était « le continent qui monte » (The Economist, 2011), puis « le continent de l’espoir » (The Economist, mars 2013). Leurs responsables chargés du commerce avec l’Afrique ont eu beau leur démontrer que les 22 milliards de dollars (16,3 milliards d’euros) d’exportations vers ce continent faisaient vivre 100 000 personnes aux États-Unis, « le marché africain n’apparaît toujours pas sur l’écran radar du monde des affaires américain », reconnaît Witney Schneidman dans une note sur les « cinq raisons pour lesquelles l’Afrique devrait être une priorité pour les États-Unis », publiée en mars 2013 par le think tank Brookings Institute de Washington. Longtemps les investisseurs ont eu du mal à oublier les statistiques sombres de la Banque mondiale et de l’ONU, qui classent 15 pays subsahariens parmi les 20 pays les plus fragiles de la planète. Ils y sont donc allés à tout petits pas, puisque l’Afrique ne draine que 1 % des investissements américains dans le monde. En matière N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
d’investissements, l’Amérique occupe une place médiocre parmi les fournisseurs des 50 milliards de dollars d’investissements directs étrangers (IDE) qui misent chaque année sur l’Afrique, selon la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced).
de nouveaux pourvoyeurs de fonds. Car, jusque-là, les investisseurs américains étaient surtout des mastodontes intéressés par les minéraux (Newmont Mining) et les hydrocarbures (ExxonMobil, Chevron), secteurs qui monopolisent la moitié de leurs investissements en Afrique. « Les esprits sont en train de changer aux ÉtatsUnis, analyse Luc Rigouzzo, cofondateur du fonds Amethis Finances. Leurs investisseurs découvrent que l’Afrique est un continent de consommateurs. Les grandes enseignes comme McDonald’s [fast-food], Procter&Gamble [hygiène, produits de beauté] ou Walmart [grande distribution] ont été les premières à s’en apercevoir. Elles ont d’abord mis le cap sur les pays anglophones, comme l’Afrique du Sud, le Ghana ou le Kenya. Les secteurs ciblés dans un premier temps ont été les télécoms [Microsoft], le BTP et la finance. Mais les fonds américains élargissent leur champ de prospection et, dans deux ou trois ans, ils deviendront très actifs. » POMPIERS. Les banques d’affaires et les
fonds spécialisés lorgnent les quelque 3 000 milliards de dollars amassés par les fonds de pension auxquels cotisent les pompiers, les infirmières ou les avocats d’Oklahoma ou de Pennsylvanie. D’abord parce que ces fonds investissent pour cinquante ans, durée qui permet MASTODONTES. Mais un tam-tam plus de financer des équipements énergéentraînant s’est fait entendre. Le bureau tiques de long terme dont le continent d’études McKinsey répète depuis 2010 que a un énorme besoin : barrages, lignes à haute tension, centrales électriques l’Afrique est le continent le plus attractif, thermiques, éoliennes, parcs photovoltaïques… « Il ne faut Selon le FMI, l’Afrique compte pas oublier les fondations unisix des dix économies les plus versitaires et les centres de santé, Rockefeller, Howard Hugues, Bill dynamiques du monde. & Melinda Gates, qui vivent des car le retour sur investissement y est le revenus de leurs placements, qui misent meilleur au monde, ou presque. Le Fonds forcément à long terme et qui sont oblimonétaire international (FMI) a calculé à gatoirement très “conservateurs”, c’estpartir des chiffres de croissance de 2001 à-dire prudents », ajoute Luc Rigouzzo. à 2012 que ce continent compte six des À la recherche de rendement (donc dix économies les plus dynamiques de d’actions), de sécurité (donc d’entreprises la planète. cotées) et de diversification (donc plus Puis les analystes ont souligné à l’envi seulement dans les pays anglophones), les beaux atouts africains : aujourd’hui, les gestionnaires américains devraient bientôt arpenter l’Afrique ou s’en remettre une classe moyenne de 350 millions de aux spécialistes de Londres, de Paris et de personnes et, en 2050, un produit intéGenève pour dénicher les belles affaires rieur brut (PIB) presque équivalent à qui s’y épanouissent… et qui peuvent celui de l’Europe et, sur cinq actifs dans le monde, un Africain. De quoi faire rêver ALAIN FAUJAS rapporter gros. l JEUNE AFRIQUE
LIRE AUSSI «Du bon usage de l’aide » et « USA-France: (més)entente cordiale en Afrique? »
Africa is beautiful Aut
Échanges États-Unis - Afrique subsaharienne en 2012
(
Afrique-France 77 milliards de dollars Afrique-Chine 200 milliards de dollars
72,1 milliards de dollars
EXPORTATIONS soit 1,5
% du total des exportations américaines en 2012
22,5 milliards de dollars
IMPORTATIONS
49,6 milliards de dollars
(en milliards de dollars)
7,6 (34 %)
Nigeria
5
19,1 (38 %) 9,8
Angola Afrique du Sud
1,5 1,3
Tchad
Éthiopie
1,3
Gabon
Premiers postes d’exportations 4,4 3,9 2,6 (dont blé 1,2 milliard, volaille 484 millions)
2,1 1,9
2,7 1,9
(en milliards de dollars)
Machines Véhicules
8,7
Premiers postes d’importations
(en milliards de dollars)
Carburant
américaines en 2012
Nigeria
Ghana
Avions
2,2 % du total des importations
(en milliards de dollars)
Afrique du Sud
Produits agricoles
soit
Principaux fournisseurs
Principaux marchés
Angola
res partenaires
Pétrole
36,7
(brut)
Minerais précieux Produits agricoles
Véhicules Autres minerais
3,4
(platine, diamants)
2,1 (dont cacao 1 milliard, caoutchouc 317 millions, café non torréfié 224 millions)
2 (titane, chrome,
1,9 uranium)
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SOURCE : MINISTÈRE DU COMMERCE DES ÉTATS-UNIS
(
En 2001 27 milliards de dollars En 2011 95 milliards de dollars
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Maghreb & Moyen-Orient
Après être parvenus à retourner la situation à leur avantage, les partisans du président semblent déjà en ordre de bataille pour assurer la réélection de leur champion en 2014 – ou du moins obtenir le prolongement de son mandat de deux ans. FARID ALILAT,
L
envoyé spécial
a scène se déroule dans la moiteur de cette fin d’août caniculaire. Mohamed Rougab, secrétaire particulier du président, appelle Dahou Ould Kablia, ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, pour exiger une autorisation préfectorale permettant la tenue de la sixième session du comité central du Front de libération nationale (FLN). Le ministre refuse d’obtempérer, arguant qu’il ne reçoit d’instructions que d’Abdelaziz Bouteflika. Nouveau coup de fil. Cette fois de la part de Saïd, frère cadet de ce dernier et conseiller à la présidence. Nouvelle fin de non-recevoir du ministre de l’Intérieur. « Je ne me réfère qu’au président de la République », répond-il en substance. Finalement, la préfecture d’Alger sera sommée par Saïd Bouteflika de délivrer de nuit la fameuse autorisation, passant outre à la décision du Conseil d’État de suspendre la tenue de cette réunion, dont l’unique ordre du jour est l’élection d’un nouveau secrétaire général. Le 29 août donc, Amar Saadani, 63 ans, candidat adoubé par Saïd Bouteflika, est élu nouveau chef de la première force politique du pays, restée sans patron depuis la destitution d’Abdelaziz Belkhadem en janvier 2013. Deux semaines plus tard, Dahou Ould Kablia est débarqué du gouvernement avec dix autres ministres à la faveur d’un important remaniement. N’ayant pas été prévenu à l’avance, le ministre de l’Intérieur apprendra son limogeage par voie de presse. Ould Kablia a-t-il payé pour avoir tenu tête au frère-conseiller, pour qui l’élection d’Amar Saadani est une étape cruciale pour rester dans le jeu politique ? Commentaire d’un haut responsable de l’État, encore choqué par la manière très cavalière dont les ministres ont été congédiés. « La présidence n’a eu aucun état d’âme, confie-t-il. Les ministres n’ont même pas eu droit à un mot de remerciement, alors que certains ont fidèlement servi Bouteflika depuis son arrivée au pouvoir, en 1999. » Il faut dire que, pour les partisans du chef de l’État, le temps presse. À six mois de la publication, N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
ALGÉRIE
Bouteflika
Maghreb Moyen-Orient
forever…
en février 2014, du décret portant convocation du corps électoral pour le scrutin présidentiel, qui doit normalement se tenir en avril, le clan Bouteflika tente de mettre en place sa machine électorale pour assurer un quatrième mandat à l’actuel locataire d’El-Mouradia ou prolonger son bail de deux ans. Le maintien du président, défi jugé impossible sinon hautement improbable au milieu de l’été, passait par la reconquête du FLN, la mise en place d’un exécutif constitué de fidèles, comme les ministres de l’Intérieur et de la Justice, la refondation de l’alliance présidentielle et la révision, le cas échéant, de la Constitution, déjà amendée en novembre 2008.
p Le chef de l’État avec son frère et conseiller Saïd Bouteflika dans un bureau de vote d’Alger lors des législatives de mai 2012.
SAMIR SID
MAIN BASSE SUR LE FLN. Une première tenta-
tive pour récupérer la direction de l’ancien parti unique – peut-être par crainte qu’elle ne soutienne l’ancien rival de Bouteflika en 2004, Ali Benflis, dont la candidature devrait être annoncée dans les prochaines semaines – est engagée en février 2013, peu de temps après le départ de Belkhadem. Amar Saadani, ex-président de l’Assemblée nationale tombé en disgrâce en 2007, tente alors une OPA sur le FLN. Contré par ses détracteurs, qui moquent son manque de consistance, son affairisme présumé, ses bourdes diplomatiques ou son allégeance au clan présidentiel, Saadani a dû battre en retraite. Momentanément. C’est qu’entretemps Bouteflika est tombé malade, et sa longue convalescence, en France puis en Algérie, a laissé à penser que le raïs était fini, que son clan avait perdu de sa puissance et que l’après-Bouteflika allait se préparer sans lui. Rien n’était moins vrai. Depuis sa résidence de Sidi Fredj, où il poursuit désormais sa rééducation, le président donne sa caution à l’intronisation de Saadani à la tête du FLN. En l’espace de quelques jours, l’entourage du chef de l’État parvient à retourner la situation à son avantage. Ex-coordonnateur général des comités de soutien au programme du candidat Bouteflika, Saadani, que la presse accuse d’avoir trempé l l l N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Maghreb Moyen-Orient Algérie
SAMIR SID
58
dans un scandale de corruption, se met aussitôt en action, défendant bec et ongles l’idée d’un quatrième mandat tant, argue-t-il, le président a prouvé « son incomparable compétence à diriger le pays ». Quid de la maladie, qui pourrait empêcher Bouteflika de faire campagne ? « Pourquoi le président ferait-il campagne ? ose le nouveau secrétaire général du FLN. Les Algériens le connaissent très bien. » En fidèle soldat, ce père de sept enfants ne voit même pas la nécessité d’organiser une élection présidentielle. » lll
p Amar Saadani, nouveau secrétaire général du FLN, le jour de son élection à la tête du parti, le 29 août.
NOUVELLES ALLIANCES. Le FLN désormais domestiqué, reste à refonder l’alliance présidentielle. Créé en février 2004 pour soutenir le programme de Bouteflika, l’attelage qui constituait la charpente politique du pouvoir présidentiel était composé du FLN, du Rassemblement national démocratique (RND) et des islamistes du
Mouvement de la société pour la paix (MSP). Sauf que, depuis la désertion du MSP en janvier 2012 et la crise de leadership qui mine encore aujourd’hui le RND huit mois après la démission d’Ahmed Ouyahia, la majorité s’est effilochée au fil des mois. Certes, le RND continue d’apporter son soutien au chef de l’État, mais l’éventuelle candidature de celui-ci en 2014 ou l’adoption par les deux chambres du Parlement – la voie référendaire est totalement exclue pour l’heure – d’une nouvelle Constitution qui prolongerait de deux ans le troisième mandat du président nécessitent d’élargir l’alliance à de nouveaux partenaires. Les nouveaux alliés se trouvent au sein même du gouvernement. Ministre depuis le premier gouvernement Bouteflika, formé en décembre 1999, Amar Ghoul est d’une fidélité sans faille envers le chef de l’État, si bien qu’en retour il a réussi à échapper au scandale qui a emporté bon nombre de ses collaborateurs dans le cadre de l’enquête pour corruption visant le projet de l’autoroute est-ouest. À la tête du parti Rassemblement Espoir de l’Algérie (TAJ), le désormais ministre des Transports vient de rejoindre l’alliance et fait campagne avec zèle pour la réélection de Bouteflika. « Si nous n’apportons pas notre soutien à Laaziz [« le bien-aimé »], les générations futures ne nous le pardonneront jamais ! » s’exclame sans rire Ghoul. Son collègue dans l’exécutif, Amara Benyounes, secrétaire général du Mouvement populaire algérien (MPA), devrait également adhérer à la coalition présidentielle. Ami de Saïd Bouteflika, avec lequel il dîne souvent, Benyounes n’a jamais ménagé sa peine pour soutenir le chef de l’État, y compris quand des voix se sont élevées pour réclamer l’application de l’article 88, qui prévoit la destitution du président en cas de maladie grave et durable. Alors, un quatrième mandat ? Benyounes répète à l’envi qu’il signerait des deux mains. Mais si les partisans du président se mettent déjà en ordre de bataille pour reconduire leur champion (qui, lui, ne s’est toujours pas exprimé) à la tête de l’État, ce scénario reste in fine tributaire d’une grande inconnue : le bulletin de santé de l’intéressé. l
CASSE-TÊTE CONSTITUTIONNEL CONFESSION DU PREMIER MINISTRE Abdelmalek Sellal au sortir d’une récente audience avec Abdelaziz Bouteflika : « Il veut un quatrième mandat… » Soit. Mais comment faire si son état de santé l’empêchait de briguer sa propre succession ? Pour le président, la solution passe N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
par l’instauration d’un septennat renouvelable une fois, tandis que son entourage songe plutôt à amender la Constitution pour prolonger son actuel mandat de deux ans. Des instructions dans ce sens ont été transmises aux membres de la commission chargée de la révision de la loi fondamentale. Mais si le
passage du quinquennat au septennat ne pose aucun problème juridique, il n’en est pas de même pour la prolongation du mandat en cours. Une telle opération se heurte à deux écueils. L’article 71 de la Constitution dispose en effet que « le président de la République est élu au suffrage universel, direct et
secret », et l’article 178 que « toute révision constitutionnelle ne peut porter atteinte au caractère républicain de l’État, à l’ordre démocratique, basé sur le multipartisme ». Un véritable casse-tête constitutionnel qui pourrait avoir de graves conséquences politiques. l F.A. JEUNE AFRIQUE
SOUS LE HAUT PATRONAGE DE SA MAJESTÉ LE ROI MOHAMMED VI Sommet Mondial des Dirigeants Locaux et Régionaux du 1er au 4 octobre 2013
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Maghreb Moyen-Orient t Session inaugurale du comité des cinquante, le 8 septembre, au Sénat.
à la société son interprétation de la religion », rétorque Chehab Waguih, porteparole du Parti des Égyptiens libres. De son côté, le secrétaire général d’Al-Nour, Galal Mora, explique que l’unique objectif de son groupe est de s’assurer que la Constitution finale soit acceptée par toutes les franges de la société. REX/APAIMAGES/REX/SIPA
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RISQUE. Autre question délicate sur
laquelle doit se pencher la Constituante : la place de l’armée dans la vie publique. « Au sein de la classe politique, il y a un consensus pour que les civils contrôlent l’armée, estime Nathan J. Brown, spécialiste de l’Égypte et professeur de ÉGYPTE sciences politiques à l’université GeorgeWashington, aux États-Unis. Mais ce consensus n’existe qu’au sein de la classe politique, le pays dans son ensemble Chargé de réviser la loi fondamentale élaborée en 2012 soutient les militaires. » Et de préciser par les Frères musulmans, le comité des cinquante devrait achever que la manière dont ce volet sera traité ses travaux d’ici à fin novembre. par la Constituante sera révélatrice de son degré d’indépendance. Plusieurs dispositions de la onformément à la feuille de du chef de l’État, prenant cependant le route adoptée en juillet par risque d’être dissous si le résultat du Constitution de 2012 continuent de faire les autorités provisoires égypréférendum était négatif. De même, le débat, comme le jugement de civils par tiennes, une Constituante président pourra organiser un référendes tribunaux militaires ou le secret qui dum sur la dissolution de l’Assemblée, révise actuellement la loi fondamenentoure le budget des forces armées, mais il devra démissionner si le non tale adoptée en 2012 par les anciens dont le détail ne peut être révisé par l’emporte. les autorités civiles. « L’argument de la dirigeants islamistes. L’avenir politique sécurité nationale ne doit pas servir de du pays est aujourd’hui entre les mains de cinquante figures publiques, diriANTI-ISLAMISME. En 2012, la loi fondaprétexte pour empêcher les services de geants syndicaux, représentants de partis mentale avait été contestée pour sa colocontrôle financier de l’État de revoir politiques et d’institutions religieuses. ration ultrareligieuse. Aujourd’hui, la en détail le budget de l’armée, comme cela se fait pour les autres institutions Assistés par un comité de dix experts donne a changé. Sans être à proprement étatiques », estime Raafat juridiques qui a déjà amendé le texte une Fouda, professeur de droit première fois, les constituants devront La classe politique est unanime : avoir terminé leur mission avant fin constitutionnel à l’université le pouvoir civil doit exercer un novembre. Pour ne pas réitérer l’erreur du Caire, à Gizeh. des Frères musulmans et de leurs alliés Alors que les autorités contrôle effectif sur l’armée. salafistes, qui avaient ignoré la minorité intérimaires continuent de non islamiste, le comité des cinquante parler laïque, la nouvelle Constituante réprimer les Frères musulmans, interdits essaie d’atteindre le consensus, optant est résolument anti-islamiste. « Le coud’activités par la justice le 23 septembre, le cas échéant pour un vote à la majorité rant islamiste n’a plus aucun poids, et que les manifestations islamistes dégédes trois quarts. ni les Frères ni les salafistes ne sont nèrent régulièrement en affrontements Tirant les leçons de plusieurs décenpopulaires », se justifie Heba Yassine, la avec les forces de sécurité, certains se nies de dictature, la Constituante semble porte-parole des nassériens du Courant demandent si le climat actuel est propice pencher en faveur d’un régime politique populaire. Dans ce contexte, la formation à la rédaction d’une constitution. Selon mixte, assurant l’équilibre entre le pousalafiste Al-Nour, seul parti islamiste à Nathan J. Brown, « le risque, c’est que voir exécutif et le pouvoir législatif afin disposer d’un représentant au sein de l’on soit tenté d’élaborer une constitul’Assemblée, est tentée de vouloir sauver de prévenir l’apparition d’un président tion censée gouverner l’Égypte pour plusieurs générations sur la base de autoritaire ou d’un parti unique toutles « acquis » de la Constitution de 2012. puissant. Le Parlement sera en droit de « Le peuple égyptien a toujours respecté leçons tirées des événements de ces réclamer un référendum à la majorité la charia. Nous ne pouvons pas accepter deux derniers mois ». l des deux tiers pour obtenir la destitution qu’un courant particulier vienne imposer TONY GAMAL GABRIEL, au Caire
Constituante bis
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Maghreb Moyen-Orient t L’actuel sélectionneur du onze kényan, le 23 mars, à Calabar (Nigeria).
PIUS UTOMI EKPEI
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FOOTBALL
Amrouche, plein Sud Ex-joueur professionnel algérien devenu entraîneur, il s’est choisi l’Afrique subsaharienne comme terrain d’expression.
L
a défaite à Nairobi face au Nigeria le 5 juin et le match nul au Malawi une semaine plus tard ont ruiné les dernières chances du Kenya de participer au Mondial 2014. Son entraîneur, Adel Amrouche, n’ajoutera pas un tampon supplémentaire à un passeport déjà lesté de nombreux visas. Mais la portée de l’échec est relative. « Quand j’ai signé mon contrat en début d’année, explique l’Algérien, la qualification pour le dernier tour était déjà compromise. Je suis là pour un projet, celui de nous qualifier
pour la CAN 2015 au Maroc », une compétition qui se refuse aux Harambee Stars depuis 2004. Dans deux ans, à la fin de son contrat, Amrouche tournera peutêtre le dos à l’Afrique. L’Asie le tente, mais pas n’importe où. Un exil paisible et lucratif dans un pays du Golfe ne le fait pas (encore) fantasmer. « J’ai besoin de ferveur. » L’Afrique, où la frontière entre la passion et l’excès est souvent virtuelle, l’a rassasié. VIRUS. Ancien milieu de terrain, ce natif
de Kouba a évolué en Algérie (Belouizdad, El Anasser, USMA et JSK), en Autriche (Favoritner) et en Belgique (La Louvière, Mons, Dender, Lombeek-Liedekerke), où il est resté huit ans. C’est dans le Plat Pays qu’il commence à entraîner des
équipes de jeunes, à la Royale Union saint-gilloise, puis au FC Bruxelles. Mais il comprend rapidement que, « pour un Africain, coacher un club professionnel en Europe est presque chose impossible. L’axe sud-nord ne fonctionne pas ». L’Afrique devient donc son terrain d’expression privilégié. D’abord en RD Congo, en 2002, au DC Motema Pembe, avec lequel il remporte ses premiers titres. Jusqu’à ce que l’envie de retourner en Europe le saisisse, en 2004, juste après un bref passage de deux mois en Guinée équatoriale. « À Malabo, j’ai vite compris que cela ne pourrait pas fonctionner », évacue-t-il, lapidaire. Son come-back en Europe – en tant que directeur technique de Volyn Lutsk, en Ukraine, puis de Ganclarbirliyi, en Azerbaïdjan –, en 2005, ne dure que quelques mois. Rattrapé par le virus de l’Afrique,ilretourneunesaisonauMotema Pembe (2005-2006), avant de prendre les rênes de la sélection du Burundi (20072012), l’un des sans-grade du football africain. « Mais j’ai rencontré Lydia Nsekera, la présidente de la fédération [première femme membre du comité exécutif de la Fifa], se félicite-t-il. Avec elle, on a fait avancer le football burundais, et certains joueurs, qui gagnaient 50 ou 100 dollars par mois, ont pu partir en Europe. C’est l’un de mes plus grands motifs de fierté! » l ALEXIS BILLEBAULT
Coulisses MAROC PLUME ET BARREAUX Arrêté le 17 septembre pour avoir posté sur son site un lien vers une vidéo d’AlQaïda au Maghreb islamique (Aqmi) hostile au pouvoir marocain, Ali Anouzla a été inculpé, le 24 septembre, pour « apologie de la terreur, incitation et aide matérielle au terrorisme ». Surtout connu pour son ton critique – on lui doit le scoop de la grâce par erreur du pédophile Daniel Galvan Vina –, Anouzla est considéré N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
par Amnesty International comme un détenu d’opinion, d’où l’engagement d’une action d’urgence pour sa libération.
LIBYE ABOU CHAGOUR, LE RETOUR Premier ministre éphémère de la nouvelle Libye, Mustapha Abou Chagour a présenté, le 25 septembre, une initiative pour « restaurer la confiance ». Après avoir constaté le blocage persistant autour de
l’élection du comité (constitutionnel) des soixante, il propose d’adopter une miniConstitution de transition, afin d’élire rapidement un chef de l’État, puis un nouveau Parlement en mars 2014. Les candidats aux législatives seraient des indépendants.
CISJORDANIE TSAHAL RASE GRATIS Le 16 septembre, le village bédouin de Khirbet al-
Makhoul, dans la vallée du Jourdain, a été rasé par l’armée israélienne. Bulldozers géants, utilisation de grenades assourdissantes, résidents molestés, personnel associatif et diplomatique violemment repoussé, aide humanitaire confisquée… Human Rights Watch a tiré la sonnette d’alarme. Le 24 septembre, la Haute Cour de justice israélienne a ordonné – trop tard – la suspension temporaire des opérations et exigé des autorités des explications. JEUNE AFRIQUE
Maghreb Moyen-Orient
SYRIE
Anissa al-Assad
La mère du crime On la dit dure, sévère et toute-puissante. Mais l’âge – et la guerre – aidant, l’épouse de Hafez al-Assad aurait beaucoup perdu de son influence. Portrait d’une ex-première dame très secrète. LAURENT DE SAINT PÉRIER
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ort austère, visage fermé, Anissa Makhlouf semble être le reflet féminin de Hafez al-Assad, son militaire et président de mari, sur cette rare photo de famille aux couleurs délavées datant de 1985. Le 23 mars 2012, l’Union européenne a fini par
GETTY IMAGES/HULTON ARCHIVE
Les parents de Bachar al-Assad et leur fille, Bouchra, le 4 juin 1974, à Damas.
inclure la matrone sur sa liste de personnalités syriennes sanctionnées : « Elle profite du régime et y est associée. » Pour le meilleur et souvent pour le pire, Anissa a lié son destin à celui des Assad en 1958, en épousant Hafez, jeune lieutenant de l’armée de l’air qui allait mettre la main sur le pays par un coup d’État en 1970. À Damas, il se murmure aujourd’hui que la douairière de 79 ans fait bien plus que profiter du régime. « Anissa al-khassissa » (« Anissa la vicieuse »), comme l’ont surnommée les insurgés, en serait l’éminence grise, l’influence occulte ; on la dit toute-puissante.
« Les décisions sont prises collégialement dans le premier cercle familial […] mais c’est Anissa qui a le dernier mot », déclarait l’opposant en exil Wael al-Hafez, quelques semaines après le début de la révolte, en mars 2011. « Ne sois pas faible ! Fais ce que ton père aurait fait », aurait tempêté la matriarche à l’adresse de son fils Bachar, poussant celui-ci à engager une répression féroce. Et à plonger le pays dans un bain de sang. « Sa mère est connue pour jouer un rôle éminent », confirme, en décembre 2011, un e-mail de la société privée américaine de renseignement Stratfor révélé par l l l
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Maghreb Moyen-Orient Syrie son cousin éloigné, elle milite activement au Parti social-nationaliste syrien (PSNS), formation rivale du Baas de son futur époux. Les Makhlouf, famille de notables fortunés, ne voient pas d’un bon œil sa liaison avec Hafez, qui, lui, est issu d’un milieu beaucoup plus humble. Ils tentent de s’y opposer. Mais les deux jeunes gens s’aiment et finissent par aplanir les obstacles à leurs épousailles. Anissa met alors son énergie au service de l’ascension politique de son mari et règne sur le foyer pendant que Hafez s’échine jour et nuit à son bureau. BIGOTE. Contrairement à sa Elle lui prodigue ses conseils, bru, Asma, l’icône flamboyante prépare elle-même les repas de du régime qui a fait scandale en sa diète frugale, lui donne cinq commandant pour des centaines enfants. Aux dires de ceux qui l’ont de milliers d’euros d’objets de luxe connue, c’est une femme simple et en pleine guerre, la grande discrétrès versée dans la pratique de la tion d’Anissa explique en partie les foi alaouite, la branche de l’islam chiite à laquelle appartiennent les Assad et « Fais ce que ton père aurait les Makhlouf. Elle fait », aurait-elle tempêté consulte fréquemment les autorités religieuses à l’adresse de Bachar. et favorise leurs revencroyances sur sa toute-puissance. dications au point d’être parfois « C’est la femme la plus secrète raillée comme la bigote du clan. du monde, explique le chercheur Au début du règne de Hafez, la syrien Salam Kawakibi. Sa perpremière dame de Syrie avait fait sonnalité est peu connue hors du quelques apparitions officielles, premier cercle. » Confirmation mais celles-ci ont cessé après la de l’ancien diplomate Ignace guerre menée par le raïs contre Leverrier, auteur du blog Un œil une violente insurrection islamiste sur la Syrie : « Elle a toujours eu au début des années 1980. « Hafez un rôle discret, et il est difficile ne mettait pas sa femme en avant, de savoir quelle est son influence comme a pu le faire Bachar avec la sur son fils. » sienne », note Leverrier. En 1994, Cette apparente réserve n’est la grande tragédie familiale des pas incompatible avec une grande Assad la plonge dans la dépresforce de caractère. Lorsque, jeune sion : le bouillant Bassel, fils aîné institutrice, elle rencontre Hafez, du couple et héritier programmé l l l WikiLeaks. Mais pour les fins connaisseurs du système Assad, le pouvoir d’Anissa est beaucoup plus relatif que ne le prétend la rumeur. Auteur d’une biographie de référence sur son mari, le Britannique Patrick Seale précise qu’« elle est très âgée, en mauvaise santé et n’est plus très influente. Bachar n’est plus le novice qu’il était il y a treize ans, quand il a hérité la République de son père. Il a affronté de grandes difficultés et sa puissance s’est renforcée. Il domine aujourd’hui le clan ».
GAMMA-RAPHO
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du trône de son père, se tue un matin au volant de son bolide. Ce militaire avait été forgé pour le pouvoir, mais le destin propulse ce matin-là sur le devant de la scène son frère Bachar, alors jeune étudiant en ophtalmologie sur les bords de la Tamise.
UNE BELLE FAMILLE SOLIDAIRE ET DOCILE
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MITANT LE JEU DE CARTES dans lequel les envahisseurs américains avaient répertorié les hauts responsables irakiens, la chaîne saoudienne Al-Arabiya a créé son propre Lion’s Den, « le repaire du lion » (« assad » signifiant « lion » en arabe). Anissa y figure en reine de cœur et le nom Makhlouf s’y affiche sur deux autres lames. Pourtant surnommé le « roi de Syrie », Rami Makhlouf, 44 ans, N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
est l’as de cœur. Sanctionné par l’Union européenne pour avoir « financé le régime, permettant la répression contre les manifestants », il contrôlerait 60 % de l’économie syrienne. Le colonel Hafez Makhlouf, 42 ans, chef d’une unité des renseignements, occupe le 10 de pique pour « implication dans la répression des protestataires ». Des carrières révélatrices de l’innervation du clan Assad-Makhlouf dans tous les
organes de la société et de l’État. Plusieurs fois alliés aux Assad depuis que la tante de Hafez a épousé un membre de la famille Makhlouf, les voisins de la montagne alaouite ont prospéré dans les affaires d’argent et de pouvoir. Chef de famille, Mohamed, le frère d’Anissa, fut le conseiller financier de Hafez. Un câble américain de 2006 souligne son « rôle particulièrement L.S.P. servile joué auprès d’Assad ». l JEUNE AFRIQUE
Anissa al-Assad, la mère du crime avait sermonné Bachar au début de la contestation, Leverrier observe que, selon d’autres versions, c’est Bachar lui-même qui aurait déclaré : « En 1982, mon père a fait 30 000 morts à Hama, il a eu trente ans de paix. » MALADE. Où se trouve aujourd’hui
Le pouvoir d’Anissa atteint sans doute son apogée après « l’élection » de Bachar à la place de son père, décédé en 2000. De même que ses parents avaient tenté de s’opposer à son mariage, elle est très réticente à l’union qu’envisage alors Bachar avec la trop belle, trop occidentale et trop sunnite Asma al-Akhras. Les noces doivent se dérouler dans la discrétion et Anissa refuse jusqu’en 2007 de céder à sa belle-fille son titre officiel de première dame de Syrie. « Il y a eu une vraie rivalité entre Anissa, soutenue par sa fille, Bouchra, et Asma pour influencer Bachar », commente Leverrier. Une anecdote, réelle ou inventée, illustre l’emprise qu’elle tente de conserver sur son président de fils. En 2005, quand celui-ci décide d’évacuer le Liban sous la pression JEUNE AFRIQUE
de la rue beyrouthine et de la communauté internationale, elle lui aurait lancé, avec son autre fils, le brutal Maher : « Tu quittes le Liban quand on te dit de quitter le Liban, est-ce que tu partiras de Syrie quand on te dira de partir de Syrie ? » Ou encore : « Tu as contredit la parole de ton père selon laquelle le Liban et la Syrie appartiennent à notre maison, jusqu’aux enfants de nos enfants. » Leçon entendue par l’élève, qui n’a jamais vraiment quitté le pays du Cèdre, infesté par ses services de renseignements et sous l’emprise du Hezbollah, son allié politicomilitaire. Six ans plus tard, le « Bachar doit partir » proféré par les chancelleries a dû sonner familièrement à l’oreille de celui-ci et l’a conduit à s’agripper au pouvoir. Et si certains ont rapporté qu’Anissa
Hafez et Anissa al-Assad aux côtés du couple présidentiel français François et Danièle Mitterrand, le 26 novembre 1984, à Damas.
la matriarche, alors que le fracas des bombes fait trembler Damas ? À en croire les médias officiels syriens, elle était toujours en Syrie, à Tartous, en septembre 2012, pour assister aux funérailles de son gendre, Assef Chawqat, le mari de sa fille, Bouchra, tué dans un attentat. Mais en janvier 2013, le bruit d’un exil aux Émirats arabes unis se propage dans les médias. Elle y aurait rejoint sa fille, qui a fui après avoir acquis la conviction que c’était Maher, son frère, qui avait fait assassiner son mari plutôt que l’opposition. Al-Arabiya, la chaîne saoudienne très hostile aux Assad, va jusqu’à parler de sa « défection ». Mais l’opposant Haytham Manna n’y croit pas et la pense toujours à Damas : « Tout le monde chez les Assad se souvient que Hafez, confronté à l’insurrection islamiste des années 1970-1980, avait dit à ceux qui souhaitaient partir qu’ils le pouvaient. Un bon millier de Syriens l’ont écouté. Par la suite, le raïs a brisé leurs carrières. Chez les Assad, tout le monde doit rester sur le bateau : on gagne ensemble, ou on meurt ensemble. » La vieille dame est malade, et la rumeur de sa mort enfle depuis février 2013. Une rumeur parmi mille autres dans la guerre de propagande qui se déroule en Syrie. En décembre 2011, un agent de Stratfor écrivait dans un e-mail publié par WikiLeaks: « Elle est très inquiète à l’idée que ses garçons puissent connaître le même destin que les Kaddafi et presse Bachar et Maher d’examiner sérieusement une stratégie de sortie avant que la fenêtre d’opportunité ne se referme complètement. » Si le rapport est exact, il faut croire, deux ans et des dizaines de milliers de morts plus tard, que madame Mère a en effet beaucoup perdu de son influence. l N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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FRANCE
Anne Hidalgo
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Europe, Amériques, Asie
L’improbable héritière
Fille d’immigrés espagnols naturalisée à l’âge de 14 ans, elle ne partait pas dans la vie avec les meilleurs atouts. C’est pourtant elle que Bertrand Delanoë a choisie pour lui succéder à la mairie de Paris. Rencontre avec une femme d’ambition.
HABY NIAKATE
Anne Hidalgo
JEAN-LUC BERTINI/PASCO
• Naissance : 19 juin 1959 à San Fernando (Espagne) • Profession : inspectrice du travail • Première adjointe au maire de Paris depuis 2001. Chargée de l’urbanisme et de l’architecture • Conseillère régionale d’Île-de-France (depuis 2004)
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lle court, elle court, Anne Hidalgo. En vraie marathonienne, elle enchaîne les kilomètres et les poignées de mains. Ici, elle donne le coup d’envoi d’un match de football; là, elle rend hommage aux pompiers, participe à la Fashion Night ou découvre les produits du terroir. On l’a même vue participer à une émission culinaire à la télévision, dans laquelle, entre deux coups de fouet, elle a trouvé l’occasion de glisser: « Plus de 90 % des écoliers parisiens sont inscrits à la cantine, et nous, nous sommes très attentifs à la qualité de ce qu’ils mangent. » Anne Hidalgo briguera la mairie de Paris en mars 2014. Commencée depuis au moins un an, sa campagne électorale s’est brusquement accélérée en cette rentrée. Le 23 septembre, elle a rendu publiques ses « priorités », au nombre desquelles le logement, le développement économique et les transports. Première adjointe de Bertrand Delanoë depuis douze ans, la brune candidate du Parti socialiste sera peut-être, à 54 ans, la première femme à diriger la capitale française. Pourtant, les Parisiens la connaissent encore mal, bien que, depuis un an, elle se donne un mal de chien pour remédier à cette lacune: elle enchaîne les interviews et, en mars, a publiéunlivre,Mon combat pour Paris. Est-elleaussi «peucharismatique»et«effacée»queleprétendent ses adversaires? « Si c’était le cas, grince-t-elle, je ne serais pas là. Je suis simplement loyale. » Quoi qu’il en soit, les médias en redemandent, tant son parcours se prête au storytelling. La belle est née près de Cadix. Son grand-père est un républicain espagnol condamné à mort sous Franco, mais jamais exécuté. Son père, électricien, préfère fuir la dictature et, comme beaucoup d’autres, décide de s’installer en France. En 1961, il pose ses valises à Lyon, dans le quartier populaire de Vaise, avec sa femme couturière et ses deux filles, Marie et « Ana », laquelle est âgée de 2 ans.
En cet après-midi pluvieux, dans son bureau parisien, Anne Hidalgo, toute de noire vêtue à l’exception d’un foulard bleu électrique, revendique fièrement cette histoire familiale. « Oui, je suis une fille d’immigrés. Je viens d’un milieu populaire qui ne me prédestinait pas à être là où je suis aujourd’hui, mais j’ai beaucoup travaillé, dit-elle, presque avec emportement. Certains traitent ce genre de parcours avec condescendance : “Elle nous fait encore le coup de la fille qui s’est faite toute seule…” Mais je ne fais aucun coup, je n’invente rien, c’est mon histoire. » TITRES DE SÉJOUR. Elle devient française à l’âge de
14 ans. « Mon père a voulu nous épargner les files d’attente à la préfecture pour renouveler nos titres de séjour. Il disait que notre vie était désormais en France. » La Constitution espagnole de l’époque interdisant la double nationalité, Anne Hidalgo perd sa nationalité d’origine, qu’elle ne retrouvera qu’en 2003. Elle rend un hommage appuyé à ses parents, qui ont « consacré toute leur énergie à la réussite de leurs filles » et étaient « convaincus que l’éducation et le travail sont les seuls moyens d’y arriver ». Diplôme de droit en poche, la jeune femme est reçue cinquième au concours de l’inspection du travail. Son premier poste est dans le Val-de-Marne, aux portes de la capitale. Elle s’installe donc dans le 15e arrondissement de Paris, sa « ville rêvée » – où elle habite toujours –, et mène de front vie de familleetvieprofessionnelle.D’unpremiermariage, elle a deux enfants, aujourd’hui âgés de 27 ans et 25 ans. Et un troisième (11 ans) de son union avec le député PS Jean-Marc Germain. Pour garder la forme, elle fait beaucoup de sport: « J’essaie de me ménager des créneaux pour courir ou nager, c’est indispensable. » Rien ne la prédestinait à la politique, mais, en 1997, sa rencontre avec Martine Aubry a tout changé: à 39 ans, elle fait son entrée dans le cabinet de la ministre du Travail. Par la suite, elle servira N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Europe, Amériques, Asie France
Rien ne la prédestinait à la politique. Mais en 1997 elle croise Martine Aubry, alors ministre du Travail. Sa vie bascule.
dans deux autres ministères de l’ère Jospin : Droits des femmes et Justice. Lentement mais sûrement, elle se fait remarquer. Pour les élections municipales de 2001, Bertrand Delanoë l’impose contre toute attente comme tête de liste dans le 15e arrondissement. Elle va mener une campagne que, jusque dans son propre camp, certains ont toujours du mal à digérer. « Il ne faut pas se fier aux apparences, elle peut être très méprisante », lâche une militante. La liste qu’elle conduit est devancée par celle de la droite, mais qu’importe : Anne Hidalgo fait son entrée au Conseil de Paris, désormais dominé par la gauche. Et c’est elle que Bertrand Delanoë, le nouveau maire, choisit comme première adjointe chargée, entre autres, de l’égalité hommes-femmes (lors du second mandat, elle s’occupera d’une tâche plus stratégique : l’urbanisme et l’architecture). MONARCHIE. Pour les municipales de 2014, il a
suffi que son mentor l’adoube pour que les militants lui emboîtent le pas. « Le soutien de Delanoë est logique. Elle est restée à ses côtés pendant plus d’une décennie, sans tenter de lui faire de l’ombre », explique une socialiste du 15e arrondissement. L’opposition, elle, crie à l’archaïsme: « Au PS, ils ont inventéledauphinat,unsystèmemonarchiquedans lequel le roi désigne son héritière », ironise Nathalie Kosciusko-Morizet (NKM), sa rivale de l’UMP. La bataille de Paris, Anne Hidalgo y pense depuis des années. « En me maquillant le matin », dit-elle. La malicieuse allusion à un ancien président de la République n’aura échappé à personne. À l’en croire, « la politique, c’est davantage un marathon qu’un sprint. Il faut construire les choses, avoir de la cohérence, des valeurs, des convictions ». Elle cite Michelle Bachelet, l’ancienne présidente du Chili, son « modèle en politique », et Lionel Jospin, l’ancien Premier ministre, qu’elle admire pour sa « moralité ». Quand François Hollande lui a proposé de devenir ministre, elle a décliné, parce qu’« il faut
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parfois savoir dire non ». Elle se veut le contraire de ces « étoiles filantes utilisées puis lâchées » par Sarkozy que furent Rama Yade ou Fadela Amara. Elle leur préfère Najat Vallaud-Belkacem, l’actuelle porte-parole du gouvernement et ministre du Droit des femmes, ou la députée Seybah Dagoma, l’un de ses porte-parole. Parce qu’elles « prennent leur temps et bâtissent ». La voilà donc à l’aube de son grand rendezvous électoral. Ceux qui la pensaient timide la découvrent en meneuse d’équipe capable de montrer les crocs. NKM, cette « parachutée », comme la surnomme Pascal Cherki, un autre de ses porte-parole, le camp Hidalgo l’attend « de pied ferme ». Maire sortant du 14e arrondissement, ledit Cherki sait de quoi il parle lorsqu’il évoque la « fermeté » d’Hidalgo : c’est elle qui l’a écarté, comme d’autres barons socialistes, de la tête de liste d’arrondissement. Au nom du non-cumul des mandats et de la parité hommes-femmes. « Les discussions avec les maires ont commencé il y a un an, ils savaient qu’il n’y aurait pas d’exception », se défend la candidate. Chez les grognards, cette priorité donnée à la jeunesse passe difficilement. Le dernier sondage la donne gagnante au second tour: 52,5 %, contre 47,5 % à NKM. Il y a quatre mois, le rapport était de 54 %-46 %. Principale raison de cet effritement, selon elle : un contexte national peu favorable et l’impopularité record de l’exécutif. Hidalgo ne se fait donc aucune illusion: « L’élection sera très difficile. » Et le résultat « très serré ». l
PARIS, ILS EN RÊVENT TOUS
L
A MAIRIE DE PARIS a toujours fait rêver. À droite comme à gauche. Diriger la capitale française, c’est certes occuper un poste de prestige, au niveau national et international. Mais nombre de responsables politiques sont convaincus que c’est aussi un tremplin vers l’Élysée. En réalité, les locataires de l’Hôtel de Ville ont, après leur départ, connu des fortunes diverses. Jacques
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Chirac (1977-1995) a, c’est vrai, présidé par la suite aux destinées du pays. Mais JeanTiberi (1995-2001) a surtout accumulé les déboires judiciaires. Quant à Bertrand Delanoë, le maire actuel, il a sans doute des chances limitées de devenir un jour président de la République, mais il quitte ses fonctions avec un taux de popularité enviable (60 %, début 2013). Et il a plusieurs fois refusé d’entrer
dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Paris, c’est aussi un pactole : 8 milliards d’euros de budget, près de 51 000 salariés, des sièges de grandes entreprises (donc des rentrées fiscales) en pagaille… Contrairement à d’autres grandes métropoles comme Rome, NewYork ou Berlin, son premier magistrat n’est pas élu au suffrage universel direct. Les 1,3 million
d’électeurs parisiens (sur 2,2 millions d’habitants) élisent dans chaque arrondissement des conseillers (dont le nombre est fonction de la population), qui, réunis en conseil, élisent à leur tour le nouveau maire, pour un mandat de six ans. La gauche détient actuellement douze arrondissements sur vingt, alors qu’elle n’en avait conquis que six en 1995, et aucun en 1983 et 1989. l H.N. JEUNE AFRIQUE
Europe, Amériques, Asie
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ÉTATS-UNIS
The Big Apple vire à gauche New York se choisira un nouveau maire le 5 novembre. Et c’est Bill de Blasio, un démocrate à la fibre très sociale, qui a toutes les chances de succéder au milliardaire Michael Bloomberg.
I
MARIO TAMA/GETTY IMAGES/AFP
lseraprobablementélumairedeNew York, le 5 novembre. Bill de Blasio, 52 ans, qui vient de remporter la primaire du Parti démocrate dans cette ville, compte selon les derniers sondages quarante points d’avance sur son adversaire républicain. C’est un miraculé, auteur d’un improbable come-back. Situé très à gauche sur l’échiquier politique américain, il s’est longtemps traîné dans les sondages, loin derrière Christine Quinn, speaker du conseil municipal, et l’ancien parlementaire Anthony Weiner. Mais voilà, les vieux démons de ce dernier ont fini par le rattraper. Confondu une première fois en 2011, il a récemment été contraint d’admettre qu’il n’avait jamais renoncé à envoyer des textos salaces à des inconnues. Une vraie manie ! Quant à Quinn, elle a beaucoup pâti de sa proximité avec le maire sortant… Mais de Blasio a un autre atout dans sa manche : sa famille, qu’il n’hésite pas à mettre en scène avec une habileté
qui vise en premier lieu les minorités –, cette mise en scène a permis au candidat italo-américaindegagnerlevotenoir,alors que, lors de la primaire, il avait contre lui un candidat africain-américain. VANITÉS. Charismatique et un brin pro-
fessoral, de Blasio est le seul candidat à attaquer de front le bilan du milliardaire Michael Bloomberg, qu’il qualifie, parodiant le titre d’un célèbre roman de Tom Wolfe (Le Bûcher des vanités), de « maire de toutes les vanités ». Du coup, il est devenu le champion de tous ceux, et ils sont nombreux, qu’exaspèrent l’accroissement des inégalités et l’envolée des prix des loyers. Selon une étude récente, 1,7 million de New-Yorkais – 21,2 % de la
consommée. Sa femme, tout d’abord, Chirlane, née McCray, une poétesse noire qui, en 1979, avait avoué son homosexualité dans un article publié par une revue africaine-américaine (Essence). Elle a apparemment changé d’avis, mais n’exclut pas de retomber un jour amoureuse d’une femme. « Bill et moi formons un couple très peu conventionnel », commente-t-elle. En 1994, pour leur lune de miel, Plus de 20 % des New-Yorkais vivent les tourtereaux avaient au-dessous du seuil de pauvreté. séjourné à Cuba, où les ressortissants amériSoit 1,7 million de personnes. cainsontthéoriquement interdiction de se rendre. population – vivaient en 2012 au-dessous Autre star de la campagne, Dante, le fils du seuil de pauvreté, chiffre en constante de Blasio, un adolescent de 15 ans dont augmentation. Les 5 % les plus riches la spectaculaire coupe afro a fait le buzz gagnent quarante-neuf fois plus que les 5 % les moins favorisés. sur internet. Certains des spots électoraux Comme le martèle de Blasio, qui est télévisés où il apparaît ont été vus jusqu’au Texas. S’ajoutant à sa dénonciation des l’actuel médiateur de la ville, il y a désorcontrôles musclés pratiqués par la police mais deux New York, celui des riches et new-yorkaise – le fameux stop and frisk, celui des pauvres. Et Bloomberg préfère construire des pistes cyclables et des zones piétonnes plutôt que de s’attaquer aux Bill, Dante, inégalités. Chiara et Une stratégie gagnante que de Blasio Chirlane aurait, selon le New York Times, échade Blasio, faudée… dans sa cuisine, dans laquelle le 11 septembre, il souhaitait tourner un spot publicitaire à New York. avec sa famille et qui s’était révélée trop exiguë. Des problèmes de logement, vraiment ? De Blasio a pourtant des amis fortunés, au premier rang desquels les époux Clinton, qui viennent d’ailleurs de lui apporter leur soutien. Il est vrai qu’avant de devenir conseiller municipal de Brooklyn (2002-2009) il avait, en 2000, dirigé la campagne victorieuse de Hillary, élue sénatrice de New York. De Blasio, que son adversaire républicain dépeint comme un dangereux gauchiste – passionné par l’Amérique latine, il fut un fan de la révolution sandiniste au Nicaragua –, a fait savoir que, sitôt élu, il augmenterait les impôts des plus riches pour financer l’école maternelle pour tous à partir de 4 ans. Là, ce serait vraiment la fin de l’ère Bloomberg. l JEAN-ÉRIC BOULIN, à New York
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JEUNE AFRIQUE
MUNIR UZ ZAMAN/AFP
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p Manifestation d’ouvrières du textile, le 21 septembre, à Dacca. BANGLADESH
La révolte des petites mains Salaires de misère, conditions de travail exécrables… Dans le textile et l’habillement, les mouvements sociaux se multiplient. Et suscitent l’inquiétude des grands distributeurs occidentaux.
P
lusieurs dizaines de milliers de travailleurs du textile et de l’habillement manifestent au Bangladesh depuis le 21 septembre pour obtenir des augmentations de salaires. Dans la banlieue industrielle de Dacca, la capitale, trois usines de textile ont été incendiées, une gendarmerie a été vandalisée et les exportations sont bloquées, près de trois cents usines ayant préféré stopper toute production. La colère a éclaté lorsque les salariés du secteurontapprisquelesyndicatpatronal, la Bangladesh Garment Manufacturers and Exporters Association (BGMEA), refusait de relever le salaire mensuel minimum de 3 000 à 8 114 takas (28 à 76 euros), arguant qu’une telle augmentation porterait tort à la compétitivité de leurs produits auprès des consommateurs américains et européens, n’acceptant de porter ledit salaire qu’à 3 600 takas. Les syndicats, et notamment la Bangladesh National Garment Workers Employers League, ont rejeté cette offre « inhumaine et humiliante » dans un contexte d’inflation des prix alimentaires. Quatre millions de salariés particulièrement mal rémunérés ont fait du Bangladesh le deuxième exportateur mondial de vêtements, derrière la Chine. Les grands noms du commerce, comme
JEUNE AFRIQUE
30 % et 50 %. De nombreuses productions ont alors été délocalisées dans des pays où le coût du travail est encore plus bas, comme le Vietnam, le Cambodge ou, bien sûr, le Bangladesh. Mais même là, la situation se détériore. Depuis cinq ans, les fournisseurs des marques Nike ou Puma sont, au Vietnam comme au Cambodge, confrontés à d’importants mouvements sociaux. Dans ce dernier pays, 134 grèves ont eu lieu en 2012 dans le secteur de l’habillement(130000salariés).Soitquatrefois plus qu’en 2011. Et on en a recensé 48 au cours du premier semestre de cette année, bien que le salaire mensuel minimum ait été, en mars, porté à 61 euros. Violation des libertés syndicales, temps de travail excessif, nourriture insuffisante, sécurité incendie médiocre… Les entreprises
l’américain Walmart, le français Carrefour ou le suédois H&M, s’y fournissent. Le gouvernement est tiraillé entre des intérêts contradictoires. D’une part, il redoute qu’une hausse des prix de ses textiles (qui représentent 80 % du commerce extérieur, 15 % du PIB et 45 % de l’emploiindustriel)nefassefuirEuropéens et Américains. De l’autre, il doit s’efforcer de redorer l’image du pays, souvent assimilé à un bagne en raison de l’extrême modicité de la rémunération des salariés (un tiers Les patrons refusent de porter du salaire moyen chinois) le salaire minimum de 28 euros et du caractère déplorable de leurs conditions de traà 76 euros par mois ! vail. L’effondrement d’un atelier, le Rana Plaza, le 24 avril, avait cambodgiennes ne sont pas épargnées fait 1 129 morts et mis en lumière les par le rapport que l’International Human comportements de négriers de certains Rights and Conflict Resolution Clinic de entrepreneurs. Certaines firmes étranla Stanford Law School a publié en février. gères, comme Walmart, ont refusé de Les marques aussi se trouvent au pied participer à l’indemnisation des victimes du mur : « Si elles ne font pas pression et de leurs familles. sur leurs fournisseurs cambodgiens pour qu’ils améliorent leur manageDÉLOCALISATIONS. La course folle au ment, estime David Welsh, responsable « moins-disant salarial » dans laquelle les du Solidarity Center à Phnom Penh, les importateurs occidentaux sont engagés en choses ne s’amélioreront pas, parce que Asie arrive-t-elle à son terme ? En Chine, tout le monde cherche à faire le plus la multiplication des mouvements sociaux d’argent possible dans ce secteur. » Le a contraint les employeurs à accepter des pronostic est identique pour toute l’Asie augmentations salariales comprises entre ALAIN FAUJAS du Sud-Est. l N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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PARCOURS | D’ici et d’ailleurs
p « Mes racines sont au Sénégal, mais je fais de la politique pour les gens qui m’ont élu », souligne le membre du SPD.
Karamba Diaby Le défricheur Représentant du parti social-démocrate à Halle (Saxe-Anhalt), ce Sénégalais est devenu le premier député d’origine africaine au Parlement allemand.
E
N CE MARDI SOIR, les sociauxdémocrates allemands organisent leur première rencontre postélectorale. Au milieu des nouveaux et des anciens députés, Karamba Diaby ne passe pas inaperçu. Tous connaissent au moins son nom, sa circonscription ou une partie de son histoire. Il faut dire que, en tant que premier député d’origine africaine à entrer au Parlement allemand, ce natif de Casamance (Sénégal) fait l’objet depuis six mois d’une attention toute particulière de la part de la presse mondiale. « Au début, j’étais irrité, confie l’homme de 51 ans. Je voulais être considéré en ma qualité de membre du SPD et non pour la couleur de ma peau ou mon identité. Puis je me suis dit que ma candidature et mon élection en tant que député pouvaient servir à ouvrir un débat sur la trop faible
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représentativité des personnes d’origine étrangère en Allemagne. » L’élection pour la CDU de Charles M. Huber, fils d’un diplomate sénégalais né à Munich, montre d’ailleurs que la société allemande commence peut-être à changer. Comment cet orphelin de Marsassoum en est-il venu à embrasser un destin national en Allemagne ? Issu d’une famille pauvre, élevé par sa sœur, il a très tôt été confronté à l’injustice et s’est impliqué dans les mouvements étudiants de gauche. Mais c’est grâce à la chimie qu’il s’est envolé, en 1986, vers l’ancienne Allemagne de l’Est (RDA), un pays situé alors derrière le rideau de fer. « Après le bac, j’avais sollicité une bourse dont le but était d’encourager les étudiants à poursuivre leur formation dans un pays de l’ancien bloc
socialiste. J’avais donc coché trois disciplines – l’électronique, la chimie et l’agronomie – et trois destinations – la RDA, la Bulgarie et laTchécoslovaquie. » Arrivé à Leipzig, il est pris en main par le pays qui l’accueille, apprend l’allemand, poursuit un doctorat. Tenant à s’investir dans les associations, où il est souvent la seule personne étrangère, il prend des responsabilités au sein du Conseil des étrangers de l’université. Mais s’il estime avoir eu des facilités pour s’intégrer, le rêve de retourner au pays ne le quitte pas avant le milieu des années 1990. « J’ai cherché du travail dans la chimie au Sénégal, sans succès. Entre-temps, notre fille est née », se souvient ce père de deux enfants de 18 ans et 11 ans marié à une Allemande rencontrée pendant ses études. Il s’établit à Halle, ville de 230 000 habitants à 200 km au sud-ouest de Berlin, où il devient président du Conseil des étrangers puis conseiller municipal. Le grand saut, il l’accomplit en 2001 en adoptant la nationalité allemande et en abandonnant la sénégalaise. Un choix JEUNE AFRIQUE
Europe, Amériques, Asie
Après son adhésion au SPD, en 2008, tout s’enchaîne. Aux élections fédérales de 2013, il présente sa candidature à Halle, sous le slogan « La diversité crée des valeurs ».Toujours souriant, d’un contact facile, il séduit les électeurs, qui lui accordent 23 % de leurs voix. Un score insuffisant face à son concurrent de la CDU, mais qui lui permet de faire son entrée au Parlement grâce au mode de scrutin partiellement proportionnel. Sur le racisme ordinaire, il s’épanche peu. Tout juste évoque-t-il quelques e-mails insultants et des graffitis sur ses affiches. Pas plus que pour d’autres candidats. Son résultat indique que les mentalités évoluent. Aujourd’hui, il veut défendre l’égalité des chances dans l’éducation, se bat pour l’instauration d’un salaire minimum de 8,50 euros brut de l’heure, la généralisation de la double nationalité ou le développement des crèches, pour faciliter l’apprentissage de l’allemand. « Mais si je suis sensible au thème de l’intégration, je ne veux pas en faire un sujet central. Mes racines sont au Sénégal, mais je fais de la politique pour les gens qui m’ont élu, c’est-à-dire les Allemands de ma circonscription », insiste-t-il. Cela ne l’empêche pas de conserver avec son pays un lien fort et particulier. Il s’y rend tous les deux ans pour retrouver ses sœurs et son frère restés là-bas. « Et si je peux faire bénéficier le Sénégal et les pays africains des contacts que j’ai noués en Allemagne, leur ouvrir des portes, je le ferai tout naturellement. » l
ALLEMAGNE
Chancelière cherche partenaire Victoire électorale écrasante pour Angela Merkel, le 22 septembre. Mais, pour gouverner, il va lui falloir trouver des alliés.
L
eraz-de-maréeétaitannoncé,mais il a dépassé les prévisions. Lors des élections du 22 septembre, la CDU d’Angela Merkel a obtenu 41,5 % des suffrages – huit points de plus qu’en 2009 ! Après Konrad Adenauer et Helmut Kohl, elle n’est que le troisième chancelier depuis 1945 à remporter trois victoires consécutives. Elle est surtout le seul dirigeant européen à être reconduit dans ses fonctions depuis le déclenchement de la crise financière. Après l’annonce de son triomphe, on a vu – spectacle rare – la chancelière esquisser quelques pas de danse devant des militants survoltés ! La CDU-CSU dispose désormais de 311 députés au Bundestag. Il ne lui en manque que quatre pour avoir la majorité absolue et gouverner seul. C’est un paradoxe : en dépit de sa victoire écrasante, Merkel doit négocier ferme pour s’assurer une majorité, puisque ses alliés libéraux, qui ont obtenu moins de 5 % des suffrages, ne comptent plus aucun député. Choisirat-elledes’allieraveclessociaux-démocrates du SPD ou avec les Grünen (Verts)? CONTREPARTIES. Dès le lendemain de
sa victoire, elle a pris contact avec les dirigeants du SPD, qui se sont déclarés ouverts au dialogue mais ne noueront pas
d’alliance sans contreparties. « Ils gardent un souvenir cuisant de la grande coalition de 2005-2009. Car c’est toujours le plus petit des partenaires qui perd le plus de plumes dans l’aventure. Regardez ce qui vient d’arriver aux libéraux », commente un cadre du parti. Pour l’instant, rien n’a filtré du contenu des discussions, mais le SPD pourrait défendre âprement certaines revendications comme l’instauration d’un salaire minimum, la réforme de la fiscalité ou l’assouplissement de la politique européenne d’austérité. Pour faire monter les enchères, la CDU se dit également prête à négocier avec les Verts, en pleine déconfiture après leur médiocre score. Mais les divergences entre les deux partis sont profondes. La CSU, la très conservatrice aile bavaroise de la CDU, est farouchement hostile à une telle alliance « noire-verte », comme on dit ici, qui risquerait en outre de provoquer un éclatement du parti écolo. Si le bloc de gauche SPD-Verts-Linke disposeenthéoried’unemajoritédesièges (319),AndreaNahles,lasecrétairegénérale du SPD, a une nouvelle fois exclu toute alliance avec l’extrême gauche. En 2005, la formation d’un gouvernement avait pris trois semaines. Qu’en sera-t-il cette fois? l G.D.
MICHAEL KAPPELER/AFP
longtemps repoussé. « J’ai toujours eu l’intention de contribuer au débat politique, ce qui impliquait d’adopter la citoyenneté allemande. Mais je trouvais injuste qu’en tant que Sénégalais je sois obligé d’abandonner ma nationalité, alors que pour d’autres pays, européens par exemple, ça n’est pas nécessaire. » Il s’est décidé en 1999, alors qu’une poignée d’élus de droite lançait une pétition contre la double nationalité, rencontrant un grand succès parmi la population et suscitant même un flot de remarques racistes.
GWÉNAËLLE DEBOUTTE, à Berlin Photo : JENS SCHLUETER/AFP JEUNE AFRIQUE
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p Divine surprise pour Angela Merkel au QG de la CDU, à Berlin, le 22 septembre. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Économie
LES INDISCRETS
Guinée, Nigeria, Bénin, Tunisie, Kenya
FINANCE
UNE ASCENSION FULGURANTE Total de bilan
20
(en milliards de dollars)
Produit net bancaire (en milliards de dollars)
Nombre de pays
3,5
33
18
1,8
0,35 2006
2012
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JEUNE AFRIQUE
ENTREPRENEURIAT
PME africaines, qui êtes-vous ?
DÉCIDEURS
Mohamed Najib Boulif Ministre marocain des Affaires générales et de la Gouvernance
a mal à la tête
JEUNE AFRIQUE
Oando dévisse mais reste optimiste
Tensions au plus haut niveau, accusations de conflits d’intérêts et luttes de pouvoir: le premier groupe bancaire panafricain est dans la tourmente. Enquête sur une affaire explosive. FRÉDÉRIC MAURY
P
MICHEL AVELINE POUR J.A.
p Le siège de la banque, à Lomé.
NIGERIA
et
STÉPHANE BALLONG
our un peu, Lomé se serait transformé en Dallas. Une femme en colère, un directeur général contesté, un président mis en cause, un ex au jeu trouble, des associés divisés… Depuis le 16 juillet à 18 h 27 (heure de la capitale togolaise, où le premier groupe bancaire panafricain a son siège), Ecobank, et avec lui ses filiales dans 34 pays du continent et son million d’actionnaires, a basculé dans le mauvais feuilleton. Se basant sur des courriers confidentiels, le Financial Times, prestigieux quotidien économique britannique qui a « honoré » Ecobank d’une une et de multiples articles, a jeté une lumière crue sur les conflits plus ou moins larvés qui minent le conseil d’administration et une partie du management du groupe, ainsi que sur la gestion pas toujours exemplaire des conflits d’intérêts et sur le rôle trouble de certains actionnaires. Accélérant ainsi le cours de l’histoire : au cours des deux derniers mois, les administrateurs d’Ecobank se sont réunis officiellement quatre fois, à Lomé et jusqu’à Kigali, soit presque autant qu’au cours de toute l’année 2012. Le cours de Bourse, qui s’envolait depuis le début de l’année, passant de 35 F CFA (0,05 euro) début janvier à 65 en juin, est reparti à la baisse (– 11 % entre le 16 juillet et le 24 septembre). Le nouveau directeur général, Thierry Tanoh, qui fait partie des personnalités mises en cause, garde le cap, estimant que « le groupe sortira grandi de cette épreuve ». En attendant, c’est toute la dynamique d’une banque presque familiale, dont les employés se baptisent euxmêmes les « Ecobankers », qui est en danger. Là réside sans doute aujourd’hui le principal enjeu : sauvegarder cet état d’esprit qui a permis au rêve panafricain – celui-là même que les politiques ont été incapables de mettre en œuvre – de devenir réalité sous la forme d’une entreprise unique sur le continent. Enquête sur un scandale qui pourrait bien relever de l’entreprise de déstabilisation.
UNE TRANSITION CHAOTIQUE Jamais ambiance n’a été aussi délétère au sein du groupe bancaire panafricain. En fait, depuis l’arrivée de Thierry Tanoh à sa tête, la tension au sein du comité exécutif l l l N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Entreprises marchés
Chronologie
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Octobre 2012
Avril 2013
Début juillet
16-17 juillet
6 août
Avec trois mois d’avance, Arnold Ekpe, directeur général, quitte Ecobank
La Banque centrale du Nigeria met en cause Kolapo Lawson, président du conseil d’administration
Laurence do Rego, directrice finance et risque, refuse de partir à l’amiable
Le FinancialTimes révèle la mise en cause de Kolapo Lawson
1er janvier 2013
19 juin 2013
16 juillet
5 août
Thierry Tanoh devient juridiquement directeur général
Thierry Tanoh obtient des administrateurs l’autorisation de se séparer de l’un des directeurs exécutifs
Le principal actionnaire, PIC, s’oppose par courrier au départ de Laurence do Rego
Le président est confirmé dans ses fonctions
Laurence do Rego dénonce dans un courrier aux autorités boursières nigérianes la mauvaise gouvernance au sommet d’Ecobank
l l l n’est jamais réellement retombée jusqu’à l’éclatement de ce qu’il convient aujourd’hui d’appeler « l’affaire Ecobank ». Il y a d’abord eu la période de transition entre Thierry Tanoh et Arnold Ekpe, l’ancien directeur général poussé vers la sortie par le conseil d’administration. Censée durer six mois, elle a été réduite de moitié. La raison ? La difficile cohabitation entre les deux hommes. « Avec le fort caractère du directeur général sortant, la transition ne pouvait pas durer plus longtemps », indique-t-on en interne. En outre, c’est peu dire que dans les plus hautes sphères d’Ecobank la nomination de Thierry Tanoh a fait quelques frustrés. L’ancien viceprésident de la Société financière internationale (IFC, filiale de la Banque mondiale) a en effet été préféré, dans le cadre d’un processus de sélection
2 septembre Kolapo Lawson pointe des liens d’affaires entre deux
mené par le cabinet international Korn/Ferry, à trois candidats internes comptant entre dix et vingt-cinq ans de maison : Albert Essien, Evelyne Tall et Laurence do Rego. On sait désormais ce que cette dernière pense du nouveau patron, qui « n’est pas un banquier et n’a pas les compétences de base nécessaires pour diriger [l’]institution », comme elle le déclare dans un courrier dont Jeune Afrique a vu une copie. C’est dans ce passage de relais chaotique que se trouvent les germes de l’actuelle crise de leadership (lire p. 77).
LE TROUBLE JEU DES SUD-AFRICAINS Derrière cette crise au sommet, certains voient déjà poindre une tentative de déstabilisation du groupe. Présent dans 34 pays du continent,
L’OMBRE D’EKPE ifficile de dissocier son nom de celui d’Ecobank. L’homme qui a dirigé le groupe bancaire pendant douze ans (d’abord de 1996 à 2001 puis de 2005 à 2012) et en a fait le plus vaste réseau du continent est pourtant celui dont personne ne parle aujourd’hui. En tout cas, pas ouvertement. Contacté par Jeune Afrique, il affirme vouloir rester en dehors de cette crise. « Tout ce qui se passe à Ecobank ne me concerne plus », a-t-il indiqué. Arnold Ekpe, 60 ans cette année, est désormais membre du conseil d’administration du fonds N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
souverain nigérian et du conseil de surveillance de l’investisseur financier ADC. Et met aussi sur pied un fonds d’investissement de plusieurs centaines de millions de dollars. Loin d’Ecobank ? Pas totalement. Sa proximité avec plusieurs acteurs de la crise actuelle au sein du groupe panafricain, notamment avec Laurence do Rego, a rappelé à tous que ce diplômé de l’université de Manchester, contrairement à ce qu’il dit, n’a pas digéré son départ forcé du groupe. Selon un observateur MARK CHILVERS POUR J.A.
D
extérieur, l’antagonisme entre Arnold Ekpe et Kolapo Lawson est tel que les deux hommes ont eu, début août, un échange très vif. Ses liens désormais déclarés avec les membres sudafricains du conseil d’administration (lire ci-dessus), alors qu’il avait lui-même fait entrer ces nouveaux partenaires au tour de table, braquent de nouveau les projecteurs sur lui. l F.M. et S.B. JEUNE AFRIQUE
Ecobank a mal à la tête
11 septembre Gervais Koffi Djondo, cofondateur du groupe, demande la démission de Kolapo Lawson (fils d’un autre fondateur)
16 septembre
nigérianes chargent KPMG d’enquêter sur la gouvernance au sein d’Ecobank
20 septembre Le juriste Seydou Ba est nommé par le groupe pour enquêter sur les allégations de Laurence do Rego
Les autorités
Ecobank Transnational Incorporated (ETI) est aujourd’hui l’établissement africain le mieux placé pour profiter de son émergence annoncée. Il éveille de fait depuis quelques années la convoitise des grands noms du secteur. Déjà, en 2007, la montée en puissance fulgurante de la banque d’affaires Renaissance Capital au tour de table du groupe avait semé la panique. Six ans plus tard, la décision d’Ecobank d’annoncer publiquement le renforcement de son statut pour conserver son indépendance, alors que celle-ci ne semblait pas menacée, a ravivé les craintes. Tous les regards se sont alors tournés vers l’Afrique du Sud. Le fonds de pension sud-africain Public Investment Corporation (PIC) est en effet aujourd’hui le principal actionnaire d’Ecobank, avec 18,2 % des parts. Nedbank, quatrième banque de la nation Arc-en-Ciel, a annoncé en début d’année son intention de convertir en actions dès le mois de novembre le prêt de 285 millions de dollars (plus de 212 millions d’euros) accordé au groupe panafricain en 2011. L’opération, équivalente à une augmentation de capital, lui permettrait de détenir environ 12 % du groupe (avec la possibilité de monter à 20 %), ramenant les parts de PIC autour de 15 %. Derrière la montée des Sud-Africains au tour de table d’Ecobank, un homme : Arnold Ekpe (lire ci-contre, à gauche), le patron emblématique du groupe. C’est lui, « malgré la réticence de la majorité du conseil d’administration », précise un membre de cette instance, qui a négocié et obtenu le crédit convertible en actions auprès de Nedbank. C’est aussi durant son mandat que PIC a fait son entrée dans le capital du groupe. Selon deux sources concordantes, Sipho Mseleku, administrateur d’Ecobank (qui a également été l’un des artisans du deal avec Nedbank), a admis lors du conseil tenu récemment à Kigali s’être depuis associé à Arnold Ekpe pour créer un fonds de plusieurs centaines de millions de dollars, fonds dans lequel PIC envisagerait d’investir. Cet étonnant attelage l l l JEUNE AFRIQUE
Laurence do Rego, celle par qui le scandale arrive La décision d’écarter la puissante directrice chargée de la finance et du risque a entraîné une réaction en chaîne.
F
in juin à Lomé, le malaise était déjà perceptible. Lors de l’assemblée générale d’Ecobank – qui marquait également le 25e anniversaire du groupe –, Laurence do Rego, puissante administratrice exécutive et directrice finance et risque, était en retrait, contrairement aux habitudes. En coulisses, son sort avait été scellé quelques jours plus tôt, le 19 juin, par les administrateurs. Thierry Tanoh avait obtenu d’eux l’autorisation de la révoquer pour nommer le directeur financier de son choix. Et quelques semaines plus tard, le 5 août, elle était suspendue. Une décision motivée, officiellement, par la découverte qu’elle n’avait pas le diplôme d’expertcomptable certifié dont elle se prévalait. Absence confirmée depuis par un courrier du ministère français de l’Enseignement supérieur et de la Recherche daté du 28 août.
PROCHE. Au cours du conseil d’administration du 5 août, qui a mené à sa suspension, ses compétences ont été partiellement remises en question à la suite de rapports effectués quelques mois plus tôt par les autorités bancaires de l’Union monétaire ouest-africaine (Umoa) et du Nigeria. Des critiques qui ont surpris les familiers de cette Franco-Béninoise de 48 ans dont la réputation était jusqu’à récemment bonne, plusieurs financiers l’ayant côtoyée la qualifiant de bonne professionnelle. En réalité, Laurence do Rego paie aussi son statut d’« Ekpe girl ». « Elle était vue par Thierry Tanoh comme trop proche d’Arnold Ekpe. Il était logique qu’il veuille s’en séparer
et nommer à sa place le directeur financier de son choix, car c’est un poste très sensible », souligne un dirigeant de la banque. Dans la lettre qu’elle a adressée à l’autorité des marchés du Nigeria après sa suspension, Laurence Do Rego met en cause la méthode du directeur général, parlant de « pressions psychologiques » et de « dénigrement ». Thierry Tanoh ne s’attendait pas à une telle résistance. Il aurait dû se méfier : femme à la poignée de main ferme, Laurence do Rego était réputée pour son caractère de battante. « J’ai donné onze années de ma vie à cette institution… C’est vous qui allez partir », a-t-elle ainsi lancé au directeur général lorsque celui-ci lui a demandé de démissionner. l F.M. et S.B.
VINCENT FOURNIER/J.A.
membres du conseil et Arnold Ekpe
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Entreprises marchés entre un actionnaire, un administrateur et un ancien dirigeant cristallise désormais les interrogations. D’autant qu’Ecobank reste une proie facile. La seule disposition connue pour protéger le groupe d’une prise de contrôle est celle qui impose à un actionnaire détenant plus de 24,99 % des parts de faire une offre pour monter à 75 %. La récente vente par Renaissance Capital des 6 % qu’il détenait à un acquéreur anonyme entretient en outre l’incertitude. lll
Présente dans 34 pays du continent, la banque éveille la convoitise des grands noms du secteur.
LE NIGERIA AUX AGUETS Parmi les acteurs inquiets de la montée en puissance des Sud-Africains, les Nigérians. Chez ETI, le géant économique ouest-africain est en effet partout. Historiquement d’abord, car le pays a été le principal contributeur (secteurs public et privé confondus) à la création du groupe, en octobre 1985. Capitalistiquement, aussi : via la structure publique Amcon, il est aujourd’hui son deuxième actionnaire, avec 9,7 % des parts. Mais ce n’est pas tout : avec le rachat d’Oceanic Bank, le Nigeria représente 41 % des actifs du groupe. Sanusi Lamido Sanusi, gouverneur de la Banque centrale, devrait d’ailleurs jouer un rôle clé dans l’évolution du groupe, qu’il semble
vouloir attirer encore davantage dans le giron nigérian. Il a adressé des courriers en ce sens à la Commission bancaire de l’Union monétaire ouest-africaine (Umoa), qui est aujourd’hui le seul superviseur d’Ecobank. Il est l’homme qui, début 2009, lorsqu’il était directeur général de First Bank of Nigeria, a remis d’actualité le projet de fusion entre son établissement, le premier du pays, et le groupe Ecobank. « Les Nigérians craignent la montée des Sud-Africains au capital, explique un membre du conseil d’administration. Ils veulent que la banque reste réellement panafricaine, jusque dans la composition de son actionnariat. »
VERS UNE NÉCESSAIRE REFONTE DE LA GOUVERNANCE ? S’il est un point sur lequel tout le monde se retrouve dans la bataille actuelle, c’est celui-ci : la qualité du conseil d’administration et les questions de gouvernance ne sont pas suffisamment prises au sérieux. Évoquée à de multiples reprises depuis plusieurs mois – dans l’affaire du bonus de 1,15 million de dollars accordé à Thierry Tanoh (auquel il a renoncé depuis), à propos du prêt de Kolapo Lawson et sur le départ de Laurence do Rego –, la question des bonnes pratiques sera d’ailleurs confiée par le groupe à « un cabinet de réputation internationale ».
AU CENTRE DE L’ÉCHIQUIER
Evelyne Tall
Thierry Tanoh
L’ancien patron Afrique de l’IFC (où il a passé près de dix-huit ans) subit son véritable baptême du feu. S’il apparaît hors de cause sur la plupart des questions de gouvernance, antérieures à son arrivée, il a été affaibli par la polémique sur son bonus. Sa personnalité suscite aussi le débat. « Cassant et hautain », pour ses détracteurs. « L’homme qu’il faut pour transformer Ecobank en une véritable institution », selon ses partisans.
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Discrète mais disposant d’un impressionnant carnet d’adresses, enrichi par ses fonctions à la tête du réseau d’Ecobank, la Sénégalaise a été la plus sérieuse des candidates internes à la succession d’Arnold Ekpe. Dans la bataille en cours, elle garde le silence.
ECOBANK
BRUNO LEVY
Le Nigérian, fils du principal fondateur d’Ecobank, a été mis en cause par la Banque centrale du Nigeria pour un prêt non remboursé (qui l’a été depuis). Son départ de la présidence est toujours en jeu. Même si personne ne souhaite le confirmer officiellement.
Albert Essien
ECOBANK
Kolapo Lawson
VINCENT FOURNIER/J.A.
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L’autre candidat interne à la succession d’Ekpe est, comme EvelyneTall, un « Ecobanker » pur jus après plus de deux décennies dans le groupe. Mais le Ghanéen, proche de la retraite, préfère rester en retrait. JEUNE AFRIQUE
Ecobank a mal à la tête En coulisses, les analyses se font sévères. « Depuis que le Financial Times a débuté sa campagne, le conseil n’a pas été capable de prendre les décisions importantes. Il a trop tardé », lâche l’un de ses membres, dépité. Dans la communauté financière, le manque de représentation des actionnaires au sein du conseil étonne depuis longtemps : sur les 17 membres, 5 représentent des actionnaires, 5 sont des managers opérationnels et 7 sont réputés indépendants. Une composition contraire aux règles de l’Ohada, qui limitent à un tiers le nombre d’administrateurs non actionnaires, et que la banque doit en partie à Arnold Ekpe. L’exdirecteur général a vu dans cette composition une manière de préserver l’indépendance de l’institution et de la protéger d’un actionnaire trop gourmand qui aurait été tenté de dicter sa stratégie au management… Cet état de fait n’a d’ailleurs rien de nouveau : l’immense majorité des membres du conseil d’administration est en place depuis longtemps. « Depuis quelques années, la taille d’Ecobank a explosé, souligne un consultant, mais les pratiques n’ont pas été mises à niveau. » Comble de l’ironie, c’est notamment dans ce but que Thierry Tanoh, expert en bonnes pratiques en tant qu’ancien de l’IFC, a été choisi pour succéder à Arnold Ekpe. l
EN VÉRITÉ
Opinions & éditoriaux Frédéric Maury
Fragile joyau ’
L Dans les plus hautes sphères, la nomination de Thierry Tanoh a fait quelques frustrés.
DR
Véritable patron de PIC, le gestionnaire des retraites des employés du secteur public sud-africain, et administrateur d’Ecobank, « Dr Dan » est critiqué chez lui pour certains investissements jugés plus politiques qu’économiques. Il s’en défend et entend imposer la bonne gouvernance aux entreprises dans lesquelles PIC investit. Quelles sont ses véritables ambitions chez Ecobank?
JEUNE AFRIQUE
DR
Dan Matjila
Mike Brown
Le patron de Nedbank, la plus petite des quatre grandes banques sud-africaines, sera sans doute dans les semaines qui viennent le premier actionnaire d’Ecobank ainsi qu’un nouvel administrateur de poids. Quant à ses intentions à plus long terme, mystère…
année 2013 aurait dû être l’un des plus beaux crus de la jeune existence d’Ecobank. Un 25e anniversaire, un nouveau patron et une place de numéro un dans cette vaste zone qui va du Sahara à l’Afrique du Sud. Il n’en aura rien été. Ce queThierryTanoh nomme lui-même son « baptême du feu » laissera sans nul doute des traces dans ce qui est clairement la plus belle réussite – et peut-être même la seule – du capitalisme panafricain. Né de presque rien, à l’initiative des chambres de commerce d’Afrique de l’Ouest et de quelques hommes d’affaires dont Adeyemi Lawson et Gervais Koffi Djondo, le groupe bancaire s’est développé pas à pas, embrassant il y a une dizaine d’années le rêve du panafricanisme, sous la houlette – et avec le talent – d’Arnold Ekpe. Ecobank n’est ni togolais, ni nigérian, ni kényan. Ou il est, comme le disent souvent ses employés, « tout ça à la fois ». Malgré cela, malgré ses 18 700 employés, malgré ses 9,6 millions de clients à travers 34 pays, Ecobank ne pèse rien, ou si peu. Dans la crise actuelle, dont bien des traits soulignent la complexité de faire du business en Afrique, c’est cela qui frappe. Quelques courriers confidentiels diffusés dans la presse… et ce qui aurait dû rester une bataille de conseil d’administration, comme les entreprises en connaissent de temps à autre, semble menacer le groupe. On repense à cette époque, pas si lointaine, où la banque d’affaires Renaissance Capital s’était jouée d’autorités de contrôle aux moyens désuets pour s’emparer en quelques mois de près d’un quart du capital de la banque panafricaine. Six ans plus tard, Ecobank pèse davantage, mais pas tant que ça. Un seul milliard de dollars : c’est le prix qu’il faudrait, aujourd’hui, pour s’offrir ce fragile joyau. Que tout le monde, désormais, joue son rôle et assume ses responsabilités. Pour sauver Ecobank et, surtout, la philosophie qui l’a fait grandir. l N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Les indiscrets
Guinée
p Le gisement de fer du mont Simandou.
NIGERIA PEUGEOT RUGIT DE NOUVEAU
La marque au lion repart à l’offensive au Nigeria. Éric Maydieu, nouveau déléguégénéraldugroupe PSA Peugeot Citroën dans le pays, mise notamment sur le modèle 301 pour revenir rapidement à 12 000 voitures écoulées paran,soitleniveaudeses ventes dix ans plus tôt. Il entend renforcer le réseau du constructeur français
vouloirattaquerlejournalsatiriquefrançais en justice: « Je viens de voir nos avocats du cabinet Richard Malka. Une plainte sera déposée d’ici à mercredi à Paris. L’accusation de financement d’un coup d’État est grotesque, cela fait partie d’une campagnededéstabilisation.Jeneconnais pas les mercenaires mentionnés par le journal, qui ne m’a pas contacté alors que je suis en France », fait-il valoir, persuadé que«lesinformationsduCanardenchaîné viennent de personnes malintentionnées, proches des autorités guinéennes ». l
au Nigeria, puis relancer la production de véhicules dans une ancienne usine d’assemblage à Kaduna. Un objectif qui marque une inflexion dans la stratégie du groupe PSA, qui n’envisageait jusqu’alors aucune réimplantation industrielle en Afrique.
Y. TYLLE/ACTION PRESS
I
ndiquant s’appuyer sur des notes des servicessecretsfrançais(DGSE)etaméricains (CIA), l’hebdomadaire français satirique Le Canard enchaîné a annoncé, dans son édition du 25 septembre, un coup d’État imminent en Guinée, avec l’implicationprobableduFranco-Israélien Beny Steinmetz, fondateur du groupe minier BSGR. En conflit avec Conakry, quil’accusedecorruptiondansl’obtention d’une licence sur le gisement de fer du mont Simandou, AsherAvidan, directeur général de BSGR, a confié à Jeune Afrique
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BSGR
BSGR attaque le « Canard »
BÉNIN COTONOU FILE UN MAUVAIS COTON
La filière coton béninoise est plongée dans
l’incertitude. Depuis l’éviction de l’homme d’affaires Patrice Talon, l’État tente en vain de reprendre le secteur en main. Et les quatre opérateurs privés du pays, plombés par une dette de 3 milliards de F CFA (4,6 millions d’euros), menacent toujours de ne pas égrener la prochaine récolte. Une rencontre entre entreprises et pouvoirs publics prévue à Paris le 24 septembre a purement et simplement été annulée.
TUNISIE LE GENDRE IDÉAL Directeur général du pôle agroalimentaire du groupe tunisien Mabrouk depuis 2006, le français Frédéric Pecastaings (photo) poursuit sa progression au sein de l’empire familial. L’ancien directeur des acquisitions de Danone dans les marchés émergents vient d’être nommé administrateur du nouveau holding, Saïda Group, qui contrôle désormais les sociétés Sotuchoc (chocolat), Sotubi (biscuits), les Industries alimentaires de Tunisie (fromage) et Lu Algérie (biscuits). Soit un chiffre d’affaires d’environ 240 millions d’euros.
CAMILLE MILLERAND POUR J.A.
Entreprises marchés
PHOTO12/ALAMY
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KENYA CENTRALE AMÉRICAINE Le groupe Symbion Power vient de remporter l’appel d’offres lancé en début d’année par le gouvernement kényan pour la construction et l’exploitation d’une centrale géothermique dans le nord du pays. Cet équipement, dont les activités doivent démarrer « courant 2014 », selon Paul Hinks, directeur général de Symbion Power, aura une puissance de 30 MW. L’investissement total s’élève à 60 millions d’euros, à la charge du groupe américain et de ses partenaires. JEUNE AFRIQUE
FINANÇONS ENSEMBLE L’ACCÈS À LA PROPRIÉTÉ POUR TOUS
EMPRUNT OBLIGATAIRE par appel public à l’épargne DU 16 septembre 2013 AU 18 octobre 2013 CAISSE RÉGIONALE DE REFINANCEMENT HYPOTHÉCAIRE DE L’UEMOA
CRRH-UEMOA 6%* 2013-2023 NOMBRE DE TITRES VALEUR NOMINALE MONTANT DE L’ÉMISSION PRIX D’ÉMISSION DURÉE
2 000 000 10 000 FCFA 20 MILLIARDS 10 000 FCFA 10 ANS
*Net d’impôts et taxes dans tous les pays de l’UEMOA
Consortium Chef de file :
Cette opération a été autorisée par le Conseil Régional de l’Epargne Publique et des Marchés Financiers sous le n° EOP/13-02 Syndicat de Placement : ACTIBOURSE - AFRICABOURSE - BIBE FINANCE & SECURITIES - SGI BENIN - SBIF - AFRICAINE DE BOURSE ATLANTIQUE FINANCES NSIA FINANCES - BICI BOURSE - BNI FINANCE - CITICORP SECURITIES WEST AFRICA - EDC INVESTMENT CORPORATION - SOGEBOURSE - HUDSON & CIE - PHOENIX CAPITAL MANAGEMENT SGI CORIS BOURSE - SGI MALI - SGI NIGER - CGF BOURSE - IMPAXIS SECURITIES - SGI TOGO
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Entreprises marchés ENTREPRENEURIAT
PME africaines, qui êtes-vous ? Accès au crédit, démarches administratives, marchés publics : une étude menée auprès de 1 600 petites et moyennes entreprises permet de mieux cerner leur profil et leurs besoins.
L
ongtemps ignorées par les pouvoirs publics comme par les banques, qui semblent enfin les découvrir ces dernières années, les PME sont plus que jamais à l’ordre du jour en Afrique. Appartenant au secteur informel pour 60 % à 90 % d’entre elles selon les observateurs, elles restent difficilement repérables, et leurs besoins toujours aussi mal identifiés. Ces petites et moyennes entreprises sont pourtant au cœur du processus de développement des économies africaines, puisqu’elles représenteraient 90 % des sociétés privées, 75 % de l’emploi industriel et qu’elles embaucheraient 70 % de la population rurale. Elles sont donc incontournables sur le marché du travail, même si, selon plusieurs études, leur création de richesse reste limitée, représentant 20 % du PIB continental. « Les PME sont aujourd’hui un vrai sujet, au moment où l’é m e rg e n c e d’ u n e classe moyenne doit permettre à la consommation africaine de décoller pour devenir le moteur du développement
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économique du continent », confirme Stéphane Cormier, délégué général de la Conférence permanente des chambres consulaires africaines et francophones (CPCCAF), depuis son bureau parisien. De son poste d’observation privilégié, « entre secteur privé et pouvoirs publics », selon la formule de son délégué général, la CPCCAF s’est donc saisie du sujet ces dernières années. Après avoir publié en 2010 une charte des PME, l’organisation, présidée par le Congolais Albert Yuma-Mulimbi, vient de récidiver en présentant mi-septembre son
« Baromètre de l’accompagnement des PME », premier du genre. « Dans la foulée de la charte, il nous a semblé nécessaire d’approfondir nos connaissances sur les PME, en étudiant leurs besoins et leur degré de satisfaction concer-
Les sociétés sont assez unanimes pour juger insatisfaisantes les politiques publiques de soutien. nant l’offre d’appui mise à leur disposition », explique Stéphane Cormier. Le baromètre doit permettre par la suite aux chambres consulaires « de faire leur boulot » et d’influencer les politiques publiques d’accompagnement sur un certain nombre de services comme l’accès à l’information et à la formation, la facilitation des démarches administratives, l’aide à l’entrepreneuriat et à la recherche de financement, ou encore l’accès aux marchés. PARTICIPATION. Diffusé par les organisations consulaires d’une vingtaine de pays d’Afrique francophone, le questionnaire a été rempli et renvoyé par plus de 1 600 petites et moyennes entreprises à travers le continent. Faute de définition unique des PME, la CPCCAF a ciblé les sociétés ayant un chiffre d’affaires annuel inférieur à 200 millions de F CFA (305 000 euros) ou employant moins de 250 salariés, dans l’industrie, le commerce, l’agriculture et les services. Chaque chambre a dû interroger un échantillon minimum d’une centaine d’entreprises, le plus représentatif possible de la diversité des économies locales. « Plus que des résultats, la vraie surprise vient du taux de participation », estime Stéphane Cormier, qui n’hésite pas à qualifier l’opération de succès. La teneur JEUNE AFRIQUE
Coulisses
Entreprises & marchés
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GUICHETS UNIQUES. Concernant
les autres thèmes, les avis sont plus unanimes, qu’il s’agisse des politiques de soutien mises en place par les gouvernements, jugées insatisfaisantes par 90 % des entreprises en Afrique subsaharienne et 70 % en Afrique du Nord, ou de l’accès aux marchés publics, « pas assez ouverts aux PME » pour plus de la moitié des répondants. Autres handicaps pointés : l’absence de fichiers nationaux d’entreprises ou la difficulté persistante des démarches administratives, malgré la mise en place de guichets uniques particulièrement appréciés en Afrique de l’Ouest. « Les résultats confirment que les chambres consulaires ont un rôle très important à jouer en matière de relais d’information, de communication et de formation », observe Stéphane Cormier. Plutôt satisfaite de son coup d’essai, la CPCCAF a déjà prévu de prendre la température des PME africaines chaque année et de profiter de l’expérience acquise pour améliorer son questionnaire, « en posant par exemple des questions ouvertes qui permettront aux entreprises de répondre avec plus de précision », reprend le délégué général. À peine collectés, les résultats ont été rapidement envoyés à toutes les chambres consulaires participantes pour qu’elles en prennent connaissance et les diffusent auprès des PME de leur zone, avant d’aller en débattre lors de la 39e assemblée générale de la CPCCAF, qui se déroulera le 1er novembre à Tunis. l OLIVIER CASLIN JEUNE AFRIQUE
ALGÉRIE MÉGACONTRAT POUR GENERAL ELECTRIC LE GÉANT AMÉRICAIN vient de signer avec la Société algérienne de production de l’électricité (SPE), filiale de Sonelgaz, trois contrats pour un montant total de… 2,7 milliards de dollars (2 milliards d’euros). Le premier, d’une valeur de 1,9 milliard de dollars, prévoit la construction de six nouvelles centrales électriques. Objectif : accroître la capacité de production du pays de près de 8 gigawatts, soit une hausse de 70 %. Il inclut également la création d’un complexe industriel de fabrication de turbines à gaz, dans le cadre d’une coentreprise. Le deuxième, estimé à 800 millions de dollars, porte sur l’installation, dans les six prochains mois, de deux unités de production « à mise en œuvre rapide », d’une capacité de 528 mégawatts (MW) permettant de faire face au pic de consommation électrique observé pendant l’été. La dernière convention (150 millions de dollars) signée avec SPE concerne la livraison d’équipements pour la centrale de Hassi R’Mel. Et devrait augmenter la capacité de ce site de 370 MW. l
SEBASTIEN BOZON/AFP
des réponses est en effet moins étonnante, confirmant au passage une certaine disparité des situations entre l’Afrique du Nord et le reste du continent. C’est le cas en particulier sur la question du financement : 80 % des entreprises nord-africaines répondent avoir accès aux prêts bancaires, contre moins d’une PME subsaharienne sur deux. Point commun aux deux régions, plus la taille et le chiffre d’affaires des sociétés sont importants, plus large est l’accès au crédit.
• FINANCE Pour la Commission des marchés financiers du Cameroun,
S
M
l’emprunt obligataire du gabonais BGFI est illégal: son visa est absent de la note d’information • SANTÉ Le jordanien Hikma Pharmaceuticals et le saoudien Midroc viennent de créer, en Éthiopie, une coentreprise pour la production et la commercialisation de produits pharmaceutiques • AÉRIEN Royal Air Maroc
S•
renforce sa présence à Rabat, avec l’ouverture de cinq nouvelles lignes versl’Europe DÉVELOPPEMENT Selon l’ONG Development Initiatives, la croissance seule
ne pourra pas éradiquer la pauvreté en Afrique subsaharienne d’ici à 2030
RD CONGO KIBALI PRODUIT SON PREMIER LINGOT D’OR Pari gagné pour Mark Bristow, le patron de Randgold Resources. La mine de Kibali (nord-est de la RD Congo), dont le groupe sud-africain gère l’exploitation, a coulé son premier lingot d’or le 24 septembre, avec une légère avance sur le calendrier initial. Le groupe et ses partenaires (le sud-africain Anglogold Ashanti et le congolais Sokimo) entendent y produire près de 600000 onces d’or chaque année.
CAMEROUN EWELE DEVIENT DIRECTEUR GÉNÉRAL DE CHANAS Fondatrice du leader de l’assurance dommages au Cameroun, Jacqueline Casalegno n’est plus PDG de Chanas Assurances. À 86 ans, elle conserve la
présidence du conseil d’administration, mais cède la direction générale à Henri Ewele, ex-directeur général adjoint. La décision a été prise le 20 septembre 2013 par le conseil d’administration, le deuxième convoqué au cours de ce mois, à la suite d’un conflit interne à propos de failles dans la gouvernance.
TUNISIE LOUKIL S’OFFRE 65 % DE GIF FILTER Le conglomérat tunisien va racheter 65 % des parts de son compatriote GIF Filter, spécialisé dans la production de filtres à carburant et à huile (pour l’automobile), pour 15,308 millions de dinars (6,89 millions d’euros). Cette acquisition intervient alors que Loukil a perdu l’appel d’offres pour la cession de 66 % des parts de Stafim Peugeot (distributeur de la marque française enTunisie), le 16 septembre 2013. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
Décideurs MAROC
Najib Boulif aux avant-postes Pour alléger le coût des subventions, le ministre des Affaires générales et de la Gouvernance a mis en place une indexation partielle du prix des carburants. Première étape d’une réforme très attendue ?
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L’ÉCONO ISTÈRE DE
homme de la rentrée, au Maroc, c’est lui. Mohamed Najib Boulif a été propulsé au cœur de l’actualité par la hausse du prix des carburants, survenue le 16 septembre. Une augmentation causée par le décret sur le nouveau barème des tarifs des hydrocarbures, publié au Bulletin officiel et dont Boulif avait fait la priorité de son ministère des Affaires générales et de la Gouvernance. Voilà donc lancée la réforme de la compensation – comprenez : le système de subventions sur les produits de consommation courante (super, gazole, farine de blé tendre, sucre), qui pèse toujours plus sur le budget de l’État. En 2012, les dépenses de compensation se sont élevées à 54,9 milliards de dirhams (environ 5 milliards d’euros), près de cinq fois le budget alloué au ministère de la Santé. Un record absolu, qui dépasse les crédits ouverts par la loi de finances. Celle-ci ne prévoyait « que » 45,5 milliards de dirhams (dont 14 milliards d’arriérés au titre de l’année 2011) pour ce seul poste budgétaire, une somme déjà supérieure à l’enveloppe de l’Éducation nationale (le ministère le mieux doté, avec 42,2 milliards de dirhams) et même aux budgets cumulés de la Défense nationale et de l’Intérieur (qui totalisaient 50,4 milliards de dirhams).
s dep enses Montant de ation de compens en 2 0 1 2 : ds 54 9 milliar , de dirhams , du PIB soit 6 6 % , aire 2012 : t e g d u b it Defic 7 1 % du PIB ,
Les prix seront désormais révisés mensuellement, mais ils resteront inférieurs à ceux du marché grâce au maintien d’une subvention, fixée par décret. De quoi limiter les dégâts pour les finances publiques. Dans la réforme de la Caisse de compensation, le prochain défi est la subvention sur le gaz butane, majoritairement utilisé pour les usages domestiques, dont le chauffage. Aujourd’hui, la bouteille de 3 kg est vendue au consommateur 10 dirhams, et celle de 12 kg 40 dirhams. Le coût de revient est environ trois fois plus élevé. L’État continue de
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BÊTE NOIRE. Le nouveau système,
que supervisera Najib Boulif, consiste à indexer partiellement les prix de l’essence (super), du diesel et du fioul industriel sur les cours mondiaux des hydrocarbures. Jusqu’à présent, le prix à la pompe était fixe, les variations sur le marché international étant intégralement compensées par l’État. Ce tarif fixe est supprimé. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
u Docteur en sciences économiques, il enseignait àTanger jusqu’à sa nomination, en janvier 2012.
DR
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JEUNE AFRIQUE
Décideurs
JEUNE AFRIQUE
COFACE
ON EN PARLE
CITIGROUP
»
SELTEM IYIGUN COFACE L’ancienne correspondante de Reuters est nommée économiste pour la région Méditerranée et Afrique. Basée à Istanbul, elle apportera son expertise technique et sa connaissance de ces zones au leader de l’assurance-crédit.
ADE AYEYEMI CITIGROUP Le Nigérian prend la direction générale de la division Afrique subsaharienne du groupe américain. Il aura pour mission d’accroître la couverture de la banque sur les marchés clés du continent.
SGPB
payer la différence, contre toute politiques sociales et au recenselogique redistributive, puisque les ment général de la population. riches consomment plus que les C’était aussi vrai de 2007 à 2012, pauvres. Une mesure qui pourrait quand Nizar Baraka, gendre du Premier ministre Abbas El Fassi, faire du ministre, valeur monétait considéré officieusement tante du Parti de la justice et du comme son principal conseiller développement (PJD, islamiste), la bête noire des protestataires. économique. Promu au ministère « Barberousse » – comme on de l’Économie et des Finances, le surnomme – est un homme Baraka a ensuite été nommé préde dossiers, plutôt affable d’après sident du Conseil économique, social et environnemental à la ses collaborateurs, mais qui sait suite de la démission collective se montrer plus tranchant quand il s’agit des affaires de l’État. de son parti, l’Istiqlal, du gouverDans une formation qui compte nement Benkirane. beaucoup de cadres universitaires, il ne Homme de dossiers, détonne pas. Docteur en plutôt affable, « Barberousse sciences économiques de l’université Paris-II sait se montrer tranchant Panthéon-Assas, Najib quand il s’agit des affaires Boulif a aussi obtenu de l’État. un doctorat d’État à l’université Sidi-Mohamed-BenNajib Boulif peut également Abdellah de Fès. Et jusqu’à son s’appuyer sur ses réseaux interentrée dans le gouvernement nationaux. Des contacts établis en tant que professeur et conféBenkirane, en janvier 2012, il rencier, mais pas seulement. enseignait l’économie à Tanger Président du groupe d’amitié – la ville où il est né, le 1er janvier maroco-turque au Parlement 1964. marocain, il est l’un des défenSiégeant au Parlement depuis 2002, il connaît bien les arcanes seurs du libéralisme social à la sauce AKP (Parti de la justice et des lois de finances, à tel point que du développement turc). ses camarades le pressentaient au Élu trois fois député PJD de ministère de l’Économie et des Tanger, Mohamed Najib Boulif Finances, finalement attribué en avait réussi en novembre 2011 le janvier 2012 à Nizar Baraka, son prédécesseur au ministère des petit exploit de mener à la victoire Affaires générales. Et c’est très deux de ses colistiers, emportant certainement pour laisser les coutrois des cinq sièges de la cirdées franches à ce dernier que le conscription de Tanger-Asilah. ministère du Budget n’a pas été Le PJD avait alors recueilli sur sa confié à Najib Boulif. liste 47 % des suffrages locaux. Les Tangérois avaient été près de TREMPLIN. Si le portefeuille qui trois fois plus nombreux à voter lui est échu paraît modeste, il pour la formation islamiste qu’en peut en réalité servir de tremplin 2007 (41 433 voix contre 14 818). à une carrière politique ou admiL’élection a ensuite été invalidée nistrative. Traditionnellement, par le Conseil constitutionnel. le ministre qui en est chargé est Les magistrats ont estimé qu’une un proche du chef du gouverneaffiche électorale sur laquelle figument. C’était le cas du socialiste rait une mosquée enfreignait la loi, Ahmed Lahlimi, véritable bras qui interdit l’usage de symboles droit d’Abderrahmane Youssoufi, religieux pendant les campagnes. Premier ministre du gouverneAux élections partielles, le PJD a ment d’alternance, de 1998 à 2002. tout de même fait un bon score, En 2003, il a rebondi comme haut remportant deux des trois sièges commissaire au Plan, un poste remis en jeu. La preuve que l’effet qu’il occupe encore et où il préside Boulif marche encore. l aux statistiques, aux études sur les YOUSSEF AÏT AKDIM
VINCENT COMBES SGPB Le nouveau directeur de la clientèle Afrique de Société Générale Private Banking exercera ses fonctions depuis Londres, tout en restant directeur de la clientèle patrons d’entreprise de matières premières et négociants. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Finance NIGERIA
Oando dévisse mais reste optimiste Cité dans une affaire judiciaire, le premier groupe pétrolier local a vu son cours plonger à la Bourse de Lagos. La direction se dit confiante et compte sur le rachat des actifs de ConocoPhillips pour se renforcer.
JACOB SILBERBERG/PANOS-REA
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ouveau rebondissement dans l’affaire James Ibori, l’ancien gouverneur de l’État pétrolier du Delta (sud du Nigeria) condamné en avril 2012 à treize ans de prison par la justice britannique pourdétournementetblanchiment de fonds d’un montant d’environ 59 millions d’euros. Son nom revient sur le devant de la scène judiciaire avec l’ouverture d’une audience destinée à recenser et saisir ses avoirs. Le 16 septembre, la procureure londonienne Sasha Wass a affirmé que le détenu aurait déclaré en 2004 posséder 30 % du capital d’Oando. Conséquence immédiate : le cours du premier groupe pétrolier nigérian a chuté de 21 % à la Bourse de Lagos entre le 16 et le 18 septembre. « Cette forte baisse est uniquement due au lancement de l’enquête impliquant James Ibori », estime Pabina Yinkere, directeur de la recherche N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
de Vetiva Capital Management, société panafricaine de services financiers basée à Lagos. T R A N S PA R E N C E . Adewale
Tinubu, directeur général d’Oando, a réagi le 20 septembre : « Nous sommes transparents. Il n’y a aucune preuve contre nous. » Et pour appuyer ses propos, le patron a publié le registre de ses principaux actionnaires durant la période concernée. Selon cette liste, James Ibori détient une participation marginale : 443 actions sur les 6,8 milliards de titres qui composent le capital. Quant aux transferts de fonds relevés par la justice britannique entre Ocean & Oil Holding – premier actionnaire d’Oando – et des sociétés contrôlées par James Ibori, il ne s’agirait que de simples transactions de change. Oando nie en outre avoir eu connaissance des liens entretenus par l’ex-gouverneur avec ces entreprises. La procédure
p Exploration, production, distribution… Le groupe est présent sur toute la chaîne de production.
judiciaire, toujours en cours, doit durer jusqu’au début d’octobre. Pendant ce temps, à la Bourse de Lagos, le titre s’est légèrement repris, repassant au-dessus des 10 nairas (0,05 euro). « Les déclarations de la direction ont permis d’expliquer la situation aux investisseurs. Le cours se stabilisera », affirme Pabina Yinkere. Pour sa part, la société nigériane de services financiers ARM Investment Managers, qui avait revu sa recommandation de « vendre » à « neutre » en août, maintient son opinion sur la valeur. Mais rien n’est sûr car, depuis le mois de mars, le cours d’Oando a été divisé par deux. L’affaire James Ibori n’est en effet que la dernière péripétie. Les marchés financiers des pays émergents sont à la peine. Ils subissent une fuite des capitaux étrangers depuis que la Réserve fédérale américaine (Fed) a annoncé, en juin, un futur durcissementdesapolitiquemonétaire, ultra-accommodante depuis la crise financière internationale de 2008. En dépit de cette situation boursière difficile, le groupe mise sur de prochains relais de croissance. Oando a en effet signé en décembre 2012 des protocoles d’accord pour racheter les actifs du géant américain ConocoPhillips au Nigeria pour un montant de
La première société nigériane du secteur Résultats 2012
Chiffre d’affaires
Bénéfices
673,2
milliards de nairas
milliards de nairas
(+ 18 %)
10,8
(+ 310 %)
JEUNE AFRIQUE
Baromètre
DÉPENDANCE. Présent sur toute la
chaîne de production d’hydrocarbures, Oando entend par ce rachat renforcer sa stratégie de diversification, cruciale pour sa croissance. Ainsi, le groupe pourra réduire sa forte exposition à l’aval (distribution de produits raffinés, trading), qui constitue 80 % de son chiffre d’affaires. D’ailleurs, au premier semestre 2013, il a payé cher cette dépendance : son chiffre d’affaires a chuté de 20 %, à 280,3 milliards de nairas. Le groupe souhaite donc renforcer ses activités en amont (exploration et production d’hydrocarbures) et au milieu de la chaîne de valeur (distribution de gaz). « Cela créera des revenus supplémentaires, car les marges sont plus élevées sur ces métiers », explique Pabina Yinkere. À plus long terme, Oando ambitionne de devenir un acteur privé africain de référence dans la région en ciblant des pays comme l’Angola, le Cameroun ou le Ghana. l
TÉLÉCOMS
Sonatel toujours solide AU COURS actuel [18 100 F CFA, soit 27,60 euros, le 24 septembre], nous recommandons l’achat des actions de l’opérateur Sonatel. Selon nos calculs, le potentiel de gain est encore d’environ 11 %. L’analyse des résultats de l’entreprise au premier semestre 2013 montre que même dans un contexte très concurrentiel, caractérisé par une baisse du revenu par utilisateur – entre 13 % et 19 % – sur les cinq dernières années, la filiale du groupe Orange maintient une croissance soutenue. Sa base d’abonnés mobile [19,8 millions] a progressé de 27 % par rapport à la même période l’an dernier, et son revenu [357 milliards de F CFA, en hausse de 10,3 %] a dépassé nos prévisions.
Une performance qui s’explique notamment par les investissements consentis pour améliorer la qualité du réseau. Cela se traduit, entre autres, par la forte résilience du marché malien [hausse du revenu de 6,5 %], mais surtout par la progression enregistrée en Guinée [+ 42 %], où Sonatel est devenu le leader du secteur devant le sud-africain MTN. La hausse des marges Ebitda [indicateur proche de l’excédent brut d’exploitation] dans ces deux pays est ainsi venue compenser la baisse constatée au Sénégal. Sur l’ensemble de ses opérations, Sonatel conserve même un taux de marge sensiblement supérieur – 53 %, en baisse de un point par rapport au premier semestre 2012 – par rapport aux
David Jean Faye Analyste chez CGF Bourse
autres acteurs télécoms de la région. Dans un futur proche, nous anticipons l’entrée de la filiale d’Orange dans un cinquième pays d’Afrique de l’Ouest. Le marché sous-régional constitue un réservoir de croissance dans la perspective de l’arrivée d’un quatrième opérateur sur le marché sénégalais, qui représente toujours 60 % du chiffre d’affaires du groupe et 55 % de son résultat net. » l
Cours de l’action Sonatel à la BRVM 25 000
(en F CFA)
19000 19.6.2013
20 000
15 000
18100 24.9.2013
10 000
14000 2.1.2013
5 000
0 Janvier 2013
Sept. 2013
SOURCE : BRVM
1,8 milliard de dollars (1,36 milliard d’euros). Certes, la transaction n’a pas encore été officiellement conclue et la date butoir a été repoussée de mi-septembre à fin novembre. Mais les dirigeants de la compagnie restent confiants. Et pour cause : « Cette opération permettra d’augmenter la production de 43 000 barils équivalent pétrole par jour [bep/j, unité incluant le pétrole et le gaz], contre 5000 bep/j actuellement. Les actifs concernés contiennent également des réserves probables de 220 millions de bep et des ressources potentielles de 493 millions de bep », confirme Pabina Yinkere. La transaction concerne entre autres des participations dans deux permis en mer, 95 % dans OML 131 (qui comprend le champ Chota) et 20 % dans OPL 214 (dont fait partie le champ Uge), ainsi que dans un permis onshore (20 % des OML 60 à 63). S’y ajoutent 20 % de la centrale électrique Kwale-Okpai Independent Power Plant, et 17 % du terminal de gaz naturel liquéfié Brass LNG, situé sur le delta du fleuve Niger, dans le sud du Nigeria.
Finance
RYADH BENLAHRECH JEUNE AFRIQUE
N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Dossier
Aérien
CAMEROUN
Camair-Co en quête d’un second souffle
ANTONIN BORGEAUD POUR J.A.
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INFRASTRUCTURES
Les aéroports africains Sur le continent, le trafic devrait tripler d’ici à 2029. Mais si les aménagements aéroportuaires ne suivent pas l’évolution de la demande, cette croissance risque d’être fauchée en plein vol. CHRISTOPHE LE BEC
L
’
aéroport de Nairobi, le premier d’Afrique de l’Est, avec 6,3 millions de passagers en 2012, est devenu un rouage incontournable de l’économie nationale. Depuis ce hub, Kenya Airways relie directement 60 destinations dans le monde. Et pas moins de 20 autres transporteurs aériens desservent l’aéroport. Le 7 août, une partie du site a brûlé accidentellement. Les images impressionnantes des N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
flammes dévorant le hall d’arrivée des passagers ont fait les unes de la presse. Aucune victime n’a été à déplorer et le trafic n’a été interrompu qu’une journée. Mais la compagnie nationale estime ses pertes à 2,9 millions d’euros. Seul effet positif, le projet d’agrandissement du terminal 1, en sommeil depuis cinq ans, est remis à l’ordre du jour. Cet incident majeur montre l’importance des aéroports pour les économies africaines. Il souligne surtout plusieurs de leurs points faibles, notamment leur niveau de sécurité médiocre et leur mauvaise connexion avec les centres-villes. JEUNE AFRIQUE
INTERVIEW
Awel Busera Directeur général d’Asky Airlines
STRATÉGIE
Brussels Airlines joue sa survie en Afrique
UNE JOURNÉE AVEC
Oulimatou Dione Diakhaté Contrôleuse aérienne à Dakar
t L’aéroport de Brazzaville est géré par l’opérateur privé français Egis.
décollent-ils? « La protection civile, dépendante de l’État, constitue la première fragilité des aéroports africains. D’après un audit effectué récemment, en moyenne, seulement 60 % des normes de sécurité de l’Organisation de l’aviation civile internationale (Oaci) sont appliquées, même s’il y a de bons élèves comme le Ghana ou le Maroc », regrette Ali Tounsi, secrétaire général pour l’Afrique du Conseil international des aéroports (ACI). « Lors de l’incendie de Nairobi, les pompiers ont été bloqués dans les embouteillages. Ils ont mis près de deux heures pour parcourir 15 km. Les dégâts auraient été bien moindres s’ils étaient intervenus plus rapidement », estime-t-il. Pour changer la donne, l’ACI, appuyé par ses 1 700 membres, mène depuis deux ans un programme gratuit d’évaluation effectué JEUNE AFRIQUE
par des experts. Il a déjà été déployé dans vingt aéroports africains. RETARDS. Sur le continent, comme au Kenya,
1000
avions seront vendus aux compagnies africaines d’ici à 2029
le nombre de passagers transportés est en forte hausse. D’ici à 2029, l’ACI prévoit un triplement du trafic aérien. Les constructeurs s’attendent à vendre 1 000 avions supplémentaires aux seules compagnies africaines. Mais les opérateurs aéroportuaires peinent à suivre. « Pour répondre à cette demande, les chantiers d’extension et de construction de nouveaux aéroports se multiplient, notamment à Nairobi, Addis-Abeba, Luanda, Lagos, Kigali, Dakar et Accra. Certains d’entre eux ont été achevés, comme à Brazzaville et à Maputo, mais dans la plupart des cas ils sont en retard, en N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Dossier Aérien raison d’une mauvaise planification des travaux ou de financements adéquats », observe Elijah Chingosho, secrétaire général de l’Association des compagnies aériennes africaines (Afraa). L’exemple de l’aéroport Blaise-Diagne de Dakar, censé remplacer l’ancien (LéopoldSédar-Senghor), est à ce titre emblématique. Son ouverture, annoncée pour 2011, n’a toujours pas eu lieu (lire encadré). Mêmes atermoiements à Ouagadougou, où le nouvel aéroport,
3 QUESTIONS À
qui doit s’élever à Donsin, à 30 km de la capitale, en est au stade de projet depuis plus de dix ans. « Initialement, nous envisagions de prendre en main sa gestion. Mais compte tenu de son coût [349 millions d’euros], les études de prévisions de trafic ne nous ont pas convaincus », indique un opérateur aéroportuaire privé, dubitatif sur les 30 millions de passagers annuels annoncés. « Bien sûr, de nouvelles infrastructures sont nécessaires, mais attention à la folie des grandeurs. Plutôt que de fermer un aéroport historique et d’en ouvrir un autre loin du centre-ville, il est souvent plus judicieux de le conserver et de laisser la nouvelle aérogare prendre de l’ampleur », indique Ali Tounsi.
REDA EL FILALI
Directeur des opérations au sol et cargo de Royal Air Maroc
Casablanca au cœur de la stratégie de la RAM JEUNE AFRIQUE: Comment s’est construit votre hub? REDA EL FILALI : Depuis le
début des années 2000, son développement rapide est au cœur de notre stratégie. Nous nous sommes appuyés sur la position géographique idéale de Casablanca, entre Europe et Afrique. Pour construire une plateforme, il faut au minimum 15 vols quotidiens au départ ou à destination de l’aéroport. En 2003, nous avons donc multiplié les liaisons avec l’Afrique de l’Ouest pour les coupler à nos vols européens existants, notamment ceux qui desservent la France, l’Italie et l’Espagne. À Casablanca aujourd’hui, Royal Air Maroc gère la moitié environ des 7,1 millions de personnes qui y passent chaque année. Quelle part de votre trafic passager ne fait que transiter par Casablanca ?
Pour qu’un hub soit une réussite économique, il est vital qu’une partie importante de son trafic soit de « point à point » [sans correspondance]. Environ 55 % des passagers de Royal Air Maroc ne font que passer par Casablanca, mais 45 % s’y rendent ou en partent. Cette répartition équilibrée a été atteinte grâce à la taille [plus N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
MOHAMED SMYEJ POUR J.A.
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de 3 millions d’habitants] et à l’attractivité de la capitale économique, ainsi qu’aux allées et venues des Marocains résidant à l’étranger et des touristes. Quelles relations Royal Air Maroc a-t-elle tissées avec le gestionnaire de l’aéroport ?
Nous dialoguons en permanence avec l’Office national des aéroports [Onda] et sommes ses premiers utilisateurs. Mais aujourd’hui, nous sommes bridés par la taille et les fonctionnalités de l’aéroport. Il nous faut de meilleures technologies pour gérer les bagages, et davantage d’accès à bord directs. Plus de 50 % de nos accès se font en bus. Il nous faut plus de passerelles. Nous avons besoin d’une extension. l Propos recueillis par CHRISTOPHE LE BEC
VACHE À LAIT. La petite taille des aéroports africains ne joue pas en leur faveur auprès des investisseurs : « 84 % d’entre eux drainent un trafic inférieur à 1 million de passagers, alors que cette proportion est de 58,7 % en moyenne dans le reste du monde. À eux trois, les aéroports américains de Dallas, Chicago et New York pèsent plus que l’ensemble des 250 aéroports africains », affirme Ali Tounsi. Si nombre de projets aéroportuaires patinent, c’est donc souvent parce qu’ils n’ont pas trouvé de mode de financement et de gestion suffisamment attractif pour des acteurs privés. « Les aéroports africains sont dans leur grande majorité gérés par des organismes publics, en général l’aviation civile ou le ministère des Transports. Or l’implication de professionnels privés efficaces est cruciale pour améliorer la qualité du service dans ces structures et pour réussir leur développement », estime Elijah Chingosho. L’interventionnisme de l’État est décrié par Cheick Tidiane Camara, président du cabinet Ectar : « Les gouvernements, particulièrement en Afrique de l’Ouest, considèrent un aéroport non comme un vecteur de croissance, mais comme une “vache à lait”. L’Afrique détient le triste record du niveau le plus élevé de taxes aéroportuaires de tous les continents, souvent le triple de ce que l’on peut voir en Europe ou en Asie. Les gouvernements cherchent aussi à limiter l’entrée de nouveaux transporteurs pour protéger leur propre compagnie nationale, ce qui bride forcément la croissance aéroportuaire », dénonce-t-il. Pourtant, il n’y a pas de fatalité. Francis Brangier, le directeur général d’Egis, qui gère les aéroports d’Abidjan, Brazzaville, Pointe-Noire et Libreville, croit à un modèle économique rentable pour des acteurs privés : « En Afrique, nous avons adopté avec succès, aussi bien au Gabon qu’en Côte d’Ivoire ou au Congo, un système de concession de longue durée, de vingt à trente ans, qui peut être rentable même en y intégrant de plus petits aéroports comme celui que nous gérons à Ollombo (à 400 km de Brazzaville). Notre groupe monte une société concessionnaire qui prend JEUNE AFRIQUE
Les aéroports africains décollent-ils ?
SOURCE : ACI AFRIQUE
les risques financiers et la responsabilité de la de systèmes d’information. Cela suffit souvent gestion de l’aéroport, y compris les responsabipour dégager des bénéfices qui nous permettent lités commerciales et techniques. Nous avons la d’investir progressivement. Nous étudions ensuite garantie de retrouver nos investissements si nous les pistes possibles pour développer le trafic – notamment avec la compagnie nationale –, et sommes rentables sur cette période », explique-t-il. nous examinons le développement Comme Egis, d’autres grands acteurs d’autres sources de revenus, comme privés – le français ADP, le sud-africain Rang des aéroports africains les revenus commerciaux non aéroAcsa ou le canadien SNC-Lavalin – selon leur flux de passagers* (en millions, en 2012) nautiques », détaille Francis Brangier. s’intéressent aux aéroports du contiFlux N ° Ville Pays nent. Avec une prédilection pour les Selon Ali Tounsi, « pour doper la ren1 JOHANNESBURG AFRIQUE DU SUD 18,8 concessions ou certains modèles de tabilité, il faut prendre en compte le 2 LE CAIRE ÉGYPTE 14,8 tourisme, mais aussi les sociétés de BOT (« Build, Operate and Transfer »), 4 LAGOS NIGERIA 7,1 transport de fret, la maintenance, l’imqui leur garantissent de récupérer leur 5 CASABLANCA MAROC 7,1 8 NAIROBI KENYA 6,3 mobilier et – point crucial – le lien avec investissement avant de transférer le 9 ALGER ALGÉRIE 5,4 projet à une entreprise locale. Les parle centre-ville. Chaque partie du modèle 11 TUNIS TUNISIE 5,2 tenariats public-privé (PPP) appuyés doit être adaptée aux réalités écono22 DAKAR SÉNÉGAL 1,7 par les institutions financières internamiques locales : les aéroports kényans 30 ABIDJAN CÔTE D’IVOIRE 0,9 31 BRAZZAVILLE CONGO 0,9 ont mis au point une chaîne logistique tionales ne rencontrent pas beaucoup * Hors Cameroun reliée aux grandes fermes du pays ; de succès. « Il ne suffit pas d’avoir un bailleur, il faut surtout de bons profesau Caire, le gestionnaire a parié sur de sionnels. Or la planification et le suivi d’un projet nouvelles galeries commerciales, et à Casablanca, en PPP restent pilotés par les États, ce qui rebute c’est tout un pôle de maintenance aéronautique les acteurs privés », observe Elijah Chingosho. qui croît progressivement », égrène-t-il. À terme, c’est le concept d’« aérométropoles » (aerotropolis en anglais) – ensemble de projets AÉROMÉTROPOLES. Pour faire décoller les urbains interconnectés formant un tissu écorevenus et améliorer les performances des aéronomique irriguant toute la région – qui devrait ports du continent, Egis a sa méthode : « Dans s’implanter en Afrique. À l’image d’Ekurhuleni, un premier temps, nous adaptons et unifions le management, améliorons la gestion financière qui aura pour centre névralgique l’actuel aéroport et opérationnelle et lançons les investissements Tambo International de Johannesburg et sera les plus utiles en matière d’infrastructures ou érigé en deux décennies. l
BLAISE-DIAGNE TOUJOURS CLOUÉ AU SOL PRÉVU À NDIASS, à 42 km au sud-est de Dakar, le nouvel aéroport de la capitale sénégalaise attend encore son heure – il devait voir le jour en 2011. « On a présenté le projet alors que les études du sol n’avaient même pas été réalisées. Or elles ont révélé que ce dernier est peu adapté à
l’atterrissage des avions. Du coup, le budget de construction a explosé », explique AliTounsi, du Conseil international des aéroports. Après l’élection de Macky Sall, le gouvernement semble revenu sur l’idée d’un transfert de la totalité des vols internationaux vers un nouveau
site. « Ils vont plus probablement en déplacer une partie peu à peu. La taille de l’infrastructure devrait être plus raisonnable que ce qui était initialement prévu », indique Ali Tounsi. L’ouverture des pistes est annoncée pour le début de l’année C.L.B. prochaine. l
Aviation GÉNÉRALE
Pro-Export - Pièces et service technique ➥ Service première classe, partout en Afrique. Pro-Export ➥ Travail 100 % sur l’Afrique depuis plus de 14 ans ➥ Pièces de rechange, Support Technique ; Piston et Turbine ➥ Pratt & Whitney Canada, Dehavilland et Bombardier ➥ Cessna, Piper, Beechcraft, Lycoming, Continental, Turbine Garrett ➥ Échange standard pour Hartzell, MacCauley, Dowty ➥ Achat et vente d’avions. Pilote convoyeur. ➥ Formations d’étudiants au Québec, Canada ➥ Recherche représentant sur le terrain. Expérience obligatoire
6575 De La Savane (H18) St-Hubert, Québec, CANADA J3Y 8Y9 www.aviationzenith.com Transport Canada # 24-11 Tél : 001.450.468.9007 Fax : 001.450.468.9008 Courriel : avion@aviationzenith.com
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ECAir, pionnière d’une nouvelle génération de compagnies aériennes africaines. À l’aube de la célébration des deux ans d’ECAir (Equatorial Congo Airlines), la compagnie nationale du Congo affiche un bilan prometteur, tourné vers l’avenir du hub de Brazzaville, dont elle est la locomotive.
Une compagnie aux normes internationales de sécurité et de sûreté
◗ 2 Boeing 757-200 de 150 places dont 16 en Classe Affaires et 134 en Classe Économique ◗ 2 Boeing 737-300 de 120 places dont 12 en Classe Affaires et 108 en Classe Économique ◗ 1 beechcraft (taxi aérien)
◗ Application de la règlementation internationale ◗ Formation de tout le personnel au SMS (Security Management System) ◗ Des partenariats techniques et opérationnels solides (PrivatAir et Lufthansa Technik)
Un réseau étendu facilitant l’interconnexion à l’intérieur du pays, ainsi qu’entre le Congo et le reste du monde ◗ 23 rotations hebdomadaires au niveau domestique : Brazzaville, Pointe-Noire et Ollombo ◗ 6 rotations régionales par semaine de Brazzaville et Pointe-Noire vers Douala et Cotonou ◗ 4 rotations internationales par semaine entre le Congo et la France
Des performances commerciales à la hauteur des objectifs depuis le lancement ◗ Plus de 300 000 passagers transportés au niveau domestique et régional ◗ Un bon taux d’occupation des vols ◗ Lancement du Programme de Fidélité Mboté, large et diversifié Un pari réussi sur l’investissement en ressources humaines qualifiées ◗ Plus de 250 salariés recrutés depuis le lancement
◗ Plusieurs centaines d’emplois indirects ◗ Une compagnie multiculturelle avec plus de 10 nationalités représentées ◗ Mise en place d’un programme international de formation de jeunes pilotes congolais ◗ Une politique de ressources humaines orientée vers la détection et la formation de jeunes congolais à fort potentiel ◗ Une part importante du budget consacrée à la formation du personnel dans les différents métiers de l’Aviation Une entreprise engagée socialement à travers la Fondation ECAir ◗ Promotion des métiers de l’aéronautique ◗ Actions de solidarité en faveur des plus démunis (Jeunes) ◗ Promotion du développement durable et de la préservation de l’environnement.
Equatorial Congo Airlines, 1604 avenue des Trois Martyrs, Brazzaville, République du Congo - Email : communication@flyecair.com
www.flyecair.com
DIFCOM / Creapub - © D. Bedel / J.L. Altherr
Uniformité et cohérence dans la constitution de sa flotte
Dossier Aérien TENDANCE
L’incontournable « yield management » Grâce à cette méthode, toutes les compagnies africaines jouent désormais sur leurs tarifs pour augmenter leurs revenus. la faillite ». Cette époque est révolue. Aufuretàmesurequelecielafricain s’ouvre à la concurrence, les grands nomsducontinentmettentenplace des systèmes de yield management. « Nous utilisons des outils informatiques de renommée internationale pour le traitement et l’optimisation des vols », confirme ainsi Chokri Wallani,directeurderevenuemanagement, distribution, tarification et e-commerce chez Tunisair.
SIMON MAINA/AFP
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ne jeune compagnie aérienne qui, trois ans après son premier vol, investit près de 1 million de dollars (740 000 euros) dans un logiciel informatique, ça ne s’est jamais vu. C’est pourtant ce que le togolais Asky met sur la table cette annéepourmodernisersonsystème de réservation avec la méthode de gestion dite du yield management. Très prisée par les grandes compagnies internationales, elle se développe bien sur le continent. Pour Asky, dont le nouveau système sera opérationnel en octobre, c’est un investissement important – à elle seule, la licence du logiciel coûte 270 000 dollars –, mais sur lequel elle compte bien capitaliser. Le yield management permet en effet des gains significatifs, de l’ordre de 3 % à 7 % du chiffre d’affaires. De quoi s’agit-il ? Tout simplement de modifier le prix des sièges en temps réel pour optimiser les revenus. Les sièges disponibles à la vente sont répartis entre différentes classes, auxquelles correspondent autant de tarifs, calculés en fonction de la période de réservation, du type de siège, du canal de distribution (internet, agence)… N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
En régulant le nombre de sièges disponibles à un moment donné pour chaque prix, la compagnie peut maximiser ses profits. Ainsi, on compte aujourd’hui cinq à six niveaux de tarifs chez Asky, douze chez la jeune compagnie low cost africaine FastJet et jusqu’à une vingtaine pour les grandes compagnies – bien plus en tout cas que les trois classes (économique, business et première) habituelles. Pour Dustin Holland, chargé du revenue management et du développement du réseau de FastJet, « l’Afrique a longtemps été en retard dans la mise en place du yield management. C’est l’une des principales faiblesses de ses lignes aériennes ». Selon ce professionnel qui a fait ses classes en Europe chez Estonian Air et Flybe avant d’entrer chez le nigérian Arik Air, « la plupart des compagnies n’avaient que un ou deux tarifs jusqu’à récemment. Elles rataient une réserve de profits substantiels ». Comment l’expliquer? Selon Martial Tevi-Benissan, responsable marketing chez Asky, « beaucoup de compagnies étatiques pratiquaient une politique très simple: tarifs très bas et passagers nombreux. Mais cela conduit à
p Fini les trois classes habituelles, certaines sociétés en définissent une vingtaine.
CALCULS. Tout n’est pas pour autant informatisé lorsque l’on adopte cette méthode. « La gestion du yield est encore très manuelle [chez Asky], neuf personnes y travaillent », explique Martial TeviBenissan. Bien sûr, des logiciels spécialisés permettent d’automatiser de nombreux calculs. Il est ainsi possible, dès l’ouverture des réservations, de connaître l’historique du vol sur plusieurs années et d’affecter un nombre de sièges optimal à chaque classe. Cependant, il est impossible de s’en remettre totalement aux machines. D’abord parce qu’il faut se constituer une solide base de données qui puisse servir de référence, ce qui demande au minimum trois années d’exploitation. Ensuite parce que de nombreux paramètres ne sont pas pris
À la clé, une augmentation du chiffre d’affaires de l’ordre de 3 % à 7 %. en compte par les logiciels et nécessitent l’intervention d’un analyste connaissant parfaitement la ligne desservie. « Quels sont les prix de la concurrence? Y a-t-il un avion en réparation chez nos concurrents ? Y a-t-il une compétition sportive qui renforce la demande ? » énumère Dustin Holland. Autant de critères qui, pris en compte au jour lejour,peuventfaireévoluerlepanel tarifaire proposé aux voyageurs. l SÉBASTIEN DUMOULIN JEUNE AFRIQUE
ECAir (Equatorial Congo Airlines) s’est lancé sur le ciel congolais en Septembre 2011
Fatima Beyina-Moussa, Beyina-Moussa Directeur Général d’ECAir
www.flyecair.com
FBM : Depuis la mise en place du projet, notre vision est de devenir la compagnie aérienne leader en Afrique centrale, celle de la République du Congo qui offre le meilleur réseau dans la région et le relie au reste du monde. C’est ainsi qu’ECAir a été créée dans la dynamique de modernisation des infrastructures aéroportuaires du pays, afin de doter le Congo d’une véritable compagnie aérienne répondant aux standards internationaux. Pour ce faire, nous nous sommes entourés de partenaires sérieux, lesquels, forts de leurs expériences, nous accompagnent depuis le début. Aujourd’hui, nous avons pratiquement atteint la barre des 300 000 passagers pour nos vols en domestique et dans la sous-région, ce qui équivaut à un taux d’occupation de 60%. Sachant qu’au départ notre objectif sur deux ans était de 200 000 passagers. Dans notre mission de désenclaver le Congo, en facilitant le déplacement des biens et des personnes, nous réalisons une rotation moyenne de 23 vols par semaine entre Brazzaville, Pointe-Noire et Ollombo. Au niveau de la sous région, notre volonté est d’assurer des liaisons directes entre le Congo et les principales capitales économiques africaines. C’est dans ce sens qu’a été lancée la connexion entre Pointe-Noire, Brazzaville et Douala en Août dernier, à raison de trois vols par semaine. Nous nous activons à développer notre réseau régional. Ainsi, nous commençons, début Octobre 2013, nos vols entre Brazzaville, Pointe-Noire et Cotonou. Aujourd’hui, ECAir relie l’Afrique, du centre à l’Ouest. Il faut dire que cette ambition d’étendre notre réseau dans la sous région a été portée par la volonté du chef de l’État de soutenir particulièrement les principaux acteurs concernés par la dynamique d’intégration régionale. Au niveau international, nous avons relevé le défi de relier le Congo à la France, première destination favorite des Congolais. Fort du succès de cette ligne Brazzaville-Paris, avec trois vols par semaine, nous avons lancé en Juin dernier, une rotation directe entre notre capitale économique Pointe-Noire et Paris. ECAir « foule » donc le sol français, quatre jours par semaine ! Cet été nous avons enregistré un bilan estival très positif avec un taux de remplissage des vols de plus 90%, dont certains ont décollé au maximum de leur capacité ! Plus nous étendons notre réseau, plus nous développons notre flotte par l’acquisition d’appareils de plus grande capacité, répondant également à l’augmentation du nombre de nos passagers.
Un bilan très positif ! Parmi toutes les réalisations, quelle est celle dont vous êtes le plus fière ? FBM : Tout ceci n’aurait pas été envisageable sans un bon contrôle de nos ressources humaines, les réalisations n’étant possibles que par l’action des Hommes. Il nous a fallu mettre en place une allocation optimale des ressources, c’est-à-dire détecter les bonnes personnes, et les positionner aux bons endroits. Le challenge que nous nous sommes donnés, est de faire émerger une nouvelle génération de jeunes congolais rompus aux différents métiers de l’aviation. Parier sur la jeunesse, c’est investir en l’avenir. C’est dans ce sens que nous avons consacré une grande part de notre investissement dans la formation de notre personnel. A tous les niveaux, nous détectons et formons des talents : pilotes, techniciens, hôtesses, stewards, commerciaux… En tant que compagnie nationale du Congo, nous nous sommes engagés à miser sur les talents congolais (aussi bien sur le plan local qu’international).
Forte des réalisations accomplies sur ces deux ans, quels sont les prochains défis d’ECAir ? FBM : La position géographique de notre pays et ses nouvelles infrastructures aéroportuaires sont des atouts majeurs pouvant permettre au Congo d’être un grand hub de la sous région. Dans ce contexte, notre nouvel aéroport de Maya-Maya deviendrait une plate forme de correspondance, qui permettrait ainsi à des milliers de passagers de transiter par notre belle capitale avant de s’envoler vers d’autres destinations. ECAir, en tant que compagnie nationale, a un rôle crucial à jouer dans la constitution de ce hub. Nous devons continuer à nous développer afin d’être une compagnie qui aura la capacité d’offrir une fréquence régulière de vols vers de nombreuses destinations. Cette dynamique, générée par l’importance du trafic aérien, contribuerait à augmenter la fréquentation de l’aéroport ainsi que le flux des transactions. L’aéroport de Maya-Maya deviendrait ainsi une plaque tournante en ce qui concerne les échanges sous régionaux et internationaux. D’autres activités liées aux métiers de l’aérien et du tourisme pourraient également émerger du hub de Brazzaville. La création de nouveaux emplois et de nouveaux métiers contribuerait à faire du secteur aérien congolais un nouveau vecteur essentiel de la croissance économique du pays. ■
DIFCOM / Creapub - © Delphine Bedel
Deux ans après, quel est votre bilan Mme Beyina-Moussa ?
Dossier Aérien INTERVIEW
Awel Busera
Directeur général d’Asky Airlines
« Nous sommes la première compagnie ouest-africaine rentable » Droits de trafic, partenariat avec Ethiopian Airlines, objectifs de croissance : le dirigeant de la société, dont le siège est basé au Togo, dévoile les grands axes de sa stratégie.
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maginépourprendrelerelaisdu défunt Air Afrique, Asky a trouvé sonpublicetaffichedesrésultats financiers encourageants. Ses comptes devraient être à l’équilibre en 2014. À sa tête depuis le premier jour, Awel Busera est le grand artisan de cette réussite. Alors que sa compagnie projette d’étendre son offreenlançantuneactivitédefretet planifie déjà ses premiers vols hors ducontinent,l’ancienvice-président commercial d’Ethiopian Airlines livre son analyse à Jeune Afrique. JEUNE AFRIQUE: En trois ans, vous n’avez pas hésité à multiplier les ouvertures de lignes. AWEL BUSERA : Tout à fait.
L’ambition d’Asky était de résoudre les problèmes de transport aérien dans la sous-région. Aujourd’hui, nous desservons 23 destinations en comptant Bissau, mise en service le 15 septembre. À l’exception de Praia et Malabo, que nous ouvrirons prochainement, nous assurons la connexion entre Lomé et toutes les capitales de la sous-région. Les principales font même l’objet d’une desserte quotidienne, qu’il s’agisse d’Abidjan, Ouagadougou, Niamey, Lagos, Accra, Douala, Dakar, Conakry ou N’Djamena. Notre objectif – relier ces villes entre elles – est rempli. Même pour les destinations les plus compliquées comme Bangui ou Bissau, il n’est plus nécessaire de passer par Addis-Abeba, Nairobi, Casablanca ou même Paris, comme N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
JEAN-CLAUDE ABALO POUR J.A.
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cela arrivait fréquemment il y a quelques années. Qu’en est-il de vos résultats opérationnels?
Dès la première année, nous avons accueilli 179 000 passagers. Ce chiffre a crû régulièrement et nous comptons finir l’année 2013 à
p L’ancien vice-président commercial d’Ethiopian Airlines dirige Asky depuis son lancement, en 2010.
plusde540000passagers.Entermes de revenus, notre chiffre d’affaires s’élevait à 18,7 milliards de F CFA [28,5 millions d’euros] en 2010 et nous terminerons l’année autour de 70 milliards de F CFA. Nous ferons donc du profit avant la fin de l’année. Selon les lignes, il y a plus ou moins de compétition. l l l JEUNE AFRIQUE
EmbraerCommercialAviation.com
Never has such a small number been such big news. Announcing E-Jets E2, the second generation. E-Jets invented the 70 to 120-seat segment. Ten years later, they still lead it. And continuous improvements mean they’re well ahead of competitors. So what next? E2, the second generation. Three new models, reconceived from nose to tail. Sure, the E2 series inherits all the well-loved family traits. But E2 takes quantum leaps with uniquely efficient new high-aspect-ratio wing designs. With ultra-high-performance P&W GTF engines. With greater seating capacities. And with major cockpit-to-cabin innovations. So it is that the second generation promises even higher achievement than the first. Which is obviously no small thing.
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Dossier Aérien l l l L’avantage d’avoir un hub est que les destinations les plus rentables,commeN’Djamena,Niamey, Abuja, Ouagadougou ou Kinshasa, viennent nourrir les autres par leurs bénéfices.Jusqu’àprésent,iln’yavait jamais eu de compagnie aérienne bénéficiaire dans la région. Asky est la première dans ce cas – tout en volant de ses propres ailes, c’est-àdire sans aucune subvention. C’est historique. En ce sens, nous pourrons servir de modèle à d’autres compagnies.
Est-ce qu’Asky a des ambitions extracontinentales?
Nous allons d’abord assurer des liaisons quotidiennes avec tous les pays que nous desservons. Abuja passera de cinq vols par semaine à une liaison quotidienne, de même que Freetown et Monrovia, notamment. Cotonou, qui en compte quatre par semaine, en verra un par jour. Nous allons aussi poursuivre notreexpansiongéographique.Puis, danslecourantde2014,nousétablirons des lignes avec le sud du continent – Luanda et Johannesburg – et notrepremièreconnexionextracontinentale, avec Beyrouth. Nous lançons également une activité de fret, de façon à ce que les biens puissent voyager aussi facilement que les personnes dans le ciel ouest-africain. Nous avons acquis pour cela un Boeing 737 qui desservira dans un premier temps les villes d’Abidjan, Accra, Port Harcourt, Abuja, Libreville, Ouagadougou, Malabo, Bamako, Cotonou et Douala depuis Lomé.Grâceànotrepartenariatavec Ethiopian Airlines, des marchandises de l’extérieur de notre zone decouverture pourronttransiterpar Lomé pour rejoindre ces nouvelles destinations. Après le problème du transport de passagers dans la sousrégion, nous allons résoudre celui des marchandises. En quoi consiste votre partenariat avec Ethiopian Airlines?
Ethiopian joue un grand rôle dans le succès d’Asky. Signé pour cinq ans, ce partenariat arrive à terme en 2015. Notre maintenance est assurée par l’une de ses équipes, détachée à Lomé, qui met à notre N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
Plus de
540 000 passagers transportés en 2013
disposition son stock de pièces – les faire venir d’Europe ou des ÉtatsUnis pourrait prendre une semaine. Ainsi, nos problèmes techniques sont vite résolus et nos avions très peu immobilisés. Ethiopian est aussi un partenaire commercial. Nous avons des accords de partage de codes [accords commerciaux] sur toutes nos destinations. Depuis leur région, qui couvre l’Afrique de l’Est, l’Asie et le Moyen-Orient, ils peuvent se connecter à la nôtre, l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale. Et réciproquement. Chaque mois, Ethiopian nous amène environ 1 500 passagers et nous faisons à peu près de même en sens inverse. En juillet, nous avons conjointement lancé une liaison avec le Brésil. Depuis São Paulo et Rio de Janeiro, un Boeing 787 Dreamliner fait la traversée jusqu’à Addis-Abeba en passant par Lomé. C’est un énorme avantage pour la région. Il n’est plus nécessaire de transiter par l’Europe, d’obtenir un visa, de perdre du temps et de l’argent. Et à Lomé, on est sûr d’être respecté, alors que dans les aéroports européens les voyageurs en provenance d’Afrique sont harce-
Ouagadougou-Bamako, nous n’avons pas de droits de trafic. Peutêtre est-ce pour protéger Senegal Airlines et Air Burkina… Mais nous ne cherchons pas le conflit. Ces blocages disparaîtront. La première qualité d’Asky est d’être une compagnie fiable et reconnue comme telle. Nos avions sont à l’heure dans 92 % des cas, ce qui est une très belle performance dans notre industrie. Nous le devons en grande partie à la qualité de notre flotte, constituée aujourd’hui de sept avions, dont quatre Bombardier Q400 achetés neufs l’an dernier. D’ici à la fin de l’année, nous devrions aussi acquérir un Boeing 737-800 pour assurer nos futures liaisons long-courriers. N’êtes-vous pas limités par la taille de certaines installations aéroportuaires ?
Notre seul souci de taille, actuellement, vient de l’aéroport de Lomé, trop petit pour nous. Mais les autorités togolaises travaillent dur pour mettre en service le nouvel aéroport en 2014, ce qui devrait résoudre ces difficultés. C’est dans ce hub de Lomé que nous aurons, d’ici à cinq ans maximum, notre propre centre de formation.
Nos avions sont à l’heure dans 92 % des cas: une très belle performance dans ce secteur. lés. Cette liaison avec le Brésil est d’ores et déjà un succès. L’avion est presque toujours plein et embarque en moyenne une cinquantaine de passagers à Lomé. L’absence d’ouverture du ciel africain n’est-elle pas votre plus grande difficulté ?
C’est un business compliqué, il faut de grandes capacités d’investissement et un bon environnement. Effectivement, obtenir les droits de trafic de plusieurs pays n’a pas été facile pour Asky. Aujourd’hui, nous regrettons toujours certaines restrictions. Nous avons trois vols sur la ligne Dakar-Conakry, mais nous ne sommes autorisés à embarquer des passagers que sur deux d’entre eux. Et sur la ligne
Certains de vos concurrents peuvent-ils vous inquiéter ?
Nous ne sommes pas en concurrence directe. Dans notre zone, Arik Air dessert Banjul, Freetown et Dakar. Mais nous avons des connexions avec toute la sousrégion. Personne n’y a de réseau équivalent au nôtre aujourd’hui. Sur certaines lignes, nous avons un concurrent direct: Air Côte d’Ivoire sur Lomé–Abidjan–Conakry par exemple. Mais au niveau du réseau dans son ensemble, il n’y a pas de concurrence. Bien sûr, si l’accord entre Arik Air et Air Côte d’Ivoire se matérialise, un défi se présentera à nous. Mais une saine compétition est bonne pour la région. l Propos recueillis par SÉBASTIEN DUMOULIN JEUNE AFRIQUE
La plus grande conférence des PDG des compagnies aériennes de l’Afrique L’Associati des compagnies aériennes africaines (AFRAA) tienendra sa 45ème Assemblée générale annuelle (AGA) et le Sommet africain du transport aérien à Leisure Lodge, située à la côte sud de Mombasa au Kenya, du 24 au 26 novembre 2013. Abritée par Kenya Airways, l’AGA sera placée sous le thème: «Temps difficiles - Alignement stratégique de l’Afrique.” Rejoignez plus de 400 leaders influents de l’aviation africaine et mondiale pour discuter des possibilités inexploitées du transport aérien en Afrique. Rencontrez les fournisseurs de l’industrie et profitez de l’hospitalité typiquement Africaine au complexe exclusif et époustouflant de Leisure Lodge Resort le long de la côte sud du Kenya. Pour de plus amples informations, veuillez visiter le site internet de l’événement: http://aga45.afraa.org/ Pour les opportunités de parrainage d’exposition, veuillez contacter: Mme Juliette Indetie: jindetie@afraa.org ou M. Kepha Bosire: Kepha.Bosire @ kenya-airways.com Association des compagnies aériennes africaines (AFRAA) Tel: 254202320144/8 | GSM: +254 722 209708/735 337669 Email: afraa@afraa.org | Site Web: www.afraa.org
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Dossier Aérien STRATÉGIE
Brussels Airlines joue sa survie en Afrique Toujours en difficulté financière, la compagnie belge mise plus que jamais sur le continent malgré la concurrence.
sous pression. Une tendance qui laisse planer le doute sur le fait que le groupe puisse atteindre les 5 % de croissance de ses ventes qu’il prévoyait en Afrique. Cette inquiétude est d’autant plus compréhensible que Brussels Airlines subit depuis 2009 – date à laquelle Lufthansa a investi 65 millions d’euros dans sa filiale – une perte opérationnelle cumulée de 170 millions d’euros. PRÉBOOKING. Reste que, en dépit
ÉRIC VIDAL/AFP
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p Ces six dernières années, la société a gagné 60 000 passagers par an en moyenne.
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e ciel de l’Afrique est plein de promesses. Selon les chiffres de l’Association internationale du transport aérien (Iata), le trafic devrait y progresser de plus de 6 % par an au cours des vingt prochaines années. Mais pour les acteurs traditionnels, qui ont des liens historiques avec le continent, ces perspectives bouleversent la donne. C’est le cas notamment pour Brussels Airlines, élevé sur les ruines de la compagnie publique belge Sabena. Présente en Afrique depuis 2002, avec vingt villes desservies – elle en comptait huit à l’origine –, la filiale de Lufthansa réalise un tiers de son chiffre d’affaires sur place. Désormais, elle doit composer avec la montée en puissance de N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
nouveaux acteurs très agressifs, Turkish Airlines, Emirates Airlines et Qatar Airways en tête. Mais aussi de compagnies africaines comme Ethiopian Airlines et Kenya Airways. Et, dans une moindre mesure, de compagnies low cost telles qu’Air Arabia, Kulula, Mango ou FastJet, lancée en 2012 par le fondateur d’easyJet. « L’Afrique est une zone où l’activité reste soutenue, mais pas autant que ce que nous anticipions, s’est inquiété Bernard Gustin, le directeur général de Brussels Airlines, en juin, au sortir de la basse saison. Tout le monde parle des nouveaux concurrents, notamment de Turkish Airlines. C’est vrai que nous souffrons beaucoup à cause d’eux. » Concurrence oblige, les revenus par siège sont
de cet environnement plus agressif et des difficultés économiques, Brussels Airlines veut « maintenir le cap, en particulier le cap africain », selon son président. Les prochains mois pourraient lui donner raison. « Sur une base annuelle, la deuxième moitié de l’année est en général plus active », souligne Philippe Saeys-Desmedt, responsable de l’Afrique au sein de la compagnie. « Le prébooking est encourageant. Le nombre de réservations en portefeuille sur lesquelles nous avons une visibilité de huit à douze mois est nettement meilleur que l’an dernier à la même époque. » Cette année, Brussels Airlines devrait encore essuyer une perte opérationnelle de 20 millions d’euros, mais il table sur un retour à l’équilibre en 2014. « Notre objectif est d’accélérer le retour à la rentabilité grâce à nos activités africaines », poursuit le responsable. Point positif pour la compagnie : elle est jusqu’à présent parvenue à maintenir sa part de marché en abaissant le prix de son billet. La croissance du nombre de passagers suit celle du continent. « Sur les cinq à six dernières années, nous avons gagné 60 000 passagers par an en moyenne », ajoute Philippe Saeys. En 2013, ce nombre devrait dépasser celui de l’an dernier (716 000 personnes), soit une hausse de 11 %. La stratégie de Br uss els Airlines passe avant tout par la JEUNE AFRIQUE
Les aéroports africains décollent-ils ? consolidation de sa présence. Pour ce faire, la filiale de Lufthansa a accru cette année la fréquence de ses vols, notamment vers Freetown (Sierra Leone), Conakry (Guinée) et Cotonou (Bénin). Elle a également mis en place un vol quotidien vers Dakar, au Sénégal, contre quatre dessertes hebdomadaires auparavant. À cet effet, un accord a été conclu avec la compagnie nationale, Senegal Airlines, pour améliorer la commercialisation des vols. Cette dernière va ainsi établir des liaisons régionales en parfaite connexion avec les vols directs de Brussels Airlines reliant Dakar à la capitale belge. « L’Afrique est en pleine croissance, poursuit le patron de la compagnie. De plus en plus de gens voyagent pour le business. Si nous n’investissons pas maintenant, les autres vont nous manger. » La guerre est déclarée… l
KORONGO AIRLINES, LA PETITE SŒUR CONGOLAISE EN RÉPUBLIQUE démocratique du Congo, Brussels Airlines a trouvé en Korongo Airlines un allié. Née en avril 2012, cette compagnie congolaise basée dans la province cuprifère du Katanga offre aux passagers de l’opérateur belge, via Kinshasa, de parfaites correspondances vers l’importante ville industrielle de Lubumbashi. Plus récemment, la compagnie a également établi une
liaison entre Lubumbashi et Mbuji-Mayi. Une nouvelle destination qui, là encore, permet des connexions, deux fois par semaine, avec les vols de Brussels Airlines au départ de Kinshasa. Enfin, Korongo relie également plusieurs fois par semaine la ville de Lubumbashi à Johannesburg. La société profite des vols d’affaires générés par cette région minière, mais également du fait que Brussels Airlines
MARJORIE CESSAC
first
* L’environnement en priorité.
Nouveau Monde DDB Toulouse / Pixteur - © ATR.
Environment
www.atraircraft.com
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milite pour faire valoir la sécurité de ses prestations auprès de l’Union européenne. « Korongo est encore sur liste noire, à l’instar de l’ensemble de l’aviation civile congolaise, soulignet-on au sein de Brussels Airlines. Néanmoins, c’est un cas à part, puisque leur avion nous appartient et qu’il opère selon les normes occidentales. » l M.C.
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Dossier Aérien
UNE ÉE JOURN AVEC
Oulimatou Dione Diakhaté
Contrôleuse aérienne à l’aéroport international Léopold-Sédar-Senghor de Dakar
Sa mission : suivre les appareils en vol, leur transmettre des informations et éviter les collisions. Découverte d’un quotidien exigeant, « où l’erreur est strictement interdite ».
À
43 ans, Oulimatou Dione Diakhaté a déjà derrière elle quinze années de carrière au service de l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (Asecna) en tant que contrôleuse aérienne à l’aéroport international Léopold-Sédar-Senghor de Dakar. « Dès qu’il s’installe dans l’avion, le pilote est aveugle. Il me confie en quelque sorte sa sécurité, celle de son équipage et de ses passagers », explique cette femme mince et élégante en se dirigeant avec détermination vers la salle de contrôle du Centre régional de la navigation aérienne (CRNA) de Dakar, bâtiment équipé d’un radar et situé à quelques encablures de la tour de contrôle. « Ici, on s’occupe de réguler l’espace aérien pour les avions en survol », indique-t-elle avant d’ouvrir la porte d’un vaste open space climatisé. Elle s’apprête à y passer plus de sept heures assise devant un immense écran radar représentant l’espace aérien avec les appareils en mouvement. Sa mission: éviter les collisions et fournir aux pilotes des informations telles que les données météorologiques ou l’état du trafic. Au fur et à mesure que les avions pénètrent dans sa zone, elle prend le relais des contrôleurs des régions d’information de vol (FIR) limitrophes et note les données concernant chaque appareil sur des bandelettes orange (strips).
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Dans la salle de contrôle, la concentration est à son paroxysme. Mais si le stress est présent, difficile de le déceler. Plus de 250 appareils traversent quotidiennement l’espace aérien sénégalais, qui couvre la terre et l’océan. L’équipe doit en gérer simultanément une vingtaine. « Tous nos échanges sont enregistrés », indique un contrôleur aérien d’origine burkinabè. « Quand [en 2009] le vol Rio-Paris d’Air France a disparu au-dessus de l’océan Atlantique dans la FIR Atlantico, limitrophe de la FIR Dakar, nous avons tous été très affectés. Nos échanges avec l’équipage ont été saisis pour les besoins de l’enquête », se remémore-t-il. Les communications HF (pour high frequency, le canal sur lequel
est sortie en 1995. Son diplôme de technicien supérieur de la navigation aérienne en poche, Oulimatou Dione Diakhaté a débuté sa carrière comme agent d’opération chez Air Afrique. Pour disposer de la licence de contrôleur délivrée par l’Anacim (organisme du ministère sénégalais desTransports), elle a dû obtenir l’aval du CRNA, satisfaire à une batterie de tests médicaux et atteindre un excellent niveau d’anglais. Des critères sur lesquels elle est évaluée chaque année, comme ses collègues.
Aujourd’hui, cette mère de deux enfants gagne environ 1400000 F CFA (2100 euros) net par mois, une somme qu’elle juge insuffisante compte tenu de la masse de travail fournie et Plus de sept heures par jour, face des horaires contraignants (les contrôleurs se relaient à un écran radar, elle dialogue sur des « quarts » allant de par radio avec les pilotes. 6h45 à 13h45, de 13h45 à 21 heures et de 21 heures à les contrôleurs communiquent) grésillent 6h45). Quant aux conditions de travail, de plus belle dans la salle de contrôle. Le Oulimatou clame qu’elles pourraient bruit est infernal. « On s’y habitue, à être meilleures. « Nous sommes en force. La passion nous permet de gérer sous-effectifs alors que tout le trafic beaucoup de choses », sourit Oulimatou. entre l’Europe et l’Amérique du Sud Ce mardi, de 13h45 à 21 heures, elle passe par notre centre. Nous ne est accompagnée de sa collègue sommes que 50 contrôleurs aériens Aminata Mbaye et de deux stagiaires, alors qu’il y en a plus de 200 à l’aéroport étudiants à l’École africaine de la de Casablanca », déplore-t-elle. Résultat, météorologie et de l’aviation civile elle n’a qu’un jour et demi de repos par (Eamac) de Niamey, au Niger – dont elle semaine au lieu des deux jours et demi JEUNE AFRIQUE
UR J.A . BA SSI NE T PO GU ILL AU ME
prévus. Et ses doléances ne s’arrêtent pas là: « Il faut revoir la gestion du personnel, mieux promouvoir ce métier, davantage encadrer la formation des jeunes… » Des revendications qui l’ont poussée à adhérer au Syndicat des contrôleurs aériens du Sénégal, dont elle est élue depuis 2007. Elle est également, depuis 2005, vice-présidente pour l’Afrique de l’Ouest de la Fédération des associations des contrôleurs de la circulation aérienne de l’Asecna. Parmi ses griefs figure également le manque de place faite aux femmes dans sa profession: à Dakar, elles ne sont que dix. « C’est bien dommage. Je pense sincèrement que les femmes sont les plus à même de faire ce métier, en ce qui concerne la gestion du stress. Et puis, les pilotes préfèrent entendre une voix féminine car c’est plus rassurant. » Tous les quinze jours, les contrôleurs quittent le CRNA pour la tour de contrôle, où ils supervisent les avions en phase de décollage ou d’atterrissage. Perchés à 112 m de haut, ils ont une vue à 360 degrés sur l’aéroport. Oulimatou Dione Diakhaté se rappelle y avoir connu des situations assez cocasses, comme avec ce pilote terrorisé par un boa se dorant sur la piste d’atterrissage. À 21 heures, il est temps pour elle de laisser la place à une autre équipe au CRNA. Elle sera de retour le lendemain, à 6h45. Ambitieuse, la Sénégalaise n’entend pas rester contrôleur toute sa vie. « Et quand bien même je le voudrais, c’est humainement impossible, affirmet-elle. C’est un métier extrêmement stressant où l’erreur est strictement interdite. » Oulimatou a une nouvelle corde à son arc: elle vient d’être nommée chef par intérim de l’unité des contrôleurs aériens. l KATIA TOURÉ, à Dakar JEUNE AFRIQUE
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BOMBARDIER
t Le canadien Bombardier et ses CSeries, de 100 à 149 sièges.
CONSTRUCTEURS
Le match des « petits » Le développement des lignes intra-africaines offre de plus en plus d’opportunités aux fabricants d’avions de 50 à 120 places.
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ans une dizaine d’années, le secteur aérien africainseraéquivalentà celui du Moyen-Orient. L’émergence d’une classe moyenne et la diversification des économies vont tirer cette croissance, ce qui augmentera le trafic intra-africain. Une aubaine pour les constructeurs d’appareils de 50 à 120 places commel’européenATR,lecanadien BombardieroulebrésilienEmbraer, 87 % des routes aériennes correspondant à des vols de moins de cent passagers sur le continent. Un marché où cohabitent des avions turbopropulsés (à hélices), économes en carburant, et des jets (dotés de réacteurs), plus rapides. « Même avec une forte croissance, ce marché reste une niche,
la concurrence y est très forte. Les compagnies africaines se doteront de 250 appareils de ce type dans les vingt ans à venir », indique MatthieuDuquesnoy,vice-président Afrique et Moyen-Orient d’Embraer Commercial Aviation. Le groupe brésilien compte plus de 160 appareils (dont 80 jets) sur le continent, dans 20 compagnies environ. Et l’avionneur a ouvert un centre de maintenance en Afrique du Sud. ESPOIRS. Bombardier, qui fabrique
àlafoisdesappareilsturbopropulsés et des jets, affiche le même enthousiasme.«Nousvenonsdesigneravec un treizième opérateur pour notre modèle CRJ [de 60 à 99 places]. Au total, nous comptons 170 avions sur le continent », se félicite Raphaël
Haddad, vice-président Afrique et Moyen-Orient. Plusieurs compagnies seraient aussi intéressées par les nouveaux modèles, les CSeries, de 100 à 149 places. Preuve de ses espoirssurlecontinent,Bombardier s’apprête à inaugurer au Maroc une usine dans laquelle il aura investi 200 millions de dollars (près de 150 millions d’euros) d’ici à 2020. De son côté, ATR, spécialiste des appareils turbopropulsés de 50 à 70 places, a aussi fait de l’Afrique une priorité. Il y a renforcé sa présence en implantant un centre de formation à Johannesburg. Son objectif : doubler en dix ans le nombre de ses avions en service sur le continent (110 aujourd’hui). Le consortium européen mise sur leur faible consommation et leur souplesse d’utilisation lorsque les infrastructures sont limitées. Ilpourraitaussilancerlaproduction d’un avion de 100 places. Pour tous, le match ne fait que commencer. l JULIEN CLÉMENÇOT
SÉCURITÉ
L’Asecna remplit ses caisses L’agence chargée de la surveillance et du contrôle aériens a décroché un prêt de 27,4 millions d’euros pour améliorer ses services.
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our financer son Plan de services et d’équipement2009-2013,l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (Asecna) a signé le 1er juillet dernier avec la Société financière internationale (SFI, filiale de la Banque mondiale) une convention de prêt de 18 milliards N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
de F CFA (27,4 millions d’euros). Celle-ci vient boucler l’enveloppe de 180 milliards de F CFA destinée à financer le programme d’améliorationdelasécuritéaérienneàtravers, essentiellement,les17Étatsafricains membres de l’agence (le 18e étant la France),auniveaudeséquipements de navigation, de surveillance et de contrôle aérien. Ces 18 milliards de F CFA seront affectés au renouvellementdeséquipementsélectriques,à lafabricationdebalisageslumineux, aux investissements aéroportuaires et à la construction de générateurs électriques.
C’est la première fois que l’Asecna contracte un prêt auprès de la SFI. « Ce choix s’inscrit dans une politique de diversification de ses sources de financement », explique Denis Ousmane Sylla, responsable de la planification financière. Elle doit aussi rationaliser ses dépenses. « C’était l’offre la plus avantageuse », poursuit le responsable. De fait, le taux d’intérêt du prêt oscille entre 5 % et 6 %. Signé pour dix ans, avec un différé de deux ans (le remboursement commencera en 2015), il prendra fin en 2022. l BINTOU BATHILY JEUNE AFRIQUE
Dossier Aérien inférieurs de 50 % à ceux qui se pratiquent dans l’Hexagone à compétences équivalentes. « Ces conditions favorables, puisque la main-d’œuvre représente 80 % des coûts d’entretien d’un avion, nous permettent de rivaliser avec les bases européennes et nordafricaines de maintenance aéronautique les plus compétitives, comme celles de Sabena Technics en Tunisie, de Lufthansa à Malte et de Turkish Airlines à Istanbul », ajoute Le Plat, qui compte attirer d’autres clients, en particulier ouestafricains, grâce à l’agrandissement duhangar,quipermettrad’accueillir un cinquième appareil. « Les avions des compagnies sénégalaises et ivoiriennes sont des cibles commerciales naturelles », affirme-t-il.
SERVICES
ATI, l’as de la maintenance Grâce à Aerotechnic Industries, coentreprise entre la RAM et Air France, Casablanca s’impose comme une plateforme de référence dans le domaine de l’entretien des appareils.
MOHAMED SMYEJ POUR J.A.
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ans le hangar d’Aerotechnic Industries (ATI), près de l’aéroport Mohammed-V de Casablanca, les techniciens s’affairent autour de trois avions moyen-courriers aux couleurs d’Air France et de Royal Air Maroc (RAM). « Devant nous, des techniciens réalisent le D-Check [grand entretien] d’un Boeing 737, obligatoire toutes les 5 000 heures de vol, indique Dominique Le Plat, directeur général d’ATI. En cinq semaines, ils vérifient que toutes les pièces de l’avion fonctionnent bien. À côté se termine le A-Check des Airbus A321 et A319: des contrôles plus fréquents, toutes les 260 heures de vol, réalisés en moins d’une semaine et centrés sur la correction des anomalies récurrentes. » Créée en 2009, la coentreprise entre Air France et la RAM a repris les équipes et équipements de l’ancienne direction technique de la RAM, qui ne prenait en charge que ses propres appareils. Initialement N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
baséesàMarrakech,ceséquipesont déménagé à Casablanca. « Grâce à la force commerciale d’Air France et à la productivité marocaine, notre activité est en forte croissance », explique Dominique Le Plat. Dès ses débuts, en plus des appareils des deux compagnies actionnaires – qui assurent chacune 40 % du chiffre d’affaires –, ATI a décroché la maintenance d’avions d’Air Méditerranée, d’Air Ivoire (disparue depuis), d’Air Arabia et même de Vladivostok Airlines, transporteur de Russie orientale. En 2012, ATI, qui compte 200 salariés, a réalisé un chiffre d’affaires d’environ 100 millions de dirhams (près de 9 millions d’euros). « Nous voulions une croissance raisonnable, pour augmenter notre rythme graduellement. Conformément à nos prévisions, nous avons atteint notre seuil de rentabilité trois ans après le lancement de nos activités, début 2010 », se félicite le directeur général. Un résultat obtenu notamment grâce aux coûts de personnels,
p Au Maroc, la maind’œuvre coûte 50 % moins cher qu’en France.
PANOPLIE. Royal Air Maroc, en pleine restructuration après des années 2011 et 2012 financièrement catastrophiques, fait tout pour que Casablanca devienne un hub de maintenance aérienne : avec un tel service à domicile, ses coûts d’entretien baisseront et, surtout, ces activités, anciennement déficitaires, deviendront rentables grâce aux économies d’échelle réalisées. Après l’implantation de Snecma Morocco Engine Services (Smes), coentreprise fondée il y a dix ans entre la RAM et le motoriste aéronautique Snecma pour l’entretien desmoteursCFM56desBoeing737, puis celle d’ATI en 2009, la compagnie marocaine négocie à présent l’installation à Casablanca de la Société toulousaine de traitement
La société, au chiffre d’affaires de près de 9 millions d’euros en 2012, est devenue rentable en trois ans. de surface (STTS), leader européen de la peinture d’avion, là aussi sous la forme d’une coentreprise. « C’est une excellente nouvelle, car nos clients vont pouvoir réaliser ici une panoplie plus large d’opérations contre la corrosion, ce qui limitera les frais de déplacement de leurs appareils », indique ATI, qui recourra aussi aux services de STTS. l CHRISTOPHE LE BEC JEUNE AFRIQUE
Bissau Toucher
du doigt
2 vols/ semaine Nos destinations Abidjan, Abuja, Accra, Bamako, Bangui, Banjul, Bissau, Brazzaville, Conakry, Cotonou, Dakar, Douala, Freetown, Kinshasa, Lagos, Libreville, Lomé, Monrovia, N djamena, Niamey, Ouagadougou, Pointe Noire, Yaoundé
Des avions de nouvelles générations pour un réseau plus large
avec plus de fréquences et de nouvelles destinations
(228) 22 23 05 05
Dossier Aérien
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À SUIVRE
Ils font bouger les lignes À la tête de leurs compagnies respectives, ces grands patrons foncent droit vers l’Afrique.
Royal Air Maroc
Driss Benhima Un homme de devoir
ommeunparfumderevanche. En l’espace de quelques mois, Driss Benhima, directeur général de Royal Air Maroc (RAM), est devenu la coqueluche des médias. Il est l’homme qui a redressé la RAM. Secoué par la crise mondiale dès 2008 et les contrecoups de l’ouverture à la concurrence du ciel marocain, le pavillon national était parti en piqué. Nommé en 2006, son patron n’avait pas été épargné par les critiques. On le disait trop rigide, incapable de négocier avec les syndicats. Aujourd’hui, on salue sa capacité à prendre des décisions courageuses. Car la situation est en passe de s’inverser. Avec le soutien du gouvernement, il a réussi à diminuer drastiquement les effectifs en organisant le départ de près de 2 500 salariés (600 ont rejoint ses filiales), contre 1 300 prévus dans le plan initial. Parmi les autres chantiers : la suppression des agences commerciales et des lignes non rentables, le rajeunissement et la rationalisation de la
HASSAN OUAZZANI POUR J.A.
C
flotte, la maîtrise des coûts des services aéroportuaires et de restauration. À 59 ans, ce grand commis de l’État, fils d’un ancien Premier ministre, poursuit un parcours presque sans faute commencé
dans les années 1980 au sein de l’Office chérifien des phosphates, et poursuivi en 1994 à la tête de l’Office national de l’électricité (ONE). Durant cette décennie, il a fait partie de l’équipe de technocrates – au côté par exemple de l’actuel PDG de Maroc Télécom – chargée par Hassan II de moderniser le royaume. En parallèle à ses fonctions à la tête de l’ONE, Driss Benhima a participé au G14, un groupe de réflexion créé par le souverain, et a même assuré un court intérim au sein de l’exécutif, en 1997-1998, en tant que ministre des Transports, du Tourisme, de l’Énergie, des Mines et de la Marine marchande. Confortablement installé à la tête de la RAM, ce diplômé de Polytechnique, boulimique de travail, n’a cependant pas partie gagnée. Il sait que pour faire exister une compagnie de taille moyenne dans un paysage toujours plus concurrentiel ses équipes doivent poursuivre le développement de nouvelles lignes, notamment vers le continent. Entre 20 et 30 nouveaux appareils devraient permettre au pavillon marocain d’étendre son réseau en Afrique. l JULIEN CLÉMENÇOT
Air France Franck Legré Un ancien à la manœuvre
AIR FRANCE
AU MOMENT OÙ Air France dévoile la seconde partie de son plan d’économies, Franck Legré est chargé de poursuivre l’extension du réseau de la compagnie française sur le continent (15 % de son trafic long-courrier). Il a succédé le 1er juillet à Pierre Descazeaux, qui supervisait également la zone Moyen-Orient. Cette dernière a finalement été rattachée au sous-continent indien pour correspondre à la zone de chalandise d’Emirates, de Qatar Airways et d’Etihad. Diplômé de HEC, Franck Legré a auparavant piloté les N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
ventes d’Air France en Amérique du Sud, en Europe puis en Chine. Parmi ses nouveaux dossiers : le décollage, pour le moment incertain, d’Air Côte d’Ivoire, dont Air France détient 20 %, et un éventuel partenariat avec le gouvernement de RD Congo, qui envisage de créer une compagnie nationale. L’occasion de contrer Brussels Airlines qui, avec sa filiale locale Korongo Airlines, joue déjà la complémentarité entre vols internationaux et vols nationaux dans ce pays. l J.C. JEUNE AFRIQUE
Les aéroports africains décollent-ils ?
Syphax Airlines
Mohamed Frikha
Un trublion tunisien
NICOLAS FAUQUE/WWW.IMAGESDETUNISIE.COM
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ans la Tunisie du président Ben Ali, Mohamed Frikha avait réussi à faire prospérer l’une des premières sociétés d’informatique du pays en la protégeant de la prédation du clan au pouvoir. Après la révolution, ce Sfaxien, passé par Polytechnique (Paris), s’est encore illustré en lançant sa propre compagnie aérienne. Vent debout contre ce projet dès son annonce, Tunisair doit aujourd’hui composer avec un nouveau concurrent. Syphax Airlines exploite plusieurs lignes intérieures, dessert également Paris, Tripoli et Istanbul, et vise de nouvelles destinations. En juin, la compagnie a officialisé la commande de trois A320. Selon son promoteur, Syphax pourrait être bénéficiaire dès 2014, mais les indicateurs présentés récemment suggèrent des résultats financiers inférieurs aux prévisions. l J.C.
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Dossier Aérien
FastJet Ed Winter Un pilote aux manettes
Turkish Airlines
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Un patron atypique
cost. Ancien pilote, il a d’abord exercé différentes fonctions managériales au sein de British Airways, avant de lancer à la fin des années 1990 GoFly, la filiale à bas coût du transporteur britannique. Celle-ci comptera jusqu’à 28 appareils, avant d’être absorbée par easyJet, contrôlée par George Stelios. Une rencontre déterminante. À la demandedumagnatgrec,Winterrestedans l’entreprise et devient pendant quatre ans directeur des opérations d’easyJet, qu’il quittefinalement en 2006. Après un crochet par l’Arabie saoudite, où il est un temps patron de la compagnie Saudi National Air Services, c’est à nouveau George Stelios, actionnaire de FastJet, qui le convainc de rejoindre son projet de compagnie low cost africaine. Près d’un an après son premier vol, cette dernière compte quatre liaisons avec la Tanzanie et une avec l’Afrique du Sud. Elle a également signé un accord avec Red 1 Airways pour lancer sa marque au Nigeria, tout en restant actionnaire minoritaire de cette filiale. l JULIEN CLÉMENÇOT
BLOOMBERG
a carrière, qui s’étend sur quatre décennies, reflète à la fois l’évolution du secteur aérien et la mondialisation. Aujourd’hui, le Britannique Ed Winter est le patron de FastJet, l’une des plus prometteuses compagnies africaines low
Temel Kotil
SON PROFIL détonne. Docteur en ingénierie mécanique, Temel Kotil, le directeur général de Turkish Airlines, a fait une grande partie de sa carrière à l’université et dans la recherche, en Turquie puis aux États-Unis. À la tête de la société turque depuis 2005, Kotil est un fervent supporteur du développement de son entreprise sur le continent. « Le temps de l’Afrique est venu », répète-t-il. Pour ce faire, Turkish Airlines va profiter de son hub d’Istanbul. En 2013, elle a porté à 26 le nombre de pays africains desservis. Fin 2012, Kotil avait souhaité arriver J.C. rapidement à 40… l
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TENDANCE
Wifi, embarquement immédiat En proposant internet à bord, les compagnies espèrent séduire les clients. Réelle amélioration ou simple coup de pub?
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ango a beau être une compagnie low cost, c’est sur le terrain du service aux passagers qu’elle entend s’illustrer. Depuis un an, ses avions reliant les principales villes sud-africaines sont les seuls du continent à offrir internet à plus de 35000 pieds. Mais l’innovation a un prix : 50 rands (3,75 euros) pour trois heures de connexion avec un débit maximum de 4 mégaoctets. D’après les experts, l’initiative relève avant tout
Orgaanismee d’aud dit (AO O) accrrédité par p IATTA pou ur la réaliisation n d’aud dits de certification n IOSA et ISA AGO. Centtre de formaation (EETO) approuvé parr IATA pour la form mation des au uditeurs IOSA A
Qualli!aud dit, pour p vvotre e Certtificaation IOSA A
du « coup de pub ». Entre le prix de l’installation des équipements, la surconsommation en carburant induite par la présence d’une antenne sur le fuselage et le faible nombre de clients, la rentabilité n’est pas au rendez-vous. Mais nul doute que d’autres compagnies africaines lui emboîteront le pas. CAPTIF. Aux États-Unis, 24 % des
liaisons intérieures offrent déjà un accès wifi et 20 % de plus pourraient le proposer prochainement.
Les vols internationaux, ceux d’Air France par exemple, commencent eux aussi à en être équipés, bien qu’aucun d’entre eux ne desserve encore le continent. Pourquoi cet engouement?Pourapporterplusde confortauxpassagersoutenterdese distinguer de la concurrence, certes. Mais aussi pour vendre à un public captif de nouvelles prestations, qu’il s’agisse d’accès à des jeux en ligne ou de la possibilité de réserver une chambre d’hôtel ou une table dans un restaurant… l JULIEN CLÉMENÇOT
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Culture & médias
Felwine Sarr ÉDITION
« Le poids du religieux dans nos sociétés est un tabou » Avec Boubacar Boris Diop et Nafissatou Dia Diouf, cette figure intellectuelle sénégalaise reprend en main la librairie Athéna de Dakar. Rencontre avec un libre penseur vivifiant.
J
Propos recueillis à Dakar par
MEHDI BA
imsaan, la maison d’édition dont il est l’un des trois cofondateurs, porte le nom d’une rizière de Niodior, une île du Saloum où lui-même a fait ses premiers pas et où, enfant, il revenait en famille passer les grandes vacances. Révélé en 2009 par Dahij, son premier texte, publié par Gallimard, Felwine Sarr, 41 ans, fait germer réflexions philosophiques, méditations poétiques et mélodies polyglottes comme d’autres font pousser du riz. Écrivain, il privilégie la quête spirituelle et le cheminement introspectif, s’autorisant la plus totale liberté stylistique, comme dans ses récentes Méditations africaines (Mémoire d’encrier, 2012). Producteur, musicien et parolier, il promène sa guitare acoustique sur les scènes du Sénégal. Universitaire, il dirige deux UFR à l’université Gaston-Berger de Saint-Louis (sciences économiques ; civilisations, religions, arts et communication). Aux côtés de ses complices écrivains Boubacar Boris Diop, 67 ans, et Nafissatou Dia Diouf, 40 ans, N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
Felwine Sarr est en train d’ajouter quelques lignes à un CV déjà foisonnant. Avec Jimsaan, structure polyvalente créée en juillet 2013, ce quadra jamais rassasié fait ses débuts de libraire, d’éditeur, d’agitateur d’idées et de producteur. « Ce qui relie mes différentes identités, de la littérature au savoir académique, c’est le désir de transmettre, d’aller à la rencontre de l’autre et de partager », analyse celui qui a délaissé les rizières de son Saloum natal pour irriguer d’autres cultures. JEUNE AFRIQUE : Qu’est-ce qui a amené le trio d’écrivains que vous formez avec Boubacar Boris Diop et Nafissatou Dia Diouf à devenir libraire ? FELWINE SARR : Lina Husseini, l’ancienne pro-
priétaire de la librairie dakaroise Athéna, nous a fait savoir qu’elle désirait la revendre et qu’elle souhaitait vivement que nous la reprenions tous les trois. Nous avions alors d’autres projets, en particulier la création de notre maison d’édition, mais nous avons estimé que c’était une très belle librairie, bien située, jouissant d’une excellente réputation. Cela entrait dans le projet culturel global qui était le nôtre, nous nous sommes donc lancés.
Culture médias t Économiste, philosophe, l’écrivain-poète est aussi musicien.
Comment se décline ce projet ?
Nous souhaitons faire d’Athéna un lieu-carrefour du débat d’idées, où nous organiserons des rendezvous réguliers. Ce sera plus qu’une librairie : un espace de proposition culturelle. Pour la maison d’édition que nous venons de créer à Saint-Louis, nous mettrons en avant le sérieux et l’exigence. Il existe ici un lectorat prêt à investir dans des livres de tous horizons si on lui présente une offre de qualité. Nousvoulonsinstallerunlabelsanscompromission, en publiant peu si nécessaire. Si ce label s’impose, il deviendra viable économiquement. Mais nous n’avons pas l’intention de faire du livre religieux ou du roman à l’eau de rose pour atteindre cet objectif. Le Sénégal aime la confrontation d’idées, mais cette aspiration au débat semble parfois tourner en rond, sans déboucher sur une véritable réforme des modes d’action…
La parole est déjà un acte, encore faut-il qu’elle soit vraie. Le Sénégal est un pays de débats, mais ceux-ci restent souvent superficiels. Il y a un certain nombre de questions épineuses que les intellectuels n’abordent pas frontalement. Par exemple, la place du religieux, la chape de plomb que fait peser le groupe sur l’individu, ou encore la question de notre rapport au monde occidental. La parole consensuelle est libre. Mais celle qui touche aux problèmes de fond, aux tabous, expose son auteur à en payer le prix. Nous aimerions promouvoir un espace de débats exigeant en mettant en avant des gens qui ont eu à creuser en profondeur. C’est le dialogue sans poids qui mène à l’inaction. Vous risquerez-vous à aborder ces problématiques épineuses ?
Aucune n’est a priori exclue ni taboue. Nous nous efforcerons de ne pas tomber dans le double piège intellectuel qui consisterait, d’un côté, à éviter certains sujets pour ne pas être victime de l’anathème, ou de l’autre à chercher par principe à choquer ou à créer la polémique. Le poids du religieux est une question centrale qui ne peut plus être traitée dans les chaumières, en privé : elle doit faire l’objet d’un débat intellectuel sérieux. C’est à nous de réfléchir aux questions qui nous semblent urgentes, hic et nunc, dans notre processus d’émancipation, plutôt que de rester à la remorque des débats contemporains à la mode dans d’autres espaces géographiques et culturels.
PHILIPPE GUIONIE/MYOP
Vous êtes reliés tous les trois par une certaine forme d’engagement qui emprunte toutefois des chemins différenciés.
Nos engagements respectifs sont complémentaires. Boris est né avant les indépendances. Chez lui, l’engagement prend naturellement une forme politique. Nafissatou emprunte une voie moins frontale et tranchée, comme dans Socio Biz, où elle porte un regard ironique et subtil sur la l l l N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Culture médias Édition comme si le temps s’était arrêté. C’est le réflexe d’un groupe social dont la structure mentale s’est construite sur le référent à l’aîné. Il faut de l’indiscipline, nous devons savoir prendre des chemins de traverse car c’est aussi du chaos que naît la créativité. Un monde qui finit n’est pas synonyme de fin du monde. On a beaucoup stigmatisé la « Françafrique ». Désormais, ce sont les ONG et les institutions internationales qui semblent avoir pris le relais de la tutelle postcoloniale…
SYLVAIN CHERKAOUI POUR J.A.
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société sénégalaise. De mon côté, je développe une forme d’engagement plus introspectif. Je suis convaincu que la vraie liberté c’est la conscience individuelle, ce que j’ai tenté de développer dans Dahij. La véritable guerre est à l’intérieur de nous-mêmes. Je prône une révolution radicale des individus. lll
Sur quelles dimensions doit porter cette « révolution radicale des individus » ?
L’individuation n’est pas l’individualisme. Ce n’est pas un égoïsme obtus, replié sur lui-même. Pour qu’il y ait de la créativité, pour que le groupe social aille de l’avant, il est essentiel que l’individu puisse s’épanouirenexplorantd’autresvoies.Noussommes soumis à une forme de grand écart entre nos traditions et notre aspiration à la modernité. Il existe des éléments d’inertie et des éléments dynamiques, à nous d’en dresser l’inventaire : que conservonsnous? que laissons-nous de côté? qu’enrichissonsnous ? Nous ne pouvons pas demeurer dans la répétition. Un héritage assumé, c’est un héritage que l’on enrichit à chaque génération. À nous de le faire librement, sans nous laisser imposer une réalité qui ne serait pas la nôtre, mais en évitant aussi une forme de fétichisme des origines qui boucherait notre horizon. Qu’il s’agisse de la littérature ou de la pensée africaine, n’y a-t-il pas un culte excessif des grands anciens ?
Il est vrai que nous avons tendance à nous tourner systématiquement vers les figures tutélaires, N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
p Boubacar Boris Diop et Nafissatou Dia Diouf, à la librairie Athéna de Dakar (le 25 septembre).
Les indépendances n’ont pas achevé l’œuvre de la décolonisation. Les rapports de force sont toujours asymétriques et les rapports de domination subsistent dans tous les mécanismes de nos relations, même s’ils sont devenus plus subtils. Les politiques économiques, de santé publique, d’éducation, doivent demeurer du ressort des États, c’est une question d’autorité politique et de souveraineté. Le prix à payer, c’est de savoir renoncer parfois à certains financements s’ils doivent nous conduire à abandonner cette souveraineté. L’émancipation, ça se construit et ça nécessite de faire des choix de rupture tout en acceptant d’en payer le prix. Encore faut-il se livrer préalablement à un véritable travail de réflexion afin d’identifier nos choix. Si cet espace-là est vide, on en revient au prêt-à-penser qui nous est servi. Justement, la philosophie du « développement » à l’occidentale n’est-elle pas un angle mort de la pensée critique en Afrique de l’Ouest ?
Dans mon cours d’économie, depuis cinq ans, je m’attache à déconstruire les notions qui sous-tendent le concept de développement économique. Nous sommes encore sous le joug de la doxa « développementiste », qui nous a été vendue comme la version profane du salut. À
Nous nous tournons systématiquement vers les figures tutélaires. Il faut de l’indiscipline. l’arrivée, tout le monde est convaincu que c’est le seul chemin possible. La croissance, ce n’est pas le développement: on peut accroître les richesses sans pour autant transformer qualitativement la vie des gens. Un autre dogme consiste à prôner une modalité unique pour faire face aux besoins des sociétés. Le développement à l’occidentale est une forme de réponse que l’Histoire a livrée à un moment donné. À chaque société de définir ce qu’elle entend par « progrès social ». La proposition « développementiste » semble généreuse, ce qui la rend difficilement critiquable. Mais elle n’est, au fond, qu’une construction idéologique. l JEUNE AFRIQUE
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MUSIQUE
Opération séduction pour Magic System c’est qu’il est aussi plus engagé », assure l’un d’eux. Tout en restant dans les limites du « politiquement correct », bien sûr ! Les guerres, la famine, la faiblesse du système éducatif, mais aussi les réussites… est une évidence, notamment avec le très Les quatre Ivoiriens ont voulu aborder entêtant « Travailler », sur lequel A’salfo le continent dans sa globalité, avec des s’autorise des envolées vocales aussi chansons telles qu’« Africa », « Abidjan » inattendues que précises. « Woyo » est ou encore « Tour du monde ». « Ceux qui une déclaration d’amour au zouglou, ce nousconnaissentdepuislongtempssavent genre musical ivoirien qui relate les réalités que le Magic System “sérieux” a toujours sociales et dont le groupe est l’une des existé. Peut-être qu’en France, cependant, figures de proue, notamment depuis le cela pourra surprendre. » succès de 1er Gaou en 1999. « Zouglou, c’est C’est ce que laissent en tout cas présager pas coupé-décalé [un autre style musical les réactions qui, en juin dernier, ont suivi ivoirien] qui peut t’effrayer », chantent-ils. la sortie française du premier et seul single Ni le « ndombolo [congolais] », ajoutentdel’albumMamadou.Certainsontvudans ils, un brin provocateurs. ce titre, qui entend dénoncer la précarité des sans-papiers et le mariage blanc, une GORILLE. Bien sûr, il fallait aussi titiller la occasion de renforcer les préjugés contre gent féminine (« Femme est forte »)… Les les immigrés. « Il y a même eu un vrai « hommes » de Magic System expliquent blocage au niveau de certaines télévisions alors, entre plusieurs éclats de rire : et radios qui n’ont pas voulu passer la chanson, la trouvant trop communautariste », admet Un album différent, plus engagé, A’salfo. dont le premier single a fait L’expérience ne semble grincer quelques dents en France. pourtant pas avoir découragé les Ivoiriens. Et si « “Femme est forte”, c’est une expresla France ne semble, pour le moment, sion ivoirienne qui veut dire que pour pas encore prête pour un Magic System se protéger une femme peut beaucoup engagé, qu’en sera-t-il des différents pays mentir. » Et de plaisanter, dans le refrain : africains – tels que le Burkina Faso, le « On dit femme est forte… elle peut mettre Bénin, le Cameroun et, bien sûr, la Côte un gorille dans un sachet ! » d’Ivoire –, où ils prévoient de se produire « Là où cet album est vraiment différent, lors de leur prochaine tournée? À suivre. l presque en rupture avec les précédents, HABY NIAKATE
Avec un septième disque en préparation qui fait la part belle aux sons traditionnels, le groupe ivoirien s’apprête à reconquérir un public africain quelque peu délaissé ces dernières années.
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ls le promettent, 2014 sera l’année de leur retour en Afrique. La critique est, il est vrai, devenue récurrente : Magic System se serait peu à peu transformé en un groupe enchaînant les chansons commerciales plus ou moins réussies – pourvu que cela plaise à un public majoritairement occidental. « Ces dernières années, nous avons beaucoup tourné et avons un peu délaissé le public africain, avec qui un lien a été presque coupé, admet A’salfo, leader du groupe. Aujourd’hui, nous voulons renouer avec ce public, qui nous a apporté son soutien dès nos débuts. » Pour soigner ce come-back, le célèbre quatuor ivoirien travaille sur un nouvel album dont la sortie est prévue en janvier 2014. Le septième, en près de dix-sept années de carrière. Des mois qu’ils le peaufinent. Comme en cette journée d’été où ils font découvrir en exclusivité à J.A. les treize titres qui devraient – certains sont encore provisoires – figurer sur le nouvel opus. Dans un studio du 18e arrondissement de Paris, ils arrivent très fatigués – ayant assuré un show à Alger la veille –, mais ils retrouvent rapidement le sourire, hochent la tête, et tapent discrètement des pieds à mesure que les titres défilent. Le retour aux sources, aux rythmes, sonorités et instruments traditionnels JEUNE AFRIQUE
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Culture médias nousn’avonspaslesmoyensd’envoyerdes correspondants partout. » L’AITV dispose d’un réseau de trente correspondants qui envoient des images brutes à l’agence afin que celles-ci soient montées et alimentent les journaux du continent ainsi France Télévisions ferme sa banque d’images spécialisée que les chaînes françaises TV5, France 24 dans l’actualité africaine. De quoi inquiéter les chaînes du continent. et France Ô. Craignant un conflit social important, prèsl’annoncedelafermeture International (CFI) – qui finance l’AITV à France Télévisions souhaiterait propode son Agence internationale hauteur de 1,8 million d’euros par an –, qui ser un plan de départ aux 30 salariés de d’imagesdetélévision(AITV), estime qu’il faut donner aux Africains plus l’AITV, mais cherche aussi un repreneur. spécialisée dans le suivi de d’autonomie en termes de production et Le groupe et CFI sont en discussion avec l’actualité africaine, France Télévisions de diffusion de l’information. l’AFP et Afrik.tv. « C’est de l’intox, assure NathalieSarfati.Sil’AFPveutsedévelopper fait face à un mouvement social mené RELAIS. Par ailleurs, le but de CFI est en Afrique, elle n’a pas besoin de nous. » par la trentaine de salariés basés à Paris et appuyé par les syndicats SNJ et CFDT. également de faire payer les programmes Pourtant, Olivier Lombardie, Une pétition circule. Parmi ses signataires: aux chaînes africaines, qui directeur commercial et marYoussou Ndour et Alpha Blondy. jusqu’alors profitaient gratuiketing de l’AFP, assure que Nathalie Sarfati, grand reporter à l’AITV, tement des images de l’AITV. l’agence devrait créer des est déterminée à ne pas laisser France Une solution qui semble postes si elle reprenait la misle nombre de sujets Télévisions fermer l’agence. « Plus de 70 effrayer ces dernières, si sion de l’AITV. Olivier Zegnade l’AITV diffusés chaînes africaines publiques et privées l’on en croit Bertille Kessou, Rata, directeur général d’Afrik chaque année sur les chaînes reprennent nos sujets », déclare-t-elle, adjointe du rédacteur en chef .tv, se dit quant à lui intéressé d’Afrique agacée que l’on remette en question l’utide l’ORTB au Bénin : « Il faut par une éventuelle reprise du et d’outre-mer réseau de correspondants de lité de l’AITV. Le 12 septembre, Thierry être conscient des réalités (dont France Ô et TV5) l’AITV. « Il est temps de pasThuillier, directeur de l’information de du continent, nous n’avons ser le relais à une agence afriFrance Télévisions, avait en effet annoncé pas les moyens d’acheter des aux salariés de Malakoff son intention de programmes. » Pour Étienne caine; cela va dans la logique du développement du continent », fermer l’agence pour des raisons budgéFiatte, les télévisions du continent ont taires – le groupe avance le chiffre contesté surtout besoin de sujets panafricains faits explique-t-il. S’il n’est pas question pour par les syndicats de 3 millions d’euros de par les Africains eux-mêmes. Pourtant, Afrik.tv d’accueillir l’équipe de l’AITV, « il M. Yovodevi, directeur de TV Togo, ne financementpourl’AITV–,maisaussiparce serait tout à fait envisageable de déloqu’elle ne correspondait plus vraiment à l’entend pas de cette oreille : « Tout ce qui caliser l’équipe de France Télévisions la « mission » de l’audiovisuel public franconcerne l’actualité nationale dans notre à Dakar, où se trouvent déjà plusieurs çais. Un point de vue avancé par Étienne journal télévisé provient de l’AITV. Idem journalistes d’Afrik.tv » l pour l’actualité des autres pays africains ; Fiatte, directeur général de Canal France PIERRE MARECZKO MÉDIAS
au bord du gouffre
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Culture médias t Edenvale XVI X, de Paul Samuels (Afrique du Sud).
PAUL SAMUELS
d’un quotidien individualiste en perte de repères, éloigné de l’extraordinaire que peut représenter la guerre – par exemple. « Nous avons choisi des photographes qui appartiennent à trois générations différentes, explique Pinto Ribeiro. Certains sont nés sous l’apartheid, d’autres dans des régimes démocratiques ou postcoloniaux. Tous sont des photographes du monde, et nous avons voulu nous détacher d’une photographie africaine bien identifiée. » Autrement dit : rechercher l’universel. Comme Samuels, la plupart des artistes s’intéressent à la violence contenue du vivre-ensemble, aux tensions urbaines, à l’incarnation du pouvoir dans le paysage ou le bâtiment. Le jeune Sud-Africain Mack Magagane photographie ainsi, de nuit, ces jardins minuscules entourés de hauts murs où l’on enferme sa voiture, PHOTOGRAPHIE possession à protéger du voisin, derrière un portail métallique. Jo Ractliffe, sa professeure au Market Photo Workshop, va, de son côté, s’intéresser aux stigmates laissés dans le paysage par la guerre de Regroupant 14 artistes du sud de l’Afrique, la Fondation Gulbenkian la frontière, qui s’acheva avec l’indépenà Paris interroge les tensions du quotidien et la difficulté dance de la Namibie. de construire un vivre-ensemble. Sans clichés ni exotisme. « On peut aussi dire que le régime politique d’une société fondée sur un n homme tatoué, les bras croiRibeiro, elle porte sur ce que l’on pourrait régime de contrôle, comme l’était celui sés, vous regarde. Il est dans appeler les « tensions de convivialité » de l’Afrique du Sud pendant l’apartheid ou d’autres pays à l’époque coloniale une cour, éclairé par la lumière au sein de l’espace public. C’est d’ailet dont la responsabilité directe relede ce qui pourrait être un lamleurs là l’exceptionnelle réussite de cette vait du gouvernement, padaire, quelque part dans l’une de ces exposition. Non contente s’est métamorphosé en banlieues qui se ressemblent tant, où que d’évacuer tout exotisme, une société toujours de ce soit dans le monde. Vous ne savez pas tout afrocentrisme et tout pathos, la Fondation contrôle, mais sans que exactement ce que signifie son regard, l’on puisse identifier l’enentre « tu n’es pas chez toi » et « n’avance Gulbenkian a relevé le défi pas ». Mais de toute façon vous ne le de réunir sur un même tité qui exerce ce contrôle, regardez pas dans les yeux, puisque la thème, abordé sous des écrit Pinto Ribeiro. C’est le seule chose que vous voyez c’est, contre angles différents, quatorze régime de la peur et de la un mur de briques rouges, en arrièrephotographes (sept Sudtension constantes, dont plan, un chien bondissant pour attraper Africains, un Congolais, la plus haute expression un morceau de viande suspendu à une deux Mozambicains, une se produit en particulier en « Present Tense, photographies du corde. À moins qu’il ne joue ? Difficile à Malgache,unZimbabwéen, milieu urbain. » Une forme sud de l’Afrique », dire dans cette pénombre caravagesque… deux Angolais) qui pas une de totalitarisme inavoué, jusqu’au 14 décembre Troublante, cette photographie signée fois ne se répètent. donc ? Inversant les points à la Fondation duSud-AfricainPaulSamuelsesttiréedela de vue, le Mozambicain Calouste Gulbenkian à série Edenvale XVI X, du nom d’une bourUNIVERSEL. Se trouve-t-on Mauro Pinto préfère se Paris, entrée libre. gade de la périphérie de Johannesburg en Afrique? C’est loin d’être concentrer sur le foison(code postal 1610). Elle fait partie de l’exsûr, d’ailleurs les photos du nement de vie – et même position « Present Tense, photographies Sud-Africain Pieter Hugo ont été réalid’amour – dans un cimetière décati. Et du sud de l’Afrique », présentée à Paris sées le long de la voie de chemin de fer au fond, l’exposition montre simultanépar la Fondation Calouste Gulbenkian du reliant autrefois New York à Washington. ment nos enfermements et l’incroyable 18 septembre au 14 décembre. Et comme Mais au fond, aucune importance : nous inventivité humaine pour se ménager des la plupart des œuvres réunies ici par le sommes partout, au cœur des tensions espaces de liberté, de vie. l commissaire portugais Antonio Pinto contemporaines les plus sourdes, au cœur NICOLAS MICHEL
Ensemble malgré tout
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Culture médias En vue
n n n Décevant
n n n Pourquoi pas
n n n Réussi
n n n Excellent
EXPOSITION
La vie est un long fleuve tranquille À l’occasion du festival Photoquai, organisé au musée du Quai Branly, le Burkinabè Nyaba Léon Ouedraogo présente une série consacrée au fleuve Congo.
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NYABA OUEDRAOGO
éalisées lors de trois séjours à Brazzaville entre 2011 et 2013, les onze photographies couleurs présentées par le Burkinabè Nyaba Léon Ouedraogo ont toutes été prises aux abords du fleuve Congo, où vivent des familles qui ont, pour la plupart, élu domicile sur des bateaux abandonnés. Animistes pour la plupart, elles vouent un culte à la sirène Mami Wata. Grâce à la confiance que lui ont accordée ces habitants du fleuve, le photographe nous invite à observer un monde ésotérique que nul ne peut voir sans y être invité. Inspiré par le roman de Joseph Conrad Au cœur des ténèbres, Nyaba Ouedraogo nous présente des personnages « fantomatiques » qui, même lorsqu’ils posent devant l’objectif, semblent ne pas vouloir qu’on les « saisisse » complètement, à l’instar de ce pêcheur travesti ou de cet homme entièrement nu dont le visage est dissimulé derrière un bonnet flanqué du portrait de Che Guevara. Impressionné par l’aspect sacré et dangereux du fleuve – l’un des clichés nous montre des eaux déchaînées –, Nyaba Léon Ouedraogo a voulu illustrer la « tension entre l’homme et son environnement ». Ciel chargé et lumière faible ajoutent à l’atmosphère crépusculaire et intemporelle qui entoure les sujets. Parfois, un détail fait ressurgir le réel et l’actualité, comme la une de ce journal suspendu à une corde à linge: « Le
pape Benoît XVI vient de démissionner. » Brièvement, la rêverie s’estompe. Lauréat de la résidence Photoquai 2013, Nyaba Léon Ouedraogo partira à la rencontre des « dévoreuses d’âmes », ces femmes africaines accusées de sorcellerie, afin de réaliser une série en deux étapes : d’abord les photographier dans leur vie quotidienne puis habillées de
tenues excentriques plus conformes à leur statut imaginaire – un questionnement sur l’image et la place de la femme dans le monde. l PIERRE MARECZKO The Phantoms of Congo River, de Nyaba Léon Ouedraogo, jusqu’au 17 novembre, dans les jardins du musée du Quai Branly, entrée libre nnn
Le mensuel anglophone de référence sur l’Afrique SIERRA LEONE trial History put on in elections
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THE AFRICA
SOUTH AFRICA Zuma’s struggle votes in Eastern to win Cape
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Journalists, politicians and business fight for control of Africa’s information industry
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NIGERIA: Eye kept on bad banks
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NIGERIA Ruling party barons challenge Jonathan
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SOUTH AFRICA Union boss Vavi on the revolt politics of the worker
MAURITIUS Smart policies to weather the financial storm
AFRICAN UNION win marks Dlamini-Zuma shift power and policy
THE AFRICA REPORT
NIGERIA 10 characte sure to meetrs you’re
SOUTH AFRICA ANC boss Mantashe plans Zuma’s victoryy
PAULO NOVAIS/EPA/MAXP
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ZIMBABWE Tsvangirai Mugabe and election in “do or die”
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MAURITIUS: More than a tax haven? DRC s on ZIMBABW E: Grand ambition The telco River that ate a bank the Congo
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n C’est aujourd’hui l’outil essentiel pour anticiper les évolutions politiques et économiques des marchés africains.
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In an exclusive interview, World Bank President Jim Yong Kim says the Bank has learnt from its mistakes
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n Publié par le Groupe Jeune Afrique depuis 2005, The Africa Report s’est imposé comme le magazine anglophone de référence dédié au continent.
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n Afin de toujours mieux répondre aux attentes de ses lecteurs, le leader de la presse panafricaine anglophone est désormais mensuel.
Culture médias
Et il est comment le dernier…
JAZZ-FUNK
Perle arc-en-ciel
… Olivier Poivre d’Arvor
SPÉCIALISÉ DANS l’exhumation de trésors musicaux perdus, le label allemand Black Pearl publie, uniquement en vinyle, un album inédit d’Abahambi, un obscur et atypique groupe sud-africain emmené par le bassiste Sipho Gumede, futur producteur de Sakhile. Enregistré en 1975 à Johannesburg, cet opus essentiellement instrumental surprend par son orientation jazz-funk, dans la plus pure tradition des classiques du genre, et plus encore par l’absence de cuivres, compensée par un piano et un orgue Hammond omniprésents. Disponible en boutique ou sur le site du label. Attention, tirage limité à 500 exemplaires. l TAREK MOUSSA
Freeway, d’Abahambi (Black Pearl)
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DOCUMENTAIRE
L’école de tous les dangers IL N’Y A RIEN de plus banal, de plus routinier, que d’aller tous les matins à l’école. Sauf pour le jeune Kényan Jakson, par exemple, qui, souvent en courant, avale tous les jours 15 km à partir de son village perdu dans la savane pour rejoindre en bravant de réels dangers l’établissement de fortune où il est un élève modèle. Ni pour la Marocaine Zahira, qui rêve de devenir docteur et marche pendant des heures dans les vallées caillouteuses du Haut-Atlas pour pouvoir acquérir en ville ce savoir auquel ses parents n’ont pu prétendre. Ni pour le handicapé indien Samuel ou l’adolescent argentin Carlito. Un documentaire tourné comme un grand film d’aventure avec de gros moyens, sans doute un peu trop édifiant, mais d’une grande beauté et qu’on ne peut voir sans être ému. l RENAUD DE ROCHEBRUNE
Sur le chemin de l’école, de Pascal Plisson (sorti à Paris le 25 septembre) JEUNE AFRIQUE
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ous avez toujours tout voulu savoir sur la vie sexuelle d’Olivier Poivre d’Arvor sans jamais oser le demander ? Eh bien vous allez être servis ! L’ancien directeur de Culturesfrance et actuel directeur de la radio France Culture dit tout, ou presque, confirmant les rumeurs plus ou moins bien intentionnées circulant à son propos. Oui, il est un coureur de jupons patenté, tenté par toute beauté jugée consommable, tenté jusqu’à tenter le diable « en tirant l’amour au hasard, dans d’infâmes bordels du Zimbabwe, avec un taux de prévalence du sida d’une fille sur deux ». Oui, il est stérile. Pour autant, Le jour où j’ai rencontré ma fille n’est pas une autofiction érotique célébrant une virilité au garde à vous. Il s’agit plutôt d’une confession défensive, au fond assez pudique, visant à prévenir les réactions prévisibles d’une société dans laquelle on ne badine pas avec l’amour… des enfants. L’explication se trouve en page 127 : « Je ne pouvais m’imaginer alors qu’il faudrait faire la preuve, plus tard devant la société, en France comme au Togo, qu’en adoptant une petite fille de 9 ans, moi célibataire, âgé de cinquante ans, je n’étais en rien ambigu quant au type de rapports que je souhaitais engager avec elle. » Le qu’en-dira-t-on comme les regards en biais semblent ainsi avoir poussé l’ancien diplomate à prendre la plume pour parer aux attaques à venir, mais aussi raconter le chemin de croix que représente l’adoption d’une orpheline togolaise pour un homme seul. La diplomatie,
et la langue de bois qu’elle impose, il les a laissées tomber, n’hésitant pas à s’attaquer bille en tête aux services consulaires de la France au Togo – et plus particulièrement à l’obstruction volontaire d’un bureaucrate insensible comme aux remarques maladroites des uns et des autres sur un désir de paternité tourné vers une enfant spécifique, noire de surcroît. OPDA ayant l’écriture facile et le sens de la formule, son histoire se lit d’une traite et l’on y retrouve ce goût pour l’Afrique qui était une évidence lorsqu’il dirigeait Culturesfrance,
Le jour où j’ai rencontré ma fille, d’Olivier Poivre d’Arvor, Grasset, 258 pages, 18 euros nnn
devenu l’Institut français. À l’éreintante course d’obstacles qu’est l’adoption internationale, il oppose une déclaration d’amour au Togo, à Lomé, et à la petite fille – Amaal dans le livre – qui est désormais la sienne. Mais sur le père qu’il est, on ne saura rien ou presque. Tout juste peut-on deviner une tendance papa poule assumée… l NICOLAS MICHEL N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre -Tél. : 01 44 30 18 76 - Fax : 01 44 30 18 77 - Email. : f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique - 57 bis, rue d’Auteuil 75016 Paris - France
DIRECTEUR DES RESSOURCES HUMAINES (H/F) L’Organisation internationale de la Francophonie regroupe 57 Etats et gouvernements membres et 20 observateurs répartis sur les cinq continents, rassemblés autour du partage d'une langue commune : le français. Elle œuvre au service de la paix, de la coopération, de la solidarité et du développement durable.
L’Organisation recrute un (1) Contrôleur financier (H/F) Ce poste est basé à Paris. Les personnes intéressées peuvent consulter le descriptif détaillé à l’adresse : http://www.francophonie.org/-Recrutements-.html
Date limite de réception des dossiers de candidature : 3 novembre 2013.
CFAO est un leader de la distribution spécialisée dans ses métiers clés, la distribution automobile et pharmaceutique, en Afrique et dans les Collectivités Territoriales Françaises d’Outre-mer. CFAO opère également en Afrique dans la distribution de matériels d’équipement, la production et la distribution de biens de consommation courante ainsi que de certains services technologiques. CFAO est présent dans 37 pays, dont 32 pays d’Afrique, ainsi que dans sept Collectivités et Territoires d’Outre - Mer, et emploie 11 400 personnes à fin 2012. Nous recherchons aujourd’hui le Directeur des Ressources Humaines (H/F) de notre filiale automobile basée à Pointe Noire, au Congo. Membre du Comité de Direction et en lien direct avec le Directeur Général de CFAO Motors Congo, votre mission principale consiste à définir et à animer la politique des ressources humaines de la filiale et d’en assurer la gestion. Dans un contexte de croissance, vous pilotez la politique de recrutement et d'intégration, ainsi que la formation. Dans le cadre des projets du Groupe, vous accompagnez le développement des compétences et mettez en œuvre les dispositifs de rémunération individuelle et collective adéquats. Responsable de l'administration du personnel, vous êtes le garant de l’application de la législation, vous co-animez les relations sociales de la filiale et assurez la relation avec l’Administration locale. Votre profil : Diplômé d'une formation RH, vous justifiez de 10 ans d’expérience en gestion des ressources humaines et avez occupé un poste de Direction idéalement au Congo. La maîtrise du droit social et des techniques de gestion de la paie sont indispensables. Si vous souhaitez répondre à cette annonce, veuillez déposer votre candidature sur notre site internet www.cfaogroup.com rubrique carrières.
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Le Centre Africain d’Etudes Supérieures en Gestion (CESAG) est un établissement public international appartenant aux Etats membres de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). Les activités principales du CESAG sont l’enseignement, la recherche, l’organisation de séminaires et la consultation. Pour la rentrée académique 2013-2014, le CESAG recrute des enseignants dans les spécialités suivantes : Gestion des Ressources Humaines, Finance, Comptabilité et Contrôle de Gestion, Marketing / Communication
tionnelles, capacité à travailler en équipe et dans un environnement multiculturel ; Les candidatures féminines sont vivement encouragées.
PIÈCES A FOURNIR Les pièces du dossier de candidature indiquant la spécialisation et comprenant : i. Une lettre de motivation ii. Un curriculum vitae iii. Un certificat de nationalité PROFIL RECHERCHÉ iv. Les copies certifiées conformes des diplômes - Etre ressortissant d’un des pays membres de l’UEMOA ; v. Les attestations ou certificats de travail - Etre titulaire du Doctorat d’Etat, du Doctorat nouveau régime, du Doivent parvenir au plus tard le vendredi 18 octobre 2013 au PhD en Sciences de Gestion ou, à défaut, être Doctorant devant CESAG à l’attention du Chef du Département de l’Administration et soutenir au plus tard dans douze mois (un rapport du Directeur de des Ressources Humaines. thèse fera foi de l’état d’avancement de la thèse) ; - Avoir une expérience confirmée d’au moins trois ans dans l’enB.P. 3802 Dakar - Sénégal seignement au niveau universitaire ; Tél. : +221 839 73 60 - Avoir une bonne maîtrise du français et de l’outil informatique ; Fax : +221 821 32 15 - Aptitudes pédagogiques avérées, capacité à développer la E-mail : courrier@cesag.sn recherche appliquée, bonne capacité de communication orale et Site internet : www.cesag.sn écrite, capacité d’analyse et de synthèse, excellentes qualités relaJEUNE AFRIQUE
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AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL ASECNA/DGDI/DGDIM/1305/2013
1. L’Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar (“ASECNA”) a obtenu un prêt de l’Agence Française de Développement (AFD) pour contribuer au financement de son Plan de Services et Équipements (PSE) 2009 – 2013. Il est prévu qu’une partie des sommes accordées au titre de ce financement sera utilisée pour effectuer les paiements prévus au titre du Marché relatif au renouvellement des meubles de contrôle tour approche et divers équipements de navigation aérienne sur les sites suivants : Sarh – Yaoundé – Mahajanga – Toamasina – Antananarivo – Gao et Garoua. 2. L’Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar (“ASECNA”) invite, par le présent Appel d’Offres international, les entreprises ou groupements d’entreprises spécialisées dans la conception, la fourniture et le montage d’installations des équipements de navigation aérienne et admis à concourir à présenter leurs offres sous pli fermé, pour la réalisation des travaux susvisés. 3. Les entreprises ou groupements d’entreprises intéressées par l’appel d’offres peuvent consulter le Dossier d’Appel d’Offres (DAO) sur le site web de l’ASECNA (www.asecna.aero), obtenir des informations supplémentaires ou examiner le Dossier d’Appel d’Offres (DAO) à partir du 30 septembre 2013 au Département Ingénierie et Prospective (ASECNA) sis à l’aéroport Léopold Sédar Senghor, BP 8163 Dakar – Yoff, Sénégal,Téléphone : +221 33 869 51 20/24/25 ou dans les Représentations de l’ASECNA auprès des pays concernés.
5. Les offres établies en langue française et en quatre (04) exemplaires papier dont un (01) original et trois (03) copies doivent être déposées au secrétariat du Chef du Département Ingénierie et Prospective (ASECNA) sis à l’aéroport Léopold Sédar Senghor, Dakar – Yoff, Sénégal au plus tard le 04 décembre 2013 à 11 heures, heure locale (GMT) sous plis fermés et être accompagnées d’une garantie de soumission d’un montant de vingt millions (20.000.000) de Francs CFA. 6. L’ouverture des plis interviendra le même jour (04 décembre 2013) à 12 heures, heure locale (GMT), dans la salle de réunion du Département Ingénierie et Prospective en présence des soumissionnaires qui le souhaitent ou de leur représentant. 7. Les soumissionnaires doivent prendre toutes les dispositions requises pour que leur offre soit reçue au secrétariat du Chef du Département Ingénierie et Prospective avant la date et l’heure indiquées ci-dessus. Toute offre déposée à tout autre endroit à l’ASECNA, se fera aux risques du soumissionnaire et ne sera pas prise en compte. Toute offre reçue après l’heure de clôture ou la date limite de dépôt indiquées ci-dessus sera rejetée. Les soumissionnaires sont informés qu’aucune offre présentée par télécopie ou de manière électronique ne pourra être acceptée. Le Directeur Général JEUNE AFRIQUE
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Appel d’offres
4. Le Dossier d’Appel d’Offres (DAO) peut être retiré à partir du 30 septembre 2013 moyennant le paiement, en espèce ou par chèque certifié, d’une somme non remboursable de Deux Cent Mille (200.000) Francs CFA, soit Trois Cent Quatre Euros Quatre-Vingt Dix Centimes (304,90€) contre délivrance d’une quittance au Département Ingénierie et Prospective (ASECNA) sis à l’aéroport Léopold Sédar Senghor, BP 8163 Dakar – Yoff, Sénégal,Téléphone : +221 33 869 51 20/24/25 ou +221 33 869 52 76, à la Délégation à Paris (ASECNA), 75 Rue la Boétie – 75008 Paris – France, Téléphone : +33 (01) 44 95 07 07 ou dans les Représentations de l’ASECNA auprès des pays concernés. Le chèque certifié sera libellé au nom de Madame l’Agent Comptable de l’ASECNA et susceptible d’être tiré sur une banque agréée dans un pays membre de l’ASECNA.
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Avis d’Appel d’Offres (AAO) Date : 20 septembre 2013
1. La Commission de la CEDEAO a alloué ses fonds propres pour la Fourniture, le Déploiement et l’Installation de l’Equipement Réseau au Centre de Données de la Commission de la CEDEAO à Abuja. 2. La Commission de la CEDEAO lance à présent un Avis d’Appel d’Offres pour la soumission d’offres, sous plis fermés, pour la Fourniture, le Déploiement et l’Installation de l’Equipement Réseau au Centre de Données de la Commission de la CEDEAO à Abuja décrits ci-dessus (lot unique). 3. Le Dossier d’Appel d’Offres peut être acheté auprès de la Division de la Passation des Marchés, Direction de l’Administration générale, Commission de la CEDEAO, Plot 101, Yakubu Gowon Crescent, Asokoro District, Abuja, Nigéria, sur envoi d’une demande écrite et paiement d’une somme de trois cents dollars US (300 US$) en espèces ou par chèque, à l’ordre de la Commission de la CEDEAO, Abuja. 4. Pour les soumissionnaires résidant à l’extérieur du Nigéria, le Dossier d’Appel d’Offres peut être envoyé par voie courrier aux soumissionnaires intéressés, sur paiement (virement bancaire) d’une somme non remboursable de trois cents dollars US (300 US$) à la Commission de la CEDEAO (les frais afférents au virement étant à la charge du soumissionnaire). (Coordonnées bancaires disponibles sur demande). 5. Les soumissionnaires intéressés peuvent obtenir des informations complémentaires à l’adresse suivante pendant les heures de bureau : lundi à vendredi de 9h00 (8h00 GMT+1) à 16h00 (15h00 GMT+1), Commission de la CEDEAO, Direction de l’Administration générale, Division de la Passation des Marchés, 1er étage, Plot 101, Yakubu Gowon Crescent, Asokoro District, PMB 401 Abuja Nigéria. E-mail : procurement@ecowas.int 6. Les soumissions doivent rester valides pour une période de 120 jours après l’ouverture des plis et doivent être accompagnées d’une garantie d’offre d’un montant de 20 000,00 US $ (garantie bancaire ou cautionnement d’assurance). 7. Les offres doivent être soumises dans une enveloppe scellée qui est déposée dans la Boite d’Appel d’Offres de la CEDEAO se trouvant dans le bureau de l’Assistante Principale du Commissaire en charge de l’Administration et des Finances, cinquième (5ème) étage du bâtiment de la Commission de la CEDEAO, 101, Yakubu Gowon Crescent Asokoro District, P. M. B. 401, Abuja, Nigéria au plus tard le 07 Novembre 2013, à 11h30 (10h30 GMT+1), en mentionnant clairement ‘’Appel d’Offres international pour la Fourniture, le Déploiement et l’Installation de l’Equipement Réseau au Centre de Données de la Commission de la CEDEAO a Abuja” Ne pas ouvrir, sauf en présence du Comité d’Appel d’Offres de la CEDEAO. 8. Les offres seront ouvertes en présence des soumissionnaires désireux d’assister à l’ouverture des plis le 07 Novembre 2013 à 12h00 (11h00 GMT+1), Salle 523, Commission de la CEDEAO, Abuja, Nigéria. Commissaire, Administration & Finances Mrs. Khadi R. Saccoh
Appel d’offres
AVIS D’APPEL D’OFFRES L’Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) lance un Appel d’Offres en vue du recrutement d’un cabinet pour effectuer l’audit de l’infrastructure de son réseau informatique. Le Dossier de Demande de Propositions (DDP) peut être consulté sur le site web de l’ASECNA (www.asecna.aero) et retiré contre le paiement obligatoire d’une somme non remboursable de Cinquante Mille (50.000) Francs CFA, soit Soixante Seize Euros Vingt Centimes (76,20 €) à partir du 23 septembre 2013 au Département Ingénierie et Prospective de l’ASECNA à Dakar, Aéroport Léopold Sédar SENGHOR, Dakar-Yoff (Sénégal), à la Délégation de l’ASECNA à Paris – 75, Rue de la Boétie 75008 Paris Cedex 08 (France) ou dans les Représentations de l’ASECNA auprès des Etats membres. La date limite de remise des offres au Département Ingénierie et Prospective (ASECNA),Aéroport Léopold Sédar SENGHOR, Dakar-Yoff (Sénégal) est fixée au 31 octobre 2013 à 11 heures, heure locale (GMT). Aucune offre arrivée hors délai ne sera acceptée. L’ouverture des plis en séance publique devant les soumissionnaires (ou leurs représentants) qui le désirent, aura lieu le même jour (31 octobre 2013) à 12 heures, heure locale (GMT). Le Directeur Général N° 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Avis d’Appel d’offres International (AA0I)
BUREAU CENTRAL DE COORDINATION (BCECO) Source de Financement : INTERVENTION DU GOUVERNEMENT Appel d'offres international : 404/INTER-GOUV/BCECO/DG/DPM/JPKM/2013 Date de Publication : Jeudi 19 septembre 2013 Date de dépôt : Mardi 10 décembre 2013 Nom du Projet : Contrat de Partenariat Public-Privé pour la gestion durable des déchets, de l'assainissement et de l'entretien de la voirie et des drains pour la Ville de Kinshasa.
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amplitude similaire aux œuvres de conception, travaux et mise à disposition d’équipements tels que requis dans la Section VI.B Encadrement conceptuel des investissements à réaliser. Le chiffre d’affaire minimum réalisé par le soumissionnaire pour ces références devra être de 10 millions USD ; • Au moins 5 expériences réalisées dans les 10 dernières années, dans des pays en voie de développement, pour des thématiques et avec une amplitude similaire aux services d’opération d’installations techniques tels que requis dans la Section VI.C Encadrement conceptuel des opérations à exécuter. Le chiffre d’affaire minimum réalisé par le soumissionnaire pour ces références devra être de 10 millions USD. Aucune marge de préférence ne sera octroyée aux soumissionnaires dans le cadre du présent marché. Voir le document d’Appel d’offres pour les informations détaillées. 8. Les candidats intéressés peuvent obtenir le dossier d’Appel d’offres complet en Français contre un paiement non remboursable de 200 USD. Le paiement devra être effectué par versement d’espèces au compte n° 0240001145502 intitulé « PROJET BCECO VENTES DAO » ouvert à la Banque STANDARD BANK/Kinshasa, code SWIFT : SBICCDKX en indiquant la référence de ce DAO. Le dossier pourra être retiré à la Division de Passation des Marchés du BCECO sur présentation de la preuve de paiement. 9. Une réunion de Pré-soumission obligatoire aura lieu à la date, heure et lieu suivants : Le vendredi 11 octobre 2013 à 10 heures Bureau Central de Coordination (BCECO) Avenue Colonel Mondjiba, n° 372 Concession Utexafrica Commune de Ngaliema, Kinshasa République Démocratique du Congo Les soumissionnaires sont invités à formuler en préalable et par courriel les demandes d’éclaircissement qu’ils voudront voir traiter lors de cette réunion de pré-soumission. 10. Les offres doivent être présentées avec une enveloppe extérieure avec les renseignements ci-après : Contrat de Partenariat Public-Privé pour la gestion durable des déchets, de l’assainissement et de l’entretien de la voirie et des drains pour la Ville de Kinshasa, DAOI n°404/INTERGOUV/BCECO/DG /DPM/JPKM /2013. L’enveloppe extérieure doit comprendre en son sein deux plis séparés, l’un pour la proposition technique (1 original + 3 copies) et l’autre pour la proposition financière (1 original + 3 copies). 11. Les offres devront être soumises à l’adresse ci-après au plus tard le mardi 10 décembre 2013 à 15 heures locales (TU+1). Les offres remises en retard ne seront pas acceptées. Les offres seront ouvertes en présence des représentants des candidats présents à la séance d’ouverture qui aura lieu à l’adresse ci-dessous le mardi 10 décembre 2013 à 15h30’ locales (TU+1). Les offres doivent comprendre une garantie d’offre d’un montant équivalent par lot de 250.000 USD. Les offres devront demeurer valides pendant une durée de 180 jours à compter de la date limite de dépôt des soumissions. Bureau Central de Coordination (BCECO) Avenue Colonel Mondjiba, n° 372, Concession UTEXAFRICA - Commune de Ngaliema Kinshasa - République Démocratique du Congo - Local 301 Email : bceco@bceco.cd ; dpm@bceco.cd ; bcecobceco@yahoo.fr ; dpmbceco@yahoo.fr Tél. : (+243) 815136729 – (+243) 15 12 64 50 MATONDO MBUNGU, DG du BCECO N° 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
Appel d’offres
1. Cet Avis d’appel d’offres fait suite au Plan de passation des marchés ayant obtenu l’avis de non objection de la DGCMP le 23 avril 2013. 2. Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo a mis en place, dans le cadre de son programme axé sur la Révolution de la Modernité, un fonds appelé Intervention du Gouvernement, et a l’intention d’utiliser une partie du montant de ce financement pour effectuer les paiements au titre du Contrat de Partenariat Public-Privé pour la gestion durable des déchets, de l’assainissement et de l’entretien de la voirie et des drains pour la Ville de Kinshasa. 3. Le Bureau Central de Coordination « BCECO » sollicite des offres sous pli fermé de la part de candidats éligibles et répondant aux qualifications requises pour être Recruté comme Opérateur Privé pour un Contrat de Partenariat Public-Privé pour la gestion durable des déchets, de l’assainissement et de l’entretien de la voirie et des drains pour la Ville de Kinshasa tels que libellés ci-dessous. Les variantes ne pourront être prises en considération. - Lot 1 : Zone 1 qui compte 4 communes (KIMBANSEKE, MASINA, NDJILI et NSELE). - Lot 2 : Zone 2 qui compte 11 communes (BANDALUNGWA, BARUMBU, GOMBE, KALAMU, KASA-VUBU, KINSHASA, KINTAMBO, LIMETE, LINGWALA, NGALIEMA et NGIRI-NGIRI). - Lot 3 : Zone 3 qui compte 8 communes (BUMBU, KISENSO, LEMBA, MAKALA, MATETE, MONT-NGAFULA, NGABA et SELEMBAO). Chaque lot constitue un marché distinct. 4. La passation du Marché sera conduite par appel d’offres international ouvert tel que défini dans la Loi relative aux marchés publics, et ouvert à tous les candidats éligibles. 5. Les candidats intéressés peuvent obtenir des informations auprès du Bureau Central de Coordination « BCECO » et prendre connaissance des documents d’Appel d’offres à l’adresse mentionnée ci-après, de lundi à vendredi de 9 heures à 16 heures locales (TU +1). 6. Il est rappelé ici qu’il s’agit d’un appel d’offre international ouvert et que la sélection des soumissionnaires se fera en deux étapes, à savoir : 1ère étape : • La Qualification préalable ; • L’évaluation technique (score technique minimum requis est de 75%) ; 2ème étape : • L’évaluation combinée technique et financière (S = 0,80*St + 0,20*Sf). Le score final sera obtenu par la méthode Qualité Coût avec un encadrement budgétaire. 7. Les exigences en matière de qualifications sont : • Les soumissionnaires sont invités à déclarer par acte comptable officiel la réalisation de leur chiffre d’affaire cumulé sur les 5 dernières années. Le chiffre d’affaire cumulé minimal requis est de 30 Millions USD ; • Dans l’éventualité où ils seraient attributaires, d’un lot à l’issue de cet exercice d’appel d’offre, les soumissionnaires sont invités à présenter une attestation bancaire prouvant leur capacité à lever, au minimum et dans un délai d’un mois à compter de la signature du Contrat, la somme de 8 Millions USD en liquidités et en contrepartie d’une somme équivalente apportée par le Client au début du projet ; • Au moins 3 expériences réalisées dans les 10 dernières années, dans des pays en voie de développement, pour des thématiques et avec une amplitude similaire aux études ou à l’assistance technique requises au titre de la Section VI.A Spécification des services de conception et assistance technique. Le chiffre d’affaire minimum réalisé par le soumissionnaire pour ces références devra être de 2 millions USD ; • Au moins 5 expériences réalisées dans les 10 dernières années, dans des pays en voie de développement, pour des thématiques et avec une
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Annonces classées MINISTRY OF ENERGY - IDB PROJECT MANAGEMENT UNIT ELECTRICITY HOUSE, SIAKA STEVENS STREET, FREETOWN INTERNATIONAL COMPETITIVE BIDDING
INVITATION FOR BIDS (IFB) DATE: 30TH - SEPTEMBER-2013 CONTRACT IDENTIFICATION NO: MOE/IDB/ML&PPM/ICB/01/2013 IDB FINANCING NO: 32241 PROJECT NAME: REINFORCEMENT AND EXTENSION OF THE MEDIUM AND LOW VOLTAGE DISTRIBUTION NETWORK IN THE FREETOWN AND GREATER FREETOWN AREA 1. The Government of Sierra Leone has received a loan from the Islamic Development Bank (IDB) for the Reinforcement and Extension of the Medium and Low Voltage Distribution Network in the Freetown and Greater Freetown Area. It is intended that the proceeds of this financing will be applied to eligible payments under the contract for Reinforcement and Extension of the Medium and Low Distribution Network in the Freetown and Greater Freetown Area. 2. The Ministry of Energy acting as the Implementation Agency for the Government of Sierra Leone as the Employer under the Contract invites sealed bids for Package 2,consisting of the following, to be executed at the various locations in the Freetown and Greater Freetown Area: • Procurement, Erection, and Commissioning of 11kV Transmission Lines • Procurement, Erection, and Commissioning of Low Voltage overhead distribution lines • Construction of Substations and Supply of tools and field equipment • Supply of prepayment meters, outdoor meter boards, communication wires, vending stations, dongles and ladder mounted pick-up trucks 3. Interested eligible bidders may obtain further information from and inspect the bidding documents at shall be available from the below office: Procurement Officer IDB Project Management Unit - Ministry of Energy 4th Floor, Electricity House, 36 Siaka Stevens Street - Freetown Sierra Leone Email: turayabubockarie@ymail.com Attn:
The Project Coordinator IDB, Project Management Unit - Ministry of Energy
1st Floor, Electricity House, 36 Siaka Stevens Street - Freetown Sierra Leone Email: ibrwilson@yahoo.com 4. A complete set ofTender Documents may be purchased by interested bidders upon payment of a non-refundable fee of $300 (Three Hundred United State Dollars) by bank draft payable to the Ministry of Energy Reinforcement & Distribution Network Project, Account No. 003001117838030148 located at the Sierra Leone Commercial Bank, Siaka Stevens Street, Freetown, Sierra Leone. 5. The provisions in the Instruction to Bidders and the General Conditions of Contract are the provisions of the IDB Standard Small Bid document with modification to the Contract Data to suit the requirements of the Islamic Development Bank. 6. The completed and sealed bids must be delivered to the above office on or before 12:00 P.M Freetown Local Time on Monday 18th November 2013 and must be accompanied by a bid security of US $ 258,000.00 (Two Hundred and fifty-eight thousand US Dollars) and in the form of a Bank Guarantee acceptable to the Ministry of Energy, Sierra Leone and as specified in Bid Forms and shall be valid for a period of One hundred and twenty (120) days after Bid opening date.The bid SecurityValidity shall be for a period of One hundred and fifty (150) days. 7. Bids will be opened in the presence of bidders’ representatives who choose to attend at 12:15 Hrs. GMT on Friday 29th November 2013 at the office of the Ministry of Energy.The bidders’ representatives are required to produce authorization document from the bidders’ office at the time of bid opening. 8. This bid/tender is restricted to the Islamic Development Bank Member Countries only.
AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL N° 035/2013/UGFM-SEIB.sa
Appel d’offres
Pour la fourniture et l’installation d’un logiciel de gestion comptable et financière au profit de l’Unité de Gestion du Fonds Mondial SEIB.sa (UGFM-SEIB.sa) et du Programme National de Lutte contre le SIDA (PNLS)
La République du Bénin a obtenu du Fonds Mondial de lutte contre le VIH/SIDA, la Tuberculose et le Paludisme (FM) une subvention destinée à appuyer le Bénin dans sa stratégie d’intensification de la lutte contre le SIDA, conformément aux propositions soumises pour la composante SIDA au Round 9 du Fonds mondial par le Comité National de Coordination (CNC) du Bénin, instance nationale de coordination des activités du Fonds Mondial. Au nombre des Bénéficiaires Principaux, on a le Ministère de la Santé du Bénin à travers le Programme National de Lutte contre le SIDA (PNLS) et la Société d’Électricité Industrielle et de Bâtiment (SEIB SA) pour le secteur privé. Dans le cadre de la mise en œuvre des activités du Round 5 et 9 consolidés, il a été procéder au paramétrage de l’ensemble du budget dans un logiciel de gestion comptable. Ce logiciel n’ayant pas comblé les attentes sur la subvention, il a été décidé de le changer. C’est dans ce cadre que se situe cette acquisition. Cette acquisition comporte les points suivants : • La fourniture, l’installation et le paramétrage d’un logiciel pour l’amélioration de la gestion financière comptable et budgétaire ; • la formation du personnel à l’utilisation du système ; • l’assistance au démarrage et accompagnement ; • L’assistance lors du transfert des données de l’ancien Logiciel vers le nouveau ; • la maintenance du système pour deux années. Pour assurer cette acquisition, l’UGFM-SEIB.sa lance un Appel d’offre international. Cet appel d’offre international est ouvert à égalité de conditions aux soumissionnaires qui satisfont aux critères d’éligibilité définis dans le dossier d’appel d’offres international. Les soumissionnaires peuvent retirer le dossier complet d’Appel d’offres international gratuitement ou obtenir de plus amples informations à partir du lundi 30 septembre 2013 à 09 heures, (heure locale, GMT+1) à : « Unité de Gestion du Fonds Mondial SEIB.sa Cotonou 01 BP 472 au courriel : seibsaugfm@gmail.com » ou au siège de l’UGFMSEIB.sa (au 3ème étage immeuble BADIROU, à l’angle de rue amenant à l’Eglise catholique Sainte Thérèse de PK6. Cet immeuble est situé à quelques mètres de l’agence MTN abattoir) à Akpakpa Cotonou. Ce dossier peut être téléchargé sur le site : http://appel-d-offre.dgmarket.com/tenders/adminShowBuyer.do~buyerId=6713540.
N° 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
Les offres technique et financière rédigées en langue française seront présentées chacune en quatre (04) exemplaires dont un (01) original et trois (03) copies marqués comme tels. Les quatre (4) exemplaires de la proposition technique seront contenues dans une même enveloppe A marquée « OFFRE TECHNIQUE ». Les quatre (4) exemplaires de la proposition financière seront contenues dans une même enveloppe B marquée « OFFRE FINANCIERE ». Les enveloppes A et B marquées respectivement OFFRE TECHNIQUE et OFFRE FINANCIERE seront glissées dans une autre enveloppe anonyme, appelée enveloppe extérieure. Celle-ci sera envoyée à l'Acheteur suivant : UGFM-SEIB.sa sis au 3ème étage immeuble BADIROU, à l’angle de rue amenant à l’Eglise catholique Sainte Thérèse de PK6. Cet immeuble est situé à quelques mètres de l’agence MTN abattoir à Akpakpa Cotonou. L'enveloppe extérieure portera uniquement la mention « APPEL D’OFFRE INTERNATIONAL N° DAOI 035-09-2013/UGFM-SEIB.sa RELATIF A : FOURNITURE ET INSTALLATION D’UN LOGICIEL DE GESTION COMPTABLE ET FINANCIERE A l’UGFM-SEIB.sa ET AU PNLS DU BENIN.» Toutes les offres doivent parvenir sous plis fermé au Bureau de l’UGFM-SEIB.sa sis à Cotonou à l'adresse indiquée ci-dessus, au plus tard le jeudi 14 novembre 2013 à 09 heures 30 minutes (heure locale, GMT +1). L'ouverture des offres aura lieu en séance publique le même jour à partir de 10 heures (heure locale, GMT +1) à la salle de réunion de l’UGFM-SEIB.sa (au 3ème étage immeuble BADIROU) à Akpakpa Cotonou. Les soumissionnaires qui le souhaitent peuvent assister ou se faire représenter à la séance d'ouverture des offres. Les offres resteront valables pendant une durée de quatre vingt dix (90) jours à compter de la date d’ouverture des plis. Tous renseignements complémentaires peuvent être obtenus au courriel à seibsaugfm@gmail.com. L’UGFM-SEIB.sa se réserve le droit de ne pas donner de suite à cet appel d’offres. Cotonou, le 27 septembre 2013 Le Superviseur Ayéto DOSSOU
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BURUNDI PROJECT: FINANCIAL AND PRIVATE SECTOR DEVELOPMENT PROJECT (PSD) LOAN N° IDA H6590 INVITATION FOR BIDS (IFB): PSD/003/F/2013 BRIEF DESCRIPTION OF THE INFORMATION SYSTEM The main scope of this tender is the provision of a fully operational Data Center required to run and support National Payment Systems and Bank Supervision applications: i. the delivery of equipment, the design, installation, and Operations for the next 3 to 5 years of all main components of a Data Centre: servers, storage, backup/archival, Corporate LAN, security, to be deployed at the main Data Centre of the Head Office, and at a warm standby Disaster Recovery Center; ii. the delivery, design, installation and Operations of business oriented IT services, mainly workplace services and secure EAI/ESB integration services;. iii. the delivery of the foundations of highly effective and efficient ready-to-use IT services, IT Operations and support services based on today’s market accepted service paradigm, i.e., the PaaS (Platform as a Service) private cloud services model, and on a process based organization. iv. the coaching of, training of, and knowledge transfer to the IT personnel of the BRB in the various IT fields involved in this tender, so that BRB be self-support at project completion. v. proposals for a support contract covering the post-warranty period. 1. This Invitation for Bids (IFB) follows the General Procurement Notice (GPN) for this project that appeared in UNDB online on July 8th, 2010.
3. Bidding will be conducted using the International Competitive Bidding (ICB) procedures specified in the World Bank’s Guidelines: Procurement under IBRD Loans and IDA Credits, edition of May 2004, revised October 2006 and May 2010, and is open to all Bidders eligible as defined in these Guidelines, that meet the following minimum qualification criteria 4. Conditions for participation: Financial capacity: i) the presentation of the last three balance-sheets or extracts from the balance-sheets, where publication of the balance-sheet is required under the law of the country in which the economic operator is established; ii) an annual average turnover of at least 6 MILLIONS OF USD for the last three years, iii) certified credit line of an amount of USD 350 000. Technical capacity: i) a list of TWO (2) similar works carried out over the past FIVE (5) years, detailing the value of the consideration received; when and where the works were carried out; and whether they were carried out according to the rules of the trade or profession and properly completed. These references should apply to the following domains :
JEUNE AFRIQUE
5. Interested eligible Bidders may obtain further information from Financial and Private Sector Development Project (PSD) and inspect the bidding documents at the address given below from 8:00 to 17:30. 6. A complete set of bidding documents in English may be purchased by interested bidders on the submission of a written application to the address below Immeuble SOCAR, jonction Bd de l’Indépendance et Avenue d’Italie B.P. 1590 Bujumbura, BURUNDI Tél : (257) 22 24 9595, Fax : (257) 22 24 9592 E-mail : page@page.bi and upon payment of a non refundable a fee of 200 000 BIF or its equivalent in any other convertible currency. The method of payment will be deposit in the project account which is opened in INTERBANK BURUNDI (IBB) n°IBB 701-2553001-81; SWIFT CODE: IBBUBIBI; IBAN: BI38701255300181. A pre-bid meeting which potential bidders may attend will be held on October 23th, 2013 at 9 H00 at Banque de la République du Burundi 7. Bids must be delivered to the address below at or before November 14th, 2013; at 10 H 00 local time. The amount of Bid Security required is 30 000 USD. Late bids will be rejected. Bids will be opened in the presence of Bidders’ representatives who choose to attend at the address below at Financial and Private Sector Development Project (PSD) Mr Jérôme SIBOMANA, Coordinateur a.i. Immeuble SOCAR, jonction Bd de l’Indépendance et Avenue d’Italie B.P. 1590 Bujumbura, BURUNDI Tél : (257) 22 24 9595, Fax : (257) 22 24 9592 E-mail : page@page.bi Site web: www.psd.bi 8. The attention of prospective Bidders is drawn to (i) the fact that they will be required to certify in their bids that all software is either covered by a valid license or was produced by the Bidder and (ii) that violations are considered fraud, which can result in ineligibility to be awarded World Bank-financed contracts.
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Appel d’offres
2. The Government of Burundi has received funds from International Development Association (IDA) and intends to acquire an operational data-processing environment for the needs described above. The Financial and Private Sector Development Project (FPSDP) serves as the implementing agency for the project and now invites eligible Bidders for submitting their bids.
a. Implementing private or public Cloud services: from scope and service definition through, till Operations and support; b. implementing shared services with high security requirements; c. Implementing Business Continuity Plans, including Disaster Recovery services. ii) personnel qualification : a. at least 3 certified qualifications in IT architectures, shared services, Cloud services, and process-based organizations b. At least 5 certified qualifications in OS, virtualization, storage and backup/archival c. At least 3 certified qualifications in Internet and networking technology; d. At least 3 certified qualifications in security; e. At least 2 certified qualifications skilled in Prince2 Project management.
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Annonces classées RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO MINISTÈRE DES RESSOURCES HYDRAULIQUES ET ÉLECTRICITÉ SOCIÉTÉ NATIONALE D’ÉLECTRICITÉ (SNEL) sarl
PROJET DE DÉVELOPPEMENT DES MARCHÉS D’ÉLECTRICITÉ POUR LA CONSOMMATION DOMESTIQUE ET À L’EXPORT (PMEDE)
Don IDA H7080 – ZR - DAOI n°011/PMEDE/SNEL/DG/CDP/CPM/GKW/2013/MF Gouvernance SNEL - Marché M 22.7 : Acquisition des compteurs et Banc d’étalonnage.
Appel d’offres
AVIS D’APPEL D’OFFRES Evaluation commerciale et financière 1. Le présent avis d’appel d’offres fait suite à l’Avis général de passation des • Conformité aux exigences du DAO marchés du projet PMEDE paru le 12 avril 2007 dans Dg Market et dans la • Prix et conditions de prix ; presse locale ainsi que le 14 septembre 2008 dans Jeune Afrique, dans Dg Une marge de préférence applicable à certaines fournitures fabriquées Market et dans les journaux locaux. localement ne sera pas octroyée aux soumissionnaires éligibles. Voir le doc2. La République Démocratique du Congo a obtenu un financement de ument d’Appel d’offres pour les informations détaillées. l’Association Internationale de Développement (IDA) pour financer le Projet de Développement des Marchés d’Electricité pour la consommation Domestique et 7. Les soumissionnaires intéressés peuvent acheter un jeu complet du dossier d’appel d’offres à l’adresse mentionnée ci-dessus sur présentation d’une à l’Export (PMEDE). Elle se propose d’utiliser une partie du montant de ce demande écrite et moyennant paiement d’un montant non remboursable de financement pour effectuer les paiements autorisés au titre du marché. deux cents dollars américains (200 $US). 3. La Coordination des Projets (CDP/SNEL), pour le compte de la Société Le paiement sera effectué par versement d’espèces au compte n° « 0133579Nationale d’Electricité (SNEL), invite les candidats admis à concourir, entre15 », intitulé SNEL-PROJET UGP/PMEDE auprès de la Banque Commerciale prises ou groupements d’entreprises, à soumettre leurs offres sous pli sceldu Congo (BCDC) / Kinshasa, code SWIFT : BCDCCDKI. Le Dossier d’aplé pour les fournitures et services connexes concernés. pel d’offres sera envoyé aux soumissionnaires, contre présentation de la Les fournitures concernées sont les suivantes : preuve de paiement, par courrier. Les frais d’envoi des dossiers aux - Sous - Lot 1 : 108.000 compteurs statiques (dont 78.000 triphasés et acheteurs sont en sus et à charge de ces derniers. 30.000 monophasés) ; - Sous - Lot 2 : 1270 compteurs d’énergie et accessoires pour cabine 8. Les Soumissions devront être déposées à l’adresse ci-dessous au plus tard le mardi 29 octobre 2013 à 15H00’ (heure locale, TU+1) sous pli scellé MT/BT. et doivent être clairement marquées « DAOI n° 011/PMEDE/SNEL/DG/ - Sous - Lot 3 : Banc d’étalonnage. CDP/CPM/GKW/2013/MF : Acquisition des compteurs et Banc d’éLe Soumissionnaire est libre de soumettre une offre pour n’importe quel talonnage ». Les dépôts électroniques ne seront pas admis. Les soumissions sous-Lot, soit pour les trois à la fois. présentées hors délais seront rejetées. 4. La passation du Marché sera conduite par Appel d‘offres international (AOI) Les offres soumises doivent être assorties d’une garantie de l’offre de : cent tel que défini dans les « Directives : passation des marchés financés par les soixante-trois mille dollars américains (163.500 $US), soit cent trente Prêts de la BIRD et les Crédits de l‘IDA » (Edition mai 2004, révisée en octomille dollars américains (130.000 $US) pour le sous - lot 1, trente bre 2006 et janvier 2011). Le DAO type de la Banque Mondiale est mille dollars américains (30.000 USD) pour le sous - lot 2 et trois « Passation des Marchés de Fournitures ». Il est ouvert à tous les candidats mille cinq cent dollars américains (3.500 USD) pour le sous - lot 3. originaires des pays membres de la Banque mondiale et remplissant les La garantie de soumission sera une garantie bancaire. Cette garantie de conditions stipulées dans les Directives. soumission demeurera valide pendant vingt-huit (28) jours au-delà de la 5. Les candidats répondant aux critères de participation et qui le souhaitent date limite initiale de validité des offres, ou de toute nouvelle date limite de peuvent obtenir tout renseignement complémentaire auprès de la validité demandée par l'Acheteur et acceptée par le Soumissionnaire, conCoordination des Projets de la SNEL sarl (CDP/SNEL) et prendre connaisformément aux dispositions de la Clause 20.2 des IS. La période de validité sance des documents d’appel d’offres à l’adresse reprise ci-dessous, de 9h initiale des offres est de cent vingt (120) jours. à 16h (heures locales, TU+1). Les plis seront ouverts en présence des représentants des soumissionnaires 6. Les exigences en matière de qualifications sont : qui décident d’assister à la séance d’ouverture qui aura lieu le mardi 29 Evaluation technique octobre 2013 à 15H30’ à l’adresse ci-dessous : • Conformité technique de la soumission par rapport aux spécifications de l’Appel d’Offres (fiches et documentation techniques) ; La Coordination des Projets (CDP) - Avenue le Marinel n° 06, Quartier Lemera • Calendrier de livraison ; Kinshasa / Gombe - République Démocratique du Congo • 3 Références au moins attestées du Soumissionnaire pour des fournitures Tél : (00243) 81 7005428 ; (00243) 81 0040030 similaires hors pays de fabrication dans les derniers cinq ans (pour le E-mail : cdp.snel@yahoo.fr sous-lot 1, 2 et 3) par projet ; au moins un projet dans l’Afrique sub-sahariLe Coordonnateur des Projets. enne), (Critère de forclusion) MASOSO BUMBA
RÉPUBLIQUE TUNISIENNE - MINISTÈRE DE LA DÉFENSE NATIONALE AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL N° 01/EMAM/2013 VENTE D’UN BATEAU DE PLAISANCE Le Ministère de la Défense Nationale se propose de lancer un appel d’offres international pour la vente, au plus offrant d’un bateau de plaisance type Fairline Squadron 65 en très bon état. Pour plus de renseignements veuillez consulter le site web http://www.defense.tn/allyssasite. La date limite de réception des offres est fixée au 07 novembre 2013 (Le cachet du bureau d’ordre de la DAT faisant foi). N° 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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AFRICAN UNION
UNION AFRICAINE UNIÃO AFRICANA
Autorité de Réglementation des secteurs de Postes et de Télécommunications
RÉPUBLIQUE TOGOLAISE Travail - Liberté - Patrie
COMMUNIQUÉ
INVITATION FOR BIDS Procurement Number: 45/PSD/13 Supply and Delivery of IT and Conference Equipment
The African Union Commission has reserved some funds towards the procurement of the above mentioned services. The African Union Commission now invites bids from interested bidders for the Supply and Delivery of IT and Conference equipment
L’Autorité de Réglementation des secteurs de Postes et Télécommunications (ART&P) a lancé le 21 Août 2013 un appel d’offres ouvert n°004/ART&P/PRMP/2013 pour la fourniture et l’installation d’un centre d’appels pour les consommateurs. A la date de clôture du dépôt des offres fixée au 24 septembre 2013 à 10 heures, l’ART&P n’a enregistré que le dépôt de deux (2) offres.
The closing date for the submission of bids shall be 23rd October 2013.
L’ART&P prolonge la date de clôture du dépôt des offres au 16 octobre 2013 à 10 h 00 mn TU.
For further inquiries please use Tel: +251-11-5517700, Ext 4305. E-mail: Tender@africa-union.org
Fait à Lomé, le 25 Septembre 2013 Le Directeur Général pi, Abayeh BOYODI
REQUEST FOR EXPRESSIONS OF INTEREST GMS Regional Partner Organizations Regions: Asia Pacific, Eastern Europe and Central Asia (EECA), East Africa, West and Central Africa, Southern Africa, and Latin America and the Caribbean (LAC), Middle East and North Africa (MENA) Issuance Date: October 1, 2013 Deadline for Submission: November 4, 2013, 12:00 noon EST Deadline for Questions: October 10, 2013, 12:00 noon EST
Management Sciences for Health, Inc. (MSH) is currently soliciting expressions of interest (EOIs) from qualified organizations based in the following regions: Asia Pacific, Eastern Europe and Central Asia (EECA), East Africa, West and Central Africa, Southern Africa, and Latin America and the Caribbean (LAC), Middle East and North Africa (MENA), with capabilities and experience in one or more of four technical areas: Governance & Oversight, Program & Financial Management, Procurement & Supply Management, and Monitoring & Evaluation. Organizations will be expected to deliver management-related technical support to beneficiaries and stakeholders of the Global Fund to Fight AIDS, Tuberculosis and Malaria (Global Fund). Successful firms will demonstrate their potential to implement, manage, and provide technical oversight of complex scopes of work at national or regional level or both, including production of technical documents and delivery of effective capacitystrengthening interventions that meet stringent standards of quality. GMS will support successful firms to integrate technical support to Global Fund grantees in their respective regions into their strategic business plan, and to build capacity to target, evaluate and respond to a range of business opportunities in this field. To qualify, an organization must meet the following criteria: a. Must be a small business or small, nongovernmental organization, institution or consulting group. (“Small” is defined as having annual revenues of $14 million US dollars or less.) b. Must have been in operation for at least 5 years and be able to demonstrate relevant activity during that period.
c. May not be affiliated with any multilateral organization or existing GMS technical support partner. d. Must have been founded and still be headquartered in its respective region. e. Core business (defined as 50% or more of total revenues in the last year) must be other than provision of management-related technical support to Global Fund grantees. f. May not be a principal recipient or subrecipient of an active Global Fund grant. In addition, organizations must be able to provide a substantial roster of experts with at least 10 years of experience in technical areas relevant to the Terms of Reference (see annex 1 in the full solicitation at http://www.gmsproject.org/about/Solicitation.cfm), and at least five years of experience working at national and regional levels. The majority of the consultants in the roster should not have already been trained by or done work for GMS. Consultants must have appropriate language skills. Local and regional organizations that can provide consultants fluent in one or more of the following languages are strongly encouraged to apply: Arabic, English, French, Portuguese, Russian, and Spanish. Please submit any questions concerning this request by e-mail by October 10, 2013, 12:00 noon EST to solicitation@gmsproject.org Questions and their responses will be posted on or before October 15, 2013, on the GMS website: http://www.gmsproject.org/about/Solicitation.cfm Expressions of interest must be submitted by e-mail on or before November 4, 2013, 12:00 noon EST to solicitation@gmsproject.org
N° 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
Appel d’offres - Manifestation d’intérêt
Interested firms can collect the bid documents from the African Union website: http://www.au.int/en/bids
Conformément à l’article 54 du code des marchés publics, « lorsqu’un minimum de trois plis n'a pas été remis aux date et heure limites de réception des offres, l’autorité contractante ouvre un nouveau délai qui ne peut être inférieur à quinze (15) jours calendaires et qu'elle porte à la connaissance du public »,
More details on the above requirements are provided in the bid document.
JEUNE AFRIQUE
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Annonces classées
AVIS À MANIFESTATION D’INTÉRÊT N°ASECNA/DGDI/DGDIM/1376/2013 Services de Consultants : Recrutement d’un cabinet de réputation internationale pour l’audit des comptes des exercices 2013, 2014 et 2015 Date de publication : Lundi, le 23 septembre 2013 – Date de clôture : Jeudi, le 10 octobre 2013
1. Contexte général Dans le cadre de ses dispositions statutaires et règlementaires, l’Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar (“ASECNA”) est tenue de faire auditer annuellement ses comptes et a donc l’intention d’utiliser une partie de ses crédits budgétaires pour effectuer les paiements prévus au titre du Contrat relatif aux services de consultants ci-après : Audit comptable et financier des exercices clos les 31 décembre 2013, 2014 et 2015.
Manifestation d’intérêt
2. Objectif de l’intervention du consultant L’objectif de la mission est d’accomplir, dans le cadre des dispositions statutaires et règlementaires et selon les normes internationales d’audit, une mission d’audit comptable et financier des comptes de l’ASECNA pour les exercices clos les 31 décembre 2013, 2014 et 2015 ainsi que la production au titre de ces exercices des ratios d’endettement, de couverture du service de la dette, de liquidité, de recouvrement des créances, des charges du personnel, etc... 3. Méthode de sélection L’ASECNA invite les cabinets d’audit à manifester leur intérêt individuellement ou en association à fournir les services décrits ci-dessus. Les cabinets intéressés sont invités à fournir les informations démontrant qu’ils possèdent les qualifications requises et une expérience pertinente pour l’exécution des services. Les critères pour l’établissement de la liste restreinte sont : - Expérience générale (organisation, domaine d’intervention, etc.) - Expériences pertinentes par rapport à la présente mission - Compréhension de la mission. Le cabinet d’audit sera recruté par la méthode de sélection fondée sur la qualité technique et le coût. 4. Contenu du dossier de candidature Les dossiers de candidature devront comprendre : - une présentation du cabinet ou des cabinets dans l’association ; - les références des missions d’une manière générale ; - les références des missions pertinentes. 5. Informations supplémentaires sur l’Avis à Manifestation d’Intérêt Les cabinets d’audit intéressés peuvent obtenir les informations supplémentaires au Département Ingénierie et Prospective – Marchés et Contrats – Aéroport Léopold Sédar Senghor, BP 8163 Dakar-Yoff, Sénégal, téléphone : +221 33 869 51 24/25, télécopie : +221 820 00 15, adresse électronique : aos@asecna.org 6. Dépôt des candidatures Le dossier de candidature rédigé en langue française, établi en trois (03) exemplaires dont un (01) original et deux (02) copies, présenté sous pli fermé et portant, en plus du nom et de l’adresse du candidat, la mention : ASECNA, Département Ingénierie et Prospective, Aéroport Léopold Sédar Senghor, BP 8163 Dakar-Yoff, Sénégal, AMI n°ASECNA/DGDI/DGDIM/1376/2013, Audit comptable et financier des exercices 2013, 2014 et 2015 devra être déposé au secrétariat du Département Ingénierie et Prospective (ASECNA), Aéroport Léopold Sédar SENGHOR, Dakar-Yoff (Sénégal) au plus tard le 10 octobre 2013 à 11 heures, heure locale (GMT). Aucune candidature arrivée hors délai ne sera acceptée. L’ouverture des dossiers de candidatures en séance publique devant les candidats (ou leurs représentants) qui le désirent, aura lieu le même jour (10 octobre 2013) à 12 heures, heure locale (GMT). Le Directeur Général
N° 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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N° 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
Vous & nous
Le courrier des lecteurs Envoyez-nous vos réactions, vos réflexions, vos coups de gueule ou de cœur à redaction@jeuneafrique.com ou au 57 bis, rue d’Auteuil, 75016 Paris.
Gabon Compétences étrangères DANS JEUNE AFRIQUE no 2748, répondant à ses détracteurs qui, tapis dans certaines administrations publiques et dans le privé, arguent de la nécessaire « gabonisation des postes » pour limiter l’octroi d’autorisation d’emploi aux étrangers, Ali Bongo Ondimba s’est montré très clair : « Aujourd’hui, l’important est d’identifier les compétences, qu’elles se trouvent chez vous ou ailleurs. La seule chose qui compte, ce sont les résultats. […] Si des non-Gabonaispeuventm’aider à faire en sorte que les Gabonais soient plus heureux, je ne vois pas bien où est le p ro b l è m e. [ … ] S oyo n s modestes : nous n’avons pas la science infuse et avons parfois besoin, surtout dans cette phase de rupture et de réformes urgentes, de nous
faire assister, à condition bien sûr qu’il y ait transfert de compétences… » Et toc ! Merci, monsieur le Président, car beaucoup n’ont pas compris (ou refusent de comprendre) la vision universellequevousavezduGabon. l KONÉ IDRISS KASSOUM, Libreville, Gabon
Polémique Kery James a raison APRÈS UNE LECTURE attentive de votre article « Une polémique française » (J.A. no 2749, du 15 au 21 septembre) et du texte de la chanson réprouvée par Christian Estrosi et Éric Ciotti, hommes politiquesdeladroitefrançaise, plusieurs explications me viennent à l’esprit. D’abord, ces messieurs n’ont rien écouté; ils devaient envoyer des messages sur leur téléphone ou regarderunevidéo(c’estleplus
simple). Ensuite, leur intellect ne leur permet peut-être pas de comprendre ce texte (c’est méchant?) remarquablement bien écrit! Enfin, Kery James écrit:«Silesavoirestunearme, soyons armés »; mais le savoir est peut-être réservé à une certaine catégorie de la population ? On préconisait bien autrefois de ne pas trop instruire les filles car elles risquaient sinon de devenir des femmes incontrôlables ! Et je ne remonte pas au tiers état! C’est ce qui les choque? Qu’un petit gars de banlieue « manie » et « maîtrise » la langue de Molière? Et pourtant, Kery James a raison : c’est l’échec scolaire et l’exclusion qui provoquent la colère, entraînant tous ces dérapages. Quand on sait construire une voiture, on ne la brûle pas ! l ODILE ROUQUIER, Étrechy, France
Laïcité À la sauce musulmane L’EXPÉRIENCE ALGÉ RIENNE prouve que mêler politique et religion peut engendrer des catastrophes, comme la terrible guerre civile qui a ravagé le pays. Les musulmans devraient par conséquent s’inventer leur « laïcité » propre, qui séparerait le culte musulman du jeu politique. En Égypte comme en Tunisie, les partis islamistes arrivés au pouvoir n’ont rassuré ni les populations ni les pays voisins. La Tunisie inquiète son voisin algérien car elle y « exporte » ses terroristes intégristes ; l’Égypte émeut tout le Proche-Orient, en particulier son voisin israélien. Seul le modèle turc suscite de l’espoir, avec quelques bémols cependant : les questions kurde et chypriote ne sont toujours pas résolues, et l’intégration du pays à l’Europe reste en suspens, le Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, semblant écartelé entre l’Orient et l’Occident. l ALBERT BARDOT, Sète, France
MERCI POUR LE LIVRE JEUNE AFRIQUE. 50 ANS, une histoire de l’Afrique, que je déguste chaque matin, à petite dose, en prenant mon café. C’est émouvant d’y retrouver Siradiou Diallo, Sennen Andriamirado, Paul Bernetel, ainsi que le « président » Jos-Blaise Alima, vivants avec leur prose. Vous p Abbas, par Jordan, 1997. avez vraiment fait la part belle aux quatre photographes qui ont débuté avec Jeune Afrique. Je regrette de ne pas avoir connu Kahia, dont les photos m’inspiraient quand, adolescent, je dévorais J.A. Ah, cette photo de Boumédiène au visage de loup, précédant Ben Bella et les membres du GPRA ! Nous avons tous une dette envers J.A. et envers Béchir Ben Yahmed. l ABBAS, PHOTOGRAPHE, membre de l’agence Magnum, Paris, France JEUNE AFRIQUE
ABBAS/MAGNUM PHOTOS
Reconnaissance Ma dette envers « Jeune Afrique »
Xénophobie Le combat de Cécile Kyenge AYANTPARCOURUavec intérêt l’article consacré à Cécile Kyenge, ministre italienne originaire du Katanga, en RD Congo (« Feu à volonté ! », J.A., no 2749, du 15 au 21 septembre), je voudrais y faire écho. En effet, nul ne devrait rester insensible aux dérapages xénophobes, encore moins lorsqu’ils viennent de politiques reconnus. Mais, il arrive souvent – et c’est bien malheureux ! – que l’irrationnel l’emporte sur le rationnel. Les propos de certains « élus » en disent véritablement long sur le calvaire – qui ne fait que N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Vous nous
commencer ! – que Kyenge aura à endurer. Et tant mieux pour elle si elle « [s]’attendai[t] à ce genre de réactions ». Alors, courage, madame la ministre! Et fructueux combat pour la dignité humaine ! l ALOYS S. MUPENDA-WATU, Paris, France
Syrie Loin du conflit intercommunautaire LECTEURASSIDUdeJeune Afrique, je reviens sur l’éditorial de François Soudan, « Crime sans châtiment », publié dans votre édition datée du 26 au 31 août (J.A. no 2746). J ’e s t i m e i n e x a c t e s l e s
Réaction Émile Zinsou, ancien président béninois
Ahidjo, Biya et moi Dans votre édition datée du 8 au 14 septembre (J.A. no 2748), vous avez publié un article sur Aminatou Ahidjo, fille du président Ahidjo, dans lequel je suis cité. Afin que tout soit clair, je vous renvoie au texte de mes Mémoires*, dont voici un extrait.
VINCENT FOURNIER/J.A.
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«… La mémoire d’Ahidjo n’a pas besoin de mensonge pour rester dans l’histoire de son pays. Paul Biya n’avait pas tous les torts. Cependant, il était inadmissible qu’à l’annonce de la mort de son prédécesseur, un ministre du Cameroun présent à leur Ambassade à Paris ait déclaré “Qu’il n’avait pas le temps de s’occuper des fantômes”. Un fantôme qui depuis plus de vingt ans continue de faire peur et reste vivant dans la mémoire de la plupart de ses compatriotes. Jusqu’à ce jour, il repose à Dakar. J’ai plusieurs fois parlé du problème du transfert du corps d’Ahidjo pour qu’il puisse reposer dans son pays et dans sa ville, Garoua. Le Président Biya m’a toujours reçu avec amitié et écouté avec une grande attention. Je ne dévoile pas un secret en disant qu’il a été toujours d’accord avec mes propos et mes suggestions, me remerciant chaque fois avec chaleur. Cependant, il a eu plusieurs occasions de mettre en œuvre ce sur quoi nous étions d’accord, sans en saisir aucune. Qu’est ce qui le retient d’un geste attendu par la majorité des Camerounais, qui ne pouvait être qu’à son honneur, qu’à son bénéfice ? Ce serait si beau que ce soit Biya qui enterre Ahidjo dans leur commun Cameroun ! Je vois le spectacle d’ici et en mesure toute la signification. Mais probablement ai-je tort ? Puisque rien n’a bougé. Madame Ahidjo a montré tout au long de cette épreuve une parfaite dignité. Certains l’accusent d’une trop grande exigence. Ils ne savent pas ce que c’est qu’une épouse qui aime son mari et surtout quand ce mari est le Président Ahmadou Ahidjo mort en exil… » Je n’ai rien à ajouter, rien à retrancher. l En ces temps là…, Riveneuve Éditions (Paris, 2012). N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
affirmations suivant lesquelles les autorités syriennes ont fait usage à six reprises de l’arme chimique. De même, l’expression « guerre civile » que vous employez pour désigner les événements en Syrie me semble inappropriée. L’armée syrienne est aux prises avec des milliers de terroristes-mercenaires et une infime minorité de la population locale, armés et financés par le nouveau sultan ottoman et les dirigeants d’Arabie, et dont le seul objectif est de renverser un régime bénéficiant d’une solide et indiscutable assise populaire. Rien à voir donc avec l’idée du conflit intercommunautaire que vous semblez défendre. l HOUCINE AGUEL, Gabès, Tunisie
Réponse Il est aujourd’hui avéré que des armes chimiques ont été utilisées non loin de Damas le 21 août. Depuis quelques jours, les inspecteurs des Nations unies sont de retour en Syrie, pour enquêter cette fois sur une dizaine d’attaques du même type enregistrées depuis trente mois, dont une pourrait être attribuée aux rebelles. Enfin, Bachar al-Assad a lui-même reconnu détenir un arsenal chimique. Le fait que l’enquête de l’ONU n’ait pas désigné un coupable ne nous empêche pas d’avoir nos propres informations et notre propre conviction. Quant à la nature du conflit syrien, il est clair que votre analyse est aux antipodes de la mienne. F.S.
Fiction La fin du film J’AI TENTÉ DE ME PRÊ TER à l’exercice auquel appelait Fawzia Zouari dans son « Post-scriptum » intitulé « La main dans la fiction » (J.A . n o 2749, du 15 au
21 septembre), et je crois avoir trouvé quelques pistes. Scénario 1 : l’infirmière, qui n’est pas mère infirme, s’offre aux combattants dans l’espoir de retrouver son fils. Dévoilant un corps superbe, experte en volupté, elle convertit au culte d’Éros les jihadistes qui passent par sa tente. Ceux-ci finissent par constituer la Jabhat al-Mutaa, ou Front du plaisir, qui marche en grand cortège bachique jusqu’aux portes de Damas. Les soldats, charmés par la grande prêtresse, abandonnent fusils et canons et rejoignent la bacchanale, qui parvient au palais présidentiel. Bachar tombe dans le pouvoir de cette divine Salomé et fait du plaisir la nouvelle religion de l’État, appelée à se répandre dans le monde. Scénario 2 : l’infirmière retrouve son fils, embrigadé par l’État islamique en Irak et au Levant. Il n’a que mépris pour elle et ses discours, mais elle s’obstine à le suivre partout, jusque sur les fronts, jusque dans ce village alaouite où la mère voit sa progéniture égorger de jeunes « hérétiques » en invoquant Dieu. Écœurée, elle finit par tuer son fils avant de se donner la mort. J’ai une préférence pour le premier des deux. l ZIAD HAMAMI, Sousse, Tunisie
Rwanda Liberté de vote J’AI VÉCU PLUSIEURS années en Belgique, où le vote est obligatoire. Cet exercice citoyen m’était imposé. Ma carte d’électeur me parvenait directement dans ma boîte aux lettres et toute absence aux urnes se soldait par une amende administrative… Une dépêche de l’AFP reprise par jeuneafrique.com insinue que, lors des législatives JEUNE AFRIQUE
Vous nous CÔTE D’IVOIRE LA NOUVELLE VIE DES (EX-)REBELLES jeuneafrique.com
rwandaises du 16 septembre dernier, « la population [était] fortement incitée à voter par les autorités », tentant ainsi de justifier la suprématie du Front patriotique rwandais (FPR). Membre actif de ce parti, je n’ai pourtant pas pu voter pour n’avoir pas entrepris les démarches administratives nécessaires en temps et en heure. Nul n’est venu me sortir de mon lit pour me conduire aux urnes, encore moins pour influencer mon vote. Une collègue qui était dans la même situation que moi et qui s’était tout de même présentée au bureau de vote a été éconduite. Il s’agit peut-être d’un détail, mais il me paraît important de le relever. l JOËL NDOLI PIERRE, Kigali, Rwanda
Armée Les troupes camerounaises à nu ? J’AI PRIS CONNAIS SANCE de votre dossier sur l’armée camerounaise (J.A. n o 2749, du 15 au 21 septembre). Si l’on peut relever en son sein des insatisfactions plus ou moins visibles, il est excessif de parler d’une institution qui serait devenue un « grand corps malade ». Quant aux portraits des « hommes du président », le casting présenté est peu crédible aux yeux des observateurs, des généraux comme Ivo Desancio, directeur de la sécurité présidentielle, et René Claude Meka, chef d’état-major des armées, n’y figurant pas. Et l’on se demande alors en quoi le commandant du corps des sapeurs-pompiers (le général
Hebdomadaire international indépendant • 53e année • no 2749 • du 15 au 21 septembre 2013
Militaires camerounais en Centrafrique, mars 2013.
Spécial 14 pages
Malaise dans les rangs CAMEROUN
Insécurité aux frontières, incertitudes de l’après-Biya, matériel et moral en berne… L’armée traverse une vraie crise d’identité. Voyage à l’intérieur de la Grande Muette. ÉDITION AFRIQUE CENTRALE
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p J.A. no 2749, du 15 au 21 septembre 2013.
Mahamat Ahmed) ou le commandant d’une région militaire(legénéralMartin Chomu Tumenta) seraient de ces hommes sur lesquels le président Paul Biya compte tant ! Même si on n’y roule pas sur l’or, l’armée camerounaise est l’une des rares institutions à
n’avoir pas connu de diminution de solde découlant de la récession économique des années 1980-1990. Au contraire, les soldats ont plutôt bénéficié d’avantages substantiels. Ce qui est un indicateur suffisamment éloquent. l ABRAHAM NDJANA MODO, Yaoundé, Cameroun
Réponse Merci pour toutes vos remarques. Nous assumons néanmoins le choix de ne présenter que « les hommes du président » les moins connus, sans dénier ce statut aux plus anciens que vous citez. Par ailleurs, nous n’avons jamais écrit que les soldats ne bénéficiaient pas d’avantages substantiels par rapport aux fonctionnaires. l LA RÉDACTION
Conférence internationale Internationale Conférence
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4-8 November 2013 Kigali, Rwanda www.ict4ag.org
Cycle de conférences internationales : Repenser l’agriculture à petite échelle.
Ministry of Agriculture and Animal Resources
Oeuvrer pour que les O populations rurales pauvres se libèrent de la pauvreté
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de l'agriculture inclusive
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HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL POLITIQUE, ÉCONOMIE, CULTURE
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Post-scriptum Tshitenge Lubabu M.K.
Fondé à Tunis le 17 oct. 1960 par Béchir Ben Yahmed (53e année) Édité par SIFIJA Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS Tél. : 01 44 30 19 60 ; Télécopieurs : rédaction : 01 45 20 09 69 ; ventes : 01 45 20 09 67 ; Courriel : redaction@jeuneafrique.com DIRECTION
L’opium des peuples
K
INSHASA, un dimanche après-midi. J’ai rendez-vous avec un pasteur évangélique. Il m’a rappelé nos liens familiaux et tient à me prouver qu’il est parmi les pontes de l’évangélisme. Alors, rien de mieux qu’un tour là où il officie au moins trois fois par semaine. Sur les lieux, une foule impressionnante d’ouailles l’attend fébrilement. Son véhicule s’arrête. Hommes, femmes, jeunes et vieux trépignent. Une haie d’honneur se forme. Mon parent pasteur met pied à terre. C’est l’hystérie. Sans que je sache pourquoi, il prend ma main dans la sienne. Ne la lâche plus. Prisonnier, j’assiste alors à une scène inouïe : chacun veut le toucher ou s’agenouiller devant lui pour recevoir une bénédiction. Des gros bras tentent, en vain, d’écarter la foule. Au bout du parcours, un podium. On m’installe à cet endroit réservé aux « hôtes de marque ». Un groupe musical joue, le public danse comme dans un bal. Le pasteur, en véritable maître de cérémonie, prend la parole, mêlant versets bibliques et bons mots. Les témoignages de « délivrés du démon », de nouveaux adeptes, de ceux qui ont fait des rêves merveilleux s’enchaînent. Puis vient l’apothéose : l’offrande. Sous mes yeux ébahis, des seaux se remplissent. Le pasteur donne des instructions : francs congolais et dollars doivent être mis dans des seaux distincts. Précision importante: à chaque récipient correspond un type de coupure de dollars (pas question, donc, de mélanger les coupures de 5, 10, 20, 50 ou 100 dollars). Sans attendre, il circule parmi la masse des ouailles pendant que l’orchestre redouble d’ardeur, incitant l’assistance à donner, encore et encore. Je ne peux pas rester jusqu’à la fin. Quelques jours après, je revois mon parent pasteur sur un chantier. Grâce aux offrandes des adeptes, confie-t-il, il construit un immeuble de sept étages qui comprendra des boutiques, un hôtel et une salle de prières. La pudeur m’empêche de lui demander si ses ouailles y trouveront leur compte. Mon jeune frère éclairera plus tard ma lanterne : « Ce n’est pas à lui qu’ils donnent, mais à Dieu. » Évidemment ! Depuis le développement exponentiel des Églises dites de réveil, prier entre « frères et sœurs en Christ » sous la supervision du « papa pasteur » est devenu une activité à part entière. Pour les chaînes de télévision publiques ou privées, c’est un filon intarissable: payantes, les prédications occupent l’antenne matin et soir. Les bondieuseries sont également relayées par des officiels dans le cadre de leurs fonctions presque partout sur le continent. Ministres, députés, sénateurs, chefs de parti ou d’entreprise n’hésitent pas à citer Dieu, le seul à pouvoir résoudre les problèmes auxquels les citoyens sont confrontés. Il en est de même de ces présentateurs, à la télévision comme à la radio, qui ne peuvent s’empêcher de mettre Dieu à toutes les sauces. Pourtant, dans l’espace public, la laïcité doit être respectée. Car tout le monde ne croit pas en Dieu. À moins qu’on ne cherche à endormir les populations. Question : pourquoi les plus démunis s’investissent-ils à ce point dans le fait religieux ? Ils espèrent, m’a-t-on dit, recevoir un don de Dieu. Mais quoi, sacredieu ? Tout : santé, fortune, emploi, amour, bonheur en plus de l’éden… À mon avis, cette énergie dépensée en priant pourrait servir à créer le progrès. l
Directeur de la publication : BÉCHIR BEN YAHMED (bby@jeuneafrique.com) Directeur général : Danielle Ben Yahmed Vice-présidents: Aldo de Silva, Danielle Ben Yahmed, François Soudan, Amir Ben Yahmed Actionnaire principal : Béchir Ben Yahmed RÉDACTION Directeur de la rédaction : François Soudan (f.soudan@jeuneafrique.com) Directeurs exécutifs : Marwane Ben Yahmed (mby@jeuneafrique.com), Amir Ben Yahmed (aby@jeuneafrique.com) Rédaction en chef : Élise Colette (éditions électroniques, e.colette@jeuneafrique.com), Laurent Giraud-Coudière (technique, lgc@jeuneafrique.com) Conseillers de la direction de la rédaction : Hamid Barrada, Aldo de Silva, Dominique Mataillet, Renaud de Rochebrune Secrétariat : Chantal Lossou, Joëlle Bouzignac Chefs de section : Joséphine Dedet (La semaine de J.A.), Michael Pauron (Grand angle), Anne Kappès-Grangé (Afrique subsaharienne), Tarek Moussa (Maghreb & Moyen-Orient), Frédéric Maury (Économie), Jean-Michel Aubriet (Europe, Amériques, Asie), Cécile Manciaux (Le Plus de J.A.), Séverine Kodjo-Grandvaux (Culture & médias), Clarisse Juompan-Yakam (Vous & nous) Secrétaires de rédaction : Sabine Clerc, Fabien Mollon, Ophélie Négros, Louisa Yousfi Rédaction : Youssef Aït Akdim, Farid Alilat, Mehdi Ba (à Dakar), Stéphane Ballong, Ryadh Benlahrech, Pierre Boisselet, Rémi Carayol, Julien Clémençot, Frida Dahmani (à Tunis), Georges Dougueli, Trésor Kibangula, Christophe Le Bec, Nicolas Michel, Haby Niakate, Cherif Ouazani, Abdel Pitroipa, Fanny Rey, Laurent de Saint Périer, Tshitenge Lubabu M.K. ; collaborateurs : Edmond Bertrand, Christophe Boisbouvier, Patrick Seale; accords spéciaux : Financial Times Responsable de la communication : Vanessa Ralli (v.ralli@jeuneafrique.com) RÉALISATION Maquette : Marc Trenson (directeur artistique), Emeric Thérond (premier rédacteur graphiste), Christophe Chauvin, Stéphanie Creuzé, Julie Eneau, Valérie Olivier ; révision : Nathalie Bedjoudjou (chef de service), Vladimir Pol ; fabrication : Philippe Martin (chef de service), Christian Kasongo ; service photo : Dan Torres (directrice photo), Nathalie Clavé, Vincent Fournier, Claire Vattebled ; documentation : Anita Corthier (chef de service), Sylvie Fournier, Florence Turenne, Angéline Veyret JEUNEAFRIQUE.COM Direction éditoriale : Élise Colette ; chefs d’édition : Pierre-François Naudé, Frédéric Maury (économie) ; rédaction : Vincent Duhem, Jean-Sébastien Josset, Trésor Kibangula, Mathieu Olivier, Benjamin Roger et Nicolas Teisserenc Responsable web : Jean-Marie Miny ; studio : Cristina Bautista, Jun Feng et Maxime Pierdet VENTES ET ABONNEMENTS Directeur marketing et diffusion : Philippe Saül ; responsable des ventes adjointe : Sandra Drouet ; chefs de produit : Hélène Constant, Maty N’Dome ; abonnements : Laetitia Banelle avec: COM&COM, Groupe Jeune Afrique 18-20, avenue Édouard-Herriot, 92350 Le Plessis-Robinson. Tél. : 33 1 40 94 22 22 ; Fax : 33 1 40 94 22 32. E-mail : jeuneafrique@ cometcom.fr l
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N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
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Camair-Co en quête d’un second souffle Manque de ponctualité, flotte réduite au minimum, taux de remplissage insuffisant… La compagnie est à la peine dans un environnement hautement concurrentiel.
L
e 26 août, le Boeing 767300, alias « le Dja », l’unique appareil que possède en propre Cameroon Airlines Corporation (Camair-Co), a repris du service après avoir été cloué au sol quelques jours. Une occasion pour l’ex-directeur général, le Néerlandais Boertien Matthijs Johannes – remplacé le 13 septembre par son adjoint Frédéric Mbotto Edimo –, de présenter par voie de presse ses excuses à la clientèlepourlesdésagrémentsrencontrés. « Cela marque un progrès dans la communication », reconnaît la responsable d’une agence de voyages de Yaoundé, habituée aux plaintesdesvoyageurspourmanque de ponctualité et annulations de dernièreminutequiavaientvaluàla défunteCameroonAirlines(Camair) le surnom d’« Air peut-être ». Au siège de Camair-Co, à Douala, on a conscience de cette réputation, attribuée, entre autres, à la difficulté de se procurer des pièces détachées. « Nous visons un taux de disponibilité de 97 % des appareils [le taux actuel est confidentiel], c’est-à-dire que sur 100 vols 3 au maximum seront annulés ou retardés pour raisons techniques », annonce Christian Perchat, le directeur commercial et marketing arrivé en janvier. En attendant, le management tient une réunion « de ponctualité » chaque matin, où bon nombre des 438 employés sont présents. N O 2751 • DU 29 SEPTEMBRE AU 5 OCTOBRE 2013
Autre grief, l’absence d’un écran de télévision à bord. « C’est le reproche le plus courant », se désole lapatronned’uneagencedevoyages de Douala. La direction a d’ailleurs annoncé fin août la mise en service effective d’un système audio-vidéo. Camair-Co tente de compenser ce handicap en proposant des billets à des tarifs compétitifs. Le DoualaParis coûte ainsi entre 400 000 et 450 000 F CFA (610-690 euros), contre 500000 à 550000 F CFA chez sesprincipauxconcurrents(Turkish Airlines, Brussels Airlines et Royal Air Maroc). Il n’empêche: le niveau de remplissage actuel dépasse à peine la moitié de l’objectif de 400 000 passagers fixé le 28 mars 2011 pour la même année.
d’opportunité commerciale pour Camair-Co. Selon le management, le trafic « de point à point » entre Douala/Yaoundé et Istanbul n’est pas suffisant pour justifier un vol direct. Seule perspective intéressante à moyen terme, la Chine, notamment Canton, avec ses 300 000 résidents africains, sans oublier les nombreux ressortissants de l’empire du Milieu qui viennent de plus en plus souvent sur le continent pour raisons professionnelles. Pour profiter de ce marché, la compagnie doit renforcer sa flotte long-courrier, quasi inexistante. Las, sa trésorerie est déjà plombée par la location et l’entretien de deuxBoeing737-700enleasingpour les vols intérieurs et régionaux. Le déficit d’exploitation mensuel, de
Avec l’arrivée de 2 MA-60 chinois, la société va faire des économies et relancer le trafic intérieur.
DÉSÉQUILIBRE. Camair-Co souffre
d’unénormehandicapparrapportà la concurrence. Elle n’offre que cinq vols allers-retours hebdomadaires entre le Cameroun et l’Hexagone, alors qu’Air France en propose le double et vient d’obtenir trois fréquences supplémentaires. « Le déséquilibre est patent : lorsque Camair-Co met un siège à la vente, Air France en met deux, déplore Christian Perchat. La nouvelle donne va renforcer cette distorsion, la croissance du marché sera monopolisée par le français. » En outre, en décembre 2012, Turkish Airlines a atterri sur le sol camerounais sans que cela n’ouvre
1 milliard de F CFA, est comblé par une subvention gouvernementale. L’arrivée prochaine de deux MA-60 chinois dans la flotte de Camair-Co relancera le trafic intérieur,toutenpermettantàlacompagniedefairedeséconomies.Attendu enfind’année,leBoeing777-200ER, bienquesurdimensionnépourcette destination, desservira Paris dans un premier temps. Puis il assurera la liaisonavecCantonen2015,dèsque les deux Boeing 787 Dreamliner en cours d’acquisition seront engagés sur les lignes à destination de Paris à partir de Douala et à Yaoundé. l OMER MBADI, à Yaoundé JEUNE AFRIQUE
JEAN-PIERRE KEPSEU
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