LE PLUS DE JEUNE AFRIQUE
MINES
Katanga
Nouvel eldorado du cuivre
Nouvelle usine de cuivre et de cobalt de Ruashi Mining (coentreprise contrôlée par le sud-africain Metorex), près de Lubumbashi.
JB RUSSELL/COSMOS
Son sous-sol fait du plateau katangais une terre de prédilection pour les miniers de la planète. Après des décennies de monopole, lʼouverture à la concurrence a attiré des dizaines dʼopérateurs privés et entraîné un véritable boom de la production.
7-10 FÉV. 2011
An Affiliate of Freeport-McMoRan Copper & Gold
LE PLUS 57 LE PLUS DE JEUNE AFRIQUE
PRÉLUDE
MINES
Katanga
Nouvel eldorado du cuivre
CÉCILE MANCIAUX
JB RUSSELL/COSMOS
Promesses katangaises 7-10 FÉV. 2011
PA N O R A M A
Le réveil dʼun géant p. 58 R E P O R TAG E
Kolwezi en pleine croissance p. 64 E N T R E PR I S E
La Gécamines en sursis ? p. 68 É CO N O M I E
Les affaires reprennent p. 72 AG R I C U LT U R E
Vers davantage dʼautonomie p. 74 PORTRAITS
Culture du risque p. 77 SOCIÉTÉ
Melting-jackpot dʼexpatriés p. 78 FO O T BA L L
TP Mazembe, le dieu des stades p. 79 LO I S I R S
Les incontournables de « Lshi » p. 80 Direction : Danielle Ben Yahmed et Marwane Ben Yahmed Rédaction en chef : Cécile Manciaux Rédaction : Muriel Devey, envoyée spéciale, Tshitenge Lubabu M.K. et Arthur Malu-Malu
EN CE DÉBUT DE FÉVRIER 2011, deux ans après son effondrement, le cours du cuivre atteint un record historique. Il caracole à quelque 10 000 dollars la tonne sur le London Metal Exchange. Cette tendance durable ne fait plus seulement rêver le Katanga. Elle transforme son potentiel en réalité. La fameuse copperbelt (ceinture de cuivre) katangaise, qui relie les villes de Lubumbashi, Likasi et Kolwezi, recèle en effet 10 % des réserves mondiales de cuivre et, « accessoirement », 34 % de celles de cobalt. Ces ressources désormais prouvées ont, depuis des siècles, rendu célèbre la province la plus méridionale de la RD Congo, située le long de la frontière zambienne, et n’ont pas manqué, depuis tout aussi longtemps, d’attirer les explorateurs et opérateurs étrangers. Rien de nouveau, direz-vous. Pourtant, ce territoire – plus étendu que le Cameroun et presque autant que la France – pourrait rapidement changer la donne sur le marché mondial du cuivre. Que vaut au Katanga cette reprise semble-t-il pérenne des activités d’exploration et de production, alors que la planète minière est à peine sortie de la crise internationale qui l’a ébranlée ? Crise qui ne l’a d’ailleurs pas épargné puisque, d’après les chiffres du ministère provincial des Mines, une quarantaine d’opérateurs sur les quatre-vingts recensés ont cessé leurs activités. Passées ces turbulences et à l’issue de la revisitation des contrats miniers, le Katanga s’est ouvert à de nouveaux partenaires, majors et juniors, entraînant un regain des investissements, en amont comme en aval de la filière. La montée en puissance de la production de métal rouge a suivi : celle-ci a frôlé les 400 000 t en 2010 (+ 30 % en un an) et devrait dépasser 1,8 million de tonnes en 2015. Le Katanga peut donc désormais rivaliser, sinon avec le Chili – qui détient à lui seul 38 % des réserves mondiales connues de cuivre et est le principal producteur du minerai primaire avec plus de 5 millions de tonnes –, tout au moins avec ses challengers immédiats, parmi lesquels les États-Unis et le Pérou (environ 8 % chacun du marché mondial) ou encore la Zambie voisine (3,5 %), qu’elle pourrait rattraper dès cette année. La production des autres minerais qu’abrite le Katanga (cassitérite, coltan, manganèse, or, zinc…) suit la même tendance haussière, à commencer par celle de cobalt. Dans le sillage des miniers, des paraminiers et de leurs sous-traitants, l’économie katangaise tout entière s’ébranle, du BTP aux services. Des groupes financiers étrangers, notamment indiens et sud-africains, se sont installés et renforcent leur présence via l’ouverture d’agences bancaires dans les différentes villes de la province (autrefois réservée aux banques locales). Portés par la réhabilitation des voies de communication avec la Zambie, la Tanzanie et l’Angola voisins, les échanges régionaux sont redynamisés. Enfin, depuis deux ans, les opérateurs miniers semblent s’être engagés « pour de bon », et au-delà des besoins de leur activité propre, dans le développement socio-économique du territoire : investissement dans la création de fermes mécanisées, la construction d’établissements d’enseignement, d’hôpitaux… De quoi changer, pour les Katangais, le visage de la mine. ■
Coordination : Nisrine Batata Difcom – 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 Paris Tél.: + 33 1 44301960 – Fax: + 33 1 45200823 J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11
58 LE PLUS KATANGA
PANORAMA LE RÉVEIL Lʼannée 2010 a été marquée par la relance du secteur minier, dont la production doit quadrupler dʼici à 2015. Une dynamique qui permet à la province de moderniser ses infrastructures et de diversifier son économie. Un vaste chantier.
D
epuis quelques mois, la plus méridionale des provinces congolaises – qui doit son nom à Katanga, un chef local du milieu du XIXe siècle – est régulièrement sous les feux de la rampe. L’an dernier, alors que son chef-lieu, Lubumbashi, fêtait ses 100 ans et abritait la seconde édition de la biennale Picha – « image », en swahili –, son équipe de football, le Tout-Puissant Mazembe (lire p. 79), remportait, mi-novembre, la Ligue des champions de la Confédération africaine de football (CAF), avant de se classer deuxième de la Coupe du monde des Clubs. Et de s’imposer en finale de la Super Coupe Orange, le 29 janvier dernier, devant les officiels de la CAF réunis à Lubumbashi, où ils ont dévoilé la liste des futurs hôtes de la Coupe d’Afrique des nations – le Maroc en 2015 et l’Afrique du Sud en 2017. L’année 2010 a surtout été marquée par la reprise du secteur minier. Les gisements de cuivre et de cobalt bruissent à nouveau du brouhaha des pelleteuses et autres engins chargés d’extraire de leurs entrailles puis de transformer les minerais que s’arrache le monde entier. 40 % À 60 % DU PIB DU PAYS
De tout temps, sa richesse minière a fait de ce plateau, presque aussi grand que la France et dont l’altitude moyenne dépasse les 1 000 m, une province convoitée. Dès la conquête coloniale s’y sont affrontés Britanniques et Belges. Ces derniers, qui l’emporteront, y
BAUDOUIN MOUANDA POUR J.A.
MURIEL DEVEY, envoyée spéciale
Le chef-lieu, Lubumbashi, compte 2 millions d’habitants.
établiront l’Union minière du Haut-Katanga (UMHK), dont la nationalisation fin 1966 donnera naissance en 1967 à la Générale des carrières et des mines (Gécamines, lire pp. 68-69). Jusqu’à l’indépendance, le 30 juin 1960, la province – dont la capitale est Élisabethville (l’actuelle Lubumbashi) – aura un statut particulier, ses gouverneurs et vice-gouverneurs traitant directement
avec Bruxelles et non Léopoldville (aujourd’hui Kinshasa). Le 11 juillet 1960, aidés des Américains, les Belges, qui ne voulaient pas renoncer à un si riche filon, soutiendront la sécession de Moïse Tshombé (lire p. 61), à laquelle l’intervention des Nations unies mettra un terme en 1963. En 1971, le président Mobutu Sese Seko rebaptisera la province Shaba (« cuivre », en swahili),
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LE PLUS 59
DʼUN GÉANT
LE KATANGA EN BREF
2e plus grande province de RD Congo par sa superficie (après la Province Orientale) avec 496 877 km2 , soit plus de 21 % de la RD Congo. Elle est à elle seule plus étendue que la plupart des grands pays du continent (comme le Cameroun : 475 440 km2 ). Population 10 millions d’habitants. 3 villes principales Lubumbashi (chef-lieu, 2 millions d’habitants), Kolwezi (1,5 million d’hab.) et Likasi (480 000 hab.). 5 districts et 22 territoires (en plus des territoires urbains de Lubumbashi, Kolwezi et Likasi) : • District du Haut-Katanga : Kambove, Kasenga, Kipushi, Mitwaba, Pweto, Sakania • District urbanorural de Kolwezi : Lubudi, Mutshatsha • District du Lualaba : Dilolo, Kapanga, Sandoa • District du Haut-Lomami : Bukama, Kabongo, Kamina, Kaniama, Malemba-Nkulu • District du Tanganyika : Kabalo, Kalemie, Kongolo, Manono, Moba, Nyunzu Représentation nationale au Parlement 69 députés, 4 sénateurs. Gouvernement provincial Le gouverneur (Moïse Katumbi Chapwe) et le vice-gouverneur (Guibert Yav Tshibal) ont été élus en 2007 par les députés provinciaux pour cinq ans. Le gouvernement compte 10 ministres. Assemblée provinciale Composée de 103 députés, dont 44 élus au suffrage universel direct, elle est présidée par Gabriel Kyungu wa Kumwanza. Langues Français (officielle), swahili et plusieurs langues locales Monnaie Franc congolais (CDF). Parité au 01/02/2011 : 1 euro = 1 239,25 CDF ; 1 dollar = 904,024 CDF.
un nom qu’elle gardera jusqu’à la chute du Léopard, en 1997. Aujourd’hui, le Katanga est une zone d’affrontement géopolitique et économique entre Occidentaux et Asiatiques. Grâce à son secteur minier, qui a bénéficié d’environ 9 milliards d’euros d’investissements ces dernières années, la province représente entre 40 % et 60 % du PIB de la RD Congo. Après des
décennies de monopole – de l’UMHK puis de la Gécamines –, ce sont désormais des dizaines de sociétés privées, dominées par des étrangers, qui tiennent le haut du pavé. UN CARACTÈRE BIEN TREMPÉ
Malgré sa taille, le Katanga ne compte que 10 millions d’habitants, en partie concentrés dans les villes (voir « Repè-
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res ») de son Sud minier. Les groupes dominants y sont les Balubakat, les Arunds (Lundas et Tchokwes) et les Bembas. Plus quelques tribus, dont les Sangas. Si chaque communauté a son idiome, le swahili s’est imposé à tous. Outre le français – langue officielle de la RD Congo –, l’anglais a fait une percée remarquée, liée à la présence de sociétés anglo-saxonnes et asiatiques
60 LE PLUS KATANGA
KASAÏ OCCIDENTAL
et à la proximité de pays anglophones. Les mines katangaises attirent aussi des étrangers et des ressortissants d’autres régions congolaises (lire p. 78), en particulier des deux Kasaïs. Une présence que les politiciens locaux ne se privent pas de fustiger, surtout en période de crise économique. Dans les années 1990, des milliers de Kasaïens ont ainsi été chassés du Katanga. Un terrible épisode, qui a laissé des traces. Kinshasa a longtemps été accusé de profiter trop largement des fruits de la riche province. L’arrivée, en mai 1997, à la tête du pays du Katangais Laurent-Désiré Kabila, remplacé en janvier 2001 par son fils Joseph, a changé la donne. Cependant, alors que l’économie provinciale semble repartir, des tensions existent entre Katangais du Nord (Balubakat), dont Kabila père reste la référence et qui se sentent délaissés, et Katangais du Sud minier.
KASAÏ ORIENTAL
Kananga
Kabalo
Manono
HAUT-LOMAMI
LUALABA Sandoa Dilolo
Kamina
Kalemie
Nyunzu
Kaniama
Kapanga
Lac Tanganyika
Kongolo
TANGANYIKA
Mitwaba
Pweto Lac Moero
Bukama HAUT-KATANGA
ZAMBIE
Lubudi KOLWESI
Kambove
Mutshatsha Kolwezi
TANZANIE
Likasi
Kasenga
Lubumbashi
Kipushi
ANGOLA
Kasumbalesa
180 km
Sakania
Voie ferrée
DES ÉCHANGES TOURNÉS VERS LE SUD ET L’EST
RN1
Porte d’entrée en Afrique australe, la province semble tourner le dos à l’Atlantique et à Kinshasa. Il n’en fut pas toujours ainsi. Quand la ligne angolaise du chemin de fer de Benguela (CFB) fonctionnait encore et que les infrastructures de transport – ferroviaires, fluviales et routières – de la RD Congo étaient en bon état, c’est par la façade atlantique, via les ports de Lobito (Angola) et Matadi (RD Congo), que transitaient nombre de produits importés destinés au Katanga
e t q u ’é t a it évacué l’essentiel des produits miniers. À partir des années 1980, avec le délabrement des transports nationaux et l’arrêt du CFB, les flux commerciaux et économiques se sont déplacés vers l’Afrique australe et orientale et l’océan Indien. Un basculement favorisé par le bon réseau routier de ces régions ainsi que par l’interconnexion du réseau sud de la Société
nationale des chemins de fer du Congo avec ceux des pays voisins. Et conforté par la place grandissante prise par l’Asie dans le commerce avec la RD Congo. La réouverture du CFB pourrait réactiver l’axe angolais. Le géant sud-africain en prendra-t-il ombrage? Car, de tous les pays du continent, c’est l’Afrique du Sud qui domine dans les échanges extérieurs du Katanga et qui investit le plus dans la province.
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Merci de continuer à nous porter vers l’excellence. Votre équipe TMB
LE PLUS 61 Une importance qui s’explique par sa puissance économique et les liens politiques qu’elle entretient avec la RD Congo, ainsi que par la présence d’un grand nombre de Congolais en Afrique du Sud.
Fort de ses mines, le Katanga n’en reste pas moins une province à l’économie fragile. Malgré ses potentialités, le secteur rural – agriculture, élevage et pêche – y tient une place marginale, et l’expertise minière n’a guère été valori-
sée à l’extérieur. L’actuel gouvernement provincial s’emploie à diversifier l’économie et à mettre sur pied un réseau d’instituts supérieurs chargés de former des ingénieurs et des spécialistes miniers. Il est temps. ■
Ils ont fait le Katanga... et le Congo
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Le Lushois Frédéric Kibassa Maliba (1939-2006), entré au gouvernement en tant que ministre de la Jeunesse et des Sports (1967-1968, puis 1988), fut l’un des treize parlementaires (dont Étienne Tshisekedi) qui défièrent Mobutu en 1982, au temps du parti unique, en fondant l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Il a également détenu le portefeuille des Mines sous Laurent-Désiré Kabila (1998-1999). Enfin, parmi les personnalités politiques katangaises d’aujourd’hui, citons Vincent de Paul Lunda Bululu. Professeur de droit, Premier ministre pendant la transition (1990-1991), il s’est présenté à la présidentielle de 2006 pour le Rassemblement des forces sociales et fédéralistes (RSF, opposition) et, à 68 ans, est actuellement sénateur. SONS ET LUMIÈRES
Homme d’affaires – notamment dans l’aviation et les hydrocarbures – et homme politique – il fut deux fois ministre de Laurent-Désiré Kabila et sera ministre d’État sans portefeuille de Joseph Kabila, avant de prendre ses distances –, Pierre-Victor Mpoyo, dit Mpoy, 76 ans, est avant tout un artiste peintre de renommée internationale, exposé dans les plus grands musées et qui a fréquenté les maîtres des arts et des lettres (Picasso, Dali, Chagall, Cocteau, Malraux…). Parmi ses confrères qui ont fait rayonner l’école de Lubumbashi, citons Pili-Pili Mulongoy (1914-2007) et Mwenze Kibwanga (1925-1999). Côté musique, le chanteur et guitariste acoustique Jean Bosco Mwenda (1930-1990) a séduit l’Afrique anglophone d’expression swahili, où ses titres racontant la vie quotidienne étaient aussi populaires que dans le Katanga. Ils n’ont cependant pas conquis les Kinois, parce qu’il ne chantait qu’en swahili. Ses participations au Newport Folk Festival le firent connaître des musiciens de jazz en Europe et aux États-Unis. Enfin, le Katanga est également le berceau d’hommes de médias connus, à l’instar de Kibambi Shintwa (62 ans), directeur de la chaîne de télévision Numerica TV, à Kinshasa, de Kabulo Mwana Kabulo (56 ans), journaliste sportif à la télévision nationale et correspondant de Radio France Internationale (RFI), et de son confrère Kasongo Mwema Yamba TSHITENGE LUBABU M.K. Yamba (60 ans), journaliste à RFI. ■
MIROIR
RUE DES ARCHIVES/AGIP
SI UN KATANGAIS A MARQUÉ l’histoire contemporaine de la province et du pays, c’est Moïse Kapenda Tshombé. Né en 1919 à Musumba, cet homme d’affaires entre en politique et prend la tête de la Convention nationale du Katanga (Conakat), un parti fédéraliste fondé en 1958. Après l’indépendance du pays, opposé au Premier ministre Patrice Lumumba, Tshombé proclame la sécession de la province le 11 juillet 1960 et, le mois suivant, est élu président de l’État du Katanga. C’est à lui que Lumumba est livré le 17 janvier 1961 ; il assiste à son exécution. Lorsque les Casques bleus des Nations unies écrasent la sécession, en 1963, Tshombé s’exile en Espagne. Rentré au Congo en 1964 pour devenir Premier ministre du gouvernement de coalition, il est révoqué un an plus tard par le président Joseph Kasa-Vubu alors qu’il vient de remporter les législatives. Nouvel exil. Le 30 juin 1967, Tshombé reprend le chemin du pays lorsque son avion est détourné vers Alger, où il est incarcéré et où il meurt le 30 juin 1969. Ci-dessus: Moïse Tshombé, alors Premier ministre, en Autre personnalité mar1965. Ci-contre : Vincent de quante, Jason Sendwe, Paul Lunda Bululu en 1980; leader du parti Balubakat. il est aujourd’hui sénateur. Allié de Lumumba, il s’opposa fermement à la sécession en lançant une rébellion. Élu président de la province du Nord-Katanga en 1963, il fut assassiné en 1964. Godefroid Munongo (1925-1992), numéro deux de la Conakat et bras droit de Tshombé, fut son ministre de l’Intérieur durant la sécession du Katanga puis, en 1964, au sein du gouvernement central. Ministre des Affaires étrangères du Katanga sécessionniste, Évariste Kimba fut quant à lui nommé Premier ministre par Joseph Kasa-Vubu en octobre 1965, après le limogeage de Tshombé. Il ne resta en fonction qu’un mois, l’armée ayant pris le pouvoir. Kimba est resté dans la mémoire des Congolais pour avoir été le premier homme politique pendu sur la place publique (avec deux de ses compagnons), sous Mobutu, pour tentative de coup d’État. Neveu de Tshombé, Nguz a Karl-i-Bond (1938-2003) fut plusieurs fois ministre des Affaires étrangères (1972, 19761977, 1979-1980) et Premier ministre (1980-1981 et 19911992) de Mobutu Sese Seko. Lors de l’ouverture démocratique d’avril 1990, il avait créé un parti d’opposition, l’Union des fédéralistes et républicains indépendants (Uferi), avant de se rapprocher à nouveau du chef de l’État.
MCK TRUCKS SPRL Portrait d’un géant
Mine a ciel ouvert de Kinsevere ou la Société MCK s’occupe de l’excavation.
Créée en 2001, MCK TRUCKS Sprl est à ce jour l’une de grande entreprise de sous-traitance minière en République Démocratique du Congo, dont le siège social est à Lubumbashi dans la riche province du Katanga.
Mr Paul Kaponda, Directeur Financier.
Mr Moise katumbi. Mr Guy Kiluba, Directeur des Mines.
Ses fondateurs : Messieurs MOISE KATUMBI CHAPWE et KENNETH MACLEOD Moïse Katumbi s’est retiré de l’Entreprise au regard de ses obligations politiques, car il est l’actuel gouverneur élu du KATANGA.
Une pelle en plein travail d’excavation.
Mr Kenneth Macleod.
Elle s’occupe essentiellement de la vente de services dans le domaine minier, d’excavations principalement (forage, minage, chargement,...) avec une moyenne annuelle de 15 million de m3, grâce à une gamme d’équipements classés parmi les plus importants du pays, des pelles (allant jusqu’à 19 Tonnes), des camions benne de 25 à 100 tonnes, des sondeuses appuyées par des engins de terrassement comprenant des niveleuses, des bulldozers, des chargeuses, des tractopelles et des arroseuses
Benne B40D transportant les minerais de la mine vers le stock.
Un investissement évalué à plusieurs millions de dollars américains. MCK TRUCKS SPRL, s’occupe également de travaux de génie civil, tels que la construction de bassins de rejet d’usines, la construction et la réparation des plates-formes, l’entretien de routes d’intérêt général et de desserte agricole.
Une sondeuse Pantera 1500.
Au registre de ses plus grands projets peuvent être signalés l’OPEN CAST MINE, KAMOTO mine souterraine, KAKONTWE (CCC) aggregate and lime quarry, Kanfundwe mine à ciel ouvert, Kamoya pour le compte de la Gécamines, de 2000 à 2008. La Mine de diamant de Mbuji mayi pour le compte de ORYX
Une chargeuse alimentant le crusher.
Vue d’un bassin de décantation réalise par MCK Trucks au site de Ruashi Mining.
Ambitieuse, la société emploie plus d’un millier de travailleurs ,aussi bien locaux, qu’expatriés.
Engin en pleine maintenance.
Mining Company Katanga
TRUCKS
SPRL
Mining Company Katanga
TRUCKS
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Mining Company Katanga
TRUCKS
SPRL
Natural Ressources de 2003 à 2004. Dikulushi Copper Mine pour le compte de Anvil Mining company Limited de 2004 à 2007, Ruashi Mining pour le compte de Metorex, le projet Tenke Fungurume Mining pour Freeport McMoran, Chemaf pour le compte de Shalina Group entre autre.
Pelle en pleine action.
Actuellement, elle continue de s’occuper de la soustraitance minière et des travaux de génie civil dans plusieurs entreprises leader en RDC.
Personnel du service des finances.
Reconnue pour son implication sociale auprès des populations locales, elle a construit des hôpitaux, des écoles et foré des puits d’eau en milieux ruraux, avec également un soutien conséquent au domaine agriÉquipe de TP Mazembe sponsorisée cole local. Présente aussi dans par MCK Trucks. le domaine sportif, elle est notamment le sponsor du TP Mazembe, l’actuel vice champion du monde des clubs. Pleine de promesses, cette entreprise de droit congolais poursuit son ascension avec pour priorité le bien être et la sécurité de ses travailleurs selon les normes internationales admises dans le domaine, des relations privilégiées avec sa clientèle, et le respect de ses engagements envers les populations locales dans le respect de la protection de l’environnement.
La gente féminine de la direction.
Personnel de maintenance et des approvisionnements.
Euclid 100 tonnes allant au chargement des minerais.
En fait d’une appropriation locale du projet, la gestion courante de l’entreprise est actuellement assurée à 60 % par des cadres Congolais. Pelle en train de charger une benne Euclid 100 tonnes.
Mr Kenneth au milieu avec le personnel.
Propos recueillis par Nono N’Landu Personnel du service informatique.
Mining Company Katanga
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Mining Company Katanga
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Mining Company Katanga
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Eben, Directeur de la chaine de commande.
Dennis Collins, Directeur de la maintenance.
MURIEL DEVEY POUR J.A.
64 LE PLUS
REPORTAGE
Kolwezi en pleine croissance Cʼest dans lʼarc cuprifère, dont le district est le centre nerveux, que se concentrent les plus grands gisements. Voyage au cœur dʼune ville qui grandit au milieu des concessions.
D
epuis l’avion – un petit porteur d’une vingtaine de places –, la vue est grandiose. À l’est, la majestueuse rivière Lualaba – qui prendra le nom de Congo à Kisangani – ondule à travers champs, tel un gros serpent repu. Et nous arrivons à Kolwezi. Sur le trajet depuis l’aéroport, hormis quelques camions et bus jaunes « made in USA » qui sillonnent une route tout juste réhabilitée, rien n’indique que l’on se trouve dans le plus grand centre minier de la RD Congo. Pas plus qu’en centre-ville, dans la coquette commune de Manika, comme
endormie à l’ombre de ses arbres touffus. Seules les villas des anciens cadres de la Gécamines (lire pp. 68-69) rappellent le temps glorieux de l’ex-géant minier. Il faut pousser jusqu’à l’ouest du centre-ville et franchir la barrière d’accès de la concession que la Gécamines partage avec ses partenaires pour réaliser que l’on est bien dans l’antre des « mangeurs de cuivre », comme le rappelle une pancarte rouillée. Devant nous, un paysage lunaire, parsemé de touffes de verdure. Sur plusieurs kilomètres, ce ne sont que mines souterrai-
nes et carrières à ciel ouvert – vastes gradins circulaires de pierre et de terre rouge, parfois envahis d’eaux bleutées –, remblais grisâtres, amas poudreux olivâtres, pylônes, usines… Le tout baigné de nuages de poussière et de fumée. Au lointain, on distingue des creuseurs, souvent très jeunes, et quelques femmes et négociants, « petits poucets » perdus dans l’immensité des lieux. UNE CITÉ INTERNATIONALE
L’empire minier de Kolwezi s’étend bien au-delà de cette concession. Il couvre l’ensemble du district (formé des communes urbaines de Manika et de Dilala, et des territoires ruraux de Lubudi et de Mutshatsha). L’un des plus grands projets y est mené par Kamoto Copper Company (KCC), un partenariat
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LE PLUS 65 L’ELDORADO SE TROUVE AU SUD
Kasaï Occidental
Kasaï Oriental
BURUNDI TANZANIE
Sud-Kivu Maniema
Lac Tanganyika
Katanga nga ng ZAMBIE
Kolwezi wezi
Likasi Lik Lubumb Lub Lubumbashi
ANGOLA
Cuivre et cobalt Cuivre Étain
Manganèse èse Charbon Uranium
CUIVRE
10 %
RESPONSABILITÉS SOCIALES
entre Katanga Mining, filiale du suisse Glencore, et la Gécamines. Sa fusion avec DRC Copper and Cobalt Project a permis à KCC de mettre la main sur les importants gisements de Kamoto et de Kov. Glencore est aussi actionnaire de Mutanda Mining, via sa filiale Samref, qui a confié l’exploitation de sa carrière de Kisanfu au libanais Bazano. Glencore gère quant à lui l’usine, dont la production de 20 000 tonnes de cathodes doit tripler d’ici à 2012, grâce à deux nouvelles unités d’électrolyse. L’autre grande concession est confiée à Tenke Fungurume Mining, contrôlé par l’américain Freeport-McMoRan Copper & Gold, aux côtés de son compatriote Lundin et de la Gécamines: un royaume d’une centaine de collines, à l’est de Kolwezi, formant les mines de Kwatebala et de Tenke-Sefu-Fwaulu, auxquelles s’ajoutent deux usines de transformation du cuivre et du cobalt. Parmi les poids lourds figure aussi Metalkol, dont l’actionnaire majoritaire, le kazakh Eurasian Natural
SOURCE : MINISTÈRE DES MINES, 2010 - OCDE
des réserves mondiales
Espace urbain et zone minière se côtoient.
399935 t produites en 2010 (contre 279 000 t en 2007) et une prévision de 1,8 million de tonnes en 2015 COBALT
34 %
des réserves mondiales
39 327 t produites en 2010 (41 000 t en 2007) et une prévision de 137 800 t en 2015
Resources Corp. (ENRC), a récupéré les riches rejets de Kingamyambo, autrefois attribués à Kingamyambo Musonoi Tailings, une filiale du canadien First Quantum Minerals – dont le litige avec l’État congolais sur ce dossier est actuellement soumis à un arbitrage international. ENRC a également pris le contrôle de Boss Mining, qui exploite la mine de Mukondo, à Kakanda, et dispose de deux concentrateurs et d’une usine hydrométallurgique. Des projets de plus pet ite enverg ure, en phase d’exploration, sont menés par la Société d’exploitation des gisements de Kalukundi, détenue par l’australien Africo Resources, ainsi que par la Société minière de Deziwa et Ecaille C, une filiale de Platmin Congo. Les Indiens sont présents également, via Kisanfu Mining, une coentreprise associant Aurum, la Société minière du Katanga et Mineral Mining Resources.
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Enfin, parmi les compagnies chinoises opérant dans la province, la plus célèbre est la Sino-Congolaise des mines (Sicomines), un partenariat entre China Railway, Sino Hydro et la Gécamines. La Sicomines a hérité des gisements de Dikuluwe, Mashamba, Jonction D et Cuvette Dima, mais leur exploration est retardée, la carrière étant noyée. Les Chinois se rattrapent via la Compagnie minière de Musonoï (Western Mining) et la Minière de Kalumbwe Myunga (China Overseas Engineering Corp.), en phase d’exploration. Quant à la Congo Dong Fang International Mining, elle pourrait reprendre l’exploration, actuellement à l’arrêt, des rejets de la mine de Mutoshi, détenue par la Société minière de Kolwezi (joint-venture entre Anvil Mining et la Gécamines). Forage, prospection, construction de mines, production, réhabilitation et réalisation de concentrateurs et d’usines métallurgiques… Les sites sont de véritables ruches. Certains sont aussi pourvus de logements pour les ouvriers recrutés aux quatre coins du monde. Les travailleurs congolais, eux, logent en ville, notamment dans les cités minières – Musonoï, Kapata et Luilu – construites par la Gécamines. Pou r nou r r i r et s oig ne r leu r s employés et s’acquitter de leurs responsabilités sociales vis-à-vis des villages situés dans leurs périmètres, les compagnies investissent dans l’agriculture (lire p. 74), forent des puits, construisent des hôpitaux, des écoles… Des réalisations auxquelles elles consacrent un pourcentage des droits superficiaires et de la redevance minière ; la part qui leur est demandée, selon elles.
Sur plusieurs kilomètres, ce ne sont que mines souterraines et carrières à ciel ouvert. Pourtant, certains exigent la mise en place d’un organe tripartite – pouvoirs publics (État et province), société civile et représentants des miniers – chargé de contrôler la mise en œuvre effective, par les entreprises, de leurs responsabilités sociales. Mais ce sont surtout l’approvisionnement énergétique et les transports qui préoccupent les miniers. Bien qu’assu-
66 LE PLUS KATANGA rée par les centrales hydroélectriques de Nseke et Nzilo, par la connexion aux lignes à haute tension de la centrale d’Inga (dans la province du BasCongo) et par des groupes électrogènes, l’offre en énergie est très insuffisante. Tous attendent donc l’achèvement de la centrale de Busenga, sur la Lualaba, à 50 km de Kolwezi. Autre chantier suivi de près : la reconstruction du chemin de fer angolais de Benguela (CFB), détruit par la
avec ses aléas, en particulier sur le tronçon Kolwezi-Likasi, en cours – enfin – de bitumage. Implantation d’agences bancaires, de magasins, d’hôtels et de restaurants, amélioration de la voirie (en partie financée par les miniers)… Avec la reprise, Kolwezi s’équipe progressivement.
guerre civile dans ce pays (1975-2002). L’État angolais, qui a confié les travaux à des entreprises chinoises, annonce que ce réseau de 1 350 km devrait être opérationnel en 2012. Il permettra d’évacuer dans de meilleures conditions les minerais katangais depuis Dilolo, le tout proche poste frontalier, et d’acheminer les équipements industriels lourds depuis le port angolais de Lobito, sur la côte atlantique. D’ici là, le transport s’effectue surtout par la route,
LE REVERS DE LA MÉDAILLE
De quoi réjouir Mme la maire, ex-cadre de la Gécamines, qui fut bourgmestre de la populaire commune de Dilala. Mais la médaille a son revers. L’afflux de migrants venus d’autres districts du Katanga, des provinces voisines (Kasaï et Maniema), voire des pays limitrophes, a fait exploser la population de
MURIEL DEVEY POUR J.A.
La concession de la Gécamines et de ses partenaires à Kolwezi.
MAJORS ET JUNIORS S’ACTIVENT PLUS DE 1 200 PERMIS DE RECHERCHE, quelque 130 permis d’exploitation… La province est un eldorado du cuivre. Et c’est dans l’arc cuprifère, entre Kolwezi et Sakania, que se trouvent les gisements les plus juteux. Donc les grandes sociétés, particulièrement les jointventures impliquant la Gécamines. Dans la zone de Likasi, les poids lourds sont la Société d’exploitation de Kipoi (filiale de l’australien Tiger Resources, qui explore aussi le gisement de Lupoto), Ruashi Mining (contrôlé par le sud-africain Metorex), la Compagnie minière du Sud-Katanga (groupe Forrest) et le libanais Bazano. Les Chinois sont notamment présents via la Compagnie minière de Luisha (China Overseas Engineering Corp. et China Railway Engineering Corp. – ou Crec) et l’important projet Shituru Mining Corp. (East China Capital Holding). Dans les zones de Lubumbashi et de Sakania, les grands projets sont menés par la Compagnie minière du Sud-Katanga (Forrest), qui dispose du nouveau concentrateur de Kipushi, la Société pour le traitement du terril de Lubumbashi (un partenariat entre Forrest et le finlandais OMG Kokkola Chemicals Holding BV), Ruashi Mining et Crec, qui traite la production de Comilu. Citons encore le projet de Chemaf (groupe indien Shalina Resources), celui de la Société minière du Katanga (coentreprise entre des Indiens et la Gécamines) et, l’un des plus grands projets de la zone, Anvil Mining Kulu Concentrate Kinsevere (AMSK), contrôlé par l’australien Anvil Mining. Tout au Sud, l’exploration mobilise l’indien Aurum en partenariat avec Tiger Resources et la Sodifor, une coentreprise entre le sudcoréen Fortune et la Sodimico, qui a repris les titres miniers de FronM.D. tier et de Comisa (filiales de First Quantum). ■
La centrale électrique de Busenga, sur la rivière Lualaba, est très attendue. Kolwezi. « Nous avons 1,5 ou 2 millions d’habitants, je ne sais pas… Ce que je constate, c’est que la ville s’étend de plus en plus vers le fleuve et que les familles s’entassent dans une même pièce », explique Charlotte Cime, « Maman » pour ses administrés. Une urbanisation accélérée qui pose des problèmes, aussi bien en ce qui concerne l’aménagement et les services urbains (logement, assainissement, eau, électricité…) que le civisme, la sécurité ou même l’alimentation. « Il faut remettre nos populations aux champs », martèle l’élue, inquiète du déficit de produits agricoles. Au premier rang de ses préoccupations figurent également la santé – avec des projets de nouveaux hôpitaux, centres de santé et cliniques mobiles – et l’éducation. La scolarisation primaire, notamment, est en forte baisse depuis la fermeture des écoles de la Gécamines. « Nous devons rouvrir des écoles publiques, réhabiliter notre université et nos instituts supérieurs, les doter en matériel, et construire des logements d’étudiants pour que Kolwezi redevienne le carrefour universitaire qu’il était autrefois », martèle Mme la maire, qui imagine le mieux pour sa ville. Le cœur cuprifère de la RD Congo le vaut bien. ■ MURIEL DEVEY
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68 LE PLUS KATANGA ENTREPRISE
La Gécamines en sursis ? Contrats renégociés, réorganisation en profondeur, changement de statut et de direction... En 2011, lʼex-société publique prend un nouveau départ, mais est loin dʼavoir tous les atouts en main.
F
in décembre 2010, la Générale des carrières et des mines (Gécamines) est devenue une société commerciale. Une mesure qui s’inscrit dans le cadre de la réforme des entreprises publiques du pays. Mission de ses nouveaux dirigeants, Albert Yuma Mulimbi, président du conseil d’administration, et Kalej Nkand, administrateur délégué général (lire encadré) : permettre à la Gécamines de redevenir un opérateur minier à part entière, de nouveau capable de déployer une activité propre. Un vrai défi, car l’ex-entreprise publique, née en 1967 sur les cendres de l’Union minière du Haut-Katanga (UMHK), s’est effondrée sous l’effet cumulé d’une mauvaise gestion, des troubles sociopolitiques des années 1990, des affrontements de 1998-2003 et du gel des financements internationaux qui s’est ensuivi. Trop exsangue pour payer les droits superficiaires (des taxes instituées par le code minier de 2002) comme pour relancer l’outil de production ou l’exploration, la Gécamines a dû « libérer » nombre de ses permis et les concéder à des sociétés privées, sous forme de joint-ventures. Une option facilitée par l’ouverture du secteur à la concurrence. Au total, trente-cinq contrats ont été signés, parmi
Le groupe a dû former des joint-ventures, comme la Société pour le traitement du terril de Lubumbashi.
lesquels une trentaine ont été renégociés. Aujourd’hui, sept d’entre eux sont en production. L’ex-géant minier ne possède désormais plus qu’une poignée de gisements en propre, dont une partie sans réserves certifiées. S’y ajoutent quelques unités industrielles (concentrateur de Kambove, usine de zinc et four Felco à Kolwezi, usines pyrométallurgiques de Lubumbashi et de Shituru, fonderie de Panda à Likasi, usine d’électrolyse de Luilu…) où sont traités les minerais provenant des remblais de Mukine et des rares mines exploitées par la Gécamines (dont celle de Kilamusembu), ceux de certains joint-ventures, et ceux livrés par des coopératives de creuseurs en échange de leur accès aux mines. Soit une production propre de 20 000 tonnes de cuivre et de cobalt par an. Très loin des 450 000 t de
UN TANDEM FINANCIER AUX COMMANDES NOMMÉS LE 20 NOVEMBRE 2010 PAR LE CHEF DE L’ÉTAT, Joseph Kabila, les nouveaux dirigeants de la Gécamines sont tous deux katangais et proches du gouverneur de la Banque centrale du Congo (BCC), Jean-Claude Masangu Mulongo. Le nouveau président du conseil d’administration, Albert Yuma Mulimbi, également proche du président, est une figure bien connue du milieu des affaires. Depuis 2005, il préside la puissante Fédération des entreprises du Congo (FEC). À 55 ans, cet homme à poigne, originaire du nord du Katanga, ancien étudiant de
l’Université catholique de Louvain (en Belgique), cumule les casquettes. Outre les fonctions de directeur général adjoint d’Utexafrica (filiale de la société financière et de gestion Texaf), qu’il a rejoint en 1983, il est administrateur de plusieurs sociétés congolaises et de diverses institutions – dont la Chambre de commerce belgo-congolaise –, vice-président pour l’Afrique centrale de la Conférence permanente des chambres consulaires africaines et francophones et, depuis 2003, administrateur et président du comité d’audit de la BCC.
Né à Likasi le 19 novembre 1960, économiste de formation (option gestion financière) et diplômé de l’Université de Kinshasa, Kalej Nkand a quant à lui fait l’essentiel de sa carrière à la BCC. D’abord au département études, ensuite en tant que directeur de la banque au Katanga (2001-2009) et, enfin, comme directeur de la trésorerie. Avec un interlude de deux ans au gouvernorat du Katanga, où il officia comme conseiller économique d’Augustin Katumba Mwanke, qui fut gouverneur de la province de 1998 à 2001. ■ M.D.
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THIERRY MICHEL
1986, l’année record. Le niveau de production espéré par la nouvelle Gécamines est de 35 000 t de cuivre et de cobalt en 2011 et de 75 000 t en 2015. L’URGENCE : CERTIFIER LES RÉSERVES
La stratégie de l’entreprise tient en deux points. Il s’agit tout d’abord de relancer la prospection et la recherche afin de confirmer les réserves de ses gisements. Il lui faut ensuite investir dans la réhabilitation et la modernisation des usines existantes, ainsi que dans la construction d’une usine d’extraction par solvant – enveloppe nécessaire pour la seule année 2011 : 150 millions de dollars (110 millions d’euros). Mais comment lever des fonds alors que la dette de la Gécamines s’élève à 1,6 milliard de dollars et que son activité de production ne rapporte que de 50 à 100 millions de dollars par an ? La solution ne se trouve pas du côté des partenariats : les pas-de-porte dus par les sociétés contractantes n’ont pas été entièrement réglés et les royalties ne sont pas énormes. Quant aux dividendes que la Gécamines peut espérer tirer de ces accords, il va falloir attendre, beaucoup de projets étant en phase d’investissement. Impossible aussi, pour le moment, de faire entrer des investisseurs privés dans le capital de la nouvelle entité – détenue à 100 % par l’État –, faute de « biscuits » à leur proposer. Tout est suspendu à la certification des réserves. Outre l’établissement de règles de gestion rigoureuses afin de dégager plus de bénéfices, la nouvelle direction mise sur l’allègement de la dette de la Gécamines : « On doit se défaire d’un passif que l’entreprise ne pourrait pas assumer », explique Kalej Nkand. Autre cible : la réduction de la masse salariale, avec la mise en retraite ou en préretraite de 3 500 à 4 000 employés, soit près de la moitié de l’effectif actuel, pour un coût d’environ 20 millions de dollars. ■ MURIEL DEVEY J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11
CHEMAF
CHEMAF : L’expertise Chemaf SPRL est un leader dans la production du Cuivre et du Cobalt en République démocratique du Congo (RDC) ; Chemaf est une société de droit congolais, enregistrée au nouveau registre de commerce de Lubumbashi.
À partir de la mine de L’Étoile la production annuelle est de : ◆ Mine de l’étoile : 1,5 Million de tonnes de minerais a 3,1% Cu et 0,5% Co. ◆ Usines hydrométallurgie d’USOKE : 18 000 tonnes de Cathodes de Cuivre à 99,999% et 3 000 tonnes de Cobalt sous forme de Carbonate à 20 % Co.
Réserves Géologiques : En dehors de la mine de l’Étoile, actuellement en exploitation ayant près de 15 millions de tonnes de minerais contenant 540 000 tonnes de Cuivre et 100 000 tonnes de Cobalt, Chemaf détient près de 42 permis de recherche, principalement aux alentours de Kolwezi, à coté des grands gisements et mines de la ceinture du Cuivre.
Métallurgie de pointe pour des résultats exceptionnels :
◗ Concentration en Milieu dense Le traitement de minerais à CHEMAF SPRL commence par une concentration en milieu dense des toutvenant de la mine de L’Étoile - Le concentrateur a une capacité de traitement de 8 000 tonnes sèches par jour à 0,6 % Co et 3 % Cu, pour produire près
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de 700 tonnes sèches de concentré par jour à 10 % Cuivre et 1% Co ;
◗ Concassage, broyage et lixiviation Le concentré est ensuite acheminé vers l’atelier de concassage et broyage humide ; la pulpe issue du broyage est ensuite épaissie sur un filtre à bande horizontale qui en extrait l’eau ; le gâteau épaissie est ainsi repulpé avec le raffinat provenant de l’unité d’extraction par solvant Cuivre tandis que l’eau extraite est recyclée au broyeur ; la lixiviation du cuivre et du cobalt se fait par addition d’acide et du dioxyde de soufre ; la séparation solide liquide après lixiviation se fait sur une série des décanteurs laveurs, filtres presses et filtre à bande horizontale pour générer la liqueur mère qui est pompée au circuit d’extraction par solvant du Cuivre.
◗ Extraction par solvant du Cuivre Le cuivre est extrait de la liqueur mère par un solvant organique sélectif pour générer le raffinat qui est envoyé à l’étape de récupération du cobalt. La phase organique chargée en cuivre est régénérée après stripage puis recyclée en tête d’extraction tandis que la phase aqueuse chargée en cuivre est envoyée à l’électrolyse d’extraction.
◗ Électro- extraction du Cuivre La solution riche en cuivre débarrassée de la phase organique est ensuite pompée dans un tank de recirculation où elle circule dans des cellules d’électrolyse où le cuivre est déposé sous forme métallique. Les cathodes de cuivre obtenues ont une pureté de l’ordre de 99,999 % Cu.
◗ Extraction du Cobalt Avant extraction du cobalt la saignée de raffinat est soumise à une étape de purification dans laquelle le cuivre résiduel, le fer, l’aluminium et le manganèse sont éliminés ; le filtrat provenant de cette étape de purification est pompé dans des cuves placées en cascades pour précipiter le Cobalt sous forme de carbonate ; la pulpe après réaction est épaissie et filtrée sur des filtres presses pour obtenir un gâteau humide qui sera ensuite séché pour obtenir le carbonate de cobalt en poudre titrant 20-30 % Co. La précipitation bien que récupérant avec succès le cobalt , n’élimine pas pour autant toute les impuretés telles que le Manganèse, le magnésium, le Zinc, le Nickel... Aussi Chemaf a-t-il décidé d’utiliser en plus de la précipitation, l’extraction par solvant et l’électrolyse du cobalt pour produire du cobalt de haute pureté ; pour ce faire, un circuit d’extraction par solvant et électrolyse du cobalt d’une capacité de 6 600 tonnes par ans et en cours de construction et sa mise en service est prévue pour le deuxième semestre de l’année 2012.
Responsabilités sociale et développement communautaire
- Don de médicaments et soutien aux hôpitaux et centre de santé locaux, - Sponsoring des équipes sportives locales.
◗ Domaine de l’éducation - Attribution des bourses et soutien à l’université de Lubumbashi, - Formation continue pour les travailleurs.
Chemaf Emploie plus de 3 000 employés et contribue à leur bien être. ◗ Projets d’extension - Augmentation de la capacité de l’usine d’USOKE pour produire ≥30000 tonnes Cuivre cathodique et ≥ 3000 Cobalt sous forme de carbonate - 2012, - Construction d’une usine de flottation à la mine de l’Étoile pour le traitement des minerais mixte et sulfurés - 2013, - Construction d’une usine d’extraction par solvant et électrolyse cuivre à la mine de l’étoile - 2014, - Construction d’un concentrateur en milieu dense à Kapamba (Kolwezi) - 2014.
◗ Domaine de l’infrastructure - Construction des routes asphaltées dans la commune Kampemba, - Construction des ponts dans la ville de Kolwezi - Réhabilitation des locaux des écoles locales, - Contribution a l’amélioration de la desserte en eau et l’électricité au Katanga.
◗ Domaine de la santé et du sport - Soins médicaux gratuits pour les travailleurs et leurs familles,
Shiraz Virji Chairman de Chemaf-SPRL
Siège social : 144 Avenue USOKE, Quartier Industriel, Commune de Kampemba, Lubumbashi / Province du Katanga République Démocratique du Congo
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72 LE PLUS KATANGA ÉCONOMIE
Les affaires reprennent Avec la relance de lʼactivité minière, lʼembellie profite en premier lieu aux secteurs de la banque, des transports, du BTP et des services.
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un des premiers bénéficiaires de la reprise économique katangaise est le secteur bancaire. Outre les acteurs anciennement implantés – Banque commerciale du Congo (BCDC) et Banque internationale pour l’Afrique au Congo (Biac) – et la Trust
40 % de leurs recettes d’exportation dans les banques locales », indique Didier Tilman, directeur de Rawbank dans le Katanga. En matière de transports, la Société nationale des chemins de fer du Congo (SNCC), dont les voies et le matériel roulant sont très dégradés, n’est pas la mieux placée pour répondre aux besoins d u s e c t e u r m i n i e r, en pleine expansion. D’autant que « le trafic, qui est actuellement de 8 000 à 10 000 tonnes par mois, doit passer à 40 000 t par mois en 2015 », indique le directeur commercial de la SNCC, Ir Wassa Wa Gombele. Le lancement, en 2011, du projet de transport multimodal (PTM), qui prévoit, entre autres, le renouvellement de 200 km et la restauration de 490 km de voies, ainsi que l’achat de matériel roulant, devrait améliorer la situation… Mais pas avant trois ans – au moins. Le déclin du chemin de fer a profité aux transporteurs routiers. L’es-
Le déclin du chemin de fer a profité aux transporteurs routiers, surtout sud-africains. Merchant Bank, dont le siège est à Lubumbashi (créée en 2004, elle est déjà l’une des plus importantes banques congolaises), de nouveaux établissements ouvrent des agences dans le chef-lieu de province et les autres villes du bassin minier, dont la Banque internationale de crédit et Rawbank. L’objectif : engranger les dépôts des particuliers, des PME et, surtout, des grands comptes, notamment des miniers, « censés rapatrier
sentiel du trafic se fait en effet par la route, les exportations minières et les importations de marchandises diverses (dont les intrants pour l’industrie minière) mobilisant chaque mois 600 à 900 camions, qui font la jonction entre la province et les ports de Tanzanie, de Namibie et d’Afrique du Sud. Une manne, vue du péage rou-
VICTOR NGEZAYO Président du groupe Ngezayo
TOUT COMMENCE EN 1974, quand Victor Ngezayo crée Tour Hôtel, une chaîne d’ampleur nationale, avec des partenaires étrangers et congolais. De cette aventure naîtront quelques hôtels célèbres implantés dans l’est de la RD Congo – d’où la mère de Ngezayo est originaire – et à Kinshasa. En 1981, il rachète le Park Hôtel, l’ex-Léo-II, fondé en 1929, une institution du centre-ville de Lubumbashi. « Le projet était porteur, car à l’époque, l’économie était soutenue
par la Gécamines. » Tout baigne jusqu’en 1998, lorsqu’éclate la guerre. L’hôtel sera occupé jusqu’en 2003. Des déboires qui ne découragent pas Ngezayo. Pas plus que la baisse du taux d’occupation en 2008-2009, liée à l’effondrement du secteur minier. Depuis, l’activité est repartie. Après un changement de direction et l’arrivée d’un nouveau chef de cuisine, des investissements sont engagés pour rénover le Park Hôtel et accueillir une clientèle appelée à croître. ■ M.D.
MURIEL DEVEY POUR J.A.
LʼHÔTELLERIE COMME SECONDE NATURE
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LE PLUS 73 minérale, fourniture de matériels et d’intrants… De quoi favoriser la sous-traitance locale. Cependant, « beaucoup de miniers ont leur propre circuit d’approvisionnement et leurs sous-traitants habituels, qui sont à l’extérieur. Ils se débrouillent donc seuls », explique Félicien Tshi-
Les établissements financiers (ici à Lubumbashi) sont les premiers bénéficiaires de la reprise.
tier entre Kolwezi et le poste douanier de Kasumbalesa, mais une surcharge catastrophique pour les routes. Près de 80 % du marché du transport routier est occupé par des Tanzaniens et, surtout, des Sud-Africains. Les transporteurs congolais sont peu nombreux. À l’exception de la société Hakuna Matata, leurs moyens leur permettent rarement de s’acquitter du dépôt de garantie demandé pour lever les marchandises dans les ports de la sous-région. SOUS-TRAITANCE LOCALE
Le transport aérien a aussi pris de la hauteur. Luano, l’aéroport international de Lubumbashi, est desservi tant par des compagnies provinciales (qui assurent les liaisons avec l’hinterland minier), que nationales (dont, prochainement, Korongo Airlines, fruit d’un partenariat entre le belge Brussels Airlines et l’Entreprise générale Malta Forrest, berceau du groupe George Forrest International) et internationales (South African Airways, Ethiopian Airlines et Zambezi Airlines). Le dynamisme des
échanges bénéficie bien entendu aux divers transitaires internationaux, comme Gecotrans et SDV. To u j o u r s p o u r r é p o n d r e a u x besoins et à la demande des miniers, d’autres activités se développent : restauration collective, logistique, t r a v au x d e g é ol o g i e , d ’a n a l y s e
MURIEL DEVEY POUR J.A.
Le groupe Forrest compte investir dans l’hydroélectricité avec des Sud-Coréens. bangu Yamba, le président de la section katangaise de la Fédération des entreprises du Congo (FEC). Dynamisés par les besoins en usines, en bureaux et en logements des miniers, ainsi que par les programmes routiers ou les projets de réhabilitation et de constr uction de centrales hydroélectriques, les chantiers d’infrastructures et de BTP mobilisent des sociétés locales (Safricas, Forrest…) et étrangères (dont le sud-africain Group Five et la China Railway Engineering Corporation). Misant sur ces marchés porteurs, le groupe Forrest compte, d’une part, investir dans l’hydroélectricité en partenariat avec des Sud-Coréens et, d’autre part, relancer la production de ses deux cimenteries, Interlacs et Cimenkat, en s’associant avec l’allemand HeidelbergCement. ■ MURIEL DEVEY
MILLE ET UNE POSSIBILITÉS POUR L’ÉCOTOURISME PARCS NATIONAUX DE L’UPEMBA ET DES KUNDELUNGU, lacs naturels – dont le vaste Tanganyika –, chutes de la Lofoï, source du fleuve Congo, villes historiques rappelant l’aventure minière… Le Katanga a de quoi attirer les visiteurs de tout poil. En particulier la nouvelle génération des écotouristes. Toutefois, en dehors des villes minières, qui abritent l’essentiel des hôtels, et du parc animalier Muyambo Park, près de Lubumbashi, peu de sites ont été aménagés pour le moment. Par ailleurs, si le Sud minier est doté d’un assez bon réseau routier, le reste de la province n’est guère facile à parcourir. La rare clientèle touristique se compose pour l’heure de visiteurs locaux (expatriés et Congolais aisés) et de quelques hommes d’affaires étrangers de passage. Pour développer un marché qu’ils savent porteur, certains acteurs privés, comme la société congolaise Number One, investissent dans la reconstitution de réserves de faune et la création de lodges. D’autres préparent des projets d’aménagement de sites lacustres, propices aux sports nautiques et à la pêche sportive. ■ M.D.
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Plantation de riz près de Kashobwe, dans l’est du Katanga.
AGRICULTURE
Vers davantage dʼautonomie Largement sous-exploité, le potentiel de la province commence, enfin, à être mis en valeur. Objectif : sʼémanciper de la dépendance aux importations alimentaires.
M
algré leur potentiel agropastoral et piscicole, les campagnes katangaises ne nourrissent pas la province, contrainte d’importer une grande part de son alimentation. « La moitié de nos besoins en maïs, soit environ 500000 tonnes par an, est couverte par des importations venant de Zambie, du Malawi et d’Afrique du Sud », explique le ministre provincial de l’Agriculture, Barthélemy Mumba Gama. De même, une grande partie du poisson et de la viande consommés localement vient de Namibie et du Zimbabwe. Sans compter le blé, le riz, le sucre, l’huile de table et autres produits qui arrivent du Brésil, du Moyen-Orient, de Chine et de Thaïlande. CERCLE INFERNAL
Tant et si bien que le montant consacré aux importations alimentaires est trois fois plus élevé que celui provenant de la redevance minière. Un cercle infernal, particulièrement dangereux en période de crise alimentaire mondiale et dans le cadre d’une économie extravertie car, comme le précise Barthélemy Mumba Gama, « les exportations minières et les
importations alimentaires du Katanga sont, les unes et les autres, très dépendantes des cours mondiaux ». Cette situation trouve son origine dans les faibles rendements de l’agriculture villageoise, qui produit pour une consommation locale mais ne couvre pas les besoins urbains, et dans la prééminence du secteur minier, qui mobilise l’espace et les énergies. Pour inverser la tendance, le gouvernement provincial s’est donné trois priorités. La première est d’inciter les petits exploitants à se regrouper en coopératives et de leur four nir des intrants et des outils agricoles plus performants, notamment de petits tracteurs. Il s’agit également de sécuriser le foncier face aux sociétés minières, afin d’éviter que les cultivateurs soient délogés de leurs terres lorsque les concessions entrent en phase d’exploitation, et, enfin, d’encourager la création de grandes sociétés agricoles. Une stratégie qui commence à porter ses fruits puisque la plupart des entreprises minières ont aujourd’hui déve-
loppé des activités dans le secteur. « On compte déjà 36 fermes émergentes, note Mumba, dont les superficies varient entre 1000 et 3000 ha. » Ces fermes mécanisées s’ajoutent aux grands domaines et ranchs existants – Grelka (Forrest), Number One, Kifita et Mangombo à Kolwezi – ainsi qu’à des fermes plus petites, aménagées à l’époque coloniale dans la ceinture cuprifère. Reprises en majorité par des Congolais pratiquant une culture vivrière, ces der-
La plupart des sociétés minières ont investi dans la création de grandes fermes mécanisées. nières sont tournées vers le maraîchage et la production de semences, en plus d’un petit élevage. Malgré ces premiers efforts, beaucoup reste à faire. Notamment dans l’ouest et le nord de la province, terres de maïs et de manioc, où bien des villages sont encore enclavés et les techniques culturales rudimentaires. ■ MURIEL DEVEY
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GWENN DUBOURTHOUMIEU
74 LE PLUS
• De gauche à droite :
mine de Luiswishi exploitée par CMSK, sous-traitance minière par EGMF, pont à peser pour poids-lourds réalisé par EGMF, coulée de métal dans l’usine STL.
LE GROUPE FORREST INTERNATIONAL : UN PILIER INDUSTRIEL DE LA R.D.CONGO
Groupe Forrest International est un groupe de sociétés appartenant à George Arthur FORREST où dans lesquelles, il détient une participation. La naissance du Groupe Forrest International remonte à 1922, année au cours de laquelle Malta FORREST créa sa société dans la province du Katanga. En 1986, son fils, George Arthur FORREST, prit seul, la direction de l’entreprise familiale et lui donna un nouvel essor. Par la diversification de ses activités, le Groupe Forrest International s’est érigé en un opérateur économique incontournable de la République Démocratique du Congo. Il en est aujourd’hui un des principaux investisseurs et employeurs privés. Le Groupe est actif dans le secteur minier, l’industrie du ciment, les travaux publics et de génie civil, l’énergie renouvelable, le domaine aéronautique, le montage industriel, la santé et l’agroalimentaire. L’activité de ses sociétés procure un emploi à prés de 15 000 personnes. Parallèlement à ses activités économiques et compte tenu du contexte socio-économique de la République Démocratique du Congo, le Groupe Forrest International est particulièrement impliqué dans des projets sociaux. Notamment via la Fondation Rachel Forrest, qui elle, finance des initiatives dans les domaines de l’enseignement, la santé, le sport, l’agriculture ou encore l’environnement. Malgré les conflits qui ont ravagé le pays pendant près de huit années, le Groupe Forrest International est l’une des rares entreprises a n’avoir jamais suspendu ses activités, ni ne s’être détournée du pays et de la population congolaise. Elle a au contraire continué à y investir, entraînant dans son sillon des investisseurs occidentaux de premier plan. George Arthur FORREST, président du Groupe est Consul honoraire de France à Lubumbashi. En mars 2007, il a été nommé Président d’Honneur de la Chaire UNESCO pour l’Afrique centrale et les pays de la SADC. Fervent promoteur de la transparence dans le secteur minier, il est également, depuis octobre 2007, membre du Comité de Pilotage de l’Initiative pour la Transparence dans la gestion des Industries Extractives (ITIE) en République Démocratique du Congo. Il est finalement un ardent défenseur de l’art contemporain congolais, notamment via l’ASBL Dialogues qu’il finance entièrement. Celle-ci soutient les artistes congolais et promeut leurs œuvres par des expositions tant en République Démocratique du Congo qu’en Europe et dans le reste de l’Afrique.
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GROUPE FORREST INTERNATIONAL
WE ADD VALUE - ALLONS DE L’AVANT Ruashi Mining Sprl est situé dans les périphéries de Lubumbashi, dans la province du Katanga, qui est le berceau minéral de la République Démocratique du Congo. Ruashi Holding Ltd (Pty), est une filiale de Metorex Ltd enregistrée en Afrique du Sud, et a 75 % d’actions dans Ruashi Mining, une société à responsabilité limitée anonyme privée enregistrée en RDC. L’autre 25 % de Ruashi Mining est tenu par la Générale des Carrières et des Mines « Gécamines » une société d’État en RDC. Metorex Ltd est une société minière publique incorporée en République Sud-Africaine et coté en bourse sur le JSE. Jusqu’ici, des activités minières à la Mine de Ruashi ont été effectuées en deux phases. La construction de l’usine de concentrateur de la phase I de Ruashi (« Phase I ») qui a débuté en mai 2005, et a constitué une usine de concentrateur d’oxyde pour traiter les réserves des minerais d’oxyde laissées par Union Minière du Haut Katanga (UMHK) et Gécamines. Le premier concentré a été produit en septembre 2006.
Une usine Moderne
Production du Cuivre
Produits fins de cuivre 99 %
Le concentrateur de la phase I a été placé sous le soin et l`entretien en 2008 comme la production de l’usine hydrometallurgical de la phase II de Ruashi (« Phase II ») commençait . L’usine de la phase II a constitué un processus hydrometallurgical qui incorpore la lixiviation-décantation, l’extraction par solvants/l’électrolyse (« SX-EW ») et les opérations de précipitation de cobalt. La construction de l’usine de la phase II a débutée en mars 2007 et a été suivie de près du début des travaux dans la mine à ciel ouvert en octobre 2007. L’usine de la phase II a été construite et commissionnée étapes par étapes pour permettre la production « du cuivre de premier jet -sans extraction par solvent- » (cuivre direct d’Électrolyse-EW- à l’exclusion de SX). Le cuivre de premier jet a été produit la première fois en mars 2008 avec le circuit de cuivre complet (SX de incorporation) commissionné en octobre 2008. L’installation de cobalt a été mise en service en février 2009. Les sections de lixiviation et de décantation de l’usine ont atteint la capacité de conception (1.44mtpa), tandis que les sections d`aval (SXEW) sont toujours en chemin pour attendre la capacité de conception, principalement à cause des teneurs d’alimentation obtenues qui étaient plus faible que celles prévues lors de la commission. Pendant que Ruashi réalise maintenant uniformément ses nombres visés de production, elle a également développé des politiques de sécurité de travail, de santé, de environnementales et de communauté de niveau international, et exécute de divers programmes sociaux, dont certains sont montrés sur cette page. C’est la devise de Ruashi d’ajouter la valeur à tous les parties prenantes affectées.
Approvisionnement en eau
Approvisionnement en électricité
Promotion de l’enseignement
Produits fins de cuivre 99 %
LE PLUS 77
Culture du risque Issus dʼautres secteurs, ils ont misé sur le développement des filières agroalimentaires. Itinéraires particuliers dʼexploitants et dʼindustriels.
LEILA KATEBE Directrice de KTB
LA FONCEUSE
MURIEL DEVEY POUR J.A.
Bien qu’issue d’une famille d’entrepreneurs, elle n’a rien d’une fille à papa. Diplômée en management de l’École pratique des hautes études commerciales de Bruxelles, Leila Katebe rentre au pays en 2004, bien décidée à faire cavalier seul. Après avoir créé KTB, une société spécialisée dans l’importation de produits alimentaires (poisson et viande congelés, produits secs), dont elle est directrice, elle investit dans les infrastructures (magasins, locaux industriels) et dans une flotte de camions pour ravitailler l’intérieur de la province. Elle poursuit la diversification de ses activités en créant une boulangerie industrielle et une pâtisserie à Lubumbashi, ainsi qu’une ferme à Likasi, qui produit du maïs. Ses projets: développer ses activités agricoles et se lancer dans la pêche industrielle. Pour approvisionner le Katanga, puis d’autres provinces de la RD Congo. « L’agriculture est notre richesse. On ne peut pas vivre que d’importations », martèle cette trentenaire au sourire éclatant. ■ MURIEL DEVEY
VICTOR MULONGO MUKALAY
Exploitant de la ferme Nsenga Lutanga
GENTLEMAN-FARMER
MURIEL DEVEY POUR J.A.
Il y a longtemps que cet ancien haut fonctionnaire a compris que « sans l’agriculture, la RD Congo ne [valait] pas un penny ». Or si son statut ne l’autorisait pas à exercer des activités lucratives, il ne lui interdisait pas celle-ci. En 1978, Victor Mulongo Mukalay rachète donc une ferme avicole, à 12 km de Lubumbashi, que son ancien propriétaire n’avait pas récupérée après la restitution des biens « zaïrianisés ». Il la rebaptise Nsenga Lutanga, du nom de son grand-père maternel, et en confie la gestion à son frère. Une fois à la retraite, il en reprend les rênes. Aujourd’hui, outre l’élevage de canards et de lapins, la ferme produit quelque 2 000 poulets de chair, 5 000 œufs et 100 porcs par mois, vendus sur les marchés de Lubumbashi, ainsi que du maïs (cultivé sur 100 ha), et des semences (maïs, soja et haricots). Mulongo a dû faire une croix sur le maraîchage, « en raison de la pollution de la rivière Kafubu par les industries minières ». ■ M.D. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11
MUKALAY NSENGA SONKUE PDG de Mukalay et Frères
DU COMMERCE AU MOULIN
Après avoir été initié par son aîné, en 1986, Mukalay Nsenga Sonkue – fort du petit pécule que son frère lui accorde – se lance dans le commerce en créant Mukalay et Frères. En 2008, après un bref intermède minier, il opte pour l’agroalimentaire et lance une minoterie à Lubumbashi, qui produit du son pour bétail et, surtout, de la farine de maïs pour la fabrication du foufou, aliment de base des Katangais. « J’ai choisi cette activité car la population consacre l’essentiel de ses revenus à l’alimentation », explique-t-il. Alors que sa première machine lui permettait de traiter entre 5 et 10 tonnes de maïs par jour, la toute nouvelle, importée d’Afrique du Sud, a une capacité quotidienne de 55 t. Pour faire tourner son moulin, Mukalay doit importer chaque mois plus de 1500 t de maïs de Zambie, la production locale étant insuffisante, et garde en permanence un stock de sécurité de 4500 t. ■ M.D.
AGNÈS KILUME
Présidente et gérante de la ferme Safari International-SOD
MADAME SÈME Cette ex-cadre de la Gécamines, qui fêtera ses 60 ans cette année, a toujours eu une passion pour l’agriculture. En 1998, tout en assumant ses fonctions de directrice commerciale, elle achète une ferme dans la vallée de la Lufira. « Nous consacrons 218 ha à des cultures vivrières, notamment du maïs, et 8 ha de bas-fonds au maraîchage. On fait aussi un peu d’élevage et de pisciculture. » Agnès Kilume vend sa production à des sociétés minières. En 2009, constatant que la région manque de semences vivrières de qualité, elle se tourne vers cette production, qui est aujourd’hui devenue son activité principale. Elle y consacre une centaine d’hectares, dont 20 aux semences de maïs et 10 aux boutures de manioc. En 2010, elle a ajouté une nouvelle corde à son arc en se lançant dans la production de semences maraîchères (gombo), en partenariat avec le belge Somers Seeds, qui lui fournit les intrants, et le congolais MaPhartech, qui assure la commercialisation. ■ M.D. MURIEL DEVEY POUR J.A.
PORTRAITS
78 LE PLUS KATANGA SOCIÉTÉ
Melting-jackpot dʼexpatriés Ils étaient 30 000 en 1960, un peu plus de un millier aujourdʼhui. Si les ressortissants européens sont désormais peu nombreux dans la province, la plupart y ont de gros intérêts. Et dʼautres nationalités les rejoignent.
B
elges, Grecs, Italiens, Portugais… Ils étaient quelque 30 000 da ns la prov ince en 1960. Aujourd’hui, les ressor t issants européens, descendants d’ex-cadres de l’Union minière du Haut-Katanga et de la Gécamines ou de familles de colons, sont environ 1 300, concentrés à Lubumbashi, Likasi et Kolwezi. Parmi eux, quelques entrepreneurs de premier plan. En tête des Belges, le groupe George Forrest International, né de l’Entreprise générale Malta Forrest (EGMF, créée dans le Katanga en 1922), est de loin le plus diversifié (BTP, mines, agrobusiness, ciment, banque…). Il est suivi de Number One (élevage, abattoir, charcuterie et catering), de Demimpex Afrique (distribution automobile) et d’une kyrielle de PME. Les principaux représentants de la communauté italienne sont Edile Construction et Scorpion (transports), et les Grecs restent présents à travers
Psaromatis (supermarchés, commerce de gros, distribution de carburant, agroalimentaire), Evangelatos (ferme agricole et import-export) et Relacom (biscuiterie). Au fil des ans, d’autres nationalités sont venues occuper la place laissée vacante par les Européens qui ont fui les troubles qu’a connus la province après l’indépendance.
Les Anglo-Saxons ont amené dans leur sillage des Philippins, des Indonésiens, des Péruviens… Certaines ont consolidé leurs positions, en particulier les Indiens, principalement des Ismaéliens, qui, dès l’époque coloniale, ont prospéré dans l’import-export. Cette communauté, grossie depuis les années 1990 de nouveaux arrivants, hindous ou musulmans, occupe de solides positions dans le commerce de gros, la distribution (supermarchés Jambo Mart et Ma Maison), la banque, les mines et l’industrie légère. Arrivés dans les années 1970 et 1980, les Libanais ont quant à eux d’abord fait fortune dans le commerce de diamants avec le Kasaï. Aujourd’hui, ils sont actifs dans le commerce général (textile, électroménager…), l’industrie légère et le secteur minier. SUD-AFRICAINS, LA NOUVELLE GÉNÉRATION
Après les Ouest-Africains et les Zambiens, pour la plupart petits commerçants ou transporteurs installés depuis longtemps dans le Katanga, la nouvelle génération de ressortissants du continent est surtout constituée de Sud-Africains (mines, BTP, transports et agriculture). Le minier Amari Holdings, par exemple, projette la construction de Luano City, un grand complexe intégré sur 380 ha (logements, bureaux, écoles, commerces, loisirs), aux abords de l’aéroport international de la Luano, à Lubumbashi. Arrivés plus récemment, les Chinois opèrent quant à eux principalement dans les mines et le BTP, où règne la puissante China Railway Engineering Corporation, et font une percée dans la restauration. Côté nouveaux « expats » occidentaux, Américains, Australiens et Canadiens dominent. Ils ont amené dans leur sillage des Philippins, des Indonésiens et des Péruviens pour construire mines et usines. Les Britanniques font leur apparition avec le groupe Lonrho, chargé de la réhabilitation et de la gestion du Grand Karavia Hôtel, un cinqétoiles lushois qui a rouvert ses portes en juin 2010. Enfin, de nouvelles PME belges devraient s’implanter dans la province pour sceller des partenariats avec leurs homologues congolais dans la sous-traitance minière. ■ MURIEL DEVEY J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11
KARIM SAHIB/AFP
LE PLUS 79
Quart de finale de la Coupe du monde des clubs, à Abou Dhabi, le 11 décembre 2009.
FOOTBALL
TP Mazembe, le dieu des stades Il vient de remporter pour la seconde fois consécutive la Super Coupe Orange : le Tout-Puissant est lʼidole de la province. Retour sur une légende désormais internationale.
I
l n’y a pas photo. Depuis une décennie, le Tout-Puissant Mazembe est (re)devenu la meilleure équipe congolaise, supplantant ses lointains concurrents de Kinshasa (l’AS V.Club et le DC Motema Pembe) et son frère ennemi katangais, le FC SaintÉloi Lupopo, fondé, comme lui, en 1939. Alors que les derbys entre les deux formations se concluaient jadis par des scores serrés, leurs récentes confrontations en championnat national montrent bien le gouffre qui les sépare désormais : lors de la phase qualificative, les « Corbeaux » ont humilié les « Lumpas » du FC Saint-Éloi, battus à plate couture à l’aller (5-0) comme au retour (1-7) – les scores en phase finale ont toutefois été plus serrés. Qui aurait cru que le FC SaintGeorges, créé par des missionnaires bénédictins, rebaptisé Saint-Paul FC en 1944, puis FC Englebert et, finalement, TP Mazembe, écrirait à nouveau les plus belles pages de l’histoire du football congolais ? Car le succès du Tout-Puissant dépasse désormais de loin les frontières provinciales et nationales. En témoigne le nombre de trophées récoltés ces dernières années. Dernier en date : celui marquant sa deuxième victoire consécutive en finale de la Super Coupe Orange, cette fois face au FUS Rabat,
le 29 janvier. Un sacre venu conforter la première place du club sur la scène africaine, après son succès en Ligue des champions de la CAF, en 2009 et 2010 – il a battu, le 13 novembre dernier, l’Espérance de Tunis. Cerise sur le gâteau : en décembre, le TP Mazembe est devenu la première équipe africaine à avoir joué – et perdu – une finale de Coupe du monde des clubs. C’était à Abou Dhabi, face à l’Inter de Milan. Finie, donc, la longue traversée du désert pour le club katangais, qui, de 1981 à sa victoire en 2009, était rentré bredouille de toutes ses campagnes africaines. De quoi désespérer ses supporteurs, qui évoquaient non sans nostalgie les succès passés de leur équipe préférée : en 1967 et en 1968, elle avait gagné la Ligue des champions et, en 1980, la Coupe d’Afrique des vainqueurs de coupes – compétition aujourd’hui disparue.
Doté d’un budget important dans le contexte africain (10 millions de dollars en 2010, soit 7,3 millions d’euros) et d’un centre de formation moderne, le club offre des salaires attrayants (jusqu’à 25 000 dollars par mois, hors primes) et attire des talents étrangers. Et alors qu’aucun autre club congolais ne dispose de ses propres installations sportives, le TP Mazembe aura bientôt son stade (18 000 places) dans la commune de Kamalondo, à Lubumbashi. Le club a abandonné ses oripeaux d’association pour se muer en une société à responsabilité limitée, ce qui
Le club a quitté ses oripeaux d’association pour se muer en véritable entreprise.
DES SALAIRES ATTRAYANTS
Actuellement entraîné par le Sénégalais Lamine Ndiaye, le TP Mazembe s’est profondément métamorphosé depuis que Moïse Katumbi Chapwe, homme d’affaires prospère et gouverneur du Katanga, en a pris les commandes, en 1998.
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a impliqué l’entrée dans le capital de Moïse Katumbi, de la société Mining Company Katanga et de plusieurs autres petits actionnaires. Une grande première en RD Congo, où la gestion du football reste plutôt archaïque. L’entreprise entend trouver de nouvelles sources de revenus, notamment en développant la vente de produits dérivés – un filon quasi inexploité dans le pays. ■ ARTHUR MALU-MALU
80 LE PLUS KATANGA LOISIRS
de nuit ouverte récemment, avenue de la Révolution, pour une clientèle « d’un certain âge ». De leur côté, les étudiants fréquentent volontiers le Twenty One, avenue Kamalondo, ou le Sodome et Gomorrhe, près de la gare, et vont refaire la RD Congo en prenant une bière au Village Bonta.
Les incontournables de « Lshi »
GWENN DUBOURTHOUMIEU
LA PALETTE EST LARGE
Chez Ntemba, une boîte de nuit pour fans de musique congolaise.
Expositions, restaurants, night-clubs... La géographie de lʼambiance lushoise a-t-elle changé avec le regain de lʼactivité minière et lʼarrivée de nouveaux expatriés ? Revue des lieux où il fait bon sortir.
À
Lubumbashi, « Lshi » pour le s i n it ié s, le gou r met, l’amateur de Simba (la bière locale) et celui qui aime se trémousser seront servis. Depuis quelques années, restaurants, boîtes de nuit, bars, hôtels et guest houses poussent comme des champignons. Il y en a pour toutes les bourses et pour tous les goûts. Au passage, la géographie des lieux de loisirs s’est modifiée, avec l’apparition de nouveaux quartiers in, dont celui du Lac-Kipopo, où, en mars 2010, a été inauguré un complexe commercial, à deux pas du Grand Karavia Hôtel, le cinq-étoiles local, entièrement rénové. Ces nouveaux points chauds n’ont cependant pas détrôné, en termes de réputation, les communes de Kamalondo, de Kenya – fief des orchestres de « karindula », la musique des mineurs –, de Ruashi et de Lubumbashi, qui ont conservé leur attractivité.
En centre-ville, le Patio du Park Hôtel, animé par un orchestre en début de soirée, reste un lieu incontournable où se rencontrent les politiques, les hommes d’affaires… et les couples d’amoureux. Les vieux Lushois aiment aussi se retrouver chez Mukubwa Denis, avenue de la Révolution, une autre institution de la ville, plus populaire, où ils ne se lassent pas d’écouter les tubes indémodables de leurs stars préférées : Franco, Tabu Ley, Mbilia Bel… Les amateurs de danse ont l’embarras du choix. Les fans de musique congolaise et plus généralement africaine se trémoussent chez Ntemba (« secret », en swahili), une chaîne créée par un Congolais installé en Afrique du Sud, ainsi qu’au Godfather, à l’O 2 (Oxygène) ou au Ngwasuma. Les mordus de musique occidentale préféreront le Blue Tooth, une boîte
En matière de restaurants, la palette est également large. Les plus chics, fréquentés par les « expats » et les hommes d’affaires de passage, sont la Bonne Table du Grand Karavia Hôtel, Planet Hollybum (qui est aussi un hôtel et une boîte), le Kalubwe Lodge (le restaurant du golf), Les Artistes ou encore le Safari Grill du Park Hôtel. Pour déguster un bon steak made in Katanga, il n’y a toutefois pas mieux que le Bush Camp, et pour manger sur le pouce rendez-vous à La Brioche, sorte de snack-bar en centre-ville. Lubumbashi regorge aussi de restosbars belges (Cercle wallon), grecs (Cercle hellénique), italiens (Casa degli Italiani), libanais (La Perle d’Orient), indiens (Royal India) et chinois, dont certains font office de clubs. La jeunesse dorée et gourmande raffole des glaces du Miga Gelato et des pâtisseries de Vanille & Chocolat, tandis que les aînés prennent un verre au Café du Lac en regardant le coucher du soleil sur le lac Kipopo. Musée, galerie d’art contemporain, Halle de l’Étoile (centre culturel français), espace Picha (consacré à l’image), golf, cercle hippique, piscines des hôtels, plage du lac et son terrain de volley, parc animalier (Muyambo Park)… Le chef-lieu du Katanga offre un large éventail aux férus d’expositions,
Fête, culture, sport et nature… Seuls les mordus du shopping seront déçus. de concerts et de théâtre, comme aux sportifs et aux amoureux de la nature. Moins aux mordus du shopping, car il est chiche en magasins. Quelques boutiques d’artisanat et de vêtements chics, trois ou quatre supermarchés. C’est tout. La construction, en projet, d’un grand complexe intégré près de l’aéroport pourrait changer la donne. ■ ARTHUR MALU-MALU
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n un an, la capitalisation boursière totale de six entreprises minières juniors spécialisées dans les métaux rares et réparties aux États-Unis, au Canada et en Australie, a connu une c roissa nce de 30 % à 50 %, pour atteindre 7 milliards de dollars (5,2 milliards d’euros). Du jamais vu. En annonçant la réduction de ses quotas d’exportation de métaux rares, la Chine, qui contrôle 97 % de la production – elle produit 120 000 des
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124 000 tonnes annuelles –, a provoqué un véritable tsunami. L’inquiétude est particulièrement vive dans les pays développés, soucieux de sécuriser leurs approvisionnements face à la forte demande : téléphones portables et autres tablettes numériques, technologies vertes (éoliennes, panneaux solaires, batteries des futurs véhicules électriques)… Des marchés en pleine croissance qui nécessitent l’utilisation de métaux non pas rarissimes, mais difficilement exploitables.
82 DOSSIER MINES Sur les cours mondiaux, le tantale (téléphonie mobile principalement) a vu son indice progresser de 190 % en 2010 ; le sélénium (utilisé dans l’industrie métallurgique pour des alliages complexes) a augmenté de 85 %… « Pour la Chine, il s’agit de faire monter les prix et de forcer l’industrie mondiale à venir produire chez elle en échange de métaux meilleur marché », analyse Christian Hocquard, du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). L’Union européenne (UE) a ainsi classé comme stratégiques 14 métaux rares* et publié en octobre un rapport alarmant : une pénurie pourrait intervenir dans les vingt prochaines années. DES COURS TRÈS VOLATILS
Face au monopole chinois, l’UE et les États-Unis cherchent de nouvelles opportunités. L’Afrique apparaît comme une zone potentiellement stratégique. La RD Congo était déjà l’un des principaux producteurs mondiaux de tantale, jusqu’à ce que Washington interdise aux fabricants de téléphonie l’utilisation de ressources ne pouvant répondre à certaines normes d’extraction, notamment en termes de droits humains. Globalement, si les projets africains de métaux rares se comptent encore sur les doigts d’une main, la dynamique s’accélère. Producteur historique, l’Afrique du Sud a rapidement concentré de nouveaux intérêts. Frontier Rare Earths, basé au Luxembourg et présent dans le Namaqualand, dans le nord de la province du Cap, vient par exemple de débuter ses études de faisabilité ce mois-ci avec l’ambition de commencer à produire dès 2014. Le canadien Great Western Minerals Group a de son
côté signé en juin 2010 un accord pour la réouverture de la mine de Steenkampskraal, à 350 km au nord-ouest du Cap. « Le jeu de la Chine a rendu les cours extrêmement volatils, les prix ne sont plus prédictibles », estime Hugo Schmitt, de l’entreprise minière française Eramet. Présente au Gabon sur le site de Mabounié, la firme est positionnée sur le seul projet qui pourrait, à terme, devenir un point de ressource « européen ». Celui-ci est mené par sa filiale gabonaise, la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog), en partenariat avec le groupe nucléaire Areva (actionnaire d’Eramet). « Le gisement pourrait être de classe mondiale, mais aujourd’hui nous n’avons aucune visibilité sur le montant des investissements nécessaires », rapporte Hugo Schmitt. Et pour cause : Mabounié, outre ses réserves de métaux rares, pourrait fournir de l’uranium et du thorium, des métaux hautement radioactifs. « Le processus de séparation et de transformation n’est pas encore défini, poursuit le porte-parole d’Eramet, ce qui peut tout changer sur le montant du projet. »
tantale et uranium pour le reste), après une étude de faisabilité en 2009, devrait entrer en exploitation en 2013. La société minière, cotée sur l’Australian Stock Exchange, a un autre projet de terres rares, à Machinga, dans le sud du pays, qui devrait bientôt voir le jour. Madagascar et le Kenya sont d’autres pays riches en métaux rares. Mais avec 37 % des réserves mondiales (36 millions de tonnes), la suprématie chinoise n’est pas près de s’interrompre. D’abord parce qu’elle
Le site de Mabounié, au Gabon, pourrait être un gisement de classe mondiale.
UN SECTEUR HABITUÉ AUX CRISES
Le canadien Montero Mining & Exploration a quant à lui investi quelque 3,5 millions de dollars (2,6 millions d’euros) pour acquérir 60 % de Wigu Hill, à 200 km au sud de Dar es-Salaam, en Tanzanie. La mine regorge notamment de lanthanum, très utilisé dans l’industrie du verre et des pots catalytiques automobiles. Au Malawi, c’est l’australien Globe Metals & Mining qui s’est lancé dans l’aventure. La mine de Kanyika (niobium à 80 %,
applique une politique de bas coûts (dumping social et économique). Ensuite parce qu’il faut au moins dix ans pour qu’un nouveau projet d’extraction voie le jour. L’industrie des métaux rares reste en outre opaque. Selon Christian Hocquard : « Les déséquilibres offre-demande sont difficilement appréciables. Il y a peu de marchés spot, peu d’échanges, le marché est petit, les produits sont variés… » Un environnement favorable à la spéculation. Le secteur est cependant habitué aux crises : au début des années 2000, les prix ont été multipliés par cinq sous l’impulsion d’une nouvelle industrie alors en plein essor, celle du téléphone portable. Avant de redescendre à son niveau initial deux ans plus tard. ■ * Antimoine, béryllium, cobalt, fluorine, gallium, germanium, graphite, indium, magnésium, niobium, platine, terres rares, tantale et tungstène.
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84 DOSSIER MINES
Frank Timis
INTERVIEW
PRÉSIDENT DʼAFRICAN MINERALS
« Lʼavenir se joue en Afrique de lʼOuest » A PRÈS AVOIR MIS AU JOUR, EN SIERRA LEONE, LE PLUS IMPORTANT GISEMENT DE FER DU CONTINENT, L’HOMME D’AFFAIRES AUSTRALO -ROUMAIN VEUT CONCURRENCER LES MAJORS VALE, R IO TINTO ET BHP BILLITON. SON ATOUT : L’ALLIANCE AVEC DE GRANDS GROUPES CHINOIS. JEUNE AFRIQUE: Après avoir investi en Sierra Leone, vous avez commencé à prospecter en Guinée, en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso… L’Afrique de l’Ouest est-elle votre nouveau terrain de chasse ? FRANK TIMIS : C’est ici que se joue l’avenir minier ! Ce que vit l’Afrique de l’Ouest aujourd’hui est comparable à ce qu’a connu le nord-ouest de l’Australie au début des années 1970 : l’amorce d’un boom minier. La région recèle des gisements de fer, de cuivre, de bauxite et de manganèse non exploités, d’un potentiel exceptionnel par rapport aux réserves mondiales actuellement disponibles, alors même que la demande pour ces matières premières explose, dopée par l’industrialisation accélérée de l’Asie. Autre atout de la zone : sa proximité avec l’Europe, à laquelle il coûte moins cher de faire venir du minerai d’Afrique de l’Ouest que d’Océanie ou
d’Amérique du Sud. Avec ces éléments en tête, comment voulez-vous que je ne m’intéresse pas à l’Afrique de l’Ouest ? N’êtes-vous pas inquiet de l’instabilité politique qui a retardé de nombreux projets ? Le Sénégal, le Burkina Faso et la Sierra Leone ont des régimes stables et ouverts aux investisseurs miniers, notamment issus d’autres pays que leurs anciennes puissances coloniales, dont ils veulent s’affranchir économiquement. Bien sûr, la situation ivoirienne est préoccupante à court terme, mais sur le long terme, qui est l’horizon naturel des projets miniers, on peut être raisonnablement optimiste pour toute la région. La situation de la Guinée me donne d’ailleurs raison: malgré tout ce qu’on a pu dire de négatif sur ce pays, il dispose aujourd’hui d’un président expérimenté qui pourra piloter son développement minier.
COULISSES
Le franc-parler du « Gusher » FRANK TIMIS, poignée de main à vous briser le poignet, mérite son surnom de Gusher, (le « jaillissant » en anglais): le patron d’African Minerals (actif en Sierra Leone) et de Pan African Minerals (Guinée et Burkina Faso) est toujours sur un « coup minier » entre Londres et l’Afrique, où il travaille, la Roumanie où il est né, et l’Australie où il s’est fait un nom dans les mines de fer. Initialement prévue au téléphone, l’interview avec ce self-mademan australo-roumain se fera les yeux dans les yeux à Londres, car il aime convaincre. Après une arrivée en trombe, l’homme rentre dans le vif du sujet, avec un franc-parler qui tranche dans le décor feutré du restaurant C.L.B. select choisi à deux pas de Piccadilly Circus. ■
Tout au long de votre carrière, vous vous êtes justement illustré dans des pays où peu osaient aller… C’est vrai, si je sens une belle opportunité, je n’hésite pas à prendre des risques, cela a toujours été ma force, que ce soit en Roumanie, en Bulgarie, au Kazakhstan ou aujourd’hui en Afrique. En réalité, j’analyse finement l’intérêt d’un projet. Et surtout, je ne me lance que si je rencontre des gens avec qui je peux travailler sereinement. Comment êtes-vous arrivé en Sierra Leone ? C’est mon ami Lord Anthony St John [connu au Royaume-Uni pour ses interventions à la Chambre des lords sur les questions africaines, NDLR] qui m’a conseillé de visiter le pays, seulement huit mois après la fin de la guerre civile en 2003, et qui m’a mis en contact avec les autorités et le président d’alors, Ahmad Tejan Kabbah. J’étais le premier entrepreneur à m’intéresser au potentiel minier sierra-léonais depuis la fin des troubles. Il fallait avoir le cœur bien accroché ! J’ai visité le centre et le nord du pays, non exploités jusqu’alors. Là-bas, j’ai été touché par des interlocuteurs locaux compétents et désireux de faire émerger leur pays, tel Gibril Bangura, aujourd’hui directeur général d’African Minerals. Début 2004, je suis revenu à Freetown avec une proposition pour les autorités : la cartographie minière de l’ensemble du territoire sierra-léonais pas encore sous licence, soit 42000 km2, en échange des droits d’exploration sur cette même zone. Cela représentait pour moi 60 millions de dollars d’investissements sur mes propres deniers [environ 48 millions d’euros à l’époque]. Le président et le gouvernement ont accepté, fin 2004. Les investisseurs ne se bousculaient pas au portillon. Ce coup de poker s’est avéré payant, puisque vous êtes tombé sur le plus grand gisement de fer d’Afrique… En explorant le territoire sierraléonais, j’avais plus en tête de découvrir des diamants. Nous en avons
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KALPESH LATHIGRA POUR J.A.
liard de dollars. C’est sans commune mesure avec le projet du Transguinéen de 1 000 km, qui coûtera au minimum 12 milliards de dollars ! Enfin, notre port minéralier de Tagrin Point sera en eau profonde, donc bien plus avantageux que les ports envisagés au Liberia et en Guinée. Je suis d’ailleurs persuadé qu’à terme les gouvernements de ces deux pays finiront par accepter de faire passer leurs minerais sur nos infrastructures plutôt que de lancer des travaux pharaoniques et coûteux… Est-ce pour faire face à ces coûts que Rio Tinto a annoncé, en mars 2010, un partenariat avec Chinalco, l’un des leaders de la sidérurgie chinoise? Ce n’est selon moi qu’un accord de façade pour aider Rio Tinto à améliorer ses relations avec les autorités guinéennes de l’époque, alors sensibles au soutien de Pékin. Sur le long terme, on verra si cet attelage tiendra. À mon avis, Rio Tinto restera réticent à donner tout ou partie des commandes d’un projet minier à l’un de ses gros clients chinois…
À Londres, en janvier 2011: « Les exportations de fer sierra-léonais commenceront dès la fin de cette année. »
effectivement trouvé, mais finalement peu, ainsi que de l’uranium au NordEst, du cuivre et de l’or au Nord-Ouest et, enfin, du fer dans le Centre. En novembre 2007, en faisant des sondages pour confirmer ce que nous avions cartographié, nous sommes tombés sur le gisement exceptionnel de Tonkolili. Notre force a été de ne pas nous disperser : dès que nos géologues m’ont averti de son extraordinaire potentiel, j’ai concentré tous nos efforts et investissements sur cette zone. Où en êtes-vous du montage financier pour le projet de Tonkolili ? Nous avons déjà 1,2 milliard de dollars [environ 900 millions d’euros] de capital pour l’ensemble des projets d’African Minerals, dont un tiers levé sur le second marché londonien [Alternative Investment Market], un tiers apporté par les banques et un tiers de la China Railway Materials. Et nous sommes actuellement en pleine opération de due diligence [audit préalable] avec un autre partenaire chinois, Shandong
Iron and Steel, pour une prise de participation de 25 % des parts de Tonkolili, pour 1,5 milliard de dollars. Quand serez-vous en mesure de produire du fer à Tonkolili ? Dès la fin de cette année 2011, nous pourrons exporter du fer sierra-léonais. Dans une première phase, nous produirons 12 millions de tonnes. D’ici à cinq ans, nous visons une production annuelle de 35 millions de tonnes, ce qui fera de la Sierra Leone le premier producteur africain de fer et le troisième au niveau mondial… Les gisements guinéens de Rio Tinto et Vale, au mont Simandou, sont eux aussi très prometteurs… Oui, mais leurs réserves sont plus petites : environ 6 milliards de tonnes de fer, contre 12,8 milliards pour Tonkolili. Et surtout, notre projet est nettement plus attrayant sur le plan logistique : nous n’avons à construire que 200 km de voies ferrées, dont 80 km à réhabiliter, ce qui nous coûtera 1 mil-
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Vous-même, à African Minerals, êtes associé à de grands groupes chinois… Oui, mais moi je les aide à casser l’oligopole mis en place par les australiens Rio Tinto et BHP Billiton et le brésilien Vale, qui à eux trois contrôlent 80 % du marché du fer. Contrairement à ces trois majors, j’offre aux groupes chinois un véritable accès à un outil industriel minier. Avec moi, ils ne sont plus simplement clients, mais décideurs et investisseurs. L’avenir du secteur minier passe par la Chine ? C’est évident… Je connais bien ce pays, je sais la capacité des entreprises chinoises à faire du « high-tech-lowcost ». Dans le domaine de la production d’électricité, ils sont déjà capables de construire une centrale à charbon de 400 mégawatts chaque semaine. Il n’y a aucune raison qu’ils n’apprennent pas aussi vite dans le secteur minier. Quand ils auront réussi à répondre à leur gigantesque demande intérieure, dans une vingtaine d’années, avec leur compétitivité économique, ils ne feront qu’une bouchée d’entreprises sidérurgiques comme ArcelorMittal! Autant s’associer avec eux dès maintenant… ■ Propos recueillis à Londres par CHRISTOPHE LE BEC
86 DOSSIER MINES MAROC
Khouribga, pierre angulaire de lʼOCP L’OFFICE CHÉRIFIEN DES PHOSPHATES MET SA PRINCIPALE ZONE MINIÈRE EN ORDRE DE BATAILLE POUR AUGMENTER
SA PRODUCTION ET PROFITER DES PRIX ÉLEVÉS DU MARCHÉ,
DOPÉ PAR LA DEMANDE EN ENGRAIS.
Océan Atlantique Casablanca
ESPAGNE Rabat
Khouribga
MAROC
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e loin, l’énorme engin ressemble à un navire échoué dans le lit d’une rivière asséchée, avec sa coque blanche, haute d’une vingtaine de mètres, et son bras métallique telle une proue. La machine vrombissante qui attaque avec sa pelle le sol friable est l’une des plus grandes draglines (pelles mécaniques à câble) que les mines de Khouribga possèdent. Malgré la taille de l’engin, le conducteur et ses deux techniciens mènent un travail de précision: ils creusent une tranchée de 60 m de large et d’une dizaine de mètres de profondeur, empilant avec adresse les terrils pour éviter tout effondrement. L’objectif de l’opération est crucial : mettre à nu la première couche riche d’un précieux sédiment qui a mis 70 millions d’années à se former, le phosphate. Tranchée après tranchée, jour et nuit, les draglines de l’Office chérifien des phosphates (OCP) quadrillent la région. Chaque sillon creusé peut aller jusqu’à 50 m de profondeur. Un véritable canyon quand on y circule en 4x4. « Il y a ici trois couches de phosphate dans le sol, quand nos concurrents américains n’en ont qu’une seule, et encore, d’une concentration bien plus faible », se réjouit Abderrazak El Kaissi, directeur de l’exploitation minière de Khouribga. « Le sol est plutôt facile à travailler, nous utilisons rarement les explosifs,
R EPORTAGE.
nos techniques sont similaires à celles employées pour le charbon », ajoute Abdelkrim Ramzi, directeur de la production minière. Une fois les couches exploitables dégagées, c’est un balai incessant de bulldozers et de camions (certains peuvent transporter jusqu’à 500 tonnes) pour acheminer le minerai vers les centres de traitement qui le trient et le concassent. Le produit obtenu est ensuite dirigé soit vers des usines de lavage (« laveries ») où il est mélangé à de l’eau, purifié et enrichi grâce à un procédé chimique, soit directement vers des unités de séchage. DES TERRILS QUI VALENT DE L’OR
Située à 120 km au sud-est de Casablanca, la zone minière de Khouribga s’étend sur 400 km 2 et compte trois mines à ciel ouvert exploitées : Sidi Chennane, la plus importante (10 millions de tonnes par an), Sidi Daoui et Merah Lahrach. Un circuit de convoyeurs mécaniques (certains atteignent 25 km de long) relie les centres de stockage aux laveries et usines de séchage. De larges pistes, régulièrement arrosées pour éviter la poussière, slaloment entre les mines et les terrils, traces de quatrevingt-dix années d’exploitation. « Nous avons mis de côté de nombreuses réserves issues de couches à faible teneur en phosphate. Pour l’heure, nous
Une dragline dans la mine à ciel ouvert de Sidi Chennane, en 2009.
jugeons qu’elles ne sont pas suffisamment rentables, mais quand nos réserves à haute teneur viendront à manquer, nous pourrons les utiliser », explique le prévoyant Abderrazak El Kaissi, montrant de vieux terrils couverts de végétation, qui un jour vaudront de l’or. « Khouribga est une sorte de Las Vegas marocaine, une ville libérale, car il y a ici des gens venus de partout, poursuit-il. Jadis, il y avait même quelques maisons de jeux. La ville ne comptait que quelques milliers d’âmes en 1920, quand les Français ont démarré l’exploitation souterraine. Au début, les travailleurs étaient des saisonniers, mais, pour les fixer, la direction leur a concédé des lotissements. Dans les années 1960, avec l’exploitation à ciel ouvert, la ville a ensuite pris un essor considérable. » Abderrazak El Kaissi a la rude
AU ROYAUME DU PHOSPHATE LES RÉSERVES MAROCAINES CONNUES sont supérieures à 50 milliards de tonnes et sont réparties principalement sur les sites de Khouribga, Benguérir et Laayoune. À elle seule, la production de la zone minière de Khouribga s’est élevée à 18 millions de tonnes en 2010. La tonne de phosphate s’échange à 145 dollars. Il faut 2 t de phosphate pour produire 1 t d’engrais (570 dollars) et 4 t pour fabriquer 1 t d’acide (1000 dollars). ■ C.L.B. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 11 • D U 2 3 A U 2 9 J A N V I E R 2 0 11
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QUELQUES DATES
1917 Premières tâche de coordonner les ment agricole des pays découvertes de 5 800 salariés de l’OCP sud-américains et asiatiphosphate à Khouribga présents dans la zone, ques, grands consommamais aussi de veiller teurs d’engrais et donc de 1920 Création sur les 10 000 retraiphosphates, et demain de de l’Office chérifien tés de l’entreprise qui l’Afrique subsaharienne. des phosphates s’y sont installés. Sur Pour la direction de les 220 000 habitants l’OCP, Khouribga est la 1921 Démarrage de la de K hour ibga, 80 % pierre angulaire du nouproduction souterraine dépendent des activités veau dispositif minier. minières. La cité et la « En 2010, nous avons 1950 Démarrage mine vibrent au même produit ici 18 millions de r ythme, et la société de l’exploitation à ciel tonnes. À l’horizon 2018, ouvert à Sidi Daoui soutient la quasi-totalité nous visons les 38 mildes infrastructures de lions de tonnes annuel1994 Ouverture de la la ville, qui continue de les », indique Houssine grandir avec elle. mine de Sidi Chennane Bouhiaoui, directeur du Car l’expansion de développement minier. 2010 Démarrage Khouribga se poursuit. Et la pénurie n’est pas de la laverie L’OCP, piloté par le strapour demain : « On peut tège industriel Mostafa nouvelle génération tenir ici au moins un siède Merah Lahrach Terrab, s’est lancé dans cle rien qu’avec les réserun impressionnant plan ves connues », confie de développement. Ses Abderazzak El Kaissi. dirigeants veulent doper la capacité Pour parvenir à ses fins, l’OCP met de leur outil industriel pour profiter la main au portefeuille : sur la seule du niveau élevé des prix : alors que zone minière de Khouribga, 4 milliards la tonne de phosphate s’est vendue à de dollars (3 milliards d’euros) doivent 40 dollars pendant des décennies, elle être investis. D’ici à 2018, trois nouvels’échange aujourd’hui à 145 dollars les mines vont entrer en exploitation, (environ 108 euros). Une situation qui ainsi que trois laveries, un aqueduc et devrait durer en raison du développeun barrage pour acheminer davantage J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 11 • D U 2 3 A U 2 9 J A N V I E R 2 0 11
SAAD A. TAZI
d’eau vers ces installations. La première phase de ces développements est déjà avancée. En août dernier, l’OCP inaugurait en grande pompe à Merah Lahrach la première laverie nouvelle génération, élaborée avec la société d’ingénierie américaine Jacobs : « C’est un outil industriel qui a nécessité 2,5 milliards de dollars d’investissement », explique Houssine Bouhiaoui, déambulant sous les cuves et les tuyaux rutilants encore en phase de rodage. Juste à côté, des bassins de décantation de 135 m de diamètre permettent de récupérer un maximum d’eau, qui repart dans l’usine. « Les procédés de recyclage ont coûté un quart du coût de l’installation, mais ils étaient indispensables : avec les technologies actuelles, nous ne pourrions pas faire fonctionner trois laveries en 2018 sans pomper dans la nappe phréatique, une solution que nous rejetons », affirme l’ingénieur, fier de cette technologie propre et économique. UN MINÉRODUC EN CHANTIER
Pour l’heure, la production de Khouribga est envoyée par les lignes de chemin de fer, une moitié vers le port de Casablanca (pour le minerai exporté), l’autre vers le complexe chimique du port de Jorf Lasfar (pour le phosphate qui y est transformé en engrais). Mais dès 2013, tout passera par un pipeline convoyant un mélange de phosphate et d’eau, un minéroduc ayant pour destination unique Jorf Lasfar. « Cette technologie, utilisée depuis trois décennies au Brésil, est apparue comme la solution naturelle à notre problématique logistique », précise El Moutaoikkil El Baraka, directeur industriel de l’OCP, sûr de son affaire. « Cet outil est indispensable non seulement pour augmenter notre capacité de transport, mais aussi et surtout pour maîtriser la logistique de bout en bout, de la mine à la cargaison d’engrais », ajoute Abderazzak El Kaissi. L’objectif de ce dispositif est également économique : « À terme, le transport ne nous coûtera plus que 1 dollar par tonne, contre 7 à 9 dollars actuellement », assure Houssine Bouhiaoui. D’un coût de 4 milliards de dollars, le chantier, octroyé au turc Tekfen, vient de commencer à Khouribga. Trois ans et près de 3 000 ouvriers seront nécessaires pour réaliser les 187 km de conduite. ■ CHRISTOPHE LE BEC,
envoyé spécial
Premier sommet ouest-africain de l’énergie et des mines, à Yamoussoukro, en 2008. Le pays s’est ouvert à un grand nombre d’investisseurs venus de tous les continents.
CÔTE DʼIVOIRE
Ambitions contrariées M ANGANÈSE, FER, OR… LE PAYS, QUI A MISÉ EN VAIN SUR LE RETOUR DE LA STABILITÉ APRÈS LA PRÉSIDENTIELLE
2010, DISPOSE D’UN POTENTIEL À PEINE ENTRÉ EN EXPLOITATION. R EVUE DE DÉTAIL. DE
L
« ’
an 2011 sera à coup sûr, pour la Sodemi [Société d’État pour le développement minier, NDLR], le point de départ vers des horizons meilleurs. Cela se traduira par son positionnement en tant que société minière d’envergure internationale, parmi les premières en Afrique. » Cette prévision optimiste faite avant le scrutin présidentiel par Kadjo Kouamé, directeur général de la compagnie publique, qui centralise les prises de par ticipations gouvernementales dans un grand nombre de projets mis en œuvre par les multinationales du secteur, est fortement remise en question par la crise postélectorale dans laquelle est plongé le pays. L’instabilité est une vraie plaie pour un secteur où de bonnes relations avec le pouvoir central, s’inscrivant dans la durée, sont d’une importance capitale. La Côte d’Ivoire recèle pourtant de nombreux atouts miniers, dont l’ex-
ploitation s’est accélérée ces dernières années. Ouvert à un grand nombre d’investisseurs venant de tous les continents, le pays dispose d’un sous-sol riche d’une grande diversité de matières premières : manganèse, fer, or, nickel, bauxite… Et ces dernières années, les autorités ont renforcé l’importance stratégique de la Sodemi, qui épouse progressivement le positionnement de la Petroci, société d’État qui gère les participations publiques dans le domaine du pétrole et du gaz et ne cesse de monter en puissance.
production oscille entre 300 000 et 500 000 tonnes par an. Il est exploité par un consortium sino-ivoirien, la Compagnie minière du littoral (CML), dans lequel la Sodemi est majoritaire (51 %), aux côtés de l’État ivoirien (10 %) et de la China National Geological and Mining Corporation (39 %). Des investissements sont engagés pour que la compagnie puisse extraire très vite 500 000 t de manganèse par an. Le même type d’équilibre a été respecté dans la constitution de la Société des mines d’Ity (SMI, extraction d’or), dont la firme publique possède 54,1 % des parts, contre 45,9 % pour Cominor, une filiale du groupe français Areva. La mine d’Ity se trouve à Zouan-Hounien (extrême Ouest), dans
La Sodemi centralise les prises de participation de l’État dans les projets des multinationales.
ALLIANCES AVEC DES CHINOIS, DES FRANÇAIS, DES INDIENS…
L’exploitation du manganèse a pris, ces dernières années, une grande importance. Le gisement le plus important est situé à Lauzoua, dans la région de Grand-Lahou (Sud). Sa capacité de
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une zone contrôlée par l’ex-rébellion des Forces nouvelles, mais elle est sécurisée par les Forces de défense et de sécurité (FDS), loyales à Laurent Gbagbo. Toujours sur le même modèle, la Sodemi est actionnaire à 25 % de Tata Steel Côte d’Ivoire (TSCI), compagnie dans laquelle le mastodonte indien de l’acier détient 75 % des parts. TSCI, qui regarde vers les réserves prometteuses
LUC GNAGO/REUTERS
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90 DOSSIER MINES des régions frontalières de la Guinée et du Liberia, a déjà commencé à prospecter les gisements de fer du mont Nimba (dont les réserves sont évaluées à 1 milliard de tonnes) et du mont Gao (370 millions de t). Le mont Klahoyo (673 millions de t) est destiné à la compagnie israélo-américaine Valleymist. La Sodemi s’est également associée avec le canadien TAU Group pour exploiter les gisements de nickel latéritique de Sipilou et de Foungbesso. La mise en production effective du fer et du nickel ivoiriens est prévue en 2014 et pourrait nécessiter la mise en place d’une ligne de chemin de fer allant des montagnes de l’extrême Ouest ivoirien, enclavé, jusqu’au port de San Pedro, s’inscrivant ainsi dans ce qu’on appelle en Côte d’Ivoire le Grand Projet minier de l’Ouest (GPMO). La Sodemi veut également renforcer son expertise dans les forages, d’où son alliance avec la société française Foraco dans le cadre d’une coentreprise, Foremi, qu’elle possède à 49 %. Plus que jamais, elle mise aussi sur la recherche et développement avec la création d’un laboratoire d’analyse et de traitement des minerais à Yopougon-Kouté, dans la périphérie d’Abidjan. LES COMPAGNIES PRIVÉES CONTINUERONT-ELLES D’INVESTIR ?
Les compagnies minières privées qui se lancent de manière indépendante sur le marché ivoirien se sont elles aussi signalées par leur activisme ces dernières années. Dans la fièvre de l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle a eu lieu la première coulée de la mine d’or de Tongon, dans le département de M’Bengué (Nord), et le premier lingot (9,5 kg) a été présenté au ministre des Mines de Laurent Gbagbo, Augustin Komoé Kouadio.
À la manœuvre, la multinationale sudafricaine Randgold Resources, dirigée par Mark Bristow. Ce dernier annonce avoir déjà réalisé des investissements de 47 milliards de F CFA (71,7 millions d’euros) sur les 140 milliards prévus. La mine de Tongon, dont le potentiel de production est estimé à 120 t exploitables sur une quinzaine d’années, est située dans la partie du territoire contrôlée par l’ex-rébellion des Forces nouvelles, qui soutient Alassane Ouattara. Randgold Resources continuera-t-il d’investir, quitte à exporter sa production à partir d’un port d’un pays de la sous-région ? Si oui, la production du pays, qui devait
être de 7,21 t en 2010, doublera quasiment pour passer à 14 t en 2011. Une société australienne, Equigold, exploite quant à elle la mine d’or de Bonikro, à 60 km de Yamoussoukro, la capitale politique située dans le centre du pays, et mise sur une production annuelle de 4 t sur huit ans. La compagnie indienne Taurian, qui a eu quelques difficultés avec le gouvernement ivoirien au sujet des modalités d’exploitation d’une mine de manganèse dans le département de Bondoukou, il y a quelques mois, est quant à elle surtout active dans l’exploration du manganèse, de la bauxite et du nickel. ■ THÉOPHILE KOUAMOUO
LES ESPOIRS DU CAMEROUN GROS PRODUCTEUR de diamants, le Cameroun ? Cela relève aujourd’hui du domaine du possible. La mine de Mobilong (province de l’Est), dont les réserves seraient d’environ 736 millions de carats, est l’objet de tous les fantasmes. Une convention a déjà été signée entre le gouvernement camerounais et la firme coréenne C&K Mining. Cette dernière contrôlera 65 % de la mine, contre 35 % pour l’État camerounais. Il reste désormais à négocier les détails du permis d’exploitation. « Si les résultats projetés par C&K Mining sont confirmés, le Cameroun sera un grand producteur de diamants. Mais, dans ce secteur, il faut toujours prendre les évaluations avec des pincettes. Les méthodes changent d’une société à une autre. Et on n’est pas à l’abri de mauvaises surprises », explique Hubert Ndonguissop, un expert camerounais. Comme le gouvernement de son pays, il tient à éviter tout enthousiasme prématuré. Les observateurs, quant à eux, se posent une question : peut-on espérer un début d’exploitation effective cette année, dans un pays où de nombreux projets miniers avancent de manière jugée trop lente ? L’entreprise australienne Legend Mining, de son côté, est entrée dans une phase de recherche de gisements de diamants à Ngovayang (région d’Eseka, province du Centre). « Le contexte géologique permet de penser qu’on peut y trouver de la kimberlite, roche mère du diamant. Mais c’est une zone où il n’y a jamais eu d’exploitation artiT.K. sanale de ce minerai », note Hubert Ndonguissop. ■
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MESSAGE
GABON Ministère des Mines, du Pétrole et des Hydrocarbures
S’appuyant sur les résultats d’une campagne géologique sans précédent, les experts du ministère gabonais des Mines, du Pétrole et des Hydrocarbures relancent la stratégie de développement minier du pays et nouent de nouveaux partenariats internationaux. Objectifs : diversifier les sites d’exploitation et les industrialiser pour créer de la valeur ajoutée et de l’emploi.
GABON Ministère des Mines, du Pétrole et des Hydrocarbures
Le potentiel minier du Gabon évalué avec précision Déterminés à transformer et moderniser le secteur dont ils ont la charge, les responsables de la Direction des Mines et de la Géologie inscrivent leur action suivant trois axes : la qualité et la diversité des partenariats, la création de valeur ajoutée par l’industrialisation des exploitations minières et la protection de l’environnement. Ces objectifs découlent en droite ligne de la politique de développement économique lancée par le président du Gabon, Ali Bongo Ondimba, dès son élection en août 2009.
© Tiphaine St Criq / JA
Deuxième producteur mondial de manganèse, le Gabon est connu des professionnels du secteur des mines pour les richesses de son sous-sol. Ce patrimoine, désormais répertorié au sein d’une base de données, est mis en valeur par la Direction générale des Mines et de la Géologie, du ministère gabonais des Mines, du Pétrole et des Hydrocarbures. Répondant aux critères de référence des groupes internationaux, cette base de données met à leur disposition les résultats de la campagne d’exploration Sysmin, financée par l’Union européenne. De 2004 à 2009, 356 000 km de survol par avion et hélicoptère ont permis d’effectuer des mesures (magnétisme et spectrométrie), suivies de prospections sur le terrain. Au total, 142 000 km2 (plus de la moitié de la superficie du pays) ont été analysés, cartographiés. Ces informations sont réunies dans une base de données qui qualifie plus d’une trentaine de zones à fort potentiel de plusieurs minerais, dont le fer, l’or, le manganèse ou encore le diamant.
Ministère des Mines, du Pétrole et des Hydrocarbures à Libreville.
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Une priorité de la politique nationale « Faire du Gabon un pays émergent. » Cette phrase, le président du Gabon Ali Bongo Ondimba l’a martelée durant toute la campagne électorale qui l’a mené à la magistrature suprême, le 30 août 2009. À peine élu, il est passé à l’action, lançant notamment de grands projets d’infrastructures, indispensables bases du développement économique qu’il est déterminé à impulser. Lutte contre la corruption, réduction du train de vie de l’État, protection de l’environnement, tous les chantiers annoncés sont engagés, accompagnés de mesures sociales importantes, comme la mise en place de la journée continue dont les effets sur la productivité des entreprises se sont fait immédiatement sentir. Le ministère des Mines, du Pétrole et des Hydrocarbures se trouve naturellement au cœur de la stratégie d’émergence. Il en est à la fois le pilier et le moteur : premier pourvoyeur de richesses du pays, il se doit de montrer l’exemple. Crédibilité, diversification, industrialisation, le secteur minier enregistre les premiers résultats concrets de cette stratégie.
Trente dossiers à l’étude Les contacts et négociations entrepris confirment que la politique de diversification minière du Gabon est bel et bien engagée. En témoigne la liste des groupes internationaux ayant manifesté la volonté de prospecter plus avant les richesses de son sous-sol. Y figurent les noms de groupes indiens, notamment pour la barytine (source de baryum, utilisé en médecine et dans la construction), de sociétés chinoises (dans le fer), du géant sud-africain Anglogold Ashanti (pour l’or), ou encore du numéro un mondial, le groupe australien BHP Billiton (manganèse). À la fin de 2010, une dizaine de sociétés internationales ont obtenu un permis d’exploration et une trentaine d’autres ont déposé un dossier à la DG Mines et Géologie en vue de lancer des recherches, notamment dans l’or.
Deux nouvelles mines en exploitation Dès cette année, la nouvelle stratégie minière du Gabon se concrétise avec l’ouverture de deux exploitations minières. C’est une avancée historique : depuis la fermeture de la mine d’uranium de Franceville en 1999, les ressources minières gabonaises proviennent du seul gisement de manganèse de Moanda (dans le Haut-Ogooué, au sud-est du pays), exploité depuis les années 1960 par la Comilog (Compagnie minière de l’Ogooué), filiale du groupe français Eramet. Sa production, de 3 millions de tonnes en 2010, sera complétée par l’entrée en service d’une seconde exploitation de manganèse à Ndjolé, dans le Moyen-Ogooué (au sud de Libreville), dans le cadre d’un partenariat entre des entreprises chinoises et gabonaises réunies au sein du consortium CICMHZ (Compagnie industrielle et commerciale des mines Huazhou). Ce site produira 1 million de tonnes par an et emploiera 340 personnes. Témoin de la volonté des autorités gabonaises
de faire avancer les dossiers, moins d’un an s’est écoulé entre le premier contact, le 29 novembre 2009, et la signature de la convention d’exploitation, le 21 octobre suivant. La seconde mine entrant en service cette année se situe à Bakoudou, dans la province du Haut-Ogooué, où la société REG Managem, filiale de l’ONA, premier holding privé marocain, se lancera au 2e semestre 2011 dans l’exploitation d’un gisement de 1,7 million de tonnes de minerai d’or (représentant 48,6 tonnes d’or sur quatre ans d’extraction). Le site emploiera 178 personnes.
Un complexe métallurgique au cœur du pays Sur la quarantaine de permis d’exploration attribués ou demandés, il est encore trop tôt pour connaître celui ou ceux qui entreront en exploitation en 2012. Mais il est d’ores et déjà certain que le secteur minier gabonais accomplira dès l’an-
née prochaine une étape tout aussi fondamentale de sa stratégie de redéploiement, celle de l’industrialisation, avec le lancement du Complexe métallurgique de Moanda. Destiné à transformer sur place le minerai en produits semi-finis afin d’accroître la valeur ajoutée des exportations, il vise une production annuelle de 20 000 tonnes de manganèse-métal la première année, puis de 65 000 tonnes de silico-manganèse l’année suivante. Ce programme permettra la création de 400 emplois directs et s’accompagne de la construction d’une centrale hydro-électrique. D’un coût total de 131 milliards de F CFA (200 millions d’euros), les travaux sont financés à 40 % sur fonds
Le code minier plus incitatif Les textes régissant l’environnement des affaires au Gabon, comme le code d’investissement dans le secteur minier, sont en voie d’aménagement pour tenir compte de la nouvelle stratégie minière du pays. De nouveaux chapitres traduiront les volontés d’industrialisation et de protection de l’environnement définies par le chef de l’État, tandis que des mesures incitatives seront mises en place pour favoriser les nouvelles implantations industrielles. Objectifs prioritaires : diversifier les partenaires et améliorer les perspectives de développement du pays tout en préservant l’environnement.
bon Vert », lancé par le président de propres. Cet ambitieux projet traduit la République en mai 2010 : « Nos la volonté du Gabon de tirer désorressources naturelles sont le premier mais le meilleur parti de ses ressourcapital du pays, nous devons exploices minières : « Nous voulons, nous tercecapitalsans devons transforle fragiliser. » mer localement « Nous voulons Tous les dossiers nos ressources transformer localement soumis à la DG naturelles, répènos ressources Mines et Géotent les responlogie sont donc sables du minisnaturelles » aussi examinés tère des Mines, sous l’angle de la prise en compte du Pétrole et des Hydrocarbures. Le de l’environnement. Chaque projet temps de l’exportation brute est terd’exploitation doit être accompagné miné. » d’une étude d’impact de la future activité sur l’environnement. ÉlaboPrendre en compte rée en liaison avec le ministère de la protection l’Environnement, cette étude doit de l’environnement également aborder la question des mesures envisagées pour se prémuLe temps de l’exploitation minière nir d’éventuels accidents. Enfin, le sans s’inquiéter des conséquences dossier idéal comporte un volet porpour l’environnement, lui aussi, est tant sur la réhabilitation du site une terminé. Le ministère des Mines, du fois l’exploitation terminée. Pétrole et des Hydrocarbures a inscrit Deuxième producteur mondial de manganèse, le Gabon est aussi, grâce à treize parcs nationaux créés en 2005, le deuxième pays au monde en termes de zones écologiquement protégées par rapport à sa superficie totale. Sa nouvelle politique de développement minier tient compte de ces deux facteurs. Volontairement moderne, elle fait en sorte de répondre au triple objectif du développement économique, de la qualité de vie des population et du développement durable. Et de permettre au pays de tirer le meilleur parti de ses richesses géologiques.
Renforcement des compétences humaines Ingénieurs, titulaires d’une maîtrise en géologie, ou encore docteur en géomorphologie, les cent personnes qui composent la Direction générale des mines et de la géologie ont été formées au traitement, à l’inventaire et l’analyse des données géologiques résultant de la campagne d’exploration géophysique Sysmin. Rattachée au Secrétariat général du ministère gabonais des Mines, du Pétrole et des Hydrocarbures, la DG Mines et Géologie est organisée en quatre départements : géologie et recherche, économie et propriété, mines et carrières, documentation géologique et minière. En 2010, une vingtaine de recrutements ont permis à la fois de rajeunir les effectifs et de renforcer les compétences.
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sa politique de développement économique dans le programme « Ga-
C.C. pour DIFCOM / © Pascal Maitre et Antonin Borgeaud / Interlinks Images / Eramet
GABON Ministère des Mines, du Pétrole et des Hydrocarbures
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entreprises se partagent le reste), travaillent main dans la main depuis près d’un demi-siècle. D’ailleurs, en septembre 2006, le président russe d’alors, Vladimir Poutine, couronnait sa visite en Afrique du Sud d’un contrat entre les deux groupes. « Nous sommes des partenaires naturels », avait alors déclaré Nicky Oppenheimer, le petitfils d’Ernest. À l’époque, des analystes avaient relevé un retard technologique d’exploitation chez De Beers, tout en soulignant que les avancées des SudAfricains dans le domaine de l’exploration intéressaient les Russes. Chez De Beers, on reste silencieux sur l’avenir du partenariat avec Alrosa.
De Beers et Alrosa, vrais-faux rivaux L A SAGA DU GÉANT SUDAFRICAIN PREND L’ALLURE D’UNE FIN DE RÈGNE FACE À L’EXPANSION DU GROUPE RUSSE. E N RÉALITÉ, IL S’AGIRAIT PLUTÔT D’UNE STRATÉGIE COMMERCIALE IMPARABLE.
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est en une phrase, formulée pour la première fois en 1910, que le propriétaire de mines Ernest Oppenheimer propulsera la société De Beers – qu’il achètera seize ans plus tard – vers un quasi-monopole du diamant qui a duré jusqu’aux années 1990 : « Le seul moyen d’augmenter la valeur des diamants est de les rendre rares, c’est-à-dire d’en réduire la production », avait-il déclaré. Ces propos valaient encore tant que le groupe était en situation de monopole. Mais 2009 a mis en exergue cette fin de règne : le russe Alrosa, qui produit 97 % des diamants de Moscou, a pour la première fois dépassé la production du sud-africain. Face à une forte demande russe, Alrosa (présent principalement en Angola et en Russie) a produit 33,7 millions de carats et augmenté de 50 % ses revenus, à 2,4 milliards d’euros. Depuis le siège londonien, les mots de la porte-parole Lynette Gould contrastent désormais avec ceux d’Ernest Oppenheimer : « Notre approche n’est plus de maximiser notre part de la production mondiale. De Beers a longtemps été le premier diamantaire, nous produisons et vendons 34 % des diamants bruts du monde. De notre point de vue, ceci représente le niveau optimal que la compagnie peut atteindre. » Le groupe sud-africain n’abandonne pas la partie pour autant. Il entend mettre son énergie dans un passage en Bourse, alors qu’Alrosa rencontre des problèmes de liquidités. La production du géant De Beers devrait à nouveau
Nicky Oppenheimer, président de De Beers.
dépasser celle du russe en 2011. Surtout, la société a opéré un réel revirement de sa politique de production, laquelle a pris une nouvelle ampleur après des années de stagnation. Entre 2009 et 2010, elle est passée de 24,6 millions à 31 millions de carats. De Beers a aussi rendu publique en novembre dernier son intention de miser sur les marchés indien et chinois, sur lesquels elle s’attend à une augmentation de la demande de l’ordre de 20 % par an (contre 4 % sur le marché américain). En réalité, les deux sociétés, qui contrôlent 75 % du marché (Rio Tinto, BHP Billiton et une douzaine d’autres
REUTERS
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« UNE VRAIE CONCURRENCE »
DÉCRYPTAGE.
Tout porte à croire, donc, que le groupe n’est pas vraiment inquiet de l’essor de son concurrent russe. D’autant que, en acceptant de lâcher progressivement son monopole mondial écrasant, le groupe a pu mettre fin à un conflit antitrust avec les États-Unis, tout en gagnant l’accès au marché américain de la bijouterie à la suite d’une union avec le groupe de luxe français LVMH. De Beers a également joué le jeu, en 2006, face à la Commission européenne, qui s’opposait à un accord d’exclusivité d’achat entre les deux géants. À l’époque, la commissaire chargée de la concurrence, Neelie Kroes, s’était réjouie d’avoir cassé le cartel De BeersAlrosa. « Pour la première fois dans l’histoire du marché du diamant, il y a une opportunité pour une vraie concurrence », avait-elle déclaré. L’apparente rivalité a semble-t-il eu l’effet escompté. Car le sud-africain n’a jamais réellement abandonné la devise monopolistique d’Ernest. Il l’a simplement adaptée à l’arrivée de la concurrence. ■ ALEX DUVAL SMITH, au Cap
UNE SUCCESS-STORY SUD-AFRICAINE DE BEERS RESTE LE PLUS IMPORTANT GROUPE DIAMANTAIRE DU MONDE en termes de chiffres d’affaires. Fondé en Afrique du Sud en 1888 par Barney Barnato et Cecil Rhodes, il a été acheté en 1926 par Ernest Oppenheimer. Depuis, De Beers s’est régulièrement transformé pour échapper aux nationalisations et a notamment cédé 45 % de participation à Anglo American. Jusqu’aux années 1980, De Beers produisait 80 % des diamants bruts du monde et en vendait 65 %. Aujourd’hui, ces chiffres ont chuté. En 2010, la société a vendu des diamants bruts pour une valeur de 5,9 milliards de dollars (environ 4,5 milliards d’euros). En décembre, des rumeurs ont fait état d’une préparation de vente par Oppenheimer de 40 % du groupe. L’intéressé a démenti mi-janvier. ■ A.D.S.
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Lakshmi Mittal, patron du groupe indien, en 2010.
SÉNÉGAL
ArcelorMittal déçoit
LE GOUVERNEMENT POURRAIT DEMANDER À KUMBA IRON ORE DE REPRENDRE LA MAIN SUR LES MINES DE FER DE LA FALÉMÉ.
L
e Sénégal piaffe. Arrivé en 2006 sur le site de la Falémé, à 700 km à l’est de Dakar, ArcelorMittal n’y a toujours rien fait. « Nous sommes en conciliation, car le groupe n’a pas respecté ses engagements », explique Macoumba Diop, directeur du département géologie à la Société des mines de fer du Sénégal oriental (Miferso). Le revers, économique et politique, est lourd. Dans son offre, qui fut préférée à celle du sud-africain Kumba Iron Ore (filiale d’Anglo American), pourtant opérateur des travaux d’exploration, le groupe indien avait prévu quelque 2,5 milliards de dollars (environ 1,9 milliard d’euros). Son programme d’investissements comprenait un port minéralier à Bargny (à 27 km de la capitale) et une ligne de chemin de fer, et les exportations auraient dû com-
mencer cette année. Le premier groupe sidérurgique mondial s’est finalement contenté de certifier – et de rehausser – l’estimation des ressources sondées par Kumba : entre 15 millions et 20 millions de tonnes seraient exploitables chaque année. Conséquence: selon nos informations, le gouvernement sénégalais aurait déjà fait un appel du pied à son ancien partenaire sud-africain. En attendant, le pays ne se laisse pas abattre. Macoumba Diop révèle ainsi que la Miferso a engagé des explorations à Bakel, dans l’Est, avec un partenaire nigérian, Oranto Petroleum (filiale d’Oranto International, coté à Londres), déjà présent dans l’exploration pétrolière au large du Sénégal en partenariat avec la société nationale Petrosen. « Les résultats sont positifs », assure simplement la Miferso. ■ MICHAEL PAURON
FRED MARVAUX/REA
Une production record A PR ÈS PLUS D’UNE DÉCENNIE DE STAGNATION, la production d’or mondiale a atteint un record avec 2 652 tonnes en 2010, sous l’effet d’une forte demande mondiale (chinoise et indienne principalement) qui a également poussé les prix vers le haut. Depuis 2001, l’index du New York Stock Exchange a crû de 375 % et le prix de l’once d’or a progressé de 407 %. Le 18 janvier, l’once cotait à 1370 dollars, après un pic en décembre 2010 à 1 430 dollars. Le Ghana, plus gros producteur du continent derrière l’Afrique du Sud, a annoncé une augmentation de sa production de 2,9 % sur les neuf derniers mois par rapport à la même période l’année précédente, avec des revenus aurifères en hausse de 30 %, à 2,6 milliards de dollars (environ 2 milliards d’euros). Les industries sont aussi gagnantes. La petite minière canadienne Semafo, présente au Bénin, au Niger et en Guinée, a annoncé une augmentation de sa production en 2010 de 8 % par rapport à 2009 et plus de 323 millions de dollars de revenus. D’autres, comme Severstal, cherchent des capacités de financement sur les marchés afin de se développer. Le groupe sidérurgique russe devrait introduire cette année 25 % de sa filiale aurifère North Gold Ore sur la Bourse de Londres, avec l’objectif de lever pas moins de 1 milliard de dollars. Preuve du dynamisme du secteur : les sociétés aurifères représentent déjà 15 % de l’indice M.P. londonien FTSE-100. ■
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JEUNE AFRIQUE N° 2611 – DU 23 AU 29 JANVIER 2011
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