RÉVOLUTION À LA MAROCAINE jeuneafrique.com
LE PLUS
de Jeune Afrique
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 52e année • N° 2661 • du 8 au 14 janvier 2012
ÉCONOMIE CE QUI NOUS ATTEND EN 2012
TUNISIE BEN JAAFAR: « POURQUOI NOUS ALLONS RÉUSSIR »
SÉNÉGAL LES VÉRITÉS DE TANOR
SANTÉ
L’Afrique contre le cancer
Spécial 10 pages
Voyage au cœur de l’armée algérienne CÔTE D’IVOIRE
Le système
ADO Comment et avec qui travaille le chef de l’État Alassane Ouattara.
Cet exemplaire vous est offert et ne peut être vendu.
| Not for sale.
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Vous retrouverez Ce que je crois de Béchir Ben Yahmed dans le n0 2662 du 15 janvier 2012.
Éditorial François Soudan
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Rois nègres et barbus bistres
Rois nègres au Sud, barbus basanés au Nord: la fabrique à fantasmes fonctionne à plein régime dans la France malade de 2012, plus ignorante que jamais des réalités africaines. Un peu comme un antidote, ce premier numéro de l’année vous propose donc de découvrir comment, au Maroc, un roi intelligent et ouvert cohabite avec des islamistes modérés et monarchistes élus par le peuple. Comment, en Tunisie, un président d’Assemblée aux impeccables états de service démocratiques s’exprime à rebours du pessimisme ambiant quant à l’avenir du nouveau régime. Et comment, en Côte d’Ivoire, un chef d’État pointilleux remet peu à peu son pays sinistré sur les rails de la bonne gouvernance. À lire d’urgence par nos deux candidates blondes, qu’il ne viendrait à l’idée de personne de mettre dans le même panier, mais qui, par conviction pour l’une et par maladresse pour l’autre, barbotent pour une fois dans le même marigot… ● JEUNE AFRIQUE
PHOTOS DE COUVERTURES : SIA KAMBOU/AFP PHOTO ; AZZOUZ BOUKALLOUCH/AP/SIPA ; BRUNO LEVY POUR J.A. ; SIDALI/NEW PRESS/SIPA PRESS
L
A CAMPAGNE ÉLECTORALE FRANÇAISE pour la présidentielle d’avril-mai 2012 s’annonce particulièrement dure, tranchante et même carrément trash. Au cœur de ce maelströmdecoupsbas,dephrasesvachardesetdemanips tordues destinées à briser l’adversaire, dont le zapping de Canal+ fera son miel au cours des mois à venir, l’Afrique, du nord au sud, ne tient aucune place, si ce n’est celle, habituelle, de repoussoir. Une fois de plus les thématiques de l’immigration, de l’islamisme et de l’insécurité – les trois étant liées – servent de fond de sauce ad nauseam au menu du Front national de Marine Le Pen, rejoint dans les arrière-cuisines par l’aile la plus droitière du parti au pouvoir et même par un ministre de l’Intérieur passeur de plats en service commandé. Mais voici que l’auteure de l’ineffable « je connais bien Dominique Strauss-Kahn, je l’ai mis en examen », lunettes rouges et 5 % dans les sondages, vous avez reconnu Eva Joly, y va de son dérapage incontrôlé direction fosse à clichés. Pour mieux stigmatiser celui dont elle a « détesté la présidence », la candidate écologiste n’a rien trouvé de mieux que cette phrase choc qui à ses yeux, on l’imagine, vaut mille discours: « Sarkozy? C’est l’africanisation de la France! » Certes, l’ancienne juge d’instruction de l’affaire Elf voulait ainsi dénoncer divers scandales de corruption qui, de Karachi aux porteurs de valises, empoisonnent la République. Mais Mme Joly, bien que d’origine norvégienne, ne descend pas de son drakkar, puisqu’elle est française, vit en France depuis un demi-siècle et qu’elle a vu défiler dans son cabinet bon nombre de grands et petits filous. Elle doit donc savoir que, en matière d’honnêteté et de respect de l’autre, l’Afrique – qui par ailleurs est d’une extrême diversité – aurait au moins autant à s’inquiéter d’une « francisation » que de l’inverse. Et que ce type de comparaison conforte involontairement les préjugés de ceux qui voient dans le continent une calebasse d’eau stagnante dans laquelle il vaut mieux ne pas tremper ses doigts.
Confidentiel
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LA S EM A IN E D E J EU N E A F RIQ U E
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Maroc L’alternance en douceur
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Youssou Ndour Dans la fosse aux lions
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Youssef El-Mangoush, un général désarmé
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Cameroun Poussée de fièvre à Douala
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Presse La face cachée de l’islam
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Pétrole Une hausse qui fait tache d’huile
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Poker Tour Dakar plein aux as
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Arabie saoudite Cyber-djihad du nouvel an
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Tour du monde
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G RA N D A N G L E
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Algérie Voyage au cœur de l’armée
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A F RIQ U E SU BSA H A RIEN N E
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Côte d’Ivoire Le système ADO
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Madagascar À l’est, rien de nouveau
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Sénégal Interview d’Ousmane Tanor Dieng, secrétaire général du Parti socialiste
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RD Congo Quand les casseurs s’en mêlent
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Nigeria Abuja sur le qui-vive
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M AG H REB & M OYEN - O RIEN T
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Tunisie Mustapha Ben Jaafar : « Pourquoi nous allons réussir »
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Mauritanie Un trouble-fête nommé Chafi
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Libye-Otan Une sale « guerre propre » N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
Dans Jeune Afrique et nulle part ailleurs
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SÉNÉGAL OUSMANE TANOR DIENG : « C’EST MON DERNIER COMBAT »
Le patron du Parti socialiste espère bien être celui qui boutera Abdoulaye Wade hors de la présidence, le 26 février.
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28
L’INTERVIEW DE MUSTAPHA BEN JAAFAR
CÔTE D’IVOIRE
Le président de la Constituante s’explique sur l’alliance qu’il a nouée avec les islamistes et le Congrès pour la République.
LE SYSTÈME ADO
À Abidjan, le palais présidentiel du Plateau a changé de locataire, mais aussi de style. Alassane Dramane Ouattara s’est entouré de quelques personnes de confiance. Enquête au cœur du pouvoir.
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LE PLUSe
de Jeune
TUNISIE
Afriqu
SANTÉ
e L’Afriqule cancer e r t n co ge s i l 12 pa Spécia
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CANCER • État des lieux La maladie silencieuse • Interview Adama Ly, chercheur et cancérologue • Réseaux Des professionnels aux patients, l’union fait la force • Portraits Grands pontes sur tous les fronts
05/01/12
10:53
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Quels sont les grands enjeux auxquels va être confrontée l’Afrique en cette période de crise mondiale ?
EUROPE, AM É R I Q U E S, ASIE
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États-Unis Jésus-Christ candidat !
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France Niqab : Rachid-des-Bois contre Sarkozy
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Allemagne Série noire pour les barons
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Parcours Bariza Khiari, la preuve par l’exemple
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Football Quand la Chine marquera des buts
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Hongrie Orban au ban de l’Europe
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LE PLUS DE JE U N E A FR I Q U E
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Santé L’Afrique contre le cancer
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ÉCON OMIE
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Conjoncture L’année 2012 en questions
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Automobile Peugeot veut rugir à nouveau en Afrique
N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
ÉCONOMIE L’ANNÉE 2012 EN QUESTIONS
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Côte d’Ivoire Interview de Madani M. Tall, directeur régional de la Banque mondiale
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Agro-industrie Un bilan aigre-doux pour Cosumar
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C U LT U RE & M ÉD IA S
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Égypte Gamal al-Ghitani : « Je ne fais pas de différence entre les salafistes et les Frères musulmans »
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Arts plastiques Œuvre de salut public
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La semaine culturelle de J.A.
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Lu et approuvé Plaidoyer pour les Roms
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VOUS & NOUS
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Le courrier des lecteurs
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Post-scriptum JEUNE AFRIQUE
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France Marine Le Pen en Afrique avant la présidentielle
SÉNÉGAL GRAND FLOU AU MÉRIDIEN
AIR CÔTE D’IVOIRE DÉCOLLAGE REPORTÉ
Le premier vol d’Air Côte d’Ivoire devait avoir lieu ce mois-ci. Ce sera finalement au printemps, sans doute vers le 30 mars. Plombée par une dette de 50 millions d’euros, la compagnie avait été mise en faillite en juillet dernier. Depuis, les autorités ont sollicité l’appui technique d’Air France afin de mettre en chantier une nouvelle compagnie dont l’État sera l’actionnaire majoritaire. Mais le tour de table tarde à être bouclé. Nicolas Sarkozy avait promis à N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
Alassane Ouattara le concours financier de l’Agence française dedéveloppement(AFD),mais celle-ci refuse d’entrer dans le capital d’une entreprise détenue majoritairement par un État. Les autorités ivoiriennes sont donc en quête de nouveaux partenaires. CAMEROUN UN PETIT PAS POUR LES INTERNAUTES
Après deux ans de discussions, les fournisseurs d’accès à internet (FAI) camerounais sont sur le point de trouver un accord pour interconnecter leurs réseaux. À la clé, des
VINCENT FOURNIER/J.A.
L
A CANDIDATE DU FRONT NATIONAL à l’élection présidentielle est formelle : elle se rendra bien en Afrique francophone subsaharienne dans le cadre de sa campagne. « Les étapes ont été choisies, dit-elle, mais je ne vous dirai ni où ni quand, car dès qu’ils le sauront le Quai d’Orsay et l’Élysée multiplieront les pressions pour qu’on ne me reçoive pas. » Une chose paraît sûre : Abidjan ne sera pas au programme, Marine Le Pen ne cachant guère son aversion pour le président Ouattara (la réciproque est vraie) : « J’ai toujours eu des ré- OÙ SE RENDRA LA CANDIDATE du Front serves à l’égard de ce type d’homme national ? Sûrement pas à Abidjan ! providentiel qui accède au pouvoir dans les fourgons de l’Occident. En plus, il donne des leçons de morale en s’appuyant sur des milices qui ont commis des crimes », soutient-elle. La fille de Jean-Marie Le Pen, qui estime que l’élection de novembre 2010 « n’a pas été libre » et qu’il aurait fallu « recompter les voix », ne cache pas sa sympathie pour Laurent Gbagbo. Même si elle dément avoir failli se rendre à Abidjan au début de 2011 pour lui apporter son soutien: « Il n’en a jamais été question », jure-t-elle. Quant à Marcel Ceccaldi, l’avocat français organisateur présumé de ce voyage, elle n’est « plus du tout en contact avec lui, depuis des années ». ●
économies de bande passante importantes pour les FAI, et un service amélioré pour les internautes. Pas assez pourtant pour démocratiser le web. Un débit de 1 mégaoctet coûte environ 150 euros par mois, en raison du double monopole de Camtel, l’opérateur public, sur l’accès au câble SAT3, et de France Télécom sur SAT3 lui-même, unique liaison sous-marine du pays avec le réseau mondial. Le mégaoctet est vendu 850 euros par mois par Camtel aux fournisseurs d’accès, contre 20 euros en France.
Depuis le 1er janvier, la gestion de l’hôtel Méridien Président, à Dakar, a changé de main, passant de l’américain Starwood au sénégalais Les Soleils d’Afrique, propriété de Mamadou Racine Sy. Le contrat du premier a pris fin il y a un an, ce qui aurait incité l’État du Sénégal, propriétaire des lieux, à changer de gestionnaire. Mais pour l’avenir, l’incertitude est totale. Y a-t-il eu appel d’offres? Dans quelles conditions la passation a-t-elle eulieu?«Nousn’avonsaucune information », répond-on au siège belge de Starwood, qui couvre l’Afrique francophone.
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LE CHIFFRE BINGO !
millions
C’est à ce prix que, le 29 janvier, le consortium regroupant Planor et Monaco Telecom a décroché la troisième licence téléphonique malienne. Un montant très supérieur aux offres de Bharti Airtel (30 millions) et de Viettel (16,5 millions). Pilotée par la banque Linkstone Capital et le cabinet Bird & Bird, l’opération est pour le Mali un succès : il ne s’attendait à récolter qu’une cinquantaine de millions. CEDEAO TOUJOURS PAS DE PRÉSIDENT
Le Bénin et le Burkina sont toujours à la bagarre pour la présidencedelaCommunauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Goodluck Jonathan, le chef de l’État nigérian, devait départagerleurscandidaturesaucours d’un entretien, en décembre, avec le Béninois Boni Yayi et le Burkinabè Blaise Compaoré. « La rencontre n’a pu avoir lieu en raison d’agendas JEUNE AFRIQUE
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Politique, économie, culture & société
Côte d’Ivoire Mystérieux remaniement ALORS QUE LE PRÉSIDENT Alassane Ouattara poursuit ses consultations en vue de la formation d’un nouveau gouvernement, Abidjan se perd en conjectures. Quand sera-t-il annoncé? Quelle en sera l’ampleur? Guillaume Soro, le Premier ministre sortant, sera-t-il reconduit? Contrairement aux rumeurs, rien ne devrait se faire avant la fin de ce mois. Dans le meilleur des cas. D’une part, parce que, le Conseil constitutionnel n’ayant pas achevé l’examen des nombreux recours déposés à l’issue des législatives du 17 décembre (l’opération devrait encore prendre deux ou trois semaines), les résultats n’ont pas encore été officiellement proclamés. Ensuite, parce que Ouattara est attendu en France à la fin du mois pour sa première visite officielle. Enfin, parce que le choix du nouveau chef du gouvernement n’est pas encore arrêté. On parle d’une possible élection de Soro à la présidence de l’Assemblée nationale, ce qui permettrait à « ADO » de confier la primature au PDCI, son allié, et de désamorcer les critiques concernant la mainmise des nordistes sur le nouveau pouvoir. Mais il faudrait attendre pour cela le mois de mai. Soro aura alors 40 ans, âge requis pour occuper le perchoir. ●
surchargés », explique-t-on à Cotonou, où l’on continue de croire que le principe de la rotation par ordre alphabétique pour l’attribution du poste sera respecté. De son côté, le Burkina insiste sur le rôle de sa diplomatie dans la résolution des crises régionales. Déjà nommés, les autres commissaires de la Cedeao doivent entrer en fonction le 1er février. « La décision pour la présidence doit donc intervenir avant cette date », espère un diplomate béninois, qui mise sur le soutien de Paris. « Nous ne soutenons personne », réplique un haut diplomate français. De passage à Paris, en novembre, Boni Yayi avait semble-t-il entendu dans la bouche de Nicolas Sarkozy des propos plus encourageants.
JEUNE AFRIQUE
COMORES IL FAUT SAUVER LE SOLDAT AMIRI
Depuis presque un an et demi, le général Salimou Mohamed Amiri,ancienchefd’état-major de l’armée comorienne et héros de la libération de l’île d’Anjouan en 2008, est dans l’expectative. Inculpé dans l’affaire de l’assassinat du lieutenant-colonel Combo Ayouba, abattu en juin 2010 devant son domicile, il a été démis de ses fonctions et placé en résidence surveillée en août 2010. Son procès, qui devait s’ouvrir en juin 2011, a été renvoyé sine die. Hachim Said Hassane, le porte-parole de son comité de soutien, a adressé début janvier une lettre ouverte au général Éric Bonnemaison, commandant des écoles militaires de Saint-Cyr, dont
PROCÈS HABRÉ LA PISTE QUI FAIT « PSCHITT »
Approché par l’Union africaine, le Rwanda avait laissé entendre, début octobre, qu’il n’était a priori pas hostile à l’idée d’organiser le procès de l’ancien dictateur tchadien Hissène Habré, tout en précisant qu’il n’était pas demandeur. Depuis, plus rien. Le président Déby s’est dit « prêt à coopérer»avecleRwanda (J.A. no 2658), mais n’a finalement envoyé aucun représentant à Kigali. Quant à Robert Dossou, chargé du dossier auprès de l’UA, il ne s’est rendu ni au Sénégal (où vit Habré), ni au Tchad, ni au Rwandapour évoquer le dossier. Les associations de défense des droits de l’homme, qui souhaitent que Habré soit jugé en Belgique, sont satisfaites. Interrogé par RFI le 5 janvier, le président sénégalais Abdoulaye Wade n’a pour sa part évoqué que la demande d’extradition lancée par Bruxelles et n’a pas soufflé mot de la « piste rwandaise ».
IL NE LAISSE QUE DE BONS SOUVENIRS À RABAT
Bruno Joubert au Vatican
LUDOVIC/REA
SÉNÉGAL SANT’EGIDIO AU CHEVET DE LA CASAMANCE Principaux protagonistes des médiations africaines de Sant’Egidio, Matteo Zuppi et Mario Giro réfléchissent à la mise en place d’une task-force dans la crise casamançaise. Le 5 janvier, le président Abdoulaye Wade a officiellement appelé la communauté à l’aider à résoudre un conflit qui
dure depuis que, en 1982, le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC) a commencé de réclamer l’indépendance. « L’idée est de rassembler tous les protagonistes autour d’une table et de ne surtout pas internationaliser le conflit », explique Mario Giro. Le cardinal Théodore Adrien Sarr, archevêque de Dakar, est disposé à jouer les intermédiaires. Tout comme le Collectif des cadres de Casamance (CCC), que préside un proche du chef de l’État, l’architecte Pierre Goudiaby, actuellement en Guinée-Bissau, où il s’entretient avec l’aile militaire du MFDC.
Amiri est un ancien élève, ainsi qu’aux ministres français de la Défense et des Affaires étrangères. Il demande à ses correspondants de faire en sorte que le président Sarkozy évoque la question avec son homologue comorien. « Non pour que le général soit libéré, mais, simplement, pour que son procès puisse se tenir », écrit-il.
Ambassadeur de France au Maroc depuis octobre 2009, Bruno Joubert, 61 ans, est sur le point d’être nommé ambassadeur auprès du Saint-Siège, à Rome, poste traditionnellement réservé à des diplomates chevronnés et réputés proches du chef de l’État. Son nom a été proposé en Conseil des ministres le 4 janvier et doit encore être validé par le Vatican, ce qui ne fait guère de doute. Conseiller Afrique du président Sarkozy de 2007 à 2009, ce bon connaisseur du continent sera regretté à Rabat. Il était apprécié tant par ses collaborateurs que par ses interlocuteurs marocains. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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La semaine de Jeune Afrique
MAROC
L’alternance Trente-cinq jours de tractations en coulisses avec plusieurs formations politiques avant l’assentiment du Palais… Voici comment l’islamiste Abdelilah Benkirane a formé son gouvernement. HAMID BARRADA,
M
envoyé spécial
ardi 3 janvier, palais royal à Rabat, salle du trône. Installation du nouveau gouvernement et prestation de serment. Le roi, flanqué à sa droite du prince héritier Moulay Hassan, accueille d’abord le chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, qu’il invite à se placer à sa gauche, puis les trente membres du cabinet. À l’instar de leur leader, les ministres islamistes, en saluant le roi, se contentent d’effleurer son épaule. Sous M6, le baisemain traditionnel n’est plus de
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rigueur, mais rares sont ceux qui ne l’observent pas. Sans être donc iconoclaste, l’attitude des islamistes n’a pas échappé aux Marocains… La gestation du gouvernement a duré trente-cinq jours, suscitant une certaine impatience dans l’opinion. En fait, Benkirane a mis moins de temps que ses prédécesseurs. Dans le cas du gouvernement d’alternance, en 1998, Abderrahmane Youssoufi, qui avait été désigné le 4 février, avait bouclé son équipe avant la fin du mois, mais l’annonce en avait été retardée de deux semaines. En 2002, Driss Jettou avait bénéficié du même laps de temps. Quant à Abbas El Fassi en 2007, il ne lui fallut que vingtsept jours, mais chacun sait que c’est le Palais qui fit preuve de diligence. Aujourd’hui, Abdelilah Benkirane a dû faire face à des contraintes multiples, qui découlent de ses prérogatives inédites issues de la nouvelle Constitution. Le chef du gouvernement jouit de pouvoirs réels et étendus. Patron de la majorité, il lui revient de JEUNE AFRIQUE
L’événement la répartition des portefeuilles et le choix de leurs titulaires. Rapidement, on a fixé à une trentaine le nombre des ministres. Le PJD s’est réservé la part du lion : onze ministères, en plus de la direction du gouvernement, l’Istiqlal en obtenant six, le PPS et le MP quatre chacun. Une fois esquissé, l’accord devait être entériné par le Palais. La distribution arithmétique des postes, qui reflète le nombre des sièges remportés, n’a pas soulevé de problème. Il n’en est pas allé de même pour la configuration du gouvernement. Souhaitée par le PJD, la création d’un poste de vice-chef du gouvernement (qui n’est pas prévu par la loi fondamentale) a été écartée au profit d’un ministre d’État unique. La division du ministère de l’Intérieur en deux (Sécurité et Collectivités locales), réclamée également par les islamistes qui espéraient y mettre un pied, n’a pas été agréée. En revanche, il a été adjoint au ministère de l’Économie et des Finances un département du Budget qui revient au PJD. Le débat a été âpre avec l’Istiqlal, qui entendait garder l’Équipement et les Transports après l’élection de Karim Ghellab, son ancien titulaire, à la présidence de la Chambre. Le PJD a obtenu finalement gain de cause, et c’est Abdelaziz Rabbah qui en a hérité. Avant d’évoquer les ministères PJD, un mot sur le dispositif original mis en place par Benkirane pour diriger son gouvernement. Il faut citer d’abord Abdellah Baha, le ministre d’État, numéro deux de l’équipe – pour ne pas dire son numéro un bis. Cet ingénieur agronome, vétéran du mouvement islamiste, forme avec le chef du gouvernement un tandem dont on ne connaît pas d’équivalent. Il en est à la fois l’alter ego et le total opposé. Autant l’un est spontané, séducteur, gaffeur, autant l’autre est discret, réservé, voire mutique. Les deux se complètent à merveille. À leurs côtés, un troisième homme : Mohamed Najib Boulif, ministre des Affaires générales et de la Gouvernance. ● ● ●
AZZOUZ BOUKALLOUCH/AP/SIPA
ð AUTOUR DE MOHAMMED VI, l’équipe d’Abdelilah Benkirane (à la gauche du roi), au palais de Rabat, le 3 janvier.
en douceur proposer les futurs ministres qui seront nommés par le roi. Et ce pouvoir de proposition est essentiel dès lors qu’il est exercé pleinement.
PART DU LION. Désigné par le roi au lendemain
des législatives du 25 novembre, qui ont abouti à la victoire du Parti de la justice et du développement (PJD) avec 107 sièges (sur 395), le leader islamiste se devait de constituer une majorité pour obtenir la confiance de la Chambre des représentants. Faute d’une coalition avec la Koutla, qui regroupe l’Union socialiste des forces populaires (USFP), l’Istiqlal et le Parti du progrès et du socialisme (PPS), les socialistes ayant préféré tirer les leçons de leur échec (39 sièges) et se refaire une santé dans l’opposition, Benkirane a été amené à traiter avec les seuls Istiqlal (60 députés) et PPS (18), en comptant sur l’appoint du Mouvement populaire (32). Les discussions entre le leader islamiste et ses partenaires ont porté sur la structure du gouvernement, JEUNE AFRIQUE
Ancien et nouveau look
Gouvernement EL FASSI (15 octobre 2007)
Gouvernement BENKIRANE (3 janvier 2012)
Ministres dont femmes
26 5
30 1
Secrétaires d’État dont femmes
7 2
0 0
Karim Ghellab (Équipement et Transports), 40 ans à l’époque.
Mustapha El Khalfi (Communication et porte-parole du gouvernement), 38 ans.
Le plus jeune
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La semaine de J.A. L’événement Plus ouvert aux questions économiques, il est appelé à jouer le même rôle qu’un Ahmed Lahlimi auprès de Youssoufi ou qu’un Nizar Baraka dans l’entourage immédiat d’Abbas El Fassi. La désignation à la Justice d’El Mostafa Ramid ne s’est pas faite sans mal. Fort en gueule, avocat des djihadistes, le personnage est souvent l’objet de polémiques, quand il ne les provoque pas. Ceux qui l’ont récusé au Palais se sont appuyés sur des accusations précises, qui, vérification faite sur ordre du roi, se sont révélées sans fondement. L’affaire, qui a failli tourner à la crise, s’est conclue à l’avantage du chef du gouvernement, qui en a retiré un surcroît d’autorité.
●●●
Les poids lourds du gouvernement, et la faiblesse des
Abdellah Baha
Le numéro deux Ministre d’État, 57 ans (PJD)
C
N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
et ingénieur agronome originaire du Souss est, de tous les dirigeants du PJD, le plus proche d’Abdelilah Benkirane. Bras droit, confident et conseiller, il a toutes les qualités que ce dernier reconnaît ne pas posséder : pondéré, discret et conciliateur, il l’a accompagné tout au long de sa carrière politique, de la Jamaa Islamiya au Mouvement Unicité et Réforme, matrice idéologique du PJD, dont il est le secrétaire général adjoint. ●
Mohand Laenser Le technicien Ministre de l’Intérieur, 69 ans (MP)
D
DR
pour diriger les Affaires étrangères n’a apparemment pas donné lieu à de longs débats. On ignore quels sont les talents de diplomate de ce psychiatre, par ailleurs diplômé en sciences islamiques. Il pourra en tout cas compter sur le concours efficace de son ministre délégué, Youssef Amrani, un diplomate chevronné dont on ignorait l’appartenance à l’Istiqlal et qui était, depuis mai 2011, secrétaire général de l’Union pour la Méditerranée (UPM). Sans oublier que, parallèlement, Taïeb Fassi Fihri, le ministre sortant, est appelé à suivre les dossiers importants au Palais au titre de conseiller du roi. Le principe de précaution qui a prévalu pour les Affaires étrangères a été observé au ministère de l’Intérieur, avec la nomination de Mohand Laenser, le leader du MP, dont la loyauté à l’égard du Makhzen ne fait pas de doute. Il bénéficiera de l’aide d’un ministre délégué qui est un homme de la « maison », Charki Draiss, ci-devant patron de la Sûreté nationale. Parmi les autres ministères islamistes, la Communication échoit à Mustapha El Khalfi. Universitaire, anglophone, le benjamin de l’équipe (il a 38 ans) conjugue aisément les vertus de rigueur et de pédagogie qu’exige la fonction de porte-parole du gouvernement. Enfin, l’unique femme du cabinet, Bassima Hakkaoui, dirigera le ministère de la Solidarité et de la Famille. Ce rude coup porté à l’objectif de la parité est d’autant plus regrettable que le précédent cabinet comptait pas moins de sept femmes. En ce qui concerne l’Istiqlal, son chef, Abbas El Fassi, a été l’objet de pressions incessantes tout au long de la gestation du gouvernement. Et c’est le « lobby familial » qui a emporté le plus gros morceau avec la désignation de son gendre, Nizar Baraka, à l’Économie et aux Finances, de son beau-frère, Mohamed El Ouafa, à l’Éducation, et de Fouad Douiri, neveu d’une autre figure du parti nationaliste, à l’Énergie… Le PPS ne s’en est pas mal tiré au regard de son score électoral en contrôlant l’Habitat (confié à Nabil Benabdellah, son secrétaire général), la Santé, l’Emploi et la Culture.
DR
RUDE COUP. Le choix de Saad-Eddine El Othmani
epuis un putsch réussi en 1986 contre son mentor Mahjoubi Aherdane, accusé de pouvoir personnel, Laenser est le zaïm (chef ) incontesté du Mouvement populaire, un parti de notables berbères. Sa carrière professionnelle démarre aux Postes et Télécommunications, dont il devient ministre en 1992. Serviteur du Palais aux positions changeantes, il est à nouveau ministre de l’Agriculture en 2002, puis ministre d’État sans portefeuille en 2009. ●
Saad-Eddine El Othmani
Le psy Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, 55 ans (PJD)
P
DR
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résident du conseil national du PJD depuis 2008, il y est également chargé des relations extérieures. Accusé de porter la « responsabilité morale » du terrorisme après les attentats du 16 mai 2003, le parti élit à sa tête ce psychiatre, issu d’une famille de théologiens d’Inezgane et diplômé en études islamiques. El Othmani a été secrétaire général du PJD de 2004 à 2008 et cultive depuis son image de modéré. ● JEUNE AFRIQUE
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femmes
El Mostafa Ramid
L’indigné Ministre de la Justice et des Libertés, 52 ans (PJD)
HASSAN OUAZZANI
N
atif de Sidi Bennour, célèbre pour ses colères homériques au Parlement, Ramid est avocat au barreau de Casablanca où il s’est fait connaître en défendant des journalistes et des détenus salafistes. Spécialiste des procès politiques, dirigeant d’Al Karama, une ONG de défense des droits de l’homme, il s’est aussi illustré par ses déclarations iconoclastes contre les laïcs. Sa nomination est une revanche sur l’entourage royal, qui l’a beaucoup combattu. ●
Qu’en est-il des cinq ministres « indépendants »? S’agissant des portefeuilles des Affaires religieuses, de l’Administration de la défense et du Secrétariat général du gouvernement, Benkirane a rappelé qu’ils relevaient du domaine réservé du roi, ce qui ne l’a pas empêché d’user même ici de son droit de proposition. Ces trois départements ont gardé les mêmes titulaires. Le quatrième de ces ministres, celui délégué à l’Intérieur, déjà évoqué, est un nouveau venu ; enfin, Aziz Akhannouch conserve le ministère de l’Agriculture, où il aura à gérer encore quelques dossiers délicats, comme les négociations avec l’Union européenne. Pour ce faire, il a dû démissionner du Rassemblement national des indépendants (RNI), rejeté dans l’opposition, avec bienentendul’assentimentduPalais.Maisl’opération correspondait aux vœux du chef du gouvernement qui, d’entrée de jeu, avait sollicité l’intéressé.
« Si vous voulez que je dissimule une chose au roi, ne me la dites pas ! » BENKIRANE, À SES AMIS
Nizar Baraka
Le gendre Ministre de l’Économie et des Finances, 47 ans (Istiqlal)
DR
U
niversitaire puis cadre au ministère des Finances, il était, depuis 2007, le conseiller économique du Premier ministre sortant, Abbas El Fassi, qui est aussi son beau-père. Économiste chevronné, il a pourtant renoncé à réformer le système de subventions des produits de base. Apprécié pour son sérieux par les bailleurs de fonds internationaux, il est la principale figure de l’Istiqlal (où il milite depuis l’âge de 17 ans) au sein du gouvernement. ●
Bassima Hakkaoui
La femme Ministre de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement social, 51 ans (PJD)
DR
E
nseignante du supérieur, cette spécialiste de psychologie sociale s’est fait connaître en 2000 pour son opposition féroce au « plan d’action », première mouture avortée de la réforme du statut des femmes. Très active au Parlement, elle vient d’être portée à la tête de la toute nouvelle section féminine du PJD. Hakkaoui devra composer avec les ONG féministes qu’elle a beaucoup affrontées. ● Y.A.A.
JEUNE AFRIQUE
Abdelilah Benkirane a toutes les raisons d’être heureux. De mémoire de Marocain, jamais un chef de l’exécutif n’a disposé d’autant d’atouts – institutionnels et humains – pour gouverner et appliquer son programme de réformes qu’il s’apprête à annoncer devant le Parlement. Il faut dire que, dès le lendemain des élections, le roi a pris la mesure de la nouvelle donne politique et a joué le jeu démocratique. Non seulement le Palais n’a pas été surpris par la victoire, mais il l’a accompagnée. BLAGUE. Entre le roi et le chef du gouvernement,
les relations semblent empreintes de confiance. Le style spontané, décontracté, bonhomme, du leader islamisten’apastardéàdécrisperl’atmosphère.Lors de la première audience, Benkirane a lancé à M6: « Je ne sais même pas comment je dois m’adresser à vous: Majesté, Sidna (« Notre Seigneur ») ou Sidi Mohammed… » Puis, à la deuxième audience: « Je voudrais vous raconter une blague » – « Vous me l’avez déjà proposé la dernière fois! » – « Mais elle était salace… ». En évoquant ses entretiens avec le souverain devant ses amis, le leader islamiste a prévenu: « À l’avenir, je rapporterai tout au roi. Aussi, si vous voulez que je lui dissimule une chose, ne me la dites pas! » Toute la question désormais est de savoir si Abdelilah Benkirane pourra dire non au roi. La Constitution lui donne sur plus d’un point – qu’il s’agisse d’une banale nomination ou d’une décision stratégique – le droit et l’occasion de le faire. Après tout, c’est bien le rôle d’une Constitution de gérer les conflits. C’est-à-dire de permettre à un acteur politique de dire non, mais sans entrer en dissidence et remettre en question l’essentiel: la pérennité de l’État et de la nation. ● N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
La semaine de J.A. Les gens
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ð Businessman accompli, il est L’UN DES du Sénégal.
YL
HOMMES LES PLUS RICHES
Youssou Ndour Dans la fosse aux lions
En annonçant sa candidature à la présidentielle sénégalaise de février, la star internationale a passablement irrité la classe politique. Laquelle n’a pas tardé à le lui faire savoir.
I
l n’a pas fallu longtemps à Youssou Ndour pour saisir la portée médiatique de sa candidature à la présidentielle sénégalaise de février 2012. Télés, radios, articles en bonne place dans le New York Times et dans nombre de journaux occidentaux et africains… « Jamais on n’a autant parlé de l’élection à l’étranger qu’en ce moment », constate, un brin irrité, un proche de Macky Sall, un des favoris. Car le buzz provoqué par l’annonce du chanteur est en décalage complet avec le poids politique qu’on lui prête. Il n’a pas fallu beaucoup plus de temps à celui qui est considéré comme l’un des hommes les plus influents du continent pour comprendre dans quelle galère il s’est engagé, le 2 janvier, en annonçant sa candidature. « Nous n’avons pas besoin d’un chanteur, mais d’un président ! » ironisaitdèslelendemainuncollaborateur du président Abdoulaye Wade. « You », comme l’appellent les Sénégalais, avait anticipé ces critiques, déclarant dans son
allocution télévisée: « C’est vrai, je n’ai pas fait d’études supérieures, mais la présidence est une fonction et non un métier. » En entrant dans la fosse aux lions, le chanteur risque bien plus que de simples contrariétés. Dès le 3 janvier, des sites libéraux rappelaient qu’il était accusé de devoir 500 millions de F CFA aux impôts. Il y a quelques mois déjà, lorsqu’il avait critiqué avec véhémence Wade, le fisc lui était tombé sur le râble… GRIOT. Mais que vient faire dans cette
galère, à 52 ans, la figure de proue du mbalax, co-interprète du tube planétaire Seven Seconds Away, qui compte à son palmarès une trentaine d’albums et un Grammy Award ? « Un devoir patriotique suprême, dit-il. Les gens veulent un vrai changement, je ne pouvais pas rester les bras croisés », a-t-il répondu sur RFI. À Dakar, sa candidature était un secret de Polichinelle, même si la plupart des observateurs pensaient qu’il n’aurait pas le culot de pousser jusqu’au bout son
engagement citoyen, entamé en 2009 avec la création du mouvement Fekke maci bole. Ses détracteurs affirment qu’en parfait businessman il ne fait que se placer pour étendre son empire financier. À la tête du principal groupe de presse du pays – il possède le quotidien L’Observateur, la radio RFM et la télé TFM –, Youssou Ndour est l’un des hommes les plus fortunés du Sénégal. Il nourrit pour TFM des rêves à la CNN et lorgnerait la quatrième licence de téléphonie mobile. Mais en affirmant que Wade, dont il fut un partisan jusqu’en 2007, « n’a pas le droit de se présenter », il expose son groupe à des représailles. Peut-il l’emporter? « Non, estime l’analyste politique Abdou Lô. Il peut jouer un rôle, car son soutien à un autre candidat en cas de second tour sera précieux, mais je ne le vois pas président. » Youssou Ndour peut pourtant se targuer d’avoir investi l’essentieldesafortunedanssonpays,jouit d’une image d’homme engagé et présente le parcours rêvé du self-made-man : issu d’une famille modeste, il a grandi dans le quartier populaire de Medina, à Dakar, et s’est construit sur le tas. Mais, comme le note Fadel Barro, un des leaders du mouvement de jeunes Y’en a marre, il n’a pas d’appareil derrière lui, ni aucune expérience politique. « Il n’arrivera pas à faire oublier qu’il est issu d’une famille de griots [par sa mère, NDLR], ajoute Abdou Lô. Pour beaucoup de Sénégalais non instruits, c’est incompatible avec la présidence. » Rien ne dit que ses fans se transformeront en électeurs. À Dakar, on rappelle que le Sénégal n’est pas Haïti, où un autre chanteur, Michel Martelly, a été élu il y a moins d’un an. Pas le même chaos, pas la même histoire. « Nous avons une expérience politique ancienne, des partis très bien implantés », rappelle Abdou Lô. Et dans un pays où le diplôme est roi, venir de la rue n’est pas forcément un atout. ● RÉMI CARAYOL
NOMINATIONS
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ALI MAHAMANE LAMINE ZEINE BAD L’ex-ministre nigérien des Finances a pris ses nouvelles fonctions de représentant de la Banque africaine de développement (BAD) en Côte d’Ivoire. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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GILSON PAULO FOOTBALL Ce Brésilien est le nouveau sélectionneur de l’équipe nationale de football équato-guinéenne. Il succède au Français Henri Michel, démissionnaire depuis le 21 décembre. JEUNE AFRIQUE
EN HAUSSE
SEUN KUTI
Youssef el-Mangoush Un général désarmé
Le fils de Fela est aux avantpostes de la contestation contre la hausse des prix du carburant au Nigeria. « Les Nigérians ne peuvent pas payer leur essence au même prix que les Américains », a-t-il déclaré le 3 janvier, lors d’une manifestation.
Le nouveau patron de l’armée libyenne hérite de la délicate tâche de mettre au pas les milices, qui contestent d’emblée son autorité.
L
Ì Cet excolonel à la retraite avait COMMANDÉ LES FORCES REBELLES
sur le front d’Ajdabiya.
JEUNE AFRIQUE
ALAA ABDELFATTAH Le blogueur et militant des droits de l’homme égyptien a été remis en liberté provisoire le 25 décembre. Il était détenu depuis deux mois pour avoir participé à la grande manifestation des Coptes du 9 octobre 2011. ALIZÈTA OUÉDRAOGO
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Présentée comme la femme d’affaires la plus riche du Burkina Faso, la fondatrice du groupeTan-Aliz (immobilier, BTP, cuirs et peaux) a été élue, le 29 décembre, présidente de la Chambre de commerce et d’industrie. EN BAISSE
JOSÉ AMERICO BUBO NA TCHUTO Soupçonné d’être impliqué dans l’attaque du 26 décembre contre l’état-major des armées, le chef de la marine bissau-guinéenne a été arrêté le même jour avec vingt-quatre autres personnes. OUSMANE GUIRO Déjà mis en cause en 2007, le directeur général des douanes burkinabè a été interpellé le 1er janvier, puis limogé le 2, après la saisie de quelque 3 millions d’euros au domicile d’un membre de sa famille. EHOUD OLMERT Déjà en jugement pour corruption, l’ex-Premier ministre israélien est de nouveau inculpé dans une affaire de pots-de-vin liés à la construction d’un complexe immobilier à Jérusalem, du temps où il était maire de la ville. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
AFP ; DR
e 3 janvier, l’ex-colonel à la retraite Youssef el-Mangoush a été promu général et nommé chef d’état-major de l’armée par le gouvernement intérimaire de Tripoli, avec la bénédiction du Premier ministre, Abderrahim el-Kib, et du président, Mustapha Abdeljalil. Illustrant le chaos qui règne aujourd’hui en Libye, de violents affrontements entre miliciens de Misrata et de Tripoli font quatre morts le même jour dans la capitale, selon un bilan établi par le chef du Conseil militaire de Tripoli, Abdelhakim Belhaj. Ces incidents se répètent depuis la fin de la guerre, poussant chaque faction à maintenir la présence dissuasive d’hommes en armes, avec force lance-roquettes et mitrailleuses de 14,5 mm montées sur des pick-up. Le 4 janvier, un communiqué conjoint de la coalition des révolutionnaires libyens et du Conseil militaire de la Cyrénaïque dénonce la nomination d’un nouveau chef d’état-major, qualifiée de « non démocratique ». Les rebelles de Benghazi présentent leur propre candidat : Salah Salem el-Obeidi, un général issu de la même tribu que le précédent patron de l’armée, Abdelfattah Younès, assassiné en juillet. Originaire de Misrata, Mangoush est devenu une figure familière en Libye après son arrestation près de Brega, en avril. Capturé par les troupes loyales à Kaddafi alors qu’il commandait les forces rebelles sur le front d’Ajdabiya, il est interrogé à la télévision nationale, mais refuse de traiter ses frères d’armes de « rats », selon la terminologie kaddafiste. Maintenu en détention jusqu’à la chute de Tripoli, en août dernier, le nouveau patron de l’armée occupait déjà les fonctions de vice-ministre de la Défense dans le gouvernement de Kib. N’ayant pas le pouvoir de désarmer les miliciens par la force, Mangoush a promis de faire adopter par le Conseil national de transition (CNT) une loi instituant un Conseil suprême de la défense, de réviser les organigrammes des corps de l’armée et d’accélérer la réinsertion des miliciens. Le ministère du Plan vient d’annoncer un salaire minimum de 600 dinars (environ 370 euros) pour les combattants qui intégreront les ministères de la Défense et de l’Intérieur. ● YOUSSEF AÏT AKDIM
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La semaine de J.A. Décryptage
POLYCARPE ESSOMBA
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Cameroun Poussée de fièvre à Douala Les autorités font le bilan de plusieurs jours de rixes entre habitants du quartier Déido et conducteurs de motos-taxis.
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eux morts, de nombreux blessés, plus de soixante motos brûlées, des maisons incendiées, des commerces saccagés. Le bilan est lourd, au lendemain des affrontements qui, entre le 31 décembre et le 3 janvier, ont opposé des groupes d’habitants doualas du quartier Déido, à Douala, à des conducteurs de motostaxis, bamilékés de l’Ouest en majorité. À l’origine du conflit, la mort d’un jeune habitant de Déido, froidement assassiné par un motard la veille du jour de l’an. Mis au banc des accusés, les conducteurs de motos-taxis se sont alors vu interdire l’accès au quartier par des riverains furieux. Des altercations violentes, à coups de gourdins, de pierres
Paul Biya a gagné. D’où vient donc que, quelques semaines seulement après sa prestation de serment, Douala, « ville ralliée », se rebelle à nouveau ? Chacun y va de sa réponse, qui n’est pas exempte de calculs. « Les évéð MOTOS-TAXIS nements de Déido déclarés indésirables ne seraient pas allés dans le quartier au-delà d’une réacDéido, tion éruptive de ses le 4 janvier. habitants si certains n’avaient oublié le respect normalement dû à une communauté, qui s’est sentie attaquée chez elle », soutient dans un communiqué James Mouangue Kobila, professeur agrégé de droit et membre de l’ethnie douala. Réplique de Jean Michel Nintcheu, député du Social Democratic Front (Front social démocrate) et, lui, bamiléké : « On ne saurait tolérer que, pour des motifs injustifiables, des quartiers soient érigés en bantoustans ou en zones de non-droit ». DÉFOULOIR. Anicet Ekane, candidat du
Mouvementafricainpourlanouvelleindépendance et la démocratie (Manidem) à la présidentielle de 2011, estime de son côté que « le caractère spontané et violent et de machettes se sont ensuivies. Les de ces émeutes est la conséquence des centaines de policiers et de gendarmes mobilisés n’ont pu empêcher la paralysie frustrations et des colères contenues par une jeunesse désorientée. Ces incidents de la capitale économique. ont servi de défouloir à ces désœuvrés, Avant ces émeutes, Douala, réputée dans un pays où leur voix ne compte pas. frondeuse, était plutôt calme. En octobre Dans ce genre de situation, les instincts dernier, elle avait même accueilli en primaires et identitaires surgissent. Certains individus Pourquoi ces émeutes ? Chacun en manque de popularité y va de sa réponse, qui n’est pas dans leur communauté exempte d’arrière-pensées. ont tenté d’exploiter la situation ». triomphe Paul Biya, alors en campagne Une situation à laquelle le président pour la présidentielle. Toute l’élite poliBiya compte remédier en renforçant les tique et économique acquise au parti au dispositifs de sécurité dans les villes de pouvoir avait alors souligné que la paix Douala et de Yaoundé. ● ARMELLE NYA, à Douala était le principal acquis de son candidat.
À SUIVRE LA SEMAINE PROCHAINE
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JANVIER Remise des Golden Globes, à Hollywood. The Artist, un film français muet qui rend hommage au cinéma noir et blanc, est en tête des nominations. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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JANVIER En Sierra Leone, dixième anniversaire de la fin de la guerre civile (1991-2002), qui a fait entre 100 000 et 200 000 morts. Une élection présidentielle est prévue en novembre.
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JANVIER Mario Monti, le président du Conseil italien, se rend àTripoli. Première partenaire commerciale de la Libye, l’Italie souhaite réactiver le traité d’amitié signé en 2008. JEUNE AFRIQUE
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KIOSQUE À TUNIS. « Il n’y a pas eu de censure », estime Slah Nouri, le directeur général de Sotupresse.
Presse La face cachée de l’islam Des hebdomadaires français qui avaient reproduit une image du Prophète ont été bannis des kiosques au Maroc et ont renoncé à envoyer leurs exemplaires en Tunisie et en Algérie.
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n ne badine pas avec le visage du Prophète. Les hebdomadaires français L’Express et Le Nouvel Observateur, qui avaient consacré leur numéro de fin d’année à l’histoire des Arabes, l’ont appris à leurs dépens: ils ont été interdits au Maroc. Le ministère de la Communication leur reproche d’avoir reproduit des gravures persanes où Mohammed est représenté, une pratique interdite par l’islam sunnite. Depuis l’affaire des caricatures au Danemark, en 2005, les opinions maghrébines sont très sensibles à la question et, même si Christophe Barbier, le directeur de la rédaction de L’Express, avait pris la précaution de voiler le visage du Prophète dans l’édition marocaine de son magazine, le numéro a été banni des kiosques. Une décision qui n’a rien à voir avec l’arrivée au pouvoir des islamistes. En 2008 déjà, L’Express avait été interdit pour les mêmes raisons, et par le même ministre. « Le contenu des articles n’est pas en cause et il n’y a pas d’aggravation de la censure au Maroc. Nous avions prévenu les journaux que ce type d’illustrations est systématiquement interdit ici. C’est une règle comme une autre », explique Fréderic Vézy, directeur du distributeur Sochepress. JEUNE AFRIQUE
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, Le Point et L’Express ont été également interdits à Tunis. Mais Slah Nouri, directeur général de la Sotupresse, considère lui aussi qu’« il n’y a pas eu de censure ». « Les numéros en question ne nous ont pas été livrés. Échaudés par l’interdiction au Maroc, les responsables de L’Express ont pris la décision de ne pas les expédier en Tunisie. Quant au Point, l’éditeur a tenté de modifier l’illustration, sans y parvenir pour des raisons techniques. Ce qui l’a conduit à renoncer à nous envoyer notre quota habituel. » Il en a été de même en Algérie, où les éditeurs de L’Express et du Point ont décidé de ne pas envoyer leurs numéros. Reste que, en Tunisie, les tensions provoquées par la diffusion du film Persepolis sur la chaîne Nessma ont sans doute poussé le distributeur à intervenir en amont pour dissuader les responsables des journaux. « Cela risquait de provoquer des réactions extrêmes et d’envenimer inutilement une situation déjà critique. La sagesse recommande de ne pas susciter de faux problèmes sur des questions épineuses qui détourneraient l’attention des débats essentiels », souligne Nouri. ●
Focus : Retrouvez l’interview de Lyonel Trouillot : « À propos d’Haïti, on écoute davantage les Occidentaux que les Haïtiens eux-mêmes »
SONDAGE Que pensez-vous des critiques de Moncef Marzouki à l’encontre de la politique française dans le monde arabe ?* 1
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1. Injustes, la nomination d’Alain Juppé a clairement marqué une évolution de la diplomatie française 47,48 % 2. Dangereuses. La France reste un partenaire stratégique de laTunisie 14,08 % 3. Justifiées. Les errements de la France lors de la révolution le prouvent 38,44 % CETTE SEMAINE :
Comment jugez-vous la candidature de Youssou Ndour à la présidentielle sénégalaise ?
LEÏLA SLIMANI N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
* SONDAGE RÉALISÉ PAR JEUNEAFRIQUE.COM ENTRE LE 22 DÉCEMBRE 2011 ET LE 5 JANVIER 2012. 1790 VOTES.
NICOLAS FAUQUÉ
VINCENT FOURNIER/J.A.
JEUNEAFRIQUE.COM
La semaine de J.A. Décryptage
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Pétrole Une hausse qui fait tache d’huile
AKINTUNDE AKINLEYE/REUTERS
Le prix de l’essence flambe dans plusieurs pays, suscitant la colère des consommateurs. Mais certains y trouvent leur compte.
N
igeria, Bénin, Tanzanie, Centrafrique… L’épidémie s’étend. Même si les causes en sont diverses, le prix de l’essence augmente, et la rue gronde. L’annonce du gouvernement nigérian de supprimer, au 1er janvier, les subventions sur les hydrocarbures a enflammé le pays, où une grève générale devait avoir lieu le 9 janvier. Le litre de carburant chez le premier producteur de pétrole africain a ainsi plus que doublé, passant de 0,30 à 0,66 euro. Au Bénin, le tarif de l’essence de
ð MANIFESTATION contre la hausse du prix du carburant, à Lagos, au Nigeria, le 3 janvier.
contrebande en provenance de Lagos, très prisée de la population, a triplé en quelques jours, atteignant près de 800 F CFA (1,22 euro), ce qui la rend plus chère que dans les stations-services. En Tanzanie et en Centrafrique, le prix du baril sur les marchés internationaux a incité les autorités à rehausser les tarifs. À Bangui, où le litre a augmenté de 30 F CFA, les taxis sont entrés en grève le 4 janvier avant d’obtenir la mise en place d’un comité chargé de fixer un nouveau montant. À la Bourse de New York, le cours a crû de 10 dollars en trois semaines
pour atteindre 113 dollars. Les menaces iraniennes de bloquer le détroit d’Ormuz, oùtransitentlestankersenprovenancedes pays du Golfe, en réponse aux sanctions économiquesaméricaineseteuropéennes, n’y sont évidemment pas étrangères. INTENABLE. La décision nigériane est certes brutale, mais pas totalement surprenante. Le pays, dont les capacités de raffinage sont obsolètes, importe la majeure partie de son essence. Et, comme dans de nombreux États africains, les autorités ont recours aux subventions pour amortir les hausses et préserver le pouvoir d’achat. Conséquence : Abuja y a consacré 8 milliards de dollars (6,2 milliards d’euros) en 2011. Au Maroc, ces subsides sont passés de 3 à 5 milliards de dollars entre 2010 et 2011… Intenable sur le long terme. Au Bénin, les subventions sont abandonnéesdepuisplusd’unan.LeTchadetle Niger ont une autre solution. À N’Djamena et à Zinder, deux raffineries chinoises de 20 000 barils par jour chacune sont entrées en activité en juin et en décembre derniers. Depuis, explique Foumakoye Gado, le ministre nigérien du pétrole, « le prix du litre d’essence est descendu à 579 F CFA sans subvention », contre 679 F CFA pour le prix soutenu et 600 F CFA pour l’essence de contrebande nigériane. « Les consommateurs reviennent dans nos stations-services et un marché s’ouvre à nous au Nigeria », ajoute-t-il. Les premierscamionsd’essence made in Niger devraient partir d’ici à une semaine. ●
LE DESSIN DE LA SEMAINE
MICHAEL PAURON
Glez PALMARÈS BANDE DE CHOUCHOUS, VA !
NON, Le Journal du dimanche ne s’est pas trompé dans son classement annuel. Trois Africains d’origine figurent au palmarès 2011 des personnalités préférées des Français : le chanteur et ex-tennisman Yannick Noah (pour la huitième année consécutive), l’ancien footballeur Zinédine Zidane (à nouveau deuxième) et – surprise –, en troisième position, l’acteur Omar Sy, dont la cote de popularité a explosé l’an dernier avec le film Intouchables.
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JEUNE AFRIQUE
Pour avoir la primeur sur les nouveaux marchés.
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ILS ONT DIT
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Poker Tour Dakar plein aux as
Nous jouons dans le noir pour inviter le public à plonger complètement dans notre univers et mettre tout le monde sur un pied d’égalité, pour montrer qu’on peut “voir” un concert autrement. »
S U R L E PA R K I N G d u Terrou-Bi, l’un des hôtels les plus célèbres de Dakar, autant de grosses cylindrées que de voitures modestes. Dans les salons cosy du quatre-étoiles, costumes chics et jeans cohabitent sans problème. Comme tous les ans depuis 2009, amateurs sous-régionaux et professionnels européens se retrouvent (du 9 au 15 janvier) au Dakar Poker Tour (DPT), le seul événement du genre en Afrique de l’Ouest. Après l’Afrique du Sud et le Maroc, c’est au tour du Sénégal de succomber à la fièvre. Touristes et joueurs de la sousrégion affluent au Casino du Port. « Les premières tables de jeux sont apparues en 2005. Nous avons profité de l’engouement mondial pour lancer le tournoi, raconte Pierre
AMADOU ET MARIAM Chanteurs maliens (en tournée en Europe avec leur nouveau spectacle, Eclipse)
« Au début, nous demandions l’autonomie. Aujourd’hui, les Kurdes pensent que cela ne suffit plus. Nous devons pouvoir décider de notre avenir. » LEYLA ZANA Députée kurde au Parlement turc
«
Dans l’opposition, montrez-moi le gars capable de diriger le pays. Critiquez, mais souvenez-vous de ce qu’était la Russie avant. » MARAT SAFIN Ancien champion de tennis (qui vient d’être élu député à la Douma sous l’étiquette de Russie unie, le parti présidentiel)
« Pour avoir une chance d’être élu président, un candidat doit désormais récolter plus de 1 milliard de dollars pour sa campagne. » RUSSELL BANKS Écrivain américain
«
Ce qui me choque, c’est que l’on demande aux peuples grec, de italien ou français de se serrer la ceinture, alors que, dans le football, personne ne se serre la ceinture et l’on dépense l’argent qu’on n’a pas. » MICHEL PLATINI Président de l’UEFA (Fédération européenne de football)
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Laurent, le directeur général de cette filiale du Terrou-Bi. Roger Hairabedian, le numéro un français, est venu dès la première année, et avec lui des amateurs avertis de Côte d’Ivoire, de Guinée, de Gambie et du Maroc. » Avec des droits d’entrée variant de 300 000 à 1 million de F CFA (450 à 1500 euros), le vainqueur des phases finales peut remporter une somme rondelette: environ 30 millions de F CFA pour Hairabedian, le gagnant de l’an dernier. Il n’y a aucune chance de voir un Sénégalais remporter cetournoi.«MêmesileSénégal regorge de bons joueurs, les nationaux n’ont pas droit aux jeux de table, conformément à la réglementation en vigueur », explique Laurent. ● MALIKA GROGA-BADA
Arabie saoudite Cyber-djihad du nouvel an
DOMINIC FAVRE/AP/SIPA
YOURI LENQUETTE
«
LES WAHHABITES ont beau prôner le retour à un islam pur et dur, certains reconnaissent l’utilité d’avoir des compétences en informatique dès lors qu’il s’agit de jouer un mauvais tour aux Israéliens. C’est ainsi que Group-xp, un collectif qui s’autoproclame « le plus grand groupe de hackers wahhabites d’Arabie saoudite » (titre qui leur est peu contesté), s’est emparé des coordonnées bancaires de plusieurs milliers de ressortissants de l’État hébreu. « Nous avons décidé d’offrir au monde un cadeau de bonne année : les numéros de compte de plus de 400 000 Israéliens ! » écrivait un certain 0xOmar dans un message du 3 janvier qui renvoyait vers une gigantesque base de données. Incitant les internautes à utiliser ces codes pour leurs paiements en ligne, il se réjouissait par avance de voir les victimes affolées « se presser devant les banques israéliennes ». En réalité, son butin est moins important qu’annoncé : la Banque centrale d’Israël a confirmé la fuite des données, mais estime à environ 15 000 le nombre de comptes piratés, une fois tous les doublons éliminés. Les établissements bancaires touchés ont dû immédiatement désactiver ces cartes bancaires et se sont engagés à rembourser les éventuelles transactions frauduleuses. Group-xp n’en est pas à son coup d’essai : en 2008, il avait déjà mis hors service des centaines de sites internet iraniens, Téhéran étant le grand rival de l’Arabie saoudite dans la région. ● PIERRE BOISSELET JEUNE AFRIQUE
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ON NE CHOISIT PAS SA FAMILLE, NI SES SUSPECTS.
AGAINST THE WALL SAISON 1 INÉDITE Sur 13 ÈME RUE, rien ne va plus chez les Kowalski. Abby a décidé de rejoindre la Police des Polices contre l’avis de son père et de ses frères, membres de la police de Chicago. Elle va devoir choisir entre couvrir les siens et assurer sa carrière. Tous les lundis à 21h45 UTC sur 13ÈME RUE.. Une chaîne NBCUniversal disponible en exclusivité Satellite surr
La semaine de J.A. Tour du monde
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CHILI
KCNA/AFP
Deux de chute
LE NOUVEAU PRÉSIDENT KIM JONG-UN bien entouré, le 1er janvier à Pyongyang.
NOMMÉ EN JUILLET 2011 en remplacement de Joaquín Lavín, démissionnaire, Felipe Bulnes, le ministre chilien de l’Éducation, n’a pas tenu plus de cinq mois et a démissionné à son tour, le 29 décembre. Depuis le mois d’avril, les jeunes Chiliens réclament un système éducatif public et gratuit, et multiplient les manifestations. LE MOT QUI FAIT POLÉMIQUE
CORÉE DU NORD
À double tour
SALE MEC
ELON UNE ONG SUDCORÉENNE, le 2 janvier, trois hommes qui tentaient de franchir le fleuve Yalu à partir de la ville de Hyesan pour se rendre en Chine, de l’autre côté de la frontière, ont été abattus par une patrouille nord-coréenne. À l’automne dernier, déjà, ordre avait été donné de renforcer le contrôle de ladite frontière, ce qui avait entraîné un ralentissement des défections, mais aussi du commerce frontalier, illégal mais toléré, avec la Mandchourie, nécessaire à la survie quotidienne de la population. Il alimente en effet les marchés en denrées diverses : médicaments, nourriture, vêtements, etc. Dans son premier discours (reproduit par le quotidien Rodong Shinmun), Kim Jong-un, le nouveau maître du pays, a estimé qu’« assurer l’alimentation de la population est une nécessité pour construire une puissance prospère ». Obéissant à l’une des dernières volontés de son père, il a pourtant interdit l’utilisation des devises étrangères (yuan, dollar, euro) sur les marchés, ce qui risque d’entraver l’économie parallèle et d’entraîner de nouvelles pénuries et une forte inflation. ●
C’EST LE JUGEMENT QUE, selon le quotidien Le Parisien, François Hollande aurait émis à l’endroit de Nicolas Sarkozy au cours d’un déjeuner de presse, le 3 janvier. Il semble que ce ne soit pas tout à fait ce qu’il a dit, mais peu importe : l’état-major UMP y voit la confirmation que le candidat socialiste à la présidentielle n’est pas à la hauteur de la fonction qu’il brigue. Mais le désormais célèbre « casse-toi pauv’ con » était-il vraiment plus gracieux ?
S
ROYAUME-UNI
Meurtre dans un jardin anglais UN CADAVRE a été découvert par un promeneur et son chien, le 1er janvier, à Sandringham, dans le Norfolk (Est). La police ne doute pas qu’il s’agisse d’un meurtre, et le Daily Mail, tabloïd dont les affaires sordides aiguisent souvent la perspicacité, croit savoir que la victime serait une adolescente d’origine lettonne N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
disparue au mois d’août. Tout cela n’aurait qu’une importance très relative si le corps sans vie n’avait été abandonné à moins de 1 mile de l’entrée d’une propriété de 8 000 ha appartenant à la famille royale d’Angleterre, qui y a d’ailleurs passé les fêtes de fin d’année. Quelqu’un a pensé à prévenir Agatha Christie ?
CHINE
À la recherche du dissident perdu C’EST DANS LES GEÔLES de Shaya, au fin fond de la province du Sichuan, que se trouverait Gao Zhisheng, le dissident défenseur des droits de l’homme. Après vingt mois sans la moindre nouvelle, son frère aurait enfin reçu une copie de la décision de justice indiquant son lieu de détention. Condamné en 2006 pour « incitation à la subversion du pouvoir de l’État », l’avocat avait, lors d’une remise en liberté provisoire en 2010, déclaré avoir été frappé et torturé. Il avait été ipso facto renvoyé en prison pour « non-respect des conditions de remise en liberté ». JEUNE AFRIQUE
ARRÊT SUR IMAGE
DIMITAR DILKOFF • AFP
FOLKLORE
Ils sont fous ces Bulgares! LE JOUR DE L’ÉPIPHANIE (le 6 janvier), dans la ville de Kalofer, en Bulgarie, il est de tradition qu’une poignée d’intrépides dansent dans les eaux glacées de la Tundzha. Un prêtre orthodoxe lance une croix dans la rivière, des inconscients plongent, le plus chanceux remonte le saint objet à la surface : il est censé jouir d’une santé de fer tout au long de l’année. Mouais. Bienheureux s’il échappe à la fluxion de poitrine !
BIODIVERSITÉ
Bonnes et moins bonnes nouvelles HUIT CENTS ESPÈCES animales et végétales ont officiellement disparu en 2011, tandis que 4 000 autres se trouvent « en danger critique d’extinction » et 6 000 simplement « en danger ». Dans le même temps, 18 000 nouvelles espèces ont été recensées (insectes, crustacés, mollusques, etc.). La plupart existent depuis la nuit des temps, mais personne ne s’était avisé de leur existence. AFGHANISTAN
Pax talibana ? POUR LA PREMIÈRE FOIS en dix années de conflit, les talibans se disent prêts à ouvrir un bureau de JEUNE AFRIQUE
représentation à l’étranger (sans doute au Qatar) afin de « participer à des négociations ». Mais ils exigent au préalable la libération des prisonniers détenus sur la base américaine de Guantánamo. Opposés jusque-là à toute négociation avant le retrait total des troupes de l’Otan (fin 2014), les talibans ont depuis quelques mois entamé des pourparlers secrets avec des diplomates américains, à Doha. ARGENTINE
Complot « cancérogène » ? UN MOIS APRÈS sa prestation de serment, la présidente Cristina Kirchner a été opérée le 4 janvier d’un cancer de la thyroïde. Apprenant la nouvelle, le Vénézuélien Hugo Chávez a évoqué un hypothétique « complot américain cancérogène ». Depuis 2009,
trois présidents sud-américains, les Brésiliens Luiz Inácio Lula da Silva, puis Dilma Rousseff, ainsi que le Paraguayen Fernando Lugo, ont en effet contracté la terrible maladie. « Cette série noire est étrange, très étrange », a estimé El Comandante. BIRMANIE
Aung San Suu Kyi candidate LE PARTI DE L’OPPOSANTE birmane Aung San Suu Kyi a annoncé sa participation aux élections partielles du 1er avril. En 2010, la dissidente avait refusé de cautionner les consultations organisées par la junte militaire, mais, depuis, cette dernière s’est autodissoute et a transmis ses pouvoirs à un gouvernement civil qui multiplie les gestes d’ouverture. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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Voyage
au cœur de l’armée Si la Grande Muette reste l’un des piliers du régime, l’institution évolue. Vingt ans après l’interruption du processus électoral, le changement de génération dans l’état-major et l’évolution du rapport des forces au sein du pouvoir ont modifié la donne. CHERIF OUAZANI, envoyé spécial
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ð Sortie de la promotion de L’ACADÉMIE MILITAIRE INTERARMES (AMIA) DE CHERCHELL, à l’ouest d’Alger, en juin 2011. JEUNE AFRIQUE
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À aucun moment sa chaîne de commandement n’a connu de rupture. Les gradés ont fait front. Mieux, boycottée par les organisations militaires régionales et sous embargo durant les années 1990, cette toute-puissante armée est redevenue fréquentable. Son savoir-faire en matière de lutte antiterroriste est loué de toutes parts. Son chef d’état-major est reçu à Washington, Bruxelles ou Paris. Une véritable consécration, alors que le pays entame une étape politique cruciale dans un contexte marqué par les révolutions arabes. Qui plus est, la Grande Muette peut s’enorgueillir d’un joli succès en ce début d’année.
était il y a vingt ans. L’Armée nationale populaire (ANP), rouage essentiel dans le système qui gouverne l’Algérie ANTITERRORISME. L’élimination, le 2 janvier, de depuis l’indépendance, interMoh el-Khechkhach, numéro deux d’Al-Qaïda au rompait un processus électoMaghrebislamique(Aqmi)enKabylie,estunsérieux ral qui devait conduire à un raz-de-marée islamiste coup porté à l’ennemi principal: l’islamisme armé. et contraignait le président Chadli Bendjedid à la Recherché depuis des années, le commanditaire démission après avoir obtenu de lui la dissolution des dernières attaques kamikazes ayant frappé du Parlement. Nous étions le 11 janvier 1992. Le cette région en juillet 2010 et août 2011 (de son vrai pays basculait dans le vide. Mais aujourd’hui – alors nom Mohand Ouramdane) était l’une des cibles que se profile à nouveau une poussée islamiste par prioritaires des forces spéciales de l’ANP. Ce sont les urnes aux élections législatives de mai 2012 –, d’ailleurs des membres des troupes d’élite, des parail est peu probable que les militaires optent pour chutistes, qui ont mené l’embuscade contre celui une intrusion aussi directe dans la vie politique. qui s’était fait une spécialité: le rapt de grands comLes temps ont changé. « Le caracmerçants et de notables locaux Une intervention tère républicain de l’État et le libéréscontrelepaiementdefortes multipartisme ont été sanctifiés rançons. L’opération a été rondedirecte dans par la révision de la Constitution ment menée, mais le succès de la vie politique de novembre 2008, assure un l’entreprise n’a provoqué aucun est aujourd’hui général-major, ce n’était pas le communiqué triomphaliste. Ce cas en 1992. Autre différence de n’est pas le genre de la maison. peu probable. taille par rapport à l’épisode du « La lutte antiterroriste prend Front islamique du salut (FIS), l’édifice instituune part importante dans notre quotidien, assure tionnel comprend, aujourd’hui, un Sénat qui un général-major de la Direction de la sécurité ferait contrepoids à une Assemblée tenue par des intérieure (DSI, contre-espionnage), mais nous ne islamistes. » En Algérie, l’armée reste un pilier du perdons jamais de vue qu’elle ne constitue qu’un régime, vigilant et attentif. aspect de notre vocation : défendre l’intégrité Après avoir été accusée d’être putschiste, d’avoir territoriale et protéger la souveraineté nationale. » eu la main lourde contre les manifestants en En fait, l’ANP n’a pas l’exclusivité de la lutte antioctobre 1988 et dans la lutte contre le djihadisme, terroriste. Elle est, avant tout, chargée de sa coord’être derrière les massacres collectifs de villageois dination aux côtés des autres forces de sécurité : durant la décennie noire – des crimes susceptibles police, gendarmerie et « milices patriotes » (des de poursuites devant la Cour pénale internationale civils engagés dans le combat). « Nous n’avons pas (CPI) –, l’ANP a réussi à maintenir sa cohésion. à exulter de l’élimination d’un terroriste, aussi ● ● ● N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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HOUARI BOUMÉDIÈNE (1932-1978)
MOSTEFA BELOUCIF (1939-2010)
KHALED NEZZAR (Né en 1937)
DE SON VRAI NOM Mohamed Boukharrouba, ce natif de la région de Guelma (est du pays) est le père fondateur de l’armée algérienne. Chef d’état-major général à l’indépendance en 1962, il devient vice-président du Conseil des ministres. Titulaire du portefeuille de la Défense, il destitue trois ans plus tard le président Ahmed Ben Bella. Boumédiène a placé l’armée au cœur du pouvoir. Plus de trente ans après sa mort, son portrait est omniprésent dans les casernes.
PROCHE LIEUTENANT du commandant Chadli Bendjedid au cours de la guerre de libération, il devient secrétaire général du ministère de la Défense quand ce dernier accède, en février 1979, à la présidence. Premier général-major algérien, il est nommé chef d’état-major en 1984.Trois ans plus tard débute sa déchéance. À 48 ans, il est mis à la retraite puis aux arrêts pour malversations et détournements de deniers publics. En 1993, il est condamné à douze ans de réclusion par un tribunal militaire.
CHEF D’ÉTAT-MAJOR en octobre 1988 quand l’armée est réquisitionnée pour les opérations de maintien de l’ordre, ce natif de Seriana (en pays chaoui), illustre représentant des DAF (déserteurs de l’armée française), est ministre de la Défense quand les islamistes remportent le premier tour des législatives de décembre 1991. L’ex-patron des parachutistes revendique l’interruption du processus électoral et fait ensuite partie du Haut Conseil de l’État (HCE). Il se retire de la scène politique en 1994.
● ● ● dangereux soit-il, poursuit notre interlocuteur. En fait, nos véritables performances sont passées sous silence : le maintien de la cohésion de l’institution, nos succès en matière de modernisation et de rajeunissement de l’armée. Nous tirons autant de fierté du sauvetage de la République, en 1992, que de la perspective de pouvoir satisfaire un vieux fantasme national: produire, dans quelques mois, le premier véhicule algérien. »
OFFICIERS POLYGLOTTES. Il est vrai que l’ANP – avec ses 147 000 hommes et 150 000 réservistes, ses 3 000 blindés, ses 163 avions et son budget de 5,6 milliards de dollars (422 milliards de dinars) en 2010 – n’est pas uniquement un acteur politique déterminant de l’Algérie indépendante, mais également un opérateur économique de premier plan doté d’une branche industrielle performante. C’est notamment le cas avec la base logistique de Béni Mered, à proximité de Blida (50 km à l’ouest d’Alger), le siège de la Ire région militaire. En partenariat avec le constructeur allemand Daimler, le premier complexe de production de véhicules tout-terrain va être prochainement inauguré, dans la région de Tiaret. L’ANP ne néglige pas non plus la recherchescientifiqueens’associantauxplusgrands centres de recherche et laboratoires nationaux. Les spécialités les plus prisées vont du nucléaire au spatial, en passant par l’aéronautique ou les nanotechnologies. Recrutée dans les filières d’excellence, son élite est formée dans des structures N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
« Notre fierté : le sauvetage de la République, en 1992, et produire bientôt le premier véhicule algérien. » UN GÉNÉRAL-MAJOR
pédagogiques de haut niveau et réputées pour leur sérieux. Citons notamment : l’Académie militaire interarmes (Amia), située à Cherchell (70 km à l’ouest d’Alger); l’École de guerre de Tamentafoust, dans la banlieue ouest d’Alger, où sont prodigués les cours d’état-major ; et l’École militaire polytechnique de Bordj el-Bahri, ville balnéaire à l’est de la capitale. Ces écoles dispensent également des formations à des élèves officiers étrangers, essentiellement africains (maliens, mauritaniens, nigériens, tchadiens, angolais ou mozambicains) et arabes (palestiniens et syriens). Et si l’actuel chef d’état-major, le général Ahmed Gaïd Salah, fêtera cette année son 80e anniversaire, les généraux qui constituent l’ossature du commandement, les chefs des six régions militaires et les patrons des unités opérationnelles sont des quinquagénaires, d’une génération postindépendance, débarrassés des conflits et contentieux du passé. Contrairement à leurs prédécesseurs, leur formation n’est pas exclusivement soviétique ou russe. Polyglottes et ouverts à la coopération internationale, leur apport dans les mutations de l’ANP est indéniable. Pour des raisons idéologiques, l’armée a longtemps été dépendante de son unique fournisseur, l’Union soviétique, puis de la Russie et de l’Ukraine après la chute du mur de Berlin. Mais, progressivement, les militaires ont multiplié leurs interlocuteurs étrangers et diversifié la provenance des armes achetées. Contrairement aux politiques et aux diplomates toujours embarrassés lorsqu’il s’agit JEUNE AFRIQUE
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MOHAMED LAMARI (Né en 1939)
AHMED GAÏD SALAH (Né en 1932)
MOHAMED MÉDIÈNE, alias TEWFIK (Né en 1942)
COMMANDANT des forces terrestres (ce qui en faisait le numéro deux de l’état-major) au début des années 1990, cet Algérois a longtemps incarné le clan des « éradicateurs » face aux islamistes armés. Promu chef d’état-major en 1993, Lamari sera le premier à démissionner de ce poste. Il le fait après la réélection du président Abdelaziz Bouteflika, en avril 2004, qu’il soupçonnait de vouloir réhabiliter l’islamisme politique. Paisible retraité, il se fait de plus en plus rare sur la scène publique.
SUCCESSEUR DE MOHAMED LAMARI en août 2004, il est le père de l’ouverture de l’armée à la coopération internationale. Premier chef d’état-major à se rendre en visite officielle en France ou aux États-Unis, Gaïd Salah diversifie les fournisseurs de l’armée, instaure un nouveau dispositif dans la lutte antiterroriste et améliore l’administration militaire. Promu en 2006 au grade suprême (général de corps d’armée), cet octogénaire est réputé proche d’Abdelaziz Bouteflika. Il est le principal artisan du Comité d’étatmajor opérationnel conjoint (Cemoc).
EN POSTE DEPUIS SEPTEMBRE 1989, il détient sans doute le record mondial de longévité à la tête de services secrets. Personnage clé du régime, ce natif de Bordj Bou Arreridj (Petite Kabylie) est très peu connu du grand public. Cet ancien artilleur fait ses premières armes au sein de la Sécurité militaire (SM), sous les ordres de Kasdi Merbah. Attaché de Défense à Tripoli au milieu des années 1980, il est rappelé par Chadli Bendjedid pour diriger le Département recherche et sécurité (DRS, héritier de la SM).
de discuter avec Paris, l’ANP entretient d’excellentes relations avec l’armée de l’ex-métropole. Outre West Point aux États-Unis, ses officiers suivent d’ailleurs des formations dans les plus prestigieuses académies militaires que sont Saint-Cyr et l’École de guerre de Paris. CEMOC. Dans la même dynamique, l’Algérie, le
Mali, la Mauritanie et le Niger sont parvenus à s’entendre, après un long processus diplomatique, sur la création du Comité d’état-major opérationnel conjoint (Cemoc), à Tamanrasset, le 21 avril 2010. Cela n’allait pas de soi, mais cela a été fait. L’installation de cette structure n’a pour l’instant pas endigué le trafic de drogue aux confins du Sahara, ni évité la multiplication des prises d’otages occidentaux par les salafistes d’Aqmi dans la région, ni empêché la dissémination de l’arsenal libyen et
L’état-major conjoint avec le Mali, la Mauritanie et le Niger, à Tamanrasset, est une première.
encore moins freiné la déferlante de convois de 4x4 bourrés de desperados armés jusqu’aux dents. Il n’empêche, ce Cemoc constitue une première pour l’ANP depuis sa participation à la guerre du Kippour, en 1973. C’est en effet la première fois qu’elle s’engage dans une opération concertée avec trois armées étrangères. « Nous croyons en ce mécanisme, s’enthousiasme un général-major, il assure une gestion régionale du péril Aqmi et éloigne le spectre d’une intervention militaire occidentale, ce qui constituerait le pire des scénarios. » Côté opérationnel, deux bataillons d’infanterie mécanisée sont prépositionnés à Bordj Badji Mokhtar (frontière malienne) et In Guezzam (frontière nigérienne). Ces deux postes de commandement avancés disposent également de moyens aériens : deux hélicoptères d’attaque et deux autres pour le transport de troupes ainsi qu’un avion de ● ● ●
L’ÉPINE DES FÉLONS C’EST EN JUIN 1997 qu’a lieu la première opération de cyberdissidence, avec l’apparition du site anp.org. Animé par un mystérieux colonel B. Ali, ce site connaît très vite une bonne fréquentation en publiant régulièrement des dossiers sur les généraux les plus influents. Mais l’anonymat des auteurs, le peu de crédibilité des accusations (l’opinion algérienne n’a jamais vraiment cru au « qui tue qui ? ») et l’actualisation aléatoire (la dernière remonte à février 2011) du site ont fini par lasser les internautes. Autres détracteurs : les déserteurs. JEUNE AFRIQUE
Mohamed Samraoui, ex-officier du contre-espionnage, ou le sous-lieutenant Habib Souaïdia ont publié des pamphlets rendant l’armée algérienne responsable des massacres collectifs de villageois au milieu des années 1990. Quant à AbdelkaderTigha, il est le principal témoin à charge dans l’affaire des moines deTibéhirine. Les adversaires de l’armée se recrutent également en France. En tête de liste, un éditeur, François Gèze (La Découverte) et deux journalistes, Josée Garçon (Libération) et Jean-Baptiste Rivoire (Canal+). ● CH.O. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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● ● ● reconnaissance doté d’une caméra infrarouge transmettant les images en temps réel. Sur le plan intérieur, contrairement à ce qu’affirment ses détracteurs, l’armée algérienne a plutôt une bonne image auprès de l’opinion, qui la considère comme la plus solide des institutions de la République. Elle ne le doit pas uniquement à sa puissance de feu, ses centaines de chars et ses dizaines de chasseurs bombardiers. Elle le doit surtout à son statut d’héritière de l’Armée de libération nationale (ALN), la branche militaire des indépendantistes du Front de libération nationale (FLN). Depuis, les effectifs ont bien changé, mais le prestige du libérateur demeure. En 1962, la troupe n’excédait pas les 30 000 hommes et quelques centaines d’officiers, la plupart étaient des déserteurs de l’armée française (DAF) ayant rejoint plus ou moins tardivement la lutte. Les DAF les plus célèbres ? Le colonel Abdelkader Chabou (secrétaire général au ministère de la Défense sous Boumédiène, décédé dans un accident d’avion en 1971) a été l’artisan de la mise en place du service militaire, les lieutenants Khaled Nezzar, Larbi Belkheir, ou encore le sous-lieutenant Mohamed Médiène, alias Tewfik, et Mohamed Lamari (lire portraits pp. 24-25). Autant de personnalités qui joueront un rôle clé dans l’évolution de la Grande Muette. En 1969, la conscription a permis de
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LE PRÉSIDENT ET CHEF SUPRÊME DES ARMÉES, ABDELAZIZ BOUTEFLIKA, avec le chef d’étatmajor, Ahmed Gaïd Salah, le 26 juin 2011, à Cherchell.
QUE SONT DEVENUS LES JANVIÉRISTES ? LES « JANVIÉRISTES » sont les généraux de l’ANP qui ont décidé, le 11 janvier 1992, d’interrompre le processus électoral. Cette décision a été prise par une structure informelle, le « conclave de l’armée », regroupant, autour du ministre de la Défense, le chef d’état-major, le patron du Département recherche et sécurité (DRS), celui du contre-espionnage, les directeurs centraux du ministère et les chefs des six régions militaires. Parmi eux, voici les six hauts gradés les plus influents : • Khaled Nezzar : Général-major et ministre de la Défense, il entre au Haut Conseil de l’État (HCE) en janvier 1992. Son retrait de la scène politique remonte à 1994. • Mohamed Médiène : Général et patron du Département recherche et sécurité (DRS) lors de l’interruption du processus électoral, il occupe toujours les mêmes fonctions. • Larbi Belkheir : Général à la retraite et ministre de l’Intérieur en 1992, il deviendra ensuite directeur de cabinet du président Bouteflika après une traversée du désert. Il est décédé en janvier 2010. • Abdelmalek Guenaïzia : Général et chef d’état-major, il était aux avant-postes. Il est à présent ministre délégué à la Défense après quinze années passées en Suisse comme ambassadeur. • Mohamed Lamari : Commandant des forces terrestres en janvier 1992, il est promu chef d’état-major en 1993, puis général de corps d’armée. Il démissionne en 2004. • Mohamed Touati : Il était directeur au ministère de la Défense puis membre de la Commission du dialogue national. Retraité de l’armée, il est actuellement conseiller de Bouteflika pour les affaires sécuritaires. ● N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
doubler les effectifs. L’arrivée massive de bidasses a consolidé l’assise populaire de l’armée. Le service militaire a également contribué à renforcer le creuset national d’une armée qui incorpore dans ses rangs des jeunes originaires de toutes les régions du pays, d’Annaba à Tlemcen, d’Oran à Tamanrasset. C’est pourquoi la plupart des généraux, anciens ou nouveaux, rejettent l’idée d’une professionnalisation. Ils ont cependant fait une concession : la durée de la conscription a été ramenée, en 2006, de deux ans à dix-huit mois. Comme partout ailleurs, les jeunes Algériens font des pieds et des mains pour y échapper. Cela ne signifie pas pour autant que l’armée ait des difficultés de recrutement. Le rêve de la plupart des bacheliers est d’être admis dans les concours de recrutement de l’ANP. Cela ouvre droit à de nombreux privilèges : un salaire mensuel au lieu de la bourse trimestrielle versée aux étudiants « civils », une carrière prometteuse avec une stabilité de l’emploi et, surtout, la garantie d’un logement à l’issue du cursus scolaire. Cependant, si l’armée nourrit son homme (« la vie y est dure, mais la gamelle est sûre », dit l’adage), elle ne lui garantit pas la prospérité. CONCLAVE. En 2003, excédé par les rumeurs
sur la fortune accumulée par les généraux, le chef d’état-major Mohamed Lamari avait exhibé sa fiche de paie devant les caméras de la télévision algérienne : un peu plus de 160 000 dinars (1 600 euros), l’équivalent du salaire d’un pilote d’Air Algérie. « Et encore, renchérit Fateh, colonel actuellement en formation en France, il s’agissait du traitement d’un général de corps d’armée. Contrairement à l’idée répandue, tous les généraux ne sont pas riches, et notre armée a ses officiers pauvres… » Après une hésitation, il poursuit : « Ils font péniblement partie de la classe moyenne, avec les mêmes revenus qu’un médecin spécialisé ou qu’un cadre d’entreprise publique. » Quant au fonctionnement de l’institution, s’il obéit à une stricte observance de la hiérarchie et à un culte de la nation, l’ANP a une particularité : JEUNE AFRIQUE
Voyage au cœur de l’armée
L’attitude des militaires tunisiens et égyptiens est méditée par le commandement. contrastées. Objet du désaccord : son projet de réconciliation nationale accordant l’amnistie aux terroristes qui déposent les armes. Hommes de troupes et officiers sont globalement contre la réhabilitation des islamistes armés. « C’est dur de croiser en ville l’assassin d’un camarade de mess ou d’un compagnon de chambrée », déplore Nadir, ancien bidasse des années 1990, affecté en Kabylie, épicentre du terrorisme des Groupes islamiques armés (GIA) et de l’Armée islamique du salut (AIS, la branche militaire du FIS). Pour balayer ces réticences, le président a misé sur le soutien populaire en organisant un référendum, qui lui a donné carte blanche. En désaccord et soucieux de rogner les ailes d’un Bouteflika qu’il juge trop autonome, le chef d’étatmajor, le général Mohamed Lamari, a engagé
UNE ARMÉE EN COURS DE MODERNISATION
un bras de fer feutré avec ce dernier. Il a fini par démissionner, en 2004. « C’est bien la preuve que l’armée n’est pas putschiste, assure notre général-major. Si cela avait été réellement le cas, elle aurait alors renversé Bouteflika. Elle a préféré sacrifier son chef d’état-major au profit de son chef suprême : le chef de l’État. » Peut-être, aussi, ne parlait-elle pas d’une même voix… Il n’empêche, attribuer la réconciliation au seul président de la République n’est pas tout à fait exact. Les premiers pourparlers pour une reddition des maquisards ont été initiés par un haut gradé. C’est le général Smaïn, alors patron du contre-espionnage, qui, le premier, prit langue avec les chefs de l’AIS. C’était en 1997, deux ans avant l’arrivée de Bouteflika aux affaires. L’apparente dichotomie entre réconciliateurs civils et éradicateurs militaires relève donc du simplisme.
Armée de terre 127000 hommes, dont 80000 conscrits. Près de 3000 blindés: chars d’assaut (de fabrication russe), transport de troupes… Les 7 régiments d’artillerie disposent de 1019 unités (canons, batteries antichars…). La défense antiaérienne est équipée de 288 missiles sol-air.
CASERNES. La profession de foi de notre interlo-
Armée de l’air 14000 hommes. 163 avions de combat (principalement des Mig et des Soukhoï), 8 avions de reconnaissance et 6 drones de surveillance. 51 appareils de transport de troupes. Une centaine d’hélicoptères de combat et 78 de transport. Marine 6000 hommes. 3 sous-marins tactiques. 3 frégates. 20 corvettes. 3 unités de transport amphibie. 3 navires de soutien logistique. Total:
SOURCE : THE MILITARY BALANCE 2011
le conclave. Sorte de comité central, il regroupe autour du ministre de la Défense (généralement le chef de l’État) et du chef d’état-major les directeurs centraux du ministère et les chefs des six régions militaires. Il se réunit quand les circonstances l’exigent, et ses décisions, généralement consensuelles, sont sans recours. C’est un conclave qui a choisi Chadli Bendjedid pour succéder à Houari Boumédiène, en 1979, c’en est un autre qui décida, treize ans plus tard, de le démettre, et c’est encore un conclave qui décida l’interruption du processus électoral en 1992. Remplacé peu à peu par le Haut Conseil de la sécurité nationale, il est aujourd’hui tombé en désuétude. Un signe des temps. Si l’armée a fait preuve d’un loyalisme sans faille à l’égard de l’institution présidentielle (l’épisode de Ben Bella renversé en 1965 n’entrant pas en ligne de compte, tant ce dernier était considéré à l’époque comme étant sous la coupe de Boumédiène), ses relations avec Abdelaziz Bouteflika sont plus
cuteur laisse également penser qu’aucun coup d’État ni putsch n’est envisagé à l’issue des prochaines législatives en cas de victoire des islamistes – si on en juge par les derniers résultats électoraux dans les deux pays voisins, la Tunisie et le Maroc, ce scénario est probable. « Deux textes constituent des références incontournables, du soldat de deuxième classe au général de corps d’armée : la Déclaration du 1er novembre et la Constitution, dont l’article 2 dispose que l’islam est religion d’État. Une victoire islamiste ne nous fera pas ressortir de nos casernes », explique-t-il. Un autre élément de contexte n’a pas non plus échappé aux officiers algériens. Partout autour, les militaires n’ont pas été un recours pour des régimes à l’agonie mais un appui pour des peuples en quête de liberté. Cela change tout. L’armée tunisienne a refusé de tirer sur la foule, laissant Zine el-Abidine Ben Ali seul avec ses nervis de la garde présidentielle. En Égypte, l’état-major a préféré sacrifier l’un des siens, Hosni Moubarak, plutôt que de réprimer les protestataires de la place Al-Tahrir, au Caire. Ces deux précédents sont de toute évidence médités par le commandement et la troupe en Algérie. ●
147000 150000
Ces chiffres s’expliquent par la remise à niveau de l’Armée nationale populaire (ANP), L’ALGÉRIE EST LA QUATRIÈME PUISSANCE qui a souffert, durant les années 1990, d’un réservistes embargo qui ne disait pas son nom. Sur une MILITAIRE AFRICAINE en termes d’effectifs. Elle est devancée par l’Égypte (468 500 hommes), enveloppe d’investissements de 300 milliards d’euros au cours de la dernière décennie, dans l’Érythrée (202 000) et le Maroc (195 800). Mais en termes de mobilisation financière, l’Algérie est aux l’ensemble du pays, le programme de modernisation avant-postes. En consacrant 5,67 milliards de dollars touche principalement deux corps : la marine nationale, avec l’acquisition de deux nouveaux sous-marins à (3,5 % du PIB) à son armée en 2010, l’Algérie est devant l’Égypte (6,2 milliards de dollars, mais plus de 1 milliard propulsion classique et surtout l’achat de six frégates provenant de l’aide américaine). La même année, le en cours d’étude ; et l’aviation avec le renouvellement Maroc a mobilisé 3,2 milliards de dollars. et la modernisation de la flotte. ● CH.O. JEUNE AFRIQUE
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Afrique subsaharienne
CÔTE D’IVOIRE
Le système
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À Abidjan, le palais présidentiel du Plateau a changé de propriétaire, mais aussi de style. Rien n’est laissé au hasard. Pointilleux, Alassane Dramane Ouattara s’est entouré de quelques personnes de confiance. Enquête au cœur du pouvoir.
MARWANE BEN YAHMED, envoyé spécial
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l nous faudra encore environ cinq mois pour que nous soyons totalement installés et opérationnels. Je ne m’attendais pas à trouver un pays à ce point dévasté et pillé… » Dans l’immense bureau du palais du Plateau où il nous reçoit, le chef de l’État, Alassane Dramane Ouattara, a les traits tirés. Devant lui, une pile de parapheurs qui attendent sa signature, trois fauteuils club en cuir marron pour
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accueillir ses interlocuteurs et une télévision qui diffuse en boucle les programmes d’une chaîne française d’informations en continu. L’écrin du pouvoir ivoirien, là où tout ou presque se décide, en impose. Mais il a changé de propriétaire, donc de fonctionnement et de style. Jadis ouverte aux quatre vents, la présidence n’a plus rien à voir avec la fourmilière aux allures de capharnaüm de l’ère Gbagbo. Ce dernier aimait avoir son hétéroclite tribu autour de lui, au point qu’il était parfois difficile de discerner les officiels et les confidents des simples factotums. Le JEUNE AFRIQUE
ISSOUF SANOGO/AFP
Afrique subsaharienne
LE 22 OCTOBRE, au palais du Plateau, à Abidjan.
palais lui-même, endommagé par les combats et les fidèles ; le directeur de cabinet, Marcel Amon la « bunkerisation » du régime pendant les derniers Tanoh ; et le directeur des Affaires administratives feux de sa résistance, est l’objet de toutes les attenet financières (et frère du chef de l’État), Téné tions : bureaux refaits à neuf par l’architecte Pierre Birahima Ouattara, dit « Photocopie » du fait de Fakhoury, grand nettoyage de locaux à peine entresa ressemblance frappante avec son aîné. Sans tenus pendant dix ans – dont la salle de réception oublier sa nièce, Masséré Touré, pour tout ce qui « des pas perdus », où furent découvertes armes et a trait à la communication, et son chef de cabinet, munitions – et réhabilitation de l’immeuble voisin Sidi Touré. Ouattara le définit lui-même comme son destiné à abriter certains services administratifs « special assistant », le premier et le dernier qu’il de la présidence. voit chaque jour, celui qui coordonne son agenda Désormais, on n’y croise que le personnel stricet les différents services, mais aussi la logistique tement habilité, et la salle d’attente n’est autorisée de ses déplacements. Cet ancien cadre du privé qu’à ceux qui ont un rendez-vous dûment consigné (chez Schneider Electric), membre des jeunes du dans les registres des huissiers. Fini le temps des Rassemblement des républicains (RDR), est aux demandes d’audience impromptues et des visiteurs côtés de Ouattara depuis que ce dernier est rentré (plutôt du soir à l’époque) d’exil, en 2006. Amadou Gon Coulibaly, incrustés dans les fauteuils Les conseillers sont dix 53 ans, est la pierre anguen cuir, qui avaient fini par fois moins nombreux que laire de ce système. Le chef épouser leurs formes. Tout sous Laurent Gbagbo. est « carré », organisé. Les del’Étatetluiseconnaissent conseillers du « patron », depuis 1990. Il était directoujours tirés à quatre épingles et équipés d’un iPad, teur des études économiques aux Grands Travaux sont dix fois moins nombreux que sous les refonquand Ouattara a été appelé par Houphouët pour dateurs, mais chacun remplit un rôle bien précis. présider le Comité interministériel de la coordination du programme de stabilisation et de LES HOMMES (ET LA FEMME) DU PRÉSIDENT relance économique, avant d’être nommé Premier « Le président aime déléguer, nous explique ministre. « Nous avons d’abord fait connaissance son chef de cabinet, Sidi Tiemoko Touré. Ce qui sur un plan strictement professionnel, se souvient ne l’empêche nullement d’être très exigeant. Mais Gon Coulibaly. Il m’a ensuite confirmé comme il a besoin d’avoir une confiance totale dans ses conseiller technique quand il est devenu chef du collaborateurs. » Ouattara choisit donc ceux qui gouvernement. Mais notre vraie rencontre date l’accompagnent avec une extrême prudence, du 5 octobre 1990. Il prononçait un discours lors que seul le temps viendra estomper. Il entretient du congrès du PDCI-RDA. Je suis allé le saluer et il des relations étroites avec le Premier ministre, m’a immédiatement donné rendez-vous pour que Guillaume Soro, mais également avec le ministre l’on se revoie… » Depuis, les deux hommes sont d’État, ministre de l’Intérieur, Hamed Bakayoko, inséparables. « C’est lui qui m’a formé, ma carrière dont il est très proche depuis longtemps. Viennent se fera toujours à ses côtés », conclut-il. ensuite le ministre des Finances, Charles Diby Amadou Gon Coulibaly est le bras, les yeux et les Koffi, ceux de la Justice, Jeannot Ahoussou, des oreilles du chef de l’État. Il a la charge du suivi de Affaires étrangères, Daniel Kablan Duncan, ou des l’action du gouvernement et de l’administration terInfrastructures, Patrick Achi. ritoriale, ainsi que des relations avec les institutions À la présidence, tout s’articule autour d’une et les structures rattachées à la présidence (comme « troïka » – l’expression est de Ouattara : le secréle BNETD, le Bureau national d’études techniques et taire général Amadou Gon Coulibaly, fidèle parmi de développement, l’inspection générale, etc.). ● ● ●
La présidence en chiffres (Effectifs) Cabinet du chef de l’État À Abidjan
21
Total
Présidence À Abidjan
854
1 057
À Yamoussoukro
182
JEUNE AFRIQUE
contre 1 977 en décembre 2010
Masse salariale mensuelle
522 457 604 F CFA
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AFP/ISSOUF SANOGO
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LE 28 AVRIL, À ABIDJAN. Le chef de l’État avec Amadou Gon Coulibaly (à g.), secrétaire général de la présidence, et Marcel Amon Tanoh, son directeur de cabinet (à dr.).
Sans oublier les questions d’ordre judiciaire. À la tête du cabinet, Marcel Amon Tanoh, 60 ans. Il a rencontré Ouattara « grâce à la première dame Dominique », en avril 1993. Sociologue de formation, il a occupé le poste de secrétaire général de la mairie de Cocody, avant de se lancer dans les affaires et le secteur privé (café, cacao, textile). Directeur de cabinet au sein du RDR dès 1999, il fera son entrée au gouvernement en 2002, au poste de ministre des Transports. Une fois encore, un long compagnonnage… Amon Tanoh a, sous sa tutelle, la défense et la sécurité, la diplomatie, les droits de l’homme et, évidemment, le fonctionnement du cabinet – une vingtaine de conseillers aujourd’hui, contre près de trois cents sous Laurent Gbagbo, dont certains n’avaient jamais mis les pieds au palais. Troisième tête de la troïka, le « DAF », Téné Birahima Ouattara, 56 ans, qui a rang de ministre. Depuis Houphouët, la présidence avait toujours fonctionné autour de deux entités : le secrétariat général et la direction du cabinet. La nouveauté, avec Ouattara, c’est l’autonomie de cette direction administrative et financière, jadis rattachée au secrétariat général. C’est « Photocopie » qui a mené le grand nettoyage financier – et donc forcément ●●●
Le style Ouattara, c’est plus celui d’un chef d’entreprise que celui d’un homme politique classique.
humain – à la présidence, qui accusait une situation d’endettement préoccupante en avril 2011, avec des encours auprès des fournisseurs de plus de 16 milliards de F CFA (24 millions d’euros). Entre les sites de Yamoussoukro et d’Abidjan, près de 900 salariés ont été licenciés, mis à la retraite ou à disposition de la Fonction publique, soit une économie d’environ 500 millions de F CFA par mois. Ces trois hommes sont essentiels dans le dispositif Ouattara, dont le style de gouvernance – dixit l’un des proches – à plus à voir avec celui d’un chef d’entreprise qu’avec celui d’un homme politique. Même si, compte tenu de la manière dont il est arrivé au pouvoir et de la situation sécuritaire, il est contraint de faire des concessions, de remercier les uns, par des postes politiques, et de faire patienter les autres. PRÉSIDENCE, MODE D’EMPLOI
Le chef de l’État arrive à son bureau vers 9 h 30. Il fait systématiquement un point de la situation sécuritaire avec les directeurs de la gendarmerie ou de la police. Premiers interlocuteurs au palais à son arrivée, son chef de cabinet, Sidi Touré, puis sa responsable de la communication, Masséré Touré. À 10 h 30, il passe en revue l’ordre du jour avec les membres de la troïka. À 11 h 30 commencent les audiences officielles. La plupart des déjeuners sont ensuite consacrés à des réunions de travail : les lundis avec la troïka, les mardis avec Guillaume Soro et les jeudis avec quelqu’un de l’extérieur, personnalité, visiteur étranger ou chef d’entreprise. Le vendredi, jusqu’à une période récente en tout cas, Ouattara essayait de travailler chez lui, dans le quartier de la Riviera (domicile qui est en cours d’extension pour accueillir bureaux et sécurité), puisqu’il refuse d’habiter la résidence officielle de Cocody, où aimait vivre son prédécesseur et ennemi intime Laurent Gbagbo. Tout cela en attendant de s’installer à Yamoussoukro, « mais ce ne sera pas avant deux ou trois ans, précise le chef de l’État, le temps de transférer certains services et administrations ». D’ici là, le système Ouattara aura certainement évolué, les ministres auront changé, peut-être même le premier d’entre eux, Guillaume Soro, que l’on pressent à la tête de l’Assemblée. En revanche, sauf coup de théâtre, la troïka veillera toujours sur le Palais. À Abidjan ou à Yamoussoukro… ●
ÉNIGMATIQUE M. SEREY EIFFEL ON PRÊTE À PHILIPPE SEREY EIFFEL, l’ancien directeur des GrandsTravaux sous Houphouët (1992-1994), et descendant de Gustave Eiffel, une influence considérable sur le chef de l’État.Très proche de lui depuis l’époque où il était Premier ministre, ce Français (ce qui n’est pas étranger aux attaques dont il est l’objet) de 58 ans a occupé la vice-présidence de son Institut pour l’Afrique. Depuis qu’il a été nommé conseiller économique chargé N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
des infrastructures et coordonnateur général des conseillers à la présidence, certains – et ils sont nombreux – n’hésitent pas à le décrire comme le « vice-Premier ministre chargé des Finances ». Réponse de Ouattara : « C’est un grand professionnel, mais cette réputation n’a aucun sens. Il travaille sous la direction d’Amadou Gon Coulibaly. Et je ne l’ai vu qu’une seule fois depuis qu’il nous a rejoints, en juin dernier… » ● M.B.Y. JEUNE AFRIQUE
Afrique subsaharienne ð ANDRY RAJOELINA REÇU EN GRANDE POMPE À L’ÉLYSÉE le 7 décembre. Les États-Unis et l’Afrique du Sud tardent en revanche à reconnaître sa légitimité.
de transition gouvernait de manière unilatérale. Au moins, les choses étaient claires. »
LIONEL BONAVENTURE/AFP
FRONTALE. À l’époque, les mouvances
MADAGASCAR
À l’est, rien de nouveau
Des élections doivent être organisées avant la fin de l’année, mais sur place, c’est le statu quo. Si l’opposition dénonce l’unilatéralisme du président Rajoelina, elle est plus que jamais divisée.
JEUNE AFRIQUE
De fait, quatre mois après la signature de cet accord par dix des onze mouvances « officielles », et trois ans après le début de la crise, le flou règne toujours à Madagascar. « On a progressé sur la mise en place des institutions : les membres du gouvernement et du Parlement ont été nommés dans le respect des articles de la feuille de route, indique un autre membre du CST issu de la société civile, mais on n’avance pas sur les élections », pourtant annoncées par Rajoelina avant la fin de cette année. « Le gouvernement est tétanisé et l’ambiance au Parlement est détestable. On en viendrait presque à regretter la période où la Haute Autorité
RÉMI CARAYOL
LE CAS RAVALO MARC RAVALOMANANA a beau clamer régulièrement qu’il rentrera bientôt au pays, il est a toujours coincé en Afrique du Sud. Et Rajoelina a beau assurer que l’ancien président peut rentrer et que « personne n’a peur de son retour », ses collaborateurs et l’armée n’y sont nt guère favorables. « Le pouvoir joue sur l’ambiguïté », regrette la porte-parole du président déchu, Hanitra Razafimanantsoa. « Nous avons demandé la levée de son interdiction de retour sur le territoire. On nous dit que ça été fait, mais il n’y a rien d’officiel. » En attendant, plusieurs dizaines de ses partisans continuent de se réunir chaque jour à Antananarivo. ● R.C.
ONU
D
es hommes en treillis qui haussent le ton et menacent de sortir de leurs casernes : on se croirait revenu plusieurs mois en arrière à Madagascar. L’armée, discrète depuis la dernière tentative de putsch d’une vingtaine d’officiers en novembre 2010 – un fiasco –, a refait parler d’elle pendant la trêve de Noël. Fin décembre, des sous-officiers ont fait part de leur mécontentement au commandement de l’état-major. Ils parlent de promesses non tenues. Ces sous-officiers ont beau rappeler qu’ils furent à l’origine de la chute de Marc Ravalomanana, en mars 2009, leur gronde n’inquiète pas le pouvoir. « Rien à voir avec les tensions de 2009 et 2010. Ce ne sont que des revendications corporatistes », souligne une source militaire. Mais, comme le note Alain Tehindrazanarivelo, un membre du Conseil supérieur de la transition (CST) qui fut un temps pressenti au poste de Premier ministre, ce mouvement d’humeur ne doit pas être pris à la légère. « Nous vivons une période délicate, résume-t-il. Les espoirs nés avec la signature de la feuille de route s’amenuisent. Les conditions qui devaient permettre le succès de cet accord – l’inclusion de toutes les mouvances, un Premier ministre jouant un rôle d’arbitre, une communauté internationale active – ne sont pas réunies. »
des anciens présidents Ravalomanana, Ratsiraka et Zafy jouaient une partition d’opposition frontale. Aujourd’hui, rares sont ceux qui peuvent les situer sur l’échiquier politique. Ratsiraka, isolé, a refusé de signer la feuille de route ; Zafy l’a signée mais ne veut pas intégrer les institutions de la transition ; Ravalomanana a placé des hommes à lui au gouvernement et au Parlement, tout en menaçant de les retirer à tout moment. « Il y a eu des avancées, mais elles ne sont pas suffisantes. Nous réclamons la libération des détenus politiques et le retour sans condition de Marc Ravalomanana », indique Hanitra Razafimanantsoa, une des porte-parole du président déchu. Même la reconnaissance internationale tarde à se concrétiser. Rajoelina a certes pu s’exprimer, en septembre 2011, devant l’Assemblée générale de l’ONU, et le président français, Nicolas Sarkozy, l’a bien reçu avec tous les honneurs en décembre. Mais les États-Unis et l’Afrique du Sud n’ont pas bougé d’un iota. Washington et Pretoria attendent plus d’« inclusivité » et des élections crédibles; l’Union européenne, principal bailleur de fonds, aussi. Dans ce contexte, aller aux élections relève du suicide, estime Alain Tehindrazanarivelo: « Nous connaîtrions un scénario à la RD Congo. » ●
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Ousmane Tanor Dieng « C’est mon dernier combat » Peu importe si la coalition de l’opposition ne l’a pas choisi pour candidat. Le patron du Parti socialiste sénégalais espère bien être celui qui boutera Wade hors de la présidence, le 26 février.
L
esSénégalaisluiontsouventreproché sa froideur, mais aujourd’hui, OusmaneTanorDiengsourit,s’applique et communique, soucieux de se défaire de l’image de technocrate qui lui a longtemps collé à la peau. À 65 ans, le secrétaire général du Parti socialiste (PS) sera pour la deuxième fois – et la dernière, promet-il – candidat à la présidentielle, le 26 février. Persuadé de pouvoir faire mieux qu’en 2007 (il avait recueilli près de 14 % des voix) en dépit des divisions qui plombent l’opposition, il compte sur le maillage politique du PS, le seul parti aussi solidement implanté que le Parti démocratique sénégalais (PDS, au pouvoir)surl’ensembleduterritoire.Interview.
JEUNE AFRIQUE : Barthélémy Dias, le maire socialiste de Sacré-Cœur-Mermoz, à Dakar, a été arrêté et inculpé pour homicide volontaire. Le 22 décembre, il avait ouvert le feu contre des jeunes qui avaient encerclé sa mairie. Condamnezvous son geste ? OUSMANE TANOR DIENG : J’ai dit mes
regrets qu’il y ait eu mort d’homme et j’ai exprimé ma compassion à la famille du défunt. Mais je voudrais surtout condamner le fait que des responsables du Parti démocratique sénégalais profitent de la détresse des jeunes Sénégalais pour les enrôler comme des mercenaires.
pas réussi à vous entendre. Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ?
Au sein de Benno, quand nous avions évoqué le profil de celui qui serait notre candidat, nous avions mentionné plusieurs critères, dont celui de la représentativité. Pourtant, à l’arrivée, ce poids politique du Parti socialiste n’a pas été pris en compte. Le PS pèse bien plus que l’Alliance des forces de progrès de Moustapha Niasse, dont Benno a finalement fait son candidat ! Pourquoi ne pas vous être désisté ?
Parce que nous nous étions mis d’accord pourdéciderparconsensus,paspourorganiser un vote interne à Benno. Le groupe de facilitation était chargé d’amener un des candidats à se désister, mais, à la place, il a demandé aux différentes parties quelle était leur position. Ne jouons pas sur les mots : c’était bien un vote, et cela, nos textes ne le prévoient pas. D’ailleurs, quitte à voter, il fallait consulter les 3 000 élus locaux de Benno. Ça, au moins, ç’aurait
Niasse à la présidence et moi à la primature. En tête à tête, je lui ai dit qu’il me semblait préférable que je sois le candidat de Benno et que je m’engageais à ne faire qu’un seul mandat, dans un régime d’inspiration parlementaire où les pouvoirs gouvernants seraient entre les mains d’un Premier ministre désigné par l’Assemblée. Je lui ai proposé de diriger la liste pour les législatives et de devenir président de l’Assemblée. Il m’a répondu qu’il avait déjà été ministre ou Premier ministre et
On a trop investi à Dakar. Aujourd’hui, le Sénégal, c’est une grosse tête sur un corps frêle. été démocratique! Mais on a fait voter des partis politiques d’inégales importances. Parfois, même, une seule personne a pu avoir son mot à dire.
qu’il n’avait pas envie de recommencer une carrière parlementaire.
Il a été attaqué par des dizaines de nervis armés, arrivés en pick-up et décidés à lui faire sa fête… Quiconque le sait devrait comprendre ce qu’il a éprouvé et reconnaîtrequ’iladûsedéfendre.Nousexigeons sa libération dans les plus brefs délais. La place de ce garçon n’est pas en prison.
Éprouvez-vous de l’amertume contre Moustapha Niasse, qui ne s’est pas désisté alors qu’il a obtenu près de 6 % des voix en 2007, soit un score très inférieur au vôtre ?
J’ai effectivement trouvé la situation injuste.
Bien sûr ! Abdoulaye Wade a des méthodes de corruption extraordinaires. N’a-t-il pas promis un statut et un salaire aux chefs de village, qui sont porteurs de voix ? N’appelle-t-on pas les préfets et les sous-préfets les gouverneurs wadistes ? Wade est un orfèvre en la matière.
La coalition de l’opposition Benno Siggil Senegaal avait promis un candidat unique, mais Moustapha Niasse et vous n’avez
Pourquoi ne pas avoir accepté de former un ticket avec lui ?
Qu’allez-vous faire pour vous assurer du bon déroulement du scrutin ?
Mais conservez-vous votre soutien à Barthélémy Dias ?
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C’était l’idée du groupe de facilitation :
Doutez-vous de la transparence de l’élection présidentielle ?
Nous allons veiller à ce que l’on ne vote JEUNE AFRIQUE
Afrique subsaharienne ð Le 16 décembre, DEVANT PARTI SOCIALISTE, à Dakar.
LE SIÈGE DU
n’avait pas besoin d’un tunnel de 11 milliards de F CFA [16,8 millions d’euros] dans le quartier de Soumbédioune. Cet argent aurait pu servir au désenclavement des régions… Aujourd’hui, le Sénégal, c’est une grosse tête sur un corps frêle, et ça ne va pas. Il fallait utiliser l’argent de manière plus équilibrée et ne pas miser que sur les infrastructures. Si je suis élu, l’agriculture sera l’une des priorités de mon mandat. Au moins 10 % du budget de l’État devrait y être alloué.
YOURI LENQUETTE
Mais le Sénégal n’est pas en plus mauvais état que quand Wade a pris le pouvoir après quarante années de socialisme…
pas la nuit. Nous aurons des représentants dans chaque bureau de vote, nous aurons lalistedesélecteursparbureausursupport papier et nous allons mettre en place une brigadeantifraude,pourempêcherqu’une même personne vote au Plateau puis à Pikine [deux quartiers de Dakar, NDLR]… Nous veillerons à ce que la transmission des procès-verbaux soit accompagnée par des représentants du parti. Devant les difficultés de Benno à trouver un candidat unique, Wade a paraphrasé Corneille et dit qu’à vaincre sans péril, on triomphait sans gloire… Vous lui répondez quoi ?
Je connais bien le chef de l’État. C’est un bluffeur, qui donne dans la frime et tourne tout en dérision. Il a même dit que l’opposition ferait mieux de garder son argent plutôt que de faire campagne… Mais s’il était si sûr de lui, pourquoi a-t-il voulu modifier la Constitution, en juin, pour faire en sorte qu’un candidat puisse être élu avec le quart des voix ? Que ferez-vous si vous échouez ?
Je suis depuis longtemps au PS et j’y resterai jusqu’au bout. En revanche, je ne me présenterai pas indéfiniment et, quoi qu’il arrive le 26 février, ce sera ma dernière candidature. Quitterez-vous la tête du parti ? JEUNE AFRIQUE
Que je perde ou que je sois élu, je laisserai la place. Il faut préparer les jeunes générations. Vous pensez à Khalifa Sall, le maire de Dakar, souvent présenté comme un successeur potentiel ?
À lui, à Aïssata Tall Sall, à tous ceux qui ont aujourd’hui 30, 40, 50 ans et qui sont l’avenir du parti.
Le Conseil constitutionnel doit se prononcer à la fin du mois sur la validité de la candidature de Wade. Croyez-vous en son indépendance ?
Non, il subit des pressions.
Ses membres disent que les pressions de l’opposition sont les plus fortes…
Même si elles sont fortes, elles ne sont pas de même nature, vous le savez bien. Elles ne sont pas financières par exemple… Nous, tout ce qu’on peut faire, c’est protester. Vous êtes très dur à l’égard du bilan de Wade. Lui reconnaissez-vous quelques réalisations ?
Ce que je critique, c’est la pertinence des choix qui ont été faits et la mauvaise allocation des ressources. On a beaucoup investi à Dakar, sur la corniche et sur la VDN [voie de dégagement nord], mais la moitié de ce qui a été dépensé suffisait. On
Il n’est pas en meilleur état non plus, et il aurait dû l’être ! Les résultats obtenus en matière d’éducation ou de santé sont catastrophiques, et il y a cette impunité ambiante… Aujourd’hui, chacun fait ce qu’il veut. Les valeurs traditionnelles de notre société ont été laminées.
Wade a été le premier chef d’État africain à reconnaître les nouvelles autorités libyennes, il est allé à Tripoli, il a soutenu l’opération de l’Otan… Avait-il raison ?
Non, il n’avait pas à se faire le coursier de Nicolas Sarkozy. C’est indigne.
Vous êtes proche du Parti socialiste français et de Martine Aubry, que vous avez reçue à Dakar… Êtes-vous déçu qu’elle ait perdu face à François Hollande ?
Je suis aussi proche d’elle que de François Hollande. Cette primaire était une question interne à la France, et le candidat qui a été choisi a tout mon soutien. Vous avez longtemps soutenu l’ex-président ivoirien Laurent Gbagbo. Que pensez-vous de son transfert à La Haye?
J’y suis absolument opposé. Je ne vois pas pourquoi il n’y a que les Africains que l’on envoie là-bas. Il fallait le juger, lui-même souhaitait pouvoir s’expliquer, mais en Côte d’Ivoire. Par ailleurs, le soutien que j’avais pour Gbagbo est celui que j’ai pour tous les socialistes. Quand il s’est avéré qu’il avait perdu l’élection, je lui ai maintenu mon amitié. Ce n’est pas parce qu’un ami a perdu qu’il faut aller à son enterrement. ● Propos recueillis à Dakar par ANNE KAPPÈS-GRANGÉ N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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ð MARCHE CONTRE LA RÉÉLECTION DE KABILA, le 23 décembre, à Anvers (Belgique). Les Congolais se mobilisent en masse, mais les manifestations sont le plus souvent pacifiques.
GEORGES GOBET/AFP
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RD CONGO
Quand les casseurs s’en mêlent À Londres, Bruxelles ou Paris, certains membres de la diaspora opposés à Kabila n’hésitent pas à avoir recours à la violence. Ce sont eux qui ont agressé le président du Sénat, le 31 décembre.
L
éonKengowaDondovenaitàParis avec sa femme et son fils pour passer le réveillon en famille… Il s’est retrouvédansunechambred’hôpital. Rien de grave. Quelques jours d’examensmédicaux.MaisleprésidentduSénat congolais a eu chaud. Le 31 décembre, à 16h30, à la gare de Bruxelles-Midi, Kengo monte dans un train rapide pour Paris. C’est sans doute là qu’il est repéré par un compatriote. Peut-être un guetteur… À 18 heures, à son arrivée à Paris, gare du Nord,unedizained’hommes–«entre28et 35 ans », selon un témoin – lui tombent dessus et le rouent de coups. Il est notamment frappé à la tempe. « À son âge, 76 ans, le coup aurait pu être fatal », murmure un de ses proches. Avant de s’enfuir, ses agresseursprennentletempsdefilmerleur victime, assise groggy dans une voiture, la bouche en sang. Sur internet, les images sont légendées: « Une pluie de coups s’est abattue sur l’éternelle troisième voie. » En RD Congo, la « troisième voie », c’est l’opposition modérée. À Kinshasa, Kengo en est la principale figure. En 1994, après une cohabitation impossible entre Mobutu et Tshisekedi, Kengo a accepté le rôle ingrat de Premier ministre de N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
compromis. Le 20 décembre dernier, trois semaines après le duel électoral entre Kabila et Tshisekedi, Kengo – qui réclamait pourtant l’annulation du scrutin – a accepté de venir à la prestation de serment du président Kabila. Pour beaucoup de tshisekedistes, c’est le signe que Kengo est un traître qui négocie secrètement avec Kabila… Ce que rien ne prouve. BOXEURS. Le président du Sénat a-t-il été
agressé par les tshisekedistes de Paris ? Pour le gouvernement congolais, cela ne fait aucun doute. Pour l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), c’est totalement faux. Comme Kengo a porté plainte à Paris, l’enquête de police le dira. Mais une chose est sûre: les boxeurs de la diaspora congolaise n’en sont pas à leur coup d’essai. Le sénateur She Okitundu (Londres, octobre 2006), l’opposant Vital Kamerhe (Montréal, mai 2011), le général Didier Etumba (Paris, juin 2011), le président de la commission électorale, Daniel Ngoy Mulunda (Le Cap, novembre 2011). Sans parler des musiciens pro-Kabila, comme Koffi Olomidé ou Werrason, qui sont menacés à chaque fois qu’ils veulent
organiser un concert hors du Congo… La liste des victimes s’allonge. Entre eux, leurs agresseurs s’appellent des « combattants ». Ils cherchent à terroriser les Congolais trop « tièdes » à leurs yeux et à attirer l’attention du monde sur le régime Kabila. Et ils ont un martyr : Armand Tungulu. Le 29 septembre 2010, à Kinshasa, ce Congolais de Bruxelles a jeté une pierre contre le convoi du président Kabila. Trois jours plus tard, il a été retrouvé mort dans une cellule du camp Tshatshi de la garde républicaine. Y a-t-il un lien? Le 12 septembre dernier, lors d’une visite du président rwandais Paul Kagamé en France, un Congolais de Paris a perturbé la conférence de presse de plusieurs de ses ministres et s’est fait rudement rosser par la sécurité rwandaise. Ce Congolais appartient à l’Apareco, le parti d’Honoré Ngbanda, qui a été le « Monsieur Sécurité » de Mobutu et qui vit aujourd’hui en exil. Le même jour, une trentaine de manifestants congolais opposés au chef de l’État rwandais ont incendié un véhicule sur le périphérique parisien. Pour beaucoup de « combattants », les régimes de Joseph Kabila et de Paul Kagamé sont une seule et même cible. Bref, ce mouvement « combattant » peu structuré mais violent ne se réduit sans doute pas aux tshisekedistes de la diaspora congolaise. ● CHRISTOPHE BOISBOUVIER JEUNE AFRIQUE
Coulisses NIGER PEINES PERDUES ?
NIGERIA
Abuja sur le qui-vive Plusieurs frontières ont été fermées après une nouvelle série d’attaques de Boko Haram.
B
oko Haram a encore frappé. La secte islamique a perpétré trois nouvelles attaques, à Maiduguri et Damaturu (Nord), le 4 janvier, mais sans faire de victimes. Les attentats commis pendant les fêtes de fin d’année ont en revanche fait une cinquantaine de morts et entraîné l’instauration de l’état d’urgence, le 31 décembre, dans plusieurs villes des États de Borno, de Plateau, de Delta et de Yobe. Le président nigérian, Goodluck Jonathan, a également décidé de fermer les frontières avec le Cameroun, le Niger et le Tchad, justifiant cette décision par le repli des terroristes dans ces pays voisins. La mesure ne convainc ni la classe politique ni les éditorialistes locaux : « Comment savoir s’ils passent la frontière puisqu’il est impossible de les identifier ? explique le journaliste nigérian Daouda Aliyou. Les Boko Haram se fondent dans la population et n’ont pas besoin d’aller se cacher ailleurs. » Sans compter que les policiers et douaniers nigérians, mal formés et en sous-effectif, ne sont pas en mesure d’assurer le contrôle de toute cette zone (1 500 km de frontière rien qu’entre le Niger et le Nigeria). Niamey, déjà en proie à la menace Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), dit avoir pris des dispositions. « Nous avons renforcé la sécurité le long de nos frontières et intensifié la coopération avec les agences de sécurité nigérianes », assure Mohamed Bazoum, ministre nigérien des Affaires étrangères, tout en expliquant que, pour l’heure, seule le poste-frontière de Diffa est effectivement fermé. « Ailleurs, les biens et les personnes circulent, mais avec des fouilles et des contrôles accrus », explique-t-il. Au Cameroun, seuls les postes de l’extrême nord du pays sont fermés, mais la presse camerounaise a relayé les désagréments de commerçants camerounais: refoulées à la frontière, leurs marchandises ont été confisquées par les douaniers nigérians. ● MALIKA GROGA-BADA JEUNE AFRIQUE
Afrique subsaharienne
es Des documents stockés dans les étages supérieurs du ministère de la Justice, à Niamey, il ne reste que des es cendres après l’incendie qui a ravagé le bâtiment dans la nuit du 3 au 4 janvier. En dépit de la vétusté des lieux, les autorités privilégient la piste criminelle. Car depuis son élection, en mars 2011, le président Mahamadou Issoufou a fait de la lutte contre la corruption une priorité. Quelques jours avant le sinistre, le gouvernement avait d’ailleurs demandé la levée de l’immunité parlementaire de huit députés soupçonnés de détournement de fonds. Si certains pensent que leurs poursuites sont parties en fumée, ils risquent de déchanter : ce sont essentiellement des archives et less documents administratifs sur les es magistrats qui ont été détruits. « Les es dossiers d’accusation ne font que transiter chez nous, explique-t-on à la direction des affaires judiciaires. s. Peut-être que certains ont été perdus, s, mais les plus sensibles ont déjà été té transférés aux juridictions. » ●
GABON MEILLEURS VŒUX…
SOMALIE BATAILLE RANGÉE
Le président, et seulement le président ! Au Gabon, deux médias d’opposition ont été momentanément suspendus. Le Conseil national de la communication (CNC) reproche à la chaîne de télévisionTV+ et au journal Échos du Nord d’avoir diffusé les « vœux à la nation » d’André Mba Obame il y a… un an. À l’époque, l’opposant (propriétaire deTV+) s’était autoproclamé chef de l’État. Le CNC fait valoir que seul le président peut présenter ses vœux au peuple gabonais.
La Somalie, c’est dangereux, c’est bien connu. Le 4 janvier, trois députés ont dû être hospitalisés après une bagarre générale dans l’enceinte de l’Assemblée nationale, à Mogadiscio. Coups de poing, jets de chaises, stylos utilisés comme armes… Les affrontements ont commencé quand les députés ont tenté de se choisir un nouveau président, en remplacement de Sharif Hassan Sheikh Aden, victime d’un vote de défiance le mois dernier, mais peu enclin à se laisser congédier.
AFRIQUE DU SUD BON ANNIVERSAIRE PETIT CENTENAIRE Trois jours de festivités, 100000 militants et 46 chefs d’État attendus… Le Congrès national africain (ANC, au pouvoir) n’a pas fait les choses à moitié pour fêter son centième anniversaire, du 8 au 10 janvier, à Mangaung (Bloemfontein). Un grand absent toutefois: Nelson Mandela, ancien président et figure marquante de l’histoire de l’ANC. Affaibli et âgé (93 ans), il n’avait pas prévu de faire une apparition. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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Maghreb & Moyen-Orient
TUNISIE
Mustapha Ben Jaafar
« Pourquoi nous allons réussir » Social-démocrate réputé pour son intégrité et sa pondération, le président de la Constituante s’explique sur l’alliance qu’il a nouée avec les islamistes et le Congrès pour la République. Et appelle la majorité comme la minorité à sortir des logiques partisanes dans l’intérêt supérieur de la révolution.
Propos recueillis à Tunis par
I
ABDELAZIZ BARROUHI
l est l’un des trois hommes du triumvirat qui dirige la Tunisie. Président de l’Assemblée nationale constituante (ANC), laquelle est désormais la dépositaire légitime de la souveraineté populaire, Mustapha Ben Jaafar, 72 ans, aura son mot à dire dans les grandes décisions du pouvoir exécutif, exercé par le président de la République, Moncef Marzouki, et le chef du gouvernement, Hamadi Jebali. Depuis son élection au perchoir, le 22 novembre, et en l’absence d’un règlement intérieur de l’Assemblée – qui sera adopté en janvier –, son légendaire sens du compromis, son sang-froid et le respect dont il jouit au sein de la classe politique lui ont été d’un grand secours pour diriger les premiers débats véritablement pluralistes et contradictoires de l’histoire du pays. « Nous sommes tous en train d’apprendre les règles de la démocratie », rappelle-t-il à chaque fois que les échanges deviennent houleux, le contraignant à jouer les équilibristes. Militant de la démocratie et des droits de l’homme depuis une quarantaine d’années, cet ancien professeur de médecine, père de quatre enfants (trois garçons et une fille), sait aussi se montrer ferme quand les circonstances l’exigent. Social-démocrate, il a fait le pari de nouer une alliance avec Ennahdha (islamiste modéré) et le N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
Congrès pour la République (CPR, gauche nationaliste) – qui, comme lui, ont combattu sans faiblir la dictature – et d’accepter de présider l’ANC, dont la tâche principale est de doter la Tunisie d’une nouvelle Constitution. Interview. JEUNE AFRIQUE : Un an après la révolution, comment la Tunisie aborde-t-elle 2012 ? MUSTAPHA BEN JAAFAR : Avec une certaine
sérénité retrouvée. En effet, après les premières élections démocratiques de l’histoire du pays, les institutions légitimes sont en place, et les problèmes, identifiés. Un consensus s’est dégagé au niveau de l’équipe dirigeante autour de l’adoption d’un langage de vérité. Nous sommes conscients de la gravité de la situation héritée et de l’importance des attentes. Lors des débats sur la loi de finances à la fin de décembre, on n’a d’ailleurs entendu personne dire: « Nous allons tout régler. » Bien au contraire, le discours officiel est imprégné de rationalité. Nous faisons appel à toutes les énergies et compétences, ainsi qu’à toutes les capacités d’investissement pour atteindre l’objectif prioritaire, qui est de réduire le chômage et les disparités entre les régions. Êtes-vous satisfait du fonctionnement de la coalition ?
Oui. En témoignent les bonnes conditions dans lesquelles se sont déroulés l’élection du JEUNE AFRIQUE
Maghreb Moyen-Orient Qu’en sera-t-il dans l’avenir ?
Je pense que les termes de l’alliance seront respectés pour tout ce qui se rapporte à la gestion des affaires du pays et à l’action gouvernementale. Il est cependant évident que les partenaires seront libres lorsqu’il s’agira de débattre des textes de la Constitution. Chaque parti agira selon ses convictions, ses principes et son projet de société. Le consensus sera toujours recherché, mais pas à n’importe quel prix. Ce que je peux dire, c’est qu’Ettakatol restera fidèle aux objectifs de la révolution et se comportera en partenaire loyal, indépendamment des clivages idéologiques. Ennahdha respecte-t-elle ses engagements ?
Jusque-là, oui. Je n’ai aucun doute quant à la capacité de la coalition à mener à bien la transition jusqu’aux élections qui suivront la promulgation de la Constitution. Cela dit, et pour l’avenir, Ennahdha est confrontée à un double test. Le premier, d’ordre conjoncturel, est lié au respect de son engagement d’agir au sein de la coalition en partenaire et non pas en parti dominant. L’autre test, plus important parce que plus durable, concerne la capacité d’Ennahdha à démontrer sur le terrain et par des actes concrets qu’elle ne pratique pas le double langage. La réussite de ce double test démontrera que l’attachement à nos racines et à notre culture arabo-musulmane est tout à fait compatible et conciliable avec l’ouverture sur les valeurs universelles de liberté et d’égalité. Cette alliance pour la durée du mandat de la Constituante peut-elle devenir stratégique ?
Si ce double test est réussi, le paysage politique subira de très fortes transformations. Ceux qui sont aujourd’hui hostiles à tout rapprochement avec les islamistes devront réviser leur jugement, car Ennahdha passera alors pour un parti civil comme les autres. C’est le pari que nous avons fait, même s’il n’est pas sûr qu’on le gagne, car cela dépend de tout le monde, et d’Ennahdha en particulier.
ONS ABID
L’opposition reproche à la loi organisant les pouvoirs publics de n’avoir pas fixé la durée de vie de l’ANC.
président de l’ANC, celle du président de la République, le vote de confiance en faveur du gouvernement Jebali, l’adoption de la loi sur l’organisation des pouvoirs publics [« petite Constitution », NDLR] et celle de la loi de finances 2012. Tout cela s’est fait dans le respect de la liberté d’expression de chacun, ce qui démontre bien que l’alliance entre nos trois partis ne signifie pas l’alignement. JEUNE AFRIQUE
Lors d’un
MEETING DE SON PARTI,
ETTAKATOL, le 1er octobre 2011, à Paris.
L’ANC est la source de tous les pouvoirs. Elle a élu le chef de l’État et a voté la confiance au chef du gouvernement, avec la possibilité de la lui retirer le cas échéant. Elle légifère aussi. Or le travail législatif exige une très grande disponibilité et une somme de travail qui ne peut s’effectuer qu’aux dépens du temps réservé à la Constitution. Il faudra là aussi trouver le bon équilibre et le compromis souhaitable entre toutes les parties, majorité et opposition. Le paradoxe, c’est que, dans la pratique, l’opposition veut, d’une part, limiter la durée des travaux de la Constituante à un an, avec une éventuelle prorogation de trois à six mois, et, d’autre part, N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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Maghreb Moyen-Orient propose un amendement – qui a été adopté – selon lequel il suffit de dix députés pour présenter un projet de loi. Que se passera-t-il si, entre-temps, l’élaboration de la Constitution n’est pas achevée? Surtout qu’on a assorti cette proposition d’une condition qui est l’adoption de la prolongation à la majorité des deux tiers, ce qui comporte le risque d’un vide constitutionnel – qui serait irresponsable et inacceptable – dès le lendemain d’un vote sur la prolongation qui n’atteindrait pas les deux tiers. En fait, il s’agit d’une fausse querelle. Bien avant les élections, Ettakatol et Ennahdha s’étaient engagés moralement et politiquement à respecter ce délai dans une déclaration signée par une douzaine de partis. Le CPR, qui n’était alors pas présent, n’y voit plus d’inconvénient. Cela tient toujours. Le chef du gouvernement, Hamadi Jebali, a réitéré cet engagement devant l’ANC. Nous sommes souples sur la question, mais il est aussi de notre responsabilité que l’Assemblée ne s’englue pas dans des débats stériles et ne croule pas sous des projets d’amendement afin que l’on puisse respecter les délais. Des ténors de l’opposition vont jusqu’à qualifier l’ANC de « chambre d’enregistrement » et parlent de « despotisme » de la majorité…
C’est tout à fait absurde. Dire cela, c’est comme si on voulait que la majorité n’assume pas ses responsabilités. À travers son discours, et sans oser le dire clairement, l’opposition voudrait imposer ses vues, ce qui aboutirait à la dictature d’une minorité… La vérité est que certains partis ne sont pas contents du résultat des élections, mais n’osent pas les remettre en question publiquement. Dans la pratique, ce qui s’est passé lors du débat sur l’organisation des pouvoirs publics a démontré de manière éclatante la capacité d’écoute de la majorité et sa réactivité face aux propositions constructives émanant aussi bien de ses rangs que de ceux de la minorité. Le texte adopté est le reflet de cette ouverture d’esprit, qui s’est aussi manifestée à propos d’un certain nombre d’autres questions, comme le rééquilibrage des pouvoirs au sein de l’exécutif, la consécration de l’indépendance de la Banque centrale et la désignation de son gouverneur par le président de la République avec l’aval du chef du gouvernement et du président de l’ANC. Cela s’est encore manifesté par l’introduction du respect du parallélisme des formes (à la majorité simple) en ce qui concerne le vote de la confiance et celui de la motion de défiance à l’égard du gouvernement. Le gouvernement Jebali peut-il être qualifié de « provisoire », comme on l’entend parfois au sein même de l’Assemblée ?
Ce gouvernement a été formé par des partis sortis gagnants d’élections dont le caractère démocratique et transparent a été reconnu par
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NICOLAS FAUQUE/IMAGES DE TUNISIE/ABACAPRESS.COM
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EN TOURNÉE ÉLECTORALE durant la campagne pour l’élection de la Constituante, le 16 octobre, à Menzel Bouzelfa (cap Bon), au sud-est deTunis.
Bio express 8 décembre 1940 Naissance à Bab Souika, àTunis 1950-1956 Études secondaires au collège Sadiki 1968 Achève ses études de médecine à Paris 1978 Membre fondateur du Mouvement des démocrates socialistes 1986-1994 Vice-président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH) 1994 Fonde le Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL, Ettakatol) 2009 Sa candidature à la présidentielle d’octobre est rejetée par le Conseil constitutionnel 17 janvier 2011 Nommé ministre de la Santé dans le premier gouvernement provisoire, mais démissionne aussitôt 22 novembre 2011 Élu président de l’Assemblée nationale constituante (ANC)
tous. Nous sommes donc dans une situation de légitimité institutionnelle octroyée par la volonté populaire à travers les urnes. Il est entendu que les institutions vont fonctionner pendant une période déterminée, et nous nous y sommes engagés. Ceux qui, de manière abusive, parlent de « gouvernement provisoire » cherchent à créer la confusion avec la situation qui a prévalu après le 14 janvier 2011 et remettent ainsi en question la légitimité sortie des urnes. En tant que président de l’ANC, vous avez à plusieurs reprises affirmé que l’Assemblée surveillerait l’action du gouvernement. Est-ce compatible avec le fait que votre parti soit membre de la coalition ?
Tout à fait. Nous faisons partie de cette coalition, mais nous n’oublions pas que, au-delà de tout engagement partisan, chaque membre est l’élu du peuple et que son principal devoir est de veiller à ce que la volonté populaire soit respectée. À l’ANC, nous mettons un point d’honneur à respecter les objectifs de la révolution, même si nous savons que leur concrétisation doit se faire par étapes et selon un ordre de priorité. C’est pourquoi l’ANC sera d’une extrême vigilance vis-à-vis du gouvernement. À la veille des élections, vous aviez proposé qu’au lendemain du scrutin l’ancienne opposition forme un gouvernement d’intérêt national. Bien que vous n’ayez pas été entendu, est-ce que votre proposition tient toujours ?
Elle tient toujours, ou, plutôt, elle a tenu pendant toute la période qui a précédé l’annonce de la composition du gouvernement de coalition formé par Ennahdha, le CPR et Ettakatol. Au lendemain des résultats du scrutin, j’ai personnellement pris contact avec les principaux partis aujourd’hui dans la minorité pour les convaincre de faire partie du gouvernement d’intérêt national. Ils sont malheureusement restés accrochés au schéma JEUNE AFRIQUE
Maghreb Moyen-Orient classique de la démocratie avec une majorité qui gouverne et une minorité qui s’oppose. Ils sont restés insensibles à notre argument soutenant que la situation actuelle de transition démocratique inachevée exigeait le rassemblement des forces et la réduction de toutes les sources de tension afin d’assurer la sécurité et la stabilité. Notre motivation était que nous pouvions ainsi favoriser la relance économique et la mobilisation des potentialités du pays pour drainer davantage d’investissements. Bien entendu, l’idée était que, comme nous-mêmes à Ettakatol, chaque parti garde sa totale liberté d’expression et de vote lors de l’élaboration de la Constitution.
de semer le chaos dans le pays. C’est le seul parti en position de jouer le rôle de pivot. C’est pourquoi certains de nos détracteurs nous reprochent de ne pas être restés dans l’opposition, comme nous l’avions fait lorsque ces mêmes détracteurs s’étaient empressés de rejoindre les deux gouvernements de Mohamed Ghannouchi dominés par les ministres de Ben Ali après la fuite de ce dernier. Ces partis veulent privilégier les positions idéologiques, tandis que nous privilégions les positions politiques en harmonie avec les objectifs de la révolution. Ces partis minoritaires ont donné la priorité à la bipolarisation de la vie politique en ciblant Ennahdha, alors que nous avons refusé cette bipolarisation et choisi comme priorité de faire barrage à la contre-révolution. Il était donc naturel que nous nous retrouvions avec les forces qui ont agi dans le même sens. Nous resterons fidèles à la révolution quoi qu’il nous en coûte.
Il y a des tiraillements au sein d’Ettakatol, où certaines recrues de fraîche date ruent dans les brancards…
Optimiste ?
Source de tous les pouvoirs, l’Assemblée suivra avec vigilance l’action du gouvernement.
Résolument. Je l’ai été pendant quarante ans de lutte pour la démocratie, et le suis à plus forte raison aujourd’hui. Nous allons réussir. Surtout que ce que nous avons fait jusque-là en moins d’un an suscite l’admiration du monde entier. ●
Ce ciblage d’Ettakatol traduit en fait le positionnement particulier du parti dans le paysage politique tunisien. Ettakatol, c’est l’empêcheur
"L’actualité africaine va toujours plus vite. Mais chaque semaine, je garde une longueur d’avance."
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Kadda Chaibi Directeur général
Lecteur investi.
To u s c e u x q u i fo n t avancer l’Afrique s’y retrouvent.
www.jeuneafrique.com
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jeune afrique .com
Maghreb Moyen-Orient
ð Voir l’interview de Moustapha Chafi
sur www.jeuneafrique.com
ð À côté d’Albert Vilalta, un des deux otages d’Al-Qaïda dont MOUSTAPHA CHAFI (à g.) venait d’obtenir la libération, le 23 août 2010, à Ouagadougou.
de l’affairisme, un recensement « facteur de divisions » et les échecs de la politique sécuritaire. Le 22 décembre, il compare le comportement du chef de l’État à celui de son ex-homologue pakistanais Pervez Musharraf, « qui a renversé un gouvernement civil et convaincu l’Occident de sa capacité à lutter contre le terrorisme, mais il a quitté la présidence et le terrorisme a redoublé ».
DR
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MAURITANIE
Un trouble-fête nommé Chafi
En lançant un mandat d’arrêt international contre le conseiller du président burkinabè, la justice a réveillé l’opposition et mis dans l’embarras plusieurs chancelleries africaines.
L
e ton est calme, la voix posée, le discours didactique. Accusé par la justice mauritanienne « d’appui financier au terrorisme, de coopération avec des chefs terroristes et de soutien matériel à des réseaux terroristes dans le Sahel », Moustapha Chafi ne cède pas à la colère, encore moins à la panique. La démarche est celle d’un homme décidé à laver son honneur. « Comment peut-on m’accuser de terrorisme après tout ce que j’ai fait pour obtenir la libération d’otages occidentaux ? » s’interroge le conseiller de Blaise Compaoré. Lorsqu’il a appris la nouvelle, le 28 décembre, il se trouvait d’ailleurs au Mali en compagnie du ministre burkinabè des Affaires étrangères, Djibril Bassolé, pour faire le point sur les questions sécuritaires. MÉDIATEUR NÉ. Né en 1960 à Nouakchott
de parents originaires de l’Assaba, dans le sud-est de la Mauritanie, Chafi appartient à la tribu maraboutique et commerçante des Tajakant. Au cours de son enfance, il a bourlingué dans toutes ces contrées avec son père, Limam Chafi, un grand négociant. Il apprend ainsi le tamasheq, le wolof, le bambara, le haoussa (il parle aussi l’arabe, le français et l’anglais) et acquiert une parfaite connaissance du terrain et des hommes. Entré au service de N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
COMITÉS DE SOUTIEN. « C’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, explique un journaliste de Nouakchott. Aziz a réagi en militaire, de manière impulsive, en actionnant la justice. » Pour l’instant, le mandat d’arrêt ne semble pas avoir été suivi d’effet. Plusieurs États africains contactés disent ne pas avoir reçu de notification. De la Guinée au Niger en passant par la Côte d’Ivoire, où Chafi distille de précieux conseils, les chancelleries disent le soutenir en off. Ce qui est également le cas de Ouagadougou. Quand Ould Taya avait demandé sa tête en 2003, le président Blaise Compaoré avait offert à Chafi la nationalité burkinabè et officialisé leur collaboration. À Paris, le Quai d’Orsay n’a pas souhaité se prononcer, mais certains diplomates assurent que « le dossier d’inculpation est vide ». De son côté, Chafi prépare sa défense. Il monte actuellement un collectif d’avocats internationaux qui va porter plainte contre le président Aziz pour diffamation devant une juridiction européenne. Sur le
Blaise Compaoré en 1995, on le retrouve comme acteur ou médiateur dans toutes les grandes crises africaines (RD Congo, Côte d’Ivoire, Niger, Guinée…). S’imposant une grande discrétion dans ses initiatives continentales, il s’immisce à plusieurs reprises dans les affaires intérieures mauritaniennes. Opposant déclaré, il se félicite ainsi de la chute de président Ould Taya, qui avait déjà fait émettre en 2003 un mandat d’arrêt international à son encontre pour déstabilisation. Puis il soutient le candidat devenu président, Sidi Ould Cheikh Abdallahi, qui bénéLe 22 décembre, il compare le ficiait alors également de président Aziz à Pervez Musharraf. l’appuidugénéralMohamed Ould Abdelaziz, lequel le C’est la goutte d’eau… renversera le 6 août 2008 plan national, l’« affaire Chafi » a réveillé avant de se faire élire président en 2009. l’opposition, qui a fermement dénoncé À l’époque, Chafi condamne fermement la décision de la justice. Les comités de la junte militaire. Depuis, les relations soutien s’organisent, notamment autour entre les deux hommes n’ont cessé de des organisations des droits de l’homme se détériorer. Plusieurs émissaires ont et des étudiants mauritaniens. Un sit-in tenté de les rapprocher – « Aziz m’a même a eu lieu le 4 janvier devant le minisproposé de l’argent et des postes », affirme tère de la Justice. Enfin, les discussions Chafi –, en vain. intertribales battent leur plein autour Au contraire, celui que la presse natiode cette affaire, qui devrait faire encore nale qualifie « d’épine calcanéenne du couler beaucoup d’encre. ● président » ne rate pas une occasion de PASCAL AIRAULT, dénoncer la dégradation des conditions avec BAUDELAIRE MIEU, à Abidjan de vie de ses compatriotes, la progression JEUNE AFRIQUE
Maghreb Moyen-Orient LIBYE-OTAN
TYLER HICKS/THE NEW YORK TIMES-REDUX-REA
Une sale « guerre propre »
Cet homme
Une enquête détaillée du New York Times recense les victimes civiles des frappes de l’Alliance. De quoi relancer la polémique autour de l’intervention occidentale pour renverser Mouammar Kaddafi.
À
deux reprises, le 6 août dernier, les forces de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (Otan) bombardent un entrepôt de missiles antiaériens de type SA-2 (S-75 dans la terminologie soviétique) contrôlé par le régime de Mouammar Kaddafi. Les bunkers contiennent des dizaines de missiles et de propulseurs, y compris des ogives et des réservoirs de combustible. À 40 m de là, un quartier résidentiel. Malgré le caractère militaire de l’objectif, l’Otan vient de frapper au cœur de Tripoli, dans une zone densément peuplée.
JEUNE AFRIQUE
errant au milieu frappes se succèdent cette nuitImmédiatement après l’atdes décombres là. Pour l’Otan, les bâtiments taque, une partie des muniA PERDU SA FEMME visés abritaient des centres de tions pulvérise une rangée de dans le commerces: un garage de répacommandement des troupes bombardement de leur loyales à Kaddafi. Pourtant, ration automobile, un magasin immeuble, d’équipements ménagers, un selon des médecins et des resà Syrte. autre de jouets. Les logements ponsables de l’actuel pouvoir sont partiellement détruits par libyen, la totalité des victimes le souffle de l’explosion. La façade de la sont des civils. À l’époque, l’ancien régime maison des Soudani est atteinte par un tente d’utiliser le drame pour discréditer gros morceau de voiture, qui détruit entièl’action des alliés. Dépêché depuis Tripoli, rement un mur et provoque un départ le propagandiste en chef Moussa Ibrahim est présent aux funérailles des victimes d’incendie. Père, mère et enfant sont et convie les correspondants des médias blessés. Le petit Mohamed reçoit pluétrangers à une conférence de presse… sieurs débris en plein visage. Il a depuis sur les décombres des habitations bomperdu en partie l’usage de son œil droit. bardées la veille. « Quatre-vingt-cinq civils libyens, dont 33 enfants et 32 femmes, ont DÉNI. L’histoire se répète deux jours été massacrés la nuit dernière dans un plus tard, à Majer, une localité rurale raid intensif de l’Otan », dénonce alors le située à quelques kilomètres au sud de porte-parole du gouvernement. Zliten (Ouest). Dans la bavure la plus Au terme d’une enquête menée retentissante de l’opération de l’Otan en Libye, quatre immeubles sont réduits par deux correspondants de guerre, en gravats par une nuit de ramadan. Les Christopher John Chivers en Libye, et bombes à guidage laser pèsent enviEric Schmitt à Bruxelles et à Naples ron 250 kilos chacune. Trois séries de (d’où l’Otan a dirigé ses frappes), ● ● ● N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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Maghreb Moyen-Orient Les chiffres de la guerre
Nom de code :
Unified Protector
7
mois de campagne
5 900
Coalition de cibles commandements : militaires pays menée maritime et aérien par l’Otan atteintes
18
2
le New York Times dénombre aujourd’hui 34 civils tués dans l’attaque de Majer, un chiffre confirmé par des sources médicales à Zliten. Le gouvernement transitoire a arrêté la liste à 35 victimes, en incluant le fœtus mort dans le ventre de sa mère, dont la famille affirme qu’elle était sur le point d’accoucher au moment des frappes. L’Alliance a jusque-là refusé de reconnaître son erreur, arguant de renseignements très clairs démontrant que les corps de ferme visés servaient de point de ralliement à des troupes prokaddafistes. Le déni est au centre des éléments de langage de l’Otan, qui affirme régulièrement « ne disposer d’aucune preuve de victimes civiles à ce stade ». Se félicitant de la fin des opérations armées en Libye, après la mort de Mouammar Kaddafi, tombé le 20 octobre aux mains des thowar (« révolutionnaires ») de Misrata « aidés » par une ultime frappe d’avions de l’Otan, le secrétaire général de l’Alliance, Anders Fogh Rasmussen, balayait la question d’un revers de la main : « Nous avons déjà déclaré publiquement que nous ne pouvions pas exclure la possibilité ●●●
9 700
sorties offensives
d’avoir causé des pertes civiles, mais l’enquête ne pouvait pas le confirmer. » Confrontée à des éléments nouveaux par deux organisations humanitaires occidentales, Human Rights Watch et Campaign for Innocent Victims in Conflict (Civic), l’Alliance atlantique n’a pas, à ce jour, manifesté la volonté d’enquêter sur ses responsabilités. « Il est évident que des civils sont morts à cause des frappes de l’Otan. Mais toute la campagne militaire s’est déroulée dans une atmosphère d’impunité totale », constate Fred Abrahams, enquêteur de Human Rights Watch. Les rôles sont bien partagés entre les nouveaux maîtres de Tripoli et ceux qui les ont aidés à renverser le dictateur. D’un côté, l’Alliance se dit « prête à travailler avec les autorités libyennes pour tout ce qu’elles jugeront utiles ». De l’autre, ces mêmes autorités ne semblent guère pressées d’ouvrir une enquête sur les dégâts collatéraux de la révolution du 17 février. RÉCITS TROUBLANTS. Cette situation inquiète les observateurs qui ont suivi les précédentes opérations de l’Otan,
notamment en Afghanistan. Tout indique que les leçons du passé n’ont pas été retenues: la conviction que la supériorité technique permet des frappes aériennes efficaces et propres, « chirurgicales », le refus de reconnaître des bavures avérées et l’indifférence quand il s’agit de porter secours aux victimes civiles ou de les indemniser, le cas échéant. Plus grave encore, les récits de survivants permettent de relever une pratique troublante. Comme s’il s’agissait d’une tactique « éradicatrice », les bombardiers de l’Alliance n’hésitent pas à attaquer à nouveau une cible quelques minutes après la première frappe. Scélérates, ces secondes salves fauchent civils et secours, au moment où ces derniers accourent pour aider les blessés. Interrogé par le New York Times à ce sujet, un porte-parole de l’Otan, le colonel Gregory Julian, a reconnu « une remarque valable à prendre en compte pour les opérations futures ». Depuis le précédent afghan, la question des dégâts collatéraux entache les théâtres d’opération de l’Otan. En Libye, la campagne de l’Alliance a duré sept mois. Du 31 mars au 30 octobre, les frappes ont fait entre 40 et 70 victimes civiles, selon un décompte partiel effectué par le New York Times. Une goutte d’eau dans le bilan officieux de la guerre civile – entre 15000 et 25000 morts, selon les sources –, mais une tache dans le bilan d’une guerre menée au nom de la « responsabilité de protéger » ces mêmes civils. ● YOUSSEF AÏT AKDIM
Coulisses LINGERIE RÉVOLUTION SAOUDIENNE Un an après avoir engagé la bataille, les Saoudiennes ont obtenu gain de cause. En vertu d’un décret royal, des femmes pourront désormais travailler dans les magasins de lingerie. Les clientes ne seront donc plus obligées de donner leurs mensurations à des hommes. Plus de 7 300 magasins sont N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
concernés, ce qui pourrait créer à terme jusqu’à 44 000 emplois pour les Saoudiennes. Mais les cabines d’essayage, elles, resteront interdites. TSAHAL DES SOLDATS PEU ORTHODOXES Moshe Ravad, rabbin en chef de l’armée de l’air israélienne, a présenté sa démission le 3 janvier par solidarité avec sa communauté – les haredim (juifs ultraorthodoxes) –,
opposée à toute mixité, après que l’état-major de l’armée eut décidé que les élèves officiers haredim étaient tenus d’assister à toutes les cérémonies militaires, y compris celles au cours desquelles des femmes chantent. ÉGYPTE ONG SOUS PRESSION Lors de perquisitions menées le 29 décembre, une vingtaine d’ONG étrangères et égyptiennes ont vu leur
matériel saisi dans le cadre d’une enquête sur les financements illégaux émanant de l’étranger. L’initiative est perçue par les intéressées comme une tentative d’intimidation. Rappelées à l’ordre par Washington, les autorités ont promis de mettre fin à ce type d’action. Ce qui n’a pas empêché la ministre de la Coopération de décrire son initiative comme « une action légale pour préserver la souveraineté de l’Égypte ». JEUNE AFRIQUE
BRIAN CAHN/ZUMA/REA
Europe, Amériques, Asie
MITT ROMNEY EN CAMPAGNE DANS L’IOWA : l’ancien gouverneur du Massachusetts ne l’a emporté qu’avec huit voix d’avance !
ÉTATS-UNIS
Jésus-Christ Tous les candidats aux primaires républicaines affichent une foi chrétienne à toute épreuve. Mais aucun ne paraît en mesure de rassembler un parti profondément divisé. À quand un sauveur ?
candidat!
JEAN-ÉRIC BOULIN, à New York
A
vec la victoire plus qu’étriquée – huit voix ! – de Mitt Romney dans le caucus de l’Iowa, le doute n’est plus permis : le Parti républicain traverse une grave crise d’identité. Entre la ligne conservatrice pure et dure, populiste et antiestablishment d’une grande partie de sa base, et celle, plus modérée et soucieuse de réalisme
JEUNE AFRIQUE
électoral de nombre de ses dirigeants, il ne parvient pas à choisir. Son seul ciment, c’est le rejet de Barack Obama. Comme le dit l’un de ses sympathisants, le meilleur candidat républicain dans l’Iowa eût été « Jésus-Christ », tant les chrétiens conservateurs (60 % des votants) dominent dans cet État agricole du Middle West. Depuis Ronald Reagan et, dans une moindre mesure, George W. Bush, le Grand Old Party (GOP) manque cruellement d’une grande figure capable de réaliser la synthèse de toutes les sensibilités qui le composent. De concilier, par exemple, les valeurs chrétiennes traditionnelles incarnées par un Rick Santorum, N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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Europe, Amériques, Asie mi-mandat, en novembre 2010. C’était en réalité une victoire à la Pyrrhus. L’arrivée à la Chambre des représentants de 87 parlementaires issus du Tea Party a déplacé loin vers la droite le centre de gravité du parti, désormais englué dans une opposition idéologique très dure, mais stérile, face à un Sénat et à un président démocrates. Menace de fermeture pure et simple du gouvernement, au printemps 2011, menace d’un défaut sur la dette américaine… Pour obtenir d’Obama des coupes budgétaires drastiques, les représentants républicains à la Chambre se sont aventurés jusqu’au bord du précipice. À la veille de Noël, ils ont même sombré dans le ridicule en refusant de proroger les très populaires ristournes sur les cotisations salariales que la plupart de leurs amis au Sénat avaient pourtant approuvées ! Le 24,5 principal résultat de cette stratégie a été de remettre en selle Obama : 47 % d’opinions favorables selon REPOUSSOIR. Dans l’Iowa, les échanges entre un dernier sondage. Dans leur grande majorité, candidats républicains se sont signalés par leur Santorum les Américains jugent la position républicaine extrême virulence. Le climat a été rendu encore plus délétère par la décision irresponsable. Pas de très de la Cour suprême de lever bon augure pour 2012. Pour les évangéliques, toute restriction au finanOutre l’absence d’un leaRomney, qui est mormon, cement des campagnes der fort, le GOP souffre d’un électorales. Du coup, autre problème, structurel est une sorte d’hérétique. les budgets publicitaires celui-là: son décalage granflambent : près de 6 millions de dollars pour Perry dissant avec une Amérique en pleine mutation. dans l’Iowa, 4,7 millions pour Romney, 2,8 millions Un analyste politique l’explique sans détour : il pour Paul… et seulement 560 000 dollars pour est « trop blanc, trop masculin et trop vieux ». Les Santorum, de loin le meilleur rapport qualité-prix! jeunes, y compris chez les sympathisants républicains, sont de plus en plus nombreux à juger Pris dans une absurde surenchère droitière, le démesuré le rôle joué par les questions de mœurs GOP fait aujourd’hui figure de repoussoir dans dans la vie politique de leur pays. Des voix, certes le pays. À plus long terme, son avenir même paraît menacé. Ses difficultés actuelles découlent, encore discrètes, commencent à s’élever pour paradoxalement, de la « raclée » (Obama dixit) réclamer une rénovation idéologique. Combien infligée aux démocrates, grâce à la montée en de temps encore l’opposition au mariage homopuissance du Tea Party, lors des élections de la sexuel et à l’avortement constituera-t-elle l’alpha et l’oméga du programme de tout candidat républicain, comme ce fut encore le cas dans l’Iowa ?
surprenant deuxième dans l’Iowa, et le conservatisme inclassable, libertaire et antiétatiste d’un Ron Paul, arrivé troisième. Tout en veillant à ne point trop effaroucher les électeurs du centre, qui font presque toujours la décision lors de la présidentielle du mois de novembre. Un vrai casse-tête. Le verdict Pas sûr que Mitt Romney, désormais favori de l’Iowa adoubé par John McCain (le candidat républicain en % de 2008) et bien placé pour remporter la primaire du New Hampshire, le 10 janvier, soit capable de Bachmann Romney le résoudre. Peu charismatique et, de surcroît, de confession mormone, ce qui lui vaut la farouche Perry inimitié de nombre de protestants évangéliques, 5 l’ancien gouverneur du Massachusetts, s’il est 10,3 24,6 finalement désigné, deviendra face à Obama le Gingrich 13,3 champion par défaut d’un parti divisé comme jamais.
21,4
Paul
SURENCHÈRE MORALISATRICE
DIEU SERAIT-IL CONSERVATEUR? Les électeurs de l’Iowa étant à 60 % des chrétiens plus ou moins traditionalistes, les candidats républicains en ont tous rajouté dans la défense des valeurs religieuses. Michele Bachmann et Rick Santorum n’ont pas eu à forcer leur nature pour défendre la vie « de la conception jusqu’à la mort naturelle ». Dans un spot télévisé, Rick Perry a estimé que l’Amérique courait à sa perte depuis qu’Obama avait autorisé l’enrôlement des homosexuels dans l’armée. Converti au catholicisme, Newt Gingrich a pour sa part présenté ses vœux aux électeurs devant une reconstitution de la nativité, tandis que Ron Paul défendait son christianisme en faisant valoir… son ancien métier d’obstétricien. Seul Mitt Romney, dont la foi mormone passe pour hérétique aux yeux des évangéliques, s’est contenté du service minimum : il s’est borné à affirmer son opposition à l’avortement, alors qu’il y était jadis favorable. Comme pour faire diversion, il s’est en revanche déclaré, pour la première fois, favorable à l’expulsion des 11 millions d’immigrés présents illégalement dans le pays. Apparemment, Dieu n’aime pas non plus les sans-papiers. ● J.-E.B. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
PÉRIL EN LA DEMEURE. Enfin, dans un pays qui
comptera un tiers de Latinos en 2050, le GOP devra, pour survivre, nécessairement se lancer à la conquête de cet électorat. Y compris dans ses traditionnels bastions du Sud. Comment ? En renonçant – comme avait su le faire George W. Bush – à son approche très restrictive de la question de l’immigration. Ancien gouverneur du Texas, Rick Perry ne s’y est pas trompé. Lors d’un débat télévisé, il s’est déclaré favorable à la scolarisation des enfants d’immigrés illégaux, s’attirant une volée de bois vert de tous ses adversaires républicains, Romney en tête. Pour le parti d’Abraham Lincoln, qui abolit l’esclavage en 1863, il y a péril en la demeure. En 2012, le candidat républicain aura la lourde tâche d’affronter Barack Obama, bien sûr, mais aussi d’adapter son parti à l’Amérique en train de naître. Pas sûr que Mitt Romney soit taillé pour le rôle. ● JEUNE AFRIQUE
Europe, Amériques, Asie
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FRANCE
Rachid-des-Bois contre Sarkozy
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ertains s’achètent des voitures de sport ou des maisons luxueuses. Homme d’affaires français d’origine algérienne, Rachid Nekkaz (40 ans) préfère mettre sa fortune au service de « ses principes ». Le 3 décembre, il a créé un fonds de 1 million d’euros pour payer les amendes de ceux qui seraient condamnés dans l’hypothèse où la proposition de loi sur la négation des génocides – arménien et autres – serait adoptée par le Sénat, fin janvier. « L’argent ne fait pas le bonheur, mais il permet de garantir la liberté d’expression », expliquet-il. Très remonté contre Nicolas Sarkozy, qu’il traite de « délinquant constitutionnel », il ne détesterait pas devenir « son premier prisonnier politique », puisque la proposition de loi prévoit une peine d’emprisonnement. Nekkaz aurait fait fortune à la fin des années 1990 grâce à la bulle internet et à divers investissements immobiliers. En juillet 2011, avec son épouse d’origine américaine, il avait déjà mis en place un fonds de 1 million d’euros pour payer les
amendes des porteuses de niqab verbalisées dans la rue. « Je ne défends pas la burqa, mais la liberté des individus de s’habiller comme ils l’entendent », ditil. À ce jour, il n’a payé que vingt-sept amendes pour un montant global d’environ 3 000 euros. Commentaire : « L’argent me donne le pouvoir de rendre inefficaces des lois que je juge iniques et de ridiculiser l’État français. » Persuadé qu’on ne le prend pas au sérieux parce qu’on n’aime pas que « Rachid ou Mamadou gagnent de l’argent et se fassent entendre », il s’insurge contre la montée de l’islamophobie.
Série noire pour les barons Le président Christian Wulff rattrapé par un scandale. Il est le troisième allié d’Angela Merkel dans ce cas. En moins de deux ans.
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JEUNE AFRIQUE
LEÏLA SLIMANI
L’OBJECTIF DE L’HOMME D’AFFAIRES RACHID NEKKAZ ? « Ridiculiser l’État français. »
ALLEMAGNE
tdetrois!AprèsleprésidentHorst Köhler, acculé à la démission en mai 2010 à la suite de déclarations contestées sur l’Afghanistan, puis Karl-Theodor zu Guttenberg, convaincu de plagiat et contraint de renoncer au ministère de la Défense, en mars 2011, un troisième baron de la CDU-CSU, le parti au pouvoir, se retrouve dans l’œil du cyclone. Après avoir paru brièvement en mesure debriguerlachancellerie,en2006,avantde s’effacer devant Angela Merkel, Christian Wulff avait succédé à Köhler au château
« Ce n’est pas un hasard si on s’attaque aux Turcs. Vous imaginez une loi qui sanctionnerait la négation du génocide des Indiens d’Amérique ? » Nekkaz affirme avoir acheté en Auvergne, fief de l’ancien ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux, un terrain de 16 ha qu’il loue à des Roms pour 1 euro symbolique. En 2007, il n’était pas parvenu à réunir les 500 parrainages nécessaires pour participer à la présidentielle. Sera-t-il candidat en 2012 ? Il y pense. Et pas seulement en se rasant. ●
DUPUY FLORENT/SIPA
Il paie les amendes des porteuses de niqab verbalisées. Et envisage de faire de même avec les futurs négateurs de génocides !
Bellevue, la résidence des présidents de la République – un poste surtout honorifique. Mais il a conservé la mentalité du notable de province – la Basse-Saxe en l’occurrence – qu’il fut. En 2008, ayant décidé de refaire sa vie avec la blonde Bettina, il avait cru sans conséquence de solliciter d’un couple d’amis un prêt de 500 000 euros à des conditions très avantageuses en vue de l’achat d’une maison. Ce prêt avait été ultérieurement racheté par la Banque du Bade-Wurtenberg. Pas de quoi fouetter un chat?Sansdoute,maisc’estl’accumulation
des micro-affaires dans lesquelles il est impliqué qui choque ses compatriotes : Wulff avait pris l’habitude de profiter des largesses d’amis fortunés, ce qui est sinon délictueux, du moins peu compatible avec de hautes responsabilités publiques. Plus grave, le quotidien Bild (le plus important du pays) a révélé le 12 décembre que Wulff avait fait pression sur sa direction pour empêcher la parution d’un article sur son histoire de prêt, allant jusqu’à brandir la menace d’une « guerre ». Le 3 janvier, un autre quotidien, le Welt am Sonntag, a fait savoir qu’il n’avait pas davantage été épargné par les pressions présidentielles. Le scandale est énorme, amis et adversaires du président se déchaînent. Pour l’instant, la chancelière défend bec et ongles son allié. Jusqu’à quand ? ● JEAN-MICHEL AUBRIET N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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PARCOURS | D’ici et d’ailleurs
Bariza Khiari La preuve par l’exemple La nouvelle vice-présidente du Sénat français, qui a longtemps considéré que ses origines algériennes relevaient de la sphère privée, estime aujourd’hui devoir être un modèle.
J
«
E SUIS ARRIVÉE nourrisson en France. Mes origines algériennes n’ont aucune incidence sur mon parcours politique. Je n’en parle jamais. » C’est ainsi, presque en chuchotant, que Bariza Khiari, les jambes croisées dans un tailleur mauve, introduit ses origines. La sévérité de l’expression tranche avec la voix calme, presque satinée, et le visage chaleureux. À 65 ans, la nouvelle vice-présidente socialiste du Sénat français, née à Ksar Sbahi, près de Constantine, mesure sans doute le poids de toute déclaration sur ses liens avec l’Algérie et l’islam. Pourtant, l’affirmation étonne venant d’une femme qui dit aujourd’hui assumer totalement ses racines. Et à bien y regarder, tout semble l’y lier. Son engagement politique, en premier lieu, n’est pas dû au hasard. « Mes parents ont été des militants de la décolonisation. Ils ont tous deux fait de la prison en France », dit-elle. C’est d’ailleurs leur dévouement en faveur de la cause algérienne qui l’a poussée à faire de l’antiracisme son premier cheval de bataille, au Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap), à la fin des années 1970. Un engagement pour lequel Bariza Khiari a très tôt montré un souci de l’efficacité, exigeant de ses actions une portée concrète. Ainsi, lorsqu’elle participe à la création du journal Différences, c’est « parce qu’il ne suffit pas de dire que l’on n’est pas raciste, encore faut-il avoir les outils pour expliquer ce que c’est que le racisme ». Et quand elle prend conscience des limites de son militantisme – « Tout ça c’est bien, mais on ne transforme pas » –, elle décide de s’engager en politique pour s’impliquer plus avant. Derechef, et même si la sénatrice préfère en dire peu sur leur vie, l’exemple
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SÉNATRICE SOCIALISTE depuis 2004, cette Franco-Algérienne milite pour « un islam spirituel, libre et responsable ».
parental revient en toile de fond. « Eux, ils avaient une grande cause, mais moi, qu’est-ce que je pouvais faire ? » s’estelle longtemps demandé. Son appréhension première à évoquer ses origines algériennes intrigue à nouveau. Et si cette méfiance était née lors de ses premières années en politique, dont elle semble parfois avoir du mal à se détacher ? De fait, lorsque Bariza Khiari intègre le Sénat, en 2004, elle est la première femme issue du monde arabo-musulman à entrer dans un Parlement national. Elle qui n’a « jamais considéré que le fait d’avoir une appartenance confessionnelle pouvait jouer » voit alors la question de ses origines maghrébines et sa pratique du soufisme susciter l’attention des médias. Républicaine
convaincue, elle préfère retenir de son parcours le côté « classique ». « Il n’est en rien différent de celui de mes collègues », dit-elle. Énarque (diplôme qu’elle a obtenu en formation continue), elle déclare sans fausse modestie : « J’ai excellé dans ma vie professionnelle, j’excelle de la même manière dans mes fonctions politiques. » À une carrière professionnelle bien remplie – notamment au ministère duTourisme, où elle fut déléguée régionale pour l’Île-deFrance – s’ajoute un parcours syndical à la Confédération française démocratique du travail (CFDT), un engagement de parent d’élèves et une carrière politique au sein du Parti socialiste (PS). Militante socialiste depuis les années 1980, elle a débuté dans le 16e arrondissement parisien, où elle a grandi et où elle a été élue conseillère d’arrondissement en 2008. Un choix au départ loin d’être évident. Elle a échoué à trois reprises, en 1995, 1997 et 2002, lors des élections législatives sur cette « terre JEUNE AFRIQUE
Europe, Amériques, Asie
Aujourd’hui, elle considère qu’il est de son devoir de se prononcer, à titre de modèle. « On ne peut pas laisser complètement la parole aux institutions représentatives des musulmans. Nos concitoyens ont besoin de modèles positifs d’identification individuelle », dit-elle. Et quand il s’agit d’évoquer le climat actuel, la vice-présidente du Sénat use de mots forts. Elle estime que, en France, l’islam est devenu le « péril vert », comme le communisme a pu représenter autrefois le « péril rouge ». Elle dénonce un « climat de défiance instrumentalisé par l’exécutif ». Mais elle ne s’autorise pas le moindre écart, pesant ses mots dès qu’il s’agit d’évoquer ses origines. « Elle veille toujours à éviter les discour s revanchards, confirme SébastienTurcat, membre du groupe socialiste au Sénat. Elle ne met jamais en avant ses origines. » Aujourd’hui, si elle affiche sans détour sa confiance en elle, Bariza Khiari vit sa nouvelle fonction comme l’aboutissement du combat pour l’égalité qu’elle mène depuis des années. « J’ai pu observer la régression des préjugés vis-à-vis de quelqu’un portant un nom comme le mien. À une époque, on disait que j’allais plomber les listes », se plaîtelle à rappeler. Tout juste installée dans un bureau aux dimensions démesurées, Bariza Khiari en observe le luxe majestueux. Les dorures et le mobilier royal ne semblent pas l’impressionner. Au mur, plusieurs tableaux anciens. Elle en remplacera bientôt un par « une calligraphie arabe »… Quand même ! ● VINCENT DUHEM Photo : VINCENT FOURNIER JEUNE AFRIQUE
FOOTBALL
Quand la Chine marquera des buts Anelka, Tigana et les autres… Les clubs de la Super League s’arrachent les stars du ballon rond. À coups de millions d’euros.
HANDOUT/REUTERS
de mission » qui lui a « donné le goût de la discussion, de la bataille politique ». Pugnace face au « climat de défiance qui entoure l’islam en France », Bariza Khiari s’est finalement décidée à ranger ses craintes et à élever la voix. Un déclic citoyen. « À un moment donné, quand l’islam est devenu un sujet politique, il était normal que je sorte du bois et que je fasse valoir un islam spirituel, libre et responsable. J’ai choisi d’en parler. »
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L
a Chine se targue d’avoir inventé le football, vers 250 av. J.-C. Mais elle n’a jamais brillé dans les compétitions internationales. Une seule qualification en phase finale de Coupe du monde, en 2002… Une équipe nationale médiocre… Un championnat jalonné de scandales à répétition… Les autorités sont décidées à réagir. Et c’est le vice-président Xi Jinping qui a annoncé le programme : la Chine veut se qualifier pour la Coupe du monde, l’organiser un jour et même la remporter ! Dans l’immédiat, c’est du côté de la Super League que la révolution est en train de se jouer avec l’arrivée dans le modeste club de Shanghai Shenhua de Nicolas Anelka, l’enfant terrible du football français, en provenance de Chelsea. Le montant de la transaction n’est pas connu, mais le salaire hebdomadaire du joueur avoisinerait les 230 000 euros, alors qu’il ne dépassait pas 90 000 euros à Londres. Shenhua est présidé par le milliardaire Zhu Jun (45 ans), qui a fait fortune dans les jeux vidéo et ne fait pas mystère de son intention de bousculer le championnat national. Et c’est un autre Français, Jean Tigana, ancien coach des Girondins de Bordeaux, qui est chargé de piloter l’opération. D’autres clubs,
NICOLAS ANELKA ET ZHU JUN, patron du Shanghai Shenhua Football Club.
comme Guangzhou ou Dalian, ont pris le train en marche et, dans le mercato d’hiver en cours, tentent d’arracher une poignée de stars aux plus grands clubs européens. L’Ivoirien Didier Drogba fut, un temps, dans le collimateur… SCANDALES À TOUT VA. Mais quelques
têtes d’affiche ne suffiront pas à sortir la Super League de l’ornière. Fin décembre, au terme de deux ans d’enquête, une soixantaine de joueurs, entraîneurs et arbitres ont ainsi été déférés devant les tribunaux pour diverses affaires de matchs truqués. Ils risquent de lourdes peines d’emprisonnement. « La corruption a terni l’image du football dans notre pays, il était plus que temps d’y mettre un terme », a commenté la fédération chinoise. Avec l’arrivée de stars, les clubs espèrent doubler leurs audiences télévisées et leurs recettes publicitaires. Et surtout, tourner la page des années noires. Le club de Shanghai (20 millions d’habitants) peine en effet à remplir son stade de 35 000 places. Le couple Anelka-Tigana devrait changer la donne. En attendant l’émergence de stars made in China. ● STÉPHANE PAMBRUN, à Pékin N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
Europe, Amériques, Asie ð MANIFESTATION DE L’OPPOSITION, le 2 janvier, à Budapest, contre la nouvelle Constitution entrée en vigueur la veille.
LASZLO BALOGH/REUTERS
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HONGRIE
Orban au ban de l’Europe Ancien dissident anticommuniste, le Premier ministre vire à l’autocrate ultranationaliste.
L
a Hongrie est-elle en train de se transformer en « Orbanistan », du nom de son autoritaire Premier ministre, Viktor Orban ? C’est ce que craignent partis de gauche, écologistes et ONG, qui ont rassemblé cent mille personnes dans les rues de Budapest le 2 janvier, mais aussi l’Union européenne et les États-Unis. Alors que le pays traverse une crise grave (sa
dette publique atteint 80 % du PIB), la Commission européenne et le Fonds monétaire international (FMI), appelés à la rescousse pour discuter d’une aide de 20 milliards d’euros, ont interrompu leur mission pour protester contre les nouvelles atteintes portées à la démocratie. Un an après l’adoption d’une loi qui a muselé la presse et alors que la seule radio d’opposition a été fermée le 21 décembre
sur décision d’un Conseil des médias à la botte d’Orban, une Constitution aux relents ultranationalistes est entrée en vigueur le 1er janvier. « Dieu bénisse les Hongrois », stipule-t-elle en supprimant le statut de république du pays et en accordant le droit de vote aux Hongrois d’origine vivant à l’étranger. Le mandat des postes clés de l’appareil d’État (justice, police, armée), déjà aux mains des fidèles d’Orban, a été porté à neuf ou douze ans ; la Banque centrale, ses dirigeants, ainsi que la politique budgétaire et fiscale sont placés sous le contrôle direct du Premier ministre; enfin, des dispositions électorales favorisent la reconduction de son parti, le Fidesz. Non seulement Orban concentre tous les pouvoirs, mais il a totalement verrouillé la vie politique, seuls les deux tiers des députés – majorité qui semble hors de portée de l’opposition – pouvant défaire ces dispositions taillées sur mesure pour perpétuer son règne. Ancien dissident à l’époque communiste, Orban vire à l’autocrate et, face aux critiques de l’UE, affirme que cette dernière ne lui « dictera jamais rien ». La banqueroute qui menace son pays pourrait le ramener à de meilleurs sentiments. ● JOSÉPHINE DEDET
TAIWAN
Dans l’ombre du grand dragon Les relations avec la Chine constituent l’enjeu essentiel de l’élection présidentielle du 14 janvier. Comme d’habitude.
«
S
i Taiwan et la Chine ne forment qu’un seul pays, pourquoi suis-je un clandestin ? » s’est exclamé lors de son arrestation, le 7 décembre, Guo Zhiyong, un Chinois du continent arrivé illégalement à Taiwan sur un bateau de fortune. À la veille de la présidentielle du 14 janvier, c’est bien cette ambiguïté des rapports entre l’île rebelle et la République populaire de Chine qui est au cœur de la campagne électorale. D’un côté, l’opposante Tsai Ing-wen, du Parti démocrate progressiste (DPP), une modérée qui milite pour une Taiwan N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
forte et indépendante. De l’autre, pour le Guomindang (GMD), le président sortant, Ma Ying-jeou, artisan du rapprochement historique avec Pékin. Depuis son élection en 2008, les relations et les échanges entre les deux pays se sont spectaculairement améliorés. Fin 2010, la signature d’un accord de coopération économique d’un montant estimé à plus de 100 milliards de dollars (76 milliards d’euros) a scellé cette nouvelle entente. CHAUD ET FROID. Pourtant, Pékin
continue de souffler le chaud et le froid. Mi-décembre, l’un de ses porte-parole
faisait miroiter de nouvelles opportunités économiques. Mais quelques jours plus tard, le vice-président (et futur numéro un) Xi Jinping rappelait que la condition à toute coopération demeurait la reconnaissance du consensus de 1992 : « pas d’indépendance de Taiwan ». Cette dernière refuse pour sa part toute idée de réunification. Clé de voûte des relations entre deux États techniquement en guerre depuis soixante ans, ce statu quo est dénoncé par Tsai Ing-wen, qui redoute que, sous couvert de développement économique, la République populaire finissepar absorber Taiwan.Maisrienn’est joué : ce sera peut-être James Soong, un outsider sans étiquette, qui départagera les deux favoris au coude-à-coude dans les sondages. ● JULIETTE MORILLOT JEUNE AFRIQUE
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LE PLUS
de Jeune Afrique
ÉTAT DES LIEUX La maladie silencieuse INTERVIEW Adama Ly, chercheur et cancérologue RÉSEAUX Des professionnels aux patients, l’union fait la force PORTRAITS Grands pontes sur tous les fronts
SANTÉ
Loin d’être l’apanage des pays développés, la maladie fait des ravages sur le continent. États, praticiens, associations, patients, organisations internationales… Une bataille sanitaire de grande ampleur doit s’engager d’urgence.
ONS ABID POUR J.A.
L’Afrique contre le cancer
Notre recherche se préoccupe de votre santé. Les maladies graves sont au cœur de nos efforts. Combattre des maladies graves comme le cancer est notre spécialité. Nos innovations permettent de traiter des millions de personnes qui souffrent, tout en améliorant leur qualité de vie. Nous leur donnons de l’espoir.
Nous innovons la santé
LE PLUS
Le Plus de Jeune Afrique
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de Jeune Afrique
Prélude
Pr Edmond Bertrand*
SANTÉ
L’Afrique contre le cancer
Double fardeau
P
ENDANT LE XXE SIÈCLE,lapriorité sanitaire a été donnée en Afrique à la lutte contre les maladies infectieuses et parasitaires responsables d’une forte mortalité et très médiatisées. Puis vint la « transition épidémiologique », avec l’importance croissante prise par les maladies dégénératives et les cancers, sans que disparaissent – hélas ! – les affections précédentes. C’est le « double fardeau ». Aujourd’hui, les cancers sont responsables de centaines de milliers de morts chaque année. Une surmortalité considérable qui s’explique par le manque de spécialistes et de moyens techniques et thérapeutiques. En la matière, la situation actuelle fait apparaître une avance importante du Maghreb sur l’Afrique subsaharienne, notamment francophone (hors Afrique du Sud, très bien équipée).
de poids devant l’opinion internationale, en particulier l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Des synergies s’organisent entre cancérologues africains et européens, et aussi, c’est très important, entre les équipes africaines. Vous découvrirez dans les pages suivantes les différentes structures mises en place (associations, instituts, comités nationaux, partenariats avec l’industrie pharmaceutique…); toutes ont pour objectif de dépister plus tôt, d’aider et de traiter les malades. Cette multiplicité d’initiatives est une bonne nouvelle. Elle nous permet de rêver à un grand « plan cancer » pour l’Afrique subsaharienne : il bénéficierait de l’aide internationale et pourrait coordonner les activités. Une telle entreprise nécessite des appuis politiques sûrs et engagés,
C’est en Afrique qu’a été identifié
La recherche africaine le premier virus reconnu comme sur le cancer, peu développée jusqu’ici, a cependant facteur causal du cancer. apporté quelques résultats très intéressants. Le premier virus reconnu garantissant l’intégration du plan dans les comme facteur causal d’un cancer (le virus services de santé nationaux. d’Epstein-Barr) l’a été en Afrique, dans le lymphome de Burkitt. À Dakar, on a montré La prévention doit être privilégiée. la relation du cancer primitif du foie avec le Elle implique l’adhésion des populations, virus de l’hépatite B et avec une toxine d’orilaquelle sera beaucoup mieux obtenue si, gine alimentaire (aflatoxine). En Afrique parallèlement, on traite les malades. du Nord, l’association entre bilharziose et Quant aux campagnes de dépistage, elles cancer de la vessie a été envisagée. sont utiles si les structures sont disponibles Par ailleurs, l’évolution du cancer du pour accueillir les malades dépistés; sinon, poumon est un cas d’école : alors qu’il était elles sont décevantes pour ces derniers et rarissime il y a cinquante ans dans de nomcontre-productives pour la lutte. breux pays du continent, il y est aujourd’hui Le fait le plus positif dans cette grande en croissance constante, soutenu par la aventure anticancéreuse, c’est… la présence publicité indécente de l’industrie tabagique. de cancérologues dans presque tous les pays. En nombre encore insuffisant, certes. L’avenir est à l’organisation de la lutte Mais rappelons-nous qu’il n’y en avait pas contre le cancer. Des études africaines ou très peu il y a seulement une vingtaine communes à plusieurs centres auront plus d’années. ● * Doyen honoraire de la faculté de médecine d’Abidjan, membre correspondant de l’Académie française de médecine, le Pr Edmond Bertrand a exercé pendant trente ans en Afrique dans les centres ruraux, les hôpitaux régionaux et les CHU. JEUNE AFRIQUE
N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
ÉTAT DES LIEUX La maladie silencieuse p. 52 INTERVIEW Adama Ly, chercheur et cancérologue sénégalais p. 54 RÉSEAUX L’union fait la force
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QUESTIONS À Rachid Bekkali, directeur exécutif de l’Association Lalla Salma de lutte contre le cancer p. 57 TRIBUNE Pr David Khayat, chef du service d’oncologie de l’hôpital Pitié-Salpêtrière, à Paris p. 58 ÉQUIPEMENTS Le Maghreb en services de pointe p. 59
PORTRAITS Grands pontes sur tous les fronts p. 60
Le Plus de Jeune Afrique
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ÉTAT DES LIEUX
maladie
La
Le paludisme et le sida font oublier que le cancer fait aussi des ravages sur le continent. Or sa progression y est des plus alarmantes. Une bataille sanitaire de grande ampleur doit s’engager d’urgence, qu’aucun pays ne peut gagner seul. FANNY REY
DIAGNOSTIC TARDIF. Absence de prévention, tabou de la maladie, diagnostic tardif, indigence des infrastructures, pénurie de personnel qualifié… À tous les niveaux de la chaîne, le manque de moyens est criant. Sur le plan de la prévention, des équipements, comme de l’accès aux traitements et aux soins palliatifs, le Maghreb et l’Afrique du Sud affichent une longueur d’avance. Le reste de l’Afrique subsaharienne arrive loin derrière. « Plus de 70 % des malades ne se rendent dans les structures de prise en charge que lorsqu’il est déjà trop tard », explique le cancérologue camerounais Paul
ONS ABID POUR J.A.
L
e cancer tue plus que le paludisme, la tuberculose et le sida réunis. À l’échelle mondiale, il cause plus de 7 millions (13 %) des décès chaque année. Et l’Afrique n’est pas épargnée. Loin de là. Si des mesures de prévention ne sont pas prises d’urgence, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) prévoit que, d’ici à 2030, y seront enregistrés entre 800000 et 1,6 million de nouveaux cas de cancer et entre 500 000 et 1,2 million de décès par an (soit 20 % de la charge de morbidité du continent). Un constat d’autant plus alarmant que ces estimations s’avouent sous-évaluées, faute de registres fiables qui répertorient l’ensemble des cas et des pathologies dans les différents pays.
BLOC DE CHIRURGIE ONCOLOGIQUE À L’INSTITUT SALAH-AZAÏEZ de Tunis. Fondé en 1969, c’est le premier centre spécialisé en cancérologie du pays.
Une redoutable évolution Nouveaux cas enregistrés en Afrique
Décès liés au cancer
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1,2
million
Ndom (lire p. 60), président de l’ONG Solidarité Chimiothérapie (Sochimio). Résultat : le taux de mortalité par cancer atteint 75 % dans certains pays. Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), la radiothérapie, utilisée efficacement sur plus de la moitié des malades dans les pays développés, n’est accessible que dans 21 des 54 pays du continent (couvrant moins de 20 % de la population totale), où elle est parfois vétuste et peut s’avérer dangereuse. Du côté des praticiens, le cas de la Côte d’Ivoire (qui a validé son Programme national de lutte contre le cancer en 2009) est éloquent: pour 21 millions d’habitants, le pays él ne comptait en 2011 que 4 cancérologues… COÛT COÛ DES TRAITEMENTS. L’accès aux thérapies, quand elles sont disponibles, se heurte à un problème de coût, que l’offre maghrébine, pro indienne et sud-africaine en génériques ne suffit indi JEUNE AFRIQUE
L’Afrique contre le cancer
silencieuse SARCOME DE KAPOSI, n. m.
Tumeur liée à l’infection par l’herpèsvirus HHV8, endémique en Afrique, qui provoque des lésions cutanées, muqueuses puis viscérales. Il se développe particulièrement chez les personnes infectées par le virus du sida.
Pathologies cancéreuses les plus fréquentes (en % des cas de cancer en Afrique)
Sein
Foie
10%
pas à résoudre. Quelques laboratoires s’efforcent d’y remédier. Fin novembre 2011, un partenariat a été signé entre l’algérien Biopharm et le britannique AstraZeneca pour la production de traitements anticancéreux qui devraient couvrir, à terme, 70 % des besoins en Algérie. De grands laboratoires occidentaux soutiennent par ailleurs le financement d’infrastructures et d’équipements, et offrent tout ou partie des traitements. Par exemple, le programme « Accès » du suisse Roche permet aux patients à revenus modestes, au Maroc et en Mauritanie, de bénéficier de traitements innovants à moitié prix. Reste qu’il est difficile de sortir de l’impasse en l’absence manifeste de volonté politique et de programmes cohérents, financés et durables. Aucun pays au monde ne peut prétendre vouloir lutter contre le cancer sans avoir mis en œuvre un plan national à cet effet. Ce qui implique l’existence réelle d’un registre national et d’un plan JEUNE AFRIQUE
Col de l’utérus
12%
8%
Prostate
5%
Sarcome de Kaposi
5%
d’infrastructures, sans oublier le volet prévention. Certains pays ont engagé des plans nationaux, notamment ceux du Maghreb. En revanche, ainsi que le souligne le professeur guinéen Namory Keita, « hormis l’Afrique du Sud, qui a fait un grand pas dans ce sens, tous les pays au sud du Sahara font traîner l’application de leurs plans nationaux ». Et pour cause : alors que les pays africains se sont engagés, à travers la Déclaration d’Abuja de 2001, à affecter 15 % de leur PIB au secteur de la santé, ils n’y consacrent en moyenne que 3 %, ciblant en priorité le sida, le paludisme et la tuberculose. PROMESSES. Cela étant, même en y accordant une
politique volontariste, aucun pays n’est susceptible de faire face, seul, aux coûts élevés incontournables à tous les niveaux. D’où l’importance du secteur privé et des réseaux Nord-Sud, mais aussi SudSud, qui se mettent en place entre chercheurs, praticiens, laboratoires, associations de professionnels et de la société civile. Dans le sillage de l’Organisation africaine pour la recherche et l’enseignement sur le cancer (Oarec), fondée en 1983, ou encore d’Afrocancer, créée en 2005, l’Africa Cancer Foundation a été lancée au Kenya en avril 2011. « C’est le réseau associatif qui fait évoluer les choses, avec au premier rang l’Association Lalla Salma contre le cancer [lire p. 57, NDLR], au Maroc, qui n’a pas d’équivalent en Afrique », souligne le cancérologue sénégalais Adama Ly (lire p. 54). De leur côté, les organisations internationales multiplient les démarches, à l’image de l’AIEA avec son programme d’action pour la radiothérapie contre le cancer. Face aux promesses gouvernementales non tenues et aux plans inachevés ou virtuels, c’est de ces partenariats que viendront les progrès. « Dans de nombreuses localités rurales et dans certains bidonvilles, les acteurs privés sont les seuls prestataires de santé », a rappelé le docteur Khama Rogo, responsable de l’Initiative santé en Afrique à la Banque mondiale, lors de la réunion de l’Assemblée des ministres de la Santé de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), le 5 décembre, à Dakar. Le secteur privé semble en tout cas être le seul à même, pour l’instant, d’accélérer la réalisation d’objectifs sanitaires en espérant qu’à terme la lutte contre le cancer puisse être intégrée aux Objectifs du millénaire pour le développement définis par l’ONU. Un Graal synonyme de manne financière. ● N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
53
Le Plus de J.A. Santé ð Depuis 2002, le médecin a choisi la RECHERCHE. Sans pour autant oublier les patients.
hommes africains développent davantage de cancers de la prostate que la moyenne, ce qui a probablement une double explication, hormonale et génétique. Comment la maladie va-t-elle évoluer à moyen terme ?
Lenombredecasvalittéralementexploser en Afrique. Selon l’OMS [Organisation mondiale de la santé, NDLR], en 2030, les chiffres de la maladie seront en très forte augmentation sur le continent, tant en termes d’incidence, avec 1,6 million de nouveaux cas de cancer contre 681000 en 2008, qu’en termes de mortalité, avec plus de 1 million de décès contre 512 000 en 2008. Le déséquilibre Nord-Sud est flagrant : alors que le taux de mortalité tend à diminuer dans les pays développés, il augmente dans les pays du Sud, où sont enregistrés 63 % des décès et 56 % des nouveaux cas de cancer aujourd’hui. Et ces pays paieront un tribut encore plus lourd en 2030, avec 70 % des décès et 60 % des nouveaux cas.
VINCENT FOURNIER/J.A.
54
Adama Ly « Sur le terrain, rien ne bouge » Chercheur à l’Inserm, à Paris, le cancérologue sénégalais a mis ses compétences au service de l’Afrique. Son sacerdoce : faire connaître la maladie, étudier ses causes et trouver des traitements.
A
près un internat à l’Institut Gustave-Roussy (IGR) et à l’hôpital Paul-Brousse (université Paris-XI) de Villejuif, Adama Ly a effectué un postdoctorat au Sidney Kimmel Cancer Center, aux ÉtatsUnis. Chercheur à l’Institut national de la santéetdelarecherchemédicale(Inserm), à Paris, depuis 2002, il a créé l’association Afrocancer en 2005 et codirigé avec le Pr David Khayat (lire p. 58) un ouvrage collectif de référence: Le Cancer en Afrique, de l’épidémiologie aux applications et perspectives de la recherche biomédicale (éd. INCa, 2007). À 47 ans, son nouveau défi est l’ouverture en 2013 à Touba, au Sénégal, du Centre de prévention et de recherche sur le cancer (Ceprec), première infrastructure du genre en Afrique de l’Ouest. JEUNE AFRIQUE: Comment expliquer la progression des cas de cancer en Afrique? ADAMA LY : Cela tient à la croissance
démographique, au vieillissement de la populationetàdesfacteurscomportementaux comme le tabagisme, la consommationd’alcooletunemauvaisealimentation. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
Les cancers liés à des facteurs environnementaux, dont la pollution urbaine, et à des infections bactériennes ou virales sont également très importants, un quart des cas de cancer en Afrique découlant d’une infection chronique. Y observe-t-on un profil épidémiologique particulier ?
Y a-t-il une prise de conscience sur le continent ?
On ne parle pas beaucoup des maladies non transmissibles, car elles sont bien moins visibles que les pathologies de masse comme le paludisme et ont un impact économique moindre, notamment au niveau touristique. Même si l’OMS alerte régulièrement l’opinion, chiffres à l’appui, et que quelques associations commencent à tirer la sonnette d’alarme, sur le terrain, rien ne bouge. L’association Afrocancer travaille à mutualiser les travaux scientifiques, et l’ouvrage collectif Le Cancer en Afrique a contribué à lui donner plus de visibilité. Depuis, nous avons fait des émules dans certains pays au niveau associatif et auprès des sociologues. Mais il manque toujours les financements.
L’origine infectieuse, justement, est très marquée, avec notamment les virus des hépatites B et C et les papillomavirus, qui peuvent respectiveTrimestriel scientifique Par où commencer pour ment entraîner des canet médical bilingue améliorer la situation ? cers du foie et du col de (français-anglais), publié par Afrocancer aux éditions Il faut miser en priol’utérus. Certains cancers Springer et dont Adama Ly sont également associés au rité sur la prévention de est le rédacteur en chef sida, le plus connu étant le masse, en particulier pour sarcome de Kaposi. Autre les cancers du foie et du col spécificité continentale : l’origine paraside l’utérus puisque des vaccins existent. taire. La bilharziose peut être à l’origine L’OMS doit aussi faire en sorte que ces d’un cancer de la vessie ; quant au palutraitements soient rapidement disponibles disme, il est responsable du lymphome et accessibles, en termes de coûts, dans les de Burkitt, qui touche en particulier les pays du Sud. C’est le nerf de la guerre. ● enfants. On remarque en outre que les Propos recueillis par FANNY REY
À lire
JEUNE AFRIQUE
Nous cherchons des solutions innovantes, pour des besoins médicaux non satisfaits.
Combattre des maladies graves comme le cancer est notre spécialité. Nos innovations permettent de traiter des millions de personnes qui souffrent, tout en améliorant leur qualité de vie. Nous leur donnons de l’espoir.
Nous innovons la santé
Deux Questions au Dr. Sami Zerelli, Directeur Général de Roche pour L’Afrique du Nord et de l’Ouest :
Message
De quelle manière Roche perçoit-t-il le marché Africain ? Pour Roche, l’un des enjeux majeurs est la recherche et le développement de solutions thérapeutiques innovantes en mesure de répondre à des besoins médicaux non satisfaits. Par ailleurs, Roche souhaite poursuivre son engagement citoyen en jouant son rôle de partenaire de santé publique, notamment en élargissant l’accès aux traitements en collaboration avec les autorités sanitaires et les associations de professionnels de la santé et de patients. Au Maroc, à titre d’exemple, Roche a été précurseur en participant dès 2009 au programme d’accès aux thérapies anticancéreuses innovantes en collaboration avec l’Association Lalla Salma de lutte contre le Cancer. Nous avons aussi lancé plusieurs programmes d’aide aux patients indigents dans d’autres pays tels que l’Egypte et la Mauritanie. En 2012, Plusieurs accords de partenariat avec des gouvernements d’Afrique du Nord
et de l’Ouest phase avancée et permettrons aux patients de ces pays de bénéficier de nos thérapies innovantes.
Quelle est votre stratégie pour les années à venir en Afrique ? Continuer à soutenir les efforts des gouvernements Africains visant la mise en place de plans nationaux pour la Lutte contre le cancer et les maladies virales. Dans cette dynamique sanitaire et sociale, nous souhaitons donner accès à nos thérapies innovantes à tous les patients et notamment les plus démunis et ceux ne bénéficiant pas d’une assurance maladie. En ce qui concerne les professionnels de la santé, Roche va continuer à nouer des partenariats afin de permettre un transfert du savoir-faire en matière d’utilisation des thérapies innovantes (biotechnologies) ainsi qu’en recherche clinique. En somme, nous visons l’accès pour tous les patients africains à nos thérapies innovantes.
56
HASSAN OUAZZANI POUR J.A.
LYMPHOME DE BURKITT, n. m.
RÉSEAUX
L’HÔPITAL D’ENFANTS DE RABAT accueille l’une des 17 unités pilotes du GFAOP.
L’union fait la force S’il est du devoir des pays du Nord d’aider ceux du Sud à contrer la maladie, ils doivent aussi favoriser une coopération accrue entre Africains. Ce que fait, avec un certain succès, le Groupement franco-africain d’oncologie pédiatrique.
I
mpulser une dynamique, puis passer le relais. Telle est la raison d’être du Groupement franco-africain d’oncologie pédiatrique (GFAOP) depuis sa création, en octobre 2000. Tout est parti d’un triste constat : moins de 20 % des cancers de l’enfant sont guéris en Afrique subsaharienne, contre 75 % dans les pays développés, alors même que les cinq cancers qui touchent le plus fréquemment les enfants sont ceux pour lesquels il existe les traitements les plus efficaces… Ce qui a conduit le Dr Jean Lemerle, ancien chef du service d’oncopédiatrie à l’Institut
Gustave-Roussy (IGR) de Villejuif, l’un des centres de référence français, à nouer des partenariats pour mettre en place un réseau d’unités pilotes (UP) d’oncologie pédiatrique, destiné à améliorer la prise en charge des cancers de l’enfant en Afrique et à mettre en place une base de données. CINQ CIBLES . Après de premières
implantations au Maghreb, le réseau s’est progressivement étendu aux pays francophones d’Afrique subsaharienne. Aujourd’hui, douze pays accueillent
AU CHEVET DES PETITS LA PREMIÈRE « MAISON DES PARENTS » d’Afrique subsaharienne ouvrira ses portes fin 2012 à Bamako, à proximité de la seule unité d’oncopédiatrie du Mali. « L’État a offert un terrain et une maison près du CHU Gabriel-Touré, et le Maroc, à travers l’Association Lalla Salma contre le cancer, va financer sa réhabilitation et son équipement. Il s’agit de désengorger le service d’oncopédiatrie de l’hôpital en permettant aux parents accompagnants d’être hébergés et d’avoir accès aux commodités nécessaires », explique Débora Lolonga, du Groupement franco-africain d’oncologie pédiatrique (GFAOP). L’objectif est surtout de fixer les « perdus de vue », comme les appelle le professeur Boubacar Togo, coresponsable de l’unité d’oncopédiatrie du CHU, car, « à défaut d’hébergement des parents, on est confrontés à des abandons de traitement dans 18 % des cas ». Avec une capacité d’accueil d’une vingtaine de chambres, la structure pourra recevoir chaque année environ 300 parents pendant la prise en charge de leur enfant. ● F.R. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
Cette tumeur maligne, souvent d’origine virale, affecte le système lymphatique. Rare dans le reste du monde, elle touche quasi exclusivement les enfants africains sous sa forme endémique ou associée à l’immunodéficience.
17 UP, comptant entre 10 et 30 lits, dont 7 au Maghreb (2 à Alger, 1 à Casablanca, Rabat, Marrakech, Tunis et Nouakchott) et 10 en Afrique subsaharienne (1 à Abidjan, Dakar, Bamako, Ouagadougou, Lomé, Yaoundé, Lubumbashi, et 3 à Antananarivo). Le réseau est appelé à s’agrandir, le Gabon, le Bénin et le Niger, entre autres, étant sur les rangs. « Il est aussi question de créer des antennes secondaires pour désengorger les capitales », précise Louis OmerDecugis, président du comité de soutien du GFAOP. C’est le cas notamment au Sénégal et au Mali, où, comme le constate Lucienne Traoré, infirmière à l’UP de Bamako, « les malades viennent de loin, même de pays voisins comme la Côte d’Ivoire ou la Guinée ». À l’image de tant de parents, Fanta Diarra a ainsi parcouru près de 300 km pour que son fils de 4 ans puisse être pris en charge à l’hôpital Gabriel-Touré de Bamako. « Comme il n’y a qu’une seule unité dans le pays, de nombreux patients abandonnent, d’où la nécessité d’unités relais », explique M’Hamed Harif, directeur du CHU Mohammed-VI de Marrakech et président du GFAOP. Dès l’origine, les oncopédiatres africains se sont associés à leurs homologues français pour adapter les protocoles internationaux aux réalités de leur pays. Leurs cinq cibles : le lymphome de Burkitt, la tumeur du rein, la leucémie aiguë lymphoblastique, la maladie de Hodgkin et le rétinoblastome, pour lequel un protocole GFAOP vient d’être mis en place. « Ces cinq maladies, qui représentent 70 % des cancers de l’enfant, sont faciles à traiter, avec de très bons pronostics de guérison », insiste Louis Omer-Decugis. De fait, sur JEUNE AFRIQUE
Nouveaux cas de cancer des moins de 15 ans en Afrique francophone par an
L’Afrique contre le cancer
3 000 enfants traités en onze ans, le taux de survie varie entre 50 % et 80 % selon les pathologies. « Progressivement, d’autres pathologies vont être abordées, mais nous nous heurtons encore à un problème de soutien logistique et de prise en charge », ajoute le Pr M’Hamed Harif. Si tous les enfants sont soignés sur le continent, leur suivi est assuré à travers des bases de données centralisées à l’IGR, de façon à étudier l’efficacité des traitements et les faire évoluer.
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QUESTIONS À | Rachid Bekkali
Directeur exécutif de l’Association Lalla Salma de lutte contre le cancer (ALSC)
DR
12000 à 15000
Ce qui a changé la donne JEUNE AFRIQUE : Quelles sont les réalisations majeures de l’association depuis sa création en 2006? RACHID BEKKALI: La lutte contre le cancer ne peut réussir que si elle est globale (de la prévention aux soins palliatifs) et intégrée à un système de santé.Au Maroc, la donne a totalement changé avec la mise en place d’un plan national sur le long terme et la généralisation de l’accès aux soins. Désormais, 95 % des patients nécessiteux ont accès aux traitements de pointe grâce à l’ALSC et à ses partenaires. Nous devons encore renforcer les programmes de dépistage précoce pour les cancers du sein et du col de l’utérus, et institutionnaliser la lutte contre le tabagisme.
Au Mali, par exemple, où il n’y a qu’un seul service spécialisé, de nombreux patients abandonnent… Au-delà des soins, la formation, totalement absente sur le terrain, représente le deuxième pilier du GFAOP. Le diplôme interuniversitaire d’oncopédiatrie créé par le Dr Jean Lemerle a permis à trente soignants, dont quatorze médecins spécialistes, de se perfectionner. « Chaque année, deux ou trois d’entre eux viennent se former à l’IGR, où ils sont salariés comme des internes », précise Louis Omer-Decugis. TÉLÉMÉDECINE. Pour étoffer le dis-
Comment évoluent les partenariats? Nous avons mis en place un partenariat de formation avec la Mauritanie. Au Mali, nous contribuons à la création
positif, une école africaine d’oncologie pédiatrique est en train de voir le jour. « Une formation intensive et courte a été organisée au Maroc en 2011, dans un premier temps, indique M’Hamed Harif. L’objectif cette année est de former 25 infirmières et 25 médecins. À terme, il faudra pouvoir développer des cours en Afrique subsaharienne, sous une forme itinérante, pour toucher beaucoup plus de monde. » Le GFAOP s’attelle aussi à développer la télémédecine, pour que
les équipes puissent échanger sur un cas précis, ainsi qu’un outil de suivi des patients. La force du réseau, outre ce partenariat entre l’IGR et les UP, est aussi d’être soutenu, sur le plan financier et logistique, par des associations et organismes du
d’une maison des parents [lire encadré p. 56, NDLR] et d’un nouveau centre d’oncologie pédiatrique, ainsi qu’à la mise en place d’un plan national. Nous avons des projets avec le Sénégal, le Gabon, la Côte d’Ivoire… On observe un intérêt de plus en plus marqué des pays pour la lutte contre le cancer. L’ALSC a créé une Alliance des ONG de la Méditerranée orientale. Reste à l’étendre à l’Afrique francophone. Qu’attendez-vous de la conférence internationale sur le cancer qui se tient à Marrakech du 12 au 14 janvier? Nous allons insister sur la coopération et l’accès aux soins, et plaider pour que le prix du vaccin contre le cancer du col de l’utérus, entre autres, devienne accessible. Les laboratoires sont prêts à faire un effort. Il faut impliquer de plus en plus les États et les organismes internationaux. ● Propos recueillis par F.R.
Nord comme du Sud (L’Avenir, l’Ordre de Malte, l’Académie nationale de médecine française…), et par des industriels (Sanofi-Aventis, Roche, Total, Carrefour, Siim…). Un modèle de réseau à suivre. Et à rejoindre. ● FANNY REY
Tunisie Libye Égypte Maroc
Équipements de radiothérapie en Afrique du Nord et en Afrique francophone Nombre d’appareils pour 1 million d’habitants
Algérie Mauritanie Gabon Cameroun
2011
Sénégal 0 JEUNE AFRIQUE
2012
Seuil minimum requis : 2 0,20
0,70
1,20
1,70
2,20
Libye Algérie Tunisie Égypte Maroc Gabon Sénégal Côte d’Ivoire Mali Cameroun Mauritanie
Nombre d’oncologues médicaux pour 1 million d’habitants
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Tunisie Côte d’Ivoire Gabon Mali Algérie Cameroun Mauritanie Libye Maroc Égypte Sénégal
SOURCE : ROCHE PHARMACEUTICALS 2011
Moyens et effectifs en légère augmentation
Nombre de chirurgiens spécialisés en oncologie pour 1 million d’habitants 0 0,50
1 1,5
2 2,5
3
3,5
N 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012 o
Le Plus de J.A. Santé
TRIBUNE
Op pinions & éditoriauxx
VINCENT ISORE/IP3
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De l’urgence d’améliorer l’accès au diagnostic
L
PR DAVID KHAYAT Chef du service d’oncologie de l’hôpital Pitié-Salpêtrière, à Paris
e cancer est très probablement le plus grand fléau auquel l’Afrique devra faire face dans les trente prochaines années. L’Afrique du Sud et les pays d’Afrique du Nord étant aussi avancés que l’Occident en matière de lutte contre le cancer, c’est dans « l’Afrique du milieu » que devront se concentrer les efforts. La situation est contrastée selon les pays. Des instituts spécialisés et des stratégies de prise en charge commencent à s’organiser dans les grandes villes, mais, partout, on est confrontés à un problème dramatique de retard dans les diagnostics : entre 50 % et 70 % des patients arrivent à l’hôpital à un stade déjà très avancé de la maladie. Ainsi, dans le cas du cancer du sein, alors que l’âge moyen d’apparition de la maladie est de 43 ans en Afrique, contre 59 ans en Occident, une étude comparative entre le Nigeria et des pays européens révèle que 53 % des patientes nigérianes sont diagnostiquées à un état très tardif, contre 7 % des patientes occidentales. Résultat : la taille de la tumeur au moment du diagnostic est de 4,8 cm chez les premières, contre 2,6 cm chez les secondes. Il est donc urgent d’asseoir des pistes d’amélioration de l’accès au diagnostic.
Évidemment, on ne peut se permettre d’installer des centres de radiothérapie tous les 300 km ; il faut donc développer l’accueil des patients et de leur s familles en ville le temps du traitement. Il ne faut pas s’en cacher, le continent n’aura pas, dans un premier temps, les moyens financiers de traiter tous les cancers. D’où l’importance de mettre en œuvre dès à présent des politiques de prévention, moins onéreuses, qui passent entre autres par la lutte contre le tabagisme. Alors que l’Occident diminue sa consommation de tabac, l’Afrique, où les législations sont plus faibles, devient l’eldorado des cigarettiers… et du cancer du poumon. Dans le cadre de la prévention, il faut aussi pouvoir agir sur les cancers liés aux maladies infectieuses, notamment au moyen de traitements antibiotiques, qui peuvent par exemple facilement
Le continent devient l’eldorado des cigarettiers… et du cancer du poumon.
Cela suppose davantage de spécialistes. Or c’est la pénurie. Il est indispensable que les nombreux oncologues, radiothérapeutes et physiciens africains formés à l’étranger retournent dans leur pays. Malheureusement, parce qu’ils ont peu ou prou les mêmes besoins de spécialistes, les pays développés ont tendance à en retenir un grand nombre. En outre, la formation ne doit pas concerner que les hauts niveaux de qualification : envoyer dans les dispensaires ruraux des généralistes et des infirmiers qualifiés permet d’établir les diagnostics, puis d’orienter les malades vers les centres de soins basés en ville. Pour poser leurs diagnostics, les praticiens ont aussi besoin d’équipements adéquats. Chaque pays devrait disposer de deux ou trois centres de référence et de plateaux de radiothérapie, laquelle est le traitement à privilégier dans les cas de cancers détectés tardivement. Elle permet de traiter quand c’est possible et, au moins, d’améliorer la fin de vie le cas échéant. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
éradiquer la bactérie Helicobacter pylori, responsable du cancer de l’estomac, ainsi qu’avec les vaccins contre l’hépatite B et contre le papillomavirus, responsables respectivement des cancers du foie et du col de l’utérus. D’autant qu’une négociation panafricaine permettrait d’obtenir des industriels des vaccins à prix coûtant. Quant au cancer du sein, on peut, comme on le fait dans les régions rurales françaises, aménager des « mammobus » et organiser des dépistages réguliers dans tous les coins de l’Afrique. Les mammographies seront ensuite confiées à des spécialistes locaux, au gré des déplacements, ou envoyées sous forme numérique à des experts occidentaux, dans le cadre d’une coopération. Toutes ces voies sont exploitables, à condition qu’il y ait une prise de conscience des risques qui se profilent et une réelle volonté politique de les contrer, sans tarder. L’ensemble devra s’articuler autour de campagnes visant à modifier la perception que les Africains ont de cette maladie. Ils doivent la considérer comme n’importe quelle autre, l’issue n’étant pas forcément fatale. Pris en charge suffisamment tôt, le cancer peut être soigné. ● Propos recueillis par CLARISSE JUOMPAN-YAKAM JEUNE AFRIQUE
850
millions de dollars
Coût estimé des nouveaux cas de cancer en Afrique en 2009 (The Economist)
L’Afrique contre le cancer
ÉQUIPEMENTS
Le Maghreb en services de pointe
En termes de plateaux techniques, la Tunisie et le Maroc sont plutôt bien dotés. Reste à étoffer le réseau des structures de soins.
A
NICOLAS FAUQUÉ/WWW.IMAGESDETUNISIE.COM
CRÉDIT PHOTO
«
vec 12 000 nouveaux cas de cancer par an en Tunisie, la pathologie du siècle n’a fait l’objet d’aucune décision politique réelle, malgré les différents plans stratégiques proposés. Nous avons les compétences humaines, mais le manque de structures publiques crée une discrimination entre les villes et les régions en termes d’accès aux traitements », déclare le Pr Farhat Ben Ayed, éminent cancérologue président de l’Association tunisienne contre le cancer (ATCC). Cause, en 2009, de 1 décès sur 6 (dont 40 % dus au tabagisme), le cancer frappe de plus en plus une population qui vieillit et prend du poids, sans parler de la pollution de l’environnement par des produits chimiques et de métaux lourds. Actuellement, près de 30 000 patients étrangers atteints de cancer consultent en Tunisie. Venus essentiellement de Libye et d’Afrique subsaharienne, notamment du Gabon et de Côte d’Ivoire, ils sont suivis dans des établissements privés équipés de matériel de pointe, qui assurent des prestations de haut niveau. Si la Tunisie est bien dotée en termes de compétences et d’infrastructures, elle a importé en 2010, faute de production
DES MILLIERS DE MAMMOGRAPHIES, GRATUITES, sont réalisées chaque année au sein de l’unité de dépistage du Centre de recherche en santé de l’Ariana (au nord de Tunis).
locale de génériques, pour 87,6 millions de dinars (45,4 millions d’euros) de traitements contre le cancer. PRÉVENTION. Au Maroc, le mal touche
30 000 nouveaux patients par an et est responsable de 7,2 % des décès. Depuis 2009, le royaume est entré en guerre contre cette maladie, qui a un coût humain et économique colossal. Au cœur de cette bataille, l’Association Lalla Salma de lutte contre le cancer (lire p. 57), présidée par l’épouse du roi. En partenariat avec le ministère de la Santé,
UN INSTITUT OUVRE AU GABON OMAR BONGO ONDIMBA en avait rêvé, Ali Bongo Ondimba le voit naître. L’Institut de cancérologie de Libreville, situé dans le quartier d’Angondjé, est opérationnel depuis fin décembre 2010. Avec le CHU auquel il est adossé, cet établissement, troisième du genre en Afrique subsaharienne francophone (après ceux de Dakar et Brazzaville), devient un pôle de référence en matière de prise en charge du cancer, du diagnostic au traitement. Financé sur fonds européens (espagnols, autrichiens et allemands), il dispose d’une unité de médecine nucléaire et d’un service de chimiothérapie. Le centre de radiothérapie sera quant à lui livré en juillet. Les accélérateurs sont en cours d’installation, et une équipe de médecins nucléaires et de physiciens médicaux étrangers, pour la plupart marocains, sont attendus pour faire fonctionner le plateau technique. Le temps, pour une vingtaine de spécialistes gabonais, de se former dans des centres d’études nucléaires occidentaux. ● CLARISSE JUOMPAN-YAKAM JEUNE AFRIQUE
elle a lancé en 2010 le Plan national de prévention et de contrôle du cancer. Pragmatique et ambitieux, ce plan part du constat que 40 % des cancers pourraient être évités et insiste en particulier sur la prévention et la communication. En termes d’équipement, certaines structures sont à la pointe. Ainsi, le centre d’imagerie Rabat Petscan vient de se doter d’un appareil de tomographie par émission de positrons, le premier du genre en Afrique et dans le monde arabe. Coût : 25 millions de dirhams (2,2 millions d’euros). Cependant, l’insuffisance des structures de soins et de personnels spécialisés oblige encore les patients à de grands trajets ou à des rendez-vous tardifs. Il n’existe aujourd’hui qu’une dizaine de centres d’oncologie au Maroc, aussi est-il prévu d’en ouvrir prochainement à Meknès, Tanger, Safi et Laayoune, et de créer des services d’oncologie de proximité dans les hôpitaux provinciaux. Deux centres d’hémato-oncologie pédiatrique vont également être mis en place à Fès et Marrakech. Le Maroc a par ailleurs lancé une commission du médicament pour tenter de développer le recours aux génériques et de réduire les prix de vente. ● FRIDA DAHMANI, à Tunis, et LEÏLA SLIMANI N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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Le Plus de J.A. Santé PORTRAITS
DR
Grands pontes sur tous les fronts
Kamel Bouzid
Zoom sur ces médecins réputés qui mènent leur combat des hôpitaux jusque dans le milieu associatif.
Chef du service d’oncologie du Centre Pierre-et-Marie-Curie, à Alger. Président de la Société algérienne d’oncologie médicale
Khaled Rahal
Chef du service de chirurgie carcinologique à l’Institut Salah-Azaïez, à Tunis. Président de l’Association tunisienne d’assistance aux malades du cancer du sein
ONS ABID POUR J.A.
À 54 ANS et après presque vingtcinq années de carrière dans le service public, le professeur Rahal dit être confronté chaque jour encore à l’énigme de la cellule maligne : « Plus on avance, plus on se pose de questions. » De nombreux praticiens tunisiens doivent leur formation à ce grand patron incontesté de la chirurgie oncologique. « Nous avons les spécialistes, maintenant il faut développer les structures », souligne Khaled Rahal, qui appelle à plus d’interactions entre les secteurs public et privé, et insiste sur la nécessité de développer la prévention de la maladie et le suivi psychologique des patients. ● FRIDA DAHMANI, à Tunis
Fouzia Msefer Alaoui Ancienne chef du service de pédiatrie hématologie et oncologie à l’Hôpital d’enfants de Rabat. Présidente de l’association L’Avenir
DR N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
AU DÉBUT DES ANNÉES 1980, cette pédiatre a ouvert une petite unité d’oncologie (six lits) à l’Hôpital d’enfants de Rabat. Les guérisons se sont faites de plus en plus nombreuses et le service n’a cessé de grossir. En 1986, elle a créé l’association L’Avenir, qui collecte des fonds, gère des programmes médicaux et a permis la création, en 1995, de la première maison accueillant des parents d’enfants malades. Fouzia Msefer Alaoui a
DIPLÔMÉ EN 1978 de la fac de médecine d’Alger, Kamel Bouzid dirige depuis 1996 le service d’oncologie du Centre Pierreet-Marie-Curie (CPMC), qui accueille chaque année des milliers de malades. En contact direct avec le terrain, il mène un combat sans relâche pour une meilleure prise en charge des patients. Selon lui, « sur 44 000 nouveaux cas de cancer enregistrés chaque année dans le pays, 28 000 nécessitent un traitement par radiothérapie… et seuls 8 000 y ont accès ». En octobre 2011, il a lancé un pavé dans la mare en affirmant que les équipements de radiothérapie du CPMC étaient dans un état « calamiteux » à cause de problèmes de maintenance. En outre, il a pointé le fait que, les patients se voyant fixer des rendez-vous huit mois après leur consultation, 80 % d’entre eux décèdent avant… ● TAREK HAFID, à Alger
Paul Ndom Chef du service d’oncologie médicale de l’Hôpital général de Yaoundé. Président de Solidarité Chimiothérapie
aussi supervisé un projet de centre d’oncologie pédiatrique, qui a ouvert à Rabat en 2010. À 62 ans, celle qui a arrêté d’exercer depuis 2005 n’a pas abandonné son engagement social auprès des malades. Elle a notamment fait bénéficier de son expérience aux jeunes médecins et aux parents en publiant un livre en arabe et en français, La Leucémie de l’enfant en mots et en images (éd. Empreintes, 2010). ●
AU CAMEROUN, où 12 000 nouveaux cas de cancer sont enregistrés chaque année, « 70 % des malades se rendent dans les services d’oncologie dans un état critique », se désole Paul Ndom. En 1999, ce médecin a créé Solidarité Chimiothérapie, qui apporte notamment un soutien psychologique à quelque 700 patients. Sous son impulsion, une pharmacie sociale a ouvert en 2004 au sein de l’Hôpital général de Yaoundé : les traitements anticancéreux y sont accessibles à moitié prix et les patients y bénéficient de facilités de paiement. ●
LEÏLA SLIMANI
FANNY REY
DR
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JEUNE AFRIQUE
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Économie CONJONCTURE
L’année
WILLIAM DANIELS – RON WATTS/CORBIS – GILLES ROLLE/REA – TIPHAINE SAINT-CRIQ POUR J.A. – RICCARDO VENTURI/CONTRASTO-REA – JEAN-CLAUDE MOSCHETTI/REA
2012 en questions Alors que la planète va connaître un ralentissement de sa croissance, l’Afrique devrait poursuivre sa progression. Mais les révolutions arabes, la récession européenne et les variations du prix du pétrole peuvent fragiliser cette tendance.
JEAN-MICHEL MEYER
E
t s’il ne restait plus que l’Afrique pour confirmer de bonnes perspectives de croissance pour 2012 ? Cette année, la planète tournera au ralenti avec une croissance attendue de 2,8 % (3,2 % en 2011). Même la Chine s’essouffle. Affectée par une baisse de la demande, intérieure et extérieure, et sous la menace de l’explosion d’une bulle immobilière, l’économie chinoise progressera de « seulement » 8,7 % en 2012. C’est la première fois depuis 2001 que le taux de croissance du pays tombera sous la barre des 9 %. Idem pour l’Inde, dont le PIB ne progressera « que » de 7,7 %. Une baisse de régime qui avait déjà tempéré l’ardeur des investisseurs internationaux en 2011. Selon la base de données de l’américain EPFR Global sur les flux des capitaux investis dans le monde, les fonds spécialisés dans le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine ont retiré 15 milliards de dollars (11,6 milliards d’euros) de ces marchés en 2011, et l’indice boursier MSCI « marchés émergents » a chuté de 21 % l’an passé. Dans ce contexte, le continent fait figure d’exception. La croissance du PIB de l’Afrique subsaharienne approchera les 6 % en 2012 (5,2 % en 2011), selon le Fonds monétaire international (FMI). En Afrique du Nord et au Moyen-Orient, la croissance atteindra 3,6 % (4 % en 2011). Mais rien N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
n’est acquis. Au nord du continent, les économies marquées par les révolutions subiront encore les contrecoups de ces événements – le PIB de la Libye pourrait se contracter de plus de 50 % cette année – ainsi que les effets de la récession européenne. « Les pays africains vont souffrir si on ne prend pas en charge la crise de l’euro », a déclaré Christine Lagarde, directrice du FMI, à Johannesburg le 6 janvier. Plus largement, des interrogations persistent. Les cours des matières premières dépendront de la vitalité des demandes chinoise et indienne. Quant au pétrole, la planète consommera 90,3 millions de barils par jour (+ 1,4 % par rapport à 2011). Mais à quel prix ? Plus, ou moins, que la moyenne de 111 dollars le baril de l’an passé ? À lui seul, le blocus du détroit d’Ormuz – dont l’Iran agite le spectre – augmenterait le prix du baril de 25 à 50 dollars. L’année 2012 sera déterminante pour l’Afrique. Plus que jamais le continent devra démontrer sa capacité à générer sa propre croissance pour soutenir son économie dans un environnement mondial très troublé. ●
Brésil, Russie, Inde, Chine… La baisse de régime affecte aussi les pays émergents. JEUNE AFRIQUE
ENTREPRISES
Peugeot veut rugir à nouveau
INTERVIEW
Madani M. Tall
Directeur régional de la Banque mondiale
MARCHÉS FINANCIERS
Un bilan aigre-doux pour Cosumar
AFRIQUE DU NORD
Les islamistes sauront-ils rassurer?
Afin de gagner la confiance des investisseurs, les partis arrivés au pouvoir jouent la continuité.
C
oup sur coup, la Tunisie et le Maroc ont accordé leur confiance à des partis islamistes. S’ils pourront toujours compter sur le soutien des puissances du Golfe, il faudra à ces partis aller au-delà d’un discours moralisateur pour mobiliser la finance internationale. En Tunisie, rassurer les milieux d’affaires a été l’une des priorités du parti Ennahdha, sorti vainqueur des élections du 23 octobre. « Notre pays réalise 80 % de ses échanges avec l’Union européenne, nous ne voulons pas tout bouleverser », assure Ridha Saïdi, ministre délégué chargé des questions économiques. Pas convaincus, JEUNE AFRIQUE
certains patrons tunisiens attendent encore avant de lancer de nouveaux projets. GARDER LE CAP. Au Maroc, l’arrivée aux affaires du Parti de la justice et du développement (PJD) ne devrait guère bouleverser la politique économique. Les investisseurs étrangers, nombreux à bénéficier des grands projets pilotés par l’État, ne fuiront pas le pays. Dans le gouvernement d’Abdelilah Benkirane, dévoilé le 3 janvier, le PJD se consacre aux dossiers sociaux, et laisse les portefeuilles économiques majeurs à ses alliés. À l’Économie et aux Finances, Nizar Baraka, de l’Istiqlal (droite), ministre
délégué dans le gouvernement sortant, ne devrait pas réformer la fiscalité sur les hauts revenus ou les grandes entreprises, une mesure prônée par le PJD et crainte par certains. Quant au ministère de l’Équipement et du Transport et à celui de l’Industrie, du Commerce et des Nouvelles Technologies, ils échoient à Abdelkader Aamara et Aziz Rabbah, certes tous deux du PJD, mais qui, à la différence d’autres membres de leur parti, n’ont pas remis en question les grands projets comme le TGV ou le Pacte national émergence industrielle, qui seront maintenus. ● JULIEN CLÉMENÇOT et CHRISTOPHE LE BEC N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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ASSANE GUEYE/APANEWS
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POLITIQUE
Les élections, un piège pour l’économie?
Du Mali à Madagascar, les multiples échéances présidentielles risquent de bouleverser les équilibres nationaux.
P
as moins de sept élections présidentielles sont attendues en 2012. Quatre de ces rendez-vous électoraux, même si des reports ne sont pas à exclure, sont déjà programmés: Sénégal (26 février), Mali (29 avril), Sierra Leone (17 novembre) et Ghana (7 décembre) ; trois d’entre eux restent incertains : Angola (troisième trimestre 2012?),Kenya(décembre?)etMadagascar. S’ils dégénèrent, ces événements risquent de malmener les économies, comme récemment en Côte d’Ivoire ou en RD Congo. À la veille de l’échéance présidentielledefévrier,uneétincellepeutembraser Dakar, tant l’insatisfaction de la population estgrande(pouvoird’achat,chômageélevé, délestages…).Cenesontpaslesproposrassurants du Fonds monétaire international (FMI), le 19 décembre 2011, qui calmeront les Sénégalais: « En 2012, le rétablissement d’un approvisionnement suffisant en électricité, associé à d’importantes dépenses d’infrastructures énergétiques et routières, devrait doper la croissance, qui atteindrait N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
4,4 %. » Les questions économiques tiendrontaussiunegrandeplacedansl’élection malienne, surtout avec un jeu de l’alternance politique clairement établi. Selon le FMI, le pays connaîtra une croissance de 5,6 % en 2012 et une inflation inférieure à
! AU SÉNÉGAL, le premier tour aura lieu le 26 février.
2,5 %. Deux défis majeurs sont à l’ordre du jour: réussir enfin la restructuration de la filière coton et relancer le secteur minier en déclin (7,7 % du PIB en 2007; 5,4 % en 2010) avec l’exploitation de deux nouveaux gisements d’or (Syama et Gounkoto). À la différence du Mali, le retour aux urnes risque d’être plus tendu à Madagascar. Or unealternancedémocratiqueréussieserait une excellente nouvelle pour l’économie du pays, exsangue depuis le coup d’État de mars 2009. ● J.-M.M.
CÔTE D’IVOIRE LA LOCOMOTIVE RÉGIONALE SE REMET SUR LES RAILS À ABIDJAN, l’heure est à la relance. Le budget de l’État est en hausse de près de 110 milliards de F CFA en 2012 (1 million d’euros). Il est estimé à 3160 milliards de F CFA, dont plus de 600 milliards seront consacrés à l’investissement.Tout le pays devrait être en chantier. Le réseau routier sera réhabilité. Dans les centres urbains, les infrastructures d’électricité et de santé et les équipements sociaux seront rénovés. La réalisation du troisième pont à Abidjan a déjà démarré, et sa livraison est prévue en 2013. La construction de l’autoroute Abidjan-Ouagadougou sera poursuivie, et les travaux de celle qui reliera la métropole économique à Accra ont déjà commencé. Dans le rail, la réhabilitation du chemin de fer Abidjan-Ouagadougou et son extension jusqu’à Niamey sont au programme. À l’étude: la construction du chemin de fer San Pedro-Man avec une possible extension jusqu’en Guinée. Pour satisfaire les besoins énergétiques croissants, les autorités augmenteront la production électrique d’environ 150 MW par an. Des grands travaux qui doperont la croissance ivoirienne prévue à près de 9 % cette année. ● P.A. JEUNE AFRIQUE
L’année 2012 en questions PANORAMA
Secteur par secteur, quels seront les enjeux? Banques, infrastructures, mines, télécoms… Tour d’horizon des défis qui attendent le continent. en difficulté et incapables d’atteindre ce seuil devront trouver des repreneurs DE LA NOURRITURE POUR TOUS : ou de nouveaux actionnaires. Parmi le chanteur sénégalais Youssou Ndour, eux, la Banque régionale de solidarité, candidat à l’élection présidenprésente dans les huit pays de l’Union économique et monétaire ouest-afritielle depuis le 2 janvier, caine (UEMOA), et Bridge Bank, promet l’autosuffisance appartenant pour 85 % à l’homme alimentaire au pays de milliards d’euros d’affaires sénégalais Yérim Sow la Teranga, et pointe C’est ce que coûtent et opérant en Côte d’Ivoire et du même coup les importations au Sénégal. À l’instar des quatre l’échec du président alimentaires à banques publiques en cours de sortant Abdoulaye l’Afrique Wade. Malgré la Grande privatisation au Togo (BTD, UTB, subsaharienne Offensive agricole pour la BTCI, BIA), d’autres établissements nourriture et l’abondance publics de la sous-région devront se (Goana), lancée en 2008 au lendemain rapprocher d’acteurs privés. ● S.B. des émeutes de la faim, le pays dépense toujours 211 milliards de F CFA (322 millions d’euros) pour importer du riz. CONSOMMATION LES CLASSES La Côte d’Ivoire, elle, a affiché ses ambiMOYENNES ENTRENT EN SCÈNE tions : « En 2012, nous consacrerons à l’agriculture 15 % du budget au lieu de DÉTRUIT PENDANT LA RÉVOLUTION, 1,7 % actuellement », a déclaré le ministre l’hypermarché Géant de Tunis va rouvrir. de l’agriculture Mamadou Sangafowa Un mode de consommation qui illustre Coulibaly. Sur le plan industriel, le sinl’émergence des classes moyennes. gapourien Olam inaugurera dans le pays Ainsi, Moez Zouari, détenteur en France deux usines en février : l’une de transdes franchises Casino, Leader Price et Franprix, prévoit de s’implanter au second formation de noix de cajou à Bouaké, semestre 2012 en Tunisie et en Libye. l’autre de lait en poudre à Abidjan. Enfin, Au Maroc, Label’Vie, après le rachat l’Alliance pour une révolution verte en Afrique (Agra) de Kofi Annan, présente de Metro, poursuivra le déploiement dans quinze pays déjà, entend doubler des hypermarchés Carrefour. Le français Auchan et le groupe Mabrouk avec les revenus de 20 millions d’agriculteurs d’ici à 2020 sur le continent. ● M.P. Monoprix seraient sur les rangs pour de futures ouvertures marocaines. AGRO-INDUSTRIES VERS UNE RÉVOLUTION VERTE
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BANQUES COUP DE CHAUD DANS LA ZONE FRANC
LA RÉFORME du secteur bancaire dans la zone franc CFA (Afrique de l’Ouest et Afrique centrale) visant à porter le capital social minimum des établissements de 1 à 10 milliards de F CFA (15 millions d’euros) devrait franchir une autre étape cette année. De nombreuses banques veulent atteindre cet objectif, fixé par la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), au 31 décembre 2012. Conséquence : certains établissements JEUNE AFRIQUE
En grande distribution ou en commerce de détail, l’Afrique subsaharienne est loin d’une telle densité. Leader sur ces secteurs, le groupe Mercure International of Monaco (MIM) ouvrira au premier trimestre un supermarché sous l’enseigne Casino (le distributeur est associé à plusieurs partenaires) à Yaoundé. Et le Mali serait une future cible de MIM. Mais, officiellement, le groupe se consacre à l’essor de ses franchises, notamment Celio, City Sport, Aldo… Casino débarquera aussi à Abidjan au premier semestre 2012. Un projet du groupe ivoirien Prosuma, déjà principal acteur de la grande distribution dans le pays. ● J.C. COTON ON PRIVATISE AU MALI
L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE au Mali, prévuele29avril,donneuncoupd’accélérateurauxnégociationssurlacessionde61% de deux filiales régionales (Sikasso et Kita) de la Compagnie malienne pour le développement du textile (CMDT) au chinois Yuemei. Les pourparlers étaient suspendus faute d’accord sur certains aspects techniques. Ils viennent de reprendre avec l’objectif de se conclure avant le scrutin. L’offre financière du groupe – qui n’a pas été révélée – avait déjà été acceptée par le Mali début 2011. Les deux autres filiales de la CMDT (Koutiala et Fana), également concernées par ce processus de privatisation, n’ont pas trouvé de repreneurs. ● S.B. INFRASTRUCTURES DES CHANTIERS VRAIMENT À LA HAUTEUR
MALGRÉ LES 56 MILLIARDS DE DOLLARS (42 millions d’euros) investis en 2010, le continent manque ● ● ●
BOURSES ENFIN LA FUSION LIBREVILLE-DOUALA LE RAPPROCHEMENT entre la Bourse des valeurs mobilières d’Afrique centrale (BVMAC, à Libreville) et le Douala Stock Exchange (DSX), resté lettre morte depuis son annonce début 2010, doit franchir une étape décisive cette année après le sommet des chefs d’État de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) qui devrait se tenir fin janvier. Réticents jusque-là, les Camerounais sont désormais plutôt favorables au projet de fusion proposé par la Banque africaine de développement (BAD). Ce projet préconise la délocalisation du siège de la BVMAC à Douala (Cameroun) en raison d’une activité économique plus dense. Et l’installation des régulateurs du marché à Libreville (Gabon). « Si les chefs d’État donnent leur aval, comme prévu, il sera techniquement possible d’aller vers une fusion effective avant la fin de 2012 », affirme-t-on à la BVMAC. ● S.B. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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Entreprises marchés ● ● ● cruellement d’infrastructures de qualité. Coup de fouet pour leur développement, onze projets ont été recensés à l’issue du G20 de Cannes, en France. Parmi eux, le site hydroélectrique d’Inga (RD Congo), capable de générer 40 GW, soit plus du tiers de l’électricité produite sur le continent. Également pointé : le West African Power Pool, qui permettra d’ici à 2015 de relier les réseaux électriques sur 1400 km entre la Côte d’Ivoire, la Guinée, le Liberia et la Sierra Leone, au bénéfice de 200 millions d’habitants. Au nord du continent, le Plan solaire méditerranéen développera une capacité de 20 GW d’énergie solaire pour 2020, dont le quart sera exporté en Europe. Et dans la région des Grands Lacs, un tronçon de chemin de fer de 500 km entre Isaka et Kigali contribuera en 2018 à désenclaver le Rwanda et le Burundi. Autant de projets qui bénéficieront dès fin mars de la plateforme numérique Sokoni, qui simplifiera la mise en relation des porteurs de projets avec les investisseurs internationaux. ● F.R.
MINES GRANDS PROJETS GELÉS
AVEC LA NERVOSITÉ des marchés financiers, l’année 2012 devrait être pauvre en projets miniers. « Ces dernières semaines, il est devenu difficile de mobiliser des fonds en Bourse, que ce soit dans l’exploration ou dans l’exploitation », indique Gabriel Fal de CGF Bourse, qui participe au montage de plusieurs projets en Afrique de l’Ouest. Si la majorité des cours des minerais reste à des niveaux élevés grâce à la demande chinoise, leur volatilité rend peu propices les investissements lourds, en particulier dans les pays africains riches en minerais mais instables politiquement, telle la RD Congo. À l’image d’Areva, qui a repoussé l’exploitation des gisements d’uranium de Trekkopje (Namibie) et d’Imouraren (Niger), les premières exportations de fer – attendues dès 2013 – de Guinée n’interviendront pas avant mi-2015 pour le gisement du Simandou. AuGabon,l’exploitationduferdeBelinga par le chinois CMEC, prévue en 2011, n’a toujourspascommencé.QuantauSénégal, la production de fer à Falémé est encore bloquée par le conflit avec ArcelorMittal. Vu la conjoncture, ces dossiers seront difficiles à résoudre d’ici à fin 2012. ● C.L.B. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
PÉTROLE BARIL ÉLEVÉ, INVESTISSEMENTS RELANCÉS
TÉLÉPHONIE DE NOUVELLES LICENCES 3G
FORTE D’UN PRIX du baril qui ne s’annonce pas en dessous de 100 dollars (77 euros environ), l’activité pétrolière devrait être riche. Au large de la Côte d’Ivoire, d’abord, la mise au jour d’un champ le 7 décembre dernier par l’américain Vanco, le russe Lukoil et l’ivoirien Petrocidonneuneidéedesattentesdansla région.Égalementaularged’Abidjan,Total devrait intensifier ses activités de forage. Le golfe de Guinée verra aussi le retour du Gabon dans l’exploration offshore grâce à deux contrats signés entre Gabon Oil et le franco-britannique Perenco. Les investissements devraient atteindre 40 millions de dollars (30,7 millions d’euros). Plus au nord, African Petroleum débutera l’exploration aux abords des côtes sénégalaises. La Mauritanie a signé des accords fin 2011 avec le britannique Tullow Oil et le français Total. Au Maghreb, la Libye devrait retrouver son niveau de production normal (1,6 million de barils par jour). Total, le chinois Cnooc et Tullow espèrent aussi trouver une issue favorable au projet du lac Albert en Ouganda, l’un des plus importants gisements du continent avec ses 2 milliards de barils potentiels. ● M.P.
C AMEROUN, ALGÉRIE, CÔTE D’IVOIRE, MALI… plusieurs États africains délivreront cette année de nouvelles licences 3G (haut débit mobile). Bamako devrait ouvrir le bal en confirmant ce mois-ci l’attribution d’un sésame au groupe burkinabè Planor, dont le projet bénéficie de l’expertise technique de Monaco Télécom. Avec Orange et Maroc Télécom, ils seront alors trois opérateurs à en bénéficier. À Abidjan, le choix n’est pas encore annoncé, même si le gouvernement laisse entendre qu’il donnera la priorité aux leaders du marché: Orange,MTN et Moov, au détriment de LAP Green Network et de Comium. L’Algérie devrait également passer au haut débit mobile. Reste le Cameroun, qui doit attribuer trois licences. Bharti a retenu l’attention des officiels, mais le fournisseur d’accès camerounais Ringo, appuyé lui aussi par Monaco Télécom, n’a pas dit son dernier mot. En marge de la compétition, le projet du footballeur Samuel Eto’o (Set’Mobile) fait figure d’ovni. Un opérateur dit virtuel (MVNO) utilisant le réseau d’Orange est évoqué… Réponse le 21 janvier. ● J.C.
ENTREPRISES ET INSTITUTIONS
Quels patrons en première ligne? Ministres issus du privé, dirigeants appelés à de plus hautes fonctions, le changement ne s’est pas fait attendre.
I
l n’aura fallu patienter, finalement, qu’une poignée de jours pour voir changer les directions des entreprises africaines. Premier mouvement de l’année sans doute : Souleymane Diarrassouba, directeur g énéral de la Banque Atlantique de Côte d’Ivoire (Baci), a été nommé, début janvier, directeur général d’Atlantic Financial Group (AFG), le holding qui chapeaute l’ensemble du pool bancaire et financier du groupe présent dans huit pays
en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. Il succède à Charles Kié, parti rejoindre Ecobank Capital à Londres. Très mouvementée déjà, la fin de l’année 2011 laissait présager de nombreux changements en 2012. Palme de la nomination surprise : Thierry Tanoh, appelé à rejoindre R D Ecobank Transnational Incorporated (ETI). L’entrée dans la banque panafricaine du viceprésident de la Société financière internationale (Banque mondiale), chargé JEUNE AFRIQUE
L’année 2012 en questions
Partager g le sourire e de millions de planteurs planteu urs En tant que leader international et Chef de file mondial dans la gestion de la « Supply Chain », Olam a engagé des partenariats avec les planteurs en Afrique et dans les pays émergents. Nous nous basons sur notre Charte de Développement Durable « Livehood Charter » pour créer un partenariat gagnant avec les planteurs, basé sur la transparence et la confiance. Nous
renforçons les capacités des planteurs en mettant à leur disposition du financement de campagne, en leur fournissant des formations d’outils et des techniques pour améliorer les rendements et la qualité des récoltes et en les mettant en relation avec les principaux marchés mondiaux. Au travers de ces démarches, Olam a contribué à l’amélioration des revenus de plus de 1,5 million d’agriculteurs en Afrique en apportant à nouveau le sourire sur le visage de ceux qui en ont le plus besoin.
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De nouveaux visages appalancement de la 3G dans le pays raissent également dans cette année. Même mission les gouvernements, avec, délicate pour Mohamed notamment, des perSalah Boultif. Les comsonnalités venues du mandes d’Air Algérie lui monde de l’entreprise. ont été confiées pour Au Cameroun, Alamine éteindre un conflit Ousmane Mey, qui dirisocial larvé. La PO geait jusque-là Afriland First grève surprise des I ID EY NIC O LAS Bank, la deuxième banque du pilotes, le 3 janvier, pays, prend le maroquin des Finances démontre que ce spéciadans le nouveau gouvernement dirigé liste du transport aérien par Philémon Yang. Son homologue a du pain sur la planche. au ministère de l’Eau et de l’Énergie est Côté institutions aussi, lui aussi un homme de terrain : 2012 aura son lot R D de changements. Basile Atangana Kouna, qui L’Union économique était le directeur général de et monétaire ouest-afrila Cameroon Water Utilities caine (UEMOA) verra de Corporation (Camwater), nouvelles têtes: Hadjibou l’entreprise publique charSoumaré, dans le faugée d’améliorer l’accès à teuil de président de la l’eau potable dans le pays. Commission, et Tiémoko Un appel aux compétences PA Meyliet Koné, gouverneur de du privé dans les ministères qui la Banque centrale des États de sera peut-être la grande tendance l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). de 2012. ● J.-M.M. N
de l’Afrique subsaharienne, de l’Amérique latine et de l’Europe de l’Ouest, se négocie depuis deux ans. L’Ivoirien succédera à Arnold Ekpe en juillet 2012 et ne prendra les rênes d’ETI que début 2013. Avec l’arrivée en rafales de nouvelles têtes, l’Algérie sera un pays à suivre. S’il est un homme qui risque d’être sous pression en 2012, c’est bien Abdelhamid Zerguine, le nouveau patron de Sonatrach, la première entreprise africaine. Homme du sérail, son agenda sera très chargé : restaurer la confiance dans l’entreprise, faire oublier toutes les affaires de corruption, relancer l’exploration et la production, élaborer une stratégie de diversification crédible… Quant à El Hachemi Belhamdi, il n’aura pas de temps à perdre non plus. Spécialiste des télécommunications à la retraite, il a été rappelé d’urgence par les autorités pour redresser Algérie Télécom et permettre à l’opérateur historique de profiter du
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Entreprises marchés
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ð Le constructeur n’envisage pas de relancer son USINE DE MONTAGE DE KADUNA (Nigeria) et privilégie l’importation.
JOHN COLE/ALAMY
seuledéclinaisonpick-upentre1968 et 2004), mais beaucoup plus que ce que vend sa marque sœur Citroën, bien moins connue dans la région, qui n’y a commercialisé en 2011 que 3 500 véhicules.
AUTOMOBILE
Peugeot veut rugir à nouveau en Afrique Si ses derniers modèles ne répondent guère aux besoins des conducteurs locaux, la marque jouit toujours d’une bonne image au sud du Sahara et entend en profiter. Dans sa ligne de mire, le Nigeria et la Côte d’Ivoire.
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n perte de vitesse depuis l’arrêt, en 2005, de la production de la mythique 504 dans son usine de montage de Kaduna, au Nigeria (425 000 produites en trente ans), Peugeot veut repartir à la conquête du marché subsaharien. « Après nos belles performances au Maghreb en 2011 [lire l’encadré, NDLR], l’Afrique subsaharienne est prioritaire en 2012 », affirme Jean-Philippe Imparato, directeur des opérations internationales de la marque au lion (devenu, le 1er janvier, directeur du commerce Europe). Pour le constructeur français, il y a urgence : il s’agit de profiter, tant qu’il est encore temps, de sa bonne image, en particulier dans l’ouest et le centre du continent, où ses anciens modèles (breaks et pick-up 504 et 505, mais aussi 405 et 205) continuent à parcourir routesetpistes.«Nousavonsfaitune étude de marché l’année dernière auprès de nos clients subsahariens. Pour eux, Peugeot est synonyme N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
de robustesse, mais notre gamme actuelle ne correspond plus suffisamment à leurs besoins. Dans quelques années, si nous ne faisons rien, nous ne pourrons plus profiter de cet avantage d’image », indique André Lorgère, directeur commercial Afrique subsaharienne. Objectif pour la marque en 2012 : atteindre 10 000 ventes, après une année 2011 où seuls 5 750 véhicules ont trouvé preneur au sud du Sahara. C’est encore peu par rapport au nombre de Peugeot 504 écoulées jadis (372700 pour sa
Dernière actu Directeur des opérations internationales de Peugeot et Citroën depuis avril 2010, Jean-Philippe Imparato devient directeur commercial Europe. Il est remplacé par Yves Moulin
POTENTIEL. Le Nigeria (près de 160 millions d’habitants) est la première cible du constructeur: « Alors que nous étions tombés là-bas à moins de 100 ventes en 2009, nous y avons écoulé 1300 voitures en 2010 et nous comptons atteindre les 2300 en 2012 », annonce André Lorgère. Le directeur commercial explique ce nouveau départ par un partenariat fructueux avec l’ancienne filiale Peugeot Automobile Nigeria (PAN), revendue à des entrepreneurslocaux.«Nousavonsintroduit ensemble les berlines 408 et 508, puis le véhicule utilitaire Boxer. Nous recevons de nombreuses demandes de devis, on sent le potentiel », affirme Imparato. Toutefois, Peugeot n’envisage pas de relancer ses installations industrielles de Kaduna : « Ce n’est pas à l’ordre du jour, indique Lorgère. Au Nigeria, comme dans le reste de l’Afrique, nous préférons désormais importerdesvéhiculesplutôtquede les produire dans des petites usines de montage peu compétitives. » Autre espoir de la marque, le redémarrage de l’économie ivoirienne: « La crise en Côte d’Ivoire a été dure pour nous. Nous n’y avons vendu que 200 véhicules neufs en 2011, soit trois fois moins qu’en 2010, alors que le pays représente habituellement60%desventesdela
INCONTOURNABLE AU MAGHREB « DÉSORMAIS, NOUS SOMMES DANS LETOP 3 dans tout le Maghreb francophone », se félicitait, avant son changement de poste (lire ci-dessus), Jean-Philippe Imparato, directeur des opérations internationales de Peugeot. En Algérie – premier marché de la zone, avec 320000 véhicules vendus en 2011 (+ 24,5 %) –, la marque détenait 11,2 % de part de marché fin octobre, derrière Renault et Hyundai mais devantToyota. « Au Maroc [120000 véhicules vendus en 2011, NDLR], nous sommes la première marque importée », ajoute Imparato. Enfin, enTunisie, Peugeot est troisième, derrière Volkswagen et Renault, avec 10,6 % du marché au premier semestre 2011. Depuis juillet, la marque y vend C.L.B. environ 700 véhicules par mois, autant qu’avant la révolution. ● JEUNE AFRIQUE
zone UEMOA [Union économique etmonétaireouest-africaine].»Pour rebondir, le constructeur compte sur sa citadine 206, mais aussi sur la berline compacte 308 et l’utilitaire Partner, qui ont séduit les Ivoiriens. « Fin 2011, nous avons introduit la [berline routière] 508, mais aussi le 3008, un modèle à cheval entre le véhicule de loisir et le monospace. Cette année, les Abidjanais découvriront la 408 et le 4008, un 4x4 de loisir qui devrait se tailler un certain succès », égrène André Lorgère.
Objectif pour le groupe français en 2012 : 10 000 ventes, contre 5 750 en 2011. En Afrique francophone, la marque au lion voit aussi un bon potentiel au Sénégal, au Togo et au Bénin, des pays qui importent beaucoup de véhicules. PICK-UP ET 4X4. Reste que pour
retrouver ses ventes d’antan, Peugeot devra enrichir sa gamme avec des voitures répondant mieux aux besoins des conducteurs africains. « Ce que veulent nos clients, nouslesavonsbien,cesontdespickup, des 4x4 et des minibus… Pour le moment, nous faisons du mieux possible avec la gamme existante, maisilestévidentqu’ilnousfautvite répondre à ces demandes, faute de quoi des concurrents comme Kia et Hyundai, malgré leur image de marque moins bonne que la nôtre, prendront durablement l’avantage sur nous », affirme André Lorgère. Si les résultats sont au rendezvous en 2012, le directeur commercial espère réussir à convaincre la direction de son groupe de développer une offre pensée pour le continent, et pas seulement adaptée. « Ce ne sera pas comparable à une 504 du futur, bien sûr; nous ne visons pas le marché des taxis. Mais je suis persuadé que si nous distribuons une berline tricorps robuste et technique, avec un niveau élevé de sécurité du passager, ce sera un succès », pronostique-t-il. ● CHRISTOPHE LE BEC JEUNE AFRIQUE
AURÉLIE GRIMBERGH POUR J.A.
Coulisses
BRVM REDÉCOLLAGE PRÉVU EN 2012 La Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) d’Afrique de l’Ouest table sur au moins quatre nouvelles cotations en 2012. Dans une interview accordée à l’agence Reuters, Jean-Paul Gillet, son directeur général, a indiqué s’attendre à l’introduction sur la place d’Abidjan de la Société
S
M
S
Entreprises
marchés
des télécommunications du Mali (Sotelma), des filiales malienne et sénégalaise de Bank of Africa (BOA) et de Côte d’Ivoire Télécom. Il a également affirmé être en contact avec les autorités de régulation pour réduire le prix minimum des titres des sociétés cotées (10 000 F CFA, soit 15,2 euros), plus élevé que ceux pratiqués sur les marchés anglo-saxons. Objectif : rendre la Bourse plus accessible aux petits investisseurs et augmenter la liquidité. Pénalisé par la crise ivoirienne, l’indice BRVM Composite (qui rassemble toutes les valeurs cotées) a fini l’année 2011 à 138,88 points, en baisse de 13 %. La valeur totale des transactions a atteint 80 milliards de F CFA, contre 110 milliards l’année précédente. ●
• MAROC Intelcia, le leader national de l’offshoring, rachète le français The Marketingroup • CÔTE D’IVOIRE Les négociations pour l’achat de Baci par le groupe bancaire français BPCE se poursuivent • TUNISIE Le fournisseur d’accès internet Hexabyte lancera le 13.1 une offre de vente de 333334 actions (6 DT) • SÉNÉGAL La gestion de l’Hôtel Méridien Président (Dakar) passe de l’américain Starwood à la société Les soleils d’Afrique, dirigée par Mamadou Racine Sy
BOIS LE GABON ACTIONNAIRE DE ROUGIER Après avoir négocié le renforcement de sa participation dans la société minière Eramet (10 % à 15 % du capital), l’État gabonais entre au capital d’un autre groupe français, Rougier Afrique International, à hauteur de 35 %. Réalisée via la Caisse des dépôts et consignations du pays, l’opération a coûté 24 millions d’euros et permet au Gabon de disposer d’une minorité de blocage au sein de la compagnie, qui exploite près de 2 millions d’hectares de forêt en Afrique centrale. ● HÔTELLERIE AZALAÏ À ABIDJAN Le groupe malien a lancé, fin décembre, la construction d’un hôtel 4 étoiles à Abidjan. Montant prévu de l’investissement: environ 13 milliards de F CFA (près de 20 millions d’euros).
La société dirigée par Mossadeck Bally prend ainsi pied dans un sixième pays d’Afrique de l’Ouest. Azalaï Hôtels s’apprête en outre à lever un emprunt obligataire de 7 milliards de F CFA d’une maturité de six ans et à un taux de 6,5 %. Ces fonds devraient financer trois projets hôteliers au Mali. ● BANQUE ATTIJARIWAFA SE RÉORGANISE Le groupe marocain, piloté par Mohammed El Kettani, a dévoilé le 3 janvier un organigramme repensé. Dans le royaume, il accorde un rôle central aux directeurs de région, qui bénéficient d’une plus grande autonomie. Les moyens des filiales opérant dans les activités parabancaires, les marchés de capitaux et la banque de détail à l’international sont renforcés, pour accompagner leur développement à l’étranger. ● N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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Décideurs INTERVIEW
Madani M. Tall
D IRECTEUR
« La Côte d’Ivoire est redevenue fréquentable » Le responsable régional de la Banque mondiale souhaite qu’en sortant de ses dix années de crise Abidjan retrouve son rôle de locomotive en Afrique de l’Ouest. Et en profite pour se rapprocher vraiment du Nigeria.
B
asé à Abidjan, le représentantdelaBanquemondiale dans cinq pays d’Afrique de l’Ouest (Côte d’Ivoire, Mauritanie, Niger, Togo, Bénin) suit de très près les chantiers de relance de l’économie ivoirienne et apprécie leur impact sur les pays voisins. Malien d’origine, Madani Tall – il n’a rienàvoiravecsonhomonymecandidat à la présidentielle du Mali – est un ardentdéfenseurde l’intégration régionale qui milite en faveur d’un rapprochement plus étroit avec le Nigeria et le Ghana pour dynamiser un espace économique de près de 300 millions de consommateurs. JEUNE AFRIQUE : Environ dix mois après la fin de la guerre, comment se porte l’économie ivoirienne ? MADANI M. TALL : Le pays sort
d’une grave crise politico-militaire qui s’est soldée par plus de 3 000 morts, de 100 000 réfugiés, environ 1 million de déplacés internes et un corps social profondément déstructuré. L’arrêt de l’outil de production, des banques et des services a eu de lourdes conséquences. Certaines PME ne s’en remettront jamais. La récession devrait atteindre – 5,8 % en 2011. Heureusement,l’année2012 devrait voirunrebonddeplusde8%duPIB avec le retour de la paix, la normalisation politique et la capacité de résilience de l’économie. La filière cacao en est la parfaite illustration. Près de 1,5 million de tonnes ont quitté les champs pour les ports d’Abidjan et de San Pedro. En août, la production industrielle a atteint 95 % du niveau d’avant l’élection présidentielle. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
Les bailleurs de fonds ont-ils aussi retrouvé la confiance dans le pays?
Prenonsnotreexemple.LaBanque mondiale s’est réengagée en Côte d’Ivoire avec un portefeuille de projetsdeplusde400millionsdedollars [307 millions d’euros, NDLR], dont 150 millions de dollars d’appui budgétaireapprouvéenseptembre.D’ici à juin 2012, notre conseil d’administration pourrait accorder 200 millions de dollars supplémentaires. La Côted’Ivoireestredevenuefréquen-
Les présidents Ouattara et Jonathan semblent décidés à accélérer les grands chantiers. Excellente nouvelle! table. La classe affaires des vols pour Abidjanestpleineetlessouscripteurs ontréponduau-delàdesespérances aux derniers emprunts obligataires de l’État. Le pays a-t-il la capacité d’absorber tous ces fonds ?
Les années de crise ne lui ont pas permis de réaliser son potentiel en termes d’investissement public, avec en moyenne l’équivalent de 3 % du PIB, bien en deçà des 10 % du Sénégal ou des 15 % du Cap-Vert. Cela devrait remonter rapidement. Et l’État a intérêt à poursuivre la modernisation de l’administration et des ministères techniques pour améliorer la capacité d’absorption. Reste aussi à savoir si la communauté internationale sera à la hauteur des besoins avec la
RÉGIONAL DE LA
B ANQUE
MONDIALE
crise économique qui persiste, voire s’aggrave, en Occident. Abidjan peut-elle redevenir la locomotive régionale ?
La Côte d’Ivoire représente 40 % du PIB de l’Union économique et monétaireouest-africaine[UEMOA] et reste la principale plateforme du commerce extérieur des pays de l’hinterland. Plus de 3 millions d’immigrants ouest-africains y vivent. Les transferts de fonds de cette diaspora sont les plus élevés d’Afrique subsaharienne, juste derrière l’Afrique du Sud. Avec son économie diversifiée, elle est au cœur d’une dynamique qui va forger l’avenir de la région. L’enjeu, c’estl’intégrationdesmembresdela Cedeao[Communautééconomique des États de l’Afrique de l’Ouest], ainsi que de la Mauritanie, soit seize pays qui représentent un espace économiquedeprèsde300millions d’habitants. À quelles conditions les pays voisins profiteront-ils de cette dynamique ?
L’intégration des États doit évoluer vers une intégration effective des peuples. Les dirigeants doivent arrêter d’instrumentaliser les questionsethniquesetmigratoires.Leurs discourséconomiquesdoiventaussi se traduire dans leur comportement. L’exportation de l’huile de palme ivoirienne est parfois bloquée par d’autres pays qui veulent protéger leur marché. Les règles pour faciliter le transport routier inter-États ne sont pas appliquées. Les barrières non tarifaires sont trop nombreuses. Les banques ont trop de liquidités et ne financent pas assez l’économie. Si tous les pays aspirent à un environnement des affaires de classe internationale, certains, comme le Cap-Vert, sont plus déterminés que d’autres. Quels sont les projets d’intégration prioritaires ?
Ilfautdoterlasous-régiond’infrastructures routières, ferroviaires et JEUNE AFRIQUE
Décideurs
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ð IL REPRÉSENTE L’INSTITUTION DE BRETTON WOODS dans cinq pays du continent.
la standardisation, le stockage et la traçabilité des produits, ainsi que réduire au minimum les contrôles.
OLIVIER POUR J.A.
Faut-il relancer l’idée d’une monnaie commune dans tout l’espace?
1989
énergétiques. Ce sont à la fois des facteurs de compétitivité pour les entreprises et des vecteurs de mobilité pour les personnes et les biens. Citons le projet de transport et de facilitation du commerce dans le corridor Abidjan-Lagos, ou encore le pool énergétique de l’Afrique de l’Ouest, qui va contribuer à accroître la production, interconnecter les pays et créer un marché régional. Les présidents Alassane Ouattara et Goodluck Jonathan semblent décidés à accélérer les grands chantiers. C’est une excellente nouvelle. Faut-il créer une bourse des matières premières ?
Les systèmes de production en
Afrique de l’Ouest sont dominés par de petites exploitations familiales. Plus résistantes aux chocs naturels etéconomiques,ellessontplusdifficiles à structurer pour répondre aux exigences des marchés. Il faut donc revoir la commercialisation interne et externe des cultures vivrières et d’exportation, et s’inspirer des pays d’Afrique australe et d’Afrique de l’Est, à la tradition d’organisation des marchés séculaire. L’essor des technologies de communication et la bonne santé du secteur financier permettent d’envisager la mise en place de bourses agricoles. Mais ce n’est pas la panacée. Il faut aussi réhabiliter les pistes agricoles, développer le réseau routier et les corridors, améliorer la sécurité sanitaire,
Entre à la Banque mondiale 2004
Directeur régional Afrique, à Dakar (Sénégal, CapVert, Gambie, Guinée-Bissau) 2008
Directeur régional Afrique, à Abidjan (Côte d’Ivoire, Mauritanie, Niger,Togo, Bénin)
Cela pourrait doper les échanges. Les dirigeants de ces pays doivent y réfléchir. Le Nigeria représente un marché de 160 millions d’habitants. Lesindustrielsivoiriensetghanéens pourraient trouver des avantages à utiliser la même monnaie que lui. La cherté des coûts logistiques et l’insuffisance du réseau électrique freinent-ils le développement ?
Il faut réformer le secteur de l’électricité. Les délestages ont coûté environ 0,5 % du PIB ivoirien en 2010etlessubventionsreprésentent 100 milliards de F CFA (152 millions d’euros) pour l’État. Le port d’Abidjan doit faire des efforts de compétitivitépourlespaysenclavés. D’après l’une de nos études, l’envoi d’un conteneur de 20 pieds de Singapour à Abidjan coûteentre 700 et 1000 euros, son déchargement et la livraison, entre 500 et 800 euros. L’acheminer à Ouagadougou demanderait 1 500 euros de plus, notamment en raison du racket. Les autorités doivent engager des réformes pour mettre fin aux situations de rente. ● Propos recueillis à Abidjan par PASCAL AIRAULT
PASCAL ROLLAND EUROGROUP CONSULTING Associé du cabinet de conseil en France, il prend la tête du nouveau bureau de Casablanca. Eurogroup intervient notamment dans les secteurs de l’assurance, de l’énergie, des transports et de la banque. JEUNE AFRIQUE
GUY ZIBI PYRAMID RESEARCH Le fondateur (en 2007) du cabinet AfricaNext rejoint Pyramid Research, l’un des leaders de l’intelligence économique dans le domaine des télécoms et des médias, en tant que directeur du consulting.
NICKY NEWTON-KING JOHANNESBURG SE À 45 ans, dont une douzaine d’années au sein de l’institution, elle est devenue le 2 janvier la première directrice générale (DG) de la Bourse de Johannesburg. Elle en était auparavant DG adjointe. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
DR ; DONALD ROCKHEAD ; DR
ON EN PARLE
Marchés financiers
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MICHEL SETBOUN/RAPHO
ð L’entreprise compte cinq filiales OPÉRANT SUR HUIT SITES INDUSTRIELS.
AGRO-INDUSTRIE
Un bilan aigre-doux pour Cosumar Le sucrier marocain poursuit son plan de modernisation et voit ses résultats progresser. Pourtant, son cours a chuté de 7,5 % en 2011, alors que son principal actionnaire, SNI, veut diminuer sa participation.
C
progression respectivement de 9 % et de 7 % de leur cours de Bourse. Les résultats de Cosumar au premier semestre 2011 ont, de fait, été Une mauvaise année pour conformes aux prévisions, avec la filière une croissance du chiffre d’affaires Évolution des cours de 3,8 % par rapport à la même des valeurs sucrières période en 2010, à près de 3 milafricaines sur un an liards de dirhams (263 millions Omnicane d’euros), une marge nette en (Maurice) hausse de 1,9 point et un résultat net part du groupe (RNPG) en pro+ 2,8 % gression de 22,7 %, à 363,5 millions ENL Land de dirhams. Selon CFG Group, le chiffre d’affaires pour l’ensemble (Maurice) de l’année 2011 devrait s’établir – 7,4 % autour de 5,9 milliards de dirhams (+ 2 %). « Le groupe profite prinIllovo Sugar cipalement du raffermissement (Afr. du Sud) des quantités vendues », explique
osumar s’en sort bien. La filiale du holding royal SNI, spécialisée dans la production et le raffinage du sucre, a certes vu son cours chuter de 7,5 % sur un an (du 31 décembre 2010 au 30 décembre 2011) à la Bourse de Casablanca, mais elle reste une valeur solide. « L’ensemble du secteur [les valeurs agroalimentaires, NDLR] a perdu 0,38 %, rappelle ainsi l’analyste d’Integra Bourse Maryame Njioui. Cosumar a été touché par une situation générale maussade, mais a bien résisté. Lesieur Cristal a, par exemple, perdu 28 %. » Dans ce contexte, Centrale laitière et Unimer font figure d’exceptions avec une
– 7,55 %
2 500
Mumias Sugar (Kenya)
2 000 1 500 1 000 500 0
1 870
dirhams
UNE VALEUR SOLIDE MAIS EN REPLI
1/2/2011
1/3
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N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
1/5
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1/8
1/9
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Dangote Sugar (Nigeria)
dirhams
(Cours à la Bourse de Casablanca)
31/12/2010
– 42,65 %
1 730
4/1/2012
1/11
1/12
1/1/2012
– 69,22 %
encore Maryame Njioui. Seul producteur de sucre du pays, il bénéficie de la croissance de la demande, de l’ordre de 2 % à 2,5 % par an. Cosumar, qui dispose de cinq filiales (Cosumar SA, Sunabel, Surac, Suta et Sucrafor) opérant sur huit sites industriels, récolte les fruits des importants investissements du plan Indimage 2012, qu’il a lancé il y a près de cinq ans. Indimage prévoyait notamment de consacrer 3,6 milliards de dirhams à l’amélioration des performances industrielles et agricoles du groupe. Renforcement des capacités de raffinage, efficience industrielle, augmentation des rendements opérationnel et agricole, amélioration de la qualité… Une filiale de Surac consacrée à ces objectifs, Cosumagri, a été créée en 2010. « Dans le cadre du développement de son outil industriel, la filiale de SNI a alloué 1,6 milliard de dirhams aux unités de traitement des plantes sucrières et 2 milliards à l’extension et la modernisation de la raffinerie de Casablanca », précise CFG Group. CESSION RETARDÉE. Des inves-
tissements de bon augure dans la perspective d’une cession annoncée déjà depuis presque un an. SNI veut en effet vendre Cosumar, à l’instar de Lesieur Cristal. Si cette dernière opération a été rapidement bouclée (SNI a cédé 41 % de ses parts au groupe français Sofiprotéol cet été), celle du sucrier, qui devait intervenir avant la fin de l’automne, a été retardée de plusieurs mois. « Les mauvaises performances de Lesieur Cristal ont peut-être freiné le projet, explique Maryame Njioui. Mais il est toujours d’actualité. » En mai, SNI, actionnaire à 63 % de Cosumar, annonçait pourtant avoir eu des offres du monde entier, y compris d’Afrique. La société d’investissement affirmait en outre vouloir se délester de 25 % à 40 % de ses parts. Selon CFG Group, « Cosumar évolue dans un marché mondial JEUNE AFRIQUE
Baromètre
Seul producteur du royaume, il profite de la croissance de la demande. marocain. Les estimations de la campagne de commercialisation 2011-2012 prévoient un surplus de production au niveau mondial. L’Inde, deuxième pays producteur, a déjà autorisé depuis fin novembre l’exportation massive de 1 million de tonnes de sucre. CFG Group conclut cependant sur une note relativement optimiste pour Cosumar: « Malgré une certaine exposition de l’activité et de la performance du groupe aux aléas climatiques et à la volatilité des cours des matières premières à l’international, le groupe dispose de fondamentaux solides et d’opportunités importantes, notamment grâce à son positionnement d’opérateur unique, à son dispositif industriel modernisé et à proximité des cultures sucrières, à la résilience de son modèle économique et à la flexibilité de son outil industriel, ainsi qu’à une forte consommation de sucre par habitant (35 kg par an), bien au-dessus des pays voisins. » ●
Année satisfaisante en Afrique du Sud VALEURS
SABMiller Sasol Richemont AngloGold MTN BHP Billiton Standard Bank Anglo American Naspers Impala Platinum
SECTEUR
COURS au 4 janvier 2012 (en dollars)
ÉVOLUTION depuis le début de l'année 2011 (en %)
B OISSONS
35,96
+ 28,29
C HIMIE L UXE M INES T ÉLÉCOMS M INES B ANQUE
47,72 5,16 43,15 16,61 30,37 12,17
+ 17,52 + 9,6 + 9,21 + 6,15 – 3,39 – 3,52
M INES NTIC M INES
37,92 42,86 20,83
– 7,88 – 8,61 – 24,16
EU ÉGARD à la baisse de la plupart des grandes places internationales en 2011, l’évolution des principales capitalisations sud-africaines l’année dernière semble satisfaisante. La seule désillusion importante est venue du spécialiste du platine Impala Platinum, dont la valeur a lourdement chuté. En cause, notamment: le ralentissement économique international et la crise du secteur
automobile. À l’inverse, AngloGold profite de l’envolée des cours de l’or, vu comme une valeur refuge. Numéro un de notre tableau, SABMiller enregistre une très belle progression. Pourtant il n’est que neuvième parmi les 40 premières capitalisations, derrière, notamment, Shoprite, Old Mutual,Tiger Brands… Signe d’une année correcte sur la place sud-africaine. ●
Valeur en vue SABMILLER Les marchés émergents comme moteur BOURSE Johannesburg • CA 2011 14,9 milliards d’euros COURS 291,4 rands (4.1.2012) • OBJECTIF 287 rands
PARMI LES GRANDS BRASSEURS,SABMiller est le plus exposé aux marchés émergents (80 % de ses revenus et 50 % pour la région EuropeMoyen-Orient-Afrique). Nous estimons que 2012 sera une année à deux vitesses en termes de ventes pour lui, avec une croissance décente sur les marchés émergents tandis que l’activité sur les marchés développés devrait connaître des difficultés. L’Amérique latine, l’Afrique et l’Asie devraient alimenter la croissance. En Afrique, nous anticipons une hausse des Rey Wium volumes à un chiffre (élevé), la société augmentant Analyste chez son réseau de distribution enTanzanie et en Ouganda Renaissance Capital et visant de nouveaux marchés tels que le Kenya et le Nigeria. Pour l’ensemble du groupe, nous anticipons une croissance organique en volume de 3,1 % en 2012 et 3,7 % en 2013 (clôture des comptes en mars), en dessous de la moyenne des dix dernières années (4,1 %). L’acquisition de Foster en Australie et la réorganisation des activités en Russie et en Ukraine aboutiront à un ajustement ponctuel des bénéfices. ●
DR
du sucre marqué par une forte volatilité des prix attribuable aux déficits mondiaux sur les deux campagnes antérieures, liés à des conditions climatiques défavorables et au transfert d’une partie de la production des plantes sucrières à la fabrication de biocarburants ». Dans leurs Perspectives agricoles 2011-2020, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) prévoient une chute des prix mondiaux du sucre en 20112012 par rapport aux 759,4 dollars (552,4 euros) la tonne atteints en février 2011, le cours le plus haut depuis trente ans. « Cette déflation est imputable à une augmentation de la production encouragée par la hausse des prix sur les deux dernières années », analyse le cabinet
Marchés financiers
MICHAEL PAURON JEUNE AFRIQUE
N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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Culture & médias
Gamal al-Ghitani
« Je ne fais pas de différence entre les salafistes et les Frères musulmans » De passage dans la capitale française, l’écrivain engagé revient sur la révolution de janvier et s’exprime sur l’avenir politique et culturel de l’Égypte. Sans cacher sa vive inquiétude face à la percée des courants islamistes. Propos recueillis par
S
TONY GAMAL GABRIEL
ouriant, un rien gêné, l’écrivain égyptien Gamal al-Ghitani se laisse prendre en photo avec ses admirateurs. À 66 ans, il a été choisi pour diriger le conseil d’administration de la Grande Bibliothèque du Caire. La consécration d’une brillante carrière littéraire, que personne n’aurait pu prédire au jeune tisserand né dans un petit village du sud de l’Égypte. Et pourtant, encouragé à ses débuts par Naguib Mahfouz, qu’il considère comme « le père de la littérature arabe », il est aujourd’hui l’un des plus grands écrivains égyptiens. Connu pour son œuvre abondante, Gamal alGhitani est aussi un journaliste réputé pour ses diatribes virulentes à l’encontre des courants religieux extrémistes. Longtemps reporter de guerre à la frontière israélienne, il est devenu le rédacteur en chef de la revue littéraire Akhbar al-Adab. Activiste politique, il a été emprisonné sous Nasser, avant d’être interdit de publication sous Sadate. Mais ce soir, dans un petit café de Ménilmontant (Paris), Al-Ghitani est là pour exposer son point de vue sur la transition démocratique égyptienne. Sur un ton courtois, et sans jamais se départir de son calme, l’auteur du Livre des illuminations répond à toutes les questions. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
JEUNE AFRIQUE: On attribue souvent le Printemps arabe à la jeunesse. Quelle a été la contribution de votre génération ? Gamal al-Ghitani : Elle l’a préparé. Je suis allé
deux fois place Al-Tahrir, et les jeunes qui étaient là m’ont accueilli en disant : « Bonjour au créateur de Zayni Barakat! » [Le personnage principal de ce roman du même nom, un ministre des comptes tyrannique, rappelle le président Gamal Abdel Nasser, NDLR.] Cela veut dire qu’ils ont lu nos œuvres et qu’ils sont dans la continuité de notre génération. Si cette continuité n’apparaît pas clairement, c’est sans doute à cause de la coupure causée par les nouvelles technologies. Moi, par exemple, je ne maîtrise pas du tout ce domaine. La littérature a été pionnière dans l’audace, depuis les œuvres de Naguib Mahfouz, qui critiquaient la situation à l’époque d’Abdel Nasser, en passant par Cette odeur-là, de Sonallah Ibrahim, ou encore Zayni Barakat, que j’ai écrit en 1969.
LE CÉLÈBRE ÉCRIVAIN ÉGYPTIEN discute avec des compatriotes au café Miyanis, le 13 décembre dernier, à Paris.
Que pensez-vous de la situation aujourd’hui ?
Après la chute de Moubarak, on a empêché Wael Ghonim, ce jeune révolutionnaire qui travaillait chez Google à Dubaï, de parler place Al-Tahrir pour donner la parole au prédicateur Youssef al-Qaradawi, président de l’Union internationale des oulémas. J’ai dit qu’il essayait de « khomeiniser » la révolution égyptienne. Cet événement résume la situation dans laquelle on est depuis la révolution. Les jeunes auraient dû s’unir et former un parti, mais les divisions se sont accrues. Cela a favorisé l’apparition d’opportunistes, qui tentent de récupérer la révolution. Je pense notamment à Amr Moussa, l’ancien secrétaire général de la Ligue arabe, l’un des serviteurs du régime de Moubarak, qui se présente à l’élection présidentielle et clame qu’il était différent. C’est une arnaque politique ! JEUNE AFRIQUE
CAMILLE MILLERAND POUR J.A.
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Pensez-vous qu’il faille transférer le pouvoir aux civils ?
C’est essentiel. Mais il ne faut pas précipiter cette passation de pouvoir pour ne pas aggraver nos problèmes. Aujourd’hui, la présence du Conseil suprême des forces armées dans la vie politique en fait l’objet de toutes les critiques. Et ce n’est pas quelque chose de positif pour l’institution militaire. Si l’armée se divise, l’État va disparaître, puisque c’est peut-être la seule institution qui n’a pas été mise à mal par la révolution. Et le point important à mes yeux, en ce moment, c’est la préservation de l’État égyptien. Pour la première fois, j’ai l’impression qu’il est menacé de division. Pourquoi ?
La situation au Sinaï est instable. Il y a là un projet d’État bédouin. Je ne fais pas confiance au Hamas parce qu’ils rejoignent les Frères musulmans sur l’idée d’Oumma islamique et ne croient pas à l’idée de nation. On peut à tout moment assister à un transfert de population de Gaza vers la ville d’Al-Arish. Les Frères musulmans pourraient se justifier en disant qu’il s’agit là de nos frères dans l’islam. Avec la montée des courants extrémistes, la situation des Coptes est vraiment difficile. Quand un cheikh salafiste s’exprime en disant que ceux qui ne sont pas contents n’ont JEUNE AFRIQUE
qu’à partir au Canada, je réponds que ce n’est pas possible, qu’il s’en aille lui s’il n’est pas content. Un certain immobilisme pousse des révolutionnaires à douter de la crédibilité du Conseil suprême…
Il y a eu des erreurs de gestion. Pourquoi le Conseil ne récupère-t-il pas les terres qui ont été distribuées par l’ancien régime ? On n’a pas concrétisé l’idée de justice sociale. La différence
Les jeunes nous ont lus et sont dans la continuité de notre génération. La littérature a été pionnière dans l’audace! moyenne entre le salaire minimum et le salaire maximum est de l’ordre de 1 pour 4 000. Moi, je gagne 2 000 livres [255 euros] par mois. Un de mes collègues au sein du groupe Al-Akhbar, dont dépend ma revue, parce qu’il était proche du régime, touchait 2 millions de livres par mois. L’ancien régime est encore là. Des milliardaires connus utilisent leurs ressources pour donner une mauvaise image de la révolution. Une guerre invisible est livrée contre les jeunes. N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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jeune afrique .com
Culture médias
À mon avis, le Conseil manque d’expérience et garde peut-être une certaine fidélité à l’ancien régime. N’oublions pas qu’il n’a pas fait de coup d’État ! Pourtant, il ne faut pas entrer en confrontation avec lui, il faut faire pression sur le Conseil et dialoguer avec ses membres. Craignez-vous l’arrivée des salafistes au pouvoir ?
Le Conseil suprême a pourtant organisé une conférence de presse pour affirmer que le résultat des élections n’était pas représentatif…
Le Conseil croit que notre régime est de type présidentiel et que le Parlement n’a aucun poids. Celui-ci ne pourra pas imposer une motion de censure au gouvernement, par exemple. J’ai écrit un article contre cette décision, en disant que si moi j’allais voter, c’était pour avoir un Parlement qui dispose de cette arme.
Zayni Barakat, Seuil, 400 pages, 7,50 euros Mahfouz par Mahfouz, Sindbad, 168 pages, 14 euros Le Livre des illuminations, Seuil, 874 pages, 35 euros La Mystérieuse Affaire de l’impasse Zaafarani, Actes Sud, 448 pages, 9,50 euros Muses et Égéries, Seuil, 342 pages, 23 euros
Comment expliquez-vous la grande liberté dont jouissait le monde littéraire sous Moubarak ?
Akhbar al-Adab, la première revue à avoir
LA PLACE DES ARTISTES LES CRÉATEURS ont été nombreux à soutenir les révolutionnaires de la place Al-Tahrir. Cela a été le cas d’Alaa el-Aswany, célèbre écrivain qui, pendant le soulèvement populaire, a organisé tous les jours une conférence de presse destinée aux correspondants étrangers. Cela a été le cas aussi d’Ahdaf Soueif, autre grand nom de la littérature égyptienne, qui a défendu la cause révolutionnaire dans le quotidien britannique The Guardian, quand Amr Waked et Khaled Abol Naga, deux artistes engagés, étaient régulièrement à l’antenne d’Al-Jazira pour dénoncer les méfaits du régime de Moubarak. Plusieurs artistes, et non des moindres, ont cependant fait le (mauvais?) choix d’apporter leur soutien au président déchu: à l’instar d’Ahmed el-Sakka, acteur populaire, ou encore du chanteurTamer Hosni, surnommé « le roi de sa génération ». Tous deux ont été violemment chassés de la place Al-Tahrir alors qu’ils essayaient de convaincre les révolutionnaires de rentrer chez eux. ● TONY GAMAL GABRIEL N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
sur notre site
publié L’Immeuble Yacoubian, dépend d’une organisation étatique. Malgré cela, nos textes ont toujours été très critiques. Cet espace de liberté est apparu avec Anouar al-Sadate et a gagné en importance sous Moubarak. Parce que les services de sécurité ne s’intéressent pas à la littérature. Ils visent en priorité le journalisme politique. Et même dans ce domaine, des journaux attaquaient Moubarak de manière très virulente. Je me souviens d’un titre d’Abdel-Halim Qandil, journaliste nassériste et opposant, qui disait : « C’est une honte que tu sois président. » Cette marge de liberté permettait à Moubarak de prouver que son régime était démocratique.
Pourquoi rien n’a changé ?
Je ne fais pas de différence entre les salafistes et les Frères musulmans. Les Frères sont plus importants, plus dangereux, plus intelligents. Ils peuvent arriver au pouvoir. À un moment, les salafistes vont faire alliance avec eux. La vraie question qui se pose, c’est de savoir si nous voulons un État laïc ou un État islamique. L’armée va-t-elle le permettre ? Non. Car si les Frères arrivent, cela va entamer l’influence du Conseil. On ne laissera pas un courant religieux conservateur tirer les fruits de la révolution de janvier. Pour nous, intellectuels, les conséquences seraient terribles. En même temps, les résultats des élections ont une légitimité certaine.
ð Retrouvez Gamal al-Ghitani en vidéo
Existe-t-il une véritable création littéraire dans le monde arabe ou sommes-nous dans l’imitation ?
Il existe un véritable foisonnement créatif depuis le milieu des années 1990. L’Arabie saoudite connaît un mouvement littéraire fort qui raconte la réalité du pays. Il existe aussi une véritable compétition entre les émirats pour le financement de projets culturels. Même le Qatar a lancé un projet génial pour la traduction. Si l’Irak semble absent, nous avons veillé à garder le lien. Depuis l’invasion américaine, sa vie culturelle nous semble lointaine, mais il y a une nouvelle génération d’écrivains dont nous ne connaissons rien. Il est de notre devoir de communiquer avec eux. Cela signifie-t-il que l’Égypte a perdu sa place centrale ?
La révolution de janvier la lui a rendue, mais elle a besoin d’une politique culturelle nouvelle. J’ai espoir que le nouveau ministre de la Culture, Chaker Abdel Hamid, saura apprécier à sa juste valeur le contexte postrévolutionnaire. Le retour d’Al-Azhar est également essentiel pour remettre l’Égypte sur le devant de la scène culturelle. L’institution religieuse, en tant qu’université, peut combattre le courant wahhabite. Quelle empreinte a, selon vous, laissée Naguib Mahfouz sur la littérature arabe ?
Avant Mahfouz, le mot arabe qui signifie « écrivain » désignait le conteur qui, avec son instrument de musique, récitait des poésies dans les cafés populaires. Il était presque considéré comme un mendiant. Naguib Mahfouz a fondé la littérature arabe moderne. Plus encore, il l’a développée. Il a commencé avec le roman historique, puis réaliste, puis symbolique. Nous sommes tous sortis de son école, même ceux qui s’opposent à lui aujourd’hui. Prenez mon œuvre, par exemple. En un sens, je suis en contradiction avec Mahfouz, puisque j’appelle à une réutilisation des formes anciennes de notre patrimoine littéraire. Mais sans lui, je ne serais pas là aujourd’hui. ● JEUNE AFRIQUE
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ARTS PLASTIQUES
Œuvre de salut public
Afin de pousser à la réhabilitation du parc de l’Hermitage, à Casablanca, le marocain Hassan Darsi a réalisé une maquette du jardin. Le Centre Pompidou, à Paris, va accueillir cette création.
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idèle reproduction du parc de l’Hermitage en ruine, « la maquette » est avant tout une œuvre engagée. En reproduisant sur 18 m2 le jardin public de 18 ha de Casablanca, Hassan Darsi a mis son talent au service de la sauvegarde d’un lieu historique. Et il a remporté son pari : en 2008, la municipalité a entrepris les travaux nécessaires à la réhabilitation du parc – dont le coût s’élève à 30 millions de dirhams (2,7 millions d’euros) – par le biais d’une convention signée entre le conseil de la ville, la wilaya et la Fondation MohammedVIpourlaprotectiondel’environnement. Construit entre 1917 et 1927, le parc avait été laissé à l’abandon à la suite des découpages électoraux qui le laissaient à la jonction de plusieurs communes. Le 28 mai dernier, la princesse Lalla Hasna, sœur du roi, a inauguré le jardin presque entièrement rénové. L’œuvre a donc suscité un vaste débat public. « La maquette est une œuvre, mais c’est d’abord un outil », affirme l’artiste de 50 ans, diplômé de l’École supérieure des arts plastiques et visuels de Mons (Belgique). En février 2002, tandis qu’associations et riverains commençaient à se mobiliser, Hassan Darsi réalise sa maquette, conçue comme un puzzle de JEUNE AFRIQUE
LA MAQUETTE a été élaborée à partir de matériaux trouvés sur place.
raconte-t-il.Depuis le lancement d’un programme de mondialisation de ses œuvres sous la houlette de Catherine Grenier, le Centre Pompidou cherche à faire entrer dans ses collections des créations non occidentales. Ainsi, le musée a acquis la maquette grâce à un don de Hicham Daoudi, président de la Compagnie marocaine des œuvres et objets d’art (CMOOA) et organisateur de la foire Marrakech Art Fair. L’entrepreneur marocain s’est engagé à financer des œuvres d’art pour le compte du musée sur trois ans, grâce aux bénéfices de ses activités commerciales et des dons de mécènes locaux. Le 25 janvier prochain, une commission
quatorze pièces. Avec le collectif d’artistes La Source du lion, qu’il a créé en 1995, il y travaille pendant plus d’un an. « Les matériaux que j’ai utilisés proviennent du parc lui-même, explique-t-il. Cette maquette est un constat très minutieux de la réalité. » Et s’il salue aujourd’hui la réussite des travaux, l’artiste regrette néanmoins que la municipalité n’ait pas pris en compte le plan de réaménagement que son association avait proposé. « Il n’y a pas eu de concertation, déploret-il. Le nouveau parc exclut L’artiste a mis son talent au les activités humaines que service de la sauvegarde d’un lieu nous avions suggérées et n’a rénové que les zones de historique. Et a remporté son pari. plantation. » d’acquisition se réunira pour valider défiMÉCÉNAT. La maquette, elle, allie esthénitivement l’entrée de la maquette dans tique et utilité sociale. « C’est l’œuvre d’un la collection du Centre Pompidou. Le artiste dans l’air de son temps qui évoque processus a été lancé il y a un an, après la ruine, élément très présent dans l’art que Michel Gauthier eut présenté devant contemporain. C’est aussi une œuvre le comité des conservateurs l’œuvre de ancrée dans un contexte local », souligne Darsi. « La maquette est devenue une Michel Gauthier, conservateur du Centre nouvelle forme d’expression », expliquePompidou chargé de la scène marocaine. t-il. Dans le paysage artistique actuel, ce C’est à Anvers (Belgique), en 2007, qu’il type de support est encore très peu utilisé. a découvert le travail de Darsi, exposé Pour Hicham Daoudi: « Avec cette œuvre, au M HKA, le musée d’art contemporain Hassan Darsi a marqué l’Histoire, mais de la ville. « Dès mon premier voyage au aussi l’art contemporain au Maroc. » ● Maroc, j’ai voulu rencontrer Hassan », MARIE VILLACÈQUE N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
Culture médias En vue
■ ■ ■ Décevant
■ ■ ■ Pourquoi pas
■ ■ ■ Réussi
■ ■ ■ Excellent
DOCUMENTAIRE
Regards sur l’Afrique éternelle ÊTESVOUS CURIEUX des traditions, des mœurs et des modes de vie des « peuples autochtones africains », Bochimans, Pygmées, Dogons et autres? L’ambition de ce film réalisé par un couple de documentaristes russes est de vous faire découvrir ces hommes qui vivent pour l’essentiel « à l’abri de l’occidentalisation » et « hors du temps ». Beau programme que celui de ces amoureux d’une certaine Afrique qui craignent la disparition des cultures ancestrales et nous proposent des images magnifiques… Mais donnent plus l’impression de faire visiter un musée que de s’intéresser vraiment au sort de ces populations et à l’enjeu qu’il représente pour l’humanité. ● RENAUD DE ROCHEBRUNE
Africa, le sang et la beauté, d’Anastasia et SergeYastreb (sorti à Paris le 4 janvier) ■ ■ ■
ENFANCE
Questions essentielles VOUS ÊTES-VOUS déjà demandé pourquoi il y a tant d’idiots de par le monde ? Ou bien encore pourquoi l’hyène arbore des rayures sur son pelage ? Si c’est le cas, vous pourrez trouver des réponses à ces questions fondamentales en lisant le conte peul et le conte bochiman qui donnent la clé de ces mystères dans le recueil Contes africains que propose l’éditeur Gründ. En tout, vingt-neuf histoires venues de tout le continent – malheureusement accompagnées d’illustrations peu originales. ● NICOLAS MICHEL
Contes africains, illustrés par Joanna Boillat, Gründ, 198 pages, 14,95 euros ■■■ N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
OLIVIER BRAMANTI/LES CAHIERS DESSINÉS
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BEAU LIVRE
Les couleurs du génocide Avec un texte épuré et des images presque abstraites, deux auteurs français reviennent sur le génocide rwandais.
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urquoise, le titre annonce la couleur et dit clairement l’intention des auteurs. À savoir : raconter l’implication française lors du génocide rwandais. Mais ce que proposent le dessinateur Olivier Bramanti et le scénariste Frédéric Debomy est un objet hybride d’une grande originalité. Ce n’est ni une bande dessinée, ni un texte illustré, ni un reportage, ni une fiction. À cheval entre tous ces genres, Turquoise raconte le drame en mots et en images, tout en évitant les noms trop précis et les lignes trop claires. Ainsi, la France est alternativement « le pays des droits de l’homme » et « le pays des téléspectateurs », les mentions « hutu » ou « tutsi » n’apparaissent jamais, et François Mitterrand est « le président ». Ainsi, les peintures d’Olivier Bramanti,
parfois quasi abstraites, suggèrent plus qu’elles ne dévoilent, dominées par le vert, le noir, le brun et le gris. L’ensemble, qui tend à l’épure, revient sur le déroulement de l’horreur, mais s’intéresse aussi au destin d’une rescapée. Direct et simple, cru et violent, Turquoise acquiert à travers elle, femme sans nom, une portée universelle. ● NICOLAS MICHEL
Turquoise, d’Olivier Bramanti et Frédéric Debomy, Les Cahiers dessinés, 98 pages, 23 euros ■■■
PHOTOGRAPHIE
Images et clichés CHAQUE ANNÉE, la remise du prix Pictet s’accompagne d’une commande passée à un photographe, invité à témoigner sur un projet de développement durable soutenu par la banque Pictet & Cie. Commande qui débouche sur la publication d’un livre. Cette année, c’est l’Américain Chris Jordan, qui a travaillé sur le Kenya, et plus particulièrement sur la mise en œuvre du conservatoire écologique de Nakuprat-Gotu. Si quelques images dégagent une vraie force, on regrettera que nombre d’entre elles soient plutôt banales, voire superficielles. ● NICOLAS MICHEL
Ushirikiano, de Chris Jordan, teNeues, 108 pages, 39,90 euros
■■■ JEUNE AFRIQUE
Culture médias CINÉMA
Quand Eastwood raconte Hoover CE BIOPIC SUR HOOVER rapporte chronologiquement les faits et gestes de l’inamovible patron du FBI, entre 1924 et 1972. Bien réalisé et bien joué (Leonardo DiCaprio est excellent dans le rôle-titre), le film permet de suivre le parcours de cet anticommuniste adepte du fichage des citoyens, et de comprendre comment cet homosexuel refoulé a imposé sa marque paranoïaque sur l’Amérique. Bien que Clint Eastwood évite l’hagiographie, qui avait plombé son film sur Mandela (Invictus), comme le portrait à charge, J. Edgar frustrera néanmoins beaucoup de spectateurs. En particulier ceux qui espéraient une lecture politique du comportement d’un homme raciste dont l’influence à Washington, sous une bonne demi-douzaine de présidents, ne sauraitêtresous-estimée.Mêmelesgrands cinéastes ont leurs limites… ● RENAUD DE ROCHEBRUNE
J. Edgar, de Clint Eastwood (sortie à Paris le 11 janvier) ■■■
CINÉMA
Mélodrame social YANN ET NADIA, issus de milieux défavorisés, tombent amoureux. Ils veulent s’en sortir en montant le restaurant de leurs rêves. Comme l’entreprise est au-dessus de leurs moyens, ils s’endettent. De façon peu orthodoxe. La catastrophe, inévitable, conduit à une séparation d’autant plus douloureuse que Nadia doit laisser son fils à la charge de Yann… Ce mélodrame social, hélas plutôt conventionnel, est sauvé par ses acteurs. Guillaume Canet, qui sait ne point trop en faire, mais aussi Leïla Bekhti, qui poursuit son ascension éclair, et Slimane Ketthabi, d’un naturel con confondant dans son rôl de victime non rôle con consentante des erreurs commises par les adultes. ● RENAUD DE ROCHEBRUNE
Une vie mei meilleure, de Cédric Kahn (sorti à Paris le 4 janvier) ■■■ JEUNE AFRIQUE
Lu et approuvé ALAIN MABANCKOU Écrivain franco-congolais
PLAIDOYER POUR LES ROMS
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L’actualité nous a habitués à des E SILENCE ne sera qu’un souvenir, de Laurence Vilaine, images de Roms persécutés et perm’avait été offert par le romançus comme des damnés de laTerre. cier algérien Yahia Belaskri. Nous L’année dernière, la police française avons l’habitude de passer en revue les a chassés du département de la les parutions littéraires dans un café Seine-Saint-Denis en utilisant les du 1 er arrondissement de Paris tramways. Ce qui, toutes proportions lorsque je suis de passage en France. gardées, ne manqua pas de rappeler Je lui fais confiance chaque fois qu’il à beaucoup l’époque funeste de la me tend un livre et insiste pour que déportation des Juifs. je le lise sans tarder – en général, c’est un premier roman. Ce fut le Le silence ne sera qu’un souvenir cas pour le livre de Laurence Vilaine. bouscule les clichés en vogue sur Mikluš, le narrateur de ce roman, ce peuple nomade venu de la nuit est un vieuxTsigane. Le temps pasdes temps. Que sait-on réellement sant, rongé par le remords d’avoir d’eux ? On évoque parfois la mertrop longtemps gardé le silence, il se décide enfin à parler et livre ses confessions à un journaliste lors de la célébration du vingtième anniversaire de la chute du mur de Berlin. C’est décidé, veilleuse musique tsigane, et les Mikluš dira tout pour que perdure violons sont là, bien sûr, ainsi que la mémoire de sa communauté, celle les chants, à travers les personnages des Roms installés sur une rive slode Dilino, du Petit, de l’Idiot, de vaque du Danube. Sa voix, terrible l’enfant auquel Mikluš aura caché et profonde, ne vous la tragédie de sa naislâche plus et vous sance. Et puis il y a aussi emporte jusqu’au terme la voix d’oiseau magique d’un récit rempli de soude Chnepki, qui somvenirs effroyables et brera dans la folie, ou pourtant plein encore Lubko, le vagad’humanité. bond rescapé des camps Le silence ne sera Laurence Vilaine, grâce à son violon et que Le choix de Goldie qu’un souvenir Roopa Farooki Laurence Vilaine journaliste de formale drame n’épargnera tion, aurait pu livrer une pas. En décrivant ces destins enchevêtrés et œuvre faussement fictionnelle et saturée par liés par un inexorable Le sil silence ne sera qu’un une documentation qui malheur, l’auteure nous souvenir, aurait éclipsé les perraconte la douloureuse de Laurence sonnages. Ce n’est pas fatalité pesant sur les Vilaine, Gaïa, le cas. Elle a au contraire Tsiganes du monde 172 pages, le regard des vrais voyaentier et signe au pas17 euros geurs qui, par leurs sage une brillante entrée témoignages, nous permettent en littérature, en ces temps où la d’aller à la rencontre de destins fiction semble avoir tourné le dos rayonnants et inoubliables. à l’humanisme. ●
L’auteure raconte la douloureuse fatalité pesant sur les Tsiganes.
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ANNONCES CLASSÉES
Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre -Tél. : 01 44 30 18 76 - Fax : 01 44 30 18 77 - Email. : f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique - 57 bis, rue d’Auteuil 75016 Paris - France RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO - MINISTÈRE DE L’ÉNERGIE - SOCIÉTÉ NATIONALE D’ÉLECTRICITÉ (SNEL)
APPEL À LA MANIFESTATION D’INTÉRÊT
N° Avis : AMI/321/PMEDE/BCECO/DG/DPM/GK/2011/SC Pays : République Démocratique du Congo (RDC) Source de financement : Don IDA H 2960 – DRC Nom du Projet : Projet de Développement des Marchés d’Electricité pour la Consommation Domestique et à l’Export (PMEDE) Services de consultant : Assistance technique à la Société Nationale d’Electricité (SNEL) pour le dragage du canal d’amenée d’Inga Date de publication : 29 décembre 2011 (Dg Market)
Manifestation d’intérêt
Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo (RDC) a obtenu un financement de l’Association Internationale de Développement (IDA) en vue de financer le Projet de développement des marchés d’électricité pour la consommation domestique et à l’export (PMEDE), et a l’intention d’utiliser une partie de ce financement pour effectuer les paiements autorisés au titre d’un contrat relatif aux services de Consultant chargé de l’Assistance technique à la SNEL pour le dragage du canal d’amenée d’Inga. Le Consultant à recruter devra être une firme spécialisée ou un bureau d’études disposant d’une expérience avérée dans les prestations d’expertise de dragues et d’études sur le dragage de canal d’amenée en général, et d’assistance technique aux entreprises d’exploitation des centrales hydroélectriques pour des missions similaires à celle du présent marché. Des expériences en Afrique ou dans un pays similaire à la RD Congo seraient un avantage. Les activités de l’entreprise se dérouleront en République démocratique du Congo, à Kinshasa et sur le site d’Inga, et à son siège. La Société Nationale d’Electricité (SNEL), par l’entremise du Bureau Central de Coordination (BCECO), invite les candidats admissibles à manifester leur intérêt à fournir les services décrits ci-dessus. Ceux-ci doivent fournir les informations indiquant leurs capacités techniques à exécuter lesdits services, notamment un dossier comprenant les principales informations sur : • L’expérience générale en tant que firme ou cabinet d’assistance technique aux sociétés d’exploitation des centrales hydroélectriques ; • Les références pertinentes des missions similaires auprès des entreprises d’envergure de la Société Nationale d’Electricité (SNEL) ou plus ; • Les ressources humaines disponibles ayant l’expérience et la formation exigées pour le
personnel clé attendu ; • La connaissance du milieu et la maîtrise en français. Un Consultant sera sélectionné en accord avec les procédures définies dans les Directives « Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque Mondiale » (Edition mai 2004, révisée en octobre 2006). Les consultants intéressés peuvent consulter les Termes de Référence de la mission et obtenir des informations supplémentaires à l’adresse ci-dessous, de lundi à vendredi aux heures suivantes : de 9 h 00 à 16 h 00 (TU+1). Les manifestations d’intérêt rédigées en langue française doivent parvenir, par courrier ou par courriel, à l’adresse ci-dessous au plus tard le lundi 16 janvier 2012 et porter clairement la mention « AMI/321/PMEDE/BCECO/DG/DPM/GK/2011/SC – Recrutement du Cabinet chargé de l’Assistance technique à la SNEL pour le dragage du canal d’amenée d’Inga ». BUREAU CENTRAL DE COORDINATION (BCECO) Pour le compte de la Société Nationale d’Electricité (SNEL) A l’attention de Monsieur MATONDO MBUNGU, Directeur Général a.i Avenue Colonel Mondjiba, n°372 - Concession UTEXAFRICA KINSHASA / NGALIEMA - RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO TEL. (243) 815 136 729 (243) 819 999 180 Email : bceco@bceco.cd avec copie à dpm@bceco.cd; bcecobceco@yahoo.fr ; dpmbceco@yahoo.fr MATONDO MBUNGU Directeur Général a.i du BCECO
COMMISSION SOUS RÉGIONALE DES PÊCHES (CSRP) --------------SECRÉTARIAT PERMANENT
--------------NOM DU PROJET : « APPUI À LA COMMISSION SOUS RÉGIONALE DES PÊCHES POUR LE DÉVELOPPEMENT D’INITIATIVES DE COGESTION ET POUR L’INTEGRATION DES AIRES MARINES PROTÉGÉES DANS L’AMÉNAGEMENT DES PÊCHES EN AFRIQUE DE L’OUEST » Volet 3.4 « Fonctionnement du projet et appui à la maîtrise d’ouvrage »
Financement AFD Convention N°: CZZ3056 01 B ÉVALUATION À MI-PARCOURS DU PROJET « APPUI À LA COMMISSION SOUS RÉGIONALE DES PÊCHES POUR LE DÉVELOPPEMENT D’INITIATIVES DE COGESTION ET L'INTÉGRATION DES AMP DANS L'AMÉNAGEMENT DES PÊCHES EN AFRIQUE DE L'OUEST »
AVIS DE MANIFESTATION D’INTÉRÊT (AMI)
La Commission Sous Régionale des Pêches (CSRP) est une organisation intergouvernementale créée le 29 Mars 1985 par voie de convention. Son siège est à Dakar, Sénégal, et les sept Etats ci-après sont membres de la CSRP : le Cap Vert, la Gambie, la Guinée, la Guinée Bissau, la Mauritanie, le Sénégal et la Sierra Leone. La CSRP est une institution de coopération halieutique au service de ses Etats membres. En plus des cotisations des Etats membres, la CSRP est financée par plusieurs bailleurs dont l’AFD. La CSRP est articulée autour de trois organes constitutifs que sont la Conférence des Ministres (organe décisionnel), le Comité de Coordination (organe technique consultatif) et le Secrétariat Permanent (organe exécutif des décisions de la conférence des Ministres). Le 12 février 2008, l’Agence Française de Développement (AFD) a signé une Convention de Financement d’une subvention de 5.000.000 euros avec la Commission Sous Régionale des Pêches (CSRP) pour la mise en œuvre du projet « Appui à la Commission Sous Régionale des Pêches pour le développement d’initiatives de cogestion et l'intégration des AMP dans l'aménagement des pêches en Afrique de l'Ouest », dédié à l’aménagement durable des pêches dans la sous-région. Ce projet appuiera notamment la démarche d’initiatives de cogestion entreprises au niveau des pays de la sous-région, ainsi que la production de connaissances en réponse aux besoins de l’aménagement et l’élaboration des systèmes de suivi et d’évaluation de l’efficacité des AMP comme outils pour la gestion des pêches. La convention citée ci-dessus prévoit une évaluation à mi-parcours qui vise à produire des connaissances sur les actions publiques, notamment quant à leurs effets, dans le double but de permettre aux citoyens d’en apprécier la valeur et d’aider les décideurs à en améliorer la N° 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
pertinence, l’efficacité, l’efficience, la cohérence et les impacts. La CSRP compte sélectionner ; à partir d’une liste restreinte, un consultant qui sera chargé d’effectuer ladite évaluation. En vue de confectionner cette liste restreinte, la CSRP invite les candidats intéressés à déposer le 06 février 2012 à 10 H 00 au plus tard, à son siège Amitié 3, villa 4430 B.P 25 485 Dakar/Sénégal. Email : spcsrp@gmail.com Téléphone : 00 221 33 864 04 75. Télécopie : 00 221 33 864 04 77, site www.spcsrp.org, un dossier de candidature comprenant : - une présentation détaillée et complète du candidat (notée sur 10 points) ; - Les références du candidat dans le secteur des pêches en Afrique de l’Ouest (notées sur 20 points) ; - Les références du candidat en matière d’évaluation de projets de renforcement des capacités institutionnelles (notées sur 20 points) ; - Les références du candidat en matière d’évaluation de projets de renforcement des capacités institutionnelles des organisations régionales (notées sur 20 points) ; - Les moyens humains du candidat (cv à joindre) composés d’un expert international dans l’évaluation de projets de renforcement des capacités institutionnelles (noté sur 15 points) et un expert international dans l’aménagement des pêches (noté sur 15 points). Les candidats retenus dans la liste restreinte recevront une Demande de proposition. Le SECRÉTAIRE PERMANENT Monsieur KANE CIRE AMADOU JEUNE AFRIQUE
RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE, SECONDAIRE ET PROFESSIONNEL « EPSP »
Projet d’Appui au Redressement du Secteur de l’Education PARSE Unité de Coordination et de Gestion du Projet « U.C.G.P. » APPEL À MANIFESTATION D’INTÉRÊT N°008/2011/PARSE/SC Sélection d’un consultant international pour appuyer la mise en place des mécanismes de Suivi des Dépenses à Destination (enquêtes « PETS ») dans le secteur de l’éducation en RDC Cette sollicitation de manifestations d’intérêt fait suite à l’avis général de passation des marchés de ce projet publié dans le Development Business No 728 du 14 mai 2008. 1. La République Démocratique du Congo (RDC) a signé un Accord de Don pour un montant de 150 millions de dollars américains avec l’Association Internationale de Développement (IDA) en vue de financer le Projet d’Appui au Redressement du Secteur de l’Éducation (PARSE) et se propose d’utiliser une partie de ces fonds pour régler des fournitures, travaux et services devant être acquis dans le cadre de ce projet. Le projet est mis en œuvre sous la responsabilité de l’UCGP. Le Don H303-DRC est entré en vigueur le 11 janvier 2008 et prendra fin en décembre 2013. 2. Le Don finance en particulier des activités suivantes : - Composante 1 : Faciliter l’accès et l’égalité des chances au niveau primaire (108.47 millions USD) ; - Composante 2 : Améliorer la qualité de l’enseignement primaire (24.90 millions de USD) ; - Composante 3 : Renforcement de la capacité institutionnelle et financière du secteur Education (7.15 millions de USD) - Composante 4 : Gestion du Projet (9.48 millions de USD)
4. Les prestations seront rendues principalement à Kinshasa et couvriront une période de trente (30) jours au maximum englobant la période de rédaction du rapport. 5. L’UCGP invite ainsi les candidats admissibles à manifester leur intérêt à fournir les services décrits ci-dessus. Le Consultant devra présenter au moins le profil suivant : - Etre titulaire d’un diplôme universitaire de niveau supérieur (BAC+5, niveau licence et plus) en Economie, Statistique, Sciences sociales, Gestion de projets, Administration publique.
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6. Les informations et les pièces fournies doivent être complètes et précises car l’évaluation des dossiers de manifestation sera basée sur ces documents. 7. Les principaux critères suivants seront utilisés pour l’évaluation des manifestations d’intérêt : • Formation du Consultant ; • Expérience pertinente du Consultant applicable à la mission ; • Connaissance du milieu (environnement comparable à celui de la RDC). 8. Les consultants seront sélectionnés en accord avec les procédures définies dans les Directives de l’IDA : Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque Mondiale (mai 2004, révisées en octobre 2006 et en janvier 2011). 9. Les manifestations d’intérêt, rédigées en langue française, doivent parvenir par courrier aux adresses ci-dessous au plus tard le 18 janvier 2012, à 17 heure locale de Kinshasa et porter clairement la mention « AMI N° 008/2011/PARSE/SC – Sélection du Consultant chargé d’appuyer la mise en place des mécanismes de Suivi des Dépenses à Destination (enquêtes « PETS ») dans le secteur de l’éducation en RDC» 10. Les consultants intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires sur les Termes de Référence de la mission à l’adresse mentionnée ci-dessous : Unité de Coordination et de Gestion du Projet « U.C.G.P. » À l’attention de Monsieur Simon KAYOYO, Coordonnateur National Croisement des avenues Cliniques – Batetela (derrière le Cabinet du Ministère de l’EPSP) Téléphone : 00 243 999991852, 00243 811387062 E-Mail : ucgpparse@yahoo.fr Kinshasa/Gombe République Démocratique du Congo. N° 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
Manifestation d’intérêt
3. Une partie de cette somme servira à effectuer des paiements au titre du contrat de Consultant chargé d’appuyer la mise en place des mécanismes de Suivi des Dépenses à Destination (enquêtes « PETS ») dans le secteur de l’éducation en RDC. Les objectifs de la mission du Consultant consistent à : (i) renforcer les capacités des Experts nationaux impliqués dans la mise en œuvre du projet PARSE en ce qui concerne la compréhension du concept « PETS » et son exploitation dans le contexte de la RDC. Il s’agit principalement des experts des ministères de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Professionnel (EPSP), de l’Enseignement Supérieur et Universitaire (ESU), des Affaires Sociales (MAS), des Finances et du Budget ; ainsi que ceux de l’Unité de Coordination et de Gestion du Projet (UCGP) ; (ii) élaborer les TDR’s devant expliciter les objectifs, les résultats, la méthodologie, les outils et le profil du consultant (firme) à recruter pour conduire l’activité pilote « PETS » sur le terrain. (iii) proposer la feuille de route pour la mise en place d’un mécanisme « PETS » au sein d’une institution pérenne de l’administration publique de la RDC.
- Avoir une expérience avérée d’au moins dix (10) ans dans le domaine de l’analyse, du montage, de la gestion, du partenariat secteur publicsociété civile et de la coordination des programmes/projets institutionnels. - Avoir réalisé une mission similaire dans un environnement comparable à celui de la RDC. - Etre familier dans les relations professionnelles avec les structures tant étatiques que non-étatiques - Avoir une grande capacité à transférer les compétences de manière formelle et informelle Seront considérés comme atouts : - Avoir déjà travaillé en RDC ; - Avoir la connaissance du contexte congolais (étendue du territoire, pays post conflit, engagée dans les réformes institutionnelles et financières etc) ; - Avoir déjà réalisé des missions similaires dans un projet financé par la Banque Mondiale et/ou d’autres bailleurs de fonds - Maîtrise de la langue anglaise
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Annonces classées RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO - MINISTÈRE DE L’ÉNERGIE CELLULE D’ÉXÉCUTION DES PROJETS DE LA RÉGIE DE DISTRIBUTION D’EAU (REGIDESO) PROJET D’ALIMENTATION EN EAU POTABLE EN MILIEU URBAIN (PEMU)
AVIS À MANIFESTATIONS D'INTÉRÊT RECRUTEMENT D’UN EXPERT INTERNATIONAL EN PASSATION DES MARCHÉS 1. Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo a obtenu un don de la Banque Mondiale en diverses monnaies pour financer le Projet d’Alimentation en Eau Potable en Milieu Urbain (PEMU) et a l’intention d’utiliser une partie des sommes accordées pour financer les services d’un Expert International qui sera chargé de la Passation des Marchés au sein de la Cellule d’Exécution des Projets de la Régie de Distribution d’Eau (CEP-O/REGIDESO). 2. Durée de la mission : La mission de l’Expert International en passation des marchés s'étendra sur une durée d’une année renouvelable sur la base des performances. 3. La CEP-O invite les Consultants individuels à présenter leur candidature en vue de fournir les prestations prévues. Les candidats éligibles intéressés doivent produire les informations sur leur capacité et expérience démontrant qu’ils sont qualifiés pour les prestations (documentation, référence des prestations similaires, expérience dans des missions comparables, etc.). 4. Les Consultants intéressés peuvent consulter les Termes de Référence et obtenir des informations supplémentaires à l’adresse mentionnée ci-dessous aux heures d’ouverture de bureaux suivantes : de 9 heures à 15 heures, heure locale. 5. Les dossiers de manifestations d’intérêt devront être déposées à l’adresse mentionnée ci-dessous au plus tard le 25/01/2012 à 11 heures (heure locale) et porter expressément la mention « Expert International en Passation des Marchés» : Cellule d’Exécution des Projets, CEP-O/REGIDESO, C/°Centre de Formation de la REGIDESO, 22007, Route de Matadi, Binza – Ozone Kinshasa / Ngaliema - B.P. 12599 Kinshasa I - République Démocratique du Congo Tél. : (+243) 81 504 76 91, (+243) 9999 20 948 - E-mail : cepo@regidesordc.com 6. Un consultant individuel sera recruté conformément aux dispositions des Directives de la Banque Mondiale sur la sélection et l’emploi des Consultants de mai 2004, révisées en octobre 2006, et mai 2010. BONGUNGU LOEND’a NAMBA JELO Coordonnateur National
Manifestation d’intérêt
RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO - MINISTÈRE DES INFRASTRUCTURES, TRAVAUX PUBLICS ET RECONSTRUCTION
Projet de Réouverture et d’Entretien des Routes Hautement Prioritaires (PRO-ROUTES) SOLLICITATION DE MANIFESTATION D’INTÉRÊT Service de Consultant : Consultant chargé de la mise en place du système des chantiers pédagogiques. N° Avis: AMI N° 019/CI/PRO-ROUTES/2011 - Date de l’Avis : le 06 janvier 2012
1. Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo a obtenu des dons initiaux de l’Association Internationale de Développement et de DFID de 123 millions de USD qui viennent d’être augmentés par une enveloppe supplémentaire des deux bailleurs équivalent à 125,2 millions USD pour financer le Projet Pro-Routes dont l’objectif global est de contribuer à la réduction de la pauvreté grâce au rétablissement et à la préservation durable des infrastructures routières permettant l’accès des populations aux marchés et aux services sociaux et administratifs nécessaires à la relance socio-économique et à la réintégration du pays. Il a l’intention d’utiliser une partie du montant de ces dons pour effectuer les paiements au titre du Contrat de services le recrutement d’un Consultant-Firme chargé de la mise en place du système des chantiers pédagogiques. 2. Le Consultant visé ci-dessus devra fournir les services suivants : (i) Formation de formateurs du groupe d’intervention (ii) Assistance dans la réalisation des chantiers pédagogiques (iii) Support opérationnel La durée totale des prestations est estimée à 350 jours répartis sur la période 2012-2014. 3. Pour répondre aux critères de sélection, le Consultant devra : a. prouver qu’il possède des capacités professionnelles et une expérience avérée pour la mise en place d’un système des chantiers pédagogiques dans le cadre du Plan de renforcement des capacités des PME du secteur de la construction routière. Une déclaration prouvant que la firme a une telle expérience, en citant les missions déjà réalisées, ces cinq (5) dernières années et qui lui permettent de remplir ces critères (nature de la mission, pays, dates, administration responsable, bailleurs de fonds etc.) sera présentée ; b. avoir réalisé au moins 3 chantiers pédagogiques au cours des cinq (5) dernières années, de préférence en Afrique, au Sud Sahara ; c. avoir assuré un accompagnement opérationnel réussi pour une mission similaire (un atout) ; d. être en mesure de mobiliser des experts jouissant d’une très bonne expérience dans les services attendus tant pour les prestations à dispenser que pour la validation des formateurs devant constituer le Groupe d’intervention ; N° 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
4. La Cellule Infrastructures invite les Candidats admissibles, à manifester leur intérêt à fournir les services précités. Les Candidats potentiels intéressés doivent fournir les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exécuter ces services (brochures, références concernant l’exécution des contrats analogues, expériences dans des conditions semblables, disponibilité des connaissances nécessaires parmi le personnel permanent ou ponctuel, une lettre de motivation-2 pages maximum- expliquant les motivations profondes d’intérêts pour le présent projet, les expériences spécifiques pertinentes et similaires à prendre en compte pour l’examen des expressions d’intérêts en vue de la constitution de la liste restreinte, etc.). Ils doivent fournir les éléments de justification des expériences spécifiques exigées au point 3.a ci-dessus. 5. Un Consultant sera sélectionné, suivant la méthode de « Sélection basée sur la Qualité Technique et le Coût », en accord avec les procédures définies dans les Directives : « Sélection et Emploi des Consultants par les emprunteurs de la Banque mondiale », édition Mai 2004, révisées en Octobre 2006 et Mai 2010. 6. Les Consultants intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence à la CI à l’adresse ci-dessous, les jours ouvrables de lundi à vendredi de 9h00 à 16h00, heures locales. Les termes de référence complets sont disponibles sur le site Internet de la Cellule Infrastructures www.celluleinfra.org. 7. Le démarrage de la mission est prévu à partir de juin 2012. Les Manifestations d’Intérêts, rédigées en langue française, doivent parvenir par courrier ou par e-mail à l’adresse ci-dessous au plus tard le 23 janvier 2012 à 15 heures précises locales (heure de Kinshasa) et porter clairement la mention: « AMI N°019/CI/PROROUTES/2011 - RECRUTEMENT D’UN CONSULTANT CHARGE DE LA MISE EN PLACE DU SYSTEME DES CHANTIERS PEDAGOGIQUES ». Cellule Infrastructures du Ministère des Infrastructures, Travaux Publics et Reconstruction Cellule Infrastructures - 70A, Avenue Roi Baudouin, Kinshasa/Gombe République Démocratique du Congo - Téléphone : (+243) 81.037.64.94 E-mail : celluleinfra@vodanet.cd - Site web : www.celluleinfra.org Pour le Coordonnateur en congé, Théophile NTELA LUNGUMBA Coordonnateur - adjoint
JEUNE AFRIQUE
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RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO - MINISTÈRE DES INFRASTRUCTURES, TRAVAUX PUBLICS ET RECONSTRUCTION
Projet de Réouverture et d’Entretien des Routes Hautement Prioritaires « PRO-ROUTES »
SOLLICITATION DE MANIFESTATION D’INTÉRÊT Service de Consultant : CONTRÔLE ET SUPERVISION DES TRAVAUX DE GESTION DE L’ENTRETIEN PAR NIVEAU DE SERVICE (GENIS) SUR LA ROUTE KISANGANI-NIANIA-BENI (741 KM) ET DE RÉHABILITATION/RECONSTRUCTION DE ONZE (11) PONTS A TABLIERS MÉTALLIQUES MODULAIRES DE 20 ET 240 MÈTRES SUR L’ITINERAIRE BANALIA-KISANGANI-BENI N°Avis: AMI N°015/CI/PRO-ROUTES/2011- Date de l’Avis: 06 janvier 2012
AVIATION GÉNÉRALE Pièces et Service • Service première classe, partout en Afrique. Pro-Export • Travail avec les clients africains depuis plus de 12 ans • Pièces de rechange, Support Technique; Piston et Turbine • Pratt & Whitney Canada, Dehavilland et Bombardier • Cessna, Piper, Beechcraft, Lycoming, Continental • Échange standard pour Hartzell, MacCauley, Dowty • Achat et vente d’avions. Pilote convoyeur. 5900 Route de l’Aéroport, St-Hubert, Québec, CANADA www.aviationzenith.com Transport Canada # 24-11 Tel : 001.450.926.9007 Email : avion@aviationzenith.com JEUNE AFRIQUE
(b) la maîtrise d’oeuvre et la gestion du contrat passé avec l'Entreprise titulaire du marché des travaux, 3. La Cellule Infrastructures invite les candidats admissibles, firme ou groupement de bureaux à manifester leur intérêt à fournir les services précités. Les candidats potentiels intéressés doivent fournir les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exécuter ces services (brochures, références concernant l’exécution des contrats analogues, expériences dans des conditions semblables, disponibilité des connaissances nécessaires parmi le personnel permanent ou ponctuel, une lettre de motivation-2 pages maximum- expliquant les motivations profondes d’intérêts pour le présent projet, les qualifications et expériences spécifiques pertinentes et similaires à prendre en compte pour l’examen des expressions d’intérêts en vue de la constitution de la liste restreinte, etc.). Ils doivent fournir les éléments de justification des expériences spécifiques exigées au point 2.c cidessus. 4. Un Consultant sera sélectionné, en accord avec les procédures définies dans les Directives: « Sélection et Emploi des Consultants par les emprunteurs de la Banque mondiale », édition Mai 2004, révisée en Octobre 2006 et Mai 2010. 5. Les Consultants intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence à la CI à l’adresse ci-dessous, les jours ouvrables de lundi à vendredi de 9 h 00 à 16 h 00, heures locales. Les termes de référence complets sont disponibles sur le site de la Cellule Infrastructures « www.celluleinfra.org ». 6. Le démarrage de la mission est prévu à partir du mois de juin 2012. Les Manifestations d’Intérêts, rédigées en langue française, doivent parvenir par courrier ou par e-mail à l’adresse ci-dessous au plus tard le 23 janvier 2012 à 14 h 00’ (heure locale) et porter clairement la mention: AMI N°015/CI/PRO-ROUTES/2011–RECRUTEMENT DU CONSULTANT POUR LA RÉALISATION DU CONTROLE ET SUPERVISION DES TRAVAUX DE GESTION DE L’ENTRETIEN PAR NIVEAU DE SERVICE (GENIS) SUR LA ROUTE KISANGANI-NIANIA-BENI (741 KM) ET DE RÉHABILITATION/RECONSTRUCTION DE ONZE (11) PONTS A TABLIERS MÉTALLIQUES MODULAIRES DE 20 ET 240 MÈTRES SUR L’ITINERAIRE BANALIA-KISANGANI-BENI. Cellule Infrastructures du Ministère des Infrastructures, Travaux Publics et Reconstruction Cellule Infrastructures - 70A, Avenue Roi Baudouin N°70A, Kinshasa/Gombe - République Démocratique du Congo Téléphone : +243.993.152.233 - E-mail : celluleinfra@vodanet.cd Site web : www.celluleinfra.org Pour le Coordonnateur en congé, Théophile NTELA LUNGUMBA Coordonnateur - Adjoint
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N° 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
Manifestation d’intérêt - Divers
1. Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo a obtenu des dons initiaux de l’Association Internationale de Développement et de DFID de 123 millions de USD qui viennent d’être augmentés par une enveloppe supplémentaire des deux bailleurs équivalent à 126 millions USD pour financer le Projet Pro-Routes dont l’objectif global est de contribuer à la réduction de la pauvreté grâce au rétablissement et à la préservation durable des infrastructures routières permettant l’accès des populations aux marchés et aux services sociaux et administratifs nécessaires à la relance socio-économique et à la réintégration du pays. Il a l’intention d’utiliser une partie du montant de ces dons pour effectuer les paiements au titre du contrat de services d’une Firme Internationale, pour le Contrôle et la Supervision des Travaux de Gestion de l’Entretien par Niveau de Service (GENiS) sur la route Kisangani-Niania-Beni (741 km) et de réhabilitation/reconstruction de onze (11) ponts à tabliers métalliques modulaires de 20 et 240 mètres sur l’itinéraire Banalia-Kisangani-Beni. 2. Pour répondre aux critères de sélection, la Firme de renommée Internationale doit : a. prouver qu’elle possède des capacités professionnelles et une expérience avérée dans le domaine de l’ingénierie routière. Une déclaration prouvant que la firme a une telle expérience, en citant les missions déjà réalisées qui lui permettent de remplir ces critères (nature de la mission, pays, dates, administration responsable, bailleurs de fonds etc.) sera présentée ; b. soumettre les bilans certifiés des cinq (5) dernières années qui établissent qu’elle est dans une situation financière saine ; c. avoir réalisé au cours des cinq (5) dernières années :(i) au moins deux (2) opérations de Contrôle et de Surveillance des travaux de réouverture, d’entretien ou de réhabilitation de route en terre en utilisant l’approche par traitement de points critiques et (ii) au moins deux (2) opérations de contrôle et de surveillance des travaux de réhabilitation/reconstruction de ponts à tabliers métalliques modulaires de portées équivalentes à celle prévues ; d. être en mesure de mobiliser des Experts jouissant d’une très bonne expérience dans le Contrôle et la Supervision (i) des travaux de réhabilitation ou d’entretien par niveau de service des routes en terre dans un environnement similaire, (ii) des travaux de réhabilitation/reconstruction de ponts à tabliers métalliques modulaires et (iii) des projets financés par la Banque Mondiale. La durée totale du Contrôle et de Surveillance des travaux est estimée à Quarante neuf (49) mois. La firme sélectionnée devra fournir les services suivants : (a) le contrôle et la surveillance des prestations de l’entreprise et, en particulier, en collaboration avec l’entrepreneur, le contrôle contradictoire des niveaux de service et des travaux de réhabilitation/reconstruction des ponts,
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AVIS D’APPEL D’OFFRE INTERNATIONAL VALORISATION DES ACTIONS DU FONDS DE GARANTIE DES INVESTISSEMENTS PRIVÉS EN AFRIQUE - GARI SA RECRUTEMENT D’UN CONSULTANT SPÉCIALISÉ Date de publication : 10 janvier 2012
1. Les actionnaires du Fonds Africain de Garantie de Garantie des Investissements Privés en Afrique de l’Ouest (Fonds GARI) réunis à Paris le 29 avril 2011, puis à Lomé le 06 mai 2011, et enfin le 30 mai 2011, ont validé le principe de cession des parts détenues par certains partenaires dans le capital du Fonds GARI. Mandat a été donné à la Direction Générale à l’effet de (i) valoriser le Fonds GARI et (ii) rechercher des repreneurs. 2. Les actionnaires qui souhaitent se retirer ont toutefois manifesté la nécessité de mener le processus à son terme dans la transparence et l’objectivité pour connaître la valeur des actions, cet exercice devant être mené par un Consultant externe indépendant de référence.
Appel d’offres
3. Le Fonds GARI, maître d’ouvrage de ce projet, sollicite des propositions en vue de la fourniture des services d’un consultant spécialisé pour une prestation scindée en deux parties : (i) établir la valeur du Fonds GARI et de ses actions et (ii) apporter l’assistance technique et juridique à la Direction Générale du Fonds GARI pour la recherche et la sélection d’investisseurs de référence. Les termes de référence contiennent, à toutes fins utiles, de plus amples renseignements sur les services en question. 4. Objectifs et description de la mission : Fournir au Fonds GARI une prestation technique spécialisée destinée à l’appuyer dans ce cadre. Cette prestation spécialisée comportera deux composantes : - une première phase destinée à établir la valeur du Fonds GARI et de ses actions, sur la base de la méthode la plus adaptée au contexte d’activité du Fonds GARI, Etablissement Financier de Garantie et des objectifs de l’opération de cession des parts des actionnaires sortants, - une seconde phase destinée à apporter l’assistance juridique et financière, mais également commerciale et technique, à la Direction Générale pour la recherche et la sélection d’actionnaires de référence. Cette phase comportera l’appui au Fonds GARI pour l’opération de consultation et de recherche, avec i) l’élaboration du DAO et de son cahier des charges, la publication de l’offre sur les supports adaptés, tant localement qu’au niveau régional et international, l’analyse des offres, la proposition d’attribution et l’élaboration du projet de contrat de cession des actions, ii) la mise en place des démarches de marketing et de prospection nécessaires pour aboutir à la conclusion du contrat de rachat des actions par les candidats repreneurs de référence intéressés par l’opération. Cette mission s’adresse à un cabinet d’Audit Comptable et Financier à signature internationale, expérimenté dans les opérations de valorisation de banques et établissements financiers. Ce cabinet devra également disposer de compétences fortes en matière de conseil juridique et devra être expérimenté dans les opérations de privatisation, d’investissements ou de fusion acquisition. Il devra disposer d’un bon relationnel, notamment dans le milieu bancaire et financier, en particulier sur le continent africain et dans la sous-région de l’UEMOA. Il devra pouvoir justifier de la réalisation de missions équivalentes auprès d’institutions financières, notamment bancaires et d’organismes spécialisés en Garantie exécutées à un niveau régional (CEDEAO, UEMOA) ou international. La connaissance de la région ouest africaine, particulièrement de l’UEMOA, est un atout majeur. 5. Assistance marketing dans la recherche d’investisseurs de référence. Le consultant conseillera le Fonds GARI dans le ciblage de son appel à manifestation d’intérêt et la définition d’un profil pour les investisseurs recherchés. La taille du marché au sein de la CEDEAO et le positionnement vers le secteur privé et le secteur public marchand seront pris en compte de façon spécifique pour établir ce ciblage. Sur la base du profil défini, le consultant dressera la liste des Institutions auprès desquelles il apparaît pertinent de lancer un appel à manifestation d’intérêt. Le consultant préparera dans ce cadre un plan marketing pour cette opération et élaborera un argumentaire commercial à destination des investisseurs potentiels ; ce plan et cet argumentaire seront soumis au Fonds GARI pour validation. Le plan marketing devra prévoir au minimum un contact téléphonique auprès de chaque investisseur à qui un appel à manifestation d’intérêt a été lancé et un programme de rendez vous dans les pays de la zone auprès des investisseurs que le consultant aura sélectionnés, à l’issue de ces échanges téléphoniques. Dans ce cadre, le
N° 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
consultant contactera donc personnellement par téléphone, les responsables des institutions auxquelles un dossier d’appel à candidature aura été remis ; le consultant organisera une mission dans les pays pour rencontrer les soumissionnaires intéressés dont l’entretien téléphonique a révélé un intérêt significatif et prometteur. Les rendez vous seront établis à un niveau hiérarchique élevé (Direction Générale et/ou le département habilité à traiter des opérations d’acquisition). Les entretiens auront pour objectif d’apporter une information plus complète, de répondre aux questions posées, de susciter leur intérêt et de les inciter à le manifester. Le consultant assurera un suivi des échanges avec les investisseurs contactés et rencontrés ; il rédigera un compte rendu des entretiens qu’il aura eus auprès de chacun d’eux ; il validera auprès du Fonds GARI le contenu des réponses qui seront apportées. Le consultant pourra être accompagné lors de sa mission dans les différents pays par un dirigeant du Fonds GARI. Après le lancement de l’appel d’offre auprès des candidats ayant manifesté leur intérêt, le consultant préparera les réponses aux questions posées par les candidats, les validera auprès du Fonds GARI et les diffusera à l’ensemble des candidats. Le consultant conseillera le Fonds GARI dans la sélection de l’investisseur au vu des différentes soumissions et des informations qu’il aura collectées au cours de la phase d’approche en amont. 6. Les propositions doivent demeurer valides soixante (60) jours après la date de soumission. Le dossier d’appel d’offre sera adressé au candidat par courrier électronique moyennant le paiement d’un montant non remboursable de l’équivalent de cinq cent mille FCFA. Le paiement devra être effectué, soit par chèque, soit par virement bancaire sur le compte suivant : Titulaire : Fonds GARI Domiciliation : BCEAO – Direction Nationale du Togo - Lomé BCEAO - Lomé BP 120 Tél : 00 228 22 21 53 84 Fax : 00 228 22 21 76 02 Numéro du compte T00 261200 T0040761 Il est demandé aux soumissionnaires de fournir la preuve de leur versement en envoyant une copie du chèque ou du transfert au n° de fax 00228 22 21 35 05 ou à la boîte électronique gari@fondsgari.org. 7. Les consultants doivent soumettre un original et quatre (04) copies de chaque proposition sur support papier. En outre, chaque proposition technique comprendra une version livrée sur un support magnétique de type CD-Rom. 8. Adresse de soumission des propositions : Fonds de Garantie des Investissements Privés en Afrique de l’Ouest GARI SA A l’attention personnelle de Monsieur le Directeur Général. Un exemplaire électronique de la soumission sera adressé, après la date et l’heure limite de dépôt des offres, aux adresses e-mail suivantes : jacques.nignon@gmail.com Renseignements à ajouter sur l’enveloppe extérieure : « Appel d’offres Fonds GARI Recrutement d’un Consultant Spécialisé dans la valorisation des actifs et dans la recherche de repreneurs d’actions – Ne pas ouvrir au bureau d’ordre ». Les propositions doivent être soumises au plus tard le 22 février 2012, avant 15 heures, heure de Lomé, à l’adresse suivante : FONDS DE GARANTIE DES INVESTISSEMENTS PRIVÉS EN AFRIQUE DE L’OUEST BP 985 - 68, Avenue de la Libération Lomé - République Togolaise Tout complément d’information au Maître d’Ouvrage doit être envoyé à l’adresse suivante : FONDS DE GARANTIE DES INVESTISSEMENTS PRIVÉS EN AFRIQUE DE L’OUEST BP 985 – 68, Avenue de la Libération Lomé République Togolaise A l’attention de Monsieur le Directeur Général Tél : 00 228 22 21 06 05 – Télécopie : 00 228 22 21 35 05 Adresse électronique : gari@fondsgari.org Fait à Lomé, 10 janvier 2012
JEUNE AFRIQUE
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AVIS D'APPEL D’OFFRES À MANIFESTATION D’INTÉRÊTS Date de lancement : 02/01/2012. Nom du projet : Construction d'un dépôt pétrolier à Nkok - PK27 (GABON)
1. Objet. Dans son projet de servir une grande partie du territoire Gabonais en hydrocarbures, la société Petro Gabon, société de distribution de produits pétroliers, lance un avis d’appel d’offres international pour la construction d’un dépôt pétrolier. Le présent avis porte sur l’ensemble des travaux à réaliser dans le cadre dudit projet de construction sur la Zone Economique Spéciale de NKOK. 2. Allotissement. Le présent avis d’appel d’offres est constitué de sept (7) lots décrits comme suit : - Lot 1 Génie Civil / VRD - Lot 2 Réservoirs/Sphères/Tuyauterie/Charpente/Fondations Ouvrages - Lot 3 Bâtiments - Lot 4 Electricité/Instrumentation/Automatismes/Protection cathodique - Lot 5 Pose Pipelines - Lot 6 Equipements - Lot 7 Fourniture pipeline Chaque lot est indivisible. 3. Soumissionnaires. Il s’agit d’un appel d’offres international ouvert aux entreprises : - D’une part, spécialisées dans les corps de métier liés aux travaux à exéJEUNE AFRIQUE
cuter et ayant des références confirmées de travaux en secteur industriel. - D’autre part, ayant des références d’intervention en secteur pétrolier. Il est demandé aux soumissionnaires, à toutes entreprises, personnes physiques et morales ayant au moins cinq (5) ans d’expérience dans le domaine concerné, d’envoyer leurs dossiers préalablement à leur offre. 4. Dépôt des dossiers de candidatures. Le Dossier doit être déposé ou envoyé au plus tard le 01 Février 2012 auprès de : Petro Gabon Division Achats & Logistique - BP. 20132 Libreville-Gabon Standard : (241) 70 46 76 - Portable : (241) 04 22 89 09 Divisionachats@petrogabon.com 5. Validité des dossiers de candidatures. Les dossiers demeureront valides pour une durée de trois (3) mois à partir de la date limite de dépôt et doivent être composés de ce qui suit : - Une présentation de l’entreprise ; - Références et Certificats de bonne exécution ; - Contacs ; - Organigramme de l’entreprise. Jean-Baptiste BIKALOU Président Directeur Général N° 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
Appel d’offres
Numéro Appel d'0ffres : A0/01/2012/DR/DG/PG.
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w w w. s a i 2 0 0 0 . o r g COURS INTENSIFS D’ANGLAIS École Commerciale Privée fondée en 1955 THIS SCHOOL IS AUTHORIZED UNDER FEDERAL LAW TO ENROLL NONIMMIGRANT ALIEN STUDENTS
Comptabilité sur ordinateur Gestion de bureau sur ordinateur dBase Management ® Microsoft Office Suite - Windows Traitement de texte Microsoft ® Lotus Suite - (T1) Internet access • Membre accrédité du “ACICS” • Établissement reconnu par le Département d’Éducation de l’État de New York • Commence dès ce mois-ci • Cours offerts le matin, l’après-midi et le soir.
Dans le cadre de son programme « Amélioration de l’accès à l’eau potable et à l’assainissement de base, ainsi que des pratiques d’hygiène pour les populations de la Sous-préfecture de Bambari, Préfecture de Ouaka, République Centrafricaine » la Croix-Rouge Française (en partenariat avec la Croix-Rouge Centrafricaine et EuropeAid) souhaite acheter les biens décrits ci-dessous : LOT N° 1 : 1 atelier de forage (équipement, pièces d’usure et accessoires) LOT N° 2 : Tubes de forages
Tél. (212) 840-7111 Fax (212) 719-5922 SKYPE Studentclub SPANISH-AMERICAN INSTITUTE 215 W 43 St. (Times Square) Manhattan, NY 10036-3913
info@sai2000.org
AVIS D’APPEL D’OFFRES OUVERT INTERNATIONAL Réf : EuropeAid/2011/AOOI/BAM/FORAGE
Nous invitons les entreprises souhaitant soumissionner à l’un ou plusieurs de ces lots à nous demander par mail un dossier à l’adresse suivante : marie.evreux@croix-rouge.fr La remise des dossiers d’appel d’offre est fixée au 15 février 2012 avant 16 heures précises (heure française).
Divers
Publiéau auJournal Journald’annonces d’annonceslégales légales Publié du Gabon Le quotidien L’Union du 06/12/2011. du Gabon Le quotidien le 06/12/2011. ETUDE MAÎTRE ROGER VALÈRE MOUSSADJI SYNDIC JUDICIAIRE
PRODUCTIONET ETVÉRIFICATION VERIFICATION PRODUCTION E DES CREANCES 2 ET DERNIER AVIS DES CRÉANCES 1ER AVIS
En date du 7 novembre 2011, la Chambre commerciale du Tribunal Judiciaire de Première Instance de Libreville a rendu un jugement répertorié sous le N° 001/2011-2012, prononçant la mise en redressement judiciaire de la société S.A. Africa N°1 au Capital de 100 000 000 FCFA dont le Siège social est situé à Libreville, B.P. 1 Libreville, Registre de Commerce 1337/B. Maître Roger Valère MOUSSADJI dont l’étude est située à l’avenue de COUINTET- BP 3387- Téléphone (+241) 05 72 95 85 à Libreville a été désigné Syndic Judiciaire. Il invite conformément à l’article 78 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures d’Apurement du Passif, tous les créanciers chirographaires ou munis des sûretés composant la masse, à produire sous peine de forclusion, leurs créances auprès du syndic sous 60 jours pour les créanciers domiciliés hors du territoire national et de 30 jours pour ceux établis sur le territoire national. La même obligation est faite au créancier qui, muni d’un titre de créance, a introduit, avant la décision d’ouverture une procédure en condamnation en vertu d’un titre ou, à défaut d’un titre, pour faire connaître son droit. Les titulaires d’un droit de revendication doivent également produire en précisant s’ils entendent exercer leur droit de revendication. A défaut de cette précision, ils sont considérés comme créanciers chirographaires. La production interrompt la prescription extinctive de la créance. Etude Maître Roger Valère MOUSSADJI – Siège social : Libreville- Avenue de COINTET – BP 3387 - Tél : 05 72 95 85 / 07 41 93 99 N° d’identification Fiscale(NIF) : 477002 K
N° 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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AVIS DE VACANCE DE POSTE
ADMINISTRATEURS INDEPENDANTS (2 POSTES) SHELTER-AFRIQUE est une institution régionale de financement de l’habitat créée par les gouvernements africains et la Banque africaine de développement, avec mission d’investir dans la promotion immobilière et l’aménagement urbain dans les pays africains. L’actuel capital-actions est détenu par 43 pays africains, la Banque africaine de développement (BAD) et la Société africaine de réassurance (AFRICA-RE). Dans la perspective de renforcer sa gouvernance d’entreprise, l’Institution, dont le Siège est basé à Nairobi, Kenya, se propose de pourvoir à deux postes vacants au Conseil d’administration par le recrutement de candidats ressortissants de ses pays membres. Ci-après les termes de référence des administrateurs indépendants: 1. Participer activement aux réunions des comités et du Conseil et aux délibérations afférentes comme tout autre administrateur; 2. Assurer l’expertise technique, financière et toute autre prestation indépendante au Conseil; 3. Réduire les conflits potentiels entre la Direction générale et les intérêts plus larges de la Société et des actionnaires; 4. Mettre à contribution leur expérience et savoir-faire dans la prise de décisions par le Conseil; 5. Diriger certains comités du Conseil; 6. Les administrateurs indépendants serviront pour un mandat de 3 ans renouvelable une seule fois. Qualifications et expérience minimum: 1. Les candidats potentiels doivent justifier d’au moins cinq ans d’expérience en tant qu’administrateur d’un conseil d’administration d’une organisation locale ou internationale: L’administrateur chargé de l’analyse d’investissement et de la construction et du financement immobilier, devrait avoir des qualifications et une expérience en analyse d’investissement et financement de construction et de projets. Il/elle doit détenir une Maîtrise en gestion des entreprises (MBA) ou tout autre diplôme supérieur en gestion des affaires avec au moins 10 ans d’expérience professionnelle. L’administrateur chargé de la gestion des risques et de l’audit devrait avoir une vaste expérience en gestion des risques et en audit. Il/elle devrait justifier d’une expérience de 10 ans au moins au sein d’un cabinet d’audit ou à un poste de Chargé de gestion des risques ou d’audit interne dans une institution de renom. 2. Les administrateurs indépendants n’entretiennent aucune relation matérielle avec l’Institution outre leur qualité d’administrateur. Pour plus d'informations, veuillez consulter le site Web. REMUNERATION: Shelter-Afrique offre une rémunération compétitive et attrayante aux administrateurs indépendants, y compris les frais de voyage et autres coûts afférents, ainsi des jetons de présence et indemnités journalières de subsistance durant les réunions du Conseil et de ses comités. CANDIDATURES: Les candidats sont invités à transmettre une lettre de motivation illustrant leur éligibilité par rapport aux qualifications, accompagnée d’un curriculum vitae détaillé, ainsi que les noms et adresses de références, au courriel: jobs@shelterafrique.org et/ou à Shelter-Afrique Center Longonot Road Upper Hill PO Box 41479 00100, Nairobi Kenya. Les candidats devraient indiquer le poste sollicité comme objet de leurs soumissions par courriel. La date butoir pour la soumission des candidatures est fixée au 7 février 2012. Seuls les candidats présélectionnés remplissant les conditions susvisées seront contractés. Pour plus d'informations, visitez notre site Web: http://www.shelterafrique.org.
Recrutement - Formation
JEUNE AFRIQUE
N° 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
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Vous nous
Le courrier des lecteurs Envoyez-nous vos réactions, vos réflexions, vos coups de gueule ou de cœur à redaction@jeuneafrique.com ou au 57 bis, rue d’Auteuil, 75016 Paris.
Le retard des francophones J’ai trouvé votre dossier sur la compétitivité des différents blocs linguistiques africains assez édifiant (J.A. no 2659-60, du 25 décembre 2011 au 7 janvier 2012). J’ai ainsi pu mesurer le retard qu’accusent les pays d’Afrique francophone en termes d’indice de développement humain et de dynamisme économique. Nos dirigeants devraient déployer davantage d’efforts dans l’éducation et faciliter la libre création d’entreprise. C’est à ces seules conditions que nous pourrions nous hisser au même niveau de développement que les Nigérians, les Ghanéens ou encore les Kényans. Quand allons-nous enfin, nous, Africains francophones, entreprendre la longue marche vers le progrès économique et social ? ● CHRISTIAN LOUHOU KINSANGOU, Melun, France
Pourquoi tant d’acharnement ? J’apprécie votre hebdomadaire, que je lis attentivement depuis près d’une décennie. Cependant, permettez-moi de vous faire part de ma déception et de mon étonnement à la découverte de vos derniers articles sur la RD CONGO RD Congo, AU BORD particulièrement DU GOUFFRE virulents et subjectifs. Ayant J.A. N 2657, longtemps vécu du 11 au dans ce pays, je 17 décembre 2011. remarque, pour la première fois, une administration qui a un certain projet de société ainsi qu’une vision économique axée sur le développement des infrastructures. En dépit des graves irrégularités GABON LÉGISLATIVES, LE GRAND TEST
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 52e année • N° 2657 • du 11 au 17 décembre 2011
INTERVIEW FATOU BENSOUDA : « NON, LA CPI N’EST PAS À LA SOLDE DES BLANCS »
SÉNÉGAL LES SONDAGES DE LA DISCORDE
jeuneafrique.com
CÔTE D’IVOIRE GBAGBO CONTRE-ATTAQUE
Joseph Kabila
Étienne Tshisekedi
ÉDITION AFRIQUE SUBSAHARIENNE ET BELGIQUE
France 3,50 € • Algérie 170 DA • Allemagne 4,50 € • Autriche 4,50 € • Belgique 3,50 € • Canada 5,95 $ CAN • Danemark 35 DKK • DOM 4 €
Espagne 4 € • Éthiopie 65 birrs • Finlande 4,50 € • Grèce 4,50 € • Italie 4 € • Maroc 23 DH • Mauritanie 1100 MRO • Norvège 41 NK • Pays-Bas 4 € Portugal cont. 4 € • RD Congo 5,50 $ US • Royaume-Uni 3,50 £ • Suisse 5,90 FS • Tunisie 3,30 DT • USA 6,50 $ US • Zone CFA 1700 F CFA • ISSN 1950-1285
O
LETTRE OUVERTE À MONCEF MARZOUKI Monsieur le Président, Votre accession à la magistrature suprême en toute transparence est une première dans le monde arabe, assoiffé de liberté, de dignité et de démocratie. J’en suis d’autant plus heureux que vous êtes un médecin dévoué, doublé d’un homme de culture et d’un ardent défenseur des droits de l’homme, qui a vaillamment bravé la dictature du précédent régime. Votre abord facile, ainsi que votre approche pragmatique des problèmes vitaux du pays et du peuple nous inspirent confiance et admiration. Dans votre discours inaugural, vous exhortiez lesTunisiens à vous présenter leurs doléances sans ambages ni crainte. Ce qui m’encourage à vous exposer mon cas. En novembre 2011, j’ai reçu de Paris un livre des éditions Desclée de Brouwer sur le dialogue interreligieux, intitulé Nous ne choisissons d’autres dieux que Dieu. Le préposé à la douane de la poste de Gafsa a saisi ledit livre, sous prétexte que le titre comporte le mot « Dieu ». Connaissant bien votre respect et votre amour pour le livre et la lecture, j’estime que, après la « Révolution de la liberté et de la dignité », il ne devrait plus jamais y avoir ni censure, ni interdiction, ni saisie des œuvres de l’esprit. Je suis persuadé, Monsieur le Président, que pareil cas ne vous laisse point indifférent, vous qui avez tant combattu par la parole et la plume. Merci, Monsieur le Président, de m’avoir lu et compris. Bien patriotiquement vôtre. ● ALI SMAOUI, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL DE L’ALLIANCE FRANCOPHONE INTERNATIONALE, Gafsa, Tunisie N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
constatées lors des élections, vous conviendrez que deux scrutins présidentiels se sont déroulés ces cinq dernières années, plaçant ainsi le pays sur la voie démocratique. En trente-deux ans d’un pouvoir caractérisé par une « kleptocratie » obscène, une mascarade de libéralisation politique en 1991, des pillages et des massacres orchestrés par l’armée en 1978, 1991 et 1993, ainsi qu’un sous-développement entretenu pour mieux régner, Mobutu n’avait organisé aucune consultation. J’ai donc beaucoup de mal à comprendre votre assimilation de Joseph Kabila à Mobutu (Kabila = Mobutu light). Étienne Tshisekedi s’est autoproclamé président à plusieurs reprises (même avant les élections), et il a également tenu des propos insurrectionnels et insultants. Vous n’en faites pas mention dans vos articles. Au contraire, il est presque présenté comme un Ouattara congolais, dont on aurait volé la victoire en bourrant les urnes au Katanga et en les brûlant aux Kasaïs. Je vous invite à plus d’équilibre et d’objectivité. La RD Congo revient de loin et a entrepris son redressement. Des titres tels que « Au bord du gouffre » (J.A. no 2657, du 11 au 17 décembre) et « Autopsie d’un fiasco » (J.A. no 2658, du 18 au 24 décembre) sont racoleurs et me poussent à m’interroger sur votre acharnement à dénigrer le pouvoir en place. ● VIC SUBRAMANIAN, Bujumbura, Burundi
Kabila a perdu Le monde entier et les Congolais connaissent le verdict des urnes : Kabila a perdu les élections pour la deuxième fois et essaie de conserver le pouvoir par la force. La première tricherie avait été soft, la deuxième, plus grotesque. Si la majorité présidentielle avait gagné les élections, pourquoi Étienne Tshisekedi serait-il placé en résidence surveillée ? Pourquoi l’empêcherait-on de tenir un meeting au stade ? Et pourquoi les vainqueurs ne prennent-ils pas de bain de foule au Congo et à l’étranger ? Pourquoi déployer les forces de l’ordre à Kinshasa et ailleurs, alors que dans l’est du pays des forces armées JEUNE AFRIQUE
Vous nous
étrangères multiplient les attaques ? Si Kabila persiste et installe la terreur avec des arrestations et des tueries, il lui sera impossible de diriger le pays. Pour le moment, les Congolais ont fait le choix de la non-violence. Mais une insurrection n’est pas exclue si l’on continue ainsi à ridiculiser Étienne Tshisekedi ! ● WILFRID MOYOWONA, Bordeaux, France
Colin Powell est coupable Laurent Gbagbo est poursuivi par la Cour pénale internationale, mais un homme est toujours en liberté : l’ancien secrétaire d’État américain Colin Powell, qui devrait subir le même sort pour l’intervention des États-Unis en Irak. Souvenez-vous du motif alors avancé : il fallait mettre la main sur des armes de destruction massive, qui n’ont curieusement jamais été trouvées.
Bilan de l’opération : quelque 100 000 morts et un pays dévasté. Alors, j’ignore si Laurent Gbagbo est coupable de crime contre l’humanité, mais Colin Powell, lui, certainement. ● JEAN ARDIET, Besançon, France
Sarkozy sur le fil Je voudrais saluer la pertinence de l’article d’Henri Marque consacré aux chances de réélection de Nicolas Sarkozy lors du scrutin présidentiel de 2012. De nombreux compatriotes partageront cette analyse reflétant une profonde réalité. ● JEAN-JACQUES BURICAND, Lyon, France
Meilleurs vœux à J.A. Riche en événements et en rebondissements, l’année 2011 aura été, à mon sens, toute particulière. Aussi, alors qu’elle vient de s’achever,
je présente mes vœux les meilleurs et remercie tous les journalistes grâce auxquels j’ai pu scruter, m’inspirer et m’imprégner du bain littéraire, fasciné par la magie de l’écriture. Ils m’ont permis de déguster avec appétit et gourmandise des mots suaves, de profiter de leurs critiques, analyses et reportages. Beaucoup ont bravé la salve meurtrière des despotes, autocrates et mécréants de par le monde, dénonçant l’injustice et le musellement de la presse, tout en fustigeant la dictature, parfois au péril de leur vie. Je pense à ceux qui ne sont plus et à ceux qui œuvrent encore. Je salue ici le professionnalisme de Béchir Ben Yahmed, François Soudan et bien d’autres, dont Philippe Perdrix, Tshitenge Lubabu, Alain Faujas… Merci à toute l’équipe de Jeune Afrique pour son inestimable travail. ● TRÉSOR GILBERT RAMAZANI, Hamm-Westfalen, Allemagne
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HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL POLITIQUE, ÉCONOMIE, CULTURE
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Post-scriptum Fawzia Zouari
Fondé à Tunis le 17 oct. 1960 par Béchir Ben Yahmed (52e année) Édité par SIFIJA Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS Tél. : 01 44 30 19 60 ; Télécopieurs : rédaction : 01 45 20 09 69 ; ventes : 01 45 20 09 67 ; Courriel : redaction@jeuneafrique.com DIRECTION Directeur de la publication : BÉCHIR BEN YAHMED (bby@jeuneafrique.com) Directeur général : Danielle Ben Yahmed Vice-présidents: Aldo de Silva, Danielle Ben Yahmed, François Soudan, Amir Ben Yahmed Actionnaire principal : Béchir Ben Yahmed
L’année du grand ménage
RÉDACTION Directeur de la rédaction : François Soudan (f.soudan@jeuneafrique.com) Directeurs exécutifs : Marwane Ben Yahmed (mby@jeuneafrique.com), Amir Ben Yahmed (aby@jeuneafrique.com) Rédactrice en chef déléguée : Élise Colette (e.colette@jeuneafrique.com) Rédacteur en chef technique : Laurent Giraud-Coudière
L’
AN 2011 AURA ÉTÉ CELUI d’un extraordinaire nettoyage dans les rangs des hommes politiques. Un vrai coup de balai ! Zapatero, Berlusconi et Papandréou, pour la seule Europe, tous noyés dans les eaux de la crise, la planche savonnée par les agences de notation. En France, celui qui était pressenti comme le futur président de la République, Dominique Strauss-Kahn, a vu son linge sale accroché aux câbles du monde entier, en raison d’une série de procès qui lui pendent encore au nez. Je passe rapidement sur l’Afrique subsaharienne et la prise de Gbagbo en tricot de peau, le costume parti au lavage. Je survole aussi la Russie et la vague de contestation qui a éclaboussé Poutine, pour arriver au torrent qui a emporté les présidents arabes : Ben Ali, Moubarak, Kaddafi, Saleh… Sans compter Ben Laden, politique d’un autre genre, dont le corps fut jeté dans l’océan, à en croire les Américains. Il y a également ceux qui sont partis bien propres, c’est-à-dire de mort naturelle, tels que le prince héritier saoudien Sultan Ben Abdel Aziz Al Saoud, le Tchèque Vaclav Havel ou le président de la Corée du Nord Kim Jong-il. Vous remarquerez qu’il n’y a presque pas de femmes dans le palmarès des chefs déchus. Pour une fois que le ménage ne les concerne pas ! Quant à ces messieurs, l’on se demande si leur départ réglera les problèmes. Rien n’est moins sûr. Certains leaders européens ont beau jeter l’éponge, il n’est pas acquis que leur éviction réussisse à nettoyer le terrain des traces de la mouise. Comme si les politiques, de quelque parti qu’ils soient, avaient sali le métier. Comme si la fonction politique avait été maculée à jamais ! Idem pour les révoltes arabes. Si elles semblent, pour une fois, profiter au peuple, il faut craindre l’effet de mousse : les nouveaux élus n’étant pas tous blancs comme linge – certains pourraient même laver moins propre –, le grand lessivage de l’année 2011 risque d’apparaître comme du travail bâclé, les méchantes langues diront « du travail d’Arabe »…
Alors, comment gouverner les peuples en général, et les Arabes en particulier ? Les actuels ou futurs élus tunisiens, libyens et égyptiens entendent puiser à la source de la religion, dépoussiérer les califats et, pourquoi pas, rafraîchir à la chaux les harems. Les Européens ne jurent, quant à eux, que par le fédéralisme économique et confondent la trousse de la monnaie unique avec le trousseau de la mariée. Mais qui a dit que les peuples veulent encore caler leur vie sur le programme des tambours politiques ? Et si la grogne ne relevait pas d’une crise de sous mais de sens ? D’un désir de laver les consciences de la gangrène du profit et de décrasser les esprits du délire de puissance ? Et si la contestation avait tout à voir avec une soif de dignité qui ne figure pas dans les calculs des banques et avec un rêve – hélas, impossible –, celui de se débarrasser de la tutelle des raïs en tous genres ? ●
Conseillers de la direction de la rédaction : Hamid Barrada, Abdelaziz Barrouhi (à Tunis), Aldo de Silva, Dominique Mataillet, Renaud de Rochebrune Responsable de la communication : Vanessa Ralli (v.ralli@jeuneafrique.com) Secrétariat : Chantal Lossou, Joëlle Bouzignac Chefs de section : Joséphine Dedet (La semaine de J.A.), Philippe Perdrix (Grand angle), Anne Kappès-Grangé (Afrique subsaharienne), Tarek Moussa (Maghreb & Moyen-Orient), Jean-Michel Aubriet (Europe, Amériques, Asie), Cécile Manciaux (Le Plus de J.A.), Jean-Michel Meyer (Économie), Séverine Kodjo-Grandvaux (Culture & médias), Clarisse Juompan-Yakam (Vous & nous) Secrétaires de rédaction : Sabine Clerc, Fabien Mollon, Ophélie Négros Rédaction : Pascal Airault, Youssef Aït Akdim, Stéphane Ballong, Pierre Boisselet, Tirthankar Chanda, Julien Clémençot, Georges Dougueli, Tony Gamal Gabriel, Malika Groga-Bada, André Silver Konan (à Abidjan), Christophe Le Bec, Nicolas Michel, Fabien Mollon, PierreFrançois Naudé, Ophélie Négros, Cherif Ouazani, Michael Pauron, Laurent de Saint Périer, Leïla Slimani, Justine Spiegel, Tshitenge Lubabu M.K., Marie Villacèque ; collaborateurs : Edmond Bertrand, Christophe Boisbouvier, Frida Dahmani, Muriel Devey, André Lewin, Patrick Seale ; accords spéciaux : Financial Times RÉALISATION Maquette: Émeric Thérond (conception graphique, premier maquettiste), Christophe Chauvin, Stéphanie Creuzé, Valérie Olivier; révision: Nathalie Bedjoudjou (chef de service), Vladimir Pol; fabrication: Philippe Martin (chef de service), Christian Kasongo; service photo: Dan Torres (directrice photo), Nathalie Clavé, Vincent Fournier, Claire Vattebled; documentation: Anita Corthier (chef de service), Sylvie Fournier, Florence Turenne, Angéline Veyret JEUNEAFRIQUE.COM Responsable éditoriale : Élise Colette, avec Pierre-François Naudé ; rédaction : Camille Dubruelh, Vincent Duhem et Jean-Sébastien Josset Responsable web : Jean-Marie Miny ; studio : Cristina Bautista, Haikel Ben Hmida et Maxime Pierdet VENTES ET ABONNEMENTS Directeur marketing et diffusion : Philippe Saül ; responsable ventes au numéro : Philippe Blanc ; ventes au numéro : Sandra Drouet, Dhouha Boistuaud ; abonnements : Vanessa Sumyuen avec: COM&COM, Groupe Jeune Afrique 18-20, avenue Édouard-Herriot, 92350 Le PlessisRobinson. Tél. : 33 1 40 94 22 22 ; Fax : 33 1 40 94 22 32. E-mail : jeuneafrique@cometcom.fr ●
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N o 2661 • DU 8 AU 14 JANVIER 2012
JEUNE AFRIQUE
Ce numéro s’accompagne d’un encart abonnement sur une partie de la diffusion.
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AVIS DE RECRUTEMENT D’UNE AGENCE DE GESTION FIDUCIAIRE POUR LA GESTION DES RESSOURCES DU PROGRAMME VIH ROUND 10 DU FONDS MONDIAL DE LUTTE CONTRE LE SIDA, LA TUBERCULOSE ET LE PALUDISME POUR LE COMPTE DU SECTEUR PUBLIC BURKINA FASO ET LE RENFORCEMENT DES CAPACITÉS DU SP/CNLS-IST ET DES RÉCIPIENDAIRES SECONDAIRES. Financement : Fonds Mondial de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme
1. Objet Le présent avis a pour objet le recrutement d’une Agence de Gestion Fiduciaire pour la gestion des ressources du programme VIH round 10 du Fonds Mondial de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme pour le compte du secteur public et le renforcement des capacités du SP/CNLS-IST et des récipiendaires secondaires. 2. Contexte et justification Le Burkina Faso a élaboré pour la période 2011 – 2015 le cadre stratégique de lutte contre le VIH, le Sida et les IST (CSLS 2011-2015). Troisième du genre, après ceux de 2001-2005 et 2006-2010, il est axé sur le ciblage des interventions et des options de mise en œuvre basées sur la contractualisation et la multisectorialité. Son coût global est de cent soixante dix milliards sept cent soixante dix neuf millions zéro quatre vingt dix milles deux cent quarante (170 779 090 240) de FCFA soit deux cent soixante millions trois cent cinquante un mille zéro quarante cinq (260 351 045) Euros. Le Secrétariat Permanent du Conseil National de Lutte contre le Sida, les Infections Sexuellement Transmissibles (SP/CNLS-IST), en sa qualité de Récipiendaire Principal, a mis en place une cellule de gestion appelée Coordination du projet Fonds Mondial (CPFM/SSP) avec pour fonction d’assurer la gestion quotidienne des subventions. En vue de renforcer les capacités du SP/CNLS-IST et des récipiendaires secondaires pour la mise en œuvre du programme VIH round 10 au titre du secteur public, il est envisagé le recrutement d’une Agence de Gestion Fiduciaire. 3. Description des missions de l’Agence de Gestion Fiduciaire L’Agence de gestion fiduciaire sera recrutée pour une durée d’un an renouvelable annuellement après évaluation sur une durée maximum de trois (03) ans. L’agence de gestion fiduciaire aura pour missions, sous la supervision du SP/CNLS-IST Récipiendaire Principal (RP) du programme VIH round 10 pour le compte du secteur public de : i. assurer la gestion financière et comptable du programme et la passation des marchés (non compris les marchés pour les médicaments et les produits de santé) ; ii. assurer le renforcement des capacités de gestion administrative, financière et comptable du RP et des Récipiendaires secondaires et ; iii. aider à la mise à jour et au paramétrage du logiciel comptable intégré existant (comptabilité, budget, trésorerie, et gestions des immobilisations). Un Manuel de Procédures Administratives, Financières et Comptables a déjà été élaboré par le SP/CNLS-IST et servira dans le cadre de l’intervention de l’Agence de Gestion Fiduciaire, après que les mises à jour nécessaires aient été effectuées. L’agence de gestion fiduciaire devra s’assurer que ledit manuel est conforme aux règles et pratiques de gestion définies au Burkina Faso. L’Agence de Gestion Fiduciaire assurera ses fonctions en qualité de prestataire pour le compte du SP/CNLS-IST. A ce titre, ses principales tâches sont détaillées dans les TDR révisés de la présente mission. 4. Profil de l’Agence de Gestion Fiduciaire L’Agence de Gestion Fiduciaire sera un cabinet ayant (i) une bonne connaissance des procédures de gestion financière et comptable du programme, de passation de marchés applicables à la gestion des projets financés par les Bailleurs de Fonds internationaux, (ii) et une expérience pertinente dans des missions similaires de gestion fiduciaire de projets financés par les bailleurs de fonds internationaux (Fonds Mondial, Banque Mondiale, BAD, Union Européenne, etc.) sera un avantage. Elle doit disposer d’une équipe compétente ayant les profils exigés, qui devra travailler en permanence avec la CPFM et ses récipiendaires secondaires dans le cadre de programmes financés par ce biais. Elle sera supervisée par le Secrétaire Permanent du CNLS-IST. L’interlocuteur de l’Agence de Gestion Fiduciaire pour la mesure de la performance de l’équipe est le service de contrôle interne du SP/CNLS-IST. Pour exécuter ces tâches, l’Agence devrait être constituée d’un personnel répondant aux qualifications définies dans les TDR révisés. 5. Conditions de participation La participation au présent avis de recrutement est ouverte à tous les cabinets ou groupements de cabinets pour autant qu’ils ne soient pas sous le coup de l’interdiction ou de suspension. Les soumissionnaires éligibles, intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires et consulter gratuitement les TDR et la grille d’évaluation des offres révisés auprès du Centre International de Formation et de Management (CIFOM), 06 BP 9355 Ouagadougou 06, Tél : (00226) 50 36 71 73, E-mail : cifom.2010@gmail.com, site web : www.esmatbf.com tous les jours ouvrables entre 7 h 30 mn à 12 h 30 mn le matin et de 15 h à 17 h 30 l'après midi. Tout soumissionnaire éligible, intéressé par le présent avis, doit retirer gratuitement les TDR et la grille d’évaluation des offres révisés au Siège Social de CIFOM : 2ème Etage de l’Immeuble ESMAT (Ecole Supérieure de Management et de Technologies Appliquées), Avenue Tansoaba (Ex Boulevard Circulaire), à 400 m de l’échangeur de l’Est / 06 BP 9355 Ouagadougou 06- Tél. : 50 36 71 73. Aussi les soumissionnaires peuvent télécharger gratuitement les TDR et la grille d’évaluation des offres révisés sur les sites : www.esmatbf.com, www.cnls.bf , www.dgmarket.com , www.undb.org Les offres présentées en un (1) original et trois (03) copies, devront parvenir ou être remises au Service Courrier de CIFOM au plus tard le 30/01/2012 à 9 heures 00 GMT. L'ouverture des plis sera faite immédiatement en présence des soumissionnaires qui souhaitent y assister. En cas d'envoi par la poste ou autre mode de courrier, CIFOM ne peut être tenu pour responsable de la non transmission de l'offre du soumissionnaire dans les délais requis. Les envois d’offres par courrier électronique ne seront pas acceptés. Les offres hors délai ne seront pas reçues. Les soumissionnaires resteront engagés par leurs offres pour un délai de quatre vingt dix (90) jours, à compter de la date limite de dépôt des offres.