ja 2613 du 6 au 12 février 2011

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C Ô T E D ’ I VO I R E

D ÉS U N I O N A F R I CA I N E

HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 51e ANNÉE • N° 2613•du 6 au 12 février 2011

TUNISIE ET MAINTENANT?

HOMMAGE GLISSANT: MORT D’UN GÉANT

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BIENS MAL ACQUIS LA FIN DU PARADIS SUISSE

Sur un dessin placardé au mur, les manifestants ont écrit : « Va-t’en, pour le bien du pays. Tu coules! »

ÉGYPTE

Bye bye Pharaon Cet exemplaire vous est offert et ne peut être vendu.

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CE QUE JE CROIS BÉCHIR BEN YAHMED bby@jeuneafrique.com

Samedi 5 février

Apparences et réalités...

I

l y a quelques décennies, une célèbre marque de soda s’est fait connaître avec ce slogan publicitaire : « Ça a la couleur de l’alcool, l’odeur de l’alcool, le goût de l’alcool. Mais ce n’est pas de l’alcool. » Le parallèle avec l’Égypte et ce qui s’y passe en ce moment paraîtra impie. Mais il s’impose. Ce à quoi nous assistons en Égypte a les apparences d’une révolution. Mais, hélas, pas sa réalité.

Les Égyptiens se sont enfin massivement soulevés et manifestent depuis plusieurs jours dans les grandes villes par centaines de milliers pour faire partir Hosni Moubarak. Le dictateur, aux commandes de cet infortuné pays depuis trente ans, s’accroche pitoyablement au pouvoir : discours après discours, il égrène les concessions partielles et tardives. Mercredi dernier, il en était à quémander de rester au pouvoir quelques mois de plus, jusqu’à la fin de son cinquième mandat de six ans. L’inconscient s’est même dit fier de ce qu’il a accompli et, mieux inspiré, a affirmé vouloir mourir dans son pays. Les Égyptiens, eux, dans leur très grande majorité, ont fait du départ immédiat de Hosni Moubarak l’objectif principal de leur soulèvement. Protecteurs déclarés de son régime, les États-Unis (mais aussi l’Europe et même Israël) se sont résignés à ce départ ; mais ils hésitent à faire en sorte qu’il soit immédiat. Il interviendra donc tôt ou tard. Le général Omar Souleimane est déjà un vice-président exécutif, et l’on verra, à brève échéance, des figures de l’opposition participer au gouvernement. On annoncera la tenue d’élections démocratiques, que l’on se mettra à préparer. Mais où est la révolution ?

Ceux d’entre nous qui connaissent l’Égypte savent qu’elle est directement gouvernée, depuis 1952 – cela va faire soixante ans –, par l’armée. Investis de tous les pouvoirs, les quatre présidents qui se sont succédé à sa tête, dont l’éphémère Mohamed Naguib (1953-1954), étaient des militaires, et ils ont confié les postes clés, tant politiques qu’économiques, à d’autres militaires. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

En janvier 2011, alors qu’il était déjà plus contesté que jamais, Hosni Moubarak a trouvé normal de désigner comme vice-président et successeur un général et… de nommer un autre général comme Premier ministre : ils ont déjà la réalité du pouvoir. Avons-nous entendu, venant d’Égypte, de la part d’un seul opposant, un mot contestant l’une de ces deux nominations ? N’avons-nous pas vu, au contraire, les manifestants fraterniser avec les militaires déployés dans les rues ? N’avons-nous pas vu ces derniers applaudis et embrassés pour avoir seulement dit… qu’ils ne tireraient pas sur la foule ? Ne constatons-nous pas, jour après jour, que l’armée n’accepte le changement que par habileté et pour mieux préserver la continuité ?

Depuis près de soixante ans qu’elle règne sur lui en maître absolu et sans avoir jamais essayé de le conduire à la démocratie, l’armée égyptienne a ballotté le pays de gauche à droite, littéralement. Nasser l’a certes libéré de la tutelle britannique et lui a donné, pour la première fois de son histoire, la maîtrise de sa veine jugulaire : le canal de Suez. Mais, rejeté par les États-Unis des frères John Foster et Allen Dulles, il s’est rapproché de l’URSS et, à son exemple, il a étatisé l’économie égyptienne. Ayant perdu la guerre de 1967 contre Israël, il a laissé derrière lui, à sa mort, en 1970, un pays occupé, canal de Suez inclus.

Son successeur, Anouar al-Sadate, a choisi de faire… le contraire. Il a renoncé au panarabisme nassérien, signé un accord de paix avec Israël sous l’égide des États-Unis, dont il a fait le protecteur de son pays et son principal bailleur de fonds, notamment pour financer son budget militaire. Après son assassinat, en octobre 1981, l’Égypte s’est retrouvée sous la férule d’un troisième officier général, Hosni Moubarak. Qui a géré l’héritage en mauvais père de famille, installant l’armée aux commandes de la vie politique et économique, conduisant tout doucement son pays au déclin, sans jamais accepter de lever l’état d’ur-

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CE QUE JE CROIS

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gence, ni de nommer un vice-président appelé à lui succéder en cas de vacance du pouvoir. Il est à peine exagéré de dire qu’il a fait de son pays – le plus grand du monde arabe – un protectorat américano-israélien, dont il aura été le gouverneur général. C’est contre cet état humiliant de dépendance, contre l’appauvrissement et les inégalités que les Égyptiens ont fini par se révolter. En revanche, l’armée, à laquelle Moubarak appartient et qui est le rempart du régime, reste, elle, populaire ou, en tout cas, acceptée.

Le soulèvement égyptien de janvier et février 2011 n’est pas révolutionnaire, tant s’en faut. C’est parce qu’il a emboîté le pas à la révolution tunisienne et semblé procéder d’elle qu’on a pensé qu’il l’était. Il traduit seulement l’exaspération de tout un peuple, sa lassitude de n’être pas le moins du monde considéré, ni par ses dirigeants ni par les autres peuples. Le cheval égyptien n’aspire qu’à changer de selle et de cavalier pour se sentir un peu mieux, retrouver l’estime de soi et le respect des autres. Il est évident, en tout cas à mes yeux, qu’il n’en est pas encore à remettre en cause la légitimité et le rôle de l’institution militaire qui a renversé et remplacé la monarchie. Sauf rebondissement, que je ne vois pas venir, il n’y a pas de révolution égyptienne ; c’est à tort qu’on en parle ; elle n’est pas pour cette fois-ci. Cela étant dit, même s’il ne débouche pas sur une vraie révolution, le soulèvement populaire que nous avons observé ouvre clairement la voie au renouvelle-

ment de la direction politique de l’Égypte. Qui, à l’aube de cette nouvelle décennie, peut espérer être mieux gouvernée et recevoir une dose de démocratie.

Alors que le mouvement de révolte né en Tunisie se propage déjà au Moyen-Orient, avant de gagner, demain, peut-être, l’Afrique, au nord et au sud du Sahara, nous nous posons la question de savoir s’il a abouti, en Tunisie, à une vraie révolution. Dans l’affirmative, ce pays méditerranéen est-il un cas particulier ? Je pense que oui : les mouvements qu’il semble avoir inspirés s’essouffleront vite et les éruptions auxquelles nous assistons ne tarderont pas à se résorber. Mais quid de l’Algérie et de la Libye voisines ? Seront-elles à leur tour affectées ?

S’agissant de ce Moyen-Orient où sont concentrées les principales réserves mondiales de pétrole, il est cependant une question, la plus importante peut-être, qui se pose avec acuité aux grandes puissances concernées : États-Unis, Europe, Russie, Chine et Inde. Cette question, la voici : lequel des trois pays qui se disputent le leadership de la région – Turquie, Iran et Israël – perdra au change et lequel y gagnera ? On n’aura la réponse que dans quelques mois, quand l’Égypte aura un nouveau pouvoir, qui imprimera au pays une autre orientation. Mon pronostic est qu’Israël et l’Iran sortiront perdants de ce changement tandis que la Turquie sera la grande gagnante… Tuteurs de l’armée égyptienne, qui aura conservé le pouvoir, les Américains demeureront les maîtres du jeu. Quant à la révolte des Égyptiens, elle aura revêtu les apparences d’une révolution, sans en être une. ■

HUMOUR, SAILLIES ET SAGESSE Pour vous faire sourire, grincer des dents – ou réfléchir –, ici, chaque semaine, une sélection subjective, la mienne, de ce qui a été dit ou écrit au cours des siècles par des hommes et des femmes qui avaient des choses intéressantes ou drôles à nous dire. B.B.Y.

La femme est un roseau dépensant. JULES RENARD ■

■ Cette roue sous laquelle nous tournons Est pareille à une lanterne magique. Le soleil est la lampe; le monde l’écran; Nous sommes les images qui passent OMAR KHAYYAM ■ On n’apprend pas au chien à chasser la veille de partir à la chasse. PROVERBE AFRICAIN ■ La dialectique est pour ainsi dire le faîte et le couronnement des sciences. PLATON

On a connu des hommes qui ont fait de hautes études, qui ont eu de très belles situations, qui ont gagné beaucoup d’argent et qui ont tout de même réussi leur vie. JEAN-CLAUDE CARRIÈRE

J’en connais qui seraient capables de tuer pour avoir le prix Nobel de la paix. JEAN YANNE

■ Rien que si tu dis le mot « juif », ça fait antisémite. LES NOUVELLES BRÈVES DE COMPTOIR ■ La pratique du zapping procure au téléspectateur l’illusion de la sélection consciente, alors qu’il ne répond souvent qu’à des réflexes immédiats d’ennui passager. JOËL DE ROSNAY

La règle du sage, pour gouverner, est d’ouvrir les cœurs et d’emplir les ventres. LAO-TSEU

La seule chose dont on soit sûr, en ce qui concerne l’avenir, c’est qu’il est rarement conforme à nos prévisions. JEAN DUTOURD ■

■ Je conviendrais bien volontiers que les femmes nous sont supérieures, si cela pouvait les dissuader de se prétendre nos égales. SACHA GUITRY

Peu d’enfants sont pareils à leur père: la plupart sont pires. HOMÈRE

La flatterie est une fausse monnaie qui n’a de cours que par notre vanité. LA ROCHEFOUCAULD ■

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SOMMAIRE

ÉDITORIAL

Gbagbo n’est pas Ben Ali

PS: Notre dernière enquête (J.A. no 2612) sur le bilan de Joseph Kabila a déclenché un petit tsunami politicomédiatique à Kinshasa. Aussitôt après nous avoir fait parvenir un long droit de réponse, le ministre de la Communication, Lambert Mende a, sur ordre, été le lire en direct à la télévision, avant d’en arroser la presse qu’il contrôle. Le tout assorti d’accusations aussi paranoïaques que diffamatoires. Nous aurions pu aisément arguer de cette mauvaise manière pour refuser de publier ce texte, mais nous l’avons néanmoins maintenu (lire pp. 36-39). Pour deux raisons. J.A. a toujours ouvert ses colonnes à la contradiction, fût-elle la plus vive: telle est notre conception de la liberté d’expression. Et la lecture de ce droit de réponse suffit en elle-même à valider le bienfondé de notre diagnostic: de Mobutu à Kabila, il n’y a que les hommes qui changent.

DANS JEUNE AFRIQUE ET NULLE PART AILLEURS

CENTRAFRIQUE BOZIZÉ AU FORCEPS Le chef de lʼÉtat sortant est réélu dès le premier tour. Trois de ses adversaires ont déposé un recours en annulation. Mais certains semblent prêts à composer avec lui. Le vainqueur va-t-il leur tendre la main ?

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ÉGYPTE LE PHARAON EST NU

Rejeté par la majorité de son peuple, poussé dehors par lʼarmée, lâché par les Américains, Hosni Moubarak sʼapprête à quitter le pouvoir. Fin de règne ou fin de régime ? Décryptage.

PHOTOS DE COUVERTURE : PANAPRESS/MAXPPP ; JON BERKELEY-ANDREA DE MURI ; HALEY/SIPA

DEPUIS UN MOIS, la polarisation médiatique et diplomatique sur les événements de Tunisie et d’Égypte a ouvert ce que l’on pourrait appeler une fenêtre d’opportunité pour quelques responsables subsahariens confrontés à des crises de légitimité et qui n’ignorent pas à quel point la fameuse communauté internationale FRANÇOIS est à la fois versatile et inconstante. SOUDAN L’élection présidentielle en Centrafrique, contestée par l’opposition, est ainsi passée comme une lettre à la poste, à l’instar du tripatouillage constitutionnel en cours en RD Congo, qui a déjà débouché sur une modification du mode de scrutin. Orfèvre en la matière, Laurent Gbagbo est sans doute celui qui a su le mieux mettre à profit ce détournement de focale pour que, imperceptiblement, ainsi que le démontrent les résultats « ivoiriens » du dernier sommet de l’Union africaine, on ne parle plus du problème (un coup d’État électoral), mais de la solution (comment s’en sortir sans recourir à une intervention militaire dont plus personne ne veut prendre la responsabilité). À cet égard, on me permettra ces trois avertissements à l’usage des membres du panel des chefs d’État chargés par leurs confrères d’une énième médiation. Sachez que Gbagbo ne partira pas. Il n’est pas Ben Ali. Ni les sanctions, ni les menaces de la CPI, ni l’étau financier, qu’il estime pouvoir contourner des mois encore, ni la rue – d’autant qu’elle lui est majoritairement acquise à Abidjan –, ni les gesticulations militaires ne le feront bouger. C’est un survivant, prêt à mourir dans les décombres de son palais. Sachez que Ouattara ne cédera pas. C’est le combat de sa vie, dans lequel il a engagé la totalité de ses proches et de ses partisans. Il y joue sa propre crédibilité, celle de l’ONU, de la Cedeao et de tous ceux qui, à l’extérieur, le soutiennent. Sachez enfin que l’un et l’autre ont désormais franchi le Rubicon, brûlé leurs vaisseaux, et qu’une conciliation entre les deux (trois avec Bédié) semble impossible tant leur affrontement a révélé de haines insoupçonnées. Cela étant dit, bonne chance et bon courage… ■

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CE QUE JE CROIS Par Béchir Ben Yahmed

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CONFIDENTIEL

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FOCUS

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Centrafrique Bozizé au forceps

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Commémoration Auschwitz, la douleur en partage

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Algérie Attention à la marche

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Tunisie-France Lʼencombrant ami dʼAlliot-Marie

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Nigeria Un Iranien dans la galère

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Interview Casimir Oyé Mba, ancien Premier ministre du Gabon, vice-président de lʼUnion nationale

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Pétrole Coup de chaud sur le baril

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LʼÉVÉNEMENT

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Paysage après la révolution

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AFRIQUE SUBSAHARIENNE

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Côte dʼIvoire Désunion africaine

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LIRE AUSSI : • Interview dʼAhmed Néjib Chebbi, p. 24 • Guerre ouverte chez les patrons, p. 88

LʼÉVÉNEMENT

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CÔTE DʼIVOIRE DÉSUNION

AFRICAINE Officiellement, les chefs dʼÉtat ont reconnu la victoire dʼAlassane Ouattara. Rarement, pourtant, ils auront été aussi divisés.

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DE JEUNE AFRIQUE

Katanga

Nouvel eldorado du cuivre

7-10 FÉV. 2011

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Son soussol fait du plateau katangais une terre de prédilection pour les miniers de la planète. Revue de détail. Spécial 28 pages.

SUISSE

LE PARADIS NʼEST PLUS CE QUʼIL ÉTAIT Gel des avoirs de Gbagbo et de Ben Ali, « loi Duvalier »... La Confédération ne veut plus être le coffre-fort des dictateurs. Surtout quand ils ont perdu le pouvoir.

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ADIEU

ÉDOUARD GLISSANT : « TOUT-MONDE » EN DEUIL Lʼécrivain martiniquais est mort le 3 février. Hommage.

L E D E VO I R D ʼ I N FO R M E R , L A L I B E R T É D ʼ É C R I R E

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Réactions À Abidjan, prudence et déception Droit de réponse à la RD Congo

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ECOFINANCE

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Côte dʼIvoire Les entreprises en mode survie

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MAGHREB & MOYEN-ORIENT

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La semaine dʼEcofinance

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Égypte Le pharaon est nu

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Finance Helios fait le plein

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Mauritanie Une explosion et des questions

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Tunisie Guerre ouverte chez les patrons

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Maroc Les hooligans hors jeu

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Aérien Dakar éjecte Brussels Airlines

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INTERNATIONAL

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Nigeria Fast-food à la sauce africaine

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Suisse Le paradis nʼest plus ce quʼil était

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Sénégal Patisen ne manque pas dʼappétit

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France Lʼhomme qui veut la peau de « DSK »

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Parcours Aya Cissoko

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Birmanie Mascarade à Naypyitaw

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Russie Agent 00 Sex

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L E P L U S D E J E U N E AF R I Q U E

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Mines Katanga : nouvel eldorado du cuivre

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MINES

JB RUSSELL/COSMOS

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TUNISIE

Malgré les soubresauts du régime benaliste, le peuple et la classe politique savourent une dignité et une liberté chèrement reconquises. Et esquissent les contours de la nouvelle République. Paysage après la révolution.

LE PLUS

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LIRE, ÉCOUTER, VOIR

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Livres Sonallah Ibrahim : « LʼHistoire est de nouveau en marche dans le monde arabe »

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Adieu « Tout-Monde » en deuil

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VOUS & NOUS

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Courrier des lecteurs

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« La revue » Le futur se pense au présent Post-scriptum


CONFIDENTIEL

POLITIQUE

TUNISIE LES VRAIS CHIFFRES DU MALAISE DES JEUNES L’OBSERVATOIRE NATIONAL DE LA JEUNESSE (ONJ) tunisien peut enfin rendre publics les résultats de quatre enquêtes réalisées entre 2005 et 2010, mais censurées par le régime Ben Ali. Un sondage de 2005 révèle par exemple que 41 % des jeunes Tunisiens (15-19 ans) souhaitaient émigrer, fût-ce clandestinement (pour 15 % d’entre eux). Motif le plus fréquemment invoqué: « l’absence d’avenir ». Par ailleurs, 58 % des personnes interrogées considéraient que le piston constituait le plus sûr moyen de s’insérer professionnellement. En 2006, 2009 et 2010, des enquêtes consacrées aux comportements des jeunes Tunisiens, au pays comme en France, sont, de la même façon, restées dans les tiroirs. « On nous a demandé de

falsifier des chiffres, raconte Brahim Oueslati, le directeur général de l’ONJ. Nous avons donc préféré enterrer les rapports. Parfois, c’est l’analyse des résultats qu’il fallait distordre. À plusieurs reprises, nous avons tiré la sonnette d’alarme sur la situation de la jeunesse, mais on a refusé de nous entendre. » D’autres organismes ont été confrontés à des problèmes du même ordre. L’Institut national de la statistique, par exemple, avait calculé que 44 % des diplômés étaient au chômage en 2010. Or le régime a publiquement avancé le chiffre de 22 %… Au ministère de l’Enseignement supérieur, des chercheurs avaient estimé que 40 % de ces mêmes diplômés n’avaient pas le niveau requis, et que 30 % d’entre eux étaient « irrécupérables »…

AMBASSADEURS SUR SIÈGE ÉJECTABLE

Le siège de l’ambassade de Tunisie, rue Barbet-de-Jouy, dans le 7e arrondissement de Paris.

QUE VA-T-IL ADVENIR des diplomates tunisiens en poste à l’étranger ? À Tunis, le ministère des Affaires étrangères a établi une liste d’ambassadeurs et de consuls jugés trop proches de l’ancien régime et appelés à être rapidement remplacés. Les ambassadeurs à Paris, Rome et Bruxelles seraient les premiers concernés. Pour les remplacer, reste

VINCENT FOURNIER/J.A.

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à trouver des hommes et des femmes immédiatement disponibles. Le ministère a donc pris contact avec des retraités de la haute fonction publique afin d’assurer la transition. À Paris, Mohamed Raouf Najar est pour l’instant toujours en poste. Mais le ménage a déjà été fait, à l’ambassade comme au consulat. Les portraits de l’ancien président ont disparu et, sur la page d’accueil du site officiel, une photo de Nicolas Sarkozy serrant la main d’un Zine el-Abidine Ben Ali tout sourire a été retirée. Quant aux opposants exilés et interdits de passeport sous la dictature, ils ont été fort bien reçus: en moins de deux heures, ils ont obtenu leurs papiers. À Tokyo, l’ambassadeur Noureddine Hached, fils de Farhat, le fondateur de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), assassiné en 1952, a annoncé sa démission dans une lettre en date du 26 janvier. Il devrait rentrer au pays à la mi-février pour s’impliquer dans la reconstruction du pays. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


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Le gouvernement rwandais a été l’un des tout premier s en Afrique à mettre en place une opération d’évacuation de ses ressortissants établis en Égypte. Le 4 février, un Boeing 737 de Rwandair est venu chercher à l’aéroport du Caire une centaine de passagers convoqués la veille sur leur lieu de résidence, tant dans la capitale qu’à Alexandrie. L’Égypte et le Rwanda entretiennent une coopération économique non négligeable. La construction du nouveau (et imposant) ministère de la Défense, en plein centre de Kigali, a ainsi été réalisée par Arab Contractors, le géant du BTP égyptien. AFFAIRE HABRÉ

QUAND WADE CONTREDIT NIANG Cafouillage lors du récent sommet de l’Union africaine à propos du dossier Hissène Habré. À l’issue d’une rencontre, le 31 janvier, entre Madické Niang, le chef de la diplomatie sénégalaise, et Ramtane Lamamra, le commissaire à la Paix et à la Sécurité de l’organisation – alors que le président Abdoulaye Wade avait déjà quit té Addis-Abeba –, l’UA avait pris acte du fait que le Sénégal restait disposé à juger l’ex-dictateur tchadien, par l’intermédiaire d’un « tribunal spécial à caractère international ». Quelque s heur e s plus tard, le chef de l’État a contredit son ministre et déclaré au quotidien f r an ç a i s La C ro ix q u e Habré ne serait pas jugé au Sénégal…

MAROC LE PRINCE ROUGE ET LES « RÉVOLUTIONS ARABES » C’est peu dire que le pouvoir marocain n’a que très modérément apprécié les récentes déclarations du prince Moulay Hicham au quotidien espagnol El País. Après avoir affirmé que « le Maroc ne fera probablement pas exception » à la vague de contestation qui, selon lui, est en passe d’atteindre « tous les régimes autoritaires » de la région, le cousin de Mohammed VI ajoute que « l’étendue » et « la vaste concentration » du pouvoir monarchique sont incompatibles avec « la dignité du citoyen ». « C’est la première fois qu’il s’en prend aussi directement au régime, commente un proche du Palais. Pourquoi le prince ne vient-il pas ici pour créer un parti plutôt que de critiquer de l’extérieur ? Pourquoi ne l’entend-on jamais s’exprimer sur les monarchies du Golfe ? Pourquoi ne crée-t-il pas davantage d’emplois dans son pays, plutôt que d’investir dans les Émirats ou en Thaïlande ? » Pour l’instant, aucun des quatorze partis marocains, que Le prince Moulay Hicham, cousin de Mohammed VI. Moulay Hicham juge pourtant « enhardis par les récents événements », ni aucune « contestation purement sociale » particulière ne semble avoir répondu à ce qui ressemble fort à une tentative de prophétie autoréalisatrice. ABD RABBO/SIPA

KIGALI ÉVACUE SES RESSORTISSANTS

CÔTE D’IVOIRE CASSE-TÊTE POUR ALPHA CONDÉ Qui soutenir en Côte d’Ivoire ? Gbagbo ou Ouattara ? Depuis son arrivée au pouvoir, le Guinéen Alpha Condé est tiraillé. Le 20 décembre, veille de son investiture, il avait invité à dîner Denis Sassou Nguesso et Jacob Zuma, les chefs d’État congolais et sud-africain, ainsi que Jean Ping, le président de la Commission de l’UA. Tous trois lui avaient conseillé la plus grande prudence. Le 24 janvier, chez Blaise Compaoré, à Ouagadougou, il a entendu les arguments pro-Ouattara. Mais trois jours plus tard en Angola, chez José Eduardo dos Santos, l’avis était diamétralement opposé. « Je suis pour un règlement pacifique de la crise », dit-il en public. « Entre Gbagbo et Ouattara, le choix est difficile », confie-t-il en privé. Une chose est sûre : il ne veut se fâcher ni avec son vieux complice burkinabè ni avec ses nouveaux Le président guinéen lors du dernier sommet amis d’Afrique australe. ZHAO YINGQUAN/LANDOV/MAXPPP

ÉGYPTE

de l’Union africaine, le 30 janvier à Addis-Abeba.

L’AGENDA DU « PANEL » Les ambassadeurs des cinq pays (Tanzanie, Mauritanie, Burkina Faso, Afrique du Sud, Tchad) membres du « panel » chargé par l’Union africaine de résoudre la crise ivoirienne devaient arriver le 5 février à Abidjan, afin de s’entretenir avec des représentants des deux camps. Le 20 février, à Nouakchott (le président mauritanien assurant la présidence du panel), ils rendront compte aux chefs d’État de leurs entretiens. Trois jours plus tard, les présidents des pays concernés se rendront à leur tour à Abidjan. Pour présenter un plan global de sortie de crise.

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CONFIDENTIEL

ÉCONOMIE

CÔTE D’IVOIRE GUERRE ÉCONOMIQUE

ÉNERGIE

Le président Alassane Ouattara et ses partisans menacent de sanctions internationales les banques qui continuent de travailler avec le gouvernement de Laurent Gbagbo. L’objectif est évidemment d’empêcher celui-ci de percevoir recettes de douane et impôts, et donc de payer les fonctionnaires. Dans le camp d’en face, Désiré Dallo, le ministre de l’Économie et des Finances, menace ces mêmes établissements bancaires de leur retirer leur agrément. Au mois de janvier, le camp Gbagbo a réussi à collecter en moyenne entre 5 milliards et 10 milliards de F CFA (entre 7,6 millions et 15 millions d’euros) par jour – avec un pic à 14 milliards. Ces recettes provenaient essentiellement du droit unique de sortie (DUS) sur les exportations de cacao et du paiement de l’impôt sur les entreprises.

Le sénateur – et ancien Premier ministre – Jean-Pierre Raffarin.

BENOIT TESSIER/REUTERS

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EDF ET VEOLIA SE RAPPROCHENT Les états-majors de Veolia et d’Électricité de France (EDF) – Henri Proglio est l’actuel patron de la seconde entreprise, après avoir été celui de la première – discutent d’un rapprochement de leurs activités en Afrique à travers la filiale Veolia Water India Africa. Les discussions entre les deux géants français de l’électricité et de l’eau ne concernent donc pas exclusivement le Gabon, où la presse s’était fait l’écho d’un rachat par EDF de 51 % des parts de Veolia dans la Société d’énergie et d’eau du Gabon, mais l’ensemble de l’Afrique subsaharienne. À commencer par le Niger et, à plus long terme, le Nigeria. HÔTELLERIE

FRANCE-ALGÉRIE UN VRP NOMMÉ RAFFARIN

MAZAGAN À L’HEURE SAOUDIENNE

LORS DE SON PROCHAIN DÉPLACEMENT à Alger, les 20 et 21 février, l’ancien Premier ministre français Jean-Pierre Raffarin tentera de faire avancer deux dossiers prioritaires. L’un concerne Total et le projet de construction d’une usine de vapocraquage d’éthane à Arzew, en coopération avec Sonatrach et Qatar Petroleum (l’accord avait été conclu lors d’une visite de Nicolas Sarkozy, en 2007). L’autre, une usine de montage de véhicules Renault, censée faire appel à des sous-traitants locaux (qui restent à découvrir). Mais ce n’est pas tout. Il sera aussi question de la construction par le groupe Sanofi-Aventis d’une troisième usine de fabrication de médicaments, d’un centre de stockage et d’un pôle biotechnologique à Alger (l’annonce en a été faite le 2 février), ainsi que de l’avancement des chantiers du métro et du tramway algérois. Enfin, Raffarin fera le point avec ses interlocuteurs sur le forum de partenariats et d’affaires, qui, les 30 et 31 mai, à la veille de la Foire internationale d’Alger, doit réunir entre 80 et 100 entrepreneurs français et entre 350 et 400 algériens.

Opéré d’une hernie discale au mois de décembre, à New York, le roi Abdallah d’Arabie saoudite, 86 ans, passe sa convalescence dans le complexe touristique de Mazagan, près d’El-Jadida, sur la côte marocaine. La quasi-totalité des chambres ont été réservées pour le monarque et sa suite, du 26 janvier au 20 février. Ce premier séjour d’un chef d’État est une belle opération pour le complexe, lancé en octobre 2009 par le groupe américano-sud-africain Kerzner. Ses promoteurs ciblent en priorité une clientèle moyen-orientale aisée.

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CULTURE & SOCIÉTÉ

CONFIDENTIEL LITTÉRATURE

MENGESTU CONFIRME

SCÉNARISTE ET PRODUCTEUR de Neuilly sa mère !, le grand succès de l’été 2009 en France (2,5 millions d’entrées), Djamel Bensalah va tenter de renouveler cette performance avec son prochain long-métrage, dont Le réalisateur Djamel Bensalah. le tournage s’est achevé le 15 janvier. Manifestement amateur de jeux de mots (on se souvient de Il était une fois dans l’Oued, en 2005), l’auteur songe à lui donner le titre facétieux de Beur sur la ville. Il est vrai qu’il s’agit d’une comédie… Tourné en grande partie à Saint-Denis (au nord de Paris), la ville natale de Bensalah, le film est doté d’un casting prestigieux. Autour de Booder, l’humoriste d’origine marocaine qui tient le rôle principal, on retrouve en effet Gérard Jugnot, Sandrine Kiberlain, Josiane Balasko et même le chroniqueur sportif Pierre Ménès. Beur sur la ville évoque les conséquences d’un cas de discrimination positive dans le commissariat de police d’une banlieue parisienne… Sortie prévue le 20 juillet.

GERIMA SUR DEUX FRONTS HAÏLÉ GERIMA, le réalisateur éthiopien de Teza (prix spécial du jury et prix du meilleur scénario à la 65e Mostra de Venise), travaille simultanément sur deux films. Le premier, Chicken Bone Express, est un long-métrage évoquant la ségrégation raciale aux États-Unis. Le second, The Children of Adwa, un documentaire historique sur la guerre italo-éthiopienne, en 1935.

PHOTOGRAPHIE VAUDEVILLE À ADDIS Le Maroc n’est pas membre de l’Union africaine (UA), mais il était quand même représenté au dernier sommet d’Addis-Abeba par la photographe Leïla Ghandi, l’un des cinq lauréats d’un concours organisé par l’UA et l’Union européenne. Trois de ses clichés étaient exposés dans le bâtiment de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique, où se sont retrouvés les chefs d’État. Problème : l’un d’eux (Fraternité) montre deux hommes se tenant par la main. Redoutant que l’image puisse être mal interprétée, certains étaient favorables à son retrait. Il a fallu que Jean Ping, le président de la Commission en personne, prenne la décision de la maintenir. Bien entendu, la photo n’a provoqué aucune protestation indignée… J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

VINCENT FOURNIER/J.A.

CINÉMA BENSALAH, DE NEUILLY À SAINT-DENIS

Les éditions Albin Michel publieront au mois de septembre la traduction française du nouveau roman de l’écrivain américain d’origine éthiopienne Dinaw Mengestu, paru en octobre 2010 aux États-Unis sous le titre How to Read the Air. L’auteur y évoque le dilemme d’un écrivain subsaharien, déchiré entre le désir de dire la vérité sur son pays d’origine et celui de se conformer à la perception générale d’une Afrique miséreuse, en marge de l’Histoire. Il y a quatre ans, Mengestu s’était fait connaître avec un premier roman magistral, Les belles choses que porte le ciel (Albin Michel, 2007). Le magazine The New Yorker voit en lui l’un des vingt jeunes romanciers américains les plus prometteurs. MUSIQUE

LES REVENANTS DE COTONOU Groupe légendaire des année s 1970, l ’Orches tre Poly-Rythmo fera son grand retour le 28 mars avec un album, Cotonou Club, enregistré dans la capitale économique du Bénin et à Paris. Produit par Sound’ailleurs et distribué par Universal, il sera disponible en CD et en vinyle, avec une version « de luxe » comprenant des bonus : vidéos backstage, live et quelques chansons acoustiques. Les fans pourront (re)découvrir leurs tubes revisités, avec des guest stars prestigieuses: Angélique Kidjo, Fatoumata Diawara, Paul Thompson et Nick McCar thy, du groupe Franz Ferdinand. Concerts prévus le 20 avril à la Cigale, à Paris, et le 24 au Printemps de Bourges.

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12 FOCUS

CENTRAFRIQUE

BOZIZÉ AU FORCEPS

Le chef de lʼÉtat sortant est réélu dès le premier tour. Trois de ses adversaires ont déposé un recours en annulation. Mais certains semblent prêts à composer avec lui. Le vainqueur va-t-il leur tendre la main ?

MARIANNE MEUNIER

P

endant que certaines scènes africaines captivent le monde – la Côte d’Ivoire, la Tunisie, l’Égypte –, d’autres sont sans spectateurs. Figurant au palmarès de la pauvreté, secouée par des rébellions sporadiques depuis 2005, la Centrafrique appartient à la seconde catégorie. La joute électorale qui s’y déroule depuis le 23 janvier se tient à huis clos. C’est que le vent de la révolution ne souffle pas sur le pays. François Bozizé, le président sortant, l’emporte dès le premier tour avec 66,08 % des voix, a annoncé la Commission électorale indépendante (CEI) le 1er février. Son adversaire au second tour de la présidentielle de 2005, Martin Ziguélé, ne recueille cette fois qu’un maigre 6,46 %. Entre les deux, l’ancien chef de l’État AngeFélix Patassé, renversé par Bozizé en mars 2003, obtient 20,1 % des suffrages. Émile Gros-Raymond Nakombo et Jean-Jacques Demafouth s’en tirent avec respectivement 4,64 % et 2,72 % des voix. Le taux de participation s’élève à 54,01 % (soit 986030 électeurs). La Cour constitutionnelle devait valider au plus tard le 7 février les résultats de cette élection largement négligée par les observateurs internationaux. Seule l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) aura dépêché une équipe importante le

jour J : trente personnes, qui ont toutefois renoncé à se rendre dans la moitié est du pays, jugée insuffisamment peuplée et trop dangereuse. Pour des raisons de sécurité également, l’Union européenne, qui a financé le scrutin à hauteur de 45 % et déploie souvent des missions pour les élections, s’est contentée de deux experts. « Il y a beaucoup de zones où nous n’aurions pu accéder, explique une source à Bruxelles, et nous n’aurions donc pas pu obser ver un échantillon suffisamment représentatif de bureaux de vote. » Mais la véritable explication, les diplomates occidentaux, empreints de commisération, finissent par l’avouer: la Centrafrique et ses 4 millions d’habitants n’est pas une priorité pour leurs pays. COSTUME ORANGE

Listes électorales incomplètes, affichage tardif, cartes d’électeur qui n’en sont pas: il y avait pourtant matière à observation, le 23 janvier. Aujourd’hui, ces irrégularités – dont certaines ont été relevées par l’OIF – n’inquiètent pas la majorité, qui se félicite de son score. « J’en suis très satisfait, dit Élie Oueifio, secrétaire général du parti au pouvoir, le Kwa na kwa [« Le travail, rien que le travail », NDLR]. Il entre dans la fourchette de nos prévisions. » Le résultat correspond au slogan que le candidat Bozizé, dans son costume

orange – sa couleur de campagne –, a scandé lors de chacun de ses meetings : « Premier tour ! » « Je ne fais que me référer aux électeurs, c’est ce que dit le peuple », expliquait-il à J.A. l’avant-veille du vote. Mais pour les candidats vaincus, ce n’est pas le peuple qui a parlé. Trois d’entre eux – Ange-Félix Patassé, Martin Ziguélé et Émile Gros-Raymond Nakombo – ont déposé un recours en annulation du scrutin devant la Cour constitutionnelle. « C’est un hold-up ! » s’exclame Patassé. Rentré au pays en 2009 après six ans d’exil, l’ancien président prétend à la victoire. Il en veut pour preuve le succès de son « carnaval », le 21 janvier. Ce jour-là, plusieurs heures durant, il avait sillonné la capitale à bord d’un Hummer noir, une Bible à la main, pour saluer une foule nombreuse. « Le peuple s’est levé pour me soutenir, explique-t-il à J.A. J’ai gagné les élections. » Et de promettre une « démonstration mathématique ». De son côté, Martin Ziguélé, qui

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François Bozizé et son épouse, Monique, à Bangui, le 21 janvier.

avait obtenu 23,5 % au premier tour de la présidentielle de 2005 et avait affronté Bozizé au second tour, estime qu’on lui a « fabriqué un score ridicule pour pouvoir dire “Ziguélé ne vaut rien” ». Il se fonde notamment sur un tableau détaillé qui recense les irrégularités préfecture par préfecture. En 2006, cet ancien assureur a pris la tête du Mouvement de libération du peuple centrafricain (MLPC), le parti fondé en 1979 par Patassé, dont il fut Premier ministre (de 2001 à 2003). Depuis lors, une question se posait : de facto chef de l’opposition, Ziguélé bénéficiait-il de l’absence de Patassé? « Il est tout à fait plausible que Patassé m’ait pris des voix », reconnaît-il aujourd’hui. Si la Cour constitutionnelle valide les résultats annoncés le 1er février, le paysage politique risque d’être monochrome. D’autant que les résultats des législatives, qui se sont également déroulées le 23 janvier, promettent eux aussi une vague orange à l’Assemblée nationale.

À 74 ans, Ange-Félix Patassé n’entend pas prendre le leadership de l’opposition. Malgré son recours en annulation, il joue le patriarche sage et rassembleur avec ses « enfants », comme il appelle les hommes politiques. Tout indique qu’il accepterait un poste taillé à la mesure de sa stature d’ancien chef d’État. S’il dénonce aussi la « fraude », Jean-Jacques Demafouth n’a pas déposé de dossier devant la Cour constitutionnelle. Leader politique

la question d’une éventuelle main tendue par le chef de l’État. Émile Gros-Raymond Nakombo se retrouve quant à lui dans une formation divisée. Une partie du Rassemblement démocratique centrafricain (RDC), créé par l’ancien chef de l’État André Kolingba (décédé en février 2010), a en effet rejoint la majorité. Reste Ziguélé, qui entend continuer son « combat politique ». Mais son score de 6,46 % le marginalise. « L’opposition politique est réduite aux acquêts », analyse-t-il. Bozizé se trouve face à une alternative: considérer ces appétits de toute nature dans un « idéal consensuel », selon l’expression de l’un de ses collaborateurs, en formant par exemple un gouvernement d’union nationale, ou les ignorer tout bonnement. Mais, avertit la même source, « l’humiliation ne pourrait que renforcer des positions belliqueuses ». ■

Demafouth rêve de participer au pouvoir, Patassé joue au sage, Ziguélé veut se battre. de la rébellion de l’Armée populaire pour la restauration de la démocratie (APRD), il annonce que sa « mission va finir dans un mois » et ne cache pas son envie de participer à l’exercice du pouvoir. « On discutera », répond-il à

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BAUDOUIN MOUANDA POUR J.A.

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COMMÉMORATION Auschwitz,

ALIK KEPLICZ/AP/SIPA

la douleur en partage

Une centaine de personnalités ont visité le camp d’extermination nazi, situé en Pologne, le 1er février.

UNE JOURNÉE PARTICULIÈRE et un pèlerinage pas comme les autres. Rabbins, imams, prélats à AuschwitzBirkenau (Pologne). Avec eux, quelque cent trente personnalités appartenant aux trois religions monothéistes qui ont décidé de communier ensemble en ce lieu de mémoire qui aura été l’épicentre de la plus grande catastrophe de l’Histoire. Le 1er février, ils sont partis de Roissy à bord d’un avion spécial pour Cracovie avant de rejoindre les camps où s’est perpétré le génocide des Juifs. Le pèlerinage était organisé à l’initiative de la mairie de Paris, de l’Unesco et du Projet Aladin, qui, depuis 2009, se donne comme objectif de rapprocher juifs et musulmans, et de lutter contre le négationnisme qui prospère à l’abri des conflits du Moyen-Orient. Étaient notamment du voyage Gerhard Schröder, l’ancien chancelier allemand ; Ely Ould Mohamed Vall et Nicéphore Soglo, anciens présidents de la Mauritanie et du Bénin ; Rama Yade, ambassadrice de France à l’Unesco ; Adama Sangaré et Simon Compaoré, maires de Bamako et de Ouagadougou. Les Marocains étaient venus en force : l’ambassadrice Aziza

Bennani, repré sent ant Moham med VI ; André Azoulay, conseiller du roi et l’un des initiateurs du Projet Aladin ; Fathallah Oualalou, le maire de Rabat, ainsi que les édiles de Casablanca, Fès et Meknès ; des intellectuels, comme Abdellatif Laabi, Driss El Yazami, Mohamed Tozy et Driss Khrouz. VERSET DU CORAN

Un moment for t : la cérémonie œcuménique. Le grand rabbin Israël Meïr Lau s’exprime en hébreu et en anglais. André Vingt-Trois, archevêque de Paris : « Ici, seul le silence constitue une attitude juste. » Enfin, d’une voix qui porte, Mustafa Ceric, grand mufti de Bosnie, entame son prêche (en arabe) comme dans n’importe quelle mosquée : « Au nom de Dieu, le Clément, le Miséricordieux… » Suit un verset qui assimile l’assassinat d’une âme à l’assassinat de toute l’humanité. L’émotion est à son comble, et pas uniquement parmi les musulmans. La visite des camps avec leurs fils barbelés, leurs miradors et les cheminées des fours crématoires laisse une impression de malaise grandissant.

On ne déambule pas impunément en ces lieux d’horreur absolue. Surtout, on a du mal à se représenter ce qui s’est passé ici. La Shoah reste abstraite, désincarnée. On s’accroche à ce qu’on a lu ou vu au cinéma. Si c’est un homme, de Primo Levi, ou Nuit et Brouillard, d’Alain Resnais, sont plus parlants que ce qu’on voit de ses propres yeux. Il s’agit pourtant d’une visite guidée. Et ce sont des rescapés qui sont nos guides. Raphaël Esrail est entré en résistance au début de la guerre. Il fabrique des faux papiers. Arrêté, il se retrouve à Drancy, où une jeune fille lui confie ses deux frères (10 ans et 13 ans), enfermés avec elle. Ils n’échappent pas à l’extermination. D’un camp à l’autre, les horreurs se succèdent, ainsi que des miracles qui lui permettent de survivre et de retrouver la jeune fille de Drancy, qui deviendra son épouse. MONTICULE DE CHEVEUX

Ginette Kolinka est également une rescapée. Elle nous montre des étendues vertes: « Il n’y avait pas d’herbe. S’il y en avait eu, je l’aurais mangée… Je ne garde aucune haine à l’égard des Allemands, mais j’en veux à ceux (anonymes) qui m’ont dénoncée. » C’est au musée que la réalité insaisissable jusqu’à présent saute au visage. Derrière les vitres, ce que les suppliciés ont laissé. Ici, un tas de chaussures ; là des peignes, des boîtes à cirage. Un amoncellement de valises portant le nom et l’adresse de leurs propriétaires : Marta Kafka – Vienne. Un monticule de cheveux destinés à une usine de textiles. Plus loin, le ballot de tissu, rêche et brunâtre. L’horreur. Retour à Paris avec une note d’espoir. La communion autour du souvenir de la Shoah a gagné tous les cœurs. La concurrence des mémoires et des souffrances s’est éteinte et nul n’a songé, d’un côté comme de l’autre, à se livrer à un marchandage des martyrs. La compassion ne se partage pas. ■ HAMID BARRADA, envoyé spécial

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FRANÇOIS MORI/AP PHOTO

Le Franco-Algérien, étoile de l’Opéra de Paris jusqu’en 2008, sera le prochain directeur de la danse du Théâtre du Capitole de Toulouse. Sous contrat depuis le 1er février 2011, il prendra la tête du ballet le 1er août 2012.

LA VACHE QUI RIT

AFP

C’était le surnom moqueur du président Moubarak. Le ruminant symbole de la célèbre marque de fromage, affublé de cadenas à la place de ses boucles d’oreilles, est aujourd’hui la star des manifestations en Égypte.

AHMED EZZ

Proche de Gamal Moubarak, l’homme d’affaires égyptien, accusé par l’opposition d’accaparer 60 % du marché national de l’acier, a démissionné du secrétariat général du Parti national démocratique (PND, au pouvoir).

AMR DALSH/REUTERS

Bouteflika multiplie les gages pour éviter la manifestation du 12 février.

KADER BELARBI

PIERRE KIPRÉ

L’ex-ambassadeur de Côte d’Ivoire en France a laissé son domicile de fonction aux mains de militants pro-Gbagbo : ils l’ont saccagé pour empêcher le nouvel ambassadeur, Ally Coulibaly, d’en prendre possession.

VINCENT FOURNIER/J.A.

ABDELAZIZ BOUTEFLIKA A ENFIN PARLÉ. Un mois après les émeutes qui ont éclaté dans vingt des quarante-huit wilayas (préfectures) que compte le pays. Ses propos sont rapportés par le communiqué du Conseil des ministres du 3 février. Après s’être incliné en mémoire des victimes (quatre morts, dont un tué par balle) et avoir déploré que des actes de destruction aient accompagné les manifestations, le président algérien a abordé la question de l’état d’urgence. La levée de ce dernier – il est en vigueur depuis 1992 – constitue la principale revendication de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD), une coalition de partis politiques et d’organisations de la société civile, qui appelle à une marche populaire et pacifique à Alger, le 12 février. Bien que marches et manifestations soient interdites dans la capitale, la CNCD maintient son appel. Un bras de fer du plus mauvais effet pour le pouvoir, trois semaines après la fuite pitoyable du Tunisien Ben Ali et au moment où les images de la place Al-Tahrir, au Caire, passent en boucle sur toutes les chaînes de télévision. Afin de « mettre un terme à toute polémique infondée sur la question de l’état d’urgence, a annoncé Bouteflika devant un Conseil médusé, je charge le gouvernement de s’atteler sans délai à l’élaboration de textes appropriés qui permettront à l’État de poursuivre la lutte antiterroriste dans le cadre de la loi. » Un plan Vigipirate à l’algérienne? Pour le cas où son annonce ne dissuaderait pas les organisateurs de la marche, le président a réaffirmé que l’exception qui frappe Alger – les manifestations sont autorisées ailleurs – est due à « des raisons d’ordre public bien connues, et qu’elle n’a certainement pas pour objet d’empêcher une quelconque expression ». En ces temps d’incertitudes sociales, d’effluves révolutionnaires et d’envolée des cours mondiaux des produits de première nécessité, le chef de l’État a tenu à rappeler que l’amélioration des conditions de vie de la population a toujours été au cœur de son action. « Pour répondre aux attentes des citoyens », il a annoncé de nombreuses mesures visant à encourager l’emploi, accélérer les chantiers de construction de logements sociaux, réguler le marché et préserver le pouvoir d’achat. S’agissant de la corruption, Bouteflika a reconnu que « des atteintes aux deniers publics existent et [que ce] fléau s’est renforcé ». « Nul ne tente de dissimuler ces réalités, mais nul ne peut contester la détermination de l’État à combattre ces déviations », a-t-il conclu. ■ CHERIF OUAZANI

OSCAR PISTORIUS

L’athlète sud-africain, médaillé d’or aux Jeux paralympiques de Pékin en 2008 (en 100, 200 et 400 mètres), est la nouvelle égérie d’A*Men, le parfum du créateur français Thierry Mugler.

KENNY KUNENE

Le magnat sud-africain des mines a dû s’excuser d’avoir gobé des sushis à même le corps d’un mannequin, lors d’une soirée qu’il organisait. Un acte qualifié par l’ANC (au pouvoir) de contraire à son éthique.

D.R.

Attention à la marche

GIAMPIERO SPOSITO/REUTERS

EN HAUSSE

ALGÉRIE

EN BAISSE


16 FOCUS

CES

TUNISIE-FRANCE Lʼencombrant CHIFFRES ami dʼAlliot-Marie QUI PA RL EN T

3 millions

de F CFA (4 570 euros) offerts par Blaise Compaoré à chacun des vainqueurs burkinabè de la CAN Cadets.

50 milliards

d’euros dissimulés au fisc par les Italiens en 2010.

2400

c i v ils afghans tués en 2010, selon l’ONG Afghan Rights Monitor.

4 éléphantes

de cirque, de 40 ans et 3,5 tonnes chacune, bloquées au Maroc en at tente d’un visa européen.

LORSQUE, À LA FIN DE DÉCEMBRE, il a transporté dans son jet privé, de Tunis à la station balnéaire de Tabarka (Nord-Ouest), Michèle Alliot-Marie, ainsi que les parents et le compagnon de la ministre française, Aziz Miled l’a fait par amitié. Mais l’homme d’affaires savait aussi que le président Ben Ali allait lui savoir gré de ce geste gratifiant pour le tourisme tunisien et… pour sa propre image. En installant ses amis au Tabarka Beach, un paradisiaque cinq-étoiles qui lui appartient, Miled était cependant loin de s’imaginer que Ben Ali prendrait la fuite trois semaines plus tard, et que les vacances de la chef de la diplomatie française dans un pays au régime contesté susciteraient une vive polémique. Durant leur séjour, Alliot-Marie et les siens ont été « chaperonnés » – c’est le terme employé par un témoin – par un ami tunisien qui a longtemps dirigé le casino Partouche de Djerba, où la ministre avait l’habitude de passer ses vacances. Yassine Ben Abdessalem, 46 ans, ingénieur des Ponts et Chaussées-Paris, a fait carrière dans le groupe Partouche, dont il dirigeait un établissement en Suisse il y a un an. Depuis Tabarka, il a accompagné le groupe dans des excursions alentour, notamment à Bulla Regia, un site romain. Ils ont aussi passé une journée à Tozeur, aux portes du désert, où ils se sont rendus grâce au jet de Miled. Selon notre source, ce serait Patrick Ollier, le compagnon d’Alliot-Marie – et par ailleurs ministre chargé des Relations avec le Parlement –, qui a payé la facture : de l’ordre de 3 000 dinars (1500 euros) pour les quatre personnes. « La modicité de cette somme pour un séjour dans deux suites, thalasso comprise, est due au fait que l’hôtel leur a fait une fleur

en cette période creuse. Il a appliqué le tarif des chambres ordinaires. » Membre actif du clan Ben Ali, Miled a fait partie du comité de campagne du président à plusieurs reprises, et en était l’un des principaux bailleurs de fonds. Son nom figure – avec un millier d’autres – sur deux pétitions diffusées dans les médias en octobre dernier appelant Ben Ali à briguer un sixième mandat. On a appris depuis que certaines personnes n’avaient pas signé ces pétitions et qu’elles avaient été inscrites d’office par deux conseillers du président. Miled a-t-il été « spolié » par Belhassen Trabelsi, le beau-frère de Ben Ali, et sous la pression de ce dernier ? La fusion des compagnies aériennes privées Nouvelair (contrôlée par Miled) et Karthago Airlines (propriété de Trabelsi) a pourtant eu lieu, dit-on dans les milieux boursiers, sur la base d’un échange d’actions dont la parité a été recommandée par un cabinet indépendant du groupe Rothschild (1 action Nouvelair pour 3,8 actions Karthago). Ce qui a en revanche paru curieux à l’époque, c’est que, avec 21 % du capital, Trabelsi ait pris la présidence de Nouvelair jusque-là assurée par Miled. Ce dernier avait justifié son retrait par son âge (71 ans, en 2008). Vendeur à la sauvet te de tapis de Kairouan, sa ville natale, Miled est devenu un pionnier de l’industrie touristique avec Tunisian Travel Service, aujourd’hui l’un des dix premiers groupes privés du pays. Il a notamment développé ses affaires avec Slim Chiboub et Marwan Mabrouk, deux autres gendres de Ben Ali. Avec 12 % dans le capital de la Banque internationale arabe de Tunisie, il a permis aux frères Mabrouk de disposer d’une majorité de contrôle. ■ ABDELAZIZ BARROUHI, à Tunis

L’homme d’affaires Aziz Miled. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

HICHEM

10,2 millions

de litres de blended scotch whisky consommés par les Émiratis en 2010, qui deviennent les premiers consommateurs au monde, devant les Français, selon une étude d’Euromonitor International.


STEFANO DE LUIGI/VII NETWORK

FOCUS 17

SUD-SOUDAN RIME AVEC INDÉPENDANT

ARRÊT SUR IMAGE

À 98,83 %, selon les résultats provisoires, les Sud-Soudanais se sont prononcés pour l’indépendance. Conformément à l’accord de paix signé en 2005 par Juba et Khartoum, la région ne sera un État souverain que le 9 juillet prochain. Le temps pour les deux Soudans de régler la question du tracé des frontières ou celle de la répartition des recettes pétrolières. En attendant, les Sud-Soudanais célèbrent la naissance de leur pays, le 54e du continent, laissant les politiques définir les nouvelles règles du vivre ensemble… séparément.

NIGERIA Un Iranien dans la galère LE 31 JANVIER, UN TRIBUNAL D’ABUJA a accédé à la requête du procureur Moses Idakwo en annulant les accusations d’importation illégale d’armes qui pesaient sur Azim Aghajani. Mais la remise en liberté de l’homme d’affaires iranien aura été très provisoire : dans la foulée, Idakwo a annoncé avoir déposé contre lui une plainte identique devant une juridiction de Lagos, à quelque 500 km d’Abuja. Plus pratique, selon le magistrat. Explications. Les autorités nigérianes suspectent Aghajani d’avoir organisé le transport, depuis le port de Bandar Abbas (Iran), de treize conteneurs remplis d’armes, notamment des lance-roquettes et des grenades (voir J.A. n o 2603). Saisis à la fin d’octobre dernier dans le port d’Apapa, à Lagos, ils étaient destinés à la Gambie, selon l’affréteur du navire, le français CMA CGM, qui a précisé que la cargaison était enregistrée sous la mention « paquets de laine de verre et palettes de pierre ». Quatre J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

personnes ont été arrêtées : Aghajani (qui est membre des Gardiens de la révolution, bras idéologique du régime iranien), ainsi que trois Nigérians. Les accusations contre deux de ces derniers ont été retirées le 31 janvier, date prévue pour l’ouverture du procès. Aghajani et son coaccusé nigérian, eux, seront jugés à Lagos. Pour le procureur, cette délocalisation permettra à la cour de se rendre facilement sur les lieux où sont stockées les armes. Lorsqu’elle a éclaté, l’affaire a provoqué bien des remous. Banjul avait rompu ses relations diplomatiques avec Téhéran. Et, se sentant menacé par un arrivage d’armes chez son voisin gambien, le Sénégal avait dépêché son ministre des Affaires étrangères à Lagos. Le 18 janvier, des experts des Nations unies sont arrivés au Nigeria pour inspecter la cargaison. Les sanctions qui pèsent contre l’Iran lui interdisent notamment d’exporter des armes. ■ MARIANNE MEUNIER


18 FOCUS

INTERVIEW

Casimir Oyé Mba ANCIEN PREMIER MINISTRE DU GABON, VICE-PRÉSIDENT DE LʼUNION NATIONALE (UN)

CANDIDAT LUI AUSSI à la présidentielle d’août 2009, l’ancien Premier ministre d’Omar Bongo Ondimba se dit solidaire du coup d’éclat de son allié Mba Obame – lequel est réfugié dans les locaux du Pnud à Libreville depuis son autoproclamation en tant que chef de l’État, le 25 janvier. Il explique pourquoi. JEUNE AFRIQUE : Pourquoi n’êtesvous pas réfugié au Pnud? CASIMIR OYÉ MBA : Parce que j’ignorais qu’à l’issue de la cérémonie de prestation de serment d’André Mba Obame (AMO) il y aurait une marche vers le Pnud. Le lendemain, j’ai appris que les membres du gouvernement nommés par AMO et une partie des cadres de notre parti avaient choisi cette représentation diplomatique pour se mettre à l’abri des arrestations massives qui auraient eu lieu s’ils étaient rentrés chez eux. Depuis, cette trentaine de personnalités vit dans des conditions très inconfortables. Cela n’a que trop duré.

Ce coup d’éclat était-il le seul moyen de faire bouger le pouvoir ? Les gens ont tort de porter sur cet acte politique un regard de juriste. Lorsqu’une personnalité prête serment alors qu’il y a un président déjà en place, on a vite fait de l’accuser de haute trahison. Nous devons considérer cette crise comme une crise éminemment politique. L’ancien candidat à la présidentielle estime qu’il est le vainqueur de l’élection. Il s’appuie en cela sur un film [Françafrique, 50 années sous le sceau du secret, réalisé par Patrick Benquet, NDLR] dont on peut penser ce que l’on veut. Cer tes, ce n’est pas le gouvernement français qui y prend la parole au nom de la France. Mais ce film a été financé en partie par des fonds publics et diffusé sur une chaîne du service public. Même si les personnalités qui s’y expriment ont quitté les affaires depuis longtemps, elles ont tout de même été au cœur des rapports entre la France et l’Afrique en général, et le Gabon en

BRUNO LÉVY POUR J.A.

« André Mba Obame ne pouvait rester inerte »

particulier ! Connaissant la teneur de ces rapports, Mba Obame ne pouvait rester inerte. Quelle sera l’issue de cette crise? Croyez- en mon expérience, le Gabon est malade. Je propose à toutes les parties de s’asseoir autour d’une table pour apaiser les tensions. Le pouvoir doit prendre l’initiative de la discussion. Au regard du mauvais déroulement de la dernière présidentielle, l’opposition dans son ensemble demande plus de transparence, notamment l’utilisation de la biométrie pour l’élaboration du fichier électoral. ■ Propos recueillis par GEORGES DOUGUELI

NIGER Hama, arbitre du duel Issoufou-Seini POUR QUI VA VOTER HAMA AMADOU ? C’est l’un des principaux enjeux du second tour de la présidentielle, prévu le 12 mars. L’ancien Premier ministre a le choix entre Mahamadou Issoufou – arrivé en tête, selon les résultats provisoires du premier tour du 31 janvier, avec quelque 36 % des suffrages exprimés – et Seini Oumarou – qui s’est hissé à la deuxième place avec 23,2 % des voix. Fort de ses 19,8 %, Hama est donc en position d’arbitre. Trois autres candidats pèseront aussi sur la victoire finale : Mahamane Ousmane, qui pointe à 8,4 %, et Cheiffou Amadou et Moussa Djermakoye, qui sont presque ex æquo avec quelque 4 % chacun. Pour Hama, le choix n’est pas simple. Le 25 janvier, quelques jours avant le premier tour, il s’est allié avec Seini et Ousmane pour battre Issoufou. Conformément à cet accord, il devrait donc appeler à voter Seini au second tour. Mais beaucoup de ses militants ne sont pas d’accord.

« C’est une alliance contre-nature », disent-ils. Après avoir lutté contre le tazartché – ce bonus de trois ans que l’exprésident Tandja avait tenté de s’octroyer en 2009 –, ils n’ont pas du tout envie de voter pour Seini, l’héritier de Tandja, et se sentent beaucoup plus proches d’Issoufou. Dans la sous-région, plusieurs chefs d’État grincent aussi des dents. Si Seini gagne, ils redoutent que Tandja soit libéré et reprenne la main. Du coup, depuis quelques jours, le Nigérian Goodluck Jonathan, le Burkinabè Blaise Compaoré et le Guinéen Alpha Condé parlent beaucoup avec Hama Amadou… Quant à la junte au pouvoir à Niamey, officiellement, elle est neutre. Mais, en privé, elle penche nettement pour Issoufou. « Si Seini passe, on aura fait un coup d’État pour rien », confie un proche du général Salou Djibo – en référence au putsch anti-Tandja de février 2010. ■ CHRISTOPHE BOISBOUVIER J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


FOCUS 19 ILS ONT DIT

Coup de chaud sur le baril LA RÉVOLTE ÉGYPTIENNE est-elle responsable de l’envolée du prix du baril ? À son plus haut niveau depuis septembre 2008, il a dépassé les 103 dollars à New York le 2 février. Certes, les marchés ont anticipé les répercussions possibles de ces troubles politiques sur le bon fonctionnement du canal de Suez, où transitent 5 % du brut mondial, et de l’oléoduc Sumed, voie stratégique pour les exportations en provenance du MoyenOrient. Mais les prévisions de croissance de la Chine et de l’Inde pour 2011, respectivement de 10 % et de 8 %, avaient déjà rendu les cours nerveux : la demande mondiale d’or noir, qui a bondi de 3 % en 2010, pourrait encore croître d’au moins 2 % cette année, alors que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a plutôt eu tendance à réduire l’offre. Enfin, les investisseurs – derrière qui s’agitent les spéculateurs – ne se plaindront pas d’un baril qui a pris plus de 9 % rien que pour le mois de janvier. Qu’importent les raisons : les gagnant s et les perdant s font déjà leurs comptes. Les bénéfices records devraient émailler la saison des résultats annuels des compagnies pétrolières : l’angloné erlandais Shell a ou ver t le bal le 3 février, avec un profit de 20,13 milliards de dollars (14,6 milliards d’euros) pour l’année 2010, soit une hausse de 62 %. Les pays dépendants des importations, au premier rang desquels les États africains, continuent quant à eux de souf frir. Face à l’augmentation du prix des denrées alimentaires, les subventions sont leur seul recours. Le Sénégal a annoncé une baisse de 10 % à 15 % du prix de certains produits, et le Maroc prévoit d’accroître ses subsides aux produits pétroliers : de 3 milliards de dollars en 2010, ils passeront à 5 milliards en 2011. Cela suffira-t-il à assurer la paix MICHAEL PAURON sociale ? ■

ANITA CORTHIER

« Moralement, le régime est mort. Mais il n’est pas encore mort politiquement. » ALAA EL ASWANY Écrivain égyptien

« Après soixante-deux ans au service de l’État, j’en ai assez. Je veux partir. Mais si je démissionne aujourd’hui, ce sera le chaos. » HOSNI MOUBARAK Président de l’Égypte (le 3 février, à la chaîne de télévision américaine ABC)

« C’est moi qui ai lancé le processus démocratique.

Lorsque l’on me traite de tyran, ça me fait rire, parce que les gens souffrent d’amnésie. Ils ont oublié dans quelles conditions je suis parti d’Haïti. » JEAN-CLAUDE DUVALIER Ancien dictateur haïtien, de retour après vingt-cinq ans d’exil

« Avant la crise, les pays émergents représentaient 40 % du marché automobile ; en 2020, ils en détiendront plus de 60 %. C’est un véritable basculement. » CARLOS GHOSN PDG de Renault

« Entre Aubry, DSK et Royal, on dirait une bagarre de dealers de quartiers. » JAMEL DEBBOUZE Humoriste et comédien franco-marocain (à propos du Parti socialiste français)

LE DESSIN DE LA SEMAINE

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GABLE • THE GLOBE AND MAIL (Toronto, Canada)

THE NEW YORK TIMES SYNDICATION

PÉTROLE


20 L’ÉVÉNEMENT

T UNISIE

PAYSAGE APRÈS LA RÉVOLUTION Malgré les soubresauts de lʼappareil sécuritaire benaliste, le peuple et la classe politique ‒ toutes tendances confondues ‒ savourent une dignité et une liberté chèrement reconquises. Et esquissent les contours de la nouvelle République.

E

FRANÇOIS SOUDAN

ntre chien et loup, grisaille d’hiver et effluves de jasmin, la Tunisie vient de vivre une semaine étrange, quand la marche de l’Histoire semble hésiter, au risque parfois de se fourvoyer. Tous les changements de régime, toutes les révolutions ont connu ces lendemains de victoire un peu pâteux, ces retours de vent mauvais, cette apparente précarité qui fait craindre, parfois au-delà du raisonnable, que tout est encore réversible. Les soubresauts de l’hydre agonisante ont pris ici l’allure des flics perdus du benalisme, hier tout-puissants, aujourd’hui traînés dans la boue, dont le baroud de déshonneur s’est concrétisé le 31 janvier par l’occupation de leur matrice, le ministère de l’Intérieur, suivie de la tentative de prise en otage du nouveau titulaire des lieux, Farhat Rajhi, et du chef d’état-major des armées, Rachid Ammar. Triste équipée, menée par une cohorte de policiers en civil, d’ex-miliciens, de repris de justice, vouée d’avance à l’échec et qui traduit plus leur

désespoir que les prémices d’une improbable contre-révolution. Reste que, au milieu d’un océan de rumeurs, de surenchères et parfois de règlements de comptes – d’autant plus venimeux qu’ils émanent d’anciens eunuques du pouvoir déchu subitement mués en héros de la résistance –, le gouvernement Ghannouchi se serait bien passé de ces coups de pied de l’âne, lui dont le silence et une certaine forme de paralysie sont critiqués par un peuple avide au même moment de changement immédiat et de retour à la normalité. Quant aux leaders d’opinion, qui ont tous déjà en point de mire la future élection présidentielle, ils mesurent chaque jour un peu plus combien la valeur refuge qu’ils incarnaient courageusement face à la dictature était finalement plus confortable à gérer – au sens politique du mot – que les exigences postrévolutionnaires. La chute de Ben Ali a apporté la dignité et la liberté. Reste le pain et le travail. Ce combat-là ne se règle pas en une journée, fût-elle celle, historique, du 14 janvier 2011. ■



22 L’ÉVÉNEMENT

RCD, cʼest fini!

D

ésormais passé à la postérité, le slogan « dégage ! » s’adressait à Ben Ali et à ses clans, mais aussi au parti au pouvoir, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD). Dominateur et omnipotent vingt-trois ans durant, le seul parti de masse « légal » ressemble désormais à une coquille vide. Reconnaissable à sa façade de verre, sur l’avenue Mohammed-V, à Tunis, son imposant et rutilant siège de dix-sept étages, d’une valeur estimée à 20 millions de dinars (environ 10 millions d’euros), est désert depuis que des manifestants ont tenté de le prendre d’assaut, le 15 janvier, au lendemain de la fuite du président déchu. Dans la foulée, le portrait géant de « l’homme du changement » a été retiré de la façade, et l’immense banderole à sa gloire qui lui jurait fidélité « à vie » a disparu. Protégé par des blindés arrivés juste à temps, il n’a pas été incendié, contrairement au siège du PND égyptien. Symboliquement, les manifestants se sont contentés de décrocher les lettres dorées de son enseigne. Aussitôt Ben Ali parti, les deux quotidiens du RCD ont cessé de paraître. Le président déchu ayant été radié du parti, Mohamed Ghannouchi a dû démissionner du poste de viceprésident pour pouvoir se maintenir à la tête du gouvernement provisoire. Le bureau politique, la supposée instance suprême, dont les membres étaient nommés par Ben Ali, s’est autodissous. À l’image du siège, les 9 000 sections de base, 360 fédérations et 28 comités de coordination régionaux ont été fer-

ONS ABID

Dominateur et omnipotent vingttrois ans durant, lʼancien parti au pouvoir ressemble aujourdʼhui à une coquille vide. Mais certains ne désespèrent pas de le « reconstruire ».

Le siège du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), à Tunis.

més, quand ils n’ont pas été incendiés par les manifestants. Les dirigeants des organisations professionnelles satellites, comme l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica, patronat) ou l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (Utap), ont collectivement démissionné du parti et proclamé leur indépendance à son égard. Les directions pro-RCD des syndicats de la magistrature et de la presse ont été déposées au profit de celles, légitimes, écartées sur décision de juges aux ordres du régime. L’Interna-

ancien ministre des Affaires étrangères et homme politique respecté, qui est le seul à faire publiquement état de ses intentions. Mais ses liens avec la famille Ben Ali – il est cousin par alliance de l’ex-président – pourraient lui compliquer la tâche. M’Hamed Chaker, ministre de la Justice de 1980 à 1984, a pour sa part été approché pour coiffer le mouvement, mais l’intéressé, âgé de 77 ans, n’est guère enthousiaste. Le seul point commun entre ces groupes aux motivations diverses et parfois inavouables est le choix de revenir à l’appellation historique du parti, le Néo-Destour, et de prendre comme référence Habib Bourguiba. Hédi Baccouche, qui fut le Premier ministre de Ben Ali, de 1987 à 1989, serait, dit-on, mêlé aux consultations politiques actuelles, mais l’intéressé dément catégoriquement qu’il soit en train de tirer les ficelles. « J’ai été consulté, nous a-t-il déclaré, mais je n’ai pas de projet politique. Cela dit, si les diverses initiatives aboutissent à l’élaboration d’une plateforme commune, je souhaiterais qu’il y ait un Néo-Destour rénové qui défende un “bourguibisme” ouvert et

On s’acheminerait vers la renaissance du Néo-Destour bourguibiste. tionale socialiste a exclu le RCD, et c’est un parti d’opposition, le Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL), qui en reste le seul membre tunisien. Requiem donc pour l’ex-parti au pouvoir ? Voire. Dans l’ombre, au moins cinq groupes s’activent pour le « reconstruire » sur de nouvelles bases. À la tête de l’un d’eux, Kamel Morjane,

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TUNISIE PAYSAGE APRÈS L A RÉVOLUTION 23

ABDELAZIZ BARROUHI, à Tunis

CONFIDENCES DE...

Mustapha Ben Jaafar Secrétaire général du Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL) JEUNE AFRIQUE : Vous étiez à Paris le 1er février, invité par le Parti socialiste (PS). Qu’avez-vous pensé de l’attitude de la France pendant la révolution tunisienne ? M U S TA P H A B E N JAAFAR : Elle ne m’a pas étonné. C’est la France habituelle, qui donne la priorité à la realpolitik, aux capitaux et au sécuritaire. Mais il y a aussi une autre France, celle des ONG, des partis de gauche, qui se sont toujours tenus aux côtés des défenseurs des droits de l’homme et des démocrates. ARNAUD ROBIN/FEDEPHOTO

démocratique. » Ce qui est cocasse, c’est que tout ce petit monde avait adulé Bourguiba avant de le vouer aux gémonies au profit de Ben Ali. Ironique retournement de l’Histoire. À supposer que ces groupes réussissent à « reconstruire » le RCD sous une nouvelle appellation, ses chances de redevenir un parti de masse sont extrêmement réduites. À cela une raison simple: si la séparation du parti et de l’État décidée par le gouvernement provisoire est effective et totale, le RCD perd ipso facto son caractère de « parti clientéliste », qui lui permettait de revendiquer plus de deux millions d’adhérents alors qu’il n’en comptait que le quart. En outre, il ne disposera plus de la manne financière que lui assurait sa position privilégiée et qui était gérée d’une façon opaque par le trésorier du parti, Abdallah Kallel. Le RCD ne pourra plus, par ailleurs, racketter les grandes entreprises, qui lui fournissaient la plus grande partie de ses ressources occultes. Fini le 1,6 million de dinars de subvention budgétaire annuelle dont il disposait sur la base d’une loi « sur mesure » relative au financement des partis et de leur presse. Exit les six cents fonctionnaires (dont deux cents au siège) mis à sa disposition et rétribués par l’administration et les sociétés publiques. Exit aussi les innombrables véhicules du domaine de l’État octroyés aux membres du parti, et les biens immobiliers publics et municipaux abritant la plupart de ses structures pour des loyers symboliques. Le RCD, rebaptisé Néo-Destour à la faveur du pluralisme politique et de la liberté d’association, qui sont désormais la règle, deviendrait alors un parti comme les autres, estiment les plus favorables à cette hypothèse. Et pour rassurer, ils estiment son poids électoral, sans falsification, à « au moins 10 % des voix », comme nous l’a confié l’un des promoteurs du futur NéoDestour. « Au moins » ? Si tel était le cas, cela voudrait dire, vu l’impopularité criante du parti, qu’on sera tout bonnement revenu aux bonnes vieilles habitudes de la fraude électorale et du pouvoir de l’argent. ■

L’actuel gouvernement de transition vous paraît-il légitime ? Quelles que soient les qualités de ceux qui le composent, ce gouvernement n’incarne ni la rupture ni l’unité nationale, puisque les principaux partis n’y sont pas représentés. Ce gouvernement annonce des réformes et se comporte comme s’il allait durer, alors que c’est un gouvernement de transition, qui n’a aucune légitimité démocratique. Je m’inquiète par ailleurs de constater qu’il agit sans aucun contre-pouvoir, l’Assemblée nationale et la Chambre des conseillers étant actuellement des coquilles vides. Il aurait fallu constituer un gouvernement de technocrates chargé des affaires courantes et mettre en place un Conseil de la révolution, qui soit une structure plus politique, composée de membres de la société civile ayant une autorité morale. Allez-vous être candidat à l’élection présidentielle ? C’est une décision qui me paraît prématurée. On ne sait même pas à quoi va ressembler la nouvelle Tunisie. La question se posera lorsqu’une réforme constitutionnelle et l’abrogation des lois liberticides auront eu lieu. Quel est le poids électoral de votre parti ? C’est difficile à dire. On sort d’une période de verrouillage extrême où l’on ne pouvait ni communiquer, ni organiser de meetings, ni se présenter à des élections libres. D’ailleurs, je remarque que les médias nous sont toujours fermés et sont monopolisés par les membres du gouvernement. Les islamistes sont revenus dans le jeu politique. Faut-il en avoir peur ? La stratégie de Ben Ali a justement consisté à faire peur en agitant l’épouvantail islamiste. Aujourd’hui, on ne marche plus. La nouvelle Tunisie doit être la Tunisie de tous, la Tunisie de la réconciliation, où chaque Propos recueillis par LEÏLA SLIMANI citoyen aura sa place. ■

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24 L’ÉVÉNEMENT

INTERVIEW

Ahmed Néjib Chebbi

LEADER HISTORIQUE DU PARTI DÉMOCRATIQUE PROGRESSISTE (PDP)

« La politique, ce nʼest pas tout ou rien »

L

e pragmatisme est-il une tare ou une vertu ? Une chose est sûre : sans lui, le gouvernement d’union nationale serait mort-né. Ahmed Néjib Chebbi, leader historique du Parti démocratique progressiste (PDP), est aujourd’hui à la fois incontournable et surexposé. Au centre de l’échiquier politique. Devenu ministre du Développement régional – un portefeuille stratégique –, cet avocat de 67 ans, opposant résolu aux régimes de Bourguiba et de Ben Ali, a pris le risque de brouiller son image en acceptant de participer au gouvernement de Mohamed Ghannouchi. Il s’en explique. Et livre sa vision de la transition qui doit conduire la Tunisie vers les premières élections libres de son histoire.

JEUNE AFRIQUE : Le gouvernement « Ghannouchi I », annoncé le 17 janvier, auquel vous avez choisi de participer, faisait la part belle aux anciens du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD). Il a suscité l’hostilité de la population et n’a pas survécu dix jours. Rétrospectivement, regrettez-vous d’avoir apporté votre « caution » à un cabinet si impopulaire ? AHMED NÉJIB CHEBBI : Revenons un peu en arrière et repensons à la situation dans laquelle le pays se trouvait dans les jours précédant le 14 janvier. La Tunisie était au bord du gouffre. La révolution aurait pu être écrasée dans le sang, comme en Birmanie en 1988. Au PDP, nous avons été les premiers à réclamer la constitution d’un gouvernement de coalition pour sortir de l’impasse politique. La frange réformatrice du pouvoir – Mohamed Ghannouchi et Kamel Morjane, pour ne pas les citer – a saisi la balle au bond en engageant des tractations, qui se sont

poursuivies et accélérées après la chute de Ben Ali. La politique, ce n’est pas tout ou rien, c’est aussi composer avec le réel, avec l’existant. Nous savions à quoi nous attendre, mais avions-nous une autre formule à proposer? Fallait-il se figer dans une posture protestataire stérile et laisser pourrir la situation, ou au contraire prendre des risques politiques pour tenter de mettre en œuvre un processus de transition et permettre à la révolution populaire de réaliser son objectif : la conquête de la liberté et de la citoyenneté démocratique ? Évidemment, le casting gouvernemental était loin d’être parfait, nous en étions conscients, mais nous avions obtenu satisfaction sur toutes nos revendications fondamentales : la liberté de la presse, la liberté d’association, l’am-

des cellules professionnelles du parti dans l’administration et le secteur parapublic a été prononcée. Il s’agit d’un acquis fondamental. Nous avons obtenu satisfaction sur toute la ligne. Faut-il s’engager maintenant dans une chasse aux sorcières ? Non. Il faut que la justice passe. Ceux qui, au sein du RCD, se sont rendus coupables de crimes ou ont trempé dans la corruption devront répondre de leurs actes devant les tribunaux. Les autres, les militants et les cadres honnêtes, devront faire leur examen de conscience. C’est leur affaire, pas celle du gouvernement. Je comprends les sentiments de rejet qu’inspire l’ancien parti unique : ils sont parfaitement légitimes. Mais on ne doit pas tout mélanger, la justice et la vengeance. En démocratie, la sanction doit émaner des électeurs, pas des tribunaux… Que pensez-vous de la proposition d’Ahmed Mestiri, leader historique du Mouvement des démocrates socialistes (MDS), qui souhaite la formation d’un comité des sages, sorte d’autorité politique et morale qui chapeauterait le gouvernement et encadrerait ses activités ? J’ai énormément de respec t pou r A h med Me s t i r i, qu i e s t u ne grande figure de la politique tunisienne, mais son idée est inopportune, car elle vient trop tard. S’il l’avait formulée au plus fort de la crise, c’est-à-dire avant le 13 janvier, nous nous y serions ralliés avec enthousiasme. Mais il a attendu la formation du gouvernement d’union nationale pour sortir de son silence, un silence de vingt-trois ans. J’ai du mal à comprendre le sens de sa démarche. Cherche-t-il à torpiller le gouvernement ? Maintenant que ce gouvernement existe et a commencé à travailler, pourquoi le remplacer par un comité des sages venu de nulle part ? Il y a une place pour un comité de vigilance, formé par des sages, à condition que celui-ci reste dans son rôle d’autorité morale, émanation de

« Il faudra obligatoirement commencer par l’élection présidentielle. » nistie générale, la tenue rapide d’élections sous supervision internationale, la création de commissions d’enquête indépendantes sur les violences et la corruption, dirigées par des personnalités incontestables. Ce n’est pas rien ! Beaucoup de voix s’élèvent maintenant pour demander la dissolution du RCD. Quelle est votre position ? Évitons de verser dans la démagogie. Le PDP, à l’instar de l’ensemble des formations de l’opposition réelle, a exigé pendant des décennies une séparation entre l’État et le parti. Cette exigence est aujourd’hui réalisée. L’État va récupérer tous les biens meubles et immeubles qui étaient mis gracieusement à la disposition du RCD. La dissolution

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TUNISIE PAYSAGE APRÈS L A RÉVOLUTION 25 chir à ce à quoi pourraient ressembler les institutions de la IIe République tunisienne. Mais il faut bien comprendre que ce débat restera théorique tant que nous n’aurons pas procédé à l’élection d’un nouveau Parlement.

ONS ABID

À titre personnel, votre préférence va-t-elle à un régime parlementaire, à un régime mixte « à la française » ou à un régime présidentiel ? Aujourd’hui, par réaction, beaucoup de gens expriment leur préférence pour le parlementarisme. La Tunisie a souffert dans sa chair des excès du présidentialisme. Mais le présidentialisme qui a été théorisé et pratiqué était un présidentialisme dévoyé. La question qui se pose, c’est : « Faut-il jeter le bébé avec l’eau du bain ? » Rompre avec les excès du présidentialisme est une chose, tourner le dos au régime présidentiel tempéré et tenter l’aventure du parlementarisme intégral, « à l’italienne », en est une autre. Avec mes camarades du PDP, j’ai fait publier, il y a près de huit mois, un projet de Constitution, en 115 articles, qui préfigure ce à quoi pourrait ressembler la IIe République tunisienne. Le régime que nous décrivons dans ce document se rapproche du présidentialisme américain. Il s’agit d’un système fondé sur une séparation stricte des pouvoirs et reposant sur une sorte d’équilibre entre les pouvoirs du gouvernement, de l’Assemblée et de la justice. Un régime où les pouvoirs ne seraient pas confondus, mais au contraire séparés et susceptibles de s’annuler les uns les autres. Ce serait, à mon avis, la formule la plus adéquate en l’état actuel des choses. Et cela supposerait la création d’une véritable Cour constitutionnelle.

la société civile. Pas comme substitut du gouvernement. Mansour Moalla, autre figure éminente de la politique tunisienne, souhaite la convocation dans les plus brefs délais d’une Assemblée constituante, afin de rév iser la Constitution, taillée sur mesure pour Bourguiba et Ben Ali… Juridiquement, c’est inenvisageable. Fouad Mebazaa, le président de la transition, assure l’intérim, et il n’a pas le pouvoir de dissoudre le Parlement

pour convoquer de nouvelles élections. Il n’est donc même pas possible de coupler la présidentielle et les législatives. Il faudra obligatoirement commencer par la présidentielle. Nous avons fait le choix d’une démarche légaliste en nous inscrivant dans le schéma dessiné par la Constitution. Elle sera révisée, car elle est imparfaite, mais on ne peut pas brûler les étapes. Le nouveau président élu convoquera très rapidement des élections anticipées. Rien ne nous empêche d’ouvrir, dès maintenant, un grand débat constitutionnel, de réflé-

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Rached Ghannouchi, le fondateur du mouvement Ennahdha, vient d’accomplir son retour en Tunisie après vingt ans d’exil. Son parti n’est pas encore légalisé. Doit-il l’être ? Il représente une sensibilité qui n’est pas la nôtre, mais il a sa place sur l’échiquier politique. On n’a pas le droit de lui refuser le visa, du moment où il souhaite inscrire sa pratique politique dans le cadre de la loi. J’espère simplement que son retour ne contribuera pas à polariser encore davantage le climat politique. Car la Tunisie, en ce moment, a surtout besoin de sérénité… ■ Propos recueillis à Tunis par SAMY GHORBAL


26 L’ÉVÉNEMENT

Faut-il avoir peur des islamistes? Ils ont beau multiplier les déclarations rassurantes et jurer leur attachement à la démocratie, rien nʼy fait : leur retour sur la scène politique inquiète les partisans dʼune Tunisie libre et laïque.

C

onséquence directe de la révolution, la fin de la clandestinité pour toute une série de mouvements politiques interdits, au premier rang desquels les islamistes d’Ennahdha (« La Renaissance »), qui ont réservé un accueil triomphal, le 30 janvier, à leur chef de file, Rached Ghannouchi, exilé depuis plus de vingt ans au Royaume-Uni. Massés à l’intérieur et aux abords de l’aéroport Tunis-Carthage, des milliers de sympathisants, venus de toute la Tunisie et issus de toutes les classes sociales, ont manifesté leur joie en scandant des slogans politiques et religieux. Femmes voilées, en hijab ou en niqab, et hommes barbus flanqués d’une calotte blanche ont entonné tour à tour l’hymne national et des chants sacrés, agitant au-dessus de la foule des étendards verts et des drapeaux tunisiens dans une ambiance survoltée. L’engouement suscité par le retour du leader d’Ennahdha a révélé la réalité et l’ampleur de la popularité du mouvement islamiste tunisien. « C’est un

déjà tenus aux médias et qu’il réitérera ultérieurement lors d’une conférence de presse. « Notre rôle consiste à participer à la réalisation des objectifs de cette révolution : ancrer un système démocratique et la justice sociale, et lutter contre les discriminations. […] Je n’ai pas l’intention de me présenter à l’élection présidentielle. Il n’y aura aucun candidat membre d’Ennahdha. » En clair, les islamistes, dans un premier temps, entendent occuper la scène parlementaire et briguer des sièges aux municipales. Le mouvement se défend de vouloir entrer au gouvernement, mais s’il est représenté à l’Assemblée, ce qui est fort probable, il aura de fait un rôle politique. 30 000 MILITANTS

Aux élections de 1989, les 30 % d’intentions de vote en faveur des islamistes avaient alarmé le régime de Ben Ali, qui avait aussitôt décidé de neutraliser Ennahdha. D’abord par une répression féroce, ensuite par la mise en place de garde-fous comme le développement d’une classe moyenne consumériste et la séparation entre enseignement coranique et instruction civique. Cependant, au cours de la dernière décennie, un rapport ambigu avec le fait religieux s’est insidieusement établi. Tout en brandissant l’épouvantail intégriste sur la scène internationale, prétexte à toutes les brimades et atteintes aux libertés fondamentales, le pouvoir a parallèlement orchestré une lente islamisation de la société : radio religieuse, développement de la finance islamique, création de petites écoles coraniques (kottab) dans

Le chef d’Ennahdha se dit aujourd’hui proche des islamo-conservateurs turcs. grand jour, je n’ai plus à cacher mes opinions ni à craindre de représailles. Fini la “démoncratie”, c’est la démocratie ! » s’enthousiasme Raouf, un commerçant, tandis qu’un groupe d’opposants revendique « une Tunisie libre et laïque ». Très entouré, Rached Ghannouchi, 70 ans, visiblement fatigué, a été peu loquace, se contentant de reprendre en quelques phrases les propos qu’il avait

les quartiers. Les signes d’un regain de religiosité sont d’ailleurs patents, comme l’engouement grandissant pour les chaînes satellitaires arabes, la fréquentation assidue des mosquées et la nette extension du port du voile. En l’absence d’études quantifiant le phénomène islamiste, personne n’en connaît véritablement l’ampleur ni la nature. Opposant aux régimes de Bourguiba et de Ben Ali, Rached Ghannouchi, qui a longtemps incarné la ligne dure du mouvement, se dit aujourd’hui proche des islamo-conservateurs de l’AKP turc et affirme vouloir céder la direction du parti aux plus jeunes. Mais cela fait vingt ans qu’Ennahdha, qui a déposé sa demande de légalisation officielle, n’a plus ni structure, ni journal, ni local. Elle ne disposait que d’une

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Fin de l’exil pour Rached Ghannouchi, accueilli par une marée humaine, le 30 janvier, à l’aéroport Tunis-Carthage.

chaîne satellitaire, Al-Hiwar, et d’un cercle de sympathisants. S’il est difficile d’évaluer son poids politique, nul doute qu’elle a développé ses réseaux en toute discrétion dans les zones rurales et les campus. « Nous représentons une force potentielle, affirme Hamadi Jebali, secrétaire général et porte-parole du mouvement. Nous n’avons plus de parti, plus de structure, mais les 30 000 cadres et militants victimes de la répression sont là. Nous sommes présents dans toutes les classes sociales comme une partie intégrante du peuple tunisien. » Jebali a multiplié les déclarations aux médias, esquivant les questions sur la place de la charia dans le programme d’Ennahdha tout en se montrant rassurant quant à la préservation des

acquis des femmes, sans toutefois être explicite. « C’est par étapes que nous atteindrons nos objectifs, souligne-t-il, mais nous sommes d’abord les défenseurs de l’islam. » « Notre priorité n’est pas de gouverner le pays, précise Rached Ghannouchi. Notre priorité est de contribuer à l’avènement de la démocratie. Il est indispensable que toutes les sensibilités, sans exception ni exclusion, puissent apporter leur pierre à un processus qui doit nous permettre de construire un vrai système démocratique. » Mais l’homme de la rue demeure circonspect. « Je demande à voir, j’ai désormais du mal à faire confiance sur parole, tempère Farès, un jeune chômeur. Tout le monde n’a que le mot démocratie à la bouche sans en spécifier le contenu !

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Que signifie l’islam politique ? Nous sommes musulmans, mais la religion est une affaire privée. » JEUNE GARDE

Le chef historique du mouvement, que les Tunisiens de moins de 30 ans ne connaissent pas, peut s’appuyer sur deux fidèles de toujours, Hamadi Jebali et Sadok Chourou, mais aussi sur la jeune garde, et notamment Ajmi Lourimi, ex-chef de l’Union générale tunisienne des étudiants (UGTE) à Tunis, qui apparaît comme une des figures clés du renouveau d’Ennahdha. Philosophe de formation, Lourimi planche sur la ligne politique du parti. « Nous ne représentons pas une menace, mais nous serons une force d’opposition, déclare-t-il. Nous sommes favorables à

NICOLAS FAUQUÉ/WWW.IMAGESDETUNISIE.COM

TUNISIE PAYSAGE APRÈS L A RÉVOLUTION 27


28 L’ÉVÉNEMENT cent Geisser. Une observation confirmée par l’apparition de tendances marginales, telles que celle du Hazb at-Tahrir (« Parti de la libération ») – issu d’une scission au sein des Frères musulmans – et celle des salafistes. PERPLEXITÉ

Face au retour des islamistes sur le devant de la scène, de nombreux Tunisiens s’indignent. « Ils n’ont pas du tout participé à la révolution du peuple ! Ils veulent aujourd’hui la récupérer par la manipulation ! » Tandis que d’autres réclament la consolidation de la laïcité et refusent de se voir dépouillés des libertés chèrement acquises. Surtout, ils ne veulent pas avoir comme alternative Ennahdha ou une nouvelle mouture du RCD, d’autant qu’ils s’interrogent sur les rapports de Rached Ghannouchi avec Sakhr el-Materi, gendre du président

portrait

toutes les libertés démocratiques. Nous sommes le produit de la culture tunisienne, du système éducatif tunisien, nous sommes le prolongement du mouvement réformiste. » Sur la question de la libération de la femme, Rached Ghannouchi affiche, dans son discours, une position claire. « Nous avons toujours dit que nous acceptions le code du statut personnel, ainsi que toutes les dispositions sur l’égalité homme-femme. Nous nous y sommes de nouveau engagés dans le cadre de la plateforme du Collectif du 18 octobre [accord signé en 2005 par plusieurs partis de l’opposition]. » Mais ces propos modérés de nature à rassurer les plus sceptiques sont contredits par certains slogans qui exigent l’instauration de la charia comme base du corpus juridique. Car si Ennahdha représente la mouvance islamique majoritaire, « il existe dans la jeunesse tunisienne des tendances islamistes radicales qui sont encore mal connues », note le politologue Vin-

HAMADI JEBALI UN TRIBUN AGUERRI AVEC SES ALLURES DE BON PÈRE DE FAMILLE, il se fond sans peine dans la foule qui manifeste avenue Bourguiba. La révolution, en sortant le parti islamiste Ennahdha de la clandestinité, a propulsé Hamadi Jebali, secrétaire général et porte-parole du mouvement, aux premiers rangs des manifestations et de la scène médiatique. Originaire de Sousse et ancien directeur de l’hebdomadaire El-Fajr, Jebali, 62 ans, était aussi membre du bureau exécutif du mouvement avant

déchu, les deux hommes s’étant rencontrés à Londres. Avec des partis de l’ancienne opposition qui peinent à se mobiliser, des islamistes qui prennent le train en marche, une région en pleine mutation géopolitique, les Tunisiens sont perplexes. Aussi accordent-ils la plus haute importance aux travaux de la nouvelle Commission supérieure pour la réforme politique présidée par Yadh

Nombre de Tunisiens refusent de se voir dépouillés de leurs libertés. Ben Achour. S’ils ne peuvent espérer une totale séparation du religieux et de l’État, ils souhaitent à tout le moins une interprétation moderne des textes fondateurs de l’islam, dans la droite ligne d’une tradition amorcée par FRIDA DAHMANI, à Tunis Bourguiba. ■

son interdiction. Condamné une première fois, en 1991, à un an de prison pour diffamation après un article critique sur les tribunaux militaires, il est de nouveau arrêté en 1992, avec près de un millier d’activistes d’Ennahdha, pour « appartenance à une organisation illégale » et « complot visant à changer la nature de l’État » ; il écope de seize ans de prison ferme à l’issue d’un procès retentissant. En 2002, il alerte l’opinion internationale en entamant une grève de la faim qui nécessite son hospitalisation. Mais il ne sera libéré qu’en 2006, à la faveur d’une grâce présidentielle. C’est dans sa ville natale, avec sa femme Wahida, également journaliste et militante d’Ennahdha, et ses trois filles, qu’il n’a pas vues grandir, que Hamadi Jebali attendait, comme tous les sympathisants, son heure. Muet durant les premiers jours de la révolution, il est sorti de sa réserve à partir du 18 janvier, tentant de positionner Ennahdha en se référant à l’AKP turc et de rassurer quant au projet politique des islamistes en Tunisie. Désormais présent sur tous les fronts, Jebali excelle dans les joutes orales et manie l’ellipse avec la maesF.D. tria des politiques aguerris. ■ J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


TUNISIE PAYSAGE APRÈS L A RÉVOLUTION 29

Le facteur UGTT La puissante centrale syndicale pourrait constituer un pôle de rassemblement au nom de la défense des acquis de la révolution.

QUATRE COURANTS

Ce rôle n’a pas beaucoup surpris. L’UGTT a, depuis sa fondation, en 1946, joué un rôle politique central. Partenaire du Néo-Destour de Habib Bourguiba durant la lutte pour l’indépendance, qu’elle a parfois suppléé quand les militants destouriens étaient emprisonnés ou exilés, elle a été associée à la construction des nouvelles institutions du pays. Mais par la suite, la nature de ses relations avec le pouvoir va osciller entre la confrontation et la rivalité, sur fond d’autonomisation des syndicats dans un environnement répressif. Sa direc-

REMI OCHLIK/IP3/BUREAU233

L

e vide politique créé par la fin du régime Ben Ali aura largement profité à l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), la puissante centrale syndicale. Forte de 500 000 adhérents, elle est la seule organisation de masse du pays après la déconfiture de l’ex-parti au pouvoir. Historiquement, sa base a toujours représenté un contrepoids naturel au système autoritaire établi. Aujourd’hui, elle est à la pointe du combat pour la défense des acquis de la révolution. Et pourrait jouer un rôle de rassembleur dans la perspective des prochaines élections. Dès le déclenchement de la révolte populaire, ses cadres locaux se sont solidarisés avec les manifestants. Lorsque la contestation a atteint la capitale, la direction les a rejoints à son tour. La manifestation du 14 janvier, à laquelle ont appelé ses filiales, a largement contribué à la chute de Ben Ali. L’UGTT s’est ensuite posée comme l’interlocuteur principal du pouvoir, pesant sur la définition de la période de transition et obtenant la mise à l’écart des principaux ministres de Ben Ali dans le gouvernement Ghannouchi I.

Rassemblement de femmes dans les locaux de l’UGTT à Kasserine, le 24 janvier.

tion nationale s’est progressivement bureaucratisée, mais elle a toujours choisi de suivre sa base pour éviter d’être balayée. Sans doute parce que cette base a réussi à faire entrer au sein du bureau exécutif plusieurs de ses représentants, faisant de l’UGTT un microcosme du champ politique tunisien avec quatre courants principaux : des syndicalistes de gauche, des indépendants, des sympathisants islamistes et des proches du parti au pouvoir. C’est ce qui explique que l’UGTT était la seule organisation nationale, avec celle des avocats, à ne pas soutenir la candidature de Ben Ali aux présidentielles, même si Abdessalem Jrad, son secrétaire général, entretenait des relations courtoises avec l’ex-chef de l’État. Lorsque la révolte populaire a atteint son paroxysme, la direction a basculé du côté des partisans du départ de Ben Ali. En parallèle avec l’armée, l’UGTT joue désormais un rôle national pour permettre la réalisation des objectifs de la révolution. Elle soutient le maintien de Mohamed Ghannouchi à la tête du gouvernement de transition jusqu’à la prochaine élection présidentielle,

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qui pourrait avoir lieu dans six mois, tout en conservant sa liberté de proposition et d’appréciation. Mais en coulisses, les caciques de l’ancien régime font campagne pour qu’elle retourne à son strict rôle de syndicat, de la même manière qu’ils veulent que les militaires, qui se sont portés garants de la révolution, retournent à leurs casernes. Leur objectif est simple : empêcher la centrale d’occuper le champ politique afin de se donner les moyens de reconstruire l’ancien parti au pouvoir et tenter de remporter les prochaines élections. C’est pourquoi des voix s’élèvent pour demander que l’UGTT constitue un pôle de rassemblement pour renforcer les partis démocratiques et la société civile, et veiller à l’élargissement et à la concrétisation des principales réformes lancées par le gouvernement Ghannouchi II. Si la centrale n’a pas souhaité participer au gouvernement, elle a cependant obtenu de siéger dans les trois commissions dont la mise en place, sous la présidence de personnalités indépendantes, est l’un des principaux acquis de la révolution. ■ ABDELAZIZ BARROUHI, à Tunis


30 AFRIQUE SUBSAHARIENNE

CÔTE DʼIVOIRE DÉSUNION AFRI Officiellement, les chefs dʼÉtat qui se sont réunis fin janvier à Addis-Abeba ont parlé dʼune seule voix et reconnu la victoire dʼAlassane Ouattara. Rarement, pourtant, ils auront été aussi divisés.

R

ANNE KAPPÈS-GRANGÉ, envoyée spéciale à Addis-Abeba

egards en coin, moue s dé da ig neuses… Dans les couloirs du 16 e sommet de l’Union africaine ( U A), i l s o n t p r i s soin de s’éviter. Le premier, Gervais Kacou, est le ministre des Affaires étrangères d’Alassane Ouattara. Le second, Alcide Djédjé, est le chef de la diplomatie de Laurent Gbagbo.

Fin janvier, à Addis-Abeba, chacun a œuvré en sous-main pour « son » président, négociant les soutiens en marge de réunions où chaque mot était âprement négocié. Car dans le huis clos des salles de conférences – et de l’aveu même d’un ministre ouest-africain –, « la bataille a été dure, très dure ». L’UA a, certes, une nouvelle fois reconnu la victoire d’Alassane Ouat-

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AFRIQUE SUBSAHARIENNE 31

TONY KARUMBA/AFP

Jean Ping, président de la Commission de l’UA (à g.), et le Nigérian Goodluck Jonathan, avant la réunion du Conseil de paix et de sécurité consacrée à la Côte d’Ivoire, le 28 janvier.

CAINE tara au second tour de la présidentielle du 28 novembre 2010. Mais au fil des semaines, le front anti-Gbagbo s’est fissuré. Rarement la famille africaine aura été aussi divisée. Revue de détail.

Pour ou contre lʼintervention militaire

« Il faut voir les choses autrement, explique le même diplomate. À ce stade, seuls Compaoré et Zuma peuvent vraiment peser sur leurs poulains respectifs. » Ce comité d’experts de haut niveau va donc se rendre à Abidjan. Il fera ensuite son rapport aux chefs d’État, qui, dans un délai de un mois, présenteront leurs recommandations. Iront-elles dans le sens d’un

Que peut-on encore proposer à Laurent Gbagbo pour qu’il accepte de quitter le pouvoir?

Un panel, pour quoi faire ?

De l’aveu même d’un diplomate de haut rang en poste en Afrique de l’Ouest, « la marge de manœuvre sera très étroite ». Que peut-on encore proposer à Laurent Gbagbo pour qu’il accepte de quitter le pouvoir ? « C’est bien là le problème, il va falloir faire preuve de créativité. » Cinq chefs d’État – un pour chaque région du continent – ont été désignés pour faire partie du panel. Le Burkinabè Blaise Compaoré représente l’Afrique de l’Ouest, et, même s’il s’est fait discret depuis le début de la crise postélectorale, son soutien pour Alassane Ouattara n’est pas un secret. Face à lui, le Sud-Africain Jacob Zuma, allié et ami de Laurent Gbagbo. Les trois autres chefs d’État – le Mauritanien Mohamed Ould Abdelaziz (président du panel), le Tchadien Idriss Déby Itno et le Tanzanien Jakaya Kikwete – n’ont pas publiquement pris parti et pourraient jouer les arbitres. Mais le Burkina Faso et l’Afrique du Sud ne risquent-ils pas de se neutraliser ?

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partage du pouvoir ? « Il ne faut rien exclure », lâche un membre de la commission de l’UA. « C’est hors de question ! » rétorque-t-on dans l’entourage d’Alassane Ouattara.

Zuma, le porte-voix

« Devant le CPS, Zuma s’est fait le porte-voix de dos Santos et de Laurent Gbagbo », analyse un membre de la délégation burkinabè. Le président angolais voue une profonde reconnaissance à Gbagbo depuis que, en 2000, il a fermé le bureau des rebelles de l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (Unita) à Abidjan. Du coup, quand en 2002 une tentative de coup d’État manque d’emporter le régime de son ami Laurent, José Eduardo dos Santos lui envoie armes et conseillers. Aujourd’hui encore, plusieurs membres de sa garde rapprochée seraient angolais. « Et puis, expliquet-on côté équato-guinéen, dos Santos se reconnaît en Laurent Gbagbo. Il voit en Ouattara son Savimbi. » Pour ne rien gâcher, Gbagbo a combattu Houphouët, qui était lui-même un allié de l’Unita. Proximité idéologique qui se double d’étroits liens commerciaux (la Société ivoirienne de raffinage s’approvisionnant au Nigeria, mais aussi en Angola). Le président sortant aurait par ailleurs procédé à des transferts financiers vers Luanda pour se mettre à l’abri du besoin. Bien conscients que c’est là-bas que se trouve le principal soutien à Laurent Gbagbo, le président de la commission de l’UA, Jean Ping, et le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, ont rencontré le chef de la délégation angolaise, qui s’est, semble-t-il,

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L’Union africaine a-t-elle rétropédalé à Addis-Abeba ? Les partisans d’Alassane Ouattara espéraient que les chefs d’État africains s’aligneraient

sur la fermeté affichée jusque-là par la Communauté des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Mais d’intervention militaire contre Laurent Gbagbo, il a finalement peu été question. Accusé de tiédeur, l’Algérien Ramtane Lamamra, à la tête du Conseil de paix et de sécurité de l’UA (CPS), s’est défendu : « Nos frères de la Cedeao n’ont jamais dit que la solution militaire était pour demain, a-t-il argumenté. L’usage de la force ne doit être envisagé qu’en dernier recours. » Marche arrière toute ? « On a d’abord envoyé à Laurent Gbagbo des médiateurs qu’il pouvait percevoir comme conciliants, ça n’a pas marché, explique un diplomate africain. Puis on a durci le ton. On a dépêché sur place le Kényan Raila Odinga et on a parlé d’opération militaire. C’est la stratégie du tambour de guerre. Sauf que Gbagbo n’a pas cédé et qu’il va falloir trouver autre chose. » D’où l’idée du panel, dont l’unique intérêt semble être de donner au camp Gbagbo et à des médiateurs embarrassés un répit supplémentaire. Le temps, peut-être, de laisser la stratégie d’assèchement financier porter ses fruits.


32 AFRIQUE SUBSAHARIENNE

L’AFRIQUE DIVISÉE Tunisie

Maroc Algérie

Mauritanie

Cap-Vert Sénégal Gambie GuinéeBissau

Guinée Sierra Leone Liberia

Libye

Mali

Niger

Égypte

Érythrée

Tchad Soudan

Burkina Faso Bénin CÔTE Togo D’IVOIRE Ghana

Djibouti

Nigeria

Éthiopie Centrafrique

São Tomé e Príncipe Guinée équatoriale

Somalie

Cameroun

Ouganda

Gabon Congo

République démocratique du Congo

Kenya Rwanda Burundi

Seychelles Tanzanie

SOURCE : JEUNE AFRIQUE

Pays favorables à toutes les formes de pression – y compris militaire – pour faire partir Laurent Gbagbo

Comores Angola

Pays partisans d’une solution négociée Pays partisans d’une solution négociée ayant exprimé publiquement leur refus d’une intervention militaire

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De son côté, le chef de l’État nigérian, Goodluck Jonathan, a, le 28 janvier, menacé de claquer la porte, en pleine réunion du CPS, si l’Afrique du Sud s’obstinait à demander un nouveau décompte des voix. Il est aussi l’un des premiers à s’être prononcé, dès début janvier, en faveur de l’option militaire. Mais irait-il jusqu’au bout le cas échéant ? Pas sûr.

Maurice Madagascar

Botswana Swaziland

Ne sont pris en compte que les pays dont la position est connue ou qui jouent un rôle dans le règlement de la crise ivoirienne.

Jonathan, un médiateur en campagne

Mozambique

Zimbabwe

Namibie

Pays membres du panel de l’UA

montré assez peu réceptif. Dos Santos, arrivé en cours de sommet, n’aurait pas été plus conciliant.

Malawi

Zambie

Afrique du Sud

Lesotho

Jonathan est un président en campagne, qui espère être reconduit à la tête de son pays début avril. La crise ivoirienne peut lui permettre d’acquérir une stature internationale, mais elle pourrait aussi lui coûter cher dans les urnes.

Afrique de lʼOuest-Afrique australe : le clash

Les membres de la Cedeao ont très mal perçu les prises de position de Zuma. « Quand la Communauté économique des États de l’Afrique australe [SADC, NDLR] va négocier à Madagascar, nous ne nous en mêlons pas ! »

s’emporte un diplomate ouest-africain. À Addis-Abeba, la Cedeao a d’ailleurs insisté pour garder la haute main sur le dossier ivoirien. Pas question de laisser l’Afrique du Sud s’en saisir. Interrogé sur ces divergences au sein de la famille africaine, Jean Ping parle « d’exagérations » et tempère : « L’essentiel, c’est que l’on trouve une solution africaine à un problème africain. » Référence cette fois-ci aux Nations unies, à l’Union européenne et à la France, que l’on a tenu à ramener, pour l’occasion, au simple rang de « partenaires ». « Il ne faudrait pas qu’à chaque fois que nous allumons

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AFRIQUE SUBSAHARIENNE 33 un feu ce soit les autres qui l’éteignent », conclut-on dans l’entourage de l’Équato-Guinéen Teodoro Obiang Nguema, le tout nouveau président de l’UA.

INTELLECTUELS

Dakar et Ouaga embarrassés

Partisans de la souveraineté nationale contre défenseurs du vote-avant-tout... Rares sont ceux qui, sur le continent, ne prennent pas position.

À Addis-Abeba, Abdoulaye Wade s’est fait discret. Dans le huis clos du mini-sommet sur la Côte d’Ivoire, qui s’est tenu le 29 janvier en présence de Ban Ki-moon, le président sénégalais a dit – et à plusieurs reprises – son mécontentement de ne pas voir l’attitude de Laurent Gbagbo condamnée plus fermement. Mais en public, motus. Même discrétion du côté de Blaise Compaoré, du Guinéen Alpha Condé et du Malien Amadou Toumani Touré. « À croire, murmure-t-on dans les couloirs de l’UA, qu’ils se sont passé le mot… » En attendant, une chose est sûre : tous craignent pour leurs nombreux ressortissants installés en Côte d’Ivoire. Ellen Johnson-Sirleaf, la présidente du Liberia, s’en est ouverte à l’un de ses interlocuteurs européens. En Afrique de l’Ouest, de la Mauritanie au Burkina Faso, personne ne tient à devoir accueillir, dans l’urgence, des centaines de milliers de rapatriés. Le risque politique est trop grand.

Sarkozy, étonnamment discret

Un petit tour et puis s’en va. Le 30 janvier, le président français n’a passé que quelques heures à AddisAbeba. Prudent, sans jamais prononcer le nom d’Alassane Ouattara ou celui de Laurent Gbagbo, il s’est contenté de regretter qu’« un peuple [se] voie bafouer le choix qu’il a librement exprimé ». Peut-être Nicolas Sarkozy a-t-il enfin compris, espèret-on dans les couloirs de l’UA, qu’il était pour Alassane Ouattara un allié bien encombrant. « Nous sommes tous convaincus de l’injustice que Ouattara a vécue pendant toutes ces années, ex plique un diplomate d’A f r ique centrale. Mais certains parmi nous voient d’un très mauvais œil sa proximité avec l’Élysée. » Jacob Zuma n’a pas caché son agacement face à l’interventionnisme de Paris. Quant au discours anticolonialiste de Laurent Gbagbo, il a trouvé un écho certain auprès des présidents ougandais et zimbabwéen. ■

Tous engagés

G

bagbo ou Ouattara ? Deux mois après le début de la crise postélectorale, rares sont les intellectuels africains qui restent neutres. « Je suis assailli, comme bien d’autres personnalités noires plus ou moins médiatisées, d’interpellations africaines m’intimant de prendre position pour le “digne frère” qui a dit “non” à la communauté internationale », confiait dès la fin de décembre l’écrivain français Gaston Kelman, né à Douala. Comme en Europe pendant la guerre d’Espagne… Principal argument en faveur de Gbagbo : la souveraineté nationale. « Je ne crois pas en l’ONU, ce minuscule club d’États riches, où aucun pays d’Afrique ne siège au Conseil de sécurité », déclare Calixthe Beyala, la romancière française d’origine camerounaise (voir J.A. no 2607-2608). La cible ? Les États-Unis et, surtout, la France. « Nicolas Sarkozy veut nous faire “entrer dans l’Histoire” en usant du plus primitif de tous les droits, celui de la force », lâche le Sénégalais Pierre Sané, ancien secrétaire général d’Amnesty International. Son compatriote, l’ex-ministre de la culture Makhily Gassama, soupçonne la communauté internationale d’avoir des « agendas cachés ». Et Aminata Traoré, l’altermondialiste malienne, lance : « La Cedeao va-t-elle assumer le rôle de bras armé de l’impérialisme ? » Achille Mbembe et Célestin Monga n’y vont pas par quatre chemins. Pour les deux essayistes camerounais, une intervention militaire en Côte d’Ivoire serait une forme de recolonisation du continent : « Le droit d’ingérence est une perversion du droit […] L’équivalent du droit de conquête et d’occupation, qui, au temps de la colonisation, justifiait l’asservissement des “races

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inférieures”. » Mbembe et Monga disent ne pas savoir qui a gagné, le 28 novembre en Côte d’Ivoire. Tier no Monénembo, lui, « ne conteste pas » l’élection d’Alassane Ouattara. Mais l’écrivain guinéen ajoute aussitôt: « Ce raffut fait autour de Ouattara est tel qu’il en devient suspect. […] Si les grands de ce monde sont devenus aussi vertueux qu’ils le prétendent, pourquoi ne vont-ils pas fouiller dans les cuisines électorales du Burkina, de la Tunisie ou de l’Égypte ? Sont-ils sûrs que les dynasties présidentielles du Gabon et du Togo sont sorties de la vérité des urnes ? » IRRESPONSABLE

À la souvera i neté nat iona le, d’autres grandes voix du continent opposent la souveraineté du vote. « Les leaders africains sont incapables de quitter le pouvoir et de respecter le verdict des urnes », se désole le Prix Nobel de littérature

Pour Achille Mbembe, une opération armée serait une forme de recolonisation. 1986, le Nigérian Wole Soyinka. « Il serait totalement irresponsable de laisser cette jurisprudence prospérer, parce qu’en réalité il n’y aura plus de crédibilité en matière d’élection sur ce continent », avertit Alioune Tine, le président sénégalais de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (Raddho). Et à Washington, le responsable Afrique du National Democratic Institute (NDI), le Camerounais Christopher Fomunyoh, a cette formule : « Si la Côte d’Ivoire ne sort pas de cette crise proprement, partout en Afrique les démocrates n’auront plus qu’à rentrer à la maison. »


34 Les défenseurs du vote-avanttout attaquent leurs adversaires sur leur terrain, la lutte contre le néocolonialisme. « C’est une rhétorique de diversion », lâchent le Sénégalais Mamadou Diouf, le Béninois Paulin Hountondji et le Congolais Elikia M’Bokolo, dans une tribune cosignée avec une trentaine d’universitaires américains et européens et publiée dans Le Monde sous le titre : « Laurent Gbagbo, chef ethnocentriste ». Après la décision pro-Gbagbo du Conseil constitutionnel d’Abidjan, Gilles Yabi, directeur Afrique de l’Ouest d’International Crisis Group, interpelle le président sortant et ses amis par ces mots : « Est-ce en faisant prononcer des décisions ridicules par la plus haute juridiction de leur pays qu’ils feront respecter les institutions des États africains souverains par les donneurs de leçons de l’Occident ? » Et d’ajouter : « Capable de refuser de prendre l’appel téléphonique de Barack Obama, Laurent Gbagbo a définitivement prouvé au monde qu’il était “garçon”. […] Faut-il vraiment plomber l’avenir de millions de personnes juste pour gagner une place au panthéon des héros des luttes africaines ? » Quant à Venance Konan, il file la métaphore : « Il n’y a pas de France ou de Françafrique dans cette

Gbagbo « tente un braquage de la démocratie », VENANCE KONAN, écrivain. affaire. Chercher des poux dans les cheveux de la France, c’est montrer du doigt un sorcier lorsqu’un homme ivre se tue au volant de sa voiture. » Puis l’écrivain ivoirien se lâche : « Ce qui se passe en Côte d’Ivoire est tout simplement une tentative de braquage de la démocratie. […] Et ce sont nos intellectuels africains et panafricanistes de Paris qui prennent la défense de cet assassin. Pincez-moi, je rêve ! » Quelques jours après cette tribune, l’auteur a dû se réfugier en Europe. ■ CHRISTOPHE BOISBOUVIER

RÉACTIONS

À Abidjan, prudence et Personne nʼose se dire mécontent. Mais personne ne sait non plus quʼattendre du panel de cinq chefs dʼÉtat africains chargés de trouver une issue à la crise.

O

fficiellement, le communiqué final du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA) n’a fait que des heureux. Au Golf Hôtel, on se félicite de voir la victoire d’Alassane Ouattara réaffirmée. L’essentiel est sauf, martèlet-on. Dans l’entourage de Laurent Gbagbo, on affiche la même satisfaction : on souligne que cette reconnaissance n’est faite que « sur la base des résultats certifiés par Choi Young-jin », le représentant spécial des Nations unies en Côte d’Ivoire, et on espère bien prouver que des fraudes massives ont eu lieu dans le Nord malgré la certification de l’ONU. Voilà pour les réactions officielles. En coulisses, elles sont plus mitigées. Voire un brin inquiètes. En sommet à Addis-Abeba, fin janvier, l’UA a décidé de mettre sur pied un panel de chefs d’État chargés de formuler des recommandations de sortie de crise. Parmi eux, le Burkinabè Blaise Compaoré, qu’à défaut de convaincre le camp du président sortant espère bien décourager. Cette mission revient au

nouveau ministre de la Jeunesse de Gbagbo, Charles Blé Goudé. « La Côte d’Ivoire lui a confié le règlement de la crise ivoirienne et il a échoué, a-til lancé, le 1er février, dans un maquis du quartier de Yopougon, à Abidjan. Blaise Compaoré est le sosie de Nicolas Sarkozy. Il n’est pas le bienvenu ! Il faut des chefs d’État qui sont neutres et qui viennent véritablement faire une évaluation. » MACHINE ARRIÈRE

Comme d’autres caciques du régime, Charles Blé Goudé voit dans cette nouvelle médiation un piège tendu à Laurent Gbagbo, qui aura du mal à remettre en question les décisions de l’UA. On s’interroge aussi sur la fiabilité des présidents africains. « Zuma, le président sud-africain, nous est plutôt favorable, confie un proche de Laurent Gbagbo. Mais pas autant que son prédécesseur, Thabo Mbeki. Ne va-t-il pas faire machine arrière alors que la communauté internationale lui fait miroiter un siège permanent au Conseil de sécurité

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AFRIQUE SUBSAHARIENNE 35

REBECCA BLACKWELL/AP PHOTO

Pour Charles Blé Goudé, ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo, la nouvelle médiation voulue par l’Union africaine est un piège tendu à « son » président.

déception des Nations unies? » Le Tchadien Idriss Déby Itno « a toujours entretenu de bons rapports avec Gbagbo, souligne notre interlocuteur. Mais il doit beaucoup à la France, qui a sauvé militairement son régime. Paris a aussi encouragé le Mauritanien Ould Abdelaziz à transformer son coup d’État en victoire dans les urnes, avant de l’adouber officiellement ». Reste le chef de l’État tanzanien, Jakaya Kikwete: « Lui, on ne le connaît pas vraiment. Il ne semble pas avoir de position arrêtée sur la crise ivoirienne. Va-t-il peser sur les décisions? » Le camp Ouattara n’est pas plus rassuré et voit, dans cette nouvelle média-

tion, une source de division à l’échelle continentale. On n’apprécie pas non plus ce répit supplémentaire accordé au régime de Laurent Gbagbo. Mais devant les médias, on se veut rassurant : « L’Union africaine a décidé d’envoyer un panel de chefs d’État pour rechercher des solutions, commente Gervais Kacou, le ministre des Affaires étrangères de Ouattara. Mais avec une donnée principale : la reconnaissance d’Alassane Ouattara comme le président élu de la République de Côte d’Ivoire. Ce point n’est donc plus en discussion. Il s’agit simplement de se rendre à Abidjan pour voir dans quelle mesure Laurent Gbagbo peut consentir à laisser sa charge. » « PLUS AUCUNE FERMETÉ »

Un optimisme que beaucoup ne partagent pas. « Je suis convaincu que Gbagbo ne cédera pas le pouvoir, a déclaré le Premier ministre de Ouattara, Guillaume Soro, depuis Ouagadougou. Je le connais très bien pour avoir travaillé plus de trois ans avec lui. Il est allé trop loin pour reculer. » En privé, les cadres des Forces nouvelles et les houphouétistes s’inquiètent de l’enlisement actuel, plutôt favorable au camp Gbagbo. « Il arrive à contourner les mesures d’asphyxie financière ; il s’arme régulièrement, et la communauté internationale, notamment les Américains, a d’autres soucis avec l’embrasement du monde arabe, explique un baron du Rassemblement des républicains (RDR) d’Alassane Ouattara. Plus personne ne s’intéresse à nous. Les médias internationaux ont quitté le pays. » D’autres s’inquiètent de l’évolution des positions africaines. À AddisAbeba, Jacob Zuma a commencé par demander un nouveau décompte des

voix. Le Liberia, le Mali et la Guinée ont tiédi leur position et craignent pour leur diaspora. Même la France ne montre plus la même détermination. « Nous avons été déçus par le discours de Sarkozy, poursuit le partisan de Ouattara. On ne sent plus aucune fermeté. » À Abidjan, la communauté française fait profil bas. Les patrons originaires de l’Hexagone ne veulent pas être pris entre deux feux. « Nous avons investi notre argent dans ce pays, explique Michel Tizon, de la Chambre de commerce et d’industrie française. Nous vivons en Côte d’Ivoire et travaillons aux côtés des Ivoiriens, avec lesquels nous voulons simplement poursuivre nos activités. » Mais les notes rédigées par les services de l’ambassade sont de plus en plus alarmistes et insistent sur les risques encourus par les Français du fait de l’interventionnisme de l’Élysée. Pourtant, depuis 2004, les choses ont changé. Le camp Gbagbo fait aujourd’hui un distinguo clair entre la politique de Nicolas Sarkozy et les ressortissants français, protégeant même leurs intérêts. S’ils se sentent forts sur le plan militaire, les hommes du président sortant craignent toutefois que l’UA leur impose une solution bicéphale, avec un président (Laurent Gbagbo) dont les prérogatives n’iraient pas plus loin que celles de la reine d’Angleterre et un vice-président ou un Premier ministre (Alassane Ouattara) qui concentrerait tous les pouvoirs économiques, civils et militaires. Pour se protéger de ce scénario, Alcide Djédjé, ministre des Affaires étrangères de Laurent Gbagbo, a déjà prévenu : « Toute proposition qui ira à l’encontre de la Constitution sera rejetée. » ■ PASCAL AIRAULT, envoyé spécial à Abidjan


36 AFRIQUE SUBSAHARIENNE

Droit de réponse La RD Congo nʼest pas une république bananière !

C

est une volée de bois vert qui a été infligée à Joseph Kabila, le président de la RD Congo, dans la livraison no 2612 du 30 janvier 2011 de l’hebdomadaire Jeune Afrique. Les 14 pages qui lui ont été consacrées sous un titre très engagé : Kabila = Mobutu light ont la causticité du vitriol. Ce n’est pas la première fois que le défunt dictateur du Zaïre inspire la chronique. Il y a quelques années, le périodique kinois Le Soft avait disserté sur « Bemba, fils Mobutu ». Dans le microcosme politique kinois, être assimilé à Mobutu, l’antihéros, est une forme d’injure suprême. Il apparaît assez clairement que l’objectif de cette série d’articles d’une rare virulence est de démolir la réputation d’une personnalité politique qui se prépare à affronter le verdict des urnes dans moins d’un an. Pour l’édification des lecteurs de J.A., le gouvernement de la RD Congo, contrairement au régime autocratique qui sévissait dans ce pays il n’y a pas si longtemps, n’a pas censuré ce brûlot, librement distribué aux quatre coins du Congo-Kinshasa. Il tient cependant à faire quelques mises au point :

(vie 1 privée, politique, économie, sécurité, relations internationales, élections, etc.) dans un assez curieux DANS CES ARTICLES OÙ TOUT S’ENTREMÊLE

agencement, on perçoit nettement en filigrane une implacable hostilité à l’égard du président du CongoKinshasa. Ainsi, Joseph Kabila, après un pseudo « pacte tacite » (les mots sont de J.A.) avec les capitales occidentales (« aide contre démocratie »), aurait vu remballer le tapis rouge que lui déroulaient auparavant lesdites capitales. L’auteur de l’article prétend même que ce refroidissement envers JKK serait observé également chez ses homologues africains qui seraient agacés par « ce qu’ils perçoivent comme de l’arrogance à leur égard ».

2 que d’aucuns souhaitaient voir demeurer ad vitam æternam un « gamin de 29 ans, fétu de paille » LA VÉRITÉ, C’EST QUE LE PRÉSIDENT KABILA

(les mots sont encore de J.A.) a pris de l’étoffe et de l’assurance. Ce qui n’est pas pour déplaire au peuple congolais dont il défend avec plus de pugnacité les intérêts légitimes, notamment par rapport aux contrats léonins sur les mines dont la revisitation fait grincer les dents des prédateurs et de leurs affidés dans le pays. Il y a peu de doute : cette campagne de sape musclée est le fait des forces qui militent

Dès la parution du dernier numéro de J.A., Joseph Kabila a instruit son ministre de la Communication de réagir. Nous publions ici l’essentiel de ce très long droit de réponse. Suivi d’une précision de François Soudan.

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pour un statu quo ante auquel les Congolais n’ont aucun intérêt. En effet, pourquoi et pour qui serait-il si dramatique que Joseph Kabila ait gagné en assurance et ne reçoive plus de « leçons » par téléphone de l’extérieur ? au “prin3 temps de Kinshasa”, illustré par la rupture du deal entre Kabila et les capitales occidentales au début de FRANÇOIS SOUDAN SITUE L’ACCROC

l’an 2003 lorsque le ministre Matungulu Mbuyamu, “l’homme du FMI”, démissionna. On a beau manipuler la casuistique, tout Congolais averti comprend que pour les inspirateurs de ce commentaire, le vrai “crime” de Joseph Kabila, c’est d’avoir osé privilégier les intérêts nationaux de la RD Congo et de ne pas avoir laissé les « maîtres » gérer à leur guise les ressources du Congo par missi dominici interposés. Une façon comme une autre de chercher à faire marcher le train de l’Histoire à reculons. Ces inspirateurs étaient du reste dans le premier cercle du pouvoir en 2003 sans lever le petit doigt pour plaider en faveur de cette sorte de tutelle de Bretton Woods sur leur pays.

n’acceptent 4 pas que le président Joseph Kabila sur la timidité duquel ils comptaient pour continuer à exploiter sans LES PRÉDATEURS ET LEURS AFFIDÉS

contrepartie significative les richesses de la RD Congo se soit métamorphosé en ce défenseur « moderne, modeste et avisé » des intérêts nationaux de son pays, qui « agace jusqu’à ses voisins africains ». Du

J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

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LAMBERT MENDE OMALANGA

Ministre de la Communication et des Médias, porte-parole du gouvernement de la RD Congo coup, même les quelques qualités dont il était crédité avant sa « mue » (horreur du culte de la personnalité, grande capacité de synthèse) ne sont plus perçues par ceux qui ont programmé sa mise à l’écart et multiplient les fausses accusations à cet effet.

5 s’ouvre sur une affirmation : « Il y a dix ans, c’est un Joseph mystérieux et timide qui prenait la place de

L’ARTICLE INTRODUCTIF DE FRANÇOIS SOUDAN

son père, assassiné. Beaucoup alors ont cru au réveil congolais… » Tout y est dit comme si pour l’auteur le mystère et la timidité étaient à ranger parmi les « qualités » que l’on voudrait trouver chez un chef d’État africain. Pourtant, J.A. a construit sa réputation professionnelle flatteuse sur un engagement constant en faveur de la transparence qui est aux antipodes d’une gestion « mystérieuse » et « timide » d’un État. Deux poids, deux mesures ? de 6 s’être transformé en « papillon solitaire » après avoir été à son avènement « la chrysalide qui inspirait à JacIL EST REPROCHÉ AU PRÉSIDENT CONGOLAIS

ques Chirac, George W. Bush, Kofi Annan et au roi des Belges un irrépressible désir de protection, au point de le porter à bout de bras sur le tipoye de l’élection présidentielle de 2006 ». J.A. ne dit pas à ses lecteurs si les compatriotes – et électeurs – de Joseph Kabila apprécieraient que leur président soit « protégé » par d’autres au lieu de les protéger, le cas échéant face aux intérêts desdits autres. Les espoirs déçus sont en fait portés par ceux qui pensent que, cinquante ans après l’indépendance, il leur revient toujours la mission d’octroyer aux Congolais leurs dirigeants et à ces derniers leurs programmes d’action. Les Congolais ont payé le prix du sang pour récupérer leur souveraineté que J.A. a tort de considérer comme une simple vue de l’esprit. C’est un des soubassements du contentieux entre Joseph Kabila et ceux qui, de l’extérieur, tentent de lui faire payer son indocilité.

7 À quelque facette de la très forte personnalité de l’autocrate de la deuxième République KABILA = MOBUTU LIGHT, EST UN PONCIF ÉMASCULATEUR.

que l’on puisse se référer, rien ne permet d’induire un quelconque jumelage entre les deux styles de gouvernement. Mobutu vouait une reconnaissance éternelle à ses mentors occidentaux qui l’avaient créé de toutes pièces, malgré quelques ruades passagères pour amuser la galerie. Joseph Kabila, né dans les maquis de son J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

père et venu au pouvoir à la faveur des péripéties du mouvement révolutionnaire lancé par ce dernier avant d’être élu démocratiquement en 2006, a d’autres repères politiques et idéologiques, n’en déplaise aux kings makers occidentaux qui prétendent l’avoir « porté à bout de bras sur le tipoye des élections », une injure à la souveraineté des Congolais qui s’étaient bel et bien prononcés en faveur de JKK. Homme sobre et introverti, Joseph est donc tout sauf le « petit-fils idéologique » de Mobutu. journal réputé 8progressiste, condamnerpour un chef d’État africain ne pas avoir à la tête IL N’EST PAS BANAL DE VOIR J.A.,

du ministère des Finances un agent du Fonds monétaire international. Pas banal aussi, ce reproche à l’homme politique Joseph Kabila de vouloir gouverner autrement que certains de ses aînés du sérail africain. Qui ignore le sort peu enviable réser vé à cer tains membres parmi les plus prestigieux du « Club des chefs d’États » en Afrique du Nord notamment ? Ceux qui veulent absolument le voir se couler dans un moule aussi suranné que décrié par nos peuples ne voudraient-ils pas tout simplement le pousser au suicide politique ?

L’affairisme et la corruption sont des fléaux hérités du mobutisme. Joseph Kabila, lui, ne possède pas de châteaux en Occident.

9 de l’affairisme et de la corruption comme s’il s’agissait de tares créées de toutes pièces par Joseph J.A. ÉVOQUE LES PROBLÉMATIQUES DE L’IMPUNITÉ,

Kabila lors de son avènement aux affaires, il y a dix ans. C’est tromper l’opinion que ne pas indiquer qu’il s’agit de fléaux hérités de la deuxième République mobutiste qui a étendu ses tentacules sur le pays trente-deux ans durant et contre lesquels Joseph Kabila a mobilisé très fermement l’ensemble des institutions de la République en redonnant de nouveaux moyens à la magistrature et au système de sécurité. C’est également brosser un tableau incomplet de la situation du Congo-Kinshasa que de ne pas signaler que Joseph Kabila ne possède pas des châteaux en Occident.

VINCENT FOURNIER/J.A.

AFRIQUE SUBSAHARIENNE 37


38 AFRIQUE SUBSAHARIENNE

Droit de réponse (suite)

10 et du fonctionnement des institutions congolaises après celle-ci telle que rendue par J.A. est

L’HISTOIRE DE L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE DE 2006

totalement tronquée. À parcourir la version reprise par J.A., on remonte facilement à la « gorge profonde » qui a généreusement inspiré les auteurs. La légende d’infamie servie aux lecteurs de J.A. est le fruit de l’ego surdimensionné d’un ancien cacique tombé en disgrâce et qui, depuis lors, consacre son temps à se venger. […]

On retrouve les thèmes de prédilection des multiples prestations mondaines de « gorge profonde », la source de J.A. depuis le second semestre 2007 : attaques systématiques contre quiconque tourne autour du chef, particulièrement les Katangais accusés de lui faire ombrage, acharnement sur des personnalités restées fidèles à JKK comme le speaker de l’Assemblée nationale Boshab, le député Augustin Katumba Mwanke ou le chef d’état-major général des FARDC, Didier Etumba. […]

dont il dit avoir appris “la fierté” est sa référence. Une facette tenue cachée jusqu’en 2006 alors que le pays était sous tutelle, mais qui s’est révélée après l’onction du suffrage universel ». On croit rêver : C’est à devenir une république bananière que J.A., pourtant fervent admirateur, comme la majorité des Congolais, du regretté révolutionnaire burkinabè, nous destine. Dont acte. […]

12 en revoyant à la baisse ses projets d’infrastructures dans le cadre des contrats chinois. LA RD CONGO A SUFFISAMMENT PROUVÉ SA BONNE FOI

Le but en était d’intégrer les exigences des partenaires occidentaux. Il ne faut pas en plus exiger d’elle de renoncer à sa souveraineté. Ceux qui attendaient une telle démarche de Joseph Kabila se sont trompés. Le partenariat mutuellement avantageux que le gouvernement souhaite entretenir avec la communauté internationale n’est pas à confondre avec un bradage de nos ressources que les Congolais n’accepteront jamais.

(« Chronique d’un dont parle Marianne 11 isolement avancé ») un « contrat tacite » (sic !) 13 Meunier n’est pas le fait du président Joseph Kaaurait été passé entre le numéro un congolais et « les bila, loin s’en faut. C’est une véritable stratégie déstaSELON MARIANNE MEUNIER

Occidentaux ». Les entorses à cet engagement de la part du président congolais auraient « provoqué le retrait du tapis rouge ». Au terme de cet accord, « les bailleurs de fonds occidentaux financent le processus électoral (370 millions d’euros). En échange, l’élu doit veiller à la bonne gouvernance économique et à la démocratie ». Un vrai roman à l’eau de rose. Mais voici qu’en dépit du certificat de bonne gouvernance économique que fut l’atteinte du point d’achèvement de l’Initiative PPTE, de la bonne tenue générale des paramètres macroéconomiques et de la consolidation des libertés démocratiques nonobstant les dysfonctionnements plus anecdotiques que structurels montés en épingle par une opposition en mal de visibilité, Marianne Meunier découvre un nouveau péché cardinal de Joseph Kabila : la révision des contrats miniers « le plus souvent en défaveur des compagnies occidentales ». Elle ne dit pas comment la bonne gouvernance et la transparence peuvent faire l’économie d’une revisitation corrective des contrats léonins qui pullulent dans les placards du gouvernement. Plus loin, on entre de plain-pied dans l’autre péché du numéro un congolais : « La signature des contrats chinois en septembre 2007. Dans la foulée, la rupture de l’accord entre l’État congolais et le groupe minier canadien First Quantum crispe Ottawa ». La messe est dite : on sort carrément des principes pour plonger dans la défense des spoliateurs qui financent « gorge profonde ». Mais ce n’est pas tout. Joseph Kabila serait également coupable d’être « bercé par les refrains du panafricanisme. Il n’a pas de tropisme occidental. Thomas Sankara

« L’ISOLEMENT AVANCÉ »

bilisatrice délibérée contre le président Joseph Kabila qui a cessé d’être ce qu’on aurait voulu qu’il fût et qu’on accuse de tous les péchés p o ur mi e u x l e n oye r. Mais c’est sans compter avec la clairvoyance du peuple congolais, qui, après avoir perdu Patrice Emery Lumumba en 1961 et Mzee Laurent-Désiré Kabila en 2001, n’est plus dupe et sait se prendre en charge.

La légende d’infamie servie aux lecteurs de J.A. est le fruit de l’ego surdimensionné de votre « gorge profonde ».

14

I L N ’ Y A PAS S I LONGTEMPS, FR ANÇOIS SOUDAN

avait bravement dénoncé le « Congo bashing », ce lynchage médiatique systématique de la RD Congo qui est devenu un lieu commun aussi bien dans une certaine presse que dans les rapports d’ONG et agences internationales bien-pensantes. Dommage qu’il semble avoir été pris en tenaille, entre, d’une part le propriétaire de J.A., le respecté Béchir Ben Yahmed, qui donne l’impression d’avoir pris en grippe Joseph Kabila (du simple fait qu’il ait succédé à son défunt père ?), et d’autre part, les devoirs de l’amitié envers un ancien courtisan congolais éconduit et inconsolable. Pour mémoire, M. Soudan écrivait, entre autres, J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


AFRIQUE SUBSAHARIENNE 39

ceci : « Le problème dans cet exercice de “Congo bashing” (que l’on pourrait traduire par “critique permanente et systématique”) est que tout élément à décharge, ou tout simplement explicatif, de la situation actuelle, est a priori écarté. […] » Certes, on l’a vu, deux choses ont changé sous le soleil depuis cette réflexion pertinente : « gorge profonde » connu de tous comme un indécrottable complexé adepte du « muzungu anasema » (littéralement : « le blanc a dit… ») et ami de l’auteur a claqué la porte de la majorité présidentielle lumumbiste-kabiliste pour passer dans le camp des partisans de la souveraineté surveillée ; par ailleurs, le propriétaire de J.A. s’est laissé convaincre par les sirènes tonitruantes du Congo bashing que son directeur de la rédaction avait pourtant décriées. Mais cela suffit-il pour que cesse d’exister cette « volonté des Congolais de vivre ensemble [qui] ne s’est jamais démentie en un demi-siècle d’Histoire tourmentée, malgré les guerres civiles et les multiples ingérences extérieures » dont parlait François Soudan et dont Joseph Kabila est à ce jour l’incarnation vivante ? En fait, le seul parallélisme qui ne fait pas de doute et qui transparaît dans tous ces articles est celui établi entre Joseph Kabila prétendu « petit-fils idéologique de Mobutu » et accusé de considérer « ses voisins comme des sous-préfets », et Patrice Emery Lumumba taxé de « dangereux communiste » en 1960, le tout traduisant une flambée d’adrénaline chez ceux pour qui Kabila aujourd’hui comme Lumumba en 1960 n’est qu’un obstacle à éliminer à tout prix, quitte à trouver n’importe quel prétexte. Cinquante ans après, le peuple congolais, blanchi sous le harnais des épreuves, ne se laissera plus faire.

Réponse :

Je ne peux que donner raison au ministre Lambert Mende sur un point : là où Mobutu aurait très certai-

nement donné l’ordre d’interdire ce numéro de J.A., Joseph Kabila, lui, ne l’a pas censuré. Même s’il ne s’agit là, après tout, que de la mi s e e n a p p li c a t ion d ’une r è gle élémen taire de la démocratie, cette dif férence est à porter au crédit du chef de l’État. Ainsi que je l’ai moi-même écrit en c omp ar an t l e s d e u x hommes : « Un zeste de répression en moins, une rondelle de démocratie en plus. » Pour le reste, le style a beau changer et les années s’écouler, la rhétorique hélas reste la même. Comme sous Mobutu, le nationalisme offre un paravent commode à la mauvaise gouvernance ; comme sous Mobutu, l’insinuation sur de pseudo-sources masquées sert à élaborer une improbable théorie du complot ; comme sous Mobutu, la critique du bilan d’un homme est assimilée à la critique de tout un pays et de tout un peuple. Malgré son incontestable talent de juriste, M. Mende aura bien du mal à nous convaincre que Kabila = Lumumba, même en version light. En guise de conclusion, une phrase : « Il est indéniable que nous avons aussi connu de regrettables ratés, notamment en matière de développement, de progrès social et de droits humains […]. Il importe d’en cerner la teneur et les causes. » L’auteur ? Joseph Kabila, lors de son discours du cinquantenaire, en juin 2010. Qu’avonsnous fait, dans cette enquête, si ce n’est suivre cette lucide et présidentielle recommandation ? ■

Comme Lumumba en 1960, Kabila est un obstacle à éliminer à tout prix, sous n’importe quel prétexte.

Pour sa troisième édition, le YML Forum réunira 250 jeunes décideurs des deux rives de la Méditerranée, autour du thème

"Construire les Modernités Méditerranéennes"

FRANÇOIS SOUDAN

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Pourr p participer au Forum et rejoin rejoindre rej le réseau seau e exclusif des Y oungg Medi oun Mediter Mediterran editerranean editerran terranean Leaders, Young Mediterranean contac contactez-no contactez-nous! Ma Mail: ail: info@ymlforum.org info@ym o@y lfo Tél Tél.:.: + 33 (0) 9 64 1 11 42 79

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40 MAGHREB & MOYEN-ORIENT

ÉGYPTE LE PHARAON EST NU Rejeté par la majorité de son peuple, poussé dehors par lʼarmée, lâché par les Américains, Hosni Moubarak sʼapprête à quitter le pouvoir. Fin de règne ou fin de régime ?

O

n le croyait aussi inébranlable que les pyramides, aussi éternel que le sphinx de Gizeh. Mais voici que, après quatre jours d’intifada populaire, Hosni Moubarak, 82 ans, dont vingt-neuf au pouvoir, annonce aux Égyptiens, au soir du 28 janvier, son retrait programmé de la plus haute marche du Temple dans six mois tout au plus, ou peut-être avant. On la croyait soumise et résignée comme les cohortes de fellahs du Delta à l’époque de Sethi 1er. Mais voici que la classe moyenne, socle du pouvoir, se joint à la jeunesse et aux chômeurs des faubourgs du Caire dans un impensable « kefaya ! » (« ça suffit ! ») clamé par des armées de poitrines. Effet de la révolution tunisienne ? Certes, mais à la démesure de l’Égypte, de ses 85 millions d’habitants et de son importance stratégique majeure au cœur du Moyen-Orient. Un enjeu crucial pour l’équilibre de cette partie du monde, qui explique sans doute que cette révolte, justement, n’est pas encore une révolution. Des trois scénarios possibles, celui d’une prise du pouvoir par le peuple avec l’appui des militaires et d’une fuite précipitée du raïs – répétition du casting tunisien – semble en effet le moins probable. Avec ses 450 000 hommes, son implication directe ou indirecte, mais constante, dans la vie politique depuis 1952 et ses multiples intérêts économiques, l’armée n’a rien à voir avec sa petite sœur tunisienne. Reste donc deux hypothèses: celle d’une transition tout d’abord assurée par le vice-président, Omar Souleimane, sans Moubarak, mais avec le soutien d’une armée considérée comme la seule institution légitime du pays, ce qui revient à perpétuer le régime sans celui qui l’incarne depuis trois décennies. Cette solution est ouvertement prônée par Washington et mezza-voce par TelAviv, l’important à leurs yeux étant de préserver à tout prix le traité de paix égypto-israélien. L’autre possibilité est que Moubarak s’accroche aux termes de son discours du 28 janvier, autrement dit jusqu’à l’échéance de son mandat en septembre prochain. Ce dernier scénario, dont on a perçu les prémices sanglantes les 2 et 3 février lors des affrontements de la place Al-Tahrir, au Caire, entre manifestants et « baltaguis » (nervis du pouvoir), est de loin le plus dangereux. S’il choisit cette option, celle du chaos, Moubarak peut sans doute compter sur une partie des forces de sécurité du ministère de l’Intérieur (garde nationale et police), mais beaucoup moins sur l’armée, très dépendante de son bailleur de fonds américain et dont les chefs pourraient décider de le sacrifier afin de préserver leurs avantages. Comme on le voit, si l’avenir de l’Égypte s’écrit désormais sans Moubarak, la momie du dernier pharaon, elle, bouge encore… ■ FRANÇOIS SOUDAN

CHERIF OUAZANI, PHILIPPE PERDRIX, LEÏLA SLIMANI et CONSTANCE DESLOIRE

Les causes

Tout régime autoritaire est voué à disparaître. Une règle que Hosni Moubarak, après vingt-neuf ans de règne sans partage, a vérifiée à ses dépens. Quand ceux d’en bas ne supportent plus ceux d’en haut, la révolution n’est pas loin. Surtout lorsque le mur de la peur a cédé. De ce point de vue, l’exemple tunisien a sans doute conduit à une accélération de l’histoire au pays des Pharaons. Un « mur de Berlin » est tombé dans le monde arabe, explique Vincent Geisser, sociologue et chercheur au CNRS (France). En Égypte, ce raz-de-marée de la liberté repose d’abord sur la déconstruction de deux mensonges d’État. Premier mensonge : l’absence d’alternative au pouvoir autoritaire. Les grandes idéologies héritées de la décolonisation – panarabisme, socialisme… – ont progressivement laissé la place à un face-à-face stérile entre un régime autocratique et la mouvance islamiste à laquelle il est censé faire barrage. Officiellement interdits, les Frères musulmans égyptiens n’en ont pas moins prospéré sur la misère des faubourgs du Caire. À la recherche d’une troisième voie, les Égyptiens – connectés au monde via internet et les médias internationaux, de plus en plus éduqués et désireux d’inventer

J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


Affrontements entre pro- et anti-Moubarak, le 2 février, place Al-Tahrir, au Caire.

leur modernité – ne supportent plus ce marché de dupes qui a surtout permis à un clan de capter la richesse nationale. L’état d’urgence en vigueur depuis près de trente ans, l’absence de liberté, les élections confisquées – comme cela fut encore le cas lors des législatives de

novembre et décembre derniers – ont exacerbé la colère populaire et nourri le besoin impérieux de démocratie. Second mensonge : l’émergence économique. Derrière une croissance supérieure à 5 % en moyenne se cachent des inégalités d’autant plus insupportables

J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

que la corruption et le népotisme de l’élite dirigeante confinent à l’obscène. En Égypte, 40 % de la population disposent de moins de 2 dollars par jour, une famille sur cinq vit dans l’insalubrité et le salaire minimum mensuel n’est que de 50 euros. Le chômage des

BEN CURTIS/AP/SIPA

41


42 MAGHREB & MOYEN-ORIENT jeunes, lui, est endémique. Or 20 millions d’Égyptiens ont entre 18 et 29 ans, soit le quart de la population. Près de 90 % des sans-emploi ont moins de 30 ans. Une bombe démographique et sociale qui a fini par exploser au visage de Moubarak.

Les acteurs

L’ARMÉE OMNIPRÉSENTE

Première à l’échelle continentale, septième au niveau mondial, l’armée égyptienne est un rouage essentiel du système, et ce pour trois raisons. La première est d’ordre historique. La République d’Égypte, née en 1953, est le produit de la révolution des Officiers libres qui a balayé, le 26 juillet 1952, la dynastie de Méhémet Ali, incarnée par le roi Farouk Ier. La deuxième tient au fait que les quatre présidents de la République successifs (Naguib, Nasser, Sadate et Moubarak) sont issus de ses rangs. La troisième est liée à son statut d’opérateur économique très actif

dans la réalisation d’infrastructures, l’agroalimentaire et autres industries, et les nouvelles technologies, notamment spatiales. Mais les 450000 soldats et officiers de l’armée, placés sous le commandement de leur chef suprême, Hosni Moubarak, ne sont pas logés à la même enseigne. De nettes disparités caractérisent les quatre corps qui la composent. L’armée de terre et ses 320000 fantassins, dont 60 % de conscrits, est beaucoup moins favorisée que les forces aériennes, corps d’origine de Moubarak et du tout nouveau Premier ministre, Ahmed Chafiq. La défense aérienne du territoire est la plus engagée dans la sphère économique. Quant à la marine, elle reste le parent pauvre des forces militaires. Ces disparités nourrissent le manque d’homogénéité de l’armée et expliquent la confusion qui entoure sa position par rapport à la révolte populaire. Quelques heures après que son porte-parole a reconnu la légitimité des revendications de la rue, des Mirage 5 survolaient Le Caire à basse altitude, une première depuis la guerre des Six-Jours (juin 1967) dans une tentative d’intimidation de la foule.

OMAR SOULEIMANE DE LʼOMBRE À LA LUMIÈRE QUAND LES ÉGYPTIENS spéculaient sur le nom du successeur de Hosni Moubarak avant le début de la révolte populaire, seuls deux noms émergeaient réellement: Gamal Moubarak, fils cadet du président, et Omar Souleimane, chef des services de renseignements. Pour beaucoup d’observateurs, Gamal est désormais hors course. Souleimane, lui, a été nommé vice-président, poste qui, en Égypte, conduit traditionnellement tout droit à la magistrature suprême. Mais tout dépendra de sa capacité à apaiser ses compatriotes. Grand, mince, portant une fine moustache, le chef des services de renseignements est considéré depuis longtemps comme le deuxième homme le plus puissant du pays. Né en 1936 à Qena, en HauteÉgypte, il a été formé dans des académies militaires, en Égypte et en Russie. Il est également titulaire d’un master en sciences politiques. Très proche de Moubarak, Souleimane dirige les renseignements depuis les années 1990. C’est en déjouant, en 1995, à Addis-Abeba, une tentative d’assassinat contre le chef de l’État qu’il a définitivement gagné la confiance de Moubarak. Souleimane l’avait convaincu de monter à bord de la Mercedes blindée REUTERS

portrait

Ce n’est pas un hasard si, dès le 28 janvier, les autorités égyptiennes ont exaucé le vœu de toute dictature en bloquant à 88 % l’accès à internet. Avec 17 millions d’internautes et plus de 160000 blogueurs, la Toile égyptienne est à la pointe de la contestation du président Moubarak. Harcelés, emprisonnés, accusés de terrorisme, les blogueurs sont depuis des années les bêtes noires du régime. Informelle, peu structurée, cette cyberopposition bénéficie en tout cas du soutien des pays occidentaux, en particulier des États-Unis. Selon un câble de WikiLeaks, elle serait composée essentiellement de jeunes entre 20 et 35 ans, étudiants, journalistes ou citoyens ordinaires. Ne se reconnaissant pas dans les partis politiques, ils utilisent le web

comme un moyen d’expression ou de témoignage à l’intention de l’opinion publique internationale. Symbole de la capacité de mobilisation d’internet : le Mouvement de la jeunesse du 6 avril, créé en 2008 après les émeutes des ouvriers du coton. Alors que Ben Ali fuyait la Tunisie, le collectif a appelé sur Facebook à manifester le 25 janvier pour chasser Moubarak du pouvoir. En quelques heures, 90 000 personnes avaient répondu.

présidentielle. Prise pour cible à la sortie de l’aéroport, celle-ci résiste aux tirs d’armes automatiques d’un commando d’islamistes radicaux, avant que le chauffeur ne parvienne à faire demi-tour. Moubarak sort sain et sauf de l’embuscade. La stature de Souleimane au sein du régime s’en est trouvée renforcée. Décrit par les diplomates occidentaux comme un stratège brillant, il a été le porte-drapeau de l’Égypte dans toute une série de dossiers régionaux délicats, et a joué un rôle clé dans les relations bilatérales de son pays avec Israël, l’Iran ou le Soudan, et dans le processus de paix au Moyen-Orient. Mais l’épisode éthiopien ne lui suffira peut-être pas à gagner l’assentiment populaire. En tant que proche confident du président, Omar Souleimane a vraisemblablement contribué aux choix stratégiques internes et régionaux du pays, lesquels sont aujourd’hui dénoncés par les manifestants. Doué d’un « talent incomparable pour inspirer confiance », il lui faudra mobiliser toute sa capacité de persuasion, et même plus, pour calmer la fureur des Égyptiens. ■ HEBA SALEH © FINANCIAL TIMES et JEUNE AFRIQUE 2011.

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MAGHREB & MOYEN-ORIENT 43 L’ÉGYPTE EN CHIFFRES

Superficie 1 001 449 km2

Espérance de vie 70 ans

Âge médian 23,9 ans

Population 83 millions d’habitants

Population urbaine 43 %

PIB par habitant 2 090 euros

Croissance démographique 1,8 %

Taux d’inscription dans l’enseignement supérieur 31,2 %

Taux de chômage 9,7 %

SOURCES : BANQUE MONDIALE, PNUD, FNUAP, CHIFFRES 2009

ZAINAL ABD HALIM/REUTERS

portrait

où il se trouvait en visite de travail, et n’a rallié Le Caire qu’au lendemain de la nomination d’Omar Souleimane, le patron des services de renseignements, au poste de vice-président. Depuis le début de la mobilisation populaire, les contacts entre Robert Gates, chef du Pentagone, et le général Hussein Tantaoui, son homologue égyptien, sont quasi ininterrompus. Détenant la clé de la crise politique, l’armée a une position ambiguë. Fraternisant avec les protestataires, elle a supplanté la police et la garde nationale dans le maintien de l’ordre. Et si la « marche millionnaire » (on évoque 5 millions de marcheurs sur l’ensemble du territoire) du 1er février s’est déroulée sans incidents majeurs, le mérite en

FAIBLESSE SYNDICALE

Héritage de l’ère Nasser, qui se méfiait du monde ouvrier, le syndicalisme a longtemps été dévoyé et se résume à la seule Union fédérale ég y ptienne du travail (Etuf ), qui regroupe une vingtaine de fédérations sectorielles. Sous Moubarak, elle est devenue un satellite du Parti national démocratique (PND, au pouvoir) et un ascenseur social pour les opportunistes de tout acabit qui cassent les mouvements de grève des travailleurs, dénoncent les authentiques syndicalistes et contrôlent les élections syndicales dans les entreprises, le tout contre privilèges sonnants et trébu-

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Malgré la diversité qui caractérise son équipement et son armement (l’aviation dispose ainsi de F-16 et Phantom américains, de Mirage français et de Mig-29 russes), l’armée entretient des liens privilégiés avec l’administration américaine. Depuis l’arrivée de Moubarak au pouvoir, en 1981, elle a reçu plus de 36 milliards de dollars sous forme d’aide non remboursable. Cette somme a servi à moderniser son équipement, mais aussi à former ses officiers supérieurs. Les généraux les plus influents sont sortis de l’académie de West Point et les relations avec l’armée américaine sont étroites. À telle enseigne que le chef d’état-major égyptien, le général Sami Annan, a vécu le « vendredi de la colère » à Washington,

revient autant aux manifestants, bien encadrés par les Frères musulmans, qu’au sang-froid des soldats déployés dans les grands centres urbains. En outre, elle a consolidé sa place dans les institutions politiques, notamment dans le nouveau gouvernement d’Ahmed Chafiq, où des généraux ont remplacé les ministres issus du parti et des milieux d’affaires se réclamant de Gamal Moubarak.

MOHAMED EL-BARADEI RENDEZ-VOUS AVEC LʼHISTOIRE ?

L’ARRIVÉE, L’AN DERNIER, de Mohamed el-Baradei sur la scène politique égyptienne avait provoqué des réactions mitigées. Certains partisans de la démocratie étaient euphoriques à l’idée que le Prix Nobel de la paix et ancien directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) puisse mettre son prestige international au service de leur combat pour de vastes réformes. D’autres, en revanche, se sont demandé ce qu’un homme qui avait passé plus de trente ans à l’étranger pouvait bien comprendre à leur sort. Mais après plusieurs jours de manifestations sans précédent contre Hosni Moubarak, Baradei s’est imposé comme l’une des voix majeures de l’opposition. Le 30 janvier, plusieurs jours après être revenu au Caire pour se joindre aux manifestants, Baradei affirmait avoir reçu un mandat politique et populaire pour négocier la création d’un gouvernement d’union nationale. « Il est évident pour tout le monde en Égypte que Moubarak doit partir immédiatement », a-t-il déclaré à la chaîne de télévision américaine CNN. Baradei ne craint pas la controverse. Avant l’invasion de l’Irak en 2003, il a résisté aux pressions

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des États-Unis et répété qu’il n’existait pas d’« indice crédible » permettant d’affirmer que Bagdad avait relancé son programme nucléaire militaire. Il a ensuite brigué – avec succès – un second mandat à la tête de l’AIEA, qu’il avait rejointe en 1984, muni d’un doctorat en droit international de l’université de New York. À son retour en Égypte, Baradei a promis de se battre pour les réformes, de faire échec à Moubarak et de se présenter à la présidentielle. Mais il s’est rapidement heurté à la dure réalité de la politique égyptienne. Dans une interview accordée au Financial Times l’an dernier, il déplorait la « culture de la peur » et se plaignait de ne pas pouvoir créer un quartier général, lever des fonds ou tenir des réunions publiques. Les événements de ces derniers jours laissent penser que cette peur a été balayée. Un changement déterminant dans la psychologie des Égyptiens qui pourrait ouvrir la voie à Baradei. Mais l’ampleur du soutien populaire dont il bénéficie reste encore largement inconnue. ■ ANDREW ENGLAND © FINANCIAL TIMES et JEUNE AFRIQUE 2011.

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44 MAGHREB & MOYEN-ORIENT ▲ ▲ ▲

chants. Il faudra attendre 2009 pour que l’administration accorde l’agrément à un premier syndicat autonome. Depuis, le monde ouvrier s’est quelque peu affranchi et en a fini avec le « soutien inconditionnel » au pouvoir. Si ces nouveaux syndicats n’ont pas été à l’avant-garde du mouvement de révolte, ils ont tout de même pris le train de la contestation en marche. Mais ce sont les organisations syndicales autonomes des différentes corporations (avocats, ingénieurs, journalistes…) qui, grâce aux réseaux sociaux, ont donné des allures de révolution à la protesta lancée le 26 janvier. Créée dans la ville balnéaire d’Is-

argument dont ne peuvent se prévaloir les autres forces politiques. La Constitution interdisant les partis religieux, l’ensemble de la classe politique (vingt-quatre partis) revendique la séparation de la religion et de la gestion des affaires publiques. Les clivages traditionnels droite-gauche n’ont pas cours en Égypte. Il y a le PND de Moubarak, et les autres. Les conservateurs se recrutent dans le parti au pouvoir, le reste de l’échiquier allant des nationalistes arabes aux libéraux en passant par les progressistes. La principale formation de l’opposition légale, le néo-Wafd, présidé par Sayyed Badawi, se réclame de l’ancien Premier ministre Saad Zaghloul. Mais à l’instar des autres partis traditionnels, le néo-Wafd est miné par des dissensions internes qui l’empêchent de prendre la tête du mouvement contestataire. Les formations récentes, comme Hizb el-Ghad (« le parti de demain »), du laïc Ayman Nour, manquent d’ancrage populaire et ne doivent leur survie qu’à la notoriété et au charisme de leur chef. C’est pourquoi aucun parti ne peut prétendre représenter ou canaliser les millions de protestataires. Du pain bénit pour les Frères.

fera ensuite le dos rond et reconstituera patiemment ses forces. Les Frères musulmans sont favorables à l’instauration d’un État islamique, mais ils divergent avec les salafistes sur la manière d’y parvenir. La confrérie privilégie le prosélytisme et une islamisation de la société par le bas, quand les djihadistes prônent la lutte armée et le contrôle de l’appareil d’État par la force. Cette approche pacifique a permis aux Frères de maintenir le contact avec le reste de la classe politique. Non agréée, la confrérie se transforme peu à peu en groupe de pression très influent au sein de la société civile à travers un

YANNIS BEHRAKIS/REUTERS

Réactions et conséquences

Un manifestant tenant un portrait du raïs grimé en Hitler, le 31 janvier, au Caire.

maïliya, en 1928, par Hassan el-Banna, la confrérie des Frères musulmans a joué un rôle central dans l’évolution politique du pays sans jamais jouir du statut de parti. Elle a inspiré la révolution des Officiers libres (Sadate se réclamait de la confrérie avant de prendre le pouvoir après la mort de Nasser). Mais cette influence ne lui a jamais permis d’obtenir l’agrément gouvernemental qui lui aurait permis d’avoir une existence légale. Au début des années 1960, les relations entre les Frères musulmans et le pouvoir se détériorent brusquement quand Nasser les accuse de fomenter un complot contre lui. La répression décapite la confrérie (son chef, Sayyed Qotb, est pendu en 1966), mais elle

tissu associatif dense, mais son poids politique réel reste inconnu. Lors des législatives de 2005, les Frères musulmans ont réussi à faire élire 88 députés (sur 454) sous l’étiquette « indépendants ». Mais Moubarak n’en veut plus. Aux élections de novembre et décembre 2010, ils sont laminés à l’issue du scrutin le plus frauduleux de l’histoire de l’Égypte contemporaine. Absents du mouvement de protestation au départ, les Frères ont pris le train en marche, replaçant la mosquée au cœur de la contestation. La confrérie sera indéniablement un acteur clé de l’Égypte postrévolution, d’autant que la clandestinité lui a permis de consolider l’homogénéité de son leadership, un

Du Moyen-Orient au Maghreb, les ondes de choc combinées de la révolution tunisienne et de la révolte égyptienne n’ont pas manqué de se faire sentir. Au Maroc, les autorités n’ont fait aucune déclaration officielle. Certes, le gouvernement a annoncé le maintien des subventions sur les produits de base et le Premier ministre a promis que, en 2011, 10 % des postes budgétaires seraient réservés aux diplôméschômeurs. Mais n’y voyez pas un signe d’inquiétude lié au contexte régional, a martelé le ministre de la Communication, Khalid Naciri. Selon des médias espagnols, Rabat aurait rappelé des troupes postées dans les provinces du Sud pour parer à d’éventuels troubles dans les villes du Centre. « De fausses informations », a rétorqué le ministre des Affaires étrangères, Taïeb Fassi Fihri. C’est également à un quotidien espagnol, El País, que le prince Moulay Hicham a déclaré, le 31 janvier, que « le Maroc ne fera pas exception ». Pourtant, l’opinion publique ne se

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AMR DALSH/REUTERS

portrait

MAGHREB & MOYEN-ORIENT 45

HOSNI MOUBARAK EXCÈS DE PRUDENCE NʼEST PAS MÈRE DE SÛRETÉ

ALORS QU’IL ÉGRÈNE les revendications d’une jeunesse qui ne veut plus de Hosni Moubarak, un dirigeant de l’opposition s’interrompt et lâche en riant. « Évidemment que ce n’est pas possible ! Moubarak est trop borné ! » Le président égyptien, 82 ans, est connu pour son obstination et son extrême prudence. Mais aujourd’hui, c’est cette attitude inflexible qui alimente la colère de son peuple. Les jeunes, qui, à l’exemple de leurs frères tunisiens, se sont débarrassés de leur peur, ne voient rien d’extraordinaire dans la stabilité dont Moubarak se dit être le garant. À leurs yeux, le système politique est sclérosé et appartient à une autre époque. Souvent dépeint comme l’archétype du dirigeant arabe autoritaire, Moubarak n’a ni le charisme d’un Gamal Abdel Nasser, ni le panache de son prédécesseur, Anouar al-Sadate. « Un réaliste convaincu qui a fait ses preuves », qui « n’a pas de temps pour l’idéalisme » : voilà comment les diplomates américains le décrivent dans un télégramme de 2009 révélé par WikiLeaks. Né dans une famille modeste du delta du Nil, Hosni Moubarak est diplômé de l’académie militaire en 1949, puis il reçoit une formation de pilote de chasse qui sera le socle de sa carrière politique. Après la défaite arabe de 1967, il orchestre la reconstruction de l’armée de l’air et devient l’un des héros de la guerre de 1973, qui va mener aux négociations de paix et à la restitution du Sinaï occupé à l’Égypte. Deux ans plus tard, il est nommé vice-président. Après l’assassinat de Sadate, il prend le pouvoir dans un contexte difficile. Il hérite d’un pays ostracisé par ses voisins arabes pour avoir signé les accords de Camp David avec Israël en 1979. Son principal défi: renouer avec ses pairs arabes sans mettre en péril l’accord de paix avec Israël, qu’il considère, à l’instar de Sadate, comme crucial pour la sécurité de l’Égypte. Lors de la première guerre du Golfe, il se range aux côtés des Occidentaux et gagne les faveurs des États-Unis, qui lui accordent une réduction de dette de 30 milliards de dollars. Mais au cours des dix dernières années, sa prudence excessive contribue

chaînes satellitaires et dans les médias nationaux, plus réactifs que pendant la révolution tunisienne. À l’appel de certaines ONG, dont l’Association marocaine des droits de l’homme (AMDH), près de un millier de personnes se sont réunies le 31 janvier devant l’ambassade d’Égypte à Rabat pour manifester leur soutien à ce peuple frère.

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ROULA KHALAF © FINANCIAL TIMES et JEUNE AFRIQUE 2011.

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La révolte populaire en Égypte a fait une victime collatérale : Mouammar Kaddafi. Habitué des sommets africains, le « Guide » a annulé à la dernière minute son voyage à Addis-Abeba, en Éthiopie, où il devait assister aux 16 es assises de l’Union africaine (lire aussi pp. 30-35). Les émeutes contre la cherté de la vie, au début de

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sent pas, pour l’heure, concernée par ce vent révolutionnaire. « Ici, tout n’est pas parfait, mais nous avons des partis politiques, nos islamistes siègent au Parlement et on peut dire ce qu’on veut sans se faire arrêter », se rassure Najat, une commerçante casablancaise. Les Marocains suivent cependant avec passion l’actualité égyptienne sur les

au déclin de l’influence de l’Égypte, tandis que de nouvelles puissances régionales – l’Iran et le Qatar – musclaient leur diplomatie. Mais c’est sur la scène nationale que son échec est le plus patent. Craignant de perdre le contrôle et face à la résistance des intérêts corporatistes – une armée aux privilèges étendus et une élite d’affaires étroitement liée au Parti national démocratique (PND, au pouvoir) –, il engage des réformes économiques trop timides, avant que son fils cadet, Gamal, un banquier de 47 ans, ne les prenne en main. L’ascension de celui-ci au sein du PND est cependant perçue comme un abus de pouvoir. Nombre d’Égyptiens pensent même que c’est la femme du président, Suzanne, connue pour son engagement en faveur de la défense des droits des femmes et des enfants, qui est à l’origine des ambitions présidentielles de Gamal. En 2005, sous la pression des États-Unis, Moubarak consent à organiser une présidentielle pluraliste. Mais il s’arrange pour écarter son concurrent, le laïc Ayman Nour, condamné à quatre ans de prison pour une affaire de fraude montée de toutes pièces. La même année, il organise des législatives relativement libres au cours desquelles les Frères musulmans remportent 20 % des sièges. Depuis, il leur livre une guerre sans merci. Aux dernières législatives, en novembre et décembre 2010, des fraudes massives empêchent l’élection du moindre député issu de la confrérie. Cette guerre, Moubarak la mène au nom de la laïcité, dont il se dit un défenseur acharné. Mais il est aussi animé par la certitude, ou l’illusion, d’être à la fois un dirigeant juste et le gardien de la stabilité de l’Égypte. Comme le rapportent les télégrammes éventés par WikiLeaks, le raïs évoque souvent le destin du chah d’Iran, considérant que les États-Unis l’ont poussé à accepter des réformes qui ont précipité la révolution islamique de 1979 : « Dès qu’il y a des pressions américaines pour obtenir des réformes, il met en garde contre le chaos et l’instabilité qui en découleraient. » ■


PART DES 15-29 ANS DANS LA POPULATION TOTALE

Liban

Syrie

27 % Israël

Tunisie

34 % Irak

23 %

29 %

Iran

31 % 28 %

Jordanie

30 %

Cisjordanie et Gaza

27 %

Qatar

34 % Bahreïn

28 % E.A.U.

Maroc

29 %

Algérie

31 %

Libye

28 %

Égypte

29 %

28 %

Yémen

30 %

▲ ▲ ▲

janvier, en Algérie, l’avaient d’ailleurs conduit à réduire les prix des produits de première nécessité. Si ses déclarations désobligeantes à l’égard de la révolution tunisienne sont dans toutes les mémoires, Kaddafi s’est fait moins disert à propos de l’Égypte. Les médias de la Jamahiriya ont totalement passé sous silence les événements de la place Al-Tahrir, devenue le Tiananmen des bords du Nil. Cela n’empêche pas Kaddafi de téléphoner chaque jour à son ami Moubarak pour lui réaffirmer son soutien. La raison de ces coups de fil quotidiens ? « Je suis tout de même président en exercice de la Ligue arabe », explique le « Guide » à l’un de ses hôtes africains. Pas plus que le scandale de Sonatrach, que l’assassinat dans son bureau d’Ali Tounsi, patron de la police, ou que la révolution tunisienne, les événements en Égypte n’ont réussi à sortir Abdelaziz Bouteflika de son mutisme. Présentée comme le pays le plus exposé au vent de la « révolution arabe », l’Algérie réunit tous les ingrédients d’une explosion sociale : une jeunesse marginalisée, frappée de plein fouet par le chômage et le mal-être, un sérail politique vieillissant, un état d’urgence en vigueur depuis plus de vingt ans et un système en place depuis près d’un demisiècle. Opposition et société civile veulent surfer sur la vague révolutionnaire pour accélérer le départ de l’équipe en place. Une Coordination nationale pour le changement et la démocratie, regrou-

27 %

Arabie saoudite

pant partis, syndicats autonomes et associations, a vu le jour au lendemain des émeutes contre la hausse des prix, en janvier dernier. Elle a décidé d’appeler à une marche pacifique, le 12 février, à Alger, pour exiger un changement de régime. Seulement voilà, pacifiques ou non, les marches sont interdites dans la capitale. Au refus du gouvernement d’autoriser la manifestation, les organisateurs ont répondu en annonçant son maintien. La seconde révolution algérienne débutera-t-elle le 12 février ?

Koweït

25 %

Oman

31 %

le président Bachar al-Assad le 31 janvier. Filant une métaphore médicale, il a déclaré la Syrie « immunisée » et a promis de poursuivre les réformes pour éviter « les microbes » attirés par la « stagnation ». En Jordanie, le Front d’action islamique, qui mène la contestation, a pris soin de préciser qu’il ne demandait pas un changement de régime et qu’il reconnaissait la dynastie hachémite. Il a obtenu, le 1er février, la nomination d’un nouveau gouvernement, auquel le roi Abdallah II a demandé de prendre des « mesures rapides pour de vraies réformes politiques ». Dans les pays du Golfe, la légitimité des monarchies pétrolières ne semble pas non plus contestée. En Israël, c’est la peur de l’instabilité qui domine. Tel-Aviv redoute par-dessus tout un changement de régime et la remise en question de l’accord de paix signé en 1979 avec Le Caire. Pour l’éditorialiste israélien Sever Plocker, il s’agit même, depuis longtemps, d’une « peur de la démocratie ». L’Autorité palestinienne et le Hamas, de leur côté, sont restés muets et ont dispersé les manifestations de soutien aux Égyptiens. Dans la région, seuls le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, et le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, ont publiquement salué la révolte populaire. Deux dirigeants non arabes… ■

Habitué des sommets de l’UA, Kaddafi a annulé à la dernière minute sa venue à Addis. Au Moyen-Orient, la révolte égyptienne a soulevé chez les peuples un enthousiasme qui n’a d’égal que l’embarras de leurs dirigeants. Dans l’autocratique République du Yémen, des milliers de personnes, étudiants ou opposants, ont manifesté à plusieurs reprises en janvier. Au pouvoir depuis plus de trente ans, le président Saleh a renoncé à briguer un nouveau mandat, écarté l’hypothèse d’une succession héréditaire et accepté d’ouvrir un dialogue sur le thème des réformes. En Syrie, les internautes, qui ont appelé à la mobilisation sur Facebook, ont sérieusement écorné l’image assez lisse du pays que tentait encore de donner

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SOURCE : NATIONS UNIES

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MAGHREB & MOYEN-ORIENT 47 MAURITANIE

Une explosion et des questions

L

a déflagration a retenti jusqu’au Ksar, dans le centre de Nouakchott. L’armée avait pourtant tiré l’obus à une dizaine de kilomètres, entre les dunes de Riyad, à la lisière de la capitale mauritanienne. Mais selon les déclarations du ministère de la Défense, le 4x4 visé était lourdement chargé : outre trois combattants d’AlQaïda au Maghreb islamique (Aqmi), il transportait 1,5 tonne d’explosifs. L’épisode, qui a valu des couronnes de lauriers aux troupes mauritaniennes – une « opération qualitative qui a sauvé de nombreuses vies et évité au pays beaucoup de dégâts », selon l’agence de presse officielle –, remonte au 2 février. Ce jour-là, peu après 2 heures du matin, des militaires dissimulés derrière les dunes, à Riyad, guettent un véhicule. Le 29 janvier, l’armée avait été avertie du passage à vive allure à Bassiknou, dans l’est du pays, d’une colonne de trois 4x4. Plus tard, à Sélibaby, dans la vallée du fleuve Sénégal, les véhicules auraient même grillé un poste de contrôle. L’armée, obnubilée par le péril Aqmi qui frappe la Mauritanie depuis 2007, décide de recourir à des moyens

MAROC

A

«

Les armes saisies à bord de l’un des 4x4 interceptés.

aériens. Traqués par un hélicoptère et un avion de reconnaissance, les trois véhicules se séparent. Un des 4x4 est abandonné par ses occupants à quelque 200 km de Nouakchott. Un autre est arrêté le 1er février en fin de journée. Deux de ses trois passagers réussissent à prendre la fuite, à pied, et le troisième est interpellé. Il reste donc un véhicule. L’armée le « canalise » vers Nouakchott, où elle prépare l’embuscade. Puis c’est l’explosion de Riyad. Elle tuera les trois occupants du 4x4 et blessera huit militaires mauritaniens. Au final, l’armée a donc appréhendé un terroriste. Lors d’une conférence de presse donnée le 2 février, le ministre mauritanien de la Défense a expliqué

que ses aveux avaient permis de déterminer les intentions d’Aqmi: un attentat contre l’ambassade de France à Nouakchott – déjà visée, en août 2009, par un kamikaze, le seul à avoir péri dans l’explosion – et un autre contre une caserne militaire. Mais selon un porteparole d’Aqmi cité par Mohamed Ould Khattat, rédacteur en chef de l’Agence Nouakchott d’information, les terroristes visaient « la personne du président », Mohamed Ould Abdelaziz, et auraient décidé de se faire exploser en voyant approcher les militaires. Aqmi aurait prévu de diffuser leurs « testaments » afin de prouver leurs intentions. Une thèse jugée farfelue par une source ocMARIANNE MEUNIER cidentale. ■

Les hooligans hors jeu

ssister à un match dans les gradins ? C’est bien trop dangereux, j’aurais peur de me retrouver au milieu d’une bagarre », déplore Youssef, un supporteur de toujours du Wydad Casablanca. Alors que le ministère des Sports s’est lancé dans un ambitieux programme de construction de stades, les Marocains, eux, sont de plus en plus inquiets face à la montée du hooliganisme et préfèrent souvent regarder les matchs à la télévision. Selon le ministre de la Justice, Mohamed Naciri, le Parlement s’apprête à adopter un projet de loi qui punit très sévèrement les auteurs de violences à l’intérieur des stades. « Les peines prévues vont de un an à cinq ans de prison, et les amendes jusqu’à 10 000 dirhams [900 euros, NDLR] », a-t-il indiqué devant les députés. Les responsables de club et les animateurs d’activités sportives pourront également être J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

tenus pour responsables en cas de violences à l’intérieur ou à l’extérieur des stades. Des mesures d’urgence avaient déjà été prises en 2008 après des incidents qui avaient fait plus de quarante blessés à Marrakech, mais la législation reste inadaptée. « Ce texte va combler certaines failles de l’arsenal juridique concernant une violence qui commence dans les stades et s’étend le plus souvent après les matchs dans la rue », a ajouté Naciri. Pour Najib Salmi, chroniqueur sportif à L’Opinion, « les fauteurs de trouble ne représentent qu’une infime partie des supporteurs et sont pour la plupart des adolescents déscolarisés qui viennent se défouler dans les stades ». Encore embryonnaire, le hooliganisme marocain n’est pas organisé comme en Europe, mais le phénomène a pris ces dernières années une ampleur inquiétante. ■ LEÏLA SLIMANI

TÉLÉVISION MAURITANIENNE

Lʼarmée neutralise un groupe de djihadistes qui sʼapprêtaient à commettre une série dʼattentats dans le pays.


48 INTERNATIONAL

SUISSE LE PARADIS NʼEST PLUS CE QUʼIL ÉTAIT Gel des avoirs de Laurent Gbagbo et de Zine el-Abidine Ben Ali, entrée en vigueur de la « loi Duvalier »... La Confédération ne veut plus être le coffre-fort des dictateurs. Surtout quand ils ont perdu le pouvoir.

I

RÉMI CARAYOL

l y a quelques mois, dans un salon feutré du club de la pre sse, à G enève, lor s d’une conférence sur la restitution des biens mal acquis, Valentin Zellweger se plaint amèrement devant un aréopage de journalistes. Patron de la Direction du droit international public, un service du département fédéral des Affaires étrangères, il est chargé, entre autres, d’améliorer l’image de la Suisse. De faire le tri entre « mythes et réalité » en matière d’argent sale. La mission n’a rien d’une sinécure… Zellweger fait référence à une scène de l’avantdernier James Bond, Casino Royale, dans laquelle l’adversaire du célèbre agent secret britannique manigance une transaction financière, évidemment illicite, avec un banquier, évi-

demment suisse. « Qui s’en étonne ? » s’agace-t-il. Selon lui, il s’agit là d’un cliché, d’une idée reçue. Bref, d’une injustice. CAS D’ÉCOLE

Depuis plusieurs années, la Suisse s’efforce de casser son image de paradis fiscal à l’usage des mafieux et des dictateurs. Le 19 janvier, le Conseil fédéral (l’équivalent du gouvernement) s’est résolu à bloquer, « avec effet immédiat », les « éventuels avoirs en Suisse » de l’Ivoirien Laurent Gbagbo et du Tunisien Zine el-Abidine Ben Ali. Valables pour une durée de trois ans, ces mesures sont censées « empêcher que la place financière suisse ne serve de coffre-fort pour des fonds potentiellement acquis de manière illégale ». Quelques jours plus tard, le 1er février,

une nouvelle loi est entrée en vigueur. Elle concerne « la restitution des valeurs patrimoniales d’origine illicite de personnes politiquement exposées » (loi sur la restitution des avoirs illicites, LRAI). Une première mondiale, selon les autorités helvétiques. Réclamé par les ONG depuis des années, le texte avait été adopté par l’Assemblée fédérale au mois d’octobre 2010. Hasard du calendrier, cette loi spécialement conçue pour les fonds déposés par la famille Duvalier (elle est d’ailleurs surnommée « loi Duvalier ») est donc entrée en vigueur quelques jours après le retour en Haïti de l’ancien dictateur (lire encadré p. 50). « Un cas d’école », estime un spécialiste. Dès 1986, peu après la fuite de Baby Doc, la Suisse, à la demande

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des nouvelles autorités haïtiennes, avait bloqué les fonds de la famille déposés dans ses banques – enfin, ceux qui avaient pu être identifiés. En tout, quelque 4,2 millions d’euros. Pendant son exil en France, Duvalier avait, à plusieurs reprises, tenté de les récupérer en saisissant la justice. En février 2010, il avait obtenu gain de cause, le tribunal fédéral s’étant opposé à la restitution d’une partie de ces avoirs à l’État haïtien. Et ayant justifié sa décision par l’absence d’un traité d’entraide

judiciaire entre les deux pays – entretemps, Haïti avait lâché l’affaire. Le gouvernement a immédiatement réagi en accélérant la mise en œuvre de la LR AI, qui devrait lui permettre de passer outre au jugement et de restituer le magot à Haïti. Au moment où l’île caraïbe est, une nouvelle fois, en proie au chaos, voilà pour la Suisse un excellent moyen de « soigner sa réputation », commente, non sans ironie, Fati Mansour, la chroniqueuse judiciaire du quotidien Le Temps. Alors, simple coup de com’ ? Non, jurent les autorités helvétiques, qui rappellent que, depuis quinze ans,

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elles ont, au total, restitué env iron 1,7 milliard de francs suisses (1,3 milliard d’euros) à divers États. « Aucun pays n’en a fait autant », assure Zellweger. De fait, en 2005, la Confédération a rendu au Nigeria 510 millions d’euros provenant de comptes appartenant à l’ancien dictateur Sani Abacha. Deux ans auparavant, elle avait restitué aux Philippines 498 millions d’euros détournés par Ferdinand Marcos. Le Pérou, l’Angola, le Mexique et le Kazakhstan en ont également profité. « La Suisse a développé un système reposant sur deux piliers : la prévention et l’entraide », explique une note du département des Affaires étrangères. Las, « le phénomène croissant des États dits défaillants a montré les limites du système ».


50 INTERNATIONAL Dans tous les cas évoqués plus haut, c’est grâce à l’entraide judiciaire que la Suisse a pu restituer les sommes spoliées. « Le problème, c’est quand l’État en face ne répond pas », note Olivier Longchamp, un responsable de la Déclaration de Berne, une ONG suisse très en pointe sur cette question. La « loi Duvalier » est censée y remédier. Elle permettra au gouvernement de restituer certains fonds de façon autonome. « C’est un petit pas dans la bonne direction », juge le militant, qui insiste sur le mot « petit ». Car la loi est incomplète, estiment les ONG. « Pour pouvoir en faire usage, il faut que l’État d’où sont originaires les fonds ait déposé une demande d’entraide pénale et que cet État soit ensuite jugé défaillant ; c’est

« L’idée est de continuer sur la base d’un système qui a fait ses preuves. Nous n’avons aucun intérêt à le saper, nous voulons le compléter », rétorque Zellweger. « On punit les dictateurs ? Certes, mais seulement après leur ren-

paradoxal. » D’autre part, « la loi ne permet pas à la société civile des pays concernés, ni même aux juristes ou aux avocats des victimes, d’engager le processus de blocage ». Spécialiste des questions financièr e s, le m ag i st r at Ber nard Ber tossa est convaincu que « la portée concrète [de cette loi] sera quasi nulle, les conditions prévues pour son application étant bien trop restrictives ». Conçue pour le cas particulier de Duvalier, elle risque, au mieux, « de dépendre de critères plus diplomatiques que juridiques », et, au pire, de ne pouvoir s’appliquer qu’à cet unique cas.

Spécialement conçue pour Baby Doc, la loi pourra-t-elle être appliquée à d’autres cas ? versement », persifle pour sa part un journaliste, qui parle carrément de « coup d’épée dans l’eau ». BONNES INTENTIONS

EDUARDO MUNOZ/REUTERS

Jean-Claude Duvalier à son arrivée à Port-au-Prince, le 18 janvier.

LES RAISONS D’UN RETOUR Et si Jean-Claude Duvalier n’était rentré en Haïti que pour récupérer ses millions bloqués en Suisse ? L’hypothèse a été lancée par le New York Times. Depuis, elle a été confortée par une déclaration de Me Ed Marger, l’un des avocats de l’ancien dictateur : « Ce qu’il [Duvalier] aimerait faire avec les fonds suisses, c’est contribuer à la reconstruction du pays. C’est l’une des raisons de son retour. » Tel est le raisonnement: Duvalier, que certains disent ruiné, se devait d’agir avant l’entrée en vigueur de la loi suisse qui porte son nom. Pour pouvoir toucher les fonds, sa seule chance était de se rendre en Haïti et d’en repartir libre, afin de prouver aux autorités helvétiques qu’il ne fait l’objet d’aucune poursuite judiciaire. La thèse est séduisante, mais la réalité est peut-être moins simple. Et pas seulement parce que Duvalier a finalement été inculpé, à Portau-Prince. Le simple fait que Duvalier se rende en Haïti et en reparte libre ne suffit pas pour que les fonds soient débloqués. Et il n’y a nul besoin qu’une procédure soit ouverte en Haïti pour justifier un blocage. À Berne, le gouvernement rappelle qu’en toute occurrence « plusieurs voies de droit existent encore pour Jean-Claude Duvalier ». ■ R.C.

Car le problème est plus profond. « La solution, ce n’est pas de restituer les fonds illicites, mais de ne jamais les accueillir, estime Olivier Longchamp. Les fonds Duvalier ou les fonds Ben Ali n’auraient jamais dû arriver chez nous. » La Suisse est-elle à la hauteur des bonnes intentions qu’elle affiche ? « Certains de ses dirigeants, comme Micheline Calmy-Rey, l’actuelle présidente de la Confédération, oui. » Le problème est que la Suisse compte quelque 350 banques. Et que le poids de celles-ci est loin, très loin d’être négligeable. Ne représentent-elles pas plus de cent mille emplois ? « Si la LRAI a été votée, c’est parce qu’elle a été soutenue par les banques. Et si les banques l’ont soutenue, c’est uniquement pour améliorer leur image. » Reste que les avancées sont indiscutables. Dans les années 1980, les banques étaient de véritables vaches sacrées. Le black-out concernant leurs activités était total. Le climat a changé. La loi aussi, grâce, en partie, aux pressions internationales. « La législation a prouvé son efficacité, on recense nettement moins de cas de blanchiment d’argent », estime Valentin Zellweger. Sans doute. Mais les mentalités, elles, ne changent que lentement. En 1984, une initiative populaire contre « l’abus du secret bancaire et de la puissance des banques » avait été rejetée par 73 % des électeurs. Il y a un an, un sondage révélait que 61 % des Suisses restaient opposés à l’abolition dudit secret. On l’aura compris : mafieux et dictateurs ont encore un peu de temps devant eux avant de songer à changer de banque ! ■

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INTERNATIONAL 51 FRANCE

Lʼhomme qui veut la peau de « DSK »

À

droite, il y a Mar ine Le Pen. À gauche, JeanLuc Mélenchon. Aussi dissemblables soientils, ces deux-là ont un point commun : ils chassent sur les mêmes terres électorales. Leur cible ? Les laissés-pourcompte de la mondialisation. Le 14 février, la patronne du Front national et le coprésident du Parti de gauche Le coprésident du Parti de gauche. s’affronteront en direct sur RMC et BFM TV. « Je vais lui envoyer un exocet dans la cabine », c’est de « recomposer la gauche autour fanfaronne le second. Il faudra bien ça, de sa propre personne ». En contribuant tant son retard dans les sondages (plus à la défaite de ses anciens camarades. de 10 points) paraît sans remède. Détail Curieux itinéraire que celui de ce piedrévélateur : il ne séduit, pour l’instant, noir né à Tanger il y a près de soixante que 13 % des ouvriers. Pour un popuans, passé sans état d’âme du trotskisme liste présumé, c’est peu. La vérité est le plus dogmatique au mitterrandisme que, populiste, Marine l’est vraiment. le plus ondoyant. Puis du fédéralisme Et que Jean-Luc joue à l’être. européen au souverainisme « de gauTout cela n’est d’ailleurs que mise en che ». Indulgent avec les autocrates postscène médiatique dans la perspective communistes (Poutine, Castro, Chávez), de l’élection présidentielle de 2012, à il se montre sans pitié avec les Amérilaquelle Mélenchon est officiellement cains, ces « cow-boys en virée », comme candidat depuis le 21 janvier. Car sa avec les « séides de l’Église catholique », vraie cible, c’est… le Parti socialiste, défenseurs de l’école libre. Adversaire dont il fut membre pendant plus de déclaré du libéralisme et même du libretrente ans (1977-2008). Secrétaire échange, il voue une exécration partinational de ce parti et strauss-kahnien culière au FMI, accusé d’« organiser la notoire, Jean-Christophe Cambadélis ne famine, le désordre et le démantèlement s’y trompe pas. L’objectif de Mélenchon, de l’État ». Et donc, on l’aura compris, à estime-t-il dans le quotidien Libération, Dominique Strauss-Kahn, son directeur J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

général, avec lequel le PS ne manquerait pas de « s’enfoncer dans l’impasse » s’il avait le mauvais goût d’en faire son candidat pour 2012. « GORGÉS DE FRIC »

Dans le pamphlet qu’il vient de publier chez Flammarion (Qu’ils s’en aillent tous!), Mélenchon alterne les formules brillantes (« insurrection civique froide » pour désigner l’abstention massive qui caractérise la majorité des scrutins dans les démocraties occidentales), les invectives fleurant bon l’antiparlementarisme d’avant-guerre (« goinfrée », « gorgés de fric ») et les effets rhétoriques néo-hugoliens : « Qu’ils s’en aillent tous ! : les patrons hors de prix, les sorciers du fric qui transforment tout ce qui est humain en marchandise, les émigrés fiscaux, les financiers dont les exigences cancérisent les entreprises. […] Du balai ! Ouste ! De l’air ! » Bien campé dans le rôle d’un moderne Saint-Just, il rêve d’une « révolution citoyenne », d’une abolition des privilèges, d’une nouvelle nuit du 4 Août. Ayant consacré plusieurs mois à agresser les journalistes – ces « petites cervelles », ces « larbins » –, il est aujourd’hui invité sur tous les plateaux de télévision. À seize mois de l’échéance présidentielle, il court le risque de s’essouffler. D’autant que des tâches plus ingrates l’attendent. Comme son « OPA amicale » (Cambadélis) sur le vieux Parti communiste, son allié au sein du Front de gauche. Très affaibli électoralement, le PCF conserve en effet un réseau d’élus et un réservoir de militants indispensables à la réussite de son entreprise. Or, Place du Colonel-Fabien, une poignée de grognards renâclent à faire de Mélenchon leur candidat… ■ LAURENT TROUDE/FEDEPHOTO.COM

Membre du Parti socialiste trente ans durant, Jean-Luc Mélenchon a juré la perte de ses anciens camarades lors de la présidentielle de 2012. Sa bête noire ? Lʼactuel directeur général du FMI.

JEAN-MICHEL AUBRIET


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ILS VIENNENT D’AFRIQUE, ILS ONT RÉUSSI AILLEURS

PARCOURS

Aya CISSOKO Lʼex-championne du monde de boxe, fille dʼémigrés maliens, livre une autobiographie saisissante. Et ne mâche pas ses mots sur le contexte politique français.

D

anbé: un petit mot de deux syllabes qui signifie beaucoup. C’est du malinké, et si l’on voulait à tout prix trouver un équivalent français, ce serait « dignité ». Danbé, c’est aussi le titre d’un livre écrit par Aya Cissoko et Marie Desplechin. Un titre à mille lieues des racoleurs Brûlée vive ou Dans l’enfer des tournantes qui encombrent les étals des librairies. Un titre simple, sobre et mystérieux qui se garde de tout mélodrame pleurnichard. Et pourtant: à la lecture, les larmes viennent. Danbé, c’est l’histoire d’Aya Cissoko, née en 1978 à Paris et aujourd’hui étudiante à Sciences-Po. Il serait possible de jouer sur le pathos, d’évoquer la mort du père et de la petite sœur lors de l’incendie criminel du 22, rue de Tlemcen, dans la nuit du jeudi 27 au vendredi 28 novembre 1986, d’en rajouter avec le décès du petit frère onze mois plus tard. Il serait aussi possible d’écrire une fable exemplaire où une jeune femme issue d’un milieu défavorisé, fille d’émigrés maliens, se sortirait de tous les mauvais pas grâce à la pratique d’un sport, la boxe, à un haut niveau, jusqu’à devenir la meilleure du monde dans sa catégorie. Le happy end serait celui-ci: bien que gravement blessée lors de son dernier match, la belle jeune femme trouva encore la force de reprendre ses études… Mais Aya Cissoko a décidé d’écrire son histoire d’une autre manière – « De raconter les faits sans y mettre d’affect. D’éviter le pathos. » Et elle l’a fait avec son amie, l’écrivaine Marie Desplechin, qui lui a dit: « Il n’y aura rien dans ce livre qui ne t’appartienne pas. » Pourquoi, dans ce cas, redire ce qui a été si bien écrit? Tentons plutôt de voir Aya Cissoko derrière quelques mots.

FAMILLE. « Elle est essentielle, mais il faut savoir couper

le cordon pour vivre sa propre existence. Surtout dans les familles africaines », dit celle qui a perdu trois des siens pendant son enfance. Avant d’ajouter: « Ma mère a été une guerrière contre la famille – c’était nous trois contre le reste du monde! » Gravement malade, par trois fois endeuillée, Massiré Cissoko a dû se battre contre ceux qui voulaient choisir à sa place, contre ceux qui ont refusé de l’aider alors qu’elle était seule et sans moyens pour élever deux enfants, contre ceux qui voulaient qu’elle rentre au Mali. MALI. « Depuis l’âge de 15 ans, j’espère faire ce voyage

entre femmes, avec ma mère. J’y suis allée quand j’avais 2 ans, mais je n’en garde aucun souvenir. Maintenant, sa santé s’est améliorée, et je pense qu’il ne peut pas y avoir de meilleure initiation que de partager ce moment avec elle », affirme Aya Cissoko. Entre elle et sa mère, il n’y a qu’une

langue possible: le bambara. Et si la jeune femme se revendique totalement française, elle se dit aussi « très fière de [sa] part africaine ». De nature curieuse, elle a toujours été à l’affût des informations concernant son pays, à l’écoute de la moindre anecdote. Si son père était originaire de Kakoro Mountan, Aya Cissoko n’envisage pas forcément un retour au village même. « J’ai plutôt envie de m’imprégner d’un pays et de ses odeurs, de me fondre dans la foule, de fouler du pied la terre de mes ancêtres. J’aimerais découvrir le Mali dans sa diversité géographique. J’ai un peu peur, mais pas trop: je serai traversée par un nombre important d’émotions – mais ce sera surtout du bonheur. » COMBAT. « C’est celui de tous les jours: rester digne, rester libre, rester intègre », lance Aya Cissoko. D’elle, on attendait qu’elle parle de la boxe, ce domaine où elle a excellé. Elle a voulu boxer alors qu’elle était encore à l’école primaire, sa mère a cédé. Persévérante, soutenue par des entraîneurs pas23 novembre sionnés, elle sera championne du monde de boxe française en 1999 1978 et 2003, de boxe anglaise en 2006… Naissance à Paris Mais il n’y a dans sa réserve rien de surprenant pour celui qui a lu 1986 Perd son son livre, où elle écrivait déjà: « Je père et sa sœur dans ne m’habituerai jamais à la déconl’incendie criminel venue de la victoire, la même au du 22, rue de Tlemcen long des années. Je n’arriverai pas (Paris) à me réjouir. Je suis toujours allée au combat sans haine ni rage. […] 1999 et 2003 Je n’aime pas faire mal. » D’ailleurs, Championne du commentant le mot « victoire », elle monde amateur dit simplement: « Même si je suis de boxe française malinkée, j’adore cette phrase qui définit les Bambaras: ceux qui ont 2006 Championne refusé de se soumettre. » Essayons du monde amateur donc un autre mot, plus précis.

de boxe anglaise

2009 Sciences-Po Février 2011 Sortie de Danbé, avec Marie Desplechin, aux éditions Calmann-Lévy

RING. « C’est une belle illustration de ce que peut être la vraie vie. Il ne faut jamais faillir. » Elle n’en dira pas plus. Sans doute parce qu’elle ne cherche ni à placer sa réussite sportive au-dessus du reste de sa vie, ni à s’ériger en exemple. Marie Desplechin confirme: « Aya ne souhaite pas être héroïsée. Son histoi-

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re est belle parce qu’elle est digne. » Pourtant, la fille de Ménilmontant pourrait, mieux que bien d’autres, donner des leçons de courage et d’abnégation. BLESSURES. Il y a eu les deuils. Il y a eu aussi la fracture

des cervicales lors des championnats du monde de 2006, aggravée par une opération suivie de complications, et l’interdiction de remonter sur un ring. « J’ai plus de mal à me remettre des blessures occasionnées par des gens en qui j’ai eu confiance que des blessures physiques. Je suis très rancunière », confie-t-elle pourtant avec un sourire. Pas de doute, c’est une forte tête. « Elle est droite, loyale, dure, radicale, très fragile, très intelligente, très réservée, très vulnérable », ajoute Marie Desplechin. Ce qui explique que certains mots suscitent des réponses tranchées… ou distanciées. À « racisme », elle répond « ignorance ». À « Amour », elle répond – après un soupir et un « Ah… Amour ! » – « c’est le respect de l’autre ». À « enfants », laconique: « J’espère que cela m’arrivera un jour. » En revanche, lorsque le mot « politique » est lâché, la parole se libère. Aya Cissoko s’anime d’une colère franche, réfléchie, contenue, née d’une véritable douleur. Aujourd’hui étudiante à Sciences-Po grâce à l’aide de la J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

fondation Lagardère, elle dit: « Je déteste le contexte politique actuel. Le gouvernement accentue les clivages entre les différentes composantes de la société, alors que son rôle premier est d’assurer la cohésion des individus. Il piétine cet héritage républicain auquel je tiens. » Le discours, à gauche toute, est argumenté. Aya Cissoko se désole que « la réussite se mesure à la capacité à amasser » et que le citoyen soit réduit à son « potentiel de consommation ». Sa voix est douce, son visage calme, mais elle cogne sur les « repris de justice du gouvernement », sur les « donneurs de leçons », sur la « staracadémisation de la politique »… Se lancera-t-elle dans l’arène ? « Je suis trop entière et j’ai du mal avec le politiquement correct. Ça risque de poser problème… » AVENIR. « J’ai du mal à me projeter », dit-elle, avant d’éva-

cuer la question sur ses choix d’orientation à Sciences-Po. Marie Desplechin peut néanmoins répondre pour elle: « Elle ne sera pas là où on l’attend. Ce ne sera jamais la jeuneblack-mignonne-issue-de-la-diversité de service. Elle est trop entière, trop autoritaire, trop indépendante! » ■ NICOLAS MICHEL

Photo : JACQUES TORRÉGANO/FÉDÉPHOTO pour J.A.


GLEISON MIRANDA/FUNAI/WWW.UNCONTACTEDTRIBES.ORG/PHOTOSBRÉSIL

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AMAZONIE CES INDIENS SURGIS DE LA NUIT DES TEMPS... Ces Indiens amazoniens ignorent tout de la « civilisation » et ne savent même pas qu’ils sont « brésiliens », bien qu’établis sur le territoire de ce pays, non loin de la frontière avec le Pérou. Ils vivent de la chasse et de la cueillette, et ne s’en portent apparemment pas mal. Un premier groupe avait été découvert en mai 2008. Celui-ci l’a été, deux ans plus tard, par un hélicoptère de la Fondation nationale de l’Indien, dont les agents sont seuls autorisés à les approcher, une fois l’an, afin de s’assurer que rien ni personne ne menace leur survie. Et surtout pas les bûcherons péruviens, ces forcenés de la déforestation illicite.

BIRMANIE

RUSSIE

Mascarade à Naypyitaw

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our la première fois depuis cinquante ans, le Parlement birman s’est réuni, le 31 janvier, à Naypyitaw, la nouvelle capitale administrative du pays. Estce la fin du régime militaire en place depuis vingt ans ? Non, bien sûr. Peu de choses vont changer, au moins dans l’immédiat. La junte continuera d’exercer sur le pays un contrôle absolu. Le nouveau Parlement sera dominé par les militaires. Conformément à la Loi fondamentale, un tiers des sièges de députés leur sont réservés. Et 80 % des civils élus lors des élections controversées du 7 novembre représentent des partis créés avec la bénédiction de l’état-major. C’est le cas du Parti de l’union pour le développement et la solidarité, le grand vainqueur du scrutin. Le Front démocratique national, le parti d’Aung San Suu Kyi, qui avait remporté les législatives de 1990 mais n’a jamais été autorisé à gouverner, a boycotté la consultation de novembre. Certains de ses membres se sont néanmoins présentés en tant que candidats indépendants et ont remporté une douzaine de sièges, sur les six cents que compte la nouvelle Assemblée. Ils constituent la troisième force du Parlement, mais on voit mal quel rôle ils seront en mesure de jouer dans la « démocratie disciplinée » imposée par l’armée. Les travaux du nouveau Parlement ont été dominés par l’élection du chef de l’exécutif. Le retrait de Than Shwe, l’actuel homme fort du pays, a créé la surprise. Il sera vraisemblablement remplacé par Thein Sein, le Premier ministre sortant. Celui-ci a été coopté par la Chambre basse, mais ce choix doit encore être entériné par la Chambre haute. ■ TIRTHANKAR CHANDA

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Agent 00 Sex

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on nom est Chapman, et je vais tout vous révéler. » Moulée dans des robes de velours, la sculpturale Mata Hari russe aux yeux revolver présente une émission sensationnaliste sur la chaîne privée REN-TV. Mais depuis le 1er février, Anna Chapman, 28 ans, n’est plus seulement l’icône cathodique des Mystères du monde. Elle est une marque. Son nom a été déposé à l’Office des brevets, à Moscou, ce qui lui permettra de commercialiser des cosmétiques, des boissons, des poupées érotiques à son effigie, ou encore sa propre ligne de vêtements. Espionne démasquée, la belle Anna a été expulsée des États-Unis en juillet 2010 avec neuf autres agents des services de renseignements russes. Elle aurait pu chercher à se faire oublier, mais pas du tout. À peine avait-elle posé le pied en Russie que le Premier ministre, Vladimir Poutine – lui-même ancien espion –, l’accueillait en grande pompe et lui prédisait une « brillante carrière ». Depuis, on l’a vue exhiber ses formes avantageuses, pistolet à la main, dans le magazine masculin Maxim sous le surnom d’Agent 00 Sex ; parrainer le lancement de la capsule Soyouz vers la station spatiale internationale ; assister aux célébrations du 68 e anniversaire de la bataille de Stalingrad ; et même entrer à la direction de Molodaïa Gvardia, l’organisation de la jeunesse de Russie unie, le parti de Poutine. Elle lorgne, dit-on, un siège au Parlement. Pas encore la présidentielle de 2012, mais sait-on jamais… ■ JOSÉPHINE DEDET J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


LE PLUS DE JEUNE AFRIQUE

MINES

Katanga

Nouvel eldorado du cuivre

Nouvelle usine de cuivre et de cobalt de Ruashi Mining (coentreprise contrôlée par le sud-africain Metorex), près de Lubumbashi.

JB RUSSELL/COSMOS

Son sous-sol fait du plateau katangais une terre de prédilection pour les miniers de la planète. Après des décennies de monopole, lʼouverture à la concurrence a attiré des dizaines dʼopérateurs privés et entraîné un véritable boom de la production.

7-10 FÉV. 2011


An Affiliate of Freeport-McMoRan Copper & Gold


LE PLUS 57 LE PLUS DE JEUNE AFRIQUE

PRÉLUDE

MINES

Katanga

Nouvel eldorado du cuivre

CÉCILE MANCIAUX

JB RUSSELL/COSMOS

Promesses katangaises 7-10 FÉV. 2011

PA N O R A M A

Le réveil dʼun géant p. 58 R E P O R TAG E

Kolwezi en pleine croissance p. 64 E N T R E PR I S E

La Gécamines en sursis ? p. 68 É CO N O M I E

Les affaires reprennent p. 72 AG R I C U LT U R E

Vers davantage dʼautonomie p. 74 PORTRAITS

Culture du risque p. 77 SOCIÉTÉ

Melting-jackpot dʼexpatriés p. 78 FO O T BA L L

TP Mazembe, le dieu des stades p. 79 LO I S I R S

Les incontournables de « Lshi » p. 80 Direction : Danielle Ben Yahmed et Marwane Ben Yahmed Rédaction en chef : Cécile Manciaux Rédaction : Muriel Devey, envoyée spéciale, Tshitenge Lubabu M.K. et Arthur Malu-Malu

EN CE DÉBUT DE FÉVRIER 2011, deux ans après son effondrement, le cours du cuivre atteint un record historique. Il caracole à quelque 10 000 dollars la tonne sur le London Metal Exchange. Cette tendance durable ne fait plus seulement rêver le Katanga. Elle transforme son potentiel en réalité. La fameuse copperbelt (ceinture de cuivre) katangaise, qui relie les villes de Lubumbashi, Likasi et Kolwezi, recèle en effet 10 % des réserves mondiales de cuivre et, « accessoirement », 34 % de celles de cobalt. Ces ressources désormais prouvées ont, depuis des siècles, rendu célèbre la province la plus méridionale de la RD Congo, située le long de la frontière zambienne, et n’ont pas manqué, depuis tout aussi longtemps, d’attirer les explorateurs et opérateurs étrangers. Rien de nouveau, direz-vous. Pourtant, ce territoire – plus étendu que le Cameroun et presque autant que la France – pourrait rapidement changer la donne sur le marché mondial du cuivre. Que vaut au Katanga cette reprise semble-t-il pérenne des activités d’exploration et de production, alors que la planète minière est à peine sortie de la crise internationale qui l’a ébranlée ? Crise qui ne l’a d’ailleurs pas épargné puisque, d’après les chiffres du ministère provincial des Mines, une quarantaine d’opérateurs sur les quatre-vingts recensés ont cessé leurs activités. Passées ces turbulences et à l’issue de la revisitation des contrats miniers, le Katanga s’est ouvert à de nouveaux partenaires, majors et juniors, entraînant un regain des investissements, en amont comme en aval de la filière. La montée en puissance de la production de métal rouge a suivi : celle-ci a frôlé les 400 000 t en 2010 (+ 30 % en un an) et devrait dépasser 1,8 million de tonnes en 2015. Le Katanga peut donc désormais rivaliser, sinon avec le Chili – qui détient à lui seul 38 % des réserves mondiales connues de cuivre et est le principal producteur du minerai primaire avec plus de 5 millions de tonnes –, tout au moins avec ses challengers immédiats, parmi lesquels les États-Unis et le Pérou (environ 8 % chacun du marché mondial) ou encore la Zambie voisine (3,5 %), qu’elle pourrait rattraper dès cette année. La production des autres minerais qu’abrite le Katanga (cassitérite, coltan, manganèse, or, zinc…) suit la même tendance haussière, à commencer par celle de cobalt. Dans le sillage des miniers, des paraminiers et de leurs sous-traitants, l’économie katangaise tout entière s’ébranle, du BTP aux services. Des groupes financiers étrangers, notamment indiens et sud-africains, se sont installés et renforcent leur présence via l’ouverture d’agences bancaires dans les différentes villes de la province (autrefois réservée aux banques locales). Portés par la réhabilitation des voies de communication avec la Zambie, la Tanzanie et l’Angola voisins, les échanges régionaux sont redynamisés. Enfin, depuis deux ans, les opérateurs miniers semblent s’être engagés « pour de bon », et au-delà des besoins de leur activité propre, dans le développement socio-économique du territoire : investissement dans la création de fermes mécanisées, la construction d’établissements d’enseignement, d’hôpitaux… De quoi changer, pour les Katangais, le visage de la mine. ■

Coordination : Nisrine Batata Difcom – 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 Paris Tél.: + 33 1 44301960 – Fax: + 33 1 45200823 J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


58 LE PLUS KATANGA

PANORAMA LE RÉVEIL Lʼannée 2010 a été marquée par la relance du secteur minier, dont la production doit quadrupler dʼici à 2015. Une dynamique qui permet à la province de moderniser ses infrastructures et de diversifier son économie. Un vaste chantier.

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epuis quelques mois, la plus méridionale des provinces congolaises – qui doit son nom à Katanga, un chef local du milieu du XIXe siècle – est régulièrement sous les feux de la rampe. L’an dernier, alors que son chef-lieu, Lubumbashi, fêtait ses 100 ans et abritait la seconde édition de la biennale Picha – « image », en swahili –, son équipe de football, le Tout-Puissant Mazembe (lire p. 79), remportait, mi-novembre, la Ligue des champions de la Confédération africaine de football (CAF), avant de se classer deuxième de la Coupe du monde des Clubs. Et de s’imposer en finale de la Super Coupe Orange, le 29 janvier dernier, devant les officiels de la CAF réunis à Lubumbashi, où ils ont dévoilé la liste des futurs hôtes de la Coupe d’Afrique des nations – le Maroc en 2015 et l’Afrique du Sud en 2017. L’année 2010 a surtout été marquée par la reprise du secteur minier. Les gisements de cuivre et de cobalt bruissent à nouveau du brouhaha des pelleteuses et autres engins chargés d’extraire de leurs entrailles puis de transformer les minerais que s’arrache le monde entier. 40 % À 60 % DU PIB DU PAYS

De tout temps, sa richesse minière a fait de ce plateau, presque aussi grand que la France et dont l’altitude moyenne dépasse les 1 000 m, une province convoitée. Dès la conquête coloniale s’y sont affrontés Britanniques et Belges. Ces derniers, qui l’emporteront, y

BAUDOUIN MOUANDA POUR J.A.

MURIEL DEVEY, envoyée spéciale

Le chef-lieu, Lubumbashi, compte 2 millions d’habitants.

établiront l’Union minière du Haut-Katanga (UMHK), dont la nationalisation fin 1966 donnera naissance en 1967 à la Générale des carrières et des mines (Gécamines, lire pp. 68-69). Jusqu’à l’indépendance, le 30 juin 1960, la province – dont la capitale est Élisabethville (l’actuelle Lubumbashi) – aura un statut particulier, ses gouverneurs et vice-gouverneurs traitant directement

avec Bruxelles et non Léopoldville (aujourd’hui Kinshasa). Le 11 juillet 1960, aidés des Américains, les Belges, qui ne voulaient pas renoncer à un si riche filon, soutiendront la sécession de Moïse Tshombé (lire p. 61), à laquelle l’intervention des Nations unies mettra un terme en 1963. En 1971, le président Mobutu Sese Seko rebaptisera la province Shaba (« cuivre », en swahili),

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LE PLUS 59

DʼUN GÉANT

LE KATANGA EN BREF

2e plus grande province de RD Congo par sa superficie (après la Province Orientale) avec 496 877 km2 , soit plus de 21 % de la RD Congo. Elle est à elle seule plus étendue que la plupart des grands pays du continent (comme le Cameroun : 475 440 km2 ). Population 10 millions d’habitants. 3 villes principales Lubumbashi (chef-lieu, 2 millions d’habitants), Kolwezi (1,5 million d’hab.) et Likasi (480 000 hab.). 5 districts et 22 territoires (en plus des territoires urbains de Lubumbashi, Kolwezi et Likasi) : • District du Haut-Katanga : Kambove, Kasenga, Kipushi, Mitwaba, Pweto, Sakania • District urbanorural de Kolwezi : Lubudi, Mutshatsha • District du Lualaba : Dilolo, Kapanga, Sandoa • District du Haut-Lomami : Bukama, Kabongo, Kamina, Kaniama, Malemba-Nkulu • District du Tanganyika : Kabalo, Kalemie, Kongolo, Manono, Moba, Nyunzu Représentation nationale au Parlement 69 députés, 4 sénateurs. Gouvernement provincial Le gouverneur (Moïse Katumbi Chapwe) et le vice-gouverneur (Guibert Yav Tshibal) ont été élus en 2007 par les députés provinciaux pour cinq ans. Le gouvernement compte 10 ministres. Assemblée provinciale Composée de 103 députés, dont 44 élus au suffrage universel direct, elle est présidée par Gabriel Kyungu wa Kumwanza. Langues Français (officielle), swahili et plusieurs langues locales Monnaie Franc congolais (CDF). Parité au 01/02/2011 : 1 euro = 1 239,25 CDF ; 1 dollar = 904,024 CDF.

un nom qu’elle gardera jusqu’à la chute du Léopard, en 1997. Aujourd’hui, le Katanga est une zone d’affrontement géopolitique et économique entre Occidentaux et Asiatiques. Grâce à son secteur minier, qui a bénéficié d’environ 9 milliards d’euros d’investissements ces dernières années, la province représente entre 40 % et 60 % du PIB de la RD Congo. Après des

décennies de monopole – de l’UMHK puis de la Gécamines –, ce sont désormais des dizaines de sociétés privées, dominées par des étrangers, qui tiennent le haut du pavé. UN CARACTÈRE BIEN TREMPÉ

Malgré sa taille, le Katanga ne compte que 10 millions d’habitants, en partie concentrés dans les villes (voir « Repè-

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res ») de son Sud minier. Les groupes dominants y sont les Balubakat, les Arunds (Lundas et Tchokwes) et les Bembas. Plus quelques tribus, dont les Sangas. Si chaque communauté a son idiome, le swahili s’est imposé à tous. Outre le français – langue officielle de la RD Congo –, l’anglais a fait une percée remarquée, liée à la présence de sociétés anglo-saxonnes et asiatiques


60 LE PLUS KATANGA

KASAÏ OCCIDENTAL

et à la proximité de pays anglophones. Les mines katangaises attirent aussi des étrangers et des ressortissants d’autres régions congolaises (lire p. 78), en particulier des deux Kasaïs. Une présence que les politiciens locaux ne se privent pas de fustiger, surtout en période de crise économique. Dans les années 1990, des milliers de Kasaïens ont ainsi été chassés du Katanga. Un terrible épisode, qui a laissé des traces. Kinshasa a longtemps été accusé de profiter trop largement des fruits de la riche province. L’arrivée, en mai 1997, à la tête du pays du Katangais Laurent-Désiré Kabila, remplacé en janvier 2001 par son fils Joseph, a changé la donne. Cependant, alors que l’économie provinciale semble repartir, des tensions existent entre Katangais du Nord (Balubakat), dont Kabila père reste la référence et qui se sentent délaissés, et Katangais du Sud minier.

KASAÏ ORIENTAL

Kananga

Kabalo

Manono

HAUT-LOMAMI

LUALABA Sandoa Dilolo

Kamina

Kalemie

Nyunzu

Kaniama

Kapanga

Lac Tanganyika

Kongolo

TANGANYIKA

Mitwaba

Pweto Lac Moero

Bukama HAUT-KATANGA

ZAMBIE

Lubudi KOLWESI

Kambove

Mutshatsha Kolwezi

TANZANIE

Likasi

Kasenga

Lubumbashi

Kipushi

ANGOLA

Kasumbalesa

180 km

Sakania

Voie ferrée

DES ÉCHANGES TOURNÉS VERS LE SUD ET L’EST

RN1

Porte d’entrée en Afrique australe, la province semble tourner le dos à l’Atlantique et à Kinshasa. Il n’en fut pas toujours ainsi. Quand la ligne angolaise du chemin de fer de Benguela (CFB) fonctionnait encore et que les infrastructures de transport – ferroviaires, fluviales et routières – de la RD Congo étaient en bon état, c’est par la façade atlantique, via les ports de Lobito (Angola) et Matadi (RD Congo), que transitaient nombre de produits importés destinés au Katanga

e t q u ’é t a it évacué l’essentiel des produits miniers. À partir des années 1980, avec le délabrement des transports nationaux et l’arrêt du CFB, les flux commerciaux et économiques se sont déplacés vers l’Afrique australe et orientale et l’océan Indien. Un basculement favorisé par le bon réseau routier de ces régions ainsi que par l’interconnexion du réseau sud de la Société

nationale des chemins de fer du Congo avec ceux des pays voisins. Et conforté par la place grandissante prise par l’Asie dans le commerce avec la RD Congo. La réouverture du CFB pourrait réactiver l’axe angolais. Le géant sud-africain en prendra-t-il ombrage? Car, de tous les pays du continent, c’est l’Afrique du Sud qui domine dans les échanges extérieurs du Katanga et qui investit le plus dans la province.

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Merci de continuer à nous porter vers l’excellence. Votre équipe TMB


LE PLUS 61 Une importance qui s’explique par sa puissance économique et les liens politiques qu’elle entretient avec la RD Congo, ainsi que par la présence d’un grand nombre de Congolais en Afrique du Sud.

Fort de ses mines, le Katanga n’en reste pas moins une province à l’économie fragile. Malgré ses potentialités, le secteur rural – agriculture, élevage et pêche – y tient une place marginale, et l’expertise minière n’a guère été valori-

sée à l’extérieur. L’actuel gouvernement provincial s’emploie à diversifier l’économie et à mettre sur pied un réseau d’instituts supérieurs chargés de former des ingénieurs et des spécialistes miniers. Il est temps. ■

Ils ont fait le Katanga... et le Congo

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Le Lushois Frédéric Kibassa Maliba (1939-2006), entré au gouvernement en tant que ministre de la Jeunesse et des Sports (1967-1968, puis 1988), fut l’un des treize parlementaires (dont Étienne Tshisekedi) qui défièrent Mobutu en 1982, au temps du parti unique, en fondant l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Il a également détenu le portefeuille des Mines sous Laurent-Désiré Kabila (1998-1999). Enfin, parmi les personnalités politiques katangaises d’aujourd’hui, citons Vincent de Paul Lunda Bululu. Professeur de droit, Premier ministre pendant la transition (1990-1991), il s’est présenté à la présidentielle de 2006 pour le Rassemblement des forces sociales et fédéralistes (RSF, opposition) et, à 68 ans, est actuellement sénateur. SONS ET LUMIÈRES

Homme d’affaires – notamment dans l’aviation et les hydrocarbures – et homme politique – il fut deux fois ministre de Laurent-Désiré Kabila et sera ministre d’État sans portefeuille de Joseph Kabila, avant de prendre ses distances –, Pierre-Victor Mpoyo, dit Mpoy, 76 ans, est avant tout un artiste peintre de renommée internationale, exposé dans les plus grands musées et qui a fréquenté les maîtres des arts et des lettres (Picasso, Dali, Chagall, Cocteau, Malraux…). Parmi ses confrères qui ont fait rayonner l’école de Lubumbashi, citons Pili-Pili Mulongoy (1914-2007) et Mwenze Kibwanga (1925-1999). Côté musique, le chanteur et guitariste acoustique Jean Bosco Mwenda (1930-1990) a séduit l’Afrique anglophone d’expression swahili, où ses titres racontant la vie quotidienne étaient aussi populaires que dans le Katanga. Ils n’ont cependant pas conquis les Kinois, parce qu’il ne chantait qu’en swahili. Ses participations au Newport Folk Festival le firent connaître des musiciens de jazz en Europe et aux États-Unis. Enfin, le Katanga est également le berceau d’hommes de médias connus, à l’instar de Kibambi Shintwa (62 ans), directeur de la chaîne de télévision Numerica TV, à Kinshasa, de Kabulo Mwana Kabulo (56 ans), journaliste sportif à la télévision nationale et correspondant de Radio France Internationale (RFI), et de son confrère Kasongo Mwema Yamba TSHITENGE LUBABU M.K. Yamba (60 ans), journaliste à RFI. ■

MIROIR

RUE DES ARCHIVES/AGIP

SI UN KATANGAIS A MARQUÉ l’histoire contemporaine de la province et du pays, c’est Moïse Kapenda Tshombé. Né en 1919 à Musumba, cet homme d’affaires entre en politique et prend la tête de la Convention nationale du Katanga (Conakat), un parti fédéraliste fondé en 1958. Après l’indépendance du pays, opposé au Premier ministre Patrice Lumumba, Tshombé proclame la sécession de la province le 11 juillet 1960 et, le mois suivant, est élu président de l’État du Katanga. C’est à lui que Lumumba est livré le 17 janvier 1961 ; il assiste à son exécution. Lorsque les Casques bleus des Nations unies écrasent la sécession, en 1963, Tshombé s’exile en Espagne. Rentré au Congo en 1964 pour devenir Premier ministre du gouvernement de coalition, il est révoqué un an plus tard par le président Joseph Kasa-Vubu alors qu’il vient de remporter les législatives. Nouvel exil. Le 30 juin 1967, Tshombé reprend le chemin du pays lorsque son avion est détourné vers Alger, où il est incarcéré et où il meurt le 30 juin 1969. Ci-dessus: Moïse Tshombé, alors Premier ministre, en Autre personnalité mar1965. Ci-contre : Vincent de quante, Jason Sendwe, Paul Lunda Bululu en 1980; leader du parti Balubakat. il est aujourd’hui sénateur. Allié de Lumumba, il s’opposa fermement à la sécession en lançant une rébellion. Élu président de la province du Nord-Katanga en 1963, il fut assassiné en 1964. Godefroid Munongo (1925-1992), numéro deux de la Conakat et bras droit de Tshombé, fut son ministre de l’Intérieur durant la sécession du Katanga puis, en 1964, au sein du gouvernement central. Ministre des Affaires étrangères du Katanga sécessionniste, Évariste Kimba fut quant à lui nommé Premier ministre par Joseph Kasa-Vubu en octobre 1965, après le limogeage de Tshombé. Il ne resta en fonction qu’un mois, l’armée ayant pris le pouvoir. Kimba est resté dans la mémoire des Congolais pour avoir été le premier homme politique pendu sur la place publique (avec deux de ses compagnons), sous Mobutu, pour tentative de coup d’État. Neveu de Tshombé, Nguz a Karl-i-Bond (1938-2003) fut plusieurs fois ministre des Affaires étrangères (1972, 19761977, 1979-1980) et Premier ministre (1980-1981 et 19911992) de Mobutu Sese Seko. Lors de l’ouverture démocratique d’avril 1990, il avait créé un parti d’opposition, l’Union des fédéralistes et républicains indépendants (Uferi), avant de se rapprocher à nouveau du chef de l’État.


MCK TRUCKS SPRL Portrait d’un géant

Mine a ciel ouvert de Kinsevere ou la Société MCK s’occupe de l’excavation.

Créée en 2001, MCK TRUCKS Sprl est à ce jour l’une de grande entreprise de sous-traitance minière en République Démocratique du Congo, dont le siège social est à Lubumbashi dans la riche province du Katanga.

Mr Paul Kaponda, Directeur Financier.

Mr Moise katumbi. Mr Guy Kiluba, Directeur des Mines.

Ses fondateurs : Messieurs MOISE KATUMBI CHAPWE et KENNETH MACLEOD Moïse Katumbi s’est retiré de l’Entreprise au regard de ses obligations politiques, car il est l’actuel gouverneur élu du KATANGA.

Une pelle en plein travail d’excavation.

Mr Kenneth Macleod.

Elle s’occupe essentiellement de la vente de services dans le domaine minier, d’excavations principalement (forage, minage, chargement,...) avec une moyenne annuelle de 15 million de m3, grâce à une gamme d’équipements classés parmi les plus importants du pays, des pelles (allant jusqu’à 19 Tonnes), des camions benne de 25 à 100 tonnes, des sondeuses appuyées par des engins de terrassement comprenant des niveleuses, des bulldozers, des chargeuses, des tractopelles et des arroseuses

Benne B40D transportant les minerais de la mine vers le stock.

Un investissement évalué à plusieurs millions de dollars américains. MCK TRUCKS SPRL, s’occupe également de travaux de génie civil, tels que la construction de bassins de rejet d’usines, la construction et la réparation des plates-formes, l’entretien de routes d’intérêt général et de desserte agricole.

Une sondeuse Pantera 1500.

Au registre de ses plus grands projets peuvent être signalés l’OPEN CAST MINE, KAMOTO mine souterraine, KAKONTWE (CCC) aggregate and lime quarry, Kanfundwe mine à ciel ouvert, Kamoya pour le compte de la Gécamines, de 2000 à 2008. La Mine de diamant de Mbuji mayi pour le compte de ORYX

Une chargeuse alimentant le crusher.

Vue d’un bassin de décantation réalise par MCK Trucks au site de Ruashi Mining.

Ambitieuse, la société emploie plus d’un millier de travailleurs ,aussi bien locaux, qu’expatriés.

Engin en pleine maintenance.

Mining Company Katanga

TRUCKS

SPRL

Mining Company Katanga

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Mining Company Katanga

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SPRL


Natural Ressources de 2003 à 2004. Dikulushi Copper Mine pour le compte de Anvil Mining company Limited de 2004 à 2007, Ruashi Mining pour le compte de Metorex, le projet Tenke Fungurume Mining pour Freeport McMoran, Chemaf pour le compte de Shalina Group entre autre.

Pelle en pleine action.

Actuellement, elle continue de s’occuper de la soustraitance minière et des travaux de génie civil dans plusieurs entreprises leader en RDC.

Personnel du service des finances.

Reconnue pour son implication sociale auprès des populations locales, elle a construit des hôpitaux, des écoles et foré des puits d’eau en milieux ruraux, avec également un soutien conséquent au domaine agriÉquipe de TP Mazembe sponsorisée cole local. Présente aussi dans par MCK Trucks. le domaine sportif, elle est notamment le sponsor du TP Mazembe, l’actuel vice champion du monde des clubs. Pleine de promesses, cette entreprise de droit congolais poursuit son ascension avec pour priorité le bien être et la sécurité de ses travailleurs selon les normes internationales admises dans le domaine, des relations privilégiées avec sa clientèle, et le respect de ses engagements envers les populations locales dans le respect de la protection de l’environnement.

La gente féminine de la direction.

Personnel de maintenance et des approvisionnements.

Euclid 100 tonnes allant au chargement des minerais.

En fait d’une appropriation locale du projet, la gestion courante de l’entreprise est actuellement assurée à 60 % par des cadres Congolais. Pelle en train de charger une benne Euclid 100 tonnes.

Mr Kenneth au milieu avec le personnel.

Propos recueillis par Nono N’Landu Personnel du service informatique.

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Eben, Directeur de la chaine de commande.

Dennis Collins, Directeur de la maintenance.


MURIEL DEVEY POUR J.A.

64 LE PLUS

REPORTAGE

Kolwezi en pleine croissance Cʼest dans lʼarc cuprifère, dont le district est le centre nerveux, que se concentrent les plus grands gisements. Voyage au cœur dʼune ville qui grandit au milieu des concessions.

D

epuis l’avion – un petit porteur d’une vingtaine de places –, la vue est grandiose. À l’est, la majestueuse rivière Lualaba – qui prendra le nom de Congo à Kisangani – ondule à travers champs, tel un gros serpent repu. Et nous arrivons à Kolwezi. Sur le trajet depuis l’aéroport, hormis quelques camions et bus jaunes « made in USA » qui sillonnent une route tout juste réhabilitée, rien n’indique que l’on se trouve dans le plus grand centre minier de la RD Congo. Pas plus qu’en centre-ville, dans la coquette commune de Manika, comme

endormie à l’ombre de ses arbres touffus. Seules les villas des anciens cadres de la Gécamines (lire pp. 68-69) rappellent le temps glorieux de l’ex-géant minier. Il faut pousser jusqu’à l’ouest du centre-ville et franchir la barrière d’accès de la concession que la Gécamines partage avec ses partenaires pour réaliser que l’on est bien dans l’antre des « mangeurs de cuivre », comme le rappelle une pancarte rouillée. Devant nous, un paysage lunaire, parsemé de touffes de verdure. Sur plusieurs kilomètres, ce ne sont que mines souterrai-

nes et carrières à ciel ouvert – vastes gradins circulaires de pierre et de terre rouge, parfois envahis d’eaux bleutées –, remblais grisâtres, amas poudreux olivâtres, pylônes, usines… Le tout baigné de nuages de poussière et de fumée. Au lointain, on distingue des creuseurs, souvent très jeunes, et quelques femmes et négociants, « petits poucets » perdus dans l’immensité des lieux. UNE CITÉ INTERNATIONALE

L’empire minier de Kolwezi s’étend bien au-delà de cette concession. Il couvre l’ensemble du district (formé des communes urbaines de Manika et de Dilala, et des territoires ruraux de Lubudi et de Mutshatsha). L’un des plus grands projets y est mené par Kamoto Copper Company (KCC), un partenariat

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LE PLUS 65 L’ELDORADO SE TROUVE AU SUD

Kasaï Occidental

Kasaï Oriental

BURUNDI TANZANIE

Sud-Kivu Maniema

Lac Tanganyika

Katanga nga ng ZAMBIE

Kolwezi wezi

Likasi Lik Lubumb Lub Lubumbashi

ANGOLA

Cuivre et cobalt Cuivre Étain

Manganèse èse Charbon Uranium

CUIVRE

10 %

RESPONSABILITÉS SOCIALES

entre Katanga Mining, filiale du suisse Glencore, et la Gécamines. Sa fusion avec DRC Copper and Cobalt Project a permis à KCC de mettre la main sur les importants gisements de Kamoto et de Kov. Glencore est aussi actionnaire de Mutanda Mining, via sa filiale Samref, qui a confié l’exploitation de sa carrière de Kisanfu au libanais Bazano. Glencore gère quant à lui l’usine, dont la production de 20 000 tonnes de cathodes doit tripler d’ici à 2012, grâce à deux nouvelles unités d’électrolyse. L’autre grande concession est confiée à Tenke Fungurume Mining, contrôlé par l’américain Freeport-McMoRan Copper & Gold, aux côtés de son compatriote Lundin et de la Gécamines: un royaume d’une centaine de collines, à l’est de Kolwezi, formant les mines de Kwatebala et de Tenke-Sefu-Fwaulu, auxquelles s’ajoutent deux usines de transformation du cuivre et du cobalt. Parmi les poids lourds figure aussi Metalkol, dont l’actionnaire majoritaire, le kazakh Eurasian Natural

SOURCE : MINISTÈRE DES MINES, 2010 - OCDE

des réserves mondiales

Espace urbain et zone minière se côtoient.

399935 t produites en 2010 (contre 279 000 t en 2007) et une prévision de 1,8 million de tonnes en 2015 COBALT

34 %

des réserves mondiales

39 327 t produites en 2010 (41 000 t en 2007) et une prévision de 137 800 t en 2015

Resources Corp. (ENRC), a récupéré les riches rejets de Kingamyambo, autrefois attribués à Kingamyambo Musonoi Tailings, une filiale du canadien First Quantum Minerals – dont le litige avec l’État congolais sur ce dossier est actuellement soumis à un arbitrage international. ENRC a également pris le contrôle de Boss Mining, qui exploite la mine de Mukondo, à Kakanda, et dispose de deux concentrateurs et d’une usine hydrométallurgique. Des projets de plus pet ite enverg ure, en phase d’exploration, sont menés par la Société d’exploitation des gisements de Kalukundi, détenue par l’australien Africo Resources, ainsi que par la Société minière de Deziwa et Ecaille C, une filiale de Platmin Congo. Les Indiens sont présents également, via Kisanfu Mining, une coentreprise associant Aurum, la Société minière du Katanga et Mineral Mining Resources.

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Enfin, parmi les compagnies chinoises opérant dans la province, la plus célèbre est la Sino-Congolaise des mines (Sicomines), un partenariat entre China Railway, Sino Hydro et la Gécamines. La Sicomines a hérité des gisements de Dikuluwe, Mashamba, Jonction D et Cuvette Dima, mais leur exploration est retardée, la carrière étant noyée. Les Chinois se rattrapent via la Compagnie minière de Musonoï (Western Mining) et la Minière de Kalumbwe Myunga (China Overseas Engineering Corp.), en phase d’exploration. Quant à la Congo Dong Fang International Mining, elle pourrait reprendre l’exploration, actuellement à l’arrêt, des rejets de la mine de Mutoshi, détenue par la Société minière de Kolwezi (joint-venture entre Anvil Mining et la Gécamines). Forage, prospection, construction de mines, production, réhabilitation et réalisation de concentrateurs et d’usines métallurgiques… Les sites sont de véritables ruches. Certains sont aussi pourvus de logements pour les ouvriers recrutés aux quatre coins du monde. Les travailleurs congolais, eux, logent en ville, notamment dans les cités minières – Musonoï, Kapata et Luilu – construites par la Gécamines. Pou r nou r r i r et s oig ne r leu r s employés et s’acquitter de leurs responsabilités sociales vis-à-vis des villages situés dans leurs périmètres, les compagnies investissent dans l’agriculture (lire p. 74), forent des puits, construisent des hôpitaux, des écoles… Des réalisations auxquelles elles consacrent un pourcentage des droits superficiaires et de la redevance minière ; la part qui leur est demandée, selon elles.

Sur plusieurs kilomètres, ce ne sont que mines souterraines et carrières à ciel ouvert. Pourtant, certains exigent la mise en place d’un organe tripartite – pouvoirs publics (État et province), société civile et représentants des miniers – chargé de contrôler la mise en œuvre effective, par les entreprises, de leurs responsabilités sociales. Mais ce sont surtout l’approvisionnement énergétique et les transports qui préoccupent les miniers. Bien qu’assu-


66 LE PLUS KATANGA rée par les centrales hydroélectriques de Nseke et Nzilo, par la connexion aux lignes à haute tension de la centrale d’Inga (dans la province du BasCongo) et par des groupes électrogènes, l’offre en énergie est très insuffisante. Tous attendent donc l’achèvement de la centrale de Busenga, sur la Lualaba, à 50 km de Kolwezi. Autre chantier suivi de près : la reconstruction du chemin de fer angolais de Benguela (CFB), détruit par la

avec ses aléas, en particulier sur le tronçon Kolwezi-Likasi, en cours – enfin – de bitumage. Implantation d’agences bancaires, de magasins, d’hôtels et de restaurants, amélioration de la voirie (en partie financée par les miniers)… Avec la reprise, Kolwezi s’équipe progressivement.

guerre civile dans ce pays (1975-2002). L’État angolais, qui a confié les travaux à des entreprises chinoises, annonce que ce réseau de 1 350 km devrait être opérationnel en 2012. Il permettra d’évacuer dans de meilleures conditions les minerais katangais depuis Dilolo, le tout proche poste frontalier, et d’acheminer les équipements industriels lourds depuis le port angolais de Lobito, sur la côte atlantique. D’ici là, le transport s’effectue surtout par la route,

LE REVERS DE LA MÉDAILLE

De quoi réjouir Mme la maire, ex-cadre de la Gécamines, qui fut bourgmestre de la populaire commune de Dilala. Mais la médaille a son revers. L’afflux de migrants venus d’autres districts du Katanga, des provinces voisines (Kasaï et Maniema), voire des pays limitrophes, a fait exploser la population de

MURIEL DEVEY POUR J.A.

La concession de la Gécamines et de ses partenaires à Kolwezi.

MAJORS ET JUNIORS S’ACTIVENT PLUS DE 1 200 PERMIS DE RECHERCHE, quelque 130 permis d’exploitation… La province est un eldorado du cuivre. Et c’est dans l’arc cuprifère, entre Kolwezi et Sakania, que se trouvent les gisements les plus juteux. Donc les grandes sociétés, particulièrement les jointventures impliquant la Gécamines. Dans la zone de Likasi, les poids lourds sont la Société d’exploitation de Kipoi (filiale de l’australien Tiger Resources, qui explore aussi le gisement de Lupoto), Ruashi Mining (contrôlé par le sud-africain Metorex), la Compagnie minière du Sud-Katanga (groupe Forrest) et le libanais Bazano. Les Chinois sont notamment présents via la Compagnie minière de Luisha (China Overseas Engineering Corp. et China Railway Engineering Corp. – ou Crec) et l’important projet Shituru Mining Corp. (East China Capital Holding). Dans les zones de Lubumbashi et de Sakania, les grands projets sont menés par la Compagnie minière du Sud-Katanga (Forrest), qui dispose du nouveau concentrateur de Kipushi, la Société pour le traitement du terril de Lubumbashi (un partenariat entre Forrest et le finlandais OMG Kokkola Chemicals Holding BV), Ruashi Mining et Crec, qui traite la production de Comilu. Citons encore le projet de Chemaf (groupe indien Shalina Resources), celui de la Société minière du Katanga (coentreprise entre des Indiens et la Gécamines) et, l’un des plus grands projets de la zone, Anvil Mining Kulu Concentrate Kinsevere (AMSK), contrôlé par l’australien Anvil Mining. Tout au Sud, l’exploration mobilise l’indien Aurum en partenariat avec Tiger Resources et la Sodifor, une coentreprise entre le sudcoréen Fortune et la Sodimico, qui a repris les titres miniers de FronM.D. tier et de Comisa (filiales de First Quantum). ■

La centrale électrique de Busenga, sur la rivière Lualaba, est très attendue. Kolwezi. « Nous avons 1,5 ou 2 millions d’habitants, je ne sais pas… Ce que je constate, c’est que la ville s’étend de plus en plus vers le fleuve et que les familles s’entassent dans une même pièce », explique Charlotte Cime, « Maman » pour ses administrés. Une urbanisation accélérée qui pose des problèmes, aussi bien en ce qui concerne l’aménagement et les services urbains (logement, assainissement, eau, électricité…) que le civisme, la sécurité ou même l’alimentation. « Il faut remettre nos populations aux champs », martèle l’élue, inquiète du déficit de produits agricoles. Au premier rang de ses préoccupations figurent également la santé – avec des projets de nouveaux hôpitaux, centres de santé et cliniques mobiles – et l’éducation. La scolarisation primaire, notamment, est en forte baisse depuis la fermeture des écoles de la Gécamines. « Nous devons rouvrir des écoles publiques, réhabiliter notre université et nos instituts supérieurs, les doter en matériel, et construire des logements d’étudiants pour que Kolwezi redevienne le carrefour universitaire qu’il était autrefois », martèle Mme la maire, qui imagine le mieux pour sa ville. Le cœur cuprifère de la RD Congo le vaut bien. ■ MURIEL DEVEY

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68 LE PLUS KATANGA ENTREPRISE

La Gécamines en sursis ? Contrats renégociés, réorganisation en profondeur, changement de statut et de direction... En 2011, lʼex-société publique prend un nouveau départ, mais est loin dʼavoir tous les atouts en main.

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in décembre 2010, la Générale des carrières et des mines (Gécamines) est devenue une société commerciale. Une mesure qui s’inscrit dans le cadre de la réforme des entreprises publiques du pays. Mission de ses nouveaux dirigeants, Albert Yuma Mulimbi, président du conseil d’administration, et Kalej Nkand, administrateur délégué général (lire encadré) : permettre à la Gécamines de redevenir un opérateur minier à part entière, de nouveau capable de déployer une activité propre. Un vrai défi, car l’ex-entreprise publique, née en 1967 sur les cendres de l’Union minière du Haut-Katanga (UMHK), s’est effondrée sous l’effet cumulé d’une mauvaise gestion, des troubles sociopolitiques des années 1990, des affrontements de 1998-2003 et du gel des financements internationaux qui s’est ensuivi. Trop exsangue pour payer les droits superficiaires (des taxes instituées par le code minier de 2002) comme pour relancer l’outil de production ou l’exploration, la Gécamines a dû « libérer » nombre de ses permis et les concéder à des sociétés privées, sous forme de joint-ventures. Une option facilitée par l’ouverture du secteur à la concurrence. Au total, trente-cinq contrats ont été signés, parmi

Le groupe a dû former des joint-ventures, comme la Société pour le traitement du terril de Lubumbashi.

lesquels une trentaine ont été renégociés. Aujourd’hui, sept d’entre eux sont en production. L’ex-géant minier ne possède désormais plus qu’une poignée de gisements en propre, dont une partie sans réserves certifiées. S’y ajoutent quelques unités industrielles (concentrateur de Kambove, usine de zinc et four Felco à Kolwezi, usines pyrométallurgiques de Lubumbashi et de Shituru, fonderie de Panda à Likasi, usine d’électrolyse de Luilu…) où sont traités les minerais provenant des remblais de Mukine et des rares mines exploitées par la Gécamines (dont celle de Kilamusembu), ceux de certains joint-ventures, et ceux livrés par des coopératives de creuseurs en échange de leur accès aux mines. Soit une production propre de 20 000 tonnes de cuivre et de cobalt par an. Très loin des 450 000 t de

UN TANDEM FINANCIER AUX COMMANDES NOMMÉS LE 20 NOVEMBRE 2010 PAR LE CHEF DE L’ÉTAT, Joseph Kabila, les nouveaux dirigeants de la Gécamines sont tous deux katangais et proches du gouverneur de la Banque centrale du Congo (BCC), Jean-Claude Masangu Mulongo. Le nouveau président du conseil d’administration, Albert Yuma Mulimbi, également proche du président, est une figure bien connue du milieu des affaires. Depuis 2005, il préside la puissante Fédération des entreprises du Congo (FEC). À 55 ans, cet homme à poigne, originaire du nord du Katanga, ancien étudiant de

l’Université catholique de Louvain (en Belgique), cumule les casquettes. Outre les fonctions de directeur général adjoint d’Utexafrica (filiale de la société financière et de gestion Texaf), qu’il a rejoint en 1983, il est administrateur de plusieurs sociétés congolaises et de diverses institutions – dont la Chambre de commerce belgo-congolaise –, vice-président pour l’Afrique centrale de la Conférence permanente des chambres consulaires africaines et francophones et, depuis 2003, administrateur et président du comité d’audit de la BCC.

Né à Likasi le 19 novembre 1960, économiste de formation (option gestion financière) et diplômé de l’Université de Kinshasa, Kalej Nkand a quant à lui fait l’essentiel de sa carrière à la BCC. D’abord au département études, ensuite en tant que directeur de la banque au Katanga (2001-2009) et, enfin, comme directeur de la trésorerie. Avec un interlude de deux ans au gouvernorat du Katanga, où il officia comme conseiller économique d’Augustin Katumba Mwanke, qui fut gouverneur de la province de 1998 à 2001. ■ M.D.

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THIERRY MICHEL

1986, l’année record. Le niveau de production espéré par la nouvelle Gécamines est de 35 000 t de cuivre et de cobalt en 2011 et de 75 000 t en 2015. L’URGENCE : CERTIFIER LES RÉSERVES

La stratégie de l’entreprise tient en deux points. Il s’agit tout d’abord de relancer la prospection et la recherche afin de confirmer les réserves de ses gisements. Il lui faut ensuite investir dans la réhabilitation et la modernisation des usines existantes, ainsi que dans la construction d’une usine d’extraction par solvant – enveloppe nécessaire pour la seule année 2011 : 150 millions de dollars (110 millions d’euros). Mais comment lever des fonds alors que la dette de la Gécamines s’élève à 1,6 milliard de dollars et que son activité de production ne rapporte que de 50 à 100 millions de dollars par an ? La solution ne se trouve pas du côté des partenariats : les pas-de-porte dus par les sociétés contractantes n’ont pas été entièrement réglés et les royalties ne sont pas énormes. Quant aux dividendes que la Gécamines peut espérer tirer de ces accords, il va falloir attendre, beaucoup de projets étant en phase d’investissement. Impossible aussi, pour le moment, de faire entrer des investisseurs privés dans le capital de la nouvelle entité – détenue à 100 % par l’État –, faute de « biscuits » à leur proposer. Tout est suspendu à la certification des réserves. Outre l’établissement de règles de gestion rigoureuses afin de dégager plus de bénéfices, la nouvelle direction mise sur l’allègement de la dette de la Gécamines : « On doit se défaire d’un passif que l’entreprise ne pourrait pas assumer », explique Kalej Nkand. Autre cible : la réduction de la masse salariale, avec la mise en retraite ou en préretraite de 3 500 à 4 000 employés, soit près de la moitié de l’effectif actuel, pour un coût d’environ 20 millions de dollars. ■ MURIEL DEVEY J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


CHEMAF

CHEMAF : L’expertise Chemaf SPRL est un leader dans la production du Cuivre et du Cobalt en République démocratique du Congo (RDC) ; Chemaf est une société de droit congolais, enregistrée au nouveau registre de commerce de Lubumbashi.

À partir de la mine de L’Étoile la production annuelle est de : ◆ Mine de l’étoile : 1,5 Million de tonnes de minerais a 3,1% Cu et 0,5% Co. ◆ Usines hydrométallurgie d’USOKE : 18 000 tonnes de Cathodes de Cuivre à 99,999% et 3 000 tonnes de Cobalt sous forme de Carbonate à 20 % Co.

Réserves Géologiques : En dehors de la mine de l’Étoile, actuellement en exploitation ayant près de 15 millions de tonnes de minerais contenant 540 000 tonnes de Cuivre et 100 000 tonnes de Cobalt, Chemaf détient près de 42 permis de recherche, principalement aux alentours de Kolwezi, à coté des grands gisements et mines de la ceinture du Cuivre.

Métallurgie de pointe pour des résultats exceptionnels :

◗ Concentration en Milieu dense Le traitement de minerais à CHEMAF SPRL commence par une concentration en milieu dense des toutvenant de la mine de L’Étoile - Le concentrateur a une capacité de traitement de 8 000 tonnes sèches par jour à 0,6 % Co et 3 % Cu, pour produire près

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de 700 tonnes sèches de concentré par jour à 10 % Cuivre et 1% Co ;

◗ Concassage, broyage et lixiviation Le concentré est ensuite acheminé vers l’atelier de concassage et broyage humide ; la pulpe issue du broyage est ensuite épaissie sur un filtre à bande horizontale qui en extrait l’eau ; le gâteau épaissie est ainsi repulpé avec le raffinat provenant de l’unité d’extraction par solvant Cuivre tandis que l’eau extraite est recyclée au broyeur ; la lixiviation du cuivre et du cobalt se fait par addition d’acide et du dioxyde de soufre ; la séparation solide liquide après lixiviation se fait sur une série des décanteurs laveurs, filtres presses et filtre à bande horizontale pour générer la liqueur mère qui est pompée au circuit d’extraction par solvant du Cuivre.

◗ Extraction par solvant du Cuivre Le cuivre est extrait de la liqueur mère par un solvant organique sélectif pour générer le raffinat qui est envoyé à l’étape de récupération du cobalt. La phase organique chargée en cuivre est régénérée après stripage puis recyclée en tête d’extraction tandis que la phase aqueuse chargée en cuivre est envoyée à l’électrolyse d’extraction.

◗ Électro- extraction du Cuivre La solution riche en cuivre débarrassée de la phase organique est ensuite pompée dans un tank de recirculation où elle circule dans des cellules d’électrolyse où le cuivre est déposé sous forme métallique. Les cathodes de cuivre obtenues ont une pureté de l’ordre de 99,999 % Cu.


◗ Extraction du Cobalt Avant extraction du cobalt la saignée de raffinat est soumise à une étape de purification dans laquelle le cuivre résiduel, le fer, l’aluminium et le manganèse sont éliminés ; le filtrat provenant de cette étape de purification est pompé dans des cuves placées en cascades pour précipiter le Cobalt sous forme de carbonate ; la pulpe après réaction est épaissie et filtrée sur des filtres presses pour obtenir un gâteau humide qui sera ensuite séché pour obtenir le carbonate de cobalt en poudre titrant 20-30 % Co. La précipitation bien que récupérant avec succès le cobalt , n’élimine pas pour autant toute les impuretés telles que le Manganèse, le magnésium, le Zinc, le Nickel... Aussi Chemaf a-t-il décidé d’utiliser en plus de la précipitation, l’extraction par solvant et l’électrolyse du cobalt pour produire du cobalt de haute pureté ; pour ce faire, un circuit d’extraction par solvant et électrolyse du cobalt d’une capacité de 6 600 tonnes par ans et en cours de construction et sa mise en service est prévue pour le deuxième semestre de l’année 2012.

Responsabilités sociale et développement communautaire

- Don de médicaments et soutien aux hôpitaux et centre de santé locaux, - Sponsoring des équipes sportives locales.

◗ Domaine de l’éducation - Attribution des bourses et soutien à l’université de Lubumbashi, - Formation continue pour les travailleurs.

Chemaf Emploie plus de 3 000 employés et contribue à leur bien être. ◗ Projets d’extension - Augmentation de la capacité de l’usine d’USOKE pour produire ≥30000 tonnes Cuivre cathodique et ≥ 3000 Cobalt sous forme de carbonate - 2012, - Construction d’une usine de flottation à la mine de l’Étoile pour le traitement des minerais mixte et sulfurés - 2013, - Construction d’une usine d’extraction par solvant et électrolyse cuivre à la mine de l’étoile - 2014, - Construction d’un concentrateur en milieu dense à Kapamba (Kolwezi) - 2014.

◗ Domaine de l’infrastructure - Construction des routes asphaltées dans la commune Kampemba, - Construction des ponts dans la ville de Kolwezi - Réhabilitation des locaux des écoles locales, - Contribution a l’amélioration de la desserte en eau et l’électricité au Katanga.

◗ Domaine de la santé et du sport - Soins médicaux gratuits pour les travailleurs et leurs familles,

Shiraz Virji Chairman de Chemaf-SPRL

Siège social : 144 Avenue USOKE, Quartier Industriel, Commune de Kampemba, Lubumbashi / Province du Katanga République Démocratique du Congo

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72 LE PLUS KATANGA ÉCONOMIE

Les affaires reprennent Avec la relance de lʼactivité minière, lʼembellie profite en premier lieu aux secteurs de la banque, des transports, du BTP et des services.

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un des premiers bénéficiaires de la reprise économique katangaise est le secteur bancaire. Outre les acteurs anciennement implantés – Banque commerciale du Congo (BCDC) et Banque internationale pour l’Afrique au Congo (Biac) – et la Trust

40 % de leurs recettes d’exportation dans les banques locales », indique Didier Tilman, directeur de Rawbank dans le Katanga. En matière de transports, la Société nationale des chemins de fer du Congo (SNCC), dont les voies et le matériel roulant sont très dégradés, n’est pas la mieux placée pour répondre aux besoins d u s e c t e u r m i n i e r, en pleine expansion. D’autant que « le trafic, qui est actuellement de 8 000 à 10 000 tonnes par mois, doit passer à 40 000 t par mois en 2015 », indique le directeur commercial de la SNCC, Ir Wassa Wa Gombele. Le lancement, en 2011, du projet de transport multimodal (PTM), qui prévoit, entre autres, le renouvellement de 200 km et la restauration de 490 km de voies, ainsi que l’achat de matériel roulant, devrait améliorer la situation… Mais pas avant trois ans – au moins. Le déclin du chemin de fer a profité aux transporteurs routiers. L’es-

Le déclin du chemin de fer a profité aux transporteurs routiers, surtout sud-africains. Merchant Bank, dont le siège est à Lubumbashi (créée en 2004, elle est déjà l’une des plus importantes banques congolaises), de nouveaux établissements ouvrent des agences dans le chef-lieu de province et les autres villes du bassin minier, dont la Banque internationale de crédit et Rawbank. L’objectif : engranger les dépôts des particuliers, des PME et, surtout, des grands comptes, notamment des miniers, « censés rapatrier

sentiel du trafic se fait en effet par la route, les exportations minières et les importations de marchandises diverses (dont les intrants pour l’industrie minière) mobilisant chaque mois 600 à 900 camions, qui font la jonction entre la province et les ports de Tanzanie, de Namibie et d’Afrique du Sud. Une manne, vue du péage rou-

VICTOR NGEZAYO Président du groupe Ngezayo

TOUT COMMENCE EN 1974, quand Victor Ngezayo crée Tour Hôtel, une chaîne d’ampleur nationale, avec des partenaires étrangers et congolais. De cette aventure naîtront quelques hôtels célèbres implantés dans l’est de la RD Congo – d’où la mère de Ngezayo est originaire – et à Kinshasa. En 1981, il rachète le Park Hôtel, l’ex-Léo-II, fondé en 1929, une institution du centre-ville de Lubumbashi. « Le projet était porteur, car à l’époque, l’économie était soutenue

par la Gécamines. » Tout baigne jusqu’en 1998, lorsqu’éclate la guerre. L’hôtel sera occupé jusqu’en 2003. Des déboires qui ne découragent pas Ngezayo. Pas plus que la baisse du taux d’occupation en 2008-2009, liée à l’effondrement du secteur minier. Depuis, l’activité est repartie. Après un changement de direction et l’arrivée d’un nouveau chef de cuisine, des investissements sont engagés pour rénover le Park Hôtel et accueillir une clientèle appelée à croître. ■ M.D.

MURIEL DEVEY POUR J.A.

LʼHÔTELLERIE COMME SECONDE NATURE

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LE PLUS 73 minérale, fourniture de matériels et d’intrants… De quoi favoriser la sous-traitance locale. Cependant, « beaucoup de miniers ont leur propre circuit d’approvisionnement et leurs sous-traitants habituels, qui sont à l’extérieur. Ils se débrouillent donc seuls », explique Félicien Tshi-

Les établissements financiers (ici à Lubumbashi) sont les premiers bénéficiaires de la reprise.

tier entre Kolwezi et le poste douanier de Kasumbalesa, mais une surcharge catastrophique pour les routes. Près de 80 % du marché du transport routier est occupé par des Tanzaniens et, surtout, des Sud-Africains. Les transporteurs congolais sont peu nombreux. À l’exception de la société Hakuna Matata, leurs moyens leur permettent rarement de s’acquitter du dépôt de garantie demandé pour lever les marchandises dans les ports de la sous-région. SOUS-TRAITANCE LOCALE

Le transport aérien a aussi pris de la hauteur. Luano, l’aéroport international de Lubumbashi, est desservi tant par des compagnies provinciales (qui assurent les liaisons avec l’hinterland minier), que nationales (dont, prochainement, Korongo Airlines, fruit d’un partenariat entre le belge Brussels Airlines et l’Entreprise générale Malta Forrest, berceau du groupe George Forrest International) et internationales (South African Airways, Ethiopian Airlines et Zambezi Airlines). Le dynamisme des

échanges bénéficie bien entendu aux divers transitaires internationaux, comme Gecotrans et SDV. To u j o u r s p o u r r é p o n d r e a u x besoins et à la demande des miniers, d’autres activités se développent : restauration collective, logistique, t r a v au x d e g é ol o g i e , d ’a n a l y s e

MURIEL DEVEY POUR J.A.

Le groupe Forrest compte investir dans l’hydroélectricité avec des Sud-Coréens. bangu Yamba, le président de la section katangaise de la Fédération des entreprises du Congo (FEC). Dynamisés par les besoins en usines, en bureaux et en logements des miniers, ainsi que par les programmes routiers ou les projets de réhabilitation et de constr uction de centrales hydroélectriques, les chantiers d’infrastructures et de BTP mobilisent des sociétés locales (Safricas, Forrest…) et étrangères (dont le sud-africain Group Five et la China Railway Engineering Corporation). Misant sur ces marchés porteurs, le groupe Forrest compte, d’une part, investir dans l’hydroélectricité en partenariat avec des Sud-Coréens et, d’autre part, relancer la production de ses deux cimenteries, Interlacs et Cimenkat, en s’associant avec l’allemand HeidelbergCement. ■ MURIEL DEVEY

MILLE ET UNE POSSIBILITÉS POUR L’ÉCOTOURISME PARCS NATIONAUX DE L’UPEMBA ET DES KUNDELUNGU, lacs naturels – dont le vaste Tanganyika –, chutes de la Lofoï, source du fleuve Congo, villes historiques rappelant l’aventure minière… Le Katanga a de quoi attirer les visiteurs de tout poil. En particulier la nouvelle génération des écotouristes. Toutefois, en dehors des villes minières, qui abritent l’essentiel des hôtels, et du parc animalier Muyambo Park, près de Lubumbashi, peu de sites ont été aménagés pour le moment. Par ailleurs, si le Sud minier est doté d’un assez bon réseau routier, le reste de la province n’est guère facile à parcourir. La rare clientèle touristique se compose pour l’heure de visiteurs locaux (expatriés et Congolais aisés) et de quelques hommes d’affaires étrangers de passage. Pour développer un marché qu’ils savent porteur, certains acteurs privés, comme la société congolaise Number One, investissent dans la reconstitution de réserves de faune et la création de lodges. D’autres préparent des projets d’aménagement de sites lacustres, propices aux sports nautiques et à la pêche sportive. ■ M.D.

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Plantation de riz près de Kashobwe, dans l’est du Katanga.

AGRICULTURE

Vers davantage dʼautonomie Largement sous-exploité, le potentiel de la province commence, enfin, à être mis en valeur. Objectif : sʼémanciper de la dépendance aux importations alimentaires.

M

algré leur potentiel agropastoral et piscicole, les campagnes katangaises ne nourrissent pas la province, contrainte d’importer une grande part de son alimentation. « La moitié de nos besoins en maïs, soit environ 500000 tonnes par an, est couverte par des importations venant de Zambie, du Malawi et d’Afrique du Sud », explique le ministre provincial de l’Agriculture, Barthélemy Mumba Gama. De même, une grande partie du poisson et de la viande consommés localement vient de Namibie et du Zimbabwe. Sans compter le blé, le riz, le sucre, l’huile de table et autres produits qui arrivent du Brésil, du Moyen-Orient, de Chine et de Thaïlande. CERCLE INFERNAL

Tant et si bien que le montant consacré aux importations alimentaires est trois fois plus élevé que celui provenant de la redevance minière. Un cercle infernal, particulièrement dangereux en période de crise alimentaire mondiale et dans le cadre d’une économie extravertie car, comme le précise Barthélemy Mumba Gama, « les exportations minières et les

importations alimentaires du Katanga sont, les unes et les autres, très dépendantes des cours mondiaux ». Cette situation trouve son origine dans les faibles rendements de l’agriculture villageoise, qui produit pour une consommation locale mais ne couvre pas les besoins urbains, et dans la prééminence du secteur minier, qui mobilise l’espace et les énergies. Pour inverser la tendance, le gouvernement provincial s’est donné trois priorités. La première est d’inciter les petits exploitants à se regrouper en coopératives et de leur four nir des intrants et des outils agricoles plus performants, notamment de petits tracteurs. Il s’agit également de sécuriser le foncier face aux sociétés minières, afin d’éviter que les cultivateurs soient délogés de leurs terres lorsque les concessions entrent en phase d’exploitation, et, enfin, d’encourager la création de grandes sociétés agricoles. Une stratégie qui commence à porter ses fruits puisque la plupart des entreprises minières ont aujourd’hui déve-

loppé des activités dans le secteur. « On compte déjà 36 fermes émergentes, note Mumba, dont les superficies varient entre 1000 et 3000 ha. » Ces fermes mécanisées s’ajoutent aux grands domaines et ranchs existants – Grelka (Forrest), Number One, Kifita et Mangombo à Kolwezi – ainsi qu’à des fermes plus petites, aménagées à l’époque coloniale dans la ceinture cuprifère. Reprises en majorité par des Congolais pratiquant une culture vivrière, ces der-

La plupart des sociétés minières ont investi dans la création de grandes fermes mécanisées. nières sont tournées vers le maraîchage et la production de semences, en plus d’un petit élevage. Malgré ces premiers efforts, beaucoup reste à faire. Notamment dans l’ouest et le nord de la province, terres de maïs et de manioc, où bien des villages sont encore enclavés et les techniques culturales rudimentaires. ■ MURIEL DEVEY

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GWENN DUBOURTHOUMIEU

74 LE PLUS


• De gauche à droite :

mine de Luiswishi exploitée par CMSK, sous-traitance minière par EGMF, pont à peser pour poids-lourds réalisé par EGMF, coulée de métal dans l’usine STL.

LE GROUPE FORREST INTERNATIONAL : UN PILIER INDUSTRIEL DE LA R.D.CONGO

Groupe Forrest International est un groupe de sociétés appartenant à George Arthur FORREST où dans lesquelles, il détient une participation. La naissance du Groupe Forrest International remonte à 1922, année au cours de laquelle Malta FORREST créa sa société dans la province du Katanga. En 1986, son fils, George Arthur FORREST, prit seul, la direction de l’entreprise familiale et lui donna un nouvel essor. Par la diversification de ses activités, le Groupe Forrest International s’est érigé en un opérateur économique incontournable de la République Démocratique du Congo. Il en est aujourd’hui un des principaux investisseurs et employeurs privés. Le Groupe est actif dans le secteur minier, l’industrie du ciment, les travaux publics et de génie civil, l’énergie renouvelable, le domaine aéronautique, le montage industriel, la santé et l’agroalimentaire. L’activité de ses sociétés procure un emploi à prés de 15 000 personnes. Parallèlement à ses activités économiques et compte tenu du contexte socio-économique de la République Démocratique du Congo, le Groupe Forrest International est particulièrement impliqué dans des projets sociaux. Notamment via la Fondation Rachel Forrest, qui elle, finance des initiatives dans les domaines de l’enseignement, la santé, le sport, l’agriculture ou encore l’environnement. Malgré les conflits qui ont ravagé le pays pendant près de huit années, le Groupe Forrest International est l’une des rares entreprises a n’avoir jamais suspendu ses activités, ni ne s’être détournée du pays et de la population congolaise. Elle a au contraire continué à y investir, entraînant dans son sillon des investisseurs occidentaux de premier plan. George Arthur FORREST, président du Groupe est Consul honoraire de France à Lubumbashi. En mars 2007, il a été nommé Président d’Honneur de la Chaire UNESCO pour l’Afrique centrale et les pays de la SADC. Fervent promoteur de la transparence dans le secteur minier, il est également, depuis octobre 2007, membre du Comité de Pilotage de l’Initiative pour la Transparence dans la gestion des Industries Extractives (ITIE) en République Démocratique du Congo. Il est finalement un ardent défenseur de l’art contemporain congolais, notamment via l’ASBL Dialogues qu’il finance entièrement. Celle-ci soutient les artistes congolais et promeut leurs œuvres par des expositions tant en République Démocratique du Congo qu’en Europe et dans le reste de l’Afrique.

Avenue USOKE 359 Lubumbashi Katanga – RDC Tél. : +243 99 534 00 00 / +243 81 558 10 10 Fax : +243 (0) 23 42 223 E-mail : hdh.gfi@forrestgroup.com

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DIFCOM/D.F. _ PHOTOS : D.R.

GROUPE FORREST INTERNATIONAL


WE ADD VALUE - ALLONS DE L’AVANT Ruashi Mining Sprl est situé dans les périphéries de Lubumbashi, dans la province du Katanga, qui est le berceau minéral de la République Démocratique du Congo. Ruashi Holding Ltd (Pty), est une filiale de Metorex Ltd enregistrée en Afrique du Sud, et a 75 % d’actions dans Ruashi Mining, une société à responsabilité limitée anonyme privée enregistrée en RDC. L’autre 25 % de Ruashi Mining est tenu par la Générale des Carrières et des Mines « Gécamines » une société d’État en RDC. Metorex Ltd est une société minière publique incorporée en République Sud-Africaine et coté en bourse sur le JSE. Jusqu’ici, des activités minières à la Mine de Ruashi ont été effectuées en deux phases. La construction de l’usine de concentrateur de la phase I de Ruashi (« Phase I ») qui a débuté en mai 2005, et a constitué une usine de concentrateur d’oxyde pour traiter les réserves des minerais d’oxyde laissées par Union Minière du Haut Katanga (UMHK) et Gécamines. Le premier concentré a été produit en septembre 2006.

Une usine Moderne

Production du Cuivre

Produits fins de cuivre 99 %

Le concentrateur de la phase I a été placé sous le soin et l`entretien en 2008 comme la production de l’usine hydrometallurgical de la phase II de Ruashi (« Phase II ») commençait . L’usine de la phase II a constitué un processus hydrometallurgical qui incorpore la lixiviation-décantation, l’extraction par solvants/l’électrolyse (« SX-EW ») et les opérations de précipitation de cobalt. La construction de l’usine de la phase II a débutée en mars 2007 et a été suivie de près du début des travaux dans la mine à ciel ouvert en octobre 2007. L’usine de la phase II a été construite et commissionnée étapes par étapes pour permettre la production « du cuivre de premier jet -sans extraction par solvent- » (cuivre direct d’Électrolyse-EW- à l’exclusion de SX). Le cuivre de premier jet a été produit la première fois en mars 2008 avec le circuit de cuivre complet (SX de incorporation) commissionné en octobre 2008. L’installation de cobalt a été mise en service en février 2009. Les sections de lixiviation et de décantation de l’usine ont atteint la capacité de conception (1.44mtpa), tandis que les sections d`aval (SXEW) sont toujours en chemin pour attendre la capacité de conception, principalement à cause des teneurs d’alimentation obtenues qui étaient plus faible que celles prévues lors de la commission. Pendant que Ruashi réalise maintenant uniformément ses nombres visés de production, elle a également développé des politiques de sécurité de travail, de santé, de environnementales et de communauté de niveau international, et exécute de divers programmes sociaux, dont certains sont montrés sur cette page. C’est la devise de Ruashi d’ajouter la valeur à tous les parties prenantes affectées.

Approvisionnement en eau

Approvisionnement en électricité

Promotion de l’enseignement

Produits fins de cuivre 99 %


LE PLUS 77

Culture du risque Issus dʼautres secteurs, ils ont misé sur le développement des filières agroalimentaires. Itinéraires particuliers dʼexploitants et dʼindustriels.

LEILA KATEBE Directrice de KTB

LA FONCEUSE

MURIEL DEVEY POUR J.A.

Bien qu’issue d’une famille d’entrepreneurs, elle n’a rien d’une fille à papa. Diplômée en management de l’École pratique des hautes études commerciales de Bruxelles, Leila Katebe rentre au pays en 2004, bien décidée à faire cavalier seul. Après avoir créé KTB, une société spécialisée dans l’importation de produits alimentaires (poisson et viande congelés, produits secs), dont elle est directrice, elle investit dans les infrastructures (magasins, locaux industriels) et dans une flotte de camions pour ravitailler l’intérieur de la province. Elle poursuit la diversification de ses activités en créant une boulangerie industrielle et une pâtisserie à Lubumbashi, ainsi qu’une ferme à Likasi, qui produit du maïs. Ses projets: développer ses activités agricoles et se lancer dans la pêche industrielle. Pour approvisionner le Katanga, puis d’autres provinces de la RD Congo. « L’agriculture est notre richesse. On ne peut pas vivre que d’importations », martèle cette trentenaire au sourire éclatant. ■ MURIEL DEVEY

VICTOR MULONGO MUKALAY

Exploitant de la ferme Nsenga Lutanga

GENTLEMAN-FARMER

MURIEL DEVEY POUR J.A.

Il y a longtemps que cet ancien haut fonctionnaire a compris que « sans l’agriculture, la RD Congo ne [valait] pas un penny ». Or si son statut ne l’autorisait pas à exercer des activités lucratives, il ne lui interdisait pas celle-ci. En 1978, Victor Mulongo Mukalay rachète donc une ferme avicole, à 12 km de Lubumbashi, que son ancien propriétaire n’avait pas récupérée après la restitution des biens « zaïrianisés ». Il la rebaptise Nsenga Lutanga, du nom de son grand-père maternel, et en confie la gestion à son frère. Une fois à la retraite, il en reprend les rênes. Aujourd’hui, outre l’élevage de canards et de lapins, la ferme produit quelque 2 000 poulets de chair, 5 000 œufs et 100 porcs par mois, vendus sur les marchés de Lubumbashi, ainsi que du maïs (cultivé sur 100 ha), et des semences (maïs, soja et haricots). Mulongo a dû faire une croix sur le maraîchage, « en raison de la pollution de la rivière Kafubu par les industries minières ». ■ M.D. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

MUKALAY NSENGA SONKUE PDG de Mukalay et Frères

DU COMMERCE AU MOULIN

Après avoir été initié par son aîné, en 1986, Mukalay Nsenga Sonkue – fort du petit pécule que son frère lui accorde – se lance dans le commerce en créant Mukalay et Frères. En 2008, après un bref intermède minier, il opte pour l’agroalimentaire et lance une minoterie à Lubumbashi, qui produit du son pour bétail et, surtout, de la farine de maïs pour la fabrication du foufou, aliment de base des Katangais. « J’ai choisi cette activité car la population consacre l’essentiel de ses revenus à l’alimentation », explique-t-il. Alors que sa première machine lui permettait de traiter entre 5 et 10 tonnes de maïs par jour, la toute nouvelle, importée d’Afrique du Sud, a une capacité quotidienne de 55 t. Pour faire tourner son moulin, Mukalay doit importer chaque mois plus de 1500 t de maïs de Zambie, la production locale étant insuffisante, et garde en permanence un stock de sécurité de 4500 t. ■ M.D.

AGNÈS KILUME

Présidente et gérante de la ferme Safari International-SOD

MADAME SÈME Cette ex-cadre de la Gécamines, qui fêtera ses 60 ans cette année, a toujours eu une passion pour l’agriculture. En 1998, tout en assumant ses fonctions de directrice commerciale, elle achète une ferme dans la vallée de la Lufira. « Nous consacrons 218 ha à des cultures vivrières, notamment du maïs, et 8 ha de bas-fonds au maraîchage. On fait aussi un peu d’élevage et de pisciculture. » Agnès Kilume vend sa production à des sociétés minières. En 2009, constatant que la région manque de semences vivrières de qualité, elle se tourne vers cette production, qui est aujourd’hui devenue son activité principale. Elle y consacre une centaine d’hectares, dont 20 aux semences de maïs et 10 aux boutures de manioc. En 2010, elle a ajouté une nouvelle corde à son arc en se lançant dans la production de semences maraîchères (gombo), en partenariat avec le belge Somers Seeds, qui lui fournit les intrants, et le congolais MaPhartech, qui assure la commercialisation. ■ M.D. MURIEL DEVEY POUR J.A.

PORTRAITS


78 LE PLUS KATANGA SOCIÉTÉ

Melting-jackpot dʼexpatriés Ils étaient 30 000 en 1960, un peu plus de un millier aujourdʼhui. Si les ressortissants européens sont désormais peu nombreux dans la province, la plupart y ont de gros intérêts. Et dʼautres nationalités les rejoignent.

B

elges, Grecs, Italiens, Portugais… Ils étaient quelque 30 000 da ns la prov ince en 1960. Aujourd’hui, les ressor t issants européens, descendants d’ex-cadres de l’Union minière du Haut-Katanga et de la Gécamines ou de familles de colons, sont environ 1 300, concentrés à Lubumbashi, Likasi et Kolwezi. Parmi eux, quelques entrepreneurs de premier plan. En tête des Belges, le groupe George Forrest International, né de l’Entreprise générale Malta Forrest (EGMF, créée dans le Katanga en 1922), est de loin le plus diversifié (BTP, mines, agrobusiness, ciment, banque…). Il est suivi de Number One (élevage, abattoir, charcuterie et catering), de Demimpex Afrique (distribution automobile) et d’une kyrielle de PME. Les principaux représentants de la communauté italienne sont Edile Construction et Scorpion (transports), et les Grecs restent présents à travers

Psaromatis (supermarchés, commerce de gros, distribution de carburant, agroalimentaire), Evangelatos (ferme agricole et import-export) et Relacom (biscuiterie). Au fil des ans, d’autres nationalités sont venues occuper la place laissée vacante par les Européens qui ont fui les troubles qu’a connus la province après l’indépendance.

Les Anglo-Saxons ont amené dans leur sillage des Philippins, des Indonésiens, des Péruviens… Certaines ont consolidé leurs positions, en particulier les Indiens, principalement des Ismaéliens, qui, dès l’époque coloniale, ont prospéré dans l’import-export. Cette communauté, grossie depuis les années 1990 de nouveaux arrivants, hindous ou musulmans, occupe de solides positions dans le commerce de gros, la distribution (supermarchés Jambo Mart et Ma Maison), la banque, les mines et l’industrie légère. Arrivés dans les années 1970 et 1980, les Libanais ont quant à eux d’abord fait fortune dans le commerce de diamants avec le Kasaï. Aujourd’hui, ils sont actifs dans le commerce général (textile, électroménager…), l’industrie légère et le secteur minier. SUD-AFRICAINS, LA NOUVELLE GÉNÉRATION

Après les Ouest-Africains et les Zambiens, pour la plupart petits commerçants ou transporteurs installés depuis longtemps dans le Katanga, la nouvelle génération de ressortissants du continent est surtout constituée de Sud-Africains (mines, BTP, transports et agriculture). Le minier Amari Holdings, par exemple, projette la construction de Luano City, un grand complexe intégré sur 380 ha (logements, bureaux, écoles, commerces, loisirs), aux abords de l’aéroport international de la Luano, à Lubumbashi. Arrivés plus récemment, les Chinois opèrent quant à eux principalement dans les mines et le BTP, où règne la puissante China Railway Engineering Corporation, et font une percée dans la restauration. Côté nouveaux « expats » occidentaux, Américains, Australiens et Canadiens dominent. Ils ont amené dans leur sillage des Philippins, des Indonésiens et des Péruviens pour construire mines et usines. Les Britanniques font leur apparition avec le groupe Lonrho, chargé de la réhabilitation et de la gestion du Grand Karavia Hôtel, un cinqétoiles lushois qui a rouvert ses portes en juin 2010. Enfin, de nouvelles PME belges devraient s’implanter dans la province pour sceller des partenariats avec leurs homologues congolais dans la sous-traitance minière. ■ MURIEL DEVEY J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


KARIM SAHIB/AFP

LE PLUS 79

Quart de finale de la Coupe du monde des clubs, à Abou Dhabi, le 11 décembre 2009.

FOOTBALL

TP Mazembe, le dieu des stades Il vient de remporter pour la seconde fois consécutive la Super Coupe Orange : le Tout-Puissant est lʼidole de la province. Retour sur une légende désormais internationale.

I

l n’y a pas photo. Depuis une décennie, le Tout-Puissant Mazembe est (re)devenu la meilleure équipe congolaise, supplantant ses lointains concurrents de Kinshasa (l’AS V.Club et le DC Motema Pembe) et son frère ennemi katangais, le FC SaintÉloi Lupopo, fondé, comme lui, en 1939. Alors que les derbys entre les deux formations se concluaient jadis par des scores serrés, leurs récentes confrontations en championnat national montrent bien le gouffre qui les sépare désormais : lors de la phase qualificative, les « Corbeaux » ont humilié les « Lumpas » du FC Saint-Éloi, battus à plate couture à l’aller (5-0) comme au retour (1-7) – les scores en phase finale ont toutefois été plus serrés. Qui aurait cru que le FC SaintGeorges, créé par des missionnaires bénédictins, rebaptisé Saint-Paul FC en 1944, puis FC Englebert et, finalement, TP Mazembe, écrirait à nouveau les plus belles pages de l’histoire du football congolais ? Car le succès du Tout-Puissant dépasse désormais de loin les frontières provinciales et nationales. En témoigne le nombre de trophées récoltés ces dernières années. Dernier en date : celui marquant sa deuxième victoire consécutive en finale de la Super Coupe Orange, cette fois face au FUS Rabat,

le 29 janvier. Un sacre venu conforter la première place du club sur la scène africaine, après son succès en Ligue des champions de la CAF, en 2009 et 2010 – il a battu, le 13 novembre dernier, l’Espérance de Tunis. Cerise sur le gâteau : en décembre, le TP Mazembe est devenu la première équipe africaine à avoir joué – et perdu – une finale de Coupe du monde des clubs. C’était à Abou Dhabi, face à l’Inter de Milan. Finie, donc, la longue traversée du désert pour le club katangais, qui, de 1981 à sa victoire en 2009, était rentré bredouille de toutes ses campagnes africaines. De quoi désespérer ses supporteurs, qui évoquaient non sans nostalgie les succès passés de leur équipe préférée : en 1967 et en 1968, elle avait gagné la Ligue des champions et, en 1980, la Coupe d’Afrique des vainqueurs de coupes – compétition aujourd’hui disparue.

Doté d’un budget important dans le contexte africain (10 millions de dollars en 2010, soit 7,3 millions d’euros) et d’un centre de formation moderne, le club offre des salaires attrayants (jusqu’à 25 000 dollars par mois, hors primes) et attire des talents étrangers. Et alors qu’aucun autre club congolais ne dispose de ses propres installations sportives, le TP Mazembe aura bientôt son stade (18 000 places) dans la commune de Kamalondo, à Lubumbashi. Le club a abandonné ses oripeaux d’association pour se muer en une société à responsabilité limitée, ce qui

Le club a quitté ses oripeaux d’association pour se muer en véritable entreprise.

DES SALAIRES ATTRAYANTS

Actuellement entraîné par le Sénégalais Lamine Ndiaye, le TP Mazembe s’est profondément métamorphosé depuis que Moïse Katumbi Chapwe, homme d’affaires prospère et gouverneur du Katanga, en a pris les commandes, en 1998.

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a impliqué l’entrée dans le capital de Moïse Katumbi, de la société Mining Company Katanga et de plusieurs autres petits actionnaires. Une grande première en RD Congo, où la gestion du football reste plutôt archaïque. L’entreprise entend trouver de nouvelles sources de revenus, notamment en développant la vente de produits dérivés – un filon quasi inexploité dans le pays. ■ ARTHUR MALU-MALU


80 LE PLUS KATANGA LOISIRS

de nuit ouverte récemment, avenue de la Révolution, pour une clientèle « d’un certain âge ». De leur côté, les étudiants fréquentent volontiers le Twenty One, avenue Kamalondo, ou le Sodome et Gomorrhe, près de la gare, et vont refaire la RD Congo en prenant une bière au Village Bonta.

Les incontournables de « Lshi »

GWENN DUBOURTHOUMIEU

LA PALETTE EST LARGE

Chez Ntemba, une boîte de nuit pour fans de musique congolaise.

Expositions, restaurants, night-clubs... La géographie de lʼambiance lushoise a-t-elle changé avec le regain de lʼactivité minière et lʼarrivée de nouveaux expatriés ? Revue des lieux où il fait bon sortir.

À

Lubumbashi, « Lshi » pour le s i n it ié s, le gou r met, l’amateur de Simba (la bière locale) et celui qui aime se trémousser seront servis. Depuis quelques années, restaurants, boîtes de nuit, bars, hôtels et guest houses poussent comme des champignons. Il y en a pour toutes les bourses et pour tous les goûts. Au passage, la géographie des lieux de loisirs s’est modifiée, avec l’apparition de nouveaux quartiers in, dont celui du Lac-Kipopo, où, en mars 2010, a été inauguré un complexe commercial, à deux pas du Grand Karavia Hôtel, le cinq-étoiles local, entièrement rénové. Ces nouveaux points chauds n’ont cependant pas détrôné, en termes de réputation, les communes de Kamalondo, de Kenya – fief des orchestres de « karindula », la musique des mineurs –, de Ruashi et de Lubumbashi, qui ont conservé leur attractivité.

En centre-ville, le Patio du Park Hôtel, animé par un orchestre en début de soirée, reste un lieu incontournable où se rencontrent les politiques, les hommes d’affaires… et les couples d’amoureux. Les vieux Lushois aiment aussi se retrouver chez Mukubwa Denis, avenue de la Révolution, une autre institution de la ville, plus populaire, où ils ne se lassent pas d’écouter les tubes indémodables de leurs stars préférées : Franco, Tabu Ley, Mbilia Bel… Les amateurs de danse ont l’embarras du choix. Les fans de musique congolaise et plus généralement africaine se trémoussent chez Ntemba (« secret », en swahili), une chaîne créée par un Congolais installé en Afrique du Sud, ainsi qu’au Godfather, à l’O 2 (Oxygène) ou au Ngwasuma. Les mordus de musique occidentale préféreront le Blue Tooth, une boîte

En matière de restaurants, la palette est également large. Les plus chics, fréquentés par les « expats » et les hommes d’affaires de passage, sont la Bonne Table du Grand Karavia Hôtel, Planet Hollybum (qui est aussi un hôtel et une boîte), le Kalubwe Lodge (le restaurant du golf), Les Artistes ou encore le Safari Grill du Park Hôtel. Pour déguster un bon steak made in Katanga, il n’y a toutefois pas mieux que le Bush Camp, et pour manger sur le pouce rendez-vous à La Brioche, sorte de snack-bar en centre-ville. Lubumbashi regorge aussi de restosbars belges (Cercle wallon), grecs (Cercle hellénique), italiens (Casa degli Italiani), libanais (La Perle d’Orient), indiens (Royal India) et chinois, dont certains font office de clubs. La jeunesse dorée et gourmande raffole des glaces du Miga Gelato et des pâtisseries de Vanille & Chocolat, tandis que les aînés prennent un verre au Café du Lac en regardant le coucher du soleil sur le lac Kipopo. Musée, galerie d’art contemporain, Halle de l’Étoile (centre culturel français), espace Picha (consacré à l’image), golf, cercle hippique, piscines des hôtels, plage du lac et son terrain de volley, parc animalier (Muyambo Park)… Le chef-lieu du Katanga offre un large éventail aux férus d’expositions,

Fête, culture, sport et nature… Seuls les mordus du shopping seront déçus. de concerts et de théâtre, comme aux sportifs et aux amoureux de la nature. Moins aux mordus du shopping, car il est chiche en magasins. Quelques boutiques d’artisanat et de vêtements chics, trois ou quatre supermarchés. C’est tout. La construction, en projet, d’un grand complexe intégré près de l’aéroport pourrait changer la donne. ■ ARTHUR MALU-MALU

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ECOFINANCE |

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COMMUNIC ATION

Uniwax, qui fabrique des pagnes, a négocié une mise au chômage technique de deux semaines. Et après?

CÔTE DʼIVOIRE

Les entreprises en mode survie PRISES EN OTAGES PAR LA CRISE POLITIQUE, LES SOCIÉTÉS ACCUSENT DES BAISSES D’ACTIVITÉ ALLANT PARFOIS JUSQU ’À 70 %. L E SPECTRE DES DÉPÔTS DE BILAN ET DES LICENCIEMENTS MASSIFS SE RAPPROCHE DANGEREUSEMENT. PASCAL AIRAULT et BAUDELAIRE MIEU, à Abidjan

D

ans les couloirs de l’hôtel Tiama, à Abidjan, les employés tentent de préserver un semblant de sourire, mais l’inquiétude est palpable sur tous les visages. « Sur les dix étages que compte l’établissement, seul le sixième accueille des clients, et encore, toutes les chambres ne sont pas réservées, déplore un employé. Que va-t-on devenir si la crise persiste ? »

Le taux maximum d’occupation des hôtels de la métropole ne dépasse pas les 20 %. Hormis quelques diplomates, de rares hommes d’affaires et une poignée de journalistes, plus personne ne vient en Côte d’Ivoire. Des établissements comme l’Ibis Plateau ont fermé, et environ 80 % du personnel est au chômage technique. « Nous avons déjà poussé nos employés à prendre leurs congés, nous n’engageons plus de contractuels et

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nous n’avons pas renouvelé les contrats à durée déterminée, soupire Christian Filiol, directeur de l’hôtel Tiama. Le 15 février prochain, nous pourrions réduire le temps de travail, l’objectif étant de conserver tous les salariés. » À l’aéroport, le concessionnaire Aeria a enregistré une chute d’activité de 45 % et demande à ses fournisseurs de réduire leurs prestations de 30 %. La société de catering Servair Abidjan a, quant à elle, enregistré une chute d’activité de 70 % et mis ses salariés au chômage technique. Si le transport aérien, l’hôtellerie et la restauration sont les secteurs les plus touchés par la crise postélectorale, la majorité des branches d’activité est affectée. La moitié des 600 sociétés membres de la Chambre de commerce et d’industrie

NABIL ZORKOT POUR J.A.

MARCHÉS


84 ECOFINANCE entrepreneur. Dans un courfrançaise en Côte d’Ivoire rier adressé à leurs clients le enregistrent une baisse d’ac27 janvier (voir ci-contre), les tivité de 25 % à 50 %. Avec groupes maritimes Maersk pour conséquences directes Line et Hapag-Lloyd ont en un gel des investissements, effet prévenu qu’ils suspenune baisse des effectifs pour daient tous leurs embarqueabaisser les charges salariales ments vers la Côte d’Ivoire et une réduction des budgets p ou r se con for mer au x de communication. sanctions de l’Union euroLa note hebdomadaire de péenne, qui a mis à l’index la Confédération générale des les ports d’Abidjan et de San entreprises de Côte d’Ivoire Pedro. « Nous allons tra(CGECI), le patronat ivoirien, vailler avec des opérateurs égrène les mauvaises nouvelDES PORTS AU BORD DE L’ASPHYXIE Pour se conformer aux exigences de l’Union européenne, évoluant dans d’autres réles : « La baisse d’activité et du le danois Maersk Line a averti ses clients, dans un courrier gions du monde », rétorque chiffre d’affaires des entrepridaté du 27 janvier, qu’il interrompait immédiatement Marcel Gossio, directeur du ses est de 10 % à 30 % dans le l’acheminement de marchandises vers la Côte d’Ivoire. Port autonome d’Abidjan, le secteur industriel, elle peut atLa mesure s’applique aussi au départ des ports d’Abidjan regard tourné vers l’Asie. Au teindre 30 % dans les assuranet de San Pedro. Un courrier identique a été adressé à ses clients par l’allemand Hapag-Lloyd. port de pêche, les armateurs ces et 70 % dans la construcchinois lorgnent déjà la plation. » Toutes les entreprises ce des thoniers espagnols et français. de BTP qui travaillent sur des fonds inmise en chômage technique de deux ternationaux et publics connaissent des semaines. L’origine Côte d’Ivoire n’a RECRUDESCENCE DU RACKET difficultés. Le groupe Pierre Fakhoury plus la cote dans l’industrie du bois : Les seuls à résister à cette crise sont Operator cherche actuellement de nouen raison de la baisse des commandes, les importateurs de produits alimenveaux marchés en Afrique pour occuper Covalma a licencié 55 de ses 200 emtaires, notamment l’homme d’affaison personnel en attendant la reprise ployés. Les exportations de fruits et res libano-ivoirien Ibrahim Ezzedine des grands travaux. Dans les mines, les légumes, produits périssables, ont (SDTM, Global Manutention, Copraci, exportations de manganèse ont chuté connu des retards de livraisons entraîSpaguetti Maman, Siprem-CI, Farine de 64 % en deux mois. Le sud-africain nant des pénalités liées au non-respect Malika, Mici, Choco Ivoire…). Autre Randgold Resources, l’australien Newdes contrats. L’imprimerie et l’édition, groupe à s’en sortir : Sifca, la première crest Mining et le britannique Cluff deux secteurs qui ont marché à plein entreprise privée du pays (17 000 salaGold ont fermé leurs mines à Noël et régime durant la campagne électorale, riés et un chiffre d’affaires 2010 d’envitentent de redémarrer l’activité depuis sont aujourd’hui sinistrées. ron 530 millions d’euros). « Nous contila fin de janvier. « On va connaître des difficultés pour nuons pour l’instant à produire notre Dans le textile, la société Uniwax, s’approvisionner en marchandises en sucre, nos huiles et notre caoutchouc et qui fabrique des pagnes, a négocié une provenance d’Europe », explique un nous parvenons à exporter en Europe et dans les pays limitrophes », explique Yves Lambelin, directeur général. RISQUE DE PANNE DE COURANT Ce qui n’empêche pas certaines difRéquisitionnée depuis le 26 janvier par le gouvernement Gbagbo, la ficultés. Ainsi, Sucrivoire, filiale du Compagnie ivoirienne d’électricité (CIE) opère sous le contrôle d’homgroupe Sifca, a dû demander des automes en armes. Une décision dont la société avait été prévenue une risations au gouvernement Gbagbo pour semaine auparavant par un courrier du ministre de l’Énergie. Dans la acheminer le sucre du nord au sud du soirée du 26 janvier, les équipes de la CIE, qui distribue et commerciapays. À cette contrainte s’ajoute la relise l’électricité, ont été contraintes de couper le courant dans le nord crudescence du racket exercé par les du pays. Mis dans une situation délicate, les actionnaires (le holding corps habillés depuis le 28 novembre, Finagestion, détenu majoritairement par le capital-investisseur amérenforçant les surcoûts de transport ricain Emerging Capital Partners) ont averti le gouvernement d’Aké entre les plantations et les usines de N’Gbo de leur opposition à cette réquisition ainsi que de leur décision transformation. À Abidjan, la raffinerie d’en informer les Ivoiriens. de ce même groupe, Sania, continue De plus, la CIE commence à éprouver des difficultés pour régler toutefois à produire près de 1 000 tonles factures auprès des producteurs de gaz naturel (Afren CI, Foxtrot nes par jour d’huile destinée pour une International et Canadian Natural Resources) qui alimentent les trois moitié à la consommation intérieure et centrales thermiques d’Abidjan. La raison ? L’État n’honore plus ses pour l’autre à la sous-région. Chez Siengagements depuis plus de trois mois et accumule des arriérés de fca, on se projette déjà sur les prochains 61 millions d’euros auprès de l’entreprise. La CIE a déjà transmis un obstacles. Un embargo portuaire? « On plan d’urgence aux autorités et prévoit d’arrêter la production en mars trouvera toujours des solutions, rassure si l’État ne règle pas sa dette. D’ici là, les coupures intempestives Yves Lambelin. On peut exporter via d’électricité pourraient revoir le jour. ■ le Ghana, même si cela engendre des FRÉDÉRIC MAURY et BAUDELAIRE MIEU surcoûts. » J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


ECOFINANCE 85 Mais avec le blocage de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), le plus difficile restera le règlement interbancaire dans la sous-région. « Les banques régionales comme Bank of Africa et Ecobank pourront faire elles-mêmes les compensations », estime un banquier. Quant aux établissement ivoiriens, depuis la réquisition de l’Agence nationale de la BCEAO par le camp Gbagbo, ils sont revenus au système de compensations manuelles, une pratique risquée, disparue depuis vingt ans. Le ministre de l’Économie de Gbagbo, Désiré Dallo, tente d’imposer un nouveau système de télécompensations locales. « On ne ferme pas boutique, mais nous évoluons dans un environnement où les risques opérationnels sont très élevés », estime un haut cadre d’une filiale de banque internationale basée à Abidjan. Si les banques tiennent encore, c’est parce que, au siège de la BCEAO, à Dakar, on n’a pas encore bloqué le système

le moral au plus bas, explique un chef d’entreprise. Les plus gros s’en sortent, surtout s’ils sont diversifiés, mais les PME-PMI qui n’ont pas les reins assez solides sont étranglées. » Déjà, des entreprises n’ont pas versé de treizième mois en fin d’année ; d’autres, dans le BTP et l’import-export, ont baissé les salaires jusqu’à 40 % pour éviter les licenciements, alors que la menace de plans massifs de dégraissage plombe l’atmosphère. « Nos prévisions se font sur le court terme et nous avons tiré un trait provisoire sur les exportations », détaille un patron. La situation n’est pas plus confortable dans les grandes entreprises publiques. Confrontées au bicéphalisme, avec chacune deux directeurs généraux nommés à leur tête par chaque camp politique, leur position n’est pas tenable. Pris entre deux feux, la plupart des opérateurs économiques ne demandent qu’une seule chose : « Laissez-nous travailler en paix ! » ■

qui permet les virements interbancaires instantanés. C’est aussi parce que, avant la réquisition, la plupart des banques sont parvenues à s’approvisionner à la BCEAO, mais la liquidité commence à faire défaut. Conséquence, les établissements, coupés du système de refinancement de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (les réserves des banques ivoiriennes à la BCEAO auxquelles elles n’ont plus accès sont de 450 millions d’euros), limitent les retraits à leurs guichets : 1 million de F CFA (1 524 euros) pour les particuliers, et de 5 millions à 20 millions, selon les banques, pour les entreprises. DES PME « ÉTRANGLÉES »

Les crédits à la consommation et à l’investissement sont désormais en recul à cause de la précarité des emplois et des entreprises. Le plus inquiétant reste l’absence de perspectives et l’impression générale que l’on s’enfonce dans une crise durable. « Nous avons

Conrad Gbaguidi

INTERVIEW

DIRECTEUR GÉNÉRAL DE MGT CONSEILS*

« Seules les sociétés de sécurité prospèrent »

Et les banques ? Après l’import-export, le secteur bancaire est le plus impacté par la crise. Des établissements ont licencié dès décembre. Les banques subissent de

ges politiques et économiques plus ou moins durables. Même si la crise actuelle est moins forte qu’en 2004, la population considère comme naturel ce qui serait intolérable ailleurs. Quant aux entreprises, elles doivent déterminer de nouveaux indicateurs clés de pilotage de leur activité, notamment en matière de ressources humaines, d’organisation interne et de production, en tenant compte des facteurs conjoncturels : identité des nouveaux acteurs, attitude des banques, etc. Un dirigeant doit savoir à tout moment, par exemple, si ses produits sont encore accessibles et comment réajuster ses processes. ■ D.R.

JEUNE AFRIQUE : Vous êtes à Abidjan depuis dix jours. Dans quel état trouvez-vous les entreprises ? CONRAD GBAGUIDI : J’ai rencontré une quinzaine de patrons depuis mon arrivée en Côte d’Ivoire, et 99 % d’entre eux ont vu leur activité chuter de 30 % à 40 %. Les sociétés qui effectuent des transactions à l’international, notamment les entreprises d’importexport et du tourisme, sont les plus touchées, elles peuvent se préparer à mettre la clé sous la porte. À l’exception des banques, la baisse d’activité dans les services est moindre : entre 10 % et 15 %. Mais si ces entreprises s’arrêtent aussi, on s’acheminera vers une banqueroute généralisée du pays. En fait, seules les sociétés de sécurité prospèrent aujourd’hui. Ce qui traduit la peur des particuliers aisés et des entreprises.

plein fouet la réquisition de l’Agence nationale de la BCEAO. Plus aucune transaction n’est possible avec l’étranger. Ce qui revient à créer un périmètre autour de la Côte d’Ivoire. Comment s’adaptent les sociétés ? Depuis près de dix ans, une culture s’est installée, qui a préparé les salariés à affronter les crises et les bloca-

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Propos recueillis par JEAN-MICHEL MEYER

* Fondé en 2005 à Paris, MGT Conseils dispose de filiales à Abidjan et Cotonou. Son expertise: aider les entreprises à piloter leur activité en fonction de tableaux de bord réalisés avec des indicateurs clés (ressources humaines, satisfaction des clients, etc.). MGT Conseils compte parmi ses clients la Société des transports abidjanais, la Société africaine de raffinage et Moov. Il réalise un chiffre d’affaires de 1 million d’euros.


86 L A S E M A I N E D ’ E C O F I N A N C E Au Mali (ici près de Mopti), les terrains sont parfois laissés à titre gracieux.

MAROC

GLOAGUEN HERVÉ/GAMMA/RAPHO

Le textile reprend des couleurs

CESSION DE TERRES

Des deals obscurs « DE NOMBREUX CONTRATS concernant de grandes superficies de terre sont négociés dans le secret. » Voici l’une des conclusions de l’International Institute for Environment and Development (IIED), basé à Londres, après analyse de douze contrats de location de terres réparties sur tout le continent. L’étude « Land deals in Africa: What is in the contracts? » (« Cessions de terres en Afrique: qu’y a-t-il dans les contrats? »), publiée le 31 janvier, concerne des étendues de 500 à 200000 ha, louées aussi bien par des fonds d’investissement que par des agences gouvernementales ou des compagnies privées. Le panel de l’auteur, Lorenzo Cotula, a été limité par l’accessibilité des documents: le rapport souligne que peu de contrats sont disponibles une fois signés, ce qui augmente le flou qui les entoure. Nombreux sont ceux qui ne font que quelques pages, avares de détails sur les conditions d’exploitation des terres (revenus, transferts de compétences, production à destination du marché local…). L’étude pointe du doigt la rétribution ridicule accordée aux bailleurs africains. Au Soudan par exemple, un contrat prévoit une location pour moins de 1 dollar l’hectare par an. Dans un autre, au Mali, la terre est simplement laissée à titre gratuit. D’autres documents ne mentionnent tout bonnement aucune condition de rémunération. « Les négociations se déroulent vite et à huis clos. Plutôt que de se précipiter, les gouvernements devraient promouvoir un débat public transparent », conclut Lorenzo Cotula. Populations mises à l’écart des négociations, cessions sur des durées pouvant aller jusqu’à un siècle, accès prioritaires des investisseurs aux ressources en eau… Autant de points qui marginalisent un peu plus les popuMICHAEL PAURON lations locales et freinent le développement économique. ■

LES E X PORTATIONS marocaines de tissus et de vêtements ont atteint 28,3 milliards de dirhams (2,5 milliards d’euros) en 2010, soit 16 % de hausse par rapport à 2009. Derrière ces chiffres, le positionnement réussi du royaume sur les petites séries à destination de l’Europe. Mais le textile marocain reste dépendant de l’Espagne et de la France (74 % des exportations), alors que les commandes britanniques se sont effondrées, passant de 8 milliards à 2 milliards de dirhams; la zone textile de Rabat-Salé, qui misait sur ce marché, a été durement frappée.

TUNISIE

Précision de Banque Zitouna UNE FORMULATION dans l’article « Tunisie SA : l’heure des comptes », paru dans J.A. no 2612, a pu prêter à confusion. L’avenir « compromis » de Banque Zitouna est bien l’analyse de J.A. Son secrétaire général, Hichem Ben Fadhl, nous demande de souligner qu’il n’en est pas l’auteur et, au contraire, « rassure l’ensemble de ses clients et collaborateurs sur la solidité de la situation financière » de l’établissement.

EN BREF SUCRE ACCORD FRANCOALGÉRIEN L’algérien La Belle et le français Cristal Union construiront une raffinerie à Ouled Moussa (Boumerdès). D’un coût de 70 millions d’euros, elle produira 350000 t de sucre par an dès 2012.

MINES SUNDANCE DANS LE FER Congo-Iron, filiale de l’australien Sundance, investira 2,2 milliards d’euros en 2011 pour exploiter le mont Nabemba (nord du Congo), près de la mine camerounaise de Mbalam.

ÉNERGIE LA CHINE PRÊTE À KIN La RD Congo vient de recevoir de la Chine un prêt de 260 millions d’euros, remboursable sur vingt ans, pour la construction d’une centrale hydroélectrique de 150 MW, à Zongo.

PÉTROLE PHUTHUMA NHLEKO CHEZ BP Le PDG de MTN, qui quitte son poste fin mars, a été nommé au conseil d’administration de BP. Un choix qui marque l’importance des marchés émergents pour le pétrolier.

AÉRIEN RWANDAIR À BRAZZAVILLE Le 3 mars, Rwandair ouvrira une liaison Kigali-Brazza (trois vols hebdomadaires). Lagos et Libreville devraient suivre avant la fin 2011, ce qui portera le réseau du transporteur à 13 escales.

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ECOFINANCE 87 FINANCE

Helios fait le plein LE CAPITAL-INVESTISSEUR BASÉ À LONDRES GÈRE PLUS DE 1 MILLIARD DE DOLLARS DANS DES ENTREPRISES AFRICAINES. DANS LE CADRE D’UN CONSORTIUM, IL REPRENDRA BIENTÔT L’ACTIVITÉ DISTRIBUTION DE SHELL.

connus chez l’un des plus importants capital-investisseurs au monde, Texas Pacific Group, sont en effet capables de s’allier avec la fine fleur de la finance mondiale. La Société financière internationale (SFI, filiale de la Banque mondiale) les suit dans leurs projets. Le philanthrope et ex-spéculateur américain George Soros mise régulièrement plusieurs dizaines de millions à leurs côtés, via sa filiale dédiée, Soros Capital Management. Une des branches britanniques de la famille Rothschild les accompagne également. « Ces investisseurs s’intéressent aux pays émergents mais ne disposent pas forcément d’équipes spécialisées sur l’Afrique, explique Tope Lawani. Helios joue ce rôle auprès d’eux. »

Shell Oil Products Africa: 1500 stations-service dans 19 pays (ici, à Marrakech).

D

ans une semaine ou deux, Shell Oil Products Africa aura changé de main. Après sept mois de négociations entre la multinationale et les repreneurs, la filiale spécialisée dans la distribution de carburants (1 500 stations-service dans 19 pays) sera la propriété d’un nouveau consortium associant Shell, le trader suisse Vitol et le financier qui monte en Afrique, Helios Investment Partners. L’opération, valorisée à hauteur de 2 milliards de dollars environ (1,5 milliard d’euros), sera la plus importante à laquelle Helios a jamais participé. Basé à Londres, fondé et dirigé par des Nigérians, Helios emploie une vingtaine de deal makers, des financiers pur jus formés dans les plus grandes écoles. Ils gèrent aujourd’hui plus de 1 milliard de dollars d’investissements dans des grandes entreprises africaines. Avec une stratégie claire: cibler des secteurs à haute valeur ajoutée, investir dans des entreprises régionales ou les reprendre majoritairement, et s’associer avec des multinationales. Aucun besoin, selon Helios, de multiplier les investissements pour diversifier les risques, si l’on sait où inves-

tir. D’ailleurs, avec son premier fonds (Helios Investors, 304 millions de dollars), le capital-investisseur n’a fait qu’une dizaine d’opérations. Il n’en fera guère plus avec son second, dont il achève actuellement la levée (Helios Investors II, 650 millions de dollars). Mais quels investissements! Les plus modestes : 170 millions de dollars dans la banque kényane Equity Bank, 137 millions dans le groupe panafricain d’affichage extérieur Continental Outdoor (ex-INM Outdoor) ou, très récemment, 115 millions dans Interswitch, une société nigériane spécialisée dans la monétique. Le plus important (avant Shell): 350 millions dans Helios Towers Africa, une société panafricaine de gestion d’antennes-relais. Dans le paysage du capital-investissement africain, Helios est le seul – avec l’égyptien Citadel Capital – à savoir monter de telles opérations, en emmenant avec lui de prestigieux investisseurs. Car ses fondateurs et dirigeants, Tope Lawani et Babatunde Soyoye, ont de l’entregent. Les deux associés, qui se sont

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RGA/REA

RENDEZ-VOUS MANQUÉ

La relation d’Helios avec l’Afrique francophone était, jusqu’au deal scellé avec Shell, l’histoire d’un rendez-vous manqué. La zone, pourtant, est résolument sur le radar panafricain de ses équipes. Pendant un temps, l’un des investisseurs professionnels de la maison, Koffi Klousseh, consacrait même l’essentiel de son temps passé chez Helios (avant d’en partir) à trouver des cibles dans la région. Une mission bien délicate quand on sait que l’investisseur mise au minimum 100 millions de dollars dans chaque deal. Mais s’il est une opération qui reste en travers de la gorge des financiers londoniens, c’est le rachat manqué de CFAO qui, avant de s’introduire sur la Bourse

Les associés nigérians attirent à leurs côtés des noms comme Soros ou Rothschild. de Paris fin 2009, avait réfléchi à céder une partie de son capital à des investisseurs. Le capital-investisseur, associé aux hommes de Soros, était quasiment arrivé au bout du processus, avant que le groupe de distribution français ne choisisse l’option boursière. Mais Helios le promet, l’aventure francophone n’est que partie remise. ■ FRÉDÉRIC MAURY


88 ECOFINANCE TUNISIE

Guerre ouverte chez les patrons L A RÉVOLUTION GAGNE LES CHEFS D’ENTREPRISE. DES QUADRAS MÈNENT LA FRONDE ET RÉCLAMENT DE NOUVELLES TÊTES AU SOMMET DE LEUR SYNDICAT, L’UTICA.

LEUR BUT : PESER DAVANTAGE SUR LES CHOIX ÉCONOMIQUES À VENIR.

R

endez-vous avait été donné mardi 1er février à 10 heures au siège de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica). Dans la grande salle, plus de 250 représentants des fédérations professionnelles et des unions régionales étaient venus apporter leur contribution à la convention nationale de l’organisation patronale, décapitée sous la pression des « refondateurs » après la fuite de Ben Ali. Démissionnaire le 19 janvier, après vingt-trois ans de règne au sommet de l’Utica, Hédi Djilani est le premier à avoir fait les frais du changement de régime au sein du syndicat patronal. Beau-père de Belhassen, le « parrain » du clan Trabelsi, l’homme d’affaires avait érigé la compromission et l’allégeance à l’ex-président en ligne de conduite. Artisan de la campagne de Ben Ali en 2009, il avait annoncé son soutien pour la prochaine élection présidentielle, en 2014. Aujourd’hui, Hédi Djilani fait profil bas.

« La direction de l’Utica a été complètement discréditée en raison de sa proximité avec le pouvoir. Résultat : elle est aujourd’hui totalement absente du débat public », plaide Abdelaziz Darghouth, patron d’Arts et Déco, une société du secteur textile. À la tête du Centre des jeunes dirigeants (CJD) de 2005 à 2007, une instance du syndicat patronal qu’il a ouverte sur l’international, l’homme a acquis une vraie légitimité. Connu pour son franc-parler, il incarne aujourd’hui les aspirations d’une nouvelle génération d’entrepreneurs partisans d’un renouvellement du comité exécutif de l’Utica. Un combat qu’il mène aux côtés de Slim Ben Ammar, directeur général de la filiale tunisienne de Sodexo et actuel président du CJD, de Kais Sellami, patron de Discovery Informatique, et de Khalil Charfi, fondateur d’Oxia – ces deux derniers présidant par ailleurs la chambre professionnelle des SSII (sociétés de services en ingénierie informatique). Des quadragénaires auxquels se mêlent quelques per-

MUTISME DES ÉTATS-MAJORS MAIS QUE FONT LES PATRONS TUNISIENS qui ont prospéré sous l’ère Ben Ali ? En pleine crise politique et économique, beaucoup jouent la carte de la discrétion médiatique. Si certains, comme les frères Mabrouk (Banque internationale arabe de Tunisie, Monoprix, Mercedes…), Aziz Miled (Nouvelair) ou Lotfi Abdennadher (Agromed, Somocer…) fuient la publicité, d’autres communiquent et se placent pour tirer parti des évolutions que va connaître la Tunisie. Les frères Loukil, par exemple, ont suggéré au gouvernement provisoire une redistribution aux enchères des actifs détenus par la famille de l’ancien président. Du côté de chez Poulina, Abdelwahab Ben Ayed et Karim Ammar ont dépêché dans l’arène le directeur du développement Maher Kallel. Membre de l’Association des Tunisiens des grandes écoles (Atuge), ce dernier entretient des contacts avec les élites tunisiennes et notamment les ministres membres de l’Atuge J.C. nommés lors du remaniement ministériel du 27 janvier. ■

sonnalités de l’Utica, comme Hichem Elloumi, figure de la sous-traitance automobile, ou Tarek Chérif, patron du groupe chimique Alliance. LES CACIQUES S’ACCROCHENT

Portés par le vent de l’Histoire et une pétition signée par plus de 1000 patrons, les jeunes entrepreneurs espéraient bien, ce 1er février, se débarrasser des caciques de l’ancienne direction. Ils ont vite déchanté. Sur l’estrade, Hamadi Ben Sedrine, Ali Slama et Zohra Driss, tous membres du comité exécutif de l’Utica, leur ont donné une leçon de guérilla politique. Dans une assemblée fébrile mêlant supporteurs de tous bords, les proches de Djilani ont appelé dès le début de la séance à un vote de confiance en leur faveur, dont le but était d’empêcher tout débat. Applaudissements des uns, protestations des autres… L’atmosphère s’est tendue davantage quand une centaine d’hommes mal identifiés ont fait irruption dans la salle après en avoir forcé l’entrée. L’occasion était trop belle pour Hamadi Ben Sedrine qui, profitant de la confusion, clôturait le conseil national sans autre forme de procès.

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Siège de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat, à Tunis.

« C’est une énorme déception, la génération Ben Ali s’accroche à son pouvoir », enrage Abdelaziz Darghouth. Pourtant, le chef d’entreprise veut rester positif et ne désespère pas de renouveler l’ensemble des instances dirigeantes du patronat tunisien le plus rapidement possible. « Nous pensons fixer un ultimatum à l’équipe en fonction, car la situation n’a que trop duré, avoue-t-il. Si nous collectons les deux tiers des signatures des représentants du conseil national, nous pourrons le convoquer sans l’aval du bureau exécutif. » S’il est si pressé, c’est que la révolution n’attend pas. Alors que le gouvernement provisoire a commencé à travailler, les jeunes dirigeants ne veulent pas laisser le champ libre au syndicat de salariés de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT). « L’UGTT a négocié avec le gouvernement et a donné son accord pour le remaniement ministériel du 28 janvier. Elle est au cœur des prises de décision, alors que l’Utica est complètement absente, politiquement et médiatiquement, déplore Abdelaziz Darghouth. Par deux fois, les représentants du patronat sont allés à la télé-

vision. La première fois, Hamadi Ben Sedrine n’a dit que du bien de l’UGTT ; et la seconde, Ali Slama a été ridiculisé par le journaliste de Hannibal TV. » Les chefs d’entreprise sont d’autant plus inquiets qu’ils assistent selon eux à la montée en puissance de la gauche radicale et s’attendent à une vague de revendications portées par les syndicats de salariés, désormais au nombre de deux depuis la création de la Confédération générale tunisienne du travail (CGTT), le 1er février. « Certaines attentes sont légitimes. Mais les évolutions doivent être discutées pour trouver des consensus. Pour cela, nous avons besoins d’une Utica unie », insistent-ils. Sous la pression des représentants des employés, certaines entreprises, comme la Société tunisienne de biscuiterie (Sotubi, filiale du groupe Mabrouk), ont déjà entamé des négociations salariales. Des demandes d’augmentation qui atteignent 200 dinars (environ 102 euros), quand les salai-

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NICOLAS FAUQUE/WWW.IMAGESDETUNISIE.COM

89 res sont en grande partie inférieurs à 500 dinars par mois. Un véritable danger selon les patrons réformateurs, qui souhaiteraient organiser des discussions par branches. Pis, « l’UGTT demande aussi la fin de l’emploi de contractuels dans les entreprises. C’est tout le modèle économique tunisien qu’ils veulent remettre en cause! » s’alarme Abdelaziz Darghouth. Et s’il reconnaît que, dans certains cas, l’utilisation abusive de contrats courts s’apparente à de « l’exploitation », il estime que les changements doivent être progressifs. Sinon, prévient-il, la Tunisie fera fuir ses partenaires étrangers, notamment européens, vers d’autres destinations, comme le Maroc. Des craintes qui tiennent aussi aux projets de nationalisation des actifs de la famille Ben Ali-Trabelsi: « Tout doit être réalisé de manière transparente pour ne pas envoyer un signal négatif au marché », estime le chef d’entreprise. PARLER D’UNE SEULE VOIX

Lui plaide au contraire en faveur d’un modèle libéral : « Il est important de renforcer notre attractivité et de réfléchir à un aménagement des règles qui régissent les investissements étrangers. Principalement sur la possibilité pour nos partenaires de faire sortir du pays leurs bénéfices. Si les conditions sont réunies à court terme, beaucoup d’entreprises se disent prêtes à investir en Tunisie. On pourrait alors avoir une croissance à deux chiffres en 2012. » Mais pour faire entendre son discours, « le patronat a besoin de parler d’une seule voix, et pour être légitime dans ce rôle de catalyseur, l’Utica doit évoluer », assure Kais Sellami, de Discovery Informatique.

Les entrepreneurs craignent une montée en puissance de la gauche radicale. Car la crainte des réformateurs est de voir la division s’installer au sein du patronat. « Nous ne voulons pas d’une situation à l’algérienne, où une multitude d’organisations patronales coexistent et finalement ont peu de poids. L’Utica présente l’avantage d’être bien structurée, par secteurs et dans les régions, justifie Abdelaziz Darghouth. Le problème, c’est que ce système qui


90 ECOFINANCE fonctionnait sous la dictature doit maintenant s’ouvrir à la démocratie. » Dans l’attente d’un changement, certains chefs d’entreprise s’organisent en groupes spontanés. « Dès le 15 janvier, plusieurs entrepreneurs ont lancé des appels sur les réseaux sociaux pour encourager les salariés à retourner dans leurs entreprises, conscients qu’une crise économique ne pourrait qu’ajouter au risque de chaos pour la Tunisie », indique Joëlle Vauthier, directrice commerciale de l’agence de relations publiques Strat&Go, qui leur a spontanément apporté un soutien. « Depuis un mois, nous sommes sept ou huit dirigeants à coordonner nos efforts », explique par exemple Kais Sellami. Une initiative dans laquelle sont aussi impliqués Aziz Mebarek, dirigeant du fonds Tuninvest, Slim Zeghal, patron d’Altea Packaging, ou encore Neila Ben Zina, PDG de Business et Décision. « Notre groupe est

amené à disparaître quand les acteurs économiques se seront organisés. Déjà, le secteur de l’hôtellerie a repris l’initiative pour sa communication », précise Mouna Kharouf, consultante en gestion. Un travail qui passe par l’élaboration d’un discours positif adressé aux Tunisiens mais aussi aux investisseurs étrangers, au travers de médias nationaux et étrangers comme Al-Jazira ou France 24. Avec pour premier objectif de les rassurer sur la situation sécuritaire du pays. PASSERELLES AVEC LA POLITIQUE

Et pour influer sur la politique économique nationale, les hommes d’affaires peuvent aussi compter sur l’Association des Tunisiens des grandes écoles (Atuge), qui a vu plusieurs de ses membres rejoindre le gouvernement de transition pour prendre des ministères importants (voir ci-dessous). « Nous ne sommes pas en relation for-

melle, mais nous nous connaissons très bien », explique Mondher Khanfir, ancien président de l’Atuge et actuel président de la Chambre de commerce tuniso-américaine. Des passerelles avec la sphère politique que les adhérents de l’association ne manqueront pas d’exploiter, même si son président, Khaled Abdeljaoued, l’assure : « Nous ne sommes pas un lobby. » L’Atuge entend pourtant se déplacer sur le terrain des idées en créant un think-tank, idéalement deux – l’un libéral et l’autre social-démocrate. À l’origine du soulèvement populaire, les régions intérieures sont aussi au cœur des préoccupations de l’association, qui souhaite y organiser des sondages pour mieux cerner leurs besoins socio-économiques. Avant sans doute de partager leurs conclusions avec une Utica renouvelée et armée pour les défis que doit désormais relever la Tunisie. ■ JULIEN CLÉMENÇOT

D.R.

VINCENT FOURNIER/J.A.

SEBASTIAN DERUNGS/WORLD ECONOMIC FORUM

DES PROFESSIONNELS DU BUSINESS AUX MANETTES DE L’ÉCONOMIE NATIONALE

JALOUL AYED

60 ans, ministre des Finances Après un master en économie à l’université du Maryland, il intègre le groupe Citibank en Tunisie. Puis il rejoint BMCE Bank en 1998 pour en devenir le numéro deux. Il y développe le pôle banque d’affaires et l’activité à l’international. En 2006, il crée, au sein de BMCE Bank, Axis Capital, une filiale de gestion d’actifs, d’intermédiation boursière et de conseil.

ELYÈS JOUINI

YASSINE BRAHIM

46 ans, ministre des Réformes économiques et sociales

44 ans, ministre des Transports et de l’Équipement

Docteur en mathématiques appliquées, l’universitaire occupait avant sa nomination la vice-présidence de l’université Paris-Dauphine. En 2005, il a reçu le prix du meilleur jeune économiste attribué par le Cercle des économistes français. Ses travaux sur la modélisation des marchés financiers incorporent aussi bien les dimensions économique et financière que d’autres moins regardées, comme la psychologie et la sociologie.

Diplômé de Centrale Paris, ce Franco-Tunisien a démarré sa carrière à Capgemini, avant de rejoindre la Société générale, où il s’est occupé pendant huit ans des logiciels et des systèmes d’information. Avant sa nomination au gouvernement, il était président de la division Global Trading de SunGard, fournisseur mondial de solutions informatiques destinées aux établissements financiers.

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ECOFINANCE 91

Que devient Oxygène Afrique? RAPHAËL DEMARET/REA

Le transporteur belge a dû mettre fin à ses liaisons transitant par la capitale sénégalaise.

AÉRIEN

Dakar éjecte Brussels Airlines

LES AUTORITÉS ONT JUGÉ QUE LA COMPAGNIE EXERÇAIT UNE CONCURRENCE DÉLOYALE AU DÉTRIMENT DE SÉNÉGAL A IRLINES.

B

russels Airlines aurait souhaité entamer 2011 en Afrique sous de meilleurs augures. Le 4 janvier, la compagnie belge a reçu des autorités sénégalaises un courrier lui demandant de mettre fin dès le lendemain à tous ses vols reliant Bruxelles à Conakry, Freetown et Banjul via Dakar. Le transporteur, filiale à 45 % de l’allemand Lufthansa, ne peut désormais qu’opérer la ligne Bruxelles-Dakar. La porte vers trois de ses dix-huit destinations africaines lui est tout simplement fermée. « Toute liaison entre la capitale belge et d’autres destinations africaines en passant par Dakar constitue en réalité un détournement de trafic et donc une concurrence déloyale au détriment de la compagnie Sénégal Airlines et de toutes les autres compagnies aériennes africaines », explique-t-on dans la capitale sénégalaise. Autrement dit, ajoute une source au ministère des Transports, « un passager qui embarque en Belgique pour aller à Conakry en passant par Dakar est un client potentiel de Sénégal Airlines sur le trajet Dakar-Conakry ». Depuis 2008, un accord bilatéral conclu entre les deux pays permettait à Brussels Airlines d’opérer sept vols hebdomadaires entre la capitale belge et Dakar, avec connexion vers les trois capitales ouest-africaines. « Brussels Airlines opérait ces liaisons en respectant scrupuleusement toutes les règles

internationales et en collaboration avec la précédente compagnie nationale Air Sénégal International », indique le transporteur belge, qui dénonce une violation de cet accord. LA FIN DU COMPROMIS

Réponse de Dakar à Bruxelles (qui a rappelé, pour consultation, son ambassadeur au Sénégal le 28 janvier): « L’accord aérien entre le Sénégal et la Belgique n’est ni signé ni ratifié par les autorités compétentes des deux pays et n’est donc pas entré en vigueur. » Selon une source sénégalaise proche du dossier, ce compromis était juste appliqué à titre provisoire sur la base d’un mémorandum d’entente signé par les directeurs des aviations civiles des deux pays. En attendant le dénouement de la situation, Brussels Airlines a loué un Boeing 767 à Air Italie et mobilise du personnel navigant supplémentaire pour desservir ces trois destinations ouestafricaines directement depuis la capitale belge. Pendant ce temps, Sénégal Airlines affine sa stratégie pour prendre ses marques sur le marché régional. Dans une récente interview accordée à Jeune Afrique (n° 2612), le patron de la compagnie, le Suisse Edgardo Badiali, a indiqué vouloir mettre l’accent sur des vols directs aller-retour au départ de Dakar pour, affirme-t-il, réduire les risques de retard. ■

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STÉPHANE BALLONG

L’ANNONCE, EN JUILLET 2010, de la création d’Oxygène Afrique, une nouvelle compagnie française spécialisée dans les liaisons vers le continent, a été une surprise. Oxygène Afrique devait décoller en septembre, puis en octobre, affirmait, confiant, son PDG, Steve Bokhobza. Deux Boeing 767 peints aux couleurs du nouveau transporteur avaient été loués auprès de la société américaine International Lease Finance Corporation (ILFC) et près de 25 millions d’euros, soit l’équivalent de trois mois d’activité, avaient été déposés à la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), en France, pour l’obtention du certificat de transport aérien (CTA). Mais depuis, toujours pas de trace du transporteur dans le ciel africain. Steve Bokhobza affirme pourtant que « le projet est toujours d’actualité ». Également directeur d’Airops, une société spécialisée dans les services aux compagnies aériennes sur les zones aéroportuaires de Paris, il table désormais sur un décollage l’été prochain – date à laquelle, selon une source proche de la DGAC, le dossier pour l’obtention du CTA devrait aboutir. « ILFC n’a pas tenu son engagement de réaménager les classes affaires des deux avions », ajoute le patron pour justifier le retard dans le démarrage des activités de sa compagnie. Qu’à cela ne tienne : Steve Bokhobza affirme être en prospection pour louer des avions de plus grande capacité auprès d’une nouvelle société. Autre incertitude qui pèse sur Oxygène Afrique : l’évolution de la crise ivoirienne. Car si la compagnie veut établir son hub d’Afrique centrale à Malabo (Guinée équatoriale), elle a prévu de s’installer dans la capitale ivoirienne pour desservir l’ouest du S.B. continent. ■


92 ECOFINANCE NIGERIA

Fast-food à la sauce africaine METTANT LE MODÈLE AMÉRICAIN AU GOÛT LOCAL, LES CHAÎNES DE RESTAURATION RAPIDE DE L AGOS SONT EN PLEINE EXPANSION. POUR RÉSISTER À L’ARRIVÉE DE KFC, CERTAINES VONT S’INTRODUIRE EN BOURSE.

P

la chaîne Chicken Republic compte déjà 62 restaurants, et voit grand : « À l’horizon 2012, nous visons les 30 0 f ra nc h i sés au Niger ia et au Ghana, idéalement placés dans les quartiers aisés de Lagos, d’Abuja, de Port Harcourt et d’Accra », affirme Lola Ashafa, directrice du marketing du groupe de restauration Food Concepts, propriétaire de la marque Chicken Republic ainsi que d’enseignes plus haut de gamme comme les pizzerias St Elmo’s et les bars-lounge Reeds.

renez le « M » jaune sur fond le rajeunissement de la population. rouge de McDonald’s, renDésormais, 73 millions de Nigérians versez-le sur la droite pour (dont la moitié de jeunes) vivent dans en faire un « B », et vous les villes. Ceux qui gagnent bien leur obtenez le logo de Mr Bigg’s, la previe veulent manger vite, dans des resmière chaîne de fast-food nigériane, taurants proches de leurs entreprises. créée en 1986, offrant aux comptoirs En 2009, on estimait à 800 le nomde ses restaurants propres et lumibre de fast-food au Nigeria, générant neux frites et hamburgers, mais aussi un chiffre d’affaires de 588 millions FRANCHISE OU PAS ? tourtes et poulets grillés. Pionnière d’euros, avec une croissance annuelle Chez Mama Cass, on opte résolude la restauration rapide, l’enseigne ment pour la cuisine traditionnelle. a su profiter du consumérisme On peut y déguster des frites, mais 6m ambiant à la fin du régime pas de hamburgers. Créée par de p illions oule de m es t n v militaire pour se lancer : Charis Onabowale, ancienn e o n t s orce r d s en 200 us en nnem 00 pe aux « Au début des années ne pat ron ne d’u n buk k a 7 pa 100 0ent quotidie Chic r 1990, inv iter une per(petit restaurant de rue) de mang s Rep ken le u s blic son ne c hez Mr Bigg ’s, Lagos, la chaîne propose à dan s t uran resta g's c’était la meilleure façon ses clients des plats nigérians ig Mr B de l’impressionner, même typiques, comme de la semoule s’il fallait y casser sa tirede manioc, de l’igname, sans lire », se souvient avec oublier le poulet épicé et le jolnostalgie Daouda Aliyou, lof rice (riz gras mélangé avec un journaliste de Lagos, des petits légumes) et toutes étudiant à l’époque. sortes de sauces. Pour inventer le « Nous sommes un fast-food, concept de Mr Bigg’s, sa mais nous voulons absolument maison mère, le géant garantir la qualité des mets a g r o a l i me nt a i r e Un iproposés. C’est pourquoi nous ted African Company of avons opté pour une croisNigeria (UACN, ancienne sance raisonnable depuis les filiale d’Unilever, à 80 % années 1980. Nous comptons Coût moyen d’un repas (plat-dessert-boisson) : à c ap it au x a f r i c a i n s) 19 restaurants implantés dans 1 500 nairas (7,20 euros) ne s’est pas contenté de les grandes villes nigérianes, dupliquer le modèle amétous propriété de Mama Cass », ricain, mais l’a adapté aux indique Aziz Kazam, directeur du palais nigérians. « Ce qui a fait décolde 30 % chaque année pendant la derdéveloppement de l’enseigne, assez ler Mr Bigg’s, c’est sa fameuse meat nière décennie. critique sur l’expansion des chaînes pie [tourte à la viande, NDLR], un plat Si Mr Bigg’s est le leader incontesté concurrentes Mr Bigg’s et Chicken traditionnel préparé par nos mères avec 160 restaurants, ses challenRepublic grâce au système de frandepuis des lustres, dont la chaîne a su geurs, alléchés par la croissance du chise, qui, selon lui, « ne permet pas industrialiser la préparation », relève marché, veulent aussi une part du de garantir une qualité homogène ». Daouda Aliyou, aussi adepte des saugâteau : les enseignes Mama Cass, Le point critique pour les fast-foods ces ultra-épicées made in Nigeria qui Tantalizers, Chicken Republic, Tasty nigérians, c’est justement la logistiaccompagnent les plats. « On mange Fried Chicken et Sweet Sensation que. Chaque chaîne doit faire preuve dans un univers nouveau, mais on multiplient les ouvertures de restaude souplesse pour garantir la qualité retrouve certains codes de la cuisine rants, mais ont opté pour des stratémalgré les fortes variations de prix, de nigériane », apprécie-t-il. gies différentes. qualité, les pénuries de produits et les Aujourd’hui, l’industrie du fast-food Fondée par Deji Akinyanju, ancien délestages électriques. « Chez nous, a explosé, portée par l’urbanisation et franchisé d’un fast-food sud-africain, c’est le responsable du restaurant qui J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


ECOFINANCE 93 se charge de l’approvisionnement. Il développe des relations durables avec un tissu de fournisseurs locaux. Compte tenu du réseau électrique défaillant, il n’y a pas de chaîne du froid, nous travaillons exclusivement avec des produits frais et régionaux », explique Aziz Kazam. Chicken Republic vise de son côté les économ ies d’éc hel le, avec la construction d’une usine de découpe de volaille à Ota, au nord de Lagos, qui doit conditionner pas moins de 35 000 poulets chaque semaine dès la fin de 2011. Avec cet outil industriel, l’entreprise espère réduire ses coûts et standardiser la qualité de ses manchons de poulets frits. UN GÉANT S’INVITE À TABLE

Chez Mr Bigg’s, l’approvisionnement se fait à l’échelon national pour le pain et les viandes. Pour pallier les variations de prix, la chaîne achète de gros volumes à tarif fixe, négociés et payés six mois à l’avance. En revanche, chaque restaurant achète ses légumes localement, pour éviter les

SIX ACTEURS PRINCIPAUX AU MENU Nombre de restaurants

Pays d’implantation

Mr Bigg’s

160

Nigeria, Ghana

Chicken Republic

62

Nigeria, Ghana

Tantalizers

39

Nigeria, Ghana

Sweet Sensation

25

Nigeria, Ghana

Mama Cass

19

Nigeria, Royaume-Uni

Tasty Fried Chicken

11

Nigeria

Chaînes

SOURCES: SOCIÉTÉS

pertes dues à la mauvaise conservation lors de longs transports. Reste que, même si leur organisation est rodée, les fast-foods nigérians regardent avec appréhension l’expansion de la chaîne américaine Kentucky Fried Chicken (KFC, la septième chaîne mondiale, avec 13 000 restaurants), qui a commencé à attaquer le marché local en 2010. « Les chaînes qui ont les menus les plus américains vont souffrir ou vont devoir s’africaniser

davantage », estime Aziz Kazam, qui prédit à Mr Bigg’s et Chicken Republic des jours difficiles. Pour faire face, les holdings de ces deux chaînes, UACN et Food Concepts, pourraient, comme leur concurrent Tantalizers, s’introduire à la Bourse de Lagos pour lever des fonds. Objectif : trouver l’argent pour s’industrialiser davantage et s’implanter à l’étranger, notamment au Ghana, au Bénin et au Cameroun. ■ CHRISTOPHE LE BEC, envoyé spécial

The 13th Annual Africa Business Conference

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94 ECOFINANCE SÉNÉGAL

Patisen ne manque pas dʼappétit

L’entreprise étend sa gamme, du chocolat en poudre jusqu’au vinaigre.

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ivaliser en Afrique de l’Ouest avec le suisse Nestlé et s’attaquer à son produit phare : le célèbre bouillon cube Maggi, présent dans tous les foyers. C’est sans doute le rêve secret de Youssef Omaïs. Depuis cinq ans, le calme et discret entrepreneur sénégalais est à la tâche pour bâtir un groupe agro-industriel digne de ce nom. Bouillons Mami et Adja (en poudre et en cubes), pâte à tartiner, chocolat en poudre (marque Chocolion)… Ses gammes de produits sont représentées dans les rayons des centres commerciaux, les épiceries de quartier, chez les vendeurs ambulants… « Du grossiste à la ménagère », résume le patron. Cette année, il investira environ 10 milliards de F CFA (15,2 millions d’euros), avec le soutien probable de Banque Atlantique, dans une nouvelle unité de production de bouillons, et l’ensemble des usines Patisen (une douzaine actuellement) seront regroupées près du nouvel aéroport BlaiseDiagne, près de Thiès. « Nos exportations [principalement en Afrique de l’Ouest, mais aussi un peu en Europe,

ANTOINE TEMPE/PICTURETANK POUR J.A.

EN CINQ ANS, LE GROUPE AGROALIMENTAIRE SPÉCIALISÉ DANS LES BOUILLONS ET LES PÂTES À TARTINER S’EST IMPOSÉ SUR LE MARCHÉ LOCAL. AUJOURD’HUI, IL INVESTIT POUR SE DIVERSIFIER ET S’ATTAQUER À TOUTE L’A FRIQUE DE L’OUEST.

Amer, il part à la charge en 2005. D’abord en sollicitant un nouvel accord auprès de Barry Callebaut : « Pour eux j’étais dépassé, raconte-t-il. Je leur ai dit que j’allais remonter mon affaire et faire mieux qu’eux. » La production de Patisen, qui poursuivait ses activités d’importation et de distribution, renaît. Le succès est quasi immédiat. « Je peux mettre deux ans à réfléchir à un produit, mais quand je le lance, je fais mouche à chaque fois. Et nous innovons tout le temps. » Un centre de recherche et développement a d’ailleurs vu le jour en 2008. Vinaigre, margarine… Le groupe entend poursuivre sa diversification. TROUBLANTE RESSEMBLANCE

La réussite de Patisen n’est peut-être pas uniquement le fait de son fondateur visionnaire. Lettres jaunes sur fond rouge, consonance familière… Difficile de ne pas déceler chez Mami une ressemblance troublante avec Maggi, la marque leader en Afrique de l’Ouest. Sollicité sur ce sujet par Jeune Afrique, Nestlé s’est fendu d’un communiqué laconique : « Nous nous attendons à faire face à une compétition accrue. […] Des imitations de tout genre sont présentes sur le marché. […] L’application parfois faible ou aléatoire des législations sur la propriété intellectuelle en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale ne nous aide pas à défendre l’intégrité de notre marque. » Youssef Omaïs, lui, estime que sa valeur ajoutée est ailleurs : « Nous

notamment en Espagne, en France et en Italie via des réseaux ethniques de distribution, NDLR] représentent 10 % à 15 % de nos ventes, explique Youssef Omaïs. Notre objectif est de porter cette part à 85 % d’ici trois ou quatre ans. » Et de multiplier par quatre, dès cette année, le chiffre d’affaires (25 milliards de F CFA aujourd’hui). Au-delà de la passion qui l’anime, le directeur général de Patisen affiche plus de t rente a n née s d’e x pér ience dans l’agro-industrie. Fondée en 1981, l’entreprise était déjà leader en Afrique de l’Ouest YOUSSEF OMAÏS, fondateur et directeur général avec ses pâtes à tartiner chocolatées. En 1999, il savons nous adresser aux consommarevend sa production au géant du choteurs, alors que la plupart des induscolat Barry Callebaut, alors en pleine triels étrangers sont déconnectés du offensive sur le continent. « Ils m’ont terrain. » Par ailleurs, il revendique à peine laissé le choix et m’ont proun personnel 100 % sénégalais, des posé une place dans le conseil d’admicharges moindres qu’en Europe et une nistration, se souvient le Sénégalais. production qui ne s’arrête pas le weekMais rapidement, je me suis rendu end. Les géants mondiaux de l’agroalicompte que je ne pesais plus rien, que mentaire n’ont qu’à bien se tenir. ■ je n’existais plus, que je ne participais MICHAEL PAURON, envoyé spécial à Dakar plus aux décisions. »

« Quand je lance un produit, je fais mouche à chaque fois. »

J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


u a r i t s e Inv

a d n Rwa Croissance économique soutenue Climat politique propice aux investisseurs Portail vers l’Afrique de l’Est et le Continent

Opportunités multiples à exploiter

Services, TIC, Finances, Energie, Infrastructures, Tourisme, Immobilier, Agriculture…

1er pays réformateur au Monde en 2010 « Rapport Doing Business 2010 » de la Banque mondiale

DIFCOM F.C

La terre aux mille collines, le pays aux mille opportunités.


96 LIRE, ÉCOUTER, VOIR

Livres

SONALLAH IBRAHIM

« LʼHistoire est de nouveau en marche dans le monde arabe »

Emprisonné sous Nasser pour avoir milité au Parti communiste, lʼécrivain nʼa cessé de dénoncer la corruption et la dictature qui minent son pays. À lʼoccasion de la sortie de son dernier roman, il revient pour J.A. sur le soulèvement populaire égyptien.

R

Propos recueillis par TIRTHANKAR CHANDA

oman à la fois historique et contemporain, Turbans et Chapeaux, du Cairote Sonallah Ibrahim, revient sur l’expédition égyptienne de Napoléon. Raconté par un jeune disciple de l’historien Jabarti, dont le récit de l’occupation française est l’une des principales sources sur cette période turbulente de l’histoire égyptienne, le roman prend le contre-pied de l’opinion courante selon laquelle la force expéditionnaire française aurait ouvert le pays des Pharaons à la modernité. Turbans et Chapeaux se transforment alors en une critique de l’impérialisme occidental au Moyen-Orient. Écrivain engagé, passé par les geôles nassériennes dans les années 1960, Sonallah Ibrahim est l’auteur d’une dizaine de romans qui s’inscrivent dans le courant réaliste de la fiction

égyptienne moderne. Ancien communiste, vivant loin des cénacles officiels de la culture, il attend le grand soir. Sa fiction, profondément politique, raconte les heurs et malheurs du monde arabe accablé par la corruption, la dictature et l’absence de perspectives d’avenir. Ses personnages, confrontés au chaos du monde, victimes d’une société bureaucratique et autoritaire, s’enlisent dans la frustration et l’amertume. À 73 ans, alors qu’il commençait à désespérer de voir de son vivant des bouleversements révolutionnaires balayer les régimes autoritaires et corrompus qui bâillonnent les populations arabes, Sonallah Ibrahim voit avec satisfaction et inquiétude le soulèvement qui secoue son pays depuis le 25 janvier, après la révolte tunisienne. L’heure de la révolution a-t-elle enfin sonné à Oum Dounia (« la mère du monde », l’autre nom du Caire) ? Entretien. ■ J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


Le romancier égyptien chez lui, au Caire, le 27 janvier.

JEUNE AFRIQUE : Peut-on qualifier le soulèvement populaire égyptien de révolution ? SONALLAH IBRAHIM : Oui, c’est une révolution. Les Égyptiens forment un peuple extrêmement résistant. Ils peuvent accepter de vivre pendant des décennies sous un régime dictatorial, corrompu. Ils grognent, ils plient, ils supportent, et puis un jour c’est l’explosion. Quand ça casse, tout éclate et explose. C’est ce qui est en train de se passer aujourd’hui. Vous verrez, cette révolution ne s’arrêtera pas de sitôt. Je crois même que ce qui se passe chez nous et ce qui s’est passé en Tunisie va contaminer les autres pays de notre région où règnent l’autoritarisme et l’arbitraire. L’Histoire est de nouveau en marche dans le monde arabe. Êtes-vous allé place Al-Tahrir, là où les Cairotes manifestent depuis le 25 janvier ?

Vous savez, je suis un vieux monsieur, mais j’ai quand même manifesté. Je me suis bien évidemment rendu place Al-Tahrir, où souffle un vent de liberté. Nous attendons ce moment depuis très longtemps. C’est un moment historique que nous, les intellectuels de gauche, avons appelé de tous nos vœux. Mais ne vous méprenez pas. Ce ne sont pas les intellectuels qui ont fait bouger les choses. Ce mouvement vient du fond de la conscience égyptienne. Il a ses assises dans notre longue histoire, au cours de laquelle le petit peuple n’a jamais vraiment réussi à se faire entendre. Des fortunes colossales se sont faites sur le dos de ce peuple qui travaille très dur, mais qui se fait humilier par les nantis, les policiers, les fonctionnaires. Aujourd’hui, il réclame son dû. Qui sont ces manifestants ? Chômeurs, fem mes, c h rét iens, musulmans, bourgeois déclassés, ouvriers, chauffeurs de taxi, univer-

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sitaires… Tout le peuple égyptien est dans la rue au Caire, à Alexandrie, à Suez, à Ismaïliya, et ne rentrera chez lui que lorsque Moubarak sera parti. Moubarak doit partir. Pas dans une semaine, pas après les élections, mais immédiatement. C’est ce que demandent ceux qui descendent dans la rue ? Le départ de Moubarak, mais aussi l’arrestation de l’ancien ministre de l’Intérieur Habib el-Adly, que Moubarak a limogé et qui a du sang sur les mains. C’est lui qui avait ordonné aux policiers de tirer sur les manifestants, alors que ceux-ci ne demandaient que du pain, du travail, des salaires décents. Il faudrait traiter cet homme en criminel de guerre et le faire juger par un tribunal militaire. Croyez-vous que quelqu’un comme le Prix Nobel de la paix Mohamed el-Baradei puisse être aujourd’hui

PAULINE BEUGNIES/OUT OF FOCUS POUR J.A.

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98 LIRE, ÉCOUTER, VOIR le porte-parole du mécontentement populaire? Il semble avoir été adoubé par l’opposition… Surtout par les Américains, qui voient en lui un rempart contre l’instabilité et le radicalisme musulman. Les Égyptiens ne veulent pas de leaders qui arrivent opportunément de l’étranger pour cueillir les fruits d’un soulèvement populaire autochtone. Malgré le chaos indescriptible et l’atomisation du mouvement de révolte, on s’achemine, me semble-til, vers un gouvernement d’union nationale en attendant de nouvelles élections, et peut-être une nouvelle Constitution. On a besoin de changement, pas d’un nouvel homme fort.

siennes des renforts policiers pour mater la révolte populaire, est emblématique de nos rapports avec l’Occident. Depuis les velléités d’indépendance de Nasser, les pays occidentaux se sont arrangés pour avoir en Égypte des dirigeants acquis à leur cause.

Il y a dans vos propos une pointe de regret pour les années Nasser. Paradoxalement, c’est l’époque où vos romans étaient censurés et où vous étiez mis en prison pour avoir milité au Parti communiste ! Certes, au temps de Nasser, les libertés fondamentales étaient bafouées. Mais l’Histoire se souviendra de Nasser avant tout comme d’un grand nationaliste. Il a su défier les grandes puissances et a créé les conditions du développement d’une classe moyenne dynamique. Il a aussi imposé au monde arabe Turbans et Chapeaux, l’idée de panarabisme. Les de Sonallah Ibrahim, successeurs de Nasser ont Actes Sud, 288 pages, conduit le pays sur la voie 22 euros. de la régression.

Les islamistes peuvent-ils profiter de cette opportunité pour prendre le pouvoir ? Oui, c’est une possibilité. Mais, très franchement, les Égyptiens s’en fichent ! Ce qu’ils veulent, c’est être débarrassés de ce régime. Pour l’instant, aucun leadership n’a encore émergé, ni au sein des Frères musulmans ni au sein de l’opposition en général, pour canaliser le mouvement de mécontentement. L’opposition a été affaiblie et cassée par le pouvoir, ne permettant à aucun leader charismatique d’émerger. D’une certaine façon, c’est une chance pour l’Égypte, mais aussi un danger, car le premier aventurier venu pourrait détourner la colère des masses à son profit.

Comment en est-on arrivé là ? À peu de chose près comme en Tunisie, qui a été une source d’inspiration pour les Égyptiens. Une petite oligarchie a fait main basse sur le pays. Elle s’est maintenue en place avec l’aide des grandes puissances. La réaction du ministère français des Affaires étrangères, qui se proposait d’envoyer aux autorités tuni-

Vous avez été au Parti communiste dans votre jeunesse. Aujourd’hui, vous faites partie du mouvement contestataire Kefaya (« ça suffit ! »). Croyez-vous que l’écrivain doive être aussi un militant ? Non, pas nécessairement. Moi-même, j’ai très tôt renoncé à l’action militante pour être un écrivain. Aujourd’hui, je fais certes partie de Kefaya, mais ce n’est pas un parti politique. C’est un outil de sensibilisation dont l’une des premières actions a consisté à appeler la population à boycotter les élections. La politique est omniprésente dans le monde arabe. Difficile de l’ignorer, qu’on soit un écrivain ou un simple citoyen. Allumez la télé, vous avez le choix entre la guerre, les invasions, les révolutions ou les mensonges dont nos leaders nous abreuvent à longueur de

journées. La politique s’est insinuée jusque dans nos rêves. C’est ce qui explique sans doute que la politique soit au cœur de votre œuvre, comme dans votre nouveau roman, Turbans et Chapeaux, qui raconte l’Égypte au temps de l’expédition napoléonienne. Pourquoi vous êtes-vous intéressé à cette période ? Cette page de l’histoire égyptienne, qui a duré de 1798 à 1801, demeure encore un sujet sensible. Je voulais remettre en question l’idée courante selon laquelle la conquête de l’Égypte par Napoléon a ouvert ce pays à la modernité. S’il est vrai que les scientifiques français qui accompagnaient Napoléon ont apporté des connaissances et des techniques supérieures aux savoirs égyptiens de l’époque, politiquement parlant cette invasion fut un moment de régression pour l’Égypte. Avant l’arrivée de Napoléon, le pays était mûr pour un soulèvement contre la domination ottomane. Le débarquement de l’armée française a retardé l’évolution politique et économique du pays. Il a fallu attendre le long règne de Méhémet Ali (18051848) pour faire entrer l’Égypte dans la modernité et couper le cordon ombilical avec les Turcs. L’expédition napoléonienne est-elle emblématique des relations difficiles entre les Arabes et l’Occident ? Lorsque j’ai écrit ce roman, les images de l’invasion de l’Irak étaient très présentes dans mon esprit. Avec Napoléon, la diffusion des bienfaits de la civilisation rationnelle au Moyen-Orient était un prétexte à la conquête de l’Égypte, afin de couper les voies de communication britanniques vers les Indes. De la même manière, le véritable objectif de l’invasion de l’Irak par Bush au XXIe siècle était non pas la destruction des armements chimiques de Saddam Hussein, mais le contrôle des champs pétrolifères du pays. Les objectifs de ces guerres impérialistes n’ont jamais été civilisationnels, mais tout simplement prédateurs. ■

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Édouard Glissant, en 2005.

« Tout-Monde » en deuil Chantre de la diversité et du métissage, poète-philosophe engagé, lʼécrivain martiniquais Édouard Glissant est mort le 3 février à lʼâge de 82 ans.

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à la réflexion de Frantz Fanon sur les conséquences psychiques désastreuses de l’assimilation coloniale aux Antilles. Les Antilles, îles natales du poète-philosophe, constituent le soubassement géographique et historique de la plupart de ses écrits, jusqu’à devenir le paradigme d’une culture mondiale en cours de créolisation (que le poète désigne par le terme de « chaos-monde »), où « tout change en s’échangeant ». Elles sont le lieu exemplaire où l’emmêlement des langues et des cultures (occidentale, africaine, asiatique, indienne d’Amérique) crée les conditions d’émergence d’une identité plurielle, ouverte sur le monde. Né le 21 septembre 1928 en Martinique, Édouard Glissant a grandi dans les mornes, sur les hauteurs de Sainte-Marie. Son père était « géreur », une sorte d’inten-

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l faut changer les imaginaires des humanités. » Cette brève phrase extraite du dernier ouvrage, L’Imaginaire des langues, entretiens avec Lise Gauvin (1991-2009), d’Édouard Glissant dit toute l’ambition et la portée de l’œuvre riche et complexe du poète antillais mort le 3 février à l’âge de 82 ans. Une œuvre située au confluent de différentes disciplines (politique, linguistique, anthropologie, psychanalyse, philosophie) et de genres (fiction, poésie, essai, théâtre). Une œuvre héritière de la « parole de la nuit » du conteur créole, mais aussi du souffle poétique caribéen illustré aux Antilles francophones par SaintJohn Perse et Aimé Césaire. Sa pensée, originale et posthistorique, emprunte ses lignes de force à la philosophie de Gilles Deleuze et Félix Guattari (le concept de « rhizome ») et

FRÉDÉRIC STUCIN/M.Y.O.P.

Adieu

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100 LIRE, ÉCOUTER, VOIR

La Lézarde, Seuil, 1958 (prix Renaudot)

Poétique de la relation, Gallimard, 1990

dant qui se déplaçait de plantation en plantation. Dans ses entretiens sur son enfance martiniquaise, Glissant a raconté comment la profession de son père, qui l’obligeait à changer de patron et de paysage presque chaque année, lui a permis dès son plus jeune âge de découvrir la Martinique dans toute sa multiplicité. « Déjà c’était humblement apprendre la diversité du monde », dira le poète. Les Glissant sont une famille modeste, mais Édouard est un élève brillant. À 10 ans, il quitte Le Lamentin, où il vivait avec sa mère, pour aller à Fort-de-France, où il est admis au célèbre lycée Schoelcher. Aimé Césaire venait d’y être nommé. Contrairement à une idée reçue, le jeune Glissant n’a jamais eu le chef de file de la négritude comme professeur, mais a découvert sa pensée à travers la revue Tropiques que Césaire animait avec son épouse Suzanne.

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BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

« SE TRANSFORMER MUTUELLEMENT »

Traité du Tout-Monde, Gallimard, 1997

L’Intraitable Beauté du monde, avec Patrick Chamoiseau, Galaade, 2009

La Terre, le feu, l’eau et les vents. Une anthologie de la poésie du Tout-Monde, Galaade, 2010

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, Glissant débarque à Paris, en 1946. Il a à peine 18 ans. Il s’inscrit à la Sorbonne, où il fait des études de philosophie. Parallèlement, il milite au sein des mouvements marxistes et anticolonialistes, ce qui le rapproche un temps de Présence africaine. Il collabore à la revue créée par le Sénégalais Alioune Diop, participe au premier congrès des écrivains et artistes noirs qu’organisent ce dernier et son équipe en 1956. Malgré ce foisonnement d’activités, il trouve le temps de publier plusieurs recueils de poèmes (Un champ d’îles, La Terre inquiète, Les Indes) qui le font connaître des cénacles littéraires parisiens de l’époque. Mais c’est en 1958, avec son premier roman La Lézarde, couronné par le prix Renaudot, qu’il acquiert une visibilité qui n’a cessé de croître au cours des années. À la fin des années 1950, la Martinique et la Guadeloupe sont à feu et à sang. Proche des mouvements indépendantistes algériens (il était l’un des signataires du « Manifeste des 121 » contre la guerre d’Algérie), Glissant fonde avec des camarades radicaux le Front antillo-guyanais pour l’autonomie, qui réclame l’indépendance des A ntilles. Le gouvernement de De Gaulle fait interdire la formation et assigne ses fondateurs à résidence en France métropolitaine. Glissant réussira toutefois à se rendre clandestinement en Guadeloupe, mais sera immédiatement arrêté et renvoyé manu militari en métropole. Pendant toute cette phase d’activis-

me politique qui a duré près de dix ans, l’homme a toujours écrit, et s’est même attaché à ajouter une nouvelle dimension à son œuvre romanesque en entreprenant une saga martiniquaise à portée historique (Le Quatrième Siècle, Malemort, La Case du commandeur). La publication de l’essai Le Discours antillais, en 1981, consacré à la créolisation, marque un tournant dans l’écriture et l’orientation littéraire d’Édouard Glissant. Les textes qu’il publie désormais s’inscrivent difficilement dans des genres conventionnels. Sa fiction (Tout-Monde, Sartorius, Ormerod), sa poésie (Le Sel noir, Pays rêvé, pays réel, Le Monde incréé) tout comme ses essais (Poétique de la relation, Introduction à une poétique du divers, Faulkner, Mississippi, Traité du Tout-Monde, La Cohée du Lamentin) se caractérisent par une intentionnalité philosophique, alors que son écriture se fait plus baroque et plus poétique. La « relation » est la clé de voûte de la pensée de la diversité et du pluriel qu’Édouard Glissant élabore dans cette dernière étape de son parcours littéraire et intellectuel. À travers ce concept qui était déjà présent en filigrane dès ses premiers écrits théoriques (Soleil de la conscience et L’Intention poétique), le Martiniquais n’a pas cessé de critiquer le totalitarisme du modèle politique et culturel occidental. Remettant en question la conception ethnocentriste du monde et de l’Histoire qu’engendre la pensée occidentale, il inter-

Glissant n’a pas cessé de critiquer le totalitarisme du modèle occidental. prète la modernité comme un processus de mise en relation, sur un monde non hiérarchisant, de tous les peuples et de toutes les cultures. « On a feint d’oublier, écrit-il, qu’un des plein-sens de la modernité est donné, ici comme ailleurs dans le monde, par ce travail où les cultures des hommes s’identifient l’une l’autre, désormais, pour se transformer mutuellement. » Cet te identité-relation qu’Édouard Glissant a tenté d’illustrer à travers son œuvre et sa vie, partagée entre Paris, la Martinique et les États-Unis, où il a été distinguished professor de littératures françaises, est aussi ce qui sépare le poète de la créolisation de la négritude senghorienne et césairienne fondée sur le mythe du « retour à des racines irrémédiablement TIRTHANKAR CHANDA perdues ». ■ J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


AC

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Titre : Fourniture et pose (installation) d’un groupe turbine-alternateur et équipements associés. Réf. : 01/2011/ACF-UK/9ACP ZR/Microcentrale Mutwanga. Financement : 9e Fonds Européen de Développement (FED9). Description du marché : Le marché consiste à la fourniture et la pose (installation) d’un groupe turbine-alternateur et équipements associés, pour l’électrification rurale de Mutwanga, Province du Nord-Kivu, RD Congo. Le marché est à lots : 1. Conduite forcée et accessoires. 2. Composants électromécaniques : une turbine, un alternateur, un régulateur, un système de contrôle et commande. Le DAO est à obtenir sur : http://projetmutwanga.gorillacd.org/

annonces sur le site : www.jeuneafrique.com

Africa Conservation Fund-Uk

JEUNE AFRIQUE N° 2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011

Emmanuel de Merode, Chef de Projet

Communiqué - Avis de Marché

LA SOCIETE AFRICAINE DE RAFFINAGE REVIENT SUR LE MARCHE INTERNATIONAL


AC

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ANNONCES CLASSÉES Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre Tél. : 01 44 30 18 76 – Fax : 01 44 30 18 77 – f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique - 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 Paris –France

SOCIETE AFRICAINE DE RAFFINAGE COMMUNIQUÉ

Le Gouvernement du Sénégal a décidé de confier à la Société Africaine de Raffinage (SAR) l’approvisionnement du Sénégal en pétrole brut et en hydrocarbures raffinés. Cette mission sera remplie dans le cadre d’appels d’offres internationaux auxquels pourraient participer, sans exclusive, tous les fournisseurs agréés par la SAR conformément aux procédures en vigueur. Les fournisseurs intéressés sont invités à se rapprocher des Autorités de la SAR pour accomplir, au besoin, les formalités d’agrément. La date limite de dépôt des demandes d’agrément est fixée au 28 Février 2011. Les demandes d’agrément seront adressées :

Société Africaine de Raffinage 15, Boulevard de la République Dakar, Sénégal

ou

Société Africaine de Raffinage BP : 203 Dakar, Sénégal.

Des hommes, des femmes : le chemin du pétrole… 15, Boulevard de la République – BP 203 – Dakar, SENEGAL Tél : +221 33 823 46 84 – Fax : +221 33 821 10 10 www.sar.sn

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AVIS DE MARCHÉ DE FOURNITURES

toutes nos

Titre : Fourniture et pose (installation) d’un groupe turbine-alternateur et équipements associés. Réf. : 01/2011/ACF-UK/9ACP ZR/Microcentrale Mutwanga. Financement : 9e Fonds Européen de Développement (FED9). Description du marché : Le marché consiste à la fourniture et la pose (installation) d’un groupe turbine-alternateur et équipements associés, pour l’électrification rurale de Mutwanga, Province du Nord-Kivu, RD Congo. Le marché est à lots : 1. Conduite forcée et accessoires. 2. Composants électromécaniques : une turbine, un alternateur, un régulateur, un système de contrôle et commande. Le DAO est à obtenir sur : http://projetmutwanga.gorillacd.org/

annonces sur le site : www.jeuneafrique.com

Africa Conservation Fund-Uk

JEUNE AFRIQUE N° 2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011

Emmanuel de Merode, Chef de Projet

Communiqué - Avis de Marché

LA SOCIETE AFRICAINE DE RAFFINAGE REVIENT SUR LE MARCHE INTERNATIONAL


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AC

CONSEILLER AUPRÈS DU CONSEIL D’ADMINISTRATION SUR L’ARABIE-SAOUDITE

Recrutement

Spécialiste de questions politiques et culturelles Rémunération généreuse et conditions flexibles

Conseiller supérieur auprès de notre client, l’une des principales banques privées européennes, vous travaillerez à niveau stratégique pour assurer un conseil en matière politique et culturelle concernant le commerce en Arabie-Saoudite. Vous pourriez également combiner ce poste avec une position à temps plein existante puisque le client offre des heures de travails flexibles. Si vous ne résidez pas dans la région vous devrez passer de longues périodes en Arabie-Saoudite. Le candidat idéal doit : • Avoir des connaissances profondes et confirmées de la société, du gouvernement et de la famille royale de l’Arabie Saoudite ; • Comprendre comment les éléments ci-dessus influent sur les activités commerciales internationales ; • Avoir accès à un réseau actif de contacts de haut niveau en Arabie-Saoudite ; et • Avoir une excellente connaissance du français ou de l’anglais et de la langue arabe (écrite et orale). Merci d’adresser votre candidature (CV + lettre de motivation) par e-mail : info@cynosureassociates.co.uk., en précisant la réf. : conseiller – conseil d’administration, avant le 28 février 2011. Votre candidature sera traitée de manière confidentielle.

COMISSÃO DA CEDEAO

ECOWAS COMMISSION

COMMISSION DE LA CEDEAO

CHANGEMENT DE DATE DE CLOTURE DES CANDIDATURES En raison des contraintes administratives et techniques, la Commission de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, CEDEAO, a décidé de faire avancer la date de clôture des candidatures pour les postes des Directeurs publiés dans l’édition no 2610 du 16 – 22 janvier 2011 de Jeune Afrique, du 7 mars au 18 février 2011. La Commission de la CEDEAO présente ses regrets tout inconvénient encouru à la suite de ce changement. La Commission de la CEDEAO saisit cette occasion pour remercier tous les ressortissants de la CEDEAO pour leur soutien sans faille au processus d’intégration régionale durant toutes ces années.

www.sai2000.org COURS INTENSIFS D’ANGLAIS École Commerciale Privée fondée en 1955 THIS SCHOOL IS AUTHORIZED UNDER FEDERAL LAW TO ENROLL NONIMMIGRANT ALIEN STUDENTS

Comptabilité sur ordinateur Gestion de bureau sur ordinateur dBase Management® Microsoft Office Suite - Windows Traitement de texte Microsoft® Lotus Suite - (T1) Internet access • Membre accrédité du “ACICS” • Établissement reconnu par le Département d’Éducation de l’État de New York • Commence dès ce mois-ci • Cours offerts le matin, l’après-midi et le soir. Tél. (212) 840-7111 Fax (212) 719-5922 SKYPE : StudentClub SPANISH-AMERICAN INSTITUTE 215 W 43 St. (Times Square) Manhattan, NY 10036-3913

info@sai2000.org

Program Manager (SSATP) The Sub-Saharan Africa Transport Policy (SSATP) partnership of 35 Sub-Saharan Africa countries, Regional Economic Communities (RECs) and donors facilitates the development of transport policies and implementation strategies to help the poor and strengthen the economy. SSATP is financed by donor contributions to a trust fund administered by the World Bank. The Program Management Team is based partly in Washington, D.C. and partly in Sub-Saharan Africa, and is administratively lodged within the World Bank’s Africa Transport Unit. SSATP has successfully completed its first development plan 2004-07 and is currently implementing its 2nd Development Plan based on three strategic themes: • Comprehensive pro-poor and pro-growth transport sector strategies • Sustainable institutional and financial arrangements for road infrastructure and rural and urban transport services • Improving transit transport along selected international corridors SSATP is currently seeking to recruit a Program Manager. This position will be based in Washington D.C., involves frequent travel to Africa, and will be for a period of two years. This is a high level position and requires several competencies and significant experience. Detailed information on the position, responsibilities, and requirements, as well as procedures to apply online can be found at http://www.worldbank.org/jobs (choose vacancy# 110118). The World Bank is committed to achieving diversity in terms of gender, nationality, culture, and educational background. Individuals with disabilities are equally encouraged to apply. The deadline for applications is February 25, 2011.

Working For a World Free of Poverty

JEUNE AFRIQUE N°2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011


102

AC

CONSEILLER AUPRÈS DU CONSEIL D’ADMINISTRATION SUR L’ARABIE-SAOUDITE

Recrutement

Spécialiste de questions politiques et culturelles Rémunération généreuse et conditions flexibles

Conseiller supérieur auprès de notre client, l’une des principales banques privées européennes, vous travaillerez à niveau stratégique pour assurer un conseil en matière politique et culturelle concernant le commerce en Arabie-Saoudite. Vous pourriez également combiner ce poste avec une position à temps plein existante puisque le client offre des heures de travails flexibles. Si vous ne résidez pas dans la région vous devrez passer de longues périodes en Arabie-Saoudite. Le candidat idéal doit : • Avoir des connaissances profondes et confirmées de la société, du gouvernement et de la famille royale de l’Arabie Saoudite ; • Comprendre comment les éléments ci-dessus influent sur les activités commerciales internationales ; • Avoir accès à un réseau actif de contacts de haut niveau en Arabie-Saoudite ; et • Avoir une excellente connaissance du français ou de l’anglais et de la langue arabe (écrite et orale). Merci d’adresser votre candidature (CV + lettre de motivation) par e-mail : info@cynosureassociates.co.uk., en précisant la réf. : conseiller – conseil d’administration, avant le 28 février 2011. Votre candidature sera traitée de manière confidentielle.

COMISSÃO DA CEDEAO

ECOWAS COMMISSION

COMMISSION DE LA CEDEAO

CHANGEMENT DE DATE DE CLOTURE DES CANDIDATURES En raison des contraintes administratives et techniques, la Commission de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, CEDEAO, a décidé de faire avancer la date de clôture des candidatures pour les postes des Directeurs publiés dans l’édition no 2610 du 16 – 22 janvier 2011 de Jeune Afrique, du 7 mars au 18 février 2011. La Commission de la CEDEAO présente ses regrets tout inconvénient encouru à la suite de ce changement. La Commission de la CEDEAO saisit cette occasion pour remercier tous les ressortissants de la CEDEAO pour leur soutien sans faille au processus d’intégration régionale durant toutes ces années.

www.sai2000.org COURS INTENSIFS D’ANGLAIS École Commerciale Privée fondée en 1955 THIS SCHOOL IS AUTHORIZED UNDER FEDERAL LAW TO ENROLL NONIMMIGRANT ALIEN STUDENTS

Comptabilité sur ordinateur Gestion de bureau sur ordinateur dBase Management® Microsoft Office Suite - Windows Traitement de texte Microsoft® Lotus Suite - (T1) Internet access • Membre accrédité du “ACICS” • Établissement reconnu par le Département d’Éducation de l’État de New York • Commence dès ce mois-ci • Cours offerts le matin, l’après-midi et le soir. Tél. (212) 840-7111 Fax (212) 719-5922 SKYPE : StudentClub SPANISH-AMERICAN INSTITUTE 215 W 43 St. (Times Square) Manhattan, NY 10036-3913

info@sai2000.org

Program Manager (SSATP) The Sub-Saharan Africa Transport Policy (SSATP) partnership of 35 Sub-Saharan Africa countries, Regional Economic Communities (RECs) and donors facilitates the development of transport policies and implementation strategies to help the poor and strengthen the economy. SSATP is financed by donor contributions to a trust fund administered by the World Bank. The Program Management Team is based partly in Washington, D.C. and partly in Sub-Saharan Africa, and is administratively lodged within the World Bank’s Africa Transport Unit. SSATP has successfully completed its first development plan 2004-07 and is currently implementing its 2nd Development Plan based on three strategic themes: • Comprehensive pro-poor and pro-growth transport sector strategies • Sustainable institutional and financial arrangements for road infrastructure and rural and urban transport services • Improving transit transport along selected international corridors SSATP is currently seeking to recruit a Program Manager. This position will be based in Washington D.C., involves frequent travel to Africa, and will be for a period of two years. This is a high level position and requires several competencies and significant experience. Detailed information on the position, responsibilities, and requirements, as well as procedures to apply online can be found at http://www.worldbank.org/jobs (choose vacancy# 110118). The World Bank is committed to achieving diversity in terms of gender, nationality, culture, and educational background. Individuals with disabilities are equally encouraged to apply. The deadline for applications is February 25, 2011.

Working For a World Free of Poverty

JEUNE AFRIQUE N°2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011


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AC Senior Africa Analyst

To find about more about this vacancy and to apply, please visit our website: www.oxan.com/About/Jobs

L'UE (Commission européenne/DG Education et Culture) offre des bourses d'études à des diplômés universitaires des pays de la Politique européenne de voisinage souhaitant étudier au Collège d'Europe L'UE (Commission européenne/DG Education et Culture) offre un nombre significatif de bourses d'études destinées à permettre à des diplômés universitaires des pays de la Politique européenne de voisinage de poursuivre des études post-universitaires au Collège d'Europe (campus de Bruges et Natolin (Varsovie)) durant l'année académique 2011-2012. Ces bourses couvrent les frais académiques ainsi que le logement et les repas.

Les pays concernés sont: l'Algérie, l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Biélorussie, l'Egypte, la Géorgie, Israël, la Jordanie, le Liban, la Libye, la Moldavie, le Maroc, l'Autorité palestinienne, la Syrie, la Tunisie et l'Ukraine. Les diplômés intéressés sont invités à envoyer leur candidature au bureau d'admission.

La date limite pour l'envoi des candidatures est le 15 mars 2011.

Pour plus d'information concernant le Collège, veuillez consulter notre site

Bureau d’admission Collège d’Europe Dijver 11 BE-8000 Brugge Belgique JEUNE AFRIQUE N° 2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011

www.coleurope.eu

Recrutement - Formation

Oxford Analytica, the global analysis and advisory firm, seeks a Senior Africa Analyst to cover the business and politics of the region. In addition to Africa expertise, excellent presentational skills are required for this position, which involves substantial client contact. The ability to write/edit with speed and accuracy is essential. The position is Oxford-based, and candidates must be eligible to work in the United Kingdom.


103

AC Senior Africa Analyst

To find about more about this vacancy and to apply, please visit our website: www.oxan.com/About/Jobs

L'UE (Commission européenne/DG Education et Culture) offre des bourses d'études à des diplômés universitaires des pays de la Politique européenne de voisinage souhaitant étudier au Collège d'Europe L'UE (Commission européenne/DG Education et Culture) offre un nombre significatif de bourses d'études destinées à permettre à des diplômés universitaires des pays de la Politique européenne de voisinage de poursuivre des études post-universitaires au Collège d'Europe (campus de Bruges et Natolin (Varsovie)) durant l'année académique 2011-2012. Ces bourses couvrent les frais académiques ainsi que le logement et les repas.

Les pays concernés sont: l'Algérie, l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Biélorussie, l'Egypte, la Géorgie, Israël, la Jordanie, le Liban, la Libye, la Moldavie, le Maroc, l'Autorité palestinienne, la Syrie, la Tunisie et l'Ukraine. Les diplômés intéressés sont invités à envoyer leur candidature au bureau d'admission.

La date limite pour l'envoi des candidatures est le 15 mars 2011.

Pour plus d'information concernant le Collège, veuillez consulter notre site

Bureau d’admission Collège d’Europe Dijver 11 BE-8000 Brugge Belgique JEUNE AFRIQUE N° 2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011

www.coleurope.eu

Recrutement - Formation

Oxford Analytica, the global analysis and advisory firm, seeks a Senior Africa Analyst to cover the business and politics of the region. In addition to Africa expertise, excellent presentational skills are required for this position, which involves substantial client contact. The ability to write/edit with speed and accuracy is essential. The position is Oxford-based, and candidates must be eligible to work in the United Kingdom.


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AC

REPUBLIQUE DU SENEGAL Un Peuple – Un But – Une Foi

Ministère de la Coopération Internationale, des Transports Aériens des Infrastructures et de l’Energie

AGEROUTE SENEGAL

REPUBLIQUE DU SENEGAL

(Agence des Travaux et de Gestion des Routes)

Avis à manifestation d’intérêt

Manifestation d’intérêt

Services de Consultants pour les études et la supervision des travaux de modernisation de la Ville de TIVAOUANE 1. L’Agence des Travaux et de Gestion des Routes (AGEROUTE) Sénégal, agissant au nom et pour le compte du Ministère de la Coopération Internationale, des Transports Aériens, des Infrastructures et de l’Energie, a l’intention de réaliser, sur financement de l’Etat du Sénégal (Budget Consolidé d’Investissement Gestion 2011-2015), les travaux de voiries et aménagements divers dans le cadre du Programme de Modernisation de la Ville de TIVAOUANE. 2. Les services de Consultants sont demandés pour les études, la surveillance et le contrôle de travaux de réhabilitation, d’élargissement, de construction de routes, d’aménagements paysagers et de trottoirs, d’assainissement des eaux pluviales, d’éclairage public moderne et de déplacements de réseaux divers dans le cadre du programme de modernisation de la ville de TIVAOUANE. 3. L’AGEROUTE, se propose ainsi d’utiliser une partie de ces fonds pour effectuer les paiements au titre du marché à passer pour les services de Consultants pour les études, la Surveillance et le Contrôle des travaux de voirie et des aménagements divers dans le cadre dudit Programme. 4. Les services comprennent notamment : - Les études et la validation de plans d’exécution des travaux de voirie et des divers aménagements tels que l’assainissement des eaux pluviales, l’aménagement paysager, l’éclairage public, etc. - La surveillance et le contrôle technique de l’ensemble des travaux, - L’appui technique et la réalisation des études de déplacements et d’aménagement urbains - La vérification des décomptes et l’établissement des métrés contradictoires avec l’entreprise de construction, - La réception des travaux (réceptions partielles, réceptions provisoires et définitives) 5. L’AGEROUTE invite les firmes et groupements volontaires de firmes intéressés à manifester leur intérêt à fournir les services décrits ci-dessus. Les firmes intéressées doivent fournir les informations ci-après indiquant qu’elles sont qualifiées pour exécuter les services : - Activités principales et années d’existence ; - Qualifications dans le domaine du service sollicité (brochures et références concernant les études, la surveillance et le contrôle de travaux analogues) ; - Capacités techniques et de gestion de la firme ; - Qualifications générales et nombre de personnel permanent ; - Références de clients et - Toute autre information jugée pertinente. NB : Une candidature n’est valable que si elle est présentée par des Consultants originaires des Etats membres de l’UEMOA ou d’Etat appliquant le principe de réciprocité ou par un groupement constitué conjointement de Consultants communautaires et non communautaires. 6. Les candidats seront présélectionnés selon les règles de procédure des décrets n° 2011-04 du 6 janvier 2011 et n° 2010-1188 du 13 septembre 2010 modifiant et complétant le décret n° 2007-545 du 25 avril 2007 portant code des marchés publics du Sénégal et sur la base d’une sélection « qualité – cout » et de la grille d’évaluation des critères ci-après : ✓ Qualifications générales en études, contrôle et surveillance de projets routiers en milieu urbain comprenant un volet assainissement : notée sur 10 points ✓ Expériences spécifiques en missions similaires au cours des dix (10) dernières années notée sur 50 points de la manière suivante : • un (1) contrat d’études d’exécution ou détaillées de travaux de routes 1x2 voies revêtues en enrobés denses, en travaux neufs, renforcement ou réhabilitation d’un linéaire au moins égal à 20 kms, noté sur (5 points). • un (1) contrat d’études d’exécution ou détaillées de travaux neufs, renforcement ou réhabilitation de routes revêtues en enrobés denses en 2x2 voies d’un linéaire au moins égal à 5kms et comportant un volet assainissement des eaux pluviales (5 points) et un volet éclairage public et/ou dévoiement de réseaux électriques (5 points). • un (1) contrat de surveillance et contrôle de travaux de routes 1x2 voies revêtues en enrobés denses, en travaux neufs, renforcement ou réhabilitation d’un linéaire au moins égal à 20 kms, noté sur (5 points). • un (1) contrat de surveillance et contrôle de travaux neufs, renforcement ou réhabilitation de routes revêtues en enrobés denses en 2x2 voies d’un linéaire au moins égal à 5 kms et comportant un volet assainissement des eaux pluviales (5 points) et un volet éclairage public et/ou dévoiement de réseaux électriques (5 points). • un (1) contrat de prestation d’études d’aménagements et de déplacements urbains (5 points). • un (1) contrat de prestation d’études d’actualisation et d’élaboration de Plan Directeur d’Urbanisme (5 points). • un (1) contrat de prestation d’études socio-économiques de projets d’aménagement de voirie urbaine (5 points). • un (1) contrat de prestation d’études d’impact environnemental de projets d’aménagement de voirie urbaine (5 points). ✓ Qualifications du personnel du candidat notées sur 40 points : le candidat devra disposer d’un personnel composé au minimum d’experts ayant les qualifications et compétences suivantes : • un Chef de mission, Ingénieur du Génie Civil justifiant d’une solide expérience d’au moins quinze (15) années dont cinq (5) années confirmées dans la conduite d’études générales, de travaux d’infrastructures en milieu urbain (3 points), le contrôle de travaux routiers (3 points) et sur les questions de transport, de trafic, d’aménagement urbain et d’élaboration de plan de déplacements urbains (2 points) ; • un Ingénieur routier, titulaire d’un diplôme d’ingénieur Génie civil ou équivalent disposant d’au moins dix (10) années d’expérience. Il devra avoir réalisé, au cours des dix dernières années, en tant qu’Ingénieur routier, au moins une (01) mission d’études d’exécution ou détaillées de travaux de routes revêtues en enrobés denses en 1x2 voies d’au moins 20 kms ou 2x2 voies d’au moins 5 kms (2 points) et une (01) mission de supervision de travaux de routes revêtues en enrobés denses en 1x2 voies d’au moins 20 kms ou 2x2 voies d’au moins 5 kms (2 points). • un Ingénieur géotechnicien, titulaire d’un diplôme d’ingénieur Génie civil ou équivalent disposant d’au moins dix (10) années d’expérience dont cinq (5) dans le domaine du contrôle géotechnique de travaux de routes revêtues en enrobés denses (2 points).

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REPUBLIQUE DU SENEGAL Un Peuple – Un But – Une Foi

Ministère de la Coopération Internationale, des Transports Aériens des Infrastructures et de l’Energie

AGEROUTE SENEGAL

REPUBLIQUE DU SENEGAL

(Agence des Travaux et de Gestion des Routes)

Avis à manifestation d’intérêt

Manifestation d’intérêt

Services de Consultants pour les études et la supervision des travaux de modernisation de la Ville de TIVAOUANE 1. L’Agence des Travaux et de Gestion des Routes (AGEROUTE) Sénégal, agissant au nom et pour le compte du Ministère de la Coopération Internationale, des Transports Aériens, des Infrastructures et de l’Energie, a l’intention de réaliser, sur financement de l’Etat du Sénégal (Budget Consolidé d’Investissement Gestion 2011-2015), les travaux de voiries et aménagements divers dans le cadre du Programme de Modernisation de la Ville de TIVAOUANE. 2. Les services de Consultants sont demandés pour les études, la surveillance et le contrôle de travaux de réhabilitation, d’élargissement, de construction de routes, d’aménagements paysagers et de trottoirs, d’assainissement des eaux pluviales, d’éclairage public moderne et de déplacements de réseaux divers dans le cadre du programme de modernisation de la ville de TIVAOUANE. 3. L’AGEROUTE, se propose ainsi d’utiliser une partie de ces fonds pour effectuer les paiements au titre du marché à passer pour les services de Consultants pour les études, la Surveillance et le Contrôle des travaux de voirie et des aménagements divers dans le cadre dudit Programme. 4. Les services comprennent notamment : - Les études et la validation de plans d’exécution des travaux de voirie et des divers aménagements tels que l’assainissement des eaux pluviales, l’aménagement paysager, l’éclairage public, etc. - La surveillance et le contrôle technique de l’ensemble des travaux, - L’appui technique et la réalisation des études de déplacements et d’aménagement urbains - La vérification des décomptes et l’établissement des métrés contradictoires avec l’entreprise de construction, - La réception des travaux (réceptions partielles, réceptions provisoires et définitives) 5. L’AGEROUTE invite les firmes et groupements volontaires de firmes intéressés à manifester leur intérêt à fournir les services décrits ci-dessus. Les firmes intéressées doivent fournir les informations ci-après indiquant qu’elles sont qualifiées pour exécuter les services : - Activités principales et années d’existence ; - Qualifications dans le domaine du service sollicité (brochures et références concernant les études, la surveillance et le contrôle de travaux analogues) ; - Capacités techniques et de gestion de la firme ; - Qualifications générales et nombre de personnel permanent ; - Références de clients et - Toute autre information jugée pertinente. NB : Une candidature n’est valable que si elle est présentée par des Consultants originaires des Etats membres de l’UEMOA ou d’Etat appliquant le principe de réciprocité ou par un groupement constitué conjointement de Consultants communautaires et non communautaires. 6. Les candidats seront présélectionnés selon les règles de procédure des décrets n° 2011-04 du 6 janvier 2011 et n° 2010-1188 du 13 septembre 2010 modifiant et complétant le décret n° 2007-545 du 25 avril 2007 portant code des marchés publics du Sénégal et sur la base d’une sélection « qualité – cout » et de la grille d’évaluation des critères ci-après : ✓ Qualifications générales en études, contrôle et surveillance de projets routiers en milieu urbain comprenant un volet assainissement : notée sur 10 points ✓ Expériences spécifiques en missions similaires au cours des dix (10) dernières années notée sur 50 points de la manière suivante : • un (1) contrat d’études d’exécution ou détaillées de travaux de routes 1x2 voies revêtues en enrobés denses, en travaux neufs, renforcement ou réhabilitation d’un linéaire au moins égal à 20 kms, noté sur (5 points). • un (1) contrat d’études d’exécution ou détaillées de travaux neufs, renforcement ou réhabilitation de routes revêtues en enrobés denses en 2x2 voies d’un linéaire au moins égal à 5kms et comportant un volet assainissement des eaux pluviales (5 points) et un volet éclairage public et/ou dévoiement de réseaux électriques (5 points). • un (1) contrat de surveillance et contrôle de travaux de routes 1x2 voies revêtues en enrobés denses, en travaux neufs, renforcement ou réhabilitation d’un linéaire au moins égal à 20 kms, noté sur (5 points). • un (1) contrat de surveillance et contrôle de travaux neufs, renforcement ou réhabilitation de routes revêtues en enrobés denses en 2x2 voies d’un linéaire au moins égal à 5 kms et comportant un volet assainissement des eaux pluviales (5 points) et un volet éclairage public et/ou dévoiement de réseaux électriques (5 points). • un (1) contrat de prestation d’études d’aménagements et de déplacements urbains (5 points). • un (1) contrat de prestation d’études d’actualisation et d’élaboration de Plan Directeur d’Urbanisme (5 points). • un (1) contrat de prestation d’études socio-économiques de projets d’aménagement de voirie urbaine (5 points). • un (1) contrat de prestation d’études d’impact environnemental de projets d’aménagement de voirie urbaine (5 points). ✓ Qualifications du personnel du candidat notées sur 40 points : le candidat devra disposer d’un personnel composé au minimum d’experts ayant les qualifications et compétences suivantes : • un Chef de mission, Ingénieur du Génie Civil justifiant d’une solide expérience d’au moins quinze (15) années dont cinq (5) années confirmées dans la conduite d’études générales, de travaux d’infrastructures en milieu urbain (3 points), le contrôle de travaux routiers (3 points) et sur les questions de transport, de trafic, d’aménagement urbain et d’élaboration de plan de déplacements urbains (2 points) ; • un Ingénieur routier, titulaire d’un diplôme d’ingénieur Génie civil ou équivalent disposant d’au moins dix (10) années d’expérience. Il devra avoir réalisé, au cours des dix dernières années, en tant qu’Ingénieur routier, au moins une (01) mission d’études d’exécution ou détaillées de travaux de routes revêtues en enrobés denses en 1x2 voies d’au moins 20 kms ou 2x2 voies d’au moins 5 kms (2 points) et une (01) mission de supervision de travaux de routes revêtues en enrobés denses en 1x2 voies d’au moins 20 kms ou 2x2 voies d’au moins 5 kms (2 points). • un Ingénieur géotechnicien, titulaire d’un diplôme d’ingénieur Génie civil ou équivalent disposant d’au moins dix (10) années d’expérience dont cinq (5) dans le domaine du contrôle géotechnique de travaux de routes revêtues en enrobés denses (2 points).

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AC

REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO MINISTERE DES INFRASTRUCTURES, TRAVAUX PUBLICS ET RECONSTRUCTION

Projet de Réouverture et d’Entretien des Routes Hautement Prioritaires (PRO-ROUTES)

SOLLICITATION DE MANIFESTATION D’INTERET

Service de Consultant : RECRUTEMENT D’UN CONSULTANT POUR LA REALISATION DE L’AUDIT TECHNIQUE DU PROJET PRO-ROUTES. N° Avis : AMI N°001 /CI/PRO-ROUTES/2011 - Date de l’Avis : 31 Janvier 2011

1. Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo a obtenu un don de l’Association internationale de développement et un don de DFID, globalement de 123 millions de USD, pour financer le Projet Pro-Routes dont l’objectif global est de contribuer à la réduction de la pauvreté grâce au rétablissement et à la préservation durable des infrastructures routières permettant l’accès des populations aux marchés et aux services sociaux et administratifs nécessaires à la relance socio-économique et à la réintégration du pays. Il a l’intention d’utiliser une partie du montant de ces dons pour effectuer les paiements au titre du Contrat de services au titre du recrutement d’un Consultant pour la Réalisation de l’Audit Technique du projet Pro-Routes, dont la Cellule Infrastructures (CI) est l’Agence d’exécution. 2. Pour répondre aux Critères de sélection, le Consultant devra avoir les compétences nécessaires et une expérience confirmée en matière d’exécution et/ou contrôle de travaux de routes en terre. Pour la réalisation de la mission, l’expert devra présenter au moins le profil suivant : • Etre détenteur d’un diplôme universitaire d’Ingénieur Civil ou Travaux Publics, et/ou d’autre diplôme universitaire équivalent (Bac + 5) ; • Avoir une expérience globale d’au moins quinze (15) ans dans la gestion des projets routiers ; • Avoir une expérience d’au moins cinq (5) ans dans l’exécution des travaux de routes en terre ; • Avoir une expérience d’au moins cinq (5) ans d’assistance dans la réalisation des études et/ou du contrôle de routes en terre ; • Avoir réalisé au moins deux (2) missions d’audit technique de projets routiers similaires au cours des cinq (5) dernières années de préférence en Afrique subsaharienne ; • Avoir une bonne connaissance des procédures des bailleurs, notamment de la Banque Mondiale, en matière de gestion des marchés de travaux routiers et de passation des marchés ; • Avoir une bonne connaissance de logiciels informatiques standards ;

JEUNE AFRIQUE N° 2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011

Les prestations de l’Auditeur seront réalisées pour une durée de trois (3 ans) extensible après évaluation des performances de l’Auditeur qui devront être jugées satisfaisantes par le Client. 3. La Cellule Infrastructures invite les Candidats admissibles, Consultants Individuels à manifester leur intérêt à fournir les services précités. Les Candidats potentiels intéressés doivent fournir les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exécuter ces services (un CV détaillé indiquant l’exécution des contrats analogues, expériences dans des conditions semblables, disponibilité des connaissances nécessaires, une lettre de motivation - 2 pages maximum- expliquant les motivations profondes d’intérêts pour la mission, les qualifications et expériences spécifiques pertinentes et similaires à prendre en compte pour l’examen des expressions d’intérêts en vue de la sélection, etc.). 4. Un Consultant sera sélectionné, suivant la méthode de « Sélection Consultants Individuels », en accord avec les procédures définies à la section V des Directives : « Sélection et Emploi des Consultants par les emprunteurs de la Banque Mondiale », édition Mai 2004, révisée en octobre 2006, Mai 2010 et Janvier 2011. 5. Les Consultants intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence à la CI à l’adresse ci-dessous, les jours ouvrables de lundi à vendredi de 9h00 à 16h00, heures locales. Les manifestations d’intérêts, rédigées en langue française, doivent parvenir par courrier ou par e-mail à l’adresse ci-dessous au plus tard le 22 Février 2011 à 15heures précises locales et porter clairement la mention : « AMI N°001/CI/PRO-ROUTES/2011 : RECRUTEMENT D’UN CONSULTANT POUR LA RÉALISATION DE L’AUDIT TECHNIQUE DU PROJET PRO-ROUTES. » Cellule Infrastructures du Ministère des Infrastructures, Travaux Publics et Reconstruction 70A, avenue Roi Baudouin 70A, Commune de la Gombe - Kinshasa République Démocratique du Congo Tél : +243 81 03 764 94 - Email : celluleinfra@vodanet.cd Amidou SERE, Coordonnateur

Manifestation d’intérêt

• un (1) Ingénieur Topographe qui devra justifier d’au moins dix (10) années d’expérience dont cinq (5) années dans le domaine du contrôle topographique de travaux de routes revêtues (2 points). • un Ingénieur hydraulicien titulaire d’un diplôme d’ingénieur en génie civil avec spécialisation en assainissement ou équivalent qui devra justifier d’au moins dix (10) ans d’expérience. Il devra avoir réalisé, au cours des dix dernières années, en tant qu’Ingénieur hydraulicien, au moins une (01) mission d’études d’exécution ou détaillées de travaux d’assainissement d’eaux pluviales réalisés en milieu urbain (1 point) et une (01) mission de supervision de travaux d’assainissement d’eaux pluviales réalisés en milieu urbain (1 point). • un (1) Ingénieur Electricien ou Electromécanicien ou équivalent qui devra justifier d’au moins dix (10) années d’expérience. Il devra avoir réalisé, au cours des dix (10) dernières années, l’étude d’au moins un projet d’éclairage public (1 point) et supervisé au moins un projet d’éclairage public (1 point). • un Architecte – urbaniste ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Economiste des transports ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Ingénieur du Génie Civil ou équivalent spécialisé dans la gestion du trafic, ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Ingénieur en Transport spécialisé dans l’organisation des réseaux de transport en commun, ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Socio – Economiste spécialisé dans les questions urbaines, ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Urbaniste ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Statisticien – Economiste spécialiste des enquêtes – ménages, ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Environnementaliste ayant au moins dix (10) ans d’expérience et ayant une spécialisation dans l’évaluation économique des nuisances urbaines dues aux transports (2 points). • un Informaticien spécialisé dans le traitement des enquêtes de trafic et enquête – ménage, ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • Un géographe – informaticien spécialisé dans la mise en place de système d’informations géographiques et de système de gestion automatisée de grande ville ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). 7. Le nombre minimum de points requis est de soixante dix (70) et une liste restreinte de cinq à sept bureaux d’études ou firmes sera établie à l’issue de cet appel public à manifestation d’intérêt. Les candidats intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires, à l’adresse mentionnée ci-dessous et aux heures suivantes : 08 H 00 à 13 H 30 et 14 H 30 à 17 H. Les dossiers de candidatures doivent être déposées au secrétariat de la Cellule de Passation des Marchés de l’AGEROUTE, sis à l’adresse ci-dessous au plus tard le jeudi 29 Mars 2011 à 10 heures 30 minutes précises (heure locale). Agence des Travaux et de Gestion des Routes, rue David DIOP x F, Fann Résidence, BP : 25 242 Dakar-Fann Tel: (221) 33 869 07 51 Fax : (221) 33 864 63 50 Email : mcfaye@ageroute.sn ou ndndiaye@ageroute.sn ou bmmbow@ageroute.sn . 8. La langue de travail sera le français et il est à noter que l’intérêt manifesté par un bureau d’études ou une firme, n’implique aucune obligation de la part de l’AGEROUTE de l’inclure sur la liste restreinte. Le Directeur Général de l’AGEROUTE Ibrahima NDIAYE


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REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO MINISTERE DES INFRASTRUCTURES, TRAVAUX PUBLICS ET RECONSTRUCTION

Projet de Réouverture et d’Entretien des Routes Hautement Prioritaires (PRO-ROUTES)

SOLLICITATION DE MANIFESTATION D’INTERET

Service de Consultant : RECRUTEMENT D’UN CONSULTANT POUR LA REALISATION DE L’AUDIT TECHNIQUE DU PROJET PRO-ROUTES. N° Avis : AMI N°001 /CI/PRO-ROUTES/2011 - Date de l’Avis : 31 Janvier 2011

1. Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo a obtenu un don de l’Association internationale de développement et un don de DFID, globalement de 123 millions de USD, pour financer le Projet Pro-Routes dont l’objectif global est de contribuer à la réduction de la pauvreté grâce au rétablissement et à la préservation durable des infrastructures routières permettant l’accès des populations aux marchés et aux services sociaux et administratifs nécessaires à la relance socio-économique et à la réintégration du pays. Il a l’intention d’utiliser une partie du montant de ces dons pour effectuer les paiements au titre du Contrat de services au titre du recrutement d’un Consultant pour la Réalisation de l’Audit Technique du projet Pro-Routes, dont la Cellule Infrastructures (CI) est l’Agence d’exécution. 2. Pour répondre aux Critères de sélection, le Consultant devra avoir les compétences nécessaires et une expérience confirmée en matière d’exécution et/ou contrôle de travaux de routes en terre. Pour la réalisation de la mission, l’expert devra présenter au moins le profil suivant : • Etre détenteur d’un diplôme universitaire d’Ingénieur Civil ou Travaux Publics, et/ou d’autre diplôme universitaire équivalent (Bac + 5) ; • Avoir une expérience globale d’au moins quinze (15) ans dans la gestion des projets routiers ; • Avoir une expérience d’au moins cinq (5) ans dans l’exécution des travaux de routes en terre ; • Avoir une expérience d’au moins cinq (5) ans d’assistance dans la réalisation des études et/ou du contrôle de routes en terre ; • Avoir réalisé au moins deux (2) missions d’audit technique de projets routiers similaires au cours des cinq (5) dernières années de préférence en Afrique subsaharienne ; • Avoir une bonne connaissance des procédures des bailleurs, notamment de la Banque Mondiale, en matière de gestion des marchés de travaux routiers et de passation des marchés ; • Avoir une bonne connaissance de logiciels informatiques standards ;

JEUNE AFRIQUE N° 2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011

Les prestations de l’Auditeur seront réalisées pour une durée de trois (3 ans) extensible après évaluation des performances de l’Auditeur qui devront être jugées satisfaisantes par le Client. 3. La Cellule Infrastructures invite les Candidats admissibles, Consultants Individuels à manifester leur intérêt à fournir les services précités. Les Candidats potentiels intéressés doivent fournir les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exécuter ces services (un CV détaillé indiquant l’exécution des contrats analogues, expériences dans des conditions semblables, disponibilité des connaissances nécessaires, une lettre de motivation - 2 pages maximum- expliquant les motivations profondes d’intérêts pour la mission, les qualifications et expériences spécifiques pertinentes et similaires à prendre en compte pour l’examen des expressions d’intérêts en vue de la sélection, etc.). 4. Un Consultant sera sélectionné, suivant la méthode de « Sélection Consultants Individuels », en accord avec les procédures définies à la section V des Directives : « Sélection et Emploi des Consultants par les emprunteurs de la Banque Mondiale », édition Mai 2004, révisée en octobre 2006, Mai 2010 et Janvier 2011. 5. Les Consultants intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence à la CI à l’adresse ci-dessous, les jours ouvrables de lundi à vendredi de 9h00 à 16h00, heures locales. Les manifestations d’intérêts, rédigées en langue française, doivent parvenir par courrier ou par e-mail à l’adresse ci-dessous au plus tard le 22 Février 2011 à 15heures précises locales et porter clairement la mention : « AMI N°001/CI/PRO-ROUTES/2011 : RECRUTEMENT D’UN CONSULTANT POUR LA RÉALISATION DE L’AUDIT TECHNIQUE DU PROJET PRO-ROUTES. » Cellule Infrastructures du Ministère des Infrastructures, Travaux Publics et Reconstruction 70A, avenue Roi Baudouin 70A, Commune de la Gombe - Kinshasa République Démocratique du Congo Tél : +243 81 03 764 94 - Email : celluleinfra@vodanet.cd Amidou SERE, Coordonnateur

Manifestation d’intérêt

• un (1) Ingénieur Topographe qui devra justifier d’au moins dix (10) années d’expérience dont cinq (5) années dans le domaine du contrôle topographique de travaux de routes revêtues (2 points). • un Ingénieur hydraulicien titulaire d’un diplôme d’ingénieur en génie civil avec spécialisation en assainissement ou équivalent qui devra justifier d’au moins dix (10) ans d’expérience. Il devra avoir réalisé, au cours des dix dernières années, en tant qu’Ingénieur hydraulicien, au moins une (01) mission d’études d’exécution ou détaillées de travaux d’assainissement d’eaux pluviales réalisés en milieu urbain (1 point) et une (01) mission de supervision de travaux d’assainissement d’eaux pluviales réalisés en milieu urbain (1 point). • un (1) Ingénieur Electricien ou Electromécanicien ou équivalent qui devra justifier d’au moins dix (10) années d’expérience. Il devra avoir réalisé, au cours des dix (10) dernières années, l’étude d’au moins un projet d’éclairage public (1 point) et supervisé au moins un projet d’éclairage public (1 point). • un Architecte – urbaniste ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Economiste des transports ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Ingénieur du Génie Civil ou équivalent spécialisé dans la gestion du trafic, ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Ingénieur en Transport spécialisé dans l’organisation des réseaux de transport en commun, ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Socio – Economiste spécialisé dans les questions urbaines, ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Urbaniste ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Statisticien – Economiste spécialiste des enquêtes – ménages, ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • un Environnementaliste ayant au moins dix (10) ans d’expérience et ayant une spécialisation dans l’évaluation économique des nuisances urbaines dues aux transports (2 points). • un Informaticien spécialisé dans le traitement des enquêtes de trafic et enquête – ménage, ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). • Un géographe – informaticien spécialisé dans la mise en place de système d’informations géographiques et de système de gestion automatisée de grande ville ayant au moins dix (10) ans d’expérience (2 points). 7. Le nombre minimum de points requis est de soixante dix (70) et une liste restreinte de cinq à sept bureaux d’études ou firmes sera établie à l’issue de cet appel public à manifestation d’intérêt. Les candidats intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires, à l’adresse mentionnée ci-dessous et aux heures suivantes : 08 H 00 à 13 H 30 et 14 H 30 à 17 H. Les dossiers de candidatures doivent être déposées au secrétariat de la Cellule de Passation des Marchés de l’AGEROUTE, sis à l’adresse ci-dessous au plus tard le jeudi 29 Mars 2011 à 10 heures 30 minutes précises (heure locale). Agence des Travaux et de Gestion des Routes, rue David DIOP x F, Fann Résidence, BP : 25 242 Dakar-Fann Tel: (221) 33 869 07 51 Fax : (221) 33 864 63 50 Email : mcfaye@ageroute.sn ou ndndiaye@ageroute.sn ou bmmbow@ageroute.sn . 8. La langue de travail sera le français et il est à noter que l’intérêt manifesté par un bureau d’études ou une firme, n’implique aucune obligation de la part de l’AGEROUTE de l’inclure sur la liste restreinte. Le Directeur Général de l’AGEROUTE Ibrahima NDIAYE


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République du Congo - Unité – Travail - Progrès

Ministère de l’enseignement primaire, secondaire et de l’alphabétisation

PROJET D’APPUI À L’EDUCATION DE BASE (PRAEBASE) UNITÉ DE COORDINATION DU PROJET (U.C.P.) B.P. 49 - Tél. 666 44 56- Email : praebase_congo@yahoo.fr - Brazzaville

SOLLICITATION DE MANIFESTATIONS D’INTERET POUR LE RECRUTEMENT D’UN CONSULTANT CHARGE DE FINALISER LE SYSTEME D’INFORMATION POUR LA GESTION DE

Manifestation d’intérêt

L’EDUCATION (SIGE) ET LA CARTE SCOLAIRE DE LA REPUBLIQUE DU CONGO - SERVICE DE CONSULTANTS - DON N° : H 487.CG 1. Le Gouvernement de la République du Congo a reçu un don de l’Association Internationale de Développement (IDA), d’un montant de 15 millions de dollars US et a l’intention d’utiliser une partie du montant de ce Don pour effectuer les paiements au titre du contrat suivant : Recrutement d’un cabinet pour finaliser le système d’information pour la gestion de l’éducation (SIGE) et la carte scolaire de la République du Congo. 2. Les services comprennent : En termes d’objectif : • Mettre en place un système informatique qui, à terme, intégrera toutes les données relatives aux activités de gestion et/ou pilotage du secteur de l’éducation au Congo ; • Faire que ce système informatique soit le cœur du processus de collecte, traitement et de stockage d’une part, et de l’exploitation, l’analyse et la diffusion des données actuelles et présentées sous une forme conviviale et en temps voulu d’autre part, pour tout le secteur de l’éducation au Congo. En termes de résultats attendus : - Pour le système d’information : - Le système d’information existant est évalué et les insuffisances à corriger sont identifiées, et un système performant élaboré est mis en place ; - Une meilleure méthode de collecte des statistiques de l’éducation est identifiée ainsi que les instruments à utiliser ; - Les indicateurs nécessaires au pilotage du système éducatif du Congo au niveau national et départemental sont définis ; - Le plan d’extension de la base de données existante au niveau des structures centrales et départementales des ministères en charge de l’éducation est conçu par rapport aux données nouvelles et à leur évolution dans le temps ; - L’architecture des réseaux informatiques (bases de données) au niveau central et départemental est définie ainsi que les procédures d’échange et de mise à jour des informations. - Pour la carte scolaire : - Le plan de généralisation de la carte scolaire au niveau national à partir des résultats de l’enquête pilote réalisé dans le département des Plateaux est élaboré et mis en œuvre ; - La carte géographique des écoles et des universités au niveau des départements, des districts et des communes est élaborée. 3. Les qualifications requises sont les suivantes : Le cabinet devra être composé de spécialistes (personnel clé) défini ainsi qu’il suit : - Un planificateur de l’éducation ayant une formation universitaire du second ou troisième niveau avec une expérience professionnelle d’au moins huit (8) ans dans une administration centrale du ministère de l’éducation nationale. L’expérience professionnelle devra entre autres porter sur la planification et la gestion de l’éducation au niveau central, départemental et local, la mise en place d’un système d’information et l’élaboration de la carte scolaire ; - Un ingénieur informaticien avec une expérience professionnelle d’au moins cinq (5) ans dans la mise en place et l’exploitation des bases de données relationnelles à des fins d’analyse d’information appliquée à la gestion de l’éducation, une capacité de formation en informatique, une bonne connaissance dans la mise en œuvre des applications client/serveur en environnement réseaux, Intranet, Extranet…Ce spécialiste devra par ailleurs avoir une bonne connaissance des instruments de collecte et de traitement des données, des listes d’indicateurs. - Un statisticien démographe possédant une expérience d’au moins cinq (5) ans dans les opérations d’enquête et de recensement de populations ayant déjà participé à la mise en place d’une carte scolaire. Une maîtrise des indicateurs démographiques permettant de projeter la demande future d’éducation et une capacité de formation des adultes dans la mise en place de la carte scolaire. - Ce personnel clé devra maîtriser la langue française. Toute expérience en Afrique, notamment l’Afrique centrale serait un atout. 4. Le cabinet sélectionné travaillera sous la supervision du Coordonnateur de l’Unité de Coordination du Projet d’Appui à l’Education de base (PRAEBASE) et en étroite collaboration avec le Coordonnateur Technique de la Partie A « renforcement des capacités de planification, de gestion et de formulation de politiques éducatives » 5. L’Unité de Coordination du Projet invite les cabinets admissibles à manifester leur intérêt à fournir les services décrits ci-dessus. Les cabinets intéressés doivent fournir les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exécuter ces services (brochures, références concernant l’exécution de contrats analogues, expérience dans des conditions semblables, curriculum vitae du personnel clé proposé, etc.). 6. Les cabinets seront sélectionnés en accord avec les procédures définies dans les Directives : Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale édition de mai 2004, révisée en mai 2010. 7. Les cabinets intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence notamment les termes de références y relatifs à l’adresse ci-dessous et aux heures ouvrables suivantes : 8 h 30 mn à 16 h (heures locales d’ouverture des bureaux). 8. Les manifestations d’intérêt doivent être rédigées en Français, déposés ou expédiés sous pli fermé à l’adresse ci-dessous au plus tard le 15 mars 2011 à 12 heures. Le pli devra porter la mention « SC 011 H487.CG : Recrutement d’un cabinet pour finaliser le système d’information pour la gestion de l’éducation (SIGE) et la carte scolaire de la République du Congo ; A n’ouvrir qu’en séance publique de dépouillement » A l’attention de : Mr le Coordonnateur de Unité de Coordination du PRAEBASE Rue : LAMOTHE (derrière le Ministère de la Fonction Publique) - Bureau : PRAEBASE - Code postal : 49 Téléphone : (00242) 666 44 56 - Adresse électronique : praebase_congo@yahoo.fr - Ville : BRAZZAVILLE - Pays : CONGO

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Ministère de l’enseignement primaire, secondaire et de l’alphabétisation

PROJET D’APPUI À L’EDUCATION DE BASE (PRAEBASE) UNITÉ DE COORDINATION DU PROJET (U.C.P.) B.P. 49 - Tél. 666 44 56- Email : praebase_congo@yahoo.fr - Brazzaville

SOLLICITATION DE MANIFESTATIONS D’INTERET POUR LE RECRUTEMENT D’UN CONSULTANT CHARGE DE FINALISER LE SYSTEME D’INFORMATION POUR LA GESTION DE

Manifestation d’intérêt

L’EDUCATION (SIGE) ET LA CARTE SCOLAIRE DE LA REPUBLIQUE DU CONGO - SERVICE DE CONSULTANTS - DON N° : H 487.CG 1. Le Gouvernement de la République du Congo a reçu un don de l’Association Internationale de Développement (IDA), d’un montant de 15 millions de dollars US et a l’intention d’utiliser une partie du montant de ce Don pour effectuer les paiements au titre du contrat suivant : Recrutement d’un cabinet pour finaliser le système d’information pour la gestion de l’éducation (SIGE) et la carte scolaire de la République du Congo. 2. Les services comprennent : En termes d’objectif : • Mettre en place un système informatique qui, à terme, intégrera toutes les données relatives aux activités de gestion et/ou pilotage du secteur de l’éducation au Congo ; • Faire que ce système informatique soit le cœur du processus de collecte, traitement et de stockage d’une part, et de l’exploitation, l’analyse et la diffusion des données actuelles et présentées sous une forme conviviale et en temps voulu d’autre part, pour tout le secteur de l’éducation au Congo. En termes de résultats attendus : - Pour le système d’information : - Le système d’information existant est évalué et les insuffisances à corriger sont identifiées, et un système performant élaboré est mis en place ; - Une meilleure méthode de collecte des statistiques de l’éducation est identifiée ainsi que les instruments à utiliser ; - Les indicateurs nécessaires au pilotage du système éducatif du Congo au niveau national et départemental sont définis ; - Le plan d’extension de la base de données existante au niveau des structures centrales et départementales des ministères en charge de l’éducation est conçu par rapport aux données nouvelles et à leur évolution dans le temps ; - L’architecture des réseaux informatiques (bases de données) au niveau central et départemental est définie ainsi que les procédures d’échange et de mise à jour des informations. - Pour la carte scolaire : - Le plan de généralisation de la carte scolaire au niveau national à partir des résultats de l’enquête pilote réalisé dans le département des Plateaux est élaboré et mis en œuvre ; - La carte géographique des écoles et des universités au niveau des départements, des districts et des communes est élaborée. 3. Les qualifications requises sont les suivantes : Le cabinet devra être composé de spécialistes (personnel clé) défini ainsi qu’il suit : - Un planificateur de l’éducation ayant une formation universitaire du second ou troisième niveau avec une expérience professionnelle d’au moins huit (8) ans dans une administration centrale du ministère de l’éducation nationale. L’expérience professionnelle devra entre autres porter sur la planification et la gestion de l’éducation au niveau central, départemental et local, la mise en place d’un système d’information et l’élaboration de la carte scolaire ; - Un ingénieur informaticien avec une expérience professionnelle d’au moins cinq (5) ans dans la mise en place et l’exploitation des bases de données relationnelles à des fins d’analyse d’information appliquée à la gestion de l’éducation, une capacité de formation en informatique, une bonne connaissance dans la mise en œuvre des applications client/serveur en environnement réseaux, Intranet, Extranet…Ce spécialiste devra par ailleurs avoir une bonne connaissance des instruments de collecte et de traitement des données, des listes d’indicateurs. - Un statisticien démographe possédant une expérience d’au moins cinq (5) ans dans les opérations d’enquête et de recensement de populations ayant déjà participé à la mise en place d’une carte scolaire. Une maîtrise des indicateurs démographiques permettant de projeter la demande future d’éducation et une capacité de formation des adultes dans la mise en place de la carte scolaire. - Ce personnel clé devra maîtriser la langue française. Toute expérience en Afrique, notamment l’Afrique centrale serait un atout. 4. Le cabinet sélectionné travaillera sous la supervision du Coordonnateur de l’Unité de Coordination du Projet d’Appui à l’Education de base (PRAEBASE) et en étroite collaboration avec le Coordonnateur Technique de la Partie A « renforcement des capacités de planification, de gestion et de formulation de politiques éducatives » 5. L’Unité de Coordination du Projet invite les cabinets admissibles à manifester leur intérêt à fournir les services décrits ci-dessus. Les cabinets intéressés doivent fournir les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exécuter ces services (brochures, références concernant l’exécution de contrats analogues, expérience dans des conditions semblables, curriculum vitae du personnel clé proposé, etc.). 6. Les cabinets seront sélectionnés en accord avec les procédures définies dans les Directives : Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale édition de mai 2004, révisée en mai 2010. 7. Les cabinets intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence notamment les termes de références y relatifs à l’adresse ci-dessous et aux heures ouvrables suivantes : 8 h 30 mn à 16 h (heures locales d’ouverture des bureaux). 8. Les manifestations d’intérêt doivent être rédigées en Français, déposés ou expédiés sous pli fermé à l’adresse ci-dessous au plus tard le 15 mars 2011 à 12 heures. Le pli devra porter la mention « SC 011 H487.CG : Recrutement d’un cabinet pour finaliser le système d’information pour la gestion de l’éducation (SIGE) et la carte scolaire de la République du Congo ; A n’ouvrir qu’en séance publique de dépouillement » A l’attention de : Mr le Coordonnateur de Unité de Coordination du PRAEBASE Rue : LAMOTHE (derrière le Ministère de la Fonction Publique) - Bureau : PRAEBASE - Code postal : 49 Téléphone : (00242) 666 44 56 - Adresse électronique : praebase_congo@yahoo.fr - Ville : BRAZZAVILLE - Pays : CONGO

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Unité – Travail - Progrès

Ministère de l’enseignement primaire et secondaire et de l’alphabétisation

PROJET D’APPUI À L’EDUCATION DE BASE (PRAEBASE) UNITÉ DE COORDINATION DU PROJET (U.C.P.) B.P. 49 - Tél. 666 44 56 - Email : praebase_congo@yahoo.fr - Brazzaville

Avis d’Appel d’Offres International Ouvert

N° 01

EDITION, IMPRESSION ET LIVRAISON DE MANUELS SCOLAIRES ET DE GUIDES PEDAGOGIQUES DE MATHEMATIQUES POUR LES CLASSES DE CP ET DE TROIS (3) LIVRETS D’EDUCATION CIVIQUE ET MORALE ET EDUCATION POUR LA PAIX (ECMP) - Don IDA n° H 487.CG Le Gouvernement de la République du Congo a obtenu un Don de l’Association Internationale de Développement (IDA) pour financer le coût du Projet d’Appui à l’Education de Base (PRAEBASE). Il se propose d’utiliser une partie du montant de ce Don, pour effectuer les paiements autorisés au titre du marché d’édition à partir de manuscrits, d’impression et de livraison dans les 112 Inspections de l’enseignement primaire du Congo de manuels scolaires et guides pédagogiques de mathématiques pour les classes de CP et de 3 livrets de l’éducation civique et morale et éducation pour la paix (ECMP). L’Unité de Coordination du Projet invite, par le présent avis d’appel d’offres international ouvert, les candidats remplissant les conditions requises à présenter une offre sous pli fermé cacheté, pour l’édition, l’impression et la livraison de manuels scolaires et de guides pédagogiques de mathématiques pour les classes de CP et de 3 livrets de l’éducation civique et morale et éducation pour la paix (ECMP) en un lot unique indivisible, réparti comme suit : Type de Fournitures (i) manuels de l’élève et guides pédagogiques de mathématiques

Bénéficiaires Unité de Coordination du Projet

Le processus se déroulera conformément aux procédures d’appel d’offres international décrites dans les Directives : Passation des marchés financés par les prêts de la BIRD et les crédits de l’IDA ; tous les candidats des pays satisfaisant aux critères de provenance énoncés dans les Directives sont admis à soumissionner. Les candidats intéressés remplissant les conditions requises peuvent obtenir un complément d’information auprès de l’Unité de Coordination du Projet et peuvent examiner/acquérir le dossier d’appel d’offres à l’adresse indiquée ci-après entre 8 h 00 et 16 H (heures locales d’ouverture des bureaux). Les candidats intéressés peuvent acheter, un jeu complet du document d’appel d’offres rédigé en français, sur demande écrite à l’adresse indiquée ci-après, moyennant paiement d’un montant non remboursable de 75.000 FCFA ou d’un montant équivalent en monnaie librement convertible. Le paiement devra être effectué par Virement au compte n° 30012 00101 182243 – 02101 28, domicilié à LA CONGOLAISE DE BANQUE, sise à Brazzaville, par Chèque de caisse ou au Comptant contre la délivrance d’un reçu de caisse. Le dossier peut être envoyé, à la demande, par courrier express ou par courrier électronique, dans les mêmes conditions. Les offres doivent être envoyées à l’adresse indiquée ci-après au plus tard le 16 mars 2011 à 12 h 00. L’offre doit être accompagnée d’une garantie d’offre d’un montant de 51 489 100 FCFA, libellée en FCFA ou dans une monnaie librement convertible sous forme de chèque certifié ou d’une caution bancaire d’une banque crédible établie ou ayant un correspondant en République du Congo. Toute soumission d’offres adressée par voie électronique ne sera pas autorisée. Les offres reçues après le délai fixé seront rejetées. Le pli devra porter la mention « AOI 01H 487.CG ; Edition, impression et livraison de manuels scolaires et de guides pédagogiques de mathématiques pour les classes de CP et de 3 livrets d’éducation civique et morale et éducation pour la paix (ECMP) ; A n’ouvrir qu’en séance publique de dépouillement » Les plis seront ouverts en présence des représentants des soumissionnaires qui souhaitent assister à la séance d’ouverture le 16 mars 2011 à 12 h 30, à l’adresse indiquée ci-après : Projet d’Appui à l’Education de Base (PRAEBASE) - Unité de Coordination du projet (U.C.P.) B.P. 49 - RUE LAMOTHE (derriere le Ministère de la Fonction Publique et de la Réforme de l’Etat) Tél. (242) 06 666 44 56 - Email : praebase_congo@yahoo.fr Brazzaville, Le Coordonnateur Marie-Joseph MALLALI-YOUGA

JEUNE AFRIQUE N°2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011

Appel d’offres - Divers

(ii) manuels de l’élève de l’éducation civique et morale, éducation pour la paix (ECMP)

Quantité -201 240 exemplaires pour les manuels de l’élève ; -3 260 pour les guides pédagogiques -CP : 201 240 exemplaires -CE : 221 360 exemplaires -CM : 155 260 exemplaires


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Unité – Travail - Progrès

Ministère de l’enseignement primaire et secondaire et de l’alphabétisation

PROJET D’APPUI À L’EDUCATION DE BASE (PRAEBASE) UNITÉ DE COORDINATION DU PROJET (U.C.P.) B.P. 49 - Tél. 666 44 56 - Email : praebase_congo@yahoo.fr - Brazzaville

Avis d’Appel d’Offres International Ouvert

N° 01

EDITION, IMPRESSION ET LIVRAISON DE MANUELS SCOLAIRES ET DE GUIDES PEDAGOGIQUES DE MATHEMATIQUES POUR LES CLASSES DE CP ET DE TROIS (3) LIVRETS D’EDUCATION CIVIQUE ET MORALE ET EDUCATION POUR LA PAIX (ECMP) - Don IDA n° H 487.CG Le Gouvernement de la République du Congo a obtenu un Don de l’Association Internationale de Développement (IDA) pour financer le coût du Projet d’Appui à l’Education de Base (PRAEBASE). Il se propose d’utiliser une partie du montant de ce Don, pour effectuer les paiements autorisés au titre du marché d’édition à partir de manuscrits, d’impression et de livraison dans les 112 Inspections de l’enseignement primaire du Congo de manuels scolaires et guides pédagogiques de mathématiques pour les classes de CP et de 3 livrets de l’éducation civique et morale et éducation pour la paix (ECMP). L’Unité de Coordination du Projet invite, par le présent avis d’appel d’offres international ouvert, les candidats remplissant les conditions requises à présenter une offre sous pli fermé cacheté, pour l’édition, l’impression et la livraison de manuels scolaires et de guides pédagogiques de mathématiques pour les classes de CP et de 3 livrets de l’éducation civique et morale et éducation pour la paix (ECMP) en un lot unique indivisible, réparti comme suit : Type de Fournitures (i) manuels de l’élève et guides pédagogiques de mathématiques

Bénéficiaires Unité de Coordination du Projet

Le processus se déroulera conformément aux procédures d’appel d’offres international décrites dans les Directives : Passation des marchés financés par les prêts de la BIRD et les crédits de l’IDA ; tous les candidats des pays satisfaisant aux critères de provenance énoncés dans les Directives sont admis à soumissionner. Les candidats intéressés remplissant les conditions requises peuvent obtenir un complément d’information auprès de l’Unité de Coordination du Projet et peuvent examiner/acquérir le dossier d’appel d’offres à l’adresse indiquée ci-après entre 8 h 00 et 16 H (heures locales d’ouverture des bureaux). Les candidats intéressés peuvent acheter, un jeu complet du document d’appel d’offres rédigé en français, sur demande écrite à l’adresse indiquée ci-après, moyennant paiement d’un montant non remboursable de 75.000 FCFA ou d’un montant équivalent en monnaie librement convertible. Le paiement devra être effectué par Virement au compte n° 30012 00101 182243 – 02101 28, domicilié à LA CONGOLAISE DE BANQUE, sise à Brazzaville, par Chèque de caisse ou au Comptant contre la délivrance d’un reçu de caisse. Le dossier peut être envoyé, à la demande, par courrier express ou par courrier électronique, dans les mêmes conditions. Les offres doivent être envoyées à l’adresse indiquée ci-après au plus tard le 16 mars 2011 à 12 h 00. L’offre doit être accompagnée d’une garantie d’offre d’un montant de 51 489 100 FCFA, libellée en FCFA ou dans une monnaie librement convertible sous forme de chèque certifié ou d’une caution bancaire d’une banque crédible établie ou ayant un correspondant en République du Congo. Toute soumission d’offres adressée par voie électronique ne sera pas autorisée. Les offres reçues après le délai fixé seront rejetées. Le pli devra porter la mention « AOI 01H 487.CG ; Edition, impression et livraison de manuels scolaires et de guides pédagogiques de mathématiques pour les classes de CP et de 3 livrets d’éducation civique et morale et éducation pour la paix (ECMP) ; A n’ouvrir qu’en séance publique de dépouillement » Les plis seront ouverts en présence des représentants des soumissionnaires qui souhaitent assister à la séance d’ouverture le 16 mars 2011 à 12 h 30, à l’adresse indiquée ci-après : Projet d’Appui à l’Education de Base (PRAEBASE) - Unité de Coordination du projet (U.C.P.) B.P. 49 - RUE LAMOTHE (derriere le Ministère de la Fonction Publique et de la Réforme de l’Etat) Tél. (242) 06 666 44 56 - Email : praebase_congo@yahoo.fr Brazzaville, Le Coordonnateur Marie-Joseph MALLALI-YOUGA

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Appel d’offres - Divers

(ii) manuels de l’élève de l’éducation civique et morale, éducation pour la paix (ECMP)

Quantité -201 240 exemplaires pour les manuels de l’élève ; -3 260 pour les guides pédagogiques -CP : 201 240 exemplaires -CE : 221 360 exemplaires -CM : 155 260 exemplaires


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RÉPUBLIQUE ISLAMIQUE DE MAURITANIE MINISTÈRE DE L’INDUSTRIE ET DES MINES

AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL Dans le cadre de la politique de transparence menée par le Gouvernement, le Ministère de l’Industrie et des Mines lance un appel d’offres international portant sur l’acquisition de 6 titres miniers pour les substances du groupe 2 dans la zone d’Amlil Boukerch (Wilaya de l’Inchiri), présentant un intérêt avéré. Le DAO peut être retiré au niveau de la Direction du Cadastre Minier contre une quittance prouvant le paiement d’un montant de 250.000 Ouguiyas ou 1000 $US au compte spécial n°933.65 intitulé « Contribution des opérateurs miniers à la promotion de la recherche minière en Mauritanie » ouvert au Trésor Public. Il contiendra les données suivantes : - les coordonnées UTM et les superficies des titres miniers concernés ; - Les éléments et pièces devant constituer l’offre ; - les critères d’évaluation et de qualification retenus ; - les données géologiques disponibles. Les offres devront être déposées dans une enveloppe scellée à la Direction du Cadastre Minier au plus tard le 21 Mars 2011 à 10 heures TU. L’ouverture des offres sera effectuée en séance publique, le même jour à 11 heures TU, dans la salle de réunions du Ministère de l’Industrie et des Mines.

Appel d’offres

Une offre doit être déposée pour chaque titre minier et contiendra une proposition financière pour son acquisition (travaux déjà effectués et potentiel de la zone), à laquelle s’ajoutent, en cas d’adjudication, les droits rémunératoires et les redevances superficiaires pour la première année. Pour chaque titre minier, l’offre retenue est l’offre la plus disant parmi les offres recevables. Si l’opérateur retenu ne s’acquitte pas auprès du Trésor Public des montants à payer dans un délai de quinze (15) jours à partir de la notification de paiement adressée par la Direction du Cadastre Minier, l’offre plus disant suivante sera considérée.

REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO

Projet de Développement des Marchés d’Electricité pour la Consommation Domestique et à l’Exportation (PMEDE) Programme de base - Crédit IDA n ° H296 – DRC - AOI no. 287/PMEDE/SNEL/BCECO/DPM/HMS/2011/MT Marché L7 - Extension du réseau de distribution de Kinshasa - Electrification des poches noires (Contrat clef en Main pour étude, fabrication et essais en usine, transport, fourniture, montage et essais sur site, et mise en service).

AVIS D’APPEL D’OFFRES 1. Le présent avis d’appel d’offres fait suite à l’Avis général de passation des marchés du projet PMEDE paru le 12 avril 2007 dans Dg Market et dans la presse locale ainsi que le 14 septembre 2008 dans Jeune Afrique l’Intelligent, dans Dg Market et dans les journaux locaux. 2. La République Démocratique du Congo a obtenu un don de l’Association Internationale de Développement (IDA) pour financer le Projet de Développement des Marchés d’Electricité pour la consommation Domestique et à l’Export (PMEDE). Elle se propose d’utiliser une partie du montant de ce don pour effectuer les paiements autorisés au titre du marché L7. 3. Le Bureau Central de Coordination (BCECO) invite les candidats admis à concourir, entreprises ou groupements d’entreprises, à soumettre leurs offres sous pli scellé pour la fourniture et le montage des installations concernées. Les installations concernées par le marché L7 sont décrites ci-dessous. L’objet du présent marché vise l’extension du réseau de distribution dans différents régions de la ville de Kinshasa par la construction et l’implantation de nouvelles cabines raccordées au réseau moyen tension (MT). Les régions concernées par ce marché sont Malweka, Kisenso et Mpasa ainsi que le parachèvement de certaines cabines de distribution existantes. 4. L’Appel d’offres se fera selon les procédures d’Appel d’offres international (AOI) définies dans les Directives : Passation des marchés financés par les prêts de la BIRD et les crédits de l’IDA (Edition mai 2004, révisée en octobre 2006). Le DAO type de la Banque mondiale est celui de « Passation des Marchés de Fourniture et Montage des installations ». Il est ouvert à tous les candidats/ aux entreprises admis à concourir. 5. Les candidats répondant aux critères de participation et qui le souhaitent peuvent obtenir tout renseignement complémentaire auprès du Bureau Central de Coordination (BCECO) et examiner les documents d’appel d’offres à l’adresse reprise ci-dessous, de 9h à 16h (heures locales, TU+1). 6. Un jeu complet du Dossier d’appel d’offres en Français peut être acheté par tout candidat intéressé sur présentation d’une demande écrite à l’adresse mentionnée ci-dessous et sur

paiement d’un montant non remboursable de cent dollars américains (100 $US). Le paiement sera effectué par versement d’espèces au compte n° « 0240001145502 », intitulé PROJET BCECO auprès de la STANBIC BANK / Kinshasa, code SWIFT : SBICCDKX. Le Dossier d’appel d’offres sera envoyé aux soumissionnaires, contre présentation de la preuve de paiement, par courrier. Les frais d’envoi des dossiers aux acheteurs sont en sus et à la charge de ces derniers. 7. Les offres doivent être remises à l’adresse ci-dessous au plus tard le jeudi 21 avril 2011 à 15H00. Toutes les offres doivent être assorties d’une garantie de l’offre de quatre cents mille dollars américains (400.000 $US). La garantie de soumission sera une garantie bancaire. Cette garantie de soumission demeurera valide pendant vingt-huit (28) jours au-delà de la date limite initiale de validité des offres, ou de toute nouvelle date limite de validité demandée par l'Acheteur et acceptée par le Soumissionnaire, conformément aux dispositions de la Clause 20.2 des IS. La période de validité initiale des offres est de cent-vingt (120) jours. Les offres reçues après le délai fixé seront rejetées. Les plis seront ouverts en présence des représentants des soumissionnaires qui décident d’assister à la séance d’ouverture qui aura lieu le jeudi 21 avril 2011, à 15H30 à l’adresse ci-dessous. Bureau Central de Coordination (BCECO) - Avenue Colonel Mondjiba, n° 372, Concession Utexafrica - Kinshasa-Ngaliema (RDC) - Local 301 E-mail : bceco@bceco.cd, dpm@bceco.cd, bcecobceco@yahoo.fr, dpmbceco@yahoo.fr Tél : (243) 81 513 67 29 – (243) 81 99 99 180 MATONDO MBUNGU Directeur Général a.i. du BCECO

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RÉPUBLIQUE ISLAMIQUE DE MAURITANIE MINISTÈRE DE L’INDUSTRIE ET DES MINES

AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL Dans le cadre de la politique de transparence menée par le Gouvernement, le Ministère de l’Industrie et des Mines lance un appel d’offres international portant sur l’acquisition de 6 titres miniers pour les substances du groupe 2 dans la zone d’Amlil Boukerch (Wilaya de l’Inchiri), présentant un intérêt avéré. Le DAO peut être retiré au niveau de la Direction du Cadastre Minier contre une quittance prouvant le paiement d’un montant de 250.000 Ouguiyas ou 1000 $US au compte spécial n°933.65 intitulé « Contribution des opérateurs miniers à la promotion de la recherche minière en Mauritanie » ouvert au Trésor Public. Il contiendra les données suivantes : - les coordonnées UTM et les superficies des titres miniers concernés ; - Les éléments et pièces devant constituer l’offre ; - les critères d’évaluation et de qualification retenus ; - les données géologiques disponibles. Les offres devront être déposées dans une enveloppe scellée à la Direction du Cadastre Minier au plus tard le 21 Mars 2011 à 10 heures TU. L’ouverture des offres sera effectuée en séance publique, le même jour à 11 heures TU, dans la salle de réunions du Ministère de l’Industrie et des Mines.

Appel d’offres

Une offre doit être déposée pour chaque titre minier et contiendra une proposition financière pour son acquisition (travaux déjà effectués et potentiel de la zone), à laquelle s’ajoutent, en cas d’adjudication, les droits rémunératoires et les redevances superficiaires pour la première année. Pour chaque titre minier, l’offre retenue est l’offre la plus disant parmi les offres recevables. Si l’opérateur retenu ne s’acquitte pas auprès du Trésor Public des montants à payer dans un délai de quinze (15) jours à partir de la notification de paiement adressée par la Direction du Cadastre Minier, l’offre plus disant suivante sera considérée.

REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO

Projet de Développement des Marchés d’Electricité pour la Consommation Domestique et à l’Exportation (PMEDE) Programme de base - Crédit IDA n ° H296 – DRC - AOI no. 287/PMEDE/SNEL/BCECO/DPM/HMS/2011/MT Marché L7 - Extension du réseau de distribution de Kinshasa - Electrification des poches noires (Contrat clef en Main pour étude, fabrication et essais en usine, transport, fourniture, montage et essais sur site, et mise en service).

AVIS D’APPEL D’OFFRES 1. Le présent avis d’appel d’offres fait suite à l’Avis général de passation des marchés du projet PMEDE paru le 12 avril 2007 dans Dg Market et dans la presse locale ainsi que le 14 septembre 2008 dans Jeune Afrique l’Intelligent, dans Dg Market et dans les journaux locaux. 2. La République Démocratique du Congo a obtenu un don de l’Association Internationale de Développement (IDA) pour financer le Projet de Développement des Marchés d’Electricité pour la consommation Domestique et à l’Export (PMEDE). Elle se propose d’utiliser une partie du montant de ce don pour effectuer les paiements autorisés au titre du marché L7. 3. Le Bureau Central de Coordination (BCECO) invite les candidats admis à concourir, entreprises ou groupements d’entreprises, à soumettre leurs offres sous pli scellé pour la fourniture et le montage des installations concernées. Les installations concernées par le marché L7 sont décrites ci-dessous. L’objet du présent marché vise l’extension du réseau de distribution dans différents régions de la ville de Kinshasa par la construction et l’implantation de nouvelles cabines raccordées au réseau moyen tension (MT). Les régions concernées par ce marché sont Malweka, Kisenso et Mpasa ainsi que le parachèvement de certaines cabines de distribution existantes. 4. L’Appel d’offres se fera selon les procédures d’Appel d’offres international (AOI) définies dans les Directives : Passation des marchés financés par les prêts de la BIRD et les crédits de l’IDA (Edition mai 2004, révisée en octobre 2006). Le DAO type de la Banque mondiale est celui de « Passation des Marchés de Fourniture et Montage des installations ». Il est ouvert à tous les candidats/ aux entreprises admis à concourir. 5. Les candidats répondant aux critères de participation et qui le souhaitent peuvent obtenir tout renseignement complémentaire auprès du Bureau Central de Coordination (BCECO) et examiner les documents d’appel d’offres à l’adresse reprise ci-dessous, de 9h à 16h (heures locales, TU+1). 6. Un jeu complet du Dossier d’appel d’offres en Français peut être acheté par tout candidat intéressé sur présentation d’une demande écrite à l’adresse mentionnée ci-dessous et sur

paiement d’un montant non remboursable de cent dollars américains (100 $US). Le paiement sera effectué par versement d’espèces au compte n° « 0240001145502 », intitulé PROJET BCECO auprès de la STANBIC BANK / Kinshasa, code SWIFT : SBICCDKX. Le Dossier d’appel d’offres sera envoyé aux soumissionnaires, contre présentation de la preuve de paiement, par courrier. Les frais d’envoi des dossiers aux acheteurs sont en sus et à la charge de ces derniers. 7. Les offres doivent être remises à l’adresse ci-dessous au plus tard le jeudi 21 avril 2011 à 15H00. Toutes les offres doivent être assorties d’une garantie de l’offre de quatre cents mille dollars américains (400.000 $US). La garantie de soumission sera une garantie bancaire. Cette garantie de soumission demeurera valide pendant vingt-huit (28) jours au-delà de la date limite initiale de validité des offres, ou de toute nouvelle date limite de validité demandée par l'Acheteur et acceptée par le Soumissionnaire, conformément aux dispositions de la Clause 20.2 des IS. La période de validité initiale des offres est de cent-vingt (120) jours. Les offres reçues après le délai fixé seront rejetées. Les plis seront ouverts en présence des représentants des soumissionnaires qui décident d’assister à la séance d’ouverture qui aura lieu le jeudi 21 avril 2011, à 15H30 à l’adresse ci-dessous. Bureau Central de Coordination (BCECO) - Avenue Colonel Mondjiba, n° 372, Concession Utexafrica - Kinshasa-Ngaliema (RDC) - Local 301 E-mail : bceco@bceco.cd, dpm@bceco.cd, bcecobceco@yahoo.fr, dpmbceco@yahoo.fr Tél : (243) 81 513 67 29 – (243) 81 99 99 180 MATONDO MBUNGU Directeur Général a.i. du BCECO

JEUNE AFRIQUE N° 2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011


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REPUBLIQUE DU BENIN

CENTRALE D’ACHAT DES MEDICAMENTS ESSENTIELS ET CONSOMMABLES MEDICAUX

AVIS D’OFFRES INTERNATIONAL OUVERT POUR L’ACQUISITION DE MEDICAMENTS ANTI-PALUDIQUES POUR CATHOLIC RELIEF SERVICE (CRS)

Le Directeur Général, Kokou O. AFOGBE

Conseil Ouest et Centre Africain pour la Recherche et le Développement Agricoles

West and Central African Council for Agricultural Research and Development

Avis de Sollicitation de Manifestation d’intérêt pour le recrutement d’un cabinet pour l’évaluation à mi-parcours du plan opérationnel 2008- 2013 du CORAF/WECARD - AMI N°003/2011/CW du 06 /02/11 Plan Opérationnel 2008-2013 - Plan stratégique 2007- 2016 Recrutement d’un cabinet international pour la mission ci-dessus précitée

1. Le Conseil Ouest et Centre Africain pour la Recherche et le Développement Agricoles (CORAF/WECARD) a reçu une contribution de ses partenaires pour couvrir le coût de la mise en œuvre de son plan opérationnel 2008-2013. Le CORAF/WECARD a l’intention d’utiliser une partie de cette subvention pour effectuer les paiements au titre du contrat relatif au recrutement d’un cabinet pour procéder à l’évaluation à mi- parcours du plan opérationnel 2008-2013 2. Les objectifs de la mission visent à évaluer de manière succincte les réalisations de la mise en œuvre du plan opérationnel après trois années et d’en tirer les leçons dans le cadre de l’état d’avancement du PDDAA. Plus spécifiquement, il s’agit: • passer en revue toutes les réalisations depuis la mise en œuvre du PO ; • évaluer sa contribution au PDDAA ; • évaluer tous les changements survenus avec la mise en œuvre du processus de changement institutionnel; • examiner l’efficience des ressources (humaines, matérielles et financières) déployées pour la mise en œuvre du PO ; • tirer les leçons apprises de la mise en exécution du PO ; • identifier les ajustements nécessaires pour la période 2011-2013 ; • examiner toutes autres questions relatives à la mise en exécution du PO. 3. Le Président du Conseil d’Administration du CORAF/WECARD invite les cabinets internationaux et/ou nationaux, à manifester leur intérêt à fournir les prestations ci-dessus décrites. 4. Les cabinets intéressés par cet avis doivent fournir des informations indiquant qu’ils

JEUNE AFRIQUE N° 2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011

sont qualifiés pour exécuter lesdites prestations : • brochures, références concernant l’exécution de contrats analogues en nature et en montant ; • capacité technique et de gestion de la firme ; • capacités administratives et financières ; • expérience dans des conditions semblables ; • références de clients ; • et toute information jugée pertinente. 5. Des cabinets seront sélectionnés en accord avec les procédures définies dans les Directives : « Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale », édition de mai 2004 révisées, octobre 2006 et mai 2010. 6. Les cabinets intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence à l’adresse ci-dessous et aux heures suivantes 8h à 12h et de 15h à 17h GMT auprès du Dr Alfred DIXON Président du Comité chargé de la mise en œuvre du processus d’évaluation du plan opérationnel ADixon.SLARI@gmail.com avec copie à byabubakarr@yahoo.com et paco.sereme@coraf.org 7. Les manifestations d’intérêt doivent être déposées à l’adresse ci-dessous au plus tard le 07 mars 2011. Dr Alfred G. DIXON Chairman of the Search Committee S/C CORAF/WECARD Executive Secretariat 7, Avenue Bourguiba – Castors BP 48 Dakar RP SENEGAL Le Président du Conseil d’Administration du CORAF/WECARD

Appel d’offres - Manifestation d’intérêt

Dans le cadre de la mise en œuvre de la Composante Paludisme du Round 7 de la Subvention Fonds Mondial, pour lequel le CRS est Bénéficiaire Principal, il sera mis en place une chaîne/système efficace de commande, d’approvisionnement et de stockage des médicaments en vue de la disponibilité permanente des Combinaisons Thérapeutiques à base d’Artémisinine (CTA/ACT) au niveau des Organisations Communautaires de Base (OCB) et facilitant la collecte des données produites. Un contrat de prestation de services étant conclu entre le CRS et la Centrale d’Achat des Médicaments Essentiels et Consommables Médicaux (CAME) pour assister CRS dans le processus d’approvisionnement, de stockage et de distribution des CTA jusqu’au niveau des dépôts répartiteurs de 14 Zones Sanitaire, la CAME invite par le présent Avis d’Appel d’Offres International, tous les soumissionnaires susceptibles de fournir des produits anti paludiques pré qualifiés par l’OMS, autorisés par une Autorité de réglementation des médicaments rigoureuse (SRA)3 ou recommandés pour utilisation par un Comité expert d’évaluation (ERP). 1. La livraison est prévue à Cotonou dans le courant du mois de Mai 2011. Les candidats peuvent retirer/consulter le Dossier complet d’Appel d’Offres international ou obtenir des informations complémentaires à partir du vendredi 4 Février 2011 à 8 heures ; heure locale (GMT +1) à l’adresse suivante : DIRECTION DE LA CAME - 01 BP 3280 COTONOU – BENIN - EX ONP – PK3 – Route de Porto-Novo Tél : (229) 21 33 09 48/21 33 28 64 - Fax : (229) 21 33 08 51 - E-mail : came.benin@intnet.bj – Site Web : www.camebenin.org 2. Toutes les offres doivent parvenir sous pli fermé ou être déposées au Secrétariat de la CAME à l'adresse indiquée ci-dessus, au plus tard le mardi 8 Mars 2011 à 10 heures, heure locale (GMT + 1). 3. L'ouverture des offres aura lieu le même jour à 10 heures 30, heure locale dans les locaux de la CAME. 4. Les soumissionnaires qui le souhaitent peuvent assister ou se faire représenter à la séance d'ouverture des offres. 5. Les soumissionnaires resteront engagés vis-à-vis de la CAME jusqu’à l’adjudication définitive et la signature du contrat avec CRS. 6. Le ou les soumissionnaire(s) qui sera (ont) retenu(s) à la suite de cet Appel d’Offre International signera (ont) avec CRS le contrat CRSFournisseur contenu à l’annexe XI du présent Dossier d’Appel d’Offre International. Cotonou, le 3 février 2011


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REPUBLIQUE DU BENIN

CENTRALE D’ACHAT DES MEDICAMENTS ESSENTIELS ET CONSOMMABLES MEDICAUX

AVIS D’OFFRES INTERNATIONAL OUVERT POUR L’ACQUISITION DE MEDICAMENTS ANTI-PALUDIQUES POUR CATHOLIC RELIEF SERVICE (CRS)

Le Directeur Général, Kokou O. AFOGBE

Conseil Ouest et Centre Africain pour la Recherche et le Développement Agricoles

West and Central African Council for Agricultural Research and Development

Avis de Sollicitation de Manifestation d’intérêt pour le recrutement d’un cabinet pour l’évaluation à mi-parcours du plan opérationnel 2008- 2013 du CORAF/WECARD - AMI N°003/2011/CW du 06 /02/11 Plan Opérationnel 2008-2013 - Plan stratégique 2007- 2016 Recrutement d’un cabinet international pour la mission ci-dessus précitée

1. Le Conseil Ouest et Centre Africain pour la Recherche et le Développement Agricoles (CORAF/WECARD) a reçu une contribution de ses partenaires pour couvrir le coût de la mise en œuvre de son plan opérationnel 2008-2013. Le CORAF/WECARD a l’intention d’utiliser une partie de cette subvention pour effectuer les paiements au titre du contrat relatif au recrutement d’un cabinet pour procéder à l’évaluation à mi- parcours du plan opérationnel 2008-2013 2. Les objectifs de la mission visent à évaluer de manière succincte les réalisations de la mise en œuvre du plan opérationnel après trois années et d’en tirer les leçons dans le cadre de l’état d’avancement du PDDAA. Plus spécifiquement, il s’agit: • passer en revue toutes les réalisations depuis la mise en œuvre du PO ; • évaluer sa contribution au PDDAA ; • évaluer tous les changements survenus avec la mise en œuvre du processus de changement institutionnel; • examiner l’efficience des ressources (humaines, matérielles et financières) déployées pour la mise en œuvre du PO ; • tirer les leçons apprises de la mise en exécution du PO ; • identifier les ajustements nécessaires pour la période 2011-2013 ; • examiner toutes autres questions relatives à la mise en exécution du PO. 3. Le Président du Conseil d’Administration du CORAF/WECARD invite les cabinets internationaux et/ou nationaux, à manifester leur intérêt à fournir les prestations ci-dessus décrites. 4. Les cabinets intéressés par cet avis doivent fournir des informations indiquant qu’ils

JEUNE AFRIQUE N° 2613 – DU 6 AU 12 FÉVRIER 2011

sont qualifiés pour exécuter lesdites prestations : • brochures, références concernant l’exécution de contrats analogues en nature et en montant ; • capacité technique et de gestion de la firme ; • capacités administratives et financières ; • expérience dans des conditions semblables ; • références de clients ; • et toute information jugée pertinente. 5. Des cabinets seront sélectionnés en accord avec les procédures définies dans les Directives : « Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale », édition de mai 2004 révisées, octobre 2006 et mai 2010. 6. Les cabinets intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence à l’adresse ci-dessous et aux heures suivantes 8h à 12h et de 15h à 17h GMT auprès du Dr Alfred DIXON Président du Comité chargé de la mise en œuvre du processus d’évaluation du plan opérationnel ADixon.SLARI@gmail.com avec copie à byabubakarr@yahoo.com et paco.sereme@coraf.org 7. Les manifestations d’intérêt doivent être déposées à l’adresse ci-dessous au plus tard le 07 mars 2011. Dr Alfred G. DIXON Chairman of the Search Committee S/C CORAF/WECARD Executive Secretariat 7, Avenue Bourguiba – Castors BP 48 Dakar RP SENEGAL Le Président du Conseil d’Administration du CORAF/WECARD

Appel d’offres - Manifestation d’intérêt

Dans le cadre de la mise en œuvre de la Composante Paludisme du Round 7 de la Subvention Fonds Mondial, pour lequel le CRS est Bénéficiaire Principal, il sera mis en place une chaîne/système efficace de commande, d’approvisionnement et de stockage des médicaments en vue de la disponibilité permanente des Combinaisons Thérapeutiques à base d’Artémisinine (CTA/ACT) au niveau des Organisations Communautaires de Base (OCB) et facilitant la collecte des données produites. Un contrat de prestation de services étant conclu entre le CRS et la Centrale d’Achat des Médicaments Essentiels et Consommables Médicaux (CAME) pour assister CRS dans le processus d’approvisionnement, de stockage et de distribution des CTA jusqu’au niveau des dépôts répartiteurs de 14 Zones Sanitaire, la CAME invite par le présent Avis d’Appel d’Offres International, tous les soumissionnaires susceptibles de fournir des produits anti paludiques pré qualifiés par l’OMS, autorisés par une Autorité de réglementation des médicaments rigoureuse (SRA)3 ou recommandés pour utilisation par un Comité expert d’évaluation (ERP). 1. La livraison est prévue à Cotonou dans le courant du mois de Mai 2011. Les candidats peuvent retirer/consulter le Dossier complet d’Appel d’Offres international ou obtenir des informations complémentaires à partir du vendredi 4 Février 2011 à 8 heures ; heure locale (GMT +1) à l’adresse suivante : DIRECTION DE LA CAME - 01 BP 3280 COTONOU – BENIN - EX ONP – PK3 – Route de Porto-Novo Tél : (229) 21 33 09 48/21 33 28 64 - Fax : (229) 21 33 08 51 - E-mail : came.benin@intnet.bj – Site Web : www.camebenin.org 2. Toutes les offres doivent parvenir sous pli fermé ou être déposées au Secrétariat de la CAME à l'adresse indiquée ci-dessus, au plus tard le mardi 8 Mars 2011 à 10 heures, heure locale (GMT + 1). 3. L'ouverture des offres aura lieu le même jour à 10 heures 30, heure locale dans les locaux de la CAME. 4. Les soumissionnaires qui le souhaitent peuvent assister ou se faire représenter à la séance d'ouverture des offres. 5. Les soumissionnaires resteront engagés vis-à-vis de la CAME jusqu’à l’adjudication définitive et la signature du contrat avec CRS. 6. Le ou les soumissionnaire(s) qui sera (ont) retenu(s) à la suite de cet Appel d’Offre International signera (ont) avec CRS le contrat CRSFournisseur contenu à l’annexe XI du présent Dossier d’Appel d’Offre International. Cotonou, le 3 février 2011


110 VOUS & NOUS qui, devant vos yeux, ont notamment spolié les travailleurs de leur droit à une vie digne et honnête ? Si vous avez la mémoire qui flanche, la nôtre est en éveil. JELILA BEHI HACHICH, ÉCRIVAIN, E-MAIL

COURRIER DES LECTEURS Un acteur de la scène politique tunisienne

■ Juste après l’indépendance de la Tunisie, un jeune militant et ministre* quitte le gouvernement. Il dit : non, il Pour un régime parlementaire en Tunisie faut mettre en pratique le sens du nom du parti, Liberté et ■ Ayant pris conscience de sa force et craignant de voir Droit. Sans haine ni rancune, il commence à travailler, et sa révolution détournée de ses objectifs ou manipulée à il n’a jamais abandonné la scène politique tunisienne. Ses des fins politiciennes, le peuple n’a pas hésité à exiger le écrits et ses contacts prouvent combien il est fidèle à ses départ de tous ceux qui ont travaillé avec l’ancien régime. principes. Il approuve toujours une opposition constructive. Cette mobilisation ne peut être dissociée du sentiment Après plus d’un demi-siècle d’attente et d’espoir, il écrit : qu’inspire la figure d’un président disposant de tous les – Ne pas surréagir et aider à se tromper le moins possible. pouvoirs conférés par la Constitution ; en insistant sur la – Aider à voir plus clair. nécessité d’éliminer le RCD, « parti-État », le peuple, dans – Faire table rase du passé. son écrasante majorité, rejette implicitement l’idée d’un – Donner son avis même si le moment ne s’y prête pas. autre président omnipotent. D’où l’urgence d’un dialogue L’espoir, oui l’espoir existe, atteindre le but recherché sur l’instauration d’un régime parlementaire. Si quelques est possible… Mais la route est trop longue. Nous avons universitaires se sont prononcés en faveur de ce projet, besoin aujourd’hui plus que jamais des personnes qui les partis de l’opposition, a fortiori les plus populaires, aiment la Tunisie. ne semblent pas vouloir lui accorder RD CONGO K ABIL A : MOBUTU LIGHT ABDESSELAM HAMZA, TUNIS, TUNISIE l’attention qu’il mérite. * Il s’agit de Béchir Ben Yahmed [NDLR]. ABDERRAZAK ESSAIED, E-MAIL HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 51e ANNÉE • N° 2612•du 30 janvier au 5 février 2011

ÉGYPTE

TRENTE ANS, ÇA SUFFIT!

www.jeuneafrique.com

CASAMANCE

IMPOSSIBLE DIALOGUE

Halte au régionalisme !

Des goûts et des senteurs

■ Après le renversement du régime de ■ Aux lecteurs critiquant le Ben Ali par le peuple tunisien, des voix traitement de l’actualité tunisienne issues des régions défavorisés et de par Jeune Afrique : sans revenir sur l’intérieur du pays émergent de temps vos propos infondés, je vous invite à autre, revendiquant une contribution à ouvrir n’importe quel numéro de au gouvernement de transition, lançant J.A., vous découvrirez qu’il en émane TUNISIE I des slogans hostiles aux « Sahéliens », plus de senteurs que le jasmin. AL N BE ION qu’ils accusent d’avoir accaparé le pouvoir MARC BLAFFART, E-MAIL LA ECT N Enquête sur Rachid Ammar, N depuis l’indépendance. O C un général dans la révolution. Nous invitons toutes les forces vives de la nation à condamner ce discours De Tunis à Abidjan Jeune Afrique no 2612, rétrograde qui n’a pas d’autre vocation que ■ De nationalité tunisienne mais du 30 janvier au 5 février. de plonger le pays dans la discorde et dans Ivoirien d’adoption, je ne peux des querelles secondaires. Il ne sert pas m’empêcher de faire un parallèle entre l’intérêt des citoyens. La Tunisie a besoin d’un consensus la situation politique des deux pays qui me sont chers. national, d’un dialogue entre les partis politiques et les Après vingt-trois ans de règne, il a suffi d’une étincelle composantes de la société civile, afin de progresser vers pour que Zine el-Abidine Ben Ali quitte le pouvoir sous la stabilité, la paix, la sécurité, le progrès et le pluralisme la pression du peuple. Ce peuple, mon peuple, s’est que désirent les Tunisiens. révolté malgré l’usage disproportionné de la force par la Halte au régionalisme qui ne sert que les ennemis du police, et a réussi à faire tomber celui qui aura tout tenté peuple ! Soyons vigilants. pour conserver le pouvoir le temps d’achever un dernier K AMEL BOUAOUINA, HAMAM SOUSSE, TUNISIE mandat. La Tunisie vient donc de faire un grand pas vers la démocratie grâce au courage et à la volonté des Tunisiens. À l’inverse, par l’obstination d’un seul homme, la Côte Lettre ouverte au secrétaire général de lʼUGTT d’Ivoire sombre chaque jour un peu plus dans le chaos. ■ Un peu de décence, M. le secrétaire général. Laurent Gbagbo devrait s’inspirer de la chute de Ben Ali Vous prétendez parler au nom du peuple ; personne n’est et trouver une issue pacifique à la crise. La « révolution à ce jour habilité à le faire. Vous prétendez défendre du jasmin » l’a prouvé : un président ne peut rester les droits des travailleurs ; pour cela, vous décrétez indéfiniment au pouvoir sans la volonté du peuple. une grève. Vous êtes en train de mener ces travailleurs MEHDI K AMOUN, E-MAIL dans un précipice. Est-ce le moment de favoriser le chômage, d’entraver l’économie et d’accroître le sentiment d’insécurité ? Aucun pouvoir nʼest éternel Nous savons quelles ont été vos positions tout au long du ■ La situation politique en Afrique devient de plus en plus régime dictatorial que vous avez accompagné. Avez-vous insupportable. En cinquante ans de souveraineté, nous élevé la voix pour condamner les dérives et la corruption n’avons jamais réussi à nous unir pour former les bases

L’homme qui a dit non s es sin Bu

ÉDITION INTERNATIONALE ET MAGHREB & MOYEN-ORIENT

France 3,50 € • Algérie 170 DA • Allemagne 4,50 € • Autriche 4,50 € • Belgique 3,50 € • Canada 5,95 $ CAN • Danemark 35 DKK • DOM 4 € Espagne 4 € • Ethiopie 65 Birr • Finlande 4,50 € • Grèce 4,50 € • Italie 4 € • Maroc 23 DH • Mauritanie 1100 MRO • Norvège 41 NK • Pays-Bas 4 € Portugal cont. 4 € • RD Congo 5,50 $ US • Royaume-Uni 3,50 £ • Suisse 5,90 FS • Tunisie 3,30 DT • USA 6,50 $ US • Zone CFA 1700 F CFA • ISSN 1950-1285

J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


VOUS & NOUS 111 institutionnelles d’un État viable. Cette révolution tunisienne est une leçon à méditer pour les chefs d’État du continent, pour la plupart vieillissants. Ils ne peuvent plus rester sourds aux aspirations légitimes de leur population et de leur jeunesse : l’emploi, les soins, l’éducation… Je les invite à réfléchir au fait qu’aucun pouvoir n’est éternel. BASSIROU LAMINE SAKHO, PARIS

Réponse à Calixthe Beyala

La chute du « mur arabe »

■ La division du monde entre Soviétiques et capitalistes aura duré de 1945 à 1989. Ce n’est qu’à partir des années 1990, après la chute du mur de Berlin, que le monde commence à évoluer. Une grande partie de l’Afrique est alors « menacée » par le sommet de La Baule, qui pose le principe de ce que certains qualifieront de « conditionnalité démocratique » en matière d’aide au développement – et d’autres, de pur chantage. C’est la naissance de la démocratie « version africaine ». Depuis, le monde a changé. Mais sur le continent, tandis que certains pays connaissaient des évolutions, parfois dans un climat d’extrême violence, d’autres restaient dans un silence assourdissant. L’année 2011 vient-elle conclure ce que 1989 avait commencé? La question reste ouverte. Il faut reconnaître que pendant longtemps – trop longtemps –, Washington, Londres, Paris, Bruxelles et d’autres ont préféré avoir pour interlocuteurs des dictateurs amis plutôt que des démocrates ennemis, sous prétexte d’éviter à tout prix le chaos. Les raisons de cette situation sont connues: lutte contre l’expansionnisme islamique assimilé au terrorisme, création et protection de zones économiques exclusives et d’approvisionnements en énergie. La rue tunisienne, d’où est partie la révolution, nous transmet un message clair et sans équivoque: une époque vient de finir. Ce ne sont pas les idées reçues, les principes ou les contraintes des grandes puissances qui vont changer, mais plutôt la cruauté des faits, qui se déroulent avec une rapidité extrême. Après la Tunisie, c’est maintenant le plus grand allié arabe de l’Occident, l’Égypte, qui

■ Merci à vous, monsieur Béchir Ben Yahmed, ainsi qu’à Jeune Afrique de tous vos efforts pour informer correctement vos lecteurs sur la crise postélectorale en Côte d’Ivoire. Mais je ne comprends pas pourquoi vous avez ouvert vos colonnes à Calixthe Beyala; j’ai décidé de lui répondre. Madame, à la lecture de votre article, on se rend compte que vous vous êtes laissée séduire par les discours incantatoires de Laurent Gbagbo et de ses partisans sur le panafricanisme et l’anticolonialisme. Je vous comprends, car vous ne vivez pas le difficile quotidien qui est celui des Ivoiriens depuis l’arrivée au pouvoir en 2000 de M. Gbagbo dans des conditions qu’il a qualifiées lui-même de « calamiteuses ». Votre argument, c’est que la « commission électorale était constituée aux deux tiers par les membres de l’opposition », ce qui sous-entend qu’elle ne pouvait pas proclamer des résultats favorables à M. Gbagbo. Mais n’est-ce pas cette même commission qui l’a déclaré en tête au premier tour devant MM. Ouattara et Bédié ? En outre, M. Gbagbo avait dissous cette Commission électorale indépendante au mois de février 2010, accusant son président d’alors, M. Beugré Mambé, de tentative de fraude sur la liste électorale – ce qui avait eu pour conséquence de repousser une fois de plus la date de l’élection. C’est donc une commission recomposée à la demande de M. Gbagbo, et acceptée par lui, qui a organisé ce scrutin. Madame, je ne pourrais vous retracer ici l’histoire de cette élection présidentielle, mais je suis sûr que vous savez qu’elle a été reportée plus de cinq fois depuis 2005 par la seule volonté de M. Gbagbo, qui n’a jamais respecté de son plein gré les engagements qu’il avait pris dans les différents accords de paix. Enfin, pourquoi tant de haine envers la communauté internationale, qui a largement contribué au financement J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11

est au bord de l’implosion. Tous les pays d’Afrique du Nord semblent être touchés par ce phénomène, qui risque de ne pas s’arrêter là. Malgré leurs différences sur le plan de l’économie ou des contraintes géostratégiques, ces États ne sont pas loin d’être emportés par la vague de la révolution tunisienne, parce que les revendications de leur population sont les mêmes: la lutte contre la corruption, le favoritisme, le népotisme, le chômage… Jusqu’où cette vague ira-t-elle? Qu’est-ce qui va changer? Qui va partir? Qui va rester et à quel prix? À la lumière des faits, rares sont ceux qui ont, à l’époque, correctement interprété et géré les conséquences de la chute du mur de Berlin. Dans la plupart des États d’Afrique subsaharienne, l’organisation en catastrophe et en toute impréparation des conférences nationales a laissé des séquelles encore visibles aujourd’hui. Après le vent de l’Est, nos pays seront-ils en mesure de gérer le souffle engendré par la révolution tunisienne? Certains Africains ne semblent pas voir arriver ce « vent du Maghreb ». Il est possible de le constater au Gabon, où des aventuriers d’une autre époque sèment la zizanie et les graines de l’instabilité en mettant en scène des scénarios qui concurrencent les meilleurs films de Charlot. Mais aussi en Côte d’Ivoire, où l’on s’accroche au fauteuil présidentiel sans mesurer les risques que cela représente, pour le pays comme pour la région ouest-africaine et le continent tout entier. L’Afrique ne court-elle pas le risque de se retrouver, encore une fois, en proie à des conflits armés à l’issue plus incertaine que jamais? ALAIN SHUNGU, JOURNALISTE, BRAZZAVILLE, CONGO

du scrutin afin d’assurer sa transparence et d’éviter toute contestation postélectorale ? Non, madame, ce n’est pas la Cedeao, l’UA, l’UE, la France, les États-Unis ou l’ONU qui ont élu M. Alassane Ouattara. Ce sont les Ivoiriens, avec 54,1 % des voix. Ils l’ont élu parce que, après des années de mensonges, ils ont compris qu’il est ivoirien. CISSE ADAM, E-MAIL


112 VOUS & NOUS Des indépendances de façade

■ Monsieur Ben Yahmed, vous qui êtes un intellectuel reconnu et respecté, arrêtez, s’il vous plaît, dans cette crise ivoirienne, d’être le relais de la machine d’intoxication française qui, aujourd’hui, nous prouve à suffisance que nos indépendances ne sont que de façade. Le président français a même réussi à se faire inviter au sommet des chefs d’État de l’Union africaine. L’Occident a trouvé une nouvelle manière d’orchestrer des coups d’État, mais nous, Africains, finirons bien par lui demander des comptes. LEONARD TCHIKOUNZI, E-MAIL

Et si on supprimait les élections ?

■ Si l’on doit organiser des élections pour ensuite obliger le gagnant à partager le pouvoir avec le perdant au nom d’une prétendue sauvegarde de la stabilité nationale, pourquoi ne pas supprimer les élections et promouvoir les présidences à vie en Afrique ? On éviterait ainsi des campagnes et des élections souvent suivies de violences meurtrières. Cela présenterait un double avantage : l’argent des élections pourrait servir à fournir des emplois et l’Afrique ferait un grand bond en avant dans le domaine du respect des droits humains. J’avais 6 ans lorsque Teodoro Obiang Nguema est arrivé au pouvoir en Guinée Équatoriale. Aujourd’hui j’en ai 38, il est toujours là et c’est lui qu’on choisit pour diriger une organisation – l’Union africaine (UA) – qui s’est fixé comme objectifs la promotion de la démocratie, des droits de l’homme et le développement économique. Quelle leçon de démocratie donnera-t-il à un Laurent Gbagbo qui refuse de se plier au verdict des urnes ? SIRA T. GUY, ABIDJAN, CÔTE DʼIVOIRE

La démocratie ne sʼimpose pas par les armes

■ Les chefs d’État de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) avaient envisagé une intervention armée pour faire partir Laurent Gbagbo et installer Alassane Ouattara au pouvoir. Si ce cas de figure advenait, non seulement le processus de paix et de réconciliation en Côte d’Ivoire serait grippé, mais la démocratisation en Afrique en prendrait également un coup. Si, sur le continent, les cas d’élections contestées sont légion, il est jusqu’ici difficile de se rappeler un pays où des forces étrangères soient intervenues pour imposer l’un des protagonistes. Heureusement. Que serait une telle démocratie imposée par une armée étrangère ? Non seulement la légitimité du pouvoir serait sujette à contestation, mais un message paradoxal serait envoyé. Rappelons que les processus de démocratisation en Afrique visaient notamment à écarter les militaires de la dévolution et de l’exercice du pouvoir politique qui échoient désormais au peuple. Installer Ouattara au pouvoir grâce à une armée, fût-elle de la Cedeao, reviendrait à les remettre en selle. MBAÏ-HADJI MBAÏREWAYE, UNIVERSITÉ LAVAL, QUÉBEC, CANADA

LʼUnion africaine déçoit

■ Lors du sommet d’Addis-Abeba, les chefs d’État de l’UA ont décidé de confier la résolution de la crise ivoirienne à un panel composé de cinq d’entre eux. Devant cette

initiative, nous sommes en droit de nous interroger sur la capacité des institutions africaines à résoudre les conflits. Là où quatorze chefs d’État ont échoué, je n’en vois pas cinq réussir, d’autant que tous ne maîtrisent pas véritablement les tenants et les aboutissants de cette crise. J’ai entendu à maintes reprises les dirigeants parler de « souveraineté ». Mais où est cette souveraineté lorsque les Africains sont incapables de régler un conflit ou de restaurer la démocratie ? Une fois de plus, Alassane Ouattara a été reconnu par l’UA comme le président élu de Côte d’Ivoire, mais depuis deux mois il est retranché au Golf Hôtel, empêché d’exercer entièrement ses pouvoirs. Comme le chantait la star ivoirienne Alpha Blondy : « Les ennemis de l’Afrique, ce sont les Africains. » Malgré le discours de Nicolas Sarkozy lors de ce sommet, ouvrant aux chefs d’État africains une perspective d’entrer dans l’arène politique internationale à travers le Conseil de sécurité de l’ONU, ceux-ci choisissent la bassesse. NAMIDJA TOURE, E-MAIL

Pourquoi Laurent Gbagbo devra partir

■ Par-delà la rancune tenace de la France contre Laurent Gbagbo, il y a un axiome de la démocratie : lorsqu’on perd les élections, il faut laisser la place au gagnant. Qu’ils aiment ou qu’ils détestent les Occidentaux, les démocrates ne seront pas mécontents d’entendre la clameur mondiale face à l’entêtement du président sortant. Le rapt électoral de Laurent Gbagbo est consternant en ce qu’il permet de dévaluer les élections : en dépit du verdict des urnes, le sortant reste en place en usant de subterfuges. Même si ces derniers sont labellisés par les juges acquis à sa cause, ce serait une fâcheuse jurisprudence que de laisser pareille pratique impunie ! Dans ce débat si passionné, l’essentiel devra être préservé : la valeur des élections dans une démocratie. Cette problématique va au-delà des personnes. DIDIER MUBINZI K. NAKEN, KINSHASA, RD CONGO

La partition de la Côte dʼIvoire, une solution ?

■ Cette crise politique oppose le courant des anticolonialistes et panafricanistes – incarné par le tandem Gbagbo-Blé Goudé – et celui des libéraux pro-Occidentaux – le couple Ouattara-Soro. Pour en sortir définitivement, il faut écarter la communauté internationale occidentale et ses sous-traitants africains (Cedeao, UA), qui ont perdu toute crédibilité, et organiser un référendum sur une question fondamentale, qu’aucun acteur de la crise n’est parvenu à résoudre : faut-il diviser le pays en deux, la Côte d’Ivoire du Sud et la Côte d’Ivoire du Nord ? GABRIEL BLEY, PRÉSIDENT DE LʼASSOCIATION DE DÉFENSE DES IVOIRIENS

Merci de vos lettres

La riche actualité du continent vous fait réagir et vous êtes, ces dernières semaines, très nombreux à nous écrire. Si nombreux que, faute de place, nous ne pouvons souvent pas publier vos lettres dans leur intégralité. Veillez donc à nous envoyer des textes courts, afin que nous ne soyons pas obligés de couper une partie de vos propos. J E U N E A F R I Q U E N ° 2 6 13 • D U 6 A U 12 F É V R I E R 2 0 11


VOUS & NOUS 113

L A R E V UE

L

Le futur se pense au présent

es événements qui ont si soudainement boulevenir. Dans ce monde qui se transforme, l’humanité versé la Tunisie, et capté l’attention du monde change aussi. Marie Lafourcade analyse les données entier, ont démontré combien la décennie dans d’un basculement anthropologique majeur. La moitié laquelle nous entrons est placée sous le signe des femmes sur terre ont maintenant un travail rémudu changement. Un nouvel équilibre économique et néré ; en corollaire, l’auteure souligne « le risque d’une politique se construit par de lents et profonds mouguerre des sexes pour l’emploi ». vements et de brusques ruptures. Ce neuvième numéro de MAIS L A R EVUE COLLE Tunisie Ce qui est fait, ce qui reste à faire La revue prend le parti audaD’ABORD AU PRÉSENT : « Indicieux d’avancer quelques pistes gnez-vous ! » Le cri de Stéphane qui pourraient bien redessiner Hessel à la jeunesse trouve un le monde d’ici à 2020. puissant écho dans l’insurrecL’art difficile de la prédiction tion tunisienne, commentée par s’appuie sur une compréhension de fins connaisseurs capables experte du passé et sur la sende dépassionner le débat pour sibilité au temps présent. Si nul mieux en décrire les enjeux. ne doute que le centre de gravité Le tumulte soulevé par Wikidu monde va se déplacer vers la Leaks est relativisé par Hubert Chine, la fine appréhension de Védrine, tandis qu’un portrait José Frèches permet de préciser fouillé de l’A méricain Dav id les défis majeurs qui attendent Petraeus nuance son image de « la seule hypernation de la plagénéral à qui rien ne résiste. nète » : « Le jour où la société Les rubriques installées ont leur chinoise sera devenue riche (et sel habituel : « Comment voyage LA NOUVELLE CARTE DU MONDE ENFIN L’HEURE DES FEMMES vieillissante), la somme des proAbdoulaye Wade » fait le point L’ISLAM PACIFIÉ blèmes qu’elle devra résoudre sur un sujet très polémique ; LE RÉVEIL DE L’AFRIQUE risque de s’avérer aussi giganl’interview de l’ancien Premier Dossier 30 pages tesque que celle de ses atouts ministre togolais Edem Kodjo actuels », écrit le sinologue. révèle un panafricaniste d’un optimisme aussi argumenté que Le neuvième numéro de La revue est déjà dans les kiosques, au prix de 4 euros À L’ÉCHELLE DE L’ENSEMBLE mystique… Pascal Airault préen France et de 3 000 F CFA en zone franc. DES PAYS ÉMERGENTS, Jeansente également la communauPierre Séréni démontre que la té catholique Sant’Egidio, dont croissance des économies passera par le développement l’inlassable travail pour la paix force l’admiration. des marchés intérieurs et l’invention de solutions régioBref, La revue donne à penser, sans compter. Et l’orinales pour maîtriser les fluctuations de capitaux. Pascal ginalité de sa démarche pourrait cette fois être illusAirault contredit le pessimisme habituel sur l’avenir trée par l’article consacré à l’extraordinaire travail de l’Afrique en s’appuyant sur des rapports dont la conclusion sonne comme un constat engageant : « Les investissements sont devenus rentables sur le continent. » Entre les menaces qui pèsent sur l’euro, le déplacement de la production industrielle vers de Nicolas Menut. Les arts dits premiers ont gagné l’Est et la montée en puissance de la Turquie, tout semleur place dans les musées au prix d’un goût pour ble confirmer le déclin de l’Europe. Mais il s’accompaune culture exotique originelle largement fantasmée. gne d’une montée des xénophobies dénoncée par Jean Cet anthropologue corrige le regard en dévoilant un Lacouture : le « désarroi de l’Occident » se traduit par contrechamp aussi riche que méconnu : l’homme blanc d’inquiétantes expressions. tel qu’il est représenté dans les arts non européens. Au-delà même des grands blocs régionaux, La revue Regarder autrement pour mieux voir : on pourrait distingue des tendances planétaires : le changement clirésumer ainsi la stimulante expérience de ce menmatique et la croissance de la population globale vont suel d’exception. ■ ÉRIC FESNEAU ainsi inéluctablement peser sur le cours des années à MENSUEL INTERNATIONAL ● No 9 ● FÉVRIER 2011

2011-2020

LA DÉCENNIE OÙ TOUT VA CHANGER

N o 9 - Février 2011 - ÉDITION GÉNÉRALE

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Le mensuel prend le parti d’avancer quelques pistes qui pourraient bien redessiner le monde.

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POST-SCRIPTUM

HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL

P O L I T I Q U E , É C O N O M I E , C U LT U R E Fondé à Tunis le 17 oct. 1960 par Béchir Ben Yahmed (51 e année)

Édité par SIFIJA

Hosni et Beatrix AUJOURD’HUI, DES DRAPEAUX flottent fièrement au fronton de tous les édifices publics des Pays-Bas et aussi au sommet des tours des églises (mais pas des mosquées, bizarrement). Ce déploiement de liesse officielle est dû au fait que la reine Beatrix fête son anniversaire. Bien qu’on ne doive jamais demander leur âge aux dames, et encore moins le divulguer, on fera une exception pour Sa FOUAD LAROUI Majesté: elle est née le 31 janvier 1938 et a donc atteint l’âge respectable de 73 ans. Au moment où, de ma fenêtre, je regarde d’un œil le drapeau batave flotter au haut de la tour de la Westerkerk, j’ai l’autre œil rivé sur la télé où les manifestations se poursuivent au Caire, à Alexandrie et dans d’autres villes égyptiennes : on y réclame le départ du président Hosni Moubarak. Un des arguments avancés par la foule est que ce dernier est au pouvoir depuis 1981 : trente ans, ça suffit ! Or Beatrix règne depuis le 30 avril 1980 et la rue ne bouge pas. Vous me dites : « Oui, mais la reine n’a aucun pouvoir. » Faux : selon la Constitution des Pays-Bas, le monarque « fait partie du gouvernement ». Beatrix peut intervenir dans toute discussion ministérielle, convoquer le Premier ministre, donner son avis, etc. C’est elle qui nomme en toute liberté le « formateur », c’est-à-dire la personne chargée de mettre sur pied une coalition gouvernementale après les élections législatives. Ce n’est d’ailleurs pas du goût de tout le monde. Le parti populiste PVV de Geert Wilders prône une modification de la Constitution qui ferait de la reine un pur symbole d’unité nationale qui n’aurait aucun pouvoir. Certains vont plus loin : il y a un très officiel Club des républicains qui réclame carrément l’abolition du régime. Signe de la très grande tolérance qui règne – si l’on ose dire – dans le pays de Rembrandt : l’un des membres les plus en vue de ce club a reçu naguère une très officielle décoration décernée par… la reine. Et il l’a acceptée, le bougre ! Vous me dites : « Oui, mais la reine n’est pas une vulgaire Leïla la Coiffeuse, qui s’est enrichie indûment sur le dos du peuple. » Absolument, comme on dit à la télé. Mais cela n’empêche pas la bonne Beatrix de détenir un bon paquet d’actions de Shell – entre autres – et d’être une des femmes les plus riches du monde. Et pourtant, la rue ne bouge pas. (Je viens encore de jeter un coup d’œil de ma fenêtre.) Vous rugissez : « Oui, mais Hosni Moubarak voulait imposer son fils comme successeur ! » Euh… Le successeur de Beatrix est déjà connu : c’est son fils Willem-Alexander. Alors ? Alors, énonçons l’évidence. À côté de toutes ces similitudes, il y a l’essentiel : un Parlement dont les membres sont élus dans des élections honnêtes et transparentes que personne ne conteste ; de vrais partis qui font leur boulot (chacun d’eux a un think-tank chargé de produire régulièrement des analyses sociopolitiques et des propositions de réforme) ; des élus et des fonctionnaires dont on peut contrôler l’enrichissement et donc l’absence de corruption. Il y a aussi (surtout ?) une presse libre, diverse, professionnelle. Il y a enfin un peuple qui se prend en charge et n’attend pas tout de l’État. Moyennant quoi, Sa Majesté peut fêter tranquillement son anniversaire. Happy birthday ! ■

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Ce magazine est accompagné d’un encart abonnement sur une partie de la diffusion.


Unité – Travail - Progrès

Ministère de l’enseignement primaire, secondaire et de l’alphabétisation

PROJET D’APPUI À L’EDUCATION DE BASE (PRAEBASE) UNITÉ DE COORDINATION DU PROJET (U.C.P.) B.P. 49 - Tél. 666 44 56 - Email : praebase_congo@yahoo.fr - Brazzaville

Avis d’Appel d’Offres International Ouvert

N° 02

FOURNITURE ET LIVRAISON DES MANUELS SCOLAIRES ET DES GUIDES PEDAGOGIQUES DE MATHEMATIQUES ET DE FRANÇAIS POUR LE SECONDAIRE 1ER CYCLE - DON IDA NO H 487.CG Le Gouvernement de la République du Congo a obtenu un Don de l’Association Internationale de Développement (IDA) pour financer le coût du Projet d’Appui à l’Education de Base (PRAEBASE). Il se propose d’utiliser une partie du montant de ce Don, pour effectuer les paiements autorisés au titre du marché de Fourniture et Livraison des Manuels scolaires et Guides pédagogiques existants de Mathématiques et de Français pour le secondaire 1er cycle. L’Unité de Coordination du Projet invite, par le présent avis d’appel d’offres national ouvert, les candidats remplissant les conditions requises à présenter une offre sous pli fermé cacheté, pour la Fourniture et Livraison dans les 295 établissements secondaires du 1er cycle des Manuels scolaires et Guides pédagogiques existants de Mathématiques et de Français pour le secondaire, en un lot unique indivisible, réparti comme suit : 01 : MANUELS DE L’ELEVE ET GUIDES PEDAGOGIQUES DE FRANÇAIS Description des Fournitures Manuel de l’élève et guides pédagogiques de français 01 Manuel de l’élève classe de 6e 02 Guide pédagogique classe de 6e 03 Manuel de l’élève classe de 5e 04 Guide pédagogique classe de 5e 05 Manuel de l’élève classe de 4e 06 Guide pédagogique classe de 4e 07 Manuel de l’élève classe de 3e 08 Guide pédagogique classe de 3e Article No

Quantité (Nb. d’unités)

Unité

22 000 exemplaires 80 exemplaires 16 000 exemplaires 80 exemplaires 13 000 exemplaires 70 exemplaires 17 000 exemplaires 70 exemplaires

Unités Unités Unités Unités Unités Unités Unités Unités

Site (projet) ou Destination finale comme indiqués aux DPAO Sibiti-KinkalaDjambala-OwandoEwo-Ouesso-ImpfindoPointe Noire-MadingouDolisie-Brazzaville-

Date de livraison (selon les Incoterms) Date de livraison Date de livraison au plus tôt au plus tard 31 mars 2011

30 juin 2011

02 : MANUELS DE L’ELEVE ET GUIDES PEDAGOGIQUES DE MATHEMATIQUES Description Quantité des (Nb. d’unités) Fournitures Manuel de l’élève et guides pédagogiques de mathématiques 22 000 exemplaires 01 Manuel de l’élève classe de 6e 80 exemplaires 02 Guide pédagogique classe de 6e 16 000 exemplaires 03 Manuel de l’élève classe de 5e 80 exemplaires 04 Guide pédagogique classe de 5e 13 000 exemplaires 05 Manuel de l’élève classe de 4e 70 exemplaires 06 Guide pédagogique classe de 4e 17 000 exemplaires 07 Manuel de l’élève classe de 3e 70 exemplaires 08 Guide pédagogique classe de 3e

Article No

Unité

Unités Unités Unités Unités Unités Unités Unités Unités

Site (projet) ou Destination finale comme indiqués aux DPAO Sibiti-KinkalaDjambala-OwandoEwo-Ouesso-ImpfindoPointe Noire-MadingouDolisie-Brazzaville-

Date de livraison (selon les Incoterms) Date de livraison Date de livraison au plus tôt au plus tard 31 mars 2011

30 juin 2011

Le processus se déroulera conformément aux procédures d’appel d’offres international décrites dans les Directives : Passation des marchés financés par les prêts de la BIRD et les crédits de l’IDA ; tous les candidats des pays satisfaisant aux critères de provenance énoncés dans les Directives sont admis à soumissionner. Les candidats intéressés remplissant les conditions requises peuvent obtenir un complément d’information auprès de l’Unité de Coordination du Projet et peuvent examiner/acquérir le dossier d’appel d’offres à l’adresse indiquée ci-après entre 8 h 00 et 16 h 00. Les candidats intéressés peuvent acheter, un jeu complet du document d’appel d’offres rédigé en français, sur demande écrite à l’adresse indiquée ci-après, moyennant paiement d’un montant non remboursable de 75.000 F.CFA ou d’un montant équivalent en monnaie librement convertibles. Le paiement devra être effectué par Virement au compte n° 30012 00101 182243 – 02101 28, domicilié à LA CONGOLAISE DE BANQUE, sise à Brazzaville, par Chèque de caisse ou au Comptant contre la délivrance d’un reçu de caisse. Le dossier peut être envoyé, à la demande, par courrier express ou par courrier électronique, dans les mêmes conditions. Les offres doivent être envoyées à l’adresse indiquée ci-après au plus tard le 17 mars 2011 à 12 h 00. L’offre doit être accompagnée d’une garantie d’offre d’un montant de 13 600 000 FCFA, libellée en FCFA ou dans une monnaie librement convertible sous forme de chèque certifié ou d’une caution bancaire d’une banque crédible établie ou ayant un correspondant en République du Congo. Toute soumission d’offres adressée par voie électronique ne sera pas autorisée. Les offres reçues après le délai fixé seront rejetées. Le pli devra porter la mention « AOI 02 H 487.CG ; La Fourniture et Livraison des Manuels scolaires et Guides pédagogiques existants de Mathématiques et de Français pour le secondaire ; A n’ouvrir qu’en séance publique de dépouillement ». Les plis seront ouverts en présence des représentants des soumissionnaires qui souhaitent assister à la séance d’ouverture le 17 mars 2011 à 12 h 30, à l’adresse indiquée ci-après : PROJET D’APPUI À L’EDUCATION DE BASE (PRAEBASE) - UNITÉ DE COORDINATION DU PROJET (U.C.P.) B.P. 49 - RUE LAMOTHE (DERRIERE LE MINISTERE DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L’ETAT) Tél. (242) 06 666 44 56 - Email : praebase_congo@yahoo.fr Brazzaville Le Coordonnateur Marie-Joseph MALLALI-YOUGA



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