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CAMEROUN LES FANTÔMES DU PALAIS

Hebdomadaire international indépendant • 54e année • no 2753 • du 13 au 19 octobre 2013

TUNISIE AGENTS TROUBLES

CÔTE D’IVOIRE BÉDIÉ ET LE BAL DES PRÉTENDANTS

jeuneafrique.com

SANTÉ À QUAND DES LABOS AFRICAINS ? Spécial 8 pages

LES BERBÈRES Algérie, Maroc, Tunisie, Sahel… Enquête sur un peuple rebelle.

ÉDITION INTERNATIONALE ET MAGHREB & MOYEN-ORIENT France 3,50 € • Algérie 180 DA • Allemagne 4,50 € • Autriche 4,50 € • Belgique 3,50 € • Canada 5,95 $ CAN • Danemark 35 DKK • DOM 4 € Espagne 4 € • Éthiopie 65 birrs • Finlande 4,50 € • Grèce 4,50 € • Italie 4 € • Maroc 23 DH • Mauritanie 1 100 MRO • Norvège 45 NK • Pays-Bas 4 € Portugal cont. 4 € • RD Congo 5,50 $ US • Royaume-Uni 3,50 £ • Suisse 5,90 FS • Tunisie 3,30 DT • USA 6,50 $ US • Zone CFA 1 700 F CFA • ISSN 1950-1285



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Ce que je crois Béchir Ben Yahmed • bby@jeuneafrique.com

SAMEDI 12 OCTOBRE

L’opération Vautour

O

N A DIT DE LUI QU’IL FUT « peut-être le seul génie militaire du XXe siècle et l’un des plus grands de tous les temps ». Le général vietnamien Vô Nguyên Giáp nous a quittés le 4 octobre à l’âge de 102 ans, au terme d’une très longue vie, fort bien remplie. « La seule académie que j’ai fréquentée, c’est le maquis », disait-il. Ce qui ne l’a pas empêché d’être le principal architecte des défaites militaires des armées française, en 1954, et américaine, en 1975, à l’issue desquelles la France puis les États-Unis ont dû évacuer son pays, le Vietnam. Par l’une de ces coïncidences dont l’Histoire a le secret, nous avons commémoré la même semaine le quarantième anniversaire du déclenchement de la guerre israélo-arabe du Kippour : l’Égypte d’Anouar al-Sadate et la Syrie de Hafez al-Assad s’y étaient lancées le 6 octobre 1973 pour récupérer leurs territoires occupés depuis 1967 par Israël. n

La victoire du général Giáp sur l’armée française à Diên Biên Phu le 7 mai 1954 eut un retentissement sans précédent ; c’était la première fois, depuis des siècles, qu’une armée européenne était battue, en rase campagne et au terme d’un affrontement sans merci qui dura deux mois, par une cohorte de va-nu-pieds asiatiques qu’elle avait sous-estimés. Ce jour-là, le colonialisme dans son ensemble, et plus particulièrement celui de la France, fut frappé à mort. Certes, l’Indonésie et l’Inde avaient recouvré leur indépendance dès 1945 et 1947. Mais partout ailleurs, le colonialisme européen (France, Royaume-Uni, Espagne, Portugal) tenait bon, en dépit du fait que les deux grands vainqueurs de la guerre mondiale de 1939-1945, les États-Unis et l’URSS, voulaient sa disparition. Durement réprimés en Indochine, à Madagascar, comme en Afrique du Nord, les indépendantistes de l’époque, dont je faisais partie, s’étaient cassé les dents sur le « mur colonial ». Nous avions le plus grand mal à entretenir parmi nos troupes l’espoir de l’abattre à court ou à moyen terme. JEUNE AFRIQUE

Et tout d’un coup, grâce à Giáp, à son génie logistique, aux sacrifices qu’il a su obtenir de son peuple, nous entendîmes, le 7 mai 1954, le coup de tonnerre de Diên Biên Phu, éclatante victoire sur une armée coloniale qui se croyait invincible. n

Sans Diên Biên Phu, qui l’avait « sonné », le Parlement français n’aurait jamais fait appel, en mai 1954, à Pierre Mendès France et, après lui, à Edgar Faure. Dès le mois de juillet, à Genève, au nom de la France, Mendès concéda à la moitié de l’Indochine son indépendance. S’ensuivit une cascade de reculs du système colonial : discours de Mendès France à Carthage le 31 juillet 1954 et promesse d’autonomie interne de la Tunisie; conférence de Bandung en avril 1955 précédant de peu les négociations franco-marocaines d’Aix-lesBains et de La Celle-Saint-Cloud qui déboucheront sur le retour de Mohammed V sur son trône; indépendance du Maroc et de la Tunisie en 1956, du Ghana en 1957. La guerre d’Algérie, qui devait mener ce pays à son indépendance, fut engagée, elle, le 1er novembre 1954 : six mois après Diên Biên Phu. La loi-cadre de Gaston Defferre fut promulguée en juin 1956 ; le discours de Brazzaville du général de Gaulle, prononcé en août 1958 ; l’indépendance du Congo ex-belge, proclamée en 1960. Dans la foulée, les anciennes colonies françaises du Sud-Sahara ainsi que Madagascar recouvrèrent leur souveraineté, prélude à la libération des colonies portugaises. Ainsi s’est défait en six ans un empire colonial qui avait duré deux siècles. Le calendrier de ce « dégel » montre que Diên Biên Phu avait bel et bien sonné le glas de l’ère coloniale : nos indépendances, aux dates rappelées ci-dessus, procèdent de cet événement qui constitua un tournant de l’Histoire. n

Diên Biên Phu, en mai 1954, et la guerre du Kippour, en octobre 1973, ont, en outre, un point commun sur lequel il me paraît nécessaire d’attirer l’attention. Il est désormais établi que, lors de ces deux affrontements, fut envisagé, le plus sérieusement du monde, par des responsables de haut niveau, français d’abord, israéliens ensuite, le recours… à l’arme atomique. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


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Ce que je crois Dévastatrice, terrifiante, cette arme nouvelle n’avait été utilisée qu’une fois, en août 1945, par les États-Unis contre le Japon, à Hiroshima et à Nagasaki. Les deux villes furent rayées de la carte. n

1- Pour tenter de sauver Diên Biên Phu, le chef d’étatmajor français de l’époque, le général Ely, se rendit à Washington le 20 mars 1954. Sur ordre de son gouvernement (dirigé par Joseph Laniel et dont le ministre des Affaires étrangères était Georges Bidault), il demanda aux États-Unis d’intervenir au besoin nucléairement contre Giáp et son armée, qui, sans cela, submergeraient le camp retranché français qu’ils assiégeaient. L’opération Vautour fut élaborée en toute hâte par les militaires américains. Elle prévoyait l’utilisation de trois bombes atomiques tactiques pour détruire les positions des Vietnamiens. Le vice-président Nixon a milité pour sa mise en œuvre, mais le président Eisenhower décida in extremis de rejeter l’opération Vautour, en grande partie, diton, pour ne pas risquer de perdre le Japon, qu’aurait horrifié une deuxième utilisation, par les Américains, de l’arme nucléaire contre des Asiatiques. n

2- La guerre du Kippour, elle, fut déclenchée par l’Égypte et la Syrie avec pour seul objectif de reconquérir le Sinaï (égyptien) et le Golan (syrien), occupés par les Israéliens depuis la guerre dite des Six Jours, de juin 1967. L’effet de surprise fut total et, en deux jours, Égyptiens

et Syriens refoulèrent les troupes israéliennes et récupérèrent une partie de leurs territoires. N’ayant jamais expérimenté pareille situation, les dirigeants israéliens de l’époque, en particulier le général Dayan, chef d’état-major, furent saisis de ce qui ressemblait à de la panique. Leur pays allait devoir lutter pour sa survie, pensèrent-ils, et il fallait donc, sans plus attendre, utiliser l’arme atomique contre les armées arabes. Le général Dayan, qui en avait la responsabilité et la capacité, ordonna de préparer les avions affectés à cette opération et de charger les bombes. Je tiens d’un responsable américain de haut rang, affecté au suivi de la guerre et dont j’avais la confiance, que les avions israéliens, armés de bombes nucléaires, se tenaient prêts à l’envol fatidique. L’ordre n’est pas venu parce que le Premier ministre israélien de l’époque, Golda Meir – retenue par les États-Unis –, refusa de le donner. Et parce que, sur le terrain, à partir du quatrième jour, avec l’aide des ÉtatsUnis, la situation militaire commença à se stabiliser, avant de se retourner en faveur d’Israël. n

Concluez vous-même : contrairement à ce qu’on nous serine, l’arme nucléaire n’est pas moins dangereuse lorsque les cerveaux et les mains de ceux ou celles qui ont la possibilité de l’utiliser appartiennent à des personnes de race blanche. l Lire aussi en pp. 68-69 l’hommage que lui rend notre ami Jean Lacouture.

Humour, saillies et sagesse Pour vous faire sourire, grincer des dents – ou réfléchir –, ici, chaque semaine, une sélection subjective, la mienne, de ce qui a été dit ou écrit au cours des siècles par des hommes et des femmes qui avaient des choses intéressantes ou drôles à nous dire. B.B.Y. u On n’est trahi que par ses proches amis. Ahmadou Kourouma u L’homme d’État se distingue à sa capacité de prendre en compte les terres inconnues, une fois le reste exploré. François Mitterrand u Les livres qui se vendent le mieux sont les livres de cuisine et les livres de régimes. Les premiers vous expliquent comment faire la cuisine et les autres comment ne pas la manger. Andy Rooney u La fortune vient en dormant… mais pas en dormant seule. Caroline Otero N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

u Un geste, un événement dans le petit monde colorié des hommes n’est jamais absurde que relativement : par rapport aux circonstances qui l’accompagnent. Jean-Paul Sartre u Je vois pas pourquoi on les paye autant les conducteurs de train, y a qu’à suivre les rails. Les Nouvelles Brèves de comptoir u Des enfants ! Je préfère en commencer cent qu’en terminer un seul. Pauline Bonaparte u La volonté ne dépend pas de l’âge : sans volonté, on vit dans le vide pendant cent ans. Proverbe chinois

u Aimer les femmes intelligentes est un plaisir de pédéraste. Charles Baudelaire u On n’est pas ridicule dans une situation ridicule, dès qu’on a l’esprit d’être le premier à en rire. Comtesse Diane u Croyez tout le monde honnête et vivez avec tous comme avec des fripons. Cardinal de Mazarin u Fermer les maisons closes, c’est plus qu’un crime, c’est un pléonasme. Arletty u Un académicien est un homme qui se change en fauteuil quand il meurt. Jean Cocteau JEUNE AFRIQUE


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Éditorial

PHOTOS DE COUVERTURES : AFRIQUE SUBSAHARIENNE : ARCHIVES JA ; YANNICK COUPANNEC ÉDITION MAGHREB & MOYEN-ORIENT ET INTERNATIONALE : FRANÇOIS GUENET

François Soudan

Le roi et le journaliste

A

li Anouzla. Cela va faire un mois que ce journaliste marocain, directeur du site d’information Lakome, est détenu à la prison de Salé en attendant son éventuel jugement. Chef d’inculpation: « apologie du terrorisme, incitation à l’exécution d’actes terroristes ». Motif : avoir publié un lien renvoyant à une vidéo d’Al-Qaïda appelant au jihad au Maroc – en d’autres termes, au régicide – sur fond nauséeux d’homophobie. Autant le dire tout de suite : notre site, jeuneafrique.com, comme beaucoup d’autres, s’est toujours gardé de relayer ce type de message exhortant à la violence terroriste. On connaît l’impact létal que peut avoir la diffusion de telles images, a fortiori au Maroc, où une demi-douzaine de cellules jihadistes ont été démantelées depuis un an, cent vingt depuis une décennie. Ali Anouzla, lui, a choisi de s’abstraire de cette responsabilité de façon détournée, en connectant ses visiteurs au site d’un quotidien espagnol certes respectable, El País, mais dont le tropisme à l’encontre du régime marocain obscurcit parfois le jugement – nul n’a oublié sa couverture des événements de Gdaïm Izik, au Sahara occidental, il y a trois ans, illustrées de photos d’enfants palestiniens blessés… à Gaza – et qui n’a eu aucune hésitation à se faire le vecteur de la propagande d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Reste qu’afficher son désaccord avec cette initiative et critiquer les méthodes de Lakome ne valent pas approbation de l’incarcération de son directeur. La jurisprudence en vigueur dans tout État de droit veut qu’un journaliste, s’il est évidemment un justiciable comme les autres, donc susceptible d’être poursuivi et au besoin condamné, n’aille pas en prison pour un délit de presse. En outre, comme on le sait, embastiller un journaliste est tout aussi contre-productif, en termes d’image, pour qui en donne l’ordre que productif, en termes de notoriété, pour celui qui se voit ipso facto propulsé au rang de martyr de la liberté d’expression.

10 LIBYE ÉTAT NÉANT Un raid américain en plein cœur de Tripoli, un Premier ministre enlevé au saut du lit, des milices qui font régner leur loi… Deux ans après la chute de Kaddafi, rien ne fonctionne dans la pétaudière libyenne.

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CAMEROUN LE FANTÔME DE DAKAR Depuis vingt-quatre ans, la dépouille d’Ahmadou Ahidjo repose au Sénégal… La veuve de l’ancien président réclame son rapatriement, mais Paul Biya ne lève pas le petit doigt. Retour sur un psychodrame.

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Ce que je crois Par Béchir Ben Yahmed Confidentiel

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L A SEM A IN E D E J EU N E A F RIQ U E

Du coup, le nécessaire débat de fond sur ce qu’il est possible d’écrire et de diffuser dans le cadre d’affaires aussi délicates que celle-là – relayer une vidéo d’Al-Qaïda appelant au terrorisme fait-il de celui qui s’y livre le complice d’une apologie de crimes de guerre ? – passe à la trappe. Il n’est plus question d’éthique et de déontologie, encore moins des motivations d’un homme passé du conformisme makhzéno-compatible de la presse saoudienne au journalisme débridé des févriéristes à la suite d’un accident de parcours professionnel, mais de pénal et de punition pour l’exemple.

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Libye État néant Salaheddine Mezouar Leur meilleur ennemi Janet Yellen Reine du billet vert Nigeria Rendez le magot de Sani Abacha ! Édition Mon grand-père, ce bourreau Fortune Crésus était une femme RD Congo Si Soco saccage… Palmarès Seconds derrière les dragons Tour du monde

Certes, le « cas » Anouzla n’émeut guère au Maroc au-delà du cercle restreint de la société civile politisée. Mais on sait cette dernière active sur la Toile, audible auprès des chancelleries et des médias occidentaux et surtout inspirée, si ce n’est organisée, par des leaders d’opinion dont l’objectif affiché est de contraindre le roi Mohammed VI à revêtir les étroits habits constitutionnels d’un Juan Carlos d’Espagne ou d’un Philippe de Belgique. Eux font flèche de tout bois, sans se préoccuper des conséquences dans un pays aussi complexe et fragile que celui-là. Pourquoi leur donner des munitions supplémentaires ? l

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G RA N D A N G L E

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Afrique du Nord L’Internationale berbère

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A F RIQ U E SU BSA H A RIEN N E

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Cameroun Le fantôme de Dakar En vérité Outrage post-mortem Côte d’Ivoire Bédié ouvre le bal des prétendants… et Ouattara tente de ramener le FPI dans l’arène

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JEUNE AFRIQUE


Dans Jeune Afrique et nulle part ailleurs GRAND ANGLE

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L’Internationale

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DOSSIER SANTÉ À QUAND DES LABOS AU SUD DU SAHARA ? Face à la concurrence asiatique et aux barrières réglementaires, les acteurs locaux peinent à émerger dans les pays francophones. Spécial 8 pages

AFRIQUE DU NORD

CÔTE D’IVOIRE CACAO, LA RÉFORME INACHEVÉE En garantissant un prix plancher aux planteurs, le pays a prouvé sa capacité à mieux répartir les richesses de la filière.

berbère Les Amazighs occupent une place à part. Souvent marginalisée par les États, leur culture a survécu. Au prix d’une lutte constante.

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TUNISIE AGENTS TROUBLES Interférences dans le circuit de décision, dissimulation d’informations, développement d’une police parallèle au service d’intérêts partisans… Le ministère de l’Intérieur baigne dans l’opacité.

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Il nous a rendu visite au 57 bis Pierre Moussa, président de la Commission de la Cemac Madagascar Un candidat peut en cacher un autre

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M AGHREB & MOY E N - O R I E N T

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Tunisie Agents troubles Tribune Pour une nouvelle approche de la prostitution au Maroc Moyen-Orient Nouvelles frontières Football Tel-Aviv continue de bétonner Algérie Retour à In Amenas

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É CON OMIE

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Côte d’Ivoire Cacao, la réforme inachevée Les indiscrets Hôtellerie Mangalis fait ses gammes

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FRANCE LES MARCHEURS SONT FATIGUÉS En 1983, une poignée de jeunes d’origine étrangère entreprenaient une marche pour l’égalité. Trente ans après, l’heure est à la désillusion.

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Interview José Lopez, vice-président exécutif de Nestlé, et Nandu Nandkishore, directeur de Nestlé pour l’Asie, l’Océanie, l’Afrique et le Moyen-Orient Automobile et équipement Le marathonien belge du Katanga Dans les kiosques L’incroyable essor des banques africaines Baromètre

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D O SSIER SA N T É

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Génériques À quand des labos au sud du Sahara ?

EUROPE, AMÉR I Q U E S, A S I E

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C U LT U RE & MÉD IA S

France Les marcheurs sont fatigués États-Unis Les exclus de l’Obamacare Hommage Vô Nguyên Giáp, l’éternel révolté Parcours Jacques Vandescure, l’art du rebond Unesco Calculs et trahisons

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Photographie Le studio ambulant d’Oumar Ly Cinéma Palestinien à 100 % Arts plastiques À l’ombre des jeunes filles en fleur La semaine culturelle de Jeune Afrique

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JEUNE AFRIQUE

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VOUS & NOUS Le courrier des lecteurs Post-scriptum

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AFP

UNE QUÉBÉCOISE À MADA

p Minoru Kiuchi, vice-ministre japonais des Affaires étrangères (à dr.), et Koichi Kawana, président de la société JJC, sur le site de la prise d’otages d’In Amenas, le 20 janvier.

Japon-Afrique Le renseignement avant tout

L

e ministère japonais de la Défense va considérablement renforcer sa présence dans le domaine du renseignement militaire en Afrique. Des agents vont ainsi être déployés dans les ambassades à Djibouti (où le Japon possède une base navale), Rabat, Abuja, Addis-Abeba, Nairobi et Alger. En janvier 2013, la sanglante prise d’otages d’In Amenas, en Algérie, au cours de laquelle dix Japonais ont trouvé la mort, avait traumatisé le gouvernement de Tokyo et mis en lumière l’incapacité de son ambassade en Algérie à obtenir des informations de manière autonome. Dans son rapport 2013 sur le terrorisme dans le monde, l’Agence des renseignements pour la sécurité publique japonaise consacre un chapitre aux activités d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et au recrutement en son sein de jihadistes marocains, tunisiens et libyens. L’agence évoque également des « alliances » croisées entre Aqmi, Al-Qaïda dans la péninsule Arabique (Aqpa) et… le Front Polisario, basé en Algérie. l

FRANCOPHONIE BISBILLES DIOUF-BENGUIGUI

Ya m i n a B e n g u i g u i , l a ministre française déléguée à la Francophonie, souhaite organiser en mars 2014 la deuxième édition de son Forum mondial des femmes francophones. Problème : cette manifestation ressemble fâcheusement au Réseau des femmes francophones N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

qu’Abdou Diouf, le secrétaire général de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), a prévu de lancer le 25 octobre. Pourquoi un tel manque de coordination, alors que le ministère et le siège parisien de l’OIF sont distants de moins de 1 km ? D’abord, parce que Benguigui, qui a repris en 2012 un ministère qui n’existait plus depuis

cinq ans, a besoin de marquer son territoire. Ensuite, parce qu’avant de passer la main (quoique…) lors du sommet de Dakar, en 2014, l’ancien président sénégalais s’efforce d’enrichirsonbilan.Désireuse, laisse-t-on entendre dans son entourage, de « dépoussiérer » la Francophonie, Benguigui n’exclut pas d’être candidate pour lui succéder.

C’est à Louise Fréchette (67 ans) qu’Abdou Diouf va confier la direction de la mission que l’OIF dépêchera à Madagascar pour le premier tour de la présidentielle du 25octobre.NativedeMontréal, elle fut de 1998 à 2006 adjointe de Kofi Annan au secrétariat général de l’ONU. Ce sera son premier séjour dans la Grande Île. Sa mission comptera une soixantaine d’observateurs (deux fois plus qu’au Mali) originaires d’une vingtaine de pays et répartis dans vingtcinq localités. LE CHIFFRE

120 MILLIONS Après cinq années de crise, c’est le nombre d’Européens menacés de sombrer dans la misère, quand ils n’y vivent pas déjà, selon la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge.

FRANCE/CONGO-BRAZZA VALETTE PROLONGE

Nommé le 30 août au poste d’ambassadeur de France au Congo, le diplomate Jacques Maillard n’a toujours pas rejoint Brazzaville. Souffrant, il est très probable qu’il doive y renoncer définitivement, et le Quai d’Orsay s’active déjà à dénicher un remplaçant. En attendant, Jean-François Valette, le sortant, va devoir se résoudre à jouer les prolongations. Et à célébrer le 14 décembre son quatrième anniversaire à la « Case de Gaulle », résidence des ambassadeursde France sur les bords du fleuve Congo. CENTRAFRIQUE FIN DE PARTIE POUR ASSIMEH

Pressé par la communauté internationale et les États de la sous-région de faire le ménage dans son entourage, Michel JEUNE AFRIQUE


Retrouvez en page 76 notre rubrique « Les indiscrets », consacrée aux informations confidentielles économiques

Politique, économie, culture & société Djotodia négocie le départ du « général » Moussa Assimeh, l’undeschefsdeguerrelesplus puissants du pays. L’intéressé demanderaitenéchange,outre une forte somme d’argent, l’intégration de ses quelque sept cents hommes dans les futures Forces de défense et de sécurité. Ancien colonel de l’armée soudanaise originaire du Darfour, Assimeh appartient à une tribu de nomades arabesDjandjawid.Convaincu de pouvoir jouer un rôle au côtéde Djotodia, qui s’est longtemps appuyé sur lui, il faisait « tout pour se fondre dans le paysage local », explique une source sécuritaire. REVOILÀ BOZIZÉ !

Sa présence et son activisme ayant été jugés gênants par les Français, qui le lui ont discrètement fait savoir, François Bozizé, l’ancien président centrafricain, a, le 24septembre,quittéParispour Bruxelles, Addis-Abeba, puis Nairobi, où il avait déjà longuement séjourné en juin et en juillet derniers. Six mois après sa chute, Bozizé, qui ne manque pas de partisans dans les milices anti-balakas – lesquelles combattent les ex-rebelles de la Séléka dans sa région natale de Bossangoa –, n’a pas renoncé à revenir à Bangui. Mais il se heurte à un

Tunisie Ennahdha voit double LES RÉUNIONS DU MAJLIS EL-CHOURA, l’instance décisionnelle d’Ennahdha qui se réunit chaque weekend, se suivent et se ressemblent. Les pressions, internes et externes, visant à contraindre le parti islamiste à quitter le pouvoir – ou, au moins, à le partager avec l’opposition – sont telles que deux camps ont fini par se constituer. Les affrontements entre eux sont parfois très virulents. Les modérés estiment que l’intérêt d’Ennahdha est de lâcher du lest et de partager les responsabilités en cette période de crise. Mais les durs n’en démordent pas : ils ont remporté les élections d’octobre 2011 et refusent toute concession. Les motifs de division (conception du parti, rôle de l’État, projet de société, relations internationales, etc.) sont si nombreux et si graves que beaucoup en viennent à envisager une scission de la formation dirigée par Rached Ghannouchi. « Notre plus grand ennemi n’est pas l’opposition, c’est nous-même. Si l’on ne sépare pas colombes et faucons, notre parti court à sa perte », analyse l’un de ses membres les plus éminents. l

double problème. 1. Il manque cruellement de moyens financiers. 2. La perspective de son retour ne figure sur aucun agenda, qu’il soit français, onusien ou régional. ÉDITION SERGE DANIEL RÉCIDIVE

Après Aqmi, l’industrie de l’enlèvement, paru chez Fayard au début de 2012, le journaliste franco-béninois Serge Daniel s’apprête à publier Les Mafias du Sahel aux Éditions Descartes. Au menu : les

filières de la drogue et de l’immigration clandestine, des entretiens avec plusieurs jihadistes appréhendés dans le Nord-Mali lors de l’opération Serval, des révélations sur l’intervention française et le rôle du capitaine Sanogo lors de la présidentielle. Parution prévue en février 2014. AFRIQUE CENTRALE CONCLAVE POLICIER

Comment lutter contre la criminalité transfrontalière ? Les participants à la 14e session

FAROUK BATICHE/AFP

Algérie Valse diplomatique APRÈS LE REMANIEMENT MINISTÉRIEL, la valse des ambassadeurs a commencé. Ancien Premier ministre et ancien chef du Rassemblement national démocratique (RND), Ahmed Ouyahia devrait être nommé ambassadeur à Washington. Abdelaziz Belkhadem, son prédécesseur, qui dirigea le FLN jusqu’en janvier dernier, devrait pour sa part atterrir à Riyad, et le sénateur Abou Bakr Benbouzid, ancien ministre de l’Éducation nationale, à Moscou, où il remplacerait Smail Chergui. Ce dernier a, quant à lui, été envoyé à Addis-Abeba en remplacement de Ramtane Lamamra, nommé en septembre à la tête de la diplomatie. Comment interpréter les nominations d’Ouyahia et de Belkhadem, probables candidats à la succession de Bouteflika p Ahmed en avril 2014 ? Comme une volonté de les éloigner Ouyahia, futur de la scène politique ? Ou comme une récompense ambassadeur à Washington ? offerte à deux fidèles du chef de l’État ? l JEUNE AFRIQUE

du Comité des chefs de police de l’Afrique centrale (CCPAC) ont beaucoup réfléchi à la question, du 7 au 11 octobre à Kinshasa. Les représentants des huit pays concernés misent sur un « plan plus souple » que la traditionnelle procédure d’extradition des délinquants, jugée « trop lourde et trop lente ». Bref, il s’agit de contourner la voie judiciaire et de privilégier la remise « de police à police ». Les criminels en cavale à l’étranger sont prévenus : une fois arrêtés dans un État membre du CCPAC, ils seront rapidement remis à la police de leur pays d’origine.

MADAGASCAR UN RAJOELINA PEUT EN CACHER UN AUTRE Ce n’est pas un, mais deux Rajoelina qui soutiennent la candidature de Hery Rajaonarimampianina à l’élection présidentielle malgache. Après Andry, le président de la Transition, voici Patrick (aucun lien de parenté entre les deux), un haut fonctionnaire francomalgache qui enseigne depuis plus de vingt ans à l’École supérieure de journalisme de Paris et fut membre de plusieurs cabinets ministériels en France. Bien que partisan de ce qu’il appelle « la troisième voie » (un régime politico-militaire), Patrick Rajoelina a décidé de rejoindre l’équipe de campagne de Hery, l’un de ses vieux amis. Sa mission : mettre depuis Paris ses réseaux au service de son candidat et convaincre les Occidentaux que celui-ci est « le meilleur ». Proche des socialistes, Rajoelina est un ami de Yamina Benguigui, la ministre déléguée à la Francophonie, qui, en avril, lui a remis la Légion d’honneur. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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La semaine de Jeune Afrique

Un raid américain en plein cœur de Tripoli, un Premier ministre enlevé au saut du lit, des milices qui font régner leur loi… Deux ans après la chute de Kaddafi, rien ne fonctionne dans la pétaudière libyenne. YOUSSEF AÏT AKDIM

«

L

a Libye n’est pas à un car refour. En réalité, nous sommes coincés dans un rond-point dont nous faisons le tour sans savoir quelle sortie prendre. » Devant un aréopage d’investisseurs réunis à Londres le 18 septembre, Alkilani al-Jazi, le ministre libyen des Finances, n’y est pas allé par quatre chemins pour décrire l’anarchie qui règne dans son pays. Quitte à refroidir les ardeurs de ses interlocuteurs… Si le marketing politique n’est à l’évidence pas le point fort des dirigeants de la transition, leur franchise, elle, ne fait pas de doute. Et elle est parfois désarmante. Interviewé quelques jours plus tard par Christiane Amanpour, la journaliste vedette de la chaîne américaine CNN, en marge de l’assemblée générale des Nations unies, Ali Zeidan, le Premier ministre, a eu cette réflexion candide : « La Libye n’est pas un État en faillite car l’État n’existe pas encore. Nous sommes en train d’en créer un. Il n’y a aucune honte à cela. » En rentrant se coucher dans sa chambre du 21e étage de l’hôtel Corinthia, à Tripoli, dans la nuit du 9 au 10 octobre, Zeidan avait donc déjà bien des soucis en tête. Mais de là à s’imaginer qu’une poignée de miliciens patibulaires et surarmés le tireraient de son lit avant l’aube… Lorsque ses ravisseurs font irruption dans la pièce, celui qui fut diplomate avant un long exil en Suisse et en Allemagne, ne cherche pas à résister. Il ordonne à ses gardes du corps de ne pas bouger eux non plus : dans le lobby, des dizaines de complices assurent une présence intimidante. Il se rend, en galabiya [pyjama traditionnel] et sans avoir le temps de chausser les lunettes qui corrigent son strabisme marqué. L’un de ses kidnappeurs en profite pour le photographier avec son téléphone portable. L’image est immédiatement diffusée sur Facebook et aux quatre coins de la planète. Tripoli se couche habituellement tard, et se réveille tout aussi tard. Ses habitants découvriront la photo à l’heure du petit-déjeuner. Dans la foulée, la Chambre d’opérations des révolutionnaires de Libye (CORL) revendique N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

LIBYE

MAHMUD TURKIA/AFP

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État néant l’arrestation de Zeidan « sur ordre du parquet ». Cette milice agit sous l’égide des ministères de l’Intérieur et de la Défense. Les Tripolitains ont découvert ce groupe au printemps 2013. Dans le pays, le débat fait alors rage entre partisans et adversaires de la loi d’exclusion politique, qui vise à écarter du pouvoir et de l’administration toute personne ayant collaboré de près ou de loin avec le régime Kaddafi. Sit-in, occupations de ministères, menaces verbales, enlèvements… De mars à mai, les « brigades révolutionnaires » alliées aux salafistes intimident JEUNE AFRIQUE


le Congrès national général (CNG, le Parlement) et le forcent littéralement à adopter cette loi, dont Mohamed el-Megaryef, le président du CNG, pourtant opposant à Kaddafi depuis plus de trente ans, est le premier à faire les frais. Forts de ce succès, les miliciens tentent depuis lors de démettre Ali Zeidan de son poste de Premier ministre. Parmi ces groupes armés qui font aujourd’hui la pluie et le beau temps, paradant encore régulièrement dans les rues de Tripoli avec leurs convois de pickups surmontés d’une mitrailleuse 14,5, la CORL est la seule à être JEUNE AFRIQUE

 Ali Zeidan à Tripoli, le 10 octobre, juste après sa libération.

adoubée par le président du Parlement. Le 6 octobre, ce dernier, Nouri Bousahmein, nommait à sa tête un certain Abou Obeid alZaouïa, dont on ne sait quasiment rien, sinon que ce cheikh de Zawiyah était surtout connu localement pour diriger des activités caritatives. Son premier fait d’armes, un communiqué au ton martial, diffusé le 7 octobre, promettait de « poursuivre les complices [de l’enlèvement d’Abou Anas al-Libi] et de leur appliquer le qasâs [la loi du talion] ». La menace, mise à exécution, visait donc Ali Zeidan. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


La semaine de J.A. L’événement C’est de retour d’une visite au Maroc et en Tunisie que ce dernier a été rattrapé par le rapt, le 5 octobre et en plein cœur de la capitale libyenne, de son compatriote Abou Anas al-Libi. De son vrai nom Nazih Abdelhamid al-Raghie, ce vétéran du jihad en Afghanistan était recherché activement par Washington pour son rôle présumé dans la préparation de l’attentat contre l’ambassade américaine de Nairobi, en 1998. FEU VERT. Libi rentrait chez lui, dans le quartier de Naflein, après la prière du fajr, quand il a été enlevé par des « étrangers armés et masqués », selon des témoins oculaires. Le commando des forces spéciales américaines, qui avait pris place dans trois véhicules banalisés, a barré la route puis brisé la vitre pour extirper Libi de sa voiture. Toujours selon les témoins, « certains membres du commando s’exprimaient dans le dialecte local ». Ce qui devait être une opération secrète a rapidement tourné à l’imbroglio. Pour les Libyens uniquement, car, de l’autre côté de l’Atlantique, les responsables américains se félicitent plutôt d’une réussite qui permet de masquer l’échec du raid concomitant visant le chef militaire des Shebab en Somalie. Plus gênant encore pour Zeidan : selon le New York Times, le gouvernement libyen, soumis à d’intenses pressions, aurait fini par donner son feu vert aux Américains pour la capture de Libi et celle d’Ahmed Abou Khattala, suspect numéro un de l’attentat du consulat de Benghazi (qui fit quatre morts américains, dont l’ambassadeur Christopher Stevens, le 11 septembre 2012). Le gouvernement libyen a beau protester – Tripoli n’a pas été tenu au courant des détails

ISMAIL ZETOUNI/REUTERS

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 Poignée de main au Premier ministère, le 10 octobre dans l’après-midi, entre Ali Zeidan (à g.) et Nouri Bousahmein, le président du Parlement. Le second est le « parrain » de la milice fortement soupçonnée d’avoir perpétré l’éphémère enlèvement du premier.

MILICES & CO DEPUIS 2011, le phénomène des groupes armés n’a cessé de prendre de l’ampleur. Sous Kaddafi, l’armée était à la fois faible en effectifs et suréquipée. En 2011, on estime qu’elle s’est battue contre près de 20 000 rebelles. Ceux qu’on appelle les thuwar [« révolutionnaires »] sont aujourd’hui environ 200 000, répartis en quelque 300 milices de tout acabit. En Cyrénaïque, la Brigade des martyrs du 17 février compte 3500 hommes. Elle était chargée de protéger le consulat américain de Benghazi, attaqué le 11 septembre 2012. Un attentat attribué à des groupes radicaux tels Ansar el-Charia et N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

la brigade Omar Abdel Rahman. En Tripolitaine, le Conseil militaire de Zintan prétend disposer de 4 000 hommes. À Misrata, le conseil local compte 820 véhicules blindés. Certaines milices ont rejoint les forces auxiliaires de l’armée et/ou de la police. C’est le cas des Forces du bouclier libyen, placées sous l’autorité du chef d’état-major des armées. Ces tentatives de cooptation n’ont pas mis fin aux différents trafics – armes, drogues, immigration, enlèvements… – très lucratifs, notamment dans le Fezzan, la vaste région du Sud, véritable nœud d’activités criminelles. l Y.A.A.

de l’opération ni de son timing –, les déclarations de Zeidan ne calment pas le jeu. Dès l’annonce du rapt de Libi, le Premier ministre déclare en effet plutôt maladroitement : « Les Américains nous ont aidés durant notre révolution. Cette relation ne doit pas être affectée par cet événement, que nous réglerons de la manière appropriée. » Entre-temps, les réseaux jihadistes et la mouvance salafiste s’organisent. Un appel à manifester est peu suivi à Benghazi, où les islamistes dominent par les armes, mais où la population est lassée par des mois de violence. Deborah Jones, l’ambassadrice des États-Unis, est convoquée pour un entretien par le gouvernement libyen. Incapables depuis des mois d’accoucher d’une feuille de route pour la nouvelle Constitution, les parlementaires du CNG se réunissent d’urgence pour condamner la violation de la souveraineté libyenne. En coulisses, on prépare une motion de censure pour faire tomber Zeidan. Le rôle joué par Nouri Bousahmein, le président du CNG, dans cette curée anti-Zeidan soulève d’ailleurs de nombreuses interrogations. Amazigh de Zouara, réputé proche des Frères musulmans, il a parrainé la création de la CORL responsable de l’enlèvement du Premier ministre. Lors de la conférence de presse qui a suivi la libération de ce dernier, il est apparu plutôt embarrassé. Enlevé par des rebelles islamistes qui le tiennent pour responsable du rapt de Libi, ex-jihadiste membre du Groupe islamique combattant libyen (GICL), Zeidan n’a paradoxalement dû son salut qu’à l’intervention de Khalid al-Sharif, lui-même un ancien du GICL. Mais dans cette Libye où tout part à vau-l’eau, on n’est plus à un paradoxe près… Dans ce contexte, l’ancien diplomate reconverti dans l’import-export de matériel médical en Allemagne apparaît bien isolé dans un monde de cow-boys où tous les coups sont permis. Deux ans après la fin brutale du régime Kaddafi, la Libye se cherche toujours une improbable stabilité. Bienvenue au Far West… l JEUNE AFRIQUE



La semaine de J.A. Les gens

Salaheddine Mezouar Leur meilleur ennemi

en 2010 la présidence du RNI à Mustapha Mansouri, au terme d’une campagne parfois qualifiée de « putschiste ». Réélu à la tête du RNI en avril 2012, il s’attelle depuis à réformer ce parti « de notables et de technocrates » pour l’ouvrir aux jeunes, aux femmes, et l’ancrer dans le territoire. Si, étudiant, Mezouar militait à l’extrême gauche, le zaïm du RNI se révèle un libéral de centre droit pragmatique, n’hésitant pas à s’associer au PJD qu’il fustigeait hier. « Comment peut-on s’allier avec des partis aux projets et principes diamétralement opposés à ceux du RNI ? » demandait-il en 2009. En mars 2013, près d’un an et demi après sa défaite et la victoire du PJD aux législatives, il assénait : « L’exécutif Benkirane est le plus mauvais gouvernement de l’histoire du pays. » Un jugement qu’il ne réservera sans doute pas à la nouvelle équipe de Benkirane, dont sa formation est devenue une pièce maîtresse.

Il était leur adversaire, le voici leur allié. Le patron du Rassemblement national des indépendants tire les islamistes d’un mauvais pas en entrant dans le nouveau gouvernement marocain. À ses conditions.

HASSAN OUAZZANI POUR J.A.

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p À l’âge de 60 ans, il devient ministre des Affaires étrangères.

S

alaheddine Mezouar tient sa revanche.Prèsdedeuxansaprès l’échec électoral cinglant de sa coalition face aux islamistes du Parti de la justice et du développement (PJD), le chef du Rassemblement national des indépendants (RNI) a obtenu huit portefeuilles dans le second gouvernement d’Abdelilah Benkirane qui a prêté serment le 10 octobre. Les marchandages ont duré trois mois depuis que les six ministres de l’Istiqlal du précédent gouvernement ont claqué la porte début juillet, faisant peser la menace d’élections anticipées. Conclu à la veille de la rentrée parlementaire, l’accord donne au RNI les portefeuilles stratégiques des

Finances, de l’Industrie et des Affaires étrangères, ce dernier revenant à Mezouar, dont l’expérience, en ce domaine, reste à construire. Une concession pour celui qui, à 60 ans, lorgnait le poste de grand argentier, qu’il a occupé entre 2007 et 2012, après avoir dirigé pendant trois ans le ministère de l’Industrie, du Commerce et de la mise à niveau de l’Économie. Issu du secteur privé, cet ancien basketteur né à Meknès est un meneur d’hommes, entré au comité central du RNI très vite après avoir rejoint le parti, en 2002. Il obtiendra son premier ministère deux ans plus tard. Ambitieux, il ne cible que les instances de direction. À la tête du « mouvement des réformateurs », il a ravi

MANŒUVRE. De son côté, le PJD lui a

rendu coup pour coup – avant de voir en lui l’homme providentiel qui allait sauver son gouvernement. « Comment voulezvous que les Marocains accordent leur confiance à quelqu’un comme vous? » lui avait lancé Benkirane en novembre 2011. À présent, ses anciens adversaires islamistes seraient sans doute moins prompts à lui rappeler les primes qu’il s’était versées au ministère des Finances ou à l’accuser d’être inféodé à Ilyas El Omari et à Fouad Ali El Himma du Parti Authenticité et Modernité (PAM), dont le RNI est proche. « Benkirane aura à gérer un gouvernement en deux blocs. C’est une défaite politique pour le PJD, qui va devoir rendre des comptes à sa base, réticente à l’égard de cette alliance », analyse Brahim Fassi Fihri, du think tank Amadeus. Un observateur de la politique marocaine va plus loin : « Le PJD est mis en minorité. Mezouar et le RNI n’ont qu’une marge de manœuvre très relative par rapport au Palais. C’est à nouveau le roi qui gouverne. » l LAURENT DE SAINT PÉRIER, envoyé spécial à Rabat

NOMINATIONS

DIDIER DACKO MALI Cet ex-colonel fraîchement élevé au grade de général de brigade devient chef d’état-major général adjoint des armées. Depuis le début de l’intervention française, il dirigeait les opérations dans le nord du pays. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

MOHAMED HASSAD MAROC Ce polytechnicien âgé de 61 ans a été nommé ministre de l’Intérieur dans le nouveau gouvernement. Depuis 2005, il était wali de la région deTanger-Tétouan et gouverneur de la préfecture deTanger-Asilah. JEUNE AFRIQUE


EN HAUSSE

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RACHID DERICHE

Janet Yellen Reine du billet vert DR

Cette économiste âgée de 67 ans a été nommée par Barack Obama à la tête de la Banque centrale des États-Unis.

Cet Algérien s’est vu attribuer par l’Académie des sciences française le prix de la fondation EADS en informatique. Diplômé de l’École polytechnique d’Alger, il est directeur de recherche à l’Inria, à Sophia-Antipolis (sud de la France). PAPE DIOUF

RYADH BENLAHRECH JEUNE AFRIQUE

DR DR

Ce chirurgien qui soigne les femmes victimes de viols en RD Congo a reçu le Prix pour la prévention des conflits de la Fondation Chirac. Il y a quelques semaines, il s’était vu décerner le Right Livelihood Award, qualifié de « Nobel alternatif ». EN BAISSE

ABACA

ALAIN DELON Dans un entretien au journal helvétique Le Matin, l’acteur franco-suisse a apporté son soutien implicite au Front national. Il a dit « approuver, pousser, et comprendre parfaitement » la montée de l’extrême droite. MANDLA MANDELA

PUISSANCE. En tant que présidente de la Fed, elle sera l’une

des personnalités les plus puissantes du monde. Elle devra notamment conduire le durcissement annoncé de la politique monétaire sans perdre de vue les objectifs de réduction du chômage (à moins de 7 % contre 7,3 % aujourd’hui) et de maintien d’une inflation modérée – bref, sans casser la croissance. Un changement qui aura des répercussions sur les autres économies du globe, notamment émergentes. Sa première déclaration sur la nécessité de « soutenir la reprise », qui suggère que la transition ne sera pas trop brutale, a été bien accueillie par les marchés financiers. l

L’ex-président de l’Olympique de Marseille a été décoré de la Légion d’honneur par François Hollande lui-même. Le FrancoSénégalais est à ce jour le seul Noir à avoir dirigé un club de football de première division en Europe. DENIS MUKWEGE

DR

AUDE GUERRUCCI/NEWSCOM/SIPA

U

nique favorite depuis le retrait de son principal concurrent, Larry Summers, Janet Yellen sera – sous réserve d’approbation de sa nomination par le Sénat – la première femme à présider la Banque centrale (Réserve fédérale, ou Fed) des États-Unis. Elle est « exceptionnellement qualifiée » pour succéder, le 31 janvier, à Ben Bernanke, a estimé le président Barack Obama en dévoilant son choix, le 9 octobre. Et pour cause : à l’âge de 67 ans, cette native de Brooklyn (New York) a réalisé un parcours sans faute. Elle est sortie major en économie de l’université de Brown avant d’obtenir un doctorat à Yale. Qualifiée d’accessible, simple et sociable par ceux qui la côtoient, elle sera en terrain connu à la Fed, dont elle est la numéro deux depuis 2010. C’est dans cette institution qu’elle a fait ses débuts comme économiste, en 1977, et qu’elle a rencontré son mari, George Akerlof, Prix Nobel d’économie en 2001 – leur fils Robert travaille aussi dans ce domaine. Spécialiste des questions liées au c h ô m a g e, e l l e a ensuite enseigné dans les prestigieuses universités de Berkeley et Harvard, avant de faire son entrée au p Elle sera la première femme présidente de la Fed. conseil des gouverneurs de la Fed en 1994. Janet Yellen quitte une nouvelle fois la Banque centrale en 1997 pour conseiller Bill Clinton à la Maison Blanche… et y revient en 2004, à la tête de l’antenne de San Francisco.

Le petit-fils de l’ancien président sud-africain, 39 ans et député de l’ANC, est accusé d’avoir pointé une arme à feu sur un autre conducteur après un accrochage à Mthatha (Sud-Est). Ce dernier a porté plainte et une enquête est ouverte. CNN La chaîne américaine a diffusé une carte situant Hong Kong au Brésil. En 2011 déjà, elle avait confondu la ville libyenne de Tripoli avec son homonyme libanaise et localisé le Cambodge dans le sudouest de l’Afrique. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


La semaine de J.A. Décryptage recours devant la justice locale, le clan Abacha, particulièrement procédurier, a déposé une nouvelle plainte devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). De l’avis de Robert Wallner, procureur général du Liechtenstein, les chances qu’elle aboutisse sont « faibles », mais cela n’empêche pas le gouvernement de refuser de restituer les fonds – qui restent donc sous son contrôle – tant que la procédure est en cours. Quant à la garantie offerte, par écrit, par le gouvernement nigérian de rendre l’argent en cas de décision défavorable de la justice européenne, elle a été balayée d’un revers de main par le Liechtenstein. IRONIE. Une position « scandaleuse », F. AHOUADI

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p Au pouvoir de 1993 à 1998, le défunt général-président avait placé au moins 2,4 milliards de dollars sur des comptes à l’étranger.

Nigeria Rendez le magot de Sani Abacha! Le Liechtenstein est assis sur un tas d’or appartenant à… Abuja. Le petit paradis fiscal restituera-t-il les sommes détournées par l’ancien dictateur ? L’affaire est devant la justice européenne.

L

«

’argent ne dort jamais », paraît-il. Surtout, ne le répétez pas à Goodluck Jonathan, le président nigérian, il risquerait d’en perdre… le sommeil. Car quinze ans après la mort de Sani Abacha, l’État bataille toujours pour récupérer la colossale fortune détournée et placée sur des comptes à l’étranger par l’ancien général-président. Sur les 2,4 milliards de dollars (1,8 milliard d’euros) qu’Abuja a réclamés, seuls 1,3 milliard de dollars ont été récupérés.

Une partie (185 millions d’euros) de ce fabuleux magot se trouve toujours au Liechtenstein, petit paradis fiscal niché entre la Suisse et l’Autriche. Et le Nigeria s’impatiente de voir cette principauté lui rendre son dû. Un tribunal du Liechtenstein avait pourtant ordonné, en 2012, après plus d’une décennie de procédure, la confiscation des fonds, jusque-là détenus par la famille du défunt dictateur. En mars, celle-ci a perdu en appel. Qu’à cela ne tienne : ayant épuisé tous les

a tonné Ngozi Okonjo-Iweala, la ministre nigériane de l’Économie et des Finances et ancienne directrice générale de la Banque mondiale, qui avait elle-même – ironie du sort – lancé l’Initiative pour le recouvrement des avoirs volés lorsqu’elle était en poste à Washington. Elle a même menacé d’utiliser les assemblées annuelles de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI), du 11 au 13 octobre, pour dénoncer l’attitude de la principauté. Mais pendant que le gouvernement nigérian et la famille du dictateur s’écharpent dans les tribunaux, tout dialogue entre les deux parties n’est pas rompu, loin de là… Ainsi, Mohammed Abacha, le fils de l’ancien président, lui-même accusé d’avoir joué un rôle clé dans les détournements et à qui l’on prête des ambitions politiques dans l’État de Kano (nord du pays), s’est rallié au Parti démocratique populaire (PDP, au pouvoir) en septembre. Profondément divisé entre nordistes et sudistes, le PDP a semble-t-il besoin d’alliés dans le septentrion nigérian. l PIERRE BOISSELET

À SUIVRE LA SEMAINE PROCHAINE

24-27

OCTOBRE Plus de 3 000 artistes de 60 pays et 70 000 visiteurs sont attendus à la 40e Foire internationale de l’art contemporain (Fiac), à Paris (au Grand Palais notamment). N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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OCTOBRE Foire internationale du livre de Tunis, jusqu’au 3 novembre. Le Sénégal est l’invité d’honneur de cette 30e édition. Celle de 2012 avait réuni 22 pays et plus de 300 exposants.

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OCTOBRE Des militantes saoudiennes appellent les femmes du royaume à prendre le volant, afin de braver une interdiction dont elles sont les seules au monde à faire les frais. JEUNE AFRIQUE


ILS ONT DIT

« Je suis consciente qu’avoir un passeport européen est une chance. Mais un passeport est une chose horrible en soi : cela renvoie au tri des humains. »

GEORGES DOUGUELI

Fortune Crésus était une femme ISABEL DOS SANTOS n’est pas seule ! Depuis que le magazine Forbes a publié, en janvier, son classement des milliardaires africains en dollars, on sait que la femme d’affaires angolaise, fille du président José Eduardo dos Santos, appartient à ce cercle très fermé. Or le magazine nigérian Ventures, qui a mené sa propre enquête, cite deux autres femmes dans son palmarès, beaucoup plus étoffé : il y aurait 55 milliardaires sur le continent, contre 16 selon Forbes. Et encore, « c’est une estimation bien en deçà de la réalité », affirme Chi-Chi Okonjo, le fondateur du magazine. Avec un patrimoine estimé à 7,3 milliards de dollars (5,4 milliards d’euros), la Nigériane Folorunsho Alakija serait la plus riche des Africaines, devant Isabel Dos Santos. Ngina Kenyatta, veuve de Jomo, l’ancien président kényan, et mère d’Uhuru, l’actuel chef de l’État, complète ce podium féminin avec 1,65 milliard de dollars. Point commun entre ces trois femmes ? Leurs liens avec le monde politique. Évidents pour Dos Santos et Kenyatta, ils sont plus discrets chez Alakija. Selon le magazine nigérian, celle-ci aurait commencé à faire fortune après avoir rencontré Maryam Babangida, alors première dame du Nigeria, pour qui elle créait des robes. Elle aurait alors acquis un premier bloc pétrolier à bas coût, en 1993. Aujourd’hui, elle possède 60 % de l’un des PIERRE BOISSELET gisements les plus lucratifs du pays. l JEUNE AFRIQUE

AYO Chanteuse germanonigériane

« Nous prenons des risques que les gouvernements ne peuvent et que les entreprises ne veulent plus prendre. » MELINDA GATES Philanthrope américaine, coprésidente de la fondation Bill & Melinda Gates

« Les jihadistes sont des hypocrites, ils courent après les femmes et, en même temps, ils veulent les voiler. Tout ça n’est pas dans notre culture. » BABANI KONÉ Griotte malienne

« J’ai hérité du meilleur : les États-Unis m’ont donné la confiance en soi. La France, la capacité de garder les pieds sur terre. » TONY PARKER Champion français de basket

« Il faut que je me libère ; évidemment, je vais casser un peu de vaisselle. » FRANÇOIS FILLON Ancien Premier ministre français (qui se pose en rival de Nicolas Sarkozy pour la présidentielle de 2017)

WITT/SIPA

SVEN HOPPE/AFP

mène ensuite une vie paisible à Hambourg, où elle travaille comme publicitaire, jusqu’à ce jour de 2008 où elle découvre que son grand-père, Amon Göth, le « boucher de Plaszow », fut l’officier SS qui dirigea entre 1943 et 1944 ce camp de la mort de Cracovie (Pologne). Ce monstre, évoqué dans le film de Steven Spielberg La Liste de Schindler (1993), tua des milliers de personnes et fut exécuté en 1946 sans avoir exprimé le moindre regret. On peut encore visionner sur internet son effroyable pendaison, deux fois ratée par les soldats alliés. Au cours de son enquête, Jennifer a découvert le traumatisme de sa mère. « Je comprends mieux pourquoi elle ne s’est pas sentie en mesure de m’élever », s’attendrit-elle. Mais elle doit vivre avec l’idée que son grand-père aurait pu la tuer, elle la métisse africaine, au nom de la pureté de la race prônée par les nazis. l

IBO/SIPA

Édition Mon grand-père,ce bourreau COM ME N T réagit-on lorsqu’on découvre, au hasard d’une lecture à la bibliothèque, que son grand-père a été l’un des plus grands criminels nazis ? « Je suis tombée des nues », confie Jennifer Teege (photo), une métisse de 43 ans. Passé le choc, elle surmonte l’effroi et le dégoût, fait des recherches et écrit un livre, Mon grand-père m’aurait tuée, tout juste paru en Allemagne. Née d’une liaison éphémère entre une Allemande et un étudiant nigérian, Jennifer a été abandonnée à la naissance et élevée par les services sociaux. Mariée et mère de deux petits garçons, elle

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La semaine de J.A. Décryptage

RD Congo Si Soco saccage… Le Fonds mondial pour la nature a porté plainte contre la compagnie pétrolière Soco, qui détient un permis d’exploration dans le parc naturel des Virunga.

C

est une guerre médiatique. Le 7 octobre, le Fonds mondial pour la nature (WWF) a déposé une plainte contre la firme pétrolière britannique Soco auprès de l’OCDE. Ce geste fait déjà grand bruit alors même qu’une éventuelle condamnation ne serait nullement contraignante. Selon WWF, l’entreprise a « violé [en RD Congo] les normes de responsabilité sociale des sociétés internationales et les directives de l’OCDE concernant l’environnement et les droits de l’homme ». Soco avait obtenu en 2007 un permis « d’évaluation scientifique » sur un bloc de 7 500 km2, dont plus de la moitié sont situés dans le parc des Virunga, classé au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1979. Cette « évaluation scientifique » – terme permettant de contourner la loi congolaise qui interdit toute exploration dans un parc naturel – conduira inévitablement à des forages nocifs pour l’environnement, estime le Fonds, qui dénonce par ailleurs le caractère léonin du contrat de concession. « Il contient une clause d’exclusion de toute loi qui pourrait être adoptée a posteriori par LE DESSIN DE LA SEMAINE

VANESSA VICK/REDUX-REA

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p Patrouille dans le parc des Virunga, classé au Patrimoine mondial de l’Unesco.

la RD Congo, souligne Jean-Baptiste Roelens, coordinateur de WWF France. Soco se met ainsi à l’abri d’une nouvelle législation, ce qui est contraire aux principes directeurs de l’OCDE. » BITUME. WWF accuse également la com-

pagnie pétrolière d’avoir dissimulé aux populations locales les résultats d’une étude d’impact réalisée en interne et faisant état de nombreux risques. « Ces allégations sont infondées, tendancieuses et ne reposent sur aucun fait », a riposté la compagnie dans un communiqué. L’OCDE se prononcera dans deux mois sur la recevabilité de la plainte.

Cette affaire illustre une fois de plus la difficulté de concilier les intérêts économiques et la préservation d’un patrimoine naturel. À Virunga, l’italien ENI a déjà renoncé à son permis d’exploration. Le français Total, lui, s’est engagé à exploiter sa concession en dehors des limites actuelles du parc. ENI se voit malgré tout reprocher de mettre en péril la forêt primaire du Congo Brazzaville voisin en envisageant d’exploiter des sables bitumineux près de Pointe-Noire. Si la production de pétrole est pour l’instant repoussée sur ce site, la firme y extrait déjà du bitume, utilisé pour la chaussée des routes. l MICHAEL PAURON

Chappatte • International Herald Tribune ÉGYPTE TRRRIIIIIIIIT !!!

LE 9 OCTOBRE, l’administration Obama a sifflé la fin de son aide militaire au Caire, « en attendant des progrès tangibles vers un gouvernement civil démocratiquement élu ». En clair, si la formation d’officiers égyptiens aux États-Unis se poursuit, Washington gèle son assistance financière (soit des centaines de millions de dollars) et sa fourniture de gros matériels militaires. Il est vrai que ceux-ci, depuis la destitution du président Morsi, le 3 juillet, servent surtout à écraser les islamistes… N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

JEUNE AFRIQUE



La semaine de J.A. Décryptage

CAMILLE LEPAGE_HANSLUCAS.COM

JEUNEAFRIQUE.COM

RÉSEAUX SOCIAUX

Qui se cache derrière les comptes Twitter des présidents africains ? p Le plus dynamique du monde ? Le Soudan du Sud. Mais il part de très bas.

VIDÉO

VINCENT FOURNIER/J.A.

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Sœur Angélique Namaika, lauréate du prix Nansen, décerné par le HautCommissariat aux réfugiés : « Je dédie mon prix aux femmes victimes d’atrocités en RD Congo. »

LE TWEET Mabrouk Rachedi* @MabrouckRachedi

« Non-lieu pour Sarkozy dans l’affaire Bettencourt. Les juges Gentil et Noël n’ont jamais aussi bien porté leur nom. » * écrivain français d’origine algérienne.

À LIRE AUSSI Baiser de Nador : les adolescents qui avaient publié sur Facebook une photo d’eux en train de s’embrasser ont été libérés, mais la Toile marocaine continue de se mobiliser. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

Palmarès Seconds derrière les dragons Le Fonds monétaire international a publié ses prévisions sur la croissance mondiale. Belle surprise : l’Afrique subsaharienne n’est dépassée que par les pays du continent asiatique.

S

eule l’Asie fait mieux que l’Afrique subsaharienne en matière de croissance. Selon les prévisions du Fonds monétaire international (FMI), publiées à Washington le 8 octobre, la richesse de l’Afrique noire progressera de 5 % en 2013, et celle des dragons de l’Asie émergente de 6,3 % quand les ÉtatsUnis n’afficheront pas plus de 1,6 % et l’Amérique latine 2,7 %. La zone euro, elle, connaîtra une récession de 0,4 %. L’année suivante devrait confirmer la bonne santé du sud du Sahara, avec une croissance moyenne de 6 %. Principal fait notable, cinq États africains figurent dans le classement 2013 des dix pays les plus dynamiques du monde : le Soudan du Sud (1er, avec 24,7 %), la Sierra Leone (2e, avec 13,3 %), le Liberia (7e, avec 8,1 %), la Côte d’Ivoire (9e, avec 8 %) et le Ghana (10e, avec 7,9 %). DU SURPLACE. Ces chiffres sont pour-

tant en retrait par rapport aux prévisions du mois d’avril pour au moins trois raisons : la demande des pays industrialisés demeure anémique ; les flux de capitaux ont tendance à repartir vers le Nord; enfin, les pays émergents, comme la Chine, sont confrontés à un ralentissement qui

réduit mécaniquement leurs besoins en matières premières. Deux pays en butte à des troubles internes sont en passe de tomber en récession : la Guinée-Bissau (– 1,5% en 2013 et – 1,9% en 2014) et la Centrafrique (– 14,5% et + 0,2 %). L’Érythrée (+ 1,1 % et + 1,9 %) et le Swaziland (0 % et + 0,3 %) font du surplace, ce qui, compte tenu de leur croissance démographique, signifie qu’ils s’appauvrissent. CHAMPIONS. Le reste du palmarès est

plus qu’honorable, avec des taux compris entre 2 % (l’Afrique du Sud, handicapée par les grèves et la faiblesse de sa monnaie) et 24,7 % (le Soudan du Sud, qui partait de très bas). S’il fallait citer quelques champions, en plus des cinq précités, figureraient dans la liste l’Éthiopie (7 %), recordman d’Afrique de la décennie avec une croissance annuelle moyenne de 10,6 %, la Tanzanie (7 %), le Gabon (6,6 %), le Burkina Faso (6,5 %), la Gambie (6,4 %), le Niger, le Nigeria et la RD Congo (6,2 %). Ces résultats sont d’autant plus remarquables qu’ils s’accompagnent d’un recul de l’inflation, désormais à un seul chiffre partout, grâce à une baisse des prix de l’alimentation et à des politiques monétaires prudentes. l ALAIN FAUJAS JEUNE AFRIQUE



La semaine de J.A. Tour du monde FRANCE

Sarkozy, couci-couça

L

e 7 octobre, les juges Jean-Michel Gentil et Valérie Noël ont rendu à propos de Nicolas Sarkozy une ordonnance de non-lieu dans l’affaire Bettencourt. Oh, certes, ils ne sont pas absolument convaincus que l’ancien président n’a pas tenté de profiter de la faiblesse présumée de l’héritière de L’Oréal pour financer ses campagnes électorales, mais ils ont échoué à en apporter la preuve. Autre bonne nouvelle, la cote de p L’ancien président français popularité de son rival, le à la sortie du tribunal de Bordeaux, trop normal François le 31 mars. Hollande, s’obstine à caresser les grands fonds: 21 % d’opinions favorables, selon un sondage YouGov du 10 octobre. Jamais un président ne s’était aventuré à de telles profondeurs. Pour Sarkozy, le chemin vers l’Élysée 2017 serait-il désormais dégagé? Holà! pas si vite. Car voici que surgit de son propre camp un intraitable paladin sarthois, son ex-féal François Fillon, qui, dans l’hebdomadaire Valeurs actuelles, a l’insolence de s’estimer mieux placé que lui pour briguer la couronne de France. Il peut préparer son heaume et son bouclier! Au fait, que pensent les Français d’un éventuel retour de Sarko-le-Trépidant? Là, les sondages sont carrément décevants. L’institut CSA est formel: seuls 54 % l’appellent de leurs vœux. Ingrats, va! l AFP PHOTO/PATRICK BERNARD

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JAPON

Ça plane pour Airbus CHASSE GARDÉE du groupe américain Boeing, le Japon rompt avec ses vieilles habitudes. Japan Airlines (JAL) vient en effet de commander au constructeur européen Airbus 31 avions long-courriers (A350-900 et A350-1000), dont les premiers spécimens devraient entrer en service en 2019. Coût de la transaction : 9,5 milliards de dollars (prix catalogue). Des options ont été prises sur N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

l’achat de 25 appareils supplémentaires. Confronté en 2010 à de graves difficultés financières, JAL avait alors frôlé la faillite.

de renoncer à sa candidature, le Tribunal supérieur électoral ayant estimé qu’elle n’avait pas réuni les 492 000 signatures requises. Elle s’est ralliée à la candidature d’Eduardo Campos, le leader du Parti socialiste brésilien (PSB), qui vient de se retirer de la coalition gouvernementale. LE CHIFFRE

2 MILLIONS C’EST, SELON LES NOUVELLES DE PÉKIN, le nombre de personnes chargées de la surveillance de l’internet chinois. Mission de ces policiers de la Toile : filtrer quotidiennement des milliards de messages afin d’empêcher blogueurs et réseaux communautaires de critiquer la ligne du parti. ITALIE

Coup de colère à Lampedusa ACCUEIL MUSCLÉ le 9 octobre dans l’île sicilienne de Lampedusa pour Manuel Barroso, le président de la Commission européenne, et Enrico Letta, le président du Conseil italien. Venus se recueillir devant les corps des migrants, érythréens pour la plupart, morts dans le naufrage du 3 octobre (plus de 300 victimes), ils ont été pris à partie par des habitants de l’île, qui leur ont lancé des slogans d’une rare violence (« Assassins ! »). « Ce genre d’événement ne devrait pas se produire en Europe, il faut une plus grande coopération entre les États membres », leur a répondu Barroso, maître incontesté de la langue de bois. Vous savez? Celle dont on fait les cercueils. Les migrants trépassés auront quand même droit à des funérailles nationales, a fait savoir Letta. CORÉE DU NORD

BRÉSIL

Marina renonce ALORS QU’ELLE était en seconde position dans les intentions de vote derrière Dilma Rousseff pour l’élection présidentielle de 2014, l’écologiste (et afro-brésilienne) Marina Silva, fondatrice du parti Réseau durable, a été contrainte

Centrale ou cimetière? CAPABLE DE PRODUIRE près de 6 kg de plutonium par an, le réacteur nucléaire de la centrale nordcoréenne de Yongbyon aurait redémarré à la fin du mois d’août, selon les services JEUNE AFRIQUE


ARRÊT SUR IMAGE

YVES HERMAN • Reuters

BELGIQUE

Bonshommes de neige (carbonique) La scène ne se passe ni à Reykjavik, en Islande, ni à Irkoutsk, au cœur de l’hiver sibérien, mais, plus méridionalement, à Bruxelles, le 7 octobre. Que les pompiers belges ne supportent plus leurs conditions de travail et tiennent à le faire savoir est normal. Mais que, pour cela, ils aspergent de neige carbonique de pauvres policiers antiémeutes, non ! On admirera au passage le stoïcisme des forces de l’ordre dans la tourmente.

de renseignements sud-coréens et des chercheurs américains. Il avait été arrêté en 2007 dans le cadre d’un accord international avec les États-Unis. Selon des sources russes, il serait aujourd’hui « dans un état épouvantable » qui fait craindre « une catastrophe à côté de laquelle celle de Tchernobyl ferait pâle figure ». L’avis de connaisseurs. VENEZUELA

Inflation salariale LESALAIREMINIMUMaugmentera de 10 % à compter du 1er novembre pour atteindre 2973 bolivars (347 euros), soit 40 % de plus qu’au mois d’avril, après l’élection à la présidence de Nicolás Maduro. À cette somme s’ajoute un bon d’alimentation d’une valeur avoisinant 132 euros. C’est la troisième fois que le JEUNE AFRIQUE

salaire minimum est revu à la hausse depuis sept mois, alors que le taux d’inflation atteint déjà 32,9 %. Les élections municipales auront lieu le 8 décembre. INDE

Nouvel État Multiples manifestations pour protester contre la création, le 3 octobre, d’un nouvel État de la Fédération indienne: le Telangana (35 millions d’habitants). Depuis la fondation de l’Andhra Pradesh, en 1956, les Télougous (issus de basses castes) se sentaient lésés par rapport aux autres régions de cet État, plus riches en ressources naturelles. La partition met donc fin à cinquante-sept années de revendications séparatistes. Les opposants crient au « dépècement de la société et de l’économie ».

ESPAGNE

Rajoy, faute de mieux MAUVAIS RÉSULTATS économiques, scandales de corruption… La cote de popularité du gouvernement de Mariano Rajoy avait plongé au cours de l’été. Or, surprise, un sondage publié le 6 octobre par le quotidien El País montre que le Parti populaire au pouvoir l’emporterait sur le Parti socialiste ouvrier espagnol si des élections législatives avaient lieu aujourd’hui : 34,1 % des voix, contre 29 %. Certes, les trois quarts des personnes interrogées désapprouvent la politique économique de Rajoy, mais elles sont encore plus nombreuses (85 %) à ne pas faire confiance à Alfredo Pérez Rubalcaba, le leader de l’opposition. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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Grand angle

AFRIQUE DU NORD

L’Internationale

berbère Du Maroc à l’Égypte, en passant par le Mali et le Niger, les Amazighs occupent une place à part. Souvent marginalisée par les États, leur culture a survécu. Au prix d’une lutte constante. MARWANE BEN YAHMED

usqu’à une période récente, l’essentiel de l’« actualité berbère » se déroulait au Maghreb. Du Souss marocain aux contreforts du Djebel Nefoussa, en passant par la frondeuse Kabylie. Revendications identitaires, culturelles ou sociales, lutte contre l’ostracisme : les raisons de la colère de cette communauté historiquement perçue comme un facteur de division à l’époque de la lutte pour l’indépendance, puis comme une Leurs origines font menace pour une unité natiol’objet des légendes nale, définie autour des piliers les plus folles. de l’arabité et de l’islam, sont toujours les mêmes. Objets de légendes les plus folles, relatives à leurs origines (Perse, Yémen, Palestine, voire Europe), les Berbères doivent être considérés comme les habitants autochtones du nord de l’Afrique. Aujourd’hui, leur principal critère d’identification demeure la langue. D’où la préoccupation quasi obsessionnelle de sa reconnaissance officielle et, surtout, de sa perpétuation. Les « hommes libres » (« Imazighen », en berbère) entendent N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

le rester, quitte parfois à confondre leur combat identitaire, louable, avec les exigences sociales – comme lors des événements qui ont secoué la Kabylie en 2001 –, et qui sont, à vrai dire, celles de tout un peuple et non des seuls Berbères. Une attitude qui leur a souvent valu la défiance de leurs compatriotes arabes. CATACLYSME. Aujourd’hui, le front s’est déplacé

plus au sud, dans les sables de l’Azawad, en pays touareg, aux confins méridionaux de l’Algérie, entre le Mali et le Niger. Des Berbères toujours marginalisés au sein de leurs nations respectives, et parfois au cœur de leur propre communauté, qui n’hésitèrent jamais à prendre les armes, dès l’aube des indépendances, pour alterner rébellion et accords de paix pendant près de cinquante ans. Ils sont à l’origine – en tout cas le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) –, peut-être à leur corps défendant, du cataclysme qui s’est abattu sur le Mali en 2012. À chaque pays son histoire et ses particularismes. À chaque Berbère ses méthodes de combat. Et quel combat ! Ils n’ont jamais rien obtenu sans lutte. Pour les plus militants d’entre eux, c’est tout simplement une question de survie. l JEUNE AFRIQUE


Grand angle

t Tamazgha (« Terre des Berbères »), calligraphie du peintre Smaïl Metmati.

DE DROITE À GAUCHE OU DE GAUCHE À DROITE ? COMMENT TRANSCRIRE les langues et les dialectes berbères ? En lettres arabes ? En latin ? En tifinagh, les caractères adoptés par les Amazighs au milieu du Ier millénaire avant Jésus-Christ ? La question fait encore débat parmi les spécialistes. Pour les puristes, la langue berbère possède ses propres signes, des voyelles et des consonnes formées de quelque cinquante caractères. C’est l’Académie berbère qui a établi, à la fin des années 1960, un alphabet standard pour transcrire ces langues restées pendant des siècles au stade de l’oralité. En Algérie, où l’enseignement du tamazight a été officialisé au milieu des années 1990, les élèves le transcrivent en arabe bien qu’une large majorité de Kabyles adopte les caractères latins. Au Maroc, la graphie tifinagh, qui se lit de gauche à droite contrairement à l’arabe, est adoptée officiellement en 2003. Un choix politique – ni arabe, ni latin – qui pose des défis éducatifs. l F.A. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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Grand angle Afrique du Nord

Maroc Du bout des lèvres… n juillet 2011, le Maroc est devenu le premier paysàreconnaîtrelalangueamazighcomme langue officielle. C’est à la fois une victoire et un défi pour les militants de la diversité culturelle au sein du royaume. Car il y a loin de la coupe aux lèvres. Un exemple : les prénoms. Régulièrement, des officiers de l’état civil rechignent à enregistrer des prénoms à consonance amazigh, voire refusent. Les parents les plus motivés vont jusqu’au contentieux administratif, les autres rejoignent la cohorte des déçus, blessés et amers de voir une partie de leur identité niée. Mohand Laenser, le ministre de l’Intérieur, a annoncé en avril une énième levée de l’interdiction. Dans les faits, une ancienne circulaire a été renvoyée aux services administratifs, ce qui n’a pas empêché un père résidant en Espagne de se voir refuser l’inscription de sa fille Sifaw au consulat marocain de Valence, en mai. La généralisation de l’enseignement de la langue, lancée en 2003, n’avance pas. En 2012, seuls 2 % des écoles et 15 % des élèves y avaient accès, selon les chiffres du ministère de l’Éducation nationale. Pour rappel, l’objectif est d’en faire une langue d’enseignement obligatoire

Océan Atlantique Casablanca Safi Marrakech Agadir

60000 9000

1000020000 3 millionsCombien

sont-ils ?

Aucune statistique fiable n’est disponible. En Algérie, la fourchette oscille entre 6 et 8 millions ; entre 60 000 et 90 000 en Tunisie ; ils seraient plus de 300 000 en Libye ; 10 000 à 20 000 en Égypte. Quant aux Touaregs, entre 2 et 3 millions…

Oran

Tanger Rabat

300000

8 millions

TiziAlger Ouzou

ESPAGNE

Constantine

Tunis Sousse

Fès

Sfax

Loghaouat

Meknès

Tourgout

Ain Sefra

MAROC

Gabès

Mer Méditerranée Tripoli

Ouargla

Béchar

Ouarzazate

pour tous. Le débat politique sur le tifinagh, la graphie retenue officiellement en 2003, affleure à nouveau. À l’époque, 31 des 33 partis représentés au Parlement avaient opté pour le tifinagh, un choix du mouvement amazigh qui permettait d’éviter la graphie arabe ou latine. Or le Parti de la justice et du développement (PJD) et l’Istiqlal, qui s’y étaient opposés, mènent aujourd’hui respectivement la coalition gouvernementale et l’opposition parlementaire. Depuis l’indépendance, le « berbérisme » était regardé avec suspicion par les nouvelles élites nationalistes. Il a longtemps été associé au colonialisme à cause du dahir berbère [décret de 1930, qui a instauré des tribunaux coutumiers] puis dominé par le modèle panarabe, alors porté par les idéologies nassériste et baasiste. Pourtant, les Amazighs existent. C’est même une évidence anthropologique. Et plutôt trois fois qu’une. Dans le Rif (Nord), dans le centre du pays, et dans le Souss (Sud), on parle respectivement tarifit, tamazight et tachelhit. Ces trois dialectes – le terme est impropre et peut froisser certaines susceptibilités – reflètent les variantes régionales d’une langue et d’une culture restées vivaces. C’est la défense de ce patrimoine qui préside à la fondation, en 1967, de l’Association marocaine

Ghardhaia El Goléa

DjeraBoub

Ghadamès ALGÉRIE

ÉGYPTE

Aoudjila

Adrar In Salah

Siwa

LIBYE

Djanet

DIVERSITÉS AMAZIGHS

Tamanrasset MAURITANIE MALI NIGER Agadès

Tombouctou Gao

GoromGorom BURKINA

Niamey

Kabyles Rifains (parlent le zenatiya) Chaouis Amazighs (parlent le tamazight) Chleuhs (parlent le tachelhit) Populations berbérophones duTell Touaregs (nomades) Berbères des oasis

Zinder TCHAD

250 km

NIGERIA

Sources : L’État du Maghreb, La Découverte, Paris, 1991 ; Abdallah Laraoui, L’Histoire du Maghreb, François Maspero, Paris, 1970 ; Encyclopédie berbère, Édisud, Aix-en-Provence, 1992 ; Géographie du Maroc, Hatier, Paris, 1967 ; Les Kabyles : éléments pour la compréhension de l’identité berbère en Algérie, Groupement pour le droit des minorités, Paris, 1992 ; Salem Chaker, Berbères d’aujourd’hui, l’Harmattan, Paris, 1989. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

JEUNE AFRIQUE


L’Internationale berbère

Algérie Printemps fugace abyles, Chaouis, Mozabites, Touaregs, Chenouis… Ils seraient quelque 7,5 millions à faire partie de cette communauté berbère, descendants des Amazighs qui peuplaient déjà l’Afrique du Nord plusieurs siècles avant Jésus-Christ. Bien qu’ils constituent presque un quart de la population et que de grandes figures de cette communauté aient activement pris part à la guerre de libération, les Berbères ont subi une politique d’exclusion de la part du pouvoir central. Dans les années 1960 et 1970, il était même très malvenu de se revendiquer amazigh, et certains militants de cette cause – comme l’écrivain Mouloud Mammeri ou des chanteurs Ferhat Mehenni et Idir – ont été persécutés ou contraints à l’exil. Au lendemain de l’indépendance, dans une Algérie régie par un parti unique, le Front de libération nationale (FLN), la question relevait du tabou. Il a fallu le Printemps berbère d’avril 1980 pour que les autorités acceptent de reconnaître le berbère comme composante de l’identité et de la culture algériennes, aux côtés de l’arabité et de l’islam. Le paradoxe est que plusieurs personnalités berbères ont exercé ou exercent encore de très hautes fonctions. L’ancien président Liamine Zéroual et l’ex-chef du gouvernement Ali Benflis sont chaouis, originaires de Batna (dans les Aurès). Abdelmalek Sellal, l’actuel Premier ministre, et Ahmed Ouyahia, son prédécesseur, sont kabyles. Des généraux aussi : Mohamed Mediène, dit Toufik, patron des services de renseignements, est issu de la petite Kabylie ; Gaïd Salah, vice-ministre de la Défense et chef d’état-major, ou Khaled Nezzar, l’ex-patron de l’armée, sont natifs de Batna. Le tamazight est enseigné dans les établissements scolaires (primaire, collège et lycée) depuis la grève du cartable de 1994 à 1995, mais son apprentissage jusqu’au début des années l l l JEUNE AFRIQUE

QUESTIONS À STÉPHANIE POUESSEL Chercheuse à l’Institut de recherche sur le Maghreb contemporain (IRMC, à Tunis).

« Leur combat est moins identitaire que social » Révolutionnaires les Berbères ? L’analyse d’une anthropologue spécialiste du Maghreb. JEUNE AFRIQUE : Y a-t-il une spécificité berbère au sein du Printemps arabe, en Afrique du Nord ? STÉPHANIE POUESSEL: Pas du

tout ! Ce qu’on appelle le Printemps arabe est avant tout l’expression de révoltes sociales et politiques. En Tunisie, en Égypte et en Libye, les débats identitaires étaient absents au départ. Le Maroc est un cas particulier puisque le roi a été amené à réformer la Constitution et à intégrer la langue amazigh comme langue officielle. Quel rôle jouent les diasporas dans la mobilisation amazigh ?

Dès les années 1960, les militants, surtout des Marocains et des Algériens, se sont rencontrés à Paris. Le Congrès mondial amazigh [CMA], créé d’ailleurs en France, porte depuis cet idéal transnational. Mais la lutte s’inscrit à chaque fois dans des contextes nationaux spécifiques. Derrière la revendication identitaire se cache celle d’une intégration dans les rouages de l’État. Dans les régions berbérophones, souvent marginalisées, les habitants ont des aspirations sociales et économiques, pas transnationales. La solidarité affichée entre activistes amazighs et mouvements autonomistes en Kabylie et dans l’Azawad (au Mali) inquiète-t-elle les pouvoirs centraux ?

En Kabylie, le pouvoir algérien prend très au sérieux cette menace et tente de l’endiguer, mais elle est portée par un groupe très minoritaire. Le Mouvement

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de recherche et d’échanges culturels (Amrec). La neutralité de son nom témoigne de son caractère universitaire. Dès les années 1970, le mouvement prend un tournant plus politique, avec la création, en 1978, de l’association Tamaynut. Il s’agit d’internationaliser la question amazigh, en mobilisant la diaspora (lire p. 31) et en s’appuyant sur les textes protecteurs des droits de l’homme, notamment les conventions internationales sur les droits culturels et linguistiques. En 1991, Tamaynut traduit la déclaration universelle des droits de l’homme en tamazight. Dans les années 1990 et 2000, la jonction se fait avec le mouvement altermondialiste, dans le sillage des forums sociaux. l YOUSSEF AÏT AKDIM

pour l’autonomie de la Kabylie [MAK] n’est pas représentatif de la revendication kabyle. L’Azawad montre bien que le contexte local est important. La solidarité entre Amazighs et indépendantistes touaregs a souffert de la question islamiste [avec l’implication des jihadistes]. La question amazigh émerget-elle en Tunisie, un pays qui revendique fortement son identité arabe ?

L’élément berbère a été intégré de manière très particulière. Depuis Bourguiba, il était cité au même titre que le carthaginois ou l’ottoman dans l’héritage historique, comme une strate de l’identité, complètement morte et donc pas du tout menaçante. D’où une vision un peu folklorique, très présente dans le tourisme. Aujourd’hui, la revendication identitaire est absente du débat sur la Constitution, mais des associations de culture amazigh se multiplient dans le pays. l Propos recueillis par YOUSSEF AÏT AKDIM N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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Grand angle Afrique du Nord

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2000, sous l’autorité du Haut Commissariat à l’amazighité (HCA), se limite aux régions berbérophones par manque de moyens et d’enthousiasme des populations arabophones… En avril 2001, la mort d’un lycéen enflamme la Kabylie et donne naissance à un mouvement citoyen, porteur de revendications politiques, sociales et culturelles contenues dans la fameuse « plateforme d’El Kseur ». Alger donnera satisfaction aux populations, en avril 2002, par l’insertion dans la Constitution d’un article reconnaissant le tamazight comme langue nationale et par le versement de compensations financières aux victimes de la répression. Si le mouvement populaire s’est depuis dissous et si ses animateurs sont retombés dans l’anonymat, onze ans plus tard les Berbères ne continuent pas moins de demander l’inscription dans la Constitution du tamazight comme langue officielle, au même titre que l’arabe. l lll

FARID ALILAT

Tunisie Identité perdue u fil des invasions et des métissages, la Tunisie a perdu sa berbérité, que tous les pouvoirs successifs ont perçue comme un élément de sédition et de séparatisme. Si la révolution de 2011 a suscité un nouvel engouement pour les Amazighs, celui-ci relève surtout d’une réaction au débat qui entoure l’identité arabo-musulmane des Tunisiens. Associations et festivals sont souvent organisés pour perpétuer les traditions, bien que le texte de la loi fondamentale ne mentionne toujours paslesoriginesberbèresdelaTunisie.Pourtant,plus de 150000 locuteurs continueraient de pratiquer le chelha, l’idiome des ancêtres. « Sous Bourguiba et Ben Ali nous avons été marginalisés ; l’arabe et le français, langues de colonisation, ont pris le pas sur le berbère, qui semblait incompatible avec la modernité » explique Chérif Dergaa, originaire de Djerba,etmembredeCultureetPatrimoineamazigh.

p Retranchement de Touaregs dans la base de Tigha, au nord de Kidal, au Mali.

FATIMA TABAAMRANT Chanteuse extrêmement populaire, elle a été élue (RNI) au Parlement en novembre 2011. Elle fut le premier député à poser une question en langue amazigh.

N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

MOHAMED CHAFIK Ancien recteur de l’Institut royal de la culture amazigh (Ircam), cet intellectuel, considéré comme le doyen du mouvement berbériste, a été directeur du Collège royal.

KATEB YACINE Écrivain et dramaturge (1929-1989), il récusait le terme « berbère » (signifiant « barbare ») utilisé par les Romains. Il fut le premier intellectuel à revendiquer l’usage du mot « amazigh ».

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ALGÉRIE

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FIGURES DE PROUE MAROC

Aujourd’hui,laquestionberbèreestavanttout culturelle. Le mouvement reste trop timide pour aborderdesquestionspolitiquesetconstituerun rempart aux modèles politico-religieux importés du Moyen-Orient. Les courants religieux conservateurs sont fortement implantés dans des régions où les foyers berbères ont toujours été présents même s’ils s’amenuisent. L’héritage amazigh en tant que composante de l’identité du pays n’est reconnu que timidement. En revanche, les distributeurs de journaux à Tunis, tous originaires de Douiret, comme Mohamed Daadaa, le patron de la corporation, utilisent encore le chelha pour communiquer entre eux. Mais ni Brahim Kassas, ni Habib Bribech,

MOULOUD MAMMERI Écrivain, anthropologue et linguiste (1917-1989), il fut un intellectuel d’envergure, considéré comme le père de l’enseignement de la langue amazigh. JEUNE AFRIQUE


PATRICK ROBERT

L’Internationale berbère

ni Said Kharchoufi, élus à l’Assemblée nationale constituante, n’ont évoqué jusqu’à présent leurs racines berbères. l FRIDA DAHMANI, à Tunis

Mali-Niger Guerres et paix arfois marginalisés au sein du monde berbère, les Touaregs (ou Kel Tamasheq), que des estimations très vagues situent à près de 3 millions d’individus, le sont plus sensiblement encore dans les États au sein desquels ils évoluent, et qui les perçoivent souvent comme des « corps étrangers ». L’anthropologue André Bourgeot notait

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au début des années 1990 qu’ils faisaient l’objet, selon qu’ils vivaient en Algérie, en Libye, au Burkina Faso, au Mali ou au Niger, de politiques « qui visaient soit à marginaliser […] soit à œuvrer à leur assimilation économique, politique et culturelle ». « Dans les deux cas, écrivait-il, marginalisation et/ ou assimilation s’inscrivent dans une volonté des États indépendants de rompre avec la politique de la puissance coloniale », laquelle, après avoir détruit le pouvoir guerrier des Touaregs, les utilisa comme de précieux relais dans le Sahel et dans le Sahara. Au Niger et au Mali, deux États tournés vers l’Afrique noire, cette marginalisation, couplée à l’irrédentisme de certaines tribus, à la crise du nomadisme qui a suivi les indépendances et à l’exode vers la Libye des années 1970, n’a pas eu la même ampleur. Mais elle a eu les mêmes effets: aux revendications d’ordre communautaire ont succédé des révoltes armées, des accords de paix ou des répressions, puis un calme précaire, suivi de nouvelles révoltes. Au Mali, le problème est apparu dès l’indépendance, lorsque les notables de Kidal se sont opposés à leur intégration dans l’ensemble malien. Première rébellion dès 1963, violemment réprimée, deuxième en 1990 (et premiers accords de paix fragiles en 1992 et 1996), troisième en 2006, et la dernière en 2012, qui a provoqué l’irruption des mouvements jihadistes armés et la partition du pays. Cette crise est loin d’être réglée. Si une partie des Touaregs du Mali rejette la violence armée, et si des notables clament leur attachement à la nation malienne, beaucoup sont sensibles au rêve, sinon de l’indépendance, du moins de l’autonomie telle que prônée parle Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Les leaders de la rébellion dénoncent le sousdéveloppement du « pays » qu’ils partagent avec les Songhaïs, les Peuls, les Arabes et les Bellas. Une réalité que l’on ne nie pas à Bamako, où l’on rétorque cependant que des efforts ont été l l l

IDIR Ce chanteur très célèbre, natif de Tizi-Ouzou, est l’ambassadeur de la langue kabyle à travers le monde. Son tube, Avava Inouva, a été traduit dans une dizaine de langues. JEUNE AFRIQUE

MATOUB LOUNÈS Chanteur (1956-1998), qui a été assassiné par un groupe islamiste. Surnommé le « rebelle », il est considéré comme le chantre de la culture berbère.

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LIPNITZKI/ROGER-VIOLLET

DESSONS/SIPA

VINCENT FOURNIER/JA

LIBYE

JEAN AMROUCHE Écrivain, essayiste et journaliste (1906-1962), il est connu pour avoir transposé la poésie kabyle en langue française, lui conférant une portée internationale.

DANIA BEN SASSI Diva serbo-libyenne, appartenant à la diaspora amazigh. Depuis 2011, elle s’est fait connaître en Libye en enregistrant des chants révolutionnaires. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


Grand angle Afrique du Nord faits ces dernières décennies et où l’on met en avant l’intégration, souvent à marche forcée, de nombreux Touaregs (et Arabes) dans l’armée et l’administration. Au même moment, au Niger, le spectre d’une troisième rébellion armée semble s’éloigner. Des efforts ont été consentis depuis la première révolte pour intégrer les Touaregs dans l’armée et l’administration (comme l’actuel Premier ministre, Brigi Rafini), et la décentralisation est effective depuis quatre ans. Le risque d’un nouveau soulèvement dans le Nord n’est cependant pas totalement écarté: alors que le Niger est considéré comme l’un des pays les plus pauvres du monde, le septentrion n’attire plus les touristes et ne profite pas pleinement des richesses de son sous-sol, ce qui alimente la colère des jeunes Touaregs, dont certains ont entrepris de rejoindre les groupes armés libyens ou les mafias locales. l RÉMI CARAYOL

Libye « Azul tagrawla ! » (Bonjour révolution !) ivine surprise de la révolution du 17 février ou menace contre l’identité unitaire de la Libye? Qu’importe, la question amazigh est apparue sur la scène politique et une chose est certaine:letempsestrévoluoùMouammarKaddafi pouvait déclarer, péremptoire, que « l’amazighité a disparu ». Adepte des explications pseudo-historiques, il racontait que tous les habitants d’Afrique du Nord étaient originaires du Yémen, venus par voie terrestre (barr, en arabe, la répétition donnerait « berbère »). En septembre 2012, au lendemain de la chute de Tripoli, les drapeaux qui accueillirent MustaphaAbdeljalil,leprésidentduConseilnational detransition(CNT),étaientmajoritairementfrappés d’un Z (en alphabet tifinagh, lire ci-dessous). Plus présents qu’en Cyrénaïque, où ils se concentrent

FIERS DE LEUR DRAPEAU

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n Libye, les rebelles l’exhibaient fièrement sur les chars ou les pick-up récupérés à l’armée du colonel Kaddafi. En Kabylie, les manifestants l’arborent durant les manifestations de rue. Dans les Aurès, les militants le déploient comme un emblème de la résistance. Lors de la finale de la Champion’s League de 2011 remportée par le FC Barcelone, Ibrahim Afellay, footballeur international néerlandais d’origine marocaine, s’en était drapé les épaules. En France, au Canada ou en Australie, les émigrés le hissent dans les salles de concerts. Tout comme les Bretons, les Catalans ou les Basques, les Berbères d’Afrique du Nord possèdent leur bannière : un drapeau frappé de la lettre « Z », transcrite en tifinagh, l’alphabet berbère. Ses couleurs rappellent celles des paysages amazighs. Le bleu symbolise la Méditerranée et l’océan Atlantique, le vert les N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

DELPHINE WARIN

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p Le moussem des Fiançailles, fête traditionnelle d’origine berbère, au Maroc.

montagnes boisées, le jaune l’immensité du Sahara où vivent les Touaregs. La couleur rouge du sigle symbolise la vie, le sang qui unit les Berbères

de Libye, de Tunisie, d’Algérie, du Maroc et des îles Canaries. L’histoire de l’étendard berbère n’est pas aussi ancienne que les peuples

qu’il représente. C’est plutôt dans les années 1970 que des chercheurs et des intellectuels kabyles, réunis autour de l’Académie berbère, une association basée à Paris, envisagent la création d’un emblème commun. Toutefois, son adoption a été retardée jusqu’en 1998 pour être officialisée lors du Congrès mondial amazigh qui s’est tenu à Tafira (Las Palmas). Depuis, ce drapeau, qui n’est guère reconnu officiellement par les gouvernements, l’est en revanche par les populations des confins de la Libye aux rivages de l’Atlantique. Si en Algérie ou au Maroc les autorités tolèrent la possession ou la vente libre de l’emblème berbère, ce ne fut guère le cas en Libye sous Kaddafi ou en Tunisie sous Ben Ali. Dans ces régimes autoritaires, revendiquer son appartenance à la culture ou à la langue berbère pouvait mener jusqu’en prison ou au peloton d’exécution. l F.A. JEUNE AFRIQUE


dans l’oasis d’Oujla, les tigrawlin [rebelles] ont joué un rôle décisif sur le front de l’ouest. Dans le Djebel Nefoussa, ils ont été les premiers à réceptionner les armes venues de l’étranger et ont multiplié les foyers de résistance autour de la capitale. Certains de leurs leaders sont parvenus à gravir les échelons du CNT, comme Othman Ben Sassi ou Salem Gnane, compagnon de route de Mansour Kikhia, célèbre opposant à Kaddafi. Cet activisme n’a pourtant pas porté ses fruits sur le plan politique. Malgré quelques élus au Congrès national général (CNG), les rares voix amazighssontcommeéclipséesparlatensiongrandissante qui oppose le gouvernement d’Ali Zeidan, les Frères musulmans et les fédéralistes. Danscecontexte,larevendicationdel’officialisation de la langue et de la reconnaissance de la culture n’avance pas. Nouri Bousahmein, élu de Zouara, a succédé à Mohamed el-Megaryef comme président du CNG en juin dernier. C’est le plus haut poste jamais occupé par un Amazigh. Un symbole, sans plus. Quelques semaines plus tard, les élus amazighs ont décidé de se retirer du Parlement. « Nous n’acceptons pas que la Constitution soit adoptée selon un principe majoritaire, alors que nous sommes sousreprésentés dans la Constituante », lancent-ils pour expliquer leur décision de boycotter la commission des 60. Fethi Benkhalifa, ancien conseiller du CNT et aujourd’hui président du Congrès mondial amazigh (CMA), principal rassemblement de la diaspora, menace: « Ceux qui nous croient faibles se trompent lourdement. Les Amazighs ont les moyens de résister. Ils l’ont montré sous Kaddafi, pendant la révolution du 17 février. Nous continuerons, s’il le faut. » l Y.A.A.

Égypte Une oasis dans la tourmente n havre de verdure en plein milieu du désert libyque: l’oasis de Siwa, palmiers et maisons de terre en guise de décor, abrite ce qui serait la seule population berbère d’Égypte. Située à la frontière de la Libye, la zone, autrefois très touristique, estaujourd’huiconfrontéeàl’instabiliténonseulement de son voisin, mais aussi du pays tout entier. Comme leurs cousins de la région, les Berbères de Siwa ont longtemps dénoncé la marginalisation de leur culture par les pouvoirs successifs. Difficile cependant pour les 150000 Amazighs de l’oasis de se faire entendre dans le pays le plus peuplé d’Afrique du Nord où la révolution a laissé place à un imbroglio politique. Fin 2012, le Congrès mondial amazigh (CMA) s’inquiétait de l’attitude des Frères musulmans à leur égard. Relayé par l’Agence kabyle d’information Siwel, l’appel de la militante Amani El Ouahchi, conseillère au sein du CMA, était très vindicatif: les Amazighs égyptiens pourraient prendre les armes. L’oasis deviendrait alors, selon elle, un nouveau Sinaï, région régulièrement endeuillée par des attaques armées. l MICHAEL PAURON JEUNE AFRIQUE

NICOLAS FAUQUÉ

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p Congrès mondial amazigh, en octobre 2011, à Djerba, en Tunisie. DIASPORA

Dispersés mais unis Au gré des colloques, les Berbères du monde entier ont su tisser un véritable réseau de solidarité.

U

n homme (une femme), une voix, une association. Tel pourrait être le slogan du Congrès mondial amazigh (CMA). Réunie à Djerba, fin septembre 2011, cette Internationale qui ne dit pas son nom est animée par une myriade d’associations locales et transnationales. Ici, tout le monde se connaît (ou presque). On trouve des Libyens et des Rifains, des Soussis et des Kabyles, des Touaregs et des Chaouis. Il y a même des Canariens. BeaucoupviennentaussideFrance, d’Espagne et des Pays-Bas. D’autres du Canada. Un véritable réseau, constitué au fil des congrès, des colloques et des sessions des organes des Nations unies. Une partie des intellectuels amazighs ont commencé à se fréquenter à l’Académie berbère, créée à Paris en 1967. À l’époque, les Kabyles sont très en avance dans le discours et la pratique politique. Les Marocains, étudiants et ouvriers, sensibles à leur appartenance identitaire, apprennent vite. À l’époque, les écrits de Mouloud Mammeri, de Jean Amrouche et de Kateb Yacine étaient incontournables. L’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco), qui a accueilli, avant la création de l’Institut royal de la culture amazigh au Maroc (Ircam), les premières cohortes de linguistes amazighophones, fait aussi office de lieu de rendez-vous.

Aujourd’hui, les didacticiens de l’Ircam sont sollicités jusqu’en Libye. Quelles que soient les positions institutionnelles, beaucoup ont gardé l’esprit militant et les habitudes de la vie associative. Nombre de questions sont réglées sans tambour ni trompette. Cette solidarité est renforcée, chez certains, par l’émigration. En cas de difficulté, des sommes d’argent colossales peuvent être mobilisées auprès d’un riche commerçant Soussi et, par un jeu de compensation, atterrir dans une famille nécessiteuse, à Gennevilliers, Bruxelles, ou Tanger. COMBAT. Le Congrès mondial amazigh est une première tentative de rassembler autour de la même cause – la défense des droits linguistiques, culturels, politiques, sociaux et économiques, et amazighs – des expériences diverses. Cela ne va pas sans la résistance de certains militants qui préfèrent le combat national. Solidaire des autres « peuples autochtones », comme les Basques et les Catalans, le CMA n’a pas peur de mettre en avant les revendications autonomistes. C’était notamment le cas, il y a peu, de l’Azawad et de son représentant, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), dans le Nord-Mali. Sur cette question, le débat en interne reste très animé. l YOUSSEF AÏT AKDIM N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


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REPORTAGE

Kahina, reine des cœurs De sa forteresse dans les Aurès, la souveraine combattit farouchement les envahisseurs arabes. Plus de 1 300 ans après sa mort, elle demeure le symbole de la résistance amazigh.

P

our accéder au refuge de Kahina (également appelée Dihya), reine berbère qui vécut au VIIe siècle, il faut montrer patte blanche. D’abord passer plusieurs contrôles de gendarmerie et de police, franchir ensuite deux barrages militaires, y déposer ses papiers d’identité et s’engager à quitter les lieux avant 17 heures précises. « La zone est dangereuse en raison de la présence de groupuscules terroristes qui rodent dans la région dès le crépuscule », confie un militaire. Passé le dernier check-point et après une succession de virages tortueux, se dresse le site touristique de Tajmint, dans le massif N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

des Aurès (550 km au sud-ouest d’Alger), un des derniers refuges de cette reine qui tint tête aux armées arabes venues propager l’islam en Afrique du Nord à partir de l’an 670. Près de quatorze siècles après sa mort, le sabre à la main, la reine Kahina demeure un symbole de la résistance des populations berbères aux conquêtes étrangères: romaine, vandale, byzantine, arabe, turque ou française. Dans le pays chaoui partagé entre montagnes et plaines de rocailles, Kahina est adulée. On la

surnomme « Yemma », « maman » en langue amazigh. À l’entrée du canyon de Tajmint, un immense bloc de roche, aussi haut qu’un gratte-ciel, veille comme une sentinelle sur la forteresse de « Yemma Kahina ». Sur la crête des Ka falaises où poussent abonfalais damment genévriers et figues dam de Barbarie, des maisons de pierre avec poutres forment pier le village millénaire, déserté depuis le début de la guerre d’Algérie, en 1954. Pour stocker blé, orge, dattes, huile, des greniers de type troglodytique, dont il ne reste que des ruines, ont été érigés à même les parois de la muraille. Pour accéder à ce nid d’aigle où les populations de l’époque devaient tenir des JEUNE AFRIQUE


OMAR SEFOUANE POUR JA.

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p Le canyon de Tajmint, à 550 km au sud-est d’Alger. C’est d’ici que la guerrière et ses tribus surveillaient l’arrivée des troupes musulmanes venues d’Arabie.

sièges de plusieurs mois, voire de plusieurs années, pour résister aux invasions étrangères, deux seules possibilités : monter à la force des bras ou à l’aide d’une échelle fabriquée à base d’alfa. C’est sur ce promontoire, où la vue peut porter par temps clair à des dizaines de kilomètres, jusqu’aux plaines de Biskra, que Kahina et ses tribus surveillaient l’arrivée des troupes musulmanes venues d’Arabie, après avoir traversé l’Égypte, la Libye et la Tunisie. PROPHÉTESSE. Nous sommes en

l’an 686. Koceila, qui règne sur plusieurs tribus berbères, meurt lors d’une bataille contre l’ennemi arabe en compagnie de Thabet, père de Kahina, tandis que le reste de leurs troupes trouve refuge dans le maquis des Aurès. La fille unique, qui appartient à la tribu Djerawa, est belle, fougueuse, bonne cavalière, habile à JEUNE AFRIQUE

l’arc et de confession juive. Elle prend la tête de la résistance, fédère les tribus qui refusent de se soumettre aux musulmans, comme jadis la communauté s’était dressée contre les Romains et les Byzantins. Son adresse, son courage, l’aura mystique qu’elle dégage en temps de guerre comme en temps de paix ainsi que ses supposés dons surnaturels – les Arabes la surnomment Kahina (prêtresse, prophétesse ou sorcière) – font d’elle une reine aussi redoutée qu’incontestée. Le chef musulman Hassan Ibn Nouâmane, qui lance ses guerriers des années durant contre les Aurès, reçoit un jour ce conseil: « Les habitants redoutent Kahina et lui obéissent. Tue-la, et les Berbères se rendront. » Après avoir régné sur ces vastes territoires qui s’étendaient jusqu’à la frontière tunisienne, Kahina succombera vers 703 lors d’une bataille contre les hommes d’Ibn Nouâmane. Sa

tête, tranchée, est expédiée comme un trophée de guerre au calife Abd al-Malik, installé dans le Cham, l’actuelle Syrie. La légende dit que, lors de la nuit qui précéda sa mort, la reine demanda à ses deux fils de se rallier à l’ennemi afin de préserver l’héritage de son peuple. « Par vous, les Berbères préserveront quelque pouvoir », leur aurait-elle dit. Certes, du refuge de Kahina à Tajmint il ne reste aujourd’hui que des vestiges qui ne font même pas l’objet d’une protection de la part des autorités. Mais dans les Aurès, en Kabylie ou chez les Berbères de Libye, cette reine insoumise reste un symbole de courage, de beauté et de liberté. Sa légende est encore célébrée par des poèmes et des chants. Et son nom est porté avec fierté par les filles berbères. l FARID ALILAT, envoyé spécial à Alger N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


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Afrique subsaharienne

CAMEROUN

Le fantôme

de Dakar Depuis vingt-quatre ans, la dépouille d’Ahmadou Ahidjo repose au Sénégal… La veuve de l’ancien président réclame son rapatriement, mais Paul Biya ne lève pas le petit doigt. Entre rancune et intransigeance, retour sur un psychodrame qui n’en finit pas.


Afrique subsaharienne GEORGES DOUGUELI,

D

envoyé spécial

e sa fille Aminatou, tout juste rentrée au Cameroun, Germaine Ahidjo dit seulement qu’elle « espère qu’elle survivra à son aventure », si l’on en croit une confidence faite à un proche. À Dakar, où elle vit, l’intransigeante veuve ne souhaite pas commenter davantage ce que beaucoup de Camerounais ont qualifié de « trahison » en apprenant que la cadette de l’ancien couple présidentiel avait accepté de se joindre publiquement à la campagne du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC, au pouvoir) pour les législatives du 30 septembre. Aminatouacédé,pasGermaine,quirépètequ’elle ne rentrera au pays que lorsqu’elle aura la certitude que son mari, décédé en 1989, y sera enterré avec les honneurs. La mère et la fille ne se parlent plus et ce n’est pas Paul Biya qui s’en plaindra. Car l’actuel chef de l’État n’est pas fâché avec tous les membres de la famille de son ancien mentor. Avant même d’avoir débauché Aminatou, 47 ans, il avait pris soin de bichonner l’aîné des enfants Ahidjo,MohamadouBadjika,nomméambassadeur itinérant en décembre 2011 puis porté en janvier dernier à la tête du conseil d’administration de la Société hôtelière du Littoral. Le président savait tout l’intérêt qu’il y avait à s’allier à un nom de famille toujours très populaire.

t La tombe « provisoire » de l’ex-chef de l’État, dans le cimetière de Yoff, à Dakar.

ROMAIN LAURENDEAU POUR J.A.

INIMITIÉ. C’est l’histoire d’un psychodrame vieux

de presque trente ans. Celui de l’impossible retour au pays natal de la dépouille d’Ahmadou Ahidjo, le premier président du Cameroun indépendant. Le 30 novembre, ses restes entameront leur vingtcinquième année dans une sépulture dite « provisoire », dans un carré du cimetière de Yoff, à Dakar. Et rien ne semble pouvoir mettre un terme à cet exil forcé. Tout commence en novembre 1982. Ahidjo est au pouvoir depuis vingt-trois ans quand il démissionne et désigne Biya, son dauphin constitutionnel depuis 1975, comme successeur. Ahidjo choisit toutefois de conserver la présidence du parti unique, l’Union nationale camerounaise, et ne se retire que partiellement de la vie publique. Yaoundé est rapidement trop petit pour deux présidents. L’étrange cohabitation prend fin en avril 1983, après cinq mois de rumeurs malveillantes et d’intrigues de cour : Ahidjo renonce à diriger le parti. Commence alors une inimitié profonde, qui sera ponctuée d’accusations de complot et atteindra son apogée avec une sanglante tentative de coup d’État menée, en 1984, par des partisans de l’ancien président. Elle se soldera par deux procès retentissants et deux condamnations à mort par contumace pour Ahidjo, reconnu coupable d’atteinte à la sûreté de l’État. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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Afrique subsaharienne Cameroun Pourquoi les années n’ont-elles pu panser les plaies ? Au Cameroun, on se perd en conjectures. Le pouvoir rejette la faute sur Germaine Ahidjo, critiquée pour avoir « conditionné le retour du clan au Cameroun à un contingent de demandes, allant des obsèques officielles du président défunt jusqu’aux réparations des préjudices dus à l’expatriation forcée de la famille présidentielle », selon un journal proche du palais d’Etoudi. Pour justifier son refus, Biya a coutume de dire que c’est « un problème d’ordre familial ». Et d’ajouter: « Si la famille de mon prédécesseur décide de faire transférer les restes du président Ahidjo, c’est une décision qui ne dépend que d’elle. Je n’ai pas d’objection, ni d’observation à faire. » FAIBLE ESTIME. Germaine Ahidjo ne fait pas

preuve de moins de fermeté. « Ce que je veux, c’est un retour par la grande porte et non à la dérobée », aimait-elle répondre jusque-là. Et il y a fort à parier que la défection de sa fille ne fera que la radicaliser. « Le prochain président du Cameroun rapatriera Ahidjo », dit-elle désormais, déterminée malgré la maladie et la solitude (lire encadré). « Ce rapatriement ne sera sans doute pas possible de son vivant, soupire un avocat familier du pouvoir. Le blocage relève d’une animosité personnelle entre Paul Biya et Germaine Ahidjo. La seconde n’a d’ailleurs jamais tenu le premier en haute estime. » Selon des témoins, Germaine avait soutenu son époux dans sa décision de quitter le pouvoir alors qu’il n’avait « que » 58 ans. « Mais elle avait émis des réserves sur le choix de Biya comme successeur. Elle lui préférait le fidèle secrétaire général de la présidence, Samuel Eboua, le ministre de l’Administration territoriale, Victor Ayissi Mvodo, ou encore le ministre des Affaires étrangères, Jean Keutcha », explique le même avocat. Biya en a-t-il voulu à l’ex-première dame, au point d’attendre qu’elle fasse amende honorable trente ans après les faits ? Il n’en a jamais rien dit, mais le chef de l’État est connu pour ne rien oublier. Il se souvient de cette époque où il était un Premier

CAMEROON TRIBUNE

p Passation des pouvoirs entre Paul Biya et son mentor, le 6 novembre 1982.

ministre sans pouvoir et où Samuel Eboua était le véritable interlocuteur d’Ahidjo. En 1995, Eboua s’était confié dans un livre (Une décennie avec le président Ahidjo, aux éditions L’Harmattan) : « Une habile propagande de l’entourage de Paul Biya distillait la rumeur selon laquelle le Premier ministre, le vrai, était le secrétaire général Eboua, écrivait-il alors. Rien n’est fait pour que le peuple se souvienne de celui qui a assumé son destin pendant plus de deux décennies. L’ingratitude, tel l’œil de Caïn, doit-elle poursuivre l’individu jusque dans le silence et les ténèbres du tombeau ? » PLAIRE AU CHEF. Intransigeanced’uncôté,rancune

de l’autre… Pendant des années, des médiateurs ont tenté de réconcilier Etoudi et Dakar. « J’ai plusieurs fois parlé du problème du transfert du corps d’Ahidjo pour qu’il puisse reposer dans son pays et dans sa ville, Garoua », écrit Émile Derlin Zinsou, ancien président du Dahomey (l’actuel Bénin) et ami d’Ahidjo, dans En ces temps là… (Riveneuve Éditions, 2013). « Le président Biya m’a toujours reçu avec amitié et écouté avec une

GERMAINE, LOIN DES ORS DU PALAIS

A

vant que ses ennuis de santé ne l’obligent à y renoncer, il n’était pas rare de voir l’ex-première dame du Cameroun prendre sa Citroën C4 pour aller faire ses courses au marché de Kermel, à Dakar. Germaine Ahidjo, 81 ans, aimait cuisiner pour ses filles – Babette, pédiatre, et Aïssatou, responsable d’école maternelle, vivent encore avec elle – et ses cinq petitsenfants. Elle a gardé peu de contacts avec sa vie N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

d’avant. Seule la famille d’Émile Derlin Zinsou, l’ancien président du Dahomey (actuel Bénin), lui téléphone régulièrement. Cette prise de distance explique sa retenue lorsque l’avocate Alice Nkom lui a proposé de créer une fondation Ahidjo. On prête à la famille une grande fortune. Ahidjo avait fait construire des villas dans le Nord (à Garoua et Mayo-Oulo) et dans l’Extrême-Nord (à

Maroua et Mokolo). D’abord confisqués, ces biens ont été restitués, mais après pillages et dégradations. Son grand regret, dit encore Germaine à ses proches, est de n’avoir pu assister aux obsèques de sa mère, décédée pendant son exil au Sénégal (elle n’a pas de passeport, mais impossible de savoir si elle en a fait la demande). Elle vit de la pension à laquelle Ahidjo avait droit en tant qu’ex-parlementaire de l’Union française, mais ne reçoit rien de G.D., avec son pays d’origine. l CLARISSE JUOMPAN-YAKAM JEUNE AFRIQUE

ERICK-CHRISTIAN AHOUNOU

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Afrique subsaharienne grande attention. […] Cependant, il a eu plusieurs occasions de mettre en œuvre ce sur quoi nous étions d’accord sans en saisir aucune. Qu’est-ce qui le retient d’un geste attendu par la majorité des Camerounais, qui ne pourrait être qu’à son honneur, qu’à son bénéfice ? Ce serait si beau que ce soit Biya qui enterre Ahidjo dans leur commun Cameroun ! » Zinsou n’est pas le seul à s’y être cassé les dents. Marafa Hamidou Yaya, l’ancien tout-puissant secrétaire général de la présidence devenu ministre de l’Administration territoriale (et aujourd’hui en prison), avait en son temps promis de faire du retour de la dépouille d’Ahidjo, originaire de Garoua comme lui, une priorité. Il n’y est jamais parvenu. Biya, bien sûr, pourrait user de son pouvoir pour faire rapatrier son « illustre prédécesseur ». Mais les raisons de son inaction tiennent autant à sa personnalité qu’à la complexité du fonctionnement du pouvoir camerounais. Le 30 novembre 1989, Abdou Diouf, alors président du Sénégal, avait dû téléphoner au Gabonais Omar Bongo Ondimba pour pouvoir joindre son homologue camerounais et l’informer du décès d’Ahidjo. Biya avait alors réuni son entourage, auquel il avait exposé la situation, avant de quitter la pièce pour laisser libre cours au débat. Les « durs » du régime, dont l’influent ministre des Forces armées, feu Gilbert Andzé Tsoungui, ne voulurent pas entendre parler de rapatriement. Ils eurent le dernier mot. Au bout de trois jours sans nouvelles de Yaoundé, Diouf autorisal’inhumationàDakar.«Aujourd’huiencore, pour plaire au chef, son entourage l’encourage à ne rien céder. Comme si ce n’était pas Ahidjo qui avait offert à Biya le pouvoir sur un plateau d’argent », se plaint un opposant. RÉCONCILIATION. La pression se fait aujourd’hui plus forte sur les épaules du président. Aboubakar Ousmane Mey, frère de l’actuel ministre des Finances, Alamine Ousmane Mey, a lancé une association, Justice Plus, destinée à favoriser le rapatriement de l’ancien chef de l’État. « Les générations passent et, en dépit de la propagande, Ahidjo n’est plus perçu comme un coupable. Il est même devenu une victime », affirme Aboubakar Ousmane Mey, qui veut organiser une conférence sur le sujet à Garoua. Il a obtenu le soutien de personnalités telles que le cardinal Christian Tumi, l’opposant MauriceKamto,l’avocateAliceNkom,etmêmecelui de Louis-Tobie Mbida, dont le père, André-Marie Mbida, fut le premier prisonnier politique d’Ahidjo. Mais les temps ont changé. Le silence imposé sur Ahidjo ne parvient plus à dissimuler le besoin urgent de réconciliation entre le Nord et le Sud. Paul Biya, pourtant, s’honorerait à faire un geste et à autoriser le retour de son prédécesseur. L’union est à ce prix. L’émergence aussi, sans quoi ce beau concept dont le chef de l’État a fait son slogan ne restera qu’une coquille vide. l JEUNE AFRIQUE

EN VÉRITÉ

Opinions & éditoriaux François Soudan

Outrage post-mortem

S

I L’ON EXCEPTE le cas particulier du roi Idriss de Libye, renversé en 1969 par un certain Mouammar Kaddafi alors qu’il se trouvait à l’étranger, décédé quinze ans plus tard au Caire et inhumé selon ses volontés dans la ville sainte de Médine, en Arabie saoudite, seuls deux anciens chefs d’État africains continuent de subir l’outrage postmortem d’une sépulture d’exil. Ahmadou Ahidjo et Mobutu Sese Seko – ce dernier reposant depuis son décès, le 7 septembre 1997, dans un cimetière de Rabat, à des milliers de kilomètres de son Équateur natal – sont en quelque sorte morts deux fois: foudroyés par la maladie et ostracisés par la terre de leurs ancêtres, loin de laquelle il ne saurait, en Afrique, y avoir de paix éternelle.

de Kinshasa) font face au tir de barrage des enfants de la toute première épouse du maréchal. Le tout sur fond d’héritage disputé. On imagine aisément l’ambiance. Reste que si les proches ont leur fierté respectable et leurs petits calculs agaçants, ce n’est pas à eux mais à l’État qu’il revient de faire le geste historique susceptible de balayer ces obstacles. Au regard de

Ahidjo et Mobutu sont en quelque sorte morts deux fois.

De cette double anomalie, les familles des défunts peuvent en partie être tenues pour responsables. Divisés, parfois déchirés, incapables de se choisir un interlocuteur unique, les « clans » Ahidjo et Mobutu sont loin de présenter le visage qui convient pour mener dans la sérénité les négociations, préludes inévitables au retour des restes des anciens présidents. Depuis Dakar, Germaine Ahidjo campe sur son intransigeance, alors que les veuves jumelles Bobi et Kosia Mobutu (la première étant reconnue comme seule légitime par le gouvernement

l’histoire du Cameroun et de la trace qu’il entend y laisser, il serait ainsi incompréhensible que Paul Biya ne fasse pas tout, avant de quitter lui-même le pouvoir, pour organiser les funérailles nationales de celui qui fut son mentor et son Pygmalion. Savoir jeter la rancune à la rivière n’est-il pas le propre des vrais chefs ? De même, Joseph Kabila se grandirait sans nul doute à déclarer publiquement sa volonté d’offrir à la dépouille d’un homme que combattit son père mais qui, qu’on le veuille ou non, a façonné la RD Congo, un retour tout aussi honorifique. Tous deux devraient savoir que les deuils ressoudent les nations mieux que les triomphes et qu’à condition d’avoir le courage politique d’en faire bon usage, ils ne pourront qu’en tirer profit. l N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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Afrique subsaharienne CÔTE D’IVOIRE

Bédié ouvre le bal des prétendants… À peine reconduit à la tête du PDCI, le « Sphinx » a cédé à la pression des militants : oui, le parti présentera un candidat face à Ouattara en 2015. Mais qui ? Les ambitieux piaffent déjà…

«

L

a tortue, quand elle a le feu, elle peut encore bouger », dit d’un ton presque admiratif l’un des adversaires d’Henri Konan Bédié, 79 ans. Il faut dire que, lors du douzième congrès du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), l’ancien chef de l’État ivoirien a montré une belle capacité de résistance face à ses deux challengeurs, Alphonse Djédjé Mady, 68 ans, et Kouadio Konan Bertin (KKB), 44 ans. « À la présidentielle de 2010, Bédié était éteint. Mais là, il a retrouvé une seconde jeunesse. La nuit du vote des congressistes, il est resté sur place jusqu’à 2 heures du matin », poursuit notre interlocuteur. Avec 93 % des voix des délégués, sa réélection à la présidence du PDCI fait sensation. KKB dénonce « une fraude massive », mais, parmi les quelque 4 000 délégués rassemblés du 3 au 6 octobre au Palais des sports de Treichville, à Abidjan, beaucoup ont manifesté aussi leur attachement à « Papa Bédié », le dauphin que Félix Houphouët-Boigny avait fait entrer au bureau politique du parti dès… 1965 ! « Et puis, au PDCI, on a la culture du chef », ajoute la jeune députée Yasmina Ouégnin (34 ans).

VIVATS. Apparemment, donc, rien de

nouveau. Et pourtant, dans les travées de Treichville, il s’est passé quelque chose d’inattendu. La base a forcé Bédié à annoncer qu’il y aurait un candidat PDCI à la prochaine élection présidentielle. Avant ce congrès, le Rassemblement des républicains (RDR) d’Alassane Ouattara comptait sur Bédié pour qu’il « tienne » ses troupes et pour que le PDCI ne présente pas de candidat en 2015 face au chef de l’État sortant. Le « Sphinx de Daoukro » semblait d’accord. Il distillait des phrases énigmatiques sur 2015 et insistait sur la nécessité de maintenir l’alliance PDCI-RDR conclue en 2005 au nom du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Mais durant le congrès un slogan a fait mouche : « Un parti qui se respecte doit avoir un candidat en 2015. » Le président du comité d’organisation, le très pro-Bédié Emmanuel Niamien Ngoran,

L’affaire est-elle entendue ? Pas si simple. Pour désigner son candidat, le PDCI va devoir réunir une convention de plusieurs milliers de personnes. Or, dès le lendemain du congrès, l’un des piliers du parti, le Premier ministre, Daniel Kablan Duncan, a jeté un pavé dans la mare : « C’est la convention qui décidera s’il y aura un candidat. » Évidemment, derrière cette petite phrase, beaucoup croient entendre Alassane Ouattara lui-même, dont Duncan est l’un des amis les plus fidèles. Au PDCI, la base espère que la parole de Bédié prévaudra. « Quand la tête est là, le genou ne porte pas le chapeau », dit joliment Yasmina Ouégnin. Mais 2015, c’est encore loin. Et d’ici là… DILEMME. « Ce congrès n’a fait que

reporter les problèmes », affirme KKB. Il n’a pas tort. De fait, pour le PDCI, c’est au moment de la convention que sonnera l’heure de vérité. Bédié sera devant un dilemme : présenter Lui-même se lancera-t-il dans un candidat au risque de fâcher la course ? En 2010, il confiait : le RDR et de perdre des postes « C’est mon dernier combat. » au gouvernement, ou ne pas en présenter avec le danger de ancien ministre de l’Économie et des mécontenter la base et de susciter une ou Finances, a lui-même lâché : « La base plusieurs candidatures indépendantes. le demande, et un parti comme le PDCI Bédié lui-même pourrait-il se lancer dans doit avoir un candidat. » En bon animal la course ? En 2010, il confiait à Jeune politique, Bédié a senti la pression des Afrique : « C’est mon dernier combat. » Et militants. Et dans son discours de clôture, en 2015, il aura 81 ans… Du coup, sans le il a lancé, sous les vivats : « Il est évident dire ouvertement, plusieurs précandidats qu’en tant que parti politique nous ne sont déjà dans les starting-blocks. Parmi pouvons pas ne pas avoir de candidat. » eux, Emmanuel Niamien Ngoran, qui a Une double négation qui en dit long sur réussi un congrès sans bavures ; l’ancien son embarras… Premier ministre Jeannot AhoussouKouadio, qui est aussi l’un des fidèles du Sphinx ; et un certain Charles Konan UN « GOUVERNEMENT » ACQUIS AU CHEF Banny. QUELQUES FIDÈLES Ce dernier cas est particulier. L’ancien Dans ce « gouvernemaire du Plateau, gouverneur de la Banque centrale des de Bédié sortent ment » du PDCI et Robert Beugré États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) a renforcés de ce figurent aussi : deux Mambé, gouverneur toutes les raisons de demander l’invesdouzième congrès du « plumes » de Bédié, du district d’Abidjan ; titure du PDCI pour 2015. L’ex-Premier PDCI. D’abord, le les universitaires deux femmes ministre de Laurent Gbagbo est un cardiologue Maurice Wenceslas d’influence, Amah homme d’expérience. Sa mission à la Kakou Guikahué : Lenissongui Coulibaly Tehoua et Henriette tête de la Commission Dialogue, Vérité à la tête du nouveau et Robert Niamkey Dao Coulibaly ; et Réconciliation (CDVR) touche à sa fin. secrétariat exécutif Koffi – un proche de et l’ex-adjoint de Le problème, c’est que Bédié s’en méfie de vingt membres, Niamien Ngoran ; deux Kouadio Konan Bertin, depuis longtemps. À tort ou à raison, il le l’ex-ministre de poids lourds de la Brahima Kamagaté, soupçonne d’être derrière KKB et Djédjé la Santé devient le capitale, les prospères qui a rallié Bédié. l CH.B. Mady, et même de les avoir aidés à payer numéro deux du parti. Noël Akossi Bendjo,

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JEUNE AFRIQUE


Afrique subsaharienne

SIA KAMBOU/AFP

t Le 3 octobre, au Palais des sports de Treichville (Abidjan).

leurs frais de candidature – 18 millions de F CFA (27 440 euros) par personne, non remboursables pour les perdants… Si le PDCI se jette dans la bataille de 2015, la convention risque donc de mettre aux

prises Banny et un candidat soutenu par Bédié. À moins que les deux hommes finissent par faire la paix. Que vont devenir les « messieurs 3 % », comme les pro-Bédié appellent

… et Ouattara tente de ramener le FPI dans l’arène Le président ivoirien doit négocier avec la formation de Laurent Gbagbo. Mission impossible ?

A

lassane Ouattara a décidément fort à faire. En plus d’apaiser les craintes de ses alliés du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), qui s’estiment mal récompensés du soutien qu’ils lui ont apporté en 2010, le chef de l’État doit gérer les revendications de ses opposants du Front populaire ivoirien (FPI). Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ça n’est pas gagné. En avril, il n’avait pu empêcher le parti de Laurent Gbagbo de boycotter les élections municipales. Sans doute espérait-il que la libération de Pascal Affi N’Guessan, le président du FPI, et de treize autres proches du président déchu, en août, serait un geste d’apaisement suffisant. Et peut-être même un premier pas vers une participation à la présidentielle de 2015 – laquelle n’en serait que plus crédible. C’était aller un peu vite en besogne… Le 24 septembre, des délégations des JEUNE AFRIQUE

deux bords (respectivement conduites par le Premier ministre, Daniel Kablan Duncan, et par Sébastien Dano Djédjé, vice-président du FPI) se sont rencontrées à Abidjan, et les participants n’en sont pas vraiment sortis réconciliés. Le 8 octobre, Kablan Duncan évoquait sur RFI deux points de blocage : l’amnistie générale et la rencontre entre le président Ouattara et son prédécesseur dans sa prison de LaHaye–toutesdeuxsouhaitéesparleFPI. POUDRE AUX YEUX. « S’il y a des blo-

cages, ils ne sont pas à notre niveau, rétorque aujourd’hui Sébastien Dano Djédjé. Nous, nous considérons qu’il y a des divergences et que tout est négociable. Malheureusement, le gouvernement refuse de revenir sur ces deux questions. » Et il ajoute : « Nous avons demandé au président Ouattara d’aller rencontrer Gbagbo. Son gouvernement a dit non. Que pourrions-nous faire de

méchamment les deux vaincus du congrès ? Il ne faut pas les enterrer trop vite. Après sa défaite face à Bédié, lors du précédent congrès d’avril 2002, Laurent Dona Fologo avait quitté le PDCI et rejoint le camp Gbagbo. « KKB et Djédjé Mady, eux, n’iront pas sécher leur linge au soleil », pronostique un confident de Bédié. De fait, ils semblent décidés à rester au PDCI. Sans doute font-ils le calcul que, face à un adversaire de 79 ans, ils vont pouvoir rebondir assez vite. Avant le vote du 6 octobre, Bédié et KKB se sont parlé dans une ultime tentative de conciliation. « Kouadio, si tu te retires, je te réserve une place au secrétariat exécutif », a dit Bédié. « Dans nos valeurs, monsieur le président, le fils ne laisse pas le père aller chercher le gibier à sa place », lui a répondu KKB. Au PDCI, la chasse reste ouverte toute l’année. l CHRISTOPHE BOISBOUVIER

plus? Renégocier? Peut-être. Mais ce que nous voulons en priorité, c’est que Laurent Gbagbo sorte de La Haye, d’une façon ou d’une autre. » Du côté du Rassemblement des républicains (RDR, parti présidentiel), on dénonce la « surenchère permanente » de la principale formation d’opposition. « Nous sommes au point mort, affirme Joël N’Guessan, porte-parole du RDR. Le FPI demande une libération sans condition de l’ancien président, de son épouse et même de généraux impliqués dans des massacres. Ce n’est pas possible. Nous serons fermes sur ce point. » Le camp présidentiel a bien proposé la création de deux nouveaux statuts (un pour l’opposition et un autre pour son chef), mais le FPI a décliné. « Cela ne nous intéresse pas, c’est de la poudre aux yeux », répond Dano Djédjé. Ce qu’il veut, c’est la reprise du versement des subventions publiques à son parti, « interrompu depuis trois ans »: « Que l’on nous accorde en priorité nos droits en tant que formation politique, comme celui d’être financé publiquement, de critiquer le gouvernement et de manifester librement. » À quand le prochain round? Pour le moment, aucune date n’a été évoquée, ni d’un côté ni de l’autre. l HABY NIAKATE N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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Afrique subsaharienne Il nous a rendu visite au 57 bis

Pierre Moussa Président de la Commission de la Cemac « Pourquoi nous devons rester à Bangui »

S

URTOUT, NE RIEN DIRE qui pourrait remettre en cause les décisions des chefs d’État de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). Pierre Moussa, président depuis août 2012 de la Commission de cette institution commune à six pays de la sous-région, est un homme prudent. Peut-être même un peu trop en cet après-midi d’octobre où il nous rend visite et pendant lequel à aucun moment il ne se départira de sa langue de soie.

Alors même que la situation sécuritaire en Centrafrique est pour le moins chaotique et que la question du maintien du siège de la Cemac à Bangui se pose avec insistance, Pierre Moussa maintient qu’il faut respecter la décision prise par la conférence des chefs d’État de la zone, le 14 juillet, de demeurer dans la capitale centrafricaine. Selon eux, partir même temporairement, comme l’avait suggéré le Conseil des ministres de la sous-région, ne ferait qu’aggraver la situation. Dans un pays dévasté par des guerres à répétition, il est vrai que la Commission de la Cemac, qui emploie environ 300 personnes, est la plus grande administration. Et que sa délocalisation, même provisoire, pourrait entraîner celle de bien d’autres organisations étrangères. Ancien pilier du régime de Denis Sassou Nguesso, dont il est réputé proche, ce Congolais âgé de 72 ans concède cependant : « Je vous mentirais si je vous disais que la situation est idyllique et qu’on travaille dans les conditions les meilleures possibles. Des cadres de la Commission ont subi de lourds préjudices. » Allusion à ceux dont les biens ont été saccagés et les maisons pillées. Pierre Moussa n’en dira pas plus et, dans la foulée, assure que « des précautions ont été prises très tôt pour garantir la sécurité du siège de la Cemac. Nos locaux ont même servi un temps de refuge aux populations ». N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

VINCENT FOURNIER/J.A.

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p L’ancien ministre congolais est réputé proche de Denis Sassou Nguesso.

collégiales et je crois en la force de la persuasion. Mes collaborateurs peuvent en témoigner », dit-il en cherchant du regard l’approbation de ses directeurs de cabinet et de communication qui l’accompagnent. C’est sans doute cette philosophie de travail qui explique la longévité politique de cet homme formé entre Clermont-Ferrand (France), Paris et Dakar, où il a notamment étudié la planification au Homme consensuel, il ne dira côté du célèbre économiste pas de mal d’Antoine Ntsimi, franco-égyptien Samir son prédécesseur controversé. Amin. « J’ai papillonné pendant au moins un quart de cérémonies de sa prise de fonction et siècle à la tête de divers ministères de sa prestation de serment. « Je n’ai congolais [Plan, Économie et pas de commentaires à faire à ce sujet », Finances…]. Maintenant, je me retrouve glisse Pierre Moussa, égal à lui-même. à la tête de la Commission de la Cemac. Seule réponse qu’on obtiendra de lui: Parce que mon idéal est panafricain, « Nous avons chacun notre mode de c’est vraiment ce que j’ai toujours voulu fonctionnement. En ce qui me concerne, faire », conclut-il. l je suis plutôt pour des prises de décisions STÉPHANE BALLONG Pierre Moussa est ainsi, disent ceux qui le connaissent. Un homme consensuel. D’ailleurs, au sujet d’Antoine Ntsimi, auquel il a succédé dans un contexte de tension entre les pays membres de la Cemac, il ne dira pas de mal non plus. Même si le Camerounais, soupçonné de mauvaise gouvernance et débarqué en juillet 2012 après dix années passées à la tête de l’institution, a boycotté les

JEUNE AFRIQUE


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Afrique subsaharienne MADAGASCAR

Un candidat peut en cacher un autre Le président sortant et son prédécesseur n’ont pas pu se présenter à l’élection du 25 octobre ? Qu’à cela ne tienne, ils ont trouvé leurs poulains : Hery et Robinson.

I

ls ont en commun des lunettes de professeur d’université, une dégaine derond-de-cuir,uneétiquettedecandidat de substitution et un statut – très relatif dans le contexte actuel – de favori. AutreparticularitéquepartagentRobinson Jean-LouisetHeryRajaonarimampianina: il y a à peine trois mois, aucun Malgache n’aurait parié un ariary sur leurs chances d’être élus à la magistrature suprême. À dire vrai, rares étaient ceux qui connaissaient leur existence. Aujourd’hui, ils sont les deux candidats qui attirent le plus de monde à leurs meetings. Ceux que tout le monde appelle Robinson et Hery ne doivent cette soudaine popularité ni à leur charisme ni à leur parcours. S’ils sont considérés comme les favoris du premier tour de la présidentielle, le 25 octobre, c’est parce que la communauté internationale a pesé de tout son poids pour que ni Andry Rajoelina, ni Marc Ravalomanana, ni même son épouse Lalao ne puissent y participer. Et parce que ces derniers les ont choisis pour les représenter et, espèrent-ils, leur permettre, pour le premier de rester au pouvoir, pour les deux autres de le retrouver.

en avril, ce médecin de 61 ans et son parti, Avana(créétroisansplustôt),sontsortisde l’oubli. «Robinson a quittéson île déserte», ont ironisé les esprits caustiques. Il s’apprêtait à y retourner quand les Ravalomanana ont jeté leur dévolu sur lui, mi-septembre. « Robinson a travaillé avec Marc, il a été un cadre de son parti et c’est un homme de parole, nous lui faisons confiance », assure un proche de l’ex-chef de l’État. Ce métis franco-sino-malgache réputé rigoureux, ministre de la Santé puis de la Jeunesse de Ravalomanana durant cinq ans, avait cependant pris ses distances après la chute de son leader. C’est un piètre tribun ? Pas grave, sa force est ailleurs: elle a pour noms Lalao et Marc. Robinson a beau jurer n’avoir

conclu aucun accord avec eux, l’ombre des Ravalomananaplanesursacampagne.Sur ses affiches: le couple, bien qu’au second plan, prend plus de place que le candidat. Dans ses discours: il ne manque pas une occasion de promettre le retour au pays de « Dada ». Dans ses meetings: rares sont ceuxauxquelsl’épouseduprésidentdéchu ne participe pas; il est également fréquent que Marc, depuis son exil sud-africain, intervienne par téléphone. Loin d’être un fardeau, ce soutien est une bénédiction pour Robinson. « Sa campagne a pris une autre tournure, glisse un de ses conseillers. Maintenant, nous pouvons espérer l’emporter, peut-être dès le premier tour. » L’influence de Rajoelina dans la campagne de Hery, un expert-comptable de

ÎLE DÉSERTE. De simples prête-noms ?

Leur entourage n’apprécie guère ce qualificatif mais ne va pas jusqu’à nier l’évidence. « Sans le soutien de Ravalomanana, Robinson n’aurait pas existé dans cette campagne », admet un proche du candidat. Lorsqu’il a déposé sa candidature,

p Robinson Jean-Louis (g.) et Hery Rajaonarimampianina ont le soutien de Marc Ravalomanana pour le premier, d’Andry Rajoelina pour le second.

ARMADA DE SECONDS COUTEAUX EN L’ABSENCE de Rajoelina et de Ravalomanana, c’est à des seconds couteaux que les 7,8 millions d’électeurs malgaches devront donner leur voix le 25 octobre. « Avec 33 candidats, c’est une élection très ouverte », reconnaît-on dans les N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

états-majors des prétendants. Avant qu’Hery Rajaonarimampianina ne se présente, trois des favoris ont cru obtenir le soutien de Rajoelina, dont ils furent des compagnons de route : un côtier, le général à la retraite et ancien Premier

ministre Camille Vital, et deux Merina, l’ancien vice-Premier ministre chargé de l’Aménagement du territoire Hajo Andrianainarivelo, et le maire par intérim d’Antananarivo Edgard Razafindravahy. Dernier

favori, Pierrot Rajaonarivelo, récent ministre des Affaires étrangères, pourra compter sur l’électorat de l’autre grand absent de ce scrutin, Didier Ratsiraka, même si les deux hommes sont R.C. fâchés. l JEUNE AFRIQUE


Coulisses

PUISSANCE DE FEU. Au fil des ans, Hery

se rend indispensable et intègre le premier cercle des collaborateurs de Rajoelina. Quand, en décembre 2011, le président est reçu par Nicolas Sarkozy à l’Élysée, son ministre est sur la photo. C’est lui qui met en musique les « chantiers présidentiels », luisurtoutquiéviteaupayslabanqueroute et qui fait en sorte que les fonctionnaires soient payés chaque mois. Son action à la tête du ministère est saluée jusque dans les chancelleries, où on lui sait gré d’avoir maintenu Madagascar à flot malgré la suspension des aides internationales. Un diplomate africain admet d’ailleurs que nombre de partenaires verraient son élection d’un bon œil, notamment la France. Malgré cette réputation flatteuse, Hery aurait eu bien peu de chances de jouer un rôle sans la machine de guerre du régime. Elle lui a permis de remplir le Coliséum d’Antananarivo (50 000 places), fin septembre, et lui offre une place de choix dans les médias publics. Cette puissance de feu indigne ses adversaires, qui rappellent qu’en tant que grand argentier de la Transition il ne peut être totalement étranger aux scandales politico-financiers qui l’ont émaillée. « S’il est élu, ce ne sera pas la fin de la Transition, ce sera sa perpétuation », grogne un patron. Hery luimême ne renie pas le bilan de ces quatre dernières années, mais il assure qu’avec lui une nouvelle ère s’ouvrira. Le slogan de sa campagne ? « La rupture dans la continuité. » Comprenne qui pourra. l RÉMI CARAYOL JEUNE AFRIQUE

JUSTICE LOIN DES YEUX, LOIN DU CŒUR

KOEN VAN WEEL/AP/SIPA

55 ans issu de la haute société merina, protestant et franc-maçon, est moins perceptible. Le président de la Transition n’apparaît nulle part. Officiellement, il ne soutient personne, mais en coulisses, il a fait son choix: son poulain, c’est Hery. Quand il a déposé son dossier à la dernière minute, mi-août, le candidat savait qu’il aurait les faveurs de Rajoelina, de son entourage politique et des hommes d’affaires qui gravitent autour de la présidence, à commencer par le plus influent d’entre eux, Mamy Ravatomanga. Les liens entrelestroishommessontétroits.En2009, c’est Ravatomanga qui souffle le nom de Hery à Rajoelina. L’intéressé est alors le commissaire aux comptes de son empire économique,legroupeSodiat.Rajoelinalui donne les Finances et le Budget. En 2011, il est en outre nommé président du conseil d’administration d’Air Madagascar, au sein duquel figure également… Ravatomanga.

Afrique subsaharienne

Tout comme il n’était pas question de juger CharlesTaylor en Sierra Leone, il n’était pas question non plus que l’ancien président libérien, reconnu coupable d’avoir aidé les rebelles sierra-léonais pendant la guerre civile, purge sa peine en Afrique de l’Ouest. Dans les deux cas, le risque d’embrasement était bien trop grand. C’est donc sur les îles britanniques qu’il fera les cinquante années de prison auxquelles il a été condamné en p CharlesTaylor purgera sa peine au Royaume-Uni. appel, le 26 septembre, par le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL), lui-même hébergé à La Haye (Pays-Bas). La Suède et le Rwanda s’étaient également portés volontaires, mais le choix de la Cour s’est porté sur le Royaume-Uni, a confirmé son ministre de la Justice, Jeremy Wright, le 10 octobre. C’est aussi Londres qui prendra en charge les frais occasionnés par sa détention. l

KENYA IL A SUFFI D’UNE ÉTINCELLE L’incendie, le 7 août, avait été spectaculaire. Inquiet à l’idée que l’aéroport de Nairobi ait pu être la cible d’une attaque, le gouvernement kényan avait même demandé l’expertise des agents du FBI américain pour déterminer les causes du sinistre. Ceux-ci ont confirmé, le 9 octobre, qu’il n’y avait pas eu d’attentat terroriste, mais un simple courtcircuit électrique.

RD CONGO L’ARNAQUE AU BOUT DU FIL Le business était juteux. Devant la presse, le ministre congolais des Télécommunications a parlé d’un bénéfice de « 500 000 dollars par mois », rien que ça ! C’est en fait un véritable réseau de piratage des appels internationaux que la police congolaise a démantelé, le 4 octobre, à Kinshasa. Selon

Tryphon Kin-Kiey, il fonctionnait depuis une dizaine d’années et avait à sa tête un Français qui devra rendre des comptes à la justice.

AFRIQUE DU SUD RETOUR DE MATON L’expérience ne s’est pas avérée concluante, c’est le moins que l’on puisse dire. En Afrique du Sud, l’administration pénitentiaire avait confié la gestion de deux de ses 243 prisons à des sociétés privées. Sauf que l’une d’elle, G4S, « a perdu le contrôle effectif » de l’établissement de haute sécurité dont elle avait la charge, à Mangaung. La prison a été le théâtre de deux prises d’otages en moins d’un an ; en septembre, une mutinerie a éclaté dans la foulée d’une grève du personnel. Depuis, plus de 300 salariés de G4S ont été licenciés et la société à recours à des employés non qualifiés… Ceci explique peut-être cela. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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V

oici quatre ans exactement, le 16 octobre 2009, le président Ali Bongo Ondimba était investi dans ses fonctions de chef de l’État gabonais, et appelait ses compatriotes à construire dans l’harmonie « un pays émergent, riche et prospère ». Cette volonté a rapidement pris corps sous la forme du Plan stratégique Gabon émergent (PSGE), qui fixe l’objectif d’émergence à l’horizon 2025 et détermine un ensemble d’orientations, notamment : industrialisation, diversification, développement durable, infrastructures. Depuis, de nombreuses réformes ont été mises en place pour moderniser l’économie. Parallèlement, le pays a mené une « diplomatie économique » active pour faire connaître au monde entier ses perspectives de croissance et les partager avec de nouveaux partenaires. Fruit de cette politique de diversification économique et d’ouverture internationale, le Gabon a attiré, entre 2010 et 2013, près de 10 milliards de dollars d’investissements dans de nouveaux projets. Et la croissance suit. Le Fonds monétaire international (FMI) juge qu’elle restera vigoureuse à court et moyen terme (plus de 6 % par an depuis 2009 et plus de 8 % par an hors pétrole), soutenue par l’augmentation des investissements publics et les bons résultats de l’activité hors pétrole grâce à l’apparition de nouvelles activités, en particulier dans les mines, la transformation du bois, l’agro-industrie et la construction. I

Fort de ces nouvelles perspectives, le secteur privé gabonais est entré en phase de mutation accélérée. Les entrepreneurs ont vite compris que le PSGE et les investissements qui l’accompagnent représentent autant d’opportunités de création de richesses et d’emplois par les entreprises locales. Entre 2010 et 2011, le nombre de Petites et moyennes entreprises (PME) a augmenté de 22 %, soit 12 300 nouvelles entreprises. Les services informatiques et le commerce sont les secteurs dans lesquels l’augmentation est la plus importante. Encore ces chiffres pourraient-ils être bien meilleurs si un certain nombre d’entraves étaient levées, comme la difficulté de financement ou les lenteurs administratives, qui constituent autant de handicaps pour accéder aux marchés publics, où les PME gabonaises doivent en outre affronter la concurrence des grands groupes étrangers.

Dès l’origine, le PSGE a défini les principaux domaines de développement économique du pays : le Gabon industriel, le Gabon vert et le Gabon des services. S’ils constituent toujours les trois piliers de la stratégie, les PME et PMI gabonaises en sont incontestablement la base et le moteur. La réussite du « Gabon émergent » repose sur leur capacité à croître et innover. Les entrepreneurs gabonais sont résolus à tenir un rôle clé dans cette dynamique. Forts du potentiel de leur pays et de sa position au cœur de l’Afrique centrale, ils sont prêts à nouer des relations gagnantes avec de nouveaux partenaires pour y parvenir.

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’entreprise gabonaise MATEC (Matériel Technique Gabonais) a été créée en 1999 à Libreville. Née d’un partenariat avec le groupe Diesel Gabon, elle opère sur tout le territoire gabonais et dispose d’une représentation à Port-Gentil par le biais de Diesel Gabon. MATEC a pour vocation la vente et l’installation d’équipements industriels, pétroliers et agricoles. Distributeur de plus d’une quarantaine de marques de renommée internationale, la société est devenue, en l’espace de quelques

GENIE-TP

années, leader sur le marché. Spécialisée dans la production et le traitement d’air comprimé, la surpression, le traitement et le stockage de l’eau, la distribution et le traitement des hydrocarbures et dans les systèmes de lubrification fixe et embarquable, MATEC est une entreprise dynamique, innovante, avec un personnel réactif, à l’écoute.

Ses bureaux et son magasin de vente sont basés dans la zone

OKLICEANE

! BTP

Nous construisons tout ce que votre cœur désire ! Bâtiment, travaux publics et génie civil

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(flexibles), Sihi Sterling (fluides et systèmes), Sferaco (robinetterie industrielle), Latty (joints), Ravaglioli (équipements de garages), Samoa (lubrification), Gilbarco Veeder Root (distribution de carburants)… ● CONTACT Z.I. Oloumi enceinte Diesel B.P. 10033 - Libreville, Gabon Tél. : (+241) 01 74 66 16 / 22 Fax : (+241) 01 74 66 18 patrick.hernandez@matecgabon.com www.matec-gabon.com

! Prestations de services

Manager les talents pour la satisfaction de nos clients SGS) qui interviennent dans la vérification et l’harmonisation des produits et services conformément aux normes internationales (ISO ! Publicité & commerce CNAS - AQSIQ). Ces normes constiréée en 1995, tuent un gage de quaOkliceane Services lité pour les produits et et Conseils est services commercialisés une entreprise évopar la société. En récomluant dans les secteurs pense de ses efforts, du BTP, du froid et de Michel Sédrigue Ndong, la climatisation, de directeur général, a été l’informatique, de la élu manager de l’année communication et du 2010 par Économie Michel Sédrigue, Directeur Général commerce. S’appuyant Gabon et la Chambre de d’OKLICEANE. sur un réseau d’interCommerce du Gabon. ● venants qualifiés et ambitieux, l’entreprise est présente aussi CONTACT bien sur le territoire national que 1229 Boulevard Léon MBA dans la sous-région. Depuis 2009, B.P. 11106 - Libreville, Gabon la société est accompagnée par Tél. : (+241) 01 44 11 44 okliceanesn@yahoo.fr des agences internationales de contrôle qualité (AsiaInspection,

! BTP, froid & climatisation

! Études topographiques et architecturales epuis près de 14 ans, GENIE-TP œuvre par son efficacité et son professionnalisme à la réalisation d’ouvrages dans les domaines exigeants du bâtiment, des travaux publics et du génie civil. Notre savoir-faire nous a permis de travailler en direct avec l’État gabonais et souvent de participer à des travaux d’envergure pour le compte de très grandes entreprises dans les mêmes secteurs d’activité. Au Gabon, plusieurs routes, ouvrages d’art et bâtiments portent la marque de

industrielle d’Oloumi, ainsi qu’un espace de stockage sur deux niveaux, un atelier de flexibles, un atelier de montage et de réparation et un atelier de chaudronnerie. MATEC emploie une quarantaine de personnes et dispose de dix véhicules de service et d’intervention. Plus qu’une simple centrale d’achat, MATEC se déplace sur le terrain et propose des prestations clés en main. MATEC collabore avec de nombreux partenaires internationaux tels qu’Atlas Copco (air comprimé), Alfa Laval (fluides), Flygt (pompage), ABB (distribution et contrôle d’énergie), Lowara Xylem (distribution d’eau), Leroy Somer (moteurs électriques), Blackmer Mouvex (technologie des fluides), Hydro-Calade

notre qualité de réalisation. Nos équipements et notre personnel qualifié et dynamique nous permettent d’intervenir aussi bien en milieu urbain que rural. Ici ou ailleurs, aujourd’hui ou demain, nous construisons tout ce que votre cœur désire. ● CONTACT B.P. 3490 - Libreville, Gabon Tél. : (+241) 04 73 07 30 (+241) 06 70 02 02 w_genietp@yahoo.fr www.genietp.com

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PUBLI-INFORMATION LE CARREFOUR DES PME


Le Carrefour de s PME ! Expertise comptable

S’engager à vos côtés ! Expertise comptable, conseil en gestion-fiscalité

31 ans au contact de l’environnement professionnel ! Diagnostic d’entreprise Management de la qualité

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GBES

! Conseil en entreprise

! Formation - Coaching - RH

! Audit légal et contractuel a société NEW ACE a été créée en 2007 par deux experts comptables gabonais, diplômés et agréés CEMAC. Elle dispose depuis 2012 d’un bureau à Port-Gentil. La croissance et la nécessité d’avoir un arrimage international ont amené NEW ACE, après un contrôle des critères qualitatifs et quantitatifs, à adhérer au réseau Baker Tilly International (8e réseau mondial) en 2011. NEW ACE développe des missions d’audit, de conseil et d’expertise comptable pour des entreprises et des organisations, publiques et privées, assurant confiance et valeur ajoutée à ses clients.

YÉNORÉ CONSULTING

Le cabinet fédère aujourd’hui les compétences et le professionnalisme de plus de 22 collaborateurs qui délivrent leurs prestations dans le strict respect des règlementations en vigueur et des standards internationaux. ● CONTACT Descente de Louis - Libreville, Gabon Tél. : (+241) 01 44 53 28/30 (Libreville) (+241) 06 52 30 44 (Port-Gentil) contact@newace-btf.com www.newacegabon.com

N

otre vocation est de promouvoir et d’accompagner les Institutions, les partenaires au développement et particulièrement les opérateurs économiques de la région Afrique centrale (Gabon, Congo, RDC, Cameroun, Guinée Equatoriale, São Tomé et Principe, RCA et Tchad), de la phase de création audéveloppementdeprojets.Pour vous accompagner dans vos challenges, le cabinet conseil YÉNORÉ CONSULTING vous conseille dans les domaines d’activités suivants : la formation, l’accompagnement ISO,lacommunicationstratégique,

© MATTHIAS G.ZIEGLER

NEW ACE

SPÉCIAL PME GABON

le diagnostic intégral des entreprises. Pour se montrer à la hauteur des attentes de ses clients, le cabinet est constitué d’une équipe dynamique et attentive à l’évolution de ses clients qu’elle considère commedevéritablespartenaires. ● CONTACT Les Terrasses de l’Estuaire 2504 Bd du Général de Gaulle Libreville, Gabon Tél. : (+241) 01 44 19 27 (+241) 03 03 42 12 contact@yenore-consulting.com www.yenore-consulting.com

! BTP

Le spécialiste du béton cellulaire et distributeur agréé de produits TEAIS ! Construction tous corps d’état, étanchéité à froid ! Représentation et commercialisation des produits liés au BTP

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a société Gabonaise de Bâtiment Entretien et Scierie (GBES) est une entreprise gabonaise créee en 1992 à Port-Gentil. Elle dispose d’une représentation à Libreville. Exerçant ses activités sur tout le territoire gabonais, elle est spécialisée dans la construction tous corps d’état, en étanchéité à froid sur dalles, tuiles, murs et sols. Elle effectue également des constructions en panneau

de coffrage aluminium pour la réalisation d’ouvrages en béton cellulaire en partenariat avec la société Marina Grup. Parmi ses références, GBES détient un contrat de réhabilitation des bureaux et logements pour le compte de Total Gabon et met à sa disposition du personnel intérimaire depuis 22 ans. Elle réalise actuellement le terrassement pour la construction des futurs logements des agents du Centre national des œuvres universitaires sur le site

PUBLI-INFORMATION LE CARREFOUR DES PME

de l’Université Omar Bongo à Libreville. Ancien distributeur agréé des produits Swepco au Gabon, elle dispose aujourd’hui d’un partenariat exclusif avec la société Teais pour la distribution de leur large gamme de produits de revêtement et d’étanchéité bâtiment au Gabon et bientôt au Togo. Parmi les clients qui ont fait confiance à GBES figurent des entreprises privées, mais aussi des institutions publiques, notamment des ministères. GBES offre également ses services à des particuliers et leur propose une formation à l’utilisation de ses produits. Disposant d’un agrément pour l’exploitation d’une scierie, l’entreprise recherche aujourd’hui des partenaires financiers souhaitant

développer à ses cotés l’exploitation d’une unité de transformation du bois au Gabon. ● CONTACT B.P. 178 (face Conseil Départemental de Bendjè POG) Libreville, Gabon Tél. : (+241) 01 56 00 13 Fax : (+241) 01 56 00 13 gbes.gabon@yahoo.com

IV


Le Carrefou r de s PME

SPÉCIAL PME GABON

HÔTEL OKOUMÉ PALACE ! Hôtellerie-tourisme

Continuer de vous servir aujourd’hui pour de meilleurs lendemains ! Deux grands hôtels modernes et confortables

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ropriété depuis 2012 du groupe gabonais Wali Hotels & Resorts, l’Hôtel Okoumé Palace est en pleine mutation. Les travaux de rénovation en cours depuis maintenant un an donneront bientôt naissance à deux hôtels de haut standing.

réhabilitation du fleuron de l’hôtellerie du pays. Pour répondre aux attentes de tous les clients, les deux hôtels proposeront au total 470 chambres avec toutes les commodités. Spacieuses, lumineuses et modernes, les chambres Radisson Blu Okoume Palace Hotel Libreville seront équipées d’un bureau, mini-bar, TV par satellite,

Hall d’entrée du futur Radisson Blu Okoume Palace Hotel Libreville.

Dans les mois à venir, la plus grande structure hôtelière de Libreville et du Gabon, dont la gestion est assurée par le groupe international Carlson Rezidor, transmettra son flambeau au Radisson Blu Okoume Palace Hotel Libreville et au Park Inn by Radisson Libreville. « Radisson Blu » et « Park Inn by Radisson » sont des enseignes phares du groupe Carlson Rezidor. La première est la plus grande marque haut de gamme en Europe. La seconde est une marque jeune et milieu de gamme. Cette transformation est une première au Gabon qui, avec deux hôtels sur un même site, se voit ainsi doté de l’infrastructure hôtelière la plus moderne. Wali Hotels & Resorts a consacré plus de 25 milliards de francs CFA à la V

des salles de réunions ultramodernes et confortables seront mises à disposition pour assurer la réussite des évènements. Hautement équipées, elles seront dotées d’une connexion internet haut débit gratuite pour une capacité de 10 à 80 délégués. L’hôtel proposera également une salle de banquet pouvant accueillir jusqu’à 700 personnes et un centre

Le restaurant « Amaya » vous propose une gastronomie raffinée.

continue d’offrir un service de qualité à sa clientèle. Bientôt, vous aurez le choix. Le Radisson Blu Okoume Palace Hotel Libreville et le Park Inn by Radisson Libreville rendront votre séjour touristique ou v o t r e v o y a g e d ’a f f a i r e s beaucoup plus agréable. « Ajouter des couleurs à votre vie et vous donner satisfaction à 100 %, telle est notre devise ». ●

Futur « Waï Y Bar » : un espace lounge bar pour des moments inoubliables.

coffre-for t et bénéficieront d’un accès à internet haut débit, Wifi ou câblé. L’établissement prévoit un pressing et un nettoyage à sec, un kiosque à journaux, u n e b i j o u t e r i e, u n s a l o n de coiffure, un bureau de billetterie Royal Air Maroc, une agence de location de voiture et une banque avec guichet automatique. Une gamme complète de services dont un One Touch Service, une formule Grab and Run, un room service, la livraison du journal quotidien, un super petit-déjeuner et bien d’autres services seront également d i s p o n i b l e s. L a c l i e n t è l e pourra profiter d’espaces de restauration et récréatifs qui incluent des piscines et un centre de fitness bien équipé. Outre ces différents espaces,

Future chambre standard du Radisson Blu Okoume Palace Hotel Libreville.

d’affaires pour la commodité des délégués de conférences. Le s t ra va u x se d é ro u l e nt en deux phases, avec une première livraison prévue pour début 2014. Mais l’Hôtel Okoumé Palace reste ouvert et

CONTACT 5, boulevard de Nice B.P. 2254 - Libreville, Gabon Tél. : (+241) 01 73 20 23 Fax : (+241) 01 73 70 70 reservation@okoumepalace.com www.okoumepalace.com

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Le Carrefour de s PME

SPÉCIAL PME GABON

SATELIS ! NTIC

SASI GABON

Ce qui vous passionne est forcément sur CANALSAT

Vos informations à l’épreuve du temps !

! Commercialisation de chaînes de télévision payantes par satellite

! Études et traitements en archivage

! Montage, maintenance et câblage réseau TV satellitaire des collectivités

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réée en 2003, SATELIS est un partenaire de Canal+ Afrique en charge de la commercialisation officielle de la marque CANALSAT au Gabon. L’entreprise a joué un rôle important dans l’essor de la TV numérique payante et opère pour le développement d’une communication audiovisuelle accessible à tous au Gabon. Composée d’une équipe expérimentée et dynamique, l’entreprise dirigée par Mr Serge Manani Daouda a

! Services

! GED et archivage électronique connu au cours des années une croissance de son activité avec la mise en place de plusieurs agences en propre et d’un vaste réseau de vente agréé et de proximité. ● CONTACT Rue du docteur Cisse (centre ville derrière l’hôpital)

B.P. 23753 - Libreville, Gabon Tél. : (+241) 01 76 19 10 Fax : (+241) 01 76 19 13 satelis@satelis-canal.com www.satelis-canal.com

INTERNATIONAL PRO BUSINESS

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réée en 2005, SASI GABON est le spécialiste de la gestion électronique de documents (GED), de l’archivage physique et électronique, du classement, du tri et de la conservation sécurisée d’archives physiques. Il offre en outre des services de conseils en archivage. Leader au Gabon, l’entreprise met son expertise pluridisciplinaire reconnue au service des organisations privées et publiques qui souhaitent maîtriser leursinformations,leursdocuments

et leurs archives. Des administrations, des PME-PMI de tous secteurs ainsi que des grands comptes du secteur bancaire, pétrolier et assurance lui font confiance. SASI GABONaobtenuplusieurscertificationsnotammentpourl’installation et le paramétrage des solutions telles que ONBASE (GED et Records Management), DOCUWARE (GED) et BONITA (WorkFlow). ● CONTACT Résidence des Lilas (derrière le Palais de Justice)

quartier Ancienne Sobraga B.P. 886 - Libreville, Gabon Tél. : (+241) 05 54 10 70/71 Fax : (+241) 01 44 29 74 info@sasi-gabon.com www.sasi-gabon.com

! Conseil PME-PMI

Réseautage d’affaires et relations internationales ! Conseil et assistance aux PME ! Stratégies de l’organisation des PME

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uelle est votre activité ? Notre ambition est d’être le leader du réseau des affaires. Notre activité est essentiellement concentrée et orientée à 90 % vers les PME. Afin d’assurer leur dynamisme et créer une meilleure compétitivité en phase avec les mutations observées en Afrique et dans le monde, nous proposons des services à forte valeur ajoutée aux PME tels que : - Conseil, assistance, accompagnement et coaching ;

- Formations, séminaires, conférences, forums ; - Conseil en recrutement et gestion des ressources humaines. En quoi votre entreprise se démarque-t-elle de vos concurrents ? Nous sommes une PME et nos clients sont des PME. Nous connaissons mieux les problématiques des PME pour en être une nous-mêmes. Nous faisons partie des précurseurs de ce type d’activité au Gabon et nous souhaitons fédérer le maximum de PME croyant sincèrement en la mutualisation des moyens de production, afin de garantir l’attribution des marchés à un plus grand nombre de PME-PMI, la réduction du taux de

PUBLI-INFORMATION LE CARREFOUR DES PME

chômage, l’amélioration du PIB et une meilleure participation à l’effort national et continental. 10 % de nos actions sont consacrées aux propositions que nous formulons auprès de notre ministère de tutelle (ministère des PME du Gabon) : la création d’un répertoire national des PME-PMI du Gabon, l’élaboration d’une norme nationale de certification des PME-PMI basée sur les réalités locales… Quels sont vos atouts ? Nous disposons d’un carn e t d ’a d re s s e s d ’e nv i ro n 2 000 contacts de professionnels, qui peuvent « réseauter » entre eux et se partager de nombreuses opportunités d’affaires.

Donald Urbain Indingui, Directeur Général d’International Pro Business.

Quelles sont vos perspectives de développement ? Notre société est à vocation internationale mais nous souhaitons que nos actions procurent un retour sur investissement avant d’internationaliser notre société. ● CONTACT B.P. 1213 - Port-Gentil, Gabon Tél. : (+241) 01 56 58 84 Fax : (+241) 01 56 58 85 contact@ipbgabon.com www.ipbgabon.com

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Le Carrefou r de s PME

SPÉCIAL PME GABON

EGCA SA GABON ! BTP – Génie civil

Bâtisseur de valeurs durables ! BTP ! Génie Civil

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artenaire du développement durable, EGCA est spécialisée depuis 1974 dans les travaux publics, les services et depuis 20 ans dans le bâtiment. L’entreprise exerce son métier de bâtisseur au Cameroun, en Guinée Equatoriale, au Maroc et plus particulièrement au Gabon. Selon l’ANGT, le Gabon va investir plus de 13 milliards de dollars dans les routes, les chemins de fer, les ports et les aéroports d’ici 2016. « Les infrastructures de transport (routes, ports, aéroports, voies ferrées et industrielles) seront mises à niveau et de nouvelles liaisons seront construites là où cela est nécessaire, avait dit

le Président. D’ici 2016, tout le Gabon devrait être ouvert afin que le pays devienne un carrefour majeur de la région. Dès son investiture, le président Ali Bongo Ondimba a fait des infrastructures du pays, la pierre angulaire de son programme pour un « Gabon émergent », en se focalisant sur la diversification de l’économie et en brisant la dépendance du pays au pétrole et aux matières premières. La construction de près de 5000 logements sociaux a également été annoncée. C’est dans ce contexte que la Société Nationale immobilière (SNI) a pris l’engagement de construire 3 808 nouveaux logements à Libreville, Nkok, Owendo, Franceville, Moanda, Lambaréné, Mouila, Tchibanga, Makokou, Koulamoutou, PortGentil et Oyem. Concernant Port-Gentil, 827 maisons et 10 immeubles, pour un total de 140

appartements sur une superficie de quatre-vingt-cinq (85) hectares seront livrés dans le quartier N’tchengue, au sud de la ville. Les travaux d’aménagement du site ainsi que la construction des maisons ont été confiés à EGCA. Du marché à commandes au marché de conception-réalisation, EGCA intervient dans tous les domaines des secteurs public et privé. Certifiée ISO 9001 depuis 2007, EGCA déploie la qualité dans tous ses secteurs d’activité et s’est engagée dans un processus de certification ISO 14001 pour 2017. La démarche qualité est devenue le quotidien de l’entreprise, pérennisant ainsi la confiance que lui accordent ses clients dans sa capacité à respecter l’ensemble des engagements contractuels, règlementaires et techniques. La prévention en matière d’hygiène et de sécurité est intégrée

dès la préparation des projets afin d’aboutir à la meilleure sécurité de ses collaborateurs sur les chantiers. La communication interne, outil déterminant dans la capacité à réagir, a conduit à mettre à disposition des acteurs de l’entreprise, l’ensemble des systèmes documentaires « Qualité, Prévention et Environnement » via un site internet sécurisé. En plus de sa production intégrée, elle se consacre au suivi de chantier, à la coordination de celui-ci et au respect de la qualité, du planning, de la sécurité, de l’hygiène et de l’environnement. La compétence de son personnel, son savoir-faire, son expertise, son expérience et sa capacité de réaction et d’adaptation face à des chantiers très différents sont ses atouts. Son objectif est de renforcer et d’optimiser en permanence son organisation dans une volonté partagée de « mieux produire », pour la satisfaction de ses clients, son personnel et ses fournisseurs. Son ambition: devenir la référence BTP - Génie Civil en Afrique. EGCA bâtit sa réussite sur des valeurs fortes : • Le respect des valeurs historiques • Les hommes et les femmes, facteur-clé de réussite de l’entreprise. • Le sens de l’engagement • La proximité et la satisfaction de nos clients • L’exigence de la qualité

© KIM STEELE

© LEV KROPOTOV

Les activités d’EGCA sont diverses. Ses principales activités sont : les travaux maritimes, les travaux de terrassement, la construction. Nos références : L’ÉTAT GABONAIS, L’ANGT, PERENCO, TOTAL GABON, SINOPEC, PANAFRICA/ADDAX, MAURELETPROM,SCHLUMBERGER, TOTAL MARKETING, OPRAG, SNI et OLAM. ●

© MICHAEL JUNG

CONTACT

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B.P. 14027 Libreville, Gabon Tél. : (+241) 01 72 23 70 Fax : (+241) 01 72 23 68 egca@egca.ga www.egca.ga

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Le Carrefour de s PME

SPÉCIAL PME GABON

GABON TECHNIQUE PLUS (GT+) ! Électricité industrielle CABINET CHASLERIE

! Services

Votre partenaire juridique

! Maintenance & Montage des transformateurs

! Suivi comptable, juridique et fiscal des sociétés

! Maintenance des postes cellules - Traitement d’huiles diélectriques

G

ABON TECHNIQUE PLUS (GT+) est une entreprise de droit gabonais, employant des techniciens formés et expérimentés. Dirigée par Roland KOUMBA, Président Directeur Général, GT+ est le leader gabonais en matière de maintenance et montage de transformateurs sur site de toutes puissances et de toutes marques. De plus, elle exerce d’autres activités telles que: la télégestion des groupes électrogènes,l’installationindustrielleetla formation industrielle. L’entreprise GT+ intervient dans de nombreux

BE TECH

© KALAFOTO - FOTOLIA

La vie du transformateur

! Création de sociétés, assistance juridique

paysafricainscommeleCameroun, le Congo, la Centrafrique, l’Algérie et bien d’autres pays... GT+ dispose d’un incinérateur mobile de dernière génération répondant aux normesinternationalespourletraitement des déchets industriels. ●

L

e Cabinet CHASLERIE créé en 1964 à Libreville est dirigé par Monsieur Joseph CHASLERIE. Il est entouré d’une équipe dynamique et efficace de 9 collaborateurs, experts comptables mémorialistes, juristes qualifiés intervenant auprès des entreprises dans le domaine de

la comptabilité et du conseil juridique. Véritable partenaire juridique des entreprises gabonaises des secteurs BTP, transport, hôtellerie, restauration, parapétrolier, elle s’inscrit dans une démarche d’accompagnement, de conseil et suivi personnalisé au quotidien. Avec déjà une agence à PortGentil, ouverte depuis un an et demi, et une autre en cours d’ouverture à Franceville, l’entreprise souhaite s’implanter dans les 9 provinces gabonaises. ●

CONTACT

CONTACT

B.P. 18 368 Libreville, Gabon Tél. : (+241) 01 70 50 35 (+241) 07 43 95 57 gabontechniqueplus@yahoo.fr www.gabontechniqueplus.com

B.P. 10 088 Libreville, Gabon Tél. : (+241) 01 72 87 12 Cel. : (+241) 06 42 83 12 Fax : (+241) 01 72 96 26 cabinetchaslerie@yahoo.fr

! BTP

Fournisseur officiel d’expertise ! Électricité / Eau ! Climatisation

A

près un parcours au sein d’entreprises spécialisées en électricité telles qu’ENELEC ou Sogafric Services où il a mis en place et dirigé le département électricité pendant 10 ans, Monsieur André BERRE, ingénieur de l’ESTP (France) crée Be TECH en 2008. Son sérieux et ses connaissances techniques permettent à l’entreprise de croître rapidement en termes de moyens humains et financiers. Avec à son actif l’électrification d’installations de Petro Gabon, la réhabilitation de l’Immeuble Total Gabon ou encore la maintenance du site de Comilog à Owendo, Be TECH se hisse au rang d’entreprise

André Berre, Directeur Général de BE TECH

nationale citoyenne incontournable. La réalisation du plan stratégique de développement du Gabon offre aux entrepreneurs tels que Be TECH des opportunités

PUBLI-INFORMATION LE CARREFOUR DES PME

d’accession aux appels d’offres des marchés d’état et permet à l’entreprise de passer un nouveau cap. Ces appels d’offres se sont concrétisés par l’obtention de contrats d’envergure tels que la remise en état de l’Université Omar Bongo Ondimba (2011), l’électrification de complexes sportifs lors de la CAN ( 2012), l’installation de groupes électrogènes pour le New York Forum Africa (2013) et plus récemment l’électrification des 5 000 logements sociaux

à Angondjé, projet phare de la politique gabonaise dont le Maître d’Ouvrage est l’Agence Nationale des Grands Travaux. Aujourd’hui avec un effectif de 80 personnes à travers le pays, Be TECH est leader sur le marché Gabonais. ● CONTACT B.P. 8310 - Libreville, Gabon Tél. : (+241) 07 95 97 31 betechgabon@yahoo.fr

VIII


Le Carrefou r de s PME

SPÉCIAL PME GABON

SOCIÉTÉ GABONAISE DE FACTORING (SGF) ! GESTION & RECOUVREMENT

Notre savoir-faire contribue au développement des PME et PMI du Gabon Ogar et OgarVie dans l’assurance, Centr’Affaires et CECAGADIS dans la distribution ou encore le Laboratoire du bâtiment et des travaux publics du Gabon dans le BTP. Nous avons un portefeuille de créances de plus de 70 milliards de F CFA et une part de marché supérieure à 70 %. Nous sommes un véritable gendarme des créances en souffrance ! Léandre Thomas Anoue Tourou Kiki, Administrateur Directeur Général de la Société gabonaise de factoring (SGF).

! Recouvrement de créances ! Gestion de portefeuilles ! Affacturage

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l y a dix ans naissait la SGF. Dans quelles circonstances ? LÉANDRE THOMAS ANOUE TOUROU KIKI : La Société gabonaise de factoring (SGF) a en effet été créée en 2003 pour, dans un premier temps, recouvrer les créances douteuses de la Banque gabonaise de développement (BGD), qui est une institution financière dynamique et la quatrième banque du pays. La SGF a également pris en charge les créances douteuses de deux entités publiques qui avaient été absorbées par la BGD sur décision du Gouvernement gabonais ; ce sont le Fonds d’expansion

et de développement des PME (FODEX) et le Fonds de garantie et d’aide (FAGA). Avec quels résultats ? L.T.A.T.K. : Le succès a dépassé les attentes. Sur un total de 16 milliards de F CFA (24 millions d’euros) de créances de la BGD, plus de 70 % ont été récupérées. Cela représente des centaines de dossiers et plus d’un millier de démarches, aux services de la conservation, de la propriété foncière et des hypothèques ou du cadastre, par exemple. Nous avons pu le faire grâce à notre position de filiale de la BGD, grand groupe public, ce qui nous confère l’autorité nécessaire. Aujourd’hui, une trentaine de clients nous font confiance, comme Gabon Télécom et Solsi dans les télécommunications,

En quoi cela concerne-t-il les PME et PMI du Gabon ? L.T.A.T.K. : Nous mettons à leur disposition notre sérieux, nos compétences et notre réputation en développant une activité d’affacturage. Beaucoup de PME et PMI, qui travaillent avec le secteur public ou avec de grandes entreprises, sont confrontées à des problèmes de trésorerie compte tenu des délais de paiement qu’observent ces groupes. Cela va de 60 à 90 jours. Pour certaines, elles ne sont plus en mesure de mener à bien le contrat qui leur a été confié. En tant que société d’affacturage, nous payons la facture immédiatement, ce qui permet à l’entreprise de retrouver de la trésorerie afin de relancer son activité normalement et atteindre, le cas échéant, ses objectifs ; à charge pour nous de nous faire régler par le créancier. Cette solution représente un vrai plus pour toutes les PME-PMI

qui souffrent de la lenteur de règlement des factures qu’elles ont émises. Quels sont vos arguments pour les convaincre ? L.T.A.T.K. : Nous sommes leader, et même précurseur, dans ce domaine encore peu développé au Gabon. De plus, notre position de filiale de la BGD est un atout essentiel. Nous pouvons nous appuyer sur son réseau, qui couvre l’ensemble du pays. Aucun autre établissement financier n’est aussi présent au Gabon. Nous pouvons en outre bénéficier de l’assistance de la BGD dans les ressources humaines, les systèmes d’information ou encore l’audit et le contrôle de gestion. Enfin, notre crédibilité en matière de recouvrement n’est plus à démontrer. Les PME et PMI du Gabon peuvent compter sur nous pour appuyer leur développement et, par conséquent, le dynamisme de l’économie gabonaise. Votre conslusion L.T.A.T.K. : Plusieurs PME-PMI ont des créances en souffrance auprès de l’État gabonais, auprès de personnes physiques et morales, et ils n’ont pas les capacités de les recouvrer ; notre ambition est de les assister dans ce domaine. De plus, la SGF ambitionne d’apporter son expérience dans la sous-région (CEMAC) et au-delà. ● CONTACT Immeuble Concorde (3e et 12e étage)

B.P. 486 - Libreville, Gabon Tél. : (+241) 01 77 87 21 Fax : (+241) 01 74 26 99 meligueloana@hotmail.com www.sgf-gabon.com

IX

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Le Carrefour de s PME

SPÉCIAL PME GABON

UNIK AFRICA ! Agence de communication

AWELIS LEISURE

Intelligence créative

Conception de parcs aquatiques

! Conseil en marketing et en communication

! Études de faisabilité, design, conseil

! Édition jeunesse

! Fabrication et installation

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M

réée en 2008 par Angèle Yeno Traoret, l’agence UNIK AFRICA s’est hissée au plus haut niveau d’exigence professionnelle de son secteur. L’agence conçoit des stratégies marketing et des campagnes publicitaires pour les entreprises privées et l’administration publique. On lui doit notamment l’identité visuelle de la Coupe d’Afrique des Nations Orange 2012, qui avait habillé les capitales gabonaise et équato-guinéenne. Sa section édition spécialisée dans les ouvrages pédagogiques destinés à la jeunesse a publié récemment, en partenariat avec l’Unesco, le 1er imagier

éducatif dans 5 langues africaines. Remarquée pour sa créativité, son dynamisme et sa culture du résultat, cette start-up « surprenante » révèle des ambitions qui dépassent largement les frontières du Gabon. ●

! Infrastructures de loisirs

algréledéveloppement des principales villes, force est de constater que les lieux de distractions familiales sont encore rares en Afrique. AWELIS LEISURE, issue de l’union de plusieurs savoir-faire, vous propose de développer une activité novatrice, lucrative et créatrice d’emplois : l’exploitation d’un parc aquatique. Forts de

plusieurs années d’expérience dans le monde et de belles réalisations en Afrique (Maroc, Tunisie, Nigeria...), nous proposons un service complet de la conception à la mise en eau (faisabilité, étude des coûts, installation, formation du personnel, SAV). Nos sites de fabrication industrielle basés en Europe nous permettent de proposer des solutions compétitives et adaptées. Notre objectif : vous accompagner dans la création d’un centre de profit pérenne. ● CONTACT

CONTACT

Zone du technopole 14, rue Jean Neyret 42000 Saint-Étienne, France Tél. : (+33) 477 206 711 Fax : (+33) 970 062 888 bb@awelis.com www.awelis.com

Boulevard Georges Rawiri B.P. 2869 Libreville, Gabon Tél. : (+241) 07 70 41 55 angeleyeno@unikafrica.com www.unikafrica.com

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PUBLI-INFORMATION LE CARREFOUR DES PME

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Maghreb & Moyen-Orient

TUNISIE

Agents

troubles Interférences dans le circuit de décision, dissimulation d’informations, développement d’une police parallèle au service d’intérêts partisans… Le ministère de l’Intérieur baigne dans l’opacité.

ALEX FÉRAUD, envoyé spécial à Tunis

M

assif, le cube gris aux allures de bunker sur l’avenue Bourguiba, à Tunis, n’arrive pas à se défaire de sa sinistre réputation. Trois ans après la révolution, le siège du ministère de l’Intérieur cristallise encore les nombreuses suspicions d’une population marquée par la répression benaliste, dont il était l’instrument clé. Dans un contexte d’instabilité politique aiguë, le département sécuritaire enflamme les esprits et nourrit toutes sortes de rumeurs. Les assassinats de Chokri Belaïd, en février 2013, et de Mohamed Brahmi, en juillet 2013, ont écorné un peu plus son image en mettant au jour les graves défaillances du système de renseignements et en soulevant de nombreuses interrogations quant à son fonctionnement et à ses liens avec le pouvoir. Même les syndicats policiers, aussi bien celui des établissements pénitentiaires que l’Union nationale des syndicats des forces de sûreté (UNSFS), dénoncent une certaine opacité et l’implication de leur hiérarchie dans ces assassinats politiques considérés désormais par beaucoup comme des crimes d’État. Un document remis par une source interne du ministère au comité d’avocats de l’Initiative nationale pour la recherche de la vérité N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

sur les assassinats de Belaïd et de Brahmi prouve que la CIA avait alerté, dès début juillet, les services tunisiens du projet d’exécution de Mohamed Brahmi. Les directions sécuritaires, au plus haut niveau, ainsi que le chef du gouvernement étaient donc au courant. L’indignation générale qui en a résulté aura surtout mis un peu plus en difficulté Lotfi Ben Jeddou, actuel ministre de l’Intérieur et ancien magistrat, dont on savait qu’il ne contrôlait pas totalement son propre département. « Traditionnellement, un ministre de l’Intérieur a un rôle politique, son cabinet a une mission administrative et de coordination sans s’ingérer dans le volet sécuritaire. Ce sont les quatre directions – services spéciaux, services techniques, sûreté publique et sûreté nationale – qui en ont l’entière responsabilité. Six mois après le départ d’Ali Larayedh [aujourd’hui Premier ministre], le cabinet mis en place par ce dernier n’avait pas changé. On n’a pas permis à Ben Jeddou de connaître son ministère. Il n’a qu’une vision restreinte de la situation, car il ne prend conseil qu’auprès de trois personnes auxquelles il se fie et n’a pas de conseiller en sécurité », explique un membre de l’Association tunisienne pour une police citoyenne. Dans les faits, les quatre directions sont en contact direct et permanent avec Larayedh. JEUNE AFRIQUE


ONS ABID

« Tous les jours, avant 11 heures, un motard spécialement mandaté lui porte le courrier sensible et attend les consignes. Ben Jeddou n’est souvent pas informé. Ne lui parvient que ce que souhaite Larayedh », relève un agent des forces spéciales. NOYAUTAGE. Pourtant, le circuit des dossiers

chauds obéit à une procédure précise, transitant par trois directeurs généraux et trois responsables centraux. Mais depuis la révolution, les dysfonctionnements se multiplient. La perte de cadres de haut niveau – certains ont démissionné et quarante-deux ont été remerciés par Farhat Rajhi, ministre de l’Intérieur de janvier à mars 2011 – se fait cruellement ressentir. La rupture brutale avec l’ancien régime a enrayé la machine. Si la police a tenté de faire son mea culpa, le système semble toujours opérationnel. Certains agents confient que les écoutes et le contrôle d’internet n’ont jamais cessé et que des rapports sur les personnes sont dressés quotidiennement. Dans les sous-sols de l’Intérieur, on ne torture plus, mais on surveille toujours de près. De fait, toutes les propositions de réforme de fond, comme le déménagement du ministère loin du centre de la capitale, sont restées lettre morte. « Nos policiers en ont ras-lebol d’une hiérarchie qui ne tient pas compte de JEUNE AFRIQUE

p Lotfi Ben Jeddou (à dr.), premier flic du pays, avec son prédécesseur Ali Larayedh lors de la cérémonie de passation des pouvoirs, le 14 mars 2013.

leurs avertissements et sont obligés de recourir à l’arbitrage de l’opinion publique », déplore Imed Belhaj Khelifa, porte-parole de l’UNSFS. Tandis qu’associations et syndicats s’activent, des compétences jugées indépendantes continuent d’être écartées du terrain et de toutes responsabilités, quand elles ne sont pas mises à la retraite d’office. « Il n’y a pas de police parallèle, mais des nominations qui ont opéré un clivage entre une police républicaine et une autre ouvertement partisane », précise en substance Khelifa. C’est qu’Ennahdha, le parti au pouvoir, a procédé à un graduel noyautage. Avant les élections de 2011, les sections régionales ont pris contact avec des policiers, dont elles se sont assuré l’appui en leur garantissant qu’aucune poursuite ne serait engagée contre eux. Nabil Abid, directeur général de la sûreté nationale, avait d’ailleurs rencontré à plusieurs reprises les dirigeants islamistes pour les briefer sur le fonctionnement du ministère. À son arrivée à la tête de l’Intérieur, Ali Larayedh a d’abord fait preuve de prudence – pendant quatre mois, il s’est contenté d’observer – avant de décider soudainement de remercier les patrons des quatre pôles sécuritaires. « Chaque ministre a son équipe, mais cela concerne surtout la composition du cabinet. On ne remplace pas le directeur général des l l l N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


FETHI BELAID/AFP

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p Les syndicats policiers déplorent l’autisme de la hiérarchie sécuritaire, qui ne tient guère compte de leurs avertissements. l l l services spéciaux par quelqu’un qui n’est pas rompu aux arcanes du ministère et qui n’aurait pas au moins vingt ans d’expérience », s’étonne un membre du Syndicat national des forces de sécurité intérieure (SNFSI). Or le dénommé Mahrez Zouari, désigné à ce poste en février 2012, avait un parcours administratif. Atef Omrani, qui l’a remplacé en août 2013, sur recommandation de Tahar Boubahri, chargé de mission auprès du ministre, n’était deux ans auparavant que chef de district à Sfax. L’assassinat de Brahmi a certes conduit au limogeage de Mustapha Ben Amor, directeur général de la sûreté publique, et d’Abdelhamid Bouzidi, directeur général de la sûreté nationale, mais Mahrez Zouari aura eu le temps de placer des proches à des postes clés avant d’être affecté à la formation. Mohamed Ali Laroui, chargé de communication, est ainsi secondé par Lotfi Hidouri. Les deux hommes sont acquis à Ennahdha. Népotisme, clientélisme, trafic d’influence, les pratiques en cours sous Ben Ali ont la vie dure. Résultat, le circuit de transmission des ordres et des instructions est brouillé. Les dysfonctionnements actuels sont

Effectif total

91 690 41 520 2010

2012

Budget 2013

2,14

milliards de dinars (956 000 euros)

donc dus principalement à des erreurs de casting, mais aussi à la réintégration de ceux qui avaient été limogés par Ben Ali en raison de leur appartenance à Ennahdha. L’armée, elle, n’a pas réaffecté ceux qui avaient été écartés par l’ancien régime; elle les a simplement dédommagés. LotfiBenJeddouaunefaiblemargedemanœuvre, et s’il se contredit d’une déclaration à l’autre, c’est qu’il ne dispose pas de toutes les informations. Pour défendre son ministère, il annonce des statistiques attestant un retour de la sécurité, ainsi que des coups de filet dans les milieux extrémistes, mais sans réussir à convaincre, car ces résultats ne sauraient faire oublier les manquements qui ont conduit à deux assassinats politiques. « Nous avons une obligation de résultat, c’est notre devoir. La sécurité se mesure à l’aune des affaires importantes. Or, actuellement, on ne recense que les chiffres de la délinquance, et personne ne s’occupe du grand banditisme. Les statistiques n’ont jamais contribué à instaurer la sécurité, qui est d’abord une perception des citoyens », conclut un chargé de formation. l

UN ESPRIT DE CORPS À RÉINVENTER

R

ouage central de l’État policier sous Ben Ali, le ministère de l’Intérieur suscitait la crainte à travers une répression tous azimuts. Pourtant, les effectifs de l’appareil sécuritaire étaient deux fois moins élevés qu’aujourd’hui. « Jouer de la menace était une des stratégies pour compenser notre sous-effectif. Les agents changeaient sans cesse de localisation, si bien que la population percevait une présence policière constante. Nous n’étions que N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

40000, et non 80000 comme l’ont prétendu les médias. Cette pseudo-force numérique a permis de donner une illusion de domination et de contrôle », explique Béchir, un cadre mis au placard par Farhat Rajhi, ministre de l’Intérieur de janvier à mars 2011. Le système a tenu grâce aux officiers. Formatés dès leur apprentissage, ils étaient aux ordres, tout en se sentant investis d’une mission qu’ils remplissaient sans états d’âme. La hiérarchie entretenait cet

esprit de corps en se montrant attentive à ses troupes et en étant présente sur le terrain. Ripoux ou non, les directeurs généraux étaient des compétences reconnues. Beaucoup citent encore Ali Seriati, directeur général de la sûreté de 1991 à 2001, qui effectuait régulièrement des tournées nocturnes. Cette proximité entre les membres des forces de sécurité et leurs directions a consolidé l’idée d’une corporation puissante et A.F. soudée. l JEUNE AFRIQUE


Maghreb Moyen-Orient

TRIBUNE

Opinions & éditoriaux

Pour une nouvelle approche de la prostitution au Maroc

DR

A HINDE MAGHNOUJI Doctorante en anthropologie sociale à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), Paris

U MAROC COMME AILLEURS, le sexe se monnaie ; les un(e)s vendent leur corps, les autres y mettent le prix. Un chassé-croisé entre l’offre et le désir qui dessine autant de trajectoires de cette économie des chairs. Il y a un demi-siècle, le 17 juin 1963 précisément, entrait en vigueur un nouveau code pénal réformant celui qui avait été mis en place à l’aube du protectorat, en 1913. La section VII, qui traite « de la corruption de la jeunesse et de la prostitution », rend cette dernière strictement illégale. Les « filles soumises » n’existant plus, la prostitution et les pratiques y afférentes sont dès lors contraintes de trouver de nouvelles qualifications. Si les prostitué(e)s sont donc hors la loi, l’exclusion de l’espace social n’est pas pour autant totale. Mohamed Kerrou et Moncef M’Halla 1 émettent l’hypothèse d’une marginalité exclusivement spatiale, limitée à certains quartiers ou espaces spécifiques, ce qui permet aux prostituées une réintégration à terme dans le groupe social : la stigmatisation est ainsi attachée aux lieux, non aux individus. La prostitution se pense alors comme une interface; elle se situe à la limite de l’espace du dedans et de l’espace du dehors. Et c’est sans doute cette position intermédiaire, entre la sphère privée et la sphère publique, qui lui permet d’occuper un rôle social déterminant et accepté comme tel par le groupe.

fait partie de ce commerce occasionnel. Elle dure le temps des études et se compose souvent de jeunes femmes qui restent à « demi-vierges » de façon à pouvoir réintégrer la sphère sociale classique avec le mariage. Ces jeunes femmes récusent la plupart du temps le terme de « prostituée », car elles conservent une sorte de virginité. Le mariage annule d’une certaine manière une partie de l’histoire qu’elles ont traversée. Il faut croire, comme disait Nietzsche qu’« il est plus facile de s’arranger avec sa mauvaise conscience qu’avec sa mauvaise réputation ». La prostitution n’est donc pas nécessairement une rupture avec le cadre normatif. La place ambivalente qu’elle occupe au Maroc s’articule avec un jeu subtil et associe des comportements que l’on peut penser contradictoires. Par exemple, se prostituer n’empêche pas d’avoir une pratique religieuse rigoureuse: bon nombre de prostituées

Nous sommes parfois loin du schéma de la jeune fille rurale analphabète qui, plongée dans la misère urbaine, vend son corps pour survivre.

Le commerce du corps inclut une cohabitation de différentes formes et de plusieurs strates sociales. Si la figure traditionnelle de la prostitution se perpétue dans le milieu rural et à l’occasion des moussems 2, force est de constater que l’on en observe des manifestations plus « modernes ». Les hôtels de luxe, les bars ou encore les boîtes de nuit concentrent une forte activité prostitutionnelle et brassent des professionnelles mais également des « occasionnelles », qui utilisent ce moyen pour arrondir leurs fins de mois. Nous sommes parfois loin du schéma de la jeune fille rurale analphabète qui, plongée dans la misère urbaine, vend son corps pour survivre. Si ce profil est toujours assez répandu, il convient de signaler d’autres types. La prostitution estudiantine par exemple, sur laquelle se penche régulièrement la presse marocaine, JEUNE AFRIQUE

que nous avons pu rencontrer aiment à rappeler que cette activité ne les n’empêche pas d’être de « bonnes musulmanes ». Certaines refusent de travailler le vendredi ou durant le mois de ramadan, alors qu’il s’agit du mois où l’afflux de la clientèle est le plus important. Dans la prostitution estudiantine, les filles ne se reconnaissent pas sous le terme de « prostituées ». Elles précisent même : « Moi, je suis vierge ; je ne suis pas une pute. » Ce qu’il faut entendre comme un indice social et non comme un déni : ce qui ne se prouve pas ne s’éprouve pas. Une règle sociale primordiale qui permet de distinguer une fille de bonne famille, bent nass, d’une fille de la rue, bent zanqa. Le processus bien plus que le contenu, voilà sans doute un angle d’approche indispensable pour qui souhaite comprendre et penser la prostitution dans le contexte marocain. l 1. Mohamed Kerrou et Moncef M’Halla, « La prostitution dans la médina deTunis aux XIXe et XXe siècle », in Être marginal au Maghreb, Paris, CNRS Éditions, 1993. 2. Fêtes collectives à l’occasion de pèlerinages aux tombeaux des saints. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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Maghreb Moyen-Orient MOYEN-ORIENT

Nouvelles frontières Fruit de l’imagination géopolitique d’une spécialiste américaine, une carte choc publiée par le New York Times relance à sa manière le débat sur l’avenir des poids lourds de la région.

L

es lecteurs du New York Times – et ilssontnombreux–n’ontpasmanqué de relever, le 28 septembre, un op-ed au titre faussement naïf: « Imaginons un Moyen-Orient remodelé », signé de la plume de Robin Wright. Cette « spécialiste » américaine des relations internationales, rattachée actuellement au United States Institute of Peace (USIP), intervient régulièrement dans les médias américains, récemment encore sur l’Iran. Son analyse sur les convulsions du MoyenOrient n’aurait peut-être pas retenu l’attention, n’eût été la carte à l’intitulé choc – « Comment 5 pays pourraient en devenir 14 » – qui accompagne et justifie la publication de sa tribune. Une carte qui préfigure ce que serait le nouveau Moyen-Orient fragmenté sous le coup de dynamiques multiples : partition de la Syrie en trois blocs ethno-religieux (alaouite, sunnite et kurde) ; implosion de l’Arabie saoudite en cinq provinces ; retour aux deux Yémens, et résurgence de la Libye fédérale (Tripolitaine, Cyrénaïque et Fezzan). Au-delà des arguments historiques et politiques qui sous-tendent cette tentative de géopolitique prospective, la démarche est elle-même révélatrice d’un certain discours occidental sur le Moyen-Orient. Le thème est explosif, puisqu’il tourne autour de la hantise de tout État : fragmentation, désunion, séparatismes. La perte de territoires ou la prolifération étatique sont d’ailleurs, quasiment toujours et partout, vécues comme un drame et agissent comme un repoussoir. Que l’on songe à l’ex-Yougoslavie ou au Soudan. Dans une région où dominent encore des régimes autoritaires et obsédés par leur stabilité, la question de l’unité est centrale. Wright décrit un scénario où les rivalités confessionnelles pourraient conduire à une partition de la République arabe de Syrie en trois entités: un Alaouistan couvrant un large corridor le long de la côte méditerranéenne,unKurdistandébordant de l’autre côté de la frontière irakienne et un Sunnistan dans le Centre et l’Est, qui rejoindrait à terme l’Ouest irakien. L’Irak, N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

justement, est sommairement divisé selon le même principe, avec une région méridionale baptisée Chiistan. À propos de l’Arabiesaoudite,l’auteurévoqueles«idées les plus incongrues » (« the most fantastical ideas »), dont celle d’un royaume divisé en cinq entités. Une situation alimentée et aggravée par la scission du Yémen en deux Républiques, comme ce fut le cas avant 1990. Enfin, Robin Wright décèle des risques en Libye, imputables aux forts sentiments régionalistes en Tripolitaine et en Cyrénaïque, voire au Fezzan. FRAGMENTATION. Les scénarios ainsi

envisagés se parent d’une dernière coquetterie avec l’apparition de citésÉtats: Bagdad, la cosmopolite ouverte aux différentes communautés, Misrata, le port marchand et jaloux de son autonomie, ou encore la montagne des Druzes (Jebel al-Druze), en Syrie, qui eut pour capitale As-Suwaida, à l’époque mandataire. « Un siècle après que l’aventurier-diplomate britannique sir Mark Sykes et l’envoyé français François Georges-Picot eurent découpé la région, le nationalisme est diversement enraciné dans les pays initialement définis plutôt par les appétits impériaux et le commerce que par la logique », conclut la journaliste. Et d’ajouter: « La question, en cette période de conflit et de transition incertaine, est de savoir si le nationalisme est plus fort que les sources plus anciennes de l’identité. » Une série de reproches peuvent être adressés à ce

à la chronologie qu’à la probabilité même de tels changements. Prendrecommepointdedépartladéflagration de la Syrie est peut-être justifié par l’actualité noire des derniers mois, mais la partition reste fortement improbable : la région côtière baptisée hâtivement Alaouistan regroupe en réalité les principaux foyers de la population syrienne, dont les plus grandes villes que sont Alep, Damas, Homs, Lattaquié, Hama, entre autres. Le Sunnistan, au-delà des villes (contrôlées aujourd’hui par des rebelles hostiles à Bachar al-Assad) de Raqqah et de Deir Ezzor, n’engloberait qu’une vaste zone désertique. La réalité du terrain et les dynamiques de la guerre en cours n’accréditent pas ce découpage grossier. Les villes de l’Ouest syrien sont, à Pourtant, les délimitations actuelles l’exception de quelques localités, plutôt multiethne sont pas plus artificielles que niques, et le brassage des celles de nombreux pays européens. populations, notamment dans les grandes agglomérations, est réel. Le démographe d’origine texte et à la carte qui l’accompagne. Sur syrienne Youssef Courbage souligne d’ailla forme, d’abord, l’utilisation du suffixe leurs « la démesure d’un découpage de la «-stan»,déclinéàtouteslessauces,semble Syrie, inimaginable du fait du brassage de plutôt guidée par le souci du bon mot que ses populations ». Un Alaouistan qui compar celui de la justesse. D’origine persane, prendrait les cinq plus grandes villes du le nom de lieu « -stan » n’est utilisé qu’en pays signifierait un déplacement massif de Asie centrale et pas du tout dans les pays populations sunnites, d’une échelle sans arabes. Sur le fond, la thèse de l’éclatement précédent par rapport aux mouvements soulève de nombreux problèmes, liés tant JEUNE AFRIQUE


Maghreb Moyen-Orient

ABDULLAH DOMA/AFP

t Manifestants fédéralistes, le 2 novembre, à Benghazi, en Libye.

constatés depuis 2011. En septembre dernier, l’ONU dénombrait 2 millions de réfugiés et 4,2 millions de déplacés à l’intérieur du pays. Par ailleurs, la stratégie militaire de l’opposition armée au pouvoir Assad contredit une telle hypothèse : les combats continuent autour de Damas, Homs et Alep. De plus, l’hypothèse de la contagion en Irak n’est pas solidement étayée. Il faut noter que la crainte d’une

partition de l’État post-Saddam Hussein a émergé dès le début de la guerre, en 2003, sans qu’elle soit avérée à ce jour. Là encore, les réalités démographiques sont bien plus nuancées que les généralisations ethniques. SENTIMENT NATIONAL. S’il y a une tenta-

tion fédérale en Irak, elle est surtout le fait des Américains. Comme en Libye, dont

ils ont favorisé la naissance sous forme de trois provinces en 1951, les États-Unis semblent vouloir exporter leur modèle de gouvernement, sans prendre en compte les réalités locales, au rang desquelles un fort sentiment national, préexistant au « découpage colonial » et alimenté par des régimes autoritaires (Hussein, Assad, Kaddafi, voire Abdelaziz Al Saoud). Si les frontièresactuellessemblentrécentes,elles ne sont pas plus artificielles que celles de nombreux pays européens. L’Irak, hors la province de Kirkouk, est une entité nationale vieille de plusieurs siècles, les divisions de l’Arabie saoudite se jouent davantage entre factions de la famille royale que d’un point de vue territorial, dans un modèle très original de multidomination et de répartition des ressources. En Syrie, les principaux acteurs du conflit revendiquent une Syrie unie et rejettent les scénarios de partition. En Libye, la revendication d’autonomie de certains acteurs de Cyrénaïque n’a pas débouché sur une forme d’autogouvernement, en dépit d’appels récurrents depuis bientôt deux ans. Même au Yémen, pourtant réunifié en 1990 après des décennies de conflit, la domination du Nord préserve la fiction de l’unité, appuyée par les puissances tutélaires (Arabie saoudite, Russie et, dans une moindre mesure, États-Unis). N’en déplaise aux Cassandre professionnelles, la Palestine pourrait bien être le plus récent et véritable ajout à la carte du Moyen-Orient.Qu’enpensentlespartisans du Grand Israël ? l YOUSSEF AÏT AKDIM

Kurdistan

Erbil

Alaouistan SYRIE Tripoli

Mer Méditerranée

Misrata

Sunnistan

Jebel al-Druze

Benghazi

Bagdad IRAK

Tripolitaine

IRAN

Chiistan Arabie du Nord LIBYE

ÉGYPTE

Sebha

Golfe Arabo-Persique

ARABIE SAOUDITE

Ad-Dammam

Cyrénaïque Fezzan

Cités-États

NEW YORK TIMES

500 km

Comment 5 pays pourraient en devenir 14

Riyad Arabie occidentale Jeddah

La Mecque

Détroit d'Ormuz

Arabie orientale Wahhabistan

Arabie du Sud Yémen du Sud

Sanaa Yémen du Nord

YÉMEN

Mer d'Arabie

Aden JEUNE AFRIQUE

N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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NASSER NASSER/AP/SIPA PRESS

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p Lors du match Palestine-Jordanie des moins de 16 ans, à Ramallah, le 18 août. FOOTBALL

Tel-Aviv continue de bétonner Fort de la médiation de la Fifa, Jibril Rajoub, président de la fédération palestinienne, veut obtenir de l’État hébreu la levée des restrictions à la libre circulation des sportifs de son pays.

L

e problème de la libre circulation des athlètes palestiniens en Cisjordanie et à l’étranger est loin d’être résolu, et beaucoup d’eau coulera encore sous les ponts avant qu’il ne devienne plus qu’un mauvais souvenir. Mais depuis que Jibril Rajoub, l’influent président de la Fédération palestinienne de football (PFA) et du Comité olympique local, a décidé de passer à l’offensive lors du congrès de la Fédération internationale de football association (Fifa), à l’île Maurice, au mois de mai dernier, les avancées sont bien réelles. Il n’est pas interdit d’y voir la volonté israélienne de faire un pas en avant. « La Fifa veut faire appliquer ses règlements, et Sepp Blatter, son président, va jouer le rôle de médiateur entre la fédération israélienne et la fédération palestinienne. Ensuite, il y a des gens en Israël qui comprennent notre demande », explique Rajoub. Les réunions des 3 et 23 septembre dernier à Zurich ont permis de faire accepter aux Israéliens le principe d’une négociation tripartite arbitrée par Blatter, alors qu’Avi Luzon, président de la Fédération israélienne de football (IFA), N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

deux fédérations et un pour la Fifa – ont été désignés pour traiter en priorité ces quatre points sensibles.

PROGRÈS. Avi Luzon, qui a parfaitement pris conscience du risque de voir son pays suspendu des compétitions internationales, a même demandé au général Dangot, le big boss de Tsahal militait pour des discussions bilatérales. Blatter, qui a confirmé, lors du dernier dans les territoires occupés, d’assouplir comité exécutif de la Fifa à Zurich (3 et les règles d’obtention des visas d’en4 octobre), qu’il présenterait son rapport trée et de sortie de Cisjordanie. Cette en 2014, avait clairement manifesté son rencontre entre le pouvoir sportif et le intention de trouver une solution de sorpouvoir militaire israéliens a produit ses premiers effets au début du mois. tie de crise lors de sa visite en Palestine puis en Israël en juillet dernier. « À l’île Les sélections d’Oman et de Bahreïn (la Maurice, j’avais dit que si rien ne bouSyrie a déclaré forfait) ont pu se rendre geait je n’hésiterais pas à demander des en Palestine du 8 au 12 octobre, afin de sanctions contre Israël à l’occasion du participer à des rencontres qualificatives pour la Coupe d’Asie des Nations des moins de 19 ans. En cas de refus, Israël pourrait « C’est un progrès, mais il y a être suspendu des compétitions encore des problèmes et des restrictions qui ne sont pas internationales. admissibles, nuance Rajoub. prochain congrès, à São Paulo [Brésil], en Ainsi, des membres de la fédération juin 2014 », poursuit le dirigeant cisjorpalestinienne originaires de Gaza n’ont danien. Lequel, outre l’octroi de la liberté pas pu venir à Ramallah pour participer de déplacement aux athlètes palestiniens à une réunion du comité exécutif. C’est et aux équipes étrangères, attend des pour cela que je vous assure que je me autorités israéliennes, trop tatillonnes à battrai jusqu’au bout… » Les contacts son goût pour délivrer les autorisations entre le ministère palestinien des Affaires civiles et le commandement militaire de de construction d’infrastructures sportives, qu’elles assouplissent les règles de l’État hébreu en Cisjordanie sont censés dédouanement des dons internationaux faciliter les choses. Mais il y a loin de la de matériel et d’équipements. Des officoupe aux lèvres. l ciers de liaison – un pour chacune des ALEXIS BILLEBAULT, envoyé spécial à Zurich JEUNE AFRIQUE


Coulisses

Maghreb & Moyen-Orient

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ALGÉRIE

Retour à In Amenas

C

ible d’une attaque terroriste entre le 16 et le 19 janvier 2013, l e c o m p l e xe gaz i e r d e Tiguentourine (In Amenas), dans le sud de l’Algérie, a repris ses activités, mais attend toujours le retour des coopérants étrangers. Alors que les responsables de British Petroleum (BP) annoncent que leurs employés seront « bientôt de retour en Algérie », le norvégien Statoil, qui gère le site en partenariat avec BP et la compagnie pétrolière publique Sonatrach, attend davantage de garanties en matière de sécurité. Pourtant, dix mois après l’assaut qui s’est soldé par la mort de 37 otages et l’élimination de 29 terroristes, Tiguentourine a beaucoup changé. La base de vie et le site gazier ont fait l’objet de travaux de rénovation pour gommer les séquelles de l’attaque.

p Jeune Iranienne portant un jean, le 7 octobre, à Téhéran.

ATTA KENARE/AFP

Les employés occidentaux de BP et de Statoil devraient revenir sur le site du complexe gazier courant décembre.

TWITTER NETANYAHOU HABILLÉ POUR L’HIVER C’est une grossière bourde qui en dit long sur la méconnaissance – feinte ? – de la société iranienne. Quelques jours après l’Assemblée générale de l’ONU, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou s’est risqué à se prononcer sur le degré de liberté en Iran lors d’un entretien à la branche persanophone de la BBC. Avec des critères bien à lui : « Je crois que si les Iraniens étaient libres, ils porteraient des jeans, écouteraient de la musique occidentale et voteraient librement. » De quoi provoquer les lazzis de nombreux jeunes Iraniens en jeans qui se sont amusés à publier une myriade de photos surTwitter, officiellement interdit mais largement utilisé par les internautes, qui trompent la censure, et par le bureau de l’ayatollah Khamenei qui anime un compte très suivi.Tout comme le ministre des Affaires étrangères, Javad Zarif, qui révèle être un fan de Frank Sinatra. Les contradictions et la complexité de l’Iran invitent à la nuance et à la subtilité, ce dont Netanyahou semble incapable. l

SÉCURITÉ. La sécurité autour de la ville

d’In Amenas, de son aéroport, ainsi que du complexe a été renforcée, tant et si bien qu’un journaliste de Reuters a qualifié le site de « véritable bunker ». Des avions de l’armée survolent régulièrement la région et plusieurs barrages militaires en filtrent l’accès, tandis que l’étranger de passage se doit d’être muni d’un sauf-conduit sous peine d’être expulsé manu militari. Last but not least, une nouvelle piste d’atterrissage est en cours de construction et devrait être opérationnelle avant la fin de l’année. Des hélicoptères pourront effectuer la navette entre l’aérodrome et le compound de Tiguentourine pour éviter le trajet par la route, qui a été fatal à certains employés le 16 janvier dernier. Quelque peu exaspérées par les réticences et les exigences des Britanniques et des Norvégiens, les autorités algériennes n’escomptent pas moins le retour des expatriés à compter de décembre 2013, un mois avant le premier anniversaire de ce 11 Septembre algérien. l FARID ALILAT JEUNE AFRIQUE

SYRIE LES KURDES EN ORDRE DISPERSÉ Qui représentera les Kurdes à l’hypothétique conférence de Genève sur la Syrie prévue en novembre ? Si le Conseil national kurde (CNK) – qui regroupe la plupart des factions kurdes, à l’exception notable du Parti de l’union démocratique (PYD), branche syrienne du PKK – a les faveurs des Américains, lesquels souhaitent cependant qu’il se fonde dans la Coalition nationale syrienne (CNS), les Russes, eux, plaident pour une participation séparée du Conseil suprême kurde (CSK), qui refuse de rejoindre le CNS au motif que celui-ci ne reconnaît pas les droits de la communauté. ÉGYPTE LA DÉCHIRURE L’Égypte est plus que jamais coupée en deux. Le 6 octobre, alors que les affrontements entre

les Frères musulmans et les forces de l’ordre faisaient 51 morts et 268 blessés, les autorités célébraient, comme si de rien n’était, le quarantième anniversaire du jour de la victoire [surTsahal], lors de la guerre du Kippour, en 1973. Ont notamment assisté aux festivités Mohamed Hussein Tantawi, ex-patron du Conseil suprême des forces armées, et Jihane Sadate, veuve du président Anouar al-Sadate. IRAK CHASSEZ LE NATUREL… Le torchon brûle entre les milieux artistiques irakiens et leur ministre de tutelle, Saadoun al-Dulaimi, qui se trouve être aussi… ministre de la Défense par intérim. En cause, une politique culturelle entièrement consacrée à la célébration des autorités politiques et religieuses en place, comme du temps de Saddam Hussein. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


Europe, Amériques, Asie

FRANCE

Les marcheurs

sont fatigués En 1983, excédés par la multiplication des agressions racistes, une poignée de jeunes d’origine étrangère entreprenaient une marche pour l’égalité qui fut un triomphe. Trente ans après, les succès électoraux du Front national en témoignent, l’heure est à la désillusion.

CLARISSE JUOMPAN-YAKAM

A

ucoursdel’été1983,desémeutes éclatent dans le quartier des Minguettes, à Vénissieux, dans la banlieue de Lyon. Le 11 septembre suivant, une liste Front national (FN) remporte les élections municipales à Dreux, dans la région parisienne, après avoir fusionné au second tour avec celle du Rassemblement pour la République (RPR). Un mois plus tard, un groupe de jeunes issus de l’immigration déclare la guerre au racisme. Sa stratégie ? Marcher. L’idée vient de Toumi Djaidja, jeune président d’une association de Vénissieux, qui, peu de temps auparavant, a été touché par une balle tirée par un policier. Partie de Marseille le 15 octobre, la « marche pour l’égalité et contre le racisme » ne rassemble au départ que trente-deux personnes, toutes membres de l’association. À leur arrivée à Paris, le 3 décembre, les marcheurs sont près de cent

mille, certains issus de l’immigration, d’autres pas. Les dirigeants socialistes de l’époque (François Mitterrand est alors à l’Élysée) reçoivent leurs représentants, mais sans répondre à leurs attentes. Alors, une nouvelle marche a lieu l’année suivante. C’est l’acte de naissance de SOS Racisme, de « Touche pas à mon pote » et de la célèbre petite main jaune. Pour quel résultat ? L’obtention d’une carte de séjour et de travail d’une validité de dix ans. Mais aussi, et surtout, la prise de conscience dans la société de l’émergence d’une France métissée, Blanc-Black-Beur, qui connaîtra son apogée en 1998 avec la victoire des Bleus de Zinedine Zidane en finale de la Coupe du monde de foot. Trente ans plus tard, l’Histoire bégaie. Le 6 octobre, le FN est arrivé en tête au premier tour d’une élection cantonale à Brignoles (Var), tandis que le Parti socialiste était éliminé sans gloire. Plus inquiétant, selon un sondage Ifop/Le Nouvel Observateur, le parti de Marine Le Pen devance l’Union pour un mouvement populaire (UMP) et le Parti socialiste (PS) s’agissant des intentions de vote pour les municipales de mars 2014. FACIÈS. Sur le front de la lutte contre le racisme,

ARBI REZGUI, marcheur Il y avait un racisme quotidien, des ratonnades, des discriminations, des crimes racistes. À l’époque, on disait : « un Arabe vole une mobylette, il prend deux ans. Un Français tue un Arabe, il prend trois mois avec sursis. » Quand la marche a commencé, nous étions trente-deux. On dormait, on se levait, on marchait ensemble. Je n’avais jamais vu autant de Français, j’étais choqué ! Nous avons découvert une France généreuse. Des gens nous ont accueillis chez eux, nous ont donné à manger, nous ont offert des gants contre le froid. J’ai compris qu’en réalité la France n’était pas raciste, que c’était le système qui l’était. Propos recueillis par HABY NIAKATE N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

rien de bien réjouissant non plus. Les marcheurs de 1983 réclamaient – déjà ! – le droit de vote pour les étrangers lors des élections locales et l’arrêt des contrôles au faciès. Ces revendications figuraient parmi les engagements du candidat François Hollande mais sont manifestement tombées aux oubliettes. Treize étudiants lillois estimant avoir été victimes de discrimination lors d’un contrôle d’identité ont porté plainte contre l’État et le ministère de l’Intérieur, mais ont été déboutés. En 2009, un rapport de l’ONG Open Society Justice Initiative a montré que les Noirs et les Arabes ont six fois plus de chances d’être contrôlés par la police que le reste de la population. Quant au racisme lui-même, l l l JEUNE AFRIQUE

KEYSTONE-FRANCE

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p Ils partirent trente-deux (de Marseille, le 15 octobre 1983), mais par un prompt renfort ils se virent cent mille en arrivant au port (Ă Paris, le 5 dĂŠcembre).


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Europe, Amériques, Asie France

ELIKIA M’BOKOLO, historien En 1983, face à la montée en puissance des thèses racistes et xénophobes du Front national, des Français issus de l’immigration maghrébine et subsaharienne se sont rapprochés. À l’époque, tout le monde s’appelait « frère » ou « sœur ». Il y avait entre ces gens qui n’appartenaient pas à l’élite, qui n’étaient pas des intellectuels reconnus, quelque chose de nouveau et de prometteur. Hélas, cette relation est peutêtre en train de s’effriter aujourd’hui. Propos recueillis par H.N. il est en augmentation, à en croire une enquête OpinionWay pour la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra). Toutes les enquêtes révèlent que la sensibilité au racisme et aux discriminations progresse, tout comme la prise de conscience qu’il s’agit de pratiques condamnables. Comme l’explique Jacqueline Costa-Lascoux, directrice de recherche au CNRS-Sciences-Po Paris: « Il est difficile d’affirmer que la France est de plus en plus raciste, mais dans les faits, des phénomènes inquiétants ont été relevés. » Quels phénomènes ? « Le renforcement des mouvements identitaires d’extrême droite, le développement de l’antisémitisme chez les jeunes, notamment dans les quartiers populaires, la multiplication des incidents entre communautés pour des raisons religieuses, particulièrement entre musulmans et juifs. » lll

discriminations au logement et à l’embauche. Il est certain, par exemple, qu’un demandeur d’emploi portant un nom ou un prénom à consonance étrangère mettra deux fois plus de temps qu’un autre à trouver un emploi. BLOCAGE. Jakubowicz en est convaincu : le com-

munautarisme est le mal suprême dont souffre la société française, comme en témoigne la multiplication des bagarres de quartier (« Les Noirs contre les Beurs, les Beurs contre les Feujs, etc. »). Ce qui, selon lui, traduit l’échec des associations de lutte contre le racisme. Celles-ci n’ont pas vu la société évoluer, elles sont restées bloquées sur une vision binaire. D’un côté, les méchants : Blanc, nantis, citadins, catholiques, extrémistes de droite ; de l’autre, les gentils, issus des minorités. Pour le président de la Licra, il faut donc réinventer le combat antiraciste, ce qui suppose de voir la société telle qu’elle est et non telle qu’on la rêve. Et par exemple reconnaître l’existence d’un racisme anti-Blancs, réalité sociologique vécue par de nombreuses personnes, même si le terme de « racisme » n’est pas forcément approprié. Il faut donc parler vrai, tenir un discours différent de celui des politiques, dont certains s’imaginent que parler vrai c’est caresser les pires penchants de l’homme. Pour venir à bout du phénomène, 83 % des sondés ne font pas confiance aux associations de lutte contre le racisme, qui privilégient la dénonciation permanente et finissent par obtenir le contraire de ce qu’elles recherchaient : la stigmatisation des victimes. Jacqueline Costa-Lascoux, qui a ellemême participé à la marche des Beurs, propose de revenir aux fondamentaux: parler de combat pour l’égalité et la pluralité plutôt que de lutte contre le racisme. Et c’est ce qu’elle fait dans le cadre de « Jeunes pour l’égalité », un programme organisé dans vingt-quatre lycées de la région parisienne afin de donner aux élèves un certain nombre de clés pour analyser et critiquer les stéréotypes. C’est le moyen, estime-t-elle, de démonter les mécanismes de discrimination. Et d’amener ces jeunes à adhérer à l’idée d’une France multiculturelle. l

AGRESSIFS. Les Français sont 59 % à considérer

Pour 61 % des Français, il est plus difficile d’être maghrébin aujourd’hui qu’il y a trente ans.

que le racisme a globalement augmenté depuis trente ans. Et 61 % qu’il est aujourd’hui plus difficile d’être musulman et/ou d’origine maghrébine. Ceux qui n’aiment ni les uns ni les autres considèrent qu’il n’existe à travers le monde aucun pays musulman démocratique. Que ces derniers sont agressifs, sexistes, inégalitaires, homophobes et proches des milieux terroristes, cette dernière opinion étant évidemment liée aux attentats du 11 Septembre et à la surenchère suicidaire pratiquée par une infime minorité de jihadistes. L’enquête montre en revanche qu’il est plus facile d’être noir ou asiatique qu’en 1983. Dans l’imaginaire français, les Subsahariens ne sont pas associés à l’islam. Une majorité de Français considère qu’au Mali, par exemple, la population a été victime d’une tentative d’islamisation agressive, comme ils estiment l’être eux-mêmes, ce qui a suscité un élan de solidarité. Président de la Licra, Alain Jakubowicz confirme que le racisme anti-Noirs ne s’est pas aggravé, mais que la situation ne s’est pas améliorée pour autant. « Chez les indécrottables racistes, un Noir reste un sous-homme, qu’il vienne de Guadeloupe, de la Martinique ou d’Afrique subsaharienne », estime-t-il. Les problèmes de fond demeurent, notamment la persistance de

FARID L’HAOUA, ancien porte-parole de la Marche Notre premier slogan, c’était « Stop à la violence, arrêtez de tirer, rengainez », parce qu’il y avait à l’époque beaucoup d’agressions racistes, parfois mortelles. Cette marche a été un cri du cœur, nous avons provoqué un déclic au niveau national. Nombre d’entre nous se sont ensuite retirés pour essayer de faire vivre les quartiers. D’autres ont tenté d’organiser le mouvement, mais la plupart de ces tentatives ont été des échecs cuisants : nous manquions de maturité. Par la suite, je n’ai vu qu’un défilé d’ambitions personnelles et de plans de carrière. On a vu apparaître une « beurgeoisie » familière des salons ministériels. Propos recueillis par H.N.

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JEUNE AFRIQUE


Europe, Amériques, Asie

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ÉTATS-UNIS

Les exclus de l’Obamacare La Cour suprême et les États conservateurs du Sud ont conjugué leurs efforts pour empêcher de nombreux Africains-Américains de bénéficier d’une couverture maladie.

FACULTATIF. La raison de cette anomalie

est à rechercher dans une décision de la Cour suprême datant de 2012. Celle-ci a certes validé la loi, mais en a fragilisé un JEUNE AFRIQUE

t Le sénateur Ted Cruz, le 25 septembre à Washington.

LE COW-BOY ET LES PANCAKES TED CRUZ l’a confié à ses collègues sénateurs, fin septembre: il raffole des hamburgers et des pancakes que lui cuisinait son père, mais abhorre les politiciens de Washington et leurs costumes bon marché. Aucun intérêt? Non, bien sûr, mais sa

diatribe contre l’Obamacare ayant duré vingt et une heures, il lui a bien fallu meubler! Alors, au passage, il a aussi comparé les sénateurs favorables à la loi à des nazis… Avec sa gueule de cow-boy mélancolique, Cruz (42 ans) est un héros du

Tea Party. Depuis son élection en 2012, il a acquis une énorme influence, au point que nombre de républicains sont convaincus qu’il est le seul à détenir la clé pour sortir du shutdown. Et ils en font leur favori pour la primaire de J.-É.B. 2016. l

dans le Sud profond, hormis l’Arkansas. Six Noirs sur dix vivent donc dans des États qui ont décidé de ne pas étendre Medicaid. Dans le Mississippi, 56 % des adultes pauvres et sans assurance sont des Africains-Américains,alorsque Les allumés du Tea Party veulent ces derniers ne représentent que38%delapopulationtotale. coûte que coûte faire abroger À en croire certains, tout la loi. Une véritable obsession. cela s’expliquerait par les réticences des Blancs à finanrance maladie pour les plus démunis. Or cer des programmes qui bénéficient en priorité aux Noirs. L’Obamacare divise la Cour suprême, où les conservateurs décidément l’Amérique. Et ne donne pas sont majoritaires, a décidé qu’une telle forcément d’elle une image très sympaextension était facultative. Résultat: seuls la moitié des États y ont procédé – et aucun thique. l JEAN-ÉRIC BOULIN, à New York élément essentiel. Pour couvrir tous les Américains non assurés, l’administration démocrate avait prévu d’allouer aux États des fonds fédéraux pour les aider à étendre lechampd’applicationdeMedicaid,l’assu-

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JIM WATSON/AFP

L

a vraie bataille de l’Obamacare a commencé. Désormais, tous les coups sont permis. Alors que la loi est entrée dans une phase critique avec la mise en place d’un site fédéral où les Américains non assurés peuvent s’inscrire pour bénéficier d’une couverture médicale, les républicains les plusconservateursontobtenulafermeture (shutdown) du gouvernement fédéral: ils subordonnaient tout accord budgétaire au report d’un an de la mise en œuvre de l’Obamacare. Pour la frange la plus droitière de la société américaine, l’abrogation de la loi tourne à l’obsession. C’est le cas pour les allumés du Tea Party emmenés par le sénateur Ted Cruz (lire encadré), mais aussi pour quelques richissimes financiers qui n’hésitent pas à engloutir dans cette campagne des millions de dollars. Les plus connus sont les frères Charles et David Koch, récemment dénoncés par Barack Obama. Leurs armes ? Les spots publicitaires d’un goût douteuxdénonçant l’immixtion de l’État dans un secteur où il n’a, selon eux, rien à faire : la santé. Le dernierendatemontreparexemplel’oncle Sam surgissant d’entre les cuisses d’une femme, dans un cabinet de gynécologie… Il faut admettre que la mise en œuvre un peu chaotique de la loi n’arrange pas les choses. Les bugs informatiques, en effet, se multiplient. À cause du shutdown, bien sûr, mais aussi du nombre considérable d’utilisateurs potentiels: 50 millions d’Américains sont dépourvus de toute assurance. Ces ratés sont pain bénit pour les républicains. Et, comme toujours en Amérique, la question raciale n’est jamais très loin. Le New York Times a révélé récemment qu’uncertainnombred’Américains,parmi lesquels beaucoup de Noirs, étaient exclus du bénéfice de l’Obamacare, alors que cette communauté compte, en proportion, le plus grand nombre de personnes dépourvues de couverture médicale.


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HOMMAGE

Vô Nguyên Giáp L’éternel révolté C’est lui qui, en 1954 à Diên Biên Phu, porta le premier coup au colonialisme français. Stratège génial, il a eu l’occasion d’affronter bien d’autres adversaires, qu’ils aient été japonais, américains, chinois ou… vietnamiens. Il est mort le 4 octobre à Hanoi à l’âge de 102 ans. PAR JEAN LACOUTURE*

L

hommequi,enmai1954, détruits, l’occasion s’offre de proclamer porta le coup décisif à l’indépendance de la République démol’empirecolonialfrançais cratique du Vietnam: ce que fait l’Oncle est mort le 4 octobre à Hô, le 2 septembre 1945, au nom d’un Hanoi à l’âge de 102 ans. gouvernement de coalition dominé par le Viêt-minh, à dominante commuVô Nguyên Giáp fut le niste, mais où les nationalistes prochirévolutionnaire le plus constant, ou le nois occupent des postes importants plus constamment victorieux, de notre – Giáp devient pour sa part ministre de époque. En près de quatre-vingts années l’Intérieur. de combat, de la lutte contre les Chinois de Tchang Kaï-chek, à partir de 1943, puis contre les Japonais, au printemps ONCLE HÔ. Mais que faire avec la France de 1945, à sa victoire contre la France à libérée, où cinq ministres communistes Diên Biên Phu, neuf ans plus tard, et à siègent dans le gouvernement du général la capitulation américaine, en 1975, c’est de Gaulle ? À Hanoi comme à Paris, les bien la révolution permanente qu’aura tendances s’affrontent. Hô Chí Minh vécue Giáp. plaide pour la recherche d’un comIl est né en 1911 à An Xa, dans la propromis, ses ministres nationalistes ne vincedeQuangBinh,d’oùviennentbeaurêvent que d’affrontement. Giáp écoute coup de révolutionnaires vietnamiens. les avis conciliants de l’Oncle Hô, mais il Fils d’un lettré pauvre et nationaliste, il est assez bon historien pour savoir que fait de bonnes études à l’université franl’âge de la colonisation est révolu. Et que çaise de Hanoi, puis enseigne l’histoire l’indépendance est en vue. dans une école libre de la capitale. Peu après son vingEn 1945, il adopte une position tième anniversaire, il s’inscrit conciliante. Mais il sait déjà au Parti communiste indochinois, que Hô Chí Minh que l’indépendance est en vue. vient de fonder à Hong Kong. En 1943, il réussit à rejoindre ceux qu’on Il était plutôt petit, même pour un appelle « xô-viêts », dans la haute région Vietnamien, mais robuste et agile. Large sino-tonkinoise, devenant d’emblée le face, regard flambant sous un immense lieutenant préféré de « l’Oncle Hô ». front bombé, pensées percutantes éléPendant ce temps-là, sa femme et sa gamment formulées qu’on pourrait résusœur sont arrêtées par la police française, mer ainsi : « Notre indépendance, nous avant de mourir en prison. la voulons totale. Mais nous n’excluons Après des mois de guérilla contre les pas des étapes. Nous ne disposons pas Japonais, vainqueurs du pouvoir colonial d’assez de cadres pour risquer leur vie français au printemps 1945, Hô Chí Minh dans des luttes coûteuses. Nous devrions et ses compagnons gagnent Hanoi, où, pouvoir nous entendre avec la France du FrançaisetJaponaiss’étantmutuellement général de Gaulle sur ces bases. » Propos

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que je garderai en mémoire, plus tard, en écoutant un Habib Bourguiba ou un Abderrahim Bouabid. Mais ce stratège ne se montrait conciliant que pour éviter le pire. Il était capable aussi de montrer le poing. Le 6 mars 1946, Hô Chí Minh et Jean Sainteny signèrent un accord qui reconnaissait le Vietnam comme un « État libre au sein de l’Union française », laquelle restait à définir, comme le « libre » accompagnant le mot « État » et comme le sort de la Cochinchine, le sud du Vietnam. Deux mois plus tard eut lieu à Dalat, dans le Sud, une conférence préparatoire à celle de Fontainebleau. C’est à partir de là que Giáp commença à s’opposer à la volonté conciliatrice de Hô Chí Minh. Resté prudemment en marge de la négociation de Fontainebleau, en septembre 1946, celui-ci finit par signer un modus vivendi qui prolongeait l’accord de Hanoi. Mais pendant ce temps-là, au Vietnam, Giáp préparait la lutte. Le bombardement de Haiphong par la flotte française lui fournit l’occasion qu’il cherchait. La guerre reprit le 19 décembre 1946. Elle allait durer plus de sept ans. On a beaucoup parlé de guérilla, d’embuscades, de harcèlement, de « victoire du faible sur le fort » ; c’est précisément ce que récusait Giáp, qui se voulait fort contre les forts. Il prétendait que la guérilla était un reliquat de l’ère coloniale, que, pour se décoloniser, l’exploité d’hier devait se dresser bien droit, armes contre armes, étoiles contre étoiles. En 1952, je publiai en première page du Monde un portrait de l’homme aux étoiles en guerre contre la France sous le titre « Le volcan sous la neige », l’un de ses camarades m’ayant fait connaître l’étrange sobriquet que son sang-froid lui avait valu dans les « popotes » du Tonkin. Diên Biên Phu fut l’expression de l’orgueil de Giáp. Plus de volcan que de neige ? L’état-major français avait voulu ce face-à-face, au risque de se laisser enfermer dans cette « cuvette » de l’Ouest tonkinois, persuadé JEUNE AFRIQUE


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COLLECTION JEAN-CLAUDE LABBE/GAMMA

t Avec son étatmajor, pendant la bataille de Diên Biên Phu, en mai 1954.

qu’il était que son aviation pulvériserait les bataillons qu’y jetterait le petit général viet. Mais celui-ci avait en vue une bataille d’artillerie, qu’il gagna, ayant fait acheminer ses armes vers Diên Biên Phu par un formidable prolétariat en uniforme, transportant les canons en pièces détachées à travers la jungle. Ce qu’il cherchait, ce n’était pas un piège où faire tomber l’ennemi, mais une vraie bataille. Elle fut gagnée par le fils du nhà quê, petit professeur d’histoire, contre les saint-cyriens brevetés de l’état-major. Levolcanavaitcrachédesflammespour contraindre les négociateurs de Genève à reconnaître enfin l’indépendance du Vietnam, coupé provisoirement en deux en attendant un référendum qui ne vint jamais, les Américains ayant décrété que NgôDinhDiêmétaitledétenteuràjamais légitime du pouvoir dans le Sud. LÉGENDE. Dans cette guerre qui ne pou-

vait manquer de reprendre entre le Nord ainsi floué et le Sud soutenu par la plus grande puissance du monde, le général Giáp va jouer un rôle militaire mineur. Il est certes chargé de maintenir l’armée rouge de Hanoi à un niveau élevé, mais il se mêle peu des opérations du Viêt-cong, qui relèvent pour lui de la guérilla. Peu à peu,leglorieuxgénérals’éloigneducentre du pouvoir, surtout à partir de la mort de JEUNE AFRIQUE

l’OncleHô,en1969.Toutsepassecomme si le volcan disparaissait sous la neige, comme si le rôle qu’il avait joué auprès de Hô Chí Minh avait perdu son sens. Sa légende internationale restait intacte, mais on allait bientôt découvrir que son éloignement était davantage qu’une retraite : le passage à une sorte d’opposition, pour autant qu’un régime de cette nature puisse s’en accommoder. Il est vrai que la gloire du vainqueur de Diên Biên Phu était si éclatante… Lors d’un voyage au Vietnam avec Jean-Noël Jeanneney, alors secrétaire d’État au Commerce extérieur, nous demandâmes à être reçus par l’illustre retraité. Giáp nous reçut très amicalement, évitant les sujets qui fâchent. Mais il ne dissimula pas son désaccord avec la bureaucratie régnante. Dix ans plus tard, en 2002, lors d’un nouveau voyage, privé celui-là, je demandai derechef un entretien avec le vieux révolutionnaire. On me répondit qu’il soignait un cancer du poumon dans une clinique de Haiphong, mais qu’il acceptait de recevoir brièvement quelques visiteurs. Il m’accueillit en riant: « Ah ! Vous vous souvenez de Dalat ? » Sans aborder le domaine politique, il déclina très courtoisement l’invitation de la télévision française à tourner avec moi un film-dialogue – à vrai dire, c’est surtout sa femme qui mit son veto.

Quelques années plus tard, le quotidien Le Figaro publia sous le titre « Le dernier combat du général Giáp » un article signalant que le vainqueur de Diên Biên Phu avait déclenché une campagne contre la concession à la Chine de l’exploitation des mines de bauxite du plateau Moï. Sujet sensible s’il en est ! Les dirigeants vietnamiens sont très préoccupés par les revendications chinoises sur les îles Paracel et Spratly, et par l’éventuelle confiscation de leur bauxite. D’où la conclusion de la correspondante du Figaro : « En sortant de sa retraite, le vieux général est devenu le critique le plus virulent des autorités suprêmes du pays et le point de ralliement des milieux scientifiques et littéraires, des écologistes, des économistes, des blogueurs et des associations catholiques. » Jusqu’aux catholiques ! Voilà bien une ambition que ne caressait pas le Giáp que j’ai connu! Pas plus d’ailleurs que celle de devenir l’adversaire de la Chine. Ainsi ce révolutionnaire aura bravé quatre empires: après le japonais, le français et l’américain, voilà le chinois. Quel patriote, en ce siècle comme en d’autres, peut revendiquer un tel bilan – et quel révolutionnaire ? l * Journaliste, historien et écrivain, auteur entre beaucoup d’autres ouvrages d’une biographie de Hô Chi Minh (Seuil, 1967). N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


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PARCOURS | D’ici et d’ailleurs

p « C’est à 14 ans que je me suis rendu compte que je ne ressemblais à aucun de mes parents », se souvient l’athlète.

Jacques Vandescure L’art du rebond Après un bref passage dans l’équipe universitaire du Wyoming et plusieurs opérations chirurgicales, ce métis belgo-congolais prêche aujourd’hui l’évangile du ballon orange en Afrique.

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N MÈTRE QUATRE-VINGTQUINZE, short et tee-shirt extra-larges, baskets, Jacques Vandescure arbore le total look du basketteur. Loin de l’archétype du sportif bling-bling : chez lui, tout est dans la simplicité. À peine installé, il pose sa grosse valise à roulettes dans un coin et propose le tutoiement. Souvent entre deux avions, Jacques ne se sépare pas de sa valise. Dedans, il y a ses rêves et ses envies pour Basketball Global Vision, désormais l’engagement de toute sa vie. Bien qu’il ait vécu une bonne partie de sa vie aux États-Unis, Jacques Vandescure aime rappeler qu’il est avant tout bruxellois : « J’ai grandi

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place Émile-Bockstael à Bruxelles. Toutes nos pensées à l’époque étaient tournées vers l’Amérique. Nous voulions, mes frères et moi, ressembler aux stars du petit écran, toutes catégories confondues! » Issu d’une famille de cinq enfants, il est le petit dernier. Belge par son père et congolais par sa mère, il revient souvent sur son métissage et relate avec une certaine mélancolie les dures années de son adolescence. Longtemps, en classe et sur le terrain, tout lui rappelle qu’il est différent, étranger. « C’est à 14 ans que je me suis rendu compte que je ne ressemblais à aucun de mes parents… Je ne ressemblais qu’à mes frères. » Le sport va être sa planche de salut,

l’activité parascolaire par laquelle il existera auprès des ados de son quartier. Brillant sur le terrain, terne en classe. L’ascension vers la gloire commence rapidement. Alors qu’il accompagnait régulièrement son frère, Éric, à l’entraînement, il finit par intégrer le Basketball Club de Bruxelles, seul club qui ouvrait à l’époque ses portes aux joueurs de « couleur ». Puis il rejoint l’équipe nationale belge, se fait un nom et commence à rêver d’une carrière en NBA. De nombreux coachs lui font une cour assidue avant que le drame survienne. Blessures, opération du genou, et le téléphone qui cesse de sonner. Adieu le rêve de NBA ! Mais comme dans bien des successstories à l’américaine, sa carrière est faite de rebondissements et de récits édulcorés. Alors qu’il ne s’y attend plus, grâce à un ami influent JEUNE AFRIQUE


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Aujourd’hui consultant pour les San Antonio Spurs (Texas), il a créé le projet Basketball Global Vision, grâce auquel il parcourt le continent africain et prône l’éducation par le sport. De Goma à Dakar en passant par Rabat et Johannesburg, Jacques Vandescure organise des camps autour du basketball, et c’est avec beaucoup de fierté qu’il parle des cinq Congolaises qui ont pu décrocher une bourse sportive pour poursuivre leurs études aux États-Unis. Aujourd’hui âgé de 35 ans, le basketteur n’a pas encore d’enfants, mais il ne peut s’empêcher de penser à sa future famille. « Je ne suis pas encore papa, mais je sais que mes enfants seront sportifs. Je leur mettrai probablement un ballon entre les mains dès le berceau. » l WENDY BASHI, envoyée spéciale à Bruxelles Photo : THOMAS FRETTEUR/OUT OF FOCUS pour J.A. JEUNE AFRIQUE

UNESCO

Calculs et trahisons Le Djiboutien Rachad Farah paraissait en mesure d’être élu à la tête de l’organisation. Son échec n’en est que plus amer.

«

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ne fois de plus, la solidarité multilatérale du Sud n’a pas fonctionné. Elle n’est qu’une déclaration d’intention, sans conséquence concrète », déplore Rachad Farah, ambassadeur de Djibouti à Paris et candidat malheureux à la direction générale de l’Unesco. Le seul Africain en lisse avait pourtant reçu le soutien officiel de la Ligue arabe, de l’Union africaine, de l’Organisation de la conférence islamique et d’un certain nombre d’autresÉtatsmembresduConseilexécutif (qui en compte cinquante-huit). Pourtant, le 4 octobre, il a été écrasé au premier tour de scrutin – 39 voix contre 13 – par la Bulgare Irina Bokova, directrice générale sortante, l’outsider libanais Joseph Maïla ne recueillant que 6 suffrages. Farah avait pourtant obtenu 25 promesses de vote en sa faveur, qui, si elles avaient été tenues, lui auraient permis d’accéder à un second tour très risqué pour Bokova. « Rachad a fait une campagne déterminée et très professionnelle, avec une implication totale des autorités politiques de son pays. Il aurait pu et dû obtenir entre 20 et 22 voix, mais il a fait peur », analyse Maïla. Longtemps favorite, la candidate bulgare paraissait

à la veille du scrutin sur le point d’être rattrapée par « le candidat du Sud ». « Une formidable machine s’est alors mise en place pour faire barrage à Rachad », constate le Libanais. « Il y a eu au cours des deux derniers jours des pressions qui ont débouché sur des alliances contre nature », confirme le Djiboutien. Bref, « il reste un long chemin à parcourir pour que le Sud prenne la place qui lui revient dans la gouvernance mondiale ». PROMESSES. Difficile de savoir d’où sont

venues les trahisons, les votes se faisant à bulletin secret. À la veille du scrutin, le candidat libanais était convaincu d’obtenir « entre 12 et 15 voix », puisqu’il disposait de « promesses écrites » : il n’en a récolté que six. Côté arabe, le front bokoviste était conduit par l’Arabie saoudite et l’Égypte, auxquelles se sont ralliés les Émirats arabes unis et, sans doute, la Syrie. Soit 4 des 6 voix que compte le groupe régional. Quant à la France, « elle a fait voter toute l’Afrique francophone pour Bokova en faisant résolument barrage aux représentants de deux pays francophones qui lui sont proches », estime Maïla, qui juge cette attitude « triste ». l LAURENT DE SAINT PÉRIER

EDOUARD CAUPEIL

du basketball belge, Fred Young, il parvient à rejoindre les États-Unis pour jouer dans l’équipe universitaire du Eastern Wyoming College. Sacré meilleur basketteur de son État, il entre dans le top 100 des meilleurs joueurs junior des États-Unis. Après cette fulgurante escalade vers la gloire, les demandes des clubs belges affluent. Vandescure cède à la pression et décide de rentrer en Belgique. Mais même s’il remporte plusieurs trophées, ses blessures l’obligent à penser à une reconversion. C’est à ce moment que commence son histoire avec l’Afrique. Kinshasa (RD Congo) sera son point de départ vers cette terre qu’il ne connaît finalement que très peu. Muzungu (« le Blanc »), c’est comme ça qu’on l’appelle là-bas. Et comme la plupart des Bazungu, il sera d’abord subjugué par la vivacité de cette ville qui ne dort jamais. Mais il évoque aussi avec idéalisme ces « papas » et « mamans » qui gardent le sourire malgré la misère ambiante, la force de ce peuple martyrisé par la guerre. Jamais il ne parlera de politique, ou alors du bout des lèvres. À aucun moment il ne prend position, même quand il raconte Goma où il se rend régulièrement pour former coachs et jeunes basketteurs en quête de succès.

71

u Réélection dans un fauteuil, pour la Bulgare Irina Bokova. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


Économie

KAMBOU SIA/AFP

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p Le pays fournit 36 % du cacao mondial.

HÔTELLERIE

Mangalis fait ses gammes


INTERVIEW

DÉCIDEURS

Groupe Nestlé

Fondateur et patron de SDA

José Lopez et Nandu Nandkishore

Philippe de Moerloose

DANS LES KIOSQUES

L’incroyable essor des banques africaines

Cacao la réforme CÔTE D’IVOIRE

inachevée En garantissant un prix plancher aux planteurs, le pays a prouvé sa capacité à mieux répartir les richesses de la filière. Mais les rendements diminuent et la transformation locale plafonne.

JULIEN CLÉMENÇOT

prix CAF (coût, assurance, fret) – contre moins de 50 % en moyenne entre 2003 et 2011. Edward ercredi 2 octobre, Lambert George, directeur de la recherche sur les matières Kouassi Konan, président premières agricoles chez Ecobank, estime que du Conseil Café Cacao l’attention portée aux producteurs est légitime. (CCC ) ivoirien, lance « Ils étaient sacrifiés au profit des exportateurs, officiellement la nouvelle au point que beaucoup abandonnaient la culture récolte. En camion, mais du cacao », regrette-t-il. Leur quote-part a été aussi à l’aide de mobylettes, de vélos, et parfois de fixée à 750 F CFA (1,14 euro) par kilo jusqu’à la simples brouettes, près de 1,4 million de tonnes fin de la grande campagne, en janvier (contre de fèves rejoindront, d’ici à juin 2014, les 725 F CFA l’an dernier). Soit un tarif légèreusines et les ports du pays. À elle seule, ment supérieur à celui prévu par le CCC la Côte d’Ivoire mettra sur le marché sur la base de la vente aux enchères environ 36 % de l’offre mondiale. anticipée de 70 % de la récolte. 1,55 milliard Mais après vingt ans de proDeux ans et demi après la crise d’euros gression, la production du leader postélectorale, la cohésion natioRevenus des paysans mondial de la fève pourrait avoir nale reste la priorité de l’exécutif ivoiriens en atteint un palier. Le vieillissement ivoirien. « La dimension sociale de 2012-2013 du verger et la raréfaction des terres la filière est tellement importante que disponibles ne rendent guère optimistes les décisions répondent davantage à des les agronomes. Autant dire que la réforme préoccupations politiques qu’économiques », mise en œuvre par l’État depuis octobre 2012 confirme un opérateur. En conséquence, pour pour maintenir le niveau de la production et que les acheteurs réalisent une marge acceptable, assurer le développement durable de la filière l’État devra sacrifier 40 milliards de F CFA de est un enjeu de taille. Le cacao reste l’un des recettes fiscales, et même les soutenir – à hauprincipaux contributeurs du PIB (14 %) et des teur de 10 milliards de F CFA – grâce au fonds recettes fiscales (16,3 %) du pays. de réserve. Lors de la campagne 2012-2013 déjà, le gouvernement avait dû rogner sur sa part de GAGNANTS. Pour la deuxième année consécurecettes, ramenant ses prélèvements de 22 % tive, les 800 000 planteurs locaux sont les vrais à 18 % du prix CAF afin d’assurer la rentabilité gagnants de la réforme. Moins soumis à la loi de la filière. L’autre effet notable de la réorganidu marché, ils reçoivent au minimum 60 % du sation du secteur porte sur la qualité des fèves

M

N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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74

Entreprises marchés apportées aux usines. « Avant, personne ne respectait les temps de fermentation et de séchage, car les acheteurs voulaient obtenir du cacao au plus vite », explique Mamadou Bamba, directeur de la coopérative Ecookim. Désormais, la vente anticipée de la majorité de la récolte limite la ruée des exportateurs et permet aux planteurs de parfaire leur ouvrage. Dans le même temps, le Conseil a sensibilisé près de 180 000 producteurs et imposé que le taux d’humidité du cacao prêt à être chargé dans les ports ne dépasse pas 9 %, contre parfois plus de 12 % auparavant. « Même s’il y a encore des progrès à faire, nous espérons atteindre la même qualité que le Ghana [souvent cité en référence] d’ici à deux ou trois ans », assure Mamadou Bamba.

La régénération du verger prendra au minimum cinq à dix ans.

« SWOLLEN SHOOT ». Pour autant, la situation

de la filière est loin d’être totalement satisfaisante. Première préoccupation : l’état du verger ivoirien, près de 3,3 millions d’hectares, soit 10 % du territoire national. Il est en moyenne âgé de 25 ans et sa productivité – 450 kg par hectare – est

La transformation locale a du mal à décoller OBJECTIF

Transformer 50% du volume total produit à l’horizon 2020

inférieure de moitié aux meilleurs rendements (1 tonne à l’hectare). À cela s’ajoute la diminution prévisible des surfaces cultivées en raison de la décision d’expulser les planteurs installés illégalement dans les forêts classées et de la prolifération inquiétante du swollen shoot, une maladie virale qui détruit les cultures. Conscient de l’enjeu, le CCC a investi 6,83 milliards de F CFA en 2012-2013 pour distribuer des produits phytosanitaires et une nouvelle variété de plant – le cacao Mercedes – élaboré par le Centre national de recherche agronomique (CNRA), dont l’intérêt est de produire les premières cabosses en dix-huit mois au lieu de cinq ans. Un effort insuffisant, constatent les planteurs. « Nos membres cultivent 24 000 ha, mais nous n’avons reçu des intrants [produits phytosanitaires, semences et engrais] que pour moins de la moitié », déplore Mamadou Bamba. « Les moyens mobilisés pour le renouvellement intégral sont insuffisants au regard des besoins exprimés, reconnaît Djibril Fadiga, directeur général adjoint du CCC. Nous envisageons d’accorder une subvention directe sur le prix de vente des intrants afin de permettre à un plus grand nombre de planteurs de les acquérir. » Reste que la régénération du verger, délaissé pendant une décennie, prendra de cinq à dix ans – au mieux. BOUDER. Le second point noir de la réforme tient

Milliers de tonnes de produit transformé Part du cacao broyé sur place par rapport au volume total

35%

331

30%

29%

348

342

2011-2012

2012-2013

24%

221 13%

120 1996

2000

2008

à la sous-évaluation des charges de transport entre le champ et l’usine dans le barème de la filière défini par le CCC. Ce qui réduit la marge des opérateurs. En réaction, plusieurs sociétés de négoce, comme le britannique Armajaro, ont décidé de bouder le cacao ivoirien cette année. Mais il y a plus grave pour l’économie nationale: ce manque à gagner pourrait avoir un impact désastreux sur les industriels locaux. « Nous rencontrons un problème de compétitivité. Depuis deux ans, mes comptes sont dans le rouge », confirme un patron d’usine. Une situation qui pourrait constituer un obstacle à l’objectif de transformer 50 % de la récolte localement (contre environ 30 % aujourd’hui, voir

DES EX-BARONS DEVANT LA JUSTICE LE PROCÈS des hommes qui dirigeaient la filière café-cacao sous Laurent Gbagbo, qui s’est ouvert à la fin de la crise postélectorale en 2011, devrait connaître son épilogue le 30 octobre. Une vingtaine de patrons des anciens organes de gestion (aujourd’hui dissous) sont poursuivis, notamment pour abus de biens sociaux et détournements de fonds. Le montant des préjudices N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

est estimé à environ 300 milliards de F CFA (environ 460 millions d’euros), évaporés pendant les sept premières années de la libéralisation, selon un rapport d’audit financé par l’Union européenne et publié en 2007. Le parquet a déjà requis de cinq à vingt ans de prison. Mais certaines irrégularités ou certains vices de procédure dans le montage du dossier à l’instruction pourraient

jouer en faveur des prévenus, qui réclament l’acquittement. Quelle qu’en soit l’issue, ce procès des ex-barons de la filière a mis en exergue un système de gestion obscur, qui a sévi durant la dernière décennie, parfois avec la complicité passive de ministres du régime précédent – dont certains sont encore en exercice. l BAUDELAIRE MIEU JEUNE AFRIQUE


Entreprises marchés schéma ci-contre). Sans compter que la faillite des entrepreneurs ivoiriens aboutirait de facto au renforcement d’un cartel de multinationales – Cargill, Barry Callebaut, Cemoi, Touton et bientôt Olam en tête – déjà largement dominatrices, puisqu’elles contrôlent environ 80 % de la récolte grâce à leurs activités de broyage et d’exportation. « La réforme est en cours, ces questions sont en débat », répond Djibril Fadiga. Premier producteur mondial de cacao, la Côte d’Ivoire entend aussi peser davantage sur les échanges mondiaux. Pour y parvenir, Abidjan parie sur une politique commune avec

75

son voisin ghanéen, le numéro deux mondial. « Théoriquement, cela devrait être encore plus facile que pour les douze pays de l’Opep [Organisation des pays exportateurs de pétrole, qui représentaient 42 % de la production mondiale de brut en 2011]. À deux, nous maîtrisons environ 60 % de la production globale », explique Djibril Fadiga. La dernière réunion avait été annulée en raison du décès du président ghanéen John Atta Mills. Un prochain round de négociations est prévu en novembre à Accra. Avant même la fin de sa réforme, le cacao ivoirien prépare déjà sa révolution. l

Le soleil se lève à l’Est Alors que sa consommation de cacao augmente – tirée par la Chine –, l’Asie commence à peser dans la transformation. Et supplante déjà l’Afrique.

JEUNE AFRIQUE

KOICHI KAMOSHIDA/GETTY IMAGES/AFP

C

ommechaqueannéeàlamême période, alors que commence la campagne en Afrique de l’Ouest, les spécialistes du cacao annoncent une baisse des tonnages. « Pour faire remonter les cours », explique un consultant. Sauf que, cette fois, le subterfuge n’a aucune raison d’être puisque le prix de la tonne de fèves a gagné près de 30 % depuis le mois de mai, pour atteindre 2 680 dollars (1 981 euros) fin septembre. « C’est le montant le plus élevé depuis fin 2011 », confirme Edward George, directeur de la recherche sur les matières premières agricoles chez Ecobank. Avec la perte prévue de près de 200 000 tonnes de fèves cette année en raison de conditions climatiques défavorables, qui va éroder un peu plus les stocks internationaux, et une demande mondiale au beau fixe, cette tendance va se confirmer. Surtout qu’aux traditionnels marchés de consommation européens et nord-américains s’ajoute un nouvel acteur. « La demande asiatique va exploser », prévoit François Ruf, spécialiste du cacao au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad). Ce continent pourrait absorber près de 20 % de la production mondiale en 2016, porté par la Chine, qui consomme entre 15 % et 25 % de plus chaque année. Une croissance qui influence déjà le marché mondial, comme

p Près de 20 % de la production mondiale pourraient être absorbés par l’Asie.

l’illustre l’évolution des cours du cacao en poudre: en 2012, pour la première fois en vingt-cinq ans, ils ont été supérieurs à ceux du beurre de cacao. « Les Asiatiques se contentent d’un chocolat de moindre qualité, invendable en Europe, à base de poudre à laquelle sont ajoutés du sucre et de l’huile de palme », précise Ruf. AMBITIONS. En attendant une éven-

tuelle hausse de la production asiatique – l’Indonésie est déjà le troisième fournisseur mondial, et le Vietnam nourrit de grandes ambitions en la matière –, c’est dans la transformation que ce continent commence à peser. Si l’Europe reste de loin le principal broyeur, 2012 a vu l’Asie passer devant l’Afrique pour la première fois. « L’Indonésie sera un importateur net de fèves en 2014 », constate Edward George. Jakarta a mis en place une

politique incitative et a introduit une taxe sur l’exportation de fèves, « pour soutenir la première transformation », reprend l’expert. Du coup, les grands groupes internationaux réorientent géographiquement leurs investissements. Le suisse Barry Callebaut a acquis en juillet la division cacao du singapourien Petra Foods pour 950 millions de dollars, peu après que Cargill eut annoncé un investissement de 100 millions de dollars dans une usine d’une capacité de 70 000 tonnes en Indonésie. L’américain cherche aussi à acquérir le numéro trois mondial Archer Daniels Midland (ADM), qui souhaite sortir de la filière. Si l’opération se confirmait, Cargill et Barry Callebaut représenteraient à eux deux plus de la moitié des capacités de transformation mondiale. l OLIVIER CASLIN N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


Les indiscrets

RD CONGO

Quand Yuma gêne Matata

L

a révélation, par Bloomberg, du projet de cession des 20 % que détient la Gécamines dans Kamoto Copper Company (KCC, au Katanga) crée des remous. D’autant que parmi les acquéreurs se trouve le controversé Dan Gertler. « Le projet d’appel d’offres ne nous a même pas été communiqué, cela ressemble à une initiative personnelle d’Albert Yuma Mulimbi, le président de la Gécamines. La vente ne pourrait d’ailleurs se faire sans notre aval, conformément aux décrets sur la gouvernance minière », indique un conseiller du gouvernement. À la présidence, on est moins

sévère : « La Gécamines a son propre conseil d’administration indépendant, elle dispose de deux mois pour nous transmettre les informations », affirme un conseiller du président Kabila, qui confirme toutefois ne pas avoir été averti des tractations. Cette révélation tombe au plus mal pour le Premier ministre, Augustin Matata Ponyo : le 13 octobre, il rencontrait Christine Lagarde au Fonds monétaire international, à Washington. Fin 2012, l’institution avait suspendu son programme d’aide à la RD Congo en raison du manque de transparence d’un autre contrat minier, celui de Comide. l

CONSTRUCTION POULINA REMET LE COUVERT EN CHINE

Déjà présent dans l’empire du Milieu (conditionnement d’huile d’olive), le premier groupe privé tunisien s’apprête à y produire des matériaux de construction à compterde novembre. Pour ce faire, il s’est associé à Cetrapi, une PME française gérée par François Belin. La coentreprise, nommée PEPS BTP, est détenue à parts égales par les deux partenaires. Le site de N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

production a nécessité un investissement d’environ 2 millions d’euros, dont 1,4 million consentis par Poulina. TÉLÉPHONIE MOBILE APOLLINAIRE COMPAORÉ BIENTÔT EN LIGNE

Bonne nouvelle pour le Burkinabè Apollinaire Compaoré : le 3 octobre, le comité d’investissement d’Africa Finance Corporation a accordé 50 millions d’euros à s on groupe, Planor

– notamment pour financer l’acquisition de la troisième licence téléphonique au Mali. De quoi combler les 10,7 millions encore dus à l’État malien (73 millions auraient déjà été versés) à trois semaines de l’échéance finale, déjà reportée. De son côté, Cessé Komé, l’ancien associé d’Apollinaire Compaoré dans la société adjudicatrice de la troisième licence, poursuit sa bataille : il a entamé à Paris, en août, une procédure d’arbitrage contre l’État malien.

TÉLÉCOMS TELMA RESTERA-T-IL MALAGASY ? On pensait le groupe sudafricain MTN bien parti pour acheter les parts de Hassanein Hiridjee dans l’opérateur malgache Telma, mais c’est l’homme d’affaires Mamy Ravatomanga qui tiendrait la corde. Ce natif des hauts plateaux, réputé proche du président de la transition Andry Rajoelina, est devenu un acteur important de l’économie de la Grande Île dans les années 2000. Après avoir débuté dans le transport de produits pétroliers, il est aujourd’hui à la tête d’un consortium regroupant plus d’une dizaine de sociétés, de la clinique de luxe à la distribution automobile en passant par l’hôtellerie et le négoce de litchis.

CAMEROUN ANDRÉ SIAKA ROULE POUR ROUTD’AF À quelques mois de son départ à la retraite, André Siaka, patron des Brasseries du Cameroun depuis vingt-cinq ans, prépare activement la suite. Ce polytechnicien (Paris) âgé de 64 ans, également viceprésident du groupe Ecobank, mise sur l’énorme besoin en infrastructures routières du continent. Il vient de créer Routd’Af (Routes d’Afrique), une entreprise de travaux publics à vocation panafricaine qui devrait démarrer ses activités au premier trimestre de 2014. En négociation avec une société sud-africaine, il compte réunir un capital de quelque 2 milliards de F CFA (3 millions d’euros).

VINCENT FOURNIER/J.A.

Entreprises marchés

GWENN DUBOURTHOUMIEU

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JEUNE AFRIQUE


p Le futur Noom de Kinshasa, sur les rives du fleuve Congo. HÔTELLERIE

Mangalis fait ses gammes Un groupe africanisé, aux marques déclinées de la classe ultra-économique au grand luxe… Pierre après pierre, le rêve du tycoon sénégalais Yérim Sow devient réalité.

À

Conakry, les travaux sont bien entamés. À Abidjan, ils viennent de commencer. Ceux de Freetown vont débuter dans quelques jours. Depuis trois ans, Yérim Sow, le tycoon sénégalais, travaille sur ce qui est devenu son grand projet pour le continent: un groupe hôtelier comptant au moins une quarantaine d’établissements. Quinze, qu’il construira lui-même, sont d’ores et déjà planifiés dans treize pays, pour un investissement total de 315 millions d’euros. « Notre objectif est de créer un groupe africain,commel’ontfaitavantnousdes groupes hôteliers en provenance d’Europe, des États-Unis, d’Asie et même du Moyen-Orient avec un développement global, et de faire entrer l’hôtellerie africaine sur la scène mondiale », souligne Denis Sorin,directeurgénéraldeMangalis, bras opérationnel d’Inaugure Hospitality Group, filiale à 100 % de Teyliom, le groupe de Yérim Sow. Deux noms ont été choisis pour incarner cette ambition : Seen, dans la catégorie économique (concurrent direct des Ibis Rouge d’Accor), et Noom, sur le segment moyen-haut de gamme (l’équivalent des Pullman d’Accor). Ces marques seront déclinées en Seen et Seen + ainsi qu’en Noom et Noom Résidences, pour les longs séjours. D’autres dénominations, JEUNE AFRIQUE

déjà définies, feront prochainement leur apparition sur les classes ultraéconomique et très haut de gamme. Le nouveau groupe n’est pas le seulàsedévelopperdanscettezone. Au sud du Sahara, selon le cabinet de conseil W Hospitality Group, 130 hôtels seront construits cette année, ce qui représente plus de 21000 chambres. Soit une augmentation de 23 % des projets subsahariens, contre 9 % en Afrique du Nord, 4 % en Europe et 8,6 % dans la zone Asie-Pacifique. DESIGN. Pour se différencier,

Mangalismisecertessursesmarques africanisées, mais pas uniquement. Il opte ainsi pour « des chambres très modernes, très design, avec des équipements dernier cri, car les nouvelles marques ont l’avantage de pouvoir innovertoutdesuite»,préciseDenis Sorin. Le groupe entend aussi jouer la carte environnementale – par exemple, « la condensation de la climatisation servira à alimenter les toilettes en eau ». Mangalis souhaite enfin nouer des partenariats avec des fournisseurs locaux (à hauteur de 20 % des achats au moins) pour éviter de tout importer. Le but étant de réduire les coûts opérationnels pour proposer des tarifs inférieurs d’environ 5 % à ceux pratiqués par les concurrents directs de Mangalis

OBJECTIF Construire

15 hôtels dans

13

pays africains

sur son créneau : les hôtels pour hommes d’affaires, situés près des aéroports ou en centre-ville. Le projet est clair, précis, ficelé. Depuis le lancement, en 2009, du Radisson Blu à Dakar, Yérim Sow mûrissait l’idée de construire le premier vrai groupe hôtelier africain, une sorte de grand frère des acteurs régionaux tels qu’Azalaï ou Onomo. L’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale se sont imposées comme les premières zones d’implantation en raison de leur très fort déficit hôtelier. Mais l’annonce officielle du groupe lors du récent Africa Hotel Investment Forum, au Kenya, a en partie changé la donne. Désormais, Mangalis vise l’Afrique de l’Est, où il peut avancer plus rapidement en prenant en charge des hôtels dont il n’est pas propriétaire, via des contrats de gestion. « Nous recevons déjà des offres de développement au Moyen-Orient et en Europe auxquelles nous portons le plus grand intérêt », ajoute Denis Sorin. Basé à Barcelone – pour sa position centrale entre Europe, Afrique et Moyen-Orient –, Mangalis compte une vingtaine d’employés, tous issus de l’hôtellerie. Un centre de formation sera également ouvert dans la capitale catalane. « Nous voulons que nos employés, y compris les 600 que nous recruterons l’année prochaine entre Conakry, Abidjan, Cotonou et Pointe-Noire, prennent plaisir à travailler », avance Sorin. Un aspect ambitieux de plus pour un projet qui pourrait sembler trop beau pour être vrai. S’il n’était derrière tout cela un homme, Yérim Sow, connu pour sa capacité à réaliser ce qui lui tient à cœur… l FRÉDÉRIC MAURY N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

MANGALIS

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Entreprises marchés INTERVIEW

José Lopez et Nandu Nandkishore Vice-président exécutif de Nestlé pour les opérations

Directeur de Nestlé pour l’Asie, l’Océanie, l’Afrique et le Moyen-Orient

« Nous nous adaptons aux consommateurs locaux »

voulons aujourd’hui y intensifier notre présence, car l’Afrique représente 16 % de la population mondiale. Donc, pour que ces 3 % de chiffre d’affaires deviennent 16 %, nous voulons créer de la valeur, pour l’entreprise et pour les pays dans lesquels nous travaillons, et investir à long terme. Pour cela, il faut voir au-delà de la conjoncture économique, qui peut varier.

Nestlé, qui a investi quelque 900 millions d’euros sur le continent depuis cinq ans, compte y doubler son chiffre d’affaires d’ici à 2020.

Quelle part de vos produits transformez-vous localement ? J.L.: La transformation locale est

PHOTOS : NESTLÉ

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p L’Indien Nandu Nandkishore : vingt-quatre ans de carrière au sein de la multinationale agroalimentaire.

G

éant mondial de l’agroalimentaire, Nestlé possède une trentaine d’usinesenAfrique,mais le continent ne représente que 3 % de son chiffre d’affaires (soit 2,3 milliards d’euros en 2012). Il veut donc y doubler son activitéd’ici à 2020. Le groupe estime y avoir investi 1,2 milliarddedollars(environ900millions d’euros) au cours des cinq dernières années. En trois ans, il a ouvert de nouveaux sites en Afrique du Sud, en Algérie, en Angola, au Congo et au Nigeria. Présents à Kinshasa fin septembre, à l’occasion du premier anniversaire de l’inauguration de l’usine de Kingabwa, José Lopez, le numéro trois du groupe, et Nandu Nandkishore, directeur régional, ont répondu aux questions de Jeune Afrique. JEUNE AFRIQUE : Votre usine en RD Congo a 1 an. Quelles sont vos ambitions dans ce pays ?

N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

p L’Espagnol José Lopez : entré en 1979 dans le groupe, il en est aujourd’hui le numéro trois.

JOSÉ LOPEZ: Nous avons engagé des moyens [12,4 millions d’euros] pour y accroître notre activité, car nous pressentons un potentiel important. Alors que la part de marché des cubes Maggi se situe à 50 % au Congo-Brazzaville, elle n’est que de 25 % environ en RD Congo. Mais nous voyons bien au-delà de ce pays. Nous sommes en pleine tournée africaine ; nous étions en Angola et nous partons ensuite au Zimbabwe, puis au Kenya. Notre objectif: examiner l’implication de Nestlé auprès des fournisseurs, des distributeurs et, bien évidemment, des consommateurs. La présence de Nestlé en Afrique est ancienne, mais vous n’y réalisez que 3 % de votre chiffre d’affaires. Comment l’expliquez-vous ? NANDU NANDKISHORE: En effet,

nous avons une expérience de plus de cent ans sur le continent. Nous

un long processus. Nous mettons l’accent sur certaines denrées particulièrement importantes, comme en RD Congo l’huile de palme et le sucre. Mais la transformation implique un engagement, avec des fournisseurs agricoles mais aussi des fournisseurs de produits transformés. Cela implique de commenceràdévelopperdesnormesde qualité et de mettre en place toute la chaîne locale, des producteurs aux acheteurs en passant par les techniciens, les auditeurs et les agronomes. Aujourd’hui, 70 % des produits que nous utilisons dans nos usines sont importés, et 30 % ont une provenance locale. Nous voulons porter cette part à 40 % d’ici à trois ans. Cherchez-vous à maîtriser l’intégralité de la chaîne de production? J.L. : Nous ne pensons pas que

cette intégration verticale soit une solution de long terme. Nous voulons que les pays où nous sommes présents bénéficient de notre activité. Nous ne possédons pas de plantations afin de donner une chance aux acteurs locaux de développer leur savoir-faire en devenant membres d’une chaîne de valeur. La concurrence émerge en Afrique avec des sociétés locales comme Tiger Brands ou d’autres géants comme Danone ou Kraft Foods. Comment comptez-vous vous démarquer ? JEUNE AFRIQUE


Coulisses

Entreprises & marchés

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GUINÉE LA JUSTICE FRANÇAISE CONDAMNE BOLLORÉ

Prévoyez-vous d’ouvrir d’autres usines ? J.L.: Nous avons en permanence

des projets, mais nous sommes très attentifs à l’efficacité de nos opérations. En RD Congo, nous voulons en priorité aligner l’usine sur les normes du groupe en termes d’efficacité et de fiabilité. Il faut d’abord qu’une usine tourne à pleine capacité et que les capitaux investis soient rentabilisés. L’Afrique n’est pas un jeu d’échecs sur lequel nous avançons des pions. C’est l’efficacité des opérations locales qui détermine l’allocation de nos fonds. l Propos recueillis à Kinshasa par NICOLAS TEISSERENC JEUNE AFRIQUE

L’armateur NCT Necotrans réclamait 100 millions d’euros de dommages et intérêts ; il n’en recevra que 2,1. C’est le jugement rendu le 10 octobre par le tribunal de commerce de Nanterre dans le litige qui opposait le groupe français à son compatriote Bolloré sur la concession du port de Conakry. Getma, la filiale guinéenne de NCT Necotrans, avait été écartée de la gestion de ce port en 2011, quand les autorités du pays avaient estimé qu’elle n’avait pas respecté ses engagements. D’après la justice française, cette réparation (les 2 millions d’euros) correspond aux « investissements effectivement réalisés par Getma », qui « ont bénéficié au nouveau concessionnaire ». NCT Necotrans accuse son rival de « concurrence déloyale » et de « s’être rendu complice de la violation, par l’État, de ses engagements contractuels ». Et affirme avoir investi plus de 30 millions d’euros dans l’infrastructure. l

VINCENT FOURNIER/J.A.

N.N.: Un environnement compétitif est bon pour l’industrie et pour les consommateurs. Pour y faire face, nous faisons beaucoup de recherches sur les consommateurs locaux. Par exemple, la variété de cube « pondu » que nous développons ici, en RD Congo, s’adapte parfaitementauplatdumêmenom. De plus, en Afrique subsaharienne, nous accordons une attention particulière à la valeur nutritive de nos produits (en fer, zinc ou vitamine A). En RD Congo, nous proposons un cube Maggi renforcé en sel iodé. Celui que nous vendons au Nigeria est non seulement iodé, mais aussi renforcé en fer. Nous avons calculé qu’une famille peut obtenir 15 % de ses besoins quotidiens en fer grâce à notre bouillon. J.L.: Par ailleurs, nos employés vivent ici et sont eux-mêmes des consommateurs: ils comprennent le marché. Nous n’essayons pas de le comprendre à leur place. Nous sommes très impressionnés par la façon dont ils négocient avec les distributeurs et dont ils organisent le lancement des marques sur les marchés. Arriver avec un camion et organiser un concours de danse auquel tout le monde participe… Vous ne verrez pas ça à Vevey [siège de Nestlé, en Suisse] !

• ALGÉRIE Les investissements déclarés dans le pays ont atteint 7 730 M€

S•

au 1er semestre 2013, soit une hausse de 108 % par rapport à l’an dernier

M

S

MÉDIAS France 24 a lancé un plan de développement de sa chaîne en

arabe. Objectif : augmenter ses parts d’audience au Maghreb • CAPITAL-

INVESTISSEMENT Abraaj vient de boucler son 1er investissement en Côte d’Ivoire avec une prise de participation dans African Industrial Services Group

MAROC RENAULT MONTE EN PUISSANCE La marque au losange vient d’inaugurer la deuxième ligne de fabrication de son usine deTanger. Cet investissement de 400 millions d’euros, destiné à la production de la Dacia Sandero et de la Dacia Sandero Stepway, devrait lui permettre d’atteindre 340 000 unités à partir de 2014. Au total, 1 400 personnes ont été recrutées, portant ainsi l’effectif global du site à 5 000 employés.

MAURITANIE LA SNIM DÉCOUVRE UN GISEMENT La Société nationale industrielle et minière, qui produit déjà près de 12 millions de tonnes de fer par an, a découvert un important gisement de ce minerai sur le site d’exploration deTizerghaf. Ses ressources sont estimées à 830 millions de tonnes.

Au cours de la prochaine décennie, l’entreprise publique compte investir plus de 5 milliards de dollars (plus de 3,7 milliards d’euros) par an, notamment dans la construction de complexes miniers, afin de porter la production nationale à 40 millions de tonnes à l’horizon 2025.

OBLIGATIONS 8 MILLIARDS DE DOLLARS POUR L’AFRIQUE Selon l’agence de notation Moody’s, les pays africains ont levé cette année 8,1 milliards de dollars (5,9 milliards d’euros) en obligations souveraines sur les marchés internationaux, surpassant le record de 7,2 milliards de dollars de 2010. L’Égypte arrive en tête avec 3,7 milliards de dollars, suivie par l’Afrique du Sud (2 milliards), puis le Nigeria et le Ghana avec 1 milliard chacun. Le Rwanda clôt la marche, ayant collecté 400 millions de dollars en avril. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013


Décideurs AUTOMOBILE ET ÉQUIPEMENT

Le marathonien belge du Katanga

En vingt-deux ans, Philippe de Moerloose a bâti l’un des plus importants groupes de distribution de véhicules et de machines d’Afrique subsaharienne. Un succès qui ne lui a pas valu que des amis.

D

ifficile de rencontrer le discret Philippe de Moerloose. Le fondateur de la Société de distribution africaine (SDA) sillonne sans cesse les 27 pays du continent où son groupe est présent. Travailleur acharné, exigeant, l’homme est un coureur de fond. À 46 ans, il prépare d’ailleurs le marathon de New York. Lorsque nous le rencontrons au siège de SDA, à Wavre, dans la banlieue sud de Bruxelles, le Belge du Katanga rentre de voyage. Pas d’Afrique centrale, où il a grandi, mais de Casablanca. Il y a participé au conseil d’administration de Tractafric Motors, numéro deux de la distribution automobile en Afrique subsaharienne (derrière le franco-japonais CFAO). Depuis sa création, en 2011, – grâce à la fusion entre Demimpex (qui lui appartenait) et Tractafric, filiale de la Société nationale d’investissement (SNI) du Maroc –, SDA détient 40 % des parts de Tractafric Motors. Au Maroc, le patron a également inauguré son nouveau réseau de distribution d’engins agricoles John Deere. « Nos perspectives de développement en Afrique du Nord sont très prometteuses. Les volumes de distribution y sont bien plus importants qu’au sud du Sahara », assure-t-il. Pour SDA, 2013 est une année de transition. « Notre chiffre d’affaires dans la distribution devrait être similaire à celui réalisé en 2012 [460 millions d’euros, avec 27 millions d’euros de marge brute]. Ces derniers mois, nous avons professionnalisé toutes nos filières de distribution – d’automobiles, de camions, d’engins de chantier ou agricoles – en plaçant à la tête de chaque pôle une équipe de spécialistes, souvent recrutés au sein de la concurrence. Et en N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

mettant l’accent sur la qualité de service. Dès l’année prochaine, nous viserons une croissance de 15 % par an », prévient Philippe de Moerloose. Une expansion rapide, que le patron a déjà connue depuis la création en 1991 – il avait alors 24 ans – de Demimpex, l’embryon de son groupe. Fils d’un comptable de la société textile Solbena, à

Lubumbashi, il aime rappeler qu’il n’est pas né dans un milieu aisé. « J’ai commencé avec un capital de 2 500 euros, à la fin de mes études à l’Institut catholique des hautes études commerciales (Ichec), à Bruxelles. D’abord en lançant un réseau d’approvisionnement de pièces détachées en RD Congo, puis en exportant des véhicules complets », se souvient-il. Ensuite,

q Le patron et fondateur de SDA (à dr.) et Michaël Delvaux forment un tandem solide.

Bio express 1967 Naissance en Belgique à WatermaelBoitsfort 1970 S’installe avec sa famille à Lubumbashi, en RD Congo 1985 Part à Bruxelles pour y poursuivre ses études supérieures (de commerce) 1991 Tout juste diplômé de l’Ichec, il fonde Demimpex, spécialisé dans l’exportation de pièces détachées et de véhicules neufs vers la RD Congo COLIN DELFOSSE POUR J.A.

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2011 Fusionne Demimpex avec Tractafric et crée Tractafric Motors, détenu à 40 % par son groupe, SDA JEUNE AFRIQUE


Décideurs

JEUNE AFRIQUE

BMCI

ON EN PARLE

EURAPHARMA

LAURENT DUPUCH BMCI L’ingénieur en télécommunications est devenu le président du directoire de la banque commerciale, filiale chérifienne du français BNP Paribas. Auparavant, il était responsable du Moyen-Orient à l’inspection générale du groupe.

KEN ACCAJOU EURAPHARMA À 45 ans, le nouveau directeur Afrique francophone et Madagascar de la société de distribution pharmaceutique du groupe CFAO devient membre des comités exécutifs de la maison mère et de sa filiale.

BOA

section de son groupe : « Nous l’entrepreneur a su saisir sa chance. n’avons pas encore de stratégie En 1995, il a ainsi racheté le disbien définie pour CDA. Nous tributeur VRP à la famille belge cherchons à confier la gestion Theumis, lorsque le pays traversait des hôtels à un partenaire. Mais des temps difficiles. « On a redyun désinvestissement est exclu », namisé la société et étendu nos assure-t-il. Via ce holding, Philippe activités. D’abord en Centrafrique, au Rwanda et au Burundi – où de Moerloose conserve une préma connaissance du swahili a été sence importante en RD Congo, utile –, puis en Afrique de l’Ouest alors que le pays ne représente et en Mauritanie », explique-t-il. plus que 10 % du chiffre d’affaires Jouant de cette double culture de SDA. Même s’il note le caractère prometteur des secteurs énereuropéenne et africaine, Philippe gétique et agroalimentaire en RD de Moerloose a pu nouer des liens Congo, le Belge ne compte pas s’y avec des marques de référence, en risquer. « Nous n’allons pas nous obtenant leurs « cartes » (le droit disperser. Nous sommes d’abord de les représenter) pour certains un groupe de distribution. » États africains : Mercedes, Honda Bien que la RD Congo soit à et Nissan pour l’automobile, John la source de son parcours, elle Deere pour les machines agricoles, constitue aussi le talon d’Achille de Hitachi et Volvo pour les camions Philippe de Moerloose. Sa rapide et engins miniers. ascension ne lui a pas valu que des Par ailleurs, afin de consolider amis. À Kinshasa, Lubumbashi et son groupe de quelque 3 700 saladans les milieux belgo-congolais, riés, le dirigeant a engagé Michaël l’homme ne fait pas Delvaux, son camarade à En 2012, l’unanimité. Critiqué l’Ichec. Issu de la banque pour sa proximité d’affaires Paribas, ce derSDA a supposée avec Joseph nier gère depuis treize réalisé Kabila – ce qui explians les finances et les un chiffre querait la croissance ressources humaines de de son groupe –, il SDA. Les deux hommes d’affaires s’en défend fermeforment un tandem de ment : « Je suis un solide : « Je suis un fon460 millions acteur économique ceur, je me décide rapid’euros. important du pays, dement. La force de notre il est normal que le groupe est sa réactivité. président me reçoive, au même Je suis bien épaulé par Michaël et titre que d’autres entrepreneurs. ses équipes, qui valident les idées Mais je n’entretiens pas de relation et structurent les projets », résume amicale avec lui. Si nous gagnons Moerloose. certains marchés, c’est parce que nous sommes les moins-disants TALON D’ACHILLE. Même s’il ne sur les appels d’offres. » jure plus que par la distribution À l’avenir, Moerloose se ren– son « cœur de métier » –, le Belge dra en RD Congo pour affaires détient plusieurs actifs industriels autant que pour raisons peret touristiques non négligeables sonnelles. « Je suis attaché au en RD Congo, rassemblés sous Katanga, mon frère [Patrick] y est le holding CDA (environ 200 milinstallé comme distributeur de lions d’euros de chiffre d’affaires). mon groupe. » Mais il n’envisage Parmi eux : la Grande Cimenterie pas de revenir vivre à Kinshasa du Katanga, dont il détient 62,5 %, ou à Lubumbashi. « J’apprécie le Grand Hôtel de Kinshasa et le la diversité géographique de Grand Karavia de Lubumbashi mon entreprise, entre Europe et (50 % chacun). Il possède en Afrique. Il faut faire preuve de outre 100 % de la compagnie de créativité, je me sens à ma place fret aérien Demavia (10 millions dans cet entre-deux », conclut-il. l d’euros de chiffre d’affaires). CHRISTOPHE LE BEC, Le chef d’entreprise se montre envoyé spécial en Belgique moins disert sur l’avenir de cette

ALIOUNE NDOUR DIOUF BOA SÉNÉGAL Responsable Afrique subsaharienne de l’assureur Axa, ce Sénégalais est désormais président du conseil d’administration de la filiale locale de Bank of Africa. Il avait occupé ce même poste chez Ecobank à Dakar. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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Finance DANS LES KIOSQUES

L’incroyable essor des banques africaines Au cours de la dernière décennie, les revenus des groupes du continent ont bondi de 11,7 % par an en moyenne. Nouveaux profits, nouveaux défis : Jeune Afrique les passe au crible dans son hors-série « Spécial finance ».

E

n une décennie, les 200 premières banques africaines ont vu leurs revenus bondir de 263,7 % tandis que leur bilan cumulé grossissait de 172 %. Le produit net bancaire total des mastodontes financiers du continent a enregistré une croissance moyenne de 11,7 % par an. Celui-ci n’avait progressé « que » de 5,1 % en 2011 ; en 2012, il a repris son rythme de croissance à deux chiffres, avec 13,5 %. Extraits du dernier hors-série annuel de Jeune Afrique consacré à la finance – de la banque aux marchés financiers (lire encadré) en passant par l’assurance –, ces chiffres soulignent la progression forte et soutenue de l’activité bancaire sur le continent, malgré les difficultés des dernières années. Clairement, l’expansion est loin d’être terminée. S’il a fortement augmenté dans plusieurs pays – dont le Maroc et le Kenya –, le taux de bancarisation n’est encore dans de nombreux États que d’un compte bancaire pour dix habitants. Les agences devraient notamment se multiplier pour couvrir au mieux les territoires urbains et périurbains. La société de conseil Devlhon Consulting estime ainsi que le réseau de succursales des grandes institutions africaines devrait croître de 46 % à 95 % d’ici à 2020, rappelle le horssérie « Spécial finance »… Mais le continent est aussi un véritable lieu d’expérimentation commerciale. La division recherche d’Ecobank estime ainsi que les revenus tirés des services financiers sur mobile devraient passer d’environ 657 millions à 3,5 milliards de dollars (de 497 millions N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

à 2,6 milliards d’euros) entre 2012 et 2017. L’incroyable succès de l’agency banking, qui consiste à proposer des produits bancaires via un magasin par exemple, est une autre preuve de ce dynamisme. Lancée en 2010 au Kenya, cette méthode de commercialisation y impliquait déjà 17 000 représentants début 2013, et certaines banques, comme Equity Bank, réalisent désormais davantage de transactions par ce canal que via les distributeurs automatiques de billets. OFFENSIVE. Jusqu’où ira l’expé-

rimentation ? Difficile à dire, mais le cas de Société générale, qui a lancé en début d’année une filiale baptisée Manko, destinée notamment à bancariser les entrepreneurs du secteur informel, montre que l’offensive est lancée. L’acquisition récente d’une banque (TN Bank) au Zimbabwe par un opérateur télécom (Econet), dont Jeune Afrique détaille les enjeux, fait frémir la profession. L’inquiétude est grande que le monde des télécoms, dont l’emprise sur le mobile banking est déjà

p Hors-série no 34, 124 pages, 6 euros (3 000 F CFA dans la zone franc CFA).

importante, poursuive son offensive commerciale dans la finance. L’alliance récente entre Airtel et MicroEnsure dans la microassurance étant un élément supplémentaire à ajouter à ce dossier. Région par région, le dynamisme est très inégal, souligne en outre le hors-série « Spécial finance ». Le tableau général reste évidemment dominé par l’Afrique du Sud, où la véritable nouveauté est l’émergence rapide de nouveaux acteurs comme Capitec Bank, capables de menacer l’oligopole formé par les quatre grandes banques historiques du pays. À l’opposé, l’Afrique centrale semble largement à la traîne

BOURSE, « PRIVATE EQUITY »… ATTENTION FRAGILE L’ÉDITION 2013 du « Spécial finance » dresse également le bilan de l’année 2012 dans les domaines des fusions-acquisitions, des opérations boursières, du capital-investissement et des levées de dette gouvernementale. Sur le terrain boursier, les opérations d’introduction se sont comptées sur les

doigts d’une main l’année dernière. Le bilan est meilleur du côté du capital-investissement, mais l’activité, encore émergente, reste très dépendante de la réalisation ou non de quelques grandes opérations d’investissement. Enfin, en ce qui concerne les fusions-acquisitions,

malgré la présence dans notre palmarès de quelques opérations non liées aux ressources naturelles (comme le rachat du distributeur spécialisé CFAO par le japonaisTTC), ce sont bien ces dernières qui continuent à soutenir le marché. Et c’est toujours le cas en 2013. l F.M. JEUNE AFRIQUE


Baromètre

SCANDALES. Cettecroissancegéné-

ralisée (marquée également par d’importantes acquisitions, comme celle d’Oceanic Bank par Ecobank au Nigeria ou celle de la Banque régionaledesolidaritéparOragroup en Afriquedel’Ouest)posetoutefois de nouveaux défis. Avec à la clé de nécessaires changements dans les organisations, les équipements, la surveillance et la gouvernance. Or à ce titre, rappelle le horssérie, les dernières années peuvent inquiéter. Si le secteur bancaire africain n’a connu aucune crise majeure, plusieurs scandales ont émaillé l’actualité. Des établissements publics tunisiens, qui ont financé les proches de l’ex-président Ben Ali, aux groupes nigérians, qui ont traversé une violente crise due au laxisme de la supervision, les exemples sont légion – sans parler des affaires de gouvernance qui ont perturbé la vie de trois groupes bancairespanafricainsnésenzonefrancophone. Jeune Afrique s’interroge donc sur la solidité des banques africaines et la gestion des risques. l

FER

« À court terme,

les prix vont baisser » LA PRODUCTION mondiale de fer est échangée de deux manières: sur une base contractuelle, entre les grands producteurs de fer – tels que Vale, Rio Tinto et BHP Billiton, qui représentent 38 % du marché à eux trois – et les sidérurgistes majeurs (tel ArcelorMittal); sur le marché au comptant (spot), dont les cours ont fluctué fortement depuis deux ans (voir courbe). Mieux réparti à la surface du globe que le cuivre, le fer peut se trouver partout, mais l’Australie, le Brésil et la Chine en sont les principaux producteurs. Le continent africain détient des réserves majeures, notamment en Guinée, en Côte d’Ivoire, au Liberia, en Mauritanie et en Angola, mais elles sont largement sousexploitées. Alors que le marché mondial du fer représentait

1,8 milliard de tonnes en 2012, la production totale de l’Afrique n’a pas dépassé 77 millions de tonnes la même année (contre 69 millions en 2011). La grande majorité de ce minerai provient d’Afrique du Sud (57 millions de tonnes) et de Mauritanie (12 millions), même si la production du Liberia devrait grimper en 2013. Les grands projets africains, comme celui de Simandou en Guinée, qui permettent des économies d’échelle, ont pris du retard. Leur entrée en production risque d’être repoussée, alors qu’ailleurs cette dernière a fortement décollé depuis 2001, notamment en Australie (+ 8 % sur la seule année 2012). La Chine continue à représenter près de la moitié des achats de fer du globe sur les marchés (750 millions

Anton Löf Analyste senior minerais de fer, IntierraRMG

de tonnes importées en 2012), et sa propre production diminue. Elle continuera donc à importer de gros volumes, mais insuffisamment pour faire monter les prix. Ceux-ci devraient donc continuer de baisser à court terme, en raison de la hausse de la production. À moyen terme, les prix devraient toutefois se stabiliser, puis remonter sur le long terme, avec une demande croissante de pays asiatiques comme l’Indonésie et les Philippines. » l

Cours du fer sur le marché spot (en dollars) 175

154,68

150

Févr. 2013

125

99,47

100

134,19

Sept. 2012

Sept. 2013

75 Janvier 2012

Juillet 2012

Janvier 2013

Juillet 2013

SOURCE : YCHARTS

même si son total de bilan cumulé est celui qui a connu la progression la plus spectaculaire en 2012, passant d’environ 1,4 % à 1,8 % du total de bilan des 200 premières banques du continent. Les autres régions sont marquées par l’émergence de groupes de plus en plus importants. Au Nord, les trois leaders marocains font désormais partie des dix premiers groupes africains, distançant les géants publics algériens, gavés aux pétrodollars mais peu dynamiques. En termes de revenus, Attijariwafa Bank est même clairement devenu l’un des cinq plus gros acteurs du continent. L’Afrique de l’Ouest compte quant à elle seize banques dans les cinquante premières ; parmi elles, la suprématie nigériane n’est contestée que par les deux poids lourds Ecobank et Bank of Africa. Les établissements kényans, qui disposent désormais de capitaux suffisants pour s’engager résolument dans la conquête panafricaine, pointent le bout de leur nez juste derrière.

Finance

FRÉDÉRIC MAURY JEUNE AFRIQUE

N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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GECAMINES Sarl

LA GÉNÉRALE DES CARRIÈRES ET DES MINES SOCIÉTÉ PAR ACTIONS À RESPONSABILITÉ LIMITÉE

RECENTRAGE DU PLAN STRATÉGIQUE :

DE NOUVELLES ACQUISITIONS DE GISEMENTS BOULEVERSENT LES PRÉVISIONS DE GÉCAMINES Sarl Avec l’acquisition des nouveaux gisements de Deziwa et Ecaille C, Mutoshi, Lupoto et Kasonta, Gécamines Sarl, géant minier congolais basé au Katanga, vient de voir ses réserves passer de 900 000 à plus de 7 000 000 tonnes de cuivre en 2013. L’optimisation de la valorisation de ces réserves nécessite absolument la modernisation de son outil de production. Une augmentation sensible de son budget d’investissement de 630 millions USD à environ 2,8 milliards de dollars, PUBLI-INFORMATION

s’avère indispensable. Ce qui l’amène à mettre sur pied un Plan de redéploiement qui est le résultat de l’évaluation à mi-parcours de son Plan Stratégique de développement (2012-2016).

Deux ans après avoir lancé le Plan stratégique de développement 2012-2015, Ahmed Kalej Nkand, CEO de Gécamines se dit confiant et est convaincu que son entreprise va passer à la vitesse supérieure à court terme en dépassant le plafond de 100 000 tonnes de cuivre prévu en 2015 pour atteindre 200 000 tonnes de cuivre en 2018 avec les nouveaux gisements. Deziwa et Ecaillle C estimés à près de 5 000 000 tonnes de cuivre permettront de garantir la mobilisation des fonds nécessaires au financement du programme de modernisation de l’outil de production. Il va sans dire, qu’à lui seul le gisement de Deziwa, certifié selon la norme York prévoit une production de 80 000 tonnes de cuivre dans la première phase à compter de 2015 et 200 000 tonnes de cuivre à l’horizon 2018. C’est dans ce cadre que Gécamines Sarl est en train de structurer un financement avec des banques d’investissement.

La Direction de l’entreprise est en pourparlers avec différents partenaires en vue de lever des fonds substantiels nécessaires

à la matérialisation de son Plan de Redéploiement. À cela, il convient d’ajouter la récupération des gisements de Kalumines (1 300 000 tonnes de cuivre connues) et de Mutoshi qui vont également renforcer l a c a p a c i t é d e p ro d u c t i o n de l’entreprise. Il importe de rappeler que depuis 2011, les études et recherches minières ont permis d’identifier des réserves évaluées à 926 124 tonnes de cuivre dans les mines de Kilamusembu avec plus ou moins 430 000 tonnes de cuivre, Kamfundwa 310 000 tonnes de cuivre, M’sesa avec 116 219 tonnes de cuivre et ce programme d’exploration se poursuit. L’ensemble de ce potentiel minier de Gécamines estimé à plus de 7 000 000 de tonnes de cuivre efface la décennie de retard enregistrée dans la prospection et permet de planifier la production à moyen et long termes. À la suite de l’évaluation de son action à mi-parcours, l’entreprise a décidé de recentrer son plan stratégique en concentrant ses efforts sur la modernisation de l’outil de production par la


construction de nouvelles unités industrielles plus modernes et plus performantes.

Grâce à cette nouvelle stratégie, Gécamines Sarl est déterminée à atteindre son objectif de 100 000 tonnes de cuivre en 2015 en augmentant sa productivité et en améliorant sa compétitivité. Pour ce faire, elle a déjà investi quelques millions de dollars USD pour son module de concentration gravimétrique doté d’une capacité de traitement de 6 000 tonnes par jour à Kambove qui permet de produire 600 tonnes de concentré à 17 %. Ce module va contribuer à l’amélioration du niveau des alimentations aux usines de traitement métallurgique à raison de 3 000 tonnes de cuivre par mois. Ce projet va entrer en production dès le quatrième trimestre 2013. Gécamines entend aussi jouer son rôle de grand opérateur minier indépendant en s’assurant déjà de l’acquisition de plusieurs ateliers d’équipements miniers pour garantir l’exploitation des mines programmée dans ce plan révisé.

Quant aux Centres de profit, des efforts sont fournis pour la modernisation des ateliers dont celui de Panda ainsi que ceux de l’Ouest. De même, l’étude de faisabilité sur la Centrale thermique de Luena (CTL) a déjà commencé. Nouveaux partenariats : la politique de Gécamines est d’exploiter ses gisements en propre mais elle reste ouverte à de nouveaux partenariats équilibrés et profitables pour toutes les parties. Le rajeunissement du personnel : également impérieux pour l’amélioration de ses performances de production, cet axe du plan stratégique requiert une mobilisation de 160 millions USD. À ce jour, l a r é d u c t i o n d e s e ff e c t i f s a totalisé 730 unités ; cette action sera poursuivie en 2014 et 2015 jusqu’à atteindre le niveau d’équilibre entre la taille acceptable de l’effectif et la production. Au chapitre de la Production : de 400 000 tonnes de cuivre en moyenne produites entre 1980 et 1989, la production a chuté en-dessous de 20 000 tonnes à partir de 1999, et remonté à

Ce redéploiement qui a été dicté par des données nouvelles enregistrées en cours d’exécution du Plan stratégique de développement redéfinit les objectifs de départ de Gécamines. Le Plan de redéploiement qui nécessite plus de moyens en vue de sa mise en œuvre pour des résultats à la hauteur des ambitions de Gécamines, est un outil de monitoring de l’action de relance de cette entreprise.

GECAMINES Sarl

LA GÉNÉRALE DES CARRIÈRES ET DES MINES SOCIÉTÉ PAR ACTIONS À RESPONSABILITÉ LIMITÉE

419, boulevard Kamanyola Commune de Lubumbashi B.P 450 - Lubumbashi République Démocratique du Congo.

www.gecamines.cd

DIFCOM/CREAPUB - PHOTOS : DR

M. AHMED KALEJ NKAND, Administrateur Délégué Général de Gécamines sarl.

36 000 tonnes de cuivre en 2012 avec une perspective d’atteindre 200 000 tonnes à l’horizon 2018 ; cette embellie, que connaît actuellement Gécamines, fait école en RDC et en Afrique. Cela a été rendu possible grâce à la conjugaison de plusieurs facteurs mis en branle depuis 2012 et qui produisent des résultats au-delà des prévisions. La résultante de toutes ces actions est la nécessité de financement supplémentaire pour permettre à Gécamines de préparer son avenir en toute sérénité.

BUILDING GÉCAMINES À KINSHASA.


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Dossier

Santé

GÉNÉRIQUES

À quand des labos au sud du Sahara? Le marché est en pleine croissance. Pourtant, confrontés à une féroce concurrence asiatique et à de nombreuses barrières réglementaires et logistiques, les acteurs locaux peinent à émerger dans les pays francophones. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

JEUNE AFRIQUE


INTERVIEW

Abdelghani El Guermaï Président de l’Amip

RD CONGO

SECTEUR PRIVÉ

À Kinshasa, les chefs c’est les Indiens

Aux bons soins des multinationales

SERVICES

L’urgence est leur business

En matière de production, hors du Maghreb et de l’Afrique du Sud, « tout reste à faire », confirme Gilles Pedini, associé chez Deloitte. Principale acheteuse de génériques en Afrique subsaharienne francophone (25 % des importations de la zone), la Côte d’Ivoire ne produit que 5 % des génériques qu’elle consomme. « Du fait de l’impact de la guerre, le pays ne compte, paradoxalement, qu’une unité de production à capitaux ivoiriens [Cipharm]. Mais le président Alassane Ouattara souhaite le doter de sept unités supplémentaires d’ici à trois ou quatre ans », souligne Guy-Bertrand Njambong, directeur technique des ventes pour la branche pharmaceutique du groupe Unipex (chimie, cosmétiques, nutrition…). Au Sénégal – autre poids lourd de la consommation sous-régionale avec environ 16 % des importations de l’Afriquesubsahariennefrancophone–,leséquipements industriels sont également aux mains des multinationales ou d’entreprises maghrébines, comme West Afric Pharma (lire p. 88), filiale du marocain Sothema, qui a lancé sa production au début de l’année. Par comparaison, le Ghana produit 25 % des génériques consommés localement. Le pays compte une trentaine de sites de production, avec des réussites emblématiques comme Danadams, seul fabricant d’antirétroviraux du pays, dont le chiffre d’affaires a bondi de 1,3 à 7,6 millions de dollars entre 2006 et 2010.

NABIL ZORKOT POUR J.A.

PÉPITES. Sileslaboratoireslocauxsontmoinsnombreux

FANNY REY

C

est tout le paradoxe du marché pharmaceutique africain : bien qu’il progresse de plus de 10 % par an à l’échelle du continent, les acteurs subsahariens peinent à y trouver leur place. Le secteur, qui devrait peser quelque 45 milliards de dollars (33 milliards d’euros) en 2020, selon la société d’études IMS Health, reste aux mains des multinationales. Celles-ci délèguent la fabrication de génériques – qui représentent la quasi-totalité des médicaments consommés sur le continent – à des unités (filiales ou sous-traitants) spécialisées dans le façonnage. Le continent en compte environ 500, dont seulement une quinzaine en Afrique subsaharienne francophone. JEUNE AFRIQUE

p À Abidjan, dans l’usine de Cipharm, la seule du pays à capitaux ivoiriens.

dans les pays francophones qu’en zone anglophone, il existe des cas emblématiques, « à l’image du Togo et du Bénin », précise Gilles Pedini, qui prouvent qu’une africanisation du secteur est possible. Parmi ces « pépites », le laboratoire Pharmaquick, à Cotonou. Sa stratégie : faire simple en se limitant au principe actif et à l’excipient (sans agent de saveur ou autre dispositif destiné à faciliter l’ingestion) pour s’adapter au pouvoir d’achat local. « Cela lui permet de produire de gros volumes et de répondre à de nombreux appels d’offres », explique Guy-Bertrand Njambong. Le Cameroun, troisième importateur de génériques en Afrique subsaharienne francophone, compte également une poignée d’acteurs locaux, dont Genemark, Imipharmi et Cinpharm. Ce dernier, dont le laboratoire a été créé en 2010, a bénéficié de l’appui technologique de l’indien Cipla, puis noué un partenariat avec le groupe allemand Sandoz en avril 2012 afin d’améliorer la qualité de ses produits et ses normes de fabrication. Mais depuis mars 2013, l’usine de Cinpharm est à l’arrêt faute de trésorerie pour acheter de la matière première. Outre les difficultés de financement, le développement de la production locale de génériques se heurte à une concurrence asiatique de plus en plus rude. Ces dernières années, les volumes de génériques et de matières premières (principes actifs et excipients) en provenance de Chine et d’Inde ont plus que doublé. « Sur nos approvisionnements provenant d’environ 400 fournisseurs, un bon tiers provient d’Asie, et cette N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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La Côte d’Ivoire en pole position

Dossier Santé proportion ne cesse de croître », confirme Léopold Juompan Yakam, président du conseil d’administration d’Ubipharm, numéro deux de la distribution pharmaceutique en Afrique. MORCELLEMENT. Tandis que la Chine a la haute main sur les matières premières, l’Inde occupe une position solide sur le marché des produits finis, notamment grâce à l’implantation en Afrique du Sud des géants Ranbaxy, Cipla et Dr. Reddy’s, qui, au-delà du marché local, utilisent la nation Arc-enCiel comme un tremplin vers l’Afrique de l’Est. Le 16 juillet, Ciplaa pris le contrôle totalde CiplaMedpro, troisième entreprise pharmaceutique sud-africaine, dont il détenait jusque-là 50 %. La transaction, d’un montant de près de 350 millions d’euros, a représenté le plus gros investissement jamais réalisé par une société indienne dans le pays, preuve de l’importance attachée par le groupe à ce marché. Enfin, les pays subsahariens francophones commencent à éveiller la convoitise des industriels maghrébins (lire pp. 90-91). « Le Maroc regarde la zone avec intérêt, pour l’export et l’investissement, mais se heurte à la faiblesse des flux logistiques entre les espaces maghrébins et subsahariens », indique Gilles Pedini. Face à ces appétits, les États et les institutions internationales reconnaissent la nécessité de renforcer l’industrie locale. Une stratégie officialisée en 2007 avec le lancement du Plan de fabrication de produits pharmaceutiques pour l’Afrique, sous l’égide de l’Union africaine, de l’Organisation mondiale

Sénégal 16 %

Mali 8%

Poids relatif (en %) des principaux pays sur le marché des génériques en Afrique subsaharienne francophone (qui pèse, au total, 573 millions d’euros) en 2012. Dans chacun de ces pays, les importations avoisinent 95 %.

Burkina Faso 6% Côte d’Ivoire 25 %

Cameroun 13 %

Bénin 7% Gabon 8%

de la santé (OMS) et de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (Onudi). Mais six ans plus tard, alors que s’amorce la phase opérationnelle de ce plan, force est de constater que les obstacles demeurent, qu’ils soient logistiques ou réglementaires – absence d’harmonisation qui empêche la libre circulation des médicaments (même homologués selon des normes internationales), délais d’autorisation de mise sur le marché, etc. Sans parler du manque de connaissance statistique du marché, de la pénurie en ressources humaines et de l’absence d’organisation panafricaine susceptible de faire parler le secteur d’une seule voix… « Le morcellement réglementaireestunfrein.Fautedevéritablesmarchés régionaux, l’industrie pharmaceutique africaine est vouée à rester marginale », résume Léopold Juompan Yakam. La route est encore longue avant de pouvoir rivaliser avec les multinationales occidentales et asiatiques. l

Congo 6%

(SOURCE : ASSOCIATION DES PRODUCTEURS PHARMACEUTIQUES DE CÔTE D’IVOIRE)

Sothema, un marocain à Dakar En créant une unité de production au Sénégal, le groupe mise sur des prix serrés pour toucher le marché national et la sous-région.

I

naugurée en mars, l’usine de West Afric Pharma, filiale sénégalaise du groupe marocain Sothema, n’a pas encore trouvé son rythme de croisière. Pour le moment, seuls quatre médicaments sont produits sur le site – « mais une vingtaine d’autres le seront en 2014 », annonce Sidi Mohamed Lahlou, le directeur général de West Afric Pharma. Le reste de la gamme est toujours importé de l’usine de la maison mère, à Bouskoura (dans la banlieue de Casablanca), sous la forme de produits semi-finis, et mis en boîte sur place. Toutes les opérations répondent aux normes BPF (pour « bonnes pratiques de fabrication »), qui certifient la traçabilité des médicaments. Le retard du transfert de technologie entre le Maroc et le Sénégal serait dû à des N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

problèmes logistiques. « Nous sommes encore en phase de démarrage, reconnaît Awa Ly Barry, la pharmacienne responsable, diplômée de l’université CheikhAnta-Diop de Dakar. Nous n’avons pas encore déterminé la quantité de médicaments à fabriquer annuellement. » BAINS DE BOUCHE. Mais selon sa direc-

tion, le début de la production de liquides (sirops, solutions pour bains de bouche, etc.) est imminent; des locaux spécifiques sont déjà construits et attendent d’être équipés. Implanté dans la banlieue de Dakar, au sein du centre horticole de Cambérène, le site de production de West Afric Pharma a nécessité un investissement de 8 millions d’euros. Pour l’heure, la filiale de Sothema

n’alimente que le marché sénégalais, aussi bien la Pharmacie nationale d’approvisionnement que des grossistes privés (Laborex, Cophase, Sogen, Sodipharm, etc.). Mais à terme, elle vise la sous-région. Selon la directrice du marketing et du développement, Btissam Lamhannad, le lancement dans d’autres pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) est toujours prévu en 2013. Le potentiel du marché est énorme : au Sénégal, 90 % des médicaments consommés sont importés. « Nous comptons inverser cette tendance assez rapidement en proposant des produits à la portée du consommateur sénégalais, assure le directeur général. Par rapport aux autres laboratoires, nous allons réduire considérablement nos marges. » Sans perdre de vue l’objectif principal : atteindre l’équilibre financier d’ici à trois ans. l BINTOU BATHILY, à Dakar JEUNE AFRIQUE


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Dossier Santé INTERVIEW

Abdelghani El Guermaï

Président de l’Association marocaine de l’industrie pharmaceutique

« Priorité à la production marocaine! » Pour le patron des laboratoires Galenica, le royaume doit diminuer ses importations de médicaments. Il appelle aussi à une banalisation de la prescription de génériques.

S

ur fond de crise internationale et de saturation du marché des génériques, voilà deux ans que le secteur pharmaceutique est à la peine au Maroc. Prix des médicaments, préférence nationale, développement de l’export et perspectives industrielles en Afrique subsaharienne… Le président-fondateur des laboratoires Galenica et de l’Association marocaine de l’industrie pharmaceutique (Amip) revient sur l’actualité du secteur. JEUNE AFRIQUE : Le marché des génériques étant foisonnant au Maroc, comment Galenica fait-il pour tirer son épingle du jeu ? ABDELGHANI EL GUERMAÏ : Le

coûte très cher. De plus, les importations ont beaucoup progressé depuis cinq ans, au détriment de la production locale. La baisse des prix est un sujet qui préoccupe tous les acteurs de la chaîne pharmaceutique…

Cette question est devenue un enjeu à la fois politique et commercial. Le prix des médicaments est déterminé par le ministère de la Santé selon deux arrêtés ministériels aujourd’hui inadaptés. En partenariat avec toutes les parties

concernées, le ministère a décidé d’instaurer un nouveau mode de calcul plus rationnel pour toutes les spécialités, qu’elles soient produites localement ou importées, qu’il s’agisse de médicaments de marqueoudegénériques.Maistout n’est pas encore satisfaisant. Les industriels et les pouvoirs publics se sont donc mis d’accord pour faire une étude comparative incluant le Maroc et six pays ayant un circuit pharmaceutique similaire : la France, l’Espagne, le Portugal, la Belgique, la Turquie et l’Arabie

À ce jour, l’assurance maladie obligatoire ne couvre que 30 % de la population.

Maroc compte 32 laboratoires – filiales à capitaux étrangers, sociétés pharmaceutiques mixtes et sociétésnationales–,quidistribuent les médicaments de 220 firmes. Selon la société de conseil IMS Health, Galenica arrive à la troisième place en nombre d’unités vendues et à la quatrième pour le chiffre d’affaires [environ 26 millionsd’euros].Nosprincipauxatouts sont notre ancienneté, la qualité et la fiabilité de nos produits, nos prix bas et notre stratégie marketing. Le marché pharmaceutique est pourtant grippé depuis 2011…

Effectivement, et Galenica suit la tendance générale de l’industrie pharmaceutique, à savoir un tassement, voire un recul de ses résultats, essentiellement lié à la crise économique qui a contraint les familles à limiter leurs dépenses de santé. Le résultat, aussi, d’une saturation du marché: au Maroc, il y a trop de fabricants de génériques, et le développement de nouveautés N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

JEUNE AFRIQUE


À quand des labos au sud du Sahara ?

saoudite. L’objectif est de faire baisser les prix en garantissant un juste équilibre entre tous les opérateurs.

Sur quels leviers comptez-vous pour améliorer la situation ?

Sur la généralisation de l’AMO, sur le développement de nouLes industriels vont-ils transférer veaux produits et sur une poliAu Maroc, une partie de leurs marges vers tique marketing plus efficace. Il faut les génériques également que le gouvernement les pharmaciens d’officine ? Même si les officinaux, qui se représentent… favorise le développement de la trouvent dans une situation difproduction locale et la prescription ficile, réclament une compensade génériques. Il n’est pas normal tion, le transfert de marge n’est qu’ils ne représentent que 30 % pas une solution satisfaisante. Le des ventes de médicaments dans ministère de la Santé et les admiles pharmacies, alors que cette nistrations concernées étudient proportion est de 70 % à l’hôpital. des médicaments d’autres mesures. Personnellement, je pense que des hôpitaux ni l’AMO ni la baisse des prix ne … mais L’assurance maladie obligatoire seront suffisantes pour permettre seulement [AMO] ne favorise-t-elle pas le un développement significatif de développement du marché des l’accès aux médicaments et aux de ceux soins pour les ménages les moins médicaments ? vendus en pharmacie Nous pensions que la situation favorisés. Le gouvernement sera du marché pharmaceutique allait tenu d’instaurer des régimes de s’améliorer avec le déploiement gratuité adaptés, à l’instar du de l’AMO, mais elle ne couvre à régime d’assistance médicale ce jour que 30 % de la population ! instauré en 2012. Sa généralisation demandera du Prônez-vous la préférence natiotemps.

… 70 %

30 %

nale ?

Absolument, priorité à la production locale ! Aujourd’hui, le Maroc couvre environ 65 % de ses besoins en médicaments. Il faut diminuer les importations, qui ne se justifient plus. L’industrie pharmaceutique marocaine a soixante ans d’expérience et elle est classée « zone Europe » par l’Organisation mondiale de la santé en ce qui concerne la qualité de sa production.

VINCENT FOURNIER/J.A.

Le marché marocain étant ralenti, l’heure est plus que jamais au développement des exportations…

JEUNE AFRIQUE

Effectivement, mais exporter devient de plus en plus difficile compte tenu de la compétition internationale. Cela dit, vu la qualité des relations historiques, culturelles et politiques qu’entretient le Maroc avec les pays arabes et africains, je suis persuadé que nous allons développer un marché commun malgré les obstacles politiques et la concurrence.

Le dernier Forum pharmaceutique international, qui s’est tenu à Marrakech du 30 mai au 1er juin, a été consacré à la coopération Sud-Sud. Quelles sont les perspectives dans ce domaine ?

C’est la première fois que ce forum, traditionnellement consacré à l’officine, se focalise sur l’industrie. L’idée était d’informer nos confrères africains des contraintes relatives aux projets industriels : aspects réglementaires et financiers, procédures techniques, conditions opératoires, formation des ressources humaines… Une convention-cadre a été signée le 1 er juin entre les industriels marocains et leurs homologues subsahariens afin de favoriser l’émergence de projets industriels. Concrètement, comment allezvous procéder ?

Il va falloir réaliser des études de faisabilitépourcréerdessitesindustriels là où ils sont le plus rentables et éviter de fabriquer les mêmes produits partout. C’est pourquoi nous avons créé un Comité africain de l’industrie pharmaceutique, qui compte déjà huit membres [Côte d’Ivoire, Sénégal, Mali, Burkina Faso, Guinée, Gabon, Cameroun et RD Congo] et constitue un trait d’union entre les investisseurs et les pays concernés. Une première réunion de ce comité devrait avoir lieu fin octobre à Casablanca. Pourquoi, en dehors de Sothema et de sa filiale West Afric Pharma au Sénégal, les laboratoires marocains ne se sont-ils pas implantés au sud du Sahara ?

Il n’est pas évident de s’installer à l’étranger si on ne dispose pas de tous les moyens et garanties nécessaires pour le succès d’une industrie aussi technique et complexe que la pharmacie. Mais au vu de la dynamique enclenchée au forum de Marrakech, je suis certain que de nombreux projets seront réalisés. l Propos recueillis par FANNY REY N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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Dossier Santé RD CONGO

À Kinshasa, les chefs c’est les Indiens Près de soixante ans après le début des travaux, l’hôpital du Cinquantenaire ouvre enfin ses portes. Sa gestion a été confiée au groupe Padiyath HealthCare.

JUNIOR DIDI KANNAH

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L

«

’ hôpital le plus moderne de la RD Congo. » Le docteur Félix Kabange Numbi, ministre de la Santé publique, ne tarit pas d’éloges sur l’hôpital du Cinquantenaire, qui devrait être inauguré à Kinshasa en fin d’année. Les travaux avaient commencé en… 1954, sous la colonisation belge, mais ont été interrompus au moment de l’indépendance, six ans plus tard. En 2008, à la demande du président Joseph Kabila, la construction a repris. Aux commandes : l’Agence congolaise des grands travaux, le ministère des Infrastructures et l’entreprise chinoise Sinohydro. Le chantier principal s’est achevé en 2010, à temps pour le cinquantenaire de l’indépendance. Mais l’établissement de 40 000 m2 à vocation régionale n’a pas pu ouvrir ses portes dans la foulée : il a fallu équiper, recruter… Coût des travaux et équipements, parmi lesquels figurent une imagerie à résonance magnétique et l’un des plus grands scanners du pays : 100 millions de dollars (environ 75 millions d’euros), investis par N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

p L’inauguration est prévue avant la fin de l’année.

l’État et la coopération chinoise. L’établissement de 517 lits compte des unités de médecine interne, de pédiatrie, de chirurgie, de gynécologie, ainsi que des centres d’excellence de gastroentérologie, de néphrologie et de cardiologie. Sont également prévues des unités d’oncologie, d’hydrothérapie, de physiothérapie…

ÉQUILIBRE. Selon l’étude réalisée

L’hôpital en chiffres

STANDING. Au départ, précise Félix

Kabange Numbi, le groupe China Medical Investment Management devait gérer l’hôpital, mais il a requis « un certain nombre de conditions qui malheureusement ne dépendaient pas du ministère de la Santé ». Un appel d’offres international a alors été lancé auprès d’une liste restreinte de grandes sociétés ayant déjà exercé en RD Congo. Trois firmes étrangères (une espagnole, une allemande et une sudafricaine) et une entreprise locale ont décliné l’offre, trois autres n’ont pas répondu. Seul l’indien Padiyath HealthCare s’est montré intéressé. Ce groupe, qui gère 17 hôpitaux dans le sud de l’Inde et un autre à Dubaï, a présenté un business plan étalé sur environ cinquante ans.

Son offre comprend l’installation d’un système informatique de gestion, un centre de cancérologie et de cardiologie interventionnelle, des logements pour le personnel et même une école d’infirmières. Autre point fort: son engagement à « offrir un même standing de soins que celui que certains Congolais vont chercher en Inde », souligne Félix Kabange Numbi. Le contrat entre le ministère de la Santé et Padiyath HealthCare prévoit une évaluation technique tous les cinq ans. « Si des choses ne fonctionnent pas bien, nous demanderons à ce qu’on procède à des rectifications. Et si l’une des parties ne remplit pas les conditions, il est prévu qu’on puisse mettre fin au contrat. »

40 000 m2

517 lits

536

employés

pour le business plan, le fonctionnement de l’hôpital (qui comptera 536 employés congolais et étrangers, Padiyath HealthCare s’étant chargé du recrutement à l’international) va coûter 24 millions de dollars pour la première année, 26 millions pour la deuxième et, à partir de la troisième, 27 millions par an. Sur les dix premières années, le gouvernement apportera environ 19 millions de dollars, et le groupe indien quelque 60 millions. Au terme de la décennie, l’hôpital aura atteint l’équilibre grâce aux recettes des soins destinés aux VIP (les plus démunis étant en partie pris en charge par l’État), et Padiyath HealthCare devrait commencer à récupérer son investissement. « Nous allons aussi essayer d’approcher différentes entreprises aussi bien paraétatiques que privées pour qu’elles signent des contrats avec l’hôpital du Cinquantenaire. Cela nous offrira les recettes nécessaires au bon fonctionnement de l’établissement », affirme le ministre de la Santé. l AWA DIALLO, à Kinshasa JEUNE AFRIQUE


1ER LABORATOIRE PHARMACEUTIQUE NATIONAL PRIVÉ TUNISIEN La révolution tunisienne n’a pas épargné les laboratoires Adwya qui ont vécu à l’instar de la quasi-totalité des entreprises tunisiennes des tensions sociales à répétition. Faisant face à cette situation délicate, le fondateur de Adwya et son Président du Conseil d’Administration, Tahar El Materi, a pris les décisions qu’imposait la situation en opérant notamment une réorganisation du management pour une redéfinition de son plan de développement et de ses orientations stratégiques. Aujourd’hui et après 2 ans, l’entreprise a retrouvé sa santé, enregistrant une bonne évolution, à la grande satisfaction de

ses actionnaires et de ses salariés : 22 % en 2012 et 30% à fin juin 2013. Il est à noter que Adwya est le 1er laboratoire pharmaceutique national privé tunisien . Ses médicaments jouissent d’une notoriété solidement établie, aussi bien pour son portefeuille de produits génériques que celui des produits sous licence, fruit du haut degré de technicité atteint par l’entreprise et de sa politique d’amélioration continue des standards de qualité. Son introduction en bourse en 2007 a marqué le début d’une nouvelle phase de développement de l’entreprise. La flexibilité financière acquise grâce à sa cotation en bourse lui permet, aujourd’hui, d’être très bien positionnée pour développer harmonieusement la Société.

PERSPECTIVES DU DÉVELOPPEMENT DU SECTEUR DU MÉDICAMENT EN AFRIQUE médicament en Afrique. En effet leur niveau technique élevé, leur expérience qui a maintenant plusieurs dizaines d’années et leur capacité à investir à un niveau nécessaire, leur permettent de satisfaire les besoins futurs en médicaments de l’Afrique et à lui assurer une couverture satisfaisante en la matière.

Mr Ramzi Sandi à l’extrème droite de la photo

Il faut cependant que les gouvernements africains veillent à assurer les conditions optimales pour réussir ce challenge, surtout aux niveaux législatif, réglementaire et douanier pour faciliter et encourager l’implantation des installations industrielles africaines et assurer la fluidité de circulation des médicaments.

A propos des travaux du sommet pharmaceutique afrifricain, qui s’est tenu les 23 et 24 septembre 2013 à Hamammamet, nous nous sommes entretenu avec Mr Ramzi mzi Sandi, Directeur Général de Adwya et l’un des conférennciers de ce sommet. Mr Sandi précise que les dépenses de l’Afrique en médicaments enregistrent une progression à 2 chiffres et qu’en 2020, ces dépenses dépasseront les 30 milliards rds de dollars. Une somme colossale dont devront s’acquitter les gouuvernements africains, le plus souvent en devises, pour ur traiter leurs populations, sans toutefois prétendre à une e prise en charge exhaustive des pathologies qui les attteint. Mr Sandi confirme la capacité des industries pharmaceutiques nationales africaines, surtout celles du nord et du sud du continent, plus particulièrement adwya, a contribuer au développement du secteur du

Adwya est constament à l’écoute des sociétés tunisienne et maghrébine et de leurs besoins en médicaments innovants pour le traitement des principales pathologies présentes 2012 : Lancement d’une gamme OTC et du Viatec, devenu depuis, leader du marché tunisien dans le traitement des dysfonctionnements érectiles


Dossier Santé SECTEUR PRIVÉ

Aux bons soins des multinationales

Paludisme, tuberculose, sida : les entreprises s’impliquent auprès de leurs salariés et des populations locales, car elles ont tout à y gagner.

D

ifficile aujourd’hui de trouver une grande entreprise qui ne dispose pas d’un programme sanitaire en Afrique. Le minier Randgold Resources en a un (il finance des centres de santé près de ses sites de production) ; le cimentier Lafarge aussi ; tout comme Marathon Oil, CFAO ou Total. Ce dernier a consacré en 2011 plus de 10 millions d’euros à diverses actions liées à la santé à travers le monde, dont une part importante sur le continent. Les sociétés africaines ne sont pas en reste. L’agro-industriel ivoirien Sifca agit pour la prévention du sida, l’opérateur télécoms sénégalais Sonatel a pris en charge les frais de santé de près de 8 000 personnes âgées depuis 2004, et l’OCP marocain soutient des projets facilitant l’accès aux soins des plus démunis. La plupart des programmes visent le VIH, le paludisme et, dans une moindre mesure, la tuberculose. Si certaines actions sont menées en direct, bon nombre de sociétés agissent aussi par le biais de fondations interentreprises. La plus importante d’entre elles, GBCHealth, rassemble plus de 200 multinationales et permet de coordonner les actions : Anglo American lutte contre le sida tandis qu’AngloGold Ashanti travaille sur le paludisme au Ghana et Freeport-McMoRan Copper & Gold en RD Congo. « Nous ne cherchons pas à nous substituer aux politiques de santé, mais à les soutenir », souligne Caty Forget, déléguée générale de la Fondation Sanofi Espoir. Face à l’incurie des États, l’écueil N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

DUFOUR MARCO/TOTAL

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est pourtant difficile à éviter. En Afrique subsaharienne, seuls le Liberia, Madagascar, le Malawi, le Rwanda, le Togo et la Zambie allouent au moins 15 % de leur budget à la santé, conformément aux engagements pris à Abuja en 2001. D’ailleurs, les gouvernements n’hésitent pas à solliciter les entreprises. Après les inondations survenues à Dakar en 2012, c’est par exemple Sonatel qui a financé les travaux de remise en état de l’hôpital Philippe-Maguilène-Senghor. BÉNÉFICES. Les entreprises y

trouvent également leur intérêt. Un rapport publié en 2009 dans le cadre du programme Roll Back Malaria met ainsi en lumière les bénéfices qu’elles retirent de la lutte contre le paludisme. Comparant les sommes dépensées et les gains de productivité obtenus grâce à la baisse de l’absentéisme, le texte souligne que « le retour sur investissement a été impressionnant ». Dans trois entreprises zambiennes étudiées (Zambia Sugar et les mines de cuivre de Mopani et Konkola), le nombre de journées de travail perdues a diminué de 94 % entre 2000 et 2009. L’implication du secteur privé « ne relève ni de la

p Dans un centre de santé soutenu par Total, en Angola.

philanthropie ni de la philosophie. Cela doit répondre aux objectifs économiques de l’entreprise », estime Laurence Tovi, directrice de la responsabilité sociétale de l’entreprise chez CFAO : « Avoir des collaborateurs en bonne santé, c’est aussi, au-delà de l’impératif moral, protéger sa force de travail. » Autre avantage de cette forme d’engagement : elle permet de se faire accepter des populations locales. « Nos actions illustrent la responsabilité sociale du groupe et contribuentàsonimage»,confirme Caty Forget, de la Fondation Sanofi

« Maintenir nos collaborateurs en bonne santé, c’est aussi protéger notre force de travail. » LAURENCE TOVI, directrice de la responsabilité sociétale de CFAO

Espoir. Pour Françoise BarréSinoussi, Prix Nobel de médecine, à l’origine de la découverte du VIH, peu importe leurs motivations, les multinationales sont les seules à dégager assez de profits pour pouvoir agir. Ainsi juge-t-elle le soutien apporté par Total à l’Institut Pasteur déterminant pour l’application de ses travaux en Afrique. l BRICE TAHOUK JEUNE AFRIQUE


SFEH inaugure l’hopital moderne de N’Djamena Fin octobre 2013, Son Excellence Monsieur Le Président IDRISS DEBY ITNO inaugurera l’Hôpital Moderne de N’Djamena Suivant sa volonté constamment affirmée de modernisation des infrastructures hospitalières de son Pays, Son Excellence Monsieur Le Président IDRISS DEBY ITNO a fait appel à l’expertise de la Société Française d’ Equipements Hospitaliers qui a assumé l’intégralité de la construction de ce nouvel hôpital. Cette structure se déploie sur plus de 17 000m2 compte notamment 240 lits, 5 salles d’opération, un service de dialyse de 9 postes, un service des urgences. Elle est autonome pour sa production d’oxygène médical, sa production d’énergie ainsi que le traitement de ses effluents.

Quel est le cœur d’activité de la SFEH ? La Société Française d’Equipements Hospitaliers se spécialise depuis plus de 25 ans dans la livraison clé-en-main de structures de Santé. Notre domaine d’excellence est l’ingénierie biomédicale c’est-à-dire l’art de mettre en harmonie deux mondes qui généralement se connaissent mal et parfois s’opposent : celui de la construction et le monde médical tourné vers le patient.

COMMUNIQUÉ

Quel a été le rôle exact de la SFEH dans ce projet ? Nous avons pris la responsabilité globale de l’ensemble du projet, depuis sa conception jusqu’à son exécution complète pour une livraison clé-en-main à la République du Tchad. En plus de la conception et de l’exécution des travaux nous avons également géré la formation des principaux Médecins et Cadres de cette structure ainsi que celle du Personnel de maintenance. Pourriez- vous nous parler des différentes étapes de ce chantier ? Nous avons conduit et piloté ce projet depuis sa phase initiale de conception avec la programmation et architecturale qui en a découlé jusqu’à l’obtention, en collaboration avec notre client, d’un dossier d’exécution complet. La phase de travaux a dès lors commencé

sous notre contrôle. Notre grande expérience de l’Afrique nous a permis de mettre en place des méthodes et ressources adaptées à un contexte que nous connaissons bien. Grace à un contrôle rigoureux nous sommes fiers d’affirmer que nous livrons là un hôpital d’une qualité encore jamais atteinte et d’offrir ainsi un produit d’excellence à la République du Tchad. Quelles sont les perspectives de développement de la SFEH ? Le marché des infrastructures hospitalières à l’export est très porteur, en particulier sur le continent Africain, notre terrain d’action depuis plus de vingt-cinq ans, où le besoin en infrastructures modernes est l’un des plus forts actuellement dans le monde. Dans cette région la SFEH est solidement implantée avec des références importantes qui lui

permettent de se positionner comme un des acteurs les plus crédibles du secteur. Notre développement s’appuie sur les trois principes suivants : • Qualité des réalisations : nous avons vocation à contribuer à élever sans cesse le niveau de qualité des infrastructures que nous livrons à nos clients. • Pérennité & durabilité des infrastructures livrées avec notamment un accompagnement du client en matière de formation médicale et de maintenance et son implication forte dans le projet. Cette transmission de savoir-faire est essentielle pour permettre au client de s’approprier le produit et de maîtriser son utilisation. • Adaptation au contexte local : le succès d’une opération d’une telle ampleur repose sur la capacité du prestataire à livrer un produit sur-mesure adapté aux spécificités du Pays où il doit s’insérer.

Renseignements sur www.sfeh.com - Tél : ( +33) 01.45.05.15.43

DIFCOM/FC - PHOTOS : © C. de Brosses/Le Beaukal, D.R.

Entretien avec Benjamin DUNBAVAND, Directeur du Développement SFEH


Dossier Santé

INTERNATIONAL SOS

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SERVICES

p Un appareil d’International SOS à l’aéroport de Lagos.

L’urgence est leur business Que font les multinationales lorsque leurs salariés tombent malades dans des pays dont la couverture sanitaire est insuffisante ? Elles recourent à des sociétés spécialisées.

L

a patiente souffre d’une hémorragie méningée et doit être transférée sans délai dans un service de neurochirurgie. Problème : elle se trouve à Calabar, dans le sud-est du Nigeria. Elle sera finalement transportée dans un avion médicalisé, affrété par Assistance médicale africaine (AMA), jusqu’à Moscou, en Russie. Faute de centres médicaux de pointe près de leurs centres d’activité, les multinationales présentes sur le continent font souvent appel à des sociétés d’assistance pour évacuer leurs cadres, locaux ou expatriés. Direction l’Europe, Dubaï ou des hubs médicaux africains tels que Dakar, Casablanca ou Johannesburg. Le Dr Sohel Hage a créé AMA en 2002, presque par nécessité. « À cette époque, les sociétés internationales n’avaient pas de base en Afrique centrale. Elles faisaient venir les avions d’Europe ou d’Afrique du Sud et ils mettaient des heures à arriver », se souvient celui

qui fut pendant près de vingt-cinq ans le chef du département anesthésie et réanimation de l’hôpital de la fondation Jeanne-Ebori, à Libreville (Gabon). Il a rapidement été sollicité par les gouvernements de la région, puis par ses concurrents en quête de sous-traitants. HEURES DE VOL. Si les avions

d’AMA – 6 basés à Libreville et 4 à Cotonou (Bénin), tous loués – sillonnent toute l’Afrique, totalisant jusqu’à 180 missions et 1 800 heures de vol annuelles, rares sont en effet les multinationales à faire directement appel à eux. « Les grandes compagnies d’assistance internationales (Inter Mutuelles Assistance, Mutuaide Assistance, Europ Assistance, Axa Assistance, Fidelia, etc.) me confient des malades qui sont à proximité de Libreville », explique le Dr Hage. L’un de ses plus importants clients a ainsi longtemps été International SOS, numéro un mondial de l’assistance, dont

Direction l’Europe, Dubaï, ou des hubs médicaux du continent.

l’un des avions stationne depuis 2010 à Lagos. Contrairement à AMA, ce groupe cofondé par les Français Arnaud Vaissié et Pascal Rey-Herme entretient des rapports privilégiés avec les géants de l’économie mondiale. « Nous travaillons avec 87 des 100 plus grandes multinationales », explique le Dr Philippe Biberson, directeur médical consulting pour l’Europe continentale, le Maghreb et l’Afrique. En plus d’une flotte de 11 avions (sans compter les locations), International SOS dispose d’un centre d’assistance ouvert 24 heures sur 24 en Afrique du Sud, ainsi que de 7 cliniques implantées au Tchad, en Angola et au Nigeria pour répondre aux besoins des compagnies pétrolières. Depuis 2008, le groupe a en outre noué un partenariat avec le britannique Control Risks afin d’offrir, par exemple, des services d’évacuation d’urgence. Avec un chiffre d’affaires d’environ 1,3 milliard de dollars (984 millions d’euros) et plus de 10 000 salariés, International SOS ne joue pas dans la même cour qu’AMA, mais poursuit le même objectif : préserver la vie de ses clients, où qu’ils se trouvent. l BRICE TAHOUK


COMMUNIQUÉ

LE TCHAD confie la gestion de l’Hôpital Moderne de N’Djamena AU GROUPE CLINIFUTUR L’ambition d’excellence clairement affichée par le président tchadien Idriss DEBY ITNO de développer un service de soins de haut niveau, obéissant aux standards de qualité et de sécurité européens, a conduit le gouvernement tchadien à confier la gestion de l’hôpital moderne de N’Djamena au groupe de santé français CLINIFUTUR, pour une durée de 5 années. Familiarisé par son histoire et sa forte implantation dans l’océan indien avec les problématiques de santé en Afrique, le groupe CLINIFUTUR, fondé par le docteur Michel DELEFLIE, a mis en place une organisation médicale innovante et adaptée aux particularités de l’hôpital de N’Djamena et de son environnement. Elle lui permet de promouvoir au cœur de l’Afrique centrale une prise en charge médicale comparable à celle réservée aux patients accueillis dans ses établissements en France. Michel DELEFLIE, Président du Groupe CLINIFUTUR

« Nous pouvons faire aussi bien en Afrique qu’en Europe » Quelle est la mission de CLINIFUTUR auprès de l’Hôpital moderne de N’Djamena ? M.D. : La mission que le gouvernement tchadien nous a confiée consiste, après avoir identifié l’offre de soins (spécialités chirurgicales, pôle de dialyse…), répondant au plus près aux besoins spécifiques de la population, à recruter une équipe médicale expérimentée ainsi que le personnel soignant indispensable pour un établissement de ce niveau. L’équipe de direction a également défini l’ensemble des protocoles qui permettent de garantir une prise en charge de qualité et de sécurité des patients. Nous avons aussi veillé à l’excellence des fonctions logistiques de manière à offrir aux patients que nous accueillerons un séjour qui soit le plus confortable possible. En plus de ces responsabilités directement liées au fonctionnement même de l’hôpital, le groupe va s’attacher, durant ces cinq années, grâce à la venue régulière et organisée de professeurs expérimentés, à encadrer l’équipe médicale en place et contribuer à la formation des futurs cadres médicaux et paramédicaux tchadiens.

Quelles sont les perspectives de développement de votre groupe de santé sur le continent africain ? M.D. : L’ambition affichée par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) concernant l’évolution de la santé en Afrique, est d’« amener les peuples africains au niveau de santé le plus élevé ». Beaucoup de progrès ont déjà été réalisés, mais il faut aller encore plus loin. Le groupe CLINIFUTUR, par l’expérience qu’il a acquise des problématiques de santé en Afrique, peut et souhaite accompagner les États et gouvernements qui le souhaitent à concevoir, créer et gérer leurs établissements de soins et contribuer à atteindre cet objectif central.

DIFCOM/FC - PHOTOS : © D.R.

Quels sont les points forts de votre groupe ? Michel DELEFLIE : CLINIFUTUR gère actuellement une douzaine d’établissements de santé en France et en Afrique australe, totalisant un chiffre d’affaires d’environ 150 millions d’euros. Il s’appuie sur un réseau de plusieurs centaines de professionnels de la santé expérimentés relevant de différentes spécialités médicales et chirurgicales. Disposant d’une maitrise réelle de plateaux techniques complexes et des technologies médicales de pointe, CLINIFUTUR a la capacité de prendre en charge un large spectre de pathologies : cancérologie, cardiologie interventionnelle, maladies infectieuses et tropicales, diabète, traitement de l’insuffisance rénale chronique, procréation médicale assistée…. Au fil de ses trente années d’existence, notre groupe a acquis une véritable expertise d’organisation et de management des établissements de santé.

L’équipe de gestion de Clinifutur.

www.clinifutur.net

Clinifutur -14, rue Lantiez, 75 017 PARIS - Tél. : 01 44 85 66 00


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PHOTOGRAPHIE

Le studio ambulant

d’Oumar Ly Le temps d’une exposition, le Sénégalais a déplacé son atelier dans un quartier branché de Paris. Rencontre avec l’un des maîtres du portrait en noir et blanc. NICOLAS MICHEL

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il accuse 70 ans, traîne un léger mal de gorge, et un bouton dans le cou le dérange. « Je suis vieux, je suis fatigué, je suis malade », dit-il avec l’air de ne pas y croire vraiment. La vie aujourd’hui, sa présence à Paris, la reconnaissance internationale, c’est du bonus. « Je n’avais jamais pensé à ça ! Mais ça, c’est Dieu ! Pendant quarante ans, tu n’as pas trahi, et voilà ! C’est Dieu qui est venu vers moi, il m’a amené les Toubabs. Frédérique Chapuis [journaliste à l’hebdomadaire culturel français Télérama, auteure et commissaire d’exposition] m’a dit “Tu as de l’or chez toi! Tu ne sais pas ce que tu possèdes !” Elle s’est bagarrée avec beaucoup de Toubabs, mais moi j’aime les femmes. J’aime travailler avec elles. Elle est brave, elle a marché dans la chaleur, elle a rampé… »

t soudain, pour quelques heures, le canal Saint-Martin prit les teintes du fleuveSénégal,Parissedrapadansles vents de Podor et l’étrange cabinet de curiosités qu’est le Comptoir général devint le studio Thioffy, à deux pas du marché, où le photographe Oumar Ly tire le portrait des uns et des autres depuis 1963, pour SECRET. L’or dont il parle, ce sont les milliers de quelque 1 500 F CFA (2,30 euros). négatifs accumulés dans son studio et qui racontent Le boubou est blanc, la courte barbe aussi, mais la vie autour de Podor, sur la frontière entre le le friselis dans l’œil trahit celui qui n’en manque pas Sénégal et la Mauritanie, des années 1960 à nos une. Un petit coin a été aménagé pour accueillir jours. « Je suis illettré, il faut essayer de me comles Toubabs qui souhaitent se faire immortaliser prendre », dit-il. Avant d’ajouter: « Je suis un farceur. en famille – c’est 25 euros – par le maître. Le décor? Moi, ce qui m’intéresse, c’est connaître le métier. Je Deux vieux cocotiers peints sur suis illettré, mais si on rentre dans toile, une chemise en hommage au un labo, tu vas savoir que je ne suis Ses milliers de célèbrephotographemalienMalick pas illettré. » De ses appareils phonégatifs racontent tos, il parle comme s’il s’agissait Sidibé, une veste, une enseigne du studio Thioffy, toute une panoplie de ses enfants. Tous aimés sans la vie autour de de vieux appareils que les jeunes discernement. De l’énorme caisse Podor des années de moins de 20 ans ne peuvent en bois baptisée djoni djoni qui lui 1960 à nos jours. pas connaître, quelques affiches permettait de prendre l’image et et un cliché défraîchi. Oumar Ly de la développer en brousse à son y pose avec son père, marabout devenu plus tard actuel Minolta – entièrement mécanique et bien employé de la maison Guillaume Foy – du nom sûr argentique – en passant par le Rolleiflex et le d’un riche Bordelais qui bâtit sa fortune dans le petit Brownie Flash de Kodak acheté 1 500 F CFA commerce de la gomme arabique. Ly déclare avoir dans la boutique Maurel et Prom, il n’oublie rien. 18 ans sur l’image… Ce temps lointain a pris des Mais quand il s’agit de raconter, la sauce varie rides et, aujourd’hui, Oumar ressemble à Ciré Ly. selon l’humeur. Ce que l’on peut dire, c’est qu’un jour, alors qu’il À s’y méprendre. devait avoir à peu près 14 ans, un Toubab l’a pris Comme si le début pouvait être la fin, et inveren photo alors qu’il livrait des légumes puis, plus sement. Inutile d’ailleurs, avec lui, de chercher la chronologie exacte, la date de tel ou tel événement, tard, lui a offert le tirage. Aussitôt, l’adolescent le déroulé logique. Il parle de ce qu’il veut, quand il fasciné a voulu connaître le secret du portrait. Et veut, en griot malicieux. Plusieurs fois grand-père, ce secret, c’est un voisin passionné de photo l l l N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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VINCENT FOURNIER/J.A.

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u Réorienter un regard, redresser un boubou, choisir le cadre… Le photographe se transforme en metteur en scène.



Culture médias Photographie Ce travail d’artisan a souffert successivement de la généralisation de la couleur, puis de l’arrivée du numérique. Oumar Ly n’en a cure. « Maintenant, les gens se bousculent avec leurs portables pour faire les photos. Moi, j’attends qu’ils tirent et je reviens un peu plus tard. Je donne mes photos sur place. Eux, il faut encore qu’ils se déplacent pour les faire développer. » Il n’est pas pressé. Enfin, ce n’est pas sûr : « Si je vois quelque chose que je veux prendre, je me mets à trembler. » Quoi qu’il en soit, il dit n’oublier aucune photographie et pouvoir la situer sans erreur, même cinquante ans plus tard. Une mémoire sans doute utile pour classer les précieux négatifs, longtemps conservés sans précaution particulière et désormais à l’abri dans des classeurs, à l’intérieur d’une armoire. MIRACLE. En l’espace de quelques années, Oumar

Ly est passé du statut d’artisan à celui d’artiste. Un miracle, si l’on peut dire, qui s’explique par l’incroyable somme documentaire que représente son travail. Au fond, il est l’archiviste d’une époque révolue non seulement dans la ville où il officiait, mais aussi dans toute la région où il rayonnait. Ses clichés ne montrent pas seulement des hommes, l l l qui l’a éventé pour lui : Demba Assane Sy. des femmes, des familles posant dans leurs plus « Toucher l’appareil et le déclencher, j’aimais beaubeaux habits, mais aussi toute la vie autour dans des coup. Il m’a tout montré. Il m’a expliqué, expliqué, détails d’apparence anodine comme le mobilier, la expliqué. Avec ma première pellicule, j’ai égorgé décoration, les ustensiles de cuisine… Dans l’album pas mal de personnes. Elles ont râlé. » Et depuis ? Oumar Ly, portraits de brousse, Frédérique Chapuis « J’ai beaucoup bossé, papa. » écrit ainsi: « De ces négatifs enfin révélés après avoir En 1963, il a ouvert son studio et bénéficié de la été enfouis au fond des boîtes durant des décencampagne de recensement lancée par le gouvernies, il se dégage quelque chose d’éminemment nement. Parfois accompagné du sous-préfet, il a émouvant qui tient aussi au dévoilement du horssillonné la brousse alentour pour réaliser les clichés champ qui devait, dans les limites du format carré, nécessaires à l’état civil. Avec une méthode bien ne pas figurer, in fine, sur le tirage. […] La nature à lui pour économiser de la pellicule : « J’entasse entrevue sur les bords de l’image à la manière de cinq personnes sur un banc et je la veduta – ces fenêtres ouvertes tire. » C’est comme ça qu’il dit, pas sur le paysage, dans les tableaux Petite recette « je shoote » ou « je déclenche », religieux de la Renaissance, qui mais « je tire ». Après, il suffit de liaient en un seul regard le monde pour économiser découper le tirage pour obtenir sacré et le monde profane – atteste de la pellicule : des photos d’identité de chacun. de l’enracinement de ces hommes « J’entasse cinq « Je suis allé un peu partout dans dans le pays. » les régions. Il y avait beaucoup de Oumar Ly a participé aux renpersonnes sur un vent et de poussière. L’appareil contres de la photographie de banc et je tire. » était souvent coincé et je devais Bamako, rencontré Malick Sidibé, le nettoyer tous les jours. Dans qui « posait beaucoup de quesun village, le chef m’a dit qu’il ne voulait pas être tions », et s’expose ces jours-ci en grands tirages sur photographié. Il était musulman. Il fallait faire les murs du Comptoir général, à Paris. Mais dans le travail et je lui ai répondu : si tu n’as pas de le petit studio recréé pour lui loin de Podor, ses photos d’identité, tu ne vas pas à La Mecque. La gestes sont les mêmes qu’au Sénégal. Réorienter carte d’identité, c’est pour tout le monde. Il a fini un regard, déplacer un enfant, redresser le boubou par tomber d’accord. » Souvent, il développait tombant d’une épaule blanche, arranger le décor, les photos sur place, avec les moyens du bord. choisir le cadre, déclencher. Et saluer ceux qui l’ont Quant aux décors, ils étaient improvisés avec un accueilli comme une star, ou comme un voisin. « Je boubou, une natte, un bout de mur. Au studio, les ai rencontrés hier, dit-il, c’est comme si on s’était c’était plus travaillé, avec en toile de fond une connus pendant cent ans. Je suis un musulman, vue de La Mecque ou un Boeing peint au mur je suis âgé, je dois respecter tout le monde sur un par un détenu… pied d’égalité. » l OUMAR LY

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p Avec son travail réalisé en brousse, le photographe est devenu l’archiviste d’une époque révolue.

« Oumar Ly, portraits de brousse, 19631978 », du 2 octobre au 1er décembre, au Comptoir général, Paris

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Culture médias

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CINÉMA

Palestinien à 100 % Thriller politique, film d’espionnage ou histoire d’amour… Le dernier longmétrage de Hany Abu-Assad est tout cela à la fois. Avec en toile de fond l’inévitable conflit avec l’État hébreu.

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AFP PHOTO/VALERY HACHE

il est bien un sujet qui revient très régulièrement sur le grand écran, c’est celui-là : le conflit israélo-palestinien. Le plus souvent les réalisateurs sont des Israéliens, mais il arrive parfois que des Palestiniens prennent la caméra. Comme l’a fait en 2012 l’actrice Hiam Abbass avec Héritage ou en 2011 Emad Burnat avec Cinq Caméras brisées. Omar, de Hany Abu-Assad, ne serait-il donc qu’un film de plus sur ce thème ? Aucunement. Et pas seulement en raison de sa qualité, saluée par un prix du jury dans la section officielle Un certain regard lors du dernier Festival de Cannes, où il était le seul film du monde arabe sélectionné. Car il s’agit là, et Hany Abu-Assad n’en est pas peu p Hany Abu-Assad entouré de l’équipe du film, prix du jury de la sélection fier quand il le dit, du « premier film de Un certain regard, à Cannes (le 19 mai). fiction 100 % palestinien jamais réalisé ». Omar a non seulement été produit grâce première scène. Il escalade avec agilité à des investisseurs palestiniens, mais a Beth qui se charge de son interrogatoire et en un temps record le mur de sépalui propose un marché : soit il refuse également été tourné avec une équipe technique très majoritairement issue ration entre la Cisjordanie, où il habite de collaborer avec lui et de dénoncer avec sa famille, et l’État juif. Car ce mur ses camarades, et alors on lui imputera des territoires occupés. qui a coupé son village en deux l’a surHany Abu-Assad a vu le jour à Nazareth l’« assassinat » du soldat et on le condamtout arraché à la fois à Nadia, la jeune en 1961 et a émigré à l’âge de 19 ans aux nera à quatre-vingt-dix ans de prison; soit fille dont il est éperdument amoureux, Pays-Bas. « Mais je suis revenu vivre dans il accepte et on le libérera à condition et à ses deux amis d’enfance, Tarek – qu’il continue à servir d’informateur. ma ville natale, définitivement », tient-il à le frère de Nadia – et Amjad. Avec ces préciser, avant d’écrire puis de tourner ce Le film prend alors des allures de thrildeux derniers, il décide film dans des décors naturels ler – un thriller fort réussi – autant que de mener une action de en Palestine. « J’ai eu l’idée de celles d’une œuvre politique ou d’une résistance en attaquant ce long-métrage après avoir histoire d’amour. Et c’est ce à quoi tenait un poste militaire, ce qui pris le thé à Ramallah avec un Hany Abu-Assad, déjà auteur il y a huit ans d’un film très remarqué sur des kamikazes ami qui m’a raconté comment se traduit par la mort d’un il avait été approché par un soldat, tué d’un coup de palestiniens (Paradise Now), qui entend, agent du Shin Beth qui semfusil. L’affaire prend vite dit-il, avant tout « captiver le spectateur ». blait tout savoir de lui, y comde l’ampleur : les services La portée politique ou psychologique du pris sur sa vie privée. Il a alors de sécurité de Tel-Aviv film – notamment à travers le portrait des considèrent qu’il faut tenté de l’obliger à collaborer personnages et la description saisissante arrêter à tout prix et au avec les services de renseignede la situation dans les territoires occuplus vite les auteurs de ments sous peine de ruiner sa pés – n’en sera que renforcée, pense-t-il réputation », confie-t-il. l’opération. à raison. Comme dans les films de son Omar, de Hany Omar est bientôtappréOmar, personnage époauteur favori, Costa-Gavras. l Abu-Assad (sortie en France le 16 octobre) hendé. Et l’officier du Shin RENAUD DE ROCHEBRUNE nyme, apparaît dès la


Culture médias ARTS PLASTIQUES

À l’ombre des jeunes filles en fleur Les gouaches de l’artiste algérienne Baya sont emplies de femmes-oiseaux ou fleurs et de chimériques créatures… dont la poésie a fasciné les surréalistes.

REFUGE. Quand, en 1947, le Tout-Paris

découvre les gouaches de Baya, âgée d’à peine 16 ans, l’emballement est immédiat. Le chef de file des surréalistes, André Breton, est immédiatement séduit par cette « apparition étincelante » qui permet de « cerner […] ce que l’imagination berbère d’aujourd’hui a gardé vivace de la tradition de l’ancienne Égypte » et offre à voir une « Arabie heureuse », fantasme occidental par excellence. Breton préface le catalogue de l’exposition organisée en novembre par Aimé Maeght dans sa galerie inaugurée deux ans plus tôt avec une exposition consacrée à Henri N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

PHOTO GALERIE MAEGHT, PARIS

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emmes-oiseaux, dames-papillons, filles-fleurs… Les créations de Baya, femme-enfant à la destinée romanesque, sont profondément oniriques et singulièrement chimériques. Point d’homme. Quelques rares enfants. Et surtout des figures féminines tout en courbes et de couleurs flamboyantes. Les tissus de leurs tenues pourraient de temps à autre faire penser à des pagnes africains et ne manqueraient sans doute pas d’inspirer un Christian Lacroix. Esquissés de profil, les visages offrent un œil plein tels des hiéroglyphes, une fine bouche qu’un nez à la forme de bec domine. De face, ce dernier s’efface au profit de lèvres pulpeuses. Les silhouettes dansent, se donnent le bras, bercent un bambin, se prélassent tels des odalisques, partagent un repas… On les entend se confier des secrets. Parfois, l’une d’entre elles semble hausser le ton. Les regards tantôt rieurs se font alors sévères. Paons, papillons, chameaux, poissons composent avec d’autres créatures un bestiaire fabuleux au cœur d’une nature luxuriante. Les villages rassemblent quelques maisons à l’allure de huttes aux abords d’un chemin ou d’une rivière longeant de prospères palmiers.

p De g. à dr et de haut en bas : Table ; Femme allongée au vase ; Femme robe bleue, cheveux rouges (1947).

COLLECTION ADRIEN MAEGHT, ST-PAUL-DE-VENCE

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« Ma peinture est le reflet non du monde extérieur, mais de mon monde à moi, celui de l’intérieur. » Matisse. Georges Braque, Christian Bérard, François Mauriac se précipitent pour découvrir les œuvres réalisées par une enfant qui ne sait ni lire ni écrire et n’a jamais fréquenté les bancs de l’école. Quelques mois plus tard, un magazine de mode en vogue consacre deux pages à la jeune Kabyle et donne à lire un véritable conte de fées. Car Fatma Haddad, de son vrai nom, n’a pas eu la vie facile. Née en 1931 dans les environs d’Alger à Bordj el-Kiffan (ex-Fortde-l’Eau), celle qui deviendra plus tard l’une des figures de l’art moderne algérien perd, enfant, son père puis sa mère. Recueillie par sa grand-mère paternelle, elle aide cette dernière dans son travail au service d’une famille de Français. La sœur de la patronne, Marguerite Caminat, découvre la fillette dessinant dans le

sable et lui offre des gouaches. L’univers coloré de l’orpheline prend forme. Elle crée sans relâche, fuyant de la sorte une réalité douloureuse. « Quand je peins, expliquera-t-elle plus tard, je suis dans un autre monde, j’oublie. Ma peinture est le reflet non du monde extérieur, mais de mon monde à moi, celui de l’intérieur. » Baya construit ainsi son propre refuge empreint d’une poésie touchante. Chaque œuvre est une fable, une fantasmagorie sans cesse réinventée. Baya se fabrique également une signature à partir d’un alphabet imaginaire. « Son travail sans perspective ressemble parfois à du Magnelli », analyse Sandra Benadretti Pellard, conservatrice du patrimoine du Musée de la céramique de Vallauris qui expose jusqu’au 18 novembre une trentaine d’œuvres de JEUNE AFRIQUE


Culture médias lui rend parfois visite, partage avec celle qu’il surnomme « la Berbère » un couscous. « Mais elle fera peu de céramique au final. Cela ne lui plaisait pas vraiment. Le résultat n’était pas assez immédiat pour elle », explique Isabelle Maeght.

COLLECTION ISABELLE MAEGHT, PARIS

PROLIFIQUE. Partout où elle passe,

jeunesse de Baya appartenant à la famille Maeght. « En regardant ses éclatantes compositions rompues tout à coup par l’apparition d’un visage ou d’une silhouette simplifiée à l’extrême, mais d’un tracé puissant, voire robuste, nombreux sont ceux qui ont pensé à Matisse », écrit, en 1948, Edmonde Charles-Roux, alors journaliste spécialisée dans l’art. « Il est fort probable qu’elle ait vu l’art de Matisse ou de Magnelli chez Marguerite Caminat », explique Sandra Benadretti Pellard. Car Marguerite Caminat, mariée à un photographe et installée à Alger, a pris Baya sous son aile en 1942. Dans ce foyer d’amateurs d’art où les livres illustrés le disputent aux objets raffinés, on lui offre du papier, des crayons de couleur, de la gouache, de la glaise… Le JEUNE AFRIQUE

talent de Baya trouve enfin à s’exprimer et fascine un ami de la famille, le sculpteur Jean Peyrissac, qui présente Baya à Aimé Maeght, de passage en Algérie en 1945. Le marchand d’art est conquis et organise l’exposition parisienne de novembre 1947. La petite paysanne fréquente alors un univers d’art et de lumière… mais aussi les clubs de la capitale française et autres lieux prisés par la jeunesse dorée d’après-guerre. « Mon père avait le même âge qu’elle, raconte aujourd’hui Isabelle Maeght, petite-fille du galeriste. Mon grand-père l’avait chargé de s’occuper d’elle. Ils sortaient tous les soirs et s’amusaient énormément. » Quelques mois plus tard, Baya est invitée à Vallauris, dans le sud de la France, à l’atelier Madoura, là même où Picasso réalise ses céramiques. Le maître

l’adolescente, petite princesse orientale habillée dans des tuniques et des sarouals hauts en couleur et chaussée de babouches brodées de fil doré, fait forte impression. Pour Edmonde Charles-Roux : « Baya faisait corps avec son œuvre. Elle m’apparaissait comme un personnage mythique, mi-fille, mi-oiseau, échappé de l’une de ses gouaches ou de l’un de ses contes dont elle avait le secret et qui lui venait on ne savait d’où… » « Elle était d’une beauté rare et extrêmement élégante, raconte Isabelle Maeght, qui ne l’a rencontrée qu’en 1997. Elle était d’une douceur infinie et d’une force de caractère remarquable. Son regard vous transperçait. Elle a été une enfant très gaie, malgré tout. Rieuse, pas compliquée, elle chantait beaucoup. » Mais le conte de fées s’est vite arrêté. De retour en Algérie, en 1953, Baya est mariée comme seconde épouse au musicien El Hadj Mahfoud Mahieddine, âgé d’une trentaine d’années de plus qu’elle. Il a déjà 8 enfants. Elle en aura 6. La guerre éclate en 1954. Baya ne peindra plus pendant dix ans… jusqu’à ce qu’en 1963 Jean de Maisonseul, conservateur du Musée national des beaux-arts d’Alger, qui acquiert alors quelques-unes de ses anciennes gouaches, l’incite à reprendre ses pinceaux. L’univers féminin de son enfance se teinte alors de la tonalité musicale de son mariage. Violons, cithares, luths, mandores, lyres et autres harpes font leur apparition dans des compositions de plus en plus foisonnantes et aux couleurs saturées. À la mort de son mari, en 1979, Baya crée sans relâche jusqu’à son décès en 1994, à Blida, produisant une œuvre prolifique exposée aux quatre coins du monde (Lausanne, Paris, Marseille, Alger, La Havane, Tokyo, Koweït, Tunis, Washington, Bruxelles…). Une œuvre qui séduit par son universalité singulière. l SÉVERINE KODJO-GRANDVAUX, envoyée spéciale à Vallauris

« Baya, créatrice chez les surréalistes », jusqu’au 18 novembre au Musée de la céramique de Vallauris. N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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Culture médias En vue

n n n Décevant

n n n Pourquoi pas

n n n Réussi

n n n Excellent

CINÉMA

La vie de Yaëlle ALORS QUE VIENT DE SORTIR dans le bruit et la fureur La Vie d’Adèle, d’Abdellatif Kechiche, ce documentaire évoque aussi sans fard une histoire d’amour entre deux femmes. Deux artistes, l’une musicienne, l’autre plasticienne, qui vivent à Tel-Aviv et vont devoir affronter le rejet total de leur relation homosexuelle par la famille très conservatrice de l’une d’entre elles. Qui sombre dans la dépression. Un film très improvisé et un peu brouillon, ode à la liberté, réalisé par ses propres « héroïnes » dans la veine du cinéma-vérité, qui montre une fois de plus à quel point le cinéma israélien, au contraire de la société dans laquelle il baigne, ne s’encombre d’aucun tabou. l RENAUD DE ROCHEBRUNE

DR

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Home Is You, deYaëlle et Aya Schwed (sortie à Paris le 16 octobre)

MUSIQUE

Père tranquille DES GANTS DE VELOURS sur une basse fretless, une voix chaude murmurant à l’oreille de l’auditeur… Le troisième opus du Camerounais Étienne Mbappe est comme un écrin soyeux dans lequel on aime se lover. Musicien accompli (auprès notamment du guitariste John McLaughlin, de Salif Keïta ou encore de Manu Dibango), il manie subtilement envolées festives et mélodies mélancoliques. Le tout en douala, ce qui ne gâche rien. Pater Noster fait la part belle à la – difficile – simplicité et aux harmonies accrocheuses. l MICHAEL PAURON

Pater Noster, d’Étienne Mbappe (Plus Loin Music/ Abeille Musique) nnn

nnn

TÉLÉVISION

Il était une fois Nelson Mandela C’EST TOUT LE PARCOURS de Nelson Mandela, depuis sa jeunesse dans le Transkei, en pays xhosa, ses années de formation, sa carrière d’avocat et son engagement politique à Johannesburg, son emprisonnement,jusqu’àsalibérationetlaconquêtedupouvoir,quiestraconté dans ce documentaire. On y découvre de nombreux témoignages de ses proches, de ses amis et de ses adversaires. Une constante se dégage: la détermination de Mandela dans sa lutte contre l’injustice et le racisme. Et une grande soif de liberté pour l’humanité, quelle que soit la couleur de la peau. l TSHITENGE LUBABU M.K. Mandela, un documentaire de Jo Menell et d’Angus Gibson, 1995, 1 h 55, le 16 octobre sur France Ô nnn Ce mois-ci, zoom sur la télévision…

MUSIQUE

Mister Mystère LE LABEL LUAKA BOP, pour célébrer ses 25 ans d’existence, exhume les chansons d’un mystérieux artiste nigérian, William Onyeabor. Neuf compositions électro-funk étirées chacune sur plus de huit minutes toutes aussi extraordinaires les unes que les autres. Personne ne sait qui est vraiment William Onyeabor, pas même son label. Cette compilation de funk spatial ravira les collectionneurs, les rares albums que l’on pouvait apercevoir sporadiquement sur eBay se vendant à JÉRÔME BESNAULT des prix inabordables. l Who Is William Onyeabor ?, William Onyeabor (Luaka Bop), sortie le 16 octobre nnn N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

ÉCRAN TOTAL sénégalaise*

3h6

C’est le temps moyen passé chaque jour devant la télévision par les Sénégalais

LE PAYSAGE AUDIOVISUEL : TFM (Télévision Futurs Médias), la chaîne de Youssou Ndour, arrive pour la première fois depuis son lancement en 2010 en tête des audiences, suivie de près par Sen TV (lancée en 2012), Walf TV et la RTS 1. LES PROGRAMMES QUI PLAISENT : Les Sénégalais apprécient les fictions africaines ainsi que les jeux télévisés. *Étude TNS Sofres – Africascope 2013 réalisée auprès d’un échantillon de 1147 individus de 15 ans ou plus résidant à Dakar-Pikine

RECTIFICATIF Contrairement à ce qui était indiqué dans la présentation de l’article « Africa Pop » du no 2752, Vincent Michéa n’est pas photographe mais bien peintre. Que nos lecteurs et l’intéressé veuillent bien nous excuser pour cette méprise. JEUNE AFRIQUE


ANNONCES CLASSÉES

Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre -Tél. : 01 44 30 18 76 - Fax : 01 44 30 18 77 - Email. : f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique - 57 bis, rue d’Auteuil 75016 Paris - France

Recrutement

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Annonces classées AVIS DE RECRUTEMENT Réf. : PNUD/CDS/PIFSAP/07/12

Expert International en Biodiversité des forêts galeries et cartographie numérique

The West Africa Livestock Innovation Centre (WALIC) is a regional centre of excellence on livestock innovations built on the legacy and achievements of the International Trypanotolerance Centre (ITC). WALIC’s vision is a vibrant West African livestock sector, which boosts food security and wealth creation while safeguarding the environment. To implement its recently developed 10-year strategic plan, WALIC is now recruiting new staff: ! A Director General ! An Executive Assistant to the Director General ! A Head of Finance and Administration ! A coordinator for its Advocacy and Partnership Brokerage Strategic Theme

Recrutement

These positions are based at Kerr Serign, Banjul, The Gambia. For further details visit the ITC website at: www.itc.gm

Le Bureau du PNUD lance le présent appel à candidatures en vue de recruter un Expert International en Biodiversité des forêts galeries et cartographie numérique au profit du Projet d’Appui à la préservation et au développement des forêts galeries et production de cartographie de base numérique – PAPDFGC La durée du Contrat dudit Expert qui doit être parfaitement bilingue (Anglais-Français) est de 2 ans (24) mois répartis sur 5 ans à raison de 10 mois pour la première année, 05 mois pour la deuxième et la troisième année et 02 mois pour la quatrième et la cinquième année. Les termes de référence du poste sont disponibles et téléchargeables sur le site web du PNUD Bénin au http://www.bj.undp.org, rubrique : offres d’emploi Dépôt de candidatures : Les dossiers de candidature doivent comporter : Offre technique - une lettre de motivation ; - un curriculum vitae détaillé précisant les expériences dans le domaine ainsi que trois (3) personnes de référence ; - le formulaire P11 des Nations Unies, rempli et signé du postulant. Offre financière : Tous les coûts liés à la mission : - Rémunération forfaitaire mensuel (un lump sum), incluant tout frais liés à la mission - Billet d’avion + frais de visa (s’il y a lieu) NB : Les déplacements liés à la mission seront pris en charge par le projet Les candidatures devront parvenir électroniquement à l’adresse suivante : cdsbenin.offre@undp.org au plus tard le vendredi 1er novembre 2013 à 12h00 GMT + 1 : Offre : (Préciser dans l’objet «Recrutement PNUD/CDS/PAPDFGC/02/13) Toutes les candidatures reçues après les date et heure indiquées ou envoyées à toute autre adresse ou sans la référence de dossier seront rejetées. Les candidatures féminines sont vivement encouragées. Le PNUD se réserve le droit de ne pas donner suite à cet avis sans préjudice.

GlaxoSmithKline French Western and Central Africa is looking for a dynamic individual to fill the role of Quality Manager Title: Quality Manager French Western and Central Africa - Position: Full Time Regular Location: Abidjan, Cote D’Ivoire Main duties: 1. Responsible for the QMS (Quality Management System) implementation and monitoring of compliance within the Local Marketing Company: a. Implement and maintain effective Quality Assurance systems to ensure that local technical operations are in full compliance with company standards and policies, and regulatory requirements by performing the following: b. Develop, specify and approve systems that have an impact on the quality of imported, and, where relevant, contract manufactured products: c. Monitor and assess quality systems by means of audit and self-inspection: d. Ensuring a quality assurance input into the main aspects of the local company operations that influence product quality. 2. Ensure timely local Quality release of imported finished goods deliveries and resolve Quality-related issues arising from these deliveries. 3. Acts as the primary liaison with supplying sites, Research & Development and Regional Quality as it relates to approval of repacking activities and resolving Quality issues with the product supplied 4. Ensure that all colleagues in the commercial operating units are adequately trained on the procedures and processes that relate to QMS implementation and regulatory compliance Qualifications: • Successful completion of relevant qualifications • Minimum of 5-8 years experience within the Pharmaceutical / Consumer Healthcare industries, preferably in the capacity of a senior quality specialist or a manager • Strong understanding of and experience in quality assurance systems particularly in the areas of batch release, product incidents, artwork control and audits • Strong knowledge of local / west Africa regulatory requirements with regards to Quality Assurance • Good knowledge on effective quality documentation systems Other requirements include: • Professional written and verbal communication skills • Team work and people management skills • Concise and persuasive in the description of the different QA situations • Strong general computer literacy with Intermediate skills in Microsoft Word, Excel, Power Point and Outlook • Ability to read, write and speak English Interested candidates should please drop their applications to the following address: GlaxoSmithKline / GSK - 7, rue des Bougainvilliers, Route du Lycée Classique, Cocody, Abidjan 01 BP 8111 Abidjan 01, Abidjan Or send their resume to the following email address: recruitment.westafrica@gsk.com Application closes on 25th October 2013 - Only shortlisted candidates will be contacted. N° 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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African Microfinance Transparency [AMT] Recherche :

Directeur Exécutif (H/F) AMT_ED_1013 Mission Diriger et piloter la stratégie, la gestion et le développement d’AMT, conformément à la mission et aux objectifs de l’organisation, en mettant l’emphase sur le financement et la gestion des relations avec les membres et les partenaires. Profil - Formation universitaire en finance (Bac +5) - Minimum 10 années d’expérience professionnelle, dont 5 consacrées à la microfinance - Planification et gestion stratégique et financière - Connaissance parfaite impérative du français et de l’anglais (oral et écrit) - Excellentes techniques de négociation, capacité de Networking et de fundraising Basé à Dakar avec des déplacements en Afrique et en Europe. Pour plus d’information, visitez www.amt-forum.org Date de clôture : 31 octobre 2013

La Mutuelle panafricaine de gestion des risques,African Risk Capacity (ARC), une Institution spécialisée de l’Union africaine (l’UA), est en train de mettre en place une société d’assurance mutuelle à but non lucratif en vertu de la réglementation des Bermudes, jusqu'à ce que qu'un cadre juridique et réglementaire offrant les mêmes conditions efficaces existe dans un État membre de l'UA1. Parce que les épisodes de sécheresse, les inondations et les cyclones ne se produisent pas durant la même année dans toutes les régions du continent, la solidarité panafricaine dans le cadre de la création de ce fonds commun de gestion des risques de catastrophe est financièrement efficace. La mutualisation des risques à travers le continent permet de réduire sensiblement le coût des fonds d'intervention d'urgence pour les gouvernements participants, leur permettant ainsi de protéger leurs populations vulnérables, dans le contexte du changement climatique. Le Dr Lars Thunell, ancien Directeur et Vice-président exécutif de la Société Financière Internationale et actuellement conseiller du Conseil d'administration de l'Institution de l'ARC, a été nommé par le Conseil d'administration de l’Institution de l’ARC, comme Directeur intérimaire de l’African Risk Capacity Insurance Company Ltd jusqu'à ce que les pays membres de l’African Risk Capacity Insurance Company Ltd sélectionnent les Directeurs du Comité de Direction. Les Directeurs pour le Comité de Direction de l’African Risk Capacity Insurance Company Ltd seront responsables de la supervision des activités de l’African Risk Capacity Insurance Company Ltd, y compris de de l’approbation et de la supervision de toutes les politiques et activités relatives à l’administration et aux opérations de l’African Risk Capacity Insurance Company Ltd. Ils sont également tenus de superviser les prestataires de services et de s’assurer que l’African Risk Capacity Insurance Company Ltd se conforme aux lois des Bermudes2. Les Directeurs sont nommés pour des mandats de trois ans renouvelables. Leurs services seront fournis à temps partiel, mais les dépenses raisonnables liées à l’exercice de leurs fonctions seront prises en charge. Expérience et connaissances. Les Directeurs de l’African Risk Capacity Insurance Company Ltd possèdent au moins 15 ans d'expérience professionnelle dans le domaine de la finance, de la règlementation d'assurance ou financière, des transactions commerciales, du secteur public et des organisations multilatérales. Les Directeurs ont de bonnes connaissances en financement de risque –de préférence dans le domaine de l’assurance paramétrique – des principales questions de réglementation et des tendances du secteur, des exigences de Solvabilité II, de l’audit, de la réassurance et de la modélisation des risques et sont habitués à travailler avec d’importants prestataires de services, y compris des réassureurs sur le marché privé. Langue. La maîtrise de l'anglais est indispensable. La connaissance pratique d'une autre langue officielle de l’UA comme le portugais ou l’arabe, est utile. Date limite pour le dépôt des candidatures : 25 octobre 2013. Les candidatures peuvent être déposées en ligne sur www.africanriskcapacity.org/ARCLtdDirector/Application. 1 Voir l’Article 11 du traité portant création de l’ARC “Filiale ou Entités Affiliées de l’Institution de l’ARC”, disponible à l’adresse suivante : http://www.africanriskcapacity.org/documents/policydecisions 2 Les termes de référence pour les Directeurs du Comité de direction sont disponibles sur http://www.africanriskcapacity.org/ARCLtdDirector/Application

JEUNE AFRIQUE

www.sai2000.org COURS INTENSIFS D’ANGLAIS École Commerciale Privée fondée en 1955 THIS SCHOOL IS AUTHORIZED UNDER FEDERAL LAW TO ENROLL NONIMMIGRANT ALIEN STUDENTS

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info@sai2000.org N° 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

Recrutement - Formation

Appel à candidatures pour le Comité de Direction de l’African Risk Capacity Insurance Company Limited


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Annonces classées

RÉPUBLIQUE TOGOLAISE Travail - Liberté - Patrie

AUTORITÉ DE RÉGLEMENTATION DES SECTEURS DE POSTES ET DE TÉLÉCOMMUNICATIONS

APPEL À MANIFESTATIONS D’INTÉRÊT N° 01/ART&P/DG/2013 DU 13 OCTOBRE 2013

RÉALISATION DES ÉTUDES POUR LA MISE EN PLACE, L’ORGANISATION ET LA GESTION DU CENTRE NATIONAL DE TRAITEMENT D’INCIDENTS INFORMATIQUES (CERT) 1. La présente sollicitation de manifestations d’intérêt fait suite à l’Avis général d’appel d’offres paru dans le quotidien national Togo Presse n° 9014 du 10 avril 2013 à la page 10. 2. L’Autorité de Réglementation des secteurs de Postes et de Télécommunications (ART&P) dispose des fonds sur le budget 2013, afin de financer le coût du projet du centre national de traitement d’incidents informatiques (CERT) du Togo, et a l’intention d’utiliser une partie de ces fonds pour effectuer des paiements au titre du Marché de réalisation des études pour la mise en place, l’organisation et la gestion du CERT. 3. Les services comprennent la proposition : • de spécifications techniques d’équipements adéquats pour le CERT ; • d’une architecture du réseau ; • d’un cadre institutionnel et une organisation pour le CERT ; • un plan d’aménagement du site devant accueillir le CERT ; • des qualifications et profils du personnel exploitant du CERT ; • des programmes de formation adaptés à chaque profil du personnel exploitant identifié, etc.

Manifestation d’intérêt

4. Les candidats intéressés sont invités à manifester leur intérêt pour la prestation des services décrits ci-dessus en fournissant les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exécuter les services. 5. Les candidatures seront évaluées sur la base des critères ci-après : • Etre légalement constitué et disposer d’au moins cinq (05) années d’expérience dans le domaine des réseaux informatiques et de la sécurité des systèmes d’informations (20 pts) ; • Avoir réalisé, au cours des dix (10) dernières années, au moins trois (03) études similaires (30 pts) ; • Avoir réalisé, au cours des cinq (05) dernières années au moins une (01) étude pour la mise en place, l’organisation et la gestion d’un CERT (20 pts) ; • l’organisation technique et managériale du cabinet (15 pts) ; • Justifier de l’existence d’une équipe multidisciplinaire compétente en son sein pour la réalisation de la mission dont : (i) un (1) ingénieur informaticien (spécialisé en réseaux et télécommunications et ayant une bonne connaissance en sécurité des réseaux informatiques), (ii) deux (2) ingénieurs de travaux en informatique (dont un (01) analyste programmeur et un (01) en réseaux), (iii) autres compétences ayant une bonne connaissance de la mise en place et la gestion d’un CERT (15 pts). 6. Il est demandé aux candidats de fournir ces informations en ne dépassant pas 10 pages environ. Les candidats peuvent s’associer pour renforcer leurs compétences respectives. 7. Une liste restreinte de six (6) candidats présentant au mieux les aptitudes requises pour exécuter les prestations sera établie par l’Autorité contractante ; ces candidats présélectionnés seront ensuite invités à présenter leurs propositions techniques et financières et un candidat sera sélectionné selon la méthode de sélection sur la base de la qualité technique et du montant de la proposition (sélection qualité coût). 8. Les candidats intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence à l’adresse ci-dessous : Autorité de Réglementation des secteurs de Postes et de Télécommunications (ART&P) 32, Rue N’dagni (80) Tokoin Tamé Wuiti, BP : 358 Lomé, Togo Tél : +228 22 23 63 80, Fax : +228 22 23 63 94 de 8 H30 mn à 11H 30mn et de 15H00 à 17H 00 TU. 9. Les manifestations d’intérêt doivent être déposées à l’adresse ci-après Autorité de Réglementation des secteurs de Postes et de Télécommunications (ART&P) 32, Rue N’dagni (80) Tokoin Tamé Wuiti, BP : 358 Lomé, Togo Tél : +228 22 23 63 80, Fax : +228 22 23 63 94 au plus tard le 12 novembre 2013. 10. La séance d’ouverture des plis aura lieu immédiatement après la clôture des dépôts. Le Directeur Général pi, Abayeh BOYODI

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JEUNE AFRIQUE


Annonces classées Autorité de Réglementation des secteurs de Postes et de Télécommunications

MINISTÈRE DE L’ÉCONOMIE FORESTIÈRE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

PROJET FORÊT ET DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE CRÉDIT N° 5121-CG

Unité de Coordination du Projet B.P 14 564 Brazzaville, République du Congo, Tél : +242 05 616 95 74/06 817 06 33, Courriel : pfdecongo2011@yahoo.com

AVIS À MANIFESTATION D’INTÉRÊT N°007/MEFDD-CAB/PFDE/AMI/C/13

RÉPUBLIQUE TOGOLAISE Travail - Liberté - Patrie

COMMUNIQUÉ

« Recrutement d’une firme pour appuyer la campagne d'information et de sensibilisation des populations locales riveraines des concessions forestières sur leurs droits et leurs devoirs »

L’Autorité de Réglementation des secteurs de Postes et Télécommunications (ART&P) a lancé le 21 août 2013 un appel d’offres international ouvert n°01/ART&P/PRMP/2013 pour la fourniture d’une station mobile de contrôle de fréquences radioélectriques. A la date de clôture du dépôt des offres fixée au 7 octobre 2013 à 9 heures 30 mn TU, l’ART&P n’a enregistré le dépôt d’aucune offre. Conformément à l’article 54 du code des marchés publics en vigueur au Togo, « lorsqu’un minimum de trois plis n'a pas été remis aux date et heure limites de réception des offres, l’autorité contractante ouvre un nouveau délai qui ne peut être inférieur à quinze (15) jours calendaires et qu'elle porte à la connaissance du public ». En conséquence, l’ART&P prolonge la date de clôture du dépôt des offres au 13 novembre 2013 à 9 heures 30 mn TU. Fait à Lomé, le 14 octobre 2013 Le Directeur Général pi, Abayeh BOYODI

AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL POUR FOURNITURE ET LIVRAISON DES MÉDICAMENTS CONTRE LES EFFETS SECONDAIRES DE LA TUBERCULOSE ET DES MATÉRIELS MÉDICAUX. Avis d’Appel d’Offres International : N° 033 BIS/UGP/FM/A2/CC/2013 Source de financement : FONDS MONDIAL Nom du Projet : APPUI A LA LUTTE CONTRE LA TUBERCULOSE Date de publication : 02 OCTOBRE 2013 1. LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO a obtenu une subvention du Fonds Mondial dans le cadre du Round 9 de la composante Tuberculose. 2. CARITAS CONGO ASBL a été désignée Principal Récipiendaire (PR) pour la mise en œuvre des activités de lutte contre la Tuberculose notamment pour « l’Achat des médicaments contre les effets secondaires de la Tuberculose ». Conformément à la proposition de la RD Congo acceptée et subventionnée par le Fonds Mondial, CARITAS CONGO ASBL se propose d’utiliser une partie du montant de cette subvention pour effectuer les paiements autorisés au titre du marché de l’achat des médicaments contre les effets secondaires de la Tuberculose et de quelques matériels médicaux. 3. CARITAS CONGO ASBL invite ainsi, par le présent avis d’Appel d’Offres, les candidats intéressés à présenter une offre sous pli fermé cacheté pour « Fourniture et Livraison des médicaments contre les effets secondaires de la Tuberculose et de quelques matériels médicaux » qui se présentent pour cet Appel d’Offre en un lot. 4. Dans le cadre du présent appel d’offres, Caritas Congo a choisi d’utiliser les procédures d’appel d’offres International décrites dans le manuel des Procédures de Passation des Marchés de CARITAS CONGO ASBL et sur base des Directives de Passation de marchés du Fonds Mondial. 5. Les candidats intéressés remplissant les conditions requises peuvent obtenir un complément d’informations auprès de CARITAS CONGO ASBL à l’adresse indiquée ci-après entre 8h00 et 15h30. 6. Les candidats intéressés peuvent acheter un jeu complet du dossier d’appel d’offre rédigé en Français à partir du 02 Octobre 2013, à l’adresse indiquée ci-après: « CARITAS CONGO 26,avenue Basoko,Kinshasa/Gombe » moyennant présentation de la preuve de paiement par voie bancaire d’un montant non remboursable de

Cinquante dollars américains (50,00 USD). Le paiement devra être effectué uniquement par voie bancaire aux coordonnées suivantes : Banque BCDC Compte : Caritas Congo asbl/Fonds Mondial Tuberculose Série 9, Numéro de compte : 101-1018852-56 USD 7. Le dossier sera retiré, contre présentation de la preuve de paiement de la banque à l’adresse ci-dessus. Le jeu complet de document d’appel d’offre peut être transmis aux soumissionnaires par voie électronique. 8. Le délai de dépôt des soumissions est de 45 jours à compter de la date de publication. 9. Les offres doivent être envoyées à l’adresse indiquée ci-après au plus tard le 15 Novembre 2013 à 11 heures locales : « CARITAS CONGO ASBL 26, avenue Basoko, Kinshasa/Gombe » Elles doivent être accompagnées d’une garantie bancaire originale d’un montant de 2 000 USD (Deux mille dollars américains). 10. Les offres reçues après le délai fixé et/ou non accompagnées de la garantie bancaire de soumission exigée seront considérées par CARITAS CONGO ASBL comme non-conformes et rejetées. 11. L’ouverture publique des offres se fera en présence des soumissionnaires ou de leurs représentants qui désirent assister à la séance, le 15 Novembre 2013 à 11h30 minutes locale à l’adresse indiquée ci haut. 12. Toutes les questions peuvent être posées directement par téléphone ou e-mail à l’adresse suivante : Serge KALUME, Téléphone : 243 970789308 E-mails: sergekalume@yahoo.fr ; skalume@caritasdev.cd Fait à Kinshasa, le 27 septembre 2013 Dr Bruno NYENGE MITEYO Secrétaire Exécutif

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Manifestation d’intérêt - Appel d’offres

1. Le Gouvernement de la République du Congo a obtenu auprès de l’Association Internationale de Développement (IDA) un Crédit (n°5121-CG) pour financer les activités du Projet Forêt et Diversification Economique (PFDE), et a l’intention d’utiliser une partie du montant dudit Crédit pour financer les services de consultants ci-après : « Appui à la campagne d'information et de sensibilisation des populations locales riveraines des concessions forestières sur leurs droits et leurs devoirs ». 2. La mission vise à mener une vaste campagne d’information et de sensibilisation des populations locales et autochtones sur leurs droits et responsabilités liés à la participation à la gestion des ressources forestières et aux avantages qui en découlent, et à assurer leur formation aux techniques de négociation. 3. L’Unité de coordination du PFDE, chargée par le Ministère de l’Economie Forestière et du Développement Durable de la mise en œuvre dudit projet, invite les firmes spécialisées dans le domaine à manifester leur intérêt pour les services décrits ci-dessus et à fournir les informations indiquant qu’ils ont la capacité technique d’exécuter lesdits services (note de présentation de la firme, missions similaires exécutées,…). 4. Sur cette base, les consultants seront sélectionnés conformément aux Directives de la Banque « Sélection et Emploi des Consultants par les Emprunteurs de la Banque Mondiale de janvier 2011 ». 5. Les consultants désireux d’obtenir des informations complémentaires peuvent s’adresser à l’Unité de Coordination du PFDE, à l’adresse ci-dessous, les jours ouvrables. Les Termes de Références peuvent être consultés à la même adresse. 6. Les manifestations d’intérêt doivent être déposées sous pli fermé ou en version électronique à l’adresse ci-dessous, au plus tard, le 1er novembre 2013 à l’adresse ci-après : PROJET FORÊT ET DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE UNITÉ DE COORDINATION DU PROJET, Case J-142/V, OCH Moungali III, Tel : (242) 05 616 95 74/06 817 06 33, Courriel : pfdecongo2011@yahoo.com Brazzaville, le 10 Octobre 2013 Fidèle NKOUNKOU Coordonnateur du PFDE

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Annonces classées

ORGANISATION POUR LA MISE EN VALEUR DU FLEUVE SÉNÉGAL Société de Gestion de l’Energie de Manantali

AVIS D’APPEL D’OFFRES OUVERT N°2013/TRG/DG – SOGEM TRAVAUX DE RÉVISIONS GÉNÉRALES DÉCENNALES DES GROUPES DE LA CENTRALE HYDROÉLECTRIQUE DE MANANTALI 1. La Direction Générale de la Société de Gestion de l’Energie de Manantali (SOGEM) a inscrit dans son programme d’activités un montant pour financer sur Fonds Propres le montant total des travaux de révisions générales décennales des groupes (cinq groupes + auxiliaires + équipements de manutention) de la centrale hydroélectrique de Manantali 2. Le Directeur Général de la SOGEM sollicite des offres sous pli fermé de la part de soumissionnaires éligibles et répondant aux qualifications requises pour exécuter les Travaux relatifs à la Révision Générale Décennale des Groupes de production et des Auxiliaires : • Groupe N°3 + Auxiliaires + Réparation de la roue • Groupe N°4 + Auxiliaires • Groupe N°1 + Auxiliaires • Groupe N°2 + Auxiliaires • Groupe N°5 + Auxiliaires • Equipements de manutention (Pont roulant de la Centrale et Portique Aval), Système air service et Système air régulation). 3. La passation du Marché sera conduite par Appel d‘offres Ouvert et est ouverte à tous les soumissionnaires éligibles. 4. Les soumissionnaires éligibles et intéressés peuvent obtenir des informations auprès de la Direction Générale de SOGEM à Bamako/Mali, BP E4015 ACI 2000 Parcelle n° 2501. Tél (00 223) 20 23 32 86 / 20 23 26 57. E-mail : zamilatou.diallo@sogem-omvs.org Fax : (00 223) 20 23 83 50 tous les jours ouvrables de 9 heures à 15 heures. (T.U.)

Appel d’offres

5. Les exigences en matière de qualifications sont indiquées dans le DAO. Une marge de préférence ne sera pas octroyée aux soumissionnaires éligibles. Voir le document d’Appel d’offres pour les informations détaillées. 6. Les soumissionnaires intéressés peuvent obtenir le Dossier d’Appel d’Offres complet (en version papier et / ou électronique) en langue française à l’adresse mentionnée ci-dessous contre un paiement non remboursable de Un million Cinq cent Mille (1 500 000) ) FCFA ou l’équivalent en toute autre monnaie librement convertible. La méthode de paiement sera par virement sur le compte N° 026703016628 / 24 IBAN : D00160120102670301662824 ou par chèque certifié au nom de SOGEM. 7. Les offres devront être soumises à l’adresse ci-dessous au plus tard le 25 Novembre 2013 à 10 heures précises (heure de Bamako). Les offres remises en retard ne seront pas acceptées. Les dépôts électroniques ne seront pas admis. 8. Les offres seront ouvertes en présence des représentants des soumissionnaires qui souhaitent assister à l’ouverture des plis le 25 Novembre 2013 à 10 heures 15 minutes précises (heure de Bamako). Les offres doivent comprendre une garantie de Cent millions (100 000 000) F CFA ou d’un montant équivalent dans une monnaie librement convertible. 9. Les adresses auxquelles il est fait référence ci-dessus sont : Pour la Consultation et l’achat du Dossier d’Appel d’Offres • Direction Générale de SOGEM ACI 2000- Parcelle N°2501- BP : E4015 – Bamako (MALI) Tél. : (00 223) 20 23 32 86 / 20 23 26 57 – Fax : (00 223) 20 23 83 50 E-mail : zamilatou.diallo@sogem-omvs.org • Cellule Nationale OMVS de Guinée à Conakry Immeuble Dunuya Voyages – Près Mosquée Sénégalaise – Tél (00 224) 60 22 99 19/62 40 66 59 – Email : alpha.diallo2@yahoo.fr Conakry/Guinée • Cellule Nationale OMVS de la Mauritanie à Nouakchott BP : 355 – Tél/fax : (00 222) 525 84 42 Email : memmoctar@yahoo.fr Nouakchott/Mauritanie • Cellule Nationale OMVS du Sénégal à Dakar 59 Mermoz Extension sur la VDN Près AFRICATEL AVS – BP 4021 Tél/Fax : (00 221) 864 27 96 – Email a-ndao@yahoo.com Dakar/Sénégal Pour le Dépôt des offres et l’ouverture publique (seules adresses autorisées). Dépôt des offres • Direction Générale de SOGEM ACI 2000- Parcelle N°2501- BP : E4015 – Bamako (MALI) Tél. : (00 223) 20 23 32 86 / 20 23 26 57 – Secrétariat Général du Directeur Général, 3ème Etage, Porte n° 302 Ouverture Publique des offres • Direction Générale de SOGEM ACI 2000- Parcelle N°2501 - BP : E4015 – Bamako (MALI) Tél. : (00 223) 20 23 32 86 / 20 23 26 57 – Salle de Conférence de la Direction Générale, 3ème Etage, Porte n° 311 Bamako, le 07 Octobre 2013 Le Directeur Général de SOGEM Cheikh Ould Abdellahi Ould BEDDA

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Annonces classées

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RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO MINISTÈRE DES RESSOURCES HYDRAULIQUES ET ÉLECTRICITÉ SOCIÉTÉ NATIONALE D’ÉLECTRICITÉ (SNEL) SARL

AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL PROJET DE DÉVELOPPEMENT DES MARCHÉS D’ELECTRICITÉ POUR LA CONSOMMATION DOMESTIQUE ET À L’EXPORT (PMEDE) DON IDA H296 – ZR • AOI N°012/PMEDE/SNEL/DG/CDP/CPM/JSNM/2013/MF MARCHÉ LOT 11 : ACQUISITION DES LAMPES À FAIBLE CONSOMMATION 1. Le présent avis d’appel d’offres fait suite à l’Avis général de passation des marchés du projet PMEDE paru le 12 avril 2007 dans Dg Market et dans la presse locale ainsi que le 14 septembre 2008 dans Jeune Afrique, dans Dg Market et dans les journaux locaux. 2. La République Démocratique du Congo a obtenu un don de l’Association Internationale de Développement (IDA) pour financer le Projet de Développement des Marchés d’Electricité pour la consommation Domestique et à l’Export (PMEDE). Elle se propose d’utiliser une partie du montant de ce don pour effectuer les paiements autorisés au titre du marché. 3. La Coordination des Projets SNEL(CDP), pour le compte de la Société Nationale d’Electricité (SNEL), invite les candidats admis à concourir, entreprises ou groupements d’entreprises, à soumettre leurs offres sous pli scellé pour les fournitures et services connexes concernés. Les fournitures concernées sont les suivantes : Deux millions (2 000 000) de lampes à faible consommation. 4. La passation du Marché sera conduite par Appel d‘offres international (AOI) tel que défini dans les « Directives : passation des marchés financés par les Prêts de la BIRD et les Crédits de l‘IDA »,et ouvert à tous les soumissionnaires de pays éligibles tels que définis dans les Directives.

6. Les candidats répondant aux critères de participation et qui le souhaitent peuvent obtenir tout renseignement complémentaire auprès de la

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7. Les soumissionnaires intéressés peuvent acheter un jeu complet du dossier d’appel d’offres à l’adresse mentionnée ci-dessus sur présentation d’une demande écrite et moyennant paiement d’un montant non remboursable de deux cents dollars américains (200 $US). Le paiement sera effectué par versement d’espèces au compte n° « 013357915 »,intitulé SNEL-PROJET UGP/PMEDE auprès de la Banque Commerciale du Congo (BCDC) / Kinshasa, code SWIFT : BCDCCDKI. Le Dossier d’appel d’offres sera envoyé aux soumissionnaires, contre présentation de la preuve de paiement, par courrier. Les frais d’envoi des dossiers aux acheteurs sont en sus et à charge de ces derniers. 8. Les Soumissions devront être déposées à l’adresse ci-dessous au plus tard le jeudi 31 Octobre 2013 à 15H00’ (heure locale, TU+1) sous pli scellé et doivent être clairement marquées « AOI N°012/PMEDE/SNEL/DG/CDP/ CPM/JSNM/2013/MF : Acquisition des Lampes à Faible Consommation (LFC) ». Les dépôts électroniques ne seront pas admis. Les soumissions présentées hors délais seront rejetées. Les offres soumises doivent être assorties d’une garantie de l’offre de : 50.000 USD (cinquante mille dollars américains). La garantie de soumission sera une garantie bancaire. Cette garantie de soumission demeurera valide pendant vingt-huit (28) jours au-delà de la date limite initiale de validité des offres,ou de toute nouvelle date limite de validité demandée par l'Acheteur et acceptée par le Soumissionnaire, conformément aux dispositions de la Clause 20.2 des IS. La période de validité initiale des offres est de cent vingt (120) jours. Les plis seront ouverts en présence des représentants des soumissionnaires qui décident d’assister à la séance d’ouverture qui aura lieu le Jeudi 31 Octobre 2013 à 15H30’ à l’adresse ci-dessous : La Coordination des Projets (CDP) Avenue le Marinel n° 06, Immeuble le Marinel, Quartier Lemera Kinshasa / Gombe République Démocratique du Congo Tél : (00243) 81 7005428 ; (00243) 81 0040030 - E-mail : cdp.snel@yahoo.fr Le Coordonnateur des Projets, MASOSO BUMBA

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Appel d’offres - Immobilier

5. Les critères qui seront pris en considération pour l’évaluation et la comparaison des offres sont les suivants : Evaluation technique • Conformité technique de la soumission par rapport aux spécifications de l’Appel d’Offres (fiches et documentation techniques) ; • Au moins trois (3) références attestées du fabricant pour des fournitures similaires dont un projet au moins en Afrique dans les cinq dernières années sont requises • Calendrier de livraison ; Evaluation commerciale et financière • Conformité aux exigences du DAO ; • Prix et conditions de prix ;

Coordination des Projets de la SNEL Sarl (CDP/SNEL) et prendre connaissance des documents d’appel d’offres à l’adresse reprise ci-dessous, de 9h à 16h (heures locales,TU+1).


Vous & nous

Le courrier des lecteurs Envoyez-nous vos réactions, vos réflexions, vos coups de gueule ou de cœur à redaction@jeuneafrique.com ou au 57 bis, rue d’Auteuil, 75016 Paris.

VINCENT FOURNIER/J.A.

Centrafrique Il faut sauver Bangui

Nord-Cameroun avec leurs troupeaux sur les plateaux de Bouar et de Bambari. Ils ont cherché à s’étendre, entrant en rivalité avec les agriculteurs sédentaires. Début janvier, il était encore facile d’empêcher la Séléka de parvenir à Bangui. Il fallait intervenir non pour protéger un président incapable, mais pour sauver le ventre mou de l’Afrique francophone et ses populations désemparées. l YVES BOULVERT, Paris, France

p Michel Djotodia, le 14 mars à Bangui.

TRÈS INQUIET des nouvelles de la Centrafrique, sur laquelle je travaille depuis 1964, j’ai apprécié l’article que vous lui consacrez dans votre édition n o 2751, datée du 29 septembre au 5 octobre. Je prépare pour la fin de l’année la publication d’un ouvrage de Pierre Prins qui traite des razzias esclavagistes au XIXe siècle. Le résultat de ces razzias est que, de nos jours, le nord-est et l’est de la RCA sont pratiquement vides. Les « populations reliques » sont, dans le Nord-Est, les Youlous (d’Ouanda Djallé), les Kreichs, les Roungas, et les Goulas, dont fait partie le président par intérim Michel Djotodia. Ces derniers se seraient ralliés à l’islam après l’indépendance, en 1960. On ne comptait que 10 % de musulmans en RCA il y a un quart de siècle, dont des commerçants et des colporteurs haoussas, ainsi que des pasteurs nomades mbororos, que l’administration française avait fait venir du N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

Lampedusa 1 Qu’en dit l’Union africaine ? MERCI à Jeune Afrique, qui ne cesse d’attirer l’attention des dirigeants du continent sur les conséquences de l’immigration clandestine pour leurs économies pourtant prometteuses. Sans doute ne se rendent-ils pas compte que, à cause de ce fléau, l’Afrique se vide d’une jeunesse censée participer à la croissance à deux chiffres à laquelle elle

aspire. Comment comprendre que, alors que s’est réuni un conseil extraordinaire des ministres de l’Intérieur de l’Union européenne, rien n’ait été entrepris ni par son équivalent africain qu’est l’Union africaine, ni par les chefs d’État africains ? C’est la preuve même qu’il n’y a rien à espérer de ce continent et que la seule option – certes irresponsable –, c’est de se jeter à l’eau. Laisser (imposer) aux seuls Européens de régler ce problème dont l’approche reste contestable, c’est une fois de plus rater le train du décollage. l IBRAHIMA KONE, Bouaké, Côte d’Ivoire

Tunisie Vers une sortie de crise BERCEAU DES RÉVOLUTIONS ARABES, la Tunisie donne à nouveau à ses populations des raisons d’espérer, elle qui était sous tension depuis l’assassinat des opposants Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi à cinq mois et demi d’intervalle. On a un temps craint le pire avec l’opposition qui exigeait la démission d’Ennahdha, le parti islamiste au pouvoir, accusé p Des femmes brandissant une pancarte lors d’une d’être responsable de ces manifestation, le 9 mars à Tunis. crimes, et les islamistes, qui refusaient, eux, de renoncer à un pouvoir conquis par les urnes. affaires. Si les islamistes quittent le Heureusement, le compromis proposé par pouvoir, pas sûr que leurs remplaçants le patronat et l’UGTT, la grande fassent mieux. Attirer l’attention sur les confédération syndicale, a permis faiblesses de l’autre peut être bien utile. d’évoquer l’idée de négociations sur la Ils capitaliseront donc en vue d’une formation d’un gouvernement de prochaine échéance. Quant à l’opposition techniciens chargé d’organiser de actuelle, avoir fait plier le gouvernement nouvelles élections au printemps lui permettra de se montrer plus unie, ce prochain. Il devra aussi faire adopter une qui lui avait fait défaut il y a deux ans. nouvelle Constitution et mettre en place Au bout du compte, les deux camps une nouvelle commission électorale. Ouf : auront réalisé une bien belle en continuant de s’entêter à rejeter l’idée performance : faire triompher la de nouvelles élections, Ennahdha courait démocratie. C’était bien là le but premier le risque, à terme, de perdre ses du Printemps arabe. l électeurs, très déçus de sa gestion des ZIAD HAMAMI, Sousse, Tunisie

NICOLAS FAUQUE

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JEUNE AFRIQUE


Vous nous

ALPHA I. BARRY, La Chaux-de-Fonds, France

M23 Le jeu des 200 familles J’AI LU AVEC un grand intérêt votre article sur les 200 familles venues du Rwanda publié sur jeuneafrique.com. Kigali a toujours nié tout lien avec le M23. Soit. Mais comment expliquer qu’une nation ou un gouvernement en arrive à « donner » ou à « transférer » des personnes à des peuples? Comment ces gens ont-ils traversé la frontière pour arriver en RD Congo ? N’est-ce pas une forme de collaboration entre le M23 et le Rwanda? Le Rwanda traite-t-il directement avec un groupe armé plutôt qu’avec le gouvernement congolais ? Il est difficilement compréhensible que le Rwanda mette ainsi en évidence son implication, voire son ingérence, dans la conduite politique de la RD Congo, bafouant les lois internationales. Laisse tout aussi p e r p l e x e l’a t t i t u d e d u JEUNE AFRIQUE

gouvernement congolais, qui continue de discuter avec les Rwandais, alimentant des soupçons de complicité avec Kigali et de trahison envers le p e u p l e c o n g o l a i s. L e s Congolais doivent ouvrir les yeux. l RIGOBERT MANKENE

Syrie À qui profitent les crimes?

FIDÈLE LECTEUR de Jeune Afrique, j’apprécie vos analyses et vos informations, qui suscitent souvent discussions et critiques, suivant l’appréhension et la compréhension que les uns et les autres ont des sujets abordés. L’intervention dans vos colonnes (J.A. no 2752, du 6 au 12 octobre) d’Alexandre Vilgrain, président du Conseil français des investisseurs en Afrique, vient s’ajouter aux récriminations de plusieurs autres Occidentaux qui entendent investir dignement en Afrique, loin de ces salons huppés où mallettes d’argent et autres caisses d’armes sont aux menus des rencontres. Cette interview met à nu la nocivité de la Françafrique. Je profite de cette tribune pour inviter tous les leaders africains à s’approprier cette boussole. Profonde gratitude à ce grand patron d’entreSYLVAIN ÉTIENNE prise ! l

LA TRAGÉDIE SYRIENNE se joue en plusieurs actes, certains à huis clos, d’autres ouverts au public, toujours avec le même résultat depuis deux ans : l’indicible calvaire d’une population à bout de nerfs. Combien de morts ? Combien d’estropiés ? Combien de réfugiés ? Les médias internationaux livrent quotidiennement ces décomptes macabres. Qui sont les victimes ? Qui sont les bourreaux ? Qui sont les tortionnaires ? Qui sont les torturés ? Dans une sorte de jeu de rôle nauséabond, tout le monde accuse tout le monde. Et les grands dirigeants du monde ? Ils tracent des lignes vertes et des lignes rouges sur le papier, pendant que des enfants, des femmes et des hommes vivent l’enfer ! Ce hiatus entre une communauté internationale tranquille dans son coin et un pays livré à toutes les atrocités est moralement insoutenable. Je sais qu’il faut être très… naïf pour convoquer la morale dans la conduite des affaires de ce monde moderne, mais tout de même ! En Syrie, les limites du tolérable ont été franchies, sauf pour ceux qui estiment qu’il est permis de s’autoanéantir, à condition de ne pas fauter en utilisant des armes chimiques. Qu’est-ce qui justifie cette « prudence » – ou plutôt ce cynisme – de la communauté internationale, qui persiste dans sa position honteuse de nonassistance à une population en danger de mort ? Si au moins les Syriens avaient été laissés à leur triste sort, ils auraient sûrement trouvé les moyens de se lasser de ce suicide collectif. Malheureusement, Damas est au cœur de la géopolitique régionale et internationale. En première ligne pour l’observer, les pays de la région. Ils affichent des intérêts souvent contradictoires, mais la victoire en Syrie de l’un ou de l’autre camp leur nuira aux uns ou aux autres. Pour ces pays, le champ de bataille syrien est un terrain d’enjeux stratégiques. C’est pourquoi ils s’y livrent une guerre par procuration, soutenant militairement ou financièrement les belligérants. À cette guerre chaude se superpose la guerre froide qu’on croyait passée de mode. Là aussi, les intérêts opposés des puissances occidentales et de la Russie aliment la guerre fratricide tandis que les négociations pour l’arrêter se déroulent entre Américains et Russes ! Autrement dit, les figurants s’entretuent pendant que les acteurs principaux comptent les points avant d’envisager une « paix armée » ! Mais en Syrie, qu’importent les gagnants, c’est une victoire à la Pyrrhus qui se profile à l’horizon. l

BAVINDI, Yaoundé, Cameroun

ALI DIMBIO, Djibouti

MFULA, Londres, Royaume-Uni

Vilgrain La patte d’un grand chef

VINCENT FOURNIER/J.A.

Lampedusa 2 Hypocrite indignation C’EST TOUJOURS la même rengaine chaque fois qu’une tragédie humaine comme celle de Lampedusa se produit aux portes de l’Europe. Pour autant, nul État n’est prêt à accueillir ces infortunés. Pis encore, alors que la recherche des corps dans l’océan se poursuit encore, on planifie déjà le retour des naufragés dans la misère ou la guerre qu’ils ont fuies. Quelle hypocrisie! Chaque État européen se dit incapable « d’accueillir toute la misère du monde ». Ça peut se comprendre. Mais se sont-ils seulement demandé qui crée ces misères dans les pays du Sud, particulièrement en Afrique, laissant des milliers de jeunes sur le carreau ? l

p Alexandre Vilgrain, à RFI/ Jeune Afrique, « Éco d’ici Éco d’ailleurs », le 4 octobre.

N O 2753 • DU 13 AU 19 OCTOBRE 2013

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HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL POLITIQUE, ÉCONOMIE, CULTURE

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Post-scriptum Fouad Laroui

Fondé à Tunis le 17 oct. 1960 par Béchir Ben Yahmed (53e année) Édité par SIFIJA Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS Tél. : 01 44 30 19 60 ; Télécopieurs : rédaction : 01 45 20 09 69 ; ventes : 01 45 20 09 67 ; Courriel : redaction@jeuneafrique.com DIRECTION

Les poulets du halal

A

USSI INCROYABLE que cela puisse paraître, il existe aux Pays-Bas une organisation qui s’appelle « Halalpolitie », c’est-à-dire « la police halal ». C’est une association privée qui a son site internet (halalpolitie.nl), et dont le but est de contrôler si la nourriture vendue comme halal l’est vraiment. Jusqu’à présent, on n’en avait pas trop entendu parler, mais, la semaine dernière, elle a fait un coup d’éclat. Ses inspecteurs ont enquêté dans la chaîne de supermarchés « Tanger », et le couperet est tombé : selon « Halalpolitie », ce que vend cette chaîne, ou du moins sa filiale de La Haye, n’est pas plus halal que ce que dévorent habituellement les Vikings, les Chinois ou M. Le Pen.

Dans les milieux musulmans du pays, l’affaire a fait grand bruit, à tel point que la direction des supermarchés « Tanger » a reçu deux représentants de la police halal pour leur affirmer qu’elle reniait sa filiale de La Haye, qu’elle n’avait rien à voir avec elle, etc. C’est tout juste si ladite filiale n’a pas été enduite de goudron et de plumes et chassée dans le désert sous les huées de la foule. De plus, les supermarchés ont dû promettre à la police halal qu’ils allaient passer un contrat avec une organisation nommée « Halal Correct », qui devrait désormais contrôler tous leurs achats pour vérifier qu’ils sont bien halal. Un cachet indélébile sera apposé sur ce qui est permis et refusé à ce qui ne l’est pas. Soyons clair : il ne s’agit pas ici de se gausser de tout cela, ni de le condamner. Après tout, il y a des associations privées qui contrôlent si ce qui est vendu sous le nom de « bio » ou d’« organique » l’est vraiment. Et les végétariens ont également le droit d’avoir leur système de vérification : il serait fâcheux de croquer un écureuil déguisé en courgette. Les musulmans des Pays-Bas ont donc parfaitement le droit d’être vigilants sur ce qu’ils ingurgitent. Mais ce qui me gêne, c’est le nom qu’a pris cette organisation : « la police halal ». Franchement, n’aurait-on pas mieux fait de choisir un nom moins menaçant ? En effet, le propre de la police, c’est qu’elle considère que tout est de son ressort. D’où la question : et si la Halalpolitie outrepassait ses attributions actuelles ? Si elle créait une direction du film qui instaurerait une censure sur les cinémas et sur la télévision ? Si elle mettait sur pied des patrouilles de volontaires, sur le modèle de ce qui se fait en Arabie saoudite, pour vérifier que les jupes, dans les quartiers à forte population marocaine, ne sont pas trop courtes ni les cheveux trop libres ? Ou bien qui entendraient obliger quiconque ressemble à un Rachid ou à un Ali à aller cinq fois par jour à la mosquée du coin ? Bref, halal oui, police non ! Espérons que si les choses vont trop loin, l’État se réveillera. Et qu’il fera fermement remarquer à toutes les communautés que la seule police qui vaille, dans un pays démocratique quoique multiculturel, est la sienne : celle de l’État. l

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