Hissène HABRÉ UN PROCÈS POUR L’HISTOIRE
Hebdomadaire international indépendant • 55e année • n° 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
jeuneafrique.com
AlgÉRie TLemCen, L’aUTRE CaPITaLE
Spécial présidentielle Côte d’IvoIre
30 pages
Les coulisses du scrutin d’octobre n Ouattara a-t-il déjà gagné ? n 2011-2015 : le vrai bilan n Interviews : Hamed Bakayoko et Charles Konan Banny n Sur la route de l’émergence n Reportage à Bouaké n Abidjan, plaque diplomatique… n
édition INTERNATIONALE Et CÔTE D’IVOIRE France 3,80 € • Algérie 220 DA • Allemagne 4,80 € • Autriche 4,80 € • Belgique 3,80 € • Canada 6,50 $ CAN • Espagne 4,30 € • Éthiopie 67 birrs • Grèce 4,80 € Guadeloupe 4,60 € • Guyane 5,80 € • Italie 4,30 € • Maroc 25 DH • Martinique 4,60 € • Mauritanie 1100 MRO • Mayotte 4,30 € • Norvège 48 NK • Pays-Bas 4,80 € Portugal cont. 4,30 € • Réunion 4,60 € • RD Congo 6,10 $ US • Royaume-Uni 3,60 £ • Suisse 6,50 FS • Tunisie 3,50 DT • USA 6,90 $ US • Zone CFA 1900 F CFA • ISSN 1950-1285
Le pLus
de Jeune Afrique
politique La présidentielle en point de mire
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interview Hamed Bakayoko, ministre de l’Intérieur économie Le long chemin de l’émergence développement Quand Bouaké renaît de ses cendres
2011-2015 Le VRAI BILAN
Cinq ans après le scrutin de 2010, les Ivoiriens s’apprêtent à retourner aux urnes pour élire leur président. Le point sur les réalisations d’Alassane Ouattara, qui brigue un nouveau mandat… et sur les défis qui attendent un pays en voie d’apaisement.
jeune afrique
n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
©Franck castel/Wostok Press
côte d’IVoIRe
Le Plus de Jeune Afrique
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LE PLUS
de Jeune Afrique
Prélude
Marwane Ben Yahmed
2011-2015
LE VRAI BILAN
L’art du rebond
jeune afriQue
Q
u’ilsembleloinletempsoùAlassane évidemment pas là d’un aboutissement, mais d’une tendance, d’une dynamique Dramane Ouattara (ADO), à peine sur laquelle les électeurs auront à se proinstallé au Palais du Plateau, devait, avec moult précautions, mettre en noncer. En clair, la voie empruntée depuis place le socle de son pouvoir. Un président mai 2011 leur semble-t-elle être la bonne ? élu mais contesté par une partie du pays (les Et sinon, qui, parmi les autres candidats, pourrait mieux répondre à leurs aspirapro-Gbagbo), qui savait ce qu’il devait aux uns et aux autres, tous ceux qui l’ont aidé, tions ? Ensuite, parce que, sur l’actuel échiparfois les armes à la main, à prendre ce quier politique, on voit mal qui serait en qui lui revenait de droit mais que le chef mesure de contester le Rassemblement des de l’État sortant lui déniait, au prix de tant houphouétistes pour la démocratie et la paix de vies. La communauté internationale en (RHDP). Le soutien jusqu’ici indéfectible de général, et la France en particulier, Henri Konan Bédié Malgré les mécontents au sein du et Guillaume Soro, les chefs PDCI, le soutien de Bédié à ADO rebelles des ex-FRCI, Blaise sera décisif en octobre prochain. Compaoré… Autant de fils à la patte qui l’ont obligé à mettre en place son « système » progressiBédié, malgré les mécontents de sa propre vement, à renvoyer les ascenseurs et à faire, formation dont on a pu voir lors du dernier congrès qu’ils pesaient infiniment moins lui l’homme de convictions et d’action, plus de politique « politicienne » que de raison. que le « sphinx de Daoukro », sera décisif Les premiers pas d’ADO, tel l’équilibriste en octobre prochain. sur son fil, furent donc comptés. Dans un Ouattara réélu pour un dernier mandat, contexte, par ailleurs, des plus délicats : se posera inévitablement, comme souvent les plaies de la crise postélectorale étaient en Afrique, la question de l’après. Quid en encore béantes, le pays et son économie 2020 ? Une question, connaissant le perexsangues, l’État et son administration sacsonnage, sur laquelle il a forcément déjà cagés, le clan Gbagbo ayant pratiqué, avant un avis mais qu’il taira le plus longtemps possible. Dans son camp, au sein du RDR, sa défaite, la politique de la terre brûlée. Près de quatre ans plus tard, et à moins les ambitieux, Guillaume Soro, Hamed de quatre mois de la présidentielle, tout Bakayoko et quelques autres, fourbiront a changé. Pendant que ses opposants immédiatement leurs armes pour se prés’époumonent, essentiellement dans les parer à cette échéance. Parmi ses alliés également. Comment imaginer, en effet, médias, pour tenter d’exister, lui mène déjà campagne, remplit les stades et les que le PDCI passe une nouvelle fois la main ? Troisième force politique, le FPI, salles aux quatre coins du pays. Objectif : l’emporter dès le premier tour, avec un lui, aura enfin du temps pour s’organiser, taux de participation si possible élevé. En ce qui n’est pas rien pour une formation politique, rien n’est jamais sûr, mais on ne qui a passé l’essentiel du mandat d’ADO à prend pas de grands risques à parier qu’il se déchirer et à tenter de remonter la pente. devrait y parvenir. D’abord parce que, même Attention cependant à ce qui ressemble si on peut toujours discuter les détails et aujourd’hui à des évidences : cinq ans, penser qu’il était possible de faire plus, la c’est long, et il peut se passer beaucoup Côte d’Ivoire va indéniablement mieux. de choses d’ici là. Même pour un pays qui, Sur tous les plans : économique, politique jusqu’à présent, n’a jamais été réputé pour (dialogue renoué avec l’opposition), sécufaire émerger rapidement de nouvelles ritaire, social, diplomatique, etc. Il ne s’agit stars politiques… ● jeune afriQue
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CÔTE D’IVOIRE
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politique la présidentielle en point de mire
p. 64
partis rien ne sera plus comme avant
p. 70
affaires étrangères abidjan, plaque diplomatique p. 76 interview Hamed Bakayoko, ministre de l’Intérieur
p. 78
économie le long chemin de l’émergence
p. 82
HaBitat programme de construction massive
p. 92
développement quand Bouaké la rebelle renaît de ses cendres p. 96
amBiance la Zone 4, désormais à deux pas… de danse p. 102 musique espoir 2000 aussi fait bouger-bouger
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Le Plus de Jeune Afrique
POLitique
La présidentielle Le président sortant, Alassane Ouattara, espère l’emporter au premier tour le 25 octobre. Mais c’est compter sans les ambitions de Charles Konan Banny (PDCI) et de Pascal Affi N’Guessan (FPI), qui fourbissent leurs armes malgré les divisions de leurs partis respectifs.
A
moins de quatre mois d’une élection présidentielle censée tourner définitivement la page de la crise de 2010-2011, une étrange atmosphère règne à Abidjan. Alors que la date du scrutin, prévu le 25 octobre, approche à grands pas, la ferveur est loin de celle qu’a pu connaître la Côte d’Ivoire en d’autres périodes préélectorales. Les Ivoiriens considèrent-ils que les jeux sont déjà faits? Qu’avec le soutien d’Henri Konan Bédié et de n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
ViNCeNt Duhem, envoyé spécial
la machine du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) le président Alassane Dramane Ouattara sera réélu sans difficulté, et même dès le premier tour ? Que ses opposants ne font pas le poids, qu’ils sont trop divisés et faibles pour constituer une menace réelle ? Si la majorité présidentielle se laisse déjà enivrer par le parfum de la victoire, le chef de l’État reste prudent. Il a remis le bleu de chauffe du candidat, et cela se voit. Nous sommes au mois de mai, à Abidjan. Malgré les grosses chaleurs, le gouvernement, au grand jeune afrique
© SIA KAMBOU/Afp
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en point de mire complet sur le tapis rouge du palais présidentiel, presse le pas. Après le sommet de la Cedeao du 19 mai, le patron s’apprête à prendre la direction du Nord, vers ses fiefs du Kabadougou et du Folon, pour une tournée de plusieurs jours. L’événement est assez important pour que l’ensemble de l’exécutif soit mobilisé et le Conseil des ministres délocalisé à Odienné, la préfecture du Kabadougou, première étape d’une visite d’État qui mènera Ouattara à Gbéléban, à la frontière avec la Guinée, pour inaugurer le 23 mai avec le président Alpha Condé le pont de la Fraternité Famoussa-Mory Woulé. Il y a trois ans, Ouattara avait promis de se rendre dans toutes les régions du pays avant la fin de son mandat. Et il le fait. « Le calendrier était un peu jeune afrique
serré, alors nous avions pensé reporter des visites au second mandat, mais il a refusé », confie l’un de ses proches. À chaque fois, la stratégie est la même. Avant l’arrivée du président, des édifices publics sont rénovés, réhabilités. Dans le même temps, ses équipes sont envoyées pour mobiliser et sensibiliser la population. SANS RELÂCHE. Le 25 avril, l’investiture en
p Le chef de l’État sortant au stade Félix-HouphouëtBoigny, à Abidjan, le 25 avril, lors de son investiture comme candidat du RHDP.
grande pompe au stade d’Abidjan, devant plusieurs dizaines de milliers de sympathisants du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP, la coalition présidentielle), a donné le ton. L’objectif est simple : gagner au premier tour avec un fort taux de participation. C’est pour cela que le président fait campagne n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
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le Plus de J.A. côte d’ivoire sans relâche dans les zones qui lui sont le moins favorables: la région de la Mé, à l’ouest, et Abidjan. Le 18 mai, il a ainsi reçu le soutien des Atchans (le peuple autochtone de la métropole ivoirienne, sous-groupe des Akans), traditionnellement acquis à Laurent Gbagbo. « Nous n’allons pas à l’élection contre un adversaire mais pour faire le bilan du premier mandat avec les Ivoiriens et préparer les cinq années à venir, assure-t-on dans l’entourage du chef de l’État. Ce scrutin doit être une rencontre entre le président et le peuple. » PAncArtes. Pendant des mois, l’identité de
ses adversaires d’octobre est restée un mystère. On a même craint à un moment que Ouattara se présente seul devant les électeurs. Mais les crises qui ont frappé le Front populaire ivoirien (FPI, opposition) et le PDCI ont décanté la situation (lire pp. 70-71), même si rien n’est encore figé. Reconnu président légitime du FPI par la justice ivoirienne, Pascal Affi N’Guessan sera le candidat de ce parti malgré l’opposition de toute une fraction fidèle à l’ancien président Laurent Gbagbo. Au sein du PDCI, l’appel de Daoukro de septembre 2014, par lequel son président, Henri Konan Bédié, a demandé au parti de soutenir Ouattara, n’a pas toujours été bien reçu. Et ceux qui rêvaient d’en porter les couleurs se sont finalement émancipés : Jérôme Kablan Brou, Kouadio Konan Bertin et Charles Konan Banny ont rejoint Mamadou Koulibaly, l’ancien président de l’Assemblée nationale, et les frondeurs du FPI au sein de la Coalition nationale pour le changement (CNC). Cette coalition de treize partis compte plusieurs présidentiables. Se rassembleront-ils le moment venu derrière un seul homme ? Charles Konan Banny estime que ce rôle ne peut pas lui échapper (lire interview p. 74). L’ambitieux, doté d’un impressionnant réseau constitué tout au long de sa carrière, est sans doute le seul à véritablement pouvoir prétendre à la magistrature suprême. Le 15 mai, lors de la signature officielle de la charte du CNC, l’organisation lui avait réservé un traitement de faveur. L’ancien gouverneur de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) est entré dans la salle de l’hôtel Belle Côte d’Abidjan une dizaine de secondes après
le reste des troupes. Dans la salle, des pancartes « Banny président » avaient été préparées. Mais au moment où se présentent les personnalités, c’est Abou Drahamane Sangaré, le chef de file des frondeurs du FPI, qui est le plus longuement acclamé ; puis le nom de Laurent Gbagbo, dont Banny a été Premier ministre entre 2005 et 2007, est scandé pendant plusieurs secondes. Mais que pèse vraiment Konan Banny sur l’échiquier politique ivoirien ? Ses partisans rappellent que, en tant que directeur de campagne de Ouattara dans le centre du pays lors du second tour en 2010, c’est lui qui a fait obtenir au président un très bon la cnc, coalition de score. Ils sont persuadés que la treize partis, compte grande majorité des électeurs plusieurs présidentiables. du PDCI n’adhère pas à l’appel de Daoukro. Que les déçus se reporteront sur lui et qu’il pourra piocher dans l’abondant vivier du peuple baoulé. Les sceptiques préfèrent rappeler qu’il n’est que le petit frère de Jean Konan Banny, l’ancien ministre de la Défense d’Houphouët-Boigny. Et que la machine du PDCI est suffisamment bien huilée pour avoir digéré le message de Bédié, oubliant son opposant – comme semble le confirmer la récente décision de certains chefs traditionnels du canton Akouè de Yamoussoukro de rester fidèles à Alassane Ouattara. susPicion. Le rêve de Konan Banny sera d’autant
plus difficile à réaliser qu’il est peu probable que la tendance pro-Gbagbo du FPI appelle à voter pour lui. « Notre candidat sera l’abstention, annonce un cadre de cette mouvance. Le seul candidat pour lequel Gbagbo pourrait appeler à voter est Amara Essy [lire encadré ci-dessous]. » De là à ce qu’un appel au boycott lancé par l’ancien président soit suivi… C’est certainement la question que doit se poser Pascal Affi N’Guessan depuis qu’il a profité de l’absence de Gbagbo pour imposer sa ligne à un parti en pleine restructuration. « Le FPI a trop été présenté comme un parti rebelle. Il fallait changer cette image, régler le contentieux par le dialogue », explique l’un de ses proches conseillers, qui dénonce la politique de la terre brûlée menée par Gbagbo. La démarche d’Affi
AmArA essy, l’électron libre
a
lors qu’il était censé rejoindre la Coalition nationale pour le changement (CNC), Amara Essy n’a toujours pas signé la charte de cette alliance de différents courants politiques. Au-delà des divergences affichées avec les autres ténors de la CNC, ce choix est principalement stratégique. Déclaré candidat à la présidentielle depuis décembre 2014, n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
même s’il n’a pas encore lancé officiellement sa campagne, l’ancien ministre ivoirien des Affaires étrangères et cadre du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) se voit en électron libre du scrutin. Il compte pour cela sur le soutien des planteurs de la formation d’Henri Konan Bédié et sur un hypothétique adoubement par Laurent Gbagbo, à
qui il a rendu visite fin avril à la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye (Pays-Bas). Les deux hommes se connaissent bien : Essy a notamment bénéficié du soutien actif de l’ancien président ivoirien lors de son élection au poste de secrétaire général de l’Organisation de l’unité africaine (OUA, ancêtre de l’Union africaine) en Vincent duhem 2001. ● jeune afrique
2011-2015 : le vrai bilan N’Guessan a trouvé l’assentiment des jeunes, mais, en remettant en cause l’autorité d’institutions garantes de la moralité du parti, il s’est éloigné d’une certaine base. Il espère pourtant, rappelant ses faits d’armes au sein d’une formation qu’il a rejointe dès 1986, récupérer l’électorat des fidèles du FPI. Même s’il sait qu’il lui sera difficile de convaincre en territoire bété, dans l’Ouest profond, malgré le soutien de Marcel Gossio, l’un des piliers du régime Gbagbo. L’une des principales inconnues du scrutin reste le taux de participation. Quatre ans après
SIA KAMBOU/Afp
la crise, l’État s’est redéployé et ne parle plus de réconciliation mais de cohésion sociale. Rien ne prouve pourtant sur le terrain que la situation s’est apaisée, que les ressentiments ont disparu. « Il y a une suspicion autour de la Commission électorale indépendante [CEI, lire ci-dessous], et la reconduction de son président, Youssouf Bakayoko, n’a rien arrangé », souligne Francis Akindès, professeur de sociologie à l’Université de Bouaké. Et de redouter : « Toute contestation des résultats validés par la CEI risque de mettre le feu aux poudres. » ●
p Youssouf Bakayoko, le président de la CEI.
Un scrutin sous haute surveillance
Révision de la liste électorale, transmission des résultats, sécurisation des bureaux de vote… La Commission électorale indépendante a fort à faire.
L
a Côte d’Ivoire se prépare à organiser en octobre son premier scrutin présidentiel depuis la guerre civile qui avait suivi la contestation des résultats de l’élection de 2010. Chargée de piloter l’ensemble du processus, la Commission électorale indépendante (CEI) créée en 2001 s’active. Malgré de multiples protestations contre sa reconduction à la tête de l’instance, Youssouf Bakayoko, son président, a lancé les grandes manœuvres pour que les élections se tiennent bien à jeune afrique
la date prévue par la Constitution. Une nouvelle commission de 17 membres a été installée, et ses relais locaux, qui veillent à l’organisation sur le terrain et à la transmission des résultats vers Abidjan, sont opérationnels. Avant tout, la grande opération de révision de la liste électorale a lieu sur toute l’étendue du territoire, ainsi qu’auprès des Ivoiriens de l’étranger. Démarrée le 1er juin, elle devait initialement se terminer le 30, avant d’être prolongée jusqu’au 12 juillet. Selon les
projections de la CEI, établies sur la base du recensement général de la population effectué fin 2014, 3 millions de nouveaux électeurs devraient s’ajouter aux 5,7 millions déjà inscrits. « C’est vrai que nous devrions faire la révision de la liste électorale chaque année, reconnaît Youssouf Bakayoko. Mais compte tenu de la crise, nos capacités ont été réduites. » Pour éviter cette fois la contestation des résultats, la CEI entend se donner les moyens de ses ambitions. La nouvelle carte électorale est prête, la location d’un satellite de télécommunications est à l’étude et le matériel électoral est en cours de rénovation. « Les troubles naissent le plus souvent du temps mis à publier les scores des candidats. Nous réfléchissons donc à un transfert électronique depuis les bureaux de vote régionaux vers Abidjan », indique Youssouf Bakayoko. CASQUES BLEUS. Les membres de la
commission ont pris contact avec l’Onuci, la mission des Nations unies présente en Côte d’Ivoire depuis 2003, afin de pouvoir utiliser ses moyens logistiques. Hélicoptères ou véhicules de transport de troupes permettront de distribuer à temps urnes, affiches et bulletins de vote sur l’ensemble du territoire national. Pour empêcher toute violence ou tentative de blocage des bureaux de vote, la CEI a engagé des consultations avec les forces de sécurité ivoiriennes. Mais des doutes quant à la partialité des forces armées, jugées proches de l’actuelle présidence, ont incité la commission à solliciter l’envoi de Casques bleus, comme en 2010. « Nous reconduirons le même schéma de sécurisation que lors des précédentes élections, conclut Youssouf Bakayoko. À cette différence près que, cette fois-ci, il n’y a plus de rébellion. » ● BAUdELAirE MiEU, à Abidjan n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
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le Plus de J.a. Côte d’Ivoire campagne
les quatre mousquetaires de Ouattara Leur mission : convaincre la jeunesse de voter pour l’actuel président. L’équipe composée de Karamoko Yayoro, Alphonse Soro, Karim Ouattara et Mamadou Touré est à pied d’œuvre.
1. Karamoko Yayoro Député de la commune d’Abobo, surnommé « général tigre »
2. Alphonse Soro Secrétaire national chargé de la jeunesse au RDR
3. Karim Ouattara Conseiller spécial du directeur général de la Lonaci
4. Mamadou Touré Conseiller technique à la jeunesse et aux sports à la présidence
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ls sont quatre et prêts à tout pour soutenir leur champion, Alassane Ouattara. La bataille pour conquérir les jeunes, maillon essentiel du corps électoral en Côte d’Ivoire, ne se fera pas sans eux. Tous sont passés par l’incontournable Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (Fesci), le puissant syndicat proche de Guillaume Soro, le président de l’Assemblée nationale. Et tous sont appelés à jouer un rôle croissant dans la politique ivoirienne. Présentations.
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À 44 ans, Karamoko Yayoro est resté proche du mouvement de la jeunesse du Rassemblement des républicains (RDR), dont il a été le président pendant dix ans, avant de le diriger une nouvelle fois lors de la campagne du candidat Ouattara, en 2010. Député RDR de la commune d’Abobo, un des fiefs du président à Abidjan, il a été le numéro deux de Guillaume Soro à la Fesci de 1995 à 1998. Son expérience dans la gestion de la jeunesse aux heures sombres de la crise politico-militaire lui a valu le surnom de « général tigre ». n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
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Lui aussi député, Alphonse Soro est l’actuel secrétaire national chargé de la jeunesse au RDR – et une figure montante du parti. Sans lien de parenté avec le président de l’Assemblée,
homonyme de l’actuel président, qui, selon lui, « n’est pas un candidat difficile à vendre aux jeunes ». Conseiller spécial du directeur général de la Loterie nationale de Côte d’Ivoire (Lonaci), il a fait toute sa carrière Tous sont passés par la Fédération dans le privé. Également proche de Guillaume Soro, estudiantine et scolaire de Côte il n’occupe aucune fonction officielle au sein du d’Ivoire, l’incontournable Fesci. RDR mais ambitionne, à il a néanmoins évolué dans son sillage. 37 ans, de retisser les liens entre le parti Syndicaliste estudiantin, il a flirté avec la et les jeunes. Il vient de mettre à disporébellion, pour laquelle il a administré la sition de la campagne deux camions ville de Korhogo, dans le nord du pays. d’animation qui sillonnent déjà le pays. Élu président du Forum des associations de jeunesse du Nord (FAN) en 2000, Le dernier mousquetaire n’est autre Alphonse Soro compte sur ses relais sur que Mamadou Touré, le conseiller place tout en essayant de conquérir les technique à la jeunesse et aux sports de la jeunes du Sud. Apprécié de Téné Birahima présidence de la République. Porte-parole Ouattara – frère du chef de l’État ainsi que des jeunes pendant la campagne de 2010, ministre des Affaires présidentielles – et cet ancien élève de Sciences-Po Paris a homme de confiance d’Amadou Gon depuis intégré le secrétariat national du Coulibaly, il s’annonce comme l’un des RDR. C’est lui qui organise chaque année maillons forts de la campagne. les Assises nationales de la jeunesse, qui permettent au RDR de conquérir les Autre nouveau visage de la coalijeunes Ivoiriens de tous bords. ● tion au pouvoir, Karim Ouattara, BaudelaIre mIeu
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le Plus de J.A. côte d’ivoire partis
Rien ne sera plus comme avant L’élection d’octobre est peut-être la dernière qui verra s’affronter les trois formations historiques du pays : PDCI, FPI et RDR. Car déjà une recomposition, faite d’alliances et de scissions, est en cours.
R
assemblement des républicains (RDR), Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), Front populaire ivoirien (FPI) : depuis vingt ans, la politique ivoirienne est profondément marquée du sceau de ces trois partis. Bénéficiant des plus gros viviers de voix du pays, ils se sont tour à tour retrouvés aux commandes depuis l’indépendance, en 1960 : le PDCI, ancien parti unique, jusqu’en 1999, le FPI de 2000 à 2010 et le RDR depuis 2011. Au premier tour de l’élection présidentielle de novembre 2010, ils avaient raflé à eux seuls 95 % des suffrages. Seules formations dotées de structures suffisamment étoffées sur tout le territoire pour remporter une élection, ces partis sont cependant en pleine mutation et pourraient être profondément remodelés d’ici à la présidentielle de 2020. limite d’âge. Pour la première fois, le
FPI, le RDR et le PDCI pourraient alors être représentés par d’autres leaders que ceux autour desquels ils se sont construits. Alassane Dramane Ouattara terminera son second et dernier mandat ; Henri Konan Bédié sera frappé par la limite d’âge (il a déjà 81 ans) ; seul Laurent Gbagbo pourra encore faire acte de candidature. Mais il est pour le moment incarcéré à La Haye (Pays-Bas),
dans l’attente de son procès devant la Cour pénale internationale (CPI), prévu le 10 novembre. « Le départ de ces leaders va entraîner une redistribution des cartes. Aujourd’hui, aucune personnalité qui mettrait tout le monde d’accord n’émerge », estime un observateur de la vie politique. Le 15 mai, les frondeurs du FPI et ceux du PDCI, ainsi que onze autres partis et personnalités d’opposition, ont lancé la
voix après avoir traversé la plus grande crise de son histoire ? Depuis qu’il a contesté devant la justice la candidature de Laurent Gbagbo à la présidence du parti, Pascal Affi N’Guessan a certes pu asseoir sa légitimité juridique sur l’appareil, mais cette stratégie sans retour a également cristallisé les oppositions et les rancœurs. Au point qu’aujourd’hui il existe de fait deux FPI qui ne se parlent plus. Le clivage est profond et date des accords de Marcoussis, dans le parti de gbagbo, le clivage signés le 26 janvier 2003. Affi N’Guessan conduit est profond, au point qu’il existe alors la délégation du FPI deux FPi qui ne se parlent plus. et fait partie de ceux qui veulent négocier. Mais Coalition pour le changement (CNC) l’échec de la mise en place des accords dans l’espoir de contrecarrer les plans renforce la position des faucons, incardu président Ouattara lors du scrutin nés par Simone Gbagbo et Aboudramane d’octobre. De l’avis même de plusieurs Sangaré. Depuis, le fossé entre les deux de ses membres, elle a peu de chances de camps n’a cessé de se creuser. tenir après la présidentielle. Trop d’ambitions, trop d’ego, trop de différences boycott. Interdits d’utiliser le nom idéologiques… Sa création marque néanou le logo du parti, les fidèles de l’anmoins une étape importante de la vie cien président ivoirien, représenté par politique ivoirienne – avec peut-être Sangaré et Laurent Akoun, ont trouvé pour conséquence d’émietter légèredans la CNC le seul moyen d’exister ment la répartition des votes. Surtout, politiquement de manière légale. Fin les divisions à l’origine de sa naissance politicien, Gbagbo n’est pas étranger à risquent de perdurer un moment encore la création de cette coalition. N’était-il au sein du FPI et du PDCI. pas déjà membre en 1995 du Front républicain, le dernier grand rassemblement Comment en effet imaginer que le FPI puisse parler à nouveau d’une seule d’envergure en Côte d’Ivoire ? Gbagbo
une longue MaRChe veRs le MultIPaRtIsMe Félix Houphouët-Boigny crée un syndicat de fermiers qui deviendra en 1946 la section ivoirienne du Rassemblement démocratique africain, sous le nom de Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) 1944
7 août 1960
Houphouët-Boigny est élu président de la République. Il le sera à nouveau six fois de suite en 1965, 1970, 1975, 1980, 1985 et 1990. Il instaure un régime de parti unique 27 novembre 1961
Proclamation de l’indépendance de la République de Côte d’Ivoire n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
1982
Houphouët-Boigny décide d’instaurer le multipartisme. Quatorze nouvelles formations, dont le FPI, sont officialisées Mai 1990
Création dans la clandestinité du Front populaire ivoirien (FPI), constitué en parti politique en 1988
Djéni Kobina quitte le PDCI et crée le Rassemblement des républicains (RDR)
7 décembre 1993
1994
Mort de Félix Houphouët-Boigny jeune afrique
2011-2015 : le vrai bilan
s’était alors allié à Ouattara, qui venait de créer le RDR, pour appeler notamment au boycott de la présidentielle en raison des conditions d’éligibilité qui excluaient de facto l’ancien Premier ministre (de 1990 à 1993) de la course à la magistrature suprême. Après la présidentielle d’octobre, le camp Gbagbo souhaite présenter un maximum de candidats aux législatives pour être en mesure de monter un groupe parlementaire. Une première étape avant la création d’un nouveau parti ? Seule certitude, il peut difficilement se permettre de faire une nouvelle fois l’impasse sur les législatives après son abstention de 2011 – sans prendre le risque de disparaître. malentendu. Et si, finalement, le prin-
cipal bouleversement sur l’échiquier politique venait du camp présidentiel ? Annoncée par le président Ouattara en mars, souhaitée par son allié Henri Konan Bédié, l’unification du RDR et du PDCI au lendemain de la présidentielle est sur toutes les lèvres. « Ce sont deux jeune afrique
partis libéraux qui ont la même vision en termes de gestion et de gouvernance. Il est naturel qu’ils soient réunifiés. Ils n’ont été séparés qu’à la suite d’un malentendu », estime un cadre du RDR, issu d’une scission avec le PDCI en 1994 (voir chronologie p. 70). Si certains membres estiment que Bédié brade les intérêts de l’ancien parti unique, la grande majorité du PDCI ne s’est pas opposée à son désormais célèbre « appel de Daoukro » lancé le 17 septembre 2014 pour soutenir le principe d’une candidature unique. 2020, c’est demain, et les plus ambitieux ont déjà levé le voile : Patrick Achi, ministre des Infrastructures économiques, l’avocat et ministre d’État Jeannot Ahoussou-Kouadio, ou encore JeanLouis Billon, ministre du Commerce. Une éventuelle réunification rendrait en même temps impossible un retour des quatre « irréductibles » – l’ancien Premier ministre Charles Konan Banny, l’ancien ministre d’État Amara Essy et les députés Kouadio Konan Bertin et Jérôme Kablan Brou.
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p De g. à dr. : Charles Konan Banny (PDCI), Mamadou Koulibaly (Lider), Kouadio Konan Bertin (PDCI) et Laurent Akoun (FPI), lors de la création de la Coalition nationale pour le changement, le 15 mai.
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Du côté du RDR, si les cadres reconnaissent l’importance de leur allié, beaucoup pensent que le PDCI a déjà été bien assez récompensé. Et ceux qui préparent déjà l’après-Ouattara s’imaginent mal laisser la place en 2020 à une personnalité du plus vieux parti de Côte d’Ivoire. choc des ambitions. Ce rapproche-
ment entre les deux partis donnerait assurément au camp au pouvoir une avance considérable en matière de voix, et beaucoup au RDR estiment que seule la renaissance d’un grand mouvement houphouétiste peut répondre au choc des ambitions. « C’est la seule manière d’éviter une crise comme celle qui secoue le FPI », estime un cadre du parti présidentiel, favorable à une évolution bipartite en Côte d’Ivoire. Avant de conclure : « Nos pays n’ont pas besoin de querelles politiques. Il est illusoire d’avoir des débats idéologiques, car nous n’avons pas d’autre choix que d’appliquer la politique du FMI. » La politique est morte, vive la realpolitik ? ● Vincent duhem n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
le Plus de j.a. Côte d’ivoire Confidences de…
Charles Konan Banny Ancien Premier ministre (2005-2007)
« Beaucoup souhaitaient que je franchisse le pas » Le baron du PDCI se présente à l’élection présidentielle, même s’il estime que les conditions d’un scrutin équitable ne sont pas réunies.
E
n décembre 2014, l’ancien gouverneur de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO,1990-2005), devenu Premier ministre sous Laurent Gbagbo (2005-2007) puis nommé par Alassane Ouattara à la tête de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation (2011-2014), a annoncé sa candidature à l’élection présidentielle d’octobre 2015. Quitte à passer outre la consigne de son camp, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), dont le chef, Henri Konan Bédié, a appelé à voter pour le président Alassane Ouattara. jeune afrique : après avoir longtemps hésité, vous avez annoncé votre candidature en décembre. qu’est-ce qui vous a finalement décidé ? Charles Konan Banny : Dire que
j’ai hésité est à moitié vrai. Il y a énormément d’Ivoiriens, depuis bien longtemps, qui attendaient une déclaration de candidature à la présidentielle de Charles Konan Banny. Déjà aux élections passées, beaucoup de jeunes, de femmes, de militants, de mon parti ou non, ont pensé que je devais être candidat. Je vous rappelle que j’étais Premier ministre lorsque le pays était en crise. J’ai donc quelques états de services et je crois que mes passages au pouvoir n’ont pas laissé indifférents les Ivoiriens, au point que beaucoup souhaitaient que je franchisse le pas.
en tant qu’économiste, comment jugez-vous ce premier mandat d’alassane ouattara ? n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
© SANDRA ROCHA POUR J.A.
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u L’économiste n’hésite pas à opposer les bons chiffres de la croissance à ceux de la pauvreté et du chômage des jeunes.
En matière économique, lorsqu’un pays descend dans les enfers et qu’il atteint le fond du trou, qu’est-ce qu’il lui reste à faire ?Y rester ou rebondir. C’est un « rattrapage », pour utiliser un terme mis à l’honneur par Alassane Ouattara depuis son arrivée au pouvoir… La Côte d’Ivoire est donc en période de rebond, c’est incontestable. Tout le monde voit que l’indice de croissance augmente. Mais dans un pays, il y a d’autres données qui comptent, comme le partage de la richesse créée. Allez demander aux gens de communes d’Abidjan comme Treichville, Attécoubé ou Yopougon ou aux villageois s’ils ont leur part ! La pauvreté et le chômage des jeunes s’accroissent. Ces données économiques aussi sont incontestables. Comment faire justement pour mieux « partager le gâteau » ?
Nous ferons des propositions lorsque nous serons au pouvoir. ne pensez-vous pas qu’il faille justement les exposer pour convaincre les ivoiriens de voter pour vous ?
Ne rien dire fait pour le moment partie de notre stratégie. Et ne vous inquiétez pas, nous avons suffisamment d’expertise au sein de la coalition, je suis moi-même économiste. Les Ivoiriens sauront au moment voulu. les conditions pour que l’élection se déroule de manière apaisée sontelles réunies ?
Non. Et c’est l’opinion d’une majorité d’Ivoiriens. La composition de la Commission électorale doit être équitable. Il faut que ses membres soient représentatifs de la diversité politique, et ça n’est pas le cas. En outre, son président est élu pour un mandat de six ans non renouvelable, l’actuel titulaire du poste n’aurait donc pas dû être reconduit. Il ne faut pas oublier non plus que, pour la première fois en Côte d’Ivoire, le Conseil constitutionnel est unicolore. Enfin, la confection des listes électorales a été compromise par la multiplication des faux papiers d’identité. Le gouvernement doit prendre conscience qu’il existe de nombreux périls. ● Propos recueillis par VinCent Duhem jeune afrique
COMMUNIQUÉ
Mieux vaut un petit chez soi, qu’un grand chez les autres
O
pes Holding S.A est une entreprise de Construction et de Promotion immobilière qui prend une part active et remarquable dans l’ambitieux Programme présidentiel de Logements sociaux, économiques et de standing en Côte d’Ivoire. Sur le site de Bingerville où ledit Programme connaît une mise à exécution impressionnante, OPES Holding S.A avec un terrain de 12 hectares, est en train de sortir de terre près de 500 logements sociaux, économiques, de standing, soit 482 logements qui bénéficient de l’expertise de brillants urbanistes, géomètres, architectes, ingénieurs Vrd, ingénieurs génie civil, techniciens en bâtiment dont l’expérience n’est plus à démontrer. Aussi convient-il de préciser qu’Opes Holding S.A intervient en plus du site du Programme présidentiel des logements sociaux, économiques et de standing de Bingerville, sur le site de la ville d’Aboisso. Par ailleurs, la société immobilière Opes Holding, utilise une technologie innovante pour la construction de maisons. En plus de la construction classique qui consiste à utiliser les matériaux traditionnels, Opes Holding S.A réalise des maisons à partir de panneaux EPS .Ce sont des Panneaux de construction en polystyrène expansé avec une couche de mortier de haute qualité et renforcement de fibres de fer sur les deux faces. Ces panneaux
une belle vue de l’entrée principale de la Cité Opes 1 bâtie à Bingerville par Opes Holding avec toutes les commodités (espace vert, aire de jeux, Vrd, bitume, électrification publique…)
M.Siriki SANGARE, PDG d’Opes Holding et président de la Chambre Nationale des Promoteurs et Constructeurs Agréés de Côte d’Ivoire.
peuvent être installés sur des surfaces inégales, car ils permettent le rattrapage des inégalités des murs. La mise en œuvre est facile et rapide car ce panneau est découpable au cutter. La particularité et l’avantage des maisons faites avec des panneaux, est le maintien à l’intérieur de la température ambiante. Ce qui empêche la chaleur à l’intérieur des habitations .Cette technologie réduit la consommation d´énergie pendant toute la vie utile du bâtiment, en exigeant moins de combustibles fossiles, ce qui permet moins de dégagement de CO2. C’est un système constructif, qui permet d´obtenir la plus haute qualification énergétique de l´édification, grâce à son excellent isolement thermique. Cette entreprise doit sa notoriété, à sa technique de construction, à l’exécution rapide des travaux, qui se démarquent du système traditionnel de maçonnerie.
OPES HOLDING SA Siège : Abidjan-Cocody, Résidence Cannebière, 2ème étage. Tél : +225 22 48 73 53 - CELL : +225 05 26 26 40/09551166 - Email : karym.ouattara@gmail.com
www.opesholding-sa.com
DIFCOM/FC - Photos : DR
En somme, depuis le mois d’Octobre 2014, avec 500 emplois directs créés ne serait-ce que sur le site de Bingerville et répondant à l’appel de la production massive de logements lancé par le ministre ivoirien de la Construction, du Logement, de l’Assainissement et de l’Urbanisme, Mamadou Sanogo, les habitats construits tant avec des matériaux classiques qu’avec les panneaux EPS par Opes Holding S.A sortent de terre pour le bonheur futur et certain de tous ses souscripteurs ainsi que pour la satisfaction de la volonté politique de l’État ivoirien d’accorder un habitat décent à chacun de ses citoyens. Il en va de même, pour le site de la ville d’Aboisso, dans la région du sud-Comoé où des travaux de grande envergure sont entrepris pour sortir également de terre, des maisons de qualité aux Ivoiriens .Précisons à toutes fins utiles, que dans quelques semaines, les premières clés des habitats construits par Opes Holding S.A seront remises aux premiers bénéficiaires en présence de M. le Président de la République de Côte d’ Ivoire, Alassane Ouattara, du Premier ministre Kablan Duncan, du ministre de la Construction, du Logement, de l’Assainissement et de l’Urbanisme ivoirien, Mamadou Sanogo. Siriki Sangaré PDG d’Opes Holding S.A.
Le Plus de J.a. Côte d’ivoire
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AFFAIRES ÉTRANGÈRES
abidjan, plaque diplomatique Dans la sous-région comme sur le plan international, la politique active de coopération d’Alassane Ouattara redonne au pays toute son influence après des années d’isolement.
L
a Côte d’Ivoire sort enfin de son isolement diplomatique. Après dix années de crise, Alassane Ouattara a instauré une politique étrangère dynamique, renforcée par son mandat de président de la Cedeao entre février 2012 et mars 2014. à ce titre, il a aidé à résoudre plusieurs crises dans la sous-région – aux dépens parfois de certains dossiers internes, comme la réconciliation, maillon faible de son pouvoir –, notamment après les coups d’état au Mali et en Guinée-Bissau au printemps 2012. En quelques années, Abidjan est redevenu un point de passage obligé des personnalités politiques du monde entier : Hillary Clinton, alors secrétaire d’état des états-Unis, s’y est rendue en janvier 2012, le Premier ministre japonais Shinzo Abe en janvier 2014, le président français François Hollande en juillet de la même année… Alassane Ouattara fait même office de sage auprès de ses homologues d’Afrique de l’Ouest. Le Togolais Faure Gnassingbé, le Guinéen Alpha Condé, le Ghanéen John Dramani Mahama ou la Libérienne Ellen Johnson Sirleaf sont tour à tour venus le consulter. Le 28 avril, au lendemain d’une
élection présidentielle contestée au Togo, il n’a pas hésité à se rendre à Lomé en compagnie de John Dramani Mahama, alors président de la Cedeao, pour tenter de faire reconnaître le verdict des urnes. Ses interventions sont également sollicitées à l’échelle du continent. « Le fait que l’Union africaine [UA] ait demandé au président Ouattara d’ouvrir des discussions avec Mohammed VI au sujet d’un possible retour du Maroc [le royaume avait quitté l’UA en 1984 pour protester contre l’admission de la République arabe sahraouie démocratique] démontre son influence », confie un ambassadeur africain en poste à Abidjan. investisseurs. Sur des dossiers aussi
brûlants que le terrorisme ou le réchauffement climatique, le pays est aussi mis à contribution. Yamoussoukro a accueilli les 24 et 25 juin un Sommet des régions et villes d’Afrique pour le climat, en prévision de la Convention-Cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP 21), qui se tiendra à Paris en décembre. Cette activité diplomatique a largement contribué au retour de la BAD dans la
capitale économique ivoirienne. Elle a aussi favorisé l’ouverture de l’économie du pays aux investisseurs sud-coréens, turcs, chinois ou américains. C’est par exemple le sud-coréen Hyundai qui a construit l’extension de la centrale thermique de Yopougon (est d’Abidjan). Une « éco-diplomatie » mise en œuvre par Charles Koffi Diby, le ministre des Affaires étrangères. « De nombreux pays nous rendent des visites d’amitié et de travail, au cours desquelles sont signés de nouveaux accords de coopération », explique le chef de la diplomatie ivoirienne, qui a conclu en avril plusieurs conventions fiscales et juridiques avec la Turquie et qui prépare d’autres accords bilatéraux avec l’égypte. Le 23 avril, le palais présidentiel a remis leur nouvelle feuille de route aux ambassadeurs. Onze adjoints ont été nommés, à New York, Abuja, La Haye, Addis-Abeba, Bruxelles, Genève, Londres, Madrid, Rome, Vienne, ainsi qu’à l’Unesco (à Paris). La diplomatie ivoirienne couvre actuellement 60 % des pays membres de l’ONU. L’objectif est d’atteindre les 90 % à l’horizon 2018, soit 175 pays sur 193. ● BaudeLaire mieu
Le budget alloué aux dépenses de fonctionnement des chancelleries ivoiriennes était de :
60
milliards de F CFA (91,5 millions d’euros) en 2013 © Kayhan Ozer/anadOlu agency/aFP
70
milliards de F CFA en 2014 t Avec le président turc, Recep Tayyip Erdogan, le 26 mars, à Ankara. n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
80
milliards de F CFA en 2015 jeune afrique
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Le Plus de j.a. Côte d’ivoire INTERVIEW
Hamed Bakayoko « La Côte d’ivoire n’est plus un pays en crise » Réconciliation nationale, désarmement, terrorisme… Sur tous les dossiers sensibles, le ministre de l’intérieur défend son bilan. Son prochain défi : organiser une élection présidentielle irréprochable.
N
ommé ministre de l’Intérieur en juin 2011, Hamed Bakayoko est, à 50 ans, une pièce maîtresse du système Ouattara. C’est lui qui a reçu le 22 juin les leaders de la Coalition nationale pour le changement (CNC). Dialogue avec l’opposition, réforme de la Commission électorale indépendante (CEI), réinsertion des ex-combattants, fronde des militaires, enlèvements d’enfants, affaire des primes impayées de la Coupe d’Afrique des nations… Rares sont les dossiers sensibles sur lesquels le ministre ne s’est pas penché ces derniers mois. Et le premier flic de Côte d’Ivoire peut se prévaloir d’un indice de sécurité en nette amélioration : selon l’ONU, celui-ci est passé de 3,8 en 2012 à 1,3 fin 2014.
un cadre réglementaire sans perturber l’ordre public. La CNC est entièrement composée de cadres. Ils savent donc comment fonctionne l’État. Lorsqu’on veut organiser une manifestation, il y a un protocole à respecter.
tous les partis. À quatre mois de l’élection, on ne peut pas la remettre en cause sans mettre en danger tout le processus. Or il est primordial que la Côte d’Ivoire soit capable d’organiser ce scrutin aux dates prévues.
mais des jeunes du rassemblement des républicains [rdr, au pouvoir] n’ontils pas manifesté sans autorisation le 20 juin ?
Pourquoi avoir reconduit youssouf Bakayoko à la tête de la Cei alors qu’il n’est pas soutenu par une partie de l’opinion publique ?
jeuNe afrique : La Côte d’ivoire estelle prête pour une nouvelle échéance électorale ? Hamed Bakayoko : Parfaitement.
Pourquoi Hubert oulaye, Sébastien dano djédjé et justin koua, tous cadres du front populaire ivoirien [fPi, opposition], ont-ils été arrêtés début mai ?
Tous les indicateurs sont au vert. Même si quelques contradictions persistent, le dialogue politique est aujourd’hui réel. Soutenu par un effort économique important, l’environnement est propice à l’organisation de ces élections, qui marqueront un tournant pour la Côte d’Ivoire. L’objectif du rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix [rHdP] est-il de permettre la réélection d’alassane ouattara dès le premier tour?
Tout à fait. Le président a entamé un travail très important. La Côte d’Ivoire est en chantier, mais le pays se redresse. Il faut maintenant consolider tout cela. Cette réélection, avec la stabilité que représente le RHDP, doit donner plus de confiance aux investisseurs. La CNC se présente contre lui. Comment percevez-vous sa création ?
Elle participe à la dynamique démocratique. Il n’y a aucun problème pour que ses membres s’expriment et agissent. Mais toutes leurs activités doivent se faire dans n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
C’est faux. Toutes les manifestations, même un concert, sont soumises à l’autorisation des maires. dans nos colonnes, Charles konan Banny a accusé le régime de bafouer les libertés publiques…
Ilestdanssonrôledenouvelopposant…
Les faits qui leur sont reprochés n’ont rien à voir avec leurs activités politiques.
Il a été élu par la commission. Il a prouvé qu’il était un homme d’expérience et intègre. S’il n’avait pas eu le courage de donner les vrais résultats, je pense que ce pays aurait vécu une crise plus grave. après celle du 10 juin, une deuxième attaque a eu lieu à la frontière avec le mali, le 27 juin. La Côte d’ivoire pourraitelle être menacée par le terrorisme ?
Nous sommes très vigilants. Il y a une vraie menace sous-régionale que nous prenons au sérieux. Il faut anticiper. Nos forces sont montées en puissance dans la zone et nous travaillons beaucoup avec
Charles Konan Banny? Il est dans son rôle de nouvel opposant… Oulaye est accusé de complicité dans l’assassinat des Casques bleus de l’ONU en 2012. Justin Koua est poursuivi pour troubles à l’ordre public et pour avoir tenu des propos insurrectionnels. Il ne faut pas confondre faire de la politique librement et porter atteinte aux institutions. Les hommes politiques ne doivent pas franchir les limites. Nous avons déjà payé trop cher leurs erreurs. La CNC a fait des recommandations, notamment sur la Cei. allez-vous en tenir compte ?
Chaque parti peut avoir ses revendications, mais l’État et le gouvernement font ce qu’ils peuvent. La CEI a fait l’objet d’un long processus de discussion avec
les pays amis afin de mettre en place une bonne synergie entre nos services de renseignements. est-ce vrai que certaines mosquées wahhabites ont été mises sous surveillance ?
Je ne confirme pas cette information, mais nous sommes particulièrement prudents. L’islam pratiqué en Côte d’Ivoire est très modéré. Selon moi, il n’y a pas de risque d’une montée extrémiste à l’intérieur du pays. Pourquoi le désarmement a-t-il mieux fonctionné en Côte d’ivoire que dans d’autres pays aux dynamiques identiques ? jeune afrique
2011-2015 : le vrai bilan
© Bruno LEVY pour J.A.
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p Le numéro deux du gouvernement peut se targuer d’une nette amélioration de l’indice de sécurité.
Il y a d’abord un engagement important du président de la République, qui a lui-même présidé chaque semaine le Conseil national de sécurité. Des moyens conséquents ont été mis à disposition de l’Autorité pour le désarmement, la démobilisation et la réinsertion [ADDR]. Il reste bien sûr un résidu d’ex-combattants qui doit encore être pris en charge mais il était très important que le programme de l’ADDR prenne fin pour montrer que la Côte d’Ivoire n’est plus un pays postcrise. Les milliers d’anciens combattants armés qui restent introuvables ne représentent-ils pas une menace ?
Il n’y a pas d’ex-combattants armés mais un groupe de jeunes qui espéraient avoir une place dans la garde républicaine. Nous leur avons fait comprendre que le président s’y était opposé. Tous les sites qu’ils occupaient à Abidjan ont été libérés. D’ailleurs, il n’y avait pas tant d’armes que ça. Dans une cité universitaire où 200 jeunes étaient regroupés, JEunE AfriquE jeune afrique
seules quatre armes ont été retrouvées et déposées par la suite. La situation se normalise dans des conditions que je trouve très satisfaisantes. Les experts de l’ONU estiment pourtant que le nombre d’armes en circulation est inquiétant…
C’est un rapport qui date d’un an. Depuis, la situation a évolué. Il est vrai que çà et là les experts ont signalé des armes mais elles ont été récupérées. L’étatmajor est engagé dans une opération de marquage pour savoir exactement à qui elles sont attribuées. Si la sécurité est en nette amélioration, la criminalité urbaine demeure, comme le montre le phénomène des Microbes…
Les Microbes sont avant tout des enfants traumatisés par la guerre. Nous avons créé des centres de resocialisation où ils sont traités. Le retour de la Banque africaine de développement est la preuve que la sécurité en Côte d’Ivoire
s’est fortement améliorée, et nous entendons la consolider. La Direction de la surveillance du territoire permet de lutter contre l’insécurité. Au sein de l’opposition, certains dénoncent des cas de torture. Que leur répondez-vous ?
Je n’ai pas connaissance de cas de torture en Côte d’Ivoire. Ceux qui l’affirment ont-ils des preuves ? Nous avons en tout cas donné des instructions fermes à nos collaborateurs pour qu’ils travaillent au maintien de l’ordre dans le respect le plus strict de la loi et des standards internationaux. Êtes-vous partisan d’une réunification du RDR et du PDCI ?
Tout ce qui rassemble renforce. C’est un gage de stabilité pour demain. Toutes les ambitions personnelles doivent s’incliner devant le rassemblement des houphouétistes. ● Propos recueillis par VINCeNt DUheM Au 18 juillet JuiLLEt 2015 n 0 2844 • du 12 au
Le CEPICI véritable outil d’attraction
des investissements privés en Côte d’Ivoire En seulement quatre ans, Emmanuel ESSIS et son équipe ont multiplié par quatre le montant des investissements agréés et le nombre d’entreprises créées au Guichet Unique du CEPICI … loin de se reposer sur ses lauriers, il affirme : « Le défi de faire de la Côte d’Ivoire un pays émergent à l’horizon 2020 exige du CEPICI une contribution plus accrue dans l’attraction des investissements nationaux et étrangers ».
L
a vision de SEM Alassane OUATTARA, Président de la République est de faire de la Côte d’Ivoire un pays émergent à l’horizon 2020 avec le secteur privé, comme moteur de la croissance économique.
C’est pourquoi, dès sa nomination en Octobre 2011, à la tête du CEPICI en qualité de Directeur Général au terme d’un appel à candidature, Emmanuel ESSIS (ci-contre) entouré de son équipe n’a eu de cesse de multiplier les actions pour améliorer l’attractivité de la Côte d’Ivoire, faciliter et accroître ainsi l’investissement privé dans le pays. En effet, l’environnement des affaires de la Côte d’Ivoire a enregistré une embellie remarquable au cours des quatre dernières années grâce à la volonté politique et aux multiples initiatives du Gouvernement ivoirien en matière de réformes engagées sous la coordination du CEPICI et de ses partenaires techniques.
PUBLI-INFORMATION
Il s’agit d’importantes réformes institutionnelles et structurelles qui ont largement contribué à faire de la Côte d’Ivoire, un pays où l’investissement privé réalisé est sécurisé et rentable. Ces réformes ont consisté d’une part à l’assainissement du cadre macroéconomique et des finances publiques, et d’autre part à la régulation efficiente du cadre des affaires pour l’amélioration du climat des affaires en Côte d’ Ivoire. Ces dispositions prises par le Gouvernement pour développer le secteur privé ont permis entre autres résultats à travers le référentiel Doing Business du Groupe Banque Mondiale : • La réduction des coûts et délais des procédures de création d’entreprise. Par ailleurs, les sociétés de types SARL au
capital inférieur ou égal à 10 millions de F CFA se créent à seulement 15 000 F CFA avec la levée de l’obligation de passage chez le notaire. • La protection des investisseurs en renforçant les droits des actionnaires minoritaires • La mise en place d’un cadre juridique pour la création des bureaux d’information sur le crédit. • La création du Tribunal du Commerce d’Abidjan reste l’une des innovations majeures dans le cadre du règlement des litiges commerciaux. Il a également été institué des modes alternatifs de règlement des litiges, notamment la médiation commerciale. À ce jour, c’est une quarantaine de réformes qui ont été réalisées pour rendre le cadre des affaires attractif. C’est ce qui ressort des rapports Doing Business publiés en 2013 et 2014 classant l’économie ivoirienne dans le peloton des 10 meilleurs pays réformateurs au monde. D’ailleurs, la Côte d’Ivoire est le seul pays au monde à se maintenir dans ce top 10 durant deux années de suite. L’impact économique de ces réformes est impressionnant. En seulement quatre ans, Emmanuel ESSIS et son équipe ont multiplié par quatre le montant des investissements privés agréés et le nombre d’entreprises créées au Guichet Unique du CEPICI. Plus de 426 milliards F CFA d’investissements privés agréés au Code des investissements en 2014 contre 115 milliards de F CFA enregistrés en 2011. Soit 1 273 milliards d’investissements privés agréés en quatre ans. Au titre des créations d’entreprises, le CEPICI a enregistré 6 487 entreprises créées en 2014 contre 2 775 en 2013. Depuis le début de l’année jusqu’au 31 mai, ce sont 4 192 entreprises qui ont été constituées au Centre de Promotion des Investissements en Côte d’Ivoire. Et le délai de création des entreprises a été réduit à seulement 24 heures. Aujourd’hui, plus de 40 entreprises en moyenne sont créées par jour au Guichet Unique du CEPICI. Le dynamisme de l’économie ivoirienne et la volonté affichée de ces dirigeants ont repositionné le pays sur la scène internationale. En témoigne l’engouement constaté autour
du Forum International Investir en Côte d’Ivoire (ICI 2014) organisé par le CEPICI du 29 janvier au 1er février 2014 à Abidjan. Cet événement qui a eu un retentissement mondial a enregistré la participation de 5000 personnes issues de 103 pays. À cette occasion, les intentions d’investissements formulées ont été évaluées à 2 620 milliards FCFA portant sur 66 projets dont 19 à réaliser en partenariat public-privé et 47 projets privés. En raison de la portée mondiale de ce forum, la Côte d’Ivoire entend réaliser la prochaine édition en 2016. Toutes ces réalisations ont démontré le dynamisme du CEPICI et achevé de convaincre les dirigeants des agences de promotion francophones qui ont porté Emmanuel ESSIS à la tête du Réseau International des Agences Francophones de Promotion des Investissements (RIAFPI). Dans la même dynamique, le Directeur Général du CEPICI a été élu le 15 juin 2015 à Milan, comme nouveau, Représentant Régional de l’Afrique Subsaharienne au WAIPA, membre du comité de Direction de l’Association mondiale des agences de promotion des investissements, confirmant davantage le leadership de la Côte d’Ivoire. Sur la base des acquis, les réformes en cours désormais intègrent le facteur qualité des services, et vise surtout la dématérialisation des procédures administratives. C’est pourquoi, l’État ivoirien a légiféré sur l’introduction des procédés électroniques dans l’ensemble du processus administratif (déclaration et paiement d’impôts, formalités d’entreprise, etc.)
Du 29 janvier au 1er février 2014 le Forum International des Investissements en Côte d’Ivoire (ICI 2014) àAbidjan.
Lors de la cérémonie d’ouverture le Premier Ministre Daniel Kablan Ducan et Emmanuel ESSIS Directeur Général du CEPICI
DIFCOM Creapub / Photos : Coralie Barbier
À travers la dématérialisation des processus administratifs, la Côte d’Ivoire s’engage irréversiblement dans la gouvernance électronique, la transparence, la célérité, l’efficacité de l’offre de services publics qui va permettre au Secteur privé de jouer pleinement son rôle de créateur de richesse et d’emplois dans un environnement des affaires amélioré. En sa qualité de Guichet Unique de l’investissement privé en Côte d’Ivoire, le CEPICI se révèle comme le partenaire incontournable pour faire des affaires dans le pays. Son rôle est devenu encore plus important puisqu’il est dorénavant l’unique structure chargée de la création d’entreprise en Côte d’Ivoire. Pour jouer pleinement ce rôle, un identifiant unique sera désormais attribué à toutes les entreprises du pays en remplacement des différents numéros accordés aux sociétés à leur constitution, à savoir le compte contribuable (Impôts), le registre de commerce et de crédit mobilier (RCCM), le compte employeur (sécurité sociale). Cette innovation va révolutionner l’environnement des affaires en Côte d’Ivoire. En définitive, on peut noter qu’en quatre années d’exercice, le CEPICI est sur la voie de devenir une agence de promotion des Investissements (API) performante et de renommée internationale comme le désire ardemment son Directeur Général, Emmanuel Essis qui, loin de se reposer sur ses lauriers, affirme que « Le défi de faire de la Côte d’Ivoire un pays émergent à l’horizon 2020 exige du CEPICI une contribution plus accrue dans l’attraction des investissements nationaux et étrangers ». ■
16e étage Immeuble BELLERIVE Avenue ABDOULAYE FADIGA, Plateau – Abidjan République de Côte d’Ivoire Tel : +225 20 31 14 00 - Fax : +225 20 31 14 09 E-mail: infos.cepici@cepici.ci
Le Plus de J.a. côte d’Ivoire économie
Le long chemin de l’émergence Électrification, alimentation en eau, hôpitaux… L’État multiplie les projets pour rattraper le retard accumulé pendant dix ans. Mais attention à ne pas laisser les entreprises locales sur le bord de la route.
S
ur le boulevard qui longe la lagune de Cocody, les livreurs de Hello Food ne passent pas inaperçus. À Abidjan, ce sont presque les seuls conducteurs de deuxroues à porter un casque. L’émergence d’une classe moyenne se lit dans les détails, par exemple ces files de voitures bloquées dans d’interminables bouchons : chaque déplacement est l’occasion d’accumuler quelques preuves supplémentaires de la croissance ivoirienne, dont la moyenne depuis 2012 dépasse 7 %. Le long de la route de GrandBassam, les constructions d’immeubles et de lotissements se multiplient. Partout, des dizaines de chantiers ont été lancés pour refaire les routes, évacuer les eaux usées, améliorer l’éclairage public. Depuis quatre ans, de manière presque frénétique, le gouvernement multiplie les projets pour alimenter le moteur de l’économie. De larges pans du Plan national de développement présenté aux bailleurs en 2012 ont été exécutés. Quelque 5 000 km de pistes ont été remis en état, 800 localités électrifiées, 794 pompes manuelles installées pour l’approvisionnement en eau. Quatre hôpitaux et 52 dispensaires et maternités ont été construits. Entre autres… « À Korhogo [Nord], ma maison a été raccordée à l’électricité, ça change tout ! » illustre un économiste ivoirien en poste à Washington qui, comme d’autres expatriés, songe à rentrer pour participer au redécollage de son pays.
Bien sûr, beaucoup de chantiers restent en souffrance. « Le gouvernement n’a construit que 6 885 classes sur les 25 000 promises par le président, et nous attendons toujours la livraison des nouvelles universités », indique Antoine Assalé Tiemoko, fondateur du bihebdomadaire L’Éléphant déchaîné. président Ouattara depuis son accession au pouvoir en 2011 est immense. Pendant dix ans, rien ou presque n’avait pu être fait. En tentant de rattraper le temps perdu, l’économie ivoirienne frôle la surchauffe. Les facteurs qui la placent sous pression sont nombreux. Par exemple, la construction du barrage de Soubré a consommé tellement de ciment que le prix du sac a bondi de 40 % au mois de mai. Pour combattre la pénurie et limiter la hausse des prix, les autorités ont dû s’engager à importer 300 000 tonnes de ciment. La mise à niveau des centrales thermiques de la Compagnie ivoirienne de production d’électricité (Ciprel) et d’Azito, engagée dès 2011, permet au pays d’assurer la majeure partie de son approvisionnement en électricité, mais c’est le gaz naturel qui fait défaut, obligeant les autorités à utiliser du fioul. À Abidjan, la réhabilitation de la zone industrielle de Yopougon, annoncée pour 2013, n’a démarré que depuis quelques mois, et les travaux sont loin d’être achevés. Au premier orage, les routes défoncées se transforment en
bourbiers qui empêchent parfois les camions de rejoindre les usines. Le chemin sera encore long avant que l’éléphant ivoirien n’atteigne l’émergence promise pour 2020. Pour calmer les impatients, les autorités savent qu’elles doivent multiplier les prises de parole, car les bénéfices de tous ces travaux sont loin d’être palpables pour la grande majorité des Ivoiriens. L’entrée en fonction du nouveau pont Henri-Konan-Bédié, le troisième d’Abidjan, n’a pas eu le temps de soulager les automobilistes que déjà le gouvernement a partiellement fermé le pont Charles-de-Gaulle, construit en 1967, pour une réfection qui durera plusieurs mois. Vouloir se rendre au quartier des affaires du Plateau aux heures de pointe relève du masochisme. « Abidjan devrait avoir six ou sept ouvrages permettant de franchir la lagune, comme le prévoyait d’ailleurs le schéma directeur de la ville dans les années 1970 », constate le ministre du Commerce, Jean-Louis Billon, qui attribue au gouvernement le mérite d’avoir replacé le pays sur le chemin de la croissance. Pour rebâtir le pays, Alassane Ouattara a parcouru le monde à la recherche de partenaires. Ses détracteurs l’ont même surnommé Magellan. Dans ses valises, des dizaines de projets attribués en échange de financements. China Machinery Engineering Corporation a construit l’autoroute entre Abidjan et Grand-Bassam, le tunisien Soroubat a réalisé le tronçon manquant entre la capitale économique
PIB (en milliards d’euros, en prix courants)
PIB par habitant (en milliards d’euros,
Surchauffe. Mais le défi relevé par le
Lentement mais sûrement… Taux de croissance (en %) 10,7
* estimations/prévisions
27,1 8,7
20,4 7,7
27,9
en prix courants)
* estimations/prévisions
30,6
22,5
950
1229
1227
2014*
2015*
1316
1019
7,8
2012
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n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
2015*
2016*
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2012
2013*
2016*
source : fmi
* estimations/prévisions
source : fmi
7,5 source : fmi
82
jeune afrique
2011-2015 : le vrai bilan
nouvelle ère pour les finances publiques?
et Yamoussoukro, tandis que l’égyptien The Arab Contractors bâtissait le pont de Jacqueville et le français Bouygues celui d’Abidjan. À ceux qui s’inquiètent de la méthode, l’entourage du président explique que les entreprises locales manquent de compétences, de capacités financières et que le pays doit avancer vite, très vite, pour que les Ivoiriens profitent eux aussi des fruits de la croissance. « Sans infrastructures, pas de développement », récitait au mois de juin, convaincu, un taxi abidjanais. « Ce n’est pas en privilégiant les multinationales au détriment des entreprises locales que le gouvernement créera tous les emplois dont le pays a besoin », estime pour sa part un industriel ivoirien d’origine libanaise. Le chômage des jeunes (70 % de la population ont moins de 35 ans) apparaît de plus en plus comme une bombe à retardement. Face à cette préoccupation, « le gouvernement s’est engagé à réserver une part significative des travaux de sous-traitance aux sociétés ivoiriennes », précise Jean-Louis Billon.
Pour plus de transparence, l’État privilégie les appels d’offres aux marchés passés de gré à gré et impose à ses entreprises de publier leur bilan annuel.
orthodoxie. Aupremier
trimestre 2015, l’orthodoxie budgétaire imposée par la puissance publique a amélioré les capacités d’emprunt de l’État ivoirien, comme l’a montré l’émission d’un nouvel eurobond en février. Dans le même temps, les procédures de passation des marchés publics ont été épurées. Un domaine important puisque la part du budget de l’État
soumise aux procédures de passation des marchés publics est de 34 %. Fort de sa culture anglosaxonne, Abdourahmane Cissé, ministre chargé du Budget auprès du Premier ministre, a réussi à introduire des pratiques concurrentielles en privilégiant les appels d’offres plutôtquelesaccordspassés de gré à gré. Selon les statistiques du gouvernement, les marchés passés par appel d’offres ouvert étaient au nombre de 31 au premier trimestre 2013, 59 au premier trimestre 2014 et 165 au premier trimestre 2015, ceux passés par appel d’offres restreint étant respectivement au nombre de 8, 10 puis 51. Malgré tout, les marchés approuvés de gré à gré étaient dans la même période au nombre de 55 en 2013, 7 en 2014 et 51 en 2015 – ce dernier chiffre élevé s’expliquant par le calendrier des grands travaux en cours de réalisation ainsi que par un nombre plus important cette année d’autorisations
Climat des affaires
Inflation (en %)
(rang dans le classement « Doing Business », sur 189 pays) * prévisions
1,30
jeune afrique
2013
2014
2015*
2016*
source : fmi
2012
167e 177e
0,45
2012
2013
2014
vernement a annoncé un nouveau programme de quinze privatisations, que doit mettre en œuvre un comité ad hoc. En attendant, la restructuration des entreprises publiques est un autre chantier important. Des objectifs de rendement ont été fixés, à l’exemple du secteur privé. Et les sociétés d’État sont dorénavant tenues de publier leur bilan annuel, une innovation fondamentale destinée à lutter contre l’opacité des comptes. Autant de bonnes pratiques qui devraient permettre de soutenir la relance économique en renforçant la confiance des investisseurs. Même si, comme le souligne le FMI dans son dernier rapport publié début juin, « des efforts restent à faire » en matière de transparence. ● BaudeLaire mieu
(en millions d’euros)
147e
2015
source : doing business
1,50
innovation. Le gou-
Investissements directs étrangers
158e 1,16
expresses du président de la République destinées à répondre à l’urgence de certaines situations.
2010
2011
2012
2013
256
233
244
269
n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
source : cnuced
L
’
enjeu est de taille pour la Côte d’Ivoire. Si le pays veut atteindre un taux de croissance à deux chiffres, le gouvernement doit parachever très rapidement les réformes en cours pour améliorer l’environnement des affaires, tout en assainissant les finances publiques. Des efforts ont déjà été réalisés ces dernières années. Les différents services budgétaires de l’État ont été centralisés, ce qui a fait disparaître les « caisses noires », alimentées par la parafiscalité, de certains ministères.
emprunt. La marge budgétaire du gouvernement mené par Daniel Kablan Duncan est étroite, compte tenu de ses engagements auprès du FMI. Après d’importantes tensions de trésorerie en 2014, la situation semble s’apaiser. La Côte d’Ivoire a mobilisé 1638 milliards de F CFA (2,5 milliards d’euros) au premier trimestre, soit 117 % du montant prévu, grâce notamment à l’emprunt obligataire émis en février. « La gestion des dépenses publiques semble saine, même s’il y a peut-être trop de prêts chinois. Mais l’endettement est limité [environ 43 % du PIB] et le déficit budgétaire, bien qu’en hausse à 3,7 % cette année, est à peu près contrôlé », estime un membre de la Mission économique française. ● ● ●
2,58
83
Le Plus de J.A. Côte d’Ivoire Du côté du secteur privé, l’enthousiasme est mesuré. La dette contractée par l’État auprès de nombreuses sociétés entre 2002 et 2010 n’a pas encore été intégralement réglée. Surtout, de nombreux patronsseplaignentdelapressionfiscaleet mettent en cause la corruption des agents du fisc et des douanes. Cette inquiétude a même été relayée en 2014 par les chancelleries européennes lors d’une réunion à Bruxelles, reconnaît un ministre.
●●●
Guillaume Binet/mYOP POur J.a.
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AvANCéeS. La gouvernance peut encore
êtreaméliorée.Au-delàdesfonctionnaires, c’est toute la société qui doit évoluer pour mettre de côté « les petits arrangements ». « Il faut redonner de la valeur au travail », admet un proche conseiller du président. « Ouattara a fixé le cap, rappelle Meïté Sindou, secrétaire national à la Gouvernance et au Renforcement des capacités. Il a créé un tribunal de commerce,uneAutoriténationalederégulation des marchés publics, et même une Haute Autorité pour la bonne gouvernance, dont l’ancien Premier ministre Seydou Diarra a pris la direction en avril. » En 2014, l’ONG Transparency International saluait les réformes entreprises en faisant gagner vingt places à la Côte d’Ivoire (115e sur 175 pays) dans son classement évaluant la perception de la corruption. Mais le changement des mentalités ne pourra pas se faire sans que les fruits de la croissance soient mieux partagés. Car si le PIB a augmenté de 20 % entre 2012 et 2014, plus de 51 % de la population vit toujours au-dessous du seuil de pauvreté (moins de 500 F CFA par jour). Mise en placed’unecouverturemaladieuniverselle pour les plus démunis, augmentation des revenus versés aux cacaoculteurs, hausse du smig et, tout dernièrement, déblocage du salaire des fonctionnaires… Le gouvernement peut se prévaloir de quelques avancées notables. Au premier trimestre, les dépenses dites « pro-pauvres » (éducation, santé…) ont dépassé de 65 milliards de F CFA le minimum fixé à 293 milliards de F CFA par le budget 2015. Alassane Ouattara sait qu’il tient là sans douteunedesclésdelamobilisationdeses supportersdanslacampagneélectorale.Le gouvernement pourrait aussidégainer une mesure permettant aux Ivoiriens encore privés de courant et proches du réseau électrique d’être raccordés pour un prix modique. Histoire de rallumer chez eux l’espoir de jours meilleurs. ● JuLIeN CLémeNÇOT, envoyé spécial n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
p Un cybercafé dans le quartier d’Adjamé, à Abidjan.
Ça réseaute! Rapprocher l’administration et le citoyen via… internet. C’est dans cet objectif que l’État va installer 7 000 km de fibre optique, créer 3 000 cybercentres et distribuer 500 000 ordinateurs.
L
a Côte d’Ivoire a peut-être trouvé son nouveau levier de croissance : la gouvernance électronique, c’est-à-dire l’utilisation des technologies de l’information et de la communication (TIC) par l’administration, qu’il s’agisse de la transmission de données ou des actes administratifs de tous les jours. « Le passage de la Côte d’Ivoire à la gouvernance électronique s’impose,card’énormespertes financières sont liées au mode actuel de gestion de l’administration. Les coûts des services pour le contribuable demeurent élevés parce qu’ils sont très peu informatisés », explique Bruno Koné, le ministre de la Poste et des TIC. Mais pour atteindre le service universel du téléphone et d’internet, maillon essentiel de la réalisation d’un tel projet, le pays doit encore se doter des infrastructures nécessaires. L’État a lancé plusieurs projets, dont le principal
reste la pose de 7 000 km de fibre optique à travers tout le pays. Depuis 2012, entre 40 et 50 milliards de F CFA (de 61 à 76 millions d’euros) ont été injectés dans la réalisation d’un premier réseau long de 1 400 km, qui attend toujours d’être mis en service. Les opérateurs de téléphonie mobile comme le sud-africain MTN, le français Orange et Moov, filiale locale de Maroc Télécom, se sont tous engagés dans le financement des travaux. La contribution prévue de l’État est de 115 milliards de F CFA. APPLICATIONS. « Pour
nous, il est hors de question de créer un apartheid numérique. Il faut poursuivre les investissements », confie Bruno Koné. C’est dans cette optique que l’État vient de lever 100 milliards de F CFA auprès des banques locales pour financer l’accès aux TIC, tant en milieu rural qu’en zone urbaine. Un autre projet
a été annoncé en avril, celui de créer près de 3000 cybercentres jusque dans les localités les plus reculées du pays. Le président, Alassane Ouattara, a aussi lancé en février une grande opération, « un Ivoirien, un ordinateur », visant à distribuer quelque 500000 appareils à ses concitoyens. Ainsi soutenu à bout de bras par les pouvoirs publics, le secteur des TIC est en pleine évolution en Côte d’Ivoire. Avec un chiffre d’affaires d’environ 1 000 milliards de F CFA en2014, il contribue à hauteur de 7 % à 8 % au PIB national. Et les applicationsnemanquent pas. Dans le cadre de la modernisation de l’agriculture, le gouvernement veut lancer une Bourse des produits vivriers copiée sur le modèle éthiopien. Par ailleurs, l’arrivée des nouvelles technologies rend d’ores et déjà de précieux services à la lutte contre la cybercriminalité. ● BAudeLAIre mIeu jeune afrique
PuBLi-inForMATion
Tr oi s ques Tions à …
Pascal KRA KOFFI Directeur Général du BNETD
Le BneTD est une société d’État qui emploie 1080 agents de compétences diverses, fonctionnant en la forme commerciale suivant les dispositions légales du droit privé et spécifiquement les actes uniformes de l’oHADA. Par ailleurs, le BneTD qui est une structure technique au service du développement, possède une expertise pluridisciplinaire avérée, qui lui vaut aujourd’hui, d’externaliser ses compétences dans les pays de l’Afrique de l’ouest et de l’Afrique Centrale. Quels sont les projets les plus importants dont vous avez contribué récemment à la réalisation ? Le BneTD conformément à ses missions, a appuyé le gouvernement ivoirien qui a lancé un vaste programme de reconstruction et de développement matérialisé par d’importants chantiers, notamment, la réhabilitation du CCiA, l’Hôpital saint Joseph Moscati, l’Hôpital Général de Gagnoa, le tronçon singrobo-Yamoussoukro de l’autoroute du nord, le pont Henri Konan Bédié, l’échangeur du Boulevard Giscard d’estaing… outre ces chantiers, il a été réalisé au titre du développement des régions de Côte d’ivoire, la réalisation d’importantes infrastructures. en effet, les régions du Tonkpi, du Bounkani, du Gontougo, du Poro, du Gbêkê, du Bélier et de l’iffou ont bénéficié d’un nombre important d’équipements, d’infrastructures routières et d’assainissement, d’hydraulique et d’électrification. Le BneTD y a coordonné dans la plupart des cas, tout ce qui est fait en termes de travaux par les différentes entreprises qui ont été sélectionnées.
Quels sont les projets futurs ? Aujourd’hui, l’ambition est de faire de la côte d’ivoire un pays émergent à l’horizon 2020. C’est une vision affichée d’un genre de développement nouveau dont les éléments catalyseurs sont déjà perceptibles à travers l’amélioration du climat des affaires, le nouveau code d’investissements plus attractif et les importantes réformes sectorielles engagées. Le BneTD qui se veut l’outil de mise en œuvre, a accompagné le gouvernement ivoirien dans l’identification des grands projets de l’émergence et prendra une part active dans leur réalisation. Ce sont : La construction d’une université de technologie (TeCHnoPoLis) : 12 460 milliards F CFA La construction du port sec de Ferkessédougou : 300 milliards F CFA, La construction de l’autoroute Yamoussoukro – Bouaké : 164 milliards F CFA, Les universités de Man, Bondoukou, san-Pedro : 184, 350 milliards F CFA chacun, Le Gazoduc est : 122 500 milliards F CFA, La construction de plusieurs barrages hydroélectriques et de centrales thermiques : environ 3002,77 milliards de F CA, L’aéroport international de san-Pedro : 60, 200 milliards F CFA et son Aérocité : 1120 milliards F CFA, Le projet émergence numérique 2020 : 25 milliards FCFA. Les agences BNETD Bénin - Tél. : +229 21 04 76 04 / 94 79 76 09 Guinée Équatoriale - Tél. : +240 551 653 726 / 551 653 888 Gabon - Tél. : +241 05 02 53 / 01 44 23 25 Congo - Tél. : +242 06 96 05 976 / 06 80 06 244 Bureau National d’Études Techniques et de Développement Boulevard Hassan II, Abidjan Cocody 01 B.P. 945 Abidjan 04 République de Côte d’Ivoire Tél. : +225 22 48 34 00 / 35 00 / 36 00 Fax : +225 22 44 56 66 Email : contact@bnetd.ci
www.bnetd.ci
DiFCoM/FC - PHoTos : Dr
Pouvez-vous nous présenter le BNETD ? Créé en 1978 sous la dénomination de Direction et Contrôle des Grands Travaux (DCGTx), le Bureau national d’Études Techniques et Développement (BneTD) est une grande innovation en Afrique et a contribué à plus de 80% à la réalisation des infrastructures de base et autres grands projets de développement de la Côte d’ivoire à travers ses missions qui sont : l’assistance et conseil, la conception et les études, le suivi et contrôle des travaux.
Face au succès de Choco Ivoire, à San Pedro, la firme envisage de monter une deuxième unité de broyage à Abidjan. agro-industrie
Les rois de la fève
secteur où la plupart des sociétés ivoiriennes éprouvent, elles, des difficultés.
Créée il y a onze ans, l’entreprise de négoce Saf Cacao, numéro trois du marché, tutoie déjà les multinationales. Un parcours sans faute que son trio de fondateurs entend bien poursuivre.
eMBeLLie. Dans ce contexte, pas ques-
S
AF Cacao, c’est l’histoire de trois associés ivoiro-libanais, dont l’aventure s’est muée en véritable success-story. En 2004, Ali Lakiss – le directeur général, aujourd’hui âgé de 50 ans – fonde avec deux frères, Ahmed (54 ans) et Adnan Amer (49 ans), la Société Amer et frères Cacao. La première année, l’entreprise vend 40 000 tonnes de fèves, puis 65 000 en 2005. Depuis, elle est devenue le troisième négociant de fèves de cacao en Côte d’Ivoire, après les géants suisse Barry Callebaut et américain Cargill Cocoa. Elle en commercialise 150 000 t par campagne, ainsi que 15 000 t de café. fierté. Mais SAF Cacao ne se contente
pas d’exporter. En septembre 2008, les trois associés décident de se lancer dans le broyage. Avec l’aide des banques locales, ils investissent 20 millions d’euros pour fonder Choco Ivoire, une usine d’une capacité de 100000 t installée à San Pedro. Une fierté nationale. JeanClaude Brou, ministre de l’Industrie et des Mines, et Jean-Louis Billon, ministre du Commerce, ne cachent pas leur admiration pour le parcours sans faute de cette n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
tion d’ouvrir le capital à des investisseurs, d’autant que les fluctuations des cours mondiaux du cacao n’ont pas affecté la bonne santé du négociant. L’embellie constatée sur les marchés internationaux laisse même espérer que SAF Cacao pourra continuer de jouer les premiers rôles devant des multinationales comme le singapourien Olam, sa filiale Outspan, le français Sucden ou l’ivoirien Zamacom.
entreprise, qui vient d’obtenir auprès de la banque panafricaine Afreximbank une ligne de crédit supplémentaire pour l’acquisition de nouveaux équipements. Choco Ivoire prévoit de tripler sa production dans les trois ans pour atteindre les 100 000 t de fèves broyées chaque année. La réforme de la f i l i è re ca f é - ca ca o dans un contexte difficile, le groupe mise en œuvre dans a vu son chiffre d’affaires grimper le pays depuis 2012 permet aujourd’hui à de 150 à 250 millions d’euros. l’entreprise d’espérer remplir ses objectifs. Même si la fiscalité En attendant, les trois dirigeants applicable sur la transformation du cacao mettent toutes leurs chances de leur grignote les marges, « nous sommes côté en s’entourant des techniciens les optimistes car, grâce à cette réforme, plus aguerris, allant débaucher jusqu’en les fèves sont de meilleure qualité », Europe pour être certains de travailler apprécie Ali Lakiss. selon les meilleurs standards internatioà l’avenir, SAF Cacao prévoit d’agrannaux. « Le métier du broyage est délicat dir ses installations au port d’Abidjan, et rigoureux. Nous voulons proposer où elle envisage aussi de monter une des produits semi-finis exempts de tout unité de broyage, et à San Pedro. Ces reproche à des chocolatiers toujours très projets, encore à l’étude, dépendront exigeants », explique Ali Lakiss. Tout en d’abord de la rentabilité des structures parlant, l’homme d’affaires garde les existantes. Le groupe a vu son chiffre yeux rivés sur l’écran de son téléphone d’affaires passer de 150 à 250 millions portable pour suivre en direct les cours d’euros en quelques années. La situation du cacao à Londres et à New York. ● paraît donc plutôt satisfaisante dans un BaudeLaire Mieu jeune afrique
© Nabil Zorkot pour J.a.
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IPS(WA) : DE L’EMBALLAGE À L’ÉNERGIE, EN PASSANT PAR L’AGRO-INDUSTRIE Industrial Promotion Services (West Africa), ou IPS(WA), est l’un des fleurons de l’économie ouestafricaine et une réussite industrielle dont les activités s’étendent d’Abidjan à Dakar. Fondée en 1965, IPS(WA), qui fête cette année ses 50 ans, est présente dans des secteurs aussi variés que l’Emballage, son premier métier, l’Agro-Industrie et l’Énergie. Ces trois secteurs forment ensemble un pôle industriel important de la sous-région. Le chiffre d’affaires d’IPS (WA) était de 312 milliards de F CFA en 2014, le nombre d’employés de 3 500, tandis que quelques 80 000 cotonculteurs ivoiriens et burkinabés vivent de la production qu’ils écoulent auprès des usines d’Ivoire Coton et de Faso Coton appartenant à l’Institution. « Une de nos caractéristiques », explique son Directeur Général, Mahamadou Sylla, installé dans les bureaux d’IPS(WA) à Cocody (Abidjan) « est que nous cherchons à investir dans des secteurs à forte valeur ajoutée sur le développement des pays. Ainsi, dans les années 90, nous avons privilégié le secteur du coton à fort impact sur le développement rural et quitté le secteur du métal qui pouvait être occupé par des PME locales ». Au cours de son demi-siècle d’existence, IPS(WA) a largement démontré qu’il était possible de faire de l’industrie un moteur de développement durable en Afrique. Même plus : le vecteur d’une amélioration de la qualité de vie.
UN DÉVELOPPEMENT EN TROIS TEMPS Entre le premier Président de la République de Côte d’Ivoire, Félix Houphouët-Boigny et Son Altesse l’Aga Khan, 49e imam des musulmans chiites ismailis et bâtisseur d’un réseau de développement
À gauche. Les amandes de CAJOU des SAVANES, le dernier projet d’IPS(WA) inauguré à Bouaké (Côte d’Ivoire) en 2014, sont conditionnées pour l’exportation. À droite. Située à Dakar, l’usine de FUMOA est spécialisée dans la fabrication de fûts métalliques, mais aussi de flacons et bidons.
Dès 1997, IPS(WA) a participé au développement de la centrale thermique d’Azito, près d’Abidjan. Celle-ci est aujourd’hui la première pourvoyeuse d’électricité en Côte d’Ivoire et l’une des centrales thermiques les plus performantes d’Afrique. Le 30 juin de cette année, la troisième turbine, alimentée exclusivement par les gaz d’échappement des deux autres turbines, a été inaugurée, portant la capacité de la centrale à 420 mégawatts.
privé unique au monde, l’AKDN (Réseau Aga Khan de développement), s’est noué un solide lien d’amitié, né de leur volonté inébranlable de bâtir un environnement favorable au développement économique et social de ce pays, à partir de la création d’un secteur privé performant. À l’époque, la Côte d’Ivoire pouvait compter sur ses richesses agricoles comme le cacao ou le café, mais le pays n’avait pas développé de moyens suffisants pour conditionner sa production. De son côté, le chef spirituel de la communauté ismailie avait déjà investi dans la fabrication industrielle de sacs de jute au Bangladesh. Plutôt que d’importer les sacs du Bangladesh vers la Côte d’Ivoire, les deux hommes ont lancé le pari de les faire fabriquer à Abidjan. C’est ainsi que FILTISAC, la première unité industrielle d’IPS(WA), a vu le jour en 1965 dans la banlieue d’Abidjan. Durant les premières décennies, IPS(WA) s’est essentiellement développée autour de l’expertise acquise dans l’Emballage. Dans les années 80, FILTISAC a ouvert en face des bâtiments traitant le jute, une unité de tissage de sacs en fibres synthétiques afin de répondre aux besoins d’emballage de denrées nouvelles comme le ciment, le riz ou le maïs. Dans les années 90, IPS(WA) a décidé de franchir les frontières ivoiriennes, en ouvrant des filiales de FILTISAC dans les pays voisins : au Burkina Faso (FASOPLAST), au Sénégal (COFISAC et FUMOA) et au Mali (EMBALMALI). Enfin, les années 2000 ont vu l’extension rapide d’une nouvelle industrie à FILTISAC comme dans ses filiales : celle des emballages rigides (préformes, bouteilles, jerrycans, etc.) en polyéthylène ou en polypropylène. En Côte d’Ivoire, les trois unités réunies sur le même site, produisant sacs de jute, sacs synthétiques et emballages rigides, font de FILTISAC, le leader incontesté de l’emballage.
L’Afrique de l’Ouest de son côté, n’a cessé d’évoluer : à la fin des années 90, la plupart des pays de la région ont décidé de privatiser de larges pans de leurs économies. Le secteur de l’agro-industrie, longtemps aux mains de l’Etat, s’est ouvert aux investisseurs privés. C’était l’occasion idéale pour IPS(WA) de se lancer dans un nouveau secteur d’activités : en 1998, l’Institution a acquis aux côtés de la société suisse Paul Reinhart-AG, trois unités de production de coton, situées dans le nord-ouest de la Côte d’Ivoire et fondé Ivoire Coton, avant de racheter une décennie plus tard, l’unité de M’Bengue située plus au nord. En 2004, IPS(WA) rachète également les actifs de la Sofitex à Ouagadougou et crée Faso Coton. Mais au Burkina Faso, c’est dans l’industrie sucrière qu’IPS (WA) réalise son plus gros investissement. La société d’État SO.SU.HV qui donnait du travail à des milliers de personnes dans la région sudouest, souffrait de la concurrence des importateurs. En 1998, IPS(WA) décide de reprendre la société en la rebaptisant SN SOSUCO. Malgré les difficultés économiques auxquelles est confrontée la société, IPS(WA) veut maintenir le cap et relever le défi d’un équilibre financier pour que le premier employeur privé du pays ne disparaisse pas de la carte économique. Après l’Emballage qui répondait à des besoins pratiques, l’investissement dans le secteur agricole était porteur d’une dimension éthique chère à l’AKDN : avoir un impact social important en termes de création d’emplois et d’amélioration du niveau de vie à une échelle régionale. Mais pour IPS(WA), comme pour les autres sociétés installées en Côte d’Ivoire, le développement industriel continuait d’être entravé par un problème fondamental : les infrastructures. Les usines souffraient, notamment, d’un manque d’approvisionnement en énergie. Pour faire face aux investissements colossaux que requiert le secteur des infrastructures, la Côte d’Ivoire s’est mise à la recherche de partenariats avec des inves-
À gauche. La SN SOSUCO, premier employeur privé au Burkina Faso, exploite 4000 ha de canne à sucre près de Banfora. À droite. L’usine de Boundiali, l’une des trois unités d’Ivoire Coton, transforme la graine de coton en fibres. Elle produit 1 200 balles de coton par jour.
La transformation de la fibre de jute tissée en sac est le premier métier d’IPS(WA).
tisseurs privés. Dans cet esprit de coopération avec les États, les institutions financières et d’autres bailleurs de fonds qui a marqué son histoire, l’Institution s’est alors lancée dans son troisième secteur d’activité : l’Energie. Dès 1997, IPS(WA) a participé au développement de la centrale thermique d’Azito, près d’Abidjan. Celle-ci est aujourd’hui la première pourvoyeuse d’électricité en Côte d’Ivoire et l’une des centrales thermiques les plus performantes d’Afrique. Le 30 juin de cette année, la troisième turbine, alimentée exclusivement par les gaz d’échappement des deux autres turbines, a été inaugurée. Tout en portant la capacité de la centrale à 420 mégawatts, cette troisième phase permet à IPS(WA) d’atteindre une nouvelle fois son objectif : le développement durable.
ANTICIPER LES CHANGEMENTS « Nous sommes soucieux d’accompagner les changements majeurs que connaît l’Afrique », rappelle Mahamadou Sylla. En effet, à chaque étape de son développement, IPS(WA) s’est efforcée d’anticiper, tout en consolidant ses acquis. « Par exemple dans le secteur de l’Emballage, nous tenons compte du fait qu’en 2035, l’Afrique de l’Ouest aura un taux d’urbanisation de plus de 40 %, soit une population urbaine de près de 300 millions de personnes », explique encore le Directeur Général d’IPS(WA). Ce sont donc des millions de personnes qui vont modifier leurs habitudes de vie, notamment alimentaires, augmentant ainsi leurs besoins en produits de grande consommation, voraces en emballages. Accompagnant pas à pas ces changements, les unités d’emballage d’IPS(WA) ne cessent d’étoffer leurs gammes : aux côtés de la production de préformes, de flacons ou de bidons, FILTISAC vient ainsi d’acquérir une unité de fabrication de bouchons de dernière génération d’une capacité d’un million de bouchons par jour, grâce à un système de compression unique en Côte d’Ivoire.
tion de puits d’eau potable , de centres de santé et d’alphabétisation pour adultes dans les zones cotonnières, ou encore l’appui technique apporté aux cultivateurs de coton et aux coopératives féminines de cultures vivrières afin d’améliorer leurs rendements.
Dans le secteur agro-industriel, c’est la noix de cajou qui est devenue le nouveau défi d’IPS(WA). Le constat de base est celui-ci : si les noix de l’anacardier ont acquis une valeur croissante sur le marché mondial, la production et la transformation de la noix de cajou en amande sont largement en dessous de leur potentiel de croissance en Côte d’Ivoire. Avec ses 580 000 tonnes de noix brutes exportées en 2014, la Côte d’Ivoire fournit pourtant un quart de la production mondiale. En transformant ces noix brutes en amandes de cajou, le pays pourrait faire de l’anacarde un nouveau moteur industriel et s’imposer face à l’Asie qui transforme actuellement quelques 95% des noix brutes. L’opportunité est réelle, mais demande des moyens : la main d’œuvre n’est pas formée, les filières sont à construire, le savoir-faire à acquérir. IPS(WA) décide de relever le défi et ouvre en 2014, Cajou des Savanes, sa première usine de transformation de la noix à Bouaké. Près de 500 ouvrières sont engagées en un temps record et quelques 2 000 tonnes de noix sont transformées en amandes blanches, en 2014. La saison 2015 est plus ambitieuse encore : elle vise la transformation de 7 500 tonnes, tout en développant l’assistance technique aux agriculteurs, à l’image de la filière cotonnière. Grâce à ce projet, IPS(WA) est une nouvelle fois au cœur de la philosophie du Réseau Aga Khan de développement dont elle fait partie : servir de catalyseur au développement d’un nouveau secteur industriel. « A IPS(WA), le choix des activités est inspiré par la philosophie de l’AKDN », souligne Mahamadou Sylla. « Pour Son Altesse l’Aga Khan, le développement s’appuie sur trois fondements : le social, l’économique et le culturel ». En termes concrets, cela signifie que dans chaque secteur d’activité, un volet social est mis en place, notamment à travers des centres médicaux accueillant aussi bien les salariés et leurs familles que les communautés environnantes ; à travers l’installa-
Cette dimension éthique, qui guide les choix d’IPS(WA), se retrouve au sein même de l’institution. Il y a deux ans, les salariés ont été invités à définir les valeurs qu’ils désiraient pour leur société. Dans chaque société appartenant à IPS(WA), des discussions ont eu lieu et les valeurs dégagées par chacune d’elles sont remontées jusqu’au Siège à Abidjan. Elles y ont été résumées en un mot : LEADER. L pour leader, E pour engagement, A pour amélioration permanente, D pour diversité, E pour éthique et R pour responsabilité. Dans toutes les sociétés d’IPS(WA), ces six valeurs sont affichées comme un leitmotiv. En cela aussi, IPS(WA) s’inscrit dans la philosophie du Réseau Aga Khan de développement. Partout où œuvre l’AKDN, règne en effet un esprit de service humble et dévoué, qui ne s’encombre ni de publicités excessives, ni de mises en avant individuelles. Le secret d’une réussite aussi incontestable que discrète. ■
Le siège d’IPS(WA) à Abidjan, dans le quartier de Cocody.
DIFCOM/FC - PHOTOS : GAËL TURINE ET IPS(WA)
FILTISAC dispose également d’une unité de fabrication de sacs en fibres synthétiques (ci-dessus) ainsi que d’une unité d’emballages rigides.
Car le développement durable auquel aspire l’AKDN ne peut apparaître que si l’amélioration du niveau de vie économique s’accompagne également d’une amélioration de la qualité de vie sur le plan social et culturel. « Dans la commune d’Abobo où est implantée FILTISAC », témoigne l’un de ses directeurs, « chaque famille a au moins un parent qui travaille dans l’entreprise. Cela permet à une grande partie de la communauté d’accéder à une couverture sociale et médicale. Cette situation a certainement contribué à motiver les équipes pour que les usines continuent à tourner le plus longtemps possible durant la dernière crise ».
Côte d’ivoire 2011-2015 : le vrai bilan INFRASTRUCTURES
À fond la caisse Construction de ponts, prolongement de l’autoroute du Nord… En cette fin de quinquennat, l’agence ivoirienne de gestion des routes, maître d’œuvre des travaux commandés par l’État, ne chôme pas.
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est toujours avec une cerempruntés du pays. Selon une étude du taine fierté que le chef de ministère des Infrastructures, plus de l’État, Alassane Ouattara, 13000 véhicules empruntent chaque jour inaugure de nouvelles cette route, qui file jusqu’à la frontière avec infrastructures. Après le pont Henrile Ghana, avant de traverser le Togo et le Konan-Bédié, à Abidjan, construit Bénin pour rejoindre le Nigeria. en 2014 pour 125 milliards de F CFA Mais le projet le plus important reste (190 millions d’euros) par Socoprim, le prolongement de l’autoroute du Nord filiale locale du français Bouygues, le préjusqu’à Bouaké, puis au Burkina Faso. sident a, le 21 mars, coupé le ruban sur le pont Philippeles revenus provenant des voies Grégoire-Yacé, réalisé à à péage lui permettent d’investir Jacqueville (Sud) pour un dans de nouveaux projets. coût de 22,5 milliards de F CFA. Des événements qui doivent beaucoup à l’Agence ivoirienne Cette artère, qui reliera Abidjan au reste de gestion des routes (Ageroute), maître du pays, s’annonce comme l’un des poud’œuvre de ces travaux, qui s’attaque mons économiques du pays. Lancée dans aujourd’hui à la réhabilitation d’un autre les années 1980 par le président Félix ouvrage de prestige : le pont Charles-deHouphouët-Boigny, cette voie stratégique Gaulle, construit en 1967 sur la lagune mène déjà à Yamoussoukro depuis 2013. Ébrié. Le chantier a commencé le 2 juin Reste la question du financement de et devrait prendre fin en octobre. tous ces chantiers. Principal contributeur, Les projets routiers sont de plus en l’État s’engage à investir chaque année plus nombreux en Côte d’Ivoire. L’État s’est donné pour objectif de désenclaver toutes les régions sans exception, et l’Ageroute ne lésine pas sur les moyens pour mettre ses compétences à sa disposition – et réaliser la majorité de ces équipements avant le terme du quinquennat, en octobre. Fin 2013, l’agence a ainsi conclu un accord de partenariat avec son homologue sud-coréen Korea Expressway Corporation. « Cela nous a permis d’envoyer des ingénieurs ivoiriens en Corée du Sud pour profiter de leur longue expérience dans le domaine », explique Bouaké Fofana, directeur général de l’Ageroute.
4 % du PIB dans le développement des infrastructures routières, soit environ 500 milliards de F CFA. Un montant bien insuffisant qui oblige le gouvernement à solliciter les différentes institutions de développement de la région, comme la Banque islamique de développement (BID) ou la Banque ouest-africaine de développement (BOAD). transparenCe. De son côté, l’Ageroute
mise sur la pérennité des infrastructures qu’elle réalise. Les revenus provenant des voies à péage lui permettent en effet d’entretenir les routes et de réinvestir dans d’autres projets, qui sont attribués sur appels d’offres internationaux, en toute transparence. Les entreprises sélectionnées ont souvent une renommée mondiale, preuve supplémentaire de l’intérêt que suscite à nouveau la Côte d’Ivoire auprès des opérateurs étrangers. ● Baudelaire mieu
de devenir un pays émergent, poursuitil. De nombreux projets sont prévus : la construction du pont d’Azito, qui serait le quatrième à Abidjan, ou l’extension du réseau routier existant dans le pays. » Un cinquième pont est d’ores et déjà prévu dans la capitale économique, ainsi que la rénovation de la voie express entre Abidjan et Grand-Bassam, appelée à devenir l’un des tronçons autoroutiers les plus jeune afrique
© SIA KAMBOU/AFP
poumon. « La Côte d’Ivoire est en passe
p Après le pont Henri-Konan-Bédié, inauguré à Abidjan en 2014, d’autres ouvrages de même envergure devraient suivre. n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
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le Plus de J.A. Côte d’ivoire
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Habitat
Programme de construction massive Il y a cinq ans, Alassane Ouattara avait promis de réaliser 60 000 logements sociaux. Plus de 80 % des chantiers sont concentrés à Abidjan, où les premières maisons sortent de terre.
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est l’effervescence sur le marché de l’habitat social, privé comme public. La croissance continue de la démographie, conjuguée à une urbanisation soutenue, a créé d’énormes besoins dans tous les secteurs, même en logements de haut et moyen standings. Les statistiques sont formelles : elles font état d’un déficit de 400 000 logements dans tout le pays, dont 200 000 à Abidjan. Pour améliorer la situation, le gouvernement porte à bout de bras de nombreux projets immobiliers. C’était une promesse d’Alassane Ouattara lorsqu’il était candidat à l’élection présidentielle de 2010 : 60 000 logements, dont 50 000 pour la seule capitale économique, où la demande a littéralement explosé. Les premiers chantiers ont commencé.
Plusieurs sociétés immobilières, locales et étrangères, ont répondu aux appels d’offres. L’État a retenu 39 promoteurs pour les chantiers publics. Parmi eux, le groupe marocain Addoha, qui va réaliser plus de 9 000 logements sociaux
moyen standings. Mais en plus des promoteurs privés, la Société ivoirienne de construction et de gestion immobilière (Sicogi), entreprise publique dirigée par Loukimane Camara, a elle aussi commencé les travaux de construction de 15 000 habitations sur l’ensemble du territoire, soit outre le financement, l’accès aux tout de même 25 % du promatériaux de construction reste gramme gouvernemental.
un problème difficile à résoudre.
et économiques – appartements ou maisons – dans les environs d’Abidjan. Les premières maisons sortent déjà de terre et devraient être livrées prochainement. L’autre grand groupe marocain du bâtiment, Alliances, construit de son côté près de 14 000 logements à Abidjan, dont 10 000 sociaux et 4 000 de haut et
villes nouvelles. À quels prix les Ivoiriens pourront-ils devenir propriétaires de ces nouvelles habitations ? Il faudra compter entre 5 millions et 10 millions de F CFA (entre 7 620 et 15 240 euros) pour un logement social ; entre 10 millions et 15 millions de F CFA pour un logement dit économique ; entre 15 millions et 22 millions
SIA KAMBOU
Les acquéreurs devront payer un droit de préinscription et verser un apport initial représentant 10 % du prix du logement.
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jeune afrique
2011-2015 : le vrai bilan
CiMenterie. Outre le financement
des programmes, l’accès aux matériaux de construction est aussi un problème difficile à résoudre. Pour contourner cet obstacle, le groupe Addoha a monté en 2013, à Abidjan, une cimenterie d’une capacité de production annuelle de 1 million de tonnes, ainsi qu’une usine de fabrication de sacs pour l’emballage du ciment. La Sicogi, elle, envisage de créer une unité industrielle de matériaux et une autre de préfabrication de logements. En dehors du programme présidentiel, une trentaine de projets plus modestes ont vu le jour à l’initiative de promoteurs immobiliers comme la SCI Les Rosiers, qui construit des logements sociaux mais aussi des complexes résidentiels, ou la Société ivoirienne de promotion immobilière (Sipim), qui réalise des grands ensembles d’immeubles et un complexe pavillonnaire. Des chantiers qui n’ont cependant rien à voir avec le luxueux projet Camellio de Tchegbao SA, filiale du groupe de bancassurance NSIA : 63 résidences de très haut standing à CocodyAbatta, vendues autour de 265 millions de F CFA. ● BaudeLaire Mieu jeune afrique
questions à Mamadou Sanogo Ministre de la Construction, du Logement, de l’Assainissement et de l’Urbanisme
« La révolution du logement est en marche »
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n poste depuis décembre 2012, Mamadou Sanogo (52 ans) a transformé son ministère. Ce consultant en ingénierie informatique a informatisé son administration et réformé son organisation. Il souhaite maintenant se concentrer sur le développement des logements sociaux, programme phare du quinquennat d’Alassane Ouattara, inscrit au rang des priorités par le ministre. jeune afrique : Pourquoi le programme de logements sociaux a-t-il accusé un tel retard ? MaMadou Sanogo : Parce qu’il y
avait beaucoup à faire ! Il a d’abord fallu trouver le foncier à Abidjan et à l’intérieur du pays. Puis mobiliser les moyens financiers correspondant aux droits coutumiers de ces terrains. Et enfin réaliser les études, les états des lieux nécessaires, la topographie de l’urbanisme en prévision de l’aménagement des sites. Rien de tout cela n’avait été fait. Il fallait remotiver tout le monde et, pour cela, nous avons lancé en mars 2013 et début 2014 deux vastes opérations de présouscription et de précommercialisation des logements, tant en Côte d’Ivoire qu’auprès de la diaspora. Nous avons reçu près de 75 000 demandes pour un programme de 60000 logements. Trente-neuf promoteurs ont été sélectionnés, sur une liste de 150.Tous les acteurs se sont ainsi remobilisés, et le programme a pu démarrer. Depuis le mois de janvier 2015, c’est plus de 40 milliards de F CFA [plus de 60 millions d’euros] qui ont été décaissés par l’État. La Côte d’ivoire a-t-elle les moyens de financer un tel programme ?
Il va être difficile de produire des maisons à 5 millions de F CFA l’unité compte tenu de l’augmentation du coût des matériaux. Nous demandons surtout une production massive de
© dr
de F CFA pour une habitation de moyen standing ; et plus de 25 millions de F CFA pour le haut standing. Les acquéreurs devront en outre payer un droit de préinscription de 30 000 F CFA, puis verser un apport initial représentant 10 % du prix du logement. Pour les entreprises aussi, la question du prix n’est pas anodine. « Les besoins de financement s’élèvent à 150 milliards de F CFA, indique Loukimane Camara. Nous scellons des partenariats stratégiques pour partager l’investissement, ce qui nous permet de contrôler notre endettement et ainsi d’être rentables. » Pour réaliser 20 000 logements (dont 15 000 du programme présidentiel) représentant un investissement de 335 milliards de F CFA, la Sicogi s’est ainsi alliée au béninois Agetur International, au chinois Henan Guoji, au sud-africain Megatron et au néerlandais SLE Global Logistics… L’entreprise publique envisage même de développer des villes nouvelles de 150 000 habitants à Grand-Bassam et à Abidjan, avant d’étendre le concept à la commune de Bingerville.
logements estimés entre 12 et 15 millions de F CFA. En analysant les 75 000 dossiers de souscripteurs réceptionnés, nous avons pu constater que plus de 60 % risquent de voir leur projet rejeté auprès des banquiers et des promoteurs immobiliers. que pouvez-vous faire ?
Face à cette situation, nous avons décidé de trouver une solution durable et pragmatique pour le plus grand nombre. Nous explorons un nouveau concept dénommé « lotissement à équipement modéré » sur quatre sites différents. C’est une approche mixte entre l’autoconstruction et la promotion immobilière. Pour l’État, le mode opératoire consiste à se doter de réserves foncières à aménager. À lui d’apporter l’eau, l’électricité, les routes nécessaires, de réaliser les plateformes de soubassement mises ensuite à la disposition des souscripteurs pour qu’ils montent les murs de leur future maison, sur une superficie de 80 m2 à 102 m2. Ces modèles de maison n’ont rien à envier à ceux proposés par les promoteurs. La révolution ivoirienne est en marche en matière de logement. Et elle pourrait inspirer plus d’un pays en Afrique. ● Propos recueillis par B.M. n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
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le plus de J.a. côte d’ivoire portrait
Thierry dogbo, au nom de ses pairs Ce Franco-Ivoirien est de ceux qui ont réveillé l’architecture du pays dans les années 1990. à l’œuvre sur tous les fronts, il regrette qu’on ne valorise pas plus les compétences locales.
«
T
out, des chiottes aux gratte-ciel. » Lorsqu’on lui demande sa spécialité, Thierry Dogbo répond par cette image, un brin provocatrice. Formé à l’École spéciale d’architecture de Paris, ce Franco-Ivoirien de 52 ans fut avec Issa Diabaté, au sein du cabinet Guillaume Koffi, l’un des artisans du réveil des architectes ivoiriens dès le milieu des années 1990. Avant de fonder son propre cabinet (CATD, pour Cabinet d’architecture Thierry Dogbo) à Abidjan, en 2004. Des édifices de prestige, comme le siège du Port autonome d’Abidjan ou la Mosquée du Plateau, aux immeubles d’habitation et de commerce ou aux villas, ses réalisations touchent à tous les domaines. « J’ai toujours conservé une vision ouverte et fonctionnelle de l’architecture », résume cet admirateur de Le Corbusier. Et, désormais, plus verte : « Les folies climatisées des années 1980 et 1990 sont derrière nous. C’est le retour des ventilations traversantes, l’arrivée des ampoules LED, la limitation des espaces inutiles pour économiser les matériaux », détaille-t-il. prudenT. Quand nous le rencontrons,
u Formé à Paris, il a travaillé avec Guillaume Koffi et Issa Diabaté avant de monter son cabinet en 2004.
Mais depuis 2011, l’optimisme a regagné du terrain, et Thierry Dogbo a toutes les raisons de se réjouir de la situation en Côte d’Ivoire. « Je n’ai pas voté pour Ouattara, mais j’aime la paix et j’en reprendrais bien pour cinq ans », explique ce père de deux garçons, avant de confier qu’il n’ira sûrement pas déposer son bulletin dans l’urne lors de la prochaine élection présidentielle, car il ne croit plus aux promesses des hommes politiques. Rentré en 1996 après vingt ans passés en France parce qu’il ne voyait plus d’évolution possible pour sa carrière, Thierry Dogbo a assisté à la dégringolade de son pays : un Bédié hautain dont
Thierry Dogbo ne manque pas de projets : un hôtel, une résidence de standing et, pour le compte du groupe immobilier marocain Alliances, un vaste complexe de 65 ha mêlant logements sociaux et appar« la baie de cocody ? un projet tements destinés à la marocain. Quant au plan d’urbanisme classe moyenne. Quand on lui fait remarquer d’abidjan, il est japonais… » que le donneur d’ordres, dont le siège est à Casablanca, vit des l’entourage commettait trop d’écarts moments difficiles, l’homme ne s’émeut de conduite, puis les coups de feu des guère. Dix années de crise lui ont appris hommes du général Gueï, et enfin l’isola prudence. Associé à une jeune archilement de la période Gbagbo. Mais il ne tecte, Huguette Ruzibiza, il se contente tirera pas sur l’ex-président, désormais d’employer trois techniciens et une assishôte de la Cour pénale de La Haye. « Ni tante. Tous les autres collaborateurs sont Alassane Ouattara ni la communauté des free-lances. internationale ne l’ont laissé gouverner. n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
© ANANIAS LEKI DAGO POUR J.A.
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La couverture maladie universelle actuellement mise en place par le pouvoir, c’était son idée », argumente cet homme de gauche, profondément marqué par la victoire de François Mitterrand en France, en 1981. considéraTion. Élu au Conseil national
de l’ordre des architectes de Côte d’Ivoire en 2005 (il l’a quitté en 2014), Thierry Dogbo, qui a participé en 2007 à la création du salon Archibat d’Abidjan, regrette la tendance du gouvernement actuel à chercher son salut à l’étranger. « Pour la réhabilitation de la baie de Cocody, c’est un projet marocain qui a été retenu. Quant au plan d’urbanisme de la ville d’Abidjan, il est japonais… Et tout cela pour des questions de financement. Pourtant, les Ivoiriens ont de l’argent, alors pourquoi n’essaie-t-on pas de le mobiliser pour développer nos propres projets ? » se demande celui dont le père, Vincent Dogbo, avec lequel il collabore sur certains projets, fut le premier urbaniste ivoirien. Les 160 professionnels inscrits à l’ordre des architectes gagneraient, selon lui, à être pris davantage en considération dans un pays où 80 % des constructions se font sans leur intervention. ● Julien clémençoT jeune afrique
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le Plus de J.A. Côte d’Ivoire DÉveloppement rÉgional
Quand Bouaké la rebelle renaît de ses cendres Durement marquée par dix années de crise politico-militaire, l’activité de la deuxième ville du pays et ex-fief de la rébellion reprend peu à peu, mais trop lentement cependant pour ses habitants.
À
l’entrée sud de Bouaké, le barrage filtrant tenu par des gendarmes armés passe presque inaperçu. L’œil s’attarde plutôt sur les dizaines de camions ployant sous la charge, en route vers Abidjan. Ils viennent de Séguela, à l’ouest, de Katiola ou Korhogo, au nord, mais aussi du Niger, de la Guinée, du Sénégal et du Burkina Faso. Bouaké, capitale de la rébellion entre 2002 et 2011 et deuxième ville de Côte d’Ivoire, avec ses 600 000 habitants, est redevenu un carrefour commercial, comme en témoigne la présence d’un bureau des chargeurs burkinabè sur le parking. Quelques centaines de mètres plus loin, le camp des Casques bleus pakistanais est l’un des derniers vestiges de la décennie de crise qui a culminé après l’élection
présidentielle perdue par Laurent Gbagbo en novembre 2010. Il y a un peu plus de dix-huit mois, la visite d’Alassane Ouattara a donné le signal d’un nouveau départ. « Les rues ont été nettoyées, toute une série de travaux ont été lancés pour que la vie reprenne un cours normal », détaille Nicolas Djibo, le maire (lire interview p. 100), qui, pour bien faire passer le message, a relancé en avril le carnaval de sa ville, qui n’avait pas eu lieu depuis vingt ans. Bouaké recommence à danser mais continue de panser ses plaies. En plein centre-ville, un petit bâtiment au toit effondré rappelle toujours la violence des combats de novembre 2004, lorsque les pilotes ukrainiens des forces aériennes ivoiriennes ont bombardé le commandement des Forces nouvelles
de Guillaume Soro. « Les Abidjanais continuent de penser que Bouaké est une zone dangereuse. Mais cette époque est loin derrière nous », insiste Abdramane Thiéro, directeur de cabinet du maire. « Même si des armes circulent encore, la sécurité s’est largement améliorée dans la région, notamment depuis que l’armée et la gendarmerie, en 2014, ont mené des opérations communes », confirme un haut gradé. Et la grogne des militaires, sortis des casernes en
FtG file un mauvais coton Les autorités tentent de sauver la plus ancienne manufacture de textile d’Afrique de l’Ouest, en difficultés financières.
A
u milieu des herbes folles, les bâtiments coloniaux sont encore debout malgré les assauts du temps. Sur le site des Établissements Robert- Gonfreville (ERG) s’est écrite l’une des plus belles pages de l’histoire industrielle du continent. Première manufacture de textile intégrée (de la filature à la confection) en Afrique occidentale lors de sa construction en 1921, ERG a connu ses heures de gloire au cours des années 1970 et 1980. Environ 4000 salariés y travaillaient pour fabriquer notamment les uniformes des armées et des polices de la sous-région. Aujourd’hui, l’immense site de 60 ha ressemble à une ville fantôme. À distance de la route qui mène à l’aéroport, 200 salariés font tourner au
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ralenti les activités de filature et de tissage reprises en 1993 par Filature Tissage Gonfreville (FTG). Placée en redressement judiciaire en 2014, l’entreprise veut encore croire en des jours meilleurs. Soutenus par le maire de la ville et le gouvernement, le directeur général et l’administrateur chargé de la société depuis sa mise en liquidation se battent pour trouver un repreneur. À l’Arrêt. Les difficultés de l’usine ont
commencé au début des années 1990, lorsque le textile chinois a imposé sa suprématie. Fragilisé, ERG a bénéficié d’un premier plan de relance marqué par la scission de la manufacture en deux sociétés : FTG pour la filature, le tissage et la teinture, et Texicodi pour
l’impression. La société d’égrenage Global-Cotton est venue compléter le dispositif au début des années 2000. Mais la décennie de crise ivoirienne a balayé les espoirs de relance. « Après 2002, nous ne trouvions plus de financement, les clients ne pouvaient plus venir nous voir. Mais nous avons continué en récupérant sur les machines à l’arrêt les pièces nécessaires pour entretenir celles encore en mesure de fonctionner », explique Maxime Zounon, directeur général de FTG. La majorité des lignes de production sont aujourd’hui à l’arrêt. « Nous traitons encore trois tonnes de matière par jour – coton brut ou fil –, estime Maxime Zounon. Bien sûr c’est très loin des 20 tonnes quotidiennes que nous transformions avant la crise. » Dans la salle des métiers à tisser, la poussière de coton recouvre le matériel hors d’usage, tandis qu’une poignée d’hommes s’activent au jeune afrique
2011-2015 : le vrai bilan
© AnAniAs Leki DAgo pour J.A.
t Les motos chinoises défilent sur les grands carrefours, signe que la cité s’est remise à danser.
novembre, l’arme en bandoulière ? Plus qu’un mauvais souvenir depuis le versement des primes promises par le gouvernement fin mai. Pour ramener le calme, le pouvoir avait aussi impliqué dans les négociations le lieutenant-colonel Hervé Touré Armand Pelikan, connu sous le pseudo de Vetcho lorsqu’il était le comzone de Katiola. Très respecté parmi les hommes du rang, il a pris la tête du troisième bataillon d’infanterie de Bouaké dans la foulée.
son des dernières machines encore en fonctionnement. Les derniers investissements ont été réalisés en 2000, et tout est pratiquement obsolète. « Aujourd’hui, le véritable actif, c’est la réserve foncière », estime Abdramane Thiéro, directeur de cabinet du maire de Bouaké. atouts. « Gonfreville a encore de nom-
breux atouts, insiste cependant le directeur général. Nous sommes proches à la fois de la zone de production cotonnière et d’Abidjan. Notre proximité avec l’Europe [douze jours en bateau] nous offre un avantage concurrentiel par rapport à la Chine. La Côte d’Ivoire doit suivre l’exemple de pays comme l’Éthiopie, dont l’industrie textile est en plein développement. » À la recherche d’un tour de table mêlant capitaux ivoiriens et étrangers, Maxime Zounon affine son plan Jeune Afrique
La réconciliation, souvent si difficile à appréhender, semble bien engagée. Dans un fief où le soutien aux nordistes est majoritaire, les autorités religieuses auraient joué un rôle important pour renouer le dialogue entre les communautés. « Fin avril, Pascal Affi N’Guessan, le président du Front populaire ivoirien [FPI, le parti de Gbagbo], est venu en tournée pendant quinze jours sans aucun problème », explique Marcel Konan, ancien correspondant du quotidien L’Expression et désormais responsable de la communication à la mairie. fourmilière. « La paix n’est pas un
vain mot, mais un comportement », aimait répéter Félix Houphouët-Boigny. À Bouaké, tout semble indiquer que la ville a effectivement tourné la page des années noires. Autour de l’ancien marché central, les échoppes prospèrent. Sur les grands carrefours, des escadrons de petites motos chinoises, sur lesquelles se serrent des gamins, donnent à la ville l’image d’une fourmilière saisie d’une agitation saine. Bouaké fait ● ● ●
de relance. Prévus sur trois ans, les investissements sont estimés à 10 millions d’euros, dont la moitié devra être injectée d’ici à la fin de 2016. Le chiffre d’affaires de FTG pourrait, selon son directeur général, atteindre 20 millions d’euros, contre environ 2 millions en 2014. « C’est tout à fait possible puisque, durant nos meilleures années, les résultats dépassaient 28 milliards de F CFA [près de 43 millions d’euros] », indique le patron. Pour qu’une reprise soit possible, l’entreprise devra aussi renégocier une dette de plusieurs milliards de F CFA avec ses fournisseurs et les banques du pays. Maxime Zounon ne veut pas croire à la fermeture définitive du site. Le président Alassane Ouattara n’a-t-il pas promis, lors de sa visite d’État à Bouaké, en novembre 2013, de relancer les activités de l’usine ? ● Julien clémençot
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Mais dans l’immédiat, l’avenir de la cité dépend largement d’Abidjan et du programme d’urgence présidentiel. Plusieurs projets de construction de HLM ont bien été signés, mais le premier chantier de 400 logements, exécuté par l’entreprise Faso Baara sur la route de l’université, n’en est qu’au stade des fondations.
© AnAniAs Leki DAgo pour J.A.
ABONDANCE. L’émergence de nouvelles
filières économiques comme l’anacarde permet également à Bouaké de croire en son destin. En trois ans, la ville est devenue la capitale africaine de la noix de cajou, avec l’ouverture de quatre usines de transformation. D’autres devraient encore suivre tant l’offre de noix brute est localement abondante. La Côte d’Ivoire pourrait devenir, d’ici à 2020, le premier producp Bouaké est devenue la capitale africaine de la noix de cajou. teur mondial devant l’Inde. Inaugurée en Inaugurée en 2014, l’usine de transformation du groupe IPS a créé 600 emplois. 2014, l’unité de transformation du groupe IPS (propriété de l’Aga Khan) a créé 600 emplois, dont 80 % sont occupés par des ● ● ● de nouveau recette, et les enseignes milliers de salariés. « Avant, une famille des grands groupes fleurissent en ville. femmes. Rémunérées en fonction de leur disposait de 1 000 à 2 000 F CFA par jour Les stations-service ont retrouvé leur productivité, elles doivent pouvoir, grâce pour nourrir quatre ou cinq personnes. logo, le spécialiste de la quincaillerie et aux objectifs fixés, toucher au moins le Désormais, avec la même somme, il des matériaux de construction Bernabé smig, explique Ashak Shériff, directeur faut à manger pour dix parce qu’on a accueilli les neveux, les frères et sœurs, les a rouvert ses portes, tout comme le port des opérations. sec et le chemin de fer exploités par le cousins », explique un travailleur social. La mairie espère également réactiver la groupe français Bolloré. Air Côte d’Ivoire L’immigration en provenance du Burkina filièretextile,encommençantparsauverce a même inauguré, en 2014, une liaison Faso, du Mali, de Guinée et du Sénégal qui reste de la manufacture de Gonfreville, avec Abidjan. Et le soir, les maquis font est une préoccupation supplémentaire fondée en 1921 (lire pp. 96-97). Nicolas le plein en partie grâce aux étudiants, Djibo souhaite aussi amérevenus il y a déjà trois ans. Ils sont près nager une nouvelle zone logements, électricité, eau… de 30 000 à fréquenter les deux campus industrielle pour attirer Face à la pression démographique, d’autres entreprises, car de l’université Alassane-Ouattara dont un la municipalité semble démunie. vient d’être rénové. « La ville renaît même l’ancienne a été grignos’il reste beaucoup à faire, notamment tée par les constructions au niveau économique », estime Émile pour les autorités de Bouaké, que ses menées en désordre. Mais ces derniers Brou Koffi, directeur du département habitants surnomment « la ville Cedeao ». mois, son énergie a surtout été absorbée géographie de l’université. Pénurie de logements, problème d’acpar le projet de reconstruction du marché Pourtant, pour de nombreux ménages, cès à l’électricité, à l’eau: face à la pression central, partien fuméeen 1998.Lestravaux quotidien rime encore avec précarité. Si, démographique, la municipalité semble commenceront d’ici à deux ans. L’objectif: regrouper dans une grande halle, financée en moyenne, 51 % des Ivoiriens vivent bien démunie. Le budget de la commune, avec moins de 500 F CFA (0,76 euro) par multiplié par deux depuis 2013, n’est que par l’Agence française de développement, jour, la proportion est plus importante à de 3 milliards de F CFA. « Pour toutes les une bonne partie des commerçants qui Bouaké. « Pas besoin de lunettes pour voir décisions d’investissement, nous devons squattent illégalement les trottoirs de la que la pauvreté a progressé », constate nous tourner vers notre tutelle. Nous ville. À Bouaké, les rebelles, c’est de l’hisMariam Ouattara, directrice régionale des plaidons pour que l’administration des toire ancienne. ● affaires sociales. Avec la crise, les usines communes évolue vers plus de décentraJuliEN ClémENçOt, ont fermé, laissant sur le carreau des lisation », explique Abdramane Thiéro. envoyé spécial à Bouaké
Le Plus de j.a. Côte d’ivoire t L’édile souhaite donner une dimension nationale au carnaval de sa ville.
des écoles, de l’approvisionnement en eau, de l’accès à l’électricité. Ce qui a été annoncé a été en grande partie réalisé, à l’exception de deux rues qui doivent encore être bitumées.
© AnAniAs Leki DAgo pour J.A.
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nicolas Djibo « La visite de Ouattara a marqué un nouveau départ » Pour relancer l’économie locale, le maire de Bouaké mise sur les secteurs du textile, de l’agriculture et du tourisme.
É
lu en 2013 (soit trente-trois ans après son père, maire de Bouaké de 1960 à 1980), Nicolas Djibo, 66 ans, est membre du Rassemblement des républicains (RDR, au pouvoir). Il est aussi président de la Chambre de commerce et d’industrie de Côte d’Ivoire.
jeune afrique: en 2013, vous avez été élu maire de Bouaké. Dans quel état avezvous trouvé la ville? niCOLaS DjiBO: La situation était catas-
trophique. Au niveau de la mairie, les problèmesdegouvernanceétaientnombreux, etlavilleendettée.Lesservicespublicssont insuffisants tant en termes de quantité que d’efficacité.Surleplanéconomique,lacrise adurédixans,maisBouakéareculédeplus de vingt ans. En 2002, la commune tenait la deuxième place des villes de l’UEMOA [Union économique et monétaire ouestafricaine]entermesdecréationderichesse, juste devant Dakar. Aujourd’hui, une ville comme Bobo-Dioulasso, au Burkina Faso, est probablement devant Bouaké. La population de Bouaké est-elle plus pauvre aujourd’hui qu’en 2002? n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
C’est très net. Pour deux raisons : premièrement, la fermeture des entreprises. L’usine textile de Gonfreville employait plus de 800 salariés, contre 200 actuellement. La plupart des entreprises sont dans le même cas. L’autre cause de cet appauvrissement est politique. Pendant la crise, Bouaké était la capitale de la rébellion. Le gouvernement n’y avait fait
La construction d’une nouvelle zone industrielle à Bouaké est évoquée…
Oui, car celle qui existe est minée par les constructions anarchiques. Le plus facile est d’en créer une nouvelle à l’ouest de la ville, à un endroit où convergent la route et le rail, non loin de l’aéroport. Mais ce projet de plus de 100 milliards de F CFA [plus de 150 millions d’euros] est trop coûteux pour la municipalité, dont le budget n’est que de 3 milliards de F CFA. Notre espoir est que cela deviendra un chantier gouvernemental. quels sont les secteurs qui peuvent créer de l’activité dans les années à venir ?
En quelques années, Bouaké est devenu la capitale de l’anacarde [noix de cajou], notamment grâce au groupe Olam, qui y a installé la plus grande usine du pays, avec une capacité de traitement de 10000 tonnes par an. Puis le groupe de l’Aga Khan et d’autres investisseurs ont suivi. Le textile peut encore jouer un rôle à Bouaké. Par le passé, c’était la seule ville où toutes les activités, de l’égrenage à la confection en passant par la filature, le tissage et la teinture, étaient concentrées. Le secteur touristique mérite aussi d’être dynamisé. En 2015, Bouaké a organisé
si le taux de pauvreté est de 51 % en Côte d’ivoire, ici il est d’au moins 60 %. aucun investissement. Laurent Gbagbo l’avait banni. Si en Côte d’Ivoire, le taux de pauvreté est de 51 %, à Bouaké il est d’au moins 60 %. La forte immigration en provenance du Mali, du Burkina Faso et de Guinée n’a rien arrangé.
son premier carnaval depuis vingt ans. Cet événement peut avoir une dimension nationale à condition d’améliorer l’offre hôtelière.
Votre ville profite-t-elle de la croissance ivoirienne ?
Bouaké n’a pas connu de graves tensions. Sans doute parce que les autorités religieuses, avant même que le gouvernement ne prenne l’initiative, se sont emparées de ce dossier pour limiter les conflits entre les communautés. ●
La visite d’Alassane Ouattara, en novembre 2013, a marqué un nouveau départ. Dans le cadre du plan présidentiel d’urgence, toute une série de travaux a été lancée au niveau des routes, des hôpitaux,
quel bilan faites-vous du processus de réconciliation dans votre commune ?
Propos recueillis par juLien CLÉmençOt jeune afrique
Le plus de J.A. Côte d’Ivoire
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ambiance
La Zone 4, désormais à deux pas… de danse Ce quartier de Marcory est le point de rendez-vous des noctambules abidjanais. Et la construction du pont Henri-Konan-Bédié, en facilitant son accès, va encore accroître sa fréquentation.
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© ananias leki dago pour j.a.
n soir de mai au Toa. Une fois passé l’orage, l’atmosphère s’adoucit et les températures aussi. Sur la terrasse de ce bar branché d’Abidjan, un jeune couple d’Ivoiriens, rentrés au pays depuis moins d’un an, discute de son avenir. Quel serait le meilleur moyen de dépenser leur argent ? « Il faut acheter un terrain maintenant. Je veux me réveiller et entendre le chant des oiseaux », dit la femme, tout de blanc vêtue, avant de régler l’addition. Ainsi va la vie en Zone 4. Coincé entre le boulevard Valéry-Giscard-d’Estaing et le boulevarddeMarseille,cesous-quartierde la commune de Marcory est l’un des points « show » de la métropole ivoirienne, lieu de résidence d’environ 70 % des expatriés – à commencer par les Français – et des fortunes libanaises établies depuis plus longtemps à Abidjan. C’est également là que se trouve la résidence privée de l’excomzoneIssiakaOuattara,plusconnusous le nom de Wattao, aujourd’hui commandant en second de la garde républicaine, de retour dans la capitale ivoirienne après dix mois de formation au Maroc.
p Depuis 2005, le Parker Place accueille la fine fleur du reggae ivoirien. n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
Ceux qui veulent dîner pour commenHistoriquement, la Zone 4 doit son cer la soirée n’auront que l’embarras du succès à sa position géographique, non choix entre les cocktails du 37.2, les tapas loin de l’aéroport international FélixHouphouët-Boigny. Sa proximité avec la du Che Café, les sushis du Kaiten ou les base militaire française de Port-Bouët en saveurs du monde proposées au Loft. fait l’un des endroits les plus sécurisés Ils peuvent ensuite déguster une glace chez Amore ou opter pour un concert de la ville. Un argument qui ne laisse pas insensibles les grandes entreprises interdonné par la fine fleur du reggae local au nationales depuis longtemps implanParker Place, créé en 2005 par un Ivoirien de la diaspora. Les danseurs pourront tées dans le quartier, comme Nestlé ou Nescafé. Aujourd’hui, ce faubourg C’est le lieu de résidence chic et résidentiel du sud d’environ 70 % des expatriés, de la ville est le centre névralgique de Marcory. à commencer par les Français. Tous les grands supermarquant à eux choisir entre le Vodka Bar, chés y sont regroupés, et un club de le Privé Club ou encore le tout récent gym très moderne, l’Olympia, a même Blue Avenue. Sans oublier bien sûr le ouvert ses portes en début d’année. Mais c’est surtout à ses nuits chaudes et effréMix Night Club, célèbre discothèque où se donnent rendez-vous les stars du nées que la Zone 4 doit sa célébrité. Les ballon rond : Didier Drogba, Gervinho noctambules sont sûrs de trouver leur bonheur tant le nombre de restaurants ou Romaric s’y rendent à chacun de leur et de night-clubs au kilomètre carré est passage à Abidjan. impressionnant. Et entre les anciennes et les nouvelles adresses, la concurrence « rUe serpent ». À quelques minutes est rude ! de là, sur la rue adjacente Alex-Fleming, la société espagnole Pefaco a ouvert une salle de jeux, sous sa marque Lydia Ludic, qui s’est vite imposée comme l’une des attractions majeures du secteur. Si la Zone 4 est un lieu attrayant, c’est aussi parce qu’il est celui de tous les vices… La rue Pierre-et-Marie-Curie est surnommée rue Serpent, en référence aux sifflets lancés par les essaims de prostituées qui bourdonnent le long de cette artère. Surnommées toutou, djandjou, djantra, tchoin, forces nouvelles, génération pressée-pressée ou lanceuses de foulard, les professionnelles du sexe échappent difficilement aux contrôles de la police durant la semaine. « Nous ne voulons plus que nos rues donnent l’image d’un bordel à ciel ouvert », explique Nathalie Blassony, responsable de la communication à la mairie de Marcory. La Zone 4 a toujours été réputée pour sa vie nocturne débridée. Dans les années 1980-1990, c’était déjà l’endroit où tout le monde sortait pour être vu ou pour se déhancher aux rythmes ● ● ● jeune afrique
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● ● ● de LL Cool J. Deux mouvements de hip-hop s’y affrontaient, les intellectuels de la Flotte impériale répondant au Ministère Authentik, plus populaire.
nouvelle clientèle. Le quartier est
pourtant longtemps resté inaccessible à une bonne partie de la population à cause de ses tarifs souvent assez élevés, mais aussi de sa position géographique un peu excentrée. Une barrière que la construction du pont Henri-KonanBédié, qui descend depuis Cocody, a en partie levée. Il permet aujourd’hui aux nombreux Abidjanais qui y travaillent de gagner un temps fou dans les transports. « Avant, je devais passer par le Plateau, le boulevard Valéry-Giscard-d’Estaing et traverser tout Marcory. Aujourd’hui, il ne me faut que cinq à dix minutes pour me rendre en Zone 4 », explique une habitante de Cocody. Conséquence : une nouvelle clientèle commence à arriver. « Avant, la nuit était réservée aux expatriés, remarque un habitué. Maintenant, l’affluence est plus diversifiée. » Consciente de l’opportunité que représente le pont Henri-Konan-Bédié, Aby Raoul, la maire de Marcory, fait tout pour améliorer l’offre de son quartier. Des travaux de voirie ont débuté, et n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
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Le Mix Night Club, célèbre discothèque où il n’est pas rare de croiser les footballeurs Didier Drogba, Gervinho et Romaric.
le dispositif d’éclairage – encore très défaillant – est progressivement mis en place. Surtout, l’édile projette de transformer le boulevard de Marseille en une « balade du monde » composée de galeries marchandes représentatives des cinq continents et réservée aux piétons. Les autorités locales veulent faire de ce
projet, estimé à 300 milliards de F CFA (environ 457 millions d’euros), le nouveau visage de la Zone 4. Difficile dans ce contexte de contenter des riverains parfois ulcérés par l’agitation nocturne, malgré un arrêté récent contre les nuisances sonores. ● vincent Duhem jeune afrique
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espoir 2000 aussi fait bouger-bouger Des paroles sarcastiques au rythme du zouglou : depuis vingt ans, cette formule simple assure le succès du duo… qui rêve de suivre les pas de Magic System à l’international.
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uand elles entendent parler d’Espoir 2000, les Ivoiriennes lèvent les yeux au ciel. Si elles sont les premières à se trémousser sur la musique endiablée de l’un des groupes de zouglou les plus populaires du moment, elles reçoivent assez mal les paroles souvent sarcastiques qui leur sont destinées. « J’aime bien taquiner les femmes », avoue sans aucune gêne Hugues Patrick Ossohou, alias Pat Saco, le chanteur du duo qu’il forme avec Valéry Théa Doubo, dit Valéry. « Les intellectuels du zouglou » – c’est leur surnom – ont rencontré le succès en 1997 avec la sortie de leur premier album, Éléphant d’Afrique. Un an plus tard, leur opus Série C cartonne au hitparade, avec plus de 213000 exemplaires vendus. Une sacrée performance pour un marché comme celui de la Côte d’Ivoire. Mais c’est aussi depuis cette date que le groupe traîne sa réputation de misogyne. La chanson éponyme de l’opus, « Série C », raconte en effet le manque d’ambition des adolescentes qui préfèrent abandonner tôt leurs études pour devenir coiffeuses, chômeuses ou « chasseuses de primes ». Comprendre : des filles aux mœurs faciles et âpres au gain. Succès immédiat ! Plusieurs albums, plus ou moins bien reçus, se suivent entre 2000 et 2014. Ce qui n’empêche pas Espoir 2000 d’être régulièrement récompensé pour l’ensemble de son œuvre. Non content d’accumuler les prix à travers le continent, le groupe multiplie les concerts en Europe et en Amérique du Nord depuis qu’il fait partie de la playlist de la radio Africa no 1. popularité. Si la réussite est au rendez-
vous, il y a encore une chose que Pat Saco espère : jouer dans les salles parisiennes du Zénith ou de Bercy, devenues ces dernières années des lieux de passage obligé pour tout artiste africain qui souhaite n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
u L’objectif de Pat Saco (à g.) et Valéry : jouer dans les salles parisiennes du Zénith ou de Bercy.
« J’aime bien taquiner les femmes », avoue le chanteur du groupe. tester sa popularité en France. « Notre objectif est de réussir une grande carrière internationale pour porter le zouglou au plus haut, comme sait si bien le faire le groupe Magic System », explique Pat Saco. Du rêve à la réalité il n’y a qu’un pas, mais le chemin vers la reconnaissance internationale est encore long. Le duo le sait, qui a dû surmonter bien des épreuves. Shura, un ancien membre du groupe, a ainsi préféré abandonner l’aventure en cours de route. Un petit accident de parcours qui n’a pas entamé l’ambition du duo Saco-Valéry d’atteindre les sommets du zouglou en Côte d’Ivoire et sur le continent. Pour ce faire, Espoir 2000 a ensuite cru bon de se concentrer sur la consolidation de son propre label, qui, dès son lancement, s’est diversifié en lançant un journal de promotion du zouglou. L’objectif :
© AnAniAs LEKi-DAGO pOur J.A.
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faire découvrir aux nouvelles générations cette musique créée dans les années 1990 par des étudiants en révolte contre la société. Mais l’expérience Zouglou Mag a été de courte durée… Qu’à cela ne tienne, les deux acolytes ne s’arrêtent pas là. « Alors que la tendance chez les artistes est de créer une maison de production qui forme des groupes en devenir, nous préférons pour le moment lutter contre la piraterie, d’où notre partenariat avec Microsoft Afrique pour la protection de la propriété intellectuelle », poursuit le chanteur. En novembre, le groupe célébrera ses vingt ans de carrière. Les festivités devraient réunir toutes les générations d’artistes qui ont donné ses lettres de noblesse à ce genre musical 100 % ivoirien. ● Baudelaire Mieu jeune afrique
Le Plus de J.A. Côte d’ivoire
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Au studio, des animateurs bien connus des Ivoiriens, comme Digbeu Cravate (à dr.) et Kajeem (au fond).
© SIA KAMBOU/Afp
de Rire & Chansons. Les Ivoiriens ont besoin de se regarder autrement et de sourire. Cette radio est thérapeutique pour la Côte d’Ivoire, et culturelle, puisque nous diffusons toutes les musiques », précise Alpha Blondy. Guy Constant Niza, animateur de Bonjour l’Afrique, émission programmée chaque jour de 7 heures à 10 heures, acquiesce : « Nous évitons de parler des sujets sensibles. » Au lancement, l’ambition était légèrement différente. « Dans mes premières émissions, il y avait de l’information et des rubriques précises. Mais nous nous sommes rapidement rendu compte que, sur les sujets sensibles, le temps du débat débordait souvent », concède l’animateur de la matinale. Médias
Sur Alpha Blondy Fm, « surtout pas de politique! » La radio lancée par le reggaeman en 2014 se veut thérapeutique : rien que du bon son, de l’humour et de la bonne humeur. On évite les sujets qui fâchent.
C
réer une radio. Un vieux rêve enfin réalisé par le pape du reggae ivoirien, actuellement en tournée mondiale. Pour faire visiter les locaux d’Alpha Blondy FM 97.9, « la fréquence qui fait sourire le bon Dieu », Mohamed Haidara, son président, reçoit au deuxième étage du centre commercial Peace and Unity Center, à Abidjan. Le bâtiment, encore en travaux, est situé dans le quartier de Riviera 3, près de la maison du chanteur, ronde, colorée et surmontée d’une statue de Cupidon pointant son arc vers le ciel. Une porte tapissée ouvre sur une large pièce qui sert à la fois de salle d’attente, de rendez-vous et de montage. Au mur, une photo, datée de la fin des années 1980, d’Alpha Blondy au côté de l’ancien président Félix Houphouët-Boigny, puis une autre de sa grand-mère, la même qui figure sur la pochette de son dernier album, Positive Energy. « Nos bureaux seront bientôt disponibles », précise le longiligne Mohamed Haidara, qui n 0 2844 • du 12 au 18 juillet 2015
connaît le reggaeman depuis les bancs du lycée de Korhogo. Il a également été son premier manager, avant de diriger Alpha Blondy FM en 2014, à bientôt 60 ans. Credo. L’idée a germé dès les premiers
LeCture. Alpha Blondy n’intervient en
personne que dans une seule émission. Tous les soirs de la semaine, de 21 heures à 23 heures, dans L’Amour du livre, il fait la lecture de ses ouvrages de référence. D’Allah n’est pas obligé, de l’Ivoirien Ahmadou Kourouma, à Une vie de boy, du Camerounais Ferdinand Oyono, en passant par L’Enfant noir, du Guinéen Camara Laye, et Le monde s’effondre, du Nigérian Chinua Achebe. Engagée de longue date pour le changement social, la star du reggae se mue en conteur pour inciter les jeunes à aimer les livres. « Je veux susciter l’envie de ceux qui n’aiment pas lire. L’Afrique, c’est la culture de l’oralité », explique le chanteur. Entièrement financée par la Fondation Alpha Blondy, la radio est actuellement en pourparlers avec plusieurs gros annonceurs, dont Orange, pour poursuivre son développement. Le stu-
succès de la longue carrière d’Alpha Blondy, âgé aujourd’hui de 62 ans. C’est notamment grâce à l’aide logistique du programmateur français Christophe Nény qu’elle a vu le jour en mars 2014. Aujourd’hui, engagée de longue date pour une quinzaine de salariés le changement social, la star font tourner la machine : l’humoriste Digbeu du reggae se mue en conteur. Cravate, la rappeuse Nash ou encore le reggaeman Kajeem… La dio d’enregistrement vient de recevoir plupart des animateurs sont des perdes équipements vidéo pour que les sonnalités connues en Côte d’Ivoire et émissions puissent aussi être regarrodées au monde radiophonique. dées. Quant au grand hall d’entrée, il Le credo est simple : du bon son et de sera bientôt transformé pour accueillir la bonne humeur. « Nous diffusons de des concerts en direct et des émissions l’humour, de la musique, surtout pas de ouvertes au public. ● politique ! Un peu sur le modèle français VinCent duhem jeune afrique
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