JA 2714 DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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TUNISIE SOUS LES PAVÉS, LA RÉVOLUTION jeuneafrique.com

HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 53e année • n° 2714 • du 13 au 19 janvier 2013

TOGO QUI A TUÉ SYLVANUS OLYMPIO ?

CÔTE D’IVOIRE RETOUR SUR UN DRAME

FRANCE LES MINORITÉS ET LA POLITIQUE

Spécial 12 pages

LA FACE CACHÉE

DES ÉCOLES

DE RICHES

Enfants de familles présidentielles, fils et filles de ministres ou de grands patrons… Pour leurs parents, une éducation d’élite en Europe, ça n’a pas de prix. Enquête sur des (ultra) privilégiés. ÉDITION INTERNATIONALE ET AFRIQUE SUBSAHARIENNE France 3,50 € • Algérie 180 DA • Allemagne 4,50 € • Autriche 4,50 € • Belgique 3,50 € • Canada 5,95 $ CAN • Danemark 35 DKK • DOM 4 € Espagne 4 € • Éthiopie 65 birrs • Finlande 4,50 € • Grèce 4,50 € • Italie 4 € • Maroc 23 DH • Mauritanie 1100 MRO • Norvège 41 NK • Pays-Bas 4 € Portugal cont. 4 € • RD Congo 5,50 $ US • Royaume-Uni 3,50 £ • Suisse 5,90 FS • Tunisie 3,30 DT • USA 6,50 $ US • Zone CFA 1700 F CFA • ISSN 1950-1285


MetropolitanRepublic/9558/E

Connectés, on peut secouer la planète. Ni le premier ni le tiers-monde, mais un Nouveau Monde. Un monde qui adopte la technologie et ses possibilités infinies. Un monde où tout est possible, auquel chacune et chacun peut se joindre et Se connecter pour changer.

Ce Nouveau Monde il est pour toi.


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Ce que je crois BÉCHIR BEN YAHMED • bby@jeuneafrique.com

SAMEDI 12 JANVIER

Guerre et paix

L’

ANNÉE 2013, que nous entamons, a hérité de celle que nous venons d’enterrer: quelques foyers de guerre qu’on ne parvient pas à éteindre et des situations qui en annoncent d’autres dont nul ne sait si nous pourrons les éviter. Cela a pu vous échapper, mais, depuis un certain nombre d’années, les guerres ont toutes pour théâtre soit un pays d’Islam, soit un africain, musulman ou non. À quoi ou à qui est-ce imputable ? Aux Africains et aux musulmans eux-mêmes ? Ou bien à d’autres, qui les leur imposent ? Voyons ce qu’il en est de plus près.

croissance à ce rythme doubleront le PIB (produit intérieur brut) du continent et donneront naissance à une classe moyenne de près de 300 millions d’Africains… ■

Sur l’islam, nous entendons dire des choses tout aussi agréables aux oreilles des musulmans, habitués, eux aussi, à n’entendre sur eux que des propos négatifs et même islamophobes. On dit de plus en plus que l’islam donne l’impression de se réveiller enfin de la léthargie dans laquelle il est tombé il y a près de mille ans. L’effervescence des sociétés musulmanes des cinq continents indique que les musul■ mans d’aujourd’hui ont pris conscience à la fois du retard Dans quelle situation se trouvent, en ce début 2013, ces qu’ils ont accumulé et de l’importance qu’ils ont acquise: deux grandes communautés leur nombre, l’amélioration humaines que sont les Africains de leur éducation et de leur « Le vrai pays émergent, et les musulmans ? niveau de vie, leur engageà mes yeux, c’est l’Afrique. Les premiers sont plus de ment de plus en plus marqué 1 milliard et les seconds plus dansladéfensedeleurréputaTout le continent est en train d’émerger de 1,5 milliard. Les uns et tion et de leurs droits leur ont sous la forme d’un marché dont le les autres connaissent une apporté, malgré les effets très dynamisme ne repose pas uniquement croissance démographique négatifs du terrorisme aveugle sur l’exploitation des richesses supérieure à celle des autres prôné par Al-Qaïda, ce mininaturelles, mais aussi sur une nouvelle communautés humaines. mum de considération qui Leur proportion dans la leur a fait, jusqu’ici, si cruelgénération d’entrepreneurs. » population mondiale s’accroît lement défaut. RATAN TATA, donc d’une décennie à l’autre Tout est bien donc pour patron (sortant) du principal conglomérat indien et leur âge moyen demeure les Africains comme pour les remarquablement bas, alors musulmans; la bouteille est à que s’élève inexorablement celui de la plupart des autres. moitié pleine et, mieux encore, goutte à goutte, doucement ■ mais sûrement, elle est en train de se remplir… D’une manière plus générale, sur le continent africain, ■ nous entendons dire, depuis trois ans, des choses d’autant Même s’il n’est pas sans fondement, un tel optimisme plus agréables pour nos oreilles et nos esprits qu’elles sont me paraît excessif, voire fallacieux. Et de ce fait dangereux: nouvelles et nous changent de ce que nous n’avions que il risque de faire croire aux Africains et aux musulmans trop entendu. qu’ils sont sortis du tunnel, n’ont plus guère d’efforts On souligne que notre continent connaît depuis le début importants à faire pour rejoindre la caravane du progrès. du siècle une croissance économique réelle, stabilisée à Et surtout de les empêcher de voir que le positif signalé un niveau plus qu’honorable, de l’ordre de 5 % par an et ci-dessus côtoie de sombres réalités dont, en particulier, qui, fait nouveau, n’est pas due seulement à l’exportation celle-ci… qui n’a aucune chance de disparaître si on n’en à un prix plus rémunérateur des produits de son sous-sol. prend pas conscience : Les augures ajoutent, cerise sur le gâteau, qu’elle va se Regardons ensemble ce qui se passe en ce moment maintenir en 2013 et en 2014, et que quinze années de même sur les cinq continents de notre petite planète et

JEUNE AFRIQUE

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Ce que je crois nous constaterons, en effet, que de tous les hommes sur terre, seuls les musulmans et les Africains – qu’ils soient musulmans, chrétiens ou animistes – sont en train de se battre entre eux, de se faire la guerre, de s’entretuer et de subir l’occupation armée de certains de leurs territoires. Cette bien triste spécificité devrait nous interpeller et nous préoccuper au plus haut point. ■

1) Des Européens, des Américains et des Israéliens occupent militairement, depuis une ou plusieurs décennies, des territoires et des pays tous musulmans. Aucun d’eux n’occupe un pays ou un territoire autre que musulman. 2) Il n’y a pas de juifs qui font la guerre à d’autres juifs, ni de chrétiens qui font la guerre à d’autres chrétiens. Qu’ils soient catholiques, protestants ou orthodoxes, ces derniers ont cessé de s’entretuer, ont fait régner la paix entre eux depuis quelques décennies. 3) Européens contre Européens, Américains contre Américains, Asiatiques contre Asiatiques ? Cela n’existe plus ni dans le nord, ni dans le sud de leurs trois continents. Il n’y a plus de conflit armé entre eux: ils ne règlent plus leurs différends au canon ou à coups de bombes, ni même au Kalachnikov. Tandis qu’en Afrique et en pays d’Islam, outre que la dictature et la mal-gouvernance y sont encore trop répandues, on trouve encore, hélas, des pays, voire des régions entières, où sunnites et chiites, Kurdes et Arabes (ou Turcs)

s’agrippent par le collet et n’hésitent guère à s’entretuer. Il n’y a pas de règle entre eux ou, s’il y en a une, c’est celle imposée par le plus fort : il s’empare de tout le pouvoir, domine le faible et, s’il le peut, l’élimine. Entre ces sous-communautés règne une défiance absolue que vous ne trouvez plus à ce degré nulle part ailleurs ! Or une communauté ne peut pas se construire, encore moins prospérer, avant d’avoir bâti en son sein la confiance et le respect mutuel, et instauré des règles élaborées ensemble et acceptées par tous. À mon humble avis, musulmans et Africains n’en sont pas encore là ; de ce fait et tant qu’il en sera ainsi, on ne peut pas soutenir, les concernant, que « la bouteille est à moitié pleine ». ■

Mais, fort heureusement, ils ont commencé à vouloir régler eux-mêmes leurs différends au lieu de s’en laver les mains et de s’en décharger sur les autres. Certes, ils ne le font ni en Afghanistan, ni en Syrie, ni en Irak où chiites et sunnites, chiites et Kurdes ne parviennent pas à cohabiter, encore moins à forger une nation. Ils ne le font pas non plus en Somalie et en République démocratique du Congo. Mais, en ce moment même, ils s’y efforcent au Mali et en Centrafrique. Il leur faut persévérer dans cette voie déjà empruntée par les communautés qui ont trouvé l’apaisement et l’harmonie sur la base de cet adage bien connu : Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage. ●

Humour, saillies et sagesse Pour vous faire sourire, grincer des dents – ou réfléchir –, ici, chaque semaine, une sélection subjective, la mienne, de ce qui a été dit ou écrit au cours des siècles par des hommes et des femmes qui avaient des choses intéressantes ou drôles à nous dire. B.B.Y. Ì Contre la peur, un seul remède : le courage. Louis Pauwels

Ì C’est par des coups répétés qu’on vient à bout du serpent. Proverbe africain

Ì Un homme sur 1 000 est un meneur d’hommes. Les 999 autres sont des suiveurs de femmes. Anna Magnani

Ì Toute destruction brouillonne affaiblit les faibles, enrichit les riches, accroît la puissance des puissants. Jean-Paul Sartre

Ì Les temps changent. Autrefois, c’était l’homme qui décidait. Il donnait la vie, la femme était comme un frigidaire. Enfin, un frigidaire chaud ! Dont l’homme tirait la poignée ! Georges Pompidou

Ì Apprendre à mourir ! Et pourquoi donc ? On y réussit très bien la première fois ! Chamfort

Ì Les silencieux ne sont pas forcément des penseurs. Il y a des armoires fermées à clef qui sont vides. Madeleine Brohan Ì Nous ne sommes pas responsables de la manière dont nous sommes compris, mais de celle dont nous sommes aimés. Georges Bernanos N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

Ì Il vaut mieux aller plus loin avec quelqu’un que nulle part avec tout le monde. Pierre Bourgault Ì Pour les rois de France, les châteaux de la Loire, c’est des cabanes au bord d’un ruisseau. Les Nouvelles Brèves de comptoir

Ì Le jazz, c’est quand cinq musiciens jouent ensemble un morceau différent. Steve McGrew Ì Apprendre sans réfléchir est vain. Réfléchir sans apprendre est dangereux. Confucius Ì Si les gens étaient mieux logés, ils sortiraient moins. Patrick Besson JEUNE AFRIQUE


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Éditorial François Soudan

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Tonton Zuma est arrivé

C

E QUE LA FRANCE DE FRANÇOIS HOLLANDE ne veut surtout plus faire en Afrique – « défendre un régime », selon les mots du président socialiste –, l’Afrique du Sud de Jacob Zuma le fait, sans états d’âme. L’envoi, il y a quelques jours, d’un contingent de quatre cents hommes à Bangui, dont la feuille de mission est clairement de protéger le chef de l’État François Bozizé et de sécuriser sa capitale, marque à cet égard un précédent dont il faudra désormais tenir compte. L’Afrique du Sud se sent fondée à intervenir unilatéralement et où bon lui semble dans ce qu’elle considère comme son pré carré élargi, sans avoir à s’en expliquer et avec la légitimité que lui confère son statut de puissance africaine. Ce que Thabo Mbeki avait été tenté de réaliser en Côte d’Ivoire avant d’y renoncer, tant l’opération de sauvetage du soldat Gbagbo paraissait risquée, son successeur n’éprouve donc aucune gêne à se l’approprier sur un théâtre il est vrai moins complexe. Et que Paris ne s’avise pas de lui en faire le reproche: son label d’ex-colonisateur lui sera illico renvoyé au visage.

Qu’on se le dise, donc, dans les palais : Jacob Zuma est un ami sur lequel on peut compter. Sans doute est-ce là une part importante du message que Pretoria a voulu délivrer en envoyant ses boys sur les rives de l’Oubangui. Et sans doute peut-on faire confiance à son ex-épouse, Nkosazana Dlamini-Zuma, dont l’allergie à l’égard de la CPI est notoire, pour le relayer sur les cimes de l’Union africaine. Depuis la chute de Kaddafi, le syndicat des chefs d’État menacés de disparition se cherchait un parrain, ou à tout le moins un « tonton » compréhensif. Il l’a trouvé, en plus fiable et nettement plus présentable. ● N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

CÔTE D’IVOIRE LA MORT AU BO UT DU CHEMIN Dans la nuit du 31 décembre, 63 personnes ont été tuées dans une bousculade géante à Abidjan. Un drame dont les conséquences pourraient être très politiques.

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PHOTOS DE COUVERTURES : OSNOWYCZ AUDE/SIPA ; CORBIS

Ne soyons pas naïfs. Le pays de Jacob Zuma agit aussi en fonction de ses intérêts. En l’occurrence, l’uranium, l’or et les probabilités pétrolières de la Centrafrique sont loin de laisser indifférents les hommes d’affaires sud-africains, lesquels ne sont ni plus ni moins prédateurs que les Français, les Canadiens, les Chinois ou les autres. Mais ce néo-interventionnisme s’appuie aussi sur une vision à la fois nationaliste et panafricaniste de la politique étrangère, très ancrée au sein de l’ANC. Vue de Pretoria, l’Afrique francophone est encore largement un territoire à décoloniser, et tout chef d’État en délicatesse avec la France est quasiment assuré d’y trouver des oreilles attentives. Même s’il ne l’applique pas chez lui, la conception restrictive qu’a Jacob Zuma de la démocratie importée d’Occident, contraire selon lui aux valeurs traditionnelles, rejoint ainsi celle de la plupart de ses pairs africains rétifs aux diktats venus du Nord. En concluant en 2007 un accord militaire avec Bangui, le ministre sud-africain de la Défense de l’époque, Patrick « Terror » Lekota, avait confié que, contrairement à la France, l’Afrique du Sud était un « pays frère », donc sûr. Une douzaine de spécialistes avaient suivi, chargés de reconfigurer la sécurité rapprochée de François Bozizé. Et quand ce dernier s’est tourné vers Jacob Zuma pour qu’il lui envoie des troupes, auxquelles il fait manifestement plus confiance qu’à celles de ses voisins d’Afrique centrale (sans parler des six cents Français, venus en simples observateurs de sa chute annoncée), le « frère » a aussitôt dit oui.

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ESCLAVAGE AFFAIRE NON CLASSÉE Une descendante d’esclave veut assigner l’État français pour crime contre l’humanité. Objectif : obtenir réparation pour le préjudice dont elle s’estime toujours victime.

Ce que je crois Par Béchir Ben Yahmed Confidentiel

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L A SEM A IN E D E J EU N E A F RIQ U E

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Esclavage Affaire non classée Olfa Riahi Zorro est arrivé Alice Nkom « Gay pride » Sénégal L’étau se resserre autour de Wade Syrie Odeurs de soufre Turquie-Afrique Erdogan fait son show Sénégal Touche plus à mon Dakar Unesco Un Djiboutien en lice Tour du monde

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G RA N D A N G L E

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Afrique Très chères études

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A F RIQ U E SU BSA H A RIEN N E

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Côte d’Ivoire La mort au bout du chemin Rwanda Interview de Martin Ngoga, procureur général de la République JEUNE AFRIQUE


Dans Jeune Afrique et nulle part ailleurs

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GRAND ANGLE

LA FACE CACHÉE des écoles de riches

Bon nombre de hauts dignitaires subsahariens confient leurs enfants à de prestigieuses écoles privées suisses, françaises, belges… Reportage.

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CINÉMA HÉROS MALGRÉ LUI Chanteur engagé dans les années 1970, l’Américain Sixto Rodriguez a publié deux albums dans l’indifférence quasi générale… Sauf en Afrique du Sud où il est devenu sans le savoir une icône antiapartheid.

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TUNISIE L’AVENUE BOURGUIBA M’A DIT… L’artère principale de Tunis est devenue la caisse de résonance de la transition démocratique.

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RD Congo Délit de faciès ? Grands Lacs Vus du ciel Togo Qui a tué Sylvanus Olympio ?

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MAG HR E B & M OY EN- O RI ENT

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CAN C’EST DÉJÀ REPARTI SPÉCIAL 12 pages Côte d’Ivoire, Ghana et Afrique du Sud apparaissent comme les favoris de cette 29e édition. Mais la Zambie, tenante du titre, est toujours gonflée à bloc.

CHINE XI JINPING OU LA RÉVOLUTION DE L’IMAGE Il tombe la cravate, fait la une des magazines et apparaît comme un président proche des gens. Un changement de style sans précédent.

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É C ON OMIE

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Tunisie L’avenue Bourguiba m’a dit… Égypte Salafistes « peace and love » Printemps arabe Interview de Mathieu Guidère, islamologue français Israël Netanyahou peut-il perdre ?

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Côte d’Ivoire Interview d’Adama Toungara, ministre ivoirien des Mines, du Pétrole et de l’Énergie Tunisie Luxe, calme et palmeraies Maroc Menace sur la presse écrite Afrique de l’Ouest Le patronat élève la voix Matières premières Elle veut des Bourses partout Mines Redresseur de coûts Bourse Voir Paris et languir Baromètre

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E U R OPE , AMÉRI Q UES, A SIE

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C ULT URE & M É D IA S

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Chine Xi Jinping ou la révolution de l’image Parcours Hocine Ben, avoir 15 ans dans le 9-3 États-Unis Une grande gueule à la Défense France Génération pragmatique

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Cinéma Sixto Rodriguez, héros malgré lui Histoire James Bond en Afrique La semaine culturelle de Jeune Afrique

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LE PLU S DE J EUNE A FRI Q UE

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CAN 2013 C’est déjà reparti !

JEUNE AFRIQUE

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V OUS & N OUS

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Le courrier des lecteurs Post-scriptum

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AFP

! COMBATTANTS D’AQMI dans le Nord-Mali (image mise en ligne le 9 janvier par un site islamiste).

Mali Pourquoi la France intervient

F

rançois Hollande l’avait dit et répété (voir son entretien dans J.A. no 2701) : il n’y aura « pas de troupes au sol françaises » dans le Sahel ; la France se contenterait d’appuyer une éventuelle force africaine. Mais ça, c’était avant le 10 janvier. Ce jour-là, la défaite de l’armée malienne à Konna, à 70 km au nord de Mopti, a en effet provoqué un vent de panique sensible jusqu’à Paris. Dès le lendemain, le chef de l’État français a promis de s’engager contre « les terroristes ». Mais pourquoi les combattants d’Ansar Eddine (emmenés par Iyad Ag Ghali, venu en personne sur le terrain), du Mouvement pour l’unicité et le jihad (Mujao) et d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) sont-ils repassés à l’attaque ? « Parce que Iyad

GUINÉE LA LIGNE DE LA DISCORDE

Alors que le géant minier Rio Tinto avance dans le développement du mégaprojet de Simandou, les négociations avec l’État guinéen achoppent sur la question des infrastructures de transport. Le groupe australienaimeraitavoirlamaîtrise complète de la voie ferrée N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

soupçonne Bamako de jouer un double jeu. Il veut contraindre le gouvernement malien à vraiment négocier, à Ouagadougou », explique le conseiller d’un chef d’État d’Afrique de l’Ouest [des pourparlers doivent reprendre le 21 janvier, NDLR]. Surtout, Konna est proche de Sévaré, où se trouve le QG opérationnel de l’armée malienne, pas très loin de Mopti. Si l’aéroport de Sévaré venait à tomber, cela compliquerait beaucoup une éventuelle opération de reconquête. Les jihadistes ne s’y sont pas trompés et ont soigneusement préparé leur coup. Début janvier, plusieurs milliers de combattants et plus de 300 pick-up – certains équipés de lance-roquettes multiples de type BM-21 Grad – venus de Gao et de Tombouctou ont convergé vers la ligne de front.

longue de 800 km qui permettra d’acheminer le minerai de fer jusqu’à un nouveau port spécialisé. Il se déclare donc prêt à participer financièrement à la partie infrastructure du projet (plus de 5 milliards de dollars, soit 3,8 milliards d’euros, au total). Mais l’État guinéen préférerait confier la gestion de la ligne à un tiers,

Au même moment, des témoins ont vu arriver dans les deux grandes villes du Nord plusieurs convois transportant des fûts de 200 litres de carburant en provenance de Bordj Badji Mokhtar, à la frontière algérienne – le tout en l’espace de quatre jours. Commentaire d’un autre conseiller : « Une telle quantité de carburant n’a pas pu quitter le territoire algérien sans le feu vert d’Alger. » Bamako et Paris ont bien senti le danger. Quelques heures après la chute de Konna, des troupes d’élite françaises acheminées par avion C-160 et appuyées par des hélicoptères ont débarqué à Sévaré, avant même que Hollande ne réponde à l’appel au secours de Dioncounda Traoré. Ces hommes appartiennent aux forces spéciales stationnées notamment au Burkina et au Tchad. ●

pourfacilitersonutilisationpar d’autres entreprises. La société AfricanIronOreGroup(AIOG), que dirige Babacar N’Diaye, a été chargée de lever des fonds surlesmarchésinternationaux, ce qui ne s’annonce pas facile compte tenu de la morosité de la conjoncture minière. En attendant,lestravauxprennent du retard.

CAMEROUN ÇA COMMENCE MAL POUR VIETTEL

Dans s on dis cours du 31décembre2012,PaulBiya,le président camerounais, a rayé au stylo le paragraphe où il se félicitait de l’attribution, rendue publique le 10 décembre, de la troisième licence de téléphonie mobile à l’opérateur vietnamien Viettel. Plusieurs JEUNE AFRIQUE


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Politique, économie, culture & société

TUNISIE À GAMMARTH, ON SOLDE ! Commencée le 23 décembre à Gammarth, la vente des biens du clan Ben Ali-Trabelsi ne fait pour l’instant guère recette : elle n’avait rapporté le 9 janvier que 1 million de dinars (485 380 euros). Bijoux, tableaux, voitures et villas sont pourtant estimés par les autorités tunisiennes à 10 millions d’euros. Mais pour l’heure, c’est la garde-robe des anciens occupants du palais de Carthage qui suscite une véritable hystérie. Une riche Libanaise aurait ainsi acheté quarante-deux sacs à main ayant appartenu à Leïla Ben Ali. D’autres bijoux et voitures de luxe devaient être mis en vente entre le 13 et le 15 janvier.

TUNISIE HOLLANDE PRUDENT

Envisagée dans la foulée de son voyage en Algérie, en décembre 2012, la visite de François Hollande en Tunisie a été officiellement reportée. Une prudence manifestement dictée par les vicissitudes de la transition démocratique dans ce pays. Le président français ne se rendra donc à Tunis qu’après les JEUNE AFRIQUE

LE CHIFFRE

5,2 millions

d’employés de maison recensés en Afrique – soit un dixième du total mondial –, selon un rapport de l’Organisation internationale du travail. Ce chiffre ne prend pas en compte les enfants de moins de 15 ans. Il est donc en réalité sensiblement plus important.

prochaines élections législatives. Mustapha Ben Jaafar, président d’Ettakatol (parti de centre gauche membre de la coalition au pouvoir) et de l’Assemblée nationale constituante (ANC) s’en désole : il comptait sur un soutien plus ferme de l’Élysée pour se remettre en selle alors que son parti, membre de l’Internationale socialiste, est actuellement en perte de vitesse. FRANCE-RWANDA INTERMINABLES ENQUÊTES

Les enquêtes sur les Rwandais soupçonnés de génocide résidant en France sont encore

loin d’être achevées. Trois juges d’instruction (Claude Choquet, Emmanuelle Ducos et David De Pas) se sont rendus à Kigali début janvier. Parmi les dossiers sur lesquels ils travaillent, celui de Wenceslas Munyeshyaka, l’ancien prêtre de la paroisse Sainte-Famille de Kigali, qui avait été confié à la France par le Tribunal pénal international pour le Rwanda en… 2007 ; et celui de Pascal Simbikangwa, détenu depuis 2008. Ils font pourtant partie des plus avancés ! Les responsables rwandais souhaiteraient qu’un premier

procès puisse s’ouvrir rapidement en France (lire p. 33). Manifestement, ils vont devoir s’armer de patience. UNION AFRICAINE DES CHANTIERS POUR CINQUANTE ANS

Présidente de la Commission de l’Union africaine (UA), Nkosazana Dlamini-Zuma voit loin. Les 11 et 12 janvier, à Addis-Abeba, elle a convié Donald Kaberuka, président de la Banque africaine de développement (BAD), et Carlos Lopes, secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA), à parler des grands chantiers qu’il conviendra de mettre en œuvre sur le continent au cours des cinquante prochaines années. UA, CEA et BAD ont mis en place dans la capitale éthiopienne un bureau commun dirigé par Ibrahima Dia, ancien ambassadeur de Mauritanie à Washington.

Centrafrique « South African Connection » PLUSIEURS PERSONNALITÉS ont joué un rôle déterminant dans la relation particulière qui s’est instaurée depuis cinq ans entre Bangui et Pretoria – elle s’est concrétisée récemment par l’envoi de quatre cents militaires sudafricains en Centrafrique. Côté centrafricain, c’est l’ancien ministre d’État Sylvain Ndoutingaï (photo), installé à Ouagadougou depuis sa disgrâce, qui, en 2008, a conclu un accord de défense avec Patrick Lekota, le ministre de la Défense deThabo Mbeki. Le président Bozizé a ensuite confié ce dossier sensible à Jean-Francis, son fils, et à Fabien Singaye, son conseiller spécial d’origine rwandaise – l’un et l’autre se sont rendus à Pretoria en novembre 2012. Côté sud-africain, deux femmes sont à la manœuvre: Nosiviwe Mapisa-Nqakula, la ministre de la Défense, et Maite Emily Nkoana-Mashabane, sa collègue des Affaires étrangères, laquelle a fait un voyage éclair à Bangui en pleine crise, début janvier. Côté business, enfin, l’homme d’affaires congolais Didier Pereira, qui effectue de fréquents allers-retours entre les deux capitales, est incontournable. Ce proche de Bozizé est l’un des fils du colonel Roger Pereira, ancien directeur du protocole de Denis Sassou Nguesso puis de Pascal Lissouba, devenu un entrepreneur prospère en Guinée équatoriale, où il est lié à la famille du président Obiang Nguema Mbasogo. ●

VINCENT FOURNIER/J.A.

concurrents malheureux, dont l’indien Bharti Airtel et le consortium camerounocoréen TSI, contestent en effet la régularité de l’appel d’offres. Premier visé: Jean-Pierre Biyiti bi Essam, le ministre des Télécommunications. Tous soupçonnent une collusion entre le ministre et le groupement Maas Telecom/Avilyos, cabinet recruté de gré à gré par le ministre – en dépit des mises en gardes du Premier ministre – pour conseiller le gouvernement dans cette opération.

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La semaine de Jeune Afrique

ESCLAVAGE

Affaire non

classée

Une descendante d’esclave veut assigner l’État français pour crime contre l’humanité. Objectif : obtenir réparation pour le préjudice dont elle s’estime toujours victime.

HABY NIAKATE

C

est une démarche inédite en France. Une descendante d’esclave,RositaDestival,aannoncé le 8 janvier son intention d’attaquer, à titre personnel, l’État français pour crime contre l’humanité, l’esclavage étant reconnu comme tel depuis la loi Taubira du 21 mai 2001. Guadeloupéenne installée en métropole, Rosita Destival (51 ans) veut obtenir « réparation » pour le préjudice « moral, affectif, psychologique et matériel » causé à son aïeul, esclave affranchi en 1834, et dont elle estime être toujours victime aujourd’hui. Et par « réparation », elle n’en exclut aucune, qu’elle soit morale ou financière. « En tant que femme noire, j’exige des réparations. J’y ai droit », déclare-t-elle dans une vidéo, sur fond de Marseillaise. Rosita Destival est vice-présidente du Mouvement international pour les réparations (MIR), une association qui « défend l’honneur et le droit à réparation » des descendants d’esclaves. Cette dernière avait elle-même déposé une plainte similaire contre la France en 2005 – qui n’a toujours pas abouti. Dans sa démarche, la militante est soutenue par plusieurs associations, dont la Brigade antinégrophobie et le Conseil représentatif des associations noires de France (Cran). Le Cran trouve ici une occasion rêvée de remettre la question N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

L’esclavage français entre 1650 et 1848

6 000 000* Nombre total de déportés

1 000 000

Esclaves parvenus à destination

(dont 750 000 en Haïti, 250 000 dans les Caraïbes, en Guyane et à la Réunion)

248 000

Esclaves comptabilisés lors de l’abolition, en 1848 * Les historiens estiment que, pour 1 esclave débarqué, 5 mouraient.

! ROSITA DESTIVAL annonce son intention de porter plainte lors d’une conférence de presse organisée par le Cran, à Paris, le 8 janvier.

des réparations sur le devant de la scène, après le quasi-camouflet que lui a infligé l’exécutif. Le 12 octobre 2012, en visite à Dakar, François Hollande avait exclu toute notion de « réparations financières », contredisant les informations parues dans la presse, qui se fondaient en grande partie sur les affirmations du Cran. L’association soutenait que Matignon était « ouvert » à une réflexion sur tous les types de réparations et s’était engagé à tenir une réunion interministérielle sur le sujet. En ce début 2013, Matignon indique qu’il n’a jamais été question de tout cela. « Ils disent tout et le contraire de tout, s’insurge Louis-Georges Tin, le président du Cran. Il y a eu contradictions, cafouillages et mensonges. » « La plainte a plus de chances d’aboutir lorsqu’elle émane d’une personne physique. C’est pour cela que nous JEUNE AFRIQUE


VINCENT ISORE

avons préféré soutenir cette voie judiciaire, plutôt que de porter plainte en tant qu’association », poursuit-il. Rosita Destival devrait aussi bénéficier d’un pool d’avocats. « C’est une grande cause que nous défendons, s’exclame l’un d’eux, Me Gill WandjiKemadjou, du barreau de Paris. Aujourd’hui, il est tout à fait naturel que des personnes demandent à ce que la situation soit réparée. » Pour lui, le principe de la continuité de l’État prévaut. Ainsi, les gouvernants actuels seraient-ils dans l’obligation de répondre des actes commis par leurs prédécesseurs. « On nous oppose que la nouvelle génération n’a rien à voir avec tout cela. Mais, à l’époque, les esclavagistes ont agi au nom de l’État français, donc celui-ci doit répondre », conclut l’avocat. JEUNE AFRIQUE

ELIKIA M’BOKOLO, historien d’origine congolaise

« L’État français est le premier accusé, il pourrait y en avoir d’autres. Le Bureau des migrations des départements d’outre-mer, par exemple, mériterait que la justice s’y intéresse. » Outre cette plainte, les associations prévoient de déposer une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), qui permet à tout justiciable français de contester la constitutionnalité d’une disposition législative lors d’un procès. Celle-ci viserait le décret de 1848, qui a aboli l’esclavage en France tout en prévoyant des indemnisations pour les propriétaires d’esclaves. « Cette QPC ● ● ● N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013


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La semaine de J.A. L’événement CLAUDE RIBBE, écrivain français

Sceaux, écrivait : « J’avais clairement conscience que cet article était pour les institutions la souche embarrassante, le chicot d’arbre au milieu du « Plutôt Plutôt que d’engager des procédures qui n’ont chemin. » Il sera modifié, et la notion de réparaaucu aucune cune chan chance d’aboutir, les descendants tion retirée, pour permettre l’adoption du texte. d’escl d’esclaves clav aves de Fr France devraient exiger un plan de « La loi Taubira a été vidée de sa substance. Nous voulons la compléter. À défaut de pouvoir le faire lutte te ambitieux amb contre l’une des plus graves au niveau législatif, en essayant de créer une jurisséquelles quelles de l’esclavage, le racisme. » prudence », déclare Franco Lollia, porte-parole de la Brigade antinégrophobie. La plainte de Rosita Destival devrait formellei lo Ce que dit la 01 ment être déposée dans le courant du premier ● ● ● est primordiale. Elle remettrait en cause ce me décret, qui a fait de l’esclavage un crime plus trimestre 2013. En attendant, « Rosita appelle tous tr Taubira de 20grière ite né que parfait, puisqu’il y a bien eu des réparales descendants français d’esclaves à se joindre le Elle qualifie la tra « crime tions, mais pour les coupables ! » précise Tin. massivement à la procédure. Nous espérons ma et l’esclavage de 1) ité » (article ouvrir une brèche et voir d’autres Rosita venir ou contre l’human ogrammes et appelle les pr d’un peu partout ! » ajoute Me Kemadjou. BRÈCHE. La question des « réparations » a toud’ s rder à ce scolaires à acco jours été épineuse. Pourtant, celles-ci étaient Mais déjà, avocats et experts s’affrontent sur place qu’ils événements « la prévues dans la première version de la loi la validité de cette plainte et de la QPC. Ontle 2). Les méritent » (artic Taubira, dont l’article 5 stipulait: « Il est instauré elles des chances d’aboutir ? Peut-on chiffrer nt oie év pr autres articles un comité de personnalités qualifiées chargées le préjudice lié à l’esclavage, surtout au cas par on ati ur sta l’in nt notamme de déterminer le préjudice subi et d’examiner cas ? Et si oui, qui en serait chargé ? Comment mmémoration d’une date de co age lav sc peut réagir l’État français si cette plainte en les conditions de réparations dues au titre de l’e de on de l’aboliti nt de cette entraîne une cascade d’autres ? Le casse-tête ce crime. Les compétences et les missions de me se gis lar l’é et e au niveau ce comité seront fixées par décret en Conseill juridique se profile. « Le combat sera très reconnaissanc l. na d’État. » Dans son autobiographie, Mes météores es long. Nous y sommes préparés », avertit tio na er int (2012), Christiane Taubira, aujourd’hui garde des Me Kemadjou. ●

RÉPARATIONS

Ce que l’Amérique et les autres doivent aux Noirs Quelques entreprises ayant jadis tiré profit de la traite négrière font leur mea culpa et financent des projets sociaux en faveur des descendants d’esclaves. Une goutte d’eau dans un océan d’injustice.

A

ux États-Unis, l’esclavage a été aboli en 1865, sous la présidence du républicain Abraham Lincoln. Mais l’idée de faire payer ceux qui avaient profité du système depuis l’arrivée des premiers Africains sur le sol américain en 1619 n’est pas nouvelle. On la retrouve notamment sous la plume du pasteur Martin Luther King dans Why We Can’t Wait (« Pourquoi nous ne pouvons pas attendre »), un livre paru en 1963, en pleine lutte pour les droits civiques. Elle inspirera d’autres militants africainsaméricains, à l’instar de l’avocat Randall Robinson, auteur, en 2001, de The Debt: What America Owes to Blacks (« La Dette: ce que l’Amérique doit aux Noirs »). En 2002, l’exigence d’une réparation financière prend de l’ampleur lorsqu’une plainte collective est déposée contre des sociétés ayant, dans le passé, tiré profit de l’esclavage. Le but n’est pas d’obtenir des indemnisations individuelles, mais des compensations pour réaliser des N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

projets sociaux en faveur des AfricainsAméricains. Cette action menée, entre autres, par l’avocate et militante newyorkaise Deadria Farmer-Paellmann réveille quelques consciences. Ainsi, la ville de Chicago adopte, en 2003, une

de 11 millions d’esclaves au fil des siècles, augmenté des réparations et intérêts). La Grande-Bretagne a adopté une démarche différente. En 2006, Tony Blair, alors Premier ministre, s’était contenté de condamner la traite négrière sans présenter la moindre excuse. En août 2009 cependant, Les banques JPMorgan Chase, le gouvernement britanLehman Brothers et Wachovia nique a décidé d’accorder sont passées aux aveux. 600000livres(734000euros) à l’University College de disposition enjoignant aux entreprises Londres afin qu’il lance un programme qui travaillent pour elle d’enquêter sur de recherche destiné à déterminer le leur passé. Plusieurs banques, comme montant des sommes retirées du comJPMorgan Chase & Company, Lehman merce des esclaves. Brothers ou Wachovia Bank, passent aux Reste une anomalie bien française : aveux. La Morgan Chase va plus loin en Haïti. Pour avoir arraché son indépenaffectant 5 millions de dollars à un prodance et aboli l’esclavage, ce pays a gramme de bourses d’études destinées été contraint par la France à lui verser, à des Africains-Américains. de 1825 à 1946, l’équivalent de 17 milliards Les militants, eux, continuent à se battre d’euros. Pour dédommager les anciens pour une « dette » estimée à 1400 milliards propriétaires d’esclaves ! ● de dollars (représentant le travail gratuit TSHITENGE LUBABU M.K. JEUNE AFRIQUE



La semaine de J.A. Décryptage

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Olfa Riahi Signé Zorro Cette intrépide blogueuse tunisienne accuse le chef de la diplomatie d’avoir pris ses aises dans un hôtel de luxe au frais de son ministère. Il fait désormais l’objet d’une enquête judiciaire.

conscience après l’immolation de Mohamed Bouazizi, qui fut à l’origine du soulèvement contre le raïs. À 29 ans, l’inconnue d’hier devient un personnage public. Touche-à-tout, elle se définit comme « un grand voyageur qui ne descend d’un train que pour en prendre un autre et ne reste jamais en attente sur un quai ». Elle s’essaie à la radio sur Express FM, se répand sur les réseaux sociaux tout en gérant un centre de services multilingues, dont elle est cofondatrice, et la Tunis Miami Art Connection, spécialisée dans les relations publiques avec les États-Unis.

FETHI BELAID/AFP

BETTY BOOP. Olfa cultive aussi une allure

! L’EX-FÊTARDE BRANCHÉE s’est découvert une passion pour l’investigation.

P

as de chance pour Rafik Abdessalem, chef controversé de la diplomatie tunisienne et célèbre pour ses maladresses. La carrière de celui qui soutenait avec arrogance, il y a quelques mois, que la Tunisie avait 500 km de côtes (1 298 en réalité…) semble compromise. Il se retrouve au cœur du Sheraton Gate, un scandale révélé par Olfa Riahi. Le 26 décembre dernier, cette ancienne diplômée de l’Institut des hautes études commerciales de Carthage (HEC) convertie au journalisme dévoile sur son blog, documents à l’appui, que le gendre de Rached Ghannouchi, président du parti Ennahdha (au pouvoir), a fait payer à son ministère six nuitées et des frais de blanchisserie personnels facturés par l’hôtel Sheraton de Tunis. Il aurait en revanche réglé sur ses propres deniers la chambre occupée par une femme, qui serait une cousine.

Abdessalem, qui avait joué les modestes en juillet 2012, lors du 9e congrès d’Ennahdha, en dormant à même le sol, dispose pourtant d’un logement de fonction au ministère – situé de surcroît juste en face de l’hôtel de luxe. Pour des médias à l’affût d’informations croustillantes et une opinion conservatrice et très regardante en matière de bonne gouvernance, ces révélations ont eu l’effet d’une bombe et ont projeté Olfa Riahi sous les feux de l’actualité. TOUCHE-À-TOUT. Pourtant, rien ne la

prédestinait à une telle exposition médiatique. Jusqu’en décembre 2010, elle s’était surtout distinguée par son goût pour la fête et ses amitiés dans les milieux branchés tunisois, allant jusqu’à déclarer que Ben Ali était « génial ». Sur son blog, elle proteste aujourd’hui de sa bonne foi et raconte sa prise de

décalée. Cheveux courts, toute en courbes voluptueuses, la Betty Boop version bobo de la Toile tunisienne joue les candides en politique. Il n’empêche: première à dévoiler l’affaire des blogueurs de Mahdia jugés pour athéisme, elle s’est découvert une passionpourl’investigation.Maisdansune période aussi trouble, on se fait vite une réputation sulfureuse. Ainsi, dans l’affaire du Sheraton, certains assurent qu’elle a été instrumentalisée par le Congrès pour la République (CPR), parti de la troïka gouvernementale qui avait attiré de nombreux jeunes sensibles aux élans révolutionnaires et qui, à la veille d’un remaniement ministériel majeur, souhaite récupérer un ministère régalien. Le deuxième coup porté par Olfa Riahi à Rafik Abdessalem semble étayer cette thèse. La blogueuse révèle qu’un don de 1milliondedollarsfaitparlaChinen’aurait pas été reversé par le ministère des Affaires étrangères dans les caisses de l’État. Celle qui a pourtant formulé ses accusations au conditionnel se trouve aujourd’hui interditede quitterle territoire et soumise à une enquête pour « diffamation, intention de nuire à autrui et diffusion de fausses informations de nature à troubler l’ordre public ». Sûre de son fait, Olfa Riahi affirme avoir atteint son objectif: l’ouverture d’une enquête judiciaire contre le ministre. ● FRIDA DAHMANI, à Tunis

NOMINATIONS

MAHAMAT IDRISS DÉBY ITNO ARMÉE TCHADIENNE Le fils du chef de l’État a été nommé, le 9 janvier, général de brigade à titre exceptionnel sur décret du président Idriss Déby Itno. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

KANTÉ KOLY CÔTE D’IVOIRE L’Ivoirien a été élu, le 7 janvier, président du conseil d’administration du Port autonome d’Abidjan. Jean-Baptiste Kouamé Kouamé, quant à lui, prend la tête du Port autonome de San Pedro. JEUNE AFRIQUE


EN HAUSSE

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JACK LANG

Alice Nkom « Gay pride »

L’ancien ministre français de la Culture a été proposé par Paris à ses pays partenaires arabes pour présider l’Institut du monde arabe, basé dans la capitale. L’ex-responsable socialiste devrait être nommé le 25 janvier.

L’avocate a obtenu l’acquittement de deux travestis. Une première au Cameroun.

E

BEYONCÉ « Femme la plus sexy du XXIe siècle » selon le magazine américain GQ, la chanteuse a été choisie, le 9 janvier, pour interpréter l’hymne national des États-Unis lors de la cérémonie d’investiture de Barack Obama le 21 janvier. JEANNOT AHOUSSOU KOUADIO

EN BAISSE

ISSAM JEMAA L’attaquant international tunisien a été désigné Ballon de plomb 2012 par les lecteurs du mensuel en ligne Les Cahiers du football. Depuis 2003, ce trophée « récompense » chaque année le pire joueur de la saison en France. HAMZA BENDELLADJ Ce pirate informatique algérien, recherché depuis trois ans par le FBI, qui le suspecte d’avoir volé des millions de dollars à des banques américaines, a été arrêté à Bangkok, a indiqué le 7 janvier la police thaïlandaise.

CLARISSE JUOMPAN-YAKAM

! CONTRE L’HOMOPHOBIE, la corruption, le sida… Elle est de tous les combats.

JÉRÔME CAHUZAC

DR

THOMAS LOUAPRE - BABEL

L’ex-Premier ministre ivoirien a été nommé, le 9 janvier, ministre d’État auprès du président de la République. Si ses attributions n’ont pas encore été précisées, il pourrait être chargé de relancer le dialogue avec l’opposition.

DR

lle « regrette un peu » de pavoiser, mais dit ne pas pouvoir s’en empêcher. En collaboration avec la Suisse Saskia Ditisheim, du barreau de Genève, et son compatriote Michel Togué, Alice Nkom, 68 ans, a remporté le 7 janvier une victoire éclatante contre l’homophobie au Cameroun : l’acquittement en appel de Franky et Jonas, deux travestis condamnés en première instance à cinq ans de prison, dans un pays qui passe pour l’un des plus répressifs du continent sur cette question. Du baume au cœur pour la première Camerounaise avocate – elle a prêté serment en 1969 –, et un pied de nez à ceux qui ont applaudi la confirmation en appel, le 17 décembre 2012, de la condamnation à trois ans de prison d’un autre de « [ses] enfants », Roger Mbédé. Sacrée « Africaine d’exception 2012 » par le magazine américain The New Yorker, Alice Nkom s’est lancée dans la bataille il y a dix ans. Son engagement remonte à sa rencontre avec un couple gay, à qui elle recommande d’abord – « lâchement », dit-elle – de « se montrer prudent », avant de se raviser et de prendre fait et cause pour les homosexuels. Dès lors, elle arbore une double casquette d’avocate et d’activiste, créant une association pour la défense de leurs droits, l’Adefho. Mère de deux enfants (une fille et un fils, pilote à Camair-Co) et huit fois grand-mère, Alice Nkom sait que son combat met les siens en danger, mais jure avoir leur bénédiction. Pas question de reculer, en dépit des menaces de mort dont elle fait l’objet et de l’indifférence des autorités, qui n’ont même pas ouvert d’enquête après le dépôt de sa plainte il y a trois mois. Elle puise le courage de continuer « dans la force de [ses] convictions » et dans le soutien de la communauté internationale. Présente sur d’autres fronts (droits des femmes, corruption, sida…), l’avocate dit ne pas connaître la peur. Certes, aucune ambassade occidentale ne lui refuserait un visa. Mais, se jugeant « plus utile au Cameroun », elle ne partira pas. Du moins tant qu’elle n’aura pas obtenu la dépénalisation de l’homosexualité. ●

Le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire pour « blanchiment de fraude fiscale » à la suite des affirmations du site mediapart.fr accusant le ministre français délégué au Budget d’avoir détenu un compte en Suisse. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013


La semaine de J.A. Décryptage

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Sénégal L’étau se resserre autour de Wade Un homme de confiance de l’ancien président a été inculpé de détournement de deniers publics. Règlement de compte politique ou nouvelle pièce à verser au dossier des « biens mal acquis » ?

et de le distribuer. Lors de son passage à Dakar, il devait notamment rembourser les dettes que Wade a contractées auprès de deux de ses amis et anciens ministres afin de payer les salaires des membres de uSénégal,pasunesemainene de blanchiment d’argent et de détourneson cabinet (23 personnes) et de couvrir passe sans que la saga judiment de deniers publics. Il a été placé certaines dépenses datant de la dernière ciaire de la traque aux « biens sous mandat de dépôt. campagne électorale: Samuel Sarr (à haumal acquis » ne connaisse un Pour le Parti démocratique sénégalais teur de 1,37 million d’euros) et Madické nouvel épisode. Après la séquence Karim (PDS), dont Sylla est membre du comité Niang (à hauteur de 600 000 euros). directeur, il s’agit d’une nouvelle preuve Wade, durant laquelle l’ancien ministre a Cette version des faits est pour l’heure été auditionné à plusieurs reprises par les de la « persécution » dont ses cadres se invérifiable. « L’argent peut tout aussi bien enquêteurs et s’est vu refuser le droit de disent victimes. « Le pouvoir veut tuer être planqué sur un compte depuis des quitter le territoire, c’est désormais son années », persifle un député de la majorité. Pour l’entoupère, l’ancien président Abdoulaye Wade, « Le pouvoir veut tuer notre parti, rage de Wade, elle est « la qui fait l’objet de toutes les attentions. s’insurge un ancien ministre. preuve qu’il n’est pas aussi Dans la nuit du 31 décembre 2012 Dans cette histoire, il n’y a rien ! » riche qu’on le dit ». Les au 1er janvier 2013, un de ses hommes mêmes sources affirment de confiance, l’ancien député Alioune qu’une attestation de la banque dans Aïdara Sylla, a été intercepté à l’aéroport notre parti, dénonce un ancien ministre. laquelle auraient été versés les fonds de de Dakar en possession de chèques dont Mais dans cette histoire, il n’y a rien! C’est les montants totaliseraient 4,5 millions beaucoup de bruit pour rien. » l’émir prouvant la régularité de l’opération d’euros. En sa possession également : un Selon l’entourage de Wade, cet argent a été transmise aux enquêteurs. mandat de l’ex-chef d’État lui donnant proviendrait d’un don fait par un émir du Golfe, « proche d’un roi », il y a quelques le pouvoir d’utiliser ces chèques, soit ENQUÊTE PRÉLIMINAIRE. L’ancien mois. Promis en mai 2012 lors de la derpour rembourser des dettes, soit pour président peut-il être inquiété ? Non, finir les travaux de sa maison familiale nière visite de l’ex-chef d’État en Arabie rétorque-t-on au ministère de la Justice, située à Dakar et la construction d’une saoudite, à l’occasion du petit pèlerinage, pas plus dans cette affaire que dans autre de ses maisons à Touba, soit pour l’argent aurait été versé en septembre sur celles qui concernent son fils et ses acheter du matériel à Dubaï. À l’issue de le compte d’une banque de Dubaï, en anciens ministres. L’article 101 de la son audition par un juge d’instruction le dirhams. Sylla, qui y possède une entreConstitution est très clair : « Le président 7 janvier, l’homme d’affaires a été inculpé prise, aurait été chargé de le récupérer de la République n’est responsable des actes accomplis dans l’exercice de ses Ü ABDOULAYE WADE est visé par une plainte déposée en France par l’État du Sénégal. fonctions qu’en cas de haute trahison. » En d’autres termes : il jouit d’une immunité presque totale. Mais Wade, qui vit à Versailles, en France, depuis six mois, n’est pas à l’abri partout. Ainsi, la plainte déposée dans ce pays fin novembre par l’État du Sénégal pour recel de détournement de fonds publics, recel d’abus de biens sociaux et recel de corruption le vise explicitement (ainsi que son fils, Karim). Dans cette demande d’information judiciaire, il est soupçonné de posséder, outre la maison de sa belle-famille à Versailles, plusieurs biens immobiliers à Paris (dans les 14e, 16e, 17e et 20e arrondissements). Charge a été donnée aux limiers de l’Office central pour la répression de la grande délinquance financière de le vérifier dans le cadre d’une enquête préliminaire ouverte en décembre. ●

SEYLLOU/AFP

A

RÉMI CARAYOL N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

JEUNE AFRIQUE


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Syrie Odeurs de soufre

JEUNEAFRIQUE.COM

Les Occidentaux redoutent que Bachar al-Assad emploie des armes chimiques pour mater l’insurrection. Craintes fondées ou intox ?

OLIVIER PAPEGNIES/LE SOIR

VIDÉO

Denis Mukwege, chirurgien congolais et militant des droits de l’homme : « Au Kivu, le viol demeure une véritable stratégie de guerre »

! COMBATTANT REBELLE dans un quartier d’Alep, le 7 janvier.

I

l détruit son peuple et son pays depuis près de deux ans. Dans une tentative désespérée d’échapper à son funeste sort, Bachar al-Assad utilisera-t-il ses armes chimiques ? Rien ne semble arrêter la fuite en avant de son régime, qui, après avoir envoyé ses tanks contre les contestataires, a déployé son aviation et ses missiles. Des membres des services spéciaux occidentaux se tiendraient aux frontières, prêts à intervenir pour neutraliser l’arsenal. En décembre 2012, le Sunday Times a écrit que des commandos israéliens étaient déjà dans le pays pour surveiller les stocks de gaz moutarde, sarin ou VX que Damas avait, en juillet, pour la première fois avoué détenir. Quelques jours plus tôt, Nawaf Farès, un diplomate syrien passé à l’opposition, avait averti que le régime « n’hésiterait pas à en faire usage », Damas rétorquant que ces armes chimiques « ne seraient jamais utilisées contre [ses] citoyens », mais pourraient l’être en cas d’intervention étrangère. Une intervention dont Washington et ses alliés menacent justement la Syrie en cas de recours aux gaz… Pour Ziad Majed, spécialiste du MoyenOrient, la posture occidentale est en JEUNE AFRIQUE

grande partie déclaratoire: « Par manque de courage, l’Occident signifie que les massacres ne pèsent pas encore assez lourd pour provoquer une intervention. » Mais la crainte majeure reste que ces armes ne tombent entre de mauvaises mains, celles du Hezbollah libanais allié au régime et surtout des jihadistes qui le combattent. Nombre de spécialistes se montrent toutefois sceptiques, estimant que les stocks sont contrôlés par le régime, surveillés par les services de renseignements israéliens et occidentaux, et que les insurgés sont incapables de les utiliser. MENACE. Le 9 janvier, le Financial Times

a évoqué une autre menace : des experts auraient détecté « des mouvements sur ce qu’ils pensent être une installation secrète de transformation de l’uranium ». La Syrie disposerait de 50 tonnes de ce minerai, provenant de sa centrale d’AlKibar, détruite en 2007 par les Israéliens. Lesquels craignent que ce stock ne soit expédié chez l’allié iranien d’Assad. Mais les deux camps ne se livrent-ils pas à un grand bluff: les Occidentaux en menaçant d’intervenir, Assad en laissant croire qu’il est capable de tout ? ● LAURENT DE SAINT PÉRIER

SONDAGE

Vous êtes nombreux à avoir voté pour votre équipe favorite sur notre site. Voici les résultats* : 1. Côte d’Ivoire

30,82 %

2. Algérie

17,65 %

3. Maroc

10,51 %

Autres

41,02 %

À LIRE AUSSI

Nigeria : le gouvernement veut donner un téléphone à chaque fermier N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

*SONDAGE RÉALISÉ DU 25 OCTOBRE 2012 AU 10 JANVIER 2013. NOMBRE DE VOTANTS : 1 960.

OLIVIER VOISIN/AFP

DÉBAT

Paris-Dakar : pourYoussou Ndour, le rallye doit changer de nom ou revenir en Afrique après cinq éditions en Amérique du Sud. Venez en débattre avec nous sur jeuneafrique.com


La semaine de J.A. Décryptage

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BOUREIMA HAMA/AFP PHOTO

! À son arrivée au Niger, le 8 janvier, AVEC LE PRÉSIDENT MAHAMADOU ISSOUFOU.

Turquie-Afrique Erdogan fait son show Le Premier ministre turc débute l’année par une tournée à Libreville, Niamey et Dakar. Un signe de l’importance du continent pour Ankara.

E

n visite au Gabon, au Niger et au Sénégal du 7 au 10 janvier, le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan – flanqué de plus de 250 hommes d’affaires –, n’a pas caché les ambitions de son pays : resserrer les liens politiques et porter ses échanges commerciaux avec l’Afrique à 50 milliards de dollars (38 milliards d’euros) d’ici à 2015. Avec 19 milliards de dollars échangés en 2011, Ankara a déjà réussi à se tailler une place de choix, notamment en Afrique du Nord, qui compte pour 90 % de ce LE DESSIN DE LA SEMAINE

total. Présente dans l’agroalimentaire, l’industrie pharmaceutique, le textile, les biens de consommation et le BTP, la Turquie fait dans ce dernier secteur une percée remarquée au sud du Sahara depuis dix ans. Un succès facilité par la dévaluation de sa monnaie (la livre) en 2001, qui lui a permis de proposer des tarifs plus compétitifs, et par l’expansion de la compagnie aérienne nationale, Turkish Airlines. Le transporteur a annoncé fin 2012 le lancement de lignes reliant Istanbul à Niamey,

Ouagadougou,YaoundéetDouala,portant à trente-trois le nombre de ses destinations africaines. En termes d’aide, en revanche, la Turquie ne peut concurrencer la Chine et l’Europe: son agence de coopération et de coordination, Tika, n’a versé l’an dernier que 150 millions de dollars de subsides à l’Afrique subsaharienne. INCONTOURNABLE. Pour Ankara, le continent a aussi une grande importance politique – d’autant que sa candidature à l’entrée dans l’Union européenne piétine. Avec plus d’un quart des États membres des Nations unies, l’Afrique représente un réservoir de votes important, que la Turquie n’a pu ignorer lors de son élection en 2008 au Conseil de sécurité comme membre non permanent. Très impliqué pour la paix entre les deux Soudans, le pays cherche à s’imposer sur le terrain diplomatique. Il entend « devenir un interlocuteur incontournable en occupant des niches peu médiatisées, comme en Somalie, où Erdogan avait fait un discours remarqué à l’été 2011 » sur la situation politique, explique Didier Billion, directeur adjoint de l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) et spécialiste de la Turquie. Ankara accroît d’ailleurs le nombre de ses représentations en Afrique : ces trois dernières années, il y a ouvert 19 ambassades, portant leur nombre total à 25. ● MICHAEL PAURON

Van Dam • Pays-Bas ÉTATS-UNIS ENCORE UN EFFORT !

THE NEW YORK TIMES SYNDICATION

APRÈS LE MASSACRE de vingt enfants et six adultes par un déséquilibré dans une école de Newtown (Connecticut) en décembre, Barack Obama a chargé Joe Biden, son vice-président, de mener une réflexion sur la législation des armes à feu. Ce dernier pourrait proposer des contrôles d’identité plus stricts pour les acheteurs d’armes et l’interdiction des chargeurs de grande capacité. La National Rifle Association, puissant lobby proarmes, va-t-elle vaciller ? N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

JEUNE AFRIQUE


ILS ONT DIT

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le président péruvien, pour accueillir les 459 véhicules engagés dans la course et les quelque 700 concurrents qui y participent. Un manque à gagner pour le tourisme sénégalais donc, surtout pour la ville de Dakar, terminus d’antan du circuit. Car l’Africa Eco Race, qui a pris le relais depuis cinq ans, parcourant en partie le tracé initial du Paris-Dakar, ne bénéficie pas encore de la même renommée que son célèbre prédécesseur. Sa dernière course, qui s’est achevée le 9 janvier à 35 km au nord-est de Dakar, n’a vu concourir que 19 motards et une quarantaine d’équipages en autos et camions. Une question de label ? ● TRÉSOR KIBANGULA

DR

Unesco Un Djiboutien en lice APRÈS LE SÉNÉGALAIS AMADOUMAHTAR M’BOW en 1974, il pourrait être le deuxième Africain à prendre la tête de l’Unesco en novembre prochain. Le 8 janvier, poursuivant à Paris la tournée qu’il a entamée en septembre dernier en Afrique (RD Congo, Guinée équatoriale, Tunisie, Maroc, Gabon), le Djiboutien Rachad Farah a reçu les délégués permanents du groupe V (Afrique et États arabes) de cette organisation, ainsi que de nombreux ambassadeurs bilatéraux afin de s’assurer de leur soutien. Souhaitant d’abord recueillir leurs avis, il n’a pas détaillé son programme. Ambassadeur de son pays en France, et aussi auprès de l’Unesco, ce diplomate chevronné de 62 ans, accrédité en Asie de 1977 à 2004 (Japon, Inde, Chine…), est également ! RACHAD FARAH, vice-président du groupe africain au candidat au poste Conseil exécutif de l’Unesco. En vue de Directeur général. de l’élection de novembre, il a déjà reçu le soutien de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) et espère obtenir celui de l’Union africaine. Farah a toutes ses chances : alors que la Bulgare Irina Bokova, candidate à sa réélection, l’avait emporté en 2009 face à Farouk Hosni, l’ancien ministre égyptien de la Culture, le poste devrait cette fois revenir à un candidat du continent africain. ● JUSTINE SPIEGEL JEUNE AFRIQUE

« Demander ma démission ?

C’est le langage de tout hors-la-loi, la question n’a pas de sens. »

FRANÇOIS BOZIZÉ Président de la Centrafrique

« Comme en Égypte ou en Syrie, nous finirons par gagner. C’est le sens de l’Histoire. » NIMER AL-ASSAF Secrétaire général adjoint du Front d’action islamique, en Jordanie (où des législatives sont prévues le 23 janvier)

« Nous sommes passés d’un monde où ce qui était cher et rare, c’était le capital. Aujourd’hui, le capital, l’argent, est bon marché. Le facteur rare, c’est le talent. » KLAUS SCHWAB Président du Forum économique mondial de Davos, qui doit se tenir du 23 au 27 janvier

« Je vais quitter la voie rapide pour un petit moment, mais je n’utiliserais pas encore le mot “retraite”. » HILLARY CLINTON Secrétaire d’État américaine (sur le départ)

« Dans un monde de géants, la taille compte. En 2050, aucune économie européenne ne figurera dans le top 10 des économies mondiales. » JOSÉ MANUEL BARROSO Président de la Commission européenne

EU 2012

PAS DE RETOUR en Afrique, pas de Dakar. Et ce n’est pas une plaisanterie. Youssou Ndour ne supporte plus que le rallye-raid, délocalisé depuis 2009 en Amérique latine, conserve le nom de la capitale sénégalaise. Pour lui, le circuit ne peut garder le label Dakar « en ne parcourant pas l’Afrique », avance Charles Faye, l’un de ses conseillers. Le coup de gueule du ministre sénégalais du Tourisme intervient quelques jours seulement après le lancement à Lima du Dakar 2013, qui traverse, du 5 au 20 janvier, le Pérou, l’Argentine et le Chili. Un « village Dakar » de 15 000 m2 a même été construit en bordure du Pacifique par Ollanta Humala,

VINCENT FOURNIER/J.A.

Sénégal Touche plus à mon Dakar


La semaine de J.A. Tour du monde CHINE

flanqué de Jared Cohen, l’un des dirigeants de la firme avec lequel il s’apprête à écrire un livre, et de Bill Richardson, ancienambassadeuraméricain à l’ONU et grand spécialiste du dossier nord-coréen ? Seule certitude : il s’agissait officiellement d’un voyage privén’impliquantniGoogleni les États-Unis. Ceux qui croient à une prochaine ouverture économique du régime désormais dirigé par Kim Jong-un y trouveront matière à conforter leurs espérances. Mais l’administration Obama n’a pas apprécié cette « erreur de timing ».

Adieu au goulag

L

E GOULAG CHINOIS VA « disparaître dans les poubelles de l’Histoire ». C’est la stupéfiante nouvelle rapportée le 7 janvier par l’agence officielle Chine nouvelle. Un peu plus tôt dans la journée, Meng Jianzhu, membre du Bureau politique du PCC, avait annoncé qu’« après approbation de l’Assemblée nationale populaire, il sera mis un terme cette année au système de rééducation par le travail ». Une série de dépêches allant dans le même sens se sont alors succédé, avant de disparaître totalement des médias en fin de journée, laissant planer le doute sur les réelles intentions des autorités. Le système des laogai avait été créé en 1957 par Mao Zedong sur le modèle du goulag soviétique. De source officielle, il y aurait en Chine quelque 350 camps, où travailleraient plus de 2 millions de détenus. Véritables unités économiques, les laogai rapportent chaque année près de 200 millions d’euros à l’État. Pour Xi Jinping, le nouveau maître de Pékin, leur suppression serait une manière d’accroître sa crédibilité réformatrice dans l’opinion. ●

ARGENTINE - ROYAUME-UNI

Boycott or not boycott ?

XDKB

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! DÉTENUES D’UN CAMP DE RÉÉDUCATION PAR LE TRAVAIL, à Jurong, dans la province du Jiangsu (Est). INDE-PAKISTAN

Morts dans l’Himalaya LE 6 JANVIER, un soldat pakistanais a été tué et un autre blessé par des militaires indiens au Cachemire, province frontalière que se disputent les deux pays. Selon New Delhi, qui dénonce un acte « hautement provocateur », l’échangedecoupsdefeuaurait été provoqué par une intrusion pakistanaise en territoire indien. Ce qu’Islamabad dément formellement. Cet incident de frontière brise le fragile cessez-le-feu instauré en 2003. Depuis 1947, le N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

différend territorial entre les deux pays dans cette région de l’Himalaya a déjà été à l’origine de deux guerres. ÉTATS-UNIS

Giffords monte au front GRAVEMENT BLESSÉE dans une fusillade à Tucson, Arizona, il y a deux ans, l’ancienne parlementaire démocrate Gabrielle Giffords fait campagne en compagnie de son mari, l’astronaute Ma rk Ke l l y , c o n t re l a National Rifle Association, le tout-puissant, parce que richissime, lobby des armes à feu, et pour l’instauration

d’une réglementation plus sévère en la matière (30 000 personnes sont tuées par balle chaque année aux États-Unis). Le 8 janvier, elle s’est rendue à Newtown, Connecticut, où, le 14 décembre 2014, un déséquilibré a tué vingt enfants âgés de 6 à 7 ans dans une école. CORÉE DU NORD

Drôles de touristes QU’ESTCE QU’ERIC SCHMIDT, le patron de Google, est allé faire en Corée du Nord, ce véritable « trou noir » de l’internet, où il a débarqué le 7 janvier

ENPLEINEGUERRE VERBALE  avec le Royaume-Uni à propos des Malouines, le gouvernement argentinaappeléauboycottdes entreprisesanglo-saxonnes.Or le quotidien The Sun vient de révéler que Cristina Kirchner avaitlouéunavionbritannique lorsd’unvoyageofficielenAsie, début janvier. La présidente s’est défendue en invoquant la crainte d’une nouvelle saisie après celle de la frégate Libertad, au Ghana, suite à un différend avec un fonds d’investissement spéculatif, mais l’incident est quand même fâcheux. BIRMANIE

Des bombes pour les Kachins DANS LE NORD DE L A BIRMANIE, les combats entre l’armée et la minorité kachin redoublent de violence depuis Noël. Des avions de combat auraient même, pour la première fois, été utilisés, déclenchant les JEUNE AFRIQUE


ARRÊT SUR IMAGE

DEPARTMENT OF STATE • SIPA

ÉTATS-UNIS

Le phénix en tailleur rose HILLARY CLINTON va mieux. Hospitalisée d’urgence le 30 décembre, après une thrombose consécutive à une chute, Hillary Clinton est rapidement rentrée chez elle et a repris ses activités au département d’État dès le 7 janvier (on sait qu’elle sera remplacée dans le courant de ce mois par John Kerry). Facétieux, ses collaborateurs lui ont offert un casque de footballeur américain – dans l’hypothèse d’une nouvelle chute – et un maillot portant le numéro 122, comme le nombre effarant de voyages à l’étranger qu’elle a effectués depuis quatre ans.

protestations de la Chine, dont certains territoires auraient été bombardés par erreur. Selon les rebelles, des armes chimiques auraient également été utilisées. Le 6 janvier, Aung San Suu Kyi, la Prix Nobel de la paix, a rompu un silence jugé « inapproprié » par le magazine Irrawaddy. Mais elle s’est bornée à déclarer qu’elle ne prendrait pas parti sans l’aval du gouvernement. VENEZUELA

Une aussi longue absence RÉÉLUÀLAPRÉSIDENCE en octobre 2012 et hospitalisé depuis un mois à JEUNE AFRIQUE

LE CHIFFRE

18,82 MILLIONS

DE CHÔMEURS RECENSÉS en novembre 2012 dans la zone euro, selon Eurostat. Soit 2 millions de plus qu’à la même période de l’année précédente. Dans l’ensemble de l’Union européenne, le chiffre est de 26,06 millions.

Cuba, Hugo Chávez n’a pas pu rentrer à Caracas pour prêter serment le 10 janvier. Plusieurs chefs d’État latinos, au premier rang desquels le Bolivien Evo Morales, avaient pourtant fait le déplacement, tandis qu’une grande manifestation de soutien au Comandante était organisée par les autorités. Le tribunal suprême de justice a validélereportdelacérémonie à une date ultérieure, décision

jugée anticonstitutionnelle par l’opposition. Nicolás Maduro, le vice-président, continuera doncd’exercerlespouvoirsque Chávez lui a délégués. ROYAUME-UNI

Émeutes à Belfast LADÉCISION,purement administrative, prise le

3 décembre par le conseil municipal de Belfast, capitale de l’Ulster, la province britannique d’Irlande du Nord, de ne plus faire flotter en permanence l’Union Jack au fronton de la mairie a été ressenti par les jeunes protestants comme une provocation. Depuis, chaque nuit ou presque, ils balancent bouteilles, briques, cocktails Molotov et fumigènes sur les forces de l’ordre, ce qui constitue une étrange façon de montrer leur attachement au maintien de la province d a n s l e R oyau m e - Un i . La guerre entre loyalistes protestants et républicains catholiques a duré trente ans. Un accord de paix a été conclu en 1998, mais reste, à l’évidence, fragile. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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Très chères

études Bon nombre de hauts dignitaires subsahariens confient leurs enfants à de prestigieuses – et onéreuses – écoles privées suisses, françaises, belges… Reportage dans ces établissements scolaires haut de gamme.

FRAIS DE SCOLARITÉ ET D’INTERNAT POUVANT DÉPASSER LES 60 000 EUROS PAR AN, enseignants triés sur le volet venus pour certains des États-Unis, cours dispensés en français et en anglais, bâtiments impeccablement entretenus, activité golf ou équitation le mercredi… Voici le régime auquel sont soumis quelques centaines de jeunes élèves subsahariens venus en Europe pour étudier. Cette progéniture choyée de chefs d’État, de ministres, de banquiers et d’entrepreneurs marche sur les traces des « petits Mobutu » et des « enfants Houphouët-Boigny » envoyés à Bruxelles, en Suisse ou en France durant les années 1970-1980. Même univers aseptisé, même exigence d’excellence. Nous sommes loin du lycée en sureffectif de Pikine, en banlieue de Dakar, à mille lieues des collèges délabrés de Masina, à Kinshasa. Mais nous sommes en Afrique… un peu. Voyage dans un monde de privilégiés appelés à être les élites de demain. ● PHILIPPE PERDRIX

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epuis Genève, il suffit d’effectuer une dizaine de kilomètres pour accéder au Collège du Léman. Au milieu de paysages champêtres, cet établissement niché au pied du massif enneigé du Jura a été fondé en 1960, sous le signe de l’excellence et du cosmopolitisme. Les élèves viennent d’horizons très variés, et l’institution se vante d’accueillir 110 nationalités. Des Suisses bien sûr, mais aussi des Américains, des Japonais, des Hollandais, ou encore des Gabonais, des Camerounais et des Nigérians. Constituant « une proportion de 5 % à 10 % à vue d’œil », selon Yves Thézé, le directeur général de l’établissement, la « communauté africaine » est bien présente. Mais qui sont ces Africains, si nombreux en pays helvète? Selon Yves Thézé, ils sont essentiellement originaires d’Afrique francophone. Il s’agirait de la progéniture de fonctionnaires d'organisations internationales siégeant à Genève. Mais VIP la plupart étant internes u superLe prix d – donc sans parents sur place–, l’argument peine France à convaincre. En réalité, ROCHES ÉCOLE DES à la différence de leurs 99 Création 18 camarades occidentaux, élèves 0 45 if ct Effe partir ces élèves africains sont, internat À Scolarité et généralement, les enfants ros de 18 000 eu estigieux de hauts dignitaires. s élèves pr

sà e 1 145 euro Scolarité D 2 130 euros ieux èves prestig Quelques él imba… Ond Ali Bongo

assimiler les connaissances) dans la matinée, trois dans l’après-midi. Une fois de retour à l’internat, elles sont complétées par une heure Suisse d’étude et une activité obligatoire. AN M LÉ U D E COLLÈG Le dîner précède une autre séance 60 Quelque Création 19 Teodorin de travail avant l’extinction des , go es on B èv e 0 él Famill l Effectif 2 20 ema, Marce ROI DU PÉTROLE. À tout feux, à 23 heures. Et s’il existait À partir at rn te in Obiang Ngu Scolarité et o… or S juste 15 ans, Samuella, une Suisse anglophone, le visiie sl ros et Le de 78 000 eu tigieux Bénino-Gabonaise, entame teur pourrait s’y croire tant la es pr es èv Quelques él da, Bokassa RTINsa classe de seconde au langue de Shakespeare domine A M an Tog B IN A es S Famill Brenda, ie as st E Collège du Léman après dans cette école internationale. na C A N DE-FRA et Mobutu, Théo Biya… et quatre années passées Le cursus, à la carte, prépare 29 or ni 19 n Ju l io Pau Créat élèves à l’école des Roches, en au baccalauréat français ou 0 10 1 if ct Effe Normandie(France).Comme international, à la maturité internat e Scolarité et Belgiqu s suisse (un certificat) ou à un elle, tous ses frères et sœurs ro eu 0 9 00 ieux OLIÈRE èves prestig él high school diploma. sont passés par des pensionM s E É ue C lq LY ue y, Q gn phouët-Boi natsprivéseuropéens,unchoix Le complexe scolaire n 1957 io at Enfants Hou ré a C am esso, Bir 0 de leur père, roi du pétrole sur est d’apparence ordinaire. 12 if James Ngu Wade… ct Effe im 000 euros 12 le continent. « Ce n’est pas une L’ensemble de bâtisses Konaré, Kar té ri la co S estigieux modernes, en bois, verre punition, car je sais qu’il n’y s élèves pr ue lq ue E Q R N NOT utu… et fer qui le composent a pas beaucoup d’enfants qui INSTITUTIO Famille Mob TE-CROIX IN A -S E -D ne correspond en rien ont la chance d’avoir un cadre DAME 56 au gigantisme et au style qui oblige au travail et à la réusCréation 18 0 élèves site », reconnaît la jeune fille, qui néoclassique des schools Effectif 2 10 anglo-saxonnes. Mais le préfère l’approche moderne du droit d’entrée n’a rien à leur envier. Comptez Collège du Léman à celle, plus entre 16 100 et 26 250 euros par an pour y inscrire « à l’ancienne », de l’école normande. Bonne élève selon la direction, Samuella votre « très cher » bambin en externat, et jusqu’à explique que le régime soutenu auquel elle est 61 500 euros en internat. Selon la direction – qui les assume de façon totalement décomplexée –, astreinte pousse à une certaine discipline : lever à ces coûts se justifient. Tout d’abord par les condi7 heures, petit-déjeuner, cinq « périodes » (cours tions de travail privilégiées dont bénéficient les de quarante minutes, durée jugée optimale pour N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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organisation quotidienne et sur le leadership. D’origines suisse, anglaise, américaine, canadienne ou néo-zélandaise, les professeurs sont enfin triés sur le volet. Un bon curriculum vitæ (CV) doit nécessairement être couplé à d’autres références, une expérience dans l’humanitaire par exemple.

pensionnaires : fournitures, vêtements de sport, uniformes… Ensuite par la qualité de l’enseignement. Allégées, les classes comptent en moyenne neuf élèves. Au-delà de la douzaine, on frôle le sureffectif. Avec 247 enseignants pour 2 200 étudiants, un tel ratio se comprend aisément. Outre les cours, l’étudiant dispose de plages horaires aménagées pour le soutien scolaire. Il reçoit aussi des formations sur son

! L’ÉTABLISSEMENT SAINT-MARTIN-DEFRANCE, près de Paris, accueille 34 Africains sur un effectif de 1 100 élèves.

ENFANTS BIYA. Gilson Malungo, un Angolais de 17 ans, parle un français parfait, en plus du portugais et de l’anglais. Il possède aussi quelques notions de japonais, acquises lorsque son père était ambassadeur au pays du Soleil levant. Après une année d’études, l’étudiant de grade 12 (équivalent de la terminale dans le système anglosaxon) fait à peu près le même constat de réussite que sa camarade. Passée l’appréhension de l’internat, il a vu sa moyenne générale augmenter de deux points au bout de quelques mois. Membre du Student Government, nom donné au comité des élèves, Gilson est l’interlocuteur favori de ses camarades africains, qui, selon lui, ont tendance à se regrouper par communautés. L’année précédente, il a connu les fils du président camerounais,PaulBiya:PaulJunior,quiaabrégéson cursus, ainsi que Théo, fils adoptif qui a lui achevé son parcours en grade 12. Au détour d’un couloir du bâtiment réservé à l’enseignement secondaire, il est possible de croiser leur sœur, Anastasie Brenda Biya Eyenga, qui poursuit ses études en grade 10. Yves Thézé, qui a eu pour élève l’un des fils de Nicolas Sarkozy lorsqu’il dirigeait le lycée français de New York, se défend d’accorder un traitement particulier à ces pensionnaires « VIP »: « J’ai toujours été soucieux de les considérer comme étant parfaitement normaux et j’ai la même considération ● ● ●

E

lle se définit comme une « Rocheuse », un statut que l’on conserve après avoir quitté l’école des Roches, en Normandie (France). À 21 ans, Sophie-Alexandra Aiachi constate que ce cursus ouvre de belles perspectives quand on sait transformer l’essai. « C’était un tremplin », résume la jeune Tunisienne. Après le bac, en 2009, elle poursuit par une classe préparatoire littéraire. Et fait ses débuts comme observatrice de la situation politique locale pour le New YorkTimes. Un parcours qui lui ouvre les colonnes du Huffington Post à Paris et du JEUNE AFRIQUE

quotidien tunisien LeTemps. Sujet favori, le Printemps arabe inauguré par la révolution survenue dans son pays. Et pourtant, l’étudiantechroniqueuse n’était pas forcément partie du bon pied. « Comme beaucoup de mes camarades inscrits aux Roches, je me suis trouvée là pour des problèmes de discipline », reconnaît-elle. Après une enfance passée aux ÉtatsUnis et àTunis, la jeune fille est d’abord inscrite dans un collège parisien qui ne lui réussit pas. Le père, homme d’affaires, et la mère, consultante dans le pétrole,

décident alors de l’envoyer au pensionnat. Elle a 14 ans. « Quand on est contraint de fournir un travail régulier, on réussit, assure-t-elle. La méthode des Roches m’a beaucoup aidée pour mes années de prépa. » Aujourd’hui, SophieAlexandra termine ses études par deux masters, l’un en relations internationales et l’autre en communication politique, un domaine dans lequel elle songe déjà à se reconvertir. « Les Rocheux forment un vrai réseau: sur Facebook, au travers d’une association d’anciens et de nos retrouvailles régulières.

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À TRÈS BONNE ÉCOLE

Il nous arrive de solliciter les parents des uns et des autres. Leurs recommandations pour des stages ou emplois sont un plus. » ●

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pour leurs parents », assure-t-il. Il n’empêche que les visites du président camerounais, très remarquées, sont précédées d’une inspection effectuée par ses quatre gardes du corps, se souvient un membre de l’administration. La première dame, Chantal Biya, tente de se faire plus discrète, et vient voir sa fille accompagnée d’un dispositif moins lourd. Les au revoir sont toujours difficiles, d’après le même témoin. Durant ses années de lycée, cet ancien du Collège revenu pour y travailler côtoyait déjà des élèves africains, et pas des moindres. Lui reviennent en mémoire les discussions bruyantes, lors du souper au réfectoire, des étudiants qui portaient des patronymes tels que Boganda, Bokassa ou encore Mobutu. « Une de ces familles était si nombreuse qu’elle occupait une table à elle seule », se rappelle-t-il avec amusement. RICHESSES. À l’évidence, ce n’est pas pour le luxe ou le confort que fils de puissants et nantis du continent entrent dans ce pensionnat select. Dans les « maisons » de garçons ou de filles, le mobilier est assez sommaire : lits en bois agrémentés d’une couette et d’un oreiller, commodes, bureaux et armoires de qualité correcte constituent l’essentiel de l’ameublement. On note tout de même des coffres-forts individuels à code digital pour conserver les objets les plus précieux. L’aisance financière est perceptible dans le grand salon, plus agréable, avec écran plat, bibliothèque plus ou moins fournie et, parfois, console de jeux dernier cri. Des cuisines personnelles sont disponibles pour qui goûte peu la promiscuité routinière de la cantine. Machines à laver et buanderie permettent au pensionnaire d’acquérir une certaine autonomie. À chaque étage de ces maisons, une trentaine d’élèves cohabitent par chambres de deux, trois ou quatre, sous l’autorité d’un tuteur, qui devient de facto un substitut parental. Il gère l’argent de poche, dont le montant est fixé à l’avance par les parents en accord avec le Collège. Par souci d’équité et pour minimiser l’étalage de richesses, il est conseillé de limiter ces sommes à 100 francs suisses par semaine (environ 80 euros). Cette hantise de la prodigalité, le lycée SaintMartin-de-France, près de Paris, la partage avec l’institution suisse. En début d’année scolaire, il a fallu confisquer la cagnotte du petit-fils d’un chef d’État d’Afrique centrale. Il avait dépassé la somme autorisée de quelques milliers d’euros. Recadré, l’élève dispendieux évolue à présent « de façon très positive » se réjouit le chef d’établissement, Yves Bécret. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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""! LES INSTALLATIONS DU COLLÈGE DU LÉMAN, près de Genève (Suisse), sont irréprochables. De quoi justifier des frais annuels de scolarité et d’internat qui débutent à 78 000 euros.

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Paul Dechamps Président fondateur du Lycée Molière

« La meilleure publicité est le bouche à oreille »

Le système d’internat « à la française » se veut plus strict, héritier d’une conception rigoureuse de la pédagogie d’après-guerre. À l’origine, l’enfant effectuait un cycle complet d’études, de la 6e à la terminale, avec l’objectif d’en sortir formaté, adulte avant l’heure. HÔTES DE MARQUE. Cette vision de l’internat strict a disparu certes, mais son héritage demeure. À Saint-Martin comme à l’école des Roches – sa grande rivale normande –, les parents inscrivent leurs chérubins dans l’espoir qu’ils soient recadrés. Lavallière pour les filles et cravate pour les garçons complètent le blazer sombre et le pantalon gris dans ce lycée où l’uniforme est de rigueur le lundi et le vendredi. L’autre motif prédominant chez les Africains est l’encadrement rassurant qu’offrent ces enceintes dorées. Saint-Martin-de-France est très fier de ce quota d’élèves issus du continent (34 sur un effectif de 1 100) indiqué sur la mappemonde qui trône dans le bâtiment principal, aux allures de château. Cette année, les communautés les plus représentées viennent d’Afrique centrale : RD Congo, Gabon et Congo. Ivoiriens, Béninois et Guinéens arrivent ensuite. La fréquentation africaine de cet établissement fondé à la fin des années 1920 commence à partir des indépendances. Ordonné prêtre dans cette ancienne abbaye et professeur d’histoire de 1974 à 1990, le père Gérard Beneteau est en quelque sorte la mémoire de cette époque. Il se souvient du passage des fils d’Houphouët-Boigny et de ceux de son éternel homme de confiance, ●●● Georges Ouegnin. JEUNE AFRIQUE

JEUNE AFRIQUE : Pourquoi avoir créé le Lycée Molière ? PAUL DECHAMPS : À la fin

de mes études, en 1956, j’ai eu d'abord l’idée d’ouvrir « l’école des devoirs », qui existe toujours et qui permet aux parents de faire suivre leurs enfants le soir. Deux années plus tard, j'ai fondé le Lycée Molière. Quelle place l’Afrique occupet-elle à Molière ?

Les Africains représentent une proportion d’à peu près 20 % sur une moyenne de 110 à 120 élèves. Ils cohabitent avec des Ukrainiens, des Russes, etc. En tant qu’ex-colonie belge, le Congo nous a naturellement toujours fourni beaucoup d’élèves.

Avez-vous fondé votre Lycée dans le but de capter ce public ?

Non, pas spécifiquement, il est venu tout seul. La meilleure de nos publicités a été le bouche à oreille. Bruxelles étant la capitale de l’Europe, les représentations diplomatiques africaines y sont nombreuses. Les parents se rencontrent dans des réunions d’ambassade, lors de célébrations de fêtes nationales. Quel est le profil de vos élèves africains ?

Ils appartiennent au monde politique, diplomatique, ou encore à celui des affaires. Exemple avec la famille Kébé, extrêmement puissante à Dakar. Je m’en souviens parce que j’ai eu sept enfants d’Elhadji

Babacar, le pater familias. Ils faisaient sensation lors des bals de fin d’année. Quels sont les autres noms qui vous reviennent ?

Celui de Kandolo, premier président congolais de la Gécamines, qui m’a confié ses deux filles. Je me rappelle aussi de la fille de Justin-Marie Bomboko, commissaire aux Affaires étrangères sous Mobutu. J’ai également eu la fille du ministre Sakombi. Elle était la seule à venir en BMW au lycée. Le nom Georges Te Litho me revient aussi. Ce neveu de Mobutu était brillant et je crois d’ailleurs qu’il a une très belle situation en Afrique du Sud. Mais étonnamment, le pays dont j’ai eu le plus d’enfants, c’est le Gabon. Des Bongo ?

Non, mais des gens de l’entourage, c’est certain. ● Propos recueillis par ABDEL PITROIPA

ABDEL PITROIPA

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L’établissement bruxellois accueille les enfants des plus grandes familles francophones du continent.


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Et pour cause, celui qui faisait office de parrain de ces hôtes de marque n’était autre que Jacques Foccart, qui les accueillait dans sa demeure les week-ends. « Il était ce que l’on appelait leur correspondant. Un jour qu’il s’attardait dans mon bureau, voyant la une du quotidien Libération sur la chute de Bokassa, il s’était écrié : “Ça y est, ça s’est fait !”. » ●●●

" AU-DELÀ DE LA DOUZAINE D’ÉLÈVES PAR CLASSE, on frôle le sureffectif au Collège du Léman.

PREMIÈRE DAME. Par la suite, Saint-Martin-de-

France recevra Karim Wade à la fin des années 1980 ou encore Birama Konaré, fils de l’ancien président malien Alpha Oumar Konaré, entre 1996 et 1999. Actuellement, le lycée s’enorgueillit de former, entre autres, la fille d’une première dame d’Afrique de l’Ouest ainsi que sa cousine, inscrite récemment dans la même maison d’internes. Un signe que le bouche à oreille continue à fonctionner. Jusqu’en 2009, le lycée recevait l’une des petites-filles de

l’ancien président gabonais Omar Bongo Ondimba. Celle-ci, selon le personnel encadrant, « ne se cachait pas » de sa prestigieuse ascendance et de l’affection que lui témoignait son grand-père. Son oncle, Ali Bongo Ondimba, avait lui préféré pour sa scolarité l’institution Notre-Dame-deSainte-Croix à Neuilly, dans la banlieue parisienne. L’actuel président du Gabon y a effectué ses études secondaires avant d’étudier le droit à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne. Le nom de Bongo est également cité dans le hall of fame des anciens « Rocheux », aux côtés d’illustres familles telles que de Coubertin, d’Harcourt, de Habsbourg, de Lesseps, ou de La Tour d’Auvergne… Passé par la France au cours de ses études, Teodorin Obiang Nguema, fils du chef de l’État équato-guinéen, aurait également porté le blazer du pensionnat de Verneuil-sur-Avre, dont les frais

FOLLES NUITS ÉTUDIANTES

L

orsqu’ils débarquent sur la prestigieuse avenue Foch chaque vendredi soir, les internes de Saint-Martinde-France délaissent aussitôt leur austère vie scolaire. Ils jettent d’abord leur dévolu sur Le Madrigal ou le Louis 25, deux restaurants-bars des Champs-Élysées. Ces adresses huppées qui ne sont pas à la portée de toutes les bourses constituent un excellent cadre pour un before avant la sortie en boîte de nuit. Les soirées African Money ont ensuite la préférence de cette jeunesse dorée. Organisées dans les cadres les plus N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

somptueux de la capitale française (Le Club Haussmann, leTrocadéro Ozu Club…), elles proposent deux formules. Le low-cost, pour le fêtard ordinaire qui ne débourse que 20 euros pour une entrée simple avec accès au bar. Et le service haut de gamme, pour ceux qui recherchent l’aisance et l’intimité d’un salon privé, de 550 euros à 2 000 euros la réservation. Il n’est pas rare que de jeunes clients dépensent jusqu’à trois fois ce montant. Le service est alors sur mesure : barmen à disposition, organisateurs bienveillants et agents de sécurité. Lors de ces soirées bimestrielles, ces enfants de

grandes familles guinéennes, béninoises, gabonaises ou congolaises font la fête avec des guest stars. Le rappeur Booba, patron du hip-hop français, le Congolais Fally Ipupa ou encore l’Ivoirien DJ Arafat, champion du coupé-décalé, viennent animer le show sur invitation. Les organisateurs envisagent aussi de faire venir les superstars nigérianes du duo P-Square ainsi que D’Banj. Lancées en 2010 par le jeune businessman guinéen Sékou Diawara, les soirées African Money s’exportent à Yaoundé, Libreville, Abidjan et même Montréal. Prochaine édition, A.P. Casablanca. ●

! LE RAPPEUR CONGOLAIS FALLY IPUPA est l’une des guest stars de ces soirées parisiennes. JEUNE AFRIQUE


Très chères études

Amadou Diaw

de scolarité peuvent aller jusqu’à 26 000 euros en internat. Sans compter les dépenses annexes et les 6 000 à 7 000 euros qu’il faut régler en première admission. La capacité à payer constitue le premier test d’entrée, au même titre que le dossier. C’est le cas également à l’école de Tersac, près de la ville française de Bordeaux (16600 à 19600 euros l’année pour l’internat) ou encore à l’Institut Pilâtre-deRozier, en Moselle, qui abriterait les enfants du président tchadien Idriss Déby Itno. Là-bas, les prix montent jusqu’à 16 000 euros environ. Les notables de Kinshasa et de toute la RD Congo, eux, préfèrent inscrire leurs rejetons au Lycée Molière, à Bruxelles (Belgique), moyennant des frais, il est vrai, plus abordables. L’objectif affiché est clair, même s’il est inavoué : la reproduction sociale au moyen de références qui ouvrent le chemin des plus grandes universités. Au Collège du Léman, la London School of Economics ou encore le King’s College London, entre autres, viennent présenter leurs programmes – une forme de recrutement avant l’heure. Merencia Satchivi, élève en classe de terminale économique et sociale, en a conscience. Une fois son baccalauréat obtenu à Saint-Martin, elle se verrait bien entrer dans une école de commerce et occuper une position dominante dans l’économie de son pays, le Bénin, tout comme son père. Quant à cet étudiant guinéen, ancien du même lycée et plein d’ambition, il fait montre du même optimisme: « Tous les camarades de mon carnet d’adresses sont destinés à être des grands dans leur pays. Avec le réseau que je me suis constitué, moi aussi j’espère en devenir un. » ●

Président de l’International School of Management (ISM Dakar)

« Les élites se détournent de la France »

Ce spécialiste de l’enseignement supérieur constate une attirance pour les établissements anglo-saxons.

taine d’années, des Sénégalais plutôt aisés envoient leurs enfants en France ou en Suisse pour leurs études secondaires. Ce phénomène concerne tout au plus quelques dizaines de familles chaque année, en particulier dans le milieu des affaires. Il ne s’agit pas nécessairement des meilleurs éléments, on ne peut donc pas parler de fuite des élites. En revanche, nous constatons une augmentation des inscriptions dans des écoles secondaires de très haut niveau aux États-Unis ou en Afrique du Sud. Cette élite en formation se détourne de la France.

BAUDOUIN MOUANDA

Les pays d’Afrique centrale sont a priori plus représentés dans ces établissements européens. Pendant la période coloniale déjà, les familles royales du Cameroun envoyaient leurs enfants poursuivre leurs études secondaires en France. Au lendemain des indépendances, le phénomène s'est amplifié, y compris au Maghreb. Malgré l'existence de lycées de très haut niveau au Maroc, des jeunes marocains, tunisiens et libyens, notamment, ont poursuivi

leurs études dans les prestigieux établissements parisiens (lycées Louis-le-Grand, Henri-IV). Quoi qu’il en soit, le phénomène que nous évoquons, marginal, n’a aucune répercussion, ni sur nos établissements ni sur le système éducatif. Au Sénégal, quels établissements sont en mesure de proposer une alternative locale ?

En Afrique de l’Ouest, le pays affiche une belle longueur d’avance, tant au niveau du secondaire que de l’enseignement supérieur. Il y a par exemple le lycée public Mariama-Bâ, sur l’île de Gorée. Cette maison d’éducation réservée aux jeunes filles affiche 100 % de réussite au bac, avec mention ; le prytanée militaire de Saint-Louis constitue son pendantmasculin.Depuisunedizaine d'années,deslycéesprivésd’excellence affichent également de très bons résultats. À cela s’ajoutent de bons collèges catholiques. ● Propos recueillis par FANNY REY

ISM DAKAR

JEUNE AFRIQUE : Quelle est la part d’élèves sénégalais scolarisés dans des établissements européens élitistes ? Amadou Diaw : Depuis une ving-

Certains pays sont-ils plus concernés que d’autres ?

JEUNE AFRIQUE

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Afrique subsaharienne

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CÔTE D’IVOIRE

La mort au bo Dans la nuit du 31 décembre, 63 personnes ont été tuées dans une bousculade géante à Abidjan. Un drame en partie lié à la mauvaise coordination des services de sécurité, mais dont les conséquences pourraient être très politiques. PASCAL AIRAULT BAUDELAIRE MIEU,

Par et

C

à Abidjan

e devait être LE show de l’année, LE feu d’artifice à ne pas manquer, et les autorités avaient vu grand. Très grand. Mais dans la nuit du 31 décembre, « le réveillon de l’espoir » a tourné au cauchemar et, selon le bilan officiel, 63 personnes ont trouvé la mort dans le mouvement de foule qui s’est produit aux abords du stade Houphouët-Boigny, à Abidjan. Depuis, les plus hautes personnalités de l’État ont manifesté leur compassion aux familles des victimes.LeprésidentAlassaneOuattaraademandé une minute de silence en Conseil des ministres; Guillaume Soro, le président de l’Assemblée nationale, est allé déposer une gerbe de fleurs sur les lieux du drame, et Hamed Bakayoko, le ministre de l’Intérieur, a rendu visite aux blessés dans les hôpitaux… Mais derrière la solidarité nationale affichée, c’est une guerre sournoise qui se joue, chacun cherchant à rejeter la responsabilité du dramesursonvoisin.Le1er janvier,leFrontpopulaire ivoirien (FPI, opposition) a demandé la démission du ministre de l’Intérieur – lequel a répondu que « le FPI n’a pas de leçon à donner en la matière » et qu’il s’en irait le jour où « [il considérera] que [sa] responsabilité est engagée ». D’autres ont voulu faire porter le chapeau au gouverneur d’Abidjan, Robert Beugré Mambé, chargé de l’organisation du feu d’artifice, mais celui-ci s’est dédouané en affirmant que les décès étaient survenus deux heures après la fin des festivités. Des journaux, des sites internet et des proches du chef de l’État ont accusé Guillaume Soro d’être le propriétaire du terrain sur lequel de nombreuses victimes ont trouvé la mort… « C’est une cabale, rétorque un proche du président de l’Assemblée. Le terrain ne lui appartient pas, pas plus qu’à sa femme, comme on a pu le dire. » N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

À GRANDS FRAIS. L’enquête a été confiée à la

sous-direction de la police criminelle, et Simplice Kouadio Koffi, le procureur de la République, a donné quelques éléments d’explication à la télévision nationale. Le parquet a prévu d’engager des poursuites contre ceux qui auraient déclenché le mouvement de panique, et l’Inspection générale de l’État a commencé à recueillir les témoignages du préfet, des commissaires de police et des inspecteurs. Que s’est-il passé exactement? Pour fêter la nouvelle année, les autorités n’avaient pas lésiné sur JEUNE AFRIQUE


Afrique subsaharienne

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LEGNAN KOULA/EPA/MAXPPP

ut du chemin

les moyens en faisant venir à grands frais (moyennant un cachet de 1 million de dollars, environ 762 000 euros) la star américaine Chris Brown pour un concert géant, organisé le 30 décembre. Le lendemain, à la nuit tombée, entre 30 000 et 50000 personnes s’étaient déplacées pour assister au feu d’artifice. Des spots télévisés avaient appelé les Ivoiriens à venir profiter du spectacle dans le quartier du Plateau; des reportages avaient vanté le dispositif de sécurité mis en place pour l’occasion… À minuit trente, le feu d’artifice commence. Son organisation a été confiée à la société ivoirienne JEUNE AFRIQUE

! UNE RUE DU QUARTIER DU PLATEAU, le 1er janvier. Entre 30 000 et 50 000 personnes étaient venues assister au feu d’artifice.

Apoteoz. Beugré Mambé suit le spectacle depuis l’hôtel Ivoire. Le président Ouattara est à Assinie, non loin de la frontière ghanéenne, où il a prévu de fêter son 71e anniversaire. Hamed Bakayoko réveillonne chez Marcel Amon-Tanoh, le directeur de cabinet du chef de l’État. Quand à Guillaume Soro, il est à plus de 600 km de là, dans son fief de Ferkessédougou. Vingt minutes plus tard, le spectacle s’achève et le service d’ordre disparaît. Lentement, la foule se déverse dans les rues voisines du stade. Un peu avant 3 heures, nombreux sont ceux qui ● ● ● N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013


Afrique subsaharienne Des victimes prises au piège

MALI

200 km GUINÉE

Bouaké LIBERIA

Stade Félix Houphouët-Boigny

Présidence

Yamoussoukro

GHANA

Abidjan

Chantier de construction Av. Crozet

Golfe de Guinée el Hôtel Ivoire

Rue Lecœur

Quartier du Plateau

BURKINA FASO

CÔTE D'IVOIRE

Café de Rome

Bd de la République

32

Baie de Cocody

Lagune Ébrié Novotel

500 mètres

Mouvements de foule

Lieux d’où ont été tirés les feux d’artifice

● ● ● convergent encore vers le boulevard de la République, car la Garde républicaine a fermé les voies d’accès autour de la présidence, située non loin. Le drame va se nouer à l’angle de la rue Lecœur et de l’avenue Crozet. Il y a là un chantier (un immeuble de bureaux est en construction) dont le périmètre est délimité par des tôles. La société chargée des travaux a coupé les arbres et laissé les troncs le long des trottoirs. Les rues sont mal éclairées et des véhicules sont garés de manière anarchique. La foule est de plus en plus nombreuse. Selon les autorités, des jeunes du quartier d’Abobo scandent « Libérez Abobo ! », déclenchant un mouvement de panique. Des jeunes et des femmes trébuchent sur les troncs et se font piétiner. Sous la pression, les tôles qui entourent le chantier cèdent et des dizaines de personnes tombent dans le trou béant

La cohue est telle qu’il faudra près de deux heures aux pompiers pour rejoindre les lieux du drame.

destiné à accueillir les fondations du bâtiment. Les plus habiles montent sur les clôtures, sur les toits des voitures… Il faudra près de deux heures aux pompiers pour rejoindre le lieu du drame, et les premières évacuations vers les hôpitaux ne débutent que vers 4 heures du matin. Deux heures plus tard, ce n’est pas fini. L’HISTOIRE SE RÉPÈTE. Les blogueurs seront les

premiers à relayer l’information. Ils organisent l’assistance téléphonique aux familles, ce qui vaudra à deux d’entre eux d’être interpellés par la police avant d’être rapidement libérés. Prévenu au petit matin, Ouattara se rend sur les lieux, tandis que les Ivoiriens se réveillent avec la gueule de bois. L’histoire vient de se répéter : en mars 2009, avant un match de qualification pour la Coupe d’Afrique des nations entre la Côte d’Ivoire et le Malawi, une bousculade aux abords du même stade avait fait 19 morts et 130 blessés. À l’époque, Anzouan Kacou, le président de la commission d’organisation des compétitions de la Fédération ivoirienne de football (FIF), avait été tenu pour responsable et écroué à la prison d’Abidjan. La leçon n’a pas été retenue : l’Office national de la protection civile (ONPC), dirigé par le général Fiacre Kili, n’a pas été associé à l’organisation. Les policiers et les sapeurs-pompiers ont vite quitté les lieux. Un manque de coordination a été observé entre les forces de sécurité (armée et police). À l’heure où nous mettions sous presse, aucune responsabilité n’avait été précisément définie. Vers qui faut-il se tourner ? Vers le gouverneur d’Abidjan? Le préfet? Les services de police? Le ministre de l’Intérieur ? Et quelle est la responsabilité des sociétés qui opèrent sur le chantier – le maître d’ouvrage (la SCI Le Nere) ; le maître d’ouvrage délégué (le cabinet Gecmo de Philippe Nouvian) ; la société Cobats, le Français Frédéric Pola, à qui la gestion des travaux a été sous-traitée ? À qui appartient vraiment le terrain ? Alassane Ouattara a promis de faire toute la lumière sur ces événements. Ses compatriotes attendent maintenant qu’il tienne parole. ●

ASSEMBLEE GENERALE ANNUELLE DE LA FANAF YAOUNDE (REPUBLIQUE DU CAMEROUN) ACCUEILLE LA TRENTE SEPTIEME ASSEMBLEE GENERALE DE LA FANAF DATE : DU 25 AU 28 FEVRIER 2013 LIEU DES TRAVAUX : HILTON HOTEL


Afrique subsaharienne

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RWANDA

Martin Ngoga « La France protège encore les génocidaires »

L

a traque des génocidaires, c’est un peu lui qui l’incarne à Kigali. Martin Ngoga, l’intransigeant procureur général du Rwanda, en veut beaucoup à la France. En cause, deux décisions de justice prises en décembre 2012. Le 6, elle a ordonné la régularisation d’Agathe Habyarimana, la veuve de l’ancien président Juvénal Habyarimana considérée par le Rwanda comme l’un des cerveaux du génocide de 1994. Le 19, elle a annoncé qu’elle rejetait la demande d’extradition de Hyacinthe Nsengiyumva et de Vénuste Nyanbayire, deux anciens officiels du régime Habyarimana. JEUNE AFRIQUE : Comment réagissezvous aux dernières décisions de la justice française ? MARTIN NGOGA: La cour a insinué que

nos inculpations étaient politiques. Nous avons trouvé cette remarque insultante et ridicule. Les juges français doivent savoir que leur pays est le seul à n’avoir ouvert aucun procès. Il y a eu des inculpations dans beaucoup d’autres pays d’Europe, en Belgique, aux Pays-Bas et dans les pays scandinaves, et cela s’est fait sur la base de nos accusations. Le Tribunal pénal international pour le Rwanda nous a aussi donné raison [le TPIR a transféré des accusés de génocide au Rwanda pour qu’ils y soient jugés, NDLR]. Si nous ne savions pas comment nous y prendre, si nos motivations étaient politiques, nous n’aurions pas obtenu ces résultats. C’est la France qui prend des décisions politiques. Mais Paris n’est pas le seul à ne pas coopérer pleinement avec vous…

Certains pays refusent d’appliquer des décisions de justice, mais des jugements JEUNE AFRIQUE

CYRIL NDEGEYA

Selon le procureur général de la République, Kigali n’exclut pas d’engager des poursuites contre Paris.

! DANS SON KIGALI, en mai 2012.

BUREAU DE

objectifs ont été rendus. En France, quand il s’agit du Rwanda, politique et justice sont imbriquées au point de ne faire plus qu’un.

nous n’allons pas rester les bras croisés tant que ces gens, qui ont tué les nôtres, jouissent de l’impunité en France.

Vous ne croyez pas à l’indépendance de la justice française ?

Plusieurs ex-détenus du TPIR, tels que Protais Zigiranyirazo, le frère d’Agathe Habyarimana, ont demandé un titre de séjour en France. Comment réagiriezvous s’ils l’obtenaient ?

C’est la seule explication logique. En dix-huit ans, la France n’a jamais rien fait concernant les suspects de génocide. Pourquoi ? Parce qu’elle protège encore les génocidaires. Des procédures ont pourtant débuté, des instructions sont menées…

Mais pourquoi les dossiers n’ont-ils toujours pas abouti? Le TPIR a confié à la France deux dossiers [ceux de Wenceslas Munyeshyaka et Laurent Bucyibaruta]. Elle les a acceptés en s’engageant à être diligente. Or cela traîne depuis plus de cinq ans. Je remarque que Laurent Bucyibaruta, l’ancien préfet de Gikongoro, était présent dans le périmètre contrôlé par l’armée française. J’en déduis que c’est une manière de le protéger. Nous n’avons pas toutes les preuves, mais nous savons lire entre les lignes. Vous avez déclaré que vous envisagiez des poursuites contre la France. De quelle nature seraient-elles ?

Je ne peux pas être plus précis pour l’instant. Ce choix n’est pas encore fait, il appartient au gouvernement. Mais

Cela ne surprendrait plus personne. La France en a donné a des gens qui n’ont jamais été jugés, pourquoi ne le ferait-elle pas avec des gens qui ont été acquittés – même si l’acquittement est très controversé ? Que se passerait-il si Zigiranyirazo retournait au Rwanda ?

Nous ne reviendrions pas sur la procédure du TPIR. Nous savons respecter les jugements même lorsqu’ils ne nous plaisent pas. Plusieurs Rwandais libérés par le TPIR sont bloqués à Arusha faute de passeport en règle. Comment expliquez-vous qu’ils refusent de venir les chercher à Kigali ?

Je n’en ai aucune idée. C’est à eux qu’il faut poser la question. S’ils ne veulent pas revenir, c’est leur choix. Mais ce n’est pas à nous de leur faire parvenir un passeport, sous prétexte qu’ils ne se sentent pas en sécurité. ● Propos recueillis par PIERRE BOISSELET N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013


GIANLUIGI GUERCIA/AFP

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RD CONGO

Délit de faciès?

! CHALUPA EN CAMPAGNE POUR LES LÉGISLATIVES DE 2006. À l’époque, il est proche de la majorité présidentielle.

Il est blanc et jure qu’il est congolais. Condamné pour usurpation de nationalité, l’ancien député Pierre-Jacques Chalupa a fait appel.

I

lpleutsurKinshasa,maiscelane suffit pas à décourager ceux qui doivent rendre visite à des proches à la prison centrale de Makala. Malgré cette terre boueuse, glissante, et les flaques d’eau, ils sontdéjànombreuxàl’accueil.Ilsattendent le début des visites. Parmi les prisonniers, unsortdulot:c’estPierre-JacquesChalupa, un Blanc. Embastillédepuisle2février2012,ilaété condamné le 6 octobre pour « usurpation de nationalité, faux et usage de faux ». Ses proches affirment qu’il souffre d’un cancer de la prostate et, ce jour-là, ce n’est pas au parloir que nous le trouvons, mais à l’accueild’uncentremédicaldeLaGombe. L’ancien député raconte son histoire sans se faire prier. « Je suis né à Uvira [dans l’actuelle province du Sud-Kivu, NDLR] en 1948. Mon père, né à Boma [actuel BasCongo], était Portugais. Mon grand-père et ma grand-mère [une métisse] paternels sont eux aussi nés ici. Quant à ma mère, c’était une Grecque arrivée au Congo après la Seconde Guerre mondiale. J’ai toujours

été congolais. Ce procès est un règlement de comptes politique. » Après une formation à l’Académie des beaux-arts de Kinshasa et à l’institut d’architecture Saint-Luc, à Bruxelles, Chalupa se lance dans la publicité. Candidat à la députation lors des élections de 2006, il rejoint le camp de Joseph Kabila. C’est lui qui concevra les affiches de campagne du président sortant. Élu, Chalupa verra son mandat invalidé, puis à nouveau validé à la suite d’un recours auprès de l’Union parlementaire internationale (UPI), mais sans jamais que sa nationalité ne soit remise en question. À l’époque, ce sont des irrégularités observées dans plusieurs bureaux de vote qui ont fait tiquer la commission électorale, et Chalupa n’est pas le seul concerné. AUCUNE CHANCE. Le député finit par prendre ses distances avec la majorité présidentielle et se rapproche de l’opposition. Aux élections de novembre 2011, l’homme d’affaires,quiacrééunparti,l’Actionpourla

démocratie et le développement au Congo (ADD Congo), est de nouveau candidat à la députation. Il ne sera pas élu. « Son discours sans complaisance envers le régime ne pouvait lui laisser aucune chance », estime un de ses avocats, Me Hubert Efole. Arrêté en février 2012 pour « détention d’une fausse attestation d’acquisition de la nationalité congolaise, d’une fausse carte d’électeur et d’un faux passeport congolais », Chalupa est condamné à quatre ans de prison. « Cette affaire est purement raciste et politique, affirmeEfole.Beaucoupdedéputéscongolais ont, contrairement à ce que stipule la loi, plusieurs nationalités. Mais ils n’ont jamais été inquiétés. Mon client, lui, n’a pas d’autre nationalité que la nationalité congolaise, mais il est blanc. De plus, les poursuites contre lui ont été initiées sur injonctiond’unmembredugouvernement, Luzolo Bambi, qui était à l’époque ministre de la Justice. » Le 31 décembre, la demande de mise en liberté provisoire introduite par la défense n’a pas été accordée. Chalupa a fait appel desacondamnation.Prochainrendez-vous devant le tribunal le 18 janvier. ● TSHITENGE LUBABU M.K., envoyé spécial


Coulisses

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JUSTICE LE FLOCH SE DÉFEND

Vus du ciel La mission des Nations unies en RD Congo pourrait utiliser des drones dans l’Est.

D

es drones pour surveiller l’est de la RD Congo, ce serait une première… Et c’est l’option pour laquelle a milité Hervé Ladsous, le patron des opérations de maintien de la paix de l’ONU, le 8 janvier, dans le huis clos du Conseil de sécurité. Ces avions sans pilote permettraient de mieux détecter les mouvements d’armes et de troupes, et de surveiller les frontières d’un territoire en partie contrôlé par les rebelles congolais du M23, que Kigali est accusé d’aider. Pour l’instant, rien n’est fait. Le Rwanda, qui est depuis le 1er janvier et pour deux ans un membre non permanent du Conseil de sécurité, a immédiatement évoqué « les problèmes légaux et de financement » que poserait le recours à des drones. « Il n’est pas avisé d’utiliser un équipement sur lequel nous n’avons pas suffisamment d’informations, a déclaré le numéro deux de la délégation rwandaise à l’ONU, Olivier Nduhungirehe. L’Afrique ne deviendra pas un laboratoire de surveillance étranger. » Quant au secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, il milite déjà pour le renforcement de la mission onusienne déployée en RD Congo. SUR LA SELLETTE. Le M23, qui campe

toujours à une vingtaine de kilomètres de Goma (Nord-Kivu), a lui déclaré un cessez-le-feu unilatéral, le 8 janvier, avant la reprise des pourparlers de paix avec le gouvernement congolais à Kampala. Il pourrait en profiter pour se réorganiser. Son chef militaire demeure Sultani Makenga, mais son coordonnateur politique, Jean-Marie Runiga, serait sur la sellette : à son tour placé, le 31 décembre 2012, sur la liste noire des Nations unies, il est sous le coup d’une interdiction de voyager et n’a pas pu faire le déplacement jusqu’en Ouganda. Makenga, qui l’apprécie peu, tente du coup de l’écarter de la direction de la rébellion. ● ANNE KAPPÈS-GRANGÉ et TRÉSOR KIBANGULA

Il n’a, dit-il, rien fait. Ni escroqué l’homme d’affaires émirati Abbas AlYoussef, qui a porté plainte contre lui, ni « perçu le moindre euro ». Dans la toute première interview qu’il a accordée depuis son incarcération à Lomé, le 15 septembre 2012, Loïk Le Floch-Prigent, 69 ans, proteste de son innocence. « Ce n’est pas parce que j’ai été condamné dans l’affaire Elf que je ne suis pas victime dans cette affaire d’une situation particulièrement sordide et scandaleuse que je ne souhaite à personne », a-t-il déclaré, le 10 janvier, au Parisien Magazine, un hebdomadaire français, soulignant que son état de santé était précaire et qu’il risquait « de perdre sa jambe ». Le Floch-Prigent accuse également Al Youssef de corruption et décrit sa cellule, un bureau poussiéreux et inconfortable du service de recherche et d’investigation de la gendarmerie nationale du Togo. ●

VINCENT NGUYEN/RIVA PRESS

GRANDS LACS

JEUNE AFRIQUE

Afrique subsaharienne

Ì L’ANCIEN PATRON D’ELF, en juillet dernier.

BURUNDI LA POIRE EN DEUX C’est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle. Le 8 janvier, le journaliste de RFI Hassan Ruvakuki a été condamné en appel à trois ans de détention pour avoir couvert la naissance d’un groupe rebelle burundais en 2011. En première instance, accusé d’actes de terrorisme, il avait écopé de la prison à perpétuité – voilà pour la bonne nouvelle. En revanche, comme le souligne son avocat, « trois ans, c’est trop, surtout pour un innocent ». À Paris, la direction de l’Audiovisuel extérieur a fait part de sa déception à l’énoncé du verdict. TCHAD PAS CONTENTS C’est un projet de loi controversé qui a été adopté, le 9 janvier, au Tchad. Le texte, déposé par les députés du parti au pouvoir,

revient sur l’incompatibilité des fonctions du chef de l’État, qui peut désormais jouer un rôle officiel au sein d’un parti politique. Il supprime aussi l’inamovibilité des juges de la Cour suprême. Inquiets, les élus de l’opposition avaient boycotté le vote. ZIMBABWE TIC-TAC, TIC-TAC… Le président Mugabe a annoncé des élections pour le mois de mars, mais aucune des réformes censées garantir un scrutin libre et transparent n’a été menée à bien. C’est Human Rights Watch qui l’affirme dans un rapport publié le 10 janvier. L’accord de partage du pouvoir, conclu à l’issue de la présidentielle de 2008, n’a pas été vraiment appliqué, continue l’ONG, qui souligne que l’appareil judiciaire, les forces de sécurité et les médias publics demeurent très partisans et que le temps presse. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013


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Afrique subsaharienne

TOGO

Qui a tué Sylvanus Il y a tout juste cinquante ans, le président était assassiné. Aucun doute, ce sont des militaires togolais qui ont tiré. Mais la nuit du 12 au 13 janvier 1963 a été longue. Beaucoup de coups de fil ont été passés, et à Paris comme à Washington on en sait bien plus qu’on ne veut l’avouer…

CHRISTOPHE BOISBOUVIER

S

ur cette nuit tragique du 12 au 13 janvier 1963, il y a au moins deux certitudes. L’attaque de la résidence du président togolais à Lomé a commencé le soir, à 23 heures. Sylvanus Olympio a été assassiné le lendemain matin, à 7 h 15, devant le portail de l’ambassade des États-Unis, d’où il venait d’être extrait. Entre ces deux événements, il s’est passé huit longues heures où des coups de fil ont été donnés, des ordres transmis… Huit heures sur lesquelles les États-Unis et la France savent beaucoup de choses et continuent, cinquante ans après, de se taire. Saura-t-on un jour la vérité ? Des témoins ont parlé. Des documents ont été déclassifiés. Si les Togolais le demandent, les archives s’ouvriront. Mais, dès aujourd’hui, il est possible de reconstituer les principaux événements de la nuit. En 1963, qui voulait se débarrasser du père de l’indépendance togolaise ? Les Français, déjà. Pour de Gaulle et Foccart, son conseiller aux affaires africaines, Olympio était le prototype du chef d’État sournoisement anti-Français. D’abord à cause de ses origines. Né à Lomé en 1902, sous la colonisation allemande, formé à la London SchoolofEconomics,l’hommeétait polyglotte (allemand, anglais, français, portugais, yorouba) et avait longtemps travaillé pour la compagnie anglo-néerlandaise Unilever. Jusqu’en 1960, Olympio avait donc incarné ce pays multiculturel que les Français n’avaient pas pu N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

coloniser à leur façon – entre 1919 et 1960, la tutelle du Togo avait été confiée à la France par la Société des Nations (SDN), puis par l’ONU. Et juste après l’indépendance, en mai 1960, le premier président du Togo avait confié à l’AFP : « Je vais faire mon possible pour que mon pays se passe de la France. »

! FOCCART, LE « MONSIEUR AFRIQUE » DE DE GAULLE, se méfiait de ce président éduqué, polyglotte, et visiblement décidé à se passer de la France.

CHAÎNES. Olympio inspirait d’au-

tant plus de méfiance à Foccart qu’il était insaisissable – comme un savon Unilever. À la différence du Guinéen Sékou Touré, il ne s’opposait pas frontalement à la France. Il était allé voir de Gaulle à Paris, en mars 1962. Mais, dix jours plus tôt, il avait été reçu avec tous les égards par les Américains. John F. Kennedy s’était même déplacé à l’aéroport de Washington. D’où le rictus de Foccart ce jour où il accueille Olympio sur le perron de l’Élysée. « Sylvanus Olympio n’était pas un de nos amis », confiera-t-il plus tard (Foccart parle, FayardJeune Afrique, 1995). « Avec lui, mes relations n’ont jamais été cordiales comme celles que j’entretenais avec Nicolas Grunitzky [l’homme qui devait lui succéder après le coup d’État, NDLR]. » Début 1963, Olympio envisageait même de sortir de la zone franc (CFA) et de créer une monnaie togolaise adossée au… Deutsche Mark. Le Togo, par sa politique d’équilibre, risquait donc d’offrir un modèle d’émancipation à toutes les ex-colonies françaises. En un mot, vu de Paris, Olympio était plus dangereux que Sékou. JEUNE AFRIQUE


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Olympio?

TOPFOTO/ROGER-VIOLLET

Comme Washington renâcle à publier les télégrammes diplomatiques (TD) de son ex-ambassadeur à Lomé, ce TD de son collègue d’Accra – même raturé – est précieux. Écrit à chaud, le soir même de l’exécution d’Olympio, il confirme que le président togolais s’est réfugié dans l’enceinte de l’ambassade et en a été extrait de force par ses assassins.

Outre les Français, quelques dizaines de Togolais avaient aussi de sérieuses raisons de vouloir se débarrasser de leur président. Il s’agissait d’anciens soldats de l’armée coloniale française (guerre d’Indochine, guerre d’Algérie) qui venaient d’être démobilisés par Paris. Ils réclamaient leur intégration dans la toute petite armée togolaise(moinsdemillehommes). Olympio, qui s’en méfiait, refusait. Parmi ces demi-soldes, l’adjudantchef Emmanuel Bodjollé, 35 ans, le chef de l’opération du 12-13 janvier, et le sergent Étienne Eyadéma, 28 ans. Tous deux étaient des Kabyés du nord du pays, alors que le président était un Éwé du Sud. Par ailleurs, plusieurs opposants togolais, sudistes comme nordistes, étaient à l’époque emprisonnés à Lomé avec des chaînes aux pieds. Ils ne devaient pas porter Olympio dans leur cœur. ●●● N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013


Afrique subsaharienne Togo

AFP

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! AUTOUR DU CAPITAINE DADJO (en chemise blanche), qui sera brièvement président du Togo en 1967, le commando du 13 janvier. On peut y voir l’adjudant-chef Emmanuel Bodjollé, le chef de l’opération (2e en partant de la dr.) et le sergent Étienne Eyadéma (3e en partant de la dr.).

Le samedi 12 janvier, à 23 heures, un commando de six hommes, sans doute dirigé par Bodjollé lui-même, attaque la résidence présidentielle – une villa enfouie sous les filaos, à 150 m environ de l’océan Atlantique. Sylvanus et son épouse, Dina, sont déjà couchés. La résidence n’est ●●●

gardée que par deux malheureux policiers. Mais comme les assaillants parlementent, puis mettent plusieurs minutes à enfoncer la lourde porte d’entrée, le président a le temps d’enfiler un bermuda et une chemise beiges, de descendre pieds nus au rez-de-chaussée, de sortir par une fenêtre, de traverser

DES HISTOIRES DE FAMILLE

D

e 1963 à 2010, c’est la vendetta entre les familles Olympio et Gnassingbé. En septembre 1986, le président Gnassingbé Eyadéma échappe de justesse à un attentat organisé à Lomé par un commando infiltré du Ghana, où est réfugié Gilchrist, le fils de Sylvanus et Dina Olympio. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

En mai 1992, Gilchrist est grièvement blessé par balle sur une route de province au Togo. « L’attentat a vraisemblablement été préparé et exécuté par des militaires », affirme alors la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), qui dénonce « l’autonomie d’action laissée au capitaine

Ernest Gnassingbé [un fils du président Eyadéma, NDLR] ». Depuis 2010, Gilchrist et Faure Gnassingbé, un autre fils d’Eyadéma, arrivé au pouvoir en 2005, sont réconciliés. Sept membres du parti d’Olympio sont entrés au gouvernement. Pour l’opposition, Olympio CH.B. a trahi. ●

le jardin et d’escalader le mur qui sépare son domicile de l’ambassade des États-Unis. Il avise une voiture Buick, garée dans la cour en gravier, et s’y installe. Pendant ce temps, les assaillants déboulent dans la villa, montent à l’étage, mettent en joue Dina et les domestiques, tirent à bout portant dans les placards, et demandent où est Olympio. « Il est descendu depuis plus d’une heure. J’ignore où il se trouve », répond l’épouse. Tous ces faits sont établis. Ils reposent sur les témoignages de Dina et des domestiques. Ensuite, c’est moins clair… Après, il y a sans doute plusieurs heures de flottement. Le président s’est-il enfui par la route ? S’est-il réfugié dans l’ambassade américaine? Les putschistes ne le savent pas, et commencent à craindre pour leur vie si jamais Olympio réussit à retourner la situation en sa faveur. À 3 h 30, selon le récit de sa fille, Sofia, l’ambassadeur des États-Unis, Leon B. Poullada, reçoit un coup de fil à sa résidence, qui est située à environ trois kilomètres de ses JEUNE AFRIQUE


Qui a tué Sylvanus Olympio ? bureaux. Qui l’appelle? C’est là que le témoignage de Gilchrist Olympio, le fils du défunt, est important. « Fin 1964, presque deux ans après la mort de mon père, raconte-t-il, j’ai rencontré Poullada à Washington. Il venait de quitter le département d’État et était encore traumatisé. Il m’a reçu pendant trois heures et m’a dit que c’était l’ambassadeur de France, Henri Mazoyer, qui l’avait prévenu cette nuit-là qu’un coup d’État était en cours et que le président s’était peut-être réfugié dans son ambassade. » vrai. À cette époque, l’ambassade des États-Unis à Lomé n’est protégée par personne. Pas de marines, pas de gardes armés, juste un veilleur de nuit ! Quand Poullada arrive avec son véhicule devant son ambassade, il tombe nez à nez avec des putschistes qui paraissent ivres ou drogués, et qui le menacent. Après quelques palabres, il parvient à entrer dans l’enceinte diplomatique. Aussitôt, Olympio lui fait signe et lui raconte ce qui vient d’arriver. L’Américain lui conseille alors de ne pas bouger de la Buick et d’attendre qu’il revienne avec les clés pour lui ouvrir les bureaux. Dit-il la vérité ? Pas sûr. D’après sa fille, Poullada n’ouvre pas le bâtiment, car il a peur que les putschistes ne le mettent à sac. L’ambassadeur ne traîne pas. Il retourne à sa résidence et appelle son homologue français, Mazoyer, pour lui confirmer qu’Olympio est bien chez lui. Puis il ne bouge plus. Sans doute est-il mort de peur. Un jeune diplomate américain, le vice-consul Richard L. Storch, habite un bâtiment juste en face de l’ambassade. À 6h40, Poullada lui téléphone et lui demande de surveiller ce qui se passe. Storch observe le va-et-vient d’hommes armés dans la rue. À 7h10, il aperçoit un civil en short et pieds nus au milieu des putschistes. À 7h15, il va se faire un café à la cuisine. C’est à ce moment-là qu’il entend trois détonations, à intervalles réguliers. «Descoupsdefeutropespacéspour être des tirs contre un homme en JEUNE AFRIQUE

SIPA

MORT DE PEUR. Incroyable mais

! OLYMPIO ET JACQUES FOCCART sur le perron de l’Élysée, en mars 1962.

fuite », précise-t-il dans le rapport qu’il écrira le surlendemain. Pour la première fois depuis les indépendances, un président africain est abattu. Et ses assassins sont entrés dans une ambassade pour le capturer. Le territoire des États-Unis a été gravement violé. C’est sans doute la raison pour laquelle, malgré le US

En pleine nuit, l’ambassadeur de France prévient son homologue américain qu’Olympio est chez lui. Freedom of Information Act, les documents du Département d’État sur cette affaire ne sont déclassifiés qu’au compte-gouttes… « JE L’AI DESCENDU. » Qui a tiré ?

Les jours qui ont suivi, le sergent Eyadéma s’est vanté devant les reporters du Figaro, du Monde, de Paris Match et de Time Magazine d’avoir abattu le président de ses propres mains : « Je l’ai descendu parce qu’il ne voulait pas avancer. » En 1992, il s’est rétracté sur

RFI. Est-ce vraiment lui ? Faute de témoin direct, on ne le saura jamais. Mais le fait est que sa revendication, dès les premières heures du putsch, lui a donné du prestige dans la troupe et l’a sans doute aidé à prendre le pas sur des compagnons d’armes plus âgés et plus gradés lors du renversement de Grunitzky, en 1967. Surtout, qui a indiqué aux assaillants l’endroit où se cachait Olympio ? À 23 h 30 ou minuit, quand le président se réfugie dans l’ambassade américaine, les putschistes n’entrent pas dans l’enceinte diplomatique. Sept heures plus tard, après l’échange téléphonique entre Poullada et Mazoyer, ils n’hésitent plus. Or Henri Mazoyer et l’agent de Jacques Foccart à Lomé, le commandant Georges Maîtrier, se faisaient depuis des semaines les avocats de ces ex-tirailleurs sans emploi auprès d’Olympio… Dans la maison Françafrique, il reste encore un grand placard (avec plein d’archives ?) à ouvrir. ● N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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Maghreb & Moyen-Orient

L’avenue Bourguiba

TUNISIE

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JEUNE AFRIQUE


Maghreb Moyen-Orient

Aux premières loges de la révolution du 14 janvier 2011, l’artère principale de la capitale est devenue la caisse de résonance de la transition démocratique.

m’a dit...

EN LIESSE CÉLÈBRE LA LIBERTÉ RETROUVÉE. JEUNE AFRIQUE

à Tunis

L

ONS ABID

! Dans la plus grande rue de Tunis, UNE FOULE

FRIDA DAHMANI,

es anniversaires sont toujours prétexte à des bilans ; mais il est bien difficile de saisir une révolution dans ce qu’elle a de mouvant et de vivant. Toutes les analyses et tentatives de prospective autour du 14 janvier achoppent sur cette réalité. Pourtant, il suffirait tout simplement de dire que c’est le souk, sans aucune connotation péjorative. Ici mieux qu’ailleurs on sait ce que signifie le souk; entre ordre et désordre, qui est aussi un ordre en soi, il y a du bon et du moins bon. Si, au matin du 14 janvier, on avait dit aux Tunisiens qu’au crépuscule Ben Ali ne serait plus au pouvoir, nul n’y aurait cru. Si on leur avait dit que leurs slogans seraient repris par d’autres insurgés arabes et par les indignés du monde, ils en auraient ri. Mais c’est bien le célèbre « Dégage ! », scandé avec ferveur par plus de 80 000 manifestants, qui a fini par abattre définitivement vingt-trois années de dictature. De mémoire d’avenue et d’artère principale de Tunis, je n’avais jamais vu cela. Mon asphalte en tremble encore. L’important n’était pas tant l’inimaginable et rapide chute de Ben Ali que celle de tout un système s’écroulant comme un château de cartes. Dans les cafés, on murmurait bien qu’il était moribond, mais, faute d’alternative et à l’ombre du redoutable ministère de l’Intérieur, il était difficile de croire que le système allait lâcher prise. D’ailleurs, ce jour-là, pendant que jeunes et moins jeunes reprenaient le slogan « travail, liberté et dignité », né dans les régions déshéritées, matrice de l’intifada tunisienne, Ben Ali était tenu informé minute par minute des événements. Un colonel des forces de l’ordre, mis à l’écart par le gouvernement actuel, confie que l’ancien raïs recevait à Carthage, en direct de la salle des opérations du ministère, les images d’une population soudée autour d’exigences et de haines communes : « Ce qui a été dit du 14 janvier et du rôle des uns et des autres a été tronqué. Il s’agit surtout d’une mauvaise évaluation d’une situation qui a fini par devenir incontrôlable. » ●●●

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Maghreb Moyen-Orient

●●●

VENT DE LIBERTÉ. Cette vérité, comme beau-

coup d’autres, autour de la révolution demeure une question ouverte, comme une plaie non soignée. Obéissant aux ordres, la répression s’est poursuivie bien après la fuite de l’ancien président. « Avec ma femme, enceinte, et ma mère, nous étions sur l’avenue à l’annonce du couvre-feu. Quand la police a chargé, nous avons été recueillis par un vieux couple qui a tenu tête aux agents ratissant les immeubles à la recherche de manifestants. Depuis, chaque 14 janvier, nous leur apportons des fleurs », raconte un ingénieur, alors que, réfugiée à un autre étage, l’avocate Bochra Belhaj Hmida rendait compte aux médias de l’évolution de la situation. S’il fallait retenir une seule chose du 14 janvier, ce serait la naissance d’une solidarité nouvelle qui a réuni les Tunisiens pendant quelques semaines. Jusqu’à ce que la politique s’en mêle. Durant cette période-là, j’ai été une véritable agora, un lieu de N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

! Peu après la chute de Ben Ali, DES JEUNES FERONT LE SIÈGE DE LA

pour obtenir le départ des ministres de l’ancien régime. PRIMATURE

débats nourris mais jamais violents, un espace d’échanges et de rencontres. Je vivais en direct un incroyable espoir de démocratie. Les mouvements politiques ont pointé leur nez bien plus tard, même si le 18 janvier, Hamadi Jebali, actuel chef du gouvernement, avait tenu, avec quelques militants d’Ennahdha, ce qui était sans doute le premier rassemblement au grand jour des islamistes, mais leurs slogans semblaient si décalés par rapport au joyeux vent de liberté qui soufflait sur le pays que nul n’en a fait cas. Cependant, certains s’alarmaient déjà : « Attention, la démocratie peut conduire à une autre dictature. » Un peu plus tard, les salafistes ont à leur tour profité de ma visibilité en tenant de spectaculaires prières publiques. Mais c’était aussi cela l’idée que se faisaient les Tunisiens d’un début de démocratie : permettre à tous de s’exprimer librement. Toute la ville se faisait l’écho JEUNE AFRIQUE


Maghreb Moyen-Orient

Degré de satisfaction de l’action du gouvernement:

40 %

contre 66 % en février 2012

44 %

contre 43 % en février 2012 Degré de satisfaction de l’action de l’opposition :

CAPUCINE BAILLY/COSMOS

28 %

de cette mutation bruissant d’idées et de projets. À la Casbah, siège de la primature (lire encadré), on faisait entendre des revendications politiques, tandis que tous les murs affichaient la créativité des jeunes révolutionnaires ; entre concerts et graffitis, la révolution fixait des repères qui seront très vite effacés par les nouveaux gouvernants,

contre 25 % en février 2012

SOURCE : 3 C ÉTUDES, DÉCEMBRE 2012

Degré de satisfaction de la situation sécuritaire :

lesquels estimaient que cela faisait tache dans le décor d’un moment historique. L’euphorie populaire, alimentée par la chute des gouvernements Ghannouchi I et Ghannouchi II, ainsi que par la mise à l’écart des membres du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), parti de Ben Ali, découvrait un terrain d’expression sans entraves. Je devins la scène incontournable où les nouveaux partis politiques donnaient leur première représentation. Trop nombreux, avec des discours répétitifs et parfois incohérents, ils ont fini par lasser une opinion qui voulait bien d’une révolution, mais rapide et le moins douloureuse possible. « La révolution, c’est bien, mais il faut que les affaires tournent », clamait le propriétaire d’un magasin de la galerie du Palmarium. C’est ce qu’a exprimé le scrutin du 23 octobre 2011 : une sanction des lignes politiques approximatives. « S’il faut miser sur des hommes nouveaux, autant choisir ceux qui sont les serviteurs d’Allah. Au moins ils ne seront pas malhonnêtes », pouvait-on entendre durant la campagne électorale. Les Tunisiens avouaient leur profonde méconnaissance de la politique et des jeux qu’implique le pouvoir. Pourtant, le saccage du cinéma Afriart lors de la projection du film Laïcité, Inch’Allah aurait dû alerter. L’instrumentalisation de la question identitaire et la confusion savamment entretenue entre laïcité et athéisme ont été les arguments clés des islamistes. À défaut de programme, ils tablaient sur une division entre conservateurs et modernistes, tandis que les Tunisiens voulaient mettre fin à une période provisoire et jeter rapidement les fondements d’une IIe République. Tout cela semble bien loin. Les promesses électorales sont parties en fumée, la Constitution est loin d’être bouclée, le provisoire est toujours d’actualité et la violence s’est invitée, aussi bien en politique qu’en société. Les passants font grise mine, les temps sont incertains, les salaires menacés. « Les prix augmentent, les pénuries sont devenues la règle. On avait des revendications de liberté. Aujourd’hui, le gouvernement nous pousse à exiger notre pain quotidien. On n’a pas fait tout ça pour ça ! », s’écrie Hafedh, un diplômé-chômeur de Ben Arous qui ne trouve pas de financement pour un projet créateur ● ● ●

IL N’Y AURA PAS DE CASBAH III LES JEUNES DES RÉGIONS avaient fait de la place du Gouvernement, siège de la primature, non loin de la place de la Casbah, le haut lieu de la contestation. À deux reprises, ils en ont fait le siège pour réclamer un gouvernement de transition « propre ». Dans la crainte de voir la révolution dévoyée et détournée de JEUNE AFRIQUE

ses objectifs, ils ont exigé – et obtenu – l’élection d’une Assemblée constituante, scellant la fin de l’ancien régime. Soutenus par la centrale syndicale et les partis d’extrême gauche, ainsi que par certains islamistes, les rebelles de la Casbah ont obtenu la création de la première instance démocratique du pays, la

Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique. Deux ans après, ce lieu symbolique est désormais interdit aux manifestants; une palissade improvisée défigure l’espace historique pour protéger le siège d’un exécutif désigné par le peuple. ● F.D. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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Maghreb Moyen-Orient

HAMMI/SIPA

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d’une centaine d’emplois. Les désœuvrés remplissent les cafés. L’espoir s’est mué en incrédulité pour finir en désenchantement. « Je ne supporte plus d’entendre les dirigeants prononcer le mot révolution. Ils n’étaient pas là à ce moment-là, tout comme ils sont absents aujourd’hui. Ils font mine d’écouter, mais sont sourds et mènent le pays à la banqueroute faute de faire appel à des compétences. C’est insupportable », tempête une guichetière d’une banque de laquelle beaucoup de clients vident leurs comptes. ●●●

! Le 9 avril 2012, LES MODERNISTES DESCENDENT

pour protester contre les dérives d’Ennahdha. Mais la manifestation sera violemment dispersée par les forces de l’ordre. DANS LA RUE

IMPOSSIBLE DIALOGUE. Les réactions sont

épidermiques, la situation est difficile, et l’état d’urgence toujours en place. Le pays tangue, la question sécuritaire est plus que jamais d’actualité,

mais le pouvoir s’isole, nie l’évidence, tergiverse et finit par s’immobiliser. Il lui faudra pas moins de six mois pour préparer un remaniement. À l’hôtel Africa, les conférences de presse se multiplient. La police politique, les dessous de la Constitution, la gestion du pays, tous les sujets sont abordés sans aucune censure. « Plus rien n’est caché. Les seuls acquis de la révolution sont la liberté d’expression et la transparence qu’elle implique. Mais sans la réforme de la police, de la justice et des médias, la démocratie est prise en otage », déplore une militante de l’association Égalité et Parité. Cependant, elle semble oublier le poids d’une société civile qui s’active sur tous les fronts, défend le caractère civil de l’État et finit par embarrasser le pouvoir.

SIDI BOUZID N’Y CROIT PLUS

S

i les gens de Sidi Bouzid sont fiers d’avoir amorcé le soulèvement tunisien, aujourd’hui, ils n’y croient plus. « La révolution est notre œuvre, elle nous a été volée », s’insurgent-ils. Chômage croissant, absence d’investissements, réseau industriel inexistant et pas l’ombre d’une amorce de développement régional. De N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

quoi alimenter la colère d’une population ulcérée de constater que la corruption est d’autant plus rampante que l’État est absent. Cette défection institutionnelle et l’absence de stratégie de gouvernance régionale profitent aux salafistes, qui rallient les jeunes et imposent à la ville leurs diktats. Désormais, la mosquée

Habib-Bourguiba est devenue la plaque tournante de trafics en tout genre, mais aussi un espace d’entraide ; les démunis y trouvent repas et aide financière. En contrepartie, ils doivent faire preuve de piété et cautionner les initiatives des extrémistes religieux (fermeture des débits d’alcool et des confréries). Privée

de perspectives d’avenir, la région ne décolère plus, accueillant à coups de jets de pierres le président de la République et celui de l’Assemblée constituante, venus commémorer, le 17 décembre 2012, l’immolation de Mohamed Bouazizi, qui fut à l’origine du déclenchement de F.D. l’insurrection. ● JEUNE AFRIQUE


jeune ð Revivez, en images, la chronique d’une révolution afrique .com inachevée sur www.jeuneafrique.com

La manifestation pacifique du 9 avril 2012, violemment réprimée par les forces de l’ordre, symbolise l’impossible dialogue des modernistes avec le gouvernement. À ce jour, personne n’a fait la lumière sur les faits, mais j’ai bien vu des miliciens rejoindre les policiers et s’en prendre aux manifestants, et particulièrement aux femmes. Depuis, le prestige de l’État est terni. En multipliant les actions en justice contre des modernistes, en se montrant aussi répressif que Ben Ali, mais en étant clément avec les extrémistes religieux, le pouvoir a démontré qu’il y a deux poids, deux mesures, perdant ainsi de son autorité et de sa crédibilité. Les Tunisiens sont d’accord : « Le pays va à vau-l’eau. Pourtant, nous avions réussi à préserver nos fondamentaux. En moins d’un an, par incompétence, ils ont mis le pays à genoux, sans en assumer la responsabilité. » L’économiste Moez Joudi s’insurge contre la mauvaise gestion des deniers publics: « L’État, avec des caisses vides, une création de richesse quasi nulle et un cumul de déficits, prévoit la prise en charge des cotisations et des charges sociales dues par les anciens prisonniers politiques, à majorité islamistes. Ces dépenses faramineuses, prévues par la loi de finance 2013, seront réglées par les contribuables ! » AMERTUME. L’atmosphère est délétère. Les badauds découvrent, hébétés, que les élus de la Constituante tentent d’augmenter leurs salaires, que le ministre des Affaires étrangères facture à son département ses nuitées dans un hôtel en face de son ministère et que le gouvernement prévoit l’importation de « tok-tok » [tricycles] pour améliorer le transport de marchandises. Le pays gronde. « On n’a pas le sou, les régions continuent de se soulever pour que les engagements pris en matière de développement soient tenus, et nos dirigeants se comportent avec une légèreté ostentatoire. Ils nous méprisent, se comportent comme en terrain conquis. Le comble est qu’ils prétendent que les investisseurs nous boudent parce que le pays n’est pas stable… Rien n’a changé. Le système est toujours en place et profite toujours à ceux qui sont au pouvoir », assène Ali, un syndicaliste de Gafsa. Tout a changé sans que rien ne change vraiment, j’en témoigne. Les Tunisiens sont libres, mais ils n’y croient plus. Les jeunes ont disparu de la scène publique, les leaders d’opinion se font rares, la transition cafouille et les échéances politiques sont en suspens. Le deuxième anniversaire de la révolution a pour les Tunisiens un goût amer d’inachevé. Le 14 janvier, personne n’aura le cœur à la fête et, de toute façon, aucune festivité particulière n’a été prévue. Pas plus que pour célébrer l’anniversaire de l’indépendance ou la naissance de la République le gouvernement n’a jugé nécessaire de fédérer le peuple autour d’un autre moment clé de l’histoire de la Tunisie… ● JEUNE AFRIQUE

Maghreb Moyen-Orient TRIBUNE

Opiniion ns & éditorria aux WALID BELHAJ AMOR

Ingénieur, spécialiste de l’économie de développement

Condamnés à vivre ensemble

L

E 14 JANVIER AU SOIR, lorsqu’un avion survola le domicile familial situé dans le prolongement des pistes de l’aéroport de Tunis-Carthage supposé être fermé, nous avons tout de suite compris qu’il s’agissait de l’avion qui emportait Ben Ali. L’émotion était à son comble. Comme beaucoup, nous espérions qu’on entrerait immédiatement dans la phase de reconstruction. C’était compter sans la capacité de l’homme à détruire. Depuis, on n’a cessé d’accumuler les erreurs, qu’elles soient stratégiques, de jugement ou de casting. De nombreux néophytes en politique se sont cru un destin national, et on a vu naître plus de partis qu’il n’y avait de leaders. Certains n’avaient pas d’audience au-delà de leur quartier, mais ils pensaient s’adresser à la nation. Beaucoup n’ont pas tardé à manquer d’intelligence, de discernement et d’humilité. Chacun y allait de son parti, son mouvement, son association, on allait voir ce qu’on allait voir. On n’a finalement pas vu grand-chose, mais alors quelle cacophonie!

Ennahdha, elle, s’est organisée très vite, a mis la main sur les instances régionales pour les élections et a mené son œuvre de déconstruction du modèle tunisien. Les mosquées, associations, écoles coraniques, tout a été mobilisé au service d’un slogan unique: « hors de la religion, point de salut ». Le dimanche 23 octobre 2011, je suis allé faire le tour de bureaux de vote dans les quartiers populaires deTunis. La vision, à Ettadhamen, d’hommes et de femmes en files séparées entourées des brigades d’Ennahdha ne laissait aucun doute sur l’issue du scrutin, ni sur le projet de ce parti. La Tunisie a choisi de faire confiance à un parti islamiste victimisé par Ben Ali, qui, en voulant le combattre seul, sans l’appui des démocrates, l’a finalement légitimé. Les partis démocratiques ont pris un gros coup derrière la tête. Comme après un deuil, ils sont passés par différentes phases: le choc, le déni, la colère et l’abattement. La société civile, elle, est sortie renforcée de cette expérience, et la résistance s’est mise très tôt en place. La manifestation organisée le 28 janvier 2012, à l’appel des partis démocratiques, pour une fois unis, a marqué le réveil des consciences. Avec Ennahdha au pouvoir, le dialogue a cédé la place à la violence pour imposer à laTunisie un modèle importé d’Arabie saoudite. Ceux qui reprochaient à Bourguiba d’avoir tenté de dissoudre l’islam dans la dictature essaient aujourd’hui de dissoudre la démocratie dans l’islam et la Tunisie dans le wahhabisme. L’Histoire parfois bégaie, mais on n’en retient pas toujours les leçons. Désormais, les enjeux sont clairs: la Tunisie balance entre démocratie et théocratie. Et chaque camp agit comme s’il pouvait abattre définitivement l’autre, alors qu’il n’y a pas d’autre issue que celle du vivre-ensemble. Le chemin sera long et difficile, mais là est le prix de la liberté. ● N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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Maghreb Moyen-Orient La page Facebook du groupe rassemble à ce jour plus de 21 000 « fans ». Les Salafyo Costa sont aussi à l’origine de pièces de théâtre, de séminaires et de caravanes médicales qui tournent dans tout le pays. « L’objectif est de diffuser notre message afin de prouver à tous que différentes communautés peuvent cohabiter et même construire des choses ensemble », explique Andrew, un Copte de 22 ans, qui a pris la tête de l’antenne média du groupe. Comme lui, 30 % des membres des Salafyo Costa sont chrétiens. Les salafistes représentent 35 % de l’ensemble, les libéraux et socialistes 25 %.

AUDE OSNOWYCZ

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! MEMBRES DES SALAFYO COSTA lors d’une tournée en province, en mai 2012. ÉGYPTE

Salafistes «peace and love»

Aussi tolérants que surdoués en com’, les Salafyo Costa tentent de redorer l’image des islamistes, réussissant même à rallier à leur cause chrétiens et libéraux.

I

ls arborent une barbe touffue, sont polygames, leurs femmes portent le voile intégral, mais ils se sont dressés, aux côtés des chrétiens et des libéraux, contre le projet de Constitution. Manifestant face au palais présidentiel. Suppliant son occupant, Mohamed Morsi, de ne pas mélanger politique et religion. Rappelant que l’Égypte n’est pas constituée que d’islamistes conservateurs mais aussi de Coptes, de libéraux et de socialistes. Des salafistes qui redoutent une islamisation accrue du pays ? Le positionnement n’est pas banal. Mais il est le fonds de commerce d’un groupe de jeunes Égyptiens issus de tous bords (islamistes, chrétiens, bédouins, libéraux, socialistes) décidés à se battre contre les communautarismes qui rongent la société depuis le Printemps arabe. HUMOUR. Tout a commencé dans un

Costa Coffee, l’un de ces cafés occidentaux qui fleurissent dans les quartiers aisés du Caire, où le wifi est gratuit et N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

ESPRIT CRITIQUE. « Ce mouvement est caractéristique de la jeune génération où chacun bricole sa propre idéologie à la carte. Les salafistes des Salafyo Costa se disent conservateurs, mais ils font des films, ce qui est interdit par les cheikhs. Même chose avec les chrétiens, dont la plupart ont fait la révolution. Ils désobéissent ainsi à leur patriarche. On retrouve enfin cela chez les jeunes Frères, qui ne se réfèrent plus à la charia mais à la civilisation arabo-islamique. À l’inverse de leurs aînés, qui se sont repliés sur leur communauté, ces jeunes Égyptiens sont capables de dialoguer. Les frontières entre les communautés deviennent plus poreuses. C’est le signe d’un plus grand esprit critique », analyse Stéphane Lacroix, maître de conférences à Sciences-Po et spécialiste de l’islam politique. Forcément, du côté des cheikhs et officiels salafistes, les Salafyo Costa ne sont pas pris au sérieux. Mohamed Abdel Maqsoud, un célèbre prêcheur, les a ainsi qualifiés « d’ignorants et insolents ». Mais

la climatisation poussée au maximum. « J’étais assis là en train de siroter tranquillement un café quand une connaissance m’a abordé : “Quelqu’un comme toi dans un endroit comme celui-ci ?” Cette fille s’imaginait que les salafistes n’allaient que dans des cafés traditionnels, où l’on ne boit que du thé en fumant la chicha ! C’est là que j’ai décidé de créer un groupe Facebook Salafyo Costa où l’on pourProchaine étape : créer un parti rait expliquer qui on est. écologiste respectueux de la Littéralement, cela signifie “le salafiste assis dans un démocratie et des minorités. café Costa”. » L’homme qui parle ainsi est un salafiste. Quelques qu’importe. Alors que leur médiatisaminutes de conversation suffisent pourtion leur offre une influence grandistant à nous faire oublier sa barbe et son sante, les Salafyo Costa ne cachent plus refus de nous serrer la main. Un métier. leurs ambitions. La prochaine étape ? Mohamed Tolba utilise avec les jourDevenir un parti politique « écologiste nalistes la même arme que sur le web : et respectueux de la démocratie et des minorités ». Ils veulent également offrir l’humour. Les vidéos qu’il a réalisées avec quelques membres de son groupe « une alternative aux partis actuels, plus en phase avec les idées des jeunes moquant les préjugés que les différentes Égyptiens ». ● communautés ont les unes contre les CLAIRE LEFEBVRE autres ont fait le tour de la Toile arabe. JEUNE AFRIQUE


Maghreb Moyen-Orient

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Mathieu Guidère « Les révolutions arabes se sont révélées conservatrices » Dans son dernier ouvrage, l’islamologue français analyse les développements et les conséquences du Printemps arabe, notamment au Maghreb.

JEUNE AFRIQUE : Qui sont les « cocus de la révolution » ? MATHIEU GUIDÈRE : Ce sont ceux qui

l’ont faite : les jeunes libéraux, les chômeurs, les femmes, les intellectuels. Ils ont sincèrement pensé que la révolution amènerait un changement immédiat, sans attendre un processus transitoire dont on annonce qu’il pourrait durer entre cinq et dix ans. Vous écrivez : « Le retour à la religion est vécu dans ces pays comme une véritable libération »…

C’est le paradoxe : les anciens régimes avaient instrumentalisé la sécularisation des sociétés, de manière parfois très radicale, comme en Syrie où en Tunisie. Bien que l’article premier de l’ancienne Constitution tunisienne stipulait que l’islam est la religion de la Tunisie, le régime restreignait toute manifestation de religiosité : le port du voile, de la barbe, l’ouverture des mosquées hors des heures de prière. Avec les révolutions, ces éléments sont devenus des signes de libération. Associée à la démocratie en Occident, la laïcité l’est à la dictature dans les pays arabes : ces révolutions se sont ainsi finalement révélées conservatrices.

Faut-il craindre l’avènement d’une théocratie en Tunisie ?

En Tunisie, pays de rite sunnite malékite, il ne peut y avoir de théocratie, parce qu’il ne peut y avoir un religieux à la tête de l’État. On assiste en Tunisie à une bataille interne à l’islamisme entre un parti majoritaire qui est Ennahdha, de tendance « frériste » [des Frères musulmans, NDLR], et la tendance salafiste, qui peut être violente. Il fallait que la tendance frériste trouve son ancrage en s’alliant avec les salafistes ou avec le centre. Elle a tenté de s’allier avec les salafistes mais constate aujourd’hui qu’elle a beaucoup plus intérêt à s’allier avec le centre. Devenus opposants, les salafistes veulent casser Ennahdha.

Au Maroc, la révolution n’aurait ainsi pas eu lieu parce que les autorités n’ont jamais dissocié l’islam de la pratique du pouvoir ?

Exactement. Le roi n’a jamais dissocié et ne dissociera jamais le politique du religieux. Il est légitime dans ces deux domaines, et l’opposition doit choisir entre s’opposer à la dimension politique du régime ou à sa dimension religieuse. On a donc une rupture entre les opposants qui veulent la fin du symbole religieux et ceux qui veulent l’atténuation du pouvoir royal. La monarchie joue très bien sur cette rupture, qui permet la perpétuation du système. Quant à l’exception algérienne…

En Libye, on avance souvent que les libéraux l’ont emporté sur les islamistes, est-ce exact ?

On a en Libye une perception faussée de la situation. C’est un État islamique dans lequel la charia est appliquée depuis 1993. La révolution a tout de suite étendu le champ de son application. Toutes les tendances, des extrémistes aux modérés, y sont islamiques, et les libéraux s’inscrivent dans ce paysage. La question

Je parlerais plutôt de traumatisme algérien, qui a abouti à un rejet des deux protagonistes des années de plomb, les militaires et les islamistes. Le jour où ces deux-là dégageront, l’Algérie pourra probablement trouver une voie de fonctionnement et de développement normale. Personne n’est dupe : ce n’est pas parce que l’Algérie est un pays merveilleux qu’il ne s’y est rien passé… ● Propos recueillis par LAURENT DE SAINT PÉRIER

VINCENT FOURNIER/J.A.

N

é en Tunisie, Mathieu Guidère est titulaire d’un double doctorat d’arabe et de lettres françaises. Aujourd’hui professeur d’islamologie à l’université de Toulouse, il consacre beaucoup de temps au Printemps arabe, dont il est allé, sur le terrain, constater les développements et les conséquences. Une expérience rapportée dans un ouvrage paru en janvier, Les Cocus de la révolution, récit très personnel autant qu’analyse politique qu’il situe volontiers dans la lignée des périples orientalistes du XIXe siècle.

est de savoir si la Libye va devenir un sanctuaire islamo-jihadiste. Je pense que non, car lorsque l’ensemble du champ politique est islamique, les radicaux passent inaperçus.

! L’auteur des COCUS DE LA RÉVOLUTION, VOYAGE AU CŒUR DU PRINTEMPS ARABE (éd. Autrement, 160 pages, janvier 2013, 12 euros). JEUNE AFRIQUE

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Maghreb Moyen-Orient

ISRAËL

l’annonce de son alliance avec le parti d’extrême droite Israel Beitenou (« Israël, notre maison »), fin octobre 2012. Entretemps, son leader russophone, Avigdor Lieberman, a été inculpé pour fraude et abus de confiance dans une affaire de nomination d’ambassadeur. Sa démission du poste de ministre des Affaires étrangères est un coup dur pour Netanyahou, qui en avait fait le numéro deux de sa liste.

Netanyahou peut-il perdre? Plombé par les ennuis judiciaires de son colistier, Avigdor Lieberman, et débordé sur sa droite par Naftali Bennett, le favori des élections du 22 janvier est en perte de vitesse dans les sondages.

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palestinien, « future base arrière du terrorisme », selon lui. Son alternative : le « plan Bennett », qui propose l’annexion de 62 % de la Cisjordanie, actuellement sous contrôle israélien. Mais la popularité de Bennett s’explique surtoutparunevolontéd’ouverture,inédite pour un parti religieux. Sur sa liste figurent par exemple des personnalités laïques ou d’autres connues pour leur engagement social. « Notre objectif est de devenir la deuxième force politique du pays », clamet-il, au grand dam de Netanyahou, dont le parti assiste, impuissant, au grignotage de son électorat par Bennett. Même s’il reste largement favori, le Likoud ne recueillerait plus que 35 sièges au Parlement, contre 45 au moment de

LE RETOUR DE LA GAUCHE. Le Likoud

paie également sa propre radicalisation. Ses primaires ont vu l’émergence d’une jeune garde d’ultranationalistes, à l’instar de Danny Danon et Moshé Feiglin, fervents supporteurs de la colonisation. « Ce parti n’est plus celui que nous connaissions », affirme Shelly Yachimovich, chef de file des travaillistes. Celle qu’on surnomme la « dame de fer » symbolise le retour au premier plan d’une gauche sur le déclin depuis l’assassinat d’Itzhak Rabin. Au discours sécuritaire de Netanyahou, l’ex-journaliste oppose une campagne résolument sociale, s’appuyant sur les

La droite encore majoritaire

Répartition des sièges en fonction des intentions de vote

(En nombre de sièges)

33

BLOC DE CENTRE GAUCHE

BLOC DE DROITE/ RELIGIEUX

56

18

14

20 % d'indécis

11

11

10

64 120 sièges

8

6

5

2

2

SOURCE : YEDIOT AHARONOT, PUBLIÉ LE 11 JANVIER 2013

L

e crâne largement dégarni recouvert d’une kippa tricotée, signe de reconnaissance des colons israéliens, Naftali Bennett incarne le renouveau de la mouvance sioniste religieuse. Il dirige la Maison juive (Habayit Hayehudi), héritière du Parti national religieux (PNR), disparu en 2008. Depuis plusieurs semaines, sa formation se voit créditée de 11 à 15 sièges aux élections législatives du 22 janvier, contre 3 dans l’actuelle Knesset. Le jeune quadragénaire est aujourd’hui l’attraction d’une campagne électorale où tout semblait joué d’avance. Cette surprenante ascension s’explique par la personnalité de Bennett, dont le pedigree reflète bien des facettes de la société israélienne. Fils d’immigrants juifs américains, il fut officier supérieur dans les commandos de Tsahal avant de lancer une start-up spécialisée dans la protection des circuits bancaires. La vente de l’entreprise en 2005 pour quelque 145 millions de dollars (111 millions d’euros) a fait de Bennett l’une des plus jeunes fortunes du pays. Après avoir accompagné Netanyahou jusqu’à son triomphe électoral de 2008, Bennett décide de poursuivre une carrière d’irrédentiste au sein du Yesha, le Conseil des implantations juives de Judée-Samarie (Cisjordanie). Tout en résidant dans la banlieue huppée de Tel-Aviv, il s’impose comme un farouche adversaire de l’État

URIEL SINAI/AFP

! SHELLY YACHIMOVICH (au centre), chef de file des travaillistes.

BE LIK IT OU EN D OU TR AV AI PA LA LL R IS TI M TE AI SO (B N J en UI PA ne VE RT t I D t) U FU (L TU a BL pid R OC ) IS A RA RA or th od S ÉLIE BEox HA N es S sé S ( fa ul ra tra de s) HA T (T N zip O i L UA ivn H (e xt i) rê m M JU DA e g ER a E ÏS (u ME uch TZ ltr D e a- E L ) as orth A T hk od OR én o AH az xes es ) KA DI M O A (e TZ xt M rê A m IS e R dr AË oi L te )

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JEUNE AFRIQUE


revendications des Indignés, qui avaient battu le pavé en masse durant l’été 2011. Son principal atout : Stav Shaffir, 26 ans, l’une des figures de cette révolte des classes moyennes contre la vie chère, en passe de devenir la plus jeune députée de la Knesset. Principal outsider avec 18 à 20 sièges, le parti travailliste a d’ores et déjà annoncé son refus de participer à une coalition qui compterait des formations d’extrême droite et ultraorthodoxes. « Il y a seulement deux possibilités. Soit le Parti travailliste, sous mon autorité, forme le prochain gouvernement, soit nous dirigerons l’opposition », a tranché Yachimovich, qui ambitionne par ailleurs de relancer le processus de paix avec les Palestiniens. APPEL À L’UNION. Le positionnement

de Yachimovich séduit Tzipi Livni, autre candidate phare. Battue par Shaul Mofaz lors des primaires de la formation centriste Kadima en mars 2012, Livni a relancé sa carrière politique en créant Hatnouah (« le Mouvement »). Elle rêve désormais de faire tomber Netanyahou, dont elle n’a pourtant été qu’une médiocre opposante ces quatre dernières années. Problème : ses 9 à 11 mandats annoncés ne lui permettent pas de faire cavalier seul. Après l’avoir un temps snobée, puis trahie en lui arrachant le très populaire Amir Peretz, ex-numéro trois de la liste travailliste, Livni souhaite trouver un terrain d’entente avec Yachimovich. « Si les électeurs nous voient tous unis, ceux qui désespéraient de tout changement iront voter, ce qui pourrait nous permettre de constituer un bloc plus important que celui du LikoudIsrael Beitenou », assure l’ex-ministre des Affaires étrangères. Si le Parti travailliste approuve son appel à l’union, de plus en plus convaincu que « la victoire est possible », Yaïr Lapid et sa formation Yesh Atid (« Il y a un futur »), autre alternative centriste, ne sont pas convaincus du bien-fondé d’une telle stratégie. En plus de reprocher à Livni un « ego démesuré », l’ex-présentateur vedette de la télévision israélienne préfère combattre de l’intérieur le futur gouvernement Netanyahou, martelant toutefois qu’il ne sera pas « la cinquième roue du carrosse ». En attendant, même en perte de vitesse, le bloc de droite conserve une majorité de 66 à 67 députés face à une opposition de gauche et centriste toujours à l’état embryonnaire. ● MAXIME PEREZ, à Jérusalem JEUNE AFRIQUE

Maghreb & Moyen-Orient

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APS

Coulisses

COOPÉRATION UN ÉMIR À ALGER Le pragmatisme d’Alger a fini par l’emporter sur sa méfiance à l’égard du parrain des révolutions arabes: Hamad Ibn Khalifa Al Thani. Accueilli à l’aéroport le 7 janvier par le président Bouteflika en personne, l’émir du Qatar a souligné son « attachement permanent à la concertation et à l’échange de vues entre les dirigeants des deux pays frères sur les développements de la situation sur les scènes arabe et internationale ». Mais, précise Sélim Kelala, professeur de sciences politiques à l’Université d’Alger, « cette visite était à cent pour cent orientée affaires et il a dû être très peu question du Printemps arabe ». Les deux pays ont en effet conclu huit accords de coopération dans les domaines du transport maritime, des hydrocarbures et de l’industrie, pour un montant total supérieur à 3,5 milliards d’euros. L’émirat gazier renforce ainsi son engagement économique en Afrique du Nord : le lendemain de cette visite, il annonçait avoir versé 1,9 milliard d’euros à l’Égypte pour l’aider à soutenir sa monnaie. ●

JORDANIE IL REND LE GRISBI « Nayel Jamaan a retrouvé aujourd’hui 320000 dinars [près de 344000 euros] appartenant à une banque dans la rue de l’Armée », a indiqué le chef de police de la ville de Zarqa, en Jordanie. L’homme est tombé sur un sac contenant en billets de banque l’équivalent de cent vingt-sept années de salaire moyen. Il a tout de suite appelé une radio locale pour tenter de retrouver son propriétaire, une banque dont les convoyeurs avaient un peu plus tôt égaré le magot. ÉGYPTE REMANIEMENT FRATERNEL Le Premier ministre égyptien, Hicham Qandil, avait annoncé l’arrivée de technocrates au sein de son gouvernement pour faire face à la dégradation de l’économie. Mais le remaniement partiel intervenu le

6 janvier fait surtout la part belle aux Frères musulmans. Les portefeuilles desTransports, du Développement intérieur et des Approvisionnements ont ainsi été confiés à des Frères, celui des Finances revenant à un proche de la confrérie. SYRIE ÉCHANGE DE PRISONNIERS En échange des 48 Iraniens détenus depuis août par les rebelles, les autorités syriennes ont commencé le 9 janvier à libérer 2 130 prisonniers civils. Enlevés sur la route de l’aéroport de Damas, les Iraniens avaient été présentés comme des pèlerins parTéhéran, mais l’opposition les a accusés d’être des Gardiens de la révolution, l’armée idéologique du régime des mollahs. Conclu sous l’égide de laTurquie et du Qatar, cet échange est le plus important depuis le début de la crise. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013


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Europe, Amériques, Asie

CHINE

Xi Jinping ou la révolution

de l’image Il tombe la cravate, fait la une des magazines et s’efforce d’apparaître comme un président proche des gens. Un changement de style sans précédent à la tête de la République populaire.

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JEUNE AFRIQUE


Europe, Amériques, Asie ce dernier, alors que, depuis plusieurs années, le secteur public avait regagné beaucoup de terrain. Et puis on a noté que, lors du voyage à Shenzhen, les membres de la délégation officielle étaient descendus dans des hôtels de catégorie moyenne, ce qui doit être interprété comme un appel aux responsables politiques à adopter un train de vie moins dispendieux, à se montrer plus proches du peuple. Enfin, anecdote intéressante, lors d’une visite dans des écoles, Xi Jinping a fait distribuer aux élèves des dictionnaires d’anglais, geste dans lequel il faut voir une invitation à plus d’ouverture internationale. » BRÉVIAIRE. Les banquiers de Hong Kong ne sont

XINHUA/PHOTOSHOT/ABACAPRESS.COM

pas les seuls à suivre avec attention les premiers pas de Xi Jinping. « On voit de plus en plus de portraits de lui en première page des magazines, commente un journaliste de la télévision publique CCTV. Il est parfois montré sans cravate, détendu, souriant… C’est très inhabituel. D’ordinaire, c’est le Parti qui est mis en évidence dans les journaux, jamais les individus. Il y a même eu des articles retraçant sa jeunesse ou sa vie de famille… » Même Chine nouvelle, la très officielle agence de presse, souligne sa volonté de lutter contre la bureaucratie et la langue de bois. Le nouveau bréviaire des cadres du Parti fixe des règles très précises : adieu les tapis rouges, les discours sans fin prononcés sur un ton monocorde, les restrictions à la circulation automobile dans les villes pendant les voyages officiels, les banquets interminables, les réunions de travail où l’alcool coule à flots… Les responsables sont désormais astreints, plusieurs fois par an, à se rendre dans les campagnes pour entendre les doléances des citoyens les plus pauvres… Déjà, dans les pro! VISITE DANS UN FOYER VILLAGEOIS À HUANGLONG, vinces, chacun redouble de zèle pour montrer dans la province son attachement aux nouvelles directives ! méridionale « Lors de son arrivée aux affaires, chaque noudu Guangdong, veau dirigeant place la lutte contre la corruption au le 11 décembre. premier rang de ses préoccupations et s’efforce de montrer un visage plus humain pour désamorcer les contestations, explique le professeur Zhu Lijia, de l’Académie des sciences politiques. Espérons que le nouveau président soit sincère et, surtout, qu’il ait l’autorité nécessaire pour imposer ses vues aux cadres du Parti dans les Une volonté affichée de suivre provinces. Mais, la trace de feu Deng Xiaoping, jusqu’à preuve du l’artisan du décollage économique. contraire, cette campagne n’est rien d’autre à mes yeux qu’une opération de relations publiques. » Reste que, pour l’instant, le message passe plutôt bien. À en croire un sondage publié par le Quotidien de la jeunesse de Chine, à Pékin, 91 % des personnes interrogées sont favorables à des discours moins formels et sont d’accord avec les mesures décidées par Xi Jinping.

SÉBASTIEN LE BELZIC, à Pékin

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e nouveau numéro un du parti communiste, Xi Jinping, ne prendra officiellement ses fonctions qu’en mars, mais déjà il impose un nouveau style à la tête de l’État. En Chine, tout est affaire de symboles, et c’est donc à Shenzhen, dans le Guangdong, qu’il a fait ses premiers pas. Là même où, il y a tout juste vingt ans, Deng Xiaoping donna le coup d’envoi des réformes économiques. « Ce premier voyage officiel a été marqué par plusieurs gestes symboliques, explique David Guo, analyste chez Rothschild Asset Management, à Hong Kong. Il y a d’abord eu un dépôt de fleurs devant un monument à la gloire de Deng, ce qui indique que le nouveau pouvoir entend se placer dans la droite ligne des réformes entreprises par l’ancien président. Xi a ensuite participé à un forum avec six grands patrons chinois, dont cinq venaient du secteur privé, ce qui traduit sans doute une volonté de redonner toute sa place à JEUNE AFRIQUE

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Europe, Amériques, Asie Président«normal»,cedernierneménagepasses efforts pour se construire une image de réformiste à tendancesouvertementmodernistes.Ilamême une page sur Weibo, le Twitter chinois, suivie par plus de 53000 personnes. On y apprend que, « comme tous les gens du peuple “Oncle Xi” regarde des films »; qu’il a un faible pour les films de guerre américains, comme Il faut sauver le soldat Ryan; mais que La Cité interdite (2007), du réalisateur chinois Zhang Yimou, le laisse « perplexe ». Jusqu’ici, les noms des dirigeants chinois étaient censurés sur Weibo. « C’est un pas dans la bonne direction », estime l’éditorialiste de l’influent magazine Caixin, qui espère que le suivant sera la publication du montant de la fortune des dirigeants. « Le Parti fait face à de sérieuses difficultés, écrit-il, le peuple a perdu toute confiance dans le gouvernement, parce que celuici ne tient pas ses promesses et que ses membres multiplient les abus de pouvoir. »

« En Chine, tempère John Russell, directeur d’une agence d’intelligence économique à Pékin, la véritable direction est collégiale. Xi Jinping devra tenir compte des luttes d’influence et composer avec la frange la plus conservatrice du Parti. Au début, Hu Jintao aussi s’était engagé à lutter contre la corruption. On sait ce qui en a résulté… » Quoi qu’il en soit, Xi Jinping souffle à merveille le chaud et le froid. Tout en Adieu tapis rouges, cultivant son image de président « norlangue de bois mal », il flatte la fibre patriotique de ses et banquets compatriotes. Au mois de décembre, il a par exemple visité plusieurs casernes interminables. de l’Armée populaire de libération et appelé à un « renouveau nationaliste ». Il veut une armée forte, une politique digne, et exalte désormais le « rêve chinois » – comme il y avait naguère un « rêve américain ». Il a dix ans pour le mener à bien. ●

Guo Shengkun, flic et businessman Garant de la stabilité du régime, le nouveau ministre de la Sécurité publique vient du monde de l’entreprise.

un homme d’affaires, docteur en management et patron de plusieurs grandes entreprises d’État. Après avoir fait ses armes dans le secteur des métaux lourds, il avait, en 2000, créé Chinalco, le numéro un chinois de l’aluminium, aujourd’hui coté en Bourse à New York et à Hong Kong. VERTIGINEUX. « Dans l’architecture

LIANG KAICHANG/IMAGINECHINA

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! LORS D’UN FORUM ÉCONOMIQUE à Nanning, dans le Guangxi, en janvier 2010.

D

«

iriger une entreprise ou une province chinoise, c’est un peu la même chose, seuls les “clients” diffèrent. Introduire des notions de management d’entreprise dans la pratique gouvernementale ne pourra qu’améliorer son efficacité », expliquait il y a deux ans Guo Shengkun au magazine China Insight. Dans un paysage politique profondément marqué par la

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rhétorique marxiste, ce discours détonnait. Pourtant, depuis ses premiers pas à la tête de la province pauvre du Guangxi, cet ovni de la politique chinoise a encore fait du chemin. Au début de l’année, Guo Shengkun (58 ans) est devenu à la surprise générale ministre de la Sécurité publique. Autrement dit : premier flic de Chine. Rien ne l’y prédestinait. Jusqu’en 2004, et vingt années durant, Guo était en effet

du pouvoir chinois, le ministère de la Sécurité publique tient une place très particulière, rappelle Emmanuel Puig, chercheur à l’Asia Centre. Il joue un rôle déterminant dans le maintien de l’ordre et le musellement des contestations violentes, soit par la mise en place de dispositifs contre-insurrectionnels, comme à Urumqi (2009) ou au Sichuan (2012), soit par la surveillance quotidienne des flux d’informations et des forums d’expression sur internet. Il est le garant du maintien de l’ordre et de la stabilité du régime, ce qui confère à ses dirigeants une influence politique considérable. » Le ministère de la Sécurité publique dispose d’ailleurs d’un budget proprement vertigineux : plus de 70 milliards d’euros en 2012. Il est à la fois le plus craint et le plus dispendieux du pays, devant celui de la Défense. Mais apparemment pas de quoi tourner la tête du très atypique Guo Shengkun, dont les premiers pas ont été fort anodins : le 31 décembre, il a donné le coup d’envoi d’une grande campagne contre… l’alcool au volant. Attendons la suite. ● S.L.B. JEUNE AFRIQUE


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PARCOURS | D’ici et d’ailleurs

! « JE SUIS BANLIEUSARD avant d’être français et avant d’être algérien », affirme l’artiste.

Hocine Ben. Avoir 15 ans dans le 9-3 De retour d’Algérie, l’acteur-slameur confie son attachement au département de Seine-Saint-Denis.

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E GARS, SORTE DE GAVROCHE de la banlieue, beaux yeux bleus, tout juste la quarantaine, ne quitte jamais son béret et son écharpe blanche. Il parle d’une voix posée, une voix qu’il a appris avec le temps à adoucir. « Je sais, ça va faire cliché de dire ça, mais le slam a tout changé pour moi. » Hocine Ben est né… vit encore à Aubervilliers, et hésite toujours, un peu moins depuis qu’il est papa d’une petite fille, à quitter cette banlieue populaire aux portes de Paris. D’ailleurs, dans son texte AuBercail, il dit: « Aubervilliers! Dis-moi pourquoi je suis encore dans tes murs ? T’entends pas mes prières ? Dis-moi, t’entends pas mes murmures? C’est pas que je me lasse de toi, mais le monde est vaste et le monde m’appelle! Auber je t’ai déjà prévenu, un jour je manquerai à l’appel ! » « Je me suis enfin libéré de ce poids, de cette culpabilité. J’avais l’impression

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que si je partais, je quittais le navire, mais j’ai compris qu’on pouvait agir en vivant ailleurs. » Hocine Ben agit en sillonnant le monde avec des textes engagés et poétiques depuis une bonne dizaine d’années, depuis qu’il a découvert le slam. « En 1999, j’étais dans une salle d’attente d’un médecin et je suis tombé par hasard sur un article. Ça parlait de slam et ça m’a tout de suite parlé. » Avec ses textes, il s’est donc mis à arpenter les salles où les slameurs se réunissaient. « À l’époque, ça se faisait surtout dans les bars, les gens prenaient le micro et c’était parti, raconte-t-il. Le slam est resté pendant longtemps underground, c’était l’évolution du rap. » Ses textes relatent son parcours, ses environnements, mais aussi ses identités, dont la principale, celle qui vient du 93, le département de Seine-Saint-Denis. « Pour moi, c’est le point commun, je suis banlieusard avant d’être français ou avant d’être algérien.

Je trouve qu’on n’a pas encore raconté cette mémoire. Même si ça évolue un peu, il y a encore beaucoup de choses qu’on n’a pas dites. » Comme, par exemple, ce qu’il dit dans La Muselière: « Tu sais, tu peux toujours rénover nos tours, si tu ne rénoves pas ton regard… Mon slam t’attend au tournant pour te raviver la mémoire. Novembre 2005, elles sont encore chaudes les braises… Avoir 20 piges dans les Aurès, en avoir 15 dans le 9-3! » Hocine Ben revient tout juste de sa première grosse tournée en Algérie, titrée Bled Runner, en hommage à ses parents, deux Algériens analphabètes qui ont débarqué en région parisienne à la fin des années 1950. « Ils ont quitté leur petit village, près de Sétif, comme l’aurait fait un Basque quittant Bayonne, pour rejoindre la capitale. L’Algérie était encore française à cette époque. » Bled Runner, ou quinze jours de l’autre côté de la rive, à Alger, Oran, Tlemcen ou Constantine pour dire aux Algériens ce que peut ressentir un « immigri ». « Le JEUNE AFRIQUE


Europe, Amériques, Asie

Photo : CAMILLE MILLERAND pour J.A. JEUNE AFRIQUE

ÉTATS-UNIS

Une grande gueule à la Défense C’est à Chuck Hagel, un républicain très atypique, que Barack Obama a choisi de confier les clés du Pentagone. Si le Sénat y consent.

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nnoncée par la Maison Blanche le 7 janvier, la nominationdeCharlesTimothy,dit Chuck, Hagel au Pentagone peut-elle être invalidée par le Sénat ? Le choix par Barack Obama de ce républicain très atypique qu’il a appris à apprécier en 2008, lors d’une mission sénatoriale en Irak et en Afghanistan, répond à une double volonté. 1. Celle de desserrer un peu l’étouffant carcan du bipartisme ; 2.

Les militants de la cause homosexuelle lui reprochent d’anciennes (1998) et maladroites déclarations. Les Hispaniques anticastristes, au premier rang desquels Marco Rubio, le jeune sénateur républicain de Floride, ne lui pardonnent pas de juger « obsolète » l’embargo contre le régime cubain. Les idéologues néoconservateurs n’ont pas oublié sa farouche opposition à la politique de l’administration Bush en Irak (qu’il jugeait « au-delà du pitoyable ») et s’indignent aujourd’hui de son peu d’enthousiasme à sanctionner, militairement et même économiquement, l’Iran pour ses ambitions nucléaires. Voire de son souhait de négocier avec le Hamas palestinien. Accusés par lui, en 2006, « d’intimider beaucoup de monde au Sénat », certains membres du « lobby juif », comme il n’aurait pas dû dire puisqu’il s’agit du lobby pro-Likoud, ont juré sa perte et font courir le bruit qu’il serait le secrétaire à la Défense le moins favorable à Israël de l’histoire des États-Unis. KRISTOFFER TRIPPLAAR/SIPA USA

public était extra, très réceptif, se réjouit-il. On laissait la porte de la salle ouverte à chaque concert. Et là, tu avais des rappeurs locaux, des danseurs, et des beatboxers qui venaient nous rejoindre. » Dernier de sa fratrie, Hocine Ben a souvent le sourire. Cela doit venir de cette enfance heureuse, « grâce à l’amour que m’ont donné mes parents et mes huit frères et sœurs ». Même si la famille ne roulait pas sur l’or : le père, ouvrier, travaille en usine ou sur les chantiers. Hocine Ben a quitté l’école en seconde. « Heureusement que je n’ai pas tout rejeté du système scolaire! s’exclamet-il. J’avais un super prof de français: je lisais la littérature française, et puis à 17 ans, j’ai découvert que “chez nous” aussi il y avait de grands auteurs: Rachid Mimouni, Mouloud Feraoun, Aziz Chouaki, Azouz Begag ou Driss Chraïbi… » Comme la roue tourne, il a même représenté la Francophonie à l’étranger, lors d’un concours de slam au Brésil, en 2009. Il s’en est fallu de peu pourtant pour que Hocine Ben prenne un autre chemin. « J’ai fait quelques bêtises, mais rien de méchant. Ce n’est pas une fatalité, quand tu grandis dans un quartier, de devenir délinquant. Mais disons qu’ici tu as le mode d’emploi si tu veux aller dans ce sens-là… » Luimême a grandi à La Maladrerie, près du fort d’Aubervilliers, un quartier à la mauvaise réputation. « Moi, j’adore cet endroit. Il y a des problèmes de délinquance, en partie liés aux problèmes sociaux qui touchent des familles de plus en plus pauvres, mais il y a une belle solidarité que je n’ai pas retrouvée ailleurs. » Ailleurs, ça pourrait être à Cannes par exemple, où il a passé quelques jours en mai dernier, avec l’équipe de Rengaine, le premier long-métrage de Rachid Djaïdani. Hocine Ben y joue le rôle… d’un flic intègre! On l’a également vu dans Rue des cités, un excellent film de Hakim Zouhani et Carine May, deux amis d’enfance, sélectionné aussi à Cannes en 2011. Visant un peu plus haut chaque année, Hocine Ben travaille aujourd’hui avec Shani Diluka, une pianiste sri-lankaise. Un projet pour 2013, visant à rapprocher deux mondes. Après Hocine Ben, Hocine Benthoven? ● NADIR DENDOUNE

PARI. Mais Obama fait le pari

qu’en pleine guerre budgétaire, aucun sénateur démocrate ne prendra la responsabilité de court-circuiter la nomination de Hagel, à laquelle un nombre limité mais suffisant d’élus Ì CHUCK HAGEL : vétéran de la guerre du Vietnam et ancien sénateur du Nebraska. républicains devraient ne pas s’opposer. Il est d’ailleurs symptomatique que les très influents et très celle d’enfoncer un coin dans les rangs conservateurs dirigeants de l’American républicains à la veille de l’adoption par Israel Public Affairs Committee (Aipac) le Congrès de coupes drastiques dans le n’aient pas officiellement pris position budget de la défense. contre sa nomination. C’est qu’ils ne sont Bien sûr, Hagel est loin de faire l’unapas nés de la dernière pluie. Sachant nimité. Pour la plupart des républicains, c’est un traître. Pour les moins clairvoyants la partie mal engagée au Sénat, ils se des démocrates, c’est un rallié vaguement gardent bien d’empoisonner davantage suspect. Et puis, il faut admettre qu’il les relations entre Obama et Benyamin pourrait souvent s’exprimer de manière Netanyahou par des prises de position intempestives. ● plus prudente. Cela lui éviterait de se faire inutilement des ennemis. JEAN-MICHEL AUBRIET N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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Europe, Amériques, Asie

FRANCE

Génération pragmatique Élus locaux ou simples militants, les jeunes issus de l’immigration ont toujours beaucoup de mal à se faire une place en politique. Ils ont compris que rien ne leur sera accordé de bon gré et qu’ils devront se battre. Pied à pied.

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ls sont jeunes, bien formés, souvent sur le tas, et passionnés de politique. Français issus de l’immigration, ils s’appellent Ali Soumaré, Salem Belgourch ou Mahmoud Tall. À l’approche des élections municipales, dans un peu plus de un an (mars 2014), ils sont dans les starting-blocks. Nul doute qu’il faudra compter avec eux pendant la campagne. Contrairement à Najat VallaudBelkacem, Razzy Hammadi, Rama Yade ou Rachida Dati, ces troislà n’occupent pas le devant de la scène. Comme des centaines d’autres représentants de la « diversité », on les croise dans les couloirs des mairies, des conseils généraux ou des conseils régionaux. Certains exercent un mandat électif, d’autres sont simples militants. Qu’importe, ils font désormais partie intégrante de la vie politique française, cet univers pas toujours très charitable. L’heure est à la constitution des listesmunicipales.Partout,onaffûte les stratégies, on calcule, on négocie en coulisses, on s’étripe parfois. Gare à ne pas finir dans le bas-côté. D’originemalienne,AliSoumaré(32 ans) est conseiller régional d’Île-deFrance et secrétaire de la section socialiste de Villiers-le-Bel (Val d’Oise).«Lesjeunesissusdel’immigrationsebattent,explique-t-il,mais N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

certains font encore un complexe: ils hésitent à franchir le dernier pas et à briguer une tête de liste. » En 2010, lui-même a été accusé par des élus UMP – à tort – d’être « un délinquant multirécidiviste chevronné ». Il paraît aujourd’hui bien placé pour devenir maire. En tout cas, même s’il n’a pas encore annoncé sa candidature, il y pense. En se rasant? Pourquoi pas. Mais il lui faudra au préalable être désigné

«

MAHMOUD TALL (UMP)

J’étais fan du personnage Sarkozy, de sa façon de voir les choses et de faire de la politique. Lorsqu’on veut réussir, on peut, disait-il. Ça m’a tout de suite séduit. »

MOUSSE/ABACAPRESS.COM

HABY NIAKATE

DR

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comme tête de liste par son parti à l’issue d’une primaire. Et c’est loin d’êtregagné.Auxdernièresélections régionales, il a certesobtenu 71,80 % des suffrages dans sa ville, mais, il le sait, cela ne suffira pas forcément. « Tout est une question de rapport de force, dit-il. Ils [les apparatchiks socialistes, NDLR] ne nous désigneront comme têtes de liste que s’ils ne peuvent faire autrement. » D I S C R I M I N AT I O N S. Salem Belgourch, 27 ans, ne dit pas autre chose. Né de parents marocains, il est aujourd’hui conseiller municipal d’opposition à Colombes (Hauts-de-Seine). Après être passé par le PS, il est aujourd’hui sans étiquette mais figurera en 2014 sur la liste d’un candidat de centre droit. « Je ne me reconnaissais plus dans le PS, commente-t-il. Ce parti affirme lutter contre les discriminations, mais il fait tout le contraire, au moins au niveau local. On met des Blacks et des Beurs sur les listes, mais rarement en position éligible. Lorsqu’ils ont JEUNE AFRIQUE


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« envie de montrer leurs compétences, d’évoluer, ils sont souvent bloqués. Quant à revendiquer la tête de liste, ce n’est même pas envisageable ! » De manière générale, les partis politiques sont très critiqués pour leur conservatisme, mais chacun sait bien qu’ils restent incontournables. Raison pour laquelle le Franco-Sénégalais Mahmoud Tall, 27 ans, a choisi, avant même une éventuelle candidature municipale, de briguer la présidence des Jeunes Pop, le mouvement « jeune » de l’UMP. « J’ai beaucoup réfléchi avant d’être candidat, dit-il. Si j’y vais, c’est parce que je pense pouvoir apporter quelque

«

J EUNE AFRIQUE

chose de nouveau. » Délégué national des jeunes UMP chargé de la culture depuis deux ans et délégué adjoint de la 6e circonscription de Paris depuis plus de quatre, c’est un « bébé Sarkozy », un fan de l’ancien président à qui il emprunte son franc-parler : « Je suis un militant qui, lors des dernières législatives, a beaucoup mouillé sa chemise. Nous avons fait du porte-à-porte, rencontré beaucoup de gens : jamais je ne me suis senti différent. Et si quelqu’un a un jour tenté de me le faire sentir, mon travail a suffi pour calmer cette velléité. » À l’en croire, la faible représentation des minorités dans les instances dirigeantes des partis,

singulièrement à l’UMP, s’explique très simplement : « Les gens se contentent de demander qu’on veuille bien leur faire une place. Mais le pouvoir ne se demande pas, il se prend ! » De gauche, de droite ou du centre, les membres de cette nouvelle génération n’ont qu’un mot à la bouche: pragmatisme. Ils savent qu’en tant que Français issus de

ALI SOUMARÉ (PS)

Par peur d’ethniciser le débat, la gauche n’est pas très à l’aise avec la diversité. Sur ce point, Sarkozy nous a un peu ringardisé, même s’il s’est contenté d’utiliser la question pour faire des coups politiques. »

! ALI SOUMARÉ, conseiller régional en Île-de-France et secrétaire de la section socialiste de Villiers-le-Bel (Val d’Oise).

SALEM BELGOURCH (centre droit, sans étiquette)

Parler tout le temps de la diversité ou refuser d’aborder le sujet, ce sont deux solutions extrêmes qui ne règlent rien. Il faut trouver un équilibre, et ce n’est pas facile. »

l’immigration, il leur faudra toujours, pour réussir, se battre un peu plus que les autres. Ils ne sont « pas dupes », disent-ils, et sont bien conscients de ne pas vivre « au pays des Bisounours ». Plus question pour eux de jouer les icônes de la diversité, à l’instar d’une Rachida Dati ou d’une Rama Yade. Pour être gagnante, une stratégie doit être de long terme. « Émerger par le haut, c’est bien, sauf qu’en voyant le parcours d’une Rama Yade, on finit par se poser des questions », ironise le socialiste Soumaré. Lui entend d’abord se choisir un fief et « labourer le terrain » pendant au moins dix ans. « Émerger par le bas » est selon lui le seul moyen de se construire « une vraie légitimité ». C’est d’ailleurs dans l’ordre des choses: « Croyez-vous qu’avant d’accéder aux plus hautes responsabilités, un Hollande ou un Ayrault n’ont pas pris soin de s’assurer un ancrage local ? » Même son de cloche chez Mahmoud Tall. Bébé Sarko ? « Oui, je le suis. » Comme Rama Yade ? « Sûrement pas. Elle est venue du haut, moi je viens du bas. » Certes, « elle avait des compétences, mais elle aurait dû être N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013


Europe, Amériques, Asie France Génération pragmatique un exemple, alors qu’elle n’a été qu’un symbole. » « La diversité avec Sarkozy a été un marché de dupe. On a fait semblant de privilégier la méritocratie, mais tout ça n’était qu’un leurre », analyse Karima Delli, députée européenne écologiste. Pour cette jeune (33 ans) femme d’origine algérienne, la clé du problème, c’est la promesse du candidat Hollande concernant le non-cumul des mandats électifs. « Nombre de ceux qui disposent de plusieurs mandats ont souvent le même profil – ce sont des hommes blancs plutôt âgés. Ils refusent de laisser la place et empêchent l’émergence de la nouvelle génération », regrette-t-elle. NORMALITÉ. Dans un pays, où,

selon un récent rapport de l’Institut national de la statistique et des études économiques (« Immigrés et descendants d’immigrés en France », octobre 2012), vivent 6,7 millions de descendants directs d’immigrés qui ont beaucoup contribué à l’élection de Hollande, « il est normal que certains d’entre eux soient présents dans les institutions de la République ». Ce qui signifie que « les actuelles classes dirigeantes doivent accepter de partager le pouvoir », estime Karima Delli.

HUGHES LEGLISE BATAILLE/WOSTOK PRESS/MAXPPP

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À l’évidence, la « normalité » supposée de la présidence socialiste ne s’applique encore que partiellement à la « représentativité » des partis, même si deux ministres (Yamina Benguigui, à la Francophonie, Kader Arif, aux Anciens combattants) d’origine algérienne et une d’origine marocaine (Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement) ont été nommés. De même, seuls huit députés d’origine étrangère, tous de gauche, siègent désormais à l’Assemblée nationale. Un progrès, sans doute, mais encore insuffisant.

! KARIMA DELLI (À G.) avec Eva Joly, la candidate écologiste à la dernière élection présidentielle.

Militant socialiste à Clichyla-Garenne (Hauts-de-Seine), le Franco-Sénégalais Ousmane Timera, 35 ans, préside le Collectif des 577 – comme le nombre de députés que compte l’Assemblée. Il en est convaincu : la population française est, dans sa majorité, plus ouverte qu’on ne le croit. « Ce sont les partis politiques, PS compris, qui freinent l’arrivée d’élus de la diversité. Ce sont des appareils constitués de personnes avec leurs qualités et leurs défauts, mais qui ont parfois l’impression un peu primaire que nous venons pour prendre leur job ! » ●

FORUM DES HAUTS FONCTIONNAIRES DU BUDGET DES ÉTATS MEMBRES DE L’AFRITAC CENTRE (FOHBAC), N’djamena, Tchad du 7 au 11 janvier 2013 La troisième édition du forum des hauts fonctionnaires du budget des États membres de l’AFRITAC centre (FOHBAC) se tiendra à N’djamena, au Tchad du 7 au 11 janvier 2013, sous la présidence du Ministre des finances et du budget, comme objectif, le FOHBAC se donne de consolider la dynamique d’échange d’expériences sur les réformes budgétaires entre ses pays membres à savoir le Burundi, le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale, la République Démocratique du Congo et le Tchad. De manière spécifique, il s’agit pour le FOHBAC de tirer des leçons de son fonctionnement et de préparer les travaux des prochains mois en vue de renforcer son dynamisme, de partager les expériences de chaque État membres en matière de modernisation de la gestion budgétaire et de s’approprier des bonnes pratiques et standards internationaux sur les thème de cette troisième édition s’énonce en ces termes : Promouvoir une nouvelle culture de la gestion publique.


de Jeune Afrique

ALGÉRIE-TUNISIE La bataille de Rustenburg CÔTE D’IVOIRE Des Éléphants en trompe l’œil? PRATIQUE Présentation des équipes

C’est déjà reparti! JEUNE AFRIQUE

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JUNG YEON-JE/AFP

LE PLUS

INTERVIEW Claude Le Roy, sélectionneur de la RD Congo



Le plus de Jeune Afrique

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Prélude

Marwane Ben Yahmed

Où sont les cracks?

L

JEUNE AFRIQUE

N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

19 JANVIER-10 FÉVRIER La CAN fait son festival p. 62 PRATIQUE Revue d’effectifs

p. 64

AFRIMAGES/PANORAMIC

INTERVIEW

STANLEY CHOU/GETTY IMAGES

A COUPE D’AFRIQUE DES Côté Maghreb, c’est pire : les équipes NATIONS (CAN) reprend ses nationales ne recèlent plus depuis longdroits, pour le plus grand plaisir temps ce type de pépites. Le Marocain des amoureux du ballon rond. Mbarek Boussoufa aurait pu être cette Inutile de revenir ici sur ce que l’on nouvelle star tant attendue. Mais, même attend d’une telle compétition ou sur pétri de talent, il n’a jamais concrétisé l’engouement qu’elle suscite sur le les immenses espoirs placés en lui et, continent. Années impaires ou non, comme Eto’o, est allé s’enterrer à l’Anji Makhachkala… la CAN reste la CAN : trois semaines de bonheur, de liesse, de stress, de larmes ou d’adrénaline, de rassemblements On a longtemps glosé sur les partidevant le poste, en famille, entre amis, cularismes des footballeurs africains, au maquis, au café ou dans la rue. leur absence de sens tactique et de Il y a les émotions, et il y a le spectacle, rigueur, leur goût immodéré pour la pas toujours au rendez-vous il est vrai. fête et pour une hygiène de vie guère en adéquation avec les contraintes des Sans talent, le football n’est rien. On peut gagner avec une équipe de joueurs appliqués et disAdieu fantaisie ! Les joueurs ciplinés, bien sûr, mais pour africains se sont coulés dans véritablement prendre du le moule des clubs européens. plaisir, nous avons besoin d’artistes sinon de stars. Or il faut bien l’avouer, le continent, en la sportifs de haut niveau. Mais leurs indématière, semble aujourd’hui stérile. niables qualités balle au pied étaient reconnues. Diatribe d’ancien combattant ? Aujourd’hui, c’est l’inverse : ils se sont coulés dans le moule imposé par Peut-être, mais il n’est nul besoin d’être un grand spécialiste du foot pour leurs principaux employeurs, les clubs constater que Samuel Eto’o ne nous fait européens, au détriment de la créativité plus rêver depuis qu’il a quitté Milan et de ce zeste de fantaisie qui, lorsqu’il pour le très lucratif mais peu compédemeure zeste, enchante les foules titif Anji Makhachkala (Fédération de et fait des ravages sur une pelouse. Russie). Que Didier Drogba est (très) Comment oublier les Larbi Ben Barek, proche de la fin de sa carrière. Que le Rabah Madjer, Salif Keita, Mahmoud jadis prometteur Emmanuel Adebayor al-Khatib, Abedi Pelé, Roger Milla, Kalusha Bwalya ou, nous en avons n’a jamais vraiment confirmé au très déjà parlé, George Weah, le premier haut niveau. Et que les bons joueurs ballon d’or européen venu d’Afrique ? sont pléthore, mais les grands joueurs inexistants. Si on laisse de côté l’aspect Les académies fleurissent sur le contipurement sportif (influence dans le nent, dans le sillon d’un Jean-Marc jeu, résultats, efficacité, etc.) pour ne Guillou précurseur à Abidjan avant s’intéresser qu’au volet « artistique » de s’exiler sous d’autres cieux. Les (technique individuelle, vista, beaux gamins de Bamako, de Douala ou gestes), c’est le même constat : où sont d’Alger ont toujours les mêmes rêves. passés les successeurs des George Et le vivier africain n’a jamais produit Weah, Jay-Jay Okocha ou, plus près autant de joueurs professionnels. La quantité, c’est bien. Mais la qualité, de nous et à un niveau moindre, Pascal Feindouno ? c’est mieux… ●

Claude Le Roy, sélectionneur de la RD Congo

p. 66

ALGÉRIE-TUNISIE La bataille de Rustenburg

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CÔTE D’IVOIRE Des Éléphants en trompe l’œil ?

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PORTRAITS Prêts pour le grand jeu

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62

Le Plus de Jeune Afrique

19 JANVIER-10 FÉVRIER

La CAN fait son festival

La Côte d’Ivoire, le Ghana et l’Afrique du Sud apparaissent comme les prétendants les plus sérieux pour cette 29e Coupe d’Afrique des nations. Ils auront toutefois fort à faire pour détrôner la Zambie, toujours gonflée à bloc.

ALEXIS BILLEBAULT

C

est une simple évolution voulue par la Confédération africaine de football (CAF), surtout pas une révolution. La Coupe d’Afrique des nations (CAN) va continuer de se jouer tous les deux ans, mais uniquement les années impaires – ce qui lui était déjà arrivé (1957, 1959, 1963 et 1965) à une époque où elle cherchait encore son rythme de croisière. L’initiative ne calmera pas forcément les clubs – surtout ceux du Vieux Continent –, guère emballés par la perspective de devoir parfois se priver de plusieurs joueurs pendant au moins un mois en pleine saison, mais elle a le mérite d’éviter que la CAN ne se joue la même année que la Coupe du monde et, donc, de préserver la santé des principaux acteurs, qui n’auront plus à participer à deux compétitions dévoreuses d’énergie à six mois d’intervalle. Selon les plans de la CAF, la Libye devait être le théâtre de ce petit ravalement de façade offert à un tournoi qui approche tranquillement de la soixantaine. Mais l’actualité régionale a conduit

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Pour pallier le forfait de la Libye, la nation Arc-en-Ciel accueillera la compétition.

l’institution présidée par Issa Hayatou à confier prudemment l’organisation de la sauterie biennale du football africain à la nation Arc-en-Ciel, déjà bien rodée par celle de la Coupe du monde 2010. En vingt ans, depuis la fin de l’apartheid, la première puissance économique du continent aura notamment organisé la Coupe du monde de rugby en 1995, les CAN 1996 et – donc – 2013, la Coupe des confédérations en 2009 et le Mondial un an plus tard. La CAF avait d’ailleurs peu d’options pour pallier le forfait libyen. Après tout, l’Afrique du Sud dispose d’infrastructures récentes, et cette CAN tombée du ciel lui offre l’occasion de redonner vie à certains stades construits ou rénovés à grands frais pour la dernière Coupe du monde et qui, désormais utilisés qu’à de rares occasions, devenaient peu rentables. ABSENTS. Si la révolution libyenne va permettre à l’Afrique du Sud d’accueillir sa deuxième phase finaledeCAN,cellequiafrappél’Égypteaudébutde l’année 2011 continue d’imposer ses conséquences sur la vie des Pharaons, qui seront absents du tournoi 2013 comme de celui de 2012. Les septuples vainqueurs de la compétition ont des circonstances atténuantes à avancer, puisque le championnat JEUNE AFRIQUE


C’est déjà reparti !

AFRIQUE DU SUD

LE PAYS HÔTE, QUI A ORGANISÉ

COUPE DU MONDE 2010, dispose d’infrastructures récentes. LA

local est régulièrement interrompu depuis bientôt deux ans. Et les internationaux qui y évoluent – majoritaires au sein de la sélection – n’ont plus que les matchs de Ligue des champions d’Afrique ou de Coupe de la CAF, ceux de la sélection et les rencontresamicalesentreclubspours’occuper.Mais l’absence des Égyptiens est forcément une bonne nouvelle pour l’Afrique du Sud et pour tous ceux qui rêvent plus ou moins ouvertement de succéder à la Zambie, couronnée l’année dernière. Tout commelanon-qualificationduCameroun,qui avait lui aussi zappé le rendez-vous de 2012. Ces deux absences (celles de la Guinée et du Gabon sont plus anecdotiques) ont bien entendu restreint le cercle des prétendants, qui semble se résumer à quatre équipes. L’Afrique du Sud, bien sûr, qui, si elle n’est pas la plus forte du lot, aura l’immense avantage de jouer à domicile. La Zambie, parce qu’elle est tenante du titre et que les mois qui ont suivi le premier sacre de son histoire, l’an dernier à Libreville (0-0 ; 8-7 aux tirs au but, contre la Côte d’Ivoire), n’ont pas permis de déceler la moindre chute de tension. La Côte d’Ivoire, ensuite, dont le nom revient parmi les favoris avant chaque édition (lire p. 69). L’an dernier, la génération Drogba et JEUNE AFRIQUE

La prochaine édition se déroulera

en 2015 au Maroc

Un petit nouveau…

GIANLUIGI GUERCIA/AFP

LES BAFANA BAFANA, DIX-SEPT ANS APRÈS SANS LE DÉSISTEMENT de la Libye, l’Afrique du Sud aurait-elle participé à la CAN 2013 qu’elle s’apprête à accueillir, dix-sept ans après avoir organisé et remporté l’édition de 1996? Depuis son quart de finale en 2002, la nation Arc-en-Ciel n’a plus jamais franchi le premier tour, séchant même les CAN 2010 et 2012. Sa Coupe du monde plutôt encourageante en 2010 avait laissé augurer d’un renouveau. La réalité tend à prouver le contraire. L’Afrique du Sud a, depuis, vu se succéder trois sélectionneurs (Pitso Mosimane, Steve Komphela et, depuis juin 2012, Gordon Igesund); son seul joueur à évoluer dans un grand championnat, Steven Pienaar (Everton, Angleterre), a décidé de mettre un terme à sa carrière internationale en octobre 2012; et les dernières sorties des Bafana Bafana n’ont pas enthousiasmé les foules. Mais les Sud-Africains auront l’avantage du terrain. D’autant que le tirage au sort (Angola, Maroc, Cap-Vert) A.BI. n’a pas été trop féroce. ●

Cie pensait mettre fin à cette litanie d’insuccès au moment d’affronter en finale l’outsider zambien. On connaît la suite… Le Ghana, enfin, finaliste en 2010 et quatrième en 2012, et qui avait permis à l’Afrique de sauver les apparences lors de la Coupe du monde 2010 en atteignant les quarts de finale, mais qui n’a plus rien gagné depuis 1982. OUTSIDERS. Cette 29e édition de la CAN, qui

accueillera un petit nouveau (le Cap-Vert) et un revenant (l’Éthiopie, victorieuse en 1962 mais dont la dernière apparition remonte à 1982, en Libye), s’est qualifié pour ne devrait pas consacrer un quinzième lauréat. la première fois Car la plupart des outsiders, à l’exception du Mali en sortant les Lions camerounais (troisième en 2012), ont déjà remporté au moins une fois le trophée, que ce soit le Nigeria ou les trois voisins maghrébins, Algérie-Maroc-Tunisie (lire p. 68), réunis pour la première fois dans le … et deux tournoi depuis 2004. La CAN sud-africaine sera grands recalés également l’occasion de revoir le Togo – qui ne s’est pas vraiment remis du drame de Cabinda, L’Égypte en 2010 –, mais aussi la RD Congo, sept ans (7 fois victorieuse) et le après son quart de finale en Égypte. Claude Cameroun (4 fois), Le Roy, revenu aux affaires en septembre 2011 déjà absents (lire p. 66), était déjà sur le banc des Léopards de la CAN 2012 en 2006. Un signe ? ●

Le Cap-Vert

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Le Plus de J.A.

Revue d’effectifs GROUPE A AFRIQUE DU SUD Les Bafana Bafana

Sélectionneur: Gordon Igesund (Afrique du Sud) ateur; Points forts: son statut de pays organisateur; l’expérience de certains internationaux (Khune, Tshabalala, Gaxa, Parker); un effectif qui se connaît bien Points faibles: la retraite internationale de Steven Pienaar; un sélectionneur qui découvre ce poste; un jeu souvent stéréotypé ifa*: 87 Palmarès: CAN 1996 / Classement Fifa*:

ANGOLA

Les Palancas negras Sélectionneur: Gustavo Ferrín (Uruguay) Points forts: une ossature locale et des joueurs qui se connaissent bien; l’habitude de participer à la CAN; un buteur efficace (Manucho Gonçalves) Points faibles: un sélectionneur uruguayen en froid avec son employeur; un effectif en reconstruction; des performances moyennes lors des dernières CAN Palmarès: Coupe de la Cosafa 1999, 2001 et 2004 Classement Fifa*: 84

CAP-VERT

Les Requins bleus Sélectionneur: Lúcio Antunes (Cap-Vert) Points forts: l’effet de surprise d’une équipe tion méconnue; la dynamique de la qualification face au Cameroun; l’absence de pression Points faibles: une inexpérience totale à ce niveau; un seul joueur évoluant dans un grand club européen (Mendes, à Lille, France) Palmarès: – / Classement Fifa*: 69

MAROC

Les Lions de l’Atlas Sélectionneur: RachidTaoussi (Maroc) tion Points forts: la dynamique après une qualification naît décrochée in extremis; un sélectionneur qui connaît bien les joueurs locaux; quelques individualités Points faibles: un groupe et un sélectionneur que inexpérimentés à ce niveau; la pression médiatique et populaire; l’absence de certaines « stars » comme Chamakh, Kharja,Taarabt ou Boussoufa, non retenus parTaoussi Palmarès: CAN 1976 Classement Fifa*: 74

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GROUPE B GHANA Les Black Stars Sélectionneur : James Kwezi Appiah (Ghana) Points forts : des résultats constants depuis 2006 ; ueurs l’impact athlétique ; un collectif bien huilé ; des joueurs ng) expérimentés (Paintsil, Annan, Gyan, Derek Boateng) Points faibles : la retraite internationale d’Essien; l’absence de Muntari, insuffisamment rétabli, et d’André Ayew, exclu; la pression populaire après trente et un ans sans titre Palmarès : CAN 1963, 1965, 1978 et 1982 Classement Fifa* : 30

MALI Les Aigles Sélectionneur : Patrice Carteron (France)) Points forts : la dynamique de la CAN 2012 012 ; de bonnes individualités (Seydou Keita, Mohamed hamed Sissoko, Modibo Maïga) ; un jeu offensif Points faibles : la forme incertaine de Sissoko ; des joueurs perturbés par la situation dans leur pays ; l’inexpérience à ce niveau de Carteron, en poste depuis juillet 2012 Palmarès: – / Classement Fifa* : 25

NIGER Le Mena Sélectionneur : Gernot Rohr (Allemagne) Points forts : l’expérience de la CAN 2012 ; une équipe en progrès ; un sélectionneur expérimenté enté ; la solidarité Points faibles : un effectif qualitativement très moyen ; un secteur offensif peu efficace ; l’absence de joueurs de renom Palmarès: – / Classement Fifa* : 105

RD CONGO Les Léopards Sélectionneur : Claude Le Roy (France) Points forts : un sélectionneur qui participera à sa septième phase finale ; le travail de fond effectué par Le Roy depuis plus d’un an ; les retours en sélection lection de certains joueurs (Mongongu, Mbokani…) ani…) ; un style de jeu offensif Points faibles : première CAN pour de nombreux joueurs ; la fatigue des internationaux duTP Mazembe après une saison éprouvante Palmarès : CAN 1968 et 1974 Classement Fifa* : 107

JEUNE AFRIQUE


C’est déjà reparti !

GROUPE C BURKINA FASO Les Étalons

GROUPE D ALGÉRIE Les Fennecs

Sélectionneur: Paul Put (Belgique) ré, Points forts: certaines individualités (Kaboré, e AlainTraoré, Pitroipa, Dagano); une présence régulière en phase finale; un fort potentiel offensif Points faibles: des difficultés à franchir un cap en phase finale; un secteur défensif moyen; les relations tendues entre le sélectionneur et une partie de son staff technique echnique

Sélectionneur: Vahid Halilhodzic (Bosnie-Herzégovine, France) Points forts: la forte personnalité du sélectionneur; nneur; un football offensif; de jeunes joueurs prometteurs eurs (Boudebouz, Feghouli) Points faibles: certains joueurs en difficulté dans leur club; un renouvellement de génération à gérer; la pression médiatique

Palmarès: – / Classement Fifa*: 89

Palmarès: CAN 1990 / Classement Fifa*: 19

ÉTHIOPIE Les Black Lions Sélectionneur: Sewnet Bishaw (Éthiopie) Points forts: une qualification face à des adversaires ires de qualité (Bénin, Soudan); des joueurs habitués à évoluer ensemble en sélection et dans les meilleurs leurs clubs du pays (Saint George FC, Defence Force, Ethiopian Coffee SC, Dedebit FC) Points faibles: une inexpérience totale à ce niveau; eau; un seul international jouant en Europe (Saleh, à Syrianska, en Suède); une équipe friable loin des hauteurs d’Addis-Abeba Palmarès: CAN 1962 / Classement Fifa*: 110

NIGERIA Les Super Eagles Sélectionneur: Stephen Keshi (Nigeria) Points forts: les bons résultats obtenus en 2012; un important vivier de joueurs; l’expérience nce de Keshi; un potentiel offensif de qualité (Ideye, Obi Mikel) Points faibles: un onze de départ qui a du mal à se dégager; un mélange entre locaux et expatriés à améliorer; la pression populaire Palmarès: CAN 1980 et 1994 Classement Fifa*: 52

ZAMBIE Les Chipolopolos Sélectionneur : Hervé Renard (France) Points forts : un sélectionneur charismatique et respecté ; la dynamique du titre obtenu en 2012 ; une équipe très forte tactiquement et collectivement ment Points faibles : la fatigue après une saison chargée ; un choix en joueurs limité quantitativement Palmarès : CAN 2012 / Classement Fifa* : 34

CÔTE D’IVOIRE Les Éléphants Sélectionneur: Sabri Lamouchi (France) Points forts: de grosses individualités (Drogba, Drogba, YayaTouré, Gervinho, Salomon Kalou); un groupe expérimenté et stable; la solidité ité dans toutes les lignes Points faibles: un sélectionneur novice; la pression autour d’une génération brillante mais qui n’a rien gagné; un poste (gardien de but) faiblement pourvu Palmarès: CAN 1992 Classement Fifa*: 14 (1er pays africain)

TOGO Les Éperviers Sélectionneur : Didier Six (France) Points forts : le volontarisme du sélectionneur ; une phase éliminatoire encourageante ; quelques joueurs intéressants (Agassa, Romao…) Points faibles : l’incertitude autour de la participation d’ Adebayor ; les relations tendues entre plusieurs joueurs ; des prestations décevantes ntes en phase finale Palmarès: – / Classement Fifa* : 71

TUNISIE Les Aigles de Carthage Sélectionneur: SamiTrabelsi (Tunisie) Points forts: un football offensif; les individualités ividualités (Msakni, Darragi, Jemaa); le vécu de la CAN AN 2012 (quart-de-finaliste) Points faibles: la retraite internationale de Karim Haggui en avril 2012; des cadres (Chermiti, Chikhaoui, Benachour…) blessés, és, en méforme et écartés de la sélection depuis plusieurs mois Palmarès: CAN 2004 Classement Fifa*: 45

* Rang dans le classement de décembre 2012, sur 207 équipes nationales JEUNE AFRIQUE

N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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Le Plus de J.A.

Claude Le Roy « La RD Congo devrait faire partie du top 5 » Face au Niger, mais surtout au Ghana et au Mali, les Léopards devront batailler ferme. Ils pourront compter sur l’expérience de leur sélectionneur.

Ü LE FRANÇAIS VA DISPUTER SA SEPTIÈME

CAN. En 2008, avec le Ghana, il avait échoué en demi-finale. PHASE FINALE DE

À

64ans,ilfaitpartiedesentraîneurs qui ont marqué le continent. De retour depuis 2011 en RD Congo, Claude Le Roy vient aider les Léopards à sortir de l’anonymat. En six phases finales de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) – disputées avec le Cameroun, le Sénégal, le Ghana et, déjà, la RD Congo –, le technicien français a toujours franchi le premier tour, remportant même le tournoi en 1988 avec les Lions indomptables. Pour Jeune Afrique, il revient sur ces douze années passées sur un continent qui le fascine. JEUNE AFRIQUE : Quand vous avez été nommé sélectionneur du Cameroun en 1985, imaginiez-vous que vous commenciez une si longue relation avec l’Afrique? CLAUDE LE ROY: Je n’y pensais pas. Même

si l’Afrique était depuis mon enfance très présente chez moi, puisque mon père était très engagé politiquement et défendait les volontés d’indépendance de l’Algérie ou du Congo. Ça vient de très loin ! À l’école, en sixième, je parlais de Patrice Lumumba à mes camarades et ça les amusait car ils ne comprenaient pas très bien. Au Cameroun, les premiers mois ont été compliqués. Les gens se demandaient

AFRIMAGES/PANORAMIC

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réussi à atteindre la finale de la CAN 1986 contre l’Égypte au Caire [0-0, 5-4 aux tirs au but en faveur des Pharaons], alors que personne ou presque ne croyait en nos chances. Deux ans plus tard, au Maroc, nous avons remporté la compétition. Après, je suis parti car je n’entretenais pas les meilleures relations avec le ministre des Sports de l’époque. Alors que Paul Biya, le président de la République, me proposait un contrat de six ans ! Vous avez ensuite entraîné le Sénégal (1989-1992), puis vous êtes parti en Asie et en Europe avant de revenir au Cameroun (1998). Faut-il parfois quitter l’Afrique pour mieux la retrouver ?

Oui. C’est un continent fascinant. Il y a un potentiel humain extraordinaire – et

L’Afrique était depuis mon enfance très présente chez moi. Ça vient de très loin! pourquoi on confiait une partie de leur patrimoine national – les Lions indomptables – à un jeune entraîneur sans aucune expérience internationale. Vous n’avez pas mis longtemps à vaincre ce scepticisme…

Très vite, nous sommes partis en tournée plus de deux mois en France, en RFA [République fédérale d’Allemagne, NDLR] et au Brésil. Cela a constitué l’acte fondateur d’une génération, et cette équipe a N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

ce n’est bien sûr pas valable que pour le football –, mais l’Afrique demande une énergie énorme. J’ai vécu dans tous les pays où j’ai travaillé, en Afrique, en Asie [Émirats arabes unis, Malaisie, Chine, Oman, Syrie] ou en Europe. On ne peut pas être sélectionneur et ne venir que cinq jours tous les deux mois. En Afrique, un sélectionneur doit s’occuper de beaucoup de choses. Et rien ne m’énerve davantage que d’entendre des gens dire que les Africains ne sont pas travailleurs ni

disciplinés. À partir du moment où on leur propose un projet cohérent, c’est un bonheur de travailler avec eux. Votre victoire lors de la CAN 1988 est-elle votre meilleur souvenir sur le continent?

Non, même si elle fait partie des meilleurs.Jerépondstoujoursparunepirouette en disant que le meilleur est à venir. Mais une de mes plus grandes fiertés, c’est que certains pays, comme le Cameroun ou la RD Congo, m’ont rappelé. J’ai toujours ressenti une vraie proximité avec les supporteurs. Jamais je ne me suis senti menacé. Et j’ai conservé des liens étroits avec des joueurs que j’ai eus sous ma direction. Peut-être parce que vous obtenez des résultats. En six phases finales de CAN, vous avez toujours passé le premier tour…

C’est vrai. Cette fois-ci, ce sera compliqué, avec le Ghana et le Mali, qui semblent nous être supérieurs. Mais on va essayer de bien jouer, de faire quelque chose. Et aussi d’être exemplaires dans le comportement. Revenir en RD Congo, est-ce un de vos défis les plus osés ?

Peut-être. La RD Congo devrait faire partiedutop5africain–etpasseulementpour le foot. Le président Kabila m’a demandé de revenir dans l’urgence il y a un peu plus de un an. L’équipe ne gagnait plus, certains joueurs refusaient de venir en sélection. J’ai accepté, avec l’objectif de participer à la CAN 2013. Nous y sommes. ● Propos recueillis par ALEXIS BILLEBAULT JEUNE AFRIQUE



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jeune afrique .com

Le Plus de J.A. ALGÉRIE-TUNISIE

La bataille de Rustenburg

Habitués à se rencontrer, les Fennecs et les Aigles vont s’affronter pour la première fois en phase finale d’une CAN, le 22 janvier.

Les Fennecs mènent Résultats des confrontations depuis 1963

ALGÉRIE

15

victoires TUNISIE

11

victoires MATCHS NULS

12

C

es voisines entretiennent des relations plus ou moins cordiales. Elles ont remporté chacune une Coupe d’Afrique des nations(CAN)–l’Algérieen1990,laTunisie en 2004. Elles participent régulièrement à la Coupe du monde (quatre apparitions pour la Tunisie, trois pour l’Algérie) et à la CAN (16 participations pour les Aigles de Carthage,15pourlesFennecs).Ellesserencontrent très souvent (38 fois depuis 1963), mais leur rendez-vous du mardi 22 janvier à Rustenburg exhalera un parfum de nou-

veauté, puisque ce sera la première confrontation entre les deux sélections maghrébines lors d’une phase finale de Coupe d’Afrique. L’anecdote ne bouleversera sans doute pas le public sud-africain, lui qui avait ostensiblement boudé les stades lors de la CAN 1996. Mais depuis le tirage au sort, les footeux des deux pays concernés ont réservé leur soirée. Les supporteurs du vainqueur – à condition qu’il y en ait un – proclameront leur sélection « meilleure équipe du Maghreb » quand les fans des

ð Lisez aussi le témoignage de Rabah Saadane

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perdants évoqueront juste la vérité d’un match, en donnant rendez-vous pour la revanche. « Ce qui est certain, c’est que ce match sera déterminant pour la suite de la compétition. Lors d’un premier tour, la première rencontre conditionne presque toujours la suite », estime Sami Trabelsi, le sélectionneur tunisien. Un avis que partage son homologue Vahid Halilhodzic, à la tête de la sélection algérienne : « Le match face à la Tunisie sera sans doute déjà décisif. » Tous deux sont davantage concentrés sur l’importance mathématique de ce duel fratricide que sur sa portée symbolique. OFFENSIFS. S’ils n’appartiennent pas à

la même génération – Trabelsi a 44 ans, Halilhodzic 60 –, les deux hommes ont plusieurs points communs. Ils ont tous les deuxembrasséunecarrièredehautniveau, fréquentant régulièrement leur sélection nationale, la Tunisie pour le premier, l’exYougoslaviepourlesecond.Etilspartagent la même vision du football, préférant le jeu offensif à la prudence. « Mais à mon avis, il ne faudra pas forcément s’attendre à des matchs très ouverts au premier tour, où l’objectif est de se qualifier pour les quarts definale,prévientTrabelsi.Ildevraityavoir partout une certaine prudence, au moins lors de la première rencontre. » Halilhodzic, qui, depuis sa prise de fonctions en juillet 2011, a rompu avec les années Saadane et Benchikha – n’hésitant pas à mettre de côté ceux qui avaient contribué à faire revenir l’Algérie dans les hautes sphères du football africain avec la double participation des Fennecs à la CAN et à la Coupe du monde 2010 –, la joue modeste. Quand Trabelsi évoque « la finale », le technicien franco-bosniaque récuse le statut de favori parfois accordé à l’Algérie. « Nous ne sommes pas favoris. On va juste essayer de faire quelque chose lors de cette CAN. Passons déjà le premier tour… » ● ALEXIS BILLEBAULT

MAROC LES LIONS DE L’ATLAS TOURNENT LA PAGE GERETS LE 15 SEPTEMBRE, la Fédération royale marocaine de football (FRMF) a réglé le cas d’Eric Gerets. Arrivé en novembre 2010 à la tête des Lions de l’Atlas, le Belge venait de subir au Mozambique, en qualifications pour la CAN N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

2013, la défaite (0-2) de trop après une désastreuse élimination au premier tour en 2012, des résultats très moyens et nombre de polémiques sur son salaire, prétendument fixé à 250 000 euros par mois. En nommant Rachid Taoussi, ex-sélectionneur

des moins de 17 ans puis des moins de 20 ans et ancien entraîneur de nombreux clubs marocains et émiratis, la FRMF a calmé l’opinion publique – et probablement fait des économies (Taoussi touche environ 52 000 euros par mois). Les Lions se sont

qualifiés pour la CAN 2013 en battant le Mozambique (4-0) au match retour. Et le nouveau boss, qui mise sur les joueurs locaux, n’a retenu ni Kharja ni Chamakh, deux piliers du système Gerets. Les temps changent. ● A.BI. JEUNE AFRIQUE


C’est déjà reparti !

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CÔTE D’IVOIRE

Des Éléphants en trompe l’œil?

Le tournoi 2013 devrait être le dernier pour la « génération dorée ». Des superstars primées en club, mais toujours en quête d’un sacre continental.

Une liste sans grande surprise : l’équipe qui a échoué en finale de la CAN 2012 face auxmodestesChipolopoloszambiensaété reconduite, à la seule exception de Kader Keita (actuellement sans club). Le staff n’a pas non plus connu de modification. Un changement notable, cependant : la présidence n’a pas organisé la traditionnelle rencontre entre les Éléphants et le chef de l’État avant chaque grande joute internationale. FORTES TÊTES. Toutes les conditions ont

été réunies pour créer une atmosphère saine autour de l’équipe. Les ténors de la sélectionontétésensibilisésàl’importance

BAUDELAIRE MIEU, à Abidjan

ALEXANDER KLEIN/AFP

E

n Afrique du Sud, les Éléphants aborderont la compétition avec le titre très flatteur de meilleure nation africaine, selon le classement Fifa (Fédération internationale de football association) de décembre 2012. La Côte d’Ivoire occupe le 14e rang mondial (sur207fédérations),devançantdegrandes nations comme la France (17e) et le Brésil (18e).Unclassementquiluiconfèreunefois encore la stature de grande favorite pour la Coupe d’Afrique des nations (CAN). Une étiquette que refusent les Éléphants, sans doute échaudés par leurs échecs répétés. « Qu’on arrête de dire que nous allons à la CAN pour écraser tout le monde, pour remporter la coupe. Nous jouerons notre chance comme toutes les autres équipes », s’emporte ainsi Didier Drogba. Placée dans la poule D, très équilibrée, avec l’Algérie, la Tunisie et le Togo, la sélection affûte ses armes. Du côté de la Fédération ivoirienne de football (FIF), les dirigeants ne lésinent pas sur les moyens pour la préparation. C’est à Abou Dhabi, aux Émirats arabes unis, que les Éléphants sont partis en stage de préparation, du 5 au 16 janvier. Une destination « choisie par la Fédération parce qu’à cette période de l’année la température y correspond à celle de l’Afrique du Sud », précise Berthe Adou Caye, présidente de la commission des médias de la FIF. Les Ivoiriens doivent y disputer un match amical contre l’Égypte, non qualifiée pour cette CAN. Sabri Lamouchi, le sélectionneur, a dévoilé le 27 décembre le nom des 23 joueurs retenus pour la compétition.

de l’esprit de groupe et à la nécessité d’abandonner les ego surdimensionnés. « Un message très clair a été passé aux fortestêtesdel’équipe,Drogba,YayaTouré, Kolo Touré et Didier Zokora, confie un dirigeant fédéral qui suit le onze ivoirien depuis une dizaine d’années. Nous leur avons demandé de mettre fin à leurs antagonismes. Nous ne leurdemandonspasde s’aimer, mais de former une vraie équipe et de nous rapporter le trophée. » Cette « génération dorée » des Didier Drogba (Shanghai Shenhua, Chine), Kolo Touré (Manchester City, Angleterre) ou Didier Zokora (Trabzonspor, Turquie), qui joue sa dernière CAN, tentera de remporter le titre qui lui a toujours échappé. Et la Côte d’Ivoire tout entière reste mobilisée derrière sa sélection, qui constitue un socle de la réconciliation nationale. ●

!DIDIER DROGBA ET KOLO TOURÉ lors de la victoire 3-0 contre l’Autriche, en novembre 2012.

BURKINA FASO LES ÉTALONS MÉFIANTS DEPUIS 1996, le Burkina Faso n’a raté que deux phases finales de CAN (en 2006 et 2008). Il n’a pour autant jamais fait d’étincelles dans la compétition, hormis quand il l’accueillit en 1998 (4e). Régulièrement cités parmi les outsiders, les Étalons JEUNE AFRIQUE

n’ont pas passé le premier tour depuis quinze ans et, pour l’édition 2013, les pronostics sont moins optimistes que d’habitude. Parce que les Burkinabè semblent avoir du mal à franchir un palier, mais aussi en raison du tirage au sort. Face à la Zambie,

tenante du titre, et au Nigeria, personne n’en voudra aux Étalons s’ils devaient rentrer précipitamment à Ouagadougou. Avec quelques individualités comme AlainTraoré (Lorient), Charles Kaboré (Marseille), Jonathan

Pitroipa (Rennes), Bakary Koné (Lyon), sans oublier Moumouni Dagano (Al-Sailiya, Qatar), son capitaine et accessoirement recordman de buts en sélection (31), le Burkina ne fait pas pitié. Mais l’Histoire l’a rendu méfiant. ● ALEXIS BILLEBAULT N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013


Le Plus de J.A. PORTRAITS

Prêts pour le grand jeu À moins d’une semaine du coup d’envoi, petite sélection d’hommes qui, sur le terrain ou depuis le banc de touche, vont compter.

Abdelaziz Barrada

Milieu de terrain de l’équipe du Maroc, 23 ans

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STANLEY CHOU/GETTY IMAGES

achid Taoussi, le sélectionneur des Lions de l’Atlas, a fait le ménage : ni Kharja, ni Chamakh, ni Taarabt, ni Boussoufa ne disputeront la CAN. Ces cadres évincés, une partie des ambitions marocaines reposera sur de jeunes joueurs, dont Abdelaziz Barrada, le milieu de terrain de Getafe (Espagne). Né en France et formé au Paris Saint-Germain, Barrada a rejoint en 2010 le club de la banlieue madrilène, qui lui a offert son premier contrat pro en mars 2011. Il est depuis l’un des titulaires de l’équipe entraînée par Luis García Plaza. Cette éclosion lui a également permis de devenir international marocain en février 2012, un an après avoir été appelé au sein de la sélection olympique, avec laquelle il a disputé les Jeux de Londres l’été dernier. Il serait également suivi par plusieurs grosses écuries européennes, en Espagne comme en Angleterre. ● ALEXIS BILLEBAULT

Hervé Renard

Sélectionneur de l’équipe de Zambie, 44 ans

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PANORAMIC

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on physique avantageux et son look soigné ont fait le tour du monde depuis que la Zambie s’est hissée sur le toit de l’Afrique, en février 2012. Cet ancien défenseur quasi anonyme s’est vite tourné vers le métier d’entraîneur. Il fait ses débuts en France, jusqu’à ce que Claude Le Roy décide d’en faire son adjoint à Shanghai (2002-2003) puis au Ghana (2007-2008). Hervé Renard entame sa carrière de sélectionneur en Zambie – déjà – en 2008. Il la poursuit en Angola (2010) puis, après une dizaine de mois passés sur le banc de l’USM Alger, de nouveau en Zambie, un pays qu’il retrouve en novembre 2011. Depuis la victoire à la CAN 2012, le technicien français – sacré entraîneur de l’année par la Confédération africaine de football le 20 décembre – a reçu moult propositions qu’il a toutes repoussées, préférant continuer sa route avec les Chipolopolos. Et avec un nouvel objectif : qualifier la Zambie pour sa première Coupe du monde, en 2014. ● A.BI. JEUNE AFRIQUE


C’est déjà reparti !

Sofiane Feghouli

Modibo Maïga

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I

Attaquant de l’équipe du Mali, 25 ans

Milieu de terrain de l’équipe d’Algérie, 23 ans

JUAN DALI/CORDON DALI/CORDON/PRESSE SPORTS

omme d’autres internationaux africains, Sofiane Feghouli a d’abord joué dans les sélections de jeunes du pays qui l’a vu naître, jusqu’à ce qu’en octobre 2011 cet international Espoirs français décide de porter le maillot de l’Algérie. Vahid Halilhodzic, le sélectionneur des Fennecs, l’a convoqué quelques semaines plus tard. À 23 ans, le milieu de terrain est l’un des rares membres de son effectif à évoluer dans une des meilleures équipes européennes, le Valence CF. Arrivé en Espagne en 2010 en provenance de Grenoble, Feghouli est aujourd’hui un titulaire indiscutable dans son club, après une première saison délicate et un prêt à Almería. Et Halilhodzic a décidé d’en faire un des hommes de base de sa sélection, qu’il s’attelle à renouveler en douceur. ● A.BI.

Stephen Keshi hi

l est un buteur reconnu, mais aussi un footballeur capricieux. Au Mans puis à Sochaux, le Malien a laissé des souvenirs contrastés puisqu’il n’a jamais hésité à mener des bras de fer avec ses employeurs pour pouvoir partir. Après avoir, l’an dernier, quitté Sochaux pour Newcastle (où il n’est finalement pas allé à cause d’une visite médicale au diagnostic jugé rédhibitoire par les Magpies), Modibo Maïga joue finalement bien en Angleterre, mais à West Ham. Pas toujours titulaire en club, il reste malgré tout l’un des meilleurs arguments offensifs du Mali. Il a notamment marqué lors des matchs aller et retour du dernier tour qualificatif pour la CAN 2013 face au Botswana (remportés 3-0 et 4-1 par les Aigles). ● A.BI.

Sélectionneur de l’équipe du Nigeria, 50 ans

KARIM JAAFAR/AFP

L’

JEUNE AFRIQUE

ancien défenseur des es Super Eagles incarne l’âge d’or du football nigérian, vainqueur queur de la CAN 1994 et huitième me de finaliste de la Coupe du monde disputée la même année aux ig Boss, États-Unis. Surnommé Big Stephen Keshi a joué au Nigeria, nce, en en Côte d’Ivoire, en France, Belgique, aux États-Unis, en Malaisie, et s’est ensuite natuarrellement tourné vers la carrière d’entraîneur. Ou plutôt tôt de ’a dirigé sélectionneur, puisqu’il n’a es : le que des équipes nationales Togo (2004-2006), qu’il a qualifié our la à la surprise générale pour vant de Coupe du monde 2006 (avant le de s’en faire limoger à la veille la phase finale, puis d’y revenir 2010), à en 2007), le Mali (2008-2010), nouveau le Togo (2011) ett enfin i, qui le Nigeria, son pays. Keshi, ueurs a testé des dizaines de joueurs ste depuis qu’il a pris son poste rmis en novembre 2011, a permis aux Super Eagles de faire son ootball retour dans le gratin du football A.BI. africain. ●

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Économie

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TUNISIE

Luxe, calme et palmeraies

CÔTE D’IVOIRE

« Nous avons tout remis à plat »

Adama Toungara

Ministre des Mines, du Pétrole et de l’Énergie

Longtemps négligées, les ressources naturelles sont devenues un pilier du renouveau économique ivoirien. Pour l’exécutif, cela passe par une réforme en profondeur des secteurs des mines et des hydrocarbures.

PASCAL AIRAULT JULIEN CLÉMENÇOT

Propos recueillis par et

L

a Côte d’Ivoire rêve d’un avenir pétrolier et minier. Négligée pendant une décennie de crise politique et économique, l’exploitation des ressources minières pèse aujourd’hui moins de 1 % de la richesse nationale. Divisée par deux depuis 2006, la production pétrolière est tombée à 32 000 barils par jour du fait de l’ensablement du champ Baobab. Une anomalie au regard du potentiel du pays, estiment certains groupes pétroliers et l’exécutif ivoirien, qui a fait des ressources naturelles un des deux piliers du renouveau économique national, avec l’agriculture. Les autorités visent ainsi une production de pétrole et de gaz de 200 000 barils par jour. Un chiffre ambitieux au vu de la production actuelle du Ghana voisin, d’environ 80 000 barils par jour. Or en Côte d’Ivoire aucun gisement comparable au champ Jubilee n’a été découvert à ce jour. Côté mines, avec un objectif de production de 15 tonnes en 2015 – soit trois fois plus qu’en 2010 –, l’or est au cœur de la stratégie. En attendant la valorisation d’autres minerais comme le nickel, la bauxite et, surtout, le fer. Très discret dans les médias, Adama Toungara, le ministre des Mines, du Pétrole et de l’Énergie, a longuement reçu Jeune Afrique, à Paris, pour exposer la stratégie de l’État ivoirien. Réduction de la surface des concessions minières, taxe sur les superprofits, contentieux frontalier avec le Ghana… Il revient sur tous les dossiers chauds. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

JEUNE AFRIQUE: L’État a de grandes ambitions dans les ressources naturelles. Comment les réaliser? ADAMA TOUNGARA: En juin 2011, j’ai rassemblé

tous les intervenants du secteur pour un séminairebilan à Yamoussoukro. Qu’avons-nous découvert ? La mal-gouvernance, le gel des permis, des attributions clientélistes… Il y avait également un manque de contrôle des activités et une lourdeur de l’administration. Quelque 300 demandes d’opérateurs privés étaient en souffrance dans le domaine des mines. D’autres sociétés avaient une vingtaine de permis et ne faisaient aucune recherche. Elles n’avaient ni les compétences techniques ni les capacités financières pour les exploiter. Leur but était simplement spéculatif. La situation était similaire dans les hydrocarbures. Conséquence : on enregistrait une baisse des activités. Et qu’avez-vous fait ?

On a tout remis à plat, en concertation avec le secteur privé, et élaboré la vision 2030. On travaille sur tous les aspects: renforcement du cadre réglementaire pour le rendre plus incitatif et améliorer la gouvernance, formation des cadres de l’énergie et des mines, assainissement des sociétés nationales, relance des activités… Un des objectifs est d’intensifier l’exploration afin de multiplier les découvertes et de produire rapidement. Pour aller vite, une quarantaine de permis miniers ont déjà été accordés. Nous avons aussi réduit la surface des concessions minières, comme nous le permet la loi. Sous Laurent Gbagbo, on accordait systématiquement des permis de 1 000 km2. Une hérésie au regard de ce que font nos voisins [250 km2 au ● ● ● JEUNE AFRIQUE


MAROC

Menace sur la presse écrite

DÉCIDEURS

BOURSE

Eleni Gabre-Madhin, fondatrice

Voir Paris et languir

de l’Ethiopia Commodity Exchange

BIO EXPRESS 1971

Diplômé d’ingénierie pétrolière à l’université de Californie du Sud (États-Unis)

1975 -1981

DG de Petroci et PDG de la Société ivoirienne de raffinage (SIR)

1981-1993 CAMILLE MILLERAND POUR J.A.

Conseiller spécial du président Félix Houphouët-Boigny

2001

Élu maire d’Abobo

2011

Nommé ministre des Mines, du Pétrole et de l’Énergie

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74

Entreprises marchés 2 ● ● ● Mali et 200 km au Burkina Faso, NDLR]. On a donc réduit la superficie à 400 km2.

Quelle place

Un nouveau code minier est prévu. À quoi faut-il s’attendre ?

Ce code, qui sera soumis aux députés avant le mois de mars, va réduire les démarches administratives, intensifier la recherche et limiter la superficie des permis. Le cahier des charges des exploitants sera plus rigoureux aux niveaux technique et financier. On réaffirme aussi certains principes comme la taxe sur les superprofits, qui a pour ambition de mieux partager les revenus entre l’État et l’opérateur.

Les autorités misent en priorité sur les sociétés publiques Petroci et Sodemi. Des entrepreneurs locaux pourraient néanmoins tirer leur épingle du jeu.

L

Cette taxe est rejetée par les miniers. Les pétroliers, eux, l’acceptent. Pourquoi ?

C’est un problème de culture et de mentalité. Dans les pays européens ou nord-américains, cette taxe est appliquée. On l’appelle la « windfall profits tax ». Mais en Afrique, les sociétés souhaitent faire

Les Africains n’accepteront bientôt plus que les sociétés étrangères ne reversent pas un centime à l’État. un maximum de bénéfices. Pourquoi avoir peur? Si les cours n’augmentent pas, elle ne s’appliquera pas. Instaurerez-vous aussi des contrats de partage de production, comme cela se fait dans le pétrole ?

C’est une idée révolutionnaire que nous étudions trèssérieusement.Toutefois,ellenefigurerapasdans le code minier, car nous comptons en discuter préalablement avec les privés. Nous allons aussi revoir le concept de « l’inventeur » du gisement. Pour moi, les ressources naturelles sont la propriété de l’État et non pas d’un opérateur, qui ne fait qu’assurer un service. Ce concept va passer, c’est une question de temps. Les Africains n’accepteront bientôt plus que des sociétés étrangères bénéficient d’avantages exorbitants en matière de fiscalité et ne reversent pas un centime à l’État. Chez nous, une entreprise qui investit 300 millions d’euros peut récupérer sa mise au bout de deux ans. Elle continue pourtant à bénéficierd’exonérationspendantplusieursannées. Dans notre pays, une seule société aurifère paie l’impôt sur le bénéfice. C’est immoral. Où en sont les projets miniers dans l’Ouest ?

Nous avons de gigantesques réserves de fer aux monts Klahoyo et Tia. Ce projet dort depuis 1971. Le gouvernement a accordé un permis d’exploitation à African Minerals, qui a dix-huit mois pour confirmer les réserves minières. Elle devra aussi démontrer la faisabilité de l’exploitation de ce gisement, qui sera relié au port de San Pedro par une ligne ● ● ● N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

e secteur privé ivoirien va-t-il rester en marge du développement des activités pétrolières et minières ? Jusqu’à présent, les autorités privilégient les entreprises publiques pour développer une véritable expertise locale et défendre les intérêts nationaux face aux multinationales. Petroci pour le pétrole et Sodemi pour les mines s’affirment comme les véritables bras armés de l’État dans la relance des explorations… quitte à griller la politesse à certains privés. Depuis plusieurs mois, Petroci, faisant jouer son droit de préemption, négocie ainsi le rachat des parts de la junior Afren dans l’usine de butane Lion et le bloc de gaz CI-11 qui l’alimente, empêchant leur cession à la Compagnie ivoirienne du pétrole et des mines (Cipem). CADENCE. Les sociétés publiques ont-

Sur 51 blocs pétroliers,

25 restent à attribuer

elles les moyens de leurs ambitions ? Oui, assure Adama Toungara, ministre des Mines, du Pétrole et de l’Énergie. En 2011, Petroci a ainsi dégagé 43,9 milliards de F CFA de bénéfices (66,9 millions d’euros). « Il faut que Petroci utilise mieux ses ressources. On lui a fait mettre 10 milliards de F CFA dans Air Ivoire, en vain. Nous l’avons sortie d’une dizaine d’activités pour qu’elle se concentre sur l’exploitation pétrolière », explique le ministre. Loin de cantonner la société publique aux côtes ivoiriennes, les autorités veulent renforcer la présence de Petroci à l’international. L’entreprise possède déjà des permis au Congo, aux États-Unis et à Oman. Les mêmes objectifs s’appliquent, au moins au plan national, à Sodemi. Selon le ministre, cette dernière ne bénéficie pas de ses découvertes, car elle les cède trop rapidement aux sociétés minières privées. « Dans le futur, elle pourra les faire fructifier et s’associer à des partenaires privés pour exploiter ses gisements », JEUNE AFRIQUE


Entreprises marchés

ISSOUF SANOGO/AFP

pour le secteur privé?

! PETROCI a découvert l’un des tout premiers gisements ivoiriens d’hydrocarbures offshore, FOXTROT, en 1981.

explique-t-il. Le budget en matière de recherche devrait suivre la cadence, en étant largement revu à la hausse. À terme, les pouvoirs publics réfléchissent à l’intérêt d’une cotation boursière afin de financer le développement et les investissements de Sodemi. « Certaines start-up minières ont commencé leurs activités dans notre pays et sont aujourd’hui cotées. Pourquoi pas Sodemi ? » suggère Adama Toungara. PATIENCE. Les sociétés locales privées,

de leur côté, semblent devoir patienter avant de tirer profit des ressources naturelles, pourtant considérées comme un des piliers du développement national. « Si le gouvernement n’impose pas des partenaires ou des sous-traitants nationaux aux multinationales, comme au Nigeria ou au Ghana, le poids du privé ivoirien restera très limité. Pourtant il y a des Ivoiriens qualifiés au sein des majors, JEUNE AFRIQUE

mais ces professionnels ne sont pas incités à créer leur propre affaire », constate un consultant, qui dénonce également un secteur resté opaque. La réussite de l’entreprise de services Kuyo Pipeline, qui s’est imposée comme spécialiste de la construction d’infrastructures, fait de ce point de vue figure d’exception. En revanche, aucune société n’a réellement percé dans le domaine de l’explo-

Petroleum, de l’homme d’affaires Pierre Fakhoury. COMPÉTENCES. « Beaucoup de compa-

gnies locales ont bénéficié par le passé de permis, alors qu’elles n’avaient ni les compétences ni les moyens financiers pour mener à bien des explorations », relève une source au sein de la direction des mines. D’ailleurs, plusieurs d’entre elles ont vu leurs autorisations remises en cause Les rares Ivoiriens détenteurs ces derniers mois. Parmi de permis préfèrent souvent les exceptions: Transland les revendre au plus offrant. Resources, créée par Jean Likané Yagui, ancien ration pétrolière et minière, les rares directeur général de Sodemi, ainsi que Ivoiriens détenteurs de permis préférant Jofema Mineral Resources, fondée par souvent spéculer sur leur valeur en les un ancien de BHP Billiton. Toutes les revendant au plus offrant. À preuve, la deux devraient obtenir de nouveaux cession à Total, après une étude sis- permis prochainement. ● mique encourageante, de la majorité du JULIEN CLÉMENÇOT, bloc offshore CI-100 détenu par Yam’s avec BAUDELAIRE MIEU, à Abidjan N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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Entreprises marchés ferroviaire. Dans la ville sera aussi construit un ●●● port minéralier. Il s’agit de produire de 20 millions à 25 millions de tonnes de fer par an. Quarante-cinq ingénieurs travaillent sur ce projet. Plus au sud, on pourra aussi exploiter le gisement de fer du mont Gao. C’est un projet intégré qui sera entièrement financé par la société exploitante, pour un coût global de 2 milliards de dollars [1,5 milliard d’euros].

L’exploration pétrolière est l’autre pan de votre stratégie. Où en êtes-vous ?

Pendant dix ans, il n’y a eu que cinq forages d’exploration. Sur la même période, la Guinée équatoriale a réalisé 40 puits et le Gabon 25. L’État avait fait l’erreur de donner des permis à tout venant. Après inventaire, nous avons approché toutes les compagnies qui n’avaient pas fait de travaux pour leur demander de rendre les permis. Sans grincements de dents, huit permis ont été restitués. Cette politique porte-elle ses fruits ?

Tout à fait. D’avril à décembre 2011, huit forages d’exploration ont déjà été réalisés, notamment par Lukoil et Anadarko. Et nous avons beaucoup d’espoir concernant les travaux que Total entreprend en ce moment. En outre, sur la même période, nous avons signé douze contrats de partage de production. Actuellement, sur 51 blocs (dont 44 offshore), 26 sont attribués. Y a-t-il toujours des négociations avec le Ghana pour résoudre le conflit territorial concernant une zone maritime potentiellement riche en pétrole?

Les négociations ont été suspendues à la demande du président Ouattara, pour qu’il n’y ait pas d’interférence politique pendant la campagne pour l’élection présidentielle [du 7 décembre 2012] au Ghana. L’objectif est d’aboutir à un règlement amiable. Je veux préciser que la zone de contentieux ne fait pas l’objet de production. Il y a eu des découvertes, mais nous considérons qu’il ne devrait même pas y avoir d’exploration sans notre autorisation. Se dirige-t-on vers une zone d’exploitation commune avec le Ghana ?

Nous sommes disposés à analyser toutes les éventualités !

TULLOW OIL

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Quelles sont les ressources minières inexploitées?

Notre pays dispose d’un sous-sol riche d’une grande diversité de matières premières : manganèse, fer, or, nickel, bauxite… La direction des mines et de la géologie, longtemps négligée, doit rejouer un rôle important en matière de recherche. Je vais multiplier son budget par dix. Où en êtes-vous de votre adhésion à l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) ?

Elle est en cours. Nous prenons toutes les dispositions pour nous conformer à ses règles. Nous voulons aussi adhérer au processus de Kimberley et obtenir la levée de l’embargo onusien sur le commerce de notre diamant. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

! Au large de la Côte d’Ivoire, une plateforme de forage exploitée par le consortium composé de TULLOW OIL, ANADARKO et PETROCI.

Confirmez-vous la volonté de l’État, déjà affichée par l’ex-président Laurent Gbagbo, d’impliquer davantage la société nationale Petroci dans l’exploration pétrolière ?

Cette ambition ne date pas des années 2000. L’État a toujours eu la volonté de faire de Petroci une société dont les activités couvrent la recherche, le raffinage et la distribution. À la fin des années 1970, elle avait déjà réalisé quatre forages. Il ne faut pas oublier que c’est la société nationale qui a découvert le fameux gisement Foxtrot dont le gaz est utilisé pour produire la majeure partie de notre électricité. Petroci n’a pas été créée pour faire de la figuration. Son slogan est : « Produire l’énergie d’une nation forte ». Elle possède déjà une part de tous les blocs pétroliers attribués par la Côte d’Ivoire, mais elle ne doit pas mettre tous ses œufs dans le même panier. Nous sommes en train de voir avec des pays amis pour que Petroci puisse obtenir des permis d’exploration chez eux. ● JEUNE AFRIQUE


Entreprises marchés

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DAR HI

! L’ÉCOLODGE DAR HI, à Nefta (Sud-Ouest).

TUNISIE

Luxe, calme et palmeraies

Le modèle balnéaire étant en panne, Tunis mise sur le tourisme haut de gamme, notamment loin des côtes. Si des initiatives privées voient le jour, la stratégie du gouvernement, elle, doit encore être affinée.

D

epuis plus de deux ans, un ovni architectural surplombe la palmeraie de Nefta. Avec ses lignes contemporaines et ses chambres sur pilotis, Dar Hi détonne dans cette petite ville classique du Jérid tunisien (Sud-Ouest). Entièrement conçu par la designer française Matali Crasset, cet écolodge chaleureux allie modernité et respect de l’environnement local. Terrasse ensoleillée, piscine d’eau chaude soufrée, spa, mais aussi cours de cuisine traditionnelle ou coin lecture: ici, tout est fait pour prodiguer repos et bien-être aux clients. Cette nouvelle forme de tourisme haut de gamme, bien loin des séjours all-inclusive des hôtelsclubs de Djerba ou Hammamet, tend aujourd’hui à se développer en Tunisie. Si le tourisme balnéaire de masseafaitlarichessedel’économie nationale, ce modèle est désormais en panne. Depuis 2008, le compteur reste bloqué en dessous des 7 millions de visiteurs étrangers par an. La révolution n’a évidemment pas arrangé les choses, faisant plonger les chiffres à moins de 5 millions de touristes pour l’année 2011. Face à ces mauvaises statistiques, le ministère du Tourisme a lancé, JEUNE AFRIQUE

dès octobre 2010, un plan d’action national visant à redynamiser le secteur à l’horizon 2016. Mis de côté pendant la période révolutionnaire, ce plan a en partie été repris par le gouvernement Jebali. Une de ses principales pistes est de diversifier l’offre touristique en Tunisie. « On garde ce qu’on a en termes de tourisme balnéaire, tout en développant davantage le tourisme haut de gamme », résume Habib Ammar, directeurgénéraldel’Officenational du tourisme tunisien (ONTT). PUB. L’accent sera donc mis sur

des prestations plus soignées, comme des circuits culturels, des séjours de golf ou des semaines de thalassothérapie. Dès la fin du mois de janvier, une vaste campagne de publicité de 18 millions d’euros, concoctée par le français Publicis, vanteralesnouvellesfacettesdutourisme tunisien sur de multiples supports (affiches, web, télévision…). Un temps délaissée au profit des côtes, la zone saharienne fait dorénavant partie intégrante du plan de développement touristique. Symbole de ce changement de cap, legouvernementarécemmentlancé laconstructiond’ungrandcomplexe hôtelier de luxe à Tozeur. Financé

Ce collectif rassemble

12 hôteliers indépendants de haut niveau (maisons d’hôte, hôtels de charme, écolodge, resorts et campement) répartis sur l’ensemble du territoire

par le fonds d’investissement Qatari Diar, le projet Tozeur Desert Resort doitêtrelivréen2015sur40hectares de palmeraie. Il comprendra une soixantaine de suites, un centre de bien-être, des boutiques, des salles de conférence… Du côté des acteurs privés, douze hôteliers indépendants de haut niveau ont également décidé de bousculer les choses. Sous la houlette de Patrick Elouarghi, créateur de Dar Hi, ils se sont rassemblés au seinducollectif DarTunisia,officiellement présenté début décembre à Cannes (France) lors du salon International Luxury Travel Market (ILTM), le rendez-vous annuel des hôteliers de luxe mondiaux. « Nous avons eu de très bons contacts au salon ILTM et allons bientôt mettre en place des packages touristiques avec des agences de voyage », confie l’initiateur du projet. Malgré la satisfaction affichée par les autorités – « Notre nouveau modèle de développement touristique est un des signes de la nouvelle Tunisie », affirme le ministre des Finances et du Tourisme, Elyes Fakhfakh –, le plan national Tourisme 2016 ne donne que des lignes directrices, sans chiffres précis. « Cette stratégie prendra du temps à être appliquée, prévoit Patrick Elouarghi. On sent bien une volonté de changement, mais il faudra être patient. » Car pour l’instant, la « nouvelle » Tunisie a d’autres priorités: remédier au chômage de masse et aux troubles sécuritaires. ● BENJAMIN ROGER, envoyé spécial N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013


Entreprises marchés MAROC

Menace sur la presse écrite La fermeture d’Actuel est un signal d’alerte pour les journaux du royaume. Confrontés au défi de la langue, au tarissement de la publicité et à la concurrence du Net, les titres en français sont les plus vulnérables. d’exemplaires par an, selon le baromètre publié par l’Organisme de la justification de la diffusion (OJD Maroc). Soit trois exemplaires par habitant et par an, un chiffre bien en deçà de la diffusion de la presse chez le voisin algérien. PRINTEMPS ARABE. De plus,

cette statistique globale masque de grandes disparités. Selon la langue, tout d’abord : la presse marocaine est de plus en plus arabophone. À titre d’exemple, Almassae, titre leader du segment arabophone, peut compter sur un nombre de lecteurs payants (108 185 exemplaires par jour en 2011-2012) largement supérieur à celui des quotidiens francophones, dont le premier, Le Matin, pointe à 18 614 exemplaires par jour. Le Maroc est un pays arabophone, une réalité longtemps occultée par les milieux d’affaires. « Depuis le Printemps arabe, l’argument qui consistait à cibler, via l’utilisation de la langue française, un public A et B [les professions supérieures et les cadres, dans

Les leaders francophones chutent Diffusion payée 2011-2012 et évolution depuis 2008 : (quotidien)

18 614 exemplaires,

– 23 % (hebdo)

18 057 exemplaires,

– 21 %

SOURCE : OJD MAROC

F

aut-il craindre la fin du papier au Maroc, comme dans beaucoup de pays touchés par la crise de la presse ? En tout cas, les mauvaises nouvelles se succèdent pour les entreprises du secteur. Début janvier, un communiqué envoyé aux rédactions annonçait la fermeture de l’hebdomadaire francophone Actuel, invoquant « un contexte d’exploitation très difficile depuis trois ans », « un marché de la publicité presse en très forte baisse en volume et en valeur », « une remise en cause profonde de l’avenir de la presse papier […] sans convaincante perspective d’amélioration dans un avenir proche ». Cinglant, ce diagnostic vaut avertissement pour les confrères. Car les maux de ce titre lancé en 2009 par Rachid Tlemçani, un ancien banquier d’affaires, sont ceux d’une large partie de la presse écrite. Après des années de progression, la circulation totale des journaux s’est stabilisée depuis 2008, autour de 100 millions

! La nouvelle année n’a pas porté chance à L’HEBDOMADAIRE créé en 2009.

HASSAN OUAZZANI

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N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

le jargon publicitaire, NDLR] fonctionne de moins en moins », note Aziz Boucetta, éditeur du site panoramaroc.ma, qui publie notamment des articles traduits de l’arabe vers le français. Peu lue, la presse francophone est également frappée par la contraction du marché publicitaire, dont elle dépend financièrement. Un exemplaire d’un hebdomadaire vendu à 15 dirhams (environ 1,34 euro) ne dégage pas réellement de marge opérationnelle pour l’éditeur. « Environ 30 % de ce prix de vente lui échappe au profit de la diffusion [sociétés de distribution et kiosquiers], alors que les frais d’impression sont élevés : comptez 6 dirhams par exemplaire pour une pagination d’environ 80 pages et un tirage de 30 000 exemplaires », explique un directeur d’agence de communication. Un simple calcul éclaire le modèle économique : s’il veut couvrir ses frais (personnel, loyer, etc.) et dégager éventuellement des profits, tout patron de presse doit d’abord vendre de la publicité. BASCULEMENT. Sous l’effet de

la crise mondiale depuis 2008, la contraction du marché publicitaire a forcé les annonceurs et les agences à réorienter leurs budgets. Déjà concurrencée par les médias audiovisuels et l’affichage public, toute la presse écrite est aujourd’hui menacée par l’émergence de l’information sur internet. L’apparition de sites web d’infos bouleverse la diffusion de la presse payante et altère l’intérêt des annonceurs. Ces derniers sont naturellement attentifs à l’audience, ce qui explique qu’ils consacrent une part croissante de leurs budgets de communication à la publicité sur internet. Sophia Jalal, présidente du Groupement des annonceurs du Maroc, prédisait pour 2013 un basculement de la répartition du « gâteau » publicitaire. Cette année, internet devrait recueillir 19 % des investissements publicitaires dans le royaume… contre seulement 17 % pour les journaux. ● YOUSSEF AÏT AKDIM JEUNE AFRIQUE


Coulisses

Entreprises & marchés

Retrouvez toute l’actualité économique et financière du continent sur economie.jeuneafrique.com

Lepatronat élèvelavoix La Fopao revendique un poste d’observateur à la Cedeao et à l’UEMOA.

D

eux ans après la remise en route de ses activités à Abidjan, la Fédération des organisations patronales d’Afrique de l’Ouest (Fopao) a profité de son assemblée générale des 8 et 9 janvier, à Lomé, pour tenter d’être enfin associée à la mise en œuvre des politiques économiques des États. Un objectif loin d’être simple à atteindre : les pouvoirs publics et les institutions sousrégionales comme l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) continuent d’ignorer le patronat, considéré surtout comme un club de puissants et influents amis. PLAN. Conscient du peu d’intérêt accordé au secteur privé, l’Ivoirien Jean Kacou Diagou, qui vient d’être reconduit à la tête de la Fopao, envisage de mobiliser toutes les synergies pour amener les autorités à consulter les entreprises dans la conception et l’élaboration des textes réglementaires. « L’environnement des affaires ne doit pas être discuté sans nous, estime-t-il. Nous voulons avoir un poste d’observateur à la Cedeao et à l’UEMOA. » Le plan stratégique 2013-2015 du patronat repose sur quatre grands axes : être l’interlocuteur incontournable des gouvernements ; être inspirateur d’opinions ; cantonner les chambres de commerce à un rôle de promotion ; mettre en œuvre des projets nationaux de développement axés sur le secteur privé. En attendant, la Fopao a entrepris la construction d’un siège hypermoderne à Lomé. ● BAUDELAIRE MIEU, envoyé spécial à Lomé JEUNE AFRIQUE

PORT ÇA BOUGE À ABIDJAN ET À LOMÉ Le gouvernement ivoirien a retenu deux consortiums (sur trois prétendants) pour la construction, la concession et l’exploitation du second terminal à conteneurs du port d’Abidjan. Il s’agit, selon les informations exclusives de Jeune Afrique, de l’ivoirien Movis – associé aux français CMA CGM et Necotrans ainsi qu’au philippin ICTSI – et du groupement franco-danois Bolloré-Bouygues-Maersk. L’italo-suisse Mediterranean Shipping Company (MSC) n’a pas été retenu, mais pourrait se concentrer sur le développement du terminal du port de San Pedro. Signe de l’effervescence autour des infrastructures portuaires dans le golfe de Guinée, un consortium de six bailleurs de fonds, mené par la Société financière internationale (SFI, filiale de la Banque mondiale), vient de débloquer le plus important financement privé pour la construction d’un nouveau terminal à conteneurs à Lomé. Objectif : porter la capacité de ce port à 2,2 millions de conteneurs par an et en faire une plateforme de transbordement pour l’Afrique de l’Ouest. ●

VINCENT FOURNIER/J.A.

AFRIQUE DE L’OUEST

• ÉNERGIE Alstom a signé un contrat de 250 M€ pour la fourniture des turbines et alternateurs du barrage hydroélectrique de Grand Renaissance,

S

M

S

en Éthiopie • SEMENCES Le français Vilmorin s’est adjugé 81 % du sud-

africain Link Seed • ÉNERGIE (2) La Côte d’Ivoire a bouclé le financement du barrage hydroélectrique de Soubré grâce à un prêt de 364 M€ de China Exim Bank • OR Le britannique Premier African Minerals a obtenu

2 permis d’exploration dans le nord du Togo • CAPITAL-INVESTISSEMENT Cauris Management a signé une prise de participation minoritaire dans l’ivoirien Banque Atlantique, via un investissement de plus de 6 M€

FINANCE UNE BANQUE COMMUNE POUR LE MAGHREB La cinquième conférence régionale sur l’intégration économique maghrébine, à Nouakchott, les 8 et 9 janvier, a abouti sur un accord pour la création de la Banque maghrébine d’investissement et du commerce extérieur (BMICE). Doté d’un capital de départ de 75 millions d’euros, le nouvel établissement sera basé àTunis et participera à l’amélioration de l’intégration économique du Maghreb. ● INDUSTRIE LE QATAR INVESTIT EN ALGÉRIE À l’occasion de la visite à Alger de l’émir Hamad Ibn Khalifa AlThani, l’Algérie et le Qatar ont signé huit accords de coopération dans

la sidérurgie, le transport maritime et les hydrocarbures. L’accord le plus important porte sur la création d’un partenariat dans le domaine de la sidérurgie à Bellara, dans la wilaya de Jijel, à 300 km à l’est d’Alger. Un projet un temps convoité par Cevital. ● MINES PÉKIN RENONCE À AFRICAN BARRICK GOLD La société d’État China National Gold a renoncé à acheter les 74 % détenus par le canadien Barrick Gold dans African Barrick Gold, un producteur d’or actif enTanzanie. Les deux parties n’ont pu s’entendre sur le prix. L’intérêt de Pékin pour African Barrick Gold avait été vu comme une preuve supplémentaire des ambitions internationales des entreprises minières chinoises. ● N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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Décideurs pour approcher les 950 millions d’euros, est devenue une référence en Afrique. Elle a contribué à augmenter de manière significative les revenus des paysans éthiopiens, en particulier des 15 millions de caféiculteurs. Avant la création de l’ECX, 38 % seulement du prix du café leur revenait ; cette proportion est passée à près de 70 %. L’expérience éthiopienne montre aussi qu’« une Bourse peut catalyser le développement de la logistique, de l’entreposage de produits agricoles ou miniers, du transport, etc. », affirme celle qui a également officié en tant qu’économiste senior à la Banque mondiale.

MATIÈRES PREMIÈRES

Elle veut des Bourses partout

Forte du succès de l’Ethiopia Commodity Exchange (ECX), Eleni Gabre-Madhin, sa fondatrice, se lance un nouveau défi : dupliquer cette expérience dans d’autres pays du continent.

MODÈLE. Depuis la création de

! L’ÉTHIOPIENNE a passé près de cinq années à la tête de l’ECX.

«

I

l y a tellement d’opportunités en Afrique, tellement de choses à faire, qu’on n’a pas le temps de se reposer! » En septembre 2012, Eleni Gabre-Madhin a quitté la direction générale de l’Ethiopia Commodity Exchange (ECX), qu’elle avait fondé en avril 2008. Quatre mois plus tard, la voilà sur le point de lancer, à l’occasion du Forum économique mondial qui se tiendra fin janvier à Davos, une nouvelle entreprise. Baptisée Eleni, du prénom de l’économiste éthiopienne, cette nouvelle structure basée à Nairobi participera à la création et au financement de Bourses de matières premières (agricoles ou minières) dans toute l’Afrique. « Il ne s’agit pas simplement de dupliquer le modèle éthiopien dans d’autres pays. Il s’agit de s’en inspirer pour apporter des solutions appropriées aux conditions rencontrées par les acteurs locaux », tient à souligner cette spécialiste de l’agroéconomie, diplômée des universités de Michigan et Stanford (États-Unis). N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

Prix et distinctions • Personnalité éthiopienne de l’année (2010) • Prix African Banker Icon (2012) • Prix Yara pour une révolution verte en Afrique (2012)

PETE LEWIS/DFID

80

Née à Addis-Abeda, fille d’un ancien haut fonctionnaire des Nations unies, Eleni GabreMadhin, à l’aise aussi bien en français qu’en anglais, a déjà une expérience panafricaine avérée. Outre Addis-Abeba, où elle a dirigé le programme local de l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (Ifpri), elle a aussi travaillé au Kenya, au Rwanda, au Togo ou encore au Malawi. « Elle accorde beaucoup d’importance au terrain pour aboutir à des recommandations opérationnelles », jugeait Pierre Jacquet, chef économiste de l’Agence française de développement (AFD), dans une

Spécialiste de l’agroéconomie, elle accorde beaucoup d’importance au terrain. tribune parue en 2011 dans le quotidien français Le Monde. Le succès de l’ECX parle pour elle. En quatre années d’existence, cette Bourse, qui a vu ses transactions croître de 21 % en 2011-2012

la Bourse d’Addis-Abeba, des représentants d’au moins 18 pays africains sont venus s’inspirer de ce modèle. C’est ce défilé de visiteurs de haut niveau qui a donné des idées à Eleni Gabre-Madhin : sa société veut ainsi apporter aux pays dotés de potentiels agricole et minier des projets de création de Bourses, ainsi que le financement et l’expertise nécessaires à leur démarrage. Ces places seront le fruit de partenariats public-privé dans lesquels les parties prenantes auront des intérêts commerciaux. Selon la patronne éthiopienne, qui dit être en discussions avancées dans une douzaine de pays, « c’est une condition nécessaire pour que les institutions ainsi créées soient soutenables et durables ». Le financement indispensable au démarrage d’Eleni étant en cours de bouclage, sa fondatrice se garde de communiquer pour l’heure le nom des actionnaires, mais elle assure avoir le soutien d’institutions internationales actives dans le domaine des marchés financiers et boursiers. En 2008, pour le lancement de l’ECX, elle avait obtenu un appui de 24 millions de dollars (plus de 15 millions d’euros à l’époque) de plusieurs bailleurs de fonds, parmilesquelslaBanquemondiale, le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) et l’Agence canadienne de développement international. ● STÉPHANE BALLONG JEUNE AFRIQUE


Décideurs ! L’AUSTRALIEN dirigeait jusqu’à présent AngloGold Ashanti.

BRUNO LEVY POUR J.A.

comme responsable de l’exploitation du nickel, puis à AngloGold Ashanti, qu’il a rejoint en tant que directeur général en 2007, il a montré sa capacité à optimiser les coûts. Sous sa férule, le groupe aurifère est redevenu bénéficiaire, en se défaisant notamment de ses instruments de couverture qui l’ont longtemps empêché de profiter de la hausse des cours. RETARD. Affable, cet amateur de

MINES

Redresseur de coûts Mark Cutifani, le nouveau patron d’Anglo American, souhaite optimiser le fonctionnement du groupe, notamment en Afrique du Sud.

A

lors que l’industrie minière sud-afr icaine est confrontée à d’énormes troubles sociaux à la suite du massacre de Marikana, en août (34 morts parmi les grévistes de ce site exploité par Lonmin), Anglo American, qui réalise 55 % de son chiffre d’affaires dans le pays, a choisi comme nouveau directeur général un homme déjà intégré dans le tissu local. Le 8 janvier, le conseil d’administration du holding britannique, qui contrôle entre autres 85 % du groupe diamantifère De Beers, a unanimement

choisi Mark Cutifani, jusqu’alors patron du sud-africain AngloGold Ashanti, pour prendre le relais de Cynthia Caroll. Ingénieur des mines de formation, cet Australien de 54 ans se retrouvera dès le mois d’avril à la tête d’un portefeuille diversifié d’activités et de produits. Deux de ses priorités seront de redresser la mine de fer de Minas-Rio, au Brésil, qui a souffert de dépassements de coûts et de retards, et de superviser l’examen de la filiale sud-africaine Anglo American Platinum. Au sein du canadien Inco (racheté par le brésilien Vale), où il a débuté

1,5 million

d’euros C’est son salaire annuel de base

rugbyestconvaincuqueledéveloppement de nouvelles technologies révolutionnaires pourrait changer radicalement les structures de coûts de l’industrie minière, tout en améliorant la sécurité. Les mines ont, selon lui, vingt à trente ans de retard sur des industries comme l’ingénierie ou l’automobile. « Dans l’industrie minière, l’accent mis sur les détails, la façon dont vous faites le travail, depuis la définition de la stratégie jusqu’à la manière dont une personne effectue une tâche quotidienne, n’ont rien à voir avec les pratiques de haute précision de l’ingénierie », explique celui qui a été élu président de la Chambre des mines d’Afrique du Sud en novembre 2012. « Les miniers qui se concentrent sur le redressement de ces inefficacités peuvent atteindre 30 % d’augmentation de la productivité », conclut-il. ● GEMMA WARE

DR

ON EN PARLE

LOUIS AMÉDÉE FNISCI Ancien journaliste à Fraternité Matin, il a été nommé DG de la Fédération nationale des industries et services de Côte d’Ivoire, union patronale qui regroupe plus de 80 % des entreprises formelles du pays. JEUNE AFRIQUE

MICHEL EMEYRIAT SERVAIR Le nouveau PDG du troisième acteur mondial de la restauration aérienne était auparavant DG adjoint d’Air France. Il avait rejoint la compagnie en 1990 comme contrôleur de gestion des escales.

JALAL BENCHEKROUN ATLANTA Nommé DG de l’assureur marocain, il a débuté sa carrière en 1992 au sein de la compagnie Es Saada, avant d’intégrer la direction du trésor et des finances extérieures au ministère des Finances. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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Finance

SIA KAMBOU/AFP

82

! À terme, PÉTRO IVOIRE compte s’introduire à la Bourse régionale des valeurs mobilières… à Abidjan.

BOURSE

Voir Paris et languir

14,9 M€

été réalisé avec l’arrivée de Phoenix Capital Management à la place de Cauris Management. Enfin, Money Expresssouhaitaitaussisemettreen situation d’augmenter son capital; de fait, il discute aujourd’hui avec un fonds d’investissement. » Pour le banquier d’affaires parisien, l’introduction à Paris n’est qu’une première étape: « Tout cela prend du temps. Simat est satisfait, la société a pu utiliser la Bourse en fonction de ses besoins ; et Money Express fera de même lorsque ses négociations seront finalisées. » Reste que l’appétence des gérants internationaux pour les valeurs émergentes en général, africaines en particulier, n’a nullement profité aux trois PME. Samuel Maréchal estimeaujourd’huiquelaprochaine étape logique serait une cotation sur Alternext, le marché réglementé des PME en France. Une Place plus propice, selon lui, à la levée de fonds. Mais les contraintes pour y accéder sont bien plus ardues à satisfaire.

Simat

GRISE MINE. Du côté des patrons,

Les trois PME africaines cotées sur le marché libre NYSE Euronext doutent. Si leur présence sur la Place française leur a permis d’être plus visibles, la levée de fonds demeure une gageure.

«

L

e mieux serait que nos Bourses régionales jouent davantage leur rôle et simplifient les règles d’accès pour les sociétés de la région. » Meïssa Ngom, patron de Money Express, une société sénégalaise de transfert d’argent introduite à la Bourse de Paris en septembre 2011, cache mal sa déception. S’il assure être en négociation avec un fonds d’investissement approché grâce à la visibilité apportée par cette cotation, il juge néanmoins le marché parisien inadapté pour une entreprise comme la sienne. CALME PLAT. Trois PME africaines

ont tenté l’expérience: outre Money Express, l’ivoirien Pétro Ivoire (distribution de carburants) avait suivi la même année, alors que la Société ivoirienne de manutention et de transit (Simat, logistique) avait ouvert le bal dès 2007. Toutes ont été approchées, conseillées puis accompagnées par le cabinet Maréchal & Associés Finance, dirigé par le Français Samuel Maréchal. N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

Les résultats sont mitigés. IntroduitessurlemarchélibreNYSE Euronext, qui n’est pas réglementé, les valeurs sont très peu actives. L’évolution des cours de Money Express et de Pétro Ivoire ressemble àunélectrocardiogrammeplat.Plus variable, le cours de Simat a fondu, avec la crise ivoirienne, comme neigeausoleil:aprèsavoiratteintun pic le 23 janvier 2008 à 16,90 euros, le titre plafonne aujourd’hui à 4,50 euros, sans variation depuis des mois. Le cabinet Maréchal & Associés Finance défend pourtant le travail effectué. « Le premier objectif était de donner une visibilité internationale à ces sociétés africaines. En ce sens, le but est atteint », assure SamuelMaréchal,jointàAbidjanoù son cabinet possède une antenne. « Si l’on regarde Simat, son chiffre d’affaires a été multiplié par trois, mais, malheureusement, la crise ivoirienne est venue stopper ses ambitions, notamment celle d’augmenter ses fonds propres, poursuit-il. Pour Pétro Ivoire, il fallait remplacer un fonds sortant, ce qui a

Capitalisations boursières

Pétro Ivoire

21,6 M€ Money Express

7,2 M€

les avis sont moins optimistes. « Est-ce que la Bourse de Paris est prête à soutenir le développement d’une entreprise africaine? Je n’en suis pas sûr », s’interroge Stéphane Eholié,PDGdeSimat.S’ilsefaisaitle JEUNE AFRIQUE


Baromètre héraut de la démarche il y a encore troisans,àl’heuredubilan,lepatron ivoirien fait grise mine: « C’est vrai, j’y ai gagné en notoriété, mais je n’ai pas levé de fonds. Certes, c’était une micro-introduction, et avec la crise mondiale les ressources se sont raréfiées, mais d’autres sociétés de même taille [non africaines, NDLR] ont pourtant réussi à lever de l’argent. Je compte cependant trouver une issue en 2013 ou 2014 », conclut-il, espérant dénicher des fonds pour se consolider sur le marché ivoirien et réaliser enfin son ambition, d’ici à 2015, de pénétrer les marchés limitrophes. « L’objectif était plus de donner de la valeur à la société et de l’exposer aux fonds étrangers, se rassure de son côté Sébastien Kadio-Morokro, directeur général de Pétro Ivoire. Nous avons émis 100 titres, nous n’attendions vraiment pas plus de variation de notre cours. À terme, de toute manière, c’est à la BRVM [Bourse régionale des valeurs mobilières, à Abidjan] que nous comptons utiliser le levier de la Bourse. Mais toutes les conditions n’étaient pas encore réunies. » EN UN CLIC. Le financier français

Louis Thannberger, grand spécialiste des introductions en Bourse (400 à son actif), notamment des PME,estcatégorique:«Jenevoispas l’intérêt pour une société ivoirienne de venir se faire coter à Paris ! La visibilitéestunfauxdébat:unecotation à Abidjan peut s’accompagner d’une conférence de presse à Paris, on obtiendrait le même résultat… Aujourd’hui, avec internet, il n’y a plus qu’une seule et unique Bourse: en un clic, un investisseur sait où investir,oùquesoitcotéelasociété.» Le banquier d’affaires, qui cherche à s’installer à Abidjan, appelle de ses vœux, comme l’ensembledespatrons,unePlacerégionale ouest-africaine forte et plus simple d’accès pour les entreprises de la région. De son côté, Samuel Maréchal va mettre en stand-by son travail à Paris, pour introduire « d’ici à la fin du mois », assure-t-il, une société ouest-africaine sur la Bourse de… Maurice. ●

Finance

Logistique : du changement dans l’air VALEUR

BOURSE

COURS au 9 janvier (en euros)

ÉVOLUTION depuis le début de l’année (en %)

Canal Shipping Agencies

LE CAIRE

1,17

+ 17,40

Air Mauritius Alexandria Containers United Arab Shipping Co Tunisair Grindrod Comair Precision Air Bolloré Africa Logistics CI Kenya Airways

MAURICE

0,28 10,13 0,09 0,75 143,47 13,65 0,22 106,71 0,10

+ 14,85 + 12,56 + 10,00 + 8,39 + 4,10 + 1,29 0,00 0,00 – 1,75

LE CAIRE LE CAIRE TUNIS JOHANNESBURG JOHANNESBURG DAR ES - SALAAM ABIDJAN NAIROBI

CHANGEMENT D’ÉPOQUE dans le transport aérien. Confrontées à l’envolée des coûts, les compagnies africaines sont nombreuses à avoir entamé des plans de repositionnement et de restructuration. Air Mauritius, quatrième transporteur aérien au sud du Sahara, a ainsi renoué avec les bénéfices en 2012 à la suite de plusieurs décisions, dont la diminution des routes vers l’Europe et l’augmentation des vols vers l’Afrique

et l’Asie. Royal Air Maroc, qui n’est pas coté en Bourse, a également retrouvé des couleurs en se séparant d’activités non stratégiques et en rationalisant ses coûts.Tunisair, qui a fortement souffert, semblait également sur la voie de la rédemption ces derniers temps. Mais les équilibres restent fragiles à l’heure où de nouveaux concurrents se lancent. La compagnie low cost Fastjet a ainsi débuté ses activités en novembre 2012, en commençant par laTanzanie. ●

Valeur en vue TUNISAIR Restructuration coûteuse mais inéluctable APRÈS UNE ANNÉE 2011 désastreuse, la reprise aura été au rendez-vous en 2012. L’activité de la compagnie aérienne s’est nettement améliorée durant les neuf premiers mois de l’année, avec une croissance au-delà de nos attentes, soutenue essentiellement par l’activité régulière (+ 32,7 %). En comparaison avec 2010 (l’année 2011 n’étant pas une référence du fait de la révolution), le chiffre d’affaires pour les neuf premiers mois affiche une hausse de 11 %, à la suite d’une augmentation du trafic aérien Fatma Zalila de 4,1 %. Pour l’année 2012, nous avons ajusté à la Analyste hausse la perte nette, à 125 millions de dinars (61 milchez AlphaMena lions d’euros) au lieu de 56 millions auparavant, essentiellement en raison de la révision à la hausse du ratio masse salariale-chiffre d’affaires, à environ 22 %. Notre modèle tient compte du plan de restructuration visant le désengagement de 1 700 salariés (sur un total de 8 500), dont la mise en place est prévue pour 2013.Tunisair espère que l’État tunisien contribuera à hauteur de 52 millions de dinars sur les 75 millions que devrait coûter ce plan. ● BOURSE

CA (30.9.2012)

COURS (10.1.2013)

OBJECTIF

Tunis

411,5 millions d’euros (+ 23,9 %)

1,55 dinar

2,25 dinars

MICHAEL PAURON JEUNE AFRIQUE

N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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Culture & médias

CINÉMA

Héros MALGRÉ LUI Chanteur engagé dans les années 1970, l’Américain Sixto Rodriguez a sorti deux albums dans l’indifférence quasi générale… Sauf en Afrique du Sud, où il est devenu sans le savoir une icône antiapartheid pour les Blancs libéraux. RENAUD DE ROCHEBRUNE

P

rès des grands lacs, il y a un demisiècle,«MotorTown»ou«Motown», autrement dit Detroit, la ville phare de l’industrie automobile américaine, se remet à peine des grandes émeutes de l’été 1967 alimentées par le racisme et des inégalités sociales insupportables. C’est là, dans cette ambiance délétère, que vit un jeune fils d’immigrés mexicains, Sixto Diaz Rodriguez. Ouvrier le jour aux usines Chrysler, il joue de la guitare et chante le soir ses compositions véhémentes et sarcastiques, style protest song, dans quelques bars mal famés et enfumés. Séduisant ceux qui le rencontrent avec son look vaguement indien, l’ouvrier-artiste ne cherche cependant pas la gloire. Chantant le plus souvent en tournant le dos à un maigre public qui le distingue à peine, il ne fréquente pas la scène musicale locale, plus intéressé par la politique et le sort des pauvres que par le show-business. Et c’est dans la rue, dans un quartier déshérité, qu’il donne ses rendez-vous, à la manière des clochards ou des dealers. Ce qui n’empêche pas un jour un producteur noir déjà célèbre, Clarence Avant, de lui offrir l’opportunité d’enregistrer ses morceaux pour le label Sussex. Un premier 33 tours, Cold Fact, avec pour titre vedette l’entêtant « Sugar Man », sera salué par quelques critiques mais n’obtiendra aucun succès public. Pour ne rien arranger, le concert organisé pour le promouvoir en Californie a fait scandale puisque le chanteur a invité sur scène pour haranguer les spectateurs le leader local des Bérets bruns, des activistes aussi radicaux que les N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

MOV IEST ORE /REX FEAT UR/R EX/S IPA

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Sugar Man, de Malik Bendjelloul

Black Panthers à la mode chicano. Mais le producteur, persuadé d’avoir découvert un grand talent, un autre Bob Dylan avec une voix superbe et des paroles encore plus fortes comme il l’affirmera plus tard, ne se décourage pas. Rodriguez est envoyé à Londres enregistrer un second album, Coming from Reality. Une réussite artistique mais un énorme bide. Qui met fin à la carrière du chanteur, vivant désormais sans jamais se plaindre de son sort comme maçon, spécialisé dans la restauration de demeures modestes. Fin de l’histoire ? Pour lui, en effet. Et pour plus de trente ans. Mais de l’autre côté de l’Atlantique, en Afrique du Sud, cette histoire ne fait que commencer. Une touriste anglaise, du moins on le suppose, aurait amené dans ses bagages au pays de l’apartheid l’un des rares exemplaires de Cold Fact écoulés JEUNE AFRIQUE


Culture médias antiapartheid et anticonservateurs – avec l’appui involontaire des autorités, quand elles ont décidé de censurer l’un de ces morceaux.

dans le commerce. Elle l’aurait fait écouter à des amis de rencontre, qui, immédiatement séduits, se seraient empressés de copier le vinyle. Ce piratage, une fois que le bouche à oreille eut produit son effet, a pris de l’ampleur, d’autant que deux producteurs locaux, sans trop se préoccuper de questions de droits, et notamment de ceux de l’artiste, ont rapidement décidé de ressortir sous leur propre label les morceaux de Rodriguez tellement appréciés. Leur succès s’est démultiplié en raison même de la situation politique dans le pays. Car les paroles apparemment protestataires des chansons et le climat de liberté qu’elles véhiculent ont séduit en particulier une grande partie des Blancs libéraux opposés au régime de Botha. Au point de devenir presque des hymnes JEUNE AFRIQUE

! LE MILITANT LIBERTAIRE ULTRACOOL ET IDÉALISTE EN

1971. Il sera en concert à La Cigale (Paris) le 5 juin.

OSCARS. Pourapprécierlephénomène,ilsuffit de savoir qu’on évalue à plus de 500000 exemplaireslesalbumsdeRodriguezalorsécoulésen Afrique du Sud. Sans que nul ne puisse savoir qui est vraiment ce chanteur devenu culte, sur lequel les pochettes restent muettes. La rumeur, bientôtconsidérée comme véridique, le dit mort à la fin d’un concert décevant, soit parce qu’il se serait suicidé d’une balle dans la tête, soit parce qu’il se serait immolé par le feu en public! Parmi ses très nombreux fans, il y a notamment un disquaire quelque peu marginal du Cap, Stephen Segerman, et un journaliste de ses amis, qui, malgré de brèves tentatives d’enquête aux États-Unis, n’ont pu obtenir la moindre information intéressante sur ce Rodriguez que nul ne semble connaître outre-Atlantique, où ses enregistrements sont introuvables. Ils décident pourtant au milieu des années 1990 de créer un site internet dédié à leur artiste favori. Un site sur lequel, un jour où elle surfait sur la Toile, est tombée… une des trois filles de Rodriguez. Apprenant par celle-ci que le chanteur est bel et bien vivant et réside à Detroit, Segerman et divers admirateurs de Rodriguez s’emploient à le contacter et à le faire inviter dans une Afrique du Sud désormais postapartheid. Où il se rend à plusieurs reprises, à la fin des années 1990 et au début de la décennie suivante, accueilli comme une immense vedette avec toute sa famille et chantant à guichets fermés dans des salles de 5 000 places. De quoi tourner la tête d’un simple ex-chanteur totalement inconnu ailleurs, y compris dans son propre pays ? Pas le moins du monde. Rodriguez, avare d’interviews, ne parlant jamais de lui-même, refuse toujours de se plier au star-système. Il n’a pas réclamé les droits d’auteur dont il a été grugé et a distribué autour de lui l’argent que lui ont rapporté ses tournées en Afrique. Le militant politique libertaire ultracool et idéaliste est resté intègre. Il a d’ailleurs continué autant qu’il le pouvait à travailler comme maçon dans les années 2000. Et il vit toujours aujourd’hui, à 70 ans, dans la maison qu’il a achetée à Detroit pour trois fois rien il y a quarante ans. Sans regret. Et sans accorder d’importance excessive au fait qu’il est devenu, même malgré lui, une célébrité mondiale grâce au remarquable documentaire – un premier film récompensé par le prix spécial du jury et le prix du public du Festival de Sundance et sélectionné aux Oscars – que vient de lui consacrer, après quatre années d’efforts et sous le titre Sugar Man, le jeune réalisateur de télévision suédois d’origine algérienne Malik Bendjelloul. Pour qui, tout simplement, « Sixto, c’est le vrai homme libre ». ● N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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Culture médias HISTOIRE

James Bond en Afrique Plongeant au cœur des archives des services secrets britanniques, deux journalistes livrent le regard de Londres sur la décolonisation française.

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ui de mieux que les Anglais pour critiquer la décolonisation française ? Deux journalistes, François Malye, grand reporter au Point, et Kathryn Hadley, du magazine History Today, ont fouillé durant deux années des kilomètres de cartons poussiéreux dans les locaux des archives nationales britanniques à Kew (banlieue londonienne). Au final, ils ont sélectionné une série de documents, citations et portraits inédits. Une histoire de la France revisitée par ses meilleurs ennemis, qui éclaire notamment sur les relations bilatérales à l’heure de la décolonisation. L’idée du livre est venue lors de la rédaction d’un article consacré aux massacres de Sétif en Algérie en mai 1945 pour Le Point. En consultant les archives britanniques, les auteurs découvrent un rapport inédit du consul général anglais à Alger, John Carvell, fourmillant de détails sur la répression des nationalistes. Tout est parti, à l’époque, d’un tir sur un manifestant qui crée une insurrection. Cent deux Européens furent tués en représailles… avant que l’armée française n’entre en action (bombardements aériens, tirs de la marine, razzias de la Légion étrangère, des tabors marocains et des tirailleurs sénégalais…). « Un policier français a perdu la tête. Je suis certain qu’autant de sang n’aurait pas coulé si les militaires français n’avaient pas désiré perpétrer un massacre », a griffonné à l’époque le conseiller du Foreign Office. Carvell évoque encore les moteurs de la révolte

– « La population souffre d’exploitation et de discrimination… Le point de vue français est, dans l’ensemble, que les Arabes sont une race inférieure dont les habitudes ne justifient pas l’application de normes européennes dans les affaires gouvernementales ou économiques » – et de prédire le déclenchement de la guerre d’Algérie, qui interviendra neuf ans plus tard. « La destruction impitoyable des villages et le massacre sans discernement de femmes et d’enfants ne seront jamais oubliés. Le mouvement passera forcément dans la clandestinité pendant un certain temps, mais resurgira ensuite sous une autre forme », ajoute alors le consul. SUSPICION. Le mardi 1er avril 1947, un

télégramme de Peter Ivan Lake, un autre consul britannique à Tananarive, tombe sur le bureau du Foreign Office à Londres: durant la nuit du samedi au dimanche, Madagascar s’est révoltée. Il est question d’« insurgés autochtones » et de « victimes européennes ». Personne ne peut encore deviner que vient de s’ouvrir une autre des pages les plus sombres de la décolonisation. La répression des insurgés – des anciens soldats ayant combattu pendant la Seconde Guerre mondiale – est violente et cruelle. Lake vise le chef de la sûreté nationale de la Grande Île, le Français Marcel Baron : « Les méthodes dignes de la Gestapo avec lesquelles il traite les suspects politiques, ses incendies impitoyables et sans distinction de villages malgaches ont suscité la désapprobation

des ministres. […] Le renvoi de ce fonctionnaire est fortement souhaitable car sa présence a causé une grande partie du climat de suspicion et de xénophobie. » À l’époque, le président Vincent Auriol, qui reconnaîtra plus tard les excès de la répression, donne carte blanche à cet ancien commissaire de police. Il faut faire un exemple afin que les autres possessions françaises ne soient pas tentées de suivre le même chemin de la révolte.

QUAND ÉLISABETH II ÉCRIVAIT À HASSAN II UNE HISTOIRE DIGNE D’UN JAMES BOND. C’est en ces termes que sir Patrick Reilly, l’ambassadeur anglais en France, qualifie l’affaire Ben Barka. Un an après la disparition du leader de l’opposition marocaine, enlevé à Paris en 1965, les diplomates de Sa Majesté pensent à un complot des services français et marocains et relatent les suspicions N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

qui pèsent sur le général Oufkir, ministre de l’intérieur de Hassan II, et les tensions entre Paris et Rabat. À l’époque, le roi du Maroc envoie des émissaires à l’étranger pour nier toute implication du royaume. Mais les Anglais ne souhaitent pas s’immiscer dans la querelle francomarocaine. La reine Élisabeth prétexte un déplacement à l’étranger

pour refuser la venue de l’envoyé de Hassan II, Ahmed Balafrej. « Monsieur mon frère, écrit la reine. Je remercie Votre Majesté pour Votre lettre qui fut communiquée à Londres par la main de Votre émissaire et qui me fut transmise durant mon voyage aux Caraïbes… » Un chef-d’œuvre d’hypocrisie diplomatique. ● P.A. JEUNE AFRIQUE


Culture médias ! ALGÉRIE, 1945. Une cérémonie de reddition de résistants mise en scène par l’armée française.

TALLANDIER/RUE DES ARCHIVES

informelle, des membres de l’UPC ayant trouvé refuge au Cameroun anglophone. « Aussitôt ligotés, ils sont battus sous les yeux de nos policiers », relate alors un rapport britannique. Finalement, Um Nyobe est abattu par des tirailleurs tchadiens le 13 septembre 1958 près de Boumnyebel (à 70 km de Yaoundé), et Moumié assassiné par un agent des services français le 3 novembre 1960 à Genève. Les relations franco-britanniques se tendent davantage après l’expédition de Suez. En juin 1956, les dernières troupes britanniques s’en sont retirées. Ce dont profite le colonel Nasser pour annoncer la nationalisation du canal, voie de transit privilégiée des marchandises du royaume. Anthony Eden, Premier ministre, obtient alors le soutien de son ami Guy Mollet, d’autant que le président socialiste du Conseil veut aussi abattre Nasser, qui soutient les indépendantistes algériens. Israël participe à l’offensive. Mais les Américains et les Soviétiques s’y opposent. Les Anglais, qui ont compris que la fin des empires coloniaux est proche, lâchent vite prise, au grand dam des Français. « Pour les deux pays, c’est un choc immense : c’en est fini de la politique de la canonnière et des colonies comme instruments de puissance », expliquent les auteurs. Battus en Indochine et défaits à Suez, les Français concentrent leurs rancœurs sur l’Algérie où sont envoyés les Cameroun britannique. Une fois encore, parachutistes du général Massu pour les Français la sollicitent pour mater les démanteler le FLN dans la capitale où manifestations de l’Union des populations se multiplient les attentats à la bombe. du Cameroun (UPC), mouvement indéOn connaît la fin. C’est l’arrivée du général de Gaulle au pouvoir, le 13 mai 1958, dans un « Si [la France] abandonne contexte insurrectionnel. l’Indochine, sa position en Afrique L’homme providentiel va pourrait bien en être ébranlée. » alors engager les pourparlers avec les leaders des pendantiste dirigé par Ruben Um Nyobe anciennes colonies. La plupart des pays et Félix-Roland Moumié. La répression d’Afrique subsaharienne obtiennent leur indépendance en 1960, l’Algérie est une nouvelle fois violente. Comme en Algérie, Paris met en place l’« école franen 1962. ● PASCAL AIRAULT çaise de la contre-insurrection » théorisée à la suite du long conflit indochinois et de la cuisante défaite de Dien Bien Phu. Pour tenir les colonisés, les militaires ont carte blanche pour tester le nouveau Dans le secret concept : quadrillage et surveillance des des archives britanniques, populations, recours aux milices et à la de François torture, opérations de guerre contre les Malye et Kathryn indépendantistes. La brutalité française Hadley, Calmannest l’un des sujets de frictions avec les Lévy, 432 pages, Britanniques qui livrent pourtant, de façon 20,50 euros

Quelques années de répit… Puis, le 21 juillet 1954, le président du Conseil, Pierre Mendès France, officialise la fin de la présence française en Indochine. Deux mois plus tôt, la France vient de perdre la guerre à Dien Bien Phu. Anthony Eden, secrétaire d’État britannique aux Affaires étrangères, prévient alors : « Si après la chute de Dien Bien Phu le gouvernement français abandonne le combat en Indochine, sa position en Afrique pourrait bien être ébranlée… » Deux jours plus tard, le Premier ministre, Winston Churchill, reçoit René Massigli, l’ambassadeur de France venu demander de l’aide. « Ne comptez pas sur moi, j’ai subi Singapour, Hong Kong, Tobrouk…, lui répond le Vieux Lion. Les Français subiront Dien Bien Phu. » FRICTIONS. Moins d’un an plus tard, le 22 mai 1955, des émeutes éclatent au Cameroun français alors que la guerre d’Algérie bat son plein. Londres est aux premières loges puisqu’elle administre le JEUNE AFRIQUE

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Culture médias En vue LIVRE

Au bal masqué

Le chercheur Julien Volper revient sur l’esthétique et la finalité des mystérieux masques des Songyes, un peuple du centre de la République démocratique du Congo.

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ui, enfants, les a vus en garde un souvenir empreint à la fois de terreur et de magie. Les fabuleux masques des Songyes (ou Songes), un peupledelaprovinceduKasaïOriental, dans le centre de la République démocratique du Congo, étaient sortis lors de différentes cérémonies. Détenus aujourd’hui principalement dans des collections privées ou des musées, en Europe ou aux États-Unis, ils ont emporté avec eux tout leur mystère. Aussi Julien Volper s’est-il employé à interroger ces objets muets, dont l’histoire n’a pas retenu le nom de leurs créateurs, pour saisir leur esthétique, mais aussi leur finalité propre. Au-delà, il interroge également les influences

exercées ou subies par les Songyes au contact des différents peuples qui les entourent (Lubas, Tetelas, etc.). Replacé dans son contexte socioculturel, même si les anciens ne sont plus là pour apporter leur précieux éclairage, l’art du kifwebe (terme générique utilisé par les chercheurs, peut-être abusivement, pour désigner le masque chez les Songyes), tout en symboles, livre une part de cette magie qui enchante en même temps qu’elle effraie. Le mérite des concepteurs de ce travail est d’avoir réussi à interpréter des objets sur lesquelslesdonnéessontrares.Ils se sont essentiellement fondés sur un masque exposé au Seattle Art Museum, aux ÉtatsUnis. « Relancer l’étude de ces masques en gravitant autour

D.BEAULIEUX/ML FELIX/SEATTLE ART MUSEUM

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de l’exemplaire de Seattle est particulièrement important à plusieurs égards : […] il a conservé le plus d’éléments de son costume d’origine; […] il est particulièrement le plus remarquable, au point de vue

plastique, des masques ronds à stries connus. […] C’est le seul pourlequelnouspossédonsun documentdeterrainimportant: une photographie », indique l’auteur. ●

Autour des Songye, de Julien Volper, Fine Art Studio-Gourcuff Gradenigo, 256 pages, 35 euros

COMPILATION

Rythmes africains, musiques américaines Au commencement il y eut la traite des Noirs. Puis la perte de l’identité, le racisme. Mais la mémoire, elle, ne mourut pas. Elle permit de garder les bribes des origines, de les transmettre d’une génération à l’autre. Jusqu’à faire revivre l’Afrique. Une Afrique perçue, malgré tout, à travers le prisme déformant du maître. Entre détestation de soi et quête de l’identité originelle naquirent des expressions musicales inédites, empreintes d’Afrique, aux États-Unis et dans les îles des Caraïbes. Un aperçu nous est proposé ici en trois CD. Dynamique ! ● T.L.M.K.

Africa in America, Rock, Jazz & Calypso 1920-1962, Frémeaux et Associés ■■■ N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

TSHITENGE LUBABU M.K.

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CINÉMA

Bingo! ON APPREND DANS UNE BANLIEUE populaire de la région parisienne qu’un habitant a gagné au loto une somme extravagante : 124 millions d’euros. La chasse au gagnant, qui a requis l’anonymat, commence dans le quartier. Où l’on se persuade bientôt que l’heureux élu est le bien nommé Richard… qui vit d’une aide sociale de quelques centaines d’euros par mois. Et qui va subir un calvaire jusqu’à ce qu’on apprenne que le vrai nouveau richard est son meilleur ami. Adapté d’une bande dessinée, ce film sympathique ne se hisse certes pas au niveau des comédies italiennes sur des sujets semblables. Mais il est bien joué et on peut le regarder avec un sourire amusé. ● RENAUD DE ROCHEBRUNE Pauvre Richard, de Malik Chibane (sortie le 16 janvier) ■ ■ ■ JEUNE AFRIQUE


■ ■ ■ Décevant

■ ■ ■ Pourquoi pas

■ ■ ■ Réussi

Et il est comment le dernier…

BLOG

Traversées artistiques

… MALEK CHEBEL

Margaux Huille est une jeune femme de 25 ans, passionnée d’art contemporain et d’Afrique. Après un master en affaires internationales à Sciences-Po, elle a travaillé pendant deux ans pour le fonds de dotation African Artists for Development (AAD), financé par la société Tilder, à Paris. Aujourd’hui, elle arpente l’Afrique d’ouest en est, avec pour but ultime l’Afrique du Sud, en juillet 2013. Mais surtout, au-delà de l’aspect touristique du voyage, elle rend visite aux artistes contemporains, afin d’évoquer leur travail, leurs conditions de vie, leurs choix. Tout cela, elle le raconte en textes et photos sur son blog, lesbellespersonnes.com. Un lien à suivre ! ● NICOLAS MICHEL

lesbellespersonnes.com

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EXPOSITION

Magie du vaudou

PATRICE BOUVIER

CE QUI, PARDELÀ LES ÉPOQUES, relie entre elles les œuvres d’art ? Peut-être l’insondable mystère de leur alchimie et des effets qu’elle provoque ! Du 10 janvier au 23 février, la galerie parisienne Polad-Hardouin propose en la matière un dialogue intriguant intitulé « Primitive Cabaret, a Spiritual Voodoo Confrontation ». Des artistes contemporains de tous horizons – Omar Ba (Sénégal), Andrew Gilbert (Écosse), Helmut Rieger (Allemagne), Christine Sefolosha (Suisse) – ont en effet créé leurs propres œuvres en « réponse » à une collection de fétiches voduns, principalement fons du Bénin. Une manière de redonner vie à des objets cultuels trop souvent exposés en Occident comme des trophées coloniaux. Magique. ● N.M.

« Primitive Cabaret, a Spiritual Voodoo Confrontation », Galerie Polad-Hardouin, 86, rue Quincampoix, Paris JEUNE AFRIQUE

Culture médias

■ ■ ■ Excellent

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ui trop embrasse mal étreint. Voilà qui pourrait résumer en cinq mots l’impression que laisse la lecture du dernier ouvrage de l’islamologue Malek Chebel. L’anthropologue algérien déploie depuis près de trois décennies une œuvre prolifique autour du couple islam-modernité. Quelle est donc la place de ce Dictionnaire des réformateurs musulmans des origines à nos jours dans le projet « chebelien » ? S’agit-il de vulgariser un savoir sur l’islam et d’apporter la contradiction aux préjugés tenaces sur la deuxième religion de France ? L’introduction le laisse entendre. Mais en choisissant de rassembler pêle-mêle des trajectoires aussi diverses que celle du théologien de l’âge classique Al-Ash’ari, de l’idéologue des Frères musulmans égyptiens Sayyed Qotb, de la juriste iranienne Shirin Ebadi (en sept lignes) ou du poète libertin Abû Nuwâs (dont il dit pourtant qu’« il n’a cure de réformer l’islam »), Chebel tombe dans le piège du catalogue, d’un Who’s Who partiel et partial, sans problématique ni vulgarisation de l’apport intellectuel et doctrinal des personnages retenus. Le détail de ces notices biographiques n’est pas à la hauteur d’un sujet passionnant. L’œuvre de tel ou tel penseur est souvent évacuée sous les qualificatifs de « critique », « libérale », « réformiste ». Mais il y a pire, comme la légèreté qui autorise Malek

Chebel à écrire que « les idées de Mohammed Ibn Abdel-Wahhab [père du wahhabisme, NDLR] influencent l’action du sultan Mohammed Ben Abdallah (1757-1790) ». Auteur d’une étude fouillée de l’influence wahhabite dans l’action des sultans marocains et de son échec (publiée dans le numéro de novembre 2012 de la revue Zamane), le chercheur Abdellah Tourabi reste sceptique : « Rien ne permet de prouver, historiquement, cette supposée influence. Ce n’est qu’en 1803, treize ans

Changer l’islam. Dictionnaire des réformateurs musulmans des origines à nos jours, de Malek Chebel, Albin Michel, 288 pages, 20,90 euros (à paraître le 31 janvier) ■■■

après la mort de Sidi Mohammed Ben Abdallah, que le contact des Marocains avec le wahhabisme devient effectif. » Une somme, au final, qui tient plus du pensum que de l’ouvrage d’érudition et laissera certainement sur leur faim les lecteurs les plus curieux. ● YOUSSEF AÏT AKDIM N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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ANNONCES CLASSÉES

Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre -Tél. : 01 44 30 18 76 - Fax : 01 44 30 18 77 - Email. : f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique - 57 bis, rue d’Auteuil 75016 Paris - France

République du Sénégal

Un Peuple – Un But – Une Foi

Ministère des Infrastructures et des Transports

Avis de pré-qualification - Passation des marchés

PROJET DE CONSTRUCTION DE LA VOIE DE DÉGAGEMENT NORD (CICES – GOLF CLUB DE GUEDIAWAYE – 9 KM) FINANCEMENT : BANQUE ISLAMIQUE DE DÉVELOPPEMENT (BID) AVIS GÉNÉRAL DE PASSATION DES MARCHÉS 1. La République du Sénégal a obtenu un financement de la Banque Islamique de Développement (BID) d’un montant équivalant à US$ 61 millions soit environ 30 milliards de FCFA pour financer les Travaux de construction de la Voie de Dégagement Nord (VDN) entre le CICES et le Golf Club de Guédiawaye et se propose d’utiliser les fonds pour régler des fournitures, travaux et services devant être acquis dans le cadre de ce projet. 2. Le projet comprendra les composantes suivantes : • Composante A : Construction de la VDN (CICES – GOLF CLUB GUEDIAWAYE) ; • Composante B : Contrôle et Surveillance des travaux ; • Composante C : Mesures d’accompagnement qui comprennent l’indemnisation des riverains du projet et les coûts liés à l’expropriation ; • Composante D : Appui à l’Unité de Gestion du Projet (UGP) ; • Composante E : Audit du projet. 3. Les marchés financés par la Banque Islamique de Développement seront passés conformément aux procédures spécifiées dans les Directives de Passation pour l’acquisition des fournitures et des travaux de la BID, éditions de Novembre 2006 (version française) et Mai 2009 (version anglaise), et sont ouvert à tous les candidats qui remplissent les conditions stipulées dans les directives. Les consultants seront choisis conformément aux Directives pour la Sélection de Consultants de la BID, éditions de Novembre 2006 (version française) et Mai 2009 (version anglaise). 4. Les avis relatifs aux différents marchés qui doivent être passés conformément aux procédures d’appel à la concurrence internationale de la Banque Islamique de Développement seront publiés, dès leur communication, sur le site de la Banque (www.isdb.org), dans au moins un journal commercial ayant une grande diffusion internationale et dans les journaux à large diffusion de la République du Sénégal. 5. Les soumissionnaires potentiels satisfaisant aux critères de provenance et souhaitant figurer sur la liste des destinataires d’avis de présélection/d’appel d’offres dans le cadre des procédures d’appel à la concurrence internationale, ainsi que les consultants souhaitant recevoir une copie de l’avis d’appel à manifestation d’intérêt, ou ceux ayant besoin de renseignements complémentaires, devront s’adresser à : AGENCE DES TRAVAUX ET DE GESTION DES ROUTES (AGEROUTE) SÉNÉGAL Rue F angle Rue David Diop Fann Résidence BP 25 242 Dakar Fann Tel : (221) 33 869 07 51 – Fax : (221)33 864 63 50 – Email : mcfaye@ageroute.sn, isall@ageroute.sn et ageroute@ageroute.sn

AVIS DE PRÉ-QUALIFICATION POUR LA CONCEPTION FOURNITURE ET INSTALLATION DE MOBILIER ET DE PRESTATIONS DE DÉCORATION POUR LES LOCAUX DE LA BANQUE AFRICAINE DE DÉVELOPPEMENT Date: 10 Janvier 2013 - IAS N°: ADB/PQI/CGSP/PRISA/2013/0001

1. La Banque Africaine de Développement sollicite par le présent appel à pré-qualification les fabricants éligibles à déposer une candidature pour la conception, la fourniture et l’installation de mobilier et de prestation de décoration pour ses locaux. 2. Les soumissionnaires éligibles intéressés pourront télécharger le dossier de pré-qualification sur le site web de la Banque (http://www.afdb.org/en/about-us/corporate-procurement/business-opportunities/current-solicitations) ou bien l’obtenir sur simple demande adressée à tender@afdb.org 3. Le processus de passation des marchés se déroulera suivant les règles et procédures de la Banque Africaine de développement régissant les acquisitions de biens, travaux et services pour l’usage interne de la Banque. 4. Les candidatures devront être soumises en Français ou en Anglais, sous pli scellé et doivent être déposées à l’adresse indiquée ci-dessous au plus tard le 21 Février 2013 à 15 h 00, heures locales d’Abidjan. La référence de la pré-qualification devra être indiquée en caractère gras, de façon bien lisible et bien en vue. Banque Africaine de Développement (BAD) Division des Achats Institutionnels, CGSP.2 Bureaux du Projet de Rénovation de l’Immeuble Siège à Abidjan (PRISA) Immeuble Atlantique 6ème étage – Bureau 607. Pré-qualification : N° ADB/PQI/CGSP/PRISA/2013/0001 5. Les candidatures devront être valables pour un délai de quatre-vingt-dix (90) jours à compter de la date limite de leur remise. N° 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

JEUNE AFRIQUE


RÉPUBLIQUE GABONAISE MINISTÈRE DE LA PROMOTION DES INVESTISSEMENTS, DES TRAVAUX PUBLICS, DES TRANSPORTS, DE L’HABITAT, ET DU TOURISME, CHARGÉ DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

AGENCE NATIONALE DES GRANDS TRAVAUX

AVIS D’APPEL À MANIFESTATION D’INTÉRÊT

Date de lancement : 14 janvier 2013 - Appel à manifestation d’intérêt : N° 12TCT03-001 Nom du projet : Rénovation et optimisation du Transgabonais - Source de financement : Budget de l’Etat gabonais 1. OBJET Le Ministère de la Promotion des Investissements, des Travaux Publics, des Transports, de l’Habitat et du Tourisme, chargé de l’Aménagement du Territoire en tant que Maître d’Ouvrage et l’Agence Nationale des Grands Travaux (ANGT) en tant que Maître d’Ouvrage Délégué se proposent de lancer un Appel à Manifestation d’Intérêt dans le cadre de la réalisation des études pour la rénovation et l’optimisation du Transgabonais. Ces prestations consistent, entre autres, en : - Etudes de trafic ; - Etudes des infrastructures ; - Etudes et spécifications d’un système d’exploitation, de signalisation automatisée.

3. COMPOSITION DU DOSSIER DE CANDIDATURE Les dossiers de manifestation d’intérêt doivent comprendre les éléments suivants : - une déclaration de manifestation d’intérêt signée du représentant du bureau d’études faisant apparaître son nom, sa qualité, son adresse, sa nationalité et les pouvoirs qui lui sont délégués ; - les documents arrêtant la constitution ou le statut, le lieu d’enregistrement et le domicile légal de la société. Ces documents comprennent l’agrément de commerce ou la fiche circuit (conforme à l’objet du marché) ; Le Secrétaire Général Adjoint 2, du Ministère de la Promotion des Investissements, des Travaux Publics, des Transports, de l’Habitat et du tourisme, chargé de l’Aménagement du Territoire Jonas LOLA MVOU

JEUNE AFRIQUE

4. CRITÈRES DE PRÉ QUALIFICATION - le Bureau d’études doit justifier d’une expérience de plus de dix (10) ans dans les prestations similaires ; - le Candidat doit justifier des moyens matériels, techniques adéquats et d’un personnel clé en adéquation avec la mission ; - le Candidat doit justifier d’une capacité financière lui permettant de démarrer l’exécution des prestations dès la notification du marché (joindre les documents attestant l’accès à des financements tels que des avoirs liquides, lignes de crédits, etc.) ; - le Candidat ne doit pas avoir d’antécédent de non exécution de marché. Il doit établir qu’il a exécuté et achevé tous les marchés obtenus pendant les cinq (5) dernières années, et qu’il n’a pas de litige qui lui soit imputable en cours avec l’Administration. 5. DATES LIMITES DE DÉPÔT, D’OUVERTURE ET DE CLÔTURE DE DOSSIERS ET LIEU DE DÉPÔT DES CANDIDATURES Les dossiers de manifestation d’intérêt doivent être adressés à l’adresse ci-dessous, au plus tard le 28 février 2013 à 10 heures (heure locale). Agence Nationale des Grands Travaux (ANGT) B.P. : 23765 Libreville, Gabon 1er étage de l’Immeuble du bord de mer (À côté de l’ancien Gouvernorat) Département des Contrats et Approvisionnements A l’attention du Superviseur – ripandy@bechtel.com Les enveloppes extérieures devront obligatoirement porter la mention suivante : « Appel à manifestation d’intérêt N° 12TCT03-001 Rénovation et optimisation du Transgabonais A n’ouvrir qu’en séance publique » Les plis seront ouverts en présence des représentants des candidats qui le souhaitent à la même date à 11 heures (heure locale). Le Directeur Général de l’Agence Nationale des Grands Travaux J.B. DUTTON

Le Directeur Général des Marchés Publics Commissaire Général, Jean-Félix SOCKAT

N° 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

Manifestation d’intérêt

2. PARTICIPATION Le présent Appel à manifestation d’intérêt s’adresse aux Bureaux d’études nationaux ou internationaux qui ne sont pas concernés par les mesures d’exclusion de l’article 74 du décret n° 254/PR/MEEDD du 19 juin 2012 portant Code des Marchés Publics, à savoir : • qui n'ont pas souscrit les déclarations prévues par les lois et règlements en vigueur ou ne se sont pas acquittées des droits, taxes, impôts, cotisations sociales, contributions, redevances ou prélèvements de quelque nature que ce soit, à l'exception des entreprises nouvellement créées. Lorsque les entreprises se prévalent d'une dérogation en matière douanière et/ou fiscale, elles sont tenues d'en apporter la preuve ; • qui sont en état de liquidation judiciaire ou de faillite ; • qui sont frappées de l'une des interdictions ou déchéances prévues par les textes en vigueur ;· • qui sont affiliées aux consultants ayant contribue à préparer tout ou partie des dossiers d'appel d'offres ou de consultation ; • dans lesquelles la Personne Responsable du Marché ou l'un des membres de la cellule de passation et de suivi des marchés, de la Commission d'Evaluation des Offres, de la Direction Générale des Marchés Publics ou de l'autorité chargée d'approuver le marché possède des intérêts financiers ou personnels de quelque nature que ce soit ; • qui auront été reconnues coupables d'infraction à la réglementation des marchés publics ou qui auront été exclues des procédures de passation des marchés par décision administrative ou juridictionnelle devenue définitive. Les incapacités et exclusions frappent également les membres des groupements et les sous-traitants.

- un dossier juridique à jour, comprenant : l’attestation de non faillite délivrée par le tribunal compétent du lieu du siège social du Bureau d’études et datant de moins de trois (3) mois, l’attestation d’imposition (uniquement pour les candidats nationaux), l’attestation CNSS (uniquement pour les candidats nationaux) ; - un Relevé d’Identité Bancaire ; - la liste du matériel nécessaire à la réalisation des prestations ; - la liste du personnel clé que le candidat se propose de désigner pour la mission, avec leurs fonctions respectives et leurs Curriculum Vitae signés ; - les références générales et spécifiques du Bureau d’études dans le domaine concerné par le présent appel à manifestation d’intérêt (joindre les fiches projets précisant la valeur en FCFA des prestations réalisées) ; - la liste des sous-traitants, le cas échéant. - L’accord de groupement d’entreprises, le cas échéant. NB : Les dossiers ne doivent comporter aucune proposition financière.


Manifestation d’intérêt - Appel d’offres

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Annonces classées RÉPUBLIQUE TUNISIENNE

RÉPUBLIQUE TUNISIENNE

MINISTÈRE DE LA DÉFENSE NATIONALE

MINISTÈRE DE LA DÉFENSE NATIONALE

AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL N° 16/DAT/2012

AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL N° 17/DAT/2012

La Division Achat et Transit de l’Armée de Mer se propose de lancer un appel d’offres international pour l’acquisition d’équipements de pont (Défenses, cordage, câblage, élingues…).

La Division Achat et Transit de l’Armée de Mer se propose de lancer un appel d’offres international pour l’acquisition des tôles et profilés.

Les soumissionnaires intéressés peuvent retirer les dossiers de l’appel d’offres pendant les jours ouvrables (horaire administratif) à l’adresse suivante :

Les soumissionnaires intéressés peuvent retirer les dossiers de l’appel d’offres pendant les jours ouvrables (horaire administratif) à l’adresse suivante :

Division Achat et Transit de l’Armée de Mer Base Navale de la Goulette – 2060 – LA GOULETTE

Division Achat et Transit de l’Armée de Mer Base Navale de la Goulette – 2060 – LA GOULETTE

Le coût du dossier est fixé à la somme de 25,000 Dinars payable par mandat postal adressé au nom du Régisseur des Recettes du Ministère de la Défense Nationale CCP n° 616-82.

Le coût du dossier est fixé à la somme de 25,000 Dinars payable par mandat postal adressé au nom du Régisseur des Recettes du Ministère de la Défense Nationale CCP n° 616-82.

Les offres doivent être adressées à l’adresse ci-dessus indiquée dans une enveloppe cachetée, recommandée ou remis directement au bureau d’ordre de la DAT et portant lisiblement en haut et à gauche « Ne pas ouvrir Appel d’Offres N° 16/DAT/2012 pour l’acquisition d’équipements de pont » au plus tard le 22 Févier 2013, le cachet du bureau d’ordre de la DAT faisant foi.

Les offres doivent être adressées à l’adresse ci-dessus indiquée dans une enveloppe cachetée, recommandée ou remis directement au bureau d’ordre de la DAT et portant lisiblement en haut et à gauche « Ne pas ouvrir Appel d’Offres N° 17/DAT/2012 pour l’acquisition de tôles et profilés » au plus tard le 22 Févier 2013, le cachet du bureau d’ordre de la DAT faisant foi.

RÉPUBLIQUE TUNISIENNE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE NATIONALE

AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL N° 01/DAT2013 La Division Achat et Transit de l’Armée de Mer se propose de lancer un appel d’offres international pour l’acquisition et installation de Six (06) Tours parallèles conventionnels. Les soumissionnaires intéressés peuvent retirer les dossiers de l’appel d’offres pendant les jours ouvrables (horaire administratif) à l’adresse suivante : Division Achat et transit de l’Armée de Mer Base Navale de la Goulette – 2060 – LA GOULETTE Le coût du dossier ext fixé à la somme de 25,000 Dinars payable par mandat postal adressé au nom du Régisseur des Recettes du Ministère de la défense Nationale CCP n° 616-82. Les offres doivent être adressées à l’adresse ci-dessus indiquée dans une enveloppe cachetée, recommandée ou remis directement au bureau d’ordre de la DAT et portant lisiblement en haut et à gauche « Ne pas ouvrir Appel d’Offres N° 01/DAT/2013 pour l’acquisition et installation de six (06) Tours parallèles conventionnels » au plus tard le 19 Février 2013, le cachet du bureau d’ordre de la DAT faisant foi. N° 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

AVIS À MANIFESTATION D’INTÉRÊT Dans le cadre du Projet AFROMAISON, l’Observatoire du Saha et du Sahel (OSS) compte recruter un(e) Expert(e) environnementaliste pour une durée de 12 mois. Les TdR, les conditions de recrutement et la procédure de soumission de candidatures sont disponibles sur le site de l’OSS : (www.oss-online.org). Les candidatures doivent parvenir à l’OSS à Tunis avant le 3 février 2013 à minuit heure de Tunis JEUNE AFRIQUE


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RÉPUBLIQUE DU BURUNDI

MINISTÈRE DES TRANSPORTS, DES TRAVAUX PUBLICS ET DE L’ÉQUIPEMENT Date : 11/01/2013 - Appel d’Offres : N° ODR/PSDR/AOIO/1/2013 - N° du Don : H6840-BI AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL OUVERT N° ODR/PSDR/AOIO/1/2013 TRAVAUX DE RÉHABILITATION, D’ASSAINISSEMENT ET DE STABILISATION DE CERTAINES SECTIONS SUR LES ROUTES NATIONALES N° 1, 3, 7 ET 10

JEUNE AFRIQUE

2), Centrale de concassage (Nombre requis 1), Centrale à béton (Nombre requis 2), Centrale d’enrobé (Nombre requis 1), Grues mobiles 50 Tonnes (Nombre requis 2), Matériel Topographique ensemble (Nombre requis 4), Matériel du laboratoire géotechnique ensemble (Nombre requis 1), Motopompes (Nombre requis 4), Plaques vibrantes (Nombre requis 4), Compresseurs (Nombre requis 4), Brise roche (Nombre requis 2), Scie circulaire (Nombre requis 4), Compacteur à main (Nombre requis 4), Machine à peinture avec accessoire (Nombre requis 1), Autre matériel (Nombre requis 1) (v) proposer un personnel d’encadrement ayant au moins les qualifications précisées dans la Section III. Critères d’Évaluation et de Qualification : a. Directeur de travaux : Ingénieur Génie Civil avec 15 ans d’expérience, b. Conducteurs de travaux terrassement : Ingénieur Génie Civil avec 10 ans d’expérience ou technicien supérieur avec 15 ans d’expérience c. Conducteurs de travaux Enrobés : Ingénieur Génie Civil avec 10 ans d’expérience ou technicien supérieur avec 15 ans d’expérience d. Conducteur de travaux béton : Ingénieur Génie Civil avec 10 ans d’expérience ou technicien supérieur avec 15 ans d’expérience e. Topographe : technicien supérieur avec 10 ans d’expérience f. Géotechnicien : Ingénieur Génie Civil avec 10 ans ou technicien supérieur avec 15 ans d’expérience g. Ingénieur Assurance qualité : ingénieur Génie Civil avec 5 ans d’expérience (vi) disposer d’une facilité de crédit propre ou auprès d’un établissement financier de premier ordre d’un montant au moins équivalent à Quatre milliards cinq cent Millions Francs Burundais (4.500 000000 BIF) ou dans une monnaie librement convertible ; Une marge de préférence ne sera pas octroyée aux soumissionnaires éligibles. Voir le document d’Appel d’offres pour les informations détaillées. 7. L’offre comprendra une tranche ferme et une tranche optionnelle. L’évaluation des offres se fera sur la base des deux tranches, ferme et optionnelle. Toutefois et en cas de dépassement de l’enveloppe disponible, le Maître de l’Ouvrage se réserve le droit de n’attribuer que la tranche ferme ou la tranche ferme avec tout ou partie de la tranche optionnelle sans pour autant que le délai d’exécution des travaux ne soit prorogé. 8. Les soumissionnaires intéressés peuvent obtenir le Dossier d’Appel d’Offres complet à l’adresse mentionnée ci-dessus moyennant un paiement non remboursable de deux cent mille franc burundais (200 000 BIF) ou de sa contre valeur dans une monnaie convertible. La méthode de paiement sera un versement/virement bancaire au n° 1101/001ouvert à la Banque de la République du Burundi. 9. Les offres devront être soumises à l’adresse ci-dessus au plus tard le 28 Février 2013 à 14H30 (Heure locale). Les offres remises en retard ne seront pas acceptées. Les offres seront ouvertes en présence des représentants des soumissionnaires présents en personne à l’adresse mentionnée cidessus le 28 février 2013 à 14 h 45 (Heure locale). Les offres doivent comprendre une garantie de soumission d’un montant au moins égal à cent milles dollars (100 000 US$) ou son équivalent en monnaie librement convertible. 10. la visite groupée du site sera organisée, et la réunion préparatoire à l’établissement des Offres auront lieu le 23 Janvier 2013 à partir de 9H00 (heure locale). Le lieu de rencontre pour se rendre sur le site est l’Office des Routes. N° 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

Appel d’offres

1. Cet avis d’appel d’offres fait suite à l’Avis général de Passation des marchés paru dans le numéro WB4677-11/12 du 15 novembre 2012 « Development Business » 2. Le Gouvernement du Burundi a obtenu un Don de l’Association Internationale de Développement (IDA) pour financer les activités du Projet de Développement du Secteur Routier et a l’intention d’utiliser une partie de ce Don pour effectuer des paiements au titre du marché des travaux de réhabilitation, d’assainissement et de stabilisation de certaines sections sur les routes nationales N° 1, 3, 7 et 10. 3. La Direction Générale de l’Office des Routes sollicite des offres sous pli fermé de la part de soumissionnaires éligibles et répondant aux qualifications requises pour exécuter les travaux qui concernent quatre catégories de points critiques situés sur les routes nationales revêtues n° 1, 3, 7 et 10. • Points critiques type 1 portant sur les interventions au niveau de la plateforme routière. • Points critiques type 2 portant sur les interventions de protection des ouvrages d’art. • Points critiques type 3 portant sur les interventions au niveau des ouvrages hydrauliques. • Points critiques type 4 portant sur les interventions pour le traitement des instabilités au niveau des talus. 4. La passation du Marché sera conduite par Appel d’offres international (AOI) tel que définie dans les « directives : passation des marchés financés par les Prêts de la BIRD et les crédits de l’IDA, édition de 2004, révisé en 2006 et en Mai 2010 » et ouvert à tous les soumissionnaires de pays éligibles tels que définis dans les Directives. 5. Les Soumissionnaires éligibles et intéressés à concourir peuvent obtenir des informations auprès de la Direction Générale de l’Office des Routes et prendre connaissance des documents d’Appel d’offres à l’adresse mentionné ci-dessous : Direction Générale de l’Office des Routes Quartier Kabondo, Avenue Heha, B.P. 6675, Bureau N° AA13 (Secrétariat de la Direction Générale de l’Office des Routes) Bujumbura - Burundi Tél : (+257) 22 22 29 40 ; Télécopie : (+257) 22 22 09 59 E-mail : odr@iwayafrica.com 6. Les exigences en matière de qualification sont les suivantes : (i) avoir réalisé au cours des 5 dernières années un chiffre d’affaires moyen annuel, pour les travaux de construction de routes, d’un montant au moins équivalent à VINGT MILLIONS de Dollars US (20 000 000 US$) ; (ii) avoir réalisé avec succès en tant qu’entrepreneur principal au moins deux projets similaires au cours des cinq (05) dernières années ; (iii) disposer du matériel nécessaire pour l’exécution des travaux demandés conformément à la section III. Critères d’Évaluation et de Qualification dont la liste ci-dessous (liste non-exhaustive) : (iv) Bulldozers (Nombre requis 8), Niveleuses (Nombre requis 4), Camions bennes de 10 m3 (nombre requis 30), chargeurs (Nombre requis 8), Pelles mécaniques sur roues (Nombre requis 2), Pelles mécaniques sur chenilles (Nombre requis 4), Finisher (Nombre requis 1), Balayeuse (Nombre requis 2), Épandeuse (Nombre requis 2), Autogravillonneur (Nombre requis 2), Compacteurs à Pneumatiques (Nombre requis 4), Compacteurs à cylindre (Nombre requis 4), Porte chars (Nombre requis


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Le Cabinet RESHUFORM recherche pour une société agro-industrielle basée au Bénin, UN(E) DIRECTEUR(TRICE) GÉNÉRAL(E) Vos principales missions : Rattaché(e) au Président du Conseil d’Administration, vous assurez la coordination de l’ensemble des activités, afin de conduire la société vers plus de performance et de rentabilité, nécessaires à la réalisation des objectifs déterminés. Vous devrez dans ce cadre notamment : - Mettre en œuvre les décisions du Conseil d’Administration. - Coordonner les activités de toutes les Directions de l’entreprise de manière à atteindre les objectifs fixés par le Conseil d’Administration - Améliorer le niveau de profitabilité de l’entreprise - Mettre en place la politique de gestion des ressources humaines - Assurer le reporting régulier des activités. Votre profil : Formation supérieure/ Ingénieur Electromécanicien, Ingénieur Industriel ou Ingénieur Généraliste ; avec d’excellentes connaissances en matière de techniques industrielles dans le domaine agro alimentaire, gestion administrative, gestion des ressources humaines, financière et trésorerie. Bonne maîtrise de l’outil informatique. 10 ans d’expérience professionnelle dont 05 ans au moins à un poste de Direction (Directeur Général, Directeur Technique / Industriel, Directeur de Production ou Ingénieur en Chef, Directeur Commercial) dans une entreprise agro industrielle, de préférence une entreprise de trituration de graines oléagineuses (graines de coton, soja, tournesol...) Qualités requises : Charisme ; Autonomie et ouverture d’esprit ; excellentes compétences managériales ; sens élevé des responsabilités ; honnêteté ; loyauté ; rigueur et esprit d’entrepreneur ; forte capacité de négociation; bon relationnel. Vos atouts : Bonne connaissance de l’anglais (écrit et oral). Expérience réussie dans la gestion d’équipes multiculturelles. Expérience en matière de suivi d’implémentation de stratégies. Expérience professionnelle en Afrique sub-saharienne. Veuillez adresser votre dossier de candidature : lettre de motivation, curriculum vitae détaillé, photo d’identité, extrait du casier judiciaire, copie du diplôme, copie des attestations et ou certificats de travail, au Cabinet RESHUFORM Immeuble FIDAF (face restaurant Le Berlin), 01 BP 3802 Cotonou. Tél. 21 31 77 56 / 21 31 82 30 – reshuform@intnet.bj Date limite de dépôt des dossiers : jeudi 24 janvier 2013 à 17 heures.

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N° 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

Recrutement

Les offres de la semaine de Michael Page Africa


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Vous & nous

Le courrier des lecteurs Envoyez-nous vos réactions, vos réflexions, vos coups de gueule ou de cœur à redaction@jeuneafrique.com ou au 57 bis, rue d’Auteuil, 75016 Paris.

J.A. NO 2662, du 15 au 21 janvier 2012, pages 40 et 41.

Révolution Surfer sur la vague NOTRE DEVOIR à tous, Tunisiens, est de lutter pour un pays où l’ignorance et la violence seraient à jamais bannies. Une Tunisie réconciliée, généreuse et tolérante, qui fera notre fierté à tous. Notre révolution, prise pour modèle par bien des États,

nous autorise à attendre davantage de la coopération avec nos pairs, dans un vrai partenariat gagnant-gagnant. Mais que faisons-nous pour rassurer nos voisins, nos partenaires économiques et même nos compatriotes ? Rien, pour l’instant. ● MONDHER KALLALA, Monastir, Tunisie

Visite Les invités de J.A. JE NE TERMINE JAMAIS la lecture de votre hebdomadaire sans m’arrêter, quand elle y figure, à la rubrique « Il nous a rendu visite ». Dans ces colonnes, le curriculum vitæ ainsi que la pensée du visiteur sont succinctement exposés. D’une manière générale, vos invités sont des gens normaux, aux parcoursincomparablesàceux de personnes exceptionnelles comme Nelson Mandela, le dalaï-lama, Barak Obama, Béchir Ben Yahmed… D’où mon interrogation: quels sont les critères retenus par Jeune Afrique pour octroyer le « visa » d’entrée et de visite du 57 bis, rue d’Auteuil ? Est-ce la forte contribution, visible et reconnue, de l’invité à la démocratie et au progrès social ? Moi, « compagnon de votre hebdomadaire » depuis plus de vingt ans, pourrais-je aussi

Éclairage Régime contre gouvernement JE SUIS UN FIDÈLE LECTEUR DE VOTRE MAGAZINE, que je trouve très instructif. Mais une question m’obsède depuis que je vous lis. Je voudrais savoir quelle différence vous faites entre un « régime » et un « gouvernement ». Plus clairement, pourquoi le terme « régime » ne s’applique qu’à certains pays, souvent africains, et celui de « gouvernement » à d’autres, généralement occidentaux ? ● YANNICK MAC NGOUAN EYALOU, étudiant en histoire, Libreville, Gabon

Réponse

Voilà une question pertinente, qui aborde finalement le jugement que l’on peut avoir sur tel ou tel système politique. Parler de « régime » au lieu de « gouvernement » ou de « pouvoir » est tout sauf anodin. Un « régime » est fort, autoritaire, hégémonique, clanique, oligarchique… Un « gouvernement » est le plus souvent issu d’élections libres et transparentes ; il laisse un espace à l’opposition, et son chef est censé accepter les règles de l’alternance. De fait, il y a plus de « régimes » sur le continent africain que dans les pays occidentaux. C’est tout simplement une question de maturité démocratique. Et puis, avouons-le, en Afrique, il y a aussi une prime aux nouveaux venus, qui laisse une part à la subjectivité. Un chef d’État récemment élu est rarement à la tête d’un régime, un potentat au pouvoir depuis plusieurs décennies a toutes les chances de l’être. LA RÉDACTION N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

prétendre me rendre dans vos locaux ? Suffit-il de vous écrire (comme maintenant !) ou de vous téléphoner afin de convenir d’un rendez-vous ? Enfin, si les conditions d’obtention du « droit de visite » ne sont pas remplies par le juriste, président d’une association à but non lucratif et « amoureux » de l’Afrique que je suis, pourrais-je alors vous inviter à me rendre visite dans ma « case », à Sevran ? ● PATRICK TCHICAYAT, Sevran, France

Réponse

Pour figurer dans notre rubrique, il faut évidemment correspondre à certains critères, dont celui de la notoriété. Mais pour visiter J.A., il n’est nul besoin de visa. Il vous suffit de prendre rendez-vous. LA RÉDACTION

BMA Bruits de casseroles QUEL MALHEUR d’être ressortissant d’un pays dont le président est régulièrement cité dans les dossiers des « biens mal acquis » (BMA)! De tous les rêves caressés par les Africains, celui de mettre fin au scandale des BMA est largement à la portée des dirigeants d’Afrique centrale. Plutôt que de continuer à puiser dans nos caisses, déjà si durement éprouvées, pour d’hypothétiques frais d’avocats et comités de soutien, ils feraient mieux de combler notre désir de faire taire à jamais les bruits de casseroles qu’ils traînent. ● JEAN-MARIE AKPWABOT, Abidjan, Côte d’Ivoire

Conflits RDC, RCA, patries rebelles ! REGORGEANT d’importantes ressources minières (cobalt, diamant, JEUNE AFRIQUE


Vous nous

or, cuivre, zinc, manganèse, bois, pétrole, etc.), la RD Congo et la République centrafricaine sont deux pays potentiellement riches. Mais ils affichent des faiblesses qui hypothèquent leur développement : dictature, non-respect des accords signés avec leurs armées et politique de la main tendue en direction des pays occidentaux, euxmêmes en butte à de nombreux problèmes (crise financière, chômage, lutte contre le terrorisme, etc.). En RDC comme en RCA, à chaque avancée des rebelles les armées gouvernementales reculent et disparaissent dans la nature, se débarrassant de leurs uniformes pour ne pas être repérées, révélant ainsi la faillite des deux États. Alors,

pour éviter d’aller définitivement à la dérive, les autorités n’ont plus d’autres choix que de revoir leurs accords et, surtout, de les respecter. Bien sûr, elles peuvent toujours préférer être secourues par les armées des pays amis ou de la sous-région. Oui, mais pour combien de temps ? ●

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limogeant quelques cadres de l’armée qu’il fera face à une rébellion, lui qui en a fait l’expérience avant d’accéder au pouvoir. Le ménage dans son entourage n’est pas la solution. ● DESTIN GNIMADI, Bamako, Mali

JEANNOT GAKUBA SHYAKA,

J.A. N° 2713, du 6 au 12 janvier 2013.

Kinshasa, RD Congo

Bozizé Du piment dans les yeux L’EXREBELLE, devenu du jour au lendemain président de la République, est depuis quelques semaines face à l’Histoire. L’homme fort de Bangui, qui ne dort plus que d’un seul œil, a fait appel à la France et aux États-Unis

pour le tirer des griffes des rebelles, désormais aux portes de la capitale. Pour ces pays, pas question d’intervenir dans un État où la démocratie fait défaut. Le président, lui, ne semble pas réaliser que l’étau se resserre sur lui. Ce n’est pas en relevant son fils et en

Vœux Plus de dialogue ! LE FAIT MARQUANT en 2012 au Tchad aura été la grève générale des fonctionnaires exigeant l’application d’un accord signé avec le gouvernement. Que 2013 y voit le triomphe du dialogue social. Quant aux équipes de J.A., que la santé soit votre maladie quotidienne. ● ARCHÉDUC THÉO, N’Djamena, Tchad

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Post-scriptum Tshitenge Lubabu M.K.

« Cris de singe »

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NE RENCONTRE DE FOOTBALL EST, a priori, un moment de détente, de convivialité et de tolérance pour tous ceux qui aiment ce sport. Ceux qui se retrouvent dans un stade ont le droit de crier, de chanter, de chambrer l’adversaire… Rien à dire, c’est de bonne guerre. Mais peut-on, comme cela se produit de plus en plus souvent dans les stades européens, lancer ce qu’on appelle, je ne sais trop pourquoi, des « cris de singe » lorsque tout joueur qui n’est pas un visage pâle touche le ballon ? C’est ce qui est arrivé, le 3 janvier, au singe Kevin Prince Boateng, fils d’un singe ghanéen et d’une guenon germanique (permettez, madame !), milieu de terrain de l’AC Milan, en Italie, lors d’un match « amical » contre une équipe de quatrième division. Chaque fois que ce pauvre Boateng touchait le ballon, un groupe de supporteurs de l’équipe visitée poussait des « cris de singe ». Ses coéquipiers singes M’Baye Niang, Sulley Muntari et Urby Emanuelson ont subi le même traitement. Jusqu’à ce que, dépités, ils décident tous de quitter le terrain. Le 12 octobre 2012, un autre singe, Patrick Mtiliga, danois d’origine tanzanienne, était traité de la même manière lors du match opposant le Danemark à la Bulgarie, à Sofia. Les exemples sont légion, de la Grande-Bretagne à la Russie, de l’Ukraine à la Grèce. Pourtant, nous sommes en Europe et au XXIe siècle !

Les grands esprits vont me dire : « Ce n’est qu’une affaire d’étourdis. Il ne faut pas voir le racisme partout. » Évidemment, le racisme n’existe pas. Il n’existe que dans la tête de ceux qui se plaignent d’en être les victimes alors qu’ils pratiquent, en réalité, un « racisme antiblanc ». Soit. Mais comment qualifier le fait de s’en prendre à quelqu’un à cause, uniquement, de son aspect physique ? C’est, ni plus ni moins, du racisme, n’en déplaise à ceux qui peuvent s’imaginer que je recherche « le sanglot de l’homme blanc ». Et puis, quelle hypocrisie que l’expression « cris de singe » ! Qu’est-ce à dire ? De quel singe s’agit-il ? Du macaque, du gorille, du bonobo, de l’orang-outan, du capucin, du mandrill, du nasique, du lagotriche, du patas, du vervet, du babouin ou du chimpanzé ? Il faut savoir ! Les Italiens qui ont offensé Boateng et ses camarades savaient-ils ce que l’arrogance et le mépris des autres ont coûté à leurs ancêtres en Afrique ? Dans la seconde moitié du XIXe siècle, les Italiens, avides de conquêtes, jettent leur dévolu sur l’Éthiopie actuelle. Ils n’hésitent pas à grignoter le territoire du négus en occupant le port de Massawa. Une première bataille, que les Italiens perdent, a lieu en janvier 1887, à Dogali. En 1889, Ménélik II devient empereur. Il signe un traité avec Rome. Mais un des articles, selon qu’il est lu en amharique ou en italien, pose problème. Pour les Italiens, l’article stipule que l’Abyssinie est désormais leur protectorat. Pour Ménélik, c’est le contraire : son empire peut entrer en contact avec d’autres puissances par le biais de l’Italie. Le désaccord persistant, la guerre reste le dernier recours. Le 1er mars 1896, l’armée de Ménélik II, méprisée parce que constituée de sauvages, écrase celle, moderne, du général Oreste Baratieri, à Adoua. Que cette déculottée leur serve de leçon. ● N o 2714 • DU 13 AU 19 JANVIER 2013

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