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Hebdomadaire international indépendant • 54e !""ée • "o 2758 • #$ 17 !$ 23 "%&e'b(e 2013
DOSSIER PÉTROLE ET GAZ la ruÉE vErs l’Est SPÉCIAL 12 PAGES
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jeuneafrique.com
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ÉLECTIONS
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De g. à dr., Denis Sassou Nguesso, Joseph Kabila, Ellen Johnson-Sirleaf, Thomas Boni Yayi et Paul Kagamé. En bas : Blaise Compaoré
ÉDITION INTERNATIONALE ET AFRIQUE SUBSAHARIENNE France 3,50 € • Algérie 180 DA • Allemagne 4,50 € • Autriche 4,50 € • Belgique 3,50 € • Canada 5,95 $ CAN • Danemark 35 DKK • DOM 4 € Espagne 4 € • Éthiopie 65 birrs • Finlande 4,50 € • Grèce 4,50 € • Italie 4 € • Maroc 23 DH • Mauritanie 1 100 MRO • Norvège 45 NK • Pays-Bas 4 € Portugal cont. 4 € • RD Congo 5,50 $ US • Royaume-Uni 3,50 £ • Suisse 5,90 FS • Tunisie 3,30 DT • USA 6,50 $ US • Zone CFA 1 700 F CFA • ISSN 1950-1285
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SOUSCRIPTION
du
. 2013
30 Oct. au 29 Nov
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Ce que je crois Béchir Ben Yahmed • bby@jeuneafrique.com
SAMEDI 16 NOVEMBRE
Un monde qui se rééquilibre…
n
Voyons d’abord ce que disent ces chiffres et ceux qui les commentent (voir les 4 graphiques ci-dessous) : • D’ici à 2020, les Africains seront, dans leur majorité, jeunes et urbanisés ; leurs classes moyennes seront en expansion et consommeront davantage de biens, de services et d’énergie. • Peu porté sur l’hyperbole, le Fonds monétaire international (FMI) annonce pourtant qu’en 2014 Demande de pétrole
Importations africaines de céréales
(2012-2018 en % d'évolution annuelle)
AFRIQUE Moy.-Orient
Monde
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Europe de l’Est Économies avancées
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Moyen-Orient et Afrique du Nord Amérique latine
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Croissance du PIB
Asie en développement Afrique subsaharienne Marchés émergents
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Europe -1
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Amérique
(en $ parité de pouvoir d'achat 2005)
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Asie
PIB par tête des pays subsahariens
(en millions de tonnes)
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Ex-URSS
l’Afrique affichera le deuxième meilleur taux de croissance économique mondial, derrière l’Asie. Entre 2000 et 2012, l’Afrique subsaharienne avait déjà connu une croissance de 5,6 % par an, plus de deux fois supérieure à celle des années 1990, laquelle n’avait été que de 2,2 %. Le revenu par habitant a augmenté de 40 % en dépit de la forte croissance démographique, alors qu’il avait stagné tout au long des trente dernières années du XXe siècle. • L’Agence internationale de l’énergie (AIE) annonce, de son côté, que l’Afrique verra sa consommation d’énergie entre 2012 et 2018 croître à un rythme plus élevé que celui de tous les autres continents : 4 % par an, contre 1,3 % de moyenne mondiale. Il est vrai qu’elle était très faible. La capacité africaine de raffinage de produits pétroliers devrait également être considérablement renforcée. • Plus nombreux et se nourrissant mieux, les Africains importent déjà beaucoup plus de céréales : alors qu’ils en achetaient moins de 30 millions de tonnes par an il y a encore vingt ans, leurs importations annuelles s’élèvent désormais à 70 millions de tonnes, soit plus du double. Les chiffres ne mentent pas et disent tout aussi vrai que ceux qui en font état pour nous annoncer que
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SOURCES/FT RESEARCH ; IA ; USDA ; FAO ; WORLD BANK ; S
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l ne se passe pas une semaine sans qu’une publication de réputation mondiale ou le rapport d’un expert à l’autorité reconnue ne nous dise, chiffres et graphiques à l’appui, que le continent africain et ses économies sont en train (ou sur le point) de « décoller ». Les Africains, eux, n’ont pas encore senti souffler sur leurs pays le vent du changement. Ils ne vivent pas mieux et ne se jugent pas assez bien gouvernés ; ils ne sont pas bien logés et leurs infrastructures – écoles, hôpitaux, routes, voies ferrées –, dont trop peu ont vu le jour au cours de ces dernières années, sont aussi vétustes qu’il y a dix ans. Pourquoi les bons chiffres de la macroé conomie ne se traduisent-ils pas encore dans la vie quotidienne des Africains, comme c’est déjà le cas en Asie? Peut-on espérer qu’il en ira autrement demain ? Est-ce pour l’année prochaine ou seulement dans cinq ans ?
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Ce que je crois s’est déjà levé le vent du changement qui va souffler sur notre continent.
Comme au XVe siècle Christophe Colomb avait découvert l’Amérique.
n
n
Nous allons sentir, dans les deux ou trois prochaines années, que le continent africain s’est enfin mis à bouger. Après l’Asie et les Amériques du centre et du Sud, l’Afrique va en effet bénéficier, à son tour, de l’extraordinaire rééquilibrage du monde provoqué par la mondialisation. Survenue à la fin du dernier siècle, cette mondialisation va combler, en quelques décennies, le fossé qui séparait depuis plus de deux siècles le petit monde des pays développés, situé dans le nord de la planète, du gros de l’humanité, qui en peuplait le sud. Le premier avait fait la révolution industrielle qui l’a engagé sur le chemin du progrès, le second l’avait manquée et, de ce fait, était resté au bord de la route : on l’a appelé « Tiers Monde » et il rassemblait plus des trois quarts de l’humanité. Vers la fin des années 1970, Deng Xiaoping a ouvert son pays, la Chine, à l’économie de marché et au commerce avec le reste du monde ; les Chinois ont alors renoué avec leur glorieux passé et, s’astreignant à un contrôle des naissances draconien, ils ont peu à peu cessé d’être « innombrables et misérables ». Ils se sont ainsi ouvert la route de la mondialisation et, ce faisant, l’ont ouverte aux autres pays de l’ancien Tiers Monde ; ces derniers l’ont empruntée les uns après les autres. Et, last but not least, ils ont « découvert » l’Afrique.
Les Africains savent que les Européens, qui les avaient colonisés et spoliés de leurs richesses minières, ont peu à peu jugé leur continent comme un fardeau et l’ont délaissé. De leur côté, les Américains n’ont pas trouvé d’intérêt suffisant à y investir, de sorte que, la guerre froide terminée, les Africains ont été livrés à eux-mêmes, abandonnés par les hommes et les dieux. Jusqu’à ce que la Chine se dise que ce continent qui ne semble plus intéresser grand monde pouvait être sa « nouvelle frontière ». C’est donc à la Chine que les Africains doivent de se trouver, en cette fin d’année 2013, à la lisière du décollage économique et, de nouveau, au centre de l’intérêt des Euro-Américains. n
Nous sommes doublement redevables à la Chine. 1) Elle fut, comme nous l’avons rappelé ci-dessus, le pionnier de cette mondialisation qui a conduit notre planète à se rééquilibrer et à se remettre sur ses deux jambes. 2) Et même s’il n’a pris en considération que ses propres intérêts, « l’empire du Milieu » a fait briller notre continent aux yeux de ceux-là qui, hier encore, n’avaient pour lui que condescendance. Il leur a dit en somme : Vous vous trompiez sur l’Afrique et la mésestimiez. Regardez ce qu’on y trouve et ce qu’on peut faire avec ses habitants. l
Humour, saillies et sagesse Pour vous faire sourire, grincer des dents – ou réfléchir –, ici, chaque semaine, une sélection subjective, la mienne, de ce qui a été dit ou écrit au cours des siècles par des hommes et des femmes qui avaient des choses intéressantes ou drôles à nous dire. B.B.Y. u Une pomme par jour éloigne le médecin, pourvu que l’on vise bien. Winston Churchill
u J’ai rêvé d’un monde de soleil dans la fraternité de mes frères aux yeux bleus. Léopold Sédar Senghor
u Je me suis toujours demandé si les gauchers passaient l’arme à droite. Alphonse Allais
u Le bébé dans le ventre de la mère, pendant neuf mois il fait rien, en Chine, ils les font travailler. Les Nouvelles Brèves de comptoir
u Les hommes sont aussi jaloux sur le chapitre de l’esprit que les femmes sur celui de la beauté. Marie du Deffand
u Celui qui déplace la montagne, c’est celui qui commence à enlever les petites pierres. Confucius
u Un intellectuel est quelqu’un qui entre dans une bibliothèque publique même quand il ne pleut pas. André Roussin
u Quand vous voyez un couple dans la rue, celui qui marche trois mètres devant, c’est celui qui est en colère. Helen Rowland
u Ne garde pas une poule qui mange dans ta maison et pond dans celle d’un autre. Proverbe espagnol
u C’est parce que la vitesse de la lumière est plus rapide que celle du son que certains ont l’air brillant avant d’avoir l’air con. Anonyme
u En politique on n’est le père de personne… On a quelques amis, parfois deux ou trois disciples, mais des enfants jamais. François Mitterrand
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u Le vrai est trop simple, il faut y arriver toujours par le compliqué. George Sand JEUNE AFRIQUE
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Éditorial François Soudan
PHOTOS DE COUVERTURES : ÉDITION MAURITANIE : AFP PHOTO GEORGES GOBET ÉDITION MAGHREB & MOYEN-ORIENT : AFP PHOTO/FETHI BELAID ÉDITION INTERNATIONALE ET AFRIQUE SUBSAHARIENNE : VINCENT FOURNIER/J.A. ; MEIGNEUX/SIPA ; AFP PHOTO/SIMON MAINA/ISAAC KASAMANI
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Quai d’Orsay ou nid de faucons?
CEMAC OBIANG FAIT BANDE À PART La Guinée équatoriale a décidé de ne pas appliquer l’accord de libre circulation des personnes et des biens signé en juin. Un mauvais coup pour l’intégration régionale.
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UI A DIT qu’en dehors de l’Afrique la voix de la France était inaudible dans le grand théâtre des relations internationales ? Dimanche 10 novembre, campé sur son droit de veto aux Nations unies et sur l’impossibilité de lever des sanctions importantes sans unanimité européenne, le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius a fait capoter à lui tout seul le premier round des négociations de Genève sur le nucléaire iranien. Son intransigeance a été aussitôt saluée par Benyamin Netanyahou et les néoconservateurs américains, pourtant idéologiquement aux antipodes des socialistes français et – beaucoup plus discrètement – par les ultras de Téhéran, bref par un attelage improbable uni dans la même crainte de voir aboutir des pourparlers perçus par eux (et pour des raisons diamétralement opposées) comme un jeu de dupes. La posture, on serait tenté de dire l’exploit, de M. Fabius a en revanche été ressentie comme un mauvais coup du côté du tandem Obama-Kerry, qui discutait en tête à tête depuis des semaines avec Téhéran, en même temps qu’elle fragilise le couple formé par le nouveau président iranien Rohani et son chef de la diplomatie Zarif, deux modérés qui jouent une grande part de leur crédibilité sur la levée des sanctions. Pour justifier ce résultat paradoxal, l’entourage de Laurent Fabius a volontiers recours au jésuitisme, laissant entendre qu’il existe, entre la France et les États-Unis, un partage des tâches du style bad cop, good cop et que le but de la manœuvre est de prévenir une attaque militaire israélienne sur les sites nucléaires iraniens. Même si bloquer des négociations au moment où l’Agence internationale de l’énergie atomique conclut enfin une feuille de route commune avec Téhéran sur l’inspection desdits sites (y compris celui, ultrasensible, d’Arak) peut paraître incompréhensible, on aimerait y croire. L’issue du nouveau round de négociations, prévu pour les 21 et 22 novembre, dira ce que l’attitude française a en définitive favorisé : un accord de fond avec l’Iran, ou la probabilité d’une confrontation armée. En dix ans, depuis le « non » à l’invasion de l’Irak jusqu’au « oui » au bombardement de la Syrie, la politique moyen-orientale de la France a opéré un virage surprenant. Difficile de démêler, dans le dernier développement de cette posture, ce qui relève de la conviction, de la volonté de faire payer l’humiliation subie le 31 août dernier – quand, suite au revirement de Barack Obama, il fallut ordonner aux Rafale prêts à décoller pour Damas de rester sur le tarmac – et de l’influence extérieure. Sur ce dernier point, les pressions de l’Arabie saoudite, adversaire historique du régime des mollahs, avec qui Paris a conclu fin août un contrat militaire de plus de 1 milliard d’euros, n’ont sans doute pas été négligeables. Tout comme celles exercées par Israël : la campagne quasi hystérique menée contre la conclusion d’un deal avec Téhéran par Benyamin Netanyahou, dont François Hollande devait être l’hôte les 17 et 18 novembre, s’est fait ressentir jusque sous les lambris du Quai d’Orsay et de l’Élysée. Certes, la menace nucléaire iranienne existe. Mais si la France souhaite s’ériger en gardienne inflexible et impartiale des règles de non-dissémination, il serait bienvenu qu’elle en exige l’application de la part de tous les acteurs, à commencer par l’État hébreu. Lequel, est-il besoin de le rappeler, détient un puissant arsenal nucléaire sans avoir jamais signé le traité de non-prolifération, ni ratifié la convention sur les armes chimiques. On peut toujours rêver… l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
GAMBIE IL NE FAUT JAMAIS DIRE JAMMEH À Banjul, on ne prononce son nom qu’à voix basse. C’est, disent-ils, une question de survie dans un pays sur lequel Yahya Jammeh, tyran mystique et parano, règne depuis vingt ans.
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Ce que je crois Par Béchir Ben Yahmed Confidentiel
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L A SEM A IN E D E J EU N E A F RIQ U E
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Cemac Obiang fait bande à part Karim Keïta Papa m’a pas dit Avigdor Lieberman Au secours, il est de retour ! Buzz télé Nazillon arc-en-ciel Afrobaromètre Hou, les ripoux ! Salaheddine Mezouar « Attaquer le terrorisme à la racine » Maroc Posez les valises ! ONU Quatuor dissonant Tour du monde
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G RA N D A N G L E
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Élections Partira ? Partira pas ?
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A F RIQ U E SU BSA H A RIEN N E
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Gambie Il ne faut jamais dire Jammeh 57 bis Kabiné Komara, haut-commissaire de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal JEUNE AFRIQUE
Dans Jeune Afrique et nulle part ailleurs
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GRAND ANGLE
ÉLECTIONS Partira ? Partira pas ?
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Ils sont douze chefs d’État confrontés au même choix : s’en tenir à la Constitution et ne pas briguer un nouveau mandat ou tenter de la réformer. Au premier rang d’entre eux, Blaise Compaoré…
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MONDE ARABE ÉTATS DE NON-DROIT Les révoltes de 2011 n’y auront rien changé : du Maroc au Qatar, l’institution judiciaire continue d’être gangrenée par la corruption et demeure inféodée aux puissants du moment.
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Mali Kidal, trou noir électoral Cameroun Deux crocodiles, un seul marigot
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M AGHREB & MOY E N - O R I E N T
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Justice États de non-droit Tunisie Génération cannabis Maroc Très cher Sahara Israël - États-Unis La grande discorde
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E UROPE, AMÉR I Q U E S, A S I E
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Inde Objectif Mars Italie Sainte Giusi, madone des immigrés Mode La guerre des icônes Parcours Géraldine Robert, grande dame Allemagne Sigmar Gabriel, en rouge et noir
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L E PLUS DE JEU N E A FR I Q U E
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Mauritanie Aziz au banc d’essai
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ÉCON OMIE
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Afrique du Sud À bout de souffle Hôtellerie Onomo veut reprendre la main
JEUNE AFRIQUE
ART CONTEMPORAIN LE MUSÉE QUI MANQUAIT Dorénavant, la Fondation Zinsou exposera une partie de sa collection à Ouidah, au Bénin. Une manière de faire découvrir les œuvres d’artistes africains de renom au plus grand nombre.
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DOSSIER PÉTROLE ET GAZ Depuis deux ans, on a trouvé plus d’hydrocarbures le long des côtes orientales africaines que dans n’importe quelle autre région du monde. Encore faut-il pouvoir les exploiter.
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LE PLUS
de Jeune
Afrique
ÉLECTION S Le grand test ÉCON
OMIE Une croissance BUSINESS peu parta Secrets gée de famill FOOTBALL es et affaire Les Mour s d’État abitounes tournent (enfin) rond
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MAURITANIE AZ AU BANC AZIZ D’ESSAI D’ES Étape Ét clé avant au ban la présidentielle d’essaci de 2014, les législatives et les légi municipales du mun 23 novembre constituent pour le chef de l’État un vrai test de popularité. Spécial 16 pages M A U R IT
Aziz
A N IE
Les indiscrets Agroalimentaire Dans l’antre de Cevital Textile Bethlehem Tilahun Alemu, à l’aise dans ses baskets Assurances Avec Amana, la Macif prend le risque de réussir Baromètre D O SSIER Pétrole & gaz C U LT U RE & MÉD IA S Art contemporain Le musée qui manquait Cinéma Le dernier combat de Victor « Young » Perez Théâtre Au cœur de l’ignominie coloniale Portrait Marc Zinga, étoile montante La semaine culturelle de Jeune Afrique VOUS & NOUS Le courrier des lecteurs Post-scriptum
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Centrafrique Hollande passe à l’offensive
LE CHIFFRE
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MILLIARDS DE DOLLARS C’est ce que pèse Setad, le holding contrôlé par le Guide suprême Ali Khamenei. Setad a investi toute l’économie iranienne : finances, hydrocarbures, télécoms et même la production de pilules contraceptives ou l’élevage d’autruches… Khamenei peut ainsi asseoir sa domination politique, même si rien ne prouve une volonté d’enrichissement personnel. À noter que Setad a systématiquement recours à l’expropriation : ses biens immobiliers étaient évalués à 52 milliards de dollars en 2008. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
SYLVAIN CHERKAOUI POUR J.A.
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e sont 800 soldats supplémentaires que Paris envisage d’envoyer en Centrafrique, faisant passer ses effectifs sur place à 1 200 hommes. Ce redéploiement massif sera mis en place dans le cadre du renforcement de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (Misca) et ne sera pas effectif avant début décembre. Une partie de ces renforts devait quitter Toulon mi-novembre à bord d’un bâtiment de protection et de commandement Dixmude – même si officiellement le navire effectue la relève de l’opération Corymbe, positionnée de manière quasi
p Les militaires français assurent déjà, depuis plusieurs mois, la sécurité de l’aéroport de Bangui.
JUSTICE LE JUGE TRÉVIDIC BIENTÔT À ALGER
L’enquête sur l’assassinat, en 1996, des moines de Tibéhirine pourrait être relancée. Marc Trévidic, juge d’instruction au pôle antiterroriste du parquet de Paris, ira deux jours à Alger, fin novembre, pour assister à une réunion avec son homologue algérien chargé du dossier. Cette première prise de contact – longtemps attendue côté français et décisive pour la suite de l’affaire – sera consacrée à l’étude de la commission rogatoire internationale délivrée aux autorités algériennes par le juge Trévidic en décembre 2011. Il y demandait l’exhumation des têtes des sept moines pour procéder à des analyses médicolégales ; il souhaitait aussi auditionner une vingtaine de personnes, pour la plupart d’ex-membres du Groupe islamique armé (GIA).
MAGHREB LA RÉCONCILIATION ATTENDRA
Ancien ambassadeur à Dakar aujourd’hui directeur général des pays arabes au ministère
algérien des Affaires étrangères,AbdelhamidChebchoub représentait son pays à Rabat, mi-novembre, pour la conférence sur la sécurité des frontières dans la zone
Gabon Colère présidentielle RÉUNIS EN CONSEIL DES MINISTRES, le 13 novembre, les membres du gouvernement gabonais en ont pris pour leur grade. Certains ont confié n’avoir jamais vu Ali Bongo Ondimba aussi remonté ! L’objet de la colère présidentielle ? Les ordures ménagères, encore et toujours entassées sur les trottoirs de Libreville, en dépit du renfort du génie militaire. Pis : la veille au soir, le chef de l’État était passé tout près d’une montagne de détritus, dans le nord de la ville, alors qu’il allait s’incliner devant la dépouille du général André Oyini, un ancien commandant de la Garde républicaine. Pourtant, Clean Africa, nouvelle société d’assainissement à capitaux majoritairement publics, a adopté, le 24 octobre, un plan ambitieux qui devrait mettre fin au problème des ordures. Sauf que… ses dirigeants ont omis d’en informer le président, et ce sont les ministres qui ont trinqué. l
JEUNE AFRIQUE
Retrouvez notre rubrique « Les indiscrets », consacrée aux informations confidentielles économiques, en page 99.
Politique, économie, culture & société
permanente dans le golfe de Guinée depuis 1990. Le plan de Paris est d’entrer en Centrafrique via le Cameroun, où la France dispose d’une mission de coopération militaire et de défense, pour ensuite aller sécuriser le nordouest du pays. L’Union africaine s’active également, et les effectifs de la Misca pourraient dépasser les 3 650 soldats initialement prévus. À lui tout seul, le Burundi ne devrait pas dépêcher 450 mais 800 hommes sur le terrain – des militaires dont le déploiement et l’équipement vont être financièrement pris en charge par le Congo-Brazzaville. Le Rwanda s’est lui aussi dit prêt à envoyer des troupes. l
sahélo-saharienne. Mais il a soigneusement évité tout échange direct avec les officiels marocains, et aucun entretien bilatéral n’a eu lieu. « L’Algérie était présente pour ne pas dire qu’elle était absente », lâche un diplomate marocain. Le réchauffement des relations Maroc-Algérie, ce n’est pas pour tout de suite…
JEUNE AFRIQUE
E
n attendant l’arrivée des renforts, Jean-Claude Lenga, ministre centrafricain des Droits de l’homme, était à Paris mi-novembre. Il s’est entretenu avec des responsables d’ONG ainsi qu’avec Claire Thuaudet, conseillère au Quai d’Orsay chargée des organisations internationales et des droits de l’homme. Objectif : faire en sorte que la Centrafrique soit l’une des priorités au sommet sur la paix et la sécurité en Afrique, organisé à Paris début décembre. l
membre fondateur du MNLA. Sans cela, nous ne survivrons pas et nous n’arriverons pas à canaliser les jeunes qui versent dans le banditisme et qui pourraient rejoindre
Aqmi [Al-Qaïda au Maghreb islamique] ». « Nous aurons trouvénosnouveauxchefsd’ici à quelques semaines », parie une autre source interne.
PRÉCISION
Suite à la publication de notre confidentiel (voir J.A. no 2757), la Banque mondiale nous fait savoir qu’en définitive aucun journaliste n’a été accepté à bord de l’avion qui a assuré, du 4 au 7 novembre, la tournée conjointe au Sahel de son président et des dirigeants des Nations unies, de l’Union africaine (UA), de la Banque africaine de développement (BAD) et de l’Union européenne (UE).
Institut du monde arabe Jack Lang n’est pas gratuit
MARTIN BUREAU/AFP
MALI LE MNLA SE CHERCHE UN CHEF
LesjoursdeBilalAgAcherifàla têteduMouvementnationalde libérationdel’Azawad(MNLA) sont comptés. Affaibli par les nombreuses dissensions qui minent le mouvement indépendantiste touareg, contesté poursonmanqued’expérience en matière de négociations, le secrétaire général n’a plus beaucoup d’autorité sur ses hommes. « Nous avons besoin de nous restructurer et de mettre des gens crédibles à la tête du mouvement, souffle un
Bangui fait jouer ses réseaux
MAROC VILLEPIN S’ACTIVE Presque dix ans après son départ du Quai d’Orsay, Dominique de Villepin est toujours très actif à l’étranger. Le 14 novembre, il était à Rabat où il est né. L’ancien diplomate, qui multiplie les missions de conseil, s’est discrètement entretenu avec le chef de la diplomatie marocaine, Salaheddine Mezouar. Quelques jours plus tôt, il avait été aperçu au pot de départ de l’ambassadeur du Qatar à Paris, un pays dont il est proche et avec qui il est en affaire.
LA RÉPUBLIQUE VERTUEUSE chère à François Hollande est décidément à géométrie variable. En janvier dernier, Jack Lang a pris la tête de l’Institut du monde arabe (IMA). Mais alors que ses prédécesseurs (en l’occurrence Dominique Baudis puis Bruno Levallois) avaient été simplement défrayés compte tenu des difficultés économiques de l’IMA, Jack Lang a, lui, exigé un salaire. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’il s’est aperçu, tardivement, que ce n’était pas prévu ! Appel à Laurent Fabius pour lui expliquer que, dans ces conditions, le poste ne l’intéressait plus ; embarras du ministre des Affaires étrangères… Résultat : Lang, qui a obtenu gain de cause, touche 10 000 euros par mois. Les économies attendront. l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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La semaine de Jeune Afrique
CEMAC
Obiang
fait bande
u Teodoro Obiang Nguema, le président équato-guinéen, le 14 juin à Libreville.
L’événement
GEORGES DOUGUELI,
C
Rien ne va plus à la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale. La Guinée équatoriale a décidé de ne pas appliquer l’accord de libre circulation des personnes et des biens signé en juin. Un mauvais coup pour l’intégration régionale.
envoyé spécial à Libreville
inq mois. C’est le temps qu’a mis la Guinée équatoriale pour revenir sur sa signature. Le 8 novembre, le gouvernement a annoncé qu’il n’appliquerait pas sur son territoire l’accord de libre circulation des personnes et des biens, signé en juin à Libreville et qui devait entrer en vigueur le 1er janvier 2014 dans l’espace de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). Se sentant libre de tout engagement, le président Teodoro Obiang Nguema décide donc de différer l’application de ce texte, qui prévoyait de supprimer l’exigence de visas aux frontières des États membres. Les capitales des pays voisins n’ont pas vu venir ce revirement. Pas plus que le président de la Commission de la Cemac, le Congolais Pierre Moussa, qui déclarait il y a une semaine dans J.A. (no 2757) « qu’à partir de janvier » il n’y aurait « plus de problème de visa pour les séjours de moins de trois mois ». Le coup est rude pour cette organisation sous-régionale qui entamait sa phase de redécollage après la crise centrafricaine. En plus de fragiliser l’esprit communautaire, cet épisode fâcheux va davantage saper la confiance: on sait désormais qu’une mesure, même solennellement adoptée en conférence de chefs d’État, peut être unilatéralement remise en cause. « Qui est le plus à blâmer dans cette affaire ? s’interroge un cadre de la Cemac. Les présidents qui ont pris le risque de voir leur autorité se déprécier, ou les experts qui, par manque de courage, les ont laissé aller plus vite que la musique en fixant l’échéance au 1er janvier alors que ce délai était manifestement impossible à tenir? »
à part
STEVE JORDAN/AFP
SILENCE GÊNÉ. De fait, le choix de janvier 2014 était
surréaliste. Car à ce jour, seuls le Cameroun et le Congo ont les moyens techniques de délivrer à leurs citoyens les passeports biométriques Cemac prévus par l’accord. Quant au modèle de visa destiné aux pays tiers, il n’a toujours pas été réalisé. Ce n’est pas tout. Les retards concernent également l’acquisition d’équipements électroniques ayant la capacité de « traiter » les passeports biométriques aux frontières de la communauté. Le silence gêné qui a suivi l’avanie infligée à ses pairs par le plus petit État – environ 700 000 habitants – de la communauté tient évidemment au caractère ultrasensible du sujet. D’autant que, dans cette communauté regroupant des pays n’ayant pas le même poids démographique ou économique, les mouvements de population sont un enjeu de politique intérieure potentiellement explosif. La volte-face de Malabo met notamment en difficulté Ali Bongo Ondimba, le président gabonais, partisan enthousiaste de l’ouverture des frontières. À contre-courant de son opinion, un tantinet frileuse sur ce chapitre, il a opéré un virage à 180 degrés par rapport à son prédécesseur. Sous Bongo père en effet, il n’est pas sûr qu’un tel accord aurait pu voir le jour. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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La semaine de J.A. L’événement Le Palais du bord de mer a changé de locataire, le Gabon d’époque. Tout à ses projets d’émergence, le nouveau chef de l’État voit loin et pense à l’aprèspétrole, une sombre perspective que les baisses de production de ces dernières années laissent entrevoir. Il a planifié la diversification de l’économie nationale et mise sur le marché commun en zone Cemac, dont la libre circulation des biens et des personnes constitue une étape incontournable.
BAUDOUIN MOUANDA POUR J.A.
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FLEGME. La peur de « l’autre » ? Bongo fils en sait
quelque chose, lui dont les collaborateurs « étrangers » sont la cible quasi quotidienne des tenants de la « préférence nationale » à la gabonaise… Pour dissiper tout malentendu, « Ali » a choisi la pédagogie : « Il ne faut pas confondre circuler et s’installer », expliquait-il, le 17 août, à ses compatriotes qui craignaient un afflux d’étrangers et, partant, l’explosion de la criminalité et du chômage. L’embarras est tout aussi grand au CongoBrazzaville et au Tchad. Nul ne sait si les autres pays membres garderont le cap en dépit de la défection de l’un des six. Même mutisme au Cameroun, avec qui la Guinée équatoriale partage 189 kilomètres de frontière terrestre. Les Camerounais sont depuis longtemps résignés à supporter stoïquement les sautes d’humeur de leur très susceptible voisin du Sud.Lepalaisd’Étoudiobserveavecunflegmeméritoire le manège des fermetures-ouvertures quasi trimestrielles de la frontière commune, au gré des faits divers, et conserve son calme lorsque l’opinion s’émeut des expulsions massives de Camerounais. Il a fallu l’enlèvement, le 7 octobre 2008, d’un opposant équato-guinéen réfugié au Cameroun, pour faire perdre patience à Yaoundé. Mais tout est vite rentré dans l’ordre. Plus que par la peur de l’étranger, Malabo est tenaillé par l’obsession sécuritaire et la phobie du complot. Depuis la découverte dans les années 1990 d’importantes réserves pétrolières et, plus récemment, de gros gisements gaziers, ce pays à moitié insulaire qui se sait riche a des réflexes de
p Le Congolais Pierre Moussa (au centre), président de la Commission de la Cemac, à Brazzaville, en octobre 2012.
Malabo est tenaillé par l’obsession sécuritaire et la phobie du complot.
LIBREVILLE MONTRE L’EXEMPLE TERRE D’IMMIGRATION faiblement peuplée et riche en ressources naturelles, le Gabon pourrait servir d’exemple rassurant à la Guinée équatoriale dans le domaine migratoire. Selon Jean-François Ndongou, le ministre gabonais de l’Intérieur, les Maliens, Béninois et autres Nigérians constituent les plus gros contingents d’immigrants subsahariens du pays. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Ils devancent les Camerounais et les Congolais, dont les États ont pourtant une frontière commune avec le Gabon. La proximité géographique n’est donc pas forcément un facteur « aggravant ». Dans la perspective de la libre circulation, Libreville mise sur la biométrie pour sécuriser son état civil et « tracer » toute personne présente sur le territoire. l G.D.
citadelle assiégée. Pas question de laisser entrer des hordes d’immigrés, fut-ce pour un séjour de trois mois. Depuis que la manne pétrolière abonde, plusieurs braquages ont été perpétrés. Plus grave, un coup d’État a été déjoué avec l’aide du Zimbabwe, en mars 2004. Ces menaces ont exacerbé la méfiance d’Obiang Nguema et accru sa propension à tout contrôler. Ainsi, au bout d’une longue guerre d’usure, le président a fini par obtenir la nomination d’un cadre équato-guinéen, Lucas Abaga Nchama, à la tête de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac), où son pays détient à lui seul environ 50 % des réserves de toute la sousrégion. Il a également des yeux et des oreilles au cœur de la Cemac, à Bangui : il a placé en 2012 à la vice-présidence de la Commission une très proche parente,RosarioMbasogoKungNguidang,fringante trentenaire anciennement directrice générale de l’intégration régionale. COUP DE CANIF. Qui s’étonne encore que, dix-neuf
ans après la création de la Cemac, la libre circulation des personnes et des biens ne reste qu’un projet, à l’instar d’Air Cemac dont le vol inaugural, annoncé à maintes reprises, n’a jamais eu lieu ? Ou que la Bourse des valeurs mobilières d’Afrique centrale et le Douala Stock Exchange s’éloignent l’un de l’autre plus qu’ils ne se rapprochent ? L’organisation sous-régionale est rattrapée par la réalité. L’intégration en Afrique centrale se résume à une suite de résolutions et d’accords peu ou pas suivis, mais jamais mis en œuvre. Confortée par sa puissance financière, l’ancienne colonie espagnole reprend donc crânement le chemin de l’isolement, d’où elle était sortie en 1984 pour rejoindre ses voisins francophones. Reste que cet ultime coup de canif au contrat pourrait provoquer des tendances scissipares et pousser les autres pays membres à rechercher de nouveaux partenaires – un rapprochement avec le Nigeria n’est plus exclu au Cameroun – ou à privilégier une approche bilatérale, consacrant ainsi l’échec de la communauté économique régionale. l JEUNE AFRIQUE
La semaine de J.A. Les gens
Karim Keïta Papa m’a pas dit
me protéger. Il m’a fallu une grande persévérance et l’intervention de la famille pour le faire plier. » Puis il a fait face à la fronde d’une partie des militants du Rassemblement pour le Mali (RPM) qui Le fils du président malien veut faire carrière en politique. ne voulaient pas de lui comme candidat. « On ne l’a jamais vu sur le terrain. Il n’a Oui, mais… IBK est réticent. Aux législatives, le candidat devra même pas sa carte du parti ! » déplore donc faire ses preuves tout seul. l’un d’eux. Karim Keïta lui-même admet que son l est jeune, né à Paris, il a vécu loin Première étape : l’Assemblée nationale. expérience politique est pour l’heure bien des terres familiales, il a le sens des Pour cela, Karim Keïta, qui a été investi maigre. Certes, cela fait plus de quatre ans affaires, des ambitions politiques… par l’alliance au pouvoir, devra se faire qu’il pense à se présenter à une élection et son père est président. Mais ce élire le 24 novembre, jour des élections et il a accompagné son père lors des deux Karim-là ne vit pas au Sénégal et n’est législatives, dans la circonscription de dernières présidentielles : en 2007, un pas le fils d’Abdoulaye Wade. an après son retour au pays, il À 34 ans, le fils d’Ibrahim avait mis sur pied des comités Boubacar Keïta (IBK) présente de soutien dans la capitale ; bien des similitudes avec celui cette année, il s’est occupé de qui croupit dans la prison du la logistique et a fait l’interface bord de mer de Dakar depuis avec l’agence chargée d’assuplus de six mois. rer la communication d’IBK. Pourtant, la comparaison lui Mais entre ces deux scrutins, paraît hors de propos. « Je ne il ne s’est guère fait remarquer, vois pas le rapport », confie-t-il trop occupé à se lancer dans la à Jeune Afrique, tout en assulocation de voitures et le conseil rant que les attaques dont il aux investisseurs (deux sociétés qu’il a baptisées à l’identique, fait l’objet depuis plusieurs semaines le laissent de marbre. Konijane, en couplant les noms de ses grands-mères). « FLAMBEUR ». Il est vrai que, « Fils à papa », « flambeur qui contrairement à Karim Wade, aime l’argent » : ses adversaires n’hésitent pas à forcer le trait. Karim Keïta n’a pas attendu d’être nommé par son père à Mais, comme pour son aîné un poste de conseiller pour sénégalais, c’est surtout sur faire son entrée en politique. ses années passées à l’étranger Après l’élection d’IBK en août, que ses détracteurs insistent la presse a évoqué cette possi– il a vécu en Belgique à partir du lycée puis au Canada bilité, parlant de Karim Keïta pour suivre des études de comme d’un « conseiller officommerce international. cieux extrêmement influent » qui aurait notamment eu son « Confions la commune II à mot à dire sur la composition ceux qui la connaissent, ceux p Né à Paris, cet homme d’affaires de 34 ans a vécu en Belgique et au Canada avant de rentrer au Mali. du gouvernement. « C’est mal qui y vivent au quotidien, et connaître mon père », rétorque non à des intrus qui s’en réclala commune II de Bamako. Là encore, l’intéressé, qui déclare voir rarement ce ment pour les besoins des législatives, rien ne lui a été donné. Il a d’abord dû dernier depuis son installation au palais alors qu’ils n’y habitent même pas », de Koulouba. batailler pour obtenir l’aval de son père. entend-on persifler dans les meetings. Avant de pouvoir prétendre à quoi « Il s’y opposait. Il ne voulait pas que je me Bienvenue en politique ! l RÉMI CARAYOL que ce soit, il devra donc faire ses armes. lance en politique. C’était une manière de
I
EMMANUEL DAOU BAKARY
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NOMINATIONS
MAHAMANE TOURÉ MALI Ce général a été nommé chef d’état-major général des armées par le président Ibrahim Boubacar Keïta, le 8 novembre. Son prédécesseur, Ibrahim Dahirou Dembélé, avait été nommé par le putschiste Amadou Haya Sanogo. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
CHARIF SIDI MOHAMMED EL ALAOUI MAROC Ce membre de la famille royale marocaine a été nommé chambellan de Mohammed VI, le 14 novembre. Il est le petit-fils de la princesse Lalla Fatima Zahra El Azizia et du prince Moulay El Hassan Ben El Mehdi. JEUNE AFRIQUE
EN HAUSSE 15
Blanchi des accusations de corruption, le leader ultranationaliste retrouve son poste de chef de la diplomatie israélienne. On s’en serait passé.
Le directeur de l’Orchestre symphonique de Kinshasa (le seul en Afrique centrale) a dirigé, le 13 novembre, l’Orchestre symphonique de Corée, lors du 40e anniversaire du Festival des arts de ce pays.
ERIC MYER
Avigdor Lieberman Au secours, il est de retour !
ARMAND DIANGIENDA WABASOLELE
YU HONG WEI Cette Chinoise naturalisée Malienne, aussi connue sous le nom d’Astan Coulibaly, sera candidate aux élections législatives du 24 novembre, à Ségou, où elle vit depuis près de trente ans. DR
L
MIA FARROW L’actrice américaine, 68 ans, a lancé le 14 novembre un appel à la communauté internationale pour venir en aide aux Centrafricains, « peuple le plus abandonné sur la terre » qui serait « au bord d’un génocide ».
DR
es sourires et accolades victorieuses de ses compères du Likoud venus spontanément le saluer à la tribune de la Knesset n’ont pas dissipé le malaise de nombreux députés pour qui Avigdor Lieberman ne mérite aucun traitement de faveur. Le 11 novembre, à l’issue d’une cérémonie éclair, seuls 62 d’entre eux (sur 120) ont approuvé sa réintégration au poste de ministre des Affaires étrangères, moins d’un an après que des accusations de corruption l’ont contraint à quitter prématurément la vie politique. Juste avant le vote décisif, certains parlementaires ont émis de vaines protestations. « C’est comme placer une bombe dans le processus de paix, s’est écriée Zehava Gal-On, une députée d’opposition, au milieu du chahut. C’est le signe qu’Israël n’est pas tourné vers la paix ».
TSAR. Au sein du parti travailliste, la nomination de EN BAISSE
AKON
DR
Lieberman inspire le même désarroi. « Il a prouvé qu’il était le pire ministre des Affaires étrangères de l’histoire d’Israël, et c’est un individu qu’aucun pays occidental n’accepte comme interlocuteur », s’indigne l’ancien ministre Itzhak Herzog, inquiet pour l’image de son pays. Avec son franc-parler agressif et son comportement autoritaire, le leader russophone de 55 ans n’a en effet rien d’un diplomate raffiné. Ses positions radicales et ses propos quasi fascisants à l’égard des Palestiniens l’ont largement discrédité sur la scène internationale. Le retour au premier plan du « tsar » était pourtant attendu après l’abandon des poursuites judiciaires à son encontre. À la faveur d’un accord électoral conclu en début d’année, Benyamin Netanyahou s’était engagé à lui garder une place de choix dans sa coalition. « Il m’a manqué », a d’ailleurs confié le Premier ministre. l MAXIME PEREZ, à Jérusalem
Le chanteur américanosénégalais a affirmé que « les hommes étaient des reproducteurs par nature » qui « ne peuvent échapper » à l’infidélité, contrairement aux femmes qui seraient « faites pour n’avoir qu’un partenaire ». FC ZURICH Le club de football suisse a été condamné par la justice à verser l’équivalent de 255 000 euros à la famille d’Anthony Joseph Isibor, un joueur nigérian licencié en 2002 parce qu’il était séropositif. Le jeune homme est décédé en juin dernier.
q Brutal, autoritaire et… hostile au processus de paix.
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EMIL SALMAN/NEWSCOM/SIPA
CHARLES AZNAVOUR
JEUNE AFRIQUE
Le chanteur français (89 ans) a avoué, le 12 novembre, avoir remis de « l’argent liquide » à des hommes politiques « de gauche, de droite et du centre » susceptibles de lui « arranger le coup » dans ses contentieux avec le fisc. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
ILS ONT DIT
La semaine de J.A. Décryptage
« Mon procès marque sans doute le point de départ du processus [visant à interdire] les mariages précoces. Des filles ont entendu mon histoire, et m’ont dit : “Tu es notre porte-parole, on s’est libérées grâce à toi”. » NOJOUD ALI Jeune Yéménite de 15 ans, figure du combat contre le mariage forcé (elle a obtenu son divorce à 10 ans)
« Nous ne sommes pas des supplétifs. C’est la France qui est chez nous, pas l’inverse. » MOUSSA AG ACHARATOUMANE Chef rebelle touareg du MNLA
«
Elle est chelou, Carla Bruni, j’ai trouvé. Elle se fait filmer à rien faire de la journée… En fait, elle fait de la téléréalité, comme moi. »
NABILLA Vedette du petit écran, en France
« Il en va des œuvres d’art
VINCENT FOURNIER/J.A.
comme des femmes : si vous tombez amoureux trop vite, ça vous coûte trop cher. » DMITRI RYBOLOVLEV Milliardaire russe, patron de l’AS Monaco
«
La France a toujours été raciste. Sauf qu’il y a eu un moment où, le racisme n’étant pas une opinion mais un délit, les gens en avaient honte et en parlaient sous le manteau. Aujourd’hui les langues se sont déliées. » KOFI YAMGNANE Ancien secrétaire d’État en France, qui veut briguer la présidence du Togo en 2015
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Buzz télé Nazillon arc-en-ciel ADAM REYNOLDS/CORBIS
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CRAIG COBB est à 14 % Subsaharien. Ce sont ses gênes qui le disent, à travers un test ADN. Le problème, c’est que Craig est aussi… un suprémaciste blanc, néonazi à ses heures. Cet Américain de 62 ans a récemment défrayé la chronique en affirmant qu’il voulait faire d’une petite ville du Dakota du Nord une « enclave blanche » et qu’il avait « le racisme pour religion ». La « terrible nouvelle » lui a été annoncée le 11 novembre, lors d’un talk-show. « Mon petit trésor, tu as un peu de noir en toi ! », lui a lancé Trisha Goddard, l’animatrice de l’émission, qui en plus d’être moqueuse… est noire. Imaginez le choc. Ou, plutôt, le naufrage télévisuel… En trois
actes. D’abord, le balbutiement : drôle, mais gênant, même pour le public. Puis, face à l’hilarité générale sur le plateau, l’exaspération discrète, mais réelle : « Attendez, attendez, une minute », bredouille-il. Et enfin le déni : « C’est du bruit statistique ! », dit-il, avant d’ajouter, dans un sursaut désespéré : « L’huile et l’eau ne se mélangent pas. » Tordant. Interrogé par la suite par le quotidien britannique Daily Mail, il expliquera : « J’ai accepté de faire ce test car je croyais que c’était de la science. Mais c’était de la science bidon, utilisée par une télévision sensationnaliste promouvant le multiculturalisme ». Allez, encore un petit effort, Craig ! l HABY NIAKATE
Afrobaromètre Hou, les ripoux! QUEL EST LE PAYS LE PLUS corrompu du continent? La Somalie, indiquait l’an dernier le célèbre Indice de la perception de la corruption de l’ONG Transparency International (TI). Mais pour l’équipe de chercheurs indépendants d’Afrobaromètre, qui a publié une nouvelle étude le 13 novembre, c’est… le Nigeria. Et il y a d’autres différences entre ces deux organismes. Ainsi, selon Afrobaromètre, l’Algérie fait partie des pays les moins corrompus (31e sur les 32 étudiés), à l’opposé du Mali (3e le plus corrompu, derrière le Cameroun). Deux pays pourtant classés ex æquo par TI… En réalité, les méthodes diffèrent. TI s’appuie sur des « experts » et s’intéresse à la perception de la corruption par les milieux d’affaires, alors qu’Afrobaromètre a réalisé des sondages auprès d’un échantillon représentatif de 51 000 personnes, entre 2011 et 2013. Son étude dévoile donc davantage le ressenti des Africains, quelle que soit leur catégorie socioprofessionnelle. Et, pour 54 % d’entre eux, leur gouvernement lutte « très mal » ou « assez mal » contre ce fléau. Il y a dix ans, ils n’étaient que 46 % à exprimer cette opinion. Autre enseignement de l’étude : la corruption affecte surtout les plus pauvres. Ainsi, 18 % de ceux qui ont parfois du mal à se nourrir (contre 12 % de ceux qui mangent à leur faim) déclarent avoir dû payer pour recevoir des soins. Au total, le tiers des personnes interrogées avouent avoir versé au moins un pot-de-vin au cours de la dernière année, par exemple pour obtenir un document administratif ou éviter un problème avec la police. C’est d’ailleurs cette institution qui est perçue comme la plus corrompue : 43 % des sondés estiment que « tous » les policiers ou « la plupart » d’entre eux sont véreux, loin devant PIERRE BOISSELET les présidents et leurs conseillers (24 %). l JEUNE AFRIQUE
La semaine de J.A. Décryptage JEUNEAFRIQUE.COM
INFOGRAPHIE
Raja Casablanca, JSK, TP Mazembe… En Afrique comme en Europe, certains clubs de football sont de véritables institutions. Tour d’horizon de ces formations qui dépassent la simple entreprise sportive.
INTERVIEW
Edmond Mulet, sous-secrétaire général des Nations unies chargé des opérations de maintien de la paix : « Plus on attend, plus la réponse à la crise en Centrafrique sera difficile et coûteuse. »
FOCUS
Les associations de blogueurs se multiplient en Afrique francophone.
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@ Plongée au cœur de la nébuleuse des cybercitoyens, qui conjuguent web et politique.
À LIRE AUSSI Recrutement : Les multinationales s’arrachent les manageurs africains
N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
u Le chef de la diplomatie marocaine (à dr.) avec Mohamed Abdelaziz, son homologue libyen, à Rabat, le 14 novembre.
JOAN TILOUINE
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Salaheddine Mezouar « Attaquer le terrorisme à la racine »
I
l a été nommé, le 10 octobre, ministre des Affaires étrangères du Maroc. Sur le bureau de Salaheddine Mezouar, 60 ans, patron du Rassemblement national des indépendants, des dossiers sensibles, comme le risque terroriste au Sahel et les tensions avec l’Algérie, avivées par les récentes déclarations d’Abdelaziz Bouteflika sur la question des droits de l’homme au Sahara. J.A. l’a rencontré à l’issue de la réunion sur la sécurisation des frontières au Sahel, qui s’est tenue à Rabat le 14 novembre. JEUNE AFRIQUE: Votre arrivée à la tête de la diplomatie chérifienne a été controversée. Que répondez-vous à ces critiques? SALAHEDDINE MEZOUAR : Ministre
pendant près de dix ans [de l’Industrie, de l’Économie et des Finances], je suis rompu aux arcanes gouvernementaux. Notre politique étrangère a une orientation très claire, ce qui facilite ma tâche. Naturellement, chaque ministre apporte sa touche personnelle. Je souhaite pour ma part mettre l’accent sur la diplomatie économique. Quel rôle le Maroc veut-il jouer dans la sécurisation du Sahel ?
Le roi est impliqué personnellement. Sa visite au Mali l’a démontré. Le travail que nous faisons avec nos frères libyens, en mettant à leur disposition nos moyens,
notre expertise et nos connaissances, prouve notre engagement. Le Maroc joue un rôle éminent dans la région, et plus largement en Afrique, où il participe aux missions de maintien de la paix en Centrafrique et en RD Congo. Nous agissons sur trois fronts. D’abord dans le cadre d’actions de sécurisation et de formation des personnels dans les pays du Sahel. Ensuite en matière de sécurité culturelle et cultuelle. Enfin en faveur du développement. On sait combien les actions visant à améliorer le quotidien des populations sont cruciales: elles privent le terrorisme du terreau sur lequel il prospère. Fin octobre, le président Bouteflika a dénoncé dans des termes très vifs les « violations massives et systématiques » des droits de l’homme dans « les territoires occupés » du Sahara. Ces propos vous ont-ils surpris ?
C’est devenu une habitude… Mais ces accusations ne peuvent être étayées. Les droits de l’homme sont les mêmes dans le nord et dans le sud du pays. Le Maroc est un État de droit et se comporte comme tel. Il avance et engage des réformes, ce qui n’est pas le cas de l’Algérie. La situation des Sahraouis à Tindouf est une tragédie. Que fait l’Algérie pour y remédier? Tant que ce pays n’assumera pas ses responsabilités, le problème perdurera. l Propos recueillis à Rabat par JOAN TILOUINE JEUNE AFRIQUE
Genève, 17-19 mars 2014
2E ÉDITION
Le forum des dirigeants des grandes entreprises africaines UNE PLATEFORME EXCEPTIONNELLE DE RENCONTRES. UN OUTIL STRATÉGIQUE POUR DÉVELOPPER VOTRE ACTIVITÉ EN AFRIQUE ET À L’INTERNATIONAL.
INSCRIPTIONS ET INFORMATIONS : WWW.THEAFRICACEOFORUM.COM Ils participent au AFRICA CEO FORUM
MARIA LUISA ABRANTES DG, Angola Investment Agency (ANIP)
DIAMOND
JEAN KAKOU DIAGOU Président, Fédération du Patronat Ouest Africain
MOULAY HAFID ELALAMY Ministre de l'Industrie et du Commerce (Maroc)
PLATINUM
DONALD KABERUKA Président, Banque Africaine de développement
KOLA KARIM PDG, Shoreline Group (Nigeria)
JEAN-PHILIPPE PROSPER Vice-président, IFC
GOLD
ISAAD REBRAB Président, Cevital (Algerie)
VALENTINE TEWOLDE ALBERT YUMA SENDANYOYE GEBREMARIAM MULIMBI RUGWABIZA Président, Président du conseil PDG, Rwanda Ethiopian Airlines d'administration, Development Board (Ethiopie) Gécamines (RD Congo)
PARTNERS
AWARDS
GALA DINNER Islamic Corporation for the Development of the Private Sector
ORGANISATEURS
La semaine de J.A. Décryptage
Maroc Posez les valises! Fini les affres de la clandestinité ? Entre 25 000 et 40 000 sans-papiers entrevoient une lueur d’espoir : le gouvernement annonce pour 2014 une campagne de régularisation.
P
our les autorités marocaines, il s’agit d’une opération « exceptionnelle ». Le 11 novembre, lors d’une conférence de presse à Salé, Mohamed Hassad, le ministre de l’Intérieur, et Anis Birou, le ministre des Affaires de la migration, ont présenté les grandes lignes d’une importante campagne de régularisation de sans-papiers, qui se déroulera tout au long de 2014. Entre 25 000 et 40 000 clandestins – pour la plupart originaires d’Afrique subsaharienne – seraient aujourd’hui présents dans le royaume. Sans préciser combien de personnes seraient concernées par cette vague de régularisations, les deux ministres ont détaillé les différentes mesures qui seront mises en œuvre dans le cadre de cette nouvelle politique migratoire. CRITÈRES. Des « bureaux des étrangers »
devraient être créés dans chaque préfecture pour traiter les demandes, et une « commission nationale de recours » sera instaurée. Quant aux quelque 850 migrants reconnus comme demandeurs d’asile par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), LE DESSIN DE LA SEMAINE
FADEL SENNA/AFP
Manifestation en faveur des droits des migrants, à Rabat, fin 2012.
ils seront automatiquement régularisés. Les autres devront répondre à plusieurs critères : nombre d’années de résidence, situation légale de leur conjoint ou de leurs parents, existence d’un travail rémunéré depuis au moins deux ans… « C’est une mesure positive mais insuffisante, réagit Khadija Ainani, de l’Association marocaine des droits humains. La majorité des migrants n’ont aucun papier, travaillent dans le secteur informel et ne pourront donc rien prouver. » Ancienne zone de transit devenue terre d’accueil, le Maroc a été récemment critiqué par les ONG internationales de défense des droits de l’homme pour la manière dont il traite les clandestins. Après la remise d’un rapport alarmant du Conseil national des droits de l’homme, le roi Mohammed VI avait admis, en septembre, l’existence de « préoccupations légitimes » et appelé à gérer les questions migratoires de manière plus humaine. Dès le lendemain, le gouvernement Benkirane annonçait qu’une nouvelle politique verrait le jour. C’est aujourd’hui chose faite. l BENJAMIN ROGER
Toles • The Washington Post • États-Unis
AFGHANISTAN SOS DÉTRESSE
EN 2005, GEORGE W. BUSH chantait les louanges des Irakiens qui « ont risqué leur vie » aux côtés des États-Unis. « Nous ne devons pas les laisser tomber », assurait-il. Huit ans plus tard, des milliers d’entre eux attendent toujours le visa promis.Tout comme les Afghans qui servent aujourd’hui comme interprètes ou cadres administratifs et dont la sécurité (et celle de leur famille) n’est pas assurée sur place. En un an, 1 600 Afghans et 3 600 Irakiens ont obtenu un visa spécial. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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JEUNE AFRIQUE
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La semaine de J.A. Décryptage
ONU Quatuor dissonant
périodiquement, il vient de procéder à une vague d’expulsion d’immigrés éthiopiens, dans des conditions inhumaines et dégradantes (lire p. 55). La Russie, quant à elle, a rejoint le Conseil alors que la communauté internationale se mobilisait en faveur des militants de l’ONG Greenpeace, arrêtés en septembre pour avoir mené une action pacifique sur une plateforme de l’Arctique. Accusés de « piraterie » maritime, ils risquent jusqu’à quinze ans de prison. Les opposants au régime de Vladimir Poutine sont incarcérés, et les médias font régulièrement l’objet de menaces.
La Chine, la Russie, l’Arabie saoudite et Cuba ont été élues au Conseil des droits de l’homme des Nations unies. Problème : ces quatre États sont loin d’être exemplaires.
CALCUL. La situation n’est guère plus
NATALIA KOLESNIKOVA/AFP
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p Les Pussy Riot, à Moscou, en octobre 2012. Pour avoir brocardé le président Poutine, deux d’entre elles croupissent dans des camps de travail.
À
partir du 1er janvier prochain, l’Arabie saoudite, la Chine, Cuba et la Russie auront pour mission de protéger et de promouvoir les droits de l’homme dans le monde. Ce n’est pas une plaisanterie, mais une décision on ne peut plus sérieuse. Elle émane de l’Assemblée générale des Nations unies, qui, le 12 novembre, a élu ces pays (et, par ailleurs, quatre pays africains : le Maroc, l’Algérie, l’Afrique du Sud et la Namibie) au Conseil des droits de l’homme, l’une des grandes institutions onusiennes basées à Genève.
Aux côtés des 43 autres membres du Conseil, ces quatre nouveaux venus au profil atypique seront habilités à évaluer l’état des libertés sur les cinq continents et, pendant au moins trois sessions ordinaires annuelles, à étudier les éléments d’information présentés par les ONG et les États. Mais avec quelle légitimité ? PALMARÈS. L’Arabie saoudite a été élue
au moment où ses ressortissantes se battaient pour obtenir le droit de conduire une voiture. Le royaume caracole en tête du palmarès mondial des exécutions capitales. Et, comme cela arrive
brillante à Cuba ou en Chine, qui poursuit une campagne de répression au Tibet et emprisonne les dissidents. À La Havane comme à Pékin, l’accès à internet est étroitement surveillé. Que visent donc ces pays en siégeant au Conseil des droits de l’homme ? Car, comme le précise son texte fondateur, « les États membres sont soumis à une procédure d’examen périodique au cours de leur mandat pour s’assurer qu’ils respectent eux-mêmes les normes qu’ils sont chargés de défendre ». Pour les ONG, le but des quatre nouveaux membres est clair : prendre en otage le Conseil, bloquer ses travaux et multiplier les manœuvres dilatoires. Calcul ou pas, leur entrée dans ce cénacle a déjà fait une victime : les Nations unies, dont la crédibilité est sérieusement affectée, alors que son impuissance à protéger les populations civiles en Somalie ou en RD Congo avait déjà entamé la confiance que les citoyens placent en elle. L’institution n’est plus aujourd’hui perçue que comme une grosse machine, peu efficace, dépensière et pléthorique. Ce n’est pas cette étrange élection qui contribuera à améliorer son image. l SEIDIK ABBA
À SUIVRE LA SEMAINE PROCHAINE
24 - 26 NOVEMBRE À Mombasa (Kenya), 45e assemblée générale de l’Association des compagnies aériennes africaines (Afraa). Thème abordé : « La stratégie d’adaptation de l’Afrique à l’heure des défis ». N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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NOVEMBRE 13e Festival international du film de Marrakech (jusqu’au 7 décembre). Quelque 110 longsmétrages représentant 23 nationalités seront projetés.
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NOVEMBRE À Paris, Afric’Talents 2013, forum de recrutement de manageurs pour l’Afrique. Plus d’un millier de jeunes diplômés et de cadres expérimentés sont attendus. JEUNE AFRIQUE
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Au cœur d’un marché de 300 millions de personnes
✔ Carrefour ✔ Un
international d’échanges portuaires et aériens
pôle d’attraction favorable au commerce et à l’industrie
✔ Plateforme
financière et d’investissement d’une grande efficacité
DIFCOM Creapub Paris - Photos : Olivier / F. Jouval / N. Robet pour JA / Fotolia
Pour rayonner sur l’Afrique de l’Ouest
La semaine de J.A. Tour du monde l’expérience. Profitant d’une garden-party chic, il a remis à Akihito une lettre l’informant des conséquences sur la santé des enfants des retombées radioactives de la catastrophe de Fukushima, déclenchant aussitôt un tsunami de protestations scandalisées. Au Japon, l’empereur a longtemps bénéficié d’un statut divin. Personne n’avait eu l’outrecuidance de lui remettre une lettre depuis 1901.
A. MAJEED/FILES/AFP
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Le chiffre
p Le mollah Fazlullah, nouveau leader du principal groupe taliban pakistanais. PAKISTAN
Tremblez, voici « Mollah Radio »!
C
hef du Tehrik-e Taliban Pakistan (TTP), Hakimullah Mehsud a été récemment abattu par un drone quelque part dans les zones tribales du NordWaziristan, mais il n’est pas sûr que les Américains aient des raisons de s’en féliciter. Car son successeur est encore plus radical, pugnace, cruel et fanatique que lui ! Et surtout, il est farouchement opposé à toute négociation avec l’État pakistanais – ce qui n’augmente pas les chances de restauration de la paix civile – et il traîne comme un boulet un lourd contentieux avec les militaires. Le mollah Fazlullah gagna le surnom de Mollah Radio au temps où il enflammait les ondes par ses imprécations dans la vallée de Swat, magnifique région du nord du pays, dont le TTP avait pris le contrôle en 2007 et dans laquelle il faisait régner la terreur islamiste. Délogé par les militaires deux ans plus tard, Fazlullah a trouvé refuge de l’autre côté de la frontière, en Afghanistan, mais ses hommes poursuivent, plus discrètement, leurs exactions à Swat. L’an dernier, ils ont tenté d’assassiner la jeune Malala Yousafzai, aujourd’hui réfugiée à Londres et lauréate du prix Sakharov. l ARGENTINE
Retour en douceur OPÉRÉED’UNHÉMATOMEcrânien le 8 octobre, la présidente Cristina Kirchner a été autorisée par ses médecins à reprendre ses activités à compter du 18 novembre. Mais son retour devra se faire progressivement, sans provoquer de stress. Jusqu’au 8 décembre, date à laquelle elle subira de nouveaux examens, elle a par exemple interdiction de N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
prendre l’avion. Son absence et la forte poussée de l’opposition aux législatives du 27 octobre ont considérablement affaibli son gouvernement. JAPON
L’empereur et l’écolo AU JAPON, mieux vaut éviter de s’adresser à l’empereur sans y être invité. Fervent militant antinucléaire, le député Taro Yamamoto vient d’en faire
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MILLIONS DE DOLLARS (106 millions d’euros) : le prix de vente record, le 12 novembre chez Christie’s, à New York, d’un triptyque du grand peintre britannique Francis Bacon (19091992) intitulé Trois Études de Lucian Freud. Peintre lui-même, ce dernier était le petit-fils de l’inventeur de la psychanalyse.
BRÉSIL
Trop généreux, Lula LA JUSTICE a retiré à Luís Cláudio Lula da Silva, fils de l’ancien chef de l’État brésilien, le passeport diplomatique qui lui avait été indûment attribué. En 2011, la presse ayant révélé que 328 personnalités religieuses et politiques s’étaient vu remettre un tel document quelques jours avant la fin du mandat de leur protecteur, une enquête avait été ouverte. Lors de leurs déplacements, les amis de Lula bénéficiaient ainsi depuis trois ans d’un traitement de faveur alors qu’ils n’étaient chargés d’aucune mission officielle. JUSTICE
Cambodge: 2 Thaïlande: 0 C’EST UNE VICTOIRE pour toutes les nations », a estimé le ministre de l’Information cambodgien, le 12 novembre, tandis que, dans les rues de Phnom Penh, une foule survoltée hurlait « On a gagné ! » Résultat d’un match de foot ? Non, jugement de la Cour internationale de justice (CIJ). Cette dernière JEUNE AFRIQUE
ARRÊT SUR IMAGE
Atsushi Takedazu • Sipa
PHILIPPINES
Chaos à Tacloban CETTE PHOTO D’APOCALYPSE a été prise à Tacloban, principale ville de l’île de Leyte, dans l’archipel des Philippines, le 12 novembre, après le passage du typhon Haiyan. Combien de victimes ? Impossible à dire avec précision. Quatre mille au moins, et sans doute bien davantage. « Il y a tellement de cadavres, dans tellement d’endroits, ça fait peur », a commenté Alfred Romualdez, le maire de la ville martyre.
vient en effet d’attribuer au Cambodge, au détriment de la Thaïlande, un promontoire rocheux de 4,6 km2 sur lequel est perché le temple de Preah Vihear, un chef-d’œuvre architectural du XIe siècle. Le problème est qu’elle l’avait déjà fait en 1962. Et que, dans l’intervalle, le différend frontalier a fait plusieurs dizaines de morts et des milliers de déplacés. ÉTATS-UNIS
À la santé d’Obama L’OBAMACARE plombe le président américain. Le lancement, le 1er octobre, des sites internet permettant au public de souscrire des polices d’assurance santé subventionnées a tourné au fiasco. Seules 106 000 personnes sans couverture maladie ont souscrit une assurance en octobre, cinq fois moins que prévu. Ils doivent être 7 millions d’ici au 31 mars 2014 pour assurer le succès de la loi… Du pain bénit pour les JEUNE AFRIQUE
républicains, qui tirent à boulets rouges sur Obama. Par ailleurs, le président vient de s’excuser auprès de certains Américains ayant perdu leur couverture maladie en raison de la loi. Une conséquence que personne n’avait vu venir, pas même la Maison Blanche… VATICAN
Les tueurs sont lâchés LE PAPE FRANÇOIS est en danger, parce qu’il gêne la mafia. Si les parrains en ont le pouvoir, ils tenteront de l’arrêter. » Tel est le cri d’alarme lancé le 13 novembre dans le quotidien italien Il Fatto quotidiano par le procureur Nicola Gratteri, grand spécialiste de la ’Ndrangheta, la puissante mafia calabraise. Qu’est-ce que les tueurs reprochent au Saint-Père? Apparemment, sa tentative de remettre de l’ordre dans
les finances de l’Église. Et singulièrement, à l’Institut pour les œuvres de religion (IOR), la banque du Saint-Siège, qui, selon le magistrat, serait utilisée pour blanchir l’argent du grand banditisme. VENEZUELA
Maduro contre les spéculateurs DEPUIS QUE, pour juguler une inflation record, Nicolás Maduro a annoncé une baisse comprise entre 50 % et 60 % des prix de l’électroménager, les magasins sont pris d’assaut, et parfois pillés. Le président accuse les importateurs d’acheter des produits au cours officiel du dollar, puis de les revendre au cours parallèle, huit fois plus élevé. Bref, de spéculer. Plusieurs d’entre eux ont été arrêtés. Prochains secteurs promis à un assainissement du même genre: le textile et l’automobile. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Grand angle
ÉLECTIONS
PARTIRA? PARTIRA PAS? Kabila, Kagamé, Sassou Nguesso, Sirleaf, Boni Yayi… Ils sont douze chefs d’État confrontés au même choix : s’en tenir à la Constitution et ne pas briguer un nouveau mandat ou tenter de la réformer. Au premier rang d’entre eux, Blaise Compaoré, personnalité incontournable dans la région.
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eu de dupes ? Poker menteur plutôt, tant la part de bluff y est prépondérante. Ils sont une bonne dizaine de chefs d’État en exercice qui, au cours des quatre années à venir, vont être confrontés au dilemme suivant : quitter la partie (le pouvoir) comme le stipule la règle en vigueur (la Constitution) ou tenter de garder la main et de réussir la quinte de six, en l’espèce se faire réélire, quitte à modifier la loi. Les stratégies de ceux d’entre eux chez qui la tentation du maintien au pouvoir l’emporte sur celle de la retraite politique divergent selon les pays, les modèles applicables (Robert Mugabe, José Eduardo dos Santos, Idriss Déby Itno, Yoweri Museveni, Paul Biya, Teodoro Obiang Nguema et quelques autres ont ainsi déjà contourné à leur manière l’obstacle de la limitation des mandats) et bien sûr le rapport des forces internes. Mais le noyau dur tactique est toujours le même : ne dévoiler ses intentions qu’à l’ultime minute, s’avancer masqué, jurer que l’on respectera la Constitution (l’emploi du futur est ici crucial, car il s’agira de l’amender ou d’en changer) et laisser le moment venu le peuple « exiger » votre candidature. L’argumentaire des partisans de l’alternance obligatoire au sommet est connu, rodé et quasi imparable : il s’agit là d’une condition sine qua non de l’État de droit. Dans ces colonnes, Béchir Ben Yahmed défendait il y a peu la règle des quinze ans au pouvoir, une décennie et demie au-delà de laquelle « le régime patine » et le chef devient progressivement « le jouet de son entourage ». Ce à quoi les présidents soucieux de rempiler rétorquent que leur départ causerait plus de problèmes qu’il n’en résoudrait, que leurs pays sont encore fragiles, leurs
opposants revanchards, leur succession mal assurée et le chaos à leurs portes. Une peur du vide en somme, qui ne laisse indifférents ni les investisseurs, ni les sécurocrates occidentaux obsédés par l’extension des zones grises criminogènes, du Sahel à la Somalie en passant par la Centrafrique. Là aussi, la plaidoirie est éprouvée. Ce qui est nouveau en revanche, c’est qu’elle est prononcée avec plus de vigueur et moins de complexes qu’auparavant par les chantres d’une « nouvelle » Afrique, qui doit à l’intrusion massive de la Chine, de l’Inde, du Brésil, des émirats du Golfe et de la Turquie non seulement le dynamisme de ses taux de croissance, mais aussi la conviction de pouvoir parler avec l’Occident en position de force. Pour le Burkinabè Blaise Compaoré, premier de cordée parmi les « poids lourds » à affronter l’échéance fatidique et dont le pays fait un peu figure de cas d’école, comme pour ses collègues du syndicat des présidents africains, les leçons de morale et de bonne gouvernance d’un Occident en perte de vitesse pèsent désormais moins lourd que la non-ingérence et la neutralité positive des nouveaux partenaires au développement de l’Afrique. Dans la perspective d’un passage en force constitutionnel, cette réalité-là compte, le seul paramètre non maîtrisable demeurant la capacité (ou la volonté) des peuples à s’opposer aux projets de ceux qui projettent de continuer à les diriger. À la lecture des pages qui suivent, une prévision paraît toutefois assurée : ce n’est pas encore demain que le fameux prix Mo-Ibrahim, destiné à récompenser un chef d’État exemplaire ayant démocratiquement cédé le pouvoir, avec rente à vie à la clé, pourra être de nouveau décerné… l FRANÇOIS SOUDAN
ILLUSTRATION : CHRISTOPHE CHAUVIN POUR J.A.
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Grand angle Élections
Onze hommes, une femme, un même dilemme La loi fondamentale de leur pays leur interdit en principe de se représenter. À moins qu’elle ne change…
UE
MOZAMBIQUE
NAMIB
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Armando Guebuza
Hifike Lucas punye Poham ba 78
70 ans
TORALE ÉCHÉANCE ÉLEC
ans
avril 2014 Article 147 : ident andat du prés La durée du m ans. nq ci ue est de de la Républiq ne ue iq bl pu la Ré Le président de is. fo e ul se ne ’u qu peut être réélu o, la tête du Frelim Réélu en 2012 à a uz eb r, Armando Gu parti au pouvoi s pa ra ne brigue a annoncé qu’il dat. Pourtant, an m e de troisièm mpris dans son beaucoup, y co ions êtent des intent entourage, lui pr ute. do le tenant ainsi contraires, entre
TANZA
CENTRAFRIQ
ÉCHÉAN CE ÉLEC TORALE
novem Article bre 20 2 14 Le man 9 : dat du préside cinq an nt s. exercer Une personn est de e ne peu les fonc tions plu t manda ts. s de deu x
Son pré décess eur Sam avait br Nujoma igué et rempor mandat, té un tro après a isième voir mo Constitu difié la tion. Ma is Pohamb Hifikepu aa nye Luc as respectu pparaît comm e un ho eux des mme lois qui, n’envisa semble ge -t-il contesté pas de prendr e le che , de son min aîné.
Michel Djotodia 64 ans
TORALE
ÉCHÉANCE ÉLEC
début 2015
le 1 : breville. Artic Accords de Li en ue iq bl la Répu Le président de r te en és pr re ut se fonction ne pe le 6 : mandat. Artic e tr au un ur po les e qu i ns istre ai le Premier min ment ne er uv go du es autres membr peuvent être de transition ne tion prochaine élec candidats à la présidentielle.
ia ur Michel Djotod Pas question po Il . 15 20 en lui-même de succéder à de e nc lla ei rv ute su est sous très ha et il internationale té au un m la com aurait hypothèse il n’ sait qu’en toute la nt d’être élu, ta aucune chance pulaire. Séléka est impo
NIE
a Jakay te e w Kik
BURKINA FASO
63 ans
TORALE
CE ÉLEC
ÉCHÉAN
e 2015 octobr : our 40 et 42 poste p Article ent occupe le Nul ne . s id Le prés de de cinq an x fois. io u une pér élu plus de de e tr ê t u pe
ya 05, Jaka mbre 20 e e r c é tu d ta n Élu e une s a acquis gionale. Il te e w Kik nu us-ré r, soute le et so de reste t son nationa té n te cen être ui avan pourrait tisans q et ses bons r a p s e par s 3 ans) âge » (6 du président « jeune le ée a . L’esc sa tourn résultats Obama lors de ar p e in perçu e a été américa u iq fr t. r A u ve t en de juille me un fe es com h c o r p ses
Blaise Compaoré 62 ans ÉCHÉANCE ÉLECTORALE
novembre 2015 novembre 2015 Article 37 : Le président est élu pour cinq ans au suffrage universel direct, égal et secret. Il est rééligible une fois.
BÉNIN Thoma Boni Y s ayi 61 ans
ÉCHÉAN
CE ÉLEC
mars 2
TORALE
016 Article 42 : Le prés id élu au s ent de la Répu u b pour un ffrage univers lique est el Blaise Compaoré esquive toute renouv mandat de cin direct elable u q question sur ce sujet brûlant. Selon ne seule ans, fois. de bonnes sources, après avoir Thomas longtemps hésité, il serait presque Bon à François i Yayi a juré au décidé à se représenter. Au forceps ? pape, Holland Obama e et à B qu’il ne arack s e repré Quelles sentera qu it pas. sera dif e soient ses en ficile de v se dédir ies, il lui tels ser e après ments – de publics qui plus est.
CONGO -
BRAZZ A
Partira ? Partira pas ?
VILLE
Denis Sasso Nguesu so 70 ans
ÉCHÉAN
CE ÉLEC TORALE
juillet 2 Article 016 57 : Le prés ident d e la Rép est élu p ubli our sep t ans au que univers suffrage el direc t. Il est une fois rééligib . le Denis S assou N guesso pas pro ne s’est noncé. Mais sa est de p candida lus en p ture lus comme probable considérée . Via un constitu réfé tio de régim nnel sur un cha rendum ngemen e? t
RWANDA
RD CONGO
Paul Kagamé
Joseph Kabila
56 ans
42 ans
ÉCHÉANCE ÉLEC
juillet 2017
TORALE ÉCHÉANCE ÉLEC
16 décembre 20
0: 70 Article 7 est la République Le président de ct re di l se univer élu au suffrage de cinq ans e ré du e pour un e seule fois. renouvelable un a affirmé qu’il Joseph Kabila e» l’esprit et la lettr respecterait « rt de po re n. Mais un de la Constitutio lle tie en id és lection pr deux ans de l’é est envisagé.
IA LIBER
Ellen on Johns f Sirlea 75 ans
TORALE
CE ÉLEC
ÉCHÉAN
7 bre 201 novem
ge 50 : u suffra Article est élu a t at n d e n a id s r un m Le pré u o p ] ié t s ger el [… univers […] Nul ne peu lus de s n dant p de six a ent pen id s é r p comme andats. deux m t au pris goû irleaf a S n fin n o o ti s c n h rééle a s e Ellen Jo d e e À l’aub rminer c pouvoir. isait vouloir « te 2017, En ed 2011, ell it commencé ». a v cter la a e p e s qu’ell fois re te u to isques it ra te des r n ie elle dev i c s n rvenir s tion, co aient su r r Constitu u o p i les qu ste. de troub chait à son po o r c c ’a elle s
JEUNE AFRIQUE
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TORALE
Article 101 : Le président de la République est élu pour un m andat de sept ans renouvelable un e seule fois. Nul ne peut ex ercer plus de de ux mandats présid entiels. Paul Kagamé a toujours répété qu’il se soumettrait à la Constitution. M ais il a laissé s’ouvrir un débat national sur la paix, la sécurité et le développem ent du Rwanda dont devrait découler l’identité (secon daire à ses yeux ) de la personnalité le mieux à mêm e de garantir ces va leurs cardinales . Luimême ? C’est pr obable.
BURUNDI Pierre Nkurunziza
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ÉCHÉANCE ÉLEC
juin 2015
TORALE
Article 96 : Le président de la République est élu au suffrage universel direct pour un manda t de cinq ans renouvelable un e fois. Pierre Nkurunz iza, « premier pr ésident de la période po st-transition », fait abstraction de son mandat de 2005 puisque élu au suffrage indirect «à titre exceptionn el ». Ses détract eurs n’y voient qu’une manœuvre pour se maintenir au po uvoir. La bataille se jouera sur le te rrain juridique.
NE SIERRA LEO
Ernest Bai Koroma 60 ans
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ÉCHÉANCE ÉLEC
2017
Article 46 : ns ercer les fonctio Nul ne peut ex ux de de us pl ndant de président pe . un ac ch s nq an mandats de ci les ma est déjà sur Ernest Bai Koro e. ur at ième candid rails d’une trois n, tte ambitio Même s’il nie ce de vaste chantier un d’ l’ouverture ai m en n io ut nstit réforme de la Co s plus se de ns io at ar cl ainsi que les dé sent di re rateurs cont proches collabo ses propos.
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Grand angle Élections BURKINA
La tentation de Compaoré
Le président n’a peut-être pas encore formellement pris sa décision. Mais l’envie de rempiler pour un troisième mandat est grande. Avec le double risque de créer une situation de tensions sociales et politiques et d’écorner son image. RÉMI CARAYOL
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ovembre 2015, cela peut paraître loin, et deux ans en politique, très long. Mais pour un pays qui, de l’aveu même de ses plus hauts dirigeants, ne sait pas faire dans la « transition démocratique », pour la simple raison qu’il n’a jamais eu l’occasion d’en vivre une, c’est une autre histoire. Surtout quand le président sortant, qui en sera alors à sa vingtneuvième année de règne sans réel partage et qui s’est construit au fil des ans une image d’homme providentiel, n’a toujours pas levé le voile sur ses propres intentions. Ira, ira pas? Deux ans avant la fin de son mandat – théoriquement le dernier –, Blaise Compaoré reste fidèle à sa réputation: il cultive le flou. « C’est mon choix qui va être déterminant. Je sais où sont les limites de mes forces et de mon intelligence », se contentait-il de dire le 22 septembre sur La Voix de l’Amérique. Ses partisans, eux, rappellent que 62 ans c’est encore jeune pour un chef d’État. À Ouagadougou, chacun a sa petite idée. Un diplomateétrangerdepremierplan:«Ilsemblequ’il ne se représentera pas. » Ablassé Ouedraogo, son ancien ministre des Affaires étrangères aujourd’hui passé à l’opposition : « Il n’ira pas. » Un ami de Compaoré, qui fut son conseiller pendant près de vingt ans et jusqu’à il y a peu : « Je crois qu’il n’a aucune intention de prolonger et qu’il laissera sa place. » Le vote en juin 2012 par l’Assemblée nationale d’une loi d’amnistie pour les anciens chefs d’État du Burkina est souvent avancé comme la preuve que Compaoré est prêt à passer la main. D’autres personnalités haut placées dans la sousrégion disent le contraire. Il semble surtout qu’il
Un cadre du CDP : « Le clan du chef de l’État craint une chasse aux sorcières en cas d’alternance. »
L’ARMÉE PEUT-ELLE JOUER UN RÔLE EN 2015? CELA RESTE UNE ÉNIGME. Selon Rinaldo Depagne, analyste principal chargé de l’Afrique de l’Ouest pour International Crisis Group, « l’armée burkinabè est aussi silencieuse que le président qui l’a façonnée. Les mutineries de 2011 ont cependant montré que l’armée, en particulier sa base, n’était pas aussi disciplinée N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
qu’on le pensait. Depuis l’indépendance, le Burkina est traversé par une grande dynamique: à chaque fois qu’un régime a tenté d’imposer trop fortement son autorité, s’est montré incapable de gouverner ou a imposé un contrôle trop inégalitaire des ressources du pays, il a fini par être renversé, par la rue ou par l’armée ». l R.C.
n’a toujours pas pris sa décision et qu’il tranchera en fonction de l’évolution de la situation. À vrai dire, il a beau répéter à chacune de ses (rares) sorties publiques qu’il n’y pense pas, Compaoré ne trompe personne. Les pressions sont trop nombreuses et trop contradictoires pour qu’il les évacue d’un simple revers de main. D’un côté, il y a son entourage, à commencer par son frère François. Il y a son parti, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), qui réclame depuis plusieurs années la modification de l’article 37 de la Constitution, lequel stipule que le président du Faso n’est rééligible qu’une fois. Il y a tout ce que le monde des affaires compte de puissants. Et il y a l’armée. On a tendance à l’oublier, mais Compaoré et de nombreux dirigeants de l’actuel régime en sont issus, et celle-ci – faut-il le rappeler –, n’a jamais quitté la scène politique depuis sa prise du pouvoir en 1966. Elle est ce que le chercheur Augustin Loada appelle « la matrice du pouvoir », mais aussi « une épée de Damoclès » qui pèse sur les civils. OPPOSITION. Tous ceux-là souhaitent que Compaoré s’accroche au pouvoir pour diverses raisons: pour parachever « l’œuvre de démocratisation entamée en 1987 », pour « préserver la stabilité du pays » ou, plus trivialement, pour conserver le pouvoir, garder la main sur l’économie ou assurer ses arrières. « Le clan du président craint une chasse aux sorcières en cas d’alternance. Il pèse de tout son poids pour que Blaise reste à Kosyam », se désole un cadre du CDP, qui, lui, n’y est pas favorable. À force de persuader les Burkinabè qu’il est le seul recours, l’entourage du président a semble-t-il fini par y croire. En face, il y a l’opposition, de mieux en mieux structurée, la société civile, plus impliquée que jamais, les étudiants et les syndicats, toujours aussi politisés… Dans la perspective de 2015, ces pochesdecontre-pouvoirqui,jusque-là,n’arrivaient pas à s’entendre, ont effectué un rapprochement jugé inquiétant au Palais. Les manifestations des mois de juin et juillet ont démontré leur capacité à mobiliser. Celles de 2011, couplées à de nombreuses mutineries, avaient révélé l’ampleur du malaise qui touche aussi bien les soldats du rang que les commerçants, les étudiants ou encore les fonctionnaires. Il y a aussi l’Église catholique, historiquement très influente au Burkina. En dénonçant, le 15 juillet, dans une lettre pastorale qui a pris les traits d’un JEUNE AFRIQUE
MEIGNEUX/SIPA
Partira ? Partira pas ?
tract de l’opposition, « le malaise social », « une gouvernance de plus en plus déconnectée de la réalité », « la corruption » et surtout la « patrimonialisation de l’État », les évêques, qui ne sont pas favorables à la modification de l’article 37, ont lancé un sérieux avertissement. Il y a enfin la communauté internationale. Un certain nombre de voisins qui s’inquiètent d’une possible déstabilisation du pays ont d’ores et déjà envoyé des messages à « Blaise » via des intermédiaires. « Rassurez-le. Dites-lui qu’on ne l’oubliera pas. Qu’on lui trouvera une mission à sa hauteur. » À la Francophonie, à l’Union africaine ou ailleurs. Plusieurs pays européens, dont l’aide bilatérale est loin d’être négligeable, ont de leur côté manifesté leur attachement à la Constitution. Les États-Unis et la France aussi, même si la position des deux seuls partenaires qui comptent vraiment au Burkina est ambiguë. Certes, Emmanuel Beth, qui était le représentant de la France à Ouagadougou jusqu’en août dernier, lui aurait plusieurs fois conseillé de « ne pas y aller ». Mais Paris et Washington ne cachent pas leur embarras : si Compaoré a subi un relatif échec au Mali (la confiance placée par JEUNE AFRIQUE
p D’ici à moins de deux ans, Blaise Compaoré devra choisir s’il part ou s’il reste.
Inquiets, ses voisins promettent de lui trouver une mission à sa hauteur s’il quitte le pouvoir.
ses hommes en Iyad Ag Ghaly reste en travers de la gorge de la France), il est toujours considéré comme un partenaire essentiel dans la sousrégion. La stabilité du Faso n’a pas de prix alors que la Côte d’Ivoire et le Mali sortent à peine du chaos et que d’autres pays pourraient y plonger. Et l’hospitalité du pays en matière militaire est loin d’être négligeable, alors que la guerre contre la nébuleuse salafiste ne fait que débuter : voilà plusieurs années que le Faso sert de base pour les forces d’élite et les services de renseignements des armées française et américaine. Au-delà de toutes ces pressions, Compaoré doit prendre en considération les conséquences de ce qu’impliquera son choix. S’il tarde à dévoiler ses intentions, il alimente la machine à rumeurs, qui n’est pas sans impact sur le climat sociopolitique. S’il annonce qu’il ne se représentera pas, il ouvre la voie à une guerre de succession qui pourrait laminer son parti, déjà en proie à de graves dissensions depuis qu’en mars 2012 la plupart des barons du CDP ont été évincés du bureau politique au profit des proches de François Compaoré. A-t-il commis là une erreur rédhibitoire en ne désignant pas de successeur longtemps à l’avance ? Certains, au CDP, le pensent. « Notre parti peut rester dix ans au pouvoir, vingt ans même, après Blaise. Mais on ne prépare personne ! Rien n’est fait pour trouver un successeur. Au contraire, tous ceux qui sortent du lot sont écrasés », se désole un cadre du parti proche de Roch Marc Christian Kaboré, un des barons placardisé. RÉFÉRENDUM. Dans un rapport publié en juillet,
intitulé « Avec ou sans Compaoré, le temps des incertitudes », le think tank International Crisis Group établissait un douloureux parallèle avec le voisin ivoirien: « À la manière de ce qui s’est produit lors de la succession de Félix Houphouët-Boigny en Côte d’Ivoire, les caciques du régime pourraient se livrer à une bataille destructrice pour prendre la place laissée vacante par le président. » Enfin, si Compaoré décide de se représenter, il prend le double risque de créer une situation de tension politique et sociale et d’écorner son image. Va-t-il passer en force ? Comptera-t-il sur un vote du Congrès ? La polémique suscitée par la création du Sénat (qui n’a toujours pas vu le jour) l’en a dissuadé. La seule option qui lui reste est donc la voie référendaire. Mais c’est risqué. « Tout change très vite dans ce pays. Aujourd’hui, les gens réfléchissent, s’expriment, s’informent », note l’opposant Ablassé Ouedraogo. Une enquête d’opinion considérée comme fiable illustre cette évolution. Menée il y a un an auprès de 1200 Burkinabè par le Centre pour la gouvernance démocratique, elle révèle que 54 % des sondés ne veulent pas que la Constitution soit modifiée dans le but de permettre à Compaoré de se présenter à nouveau. En 2008, ils n’étaient que 46 %. l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Grand angle Élections
À Ouaga, le bal des présidentiables Compagnons de route, opposants… Chacun a sa carte à jouer si Blaise Compaoré décide de ne pas se représenter. RÉMI CARAYOL
François Compaoré Le changement dans la continuité?
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VIRGINIE LEFOUR/AFP
e frère cadet du président et son conseiller le plus influent n’a qu’une idée en tête : faire réélire Blaise, qui, selon lui, « n’a pas fini sa mission à la tête du pays ». Il fait ainsi partie de ceux qui défendent avec le plus de vigueur la modification de l’article 37. Mais celui qui est surnommé le « petit président » par la presse et qui fait figure de directeur de cabinet bis à la présidence n’exclut pas d’être le candidat du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) si jamais Blaise décidait de passer la main. Il pourrait représenter selon lui « le changement dans la continuité ». Selon plusieurs sources, c’est un homme de dossiers efficace qui jouit de l’entière confiance de Blaise. Économiste de formation et ardent défenseur de la révolution puis de la rectification, ce père de quatre enfants âgé de 59 ans et marié à la fille d’Alizéta Ouedraogo, la présidente de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI), a rejoint son frère dès sa prise de pouvoir en 1987. Pour Blaise, il représente le candidat idéal. Problème : l’idée qu’il puisse être candidat ne passe pas auprès de l’opinion. D’abord parce que son nom est à jamais lié à l’affaire Zongo (du nom de ce journaliste assassiné en 1998), même si la justice l’a blanchi. Ensuite parce que, comme le résume un opposant, « une succession dynastique serait inacceptable pour les Burkinabè ». Au sein même du CDP, où il a placé un grand nombre de fidèles à des postes clés l’année dernière, sa possible candidature pourrait provoquer une levée de boucliers, voire la scission du parti. « On est nombreux à s’y opposer. Un clan ne peut pas s’accaparer un pays », indique un cadre. l
Roch Marc Christian Kaboré Populaire et consensuel
À
AHMED OUOBA/AFP
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première vue, Roch Marc Christian Kaboré (56 ans) n’est plus dans les petits papiers de Compaoré. Compagnon des premières heures de la révolution puis de la rectification, Premier ministre dans les années 1990, cet économiste a été l’homme fort du président durant la dernière décennie, au cours de laquelle il a cumulé la présidence de l’Assemblée nationale et la direction du CDP, avant de tout perdre en quelques mois. Débarqué de la direction du parti en mars 2012 (et placardisé depuis) au prétexte que la base voulait du sang neuf, il a quitté le perchoir en décembre et n’est même plus député. Depuis, il se terre dans le silence. Disgrâce ? Oui, mais comme le fait remarquer un cadre du parti, « ce ne serait pas la première fois que Compaoré se passe quelque temps d’un compagnon pour le remettre en selle ensuite ». De fait, Kaboré, qui ne manque pas d’atouts (à commencer par la noblesse de sa famille et son carnet d’adresses international), n’a pas perdu l’espoir d’être de la bataille en 2015. En coulisses, il consulte. Si sa famille lui enjoint de ne pas bouger, certains de ses proches le poussent à créer son propre parti en compagnie des autres barons mis à l’écart (Salif Diallo, Simon Compaoré). Il ne l’exclut pas (notamment si François Compaoré est désigné comme le candidat du CDP), mais il préfère attendre. Par prudence: on ne s’affranchit pas si facilement de Compaoré. Par calcul aussi : Kaboré sait qu’il a encore une chance d’être investi par le CDP, où il a conservé de nombreux partisans. « Les récents événements jouent en sa faveur », juge son entourage. Si la tension montait d’un cran avec l’opposition, Compaoré pourrait en effet rappeler cet homme de consensus qui jouit d’une bonne cote de popularité dans le pays et auprès de l’opposition. l JEUNE AFRIQUE
YEMPABOU AHMED OUOBA/AFP
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Zéphirin Diabré L’homme qui a rompu
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éphirin Diabré ? « Depuis qu’il a pris la tête de l’opposition [en décembre 2012], il a fait un sans-faute », juge un diplomate français. Non seulement il a réussi à mobiliser dans la rue comme jamais depuis 1999, quand il s’est agi, en juin et en juillet, de fustiger la création du Sénat, mais, surtout, il s’est imposé en quelques mois comme le leader incontesté de l’opposition, y compris aux yeux des plus radicaux. Le marxiste Arba Diallo s’est ainsi rapproché de ce libéral pur sucre, qui se revendique comme tel.
Diabré (54 ans), qui a ses entrées dans l’Église catholique et qui dispose de réseaux à l’international depuis qu’il a officié au Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) et chez Areva, a également réussi à séduire les mouvements de la société civile. « Il est très structuré, très fin, et il manœuvre bien », glisse un autre diplomate admiratif. Seuls les syndicats, qui n’ont pas oublié qu’il a été un ministre (des Finances notamment) de Compaoré dans les années 1990 et qui le voient encore comme « un homme du système », s’en méfient.
Peut-il pour autant l’emporter en 2015 ? « Si Blaise ne se présente pas, il aura ses chances », glisse un proche. Il pourrait même attirer des cadres mécontents du CDP, son ancien parti, au sein duquel il a gardé quelques amitiés. Mais l’Union pour le progrès et le changement (UPC), qu’il dirige et qu’il a créée en 2010, est jeune et ne pèse pour l’heure que 19 députés et 12 % des suffrages. Et déjà, certains, dans le camp du pouvoir comme dans celui de l’opposition, rappellent que c’est un Bissa, une ethnie minoritaire au Burkina. l
Gilbert Diendéré Assurance tous risques
ROMARIC OLLO HIEN/AFP
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JEUNE AFRIQUE
epuis sa prise du pouvoir, en 1966, l’armée n’a jamais quitté la scène politique. Acceptera-t-elle de passer la main à un civil ? Si tel n’était pas le cas, le général Gilbert Diendéré pourrait être l’homme de la situation. Certes, nombre d’officiers s’en méfient tant il est vrai qu’il leur fait de l’ombre depuis plusieurs années. Mais celui que certains comparent à « la mémoire » d’un régime dont il connaît tous les secrets dispose d’un atout majeur : la confiance de Compaoré, qu’il seconde depuis trente ans (il était déjà son bras droit lors du coup d’État de 1983, puis lors de l’assassinat de Thomas Sankara, en 1987). Soupçonné dans les années 1990 d’avoir des vues sur la présidence, il a maintes fois démontré sa loyauté. En 2011, quand Compaoré a modifié toute la chaîne de commandement de l’armée, ce Mossi fut le seul à conserver son poste en dépit du fait que certains de ses hommes s’étaient eux aussi mutinés. Intouchable ? Un proche du président l’admet : « Je ne vois que François [Compaoré] ou Gilbert pour succéder à Blaise. Ils sont les seuls en qui il a une confiance totale. » Officiellement, Diendéré est le chef d’état-major particulier du président. Dans les faits, il est bien plus que cela : il est le commandant du Régiment de la sécurité présidentielle (RSP), une armée dans l’armée, le chef des services de renseignements et, en définitive, le véritable patron de l’armée. Discret, cet homme de 54 ans ne cherche pas la publicité, et ceux qui le connaissent ont du mal à l’imaginer se lancer en politique – ce à quoi il s’est toujours refusé, contrairement à son épouse, Fatou, une cadre du CDP. Mais s’il en va de la survie du régime… l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Afrique subsaharienne
GAMBIE
Il ne faut jamais À Banjul, on ne prononce son nom qu’à voix basse. Ses détracteurs ont depuis longtemps compris que mieux valait se taire. C’est, disent-ils, une question de survie dans un pays sur lequel Yahya Jammeh, tyran mystique et parano, règne depuis vingt ans. MEHDI BA,
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à Dakar
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a vie de Fatou Camara a basculé un dimanche soir. « Les policiers sont venus m’arrêter chez moi. J’ai dû laisser mes trois fils avec la bonne, sans même pouvoir leur dire au revoir », raconte l’ex-animatrice du très populaire Fatu Show, diffusé sur la chaîne publique gambienne. Elle venait de regagner son pays après un séjour au Sénégal lorsque la disgrâce présidentielle s’est abattue sur son toit. Le 15 septembre, deux agents de la police secrète se présentent à son domicile et lui ordonnent de les suivre. La jeune femme restera incarcérée pendant un mois avant JEUNE AFRIQUE
t Lors de la campagne pour la présidentielle de 2011. Le chef de l’État pose avec… des photos de lui-même.
SEYLLOU/AFP
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dire Jammeh d’être déférée devant le tribunal de Banjul. Elle est accusée de ternir l’image du chef de l’État, un délit passible de quinze ans de prison, avant d’être placée en liberté sous caution. Une comparution devant le juge avait été fixée au 28 octobre. Mais sur l’insistance de ses proches, la journaliste a préféré prendre la poudre d’escampette et a rejoint clandestinement le Sénégal puis les États-Unis. Ancienne directrice de la communication de Yahya Jammeh, connue pour avoir longtemps propagé son admiration sincère envers le président gambien, Fatou Camara est la dernière en date d’une longue série de pestiférés passés de la lumière de la State House, la présidence JEUNE AFRIQUE
gambienne, à l’ombre de Mile 2, la prison centrale de Banjul. Dans son malheur, elle pourra toujours se consoler en se disant qu’elle a échappé aux sinistres séances d’aveux filmés qui sont le lot régulier des « ennemis du régime ». Malang Fatty et Amadou Sanneh n’ont pas eu cette chance. En septembre, le premier est arrêté à un poste-frontière alors qu’il cherche à quitter le pays. Sur lui, la police secrète découvre une attestation d’Amadou Sanneh, le trésorier du United Democratic Party (UDP, le principal parti d’opposition), indiquant que Fatty, militant du parti, a reçu des menaces de mort de la part des services de sécurité et que l’UDP est régulièrement persécuté par le gouvernement. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Afrique subsaharienne Aussitôt, les deux hommes ainsi qu’un complice et un témoin présumés sont jetés au cachot, sans possibilité de rencontrer un avocat. Quelques semaines plus tard, la télé gambienne diffusera la vidéo consternante de leurs « aveux ». Parvenant à peine à se tenir droit, Amadou Sanneh, hagard, marmonne une autocritique inaudible que l’on croirait tout droit sortie d’un procès de l’Inquisition. Face à un reporter placide qui ne semble pas s’émouvoir qu’il ait subi des séances de torture, le prisonnier s’accuse du pire crime qui soit en Gambie : celui de lèse-majesté. PARADIS POUR TOURISTES. Depuis près de vingt
ans, Yahya Jammeh règne en monarque absolu sur ce petit paradis pour touristes encastré au beau milieu du territoire sénégalais. Lorsque ce jeune lieutenant de 29 ans renverse le président Dawda Jawara, en juillet 1994, il prend la tête d’un comité militaire provisoire qui suspend la Constitution et gouverne par décrets. « Quand il a accédé au pouvoir, il a été plutôt bien accueilli car les gens aspiraient à un changement, précise le journaliste Demba Jawo, qui réside à Dakar depuis 2006. Ils ont vite déchanté. » Au cours des années suivantes, Jammeh se débarrassera l’un après l’autre des compagnons d’armes qui ont conduit le coup d’État à ses côtés. « Ceux qui ne sont pas morts en prison ont été assassinés ou ont fui le pays, résume Bubacar Baldeh, ancien ministre de Jawara aujourd’hui en exil. C’est à partir de 2002 qu’il s’est révélé comme un dictateur pur et dur: il n’acceptait plus la moindre divergence ni le moindre conseil et il s’est mis à agir de manière très impulsive. » Les dérives du Conducator gambien iront croissant, caractérisées par une répression de plus en plus féroce et systématique à mesure que s’aiguisera sa méfiance envers son propre entourage. « À la fin des années 1990, il jouissait encore d’une certaine aura sur la scène internationale, rappelle Sedat Jobe, qui a été pendant plus de quatre ans son ministre des Affaires étrangères. Mais il s’est
De mal en pis…
1965
Naissance à Kanilai
1994
Renverse Dawda Jawara et accède au pouvoir
1996
Élu, à l’issue d’un scrutin très controversé, président de la République. Il sera réélu en 2001, 2006 et 2011
2007
Déclare avoir trouvé un remède contre le sida
2009
Menace de mort les ennemis du régime et les homosexuels
2013
Annonce le retrait de la Gambie du Commonwealth, jugé « néocolonial »
montré de plus en plus autoritaire, avant de basculer totalement. » En décembre 2004, l’assassinat à Banjul de Deyda Haydara, un vétéran de la presse gambienne, marque un tournant. Si le meurtre demeure officiellement non élucidé, chacun en Gambie croit savoir qu’il a été commandité par la State House. « Je n’ai jamais rencontré Au cours des années suivantes, un homme aussi le régime donne libre cours à sa viscéralement méchant. » volonté de museler la presse et de verrouiller la liberté d’expression. SEDAT JOBE, ancien ministre gambien des Affaires étrangères « On a assisté à une fermeture quasi totale de l’espace public, avec des lois de plus en plus répressives, des arrestations arbitraires et des disparitions », observe la Gambienne Fatou Diagne, directrice régionale de l’ONG Article 19. « En Gambie, personne n’ose même dire son nom, les gens ont trop peur de lui », confirme Oumar Diallo, de la Rencontre africaine pour la CIRCULEZ, Y’A RIEN À VOIR défense des droits de l’homme (Raddho, basée à as facile pour un journaliste Dakar), qui qualifie Yahya Jammeh de dirigeant demande, écrivait-il, avait été « paranoïaque ». Dans la bouche des opposants en de pénétrer en Gambie, relayée auprès des autorités. exil comme chez les anciens dignitaires du régime même pour y rencontrer des Mais quatre semaines plus tard, devenus proscrits du jour au lendemain, le mot sources officielles. Début octobre, pas de visa en vue. En 2012, revient en boucle. Car Yahya Jammeh n’est pas l’ambassadeur de la Gambie à après l’exécution de neuf seulement un chef d’État autoritaire, soucieux de Dakar accusait réception de notre condamnés à mort, un reporter museler toute contestation: c’est aussi un homme demande de visa pour Banjul afin de la BBC disposant d’un visa en qui a peur de son ombre et se méfie avant tout de d’y recueillir les explications du règle avait été retenu pendant ses proches, croyant discerner derrière chaque régime sur le retrait gambien du plus de cinq heures par la police affidé un traître en puissance. Commonwealth et sur les à l’aéroport de Banjul. Il avait dû De l’état-major de l’armée à la magistrature en accusations régulièrement regagner Dakar par le premier vol passant par ses propres ministres, Jammeh purge formulées contre lui en matière retour, sans autre explication. l M. B. son entourage au gré de ses humeurs complotistes. de droits de l’homme. Notre
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JEUNE AFRIQUE
Il ne faut jamais dire Jammeh arrêté et détenu au secret pendant plus de cinq mois avant de recouvrer la liberté. « Un certain nombre de personnes arrêtées sans motif sont finalement acquittées, commente Lisa Sherman-Nikolaus, chargée de la Gambie à Amnesty International, à Dakar.L’objectifdurégimeestdavantaged’intimider les gens que de les faire condamner. »
CANDACE FEIT/AP/SIPA PRESS
SUR ÉCOUTE. Dans un pays où les usagers ont
« C’est un autocrate complet, commente un diplomate européen en poste à Banjul. Tout le monde a peur de lui déplaire et de finir au placard. » « Je n’ai jamais rencontré un homme aussi viscéralement méchant que Yahya Jammeh », assène quant à lui Sedat Jobe. MARABOUT. Les lubies de cet Ubu ouest-africain prêteraient parfois à sourire si leurs répercussions n’étaient si dramatiques. En 2007, Jammeh annonce avoir élaboré un traitement à base de plantes censé guérirlesida.«Lecoordinateurdel’ONUenGambie a osé prendre ses distances, il a été expulsé aussitôt », rappelle Bubacar Baldeh. Deux ans plus tard, Jammeh décrète une chasse aux sorcières qui se traduira par l’arrestation de centaines de Gambiens accusés de pratiquer la magie noire. On prétend qu’un marabout lui aurait prédit une tentative de coup d’État à grand renfort d’occultisme. Un scénario aussi invérifiable que les hypothèses formulées en août 2012, après que neuf personnes ont été exécutées sans préavis, mettant fin à un moratoire sur la peine de mort qui durait depuis plus de vingt ans. Et provoquant une crise diplomatique ouverte avec le Sénégal de Macky Sall, deux des condamnés étant sénégalais. Comme souvent avec les frasques délétères du président gambien, l’absence de justification digne de ce nom a favorisé d’audacieuses spéculations. Selon certains, ce Diola imprégné de mysticisme auraitétémisengardeparunmarabout:uncomplot visant à le renverser était en préparation, nécessitant comme antidote de « verser le sang ». Pour s’être élevé contre ces exécutions, l’imam Baba Leigh a été JEUNE AFRIQUE
p En 2007, c’est avec une préparation verdâtre à base de plantes qu’il disait pouvoir guérir des malades du sida.
Il n’y a pas si longtemps, Chirac l’avait reçu à dîner. Aujourd’hui, il fait figure de paria.
dû faire enregistrer leur carte SIM et où le régime a tenté de faire interdire des logiciels tels que Skype ou Viber, « personne n’ose plus discuter de politique au téléphone », précise le journaliste Demba Jawo. « Le climat de peur s’est généralisé, tous les Gambiens sont convaincus d’être placés sur écoute », confirme Fatou Diagne, d’Article 19. Quand on lui demande si des envies de putsch agitent effectivement les rangs de l’armée, comme le craint son chef suprême, un bon connaisseur du régime gambien dresse ce constat : « Des officiers en ont assez du système Jammeh, mais personne ne fait confiance à personne : chacun a peur d’évoquer le projet de le renverser de peur d’être trahi. » Selon Sedat Jobe, Jammeh s’est entouré d’une garde rapprochée exclusivement diola, dont le socle repose sur le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC), le mouvement sécessionniste sénégalais dont l’un des leaders, Salif Sadio, bénéficie de la mansuétude de Banjul. Sur ses portraits officiels, l’ancien lieutenant devenu mégalomane aligne l’interminable liste de ses titres en papier mâché: « Son Excellence, Cheikh, Professeur, El Hadji, Dr Yahya Abdul-Aziz Jemus Junkung Jammeh. » Autrefois proche de Kaddafi, un temps partie prenante de l’axe Caracas-CubaTéhéran, celui qui était reçu à dîner à l’Élysée par Jacques Chirac il n’y a pas si longtemps se retrouve plus isolé que jamais. Jusqu’à récemment, le satrape gambien pouvait encore compter sur le soutien inconditionnel (et essentiellement financier) de Taiwan. Mais les deux pays ont rompu leurs relations diplomatiques le 14 novembre. Yahya Jammeh n’en poursuit pas moins ses saillies grandiloquentes censées témoigner de son anti-impérialisme intransigeant. Début octobre, il claquait la porte du Commonwealth, pourfendant une « institution néocoloniale ». Dans la foulée, un communiqué de la State House s’indignait de « la campagne de calomnies contre la Gambie » fomentée par « certaines puissances occidentales » en collusion avec l’UDP, décrit comme « un parti tribal mandingue ». Une analyse immédiatement suivie de menaces explicites, formulées mi-octobre par Jammeh lui-même sur les ondes de la chaîne nationale : « Ternir l’image de ce pays est un acte de trahison, et toutes les personnes engagées sur cette voie en paieront le prix fort. » Si l’image de la Gambie est plus terne que jamais, c’est pourtant bien à lui qu’on le doit. l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Afrique subsaharienne Il nous a rendu visite au 57 bis
Kabiné Komara « Dadis a fait des erreurs, mais il m’a donné ma chance » Haut-commissaire de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal
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ABINÉ KOMARA est plus à l’aise dans ses habits de haut-commissaire de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) que dans ceux de Premier ministre – poste qu’il a occupé du temps de la junte militaire. Élu en avril (grâce à l’appui du président Alpha Condé) à la tête de cette institution vieille de 41 ans, il est le premier Guinéen jamais parvenu à ce poste. Fièrement, il égrène les projets de barrages et d’aménagements dans les quatre pays qui se partagent le fleuve et ses affluents: le Sénégal, la Mauritanie, le Mali et la Guinée. De passage à Paris début novembre, il a obtenu un soutien de 240 millions d’euros de la Banque mondiale. « C’est un bon début, même si nous avons besoin de trois fois plus pour bâtir un nouveau barrage à Koukoutamba [Guinée] », commente-t-il, tout en se disant confiant pour la suite de ses discussions entamées avec l’Agence française de développement (AFD). Difficile d’imaginer cet homme calme travaillant en tandem avec Moussa Dadis Camara, le très agité capitaine devenu président fin 2008. Gestionnaire de formation, passé par la Banque centrale guinéenne puis par la Banque africaine d’import-export en Égypte, il s’étonne encore de sa nomination à la primature il y a presque cinq ans: « J’ai été choisi par accident. Dans l’avion qui me menait à Conakry, en décembre 2008, après la prise du pouvoir par les militaires, je ne savais même pas quelles étaient les responsabilités qui allaient m’être confiées. Ce n’est qu’à mon arrivée que le président m’a parlé du poste et m’a convaincu de l’accepter », raconte ce Malinké né à Kankan, non loin du fief d’Alpha Condé, et qui a grandi… en Guinée forestière, la région d’origine de Dadis Camara. Premier ministre pendant un peu plus d’un an, de décembre 2008 à janvier 2010,
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VINCENT FOURNIER/J.A.
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Kabiné Komara a, dit-il, « tenté de faire avancer le navire, avec le soutien des institutions internationales. Mais, progressivement, la primature a perdu les commandes, les ministères clés étant rattachés à la présidence ou aux militaires ». Cette période a été marquée par les viols et les massacres perpétrés le 28 septembre 2009 contre des militants de l’opposition par des soldats proches de la junte. Un événement douloureux qui n’a pas poussé l’ancien Premier ministre à la démission – ce que ses détracteurs lui reprochent. Ce n’est qu’après la tentative d’assassinat de Dadis Camara en décembre 2009 et la reprise en main du pouvoir par le général Sékouba Konaté que Komara a rendu son tablier et quitté le pays quelque temps. « Mais je ne suis jamais parti bien longtemps. Même quand j’étais au Caire, je m’arrangeais pour rentrer régulièrement en Guinée. »
Après l’élection d’Alpha Condé fin 2010, Kabiné Komara est donc revenu en Guinée, en prenant bien soin de rester à bonne distance du marigot politique et en n’adhérant à aucun parti. Il y a entamé une carrière de consultant dans le secteur des infrastructures et des mines, en s’appuyant sur sa connaissance du secteur acquise à la fin des années 1990. « Aujourd’hui, mon fils a repris cette activité », confie-t-il, regrettant au passage le discours peu favorable aux investisseurs qui a prévalu ces derniers mois. Discret, Kabiné Komara n’en reste pas moins fidèle à ses deux grands soutiens: « Les législatives ont donné au pays un Parlement équilibré, prouvant l’attachement du présidentAlpha Condé à la démocratie », fait-il valoir. Et de réaffirmer une certaine gratitude envers Dadis Camara: « C’est lui qui m’a donné ma chance. Il a commis des erreurs de jeunesse, mais c’est quelqu’un de courageux, je ne peux pas l’oublier. » l CHRISTOPHE LE BEC JEUNE AFRIQUE
Afrique subsaharienne
KENZO TRIBOUILLARD/AFP
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p Déjà en juillet, pour la présidentielle, seuls 11 % des inscrits étaient allés voter.
MALI
Kidal, trou noir électoral Les législatives auront lieu le 24 novembre, mais rares sont ceux qui croient en la possibilité d’organiser le scrutin dans le grand Nord. La sécurité y est bien trop précaire.
«
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l y a ceux qui veulent que l’élection se tienne à Kidal pour prouver que cette région, c’est au Mali. Et puis il y a ceux qui veulent empêcher qu’elle ait lieu, justement pour montrer que Kidal, ce n’est pas le Mali. » Entre les deux camps ainsi décrits par Mamadou Diamoutani, le président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), il y a les électeurs, quelque peu déboussolés. Officiellement, 11 % seulement des personnes inscrites sur les listes électorales à Kidal s’étaient rendues aux urnes pour la présidentielle de juillet. Le scrutin paraissait sans véritable enjeu local. Mais, pour les législatives du 24 novembre, il en va autrement: Kidal comptera quatre députés dans la future Assemblée nationale. Pour autant, la mobilisation des électeurs sera-t-elle plus forte qu’il y a quatre N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
de l’organisation matérielle des opérations de vote. Sauf qu’à Kidal le gouverneur de région, le colonel Adama Kamissoko, et ses préfets, sont reclus dans les locaux de la mairie. Même chose pour le représentant mois ? À Bamako, personne n’ose s’avanrégional de la Ceni. « En théorie, notre cer. Tout juste la Ceni précise-t-elle qu’elle représentant s’occupe de la supervision a établi un calendrier avec la Mission des du scrutin, mais dans la pratique, c’est Nations unies pour la stabilisation au quasi impossible », confirme le président Mali (Minusma) pour que de la Ceni. le matériel électoral (urnes, La question de la sécuriAvec seulement encre indélébile, bulletins sation de l’élection se pose de vote, enveloppes…) soit également. Quatre forces sur les 147 que comptera acheminé dans les temps armées sont pourtant le nouveau Parlement, dans le Nord. Les listes élecprésentes à Kidal : l’opéKidal est la plus petite torales devaient, quant à ration française Serval, la elles, être affichées à Kidal circonscription électorale Minusma,l’arméerégulière au plus tard le 17 novembre, malienne et le Mouvement du Mali. Logique : comme dans le reste du national pour la libération la ville en elle-même pays. de l’Azawad (MNLA), mais compte moins de il n’y a pas, sur le terrain, RECLUS. Les autres étapes de coordination de leurs du processus se révèlent opérations. Et c’est cela le plus problématiques. Selon le code électovrai problème pour ceux qui souhaitent ral, les services décentralisés du ministère aller voter. Cinq agents électoraux et un de l’Administration territoriale se chargent élu n’avaient-ils pas été enlevés par des
4 députés
30 000 habitants
JEUNE AFRIQUE
Coulisses
MANDATS D’ARRÊT. Faute de garantie pour leur sécurité, les observateurs internationaux pourraient ne pas se rendre dans les bureaux pour témoigner du bon déroulement du scrutin. Les responsables des médias affichent la même prudence et hésitent à décider de l’envoi de journalistes dans la zone. Dans l’incertitude, l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adema), une des grandes formations politiques du pays, a renoncé à se lancer dans la bataille électorale à Kidal. Trop risqué, selon ses dirigeants. « Il nous paraissait plus important de nous concentrer sur d’autres circonscriptions où les choses sont plus claires », a expliqué Tiémoko Sangaré, le président par intérim du parti. Le Rassemblement pour le Mali (RPM), du président IBK a quant à lui choisi de faire porter ses couleurs par Mohamed Ag Intallah, un fondateur du Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) et Ahmada Ag Bibi, ancien bras droit d’Iyad Ag Ghali, le dirigeant du mouvement jihadiste malien Ansar Eddine. Ces deux notables touaregs ont bénéficié de la levée des mandats d’arrêt lancés contre eux par la justice malienne juste avant la validation de leur candidature par la Cour constitutionnelle. Leur présence suffira-t-elle à convaincre les électeurs de se rendre aux urnes ? Pour l’heure, il semble certain que l’organisation du scrutin sera plus sereine à Gao ou à Tombouctou, les deux autres grandes villes du Nord qui enverront respectivement 8 et 7 députés à la prochaine Assemblée. l SEIDIK ABBA, envoyé spécial JEUNE AFRIQUE
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JUSTICE HABRÉ N’A QU’À BIEN SE TENIR Et pourquoi pas un procès retransmis en direct à la radio et à la télévision? C’est le souhait formulé, le 13 novembre, par le ministre sénégalais de la Justice, Sidiki Kaba, qui a dit parler au nom de Dakar et de N’Djamena. L’idée, a-t-il expliqué, c’est que les Sénégalais et les Tchadiens puissent comprendre et « s’approprier » la procédure enclenchée contre Hissène Habré (photo), l’ancien président tchadien inculpé de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de torture. En exil au Sénégal depuis plus de vingt ans, il y sera aussi – selon toute vraisemblance et après des années de péripéties juridiques – jugé. « Il faut que tout le monde comprenne ce qui se passe », a insisté Sidiki Kaba. Une semaine auparavant, la Cour de justice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) avait rejeté la demande de suspension des poursuites contre l’ancien président, s’estimant non compétente pour juger de la légitimité des Chambres africaines extraordinaires qui auront la charge de juger l’accusé. l
HN/EAHOUNOU
hommes armés lors du premier tour de l’élection présidentielle, avant d’être relâchés? « On ne peut pas mettre un militaire derrière chaque électeur, insiste un officiel malien. À ce jour, nous ne savons même pas qui aura la charge d’assurer la sécurité le jour du scrutin. Il faut sortir vite de cette ambiguïté : cela suffit ! » Le problème se pose évidemment dans la ville de Kidal (où l’atmosphère s’est encore alourdie depuis l’enlèvement et l’assassinat, le 2 novembre, des deux envoyés spéciaux de RFI, Ghislaine Dupont et Claude Verlon), mais d’une manière plus générale dans toute la région. Même une frange du MNLA se dit opposée à la tenue du scrutin le 24 novembre, au motif que les négociations avec Bamako n’avancent pas.
Afrique subsaharienne
KENYA PRÉSIDENT, LEVEZ-VOUS!
Tant pis pour Uhuru Kenyatta, qui misait sans doute sur le soutien de ses compatriotes face à la Cour pénale internationale. Selon un sondage Ipsos publié le 14 novembre, deux tiers des Kényans (67 % des personnes interrogées) souhaitent qu’il assiste à son procès à La Haye. Accusé de complicité de crimes contre l’humanité dans les violences postélectorales de la fin 2007, le président tente par tous les moyens de reculer l’échéance judiciaire. L’Union africaine a même appuyé une résolution soumise au Conseil de sécurité de l’ONU pour repousser le procès d’un an.
RWANDA SANS RISQUES
Une fois n’est pas coutume, la justice française s’est prononcée en appel, le 13 novembre, en faveur de
l’extradition de deux Rwandais recherchés par Kigali pour leur participation présumée au génocide de 1994. Les suspects – Claude Muhayimana et Innocent Musabyimana – ont annoncé qu’ils allaient se pourvoir en cassation. À l’audience, le président de la cour d’appel de Paris a estimé que leur vie ne serait pas menacée au Rwanda.
NIGERIA BLACKLISTÉS
L’administration Obama avait d’abord refusé, craignant de donner à Boko Haram une plus grande légitimité dans les milieux jihadistes, mais a finalement changé d’avis, le 13 novembre: la secte islamiste nigériane figure désormais sur sa liste d’organisations terroristes. Lui apporter son soutien devient donc un crime aux yeux de la loi américaine. Abuja ne peut qu’applaudir, mais on voit mal ce que cela va changer. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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CAMEROUN
Deux crocodiles,
MENOBA ABEL AIMÉ POUR J.A.
un seul marigot Chez les Bamouns, il y a le sultan, proche de Paul Biya, et le maire, encarté à l’opposition. Foumban n’est pas grande, mais les deux hommes se disputent, depuis des années, le contrôle de la ville. CLARISSE JUOMPAN-YAKAM,
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ls ne se voient plus, ne se parlent plus depuis seize ans. Et pourtant, ils s’épient consciencieusement, offrant aux habitants de Foumban (Ouest) le spectacle de ce qu’il est permis d’appeler la guerre des Njoya. D’un côté, Ibrahim Mbombo Njoya, 76 ans, dix-neuvième sultan des Bamouns et sénateur du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC, au pouvoir). De l’autre, Adamou Ndam Njoya, 71 ans, maire de Foumban depuis 1997, président JEUNE AFRIQUE
envoyée spéciale
de l’Union démocratique du Cameroun (UDC, opposition). Deux fortes personnalités, les plus importantes du département du Noun, qui tiennent les populations en haleine dans une course à l’échalote où tous les coups sont permis. Et à Foumban, vieille bourgade tout droit sortie des années 1950, les habitants voient double. Au sultan, le projet de construction d’un nouveau musée du palais destiné à abriter les 12 500 pièces d’art répertoriées par la monarchie.
p Même lors des fêtes traditionnelles, les habitants sont sommés de choisir leur camp.
Au maire, l’idée d’un musée municipal. Pas question non plus de se réunir sur les mêmes lieux de prière pour la fin du ramadan : le sultan et ses partisans se retrouvent au mont de la Piété, tandis que l’élu et les siens trustent les jardins de sa résidence. Un centre de santé érigé par l’un, un second par l’autre. Une radiocommunautairepourlepalais, une autre en construction pour la mairie. Dépenses saugrenues pour une ville qui dispose de très peu de moyens?Non,d’aprèsNdamNjoya: « À chacun son budget, même si j’ignore d’où le sultan tire ses ressources », persifle-t-il. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Afrique subsaharienne Cameroun Ce serait risible si tout cela ne générait parfois de vives tensions. Comme ce 1er janvier 2013, lors du « carnaval de Foumban ». Ce carnaval a été créé, bien que le maire s’en défende, pour faire contrepoids au Nguon, l’une des attractions phares de la chefferie, qui draine chaque année des milliers de touristes et dont le sultanat s’est approprié la gestion. Ce jour-là donc, l’UDC a prévu de défiler dans les rues la ville. Sollicité pour une autorisation, le souspréfet, proche du sultan, décide de dévier la procession de son itinéraire habituel. Le maire et ses partisans passent outre, essuyant des jets de pierres et provoquant des échauffourées… Un conseiller municipal est molesté. Ainsi vit Foumban… Dans un couloir bicéphale où, sommés de choisir leur camp, les Bamouns naviguent d’une extrémité à l’autre, colportant des rumeurs qui alimentent la haine que se vouent les deux hommes. MÉGALOMANIE. Tout commence
en 1991. Adamou Ndam Njoya crée l’UDC avec la bénédiction du roi Seidou Njimoluh. À la mort du monarque, son fils, Ibrahim Mbombo Njoya, qui est membre du bureau politique du RDPC et très proche du président Biya (il a même été pressenti pour prendre la présidence du Sénat en juin dernier), lui succède. Il estime que la mairie doit également lui revenir, mais il est battu aux élections de 1996. « Le chef traditionnel qui ose se jeter dans l’arène politique le fait à ses risques et périls », commente Adamou Ndam Njoya. Le sultan soupçonne son adversaire, candidat aux trois dernières présidentielles (« Comment Ndam peut-il prétendre gouverner un pays quand son électorat reste cantonné à un seul département ? »), de vouloir être roi à la place du roi. En clair, de vouloir prendre sa place. Il l’accuse même d’avoir fait établir un arbre généalogique pour accréditer la thèse selon laquelle il peut, en tant que cousin par alliance, prétendre au titre de roi des Bamouns… N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
p Adamou Ndam Njoya, maire de Foumban, est un opposant déclaré au chef de l’État.
Et Mbombo d’ironiser sur la dirigé par le Premier ministre Paul mégalomanie de son cousin, qui Biya, Ndam Njoya n’avait aucune lui a déjà valu quelques déboires. considération pour ce dernier et Il raconte, amusé, le piège tendu à n’en référait qu’à Ahidjo. Il revient Ndam Njoya par Ahmadou Ahidjo aussi sur cette année 1992 et « l’invia Jeune Afrique. Pour débusquer solent refus » de Ndam Njoya de les ambitieux, l’ex-président camefaire alliance avec le gouvernement rounais avait laissé filtrer une fausse pour lui permettre d’avoir la majoliste de « Premier-ministrables » sur rité absolue à l’Assemblée. « S’il laquelle figurait, entre s’était soucié du deveautres,lenomdeNdam nir du Noun, il aurait À Foumban, Njoya. Alors que tous accepté, contre au on se prend les autres pressentis moins un portefeuille à envier s’étaient empressés ministériel. » d’écrire à Ahidjo pour Balivernes, rétorque l’unité et la assurer qu’ils n’étaient Adamou Ndam Njoya. prospérité en rien responsables Lui se décrit comme des voisins de la théorie de Jeune un universitaire et rêve Afrique, le président de de faire de Foumban la bamilékés. l’UDC avait été le seul à capitale culturelle du s’abstenir, se répandant largement Cameroun. Il revendique quelques dans la presse, et notamment dans succès tout en déplorant que son le quotidien français Le Monde. Un action soit constamment entravée péché d’orgueil qu’Ahidjo, par ailpar de basses intrigues. Les tradileurs très content de sa farce, ne lui tions, insiste-t-il, il n’a rien contre, avait pas pardonné. et c’est l’arrivée de Mbombo Njoya Mbombo Njoya se rappelle aussi qui l’a éloigné du Palais. « Et ce aussi que, ministre dans le gouvernement longtemps que le sultan n’aura pas JEUNE AFRIQUE
Deux crocodiles, un seul marigot
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Bienvenue chez les Bamouns Avec ses 100 000 habitants, la ville est la capitale du royaume bamoun, dans le département du Noun, et le principal centre culturel du Cameroun
Douala
PHOTOS : MENOBA ABEL AIMÉ POUR J.A.
Foumban
YAOUNDÉ
Ils sont issus de l’une des plus anciennes dynasties d’Afrique centrale, qui a connu son apogée au XVIIIe siècle.
réparé le tort qu’il a commis » : le 21 décembre 2006, alorsqu’il préparait les fêtes de fin d’année, il avait vu son domicile envahi par une horde d’individus; une personne avait été tuée. Ndam, qui affirme devoir la vie sauve à la présence des caméras venues immortaliser les préparatifs, y voit une conspiration des autorités traditionnelles et administratives. Les deux Njoya revendiquent aussi la possibilité de désigner des chefs traditionnels. En quoi Adamou Ndam Njoya, l’élu de la République, est-il concerné? Parce que, au début des années 1920, les administrateurs coloniaux français ont créé des chefferies pour contrebalancer le pouvoir du sultan. La familleNdams’estretrouvéeàlatête de l’une des plus grandes, le groupement de Njinka, dont Adamou Ndam Njoya était le chef supérieur jusqu’à son éviction, en 2009, au profit d’un homme soutenu par le sultan. Pour l’universitaire, ce qui pose problème à Foumban, c’est moins le bicéphalisme que le JEUNE AFRIQUE
partage des rôles qui en découle. « Certains aimeraient bien qu’on revienne à la conception purement traditionnelle de l’autorité du chef, quand le roi ou le lamido pouvaient tout se permettre. Ce temps-là est révolu : nous sommes en République. » CENDRES. La querelle est vieille.
Un perfide jeu d’alternance les a conduitsàsesuccéderaugouvernement, l’un étant parfois instrumentalisé pour mieux écraser l’autre. En 1982, Ahidjo renvoie Ndam Njoya du gouvernement et le remplace par Mbombo Njoya. Dans l’imaginaire bamoun, on attribue cette éviction au sultan Seidou Njimoluh, qui aurait intrigué pour placer son fils. Selon la légende, le mal enfoui aussi dans des cendres de querelles entre les parents des protagonistes, qui ont vécu dans la même maison alors qu’ils poursuivaient leurs études en France, compliquerait encore un peu plus leur éventuel rapprochement.
p Sultan depuis 1992, Ibrahim Mbombo Njoya est un ami personnel du président Biya.
Et les habitants de Foumbandans cefeuilleton?Résignés,ilsobservent l’imaged’unedynastievieilledesept sièclessedétériorerinexorablement. Lesrivalitésentrelesdeuxcampsont créé des séparations jusque dans les familles. Il arrive que des frères ne s’adressent plus la parole. « Plus le temps passe, plus le fossé se creuse, empêchant Foumban de se poser en ville qui compte », regrette-t-on dans le Noun. Là-bas, partisan du maire ou du sultan, on envie l’unité affichée par les voisins bamilékés. « Eux au moins savent faire front pour le bien de leur région. » Pas les Bamouns, alors même que l’aura dont jouit la chefferie en raison de son histoire aurait dû lui permettre d’attirer davantage de touristes et d’aider à remettre sur pied une région économiquement sinistrée. LesdeuxNjoyafourbissentencoreet toujours leurs armes. En septembre, le camp du sultan a décidé de faire invalider la réélection du maire : une des colistières est soupçonnée d’usurpation d’identité. l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Maghreb & Moyen-Orient
JUSTICE
États de non Les révoltes de 2011 n’y auront rien changé : du Maroc au Qatar, l’institution judiciaire continue d’être gangrenée par la corruption et demeure inféodée aux puissants du moment.
Maghreb Moyen-Orient
-droit E
BORZOU DARAGAHI
nviron une fois par mois, l’an dernier, Me Reda Oulamine a quitté son bureau de Casablanca et délaissé temporairement ses dossiers de droit fiscal et commercial pour partir avec des collègues dans ce qu’il appelle « des caravanes de la justice ». En travaillant dans ces cliniques du droit gratuites destinées aux plus démunis, l’avocat a constaté que le système judiciaire marocain était bien plus malade qu’il ne le pensait. Il a vu, à Safi, cette femme sans ressources, quasi battue à mort par un voisin, qui a été déboutée. Ou, à Casablanca, ce concierge arrêté après qu’il se fut mis à dos un homme influent. Ou encore cette divorcée à qui un juge a attribué moins de 5 % de la pension alimentaire à laquelle elle avait droit, avec son enfant, parce que son ex-mari était un officier de police. « Toute une partie de la population – chômeurs, femmes de ménage, balayeurs de rue… – est malmenée par le système judiciaire. On les prend vraiment pour des sous-hommes », déplore le très disert Oulamine. Si les Arabes se sont révoltés il y a près de trois ans, c’est en grande partie pour obtenir l’instauration d’une justice transparente et impartiale que leur déniaient des gouvernements corrompus. Aujourd’hui, la déception est palpable. Certains dirigeants ont été renversés et des réformes ont été promises, mais l’institution judiciaire est restée imperméable à tout changement. Elle souffre de graves dysfonctionnements et demeure davantage un instrument aux mains des nouveaux dirigeants qu’un espace où se règlent les litiges, privés ou commerciaux.
t Avocats en colère lors d’une conférence de presse autour du procès du président déchu Mohamed Morsi, le 3 novembre, à la cour de justice du Caire.
VIRGINIE NGUYEN HOANG/HANSLUCAS.COM
DÉLIQUESCENCE. Une situation préoccupante, ravivée
début novembre par l’ouverture du procès (ajourné depuis) de Mohamed Morsi, le président égyptien déposé en juillet. Son cas est révélateur des tensions politiques qui agitent le système judiciaire. Sous Hosni Moubarak, le procureur général traquait les ennemis du régime. Quand Morsi a succédé au raïs, un nouveau procureur a poursuivi les opposants aux Frères musulmans. Maintenant, ces derniers et Morsi se retrouvent sur le banc des accusés face à l’institution qu’ils n’ont pas réussi à réformer durant leur année au pouvoir. Finalement, les pouvoirs judiciaires arabes n’auront pas su gagner l’adhésion populaire. « Dans ces pays, quand on a un problème et pas de relations, il est très difficile de faire respecter ses droits », confirme Christian Ahlund, directeur exécutif de l’International Legal Assistance Consortium (Ilac), basé à Stockholm (Suède), qui a dispensé des formations à des juges de la région. Ce manque de confiance dans l’État de droit affecte aussi le business. Bien souvent, les hommes d’affaires craignent qu’on se moque d’eux s’ils saisissent la justice. Dans les États plus autoritaires (et plus riches) du Golfe, les investisseurs s’estiment mieux protégés en matière de droit des sociétés. Mais en Afrique du Nord, rares sont ceux N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Maghreb Moyen-Orient Justice qui pensent qu’un litige sera réglé avant plusieurs dans le cadre d’un procès pour « terrorisme ». On lui reprochait d’avoir fourni un lien internet années. La frustration est telle que de plus en plus de personnes se font justice elles-mêmes. Plusieurs menant au site du quotidien espagnol El País, où fois, ces derniers mois, des villageois égyptiens ont se trouvait une vidéo dans laquelle un militant islalynché des criminels présumés. En Libye, d’anciens miste menaçait le roi Mohammed VI. Le blogueur membres des forces de sécurité algérien Abdelghani Aloui est, lui, incarcéré depuis de Kaddafi ont été victimes d’une septembre. Son crime ? Avoir posté sur sa page Seif el-Islam campagne d’assassinats. Facebook des caricatures du préKaddafi Détenu Ne s’est pas Il suffit de se rendre dans un sident Bouteflika et d’Abdelmalek à Zintan depuis présenté à son palais de justice pour constater à Sellal, le Premier ministre. novembre 2011 procès à Tripoli, quel point le système est déliquesPar ailleurs, dans de nombreux le 19 septembre cent. À la cour d’appel du Caire, qui pays arabes, on continue à traduire passe pour l’une des mieux nanties des opposants devant des cours spéRéclamé par la Cour du pays, des montagnes de paperasse ciales ou des tribunaux militaires. L’armée égyppénale internationale prennentlapoussièredansunimmense tienne fait aujourd’hui pression sur les rédacteurs (CPI) pour crimes de bureau. Un employé joue au solitaire de la nouvelle Constitution afin que celle-ci prévoie guerre sur le seul ordinateur qu’on aperçoit. que des civils puissent être jugés par des militaires. Plus loin, des prétoires crasseux et Récemment, toujours en Égypte, une cour militaire des bancs cassés. Des papiers de bonbons et des a condamné des dizaines d’opposants à des peines canettes de soda jonchent le sol. Le long de couloirs allant jusqu’à vingt-cinq ans de prison quelques malpropres, des avocats, des requérants et des sussemaines après leur arrestation, à Suez. pects menottés, parfois flanqués de leurs parents en Dans la plupart des pays arabes, affirment les larmes, fument cigarette sur cigarette en attendant experts,lepouvoirn’intervientpasdirectementdans que les juges veuillent bien arriver. Un avocat qui les procès mais a une poignée de juges à sa botte. fait le pied de grue regrette amèrement que les Et parfois, ces derniers essaient tout simplement Après avoir publié une photo de baiser pièces des dossiers soient fréquemment perdues, de précéder les attentes des dirigeants de peur de sur Facebook, deux ce qui rallonge encore les délais de jugement. Un perdre leur situation. De tels procès donnent du adolescents (14 autre affirme que des juges débordés tranchent système judiciaire une image désastreuse. Même et 15 ans) ont été souvent arbitrairement, sans lire les dossiers, afin les juges s’en inquiètent : « Quel que soit le verdict détenus pendant de réduire leur charge de travail. dans le procès de Mohamed Morsi et des Frères trois jours dans un musulmans, il dégradera encore l’image de la « Les gens se plaignent du système. Ils le trouvent centre de mineurs très lent et très corrompu, souligne Moaz Khalil, justice aux yeux des citoyens, déplore Moaz Khalil. à Nador (nordmagistrat au Caire. En réalité, la situation n’est pas Les gens penseront forcément qu’on est revenus est du Maroc). au système corrompu de Moubarak. » facile pour nous. Nous travaillons environ douze Relâchés, ils restent heures par jour, ce qui ne suffit pas pour aller au poursuivis pour fond de tous les dossiers. Heureusement, il y a CASTE. Pour certains, les maux dont souffre l’insatteinte à la pudeur. toujours possibilité de faire appel pour rattraper titution judiciaire arabe trouvent leur origine dans les erreurs éventuelles de la première instance. » la surpopulation des facultés de droit, d’où sortent Les juristes dénoncent l’ampleur de la corruption, trop de diplômés dépourvus des compétences et les plaignants, à mi-voix, les avocats et les juges adéquates. En outre, à la différence de ce qui véreux. « Si vous voulez que votre fils échappe à se fait aux États-Unis ou en Grande-Bretagne, presque rien n’est prévu en termes de formation une inculpation pour meurtre, il suffit de dégotter le bon avocat, qui ira trouver les juges corrompus. professionnelle pour les avocats et les juges en milieu de carrière. Les magistrats expérimentés Ces derniers forment un véritable lobby », explique Me Oulamine. En Égypte, il arrive même que des deviennent une caste en soi qui résiste à toute idée requérants paient le greffier pour qu’il modifie les nouvelle ou à toute aide extérieure, lesquelles, à Abdelghani retranscriptions en leur faveur. leurs yeux, porteraient atteinte à leur souveraineté. Aloui Ce jeune Algérien Les mécanismes de contrôle ou ceux visant à se est inculpé CHASSE AUX OPPOSANTS. Les procès sont aussi débarrasser d’un juriste incompétent ou corrompu « d’atteinte à lents et inefficaces pour le citoyen lambda qu’ils sont souvent entre les mains des juges eux-mêmes. la personne du sont expéditifs pour les adversaires du pouvoir. Quant aux ressources, elles sont mal utilisées. Il président de la En juillet, aux Émirats arabes unis, 94 opposants y a souvent trop de juges qui ne disposent pas République et ont été traînés devant un tribunal, qui a rapidedes équipes nécessaires pour faire face à une d’apologie du ment condamné 69 d’entre eux pour tentative de montagne de paperasse. Devant la Cour de casterrorisme » sation, un magistrat examine les griefs écrits des renversement du gouvernement, leur infligeant pour avoir posté des peines allant jusqu’à quinze ans de prison. plaignants, qui n’ont que quelques minutes pour des caricatures Certains étaient membres d’une formation islase faire entendre. Les pays qui recourent à l’aide d’Abdelaziz judiciaire étrangère, comme la Tunisie, le Liban miste qui réclamait pacifiquement des réformes. Bouteflika et de son En septembre, le journaliste marocain Ali Anouzla et la Jordanie, font mieux que leurs pairs, mais Premier ministre sur sa page Facebook. a été arrêté, emprisonné, puis relâché sous caution leur justice peine à être respectée. « On ne peut PHOTOS : DR ; NICK CORNISH/REX FEAT/REX/SIPA
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AP/SIPA
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pas changer la mentalité d’un juge en six mois, lui inspirer de la compassion et de l’intérêt pour les victimes. Cela prend des années », explique Me Oulamine, qui a aidé à former des magistrats dans le cadre d’un programme américain. À Benghazi, la grande ville de l’Est libyen, c’est un petit groupe de juges et d’avocats réformateurs qui furent les premiers à défier Kaddafi, en février 2011, et à lancer une insurrection nationale. Lors des soulèvements d’Égypte, de Tunisie, de Bahreïn et du Yémen, des juristes ont aussi été aux premières loges pour exiger un changement. Parfois avec le soutien d’organisations internationales, des réformateurs ont cherché à restructurer les systèmes judiciaires arabes. Mais ces efforts ont été entravés. Ils vont souvent à l’encontre de certains intérêts… « Supposons que vous soyez au pouvoir et que vous laissiez l’institution judiciaire faire son travail en toute indépendance. Comment réagiriez-vous si elle commençait à faire le ménage jusqu’au sommet de l’État? s’interroge Oulamine. Auriez-vous envie de voir des juges et des procureurs évoquer le cas des personnes qu’ils ont – ou n’ont pas – envoyé en prison à cause de vous ? » EXCLUSION. Des réformes rapides et décousues passent donc comme le meilleur moyen d’améliorer l’État de droit. Ainsi le ministre tunisien de la Justice a-t-il révoqué les juges réputés corrompus ou loyaux envers Ben Ali, le despote déchu. La loi d’exclusion politique libyenne empêche tout juge expérimenté ayant servi sous Kaddafi de continuer à travailler. Mais les magistrats eux-mêmes JEUNE AFRIQUE
p Le journaliste marocain Ali Anouzla quittant la prison de Salé, le 25 octobre.
peuvent être les propres acteurs du changement. L’un des mouvements les plus prometteurs, le Club des magistrats du Maroc, une nouvelle organisation fondée par des juristes réformateurs, a tenté d’imposer un code de bonne conduite. Chacun de ses membres s’engage à déclarer ses revenus et à faire état publiquement de toute tentative visant à l’influencer ou à le corrompre. « Ils disent au gouvernement qu’ils veulent être indépendants, honnêtes et mieux payés, explique Reda Oulamine. Et ce faisant, ils posent un gros problème aux autres juges. » En Libye, en Tunisie, en Égypte et au Yémen, une nouvelle Constitution est en cours d’élaboration. Le Maroc, lui, a déjà inscrit quelques réformes dans sa loi fondamentale. Mais, selon Nizar Saghieh, fondateur du Legal Agenda, journal Nouvellement créé, le juridique réformateur et panarabe basé au Liban, les Arabes Club des magistrats du sont de plus en plus conscients Maroc veut imposer un qu’une Constitution doit aller de code de bonne conduite. pair avec un système judiciaire efficace. D’autant, poursuit-il, que le manque de réformes est au centre du ressentiment, du mécontentement et de l’instabilité de la région. « Sans justice indépendante, vous êtes à la merci du pouvoir exécutif. Garantir cette indépendance est à la base de tout mouvement démocratique. Qui protégera les travailleurs, les syndicats, les minorités et les femmes si la justice ne parvient pas à empêcher les puissants de nuire aux plus faibles ? » l © Financial Times et Jeune Afrique 2013. Tous droits réservés N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Maghreb Moyen-Orient
u Quartier d’El-Kabaria, dans la périphérie de Tunis.
TUNISIE
Génération cannabis Sévèrement réprimé, l’usage de stupéfiants est l’une des causes principales de la surpopulation carcérale. Au point que certains suggèrent de dépénaliser la consommation de haschich.
L
«
’ecstasyn’estplusdequalité. La bonne came est rare, mais on trouve de tout », assure Hayet, invitée à une soirée branchée où quelques joints circulent. Sujet tabou s’il en était sous Ben Ali, la consommation de stupéfiants est désormais abordée au grand jour. Depuis la révolution, l’usage de drogues, notamment d’anxiolytiques, a explosé, et les consommateurs, tout en restant prudents, craignent moins les indics ou une indiscrétion. Pourtant, la loi n’a pas changé et punit sévèrement la consommation de stupéfiants (lire encadré). « Au rythme actuel, il faudrait mettre la moitié du pays sous les verrous », observe l’un des signataires d’une pétition pour la dépénalisation du cannabis. La drogue n’est en effet pas qu’un phénomène mondain ; elle touche toutes les couches de la population et plus particulièrement les jeunes, qui sont dans le collimateur de la police. « Ils sont plus facilement repérables que leurs aînés, qui connaissent nos pratiques, et ils nous permettent de remonter rapidement les filières », assure un ancien de la brigade des stupéfiants. Le tabassage à mort, le 2 novembre, au commissariat de Sidi el-Béchir (Tunis), de Walid Denguir, soupçonné de trafic de drogue, en dit long sur les méthodes employées par la police. Mais à Douar Hicher, quartier pauvre de la périphérie de Tunis, le commerce de stupéfiants va bon train. « Hier, j’ai fait un saut à El-Kabaria [autre bidonville de la capitale] pour ramener un kilo de zatla [résine de cannabis] en mobylette », confie sans fanfaronnade Wassim, dealer occasionnel.
Les ghettos des zones urbaines sont devenus des plaques tournantes du trafic. Il n’est pas rare qu’à certains carrefours des gamins de 14-16 ans revendent à la sauvette des joints, des barrettes de haschich ou des comprimés. Le fournisseur qui les emploie n’est jamais loin et les a à l’œil. « Je peux obtenir tout ce que vous voulez », assure Amine, qui annonce les prix : « 1,50 euro le cachet de Tranxène, 1 euro pour le Témesta et 600 euros le kilo de résine de cannabis. » S’il explique que lesmédicamentsproviennentdevolscommis dans des hôpitaux ou d’ordonnances soutirées sous la menace à des médecins, il est sûr que, malgré les contrôles rigoureux, certaines pharmacies sont peu regardantes et vendent des produits inscrits au tableau B, sans prescription. « C’est un peu à la tête du client, mais il y a aussi des complicités, précise ce jeune de 22 ans qui suit les tendances du marché. Le cannabis a toujours la vedette, l’ecstasy est passée de mode, mais le “Sobitex” – déformation de Subutex, utilisé dans les traitements de substitution à l’héroïne – est de plus en plus demandé. » COUTUME. Il y a cependant peu d’accros aux drogues dures, auxquelles on préfère le cannabis. Prohibée depuis l’indépendance, la consommation de chanvre ou takrouri est restée dans la mémoire collective comme une coutume non nocive et conviviale. « Dans les années 1930-1950, il était en vente libre dans de tout petits paquets. Il fallait le réduire en poudre fine. Planches et hachoirs étaient disponibles dans tous les cafés », se souvient El-Haj Sadok. Mais le temps des
tkarlya – fumeurs d’herbe – est révolu. Aujourd’hui, le marché est demandeur de zatla. Si, contrairement au Maroc, la Tunisie n’est pas productrice de haschich, elle est devenue une étape de transit pour les filières, ce qui lui permet d’être servie au passage. « 80 % des quantités de cannabis sont réexportées. La voie terrestre, la plus usitée, part du Maroc à destination de la Libye, via l’Algérie et la Tunisie. Certains trafiquants préfèrent la mer, moins risquée; en cas d’alerte, la cargaison est jetée par-dessus bord et sera récupérée sur les plages. Mais la surveillance des côtes pour freiner l’immigration clandestine a pratiquement fermé cette route », explique le docteur Tahar Cheniti, volontaire du Croissant-Rouge tunisien. Mais malgré une surveillance accrue aux frontières
TOUT-RÉPRESSIF L’USAGE DE STUPÉFIANTS est un délit sanctionné par les articles 1, 2, 4 et 5 de la loi 52/1992, qui prévoit une peine d’une année d’incarcération et 500 euros d’amende pour les consommateurs de N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
cannabis. Il n’est pas besoin de flagrant délit. Lors des arrestations, un dépistage sanguin est effectué systématiquement. S’il révèle des traces de tétrahydrocannabinol
(THC), substance active du cannabis que le corps met quelques semaines à évacuer, les poursuites sont engagées automatiquement. Au Maroc, fumer un joint dans un lieu public
entraîne une amende de 90 euros et deux mois de prison en cas de récidive, mais consommer du haschisch n’est pas une infraction et n’entraîne aucune poursuite. l F.D. JEUNE AFRIQUE
Saisies effectuées en 2011
8 575 comprimés 1 200 kilos de résine de cannabis 80 grammes de cocaïne 413 grammes d’héroïne p Le pays est devenu une étape de transit du trafic de drogue.
due à l’émergence du terrorisme, les sernotre vie qu’à s’échiner à produire des vices douaniers reconnaissent que pour légumes » est l’argument de ces nouveaux 1 kg saisi, 10 kg échappent aux contrôles. cultivateurs. « Le cannabis n’est pas pro« Les filières sont bien rodées. Des charhibé par le Coran mais par la loi, et ici, gements entiers de drogue en provenance c’est le Coran qui prime », dit Amine, laisd’Amérique du Sud sont débarqués dans sant entendre que, pour les extrémistes de petits aéroports africains puis transreligieux, la drogue serait licite. Au point bordés par hélicoptère ou par petit avion vers des Dès qu’il s’agit de jeunes, le test points du Sahara. À partir sanguin est systématique quel que de là, des 4x4 aménagés les acheminent vers le nord à soit le motif de l’interpellation. destination de l’Europe. La Tunisie est sur leur route », détaille un que les services aux frontières n’hésitent plus à évoquer un réseau de narcotrafiagent des douanes. Mais la brigade des stupéfiants a noté quants dont les revenus financeraient que, depuis la révolution, les plantations les mouvements jihadistes. « Du temps de cannabis se sont également multide Ben Ali, les gros bonnets de la drogue pliées, particulièrement dans la région de étaient liés au sérail – Moncef, frère de Sidi Bouzid (Centre). « On gagne mieux Ben Ali, était à la tête de la “couscous JEUNE AFRIQUE
connection”. Aujourd’hui, il n’y a plus de barons mais de nombreux et insaisissables petits dealers. Ils s’assurent, moyennant finances, des protections. Nul besoin de camions ou de grosses cylindrées, la marchandise franchit les frontières à dos d’ânes qui connaissent le chemin et n’ont pas besoin d’être accompagnés », raconte Ismaïl, un garde forestier à Fernana (Nord-Ouest). Certains, comme le docteur Cheniti, estiment que la consommation de drogue n’a pas augmenté; les chiffres étaient pratiquement les mêmes, mais ils étaient occultés par le pouvoir. Il n’empêche. Douze lycéens sur 30, dont 40,9 % de filles, ont connu le cannabis dans les établissements scolaires, tandis que les plus jeunes sont attirés par la colle. Les services sanitaires et de l’éducation sont en état d’alerte. Nabil Ben Salah, directeur général de la santé, affirme qu’« il faut un partenariat solidaire entre institutions et associations pour permettre au toxicomane de se soigner sans l’exonérer de sa responsabilité ». Pourtant, le centre de Jebel el-Oust, à 40 km de Tunis, prévu à cet effet, est pratiquement confidentiel. SOURCE : MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR
NICOLAS FAUQUÉ/WWW.IMAGESDETUNISIE.COM
Maghreb Moyen-Orient
INSTRUMENTALISATION. « Pré-
vention et suivi font défaut. Le sida n’étant pas causé, en Tunisie, par l’usage de drogues injectables, on fait moins cas des risques des stupéfiants. On en revient surtout aux peines encourues », conclut Anas Ben Hriz, médecin hospitalier. La justice semble en effet instrumentaliser la consommation de cannabis de manière préoccupante. Dès qu’il s’agit de jeunes, le test sanguin est devenu systématique, même s’ils sont mis en examen pour d’autres motifs. Le rappeur Weld El 15 et Néjib Abidi, réalisateur du documentaire Circulation, ainsi que septpersonnesquitravaillaientavecluiont été poursuivis pour usage de stupéfiants alors que la police enquêtait sur le film. Si bien que l’avocat Ghazi Mrabet se dit « révolté et dégoûté » par cette pratique devenue l’une des principales causes de la surpopulation carcérale. Le directeur du pénitencier de la Mornaguia suggère, lui, d’envisager sérieusement la dépénalisation pour les consommateurs, souvent des jeunes qui, au contact de la prison, s’initient à la délinquance et connaissent ensuite des difficultés pour se réinsérer. l FRIDA DAHMANI, à Tunis N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Maghreb Moyen-Orient t Dakhla devrait devenir le premier pôle halieutique national.
VINCENT FOURNIER/J.A.
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du modèle de développement et de sa réussite opérationnelle ». Traduites en chiffres, les recommandations du rapport donnent le vertige. Le NMDPS projette 140 milliards de dirhams (12,5 milliards d’euros) d’investissement sur dix ans. L’objectif est de doubler le PIB de la région sur la même période, de créer 120 000 emplois, ce qui permettra de réduire de moitié le taux de chômage (15 % aujourd’hui). Mais un tel effort ne doit pas reposer seulement sur les finances publiques. « L’État investit actuellement 5 milliards par an dans les trois régions sahariennes. Il s’agit de pérenniser ces investissements, tout en faisant appel à des partenariats publicprivé », précise Nizar Baraka. Ainsi, 30 % du montant doit être apporté par des partenariats public-privé.
MAROC
Très cher Sahara
HUB. La véritable rupture conceptuelle est
Élaboré par le Conseil économique, social et environnemental (Cese), le programme de développement des provinces du Sud sera doté d’une enveloppe de 140 milliards de dirhams sur dix ans.
C
ommandé par Mohammed VI en novembre 2012, il y a tout juste un an, le « Nouveau Modèle de développement pour les provinces du Sud » tombe à pic. « Il ne s’agit pas d’une simple proposition de solutions palliatives pour une conjoncture d’urgence, ni de projets isolés déconnectés les uns des autres, mais plutôt d’une vision de développement intégrée », s’est félicité le roi lors de son discours de la Marche verte, largement consacré au dossier du Sahara, le 6 novembre. Hasard du calendrier, le rapport du Conseil économique, social et environnemental (Cese) émerge en pleine crise diplomatique avec le voisin algérien au sujet des droits de l’homme dans ce que Rabat appelle ses « provinces du Sud ». Rappel de son ambassadeur à Alger, mots doux échangés entre les capitales, arrachage de drapeau au consulat algérien de Casablanca… On pourrait penser que le Makhzen a trouvé la parade par un simple effet d’annonce. Faux et même injuste au regard du processus rigoureux qui a abouti au NMDPS – son petit surnom. Ce travail sans précédent a été lancé N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
fin 2012 par Chakib Benmoussa, alors président du Cese et actuel ambassadeur du royaume à Paris. Son successeur, Nizar Baraka, rappelle que « plus de 1 500 acteurs » locaux (élus, entrepreneurs, syndicats, associations) ont été consultés, gage, selon le président du Cese, « d’une appropriation pleine
Les trois régions sahariennes n Guelmim Es-Smara n Laayoune-Boujdour n Oued Eddahab-Lagouira
59 % du territoire marocain 1 028 806 habitants (3,2 % du total)
28 % de chômeurs parmi les jeunes L’État contribue à plus de 54 % du PIB
là: pour réussir le décollage du Sahara, les experts du Cese ont imaginé de renforcer l’attractivité économique de ses territoires. De réceptacle des aides du Nord, l’ambition est de faire du vaste territoire qui s’étend de Guelmim à la frontière mauritanienne un « hub entre le Maghreb et l’Afrique subsaharienne ». Trois pôles sont envisagés, avec une spécialisation pour chacun. Autour de Laayoune, véritable centre administratif et déjà capitale régionale, il s’agit de renforcer le potentiel maritime, les activités agricoles et industrielles. Plus au sud, Dakhla devrait émerger comme le premier pôle halieutique national, avec la construction d’un grand port Atlantique-Sud (à l’image de celui, déjà réalisé, de Tanger Med et de celui, en cours, de Nador West Med) et la consolidation d’une offre touristique de niche (création d’une compagnie aérienne régionale). Dans la région de Guelmim Es-Smara, le rapport identifie unespécialisationtournéeversl’économie sociale et solidaire, autour de l’agriculture, de l’artisanat et du tourisme. À terme, le développement du Sahara « devrait faciliter l’intégration économique avec les États africains voisins, contribuant ainsi à la prospérité, à la stabilité et à la paix dans la région », conclut le président du Cese. Pour lui, la copie est rendue. Il revient maintenant aux autres acteurs d’entrer en jeu. l YOUSSEF AÏT AKDIM JEUNE AFRIQUE
Maghreb Moyen-Orient ISRAËL - ÉTATS-UNIS
La grande discorde Qu’il s’agisse du processus de paix avec les Palestiniens ou des négociations avec Téhéran, les deux alliés étalent ouvertement leurs divergences. Du jamais vu !
HEIDI LEVINE/NEWSCOM/SIPA
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p John Kerry (à g.) et Benyamin Netanyahou, le 6 novembre, à Jérusalem.
«
C
oncernant nos récents différends avec les ÉtatsUnis, c’est maintenant le moment de calmer le jeu. Il est naturel que nous ayons parfois des opinions divergentes […], mais ces différences n’auraient pas dû être exprimées publiquement. » Ces propos volontairement apaisants portent l’étonnante signature d’un habitué des esclandres diplomatiques : Avigdor Lieberman. Réintégré au poste de ministre des Affaires étrangères après la fin de ses déboires judiciaires, l’ancien colistier de Benyamin Netanyahou a évité la polémique au terme de sa toute première rencontre de travail avec l’ambassadeur américain à Tel-Aviv, Dan Shapiro, le 12 novembre. Mais il en faudra bien plus pour apaiser la colère de
l’administration américaine, frustrée de voir ses efforts au Proche-Orient continuellement sapés par l’irrédentisme du gouvernement israélien. AFFRONT. Après Hillary Clinton et ses émissaires lors du premier mandat d’Obama, c’est au tour de John Kerry de se heurter à Netanyahou, que rien ne semble arracher à ses certitudes sur les dossiers palestinien et iranien. Sauf que, cette fois, le mot « crise » est approprié. Celle-ci a largement supplanté les traditionnels désaccords qu’entretenaient jusqu’ici, presque sans brouille, Israéliens et Américains. Le Moyen-Orient a beau s’embraser de toutes parts, John Kerry n’entend pas râper son costume de secrétaire d’État pour jouer un rôle de figurant
diplomatique promis aux oubliettes de l’Histoire. Même au nom de la sacrosainte alliance avec l’État hébreu. Son coup de sang résulte d’un énième projet israélien de constructions en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. L’appel d’offres initial, qui portait sur 1 500 logements, avait été officialisé le 30 octobre, quelques heures à peine après la libération d’un groupe de 26 prisonniers palestiniens – le second depuis la timide reprise des pourparlers de paix cet été. Avant même de pouvoir être apprécié par les intéressés, ce geste de bonne volonté a été balayé par une nouvelle vague de colonisation. Abasourdie, l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas menace aussitôt de claquer la porte des négociations. Netanyahou persiste pourtant dans le déni : « Je ne comprends pas cette polémique. Il y a des arrangements entre nous, les Américains et les Palestiniens, et c’est de ça qu’il est question. Les Palestiniens font semblant de l’ignorer, car ils sont sous la pression de leur opinion publique. » Le 6 novembre, à Jérusalem, le Premier ministre israélien pousse le poker menteur jusqu’à mettre John Kerry en porte-à-faux face aux journalistes : « Nous respectons scrupuleusement les termes de l’entente à partir de laquelle nous avons lancé ces négociations […]. Je suis inquiet car ils [les Palestiniens]créentdescrisesartificielles.» Le secrétaire d’État américain n’apprécie guère la manœuvre. La réunion suivante entre les deux hommes est glaciale. Kerry choisit habilement une interview à la télévision israélienne pour répondre à l’affront : « Comment pouvez-vous, alors que vous dites œuvrer pour la paix avec la Palestine et les gens qui y vivent, construire dans des terres qui, en fin de compte, doivent revenir à cette même Palestine ? Cela renvoie un message que vous n’êtes pas vraiment sérieux. » Et de poursuivre: « Vous, Israéliens, pensez être en sécurité grâce à la barrière de séparation, parce qu’il n’y a plus d’affrontements
NUCLÉAIRE IRANIEN : DOUBLE JEU AMÉRICAIN ? SELON LE QUOTIDIEN israélien Haaretz, Washington ne considérerait pas les mises en garde répétées de Netanyahou comme une atteinte aux négociations avec l’Iran. Certains responsables de l’administration Obama N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
admettraient même, en coulisses, que les pressions du Premier ministre israélien sont « utiles » au processus diplomatique en cours. Début novembre, le secrétaire à la Défense, Chuck Hagel, avait salué les menaces israéliennes d’une
intervention militaire, affirmant que celles-ci avaient poussé les Iraniens à négocier « sérieusement ». Tout en jouant l’ouverture avec la République islamique, les États-Unis auraient aussi adopté certaines exigences de
Tel-Aviv, notamment sur l’arrêt de la production d’uranium enrichi, comme l’a laissé entendre Wendy Sherman, chef de l’équipe américaine à Genève, lors d’une interview accordée à la télévision israélienne. l M. P. JEUNE AFRIQUE
au quotidien et que votre économie se porte bien. Mais laissez-moi vous dire que le statu quo actuel ne durera pas. » L’allusion à une éventuelle « troisième Intifada » palestinienne ne passe pas. Vexé, Netanyahou adresse une ultime pique sur la question des frontières du futur État palestinien : « Je ne transigerai jamais sur la sécurité de mon pays. La vallée du Jourdain [à l’est] restera sous notre contrôle.»Restequ’auseindel’administration américaine les provocations verbales de « Bibi » semblent bien moins marquer les esprits que sa politique de grignotage des territoires palestiniens. « Les ÉtatsUnis considèrent toutes les implantations comme illégitimes », insiste John Kerry. Jamais une condamnation aussi explicite n’avait été formulée par un haut responsable américain. Le malaise prend même un peu plus d’ampleur le 12 novembre, lorsque l’organisation israélienne Shalom Arshav (« La Paix maintenant ») révèle que ce sont en fait près de 24 000 unités de logement qui sont concernées par un appel d’offres. Un record ! Washington exige sans délai des explications à son allié. Bien qu’il assure ne jamais avoir été alerté, Netanyahou se voit contraint de lâcher du lest : il ordonne d’abord un gel partiel de 1 800 logements planifiés dans la zone E-1, une bande de terre reliant l’est de Jérusalem à la colonie de Maale Adoumim – 40 000 habitants –, avant de faire annuler la totalité du plan. EXASPÉRATION. Parallèlement, Israéliens
et Américains s’affrontent sur le dossier du nucléaire iranien, autre terrain miné où leurs divergences paraissent néanmoinsdavantageliéesàdesconsidérations tactiques. Le 9 novembre, au moment où le groupe P5+1 (les cinq membres du Conseil de sécurité plus l’Allemagne) et la République islamique semblaient proches d’un accord, Netanyahou monte au créneau pour dénoncer un compromis « qui enterre toute possibilité d’un règlement pacifique avec l’Iran ». Là aussi, son empressement à critiquer un « mauvais accord » avant qu’il ne soit signé a exaspéré au plus haut point les Américains. Tandis quelechefdugouvernementisraélienétait accusé par le New York Times de « générer de l’hystérie », John Kerry lui adressait une cinglante mise au point : « Le temps de s’opposer [à l’accord] viendra quand vous saurezdequoiilretourne.Nevousopposez pas aux efforts visant à déterminer ce qui est possible. » l MAXIME PEREZ, à Jérusalem JEUNE AFRIQUE
Maghreb & Moyen-Orient
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FAYEZ NURELDINE/AFP
Coulisses
p Transfert de clandestins vers un camp de rétention, le 13 novembre.
ARABIE SAOUDITE CHASSE AUX ÉTHIOPIENS Les autorités saoudiennes avaient donné sept mois aux immigrés clandestins pour régulariser leur situation. Depuis, plus de 900 000 « irréguliers » ont quitté le royaume. Mais le 10 novembre, six jours après l’expiration du délai, les premières violences répondaient à la chasse aux étrangers menée par la police. Plusieurs centaines d’immigrés, essentiellement éthiopiens, se sont fait encercler dans Manfouha, quartier pauvre de Riyad. Le tumulte et l’assaut qui a suivi ont fait 2 morts et 68 blessés, et 561 « instigateurs de troubles » ont été arrêtés. « Inacceptable », pour le ministre éthiopien des Affaires étrangères, qui fait état de 3 morts parmi ses concitoyens et exige de Riyad une enquête. Sur une population de 27 millions d’habitants, l’Arabie saoudite compte 9 millions d’immigrés, mais la flambée du chômage incite les autorités à favoriser désormais l’emploi national.À n’importe quel prix… l
LIBYE UN TANKER POUR TOBROUK
Le 10 novembre, Abd Rabbo al-Barassi, Premier ministre putatif du bureau politique de la Cyrénaïque, a annoncé la création de la Libya Oil and Gas Corp., une entreprise d’hydrocarbures concurrente de la National Oil Company. Elle sera provisoirement basée àTobrouk, où les autonomistes occupent le port pétrolier de Hariga et empêchent des navires étrangers de charger du pétrole. Face à ces actes de piraterie, le chef du gouvernement, Ali Zeidan, menace d’utiliser la force dans un délai de dix jours.
SYRIE FRICTIONS ENTRE FACTIONS
Dans la périphérie de Damas, des affrontements entre le Hezbollah libanais et la brigade Abou al-Fadl Abbas ont fait plusieurs morts, rapporte le quotidien saoudien
Al-Watan dans son édition du 11 novembre. Les deux milices chiites prorégime assurent conjointement la garde du mausolée de Sayeda Zeinab, petite-fille du Prophète et fille du premier imam chiite, Ali. Le Hezbollah accuse la brigade Abou al-Fadl Abbas de brigandage et de veulerie.
ÉGYPTE MOSCOU, LE RETOUR
Le ministre égyptien des Affaires étrangères s’est défendu de chercher « un remplaçant à qui que ce soit », mais, le 14 novembre, la visite au Caire des ministres russes de la Défense et des Affaires étrangères semble bien traduire la quête d’une solution pour remédier au tarissement de l’aide américaine après l’éviction du président Morsi par l’armée. Au menu des entretiens, la crise syrienne et d’éventuelles livraisons d’armes. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Europe, Amériques, Asie
INDE
OBJECTIF
MARS
Le 5 novembre, la sonde Mangalyan a décollé de la base de Sriharikota. Direction : la planète rouge. C’est l’aboutissement provisoire d’un programme spatial lancé dès la fin de l’ère coloniale.
Europe, Amériques, Asie MARJORIE CESSAC
ardi 5 novembre, base de lancement de Sriharikota, dans l’État d’Andhra Pradesh, à 80 km au nord de Chennaï. Il est 14h38, heure locale. La sonde Mangalyan vient de s’arracher du sol. L’interminable périple quidoitlaconduirejusqu’àlaplanèteMars commence. Quarante-quatre minutes plus tard, les applaudissements crépitent, l’engin a réussi à se placer dans l’orbite de la Terre. « C’est le modeste commencement de notre mission interplanétaire », commente Deviprasad Karnik, porte-parole d’Indian Space Research Organisation (ISRO), la société spatiale nationale. Jusqu’au 1er décembre, la sonde va donc tourner autour de la Terre afin de prendre de la vitesse avant de s’élancer vers Mars. Ce voyage de 400 millions de kilomètres devrait durer, dans le meilleur des cas, quelque trois cents jours. Mission accomplie ? Il est encore trop tôt pour le dire. Car dans ce type d’expédition martienne, les échecs sont fréquents.
Dans le passé, moins de une mission sur deux (21 sur 51) a été couronnée de succès. La Chine en sait quelque chose. En 2011, sa sonde Yinghuo 1 n’est jamais parvenue à prendre la trajectoire de la planète rouge, ce qui, bien sûr, donne au tir indien une saveur toute particulière… Après les États-Unis, la Russie, l’Europe et le Japon, l’Inde rejoint donc le cercle très fermé des pays engagés dans l’exploration de Mars. Dans la grande course à la haute technologie dont l’Asie est le théâtre – et à laquelle elle feint de ne pas participer –, elle vient bel et bien de marquer un point contre le grand rival chinois. Il est vrai qu’elle dispose en ce domaine d’une longue tradition spatiale naguère impulsée par des responsables politiques comme l’ancien Premier ministre Jawaharlal Nehru, un passionné de sciences, et par des scientifiques charismatiques au premier rang desquels Vikram Sarabhai, fondateur en 1947 du Physical Research Laboratory, à Ahmedabad, et véritable « père » du programme spatial indien. La philosophie de ce l l l
t 5, 4, 3, 2, 1, 0 ! Début d’un beau voyage de 400 millions de kilomètres.
ISRO/AFP
M
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Europe, Amériques, Asie Inde grand visionnaire a toujours été de mettre le spatial au service de la société civile. En 1969, c’est notamment grâce à lui que l’ISRO a pu voir le jour. Dès le début de la décennie, l’Inde avait établi de fructueux contacts avec les États-Unis. La Nasa avait ouvert ses portes à certains de ses savants pour qu’ils se forment à l’assemblage et au lancement de fusées-sondes. C’est le paisible village de pêcheurs de Thumba, dans l’État du Kerala, qui, en raison de sa proximité avec l’équateur magnétique, avait été choisi pour accueillir une base de lancement. Le 21 novembre 1963, Nike-Apache, une sonde made in USA, fut lancée à partir de ce site. Outre les États-Unis, d’autres pays comme la France et la Russie participaient à l’opération. La recherche spatiale indienne était sur les rails. Au cours des douze années suivantes, de nombreuses sondes russes, françaises, allemandes et japonaises (350, au total) seront lancées depuis le pas de tir de Thumba. lll
PHOTOS. En 1964, les États-Unis expédient dans l’espace la sonde Mariner 4, qui transmettra à la Terre les premières photos de la surface de Mars. En 1967, l’Inde conçoit pour sa part sa première sonde, Rohini 75, d’un diamètre de 75 mm et d’un poids de 10 kg. Ce sera le premier d’une longue série d’engins chaque fois plus lourds et plus complexes. En 1971, c’est au tour de l’Union soviétique de s’illustrer en faisant atterrir un premier vaisseau sur la planète rouge. Son nom ? Mars 3. À la même époque, le gouvernement indien prend la décision de construire son propre lanceur. Ce sera chose faite moins de dix ans plus tard. Sous la houlette de Satish Dhawan, le directeur de l’Indian Institute of Sciences, qui a pris la relève de Sarabhai, mort en 1971, l’Inde développe la fusée SLV-3 (pour « Satellite Launch Vehicle » : « engin lanceur de satellites »), un lanceur comportant quatre étages capable de placer sur orbite une charge de 40 kg. Mais le pays n’a pas attendu de disposer de son propre lanceur pour développer ses capacités spatiales. Le 19 avril 1975, le satellite Aryabhata, du nom du célèbre astronome indien (476-550), est lancé par une fusée soviétique Cosmos-3M. Quelques jours plus tard, le contact est perdu, mais cette première mission ouvre la voie à beaucoup d’autres. En 1979 et en 1981, les satellites Bhaskara I et Bhaskara II – du nom cette fois d’un mathématicien du XIIe siècle – emportent des caméras de télévision qui transmettent de précieuses images du sous-continent à l’origine de spectaculaires avancées dans les domaines de l’hydrologie, de la géologie, de l’étude des forêts, mais aussi des télécommunications. Tout au long des années 1980 et jusqu’en 2009, le lancement de satellites Insat (pour « Indian National Satellite System ») permet à l’Inde de se doter d’un vaste réseau de télécommunications, de diffusion de télévision et de prévision météorologique. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
UNE MISSION LOW COST
(en dollars)
Coût de la mission indienne vers Mars
75 millions (55 millions d’euros)
Coût de la mission vers Mars (Maven) que la Nasa devait lancer le 18 novembre
679 millions
Coût pour la Nasa de l’envoi sur Mars du robot Curiosity, en 2008
2,5
milliards
« Le programme spatial indien a toujours été centré sur la société, répète K. Radhakrishnan, l’actuel président de l’ISRO, quand on lui fait remarquer que, dans ce pays encore très pauvre qu’est l’Inde, les 55 millions d’euros qu’a coûté la mission martienne auraient pu être employés plus utilement. Chaque roupie dépensée a eu des retombées bénéfiques, notamment dans la gestion des catastrophes naturelles. Récemment, avant l’arrivée du typhon Phailin, les images transmises par Insat aux services de la météo nationale ont permis de sauver des milliers de vies. » Le 22 octobre 2008, trente-neuf ans après l’exploit de Neil Armstrong, l’Inde est devenue la quatrième puissance, après les États-Unis, l’Union soviétique et l’Europe, à placer, grâce à une fusée PSLV, un engin, la sonde Chandrayaan 1, en orbite autour de la Lune. Cette mission a notamment permis de révéler la présence d’eau sur notre satellite. Que faut-il attendre de cette nouvelle expédition martienne – si, naturellement, elle arrive à son terme ? À l’instar de Maven, la sonde que la Nasa devait lancer ce 18 novembre, elle a pour objectif d’étudier l’atmosphère de la planète rouge. Les deux engins devraient d’ailleurs se trouver en même temps dans l’orbite de Mars le 24 septembre 2014. Mais les similitudes s’arrêtent là. L’Inde ne peut consacrer à son programme qu’une somme dix fois inférieure à celle que la Nasa investit dans le sien. Les États-Unis en sont à leur vingt-deuxième opération martienne, l’Inde à sa première. La mission américaine devra s’efforcer de répondre à des questions précises. Par exemple : pourquoi la planète rouge a-t-elle vu disparaître la plus grande partie de son atmosphère ? Son alter ego indien a nécessairement des ambitions à la fois plus modestes et plus générales. MÉTHANE. L’une d’elles devrait néanmoins susciter la curiosité de la communauté scientifique. « Nous souhaitons étudier la présence éventuelle de méthane, ce qui serait un précieux indicateur d’une possible vie sur Mars », explique Radhakrishnan. Lancé en 2011 par la Nasa, le robot Curiosity n’avait pour sa part décelé que d’infimes quantités de ce gaz à la surface de la planète rouge. Une découverte indienne dans ce domaine aurait donc une importance capitale. « Dans un second temps, nous souhaitons déterminer l’origine de ce méthane, établir s’il provient d’un processus biologique ou d’un processus géologique. » Prudence toutefois, le rêve spatial peut se briser à tout moment. Le 11 novembre, par exemple, la sonde n’arrivait plus à atteindre la vitesse souhaitée. Il a fallu des manœuvres supplémentaires pour rectifier le tir. Les ingénieurs de l’ISRO ont donc de bonnes raisons de se montrer circonspects. « Il nous reste un long voyage à parcourir, expliquentils. Dans le temps et dans l’espace. » l JEUNE AFRIQUE
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Un hors-série
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OLIVIER JOBARD/M.Y.O.P.
Giuseppina Maria Nicolini : « Jusqu’où faudra-t-il agrandir le cimetière de mon île ? »
ITALIE
Sainte Giusi, madone des immigrés Confrontés au débarquement incessant des clandestins, aux naufrages et aux drames en tout genre, bien des élus auraient baissé les bras. Mais le maire de Lampedusa est d’une autre trempe !
M
aire de Lampedusa et de Linosa, deux petites îles italiennes au sud de la Sicile, Giuseppina Maria Nicolini (52 ans) aime les tempêtes d’automne en Méditerranée. Pendant que le vent souffle en rafales, aucune embarcation ne se risque à déverser sur les plages sa cargaison de clandestins. Le 3 octobre, la disparition en mer de plus de 130 personnes pour la plupart originaires de Somalie a constitué pour elle le drame de trop. « Ce ne sont pas des immigrants, ce sont des désespérés qui fuient les conditions de vie atroces qui prévalent dans leur pays », assène celle que les Italiens surnomment affectueusement « Giusi ». Cette insulaire a toujours exprimé son profond désaccord avec les politiques migratoires menées par l’Italie et l’Europe. Indignée par les campagnes médiatiques qui, en janvier et en février 2011, dénonçaient un « exode biblique » sans précédent alors que près de 6 000 jeunes N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Tunisiens profitaient de la révolution pour tenter l’aventure de l’immigration clandestine, elle a dit et redit qu’il n’y avait à ses yeux « pas d’invasion mais des naufrages ». Et que, « alors que Lampedusa est le point d’entrée des rafiots de l’espérance depuis quinze ans, nous n’avons même pas une chambre mortuaire réfrigérée et un espace décent où recevoir les cercueils ». HUMANISTE. Depuis 2002, 3300 migrants
sont morts au large de l’île. Et Giusi s’insurge : « Ce ne sont pas des chiffres, mais des personnes. » C’est le message que ce petit bout de femme, mais grande humaniste, tente de faire passer à Bruxelles. Hélas, son intervention du 29 octobre a été un coup d’épée dans l’eau. Ce jourlà, en plein scandale des écoutes de la NSA, l’agence de renseignements américaine, les dirigeants européens avaient d’autres chats à fouetter. Le maire de Lampedusa n’en était pourtant pas à son coup d’essai. En mai 2012, deux mois
après son élection, elle avait déjà interpellé le Parlement européen. « Je suis indignée, écrivait-elle, par le sentiment d’habitude qui semble avoir envahi le monde. Je suis scandalisée par le silence de l’Europe, qui vient de recevoir le prix Nobel de la paix mais reste silencieuse face à une tragédie qui fait autant de victimes qu’une guerre. Mais si le voyage en bateau est pour ces personnes la seule façon d’espérer, je crois que leur mort en mer doit être pour l’Europe un sujet de honte et de déshonneur. Jusqu’où faudrat-il agrandir le cimetière de mon île ? » L’appel de cette ancienne militante communiste a été entendu par le pape François, qui, en juin, a fait à Lampedusa sa première sortie officielle. Et par Laura Boldrini, présidente de la Chambre des députés italiens et ex-porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR). Mais son soutien le plus indéfectible est naturellement celui de son époux, Peppino Palmeri, militant du Parti démocrate et chef de file de la gauche au conseil communal, qui n’hésite pas à alerter ses amis, à Rome, sur la situation de l’île. « Le maire fait du bon boulot », assure-t-il. Ces deux-là ont près de vingt-cinq ans de vie commune JEUNE AFRIQUE
Europe, Amériques, Asie et deux grands enfants. Mais leur passion pour Lampedusa est presque aussi forte. T’AS COMPRIS ? Il n’empêche, celle que l’on surnomme parfois la Madone des immigrés a beau avoir l’endurance et la détermination d’une coureuse de fond, elle connaît aussi de grands moments de solitude. À plusieurs reprises elle a été menacée. « Non aux clandestins en liberté chez nous », disait un message trouvé près d’une barque brûlée à proximité du futur musée de l’Immigration. L’U capisti? (« Tu as compris ? ») qui concluait cette déclaration était lourd de sous-entendus. Mais Giusi en a vu d’autres. Le parcours militant de celle qui à 23 ans était déjà maire adjoint de son île est ponctué d’incendies criminels. L’atelier de son père forgeron est ainsi parti en fumée, de même que le local de Legambiente, la plus importante association écologiste italienne, dont elle dirigeait l’antenne locale. Sa propre jeep et le minibus de Peppino ont également été la proie des flammes. Il faut dire qu’entre 1983 et 1984
elle remplaça au pied levé le maire, victime d’une agression mafieuse… Écologiste fervente, Giusi Nicolini n’a jamais ménagé ses efforts pour protéger l’environnement de son île. Son engage-
Deux confettis au large Naples Linosa Lampedusa
ITALIE
Palerme Sicile
Tunis TUNISIE
Syracuse Mer Méditerranée
Sfax
200 km
ment n’a pas été du goût de tous, mais elle est parvenue à chasser Valtur, le puissant tour-opérateur, de la magnifique plage des Cognili, où les tortues de mer viennent pondre, puis à faire fermer les cabanons
qui en souillaient le rivage et à obtenir son classement en réserve naturelle. Bref, ce site exceptionnel est pour l’instant préservé tant des constructions sauvages que des visées des promoteurs immobiliers. « Il faudrait étendre l’interdiction du commerce à la sauvette aux autres plages de l’île, quitte à faire usage de la force publique, estime Mme le maire. Un environnement préservé est plus attractif pour les touristes. » Pendant la mauvaise saison, les débarquements de clandestins s’arrêtent, et la signora Nicolini peut se consacrer entièrement à ses 5000 administrés. Elle s’est fixé pour objectif de créer une bibliothèque municipale en lançant un appel aux dons à travers toute l’Italie. « Vous pourriez vivre dans un lieu sans livres? » demande-t-elle. Et surtout, de réorganiser totalement le secteur de la pêche dans le sens d’un respect accru de l’environnement. Cette politique va lui valoir de nouvelles inimitiés. Elle le sait pertinemment, mais, en vraie Sicilienne, elle feint de l’ignorer. l FRIDA DAHMANI
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Europe, Amériques, Asie
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MODE
La guerre des icônes D’un côté, Jackie Kennedy, ses origines françaises, son grand style classique… De l’autre, Michelle Obama, sa propension à mélanger haute couture et prêt-à-porter, sa passion pour les créateurs issus de la diversité… Duel de géantes!
M
ercredi 7 novembre 2012. Barack Obama vient d’être réélu à la tête des ÉtatsUnis, le couple présidentiel s’enlace. Postée sur le compte Twitter du président, la photo fait le tour du monde. Michelle Obama porte une robe à carreaux rouge et blanc achetée 66 euros sur le site Asos. Au cours des semaines
suivantes, les ventes de la petite robe explosent… Désormais, pas une manifestation officielle ou une apparition publique de la première dame sans que ses tenues vestimentaires soient scrutées et commentées, généralement de manière laudative. Chacun y va de son appréciation sur le créateur, le prix du vêtement ou le
magasin où il est censé avoir été acheté. Il existe même un site web, mrs-o.com, entièrement consacré au sujet. Les journaux de mode et la presse people ne sont pas en reste. Même des publications a priori moins futiles comme le Los Angeles Times, le New York Magazine, le Huffington Post, voire, de l’autre côté de l’Atlantique, L’Express s’y mettent, via leurs suppléments spécialisés. Parallèlement, les shows télévisés auxquels participe Michelle Obama créent l’événement. La presse s’amuse d’un effet « Flotus », acronyme du nom du compte Twitter de Michelle Obama: First Lady of the United States. En 2011, sur le plateau du Tonight Show de Jay Leno, elle fait sensation avec une jupe et un sweater J.Crew. En 2008, dans l’émission The View, elle éblouit dans une robe de la marque White House, Black Market. Cette fascination du grand public pour la garde-robe de l’épouse du président n’est pas nouvelle. Elle a véritablement débuté avec Jackie Kennedy, dans les années 1960. Bien entendu, le style des deux femmes est fort différent, mais on y décèle quand même certaines analogies. Il ne faut pas perdre de vue que l’une et l’autre sont les épouses d’hommes à la fois charismatiques et atypiques : John Fitzgerald Kennedy fut le premier président catholique de l’histoire des États-Unis, Barack Obama le premier Africain-Américain. Cette singularité a-t-elle influé sur leur conception de l’élégance ?
CORBIS
PERLES. Bien entendu, Jackie et Michelle
p John Kennedy et son épouse, avant un dîner à la Maison Blanche, en 1962. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
connaissent leurs classiques: robes sans manches, rangs de perles unique ou triple, robes longues et blanches pour les cérémonies officielles, manteaux assortis aux robes, gants… Mais elles les réinterprètent de manière différente. La première, dont le nom de jeune fille était Bouvier et dont les ancêtres étaient originaires de Pont-Saint-Esprit, dans le sud de la France, était une inconditionnelle de prestigieux couturiers français comme Dior, Chanel ou Givenchy. La seconde s’est forgé un look chic, sans doute, mais pratique. Et elle s’efforce de promouvoir des créateurs américains tels que Jason Wu, Tom Ford, Michael Kors ou Ralph Lauren. Il lui arrive même de porter des vêtements d’un prix beaucoup plus abordable, œuvres de couturiers peu connus du grand public, qu’il s’agisse de Tracy Reese, native comme elle de Chicago, JEUNE AFRIQUE
Europe, Amériques, Asie
MIKE THEILER/CNP/ADMEDIA/SIPA
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p Barack Obama et la sienne, avant un dîner du Congressional Black Caucus Foundation, à Washington, le 21 septembre.
ou d’Isabel Toledo. Ces derniers sont souvent africains-américains ou issus de la diversité : taïwanais, cubains, indiens, etc. Il va de soi que la propension de la première dame à porter des modèles de marques américaines comme Gap, Talbot ou J.Crew booste les ventes de ces dernières et dynamise le secteur de la confection.
sans manches sans susciter de réactions indignées. Mais parallèlement, beaucoup d’Américaines s’efforcent de lui ressembler. Peu à peu, un nouveau standard de beauté triomphe : « le bras fitness, musclé ou lifté en finesse ». L’Association américaine des chirurgiens plasticiens enregistre une augmentation de 4 % des opérations de ce type et ne doute pas une seconde que Michelle Obama en soit directement bras à l’origine.
Toutes voudraient avoir les de Michelle. Les chirurgiens plasticiens se frottent les mains ! Quoi qu’il en soit, l’élégance naturelle de Michelle Obama fait l’unanimité, ou presque : sa silhouette élancée, sa grande taille (1,80 m), son sourire éclatant, ses bras musclés… Ces derniers sont d’ailleurs au cœur d’une assez étrange controverse. Sur son premier portrait officiel, la première dame apparaissait bras nus. Dans la presse et ailleurs, certains s’en sont émus, alors qu’une Jackie Kennedy, par exemple, pouvait porter des robes JEUNE AFRIQUE
CARREAUX. Sa coiffure,
aussi, fait un tabac. La frange que, pour la première fois, elle arborait lors de son quarante-neuvième anniversaire, au mois de janvier, a fait couler beaucoup d’encre et suscité les sarcasmes d’un Karl Lagerfeld, qui, certes, n’en a jamais été avare. Directeur artistique de la maison Chanel, le grand couturier allemand a estimé sur un plateau télé que la première dame américaine ressemblait désormais à « une speakerine de LCI ». Pas de quoi fouetter un
chat, mais la saillie a fait le tour de la planète… Ce qui fait la singularité – et le succès – du style de Michelle Obama, c’est peut-être le mélange qu’elle réussit entre haute couture et prêt-à-porter. On a déjà évoqué la petite robe à carreaux de chez Asos ou l’ensemble J.Crew bon marché qu’elle arborait chez Jay Leno. Mais il faudrait aussi parler de la robe Talbot blanche à fleurs jaunes – prix : 40 euros – qu’elle portait à Orlando, au mois d’août. Ses robes de créateur font rêver, ses tenues bon marché renforcent son côté accessible. Tout le monde a l’impression de pouvoir lui ressembler. Bref, Michelle O. est une icône. Mère, épouse et avocate accomplie, elle est l’archétype de la femme moderne, une sorte de version 2.0 de Jackie Kennedy. Les deux femmes ont su imposer une mode impeccable et innovante, séduire le peuple grâce à la sûreté de leur goût et à l’originalité de leur personnalité. Voilà pourquoi elles sont les First Ladies les plus admirées de l’histoire des ÉtatsUnis. l DALANDA DIALLO N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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PARCOURS | D’ici et d’ailleurs
Géraldine Robert Grande dame À 33 ans, cette FrancoGabonaise est l’une des toutes meilleures joueuses de basket en France. Mais son engagement la pousse aujourd’hui vers le terrain social, en Afrique.
I
LY A UN MYSTÈRE Géraldine Robert. Élue meilleure joueuse de la Ligue féminine de basketball (LFB) pour l’année 2012-2013, cette athlète n’a jamais été sélectionnée en équipe de France. Et quand la question vient sur le tapis, la réponse reste diplomatique mais dissimule mal une certaine aigreur: « J’ai joué trois matchs amicaux en équipe de France, jamais de match officiel. Je respecte le choix du coach, mais je ne le comprends pas. Il ne m’a pas donné ma chance. Pour le reste, je ne peux pas répondre à sa place… » Son mentor, le Sénégalais Abdou Ndiaye, actuellement entraîneur à Lille: « Le sélectionneur a ses raisons… Le jeu de Géraldine est assez atypique. Mais ne l’avoir jamais vu évoluer en équipe de France, je le déplore avec beaucoup de vigueur. » Quoi qu’il en soit, la jeune FrancoGabonaise semble s’être fait une raison. Avec une moue fillette, elle ajoute : « Si l’on devait m’appeler aujourd’hui, je ne sais pas si j’irais. Ma vie personnelle a souvent pris le dessus sur ma vie professionnelle. » Ceci explique peutêtre cela : elle n’est pas née avec une grosse balle orange entre les pognes. Son père, français, travaillait pour la Compagnie forestière du Gabon (CFG), et elle a vu le jour à Port-Gentil, le 26 juin 1980. Dans la cité CFG, où elle grandit, il y a certes beaucoup de terrains de basket, mais… « Je n’ai commencé que plus tard, vers l’âge de 14 ou 15 ans, pour m’amuser, dit-elle. Avant, j’étais vraiment un garçon manqué, j’adorais les jeux de billes, le vélo tout-terrain, et je faisais un nombre incroyable de bêtises… » Exemple ? S’enfuir dans les marécages alentour sur un petit radeau de fortune. « J’ai eu une très belle enfance. Mes parents m’ont inculqué des valeurs pour lesquelles je ne les
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p « Je n’aspirais pas à devenir professionnelle. Pour moi, c’était un jeu et ça le reste encore », déclare l’athlète.
remercierai jamais assez. Ils ont tout fait pour que je garde les pieds sur terre et que je grandisse dans la simplicité. » Ses vacances en famille dans le Jura (France), à côté de Dole, comptent parmi ses plus beaux souvenirs. Élève moyenne à l’école, elle a « la fibre sportive », se met à la danse classique, puis a l’athlétisme – où elle brille. Au Gabon comme ailleurs, les années 1990 sont les années Jordan, celles de la Dream Team. « Le basket était très médiatisé et tous les garçons de ma cité s’y sont mis, se souvient-elle. Un
coach m’a dit que j’avais des attitudes et des aptitudes de basketteuse… » Bientôt, le simple intérêt va devenir passion. « Je n’aspirais pas à devenir professionnelle. Pour moi, c’était un jeu et ça le reste encore. Je prends toujours énormément de plaisir à jouer ! » Elle pratique d’abord au sein du club du collège Raponda-Walker, puis pour le club de Mba Bekelé et enfin pour le Club de la balle orange (CBO). Mais à l’âge de 18 ans, elle est envoyée par ses parents faire des études en Europe, du côté de Besançon. « Ça s’est bien passé, j’ai retrouvé des amis JEUNE AFRIQUE
Europe, Amériques, Asie
Après un détour par l’Italie et la Pologne, elle évolue aujourd’hui à Montpellier. Mais, à 33 ans, elle prépare déjà son « après-basket ». Ce sera au Gabon, et dans l’action sociale bénévole auprès des jeunes, avec son association Yemaly, créée en 2011, parce que « le basket c’est bien, mais l’école c’est encore mieux ». Inutile de l’emmener sur un autre terrain, elle ne parlera pas politique. Ou très peu. « Je suis apolitique ! se récrie-t-elle lorsqu’on lui demande son point de vue. Je sais ce que fait le président pour le sport. Les choses sont en train de bouger, et j’espère qu’il va continuer, même si le chantier est long… » L’équipe de France n’a pas voulu d’elle ?Tant pis. Peut-être que le basketball féminin gabonais aura, lui, besoin des 184 centimètres de cette « grande dame », comme le dit Abdou Ndiaye. l NICOLAS MICHEL Photo : CAMILLE MILLERAND pour J.A. JEUNE AFRIQUE
JULIAN STRATENSCHULTE/AFP
et de la famille, ce n’est pas comme si j’avais quitté le Gabon directement. » Elle continue sur sa lancée et joue en Nationale 1 au Besançon Basket Club. L’année de ses 19 ans, sa meilleure amie lui demande de l’accompagner à Londres et, malgré les réticences initiales de ses parents, elle traverse la Manche pour entamer des études d’analyste programmeur qu’elle ne terminera pas. Elle donne naissance à un garçon en 2000 et continue de fréquenter les terrains, pour le plaisir. Bien entendu, elle se fait remarquer et finit par intégrer le London Sting, puis les Rhondda Rebels. C’est d’affronter « l’une des meilleures joueuses françaises », Cathy Melain, qui lui offrira son billet retour pour la France. D’abord au RC Strasbourg, puis à Villeneuve-d’Ascq (ESBA). L’équipe est alors emmenée par le coach sénégalais Abdou Ndiaye. « L’alchimie s’est faite, et Abdou Ndiaye est devenu mon mentor. » Pour le double champion d’Afrique, « Géraldine est une joueuse dynamique, courageuse, énergique, qui a le sens du rebond. C’est aussi une personne au grand cœur qui a toujours l’esprit d’équipe et cherche sans cesse à cimenter les relations entre ses coéquipiers ».
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p Le président du Parti social-démocrate d’Allemagne (SPD). ALLEMAGNE
Sigmar Gabriel, en rouge et noir Le nouveau chef des sociaux-démocrates négocie pied à pied avec les amis d’Angela Merkel la formation d’une große Koalition.
U
n mois après les élections fédérales, l’Allemagne se cherche toujoursunnouveaugouvernement.Presquechaquesemaine, la CDU/CSU et le SPD se retrouvent à la table des négociations en vue de constituer une coalition. Face à une Angela Merkel victorieuse, le nouvel homme fort des sociaux-démocrates se nomme Sigmar Gabriel, un ancien enseignant de 54 ans, excellent orateur mais peu réputé jusqu’ici pour sa stature d’homme d’État. LeSPDveutabsolumentéviterderééditer seserreurspassées,lorsque,en2009,ilétait sorti exsangue d’une précédente alliance avec les démocrates-chrétiens. Gabriel est convaincu qu’après la disparition parlementaire du FPD, son allié historique, et le retraitdesVertsdesnégociationspourcause d’insurmontables divergences, Merkel n’a plus d’autre choix que de s’allier avec lui. Alors il tente d’imposer ses conditions. En dépit de leurs joutes verbales – pendant la campagne, Gabriel a comparé la chancelière à « une tante radine crispée sur son sac à main » –, les deux rivaux se connaissent et s’apprécient, ce qui devrait faciliter l’instauration d’un salaire minimum (8,50 euros de l’heure), l’une des principales promesses de campagne de la gauche. Mais le leader du SPD aura fort à faire pour rallier à sa stratégie les 470 000 adhérents de son parti, qui, sur
la Toile, ont fâcheusement tendance à le traiter de « traître ». Toujours pragmatique, Gabriel a annoncé que la signature d’un éventuel accord de coalition serait soumis à référendum début décembre. Un sacré coup de poker, car, en cas de victoire du non,ilfaudraitprobablementrecommencer les législatives. COLÈRE. Dans le cas contraire, ce serait
pour Gabriel l’apothéose d’une carrière en dents de scie. Né à Goslar, dans le nord de l’Allemagne, il entre aux jeunesses socialistes à l’âge de 17 ans puis au SPD l’année suivante. De son enfance aux côtés d’un père violent et fervent admirateur de Hitler, il affirme conserver une « colère irrépressible » et une passion pour la justice. En 1999, il est élu ministre-président du Land de Basse-Saxe. Quatre ans plus tard, il est balayé par Christian Wulff, le candidat de la CDU. Tout le monde le croit fini, mais il remonte la pente. De 2005 à 2009, il est ministre de l’Environnement au sein d’un gouvernement rouge-noir (SPDCDU/CSU), avant d’être porté à la tête d’un SPD à bout de souffle, qu’il s’efforce de redresser en le gauchisant. S’il finit par s’entendre avec Merkel, il devrait hériter du poste largement honorifique de vicechancelier. Ce qui le mettrait en position favorable pour les élections de 2017. l GWÉNAËLLE DEBOUTTE, à Berlin N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
LE PLUS
de Jeune Afrique
ÉLECTIONS Le grand test
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ÉCONOMIE Une croissance peu partagée BUSINESS Secrets de familles et affaires d’État FOOTBALL Les Mourabitounes tournent (enfin) rond
MAURITANIE
Aziz au banc Premier retour aux urnes depuis l’élection de Mohamed OuldAbdelaziz,les législatives et municipales constituent une étape décisive avant la présidentielle de 2014.
p Un jour de vote à Nouakchott. JEUNE AFRIQUE
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GEORGES GOBET/AFP
d’essai
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Prélude
ÉCONOMIE Une croissance peu partagée
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BUSINESS Secrets de familles et affaires d’État FOOTBALL Les Mourabitounes tournent (enfin) rond
MAURITANIE
Aziz au banc
Seidik Abba
d’essai
C
EUX QUI REVIENNENT du 6,4 % en 2013, et autant annoncé en pays sont unanimes : quelque 2014. Avec des réserves de changes estichose bouge en Mauritanie. mées à près de 960 millions de dollars Et même très fortement. Des (714 millions d’euros), la Mauritanie élections municipales et législatives vont joue désormais dans la cour des grands sur le continent. s’y tenir le 23 novembre et le 4 décembre, et ce n’est pas qu’une simple échéance Mais attention, de nombreux défis électorale : depuis 2006 le mandat des restent à relever. Et pas des moindres… députés et des conseillers municipaux D’abord, la Mauritanie doit trouver sa n’avait pas été renouvelé, faute de place dans son environnement régioconsensus dans la classe politique. Cette nal. Entre les « grands frères » algérien et marocain d’un côté, la fois, majorité et opposition se sont enfin entendues, du Tunisie postrévolutionnaire Les moins en partie. qui peine à trouver sa voie « pesanteurs » Les prochaines élecet la Libye – au bord du tions feront donc date chaos – de l’autre, ce n’est sociales, pas gagné d’avance. dans les annales politiques telles que Ensuite, les « pesannationales. Pas moins de les violences 20 sièges sur les 147 de la teurs » sociales telles que les future Assemblée natioviolences faites aux femmes faites aux et l’esclavage demeurent nale seront en effet réserfemmes encore très fortes. En vés aux Mauritaniennes. et l’esclavage, milieu rural, la pauvreté Un tournant en soi dans touche jusqu’à 70 % de la le pays. Et comme une restent fortes. population, contre moins bonne nouvelle ne vient de 20 % à Nouakchott et à jamais seule, la tenue des Nouadhibou, ce qui apparaît comme scrutins législatif et municipal coïnun signe évident d’accaparement des cide avec le retour au bercail des Forces richesses par les élites urbaines. de libération africaines de Mauritanie (Flam). Après vingt-sept années d’exil, La démocratie semble elle aussi les principaux dirigeants du mouveencore très perfectible. Et c’est un ment interdit en 1986 sont revenus. euphémisme. Le boycott des municiLeur retour va nourrir les débats au sein pales et des législatives par une partie de la société civile et témoigne d’une non négligeable de la classe politique ouverture démocratique. sonne comme un échec des palabres à la mauritanienne. Une autre bonne nouvelle, sur le plan Il faut donc espérer que, très vite, le économique cette fois : la conclusion de pays retrouve les moyens d’associer l’accord de pêche avec l’Union eurotoutes les sensibilités à la gestion des péenne. Il va non seulement rapporter affaires publiques. C’est sans doute la pas moins de 110 millions d’euros au meilleure voie pour qu’il surmonte les budget national, mais surtout garantir la préservation des ressources halieutiques obstacles importants placés sur le cheet les intérêts des petits pêcheurs maumin des progrès socio-économiques. ritaniens. Ce compromis va, de toute L’espoir qu’il y parvienne est permis. évidence, contribuer au renforcement Surtout au regard des bons signaux d’une économie dont le taux de croisdonnés ces dernières semaines. La sance ne peut faire que des envieux : Mauritanie avance ! l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
ÉLECTIONS Le grand test
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OPPOSITION Trouble jeu
p. 72
INTERVIEW Ahmed Ould Daddah, président du RFD, chef de file de l’opposition p. 73 MAGHREB Alger, Rabat, Nouakchott: la diplomatie funambule p. 74 LAURENT PRIEUR POUR J.A.
Lueurs d’espoir
JEUNE AFRIQUE
ÉLECTIONS Le grand test
SOCIÉTÉ CIVILE Retour des Flam
p. 76
TRIBUNE Fatimata M’BAYE, présidente de l’Association mauritanienne des droits de l’homme p. 81 ÉCONOMIE Une croissance peu partagée
p. 82
BUSINESS Secrets de familles et affaires d’État
p. 84
PÊCHE Touche pas à mon poulpe !
p. 88
FOOTBALL Les Mourabitounes tournent (enfin) rond p. 90
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Le Plus de Jeune Afrique
POLITIQUE
Le grand test Après deux ans de blocage, les élections législatives et municipales devraient enfin se tenir les 23 novembre et 4 décembre. Premières et dernières consultations avant la présidentielle prévue en 2014. Et l’heure du bilan pour le président Mohamed Ould Abdelaziz.
Aziz au banc d’essai JUSTINE SPIEGEL,
p À l’ouverture du dialogue national, le 30 septembre. Mohamed Ould Maham (à g.), représentant l’UPR, et Mohamed Ould Maouloud (à dr.), la COD.
AMI
À
envoyée spéciale
COD a quitté la table et dix des onze partis qui la composent ont réitéré leur décision de boycotter les scrutins à venir. L’Union pour la République (UPR, au pouvoir) est le seul parti à avoir déposé des listes et inscrit des candidats dans toutes les circonscriptions, suivi de près, en nombre de listes et de candidats, par Tawassoul et l’APP. Ils ont donc toute latitude pour briguer les 147 sièges à pourvoir à l’Assemblée nationale… Et pour mettre sur le banc de touche la COD, qui prend le risque de se marginaliser dans la vie politique du pays.
Nouakchott,lespluiesontcessé. La ville, comme engourdie par les inondations, s’éveille. Un calme apparent qui ne laisse rien soupçonner de l’agitation qui règne dans les coulisses des partis politiques. En ce mois de novembre, la Mauritanie prépare ses élections législatives et municipales, reportées sine die depuis novembre 2011. L’Assemblée nationale et les conseils municipaux n’ont pas été renouvelés MAURITANITÉ. Si la Commission nationale indédepuis fin 2006, soit deux ans avant le coup d’État pendante a annoncé que 1,25 million d’électeurs de l’actuel président, Mohamed Ould Abdelaziz. sont appelés aux urnes, le recensement continue de Mais cette fois les dates sont fixées: le premier tour susciter la polémique. Lancé au début du mois de aura lieu le 23 novembre et le second le 4 décembre. mai 2011, il vise à doter le pays d’un état civil fiable À une semaine des scrutins, les tensions sont et biométrique. Chaque citoyen doit se déplacer, vives. La Coordination de l’opposition démocraà ses frais, dans l’un des 54 centres implantés à tique (COD), présidée par Ahmed Ould Daddah travers le pays, afin de prouver sa « mauritanité ». (lire p. 73), l’avait annoncé en juillet et s’en est Une opération d’enrôlement jugée « raciste » par les Négro-Mauritaniens, lesquels, tenue à sa décision: dix de ses onze en plus de subir des « questions partis boycotteront le scrutin. Un L’Assemblée humiliantes », rencontreraient véritable test pour la COD, qui, et les conseils beaucoup de difficultés à s’enrôdepuis 2011, réclame le départ ler (à être recensés), à l’intérieur d’« Aziz ». Sans surprise, seuls les municipaux comme à l’extérieur du pays. islamistes modérés de Tawassoul, n’ont pas été Selon les derniers chiffres de présidés par Jemil Ould Mansour, renouvelés l’Agence nationale du registre des ont rompu le pacte et participeront aux élections. Toujours du côté de populations et des titres sécurisés, depuis fin 2006. l’opposition, la Convention pour publiés dans le quotidien gouvernel’alternance pacifique (CAP, 4 partis), emmenée par mental Horizons, plus de 2,7 millions de citoyens le leader de l’Alliance populaire progressiste (APP) ont été enregistrés. Un chiffre bien supérieur à la et président de l’Assemblée nationale, Messaoud réalité selon le collectif Touche pas à ma nationaOuld Boulkheir, a choisi elle aussi de se confronter lité (TPMN), créé en 2011. « Les agents se basent aux électeurs. sur le recensement national de 1998, mais il était déjà faussé, assure Abdoul Birane Wane, leader DISSENSIONS. Ces scrutins législatif et municipal de TPMN. Nous estimons que 15 % à 20 % des tant attendus cristallisent les dissensions de la Négro-Mauritaniens ne pourront pas voter. » Sans classe politique. Depuis l’élection d’Aziz en juilcompter que dans les centres d’enrôlement de let 2009, le dialogue est rompu entre le pouvoir et Nouakchott, l’attente est longue et la colère gronde. les partis de la COD, qui ne lui ont jamais pardonné On redoute de ne pas être enregistré à temps et de son péché originel : le renversement de Sidi Ould ne pouvoir glisser son bulletin dans l’urne. Une Cheikh Abdallahi, premier président civil du pays source de trouble pour Aziz, plus d’un an après depuis Moktar Ould Daddah. Alors que ces partis la fin officielle du retour des Négro-Mauritaniens avaient refusé de prendre part au dialogue national expulsés entre 1989 et 1991 (lire p. 76)… et moins en 2011, l’espoir était mince de les voir accepter d’un an avant la fin de son mandat. de transiger lors des négociations organisées par le pouvoir à la fin du mois de septembre dernier. FOSSÉ. Car au-delà des législatives et des muniReprésentée par Mohamed Ould Maouloud, le cipales, chacun a le regard tourné vers 2014. Une président de l’Union des forces de progrès (UFP), année décisive. L’heure du bilan pour Mohamed la COD a cependant accepté de s’asseoir à la même Ould Abdelaziz, qui s’est fait élire comme « prétable que le gouvernement, dont la délégation sident des pauvres ». Il affirme qu’il a rempli son était dirigée par Mohamed Yahya Ould Horma, le contrat en ce qui concerne la sécurité, que de ministre de la Communication et des Relations avec nombreux chantiers ont été engagés pour relanle Parlement. Objectif: trouver un terrain d’entente cer l’économie et transformer le pays. Reste que avant les élections. Après seulement trois jours, nombre d’entre eux semblent inachevés : niveau les discussions ont tourné court. Faute d’accord de vie, taux de chômage, esclavage… En matière sur le report des élections qu’elle réclamait, la de sécurité du territoire, l’État est parvenu à mettre JEUNE AFRIQUE
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Le Plus de J.A. Mauritanie fin aux zones de non-droit. Il a aussi immédiatement redéployé son armée à la frontière avec le Mali au lendemain du déclenchement de l’opération Serval et a consenti à ce que la Mauritanie participe, avec 1 800 hommes, à la force des Nations unies au Mali, la Minusma, à la condition que ses troupes restent dans la zone frontalière entre les deux pays. Sur le plan intérieur, les indicateurs macroéconomiques sont au vert (lire pp. 82-83). Cependant, la croissance ne profite pas encore au commun des Mauritaniens. Le pays émarge au 155e rang sur 187 pays classés dans le rapport 2013 sur le développement humain du Programme des Nations
LES SCRUTINS EN CHIFFRES • 1,25 million d’électeurs inscrits • 71 partis et coalitions participent aux scrutins • Pour les législatives, 440 candidats se présentent (428 pour des partis politiques et 12 pour des coalitions), pour 147 sièges à pourvoir (contre 95 lors de la précédente législature), dont 20 sièges réservés aux femmes • Pour les municipales, qui concernent 218 communes, l’Union pour la République (UPR) a déposé 218 listes, contre 155 pour le parti Tawassoul et 150 pour l’Alliance populaire progressiste (APP), 103 pour El Wiam (de l’ancien ministre des Finances Boidjel Ould Homoid) et 95 pour le parti Sursaut de la jeunesse
unies pour le développement (Pnud). L’esclavage persiste. Le fossé entre riches et pauvres ne cesse de se creuser. Les jeunes se sentent laissés pour compte. Malgré le programme d’urgence Emel (« Espoir », en hassania), lancé en janvier 2012 par le gouvernement, pour plus de 113 millions d’euros, afin d’apporter une aide alimentaire à quelque 110 000 ménages et assister le secteur pastoral, Aziz ne semble pas encore avoir réussi à faire renaître l’espérance. l
Trouble jeu Depuis l’élection d’Aziz, l’opposition n’est jamais parvenue à s’entendre. De désaccords ponctuels en désunion, ses ténors jouent aujourd’hui des partitions contraires.
L
a division règne désormais en depuis l’élection d’Aziz en juillet 2009, n’a maître dans les rangs de l’opposicessé d’offrir un spectacle de désunion. tion. Depuis le dialogue national Après le coup d’État du 6 août 2008, elle de septembre 2011, les détracavançait en rangs serrés, mais la norteurs de Mohamed Ould Abdelaziz malisation politique a mis fin à la belle se sont scindés en deux camps : la entente. Reconnaissance de l’élection Coordination de l’opposition démoprésidentielle de 2009, incursions de cratique (COD, composée de 11 parl’armée mauritanienne au Mali, particitis) et la Convention pour l’alternance pation ou pas au dialogue national, aux pacifique (CAP, 4 partis), coalition de législatives et aux municipales (initialel’opposition dite modérée. Alors que ment prévues en novembre 2011)… Les cette dernière a choisi de voix de l’opposition sont participer aux élections devenues discordantes sur Tawassoul, législatives et municipales beaucoup de sujets. le parti prévues les 23 novembre et d’obédience 4 décembre, la COD a opté, CHAISE VIDE. Pourtant, islamiste, en juillet, pour le boycott. l’enjeu des prochaines élecCependant, son union tions est de taille pour deux a décidé de s’est fissurée puisque ses grandes figures, qui participer aux de Tawassoul, le parti d’obéremettent leur fauteuil en consultations. jeu. Ahmed Ould Daddah dience islamiste, présidé par Jemil Ould Mansour, (lire p. 73), le chef de file de a finalement décidé de participer aux l’opposition, leader du Rassemblement scrutins. Une décision pragmatique qui des forces démocratiques (RFD) et préne surprend guère. Avec une présence sident en exercice de la COD, tente un logistique revendiquée dans 49 départecoup de poker en boycottant les consulments sur 53, Tawassoul mène campagne tations électorales. En misant sur la à travers le pays depuis de longs mois et politique de la chaise vide, il va en effet ne veut donc pas se priver d’élections priver le RFD de ses sièges au Parlement, alors qu’il y est le parti d’opposition le dont l’issue devrait lui être favorable. Hétérogène, l’opposition mauritanienne, mieux représenté, avec 16 députés sur 95 N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
MANON RIVIERE
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pTrois des leaders de l’opposition (de g. à dr.).: Jemil Ould Mansour (Tawassoul), Messaoud Ould Boulkheir (APP), Mohamed Ould Maouloud (UFP).
et 7 sénateurs sur 56. Quant à Messaoud Ould Boulkheir, président de l’Assemblée nationale, de l’Alliance populaire progressiste (APP, 6 députés, pas de sénateurs) et de la CAP, s’il participera aux scrutins et, avec lui, les candidats de son parti, il se fait discret. Son projet de gouvernement d’union nationale est resté lettre morte et il n’est pas parvenu pour le moment à convaincre Aziz de reporter une nouvelle fois les élections. l JUSTINE SPIEGEL JEUNE AFRIQUE
Aziz au banc d’essai
LAURENT PRIEUR POUR J.A.
Comme à son habitude, le pouvoir fait semblant de discuter. Mais il ne se considère lié par aucune des décisions issues des rencontres auxquelles il participe. Ce n’est plus acceptable. Depuis deux ans, l’Assemblée nationale et les conseils municipaux n’ont pas été renouvelés comme ils auraient dû l’être. Vos élus ont pourtant continué de siéger au Parlement…
Ce Parlement ayant été maintenu, nous avions le droit, voire le devoir, de continuer à nous informer de ses activités. Les députés de l’opposition n’ont jamais cessé de dénoncer les dérives du pouvoir. Et Dieu sait qu’il y en a eu.
INTERVIEW
Ahmed Ould Daddah « Le jour du vote, nous serons présents à notre manière » Pendant deux ans, le chef de file de l’opposition a refusé de participer au dialogue national. À une semaine des législatives et des municipales, il campe sur ses positions et boycottera les scrutins.
À
l’instar de dix des onze formations politiques de la Coordination de l’opposition démocratique (COD), qu’il préside, Ahmed Ould Daddah a décidé que son parti ne participerait pas aux élections législatives et municipales prévues les 23 novembre et 4 décembre. Pour le président du Rassemblement des forces démocratiques (RFD), l’enjeu est pourtant de taille : à 71 ans, il remet en jeu son titre de chef de file de l’opposition, attribué par le Conseil constitutionnel en 2007. L’intraitable opposant n’a certes rien perdu de sa ténacité, mais, en misant sur la politique de la chaise vide, il risque de se marginaliser. JEUNE AFRIQUE : Pourquoi dix des onze partis de la COD, dont vous êtes le président, refusent-ils d’aller aux élections? AHMED OULD DADDAH: Nous souhai-
tions participer à l’ensemble du processus électoral,depuislalocalisationdesbureaux de vote jusqu’à la proclamation des résultats.Cettepropositiondevaitconstituerune garantie pour chacun. Or le pouvoir nous l’a refusée. S’il n’avait rien eu à cacher, il n’aurait eu aucune raison de réagir ainsi. JEUNE AFRIQUE
En refusant de vous confronter au vote des citoyens, comment espérez-vous continuer à peser dans la vie politique du pays ?
Les élections sont un moment très important dans une démocratie. Pas dans une dictature. Elles ne sont alors qu’un prétexte pour légitimer des résultats connus à l’avance. Les médias audiovisuels étant en situation de quasimonopole, nous exprimons nos idées par le biais de communiqués, d’articles
Il y a eu une défection dans vos rangs. Tawassoul, le parti islamiste dirigé par Jemil Ould Mansour, a décidé de prendre part au scrutin. Le regrettez-vous ?
En tant qu’actuel président de la COD, je préférerais que nous avancions ensemble. Mais je ne me donne pas le droit de juger un parti sur ses choix. À la fin, c’est l’opinion qui arbitrera. Nous avons appelé au boycott actif du scrutin et demandé aux Mauritaniens de rester chez eux. Ils se rendront certainement compte de la contradiction entre le taux de participation officiel et le réel. Tawassoul fait-il toujours partie de la COD ?
Pour le moment, et jusqu’à la fin des élections, il a suspendu ses activités au sein de la Coordination. Pourra-t-il la réintégrer plus tard ?
C’est lui qui en prendra l’initiative. Notre porte est ouverte.
Les élections sont très importantes dans une démocratie. Pas dans une dictature. de presse, de meetings, de marches et de sit-in. Le jour du vote, nous serons présents à notre manière à travers tout le territoire, afin de mesurer la participation réelle des électeurs. Tout avait pourtant bien commencé puisque vous aviez accepté de prendre part au dialogue préélectoral avec le pouvoir, début octobre.
Et quelles sont vos relations avec Messaoud Ould Boulkheir, le président de l’Assemblée nationale, qui remet lui aussi son fauteuil en jeu ?
Pour le moment, nous sommes chacun d’un côté de la barrière, puisqu’il participe à ces élections. Mais nos relations personnelles sont normales. l Propos recueillis à Nouakchott par JUSTINE SPIEGEL N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Le Plus de J.A. Mauritanie
AMI
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DIPLOMATIE
Sur un fil Entre la délicate question du Sahara occidental et la crise sahélienne, difficile de préserver l’équilibre dans les relations avec Rabat et Alger.
E
n quittant la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) en 1999, la Mauritanie avait renoncé à son statut de trait d’union entre le monde arabe et l’Afrique subsaharienne, statut hérité du père de la nation, Moktar Ould Daddah. Mais le choix d’une appartenance exclusive à l’organisation fantôme qu’est l’Union du Maghreb arabe (UMA) a fait entrer sa politique régionale dans un terrain miné depuis plus de trente ans par la question du Sahara occidental. Cette option stratégique a imposé à la diplomatie mauritanienne de jouer les funambules entre les enfants terribles du Maghreb, l’Algérie et le Maroc, ce qui requiert une vigilance de tous les instants. « Nous surveillons les états d’âme d’Alger et les humeurs de Rabat comme le lait sur le feu, assure un diplomate mauritanien à la retraite. Mais nous aussi avons la souveraineté susceptible. » Grossièrement résumée, la diplomatie des gouvernements mauritaniens successifs s’en est tenue à un non-alignement prudent, mais constant, à l’égard des deux grands voisins du nord. À tel point que les commissions mixtes avec chacun d’entre eux se tiennent toujours à des dates rapprochées. Ainsi, le Premier ministre algérien Abdelmalek Sellal s’est rendu à Nouakchott en mars 2013 pour N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
p Ramtane Lamamra (à g.), le ministre algérien des Affaires étrangères, reçu par Mohamed Ould Abdelaziz, le 24 octobre.
présider la commission algéro-mauritanienne avec son homologue Moulay Ould Mohamed Laghdaf. Lequel, un mois plus tard, accueillait le chef du gouvernement marocain, Abdelilah Benkirane, pour présider la commission marocomauritanienne. De même, alors que les Algériens s’apprêtent à construire une route de 1 000 km entre Tindouf l’algérienne et Choum la mauritanienne, les Marocains offrent de leur côté un nouveau siège au ministère des Affaires étrangères mauritanien. CRISE DE NERFS. Ce souci d’équi-
libre ne signifie pas pour autant que Nouakchott accepte que l’on marche sur ses platebandes. Et Mohamed Ould Abdelaziz sait montrer sa mauvaise humeur. En décembre 2012, il a reçu le chef de la diplomatie du Polisario, alors qu’un ministre d’État marocain, Abdellah Baha, le bras droit de Benkirane, qui se trouvait au même moment à Nouakchott pour le congrès du parti islamiste Tawassoul, n’a pas été convié au palais présidentiel. Crise de nerfs au Maroc. Aziz donne-t-il du crédit aux rumeurs qui accusent les services marocains d’être
derrière la tentative d’assassinat qui l’a ciblé le 13 octobre 2012 ? « Pas du tout, explique notre diplomate à la retraite. Le président Ould Abdelaziz était convalescent, et le roi du Maroc avait dépêché un sous-chef de bureau de son ambassade à Paris pour prendre de ses nouvelles. Le Polisario a en revanche envoyé son chef de la diplomatie, Mohamed Salem Ould Salek… Même si nous ne reconnaissons pas la RASD [République arabe sahraouie démocratique], la différence saute aux yeux. » Simple courroux protocolaire ? Rien n’est moins sûr. Le président Ould Abdelaziz récidivait, le 18 septembre dernier, en recevant à nouveau le ministre des Affaires étrangères sahraoui quelques heures avant de s’envoler pour Bamako afin d’assister à l’investiture du président Ibrahim Boubacar Keita, aux côtés de… Mohammed VI. Il est cependant peu probable que la diplomatie mauritanienne ait décidé d’évoluer sur la question du Sahara occidental au détriment du Maroc. Cela relève plus du coup de semonce que d’une charge d’artillerie. La présence d’une ambassade de la RASD à Nouakchott n’est pas pour demain. l CHERIF OUAZANI
AMBASSADE NON GRATA LE 16 JANVIER 2009, au lendemain de l’opération Plomb durci menée par les Israéliens sur la bande de Gaza, Nouakchott avait gelé ses relations diplomatiques avec Tel-Aviv, établies en 1999 par Maaouiya
Ould Taya malgré la levée de boucliers de la classe politique mauritanienne et de la majorité des pays arabes. Moins de deux mois plus tard, le président Mohamed Ould Abdelaziz donnait 48 heures à
l’ambassadeur et à son personnel pour quitter le pays. L’ambassade d’Israël en Mauritanie a donc fermé ses portes le 6 mars 2009. Elle ne les a jamais rouvertes depuis. l J.S. JEUNE AFRIQUE
PORT AUTONOME DE NOUADHIBOU
L Une infrastructure au service du développement
MOHAMED OULD DAF, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU PAN.
LE SIÈGE DU PAN.
e Port de Nouadhibou a vu le jour en 1955 avec la construction d’un quai de chalandage de 250 m pour les besoins des projets d’exploitation des gisements de mines de fer, nouvellement découverts, au Nord de la Mauritanie et s’est agrandi, en 1960, avec la construction d’un quai de commerce de 120 m et de 3 cales de pêche sur financement de la République Française. Deux nouvelles extensions ont été opérées, en 1968 et 1976, dotant le Port d’un quai de pêche de plus de 300 m, d’équipements modernes et de bâtiments administratifs. Par la suite d’autres projets ont permis au Port Autonome de Nouadhibou (PAN) de doubler la longueur de ses quais de pêche, de s’équiper en système de sécurité à la navigation et de renouveler ses phares et feux (Cap blanc, Cansado et Chacal). En 2009, le PAN a lancé les travaux d’un grand projet d’extension portant sur : • 660 m linéaires de quai, • 121 000 m2 de terre-pleins, • 2 rampes RO-RO de plus de 40 m de largeur pouvant accueillir des navires de plus de 100 m de long.
UNE OPÉRATION DE MANUTENTION.
Pour améliorer la navigabilité le long de son chenal d’accès, le PAN a connu en 2011 une large opération de nettoyage qui avait permis l’enlèvement et la dépollution de 74 épaves. Certifié ISO 9001 version 2008 et ISPS, le PAN a mis en place un manuel de gestion qui couvre tous les aspects du fonctionnement de l’établissement ainsi qu’un système d’information et un guichet unique. La modernisation du PAN s’est poursuivie avec l’installation d’un système de télésurveillance et la mise en œuvre d’un programme d’informatisation et de renforcement des capacités des ressources humaines. Principal port d’import des biens manufacturés pour les zones minières du nord du pays et d’export des produits de pêche, le PAN a enregistré une évolution du tonnage manipulé et une croissance moyenne de son chiffre d’affaires de l’ordre de 15 % par an lors des 3 derniers exercices. La position stratégique du site de la ville de Nouadhibou et les atouts naturels quasi-uniques de sa baie ont conduit l’État Mauritanien à y créer, en janvier 2013, une Zone Franche dans laquelle le Port devra occuper une place centrale.
LE QUAI DE PÊCHE.
Le PAN est membre des organismes suivants :
PORT AUTONOME DE NOUADHIBOU
• Union des Administrations Portuaires du Nord de l’Afrique : UAPNA • Fédération Arabe des Ports Maritimes : ASPF • Association des Ports de l’Afrique de l’Ouest et du Centre : AGPAOC • Central Dredging Association : CEDA • ICHCA LE NOUVEAU QUAI.
BP 236 Nouadhibou, Mauritanie Tél. : +222 45 74 61 03 Fax : +222 45 74 51 36 E-mail : contact@pan.mr
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Le Plus de J.A. Mauritanie SOCIÉTÉ CIVILE
Retour des Flam Après vingt-sept années d’exil, les principales figures des Forces de libération africaines de Mauritanie sont rentrées au pays. Avec un espoir : obtenir l’autonomie régionale partielle.
LAURENT PRIEUR POUR J.A.
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p Kaaw Touré, porte-parole du mouvement, Samba Thiam, son président, et Ibrahima Mifo, son vice-président (de g. à dr.), à Nouakchott le 31 octobre.
R
éprimés, ils avaient dû fuir leur propre pays. Le 24 septembre, ce n’est pas clandestinement, mais dans la lumière et sous les applaudissements, qu’ont débarqué à l’aéroport de Nouakchott, Samba Thiam et Kaaw Touré, le président et le porteparole des Forces de libération africaines de Mauritanie (Flam). Le mouvement de libération des Négro-Mauritaniens contre le racisme et l’esclavage avait été interdit en avril 1986 par Maaouiya Ould Taya. « On nous perçoit trop souvent comme des intellectuels coupés du peuple, confie Samba Thiam. Cet accueil populaire dément ces critiques. Nous avons pris notre temps, mais notre place est ici. » Ibrahima Mifo, le vice-président du mouvement, et Mamadou Wane, le secrétaire national chargé de la jeunesse, les avaient précédés. Les militants exilés devraient eux aussi, peu à peu, regagner le pays. Ce retour, ils l’ont envisagé depuis la chute d’Ould Taya, en août 2005, et la transition démocratique d’Ely Ould
N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Négro-Mauritanien opprimé ». Pour avoir dénoncé la mainmise des Maures sur l’appareil d’État, leurs dirigeants ont été arrêtés, puis incarcérés à la prison de Oualata, avant de s’exiler comme nombre de leurs militants. Samba Thiam et Ibrahima Mifo ont vécu aux États-Unis, Kaaw Touré en Suède. Déracinés. L’éclatement du mouvement et la dispersion de ses militants ont évidemment compliqué la lutte. « Nous sommes partis car nous n’avions pas le choix ! C’était se taire, subir la répression ou partir, explique Samba Thiam. Depuis, d’autres ont marché dans nos pas. » En effet, quelques organisations telles que l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA-Mauritanie), fondée en 2008, ou Touche pas à ma nationalité (TPMN), collectif créé en 2011 lors du processus d’enrôlement, aux revendications similaires à celles des Flam, sont nées dans leur sillage. Pour le moment, Samba Thiam tient à rester à l’écart de toute guerre de leadership. « L’unité d’action est nécessaire », dit-il. Par ailleurs, les Flam ne souhaitent ni soutenir une ligne politique ni former un parti. Ils espèrent simplement orienter les débats des campagnes pour les législatives et les municipales sur la question de l’unité nationale, qu’ils estiment négligée dans les programmes des candidats. Ils reviennent aussi porteurs d’un projet : l’autonomisation régionale. Ils souhaitent que les régions du fleuve (à vocation agricole), de l’Est (pastorale) et du Nord-Centre (minière) soient administrées par des gouverneurs choisis par les populations, prenant en
Mohamed Vall. Mais il n’a été entériné qu’en 2011, lors de leur congrès à Paris, longuement préparé depuis. Les Flam, qui ont désormais pignon sur rue à Nouakchott, reçoivent au siège du mouvement, dans le quartier du Sebkha. Pour Pour avoir dénoncé la mainmise le moment, ils n’ont aucun des Maures sur l’État, ils ont été statut officiel. « La question a été abordée avec le chef arrêtés à la fin des années 1980. de l’État, précise Ibrahima Mifo, qui a été reçu par Mohamed Ould compte leurs spécificités culturelles et Abdelaziz en mars. Il nous a répondu qu’il tribales. Ces régions reconnaîtraient y a de la place pour tous, mais nous estile pouvoir central, mais géreraient les mons être encore en phase transitoire. » particularismes locaux. « Si certaines tribus qui s’estiment EXACTIONS. En 1986, à la veille de ces lésées prenaient leur destin en main, années de braise au cours desquelles s’enthousiasme le président des Flam, on des dizaines de milliers de Négropourrait réduire les tensions et reconsMauritaniens, fuyant le racisme arabotruire la Mauritanie sur de nouvelles berbère, durent se réfugier au Sénégal bases. » En attendant, le mouvement et au Mali, tandis que d’autres – surtout prépare la tenue de son congrès pour le dans l’armée et l’administration – subisdébut 2014. La devise des Flam restera saient des exactions parfois meurtrières, la même : « Liberté, égalité, unité. » l les Flam publiaient le « Manifeste du JUSTINE SPIEGEL JEUNE AFRIQUE
Zone Franche de Nouadhibou ou quand la vision d’un homme change radicalement un pays ■ La loi portant création de la Zone Franche de Nouadhibou a été promulguée le 2 janvier 2013. Le lancement officiel a été effectué par le Président de la République, Son Excellence Monsieur Mohamed Ould Abdel Aziz le 24 juin 2013. Un immense projet, une vision ambitieuse mais non sans pragmatisme. Les atouts sont là, les potentialités économiques aussi.
La décision - la bonne - a alors été prise et tout est parti, vite et efficacement : en quelques mois le cadre juridique et institutionnel a été mis en place, l’Autorité de la Zone Franche est installée, en particulier son guichet unique a déjà agréé une cinquantaine d’entreprises, la barrière douanière a été levée, la vision a été traduite sous forme de Schéma Directeur Opérationnel et de Plan de Développement Pluriannuel, la Zone Franche est
▲ Le Président de la Républiq République, So Son E Excellence lle Monsieur Monsi Mohamed Ould Abdel Aziz lors de l’inauguration de l’AN-ZF (Autorité de Nouadhibou Zone Franche).
visitée quotidiennement par des investisseurs de tous horizons, des chantiers sont lancés (tourisme, industries de pêche, commerce, infrastructures,…). Les institutions internationales expriment leur disponibilité et leur soutien à la Zone Franche de Nouadhibou. Un développement économique et social du pays, sans précédent, se profile déjà à l’horizon.
▲ Visite du site touristiq touristique protégé tégé de la baie de l’Étoile par le Président de la République.
■ Pays charnière et pays de rencontres, la Mauritanie se situe, géographiquement, à la lisière de l’Afrique subsaharienne et du Maghreb. Elle est l’un des principaux segments du couloir naturel qui ouvre l’Europe et l’Afrique l’une à l’autre. Ouverte sur l’océan Atlantique, la Mauritanie est l’un des points d’Afrique les plus proches de l’Amérique. Une large façade maritime et un immense domaine saharien font de la Mauritanie un espace de rencontre entre la mer et le désert, dans lequel chacun de ces environnements livre ses trésors cachés : richesses halieutiques, minérales, touristiques, etc. Le climat des affaires se caractérise notamment par : • Une démocratie bien ancrée ; • Un système judiciaire indépendant ; • Une infrastructure de base ; • Un système financier en transformation ; • L’égalité de traitement entre les investisseurs mauritaniens et étrangers ; • Les étrangers propriétaires à 100 % ; • La liberté de transfert de capital, des bénéfices et des revenus. Nouadhibou sur les grandes voies commerciales internationales. ▲ Nouadhibo
PUBLI-INFORMATION
-I-
AUTORITE DE LA ZONE FRANCHE
DE NOUADHIBOU
La zone franche de Nouadhibou ■ La décision de créer la zone franche de Nouadhibou procède de la volonté du Président de la République d’impulser un développement harmonieux et intégré du pays à travers l’exploitation optimale des potentiels économiques en fonction de la spécificité et de la vocation de chaque région. Nouadhibou se trouve justement être une cité côtière, pourvue d’une large façade maritime, située sur un carrefour des grandes voies de la navigation maritime, en zone maghrébine et à proximité de l’Afrique subsaharienne, de l’Europe et des Amériques.
Cette position stratégique de Nouadhibou et le riche potentiel qu’elle recèle méritent d’être mis à contribution pour moderniser cette zone et en faire un pôle de développement compétitif. Sur la base des avantages comparatifs et des impératifs dictés par les contraintes de la compétitivité et de la nécessaire adéquation avec le contexte de globalisation, le Président de la République a instruit le gouvernement pour la mise en œuvre de la décision courageuse de lancer cet ambitieux chantier structurant porteur d’impacts socio-économiques de grande envergure, dans une démarche globale et cohérente.
▲ Monsieur Ismail Bedde CHEIKH SIDIYA, Président de l’ANZF.
Nouadhibou Zone Franche ouvre les portes de l’Afrique à vos investissements..
▲ Siège de l’ANZF à Nouadhibou.
▲ Visite du Guichet Unique informatisé par Son Excellence, le Président
Cadre juridique et institutionnel
Le Guichet unique
■ L’Autorité de la Zone Franche (l’Autorité) est une personne morale de droit public, dotée de l’autonomie financière et de gestion, régie exclusivement par le statut particulier défini par la loi N°2013-001 du 2 janvier 2013 portant création de la Zone Franche et ses textes d’application. L’Autorité est placée sous la tutelle de la Présidence de la République.
■ L’Autorité a mis en place un guichet unique pour la réalisation de l’ensemble des formalités et démarches administratives nécessaires aux activités des développeurs, des opérateurs et des entreprises agréées.
Le Conseil Supérieur d’Orientation Stratégique de la Zone Franche de Nouadhibou, présidé par le Président de la République, définit les orientations stratégiques de la Zone Franche et supervise leur mise en œuvre par l’Autorité. En vue de l’accomplissement efficient de sa mission, la loi a transféré à l’Autorité toutes les compétences nécessaires, qu’elle exerce, en lieu et place de l’ensemble des administrations, des services de l’État, des collectivités territoriales et des établissements publics. La loi a également créé un Centre de Régulation indépendant pour garantir la transparence et l’équité entre les différents acteurs au sein de la zone franche. PUBLI-INFORMATION
de la République Monsieur Mohamed Ould Abdel Aziz.
En particulier, le guichet unique est chargé de l’accomplissement de l’ensemble des formalités et démarches relatives à l’implantation des entreprises agréées dans la zone franche, dans le but de faciliter la délivrance de tous permis, licences, immatriculations et autorisations nécessaires pour leurs activités, incluant notamment les visas et permis de travail, les déclarations et autorisations relatives aux activités soumises à des régimes particuliers et l’ensemble des obligations de déclaration, de permis et d’autorisation en matière urbaine et environnementale.Le guichet unique traite, en lieu et place des administrations compétentes, l’ensemble des déclarations et autres formalités, notamment en matière fiscale, commerciale et sociale, devant être accomplies par les développeurs, les opérateurs et les entreprises agréées. Le guichet unique mis en place se caractérise par la transparence et l’efficience. Les formalités de création/agrément sont accomplies dans un délai maximal de cinq jours et sont gratuites. En quelques mois, 52 agréments au régime de la zone franche ont été octroyés par le guichet unique et 21 nouvelles entreprises créées. - II -
AUTORITE DE LA ZONE FRANCHE
DE NOUADHIBOU
Régime d’incitations LES DÉROGATIONS FISCALES L’État garantit aux entreprises agréées la stabilité des conditions fiscales applicables à leur investissement pendant 20 ans à compter de la date de notification de leur enregistrement ou agrément. En outre, les entreprises agréées bénéficient dans la Zone Franche du régime dérogatoire suivant, à l’exclusion de tout autre impôt, taxe, redevance, retenue à la source, droit de timbre ou d’enregistrement ou prélèvement obligatoire, direct ou indirect, de quelque nature que ce soit et quelle qu’en soit la dénomination, y compris l’impôt minimum forfaitaire, autres que ceux expressément prévus dans la loi portant la création de la Zone Franche : • Exonération totale jusqu’au septième exercice fiscal (inclus) suivant celui au cours duquel l’enregistrement ou l’agrément a été délivré; • Taux réduit de sept pour cent (7 %) d’impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux du huitième au quinzième exercice inclus ; • Taux de droit commun de vingt-cinq pour cent (25 %) à partir de la seizième année.
● ● ● ● ● ● ●
LES AVANTAGES DOUANIERS L’ensemble de la zone franche de Nouadhibou constitue un territoire douanier particulier, séparé du territoire douanier national. Les marchandises qui y sont introduites bénéficient d’un régime spécial les exonérant des droits et taxes à l’importation et à l’exportation. LE RÉGIME DE CHANGE Les entreprises agréées peuvent librement effectuer tous transferts de fonds liés à leurs activités, notamment pour les opérations courantes, en capital en cas de cession ou de liquidation des investissements, les distributions de bénéfices ou de dividendes, les remboursements des prêts et intérêts bancaires, les paiements pour l’achat de biens et de services à l’étranger. Les entreprises agréées dont les activités éligibles sont principalement tournées vers l’exportation pourront conserver sur des comptes en devises ouverts dans des banques étrangères, les devises nécessaires à leurs activités. L’installation de banques off-shore au niveau de la zone franche est également prévue par la loi portant création de la zone franche.
Zones logistiques Nouvel aéroport et son aérocite Nouvel axe logistique Nord/Sud Port autonome Zones industrielles Installation Éoliennes Aménagement touristique
De la vision à la programmation opérationnelle ■ La vision a été déclinée en un Schéma Directeur Opérationnel et un Plan de Développement Pluriannuel, devant permettre d’obtenir les résultats escomptés. Ces outils ont été élaborés par l’Autorité de la Zone Franche de Nouadhibou avec l’assistance technique du Bureau d’études français Egis. Tout a été conçu, pensé : un zonage intelligent pour tous les usages (zones industrielles, logistiques, touristiques, portuaires, aéroportuaires, habitat/immobilier…), tous les PUBLI-INFORMATION
équipements et infrastructures pour faire une ville moderne et attrayante, les aménagements urbains et paysagers (lac artificiel, promenade sur la plage, parcs et espaces verts…), montages techniques et financiers des projets… Dores et déjà des projets sont en cours de lancement (complexes touristiques, grands boulevards et axes de connexions, espaces verts, éclairage public, gestion des déchets ménagers, industries de transformation de la pêche, modernisation du port, projet de sports nautiques organisés…). - III -
AUTORITE DE LA ZONE FRANCHE
DE NOUADHIBOU
Zone Franche de Nouadhibou
10 bonnes raisons de voir Grand 1
Une vision claire et pragmatique.
4
Des potentialités économiques exceptionnelles.
2
La qualité du cadre juridique et institutionnel.
5
La position stratégique de Nouadhibou.
3
Le régime d’incitations fiscales, douanières et de change.
6
Un guichet unique performent, au service des investisseurs.
7
Un Centre de régulation indépendant
8
Un climat doux et un site naturellement privilégié.
9
L’existence des principales infrastructures.
10 L’aisance des montages PPP (partenariats public-
privé), conformes aux standards internationaux.
Le rêve va devenir réalité.
Les Atouts
Des potentialitéséconomiquesmajeures:Capitaleéconomique de la Mauritanie, Nouadhibou et son environnement sont naturellement tournés vers la mer, les côtes mauritaniennes étant connues pour leurs immenses richesses halieutiques. Avec un hinterland minier particulièrement riche (fer, or…), Nouadhibou dispose également d’un potentiel touristique et énergétique (éolien et solaire notamment) exceptionnel. Les importantes infrastructures existantes ou à développer (portuaires, aéroportuaires…) constituent également des opportunités intéressantes de partenariat entre le secteur public et le secteur privé. Une volonté politique affirmée : La volonté politique affirmée de faire de Nouadhibou un pôle économique majeur, de dimension internationale et sa concrétisation à travers la création de la zone franche constitue un acte fort, de nature à garantir un développement économique et social du pays sans précédent.
www.ndbfreezone.mr PUBLI-INFORMATION
Les principaux objectifs visés : > Attirer l’investissement et encourager le développement du secteur privé dans la Zone Franche de Nouadhibou ; > Développer les infrastructures dans la région de Nouadhibou ; > Promouvoir le développement de Nouadhibou pour en faire un pôle de compétitivité et hub régional de classe internationale ; > Créer de nouveaux emplois et améliorer les compétences professionnelles des travailleurs mauritaniens ; > Impulser le développement économique et social de la Mauritanie dans son ensemble. AUTORITE DE LA ZONE FRANCHE
DE NOUADHIBOU DIFCOM/FC - Photos : D.R.
■ Un environnement naturellement privilégié : La zone franche, comme la ville de Nouadhibou qu’elle englobe, est située sur la presqu’île du Cap Blanc, ouverte sur la Baie du Lévrier et sur l’Atlantique. Le site est un espace quasi vierge, qui se caractérise par la diversité et la beauté de ses paysages et un climat doux et tempéré tout au long de l’année. Sa proximité avec l’Europe, avec les Amériques pour horizon, la place au carrefour des principales routes maritimes, et en fait une interface active entre l’Afrique et l’espace méditerranéen. Cette position peut en faire un hub régional de premier plan.
Villa PS-485 à 488 Nouadhibou Tél. : +222 45 74 41 66 Fax : +222 45 74 41 69 E-mail : infos@ndbfreezone.mr
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Mauritanie Aziz au banc d’essai
TRIBUNE
Opinions & éditoriaux
Maintenant ou jamais
G. BOISSY/IP3 PRESS/MAXPPP
L FATIMATA M’BAYE Présidente de l’Association mauritanienne des droits de l’homme
ORS DE LA CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE de 2009, le candidat Mohamed Ould Abdelaziz s’était présenté comme le « président des pauvres ». Une fois élu, le chef de l’État a organisé comme promis des rencontres avec le peuple, à Nouakchott, Atar et Néma. Les jeunes et les femmes, qui constituent une grande partie de son électorat, s’y sont rassemblés massivement. Ils nourrissaient beaucoup d’espoir. Les premiers représentent près de la moitié de la population mauritanienne. Beaucoup ont fini leurs études, mais sont encore au chômage. Nombre de nos jeunes cadres diplômés sont rentrés au pays au moment de l’élection de Mohamed Ould Abdelaziz, car il leur avait promis l’accès à l’emploi. Mais ce qui a été entrepris est resté en deçà de leurs aspirations. Cette jeunesse répond pourtant aux critères exigés pour être recruté. Il y a certes un problème d’offre, mais aussi de népotisme. Pour pallier cela, l’État aurait pu insister sur l’accès au crédit, afin que les jeunes se lancent dans l’entrepreneuriat, comme c’est le cas au Maroc, par exemple. Hélas, en Mauritanie, la jeunesse est laissée pour compte. Elle n’a pas voix au chapitre.
de mettre à sa disposition des transports en commun.Tout avait bien commencé, des lignes avaient été délimitées et des stations créées. Mais l’effort n’a pas été poursuivi, et aucun bus ne roule à Nouakchott. Nous venons de fêter nos 53 ans et je trouve cette absence de développement très regrettable. Avant d’engager des réformes, l’État doit gagner la confiance de la population, rétablir la justice sociale. Mettre en place un service public adéquat et efficace pour répondre aux besoins des Mauritaniens. Ces derniers ne veulent plus de discours mais des actes concrets : l’eau potable dans tous les foyers, des logements sociaux et que Nouakchott soit entièrement éclairé et assaini. Les mentalités ont changé. On n’a plus les mêmes attentes, ni les mêmes ambitions. Plus
Nous venons de fêter nos 53 ans et il n’y a toujours aucun bus dans Nouakchott. Dommage.
L’État n’a pas non plus pris à bras-le-corps le problème des violences faites aux femmes. Il faut adopter une loi pour punir ces crimes, à commencer par le viol. Nous sommes en 2013 et nous nous battons encore pour que le troisième objectif du Millénaire pour le développement (« Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes ») soit appliqué. En Mauritanie, trop de petites filles et de femmes sont violées et tuées. Et les autorités restent impuissantes. La police de proximité n’est là que pour protéger les chauffeurs de taxi. La police judiciaire n’a pas les moyens d’enquêter. Si tous les commissariats avaient été alertés lorsque la petite Kadji Touré a disparu, on aurait pu la retrouver vivante. Mais personne n’a bougé. Et lorsqu’on a découvert le cadavre de cette fillette de 6 ans, il était trop tard. Les jeunes filles ne peuvent plus sortir le soir quand leur famille n’a pas de véhicule. L’État avait pourtant promis à la population JEUNE AFRIQUE
personne n’accepte de vendre sa voix chez les citoyens. Certes, l’État a distribué du poisson, de la farine, des dattes, mais ceux qui vivent dans les quartiers les plus précaires aspirent à autre chose. Certes, des boutiques ont été créées dans le cadre du projet Emel, offrant un accès aux denrées de première nécessité, et c’est une bonne initiative. Mais il manque des organes de contrôle pour vérifier que les produits sont de qualité et qu’ils sont effectivement distribués à la population. La corruption entre dans les mœurs des Mauritaniens et gangrène notre société. C’est extrêmement grave, d’autant que notre religion l’interdit. La lutte contre la corruption est menée, mais elle concerne des dossiers qui sont loin des préoccupations des Mauritaniens. Là encore, des organes de contrôle doivent être créés. Enfin, pour travailler dans de bonnes conditions, le pouvoir doit discuter à cœur ouvert avec l’opposition. Il faudrait que la société civile participe également à ce dialogue, sinon chacun continuera de se regarder en chien de faïence. C’est maintenant ou jamais. l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Le Plus de J.A. Mauritanie
ANALYSE
Une croissance peu partagée Bénéficiant d’excellents résultats économiques, le pays jouit de la confiance des institutions internationales. Seul hic : des inégalités sociales persistantes.
L
a Mauritanie fait incontestablement partie des bons élèves du continent, et les bailleurs de fonds ne tarissent pas d’éloges à son égard. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La croissance du produit intérieur brut (PIB) semble solidement installée puisque, après un taux fort respectable de 6,9 % en 2012, elle devrait se maintenir à 6,4 % cette année et en 2014, selon les prévisions
activités minières et à la pêche sont notamment excellentes. Le déficit du compte courant se creuse en raison des importations d’équipements miniers, mais les réserves de change ont dépassé les 960 millions de dollars (714 millions d’euros) et représentaient 6,7 mois d’importation fin 2012. Elles devraient encore progresser en 2013. Sur le plan qualitatif, la Mauritanie demeure un
faux : la Snim [Société nationale industrielle et minière] est aussi bien gérée que l’Office chérifien des phosphates [OCP], la référence africaine en la matière. La Mauritanie dément ce que l’on appelle la malédiction des matières premières. » Dans son rapport du mois de mai 2013, le FMI s’inquiète cependant de l’extrême dépendance du pays aux industries extractives. Situation qui ne semble pas près de s’améliorer, puisque les projets se multiplient – avec la garantie de l’Union européenne – pour l’exploitation du gaz qui vient d’être découvert au large des côtes mauritaniennes et dont certains pensent qu’il pourrait produire de l’électricité. Laquelle manque cruellement, moins de 30 % de la
INDICATEURS AU VERT Investissements directs étrangers
Un développement soutenu PIB (en milliards de $, en prix courants, éch. de gauche) 5 4
3,6
4,1
6,9
3 2
6,4
6,4
4,7
2010
2011
6
(en millions de $)
2010
131 2011
589 2012
1 204
5
3,6
1 0
3,9
CROISSANCE (variation du PIB réel, en %, en prix constants) * prévisions 8 4,2 4,2 7
4 2012
2013*
du Fonds monétaire international (FMI). Presque tous les indicateurs sont au vert. L’inflation très sage de l’année dernière (+ 3,4 %) devrait à peine accélérer à quelque 5 %. Pour la première fois dans l’histoire récente du pays, un excédent budgétaire a été dégagé en 2012, en raison notamment de recettes publiques plus importantes que prévu, l’administration ayant fait des efforts considérables pour améliorer le recouvrement des impôts. Les recettes dues aux
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exemple. Malgré les rumeurs de corruption et l’accusation récurrente selon laquelle les proches du pouvoir s’approprient les richesses du pays, la gestion des budgets de l’État et des entreprises publiques ne soulève pas de grandes critiques de la part des experts. « J’entends un discours auquel je n’adhère pas et qui prétend qu’en Afrique les pays disposant de fortes ressources naturelles sont mal gérés, déclare Vera Songwe, directrice des opérations de la Banque mondiale pour la Mauritanie. C’est
population y ayant accès. La Snim a par ailleurs annoncé, le 8 octobre, la découverte d’un nouveau gisement de fer près de Zouerate, dans le nord du pays, qui recèlerait 830 millions de tonnes de minerai. Promesse qui vient compenser les difficultés des mines d’or et les 300 suppressions d’emplois décidées par le canadien Kinross dans son usine de Tasiast (Nord-Ouest). Pour autant, « il reste beaucoup à faire pour que cette incontestable croissance
soit mieux partagée, souligne Vera Songwe. Plus de 70 % des ruraux vivent avec un revenu les plaçant sous le seuil de pauvreté, alors que la proportion est de 19 % à Nouakchott et de 16 % à Nouadhibou ». Pis, l’ONG Walk Free Foundation (WFF) a publié, le 17 octobre, un atlas de l’esclavage de 29,8 millions de personnes dans 162 pays. Classement dans lequel la Mauritanie occupe une peu flatteuse première place, avec 4 % de sa population asservie [160 000 personnes]. PRIVÉ EN BERNE. Signe de
l’incapacité du gouvernement à traduire la croissance en emplois, les statistiques officielles qui évaluent à 10 % le taux de chômage sont considérées par les experts comme peu réalistes. Le principal obstacle à la création d’emplois est la faiblesse persistante du secteur privé, notamment dans le secteur de la transformation et des PME, car l’industrie extractive nécessite de lourds investissements, mais peu de main-d’œuvre. Or le climat des affaires est médiocre. Le rapport « Doing business 2014 » de la Banque mondiale classe le pays au 173e rang sur 189. Et de fait, il n’est pas aisé d’y créer une entreprise. Surtout, la Mauritanie est bonne dernière mondiale pour la résolution des défauts de paiement : si un client fait faillite, il est très difficile de récupérer un minimum de sa créance. De quoi freiner les investissements, par exemple, dans l’agroalimentaire, malgré les beaux projets de hub portuaire à Nouadhibou ou d’irrigation de 15 000 ha dans la vallée du fleuve Sénégal. Les élections passées, il sera nécessaire de mener à bien ces réformes indispensables. l ALAIN FAUJAS
JEUNE AFRIQUE
Aziz au banc d’essai PORTRAIT
Sidi Ould Tah, l’homme lige
DE QUOI TITILLER QUELQUES VOISINS Population (en millions d’habitants, en 2013*) 38
32,8
Algérie
Maroc
Il cultive la discrétion. Mais, en réalité, le ministre des Affaires économiques et du Développement est l’un des piliers du gouvernement.
3,7
13,5
11
6,5
Sénégal
Tunisie
Libye
N
Mauritanie
Sénégal 15,4 Mauritanie 4,2
PIB (en milliards de $, en 2013*)
Tunisie 48,4
Algérie 215,7
Libye
Maroc 104,8
70,9
Croissance (en %, en 2013*) 6,4% Mauritanie
5,1%
4%
Maroc
Sénégal
3%
3%
Algérie
Tunisie
Libye
-5%
(en $ en prix courants, en 2013*) Sénégal 1 140
Tunisie
Libye
4 431
10 864
Mauritanie 1 126
Maroc
Algérie
3 190
5 668
IDE (Flux entrants, en millions de $, en 2012)
2 836
1 918
1 484
Maroc
Tunisie
Algérie
1 204
338
Mauritanie Sénégal
Climat des affaires (rang sur 189 pays classés, en 2013) 51
Tunisie
87
Maroc
153
Algérie
173
Mauritanie
178
Sénégal Libye
JEUNE AFRIQUE
187
*Prévisions
SOURCES : FMI, OCTOBRE 2013 - CNUCED, JUILLET 2013 - BANQUE MONDIALE, DOING BUSINESS 2014
PIB par hab.
ommé au ministère des Affaires économiques et du Développement le 31 août 2008, dès le lendemain de l’accession d’« Aziz » au pouvoir, Sidi Ould Tah, 48 ans, tout réservé soit-il, est l’un des hommes clés du gouvernement et du programme présidentiel, axé sur la lutte contre la pauvreté et la mauvaise gouvernance. « Je n’aime pas beaucoup parler de moi, confie-t-il. Je mets ma modeste expérience et ma passion pour le développement au service de mon pays. » Cadre à la Banque mauritanienne pour le développement et le commerce (BMDC), puis analyste financier à l’Autorité arabe pour l’investissement et le développement agricole, basée au Soudan, Sidi Ould Tah a rejoint le Groupe de la Banque islamique pour le développement (BID), en Arabie saoudite, en 1999. En décembre 2006, il revient en Mauritanie en tant que chargé de mission à la présidence de la République, est nommé ministre de l’ÉcoC’est un nomie et des Finances en juillet 2007, puis, un an et un spécialiste de la banque coup d’État plus tard, à celui des Affaires économiques et et des du Développement. Quatre ans après, l’inflation finances. a été maîtrisée, la croissance est solide, les réserves de change ont été multipliées par quatre. « Quand le président croit en quelque chose, il va droit au but. Ces résultats sont dus à sa vision stratégique, à l’assainissement de la gestion publique et, enfin, à la confiance retrouvée de l’ensemble des acteurs nationaux et internationaux », assure-t-il. Ces bonnes performances résultent notamment du troisième plan d’action du Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (2011-2015), dont Sidi Ould Tah est l’un des artisans. Des projets ont été lancés, avec plus ou moins de succès, dans la plupart des secteurs : énergie, hydraulique, agriculture (le fameux programme Emel), pêche, infrastructures, protection sociale, éducation, santé… « La Mauritanie va atteindre le statut de pays à revenu intermédiaire d’ici peu, assure Sidi Ould Tah. Les effets des projets structurants réalisés ou engagés se feront sentir d’ici deux ou trois ans. Dans quelques années, on ne parlera plus de pauvreté en Mauritanie, mais de prospérité partagée. » Laissons donc du temps au temps. l JUSTINE SPIEGEL N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Le Plus de J.A. Mauritanie BUSINESS
La roue de la fortune Détenu depuis plus de trente ans par les militaires, le pouvoir entretient des liens étroits avec de puissants hommes d’affaires. Une endogamie qui peut conduire au succès ou à la disgrâce.
«
E
n Mauritanie, le pouvoir peut enrichir les hommes d’affaires, ou les appauvrir quand le vent tourne. » Le cas de Mohamed Ould Bouamatou, considéré comme la première fortune du pays, suffit à illustrer ce commentaire d’un fin connaisseur du milieu des affaires mauritanien qui, comme la plupart de ceux qui s’expriment sur le sujet, préfère préserver son anonymat. Cousin du président Mohamed Ould Abdelaziz, le fondateur de Bouamatou société anonyme (BSA) fut l’un de ses principaux soutiens au lendemain du putsch d’août 2008. Activant son réseau relationnel parisien pour faire passer la pilule du coup de force ayant abouti au renversement de Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi (le premier civil élu en Mauritanie depuis près de trente ans), puis apportant un soutien financier à Aziz à l’approche de la présidentielle de 2009, Mohamed Ould
Bouamatou s’attendait à un opportun renvoi d’ascenseur. En vain. En 2010, dépité, il part s’installer au Maroc, d’où il continue depuis lors à diriger son groupe. Fin 2012, la Direction générale des impôts de Mauritanie signifie à trois de ses sociétés un redressement fiscal d’un montant total de 4,3 milliards d’ouguiyas (10,3 millions d’euros). Bouamatou est hors de portée, mais le vice-président de BSA, Mohamed Ould Debagh, est incarcéré début 2013. Officiellement, on lui reproche la « faillite organisée » de la défunte compagnie Mauritania Airways, dans laquelle BSA détenait une participation. Il recouvrera la liberté trois mois plus tard. « La situation est en cours de normalisation, mais elle reste sensible, confie un proche d’Ould Bouamatou. Personne à BSA ne souhaite s’exprimer sur cette affaire. » Malgré ladite affaire, les détracteurs du pouvoir croient voir la main du président dans la bonne fortune d’entrepreneurs
qui lui sont liés ou apparentés. Parmi les noms qui reviennent régulièrement, celui de Feil Ould Lahah, un autre cousin de Mohamed Ould Abdelaziz, dont le
Mohamed Ould Noueigued L’héritier
I
l a suivi la voie tracée par son père, le richissime Abdallahi Ould Noueigued – dont les initiales, AON, ont donné son nom au groupe –, décédé cette année à l’âge de 80 ans. Bien que « tributaire » (la caste inférieure dans la société maure), ce patriarche du monde des affaires mauritanien, apparenté à l’ancien président Maaouiya Ould Taya, a bâti un empire présent dans les secteurs clés du pays : import-export, pêche, banque, assurances… Aujourd’hui dirigé par Mohamed, le groupe AON, dont l’un des fleurons est la Banque nationale de Mauritanie, reste l’un des principaux poids lourds de l’économie nationale. l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
LAURENT PRIEUR
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JEUNE AFRIQUE
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AMI
q Mohamed Ould Abdelaziz (à g.) et, à sa gauche, Mohamed Ould Bouamatou, pendant la campagne de 2009.
groupe est présent dans les principaux secteurs de l’économie nationale, ainsi que celui de Hamady Ould Bouchraya, dont la percée en Mauritanie, où il est revenu s’installer après un long parcours en Guinée-Bissau, est attribuée à sa proximité avec le chef de l’État. PÉNÉTRATION. L’histoire est ancienne.
Après le coup d’État militaire de 1978 est apparue une nouvelle génération de businessmen liés à la junte. Mais c’est à partir de la fin des années 1980 que le monde des affaires a véritablement pénétré celui de la politique. Maaouiya Ould Taya, ancien chef d’état-major des armées arrivé au pouvoir en 1984 par un coup d’État, privatisera tour à tour plusieurs secteurs clés de l’économie du pays, comme la banque ou les assurances. De grands hommes d’affaires en profitent pour consolider et diversifier leur groupe. C’est le cas de Mohamed Abbas, avec la Banque mauritanienne pour le commerce international (BMCI), privatisée et ensuite transmise à son fils Moulay Ould Sidi Mohamed Abbas (lire p. 86). Abdallahi Ould Noueigued, à la tête de l’un des principaux empires économiques mauritaniens, le groupe AON (lire p. 84), suivra avec la Banque JEUNE AFRIQUE
nationale de Mauritanie (BNM), ainsi que Mohamed Abdallahi Ould Abdellahi (groupe MAOA), qui prendra le contrôle de la Banque mauritanienne islamique (Bamis). Tous trois sont réputés proches du président Ould Taya, dont la famille a par ailleurs prospéré du temps de son règne. Une endogamie entre hommes de pouvoir et hommes d’affaires dont les racines tiennent en partie à la structure de la société maure. Historiquement, ces « voyageurs » qui ont essaimé dans toute l’Afrique sahélo-saharienne ont une longue tradition de commerçants. Au lendemain de l’indépendance, ils feront donc prospérer l’économie nationale en développant le négoce. APPÉTENCES. Au premier rang de
l’économie moderne de la République islamique de Mauritanie, on retrouve les tribus – généralement maraboutiques – dont l’appétence pour le commerce est ancienne, notamment les Ouled Besbah (Bouamatou, Abdelaziz), les Idawali (Isselmou Ould Tajedine) ou les Smassid (Ould Noueigued, Ould Abdallahi). Dans un pays de seulement 3,7 millions d’habitants, où l’entrepreneuriat est principalement concentré entre les
Mohamed Ould Bouamatou Le proscrit
À
peine sorti de l’École normale d’instituteurs, Mohamed Ould Bouamatou a délaissé l’enseignement pour le monde des affaires. Après avoir touché à l’import-export, une spécialité nationale, il lance une confiserie puis devient le représentant de marques internationales comme Gallina Blanca (bouillons Jumbo) ou Philip Morris. Dans les années 1990, il crée la Générale de banques de Mauritanie et les Assurances générales de Mauritanie. L’insatiable homme d’affaires, qui s’est accommodé de tous les régimes, étend ensuite son empire au ciment, au transport aérien, à la téléphonie… Cousin et proche du président Mohamed Ould Abdelaziz, Ould Bouamatou, 60 ans, est pourtant aujourd’hui dans le collimateur du pouvoir (lire ci-contre). l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Le Plus de J.A. Mauritanie mains d’une poignée de familles maures, liens entrecroisés et affinités claniques sont légion entre militaires – issus des mêmes tribus – et businessmen. Un processus renforcé par une autre particularité, qui s’est déjà révélée sous le régime de Moktar Ould Daddah, le premier président de la Mauritanie indépendante, et qui se poursuit aujourd’hui sous celui de Mohamed Ould Abdelaziz. Contrairement à de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest, où les empires commerciaux et industriels ont longtemps été aux mains d’opérateurs étrangers ou d’origine libanaise, la Mauritanie a favorisé, dès les années 1970, la mise en place d’une bourgeoisie d’affaires nationale. « La sortie de la zone CFA avec la création de l’ouguiya, en 1973, reflétait la volonté de promouvoir un entrepreneuriat mauritanien, rappelle Mohamed Fall Ould Oumeir, directeur de publication du journal mauritanien
La Tribune. On a encouragé les commerçants traditionnels à devenir de véritables entrepreneurs modernes et on a même été jusqu’à inciter certains cadres de l’administration à créer leur entreprise. » Une modernisation poursuivie à sa façon par Mohamed Ould Abdelaziz, par exemple en renégociant les conventions
Liens familiaux et claniques sont légion entre militaires, politiques et businessmen. halieutiques avec l’Union européenne (lire pp. 88-89) et en imposant certaines conditions destinées à favoriser les entrepreneurs nationaux. « Il régnait dans le secteurdelapêcheuneanarchietotalequi profitait avant tout aux armateurs étrangers ; la renégociation de l’accord avec l’UE a abouti à un rééquilibrage », analyse
Ahmed Ould Abderrahmane, jeune consignataire mauritanien – et président de la fédération nationale de football (lire p. 90). Quant aux grands empires mauritaniens des affaires, initialement structurés autour de l’import-export et de la pêche, ils ont progressivement investi le secteur de la banque, des assurances, du BTP, du transport et des services. « L’industrie est peu développée, le marché mauritanien est trop réduit, explique le directeur général de l’un de ces groupes tentaculaires. Aujourd’hui, les privés regardent vers les mines, un secteur d’avenir où ils cherchent à s’associer avec des partenaires étrangers. » Un secteur où il est également nécessaire d’entretenir de bonnes relations avec la présidence, puisque c’est l’État qui attribue les licences d’exploitation. CORDON OMBILICAL. À la tête de
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Moulay Ould Sidi Mohamed Abbas L’alpiniste
A
près des études en France et aux États-Unis, ce trentenaire né d’un père mauritanien et d’une mère nigérienne catholique a repris les rênes de la Banque mauritanienne
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pour le commerce international (BMCI), l’une des principales du pays, fondée par son père. Il est le créateur de la fondation Mohamed Abbas, dont l’objet est d’apporter un soutien à de jeunes
hommes et femmes d’affaires. Alpiniste émérite, Moulay Ould Sidi Mohamed Abbas a tour à tour planté le drapeau mauritanien sur les sommets du Kilimandjaro, du mont Blanc et de l’Everest. l
holdings de plus en plus puissants, les hommes d’affaires mauritaniens demeureront-ils cette force d’appoint nécessaire au pouvoir, à charge pour ce dernier de faire prospérer leurs affaires en retour ? En juin 2005, un commando du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) [ancêtre d’Al-Qaïda au Maghreb islamique] – perpétrait un attentat contre une caserne mauritanienne. Pour traquer les auteurs de l’attaque et financer la logistique de l’opération, le régime dut mettre à contribution les principaux hommes d’affaires du pays. Une illustration de la dépendance des militaires qui pourrait expliquer la volonté affichée par le nouveau président, lui-même général, de contenir leur influence. « Abdelaziz considère que toutes ces fortunes sont récusables, commente un observateur. Il n’a donc aucun scrupule à se montrer arrogant avec eux. » Si le régime actuel affiche la volonté d’assainir les mœurs du milieu des affaires et de canaliser l’appétit des capitaines d’industrie, incités depuis l’élection d’Aziz à adopter profil bas, certains s’interrogent néanmoins sur un possible effet boomerang : ces grands patrons sont puissants, ils ont des réseaux internationaux et des moyens financiers importants… Pas sûr, dans ces conditions, que le cordon ombilical soit si facile à couper. l MEHDI BA JEUNE AFRIQUE
Un investisseur avisé au service des politiques publiques En 2011, le dispositif institutionnel économique et financier national a été conforté par la création d’une Caisse des Dépôts et de Développement (CDD). Cette nouvelle institution bâtie sur le modèle réussi des Caisses de Dépôts, compte se positionner comme opérateur économique et financier polyvalent, au service des politiques publiques. La CDD est un investisseur à court, moyen et long terme averti, un mandataire professionnel au service de l’action publique et des partenaires au développement et, également, un conseiller et partenaire au développement des politiques sectorielles. Elle est, enfin, un partenaire privilégié de l’initiative privée responsable.
En vertu de la loi créant la Caisse celle-ci a notamment pour mission de : Recevoir les fonds du public incluant les institutionnels et établissements publics ; Gérer les Dépôts des clients ; Octroyer des crédits ; Octroyer des garanties aux bailleurs de fonds sur certains projets identifiés ; Développer toute autre forme de ressources pour la Caisse pour accroître l’épargne disponible de l’économie mauritanienne; Gérer les mandats donnés par l’État, les Établissement Publics et les partenaires au développement ; Participer, en tant qu’investisseur, à certains financements de projets essentiels au développement du pays ; Appuyer les politiques de développement décentralisé ; Appuyer les politiques sociales dans les domaines, notamment : de l’emploi, de la sécurité alimentaire, de l’habitat social et de la promotion de la petite et moyenne entreprise. Très tôt, la CDD a été engagée et mise à contribution pour accompagner l’action du Gouvernement en sa qualité de Banque du Service Public, de promoteur mais aussi en tant que structure de conseil et d’accompagnement. La Caisse s’est rapidement déployée à l’échelle régionale
www.cdd.gov.mr
pour financer des centaines de projets élargissant la base productive de l’économie nationale et créant des milliers d’emplois. Elle a fortement soutenu le financement de l’économie par l’injection de plus de Dix Milliards d’Ouguiyas avec l’intermédiation du système bancaire. La Caisse des Dépôts et de Développement accompagne aussi des projets structurants tels que : Le développement de la zone Franche de Nouadhibou ; Le projet de construction de 600 logements à Zoueratt piloté par la société (ISKAN) ; Le projet de construction d’un hôtel cinq étoiles à Nouakchott piloté par la Société Nationale Industrielle et Minière (SNIM) ; Le projet de construction d’un hôtel quatre étoiles à Nouadhibou en partenariat avec la (SNIM) ; Le futur programme d’habitat social de Nouadhibou piloté par l’Etablissement Public (TADHAMOUN) ; La CDD prend en charge également des mandats de gestion confiés par l’État tel que le Fonds de Soutien à l’Emploi dont l’enveloppe financière s’élève à 10 milliards d’ouguiyas destiné à l’insertion des diplômés chômeurs, la promotion des PME et la création des Activités Génératrices de Revenus Durables et tel que la Structure Chargée du Financement du Secteur Agricole.
Caisse des dépôts et de développement B.P : 5005 - Nouakchott - Mauritanie Tél. : + 222 45 25 07 55 Fax : + 222 45 21 13 58
DIFCOM/FC - PHOTOS : DR
MESSAGE
La Caisse des Dépôts et de Développement
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PÊCHE
Touche pas à mon poulpe!
H
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istorique ! » Le mot est sur toutes les lèvres à Nouakchott pour qualifier l’adoption du protocole d’accord de partenariat de pêche (APP) 2012-2014 entre la Mauritanie et l’Union européenne. Signé après des mois d’âpres négociations en juillet 2012 et appliqué depuis de manière provisoire, cet accord aura attendu plus d’un an pour être validé par le Parlement européen, le 8 octobre dernier. Avantageux pour la Mauritanie, il respecte le double objectif de préservation des intérêts des pêcheurs locaux et de protection des ressources halieutiques nationales, en particulier des poulpes – à forte valeur commerciale –, dont la moitié des prises mondiales s’effectue au large des côtes sénégalo-mauritaniennes. Désormais, le céphalopode devient la chasse gardée des pêcheurs locaux. Il était temps, car les scientifiques de l’Institut mauritanien des recherches océanographiques et des pêches (Imrop) sont formels : la surpêche observée depuis le début des années 2000 a eu des conséquences dramatiques sur l’état des stocks toutes espèces confondues et en particulier sur celui des poulpes, dont les deux tiers auraient disparu en dix ans. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Les eaux mauritaniennes restent quasi-totalité, la pêche est le deuxième cependant parmi les plus poissonpourvoyeur de devises du pays (pour neuses au monde. Une manne qui a plus de 40 %) et contribue pour 25 % aux fait de la pêche un secteur hautement recettes budgétaires de l’État. stratégique pour le pays. Ses ressources halieutiques attirent des chalutiers, des SALUTAIRE. Le protocole adopté par palangriers et des thoniers de plus en plus le Parlement européen le mois dernier énormes, armés par des industriels du marque un radical changement de cap monde entier, en particulier européens pour la pêche mauritanienne : les diffé(principalement espagnols, lituaniens, rentes parties le trouvent enfin équitable lettons, polonais et néerlandais) et asiaet il devrait servir de référence dans les tiques (japonais et chinois), mais aussi renégociations des contrats de pêche algériens ou russes. À tel point que près que mène le gouvernement mauritanien de 80 % des petites espèces pélagiques avec ses autres partenaires. En contre(poissons de surface) capturées dans partie d’une centaine de licences de les eaux mauritaniennes en 2012 ont été pêche, la Commission européenne s’est pris dans les filets de navires industriels engagée à verser 70 millions d’euros battant pavillon étranger. (dont 3 millions pour soutenir le Le pays a exporté plus de secteur local) et les armateurs 1 milliard de tonnes de européens 40 millions, soit un poissons et crustotal de 110 miltacés en 2010 lions d’euros, et 800 000 t contre 90 UNE FILIÈRE CLÉ en 2012, soit dans l’accord (en 2012) deux fois plus pré cé dent. En plus de que dans les cette contreannées 1980. Et, malgré le peu de 12 % du PIB partie finanvaleur ajoutée 40 000 emplois, cière, le nouvel 25 % 40 % accord impose de ces produits, des recettes dont 30 000 des recettes notamment exportés bruts en de l’État artisanaux en devises JEUNE AFRIQUE
SOURCE : MINISTÈRE DES PÊCHES ET DE L’ÉCONOMIE MARITIME, COMITÉ SCIENTIFIQUE CONJOINT RIM-UE
Le nouveau partenariat entre la Mauritanie et l’Union européenne protège les intérêts des pêcheurs locaux tout en préservant les ressources halieutiques nationales.
Mauritanie Aziz au banc d’essai
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NICOLAS THIBAUT/AFP
q Certaines espèces ne sont dorénavant accessibles qu’à la seule flotte artisanale mauritanienne.
SIPAUTO/SIPA
p Halle aux poissons sur le marché de Nouakchott.
Européens doit désormais l’être à tous les autres partenaires », estime Béatrice Gorez, coordinatrice de la Coalition pour des accords de pêche équitables (Cape), qui s’est battue pour la révision de l’APP avec l’UE. EAUX TROUBLES. C’est dans cet esprit
que le nombre de Mauritaniens embarqués à bord des navires européens licenciés représente au moins 60 % de l’équipage, au lieu de 37 % auparavant. Mais le protocole s’avère vraiment salutaire, car il est le premier à garantir l’exclusivité de la pêche au poulpe à la pêche artisanale et côtière mauritanienne (PAC), point qui avait provoqué le blocage au Parlement européen. Les Espagnols y sont farouchement opposés, arguant que cette mesure entraînera d’importantes pertes d’emplois dans leur pays. Plus généralement, le nouveau contrat limite l’accès des navires européens au surplus existant et aux espèces inaccessibles aux Mauritaniens. Conséquence : les captures de petits pélagiques par les flottilles européennes, qui étaient passées de 100 000 t en 1996 à 380 000 t en 2011, sont déjà retombées à moins de 130 000 t en 2012 sur un total de 800 000 t (dont 200 000 t capturées par la PAC locale). Si ces avancées doivent renforcer le poids du secteur dans l’économie du pays, quelques inquiétudes persistent concernant la traçabilité de la contrepartie financière versée par l’UE, ainsi que la transparence des conditions d’attribution des licences de pêche aux flottes étrangères. « La convention appliquée aux JEUNE AFRIQUE
que le gouvernement mauritanien poursuit les négociations pour la révision de ses accords avec l’Algérie, la Russie et le Japon, arrivées à un stade avancé. Elles restent en revanche confuses avec la Chine et achoppent sur la renégociation
de la convention passée en 2010 avec la société chinoise Poly Hondone Pelagic Fishery – et révoquée depuis –, selon laquelle cette dernière devait bénéficier d’un droit de pêche durant vingt-cinq ans en échange d’un investissement de plus de 83 millions d’euros pour la construction et l’exploitation d’une usine de transformation à Nouadhibou. Le genre d’accord léonin et nébuleux que ne laisseront passer ni les pêcheurs locaux, ni les ONG, ni les autres partenaires étrangers. l JEDNA DEIDA, à Nouakchott
RESQUILLEURS SAINT-LOUISIENS
L
es tensions restent récurrentes entre les gardes-côtes mauritaniens et les pêcheurs de Guet Ndar, le port de Saint-Louis du Sénégal. Ces derniers s’obstinent à franchir allègrement les frontières maritimes pour aller traquer illégalement le petit pélagique dans les eaux poissonneuses de Mauritanie. Nouakchott leur alloue pourtant quelque 300 licences de pêche par an, pour un volume de capture de 30 000 tonnes débarquées au pays
de laTeranga, selon la Direction des pêches maritimes sénégalaise (DPM). S’il est difficile d’en évaluer le volume exact, la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) aurait un impact important sur la réduction des stocks. Les gouvernements et fédérations professionnelles des deux pays jouent l’apaisement, de même que la Confédération africaine des organisations de la pêche artisanale (Caopa), dont le président, Sid’Ahmed Ould Abeid,
est mauritanien et le secrétaire général, Gaoussou Guèye, sénégalais.Tous deux soulignent la solidarité entre pêcheurs, mais appellent au respect des frontières et à la mise en œuvre d’un plan concerté. Certains professionnels souhaitent même qu’une gestion par quotas soit instituée dans le cadre des États de la Commission sous-régionale des pêches (CSRP), à l’image de celle organisée à l’échelle mondiale pour la pêche au thon J.D. rouge. l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Le Plus de J.A. Mauritanie FOOT
Les Mourabitounes tournent (enfin) rond Ils enchaînent stages, matchs amicaux internationaux… et victoires. Pour la première fois en cinquante ans, les joueurs de la sélection nationale se sont qualifiés pour une compétition continentale, le Championnat d’Afrique des nations. À suivre du 11 janvier au 1er février, en Afrique du Sud.
L
eur optimisme provoquait au mieux des sourires polis, mais personne ne les prenait au sérieux quand ils expliquaient que la Mauritanie visait la qualification pour le Championnatd’Afriquedesnations(Chan) 2014, la compétition continentale réservée aux joueurs évoluant dans les clubs de leur pays. C’était il y a un peu plus d’un an. À l’époque,lesMourabitounestraînaientleur spleen dans les bas-fonds du classement Fifa, où ils côtoyaient quelques terreurs comme Saint-Marin, la Somalie, les îles Cook ou Anguilla. Après quatre années d’hibernation – un seul match, contre la Palestine (0-0), entre octobre 2008 et avril 2012, date des débuts de Patrice Neveu sur le banc de touche mauritanien –, la sélection nationale reprenait timidement goût aux échanges internationaux. « J’ai été élu en juillet 2011, raconte Ahmed Ould Abderrahmane, p À défaut de stars, l’équipe peut compter sur son sens du collectif. 37 ans, président de la fédération mauritanienne de football et ex-patron du FC Nouadhibou. La période était morose: beaucoup de matchs de championnat afin l’avant-dernier tour des éliminatoires du d’établir une première liste de 60 joueurs, Chan, crédibilisent un peu plus le travail les clubs étaient fatigués, le championnat puis je l’ai affinée pour composer une de Neveu à la tête de la sélection. Jusqu’à était en voie de disparition, la sélection sélection de locaux et disputer les élimila consécration, le 20 juillet dernier, où, nationale n’intéressait presque plus pernatoires du Chan », explique le technicien cinquante ans après son premier match sonne. » Et pour cause: elle n’avait disputé ni les qualifications pour la Coupe du français. Lequel, pour donner corps au (joué en avril 1963 contre le CongoLéopoldville), la sélection nationale se projet de son très actif prémonde2014nicellespourles sident, promène son équipe qualifie pour une grande compétition en Coupes d’Afrique des nations En moins un peu partout : l’Iran, la éliminant le Sénégal (2-0, 0-1 à l’aller). 2010, 2012 et 2013. de deux ans, Palestine, les Émirats arabes L’effet s’est propagé au-delà des fronPOINTURE. Dès son élecunis, l’Espagne, etc. « Au tières. Les joueurs « expatriés », qui avaient ils ont gagné début, on perdait souvent, fini par détourner le regard de cette tion à la tête de la fédération, 50 places on voyageait dans des équipe nationale fantôme, ont participé l’homme d’affaires se met au classement conditions difficiles, mais aux matchs amicaux de septembre et en quête d’un sélectionneur je ne me suis jamais découoctobre face au Canada (0-0) et à Oman expérimenté pour donner Fifa. ragé. Et on a tout de même (0-0 également). « Ce qui s’est passé face un peu plus d’épaisseur à son projet. Malgré des moyens financiers gagné 50 places au classement Fifa ! » Un au Sénégal le 20 juillet marque un tourclassement où les Mourabitounes figurent nant pour notre football, puisque c’est la limités et un profil peu avantageux, la aujourd’hui à la 152e place. première fois que nous allons disputer Mauritanie parvient à attirer le Français E n av r i l 2 0 1 2 , A h m e d O u l d un grand tournoi. » Porté par l’euphorie, Patrice Neveu, 59 ans, entraîneur reconnu sur le continent puisque, en quinze ans, il Abderrahmane convainc l’opérateur Abderrahmane parle même d’une qualifia eu la charge des sélections du Niger, de téléphonique Mauritel de verser 150 milcation pour la Coupe d’Afrique des nations lions d’ouguiyas (environ 360 000 euros) 2015. Et ce sera avec Patrice Neveu, qui a GuinéeetdeRDCongo,ainsiquededivers prolongé son contrat – et vu son salaire jusqu’en 2015 pour le football et s’active clubs en Tunisie (Médenine), au Maroc auprès de l’État pour que soient mis à la augmenter – jusqu’au 1er février 2015, (CA Rabat, Tétouan) et en Égypte (Ismaily SC, Smouha Alexandrie). « J’ai accepté en disposition de la sélection des moyens un après avoir été tout proche de devenir le connaissant la difficulté du challenge. Je peu plus importants. Les succès obtenus sélectionneur du Congo. l face au Liberia (1-0, 2-1) fin 2012, lors de ALEXIS BILLEBAULT me suis installé à Nouakchott, j’ai assisté à N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
JEUNE AFRIQUE
DR
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NORDREISENDER/FOTOLIA
PUBLI-INFORMATION
La SNIM se donne les moyens de ses ambitions de croissance et de développement
Nouhoudh, la SNIM du nouveau cinquantenaire Le plan stratégique de la SNIM, baptisé NOUHOUDH, entre en phase opérationnelle. Solide sur ses fondamentaux, claire sur sa stratégie, forte de ses capacités humaines, techniques et financières, riche de réserves considérables : la SNIM se positionne pour devenir un des plus grands acteurs mondiaux du minerai de fer. LE PRÉSIDENT MOHAMED OULD ABDEL AZIZ INAUGURE LE NOUVEAU SYSTÈME DE TÉLÉCOMMUNICATIONS FERROVIAIRES DE LA SNIM APRÈS AVOIR INAUGURÉ LE NOUVEAU PORT MINÉRALIER ET POSÉ LA PREMIÈRE PIERRE D’UN NOUVEAU CULBUTEUR DE WAGONS À NOUADHIBOU LE 25 JUIN 2013.
M. MOHAMED ABDELLAHI OULD OUDAÂ ADMINISTRATEUR, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA SNIM.
«N
CHARGEMENT DES CAMIONS À LA MINE DU GUELB RHEIN.
ous serons un des cinq principaux exportateurs de fer en seaborne, au monde d’ici dix ans » prédit M. Mohamed Abdellahi Ould Oudaâ, Administrateur Directeur Général de la Société Nationale Industrielle et Minière (SNIM). Déjà deuxième employeur mauritanien après l’État, et principal contributeur à l’économie du pays, la SNIM se fixe des objectifs ambitieux : passer de 12 millions de tonnes de fer produites en 2012 à 40 millions de tonnes en 2025.
Une ambition adossée à 50 années de réussite La SNIM, qui a célébré en 2013 son cinquantenaire, a démontré tout au long de son histoire sa capacité à se développer, à relever ses défis et à s’adapter aux mutations de son secteur, dans un environnement difficile, voire hostile. Opérateur reconnu sur la scène internationale, la SNIM est aujourd’hui l’une des rares entreprises industrielles du continent à pouvoir afficher un tel succès.
L’heure de la transformation Adopté en 2012, le plan stratégique Nouhoudh, est entré, cette année, en phase opérationnelle. Il fixe le cap et définit les moyens de déve-
LE TRAIN MINÉRALIER DE LA SNIM.
CONTRIBUTION DE LA SNIM AU BUDGET DE L’ÉTAT (MILLIARDS MRO)
loppement de la SNIM d’ici à 2025. Pour intégrer le top 5 mondial des exportateurs de fer en seaborne, la SNIM prévoit non seulement de tripler son chiffre d’affaires en portant sa production à 40 millions de tonnes, mais elle entend aussi maîtriser ses coûts de revient (à 40 $ la tonne). Le plan Nouhoudh prévoit ainsi une forte amélioration de la
DES RESSOURCES POUR UNE NOUVELLE SNIM
PUBLI-INFORMATION
La SNIM a annoncé, le 7 octobre dernier la découverte d’un nouveau gisement à Tizerghaf, estimé à 830 millions de tonnes de minerai de fer magnétique. Cette découverte est le résultat de travaux d’exploration de ce guelb de 6 km de long, situé à 40 km au nord de Zouerate, où plus de 60 000 mètres de sondage ont été réalisés entre décembre 2012 et septembre 2013. Le plus grand complexe minier de la SNIM « L’obtention, en un court laps de temps, de ces premiers résultats particulièrement prometteurs, nous encourage à entamer déjà la «scoping study» du projet de ce qui sera le plus grand complexe minier de l’histoire de notre entreprise », a affirmé Mohamed Abdellahi Ould Oudaâ, Administrateur Directeur Général de la SNIM. 5 milliards de dollars d’investissements Pour exploiter ces nouveaux gisements et atteindre ses objectifs de production, la SNIM a programmé la mise en service de deux nouveaux complexes de 14 MT chacun, dont le premier, celui de Tizerghaf, où ses études sont déjà lancées, sera opérationnel en 2019. Au cours des dix prochaines années, l’entreprise entend investir dans le cadre de son programme stratégique Nouhoudh plus de 5 milliards de dollars en vue de réaliser ses objectifs de croissance, hors joint-ventures.
productivité et de la rentabilité de l’entreprise, à travers notamment le renforcement de l’efficacité opérationnelle. Au total, le plan Nouhoudh aborde huit axes stratégiques de développement qui vont de l’exploration à l’amélioration du cadre de vie en passant par l’augmentation des capacités de production, les ressources humaines, le développement durable, le positionnement sur le marché, l’intégration à l’économie nationale et à la promotion des partenariats.
Un projet d’envergure nationale La SNIM, c’est une fierté nationale. Premier contributeur de l’économie mauritanienne, la SNIM demeure un moteur essentiel du développement de la Mauritanie : par les recettes qu’elle apporte à l’État, en particulier en apport de devises étrangères, par l’importance des activités
Des bénéfices pour les communautés
LE NOUVEAU PORT MINÉRALIER DE LA SNIM À NOUADHIBOU.
NOUHOUDH : c’est la SNIM du nouveau cinquantenaire
2025. En tenant compte des départs à la retraite, quelque 7 500 nouvelles embauches seront réalisées en dix ans.
ÉVOLUTION DE LA PRODUCTION ET DES VENTES DE LA SNIM (EN MILLIONS DE TONNES)
Éducation, santé, assainissement, hydraulique, sport, culture, entreprenariat, lutte contre la pauvreté et la précarité : la Fondation SNIM (FS) est présente partout à l’écoute des populations. « Les actions de notre Fondation sont menées suivant une approche participative en concertation étroite avec les acteurs locaux qui nous expriment leurs besoins », expliqueMohamedElWelySalem, le directeur général de la FS qui reçoit essentiellement ses dons et legs de la SNIM. Pour affirmer sa volonté d’implication dans des programmes de développement de portée nationale tout en accordant un intérêt particulier aux sollicitations des populations
SAFA
Société arabe du Fer et de l’Acier ■
SAMMA
Société d’Acconage et de Manutention en Mauritanie ■
SOMASERT
Société Mauritanienne de Services et de Tourisme ■
ATTM
Société d’Assainissement, de Travaux, de Transport et de Maintenance ■
COMECA
Construction Mécanique de l’Atlantique ■
Le plan Nouhoudh démultipliera le poids socioéconomique de la SNIM et l’effet d’entraînement de ses activités. Le nombre de travailleurs de l’entreprise va ainsi doubler grâce à Nouhoudh, en passant de 5 000 aujourd’hui à près de 10 000 à échéance en
FONDATION SNIM : partager le bonheur
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SAMIA
Société arabe des Industries Métallurgiques ■
GMM
Granites et marbres de Mauritanie ■
GIP
Gestions d’installations pétrolières
locales, la FS a mobilisé entre 2012 et 2013 un financement d’environ 12 milliards d’ouguiyas (40 millions de dollars). Plusieurs projets ont ainsi été ou sont en cours de réalisation : • Construction d’un hôpital de 250 lits à Nouadhibou ; • Construction et équipement de centres de santé dans le couloir
Nouadhibou/Zouerate ; • Construction et équipement d’écoles et de collèges ; • Contribution au stock national de sécurité alimentaire ; • Réalisation de barrages et d’ouvrages de désenclavement ; • Prise en charge du fonctionnement de l’école de Mines de Mauritanie (EMIM).
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Damane Assurances
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M2E
Mauritanienne de l’Eau et de l’Électricité
SOCIÉTÉ NATIONALE INDUSTRIELLE ET MINIÈRE
INTERVENTIONS DE LA FS EN MILLIONS D’OUGUIYAS
SIÈGE SOCIAL NOUADHIBOU, MAURITANIE : B.P. 42 - Nouadhibou Tél. : +222 574 10 21 Fax : +222 574 53 96 SUCCURSALE PARIS, FRANCE : 7, rue du 4 Septembre - 75002 Paris Tél. : +33 01 42 96 80 90 Fax : +33 01 42 96 12 28/26 E-mail : contact@snim.com
www.snim.com
DIFCOM/DF - PHOTOS : DR SAUF MENTION.
économiques développées dans son sillage, par les infrastructures qu’elle construit, par les emplois qu’elle crée.
Comme elle le fait depuis 50 ans, la SNIM continuera avec Nouhoudh à contribuer davantage au développement social et économique des communautés mauritaniennes, en particulier dans le couloir Zouerate Nouadhibou. Une contribution qui se manifeste directement à travers l’activité industrielle de l’entreprise. À Zouerate où elle construit un aéroport international, la SNIM fournit l’eau potable et l’électricité à la ville. Active à travers tout le pays, la FondationSNIMainvestienviron 40 millions de dollars entre 2012 et 2013 dans le développement communautaire et la lutte contre la pauvreté.
FILIALES DU GROUPE SNIM
Économie
HÔTELLERIE
Onomo veut reprendre la main
AFRIQUE DU SUD
À bout de souffle Chômage de masse, manque d’infrastructures, quasi-monopoles… Depuis la crise de 2009, le pays fait du surplace. Même le secteur des mines est en perte de vitesse. Pour redresser la barre, le gouvernement va devoir réaliser un véritable tour de force. enregistrés chaque année en moyenne entre 1994 et 2008. Le « S » des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et South Africa) affiche des résultats bien inférieurs près les passions, l’âge de raià ceux des autres pays émergents, ainsi qu’à ceux du son. À bientôt 20 ans, la jeune reste de l’Afrique subsaharienne (respectivement nation Arc-en-Ciel fait sa crise de 5,5 % et 4,8 % sur la même période). « Nous gérons toujours l’héritage de l’apartheid », observe Ellis croissance.L’économietourneau ralenti depuis 2009, et les inégaliMnyandu, rédacteur en chef du Business Report. tés secreusent,commelemontre « Les grandes orientations, comme la prépondérancedesminesetlastructurequasimonopolistique le coefficient de Gini, pire aujourd’hui qu’à l’époque de certains secteurs autour de conglomérats publics de l’apartheid, sur fond de corruption et de chômage ou privés, ont été initiées sous l’ancien régime, endémique. « Le modèle socio-économique sudafricain a atteint ses limites », estime qui n’avait pas non plus vocation à David Kaplan, professeur d’économie favoriser la constitution d’une classe « Les Blancs noire éduquée susceptible de jouer à l’université du Cap. – 8 % de la unrôleéconomiquementimportant», Lapremièrepuissanceéconomique pondère le responsable du principal du continent pèse toujours un bon population – quotidien économique sud-africain. quart du PIB africain, et depuis les détiennent Autant de blocages qui pénapremières élections démocratiques 95 % de lisent lourdement la compétitivité de 1994, des progrès notables ont été du pays, ainsi que sa productivité. réalisés en termes d’accès à l’eau et à l’économie. » l’électricité, d’éducation et de santé, Car si l’Afrique du Sud a connu de ELLIS MNYANDU, ou de lutte contre la très grande pauprofondes transformations politiques rédacteur en chef du ces deux dernières décennies, ce n’est vreté – diminuée de moitié pour être Business Report pas le cas de son économie. Le Black ramenée à 5 % aujourd’hui. « Mais Economic Empowerment (BEE), qui vise depuis son le pays n’a toujours pas lancé la révolution strucadoption en 2004 à inclure les populations historiturelle dont il a besoin pour repartir », regrette quement désavantagées dans le développement du l’universitaire, qui cite en vrac le poids démesuré pays (lire p. 97), a permis l’émergence de cadres et du secteur public, une trop grande dépendance à dirigeants noirs. Mais « les Blancs, qui représentent la rente minière, l’obsolescence des infrastructures dans l’énergie et les transports et la pénurie de 8 % de la population, détiennent toujours 95 % de l’économie », résume Ellis Mnyandu. Et les grandes main-d’œuvre qualifiée. Résultat: le pays fait du surplace. Avec un taux de entreprises qui se partageaient le gâteau vingt ans plus tôt n’ont pas vraiment desserré leur étreinte. croissancede2,1%en2013,etde2,9%prévu l’année La forte concentration des secteurs bancaire et l l l prochaine, l’Afrique du Sud est bien loin des 4,2 % OLIVIER CASLIN,
A
envoyé spécial à Johannesburg
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w MIKE HUTCHINGS/REUTERS
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p Manifestation contre les problèmes de logement au Cap, le 30 octobre.
AGROALIMENTAIRE
Dans l’antre de Cevital
DÉCIDEURS
Bethlehem Tilahun Alemu à l’aise dans ses baskets
ASSURANCES
Avec Amana, la Macif prend le risque de réussir
Taux de chômage élargi*, selon l’origine ethnique Noirs Métis Indiens/Asiatiques Blancs TOTAL
10,2 %
17,8 %
31,5 %
46,3 %
34 %
* Personnes sans emploi, y compris celles qui ne cherchent pas activement un travail.
70,7 %
ont entre 15 et 34 ans SOURCE : STATISTICS SOUTH AFRICA
59,4 %
n’ont pas terminé le lycée
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Entreprises marchés minier, de l’industrie manufacturière ou de la grande distribution constitue toujours un barrage à la constitution d’un tissu dense de PME-PMI, qui « reste parmi les plus faibles au monde », rappelle le Fonds monétaire international. « C’est pourtant l’une des sources d’emplois les plus efficaces qui soit », assure Ebrima Faal, le directeur régional de la Banque africaine de développement (BAD). Plombée par un taux de chômage de 26 % officiellement, mais que beaucoup d’observateurs jugent plus près de 34 %, l’Afrique du Sud ne semble pas se donner les moyens de lutter contre ce fléau. « Le pays crée peu d’emplois en période de croissance, et il en détruit énormément à chaque ralentissement », constate Gilles Bordes, conseiller au service économique de l’ambassade de France à Pretoria. En 2009, au lendemain de la crise financière internationale, le pays a perdu en quelques mois le million d’emplois qu’il avait péniblement réussi à créer entre 2000 et 2007. « Le nombre d’actifs dans le secteur formel est aujourd’hui moins important qu’avant la crise. Et au rythme actuel, avec les pesanteurs et la rigidité du marché du travail, il faudra des décennies pour retrouver tous ces emplois », s’agace Ellis Mnyandu. lll
SIPHIWE SIBEKO/REUTERS
96
p Dans un centre commercial de Johannesburg, en août.
MALENTENDU. Entre une réforme agraire tentée plusieurs fois mais toujours avortée, une industrialisation quasiment stoppée depuis la fin de l’apartheid et des filières textile ou automobile en difficulté sur les marchés domestique et régional en raison du coût de la main-d’œuvre locale, le pays ne semble pouvoir s’appuyer, une fois encore, que sur ses mines. Le secteur contribue chaque année à hauteurde10%auPIB et à60%desrecettesd’exportations. Il fournit un travail à 8 % de la population active, « sans compter la dizaine de personnes que chaque mineur Comment calmer les fait vivre avec son salaire », précise tensions sociales ? Gilles Bordes. Les gisements de À coups de subventions ! charbon découverts dans le nordouest du pays devraient permettre des embauches à moyen terme, mais « le secteur est en perte de vitesse, comme en atteste le nombre record de grèves ces dernières années », insiste David Kaplan. Le gouvernement ne peut même pas compter sur ses champions nationaux, « qui ne font pas preuve d’un grand patriotisme économique », ironise Ellis Mnyandu. Le géant AngloAmerican a déménagé son siège à Londres dès la fin des années 1990, tout comme SABMiller dernièrement, alors que des entreprises comme Tiger Brands ou la banque Absa, désormais dans le giron de Barclays, multiplient les investissements à l’étranger, essentiellement en Afrique. « Le malentendu entre pouvoirs publics et secteur privé n’a fait que s’accentuer depuis 1994 », confirme Nomaxabiso Majokiweni, directrice générale du Business Unity South Africa N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
(Busa), la très conservatrice organisation patronale. En brandissant dès son arrivée au pouvoir la menace d’une nationalisation de l’économie, le Congrès national africain (ANC) et ses alliés de la Cosatu, la principale confédération syndicale du pays, n’ont pas rassuré les investisseurs locaux et étrangers, qui reprochent au gouvernement ses éternelles hésitations. Dopé par l’organisation de la Coupe du monde, le stock d’investissements directs étrangers (IDE) a augmenté jusqu’en 2010, avant de marquer le pas. Pendant ce temps, la population noire se serre toujours la ceinture. De plus en plus endettée, elle compte sur les largesses du gouvernement, qui apaise toute tension sociale à coup de subventions, creusant dangereusement les déficits. « Alors que moins de 5 millions de personnes sont imposées, 17 millions bénéficient de prestations », calcule Ellis Mnyandu. Dans ces conditions, il est difficile à l’État de soutenir l’investissement public, pourtant essentiel pour se doter des infrastructures indispensables à la relance. Avec son National Development Plan (NDP), feuille de route adoptée en 2013, le gouvernement espère bien décalaminer la machine et surtout réduire le chômage. La création de 11 millions d’emplois est prévue d’ici à 2030. « Sauf que les secteurs porteurs ne sont pas clairement identifiés et que le pays a besoin d’une croissance annuelle minimale de 6 % pour obtenir de tels résultats », précise Ellis Mnyandu. « Beaucoup reste à faire. Il y a urgence », s’emporte David Kaplan. Faute de retrouver son dynamisme, le champion continental prend le risque de perdre sa couronne africaine dès 2025. Il sera alors détrôné, comme plusieurs études le pronostiquent déjà, par le Nigeria. l JEUNE AFRIQUE
Entreprises marchés
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Les « Black Diamonds » sont toujours aussi rares La discrimination positive a surtout favorisé l’émergence d’une élite noire fortunée, capitaliste et appartenant au monde de la finance. Mais la classe moyenne tarde à se généraliser.
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d’euros), financés sur prêts bancaires, auraient ainsi changé de mains – alimentant au passage les rumeurs de corruption au sein d’une élite au luxe insolant et, le plus souvent, proche de l’ANC. Sakumzi « Saki » Macozoma, ancien prisonnier à Robben Island aujourd’hui vice-président de Standard Bank, première banque du pays et multi-investisseur via Safika Holdings; Cyril Ramaphosa, ex-patron du syndicat des mines et vice-président de l’ANC, dont la fortune est estimée à 700 millions de dollars (520,9 millions d’euros) par Forbes; Tokyo Sexwale qui, avec son holding Mvelaphanda, fut un temps le plus riche de ces nouveaux investisseurs noirs, figurent dans cette caste. BISON. Pour faire taire ceux qui
protestent contre l’enrichissement de quelques-uns, les autorités ont par la suite complété le texte pour durcir les impératifs de
q La population aisée noire se développe surtout dans les grandes villes.
O.C.
ANTONY KAMINJU/REUTERS
ix ans après la mise en place définitive du Black Economic Empowerment (BEE), ses effets bénéfiques se font toujours attendre dans les townships. Jusqu’à présent, la politique de discrimination positive n’a concerné que quelques personnes qui ne s’en cachent pas et s’affichent au volant de leur berline, forcément allemande. Les Black Diamonds du Cap et de Jo’burg font toujours rêver, mais ils commencent aussi à irriter. « Le BEE était nécessaire, mais il n’a pas répondu aux attentes en matière de redistribution », estime Gilles Bordes, conseiller au service économique de l’ambassade de France à Pretoria. Purement capitalistique et financier dans un premier temps, il a consisté essentiellement à transférer des actifs, mines et médias en particulier, de la minorité blanche à la majorité noire. Plus de 600 milliards de rands (43,14 milliards
local content (emploi et achats), de transfert de technologies et, surtout, de formation, dans un pays qui ne compte que 10 000 ingénieurs noirs. Le BEE a aussi favorisé l’émergence d’une classe moyenne noire dans les grandes villes: 4,2 millions d’individus, qui dépensent jusqu’à 20 dollars par jour. En hausse de 250 % entre 2004 et 2012, elle représente les deux tiers de la classe moyenne sud-africaine, contre moins de 11 % dix ans plus tôt. Une classe supérieure noire, dont la consommation dépasse 20 dollars par jour, s’est également étoffée, à 250 000 personnes. Dans la foulée, la consommation de biens et services progresse, ainsi que les dépenses de santé et d’éducation, même si les montants restent modestes. Bien loin en tout cas des 1,2 million de livres (1,4 million d’euros) dépensés par Cyril Ramaphosa pour se faire livrer un bison d’Amérique. Ou du train de vie de Patrice Motsepe, qui a lui aussi profité du BEE pour se bâtir un empire minier avec African Rainbow Minerals : sa fortune est estimée à 2,7 milliards de dollars. l
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Entreprises marchés HÔTELLERIE
Onomo veut reprendre la main La chaîne panafricaine va développer un réseau de plus de vingt établissements en Afrique francophone. L’arrivée de très gros actionnaires à son capital lui en donne les moyens.
d’industrialisation ». Elle consiste à couvrir toutes les capitales d’Afrique occidentale et centrale au rythme de quatre ouvertures par an. Au total, le groupe pourrait compter entre vingt et vingt-cinq implantations en six ans pour un investissement total de 140 millions d’euros, dont 70 millions en fonds propres. L’Afrique francophone constitue la priorité, notamment Bamako, Lomé, Kribi, Pointe-Noire, Ouagadougou et Conakry. Chaque hôtel devrait générer un chiffre d’affaires de 2,5 millions d’euros pour unecinquantained’employéstandis que l’équipe de gestion, à Dakar, en compte une dizaine. CLEMENT-TARDIF.COM
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n Afrique francophone, la concurrence s’intensifie dans l’hôtellerie de milieu de gamme. Au début de l’année, le groupe malien Azalaï levait 12 millions d’euros auprès du fonds ouest-africain Cauris et de la Société financière internationale (IFC) pour financer son expansion régionale. En octobre, Mangalis, une filiale de Teyliom, groupe de l’homme d’affaires sénégalais Yérim Sow, faisait une entrée fracassante dans le secteur. Enfin, début novembre, Jeune Afrique révélait d’importants changements capitalistiqueschezOnomo,l’autrechaîne panafricaine active sur le créneau des hôtels pour hommes d’affaires. Grâce à plusieurs augmentations de capital, la famille Ruggieri – l’une des cent premières fortunes de France – détiendra prochainement 88 % du groupe (dont le siège juridique est à Paris) par le biais de son holding Batipart. Au côté de ce dernier figurera Darsin, holding détenu notamment par l’homme d’affaires franco-ivoirien BernardDerrien,ainsiquePhilippe Colleu, cofondateur d’Onomo
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(avec Christian Mure, qui a quitté le groupe), qui dispose d’environ 1 % des parts. Cédric Guilleminot, qui travaille avec les Ruggieri depuis plusieurs années, a été nommé directeur général. Un changement dans la continuité:lenouvelactionnairemajoritaire, qui a développé Foncière des régions, un géant de l’immobilier de bureau, et reste un actionnaire de poids du groupe européen de maisons de retraite Korian, était au capital d’Onomo depuis la création de la chaîne, en 2009. Par ailleurs, Philippe Colleu garde « les mains dans le cambouis » et demeure le président exécutif du groupe. INDUSTRIALISATION. Déjà pro-
priétaire de trois hôtels, à Dakar, à Abidjan et à Libreville, Onomo va entrer dans la deuxième phase de son développement, dans un contexte toujours plus concurrentiel. « C’est une course de vitesse pour obtenir les meilleurs emplacements. Il faut planter son drapeau le premier », souligne Philippe Colleu. Une montée en puissance qu’il qualifie de « phase
p L’enseigne s’adresse en particulier aux hommes d’affaires (ici à Dakar).
GENÈVE, 17-19 MARS
Le financement de la croissance des entreprises africaines fait partie des thèmes majeurs du AFRICACEOFORUM 2014
theafricaceoforum.com
MÉTISSAGE. Si une ouverture est
également prévue à Freetown, une offensive anglophone de plus grande envergure n’est pas exclue, en particulier en Afrique de l’Est et au Nigeria – mais à plus long terme. « Un développement loin de nos bases impliquera plus d’un hôtel », précise Julien Ruggieri, qui admet avoir déjà repéré quelques sites, jusqu’au Mozambique. Philippe Colleu, lui, souligne que « les pays plus importants comme l’Algérie, le Maroc, l’Afrique du Sud ou le Nigeria nécessitent un réseau de dix à quinze établissements chacun ». Pour le cofondateur d’Onomo, il s’agit de « créer une marque panafricaine » : « Nous ne voulons pas réaliser des hôtels pareils à ceux qu’ontrouvepartoutdanslemonde. Nous sommes dans un courant de métissage avec un service aux normes internationales, mais une architecture et une décoration locales. » Avec 70 % de clients africains et 30 % d’Occidentaux, Onomo semble avoir réussi le pari de la mixité. Par ailleurs, Dakar afficherait un taux d’occupation de 80 %, selon le management. Un beau succès qui en promet d’autres, veut croire Julien Ruggieri. Pour l’homme d’affaires comme pour son père, « la démographie crée le business ». l NICOLAS TEISSERENC JEUNE AFRIQUE
Entreprises marchés
Les indiscrets
AES-Sonel
Yaoundé prendra son temps indiquant que Yaoundé ne se prononcera qu’après avoir pris connaissance des rapports de relecture du contrat de concession et d’audit des engagements d’AES. Entamés en février, les travaux du comité de relecture se sont achevés le 13 novembre, et la séance de validation se tient le 18, sous la présidence de Basile Atangana Kouna. Mais la remise au Premier ministre Philémon Yang n’est prévue qu’un mois plus tard… l
VINCENT FOURNIER/J.A.
SIDALI DJENIDI POUR J.A.
C
ensé valider (ou pas) la cession à Actis des parts (56 %) détenues par l’américain AES dans AES-Sonel, le gouvernement camerounais compte utiliserlesquatre-vingt-dixjoursauxquels le pacte des actionnaires lui donne droit pour répondre. Le lendemain de l’accord du 7 novembre, Basile Atangana Kouna (photo), le ministre de l’Eau et de l’Énergie, a d’ailleurs envoyé une missive à la firme américaine,
RD CONGO TIGO DANS LE VISEUR
À Kinshasa, la ligne e s t b ro u i l l é e e n t re Stéphane Teyssedre, directeur général de l’opérateur téléphonique Tigo, et Tryphon
Kin-Kiey, le ministre des Télécommunications. La filiale du groupe Millicom se plaint d’un harcèlement administratif : les impôts lui réclameraient la preuve du paiement de sa licence, en 1997, et des indemnités de retard pour un total JEUNE AFRIQUE
de 8 millions de dollars (6 millions d’euros). Pis, le ministre a octroyé à un nouveau venu, Africell, des fréquences privilégiées. « Depuis son arrivée fin 2012, Africell occupe illégalement 2 MHz attribués initialement à Tigo », se plaint Stéphane Teyssedre. « Le ministre a pris fait et cause pour Africell », lâche un haut fonctionnaire, qui souligne que le Premier ministre Augustin Matata Ponyo aurait demandé à son ministre d’annuler sa décision. CÔTE D’IVOIRE FRONDE CONTRE DANGOTE
Après avoir implanté, au premier semestre,
Dangote Cement dans la zone portuaire d’Abidjan, Edwin Devakumar négocie avec Sory Diabaté, le patron de Sea-Invest en Côted’Ivoire.Enattendant de démarrer la construction d’une véritable cimenterie, le numéro deux du groupe Dangote veut utiliser la plateforme duconcessionnaireduterminalminéralierd’Abidjan pour importer 1 million de tonnes de ciment par an. La mission risque d’être compliquée : avec l’aide de deux influents alliés, Kanté Koly et Moustapha Chafi, les deux principaux cimentiers du pays, AddohaetSCA,ontdécidé de bloquer le Nigérian, avec un solide argument : à Lagos, le ciment de Dangote est protégé contre les importations.
TÉLÉCOMS L’ALGÉRIE AURA ENFIN SON SMARTPHONE Attendu depuis de longs mois, le premier smartphone produit en Algérie sortira en 2014. Chaque année, 300 000 appareils devraient être produits dans la zone industrielle de Bordj Bou Arreridj. Abdelmalek Benhamadi, patron du numéro un local de l’électronique grand public Condor, a en effet fini par obtenir le feu vert du ministère de l’Intérieur algérien. Une vingtaine de salariés de Condor vont être formés chez l’un des sous-traitants chinois.
SÉNÉGAL UN MAURITANIEN À DAKAR La Banque pour le commerce et l’industrie, l’une des principales banques mauritaniennes, a reçu le 14 novembre son agrément pour s’installer au Sénégal. Fondée en 1999 et présidée par le négociant mauritanien Isselmou ould Didi ould Tajidine, la BCI compte 35 agences en Mauritanie, au Mali (depuis 2007) et en Guinée (depuis 2012). Yves Delafon, cofondateur et administrateur du groupe, est à la manœuvre. Il compte ouvrir la première agence de la succursale sénégalaise de BCI d’ici à avril. Son objectif? Les clients actifs dans le commerce international. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Entreprises marchés AGROALIMENTAIRE
Dans l’antre de Cevital
Il y a quinze ans, Issad Rebrab a installé le noyau de son entreprise à Béjaïa. Reportage au cœur de la plus grande société privée du pays.
V
ue depuis Yemma Gouraya, le mont de la sainte patronne qui veille sur la cité des Hammadites, l’unité agroalimentaire de Cevital ressemble à un confetti. Coincé à Béjaïa entre la mer, le port autonome et l’embouchure du fleuve Soummam, le cœur économique du premier groupe privé algérien paraît encore plus petit face au vaste terrain occupé par Sonatrach, le géant public des hydrocarbures, de l’autre côté du fleuve. À mesure que l’on approche de l’usine, pourtant, l’œuvre d’Issad Rebrab prend de l’ampleur sur ses 14 ha, dont une partie gagnée sur la mer. Depuis qu’il l’a installée, en 1998, l’ancien comptable s’est arrangé pour que chaque nouvelle unité fournisse les revenus nécessaires au financement de la suivante et au remboursement des prêts. Aujourd’hui, l’espace est saturé. Des tuyaux relient la raffinerie d’huile aux quais. Des tapis roulants aériens circulent entre les silos à sucre ou à céréales et à légumineuses, vendues en l’état (400000 t de maïs et de soja importées chaque année), et les unités de production. Le plus grand – 65 m de diamètre et de haut – a une capacité de 150 000 t. De quoi alimenter l’Algérie en sucre durant quarante jours, assure Lounès Ihadadene, le directeur d’exploitation du site. TOURTEAU. À l’entrée de l’usine,
l’odeur de sucre caramélisé domine. Cette immense cuisine à ciel ouvert rejette un léger dépôt mat et brun, visible sur les vitres. Plus près de la raffinerie d’huile, une agréable odeur de tourteau (résidus solides obtenus après l’extraction de l’huile) lutte avec celle de déchets organiques en décomposition. En 2012, 450 000 t d’huile, essentiellement N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
destinées au marché national, sont sorties de Cevital Agro. Mais c’est dans le sucre – avec la plus grande raffinerie d’Afrique – que Cevital excelle. En 2013, 1,6 million de tonnes sont attendues, dont 1 million pour le marché national, estimé à 1,1 million de tonnes. Cette année, 600000 t seront exportées vers une vingtaine de pays, en Afrique de l’Ouest, pour des clients tels que Coca-Cola, mais aussi vers l’Europe (FerreroRocher)etleMoyen-Orient. En 2010, première année de vente hors d’Algérie, 150000 t seulement avaient quitté le territoire national. Premier exportateur du pays hors hydrocarbures, le groupe veut produire 2 millions de tonnes de sucre en 2014, soit un gain de productivité de 400000 t. Il s’appuie pour cela sur du matériel unique dans le pays, comme ces deux grues montées sur 14 roues et capables de charger et décharger 36 t de sucre par coup de mâchoire. Cevital fournit aussi du sucre liquide à l’industrie nationale des boissons. L’entreprise, qui envisage de produire du sucre roux, est la seule en Algérie à avoir utilisé un « bibo » (Bulk In, Bags Out), navireusine de 30000 à 40000 t qui permet de charger en vrac au départ et de décharger emballé à l’arrivée. « TCHIPA ». Le succès de Cevital
a rejailli sur la ville, qui, pourtant, était le second choix du patron, derrière Alger, trop congestionnée. Au détour d’une rue, on peut croiser l’un de ses 3 700 employés, reconnaissables à leur veste bleu et jaune. Cevital recrute une majorité d’ingénieurs très jeunes, issus de l’université locale, les forme et les fait évoluer. L’an dernier, la première grève organisée dans l’entreprise a provoqué une restructuration en profondeur des méthodes managériales, même si Cevital continue à fonctionner sans syndicat
SIDALI-DJENIDI
100
p La compagnie a produit 450 000 tonnes d’huile en 2012.
Un géant national
Premier groupe privé du pays, Cevital est actif dans
une dizaine de métiers 2,68 milliards d’euros
de chiffre d’affaires en 2012
60 %
des revenus réalisés dans l’agroalimentaire
constitué à Béjaïa. Les critiques sur la pollution de l’usine, toujours rejetées par la direction, ont molli. De même que les rumeurs qui prêtaient à Issad Rebrab des liens avec des hommes de pouvoir lors de son installation. « Pour la moindre procédure, les Algériens doivent passer par la tchipa (pot-de-vin) ou leurs relations, explique Hafid, bougiote de naissance. Comment pourraient-ils imaginer que Cevital a obtenu un terrain sur un port sans faire de même? » Rebrab, lui, assure rejeter ces pratiques, soulignant les blocages que ses projets subissent. « Être sur le port de Béjaïa n’a pas que des avantages, souligne Francesc Goula-Mallofré, directeur général de Cevital Agro. Il est en centre-ville, et l’espace, limité, ne peut se gagner que sur la mer. Un bateau arrivé en rade doit attendre vingt à vingt-cinq jours. » L’autoroute qui mène à la capitale (située à 180 km à l’ouest) n’existe que sur une centaine de kilomètres, après quoi la nationale 5 reprend ses droits, dans une vallée de la Soummam spécialisée dans l’agroalimentaire et donc encombrée de poids-lourds. « Il en coûte cinq à sept heures de trajet pour les 115 000 camions qui doivent sortir chaque année de l’unité », explique Sid Ali Adjouadi, le JEUNE AFRIQUE
Coulisses
Entreprises & marchés
101
Retrouvez toute l’actualité économique et financière du continent sur economie.jeuneafrique.com
Alors que United Bank for Africa (UBA) marque une pause dans sa stratégie panafricaine et qu’Access Bank se retire de plusieurs pays, la plus importante banque du Nigeria a annoncé la reprise des filiales d’International Commercial Bank (ICB) Banking Group au Ghana, en Sierra Leone, en Guinée et en Gambie, récupérant ainsi 28 agences. Les filiales acquises emploient environ 600 personnes, pour 120 000 clients et un total de bilan cumulé d’environ 300 millions de dollars (223,26 millions d’euros). First Bank, qui compte environ 7 millions de clients, confirme ainsi ses ambitions panafricaines. La première phase avait démarré fin 2011 avec la prise de contrôle de la Banque internationale de crédit, l’un des principaux établissements de RD Congo. Fondé parTun Daim bin Zainuddin, un homme d’affaires et politicien malaisien, ICB compte encore plusieurs filiales bancaires enAfrique, notamment au Sénégal, enTanzanie, en Zambie, à Djibouti et au Mozambique. l
directeur commercial. Cette année, lesautoritésontlancélestravauxqui doivent relier Béjaïa à l’autoroute est-ouest, sur les Hauts Plateaux. Mais ils ne prendront fin, au mieux, qu’en 2015. Pour pallier ces difficultés, Cevital a fondé en 2007 Numilog, une filiale de transport – secteur encore peu structuré – qu’elle a dynamisée depuis un an. Numilog assurera la logistiquedel’entrepriseviasaplateforme de Bouira (30 %), à 130 km à l’ouest de Béjaïa, et par le biais de partenaires (70 %). Déjà présent de la production à la grande distribution, Cevital espère installer bientôt sur le port une unité de trituration de graines oléagineuses, afin d’en extraire l’huile brute – importée jusque-là. L’entreprise n’attend que l’extension du port sur la mer, prévue de longue date. Elle souhaite aussi rapprocher etintégrersonusinedebouteillesen plastique,aujourd’huiàTizi-Ouzou. En octobre, quelques mois après Djibouti, le ministre soudanais de l’Agriculture est venu chercher l’expertise de Cevital. En jeu : des partenariats industriels, mais aussi l’approvisionnement direct du groupe algérien à partir de l’Afrique. De quoi nourrir le « monstre » de SAÏD AÏT-HATRIT, Béjaïa. l envoyé spécial à Béjaïa JEUNE AFRIQUE
PHOTO12/ALAMY
AFRIQUE DE L’OUEST FIRST BANK OF NIGERIA ACCENTUE L’OFFENSIVE
• TÉLÉCOMS Le Burkinabè Apollinaire Compaoré a finalisé le paiement des 10,9 M€ encore dus pour l’acquisition de la 3e licence mobile au Mali
S•
M
S
AVICULTURE Avec l’entrée d’IFC à son tour de table, le marocain Zalagh
Holding pourra financer son plan d’expansion de 31,4 M€ • ÉNERGIE Le
français EDF va construire au Cameroun une centrale hydroélectrique de 360 MW estimée à 610 M€ • BLANCHIMENT L’ONG Sherpa a déposé une plainte contre la filiale monégasque de BNP Paribas, qui aurait participé au blanchiment de dizaines de millions d’euros d’au moins quatre pays africains
TUNISIE RETOUR DES TOURISTES, DÉPART DE CLUB MED Selon Reuters, durant les dix premiers mois de cette année, 5,5 millions de touristes se sont rendus enTunisie, une hausse de 5,7 % par rapport à la même période en 2012. Mais cela ne suffit pas à rassurer les hôteliers, qui redoutent les effets de l’attentat avorté du 30 octobre à Sousse et subissent encore l’impact du Printemps arabe. Du coup, le Club Med fermera son village de Hammamet en 2014.
CACAO « CHOCFINGER » TIRE SA RÉVÉRENCE Armajaro s’apprête à céder Armajaro Trading Group, sa branche de courtage de matières premières « soft », au suisse Ecom Agroindustrial. Le groupe britannique, cofondé par Anthony
Ward (dit Chocolate Finger), a enregistré une perte nette de 10,3 millions de dollars (7,8 millions d’euros) en 2012. Avec cet accord, Ecom deviendrait l’un des plus importants acheteurs de cacao au monde, avec Barry Callebaut et Cargill.
ALGÉRIE LE CHINOIS FAW VA CONSTRUIRE UNE USINE En partenariat avec le holding privé Arcofina, le constructeur automobile public chinois va construire une usine d’assemblage pour un investissement initial de 5 milliards de dinars (47,3 millions d’euros). Le patron d’Arcofina a souligné l’intérêt accordé à ce projet par la Chine, qui a consacré un fonds de 30 milliards de dollars (22,7 milliards d’euros) au financement des investissements des entreprises chinoises à l’étranger. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Décideurs
JIRO OSE/REDUX-REA
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TEXTILE
Bethlehem Tilahun Alemu à l’aise dans ses baskets
p Sa compagnie a été labellisée « commerce équitable » par la World Fair Trade Organization.
Elle a 33 ans, est éthiopienne et déjà reconnue dans le monde entier. Rencontre avec la fondatrice et patronne de SoleRebels, un modèle d’entrepreneuriat social.
J
ohannesburg en octobre, Guangzhou (Chine) en novembre… En peaufinant ses premiers modèles de chaussures, en 2004, Bethlehem Tilahun Alemu était loin d’imaginer que son idée la conduirait à parcourir le monde quelques années plus tard. Elle a rencontré Bill Clinton et Muhammad Yunus, elle est intervenue à la tribune du Forum économique mondial de Davos, on l’a vue dans le magazine Forbes, sur CNN, et la BBC a parlé d’elle… Le succès de la jeune entrepreneuse éthiopienne, 33 ans, a été fulgurant. SoleRebels, l’enseigne N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
de chaussures écologiques 100 % éthiopiennes qu’elle dirige, vend ses articles dans le monde entier. Fondée il y a moins de dix ans à Zenabwork, un village délaissé des faubourgs d’Addis-Abeba où Bethlehem a grandi, l’entreprise emploie aujourd’hui près de 300 salariés et exporte 90 % de sa production. Danssaboutiqueflambantneuve d’un centre commercial de la capitale éthiopienne, la jeune femme à la volonté de fer ne cache pas sa fierté face au chemin parcouru par son « bébé ». « J’ai toujours voulu monter ma propre affaire, assuret-elle. J’ai puisé mon inspiration
dans ce qui m’entourait. Tout – les semelles en pneu, les matériaux, le savoir-faire – était à portée de main. Ma seule innovation a consisté à créer des produits colorés et abordables, et à envisager un négoce à l’échelle mondiale. » Ses articles sont fabriqués artisanalement par des ouvriers qualifiés à partir de matériaux locaux : du coton biologique, du jute, ou encore des fibres de koba. TONGS. Il y a une dizaine d’années,
après quelques expériences dans des fabriques de cuir, la jeune diplômée en comptabilité décide de franchir le pas. Elle investit ses JEUNE AFRIQUE
Décideurs Mariée et mère de trois enfants, Bethlehem se dit aussi très attentive à l’égalité des sexes. Pour elle, les femmes doivent pouvoir gagner leur vie comme les hommes. Elle a donc ouvert à proximité de l’usine une crèche où ses collaboratrices peuvent laisser leurs enfants pendant la journée.
DR
VÊTEMENTS. Pour cette patronne
HANS PAULSEN VIVO ENERGY OUGANDA Venu d’AmericanTower Corporation en Ouganda, Hans Paulsen devient directeur général du distributeur pétrolier. Il avait auparavant participé à l’intégration des stations Agip dans le réseau Shell en Afrique de l’Est.
NECOTRANS
philanthrope, difficile d’échapper à la comparaison avec les géants mondiaux de l’industrie textile qui viennent en Éthiopie pour profiter d’une main-d’œuvre trois à quatre fois moins coûteuse qu’en Chine. Huajian, l’un des principaux fabricants mondiaux de chaussures, a ainsi récemment installé une usine près d’Addis-Abeba. Les conditions de travail des ouvriers éthiopiens y laissent souvent à désirer, mais Bethlehem préfère ne pas s’étendre sur le sujet, concédant que « ces gens apportent du travail ». Le sourire aux lèvres, elle regarde vers l’avenir. En mai, elle a lancé Alemu, une ligne de vêtements et de sacs à son nom, dont le magasin est mitoyen de la boutique SoleRebels, à Addis. Elle va aussi inaugurer, avant la fin de l’année, une marque de chaussures et de sacs en cuir un CRÈCHE. De colloques internapeu plus haut de gamme. tionaux en entretiens accordés L’ambitieuse Éthiopienne ne dans son magasin éthiopien, cette compte pas s’arrêter là, espérant bûcheuse insiste sur la dimenatteindre un chiffre d’affaires sion humaine de son entreprise. annuel de 16 millions « Pendant des années, Lancée il y j’ai vu les gens travailde dollars (12 millions ler dur sans parvenir d’euros) d’ici à 2016. a dix ans, à sortir de la misère. Pour l’instant, elle tait l’entreprise L’une de mes motivales revenus dégagés emploie tions était de leur perpar son entreprise, tout mettre de s’enrichir à comme les profits… 300 salariés travers un emploi. » « On ambitionne d’emet exporte Se définissant comme baucher 600 salariés 90 % de sa une « entrepreneuse en plus et d’ouvrir une sociale », Bethlehem trentaine de points de production. vente dans le monde souhaite rendre ses en trois ans », affirme-t-elle, sûre salariés « aussi heureux que ses de sa force. SoleRebels pourrait clients ». À Zenabwork, où l’usine notamment partir à la conquête SoleRebels est toujours implandu continent. Rien n’est signé pour tée, les 160 ouvriers permanents touchent en moyenne trois fois plus le moment, mais des discussions que leurs camarades employés par avec des partenaires sud-africains, kényans ou ghanéens sont d’autres compagnies. Avec leurs en cours. l familles, ils bénéficient également BENJAMIN ROGER, d’une couverture médicale élargie. envoyé spécial à Addis-Abeba JEUNE AFRIQUE
ON EN PARLE
GRÉGORY QUÉREL NECOTRANS À 35 ans, Grégory Quérel est nommé président-directeur général du groupe logistique à la suite du décès de Richard Talbot, son fondateur. Diplômé de Centrale Paris, il a débuté chez Natixis avant d’entrer chez Necotrans, en 2004.
UN PHOTO/ESKINDER DEBEBE
maigres économies et confectionne son premier modèle avec cinq proches, dans un atelier prêté par sa grand-mère. « C’était des tongs : un style, cinq couleurs ! » se souvient-elle dans un éclat de rire. Malgré des débuts difficiles, celle qui aime rappeler que « tout problème a une solution » parvient à mettre son entreprise sur les rails du profit. Après les tongs suivront les baskets, les sandales, et les mocassins… Les produits sont de qualité et relativement bon marché (entre 40 et 60 euros la paire) pour la clientèle internationale. Parallèlement à l’ouverture des premiers points de vente à AddisAbeba, l’énergique chef d’entreprise s’attaque au marché mondial via internet et décroche une première commande sur Amazon. Suivront Urban Outfitters puis Spartoo. SoleRebels, première marque de chaussures labellisée « commerce équitable » par la World Fair Trade Organization (WFTO), commence à se faire un nom. La société ouvre des boutiques à Taiwan, Zurich, Vienne, ou Barcelone. Bethlehem, elle, est sollicitée aux quatre coins de la planète pour raconter sa success-story.
JACK ROSEN GÉCAMINES Le fondateur de Rosen Partners LLC entre au conseil d’administration de l’entreprise publique congolaise (RDC). Il est aussi conseiller d’Altimo, principal actionnaire du groupe Vimpelcom, et préside le Congrès juif américain. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Finance ASSURANCES
Avec Amana, la Macif prend le risque de réussir SAPS, la filiale algérienne du groupe français, change de nom. Elle espère ainsi se faire une place sur un marché encore embryonnaire.
L
e regard tourné vers la baie d’Alger, Said Haddouche compte les jours qui le séparent du 26 novembre. Depuis la terrasse située sur le toit de la Société d’assurance de prévoyance et de santé (SAPS), le directeur général adjoint de cette jeune entreprise basée à El-Biar, le quartier huppé des ambassades, a une vue imprenable. Un spectacle capable d’apaiser un soldat avant la bataille… Dans quelques jours, il présentera officiellement et publiquement Amana. Le nouveau nom commercial de SAPS, qui signifie « confiance », est le signe d’une volonté de conquête: la filiale à 41 % du français Macif entend s’imposer commelenuméroundel’assurance depersonnesenAlgérie,uneactivité où tout reste à faire dans le pays. Le chiffre d’affaires généré dans ce domaine a atteint péniblement les 6,4 milliards de dinars (environ 59millionsd’euros)l’annéedernière. C’est moins de 6,7 % du montant N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
global des primes d’assurances en Algérie, qui sont déjà elles-mêmes trèsnettementinférieuresàcellesdes pays voisins. Elles ne représentent que 0,7 % du PIB, contre 1,8 % en Tunisie et 2,9 % au Maroc, d’après la récenteétudeSigmadeSwissRe.Les causes?Unefortesolidaritéfamiliale et des considérations religieuses et culturelles, qui n’incitent pas les Algériens à s’assurer. MODESTE. La Macif, avec ses parte-
nairesalgériens(laSociéténationale d’assurance, la Banque de développement local et la Banque de l’agriculture et du développement rural), entend changer cette situation et profiter du potentiel énorme de l’Algérie. « Ce pays émergent correspond pleinement à notre stratégie de diversification internationale », confirme François Pompée, gérant de Macif Conseil en Algérie, une entité de droit local qui a aidé à structurer Amana. Au Maghreb, la Macif ne s’est lancée réellement
Macif en chiffres
5,465 milliards d’euros de cotisations acquises
que sur ce marché. Peu présent à l’étranger, le groupe mutualiste n’est actif au Maroc et en Tunisie que via des partenariats. À Alger, Amana a commencé à diffuser ses publicités institutionnelles dans la presse nationale, ainsi que dans les gares routières et l’aéroport, dont l’affichage est géré par le numéro un mondial du domaine, le français JCDecaux. «Nousn’avonspasfaitdecommunication pendant nos deux premières années car nous avons privilégié la structuration de l’entreprise et le recrutement du personnel », souligne Said Haddouche. L’assureur compte désormais 60 employés. La communication, au budget encore modeste, est dotée d’une enveloppe de 50 millions de dinars. Dès le début de 2014, Amana lancera un plan de communication sur ses produits d’assurance de personnes. Avec ces derniers – le remboursement de crédit, le rapatriement de corps ou encore l’assurance contre les accidents de la vie –, il espère faire la différence. La concurrence est de plus en plus dure, notamment avec la présence du français Axa, numéro un mondial. Mais Amana refuse de se lancerdansuneguerredesprix,préférantmisersurl’assurancesanté.La filiale a investi dans un outil informatique performant pour réaliser des remboursements complets et plus rapides que ceux de la sécurité sociale locale. La direction s’adresse entre autres aux employeurs, afin
Les actionnaires d’Amana
10 % 15 % 41 % 34 %
55 %
dans l’assurance dommages
128,2 millions d’euros de résultat net
4,9 millions
de sociétaires
Macif Société nationale d’assurance Banque de développement local Banque de l’agriculture et du développement rural JEUNE AFRIQUE
SOURCES : MACIF, SAPS
104
Baromètre qu’ils sensibilisent leurs salariés à la question. « Notre démarche commerciale est orientée vers la prévoyance de groupe », confirme le directeur général. Pour atteindre ses objectifs commerciaux, la direction a signé plusieurs conventions de distribution avec des assureurs dommages n’ayant pas de filiale d’assurance de personnes mais disposant d’un portefeuille d’entreprises clientes notable : 2A, Alliance Assurances et Générale Assurance méditerranéenne… En attendant d’autres partenariats. Amana peut également compter sur les agences de ses actionnaires algériens, dans lesquelles les produits Amana seront bientôt disponibles. Au total, la société disposera de 600 guichets. « Nous devons nous appuyer sur un réseau existant », souligne Said Haddouche, qui rappelle que, outre son siège, l’entreprise ne dispose que d’une agence, dans le centre d’Alger. Un bureau régional devrait ouvrir d’ici à la fin de l’année à Sétif, suivi d’un autre à Oran début 2014. COUDE À COUDE. Un peu plus de
deux ans après la création effective de l’entreprise, née de l’obligation légale de séparer les activités d’assurance de personnes de celles qui concernent les dommages (incendie, accident et risques divers), le premier bilan incite à l’optimisme. L’an dernier, Amana détenait environ 16,4 % de parts de marché, soit un chiffre d’affaires de 1,1 milliard de dinars et 20 000 adhérents. De quoi se placer au deuxième rang national de l’assurance de personnes derrière le leader à capitaux publics Caarama (filiale de la Compagnie algérienne d’assurance et de réassurance) et au coude à coude avec le bancassureur Cardif El Djazaïr, filiale du groupe bancaire français BNP Paribas. Quant aux bénéfices, ils sont prometteurs: ils ont atteint 250 millions de dinars, soit un taux de marge de 22,7 % en 2012. Du haut du siège d’Amana, « acquis cette année pour 360 millions de dinars », Said Haddouche veut y voir un signe positif. l RYADH BENLAHRECH,
Finance
BAUXITE - ALUMINIUM
« La production guinéenne va doubler » DANS la filière aluminium, l’extraction de la bauxite est l’étape qui apporte le moins de valeur ajoutée. Elle nécessite peu de capital par rapport au transport et à la transformation du minerai. La plupart des mines de bauxite sont loin des centres de production d’aluminium. Principalement en Australie, premier producteur mondial, en Guinée – le tiers des réserves du globe –, en Indonésie et au Vietnam. L’annonce par l’Indonésie – qui produira 40 millions de tonnes de bauxite en 2013 – d’un embargo applicable à partir de 2014 sur les produits miniers non transformés, donc la bauxite, a plongé le marché dans l’incertitude. Sous cette menace, la Chine, principal consommateur du minerai indonésien, cherche à diversifier ses
importations de bauxite, de 59 millions de tonnes en 2013. Ces six derniers mois, on a vu augmenter les exportations de bauxite de la Guinée vers la Chine. La production du pays africain devrait donc doubler en dix ans, passant de 19 millions de tonnes en 2012 à 38 millions en 2022, principalement pour les fonderies chinoises. Ce qui restera toutefois bien en deçà de la production australienne, qui pourrait passer pendant la même période de 75 millions à 120 millions de tonnes, avec l’entrée en production de mines actuellement en projet, grâce à un contexte politique moins troublé qu’en Guinée. Aujourd’hui, seul l’aluminium est coté sur les marchés, la bauxite étant achetée dans un cadre contractuel en corrélation avec le
Anthony Everiss Analyste métaux chez Commodities Research Unit (CRU Group)
prix du produit fini. Le cours de l’aluminium, très lié à la croissance des pays occidentaux, est orienté à la baisse ces derniers mois, avec une très forte pression sur les coûts pour les industriels et la faillite de plusieurs petits producteurs ne réalisant pas assez d’économies d’échelle. Mais la Chine et l’Inde, concentrées sur leur croissance industrielle, consommeront toujours plus de bauxite pour leurs propres fonderies d’aluminium. À terme, un marché coté de la bauxite pourrait émerger. » l
Cours de l’aluminium au London Metal Exchange (en dollars par tonne) 2 200
2 163
17.12.2012
2 100
2 000
1 760
1900
11.11.2013
1800
1 719
1700 12 nov. 2012
27.6.2013
8 février 2013
9 mai 2013
7 août 2013
5 nov. 2013
envoyé spécial à Alger JEUNE AFRIQUE
N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Dossier Pétrole & gaz
REUTERS
106
u Site de prospection pétrolière au bord du lac Albert, au nord-ouest de Kampala (Ouganda).
INTERVIEW
Jacques Marraud des Grottes
Directeur Afrique exploration-production de Total
NIGERIA
STRATÉGIE
L’île où naissent les plateformes
Puma Energy toutes griffes dehors
CRISE
La Libye mise à sec
AFRIQUE DE L’EST
Pactole en vue
Depuis deux ans, on a trouvé plus d’hydrocarbures le long des côtes orientales que dans n’importe quelle autre région du monde. Les exportations devraient bondir. Encore faut-il que les infrastructures suivent… NICOLAS TEISSERENC
E
Ecobank, l’Afrique de l’Est pourrait à terme fournir environ 300 millions de BEP de GNL par an à l’Asie.
n matière d’énergie, l’Afrique de l’Est a longtemps été considérée comme le AUTOSUFFISANCE. Mais il n’y a pas que le gaz. On parent pauvre du continent. Jusqu’en connaissaitdéjàl’ampleurdesréservesde pétroledu 2011, ses réserves de pétrole étaient Soudan; il faut désormais compter avec l’Ouganda estimées à 6 milliards de barils, contre (lac Albert) et bientôt le Kenya (lac Turkana), où 60 milliards en Afrique de l’Ouest. de nombreuses découvertes d’or noir ont éveillé Et d’après la Banque mondiale, les coûts élevés l’espoir que la région atteigne enfin l’autosuffisance énergétique.L’Ougandadisposederéservesévaluées de l’énergie constituaient – après la mauvaise gouvernance – le principal frein à la dynamique à 2,5 milliards de barils, une quantité comparable à économique de la région. Tout cela est en passe celle découverte au large du Ghana dans le champ de changer. « L’Afrique de l’Est est devenue la derJubilee. Au Kenya, le britannique Tullow a annoncé nière frontière des hydrocarbures », affirme Rolake des résultats d’exploration qui pourraient mettre le Akinkugbe, directrice de la recherche pétrole et pays sur un pied d’égalité avec son voisin ougandais. gaz chez Ecobank. Les découvertes Dans le sillage de ces découvertes, L’Ouganda d’immenses gisements se sont mulde nombreuses sociétés, qu’il s’agisse tipliées au point que, selon une étude de majors (Total, British Gas, Shell, dispose de ExxonMobil) ou de juniors (Afren, publiée par le cabinet Deloitte, plus réserves Heritage Oil, Maurel & Prom), se sont d’hydrocarbures ont été trouvés en comparables lancées dans l’exploration, de l’ÉthioAfrique de l’Est depuis deux ans que pie à l’Afrique du Sud en passant par dans n’importe quelle autre région à celles Madagascar, où Exxon Mobil vient d’andu monde. découvertes Entre 2010 et 2012, l’américain noncer la reprise de son projet d’exploau large ration. Total a obtenu un permis pour Anadarko et l’italien Eni ont fait, au largedescôtesmozambicaines,lesplus sonder le lac Tanganyika, en Tanzanie, du Ghana. tandis que BG Group s’active au large importantes découvertes de gaz de la du Kenya. Les compagnies nationales comme le décennie: leur volume exploitable est déjà estimé norvégien Statoil et le brésilien Petrobras tentent à 100 milliards de pieds cubes, soit 18 milliards de de faire jeu égal avec leurs homologues asiatiques. barils équivalent pétrole (BEP). Début 2013, l’InsLes indiens ONGC et Oil India ont ainsi investi un titut d’études géologiques des États-Unis publiait montant cumulé de 3,8 milliards d’euros. Le chinois un rapport faisant état de réserves de 72 milliards CNPC s’est quant à lui octroyé 20 % d’un champ de BEP en Afrique de l’Est. La zone pourrait ainsi détenu par Eni au Mozambique, pour 3,3 milliards devenir l’une des plus grandes plateformes mondiales de production de gaz naturel liquéfié (GNL), d’euros. notamment grâce à sa façade maritime idéalement L’excitation est telle que même la Somalie, malexposée pour servir les marchés asiatiques. Selon gré son instabilité chronique, est parvenue à l l l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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ÉGYPTE
Des gisements prometteurs
attirer des sociétés pétrolières comme Africa Oil Corp, Genel Energy ou Ophir Energy. Mais après l’exploration, des défis de taille restent à relever. lll
PIPELINES. Trouver des hydrocarbures est une chose. RAF
Port-Soudan TP
TCHAD
SOUDAN RAF
Khartoum
ÉRYTHRÉE
1000 km
El Obeid DJIBOUTI
RAF
Heglig
Addis-Abeba
RAF
SOUDAN DU SUD
CENTRAF.
ÉTHIOPIE
Djouba SOMALIE
OUGANDA
Hoima RAF
RD CONGO
KENYA RAF TP
Nairobi
RWANDA BURUNDI
TANZANIE
Dodoma
Lamu Océan Indien
RAF Mombasa TP RAF
Dar es-Salaam Songo Songo
Mtwara GNL Palma GNL MALAWI
TP Pemba
ZAMBIE
Antananarivo ZIMBABWE
MOZAMBIQUE MADAGASCAR BOTSWANA
Maputo Pipeline Pipeline en projet RAF Raffinerie
LESOTHO AFRIQUE DU SUD
RAF Raffinerie en projet TP Terminal pétrolier
TP Terminal pétrolier en projet GNL Usine de liquéfaction en projet Champ de pétrole Champ de gaz
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SOURCES : USGS, EIA, AIE, OIL & GAS JOURNAL
SWAZILAND
Les valoriser en est une autre. Comme l’explique Charles Thiémélé, fondateur de Damalex, une société de conseil spécialisée dans l’énergie, « l’exploration revient à quelques dizaines de millions de dollars, la construction de pipelines et de raffineries se chiffre en milliards, et pour un terminal de liquéfaction de GNL il faut compter en dizaines de milliards ». Duncan Clark, PDG de Global Pacific & Partners, une autre société de conseil spécialisée dans les hydrocarbures, se montre très prudent quant à la possibilité de profiter rapidement des ressources identifiées: « Au Mozambique comme en Tanzanie, les gisements de gaz se trouvent dans des zones reculées, et le manque d’infrastructures nécessitera de lourds investissements, d’importants flux de matériel, un niveau de compétences élevé – apporté notamment par les expatriés – et une bonne coordination entre opérateurs, administrations centrales, compagniespétrolièresnationalesetautoritéslocales. Rien de tout cela ne sera facilement réalisable à court terme. » Les estimations les plus optimistes ne prévoient pas de toutes les façons une entrée en production avant 2018. De nombreux projets sont à l’étude pour pallier le déficit d’infrastructures. En matière de logistique d’abord. L’ambitieux projet Lapsset (Lamu Port Southern Sudan-Ethiopia Transport), qui prévoit de relier Djouba, au Soudan du Sud, au port kényan de Lamu, inclut la construction d’un pipeline, d’une voie de chemin de fer, d’une autoroute ainsi que d’importants développements à Lamu, notamment uneraffineried’unecapacitéde120000barilsparjour (b/j).Letoutpouruncoûtestiméàplusde20milliards d’euros, déjà partiellement couvert par les Japonais et les Chinois. Pékin finance également un pipeline de 532 km du sud-est de la Tanzanie jusqu’au port de Dar es-Salaam, pour 900 millions d’euros. Plusieurs autres projets (voir carte p. 108) sont à des degrés d’avancement divers. Côté transformation, au Mozambique, Anadarko a notamment prévu deux usines de liquéfaction d’une capacité de 6,5 milliards de m3 par an, pour un coût évalué à 15 milliards d’euros. Enfin, l’Ouganda cherche des financements (près de 2 milliards d’euros) pour une raffinerie d’une capacité de 120 000 b/j dont les travaux doivent commencer en 2014. Reste l’épineux problème de la commercialisation des ressources. Les hydrocarbures peuvent être acheminés vers les consommateurs de deux manières : soit via les pipelines pour une consommation locale, soit via des raffineries ou des terminaux de liquéfaction pour l’exportation. Selon Charles Thiémélé, entre 70 % et 90 % des ressources découvertes seront exportées. « La consommation d’hydrocarbures l l l JEUNE AFRIQUE
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en Afrique de l’Est augmentera de 40 % dans la prochaine décennie, il doit bien y avoir un moyen d’enrayer la dépendance aux importations », espère de son côté Rolake Akinkugbe. Et de rappeler que le Nigeria importe 70 % de ses besoins en hydrocarbures. « L’Afrique de l’Est peut apprendre des erreurs de ses voisins », juge l’analyste d’Ecobank. Mais pour que les investisseurs privilégient les besoins régionaux, notamment pour l’alimentation de centrales à gaz, Anne-Sophie Corbeau, spécialiste du gaz à l’Agence internationale de l’énergie, prévient : « Il ne faut pas que les gouvernements imposent un prix de vente inférieur à celui obtenu en exportant. » L’Afrique du Sud constitue aussi un débouché naturel pour le gaz mozambicain, mais le pipeline prévu, long de 3000 km, pourrait mettre longtemps à voir le jour. D’autant que les immenses réserves de charbon du pays pourraient l’inciter à privilégier les centrales thermiques pour son alimentation en électricité, malgré les avantages environnementaux du gaz. lll
p Un panneau d’affichage montre une plateforme pétrolière, à Maputo (Mozambique).
volets, parmi lesquels une stratégie pour favoriser l’emploi ». La politique pourrait venir perturber le bon déroulement de l’exploitation, notamment au Mozambique, où les rebelles de la Renamo ont récemment rompu les accords de paix avec le gouvernement. De même, certains observateurs craignent que le projet de Lamu ne soit fortement retardé à cause de sa proximité avec la Somalie. Une fois ces obstacles levés, il faudra encore utiliser au mieux la manne financière recueillie. Soit en créant des fonds souverains de manière à diversifier l’économie, en redéfinissant le rôle des compagnies nationales – sur le modèle de la Sonangol, qui, en Angola, joue un rôle important dans l’exploitation des gisements –, soit en essayant de définir des règles de local content à la manière du Nigeria (lire pp. 118-119). Là encore, l’Afrique de l’Estpourras’inspirerdespaysproducteursd’Afrique de l’Ouest – ou apprendre de leurs erreurs. Après des années de mauvaise gestion, nombre d’entre eux ont récemment créé un fonds souverain ou donnéplusdeprérogatives auxsociétéspubliques. l
ARSENAL. En tant que nouveaux producteurs,
les pays d’Afrique de l’Est doivent se doter d’un arsenal législatif approprié. « La mise en valeur de leur potentiel pétrolier ou gazier dépendra de l’adéquation de leur cadre juridique, estime Akinkugbe. Si les législations ne suivent pas le rythme du développement de l’industrie, il y aura inévitablement des erreurs. » Ainsi, en juillet, Davis Chirchir, le ministre kényan de l’Énergie, reconnaissait que l’industrie extractive était en avance sur la loi, la dernière mise à jour du code des hydrocarbures datant… de 1986. Une lacune qui va souvent de pair avec un problème de compétences locales, même si tous les pays ne sont pas au même niveau. Anne-Sophie Corbeau constate cependant que les États « ne veulent pas se lancer à l’aveuglette » et souligne que « le plan directeur du Mozambique pour le gaz naturel prévoit plusieurs N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
L’OUEST DOIT-IL S’INQUIÉTER? « LA COMPÉTITION entre les deux zones a déjà commencé », affirme Rolake Akinkugbe, directrice de la recherche pétrole et gaz chez Ecobank. Les nombreux projets en cours en Afrique de l’Est pourraient bien avoir une influence sur l’exploration en Afrique de l’Ouest, notamment dans le gaz. Un industriel du secteur affirme qu’il ne serait pas étonné que nombre de projets gaziers au large des côtes ouest-africaines
soient abandonnés dans les prochaines années. Un mouvement qui irait de pair avec l’indépendance énergétique acquise par les États-Unis, clients naturels du gaz nigérian. À l’inverse, les pays d’Afrique de l’Est sont idéalement placés pour desservir les marchés asiatiques, où, selon les prévisions, l’augmentation de la demande devrait être N.T. la plus forte au monde. l JEUNE AFRIQUE
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Le Groupe
Dossier Pétrole & gaz INTERVIEW
Jacques Marraud des Grottes
Directeur Afrique exploration-production de Total
« Une partie de notre ADN est en Afrique » Petrobras et les chinoises Cnooc ou Sinopec. En parallèle, il y a les petites sociétés, les « juniors », qui ont pris des risques et exploré de nouvelles zones géologiques. Leur modèle économique n’est pas le même : ils explorent puis trouvent des partenaires plus solides pour développer parce qu’ils n’ont ni la technologie ni les mêmes moyens financiers. La compétition est donc de plus en plus ouverte.
Le géant français adopte une stratégie d’exploration audacieuse sur le continent. En misant notamment sur l’offshore profond.
L
e français Total réalise 31 % de sa production mondiale en Afrique, soit 713 000 barils par jour sur un total de 2,3 millions. Une proportion qui devrait rester stable ces prochaines années avec un effort d’exploration constant, de la Mauritanie à l’Afrique du Sud. Pour son activité exploration-production, Total a investi 6,2 milliards de dollars en 2012 (environ 5 milliards d’euros) et prévoit de dépasser ce montant en 2013. Dans les 43 pays du continent où il est présent, le groupe emploie directement 10000 personnes, dont 6 000 à l’exploration-production, et plus de 40 000 en comptant les sous-traitants.JacquesMarrauddes Grottes, qui a rejoint le groupe au début des années 1980 et occupe aujourd’hui le poste de directeur Afrique pour la branche exploration-production, répond aux questions de Jeune Afrique.
JEUNE AFRIQUE: Comment le cours du pétrole va-t-il évoluer dans les prochaines années ? J A C Q U E S M A R R AU D D E S GROTTES : Notre hypothèse, c’est
sont nombreuses, au Mozambique, au Ghana ou en Angola. Nous avons devant nous cent ans de consomque le prix du baril restera com- mation de pétrole et deux cents ans parable à ce qu’il est aujourd’hui, de gaz. C’est beaucoup plus qu’il y autour de 100 dollars. Le cours est a dix ans. largement conditionné par le coût de plus en plus élevé de l’extraction, Quelles sont les conséquences de par exemple dans les gisements cette nouvelle donne, notamment de sables bitumineux ou de grand pour l’Afrique ? offshore. Si le prix venait à s’embalJ’en vois deux, essentielles. La ler, l’Organisation des pays expor- première, c’est que la compétition tateurs de pétrole (Opep) devrait entre les États s’intensifie pour atticontinuer de tenir son rôle de rer les investisseurs. La seconde, régulateur en mettant davantage c’est qu’il y a de plus en plus d’acd’hydrocarbures sur le marché. Ce teurs sur le marché avec, à la fois qui est nouveau, c’est que nous des sociétés nationales comme ne manquons pas de ressources Sonangol et Nigerian National au niveau mondial. Rien qu’en Petroleum Corporation (NNPC) Afrique, les découvertes récentes en Afrique, mais aussi le brésilien N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Comment le décollage économique africain influe-t-il sur votre activité ?
MARCO DUFOUR/TOTAL
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p Jacques Marraud des Grottes a rejoint l’entreprise dans les années 1980.
Dans notre domaine, nous assistons à une hausse de la demande locale. Aujourd’hui sur le continent, 10,8 millions de barils sont produits chaque jour, dont 3,3 millions pour les marchés africains. Il en va de même pour le gaz. La production se situe à 200 milliards de m3 par an, dont 110 sont consommés localement. Selon nos prévisions, cette demande devrait croître de 4 % par an. Vous avez accru vos efforts d’exploration, mais n’avez pas encore fait de découvertes majeures. Espérez-vous qu’elles viendront d’Afrique ?
Nous avons adopté une stratégie d’exploration très audacieuse avec une augmentation importante de nos budgets, de 33 % entre 2010 et 2012 au niveau mondial, soit 2,7 milliards de dollars en 2012. En Afrique, nous regardons aussi bien à l’est qu’à l’ouest, de la Mauritanie à la Côte d’Ivoire en passant par l’Afrique du Sud, le Mozambique et le Kenya. En particulier dans l’offshore profond. Nos cibles sont risquées géologiquement, mais le jeu en vaut la chandelle. Les prochaines étapes de nos grands forages d’exploration, prévus pour l’année prochaine, sont la Côte d’Ivoire, l’Angola, l’Afrique du Sud et le Kenya. J’espère que nous y JEUNE AFRIQUE
HERVÉ PIRAUD/TOTAL
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ferons de grandes découvertes, notamment en « pre-salt » dans le bassin de la Kwanza en Angola [couches les plus profondes, entre 5000 et 7000 mètres sous la surface de la mer].
En ce qui concerne la production, quels sont vos projets en cours ?
de 485 millions de barils pour un investissement de 10 milliards de dollars. La première phase démarre au troisième trimestre 2015. Nous avons également les champs Clov en Angola, qui vont entrer en production au deuxième trimestre 2014 avec un nouveau FPSO [Floating Production, Storage and Offloading Unit, navire utilisé dans l’industrie pétrolière et gazière pour le traitement et le stockage des hydrocarbures]. Nous avons lancé cette année au Nigeria un autre grand projet FPSO, à Egina, avec un potentiel de plus de 500 millions de barils. Son démarrage est prévu pour la mi-2017. Nous travaillons également sur un développement en Angola à 1 800 mètres sous la mer, le projet Kaombo. Notre objectif de production se situe à 3 millions de barils par jour en 2017, et le continent continuera de représenter 30 % de ce total. Une partie de notre ADN est en Afrique.
Nous avons une volonté forte d’investir en Afrique. Moho Nord au Congo, par exemple, pour lequel nous visons l’extraction
Vous mettez souvent l’accent sur vos efforts de responsabilité sociétale des entreprises (RSE).
Vous avez cédé un certain nombre d’actifs ces derniers temps. Suivant quelle logique ?
Certains champs nécessitaient trop de moyens humains par rapport à l’enjeu. Nous avons aussi accompagné certains de nos partenaires,commeShellauNigeriadans la cession de blocs à terre. Souvent, cesparticipationssontrachetéespar des acteurs de taille modeste, dont la logique économique consiste à développer des activités existantes à travers des joint-ventures entre des sociétés locales et des juniors pétrolières.
JEUNE AFRIQUE
p Chantier de construction du projet Clov, en Angola.
Comment cela se traduit-il concrètement ?
La RSE fait aujourd’hui très clairement partie de la responsabilité opérationnelle des équipes. Cela signifie que nous devons comprendre l’impact de nos activités sur l’environnement. En tout, 88 % des dépenses sociétales du groupe ont concerné l’Afrique. En 2012, cela représentait 260 millions d’euros.
Notre objectif de production? 3 millions de barils par jour en 2017. Certes, mais par exemple, avezvous pris des décisions concernant la fin du torchage sur vos exploitations ?
En matière d’environnement, le groupe Total a pris l’engagement de réduire ses volumes de gaz torchés de 50 % entre 2005 et 2014. En Afrique, nous investissons pour réduire au minimum le brûlage de gaz.Lesprojetsderedéveloppement N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Dossier Pétrole & gaz du champ d’Anguille au Gabon et d’Ofon 2 au Nigeria permettront de réduire le torchage et de valoriser le gaz produit en le vendant sur le marché intérieur ou étranger via l’exportation. Total emploie 10000 salariés sur le continent. Avez-vous des difficultés à trouver les profils qui vous intéressent ?
Nous avons développé des programmes de formation dans tous les pays où nous intervenons. Nous proposons aussi des formations professionnelles spécialisées, voire des masters universitaires avec les
facultés locales ou bien en association avec des structures comme l’Institut français du pétrole (IFP). Nous n’avons pas vocation à tout faire, mais cela fait partie de notre activité, et nous y consacrons du temps et un peu moins de 90 millions d’euros en 2012. Les États africains sont de plus en plus nombreux à promouvoir le local content [promotion de la maind’œuvre et de l’industrie locale]. Comment vous adaptez-vous?
Aujourd’hui, il y a une forte volonté de la part des États pour développer leur économie. Nous
p Bus électriques, fruits d’un partenariat Total-Bolloré, à Abidjan.
Une place au solaire Total ne mise pas seulement sur le pétrole. Depuis deux ans, il multiplie les initiatives dans le photovoltaïque.
M
ercredi 16 octobre, Ab i d ja n . A l a s s a n e Ouattarainaugurelapremière ligne de bus électriques du pays,surlecampusdel’universitéde Cocody.Àsescôtés,VincentBolloré, développeur du projet via sa société Blue Solutions, et Momar Nguer, directeur marketing et distribution pour l’Afrique et le Moyen-Orient de Total. Entre l’homme d’affaires français, qui ne jure désormais que par les batteries électriques, et le pétrolier, c’est le début d’une association qui pourrait se révéler très prometteuse. Total a équipé le site de l’université abidjanaise
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comprenons cette nécessité. Pour nous, cela passe par notre capacité à associer ou à promouvoir l’industrie locale dans nos grands projets, mais aussi dans l’exploitation au quotidien et sur le très long terme. Au Gabon, le champ d’Anguille a fourni 2,5 millions d’heures de travail sur place. Clov, en Angola, représente déjà 9 millions d’heures. Ce sont soit des entreprises locales, soit des sous-traitants étrangers associés localement qui en profitent. Dans sa phase initiale, le local content coûte plus cher, mais à terme tout le monde y gagnera. l
Panneaux, batteries, lampes… La diversification est en marche.
de 288 panneaux solaires d’une puissance cumulée de 1 MW pour alimenterlesbusenénergie.Etalors que Bolloré entend se servir de son expérience ivoirienne pour rééditer cette stratégie ailleurs en Afrique, à commencer par le Cameroun, Total devrait rester son partenaire privilégié. IMMUNISÉ. Depuislerachaten2011
de 66 % de l’américain SunPower, un fabricant de panneaux photovoltaïques haut de gamme, moyennant 1,34 milliard de dollars, Total a donné un coup d’accélérateur à sa stratégie de diversification
Propos recueillis par NICOLAS TEISSERENC
SIA KAMBOU/AFP
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dans l’énergie solaire. SunPower vient de remporter le marché de la construction d’une centrale solaire de 86 mégawatts (MW) en Afrique du Sud, où deux projets photovoltaïques similaires sont déjà en train de sortir de terre. « Je suis très optimiste quant au développement du solaire en Afrique, s’enthousiasme MomarNguer.L’offreesttoujoursen train de courir derrière la demande en électricité. » Selon lui, les centrales sont compétitives: « Avec le diesel, vous subissez beaucoup de pertes dues au transport. Et quand vous installez une centrale solaire, vous êtes immunisés contre les variations des cours du diesel. » Au point de cannibaliser les activités traditionnelles de Total ? Momar Nguer s’en défend, précisant que la société propose notamment un modèle hybride pour l’alimentation dessitesminiersquifonctionnentau solaire pendant la journée avant de passer au diesel la nuit. Enfin, le groupe a développé une activité de vente de lampes solaires vendues entre 10 et 130 euros selon les modèles. Cette offre, commercialisée sous la marque Awango By Total, connaît un succès qui dépasse de loin les espérances du groupe. Alors que l’objectif était de vendre 300 000 lampes en Afrique et au Moyen-Orient, entre 2013 et 2015, 360000 lampes avaient été vendues fin septembre. L’objectif mondial a été relevé de 1 à 1,5 million de N.T. lampes d’ici à 2015. l JEUNE AFRIQUE
Dossier Pétrole & gaz
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STRATÉGIE
Puma Energy toutes griffes dehors Le géant suisse du stockage et de la distribution veut poursuivre son expansion en Afrique. Et ce n’est pas l’échec du rachat du kényan KenolKobil qui lui a fait perdre l’appétit…
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JONATHAN GLYNN SMITH/PUMA ENERGY
n mars, au terme d’un an de négociations, la nouvelle est tombée brutalement. Puma Energy, le géant suisse du stockage et de la distribution pétrolière (8,6 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2012), ne rachetait finalement pas le distributeur kényan KenolKobil. Une décision prise « d’un commun accord », commente Puma en refusant de rentrer dans les détails. La marque au félin n’entend pas pour autant mettre un terme à son essor sur le continent. « Nous avons une bonne implantation en Afrique australe, mais il reste beaucoup d’endroits où planter un drapeau et améliorer notre activité », avertit Duncan Armstrong, le directeur du stockage.Lemessageestclair,même si Puma se refuse à dire où il compte porter son prochain coup de griffe. Ces dernières années, alors que les majorsseretiraientprogressivement desmarchésavalpourseconcentrer sur leurs cœurs de métier plus rentables, le suisse a déjà démontré sa faculté à saisir les occasions. « Dès le début des années 2000, nous étions déjà impliqués dans la privatisation de la distribution
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pétrolière(enpartenariatavecTotal, Chevron et X-oil Congo) pour assurer le transport des produits pétroliers au Congo-Brazzaville, raconte Duncan Armstrong. Nous avions égalementdeuxterminauxpétroliers et des espaces de stockage en Côte d’Ivoire ou au Ghana. Mais notre plus gros coup a été de racheter les activités aval de BP dans cinq pays – Botswana, Namibie, Tanzanie,
Son plus gros coup? La reprise des activités de BP dans cinq pays du continent. Zambie et Malawi – il y a deux ans. » Davantage encore qu’une classique fusion-acquisition, cette expansion permet à Puma Energy d’être actif dans quinze pays africains et de disposer d’une large base logistique couvrant l’ensemble du continent au sud du Congo, de la RDC et de la Tanzanie. L’entreprise peut ainsi sécuriser de manière compétitive la livraison de plus de 300 stations-servicesetde19aéroports.Unestratégie d’approvisionnement qui avait déjà poussé Puma à construire, avant le rachatdes activitésde BP, un parc de
q Dans une station d’essence, au Botswana.
stockage à Beira (Mozambique) afin d’assurer ses importations depuis l’est de l’Afrique australe. « Même pour les pays d’Afrique de l’Ouest où nous sommes présents, il y a un avantage à ce que nous soyons en Afrique australe », assure le directeur du stockage. « Plus on possède d’activitésdansunerégion,plusona dechancesdes’adapterrapidement. Sionacinqpointsd’entréeaveccinq navires en circulation sur la zone, on peut au besoin intervertir les navires et faire des choix très différents ». LIBÉRALISATION. Avec 569000 m3
de stockage, l’Afrique représente aujourd’hui environ 13 % des capacités globales de l’entreprise. Parallèlementaurachatdesimplantations aval de BP, Puma Energy a opté pour un service répondant aux normes les plus exigeantes. La compagnie reste sans doute marquée par le scandale des déchets toxiques du Probo Koala, impliquant sa maison mère, Trafigura. « Nous investissons constamment dans nos actifs pour améliorer leur sécurité : systèmes anti-incendie, mesures de confinement en cas de déversement d’hydrocarbures… », explique Duncan Armstrong. Pour lui, ce souci de la fiabilité de leurs installations a influé sur le choix de l’Angola de s’appuyer sur Puma Energy pour accompagner le processus de libéralisation de la distribution, entièrement contrôlée jusque-làparSonangol.Enéchange, la compagnie nationale angolaise a acquis 20 % du groupe suisse en décembre. Dernièrement, l’autre grand axe de développement de Puma en Afrique, en plus de l’expansion géographique, a été son intérêt croissant pour la distribution de gaz. En 2012, l’entreprise a acquis coup sur coup deux terminaux de 5 000 m3 de GPL au Bénin et au Sénégal. l SÉBASTIEN DUMOULIN JEUNE AFRIQUE
Dossier Pétrole & gaz NIGERIA
L’île où naissent les plateformes À l’ouest de la lagune de Lagos s’étend la zone industrielle de Snake Island, où Nigerdock construit des structures offshore. Reportage au cœur d’un immense chantier.
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epuis le centre-ville de Lagos, le bateau est le meilleur moyen pour accéder à Snake Island. Sur l’eau, pas d’embouteillages pour rejoindre les rives de cette île au nom peu engageant, qui lui vient de son contour en forme de serpent. Située à l’extrémité ouest de la lagune, elle mesure une dizaine de kilomètres de long. Au début des années 1990, elle était l’un des rares lieux épargnés par l’urbanisation galopante. Isolée mais accessible aux navires à fort tirant d’eau, Snake Island a été choisie pour abriter la zone franche industrielle destinée au secteur pétrolier, lequel représente 80 % des recettes du pays. Privatisée en 2000, l’île est désormais gérée par Nigerdock, filiale du groupe privé nigérian Jagal. Sous sa houlette, Snake Island a vocation à devenir un fleuron de la politique gouvernementale de promotion des intérêts nigérians – Nigerian Oil and Gas Industry Content Development Bill – dans le secteur extractif. Les bureaux de l’entreprise sont situés sur la pointe est de l’île, à quelques encablures du port d’Apapa, principale porte d’entrée maritime du Nigeria. Trois secteurs occupent les 2500 travailleurs de Nigerdock : la construction de plateformes pétrolières ou gazières – de loin l’activité la plus importante –, la fabrication de conteneurs et de citernes, la réparation et la construction navales. À cela s’ajoute un centre de formation technique qui assure la mise à niveau de ses employés et de ceux de ses clients. Christabel Bomi-Dore, responsable du développement, n’est pas peu fière de sa clientèle : « Total, N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Shell, Chevron, ExxonMobil et Egip nous font confiance, notre expertise est reconnue par tous », affirme-t-elle. Nigerdock s’enorgueillit de respecter les meilleures normes de qualité, avec une certification ISO 9001. Après la fabrication de la plateforme d’Usan pour Total en 2010, puis de celles d’Abang et d’Itut pour ExxonMobil fin 2012, les majors ont été rassurées sur la capacité de l’opérateur nigérian à mener à bien des projets nécessitant plusieurs centaines de milliers d’heures de travail. PERFORMANT. En outre, « à Snake
Island, on bénéficie d’avantages fiscaux, logistiques et techniques majeurs pour fabriquer une plateforme », souligne Emmanuel Hyest, directeur de projet pour Total. « D’abord, la proximité du port de Lagos permet des délais d’approvisionnement bien plus courts qu’à Port Harcourt [principale ville pétrolière du pays, à 450 km au sud-est de Lagos], et ce avec certaines exemptions de taxes, explique-t-il. Ensuite, la taille de son chantier en fait l’un des sites de construction de plateformes les plus grands d’Afrique de l’Ouest, à peine plus petit que celui du groupe Saipem à Port Harcourt. Enfin, Nigerdock a beaucoup investi pour acquérir un matériel performant : ponts roulants, grues mobiles, ateliers de peinture et nouvelle machine de découpe plasma. » Des équipements d’une valeur de plus de 100 millions d’euros, selon Nigerdock. L’accès au gigantesque bassin de main-d’œuvre de Lagos (18 millions d’habitants) est un autre avantage crucial. Dernier
SERGE REPON/TOTAL
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p La construction de plateformes pétrolières est l’activité principale de Nigerdock.
point positif, et non des moindres, la sécurité: « Ici, pas de banditisme comme dans le delta du Niger. Le fait d’être sur une île nous protège », se réjouit Emmanuel Hyest. RUCHE. Pour l’heure, trois grands
chantiers sont visibles sur le site, véritable ruche d’ouvriers aux couleurs de Nigerdock, rouge et blanc. Deux sont liés à la fabrication d’Ofon 2, une nouvelle plateforme de Total qui complétera les installations d’Ofon 1, déjà en place en pleine mer, à 40 km au sud de Port Harcourt. « Après un appel d’offres, nous avons sélectionné Nigerdock pour un premier lot de 360 millions d’euros comprenant deux ponts satellites offshore de 5 000 tonnes. C’est la première fois qu’un chantier de cette JEUNE AFRIQUE
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importance est accordé directement à une société nigériane, avec près de 1,5 million d’heures de travail déjà réalisées, et ce sans aucun accident », précise Hyest, qui pilote l’ensemble du projet. Des grutiers manipulent d’énormes
Ponts roulants, grues mobiles… Le groupe a investi 100 millions d’euros dans des équipements. tuyaux métalliques et les agencent. Ils serviront à recueillir et à acheminer les 70 000 équivalents barils par jour d’huile et de gaz extraits du gisement d’Ofon et actuellement perdus car torchés (brûlés). Un système qui mettra fin à une pratique décriée pour ses conséquences sur l’environnement. JEUNE AFRIQUE
les champs pétroliers Sonam et Meren, piloté par Hyundai Heavy Industries. Là encore, les équipes de Nigerdock interviennent en sous-traitance. Si Nigerdock a incontestablement gagné en savoirfaire, la société doit encore progresser « au niveau de la gestion et de la productivité », reconnaît Emmanuel Hyest, qui observe au passage que la quasi-totalité de la direction opérationnelle de l’entreprise est étrangère – si son actionnaire, la famille Jarmakani, est nigériane, le directeur général, Louis van Alphen, est néerlandais. Autre difficulté : se faire reconnaître à l’échelle internationale, notamment pour s’approvisionner. « La partie achat de matériel du projet s’est révélée un vrai défi. Il est plus difficile pour Nigerdock d’obtenir de bonnes conditions commerciales ou tout simplement une réponse à une commande. Les vendeurs en Europe se méfient parfois d’une entreprise nigériane », note Emmanuel Hyest. Ces obstacles devraient progressivement disparaître, d’autant que la loi sur le local content Lagos Oshodi-Isolo Mainland – qui définit ce qui Lagune doit être produit ou de Lagos assemblé sur place –, votée fin 2010, Lagos Ajeromi est devenue plus Island Amuwo Ifelodua Port contraignante, avec Odofin d’Apapa pour objectif que Snake Island 70 % de la valeur des marchés de fabricaTarkwa Bay tion, de maintenance 2km Océan Atlantique et d’ingénierie soit octroyée à des entreprises locales d’ici à À proximité, toujours pour 2020. « Les inspecteurs mandatés Ofon 2, le français Eiffage supervise par l’État viennent régulièrement la réalisation des « quartiers vie » à Snake Island pour vérifier que de la plateforme, dont une partie nous sommes dans les clous », affirme Emmanuel Hyest. est réalisée par Nigerdock. Environ À terme, Nigerdock pourrait 120 personnes logeront dans ce également se positionner sur le qui ressemble à un immeuble démantèlement de plateformes de gros Legos sur quatre étages. « Mi-novembre 2013, le quartier vie pétrolières et gazières. Selon Total, va être chargé sur une barge, puis ce temps n’est pas encore venu, remorqué jusqu’à destination », mais la question se posera bientôt. explique le chef de projet. Enfin, un En 2020, les premières grandes plapeu plus loin, un dernier ensemble teformes offshore du pays auront d’échafaudages délimite le chan25 ans et seront en fin de vie. l CHRISTOPHE LE BEC, envoyé spécial tier des plateformes Chevron pour N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Dossier Pétrole & gaz
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À SUIVRE
Ivresse des profondeurs Pour leurs compagnies respectives, ces patrons rêvent tous d’un gisement hors norme.
Africa Oil Corp
Mark Dingley Le Kényan blanc
près quatorze années passées au sein de la junior Talisman Energy, notamment en tant que vice-président des opérations au Moyen-Orient, Mark Dingley, 48 ans, a rejoint en avril une autre compagnie canadienne, Africa Oil Corp (AOC) pour prendre les rênes de sa filiale éthiopienne. En mai, il était également nommé directeur des opérations de Horn Petroleum, dont Africa Oil détient 45 % et qui possède deux blocs au Puntland. Désormais installé à Addis-Abeba, Mark Dingley, qui est né et a grandi au Kenya, opère ainsi une sorte de retour aux sources. Associé à Tullow sur un bloc prometteur dans le sud du pays, AOC procède aussi à des explorations dans la vallée du Rift, ainsi que dans le nord et l’est du pays. l JULIEN CLÉMENÇOT
TULLOW OIL
A
Tim O’Hanlon « Monsieur Jubilee » Tullow Oil
Delonex Energy
N
Rahul Dhir Un chef indien
ouveau venu en Afrique, Rahul Dhir, 47 ans, est une référence en Inde. Entre 2006 et 2012, il a été, en tant que directeur général, l’un des principaux artisans de la croissance de la compagnie Cairn India, dont la production atteignait au momentdesondépart200000barils par jour pour une capitalisation de plus de 13 milliards de dollars (9,7 milliards d’euros). En juin 2013, cet ingénieur de formation a levé 600 millions de dollars auprès de Warburg Pincus, la société américaine de
capital-investissement, pour financer le lancement de sa propre compagnie, Delonex Energy. Un tour de table complété en août par la Société financière internationale (IFC), filiale de la Banque mondiale, qui a injecté 60 millions de dollars contre 10 % du capital. Pour l’heure, aucune opération n’a été rendue publique. Mais Rahul Dhir a indiqué étudier les possibilités d’obtenir des permis ou de s’associer à d’autres compagnies en Afrique de l’Est, de l’Éthiopie au Mozambique, mais aussi au Tchad et au Soudan. l J.C.
D
urant la dernière décennie, Tim O’Hanlon, 54 ans, vice-président chargé de l’Afrique, a fait de Tullow Oil l’une des compagnies les plus respectées du continent, notamment avec la découverte du champ Jubilee au Ghana. Désormais, c’est dans l’Est (Ouganda, Kenya…) que cet ingénieur, diplômé de l’Imperial College de Londres, et ses équipes concentrent leurs efforts. Ce qui ne l’empêche pas de parcourir sans cesse le continent à la recherche de nouvelles opportunités. Début octobre, on l’a aperçu, par exemple, à Niamey en train de tenter d’obtenir des blocs rendus par la société d’État China National Petroleum Corp. l J.C.
Loris Tealdi Il monte, il monte… ENI
P
AFP
ur produit de la maison Eni, Loris Tealdi, 37 ans, est une des valeurs montantes de la compagnie italienne. Diplômé de l’Imperial College de Londres et titulaire du MBA de l’université de Bologne, cet ingénieur est passé notamment par la filiale du Congo et la Nigerian Agip Oil Company (la coentreprise détenue par Eni avec l’État du Nigeria). Vice-président de Reservoirs & Petroleum pour la région Afrique depuis mars 2012, il supervise dans douze pays une production d’environ 1 million de barils par jour et est particulièrement impliqué dans les projets de forages en eau profonde en Angola. l J.C.
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JEUNE AFRIQUE
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2013 Implantation à Aberdeen, Royaume-Uni 2012 Expansion en mer du Nord 2012 Implantation à Houston, États-Unis 2011 !"#$%&%'%() *+ ,+"'+)- ./%0/+ 01()' *+ Shell dans l’offshore camerounais 2009 Acquisition par Sinopec 1998 – 2005 Expansion au Nigeria, au Cameroun, au Gabon et dans le Kurdistan irakien 1994 Création d’Addax Petroleum
Chaque étape fait une différence et la différence est notre force
Dossier Pétrole & gaz
YLER HICKS/THE NEW YORK TIMES-REDUX-REA
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CRISE
p À la raffinerie de Zaouïa, en novembre 2011.
La Libye mise à sec Alors que le pétrole représente 90 % de la richesse du pays, sa production est perturbée par des factions régionalistes. Les majors menacent de partir.
E
n Libye, même le pétrole ne fait plus consensus. Pendant et après la révolution, l’or noir était l’unique secteur stable d’un pays en proie aux brigades armées, aux islamistes et aux trafics. Si la production avait baissé durant le conflit, dès fin 2011, deux mois après la mort de Kaddafi, plus de 1 million de barils par jour (contre1,5millionavantfévrier2011) étaient extraits, et 1,6million en septembre 2012. Cela fait désormais cinqmoisquelesrevenuspétroliers, environ 90 % de la richesse de l’État, sont mis à mal par une série de blocages des sites d’extraction et des terminaux. La production a chuté à 250000 barils par jour. Dans l’Est, les terminaux de Zueitina,RasLanoufetAl-Sedrasont souslecontrôledeshommesd’IbrahimJedran.L’ancienresponsabledes Gardes des installations pétrolières (GIP) pour la zone centre (Syrte) est devenu, à la faveur des grèves, le héraut du mouvement fédéraliste de la Cyrénaïque, la région orientale de la Libye. Le 10 novembre, le gouvernement autoproclamé de N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
la région a annoncé la création de sa propre compagnie pétrolière. Débutnovembre,desTouaregsetdes Berbèresontbloquérespectivement le champ pétrolier d’Oubari, dans le sud du pays, où officie le géant espagnol Repsol, et les infrastructures de lacompagnieMellitahOildeZouara, à l’ouest de Tripoli. La société est détenue par l’italien Eni, qui est le plus important opérateur pétrolier en Libye. Les activistes menacent de recommencer leur action si le
Les autorités estiment les pertes totales du secteur à quelque 9,7 milliards d’euros. gouvernement ne reconnaît pas leurs droits en tant que minorités ethniques. Au même moment, des enseignantsontparalysélaraffinerie de Zaouïa, à l’Ouest, pour exiger une augmentation de salaire. Les autorités libyennes estiment les pertes totales du secteur à quelque 9,7 milliards d’euros. Cette situation confuse entame la confiancedesentreprisespétrolières
étrangères. Ali Zeidan, le Premier ministre,aexprimésacraintedevoir partir la société Eni, alors que l’Italie importedeLibyeprèsduquartdeses besoins en hydrocarbures. Selon le WallStreetJournal,l’entreprisebritanniqueBPchercheraitàsedésengager partiellementdesdeuxchampspétroliers qu’elle exploite à Ghadamès, dans l’Ouest. L’information n’a pas été confirmée par la société. Quant àEmmaBonino,laministreitalienne desAffairesétrangères,elleconsidère « la Libye comme absolument hors de contrôle ». PRESSION. « Nous faisons face à
plusieursdéfis,maisceluidupétrole n’est pas le plus important », assure AhmedAbdulsalam,porte-paroledu ministre de l’Économie. Son optimisme tient à plusieurs facteurs. Primo, il reviendra toujours moins cher d’importer du pétrole depuis la Libye que depuis les pays du Golfe pourlespayseuropéens.Secundo,la qualité du brut libyen est unique et, silesraffinerieseuropéennesimportaient du pétrole d’ailleurs, elles devraient payer un coût élevé pour le transformer. Tertio, il est difficile pour un grand groupe de quitter un pays, surtout s’il veut récupérer ses investissements. Quant à la concurrencedelacompagniepétrolièredissidente de la Cyrénaïque, les risques semblent réduits: « Tout le monde connaît la provenance de la marchandised’untanker.C’estmettresa réputation en danger que d’acheter du pétrole à un acteur non officiel », explique un expert. « Les discours des compagnies, c’est avant tout un jeu politique pour mettre la pression », affirme Ahmed Abdulsalam. En effet, gouvernement et entreprises pétrolières doivent renégocier, d’ici à juin 2014, l’accord Epsa (Exploration Production Sharing Agreement). Ce dernier octroie à la compagnie pétrolière nationale (NOC) entre 80 % et 90 % des revenus de la production. Fin octobre, la société Repsol a annoncé la découverte d’un gisement pétrolier dans la région de Mourzouk, dans le sudouestdupays.L’espagnoladécidéde poursuivrelescampagnesd’exploration jusqu’à la fin de l’année 2015. l MATHIEU GALTIER, à Tripoli JEUNE AFRIQUE
Dossier Pétrole & gaz ALGÉRIE
RedMed poursuit sa diversification Spécialisé dans les prestations de services pour les majors pétrolières, le groupe, numéro un dans son domaine, a su accroître ses activités. Et c’est loin d’être fini.
L
a spectaculaire attaque terroriste du site gazier d’In Amenas, qui a causé le décès d’un employé français de RedMed Group en janvier, a placé l’entreprise spécialiste de l’assistance logistique et des services parapétroliers sur le devant de la scène. Bien malgré elle. Habituellement très discrète, cette société travaille pour les plus grands groupes énergétiques, de l’incontournable Sonatrach (première entreprise d’Afrique en termes de chiffre d’affaires, d’après le classement de Jeune Afrique) au britannique BP, en passant par l’italien Eni ou le français Total. Aucune information n’est disponible concernant ses parts de marché, ainsi que celles de ses concurrents, mais la direction affirme qu’elle est numéro un sur ce créneau. RedMed a de beaux jours devant lui à Hassi Messaoud, capitale algérienne du pétrole (800 km au sudest d’Alger), et dans ses environs. L’exploitation des hydrocarbures dans le Sahara algérien représente en effet l’essentiel du PIB du pays (97 %), suscite la convoitise des multinationales et capte des investissements massifs. Quant à la concurrence étrangère, elle est quasiment inexistante en raison des difficultés opérationnelles (aridité, chaleur, connaissance du terrain) et d’uneloiimposantauxinvestisseurs étrangers un partenaire local majoritaire. Côté algérien, les acteurs ne sont pas légion, hormis quelques filiales spécifiques peu diversifiées de la Sonatrach, comme la Société nationale de génie civil et bâtiment (GCB) ou l’Entreprise nationale de N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
OMAR SEFOUANE
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p Installation d’une base de vie, dans la région d’In Amenas.
services aux puits (ENSP). Ainsi, depuissacréationen1996,RedMed, qui employait au départ 10 personnes, est devenu un groupe qui détient 10 filiales comprenant le transport aérien, l’hôtellerie et la restauration, l’assistance médicale, le génie civil, la certification technique pour les forages pétroliers, la formation professionnelle dans les métiers énergétiques, les énergies renouvelables… Il compte aujourd’hui 1 500 employés et réalise plus de 100 millions de dollars
L’entreprise des frères Fechkeur réalise plus de 100 millions de dollars de chiffre d’affaires. de chiffre d’affaires (environ 75 millions d’euros). Certaines des filiales de RedMed sont organisées en coentreprise avec des sociétés étrangères. C’est le cas notamment de la compagnie aérienne JetAir Sahara, fruit d’un partenariataveclebritanniqueJetAir pour assurer des liaisons depuis Alger ou Londres vers le Sud algérien, et de Newrest Remote en association avec le français Newrest, qui fournit des repas aux bases de vie [campements où loge le personnel
à proximité des champs pétroliers] situées dans le désert algérien. Mais les fondateurs et dirigeants du groupe, les frères Fechkeur – les jumeaux Abdelmajid et Riad, âgés de 42 ans, ainsi que leur frère cadet Nadir,aidésparleurpèreMohamed, un ancien dirigeant de la Sonatrach et initiateur de l’Institut Algérien du pétrole – ne comptent pas s’arrêter en si bon chemin. Le prochain projet de ces fans d’aéronautique? La création d’une école de pilotage à Hassi Messaoud, dont l’ouverture est prévue pour l’année prochaine. Celle-ci comprendra un simulateur de vol, plusieurs avions, et sera ouverte aux Algériens comme aux étrangers. IMPACT. Implanté dans le Sud du pays, RedMed met aussi en avant l’impact social de son développement dans une zone où le chômage desjeunesesttrèsélevé:«Nousintégrons beaucoup d’Algériens dans nos effectifs: ils représentent plus de 90 % de notre personnel. Nous avons le devoir et la conviction de créer de la valeur ajoutée dans la région », affirme Riad Fechkeur, responsable du développement commercialetdelastratégiedugroupe. l RYADH BENLAHRECH JEUNE AFRIQUE
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Culture & médias
ART CONTEMPORAIN
Le musée qui manquait N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
JEUNE AFRIQUE
Culture médias NICOLAS MICHEL,
U
q La Villa Ajavon transformée en lieu culturel.
JEUNE AFRIQUE
niforme bleu de rigueur, les écoliers quittent l’ombre fraîche de la Villa Ajavon en rang par deux pour retrouver la poussière des rues de Ouidah. Sortie d’école? Non. En ce 11 novembre 2013, unévénementexceptionnelvientd’avoir lieu. Pour la première fois, un musée consacré à l’art contemporain a ouvert ses portes au Bénin. Ces enfants de 7 ou 8 ans ont été les premiers visiteurs à en découvrir les cimaises où sont accrochées des œuvres signées par des artistes africains de renom, à l’instar du photographe malien Malick Sidibé, du plasticien béninois Romuald Hazoumé ou du peintre tanzanien George Lilanga. À l’origine de ce projet à vocation pédagogique, la Fondation Zinsou, installée depuis 2005 à Cotonou. « J’ai toujours eu envie de créer quelque chose à Ouidah, d’où est originaire ma famille », raconte Marie-Cécile Zinsou, présidente de la fondation. Petite bourgade située à une quarantaine de kilomètres de la capitale économique, la ville occupe déjà une place notable dans les livres d’histoire. C’est en effet depuis ce comptoir de la traite que des centaines de milliers d’esclaves furent déportés vers les Amériques. Mais jusqu’à présent, aucune réponse contemporaine à la hauteur de l’enjeu mémoriel n’y avait été proposée. Certes, le monument de la Porte du NonRetour et les sculptures en ciment de Cyprien Tokoudagba sur la route des Esclaves offrent aux descendants de captifs un lieu de recueillement. Mais si « on ne construit pas son avenir sans connaître son histoire », comme le dit MarieCécile Zinsou, on ne le bâtit pas non plus solidement sur un sol de larmes et de cendres. L’art d’aujourd’hui, qui est souvent digestion du passé et projection vers l’avenir, peut impulser un véritable élan créatif – vital pour une société qui a plus d’idées que de pétrole!
JEAN-DOMINIQUE BURTON
Dorénavant, la Fondation Zinsou exposera une partie de sa collection à Ouidah. Une manière de faire découvrir les œuvres d’artistes africains de renom au plus grand nombre. Une initiative salutaire.
envoyé spécial à Ouidah
CRÈME. Lors de la soirée d’inauguration du musée de Ouidah, l’économiste Lionel Zinsou (PAI Partners), qui est aussi le principal bailleur de fonds de la fondation qui porte son nom, ne s’est pas privé de raconter que l’idée d’exposer la collection familiale venait en réalité… du Japon! C’est en effet sur l’île de Naoshima que les Zinsou ont puisé l’inspiration. La société Benesse y expose, dans des espaces dessinés par l’architecte Tadao Ando, mais aussi dans des maisons traditionnelles rénovées, la crème de l’art contemporain international! « On s’est dit: et si on faisait Naoshima à Ouidah? raconte Lionel Zinsou. Peut-être ne sommes-nous que 162e dans la liste des pays selon l’indice de développement humain, mais nous disposons d’un moteur puissant qui est celui de la culture. Ici, il y a une vraie passion de la culture, une vraie passion de l’éducation. » À Ouidah, c’est dans une belle bâtisse de style afro-brésilien que la fondation a décidé de présenter un dixième des œuvres de la collection familiale, en les changeant deux à trois fois par an. C’est le hasard des rencontres qui a permis que la Villa Ajavon, construite en 1922, devienne un musée. Roger Yamadjako ne se fait pas prier pour parler de son grand-père maternel, Ayivi Ajavon l l l N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Culture médias Art contemporain
JEAN-DOMINIQUE BURTON
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– 11 femmes et 43 enfants… – qui fit fortune dans l’huile de palme et construisit sa demeure à deux pas de la cathédrale. « Il est mort en 1961, et jusqu’à récemment la maison est restée vide, mis à part la grande salle qui nous servait de lieu de réunion. Nous tenions à ce qu’elle reste dans le patrimoine familial et nous ne voulions pas la transformer en buvette ou la céder à la mairie. La proposition de la fondation correspondait exactement à ce que nous voulions, si bien que les négociations n’ont pas été longues. » L’accord: un prêt des lieux pour trente ans, en contrepartie d’une restauration. En un an, le bâtiment de terre a été rénové de fond en comble, et ce jusqu’aux poignées de portes. Puis les œuvres y ont été installées, pour certaines dans des cadres antihumidité et anti-UV. Elles y seront surveillées par 15 gardiens et seront protégées par alarme et caméras. Coût global de l’opération : sans doute un peu plus de 200000 euros pour la rénovation, tandis que le budget provisoire de fonctionnement du musée est estimé à près de 67000 euros. lll
GRATUITÉ. Mais peut-on sans risque imposer, ex nihilo, un musée en un lieu où l’art contemporain est sans doute l’une des dernières préoccupations des habitants? Après des débuts plutôt élitistes avec des expositions consacrées à Romuald Hazoumé et à Jean-Michel Basquiat, la fondation s’est peu à peu orientée vers une démarche plus pédagogique, à destination des enfants. « Il faut que les gens se familiarisent, qu’ils se sentent chez eux, pas qu’ils se sentent exclus, affirme Marie-Cécile Zinsou. Je préfère avoir un public plutôt que de mettre en avant une démarche complexe. Je défends l’idée de délectation! » À Cotonou, la fondation transporte les enfants en bus jusqu’aux salles d’exposition, à eux ensuite d’y conduire leurs parents. « Je suis en train de mettre en place cette même stratégie, de contact avec les enseignants et les élèves, explique Claude Akotome, le directeur du musée. Je ne dis pas que la tâche sera facile, mais la réaction est déjà très positive et la nouvelle s’est vite répandue sur le terrain grâce N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
p « Je n’avais jamais rêvé que des gamins béninois iraient voir mes œuvres », se réjouit Romuald Hazoumé.
aux zémidjans [mototaxis]. » Et de poursuivre: « Ici, beaucoup de gens sont habitués à l’art ancien, le musée va leur permettre de découvrir quelque chose de nouveau. » Comme rien ne doit empêcher les visiteurs d’entrer dans le musée, celui-ci est entièrement gratuit. « On s’est posé la question de la gratuité, explique Lionel Zinsou. N’était-ce pas dépréciatif? Mais même à 100 F CFA, personne n’entrerait! » Et pour celui qui entre, la promesse d’une main tendue rassure: celle d’un guide en tee-shirt rouge, expliquantlesdémarchesartistiquesduSud-Africain Bruce Clarke, du Camerounais Samuel Fosso ou du Béninois Aston. Et tout au long du parcours, des panneaux répondent à des questions sans doute basiques, mais essentielles, comme : « Qu’est-ce que la peinture? » ou « Qu’est-ce que la sculpture? » Bien entendu, la grande majorité des artistes béninois applaudissent. À commencer par le plus connu d’entre eux, Romuald Hazoumé, qui soutient la fondation depuis ses débuts. « Ce n’est jamais facile de faire quelque chose en Afrique, dit-il, il faut avoir un protecteur. J’ai joué ce rôle jusqu’à maintenant. Mais je n’avais jamais rêvé que des gamins béninois iraient voir mes œuvres! J’en ai pleuré! Aujourd’hui, des gosses de Porto-Novo me reconnaissent et me disent “je te connais, notre maître nous a emmenés à la fondation!” » DÉTERMINÉS. Pour l’exposition d’ouverture, Marie-
Après des débuts plutôt élitistes, la Fondation Zinsou s’est orientée vers une démarche plus pédagogique.
Cécile Zinsou a logiquement mis l’accent sur la production locale. « Il s’agit que les gens s’identifient tout de suite. Après, ils viendront plus facilement. Pour l’instant, le concept même d’exposition n’est pas familier. » Il est vrai que la grande majorité des enfants venus inaugurer les lieux, le 11 novembre, n’avaientencorejamaismislespiedsdansunmusée. Plus tard, la Villa Ajavon pourra tout de même être consacrée à d’autres projets muséographiques. « On nefigepasleschoses»,souligneMarie-CécileZinsou. Environunanaprèsladestructiond’uneœuvrede BruceClarkeparunbulldozer,surordreduministère de la Culture, la résilience et la détermination de la fondation surprennent. D’autres se seraient depuis longtemps découragés. « Il faut mettre l’accent sur la culture, où réside notre identité, a déclaré Lionel Zinsou lors du vernissage inaugural. Mais nous ne devons pas attendre de l’État qu’il prenne toutes les initiatives. C’est à la société civile, à la fondation, à tous les citoyens de le faire. Nous pouvons rendre à la jeunesse de ce pays sa mémoire. La diaspora est, elle aussi, une force formidable pour restituer le passéetaccomplirl’avenir.»ÀCotonou,lafondation se réjouit d’avoir touché plus de 4 millions d’enfants depuis sa création. Des enfants qui deviendront bientôt des adultes, des électeurs. « Tout ce que nous faisons en tant qu’artistes, ce musée, c’est pour la communauté, soutient l’infatigable provocateur qu’est Romuald Hazoumé. Les enfants, ce sont eux qui vont faire la révolution. » l JEUNE AFRIQUE
Culture médias
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CINÉMA
Le dernier combat de Victor « Young » Perez Inspiré d’une histoire vraie, le film de Jacques Ouaniche relate l’ascension d’un boxeur tunisien au destin hors norme, brisé par la déportation à Auschwitz, lieu de son ultime bataille.
JEUNE AFRIQUE
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ous sommes peu avant la fin de la Seconde Guerre mondiale, à Auschwitz. Derrière des barbelés, un homme en pyjama rayé, manifestement fatigué par un tel exercice, fait du footing tout en bougeant les bras comme s’il donnait des coups à un adversaire invisible. Victor, déporté, s’entraîne malgré un état physique plutôt alarmant en vue p Trois ans après sa retraite sportive, Brahim Asloum a remis les gants pour jouer d’un combat de boxe. Un match peu le rôle de Victor, s’entraînant dur pour descendre au poids de 52 kg. banal puisqu’il a été organisé par le commandant du camp de concentration qui, ayant repéré ce prisonnier juif à coups de flash-back, Victor se remémoconserver son titre et connaîtra ensuite ancien champion de boxe, veut le voir rant round après round son incroyable une carrière faite de hauts et de bas, affronter un soldat allemand, lui aussi parcours de petit « Juif arabe » tunisien se concluant malgré tout, alors que pugiliste « dans le civil », afin de démonqui a connu une incroyable ascension, débute la guerre, par un palmarès des trer l’évidente supériorité des Aryens sur puis une aussi rapide descente aux enfers, plus présentables : 91 victoires dont 27 les Juifs. Le combat se déroulant devant avant de se retrouver raflé dans la France par K.-O. pour 136 combats. l’ensemble des gardiens et de Vichy en 1943 et déporté Un palmarès tout à fait réel puisqu’il des prisonniers. dans les camps nazis. s’agit là d’une histoire authentique : L’officier allemand n’a Victor « Young » Perez, Victor Younki pris aucun risque : pour ITINÉRAIRE. L’histoire comde son vrai nom, a bel et bien existé affronter le frêle « poids et est mort en janvier 1945, quelques mence quinze ans aupamouche » Victor, de surravant dans un quartier mois avant la reddition de l’Allemagne croît affaibli par ses condipopulaire de Tunis, où Victor hitlérienne. Tellement authentique tions de détention, il a fait est repéré par un organisamême qu’on se demande pourquoi appel à Kurz, un colosse qui teur de combats parisien. le réalisateur, après avoir reconstitué affiche 20 bons centimètres Grâce à lui, il va traverser dans un style très classique le parcours et autant de kilos de plus la Méditerranée et entamer extraordinaire de son héros, a éprouvé le que lui. Et pourtant, malune brillante carrière profesbesoin de mêler la fiction à la réalité. En Victor « Young » gré les exhortations de son sionnelle. Malgré quelques revanche, il a eu une très bonne idée en Perez, de Jacques Ouaniche « manageur » qui le supplie déconvenues, comme ce recrutant Brahim Asloum, ex-détenteur (sortie en France de se « coucher » aussi vite titre européen remporté sur d’une couronne mondiale, pour jouer le 20 novembre) qu’il le peut pour éviter une le ring et perdu sur le tapis le rôle de Victor. Lui-même champion terrible punition, Victor, une vert puisque – pour l’occaolympique chez les mi-mouches à fois que le gong a retenti, se sert de ses sion – la Tunisie colonisée n’a pas été 20 ans, l’âge où « Young » Perez obtint poings comme il a toujours eu l’habitude considérée comme faisant partie de la la ceinture de champion du monde, de le faire. Il reste debout en esquivant France par les bureaucrates du noble Asloum, qui s’est toujours considéré, autant que possible les coups et réussit art, Victor, devenu « Young » Perez sur il le dit lui-même, autant comme un même à envoyer une fois son adversaire les affiches, finit par devenir champion artiste que comme un boxeur, a réussi à terre, pour la plus grande fierté de à incarner de façon crédible un persondu monde des poids mouches en 1931. Rançon du succès, la gloire lui monte à nage qui ne pouvait que lui « parler ». Il ses compagnons d’infortune, avant de la tête, et il se perd dans les bras de la a bien fait de remettre les gants devant devoir lui-même finir au tapis. C’est pendant ce combat que l’essentiel superbe Mireille avec laquelle il écume la caméra pour ce nouveau défi. l du film de Jacques Ouaniche se déroule les boîtes de nuit. Il ne réussit pas à RENAUD DE ROCHEBRUNE
t Le Sud-Africain ne cesse d’aborder le thème de l’altérité.
DANIEL BOSHOFF POUR J.A.
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THÉÂTRE
Au cœur de l’ignominie coloniale L’installation Exhibit B de Brett Bailey fait se croiser les regards des spectateurs et des acteurs, figés en pensionnaires des zoos humains du siècle dernier. Une expérience intense.
E
n une petite semaine avignonnaise, il avait adopté la bise facile à la française (par lot de trois selon la particularité locale). Anthropologue zélé et enthousiaste, Brett Bailey met autant à l’aise son interlocuteur que son œuvre bouscule. Présenté pour la première fois en France dans le cadre du Festival d’Avignon en juillet dernier, Exhibit B est le deuxième volet d’un projet inédit (qui en compte trois) autour des relations de pouvoir régissant notre monde postcolonial. Revendiquée par son auteur comme une « exposition », c’est une installation qui plonge le visiteur dans l’ambiance des zoos humains, vitrines honteuses du colonialisme. Le spectateur est confronté à des tableaux vivants, composés de figurants, anonymes pour la plupart, recrutés sur place sur casting (voir J.A. no 2741). La méthode a fait ses preuves dans les huit pays où Exhibit B a été présenté, mais Brett Bailey est encore épaté : « Ce sont des étudiants, des coiffeuses, N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
des mécaniciens… ils réalisent une sacrée performance. » Celle de prêter leur corps à l’expérience par sessions de quatre-vingtdix à cent minutes. CHARISME. Le slameur Pierre Renaud, présent à Avignon en juillet, appréhendait les crampes autant que l’impatience : « Ce n’est pas forcément mon truc de me taire et de rester immobile ! » Ce qui l’a convaincu, c’est « la portée du projet » et le charisme d’un metteur en scène tout sauf manichéen : « La consigne était claire: ne pas recevoir les visiteurs comme des bourreaux, la situation était assez forte comme ça. » Et effectivement, le regard de ces acteurs immobiles transperce le visiteur. Puis ce sont leurs histoires qui saisissent. Celles de ces milliers d’anonymes exposés dans les zoos humains, et des destinées singulières, à l’image de celle, poignante, de Swatche, plus connue sous le nom de Vénus hottentote, esclave transformée en phénomène de foire pour sa morphologie hors du commun et disséquée peu après sa mort. Et d’Angelo Soliman, enfant esclave devenu homme d’influence à la cour de
Vienne, finissant empaillé dans le cabinet de curiosités de l’empereur François II. Et de tant d’autres… Dans ce parcours du calvaire relatant le crime colonial, seul un tableau ne vous regarde pas mais vous parle : un chœur de quatre têtes décapitées, hommage aux Hereros de Namibie sur fond de chant de lamentation magnifique. « Je voulais qu’il en sorte aussi de la beauté », explique Bailey, qui a fait appel au compositeur Marcellinus Swaartbooi pour susciter cette BRETT BAILEY AU 104 À PARIS du 19 au 21 novembre : House of the Holy Afro, cocktail sudafricain de street dance, de house music, de gospel et de rituels chamaniques. du 25 au 27 novembre : Exhibit B
émotion qui achève de déstabiliser le visiteur.C’estsouventfaceàcesvoixcristallines et à ces langues qui claquent que les larmes sortaient à Avignon. « Ce n’était pas mon but de produire quelque chose d’aussi émotionnel mais c’est ainsi, ces histoires JEUNE AFRIQUE
Culture médias touchent l’humain. À Helsinki, où il n’y a pas de passé colonial, l’émotion était très forte. Parfois ça devient même un peu hystérique, c’est très dur pour les acteurs », explique Bailey, qui se fait un devoir de soutenir ses troupes : « Sa présence nous redonnait énergie et confiance », note Pierre Renaud.
PORTRAIT
Marc Zinga, étoile montante Né en RD Congo, il débarque en Belgique à l’âge de 5 ans. Quelques années plus tard, le voilà dans la peau de Patrice Lumumba.
«
AMÉLIE RIBEROLLE, à Avignon JEUNE AFRIQUE
MICHEL CACALCA/LES GÉMEAUX
Sud de l’apartheid, Brett Bailey doit attendre l’université pour rencontrer d’autres Noirs que les domestiques de sa famille. Une situation « intériorisée » jusqu’à l’activisme des années de fac au Cap où il comprend que « d’autres systèmes sont possibles ». Son travail ne cesse depuis d’interroger les dynamiques du monde postcolonial au sein de sa compagnie Third World Bunfight. Car le quadragénaire aime l’ambivalence, bunfight désignant aussi bien une réception qu’une dispute, une bagarre de mots… Des mots qu’il sait choisir : « Avec son peu de français, il a su me parler, explique Pierre Renaud, l’étudiantslameurdevenupygméeenvitrine. Je ne suis pas facile. Il a su me donner confiance. C’est un fin psychologue. » Mais un psychologue sans illusions. « La nation Arc-en-Ciel, ça a été un moment, comme un orgasme. » Aujourd’hui, les tensions de classes ont remplacé les tensions de races : « Le pouvoir économique est toujours aux mains des Blancs, tandis qu’une élite noire détient le pouvoir politique. Pour les autres, peu de changement : la population augmente, l’éducation est très mauvaise. Il y a beaucoup d’insatisfaction, tout cela pourrait bien exploser un jour. » Et le poids de l’Histoire pèse sur le débat public : « Les accusations de racisme fusent vite, c’est dur d’argumenter. » Quand on lui demande s’il compte changer le regard des gens avec Exhibit B, il passe la main sur son crâne rasé : « Les gens d’extrême droite ne viendront pas, donc ça ne les changera pas. En revanche, s’il se passe quelque chose chez ceux qui viennent, ils en parleront autour d’eux. » Pour, peutêtre, se débarrasser de ce qui colonise toujours les esprits. Pour Pierre Renaud, que cette expérience a renforcé, le bilan est en tout cas sans appel : « Je crois que j’ai appris à ne plus baisser le regard. » l
J
e me sens très honoré. Je suis profondément touché par Une saison au Congo, un texte qui charrie de très grandes émotions. C’est pour moi une catharsis. » Ce 17 octobre, au lendemain de la première de la pièce d’Aimé Césaire au Théâtre national populaire (TNP) de Villeurbanne, dans la banlieue de Lyon, Marc Zinga semble se demander si c’est bien lui qui porte sur ses frêles épaules ce spectacle longuement applaudi par le public. Il n’a pas rêvé. À 29 ans, visage et allure d’adolescent, il incarne avec talent Patrice Lumumba, le personnage principal de la pièce de Césaire. Né à Likasi, au Katanga, dans le sud du Congo-Kinshasa, il débarque en Belgique en 1989, âgé de 5 ans, avec son frère et sa mère. À l’école primaire, il rêve de devenir comédien. « L’instituteur nous a fait découvrir la chanson Le soleil a rendezvous avec la lune de Charles Trenet. Il a commencé à swinguer un peu. Ses jambes s’activaient. J’ai ressenti une émotion », se souvient Zinga. En attendant, c’est la musique qui l’attire : comédie musicale pour les 10-11 ans, académies de
CONSCIENCE. Né dans l’Afrique du
quartier, rap, funk. Cette passion aboutit à la création d’un groupe, en 2003, le Peas Project. Mais devenir acteur est primordial. « Écrire pour la caméra » aussi. D’où ce cursus en réalisation qu’il suit à Louvain-la-Neuve. « Ce qui me plaît, c’est raconter une histoire aux gens, que ce soit derrière la caméra, devant elle ou sur les planches », souligne-t-il. ASCENSION. En 2011, déclic : le jeune
Belge est sollicité pour être Mobutu dans Mister Bob, un téléfilm de Thomas Vincent produit par Canal+ et consacré aux aventures du mercenaire Bob Denard au Congo. C’est par ce biais que Christian Schiaretti, directeur du TNP de Villeurbanne et metteur en scène, qui travaille déjà sur la pièce de Césaire, découvre Zinga. Il le fait venir en France pour une audition. Pour se mettre dans la peau de Lumumba, Zinga travaille dur. « J’ai orienté mon travail vers trois directions : l’histoire de Lumumba, celle de Césaire et le regard du metteur en scène. Tout cela avec une grande confiance. Il y a un plaisir d’acteur lorsqu’on fouille dans les archives, qu’on regarde des vidéos, qu’on lit des livres et qu’on q Le jeune acteur (à g.) et son partenaire apporte un peu de vérité hisAristide Tarnagda sur la scène du TNP, en avril. torique sur la scène », expliquet-il. Sa jeune carrière ne fait que commencer. Réalisateur d’un court-métrage en 2011, Grand Garçon, il sera à l’affiche avec Benoît Poelvoorde dans un film de Benoît Mariage, Les Rayures du zèbre. Sans oublier un longmétrage tiré de l’autobiographie du rappeur français Abd Al Malik. Après Villeurbanne et Fort-de-France, Une saison au Congo se joue au théâtre des Gémeaux à Sceaux (région parisienne) jusqu’au 24 novembre. l TSHITENGE LUBABU M.K.
Une saison au Congo, d’Aimé Césaire, mis en scène par Christian Schiaretti, jusqu’au 24 novembre au théâtre des Gémeaux, à Sceaux N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Culture médias En vue
n n n Décevant
n n n Pourquoi pas
n n n Réussi
n n n Excellent
CINÉMA
Un Français au secours de Mandela Un documentaire relate le rôle de « Monsieur Jacques » dans les négociations pour la libération de Madiba et la fin de l’apartheid.
À
le voir avec son petit embonpoint, sa coupe sage et son costume banal, on pourrait hésiter entre un fonctionnaire de rang moyen ou un représentant de commerce. En fait, le Français Jean-Yves Ollivier, plus connu sous le pseudonyme de « Monsieur Jacques » par les dirigeants du plus haut niveau en Afrique et dans les pays occidentaux qui furent ses interlocuteurs, est un important négociant en matières premières, mais surtout un homme de l’ombre qui a joué un rôle majeur dans le processus qui a conduit à l’avènement d’une nouvelle Afrique du Sud. Le documentaire Plot for Peace, produit par une fondation sud-africaine spécialisée dans la recherche et la diffusion d’archives historiques, l’African Oral History Archive, raconte cette extraordinaire intervention jusque-là méconnue de ce « diplomate parallèle ». Élevé dans une famille de pieds-noirs en Algérie, Ollivier garde après l’exil en métropole un penchant pour le continent africain. Et il comprend, après un temps d’égarement dans sa prime jeunesse qui l’a conduit à entrer à l’âge de 17 ans au service de l’OAS (Organisation de l’armée
AFRICAN ORAL HISTORY ARCHIVE
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Plot for Peace, de Carlos Agullo et Mandy Jacobson (sortie à Paris le 20 novembre) nnn
secrète) comme agent de liaison et à effectuer pour cela quelques mois de prison, que la haine entre différentes communautés n’apporte rien de bon. Au milieu des années 1980, il se met au service d’une cause qui lui tient à cœur : le retour de l’Afrique du Sud dans le cercle des nations fréquentables. EXPLOIT. Après avoir tenté sans succès
d’organiser avec la France de Mitterrand (président) et Chirac (Premier ministre de cohabitation) une réunion de conciliation entre les gouvernants sud-africains
et des dirigeants africains, il parvient à obtenir à l’arraché un vaste échange de prisonniers, sous l’égide du président du Congo-Brazzaville,DenisSassouNguesso, avec l’accord des Mozambicains, des Namibiens, des Angolais ainsi que des Cubains et des Américains. Un exploit, de l’avis général, et surtout une étape essentielle sur le chemin de la libération de Mandela. Qui, une fois enfin au pouvoir, décorera le mystérieux Ollivier. Dont on attend avec intérêt les Mémoires, annoncés pour fin 2013-début 2014. l RENAUD DE ROCHEBRUNE
MUSIQUE
Mabanckou de nouveau en piste
Round 2, de Black Bazar (Lusafrica/ Sony Music Entertainment) nnn
BLACK BAZAR est un combo musical créé et produit par l’écrivain franco-congolais Alain Mabanckou, également collaborateur de J.A. Après un premier album sorti en 2012 intitulé Round 1, voici un nouvel épisode, évidemment appelé Round 2. La mission avouée de ce groupe est de redonner ses lettres de noblesse à une
musique congolaise trop souvent engluée dans des flots de synthés sans saveur par des mégalomanes qui ne se soucient plus guère de fournir des albums dignes de ce nom. Mabanckou se repose sur le talent de musiciens ayant fait leurs preuves et dont la renommée dans le milieu de la rumba n’est plus à faire : de
Monsieur Popolipo, qui a été au départ de l’aventure de Zaiko Langa Langa et qui est considéré par ses pairs comme l’un des inventeurs de la guitare soukous, à Roi David, atalaku découvert chez Wenge Musica, maison mère de Werrason. Résultat : un joyeux capharnaüm musical. l JÉRÔME BESNAULT
Rectificatif. Dans l’article consacré à TV5 Monde dans notre précédente édition (J.A. no 2757), une coquille s’est glissée dans le nom de Matthieu Vendrely, rédacteur en chef Afrique. Que l’intéressé et nos lecteurs veuillent bien nous en excuser. N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre -Tél. : 01 44 30 18 76 - Fax : 01 44 30 18 77 - Email. : f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique - 57 bis, rue d’Auteuil 75016 Paris - France
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AVIS D'APPEL À CANDIDATURES AU POSTE DE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CENTRE D’ARBITRAGE DE LA CCJA
Recrutement
L’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) est une Institution unique regroupant dix (17) pays, à savoir : Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafricaine, Comores, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée (Conakry), Guinée-Bissau, Guinée Équatoriale, Mali, Niger, République Démocratique du Congo, Sénégal, Tchad et Togo. Ces objectifs sont notamment : ! unifier le droit des affaires des États parties au Traité ; ! garantir la sécurité juridique et judiciaire des activités économiques au sein de l’espace de l’organisation ; ! promouvoir l’arbitrage comme instrument de règlement des différends contractuels. Dans le cadre de ses activités, le Secrétariat Permanent de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), a commis le cabinet international AfricSearch en vue de procéder au recrutement du Secrétaire Général du Centre d’Arbitrage de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) dont le siège est à Abidjan. Cet avis peut être consulté sur les sites suivants : - www.africsearch.com, - www.ohada.org et - www.ohada.com Les dossiers de candidature doivent être composés de : - une lettre de motivation datée et signée ; - une copie certifiée conforme du ou des diplômes ; - un curriculum vitae détaillé ; - un extrait d’acte de naissance ou tout document en tenant lieu ; - un certificat de nationalité. Les candidats doivent remplir les conditions suivantes : - être âgé de 50 ans au plus au 31 décembre 2013 et être ressortissant de l’un des pays membres de l’OHADA ; - être titulaire d’un diplôme de troisième cycle en droit des affaires ; - avoir une expérience d’au moins dix ans dans le domaine de l’arbitrage ; - avoir une solide expérience administrative, judiciaire ou du secteur privé d’au moins 10 ans ; - avoir une bonne connaissance de l’arbitrage de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage et des centres d’arbitrages ; - avoir un sens élevé de discrétion et d’intégrité ; - être totalement disponible et faire preuve d’assiduité au travail ; - savoir lire et écrire dans l’une des langues de l’OHADA, le bilinguisme étant un atout favorable ; - maîtriser l’outil informatique et les technologies de l’information et de la communication. La date limite de dépôt des candidatures est fixée au 29 novembre 2013, par mail à l’adresse électronique suivante : info@africsearch.com, ou par courrier à l’adresse ci-après : AFRICSEARCH 33, rue de Galilée 75116 Paris.
1 Sales & Marketing Specialist – Medical (North Africa) & 1 Sales & Marketing Specialist - Surgical (North Africa) We are currently seeking a highly committed and enthusiastic individual to join our multi-national medical equipment company in a Sales & Marketing Specialist role, working throughout the North African region. The successful candidate will be responsible for target sales revenue, which is to be achieved through the effective motivation,training and management of the local Olympus Distributors, or by direct sales to the end-user, where appropriate. As a result, these roles require extensive travel throughout the region and involve meeting with customers as well as attending/organising conferences & workshops. Applicants must be educated to a minimum of degree level,possess strong commercial acumen and ideally be able to demonstrate experience in a similar role. Excellent communication and interpersonal skills,along with the desire to work hard and succeed in a competitive market are important pre-requisites. The successful candidate should ideally reside in (or be willing to relocate to) Morocco or Tunisia and be fluent in written and spoken French, Arabic & English. Key duties include: • The formulation of strategies and action plans for both product portfolios and distributors with specific targets, KPIs and associated measures. • Market research & development,which will broadly assess the potential of the specific clinical area in the geographical region, and how this can be developed. • In-field & remote product support and training for areas of clinical speciality, both for the distributors and end-user customers, in the geographical region. • Support of educational activities & scientific exhibitions, including the development of training events and hands-on workshops. • Healthcare professional expert development and product/prototype demonstrations. Interested candidates who match these requirements should submit a detailed CV with covering letter to the following address personnel@olympus.co.uk. Please note, only shortlisted candidates will be contacted.
FORUM
2013 DE RECRUTEMENT
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DES MANAGERS POUR L’AFRIQUE
un forum
Paris, le 29 novembre aux Salons Hoche www.africtalents.com N° 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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JOB VACANCY African Biofuel and Renewable Energy Company (ABREC) is a partner within Berkeley Energy’s African Renewable Energy Fund (AREF), a new private equity fund focused on sub-Saharan Africa (excluding South Africa). ABREC is a renewable energy advisory and development company owned by 14 West African states and 6 prominent financial institutions operating in the region. Berkeley Energy already manages the Renewable Energy Asia Fund and has been chosen as the manager for AREF in a competitive process ran by the African Development Bank, who is an anchor investor in the fund. AREF’s mandate is to invest in grid-connected hydro, wind, solar, geothermal, biomass and stranded gas power generation projects with installed capacity of 10-50MW. AREF will work closely and actively with developers to take the projects to financial closing, through construction into operation. Target fund size is up to $200 million, with first closing in Q1 2014. The fund has attracted as investors a range of multilateral and development financial institutions, as well as private entities. ABREC is hiring for the following positions within its organisation with specific focus on AREF: a. Investment Manager b. Engineer/Project Manager c. Legal Associate For more details concerning this job vacancy (skills and characteristics), please visit the web site of the institution by following this link: http://www.faber-abref.org/ All applications must be submitted in hard copy or forwarded through electronic mail not later than 13th December 2013 to the following address: African Biofuel & Renewable Energy Company (ABREC) 128, Bd. du 13 janvier BP 2704 Lome – Togo Tel. : (228) 22 21 68 64 / Fax : (228) 22 22 81 51 Email : infos@saber-abrec.org N.B. : Only shortlisted candidates will be invited for a test. ABREC reserves the right to stop further action on this job vacancy notice
Avis d’Appel d’offres International (AAOI) - F/DR/14/2013 Fourniture d’un bac de 100 T 1. Cet Avis d’appel d’offres fait suite à l’Avis Général de Passation des Marchés paru dans le journal « le soleil » du 29 janvier 2013. 2. La Direction des Routes agissant au nom et pour le compte du Ministère des Infrastructures, des Transports Terrestres et du Désenclavement a obtenu du Budget d’Investissement de l’Etat du Sénégal au titre de la gestion 2014 des fonds afin de financer la fourniture d’un bac de 100T. 3. La Direction des Routes sollicite des offres sous pli fermé de la part de candidats éligibles et répondant aux qualifications requises pour la fourniture d’un bac de 100T. 4. La passation du Marché sera conduite par Appel d’Offres International ouvert tel que défini dans le Code des Marchés publics, et ouvert à tous les candidats éligibles. 5. Les candidats intéressés peuvent obtenir des informations auprès du Directeur des Routes et prendre connaissance des documents d’Appel d’offres les jours ouvrables de 8 heures à 17 heures à l’adresse mentionnée ciaprès : Direction des Routes, sise à Ex Camp Lat Dior Dakar. Tel : 00221 33 822 07 78 Boite Postale: 240 Dakar Peytavin seynabou.ba1@mit.gouv.sn ou mahmoutte.ndiaye@mit.gouv.sn 6. Les exigences en matière de qualification sont : a. Disposer de liquidités ou d’une attestation de capacité financière émise par une institution financière d’un montant au moins égal à 350 millions F CFA, afin de prendre en compte les coûts d’acquisition des fournitures nécessaires à la construction des équipements et de leur transport jusqu’à la destination finale. b. Disposer d’un chiffre d’affaires moyen annuel pour les cinq dernières années (2008, 2009, 2010, 2011 et 2012) d’un montant au moins égal à 2 500 000 000 F CFA ;
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Apporter la preuve par la production des états financiers certifiés des dites années. c. avoir réalisé à la satisfaction des clients au cours des quinze dernières années trois marchés de nature et de complexité similaire (bac à fond plat de 70T au moins) ; d. Disposer au Sénégal, soit directement ou par l’intermédiaire d’une représentation locale, d’une entité navale en mesure de prendre en charge le service après vente et d’assurer la disponibilité des pièces de rechange. Voir le Dossier d’Appel d’Offres pour les autres informations. 7. Les candidats intéressés peuvent obtenir un dossier d’Appel d’offres complet en formulant une demande écrite à l’adresse mentionnée ci-après : Direction des Routes, sise à Ex Camp Lat Dior Dakar contre un paiement non remboursable de 25 000 FCFA (Vingt Cinq mille francs CFA). Le mode de paiement sera par espèces. 8. Les offres portant la mention : « Fourniture d’un bac de 100T » devront être soumises à l’adresse précitée au plus tard le 07 janvier 2014 à 10 heures. Les offres remises en retard ne seront pas acceptées. L’ouverture des plis aura lieu le même jour à 10 heures 00 mn, dans la Salle de réunion de la Direction des Routes, sise à Ex Camp Lat Dior, en présence des représentants des candidats. Les offres doivent comprendre une garantie de soumission d’un montant de 30 000 000 FCFA, valables vingt huit (28) jours après expiration de la durée de validité de l’offre. Les offres devront demeurer valides pendant une durée de 90 jours à compter de la date limite de dépôt des offres. Le Directeur des routes Marième Ndoye DECRAENE
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Recrutement - Appel d’offres
Ministère des Infrastructures et des Transports Terrestres et du Désenclavement - Direction des Routes
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Annonces classées RÉPUBLIQUE ISLAMIQUE DE MAURITANIE HONNEUR - FRATERNITÉ - JUSTICE
MINISTÈRE DU PÉTROLE, DE L’ÉNERGIE ET DES MINES
AVIS D’APPEL D’OFFRE INTERNATIONAL
Le Ministère chargé des Mines lance un appel d’offres international portant sur le développement du gisement de Bofal Loubbeira situé dans les Wilayas (Régions) du Gorgol et du Brakna ; Ledit projet concerne un gisement de phosphate, ayant fait l’objet de travaux de recherche dans les années passées avant de faire 1’objet d’un permis d’exploitation, attribué par décret n° 2011-007, en date du 02 janvier 2011. Suite à l’expiration de la période allouée au développement du projet qui est prévue par l’article 47 de la Loi minière, ledit permis d’exploitation a été annulé. Une zone spéciale issue de celle du gisement en question a été constatée et délimitée par décret lors du Conseil des Ministres en date du 10 Octobre 2013 et ce, conformément aux dispositions de 1’article 35 du Code minier. Le DAO relatif à ce permis peut être retiré au niveau de la Direction des Mines contre une quittance prouvant le paiement du montant de trois cent mille Ouguiya au compte spécial n° 933.65 intitulé « Contribution des opérateurs miniers à la promotion de la recherche minière en Mauritanie » ouvert au Trésor Public. Le Dossier d’Appel d’Offres comportera les éléments suivants : - les coordonnées UTM et la superficie de la zone ; - le décret instituant la zone spéciale ; - les critères d’évaluation et de qualification retenus ; - les documents afférents aux études antérieures relatives au projet. Les offres doivent être remises sous pli fermé à l’adresse ci-dessous le 16 décembre 2013 à 12 heures, heure locale. Les offres reçues après le délai fixé seront rejetées. Les plis seront immédiatement ouverts en présence des représentants des soumissionnaires qui décident d’assister à la séance d’ouverture. Cette séance d’ouverture aura lieu à l’adresse ci-après : Direction des Mines Ministère du Pétrole de 1’Energie et des Mines ; Route de la plage rond-point Sabah, Nouakchott Mauritanie, BP : 4921, Té1: 00(222) 45259515 - Fax : 00 (222) 45255250 ; E-mail: o.diagan@yahoo.fr
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Appel d’offres
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MINISTÈRE DU PÉTROLE, DE L’ÉNERGIE ET DES MINES
AVIS D’APPEL D’OFFRE INTERNATIONAL
Le Ministère chargé des Mines lance un appel d’offres international portant sur le développement d’un gisement de Quartz situé dans la Wilaya de Dakhlet Nouadhibou. Ledit projet porte sur un gisement de Quartz de haute pureté mis en évidence par des travaux d’exploration avant de faire l’objet d’un permis d’exploitation par décret n° 2010-224 du 26 octobre 2010 à la société MMC S.A. Suite à l’expiration de la période allouée au développement du projet qui est prévue par l’article 47 de la Loi minière, ledit permis d’exploitation a été annulé. Une zone spéciale issue de celle du gisement en question a été constatée et délimitée par décret lors du Conseil des Ministres en date du 10 Octobre 2013 et ce, conformément aux dispositions de 1’article 35 du Code minier. Le DAO relatif à ce permis peut être retiré au niveau de la Direction des Mines contre une quittance prouvant le paiement du montant de trois cent mille Ouguiya au compte spécial n° 933.65 intitulé « Contribution des opérateurs miniers à la promotion de la recherche minière en Mauritanie » ouvert au Trésor Public. Le Dossier d’Appel d’Offres comportera les éléments suivants : - les coordonnées UTM et la superficie de la zone ; - le décret instituant la zone spéciale ; - les critères d’évaluation et de qualification retenus ; - les documents afférents aux études antérieures relatives au projet. Les offres doivent être remises sous pli fermé à l’adresse ci-dessous le 16 décembre 2013 à 12 heures, heure locale. Les offres reçues après le délai fixé seront rejetées. Les plis seront immédiatement ouverts en présence des représentants des soumissionnaires qui décident d’assister à la séance d’ouverture. Cette séance d’ouverture aura lieu à l’adresse ci-après : Direction des Mines Ministère du Pétrole de 1’Energie et des Mines ; Route de la plage rond-point Sabah, Nouakchott Mauritanie, BP : 4921, Té1: 00 (222) 45259515 - Fax : 00 (222) 45255250 ; E-mail : o.diagan@yahoo.fr N° 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
JEUNE AFRIQUE
Annonces classées
MINISTÈRE DES TRANSPORTS --------------PORT AUTONOME D’ABIDJAN
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RÉPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE UNION - DISCIPLINE - TRAVAIL
AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL PORT AUTONOME D’ABIDJAN N° T 329 / 2013 1. Le Port Autonome d’Abidjan (dénommé ci-après L’Emprunteur), a obtenu de la Banque Ouest Africaine pour le Développement (BOAD) (dénommée ci-après et dans tout le dossier " la Banque ") un prêt pour financer le projet de remblaiement de la baie de Biétry. L’Emprunteur a l’intention d’utiliser une partie du montant de ce prêt pour effectuer des paiements autorisés au titre du marché (ci-après dénommé le Marché) pour lequel le présent appel d’offre est lancé. 2. Le Port Autonome d’Abidjan sollicite des offres sous pli fermé de la part de candidats éligibles et répondant aux qualifications requises pour réaliser le projet de remblaiement de la baie de Biétry. Ces travaux constituent un lot unique. 3. La passation du marché sera conduite par Appel d‘offres international tel que défini dans le Code des Marchés publics à l’article 56, et ouvert à tous les candidats éligibles.
contre un paiement non remboursable de Cinq Cent mille (500 000) francs CFA : 7. La méthode de paiement sera le paiement en espèces ou par un chèque certifié. Le document d’Appel d’offres devra être retiré auprès du Service Marchés de la Direction des Marchés du Port Autonome d’Abidjan. 8. Les offres devront être soumises à l’adresse ci-après : la salle de Conférence de la Direction des Participations et de la privatisation, Tour Administrative C, 14ème étage, Plateau, au plus tard le 07/01/2014 à 9 heures 00 GMT. Les offres remises en retard ne seront pas acceptées. Les offres seront ouvertes à la date indiquée ci-dessus soit le 07/01/2013, en présence des représentants des candidats présents à l’adresse ci-après : la salle de Conférence de la Direction des Participations et de la Privatisation, Tour Administrative C, 14ème étage, Plateau. 9. Le délai d’exécution des travaux objet du présent appel d’offre international est de Six (06) mois.
DIRECTION GÉNÉRALE DU PORT AUTONOME D’ABIDJAN - DIRECTION DES MARCHÉS Zone portuaire, Angle du Boulevard du Havre 22 rue des piroguiers - Boîte Postal V 85 – ABIDJAN Tél. : (225) 21 23 85 30 /83 92) Ancienne Direction Générale du Port Autonome d’Abidjan, Bât Scaf 3, porte 011 (Voir le Chef de Service Marchés)
10. Les offres doivent comprendre un cautionnement provisoire établi par une banque, un organisme financier ou un tiers agréé par le ministre chargé des finances de l’espace UEMOA, d’un montant de Cent Cinquante Millions (150 000 000) de Francs CFA. Les soumissionnaires resteront engagés par leur offre pendant un délai de 180 jours à compter de la date limite de dépôt des offres.
et prendre connaissance des documents d’Appel d’offres à l’adresse mentionnée ci-dessus indiquée du lundi au vendredi : 8 h 30 à 11 h 30 et de 13 h 30 à 16 h.
11. Dès la validation de la décision d’attribution du (ou des) marché(s), l'autorité contractante publiera dans le Bulletin Officiel des Marchés Publics et par voie d'affichage dans ses locaux, la décision d'attribution et tiendra à la disposition des soumissionnaires, le rapport d'analyse de la commission de jugement des offres, ayant guidé ladite attribution à l’adresse ci-après :
5. Les exigences en matière de qualifications sont : • le cautionnement provisoire : 150 000 000 F CFA • le préfinancement (pour les nouvelles entreprises de moins de dix-huit (18) mois) : 10 000 000 000 F CFA • les projets similaires : Travaux de remblaiement ou de dragage. 6. Les candidats peuvent retirer le Dossier d’Appel d’Offres à l’adresse mentionnée ci-après : DIRECTION GÉNÉRALE DU PORT AUTONOME D’ABIDJAN - DIRECTION DES MARCHÉS Zone portuaire, Boulevard du Havre 22 rue des piroguiers - Boîte Postal V 85 – ABIDJAN Tél. : (225) 21 23 85 30 /83 92 Ancienne Direction Générale du Port Autonome d’Abidjan, Bât Scaf 3, porte 011 (Voir le Chef de Service Marchés)
JEUNE AFRIQUE
DIRECTION GÉNÉRALE DU PORT AUTONOME D’ABIDJAN - DIRECTION DES MARCHÉS Zone portuaire, Boulevard du Havre 22 rue des piroguiers - Boîte Postal V 85 – ABIDJAN 12. Les marchés issus du présent Appel d’offres international seront soumis aux formalités de timbres d’enregistrement et à la redevance de régulation (0,5% du montant hors taxe du marché) aux frais des titulaires. 13. Le présent appel d’offres international est soumis aux lois et règlements en vigueur en Côte d’Ivoire, notamment au Décret N° 2009-259 du 06 août 2009, portant Code des Marchés Publics et ses textes d’application. N° 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Appel d’offres
4. Les candidats intéressés peuvent obtenir des informations auprès de :
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Annonces classées RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE
UNITÉ-DIGNITÉ-TRAVAIL
APPEL D’OFFRES POUR L’OBTENTION D’UN PERMIS D’EXPLOITATION ET D’AMÉNAGEMENT EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Afin de mieux valoriser le potentiel forestier national, le Ministère des Eaux, Forêts, Chasse et Pêche procède au lancement d’un Appel d’Offres pour cinq (5) Concessions Forestières appelées Permis d’Exploitation et d’Aménagement (PEA) ci-après décrites: Zone A : Le Permis d’Exploitation et d’Aménagement dénommé PEA A est constitué d’un seul lot et est situé à cheval sur les préfectures de la Mambéré-Kadei et de la Sangha Mbaéré. La superficie totale est de 229 025 ha dont 204.695 ha de superficie utile estimée. Zone B : Le Permis d’Exploitation et d’Aménagement dénommé PEA B est constitué d’un seul lot et est situé entièrement dans la sous-préfecture de Nola dans la région de Salo. La superficie totale est de 211.155 ha dont 192.033 ha de superficie utile estimée. Zone C : Le Permis d’Exploitation et d’Aménagement dénommé PEA C est constitué d’un seul lot, situé dans la souspréfecture de Bayanga, préfecture de la Sangha Mbaéré. La superficie totale est de 234.465 ha dont 192.986 ha de superficie utile estimée. Zone D : Le Permis d’Exploitation et d’Aménagement dénommé PEA D est constitué d’un seul lot, situé dans la préfecture de la Sangha-Mbaéré. La superficie totale est 326.048 ha dont 294.478 de superficie utile estimée. Zone E : Le Permis d’Exploitation et d’Aménagement dénommé PEA E est constitué d’un seul lot et est situé dans la préfecture de l’Ombella M’poko. La superficie totale est de 156.531 ha dont 88.547 ha de superficie utiles. Le présent Appel d’Offres vise à sélectionner les entreprises forestières devant être attributaires de l’un des PEA cités ci-dessus. Elles sont donc invitées à soumettre une offre technique et financière pour l’exploitation de l’un des PEA mis en concurrence. Afin d’aider les soumissionnaires à formuler leur offre, le présent dossier d’appel d’offre comprend les documents suivants : 1. l’Avis d’Appel d’Offres, 2. les Instructions aux Soumissionnaires, 3. les données particulières d’Appel d’Offres, 4. le modèle de la convention provisoire d’exploitation et d’aménagement et du cahier de charge provisoire, 5. les formulaires obligatoires du dossier de soumission. 6. le rapport de prospection du PEA. Ces dossiers sont à retirer auprès du Directeur Général des Eaux, Forêts, Chasse et Pêche à Bangui moyennant le paiement des frais de dossiers. Il est à noter que le coût de préparation des offres et les coûts liés aux Dossiers d’Appel d’Offres ne sont pas remboursables. Les offres doivent être déposées ou envoyées par courrier rapide à l’adresse suivante : A l’attention du Directeur Général des Eaux, Forêts, Chasse et Pêche, Ministère des Eaux, Forêts, Chasse et Pêche, B.P. 830 Bangui, République Centrafricaine au plus tard le jeudi 19 décembre 2013 à 10 heures 00 soit 9 heures 00 GMT. Les plis seront ouverts le jeudi 19 décembre 2013 à 12 heures 00, en présence des soumissionnaires ou de leur représentant dûment mandaté qui souhaitent être présents à l’ouverture, et en présence de l’Observateur Indépendant recruté à cet effet. Le Ministre des Eaux, Forêts, Chasse et Pêche Rizigala RAMADANE
UNION AFRICAINE
AFRICAN UNION
UNIÃO AFRICANA
SUPPLY AND DELIVERY OF MEDICAL EQUIPMENT 62/MSD/13 1. The African Union has allocated funds for the procurement of the above mentioned goods and ancillary services, and now invites sealed bids from eligible bidders for the supply of Medical Equipment and Accessories. 2. Bidding is open to all eligible bidders who can demonstrate at least 5 years’ experience in supplying similar goods, have a manufacturer’s authorisation in the case of dealers, and are duly incorporated as firms. 3. Interested bidders may obtain the detailed bid document on the African Union website: http://www.au.int/en/bids. Clarifications and additional details can be obtained from the address given below. 4. Bids must be delivered to the address below on or before 1500 hours on Friday 12 December 2013. Bids will be opened on the 12th of December 2013, immediately after deadline for submission of bids, in the presence of bidders or bidders’ representatives who choose to attend, at the address below. Late bids will be rejected and returned unopened to bidders. 5. Bids CLEARLY marked “62/MSD/13: “SUPPLY AND DELIVERY OF MEDICAL EQUIPMENT” should be addressed to: The Chairperson, AUC Tender Board The African Union Headquarters 3rd Floor, Building C, TENDER BOX Roosevelt Street, Addis Ababa Ethiopia -P. O. Box 3243 Tel: +251 11 551 7700 ext. 4341, Fax:+251 11 551 0442 Email: tender@africa-union.org
Appel d’offres
Banque des Etats de l’Afrique Centrale - Services Centraux Commission ad hoc du marché
Appel d’offres international ouvert n° 14/BEAC/DGEFRI-DOF/AOIO/Bien/2013 du 21 octobre 2013 pour le remplacement du système d’enregistrement des appels téléphoniques de la Salle des Marchés
La Banque des Etats de l’Afrique Centrale envisage d’acquérir, sur ressources propres, une solution intégrée pour l’enregistrement des appels de sa Salle des Marchés. A cet effet, elle invite, par le présent avis d’appel d’offres, les entreprises remplissant les conditions requises, à présenter une offre. Le processus se déroulera conformément à la procédure d’appel d’offres international ouvert, définie par le Code des marchés et le Manuel de procédures de gestion des marchés de la BEAC. Les entreprises intéressées peuvent obtenir un complément d’information et examiner le dossier d’appel d’offres à l’adresse ci-dessous, entre 9 heures et 12 heures, les jours ouvrés. BANQUE DES ETATS DE L’AFRIQUE CENTRALE Services Centraux, 736 Avenue Monseigneur Vogt Secrétariat Général, DOAAR-CGAM, 14ème étage, Porte 1412 ! : 1917 Yaoundé - CAMEROUN " : (237) 22 23 40 30 ; (237) 22 23 40 60 poste 5431 # : (237) 22 23 33 29 @ : cgam.scx@beac.int Le dossier d’appel d’offres rédigé en français peut être acheté et retiré à l’adresse indiquée ci-dessus, moyennant le paiement d’un montant non remboursable de XAF 200 000 (deux cent mille) ou EUR 306 (trois cent six). Le paiement devra être effectué en N° 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
espèces aux guichets de la BEAC, à l’exception de son Bureau de Paris, et par virement bancaire pour les candidats situés hors de la zone CEMAC. La participation au présent appel d’offres est conditionnée par ledit paiement. Les soumissions conformes au règlement particulier de l’appel d’offres et obligatoirement accompagnées d’une garantie de Soumission conforme au modèle indiqué et équivalente à 3% du montant de l’offre, devront être déposées à l’adresse indiquée ci-après, au plus tard le vendredi 29 novembre 2013 à 12 heures précises. BANQUE DES ETATS DE L’AFRIQUE CENTRALE Services Centraux, 736 Avenue Monseigneur Vogt Bureau d’Ordre, 15ème étage, Porte 15.01 ! : BP 1917 Yaoundé - CAMEROUN Les offres reçues hors délai seront rejetées. Les plis seront ouverts en une seule étape, en présence des représentants des Soumissionnaires dûment mandatés qui souhaitent assister à la séance d’ouverture le vendredi 29 novembre 2013 à 13 heures précises, heure locale, aux Services Centraux de la BEAC à Yaoundé. Le Président de la Commission ad hoc JEUNE AFRIQUE
Annonces classées
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APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL POUR LA SÉLECTION D’UN CABINET INTERNATIONAL POUR L’AUDIT COMPTABLE ET FINANCIER DE LA SUBVENTION BEN-304-G04-M 1. La soumission du Bénin pour la composante Paludisme-Round 3 au Processus de reconduction des subventions du Fonds Mondial a été approuvée pour six années, d’Octobre 2009 à Septembre 2015. Le bénéficiaire principal de cette subvention est Africare-Bénin. Les objectifs de cette soumission intitulée Projet d’Intensification de la Lutte contre le Paludisme au Bénin sont :
dossier d’Appel d’Offres ou en faire la demande par mail à compter du 18 novembre 2013 à l’adresse suivante : Africare-Bénin lot L26, quartier les Cocotiers Tel : 21 30 90 12 - Fax : 21 30 42 32 Email : africare.benin@africare.org Cotonou (République du Bénin)
• Amener 90% de la population du Benin, en particulier les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes, à dormir sous MIILD d’ici à 2015. • Amener 90% des enfants de moins de 5 ans ayant de la fièvre à recevoir 4. La soumission comprendra une offre technique (la proposition technique et les pièces administratives) et une offre financière placées sous plis une prise en charge correcte dans la communauté dans 20 ZS d’ici à 2015. séparés scellés, et devra parvenir à l’adresse sus-citée, au plus tard • Assurer la référence de 90% des cas de paludisme grave identifiés dans le 19 décembre 2013 à 10 h 00 mn précises. la communauté vers les centres de référence dans 20 ZS. • Amener 90% des femmes enceintes à respecter le calendrier CPN afin de Les enveloppes intérieures doivent êtres scellées et marquées conformérecevoir les doses requises de SP dans le cadre du TPI dans 20 ZS. ment aux instructions dans le dossier d’Appel d’Offres. Par conséquent, Africare-Bénin ne pourra être tenu pour responsable au cas où ces Par le présent Avis d’Appel d’Offre International,Africare-Bénin envisage de enveloppes seraient égarées ou ouvertes de ce fait. sélectionner un Cabinet d’Expertise Comptable internationalement reconnu pour réaliser l’audit comptable et Financier de cette subvention. La période d’audit sous revue est du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012. 5. Les offres resteront valides pendant les quatre vingt dix (90) jours suivant la date de remise des offres fixée par Africare-Bénin. Une offre dont la durée de validité est inférieure à ces 90 jours, sera susceptible d’être 2. La participation à la concurrence est ouverte à égalité de condition à tous rejetée pour non conformité. les cabinets d’expertise comptables, d’audits comptables et financiers. Fait à Cotonou, le 13 novembre 2013 3. Les cabinets d’expertise comptables, d’audits comptables et financiers La Directrice Pays, intéressés par le présent Appel d’Offres peuvent retirer gratuitement le Josette Vignon Makong
AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL
Le Dossier d’Appel d’Offres (DAO) peut être consulté sur le site web de l’ASECNA (www.asecna.aero) et retiré contre le paiement obligatoire d’une somme non remboursable de Cinquante Mille (50.000) Francs CFA, soit Soixante Seize Euros et Vingt Deux centimes (76,22 €) à partir du 18 Novembre 2013 au Département Ingenierie et Prospective de l’ASECNA à Dakar, Aéroport Léopold Sédar SENGHOR, Dakar-Yoff (Sénégal), à la Délégation de l’ASECNA à Paris - 75, Rue de la Boétie 75008 Paris Cedex 08 (France) ou dans les Représentations de l’ASECNA auprès des Etats membres. La date limite de remise des offres au Département Ingénierie et Prospective (ASECNA), Aéroport Léopold Sédar SENGHOR, Dakar-Yoff (Sénégal), est fixée au 09 Janvier 2014 à 11 heures, heure locale (GMT). Aucune offre arrivée hors délai ne sera acceptée. L’ouverture des plis en séance publique devant les soumissionnaires (ou leurs représentants) qui le désirent, aura lieu le même jour (09 Janvier 2014) à 12 heures, heure locale (GMT). Le Directeur Général JEUNE AFRIQUE
MINISTÈRE DE LA DÉFENSE NATIONALE
AVIS DE REPORT DE L’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL N° 01/EMAM/2013 Le Ministère de la Défense Nationale informe que la date limite de l’Appel d’Offres International n° 01/EMAM/2013 pour la vente d’un bateau de plaisance, est reportée pour le 22 Novembre 2013. Pour plus de renseignements veuillez consulter le site web : http://www.defense.tb/allyssasite
N° 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Appel d’offres
L’Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) lance un Appel d’Offres international pour l’Acquisition de Caisses de Secours à Personnes destinées à ses SapeursPompiers d’Aérodrome.
RÉPUBLIQUE TUNISIENNE
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Annonces classées Banque des Etats de l’Afrique Centrale - Services Centraux Commission ad hoc du marché
Avis de sélection internationale ouverte n° 16/BEAC/DGE-DIPG/SIO/CC/2013 du 6 novembre 2013 pour l’assistance à la maîtrise d’ouvrage des projets immobiliers de la Banque Centrale
La Banque des Etats de l’Afrique Centrale envisage de dynamiser, sur ressources propres, sa gestion des projets immobiliers. A cet effet, elle invite, par le présent avis de sélection, les cabinets remplissant les conditions requises, à présenter une offre. Le processus se déroulera conformément aux dispositions du Code des marchés et du Manuel de procédures de gestion des marchés de la BEAC. Les cabinets intéressées peuvent obtenir un complément d’information, consulter et acheter le dossier de sélection rédigé en français à l’adresse ci-dessous, entre 9 heures et 12 heures, les jours ouvrés, contre la somme non remboursable de XAF 200 000 ou EUROS 305. BANQUE DES ETATS DE L’AFRIQUE CENTRALE SERVICES CENTRAUX Secrétariat Général – DOAAR-CGAM, 14ème étage, porte 1412 ! : 736 Avenue Monseigneur Vogt - BP 1917 Yaoundé - CAMEROUN " : (237) 22 23 40 30 ; (237) 22 23 40 60 poste 5412 # : (237) 22 23 33 29 @ : cgam.scx@beac.int
Le paiement devra être effectué en espèces aux guichets de la BEAC ou par virement bancaire. La participation à la présente sélection est conditionnée par ledit paiement. Les soumissions conformes au règlement particulier de la sélection devront être déposées à l’adresse indiquée ci-après, au plus tard le jeudi 12 décembre 2013 à 12 heures. BANQUE DES ETATS DE L’AFRIQUE CENTRALE SERVICES CENTRAUX BUREAU D’ORDRE 15ème étage, porte 15.01 736 Avenue Monseigneur Vogt ! : BP 1917 Yaoundé - CAMEROUN Les offres reçues après le délai fixé seront rejetées. Les plis seront ouverts en deux (02) étapes en présence des représentants dûment mandatés des soumissionnaires qui souhaitent assister aux séances d’ouverture. Les dossiers administratifs et techniques seront ouverts le jeudi 12 décembre 2013 à 13 heures 00 aux Services Centraux de la BEAC à Yaoundé et les dossiers financiers à une date qui sera communiquée ultérieurement.
Avis de sélection
Banque des Etats de l’Afrique Centrale - Services Centraux Commission ad hoc du marché
Avis de sélection internationale ouverte n° 17/BEAC/DGE-DIPG/SIO/CC/2013 du 8 novembre 2013 pour la revue des textes régissant la passation des marchés à la BEAC
La Banque des Etats de l’Afrique Centrale envisage de dynamiser, sur ressources propres, sa gestion des projets immobiliers. A cet effet, elle invite, par le présent avis de sélection, les cabinets remplissant les conditions requises, à présenter une offre. Le processus se déroulera conformément aux dispositions du Code des marchés et du Manuel de procédures de gestion des marchés de la BEAC. Les cabinets intéressés peuvent obtenir un complément d’information et consulter le dossier de sélection rédigé en français à l’adresse ci-dessous, entre 9 heures et 12 heures, les jours ouvrés. BANQUE DES ETATS DE L’AFRIQUE CENTRALE SERVICES CENTRAUX Secrétariat Général, DOAAR-CGAM, 14ème étage, Porte 1412 ! : 736 Avenue Monseigneur Vogt - BP 1917 Yaoundé - CAMEROUN " : (237) 22 23 40 30 ; (237) 22 23 40 60 poste 5412 # : (237) 22 23 33 29 @ : cgam.scx@beac.int Les soumissions conformes au règlement particulier de la sélection devront être déposées à l’adresse indiquée ci-après, au plus tard le vendredi 20 décembre 2013 à 12 heures. BANQUE DES ETATS DE L’AFRIQUE CENTRALE SERVICES CENTRAUX BUREAU D’ORDRE 15ème étage, porte 15.01 736 Avenue Monseigneur Vogt ! : BP 1917 Yaoundé - CAMEROUN Les offres reçues après le délai fixé seront rejetées. Les plis seront ouverts, en deux étapes, en présence des représentants des soumissionnaires dûment mandatés qui souhaitent assister aux séances d’ouverture. Les dossiers administratifs et techniques seront ouverts le vendredi 20 décembre 2013 à 13 heures 00 aux Services Centraux de la BEAC à Yaoundé et les dossiers financiers à une date qui sera communiquée ultérieurement.
N° 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
JEUNE AFRIQUE
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RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO - MINISTÈRE DES RESSOURCES HYDRAULIQUES ET ÉLECTRICITÉ - SOCIÉTÉ NATIONALE D’ÉLECTRICITÉ (SNEL) sarl
APPEL À LA MANIFESTATION D’INTÉRÊT N° Avis : AMI/003/PMEDE/SNEL/DG/CDP/CPM/KNF/2013/SC Pays : République Démocratique du Congo (RDC) - Source de financement : Don IDA H296 - ZR - Banque mondiale Nom du Projet : Projet de Développement des Marchés d’Electricité pour la Consommation Domestique et à l’Export (PMEDE) Service de consultants : Recrutement d’un Consultant (Cabinet) chargé de mener des études analytiques relatives aux solutions d’éclairage hors réseau électrique (Lighting Africa) en République Démocratique du Congo Date de publication : Le 15 novembre 2013 (date de publication dans DgMarket) 1. Contexte (organisation, domaine d’intervention, etc.) des candidats intéressés, leurs références pertinentes en Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo (RDC) sollicite un financement de adéquation avec la présente mission ainsi que la disponibilité des connaissances nécessaires parmi le l’Association Internationale de Développement (IDA) en vue de financer le Projet de développement personnel (joindre les CV pertinents) qualifié pour la mission. des marchés d’électricité pour la consommation domestique et à l’export (PMEDE), et a l’intention Il est porté à l’attention des Consultants que les dispositions du paragraphe 1.9 des « Directives : d’utiliser une partie du montant pour les services de consultant (cabinet) chargé de mener des Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale dans le cadre des études analytiques relatives aux solutions d’éclairage hors réseau électrique (Lighting Africa) Prêts de la BIRD et des Crédits et Dons de l’AID » (Edition mai 2004, révisée en octobre 2006, mai en République Démocratique du Congo. 2010 et janvier 2011). [(« Directives de Consultants »), relatives aux règles de la Banque mondiale en C’est dans ce contexte que le Gouvernement de la République Démocratique du Congo, soutenu par matière de conflit d’intérêts sont applicables. Veuillez noter les dispositions additionnelles suivantes la Banque mondiale, envisage d’améliorer les conditions de vie de sa population en recourant aux relatives au conflit d’intérêts dans le cadre des Services objet de la présente Sollicitation de manifesservices d’un consultant en vue de catalyser le marché commercial des lampes solaires photo- tation d’intérêt : Les consultants ne doivent pas être engagés pour des missions qui seraient incomvoltaïques agréées par le programme « Lighting Africa ». Le consultant recherché sera chargé de patibles avec leurs obligations présentes ou passées envers d’autres clients ou qui risqueraient de les mener des études analytiques relatives au marché des solutions d’éclairage hors réseau élec- mettre dans l’impossibilité d’exécuter leur tâche au mieux des intérêts de l’Emprunteur. trique (Lighting Africa) en République Démocratique du Congo. Les Consultants peuvent s’associer avec d’autres firmes pour renforcer leurs compétences respectives Lighting Africa est une initiative conjointe de la Banque mondiale et de la Société Financière en la forme d’un groupement solidaire ou d’un accord de sous-traitant. Internationale qui s’appuie sur le secteur privé pour promouvoir la fourniture des services d’éclairage Un consultant sera sélectionné selon la méthode de sélection fondée sur la qualité et le coût (SFQC) de haute qualité hors réseau au bénéfice des ménages et des services collectifs des populations défa- telle que décrite dans les procédures définies dans les Directives « Sélection et Emploi de Consultants vorisées, en partenariat avec les gouvernements des pays bénéficiaires. par les Emprunteurs de la Banque mondiale » (Edition mai 2004, révisée en octobre 2006, mai 2010 2. Objectif et janvier 2011). La mission du consultant consiste à mener les études et analyses techniques nécessaires en rapport 5. Information et soumission de dossier de candidature avec le développement de la composante d’éclairage hors-réseau (appuyé par le programme Lighting Les cabinets intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de Africa) dans les quartiers de la province de Kinshasa ciblées par le PMEDE. référence à l’adresse ci-dessous et aux heures suivantes de 9h00 à 16h00 (heure locale). La durée des prestations du consultant est estimée à 3 mois maximum. Les manifestations d’intérêt rédigées en langue française doivent parvenir, par courrier ou par La société Nationale d’Electricité (SNEL), par l’entremise de la Coordination des projets (CDP/SNEL), e-mail, à l’adresse ci-dessous au plus tard le jeudi 12 décembre 2013 et porter clairement la meninvite les candidats admissibles, des cabinets, à manifester leur intérêt à fournir les services décrits ci- tion « AMI/003R/PMEDE/SNEL/DG/CDP/CPM/KNF/2013/SC– Services de Consultant (cabinet) dessus. chargé de l’élaboration des études analytiques relatives au marché des solutions d’éclairage 3. Qualifications du Consultant hors réseau électrique (Lighting Africa) en République Démocratique du Congo ». Les consultants intéressés doivent fournir les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exéSociété Nationale d’Electricité (SNEL) - Coordination des Projets (CDP) cuter les services [brochures, références concernant l’exécution de contrats analogues, expérience A l’attention de Monsieur MASOSO Bumba, Coordonnateur des Projets/SNEL dans les conditions semblables, disponibilité des connaissances nécessaires parmi le personnel (joinAvenue le Marinel n° 06, Immeuble le Marinel, dre les CV pertinents), etc.]. Les consultants peuvent s’associer pour renforcer leurs compétences Quartier Lemera - Kinshasa / Gombe - République Démocratique du Congo respectives. Tél : (00243)81 7005428 ; (00243) 81 0040030 - E-mail : cdp.snel@yahoo.fr 4. Méthode sélection Le Coordonnateur des Projets SAPMP &PMEDE Les critères d’évaluation des manifestations d’intérêt prendront en compte l’Expérience générale MASOSO BUMBA
RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO - MINISTÈRE DES RESSOURCES HYDRAULIQUES ET ÉLECTRICITÉ - SOCIÉTÉ NATIONALE D’ÉLECTRICITÉ (SNEL) sarl
1. Contexte Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo (RDC) sollicite un financement de l’Association Internationale de Développement (IDA) en vue de financer le Projet de développement des marchés d’électricité pour la consommation domestique et à l’export (PMEDE), et a l’intention d’utiliser une partie du montant pour les services de consultant (cabinet) chargé de l’acquisition, la distribution et le suivi-évaluation de 25 000 lampes solaires agréées par Lighting Africa dans la province ville de Kinshasa, ainsi que de la campagne de sensibilisation et de l’éducation des consommateurs de la SNEL. C’est dans ce contexte que le Gouvernement de la République Démocratique du Congo, soutenu par la Banque mondiale, envisage d’améliorer les conditions de vie de sa population en recourant aux services d’un consultant en vue de catalyser le marché commercial des lampes solaires photovoltaïques agréées par le programme « Lighting Africa ». Le consultant (cabinet) recherché sera chargé de l’acquisition, la distribution, et le suivi-évaluation de 25 000 lampes solaires agréées par Lighting Africa dans la province ville de Kinshasa, ainsi que d’une campagne de sensibilisation et de l’éducation des consommateurs de la SNEL. 2. Objectif Les services requis du consultant consistent principalement en l’acquisition, la distribution et le suivi et évaluation de 25 000 lampes agréées par Lighting Africa dans la ville province de Kinshasa, ainsi qu’à mener une campagne de sensibilisation et de l’éducation des consommateurs. La distribution visera les établissements scolaires (professeurs et élèves), les professionnels de la santé (médecins, infirmières, sages femmes, les leaders et agents sociaux dans les communes cibles). Cette activité a pour but de permettre aux consommateurs de s’approprier du bénéfice desdites lampes afin de stimuler la demande sur le marché commercial. La durée des prestations du consultant est de 3 mois. La Société Nationale d’Electricité (SNEL), par l’entremise de la Coordination des projets (CDP/SNEL), invite les candidats admissibles, des cabinets, à manifester leur intérêt à fournir les services décrits cidessus. 3. Qualifications du Consultant Les consultants intéressés doivent fournir les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exécuter les services [brochures, références concernant l’exécution de contrats analogues, expérience dans les conditions semblables, disponibilité des connaissances nécessaires parmi le personnel (joindre les CV pertinents), etc.]. Les consultants peuvent s’associer pour renforcer leurs compétences respectives. 4. Méthode sélection Les critères d’évaluation des manifestations d’intérêt prendront en compte l’Expérience générale JEUNE AFRIQUE
(organisation, domaine d’intervention, etc.) des candidats intéressés, leurs références pertinentes en adéquation avec la présente mission ainsi que la disponibilité des connaissances nécessaires parmi le personnel (joindre les CV pertinents) qualifié pour la mission. Il est porté à l’attention des Consultants que les dispositions du paragraphe 1.9 des « Directives : Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale dans le cadre des Prêts de la BIRD et des Crédits et Dons de l’AID » (Edition mai 2004, révisée en octobre 2006, mai 2010 et janvier 2011). [(« Directives de Consultants »), relatives aux règles de la Banque mondiale en matière de conflit d’intérêts sont applicables. Veuillez noter les dispositions additionnelles suivantes relatives au conflit d’intérêts dans le cadre des Services objet de la présente Sollicitation de manifestation d’intérêt : [Les consultants ne doivent pas être engagés pour des missions qui seraient incompatibles avec leurs obligations présentes ou passées envers d’autres clients ou qui risqueraient de les mettre dans l’impossibilité d’exécuter leur tâche au mieux des intérêts de l’Emprunteur]. Les Consultants peuvent s’associer avec d’autres firmes pour renforcer leurs compétences respectives en la forme d’un groupement solidaire ou d’un accord de sous-traitant. Un consultant sera sélectionné selon la méthode de sélection fondée sur la qualité et le coût (SFQC) telle que décrite dans les procédures définies dans les Directives « Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale » (Edition mai 2004, révisée en octobre 2006, mai 2010 et janvier 2011). 5. Information et soumission de dossier de candidature Les cabinets intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence à l’adresse ci-dessous et aux heures suivantes de 9h00 à 16h00 (heure locale). Les manifestations d’intérêt rédigées en langue française doivent parvenir, par courrier ou par e-mail, à l’adresse ci-dessous au plus tard le jeudi 12 décembre 2013 et porter clairement la mention « AMI/004/PMEDE/SNEL/DG/CDP/CPM/KNF/2013/SC– Services de Consultant (cabinet) chargé de l’acquisition, la distribution, et le suivi-évaluation de 25 000 lampes solaires agréées par Lighting Africa dans la province-ville de Kinshasa, ainsi que de la campagne de sensibilisation et de l’éducation des consommateurs de la SNEL ». Société Nationale d’Electricité (SNEL) - Coordination des Projets (CDP) A l’attention de Monsieur MASOSO Bumba, Coordonnateur des Projets/SNEL Avenue le Marinel n° 06, Immeuble le Marinel, Quartier Lemera Kinshasa / Gombe - République Démocratique du Congo Tél : (00243)81 7005428 ; (00243) 81 0040030 E-mail : cdp.snel@yahoo.fr Le Coordonnateur des Projets SAPMP &PMEDE MASOSO BUMBA N° 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
Manifestation d’intérêt
APPEL À LA MANIFESTATION D’INTÉRÊT
N° Avis : AMI/004/PMEDE/SNEL/DG/CDP/CPM/KNF/2013/SC - Pays : République Démocratique du Congo (RDC) Source de financement : Don IDA H296 - ZR - Banque mondiale Nom du Projet : Projet de Développement des Marchés d’Electricité pour la Consommation Domestique et à l’Export (PMEDE) Service de consultants : Recrutement d’un consultant (cabinet) chargé de l’acquisition, la distribution, et le suivi-évaluation de 25 000 lampes solaires agréées par Lighting Africa dans la province-ville de Kinshasa, ainsi que d’une campagne de sensibilisation et de l’éducation des consommateurs de la SNEL Date de publication : Le 15 novembre 2013 (date de publication dans DgMarket)
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Annonces classées RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO - MINISTÈRE DES RESSOURCES HYDRAULIQUES ET ÉLECTRICITÉ SOCIÉTÉ NATIONALE D’ÉLECTRICITÉ (SNEL) sarl
APPEL À LA MANIFESTATION D’INTÉRÊT N° Avis : AMI 005/PMEDE/CGI3/SNEL/DG/CDP/CPM/JSNM/2013/SC Pays : République Démocratique du Congo (RDC) Source de financement : Don IDA H7080- ZR - Banque mondiale Nom du Projet : Projet de Développement des Marchés d’Electricité pour la Consommation Domestique et à l’Export (PMEDE) Service de consultants : Recrutement d’un Consultant (Cabinet) chargé de la réalisation d’études complémentaires et d’une assistance technique à CGI3 pour la structuration et le développement du projet Inga 3 Basse Chute (Inga 3 BC) en République Démocratique du Congo.
Manifestation d’intérêt
Date de publication : Le 15 novembre 2013 (date de publication dans DgMarket) Contexte Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo (RDC) a commandité en 2010 une étude de faisabilité portant sur le développement du site hydroélectrique d’Inga et des interconnexions électriques associées. Cette étude a notamment porté sur les caractéristiques de la première phase de développement du projet Grand Inga, également dénommée INGA 3 basse chute (BC) qui comprendrait les ouvrages principaux suivants : • Une prise d’eau latérale sur le fleuve et un canal de transfert (12,1 km) ; • Un barrage en Béton Compacté au Rouleau (BCR) sur la vallée de la Bundi d’une centaine de mètres de haut ; • Une centrale hydroélectrique visant une puissance garantie de l’ordre de 4 200 MW ; • Une ligne en courant continu de 1 700 km en 800 kV reliant la centrale à Kolwezi en province du Katanga et une ligne de Kolwezi à la frontière avec la Zambie dont les caractéristiques restent à déterminer; • Deux postes sur le site d’Inga, à savoir (i) un poste redresseur pour la ligne en courant continu CC d’environ 4 180 MW, (ii) un poste en courant alternatif (AC) pour le sud du pays dont la taille reste à optimiser ; et (ii) un poste onduleur à Kolwezi. Une cellule est chargée de coordonner le développement du projet pour le compte de la RDC, à savoir CGI 3. Suite à plusieurs ateliers sur le projet INGA 3 BC et au paraphe d’un traité international entre la RDC et la République Sud-Africaine, il a été convenu de réaliser des études complémentaires d’urgence destinées à accompagner CGI3 et le gouvernement de la RDC dans le développement et la structuration de ce projet. Objet de la mission Le Consultant sera chargé de : • Réaliser les études complémentaires les plus urgentes afin d’approfondir l’étude de faisabilité de Grand Inga et de répondre aux besoins de la RDC pour le développement d’Inga 3 BC, en particulier en vue de la confirmation de la répartition de la demande et des lignes associées. • Réaliser une étude tarifaire afin de confirmer la compétitivité d’INGA 3 BC par rapport aux projets alternatifs, et d’appuyer la préparation des négociations à venir de la RDC avec les futurs acheteurs. • Accompagner en assistance technique le gouvernement de RDC, représenté par CGI 3, dans les choix stratégiques qu’il devra opérer amené et dans le dialogue et les négociations avec les parties prenantes pour la structuration et le développement d’INGA 3 BC. Profil du consultant Le Consultant sera une firme ayant conduit des missions similaires, ou y ayant été associée, et disposant d’une excellente connaissance de la RDC et de son secteur énergétique. Le Consultant devra justifier avoir étudié au minimum 2 (deux) projets hydroélectriques de plus de 1000 MW et démontré une expérience confirmée dans les lignes CC et AC de très haute tension. L’équipe proposée doit disposer de compétences dans les domaines suivants : production et transport d’énergie, gestion de grands projets d’infrastructure, économie et tarification, stratégie, droit, finance, mise en place de partenariats public-privé, négociation de contrats d’achat d’énergie et relations internationales. Tous les experts devront avoir la maîtrise de la langue française. Le Consultant proposera un personnel capable de couvrir l’ensemble des domaines d’expertise indiqués dans le descriptif de la mission. Les membres principaux de l’équipe experts devront produire la preuve d’au moins dix années d’expérience dans leur domaine d’expertise. Critères de qualification Les consultants intéressés doivent fournir les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exécuter les services décrits ci-dessus : qualification de la firme dans le domaine de la mission, domaines de compétence (domaine et nombre d’années d’expérience), expériences similaires, capacités techniques et managériales de la firme, qualifications et expériences du personnel clé, disponibilité du personnel clé à réaliser leurs missions respectives. Méthode de sélection Les critères d’évaluation des manifestations d’intérêt prendront en compte l’Expérience générale (organisation, domaine d’intervention, etc.) des candidats intéressés, leurs références pertinentes en adéquation avec la présente mission ainsi que la disponibilité des connaissances nécessaires parmi le personnel (joindre les CV pertinents) qualifié pour la mission. Il est porté à l’attention des Consultants que les dispositions du paragraphe 1.9 des « Directives : Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale dans le cadre des Prêts de la BIRD et des Crédits et Dons de l’AID » (Edition mai 2004, révisée en octobre 2006, et mai 2010), relatives aux règles de la Banque mondiale en matière de conflit d’intérêts sont applicables. Un Consultant sera sélectionné selon la méthode fondée sur la qualité et coût (SFQC) telle que décrite dans les Directives précitées de Consultants. Information et soumission de dossier de candidature Les Consultants intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires à l’adresse ci-dessous et aux heures suivantes de 9 heures à 17 heures (heure locale). Les manifestations d’intérêt rédigées en langue française doivent parvenir, par courrier ou e-mail, à l’adresse ci-dessous au plus tard jeudi 12 décembre 2013 et porter clairement la mention « AMI 005/PMEDE/CGI3/SNEL/DG/CDP/CPM/JSNM/2013/SC» Consultant (cabinet) chargé de la réalisation d’études complémentaires et d’une assistance technique à CGI3 pour la structure et développement du projet Inga 3 Basse Chute (Inga3 BC). Société Nationale d’Electricité (SNEL) - Coordination des Projets (CDP) A l’attention de Monsieur MASOSO Bumba, Coordonnateur des Projets/SNEL Avenue le Marinel n° 06, Immeuble le Marinel, Quartier Lemera - Kinshasa / Gombe - République Démocratique du Congo Tél : (00243)81 7005428 ; (00243) 81 0040030 - E-mail : cdp.snel@yahoo.fr Le Coordonnateur des Projets SAPMP &PMEDE MASOSO BUMBA
N° 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
JEUNE AFRIQUE
Annonces classées
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MINISTÈRE DE L’ÉCONOMIE FORESTIÈRE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE CRÉDIT N° 5121-CG Unité de Coordination du Projet - B.P 14564 Brazzaville, République du Congo, Tel : 05 616 95 74/06 817 06 33, Courriel : pfdecongo2011@yahoo.com
AVIS À MANIFESTATION D’INTÉRÊT N°008/MEFDD-CAB/PFDE/AMI/13 « Recrutement d’un consultant individuel international assisté d’un consultant individuel local chargés de l’élaboration des textes d’application de la loi forestière y compris ceux relatifs à la réglementation des plantations privées » 1. Le Gouvernement de la République du Congo a obtenu auprès de l’Association Internationale de Développement (IDA) un Crédit (n°5121-CG) pour financer les activités du Projet Forêt et Diversification Economique (PFDE), et a l’intention d’utiliser une partie du montant dudit Crédit pour financer les services de consultants ci-après : Elaboration des textes d’application de la loi forestière y compris ceux relatifs à la réglementation des plantations privées. 2. L’Unité de coordination du PFDE, chargée par le Ministère de l’Economie Forestière et du Développement Durable de la mise en œuvre dudit projet, invite les candidats intéressés à manifester leur intérêt pour les services décrits ci-dessus et à fournir les informations indiquant qu’ils ont la capacité technique d’exécuter lesdits services (qualifications, expérience professionnelle dans le domaine, missions similaires exécutées,…). 3. Les consultants seront sélectionnés conformément aux Directives de la Banque « Sélection et Emploi des Consultants par les Emprunteurs de la Banque Mondiale de janvier 2011 » par comparaison de CV. 4. Les consultants désireux d’obtenir des informations complémentaires peuvent s’adresser à l’Unité de Coordination du PFDE, à l’adresse ci-dessous, les jours ouvrables. Les Termes de Références peuvent être consultés à la même adresse. 5. Les manifestations d’intérêt doivent être déposées sous pli fermé ou en version électronique à l’adresse ci-dessous, au plus tard, le 09/12/2013 à 16 heures 00 minutes à l’adresse ci-après : PROJET FORÊT ET DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE UNITÉ DE COORDINATION DU PROJET Case J-142/V, OCH Moungali III, Brazzaville, République du Congo, Tel : (242) 05 616 95 74/06 817 06 33 - Courriel : pfdecongo2011@yahoo.com Brazzaville, le 14 Novembre 2013, le Coordonnateur du PFDE, Fidèle NKOUNKOU
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Vous & nous
Le courrier des lecteurs Envoyez-nous vos réactions, vos réflexions, vos coups de gueule ou de cœur à redaction@jeuneafrique.com ou au 57 bis, rue d’Auteuil, 75016 Paris.
M23 La RD Congo reconnaissante APRÈS MOULT TRAC TATIONS et négociations, la plus importante rébellion de l’est de la RD Congo a été stoppée. La triple approche gouvernementale (diplomatique, guerrière et politique) a donc finalement payé. Toutefois, le mérite n’en revient pas au seul président congolais Joseph Kabila.
L’ensemble de la communauté internationale, qui s’est fortement impliquée dans la recherche d’une solution, doit être remerciée. Qu’un hommage spécial soit rendu aux soldats de terrain, en particulier à ceux qui sont morts pour une cause juste. Je pense aux trois soldats tanzaniens tombés loin de leur patrie. l KAKEL MBUMB, Lubumbashi, RD Congo
Racisme 1 Taubira, comme Yaya Touré… MALIGNECOMMEUN SINGE, Taubira retrouve la banane ». Ce titre de l’hebdomadaire français Minute a suscité la réprobation quasi unanime du microcosme politique français. Tout en partageant cette réprobation, il n’est peut-être pas superflu de se demander si la réaction ne provoque pas l’action. En effet,
Lettres à BBY Pas d’accord avec vous BBY JE NE PARTAGE PAS VOTRE ANALYSE dans l’édito intitulé « Les “sous-off” du terrorisme » (J.A. n° 2757, du 10 au 16 novembre). Que vous ne soyez pas d’accord avec Ennahdha est votre droit absolu, et que vous le critiquiez car vous estimez que ce SAHEL LA GUERRE DE L’OMBRE parti fait des erreurs est votre droit aussi! Mais vous devez selon Comment en est-on arrivé là ? moi assumer votre choix et non pas dénigrer ce parti en feignant une espèce de neutralité et en vous cachant p J.A. n° 2757, du 10 derrière les au 16 novembre 2013. attentats du 11 Septembre alors que toute la lumière sur ces attentats n’a pas encore été faite et qu’à ce jour le procès de cette affaire aux États-Unis n’a encore rien donné. l Hebdomadaire international indépendant • 54e année • no 2757 • du 10 au 16 novembre 2013
MAROC UBU JUGE
ALGÉRIE BOUTEFLIKA ET LES GÉNÉRAUX DOSSIER TÉLÉCOMS
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BENJELLOUN ABDELMAJID, Casablanca, Maroc
Guinée-Conakry DANS VOTRE ÉDITORIAL INTITULÉ « L’opération Vautour » (J.A. n° 2753, du 13 au 19 octobre), vous écrivez : « La loi-cadre de Gaston Defferre fut N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
promulguée en juin 1956 ; le discours de Brazzaville du général de Gaulle, prononcé en août 1958 ; l’indépendance du Congo ex-belge, proclamée en 1960. Dans la foulée, les anciennes colonies françaises du Sud-Sahara ainsi que Madagascar recouvrèrent leur souveraineté, prélude à la libération des colonies portugaises. » Je crois qu’avant que le Congo ex-belge proclame son indépendance en 1960, la Guinée de Sékou Touré était déjà indépendante depuis 1958. En ignorant ce détail de l’Histoire – par inadvertance ou à dessein –, vous donnez raison à ceux qui vous soupçonnent d’avoir toujours détesté Sékou Touré. L’Histoire doit être fidèlement relatée, sans censure et sans états d’âme. l MANZO L. CAMUS, Bruxelles, Belgique.
Réponse : Je vous remercie, Monsieur, de me rappeler – ainsi qu’à nos lecteurs – l’indépendance de la Guinée en septembre 1958. Avant le Congo ex-belge et avant les autres anciennes colonies françaises du Sud-Sahara. C’était là, de ma part, un très regrettable oubli : détester Sékou Touré ou plus exactement ce qu’il est peu à peu devenu, un tyran sanguinaire, ne justifie pas d’oublier que son pays, par sa décision, a été indépendant dès 1958. l BÉCHIR BEN YAHMED
MEUNIER AURELIEN/SIPA
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p La garde des Sceaux française, le 30 sept. 2013.
lors d’un match de football opposant le CSKA Moscou à Manchester City, certains supporteurs locaux ont eu des gestes à caractère raciste à l’égard du joueur Yaya Touré. Pourtant,cesmêmessupporteursadulentleursjoueursnoirs que sont Seydou Doumbia et AhmedMusa.Enréalité,déroutésparletalentdeYayaTouré,ils cherchaientpartouslesmoyens à le déstabiliser. C’est la même chose pour Christiane Taubira, qui a porté le projet de loi sur le mariage pour tous. Cela étant, il faudrait peut-être essayer la solution qui consiste à ignorer les agissements de ce genre d’individus:ilstirentleurplaisir de la souffrance qu’expriment leurs victimes. l JEAN-MARIE TOURÉ, Bonoua, Côte d’Ivoire.
Racisme 2 Madame Taubira… JE SUIS ORIGINAIRE du Cameroun, un pays d’Afrique dont je me rends compte qu’il n’est pas parmi les plus sauvages du monde. Parce que chez nous, on n’embête personne à cause de la couleur de sa peau. Pourtant, vous êtes belle. À vous écouter, vous êtes très intelligente, et, véritablement, un être humain au-dessus de la moyenne. Je me faisais une plus haute idée de votre pays. Certains de vos compatriotes pensent que le mienestforcémentdemoindre JEUNE AFRIQUE
Vous nous
civilisation que le vôtre ; nous n’avons pas grand moyen de les empêcher de le croire. Mais si vous veniez chez nous, vous verriez ce qu’est la fraternité, au milieu de vos millions de frères et sœurs. À l’Assemblée nationaleetdansnosquartiers, on vous embrasserait. Parce que, chez nous, nul ne doute quevoussoyezunêtrehumain. Vous ne méritez pas ces insultes qui salissent plus ceux qui les profèrent. l PARFAIT NKOULOU MFOULOU, Yaoundé, Cameroun
Prêts Brazza bailleur de fonds d’Abidjan QUE LE CONGO prête 100 milliards de francs CFA (152,5 millions d’euros) à la Côte d’Ivoire dans le cadre de la coopération Sud-Sud (juin 2013) n’a rien de
choquant en soi : on ne prête qu’aux riches. Abidjan est riche, entre autres, de sa réputation, car elle fait partie des trois pays africains où l’environnement des affaires est le plus favorable, selon le classement Doing Business 2014. Sauf que… les besoins du Congo sont énormes. Ainsi, les anciens salariés de la compagnie Air Afrique attendent depuis onze ans le règlement de leurs droits sociaux et de leurs indemnités de licenciement, pour un montant évalué à 17 milliards de francs CFA. De même, des propriétaires dépossédés de leurs terrains sur le site de Kintélé dans la banlieue nord de Brazzaville sont contraints d’organiser des sit-in pour se faire entendre. l CYPRIEN LAMBERT KIBANGOU, Brazzaville, Congo
Cannabis Utile légalisation AU MAROC,onparlebeaucoup de la proposition du PartiAuthenticitéetModernité (PAM) de légaliser la culture du cannabis à des fins industrielles et pharmaceutiques. Une culture jusqu’ici illégale, mais dans laquelle le royaume s’est fait expert et trouve une source non négligeable de revenus en commercialisant les psychotropes qu’il en tire. Considérant que la répression n’était pas une réponse appropriée au regard de la faible dangerosité du produit, des pays en ont légalisé la production et la consommation : les Pays-Bas et, plus récemment, certains États des États-Unis. Le Maroc pourrait s’inspirer de cet exemple, des
années d’arrachage et de surveillance n’étant jamais parvenues à endiguer la culture du cannabis. Celle du cannabis industriel se révélera toujours beaucoup moins lucrative que celle du récréatif, et il est vain de penser que l’une pourra se substituer à l’autre. En légalisant et en encadrant la production du kif et du haschich, le Maroc pourrait ainsi lutter plus efficacement contre la criminalité du secteur, contrôler son développement et s’assurer de très juteuses rentrées fiscales tout en mettant fin à une relative hypocrisie des autorités. Mais est-ce que le conservatisme local pourrait s’en accommoder ? Rien n’est moins sûr. l ZIAD HAMAMI, Sousse, Tunisie
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HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL POLITIQUE, ÉCONOMIE, CULTURE
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Post-scriptum Tshitenge Lubabu M.K.
Fondé à Tunis le 17 oct. 1960 par Béchir Ben Yahmed (54e année) Édité par SIFIJA Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS Tél. : 01 44 30 19 60 ; Télécopieurs : rédaction : 01 45 20 09 69 ; ventes : 01 45 20 09 67 ; Courriel : redaction@jeuneafrique.com DIRECTION
Parole de macaque
V
OUS LE SAVEZ DÉJÀ, la négresse Christiane Taubira, ministre française de la Justice, est l’objet d’attaques immondes de la part de certains esprits étroits qui prennent un plaisir sadique à la traiter de « guenon ». Comme vous le savez, nous sommes bien en France, au XXIe siècle. La bêtise serait-elle héréditaire ? Avant d’y répondre, laissez-moi vous raconter une petite histoire. C’était un après-midi, il y a de cela quelques années. Un documentaire animalier m’avait retenu devant le petit écran. Un groupe de singes jouait dans une vallée, en Asie. Soudain, un tigre surgit, prêt à les dévorer. À sa vue, mes cousins primates (indigène du Congo belge, j’étais traité de macaque par le colon) se passèrent le mot et, en un cri deux mouvements, ils se retrouvèrent sur la crête d’un rocher. Ensuite, unis comme un seul homme, pardon, comme un seul singe, ils ramassèrent des cailloux et se mirent à caillasser sans ménagement le pauvre félin. Dégoûté par cette résistance inattendue, le tigre fila à toute vitesse et disparut dans la broussaille. Parole de macaque, ces cousins me parurent plus intelligents et plus courageux que n’importe quel humain « civilisé », fût-il docteur en Sorbonne. Revenons à la négresse Taubira, devenue guenon par la grâce de ceux qui se gavent de chimères en s’imaginant que, sans eux, le monde ne serait plus le monde. Ceux qui enseignent la haine et l’arrogance à leur progéniture. Ceux qui s’étranglent d’indignation chaque fois que les descendants de ceux que leurs ancêtres, du haut de leur suffisance, traitaient de sauvages, osent avoir voix au chapitre. Ceux qui prétendent défendre les valeurs de leur république mais crachent sur sa devise : « Liberté, égalité, fraternité ». Parce qu’il s’agit d’une négresse, les défenseurs de ces prétendues valeurs sont devenus subitement aphones. Vous l’avez vu de vos propres yeux. Par deux fois à l’Assemblée nationale, alors que les députés socialistes acclamaient, debout, la négresse Taubira, ceux de droite sont restés honteusement assis. Comme s’ils craignaient de se compromettre. Ces lâches, je le crois, jubilaient quand l’apartheid régnait en Afrique du Sud. Ils applaudissaient lorsque l’Africain-Américain était traqué comme du gibier, sans droits, sans rien, lynché par des brutes au nom de la « suprématie blanche ». À l’instar de Langston Hughes, grand poète américain qui souffrit du racisme dans son pays, Taubira a le droit de dire aux quatre vents : « Moi aussi je suis la France ! » À moins que…
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Les masques sont tombés. Mais à ceux qui sont méprisés, on dit avec une mauvaise foi nauséabonde : « Le racisme n’existe pas en France. Vous faites du racisme anti-Blancs, de la victimisation. » À tous les hypocrites, à tous les lâches, à tous les paternalistes qui ont oublié les souffrances infligées à l’humanité depuis des siècles par les tenants de la « supériorité raciale du Blanc », j’adresse ces vers de Senghor : « Ah ! Seigneur, éloigne de ma mémoire la France qui n’est pas la France, ce masque de petitesse et de haine sur le visage de la France / Ce masque de petitesse et de haine pour qui je n’ai que haine […]. » Et ceux de Césaire : « Il n’est point vrai que l’œuvre de l’homme est finie […] / et aucune race ne possède le monopole de la beauté, de l’intelligence, de la force […]. » l
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N O 2758 • DU 17 AU 23 NOVEMBRE 2013
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