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JIHAD DU SEXE FANTASMES ET RÉALITÉ

MALI IBK SUR TOUS LES FRONTS

DOSSIER AUTO LE MAGHREB, ROUE DE SECOURS POUR LES FRANÇAIS ? Spécial 10 pages

53e année • no 2752 • du 6 au 12 octobre 2013

Hebdomadaire international indépendant • 53e année • no 2752 • du 6 au 12 octobre 2013

jeuneafrique.com

ÉDITION INTERNATIONALE France 3,50 € • Algérie 180 DA • Allemagne 4,50 € • Autriche 4,50 € • Belgique 3,50 € • Canada 5,95 $ CAN • Danemark 35 DKK • DOM 4 € Espagne 4 € • Éthiopie 65 birrs • Finlande 4,50 € • Grèce 4,50 € • Italie 4 € • Maroc 23 DH • Mauritanie 1 100 MRO • Norvège 45 NK • Pays-Bas 4 € Portugal cont. 4 € • RD Congo 5,50 $ US • Royaume-Uni 3,50 £ • Suisse 5,90 FS • Tunisie 3,30 DT • USA 6,50 $ US • Zone CFA 1 700 F CFA • ISSN 1950-1285



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Ce que je crois Béchir Ben Yahmed • bby@jeuneafrique.com

SAMEDI 5 OCTOBRE

L’optimisme est injustifié

I

L Y A SANS AUCUN DOUTE un effet Hassan Rohani. Il est immense et planétaire. Mais sera-t-il durable ? Le nouveau président iranien a passé une semaine à New York (du 23 au 28 septembre). Son discours à l’ONU, prononcé le 24, ses interviews à la presse, son échange téléphonique le jour de son départ avec le président des États-Unis, Barack Obama, ont fait souffler un vent d’optimisme parmi ceux que préoccupe l’avenir à court terme du Moyen-Orient. La personnalité avenante du nouveau président iranien, son regard pétillant et malicieux derrière des lunettes d’intellectuel, le sourire qui quitte rarement ses lèvres ont effacé, en peu de jours, le souvenir de l’atrabilaire Mahmoud Ahmadinejad et atténué l’écho de ses diatribes. n

Les commentateurs se sont mis à envisager l’hypothèse d’une détente : les nuages qui obscurcissaient le ciel du Moyen-Orient allaient se dissiper, le conflit syrien s’engager dans la voie d’une solution politique, éloignant ainsi les menaces de déstabilisation qu’il fait peser sur les pays voisins. La République islamique d’Iran et les six grandes puissances qui s’efforcent de l’empêcher d’accéder au nucléaire militaire allaient trouver, dans le premier semestre de 2014, l’accord qui permettrait de lever les sanctions contre Téhéran, de le sortir de l’isolement et de « l’axe du mal »… Sous le titre « Les choses peuvent s’arranger au MoyenOrient », le Financial Times du 1er octobre a écrit ceci : « La nouvelle donne politique en Iran incite à l’optimisme. L’entretien téléphonique entre Hassan Rohani et Barack Obama, bien que bref, est historique : c’est la première fois depuis la révolution iranienne de 1979 qu’un contact de ce niveau est établi entre les deux nations. Obama cherche à éviter tout nouveau conflit au Moyen-Orient. Un accord avec l’Iran serait un succès pour la politique extérieure du président américain et le renforcerait sur le plan intérieur. Les dirigeants iraniens sont pressés de trouver un dénouement à cette crise : leur économie est épuisée par les sanctions, et le soutien au régime de Bachar alAssad est pour eux un boulet (la Syrie est le “Vietnam de l’Iran”, a dit un Américain). JEUNE AFRIQUE

Outre qu’il éloignerait le spectre d’un conflit armé entre les deux pays, un accord sur le nucléaire iranien pourrait faire émerger une approche commune du dossier syrien. Certes, le régime et les rebelles ont encore l’espoir de remporter la guerre civile et de régner sur une Syrie unie, et il est tentant, pour la Russie, l’Iran, l’Arabie saoudite et les États-Unis, de soutenir leurs protégés jusqu’au bout. Mais tous redoutent aujourd’hui la perspective d’une Syrie fragmentée et anarchique, qui serait un véritable havre pour Al-Qaïda… » J’aimerais m’associer à cet optimisme. Mais le discours prononcé à cette même tribune de l’ONU, le 1er octobre, par Benyamin Netanyahou, qu’il faut avoir lu ou écouté, ne le permet pas. La position israélienne, qu’il a rappelée avec force et dont il prévient que son pays l’appliquera quoi que fassent les États-Unis et l’Europe, ne laisse place à aucune illusion : dès lors, l’optimisme est injustifié. n

Le Premier ministre israélien nous a solennellement dit qu’il veut, lui, un changement de régime en Iran et le désarmement de ce pays. Ci-dessous, l’essentiel du réquisitoire Netanyahou : « S’agissant du programme nucléaire iranien, la seule différence entre Ahmadinejad et Rohani est la suivante : Ahmadinejad était un loup déguisé en loup. Rohani est un loup déguisé en mouton. L’Iran n’élabore pas un programme nucléaire pacifique, mais un programme militaire. Pas plus tard que l’an dernier, l’Iran a enrichi trois tonnes d’uranium à 3,5 %, a doublé le stock d’uranium enrichi à 20 % et s’est doté de plusieurs milliers de centrifugeuses supplémentaires, dont des centrifugeuses de nouvelle génération. L’Iran a poursuivi ses travaux sur le réacteur à eau lourde d’Arak pour se ménager un autre accès à la bombe, via l’utilisation du plutonium. Et depuis l’élection de Rohani – j’insiste sur ce point –, ce vaste effort s’est poursuivi sans relâche. L’Iran fait attention de ne pas franchir la ligne rouge mais se positionne pour la traverser au moment de son choix. Il veut fabriquer des bombes nucléaires avant N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013


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Ce que je crois

que la communauté internationale ne s’en aperçoive et, a fortiori, ne l’en empêche. Rohani a lancé une offensive de charme pour obtenir la levée des sanctions tout en poursuivant son programme nucléaire. Sa stratégie pour atteindre cet objectif ? Premièrement, sourire beaucoup. Deuxièmement, du bout des lèvres, parler de paix, de démocratie et de tolérance. Troisièmement, faire des concessions insignifiantes. Quatrièmement, et c’est essentiel : s’assurer que l’Iran conserve suffisamment de matières et d’infrastructures nucléaires afin de reprendre la course à la bombe au moment où il voudra. n

Le siècle dernier nous a appris que, lorsqu’un régime radical nourrissant des ambitions internationales se dote d’une puissance militaire impressionnante, tôt ou tard son appétit pour l’agression ne connaît aucune limite. La seule solution diplomatique envisageable est celle qui conduirait au démantèlement total du programme d’armement nucléaire de l’Iran. Ce que Téhéran doit faire ? D’abord, cesser tout enrichissement d’uranium. Ensuite, retirer de son territoire les stocks d’uranium enrichi. Troisièmement, démanteler les infrastructures rendant possible une évasion nucléaire, y compris l’installation souterraine de Qom et les centrifugeuses sophistiquées de Natanz. Enfin, arrêter tous les travaux sur le réacteur à eau lourde d’Arak qui vise à la production de plutonium. Ces mesures permettraient de mettre un terme au programme d’armement nucléaire de l’Iran et d’éliminer

sa capacité de nuisance en ce domaine. Israël ne permettra pas à l’Iran de se doter de telles armes. Si Israël est obligé d’agir seul, il agira seul. Pourtant, Israël sait qu’il défendra ce faisant beaucoup, beaucoup d’autres. » Benyamin Netanyahou a consacré 90 % de son discours de trente minutes à l’Iran, érigé, sans distinction ni nuance, au rang d’« ennemi du peuple juif » comme naguère l’Allemagne nazie. Pour lui, le nouveau président iranien n’a pas de prénom et il ne le désigne qu’en l’appelant Rohani, sans jamais lui donner du « monsieur ». Il ne cache d’ailleurs pas qu’il regrette Ahmadinejad, plus facile à stigmatiser. n

Ceux qui ont rencontré le Premier ministre israélien affirment que sa « fixation » sur l’Iran ne fait que s’aggraver : « Il faut empêcher ce pays d’émerger et d’être considéré comme fréquentable ; c’est à double tour qu’il convient de l’enfermer dans “l’axe du mal” », répète-t-il sans arrêt de manière obsessionnelle. Et savez-vous qui est le plus proche allié de Netanyahou dans cette entreprise ? Aussi étonnant que cela paraisse : l’Arabie saoudite. Le chef des services de renseignements de ce pays arabe, sunnite et réactionnaire, le « prince » Bandar Ibn Soltane, s’efforce, à plein temps et avec des fonds illimités, d’aider Israël à « casser l’Iran »… Il est donc à craindre que 2014 ne soit pas l’année où, grâce au changement intervenu en Iran, le MoyenOrient prendra le chemin de l’apaisement. l

Humour, saillies et sagesse Pour vous faire sourire, grincer des dents – ou réfléchir –, ici, chaque semaine, une sélection subjective, la mienne, de ce qui a été dit ou écrit au cours des siècles par des hommes et des femmes qui avaient des choses intéressantes ou drôles à nous dire. B.B.Y. u On contient sa mort comme le fruit son noyau. Rainer Maria Rilke u En politique, il faut donner ce qu’on n’a pas et promettre ce qu’on ne peut pas donner. Louis XI u Il est très difficile de faire entrer une femme dans sa quarantième année. Et plus difficile encore de l’en faire sortir. André Roussin u Les gens à qui tout réussit sont souvent déconcertés et lâches dans l’adversité. Leur cœur n’est pas fait pour l’échec. Jean Dutourd N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

u Avec mon mari, on peut se parler que si c’est lui qui parle. Nouvelles Brèves de comptoir u La seule différence entre les Juifs et les catholiques, c’est que les premiers sont nés coupables et que les seconds ont appris à l’être à l’école. Elayne Boosler u La maison de la haine se bâtit avec les pierres des offenses. Proverbe espagnol u L’homme de bien ne demande rien qu’à lui-même ; l’homme de peu demande tout aux autres. Confucius

u Les chiens vous regardent avec vénération ; les chats vous toisent avec dédain. Il n’y a que les cochons qui vous considèrent comme leurs égaux. Winston Churchill u Les cadeaux sont comme les conseils : ils font plaisir surtout à ceux qui les donnent. Édouard Herriot u Ce n’est pas la peine d’avoir du talent à la cinquième ligne si le lecteur ne dépasse pas la troisième. Françoise Giroud u De toutes les perversions sexuelles, la chasteté est la plus dangereuse. George Bernard Shaw JEUNE AFRIQUE


Vision accomplie. La nouvelle Classe S. Repenser les limites du possible est une obligation toute naturelle pour l’inventeur de l’automobile. La nouvelle Classe S dépasse les exigences les plus pointues en termes de confort, de sécurité et de style en alliant la technologie à l’esthétique pour créer un chef-d’œuvre sur roues. www.mercedes-benz.com

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Éditorial

Marwane Ben Yahmed

PHOTOS DE COUVERTURES : ÉDITION INTERNATIONALE ET AFRIQUE SUBSAHARIENNE : YOURI LENQUETTE ; ANDREW PARSONS/ZUMA/REA ; ÉDITION MAGHREB & MOYEN-ORIENT : NIKO GUIDO

Un naufrage africain

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AMPEDUSA, petite île italienne de 20 km2 incrustée entre la Sicile, Malte et la Tunisie. Le plus grand cimetière marin du monde, théâtre paradisiaque de cauchemars à répétition : 17 000 morts depuis 20 ans… Le 3 octobre, énième tragédie avec le naufrage d’une embarcation qui transportait près de 500 de ces damnés de la terre que sont, au XXIe siècle, ces migrants africains qui ne cherchent qu’à survivre. Ici originaires de la Corne de l’Afrique pour la plupart, mais aussi du Maghreb, d’Afrique de l’Ouest ou d’Afrique centrale. La maire de Lampedusa, Giusi Nicolini, résume en quelques mots l’horreur de ces drames permanents : « On n’a plus de place, ni pour les vivants ni pour les morts [plus de 300 !]. » Avant d’accuser l’Europe de « détourner le regard ».

12 MALI IBK EN TENUE DE COMBAT Confronté à un triple péril, le nouveau président affiche la plus grande fermeté.

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L’Europe, cette citadelle assiégée qui ne cesse d’élever ses remparts. Seul résultat : l’augmentation exponentielle du nombre de victimes, noyées ou mortes d’épuisement, contraintes à des itinéraires toujours plus longs et plus dangereux, souvent hors saison, c’est-à-dire en hiver, quand les tempêtes se déchaînent. Échec patent d’une guerre déclarée aux clandestins, au regard des principes moraux qui ont fondé l’UE mais aussi, comme on le voit, sur le plan de l’efficacité. Les différentes politiques menées jusqu’ici (expulsions musclées, camps de refoulement au Maghreb, entraves au regroupement familial, à la scolarité, à l’accès aux soins, immigration « choisie », arrangements avec le droit international, etc.) sont loin d’avoir tari le flot des candidats à une vie meilleure. Le procès de cette forteresse qui se transforme chaque jour un peu plus en tour d’ivoire ne doit pas cacher la responsabilité, immense, des Africains et de leurs dirigeants en particulier. Qui font comme si ce problème ne les concernait pas – a-t-on entendu une quelconque réaction de nos chefs, Union africaine comprise, au drame de Lampedusa ? Ce serait donc aux seuls pays européens, par ailleurs en plein marasme économique, de s’en charger, d’accueillir leurs ressortissants, pendant qu’eux se pavanent de sommets en conférences pour vendre leurs marottes du moment, l’émergence, les taux de croissance à deux chiffres, les investissements ? Si l’Europe détourne le regard, que dire de l’Afrique ? Qui n’est même pas capable de se soucier d’une jeunesse active, inventive, courageuse, prête à tout pour s’en sortir ou réussir. Ceux qui en arrivent à traverser des océans au péril de leur vie ne sont pas, contrairement à ce que certains pensent, la lie de leurs populations, des problèmes en moins à gérer dont on se débarrasse chez les autres comme des poubelles chez le voisin. Au contraire, ils pourraient soulever des montagnes chez eux. Qu’ils soient de plus en plus nombreux à vouloir affronter le Styx méditerranéen, dans l’indifférence générale, en dit long sur l’état de nos sociétés… l N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

SOUDAN ENVERS ET CONTRE TOUS Omar el-Béchir sait que les manifestants veulent le chasser du pouvoir, que rien ne va plus depuis la sécession du Sud et qu’il est contesté jusque dans les rangs de son propre parti… Mais il s’accroche !

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Ce que je crois Par Béchir Ben Yahmed Confidentiel

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L A SEM A IN E D E J EU N E A F RIQ U E

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Mali IBK en tenue de combat Maroc Trois belles en goguette Afrique Ça se bouscule au portillon Interview Alexandre Vilgrain, président du Conseil français des investisseurs en Afrique Cour pénale internationale Le front du refus Mode Adama a de l’étoffe États-Unis Hillary fait fantasmer Laurent Monsengwo À la droite du Saint-Père Ali Benflis Retour de flamme Tour du monde

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G RA N D A N G L E

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Enquête Rififi à Conakry

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A F RIQ U E SU BSA H A RIEN N E

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Soudan Envers et contre tous Burkina François Compaoré, le frère qui ne dit pas non Madagascar Liquidation avant fermeture JEUNE AFRIQUE


Dans Jeune Afrique et nulle part ailleurs

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GRAND ANGLE

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GUINÉE Rififi à Conakry

LITTÉRATURE L’IMPÔT DU SANG Raphaël Confiant revient sur un pan de l’histoire de la Martinique : le recrutement de « tirailleurs » antillais lors de la Première Guerre mondiale.

Complots, coup d’État, corruption… Rien ne va plus entre le milliardaire Beny Steinmetz et le président guinéen Alpha Condé.

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GHANA LA DÉMOCRATIE À L’ÉPREUVE • Politique : tête haute • Économie : attendu au tournant • Société : le retour de la diaspora

TUNISIE JIHAD DU SEXE Nié ou minimisé par les uns, exagéré par les autres, l’enrôlement de jeunes filles pour satisfaire les besoins sexuels des combattants syriens est désormais avéré. Enquête.

SPÉCIA

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M AGHREB & MOY E N - O R I E N T

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Tunisie Jihad du sexe, fantasmes et réalité Algérie Ahmed Benbitour, seul contre personne

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Interview Nabil Mouline, chercheur au CNRS Dialogue interreligieux L’appel de Fès

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E UROPE, AMÉR I Q U E S, A S I E

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France Le come-back du vieux sage Venezuela Maduro ou l’éternel complot États-Unis On ferme !` Parcours Qudus Onikeku, acrobate sans frontières Chine Laboratoire de la croissance Grèce À l’Aube dorée, le temps se gâte

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L E PLUS DE JEU N E AFR I Q U E

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Ghana La démocratie à l’épreuve

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É CON OMIE

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Nigeria L’eldorado… de demain Côte d’Ivoire La filière hévéa sous pression Les indiscrets Énergie GE turbine en Algérie

DOSSIER AUTO LE MAGHREB, ROUE DE SECOURS POUR LES FRANÇAIS ? Confrontés à la baisse drastique de leurs ventes en Europe, PSA et Renault ont trouvé un relais de croissance vital en Afrique du Nord.

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Interview Mamadou Dia, directeur général de la Sénégalaise des eaux Algérie Comment Axa s’est imposé Gestion d’actifs RMA se lance aussi Baromètre

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D O SSIER AUT O M O BIL E

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Stratégie Le Maghreb, roue de secours pour les Français ?

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JEUNE AFRIQUE

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C U LT U RE & MÉD IA S Littérature L’impôt du sang Théâtre Requiem pour Bisesero Cinéma Kechiche tel qu’en lui-même Exposition Africa pop La semaine culturelle de Jeune Afrique Kiosque La revue V O U S & NO U S Le courrier des lecteurs Post-scriptum

N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013


NISSAN EN AFRIQUE INNOVATION ET ENTHOUSIASME POUR TOUS Grâce à un réseau couvrant 50 pays d’Afrique, axé sur l’innovation et s’appuyant sur une solide réputation, Nissan est en bonne voie pour atteindre une importante croissance de mi-trimestre. PRÉSENT DANS 50 PAYS EN AFRIQUE Nissan jouit d’une situation forte pour générer de la croissance sur le continent africain. Nous espérons que cette position contribuera de manière significative au plan global de mitrimestre, Power88. Avec une part de marché en Afrique légèrement inférieure à 8 %, et s’appuyant sur une augmentation des ventes de près de 20 % l’année passée, Nissan poursuivra sur sa lancée en présentant de nouveaux modèles et en étendant son réseau de concessionnaires.

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France-Congo Jusqu’où iront les juges?

BAUDOUIN MOUANDA

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p Pierre Oba, le ministre congolais des Mines.

TUNISIE NIDA TOUNES EN QUÊTE DE FONDS

En tête des intentions de vote pour les élections législatives et présidentielle tunisiennes maisdésireuxdeconsoliderses finances, Nida Tounes, le parti de Béji Caïd Essebsi, consulte diverses agences françaises spécialisées dans l’élaboration de stratégies de levées de fonds. C’est notamment le cas d’Optimus, qui travaille essentiellement dans l’humanitaire, mais qui a aussi contribué à recueillir les 11 millions d’euros qui ont permis à l’UMP d’équilibrer les comptes de la dernière campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. Pour l’instant, il ne s’agit que de contacts préliminaires et de mise en relation. Quelle qu’elle soit, l’agence choisie devra travailler uniquement sur le réseau tunisien, la loi N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

près Norbert Dabira et Justin Lekoundzou, Pierre Oba est la troisième personnalité congolaise en moins de deux mois – et le second ministre en exercice – à avoir reçu la visite des enquêteurs du pôle spécialisé du tribunal de grande instance de Paris. Les deux logements que l’actuel ministre des Mines possède en banlieue parisienne ont été perquisitionnés le 26 septembre en sa présence, et une convocation pour le 23 octobre lui a été adressée par un juge d’instruction. Motif, comme pour Dabira et Lekoundzou : l’affaire des « disparus du Beach », en 1999 (Oba était à l’époque ministre de la Sécurité). Close à Brazzaville, où un procès a eu lieu, depuis 2006 et pratiquement éteinte en France sous la présidence de Nicolas Sarkozy, la procédure a été relancée sous François Hollande par la juge Emmanuelle Ducos, déjà chargée de plusieurs « affaires africaines » (Kieffer, Ibni Oumar Mahamat Saleh, génocidaires rwandais présumés, etc.), sans que Christiane Taubira, la ministre de la Justice, y fasse obstacle. D’où l’agacement du président Sassou Nguesso de voir ainsi inquiétés certains de ses plus proches collaborateurs en visite en France. D’où aussi la mobilisation du parti au pouvoir au Congo contre les « ingérences » de la justice française. Décision a semble-t-il été prise de n’autoriser aucun membre du gouvernement congolais à déférer aux convocations des juges parisiens. l

interdisant les financements étrangers. CÔTE D’IVOIRE KOFI ANNAN OFFRE SA MÉDIATION

Faire revenir le Front populaire ivoirien de Laurent Gbagbo dans le jeu électoral : c’est l’un des enjeux de la visite de

Kofi Annan à Abidjan, du 8 au 10 octobre. L’ancien secrétaire généraldel’ONUdevaitnotamment rencontrer, entre autres, Alassane Ouattara, le chef de l’État, Pascal Affi Nguessan, le président du FPI (libéré de prison le 5 août), et Charles Konan Banny, le président de

laCommissionDialogue,Vérité etRéconciliation.Lediplomate ghanéen, qui était déjà venu à Abidjanenmai2011,aentrepris cettemissionaunomdesElders, ungroupeindépendantdeprestigieux aînés qui réunit notamment Desmond Tutu, Lakhdar Brahimi et Jimmy Carter.

Côte d’Ivoire Quand Bédié se lâche C’EST UNE PETITE PHRASE passée presque inaperçue. Le 3 octobre, devant les délégués au XIIe congrès du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), Henri Konan Bédié, son président, n’y est pas allé avec le dos de la cuillère ! « À l’issue du premier tour de la présidentielle de 2010, a-t-il affirmé, il est bon de rappeler que le rang que j’ai occupé n’était pas le mien. J’ai pu noter, preuve à l’appui, que j’ai été spolié d’au moins 600 000 voix. » Rien que ça ! Bédié affirme en avoir informé l’ONU, le Conseil constitutionnel et la Commission électorale. Faut-il comprendre que c’est lui qui aurait dû figurer au second tour en lieu et place d’Alassane Ouattara ? Bédié ne le dit pas, mais… le suggère fortement. Quant au motif avancé par l’ex-président pour justifier le fait qu’il ait finalement jeté l’éponge – la crainte de passer pour un mauvais perdant –, il paraît un peu court et laisse la place à de multiples spéculations. Mais une chose est sûre : le Rassemblement des républicains (RDR), le parti au pouvoir, a dû apprécier ! l JEUNE AFRIQUE


Retrouvez notre rubrique « Les indiscrets », consacrée aux informations confidentielles économiques, en page 91.

Politique, économie, culture & société

Déserté depuis quelques semaines par les cadres du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) – qui se sont égaillés de Nouakchott à Alger et de Bamako à Kidal –, Ouagadougou s’apprête à accueillir ceux-ci de nouveau du 10 au 12 octobre. Les leaders touaregs vont en effet s’efforcer de régler, si possible discrètement, les nombreux différends qui minent l’unité du mouvement et adopter une stratégie commune. Débats tendus en perspective entre les partisans du dialogue avec Bamako et les autres. Quelques jours plus tard, le 20 octobre, le MNLA sera rejoint dans la capitale burkinabè par des délégations du Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) et du Mouvementarabedel’Azawad (MAA) venues du Nord-Mali. La rencontre sera organisée avec l’aide des Nations unies et de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Les participants s’efforceront de fumer le calumet de la paix (des combattants du MAA et du MNLA continuent de s’affronter sur le terrain), de s’entendre sur une plateforme de revendications communes et de nommer un coordinateur général. UNION AFRICAINE UN ALGÉRIEN POUR SUCCÉDER À LAMAMRA

Depuis la nomination de Ramtane Lamamra à la tête du ministère algérien des Affaires étrangères, le poste de commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine est vacant. Il devrait être pourvu lors du sommet extraordinaire des chefs d’État et de gouvernement qui se tiendra le 12 octobre à Addis-Abeba. Lamamra ayant quitté ses fonctions en cours de mandat, le nouveau « Monsieur JEUNE AFRIQUE

Arts plastiques Ousmane Sow habillé par Alaïa LE SCULPTEUR SÉNÉGALAIS Ousmane Sow sera admis le 11 décembre sous la coupole de l’Académie des beaux-arts (l’une des cinq académies composant l’Institut de France), dans la section des membres associés étrangers. S’il a lui-même créé le pommeau de son épée, c’est Azzedine Alaïa, le styliste d’origine tunisienne, qui s’est chargé de son costume – et le lui a offert. Sow travaille actuellement à une sculpture représentant Toussaint-Louverture pour la ville de La Rochelle, dans l’ouest de la France. l

Sécurité » de l’UA sera l’un de ses compatriotes. Selon des sources diplomatiques, c’est Smaïl Chergui, l’ambassadeur à Moscou, qui aurait été choisi. LE CHIFFRE

8000

C’est, selon l’ONU, le nombre de personnes officiellement détenues en Libye pour des crimes liés au conflit de 2011 entre kaddafistes et rebelles. La mission onusienne sur place, l’Unsmil, a par ailleurs recensé 27 cas de mort en détention, dont 11 au cours des six premiers mois de cette année. Dans les prisons gérées par les brigades armées, la pratique de la torture est systématique.

KENYA VAINES ALERTES

Avant même le drame du Westgate Mall, on savait qu’Israël avait informé le Kenya qu’une attaque terroriste était en préparation sur son territoire. Ce que l’on sait

JEAN-MICHEL TURPIN/DIVERGENCE

MALI RENDEZ-VOUS À OUAGADOUGOU

moins, c’est que les services éthiopiens avaient eux aussi évoqué, dès la mi-juillet, un risque d’attentat imminent à Nairobi. L’alerte avait été donnée lors d’une réunion entre les différents pays contributeurs de la Mission de l’Union africaine en Somalie (Amisom) et leurs partenaires régionaux, à Mombasa. Selon une source sécuritaire éthiopienne, 17 terroristes présumés, certains établis dans la capitale kényane, avaient été identifiés. Parmi eux, des Américains, des Canadiens et des Britanniques d’origine somalienne. Le lieu de l’attaque n’avait en revanche pas pu être découvert. CENTRAFRIQUE LES PRIVÉS FRANÇAIS LÂCHENT DJOTODIA

L’escapade centrafricaine de la vingtaine d’agents de sécurité français engagés par Michel Djotodia, le président de la transition, a tourné court. Arrivés à Bangui à la mi-juin, ils ont plié bagage le 3 octobre, faute d’avoir été payés. Ils auraient même été contraints

d’acheter eux-mêmes leur billet de retour! Commandés par Jérôme Gomboc, un ancien du 3e régiment de parachutistes d’infanterie de marine (RPIMa), ils sont salariés de la société Roussel G-Sécurité, dont le siège est à Fréjus, dans le sud de la France. Ils assuraient la protection rapprochée de Djotodia et la formation de la garde présidentielle. Nommé en août conseiller spécial chargé de la sécurité du président de la transition, Gomboc se trouve pour sa part toujours à Bangui.

ALGÉRIE COUP DE SIROCCO À L’ÉTAT-MAJOR Après les changements opérés au sein du commandement du Département Renseignement et Sécurité (DRS, services secrets) et le renforcement de la position du général Ahmed Gaïd Salah, qui cumule désormais les fonctions de chef d’état-major et de vice-ministre de la Défense, le président Abdelaziz Bouteflika ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Une inspection générale de l’armée, institution disparue depuis près d’un quart de siècle dont le dernier patron fut le défunt général Abdallah Belhouchet, va en effet être créée. C’est le général Ben Ali Ben Ali (72 ans), actuel chef de la Ve région militaire (Constantine) et vétéran de l’Armée de libération nationale (ALN), qui a été pressenti pour en prendre le commandement. Un remaniement au sein de l’état-major est en outre attendu. Toutes ces décisions devraient être annoncées le 1er novembre, à l’occasion du 59e anniversaire du déclenchement de la guerre de libération. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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La semaine de Jeune Afrique

IBK en tenue

MALI

de combat Attentat et menaces d’Aqmi, échauffourées avec les rebelles touaregs, fronde d’une trentaine d’éléments de l’ancienne junte… Confronté à ce triple péril, le nouveau président affiche la plus grande fermeté.

u Ibrahim Boubacar Keïta.


L’événement RÉMI CARAYOL

ses maîtres après qu’ils l’ont amené au pouvoir lors d’une pitoyable mascarade électorale. » Le message l n’aura pas fallu plus d’un mois après sa prise est clair : le régime d’IBK, suppôt de la France, est de fonctions, le 4 septembre, pour ramener désormais une cible. Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) à la dure réalité Defait,ens’attaquantàunecasernedeTombouctou, de ce que sera son mandat. Dans l’immense la nébuleuse a marqué son retour dans le NordMali. Depuis le début de l’opération Serval, seul le poudrière qu’est devenu le Mali, la première mèche a été allumée à Kidal. Le président Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de se trouvait à New York, à l’Assemblée générale des l’Ouest (Mujao) avait revendiqué des attentats. Sonné Nations unies, quand la nouvelle est tombée, le par l’offensive des armées française et tchadienne 27 septembre en milieu de journée. Quelques heures qui aurait fait, selon Paris, entre 600 et 1 000 victimes plus tôt – il faisait déjà nuit au pied de l’Adrar des dans ses rangs, Aqmi semblait avoir fui le champ Ifoghas –, des soldats maliens avaient été visés par de bataille. « Ils ont disparu un moment, confirme une attaque à la grenade devant une banque de la une source sécuritaire française. Mais ils se sont ville. Bilan : deux blessés. réorganisés. » Puis plusieurs points sensibles du pays se sont Ce n’est pas un hasard si l’attaque a été menée par embrasés. Comme si l’on avait voulu, en l’espace deux hommes de la katiba Tariq Ibn Ziyad, celle que de trois jours, dessiner une cartographie des périls dirigea Abou Zeid avant de périr sous les bombes qui guettent le nouveau régime. françaises en mars, et qui dispose d’un nouveau Tombouctou, le 28 septembre : attentat-suicide leader en la personne d’Abou Saïd el-Djazaïri. « Les revendiquéparAl-QaïdaauMaghrebislamique(Aqmi) nouveaux chefs vont vouloir asseoir leur autorité, contre une caserne (bilan officiel : nous prenons la menace au sérieux », quatre kamikazes et deux civils tués, souligne Soumeylou Boubèye Maïga, Les jihadistes six soldats blessés). Kidal à nouveau, le ministre de la Défense. semblaient avoir le 29 septembre: échanges de tirs entre Côté français, si l’on se montre des éléments du Mouvement national moins serein qu’il y a un mois, c’est fui le champ de libération de l’Azawad et l’armée parce qu’il y a eu des signes avantde bataille. Ils malienne (trois blessés dans les rangs coureurs. Quelques semaines avant ont reconstitué du MNLA). Enfin, le lendemain, à Kati l’attentat, un camion bourré d’explo– le fief des ex-putschistes, à 15 km de sifs avait été intercepté dans le Nord. leurs forces. Bamako–,fronded’unetrentained’éléLes services de renseignements ont ments de l’ancienne junte réclamant une promotion. également noté que les mouvements entre le sud de la Ce dernier épisode a contraint IBK à écourter de Libye, où une partie des jihadistes se seraient réfugiés, deux jours la visite officielle qu’il avait entamée en et le nord du Mali s’intensifiaient. Les Français ont France. Dès la fin de son entretien avec François d’ailleurs fait de cette autoroute de l’internationale Hollande, le 1er octobre, il a sauté dans son avion. Le salafiste une priorité : ils veulent la casser. lendemain, premier discours de crise en direct à la « Nous ne sommes pas dupes, ils attendent le télévision. Et premiers uppercuts. C’est un homme départ de nos troupes pour réoccuper le terrain », visiblement irrité, « indigné » et « humilié » par la mutiadmet un diplomate français. On comprend qu’IBK nerie de Kati, cette « gifle à la nation », qui s’exprime, ne soit pas pressé de voir les soldats français quitter n’hésitant pas à prendre quelques libertés avec le le pays. Ils sont encore près de 3 000, et l’objectif de discours que lui ont préparé ses conseillers pour réduire leur nombre des deux tiers d’ici à la fin de réaffirmer sa fermeté. Commentaire de l’un de ses l’année a été reporté sine die. ministres : « Fini l’euphorie de la victoire. Nous avons un pays à reconstruire. » Et trois urgences à régler. Kidal, opération déminage

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VINCENT FOURNIER/JA

Aqmi, menace permanente Des jihadistes d’Aqmi IBK n’a pas fait mention dans son adresse à la nation. Pas question pour lui de répondre au communiqué insultant de la nébuleuse publié le 30 septembre par le site mauritanien Al Akhbar. Signé de « l’Émirat du Sahara d’Aqmi », ce texte revendique l’attentat-suicide de Tombouctou, et s’en prend une nouvelle fois à Paris : « Nous disons au président de la France : nous avons vu les manifestations clownesques que tu as orchestrées dans le stade de Bamako [le 19 septembre], où a été investie cette chose dénommée Ibrahim Boubacar Keïta, tel un fonctionnaire investi [de la défense] des intérêts de

De Kidal, IBK a un peu plus parlé lors de son allocution. « Ma main reste tendue », a-t-il indiqué, rappelant sa volonté de mener une vaste réforme de décentralisation. Mais il n’est guère allé plus loin, conscient que, dans les négociations engagées avec les rebelles touaregs, chaque mot peut avoir de graves conséquences. En s’opposant, mi-septembre, à toute idée d’autonomie, le président s’est attiré les foudres des leaders du MNLA. La veille des heurts du 27 septembre à Kidal, les trois groupes insurrectionnels du Nord, le MNLA, le Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) et le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA), avaient invoqué ces « déclarations belliqueuses » d’IBK pour justifier leur décision de l l l N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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HABIBOU KOUYATE/AFP

t Devant le camp de Kati, près de Bamako, le 3 octobre.

suspendre leur participation à la mise en œuvre de l’accord-cadre de Ouagadougou signé le 18 juin. Voilà pour la partie visible des négociations – ce qu’un conseiller du président appelle « des gesticulations médiatiques ». En coulisses, celles-ci se poursuivent et, d’un côté comme de l’autre, on assure rester ouvert aux discussions. Les affrontements de Kidal n’ont rien changé à la stratégie d’IBK. Celui-ci prône un dialogue franc et direct, mais a fixé une ligne à ne pas franchir : ni autonomie, ni fédération. Loin du brouhaha des armes, Cheikh Oumar Diarrah, le ministre de la Réconciliation et du Développement des régions du Nord, qui s’est entouré d’une équipe de diplomates et de hauts fonctionnaires, multiplie les rencontres informelles avec tous les groupes. Certains sont même représentés à Bamako, mais il ne veut pas dire lesquels. « Cela pourrait engendrer des problèmes », soufflet-il. Selon nos sources, Mohamed Ag Intallah, le fils de l’aménokal Intallah Ag Attaher, une autorité morale qui reste très influente à Kidal malgré son grand âge, est de ceux-là. Ancien cadre du MNLA, il est aujourd’hui à la tête du HCUA. Mais, officiellement, il est à Bamako en tant que « notable » de la ville. La discrétion est de mise car les dissensions au sein de ces groupes sont nombreuses. « Certains veulent négocier, d’autres sont sur une ligne plus dure. Il y a aussi des conflits d’intérêts et de personnes. Et les radicaux accusent ceux qui négocient d’être des vendus », précise un expert du Sahel. « Dans les années 1970 comme dans les années 2000, il y a toujours eu des divisions au moment des négociations, nuance Diarrah. Cela ne doit pas nous empêcher d’avancer. Il faut donner du temps à certains groupes afin qu’ils puissent assumer publiquement leur position. » Pour rétablir la confiance, le ministre a ordonné le 2 octobre la libération de vingt-trois détenus considérés comme des combattants ou des sympathisants du MNLA. Et compte agir de même dans les prochaines semaines. lll

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Kati, vider l’abcès À l’égard des mutins de l’armée nationale, la patience n’est en revanche plus de mise. Dans son allocution, IBK n’a pas fait dans la nuance. « Il suffit! a-t-il vitupéré. Kati ne fera plus peur à Bamako! » Au même moment, la trentaine d’hommes qui faisaient le siège de la maison du général Sanogo, dans le camp militaire de Kati, pour réclamer les mêmes privilèges que lui (des avantages, et surtout une promotion), étaient désarmés et mis aux arrêts. « S’ils pensaient obtenir quelque chose en employant la force, ils se sont trompés d’époque », glisse un général proche du président. Ils auraient dû s’en douter lorsque, la veille, Soumeylou Boubèye Maïga, le ministre de la Défense, était venu Pendant son négocier la libération du lieuteallocution télévisée, nant-colonel Diallo, le bras droit les mutins ont été de Sanogo, qu’ils avaient séquestré désarmés et aussitôt et blessé. Ils lui avaient réclamé des indemnités et un avancement, mais mis aux arrêts. Maïga n’avait rien lâché. Il savait que, malgré des appels diffusés dans les autres casernes du pays, leur mouvement ne serait cette fois pas suivi. Ce que le ministre qualifie de « dernier soubresaut » du putsch de 2012 a permis à IBK de solder l’héritage du gouvernement précédent. Non seulement il en a profité pour annoncer la dissolution du Comité militaire pour la réforme des forces de sécurité et de défense, cet objet institutionnel non identifié créé pour caser Sanogo et ses proches en début d’année, mais, en plus, l’intervention des forces spéciales à Kati pour mater la mutinerie a permis de désarmer les hommes du bouillant capitaine. D’une pierre deux coups… IBK s’est également adressé à la hiérarchie: « Que la chaîne de commandement se fasse obéir », a-t-il averti. Ajoutant que si elle s’avouait « impuissante et incompétente », il prendrait ses responsabilités. Au sein de l’état-major, le message a, paraît-il, été reçu cinq sur cinq. l JEUNE AFRIQUE


Modèle original d’une intégration juridique réussie, l’OHADA promeut depuis 20 ans un droit des affaires moderne et harmonisé, qui procure aux acteurs économiques la sécurité nécessaire pour investir sur le continent africain

Difcom - Creapub / © V. Fournier pour JA

Vingt années se sont écoulées depuis la signature, le 17 octobre 1993 à Port-Louis (République de Maurice), du Traité fondateur de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA). Vingt années au cours desquelles les Etats africains ont manifesté leur confiance renouvelée dans les vertus d’un droit commun et d’un système original de règlement des contentieux d’affaires, afin de restaurer un climat de confiance propice aux investissements, et de créer un nouveau pôle de développement en Afrique. Pour remplir sa mission, l’OHADA a été dotée d’institutions opérationnelles (le Secrétariat Permanent, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, l’École Régionale Supérieure de la Magistrature) dont l’armature s’est renforcée depuis la révision, le 17 octobre 2008 à Québec (Québec, Canada), du Professeur Dorothé Cossi SOSSA, Traité constitutif. L’arseSecrétaire Permanent nal normatif est, quant à de l’OHADA lui, riche de neuf « Actes Uniformes », dont certains ont déjà été actualisés. De nouveaux champs et techniques d’harmonisation juridique sont explorés, afin de proposer une réponse toujours plus appropriée aux besoins de droit des acteurs économiques. L’Organisation poursuit, par ailleurs, son expansion géographique, en droite ligne de son ambition panafricaine : elle compte à ce jour dix sept États membres, et suscite l’intérêt croissant de nouveaux pays.

COMMUNIQUÉ

En vingt ans d’existence, l’OHADA s’est mondialement imposée comme un modèle original d’intégration juridique. La confiance et le soutien de la Communauté internationale se consolident et s’amplifient en sa faveur au fil des ans. Ainsi, le G8 (Réunion de Gleenagles, juillet 2005), l’Organisation Internationale de la Francophonie, le Programme des Nations Unies pour le Développement, l’Union européenne, le Groupe de la Banque mondiale, le Groupe de la Banque Africaine de Développement, le Fonds Investment Climate Facility for Africa (ICF), la Banque de Développement de Chine, la République Française, la Confédération suisse, le Royaume de Belgique, le Canada, notamment, fondent sur l’OHADA le même espoir que celui partagé par les Etats membres : faire du droit un réel levier pour le progrès économique. Des efforts restent à faire, certes, quant à l’application complète et effective du mécanisme de financement autonome, l’opérationnalisation du multilinguisme, ou encore la finalisation de l’informatisation des fichiers nationaux et régionaux du Registre du Commerce et du Crédit Mobilier (RCCM), très attendue par le marché du crédit. Mais l’œuvre accomplie jusqu’ici est immense et a largement contribué à la croissance économique soutenue que nos États enregistrent depuis quelques années. Je voudrais, à l’occasion de ce vingtième anniversaire, rendre hommage à nos Chefs d’État et de Gouvernement qui ont su doter l’Afrique d’un si précieux outil, exprimer la gratitude de l’Organisation aux partenaires techniques et financiers qui accompagnent son action, et former le vœu que tous les acteurs concernés concourent à maintenir allumée la flamme du rayonnement de l’OHADA et du progrès du continent africain.

www.ohada.org


La semaine de J.A. Décryptage

Maroc Trois belles en goguette Elles rivalisent d’initiatives pour attirer touristes et investisseurs. Rabat, Casablanca et Agadir ont profité d’un forum mondial des élus pour vanter leurs atouts.

B

razzaville et Bogotá, Paris et Istanbul, Dakar et Barcelone… Du 1 er au 4 octobre, des dizaines de villes se sont transportées à Rabat, capitale du Maroc, pour le 4e sommet mondial des dirigeants locaux et régionaux. Véritable vedette de l’événement, le royaume chérifien est le premier État d’Afrique où l’organisation Cités et gouvernements locaux unis (CGLU) organise sa grande conférence trisannuelle. Il est aussi pionnier sur le continent grâce à sa politique de décentralisation, inscrite dans la Constitution en 2011. Exemples d’expériences municipales bien différenciées, trois de ses villes se lancent dans une course à l’attractivité : Rabat la politique, Casablanca l’économique et Agadir la touristique. Au stand Casablanca, Mohamed Sajid, le maire, se félicite de voir son principal défi en passe d’être relevé : « En 2004, on recensait 100 000 foyers dans les bidonvilles. Aujourd’hui, 70 % de ces zones ont été éliminées. » À l’origine de cette efficacité, une délégation de compétences aux autorités locales: « Nous avons innové LE DESSIN DE LA SEMAINE

HASSAN OUAZZANI

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p Le 4e sommet mondial des dirigeants locaux et régionaux, à Rabat, le 3 octobre.

en favorisant “l’autoconstruction” : des parcelles ont été offertes aux familles et la société constructrice se finance en récupérant la moitié du logement. » Confrontée au même problème, Rabat s’est surtout attelée à sortir de sa torpeur de capitale administrative. « La ville est devenue un grand centre culturel et elle s’autonomise sur le plan économique avec des zones comme Technopolis », explique Fathallah Oualalou, son maire. Au même titre que Casablanca, siège local de grandes sociétés comme IBM, Dell ou Bull, Agadir veut aussi son pôle technologique. Mais, pour le maire de Rabat, le marché est loin d’excéderlademande:«Ilyacompétition,certes,

mais cela permet d’éviter les monopoles locaux. Nous sommes complémentaires. » À Agadir, aménagement urbain et qualité de l’environnement sont les priorités du maire, Tariq Kabbage. Comme la transformation en parc botanique de la zone dévastée par le tremblement de terre de 1960. Néanmoins, l’élu ne ménage pas ses critiques : « La décentralisation a beau être inscrite dans la Constitution, les lois sur les transferts de compétence n’ont toujours pas été votées. Le discours du roi en ouverture du sommet va-t-il relancer la machine ? On l’espère… » l LAURENT DE SAINT PÉRIER, envoyé spécial à Rabat

Chappatte • International Herald Tribune CHINE - ÉTATS-UNIS ÔTE-TOI DE LÀ QUE JE M’Y METTE

CONFRONTÉ AU BLOCAGE de son budget fédéral (le célèbre shutdown), Barack Obama a dû renoncer à se rendre au forum de coopération de l’Asie-Pacifique et au sommet de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (Asean). Depuis des mois, il avançait ses pions en vue de susciter la création d’une vaste zone de libreéchange réunissant douze pays de la région. À Pékin, son homologue Xi Jinping se frotte les mains : l’absence de l’Américain lui laisse la voie libre pour poursuivre son offensive de charme en direction de ses voisins. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

JEUNE AFRIQUE


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Afrique Ça se bouscule au portillon

JEUNEAFRIQUE.COM

Une étude de l’Institut national d’études démographiques revoit à la hausse les prévisions de croissance de la population du continent. En 2100, un Terrien sur trois sera africain.

E

n 2050, un quart de la populaContrairement à l’Asie dans les tion mondiale vivra en Afrique années 1960, « aucune chute brutale et peut-être un tiers à la fin du de la fécondité n’a été observée en siècle. Dans « Tous les pays Afrique », poursuit Pison. Elle atteint du monde », sa dernière étude sur les aujourd’hui 4,8 enfants par femme, évolutions de la population mondiale, contre 2,5 à l’échelle mondiale. Un facteur qui se conjugue avec publiée à Paris le 2 octobre, En 2013, 41 % une baisse de la mortalité l’Institut national d’études infantile plus rapide que démographiques (Ined) des habitants estime que la planète, prévu, dans le monde et en du continent qui compte aujourd’hui Afrique en particulier. La ont moins de 7,14 milliards d’habitants, population du continent va devrait en abriter 9,73 mildonc croître plus vite que 15 ans. liards en 2050, puis entre partout ailleurs ; le Nigeria, 10 et 11 milliards en 2100. Selon ces aujourd’hui septième pays le plus peuprévisions « fondées sur le prolongeplé de la planète devrait ainsi, en 2050, ment des tendances actuelles », explique intégrer le tiercé de tête derrière l’Inde Gilles Pison, l’auteur de l’étude, l’Afrique et la Chine. À cette date, trois pays africomptera 2,4 milliards d’âmes en 2050 cains (Nigeria, RD Congo et Éthiopie) figureront parmi les dix premiers. l et 4,2 milliards un demi-siècle plus tard, soit cinq fois plus qu’en 2000. OLIVIER CASLIN

Les poids lourds de la population mondiale en 2050

?

QUIZ

Connaissez-vous vraiment l’Afrique des mégapoles ?

Répondez à nos questions et gagnez notre numéro spécial « Villes africaines » !

RÉSEAUX SOCIAUX

#kebetu #kony2012

#ci225 Les hashtags qui font le buzz en Afrique

Chine 2e 1 314

Russie

9e 143,5 13e 132

États-Unis 3e 316,2

6e 190,7

Nigeria

4e 400

7e 174,9

Brésil 5e 195,5

3 444

14e 89,2 10e 178

RD Congo 7e 227

Japon

e

6 363

Éthiopie e

William Ruto* @WilliamsRuto

1er 1 360,7

Pakistan

10e e 127,3 19 97

Bangladesh

Inde e

2 1276,5

8e 156,6

8e 202

Indonésie 4e 248,5

19e 9e 71,1 182

LE TWEET

« L’idéologie de ceux qui ont tué au Westgate Mall n’est que barbarie. Ce sont des démons venus de l’enfer. » *Vice-président du Kenya

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À LIRE AUSSI

Pays Rang 2013

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Population en millions d’habitants

JEUNE AFRIQUE

Rang 2050

1er 1652

Nick Kaufman, avocat de Charles Blé Goudé : « Le mandat d’arrêt émis par la CPI à l’encontre de mon client met la pression sur la Côte d’Ivoire. »

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Le grandinvité

La semaine de J.A. Décryptage

de l’économie

Alexandre Vilgrain « Les entreprises hexagonales en ont marre de la Françafrique » Pour le président du Conseil français des investisseurs en Afrique, il est urgent d’en finir avec les pratiques d’un autre âge et de se lancer dans la diplomatie économique.

Q

uatrième invité de la grande interview réalisée conjointement par Jeune Afrique et RFI, Alexandre Vilgrain, président du Conseil français des investisseurs en Afrique (Cian), analyse le recul de la France etdesesentreprisessurlecontinent. Celui qui est aussi PDG du groupe agro-industriel Somdiaa livre par ailleurs son opinion sur l’épineuse question de l’agriculture au sud du Sahara, dont les États africains sont loin d’avoir fait une priorité… Le retour des entreprises françaises «Toutlemondeparledel’Afrique, veut y aller… Les choses bougent : Carrefour souhaite s’y installer, L’Oréal, qui vient d’adhérer au Cian, y a sans doute des projets. Cela me rappelle la Chine dans les années 1980. Personne ne s’y risquait, et soudain, tout le monde s’est lancé. » La Françafrique «Lesresponsablespolitiquesfrançais ont tendance à attribuer tous leurs problèmes aux entreprises. Qui est derrière la Françafrique ? D’où venaient les valises africaines? Allaient-elles de France en Afrique ou était-ce l’inverse? À qui étaientellesdestinées?Lesentreprisesfrançaises installées sur le continent en ont marre de la Françafrique. Nous n’apprécions guère de voir des missi dominici,deshommespolitiquesqui n’ontplusdemandat,alleretvenir… Cela brouille l’image de la France. »

VINCENT FOURNIER/J.A.

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• ALEXANDRE VILGRAIN est né le 10 avril 1956. Entré dans la société familiale après des études de droit, il crée en Asie, en 1985, la chaîne de cafés-boulangeries Délifrance, revendue depuis. Il prend la tête de Somdiaa en 1995.

Le climat des affaires « Les gouvernements africains doivent se montrer constants dans leur politique. En l’absence de cadre juridique stable, aucune entreprise n’est tentée de venir. Ce qui a fait la fortunedel’Asie,c’estLeeKuanYew, l’ex-Premier ministre de Singapour. Il a fait du respect de la parole donnée une règle. À partir du moment où une décision est prise, il faut s’y tenir. »

La question du foncier « En Afrique, plusieurs types de droits se superposent: le droit coutumier, les droits de l’État dans les pays anciennement communistes et les droits liés à l’usage… Il faut procéder intelligemment. »

La sécurité « Cette question est importante et nous interpelle. Nous suivons de près ce qui se passe au Nigeria, au Mali, dans le nord du Cameroun, en Centrafrique… C’est assez angoissant. Je n’y prêtais pas attention avant. Maintenant, si. » L’agriculture « Les États la négligent, et c’est criminel. Certes, la production

augmente. Mais le marché mondial pose problème. Produire soi-même demandedesefforts,etlaprotection des industriels a un coût. Les gouvernements africains sont inquiets, car les révoltes naissent du mécontentement face à la hausse des prix des denrées agricoles et à l’arrêt des subventions.Ilfautenfiniraveccette dictature du consommateur. Si l’on ne protège pas l’industrie agricole, laproductionviendraduBrésil.Une politiquecommuneestnécessaire.»

La diplomatie économique

RETROUVEZ l’intégralité de l’interview sur jeuneafrique.com

« C’est justement ce que nous réclamons.Lesmentalitéschangent, en France, sous l’impulsion de Laurent Fabius. Les ambassadeurs nous soutiennent et prennent même parfois les devants. » l

Éco d’ici, éco d’ailleurs, tous les premiers samedis du mois sur RFI à 12 h 10* N 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013 O

Propos recueillis par FRÉDÉRIC MAURY (J.A.) et FRÉDÉRIC GARAT (RFI)

* Heure de Paris, 10 h 10 TU JEUNE AFRIQUE


Genève, 17-19 mars 2014

Le forum des dirigeants des grandes entreprises africaines UNE PLATEFORME EXCEPTIONNELLE DE RENCONTRES. UN OUTIL STRATÉGIQUE POUR DÉVELOPPER VOTRE ACTIVITÉ EN AFRIQUE ET À L’INTERNATIONAL.

www.theafricaceoforum.com

2E ÉDITION


La semaine de J.A. Décryptage 5 septembre, le Parlement kényan a voté une résolution demandant le retrait du pays de la CPI – ce qui ne mettrait de toute façon pas fin à leur procès. Cette décision n’entrera toutefois en application que un an après sa ratification par le gouvernement. Or le président Kenyatta, qui ne souhaite pas donner l’impression de vouloir échapper à la justice, s’est abstenu de le faire pour l’instant.

LEX VAN LIESHOUT/AFP PHOTO/ANP/POOL

p À La Haye, on se défend de rendre une justice dirigée contre les Africains.

Cour pénale internationale Le front du refus Les États membres de l’Union africaine vont-ils se retirer en masse de la CPI ? Réponse lors du sommet extraordinaire convoqué à cet effet à Addis-Abeba, le 12 octobre.

C

ette fois, l’alerte paraît sérieuse. L’Union africaine (UA) a convoqué, pour le 12 octobre, un sommet extraordinaire des chefs d’État et de gouvernement. Son objet : réexaminer ses relations avec la Cour pénale internationale (CPI). Les pays les plus remontés contre cette juridiction n’excluent plus de se retirer du statut de Rome. Depuis longtemps la cour de La Haye est accusée de cibler exclusivement des Africains. Une tendance qui n’est pas près

de s’inverser: les derniers mandats d’arrêt rendus publics, début octobre, visent Charles Blé Goudé, ex-chef des Jeunes patriotes et ancien ministre ivoirien, et Walter Basara, un journaliste kényan. Dès 2009, l’UA avait pris la décision collective de ne tenir aucun compte du mandat émis à l’encontre du président soudanais Omar el-Béchir. Mais c’est surtout l’arrivée au pouvoir au Kenya, en avril dernier, d’Uhuru Kenyatta et de William Ruto (tous deux accusés de crimes contre l’humanité) qui a changé la donne. Le

« CHASSE RACIALE ». Attendait-il un soutien de ses pairs ? Une partie d’entre eux a en tout cas rapidement volé à son secours. Ainsi, en mai, Hailemariam Desalegn, Premier ministre éthiopien et président en exercice de l’UA, a accusé la Cour de se livrer à « une sorte de chasse raciale ». Plusieurs chefs d’État ont profité de leur tribune à l’Assemblée générale des Nations unies, à New York, fin septembre, pour faire part de leurs griefs. « Au lieu de promouvoir la justice et la paix, la CPI a sapé tous les efforts de réconciliation et n’a servi qu’à humilier les Africains », a ainsi déclaré le Rwandais Paul Kagamé. Si l’Afrique de l’Est fait bloc derrière Kenyatta, la contestation gagne d’autres parties du continent, comme l’atteste l’organisation de ce sommet d’initiative kényane : le quorum des deux tiers des membres de l’UA nécessaire à sa convocation a été atteint. « La CPI n’est pas dirigée contre les Africains, répète-t-on au bureau de Fatou Bensouda, la procureure. D’ailleurs, nous agissons souvent à la demande des États du continent. Comme, récemment, à l’instigation des Comores, dans l’affaire de la flottille de Gaza [opposant la Turquie à Israël]. » De fait, on voit mal comment certains des 34 États ayant ratifié le statut de Rome, à l’image de la Côte d’Ivoire, du Mali ou de la RD Congo, pourraient s’en retirer après avoir coopéré avec la CPI pour juger des personnalités telles que Laurent Gbagbo. l PIERRE BOISSELET

À SUIVRE LA SEMAINE PROCHAINE

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OCTOBRE Publication de l’indice Mo Ibrahim de la bonne gouvernance africaine 2013. Maurice, le Ghana, le Bénin, laTunisie et le Maroc figuraient parmi les quinze premiers en 2012.

N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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OCTOBRE Proclamation du Man Booker Prize, à Londres. La Zimbabwéenne NoViolet Bulawayo, 31 ans, est la première Africaine noire finaliste de ce prestigieux prix littéraire.

TSVANGIRAYI MUKWAZHI/AP/SIPA

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15 - 19

OCTOBRE Au Burkina, 13e Waga Hip-Hop, festival des cultures urbaines. Slammeurs, rappeurs, danseurs et graffeurs sont attendus à Ouagadougou, Bobo-Dioulasso et Pô. JEUNE AFRIQUE


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ILS ONT DIT

« Au Mali, une femme ne parle pas en public ; mais, en privé, l’homme lui demande conseil. La femme est puissante, mais elle est humilité en Afrique ! » AWA MEÏTÉ Styliste malienne

« Je me fiche un peu de savoir

Mode Adama a de l’étoffe

SEYLLOU/AFP

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À 37 ANS, LA ST YLISTE Adama Ndiaye a organisé pour la deuxième fois la Black Fashion Week de Paris (du 4 au 6 octobre), une semaine de la mode qui vise à promouvoir les créateurs de la diversité. L’an dernier, une partie de la presse française avait dénoncé le « sectarisme » de l’événement. Cette fois, Ndiaye dégaine la première, dénonçant le « ségrégationnisme »

SALMAN RUSHDIE Romancier britannique d’origine indienne (qui fit l’objet d’une fatwa de l’ayatollah Khomeiny)

« Les chefs de l’Église ont souvent été narcissiques, aimant la flatterie et excités de façon négative par leurs courtisans. La cour est la lèpre de la papauté. » PAPE FRANÇOIS

« Je sais, j’ai dit que j’arrêterai le rap à 30 ans. Mais ça prouve bien que j’adore ça, puisque je suis encore là à 43 ans. » JAY-Z Rappeur américain

« Je vous prie de ne pas vous approcher de moi ! S’il devait m’arriver quoi que ce soit, sachez que vous auriez aussitôt à en répondre devant la communauté internationale. »

IBO/SIPA

CÉCILIA ATTIAS EX-SARKOZY s’adressant à Kaddafi (anecdote relatée dans son livre Une envie de vérité) N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

SEYLLOU/AFP

ce qui se passe en Iran. Mais, pour résumer ma pensée, je pense qu’un mollah est un mollah, quelle que soit la couleur de son turban. »

de la traditionnelle Fashion Week parisienne et appelant au boycott de créateurs « au racisme rampant ». Née à Kinshasa de parents sénégalais, Adama a grandi, grâce à son père diplomate, entre la RD Congo, la Belgique, l’Italie, l’Égypte, la Côte d’Ivoire et la France. « On déménageait tous les deux ans, j’ai dû m’adapter. J’en ai retiré une certaine combativité. » Celle-là même qu’il lui a fallu, après des études d’économie en France, pour créer sa marque, Adama Paris, et organiser dès 2002 la première Fashion Week de Dakar. « Là-bas aussi, on me regardait comme une extraterrestre. Je n’avais ni le look, ni la couleur, ni la taille : trop maigre, trop noire, trop afro. Ce n’est qu’avec la notoriété qu’on m’a acceptée telle que je suis. » l HABY NIAKATE

États-Unis Hillary fait fantasmer STOÏQUE ÉPOUSE d’un chef d’État volage (souvenez-vous de l’affaire Lewinsky) et femme de pouvoir accomplie, Hillary Clinton suscite bien des fantasmes. Vit-elle toujours avec Bill ? A-t-elle des amants ? Quelques jours après que l’ex-secrétaire d’État a confié au magazine New York être tentée de briguer l’investiture démocrate pour la présidentielle de 2016, de vieilles rumeurs refont surface. Gennifer Flowers, un ex-mannequin de 63 ans qui eut une liaison avec Bill Clinton lorsqu’il était gouverneur de l’Arkansas, s’épanche dans le Daily Mail, un tabloïd britannique. « Bill m’a dit qu’il savait que Hillary était bisexuelle et que cela ne le dérangeait pas », raconte-t-elle sans apporter la moindre preuve, ajoutant – quelle délicatesse ! – qu’elle votera volontiers en 2016 au nom de la solidarité féminine pour celle qu’elle bafoua jadis. Pendant que la « grande presse » américaine fait silence, des sites people de Hollywood évoquent l’existence d’une vidéo où l’on verrait Hillary batifoler dans une piscine et rappellent sa proximité avec la belle Huma Abedin, son ex-chef de cabinet au département d’État (elle est l’épouse d’Anthony Weiner, ce candidat à la mairie de New York qui a dû jeter l’éponge après des scandales sexuels). Évidemment, des militants ultraconservateurs s’étranglent à l’idée de voir une femme, de surcroît présumée lesbienne, élue présidente. « Hillary serait bisexuelle ? Et alors ? » titre le très sérieux quotidien israélien Haaretz, qui s’interroge sur la place de la sexualité en politique. Pendant ce temps, l’intéressée ignore ces rumeurs. Elle peut se le permettre : elle est la personnalité préférée des Américains. l JOAN TILOUINE JEUNE AFRIQUE


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La semaine de J.A. Les gens

Laurent Monsengwo À la droite du Saint-Père

épiscopale. Une quasi-consécration pour ce papabile qui jouit d’une expérience pastorale et politique inégalée. Après un brillant cursus théologique (il est le premier Africain à obtenir un doctorat en sciences bibliques dès 1970), il est ordonné évêque auxiliaire d’Inongo en 1980, dans l’ouest de la RD Congo. Quatre ans plus tard, il prend les rênes de la Conférence épiscopale du Zaïre (aujourd’hui Cenco). Son aura ne s’arrête pas aux frontières nationales, puisqu’il dirigera pendant plus de cinq ans le Symposium des conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar.

Il fait partie du groupe des huit cardinaux chargés par le pape François de réformer le gouvernement de l’Église. Une mission de confiance pour le prélat congolais, qui représente l’Afrique dans cet aréopage.

SPHÈRE. Et lorsque le vent de la démocra-

GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

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À

p

À 74 ans, il jouit d’une grande expérience pastorale et politique.

Kinshasa comme au Vatican, LaurentMonsengwon’apassa langue dans sa poche. « Il s’est fait remarquer ces dernières années par ses prises de position fortes et courageuses », souligne Antoine-Marie Izoard,unspécialistedesaffairesvaticanes. Fin 2012, le prélat congolais a coprésidé, avec Benoît XVI, le dernier synode des évêques sur la nouvelle évangélisation. Il a ensuite été choisi par l’ancien pontife pour prêcher la retraite pascale devant les membres des dicastères et autres structures du Saint-Siège. Son potentiel n’a pas échappé au nouveau pape. François a ainsi décidé de faire entrer l’archevêque de Kinshasa dans le cercle restreint de ses conseillers. Monsengwo fait partie des huit prélats appelés à siéger au Conseil

des cardinaux. Leur mission – qui a commencé début octobre – consistera à « aider le pape dans le gouvernement de l’Église et à étudier un projet de révision » de la curie, dont le fonctionnement est très critiqué. Parmi les dossiers qu’ils auront à traiter figurent l’ouverture du Vatican aux laïques et le rôle des femmes. PAPABILE. Dans ce « G8 » où les conseil-

lers viennent de tous les continents, Monsengwo représente l’Afrique. « Il aura un rôle important à jouer, compte tenu du poids de la chrétienté sur le continent, en cette période de “décatholisation” accélérée dans l’hémisphère nord », estime l’essayiste catholique Patrice de Plunkett. À 74 ans, Monsengwo franchit là une nouvelle étape de sa riche carrière

tie ébranle la dictature de Mobutu, dans les années 1990, les politiques se tournent vers lui pour lui confier la présidence de la Conférence nationale souveraine. Il joue alors les médiateurs entre une opposition radicale et un pouvoir autocratique. « Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, Monsengwo nous a épargné une guerre civile, se souvient le député Christophe Lutundula, qui a côtoyé le prélat lorsque ce dernier dirigeait le Haut Conseil de la République-Parlement de transition. Il aimait dire qu’il avait plus d’un tour dans son sac, trouvant toujours une porte de sortie pour régler les différends. » Celui qui a été archevêque de Kisangani puis de Kinshasa reste très influent dans la sphère politique congolaise et même au-delà, dans la sous-région (il est, notamment, proche du président Sassou Nguesso). Au grand dam de ses détracteurs, qui estiment qu’un prêtre n’a pas à s’immiscer dans les affaires de l’État. Monsengwo ne l’entend pas de cette oreille. À ses yeux, face à l’échec de la classe politique, l’Église se doit d’être « la garante de la vie et de la survie du peuple ». C’est dans cet esprit qu’il a dénoncé les résultats de la dernière présidentielle, qui ne reflétaient pas, selon lui, la « vérité des urnes ». Il y a gagné quelques ennemis, mais rien ne l’arrête. l TRÉSOR KIBANGULA

NOMINATIONS

SAMI SIK SALEM TUNISIE Ce colonel-major a été nommé, le 28 septembre, premier conseiller chargé des affaires sécuritaires auprès du chef de l’État, Moncef Marzouki. Il était jusque-là directeur général de la sécurité présidentielle. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

JEAN-CLAUDE MOYRET FRANCE À 56 ans, le haut fonctionnaire est devenu, le 16 septembre, ambassadeur auprès de la République d’Angola, en remplacement de Philippe Garnier. Il était auparavant consul général de France à Rio de Janeiro. JEUNE AFRIQUE


EN HAUSSE

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RACHID O.

Ali Benflis Retour de flamme DR

L’ex-chef du gouvernement algérien sera-t-il candidat à la présidentielle ? Sa réapparition publique en donne furieusement l’impression…

L’écrivain marocain, 43 ans, a remporté le 4e prix de La Mamounia (24000 euros) pour son roman, Analphabètes. Le jury, présidé par Christine Orban, était composé, entre autres, d’Alain Mabanckou, de Douglas Kennedy et de Layla Chaouni. DANNY JORDAAN

I

prépare discrètement son retour, dont cette réapparition n’est manifestement que le prélude. Dans le bureau d’avocats qui lui sert de QG, à la cité Chaabani, sur les hauteurs d’Alger, l’ex-patron du Front de libération nationale (FLN) reçoit du monde. Personnalités de la société civile, ambassadeurs, responsables politiques, tous veulent sonder ses intentions. Si Benflis offre volontiers un café à ses hôtes, il évite de s’exprimer publiquement. A-t-il renoncé à ses ambitions présidentielles ? Aucunement. Sera-t-il candidat contre Bouteflika si ce dernier venait à briguer un quatrième mandat ? « La Constitution autorise le chef de l’État à se représenter, et son éventuelle candidature ne gêne guère Benflis, avance un proche de ce dernier. Il n’est pas là pour régler des comptes ou faire la chasse aux sorcières, mais pour proposer un projet de société alternatif. » Ali Benflis, officiellement candidat le 1 er novembre, date symbolique qui correspond au début de la guerre d’indépendance ? Son entourage juge cette hypothèse « probable ». l FARID ALILAT

DR

NICOLAS HULOT L’écologiste, envoyé spécial du président de la République française pour la protection de la planète, a consacré son premier voyage officiel en Afrique aux éléphants menacés de disparition et a appelé à la mobilisation sur ce thème.

FNH

CAFÉ. En retrait total de la scène politique, Benflis, 69 ans,

Cet ancien activiste antiapartheid âgé de 62 ans a été élu à la tête de la Fédération sud-africaine de football (Safa). Il avait joué un rôle clé dans l’attribution de la Coupe du monde 2010 à son pays.

EN BAISSE

CHEIKH SALEH AL-LUHAYDAN

DR

l sort d’un très long silence. Plus de neuf ans après sa cuisante défaite à l’élection présidentielle d’avril 2004 (Abdelaziz Bouteflika l’avait emporté dès le premier tour), Ali Benflis, qui fut chef du gouvernement entre août 2000 et mai 2003, a fait sa réapparition ce 28 septembre à l’occasion d’une conférence publique organisée à l’hôtel Hilton d’Alger. Invité d’un colloque à la mémoire d’Amar Bentoumi, premier ministre de la Justice de l’Algérie indépendante, il s’est refusé à commenter l’actualité pourtant brûlante dominée par la convalescence du président Bouteflika, le remaniement ministériel, les restructurations au sein de l’institution militaire ou la présidentielle d’avril 2014. Mais il a annoncé aux journalistes qu’il ferait « une importante déclaration dans les prochains jours ».

Ce chef religieux saoudien a déclaré que les femmes ne devaient pas conduire de voitures… pour préserver leurs ovaires: « La pression pousse le bassin vers le haut. Leurs enfants présentent des troubles cliniques », explique-t-il sans rire. L’ARMÉE KÉNYANE Des soldats sont accusés de s’être livrés à des pillages systématiques lors de leur intervention contre les terroristes qui avaient pris d’assaut le Westgate Mall à Nairobi (67 morts). Une enquête interne a été ouverte.

q Dans sa ligne de mire, le scrutin d’avril 2014.

SAMIR SID

VINCENT FOURNIER/J.A.

BILL GATES

JEUNE AFRIQUE

C’est la première fois que le fondateur de Microsoft est aussi vivement contesté.Trois des principaux actionnaires du groupe lui reprochent de bloquer « l’adoption de nouvelles stratégies » et réclament son départ. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013


La semaine de J.A. Tour du monde

REX/CAMILLA MORANDI/REX/SIPA

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p Silvio Berlusconi (à g.) et Enrico Letta. Les sénateurs ont voté la confiance au gouvernement à une écrasante majorité (235 voix contre 70), le 2 octobre. ITALIE

L’homme qui a fait plier Berlusconi

I

l a joué et il a perdu. Pour éviter d’être déchu de son mandat de sénateur et de perdre son immunité parlementaire – alors qu’il vient d’être condamné pour fraude fiscale et reste menacé par plusieurs sales affaires –, Silvio Berlusconi avait tenté un coup de poker: contraindre les cinq ministres membres de son Parti de la liberté (PDL) à démissionner. Ce qui aurait fait éclater la coalition droitegauche qui dirige l’Italie depuis le 29 avril et contraint Enrico Letta, le président du Conseil, à convoquer de nouvelles élections. Mais le chef du gouvernement a eu l’habileté de refuser ces démissions – ce qui a suscité une brusque aspiration à la liberté au sein du PDL –, et de demander un vote de confiance au Parlement. Et c’est alors que vingt-trois sénateurs berlusconiens regroupés derrière Angelino Alfano, le vice-président du Conseil – « mon fils », disait de lui le Cavaliere –, se sont résolus, comme l’écrasante majorité de leurs collègues, à répondre oui à Letta. Pour éviter de perdre la face, leur ex-chef les a cyniquement imités, mais, pour lui, la suite des événements s’annonce très, très compliquée. l BIRMANIE

L’Ouest s’embrase NOUVELLES VIOLENCES entre bouddhistes et musulmans, le 1er octobre, dans l’État d’Arakan, sur la côte ouest de la Birmanie. Juste après une visite du président Thein Sein (sa première dans la région), des centaines de bouddhistes armés d’épées sont descendus dans les rues du village de Thabyachaing, non loin du port de Thandwe, et ont incendié plusieurs N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

dizaines de maisons. Dans la confusion, une musulmane âgée (94 ans) a été poignardée. Les combats ont alors redoublé d’intensité et gagné d’autres localités.

se limite à de vagues mesurettes. Loin, très loin des attentes de cette minorité de 20 millions de personnes : inscription de leurs droits dans la Constitution, autonomie des régions du Sud-Est, enseignement en langue kurde dans le public, etc. Beaucoup de vent, donc, et un seul projet concret : l’autorisation du port du foulard islamique dans la fonction publique, objectif ultime du Premier ministre. LE CHIFFRE

300000

L’augmentation par rapport à l’année précédente du nombre d’analphabètes au Brésil en 2012, selon une enquête gouvernementale rendue publique le 27 septembre. L’analphabétisme régressait sans discontinuer dans ce pays depuis quinze ans. 8,7 % de la population ne sait aujourd’hui ni lire ni écrire. CORÉES

Hagel dans le no man’s land  CETTE FRONTIÈRE est le seul endroit au monde où le risque de confrontation est permanent », a estimé Chuck Hagel, le 30 septembre, dans la DMZ, la zone démilitarisée entre les deux Corées. La visite du secrétaire d’État américain à la Défense avait pour but la révision de l’accord qui, depuis la fin de la guerre, en 1953, place les troupes sudcoréennes sous contrôle opérationnel des États-Unis en cas d’attaque du Nord. En 2010, après le torpillage d’une corvette, la reprise du contrôle par Séoul, qui aurait dû avoir lieu en 2012, avait été repoussée à 2015. Face à la montée des tensions dans la péninsule, les dirigeants sudcoréens souhaiteraient aujourd’hui négocier un nouveau report. CHILI

TURQUIE

Le coup du foulard IL ÉTAIT CENSÉ constituer le volet politique du processus de paix engagé avec les Kurdes. Las, le paquet de réformes « démocratiques » présenté le 30 septembre par Recep Tayyip Erdogan

Suicide d’un tortionnaire CONDAMNÉ EN 2009 pour violations des droits de l’homme, le général Odlanier Mena Salinast, ancien chef du Centre national d’informations (CNI), JEUNE AFRIQUE


ARRÊT SUR IMAGE

Pornchai Kittiwongsakul • AFP

THAÏLANDE

Bouddha et le moine pagayeur LA THAÏLANDE EST SOUS LES EAUX. Selon les autorités, 25 provinces sur 77 sont frappées par de graves inondations, qui, à la date du 3 octobre, avaient déjà fait 27 victimes. Dans le temple d’Ayutthaya, au nord de Bangkok, ce moine a trouvé un moyen ingénieux d’échapper au piège liquide. Sous l’œil impassible du Bouddha, que ces aléas climatiques ne semblent pas passionner.

les services de renseignements du dictateur Augusto Pinochet (1973-1990), s’est suicidé le 28 septembre à l’âge de 87 ans. Il n’avait apparemment pas supporté l’idée de son prochain transfert de la prison plutôt confortable d’El Penal Cordillera à celle, réputée beaucoup plus dure, de Punta Peuco. MEXIQUE

Bilan après l’apocalypse APRÈS LE PASSAGE de l’ouragan Ingrid dans le golfe du Mexique (Est), le 16 septembre, puis celui de la tempête Manuel, sur la côte pacifique (Ouest), trois jours plus tard, les dégâts sont immenses : 147 morts et 59 000 personnes évacuées dans 26 des 32 États que compte le pays. Les inondations provoquées par les deux sinistres sont les plus graves depuis cinquante-cinq ans. Elles ont endommagé 1,5 million JEUNE AFRIQUE

de maisons et au moins 75 routes fédérales. Un plan national de reconstruction doté de 701 millions d’euros va être mis en place. Déjà fragile avant la catastrophe, la croissance économique est aujourd’hui clairement menacée. AUTRICHE

Elle monte, elle monte, l’extrême droite L’AUTRICHE A BEAU être l’un des pays européens les moins touchés par la crise (le taux de chômage y est inférieur à 5 %), l’extrême droite y obtient aux élections des scores de plus en plus stratosphériques : 21,4 % pour le FPÖ de Heinz Christian Strache lors des législatives du 29 septembre. La « grande coalition » réunissant les sociaux-démocrates du chancelier Werner Faymann et les conservateurs de l’ÖVP perd des plumes mais conserve la majorité

absolue, en voix comme en sièges au Conseil national, la chambre basse du Parlement. ÉTATS-UNIS

Black Panther hors de sa cage CONDAMNÉ EN 1974 à la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre d’un gardien de prison blanc – qu’il a toujours nié –, l’ex-Black Panther Herman Wallace a été libéré le 1er octobre de la prison de Louisiane où il croupissait depuis quatre décennies. Sans se prononcer sur le fond de l’affaire, un juge a en effet cru déceler – il était temps – des irrégularités dans la sélection des jurés qui l’ont reconnu coupable. La vérité est que Wallace souffre d’un cancer du foie en phase avancée. Et que les autorités judiciaires ont sans doute préféré éviter qu’il passe en prison de vie à trépas. Imaginez un instant qu’il soit innocent ! N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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Grand angle

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ENQUÊTE

Rififi à Conakry Complots, coup d’État, corruption, vraies fausses révélations… Rien ne va plus entre le milliardaire franco-israélien Beny Steinmetz et le président guinéen Alpha Condé. Accusé par ce dernier d’avoir acquis frauduleusement des permis miniers au mont Simandou, le magnat du diamant est décidé à se battre jusqu’au bout. Une enquête digne d’un vrai roman policier où tous les coups sont permis.

FRANÇOIS SOUDAN

«

N

ousavonsdesennemis minière Beny Steinmetz Group Resources (BSGR), qui cherchent à nous sise dans le paradis fiscal de Guernesey, en réponse déstabiliser parce que aux accusations, fin septembre, de l’hebdomadaire nous voulons récupéfrançais satirique Le Canard enchaîné sur rer nos mines. Mais je le prétendu financement d’un coup vous le garantis: notre d’État à Conakry. Ce subit prurit droit pays ne se laissera pas déstabiliser. » Déclaration de l’hommiste de la part d’un groupe du président chilien Salvador Allende qui, jusqu’à la fin de 2010, peu avant son assassinat, il y a quarante entretenait les meilleures Larevue ans? Non: extrait du discours prononcé relations avec les juntes kleple 2 octobre à N’Zérékoré, à l’occasion tocrates, gabegistes et souvent crimiBRAS de l’anniversaire de l’indépendance, par nelles au pouvoir en Guinée peut certes DE FER le chef de l’État guinéen, Alpha Condé. faire sourire. Mais il illustre, à l’instar CONAKRY « À quelques jours d’un scrutin légisdu discours de N’Zérékoré, le ton, la latif à risque pour le parti du président, tournure et la violence qu’a pris l’affron[…] le scénario décrit […] pourrait servir tement entre deux hommes, Alpha à la répression violente de l’opposition Condé et le magnat franco-israélien du p Numéro 35 de guinéenne, étant rappelé que plusieurs diamant Beny Steinmetz, fondateur de La revue du mois centaines de Guinéens ont, dans un BSGR, autour du plus grand gisement de septembre. passé récent, été tués par les forces de de fer inexploité au monde, celui du l’ordre du président Alpha Condé lors de manimont Simandou, dans le « Far East » guinéen. Un jackpot dont la mise en valeur pourrait rapporter à festations pourtant pacifiques. » Résumé d’un l’un des pays les plus pauvres du monde quelque rapport de Human Rights Watch ? Communiqué 140 milliards de dollars (104,5 milliards d’euros) d’Amnesty International ? Non : extrait de la mise lll au cours des vingt-cinq années à venir. au point diffusée le 26 septembre par la société MANDELA A-T-IL ÉTÉ COMMUNISTE ?

NIGERIA

UN NOUVEAU GÉANT ÉCONOMIQUE

larevue.info

No 35 • SEPTEMBRE 2013

AFRIQUE DU SUD

DOCUMENT

LE PÉNIS, RÉALITÉS ET RUMEURS

MENSUEL No 35 SEPTEMBRE 2013 4,90 €

L E M O N D E C O M M E V O U S N E L ’A V E Z J A M A I S L U

À

Entre le président Alpha Condé et le milliardaire israélien Beny Steinmetz, c’est la guerre pour les mines du Simandou.

une enquête de FRANÇOIS SOUDAN

ÉDITION AFRIQUE SUBSAHARIENNE

ÉMILIE RÉGNIER POUR J.A.

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N O 2752 • du 6 au 12 OCTObre 2013

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jeune afrique


t Le président guinéen, lors du vote pour les élections législatives, le 28 septembre.


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Grand angle Enquête Le mensuel La revue a, le 1er septembre et sous la signature de l’auteur de ces lignes, publié une longue enquête sur cette affaire digne d’un roman de Gérard de Villiers. J.A. reprend ici l’essentiel de ce « bras de fer à Conakry », enrichi et actualisé de ses derniers rebondissements.

lll

1

Acte I Qui est Beny

Steinmetz ?

Officiellement, il n’en est que le conseiller, mais le vrai patron du Beny Steinmetz Group Resources (BSGR), c’est lui : Beny Steinmetz, 57 ans. Mince, éternellement bronzé, détenteur de la double nationalité israélienne et française, Steinmetz est un businessman au sang froid. Celui qui est aujourd’hui la première fortune d’Israël (4,1 milliards de dollars en mars 2013, selon le magazine américain Forbes, soit environ 3 milliards d’euros) est né avec un diamant dans la bouche. Son père, Rubin, Juif polonais et tailleur de diamants, a émigré en Palestine en 1936, où il s’est installé à Netanya et est devenu l’un des pionniers du secteur en Israël. En 1977, Beny s’installe à Anvers, en Belgique, pour y apprendre le métier. Doué, il vole rapidement de ses propres ailes et transforme la société familiale en un groupe qui revendique aujourd’hui six mille employés dans une douzaine de pays, de l’Afrique australe aux Balkans en passant par l’Inde, le Liberia et la Sierra Leone. S’il lui arrive parfois de perdre de l’argent, comme en Russie à la fin des années 1990, en Tanzanie ou en Zambie, il rebondit très vite, avec un goût prononcé pour le risque et le secret. Insaisissable, il ne se déplace qu’en jet privé entre ses propriétés de Tel-Aviv, Arsuf (non loin de Netanya), Genève, Londres et son yacht ancré au large de la Côte d’Azur. Discret sur sa vie privée, ce père de quatre enfants marié à une rencontre d’adolescence ne sacrifie qu’avec réticence aux obligations mondaines. Sur son site internet, il met en avant ses photos avec des personnalités plus présentables

Le gratin de l’UMP s’était déplacé pour la remise de son diplôme honoris causa au palais du Luxembourg.

et moins bling-bling que celles qui fréquentent d’ordinaire l’univers clinquant du diamant. On le voit avec le Prix Nobel Elie Wiesel, en conversation avec l’ex-président sud-africain Thabo Mbeki, avec le prince Albert de Monaco et, bien sûr, avec ce must qu’est Nelson Mandela (lire p. 36). Beaucoup plus soucieux de son image qu’il ne le prétend – « Les médias ne m’intéressent pas, je ne m’occupe pas de l’opinion des gens », assurait-il récemment à un journal israélien –, le milliardaire communique volontiers sur ses

INFOS OU INTOX ? EN JUIN 2012, le journal anglais The SundayTimes dévoilait un accord signé en 2011 organisant, en cas de non-remboursement d’un prêt de 25 millions de dollars à la Guinée, un transfert de titres miniers de la Société guinéenne du patrimoine minier d’une valeur de plusieurs centaines de millions de N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

dollars vers l’homme d’affaires sud-africain Walter Hennig. Dix jours après parution, Nina Mitz, PDG de FTI Consulting France dont Steinmetz est le client, ancienne conseillère de Dominique Strauss-Kahn et de Laurent Fabius, souhaite remettre à Jeune Afrique deux documents. Le premier est

présenté comme la copie de la convention de prêt évoquée par le Sunday Times; le second est un schéma complexe, censé illustrer un complot visant à s’accaparer les mines guinéennes alliant notamment Walter Hennig, le milliardaire américain George Soros, l’ancien ministre sud-africainTokyo

Sexwale, ou encore l’intermédiaire Jean-Yves Ollivier. L’examen de ces pièces par J.A. et par un avocat minier, l’incapacité de Nina Mitz à expliquer le schéma, nous ont conduit à douter de l’authenticité et de la véracité du dossier. Le choix a donc été fait de ne pas les publier. l CHRISTOPHE LE BEC JEUNE AFRIQUE


Rififi à Conakry

GUINÉE BISSAU

SÉNÉGAL MALI

GUINÉE Mont Simandou

Conakry MALI

MOISES SAMAN/MAGNUM PHOTOS

LIBERIA

activités charitables et culturelles. Steinmetz est également le principal bailleur de fonds du Collège académique de Netanya, dans sa ville natale, un établissement très largement francophone qui lui a décerné en mars 2012, lors d’une cérémonie tenue au palais du Luxembourg, à Paris, un diplôme honoris causa. Les invités et les intervenants étaient ce jour-là significatifs du positionnement politique français de Beny Steinmetz, avec en présidente de séance Valérie Hoffenberg, membre du bureau politique de l’UMP, à l’époque candidate à l’élection législative partielle dans la 8e circonscription des Français de l’étranger (qui comprend Israël) et en invités d’honneur le député UMP Jean-François Copé, le ministre de l’Éducation Luc Chatel et le député Claude Goasguen, pilier du soutien militant à la droite israélienne. Dans ce contexte, l’insistante rumeur selon laquelle Beny Steinmetz aurait pris en charge le déplacement de Nicolas Sarkozy en Israël, les 22 et 23 mai 2013, afin de soutenir la candidature de Valérie Hoffenberg (laquelle sera finalement battue par Meyer Habib, un proche de Jean-Louis Borloo), n’a surpris personne. Les amis de Steinmetz, qu’il lui arrive de recruter comme lobbyistes pour le compte de son groupe, sont pour la plupart de ce bord-là. JEUNE AFRIQUE

p Le gisement de fer du Mont Simandou est le plus important au monde non exploité : il pourrait rapporter quelque 140 milliards de dollars à l’État sur vingt-cinq ans.

Steinmetz ? « Le dernier type que vous souhaiteriez avoir comme ennemi », selon Ehoud Olmert.

CÔTE D’IVOIRE

Mais la personnalité qui connaît le mieux Steinmetz est sans doute l’ancien Premier ministre israélien Ehoud Olmert. Les deux hommes sont très liés, au point que, si l’on en croit le quotidien Haaretz, le premier aurait embarqué le second dans son avion lors de l’une de ses visites en Guinée, en 2009, afin de le présenter au chef de la junte de l’époque, l’erratique capitaine Dadis Camara. Le vivier politique, militaire et sécuritaire israélien est, on le sait, fertile en hauts fonctionnaires de l’État reconvertis en agents d’influence pour des sociétés privées. Steinmetz, comme les autres, y a donc volontiers recours. L’un de ses principaux collaborateurs, Asher Avidan, que l’on retrouvera à la tête de BSGR Guinée, est ainsi un ex-cadre du ministère israélien des Affaires étrangères puis de celui de la Défense et un ancien du Shin Bet, le service de sécurité intérieure de l’État hébreu. Habile à dénicher, puis à embaucher the right man at the right place, Steinmetz a acquis dans le milieu une réputation de tycoon particulièrement tenace. « C’est le dernier type que vous voudriez avoir comme ennemi », confie Ehoud Olmert au journaliste Patrick Radden Keefe, dont l’enquête sur l’affaire du gisement de Simandou a été publiée en juillet 2013 par le New Yorker. À Conakry, Alpha Condé ne va pas tarder à s’en apercevoir.

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Acte II Le jour où Beny

a « décroché la lune »

BSGR est entré en Guinée par la petite porte fin 2005. À l’affût de nouvelles opportunités, mais ignorant des réalités du pays, le groupe a recours à des intermédiaires. Il y a là le diamantaire israélien Victor Kenan, installé à Conakry depuis vingt ans, et les hommes d’affaires franco-israéliens Michael Noy, Frédéric Cilins et Avraham Lev Ran, qui connaissent la Guinée pour y exporter des médicaments. En février 2006, BSGR s’implante sur deux petites concessions près du mont Simandou, non loin de la bourgade de Zogota, en Guinée forestière. Il y recherche du diamant, il va tomber sur du fer. Un jour de mars 2006, le Sud-Africain Marc Struik, chef de la division mines chez BSGR, appelle N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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Grand angle Enquête Steinmetz du haut d’une colline : « Beny ? Vous ne me croirez pas. Je suis assis sur une montagne de fer ! » Le même Struik confiera quelques années plus tard que tout le monde, au sein du staff dirigeant de BSGR, était « complètement excité » par cette découverte : « À l’époque, les cours du minerai de fer étaient au plus haut et on estimait qu’il y en avait pour 3 milliards de tonnes de haute qualité dans le coin. » Dans le coin, c’est-à-dire sur la chaîne du Simandou, au-delà des deux petites parcelles attribuées à BSGR. Le problème, c’est que quelqu’un était déjà sur le coup depuis 1997 : le mastodonte anglo-australien Rio Tinto, détenteur des permis exclusifs sur les blocs 1, 2, 3 et 4. De loin les plus prometteurs. David contre Goliath : l’histoire a toujours plu à Steinmetz, encore faut-il trouver la fronde pour terrasser le géant. Ses hommes lui rapportent une rumeur insistante dans les milieux miniers de la capitale guinéenne, dont il va faire bon usage. Le président Lansana Conté et son entourage, réputés pour leur voracité, seraient mécontents du peu d’empressement mis par Rio Tinto à exploiter le fer de Simandou et donc à lui verser les royalties consécutives. Steinmetz sent qu’il y a là une occasion à saisir. Encore faut-il qu’il rencontre Lansana Conté. Or le président, malade, vit reclus. C’est là que le trio d’associés mené par Frédéric Cilins entre en scène. Cilins repère et embauche un certain Ibrahima Sory Touré, lequel n’est autre que le frère de la belle Mamadie Touré, quatrième épouse du général-président, la plus jeune et la favorite du moment. Mamadie n’est certes pas un Prix Nobel, mais elle sait où se trouve son intérêt. Elle n’ignore pas qu’à la minute où son époux fermera les yeux pour toujours, elle ne sera plus rien. A-t-elle été rémunérée par BSGR pour l’introduire auprès de Lansana Conté ? Elle-même le confirmera. Mais Steinmetz nie farouchement tout arrangement de cette nature. Mamadie ne serait-elle, comme on le dit chez BSGR, qu’une affabulatrice ? Des documents saisis par le FBI et la simple chronologie des faits permettent d’en douter. Comme le démontre une vidéo extraite du journal télévisé guinéen du 20 septembre 2006, Mamadie a eu tout le staff de BSGR à ses pieds. On la voit faisant son entrée en boubou blanc au bras de son frère, entourée de soldats de la garde présidentielle, lors d’un cocktail donné par le groupe à Conakry. Empressé, Cilins présente à Mamadie les « Steinmetz Boys » Marc Struik, Roy Oron et Asher Avidan. Quelques mois plus tard, le ministre guinéen des Mines fait connaître son agacement envers Rio Tinto, soupçonné de « geler » le gisement de Simandou. En juillet 2008, la sanction tombe : les permis des blocs 1 et 2 sont annulés et, en décembre 2008, BSGR se les voit octroyer par décret présidentiel. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

Beny a eu du flair : moins de deux semaines après la conclusion de l’accord, Lansana Conté meurt.

ANDREW PARSONS/ZUMA/REA

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QUAND LA CIA S’EN MÊLE

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ne note d’une quinzaine de pages attribuée à la CIA a, selon nos sources, été remise en août 2013 au président Condé. Sa version traduite en français, dont J.A. a pris connaissance, porte sur le financement des partis d’opposition guinéens, en particulier de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) et de ses deux ailes rivales, celle de Cellou Dalein Diallo et celle d’Oury Bah. Ce document fait également apparaître deux personnages,

deux Israéliens, en relation, selon ses rédacteurs, avec Beny Steinmetz et/ou avec BSGR : le diamantaire Victor Kenan, installé à Conakry depuis vingt ans (mais désormais persona non grata en Guinée) et un certain Victor Nassar, qui fut brièvement incarcéré à Madagascar début 2012 pour tentative supposée de coup d’État, que la note présente comme un ancien « conseiller en sécurité de BSGR ». Surtout, cette note très détaillée revient sur un épisode concomitant à JEUNE AFRIQUE


VINCENT FOURNIER/J.A.

Rififi à Conakry

l’acquisition des blocs miniers de Simandou par BSGR : la signature le 4 mai 2009 d’un contrat de sécurité entre le capitaine Dadis Camara alors au pouvoir et la firme israélienne CST Global – contrat qui a nécessité le déplacement à Conakry d’anciens responsables israéliens tel Shlomo Ben Ami, le général Ziv, Nissim Zvili, et même l’ex-Premier ministre et mentor de Steinmetz, Ehoud Olmert. Kenan aurait facilité la conclusion du contrat, et Nassar a JEUNE AFRIQUE

par la suite été l’un des principaux formateurs de l’unité des « bérets rouges » de Dadis, laquelle s’illustra dans le massacre du stade de Conakry le 28 septembre 2009. Le document se garde cependant de mettre directement en cause la galaxie SteinmetzBSGR dans l’attaque contre la résidence d’Alpha Condé en juillet 2011 ou dans une tentative de coup d’État : « Aucune preuve concrète d’un tel plan n’a encore vu le jour », conclut-elle. l F.S.

Entre-temps, si l’on en croit l’enquête du New Yorker, Beny Steinmetz a enfin obtenu son audience avec un Lansana Conté quasi grabataire. Alors que, furieux, les représentants de Rio Tinto font le tour des chancelleries occidentales à Conakry en expliquant que ce milliardaire ne s’est porté acquéreur des blocs de Simandou que pour mieux les revendre avec un énorme bénéfice, Steinmetz convainc facilement le président du contraire. « On leur a démontré qu’on travaillait vite, qu’on créait beaucoup d’emplois et qu’on avait les capacités techniques et financières nécessaires », expliquait-il au quotidien israélien Yediot Aharonot en juin. Reste à régler les droits pour les deux concessions. BSGR paie un ticket d’entrée symbolique et s’engage à investir 160 millions de dollars, une somme dérisoire par rapport à la valeur du gisement. « Les Guinéens qui ont fait ce deal sont-ils des imbéciles, des criminels, ou les deux à la fois? » commente le milliardaire soudanais Mo Ibrahim. Mais les collaborateurs de Steinmetz ont une explication. À leurs yeux, vu les risques encourus en Guinée, leur patron aurait quasi fait œuvre de philanthropie : « Il a accepté de mettre près de 200 millions de dollars dans un endroit où il faut être fou pour investir. Moi, je n’aurais pas mis 5 dollars », assure le plus sérieusement du monde Michael Noy, l’associé de Cilins et de BSGR entre 2006 et 2008. Une chose est sûre : Beny a eu du flair. Lansana Conté meurt, le 22 décembre 2008, moins de deux semaines après la conclusion de l’accord sur les blocs 1 et 2.

3

Acte III Le capitaine

et le milliardaire

Mamadie Touré avait tout prévu. À peine son époux a-t-il rendu l’âme qu’elle quitte Conakry. Destination : Jacksonville, en Floride, où elle fait l’acquisition d’une coquette villa et de trois autres propriétés plus modestes. Surtout, elle se dit que BSGR lui doit encore de l’argent, et elle a emporté avec elle des documents qui, selon elle, le prouvent. À Conakry, les collaborateurs de Steinmetz l’ont déjà oubliée. Ils ont d’autres chats à fouetter : le capitaine Dadis Camara, qui vient de s’emparer du pouvoir, parle de faire rendre gorge aux opérateurs miniers qui ont, dit-il, « pillé la Guinée ». Or BSGR n’a pas eu le temps de faire reconnaître définitivement ses droits sur les gisements de fer. Il y a donc urgence à dénicher un partenaire qui aura l’oreille du fantasque capitaine. Beny et ses hommes ne vont pas tarder à trouver le successeur de Mamadie. En mieux. Mahmoud Thiam, qui va devenir l’homme de Beny Steinmetz à Conakry jusqu’à la fin de 2010, est un cadre brillant de la diaspora guinéenne. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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Grand angle Enquête

N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

. D.R

Le clan Steinmetz

Frédéric Cilins,

homme d’affaires. Il met sur pied la structure guinéenne de BSGR. Est arrêté par le FBI alors qu’il tentait de récupérer des documents compromettants auprès de Mamadie Touré.

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.

Asher Avidan,

président de BSGR, ancien cadre du ministère israélien de la Défense, ancien membre des services de sécurité intérieure de l’État hébreu, bras droit de Beny Steinmetz.

Lansana Conté,

président guinéen de 1984 à 2008. C’est lui qui signe le décret présidentiel transférant les blocs 1 et 2 du mont Simandou de Rio Tinto à BSGR.

Moussa Dadis Camara,

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président guinéen de 2008 à 2010. Beny Steinmetz en fait un proche pour faciliter ses affaires. Il lui présente même ses enfants.

« C’est un gars honnête, qui voulait ce qu’il y a de mieux pour son pays.» STEINMETZ, à propos du capitaine Dadis Camara

.

Mamadie Touré,

quatrième épouse de Lansana Conté, elle aurait monnayé ses services d’intermédiaire pour l’octroi des permis miniers à BSGR.

D. R

Fils d’un banquier assassiné sous la dictature de Sékou Touré, ce quadragénaire a fait ses études à l’université Cornell, aux États-Unis, avant d’entrer chez Merrill Lynch, puis chez UBS. Citoyen américain, il regagne le pays de son enfance début 2009 et est aussitôt nommé au poste de ministre des Mines et de la Géologie. Une aubaine pour BSGR, dont Thiam défend aussitôt avec fougue les intérêts : c’est lui qui, en décembre 2009, permet l’octroi définitif de la convention de base sur Zogota au groupe Steinmetz, lui aussi qui avalisera quatre mois plus tard l’accord de coentreprise entre BSGR et les brésiliens de Vale – en d’autres termes, la revente des blocs 1 et 2 de Simandou pour quinze fois leur prix d’achat. Si l’on en croit le réquisitoire dressé contre lui, Mahmoud Thiam aurait été non seulement un salarié de BSGR, mais aussi un distributeur de liquidités pour le compte du groupe auprès des membres de la junte pendant près de deux ans. S’il reconnaît avoir, quand il était ministre, roulé en 4×4 Lamborghini dans les rues défoncées de Conakry et s’être offert pour 1,5 million de dollars un appartement à Manhattan, Thiam nie tout arrangement coupable avec Beny Steinmetz. S’il a défendu cette compagnie, c’est parce qu’elle était la meilleure. Thiam, qui vit aujourd’hui aux États-Unis, tient à sa réputation. N’a-t-il pas conclu, en juin 2011, un contrat de consultant auprès d’Ali Bongo Ondimba, le président gabonais ? En novembre 2012, il a envoyé une curieuse lettre au président Alpha Condé, à la fois plaintive et menaçante : « […] Être traité de porteur de valises me choque beaucoup, écrit-il. […] Il est vrai, par contre, que j’ai souvent donné de l’argent, sur mes fonds propres, à beaucoup de compatriotes. […] Vous-même, Monsieur le Président, vous avez accepté de l’argent de moi. Cette aide et celle apportée à votre concurrent au deuxième tour dans les mêmes conditions étaient désintéressées. » Mais impossible pour Thiam de nier ses relations privilégiées avec Steinmetz, qui en fit l’un de ses invités de marque au mariage de sa fille, en Israël. En cette année 2009, c’est d’ailleurs le grand amour entre le milliardaire et le capitaine Dadis Camara. Steinmetz lui présente ses deux fils, ainsi que son ami Ehoud Olmert. À l’époque, Israël tient le haut du pavé à Conakry. Aujourd’hui encore, interrogé par le New Yorker, Steinmetz continue de penser que Dadis Camara était « un gars honnête » qui « voulait ce qu’il y a de mieux pour son pays ». Et pour BSGR, manifestement. Las : le 3 décembre 2009, Dadis Camara, victime d’une tentative d’assassinat, est évacué vers le Maroc. Fort heureusement pour Steinmetz, le général qui lui succède au pouvoir, Sékouba Konaté, maintient Mahmoud Thiam à son poste stratégique.

LES PROTAGONISTES

YO

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Pour ce joueur d’échecs qu’est Beny Steinmetz, le plus beau coup est à venir. Préparée dans le plus grand secret, la signature à Rio de Janeiro, un jour d’avril 2010, d’un accord de partenariat entre BSGR et le numéro un du fer, le brésilien Vale, fait l’effet d’un coup de tonnerre. Surtout quand on en connaît les détails financiers. Dans le cadre de la coentreprise formée entre les deux groupes, VBG, Vale achète 10 % des parts de BSGR sur les blocs de Simandou pour 500 millions de dollars payables immédiatement, avec une option ferme pour 41 % supplémentaires, évalués d’un commun accord à 2 milliards de dollars. Pour Steinmetz, cette aubaine est un don de Dieu, et il sait qu’à Conakry, où Mahmoud Thiam veille sur ses intérêts, cette culbute du siècle passera comme une lettre à la poste. Ce qu’il n’a pas prévu, c’est qu’un certain Alpha Condé allait, six mois plus tard, en décembre 2010, arriver au pouvoir et bouleverser l’échiquier. JEUNE AFRIQUE


Rififi à Conakry

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Le clan Condé

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entre en scène

« Au début, on était plutôt contents. On a vu le chef de la junte remettre le pouvoir avec dignité. On s’est dit que c’était un bon signal. On a été naïfs. » Ainsi parle Beny Steinmetz de l’élection d’Alpha Condé. Les deux hommes ne se connaissaient pas, et le nouveau président guinéen pourrait sans doute parler du milliardaire israélien en des termes identiques : il n’a rien, au départ, contre lui. C’est bien simple: lors de son arrivée au palais de Sékoutouréya, à Conakry, Alpha Condé n’a encore jamais rencontré aucun minier ni aucun pétrolier et il ne dispose au sein du cercle très restreint de ses hommes de confiance d’aucun spécialiste de la question. Heureusement pour lui, « le camarade Alpha » a quelques amis très connectés. Parmi eux, le Français Bernard Kouchner, ancien condisciple de lycée, tout prêt à lui rendre service.

président du Comité technique de revue des titres et conventions miniers (CTRTCM).

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Acte IV Alpha Condé

JEUNE AFRIQUE

R D P O H L E /T H

Tony Blair,

ex-Premier ministre britannique, il dépêche une équipe de sa fondation Africa Governance Initiative pour former le staff présidentiel d’Alpha Condé.

Nava Touré,

4

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ex-ministre des Affaires étrangères français. C’est lui qui présente George Soros à Alpha Condé.

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Bernard Kouchner,

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O /F

George Soros,

milliardaire américain, il met en place et finance un comité technique afin d’étudier les contrats miniers signés sous les précédentes présidences.

Kouchner, dont le carnet d’adresses d’ex-ministre français des Affaires étrangères est loin d’être négligeable, sensibilise le milliardaire philanthrope américain George Soros aux préoccupations de son ami Alpha. Séduit par le personnage, qu’il rencontre à Conakry, Soros met aussitôt à sa disposition un redoutable duo d’ONG habituées à traquer et à débusquer les flux d’argent sale, dont il est l’un des principaux financiers, Global Witness et Revenue Watch, ainsi que l’un des plus gros réseaux de juristes au monde, DLA Piper. Le précieux Kouchner introduit également le nouveau président guinéen auprès de l’économiste britannique Paul Collier, universitaire reconnu, spécialiste du développement et auteur à succès de The Bottom Billion (un livre sur l’aide et la pauvreté en Afrique), lequel à son tour présente Alpha Condé à son ami Tony Blair. Début 2011, l’ancien Premier ministre britannique envoie à Conakry une équipe de l’organisation qu’il a fondée, Africa Governance Initiative, chargée, comme elle l’a déjà fait au Rwanda et au Liberia, de structurer et de former le staff présidentiel. Pendant toute l’année 2011, cette brigade de choc élabore un nouveau code minier nettement plus favorable aux intérêts guinéens que les précédents, commence à éplucher un à un les principaux accords conclus entre les ministres des Mines des régimes militaires (précédant l’élection d’Alpha Condé) et les opérateurs du secteur, puis met en place une structure ad hoc : le Comité technique de revue des titres et conventions miniers. Ce CTRTCM,quicompte18membres,apourprésident un professionnel des mines et de l’énergie réputé incorruptible, Nava Touré, 66 ans. C’est l’enquête, menée pour le compte du comité de Nava Touré par deux hommes de George Soros, deux Américains, l’avocat Scott Horton de DLA Piper et l’ancien agent de la CIA Steven Fox de Veracity Worldwide (un cabinet d’étude de risques), qui fera changer d’avis le nouveau président guinéen sur l’homme d’affaires israélien. En quelques mois, les deux limiers vont remonter toute la filière des relations entre BSGR, Mamadie Touré, Mahmoud Thiam, Lansana Conté et Dadis Camara et aboutir à la conviction que le contrat d’attribution des blocs 1 et 2 de Simandou à Beny Steinmetz est fortement entaché de corruption. Donc illégal et réversible. En septembre 2011, le président reçoit l’homme d’affaires pour une explication qui ne donnera rien. Selon le New Yorker, Steinmetz aurait, dès le début de l’entretien, posé la question suivante à Condé : « Pourquoi êtes-vous contre nous ? » Réponse du président : « Je n’ai rien de personnel contre vous, mais je dois défendre les intérêts de la Guinée. » Les mois suivants, BSGR prépare sa contreattaque. Beny Steinmetz loue les services d’une société de relations publiques en Floride, FTI Consulting. Spécialisée dans une forme N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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Grand angle Enquête particulièrement agressive de communication (lire encadré p. 32), FTI alimente des articles très critiques dans la presse américaine et britannique contre la gouvernance d’Alpha Condé, mettant en cause l’affairisme supposé de son fils Mohamed. De son côté, Alpha Condé – qui n’est pas loin de penser que Steinmetz finance ses opposants, espionne avec l’aide du Mossad ses communications et cherche par tous les moyens à le renverser –, ne reste pas inactif. Il fait geler les activités de BSGR à Conakry et prête une oreille attentive à l’histoire que lui raconte l’un de ses ministres de retour de Paris. Ce collaborateur lui explique qu’il s’est fait aborder, à l’hôtel Hilton Arc-de-Triomphe, par un homme d’affaires gabonais qui lui a proposé le deal suivant:contrepaiement,sonamieMamadieTouré, ex-quatrième épouse de Lansana Conté, est prête à lui fournir des documents très compromettants pour le groupe BSGR. Alpha Condé refuse de payer, mais l’information n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd. Sans que l’on sache comment – mais on l’imagine aisément – elle parvient au FBI, qui ouvre une enquête. Fin octobre 2012, Nava Touré, le président du Comité de revue des contrats miniers, fait parvenir aux représentants de VGB – le consortium ValeBSGR en Guinée – une lettre incendiaire, dans laquelle il détaille 25 « irrégularités possibles » dans l’acquisition des blocs 1 et 2 de Simandou. Le noyau dur de ce réquisitoire est constitué par des accusations explicites de corruption à l’encontre des responsables de BSGR, impliquant au passage Mahmoud Thiam et Mamadie Touré. Steinmetz répond avec mépris : « Cette lettre est une farce. » Le problème, c’est que nul ne l’entend, alors que la lettre de Nava Touré se retrouve rapidement à la une de la presse guinéenne et sur internet. La direction Afrique de FTI, la société de relations publiques dont il s’est attaché les services, vient en effet de changer de patron: le Britannique Mark Malloch-Brown est proche, lui, de… George Soros. Malloch-Brown, désireux de nettoyer le fichier de FTI de ses clients jugés par lui peu présentables, résilie les contrats qui le lient à deux diamantaires israéliens opérant en Afrique : Dan Gertler, qui opère en RD Congo, où il est réputé proche du président Kabila, et Beny Steinmetz. Steinmetz est fou de rage. Il intente un procès à FTI et se déchaîne contre Soros, aussitôt accusé d’antisémitisme.

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Acte V Cette fois,

c’est la guerre

Entre-temps, l’enquête du FBI a progressé. En épluchant les actes de vente des trois propriétés de Mamadie Touré à Jacksonville, les enquêteurs se sont rendu compte que sa société avait bénéficié de transferts de fonds de provenance douteuse. Un jour de février 2013, les agents du FBI vont N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

D.R.

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p Le milliardaire israélien avec (de g. à dr.) : l’écrivain Elie Wiesel, le prince Albert de Monaco, le chanteur Patrick Bruel, et l’exprésident Thabo Mbeki.

À partir de février 2013, Mamadie Touré est recrutée par le FBI. Elle va s’employer à piéger Cilins.

donc sonner à sa porte et lui proposent le schéma suivant : si elle veut éviter de sérieux ennuis, elle doit tout dire sur ses relations avec BSGR. Elle accepte aussitôt et leur remet trois documents : le premier est un reçu signé de sa main, dans lequel elle reconnaît avoir perçu 2,4 millions de dollars de la part de Pentler Holdings – la compagnie, enregistrée aux îles Vierges, de Frédéric Cilins et Michael Noy. Le second, plus compromettant, est un « contrat de commission » datant du 27 février 2008 dans lequel il est stipulé que BSGR s’engage à verser à Mamadie Touré 4 millions de dollars en échange de l’obtention des blocs 1 et 2 de Simandou. Le troisième est un « contrat de bonne fin », sorte de solde de tout compte conclu en juillet 2010 entre Mamadie Touré et Pentler Holdings, portant sur 3,1 millions de dollars supplémentaires. Lesquels n’auraient jamais été versés. Mais le FBI veut des aveux de la part de proches du milliardaire et tout particulièrement du FrancoIsraélien Cilins, avec lequel Mamadie Touré a gardé contact. Le téléphone de Mamadie est placé sur écoute. Depuis la Côte d’Azur, dans le sud de la France, où il réside, Cilins lui annonce justement qu’il va venir la voir en Floride, le 14 avril, pour discuter avec elle de choses importantes. Rendez-vous est pris dans un restaurant de l’aéroport de Jacksonville, autour d’un sandwich pouletsalade. Des agents du FBI, en planque, observent la scène, et Mamadie porte sur elle un micro. « Vous avez des documents, il faut les détruire, explique Cilins. En échange, nous vous paierons. » Mamadie Touré lui répond que la police s’intéresse à elle et que si la justice la convoque, il faudra bien qu’elle parle. « Justement, il faut faire disparaître tout ça avant », réplique Cilins. Puis l’homme d’affaires raconte qu’il a été reçu par Steinmetz la semaine précédente et que ce dernier lui a donné l’ordre de brûlerlui-mêmelesfameuxdocuments.Enéchange, Mamadie recevra 1 million de dollars, et 4 millions de plus si elle accepte de signer une attestation dans laquelle elle reconnaît n’avoir jamais reçu un sou de BSGR. Le FBI en sait assez. Alors qu’il s’apprête à reprendre l’avion, Cilins est arrêté. JEUNE AFRIQUE


Rififi à Conakry Incarcéré depuis dans une prison de New York, son procès est prévu à la fin de l’année: il prévoit d’y plaidernoncoupable,lerendez-vousdeJacksonville n’ayant eu d’autre but, affirme-t-il, que d’en finir avec les tentatives de chantage de Mamadie. Reste que du côté de Beny Steinmetz, il a bien fallu ajuster dans l’urgence la ligne de défense face à ce coup de Jarnac. Plus question de démentir toute relation passée avecmadameTouré,qualifiéede«simplelobbyiste» sans aucun autre lien avec l’ex-président Lansana Conté que celui qu’elle s’est inventé de toutes pièces. « Elle n’était pas sa femme et elle ne couchait même pas avec lui », assure Asher Avidan au New Yorker. En d’autres termes: la payer était légal. Idem pour Frédéric Cilins : « Je l’ai rencontré trois ou quatre fois », sans plus, jure Steinmetz. Quant aux documents de Mamadie, ce seraient des faux. À Rio, les Brésiliens de Vale, manifestement très gênés, ont pris leurs distances avec BSGR et publié un communiqué dans lequel la compagnie se dit résolue à coopérer avec les autorités guinéennes. Objectif : sauver ce qui peut l’être de leurs intérêts sur place. L’aventure guinéenne de Beny Steinmetz tourne au cauchemar: Avidan est interdit de séjour à Conakry, et le frère de Mamadie Touré, inculpé de « corruption passive », a été arrêté. Depuis, le responsable de la sécurité du groupe en Guinée, Issaga Bangoura, l’a rejoint en prison. Entre le président guinéen et le tycoon israélien, le rapport de forces s’est donc inversé. Mais ce serait mal connaître Steinmetz que de le croire résigné à perdre un gain aussi fabuleux arraché avec une mise aussi dérisoire. Ce président, pour qui il n’a pas de

3 QUESTIONS À

« Il connaît mal les Israéliens. Ce n’est pas fini. Nous ne rendrons jamais ces concessions. »

mots assez violents et qu’il qualifie au passage de « corrompu » et d’« obsessionnel », pensait sans doute « qu’on ne contre-attaquerait pas », martèlet-il dans son entretien avec le Yediot Aharonot. « Apparemment, il connaît mal les Israéliens. C’est une guerre, et nous allons la gagner. Vous verrez, ce n’est pas fini. Nous sommes des combattants. Nous ne rendrons jamais ces concessions. » Depuis, le théâtre des hostilités s’est déplacé de Conakry jusqu’en Europe. Saisi d’une demande d’entraide de la justice guinéenne, le procureur général de Genève, Olivier Jornot, a fait perquisitionner en août et en septembre le domicile et le jet privé de Beny Steinmetz, ainsi que les bureaux londoniens et parisiens d’Onyx Financial Advisors, une société de management basée en Suisse et chargée de la gestion financière de BSGR. Comme si cela ne suffisait pas, le magnat franco-israélien doit désormais se battre sur un deuxième front : son gros investissement dans la plus grande mine d’or d’Europe, Rosia Montana, en Roumanie, est en effet sérieusement remis en question par le gouvernement de Bucarest sous la pression d’ONG de défense de l’environnement, au point que le cours de la société canadienne Gabriel Resources, dont il est l’un des principaux actionnaires aux côtés de trois milliardaires américains, Seth Klarman, Thomas Kaplan et John Paulson – figures connues du lobby pro-israélien de la côte est –, a pour cette raison très lourdement chuté à la Bourse de Toronto. Sale temps pour Beny, donc. Et sommeil de plomb pour l’eldorado de Simandou, toujours en quête de la baguette magique qui viendra enfin concrétiser le rêve de 11 millions de Guinéens… l

ASHER AVIDAN

Président de Beny Steinmetz Group Resources (BSGR)

« Tout cela n’est qu’une sinistre blague »

A

ncien cadre du ministère israélien de la Défense et de celui des Affaires étrangères, Asher Avidan a rejoint Beny Steinmetz en juillet 2006. Il préside BSGR, la société minière de l’homme d’affaires présente en Guinée, mais aussi en Sierra Leone, en Afrique du Sud, au Nigeria et enTanzanie. JEUNE AFRIQUE : Pensez-vous encore pouvoir exploiter un jour le gisement guinéen de Simandou ? ASHER AVIDAN : Je ne perds pas

espoir malgré tout ce qui a été diffusé dans les journaux. Des intérêts extérieurs veulent nous nuire. Ceux de George Soros, un manipulateur qui JEUNE AFRIQUE

s’appuie sur une machine médiatique bien huilée ; ceux aussi du président Condé, de son fils Mohamed et de leurs proches, qui ont promis notre projet à d’autres pendant les élections présidentielles. Je n’ai pas de preuve, mais ces gens-là s ’acti vent. Néanmoins, la Guinée n’est pas la propriété d’une seule personne ou d’un régime, et un nouveau parlement arrive. Il devrait être possible de nous asseoir de nouveau à la même table. Que faire alors que vous-même êtes interdit de séjour à Conakry ?

Nous sommes prêt à aller au tribunal d’arbitrage, probablement à

Washington, comme stipulé dans les contrats signés avec la Guinée. Nos avocats en France y travaillent. N’êtes-vous pas inquiet des conséquences de l’audition de Frédéric Cilins par la justice américaine ?

Nous sommes serein. Frédéric Cilins est entendu pour obstruction à la justice, BSGR n’est pas directement concerné par cette affaire. Nous avons été touché médiatiquement, mais cela ne change rien à la bonne marche du groupe. Tout cela n’est qu’une sinistre blague. Nous avons signé des contrats parfaitement légaux. l Propos recueillis par C.L.B. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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Afrique subsaharienne

SOUDAN

Envers

et contre tous

Les manifestants veulent le chasser du pouvoir, Omar El-Béchir le sait. Il sait aussi que rien ne va plus depuis la sécession du Sud et qu’il est contesté jusque dans les rangs de son propre parti… Mais il s’accroche !

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JEUNE AFRIQUE


ASHRAF SHAZLY/AFP

CHRISTOPHE BOISBOUVIER

O

mar el-Béchir ne dort plus tranquille. Par deux fois, en 1964 et en 1985, les manifestants de Khartoum ont fait tomber le régime en place. Depuis le 23 septembre, le président soudanais vit dans la peur d’une troisième révolution et multiplie les précautions. Déjà, avant la crise, il logeait prudemment dans une villa mitoyenne du haut commandement militaire, non loin de l’aéroport. Aujourd’hui, il change de domicile toutes les nuits. Et ses gardes du corps sont soigneusement choisis par le général Bakri Hassan Saleh, son vieux frère d’armes, devenu le tout-puissant ministre des Affaires présidentielles. JEUNE AFRIQUE

p Khartoum, le 3 septembre. Le chef de l’État, qui vit dans la peur d’une troisième révolution, change de domicile toutes les nuits.

Surtout, El-Béchir confie la répression des manifestants aux éléments les plus durs de son régime, les miliciens du National Intelligence and Security Services (NISS). Véritable armée dans l’armée, ce service de sécurité dirigé en sous-main par Nafié Ali Nafié, l’un des durs du régime, s’est doté d’une unité de choc de 3 000 hommes, qui se déplacent en hélicoptère ou en 4x4 et peuvent s’infiltrer en civil dans les quartiers de Khartoum. Ont-ils mis le feu à des stations-service pour jeter le discrédit sur l’opposition?Entoutcas,ilsontl’autorisationdetirer à balles réelles. Le 2 octobre, la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) a publié un terrible bilan : au moins 170 personnes tuées et plusieurs cas d’exécutions sommaires. La terreur règne sur Khartoum. Jusqu’à présent, Omar el-Béchir gouvernait par un savant mélange de force et de séduction. Certes, en juin 1989, l’officier parachutiste était arrivé au pouvoir par un coup d’État. Mais, en partageant ce pouvoir avec les islamistes, il avait eu l’habileté de donner à son régime une légitimité spirituelle. Et après le boom pétrolier de l’an 2000, il avait su répartir les revenus de l’or noir entre les trois grandes tribus arabes des rives du Nil qui constituent le socle de son pouvoir, les Danagla, les Jaaliyyine et les Chayqiyya. Ces dernières années avait surgi une nouvelle génération d’hommes d’affaires qui circulaient entre Khartoum et le Golfe. En février 2011, au plus fort du Printemps arabe, seuls les étudiants étaient descendus dans la rue. La nouvelle classe moyenne de la capitale s’accommodait fort bien du régime. Le problème, c’est que, depuis l’indépendance du Soudan du Sud, en juillet 2011, plus rien ne va. Avec cette sécession, le régime de Khartoum a perdu les trois quarts de ses puits de pétrole. Surtout, il n’a pas anticipé cette perte de revenus par une politique de développement agricole et industriel. Pris à la gorge, le gouvernement a mis fin brutalement aux subventions sur le carburant. Du jour au lendemain, les Soudanais ont vu le prix du gallon d’essence passer de 12,50 livres à 20,80 livres ! Avec bien sûr une réaction en chaîne sur les prix de tous les produits de base. Dans les quartiers populaires d’Omdurman, la ville jumelle de Khartoum sur la rive gauche du Nil, mais aussi dans les quartiers résidentiels de la capitale, Burri, Nasir et Riyad, des milliers d’hommes et de femmes ont envahi les rues aux cris de « We don’t want Bashir ! » (« Nous ne voulons plus d’El-Béchir ! »). Derrière cette révolte sans précédent, c’est toute une classe moyenne qui joue sa survie. BANQUEROUTE. Le 1er octobre, lors d’une céré-

monie de remise de diplômes à des militaires, le chef de l’État soudanais a affirmé que c’était « une conspiration menée par des saboteurs » – sousentendu par les rebelles du Darfour et du Kordofan du Sud. De fait, il y a deux ans, les quatre principaux N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013


Afrique subsaharienne Soudan mouvements armés de l’ouest et du sud du pays se avanttoutéviterl’arrivéeaupouvoird’unnon-Arabe, Inquiet, il sont réunis en un Front révolutionnaire du Soudan c’est-à-dire d’un chef rebelle du Darfour ou du a confié la (FRS) « pour renverser le régime d’El-Béchir ». Kordofan du Sud. Va-t-on vers un gouvernement répression Mais ces derniers jours, les jeunes qui ont défilé d’union nationale PCN-Oumma-PDU? Au Soudan, dans les rues de Khartoum et de Wad Madani tout est possible. Il y a deux ans, le vieux leader de des marches étaient, pour beaucoup, des Arabes de la région du l’Oumma, Sadek al-Mahdi, a placé son fils aîné au aux éléments fleuve. Le 27 septembre, dans le quartier de Burri, cœur du pouvoir – il y est conseiller à la présidence. les plus durs à Khartoum, un pharmacien de 28 ans a été tué Et une cousine de Sadek al-Mahdi n’est autre que… d’une balle dans le dos pendant une manifestation de son régime. l’épouse de Ghazi Salahadine. Omar el-Béchir va-t-il se laisser faire ? Non. pacifique. Salah Sanhouri Mudathir appartenait à une grande famille d’entrepreneurs arabes qui Depuis qu’il a été inculpé par la Cour pénale interavait fait fortune à Abou Dhabi. Le lendemain, des nationale pour crimescontre l’humanitéau Darfour, milliers de jeunes ont participé à son enterrement. il craint d’être livré par un éventuel successeur et L’un d’eux a twitté : « Salah, tu es un symbole de va s’accrocher. Jusqu’à quand? L’armée est divisée. liberté et ta mort pourrait marquer la fin de vingtIl le sait. C’est pourquoi il a confié la répression quatre années de tyrannie. » aux services de sécurité. Problème : le NISS aussi Omar el-Béchir doit-il partir ? Aujourd’hui, est divisé ! Son ex-patron, le charismatique Salah quelques grands dignitaires du régime posent Gosh, y conserve des partisans. Le 23 septembre, publiquement la question. Parmi eux, l’idéologue El-Béchir a voulu le faire arrêter. Prévenu à temps, Ghazi Salahadine est sans doute le plus respecté. Gosh s’est enfui et se cache quelque part dans Membre de la conspiration islamiste de 1989, cette Khartoum. Décidément, Omar el-Béchir doit avoir figure du Parlement s’est opposée, il y a dix ans, au un sommeil bien agité. l projet de référendum d’autodétermination dans le sud du Soudan. Maintenant, il a beau jeu de dire EL-BÉCHIR NE LEUR MANQUERAIT PAS ! que, sans la partition, le gouvernement ne serait pasen état de banqueroute. Sadek al-Mahdi Ghazi Salahadine Salah Gosh Et il est à l’origine du courrier de Avant le coup d’État, Salah Arrière-petit-fils du D’abord médecin, Ghazi quelque cinquante cadres du Partiducongrèsnational(PCN, Gosh, ingénieur de formation, célèbre Mahdi qui avait Salahadine, 62 ans, est vite au pouvoir) qui, le 28 seps’occupait de la protection chassé les Anglais de devenu, aux côtés de tembre, ont demandé au rapprochée de l’islamiste Khartoum en 1885, Sadek Hassan al-Tourabi, l’un des chef de l’État de cesser la Hassan al-Tourabi. Après 1989, al-Mahdi, 78 ans, est idéologues du mouvement répression et de rétablir la il a été l’interface du régime insubmersible. Premier islamiste. Après le coup subvention sur le carburant. avec Oussama Ben Laden, qui ministre de 1986 à 1989, il d’État de 1989, il a occupé logeait à Khartoum. À partir de 2001, ce bon vivant est devenu sion, Omar el-Béchir risque un partenaire de la CIA contre de la payer cher. Les uns Al-Qaïda. Très puissant, l’accusent d’avoir cédé le Sud l’ex-chef des services a fini aux États-Unis, les autres de par faire de l’ombre à ne pas avoir préparé l’aprèsEl-Béchir. Arrêté en partition. Depuis un an, Ghazi novembre 2012, relâché en Salahadine s’oppose ouvertejuillet dernier mais de ment à une nouvelle candidature nouveau recherché, il d’El-Béchir à la présidentielle de garde un solide réseau. SACRIFICE. Cette séces-

2015. Évidemment, idemment, depuis les derniers événements, sa position se renforce. Comme beaucoup up de ses camarades de parti, il est prêt êt à sacrifier le numéro un du régime afin de garder l’essentiel, c’est-à-dire le pouvoir uvoir aux mains des trois grandes tribus ibus arabes du fleuve. En fait, au PCN comme dans les deux principales forces ces de l’opposition, l’Oumma et le Parti démocratique unioniste (PDU), qui sont en réalité alité deux confréries musulmanes lmanes transformées en partis, beaucoup veulent ulent

a été renversé par Omar el-Béchir. Mais, à la tête de l’Oumma (le principal parti d’opposition), il reste au centre du jeu. Habile, il place son fils aîné au cabinet d’El-Béchir tout en laissant ses filles manifester contre le régime. En cas d’urgence, c’est une alternative.

plusieurs postes au gouvernement. En 2009, c’est lui qui a négocié la réconciliation avec le Tchad. Au PCN (au pouvoir) et au Parlement, il est connu pour son dédain de l’argent – et donc respecté. C’est pour cela qu’il peut demander le départ d’El-Béchir sans être inquiété, du moins pour l’instant.

ASHRAF SHAZLY ; EBRAHIM HAMID/AFP ; MARWAN ALI/EPA/MAXPPP

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Afrique subsaharienne BURKINA

François Compaoré, le frère qui ne dit pas non S’il est peu probable que Blaise, son aîné, l’impose comme son successeur en 2015, il n’est pas dénué d’ambitions. Et c’est bien la première fois qu’il le formule en termes aussi peu ambigus. Rencontres et confidences.

L

a « thèse du frère » n’est plus vraiment à la mode à Ouagadougou. Ce qui était présenté il y a moins de un an comme un scénario écrit à l’avance par le président Blaise Compaoré et son frère cadet, François, n’est plus évoqué aujourd’hui qu’au conditionnel. Les principaux dirigeants de l’opposition comme les diplomates en poste au Burkina n’ont plus guère de doutes : « Blaise », s’il consent à passer la main en 2015, ne tentera pas d’imposer « François » au palais de Kosyam. « L’idée a été testée, mais elle est a priori abandonnée », indique un diplomate étranger de haut rang. Est-ce pour cette raison que François Compaoré, 59 ans, a pour la première fois ouvert à Jeune Afrique les portes de son bureau et, bien qu’à dose homéopathique, les vannes de son intimité ? C’est une possibilité. Celui que la presse surnomme Petit Président a beau vampiriser – bien malgré lui – la rumeur ouagalaise, il reste un mystère pour la plupart des Burkinabè. Ses interviews, depuis qu’il est devenu un personnage public après la mort du journaliste Norbert Zongo, en 1998, que lui a imputée une partie de la presse, se comptent sur les doigts d’une seule main. La dernière en date remonte à novembre 2012, la précédente à 2005. Il ne le dira pas, parce que c’est un homme qui prend soin d’éviter les conflits autant qu’il rechigne à livrer sur certains aspects le fond de sa pensée, mais ce genre d’épreuve n’est pas sa tasse de thé. MAINMISE. Première impression: ce qui

vaut pour son frère, mais aussi pour son chef d’état-major particulier, le général Gilbert Diendéré (lire J.A. no 2711), vaut pour « François ». En privé, cet homme poli et souriant, réservé à l’extrême, dont la voix posée se fait plus discrète encore lorsqu’il parle au téléphone, n’a rien à N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

voir avec l’image que renvoient de lui les zones d’ombre de son parcours. Ce qui ne veut pas dire qu’il y est étranger : la mort de Zongo et celle de son propre chauffeur, David Ouédraogo, la mainmise de sa belle-mère, Alizéta Ouédraogo, sur des pans de l’économie nationale, et son influence sur son frère ne sont pas des vues d’esprits retors. Même les ambitions que continue de lui prêter l’opposition n’ont rien d’un fantasme. Dans son bureau situé à l’entrée du Conseil de l’entente, non loin du bâtiment devant lequel Thomas Sankara a été assassiné il y a vingt-six ans, François Compaoré ne rejette pas l’idée – et c’est la première fois qu’il le dit en des termes aussi peu ambigus – d’être le futur président du Burkina. 2015 ? Il n’y pense pas, assure-t-il, il n’en a même pas l’envie, mais il ne s’interdit rien. « Je n’ai pas pris de décision, dit-il. Pour être candidat, il faut qu’un parti vous le propose. » Ce qui veut aussi dire qu’il ne l’exclut pas.

HIPPOLYTE SAMA POUR J.A.

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u Surnommé Petit Président, il alimente toutes les rumeurs à Ouaga.

en 2015, auquel cas il devrait modifier la Constitution, qui le lui interdit ? « Je ne tien, il dira même qu’il pourrait après lui ai pas posé la question », esquive-t-il, tout représenter « le changement dans la avant d’affirmer qu’il « faut donner une continuité » – en tant que frère, en tant chance » à son frère, qui n’est « pas si vieux » et dont il ne veut pas Réservé à l’extrême, il a la parole croire que « les Burkinabè ne veulent plus ». Pour ce faire, rare. Ses interviews se comptent il faut modifier l’article 37, qu’il juge antidémocratique, sur les doigts d’une seule main. et faire comme au Sénégal : que grand inspirateur de la politique « Donner aux électeurs la possibilité, économique du président depuis deux s’ils le souhaitent, d’écarter le président décennies, en tant que sosie aussi (la ressortant. » La démocratie : François Compaoré semblance avec « Blaise » est frappante). en a une conception plutôt restrictive, Dans tous les cas, tient-il à préciser, ce qui nous rappelle qu’il fut lui aussi un sera au président de décider, puis aux partisan de la révolution avant d’être Burkinabè. Sous-entendu : pas à l’opposition – qui dénonce d’ores et déjà « une un acteur de la rectification à la fin des succession dynastique » –, qu’il tient années 1980. « Au fil du temps, poursuitvisiblement en petite estime. il, les gens ont fini par comprendre que pour attirer les investisseurs et construire Au pouvoir depuis 1987, Blaise Compaoré pourrait-il, lui, être candidat un pays il n’y a pas que l’alternance. SOSIE. Plus tard au cours de cet entre-

JEUNE AFRIQUE


Afrique subsaharienne

Bio express

1954 Naissance à

Ziniaré, trois ans après Blaise

1987 Son frère

prend le pouvoir. François deviendra par la suite son conseiller économique

1994 Épouse en secondes noces Salah, la fille d’Alizéta Ouédraogo 1997 Accusé de vol, son chauffeur meurt en prison. Un an plus tard, le journaliste Norbert Zongo, qui a révélé l’affaire, périt dans l’incendie de sa voiture

2012 Entre au bureau politique du CDP, dont il reprend les rênes. La même année, il est élu député pour la première fois, mais laisse son siège à son suppléant On peut rester avec un système fort qui maîtrise tous les problèmes. » Et lorsqu’on lui rétorque que le pouvoir use, et que les nouvelles générations ont leur mot à dire (un constat qu’il a d’ailleurs lui-même fait en plaçant ses fidèles à la tête du Congrès pour la démocratie et le progrès – CDP – en

mars 2012), il répond que le fonctionnement d’un parti n’a rien à voir avec celui d’un État. Ce n’est pas la dernière de ses contradictions : s’il dit, au milieu de l’entretien, ne pas croire en l’homme providentiel, il s’interroge cinq minutes plus tard : « Qui pourrait remplacer un président comme le nôtre ? »

LE SÉNAT, UN « BESOIN » À OUAGADOUGOU, on ne parle que de ça : le Sénat, que le pouvoir veut mettre en place depuis plusieurs mois, mais dont l’opposition, qui craint qu’il ne serve à modifier l’article 37 de la Constitution, ne veut pas. Ébranlé par les manifestations du JEUNE AFRIQUE

mois de juillet (du jamais vu depuis l’affaire Zongo en 1999), Blaise Compaoré n’a pas pour autant capitulé. Selon son frère, les accusations de l’opposition sont infondées : « Cette chambre, ce n’est absolument pas pour

changer l’article 37. La Constitution, on l’a déjà modifiée dans le passé, sans le Sénat. Si on doit la modifier de nouveau, ce sera par voie référendaire. » Pourquoi y tenir tant, alors ? « Parce que le pays en a besoin. C’est une avancée démocratique. » l R.C.

Il s’est posé la même question en mars dernier, lorsque Issa Hayatou a remis son mandat en jeu à la tête de la Confédération africaine de football (CAF) et qu’il l’a emporté après avoir fait retoucher en sa faveur le règlement de l’institution. François Compaoré a voté pour lui, parce que « changer les textes, ce n’est pas si grave », parce que Hayatou « a fait beaucoup de choses pour le football africain », et parce que « l’expérience, c’est bon ». De sa relation avec son aîné il ne veut rien dire, pas plus que de ses liens avec Alizéta Ouédraogo, la présidente de la Chambre de commerce et d’industrie et la mère de son épouse, Salah (« elle faisait déjà des affaires quand je l’ai rencontrée »). Pas un mot non plus sur ses rapports avec les barons du CDP, les Salif Diallo (qui fut longtemps le bras droit du chef de l’État), les Roch Marc Christian Kaboré (ancien numéro deux du parti), qui l’ont vu émerger avec le regard inquiet des dauphins qui savent que leur chance est passée et qui ont été écartées lors du dernier congrès du parti (« je n’ai aucun problème avec eux »). CONTROVERSÉ. Certes, c’est par lui que

passent tous les dossiers qui sont présentés en Conseil des ministres (et pas seulement les dossiers économiques), et il compte dans l’actuel gouvernement un grand nombre de fidèles, mais il se défend de toute mainmise. Son bureau serait, dit-on, l’antichambre de la présidence… « Noooooonnnnnn », susurret-il tout en arborant un sourire gêné. Il serait le vrai chef d’orchestre de l’action gouvernementale… « C’est trop dire. » Est-il sincère ? S’il ne l’est pas, c’est un excellent acteur. Chez lui, pas de démesure, pas de grande déclamation, de jeu de menton ou de gestes grandiloquents. Même lorsqu’il évoque à la fin de cet entretien l’épisode le plus controversé de sa vie – la disparition de son ancien chauffeur David Ouédraogo, décédé dans les geôles de la sécurité présidentielle en 1997 après que l’épouse de François Compaoré l’a suspecté de leur avoir volé une grosse somme d’argent –, il ne prend pas le masque de l’innocent outragé. Il préfère jouer la sobriété : « Pour moi, c’est un cas de conscience. Je l’ai traité comme un frère. Je ne lui ai jamais voulu de mal, et c’est arrivé. » l RÉMI CARAYOL, envoyé spécial N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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Afrique subsaharienne À 24 millions d’euros, c’est une bonne affaire. Problème : les investisseurs n’ont avec eux aucune banque de référence internationale. Si cela ne semble pas être un souci pour le Crédit agricole, qui a donné son accord, il n’en va pas de même à Madagascar. Le directeur général du Trésor, en juin, puis la Commission de supervision bancaire et financière (CSBF), le 22 août, ont donc émis de sérieuses réserves quant au projet. Mais le 4 septembre, coup de théâtre : la CSBF change d’avis et donne son feu vert. Le lendemain, son président par intérim, le gouverneur de la Banque centrale, est retrouvé mort. Crise cardiaque.

MADAGASCAR

Liquidation avant fermeture La fin de la transition aiguise les appétits et, à quelques jours du premier tour de la présidentielle, fixé au 25 octobre, deux grosses affaires politico-financières défraient la chronique.

PRESSIONS. Entre-temps, les candidats

PASCAL MAITRE/COSMOS

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p Ce sont plusieurs milliers de rondins de bois de rose qu’Andry Rajoelina espère vendre avant de quitter le pouvoir.

L

a campagne bat son plein à Madagascar, où rien ne semble plus devoir enrayer le processus électoral. À quelques jours du premier tour de la présidentielle, fixé le 25 octobre, les candidats les plus fortunés, qui se comptent sur les doigts d’une main, inondent le pays de meetings festifs, de tee-shirts et de billets de banque, et les citoyens, bien qu’éblouis par les armadas de 4x4 rutilants qui les escortent, se demandent avec une naïveté feinte comment, dans un pays aussi pauvre que le leur, ils ont bien pu financer de telles machines de guerre. Chacun a sa petite idée, et ce ne sont pas les deux affaires

qui défraient la chronique actuellement qui vont atténuer leurs suspicions. La première concerne l’un des fleurons bancaires du pays, BNI Madagascar : la banque historique des entreprises, celle dans laquelle l’État compte le plus de participations directes (32,5 %). Depuis plus de deux ans, la moitié du capital de la BNI (51 % détenus par la banque française Crédit agricole) est à vendre. Et depuis quelques mois, un consortium constitué autour de Ciel, un groupe industriel mauricien allié à Hassanein Hiridjee, un homme d’affaires malgache qui a ses entrées à la présidence, est candidat au rachat.

au rachat avaient réajusté leur offre : ce n’est plus Trielite, une société de Hiridjee basée aux îles Vierges britanniques (un paradis fiscal) et déjà détentrice de 10 % de la BNI, qui accompagne le groupe Ciel, mais First Immo, une autre société de Hiridjee, implantée, elle, à Madagascar. Surtout, « les pressions ont été très fortes » ces dernières semaines, révèle un administrateur placé au cœur des négociations, et elles sont venues « de très haut ». Une source proche du candidat au rachat dénonce « une cabale à connotation xénophobe » contre le groupe mauricien et surtout contre Hiridjee, un Karane (Indo-Pakistanais), et explique la levée de boucliers par « la jalousie » que son ascension récente provoquerait. Il est vrai que la pilule passe mal chez les patrons malgaches, qui s’inquiètent de voir ce fleuron « bradé » à un investisseur qu’ils jugent peu fiable et à un homme d’affaires dont ils se méfient. « Ça sent le bricolage à plein nez », peste un membre influent du patronat, qui pointe du doigt la proximité entre Hiridjee et Rajoelina. Ce dernier rétorque que c’est une affaire privée qui ne concerne ni l’État… ni un candidat que ses détracteurs chercheraient selon lui à « salir ». En juin,

L’ÉTRANGE HISTOIRE DES 4X4 DE CAMILLE VITAL CAMILLE VITAL, ancien Premier ministre de Rajoelina qui a coupé les ponts avec le chef de l’État, est scandalisé : voilà plusieurs jours que près de 350 4x4 que lui aurait généreusement alloués un mécène installé à Hong N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

Kong pour battre campagne sont bloqués à la douane du port de Toamasina. Pendant qu’il s’interroge sur les raisons de ce blocage, les Malgaches, eux, se demandent quel homme d’affaires a bien pu offrir à

l’officier à la retraite – donné comme l’un des favoris – ce présent d’une valeur estimée à plus de 5 millions d’euros. Et, surtout : en échange de quoi. Vital assure qu’il n’y a aucune contrepartie et

promet que ces véhicules seront remis aux forces de l’ordre après l’élection. Quant à l’identité du donateur, il se contente de dire qu’il ne fait pas d’affaires à Madagascar… mais qu’il y pense. l R.C. JEUNE AFRIQUE


Coulisses

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CÔTE D’IVOIRE PRIS AU MOT Depuis plusieurs mois déjà, Charles Blé Goudé (photo) se disait « prêt » à comparaître devant la Cour pénale internationale (CPI). Qu’on lui donne seulement l’occasion de s’expliquer, clamait alors l’ancien leader des Jeunes patriotes en exil. Eh bien, cela tombe bien puisque, le 1er octobre, la CPI a confirmé la rumeur dont toutAbidjan bruissait depuis des semaines : un mandat d’arrêt a bien été émis (depuis le 21 décembre 2011) contre l’ancien baron du régime Gbagbo arrêté à Accra en janvier et extradé dès le lendemain vers Abidjan. La Côte d’Ivoire, où Blé Goudé est notamment poursuivi pour crimes de guerre, n’a plus qu’à décider si elle souhaite le voir jugé sur son sol (comme l’ancienne première dame Simone Gbagbo), ou si elle préfère l’envoyer à La Haye (à l’instar de Laurent Gbagbo). l REBECCA BLACKWELL/AP/SIPA

Hery Rajaonarimampianina avait pris la plume pour approuver ce projet de rachat qu’il aurait en coulisses ardemment soutenu. Il était alors ministre des Finances. Aujourd’hui, il est l’un des trente-trois candidats à la présidentielle et il fait figure de favori. Rajoelina en a même fait son champion. L’autre affaire est peut-être le dernier épisode d’un feuilleton à rebondissements qui a vu le jour en même temps que la transition, et dans lequel l’entourage du président est suspecté de jouer un rôle majeur. Depuis quelques semaines, Rajoelina ambitionne de vendre, via un appel d’offres international, une partie des 20 000 rondins de bois de rose – un bois précieux qui fait l’objet d’un trafic dans l’île depuis cinq ans – saisis ces dernières années et stockés dans les casernes de la gendarmerie et de l’armée.

Afrique subsaharienne

TRAFIC. Officiellement, l’argent récolté

RÉMI CARAYOL JEUNE AFRIQUE

CAMEROUN PLUS DURE EST LA CHUTE

Niger Précision À la suite de la publication de notre article intitulé « Malaise dans la Chinafrique » (J.A. no 2750), et pour éviter toute confusion, il convient de préciser que le bonus de 300 millions de dollars versé en 2008 aux autorités nigériennes par leurs partenaireschinoislorsdesnégociations sur le bloc pétrolier d’Agadem est bien apparu sur le compte de l’État du Niger à la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Ledit bonus a en outre été pris en compte lors de l’élaboration du projet de budget 2009, qui a été adopté à l’Assemblée nationale à l’unanimité en novembre 2008. La loi de finances rectificative, adoptée en février 2009, intègre elle aussi ce bonus. Tout semble donc avoir été fait dans la plus grande transparence.

Le couperet est tombé pour Ephraïm Inoni, Premier ministre entre 2004 et 2009. Accusé de détournement de fonds par leTribunal criminel spécial (TCS), il a écopé, le 2 octobre, de vingt ans de prison. Il est le premier ancien chef de gouvernement à tomber entre les griffes de l’opération Épervier. Poursuivi dans la même affaire, l’ex-secrétaire général à la présidence Jean-Marie Atangana Mebara a été condamné à la même peine.

GAMBIE BYE-BYE

L’événement

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La semaine de Jeune Afrique

N COO PÉR ATIO

ns Malaise da C’ s r leurs richesse Pékin exploite pays Lassés de voir sans que leurs et minières ments pétrolières els, les gouverne bénéfices substanti passant par le Niger – en en retirent des . Gabon au Tchad er les échanges africains – du tentent de rééquilibr frictions… Au prix de quelques CHRISTOP HE

BOISBOU VIER

sur coup. En est arrivé coup les Chinois décembre 2012, pétrolier ont perdu le champ au Gabon. En d’Obangu e, été conspués avril 2013, ils ont près des par des chômeurs août, sur En le sud-est du Niger. puits de Diffa, dans ent, ils ont dû fermer un site « La romance ordre du gouvernem polluant au Tchad. d’extraction très », s’exclame Sanusi et nous, c’est fini entre la Chine

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la Chinaffrique te parue r une tribune retentissan Le gouverneu Lamido dans le Financial Times. lance même en mars dans centrale du Nigeria s’empare de de la Banque : « La Chine cette phrase assassine et nous vend des biens premières e. » nos matières du colonialism C’est l’essence ont découvert manufacturés. quand les Chinois de pétrole Il y a vingt ans, net t importateurs en Afrique, les qu’ils devenaien se ravitailler et qu’ils devaient es d’État, Sinopec, compagni trois grandes

n (CNPC) Petroleum Corporatio n China National Offshore Oil Corporatio sur le et Chinese National à bras ouverts été accueillies (CNOOC) ont dans le domaine a été de même continent. Il en 0), les échanges ans (2000-201 minier. En dix et l’Afrique sont entre la Chine 7,5 à commerciaux de dollars (de 130 milliards RD Congo, passés de 10 à En Angola, en 97 milliards d’euros). les Chinois sont arrivés Nigeria, prêtons au Gabon, au : « Nous vous simple politique, et avec un message aucune condition sous-sol. » Le de l’argent sans accès à votre vous nous donnez l’échange était déséquilibré. que problème, c’est à Libreville, i, à Niamey comme BONUS. Aujourd’hu le sentiment que gouvernants ont lors de la signales nouveaux urs ont été bernés le Nigérien leurs prédécesse contrats. En 2008, ture des premiers qui voulait s’accrocher au Mamadou Tandja, d’argent frais pour acheter besoin avait pouvoir, La CNPC a alors classe politique. pour l’aider le silence de la de l’argent au Niger près accepté de prêter champ pétrolier un n à mettre en exploitatioune raffinerie à Zinder – où de Diffa et à construire d’électeurs. Ce montage réservoir gros un réside problèmes majeurs. désormais trois Chinois aurait financier pose présentée par les de millions de D’abord, la facture plusieurs centaines du cabinet été gonflée de le révèle un audit dollars – comme a emprunté aux Ensuite, Tandja du marché Ernst & Young. taux les – taux à Chinois à un mauvaismême Tandja a demandé le sur dix ans. Enfin, verser très discrètement un de lui n’est jamais ses partenaires de dollars, qui le bonus de 300 millions de l’État. Aujourd’hui, comptes que l’argent apparu dans les u Issoufou sait Du moins, président Mahamado très difficile à récupérer. a-t-il exigé et du bonus sera ment du prêt, pour le rembourse % sur vingt-cinq ans… de 1 le président obtenu un taux encore : au Gabon, reprendre Plus frappant a décidé de (ABO) d’Obangu e Ali Bongo Ondimba le champ pétrolierent, la société aux Chinois jour). Concrètem depuis (8 500 barils par Sinopec de – propriété d’exploitation Addax Petroleum retirer son permis la nouvelle 2009 – s’est vu Gabon Oil Company, cas l l l au profit de la « Mauvaise gestion, société nationale. RS

Membre depuis quarante-huit ans du Commonwealth, la Gambie vient de se rendre compte que c’était « une institution néocolonialiste » et a annoncé, le 2 octobre, son retrait immédiat de l’organisation. En avril 2012, le Commonwealth avait proposé de créer à Banjul des commissions pour les droits de l’homme, les médias et la lutte contre la corruption. La Gambie avait fort peu apprécié.

KATRINA MANSON/REUTE

(potentiellement plusieurs millions d’euros) devra servir à financer la sécurisation des élections et l’équipement des forces de l’ordre. L’autre objectif, « c’est de stopper ce genre de trafics », a insisté Rajoelina sur RFI début octobre. Un argument qui ne convainc guère les défenseurs de l’environnement. « Si on veut stopper le trafic, il suffit d’emprisonner les trafiquants, qui sont bien connus et depuis longtemps », estime Ndranto Razakamanarina, le président de l’Alliance Vohary Gasy, une plateforme d’organisations malgaches œuvrant pour l’environnement. Selon lui, une telle vente est certes réalisable, « mais en vingt semaines, pas en trois ». « Le président veut vendre avant les élections. C’est impossible en si peu de temps, à moins de passer par une procédure de gré à gré. Pourquoi une telle précipitation ? Pour financer la propagande ? » s’interroge-t-il. Interpellée, la communauté internationale a demandé des explications au président. L’ambassadeur français, François Goldblatt, habituellement très discret, s’est même fendu d’un tweet alarmant le 25 septembre : « Projet de cession à très court terme, en pleine campagne électorale, d’une partie du stock de bois de rose à un opérateur étranger […]. Un projet particulièrement troublant. » Début octobre, la Banque mondiale a obtenu, après avoir été reçue à la présidence, de pouvoir avoir un œil sur cette procédure pour le moins précipitée. l

congolais de g, et employés t Cadres chinois China Railways Engineerin BTP l’entreprise de 2010. à Kinshasa, en 22 AU 28 SEPTEMBRE NO 2750 • DU

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Maghreb & Moyen-Orient

Jihad du fantasmes et réalité TUNISIE


Maghreb Moyen-Orient FRIDA DAHMANI, à Tunis

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epuis janvier 2012, ils seraient près d’une dizaine de milliers de Tunisiens, dont 3 000 officiellement recensés par l’ONU, à avoir combattu aux côtés des insurgés syriens, notamment les jihadistes de la Jabhat al-Nosra (« front du soutien »). S’il est sûr que 1 900 d’entre eux ont péri, il est tout aussi certain pour plusieurs associations que de très jeunes Tunisiennes, dont le nombre est à ce jour indéterminé, les ont rejoints pour un autre type de combat, celui du jihad al-nikah, qui consiste à satisfaire les besoins sexuels des guerriers à la faveur d’une multiplication de mariages « temporaires ». Aujourd’hui, une centaine seraient revenues au pays, enceintes ou malades pour la plupart. « Épiphénomène : seules treize jeunes filles sont concernées », ont répliqué certains. « Il n’y a aucune preuve, les femmes jihadistes portent les armes comme les hommes. En revanche, les exactions dans les camps de réfugiés sont avérées », assure Lauren Wolfe, directrice du site d’investigation Women Under Siege (WUS), tandis que pour la reporter Ruth Michaelson, basée à Damas, il s’agit d’une campagne destinée à discréditer les combattants salafistes. Le 29 septembre, Ignace Leverrier, ancien diplomate français, abondait dans le même sens sur son blog.

t Lors d’un rassemblement salafiste, devant la Constituante, le 11 janvier 2013.

FILIÈRES. Qui croire ? Deux certitudes. D’abord,

Nié ou minimisé par les uns, exagéré par les autres, l’enrôlement de jeunes filles pour satisfaire les besoins sexuels des combattants syriens est désormais avéré. Enquête sur un scandale qui déchaîne les passions.

ONS ABID

sexe

la pratique du jihad du sexe est avérée en Tunisie même, dans le Jebel Chaambi, comme l’atteste l’arrestation de plusieurs mineures impliquées. Ensuite, le Réseau tunisien pour les droits, les libertés et la dignité a, le 1er octobre, saisi l’ONU sur la foi des témoignages de quinze jeunes femmes revenues de Syrie et des rapports médicaux établis par des médecins assermentés. Alerté par des familles, Badis Koubakji, président de l’Association de secours aux Tunisiens à l’étranger, confirme l’existence de filières d’embrigadement à destination de la Syrie auxquelles les Ligues de protection de la révolution (LPR), milices pro-islamistes, et des associations « humanitaires » avaient participé de manière active. Noureddine Khadmi, ministre des Affaires religieuses, en aurait été informé. La controverse est montée d’un cran quand le ministre de l’Intérieur en personne, Lotfi Ben Jeddou, a reconnu, le 19 septembre, lors d’une plénière à la Constituante, que le jihad al-nikah était une réalité, ajoutant que les autorités avaient, en six mois, empêché 6 000 nationaux – hommes et femmes – de partir en Syrie. Quelques jours plus tard, il tentait de minimiser le phénomène : « Ce n’est pas un fléau, il y a seulement quelques cas isolés, et tous les pays arabes sont touchés. » Les parents dont les jeunes filles ont disparu ne JEUNE AFRIQUE

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Maghreb Moyen-Orient Tunisie sont pas de cet avis. Depuis fin mai, Zina cherche sa fille, Basma. « Elle suivait une formation en pâtisserie organisée par une association caritative à Ettadhamen [quartier populaire de Tunis]. Elle a commencé à se renfermer et à tenir des propos très tranchés. Elle a troqué son foulard contre le niqab et, un mois plus tard, elle est partie sans rien dire. Pendant qu’elle apprenait à faire des gâteaux, son enseignante, d’origine libanaise, lui remplissait aussi la tête. Depuis un texto reçu de Turquie en juin, nous n’avons plus aucune nouvelle. Même si elle est revenue, elle doit se cacher par peur de son père, qui l’a déjà reniée. » « Il n’y a aucune gloire à participer au jihad alnikah. C’est se moquer des préceptes d’Allah et un déshonneur pour les familles », tempête Mouldi, l’oncle de Basma. Pourtant, la pratique aurait été avalisée par une fatwa attribuée au célèbre prédicateur saoudien Mohamed al-Arifi, qui aurait encouragé « les musulmanes âgées d’au moins 14 ans, veuves ou répudiées », à participer à la guerre sainte en s’offrant aux combattants par le biais de mariages temporaires. En compensation, elles s’assureraient une place au paradis. Problème : Arifi, qui n’est pas homme à se dédire, a nié catégoriquement être l’auteur de cette fatwa, dont on ne trouve nulle trace orale ou écrite. Toujours est-il que des jeunes filles ont été enrôlées, sans doute par des salafistes tunisiens locaux eux-mêmes influencés par des imams radicaux prônant le jihad al-nikah. C’est le cas d’Ines, 17 ans, qui est revenue porteuse du virus du sida. « Tu seras absoute de tous tes péchés », lui avait promis celui qui l’a séduite et épousée selon les règles du mariage coutumier (zawaj orfi), puis conduite à Jebel al-Arbaïne, en Syrie.

Le syndicat des imams entend porter plainte contre le ministre des Affaires religieuses.

PROTECTION RÉPUBLICAINE LES ENFANTS « ILLÉGITIMES » nés des mariages coutumiers ou du jihad al-nikah sont protégés par des lois républicaines. Celle promulguée en novembre 1998 par le gouvernement Ben Ali admet la matrilinéarité, permettant aux femmes de reconnaître leurs enfants nés hors mariage et de leur transmettre leur patronyme ainsi que leur nationalité. Avec des mères considérées comme des parias, de nombreux enfants risquent cependant d’être abandonnés à la naissance. Mais une loi de 1959 rend leur adoption possible. La N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

Tunisie, avec le Liban, laTurquie et l’Indonésie, est en effet l’un des rares pays musulmans à agréer l’adoption plénière, alors que le droit islamique instaure uniquement la kafala, qui exclut tout lien de filiation entre adoptant et adopté pour préserver l’héritage. Les islamistes d’Ennahdha avaient d’ailleurs annoncé leur intention de revoir le code de la famille afin de rétablir la kafala. Dans l’immédiat, le législateur devra en tout cas prendre des mesures d’urgence pour protéger ces enfants et définir F.D. leur prise en charge. l

Là, il la répudie. Ines passera ensuite entre les bras de certains chefs rebelles avant d’être donnée à la troupe. « 152 », murmure-t-elle, c’est le nombre de conjoints qu’elle a connus en six mois. « Chaque semaine, nous contractions au minimum cinq nouvelles unions, témoigne-t-elle. Tous les rituels étaient respectés ; il n’y avait rien de haram, selon nos compagnons. Au contraire. En cas de grossesse, on devenait encombrante et on était renvoyée au pays. » PROSTITUTION. Face à cette lecture, totalement

étrangère à l’islam, du licite et de l’illicite, notamment en matière de sexualité, les autorités religieuses se devaient de réagir. Ce qu’elles ont fait à travers l’ancien mufti de la République, Othman Battikh, qui a fermement condamné, en juin, le jihad en Syrie, ainsi que la pratique du jihad du sexe, qu’il assimile à une exploitation des femmes et à une forme de prostitution. Pourtant, le président Moncef Marzouki n’a pas trouvé mieux que de le limoger, le 6 juillet, pour le remplacer par Hamda Saïed, considéré comme proche d’Ennahdha, le parti islamiste au pouvoir. Autre réaction remarquée, celle du cheikh Férid el-Béji, président de l’association Dar al-Hadith Ezzeitounia, qui s’inscrit en faux contre des interprétations que n’agrée aucune des quatre écoles juridiques sunnites et qui aboutissent à de graves dérives. Enfin, le Syndicat national des cadres religieux a annoncé son intention de porter plainte contre le ministre des Affaires religieuses, accusé de protéger les prédicateurs appelant au jihad alnikah, et menacé de faire grève le jour de l’Aïd, le 14 ou le 15 octobre. Issues pour la plupart de milieux défavorisés, fragiles, crédules, sans instruction ni formation religieuse, les victimes sont des proies faciles. Ces laissées-pour-compte ont cru que c’était la chance de leur vie, celle qui leur conférerait enfin un statut, avec en prime une absolution éternelle. Mais c’est plutôt l’enfer ici-bas qu’elles ont récolté. Ines, par exemple, rejetée par sa famille, en a été réduite à squatter une cage d’escalier. Une cellule d’assistance a été mise en place à la hâte par le ministère des Affaires de la femme, mais la réinsertion des « jihadettes », comme on les surnomme à Tunis, est tout à fait aléatoire. « Il aurait fallu prévenir, informer sur les maladies, la violence. Pour ces filles, c’est trop tard, elles ne s’en remettront pas », estime une assistante sociale travaillant avec les mères célibataires. « Il s’agit aussi de prendre en charge ces femmes. Rejetées par la société, elles iront vers la délinquance et la toxicomanie » s’alarme le psychiatre sexologue Zine Ennaifer. Implicitement consentantes, elles pourraient même être poursuivies pour prostitution, alors que leurs recruteurs, payés « à la pièce » selon plusieurs témoignages, ne sont à ce jour pas inquiétés. l JEUNE AFRIQUE



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Maghreb Moyen-Orient ALGÉRIE

Ahmed Benbitour, seul contre personne Unique candidat déclaré à la présidentielle d’avril 2014, l’ancien chef du gouvernement prône une refondation en profondeur de l’État et l’instauration d’un nouveau mode de gouvernance.

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l ne se bat pas contre des moulins à vent et on ne lui connaît pas de Sancho Pança, mais l’ancien chef du gouvernement Ahmed Benbitour, 67 ans, est désormais surnommé le Don Quichotte de la vie politique algérienne. Depuis décembre 2012, il est en effet l’unique candidat déclaré à l’élection présidentielle d’avril 2014, soit dans un peu plus de six mois. Pourquoi cette singularité ? « Je n’ai pas à commenter la démarche des autres candidats potentiels pour cette échéance. En revanche, je peux vous dire les raisons qui m’ont conduit à me déclarer il y a plus de dix mois : s’il n’y a pas de changement de système de gouvernance, une opportunité qu’offre la prochaine présidentielle, l’État algérien achèvera d’ici à 2020 son processus de déliquescence entamé depuis plus d’un quart de siècle. » Selon Benbitour, ce processus est né de l’institutionnalisation de l’ignorance et de l’inertie. En clair, la méritocratie a cédé la place à l’allégeance « au puissant du moment ». La déliquescence est également liée à d’autres facteurs comme la généralisation de la corruption dans les institutions de la République – notamment l’administration –, les dysfonctionnements dans la prise de décision, l’émiettement au sein des différents clans au pouvoir, qui, « s’ils se connaissent, ne se reconnaissent plus », et, enfin, le retour au culte de la personnalité. PARRAINAGES. Une révolution à la tuni-

sienne ou à l’égyptienne ? La perspective serait porteuse de risques aux conséquences imprévisibles sur la stabilité du pays. Une alliance stratégique des forces politiques qui réclament le changement du système de gouvernance ? « Difficile de l’envisager quand ces forces sont dirigées par des personnes qui conjuguent le changement à la première personne du singulier, martèle Benbitour. C’est pourquoi je suis convaincu que l’élément déclencheur pourrait être le prochain scrutin présidentiel. » Ahmed Benbitour ne sera officiellement candidat qu’après la publication, N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

en janvier ou février 2014, du décret présidentiel convoquant le corps électoral. Pour que sa candidature soit retenue par le Conseil constitutionnel, il lui faudra remplir une exigence : obtenir le parrainage de 600 élus locaux ou nationaux, ou celui de 60 000 citoyens répartis équitablement entre au moins 25 des 48 wilayas (départements). « J’envisage

de la politique énergétique et la création de quinze pôles d’activités spécialisés, dont la répartition régionale s’inspirerait de l’organisation administrative des premières années de l’indépendance. C’est d’autant plus urgent que nous comptons, aujourd’hui, une population universitaire de 1,5 million d’étudiants. Le cycle de formation étant en moyenne de cinq ans, cela signifie que nous devons absorber chaque Il dénonce l’institutionnalisation année 300 000 nouveaux de l’inertie et l’allégeance au diplômés arrivant sur le marché de l’emploi. Or nulle puissant du moment. économie ne peut répondre de faire parrainer ma candidature par à cette exigence si sa croissance est inféplus de 600 élus locaux et par plus de rieure à deux chiffres ». Le quatrième 60000 Algériens », clame Benbitour. Pour chantier du candidat Benbitour est la convaincre les uns et les autres, il a élapromotion des compétences nationales, boré un programme électoral sous forme diaspora comprise, ainsi que la maîtrise du défi qu’imposent de feuille de route pour les nouvelles technologies changer le système à un de l’information. double niveau : dans les Repères S’agissant du changeinstitutions et dans les ment en matière de comcomportements. 20 juin 1946: naissance Le candidat à la sucportement, l’ancien Premier à Metlili, dans la région cession d’Abdelaziz ministre promet une lutte du M’zab Bouteflika énonce quatre efficace contre la corruption 1984 : doctorat en grands chantiers. Le prequi gangrène les rouages sciences économiques mierestlarefondationde de l’État à tous les niveaux à Montréal de la hiérarchie. Mais il ne l’État à travers la refonte croit pas aux vertus d’une de l’administration, la 1994 : ministre de opération mains propres : réforme de la justice, l’Économie et des la modernisation des « Elle a montré son inefficaFinances moyens de défense avec, cité chez nous et ailleurs. En 1997 : sénateur au à la clé, une redéfinition revanche, l’instauration d’un Conseil de la nation du rôle et de la place de nouveau système de gestion l’armée dans les institudes affaires publiques introDécembre 1999: chef tions de la République. duirait une traçabilité qui du gouvernement Le deuxième chantier assécherait les niches de Août 2000: publie sa envisagé est la réorganicorruption. » Ultime point lettre de démission sation de l’école par l’insde la feuille de route de pour dénoncer la tauration d’un système Benbitour: la reconstruction politique d’Abdelaziz d’enseignement capable de la citoyenneté à travers la Bouteflika d’améliorer les compéconsolidation et l’association tences managériales des de la société civile dans le futurs dirigeants poliprocessus de décision avec, à tiques et décideurs économiques, et de terme, le recours au référendum populaire s’adapter aux nouvelles réalités imposées pour ce qui est des choix stratégiques par la révolution numérique. Le troisième engageant l’avenir du pays. chantier vise « de véritables réformes Sa candidature n’étant pas encore économiques à travers une redéfinition validée, Ahmed Benbitour ne peut faire JEUNE AFRIQUE


Maghreb Moyen-Orient ouvertement campagne. Mais cela n’exclut pas le travail politique. Dans chacune des 48 wilayas et dans plusieurs dizaines de communes, sur les 1 541 que compte la République, des clubs de soutien à son programme électoral ont vu le jour. Très présent dans les médias, le candidat Benbitour sillonne le pays. Seules trois grandes wilayas du Sud ne l’ont pas encore accueilli : Tamanrasset, Tindouf et Illizi. Invité par des associations, il parcourt ainsi l’Algérie profonde, donnant des conférences, exposant sa feuille de route et rencontrant les élites et notabilités locales, qu’il appelle des « personnalités d’appui ». Les multiples sollicitations qu’il a adressées aux chefs de parti n’ont pas reçu d’écho favorable. Hormis le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD de Mohsine Bellabes, opposition), qui a donné une suite favorable, nul autre leader politique ne l’a reçu. À son grand regret : « Dommage, car je souhaiterais faire adopter par l’ensemble de la classe politique un code d’honneur à l’occasion de l’échéance présidentielle et exiger du pouvoir que l’organisation du scrutin soit confiée à une commission indépendante et non plus au ministère de l’Intérieur. »

LOUIZA AMMI POUR J.A.

DOUBLE TRANSITION. Pour l’heure,

la campagne de vulgarisation est peu coûteuse, donc financée par ses soins. Ses équipes, locales ou nationale, sont composées exclusivement de bénévoles, et ce « jusqu’à l’issue des opérations de vote, c’est un engagement souscrit par [s]es partisans ». Seul candidat contre personne, Ahmed Benbitour n’ajoute pas foi aux spéculations autour du calendrier électoral : « Aucun élément tangible ne laisse supposer un report du scrutin. » Même si sa feuille de route fixe à quinze ans la durée du processus de changement – « cinq ans pour achever la double transition que vit notre pays depuis 1988, avec une transition politique [fin du parti unique et choix de la démocratie] et une transition économique [sortie de l’économie dirigée pour aller vers une économie de marché], et dix ans de consolidation démocratique » –, Ahmed Benbitour s’engage à n’effectuer qu’un seul mandat, avant de transmettre le relais aux plus jeunes. Pour terminer le job. l CHERIF OUAZANI, envoyé spécial à Alger

t Ahmed Benbitour à son domicile, le 2 octobre, à Alger. JEUNE AFRIQUE

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Maghreb Moyen-Orient INTERVIEW

Nabil Mouline « Riyad incarne le parti de l’ordre » Quels sont les ressorts internes de la monarchie wahhabite ? Quelle est sa stratégie face au Printemps arabe ? Analyse d’un spécialiste marocain qui fait autorité en la matière.

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octeur en histoire et en sciences politiques, Nabil Mouline est chercheur associé au Centre d’études interdisciplinaires des faits religieux, rattaché au CNRS. Il enseigne à Sciences-Po et à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), à Paris. Les travaux de ce Marocain portent sur la construction de l’autorité dans les monarchies arabes, notamment en Arabie saoudite et au Maroc, sur leurs rituels et leurs symboles. Infatigable bûcheur, il prépare une Histoire de l’Arabie saoudite (à paraître chez Flammarion). Il a écrit notamment Les Clercs de l’islam: autorité religieuse et pouvoir politique en Arabie saoudite (PUF, 2011), traduit en arabe et en anglais. JEUNE AFRIQUE : Comment expliquer le retour en force de l’Arabie saoudite après ce que l’on pourrait appeler un « moment qatari » au début du Printemps arabe ? NABIL MOULINE : Imaginons une

course de 5 000 mètres. Le Qatar y jouerait le rôle du lièvre. L’Arabie saoudite accélère dans les 400 derniers mètres et finit par l’emporter. Qui se souvient du lièvre ? Dans les faits, les deux pays « jouent » à des niveaux différents, du point de vue tant du territoire et de la démographie que des moyens financiers, de la profondeur historique et des relations internationales. Jusqu’à présent, les Saoudiens ont toujours considéré le Qatar comme un « phénomène vocal », malgré le travail inédit de branding accompli sous le règne de l’émir Hamad. A-t-on surévalué le poids du Qatar ?

Le Qatar est un intermédiaire utile aux yeux des autres acteurs régionaux et internationaux. Tant que cela ne prête pas à conséquence. En revanche, l’Arabie saoudite reste un poids lourd, avec plus de leviers. Ce qui manque à Riyad, c’est une vision claire et identifiable pour N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

passer de la réaction à une action stratégique. Cela est imputable à une idéologie conservatrice et à la fragmentation de sa diplomatie. Pourtant, le régime a montré qu’il pouvait réagir face à une menace immédiate, comme à Bahreïn en mars 2011. L’Arabie saoudite est-elle, aujourd’hui, à la tête d’une contre-révolution ?

Pour des raisons biologiques, l’Arabie saoudite s’est sentie menacée par les changements en cours. La mémoire des dirigeants saoudiens est très longue. Dans les années 1950 et 1960, ils ont subitement été encerclés par des puissances hostiles se réclamant du panarabisme. En 2011,

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et les autres. En Syrie, certains groupes reçoivent des dons levés par des acteurs non gouvernementaux. C’est officiellement interdit depuis 2011, mais la pratique continue. Ensuite, à l’intérieur du système, chaque faction de la famille royale entretient des interlocuteurs à l’étranger. Ces factions sont souvent en compétition, voire en conflit. À qui faut-il s’adresser aujourd’hui quand on appelle Riyad ?

Encore une fois, il n’y a pas d’interlocuteur unique. Par exemple, le ministre des Affaires étrangères, Saoud Ibn Fayçal, et le chef des renseignements, Bandar Ibn Sultan, sont à la tête d’appareils

La perspective d’une « démocratie des Frères musulmans » est insupportable. la perspective d’une « démocratie des Frères musulmans » en Égypte, au Yémen ou en Syrie était apocalyptique. Pour autant, je n’utiliserais pas le terme de « contre-révolution », parce qu’il n’y a pas eu de véritable révolution. Je dirais que l’Arabie incarne le parti de l’ordre. Quel rôle joue Riyad en Syrie ?

L’Arabie saoudite et d’autres pays du Golfe se méfient des Frères musulmans et cherchent un partenaire plus ou moins fiable pour mener une transition avec le minimum de dégâts. Mais sur le terrain syrien se joue également la lutte avec l’Iran, qu’on aurait tort de réduire à un affrontement entre chiites et sunnites. Si la Syrie est importante symboliquement, c’est aussi à cause de la perte de l’Irak, qui a basculé en 2004 au profit de Téhéran. Pourquoi dites-vous de la diplomatie saoudienne qu’elle est fragmentée ?

Plusieurs intérêts sont à l’œuvre dans l’action étrangère saoudienne. Il faut d’abord distinguer les acteurs étatiques

concurrents et ne travaillent pas toujours ensemble. Au sein de la famille royale, il n’y a de consensus que sur deux questions : le rejet de l’Iran et la gestion de la rente pétrolière. Et avec les États-Unis ?

Au début des soulèvements arabes, en 2011, les Saoudiens avaient une approche très différente de celle des Américains. Ils sont intervenus à Bahreïn et au Yémen, sansdemanderl’avisdeWashington,parce qu’ils se sentaient directement menacés. En Égypte, Riyad n’a jamais admis le renversement du président Moubarak. Mais les relations n’ont pas été rompues, et l’administration Obama a fini par prendre ses distances avec les Frères. En 2011, Riyad a passé à l’industrie militaire américaine la plus grande commande de son histoire, pour environ 34 milliards de dollars [25,4 milliards d’euros] ! L’ex-président tunisien Ben Ali est toujours l’hôte du roi Abdallah. À quoi joue l’Arabie saoudite au Maghreb ? JEUNE AFRIQUE


Maghreb Moyen-Orient D’un point de vue stratégique, la Tunisie n’intéresse pas vraiment l’Arabie saoudite, et il n’y a pas de coût à accueillir Ben Ali, qui avait d’ailleurs des relations privilégiées avec ses dirigeants. En revanche, la diplomatie religieuse, inaugurée dans les années 1960, reste active. Ce soft power diffuse le salafisme dans tout le monde arabe et ailleurs, ce qui permet de compter des soutiens un peu partout, notamment au Maghreb.

thésaurise le maximum de ressources symboliques et matérielles pour faire pièce aux autres et, ainsi, accéder au pouvoir. Depuis les années 1970, les Soudaïri dominent la scène politique. Cette faction est constituée des sept frères germains, fils du roi Abdelaziz, dont les défunts Fahd, Sultan, Nayef, et l’actuel prince héritier Salman.

Et au Maroc ?

La génération actuelle L’Arabie saoudite est l’un arrive en bout de course et des rares pays arabes à avoir il est urgent de passer à la réussi un contre-soulèvetroisième génération, celle ment « préventif ». Au début des petits-fils d’Abdelaziz. En 2011, le pouvoir a annoncé de dollars 2006, les autres factions se un package économique sont alliées au roi Abdallah de 129 milliards de dollars pour contrer les Soudaïri. En (assurance chômage, emplois 2005, celui-ci a mis en place publics, financement de logeun Conseil de l’allégeance, puis a ments, etc.). En parallèle, le discours nommé l’un de ses fils – Miteb – comme religieux sur l’obéissance a été réactivé, ministre d’État, et deux autres de ses fils l’opposition et la presse ont été muselées. sont devenus gouverneurs. Il n’y a pas de menace sociale à court terme. Mais les défis sont nombreux : Les Soudaïri peuvent-ils être écartés ? la population double tous les vingt ans Les Soudaïri contrôlent des pans et la rente diminue. Le chômage des essentiels du pouvoir, dont les minisjeunes atteint des proportions inédites. tères de la Défense et de l’Intérieur, la Un dernier chiffre : 22 % seulement des police, les Mabahith [police secrète], Saoudiens sont propriétaires de leur les Moukhabarat, la province orientale, maison. En un sens, l’Arabie saoudite la plupart des médias locaux et panan’est plus un pays du Golfe, c’est déjà un rabes, dont Al-Arabiya, Asharq al-Awsat, pays arabe. Comme les autres. l Al-Hayat, etc. L’actuel ministre de l’IntéPropos recueillis par YOUSSEF AÏT AKDIM rieur, Mohamed Ibn Nayef, fait partie de la troisième génération et cumule plusieurs atouts: très populaire, il a mené q Le roi Abdallah (à dr.), en mars 2013.

La relation est différente avec le Maroc, qui est une monarchie. L’Arabie et le Qatar, qui contrôlent les grandes chaînes de télévision, ont organisé le black-out médiatique sur les autres monarchies, dont le Maroc, mais aussi la Jordanie et Oman, pendant la période des soulèvements. D’un point de vue religieux, Riyad a pesé sur certains salafistes marocains pour soutenir la monarchie et, inversement, sur le pouvoir chérifien pour s’appuyer sur les plus quiétistes d’entre eux. Comment se dessine la succession du roi Abdallah, que l’on sait malade ?

La succession est le véritable talon d’Achille du pouvoir saoudien. C’est le cas depuis le XIXe siècle. La dynastie des Saoud a choisi le modèle dit adelphique, où le pouvoir se transmet entre membres de la même génération : frères, cousins plus ou moins éloignés. On attend qu’une génération se tarisse pour passer à la suivante. Ce modèle encourage les factions et leurs luttes. Chaque faction

A FP

N’est-il pas nécessaire de « sauter » une génération ?

la lutte contre le terrorisme et est très apprécié de l’establishment religieux. Son frère Saoud est [depuis janvier 2013] gouverneur de la province orientale. Leur oncle Salman est prince héritier et ministre de la Défense. On raconte que le roi Abdallah aurait dit de lui : « C’est le fils que j’aurais aimé avoir. »

Coût du programme massif d’aides sociales :

129 milliards

La situation économique favorise-t-elle une transition en douceur ?

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Maghreb Moyen-Orient notamment en Afrique du Nord et dans le Sahel. Pour le secrétaire général de la Francophonie, Abdou Diouf, « cette conférence ne se veut pas une conférence de plus, parce que nous sommes venus à Fès avec la conscience qu’il faut résolument franchir une nouvelle étape […] et que nous ne saurions relever ce défi avec des mots lisses ou précautionneux dont ne peut plus s’accommoder la réalité des faits ».

DIALOGUE INTERRELIGIEUX

L’appel de Fès Pour l’OIF et l’Isesco, le problème le plus grave n’est plus la fracture entre les cultures mais celle au sein de l’islam lui-même.

SÉCULARITÉ. Et les mots ont été tout

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p Abdou Diouf, secrétaire général de la Francophonie, le 30 septembre, à Fès.

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Organisation internationale de la francophonie (OIF) et l’Organisation islamique pour l’éducation, les sciences et la culture (Isesco) ont tenu, du 30 septembre au 2 octobre, à Fès, la Conférence internationale pour le dialogue des cultures et des religions, à l’issue de laquelle a été

lancé l’« appel de Fès ». La rencontre a mobilisé une centaine de responsables religieux, intellectuels, représentants de la société civile et des médias, étudiants, dans un contexte de difficiles transitions politiques et de crispations identitaires qui remettent en question le pluralisme religieux et les libertés individuelles,

sauf lisses. Ils ont été sans concessions, comme ceux des Tunisiennes Souhayr Belhassen, ancienne présidente de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), et Naila Silini Radhoui, professeure à l’université de Sousse. Lucides, comme ceux du Sénégalais Adama Dieng, conseiller spécial du secrétaire général des Nations unies. Poignants, comme ceux du grand rabbin René-Samuel Sirat ou de l’universitaire marocaine Mariam Aït Ahmed. Tous ont souligné que la religion est beaucoup trop importante pour ne la laisser qu’aux croyants, ont condamné le mélange des genres (les États doivent être séculiers, les religions participer à la vie démocratique, mais ne pas s’immiscer dans la politique), reconnu que le problème le plus grave aujourd’hui n’est pas la fracture entre les religions, mais la fracture au sein de l’islam lui-même. Et qu’il n’était plus possible de se taire. l CÉCILE MANCIAUX, envoyée spéciale

Coulisses ALGÉRIE-FRANCE QUAND HOLLANDE DÉCORE MISSOUM SBIH Après huit années passées à Paris, Missoum Sbih, l’ambassadeur d’Algérie en France, rappelé à Alger le 17 juin, vient tout juste de rentrer chez lui. Le temps de faire une tournée d’adieu, mais aussi d’être décoré, le 27 septembre, de l’insigne de commandeur de la Légion d’honneur par François Hollande. La première distinction de ce N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

niveau accordée par le gouvernement français à un responsable algérien depuis… l’indépendance du pays. Une manière d’honorer la longue carrière de ce diplomate proche de Bouteflika qui n’est pas pour rien dans le rapprochement récent entre les deux capitales.

1953, le mémorial israélien Yad Vashem a décerné, à titre posthume, le titre de Juste parmi les nations à un Arabe, le médecin égyptien Mohamed Helmy, lequel a longtemps vécu en Allemagne, pour avoir secouru une famille juive pendant la Seconde Guerre mondiale.

ISRAËL UN JUSTE PARMI LES ARABES

ÉGYPTE SISSI ET LES MÉDIAS

Pour la première fois depuis sa fondation, en

Une vidéo diffusée par le réseau alternatif RASSD et

montrant les coulisses d’une réunion d’officiers de l’armée fait le buzz sur le web. Filmée plusieurs mois avant le « coup d’État » de juillet, on y voit Abdel Fattah al-Sissi, à l’époque ministre de la Défense du président déchu Mohamed Morsi, expliquer que le « contrôle des médias est au centre des préoccupations de l’armée. […] Cela prendra du temps avant que nous retrouvions notre influence. Il ne suffit pas de créer un comité ou un groupe de travail ». JEUNE AFRIQUE



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Europe, Amériques, Asie

FRANCE

Le come-back Ni la droite ni la gauche n’étant au meilleur de leur forme, Alain Juppé, qui fut Premier ministre il y a près de vingt ans, apparaît de plus en plus comme un possible recours. En tout cas, ses compatriotes le plébiscitent dans les sondages.

ALAIN FAUJAS

Q

uil’eûtcru?Cen’estplusManuelValls,le jeune et vibrionnant ministre de l’Intérieur socialiste, qui est le chouchou des Français, mais Alain Juppé, l’austère maire UMP de Bordeaux. Plusieurs sondages lui ayant attribué ce « maillot jaune » de la politique, les spéculations ont aussitôt fleuri: quel sera l’avenir de ce cacique de la droite, qui fut, tour à tour ou simultanément, apparatchik, maire, député, parlementaire européen, ministre et même chef du gouvernement (1995-1997) ? La grande pagaille qui règne à droite – entre le retour annoncé de Nicolas Sarkozy et la bagarre permanente entre François Fillon et Jean-François Copé – ne lui ouvre-t-elle pas un boulevard pour la primaire UMP de 2016? La cacophonie persistante au sein du pouvoir socialiste ne lui laisse-t-elle pas espérer une victoire sur François Hollande, en 2017 ? Trop vieux pour ce scénario élyséen, estiment certains. Il est vrai que Juppé aura 71 ans lors de la prochaine présidentielle, mais François Mitterrand n’avait-il pas le même âge quand, en 1988, il entama son second mandat? Il existe un second scénario que mitonnent certains de ses proches, anticipant une série de défaites électorales des socialistes en 2014-2015 (municipales, régionaleseteuropéennes).Pourcontenir une probable poussée du Front national, Hollande pourrait n’avoir d’autre recours que de constituer un gouvernement d’union nationale capable de mener à bien une série de réformes structurelles forcément impopulaires. Juppé serait alors le Premier ministre idéal, car acceptable par la gauche. Quand on lui fait ainsi miroiter l’Élysée ou Matignon, l’intéressé s’en tire par une pirouette. Tantôt il répond qu’il « se focalise sur la prochaine élection municipale à Bordeaux », tantôt il glisse avec un sourire malicieux que, oui, parfois, « les vieux lions rugissent encore ». L’image de Juppé qui se dégage après tant d’années consacrées aux affaires publiques est une sorte de triptyque. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

Le premier panneau le représente en excellent gestionnaire. Lorsqu’en 1995 il s’assied dans le fauteuil de maire de Bordeaux, il hérite d’une métropole endormie et nostalgique qu’il va réveiller grâce à d’ambitieux programmes de rénovation urbaine et à la construction d’un tramway, pour ne laisser personne à l’écart du centre-ville. Avec pour double résultat la spectaculaire renaissance des quartiers historiques (Chartrons, Quinconces) et la construction d’écoquartiers à la périphérie. Pourtant majoritairement à gauche, l l l


Europe, Amériques, Asie

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t Lors d’un meeting de l’association Les Amis de Nicolas Sarkozy, le 2 septembre, à Arcachon.

ROMAIN PERROCHEAU/AFP

du vieux sage


Europe, Amériques, Asie France l l l le corps électoral lui en est reconnaissant : il est systématiquement réélu dès le premier tour avec des scores en constante progression. Le deuxième panneau le campe en vieux sage à la trajectoire partisane impeccable. Fidèle jusqu’au bout à Jacques Chirac, son mentor, il a appelé à voter pour Nicolas Sarkozy en 2007 et reste membre de son fan-club. Il s’est même dévoué pour tenter de raccommoder Copé et Fillon afin d’épargner à l’UMP, qu’il a créée, de ravageuses divisions. Aucune trahison, même tactiquement fructueuse, dans son curriculum vitæ.

membres des GIA. En appuyant la politique « interventionniste » de Hollande à l’égard du pouvoir syrien, il a bousculé son parti, incapable d’adopter une ligne claire. Il est sans ambiguïté avec le Front national (« on ne mange pas avec le diable, même avec une longue cuillère ») et cosigne à l’occasion des textes avec des socialistes – Michel Rocard, Alain Richard ou Hubert Védrine. Opposant déterminé, oui, mais pas au point de jouer contre l’idée qu’il se fait de la France. Oui, dit-il en souriant, Avec un tel bilan, on il arrive que les vieux lions aurait pu s’attendre à ce que rugissent encore. HOMME D’ÉTAT. Le troisième panneau exalte sa stature Juppé se lance sans hésiter d’homme d’État. Celle-ci est apparue très tôt, lorsque, à l’assaut de la magistrature ministre des Affaires étrangères d’Édouard Balladur suprême. C’est oublier les graves blessures que la vie (1993-1995), il trouva avec François Mitterrand le politique lui infligea, et qui, dans l’immédiat, l’incitent moyen d’intervenir dans la guerre des Balkans et au à se contenter de la position d’outsider. Rwanda. Ou en 1994, quand il parvint à imposer que En 1995, il est au faîte de sa gloire. Chirac l’a désigné ce soient les forces françaises, et non les services algécomme « le meilleur d’entre nous », il préside le RPR, riens, qui libèrent sur le territoire français les passagers ancêtredel’UMP,conquiertBordeauxetdevientPremier d’un Airbus d’Air France détourné à Alger par quatre ministre. Il reconnaît aujourd’hui qu’à Matignon il a eu tendance à se « bunkériser ». En tout cas, il y accumule les fautes. Son refus obstiné d’amender sa réforme des retraites, malgré l’interminable grève qui paralyse les UNE VICTIME (CONSENTANTE) DU SYSTÈME CHIRAC transports, débouche sur une capitulation en rase campagne. Sa certitude d’avoir raison lui fait préconiser de dissoudre l’Assemblée nationale, décision calamiteuse qui, en 1997, aboutira à l’installation à Matignon du socialiste Lionel Jospin. JEAN MICHEL TURPIN/GAMMA

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p Pendant un conseil national du RPR, en 1991.

L

a condamnation infligée en 2004 à Alain Juppé est en fait celle du système mis en place de longue date par les dirigeants du défunt RPR pour pallier l’absence de financement officiel des partis. Ouverte en 1999, l’enquête révéla l’existence d’un système de financement occulte mis en place sous la houlette de Juppé, à la fois secrétaire général du RPR et adjoint aux finances de la Ville de Paris. Le tribunal correctionnel de Nanterre prit toutefois soin de souligner que celui-ci était « directement subordonné au président du mouvement ». Autrement dit à Jacques Chirac, également maire de Paris. Entre 1988 et 1995, les N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

rémunérations versées à sept permanents du parti chiraquien furent prises en charge par le budget de la Ville. Le préjudice subi fut par la suite évalué par le socialiste Bertrand Delanoë, élu maire en mars 2001, à 1,2 million d’euros. D’autre part, plusieurs entreprises soumissionnant pour les marchés publics de Paris avaient accepté de rémunérer des personnels du RPR. Par exemple, la secrétaire particulière de Juppé. Ce qui constituait un abus de bien social. Le 15 décembre 2011, Chirac finira par être condamné dans la même affaire d’emplois fictifs à deux ans de prison avec sursis. Il s’abstiendra de A.F. faire appel. l

PURGATOIRE. En 2004, il est condamné à quatorze

mois de prison avec sursis et à un an d’inéligibilité pour avoir rémunéré plusieurs permanents de son parti sur le budget de la Ville de Paris. Il démissionne de tous ses mandats et part au Québec enseigner « l’État et la mondialisation ». Ce purgatoire lui fait prendre conscience de certains de ses défauts. Son côté « fort en thème », par exemple, qui le rend volontiers cassant et peu pédagogue. Lors des législatives de 2007, à Bordeaux,ilestbattude670voixparlasocialisteMichèle Delaunay, alors qu’il était convaincu de l’emporter haut la main compte tenu de ses scores municipaux. Il est alors tenté de prendre sa retraite. Maintenant que Fillon s’est aliéné les centristes et les modérés de l’UMP en se déclarant prêt à voter pour un candidat du FN dans certaines circonstances, Juppé n’a plus que Sarkozy en travers de son chemin vers l’Élysée. Il continuera donc de travailler à sa candidature, mais à l’abri des projecteurs. Par exemple, en créant après les municipales du printemps 2014 « un groupe de réflexion pour vraiment approfondir un certain nombre de questions fondamentales pour l’avenir [du] pays ». Quand on lui fait remarquer que ces questions – l’Europe, la sécurité, les déficits – sont fort peu municipales et qu’elles confirment son intention de mettre à profit l’estime que lui portent les Français pour pousser son avantage, il cite un aphorisme de Jacques Chirac à propos des sondages: « Il faut mépriser les hauts et repriser les bas. » Et les bas, Alain Juppé en a connu beaucoup. l JEUNE AFRIQUE



Europe, Amériques, Asie complotsyankees:c’étaitpourluilemoyen d’amener les Sud-Américains à faire bloc derrière lui face à Washington. De ce point de vue, Maduro n’innove pas. Mais il ajoute à cette monomanie une touche plus personnelle. « Ce genre d’accusations est bien commode à l’approche d’une élection », commente Luis Vicente León, président de l’institut de sondages Datanalisis, à Caracas. Or les municipales auront lieu le 8 décembre. On comprend que le président cherche à occulter les graves difficultés économiques auxquelles le pays est confronté. L’interminable maladie de Chávez (2011-2013) puis deux campagnes présidentielles successives (octobre 2012 et avril 2013) y ont évidemment contribué. Lespénuriesalimentairesrécurrentes?Les coupures d’électricité? Tout est forcément la faute de l’opposition. TENSION. Dans les supermarchés, la ten-

JUAN BARRETO/AFP

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p Le président fait le clown dans une banlieue de Caracas, en août. VENEZUELA

Maduro ou l’éternel complot Six mois après son arrivée au pouvoir, le successeur de Hugo Chávez multiplie les provocations antiaméricaines. Une tactique éprouvée pour faire oublier le marasme économique.

Y

«

ankees,rentrezchezvous, quittez le Venezuela, ne commettez plus d’abus contre cette patrie qui n’aspire qu’à la paix ! » C’est en ces termes fortement sentis que, lors d’une allocution télévisée le 30 septembre, Nicolás Maduro a donné quarante-huit heures pour quitter le pays à trois diplomates américains qu’il accuse de financer diverses opérations de sabotage de l’économie et du réseau électrique. Avec l’aide de l’opposition, bien sûr. Le lendemain, les États-Unis ont à leur tour expulsé trois diplomates vénézuéliens. Les deux pays entretiennent N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

d’exécrables relations. Depuis le renvoi de leurs ambassadeurs respectifs, en 2010, leurs représentations diplomatiques sont assurées par des chargés d’affaires. DÉLIRES. La liste des délires paranoïaques

de Maduro est longue. En août, il affirmait qu’uneéventuelleinterventionaméricaine en Syrie visait en réalité à masquer une attaquecontreleVenezuela!Ilyaquelques jours, il a refusé de se rendre à l’Assemblée générale des Nations unies, à New York, craignant paraît-il pour son « intégrité physique ». Hugo Chávez, son mentor, a toujours été obsédé par d’hypothétiques

sion est à son comble depuis le début de l’été. Après le papier hygiénique, voici que l’huile, le sucre et la farine viennent à manquer. « Il faut faire la queue des heuresdurantpourn’obtenirparfoisqu’un paquet ou deux. Pas facile de nourrir une famille dans ces conditions », se plaint une Vénézuélienne contactée par téléphone. Les conditions de vie se dégradent, le taux d’inflation culmine à 32 % et de nombreuses entreprises quittent le pays. « Depuis que Maduro est au pouvoir, le contrôle des changes s’est durci, le gouvernement régule tout et la corruption atteint des proportions effrayantes », explique, à Madrid, l’avocate Mariale Rodriguez Mikelson, analyste politique sur perspectivasvenezuela.com. Pour les élections de décembre, les sondages accordent néanmoins 45,6 % des intentions de vote aux candidats du Parti socialiste unifié (PSUV), au pouvoir, et 30,3 % à ceux de l’opposition, à en croire l’institut Datanalisis. Mais si le parti présidentiel paraît assuré de remporter le plus grand nombre de municipalités, les autres formations obtiendront sans doute de bons scores dans les grandes villes. « Maduro va utiliser les résultats du scrutin pour asseoir sa légitimité et tenter de discréditer l’opposition, qui criait à la fraude lors de la présidentielle, analyse Mariale Rodriguez Mikelson. Mais il n’a ni le charisme de Chávez ni l’ascendant que celui-ci avait sur son entourage. Jusqu’où est-il capable d’aller ? » l MARIE VILLACÈQUE JEUNE AFRIQUE


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ÉTATS-UNIS

On ferme! Les républicains ultraconservateurs veulent retarder la mise en œuvre de l’« Obamacare ». Les démocrates s’y opposant, le budget n’a pu être adopté. Et l’État fédéral est partiellement paralysé.

IN EXTREMIS. Mais voilà, le jeu de mas-

sacre politique est cette fois allé à son terme, alors que, le 31 décembre 2012, le pire avait été évité de justesse, un accord ayant été conclu in extremis entre le Sénat démocrate et la Chambre des représentants républicaine. Les élus ultra-conservateurs du Tea Party subordonnent en effet tout accord budgétaire au report de un an de la loi sur l’assurance-maladie, la fameuse « Obamacare », pourtant votée en 2010. Un chantage que les démocrates, et Barack Obama en premier lieu, jugent inacceptable. Ladite loi est d’ailleurs entrée dans une phase cruciale, ce 1er octobre, avec le début de l’inscription sur un site gouvernemental de millions d’Américains dépourvus d’assurancemaladie – ce qui leur permettra de bénéficier d’une couverture à partir du 1er janvier 2014. Pour les républicains les plus conservateurs, l’Obamacare est devenue une véritable obsession. Une névrose paranoïde. On agite le chiffon rouge, ils foncent. C’est JEUNE AFRIQUE

p Les activistes du Tea Party, prêts à tout pour saboter la réforme du système de santé. Quelles qu’en soient les conséquences.

le cas de Ted Cruz, sénateur du Texas et héros du Tea Party, qui, au Sénat, a péroré contre la loi pendant plus de vingt heures, presque sans interruption ! Deux jours auparavant, Reid avait quant à lui fait fermer les portes de l’assemblée au nez et à la barbe des républicains pour les contraindre à un accord. En vain. On l’aura compris : l’affaire tourne au grand n’importe quoi. Du département de la Défense à l’Agence de protection de l’environnement, tous les services fédéraux ont réduit leurs effectifs au strict minimum. Une véritable « automutilation », a commenté Obama. Seuls ont été épargnés les personnels jugés essentiels comme les contrôleurs aériens, les 16 000 agents du FBI ou le 1,3 million de militaires. Pour l’instant, c’est le secteur du tourisme qui est le plus gravement touché, avec la fermeture de tous les parcs naturels, notamment le Grand Canyon. Mais les monuments ne sont pas épargnés. À Washington, le Lincoln Memorial est fermé au public. Et la statue de la Liberté, à New York, aussi. Faute de bateaux, il n’est plus possible de visiter la prison d’Alcatraz, au large de San Francisco… DÉPENSES DE SANTÉ En % du PIB, 2011

publiques privées

Italie Roy.-Uni Japon Canada Allemagne France États-Unis 0

5

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15

Ironie de l’affaire, le personnel nécessaire à la mise en œuvre de l’Obamacare n’est pas touché par le shutdown. Et les parlementaires, considérés à tort ou à raison comme des personnels essentiels, continuent d’être payés ! PRISE D’OTAGE. Largement responsable

de cette gabegie, le Grand Old Party est au bord de l’implosion. Un nombre croissant de républicains jugent suicidaire cette prise d’otage par les ultra-conservateurs. L’un d’eux a même comparé les membres du Tea Party à des lemmings, ces rongeurs accoutumés à se jeter du haut des falaises… Pour l’heure, aucun règlement n’est en vue. Et les acteurs de ce mauvais feuilleton se préparent au véritable combat. Celui qui, dans quelques semaines au Congrès, opposera démocrates et républicains à propos du relèvement du plafond de la dette. Les conséquences d’un éventuel échec seraient, de l’aveu même du secrétaire au Trésor, « catastrophiques ». Et le shutdown apparaîtrait alors comme une anicroche sans grande conséquence. l JEAN-ÉRIC BOULIN, à New York

ESPÉRANCE DE VIE

MORTALITÉ INFANTILE

En années (vers 2011)

Pour 1 000 enfants (vers 2011)

Japon Italie France Allemagne Roy.-Uni Canada États-Unis

Japon Italie France Roy.-Uni Canada Allemagne États-Unis 0

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80

82

SOURCE : FINANCIAL TIMES

C

ette fois, c’est fait. Le gouvernement américain a officiellement fermé ses portes le 1er octobre. C’est un shutdown, comme on dit ici, le premier depuis 1996. Huit cent mille fonctionnaires se retrouvent au chômage et plus de un million d’autres travaillent sans être payés. Depuis, à Washington, capitale fédérale devenue « irrationnelle et orwellienne », comme le dit Harry Reid, le leader démocrate au Sénat, le parti de l’âne et celui de l’éléphant tentent de se refiler la patate chaude. Les parlementaires avaient en effet jusqu’au 30 septembre, à minuit, pour s’accorder sur un budget provisoire (aux États-Unis, l’exercice budgétaire commence le 1er octobre) et empêcher une paralysie partielle de l’État.

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N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013


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PARCOURS | D’ici et d’ailleurs

p « Comment se réancrer dans nos cultures d’origine et dialoguer avec le monde ? » se demande le chorégraphe.

Qudus Onikeku Acrobate sans frontières De tradition yorouba, ce danseur revendique les influences du hip-hop, de la capoeira ou encore du taï-chi. Et s’affranchit de tous les codes artistiques.

I

NTERPRÈTE POUR des grands noms de la danse contemporaine tels Sidi Larbi Cherkaoui, Heddy Maalem, Boris Charmatz ou encore Jean-Claude Gallotta, primé en 2010 lors de la biennale Danse, l’Afrique danse! à Bamako, distingué en 2012 par la Société française des auteurs et compositeurs dramatiques, programmé lors de la dernière édition du Festival d’Avignon… À 29 ans, Qudus Onikeku a une carrière déjà bien remplie. À la fois sûr de lui et hésitant, ambitieux et sans cesse en questionnement, cet artiste nigérian a entrepris un riche dialogue entre l’ici et l’ailleurs, soi et l’autre. Né en 1984 au cœur de la tumultueuse capitale économique du Nigeria, Lagos, Qudus Onikeku a le voyage chevillé au corps; ce qui l’amène à se situer davantage aux frontières qu’au centre d’un

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territoire bien défini. Cet ancien acrobate autodidacte a d’abord été formé au sein des Ballets du Nigeria avant d’aller chercher du côté du contemporain de quoi briser les gestes répétitifs du traditionnel. Adolescent, il intègre une compagnie basée à Ibadan, Alajota, avec laquelle il se produit à l’étranger (Madagascar, Croatie…). « Dès le début, la danse et le voyage allaient ensemble pour moi », explique-t-il aujourd’hui. En 2002, il rencontre Heddy Maalem, venu retrouver au Nigeria les énergies de son continent natal (voir J.A. no 2737). Le chorégraphe français est alors intrigué par un jeune danseur « un peu timide mais audacieux », qui veut travailler avec lui. Il lui proposera l’année suivante d’intégrer sa compagnie. Qudus Onikeku devient ainsi l’un des interprètes du Sacre du printemps monté avec quatorze interprètes d’Afrique

de l’Ouest. Cette pièce conçue par Maalem pour « bousculer le regard des Occidentaux sur le corps noir » connaît un succès international, et, à 18 ans, le Nigérian repart sur les routes. Désireux d’améliorer sa technique, il cherche à se former. Mais, rebuté par l’académisme des écoles françaises de danse et toujours aussi curieux, il préfère se tourner vers l’acrobatie et intègre le Centre national des arts du cirque de Châlons-en-Champagne (nord-est de la France). Influencé par le hip-hop et la capoeira, Qudus Onikeku a su s’affranchir des codes artistiques de toutes ces disciplines et composer un savant mélange alliant puissance et finesse. Athlétique, robuste, dynamique, sa danse est aussi fragile, tout en émotion. « Il faut la regarder attentivement, conseille Heddy Maalem. Elle est profondément africaine et le fruit de bien des influences, mais elle est avant tout le geste sensible et intelligent d’un homme libre. » Les festivaliers d’Avignon l’ont découvert dans Qaddish, une pièce voulue par JEUNE AFRIQUE


Europe, Amériques, Asie

En Asie, il a découvert le taï-chi, dans lequel il a « retrouvé et mieux compris des éléments qui composent la danse traditionnelle africaine ». « S’il est vrai que l’on se découvre à travers le regard de l’autre, il faut d’abord se connaître pour voir ce qui nous différencie justement de lui. La culture yorouba nous enseigne comment se mêler à l’autre sans se perdre », précise-t-il, philosophe. Pour transmettre cet enseignement, Qudus Onikeku a choisi le sublime Kaddish de Maurice Ravel. « Le terme “kaddish”, qui désigne la prière juive des morts, signifie “saint”, mot qui, en arabe, se dit qudus », précise ce musulman pratiquant qui voit, avec consternation, son pays ensanglanté par la barbarie fanatique de Boko Haram. Et pour qui il est important de rappeler que « le kaddish a la même signification que le Notre Père dans la liturgie catholique et que la fatiha musulmane ». « Qudus a les pieds bien campés dans notre monde en y assumant une origine et un authentique engagement spirituel, confirme Heddy Maalem. En ce sens, il est une conscience africaine. » l

CHINE

Laboratoire de la croissance Une nouvelle zone de libre-échange expérimentale a été inaugurée le 29 septembre à Shanghai. Sa mission : doper une économie qui a tendance à s’essouffler.

«

C

ette nouvelle zone s’inscrit dans le cours de l’évolution de l’économie mondiale ; sa création reflète une stratégie d’ouverture active. » C’est par ces mots que, le 29 septembre, Gao Hucheng, le ministre chinois du Commerce, a inauguré la nouvelle zone de libre-échange expérimentale (ZLEE) de Shanghai. Vingt-neuf kilomètres carrés dans le district de Pudong appelés à devenir le nouveau laboratoire de la deuxième puissance économique mondiale, au moment précis où celle-ci semble en perte de vitesse. Sa croissance n’a pas dépassé 7,67 %, l’an dernier, son plus bas niveau depuis plus de treize ans. À en croire l’agence Chine nouvelle, la nouvelle ZLEE est censée constituer pour les autorités « un banc d’essai destiné à doper l’économie et à approfondir les réformes orientées vers le marché ». Parmi ces réformes : la convertibilité du yuan aux taux du marché sur les comptes de capitaux ; la possibilité de procéder à des échanges transfrontaliers de cette devise ; l’assouplissement « temporaire » des restrictions sur les investissements étrangers. À ce jour, 25 entreprises chinoises et étrangères ainsi que 11 institutions financières (dont l’américaine Citibank

et la singapourienne DBS) ont obtenu l’autorisation de s’installer dans la ZLEE de Shanghai. Selon les autorités, tous les secteurs « qui ne sont pas interdits » seront autorisés. Ce qui ressemble à une lapalissade est en réalité symptomatique d’un profond changement de mentalité. Car, habituellement, l’administration chinoise a plutôt tendance à interdire tout ce qui n’est pas officiellement autorisé ! Seul bémol, il n’y aura pas d’assouplissement, fût-il partiel, de la censure d’internet. PRUDENCE. Deux autres ZLEE devraient

ouvrir prochainement dans la province méridionale du Guangdong. Mais après le semi-échec, l’an dernier, de la zone économique de Qianhai, près de Shenzhen, les autorités ont prudemment décidé de procéder par étapes. Si la zone de Shanghai rencontre le succès escompté, elle pourra, dès la fin de 2014, s’étendre à tout le quartier de Pudong, soit sur 1 200 km2. Quoi qu’il en soit, le défi est de taille pour Li Keqiang, le Premier ministre, qui a entrepris de libéraliser l’économie par de profondes réformes sociétales, mais sans remettre en question le système de parti unique. N’est-ce pas ce que fit en son temps un certain Deng Xiaoping ? l JULIETTE MORILLOT

q Shanghai, 27 septembre. Vingt-cinq entreprises et onze institutions financières (dont Citibank) ont à ce jour été autorisées à s’implanter dans la nouvelle ZLEE.

SHANGHAI DAILY - IMAGINECHINA

le jeune homme comme un hommage à son père, âgé de 80 ans. Et comme un retour à son identité yorouba. Car après tant de déplacements et de décentrements, Qudus Onikeku s’est demandé « comment se réancrer dans nos cultures d’origine et dialoguer avec le monde ». Pour ce faire, cet inlassable explorateur a entrepris une sorte de pèlerinage. En compagnie de son père, il s’est rendu pour la première fois dans le village natal de ce dernier, Abeokuta. Interrogeant la mémoire familiale, Qudus Onikeku s’est confronté à l’histoire de son pays. « Mon grand-père a vu les colons arriver. Mon père est né sous la colonisation.À son époque, parler yorouba, être yorouba, ce n’était pas chic. Il fallait parler anglais. Entreprendre ce voyage avec mon père lui a permis de revenir à sa propre culture et d’en être fier », confie le chorégraphe, qui a poursuivi son chemin jusqu’en Malaisie et aux États-Unis, où des résidences d’artiste lui ont permis de poursuivre la création de Qaddish.

SÉVERINE KODJO-GRANDVAUX, envoyée spéciale à Avignon Photo : CHRISTOPHE LEBEDINSKY pour J.A. JEUNE AFRIQUE

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ANGELIKI PANAGIOTOU/AP/SIPA

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t Le leader ultranationaliste au siège de la police, le 28 septembre, à Athènes. GRÈCE

À l’Aube dorée, le temps se gâte La coalition droite-gauche au pouvoir s’est enfin résolue à frapper durement le parti néonazi de Nikolaos Michaloliakos, devenu à la faveur de la crise le troisième du pays.

P

our la première fois depuis la chute de la dictature militaire, en 1974, un chef de parti a été interpellé par les forces de l’ordre et incarcéré. Il s’agit de Nikolaos Michaloliakos, 55 ans, fondateur et dirigeant du parti néonazi Aube dorée. Le 28 septembre, un commando antiterroriste a saisi à son domicile trois armes de poing (sans permis) et 43100 euros en liquide, ainsi que plusieurs ordinateurs. Par ailleurs, des policiers ont fait irruption dans l’enceinte du Parlement – c’est, là encore, une première – pour y fouiller les bureaux des 18 députés d’Aube dorée, élus lors des législatives de juin 2012. Quatre d’entre eux ont été placés en détention, de même qu’une quinzaine de militants, tous accusés de « participation à une organisation criminelle ». Antonis Samaras, le Premier ministre conservateur (il dirige une coalition où le Pasok, le Parti socialiste, est représenté), s’est donc enfin résolu à sévir contre ce mouvementracisteetultra-violentdevenu, en raison de la crise, la troisième force politique du pays. Il ne pouvait plus faire autrement: la Grèce est en pleine négociationaveclesbailleursdefondsets’apprêteà prendrelaprésidencetournantedel’Union européenne. Mais il s’était au préalable N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

par un membre d’Aube dorée à la sortie d’un café de la banlieue d’Athènes. L’opinion internationale s’en est émue et a redécouvert du même coup la nouvelle tragédie grecque: récession économique, chômage à 27 %, baisses drastiques des salaires, corruption massive et envolée de la criminalité. Yorgos Roupakias, 45 ans, le tueur présumé de Killah P, a confié aux policiers ses difficultés à subvenir aux besoins de

efforcé d’instrumentaliser la montée en puissance d’Aube dorée, certains caciques de la Nouvelle République, son parti, allant jusqu’à caresser l’idée de nouer avec elle des alliances électorales. Lui-même n’avait pas hésité à stigmatiser les migrants et les immigrés qui « occupent » le centre des villes grecques. La goutte d’eau qui a fait déborder Depuis l’été 2012, à Athènes, le vase ? L’assassinat d’un des dizaines de milliers de personnes d’origine étranantifasciste, le 18 septembre. gère ont été contrôlées. « Les conservateurs tentent d’utiliser la populasa famille. Il a rejoint Aube dorée, qui lui rité d’Aube dorée pour contrer la gauche », a prêté de l’argent, après avoir été expulsé commente Stathis Kouvelakis, professeur de son appartement. Partisan de « la Grèce au King’s College. aux Grecs », ce parti pratique un prosélytisme agressif, n’hésite pasà faire l’apologie GRAFFITIS. Chez les électeurs, les disde Hitler, soumet ses nouveaux adhérents cours populistes et racistes font mouche. à des entraînements paramilitaires et met Et dans les rues d’Athènes, les graffitis en œuvre, de manière informelle, de vastes racistes prolifèrent comme autant de stigprogrammes sociaux. Plusieurs policiers mates de la crise. « Il y a une volonté de ont été démis de leurs fonctions en raison conquérir les voix qui se portent sur Aube de leurs accointances avec lui. En 2010 dorée, tandis que la poursuite des rafles déjà, Michaloliakos s’était distingué en vise à démontrer que le gouvernement faisant le salut nazi lors de son entrée au contrôle la situation », constate Eva Cossé, conseil municipal d’Athènes. Mais ce dinode Human Rights Watch. Dans la nuit du saure n’est pas seulement un nostalgique 17 au 18 septembre, un crime sordide a du temps « des colonels ». Comme toute tout fait déraper. Pavlos Fyssas, 34 ans, un la nouvelle extrême droite européenne, il activiste antifasciste plus connu sous son se veut pragmatique et moderne. l nom de rappeur, Killah P, a été poignardé JOAN TILOUINE JEUNE AFRIQUE


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LE PLUS

Le Plus de Jeune Afrique

de Jeune Afrique

GHANA

67

La démocratie

à l’épreuve

Prélude Prince Ofori-Atta

J

OUR ET NUIT, les sermons se sont D’autres signes laissent à penser que le succédé sur les ondes. Comme pour président John Dramani Mahama n’est peut-être pas l’homme de la situation. s’assurer la bienveillance divine, La promesse d’amélioration de l’appropeu avant de connaître la décision de la Cour suprême… visionnement électrique est restée lettre morte. Les travaux de la future centrale, Saisie par le Nouveau Parti patriogérée par Sinopec et Ghana National Gas, tique (NPP), qui contestait les résultats de la présidentielle de décembre 2012, ont cessé en avril, lorsque les ouvriers ont elle a finalement confirmé la victoire du arrêté de travailler après les retards de Congrès national démocratique (NDC). paiement des salaires. Il a fallu attendre Et le 29 août, jour du jugement, l’atmosle versement d’un prêt de 188 millions de dollars (139 millions d’euros) par la phère pesante qui règnait sur Accra n’avait China Development Bank pour que le rien à voir avec la moiteur ambiante. chantier puisse finalement reprendre. Habituellement bruyantes et embouteilLes scandales de corruption contilées, les rues étaient même étrangement désertes. Le pays semblait retenir son nuent d’éclater. Un rapport vient de révéler l’évaporation de 600 millions souffle. Le dynamisme qui avait caractéde dollars dans divers contrats passés risé le Ghana tout au long de la dernière par l’Agence ghanéenne pour l’emploi décennie s’était ralenti, et les entreprises ne dissimulaient plus leur inquiétude. Certaines parlaient même Les blessures politiques de partir. Carrément. Comme si l’ancienne Côte de l’Or avait cessé ont cicatrisé et le potentiel d’être ce pays de cocagne assis ghanéen demeure intact. sur une économie suffisamment solide pour séduire les investisseurs du des jeunes et le développement des entreprises (GYEEDA). L’argent aurait monde entier. Un paradoxe, alors que les été utilisé pour faire la claque durant exportations de pétrole et de gaz viennent les élections. Plutôt que de couper les s’ajouter à celles, déjà énormes et très têtes, Mahama a simplement demandé rémunératrices, d’or et de cacao. le remboursement de la somme. Mais depuis la mort brutale de John Atta Mills et l’élection présidentielle préBien sûr, le potentiel du Ghana reste cipitée, les critiques se sont multipliées intact. La manière dont le pays a géré le contre les autorités. Les entrepreneurs contentieux électoral, devant des médias ont commencé à se plaindre de la lenteur libres et indépendants, témoigne de sa solidité démocratique. Maintenant que des décisions administratives, pendant la victoire de Mahama est confirmée et que le gouvernement tentait tant bien que son opposant Nana Akufo-Addo a que mal de combler un déficit budgétaire estimé à 12 % du PIB, encore creusé par accepté le verdict, les blessures politiques ont cicatrisé tandis que les embouteille triplement des salaires accordé à la lages ont repris dans la capitale. Signe fonction publique entre 2009 et 2012. de bonne santé ! « La période de grâce Une décision qui a poussé l’agence de est terminée et aucune excuse ne sera notation Fitch Ratings à revoir son jugedésormais tolérée », a cependant prément, en dégradant la note du pays de B+ à B –, compliquant encore un peu plus la venu l’un des principaux éditorialistes du pays, pourtant ardent supporteur de tâche du gouvernement, déjà confronté Mahama. l à un nombre record de grèves en 2013. JEUNE AFRIQUE

N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

POLITIQUE Tête haute INTERVIEW Hanna Tetteh, chef de la diplomatie ANALYSE Attendu au tournant AGROALIMENTAIRE Les rois se partagent la fève

BANQUES Services non compris PORTRAIT Bright Simons et les médica-menteurs

p. 68

p. 73

p. 74

p. 76

p. 80

p. 81

CARNET DE ROUTE Takoradi broie de l’or noir p. 82

OBR

Le pays reprend son souffle

INNOVATION Du rêve à la réalité

p. 83

SOCIÉTÉ Le retour des enfants prodigues p. 84


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Le Plus de Jeune Afrique

POLITIQUE

Tête haute Ni le décès du chef de l’État John Atta Mills, en décembre 2012, ni la contestation des résultats de la présidentielle n’ont déstabilisé le pays. Mieux, le modèle ghanéen sort grandi de cette année de tous les dangers.


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VINCENT DUHEM,

 Devant la Cour suprême, le 29 août, jour de la validation de la victoire de John Mahama.

CHRIS STEIN

L

envoyé spécial à Accra

e siège de la Cour suprême est un long bâtiment victorien recouvert de blanc immaculé. Une institution d’inspiration britannique plantée en plein cœur d’Accra. Pendant plus de huit mois, elle a rythmé la vie de toute une nation, nourri les pages des journaux et les discussions. C’est devant cette juridiction, la plus haute du pays, que Nana Akufo-Addo, candidat du Nouveau Parti patriotique (NPP), a contesté les résultats de l’élection présidentielle de décembre 2012. La Commission électorale avait donné John Dramani Mahama vainqueur dès le premier tour avec 50,7 % des suffrages exprimés, contre 47,7 % pour AkufoAddo. Mais le NPP estimait que les chiffres produits par la commission électorale différaient de ceux constatés dans les bureaux de vote par ses agents. Une première dans l’histoire du Ghana. « Le procès du siècle, raconte Thomas Pappoe, journaliste à la chaîne de télévision GTV3. On n’avait jamais vu ça. » Le 29 août, la victoire de John Mahama a finalement été validée. Quelques heures plus tard, Nana Akufo-Addo l’appelait pour le féliciter. « Cette expérience a indéniablement renforcé notre démocratie. En acceptant le verdict de la cour, nos leaders ont respecté l’État de droit », analyse Franklin Cudjoe, président du think tank Imani (lire encadré). En optant pour la voie légale, Nana Akufo-Addo a réussi à contenir l’aile radicale du NPP. « Il a presque agi en homme d’État. C’est un juriste, il fait partie de ces dirigeants qui ont connu la période difficile des années 1970-1980 », commente un observateur. Si des manifestations ont été organisées pendant une semaine après l’annonce des résultats, aucun incident notable n’a été signalé. La gestion du contentieux électoral a considérablement renforcé l’autorité et la légitimité de la Cour suprême. Nommés par l’ancien président John Kufuor, les neuf juges qui la composent ont su jouer leur rôle d’arbitre entre le jeu constitutionnel et le jeu politique. D’abord parce qu’ils ont réussi à convaincre les deux parties de l’impartialité de leur jugement. « La Cour a permis l’égalité de traitement, c’est pour cela que sa décision a été acceptée », admet Gabby Otchere-Darko, l’un des avocats du NPP. Bien que soumis à une énorme pression, les juges ont accordé beaucoup de temps aux deux parties pour qu’elles puissent exposer leurs griefs. Les neuf avocats du demandeur, le NPP, ont ouvert le bal, suivis des trois défendeurs : le président Mahama, le Congrès national démocratique (NDC, son parti) et la Commission électorale. Très anglosaxon, ce long processus des hearings a eu un effet thérapeutique et a calmé les esprits. Autre nouveauté: les audiences de la Cour étaient retransmises en direct à la télévision. Suivies par des N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013


Le Plus de J.A. Ghana millions de Ghanéens, elles ont permis de donner un sens concret au travail de la vieille institution et un éclairage pédagogique au contentieux électoral. « Pour la première fois, les gens ont pu voir en quoi consistait le travail de ces personnes intouchables », estime Kwabena Mensah, journaliste indépendant. FAILLES. Le travail de la Cour suprême a cependant

pointé du doigt les failles du système. Il a été établi qu’un grand nombre d’erreurs ont été commises: feuillesd’émargementmalremplies,mauvaiscomptages, nombre d’électeurs trop élevés dans certains bureauxdevote,etc.«LaCour a jugéque ceserreurs, bien qu’avérées, n’avaient pas eu d’impact sur le résultat du scrutin. Mais dans un pays qui compte seulement 11 millions de votants, c’est déjà trop! » peste Gabby Otchere-Darko. Ces dysfonctionnements sont liés au manque de préparation et de réactivitédelaCommissionélectorale:danslesmois qui ont précédé le scrutin, des circonscriptions ont été ajoutées, de nouvelles lois électorales votées et le vote électronique a été mis en place. Lors de certaines audiences, les juges de la Cour suprêmeonttenuàrappelerlesdirigeantspolitiques et médiatiques à leurs responsabilités. Début juillet, ils ont même condamné un membre de l’équipe de communication du NDC ainsi que le rédacteur en chef d’un journal proche du NPP à treize jours de prison. Le premier pour avoir déclaré que son parti n’accepterait pas le verdict s’il n’était pas en sa faveur, le second pour avoir critiqué de manière trop véhémente le travail des juges. Si d’aucuns ont qualifié ces sentences de « liberticides », la plupart des analystes espèrent qu’elles permettront d’assainir l’atmosphère. « Elle ne sera plus la même », assure Nana Opoku Acheampong, un homme d’affaires proche du NDC. Car le débat est toujours aussi vif et la campagne a été d’une rare violence verbale. « Il faut que la liberté de la presse soit encadrée, estime un journaliste. Trop de médias sont tenus par des partis politiques. »

PIUS UTOMI EKPEI/AFP

70

p Le président John Dramani Mahama prête serment, le 7 janvier.

La fin du « procès du siècle » arrive à point nommé.

Et un diplomate en poste à Accra de conclure: « La décision de la Cour a valeur d’avertissement pour tous les acteurs de la vie politique. Le message est qu’il y a beaucoup de choses à revoir. » Une chose est sûre, la fin du « procès du siècle » arrive à point nommé. Car depuis le décès du président John Atta Mills, en juillet 2012, le pays vivait dans l’attente. La transition politique s’est déroulée sans accroc. Mais Mahama, vice-président d’Atta Mills, avait dû assurer l’intérim, s’imposer à la tête de son parti, puis mener une éprouvante campagne. Depuis son investiture en janvier, les décisions importantes ont été retardées, ce qui commençait à peser sur les activités économiques, notamment pétrolières (lire pp. 74-75). l

GARDE-FOUS BIEN ORDONNÉS

F

RANKLIN CUDJOE, 36 ans, dort peu. Président-fondateur du think tank ghanéen Imani, invité quotidiennement à s’exprimer dans les médias, il termine sa thèse d’économie à l’université de Buckingham, au Royaume-Uni.Très actifs et influents, les 11 salariés de son organisation publient des rapports critiques sur la situation économique du pays et tentent d’évaluer tous les projets du gouvernement. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

« Notre but est de forcer les décideurs politiques et économiques à rendre des comptes », explique-t-il, déplorant le comportement parfois agressif à leur égard d’une partie d’entre eux. Au Ghana, il existe une dizaine de structures bien organisées comme Imani. Les plus connues sont l’Institut de gouvernance démocratique (Ideg), le Centre pour le développement démocratique (CDD),

l’antenne africaine duThird World Network, dirigée par Yao Graham, et l’Institut des affaires économiques (IEA), qui a organisé les trois débats télévisés lors de la dernière campagne présidentielle.Très dynamiques également, nombre d’associations, de réseaux et d’organismes sont présents dans les grandes villes du Ghana. C’est le cas du Forum socialiste ghanéen, dirigé par l’activiste Kwesi

Pratt, à Accra. L’ancien cadre du Parti de la convention du peuple (CPP, le parti fondé par Kwame Nkrumah, père de l’indépendance et premier président du pays), y anime de sa voix rauque des réunions-débats au cours desquelles sont décryptées les questions d’actualité. On dit même que le président Mahama y avait, il y a quelques années, ses habitudes. l V.D. JEUNE AFRIQUE


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Ghana La démocratie à l’épreuve INTERVIEW

Hanna Tetteh « Notre pays a toujours été à l’avant-garde de l’intégration régionale » Mali, Côte d’Ivoire, Union africaine… La chef de la diplomatie revient sur le rôle du Ghana sur l’échiquier politique du continent.

comme notre opposition à l’intervention militaire en Côte d’Ivoire lors de la crise postélectorale. À ce moment-là, le Ghana a estimé que le dialogue était primordial. Notre pays ne voulait pas se retrouver en première ligne d’une intervention militaire sur un terrain où, dans le cadre de la mission des Nations unies, se trouvaient déjà des troupes ghanéennes. Je pense que l’Histoire nous a donné raison.

t L’avocate a déjà dirigé le portefeuille du Commerce et de l’Industrie.

XINHUA/ZUMA/REA

Depuis l’élection du président Mahama, les relations avec la Côte d’Ivoire se sont beaucoup améliorées. Quelles sont les prochaines étapes de ce rapprochement?

N

ée en Hongrie, Hanna Serwaa Tetteh, 46 ans, est avocate. Avant d’être nommée chef de la diplomatie en janvier par le président John Dramani Mahama, elle dirigeait le portefeuille du Commerce et de l’Industrie dans le précédent gouvernement, depuis 2009. Proche de Mahama, elleétaitsaresponsabledecommunication pour la campagne présidentielle de 2012. Lors des élections législatives cette même année, elle a été élue députée, sous les couleurs du Congrès national démocratique (NDC, parti présidentiel). JEUNE AFRIQUE: Pourquoi l’implication militaire du Ghana au Mali n’a-t-elle pas été plus importante? HANNA TETTEH: Simplement parce que

nous n’en avions pas les capacités. Une part importante de nos troupes participe aux opérations de maintien de la paix des Nations unies. Sur le plan politique, nous soutenons les efforts pour consolider la paix, et le Ghana peut être un exemple pour le Mali. C’est notre système de gouvernance locale qui nous a aidé à garder notre stabilité, car il permet aux localités d’être impliquées dans la prise de décisions. C’est pourquoi nous sommes prêts JEUNE AFRIQUE

à fournir une assistance technique pour le développement du Mali. S’il y a bien une leçon à retenir de cette crise, c’est qu’il faut prendre toutes les mesures pour renforcer la démocratie dans la région afin de créer un système de gouvernance plus efficace. La diplomatie ghanéenne a longtemps été définie par le panafricanisme et le non-alignement. Qu’en est-il aujourd’hui?

C’est encore le cas, mais, dans la configuration actuelle et pour un pays qui a été

Nos relations seront toujours étroites. La plupart de nos frontières sont artificielles. Certains groupes ethniques présents au Ghana le sont en nombre égal en Côte d’Ivoire. Il y a des familles liées des deux côtés de la frontière; nos pays produisent, à eux deux, les deux tiers de la production mondiale de cacao [lire pp. 76-77] et nous avons des raisons de coopérer dans d’autres secteurs, comme le pétrole. Si nous sommes capables de nous entendre sur des positions communes sur les plans régional et continental, cela sera mutuellement bénéfique. Quel bilan peut-on faire des cinquante ans de l’Union africaine (UA)?

Il faut repenser le concept de panafricanisme. Quand l’UA a été créée, l’impératif était celui des indépendances. Aujourd’hui, il faut trouver des moyens

Notre système de gouvernance locale nous a aidé à garder notre stabilité. à l’avant-garde de l’intégration régionale et continentale, il est important de construire des relations à travers les continents. Que répondez-vous à ceux qui, au sein de l’opposition, estiment que l’influence régionale du pays n’est plus ce qu’elle était?

Je ne partage pas cet avis. Nous avons la réputationdeprendredesdécisionsraisonnablesetpragmatiques.Certainesdecelles que nous avons prises ont été critiquées,

plusefficacespourpromouvoirlesobjectifs de développement économique. En mettant en place une zone de libre-échange, en s’attaquant aux questions de paix et de sécurité, l’Union africaine a montré son engagement. Enfin, le fait qu’elle se soit accordée, lors du dernier sommet d’Addis-Abeba,surundocumentcommun définissant la stratégie du continent durant les cinquante prochaines années est un pas important. l Propos recueillis par VINCENT DUHEM N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

73


74

Le Plus de J.A. Ghana ANALYSE

Attendu au tournant Malgré une croissance soutenue, l’économie reste trop dépendante des matières premières. Sa diversification devient désormais impérative.

D

epuis plus de dix ans, le Ghana fait figure d’élève modèle en Afrique de l’Ouest. La transition démocratique réussie en début d’année a confirmé la stabilité politique du pays alors que la moyenne de croissance de 7,65 % enregistrée depuis 2005 conforte l’évolution favorable du cadre macroéconomique ghanéen. Qualifiée de « robuste » par les experts du Fonds monétaire international (FMI) en mission à Accra en septembre, cette croissance devrait se stabiliser à 7 % en 2013. Pénalisée par des délestages récurrents et des taux d’intérêt en forte hausse depuis le début de l’année, elle est en deçà des prévisions et des 8 % affichés en 2012, et surtout bien inférieure aux 15 % enregistrés en 2011, à la suite de l’entrée en production du premier gisement pétrolier du pays. Elle reste néanmoins suffisante pour permettre au Ghana de conserver en 2013 sa place dans le tiercé des champions régionaux, avec la Côte d’Ivoire et le Nigeria. Dans la foulée du développement des hydrocarbures, les fondamentaux économiques du Ghana restent prometteurs à court et moyen termes, « même si de nombreuses interrogations subsistent », selon Santiago Herrera, économiste en chef chargé du Ghana à la Banque mondiale. FARDEAU. Malgré ses bons indicateurs et

l’intérêt soutenu des investisseurs étrangers pour ses ressources naturelles, le Ghana est en effet confronté à un déséquilibre croissant de ses finances, que le gouvernement doit tenter de résorber rapidement. Le plus préoccupant reste l’inflation, repassée à deux chiffres, entre 10 % et 11 % pour 2013 selon le FMI, à la suite de l’augmentation des prix du carburant en début d’année. Quant au déficit courant de l’État, il devrait être supérieur à 13 % du produit intérieur brut (PIB) en 2013, creusé par l’insuffisance des recettes fiscales et la baisse des revenus du cacao, liée aux mauvaises conditions climatiques, pour la deuxième année d’affilée. Depuis l’an dernier, le cacao a N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

Production de pétrole

(en barils/jour)

110000 86000-92000 2012

79000

2013*

2011 * Prévision

d’ailleurs été rétrogradé au troisième rang des produits d’exportation en termes de recettes (18,8 %), après l’or (40 %) et le pétrole (20,7 %). Pour accompagner la croissance, le gouvernement, tout en régularisant ses arriérés à l’égard du secteur bancaire, a dû dépenser sans trop compter (à hauteur de plus de 20 % du PIB en moyenne ces cinq dernières années) afin d’investir dans les infrastructures nécessaires au

développement du pays. Résultat : le Ghana doit faire face à une dette publique estimée par la Banque mondiale à 50 % de son PIB. « Le pays n’a pas les moyens de supporter un tel fardeau, il y a donc urgence pour les pouvoirs publics à prendre les décisions qui permettront de réduire cet endettement », insiste Santiago Herrera. Particulièrement visées, les rémunérations accordées à l’ensemble de la fonction publique, qui, fin 2012, représentaient 42 % des frais fixes de l’État, ainsi que les subventions mises en place pour soutenir les prix du carburant et de l’électricité. La première a disparu en début d’année, et les bailleurs de fonds insistent pour que la subvention à l’électricité subisse le même sort dès la prochaine loi de finances. « Il y va de la bonne santé budgétaire du pays », reprend Santiago Herrera, qui rappelle que les trop fortes dépenses de l’État ont déjà provoqué l’envol des taux d’intérêt et l’affaiblissement du cedi, qui, en moins de deux ans, a perdu 22 % face au dollar. MUTATIONS. Soutenue principalement

par ses industries extractives ainsi que par la montée en puissance des secteurs du BTP et des services (en particulier

Comparé à d’autres ouest-africains POPULATION En millions d’habitants Nigeria

Ghana

25,6

INFLATION En % du PIB, en 2013* 169,3

24,1 Côte d’Ivoire 17,8 Burkina Faso 13,5 Sénégal 9,6 Bénin Togo 6,4 Liberia 4 Cap-Vert 0,5

Sénégal Burkina Faso Côte d’Ivoire Bénin Cap-Vert Liberia Togo

Ghana Côte d’Ivoire Sénégal Burkina Faso Bénin Togo Cap-Vert Liberia

42,7 28,3 14,4 12 8,2 4,1 2,1 2

1,5 2 3,1 3,5 4 4 4,2

Ghana

10,3

Nigeria

10,7

DÉFICIT COURANT En % du PIB, en 2013*

PIB En milliards de dollars en prix courants, en 2013* Nigeria

(* Prévisions)

Nigeria 5,5 -2,7 Côte d’Ivoire -3,7 Burkina Faso -6 Liberia -6,9 Togo -7,5 Bénin -8,5 Sénégal

283,7

-13

Ghana

-13,2

Cap-Vert JEUNE AFRIQUE


XINHUA/ZUMA/REA

75

p Le barrage hydroélectrique de Bui, sur le fleuve Volta, en mai 2013.

de télécommunications), l’économie ghanéenne s’appuie encore trop sur ses ressources naturelles. Selon Santiago Herrera, « elle doit vite prendre le virage de la diversification dans les secteurs manufacturiers et des services », seuls à même de relever le défi de l’emploi tout en réduisant la fracture persistante dans le pays entre le Nord, sous-développé, et

les régions côtières autour d’Accra, en plein essor. Les économistes espèrent que le pays saura négocier ce tournant majeur et relever le défi pétrolier en utilisant à bon escient les milliards de dollars qui vont irriguer l’économie dans les années à venir. « En plus du nécessaire rééquilibrage des comptes publics et

de la réduction de l’inflation et des taux d’intérêt, l’affectation de la future manne pétrolière va jouer un rôle crucial dans les mutations économiques du Ghana », prévient Santiago Herrera. Sans oublier les transformations sociales car, selon la Banque mondiale, un quart de la population ghanéenne vit encore au-dessous du seuil de pauvreté. l OLIVIER CASLIN

Indicateurs encourageants Côte d’Ivoire Liberia Nigeria

7,9 7,4 7,2

Ghana Burkina Faso Togo Cap-Vert Bénin Sénégal

7 7

5,1 4,1 4,1 4

PIB par habitant En dollars en prix courants, en 2013* Cap-Vert

Ghana Nigeria Côte d’Ivoire Sénégal Bénin Burkina Faso Togo Liberia JEUNE AFRIQUE

PIB

Rang sur 185 pays classés, en 2013

3 946

1 786

1 676 1 177 1 068 858 673 635 481

Ghana

64

Cap-Vert Nigeria Liberia Burkina Faso Togo Sénégal Bénin Côte d’Ivoire

122 131 149 153 156 166 175

50

3 295

Ghana Liberia Côte d’Ivoire Sénégal Togo Bénin Cap-Vert Burkina Faso

1 354 478 338 166 159 71 40

7 029

15

40 30

38,9

38,4

32,2

42,7

47,3 12

20 10

8 2010

7

2013*

2014*

7,9 2011

2012

9

7

6

Des IDE multipliés par 30 en dix ans

IDE Flux entrants, en millions de dollars, en 2012 Nigeria

(Variation du PIB, en %, en prix constants. Éch. de droite)

15

0

177

CROISSANCE

(En milliards de $, en prix courants. Éch. de gauche)

3 500

Investissements directs étrangers, flux entrants, en millions de dollars

3 295

3 000 2 500 2 000 1 500 1 000 500 0

110 2003 04

05

06

07

08

09

10

11 2012

N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

SOURCES : FMI, AVR. 2013, NOTICES PAYS JUIN ET SEPT. 2013 - BAD BANQUE MONDIALE, « DOING BUSINESS » 2013 - CNUCED, JUIL. 2013

CLIMAT DES AFFAIRES

CROISSANCE En %, en 2013*


AUBREY WADE/PANOS-REA

76

p L’État a su garder le contrôle des exportations de sa production.

AGROALIMENTAIRE

Les rois se partagent la fève Le deuxième exportateur mondial de cacao doit sa réussite à une semi-libéralisation de sa production. Un modèle qui force l’admiration de la Côte d’Ivoire… son principal concurrent.

N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

leurs revenus. En plus de la disparition d’un prix d’achat minimum garanti, de l’abandon des services phytosanitaires ainsi que des subventions aux intrants, consécutifs au désengagement des pouvoirs publics, ils sont également soumis à un taux d’imposition pouvant grimper jusqu’à 45 % du prix à l’export, devenant même en 2007, selon une enquête de la Banque mondiale, « les producteurs de cacao les plus taxés au monde ». Dans le même temps, les nouveaux organismes de régulation mis en place servent surtout ceux qui sont placés à leur tête. L’opacité

Production mondiale de fèves de cacao

Côte d’Ivoire 1 511

(en milliers de tonnes)

4 078*

3 966**

Côte d’Ivoire 1 486

Côte d’Ivoire 1 475

Ghana 1 025

Ghana 879

Ghana 820

Afrique 3 224

Afrique 2 918

Afrique 2 826

Amériques 561

Amériques 639

Amériques 606

Asie-Océanie 526

Asie-Océanie 521

Asie-Océanie 534

2011-2012

2011-2012*

**Prévisions

4 311

* Estimations

E

ntre les filières cacaoyères ghanéenne et ivoirienne, « il n’y a endéfinitivequ’unelibéralisation d’écart », estime Edward George, directeur de la recherche sur les matières premières agricoles chez Ecobank. En l’occurrence,lesinstitutionsdeBrettonWoods, Banque mondiale en tête, ont engagé à la fin des années 1990 des réformes aux contenustrèsdifférents,voireopposés,chez les deux principaux pays producteurs de la planète,dontlesfilièresétaientalorsgérées par des organismes étatiques, la Caisse de stabilisation (Caistab) en Côte d’Ivoire et le Cocoa Board (Cocobod) au Ghana. À la même injonction, les deux gouvernements ont répondu chacun à sa manière. « Accra a concédé quelques changements mais, au final, le Cocobod a conservé son rôle prépondérant, tandis qu’Abidjan a accepté de libéraliser et a liquidé la Caistab », résume l’analyste de la banque panafricaine. En un peu plus d’une décennie, le Ghana a doublé sa production, pendant que la Côte d’Ivoire, ravagée par la crise politique, a vu ses volumes progresser lentement. Rien qu’entre 2002 et 2004, après deux années d’une libéralisation brutale, au moment où le pays s’enflammait et que les cours internationaux s’effondraient, les paysans ivoiriens ont ainsi perdu plus de 50 % de

règne, et les détournements sont si flagrants que le gouvernement de l’époque n’a d’autre choix que d’emprisonner leurs dirigeants. De l’autre côté de la frontière, « la semi-libéralisation », selon l’expression de l’agronome François Ruf, du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), est beaucoup moins douloureuse pour les planteurs. Toujours en place, le Cocobodaconcédéausecteurprivél’achat des fèves auprès des paysans, mais au prix d’achat qu’il continue lui-même de fixer au débutdechaquerécolte.Ilgardeégalement le contrôle total des exportations et de la commercialisation. « La libéralisation au Ghana ne fait que rejoindre la situation

2012-2013** JEUNE AFRIQUE


La démocratie à l’épreuve

STABLE. Au final, tous les observateurs s’accordent pour reconnaître que la libéralisation partielle a permis au cacao de redevenir une source stable de revenus pourlesplanteursghanéens.«LesIvoiriens sont très admiratifs du modèle appliqué chez leurs voisins et n’ont toujours pas digéré la disparition du système administré », constate un négociant présent dans les deux pays. La réforme, inaugurée par la présidence ivoirienne lors de la campagne 2012-2013, replace les pouvoirs publics au cœur du système : l’État, par l’intermédiaire du Conseil Café Cacao (CCC), le nouvel organisme paritaire de gestion de la filière, a mis en place un système de vente anticipée par enchères lui permettant de définir un tarif minimum garanti aux planteurs. Il s’est également engagé à plafonner la fiscalité à 22 % et à relancer les programmes de soutien aux paysans et de rénovation végétale des plantations. « Malgré l’absence totale de transparence, le CCC agit en profondeur pour redonner confianceauxplanteurs»,observelemême négociant.Dequoirelancerlaconcurrence entre deux pays qui fournissent ensemble près de 60 % de la production cacaoyère mondiale. l OLIVIER CASLIN JEUNE AFRIQUE

QUESTIONS À

AMIT AGRAWAL

Vice-président d’Olam Ghana et Afrique de l’Ouest

« Il faut aider les producteurs » Présent au Ghana depuis vingt ans, le leader singapourien de l’agroalimentaire a été l’un des premiers à être autorisé à acheter des fèves. JEUNE AFRIQUE : Quels sont les points forts de la filière cacao ghanéenne ? AMIT AGRAWAL : Le pays a

confirmé qu’il était bien l’un des principaux producteurs de cacao au monde. Depuis dix ans, il a réussi à améliorer de façon constante ses volumes tout en garantissant de bons prix aux producteurs. Il a surtout poursuivi ses efforts en matière de recherche et développement, ce qui lui permet aujourd’hui de proposer sur le marché des fèves de très bonne qualité. En tant qu’opérateur, nous travaillons également sur un certain nombre d’initiatives pour améliorer les rendements dans les plantations et soutenir ainsi le Cocobod dans ses activités. DR

que connaissait la Côte d’Ivoire avant la libéralisation », reprend François Ruf. Pour le plus grand bénéfice des producteurs ghanéens, qui, en plus de voir leur pouvoir d’achat augmenter, profitent également d’allègements fiscaux. Saluépoursabonnegestion,leCocobod est courtisé par les plus grandes banques internationales,quin’hésitentpasàluiprêter l’argent dont il a besoin pour acheter la récolteparanticipation.«C’estaujourd’hui l’une des entreprises africaines les plus appréciées des investisseurs, avec la Sonangol, en Angola », confirme Edward George. Grâce à ses moyens financiers, le Cocobod investit dans les services apportés aux paysans, comme la subvention des engrais et pesticides. Surtout, depuis dix ans, il multiplie les programmes de recherches. Les rendements s’améliorent toutcommelaqualitédesfèves,permettant au Cocobod de proposer des prix d’achat à ses paysans parfois supérieurs de 25 % à ceux en cours en Côte d’Ivoire. Seule l’étape de transformation n’a pas connu d’améliorationnotable,lesvolumesrestant compris entre 25 % et 30 % dans les deux pays. « C’est un problème lié aux coûts énergétiques qui font exploser les prix du cacao africain », précise Edward George.

Pourriez-vous comparer les secteurs cacaoyers ghanéen et ivoirien ?

Connaissant les contextes historiques, je ne me permettrais pas de comparer. Je peux seulement dire qu’il est essentiel pour les deux filières de pouvoir s’appuyer sur

Notre objectif ? Renforcer notre présence dans le pays. des structures comme le Cocobod et le Conseil Café Cacao, qui assurent aux producteurs un accès à la formation, aux intrants et aux préfinancements, afin de garantir l’amélioration des rendements, de la qualité des fèves et de l’entretien des unités de production. Quelles sont les autres activités d’Olam et quels sont ses projets au Ghana ?

Le groupe est présent dans le pays depuis 1994 et en est désormais l’un des principaux acteurs

agro-industriels. Nous employons plus de 850 personnes dans nos différentes activités, qui vont de la production à la distribution en passant par la transformation, la logistique et la commercialisation. En plus d’être un acteur important dans le secteur du cacao, nous sommes également le premier exportateur de noix de cajou et le premier importateur de riz et d’engrais du pays. Pour Olam, le Ghana est stratégiquement important, et nos investissements y ont été significatifs ces dernières années. En 2011, nous avons construit une unité de transformation de tomates en sauce et une autre de fabrication de biscuits. En 2012, nous avons inauguré un moulin pour produire de la farine de blé àTema. Notre objectif est de développer ces équipements pour renforcer notre présence dans le pays. l Propos recueillis par O.C. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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Le Plus de J.A. Ghana

Services non compris Dans ce secteur en pleine mutation, les activités se multiplient. À tel point que les autorités de régulation ont dû faire un peu de ménage.

A

utrefois dominé par les établissements publics, le secteur bancaire ghanéen a été privatisé et est en pleine mutation. Mais c’est surtout à la faveur de l’essor économique des dernières années (près de 10 % de moyenne de croissance depuis 2010) que ses activités ont considérablement augmenté (+ 30 % pour les dépôts bancaires en 2012, à 16,1 milliards de cedis, soit 548 millions d’euros), ce qui l’a obligé à s’adapter et à se professionnaliser pour mieux répondre à une demande de plus en plus forte et exigeante. Attirées par un marché dont la contribution au PIB ghanéen est passée de 2,7 % en 2006 à près de 6 % aujourd’hui, les banques étrangères, à commencer par celles du voisin nigérian (6 présentes dans le pays) et la panafricaine Ecobank, actuel leader du secteur, ont multiplié les implantations, exacerbant une concurrence qui n’est cependant pas toujours synonyme de qualité de services ni de réduction des risques pour la clientèle. Les autorités de régulation locales sont donc passées à l’action, dès 2008, pour assainir un secteur alors bien encombré, mais toujours sous-capitalisé. En imposant aux établissements bancaires un capital minimum de 60 millions de cedis à atteindre avant la fin de 2012, la Bank of Ghana (BOG) a fait le ménage. « Nous avons assisté à de nombreux regroupements, notamment entre ceux qui ne disposaient pas de telles réserves », confirme Gilbert Hie, directeur général de la filiale locale de la Société générale. Adossée depuis 2003 à la Social Security Bank (SSB), l’un des fleurons du secteur lorsque ce dernier était encore public, l’unique banque française de la place pèse aujourd’hui 5 % d’un marché bancaire jugé « très fragmenté » par l’ensemble des experts interrogés. Les 26 enseignes présentes en 2013 se partagent un marché estimé par la BOG à un peu plus de 37 milliards d’euros. « Sachant que les cinq premières banques [voir tableau] se partagent près de 50 % des volumes d’affaires, le système compte encore beaucoup trop N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

d’intervenants », reprend Gilbert Hie. Le régulateur ghanéen continue pourtant de distribuer les licences, comme à The Royal Bank (TRB), qui a commencé ses opérations en décembre 2012. GOURMAND. LaprioritédelaBOGsemble

ailleurs : dans l’accès des PME-PMI au crédit. Ces dernières représentent en effet plus de 90 % des entreprises enregistrées dans le pays, et ont généré 49 % de son produit intérieur brut (PIB) en 2012. « Il faut identifier les prochains facteurs de croissance et développer les produits financiers qui faciliteront l’accès aux crédits aux PME ainsi qu’aux particuliers », explique Daniel Mensah, secrétaire exécutif de l’Association des banquiers du Ghana. Le taux de bancarisation de la population,

estimé actuellement à 30 %, continue de progresser, mais « pour des raisons de frais généraux le crédit reste cher au Ghana », regrette Gilbert Hie. Ce constat est particulièrement vrai pour les PMEPMI, parfois obligées d’emprunter à des taux supérieurs à 20 %, même si l’intérêt des banques semble être plus soutenu ces derniers mois, comme l’illustre la hausse de 40 % enregistrée en 2012 pour l’obtention de crédits aux entreprises. Une tendance qui devrait se poursuivre à mesure que le secteur se consolide autour de pôles disposant de capacitésfinancières suffisantes pour prêter au secteur privé. Concernant les particuliers, les banques misent davantage sur le e-banking et le m-banking, « à condition de pouvoir tisser des relations privilégiées avec les opérateurs de téléphonie comme c’est le cas au Kenya », remarque Felix Addo, associé chez PwC. Le développement d’un secteur des hydrocarbures gourmand en investissements, puisqu’il entend tripler ses volumes de production dans les cinq ans, devrait encourager la croissance du secteur bancaire, devenu très rentable. l OLIVIER CASLIN

Les 10 premiers établissements Banque Ecobank Ghana (EBG) Ghana Commercial Bank (GCB) Standard Chartered Bank Ghana (SCB) Barclays Bank of Ghana Ltd (BBGL) Stanbic Bank Ghana Agricultural Development Bank (ADB) Fidelity Bank (FBL) CAL Bank Société générale Ghana (SG-SSB) Zenith Bank Ghana (ZBL)

Total d’actifs en 2012

Année de l’agrément

Partenaire majoritaire

(en millions de cedis)

1990 1953 1896 1917 1999 1965 2006 1990 1975 2005

Étranger Local Étranger Étranger Étranger Local Local Local Étranger Étranger

3 199 2 833 2 246 1 889 1 679 1 352 1 277 1 109 1 006 923

SOURCE : PWC GHANA, 2013 GHANA BANKING SURVEY

BANQUES

q La Ghana Commercial Bank Tower, à Accra.

CHRIS STEIN POUR J.A.

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JEUNE AFRIQUE


La démocratie à l’épreuve PORTRAIT

Bright Simons et les médica-menteurs Le chercheur a inventé un système d’authentification gratuit permettant aux consommateurs d’éviter de tomber dans le piège des faux médicaments.

I

l fait partie des 35 innovateurs de moins de 35 ans mis à l’honneur cette année par la vénérable MIT Technology Review. Sans compter les prix internationaux qui lui ont été remis depuis 2010. Astrophysicien de formation, Bright Simons, 31 ans, est vite redescendu sur terre. À peine diplômé de l’université britannique de Durham, il s’est soustrait à l’attraction des astres. « J’avais besoin de plus de concret. J’ai réalisé que, pour changer les choses, il fallait que je devienne entrepreneur et que je revienne au Ghana pour créer ma propre société. » Il restait à trouver un domaine où il pourrait, sans apport financier, avoir un impact fort. « C’est comme ça que j’ai opté pour la technologie. Les opérateurs télécoms font des investissements énormes en Afrique. Ce qu’il fallait, c’était avoir la bonne idée pour les convaincre de me donner accès à leurs infrastructures. » Sa « bonne idée » fut de développer un système permettant de lutter efficacement contre la prolifération des faux médicaments. Un fléau qui concerne la

associe les technologies du web et de la téléphonie mobile pour lutter contre les faux médicaments. Pour connecter les industriels, les distributeurs et les consommateurs, Bright Simons a travaillé avec les laboratoires pharmaceutiques, afin qu’ils apposent un code-barre spécial sur leurs produits, et avec les groupes de téléphonie, pour qu’ils ouvrent leurs réseaux à son système d’authentification par SMS et en assurent la gratuité aux utilisateurs.

communauté internationale, les États et les opérateurs économiques puisque, selon l’Organisation mondiale de la santé, entre 30 % et 70 % des médicaments vendus en Afrique sont contrefaits, causant 2000 décès chaque jour, et que le marché de la contrefaçon génère une perte de revenus pour l’industrie pharmaceutique estimée entre 70 et 75 milliards de dollars (de 52 à 55 milliards d’euros) par an. Quant

ZUTE LIGHTFOOT

LICENCES. Moins de quatre ans après sa création, l’impact économique et social de mPedigree Network est reconnu par tous et partout. Il est désormais imposé comme norme Les laboratoires pharmaceutiques nationale par les autorités apposent un code-barre spécial sanitaires du Ghana, du Nigeria, du Kenya et d’Inde sur leurs produits. – quatre pays où mPedigree aux faux antipaludéens, ils coûteraient à a installé des bureaux – et est actuellement eux seuls 12 milliards de dollars par an en en phase pilote en Ouganda, en Tanzanie, perte de productivité aux pays africains. en Afrique du Sud et au Bangladesh. Bright Simons a établi des partenariats avec de nombreux leaders pharmaceuSMS. Après avoir avancé sur son projet tiques locaux (comme Kama Industries avec l’aide de l’américain HP, fédéré des au Ghana), des majors internationales ONG, les autorités sanitaires ghanéennes (comme Sanofi-Aventis et, récemment, et nigérianes ainsi que des groupes pharmaceutiques et opérateurs de télécoms, le géant chinois Guilin Pharmaceuticals), c’est à Accra qu’il crée sa société en 2009: ainsi que plus de 25 opérateurs de télémPedigree Network, une plateforme qui phonie (dont Orange, Tigo, Airtel, MTN, Tata Indicom). mPedigree tire ses revenus q Son entreprise associe les technologies du web et de la téléphonie. de l’octroi de licences pour les codes de validation et a conclu des accords pour sécuriser des millions d’emballages – dont quelque 50 millions de boîtes d’antipaludéens rien qu’au Nigeria. « C’est la première fois qu’une innovation africaine touche de la sorte le reste du monde, se réjouit Bright Simons. Cela change des refrains habituels et montre que l’Afrique peut être une source d’inventions révolutionnaires. » D’autant que ce n’est qu’un début. Avec ses équipes, Simons est en train d’étendre l’utilisation de mPedigree aux semences agricoles et aux cosmétiques, et envisage de nouvelles applications dans les domaines de la logistique, de la gestion des chaînes d’approvisionnement et du marketing. Des créneaux qui seront encore plus rentables et que le chercheur, devenu patron, était loin d’avoir imaginés en lançant son projet. l

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OLIVIER CASLIN, avec CÉCILE MANCIAUX N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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Le Plus de J.A. Ghana années 1960 grâce à son industrie du bois, espère retrouver son lustre d’antan. « À l’époque, on rivalisait avec Accra, se souvient Jacob Ntiamoah, employé à la mairie. Avec la perte de vitesse de l’industrie dans les années 1990, l’activité a décliné. Mais aujourd’hui on sent que le regard que les gens portent sur notre ville a changé, qu’elle attire de nouveau. » Une attractivité qui ne va pas sans quelques revers. Le prix des produits de grande consommation comme celui de l’immobilier ont flambé. « Des gens sont expropriés parce que des projets plus rentables vont être construits sur leurs terres », raconte Isaac Hughes, responsable d’une radio locale consacrée à l’actualité pétrolière. « L’état de notre réseau routier s’est détérioré à cause du poids trop lourd des cargaisons, souligne Anthony Cudjoe, le maire de la ville. Par ailleurs, la migration croissante a eu un impact sur les communautés, entre lesp Le nouveau Mall Erebe, le 26 septembre. quelles les conflits sont plus fréquents. CARNET DE ROUTE Surtout, les gens ont cru qu’ils allaient tous trouver du travail, mais ce n’est pas le cas… » Résultat, le taux de chômage Depuis l’entrée en production de l’énorme gisement pétrolier Jubilee reste élevé : il est de 40 %, et beaucoup s’estiment laissés-pour-compte au profit au large des côtes, la ville se métamorphose. des travailleurs expatriés. uand il a appris que d’imporDe l’exploitation au transport, c’est toute Pour inverser la tendance, le gouvernetantes découvertes de pétrole une industrie qui a débarqué, et en cinq ment a mis en place le « local content », avaient été faites au large de ans la population de la cité est passée de loi qui oblige les pétroliers et leurs sousTakoradi en 2007, Gershon 200000à600000habitants.Lesentreprises traitants à embaucher un minimum de Kokou Amedetor, travailleur indépenpétrolières ont pris leurs quartiers travailleurs ghanéens. Encore dant dans les nouvelles technologies dans des zones sécurisées faut-il que ces derniers soient à Tema (près d’Accra), n’a pas hésité à l’entrée de la ville. Des qualifiés… Pour faire face longtemps. L’année suivante, il débaragences bancaires ouvrent à cette demande, l’uniquait dans la cité de l’or noir pour parrégulièrement. Des liaisons versité polytechnique ticiper à la création d’une entreprise de Takoradi a créé un aériennes quotidiennes de services, Seaweld Engineering, dont centre de formation avec Accra sont désormais il est directeur de la logistique et des spécialisé en coopéraassurées. Le dynamisme approvisionnements. « Notre travail est palpable. tion avec les opérateurs est de tout faire pour faciliter la vie des pétroliers. « De toute compagnies pétrolières, explique-t-il. TRAVERS. Tout le tissu façon, on ne peut pas Nous trouvons des logements pour leurs économique a été revise reposer entièrement salariés, des infrastructures, mettons à talisé, de même que cersur ce secteur, souligne leur disposition une assistance techtaines infrastructures. le maire. Sa croissance nique. » Le succès est au rendez-vous : C’est le cas de la voie ferrée L’industrie pétrolière doit nous aider à déveau Ghana (en 2012) « On a commencé à 4, aujourd’hui nous Accra-Takoradi, qui a été lopper les autres pans avons 70 employés permanents et plus modernisée et dont l’exde notre économie, Production : 110 000 b/j de 300 collaborateurs dans le pays. Ici, tension jusqu’à Sekondi comme l’agriculture. Il (prévision : 250 000 b/j en 2021) les investisseurs viennent du monde (ville jumelée, à la limite faut éviter de tomber Recettes d’exportation : entier et on vit la crise économique de de l’agglomération) est dans les mêmes travers 3 milliards $ l’intérieur. » que nos voisins. Notre en cours. Le port va être La vie entière de Takoradi, située à agrandi pour faire face à Revenus pour l’État : 541 millions $ chance est de n’être 230 km à l’ouest d’Accra, a été bouleverqu’au début de la l’augmentation du trafic. Opérateurs : Tullow Oil, Kosmos sée par cette croissance depuis que les Takoradi, qui était l’une Energy, Anadarko Petroleum Corp. production. » l premiers barils de pétrole du gisement VINCENT DUHEM, des villes les plus imporInvestissements prévus : Jubilee ont été commercialisés, en 2010. envoyé spécial tantes du pays dans les 20 milliards $ d’ici à 2020 CHRIS STEIN POUR J.A.

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Takoradi broie de l’or noir

Q

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La démocratie à l’épreuve

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INNOVATION

Du rêve à la réalité

p L’un des immeubles sera le plus élevé du continent.

L

e3mars,leprésidentJohnDramani Mahama donnait le coup d’envoi du projet le plus ambitieux jamais lancé dans son pays. Difficile d’imaginer que le vaste terrain vague de Prampam (plus de 3,6 km2), encore envahi de margousiers, accueillera d’ici à 2016 l’un des technoparcs les plus modernes du continent. C’est pourtant là, à une demiheure en voiture de l’ouest d’Accra, à proximité du port et de l’aéroport international, que vont émerger les hauts immeubles de verre de Hope City, parc technologique dont la vocation est simple : « Il sera le centre de référence en technologies de l’informationetdelacommunication[TIC] sur le continent », selon son promoteur, Roland Agambire, homme d’affaires de 39 ans, PDG d’AGAMS Group et directeur général de sa filiale, Rlg Communications, l’un des premiers assembleurs et distributeurs africains de matériel informatique (téléphones, PC, tablettes…). Sur les plans et les dessins d’architectes, Hope City – « cité de l’espoir », qui est en fait l’acronyme de Home, Office, People & Environment – semble sortie de l’imagination d’un auteur de roman d’anticipation. Ses lignes futuristes ont pourtant été inspirées à son concepteur, le cabinet d’architecture italien Open Building Research (OBR), par les maisons traditionnelles des provinces septentrionales du Ghana. Véritable ruche dimensionnée pour accueillir 50000 emplois (300000 à JEUNE AFRIQUE

terme),lecœurdeHopeCityseraconstitué de 6 tours de différentes hauteurs, dont la plus haute (75 étages), qui culminera à 270mètres,seral’immeubleleplusélevédu continent. Elles seront installées en cercle, autour d’un jardin planté sur trois niveaux, et reliées par des passerelles lumineuses. « Nous avons conçu ce projet comme une ville verticale dont les différents éléments sont interconnectés pour favoriser les

Hope City devrait séduire les développeurs les plus compétents de la planète. échanges et les rencontres », explique l’architecte Paolo Brescia, qui a également veillé à réduire au minimum l’empreinte carbone de l’ensemble. RÉALITÉ. Pendant ouest-africain du pro-

jet Konza Technology City (surnommé African Silicon Savannah), dévoilé en janvier par les autorités kényanes et qui devrait aussi être achevé pour 2030, le technoparc Hope City accueillera des bureaux, des galeries marchandes, des centres de loisirs, une université, un hôpital et, surtout, un centre de formation, de recherche et développement (R&D) et d’affaires entièrement consacré aux nouvelles technologies, ainsi que des unités d’assemblage de matériel informatique. « Ce qui manque aujourd’hui

en Afrique, c’est un endroit où il est possible de concevoir et de produire du matériel informatique et des logiciels en s’appuyant sur un centre de R&D digne de ce nom, capable d’attirer les développeurs les plus compétents de la planète », explique Roland Agambire. Commanditaire du projet et déjà propriétaire du site, Rlg Communications participe à hauteur de 30 % aux 10 milliards de dollars (environ 7 milliards d’euros) nécessaires à la réalisation de cette métropole technologique. « D’autres investisseurs ont déjà répondu à l’appel », rassure Roland Agambire,parmilesquelsMicrosoft, dont le vice-président, Ali Faramawy, était présent lors de la cérémonie de mars, de même qu’une forte délégation de décideurspolitiquesetéconomiquesnigérians. Les espoirs générés par le projet sont à la hauteur des investissements et dépassent largement les frontières du Ghana. « Il doit permettre de faire émerger les nouveaux talents, de rassembler les compétences nécessaires pour favoriser une révolution technologique qui s’étendra au reste de l’Afrique », veut croire Florence Toffa, directrice de Mobile Web Ghana. « Notre objectif est que, d’ici à trois ans, Hope City soit devenue une réalité, martèle Roland Agambire, pour montrer au monde entier que l’Afrique dispose des moyens pour réaliser ses rêves. » Même les plus fous. l OLIVIER CASLIN N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

OBR

Dans la région du grand Accra, Rlg Communications bâtit un parc technologique d’excellence… et un nouveau modèle de développement.


Le Plus de J.A. Ghana

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SOCIÉTÉ

Le retour des enfants prodigues Ils ont grandi à l’étranger, appartiennent à l’élite et sont de plus en plus nombreux à rentrer pour créer ou développer leur activité.

I

«

ci, il y a tellement de choses à faire. Tout est nouveau, à construire. » Attablée à la terrasse d’un café dans un quartier chic d’Accra, Kissy Agyeman-Togobo, 37 ans, est enthousiaste. Née au RoyaumeUni, elle a grandi à Londres où elle a commencé sa carrière avant de revenir au Ghana, que ses parents avaient quitté dans les années 1960. « L’idée a germé en 2009. C’était le début de la crise en Europe et je me suis rendu compte que bon nombre d’options se présentaient, en revanche, sur le continent. » Elle décide alors de créer une société de conseil pour les entreprises étrangères souhaitant s’implanter en Afrique de l’Ouest et s’installe avec son mari, en février 2012, dans la banlieue d’Accra. Un cas de figure qui se fait de plus en plus fréquent. Cette année, les autorités ghanéennes et les associations d’aide aux « migrants du retour » ont enregistré un record de demandes de la part de membres de la diaspora qui se renseignent pour revenir au Ghana. Le phénomène a pris une telle ampleur que les returnees, comme on les surnomme, devraient bientôt faire l’objet d’une série télévisée. Ils s’installent dans les quartiers résidentiels prisés d’Accra, intègrent les multinationales, les agences de services ou créent leur entreprise, et

sentiment que partage Jules Acheampong, entrepreneur de 35 ans, revenu à Accra en 2010 : « J’ai sous-estimé le temps et les efforts qu’il faut faire pour s’adapter. Les premiers mois, j’étais optimiste. J’ai viennent grossir les rangs des classes commencé à me poser des questions au moyennes et supérieures. Souvent, la décibout d’un an et demi. Quand on vient de sion de rentrer répond à l’amenuisement l’Occident, le Ghana n’est pas un endroit de perspectives en Europe. « Beaucoup facile à vivre : il y a beaucoup de stress, appartiennent à l’élite et ont compris qu’ils ne pourraient jamais avoir d’aussi bons toujours quelque chose qui ne fonctionne postesquechezeux»,expliqueAfuaHirsch, pas et, y faire du business est compliqué. » correspondanteen Afrique de l’Ouest pour Beaucoups’aperçoiventaussiqu’ilsnesont le quotidien britannique The Guardian, et pas totalement chez eux. « On parle, on s’habille différemment », explique Kissy elle-même returnee. Agyeman. « La différence culturelle est S’ADAPTER. Il faut dire que, avec une importante, confirme Andrew Tumi. Mon moyenne de croissance de 10 % entre 2010 retour m’a fait me poser des questions sur et 2012 et une stabilité politique désormais mon identité… et comprendre que je suis exemplaire, le Ghana a de quoi attirer. africain-européen. » « Nos parents ont quitté un pays en proie L’impact de ces milliers de retours sur l’économie n’est pas encore chiffré mais, les autorités font Grâce à une croissance et une tout pour les faciliter. Une stabilité politique exemplaires, unité de soutien, la Diaspora le pays a de quoi attirer. Support Unit (DSU), a été créée en 2011 pour accomaux coups d’État. Cette époque est révolue. pagner les returnees dans leurs démarches. Aujourd’hui, c’est ici qu’il faut être. Il s’agit Certains en tirent profit, comme la Ghana d’une prise de conscience collective », School of Law. Parmi les membres de la explique Andrew Tumi, 41 ans, chanteur. diaspora qui décident de rentrer, on trouve Pourtant, le retour est souvent labobeaucoup d’avocats, établis à Londres. Or, rieux. « Il faut s’adapter à un environnepourêtreautorisésàpratiquerauGhana,ils ment différent et être ouvert. On arrive doiventsuivreuneformation.Initialement, excité, avec la conviction que l’on va celle-ci coûtait 3600 euros. Cette année, pouvoir tout changer. Mais la réalité est l’établissement a fait passer ses tarifs à près différente », explique Kissy Agyeman. Un de 12000 euros. l VINCENT DUHEM

CHRIS STEIN POUR J.A.

CHARLES ACHEAMPONG POUR J.A.

q Andrew Tumi et Kissy Agyeman-Togobo se sont installés dans leur pays d’origine.

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JEUNE AFRIQUE


RIEN N’EST PLUS FORT QUE L’ESPRIT D’EQUIPE

P.O. Box 13119 - Ring Road Central, Accra - 0302 214 314 - www.societegenerale.com.gh


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Économie

CÔTE D’IVOIRE

La filière hévéa sous pression

L’eldorado… NIGERIA

Des ressources pétrolières dont l’exploitation est gênée par l’insécurité. Un beau potentiel agricole, mais peu d’infrastructures pour transporter la production. Un vaste marché intérieur, divisé par de profondes inégalités. Richement doté, le pays met la patience des investisseurs à rude épeuve. CHRISTOPHE LE BEC, envoyé spécial

C

«

elui qui n’est pas implanté au Nigeria n’est pas implanté en Afrique ! » a affirmé Ngozi OkonjoIweala, la ministre des Finances, pleine de conviction face aux investisseurs venus la rencontrer mi-septembre. Et son message a été reçu cinq sur cinq par Nicole Bricq, la ministre française du Commerce extérieur, en visite à Abuja et à Lagos. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

« Le Nigeria joue un rôle de locomotive régionale et nous voulons être l’un de ses partenaires stratégiques », annonçait celle-ci dès son arrivée dans la capitale fédérale. « On ne peut passer à côté de ce pays, en particulier dans les secteurs du BTP, de la production électrique, de l’agriculture et de l’environnement », a-t-elle répété aux chefs d’entreprise français, qu’elle souhaite emmener au-delà du « pré carré » francophone. Pour les prétendants, la fiancée nigériane ne manque pas de charme : ses quelque 170 millions d’habitants – autant de consommateurs en puissance –, sa JEUNE AFRIQUE


LES INDISCRETS

Cameroun, RD Congo, Côte d’Ivoire

ÉNERGIE

GE turbine en Algérie

DÉCIDEURS

Mamadou Dia Directeur général de la Sénégalaise des eaux

ALGÉRIE

Comment Axa s’est imposé

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GEORGE OSODI/PANOS PICTURES

t Comme Lagos, dont la population croît de 3 % par an, les grandes villes sont en pleine expansion.

de demain production pétrolière – près de 95 milliards de dollars (plus de 73 milliards d’euros) de recettes d’exportation en 2011 –, et son potentiel agricole inégalé en Afrique de l’Ouest. Selon la banque d’affaires Renaissance Capital, le pays pourrait même devenir la première économie du continent d’ici à cinq ans, devant l’Afrique du Sud. En 2012, son PIB atteignait 268,7 milliards de dollars (contre 384,3 milliards pour la nation Arcen-Ciel), mais il pourrait augmenter de 40 % pour peu que le pays mette à jour sa base de calcul en intégrant des variations de prix et de production omises pendant ces vingt dernières années. Un argument utilisé par les autorités pour renforcer l’image de leur pays auprès des investisseurs, même si sa réputation reste écornée par les problèmes sécuritaires, dans le Nord avec la présence de la JEUNE AFRIQUE

secte islamiste Boko Haram (basée dans l’État de Borno), et dans le Sud-Est avec la subsistance des groupes armés dans le Delta du Niger. « Ce n’est pas un pays facile, mais les occasions ne manquent pas », assure Massimo De Luca, conseiller commercial de l’Union européenne (UE) à Abuja. « En plus de sa puissance démographique, le Nigeria bénéficie de ses bons fondamentaux macroéconomiques. Avec Ngozi Okonjo-Iweala aux Finances, l’inflation est contenue (autour de 10 %), l’endettement public aussi (à 19 % du PIB), et la croissance tourne autour de 7 % », ajoute ce diplomate italien, en poste depuis quatre ans et qui voit les missions commerciales occidentales et asiatiques se succéder à Abuja. « Le pays peut aussi se prévaloir de sa stabilité politique, grâce à un subtil équilibre entre le niveau local et le niveau fédéral, et de son attitude ouverte vis-à-vis du secteur privé et des investisseurs étrangers. Ici, il n’y a pas de risque de nationalisations. » HUPPÉ. Unpaysattrayant,donc,maisdequelNigeria

parle-t-on? Celui des milliardaires comme Aliko Dangote et Tony Elumelu, installés à Victoria Island, N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013


Entreprises marchés le quartier huppé de Lagos? Ou celui des 70 % de la population qui vivent avec moins de 1 dollar par jour dans les campagnes et les bidonvilles? Sur un territoire immense (plus de 923000 km2, soit près de trois fois la superficie de la Côte d’Ivoire) coexistent en effet des réalités très contrastées. Le gouverneur de chacun des 36 États fédérés dispose d’un budget conséquent et de larges compétences, couvrant tous lesdomaines,àl’exceptiondesfonctionsrégaliennes (défense, justice et monnaie). Résultat: un paysage économique à plusieurs vitesses. « S’il y a une chose que je retiens de ma visite, notait ainsi Nicole Bricq à la fin de son séjour, c’est la différence majeure entre le nord et le sud du pays ; pas uniquement pour des raisons sécuritaires, mais surtout en termes de richesse et de perspectives économiques. » Et la ministre de s’étonner: « Dans les États du Nord, la croissance n’est que de 1 % par an… quand elle est de 14 % dans ceux du Sud! L’État de Lagos à lui seul pèse 65 % du PIB non pétrolier du Nigeria, soit davantage que la Côte d’Ivoire, le Cameroun et le Sénégal réunis. » Les entreprises françaises de sa délégation affichaient d’ailleurs un intérêt plus marqué pour les grandes villes du Sud, en pleine expansion (la population croît de 3 % par an à Lagos). « Dans les technologies de l’information, la finance, la banque, la mode, les médias, l’éducation et les services portuaires, nous sommes incontournables », se félicite Babatunde Fashola, le gouverneur de Lagos. L’élite du secteur privé, qui avait fui la ville lors du déplacement de la capitale fédérale à Abuja, y est revenue. Dans le Nord, les perspectives sont moins brillantes, notamment en raison d’un niveau d’éducation plus faible et de l’absence d’industries. Mais là encore, la situation est loin d’être homogène. « L’État de Kano [9,4 millions d’habitants], qui abrite la capitale commerçante haoussa, est dirigé par le gouverneur Rabiu Musa Kwankwaso, qui a réussi à y faire progresser la production agricole [riz, arachide et sucre] et textile, notamment grâce à l’amélioration des infrastructures routières, indique Massimo De Luca. Il a été jusqu’à présent épargné par la menace islamiste, contrairement au nordest du pays. » Une menace que subit en revanche l’État voisin de Katsina (extrême Nord) : « Là-bas, nous avons dû cesser nos opérations après une attaque islamiste et la prise en otage de l’un de nos salariés », indique Jérôme Douat, président de l’entreprise française Vergnet, qui y installait une centrale électrique. FÊTE. D’un secteur à l’autre, les situations sont

également contrastées. « Contrairement à une idée reçue, la croissance nigériane n’est plus bâtie sur l’or noir, analyse Hervé Boyer, directeur commercial du groupe Standard Bank pour l’Afrique de l’Ouest. En 2013, l’immobilier devrait croître de 7 %, les télécoms de 6 %, l’agriculture de 5 %… et N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

KANO Population* : 9,4 millions d’habitants Atouts : centre agroalimentaire et textile de première importance Handicap : problèmes d’approvisionnement en électricité

Trois États clés NIGER

TCHAD

BÉNIN

LAGOS Population* : 18 millions d’habitants Atouts : des services dynamiques (finance, médias, immobilier), un tissu industriel en renouvellement Handicap : déficit en infrastructures et en énergie

ABUJA

CAMEROUN RIVERS Population* : 5,2 millions d’habitants Atouts : la région du Delta du Niger, centre pétrolier du pays (48 % de la production), une industrie solide Handicaps : insécurité et trafic de carburant

« La croissance n’est plus bâtie sur l’or noir. L’immobilier, les télécoms et l’agriculture progressent. » HERVÉ BOYER, directeur commercial Afrique de l’Ouest de Standard Bank

200 km

le secteur pétrolier décroître de 1 %. » Pourvoyeur de 80 % des recettes fédérales, ce dernier n’est en effet plus à la fête. Les pertes dues à des fuites dans les oléoducs et à un trafic à grande échelle dans la zone du Delta du Niger, qui échappe en partie au contrôle des autorités, ont atteint un niveau considérable (quelque 400000 barils par jour en avril), entraînant une baisse de la production de 17 %. Le manque à gagner pour les compagnies et l’État est d’environ 1 milliard de dollars par mois. « Cette baisse a toutefois un côté positif, relativise De Luca. Le gouvernement a moins d’argent à distribuer, ce qui diminue le poids du secteur public au profit du secteur privé et limite les risques de corruption. » Reste que réussir au Nigeria – quel que soit le secteur ou la région – demande de pallier la défaillance chronique des infrastructures. « Le plus dur est la gestion de la logistique et de l’approvisionnement en électricité », prévient le patron d’un important groupe industriel occidental, en poste depuis cinq ans. « La corruption gangrène et ralentit la plupart des grands projets », renchérit le conseiller commercial de l’UE. En matière énergétique, le déficit est dramatique : « Le pays tout entier ne dispose que de 4 500 mégawatts, contre 40 000 MW pour la seule Afrique du Sud, trois fois moins peuplée », reconnaît Chinedu Nebo, le ministre de l’Électricité. JEUNE AFRIQUE

*CHIFFRES 2006 (DERNIER RECENSEMENT) : RECENSEMENT FÉDÉRAL POUR LES ÉTATS DE KANO ET RIVERS, LOCAL POUR CELUI DE LAGOS

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Lire l’interview d’Aliko Dangote sur economie.jeuneafrique.com

Le programme de privatisation d’une partie de la production, qui doit augmenter la capacité de 6 000 MW, a connu un beau succès en 2012, attirant des investisseurs locaux sérieux comme Tony Elumelu (Transcorp) ou Femi Otedola (Zenon Petroleum & Gas). Mais leurs centrales n’atteindront pas leur pleine capacité avant… 2020. En attendant, les industriels s’adaptent. « Nous demandons sans succès depuis plusieurs années le raccordement à un pipeline gazier d’une centrale électrique que nous sommes prêts à construire dans l’État d’Ogun (au nord de Lagos) pour alimenter une de nos cimenteries », s’est plaint Jean-Christophe Barbant, directeur Nigeria de Lafarge lors d’une rencontre avec Chinedu Nebo. PASSE-DROITS. En ce qui concerne les transports,

le réseau routier a été amélioré, notamment dans le centre du pays, mais beaucoup reste à faire: « C’est indispensable pour que l’agriculture décolle réellement, grâce à un meilleur approvisionnement en intrants agricoles, et à une circulation plus aisée des productions de manioc ou de riz », note Massimo De Luca. Mené par des groupes chinois (dont China Civil Engineering Construction Corporation, CCECC), le chantier de rénovation des voies ferrées est, lui, encore au milieu du gué. La ligne LagosKano a été rénovée, mais les autres grands projets, en particulier à partir de Port Harcourt, n’avancent qu’à petits pas. Autre écueil, la gestion des partenariats – aussi bien avec les sociétés locales qu’avec les

Entreprises marchés

POPULATION POPULA ULA ULAT ATIO TI TION 2013 : entre 169 et 174 milli millions d’habitants (7e rang mondial) 2050 (proj.) : 444 millions d’habitants (3e rang mondial) PIB 2012 268,7 milliards de dollars CROISSANCE PRÉVUE EN 2013 7,2 % INFLATION 10,7 % CLIMAT DES AFFAIRES 131e rang mondial (sur 185 pays) (SOURCES : INED, FMI, RAPPORT « DOING BUSINESS » 2013)

gouvernements – se révèle complexe, notamment en ce qui concerne les importations. « Les mesures censées encourager la production locale sont parfois appliquées “à la tête du client”, notamment dans les secteurs du pétrole, du ciment, des intrants et produits agricoles. Les groupes privés proches des autorités – locales ou fédérales – peuvent parfois bénéficier de passe-droits pour importer, voire transgresser les règles sans être inquiétés », confie un industriel. Visé par ces critiques, Aliko Dangote, l’homme le plus riche d’Afrique, justifie les politiques protectionnistes dans les secteurs du ciment et de l’agroalimentaire, où il intervient : « Le Nigeria n’a pas besoin d’entreprises qui veulent seulement exporter leurs produits, mais nous sommes prêts à accueillir ceux qui veulent être nos partenaires pour produire sur place. » Le tycoon de Lagos a su cultiver ses relations avec les présidents Olusegun Obasanjo puis Goodluck Jonathan pour passer du statut d’importateur à celui d’industriel, en bénéficiant d’un quasi-monopole sur ses produits à son démarrage, puis d’un appui dans son expansion. Investir au Nigeria exige de faire preuve de patience, de jongler avec les différents échelons administratifs et les partenaires locaux. Mais le jeu en vaut la chandelle, en particulier dans le secteur des biens de consommation de base, comme en témoigne le succès des mastodontes de l’agroalimentaire Nestlé et Cadbury. Le géant nigérian ne s’est pas encore complètement éveillé, mais c’est maintenant qu’il faut s’en rapprocher. l

TENTATIONS AUTARCIQUES ur le plan politique, on a vu le président Goodluck Jonathan très actif pour tenter de résoudre les crises ivoirienne et malienne, soucieux de contrebalancer l’influence de l’Afrique du Sud dans l’ouest du continent. Mais sur le plan économique, le Nigeria est encore loin d’être intégré à la sous-région ; les barrières fiscales à l’entrée restent élevées, en particulier sur les produits pétroliers et agricoles ainsi que sur les matériaux de construction. « Il faudra du temps avant qu’existe une véritable convergence économique et une monnaie commune en Afrique de l’Ouest. Chacun de nos pays doit mettre de l’ordre dans sa maison », estime Ngozi Okonjo-Iweala, la puissante ministre des Finances, pourtant soucieuse de renforcer la coopération régionale, notamment avec la Côte d’Ivoire d’Alassane Ouattara. JEUNE AFRIQUE

ONIISI AGALMI

S

p Aliko Dangote se concentre actuellement sur le marché national.

En matière d’activisme panafricain, les entreprises montraient jusqu’à présent l’exemple en s’implantant dans plusieurs pays du continent, en particulier dans les domaines bancaire (notamment UBA et Access

Bank), industriel (Dangote Group, Transcorp, etc.) et des télécoms (Globacom). Mais elles semblent aujourd’hui se concentrer sur leur marché domestique. Pour Aliko Dangote, interrogé à Lagos mi-septembre, « il y a tellement d’opportunités au Nigeria qu’on a du mal à sortir du pays ». « La construction de notre première grande raffinerie au Nigeria [d’un coût total de 6,6 milliards d’euros] va mobiliser une large partie de nos ressources financières. Avant, notre objectif était d’y réaliser 50 % de notre chiffre d’affaires et 50 % ailleurs en Afrique. Mais avec ce projet, la part du reste du continent ne devrait atteindre que 20 % à 25 % dans cinq ans. Néanmoins, quand nous aurons une trésorerie suffisante, nous réinvestirons en dehors du pays », assure le milliardaire. l C.L.B., avec PATRICK SMITH N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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OLIVIER

t Dans une exploitation de la SAPH, le leader national.

CÔTE D’IVOIRE

La filière hévéa sous pression Pris en étau entre de nouvelles taxes et des cours mondiaux en berne, planteurs et industriels voient leurs revenus s’éroder et demandent une révision de la fiscalité.

L

a fièvre de l’hévéa, qui poussait à multiplier les plantations, commence à s’essouffler. Le secteur – l’un des plus importants de l’économie ivoirienne, avec un chiffre d’affaires annuel de plus de 200 milliards de F CFA (305 millions d’euros) – traverse une mauvaise passe, marquée par la dégringolade des cours mondiaux depuis plus de deux ans. Le prix du caoutchouc est en effet passé de 1 200 à 395 F CFA le kilo, fragilisant l’ensemble de la filière. Faute d’un mécanisme de stabilisation de prix, les quelque 130000planteursvoientleurrevenu (environ 50 milliards de F CFA par an à l’échelle nationale) fondre. Mais les industriels ne sont pas non plus épargnés. Au premier semestre

2013, la Société africaine de plantations d’hévéa (SAPH, filiale du groupe Sifca), leader de la production de caoutchouc naturel en Côte d’Ivoire, a vu son bénéfice baisser de 24 %, à 8,65 milliards de F CFA. TRÉSORERIE. Mais « le problème

n’est pas uniquement lié à la chute des cours mondiaux. Le gouvernement a introduit depuis 2012 de nouvelles taxes, qui pèsent sur la trésorerie des différentes entités de notre secteur », explique Wadjas Honest, président de l’Association des producteurs de caoutchouc naturel de Côte d’Ivoire (Aprocanci). En effet, la bonne santé que connaissait la filière hévéa depuis 2008 a incité le gouvernement à en faire une nouvelle source de revenus fiscaux. Un

impôt mensuel de 2,5 % est appliqué sur le revenu des planteurs. Les industriels paient quant à eux 5 % sur l’exportation du caoutchouc granulé et 7 500 F CFA par hectare de plantation. Deschargesquin’ontpaschangé, malgré la baisse des prix mondiaux. « Nous avons introduit ces impôts à un moment où les cours étaient au plus haut. Des discussions et des réflexions sont en cours pour réaménager cette fiscalité », a indiqué à Jeune Afrique Bruno Koné, le porte-parole du gouvernement. La solution préconisée par les professionnels est la suspension, voire la suppression, de certaines taxes à partir de 2014. Si rien n’est fait, explique un professionnel, « les producteurs pourraient acheminer illégalement leur production vers le Ghana ou le Liberia. Ce qui créerait un manque à gagner pour l’État ivoirien ». La nomenclature de l’annexe fiscale de 2014 est donc attendue avec impatience par les acteurs de la filière. AMBITIONS. Outre la fiscalité,

Avec

256000 t en 2012,

le pays est er le producteur du continent e et le au monde

1

7

l’étroitesse du marché régional et la surcapacité des unités industrielles contribuent à rendre le secteur peu compétitif. La Côte d’Ivoire compte seize unités de transformation de fond de tasse (méthode de collecte du latex) dotées d’une capacité de 390 000 tonnes par an, alors que la production nationale était en 2012 de 256000 t. En attendant, le pays, qui est le septième producteur mondial derrière les mastodontes asiatiques mais le premier à l’échelle du continent, nourrit de grandes ambitions. Son objectif est d’atteindre la barre des 600 000 t d’ici à 2020. l BAUDELAIRE MIEU, à Abidjan

Enregistrement de l’émission de la BBC

23 Octobre, 18h45 Université Paris-Dauphine Inscrip!on en ligne obligatoire : exchangesbbc.dauphine.fr en partenariat avec

Exchanges on the Global Economy avec le Professeur

George AYITTEY

Président de la Free Africa Founda!on


Entreprises marchés

Les indiscrets

Cameroun Un nouveau

CACAO ARMAJARO BOUDE LA CÔTE D’IVOIRE Alors que la récolte du cacao débute, certains négociants ont décidé de bouder le marché ivoirien. C’est le cas d’Armajaro. Pour la société britannique, cofondée par Anthony Ward et dirigée notamment par Loïc Folloroux (fils de Dominique Ouattara), le pays a perdu de son intérêt depuis la réforme entrée en vigueur il y a un an. Les frais de transport entre les champs et les usines auraient été sous-estimés par les autorités, ce qui obligerait les exportateurs à payer un surcoût pouvant dépasser 4 %. Lors de la campagne 2012-2013, Armajaro avait acheté 50000 tonnes de cacao dans le pays.

prétendant pour AES-Sonel

ÉNERGIE QUI ACHÈTERA LA PRODUCTION D’INGA 3 ?

les Sud-Africains, clients solvables, rendra le projet bancable.

A

AÉRIEN LES ACTIONNAIRES DE KORONGO AIRLINES DIVISÉS

Avec seulement deux appareils, la compagnie congolaise, une coentreprise entre Groupe Forrest International (GFI) et Brussels Airlines (filiale de Lufthansa), peine à décoller. Alors que GFI, minoritaire avec 49,5 % du capital, est disposé à y injecter des fonds, Lufthansa s’y refuse en raison des résultats décevants de sa filiale. Or GFI ne peut se lancer seul : s’il augmentait sa participation, Korongo Airlines risquerait de perdre les bénéfices que lui confère la présence majoritaire d’un transporteur international à son capital.

PHOTO12/ALAMY

Le mégaprojet hydroélectrique d’Inga 3, en RD Congo, avance à petits pas. Un accord de coopération énergétique devrait être signé par les présidents congolais, Joseph Kabila, et sud-africain, Jacob Zuma, fin octobre à Kinshasa. Sur la production de 4 800 mégawattheures prévue, plus de la moitié seront réservés à l’Afrique du Sud et 1 300 MWh destinés aux groupes miniers actifs dans la province du Katanga. La Banque mondiale souhaite qu’une proportion plus importante de cette énergie soit réservée au secteur public congolais. Kinshasa et la Banque africaine de développement (BAD) font quant à eux valoir qu’un accord avec

GLEZ

JONATHAN DRAKE/BLOOMBERG VIA GETTY IMAGES

lors que, d’après nos informations, la cession de la compagnie d’électr icité AES-Sonel au capital-investisseur Actis achoppe encore sur quelques points, un nouveau prétendant s’est fait connaître ces dernières semaines. Le fonds souverain d’Abou Dhabi, Mubadala Development Company

(avec à la manœuvre l’un de ses vice-présidents, Rilk Wilfrith Dacleu Idrac), et le producteur indépendant d’électricité ContourGlobal, mené par Joseph Brandt, se sont en effet groupés pour proposer un dossier à AES et à l’État camerounais, tous deux actionnaires d’AESSonel. Leur stratégie ? Passer par le canal politique, en espérant que les autorités bloquent le processus de cession à Actis. Ils connaissent bien le dossier et les hommes qui le gèrent : tous deux sont des anciens d’AES, dont Joseph Brandt a même été l’un des dirigeants à l’époque de la privatisation de la Sonel… l

JEUNE AFRIQUE

FINANCE AMETHIS INNOVE À ABIDJAN L’investisseur basé à Paris et dirigé par Luc Rigouzzo finalise la mise en œuvre d’une société d’investissement qui aura son siège à Abidjan et vise un capital de 40 millions d’euros. Particularité de cette structure: les investisseurs locaux, parmi lesquels la Banque ouest-africaine de développement (BOAD), vont pouvoir bénéficier des avantages fiscaux liés à la domiciliation des principaux véhicules d’Amethis à Luxembourg et à Maurice. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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Entreprises marchés ÉNERGIE

GE turbine en Algérie

La société américaine fournira des équipements pour six nouvelles centrales électriques. Un marché de plus de 2 milliards d’euros.

P

rès de 2,7 milliards de dollars (2,1 milliards d’euros) pour l’installation de nouvelles unités de production électrique. GE Energy a décroché le gros lot en Algérie ! Akli Brihi, le directeur général de la filiale locale du géant américain, ne cache pas sa joie : « C’est le contrat de vente de turbines le plus important signé par GE dans le monde. » Le groupe est d’autant plus content que le projet sera intégralement financé par la puissante société publique Sonelgaz, qui couvre l’ensemble du secteur énergétique du pays. « Tous ces contrats ont été attribués à GE dans le cadre d’appels d’offres internationaux lancés et menés en toute transparence par CEEG, la filiale ingénierie de Sonelgaz, avec ouverture publique des plis, et sur la base de la meilleure offre technique et commerciale », tient à signaler Akli Brihi, dont l’entreprise était en concurrence avec l’allemand Siemens. Dans le passé, des soupçons de corruption ont en effet entouré des marchés att r i bu é s p a r Sonelgaz à des sociétés étrangères. Il y a moins de quatre mois, Noureddine Boutarfa, le PDG de l’entreprise publique (toujours en poste), a été inculpé et placé sous contrôle judiciaire dans le cadre d’une enquête sur des surcoûts liés à la construction de deux centrales électriques par GE et le français Alstom.

MÉGAWATTS. Officialisé fin septembre, l’accord entre le groupe américain et la Société algérienne de production de l’électricité (SPE, N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

q Les pièces seront fabriquées dans les usines du groupe aux États-Unis.

filiale de Sonelgaz) comprend plusieurs volets, dont le plus important représente la bagatelle de 1,9 milliard de dollars. Celui-ci concerne la fourniture de 24 turbines à gaz, 12 turbines à vapeur, 36 alternateurs et leur système de contrôle. Fabriqués aux États-Unis, ces équipements alimenteront six futures centrales électriques d’une puissance de 1 200 à 1 600 mégawatts chacune, qui doivent entrer en service entre 2015 et 2017. Elles seront situées dans le nord du pays, dans les wilayas (préfectures) de Biskra, Djelfa, Jijel, Khenchela,MostaganemetNaama. Pour leur construction, des sociétés ont été présélectionnées fin juillet à la suite d’un appel d’offres. Il s’agit de quatre groupes chinois (China National Technical Import and Export Corporation, Jiangsu Electric Power Design Institute et Zhejiang Thermal

Power Company, regroupés en consortium, ainsi que Power Corporation of China), du sudcoréen Samsung et d’un groupement turco-grec (Gama-Metka). À elles six, ces centrales augmenteront la capacité nationale de 8 400 MW, un accroissement de 73 % par rapport aux 11389 MW disponibles actuellement. La question énergétique est en effet cruciale dans ce pays producteur de gaz et de pétrole, notamment en période estivale – la consommation atteint alorsdesniveauxsupérieursde50% à la moyenne annuelle, selon les autorités. « En Algérie, les ménages consomment plus d’électricité que les entreprises, c’est un véritable paradoxe»,expliqueAbderrahmane Mebtoul, ancien directeur d’études au ministère de l’Énergie. Selon le gouvernement, 10000 à 12000 MW supplémentaires seront nécessaires d’ici à 2017 pour faire face à la demande croissante. PME-PMI. Outre la livraison de

matériel, GE va mettre en place, en partenariat avec Sonelgaz, un complexe industriel dans la wilaya de Batna. Il comprendra quatre usines de fabrication de turbines

MANDEL NGAN/AFP

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JEUNE AFRIQUE


Coulisses

Entreprises & marchés

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Retrouvez toute l’actualité économique et financière du continent sur economie.jeuneafrique.com

CACAO CARGILL EST SUR LE POINT DE RACHETER ADM LE NÉGOCIANT AMÉRICAIN de cacao finalise le rachat des activités cacao de son compatriote Archer Daniels Midland (ADM). La transaction, dont le montant pourrait atteindre 2 milliards de dollars (1,5 milliard d’euros), devrait donner naissance au numéro deux mondial du secteur. En reprenant plusieurs usines de transformation d’ADM aux États-Unis, en Côte d’Ivoire, au Ghana et à Singapour, Cargill entend rivaliser avec le groupe suisse Barry Callebaut, premier fournisseur mondial de poudre de cacao et leader du chocolat sur la planète. Cette opération confirme la consolidation croissante de ces filières à l’échelle du globe. À terme, Cargill et Barry Callebaut détiendront plus de 50 % de la capacité mondiale de transformation du cacao. Leur domination pourrait contraindre les autres entreprises du secteur à fusionner. l

S

M

LUC GNAGO/REUTERS

à gaz et à vapeur, d’alternateurs et de systèmes de contrôle. Montant du projet : 200 millions de dollars. Sonelgaz détiendra 51 % du capital et GE 49 %. L’objectif de cette coentreprise est de développer progressivement la production locale d’équipements énergétiques. « Les premières turbines made in Algeria sont attendues pour 2018 », assure Akli Brihi. Mais dans un premier temps le taux d’intégration local sera faible, car ce secteur d’activité nécessite le recours à la haute technologie. « Nous allons d’abord auditer le marché industriel local, identifier et sélectionner les PME-PMI capables d’intégrer le réseau local de soustraitance que nous souhaitons bâtir autour de notre projet industriel, pour que le taux d’intégration nationale soit, à terme, le plus élevé possible », explique Akli Brihi. Près de un millier d’emplois directs et indirects seront créés dans ce but. Par ailleurs, Jeffrey Immelt, PDG de GE, a récemment annoncé la création d’un fonds d’investissement pour aider les PME-PMI locales à se financer.

• FINANCE La BAD injecte 70 M$ dans PTA Bank pour le financement de projets en Afrique de l’Est et en Afrique australe • SANTÉ Le sud-africain Aspen a racheté à son actionnaire britannique GlaxoSmithKline des marques d’antithrombotiques et un site de production en France pour 1 100 M$

S•

TRANSPORT MARITIME La marine mozambicaine a officialisé l’achat de

6 intercepteurs au français Constructions mécaniques de Normandie

VIVIER. Le management de la

future coentreprise sera assuré par des experts expatriés jusqu’à ce que le complexe industriel produise des équipements aux normes internationales. Le relais devrait ensuite être pris par le personnel algérien une fois qu’il sera formé. « Nous souhaitons bâtir des passerelles vers le monde de l’université, de la recherche et de la formation professionnelle pour créer un vivier local de talents aptes à travailler dans notre monde industriel à très haute valeur ajoutée technologique », indique Akli Brihi. Ces annonces – qui surviennent après le retour en Algérie du président Abdelaziz Bouteflika au terme d’une longue convalescence en France et à l’approche de la prochaine présidentielle (prévue pour avril 2014) – visent, assure-t-on, à développer une filière industrielle locale, mais aussi à réduire la facture énergétique. Un vaste chantier. l RYADH BENLAHRECH JEUNE AFRIQUE

SÉNÉGAL LA VOLAILLE IMPORTÉE TOUJOURS INTERDITE Malgré les pressions de l’Organisation mondiale du commerce, le Sénégal, qui avait interdit les importations de volaille en 2005 pour se prémunir contre la grippe aviaire, maintiendra l’interdiction jusqu’en 2020. Cette mesure a permis au secteur avicole de se développer très rapidement, attirant près de 30 millions d’euros d’investissements. La production de poussins est passée de 6 à 20 millions entre 2005 et 2012, celle des œufs de consommation a grimpé de 349 à 584 millions. Le ministre de l’Élevage soutient qu’il faut protéger ce sous-secteur encore fragile.

PÉTROLE VITOL LORGNE L’OFFSHORE GABONAIS La société de négoce basée en Suisse est en discussions exclusives pour acquérir les 66,67 % de Harvest Natural

Resources dans le bloc offshore Dussafu Marin, au Gabon. Une transaction qui s’élèverait à 137 millions de dollars (100 millions d’euros). Vitol, qui détient déjà des participations dans des champs offshore au Nigeria, au Ghana, en Côte d’Ivoire et au Cameroun, renforcerait ainsi sa présence en Afrique de l’Ouest.

AVOCATS L’OFFENSIVE AFRICAINE D’EVERSHEDS Le cabinet britannique a dévoilé les axes de son offensive africaine. Il devrait ouvrir cinq cabinets – en Afrique du Sud, au Ghana, au Kenya, au Maroc et enTunisie. Il va aussi lancer l’Eversheds African Law Institute, une plateforme de partage d’informations et de services juridiques incluant quatorze cabinets. EnTunisie, Eversheds avance dans ses négociations avec Mohamed Raouf El Heni et Fares El Heni, associés du cabinet local CWA. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013


Décideurs INTERVIEW

Mamadou Dia

Directeur général de la Sénégalaise des eaux

EXCLUSIF

« Il faut un diagnostic global pour sécuriser l’alimentation de Dakar » Après plus de deux semaines de pénurie d’eau, la situation revient à la normale dans la capitale. L’heure du bilan pour le patron de la société de distribution.

D

u 12 septembre au 2 octobre, la majeure partie de la capitale sénégalaise a vécu sans eau. Une pénurie inédite, de mémoire de spécialiste. C’est une conduite endommagée dans l’usine de traitement des eaux de Keur Momar Sarr (à 250 km de Dakar, dans la région de Louga) qui a provoqué cette crise, assez préoccupante pour que le président Macky Sall se rende sur place, en treillis militaire, reflétant l’urgence de la situation. La livraison avant le 17 octobre d’une nouvelle pièce, usinée en France par la société Degrémont, devrait permettre de résoudre définitivement le problème. En attendant, c’est une pièce provisoire confectionnée par trois entreprises sénégalaises agréées qui permet d’alimenter Dakar en eau. Ingénieur hydraulicien entré à la Société nationale des eaux du Sénégal en 1977, Mamadou Dia a gravi les échelons pour devenir en 2006 directeur général de la Sénégalaise des eaux (SDE). Membre des comités exécutifs de l’International Water Association et d’AquaFed (l’association internationale des distributeurs d’eau privés), il vient de connaître la crise la plus préoccupante de sa carrière. En exclusivité pour Jeune Afrique, il revient sur cette pénurie historique qui trahit un manque d’anticipation et une communication défaillante dans une capitale plutôt habituée aux délestages électriques. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

ROMAIN LAURENDEAU POUR J.A.

94

p Cet ingénieur spécialiste de l’hydraulique urbaine est à la tête de la SDE depuis 2006.

JEUNE AFRIQUE: Que s’est-il passé exactement le 12 septembre à l’usine de Keur Momar Sarr ? MAMADOU DIA : À la construc-

tion de l’usine, en 2003-2004, une pièce unique en acier a été posée pour supporter les systèmes de protection de la conduite en cas d’arrêt brusque de l’électricité. Cette pièce a connu des avaries de 2009 à 2012, fragilisant la conduite. Une fragilisation qui est devenue critique du fait de surpressions importantes. La SDE a tiré le signal d’alarme, suggérant de remplacer la pièce en cause. Au bout du quatrième incident,

nous avons indiqué à la Sones [Société nationale des eaux du Sénégal] en mars 2013, après une étude approfondie, qu’il y avait lieu de renouveler cette conduite, sans quoi on risquait un arrêt irréversible de la station. Il avait été convenu avec la Sones de procéder à un remplacement en 2014. Malheureusement, la conduite a sauté le 12 septembre, provoquant un arrêt de l’usine de Keur Momar Sarr, qui approvisionne Dakar en eau à hauteur de 130 000 m3/jour. Dans la région, d’autres forages ont un circuit d’alimentation autonome ; c’est pourquoi tous JEUNE AFRIQUE


Décideurs

Ce n’est pas la question centrale. Cette pièce coûte environ 130 millions de F CFA [198 000 euros], ce qui est à la portée du secteur. Il était possible de la réparer, mais les arrêts brusques des pompes entraînés par les fréquentes coupures de courant ont favorisé des ondes de surpression propres à aggraver le phénomène. Il faut aujourd’hui non seulement remplacer la pièce en cause mais, au-delà, procéder à un diagnostic global afin de sécuriser l’alimentation en eau de Dakar. À qui incombait la réparation ? Quel est le lien contractuel entre la SDE, la Sones et l’État ?

Le renouvellement de la pièce incombait à la Sones. Un contrat d’affermage a été conclu pour dix ans en avril 1996 entre l’État (chargé principalementdeladéfinitiondela politique hydraulique, de la gestion des ressources et du système de tarification), la Sones (société de patrimoine chargée des investissements en matière de production et de distribution, avec l’aide de prêts bilatéraux ou multilatéraux à taux concessionnel) et une société privée, la SDE, chargée de l’exploitation. La SDE, qui produit, transporte, stocke, distribue et encaisse, paie une redevance à la Sones et doit en outre renouveler partiellement les réseaux, branchements et compteurs afin d’améliorer le rendement. Le contrat a été reconduit par l’État en 2011 pour un an, puis pour une année de plus. L’idée, aujourd’hui, est d’aller vers un affermage avec plus de responsabilités pour l’opérateur sur les investissements de renouvellement. Respectiez-vous vos engagements en matière d’entretien du réseau? JEUNE AFRIQUE

Votre actionnaire majoritaire, le fonds d’investissement ECP, est-il suffisamment qualifié dans votre cœur de métier pour faire face à ces enjeux ?

N’oubliezpasqueleservicepublic de l’eau est assuré par des cadres émérites sénégalais. Notre entreprise ne compte aucun expatrié, et nos performances sont saluées partout dans le monde. C’est dû au fait que notre partenaire stratégique permet de créer un environnement susceptible de faire éclore les talents d’un personnel sénégalais très qualifié. L’actionnaire majoritaire de la SDE est Finagestion, filiale à 60 % d’ECP et à 20 % de Bouygues. Nous sommes la première société d’eau du continent certifiée QSE [qualité, sécurité, environnement]. En outre, nous bénéficions d’un appui technique, avec Suez Environnement. Aujourd’hui,noustravaillonsavecla Sones sur des solutions alternatives, comme l’installation d’une usine de dessalement d’eau pour desservir Dakar à l’échéance 2016.

YIM CHIU KWAN MWANA AFRICA Cet expert-comptable de plus de trente ans d’expérience vient d’être nommé administrateur chargé de la finance du groupe minier panafricain (or, nickel, cuivre, et diamant). Il était jusque-là directeur financier et administrateur du canadien MBMI Resources.

BARCLAYS

Ne pouvait-on pas aller plus vite ? Était-ce une question de financement ?

Nous sommes tenus de renouveler tous les ans 17 km de réseau, 6000branchementset16000compteurs. Cela représente un coût total de 1,8 milliard de F CFA. Par ailleurs, en tant qu’exploitant, nous avons la charge de la maintenance des ouvrages, de l’entretien des réseaux ou encore des installations électromécaniques, soit 2,3 milliards de F CFA – 70% du bénéfice 2012. Tous les trois mois, la Sones réalise un audit pour s’assurer du respect de ce cahier des charges.

WENDY LUCAS-BULL BARCLAYS La présidente de la filiale africaine du groupe britannique rejoint le conseil d’administration de la maison mère en tant qu’administratrice non exécutive. Elle avait déjà occupé de hautes fonctions dans les groupes sud-africains Rand Merchant Bank et FirstRand.

Quel est le coût de cette crise ?

Il est trop tôt pour le dire. Une évaluation précise sera faite par la SDE. Il y a eu un préjudice économique, mais surtout moral vis-àvis des usagers. Le président de la République a annoncé que nos clients à Dakar seraient exonérés de l’équivalent d’une facture de un mois. À nous de traduire cette décision en actes. Nous y travaillons. l Propos recueillis à Dakar par MEHDI BA

CDG CAPITAL

les quartiers de la capitale n’ont pas été affectés de la même façon par la panne.

MWANA AFRICA

ON EN PARLE

OUAFAE MRIOUAH CDG CAPITAL Jusqu’ici directrice déléguée chargée du pôle support, elle est promue directrice générale adjointe et membre du comité exécutif de la banque d’affaires marocaine. Elle gérera le pôle Investment-Management. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

95


Finance t La compagnie a ouvert plus de 30 agences dans une douzaine de wilayas.

AXA

[distribution de produits d’assurance via les réseaux bancaires]. » Pour l’instant, Axa Algérie a su convaincre 44 000 clients pour des produits voyage, 14000 dans l’automobile, et compte 25 000 assurés dans le cadre de contrats collectifs de prévoyance et de santé. D’après Mecellem, le marché est demandeur de meilleures protections pour les professionnels, de solutions collectives de santé et de prévoyance améliorées et d’une refonte de la qualité de service pour les particuliers. La stratégie est donc de jouer sur tous les tableaux : ALGÉRIE « Nous voulons nous affirmer comme un assureur généraliste », indique le natif d’Alger, qui fait le pari de l’innovation. La filiale a par exemplelancéenjuinsonservicede Arrivé il y a moins de deux ans sur le marché, le groupe français y est déjà réparation à domicile, qui prend en bien implanté. Privilégiant une stratégie généraliste, il mise sur la qualité charge les problèmes de plomberie, d’électricité, de vitrerie et de serrude service et l’innovation. rerie, afin d’enrichir son assurance n décembre 2011, Axa national des assurances (CNA, le habitation. « Nous voulons devenir l’assureur préféré des Algériens, le faisait ses premiers pas régulateur), au premier trimestre leader dans la qualité de service », en Algérie. Moins de deux de cette année, le chiffre d’affaires avance le directeur général. Il met ans plus tard, la filiale de du secteur a progressé de 23 % notamment en avant les délais de l’assureur français y a les deux pieds par rapport à la même période en remboursement très courts : « Le bien ancrés. En 2012, elle a réalisé 2012, pour atteindre 30,7 milliards Vers une jour même en cas de dommage un chiffre d’affaires de 6,34 millions de dinars (près de 300 millions explosion pour les assurés automobile. » d’euros. Un montant qui, selon d’euros). du chiffre Si les débuts d’Axa Adelane Mecellem, le directeur d’affaires en Algérie semblent général, devrait presque tripler AUTOMOBILE. Un marché dyna2013 (prév.) cette année pour atteindre 18 milmique,donc,maistoujoursdominé tonitruants, rien n’était acquis d’avance. Le lions d’euros. Le groupe a déployé par les acteurs publics, qui en plus de 30 agences dans une doudétiennent 75 %. Autre caractégroupe est le deuxième zaine de wilayas (départements) ; ristique: le poids des contrats automillions d’euros français (après Macif ) il compte atteindre 48 agences fin mobiles (49 %). « La pénétration à pouvoir s’instal2013 et 76 d’ici à fin 2014. De quoi des assurances de personnes est ler dans le pays. La rendre Adelane Mecellem crétrès faible ; elles ne représentent loi imposant que des Algériens dible lorsqu’il explique souhaiter que 9 % du marché, contre plus soient majoritaires dans tous « construire une présence de long de 50 % dans cerles projets d’investissements terme » dans le pays. tains pays », explique impliquant des étrangers, il a dû 2012 Axa mise beaucoup sur l’AlgéAdelane Mecellem. s’associer à des acteurs locaux rie. « Nous la considérons comme Son objectif est simple: – dans son cas, deux entreprises un marché émergent à très fort devenir l’un des tout publiques : la Banque extérieure potentiel, notamment parce que le premiers acteurs en millions d’euros d’Algérie (15 % du capital), qui taux de pénétration de l’assurance Algérie. « À l’horizon gère la partie bancassurance, et le y est de seulement 0,8 % du PIB, Fonds national d’investissements 2015-2016, nous vou(36 %). L’assureur français est donc contre 2,9 % au Maroc par exemple, lons atteindre 5 % à 6 % de parts actionnaire minoritaire de la filiale explique le directeur général. C’est de marché sur la branche domle marché le moins développé de la mage, être le leader des assurances (49 %), mais il en assure la gestion région, malgré une forte croissance de personnes avec 20 % et faire et le management. l économique. » Selon le Conseil partie du top 3 en bancassurance BRICE TAHOUK

Comment Axa s’est imposé

E

18

SOURCE : AXA ALGÉRIE

96

6,34

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JEUNE AFRIQUE


Lire l’interview de Marc Kamgaing sur

economie.jeuneafrique.com

Baromètre

Finance

ÉNERGIE

GESTION D’ACTIFS

RMA se lance aussi L’assureur marocain tente l’aventure africaine.

P

our la grande famille FinanceCom, le groupe d’Othman Benjelloun, l’aventure africaine est une réalité. Outre le navire amiral BMCEBank,actionnairedecontrôle de Bank of Africa, et sa banque d’affaires BMCE Capital, qui a fondé il y a quelques mois BOA Capital, RMA Watanya est également dans les starting-blocks. Si l’assureur envisage des implantations en dehors du Maroc, RMA Capital, sa filiale consacrée à la gestion d’actifs, (5 milliards de dollars d’encours, soit 3,7 milliards d’euros), s’est déjà lancée. Elle commercialise Fcom Africa, géré depuis Casablanca par le Camerounais Marc Kamgaing et six analystes. Déjà doté de 30 millions de dollars apportés par le groupe, ce fonds de droit français investira dans des sociétés cotées sur les places africaines les plus liquides (de l’Afrique du Sud au Maroc), ainsi que dans des multinationales très actives sur le continent. « Nous travaillons sur l’Afrique depuis trois ans, souligne Imane Bennani, directrice Business Development de RMA Capital. Sur 60 personnes, nous comptons seize experts du domaine. »

Samir en perte de vitesse LES RÉSULTATS semestriels du premier raffineur et distributeur marocain de produits pétroliers (carburants, gaz) illustrent parfaitement ses difficultés : son chiffre d’affaires a reculé de 18 %, et sa production n’a atteint que 3,1 millions de tonnes (– 13 %). Fin 2012, la situation financière de Samir était déjà préoccupante, avec un taux d’endettement net de 401 %. À la Bourse de Casablanca, rien ne va non plus : l’action a perdu plus de 25 % depuis le début de l’année et il lui sera très difficile de rebondir dans les mois à venir. Les raisons : d’abord, la conjoncture économique morose qui prévaut au

Tarik Aoun Analyste chez AlphaMena

Nous avons d’ailleurs revu les prévisions de chiffre d’affaires à la baisse pour la fin de l’année et pour 2014. Aujourd’hui, le principal défi du groupe réside dans la reconquête de parts de marché. La création récente d’une filiale de distribution et la modernisation de sa raffinerie vont dans le bon sens, mais la concurrence reste ardue. » l

Cours du titre à la Bourse de Casablanca (en dirhams) 400

347

STRATÉGIE. La société de gestion,

qui intervient sur plusieurs classes d’actifs, avait déjà fait un pas hors du Maroc avec Arif, le fonds dévolu aux infrastructures, doté depuis trois ans d’une centaine de millions d’euros – apportés notamment par la Banque africaine de développementouencorelaSociétéfinancière internationale (Banque mondiale). La division private equity, RMA Alternative Investments, œuvre également à la mise en place d’une stratégie continentale. Mais ce n’est encore qu’un projet. l

Maroc et qui pèse sur la demande de produits pétroliers, alors que le pays représente 85 % des ventes du groupe. Ensuite, Samir, qui n’est plus en position hégémonique sur le marché local, subit la concurrence frontale des produits importés par son rival Akwa Group. Enfin, la levée progressive des subventions sur les carburants décidée en septembre par le gouvernement ne va pas encourager la consommation des Marocains. Autant d’éléments qui font perdre des parts de marché au groupe et affectent le taux d’utilisation de ses capacités de production. Celui-ci doit être d’au moins 80 % pour que Samir dégage des marges positives. Or, actuellement, il se situe autour des 60 %.

2.1.2013

251,9 2.10.2013

300

200

235

17.9.2013

100

0 1er janv. 2013

Févr.

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Oct.

FRÉDÉRIC MAURY JEUNE AFRIQUE

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Dossier

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Automobile

STRATÉGIE

FADEL SENNA/AFP

Le Maghreb, roue de pour les Français?

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JEUNE AFRIQUE


INTERVIEW

Emmanuel Bia Directeur général d’Africatrucks

ZOOM

Casa met de l’huile dans les moteurs

secours

CONSTRUCTEUR

Tata pas à pas

PANORAMA

De Francfort à l’Afrique…

Confrontés à la baisse drastique de leurs ventes en Europe, PSA et Renault ont trouvé un relais de croissance vital en Afrique du Nord. Mais dans cette région, perçue comme un accès au reste du continent, la concurrence devient rude.

CHRISTOPHE LE BEC

L

es tempssontdurspourRenaultetPSA. En cause: le marché européen en plein marasme. Alors que les volumes de ventes sur le Vieux Continent étaient déjà inférieurs de 20 % à ceux de 2009, le marché européen a encore baissé de 6,2 % au premier semestre de 2013. Or l’Europe représente encore 50,5 % des 1 300 000 véhicules vendus pendant les six premiers mois de l’année 2013 par le groupe Renault, et 59 % des 1 461 000 unités Peugeot et Citroën écoulées par son frère ennemi PSA durant la même période. Pourtant, sur l’autre rive de la Méditerranée, il est un endroit où les constructeurs français prospèrent: le Maghreb, avec quelque 741500 véhicules vendus en 2012, dont 560 000 dans la seule Algérie, 132 000 au Maroc et 49 500 en Tunisie. Dans ces trois pays, qui rattrapent leurs faibles taux d’équipement, les performances commerciales des marques françaises apportent une belle consolation aux troupes de Philippe Varin, le patron de PSA, et de Carlos Ghosn, le PDG de Renault : 17,8 % du marché est détenu par PSA et 16 % par Renault. IMPASSE. Selon Yann Lacroix, analyste du secteur

automobile chez Euler Hermes, cette présence au Maghreb est cruciale pour les Français : « Moins internationalisés que leurs concurrents allemands, ils ne peuvent pas laisser passer l’occasion d’accaparer un marché émergent attractif. Ils ont déjà manqué plusieurs opportunités ailleurs : PSA a été actif en Chine dans les années 1990 et 2000, mais il y est moins fort aujourd’hui. Renault, lui, a fait l’impasse sur l’empire du Milieu. En Russie, les deux constructeurs occupent des positions intéressantes, mais ce marché est très instable. Et, rappelle-t-il, aucun des deux groupes n’est l l l t Terminal d’expédition des véhicules Renault, tout juste sortis d’usine, dans le port de Tanger Med. JEUNE AFRIQUE

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Dossier Automobile

GILLES ROLLE/REA

100

NOTORIÉTÉ. Grâce à cette stratégie, la marque

p Chaîne d’assemblage Dacia de la Logan, à Casablanca.

Renault conserve au Maroc, depuis 2002, environ 16 % du marché automobile. Mais, surtout, depuis l’introduction des véhicules économiques de Dacia en 2005, le groupe au losange est devenu le poids lourd du secteur avec une part de 39,2 % au premier semestre de 2013. La nouvelle marque à bas coût a vu ses ventes décoller en flèche, et Voitures vendues s’est placée en première position dans le royaume en 2012 chérifien grâce aux modèles Logan et Sandero, et (Évolution entre 2005 et 2012) au 4x4 Duster. « Nous sommes satisfaits de nos résultats en 2013 », se félicite Jean-Christophe 4,6 Kugler, évoquant une « performance historique millions au Maroc », avec 42 % des ventes réalisées par ses deux marques en juin. En Algérie, le groupe Renault – 33 % est leader depuis quatre années consécutives. Et + 136 % il ne compte pas s’arrêter en si bon chemin, alors 0,6 million que ses deux marques revendiquent déjà 26,5 % En Europe Au Maghreb des ventes. En Tunisie, les résultats sont moins (Espagne, (Tunisie, reluisants à cause de l’introduction tardive de Italie, Maroc, Dacia et des quotas. Mais la marque au losange France) Algérie) s’est déjà rattrapée en 2013 avec 22 % de part de marché. « Le lancement de Dacia était parfaitement en phase avec les attentes d’un segment de USINES « RENAULT ORAN DÉMARRERA la population qui achetait auparavant des voitures DANS LES TEMPS » d’occasion. Nous sommes parvenus à l’imposer en À LA DIFFÉRENCE DE PSA, qui l’appuyant sur la forte notoriété de Renault dans production de l’usine de Tanger ce pays, et en la différenciant nettement grâce confirme « n’avoir aucun projet Med, commencée en mars, vient à un design bien à elle. Au final, il n’y a pas eu industriel au Maghreb », Renault de dépasser le cap des de cannibalisation d’une marque par une autre, avance ses projets de production 100000 modèles Lodgy la stabilité de la part de marché de Renault en dans la région. « Il est essentiel (monospace low cost) témoigne », estime-t-il. de fabriquer des véhicules commercialisés. L’objectif de Côté PSA, même satisfecit, bien que le construcauprès des clients, notamment 170000 voitures la première teur, en se concentrant sur des véhicules à plus en Algérie, premier marché de la année ne devrait donc pas être forte marge, ait souffert au Maroc de la montée en zone », affirme Jean-Christophe atteint. « Mais nous lançons dès puissance de Dacia et du délai de renouvellement Kugler, directeur des opérations octobre la seconde chaîne de de sa gamme: « Nous avons réussi une belle année de la région Euromed-Afrique de production pour un deuxième 2012 en raison de la croissance impressionnante Renault, qui se montre confiant véhicule », précise Kugler, selon du marché algérien [75 % en un an]. Dans ce sur la tenue des délais. « L’usine qui « l’usine est au rendez-vous contexte, avec des volumes stables au premier d’Oran, annonce-t-il, gérée avec de la qualité ». À Casablanca, semestre, 2013 s’annonce sous de bons auspices », l’Entreprise nationale des l’usine historique de Renault se réjouit David Rio, de PSA, qui détenait en 2012 véhicules industriels [SNVI], assemble toujours des Sandero près de 18 % de part de marché au Maghreb, dont débutera ses activités fin 2014 et des Logan (46500 en 2012). l C.L.B. 14,1 % pour Peugeot et 3,6 % pour Citroën. « Le comme prévu. » Au Maroc, la

présent aux États-Unis. Le Maghreb est une zone que les Français connaissent bien et où ils bénéficient d’une bonne notoriété, historiquement. Il est logique qu’ils cherchent à tout prix à y rester, au même titre qu’en Amérique du Sud, où ils réalisent aussi de bonnes performances. » Derrière l’enjeu maghrébin se cache également un appétit pour le marché subsaharien chez PSA et Renault. « C’est une porte qui mène plus au sud, en particulier sur les marchés francophones, où nous jouissons toujours d’une notoriété appréciable, même si elle a beaucoup baissé », reconnaît David Rio, responsable de la zone Maghreb-Turquie du groupe PSA. Chez Renault, cette idée s’est traduite au niveau organisationnel avec le regroupement début 2013 de toute l’Afrique au sein de la même direction régionale, alors qu’auparavant le nord et le sud du continent avaient des manageurs différents. lll

Pour réussir au Maghreb, les groupes ont investi dans leurs produits – ils distribuent là-bas la quasitotalité de leur gamme – et dans leurs réseaux. Tous deux évoquent les mêmes recettes commerciales, à quelques variations près. « Nous avons demandé à notre ingénierie moteur de développer des motorisations spécifiques pour chaque pays de la zone en raison des qualités disparates des carburants. Et nous avons optimisé nos kits antipoussière », indique Jean-Christophe Kugler, directeur des opérations de la région EuromedAfrique de Renault. Chez Peugeot, David Rio apporte la même attention aux motorisations et aux « suspensions adaptées à des conditions de roulage très variables », explique-t-il.

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JEUNE AFRIQUE


Le Maghreb, roue de secours pour les Français ? Marasme au nord, succès au sud

FRANCE

Tunisie. Et nous voulons irriguer encore mieux les territoires. Nous étudions toutes les propositions de partenaires : il doit être possible de trouver des pièces détachées et un service après-vente optimal dans toutes les zones urbaines », affirme-t-il. Les deux usines de Renault, à Tanger et à Casablanca, et l’annonce de son projet industriel à Oran (lire l’encadré) permettent aussi de renforcer l’attachement des Maghrébins à la marque, tout en optimisant les coûts logistiques. Chez PSA, l’heure est à l’amélioration de la qualité du service dans le réseau Peugeot, et à l’offensive pour la marque Citroën : « Elle a un potentiel de progression important en Algérie, où elle était quasiment absente il y a trois ans. Elle garde une excellente notoriété grâce aux liens avec la France et au marché de l’occasion », explique le responsable régional. La marque aux deux chevrons compte sur l’agressivité commerciale du français GBH, son distributeur choisi il y a trois ans, qui a déjà implanté quinze points de vente en Algérie.

24,2 %

27,2 %

32 %

ITALIE

30,7 %

2005

6,6 %

6,3 %

2012 10,3 %

9,8 % ESPAGNE 2005

10,7 %

12,4 %

20,6 %

17,2 %

2005

2012

TUNISIE 17,6 %

2012

15,7 %

TEMPS RÉVOLU. Si enthousiastes soient-ils sur 2010

MAROC

25,4 % 36,6 % ALGÉRIE 25,8 %

13,6 % 14,8 %

2005

2007

26,2 %

2012 14,4 %

SOURCE : CONSTRUCTEURS

22,7 %

17,4 %

2005

leurs perspectives de croissance au Maghreb, PSA et Renault savent toutefois que le temps où leur 25,8 % domination allait de soi est révolu. « La concurrence s’est intensifiée ces dernières années, en particulier en Algérie, compte tenu de la taille de 2012 ce marché, qui pourrait devenir un jour le premier du continent », observe l’analyste Yann Lacroix. Parts de marché « Tous nos concurrents sont au Maghreb, la compétition est devenue rude, en particulier avec les Renault européens Seat, Opel et Volkswagen, les coréens Hyundai et Kia, mais aussi l’américain Chevrolet », détaille David Rio. Pour résister, Jean-Christophe PSA Kugler compte sur le segment des véhicules utilitaires : « Ce marché va augmenter, poussé par la croissance économique. Le volume des ventes de pick-up restera stable, et celui des véhicules de transport fermés, fourgonnettes et fourgons comme nos Kangoo, Trafic et Master se développera grandement », prévoit-il. L’argument vaut aussi pour Peugeot, déjà bien situé sur ce Dans la région, les deux créneau avec ses fourconstructeurs emploient les gons Boxer, appréciés mêmes recettes commerciales. au Maghreb. Mais, là encore, la concurrence, en particulier Opel et Fiat, bien positionnés dans le domaine des véhicules utilitaires, devrait emboîter le pas aux Français. l 2012

2012

segment B [les citadines polyvalentes, sur lequel PSA est bien placé] est très porteur au Maghreb. La Peugeot 207 a été la voiture la mieux vendue de l’année dans la zone, et la Peugeot 301 et la Citroën C-Élysée, attendues en 2014, prendront le relais avec une légère montée en gamme », annonce-t-il. Le constructeur compte d’ailleurs beaucoup sur la 301 (lire p. 108), avec son prix attractif, au Maghreb et au sud du Sahara. Pour continuer sur cette lancée, Renault avance ses pions et étoffe son réseau : « Nous avons déjà 71 points de vente au Maroc, 64 en Algérie et 26 en

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101


Dossier Automobile INTERVIEW

Emmanuel Bia

Directeur général d’Africatrucks

« Nous visons la place de numéro un » Partenaires au sein d’une coentreprise, les belges Bia et Alcopa entendent bousculer le marché des poids lourds dans les pays francophones en devenant les distributeurs exclusifs du chinois Foton.

NABIL ZORKOT

102

C

onnu comme l’un des principaux distributeurs d’engins destinés aux travaux publics et aux mines, Bia a fondé Africatrucks en 2012, avec Alcopa. La filiale est spécialisée dans la distribution de petits camions, de poids lourds et de remorques sur le continent. Dansunsecteurdominéparlesvéhicules d’occasion, les deux groupes belges (respectivement 238 millions et 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires) ont misé sur le premier constructeur mondial : le chinois Foton. Emmanuel Bia décrypte pour Jeune Afrique les spécificités des marchés du continent et affiche ses ambitions. JEUNE AFRIQUE : Qu’est-ce qui a poussé le groupe Bia à fonder N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

p Emmanuel Bia dans la succursale d’Africatrucks à Abidjan, en septembre.

la société Africatrucks, spécialisée dans la distribution de camions ? EMMANUEL BIA : Nous avions

déjà fait une expérience dans ce secteur dans les années 1980-1990 au Congo, mais ce n’était pas une priorité. Aujourd’hui, notre groupe souhaite se diversifier afin de poursuivre son développement. Le marché des poids lourds offre de bonnes opportunités, même s’il y a déjà des acteurs sur ce créneau. Quand les activités de votre nouvelle filiale ont-elles été lancées ?

Nous avons débuté en octobre 2012 en Côte d’Ivoire et, six mois plus tard, au Cameroun. Depuis Abidjan, nous gérons également les marchés du Burkina Faso et du Mali. Quant à notre succursale de Douala, elle supervise aussi

le Tchad. Au total, nous employons une quarantaine de personnes. Par ailleurs, nous envisageons d’ores et déjà d’étendre nos activités à d’autres marchés francophones, comme la RD Congo. Quels sont vos objectifs ?

Nous visons la place de numéro un partout où nous sommes présents. C’est déjà le cas en Côte d’Ivoire, sur le segment des petits camions avec une charge utile de 3,5 t, où nous réalisons 30 % des ventes. Pour le moment, nous avons vendu une centaine de véhicules en Afrique, mais ce n’est qu’un début. Vous distribuez la marque Foton. Pourquoi avoir opté pour un constructeur chinois ? lll JEUNE AFRIQUE



Dossier Automobile Le marché des véhicules neufs est dominé par les constructeurs chinois, car ils sont 30 % à 50 % moins chers que leurs homologues européens. Il n’y a que dans des secteurs très particuliers, telle l’industrie du bois, que des marques comme Renault ou Mercedes dominent toujours. Mais il s’agit d’une niche, les acheteurs y disposent de moyens considérables et préfèrent travailler avec des constructeurs qu’ils connaissent bien. Par ailleurs, nos camions correspondent parfaitement aux besoins des clients africains. Leurs moteurs répondent aux normes antipollution Euro 2. Peu sensibles à la qualité du fioul, ils sont faciles à entretenir car ils embarquent peu d’électronique, contrairement aux modèles vendus en Europe à présent. D’ailleurs, l’évolution des normes commence à limiter le nombre de véhicules exportables en Afrique, même si le marché de l’occasion représente encore plus de la moitié des camions vendus. lll

Origines des camions importés en Afrique en 2009

Reste que les véhicules chinois n’ont pas toujours une excellente réputation en matière de qualité…

Ce qui est encore vrai, parfois, des voitures ne l’est pas des camions. Le marché chinois est le plus important au monde. Notre partenaire a tout de même produit plus de 680 000 camions en 2011, contre environ 35 000 pour Renault. Par ailleurs, nos véhicules sortiront tous de l’usine que Foton a montée avec le constructeur allemand Daimler, reconnu pour son savoir-faire. Vous dites avoir négocié l’exclusivité dans cinq pays, pourtant certains concurrents continuent de distribuer les camions Foton dans votre votre zone…

Effectivement, nous avons l’exclusivité, mais les groupes chinois ne sont pas encore matures par rapport à ce type de clauses. Nous faisons le forcing auprès de l’usine pour faire respecter notre contrat. Pour le moment, cela ne pose pas vraiment de problème, car nous nous différencions par la qualité de notre service après-vente. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

SOURCE : DOUANES

104

Quel est le délai pour obtenir des pièces de rechange ?

Grâce à notre équipe basée en Chine, nous sommes capables de faire venir certains éléments en vingt-quatre heures. En outre, nous disposons de stocks de pièces dans nos succursales, ainsi que sur le port d’Anvers. Nous consacrons énormément de temps à l’optimisation de notre approvisionnement. Auparavant, il pouvait être difficile de trouver des pièces de rechange pour les véhicules chinois, mais la situation évolue. Dans ce domaine, nos compétences sont reconnues, et des marques concurrentes nous sollicitentpouracheminercertaines commandes. Foton a ouvert une usine de camions au Kenya en 2012. Savezvous si le constructeur a des projets similaires en Afrique de l’Ouest?

À ma connaissance, ce n’est pas prévu pour le moment. Pour créer Africatrucks, vous vous êtes associé à un autre groupe belge, Alcopa. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre partenaire?

C’est un distributeur de voitures, de pick-up et de camions qui vend environ 90 000 véhicules par an, notamment en Belgique. Il contribue au projet par ses compétences logistiques. Dans cette aventure, il a vuuneoccasiondevenirenAfrique, un continent qu’il connaît mal bien qu’ildétienneuneparticipationdans la filiale Suzuki en Afrique du Sud. Sa présence à vos côtés signifiet-elle que vous allez vous lancer dans la distribution de voitures ?

Pas à court terme. l Propos recueillis par JULIEN CLÉMENÇOT JEUNE AFRIQUE


TRACTAFRIC MOTORS Corporation

Tractafric Motors Corporation

Leader de la distribution automobile en Afrique centrale et de l’Ouest

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Leader de la distribution automobile en Afrique centrale et de l’Ouest, Tractafric Motors s’associe aux plus grands constructeurs pour offrir aux marchés africains le meilleur de la technologie automobile: Mercedes-Benz, Ford, Hyundai, Renault-Nissan, Volkswagen… Voitures, utilitaires, camions, bus, pièces, accessoires…: Tractafric Motors offre aux professionnels et particuliers une large gamme de produits assortie d’un service complet (SAV, réparation, tropicalisation...). Notre savoir-faire technique nous permet de répondre à tous les besoins, y compris les plus spécifiques, avec notamment une expertise dans les grandes flottes et dans les véhicules à équipements spéciaux : citernes, grues, grumiers, semi-remorques… Plus d’informations sur nos produits, services et implantations sur www.tractafrictmc.com | info@tractafrictmc.com

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Dossier Automobile

Casa met de l’huile dans les moteurs ZOOM

Shell and Vivo Lubricants et Vivo Energy veulent faire de la capitale économique marocaine leur principal centre de production de lubrifiants.

P

our le moment, l’usine d’huiles de moteur Shell, dans le quartier Roches-Noires de Casablanca, n’a pas changé. C’est là, près du centre-ville et à 500 m de la côte, que le groupe anglo-néerlandais fabrique, depuis 1963, une bonne partie de ses lubrifiants pour l’Afrique du Nord et l’Afrique de l’Ouest. Jadis situées en périphérie, ces installations sont rattrapées par l’urbanisation de la capitale économique marocaine: les énormes cuves d’huile et la chaîne d’embouteillage sont désormais entourées d’immeubles. Mais le lieu reste stratégique, en raison de sa proximité avec le port de commerce et avec son principal fournisseur, la Société anonyme marocaine de l’industrie du raffinage (Samir). Pour l’heure, les 200 techniciens et ouvriers de l’usine règlent le dosage d’une huile de moteur destinée au Ghana dont la composition a été élaborée par la direction recherche et développement londonienne de Shell. « En fait, 60 % de l’huile utilisée proviennent de la raffinerie de la Samir et les emballages de l’usine de plastique d’Afriqiyah. Mais ce qui compte dans la qualité de nos produits, ce sont les adjuvants – zinc et phosphore notamment – qui renforcent la lubrification et épargnent les moteurs », précise leTunisien Mohamed Ben Himad, directeur du complexe.

SVL a choisi de renforcer sa production en priorité, considérant le Maroc comme un hub logistique idéal pour l’Afrique francophone. « Nous avons lancé un programme d’investissement de 8 millions de dollars [5,9 millions d’euros] pour porter la production, en deux ans, de 27000 tonnes actuellement à 90000 tonnes, avec l’explosion prochaine des flux vers le reste du continent. Et ce en partenariat avec les logisticiens DHL, Panalpina et Agility. Au total, 90 % de la production passeront par le port de Casablanca, et les 10 % restants par Tanger Med », indique l’Indien Parminder Kohli, le directeur général de SVL. À terme, 100 millions de dollars de recettes MOHAMED SMYEJ POUR J.A.

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En dix-huit mois de travaux (débutés en août), Le groupe adaptera ses produits cette installation va chanau continent, car son marché a ger de dimension. Shell une structure bien particulière. and Vivo Lubricants (SVL) – une coentreprise entre la firme pétrolière, actionnaire à 50 %, par an sont attendues et, surtout, des le capital-investisseur panafricain Helios économies d’échelle importantes seront et le négociant suisse Vitol, chacun déteréalisées. Par ailleurs, afin de desservir nant 25 % du capital – a repris l’usine l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe, le en 2011. SVL détient la licence exclusive site kényan de Mombasa sera agrandi, pour la production de lubrifiants Shell en pour un coût de 4 millions de dollars, Afrique. Sur le continent, elle possède afin de doubler sa production. cinq autres installations industrielles (à 100 % au Kenya et en coentreprise Les ambitions de SVL en Afrique sont en Guinée, au Sénégal, au Ghana et en grandes, comme celles de son distribuTunisie), mais c’est à Casablanca que teur exclusif, Vivo Energy. Cette autre N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

p La production, de 27 000 tonnes par an actuellement, passera à 90 000 tonnes dans deux ans.

coentreprise, détenue par Helios et Vitol (40 % chacun) et par Shell (20 %), a repris les stations-service de la célèbre marque au coquillage dans quinze pays du continent. « Alors qu’ailleurs dans le monde, le marché des lubrifiants ne croît que de 1 % par an, il augmente de 3,5 % en Afrique. La marque Shell en est le leader mondial, mais avec seulement 13 % des ventes, car le secteur est très concurrentiel. Elle est suivie de près par ExxonMobil, British Petroleum,Total et Sinopec, mais ces trois derniers sont moins présents en Afrique », précise le Français Denis Urtizberea, viceprésident chargé des ventes chez Vivo Energy, qui y voit une opportunité. En cinq ans, Vivo Energy compte prendre autour de 45 % du marché – estimé à 1,2 milliard de dollars – des pays où il détient la licence de vente des produits Shell. Pour réussir sa percée, le groupe adaptera ses produits au marché africain, à la structure bien particulière: « Il y a moins de véhicules légers en raison du relativement faible taux d’équipement, plus de camions, car les réseaux ferroviaires sont peu développés, plus de groupes miniers, JEUNE AFRIQUE


Le Maghreb, roue de secours pour les Français ?

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CONSTRUCTEUR

Tata pas à pas Même si son expansion y reste prudente, le numéro un indien a fait du continent une priorité.

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JEUNE AFRIQUE

ALLIANCES. Pour progresser sur

les principaux marchés africains, le constructeur, leader en Inde avec 8 millions de véhicules (bus, camions, voitures...) en circulation, recherche des alliances. Au

premiertrimestre,sesdirigeantsont annoncé avoir noué des contacts au Kenya et en Tunisie. L’objectif affiché est d’y construire des usines d’assemblage comme celle inaugurée il y a deux ans à Pretoria. Chaque fois, un investissement compris entre 5 et 10 millions de dollars (entre 3,7 et 7,4 millions d’euros), ce qui est modeste en comparaison des 32 milliards de dollars de chiffre d’affaires de Tata Motors en 2012. Nous sommes plus lents que les groupes chinois mais nous nous projetons sur le long terme, répondent en substance les dirigeants de l’entreprise. En juillet, la presse ivoirienne a également indiqué que le groupe voulait ouvrir une chaîne de montage d’autobus à Abidjan l’an prochain. Par ailleurs, Tata vise le créneau des automobiles haut de gamme avec ses marques Jaguar et Land Rover. En mai, la filiale distribuant les deux constructeurs a complété son réseau en ouvrant une succursale en Tanzanie, mais c’est au Nigeria qu’elle enregistre ses meilleurs résultats depuis cinq ans. l JULIEN CLÉMENÇOT

DR

et un nombre croissant d’entreprises produisant de l’électricité », indique Denis Urtizberea. « Sur le continent, nous vendons l’ensemble des produits de la marque, fabriqués à 90 % dans nos usines africaines, à une clientèle très hétérogène. Mais nous visons en priorité les segments les plus “haut de gamme”. Nous cherchons ainsi à fidéliser les groupes miniers, dont les engins nécessitent de grandes quantités de produits de haute technicité, les usines électriques, ainsi que les entreprises qui gèrent des flottes importantes de véhicules neufs », complète Parminder Kohli. SVL va jusqu’à envoyer des consultants auprès des groupes miniers comme Kinross ou Newmont. Autre stratégie, la formation gratuite des mécaniciens à l’utilisation des lubrifiants automobiles: « Au Maroc, nous avons touché environ 80 % de ces professionnels », affirme Parminder Kohli, pour qui le royaume est le premier marché nord-africain en termes de taille. Deux ans après leur création pour prendre la suite de Shell, Vivo Energy et SVL comptent aborder ensemble de nouveaux marchés : « Nous sommes attirés par le Nigeria, qui représente 300 000 tonnes de lubrifiants par an. Mais c’est un pays difficile sur le plan logistique. LaTanzanie et l’Éthiopie sont également prometteuses », indique Kohli. Mais c’est surtout l’Algérie qui attise les convoitises : « Elle équivaut à deux fois le marché marocain, mais il est très délicat d’y pénétrer. Les opérateurs locaux, en particulier Sonatrach avec ses huiles de base, y dominent », ajoute le directeur CHRISTOPHE LE BEC général de SVL. l

in septembre, Tata Motors lançait son nouveau pickup,leXenonXT,enAfrique du Sud. Avec ce véhicule abordable au look soigné vendu entre 189995 et 269995 rands (entre 13 910 et 19 770 euros), la branche automobile du géant indien entend offrir une alternative aux utilisateurs séduits par l’accessibilité des modèles chinois. Premier marché automobile du continent, l’Afrique du Sud est un objectif prioritaire pour l’entreprise – 70 000 Tata y circulent déjà –, qui est aussi présente directement via des succursales au Lesotho, au Zimbabwe et en Namibie. Une stratégie que le groupe Tata applique à toutes ses divisions (télécoms, chimie, énergie, automobile…) avec la volonté de faire bondir son chiffre d’affaires africain – 3,2 % de ses revenus globaux – de 30 % par an.

p Le Xenon XT est vendu entre 13 910 et 19 770 euros. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013


Dossier Automobile PANORAMA

De Francfort à l’Afrique…

Lors du salon allemand, les constructeurs ont révélé leurs derniers-nés. J.A. a sélectionné cinq modèles qui sillonneront les routes du continent.

PEUGEOT 301 LOW-COST ÉLÉGANTE

BRICE TAHOUK

RANGE ROVER HYBRID ÉCOLO (PRESQUE) COMPATIBLE omme ses concurrents, le roi des sport utility vehicles (SUV) premium a droit à sa version hybride. Celle-ci associe le V6 3.0 diesel à un moteur électrique. La puissance cumulée et les performances (340 chevaux, de 0 à 100 km/h en moins de 7 secondes) sont équivalentes à celles de la version V8 diesel, mais le bilan environnemental est (presque) « écolo-compatible », avec

6,4 ll aux 100 km 6,4 100 km et 169 g 169 g de CO2 par km. Lorsque le mode tout électrique est enclenché, le Range Rover Hybrid peut atteindre la vitesse maximale de 48 km/h 48 km/h et couvrir jusqu’à 1,6 1,6 km km avant que le moteur diesel ne redémarre. Mais le Range Hybrid conserve son système électronique, qui lui permet d’affronter tous les terrains. Il sera disponible d ébu t 2 0 1 4 , à partir de 70 000 euros. l

PEUGEOT

C

V

RANGE ROVER

oici un modèle qui illustre les nouvelles ambitions internationales de la marque au lion. L’adoption des derniers codes stylistiques du constructeur en fait une « low-cost valorisante ». La Peugeot 301 Access 1.2 VTI 72 chevaux devrait être disponible à partir de 9 000 euros. Elle a été développée pour s’adapter à toutes les conditions d’utilisation, même extrêmes : températures élevées, routes dégradées… De même, « l’offre de moteurs diesel et essence de dernière génération répond aux attentes des marchés », indique le constructeur, qui propose des puissances allant de 72 à 115 chevaux et des boîtes de vitesses manuelles, pilotées ou automatiques. Bref, c’est LA voiture africaine de Peugeot. l

NISSAN X-TRAIL SUV FAMILIAL

O

n attendait le dernier Qashqai, c’est le X-Trail de Nissan qui a profité du salon de Francfort pour se refaire une beauté : feux étirés,

calandre massive ou encore optiques arrière en forme de boomerang. À l’intérieur, les sièges sont disposés à des hauteurs différentes pour profiter

de la route « comme dans un théâtre », selon la marque. Pour la première fois, le modèle peut accueillir en option deux sièges supplémentaires et ainsi embarquer sept passagers. Le X-Trail devrait être disponible avec deux ou quatre roues motrices, mais pas avant l’été 2014. l

NISSAN

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JEUNE AFRIQUE


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MERCEDES CLASSE E CONCENTRÉ DE TECHNOLOGIE

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plutôt une grande routière. En revanche, elle se gare toute seule, lit les panneaux de signalisation, prévient des risques de collision avec ses caméras avant, arrière et latérales, détecte la somnolence et redresse le volant en cas de changement de ligne intempestif. Mais les étoiles coûtent cher, au moins 40 000 euros. l

CHEROKEE

a mythique Classe E s’offre une cure de jouvence. L’esthétique d’abord : une jupe avant renouvelée, avec ou sans l’étoile, et une partie arrière musclée. L’habitacle est lui aussi placé sous le signe du sport, avec une sellerie en cuir Nappa et des boiseries travaillées. La classe E n’est pourtant pas une sportive, mais

JEEP CHEROKEE BIEN SOUS NEUF RAPPORTS

A

M ER CE DE

llongée de 13 cm et abaissée de 9, la Jeep Cherokee opère sa mue. Seule sa calandre à 7 barres verticales rappelle son prédécesseur. Pour la première fois, le modèle est décliné en 4x2 roues motrices. Le 4x4 est proposé avec un moteur essence de 271 chevaux, ou un diesel avec 140 et 170 chevaux. Dans la première version, le V6 est associé à une boîte automatique à neuf rapports. Une première mondiale. À bord, un écran tactile de 7 pouces donne accès à des services connectés. Commercialisée à partir de janvier 2014, elle devrait coûter au minimum 30 000 euros. l

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Culture & médias

LITTÉRATURE

L’impôt du sang Dans une écriture inventive et vivifiante, Raphaël Confiant revient sur un pan méconnu de l’histoire de la Martinique : le recrutement de « tirailleurs » antillais lors de la Première Guerre mondiale. TSHITENGE LUBABU M.K.

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J

’aiattendu,longtempsattendu, comme qui dirait un siècle de temps, le rapatriement du corps de Théodore. M. le maire, le docteur Jean Préval, nous avait promis, à nous qui avions perdu un proche dans cette guerre scélérate – et nous étions une bonne trentaine ! –, que nous récupérerions le fruit de nos entrailles ou l’objet de notre amour dans les deux mois suivant l’armistice, mais notre attente fut plus vaine que la floraison du papayer mâle. » Dans le nouveau roman de Raphaël Confiant, Le Bataillon créole, la vieille Hortense, qui a perdu son fils unique au combat, revient sur un épisode important de l’histoire de la Martinique : le recrutement de jeunes gens de l’île, à l’époque colonie française, dans l’armée métropolitaine pendant la Première Guerre mondiale. Le destin des jeunes Martiniquais ressemble à celui des fameux tirailleurs sénégalais. Ils ont dû affronter un climat européen glacial, une fraternité d’armes quasi inexistante avec les métropolitains, des préjugés racistes bien enracinés, une guerre terrible où ils servent, plus que les autres, de chair à canon. L’amertume sera profonde. Raphaël Confiant soumet ses personnages à une psychanalyse littéraire. Il sonde leur âme pour comprendre ce qu’ils ressentent face à l’ennemi. Sur le champ de bataille, un soldat avoue : « La baïonnette qui s’enfonce dans le corps blanc efface d’un trait des siècles d’agenouillement, d’humiliation. Le Teuton, qui vous fait face, à l’instant où vous jaillissez de votre tranchée parce que l’ordre de fondre sur l’ennemi vous a été donné, ce Teuton au visage juvénile, souvent imberbe, aux yeux d’une clarté si bouleversante d’innocence, voire de tendresse – allez savoir ! –, ce Teuton-là devient le Béké, le Blanc créole, devant lequel les vôtres et vous n’ont u Par sa statuaire, le monument aux morts du Lorrain à la Martinique (ci-contre) efface l’engagement des Noirs lors de la guerre de 1914-1918. N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

jamais pu que courber l’échine et balbutier “oui, missié”. Mais l’immense satisfaction qui vous étreint alors ne saurait être partagée, même par ceux qui tout comme vous l’éprouvent et cela au même instant, c’est-à-dire soldats d’Afrique et du Maghreb, car aussitôt la honte vous saisit, le sentiment plus exactement d’être descendu au niveau des bêtes les plus immondes. » L’auteur martiniquais poursuit là son projet littéraire La Comédie créole, exploration de l’histoire


Culture médias

sens classique du terme. L’Histoire n’est pour moi qu’une toile de fond », se défend-il. Sa méthode : « D’abord, j’interroge la mémoire familiale et collective et, quand cela est possible, les témoins de l’événement. Dans le cas des poilus créoles, il m’est arrivé d’en rencontrer il y a une dizaine d’années. Quoiqu’ils fussent déjà très vieux à l’époque, j’ai quand même pu approcher au plus près des souffrances endurées par eux sur le front européen et sur le front d’Orient. » Il s’est également inspiré de ce qui, de génération en génération, se racontait dans sa propre famille, en l’utilisant à sa façon. Autre source, les archives de la bibliothèque Schœlcher de Fort-de-France. C’est au bout de ce processus qu’il construit ses personnages et son récit « avant de les malaxer avec les données orales et écrites » recueillies.

Le Bataillon créole, de Raphaël Confiant, Mercure de France, 320 pages, 19,80 euros

« VIP-VAP ». Le Bataillon créole est un roman

MICHEL VANDEN EECKHOUDT/AGENCE VU

des Antilles à travers le prisme des colonisés. « Je cherche à donner à lire la vision de ceux qui n’ont jamais eu droit à la parole et qui, pourtant, constituent l’écrasante majorité de nos peuples », indique-t-il. Concernant le recrutement de ces tirailleurs martiniquais, l’auteur précise : « La population créole y a vu une forme de reconnaissance de son appartenance à l’ensemble français et la circonscription comme un moyen de payer “l’impôt du sang”, selon une expression en vogue à l’époque. Elle signifie que nos soldats se devaient d’aller verser leur sang sur les champs de bataille pour remercier la France de nous avoir accueillis en son sein. Et même, dans l’esprit de certains, d’avoir aboli l’esclavage en 1848. » En 2014 sera célébré le centenaire de la Première Guerre mondiale. Confiant a-t-il voulu, dans cette perspective, apporter une pièce à conviction au procès de l’horreur absolue ? « Mes romans ne sont absolument pas des romans historiques au

jubilatoire. Il s’en dégage un charme magique que procure la parole qui s’envole de la bouche du conteur avant d’émerveiller nos oreilles, de se coucher sur notre cerveau. La lecture se transforme en écoute des voix polyphoniques qui nous parlent avec des mots fleuris, inattendus, déroutants, attendrissants et à la fois enrichissants. Les narrateurs ont une expression haute en couleur, exquise. Qu’il s’agisse de la vieille Man Hortense, qui parle à ses « plantes-remèdes-guérit-tout » et pleure son fils unique. Ou de Lucianise, quimboiseuse de son état, qu’un séducteur aborde en ces termes : « Lucianise, il y a grand longtemps que mon cœur fait vip-vap devant la belleté de ton corps et la charmanceté de tes cocos-yeux qui éclairent plus fort que le soleil en carême. » Dans ce texte, Confiant, auteur d’une cinquantaine de livres à seulement 62 ans, s’est livré à un impressionnant travail de création lexicale à partir d’expressions tirées du vieux français, du créole ou de son cru, qui apportent une fraîcheur vivifiante. Le créole est une langue jeune qui n’a que trois siècles et demi d’existence et qui ne dispose pas encore d’atouts suffisants pour pouvoir rivaliser avec une vieille langue de tradition écrite comme le français, explique-t-il. Avant de poursuivre : « Mais, à mon sens, c’est le devoir de tout écrivain antillais de s’efforcer de l’illustrer. Se détourner du créole reviendrait à pratiquer ce véritable suicide linguistique auquel on assiste en Afrique noire et qui me fend le cœur. Cela dit, je n’ai aucun problème avec la langue française, qui est non pas ma deuxième langue, mais ma langue comaternelle. Je l’ai apprise en même temps que le créole. » Nul doute : avec Le Bataillon créole, le chantre de la créolité a réalisé un travail d’orfèvre. l N O 2752 • DU 6 AU 12OCTOBRE 2013

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ANITA STEIN

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THÉÂTRE

Requiem pour Bisesero

p Deux chanteurs et cinq comédiens reprennent, sur une partition élégante, des témoignages de survivants.

La troisième et dernière partie de Rwanda 94, une pièce de six heures, revient sur un épisode symbolique du génocide: la résistance et la solidarité des habitants de la colline de Muyira.

C

est sans doute l’épisode le plus fortement symbolique de l’histoire du génocide rwandais. La résistance des habitants du massif de Bisesero rejoints par des milliers de Tutsis menacés (ils ont été jusqu’à 50 000 personnes) a duré près de trois mois entre avril et juillet 1994, avec des moyens dérisoires et un courage exemplaire, face à des forces armées, financées et organisées par le régime de l’époque. « Alors que les aspects les plus horribles de l’homme se déchaînaient, quelque chose de beau s’est dégagé : la solidarité, la résistance, la lutte jusqu’au dernier souffle », explique Jacques Delcuvellerie, metteur en scène français de Rwanda 94, une pièce de près de six heures. La Cantate de Bisesero, qui en était à l’origine la troisième et dernière partie, est donnée à la Maison des métallos, à Paris, du 9 au 13 octobre, à l’occasion de la sortie du coffret DVD de l’œuvre complète*. C’est la première représentation depuis la fin de la tournée internationale, en 2005. Cette cantate est un récit épique de près de une heure, à la fois précis et émouvant, de ces mois de lutte. Sur une composition très belle de Garrett List pour deux chanteurs, cinq comédiens déclament JEUNE AFRIQUE

journalistiques. Ainsi, le rôle pour le moins ambigu des soldats français de l’opération Turquoise, qui ont laissé les survivants de Bisesero sans assistance pendant trois jours après les avoir découleur texte, qui reprend notamment des verts, est décrit précisément, en dépit de témoignages de survivants de Bisesero. la version très différente donnée par Paris. « Sur la colline de Muyira vivaient, avant Cela a d’ailleurs valu quelques ennuis à le génocide, de nombreux hommes forts. la troupe : lorsqu’elle s’est déplacée au Sur la colline de Muyira reste une poignée pays des Mille Collines pour la dixième commémoration du génocide, en 2004, d’hommes qui maintenant meurent de chagrin », est-il répété, devant un grand elle s’était vu refuser sa représentation au mur rouge terre qui sert de fond à la scène. centre culturel franco-rwandais de Kigali Dans le livret, le courage et la déterminapar l’ambassade de France tant qu’elle ne tion côtoient l’horreur brute des violences, consentirait pas à des « aménagements ». le souvenir détaillé du massacre de leurs « Ils réclamaient des modifications pureproches par des survivants et cette idée ment politiques, au sujet du rôle de la d’une fin inéluctable qui se rapproche un France avant et pendant le génocide », peu plus chaque jour. De fait, seulement se souvient Jacques Delcuvellerie. 800 personnes ont Ce dernier espère continuer sur finalement survécu. u. la lancée de cette nouEn marge d velle ve représentation et e la cantate • La captation de PRÉCISION. Bien en se produire au Rwanda s deux première s parties du spec qu’élaboré en 2000, pour le vingtième po tacle Rwanda 94 sera diffusée di manche 13 octo à une époque où le anniversaire, en 2014. anniv bre à la Maison de s métallos (Par recul sur cette tragééPeut-être l’ambassade Pe is). • Une rencontre die sujette à de mullde France fera-t-elle avec Jacques Delcuvellerie et son équipe tiples tentatives de preuve, cette fois-ci, pr artistique aura lieu le 10 octobr manipulation était d’ouverture d’esprit. l d’ou e. • Des œuvres du plus limité, le texte PIERRE BOISSELET projet Les Hom mes debout (des pe rson frappeaujourd’hui grands que natu nages plus re par sa précision la « tentative de qui font face à * Rw Rwanda 94, de Jacques négation de la vie de tout un peup historique tant il Delcuvellerie et Mathias Delcu le »), du plastic ien sud-africain Br a été corroboré, Simons, coffret de cinq DVD Simons uce Clarke, sero nt projetées sur la depuis, par comprenant également trois com façade du théâ tre. documentaires. documen des enquêtes N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013


Culture médias CINÉMA

Kechiche tel qu’en lui-même Au cœur d’une polémique dans l’Hexagone, le réalisateur franco-tunisien reste peu connu du grand public dans son pays natal. Où il se rend fréquemment, très discrètement.

S

erein, il déambule d’un pas ex-compagne à la ville et coscénariste élastique dans les ruelles de de tous ses films, a quitté Paris pour Sidi La Marsa sous le soleil de Bou Saïd, environnement plus serein plomb du mois de juillet. Son pour élever leurs deux garçons, dont visage évoque quelque chose aux pasl’un à la santé fragile. Abdellatif les a sants, mais rares sont ceux qui reconsuivis. Ils sont son ancrage. Et ce père naissent le réalisateur de La Vie d’Adèle, de famille prévenant ne reste jamais loin Palme d’or à Cannes en mai dernier… de celle pour qui il a éprouvé un coup Peu osent l’aborder ou lui demander un de foudre sur le tournage de Bezness, de autographe. « J’ai rencontré Kechiche Nouri Bouzid. sur la corniche, mais j’ai surtout vu un « Il a eu beaucoup de courage à camper bel homme ténébreux. Ce n’est que un gigolo dans deux films successifs [Les plus tard que j’ai réalisé que c’était lui », Innocents, de Téchiné, 1987, et Bezness, raconte Amel, une artiste peintre que la 1992] alors qu’il a un côté enfant à fleur complexité du précédent long-métrage de peau. Il avait assisté à la première d’Abdellatif Kechiche, Vénus noire, avait projection de Bezness incognito parmi le interpellée. public tandis qu’il en était la vedette », se La Marsa, en banlieue de Tunis, est souvient Nouri Bouzid, qui confie avoir le nouveau refuge du cinéaste, au cœur senti venir la « cabale » autour de La Vie d’une polémique sur les conditions de d’Adèle. « Abdellatif est quelqu’un de bien tournage menée par les techniciens du qui porte et couve ses sujets pendant film et les actrices Léa Seydoux et Adèle longtemps. Comme le fait remarquer Exarchopoulos à quelques jours de sa le chef opérateur Sofian El Fani, le film sortie sur les écrans français. Le réalis’est fait avec le consentement de tous. sateur vient d’y acquérir une maison Il n’y a pas eu de tromperie. Le seul moyen pour extirper une merveille est et se fond avec plaisir dans un certain anonymat. Un moment important pour de fouiller au plus profond. Le tohu-bohu celui qui jusque-là était entre deux rives. médiatique est aussi l’effet de Cannes Celui qui se dit « étranger partout » se sur des actrices très jeunes », explique sent un peu plus chez lui dans un pays le célèbre cinéaste tunisien. natal quitté à l’âge de 6 ans. « Savoir s’il est tuniso-français ou franco-tunisien PIONNIERS. Les controverses suscitées est sans importance. Abdel n’est pas un par les conditions difficiles du tournage beur. C’est un immigré, né à Tunis. Cette ou les cuisantes déclarations de Léa sensibilité-là parle en lui », assure un Seydoux restent des polémiques parihabitué du café Jimmy’s, où Kechiche a siennes sans intérêt pour l’indolente ses habitudes. Marsa. Le film n’est pas L’homme qui marche sous dans les préoccupations des les palmiers du front de mer Tunisiens et risque de ne semble loin de la désormais pas être projeté localement. amère récompense cannoise. Cette histoire d’amour au Ombrageux et introverti, ce féminin aborde un thème timide, qui n’avance qu’au totalement sulfureux. Dans prix du doute, est extrêun pays finalement plus mement exigeant. Sur un conservateur que révolutionnaire, certains évitent plateau, ce souci de perfecd’en parler, d’autres pourtion presque maniaque fait La Vie d’Adèle, raient y voir une provocaqu’on le crédite d’un maud’Abdellatif tion. Pour les islamistes, vais caractère. À présent, il Kechiche (sortie l’homosexualité, sujet entame une nouvelle étape en France le 9 octobre) de sa vie. Ghalia Lacroix, son tabou, est ramenée à une N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

COLLECTION CHRISTOPHEL

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p Ghalia Lacroix et Abdellatif Kechiche dans Bezness (1992).

maladie ou à une déviance de l’Occident. Alors qu’en mai Kechiche était prêt à discuter de quelques coupes, il avouait le 25 septembre dernier dans Télérama qu’il ne se battrait pas pour le voir sur les écrans tunisiens : « Je ne tiens pas à ce que mon film provoque du désordre ou de la haine. […] De toute façon, il sera vu. Les Tunisiens sont les champions du piratage sur internet, et c’est mieux qu’ils le voient comme ça. » Pourtant, pour avoir évoqué l’homosexualité et la pédophilie dans L’Homme de cendres de Nouri Bouzid, la drogue dans Fleur d’oubli de Selma Baccar, le cinéma tunisien avait été avant-gardiste en la matière, et Kechiche s’inscrit aussi dans la continuité de cette génération de pionniers des années 1980. Néanmoins, pour le grand public, il reste un inconnu alors que La Graine et le Mulet (qui a remporté trois Césars en 2008 et le Grand Prix du jury de la Mostra de Venise) avait attendri une Tunisie chère à son cœur. « Son dialectal est parfait mais Kechiche est terriblement timide », raconte Selma, une architecte qui l’a croisé lors d’un vol Paris-Tunis. « Il venait de recevoir son prix à Cannes, il aurait pu JEUNE AFRIQUE


Culture médias

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EXPOSITION

Africa pop Le photographe français Vincent Michéa, installé à Dakar depuis 1986, expose pour la première fois à Abidjan. Ambiance pop art acidulée.

prétendre à être traité en vedette, mais il voyageait très simplement en classe économique comme s’il était gêné par sa notoriété, comme si la masse des voyageurs pouvait le protéger. » Acteur en Tunisie, cinéaste en France, le réalisateur de La Faute à Voltaire (Lion d’or de la première œuvre en 2000) est un hybride et une espèce de fils prodige. Les Tunisiens aimeraient sans doute qu’il soit un pur produit de la culture tunisienne, mais ils oublient souvent que la France l’a façonné et qu’il lui doit l’essentiel de sa carrière. Sans compter que le succès de l’auteur de L’Esquive, déjà récompensé par trois Césars en 2005, a suscité bien des jalousies. Sous prétexte d’en finir avec l’ancien régime, les nouveaux jacobins de la culture rappellent qu’il a été décoré par Ben Ali en 2005 et en 2008. Mais ils omettent de relever qu’aucun des projets de long-métrage que Kechiche a soumis à la commission d’aide à la production cinématographique du ministère de la Culture tunisien n’a reçu la moindre subvention. Cette porte close a permis à Kechiche « d’aller au-delà d’une intégration en travaillant à sa manière sur les libertés individuelles », remarque un cinéphile. l FRIDA DAHMANI, à Tunis JEUNE AFRIQUE

graphiste, collectionneur de disques de musique africaine des années 1950, contemplateur de Dakar, Vincent Michéa – qui a par ailleurs rendu hommage, dans un travail non exposé, aux grands noms de la musique africaine des années 1960-1970 comme l’Ivoirien Ernesto Djédjé – se voit comme un chanteur de variétés, capable d’emprunter différents répertoires. Raison pour laquelle il a aussi fixé au mur de la galerie des rangées de vinyles dont les pastilles revêtent différents coloris. Une installation réalisée il y a vingt ans et conçue comme une palette

VINCENT MICHÉA / GALERIE CÉCILE FAKHOURY

U

n e p h o t o d e Kw a m e Nkrumah et de la femme de Sékou Touré dansant ensemble transformée en peinture pop. Des clichés de Dakar en noir et blanc recolorisés. Une image d’un couple africain découpée dans un vieux magazine, devenue un grand tableau sur fond jaune, où les personnages sont peints à l’aide de milliers de points noirs. Le peintre français Vincent Michéa (50 ans) réinvente et retape les images qu’il a pu collecter tout au long de sa vie. Le rendu est simple et attirant. « Je peins ce que j’aime sans trop me poser de questions sur la cohérence de mon travail. Ma peinture est assez facile d’accès, sans abstraction. On ne me pose pas la question de savoir ce que j’ai voulu dire », souligne l’artiste qui a exposé pour la première fois en 1987, à la galerie nationale de Dakar. Arrivé en 1986 dans la capitale sénégalaise en tant que graphiste, c’est un ami qui le pousse à montrer son travail au public. PALETTE. Résultat,

beaucoup de coup « Je ne pense qu’à ça », de Vincent Michéa, leurs vives, et des gros jusqu’au 16 novembre 2013 à la galerie Cécile points noirs « appo- Fakhoury, à Abidjan. sés comme un filtre qui trouble la réalité », souligne Julie de couleurs. Pour la première fois, Diabira, de la galerie Cécile Fakhoury, l’artiste expose également une série où il expose jusqu’au 16 novembre. de photomontages qu’il n’avait pas Ainsi, jugeant trop fade sa peinture d’un vraiment osé montrer auparavant. On peut y voir des collages de perimmeuble de la gendarmerie dakaroise sonnages hybrides, moitié humains, – un building blanc immaculé sur fond moitié matériaux, scindés par une orange –, la retravaille-t-il en y ajoutant ces petites touches noires, créant épaisse ligne noire. l AURÉLIE FONTAINE, à Abidjan de la sorte de la profondeur. Peintre, N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013


Culture médias En vue

n n n Décevant

n n n Pourquoi pas

n n n Réussi

n n n Excellent

MUSIQUE

Sur la route du pardon LE BLUESMAN AMÉRICAIN Eric Bibb sort le 8 octobre un nouvel album, Jericho Road. Depuis presque cinquante ans – né en 1951 à New York, il débute sa carrière à 16 ans –, ce guitariste (acoustique) parcourt la planète. Le musicien insère çà et là, soul, gospel, voire pop (« They Know », magnifique guitare-voix rejoint par des cordes classiques). Il s’aventure aussi dans les contrées africaines avec « Have a Heart », où percussions et balafon côtoient la kora. Le fil rouge de ses textes ? Le pardon : « S’il y a toujours une raison d’entrer en conflit avec autrui, il y a aussi toujours une bonne raison de pardonner », dit-il. l MICHAEL PAURON

Jericho Road, d’Eric Bibb (Dixiefrog), sortie le 8 octobre nnn

CINÉMA

DR

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Un État pour tous

Un documentaire et un film israéliens reviennent sur la question palestinienne de manière originale.

«

S

i les sionistes avaient débarqué quelque part en Europe en disant : “Nous avons un livre qui dit que ce pays est à nous”, on les aurait égorgés ou jetés dehors ! » Dès le début, avec ces propos d’une Israélienne critique à l’égard de la politique de son pays, il paraît clair qu’État commun, le documentaire du turbulent cinéaste israélien Eyal Sivan, ne va pas aborder son sujet – comment pourrait-on en finir une fois pour toutes avec la question de l’avenir de la Palestine ? – de façon tiède. Si la quasi-totalité des acteurs comme des observateurs du conflit israélo-palestinien pensentencore,vingtansaprèslesaccords d’Oslo, que la seule issue envisageable réside dans la « solution des deux États », ce n’est pas pour autant vrai ou même simplement réaliste, pense le cinéaste. Et tous les témoins de diverses origines qu’il interroge – aussi bien des Juifs israéliens N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

que des Arabes palestiniens d’Israël, des territoires occupés ou de la diaspora, des colons que des universitaires ou des artistes, etc. – soutiennent que la seule perspective à la fois sérieuse et respectant les droits de tous ne peut résider finalement que dans la constitution d’un seul État, un État commun. Lequel, de fait, existe déjà : les populations ne sont-elles pas le plus souvent mêlées sur la grande majorité du territoire ? HUIS CLOS. Cette vision qui suppose d’abandonner l’idée de la partition de la Palestine au profit de celle du partage – dans tous les sens du terme – trouve sa traduction dans le dispositif même du film : l’écran est divisé en deux, chaque « témoin » qui parle d’un côté étant apparemment écouté par un interlocuteur attentif, de l’« autre bord ». Cette confiance dans le montage et l’agencement des séquences pour maintenir l’attention du

spectateuretrenforcerl’impactdespropos tenus, c’est également ce qui caractérise un autre film israélien, de fiction celui-là, sur le conflit. Room 514, en effet, évoquant la confrontation entre une enquêtrice de l’armée israélienne et un officier d’élite accusé de violences gratuites à l’égard d’un Palestinien dans les territoires occupés, tient en haleine grâce à sa construction qui enferme à la fois les acteurs et le spectateur dans un huis clos infernal à l’issue tragique. Ce premier film tourné en quatre jours est un plaidoyer contre les abus de pouvoir fort réussi, notamment grâce à l’interprétation puissante du personnage de l’enquêtrice par une actrice d’origine russe, Asia Naifeld. l RENAUD DE ROCHEBRUNE

État commun, conversation potentielle, d’Eyal Sivan (sortie à Paris le 9 octobre) Room 514, de Sharon Bar-Ziv (sortie à Paris le 9 octobre)

nnn nnn

JEUNE AFRIQUE


Culture médias CINÉMA

Marocains d’Israël KAMAL HACHKAR, né dans le village berbère de Tinghir, au seuil du Haut-Atlas marocain, a quitté son pays natal à l’âge de 6 mois avec sa mère pour rejoindre son père en France. D’où une particulière sensibilité au thème de l’exil. Qui l’a conduit à se demander ce qu’étaient devenus les habitants du quartier juif – le Mellah – de Tinghir, qui ont tous abandonné leurs maisons et émigré en Israël dans les années 1950 et 1960. Il s’est rendu, caméra au poing, jusqu’à Tel-Aviv et Haïfa, après avoir interrogé leurs anciens voisins sur place, pour retrouver leur trace et les faire parler de leur déracinement, encore douloureux plus d’un demi-siècle après. À tel point qu’à la différence de leurs enfants, qui se disent israéliens, ils se considèrent souvent encore avant tout comme des Marocains. Un film parfois un peu répétitif, mais le plus souvent attachant voire bouleversant. l R.R.

Tinghir-Jérusalem. Les échos du Mellah, de Kamal Hachkar (sortie à Paris le 9 octobre) n n n

DANSE

Explosif

TRÈS ENGAGÉE dans les combats féministes, l’une des figures émergentes de la scène chorégraphique sud-africaine, Mamela Nyamza, aborde la question de la violence domestique et de la sexualité dans ses créations. La dernière en date, réalisée avec les cinq danseurs du Soweto’s Finest, ne déroge pas à la règle. Il y est question du regard masculin sur le corps féminin. L’humour de Mamela Nyamza, allié au dynamisme des Kids de Soweto, maîtres de l’ishbuja (une danse urbaine percutante se référant aussi bien aux traditions zouloues qu’au hip-hop), offre une partition haute en couleur… quand elle n’est pas affaiblie par une parole parfois trop présente, comme si les mouvements ne sauraient se suffire à eux-mêmes. l SÉVERINE KODJO-GRANDVAUX

Mamela Nyamza et les Kids de Soweto, jusqu’au 11 octobre au musée du Quai Branly, puis en tournée en France. Disponible également sur le site Live Web d’Arte nnn JEUNE AFRIQUE

Lu et approuvé ALAIN MABANCKOU Écrivain franco-congolais

PARTI SANS LAISSER D’ADRESSE

T

homas B. Reverdy signe leurs pauvres de San’ya àTokyo, le roman se passe dans les avec Les Évaporés l’un des livres les plus remarstrates d’une nation qui ne resqués de cette rentrée littéraire semble pas à celle que nous française. Pour l’écrire, l’auteur renvoient les cartes postales. a séjourné plusieurs mois au Fiction ou réalité ? Reverdy précise dans une « note de l’auJapon, en 2012, à la villa teur » : « Tout ce qui est raconté Kujoyama à Kyoto, juste un an ici est vrai : c’est le fruit d’expéaprès la catastrophe nucléaire riences vécues, de rencontres de Fukushima. De ce séjour, et de nombreuses lectures faites Reverdy nous livre une fiction envoûtante autour de la dispasur place. » Le personnage rition d’un certain Kaze, cadre détective Richard B. n’est autre que l’écrivain américain Richard japonais qui du jour au lendemain « part », laissant Brautigan, qui a luisur la table de son même vécu au Japon dans les années 1970 bureau une lettre à et à qui Reverdy prête sa femme dans les traits de quelqueslaquelle il lui uns de ses persondemande de ne pas nages. Certaines être triste, « de faire pensées de Richard B. comme s ’il était viennent des poèmes mort ». Au Japon, de l’auteur américain, lorsque quelqu’un pensées que Reverdy disparaît, on dit qu’il Les Évaporés, s’est « évaporé ». Cela a pris le soin de deThomas n’inquiète ni la police mettre en italique. B. Reverdy, ni la famille puisqu’il Les chapitres brefs, Flammarion, 304 pages, n’y a pas d’infraction ciselés, instillent une 19 euros et qu’une famille qui atmosphère de mysse plaindrait souffritère, et le lecteur est rait du déshonneur. pris au piège de ce voyage au bout du pays du Soleil La fille de Kaze, Yukiko – qui levant, un roman de la fuite et habite en Californie –, ne l’entend pas de cette oreille. Elle se de la renaissance, de l’obstinalance à la recherche de son père tion, mais aussi de la désolation. accompagnée de Richard B., son « Ce roman “japonais” est ainsi ancien amant, une sorte de le témoin de ma fréquentation détective raté. À travers cette de cette civilisation qui me quête où se mêlent charme et demeure encore, à bien des mystère, Reverdy trace le décor égards, étrangère », souligne d’un Japon en proie à ses avec humilité l’auteur en guise démons. de conclusion. Un livre lumiEntre catastrophes naturelles neux, dense, sous forme de ou nucléaires et vies démantidéclaration d’amour pour une bulées dans les camps de réfucivilisation qui ne cesse de nous giés autour de Sendai ou encore enchanter malgré la colère des dans les quartiers des travaildieux… l N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

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Culture médias KIOSQUE

LA REVUE

Rabat, capitale mondiale en devenir Le numéro 36 du mensuel La revue est en vente dans les kiosques depuis le 27 septembre.

G

râce aux aménagements dont la ville bénéficie depuis une dizaine d’années, notamment la construction du nouveau pont Moulay-el-Hassan, Rabat se cherche un avenir en accord avec son prestigieux passé. De sa genèse almohade aux futurs projets urbains qui transformeront le visage de la capitale marocaine, La revue consacre un dossier complet à Rabat. L’image d’une ville confinée dans son rôle de conservatoire s’estompe peu à peu. Le peintre Mehdi Qotbi présente également les nouvelles institutions culturelles dont Rabat sera bientôt doté. D’une capitale à l’autre, Gérard Haddad s’est rendu cet été à Tunis pour prendre la température d’un pays qu’il connaît de longue date. Il s’attendait à un climat de guerre civile, il constate sur place qu’il n’en est rien. Certes, le pays traverse une sévère crise politique, économique et sociale, mais notre envoyé spécial prend le contre-pied du pessimisme ambiant et estime qu’une révolution ne peut se faire sans convulsions. Selon lui, les forces modernistes ont partie gagnée. La révolution Elon Musk. Star du salon automobile de Francfort, mi-septembre, laTesla Model S est la première voiture électrique à concurrencer vraiment les grosses

u La revue no 36, octobre 2013, 146 pages, 4,90 euros en France (3 000 F CFA dans la zone CFA).

berlines thermiques. Mais le constructeur californien dirigé par Elon Musk, qui est aussi le fondateur de PayPal, parviendra-t-il à baisser encore ses prix pour s’adresser au plus grand nombre ? Sans minimiser les succès de Tesla, Xavier Chimits rappelle que sa viabilité repose sur une voiture de production de masse. Qui n’est pour l’instant qu’un projet. L’Afrique est à la mode. Taux de croissance enviables, ressources minières qui semblent infinies, progrès de l’alphabétisation et de l’espérance de vie en passant par l’utilisation des nouvelles technologies, tous les commentateurs le disent : ça y est, l’Afrique décolle. Mais Pascal Airault nuance ces réussites et souligne les graves problèmes de gouvernance et d’instabilité politique dont souffre encore le continent. l JIHÂD GILLON

À LIRE AUSSI DANS CE NUMÉRO un mois en Afrique subsaharienne. Jean Florin, steward d’Air France, était au service du Général durant ce périple et raconte cette expérience inoubliable.

« ANGELA MERKEL, DERRIÈRE LE MASQUE » On connaît tout ou presque de l’ascension politique d’Angela Merkel, mais sa vie privée, son caractère demeurent une énigme. Alors qu’elle vient d’être reconduite pour un troisième mandat, Juliette Morillot brosse le portrait de la chancelière allemande. «ILYASOIXANTEANS,DEGAULLEENAFRIQUE» En mars 1953, il y a soixante ans, Charles de Gaulle effectuait un voyage privé de N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

au sortir de la Seconde Guerre mondiale ? Patrick Pesnot tente de démêler le mystère. « TECHNION, AU CŒUR DE L’EXCELLENCE »

« L’ÉNIGME DENOËL » Le 2 décembre 1945, le fondateur des éditions Denoël est assassiné en plein Paris. Crime crapuleux, vengeance sentimentale, règlement de comptes à caractère politique comme il y en eut tant

Israël abrite trois institutions universitaires réputées : l’université hébraïque de Jérusalem, l’Institut Weizmann de Rehovot et le Technion de Haïfa. Comment cet établissement a-t-il réussi à produire trois prix Nobel en dix ans ? Gérard Haddad s’est rendu sur place pour comprendre. JEUNE AFRIQUE


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Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre -Tél. : 01 44 30 18 76 - Fax : 01 44 30 18 77 - Email. : f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique - 57 bis, rue d’Auteuil 75016 Paris - France

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N° 2752 • DU 6 OCTOBRE AU 12 OCTOBRE 2013

Formation - Recrutement

Following to the General procurement Notice (Reference N° AfDB43-04/12) for the SARD-SC Project that appeared in UN Development Business online on 27 April 2012, ICARDA wishes to employ highly qualified individual to fill the following position:


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Annonces classées

The Africa Rice Center (AfricaRice, ex-WARDA) wishes to recruit: => A Research Assistant-Agronomy => A Consultant in Ecosystem services in inland valleys in West-Africa => A Consultant GIS specialist - mapping of inland valleys systems in West-Africa About AfricaRice AfricaRice is one of the 15 international agricultural research Centers that are members of the CGIAR Consortium. It is also an autonomous intergovernmental association of African member countries. Further details can be obtained from the AfricaRice website at www.AfricaRice.org.

Avis de vacance de poste VN/2013/001 Un(e) Gestionnaire de Programme pour un programme d’Assainissement Total Piloté par la Communauté (ATPC). Niveau : NO-3. Type de contrat : Engagement à durée déterminée (FT) - Sous la supervision directe du Spécialiste Eau, Hygiène et Assainissement du Bureau, le/la Gestionnaire de Programme sera responsable de la planification, de la mise en œuvre, de l'administration, de la gestion des subventions ainsi que du suivi et évaluation pour la réalisation des objectifs d’un vaste programme d’assainissement couvrant plus d’un tiers des villages ruraux du Togo. - Le/la Gestionnaire de programme accomplira entre autres les fonctions ci-après: assurer la bonne gestion des fonds alloués aux partenaires et assurer le suivi de leur performance sur le terrain pour l’exécution des activités prévues; suivre et évaluer l’exécution du plan de travail global et renseigner les indicateurs de résultats, préparer les rapports financiers et narratifs; faciliter les réunions de coordinations ; soutenir les efforts de plaidoyer pour atteindre les objectifs de l'assainissement pour tous. - Vous êtes de nationalité Togolaise ; vous avez un niveau « BAC+5 » en Administration des affaires, Gestion de projets de développement, Sciences sociales, Relations internationales, Politiques publiques, Développement social, ou tout autre diplôme équivalent ; vous avez une expérience professionnelle d’au moins cinq (5) ans dans le domaine de la gestion de programme de développement ainsi qu’une parfaite maîtrise de l’Anglais et du Français, merci de nous faire parvenir votre demande adressée à la Représentante de l’UNICEF Togo, CV détaillé, formulaire P11 dûment rempli, photocopies des diplômes et attestations de services rendus par courrier électronique à : lome@unicef.org ou sous pli fermé, au Bureau de l’UNICEF Lomé, TOGO, sis près d’ESBTAO, 1124 rue de Tchamba, route de l’aéroport au plus tard le 25 octobre 2013. Pour plus d’informations : Téléchargez : - Description complète du poste sur le site : http://reliefweb.int/jobs - Formulaire « UN P11 » sur le lien http://www.unicef.org/french/about/employ/files/P11.doc Les candidatures féminines sont vivement encouragées.

Recrutement

AVIS DE RECRUTEMENT

Retrouvez toutes nos annonces sur le site : www.jeuneafrique.com

N° 2752 • DU 6 OCTOBRE AU 12 OCTOBRE 2013

TDR pour le poste d’un Expert en Assistance technique pour le compte du Secrétariat exécutif national du Conseil National de Lutte contre le Sida du Tchad. Le SE/CNSL Tchad recherche un Assistant technique International pour renforcer les capacités contributives du CNLS, à aider au suivi évaluation, à la supervision et à la capitalisation des résultats et de l’impact de la subvention du Fonds mondial. Principales tâches et responsabilités de l’expert en assistance technique ! Appuyer le développement institutionnel du Secrétariat exécutif du CNLS ; ! Appuyer le développement de la coordination et de la réponse multisectorielle ; ! Aider à la prise en compte des nouvelles thématiques et orientations dans la riposte au sida comme les populations clés, le genre, le cadre d’investissement, etc. ; ! Appuyer l’opérationnalisation du manuel de suivi évaluation et la disponibilité de l’information stratégique de qualité ; ! Appuyer la capitalisation des résultats de la riposte au sida, en aidant particulièrement à faire ressortir la part contributive du Fonds mondial. Connaissances informatiques et linguistiques : ! Bonne connaissance de l’outil informatique et des tableurs (Excel, Powerpoint, EPI Info, etc.). • Excellente maîtrise du français. • Bonne connaissance de l’anglais. Atouts • Avoir travaillé avec une organisation bilatérale de développement en Santé ou avec une Agence du Système des Nations Unies œuvrant dans la lutte contre le VIH en Afrique de l’Ouest et/ou du Centre. • Avoir une bonne connaissance du Conseil National de Lutte contre le Sida (CNLS) à travers des missions de consultations. • Les candidatures féminines sont fortement encouragées. Profil de l’Assistant technique international L’Assistant doit justifier (i) d’une expérience d’au moins 10 ans dans la riposte au sida, une bonne connaissance des stratégies/orientations internationales de riposte au sida, (ii) une expérience d’au moins 3 ans d’appui au développement institutionnel d’une coordination de riposte au sida, (iii) une expérience avérée en suivi évaluation, planification stratégique et opérationnelle ainsi qu’en genre et VIH. Il doit également avoir des notions sur la prise en compte des populations clés dans les stratégies de la riposte au sida. Le candidat retenu sera rémunéré conformément à la grille prévue à cet effet. Les candidats intéressés sont priés d’envoyer une lettre de motivation, les diplômes et un CV de 3 pages maximum avec les personnes de références par email à l’adresse suivante : jobs@tsfwca.org et à tsfwca@tsfwca.org au plus tard le 27 octobre 2013 à 00h GMT. Pour plus de détails sur les informations liées au poste, veuillez télécharger les TDR sur le site www.tsfwca.org

JEUNE AFRIQUE


Annonces classées PRIMATURE DIRECTION ADMINISTRATIVE ET FINANCIÈRE

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RÉPUBLIQUE DU MALI Un Peuple - Un But - Une Foi

AVIS DE MANIFESTATION D'INTÉRÊT MISSION D'ACHÈVEMENT DES PROJETS DE L’AÉROPORT ET D’ALATONA (MAPAA) MISSION D’APPUI À L’UNITÉ DE GESTION DU PROJET AÉROPORT

Le Gouvernement de la République du Mali va recevoir un prêt de la Banque lslamique de Développement pour financer les travaux d’achèvement du projet de modernisation et d’extension de l’Aéroport de Bamako-Sénou. La Mission d’Achèvement des Projets de l’Aéroport et d’Alatona à l’intention d’utiliser une partie du montant de ce prêt pour effectuer les paiements au titre du contrat d’Appui à l’Unité de Gestion du Projet Aéroport. Les travaux comprennent l’achèvement des ouvrages ci-après : - le nouveau Terminal Passagers de 15 000 m2 ; - le système d’adduction d’eau avec un château d’eau de 10 000 m3 ; - le réseau électrique Moyenne Tension de 10 km de long avec transformateurs ; - le système de traitement des eaux usées ; - le système de traitement des déchets internationaux ; - les voies d’accès routier ; - les parkings auto et les espaces paysagers. Les services comprennent l’appui conseil à l’unité de gestion du Projet Aéroport notamment : - la mise à disposition de divers experts déterminés dans les termes de Référence ; - le suivi. de la réalisation des travaux en appui au maître d’œuvre ; - l’avis technique sur tous documents fournis ou établis par l’entreprise et le maître d’œuvre ; - le suivi régulier de l’échéancier général du Projet ; - l’analyse et l’approbation des décomptes établis par le maître d’œuvre ; - la participation aux différentes réunions de chantier. La Mission d’Achèvement des Projets de l’Aéroport et d’Alatona invite les candidats à manifester leur intérêt et à fournir les services décrits ci-dessus. Les candidats intéressés doivent

fournir les informations justifiant qu’ils sont qualifiés pour exécuter lesdits services. Les dossiers à fournir doivent comprendre : - une lettre de manifestation d’intérêt ; - une note de présentation du bureau, de son expérience et de ses compétences en rapport avec la mission ; - une liste de référence technique vérifiable en matière de missions similaires (liste des missions similaires ; nom et adresse des clients ; montant des contrats, année ; personnel de contact et leur adresse mail...) ; - l’adresse complète du consultant (adresse physique, téléphone, adresse mail). Les consultants désireux d’obtenir des informations complémentaires peuvent s’adresser à la MAPAA à l’adresse ci-dessous. La Mission d’Achèvement des Projets de l’Aéroport et d’Alatona dressera une liste restreinte d’au plus six (06) candidats, présélectionnés sur la base des candidatures reçues, à qui elle adressera la demande de proposition. Les manifestations d’intérêt, en langue française, doivent être déposées sous pli fermé ou en version électronique à l’adresse ci-dessous au plus tard le 17 octobre 2013 à 16 heures, et porter expressément la mention « Manifestation d’intérêt pour les services de consultants, relative à l’Appui à l’Unité de Gestion du Projet Aéroport ». A l’attention de : « Monsieur le Chef de la Mission d’Achèvement des Projets de l’Aéroport et d’Alatona, Complexe Administratif et Commercial ACI 2000. 3e étage, Avenue du Mali, Bamako, République du Mali, Tél : (223) 20 22 1648 ; (223) 20 22 1649, Fax : (223) 20 22 16 51, email : diarrabintou26@yahoo.fr ; miss.dakouo@yahoo.fr ». Bamako, le 1er octobre 2013 Le Directeur Administratif et Financier Bakary TRAORE Inspecteur des Finances

RÉPUBLIQUE DU MALI Un Peuple - Un But - Une Foi

AVIS DE MANIFESTATION D'INTÉRÊT MISSION D'ACHÈVEMENT DES PROJETS DE L’AÉROPORT ET D’ALATONA {MAPAA) RECRUTEMENT D’EXPERTS POUR L’UNITÉ DE GESTION DU PROJET AÉROPORT

Dans le cadre de la modernisation et l’extension de l’Aéroport international de BamakoSénou, le Gouvernement de la République du Mali avait commencé en août 2010, les travaux de construction d’un nouveau terminal passagers et des infrastructures connexes. Suite aux événements survenus en mars 2012, ces travaux qui étaient à un stade avancé ont été arrêtés. Il s’agit aujourd’hui de reprendre l’ensemble des travaux en vue de les achever et permettre le fonctionnement et l’exploitation des nouveaux ouvrages. Le Gouvernement de la République du Mali va bénéficier d’un prêt de la Banque Islamique de Développement (BID) pour financer les travaux d’achèvement du Projet de modernisation et d’extention de l’Aéroport de Bamako-Sénou (Côté ville). Une partie de ces fonds sera destinée à la prise en charge du fonctionnement de l’Unité de Gestion du Projet Aéroport (UGP). Les travaux d’achèvement du Projet Aéroport concernent les ouvrages ci-après : - le nouveau Terminal Passagers de 15 000 m2 ; - le système d’adduction d’eau avec un Chateau d’eau de 10 000 m3 ; - le réseau électrique Moyenne Tension de 10 km de long avec transformateurs ; - le système de traitement des eaux usées ; - le système de traitement des déchets internationaux ; - les voies d’accès routier ; - les parkings auto et les espaces paysagers. La Mission d’Achèvement des Projets de l’Aéroport et d’Alatona procèdera à la mise en place de cette Unité de Gestion pour une durée de vingt-quatre (24) mois à travers le recrutement de son personnel-clé selon les procédures d’appel à candidatures ci-après : 1. Consultation internationale ouverte pour le poste de Coordinateur, Chef de l’Unité de Gestion du Projet ; 2. Consultation internationale ouverte pour le poste d’Ingénieur Systèmes Aéroport ; 3. Consultation internationale limitée aux pays membres de la BID pour le poste de

JEUNE AFRIQUE

l’Ingénieur Génie Civil Aéroport ; 4. Consultation Internationale limitée aux pays membres de la BID pour le poste de l’Administrateur ; 5. Consultation nationale pour le poste de Comptable Gestionnaire. La Mission d’Achèvement des Projets de l’Aéroport et d’Alatona invite les candidats à manifester leur intérêt pour les différents postes. Les candidats intéressés doivent fournir une lettre d’expression de leur Intérêt en spécifiant le numéro et l’intitulé du poste auquel ils prétendent. Ils doivent en outre indiquer clairement leurs adresses (numéros téléphoniques, adresses e-mail, adresse physique, etc.) et y joindre leur curriculum vitae justifiant qu’ils sont qualifiés pour le poste choisi. La Mission d’Achèvement des Projets de l’Aéroport et d’Alatona dressera pour chacun des postes, une liste restreinte d’au plus six (06) candidats, présélectionnés sur la base des candidatures reçues. Les candidats présélectionnés recevront les Termes de Référence relatifs à leurs postes en vue du dépôt des dossiers de candidature. Les manifestations d’Intérêt, en langue française, doivent être déposées sous pli fermé ou en version électronique à l’adresse ci-dessous au plus tard le 22 octobre 2013 à 16 heures, et porter expressément la mention « Manifestation d’intérêt pour le recrutement d’Experts pour l’Unité de Gestion du Projet Aéroport » en précisant le numéro et l’intitulé du poste. A l’attention de : « Monsieur le Chef de la Mission d’Achèvement des Projets de l’Aéroport et d’Alatona, Complexe Administratif et Commercial ACI 2000. 3e étage, Avenue du Mali, Bamako, République du Mali, Tél : (223) 20 22 1648 ; (223) 20 22 1649, Fax : (223) 20 22 16 51, email : diarrabintou26@yahoo.fr ; miss.dakouo@yahoo.fr ». Bamako, le 1er octobre 2013 Le Directeur Administratif et Financier Bakary TRAORE Inspecteur des Finances

N° 2752 • DU 6 OCTOBRE AU 12 OCTOBRE 2013

Manifestation d’intérêt

PRIMATURE DIRECTION ADMINISTRATIVE ET FINANCIÈRE


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Annonces classées

RÉPUBLIQUE GABONAISE MINISTÈRE DE L’ÉCONOMIE, DE L’EMPLOI ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE COMMISSION NATIONALE DES TIPPEE SECRÉTARIAT PERMANENT

AVIS DE MANIFESTATION D’INTÉRÊT N° AMI/004-2013/CNT LE RECRUTEMENT D’UNE ASSISTANCE TECHNIQUE POUR LE SUIVI ET LE CONTRÔLE DES TRAVAUX DE CONSTRUCTION DE LA PHASE 1 DU BACKBONE NATIONAL

Manifestation d’intérêt

Le Gouvernement du Gabon a contracté un Prêt auprès de la Banque Mondiale pour couvrir le coût du Projet Central African BACKBONE « PCAB 4 ». Il a l'intention d'utiliser une partie de ce prêt pour effectuer les paiements autorisés au titre du Contrat objet de cet Avis. Le rôle premier de cette mission est de s’assurer du bon déroulement des travaux de pose de la fibre optique et ce en rapport avec le cahier des charges de l’entreprise adjudicataire jusqu’à la recette définitive. Le consultant sera donc chargé de veiller au respect des plans de déploiement et de suivre quotidiennement la réalisation de chantiers d'installation de réseaux de fibre optiques en sous-terrain. Il devra de même s’assurer du respect des mesures de sauvegardes. Il aura également le rôle de conseil auprès du Comité de Direction, de l’ANINF, de l’ANGT et de l’expert technique appuyant le Comité de Direction, afin de les aider dans la prise de décisions critiques qui pourront intervenir lors des travaux d’infrastructure passive. Il est précisé que les travaux de construction de la phase 1 du Backbone national sont décomposés en deux marchés qui feront chacun l’objet d’un processus d’adjudication : l’un portant uniquement sur l’Infrastructure passive de la phase 1 du Backbone National, à savoir implémentation du câble fibre Optique sur le tronçon ferroviaire, implémentation du câble fibre Optique sur les tronçons routiers et construction des centres techniques et shelters ; l’autre sur l’implémentation des Equipements de transmission sur le réseau. Les activités de Suivi et de contrôle de la Construction de la phase 1 du Backbone national vont couvrir (i) le contrôle de Conformité des différents équipements fournis dans le cadre des contrats de Construction (ii) ; le contrôle permanent sur site des travaux d’infrastructure passive de l’entreprise adjudicataire, (iii) ; la réalisation des tests de conformité des travaux et des installations, des équipements, ainsi que les tests de performance du réseau installé, (v) le suivi des mesures de sauvegardes et (vi) la participation aux réunions de validation et de réception provisoire et définitive des différentes parties. Les firmes de consultants éligibles sont invitées à manifester leur intérêt, en faisant acte de candidature et en fournissant les informations indiquant qu’ils possèdent les qualifications requises et une expérience pertinentes pour exécuter les prestations décrites ci-dessus. Ces informations doivent être fournies au moyen du dossier suivant : - Lettre de candidature ; - Déclaration éventuelle de groupement ; - Fiche de présentation du candidat (domaine d’expertise, brochure, plaquette, site web, etc. ; - Qualifications de la firme ; - Références récentes et pertinence en missions similaires avec mention obligatoire des données suivantes : libellé des missions, pays, période d’exécution, état des réalisations) ; - Etat des personnels clés et appui disponibles sans pour autant donner des données sur les experts individuels. Il est porté à l’attention des Consultants que les dispositions du paragraphe 1.9 des « Directives : Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale dans le cadre des Prêts de la BIRD et des Crédits et Dons de l’AID » de janvier 2011 (« Directives de Consultants »), relatives aux règles de la Banque mondiale en matière de conflit d’intérêts sont applicables. Les critères pour l’établissement de la liste restreinte sont : - Justifier de l’exécution d’au moins trois (3) prestations analogues dans le domaine du contrôle des travaux d’infrastructures de fibre Optique ; - Justifier de l’exécution prestations analogues en Afrique Subsaharienne. Les Consultants peuvent s’associer avec d’autres firmes pour renforcer leurs compétences respectives en la forme d’un groupement ou d’un accord de sous-traitant. Un Consultant sera sélectionné selon la méthode fondée sur la Qualité et le Coût (SFQC) telle que décrite dans les Directives de Consultants. Les Firmes de consultants intéressés peuvent obtenir le cahier de charge de ce mandat ou des informations complémentaires sur demande écrite à l’adresse ci-après : Commission Nationale des TIPPEE B.P. : 22 Libreville – Gabon ou par téléphone au n° (+241) 05 19 04 10 aux heures suivantes : de 8h00 à 15h00 (heure locale GMT+1) et par courrier électronique à : tippeegabon@cntippee.org et busamba@yahoo.com. Les plis porteront la mention suivante : « Manifestation d’intérêt pour le recrutement d’une assistance technique pour le Suivi et le Contrôle des travaux de Construction de la phase 1 du Backbone national ». Les dossiers de manifestations d’intérêt seront présentés en français en Cinq (05) exemplaires (un original et quatre copies) ou en une version électronique (avec accusé de réception), doivent parvenir au plus tard le 25 Octobre 2013 à 13h00 (heure locale GMT + 1), à l’adresse suivante : Commission Nationale des TIPPEE, quartier Glass Immeuble Volvo (2ème étage) - Libreville – Gabon, Email : tippeegabon@cntippee.org

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AVIS D’APPEL À MANIFESTATION D’INTÉRÊT (SERVICES DE CONSULTANTS) RÉPUBLIQUE GABONAISE MINISTÈRE DE LA PROMOTION DES INVESTISSEMENTS, DES TRAVAUX PUBLICS, DES TRANSPORTS, DE L’HABITAT ET DU TOURISME, CHARGÉ DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

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Manifestation d’intérêt - Divers

Le Gouvernement de la République Gabonaise a sollicité un prêt de l’Agence Française de Développement (AFD) pour la réalisation du projet d’aménagement du bassin versant de Gué-Gué à Libreville et se propose, sans préjuger de l’obtention du financement, d’utiliser une partie des fonds pour régler les prestations de maîtrise d’œuvre des travaux de construction des infrastructures projetées. Ces travaux consistent à la réalisation de 11km de canaux bétonnés, 12km de voies de circulation en béton bitumineux le long des canaux, 23 ouvrages de franchissements (dalots), 39 passerelles pour piétons et des équipements de sécurité. Les prestations prévues au titre de cette consultation sur une durée totale de quarante deux (42) mois sont reparties en trois phases : - Phase 1 : Reprise des études techniques existantes (APD) et du Dossier d’Appel d’Offres - Phase 2 :Appui à la passation du marché travaux - Phase 3 : Contrôle et surveillance des travaux de construction. Le Ministère de la Promotion des Investissements, des Travaux Publics, des Transports, de l’Habitat et du Tourisme, Chargé de l’Aménagement du Territoire par le biais de l’Unité de Coordination de l’Etude et des Travaux (UCET) invite les entreprises ou les groupements d’entreprises, nationaux et internationaux, intéressés à manifester leur intérêt pour réaliser ces prestations. Le dossier de manifestation d’intérêt rédigé en français comprendra une lettre d’intention accompagnée d’une note de présentation de la firme, ou du groupement, indiquant qu’elle est qualifiée pour réaliser ces travaux. Le dossier transmis en cinq (5) exemplaires dont un (1) original et quatre (4) copies comprendra notamment les pièces suivantes : - La lettre d’intention ; - La déclaration d’intégrité, d’éligibilité et d’engagement environnemental et social dûment signée (extraite des « directives pour la passation des marchés financés par l’AFD dans les Etats étrangers » de l’AFD, téléchargeables sur le site web : http://www.afd.fr) - L’expérience générale du bureau ; - La justification de l'exécution de prestations analogues dans le domaine de l'assainissement pluvial ; - La justification de l'exécution de prestations analogues dans le domaine des voiries urbaines ; - La justification de l'exécution de prestations analogues en Afrique Subsaharienne ; - La disponibilité des moyens matériels et humains pouvant être mis à disposition et assurant des compétences dans les domaines suivants : Conception des ouvrages de drainage des eaux pluviales – Conception de réseau routier urbain - Topographie – Géotechnique - Génie civil Hydraulique -Sécurité, environnement ; - Etats financiers des trois dernières années, démontrant la capacité financière de l’entreprise à démarrer les prestations dès la notification du marché ; - Toutes autres informations pertinentes (certification ISO, etc.). Les critères d’éligibilité, l’établissement de la liste restreinte et la procédure de sélection seront conformes aux « directives pour la passation des marchés financés par l’AFD dans les Etats étrangers » de l’AFD, qui sont disponibles sur son site web : http://www.afd.fr. L’intérêt manifesté par une entreprise n’implique aucune obligation de la part de la Maîtrise d’ouvrage de le retenir sur la liste restreinte qui sera composée de six bureaux maximum. De même, le maître d’ouvrage se réservera le droit de ne pas donner suite à l’appel d’offres et précise que la procédure sera poursuivie sous réserve de l’obtention du financement auprès de l’AFD. Les bureaux intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires à l’adresse mentionnées ci-dessous aux heures locales d’ouverture des bureaux de 7h30 à 15h30. Les expressions d’intérêt rédigées en Français doivent être déposées à l’adresse mentionnée ci-dessous au plus tard le 30 Octobre 2013 à 12 heures locales et porter expressément la mention « Manifestation d’intérêt pour le recrutement d’un bureau d’études chargé de la reprise des études, du contrôle et de la surveillance des travaux d’aménagement du bassin versant de Gué-Gué à Libreville (Gabon) ». A l’attention de M. Blaise WADA - Coordonnateur Général Unité de Coordination de l’Etude et des Travaux Immeuble Filaos B sise à Centre Affaires Rénovation - BP 12 336 - Libreville - Gabon Tél. : +241 01 20 97 39 / 01 20 97 42/ 07 02 67 98/ 07 54 86 53 - Email : ugpgabbad@yahoo.fr - wadabenalliasa@yahoo.fr


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Annonces classées République du Congo MINISTÈRE DE L’ÉCONOMIE, DES FINANCES, DU PLAN, DU PORTEFEUILLE PUBLIC ET DE L’INTÉGRATION PROJET DE RENFORCEMENT DES CAPACITÉS DE TRANSPARENCE ET DE GOUVERNANCE - Crédit n° 5063-CG

AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL

Divers - Appel d’offres

N° 02F/MEFPPPI-CAB/PRCTG-SPM/13

1. Le Gouvernement de la République du Congo a obtenu un crédit de l’Association Internationale de Développement (IDA) pour contribuer au financement du Projet de Renforcement des Capacités de Transparence et de Gouvernance (PRCTG) et a l’intention d’utiliser une partie de ce crédit pour effectuer des paiements au titre du Marché de fourniture des équipements informatiques pour les équipes de projet, les départements et les services utilisateurs des finances publiques en République du Congo. 2. L’Unité de Coordination du Projet de Renforcement des Capacités de Transparence et de Gouvernance (PRCTG) sollicite des offres fermées de la part de soumissionnaires éligibles et répondant aux qualifications requises pour fournir les équipements informatiques pour les équipes de projet, les départements et les services utilisateurs des finances publiques en République du Congo: Lot unique constitué de quatre (04) sous-lots suivants : Sous-lot 1 : Fourniture, installation et mise en œuvre des équipements informatiques pour les équipes de projet ; Sous-lot 2 : Fourniture, installation et mise en œuvre des équipements informatiques pour l’Office Congolais de l’Informatique (OCI) ; Sous-lot 3 : Fourniture, installation et mise en œuvre des équipements informatiques pour les impôts, les douanes et le trésor public ; Sous-lot 4 : Fourniture, installation et mise en œuvre des équipements informatiques pour les utilisateurs de SIDERE. 3. La passation du marché sera conduite par Appel d’offres international (AOI) tel que définit dans les « Directives : passation des marchés financés par les Prêts de la BIRD et les Crédits de l’IDA » édition 2011, et ouvert à tous les soumissionnaires de pays éligibles tels que définis dans les Directives. 4. Les soumissionnaires éligibles et intéressés peuvent obtenir des informations auprès de l’Unité de Coordination du PRCTG, sise derrière le Commissariat Central de Police, Brazzaville, Tél 00 242 06 635 50 36, courriel : prctg@yahoo.fr et prendre connaissance des documents d’Appel d’offres à l’adresse mentionnée ci-dessus de 8 heures à 16 heures, heures de Brazzaville. 5. Les soumissionnaires intéressés peuvent obtenir un dossier d’Appel d’offres complet en Français à l’adresse mentionnée ci-dessous contre un paiement non remboursable de trois cent mille (300 000) Francs CFA. La méthode de paiement sera : versement en espèces ou virement bancaire au compte Code banque : 30012, Code guichet : 00101, N° du compte : 17100802101, RIB : 94 ou IBAN CG39 3001 2001 0117 1008 0210 194 BIC CRAGCCGGXXX domicilié à la Congolaise de Banque (LCB), sise à Brazzaville au nom du PRCTG. Le Dossier sera expédié par courrier postale. 6. Les offres devront être soumises à l’adresse du PRCTG ci-dessous au plus tard le vendredi 22 novembre 2013 à 12 heures précises, heure de Brazzaville. La soumission des offres par voie électronique ne sera pas autorisée. Les offres remises en retard ne seront pas acceptées. Les offres seront ouvertes en présence des représentants des soumissionnaires présents en personne ou à distance à l’adresse du PRCTG mentionnée ci-dessous le vendredi 22 novembre 2013 à 13 heures précises, heure de Brazzaville. Les offres doivent comprendre une garantie de l’offre, pour un montant équivalent à vingt millions (20 000 000) de Francs CFA. 7. L’adresse à laquelle il est fait référence ci-dessus est : Projet de Renforcement des Capacités de Transparence et de Gouvernance (PRCTG) Derrière le Commissariat Central de Police du centre ville de Brazzaville-République du Congo. Fait à Brazzaville, le 02 Octobre 2013 Le Coordonnateur Marie Alphonse ITOUA

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AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL Nº: AAO-I/BFA/PRG 18-EC/FY14/0004 I. CONTEXTE DE L’APPEL D’OFFRES Dans le cadre de la mise en œuvre de ses activités d’Eau Potable d’Hygiène et d’Assainissement, Plan Burkina Faso a bénéficié de trois (03) subventions au titre du 10e FED ACP-CE (Référence : EuropeAid/129509/C/ACT/ Multi), pour mettre en œuvre - Le Projet d’Amélioration de l’accès des enfants et des femmes aux Services d’Eau Potable et d’Assainissement (PASEPA) dans les provinces du Poni et Noumbiel objet de la convention FED/2011/264-902 ; - Le Projet de Renforcement de l’accès aux Services d’eau Potable, d’Hygiène et d’Assainissement (PRESEA) dans les provinces du Namentenga et Sanmatenga objet de la convention FED/2011/264-855 ; - Le Projet d’Amélioration de l’Accès aux Services d’Assainissement Durable dans les provinces du Kourittenga et du Bam (PAASAD) au Burkina Faso Contrat FED /2010/252-283. Une partie des fonds de cette subvention sera utilisée pour financer la fourniture des matériaux de construction pour la réalisation de latrines familiales. C’est dans ce cadre que, Plan Burkina Faso lance un appel d’offres international pour l’acquisition de matériel de construction des latrines familiales. II. OBJET ET ALLOTISSEMENT DE L’APPEL D’OFFRES Les travaux objet du présent appel d’offres sont la fourniture et la livraison des matériaux de construction de latrines familiales dans les provinces du Noumbiel, Poni, Namentenga, Sanmatenga, Kourittenga et du BAM repartis en cinq (05) lots distincts comme suit :

Projet

Ciment CPA Barre Fer Tuyau PVC M2 de 45 sacs Ha 6 évacuation Grillage de 50 kg de 12 m de 100 (6m)

Lot 1 Bam 7,906 Lot 2 Kouritenga 10,296 Lot 3 Namentenga 1,756 Lot 4 Sanmatenga 4957 Lot 5 Poni 8236.8

1,204 1,912 1,756 1242 936

1,204 1,912 703 1242 936

602 956 896 2478 468

Rouleau de fil de fer recuit 482 765 7,022 112 374.4

III. DÉLAI DE LIVRAISON Le délai d’exécution global du marché ne devrait pas excéder six (06) mois. Les matériaux ne seront pas livrés en une seule tranche mais en fonction des ordres de services donnés. Dans tous les cas, le fournisseur dispose d’un délai maximum de trente (30) jours à compter de la réception de l’ordre de service pour livrer l’intégralité des matériaux. IV. PARTICIPATION À L’APPEL D’OFFRES La participation à la concurrence est ouverte à toutes les personnes physiques ou morales pour autant qu’elles ne soient pas sous le coup d’interdiction ou de suspension et, être en règle vis-à-vis de leur pays d’établissement. Les soumissionnaires éligibles et intéressés par le présent appel d’offres international peuvent obtenir des informations supplémentaires et consulter gratuitement le dossier d’appel d’offres auprès de : - secrétariat de Plan Burkina Faso BP 1184 OUAGADOUGOU 01 ; Téléphone (226) 50 37 87 33/35/37 ; FAX (226) 50 37 87 39, sis à la Zone d’Activités Diverses (ZAD), site web www.plan-burkina.org. V. CONSULTATION ET ACQUISITION DU DOSSIER Tout soumissionnaire éligible et intéressé par le présent avis doit retirer un dossier d’appel d’offres à la représentation de Plan Burkina Faso B.P. 1184 OUAGADOUGOU 01 ; Téléphone (226) 50 37 87 33 ; Fax 50 37 87 39, sise

JEUNE AFRIQUE

VI. PIÈCES À FOURNIR Les soumissionnaires nationaux devront produire les documents ci-dessous datés de moins de trois (03) mois 1. L’attestation de situation fiscale (ASF) ; 2. L’attestation de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) ; 3. L’attestation de la Direction Régionale du Travail et de la Sécurité Sociale (DRTSS) ; 4. Une attestation de non engagement de l’Agent Judiciaire du Trésor (AJT) ; 5. une photocopie légalisée du registre de commerce ; 6. Une photocopie du reçu d'achat du dossier ; 7. Une fiche de renseignements (voir pièce 8 du DAO). 8. Une caution bancaire de soumission d’un montant de Un Million Cinq Cent Mille (1 500 000) Francs CFA pour chaque lot (voir pièce 9 du DAO) : Pour les soummissionnaires étrangers, ils devront fournir une copie de leur Registre du Commerce certifiée par un notaire et une attestation de non faillite délivrée par l’organisme compétent de leur siège social et la caution de soumission. VII. DÉPÔT DES OFFRES Les offres présentées en un original et deux (02) copies conformément aux instructions aux soumissionnaires et accompagnées d’une garantie de soumission de Un Million Cinq Cent Mille (1 500 000) Francs CFA pour chaque lot, devront parvenir au secrétariat de Plan Burkina Faso B.P. 1184 OUAGADOUGOU 01 ; Téléphone (226) 50 37 87 33 ; Fax 50 37 87 39, sise à la Zone d’Activités Diverses (ZAD) au plus tard le 15 Novembre 2013 à 09 heures 00 GMT. L’ouverture des plis sera faite immédiatement en présence des soumissionnaires qui souhaitent y assister. En cas d’envoi par la poste ou autre mode de courrier, Plan Burkina Faso ne peut être responsable de la non réception de l’offre transmise par le soumissionnaire. VIII. DÉLAI D’ENGAGEMENT Les soumissionnaires restent engagés par leurs offres pendant un délai de quatre-vingt-dix (90) jours à compter de la date limite de remise des offres. IX. RENSEIGNEMENTS COMPLÉMENTAIRES Les renseignements sur l’avis d’appel d’offres peuvent être obtenus du lundi au Jeudi entre 9h00 et 15h00 et le vendredi entre 9h 00 – 12h dans les bureaux de Plan Burkina à : • Kongoussi BP 146 Tél +(226) 40 45 90 22 Fax +(226) 40 45 90 08 ; • Koupéla BP 138 Tél +(226) 40 70 01 78/40 70 03 41 Fax +(226) 40 70 02 ; • Gaoua BP 34 Tél +(226) 20 90 03 49/20 90 01 31 Fax +(226) 20 90 03 34 ; • Boulsa BP 300 Tél +(226) 40 70 96 07 Fax +(226) 40 70 97 14 ; • Kaya BP 56 Tél +(226) 40 45 32 69 Fax +(226) 40 45 32 77 ; • Ouagadougou (siège) BP 1184 OUAGADOUGOU 01 ; Téléphone (226) 50 37 87 33/35/37 ; FAX (226) 50 37 87 39, sis à la Zone d’Activités Diverses (ZAD), site web www.plan-burkina.org. X. RÉSERVE Plan Burkina Faso se réserve le droit de ne donner aucune suite à tout ou partie du présent appel d’offres. Ouagadougou le 17 septembre 2013. La Direction de Plan Burkina Faso

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Appel d’offres

PAASAD PAASAD PRESEA PRESEA PASEPA

Lot Province

à la Zone d’Activités Diverses (ZAD) moyennant le paiement d’une somme non remboursable de Cent Mille (100 000) francs CFA.


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(Agence des Travaux et de Gestion des Routes) République du Sénégal Ministère des Infrastructures des Transports Terrestres et du Désenclavement (MITTD)

Banque Islamique de Développement (BID)

Avis d’appel public à candidature

TRAVAUX DE CONSTRUCTION DE LA VDN 2E SECTION (CICES-GOLF CLUB DE GUEDIAWAYE) D’ENVIRON 9 KM (D/933/A3) 1. Le présent Avis d’appel public à candidature fait suite à l’Avis Général de Passation des Marchés paru dans le quotidien « Le Soleil du 19 et 20 janvier 2013.

Appel à candidature

2. Le gouvernement du SÉNÉGAL a obtenu un prêt de la Banque Islamique du Développement (BID), pour financer les travaux de construction de la Voie de Dégagement Nord 2e section (CICES – GOLF CLUB DE GUEDIAWAYE). Il est prévu qu’une partie des sommes accordées au titre de ce prêt sera utilisée pour effectuer les paiements prévus au titre du marché de travaux. 3. La passation du Marché sera conduite par Appel d‘offres avec pré-qualification suivant les procédures de la BID et ouvert à tous les candidats éligibles comme définis ci après : ! entreprises originaires des pays membres de la Banque Islamique de Développement et répondant aux critères suivants : (i) elles sont crées ou installées dans un pays membre ; (ii) leur lieu d’activités se trouve dans un pays membre ; (iii) elles appartiennent pour plus de 50% à une ou plusieurs entreprises installées dans un ou plusieurs pays membres (ces entreprises doivent également remplir le critère de nationalité par rapport à ces pays) et /ou à des ressortissants de ces mêmes pays membres, (iv) 80% au moins de l’ensemble des personnes qui doivent assurer des prestations dans le cadre du marché à exécuter dans le pays où les biens et services sont à fournir ou qui sont employées directement par l’entreprise ou par un sous-traitant sont des ressortissants d’un pays membre . ! Cependant une association de ces entreprises avec d’autres qui ne seraient pas ressortissants d’un des pays membres de la BID sera permise à condition que l’entreprise du pays membre de la BID assure plus de 50% des travaux et soit le Mandataire du groupement. Les offres présentées par un groupement de deux ou plusieurs entrepreneurs associés doivent répondre aux conditions suivantes : • l’offre et, dans le cas ou elle est retenue, le modèle de marché, seront signés de telle sorte qu’ils engagent légalement tous les membres du groupement ; • un des membres du groupement sera désigné comme responsable principal ; il apportera la preuve que cette désignation a été préalablement autorisée en présentant un pouvoir délivré par les signataires dûment autorisés de chacun des membres du groupement ; • le responsable du groupement sera autorisé à assumer les responsabilités et recevoir les instructions de tous les membres du groupement et l’ensemble de l’exécution du marché lui sera exclusivement confié ; il servira le seul intermédiaire pour les paiements effectués ; • tous les membres du groupement seront responsables conjointement et solidairement de l’exécution du marché et une déclaration à cet effet sera jointe à l’autorisation à laquelle il est fait référence ci-dessus, ainsi qu’à la soumission et à la convention (dans le cas où leur offre est retenue) ; • un exemplaire de la convention liant les membres du groupement sera joint à la soumission. 4. Les candidats intéressés peuvent obtenir des informations auprès de l’Agence des Travaux et de Gestion des Routes (AGEROUTE) sise à la Rue David Diop x Rue F Fann Residence – Dakar – Sénégal ; email : mcfaye@ageroute.sn ; isall@ageroute.sn ; et prendre connaissance des documents de pré-qualification tous les jours ouvrables de 8h00 à 17 h00 à l’adresse mentionnée ci-après : Agence des Travaux et de Gestion des Routes sise à la Rue David Diop x Rue F à Fann Résidence – Dakar – Sénégal. Téléphone : 221 33 869 07 51 - Fax : 221 33 864 63 50. - Les dossiers de Pré-qualification peuvent être retirés à l’adresse susmentionnée les jours ouvrables entre 8h 00 et 17h 00. 5. Les exigences en matière de qualifications sont : Au niveau technique : a) avoir une expérience en tant qu'entreprise principale dans la réalisation d'au moins trois (03) projets de nature et de complexité similaires aux travaux objet du présent appel à candidature au cours des dix (10) dernières années : pour remplir cette condition, les projets mentionnés devraient être entièrement achevés et accompagnés d’attestations fournies par les maîtres d’ouvrages bénéficiaires. Ces attestations devront être dûment signées par le Maître d’Ouvrage et contenir les renseignements tels que l’intitulé du projet, ses principales caractéristiques et le montant des travaux. En cas de groupement, en plus de la satisfaction de ce critère par le groupement, chacun des membres devra avoir réalisé pendant la période de dix ans, au moins un projet similaire (en 2x2 voies ou en 2x1 voies en milieu urbain) et le chef de file au moins deux. En cas de non respect de ce critère, le groupement sera éliminé du processus de présélection. b) Moyens humains et matériels : disposer de personnel qualifié, d’outillage, de matériel et d’équipements techniques nécessaires pour la réalisation des travaux.

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c) Organisation et planning : Fournir une note descriptive de l’organisation et du planning des travaux et des services qui lui seront liés, en conformité avec les moyens en personnel et en matériel que le soumissionnaire envisage de mettre sur le chantier et le chronogramme d’exécution des travaux faisant ressortir le rendement et le délai d’exécution prévu pour les différentes tâches. Au niveau financier : a) présenter les bilans et comptes de résultats des cinq derniers exercices et une déclaration concernant le chiffre d'affaires moyen annuel pour des travaux de construction d’infrastructures routières (Routes, ouvrages d’art) réalisés au cours des cinq (5) derniers exercices à compter de 2008 qui ne saurait être inférieur à Vingt Cinq (25) milliards (25 000 000 000) de F CFA. Dans le cas d’un groupement, les chiffres d’affaires moyens pour chacun des membres du groupement seront ajoutés pour déterminer si cette condition est remplie. Pour que le groupement soit éligible chacun des membres devra remplir au moins 60% de ce critère minimum. Cependant : - en cas de groupement de deux (2) Entreprises : si le Chef de file satisfait à l’ensemble du critère, le partenaire doit remplir au moins 50% du critère ; - en cas d’un groupement supérieur à deux (2) entreprises : si le chef de file satisfait à l’ensemble du critère, les autres partenaires doivent au moins remplir chacun 25% du critère. b) Disposer de liquidités et/ou de facilités de crédit net de tout autre engagement contractuel à l'exclusion de tout paiement d'avance qui pourrait être fait dans le cadre du Marché, d'au moins Sept Milliards (7 000 000 000) de F.CFA. 6. Les candidats intéressés peuvent obtenir un dossier de pré-qualification complet en formulant une demande écrite à l’AGEROUTE Sénégal sise à l’adresse indiquée ci-dessus. 7. Les demandes de pré-qualification devront être soumises au Secrétariat de la Cellule de Passation des marché (CPM) de l’AGEROUTE Sénégal sise à la Rue David Diop x Rue F Fann Résidence – Dakar – Sénégal au plus tard le 10 décembre 2013 à 10 heures 30 minutes précises et porter clairement la mention : « Demande de Pré-qualification pour les travaux de construction de la Voie de Dégagement Nord 2e Section (CICES – GOLF CLUB DE GUEDIAWAYE) ». 8. Les offres seront ouvertes le 10 décembre 2013 à 10 heures 30 minutes précises en présence des représentants des candidats présents à l’AGEROUTE Sénégal sise à l’adresse ci dessus. Le Directeur Général Oumar SY.

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Appel à candidature - Divers

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Vous & nous

Le courrier des lecteurs Envoyez-nous vos réactions, vos réflexions, vos coups de gueule ou de cœur à redaction@jeuneafrique.com ou au 57 bis, rue d’Auteuil, 75016 Paris.

Kenya À l’heure du doute PRIS EN ÉTAU par les milices Shebab et par la Cour pénale internationale (CPI) – bien déterminée à juger ses plus hauts dirigeants –, le Kenya s’interroge, doute… Que faire exactement contre ces coups de boutoir assénés de part et d’autre ? Ne plus intervenir contre ces milices en provenance de Somalie? Oublier les éventuels actes criminels du passé ? l ARCHÉDUC THÉODORE, N’Djamena, Tchad

Syrie, de « rebelles » et de « guerre civile ». Ne s’agit-il pas avant tout d’un régime qui massacre son peuple, même s’il y a, évidemment, des accrochages entre des groupes d’opposants armés ? Je suis vraiment choquée par l’emploi de ces termes (et de bien d’autres ; j’ai une petite liste), qui entravent la compréhension des vrais enjeux, réduisant la « crise syrienne » à une obscurantiste histoire de religions et de communautés qui s’entre-massacrent, forcément. l LEÏLA VIGNAL, Rennes, France

Syrie Le sens des mots AUXJOURNALISTESque vous êtes, je me permets de dire ma lassitude d’entendre les médias parler invariablement, à propos de la

France À la recherche de la grandeur perdue  LES GOUVERNANTS français ont fait de la

France la catin d’émirs bedonnants du Qatar et de l’Arabie saoudite », a récemment éructé Marine Le Pen, présidente du Front national (parti français d’extrême droite), sur une chaîne de radio. Certes, la cour assidue faite au petit émirat et au grand royaume d’Arabie a frisé l’indécence ces dernières années, et on voit depuis quelque temps se multiplier les contrats avec l’Arabie saoudite, comme on avait vu pleuvoir les investissements qataris sur les marchés français. Mais le dernier soutien hexagonal de Kaddafi et d’Assad se souvient-il de l’époque où la France se faisait le souteneur international du dingue de Tripoli et du boucher de Damas – meilleurs a mants du FN –, l eu r

Rumeurs Dans la grande muette algérienne DANS VOTRE NUMÉRO 2750 du 22 au 28 septembre 2013, l’article sur l’Algérie, « Le président cathodique », mentionne des promotions dans les rangs de l’Armée nationale populaire (ANP) qui n’ont pas eu lieu et qui relèvent juste de rumeurs. Parmi elles, celle du commandant de la 5e région militaire, le général deux étoiles Ben Ali Ben Ali, qui n’a pas gagné de galon, le nombre de généraux de corps d’armée étant ainsi maintenu à quatre. Ce p J.A. no 2750, du 22 au dernier garde conserve son poste à la tête de la 28 septembre 2013. région militaire, contrairement à ce que vous écrivez. De même, le général major Tafer Aachen reste à la tête du commandement des forces terrestres. Certes, vous écrivez au conditionnel et relayez les « révélations » du quotidien arabophone El-Khabar (qui n’est pas le porte-parole de la grande WALID HAMADA, Alger, Algérie muette). Mais ces dernières sont désormais caduques. l Réponse : Merci d’avoir précisé que nous avons cité la source de ces informations, et de reconnaître que ce que vous appelez « grande muette » ne les a démenties à aucun LA RÉDACTION moment. l N O 2752 • DU 6 AU 12 OCTOBRE 2013

aménageant les plus beaux jardins de Paris ou la meilleure place à la parade du 14 Juillet? Voit-elle la droite française avoir, sans complexe, les yeux de Chimène pour le tyran moscovite, qu’elle-même chérit par-dessus tout ? Mais qu’est-ce que ce Poutine-là a à nous offrir ? La France, nostalgique d’une « grandeur » perdue, cherche aux quatre points cardinaux le placébo qui lui ferait oublier sa petitesse présente. Ce faisant, elle n’en reçoit que la confirmation. l ZIAD HAMAMI, Sousse, Tunisie

Guinée La feuille de route d’Alpha Condé APRÈS LES AFFIRMA TIONS de l’hebdomadaire satirique français Le Canard enchaîné annonçant un coup d’État à Conakry, le moment est venu de rappeler aux Guinéens certaines réalités. Aux premières heures de l’indépendance, en 1958, une certaine Françafrique avait déclaré une guerre impitoyable à Sékou Touré et à son régime, parfois avec l’aide de Guinéens rêvant de prendre le pouvoir non pas pour développer le pays mais pour brader les matières premières, à la manière des Bongo, Bokassa ou Mobutu. Ceux qui en douteraient peuvent se reporter aux multiples documentaires sur la mafia politico-économique ruinant et ridiculisant des dirigeants africains de la période 1958-2000, régulièrement diffusés par les médias français. N’étant ni Sékou Touré ni Lansana Conté et encore moins Moussa Dadis Camara, Alpha Condé devrait s’assigner de nouvelles missions. Corriger les erreurs et les fautes de ses trois prédécesseurs. Lutter contre les dérives JEUNE AFRIQUE


Vous nous

LANCINÉ CAMARA, Paris, France

Hammarskjöld Les responsables sont connus C’EST TOUJOURS avec beaucoup de plaisir que je m’informe et me forme grâce à Jeune Afrique ! Merci pour votre enquête sur la mort de Dag Hammarskjöld, ancien secrétaire général de l’ONU. Toutes les questions que vous soulevez méritent en effet d’être posées. Simplement, quel intérêt aurait aujourd’hui la RD Congo à découvrir s’il s’agit d’un accident ou d’un attentat ? Au regard de sa situation actuelle, peut-elle raisonnablement prendre le risque de se brouiller avec quelque État impliqué de près ou de loin dans cette affaire ? Nul n’ignore que le décès de Dag Hammarskjöld est directement lié à la sécession katangaise. Vous avez d’ailleurs très bien présenté ceux qui avaient intérêt à la soutenir. Est responsable celui qui agit avec une connaissance et une liberté suffisantes

pour que ses actes puissent être reconnus comme siens et qu’il doive en répondre ! À mon avis, les jeux sont déjà faits, et les responsables connus. Si un Congolais devait être invité à s’exprimer devant la commission ad hoc chargée d’élucider le mystère, je lui suggérerais de ne pas y aller. Puissent le Royaume-Uni et les États-Unis s’unir afin de se punir mutuellement. Mais pas l’Afrique du Sud ! l ÉRIC LUBANGU, Lubumbashi, RD Congo

ONU

ethniques ; y consacrer des lois et les appliquer, notamment contre les extrémistes qui s’en servent politiquement et économiquement. Faire respecter le verdict des urnes – dont les résultats des législatives du 28 septembre dernier –, coupant ainsi l’herbe sous le pied à ceux qui, dans une dérive verbale indigne de représentants politiques, préparent « l’enfer guinéen ». Enfin, lancer de grands projets comme la lutte contre la désertification et les catastrophes climatiques, les grandes réformes pour rendre l’Union africaine plus crédible, plus efficace, plus motivante et plus sécurisante pour le continent. l

p Au siège de l’ONU à Genève, en 1953.

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HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL POLITIQUE, ÉCONOMIE, CULTURE

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Post-scriptum Fawzia Zouari

Fondé à Tunis le 17 oct. 1960 par Béchir Ben Yahmed (53e année) Édité par SIFIJA Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS Tél. : 01 44 30 19 60 ; Télécopieurs : rédaction : 01 45 20 09 69 ; ventes : 01 45 20 09 67 ; Courriel : redaction@jeuneafrique.com DIRECTION Directeur de la publication : BÉCHIR BEN YAHMED (bby@jeuneafrique.com) Directeur général : Danielle Ben Yahmed Vice-présidents: Aldo de Silva, Danielle Ben Yahmed, François Soudan, Amir Ben Yahmed Actionnaire principal : Béchir Ben Yahmed

Jihad sportif

A

RÉDACTION

PRÈS  L’AFFAIRE BABY LOUP , cette crèche d’une banlieue parisienne contrainte par la justice de réintégrer une employée licenciée parce qu’elle refusait d’ôter son voile, voici « l’affaire Orty Gym » du Raincy, toujours en banlieue parisienne. Elle oppose le maire UMP Éric Raoult à un couple de confession musulmane qui a ouvert, le 9 septembre dernier, une salle de sport exclusivement réservée aux femmes. A priori, le projet ne devrait pas choquer, certaines dames préférant clairement se muscler ou se détendre entre elles. On a vu des non-musulmanes formuler la même demande sans pour autant provoquer de scandale. Aux États-Unis, par exemple, des adeptes de la non-mixité revendiquent haut et fort des classes d’enseignement distinctes pour les hommes et pour les femmes. Le problème avec Orty Gym, c’est que le maire affirme détenir un « faisceau de preuves » accréditant l’idée d’un « commerce sportif religieux » : les gérants et les clientes de cette salle afficheraient des signes religieux ostensibles, la façade du local aurait été rendue opaque pour soustraire les filles aux regards non autorisés, et un site aurait annoncé la fermeture des lieux à l’heure de la prière du vendredi. Si tel est réellement le cas, l’on peut très justement douter que de tels arrangements soient consentis pour le simple bonheur de ces dames. Il est donc légitime de se renseigner sur les motivations qui guident pareille initiative et sur son éventuel ancrage dans une quelconque idéologie radicale. La non-mixité est en effet l’une des exigences fondamentales de l’islam orthodoxe et l’un des points les plus litigieux entre laïques et intégristes. Elle est fermement prônée par une certaine doctrine « féministe » islamiste qui occulte le fait qu’une telle pratique prépare à l’exclusion des femmes de l’espace public. N’oublions pas que, à l’origine, le voile n’avait pas pour but de « couvrir » les femmes, mais de les séparer physiquement de la gent masculine. Donc, le mot « hijab » a d’abord désigné le rideau qui servait à cet effet. Des premières croyantes de l’islam aux militantes islamistes du Printemps arabe qui manifestent dans des cortèges à part, il s’agit de la même consigne. Y céder, c’est se plier à des exigences religieuses, c’est revenir sur cet acquis qu’est la mixité. C’est, surtout, ouvrir la porte à d’autres revendications d’espaces unisexes. Les gérants du club du Raincy ont crié à l’islamophobie. Je ne veux pas préjuger de leurs intentions. Mais, de même qu’il faut se méfier des demandes de non-mixité, il faut déplorer cette attitude qui consiste, chez des particuliers ou des associations musulmanes, à crier au rejet de l’islam et à une offensive contre tous les musulmans dès lors qu’ils sont en porte-à-faux avec les règles républicaines. Cette attitude a le tort de faire croire que les musulmans sont une communauté unique et homogène. De les associer à une demande religieuse qu’ils ne formulent pas tous. De valider parfois et à leur insu le discours radical. Il y a des musulmans qui adorent la mixité et exècrent le niqab. Et ils sont une majorité. Une majorité qui se réclame à la fois laïque et musulmane sans que personne ne l’entende. Et c’est peut-être un procès en surdité qu’il faudrait intenter à la République. l

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