DOSSIER SANTÉ L’AFRIQUE AU BANC C D’ESS D’ESSAI SAI
NUMÉRO DOUBLE
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 50e ANNÉE • N° 2588-2589 • du 15 au 28 août 2010
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EN VENTE DEUX SEMAINES
CÔTE D’IVOIRE, GUINÉE, NIGER, CENTRAFRIQUE, RD CONGO… Enfin le temps des élections ? MAURITANIE MOHAMED OULD ABDELAZIZ PARLE MAROC-ESPAGNE GUÉGUERRE ET PAIX BÉNIN OBJECTIF 2011 Spécial 24 pages
GABON ALI BONGO ONDIMBA L’INTERVIEW VÉRITÉ Premier bilan, opposition, réformes, critiques, voisins, Omar Bongo, Sarkozy, Mohammed VI… Le chef de l’État dit tout. ÉDITION INTERNATIONALE ET AFRIQUE SUBSAHARIENNE France 6 € • Algérie 320 DA • Allemagne 8 € • Autriche 8 € • Belgique 6 € • Canada 11,90 $ CAN • Danemark 60 DKK • DOM 6 € Espagne 7,20 € • Finlande 8 € • Grèce 8 € • Italie 7,20 € • Maroc 40 DH • Mauritanie 2000 MRO • Norvège 70 NK • Pays-Bas 7,20 € Portugal cont. 7,20 € • RD Congo 11 $ US• Royaume-Uni 6 £ • Suisse 11,80 FS • Tunisie 6 DT • USA 13 $ US • Zone CFA 3200 F CFA • ISSN 1950-1285
TRAVAILLER SUR DES VACCINS POUR ENFANTS. Pfizer, premier investisseur mondial privé en sciences de la vie, se mobilise pour que la santé d’âge en âge devienne une réalité pour tous. Aujourd’hui, beaucoup de décès d’enfants en bas âge sont évités grâce aux nombreux vaccins préventifs. C’est pourquoi, nous travaillons inlassablement pour apporter des vaccins à chaque enfant, leur offrant ainsi une immunité face aux maladies infectieuses qui peuvent leur être fatales.
LA SANTÉ D’ÂGE EN ÂGE. En partenariat avec des organismes institutionnels, privés et associatifs, Pfizer s’engage à promouvoir la maîtrise par chacun de son capital santé et le développement de son potentiel vital tout au long de sa vie. Pfizer Afrique de L’Ouest, une usine de Production, un centre de Logistique et de Distribution de médicaments au service de l’Afrique. BP 3857 Dakar RP, Sénégal, Tel:+221 33 839 84 84.
Ensemble, œuvrons pour un monde en meilleure santé®
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DOSSIER
DE JEUNE AFRIQUE
SANTÉ
ENJEUX
Un marché comme un autre ? CONFRONTÉE À DES DÉFIS SANITAIRES MAJEURS, L’A FRIQUE ATTIRE TOUJOURS PLUS D’INVESTISSEMENTS. MÉDICAMENTS, FORMATION, INFRASTRUCTURES... LES GROUPES PRIVÉS JOUENT UN RÔLE PRÉPONDÉRANT DANS LE DÉVELOPPEMENT DU
SECTEUR DE LA SANTÉ.
MICHAEL PAURON
L
ALEXANDRE DUPEYRON
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Des laboratoires pharmaceutiques jusqu’aux blocs opératoires, les entreprises commerciales sont, de plus en plus, mises à contribution. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 5 8 8 - 2 5 8 9 • D U 15 A U 2 8 A O Û T 2 0 10
appel au marché conclu en juin par l’un des trois plus gros opérateurs hospitaliers sud-africains, Life Healthcare International Limited (63 hôpitaux en Afrique du Sud et au Botswana), qui a conduit à une valorisation du groupe coté sur la place de Johannesburg à 1,5 milliard d’euros, illustre l’appétence croissante des investisseurs privés pour le secteur de la santé en Afrique. Celui-ci représente, selon le cabinet d’études Merrill Lynch, les investissements les plus prometteurs derrière les infrastructures et les télécoms. La première puissance mondiale ne s’y est d’ailleurs pas trompée : un rapport remis en 2009 par des patrons américains au président des États-Unis, Barack Obama, demande à son administration « d’étendre son soutien à l’implication du secteur privé dans la prise en charge médicale en Afrique, d’encourager les investissements dans la santé et d’élargir les programmes de santé
112 DOSSIER SANTÉ internationaux du gouvernement ». Il y a des parts de marché à prendre : à l’horizon 2016, le marché global de la santé en Afrique sera multiplié par deux, pour atteindre quelque 35 milliards de dollars (environ 27 milliards d’euros). PAS DE LIMITES
La présence du secteur privé est déjà une réalité : au moins la moitié de l’offre de santé en Afrique subsaharienne lui est imputable. Et malgré la méfiance du secteur public à l’évocation d’entreprises commerciales – soupçonnées de privilégier les profits au détriment du bien-être – dans le domaine de la santé, l’Afrique est loin d’être le seul continent a y avoir massivement recours : en Inde, le privé représente 80 % des ser vices de soins ambulatoires et 60 % des soins en hospitalisation. La Chine elle-même a décidé de faire appel aux investisseurs privés pour atteindre ses objectifs en termes de santé publique (accès aux soins pour tous les Chinois). Dans son étude « Investir dans la santé en Afrique », la Société financière internationale (SFI, bras armé de la Banque mondiale pour financer le secteur privé) évalue à 30 milliards de dollars d’ici à 2016 les besoins d’investissements et indique que les deux tiers proviendront du secteur privé. Qu’il s’agisse des infrastructures et de la fourniture de soins (voir pp. 120121), de la fabrication et de la distribution de médicaments (voir pp. 116117 et p. 127), des assurances ou encore de la formation (voir pp. 128129), les entreprises commerciales seront mises à contribution dans tous les domaines. Seules ou en partena-
riats – public-privé ou avec de grands bailleurs de fonds (voir pp. 114-115) –, il n’y a pas de limites aux flux financiers. « Le monde n’a aucune chance de résoudre le problème global de la santé si nous ne pouvons pas tous travailler ensemble », assure d’ailleurs le vice-président des affaires extérieures de Merck, Jeff Sturchio. Le troisième groupe pharmaceutique mondial s’est notamment distingué lors de son partenariat avec la fondation Bill & Me l i nda Gate s au Botswana (programme Achap, doté de 50 millions de dollars) qui a per mis de réduire le taux de prévalence du VIH/sida chez les adultes de 37 % en 2002 à 24 % aujourd’hui. Et les investisseurs peuvent attendre de substantiels revenus : les réseaux de centres de soins primaires et secondaires à but non lucratif, comme le Christian Health Association (Kenya), AAR Clinic (Éthiopie), ou encore Clinic Africa (Ouganda), affichent des chiffres d’affaires annuels allant jusqu’à 300 000 dollars par établissement, pour un investissement n’excédant pas 600 000 dollars. Et que dire des petits centres haut de gamme qui peuvent générer 10 millions de dollars de chiffre d’affaires annuel pour un investissement trois fois inférieur ?
développement (BAD) ait décidé d’allouer, en avril, 10 millions de dollars au Fonds d’investissement pour la santé en Afrique (Investment Fund for Health in Africa, IFHA). Basé à Maurice et soutenu par la banque Goldman Sachs et par Pfizer, le numéro un mondial de l’industrie pharmaceutique, ce fonds a pour objectif d’investir dans 15 à 25 entreprises
La branche médicale de General Electric mise sur des partenariats public-privé.
INVESTIR DANS LES PME
Par ailleurs, selon le cabinet afric a i n Per for ma nces Ma nagement Consulting (PMC), « l’intervention du secteur privé rassure et facilite la levée de fonds ». Rien d’étonnant, de fait, que la Banque africaine de
GRAND-MESSE DE L’OMS À MALABO DU 30 AOÛT AU 3 SEPTEMBRE, la soixantième session du comité régional Afrique de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) réunira les ministres de la Santé de 46 pays, à Malabo, en Guinée équatoriale. Agences onusiennes, bailleurs de fonds et ONG se joindront eux aussi aux 500 participants attendus. Au menu : approbation du budget et des programmes de travail de l’organisation. Titillée par les nouveaux acteurs comme les fondations Bill Clinton ou Bill & Melinda Gates, mais aussi par la remise en question des politiques de santé qui peinent à convaincre, l’OMS tente de renforcer son rôle de « leader » et veut faire de la santé une politique centrale des gouvernements. Accès aux soins, développement des infrastructures, formation, politiques publiques… Autant de thèmes qui devront faire l’objet d’un engagement de chacun des membres. ■ M.P.
de taille moyenne à fort potentiel de croissance, dans les domaines de l’offre pharmaceutique, de l’assurance santé, des centres de soins privés ou des laboratoires. Illustration probante, aussi, avec le groupe français Sanofi-Aventis, qui emploie déjà 4 250 personnes sur le continent et possède six usines (Maroc, Algérie, Tunisie, Sénégal, Égypte, Afrique du Sud). Ou encore avec le fabricant de matériels GE Healthcare (branche médicale de General Electric) qui prévoit de doubler ses investissements en Afrique à travers des partenariats public-privé. Quant au l ab or atoi r e a ng lo - a mé r ic a i n GlaxoSmithKline (GSK), il investira plus de 97 millions de dollars dans les dix ans. Mais le dynamisme des privés ne doit pas cacher une certaine réalité : taux de mortalité infantile le plus élevé au monde, continent le plus touché par le sida avec 65 % des cas, et des Objectifs du millénaire pour le développement qui ne seront pas atteints à l’échéance de 2015… « D’une manière générale, le secteur privé ne se développe pas assez en concertation avec les politiques publiques », explique Philippe Renault, chargé de mission au département santé de l’Agence française du développement (AFD), qui appuie le secteur à travers notamment des prêts bonifiés directs ou via des banques locales. « Le secteur doit être mieux encadré et mieux régulé », poursuitil. Le marché de la santé en Afrique a de quoi aiguiser l’appétit d’acteurs en recherche de croissance. Reste au continent à s’assurer qu’elle se fera dans l’intérêt de tous. ■
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Communiqué
A
u cours des dernières années, de grands progrès ont été accomplis en Afrique dans le domaine de la santé. L’espérance de vie a augmenté de façon significative et tout est mis en œuvre pour tenter de diminuer la mortalité infantile. La santé demeure un défi permanent et de nombreux acteurs publics et privés se mobilisent pour y faire face.
Parmi eux, la Société Française d’Equipement Hospitalier (SFEH) dirigée par sa Présidente Mme Georgette Ortega, poursuit depuis 25 ans avec détermination et compétence son action en améliorant les structures de santé des pays émergents et en particulier ceux du continent africain où elle a déjà réalisé de multiples projets (www.sfeh.com). Dans les pays où elle intervient SFEH met en place des
solutions rapides et durables avec les autorités nationales et elle entretient des rapports de confiance fondés sur l’expérience, l’écoute et le partenariat avec les responsables locaux.
surera l’autonomie de l’Hôpital en fluides médicaux. La pérennité des équipements sera garantie par une société tchadienne de maintenance.
Dernier né des grands projets réalisés par SFEH : l’Hôpital Moderne de N’Djamena qui sera livré fin 2011. Cette structure située à l’est de N’Djamena dans le quartier de Ndjari développera une superficie de 14 000 m2.
Au sein de ce programme soulignons l’effort des Autorités de ce Pays en matière de Formation médicale : Actuellement, un groupe de professionnels de santé (médecins, infirmiers, techniciens d’imagerie médicale, techniciens de maintenance) sont en cours de formation dans le cadre de programmes spécifiques d’acquisition des compétences dans les spécialités médicales qui seront prises en charge à l’hôpital Moderne. Ces médecins et agents paramédicaux Tchadiens sont actuellement formés dans des structures en France, à Monaco et au Maghreb afin de préparer les équipes médicales et de maintenance à l’ouverture de ce Grand Hôpital.
Véritable concentré de technologie avec 180 lits (extensible à 240), tous les services modernes de santé dont 5 blocs opératoires de Haut Niveau, une grande unité de dialyse rénale, des services d’imagerie médicale bien équipés, cet hôpital sera l’un des plus modernes d’Afrique. De plus, la réalisation d’une centrale de production d’oxygène as-
À moyen terme l’Hôpital Moderne de N’Djamena poursuivra cette collaboration avec ces Hôpitaux de référence, et le Centre Scientifique de Monaco à travers des partenariats inter hospitaliers qui permettront des échanges de praticiens et un support diagnostique pour les patients hospitalisés à N’Djamena grâce à la télémédecine. L’Entrée de l’hôpital Moderne de N’Djamena.
Cet ambitieux programme hospitalier s’inscrit dans la volonté du Président Idriss Déby Itno d’accomplir son vœu le plus cher : donner la possibilité à la population Tchadienne d’avoir accès à « La Santé pour Tous ». 3, avenue du Président Wilson, 75116 Paris France / Tél: +33 1 45 05 15 43 - Fax: +33 1 45 05 15 33 - www.sfeh.com
114 DOSSIER SANTÉ AIDE AU DÉVELOPPEMENT
La culture du résultat, panacée des bailleurs de fonds A PRÈS DES DÉCENNIES D’INVESTISSEMENTS PRODUISANT PEU OU PAS D’EFFETS, LES STRUCTURES INTERNATIONALES ONT ADOPTÉ UNE STRATÉGIE CIBLÉE, FONDÉE SUR LES BESOINS DU TERRAIN ET DES OBJECTIFS QUANTIFIÉS. ET ÇA MARCHE. grammes sectoriels de la Banque mondiale (BM) entre 2001 et 2008. Résultat: laisser le service public gérer les fonds de la BM a été un échec. En outre, alors que l’Afrique recense 40 % des décès mondiaux de tuberculose, moins de 1 % des fonds affectés à la santé par la BM concerne cette pathologie, pourtant priorité affichée de la Banque. Et sur 15 projets étudiés, seuls 3 incluaient des indicateurs de progrès dans le diagnostic et le traitement de la tuberculose.
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BULLETIN D’ABONNEMENT
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L
a petite révolution a été initiée au début des années 2000. Estce dû à l’arrivée de personnalités comme Bill Gates et Bill Clinton aux commandes d’instruments financiers puissants ? Ou au terrible constat d’échec après des années de financements, dont deux rapports publiés en 2010 témoignent avec force? Le premier, « Aid without impact », financé par la Fondation Bill & Melinda Gates (voir ci-contre), a évalué les pro-
Le second rapport a mis en exergue la politique inadéquate du programme Stratégie accélérée pour la survie et le développement de l’enfant (SASDE), mené entre 2001 et 2005 pour 18,6 millions d’euros, et financé par l’Unicef et le gouvernement canadien (bailleur principal). Manque de personnel formé, priorités du terrain ignorées… L’étude a révélé que de meilleurs résultats avaient été atteints dans les zones non couvertes par le SDAE. L’Unicef a immédiatement annoncé modifier son mode d’action. Et d’autres bailleurs lui ont emboîté le pas. De fait, les financements à la santé répondent désormais à des objectifs quantifiés et à des obligations de résultats. Ils sont gérés comme des investissements entrepreneuriaux.
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DOSSIER 115
LA BANQUE MONDIALE S’Y MET
En 2002, à l’initiative de Kofi Annan – alors à la tête des Nations unies – et du G8, a été créé le Fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose, trois pandémies tuant 15 000 personnes par jour. Les projets sont soumis à un conseil scientifique, les enveloppes sont distribuées par
Au Botswana, le programme antisida a été géré comme une entreprise. tranches, et lorsque les objectifs fixés ne sont pas atteints, le financement est suspendu jusqu’à ce qu’un audit indépendant garantisse à nouveau l’efficience. Michel Kazatchkine, son directeur, rappelle ainsi que « la tolérance zéro s’applique. Récemment, le Mali a vu son aide suspendue, après un détournement constaté en novembre 2009 ». L’exemple de la lutte contre le paludisme est des plus flagrants : alors que cette maladie tuait de 1 million à 2 millions de personnes par an, le financement ciblé a permis de réduire les décès
liés à la maladie de moitié en trois ans en Éthiopie, de deux tiers en Zambie, et 65 % des foyers nigériens sont équipés de moustiquaires imprégnées. Ces résultats encourageants ont poussé la BM à adopter une démarche équivalente. Depuis 2005, son engagement est guidé par le Plan d’action pour l’Afrique (PAA), actuellement en cours
de révision. Objet d’une large consultation, cette redéfinition vise à modifier la conception et la mise en œuvre des opérations, décentraliser le personnel… Avec pour objectif de déterminer comment répondre efficacement aux impératifs du continent, et produire la version 2.0 de l’aide au développement. ■ JULIETTE BASTIN
À lui seul, le fondateur de Microsoft investit autant que l’OMS dans la santé. MAX LAUTENSCHLAEGER/VISUM-REA
Fers de lance de cette nouvelle politique, les organismes privés : Bill et Melinda Gates, ou la Fondation Bill Clinton en partenariat avec Unitaid, ont pris le parti de s’adapter aux réalités du terrain, tout en attendant de ce terrain une réponse professionnelle. Et les résultats sont probants. Exemple avec l’une des premières dotations majeures de la Fondation Gates (environ 38 millions d’euros), destinée au Botswana. Dans ce pays ravagé par le sida, un partenariat public-privé entre le gouvernement et le groupe pharmaceutique Merck a été instauré, et le Partenariat africain global contre le VIH/sida (Achap) a été géré comme une entreprise: élaboration des objectifs avec toutes les parties prenantes en fonction d’un diagnostic émanant du terrain, recrutement de personnels compétents dûment payés, investissement concret des politiques, auditeurs dépêchés sur place pour évaluer le bon usage des fonds. Au Botswana, le taux de prévalence chez les adultes est passé de 37 % en 2002 à 24 % aujourd’hui. Les bailleurs publics n’avaient plus qu’à prendre exemple.
BILL GATES
Lʼincontournable fondation
QU’ON SE LE DISE : dans le secteur de la santé, il faut compter avec la Fondation Bill & Melinda Gates. Le créateur de Microsoft entend peser de tout son poids, financier notamment, dans la lutte contre les grandes maladies. Quitte à ruer dans les brancards quand il n’est pas d’accord avec les politiques de santé des institutions et des gouvernements. La Banque mondiale l’a appris à ses dépens, le 9 juin, quand le centre d’analyse épidémiologique Action (Advocacy to Control Tuberculosis Internationally), financé par la fondation, a épinglé dans un rapport l’inefficacité de ses programmes de lutte contre la tuberculose en Afrique. Une intervention qui a fait grincer des dents à la Banque, alors en phase de collecte de fonds. À la tête d’une fortune de 40 milliards d’euros, Bill Gates donne chaque année via sa fondation autant que l’Organisation mondiale pour la santé (OMS). Depuis 1994, elle a versé 10,1 milliards d’euros (58 % des fonds distribués) à des programmes de santé, priorité numéro un devant l’agriculture et l’éducation. On comprend alors que les respon-
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sables des ONG et des institutions se pressent pour rencontrer le magnat de l’informatique, comme le 23 juillet à Vienne, lors de la 18e conférence internationale sur le sida. LOGIQUE D’INVESTISSEUR
Bill Gates affiche une logique d’investisseur. Il affirme choisir les projets qui ont le meilleur retour sur investissement dans les domaines que sa famille a jugés prioritaires : en Afrique, il s’agit des programmes innovants de vaccination, contre la mortalité infantile, le sida, la tuberculose, la polio et le paludisme. Ses spécialistes, dont le médecin algéro-américain Elias Zerhouni (ancien directeur de la recherche publique aux États-Unis), sélectionnent les projets en comparant une estimation du nombre de vies sauvées avec le coût du programme. Mais les interventions de la Fondation Bill & Melinda Gates sont contestées : des ONG et des médecins regrettent sa proximité avec les grands laboratoires pharmaceutiques, dont elle favorise la production au lieu de promouvoir les médicaments génériques. ■ CHRISTOPHE LE BEC
116 DOSSIER SANTÉ INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE
Un continent en quête dʼindépendance LE CONTINENT, QUI IMPORTE 80 % DE SES MÉDICAMENTS, ENTEND SE DOTER DE SES PROPRES
UNITÉS DE PRODUCTION.
ÇÀ ET LÀ APPARAISSENT DES ENTREPRISES À CAPITAUX LOCAUX, QUI MISENT SUR
LA FABRICATION DE PRODUITS
NON BREVETÉS.
CINPHARM
P
oids lou rd de l’économ ie mondiale, l’industrie pharmaceutique génère plus de 600 milliards d’euros par an. Et on estime déjà qu’en 2020 ce montant sera de 1 000 milliards d’euros. L’Afrique, l’Asie et le Moyen-Orient contribuent à ce marché à hauteur de 12 % à 15 %. Et alors que les importations de médicaments représentent 80 % du marché africain, le continent entend se doter de sa propre industrie, comme en témoigne l’émergence d’entreprises à capitaux locaux un peu partout en Afrique. Elles se répar tissent autour de deux grands pôles : l’Afrique du Nord – notamment l’Égypte, la Tunisie et le Maroc –, et l’Afrique du Sud, dont les firmes sont les plus réputées. Mais le reste du continent rattrape son retard : l’Afrique de l’Ouest compte aujourd’hui une centaine d’usines de
Au Cameroun, l’entreprise Cinpharm va produire une soixantaine de génériques.
un chiffre d’affaires pharmaceutique compris entre 360 millions et 460 millions d’euros par an. L’EXEMPLE MAGHRÉBIN
L e cont i ne nt nou r r it donc se s ambitions et se fait une place sur un marché très exigeant où la sélection des produits doit être rigoureuse, le conditionnement adéquat, le stockage garanti et, enfin, la distribution optimale. L’Afrique du Nord a donné l’exemple. D’ailleurs, Rachid Kadiri, directeur général adjoint de l’usine du marocain Sothema, p e u t e n t é m o i g n e r. Son entreprise, créée en 1976 et cotée à la Bourse de Casablanca depuis 2005, est le premier laboratoire de fabrication de médicaments sous licence du continent, avec un chiffre d’affaires annuel de 800 millions de dirhams (environ 71 millions d’euros).
En Tunisie, la production locale couvre la moitié de la consommation nationale. fabrication de médicaments, l’Afrique de l’Est (Kenya, Éthiopie, Tanzanie) est également bien avancée. Et malgré la faiblesse du secteur dans cette zone, les pays d’Afrique subsaharienne francophone génèrent déjà
« Le Maroc arrive à couvrir 70 % à 80 % de ses besoins au niveau pharmaceutique », commente-t-il. Le pays compte aujourd’hui une trentaine de laboratoires de fabrication réglementés par le ministère de la Santé. En Tunisie, la production locale de médicaments couv re la moitié de la consommation nationale (contre 7,5 % en 1987) avec, en particulier, le développement et la fabrication de médicaments génériques répondant aux normes internationales édictées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) : qualité, innocuité, efficacité, pureté des ingrédients… Au sud du Sahara, la situation diffère quelque peu. En Afrique centrale, 99 % des médicaments sont importés. Pour pallier ce problème et apporter une solution à celui de l’accessibilité des médicaments, Célestin Tawamba, à la tête du groupe agroalimentaire Cadyst Invest, a créé Cinpharm, la première usine pharmaceutique du Cameroun et la plus moderne de la région, à Maképé, dans la banlieue de Douala.
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DOSSIER 117 Avec un capital de 11 milliards de F CFA (16,8 millions d’euros) « 100 % camerounais », cette unité de fabrication de médicaments génériques a été inaugurée en avril dernier. L e t r a n sf e r t de te c h nolog ie a été réalisé avec l’appui de l’indien Cipla. « Avec l’Inde, qui a apporté son savoir-faire, nous avons mis en place un contrat de partenariat gagnant-gagnant », explique Célestin Tawamba. L’objectif à long terme est de s’émanciper de ce partenariat pour acquérir une indépendance en matière de santé. D’ailleurs, Cinpharm est « la seule plateforme au Cameroun qui offre aux étudiants une formation pratique », rappelle-t-il. L’entreprise fabriquera une soixantaine de médicaments génériques (antidouleur, a nt ipa ra sit a i res, a nt ipa ludéen s, antirétroviraux et antituberculeux) conformes aux normes de l’OMS, c’est-à-dire commercialisables non seulement en Afrique, mais aussi dans les pays voisins. UN SECTEUR PROMIS À UN BEL AVENIR
Si le rêve de Célestin Tawamba est de « faire en sorte que les gens se soignent avec moins de 1 dollar par jour », les pouvoirs publics devront nécessairement donner la priorité aux médicaments fabriqués localement pour que son initiative soit rentable. Car les entreprises à fonds locaux comme Cinpharm, qui ne produisent que des génériques, doivent faire face à une forte concurrence internationale : 70 % de ces produits sont importés d’Inde et « ne correspondent pas forcément aux standards internationaux », déplore Clive Ondari, médecin à l’OMS. De plus, les grandes firmes asiatiques – mais aussi européennes
LA GUERRE DU GÉNÉRIQUE QUINZE MULTINATIONALES DU NORD se partagent plus de la moitié des 600 milliards d’euros du marché mondial des médicaments. Mais l’arrivée massive des génériques, qui représentent déjà un volume d’affaires de 68 milliards d’euros (122 milliards prévus en 2015), a mis sur le devant de la scène de nouveaux acteurs. D’abord sur leurs propres marchés, puis en Afrique : « Les groupes indiens sont très présents dans les marchés publics à bas prix », explique Didier Rousselle, viceprésident Afrique de Sanofi-Aventis. Les indiens Ranbaxy, Dr Reddy’s ou Cipla ont bousculé les Pfizer, Merck, Novartis, Sanofi-Aventis ou encore GlaxoSmithKline (GSK), le top 5 mondial. Ce marché suscite les convoitises. Le rachat en 2008 de Ranbaxy pour 5 milliards de dollars (environ 3,2 milliards d’euros à l’époque) par le japonais Daiichi Sankyo pourrait n’être que le début d’une longue série. Dans le sillage de ses concurrents, et face aux puissantes filiales de ceux-ci dédiées aux génériques (Sandoz pour Novartis, GenMed pour Pfizer…), le groupe français Sanofi-Aventis, numéro un sur le continent, a réalisé une série d’acquisitions en 2009 : les spécialistes du générique Zentiva (République tchèque), Kendrick (Mexique) et Medley (Brésil). « Nous développons plus fortement notre gamme de génériques. La stratégie adoptée consiste à mettre l’accent sur la production locale [le groupe possède six usines en Afrique, NDLR] et les acquisitions extérieures », assure ainsi Didier Rousselle. ■ MICHAEL PAURON
(voir encadré) – ne se privent pas d’implanter sur le continent des succursales qui, outre des médicaments brevetés, fabriquent aussi des génériques. « Entre 40 % et 50 % des investissements viennent d’Inde et d’Asie du Sud-Est », précise Clive Ondari. Quoi qu’il en soit, les spécialistes s’accordent pour prédire un bel avenir à l’industrie pharmaceutique en Afrique, à condition évidemment que les gouvernements nationaux fassent de la santé leur priorité. « La politique pharmaceutique nationale doit être définie en collaboration avec l’OMS », estime le professeur Emmanuel Eben-Moussi, consultant international et auteur de L’Afrique doit
se refaire une santé (L’Harmattan, 2006). « La production locale dépend de la politique industrielle des pays, laquelle doit privilégier l’implantation d’unités locales de fabrication et ne pas favoriser les grandes firmes délocalisées », poursuit-il. C’est ce que semble avoir compris l’Algérie. Début août, le gouvernement a finalisé un projet de loi réorganisant le système de santé. Objectif prioritaire : réduire les importations de médicaments et promouvoir la production nationale. L’une des mesures pour y arriver consistera en une réduction de 50 % du taux d’impôt appliqué aux producteurs. ■ JUSTINE SPIEGEL
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120 DOSSIER SANTÉ INFRASTRUCTURES
Hôpitaux: un business lucratif L’A FRIQUE A BESOIN D’AU MOINS 550 000 LITS SUPPLÉMENTAIRES D’ICI À DIX ANS. UN MARCHÉ PORTEUR FINANCÉ PAR DES BAILLEURS OU SUR LES FONDS PROPRES DES
ÉTATS.
L’Angola a eu recours à un ensemblier hospitalier pour des établissements « clés en main ».
res ou d’équipements dans le domaine de la santé. À travers l’Eximbank, la Chine déploie ces dernières années un activisme assez impressionnant. Le privé intervient aussi, et quelques multinationales, notamment pétrolières, investissent aussi dans la construction d’hôpitaux au nom du concept de « responsabilité sociale ». UN GROS APPEL D’OFFRES PAR AN
Cependant, un cer tain nombre d’États africains trouvent, ces dernières années, le moyen de financer leurs projets sanitaires sur fonds propres ou par des financements à moyen terme auprès de banques occidentales rassurées par des couvertures officielles. Il s’agit en général d’États pétroliers comme la Guinée équatoriale et l’Angola. Les fonds désormais disponibles
dans un certain nombre de pays dans le cadre de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) pourraient également relancer les grands investissements publics en matière de structures hospitalières. « Par exemple, le Burundi a décidé de financer des centres de santé ruraux partout dans le pays… sur fonds propres ! » fait remarquer Benoît Kanyandekwe, architecte et consultant auprès de gouvernements africains dans le cadre de la construction d’hôpitaux. Le marché est porteur : selon la Société financière internationale (SFI, filiale de la Banque mondiale), l’Afrique aurait besoin de créer, d’ici à dix ans, entre 550 000 et 650 000 nouveaux lits d’hôpitaux. « Chaque année, il n’y a pas plus d’un gros appel d’offres international portant sur l’équipement
D.R.
Q
ui construit, équipe, et, surtout, paie les hôpitaux en Afrique ? Le sujet est d’une importance fondamentale sur un continent où le déficit des infrastructures de santé est criant. Mais à 40 millions d’euros l’hôpital moderne « clés en main » de 200 lits, les États ne peuvent bien souvent pas être les seuls financeurs. Les bailleurs de fonds internationaux mettent ainsi plus souvent la main à la poche. Union européenne – via le Fonds européen de développement –, Banque mondiale, Banque islamique de développement, Banque africaine de développement… À travers des dons ou des prêts, ils interviennent auprès des États, souvent dans le cadre de partenariats avec des structures de type Agence d’exécution des travaux d’intérêt public (Agetip), qui ont essaimé à la faveur des programmes d’ajustement structurel dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne francophone. Quelque peu en retrait, les bailleurs de fonds bilatéraux (France, Espagne, Italie, Belgique, Canada) continuent de financer des projets d’infrastructu-
DOSSIER 121 ou la construction d’un grand hôpital. Les projets de taille plus modeste sont plus nombreux », explique un acteur du secteur. Construire, équiper ou renouveler un hôpital moderne nécessite de nombreuses compétences techniques. Il faut des architectes et des designers, des spécialistes du bâtiment et des travaux publics, des experts en électromécanique, du personnel chargé de la maintenance et du transfert de technologies… Pour rapprocher tous ces métiers, le marché fait appel à des ensembliers hospitaliers, comme la Société française d’équipement hospitalier (SFEH) et l’espagnol IECSA. Le premier a par exemple construit, équipé et livré « clés en main » un hôpital moderne à N’Djamena, en avril 2009. Le second a fourni les hôpitaux de Bata, Mongomo et Ebebiyin, en Guinée équatoriale. Ces dernières années, l’espagnol Makiber a de son côté livré des hôpitaux « clés en main » en Angola, mais aussi équipé des centres de santé et formé les employés au Cameroun. L’ensemblier néerlandais Simed International a construit et réhabilité des structures hospitalières dans des pays aussi divers que la Zambie, l’Érythrée ou la RD Congo. Quelques ratés témoignent encore d’un certain nombre de difficultés dans le secteur de l’ingénierie hospitalière. En juillet dernier, des fissures profondes dans les murs des services de pédiatrie et de gynécologie de l’hôpital général de Luanda, construit par le chinois China Overseas Engineering Group Company (Covec), ont poussé les autorités à évacuer 150 patients et à s’interroger publiquement sur la dégradation aussi rapide d’un édifice qui a coûté 8 millions de dollars (environ 6 millions d’euros). « La rigueur et le contrôle au niveau de la maîtrise d’ouvrage manquent. Il y a pourtant le Bureau national d’études techniques et de développement [BNETD, ivoirien mais intervenant dans de nombreux pays africains, NDLR] qui garantit aux États la qualité de la réalisation, en tant qu’assistants maîtres d’ouvrage et contrôleurs. Et puis il y a un certain nombre de gens incompétents qui ne sont pas contrôlés et qui salissent l’industrie », tonne un professionnel du secteur qui souhaite garder l’anonymat. ■ THÉOPHILE KOUAMOUO
KAMEL AGREBI/IMAGESDETUNISIE.COM
MANQUE DE RIGUEUR
Les fabricants asiatiques d’appareils sophistiqués font une percée remarquée.
ÉQUIPEMENTS Des
transactions qui manquent de transparence EN CROISSANCE sur tout le continent, le marché du matériel médical demeure très lié aux financements publics. Pour les équipementiers et les industriels du secteur médical, la mise à niveau des infrastructures de santé entreprise par les pays africains annonce de belles perspectives. En Algérie, d’ici à 2014, 3 000 établissements seront réalisés ou réhabilités par l’État. Autant de lits, d’instruments, de respirateurs, d’appareils de radiologie à fournir au pays. Difficile à évaluer au niveau continental, le marché des biens et équipements médicaux atteint, pour le seul Maghreb, plus de 320 millions d’euros en 2008, en hausse de 28,5 % par rapport à 2007. Une progression qui, selon les experts, devrait se poursuivre au rythme de 10 % par an. Preuve de cette vigueur, trois salons spécialisés se sont déjà tenus au Maroc, en Tunisie et en Algérie depuis le début de l’année. D’autres sont aussi annoncés au Kenya et en Afrique du Sud. Auparavant trusté par les marques européennes et américaines, le marché est aujourd’hui capté par les produits chinois ou indiens, notamment sur les matériels les plus basiques. « Leurs plateaux chirurgicaux sont peut-être plus fins et moins bien polis, mais leurs prix sont beaucoup plus attractifs. D’ailleurs, nous ne proposons plus d’autres produits », avoue Roland Scaut, fondateur d’Excotramed, une société belge d’export de matériel médical spécialisée sur l’Afrique subsaharienne. Les équi-
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pements à forte composante technologique, comme les scanners ou les appareils de radiologie, demeurent quant à eux entre les mains de spécialistes comme Siemens, Philips, General Electric, mais aussi Hitachi ou Toshiba. Là encore, les firmes asiatiques font une percée remarquée, car elles arrivent à répondre à des spécifications de haut niveau tout en proposant des tarifs inférieurs. DEMANDES INADAPTÉES
Une course à la haute technologie qui constitue une dérive regrettable, selon Frédéric Bia, responsable du belge Biamed, distributeur de General Electric en Afrique centrale. « Habitués aux équipements utilisés en Europe, les chefs de service demandent des matériels identiques, constate-t-il. Face à la pénurie d’équipement, peut-être vaudrait-il mieux privilégier un scanner adapté à la traumatologie et un échographe pour les examens cardiaques, plutôt qu’un seul scanner cardiaque dont la facture va vite atteindre 1 million d’euros, en comptant l’installation, la maintenance et la formation du personnel… » Autre écueil récurrent dans les appels d’offres : le manque de transparence. « Les fabricants signent des engagements anticorruption, alors que les bakchichs sont des pratiques courantes, admet un distributeur. Mais pour un directeur d’hôpital dont la rémunération n’excède pas 500 euros, il s’agit plus d’un salaire déguisé que d’autre chose. » ■ JULIEN CLÉMENÇOT
122 DOSSIER
SANTÉ
PORTRAIT
Souleymane Mboup, un Monsieur Sida à Dakar À
LA TÊTE D’UNE ÉQUIPE
DE
100
[lui] facilite beaucoup de choses, au niveau administratif par exemple ». Néanmoins, les fonds nécessaires au fonctionnement du laboratoire proviennent essentiellement de l’étranger. Ils sont de l’ordre de plusieurs milliards de francs CFA, déclare Mboup sans plus de précisions.
SCIENTIFIQUES,
LE CODÉCOUVREUR DU
VIH-2
JOUIT D’UNE
RENOMMÉE INTERNATIONALE.
DANS
SON LABORATOIRE,
IL TRAVAILLE SANS RELÂCHE À LA LUTTE
CONTRE LA PANDÉMIE.
UN PASSIONNÉ
NENDIENA POUR J.A.
I
l compte parmi les chercheurs les plus connus à travers le monde. Le professeur Souleymane Mboup doit sa notoriété à une découverte faite en 1985. Cette année-là, alors que ses pairs américains et européens étudient sans relâche dans des laboratoires très sophistiqués le virus du sida (VIH), découvert quelques années auparavant, à Dakar, le scientifique sénégalais, seul entre les quatre murs d’un petit local sous-équipé du centre hospitalier universitaire Aristide-Le-Dantec, observe consciencieusement des prélèvements provenant de prostituées atteintes d’infections sexuellement transmissibles. À 34 ans, il identifie ainsi un virus du sida différent de celui connu jusqu’alors. C’est le VIH-2. Vingt-cinq ans plus tard, il se souvient en toute modestie de ces instants qui ont changé sa vie. « Cette découverte m’a été attribuée et j’en suis fier, mais elle est le fruit de ma collaboration avec d’autres chercheurs, dont le Français Francis Barin, qui, le premier, a pris connaissance de mes recherches avant de les approfondir avec des spécialistes américains, alors mieux équipés. Ce sont eux qui m’ont ensuite demandé de venir aux États-Unis avec des échantillons. Le VIH-2 est donc une codécouverte », explique Mboup, ajoutant, amusé, qu’il avait emballé les précieux prélèvements dans… du papier cadeau. « Quand les douaniers m’ont demandé de quoi il s’agissait, j’ai répondu dans un anglais hésitant: “It’s a gift” [“c’est un cadeau”, NDLR]. » La suite est connue.
Le chercheur sénégalais enseigne à l’université Cheikh-Anta-Diop.
L’existence du VIH-2, proche d’un virus trouvé sur des singes, est confirmée. Et la vie du pharmacien militaire (il est colonel de l’armée sénégalaise) passionné de recherche s’en trouve bouleversée. Il devient une personne ressource faisant l’objet de toutes les attentions. Il multiplie voyages d’études et conférences, et rédige parallèlement nombre d’ouvrages scientifiques. À la suite de la découverte du VIH-2, il obtient le soutien de Max Essex, de l’université Harvard, considéré à l’époque, avec Robert Gallo et Luc Montagnier, comme l’un des plus grands spécialistes du sida. Grâce à Essex, Souleymane Mboup obtient une aide financière qui lui permet d’équiper son laboratoire et de recruter du personnel. Alors qu’il était seul à ses débuts, il travaille aujourd’hui avec 100 scientifiques dont il a assuré la formation. Et dit recevoir un « soutien politique de l’État, qui prend très au sérieux [son] travail et
Depuis ses débuts en 1978, le chercheur a réalisé près de 300 études sur des sujets allant de la méningite au sida, évidemment, en passant par l’hépatite B et les salmonelles. « J’ai toujours été passionné par mon métier. Au fil des ans, j’ai pris pleinement conscience de son importance », dit ce quinquagénaire heureux d’avoir aussi contribué à l’élaboration d’un programme national de lutte contre le sida. Depuis 2004, l’accès aux antirétroviraux est gratuit pour plus de 12 000 malades au Sénégal. « À ce jour, notre pays a l’un des taux de prévalence du sida les plus faibles du continent. Grâce à une politique de prévention lancée peu après la découverte du VIH-2, nous l’avons maintenu autour de 0,7 %. »
« Le Sénégal a l’un des taux de prévalence les plus faibles du continent, autour de 0,7 %. » Depuis quelques années, Mboup et son équipe planchent sur la diversité génétique du VIH, devenu très complexe. L’étude de ces « recombinaisons » est importante pour la recherche sur les vaccins, lesquels doivent être efficaces sur les différentes souches existantes. Il a ainsi largement de quoi occuper ses journées, devenues trop courtes depuis un certain jour de 1985. ■ CÉCILE SOW, à Dakar
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La conférence « AfriFlu » a réuni les spécialistes de la grippe en Afrique
La grippe est un problème de santé publique majeur qui engendre une maladie sévère, l’hospitalisation et la mort, principalement chez les groupes à risque (les très jeunes, les personnes âgées et les malades chroniques) Cependant la vaccination contre la grippe peut prévenir entre 70 et 90% des infections chez les adultes en bonne santé. Malgré les récents progrès enregistrés dans le domaine de la surveillance de la grippe en Afrique, les données épidémiologiques demeurent rares pour cette affection. Très souvent, cette absence de données épidémiologiques et la confusion avec d’autres affections sont interprétées à tort comme une absence de la maladie. C’est dans l’optique de mieux comprendre la grippe en Afrique que l’Agence de Médecine Préventive
(AMP), avec le soutien de Sanofi Pasteur, a organisé, la première conférence internationale « AfriFlu » les 1e et 2 juin 2010 à Marrakech au Maroc. Cette conférence internationale a réuni près de 100 participants du monde entier, dont 53 participants venus de 22 pays africains. La première conférence AfriFlu avait pour objectif d’accroître l’échange d’informations concernant l’épidémiologie et la surveillance, de renforcer la collaboration entre les systèmes nationaux de notification, d’identifier les besoins pour mieux comprendre l’impact de la grippe, d’évaluer la capacité actuelle de mise en place de programmes de vaccination dans des régions déterminées du continent et de formuler des recommandations pour promouvoir la recherche et une coopération renforcée concernant la grippe en Afrique. Un rapport complet sera établi suite à cette rencontre présidée par le Pr. Peter Ndumbe, Doyen de la Faculté des Sciences de la Santé de l’Univer-
sité de Buéa au Cameroun et Président du Comité Scientifique d’AfriFlu. « AfriFlu a été une occasion unique de rencontres entre praticiens de la grippe de plus de 20 pays d’Afrique et partenaires internationaux pour analyser l’impact de la grippe en terme de santé publique en Afrique et les options pour lutter contre cette dernière » a déclaré le Dr. Brad Gessner, Directeur Scientifique de l’AMP à l’issue de cette conférence, qui a connu un fort retentissement médiatique.
UN ENGAGEMENT MONDIAL POUR L’AMÉLIORATION DE LA SANTÉ PUBLIQUE
Pour assurer un large accès aux vaccins, Sanofi Pasteur a mis en place des collaborations avec les différents acteurs de la vaccination, notamment les autorités de santé, les donateurs et les organisations non gouvernementales (ONG).
C.C. pour DIFCOM - Photo DR et FOTOLIA
Publi-Information
De gauche à droite : Pr. Mohammed Hassar (Maroc), Pr. Peter N’Dumbe (Cameroun), Dr. Alfred Da Silva (AMP)
124 DOSSIER SANTÉ moyens très limités, ne peut qu’entreprendre des actions de sensibilisation très ponctuelles. Sans compter la crise politique, qui a considérablement limité les budgets de santé.
De plus en plus fréquent, le surpoids est un facteur de risque pour la santé des Africains.
NOUVELLES MALADIES
Les pathologies de la richesse LE CHANGEMENT DES MODES DE VIE A POUR CONSÉQUENCE UN COÛT SANITAIRE NON NÉGLIGEABLE. IL SUFFIT POURTANT DE PEU POUR PRÉVENIR DIABÈTE, OBÉSITÉ OU HYPERTENSION ARTÉRIELLE.
U
rbanisation, mondialisation, hausse du niveau de v ie… Des changements radicau x i nter v ien nent dans les habitudes de vie des pays du Sud. En Afrique, la population urbaine a doublé, voire triplé, en moins de trente ans : de moins de 5 % en 1960, les villes africaines concentrent aujourd’hui 40 % des populations, soit 400 millions de personnes. La transition épidémiologique ne les a pas épargnées et elles doivent faire face à l’émergence de maladies dites non transmissibles, qui, jusque-là, étaient considérées comme des maux purement occidentaux : diabète, obésité, hypertension artérielle ou maladies cardiovasculaires.
Dans son rapport « Prévenir les maladies chroniques : un investissement vital », l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime à 53 millions le nombre de morts causées par les maladies non transmissibles en 2005, dont 80 % dans les pays pauvres. La faiblesse des systèmes de santé (manque d’hôpitaux, de personnels soignants ou de prise en charge financière) et la pauvreté sont catastrophiques pour ces populations. En Côte d’Ivoire, un diabétique peut dépenser 35 000 F CFA (53 euros) par mois pour son traitement et son suivi médical, alors que le « salaire minimum garanti » est de 36 000 F CFA par mois. Le Programme national de prévention des maladies non transmissibles, aux
LORI WASELCHUK/GALBE.COM
CAMPAGNES DE SENSIBILISATION
Du côté du Mali, en revanche, le ministère de la Santé, en partenariat avec des ONG, a mis en place une politique ambitieuse pour toucher toutes les couches de la population. « Nous organisons des campagnes médias, des séances de dépistage, mais aussi des formations pour les médecins de districts », explique Stéphane Besançon, nutritionniste et directeur de l’association Santé Diabète Mali. Les jeunes Africains, très touchés eux aussi, font parti de la chaîne de sensibilisation. « Nous allons dans les écoles pour faire de l’éducation thérapeutique, par des ateliers peinture », poursuit le nutritionniste. Les médicaments ne sont pas encore gratuits, mais les prix ont considérablement baissé. « L’ampoule d’insuline ne coûte désormais que 5 euros, contre 10 auparavant, et un antidiabétique générique coûte 1 euro par mois », précise-t-il. « La santé de la reproduction, le sida et le paludisme occupent toute la place dans les politiques de santé publique », explique le docteur Allel Louazani, chargé des maladies non transmissibles au bureau régional de l’OMS, lesquelles ne font pas partie des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). « Le pire, c’est que ce sont des maladies que l’on peut circonscrire sans grands moyens, se désole le docteur Dele Abegunde, du département des maladies chroniques de l’OMS. Une activité physique régulière et une alimentation équilibrée suffisent à réduire considérablement les risques d’obésité et de tension artérielle. » Pour Stéphane Besançon, il faut aussi attirer l’attention des dirigeants sur les conséquences économiques des maladies non transmissibles: « Tous les programmes de développement sont vains si l’on ne considère pas le coût de ces nouvelles maladies : moins de main-d’œuvre, plus de dépenses de santé publique. » Certains pays ont déjà fait le calcul: en 2005, le manque à gagner du revenu national chinois s’élevait à 18 milliards de dollars (environ 15,2 milliards d’euros à l’époque), à 9 milliards en Inde et à 3 milliards au Brésil. ■ MALIKA GROGA-BADA
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Vers une politique sanitaire commune aux 6 États membres LE CENTRE INTER–ÉTATS D’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR EN SANTÉ PUBLIQUE D’AFRIQUE CENTRALE, CIESPAC UNITÉ OPÉRATIONNELLE DE L’OCEAC EN MATIÈRE DE FORMATION
MISSIONS Le site du CIESPAC à Brazzaville.
• Participer à l’œuvre de développement sanitaire de l’Afrique centrale par la recherche ; • Former des personnels de haut niveau adaptés et opérationnels ; • Apporter un appui réel aux programmes de santé des pays du bloc épidémiologique d’Afrique Centrale.
PROGRAMME DE FORMATION 2010-2011 I - Atelier de formation des personnels de santé des foyers aux techniques de diagnostic et de lutte contre la Trypanosomiase Humaine Africaine. Période : 04–16 octobre 2010. Public cible : personnes impliquées dans la lutte contre la THA. Visite te du d Présid Président ésident de la l Commission de la CEMAC C au chantier de reconstruction du CIESPAC.
II - Atelier de formation sur «les statistiques à l’usage des médecins et biologistes. Période : décembre 2010. Public cible : médecins et biologistes.
IV - Cours d’épidémiologie d’intervention et d’informatique en Afrique Centrale (CEPIAC-2). Période : avril 2011. Public cible : acteurs de la lutte contre le paludisme et chercheurs.
Un atelier de formation.
V - Cours international sur le paludisme et la planification de la lutte antipaludique (CIPG-Palu). Période : mai 2011. Public cible : Gestionnaires des programmes / projets de lutte contre le paludisme et leur personnel.
SOMMET SPÉCIAL ÉCI SUR L’HARMONISATION L’ DE LA LUTTE CONTRE LES GRANDES ENDÉMIES EN AFRIQUE CENTRALE
BRAZZAVILLE : 16 > 20 NOVEMBRE 2010
Perspective du CIESPAC (en construction).
ORGANISATION DE COORDINATION POUR LA LUTTE CONTRE LES ENDÉMIES EN AFRIQUE CENTRALE
BP 15665 - Yaoundé, Cameroun - Tél.: (+237) 22 23 22 32 Fax : (+237) 22 23 00 61 - E-mail : contact@oceac.org
www.oceac.org
DIFCOM/DF - PHOTOS : DR.
III - Initiation à la surveillance des vecteurs du paludisme et des maladies re-émergentes (ISV-Palu). Période : février 2011. Public cible : agents techniques de santé des programmes / projets et institutions de recherche.
Communiqué
Inter Equipement 30 ans au service de la santé
Inter Equipement fournit depuis 1980 les équipements médicaux pour les structures sanitaires indispensables au développement d’une bonne pratique médicale en Afrique. A l’occasion de ce trentième anniversaire, nous avons demandé à Alain Taris, Président Directeur Général, de nous présenter ce qui fait la reconnaissance de son entreprise. Inter Equipement fête ses 30 ans. Comment qualifieriez-vous l’évolution de l’entreprise au cours de ces trois décennies ? Au cours des années, Inter Equipement est devenue un partenaire de référence sur le continent africain. Assemblier et fabricant de matériel médical, certifié ISO, nous proposons une offre globale quasiment unique. La conjugaison de ces deux spécialités est le fruit de notre expérience et du constat, que des produits essentiels à la pratique médicale étaient vendus beaucoup trop chers. J’ai alors fait fabriquer, sous notre marque déposée IE MEDICAL ces produits au meilleur rapport qualité / prix. Enfin ces trois décennies et c’est le plus important, ont permis à Inter Equipement de tisser un réseau de confiance. Nos clients nous sont fidèles et nous recommandent, témoignage de la qualité de notre travail. Les fabricants ou laboratoires sélectionnés parmi les meilleurs mondiaux, nous accordent de par notre expérience sur le long terme leur confiance, ce qui nous permet notamment d’obtenir des prix très compétitifs dont profitent tous nos clients. En outre, cela confère une double garantie aux clients, la nôtre, et celle du fabricant. Qui sont les clients d’Inter Equipement ? Tous les acteurs de la santé en Afrique subsaharienne, du Maghreb, et au Moyen-Orient. Nous intervenons pour des Ministères de la Santé par le biais d’appels d’offres internationaux et na-
BP 81 - F.33293 Bordeaux - Blanquefort Cedex Tel : +33 (0) 556 352 398 Fax : +33 (0) 556 951 726 Email : info@inter-equipement.com
tionaux, pour des agences internationales comme les Nations Unies, l’OMS ou l’Unicef, mais aussi pour des ONG, des hôpitaux ou des cliniques privées. Nous attachons beaucoup d’importance à nos amis distributeurs africains et aux exportateurs européens qui se fournissent également chez nous. Enfin, Inter Equipement est devenue une référence pour les bailleurs de fonds internationaux. Quelle est la valeur ajoutée d’Inter Equipement ? C’est un service « clé en main ». De la définition des besoins à la maintenance en passant par le conseil, l’assistance, l’installation et la formation, nous accompagnons nos clients et élaborons avec eux le produit qu’ils requièrent. Cela implique l’intégration de l’environnement nécessaire aux besoins vitaux. J’entends par là que nous fournissons l’autonomie complète à une structure sanitaire pour trois éléments essentiels à la santé tels que, l’oxygène médical produit sur place à un prix plancher, l’eau rendue potable après traitement sur le site et, l’énergie solaire pour une économie énergétique durable et complète. Que souhaiter à Inter Equipement pour les prochaines décennies ? Après notre filiale malgache IEM, qui traite avec les pays de l’Océan Indien, et nos représentations exclusives au Burkina Faso, Congo, Libye, Mali, RDC, Tchad, je souhaite poursuivre le déploiement d’Inter Equipement sur le terrain en ouvrant d’autres entités IE.
C’est essentiel pour les opérations de proximité comme la maintenance et l’accompagnement de l’utilisateur final. Mes objectifs se tournent vers la Côte d’Ivoire, le Sénégal et l’Afrique Centrale, où je recherche des partenaires motivés et compétents ! A bon entendeur… A titre personnel vous êtes impliqué et motivé pour l’Afrique, pourquoi ? Si vous parlez de mon action en tant que président du CBSOA Club d’Entreprises Bordeaux Afrique à la CCI de Bordeaux, vous savez que Inter Equipement doit son développement à ses clients africains. C’est un juste retour des choses de ma part que d’inciter et d’amener des collègues entrepreneurs à travailler avec ce continent, qui a le plus d’avenir…
Alain Taris PDG durant AFBM à la CCI de Bordeaux
Zone Galaxy - B.P. 685, Andraharo 101 Antananarivo - Madagascar Tél : +261 20 23 320 42 - Fax : +261 20 23 320 41 Email : iem@inter-equipement.com
w w w. i n t e r- e q u i p e m e n t . c o m
DOSSIER 127 MÉDICAMENTS
Parfois sur un plateau, souvent sous le manteau A LORS QUE GROSSISTES ET HÔPITAUX SONT POURVUS PAR DES DISTRIBUTEURS
FIABLES, LES TRAFIQUANTS CIBLENT TOUS AZIMUTS,
DU PHARMACIEN JUSQU’AU
L
a distribution des médicaments en Afrique est un secteur très convoité. Aux côtés des leaders privés et des centrales d’achats publiques se sont développées des filières parallèles dont les acteurs, alléchés par un marché juteux, brouillent les cartes. État des lieux. GÉANTS FRANÇAIS LES POIDS LOURDS DU CONTINENT Eurapharma, leader avec 40 % de part de marché, présent dans 20 pays, a vu son chiffre d’affaires progresser de 6,5 % en 2009, à 375 millions d’euros. Après avoir investi 6,1 millions d’euros l’an passé, il compte renforcer ses positions en terre anglophone et en Algérie, où son volume d’affaires a crû de 45 %. La filiale du groupe CFAO peut être optimiste : en Afrique, les dépenses pharmaceutiques sont de 4 euros par personne et par an, contre 196 en Europe. Si le réservoir de croissance est énorme, le français doit compter avec la présence d’un compatriote, Ubipharm International, numéro deux du secteur, implanté dans 19 pays du continent. Le ravitaillement des grossistes (qui, eux, dotent surtout les officines de pharmacie) demeure le cœur de l’activité des deux géants, via leurs centrales d’achats respectives, Continental Pharmaceutique et Planetpharma. CENTRALES D’ACHATS PUBLIQUES CAP SUR LES GÉNÉRIQUES Les hôpitaux et autres centres de santé sont quant à eux approvisionnés par les centrales d’achats publiques, qui lancent un appel d’offres auprès des laboratoires. « Elles privilégient les
En Afrique, les dépenses pharmaceutiques sont de 4 euros par personne et par an.
génériques, essentiellement produits en Inde et dix fois moins chers que les marques », confie Lazare Bansse, secrétaire permanent de l’Association africaine des centrales d’achats de médicaments essentiels (Acame), basée au Burkina Faso. Mais alors que la distribution semble plutôt bien huilée, certains problèmes persistent, comme les pénuries qui surviennent parfois dans les hôpitaux faute de paiement, ou des lots de dons qui périment dans les ports quand les centrales n’ont pas été informées de leur arrivée ou qu’elles manquent de fonds pour les gérer. MARCHÉ ILLICITE ATTENTION AUX CONTREFAÇONS À côté des acteurs légaux, les filières parallèles prospèrent, surtout depuis la dévaluation du franc CFA, en 1994. « Avant, dans les officines de pharmacie, il y avait surtout des marques de grands laboratoires, et leur prix a doublé, commente Serge Barbereau, viceprésident du Réseau médicaments et développement (Remed). Cela a favorisé l’arrivée des génériques, mais aussi les marchés illicites. » Centrales d’achats et grossistes illégaux, nationaux ou étrangers, pullulent
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sur le continent. Ces structures, qui deviennent de vraies concurrentes des filières légales, alimentent des pharmaciens, des fonctionnaires, des agents de santé et des vendeurs ambulants. Ainsi, des produits périmés ou de qualité inférieure et des contrefaçons potentiellement mortelles, fabriquées au Nigeria, en Chine et en Asie du Sud-Est côtoient des médicaments bons sous tous rapports. De quoi abuser le consommateur. Le business des médicaments importés frauduleusement ou détournés des circuits légaux est devenu si inquiétant (dans les pays en voie de développement, un médicament sur quatre serait contrefait) qu’il a contraint l’Organisation mondiale de la santé à adopter, en 2006, un programme mondial de lutte. Le trafic international atteindrait cette année près de 60 milliards d’euros. La réponse à ce fléau ne saurait provenir que des bailleurs internationaux. Le docteur Parfait Kouassi, président de l’Ordre des pharmaciens de Côte d’Ivoire, estime qu’« il est temps que les bailleurs de fonds conditionnent leur aide sanitaire à un engagement des gouvernements à éradiquer les médicaments de rue ». Seul moyen de couper l’herbe sous le pied des trafiquants. ■ HABIBOU BANGRÉ
JEAN CLAUDE MOSCHETTI/REA
VENDEUR AMBULANT.
Le centre hospitalier universitaire de Fann, à Dakar, est l’un des plus réputés du continent, toutes disciplines confondues.
FORMATION
Lourde déficience en diplômés LES MÉDECINS SONT UNE DENRÉE TROP RARE SUR LE CONTINENT. SPÉCIALISATION DES UNIVERSITÉS, ÉMERGENCE DE FACS PRIVÉES, INTRODUCTION DE NOUVELLES PÉDAGOGIES : LE POINT SUR LES REMÈDES À CETTE CARENCE.
D
u nord au sud de l’Afrique, le constat du manque de médecins est implacable : pas u n pay s ne rempl it actuellement l’Objectif du millénaire fixé à 2,28 médecins pour 1 000 habitants. Au Maghreb, le taux est situé entre 0,6 et 1,3. La palme de la pénurie revient à la Somalie, avec un arrondi statistique à… 0 pour 1 000 ! Facteur aggravant : le nombre de diplômés en médecine demeure insuffisant pour couvrir les besoins des populations. Et la fuite de près d’un quart d’entre eux vers les pays riches n’arrange rien. La Société financière internationale estime que, dans les dix ans à venir, il faudra former 90 000 médecins en plus de ceux déjà prévus. Où ça ? Des pôles d’excellence existent sur le continent. La faculté d’Alger
a été fondée en 1879, celle de Dakar en 1957, puis celles de Rabat (1962), Abidjan (1963), Tunis (1964)… L’Afrique subsaharienne compte aujourd’hui soixante-six facultés de médecine, l’Algérie dix, la Tunisie et le Maroc quatre chacun… « Au Magh reb, le niveau des étudiants est très proche de celui des promotions françaises, juge le docteur Fouad Kahia Tani, directeur du Centre de recherche, d’études et de documentation en économie de la santé (Credes). Seuls les bacheliers les mieux classés peuvent s’inscrire en première année. » Au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Bénin, les ambitions académiques sont identiques, mais au Cameroun ou en RD Congo, les exigences sont
parfois revues à la baisse. « Au Tchad, cela pose de réels problèmes, estime Fouad Kahia Tani. L’université admet même des étudiants qui n’ont pas eu la moyenne au bac. » Si les généralistes sont formés au plan national, les futurs spécialistes sont parfois amenés à quitter leur pays. En Afrique de l’Ouest, Dakar sort du lot et reste attractif pour toutes les disciplines, Abidjan se distingue en rhumatologie, en cardiologie et en pédiatrie, Cotonou est une référence en anesthésie, et certains Subsahariens vont faire leurs études au Maroc. Mais les facultés ne peuvent pas se reposer sur leurs lauriers : bien que financièrement limitées, elles doivent désormais adapter leurs spécialités aux évolutions du paysage sanitaire. Engagé dans une transition épidémiologique, le continent voit le
Des pôles d’excellence existent, comme la faculté d’Alger ou celle d’Abidjan. nombre de pathologies infectieuses diminuer, tandis que les affections chroniques (maladies cardiaques, allergies…) se multiplient. Des maladies pour lesquelles trop peu d’étudiants sont formés. « La gériatrie figure par exemple parmi les spécialités quasiment absentes sur le continent »,
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LISSAC/BSIP
128 DOSSIER
DOSSIER 129 relève Fouad Kahia Tani. Notamment au Maghreb, où le vieillissement de la population induit pourtant de nouveaux besoins sur les plans neurocognitif, respiratoire et cardiaque. DÉSERT MÉDICAL
Pour l’heure, « la préoccupation des États concerne surtout la bonne répartition des généralistes sur les territoires », explique le professeur Edmond Bertrand, ancien directeur de l’Institut de cardiologie d’Abidjan. Les zones rurales ressemblent souvent à un désert médical. En Tanzanie, une étude pilotée par le Centre for Educational Development in Health suggère d’orienter la sélection des futurs praticiens en privilégiant ceux qui iront a priori renforcer la couverture sanitaire du pays. Les chercheurs suggèrent également d’adapter les enseignements pour mieux préparer les étudiants aux conditions d’exercice rencontrées dans les régions reculées.
La réponse à la démographie médicale viendra peut-être, en partie, des formations privées qui, depuis dix ans, émergent au Sénégal, au Cameroun, au Tchad, bientôt au Mali et au Maroc. Mais l’irruption d’acteurs non étatiques pose aussi des questions, tant sur le contrôle des programmes que sur la sélection des étudiants ou la reconnaissance des diplômes. À Dakar, le titre délivré par l’école privée St. Ch r istopher I ba Ma r Diop, qui existe depuis 2003, est accrédité par l’État. Mais le montant des frais de scolarité, 30 000 euros par an en fin de cursus, restreint son accès. Au-delà de la formation initiale, de plus en plus de coopération entre centres hospitaliers permet aux médecins diplômés de renforcer leurs connaissances. C’est le cas du programme Raft (Réseau en Afrique francophone pour la télémédecine),
géré par les hôpitaux universitaires de Genève en partenariat avec l’Université numérique francophone mondiale (UNFM). « Connectés à internet grâce à des antennes Vsat, ce sont 200 praticiens travaillant pour 50 hôpitaux qui assistent tous les jeudis à des cours en visioconférence », expli-
Le traitement des maladies cardiaques ou des allergies n’est pas assez enseigné. que le docteur Line Kleinebreil, de l’U NFM. Toutes les sessions sont ensuite mises en ligne et constituent ainsi une précieuse base documentaire pour le corps médical. Mais la fracture, numérique pour le coup, rend ces projets encore chers et donc difficiles à reproduire pour les pays africains. ■ JULIEN CLÉMENÇOT
Kofi Annan, Secrétaire général ONU, 2004
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130 DOSSIER SANTÉ PANORAMA
Le Maghreb au stéthoscope R ÉGIMES D’ASSURANCE MALADIE, EFFICACITÉ DES HÔPITAUX, DISPONIBILITÉ DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ, OFFRE PRIVÉE… D’UN PAYS À L’AUTRE, DE FORTES DISPARITÉS APPARAISSENT. M AIS LES PROGRÈS SONT LÀ. Rabat
MAROC
ALGÉRIE
MAURITANIE
MALI
Population totale: 31,2 millions
SOURCES : UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE ET OMS
Nombre de médecins pour 1000 habitants (2008): 0,6 Espérance de vie à la naissance hommes/femmes (années): 70/74 Quotient de mortalité infanto-juvénile pour 1000 naissances vivantes: 37 Dépenses personnelles de santé par habitant (en dollars, 2008): 111 Dépenses publiques de santé en % du PIB (2009, estimation): 1,3 plus de la moitié de ce budget va aux salaires, au détriment des équipements et de la remise à niveau de centres hospitaliers universitaires (CHU) vétustes. « À l’hôpital public, on est plutôt bien soigné mais il ne faut pas être exigeant en termes d’hôtellerie : murs écaillés, chambres surchargées et nourriture infecte sont le lot commun des malades », raconte Fahd, interne à Rabat. Si le système de santé publique est peu performant, c’est essentiellement en raison d’une centralisation excessive, d’une répartition inéquitable sur le territoire et d’un personnel démotivé par les faibles salaires et parfois corrompu. Trop peu nombreux, les CHU disposent
Les cliniques privées du royaume chérifien souffrent d’une mauvaise réputation. le royaume. Si elles offrent une bonne qualité de soins et moins d’attente que dans le public, elles souffrent néanmoins d’une mauvaise réputation. De récentes affaires, révélées par la presse locale, ont montré que certaines cliniques pratiquaient régulièrement une surfacturation des soins. TUNISIE UN BILAN HONORABLE Espérance de vie de 74 ans, éradication de toutes les maladies endémiques, mortalité infantile inférieure à 25 ‰, gratuité des soins : le bilan d’un demisiècle de la politique de santé publique en Tunisie est impressionnant. Aujourd’hui, le pays compte plus de 10 000 médecins, dont la moitié exerce dans le privé, et quatre facultés de médecine, toutes aux standards internationaux. Tout le monde s’accorde également pour reconnaître la qualité des soins et l’excellente formation des
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MAROC UN SYSTÈME PEU PERFORMANT Avec une espérance de vie passée de 47 ans dans les années 1960 à 72 ans aujourd’hui, une mortalité infantile de 37 ‰ le classant au 71e rang mondial (contre 75e cinq ans plus tôt), le Maroc a notoirement fait des progrès. Mais, selon que l’on soit riche ou pauvre, urbain ou rural, les chances d’être pris en charge diffèrent encore beaucoup. Les plus démunis peuvent obtenir, après moultes tracasseries administratives, un certificat d’indigence auprès du ministère de l’Intérieur. Depuis 2008, ils peuvent également bénéficier du Régime d’assistance médicale (Ramed) mis en place pour améliorer l’égalité des citoyens dans l’accès aux soins. « Quand il s’agit d’une urgence, on soigne, même si la personne n’a pas les moyens de payer l’opération. C’est beaucoup plus compliqué quand il s’agit d’une maladie chronique », ajoute notre médecin. Or, du fait de la transition épidémiologique, les maladies cardiovasculaires, les cancers ou le diabète touchent de plus en plus de citoyens et coûtent cher au système de santé. Aujourd’hui encore, 70 % de la population n’est pas couverte et jongle entre la médecine privée et un système public où elle ne veut pas payer. Jusqu’à il y a quatre ans, l’hôpital accueillait 95 % des démunis. Grâce à la mise en place du Ramed et de l’Assurance maladie obligatoire (AMO), et au développement des assurances privées, l’hôpital public n’accueille plus que 65 % des plus pauvres. « Il y a une évidente volonté politique d’améliorer le secteur, mais ce sont des processus très longs à mettre en place », regrette le praticien. Le secteur public reste néanmoins prédominant : 50 % des médecins, 80 % du personnel paramédical et plus de 60 % des activités de consultation sont dans le public. L’État alloue 1,3 % du PIB au ministère de la Santé, mais
d’un budget insuffisant et drainent une population trop importante. Cette situation a des raisons en partie historiques, car la santé publique a tardé à être une priorité pour les autorités marocaines. Dans les années 1970, la sécheresse chronique et la guerre au Sahara ont grevé le budget de l’État. Les programmes d’ajustement structurel du Fonds monétaire international (FMI), mis en place dans les années 1980, ont eu pour première conséquence de réduire les budgets de la santé et de l’éducation. Quant au privé, le secteur est resté très limité jusque dans les années 1990. C’est à cette époque que les médecins du public ont obtenu le droit d’exercer à mi-temps en libéral. Les cliniques privées, équipées des dernières technologies, pullulent à présent dans
(suite page 133)
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DOSSIER 133
Tunis
TUNISIE ALGÉRIE LIBYE Population totale: 10,4 millions
SOURCES : UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE ET OMS
Nombre de médecins pour 1000 habitants (2008): 1,3 Espérance de vie à la naissance hommes/femmes (années): 70/75 Quotient de mortalité infanto-juvénile pour 1000 naissances vivantes: 23 Dépenses personnelles de santé par habitant (en dollars, 2008): 185 Dépenses publiques de santé en % du PIB (2009, estimation): 2 En Tunisie, contrairement à ce qui se passe au Maroc, les pathologies lourdes sont prises en charge par la sécurité sociale : les insuffisants rénaux ou les malades du sida n’ont pas à débourser d’argent pour se faire soigner. Une situation qui a aussi des explications historiques. Très impliqués politiquement, les médecins tunisiens ont réussi, dès l’indépendance du pays, en 1956, à faire de la santé publique un dossier central. Sur tout le territoire des dispensaires sont construits, de larges campagnes de vaccination sont menées, la gratuité des soins est étendue à tous et le régime de sécurité sociale devient obligatoire. Du fait de la transition épidémiologique et du coût des nouvelles mala-
dies, le régime de l’assurance maladie a été réformé en 2008 afin d’améliorer la couverture santé et le remboursement des assurés, et surtout contenir la dérive des coûts. Aujourd’hui, les médecins sont néanmoins préoccupés par leur avenir. Selon certains membres du corps médical, la Tunisie forme trop de praticiens (600 par an), d’où une paupérisation de la profession. D’autant que le nombre de postes hospitaliers à pourvoir chaque année ne dépasse pas les 120 et que l’entrée dans le privé reste difficile. ALGÉRIE DES EFFORTS INSUFFISANTS À l’indépendance, le pays comptait 500 médecins pour 10 millions d’habitants. La mortalité infantile y était de 180 ‰ et l’espérance de vie n’y dépassait pas 50 ans. Dès 1974, l’État instaure la gratuité des soins, ce qui élargit l’accès de la population aux services de santé. Les études médicales sont réformées, afin d’améliorer la qualité de l’enseignement et le renforcement de l’encadrement, ce qui a permis de disposer d’un grand nombre de praticiens ; des hôpitaux et des CHU sont également construits. Malgré cette politique volontariste, le système de santé publique souffre aujourd’hui de grandes disparités régionales en matière de ressources humaines. Les établissements publics sont inadaptés à l’évolution de la demande de soins et se sont considérablement paupérisés. Dans ce contexte, les médecins algériens sont nombreux à opter pour le privé ou pour l’étranger. Par ailleurs, penda nt la décen n ie noi re, des cent a i nes de praticiens ont fui le pays, laissant un grand vide derrière eux. Les progrès réels en matière de santé ne doivent cependant pas être occultés : le taux de mortalité infantile est estimé à 38 ‰ (contre 80 ‰ en 1984) ; l’espérance de vie est passée de 67,8 ans en 1990 à 72 ans ; et des maladies comme la rougeole et la tuberculose connaissent un recul appréciable. Ces résultats sont le fruit d’un effort humain et matériel qui s’est traduit par la multiplication des infrastructures sanitaires, totalisant plus de 70 000 lits d’hospitalisation (un lit pour 485 habitants), une augmentation du nombre
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Alger
MAROC
MAURITANIE
ALGÉRIE
MALI
LIBYE
NIGER
Population totale: 34,4 millions Nombre de médecins pour 1000 habitants (2008): 1,2 SOURCES : UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE ET OMS
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médecins tunisiens. Ils sont d’ailleurs les seuls sur le continent (hormis en Afrique du Sud), à effectuer fréquemment des greffes rénales, cardiaques ou de moelle osseuse. Dans ces conditions, pas étonnant que les Libyens, les Mauritaniens ou les Sénégalais se déplacent par milliers pour se faire soigner en Tunisie. « Je fais plus de 50 % de mon chiffre d’affaires avec des étrangers », reconnaît un radiologue tunisois. Quant aux Occidentaux, ils sont chaque année plus nombreux à coupler leurs vacances avec des soins, surtout esthétiques et dentaires.
TUNISIE
(suite de la page 131)
Espérance de vie à la naissance hommes/femmes (années): 70/72 Quotient de mortalité infanto-juvénile pour 1000 naissances vivantes: 38 Dépenses personnelles de santé par habitant (en dollars, 2008): 157 Dépenses publiques de santé en % du PIB (2009, estimation): 4,3 de professionnels de santé (plus de 36 000 praticiens, soit un ratio d’environ un médecin pour 1 000 habitants), et un accroissement des dépenses. Si les autorités ont beaucoup investi dans les équipements, les salaires des fonctionnaires restent très faibles et alimentent la grogne dans le secteur. En Algérie, un médecin généraliste commence sa carrière à 250 euros par mois et un spécialiste de niveau
Des grèves paralysent régulièrement les centres hospitaliers algériens. bac+12 à 450 euros (au Maroc, ils commencent à 727 euros et 910 euros, et en Tunisie à 791 euros et 935 euros). Depuis 2009, les CHU sont régulièrement paralysés par des grèves. Pour le docteur Mohamed Yousfi, président du Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique, « le système en vigueur encourage l’incompétence. Le gouvernement est en déphasage avec ses élites, qui se sentent méprisées malgré l’aisance finanLEÏLA SLIMANI cière du pays ». ■
134 DOSSIER du gériatre, en partie, est de rationaliser tout cela. » Outre sa compétence de prescripteur, il est aussi celui qui va pouvoir organiser et suivre une hospitalisation à domicile, autre point faible de la prise en charge tunisienne.
Un aîné rend visite à son frère à son domicile de Sfax. Les programmes de prévention ont permis de porter l’espérance de vie sans incapacité à 65 ans.
TUNISIE
Aux (trop) petits soins des séniors
SI LA PRÉVENTION DES PATHOLOGIES LIÉES À LA VIEILLESSE NE DATE PAS D’HIER, DES PROBLÈMES DEMEURENT : LA GÉRIATRIE PEINE À S’IMPOSER, TANDIS QUE L’HOSPITALISATION À DOMICILE N’EST PAS À LA PORTÉE DE TOUTES LES BOURSES.
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est un fait: la Tunisie vieillit. Les plus de 60 ans représentent aujourd’hui 10 % de la population et seront près de 18 % à l’horizon 2030. La hausse des dépenses de santé est inéluctable: si elles ont été en moyenne de 370 dinars (environ 192 euros) par habitant en 2009, elles sont cinq fois plus élevées chez les plus de 65 ans. Et l’augmentation de l’espérance de vie moyenne, actuellement de 74 ans, pourrait encore alourdir la note. Il faut par ailleurs compter avec l’apparition de nouvelles pathologies handicapantes (comme le cancer et la maladie d’Alzheimer). Le cancer, notamment à travers la lutte contre le tabagisme, est aujourd’hui le cœur de cible des actions de l’État, qui, dès les années 1970, avait lancé un programme national de prévention du diabète (communication radio-télé, prise en charge des traitements, etc.). Ces campagnes ont permis de porter l’espérance de vie sans incapacité à 65 ans, contre moins de 60 ans il y a une trentaine d’années. Mais la prévention a ses limites. L’accompagnement des malades de longue durée, majoritairement des séniors devenus dépendants, souffre
de deux manques. D’abord la formation. En effet, la gériatrie ne trouve pas encore sa place. Elle est considérée par le ministère de la Santé comme une compétence et non une spécialité, validée par un simple master depuis 2001. Les gériatres, peu nombreux et souvent formés à l’étranger, peinent à promouvoir leur domaine d’intervention. « Les familles s’adressent aux spécialistes, chacun d’entre eux prescrivant sans visibilité générale, si bien que le patient se retrouve avec trop de médicaments, parfois contre-indiqués, explique Samy Allagui, spécialiste en gériatrie. Le rôle
ONS ABID
COÛTEUSES AUXILIAIRES DE VIE
Il s’agit pourtant d’un élément crucial du traitement des personnes âgées, écartées des hôpitaux dès que leur état de santé nécessite un séjour de longue durée. Si, dans tous les cas, la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) assure une prise en charge totale des médicaments, les frais liés aux soins ne sont remboursés que lors des séjours en établissement. L’hospitalisation à domicile est à la charge des familles. Pas de problème a priori pour les classes aisées ni pour les plus démunis (personnes âgées seules), qui bénéficient de centres d’accueil publics. Il n’en va pas de même pour les classes moyennes, qui ont bien souvent du mal à s’organiser, dans un environnement social qui a changé. Les maisons communes spacieuses ont disparu, les familles vivent aujourd’hui plus à l’étroit, ce qui complique l’adaptation des habitations. Et les couples travaillent. L’accueil d’un sénior nécessite alors le recours aux auxiliaires de vie. Leurs services, délivrés dans le cadre d’une profession libérale, génèrent un surcoût non pris en charge par la Cnam. Les familles nombreuses pourront toujours trouver un compromis, mais « la situation la plus difficile est quand le sénior n’a qu’un seul enfant, relève Zine el-Abidine Ennaifar, psychiatre et expert auprès de la Cnam. C’est là où la Cnam doit encore intervenir. » Car rationaliser les dépenses maladie est de l’intérêt de tous. ■ FRIDA DAHMANI, à Tunis
À QUAND DES STRUCTURES D’ACCUEIL PRIVÉES ? L’OFFRE PRIVÉE DES ÉTABLISSEMENTS D’ACCUEIL médicalisés à destination des séniors est inexistante en Tunisie. Soumises par le ministère de la Santé à « un cahier des charges contraignant basé sur des normes européennes, ces structures requièrent des investissements bien trop lourds », estime le gériatre Samy Allagui. Cette exigence réglementaire vise à séduire une clientèle occidentale qui, pourtant, n’est pas prête à finir sa vie loin de chez elle. Outre le prix du bâti, l’investisseur doit compter 800 dinars le lit (environ 415 euros). L’amortissement ne peut être envisagé avec moins de 30 lits, et les professionnels estiment à 200 lits le seuil de rentabilité idéal. Et personne ne semble prêt, pour le moment, à prendre le risque. ■ F.D. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 5 8 8 - 2 5 8 9 • D U 15 A U 2 8 A O Û T 2 0 10
Nous ne nous contentons plus de prolonger la survie des patients. Ruggero della Bitta Responsable de la coordination régionale des affaires médicales, Unité Oncologie Genève, Suisse
Nos objectifs sont plus ambitieux. Nous avons changé de paradigme dans notre façon de mettre au point les médicaments. Développer des centaines de molécules dans l’espoir d’en trouver une pour traiter une maladie est une pratique qui appartient au passé. Aujourd’hui, les informations apportées par la révolution du génome humain sont mises à profit pour mettre au point dès le départ des traitements plus ciblés contre le cancer.
Merck Serono est la division biopharmaceutique de Merck, un groupe pharmaceutique et chimique international. En mettant les connaissances scientifiques au profit des avancées thérapeutiques, Merck Serono propose des solutions innovantes dans ses domaines de spécialité : oncologie, maladies neurodégénératives, autoimmunes et inflammatoires, fertilité et endocrinologie. Retrouvez d’autres témoignages sur : http://stories.merckserono.com
En oncologie, nous espérons que la médecine fera un bond en avant: notre objectif ultime est d’accroître le taux de guérison.
S’engager pour la science, s’engager pour la vie
Merck Serono est une division de Merck