Gabon Un nouveau départ ?
Arabie saoudite-Iran La nouvelle guerre du Moyen-Orient par Béchir Ben Yahmed
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 58e année • no 2966 • du 12 au 18 novembre 2017
jeuneafrique.com
Énergie Pourquoi l’Afrique mise sur le gaz Maroc Ilyas El Omari, l’insubmersible
DJIBOUTI
Dans la cour des grands
Spécial 14 pages
TUNISIE
L’héritier
Autorité de l’État, présidentialisation du régime, droits des femmes… Trente ans après la destitution de Bourguiba, la manière dont Béji Caïd Essebsi exerce le pouvoir rappelle de plus en plus celle de son mentor. ÉDITION INTERNATIONALE ET MAGHREB & MOYEN-ORIENT France3,80€•Algérie250DA•Allemagne4,80€•Autriche4,80€•Belgique3,80€•Canada6,50$CAN•Espagne4,30€•Éthiopie67birrs•Grèce4,80€•Guadeloupe4,60€ Guyane 5,80 € • Italie 4,30 € • Luxembourg 4,80 € • Maroc 25 DH • Martinique 4,60 € • Mauritanie 1200 MRO • Mayotte 4,60 € • Norvège 48 NK • Pays-Bas 4,80 € Portugal cont. 4,30 € • Réunion 4,60 € • RD Congo 6,10 $ US • Royaume-Uni 3,60 £ • Suisse 6,50 FS • Tunisie 3,50 DT • USA 6,90 $ US • Zone CFA 2000 F CFA • ISSN 1950-1285
DJIBOUTI, CARREFOUR STRATÉGIQUE DE L’AFRIQUE Djibouti est devenu un " hub ! multimodal stratégique liant l’Afrique au monde grâce à un investissement massif dans ses ports, son chemin de fer et bientôt son nouvel aéroport.
Ports
Chemin de fer Situés sur deux des routes maritimes les plus fréquentées au monde, les ports de Djibouti sont au cœur de l’offre commerciale et logistique de le région.
Aéroport Après avoir relancé la compagnie nationale Air Djibouti, le pays se dote d’un aéroport dernier cri qui permettra de développer une offre multimodale complète.
Nouvelle route de la soie Djibouti est une étape stratégique sur la nouvelle « route de la soie », initiative du gouvernement chinois. Ce qui était une ambition, convertir Djibouti en carrefour commercial, est désormais une réalité.
A terme, la voie ferrée qui relie Djibouti City à Addis-Ababa en Ethiopie traversera le continent, développant les flux économiques de 13 pays africains enclavés.
Zone franche internationale La plus grande zone franche du continent africain, 48 km2, offre des conditions d’investissement incomparables, avec entre autre, un taux d’imposition de 0%.
Contacts Website: http://dpfza.gov.dj Twitter: @dpfza Facebook: @DPFZA.DjiboutiPortsFreeZoneAuthority
LE PLUS
de Jeune Afrique
DIPLOMATIE Vent d’est, vent d’ouest
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INTERVIEW Mahmoud AliYoussouf, ministre des Affaires étrangères ÉNERGIE À toute vapeur BANQUE Terre promise
Le chef de l’État djiboutien, Ismaïl Omar Guelleh, avec ses homologues somalien, kényan et éthiopien, en 2016 au palais de Ras Dika.
Dans la cour des grands JEUNE AFRIQUE
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VINCENT FOURNIER/JA
DJIBOUTI
Le Plus de Jeune Afrique
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Prélude François Soudan
Djiboutiens, encore un effort!
P
endant quarante-huit heures, mesure a tenu une semaine ! C’est que à la mi-septembre, l’avion les enjeux économiques de l’empire du chargé de qat attendu chaque qat sont considérables, non seulement jour par des dizaines de milen Éthiopie, où cet arbuste rapporte à l’État presque autant d’argent que liers de Djiboutiens ne s’est pas posé le café, mais aussi au Yémen, dont il sur l’aéroport d’Ambouli. « Ce fut une est la principale culture, au Kenya, journée colorée, joyeuse, agréable et personne n’en est mort », écrit le qui alimente le marché somalien, et à quotidien La Nation, avant d’ajouter : Djibouti même, où sa distribution fait « Et s’il en était ainsi tous les jours ? » vivre des centaines de revendeuses et Pour les accros à cette plante – 70 % représente, sous forme de taxes, 15 % des hommes, 20 % des femmes, ditdes recettes fiscales du Trésor. Pourtant avérés, les effets négatifs sur la santé on – que compte la République de Djibouti, cette perspective relève des consommateurs, le budget des de l’impensable tant la mastication de ses Le qat assoupit littéralement feuilles bourrées de l’économie nationale, à partir principes actifs aux effets proches de ceux de 15 heures jusqu’au soir. des amphétamines ménages, les équilibres familiaux et relève du lien social, de l’identité commune et de la convivialité assul’environnement pèsent apparemment de peu de poids par rapport à ce qu’il mée. Importées d’Éthiopie par vol matinal et mises en vente à la mifaut bien appeler une dépendance nationale. journée sur des centaines d’étals entre 400 et 5 000 francs djiboutiens (de 2 À l’heure où Djibouti s’affirme à 26 euros) la botte, selon la qualité en hub incontournable sur l’une et la fraîcheur, les dix à douze tonnes des plus grandes voies maritimes quotidiennes de qat assoupissent de la planète, force est pourtant de littéralement l’économie nationale, à partir de 15 heures jusqu’au coucher constater que cette habitude physiodu soleil. Dans les « mabrazes », ces logique et culturelle est un obstacle salons qui sont aux Djiboutiens ce et une obsolescence. S’engourdir que les « grains » sont aux Maliens, chaque après-midi que Dieu fait et les vendredis en prime sous l’effet on broute en groupe, loin des grands vents de la mondialisation et des clid’un narcotique, même léger, pose un vages politico-ethniques internes. problème et devrait susciter un débat qui transcende les affrontements poliInterdire l’importation et la tiques – il est d’ailleurs intéressant de consommation du qat? L’ex-président constater que l’opposition ne le pose pas. Si décréter l’interdiction du qat Hassan Gouled Aptidon s’y est essayé au lendemain de l’indépendance, n’est sans doute pas la solution, c’est avant de se rendre compte que cette par l’éducation et la pédagogie que mesure n’avait fait qu’alimenter une passe le sevrage. Et le constat répété contrebande féroce. Plus récemment, qu’une « journée sans » peut être une en septembre 2016, le gouvernement « journée agréable ». Djiboutiens, encore un effort ! somaliena cru bonde faire de même: la JEUNE AFRIQUE
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DIPLOMATIE Vent d’est, vent d’ouest p. 70 INTERVIEW Mahmoud Ali Youssouf Ministre des Affaires étrangères p. 75 POLITIQUE Tant d’inconnues, si peu de suspense p. 78 ÉNERGIE
À toute vapeur
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TRANSPORTS En phase « terminal » p. 84 BANQUE Terre promise
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TOURISME Popote et melting-pot p. 90
SUIVEZ Toute l’actualité de Djibouti
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Le Plus de Jeune Afrique
ENJEUX
Vent d’est, vent d’ouest
Inauguration en grande pompe de la base militaire du géant asiatique, le 1er août, à Doraleh.
Dans la cour des grands
L
a République de Djibouti a créé l’événement en 2017. D’abord en fêtant dignement les 40 ans de son existence, le 27 juin. Puis en assistant, le 1er août, à l’inauguration officielle de la première base militaire chinoise à l’étranger. Construite sur la baie de Doraleh, juste derrière l’immense port multifonction lui aussi dévoilé au printemps, elle abrite un contingent de 400 hommes chargés de protéger les intérêts et les ressortissants de l’empire du Milieu dans la région. Et d’affirmer, au passage, la volonté chinoise de tenir toute sa place sur la scène internationale. Annoncée de longue date comme étant la première perle du collier que Pékin veut confectionner le long de l’océan Indien pour protéger l’une de ses nouvelles routes de la soie, la construction de cette caserne n’avait suscité jusqu’alors que peu de réactions internationales, en dehors de quelques grincements de dents chez les alliés américains et surtout japonais, également présents militairement à Djibouti. Il semble que l’installation physique de l’Armée populaire le long de la mer Rouge ait quelque peu crispé les chancelleries, dans une ville portuaire qui prend des allures du Casablanca de la Seconde Guerre mondiale. « Il faut gérer le poulailler », résume un consul étranger. Et c’est ce que les autorités djiboutiennes apprennent à faire, avec un corps diplomatique toujours plus étoffé où chaque silence, chaque absence laisse dorénavant libre cours à toutes les interprétations, au gré des grilles de lecture de chacun.
L’implantation récente de la première base militaire chinoise semble avoir changé la donne diplomatique à Djibouti. L’occasion pour le pays de sortir d’un partenariat trop exclusif pour chercher à tisser de nouveaux liens, notamment avec l’Inde ou avec la France. envoyé spécial
STR/AFP
OLIVIER CASLIN,
MÉFIANCE. Comme cela a été le cas lors de la réception officielle du président indien, Ram Nath Kovind, le 4 octobre, devant l’ensemble des représentations diplomatiques implantées à Djibouti, mais en l’absence – très remarquée et commentée en coulisses – de l’ambassadeur chinois. « Pékin a voulu signifier son agacement devant la volonté djiboutienne de développer un partenariat économique avec l’autre géant asiatique », veut croire le chargé d’affaires d’une ambassade occidentale, pendant qu’un de ses collègues, en poste dans un autre consulat, y voit carrément une illustration de « l’arrogance des Chinois depuis qu’ils disposent de cette base ». L’arrivée prochaine du nouvel ambassadeur américain, l’expérimenté Larry André, attendu en janvier, pour occuper un poste vacant depuis bientôt un an, va donc intervenir dans un contexte diplomatique marqué, selon certains, « par la prudence, voire la méfiance » entre certaines chancelleries. Comme si, après avoir été l’un des théâtres d’opérations les plus chauds de la guerre froide, la Corne de l’Afrique et Djibouti allaient se retrouver à nouveau au cœur des luttes d’influence menées sur le terrain par les plus grandes puissances de la planète. Si la nouvelle donne, consécutive à la présence militaire chinoise, semble avoir troublé certaines N 0 2966 • DU 12 AU 18 NOVEMBRE 2017
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Le Plus de JA Djibouti
L’urgence aujourd’hui pour le pays est de voir fonctionner les différentes infrastructures récemment réalisées.
relations de bon voisinage entre les diplomates en poste à Djibouti, elle pourrait également avoir brouillé les liens privilégiés tissés depuis 2012 entre le pays hôte et la Chine. « La lune de miel semble terminée », assure un diplomate, qui voit, dans les efforts actuels du gouvernement djiboutien à tisser des liens avec les Indiens ou à renouer de bonnes relations avec les Français (lire encadré ci-dessous) ou les Émiratis, le désir de sortir d’un partenariat un peu trop exclusif avec les Chinois. DETTE. Officiellement, les rapports entre les deux
pays restent des plus cordiaux et semblent toujours aussi constructifs, alors que de nouveaux projets d’infrastructures sont annoncés à travers le pays. Officieusement, l’arrivée à échéance des premiers remboursements de la colossale dette publique détenue par la Chine – plus de 60 % du PIB actuellement – commencerait à inquiéter les autorités djiboutiennes, selon de nombreux observateurs. C’est la raison pour laquelle, toujours selon ces derniers, le Parlement djiboutien a adopté une loi très controversée, fin octobre, autorisant le gouvernement à renégocier unilatéralement les contrats publics. Les responsables djiboutiens expliquent qu’elle a été passée pour garantir les intérêts du pays, en matière de contenu local, notamment dans l’emploi. Mais beaucoup estiment qu’elle doit surtout permettre aux autorités locales de rediscuter des taux d’intérêt, quasi usuriers, imposés par Pékin pour la réalisation de certains équipements.
Là encore, la rumeur va bon train. Seule certitude, comme l’aurait annoncé dernièrement en petit comité Zhang Guoqing, l’ambassadeur de Chine dans le pays, « Djibouti payera ». « Ce n’est pas la première fois que Pékin est confronté à une telle situation en Afrique. Mais c’est une première pour Djibouti », rappelle un membre du corps diplomatique. Vu la hauteur des investissements en jeu – 14 milliards de dollars – et l’interdépendance des relations entre la Chine d’un côté, Djibouti et l’Éthiopie de l’autre, les gouvernements ont tout intérêt à trouver un compromis satisfaisant pour tout le monde. L’urgence, aujourd’hui, pour Djibouti est de voir fonctionner les différentes infrastructures récemment réalisées, pour qu’elles commencent à produire les dividendes tant attendus par son économie. Les ports ont démarré leurs services (lire p. 84), et le voyage de travail dans le train qui relie Addis-Abeba à Djibouti, qui a réuni des ministres djiboutiens et éthiopiens à la fin d’octobre, est de bon augure pour une ouverture prochaine de la ligne. La petite république peut s’appuyer sur des fondamentaux économiques suffisamment solides – 6 % de croissance par an en moyenne – et sur une meilleure perception des milieux d’affaires – 17 places gagnées dans le dernier classement « Doing Business », publié le 31 octobre par la Banque mondiale. Il ne faudrait pas qu’un endettement trop important vienne mettre en péril l’édifice patiemment construit tout au long de ces quarante dernières années.
La tentation Macron
L
«
’électionduprésidentMacron est un signe du destin pour Djibouti. Il est né en 1977, comme le pays. » La comparaison, faite par un responsable gouvernemental djiboutien sous forme de boutade, pourrait bien symboliser les espoirs – semble-t-il réciproques – d’un réchauffement entre Djibouti et la France. Mais également la volonté de sortir du malentendu qui colore leurs relations depuisl’arrivéeprogressived’autrescontingents militaires dans la petite république et de la Chine, devenue son principal partenaire économique. « Nous avons en effet l’impression qu’il existe, ces derniers mois, un climat favorable au dialogue entre deux pays qui se veulent du bien », reprend notre observateur privilégié. Comme le sont les liens historiques et stratégiques tissés depuis plus d’un siècle entre Paris et son ancienne colonie. La France n’est-elle pas le seul pays à avoir signé avec Djibouti un traité de coopération en matière de défense? Pourtant, depuis ladécision prise N 0 2966 • DU 12 AU 18 NOVEMBRE 2017
par le président Jacques Chirac de ne pas financer la construction du terminal de Doraleh en 2000, obligeant Djibouti à aller chercher ailleurs – en l’occurrence auprès deDubaï–l’argentqu’onluirefusaitàParis, les rapports entre les deux pays se sont distendus. Tout comme leurs échanges commerciaux. Alors que l’économie djiboutienneestenpleinboum,dopéepardes milliards de dollars d’investissements, les
d’Emmanuel Macron pour que cessent ces vieilles querelles. Les propos du président français, affirmant, lors de la visite de son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sissi, fin octobre à Paris, ne pas avoir de leçon à donner, ont particulièrement retenu leur attention. La tentation de rencontrer rapidement le nouveau chef de l’État français, au moins avant les élections législatives de février prochain, est donc grande pour le président Ismaïl Omar Guelleh (IOG). Les autorités comptent sur le Lesdeuxhommespourraient réalisme du président français pour se croiser fin novembre à que cessent ces vieilles querelles. Abidjan, lors du sommet Union africaine-Union euroexportations françaises ne dépassent pas péenne (UA-UE). Ils auront alors l’occala centaine de millions de dollars par an. sion d’échanger sur la meilleure façon Et sur place, la présence d’entreprises du de renforcer les relations économiques CAC40 est des plus discrètes. « La France entre leurs deux pays, dix mois seulement après la visite d’IOG au siège parisien du doit nous considérer comme un hub économique et non plus seulement comme Medef (principale organisation patronale un point d’ancrage sécuritaire », affirme française), qui, malgré quelques frémisseun diplomate djiboutien. Les autorités ments, n’a débouché sur rien de concret. du pays comptent donc sur le réalisme O.C. JEUNE AFRIQUE
PUBLI-INFORMATION
FAVORISER ET SOUTENIR VOS RÊVES D’ENTREPRENDRE
www.fdeddjibouti.com
L
e fond de développement de Djibouti, né en avril 2000 est un établissement publique à caractère commercial. Il dispose d’une autonomie administrative et financière. Le FDED met en œuvre les politiques et les stratégies décidées par le gouvernement en matière de promotion du secteur privé à travers l’octroi de crédits à moyen terme. Il finance également des projets productifs avec un impact sur l’emploi dans les secteurs d’activités priorisés par le gouvernement.
©VINCENT FOURNIER / JA
Les axes d’intervention du FDED se concentrent ainsi sur la promotion de l’entreprenariat féminin, des jeunes et des régions, ainsi que les secteurs à fort potentiel de développement économique tels que le tourisme, le transport et le secteur primaire.
DIFCOM - PHOTOS : ABOU SAUF MENTION
Les ressources financières du FDED proviennent essentiellement des lignes de crédits accordées par les bailleurs de fonds et également de l’obtention d’une subvention du gouvernement. Parallèlement au financement des PME-PMI, le FDED gère aussi un programme intitulé Crédit Jeune Diplômé lancé par le Président de la République, Monsieur Ismail Omar Guelleh.
ACTIVITÉS DE FINANCEMENT « CRÉDIT AUX PROMOTEURS » Répartition des octrois de prêts par secteurs d’activités Tourisme Service
Primaire 7% 6%
21 %
Petite industrie 14 % 10 %
42 %
Commerce
Transport
Siège social : Angle de l’avenue Georges Clémenceau et de la rue Pierre Curie BP : 520 - Djibouti Email : fded@intnet.dj Tél : (+253) 21 35 33 91 Fax : (+253) 21 35 50 22
PUBLI-INFORMATION
Plus grand port du pays, le Doraleh Multi-Purpose Port (DMP), installé à l’entrée de la mer Rouge, dispose d’une position géostratégique exceptionnelle. Cette vaste plateforme régionale d’échanges commerciaux affiche une superficie de 94 hectares, une longueur de quai de Saad Omar 1 200 m, une profondeur de 16 à PDG de PDSA 18 m, 16 portiques à quai, ainsi que des équipements de manutention reliés à des systèmes informatiques très modernes et sécurisés. DMP est également un port d’éclatement majeur des trafics conteneurisé et non conteneurisé de la mer Rouge à destination de la péninsule arabique et de l’ensemble de la côte africaine. D’une capacité annuelle de 10 millions de tonnes, il peut accueillir des navires de 100 000 DWT.
Saad Omar, PDG de PDSA, actionnaire unique de DMP, confirme que Djibouti est devenu un lien important sur les marchés asiatique, africain et européen, ainsi qu’un centre de transport essentiel sur la ligne ouest de la route de la soie maritime du XXIe siècle. Enfin, ce nouveau port doté de nombreux avantages hautement compétitifs face aux autres plateformes de la région, joue un rôle prépondérant dans l’essor économique de Djibouti. Il offre ainsi aux clients potentiels des prestations de services de qualité dans divers secteurs d’activité du transport maritime, comme le souligne le directeur général de DMP, Wahib Daher Monsieur Wahib Daher.
Directeur général de DMP
DORALEH MULTI-PURPOSE PORT
BUREAU D’ADDIS-ABEBA
P.O. Box 2117, Djibouti, République de Djibouti. Tél. : (+253) 21 31 91 92 Hotline : (+253) 21 31 90 00 E-mail : customercare@dmp.dj
Tél. : (+251) 11 55 33 744 Fax : (+251) 11 55 34 659 E-mail : port.office.addis@gmail.com
DIFCOM - PHOTOS : ABOU & VINCENT FOURNIER
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e méga-port de classe mondiale, cofinancé par la Chine, a été officiellement inauguré par le président de la République, Ismaïl Omar Guelleh, le mercredi 24 mai dernier.
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ABOU ALLOYTA
Djibouti Le Plus de JA
INTERVIEW
Mahmoud Ali Youssouf Ministre des Affaires étrangères « Le gouvernement entretient des relations équilibrées avec tous ses partenaires » Coopération avec la Chine, regain de tension en Somalie, rapprochement avec la France, le chef de la diplomatie revient sur les enjeux auxquels fait face son pays.
A
lors que les grandes puissances de la planète se bousculent pour disposer leurs troupes au bord de la mer Rouge, la Corne de l’Afrique reste cette région troublée par les crises successives qui secouent l’Érythrée, l’Éthiopie, la Somalie ou le Yémen. Malgré sa taille mais grâce à sa stabilité, Djibouti joue un rôle majeur dans l’équilibre géostratégique de la région. En poste depuis 2005, Mahmoud Ali Youssouf connaît bien les grands enjeux diplomatiques auxquels son pays doit faire face. Il revient sur les événements qui ont agité l’année 2017, à commencer par l’implantation de la première base militaire chinoise. JEUNE AFRIQUE
JEUNE AFRIQUE: Plusieurs chancelleries estiment que la méfiance règne dans les milieux diplomatiques depuis l’ouverture de la base chinoise. Qu’en pensez-vous? MAHMOUD ALI YOUSSOUF : Cette
méfiance n’est pas ressentie par les Djiboutiens. Les relations de partenariat stratégique tissées par Djibouti avec la Chine sont exemptes de toute suspicion. Et leurs objectifs restent les mêmes que pour les autres puissances: la lutte contre le terrorisme et la sécurisation de la voie maritime de Bab al-Mandab. Qu’il existe des conflits d’intérêts entre ces pays dans d’autres régions du monde ne signifie pas qu’ils doivent s’appliquer à Djibouti. Le gouvernement entretient des relations équilibrées avec tous ses partenaires. L’arrivée de cette base a-t‑elle eu un impact sur vos relations avec la Chine ?
Elle les a consolidées. Nous avons franchi un palier qui sera bénéfique pour la République de Djibouti, où Pékin a déjà beaucoup investi.
La venue prochaine du nouvel ambassadeur des États-Unis devrait redonner un peu de poids à la diplomatie américaine à Djibouti et dans la région. C’est également votre avis ?
Le nouvel ambassadeur devrait en effet prendre ses fonctions début janvier. Cela fait bientôt un an que les ÉtatsUnis sont représentés à Djibouti par un chargé d’affaires. Or il est toujours préférable d’avoir un ambassadeur à la tête de la chancellerie, car il a une marge de manœuvre plus importante. L’année a également été marquée par une nouvelle incursion des troupes érythréennes dans le nord du pays, à la suite du retrait de l’armée qatarie. Quelle est la situation aujourd’hui ?
Les Érythréens se sont retirés au bout de quelques heures, et il n’y a pas eu d’escalade à la frontière. Il n’est donc pas prévu, pour l’instant, d’envoyer un nouveau contingent – notamment chinois, comme le dit la rumeur. Aucune troupe N 0 2966 • DU 12 AU 18 NOVEMBRE 2017
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Le Plus de JA Djibouti érythréenne n’occupe aujourd’hui le territoire djiboutien, mais la frontière n’est toujours pas démarquée et reste une source de tension. Nous travaillons sur la question avec l’Union africaine, et si l’Érythrée persiste dans son refus de collaborer, nous enverrons notre dossier devant le Conseil de sécurité de l’ONU. Quelles sont les conséquences pour Djibouti du regain de tension en Somalie, où vous disposez de 2 000 hommes dans le cadre de la Mission de l'Union africaine en Somalie (Amisom) ?
Nous sommes très vigilants car nous restons une cible privilégiée pour les
Shebab, du fait que nous abritons une large communauté européenne en plus des forces étrangères. Le regain d’activité des Shebab démontre, selon moi, un
L’Inde a choisi notre pays pour être sa porte d’entrée sur le continent. mouvement de panique devant le plan mis en place par le président Farmajo pour les déloger de leurs derniers bastions. L’Amisom, dont le commandement est assuré par Djibouti, continuera de soutenir les institutions somaliennes
Somalie ou le risque sans frontières
L
’
attentat qui a causé la mort de 358 personnes, le 14 octobre à Mogadiscio, a provoqué une onde de choc à Djibouti. Dès le lendemain, le pays a envoyé un avion transportant 29médecinsainsi que 4 tonnes de matériel de premiers secours et de médicaments sur place. Les Djiboutiens ont été les premiers, avec les Turcs, à réagir. Sur le plan de la sécurité intérieure aussi. Encore marquées par l’attaque perpétrée en 2014 par les Shebab au cœur de la ville de Djibouti, les autorités n’osent pas imaginer les dégâts que pourrait causer un camion bourré de 2 tonnes d’explosifs, comme cela a été le cas dans la capitale somalienne. Ils ont donc interdit à tous les véhicules provenant du Somaliland d’entrer sur leur territoire. Les poids lourds doivent déchargerleursmarchandises à la frontière côté somalien, où celles-ci N 0 2966 • DU 12 AU 18 NOVEMBRE 2017
dans cette lutte. Il vaut mieux contenir le terrorisme que l’attendre chez soi. L’objectif, pour Djibouti, est de le combattre là où il se trouve.
sont récupérées pour être acheminées à Djibouti. Par sa proximité géographique et culturelle – et au nom d’une fraternité issa pour une partie de la population, dont le président –, la petite République est toujours très concernée par les événements qui viennenttroublersonvoisin. « La stabilisation de la Somalie est essentielle pour Djibouti », assure un conseiller du chef de
envergure », rappelle un observateur.Sonrôleaété souligné lors de la visite à Djibouti du président somalien, Mohamed Abdullahi Mohamed dit Farmajo le 24 octobre. Cette présence n’empêche cependant pas Djibouti de sentir un danger « de l’intérieur ». Les autorités craignent des infiltrations de terroristes au milieu des réfugiés et des clandestins qui s’entassent dans le bidonville
Les autorités craignent des infiltrations de terroristes au milieu des réfugiés. l’État. Un tiers de l’armée djiboutienne, soit près de 2 000 hommes, campe aujourd’hui de l’autre côté de la frontière, dans le cadre de la Mission de l’Union africaine pour la Somalie (Amisom), dont elle assure le commandement depuis 2016. Et contrairement aux autres contingents étrangers, « elle n’a jamais subi d’action armée de grande
Les Émirats arabes unis ont annoncé, cette année, le développement du port de Berbera, après avoir pris position en Érythrée. Comment évoluent vos rapports ?
Nos relations se sont complètement normalisées, et je dirais qu’il n’existe plus de tension palpable entre les deux pays. Le chargé d’affaires de la représentation des Émirats à Djibouti est revenu, et notre ambassade fonctionne normalement à Abou Dhabi. Quant au fait qu’ils s’implantent dans les autres ports de la sous-région, cela ne nous inquiète vraiment pas car nous sommes désormais bien outillés pour faire face à la concurrence.
Le pays a reçu, début octobre, le président indien, Ram Nath Kovind. C’est la première visite officielle d’un chef d’État indien à Djibouti. Est-ce un rééquilibrage de vos relations diplomatiques, vis‑à-vis de la Chine notamment ?
L’Inde veut démarrer avec Djibouti des relations stratégiques et un partenariat qui soient à la hauteur de ses ambitions sur la scène internationale. Elle entend jouer un rôle économique dans la Corne de l’Afrique et a choisi notre pays pour être sa porte d’entrée sur le continent. Une ambassade va d’ailleurs ouvrir ses portes à Djibouti en 2018.
Et la France ? Peut-on parler d’un effet Macron à Djibouti ?
de Bouldouqo, situé aux portes de la capitale, à une quinzaine de kilomètres seulement du Somaliland. Le gouvernement tente de garder le contrôle en « décasant » certains de ses habitants, avec la promesse de mieux reloger ceux qui seront autorisés à rester. Solidarité bien ordonnée…
La visite du président Guelleh en février à Paris a permis de resserrer nos liens. Nous allons maintenant travailler ensemble, avec la nouvelle équipe, pour continuer à aller de l’avant. Et c’est pour cette raison que j’ai été reçu à Paris fin septembre par les conseillers Afrique du président Macron. Les relations avec la France sont au beau fixe. Peut-être les deux présidents pourront-ils en parler lors du sommet Union africaine-Union européenne [UA-UE] d’Abidjan. Nous y travaillons.
O.C.
Propos recueillis à Djibouti par OLIVIER CASLIN JEUNE AFRIQUE
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Le Plus de JA Djibouti POLITIQUE
Tant d’inconnues, si peu de suspense d’une frange de l’Alliance républicaine pour le développement (ARD), et Omar Elmi Khaireh, patron du Centre des démocrates unifiés (CDU). Les deux leaders se sont lancés dans d’éprouvantes tractations avec ce qui reste de l’USN – aujourd’hui pilotéeparMohamedDaoud Chehem, qui était son « candidat dissident » en 2016. Les deuxcoalitions,auxparcours entremêlés de ralliements et de défections, ont engagé des discussions pour mettre en place des listes uniques danschaquecirconscription.
À trois mois des législatives, l’opposition est toujours éclatée. Entre le boycott des uns et les tergiversations des autres, l’Union pour la majorité présidentielle s’annonce déjà comme le grand vainqueur du scrutin.
T
ous les observateurs pensaient que les leaders de l’opposition avaient retenu la leçon de la dernière présidentielle. En avril 2016, le chef de l’État sortant, Ismaïl Omar Guelleh (IOG), était réélu avec un score de plus de 86 % des suffrages exprimés, ne faisant qu’une bouchée de ses cinq concurrents partis en ordre dispersé. Le premier d’entre eux, Omar Elmi Khaireh, candidat officiel de l’Union pour le salut national (USN, coalition des partis d’opposition), n’avait rassemblé que 7,3 % des votes, les autres n’atteignant même pas la barre des 5 % qui leur aurait permis d’être remboursés de leurs frais. Dix-huit mois plus tard, rien n’a vraiment changé. Alors que s’engage la campagne pour les législatives, prévues en février 2018, l’opposition semble toujours aussi divisée. « Comme c’est souvent le cas à la veille d’élections, les querelles d’ego ressortent au sein des coalitions », remarque Abdourahman Mohamed
AUX ABONNÉS ABSENTS.
Guelleh, dit TX (lire l’encadré ci-dessous). Le président du Rassemblement pour l’action,ladémocratieetledéveloppement écologique (Radde) sait de quoi il parle puisqu’il a lui-même claqué la porte de l’Alliance des mouvements pour l’alternance et la nation (Aman) en septembre. Prônant un boycott qui a pourtant montré seslimites,celuiquisevoyaitdéjàenleader de l’opposition a finalement décidé de faire cavalier seul pour tester la popularité dont il a hérité lors de son court passage à la mairie de Djibouti. Il peut souhaiter bon vent à ses ex-alliés de l’Aman, Cassim Ahmed Dini, président
Dans cette tentative de recomposition de l’opposition, Daher Ahmed Farah, « DAF », l’ancien porteparole de l’USN, est aux abonnésabsents.Etcedepuislacampagne électorale de 2016, à laquelle il a refusé de participer. « Il est mort politiquement », veulent croire certains de ses anciens compagnons. Bien que peu probable, son éventuel retour sur l’échiquier politique ne changerait certainement pas la donne en février. Car si l’équation à résoudre pour préfigurer la composition de l’opposition au sein de la future Assemblée ne compte que des inconnues, le résultat du vote, lui, devrait sans surprise pencher en faveur de l’Union pour la majorité présidentielle (UMP). OLIVIER CASLIN
« TX » FAIT CAVALIER SEUL
A
bdourahman Mohamed Guelleh, aliasTX, 40 ans, le président du Rassemblement pour l’action, la démocratie et le développement écologique (Radde), donne l’impression de marcher dans les pas de Daher Ahmed Farah, dit DAF, opposant historique et cofondateur du Mouvement pour le renouveau démocratique N 0 2966 • DU 12 AU 18 NOVEMBRE 2017
et le développement (MRD). Comme ce dernier,TX refuse aujourd’hui de participer aux élections, un boycott qu’il justifie par l’absence de commission électorale nationale indépendante paritaire. De quinze ans son aîné, DAF a été le porte-parole d’une USN toute fringante, en 2013, avant de s’exiler en Belgique.TX, lui, a connu son
heure de gloire à la mairie de la capitale, a été secrétaire général de l’USN et, depuis sa création en septembre 2016, coordinateur de l’Alliance des mouvements pour l’alternance et la nation (Aman)… qu’il vient de quitter précipitamment. Seule différence:TX assure ne pas pouvoir sortir du pays. Il est surveillé de près par les autorités depuis son
arrestation et ses quatre mois d’emprisonnement lors des événements de Bouldouqo, qui avaient fait sept morts en décembre 2015. MaisTX croit encore en son destin, et aux défis électoraux il préfère le terrain. Il parcourt le pays pour renforcer la base du Radde, qui lui avait permis de gagner la mairie de Djibouti en 2012. O.C. JEUNE AFRIQUE
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Le Plus de JA Djibouti RESSOURCES
À toute vapeur Le pays, qui possède un fort potentiel géothermique, s’engage dans la voie de l’énergie renouvelable. Il multiplie les forages, avec le soutien financier de la communauté internationale.
À
Djibouti, on n’a pas de pétrole mais des énergies renouve‑ lables à profusion. Pour ne plus avoir à dépendre d’un or noir importé à 100 % puis, ces dernières années, d’une électricité éthiopienne qui répond à 70 % de sa consommation, la petite République a décidé de passer au vert pour devenir le premier pays africain à utiliser une énergie à 100 % renouvelable. Et si possible rapidement, c’est‑à-dire à l’horizon 2035. L’objectif peut sembler démesuré, mais la persé‑ vérance qu’ont montrée les autorités du pays ces vingt dernières années pour‑ rait être récompensée. Malgré son taux d’ensoleillement parmi les plus élevés du monde, le pays n’a fait qu’effleurer son potentiel dans le solaire. Idem pour l’éolien, dont les quelques tentatives n’ont pas dépassé les murs du Centre d’étude et de recherche de Djibouti (Cerd). Il est cependant beaucoup plus avancé dans le domaine de la géothermie. Au point de disposer aujourd’hui d’une équipe d’experts parmi les plus reconnus du continent, avec les Kényans. L’un d’eux, le Dr Kayad Moussa Ahmed, est aujourd’hui directeur général de l’Office djiboutien
de développement de l’énergie géother‑ mique (Oddeg), l’organisme créé par les pouvoirs publics en 2013 pour gérer l’ensemble des projets de recherche sur cette source d’énergie. Avec un objectif en tête : « Fournir le premier mégawatt au réseau en 2020 », affirme-t-il. ALLERS-RETOURS. En équilibre sur la
pointe nord du rift africain, Djibouti est assis sur une fournaise dont les vapeurs pourraient lui permettre de produire « 5 000 MW sur la vingtaine de sites aujourd’hui répertoriés sur le territoire », assure le spécialiste, qui, pour mémoire, rappelle que « la capacité énergétique nationale actuelle est de 120 MW ». Même si le potentiel géothermique a semblé suffisamment évident à tout le monde pour que les premières recherches soient menées dès le début des années 1970, l’identification, puis l’extraction, de ces fumerolles n’ont en revanche rien d’un long fleuve tranquille. Entre les premières tentatives du Bureau de recherches géo‑ logiques et minières (BRGM), menées dès 1972, et les promesses que fait naître aujourd’hui le projet Assal-Fiale, situé à quelques encablures seulement, les
INVESTISSEURS DE TOUS PAYS…
C’
est une première. Les 4 et 5 décembre, Djibouti lance son forum sur « l’intégration régionale et l’investissement privé dans les infrastructures ». L’occasion, selon la chambre de commerce qui organise l’événement à l’occasion de son 110e anniversaire, « de réfléchir à la manière de favoriser l’arrivée des investisseurs internationaux dans les N 0 2966 • DU 12 AU 18 NOVEMBRE 2017
infrastructures publiques d’Afrique de l’Est ». Quelques centaines de décideurs politiques, de représentants d’organisations financières internationales et d’acteurs du secteur privé sont attendus. Au menu: l’harmonisation des normes, les leviers à mettre en place entre public et privé, la réduction des risques, ainsi que les facilités de financement nécessaires
pour permettre à la sous-région de se doter des équipements dont elle a besoin. Ses organisateurs souhaitent que ce forum devienne un rendezvous régulier, afin de stimuler les partenariats entre pouvoirs publics et investisseurs privés, de rendre l’espace régional plus attractif et de doper les échanges commerciaux pour consolider la croissance de la sous-région. O.C.
Le gisement de Gaala-le-Koma, où devrait être construite une centrale de 15 MW d’ici à 2021.
experts français, italiens, américains, islandais, turcs et japonais qui se sont succédé aux côtés des Djiboutiens ont multiplié les allers-retours entre les deux lacs salés du pays, Assal et Abbé, avant de s’installer non loin du Goubet. Si les premières campagnes de forage sont encourageantes, les recherches s’arrêtent en 1987 faute de résultats et de combat‑ tants. Il faut attendre 1999 et l’arrivée au pouvoir d’Ismaïl Omar Guelleh (IOG) pour que le pays retente sa chance, sous la responsabilité des Djiboutiens euxmêmes et sous le haut patronage du chef del’État.Impressionnéparunessaiauquel il avait assisté dans les années 1980, IOG est persuadé que le futur énergétique du pays se trouve dans son sous-sol. Dès 2007, il constitue une équipe de spé‑ cialistes qu’il réunira six ans plus tard au sein de l’Oddeg. En 2016, devant le manque d’enthousiasme des bailleurs de fonds, c’est encore lui qui prend la déci‑ sion de débloquer 2 millions de dollars (1,9 million d’euros) pour démarrer les recherches sur le site de Gaala-le-Koma, identifié par l’Oddeg d’après les études réalisées dans le passé par le BRGM. Là où les Français fouillaient le lac Assal à plus de 1 000 m de profondeur, les JEUNE AFRIQUE
Dans la cour des grands
Régime sans sel
ODDEG
C
ingénieurs locaux se sont contentés de 2007 après une visite en Islande. Le temps forer entre 300 et 600 m et sont tombés de digérer la crise financière qui a placé le sur un réservoir géothermique interpays en faillite et le projet peut démarrer médiaire, d’une température de 140 °C, en 2012, avec le soutien financier des bailleurs de fonds, l’expertise améri« qui fait naître l’espoir d’avoir trouvé une ressource exploitable », explique Kayad caine et le matériel islandais. L’entrée en Moussa Ahmed. D’autant qu’il vient de production est attendue pour 2018, sur un réservoir identifié de 50 à 100 MW. recevoir 27 millions de dollars de la part du Un troisième programme de forage doit Fonds koweïtien pour le développement (FKD) et attend un montant identique du également démarrer sur le site de HanleFonds arabe pour le développement écoGarabayis, près du lac Abbé, en 2019, avec nomique et social (Fades) pour démarrer les forages IOG est persuadé que le futur de production et construire énergétique du pays se trouve une centrale géothermique de 15 MW d’ici à 2021. Située dans son sous-sol. à 3 km du Goubet, celle-ci doit participer à l’alimentation du coml’aide du Japon cette fois, qui prend à sa plexe portuaire en cours de réalisation charge 80 % des coûts. Un programme (lire p. 84). Pour cette nouvelle phase, de prospection lancé sur fonds émiratis l’Oddeg pourra compter sur une foreuse doit enfin démarrer dans la région d’Arta. de 125 tonnes, toute neuve, livrée par la Les investissements à réaliser sont à la Turquie. L’Office va lancer une campagne hauteur des risques pris pour bien idende huit forages qui, ensemble, pourraient tifier la ressource : énorme pour un pays produire entre 10 et 15 MW. « Avec un comme Djibouti, qui espère bien suivre la voie ouverte en Afrique par le Kenya potentiel, à confirmer, d’une centaine de – qui injecte 500 MW dans son réseau – mégawatts»,précisesondirecteurgénéral. Et ce n’est pas le seul projet en cours à sans devoir aller chercher l’appui des Chinois. Pour une fois. Djibouti. Le plus avancé est aujourd’hui celui d’Assal-Fiale, engagé par IOG en OLIVIER CASLIN JEUNE AFRIQUE
ocorico ! Une société française vient de remporter un appel d’offres public à Djibouti. Bien sûr, diront les grincheux, c’est l’Union européenne (UE) qui a choisi. Il n’empêche que la désignation, fin août, d’Eiffage Génie Civil pour la construction de la première usine de dessalement d’eau de mer du pays permet au secteur privé français de faire un retour remarqué dans le paysage djiboutien. Même si la filiale d’Eiffage partage le contrat avec l’espagnol Tedagua, spécialiste du traitement des eaux, sous la maîtrise d’ouvrage du ministère de l’Économie et des Finances. Ce projet de production d’eau potable par énergie renouvelable (Peper) comprend une unité de dessalement d’une capacité quotidienne de 22 500 m3, pouvant être portée à 45 000 m3 par jour, un réservoir de 5 000 m3, ainsi que le raccordement au réseau de distribution d’eau potable de la ville de Djibouti, en cours. L’UE finance la majeure partie des 63 millions d’euros nécessaires à la réalisation de l’usine, prévue pour être livrée dans trois ans. Construite sur la baie de Doraleh, elle contribuera à l’indépendance hydrique du pays. D’autres usines de dessalement sont prévues à court terme à Djibouti, vers le Goubet et Damerjog, dans le cadre des développements portuaires réalisés par les compagnies chinoises. O.C. N 0 2966 • DU 12 AU 18 NOVEMBRE 2017
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TRANSPORT AÉRIEN PRIVÉ RAPATRIEMENT SANITAIRE - CATERING Désormais à la tête de la première compagnie d’aviation privée de Djibouti,Tayoro Tommy Nyckoss continue de se développer dans l’aéronautique. Mais pas seulement… Dans les airs ou sur terre, toujours plus près du soleil !
Tayoro Tommy Nyckoss, fondateur et présidentdirecteur général de la société djiboutienne Ivory Jet Services, a fait de son rêve une réalité : créer une entité de transport aérien qui réponde aux attentes des clients les plus exigeants (hommes d’affaires, diplomates…), mais également développer une offre de qualité dans le rapatriement sanitaire au niveau international. Après avoir démarré son activité avec un seul et unique Falcon 50, Tayoro Tommy Nyckoss révélait l’année dernière à Jeune Afrique que deux autres avions – un Falcon 7X et un Falcon 900 – avaient rejoint le jet initial, transformant l’entité en une véritable compagnie. TRANSPORT AÉRIEN DE LUXE ET RAPATRIEMENT SANITAIRE DE QUALITÉ S’agissant du transport privé, Ivory Jet Services garantit une sûreté optimale basée sur des normes strictes, une confidentialité assurée, une couverture géographique mondiale, des services de luxe à bord et un équipage de très haut niveau. Mais ce n’est pas tout : pour des besoins spécifiques, Ivory Jet Services, peut affréter tout type d’avion, depuis l’Airbus A320 jusqu’au Boeing Business Jet. En ce qui concerne le transport aérien médicalisé, Ivory Jet Services, disponible notamment pour les ambassades et organisations officielles, assure rapidement la prise en charge de toutes sortes d’urgences. Et ce sont alors un médecin et un infirmier – voire une équipe médicale de réanimation (tous expérimentés et polyculturels) – qui accompagnent les malades ou blessés dans une cabine réaménagée. Toutes les étapes sont réalisées en collaboration avec les proches ou personnes en charge du ou des patient(s), et en coordination avec les services hospitaliers concernés.
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DÉVELOPPEMENT VERTICAL - CATERING Le rêve est devenu réalité, mais ce n’est pas une raison pour s’arrêter en plein… envol! Car, comme se plaît à le rappeler Tayoro Tommy Nyckoss: «Le secteur de l’aéronautique est un monde passionnant.» Ainsi, et toujours pour faire bénéficier ses passagers d’une large palette des meilleurs services, il a décidé d’initier un développement vertical de son activité. Créant une joint-venture avec la société Jetex (spécialisée dans les services dans les aéroports), et parce que cela répondait à un réel besoin de sa propre compagnie, le chef d’entreprise a investi dans le Catering, la restauration dans les avions. Avec, en ligne de mire, la volonté de fournir tous les avions se posant à l’aéroport de Djibouti. Les préoccupations de cet homme soucieux de faire prospérer et de préserver sa ville, mais aussi son pays et le continent africain, ne s’arrêtent pas à l’aéronautique. Il a parallèlement créé la société Solar 7, œuvrant dans les énergies renouvelables et spécialisée dans le solaire (lire ci-contre).
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PREMIÈRE MARQUE DJIBOUTIENNE D’ÉQUIPEMENTS SOLAIRES En proposant des solutions performantes, novatrices et durables dans les énergies renouvelables, et en particulier dans le solaire, Solar 7 affirme son engagement pour l’environnement mais aussi et surtout pour le bien-être des habitants. UNE GAMME COMPLÈTE DE PRODUITS ET SERVICES Si la Chine et le Japon n’ont pas tardé à apporter des solutions, le fondateur de la compagnie Ivory Jet Services s’est lui aussi rapidement positionné sur ce marché avec la société Solar 7, première marque djiboutienne dans le marché d’équipements solaires. Solar 7 propose une gamme complète de produits de haute performance et de services de qualité dans le domaine des énergies renouvelables pour accompagner ses clients vers une indépendance énergétique, réduire leurs dépenses en termes d’énergie et protéger l’environnement. DE NOMBREUX DOMAINES D’INTERVENTION Pour ce faire, Solar 7 a multiplié ses domaines d’intervention : audit énergétique et étude technique, distributioninstallation de systèmes d’éclairage solaire et production d’énergie propre sur toute l’Afrique, sans oublier la maintenance et la formation d’équipes techniques sur site.
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Considérant que l’accès à l’énergie est un des principaux facteurs de développement économique et social pour un pays, les solutions énergétiques Solar 7 sont adaptables aussi bien dans les villes que dans les zones rurales, en apportant l’accès à l’électricité en des lieux qui en sont souvent dénués. INSTALLATION SIMPLIFIÉE, GESTION AUTOMATIQUE La large gamme de lampadaires solaires proposée par Solar 7 est donc adaptée aux préoccupations des pays en voie de développement pour leurs besoins urbains et/ou ruraux. Nul besoin en effet de travaux pharaoniques pour disposer d’un réseau électrique fiable : l’installation simplifiée et la gestion automatique assurent un parfait éclairage nocturne tant dans les rues de la capitale que sur les pistes éloignées. Enfin, les nombreux partenariats organisés par Solar 7 lui permettent de faire bénéficier de son savoir-faire chaque pays africain souhaitant se doter d’une énergie propre, durable… et gratuite !
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En préambule, ce postulat : Djibouti est l’un des pays les plus ensoleillés au monde, avec 3 240 heures d’ensoleillement annuel moyen. Soucieux de l’environnement, de la sécurité des biens et des personnes, et ambitionnant une indépendance énergétique basée sur les énergies renouvelables, le gouvernement a choisi d’investir dans le solaire. Avec la volonté, à l’horizon 2020, d’être le premier pays africain à utiliser 100 % d’énergie verte. Et c’est l’éclairage public qui a ouvert la voie.
Le Plus de JA Djibouti
Lire aussi notre reportage sur l’inauguration du port géant de Doraleh
TRANSPORTS & LOGISTIQUE
En phase « terminal » Dans le cadre de la décentralisation, l’État vient d’inaugurer trois ports régionaux. Des atouts sérieux pour rééquilibrer le territoire.
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année 2017 restera historique pourlesecteurportuairedjiboutien. Le pays a créé l’événement en mai avec l’inauguration du nouveau port multifonction, construit dans la baie de Doraleh, en face de la ville de Djibouti, pour 580 millions de dollars (environ 520 millions d’euros). Il a également réceptionné, en juin, ses premiers ports décentralisés, à Tadjourah et au Goubet, dans le Nord. En attendant celui de Damerjog, dans le Sud, près de la frontière somalienne, aussi attendu pour cette année mais dont l’ouverture pourrait être reportée afin de répondre aux nouvelles ambitions de l’autorité portuaire. Malgré ce retard, l’arrivée de ces trois ports régionaux contribue à la volonté d’Ismaïl Omar Guelleh de rééquilibrer le territoire pour assurer une meilleure répartition des richesses et des emplois dans le pays.
Tadjourah, les pieds dans la potasse
Tout un symbole, le premier port commercial construit dans le nord du pays a été inauguré en juin, quelques jours seulementavantlacélébrationdu40e anniversaire de l’indépendance du pays (le 27 juin), en présence du chef de l’État. Les 30 ha de terre-pleins et les 435 m de quais n’attendent plus que l’arrivée des premières marchandises pour démarrer les opérations. Essentiellement destiné N 0 2966 • DU 12 AU 18 NOVEMBRE 2017
Le Goubet, financé et construit intégralement par les Chinois.
à jouer un rôle de port minéralier, il doit exporter chaque année en Chine 4 millions de tonnes de potasse, extraites des gisements situés dans le nord de l’Éthiopie. Pour cela, il lui faudra patienter au moins jusqu’à la fin de l’année, le temps que la route, tirée depuis la région du Tigré, soit terminée. À plus long terme, une ligne de chemin de fer doit également voir le jour depuis la ville éthiopienne de Mekele et coûtera 1 milliard de dollars. Le port, réalisé pour 182 millions de dollars, œuvrera également dans le secteur roulier en réceptionnant les véhicules destinés à la partie septentrionale du pays ainsi qu’aux régions éthiopiennes les plus proches.
Le Goubet, le sel de la vie Un peu plus au sud, le port du Goubet, inauguré une semaine après celui de Tadjourah, a démarré ses opérations dès le ruban coupé par les autorités. Et pour cause: financé et construit par les Chinois, il doit exporter vers leur pays le sel du lac Assal, situé à quelques kilomètres de là. Le port, qui représente un investissement de 64 millions de dollars, est en mesure d’exporter chaque année près de 5 millions de tonnes de sel brut, ainsi que 1 t de sel raffiné. En attendant l’arrivée programmée des volumes de gypse, également extraits dans la région. Le complexe se compose d’un centre de raffinage, relié à la côte par une bande transporteuse de
plusieurs centaines de mètres de longueur. Le quai, construit à une dizaine de mètres au large, permet de recevoir des navires ayant jusqu’à 15 m de tirant d’eau.
Damerjog change d’échelle Le port animalier de Damerjog, situé à une quinzaine de kilomètres au sud de la capitale, lui, se fait attendre. Il s’est finalement transformé en port polyvalent, notamment pour traiter les volumes de charbon qui doivent alimenter la centrale thermique de la capitale et qui passaient jusqu’à présent par le vieux port de la ville de Djibouti. L’enveloppe financière du projet a doublé,pours’éleveraujourd’huià150millions de dollars. Le même site doit également abriter un terminal gazier avec son usine de liquéfaction et un nouvel appontement pétrolier, réalisés respectivement pour 3,5 milliards de dollars et 200 millions de dollars. Le terminal à bétail devrait quant à lui voir le jour en 2018. Dévolu à l’export, il va dorénavant aussi recevoir à l’import les bovins et les ovins destinés à un marché éthiopien « en très forte croissance », selon les responsables de la Djibouti Ports & Free Zones Authority (DPFZA). Ce quai est très attendu dans le pays, qui chaque année exporte entre 800000 et 1 million de têtes pour alimenter le marché saoudien ainsi que l’Égypte et la Libye. OLIVIER CASLIN JEUNE AFRIQUE
DPFZA
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front de mer ont déjà trouvé preneurs, alors que les premières ne seront terminées qu’à la fin de cette année. Fort de ce succès, Bourhan Mohamed Ali, qui a fait fortune dans les activités de transit et de logistique, a déjà prévu de réaliser dix villas supplémentaires et soixante pavillons mitoyens. Le programme prévoit également la construction, dans un second temps, d’une supérette, d’une mosquée et d’un hôtel de cinquante chambres, avec marina, pour héberger les hommes d’affaires du port ainsi que les touristes. Il faut dire que Bourhan, originaire de la ville, dispose de 72 000 m2 de terrain et de plus de 700 m de plage sur l’ancien aérodrome pour bâtir le village de ses rêves… Et celui de ses
Villas du front de mer du projet immobilier de Tadjourah.
clients, qui ont déjà déboursé les 35 % d’acompte nécessaire à l’acquisition de leurs villas – vendues au prix de 23 millions de francs djiboutiens (un peu plus de 110000 euros, pour une surface bâtie de plus de 210 m2). Le promoteur, qui a prévu un investissement de 10 millions de dollars (environ
8,6 millions d’euros) pour achever l’ensemble de son projet, limite ainsi les risques. Désormaispremieremployeur de la ville, il a reçu la bénédiction du chef de l’État, qui vient de lui confier la réalisation de logements à loyer modéré sur les hauteurs de Tadjourah.
Avec l’adduction d’eau d’Ethiopie et le projet dessalement, Djibouti conforte sa place de hub régional régional. ▲
Inauguration du projet transfrontalier Djibouto-Ethiopien par le Président de la République SEM Ismail Omar Guelleh 19 juin 2017 Ali Sabieh.
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OFFICE NATIONAL DE L’EAU ET DE L’ASSAINISSEMENT DE DJIBOUTI BP : 1914 - Boulevard de la République - Djibouti
Email : oneadinfo@onead.dj Tél : + 253 21 35 31 07 Fax : + 253 21 35 44 23
O.C.
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nscrites au rang des priorités par le président Ismaïl Omar Guelleh après sa réélection en 2016, les politiques du logement et de la décentralisation se mettent lentement en place sur le territoire, sauf à Tadjourah où le rythme s’est nettement accéléré ces derniers mois. Au moment où la deuxième ville du pays inaugurait son nouveau port, les premières villas du Gadileh Palm Village commençaient à sortir de terre. Ce programme immobilier, qui pouvait sembler surdimensionné, se révèle complètement justifié, selon Bourhan Mohamed Ali, l’initiateur-promoteur et constructeur du complexe, car Tadjourah manque cruellement de logements. Les faits lui donnent raison puisque les trente villas construites en
OLIVIER CASLIN POUR JA
Maisons de (ses) rêves
Le Plus de JA Djibouti donner un peu plus de poids au rêve des autorités djiboutiennes de faire du pays un carrefour financier régional. D’autant quedesbanques algériennes,marocaines, Asie, Amérique du Nord, Europe… Les établissements financiers tunisiennes et même russes lui portent actuellement une attention soutenue. viennent du monde entier pour s’implanter dans le futur C’est aussi le cas de l’américain Citigroup, Singapour africain. qui serait en discussion avec BOA pour, en 2017, Silkroad International Bank dans un premier temps, devenir son l est loin le temps du monopole (SIB) est devenu le premier établissecorrespondant en matière de change bancaire à Djibouti. Depuis l’ouverture du secteur en 2006, les filiales ment commercial chinois avec les places financières à s’installer dans le pays occidentales et remplalocales des français BNP Paribas et Le taux de bancarisation du pays est passé de et dans la sous-région. cer Deutsche Bank, qui a Crédit agricole se sont retrouvées noyées dans un flot de nouveaux arrivants en Dans son sillage, un jeté l’éponge. « Citigroup provenance d’horizons très divers. Seul géant pourrait s’installer peut devenir un opérateur le groupe Bred Banque populaire, qui a prochainement : Bank of majeur à plus long terme, SOURCE : BANQUE CENTRALE China, numéro deux du avec l’Éthiopie dans sa remplacé BNP Paribas dans le capital de DE DJIBOUTI la Banque pour le commerce et l’indussecteur sur son territoire ligne de mire », estime un trie de la mer Rouge (BCIMR) en 2007, et quatrième au niveau mondial. banquier local qui, comme ses confrères, est encore présent à Djibouti depuis que est persuadé que Djibouti dispose de tous CARREFOUR FINANCIER. Si elle se Bank of Africa (BOA) a racheté les parts les arguments pour devenir « le Singapour confirme, l’arrivée d’un tel acteur pourdu Crédit agricole en 2010 pour fonder de la Corne ». rait rapidement bouleverser la donne et sa filiale locale, BOAMR. OLIVIER CASLIN Entre-temps se sont installés des établissements à capitaux suisses, brésiliens, Siège du chinois Silkroad International Bank, malaisiens, éthiopiens, attirés par les dans la capitale. perspectives d’un marché où presque tout restait à faire. « Jusqu’en 2006, seuls les fonctionnaires et les employés du secteur formel pouvaient détenir un compte », rappelle un expert financier djiboutien. Et, alors que le pays devrait atteindre une croissance de 7 % en 2017 et en 2018, une deuxième vague d’établissements financiers regarde avec intérêt dans sa direction. On observe notamment un engouement inédit de la part des banques chinoises, motivées par les milliards de dollars dépensés par Pékin pour équiper Djibouti et par les yuans des milliers de ses ressortissants qui y travaillent. En ouvrant sa première agence dans le nouveau quartier huppé de Haramous, BANQUE
Terre promise
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7 % en 2006 à 25 % en 2017
OLIVIER CASLIN POUR JA
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IOG A FOI EN LA FINANCE ISLAMIQUE
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e Global Islamic Finance Award (Gifa), remis le 6 septembre au président Ismaïl Omar Guelleh (IOG) à Astana, la capitale du Kazakhstan, récompense la formidable croissance de la finance islamique à Djibouti. Depuis la libéralisation du secteur bancaire, en 2006, les trois acteurs du pays – Saba Islamic Bank, Salaam African Bank et East Africa N 0 2966 • DU 12 AU 18 NOVEMBRE 2017
Bank – sont parvenus à s’octroyer 25 % des comptes et 21 % du total des actifs de la place. Surtout, ils ont contribué à faire décoller le taux de bancarisation, en allant, hier, « recruter » les dockers au port et en disposant, aujourd’hui, des réseaux d’agences les plus denses du pays (ils détiennent environ 43 % des
distributeurs automatiques). Et ce n’est probablement qu’un début. « Djibouti est l’un des meilleurs tremplins vers l’Afrique pour la finance islamique, qui gère 3 000 milliards de dollars d’actifs à travers le monde, mais seulement 1 % sur le continent », explique un expert financier local. IOG en est convaincu. En 2016, pour veiller à la régularité
des produits financiers, le pays a d’ailleurs installé un Comité national de la charia et, depuis six ans, la Banque centrale de Djibouti organise le grand rendez-vous africain de la finance islamique, l’International Islamic Banking Summit in Africa (IIBSA), dont la prochaine édition aura lieu en 2018. O.C. JEUNE AFRIQUE
MINISTÈRE DE L’AGRICULTURE, DE L’EAU, DE LA PÊCHE ET DE L’ÉLEVAGE ET DES RESSOURCES HALIEUTIQUES
INTERNATIONAL DEVELOPMENT ASSOCIATION
Le projet de développement communautaire rural et de mobilisation des eaux (PRODERMO) est exécuté par l’Unité de Gestion des projets du Ministère de l’Agriculture, de l’Eau, de la Pêche et de l’Élevage chargé des ressources halieutiques (MAEPRH). Il est financé par la Banque Mondiale, par le gouvernement djiboutien et les communautés bénéficiaires. DIFCOM/DF - PHOTOS : © DR. ILLUSTRATION : FOTOLIA
RÉPUBLIQUE DE DJIBOUTI
PRODERMO : un projet de résilience en milieu rural
Réunion avec les communautés locales.
NOTRE OBJECTIF : augmenter l’accès des communautés rurales à l’eau et augmenter leurs capacités de gestion des ressources hydrauliques et agropastorales.
Un exemple d’ouvrage hydraulique réalisé par le projet.
NOTRE DÉMARCHE : impliquer les communautés dans l’élaboration, l’exécution et la gestion des activités à travers la mise en place des comités de pilotage locaux.
Prodermo réalise des projets générateurs de revenus pour les communautés.
NOS RÉALISATIONS : des ouvrages hydrauliques et des activités génératrices de revenus pour augmenter la résilience des populations nomades.
De gauche à droite :
NOTRE SATISFACTION : le succès du projet a convaincu les bailleurs de fonds et les partenaires techniques de prolonger sa durée et de l’étendre sur le territoire national.
Ministère de l’agriculture, de l’eau, de la pêche et de l’élevage et des ressources halieutiques Ancienne zone industrielle Djibouti Tél . : 00 253 21 34 49 35 Fax : 00 253 21 34 06 27
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Le Plus de JA Djibouti
TRIBUNE
En route vers l’émergence MAG-TEEREY IBRAHIM AHMED
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Maître de conférences à l’université de Djibouti
ongtemps réduite à l’image d’une cité garnison des forces françaises et largement maintenue sous perfusion, la République de Djibouti a réussi le tour de force, en quarante années d’existence, de se forger un destin en épousant les évolutions de son environnement, et a su également s’inscrire dans les basculements en cours de l’ordre géoéconomique mondial, dans cet océan Indien en plein devenir. Faiblement dotée en ressources naturelles, mais jouissant d’une position géostratégique sur l’une des principales routes du commerce maritime mondial, par où transitent près de 40 % des navires marchands, la République de Djibouti ambitionne de devenir une économie émergente grâce à son plan Djibouti Vision 2035. Longtemps absent des principales destinations mondiales, le pays connaît une première rupture dans son évolution avec le basculement du transit éthiopien, qui lui permet de renouer avec sa vocation originelle de port naturel de son voisin. Sa deuxième opportunité sera la suite des événements du 11 septembre 2001 et la lutte contre la piraterie, avec l’installation d’une impressionnante armada militaire étrangère dans le pays. Enfin, la dernière opportunité est celle qui est aujourd’hui à l’œuvre et qui doit arrimer la croissance économique du pays au mégaprojet de couloir logistique destiné à pénétrer le marché continental africain, faisant ainsi de Djibouti son hub en même temps que la première perle du collier chinois.
logistique, de l’hôtellerie, de la finance, et en investissant dans les productions énergétiques, l’eau et les télécommunications. La nouveauté des développements actuels se situe dans des secteurs jusqu’ici encore inexplorés, tels que les prospections minières et l’industrialisation massive que compte impulser la zone économique de 4 800 hectares installée le long de la baie de Doraleh. Pourtant, en dépit de tous ces efforts pour placer le pays sur une trajectoire ascendante, Djibouti était, jusqu’à la fin du mois d’octobre, handicapé par son classement sur le climat des affaires, concernant notamment la participation des PMI-PME à l’essor économique. Longtemps cantonné en queue des classements pour une large majorité des indicateurs, le pays vient de franchir un cap important en améliorant son score dans le classement « Doing Business » 2018, publié le 31 octobre par la Banque mondiale, passant de la 171e à la 154e place. Ce résultat a été construit dès décembre 2016, lorsque, sous la houlette du chef de l’État, l’ensemble du gouvernement s’est réuni pour identifier
Le pays a franchi un cap en passant de la 171e à la 154e place dans le classement du “Doing Business”.
Au cours de la période 1998-2011, les stocks des investissements directs étrangers (IDE) ont presque atteint le milliard de dollars (862 millions d’euros). Pour sa troisième phase de développement, qui a pris son envol avec sa participation au projet des nouvelles routes de la soie, la République de Djibouti change de dimension et de perspectives en consolidant fortement ses infrastructures dans les secteurs de la N 0 2966 • DU 12 AU 18 NOVEMBRE 2017
les facteurs entravant les PMI-PME et définir une priorisation des actions. Le président Ismaïl Omar Guelleh a ensuite inauguré le guichet unique intégral, en mars 2017, et lancé une commission de travail pilotée pour diligenter des réunions avec les différentes parties nationales, ainsi qu’avec les bailleurs de fonds, dans le but de mesurer les progrès accomplis. C’est grâce à cette démarche programmatique, à cette planification séquencée d’objectifs à atteindre, que Djibouti a pu gagner sa place dans les dix plus belles progressions du classement. Le chemin est encore très long et les arbitrages nombreux entre des intérêts souvent antagonistes. Mais il est le seul à suivre pour espérer rejoindre un jour Maurice (25e) ou le Rwanda (41e). JEUNE AFRIQUE
Le Plus de JA Djibouti
PHOTOS : OLIVIER CASLIN POUR JA
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Des mets tout en finesse préparés et servis par une équipe djiboutienne.
TOURISME
Popote et melting-pot Au Café de la Gare, on attend les trains en vain. Mais pas les plats. Carte française, produits régionaux, ambiance orientale… L’adresse charme par son élégance et par le raffinement de sa cuisine.
À
Djibouti, les trains ne roulent plus depuis des lustres. Et celui qui devrait bientôt venir de l’Éthiopie voisine longera la baie de Doraleh et ses ports flambant neufs plutôt que de traverser la vieille ville résidentielle (la nouvelle voie entre Addis-Abeba et Djibouti, inaugurée fin 2016, devrait être opérationnelle très prochainement). Dommage pour ses futurs passagers, ils rateront l’une des escales gastronomiques les plus raffinées de la capitale : le Café de la Gare. MounaMusonget son époux,Christian, n’ont pas mis longtemps pour redorer le blason de ce restaurant installé depuis la fin du XIXe siècle en face de la gare aujourd’hui désaffectée. Les cheminots, disparus depuis longtemps, sont
remplacés par une clientèle aisée, djiboutienne et internationale, qui apprécie l’adresse pour un déjeuner d’affaires ou un dîner en famille, une partie de billard au fumoir, un thé ou un dernier verre au bar lounge aménagé à l’étage. Le tout dans une ambiance mi-british, mi-orientale. Le bois sombre en provenance d’Égypte habillant les murs orangés, distille une lumière tamisée, chaleureuse et bienvenue après l’aveuglante fournaise du boulevard de la République. STANDING. La carte est résolument
française mais fait la part belle aux produits régionaux : coquillages et crustacés pêchés dans le golfe « en persillade », dorade de la mer Rouge « meunière », marinade de poissons crus… Le chef de
cuisine (qui vient du Maroc) combine à merveille les saveurs et les influences culinaires. Sans négliger la présentation. Dans les assiettes, tout est délicat et raffiné. Comme l’ensemble du restaurant et de son personnel, composé exclusivement de jeunes Djiboutiennes et Djiboutiens. Formés par les bons soins de Mouna Musong, ils portent beau leurs uniformes noir et blanc inspirés de ceux des serveurs des brasseries parisiennes. Le couple a su donner un nouveau standing à l’établissement, qu’il a rouvert en mai 2016 après rénovation. À l’image de la ville de Djibouti, elle-même en pleine modernisation ces dernières années grâce aux investisseurs venus des quatre coins du monde. Mouna Musong en est le témoin privilégié depuis le balcon du Café de la Gare. Construit en 1889, ce dernier avait été repris quelques années plus tard par ses grands-parents, symboles du melting-pot djiboutien : son aïeule, d’origine libanaise, débarquait de France, et son grand-père arrivait d’Afghanistan via le Somaliland. De cet héritage, Mouna a tiré le meilleur et donné un cachet unique à son établissement. Avant de le transmettre un jour à sa fille, Sabat, pour qu’une quatrième génération prolonge l’histoire du Café de la Gare au cœur de Djibouti. OLIVIER CASLIN
POUR QUELQUES ÉTOILES DE PLUS…
L
es nuits djiboutiennes pourraient bientôt être plus étoilées. Le holding marocain Palmeraie Développement, qui gère ses propres hôtels dans le royaume et plusieurs autres sur le continent, en partenariat avec de grandes enseignes du secteur, est en pourparlers avec plusieurs N 0 2966 • DU 12 AU 18 NOVEMBRE 2017
chaînes hôtelières internationales pour ouvrir un établissement de standing (4 étoiles supérieur) sur la baie bordant la ville de Djibouti. Fin octobre, son président, Hicham Berrada Sounni, s’est rendu à Djibouti pour y rencontrer les autorités et leur présenter son projet. Le futur
établissement compterait 150 à 170 chambres, nécessiterait un investissement de 20 à 25 millions d’euros et pourrait être opérationnel un peu plus de deux ans après la signature des formalités administratives et techniques. Un autre grand hôtel pourrait voir le jour sur l’île
Moucha, qui fait face à la capitale. Le projet, également en cours de discussion, est porté par des investisseurs éthiopiens. S’ils voient le jour, ces établissements compléteraient une offre hôtelière encore réduite dont la figure de proue reste le Kempinski, ouvert en 2008. O.C. JEUNE AFRIQUE
Le secteur bancaire à Djibouti : une place financière sûre, moderne et attractive
La Banque Centrale de Djibouti a pour principales missions de veiller sur la convertibilité de la monnaie nationale, le Franc Djibouti qui a été créé en 1949. Librement convertible et lié au Dollar américain par une parité fixe, le Franc Djibouti puise sa stabilité linéaire qui le caractérise depuis plus de 65 ans dans les fondements de son système d’émission du type « currencyboard ». Son principe de fonctionnement est des plus simples : chaque Franc Djibouti émis doit être entièrement couvert par un dépôt en dollars américains auprès de l’un des correspondants à New-York. C’est ainsi que la Banque Centrale de Djibouti est chargée de la gestion des réserves officielles en devises du pays pour garantir un taux de couverture de son émission largement positif. Quant à l’achat de devises, il est libre et s’effectue contre simple dépôt de Francs Djibouti. Cette absence de contrôle de change et une application stricte et contrôlée des dispositions réglementaires et prudentielles des établissements de crédit, ont fait de Djibouti une place financière dynamique attractive et sécurisante où les opérateurs de la sous-région logent leurs principales opérations. Le secteur financier, profitant largement de la vigueur de la croissance économique du pays depuis plusieurs années, connaît une forte expansion. Le nombre d’opérateurs financiers en activité ne cesse d’augmenter et compte désormais 11 banques commerciales, un Fonds étatique de financement des PME/PMI, 2 institutions de microfinance et 18 bureaux de change et de transfert de fonds. La multiplication d’opérateurs a permis d’enrichir la panoplie de produits et services financiers offerts par la place djiboutienne.
Pour accompagner au mieux ce foisonnement du secteur financier, les autorités nationales ont procédé à une refonte de la législation bancaire et financière en janvier 2011, de sorte à l’adapter aux attentes de la profession.
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