OBJECTIF ABIDJAN
En perpétuelle extension
Avec ses 6 millions d’habitants, la capitale économique de la Côte d’Ivoire est au bord de l’asphyxie Et les multiples projets de construction en font un chantier permanent. Si la nécessité d’une modernisation est admise, certains soulignent le lourd prix à payer pour les plus modestes.
Onditsouventqu’« Abidjan est doux », mais ce matin la vie y ressemble plus à un enfer L’air est humide et diablement pollué. Sur le boule vard François-Mitterrand, les voitures jouent du pare-chocs et du klaxon. Plus d’une heure que l’accès menantauPlateauestcomplètement bouché. Un apprenti, les cheveux teints en blond, court au milieu de la voie Des centaines d’automobilistes patientent. À quelques centaines de mètres, le nœud du problème pour ces dizaines de milliers d’Abidjanais quiserendentchaquematintravailler auPlateau,lacitéadministrativedela capitale économique ivoirienne : les travaux du « 5e pont » et de la baie de Cocody.
Long de 1,5 km, l’ouvrage comprend un pont et un viaduc, de respectivement 634 m et 260 m de hauteur, deux échangeurs et leurs bretelles de liaison. L’ensemble a été conçu pour venir en complé ment de l’ambitieuse marina, chère à Alassane Ouattara, qui doit abriter un port de plaisance, des activités de loisirs, notamment des parcs d’attractions, des restaurants et des hôtels de luxe. Les travaux rendent la circulation impossible dans cette partie très fréquentée d’Abidjan. Chaque jour, il faut y rivaliser d’ingéniosité ou de patience pour avancer. Souvent des deux.
Cela aurait pu être anecdo tique si ce chantier était le seul en cours à Abidjan. Depuis plusieurs années, la capitale économique est un chantier à ciel ouvert qui traduit une volonté de moderniser et de décongestionner la ville, car celle-ci explose. Selon le dernier recensement (2021), elle concentre
36 % de la population urbaine de Côte d’Ivoire. Alors Abidjan, cet archipel citadin lové autour de la lagune Ébrié, faisant parfois office de frontière entre certaines communes, s’étend. Inexorablement, la ville semble destinée à engloutir les communes avoisinantes.
Frontière
La voie express de Bassam longe l’aé roport Félix-Houphouët-Boigny. Sur le trottoir, jeunes et moins jeunes observent les avions s’élancer dans le ciel en survolant l’océan. Après l’aéroport, voici les quartiers d’Adjouffou et de Gonzagueville et leurs milliers de petites maisons en tôle à perte de vue. Changement de paysage de l’autre côté de la voie : ici, les autorités ont érigé, sur le modèle de la promenade des Anglais, à Nice, une promenade en bord de mer, où les habitants viennent marcher, prendre du bon temps ou faire du sport sur une piste cyclable de 8 km qui serpente au milieu d’une végé tation bien ordonnée, éclairée au photovoltaïque
Hassan, 65 ans, conduit sa Toyota RAV 4 avec l’assurance d’un habitué. IlhabitePort-Bouëtdepuisbientôtun demi-siècle, et son environnement a bien changé. « Ils ont pris 30 m pour agrandir la voie et construire cette promenade. Toute une partie du quartier a été déguerpie, et les habitants sont allés s’entasser de l’autre côté de la voie », raconte-t-il.
Cette voie express, qui s’étend sur plusieurs centaines de mètres, débouche sur un rond-point qui marquelafindelavilled’Abidjan.Les dizaines de kilomètres qui mènent à la ville de Grand-Bassam étaient, il y a encore quelques années, plantés d’une végétation luxuriante.
Archipel citadin lové autour de sa lagune, la ville semble destinée à engloutir les communes avoisinantes.
Aujourd’hui,lesconstructionssesont tellement étendues qu’il est difficile d’établir une véritable frontière entre les deux villes.
Schéma similaire un peu plus au nord. Bordée par la lagune, Bingerville fut la deuxième capitale coloniale entre 1900 et 1934, après Grand-Bassam. Elle a vu sa popula tion grimper en flèche ces dernières années, passant de 35000 habitants en 2000 à plus de 60 000 actuelle ment Après la Palmeraie et le camp militaire d’Akouédo, le boulevard François-Mitterrand descend sur la droite vers Bingerville. On aperçoit la lagune en contrebas. Les projets immobiliers fourmillent, nichés dans un paysage vallonné.
Déguerpissements
Yeanzi, artiste ivoirien de 34 ans, habite Bingerville depuis une dizaine d’années. C’est là que, dans son atelier, il apporte les dernières retouches à son projet le plus récent : la création d’un incubateur dont l’ambition est d’accompagner chaque année une dizaine de créa teurs qui sortent d’école d’art. En dix ans, ce fils d’Abidjan a vu sa ville, et son lien avec elle, évoluer. Selon lui, ce n’est pas le développement qu’il faut pointer du doigt, car « il permet à la cité de grandir », mais ce sentiment d’« expansion incontrôlée ».
« On voit Abidjan s’élargir et se rapprocher des villes limitrophes. Et on se demande si cette expansion est réfléchie Ici, il y a un problème crucial de canalisation, et d’évacuation des eaux On a l’impression que, malgré les intempéries, ce n’est pas pris en compte dans l’expansion
de la ville. Ce manque de contrôle est assez inquiétant », estime t-il.
Signe d’une certaine vitalité et d’une volonté de modernisation, le branle-bas de combat dans lequel se trouve Abidjan depuis plusieurs années a aussi mis les franges les plus démunies de la population à rude épreuve. Parfois salutaires voire nécessaires, les déguerpisse ments accompagnent chaque grand projet de construction. Rocade Y4 voie de contournement d’Abidjan –, « 4e pont » reliant Yopougon à Cocody, ligne 1 du métro « Abidjan est une ville en transformation, en chantier permanent. Mais cette transformation se fait au détriment des plus pauvres », déplore Sékou Sylla, président de l’ONG Colombe Ivoire, qui accompagne les victimes de déguerpissement.
Les autorités ont annoncé la destruction, d’ici à 2025, de 132 quartiers précaires, où vivent près de 1 million de personnes.
« Tous ces projets sont pensés pour améliorer la vie des populations. Mais ils entraînent d’énormes sacrifices pour les plus démunis, en met tant des milliers de familles dans la rue », explique-t-il. Les promesses d’indemnisation ont été largement tenues pour compenser les désa gréments liés à la construction du « 4e pont », mais ce n’est pas le cas
pour le chantier du métro. Le projet est qualifié par le Premier ministre Patrick Achi, de « révolution qui va transformer la façon dont nous vivons Abidjan, en termes de mobilité et de déplacements facilités, de congestion et de pollution réduite ».
Calvaire
En théorie, près de 500 000 personnes pourront emprunter chaque jour les rames de ce métro long de 38 km et ponctué de 18 stations. Il faudra alors environ une demi-heure pour traverser la ville du nord au sud. Mais pour que ce métro voie le jour, il faut faire place nette sur son tracé Plus de 9000 foyers et entreprises sont concernés, soit plusieurs dizaines de milliers de personnes.
« Le métro est aujourd’hui un calvaire pour les populations concernées Les responsables du projet n’ont jamais respecté le cahier des charges, d’Anyama à Port-Bouët. Des immeubles qui n’étaient pas concernés ont été rasés dans le but d’y faire construire des résidences de plus haut standing », dénonce Sékou Sylla.
La modernisation d’Abidjan se fait-elle au détriment des plus pauvres, inexorablement rejetés aux extrémités de la ville? En 2019, le ministre de la Construction, Bruno Koné, a annoncé la destruction, d’ici à 2025, de 132 quartiers précaires, où vivent près de 1 million de personnes. « Mais que compte faire le gouvernement pour ces populations ? Quelle est sa politique pour les pauvres ? Abidjan est devenue une ville de riches », conclut le président de l’ONG Colombe Ivoire.
Kaba Nialé
« L’essentiel de la richesse du pays est produit ici »
La ministre du Plan et du Développement détaille la stratégie adoptée par le gouvernement pour rendre la capitale économique ivoirienne plus attractive pour les investisseurs.
Le 15 juin 2022, le groupe consultatif du Plan national de développement (PND) ivoirien, qui court sur la période 2021-2025, s’est réuni à Abidjan. La rencontre s’est soldée par un succès, les annonces d’inves tissements dépassant très largement l’objectif fixé. Où en est aujourd’hui la mobilisation de ces financements extérieurs, et quelle est la stratégie de développement mise en place, à la fois pour le pays et pour sa capitale économique? Kaba Nialé, la ministre chargée du dossier, fait le point.
Jeune Afrique : Combien de projets du PND concernent Abidjan, et quel est leur état d’avancement?
Kaba Nialé : Abidjan est la capi tale économique L’essentiel des activités économiques en Côte d’Ivoire se déroule autour de cette grande ville de 6 millions d’habitants, qui grandit vite et produit l’essentiel de la richesse du pays. Dès 2011, le président de la République, Alassane Ouattara, a lancé un certain nombre de projets importants qui concernent la mobilité urbaine, l’assainissement, la construction et l’urbanisation, et les infrastructures portuaires.
Prenons l’exemple des projets d’assainissement qui permettront de gérer la question des eaux de pluie Lorsqu’il pleut à Abidjan, il y a parfois des inondations, des éboulements, et quelquefois des
morts tragiques Il faut également trouver une réponse à la question de l’écoulement des eaux usées et des ordures ménagères que nous générons au quotidien. Une série de projets vise le même objectif : par exemple, l’aménagement de la baie de Cocody, estimé à 188 milliards de F CFA [287 millions d’euros], dont la construction du « 5e pont ». La BAD finance la gestion intégrée du bassin versant du Gourou, non loin de là, qui entre dans sa deuxième phase.
et de Grand-Bassam. Le Projet d’as sainissement et d’amélioration du cadre de vie du district autonome d’Abidjan [Paaca], estimé à 40,962 milliards de F CFA et financé par la BAD, permettra entre autres la réhabilitation et l’extension de 82,15 km de réseaux d’assainisse ment des eaux usées dans les zones nord et sud, et la réalisation de 16,15 km de canaux de drainage des eaux pluviales
Une des préoccupations majeures à Abidjan est la mobilité. Qu’est-ce qui est prévu pour faciliter le transport urbain? Où en sont les travaux de la ligne 1 du métro d’Abidjan?
Une nouvelle génération de projets est en phase de démarrage, telle que le Projet d’assainissement et de résilience urbaine [Paru] Il concerne la construction d’infrastructures de gestion des déchets solides, la construction d’une déchetterie à Bingerville, la réalisation d’in frastructures de drainage des eaux de pluie et la mise en place de services pour l’atténuation des risques d’inondation dans les communes d’Attécoubé, de Koumassi, de Marcory, de Cocody, de Yopougon
Les travaux de la ligne 1 avancent bien.Iladéjàfalluconcevoirleprojet, se mettred’accordsur letrajet,mener des études, mobiliser les financements. Actuellement, nous payons les purges annuelles de recasement, c’est-à-dire les droits des personnes déplacées ou affectées par le projet. Impossible de mener un projet à bien sans tenir compte de ses conséquences sociales. Concernant le calendrier, la libération des emprises est en cours, sachant que 2025 est un délai déjà repoussé Pour le moment, nous sommes dans les temps.
En ce qui concerne la mobilité urbaine en général, nous dévelop pons plusieurs solutions. Le projet de transport urbain de la ville d’Abidjan est terminé à 75 %, avec notamment les travaux d’aménagement de
Tous les projets d’aménagement font l’objet d’une étude d’impact social et environnemental.
l’échangeur du rond-point de la mairie d’Abobo et de la voie de contour nement « Y4 ».
Abidjan est devenue la vitrine du développement de la Côte d’Ivoire. Mais cela a entraîné l’augmentation des loyers, et rendu plus difficile l’accès à la propriété. Quelles peuvent être les réponses à ce problème?
La ville grandit vite et cela crée une certaine pression sur le foncier Les classes vulnérables et moyennes se retrouvent à la périphérie. L’État doit faire face à la demande croissante de logements sociaux et donner de quoi satisfaire à la fois les acteurs écono miques et les populations.
Le but est d’accompagner les producteurs et les assureurs. L’État a donc diversifié la qualité de son offre. Avant, la politique consistait à faire de la vente directe uniquement. Aujourd’hui, on privilégie la location de logements sociaux, mais aussi la location-vente. Il faut constituer un fonds de garantie
pour les assureurs car, comme vous le savez, nous avons une population très orientée vers le secteur informel dont les revenus ne sont pas toujours réguliers. Un fonds de garantie aux logements sociaux [FGLS] a été mis en place pour soutenir les acqué reurs, ainsi que les constructeurs et promoteurs.
L’État constitue une réserve foncière qui couvre la voirie, le drainage, l’assainissement, l’électricité, et la Société ivoirienne de construction et de gestion immobilière [Sicogi] a été remplacée par l’Agence nationale de l’habitat, chargée de porter cette politique.
Combien de logements visezvous à terme?
Dans le cadre de la mise à dis position de logements sociaux dans Abidjan et sa périphérie, nous prévoyons la construction de 150000 logements d’ici à 2025.
Dans votre politique de développement urbain, comment
prenez-vous en compte la question environnementale?
Tous les projets d’aménagement, avant financement, doivent faire l’objet d’une étude d’impact environnemental et social. Les partenaires au développement accordent une attention particulière à ce volet Ces études, pilotées la plupart du temps par l’Agence nationale de l’environnement, conditionnent l’octroi d’un crédit.
Où en est le projet du « 4e pont », financé par la BAD, dont vous êtes la gouverneure pour la Côte d’Ivoire?
Il est en retard, du fait des déguerpissements et des purges. À la suite d’un certain nombre d’accidents mortels et d’incidents sur le chantier, le projet a été arrêté par le département de sauvegarde environnemental et social de la BAD Des procédures de sauvegarde ont été mises en place avec l’opérateur, et le projet a repris normalement. Les travaux suivent leur cours.
Avant le match de qualification pour la CAN 2023 entre la Côte d’Ivoire et la Zambie, au stade de Yamoussoukro, le 3 juin.
En attendant la CAN
Cinq villes accueilleront les matchs de la prochaine Coupe d’Afrique des nations. Si Yamoussoukro disposait déjà d’un stade répondant aux normes internationales, il a fallu en construire partout ailleurs
À ABIDJAN
C’ est la course contre la montrepourterminerles travaux de la 34e édition de la Coupe d’Afrique des nations (CAN), qui devrait se dérouler en janvier et février 2024. Le président Ouattara suit de près l’évolution de chacun des chantiers qui ont coûté près de 500 milliards de F CFA (762 millions d’euros), pour les stades et les aires d’entraînement des 24 équipes qualifiées.
Le Comité national d’organisation (Cocan),présidéparl’ancienministre des Sports François Amichia, compte dans ses rangs des représentants de la Fédération ivoirienne de football (FIF), plusieurs ministères et autres représentants de l’État. Après des mois de tensions entre le comité et le ministère des Sports, le calme
est revenu entre les parties après un arbitrage du Premier ministre, Patrick Achi.
D’abord prévue du 23 juin au 23 juillet 2023, la compétition a été décalée par la Confédération africaine de football (CAF) au début de l’année 2024, officiellement pour des questions météorologiques En effet,aucours del’été,laCôted’Ivoire connaît de fortes pluies, exposant le
Le gouvernement est déterminé à tenir les délais pour effectuer des tests avant le début de la compétition.
pays à des risques élevés d’inondations. Pour l’intégrité physique des joueurs, l’épreuve reine de la CAF a été reportée, ce qui allonge les délais de livraison des stades.
Retards
« Nous serons dans les temps, le timing sera respecté Ce sera l’une des meilleures CAN jamais organisées », promet Paulin Danho, le ministre des Sports. Cinq villes ont été choisies pour accueillir la compétition : Abidjan, la capitale écono mique, Yamoussoukro, la capitale politique, la grande ville de Bouaké, San Pedro, le second port du pays, et Korhogo, située dans le Nord. En tout,sursixstades,cinqsonttoujours en travaux. Seul le stade olympique de Yamoussoukro, d’une capacité
de 20000 places, est déjà opérationnel et accueille des matchs internationaux. Dans les autres, les stades Houphouët-Boigny (40000 places) et Ébimpé (60000 places) à Abidjan, àBouaké(40000places),àSanPedro (20000 places) et à Korhogo (20000 places), les travaux sont en cours d’achèvement.
L’architecture de ces infrastructures sportives, malgré leurs capacités plafonnées, n’a rien à envier à celles des pays européens. Les officiels de la CAF enchaînent les visites dans le pays pour s’assurer de l’avancement des chantiers et de la qualité des pelouses. En mars, Véron Mosengo-Omba,lesecrétairegénéral de la Confédération, avait, accompagné de spécialistes, effectué une tournée d’inspection afin de vérifier l’état des systèmes d’électrification des stades et celui des pelouses, ainsi que le drainage. Un mois plus tôt, il s’était rendu dans la ville de San
Pedro pour visiter le village CAN, où seront construites plus de 32 villas sur 6 ha, à côté du stade de 20 000 places.
Deux autres villages verront le jour, à Bouaké et à Korhogo, avec le même nombre de villas. Le gouvernement est déterminé à finir les travaux pour effectuer des tests avant le début de la compétition. On accélère donc la cadence!LePremierministre,Patrick Achi, a visité les différents chantiers de la compétition au début de l’été. Il a reconnu les retards enregistrés dus à la pandémie de Covid 19. Certains ouvrages accusent entre quatorze et quinze mois de retard, que le gouvernement s’efforce à rattraper
Rocade
Mais la CAN ne se limite pas aux infrastructures sportives. L’État investit aussi massivement dans les routes : celle de la côte, principal axe long de 353,5 km qui relie Abidjan à
San Pedro, est en cours de réhabilitation à hauteur de 300 milliards de F CFA. Le rallongement de l’autoroute du nord de Yamoussoukro à Bouaké, villes distantes de 95 km, est en cours de réalisation pour 172 milliards de F CFA.
Le segment YamoussoukroTiébissou (60 km) est déjà terminé.
À Abidjan, pour fluidifier la circulation pendant la compétition, une voie de contournement calquée sur le modèle du périphérique parisien est en chantier. L’investissement est estimé à 74 milliards de F CFA.
Le poumon économique de la Côte d’Ivoire est fortement congestionné à cause de l’urbanisation accélérée.
Cette rocade permettra, depuis l’aé roport d’Abidjan, de rallier la commune d’Abobo,précisément Ébimpé, où est situé le plus grand stade du pays, avec ses 60000 places. Des travaux qui auraient dû se terminer en juillet…
Un nouveau Parc des expos pour devenir un hub régional
Avec son centre de conférences, ses logements et ses bureaux, il pourra accueillir de grands événements internationaux.
BAUDELAIRE MIEUAbidjan rêve en grand avec son projet de Parc des expositions, dans le sud de la ville, sur la route de l’aéroport international Félix Houphouët-Boigny. Pensée et entamée par le défunt Premier ministre AmadouGonCoulibalyquandilenvisageait d’y prêter serment s’il avait été élu président de la République, cette nouvelle infrastructure porte une grande ambition.
Son intérêt le plus évident est d’offrir des espaces adéquats pour accueillir de grandes conférences internationales,maisaussidessalons et certains événements sportifs. En effet, le Palais des congrès du Sofitel Ivoire d’Abidjan, avec sa salle de 1 300 places, est devenu trop exigu.
Le nouveau complexe, développé par le groupe PFO Africa et ses partenaires, dont le belge Besix, les français JL Event et Vinci Énergie, pour un montant estimé à 53 milliards de F CFA (81 millions d’euros), devra permettre à la capitale économique ivoirienne de rivaliser avec les grands centres urbains
comme Johannesburg, Le Caire ou Casablanca.
Le nouveau Parc des expositions sera composé d’une salle de conférences de 5 200 places, de trois pavillons d’une surface totale de 7 500 m2 et d’un conventioncenterde 9 000 m2 en forme de grande nef, avec une toiture débordante. Ce dernier aura un usage polyvalent, avec ses gradins rétractables qui permettront d’accueillir des compétitions sportives.
À terme, le parc devrait pouvoir recevoir entre 6 000 et 10 000 personnes dans ses différentes configurations. Des célébrations religieuses ou des événements politiques pourront aussi s’y dérouler.
IATF et Sara
Le projet compte aussi deux hôtels un trois-étoiles d’une capacité de 100 chambres et un cinq-étoiles de 150 chambres –, des bureaux et des commerces. Dans un deuxième temps, une marina devrait venir compléter l’ensemble Elle permettra de rallier directement la baie de Cocody par la mer. Mais la
priorité reste l’achèvement des sites de conférences et d’expositions, car la Côte d’Ivoire souhaite y accueillir, du 21 au 27 novembre 2023, la Foire commerciale intra-africaine (IATF), une initiative de la Banque africaine d’import-export Afreximbank, en partenariat avec la Banque africaine dedéveloppementpourlapromotion de la Zone de libre-échange conti nentale africaine (Zlecaf)
Legouvernementivoirienareporté à octobre 2023 le Salon international de l’agriculture et des ressources animales (Sara), l’un des rendez-vous emblématiques du secteur agricole, afin de l’organiser au Parc des expositions. Le prochain Salon de l’automobile et celui de la défense s’y tiendront.SouleymaneDiarrassouba, ministreduCommerce,del’Industrie et des PME, qui assure la maîtrise d’œuvre pour le compte de l’État, ne cache pas sa satisfaction : « Le chantier avance en conformité avec le cahier de charges. Tout se passe bien, etlesdélaisseronttenus »,assure-t-il. La première phase des travaux doit s’achever à la fin de cette année.
Chantier du futur Parc des expositions.QUAND LE CITOYEN DEVIENT ACTEUR DE SA MOBILITÉ
Lesservices de transport étant modernisés, les dispositifs pour l’amélioration de la mobilité et de la sécurité routière mis en place, désormais, Quipux Afrique souhaite proposer sa stratégie ciblée sur une «SmartMobility ». Explications.
Quipux Afrique,entreprisespécialisée dans le développement de solutions technologiques appliquées au système de transport aamorcé son activité en 2013, en Côted’ivoire.À l’issue d’un appel international lancé par le Ministère de l’Économie et des Finances, l’organisation s’estengagée dans la conception, l’ingénierie, la mise en place et l’exploitationd’un système de gestion intégrée des activités de transportsterrestres.
Quipux Afrique,entreprise spécialisée dans le développement de solutions technologiques appliquées au système du transport aentamé sa première aventure en 2013, en Côte d’ivoire, dans le cadre d’une première concession pour la conception, l’ingénierie, la miseenplace et l’exploitation d’un système de gestion intégrée des activités de transport terrestre obtenu àl’issue d’un appel international lancé par le Ministère de l’Économie et des Finances.
En investissantunpeu plus de 12 milliards danscetteétape de plusdans la modernisation du secteur routier, l’entreprisea optimisé les procédures de traitement et de délivrance des documents administratifs du transport routier en yintroduisant plusd’efficacité et de célérité
Un financementqui apermis la construction de centredegestion intégrée dans presque tous les chefs-lieux de régions améliorant ainsi l’accessibilité àl’adminis trationdes transports. La miseenplace d’une plateforme technologiquepermettantune gestion en temps réel, la production de statistiques, le suivi opérationnel et la coordination surl’ensemble du territoire, la sécurisation desrecettes avec la miseàdisposition de moyens de paiement en ligne
L’autre acquis de ce partenariat aété la miseenplace d’une base de données unique qui apermettredecréer un écosystèmepour mettreàladisposition des populationsetdel’administration, un cer tain nombre d’outils de natureàfaciliterla mobilité desbiens et des personnes, de renforcer l’autorité de l’État,d’avoir un dispositif de contrôle en ligne en temps réeletd’orientation des politiquesde transport. Aujourd’hui, cettebase de données permet l’automatisation de la gestion des infractions et l’implantation de systèmes de transport intelligents.
Enfévrier2021, le Gouvernement arenou velé la conventiondeconcession de Qui pux Afrique SA, en l’étendant au projet de mise en place du Système de Transport Intelligent(STI) et d’une fourrière administrative. Cette décisionmarqueégalement l’accord officiel pour l’application de la vidéo-verbalisation en Côte d’ivoire
L’approche classiquedelamobilité, réduiteàlanotion de transport depuis de nombreuses années, aévolué vers une logiquedeservice.LaSmart Mobility se retrouve au carrefour de deux secteurs :le secteur du numérique et le secteur des transports.Cet outil donneàchaque usagerl’opportunitédedevenir acteurdesa mobilité.Ellemet àdisposition unesolution complètequi optimise la mobilité et intègre sesattentes.
Un certain nombred’outils ont étémis en place. Objectifs: faciliter la mobilitédes biens et des personnes,renforcer l’autoritédel’État,bénéficier d’un dispositif de contrôle en ligne et d’orientation des politiques de transport
En Côte d’ivoire plusieurs initiativesde mobilitésont déjà en cours,notamment la détection automatiquenon seulement des infractionsaucode de la route mais aussi desdéfauts de documents de transport et la gestion électronique desamendes liées, la gestion du stationnement,lecovoiturage, la billettique, le désencombrement de la congestion pourneciterque ceux-là.
Grâceà uneapproche digitale,Quipux Afrique avec MOBILITY BY QUIPUX envisage de Mutualiser les équipements de collecte existants,Intégrer toutes les solu tions pour faciliter l’accès aux services offertsaux usagers clients, Fédérer toutes les initiatives autour d’une plate-forme unique,Exploiter et gérerlesystème de mobilité pourlecompte de l’État. Uneini tiative d’un cout de 17 milliardsdeFCFA.
Bruno Nabagné Koné, ou le rêve de l’architecte
À 62 ans, le ministre de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme est chargé de l’ambitieuse politique du logement social Cet ancien financier manie la calculatrice et le compas pour refaire d’Abidjan le véritable toit de la Côte d’Ivoire.
FRANÇOIS-XAVIER FRELANDComme tout bon provin cial, Bruno Nabagné Koné a d’abord rêvé d’Abidjan en regardant des cartes postales. Il y a mis les pieds pour la première fois à l’âge de 17 ans, en vacances chez des parents. Né le 6 septembre 1960 à Kouto, dans le Nord du pays, quelques semaines aprèsl’indépendance,BrunoNabagné Koné a tout vu de son pays avant de
découvrirlacapitale :« Monpèreétait militaire, on n’arrêtait pas de voya ger de caserne en caserne : Bouaké, Korhogo, Sassandra, Daloa, Bouaflé, Dimbokro, etc. Pour moi, Abidjan, c’étaitunrêved’enfant,lagrandeville avec des tours comme dans les films américains.Lapremièrefoisquejel’ai visitée, c’était à pied, pour tout voir, dans les moindres détails. Les quar tiers de Treichville, d’Adjamé, voir
la mer à Port-Bouët… mais surtout découvrir le Plateau. »
Passion
De culture sénoufo, il conserve un attachement à Kouto et sa région, incarnés par sa grand-mère mater nelle, à laquelle il est très lié depuis le décès prématuré de sa mère L’élève studieux s’éprend de littérature fran çaiseetrêvededevenirmédecin
ISSAM ZE JL Y POUR JAouarchitecte.Quandsesétudeslui en laissent le temps, il adore jouer au basket, une passion qui ne le quittera jamais : il est aujourd’hui président d’honneurdelaFédérationivoirienne de basket-ball. Bruno Koné fait toute sa scolarité dans des établissements catholiques, notamment au célèbre collège Saint-Viateur de Bouaké, où il obtient un bac scientifique
Passé par l’École supérieure de commerce d’Abidjan (Esca) et HECParis, à Jouy-en-Josas, Bruno Koné démarre sa carrière au cabinet Arthur Andersen (1985-1988), aujourd’hui Andersen Consulting. Il y croise son futur patron, Patrick Achi, chef de mission, qui remarque les qualités humaines et professionnelles de ce jeune social-libéral, futur militant ouattariste Bruno Koné va gravir une à une les marches de la réussite à Abidjan, en assumant différents postes de directeur financier chez Chanic (1988-1991), Sifcom (1998 2001),avantd’êtrerecrutéen2003par Côte d’Ivoire Telecom, opérateur his torique du pays. Il en devient le direc teur général deux ans plus tard, avant de rejoindre la direction du groupe France Télécom-Orange, à Paris, en 2008,oùiloccupesuccessivementles postesdedirecteurdel’auditfinances et de directeur des affaires réglemen taires et institutionnelles de la zone Afrique Moyen-Orient Asie.
Fin orateur
Son exil à Paris est de courte durée. En 2011, un certain Amadou Gon Coulibaly, alors secrétaire général de la présidence de la République, l’ap pelle en le priant de revenir au plus vite à Abidjan. Respectueux de ses engagements professionnels d’alors, il hésite, rate un premier vol, puis s’envole pour l’inconnu et apprend, lors d’une escale, qu’il vient d’être nommé ministre des Postes et des Technologies de l’information et de la communication. En découvrant la nouvelle sur sa messagerie, Bruno Koné ferme les yeux et se revoit enfant, jouant de la trompette dans la fanfare du collège pour la venue du président Houphouët-Boigny Tout un destin. Le lendemain, après ses premiers entretiens avec le pré sidentAlassaneOuattaraetlePremier ministred’alors,GuillaumeSoro,ilest
désigné porte-parole du gouverne ment. Fin orateur, loyal à son camp, Bruno Koné monte doucement dans la galaxie Ouattara, d’autant plus que le président est l’oncle de son épouse.
En 2018, Gon Coulibaly est Premier ministre. Il apprécie son sens du travail bien fait, « sa rigueur de financier » et lui propose un nou veau poste, plus risqué Avant de lui préciser son affectation, il le pré vient : « Aucun ministre n’est sorti de ce ministère avec un bon nom, on compte sur toi »… Bruno Koné devient ministre de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme. À l’époque, les interminables litiges dans le foncier, les nombreux scan dales, dont celui des « déguerpis », ces habitants pauvres délogés manu militari de leurs logements insalubres, ont terni l’image de son prédécesseur
« Aucun ministre n’est sorti grandi de ce ministère, on compte sur toi », l’a-t-on prévenu.
50000 habitations de ce type par an, pendant les dix prochaines années », précise-t-il.Considéréparfoiscomme « trop technocratique », l’élégant ministre n’hésite pas à se rendre sur les chantiers, casque sur la tête, et donne souvent des consignes pour penser, et ériger, des bâtiments plus écologiques. « Nous avons la chance d’avoir des architectes très compé tents, qui ont bien pris en compte toute la richesse de nos savoir-faire africains traditionnels. Par exemple, nous essayons de privilégier la venti lation naturelle des bâtiments, plutôt que la climatisation, vu la densifica tion de notre habitat. »
Mélomane
« C’est drôle parce que je n’avais pas vraiment fait d’études pour cela, mais quelque part ma fonction rejoint mes rêves d’enfant. Je considère mon rôle primordial pour assurer le bien-être des Ivoiriens. Avoir un toit, être bien chez soi est un droit fondamental. On ne travaille bien, on n’est heureux que lorsqu’on est bien logé. Partout, le bâtiment contribue fortement à la production économique et à la créa tion d’emplois. Malheureusement, malgré nos efforts, nous n’avons pas encore atteint les objectifs définis. »
Quatre ans après sa prise de fonc tions, le bilan de Bruno Koné à la tête de ce ministère est plutôt positif, mal gré quelques couacs et retards. Un ambitieux projet de modernisation de la gestion du foncier urbain est en cours de réalisation : 30000 loge ments sociaux ont déjà été construits.
« On estime aujourd’hui les besoins en logements sociaux à 600 000, dont 500 000 à Abidjan. Notre ambition est de construire 40000 à
Ces dernières années, l’effondrement d’une quinzaine d’immeubles mal conçus est venu écorner son image de « bâtisseur ». « Depuis 2020, nous avons durci la loi et renforcé la surveillance, notamment à tra vers la Plateforme collaborative de contrôle des constructions (PCCC), qui implique désormais les mairies. » Ce qui n’empêche pas une nouvelle fièvre immobilière à tendance verti cale de s’emparer d’Abidjan : la future tour F, réalisée par Pierre Fakhoury, devrait redonner à Abidjan son statut degrandecapitalerégionale Imaginé etattendudepuisquelquesdécennies, cet immense édifice qui aura la forme d’un masque africain, sixième tour de la cité administrative de la ville, deviendra la plus haute d’Afrique.
« Abidjan se particularise par sa modernité, attrayante et futu riste Cette tour sera l’un des mar queurs d’une Côte d’Ivoire forte et ambitieuse… Mais ce n’est pas du bling-bling! Nous sommes dans un environnement où manquent des bureaux, des surfaces commerciales, des hôtels, etc. Cette tour contribuera à la réduction de ce déficit et pourra abriter une partie de notre adminis tration », s’enthousiasme le ministre.
Bruno Koné, grand mélomane à ses heures, amateur de jazz et de reggae, regarde du haut du bâtiment de son ministère, récemment réhabilité, Abidjan renaître de ses cendres, avec peut-être en tête les paroles de l’un de seschanteurspréférés,AlphaBlondy : « J’ai une chance inouïe, Dieu a fait de moi un tisserand de rêves. »
Mise au vert
Le développement de la capitale économique a longtemps fait la part belle au béton. Aujourd’hui, citoyens et entreprises prennent conscience du rôle vital du reboisement, et le paysage commence à changer.
FRELANDDans certains kiosques d’Abidjan, de vieilles car te s postale s en Technicolor, légèrement oxydées par l’humidité et le temps, donnent une idée de ce que la capitaleéconomiqueivoirienneétaitdans les années 1980 Quelques tours de béton lui donnaient déjà son allure américaine, entourées d’importants halos de verdure… Abidjan respirait. L’écrivain et journaliste Venance Konan n’a pas oublié cette époque « Au Plateau, il y avait encore, à côté des bâtiments modernes, de très vieux arbres qui rappelaient ce qu’avait pu être la ville avant la coupe sauvage de ses arbres, pour certains multicentenaires, par des habitants qui n’avaient pas encore conscience de leur importance, pas plus sur le planvitalquesurleplanesthétique. »
LespremièrescampagnesdereboisementàAbidjanontcommencésous l’impulsion d’une femme, Adrienne Soundele, qui, dès 2013, lance le projet « Une école pour cinq hectares ». L’idéeestsimple :ils’agitdeconscientiser la jeunesse en faisant appel aux élèves des principaux collèges de la capitale pour reboiser. Originaire d’Aboisso, Adrienne Soundele a grandi dans la forêt. C’est en observant disparaître avec tristesse des pansentiersdecelle-ciqu’elleadécidé de s’engager d’abord à Abidjan, dans son quartier des Deux-Plateaux « J’ai commencé par planter des acacias, des tecks, des bambous chez moi. Au début, les voisins me prenaient pour unefolle.Ilsdisaientquelesbranches les gênaient. Jusqu’au jour où j’en ai surpris un s’abritant dessous alors qu’il pleuvait. À partir de ce moment, on m’a fichu la paix. J’ai alors vendu deuxRolexpourcréermafondationet agir à une plus grande échelle. »
Adrienne Soundele est très vite remarquée par le ministère des Eaux etForêts,quisoutientalorssonaction de sensibilisation dans les écoles. En 2015, la fondation Soundele reçoit le premier prix du reboisement, remis par leprésidentAlassaneOuattaraen personne Mais la tâche est immense. En cinquante ans, la Côte d’Ivoire a perduprèsde90 %desesforêts,selon leschiffresduministèredel’Environnement. En mai 2021, à l’instigation de l’Institut national des administrateurs de Côte d’Ivoire (INAD-CI), le Planvertestlancéparleministèredes Eaux et Forêts pour inciter les sociétés àengagerleurRSE(responsabilité sociale des entreprises) dans la refo restation, afin de recréer des puits de carbone.
Niangon ou okoumé
Ted Azouma, le visionnaire directeur exécutif de l’INAD-CI, est à l’origine de ce projet. « Nous demandons aux entreprises membres de notre asso ciation un financement et de partici per directement au reboisement. On essaie de planter des espèces locales, comme le niangon ou l’okoumé. Pour aller plus loin, nous faisons sortir nos partenaires de leurs bureaux Nous avons déjà organisé cinq campagnes avec des administrateurs, des ban quiers, des députés, des hommes d’affaires… Ils viennent planter des arbres le week-end avec leurs enfants, c’estutileetjoyeuxàlafois. »L’objectif initial visait à replanter 10 ha de forêt par an, sur dix ans, de 2021 à 2032…
Résultat, les campagnes de reboisement ont si bien fonctionné que près de 40 ha de forêt ont déjà vu le jour! La BFCI et le cabinet Deloitte notamment sont partenaires d’une action dont les effets commencent à se faire sentir dans le quartier
de Cocody, du côté de l’université
Houphouët-Boigny
En juillet, 3 ha ont aussi été plantés dans la forêt classée d’Audouin, sur la commune de Jacqueville À l’avenir, les campagnes de reboisement devraient cibler davantage les quartiers populaires d’Abidjan. « En Côte d’Ivoire, les gens n’ont pas encore la culture du reboisement. Au début, ils ne comprennent pas trop, car, dans leur esprit, on plante d’abord un arbre qui rapporte Avant toute chose, nous organisons des campagnes de sensibilisation dans les quartiers pour gagner la confiance des habitants », précise Ted Azouma.
Petit à petit, le reboisement, considéré désormais « d’utilité publique », s’est institutionnalisé. Afin d’enrayer la dégradation des forêts, un accord de prêt et de don pour un montant de 7,5 milliards de F CFA (11,4 millions d’euros) a été signé récemment entre le ministère ivoirien de l’Éco nomie et des Finances et la Banque mondiale « Ça commence à bouger, se réjouit Venance Konan, on voit de plus en plus de clôtures de protection autourdesparcsforestiersabidjanais Récemment, un groupe hôtelier a dû renonceràs’implanterauparcDahlia Fleur, près de Bingerville, grâce à la forte mobilisation citoyenne! »
Administrateurs, banquiers, députés, hommes d’affaires viennent planter des arbres le week-end avec leurs enfants.
«NOTRE OBJECTIF EST DE FORMER ET D’ACCOMPAGNER UNE ÉLITE AFRICAINE ÀLACONQUÊTE DE L’EXCELLENCE »
Pouvez-vous vous présenter ?
Aprèsunecarrièredanslabanqued’affaires àLondres, j’ai fondé le cabinetà Abidjan en 2015. Nous travaillons dans troisdomaines :lerenforcementdes compétences, l’organisation de confé rences institutionnelles et la modération ainsi quel’accompagnementdes PME/TPE. Le cabinetaunleitmotiv, l’excellence,etal’ambition d’êtreun catalyseur de performances au service desentreprisesetdesindividus.
En matière de renforcement des capacités, comment vous différenciez-vous de la concurrence ?
Lecabinetmetl’accentsurlaformation en matièred’attitudes comportemen tales qui sont à notre avis nécessaires pour un accroissement de productivité etledéveloppementducapitalhumain àdéfautdelasimple technicité. Nous proposonsunlarge portefeuille de formations pour nos4cibles: Conseil d’administration, Comité de Direction, Team Leader et lesjeunes. Ces forma tions concernentlagouvernance,la gestion de l’intelligenceémotionnelle, le managementopérationnel, la santé mentale,leleadershipetlaprisedeparole en publicpourneciter quecellesci.Noussommes de vraisspécialistes des«softskills». Kaizene organise égalementdes re traitesstratégiques. Ces réunions permettentdefairelepointsurlastratégie de l’entreprise,d'évaluerles progrès
danslamiseenœuvre et de réfléchir auxmodificationsàapporter. Unautrefacteurdifférenciantessentiel résidedanslefaitquetoutesnosforma tions sont100%bilingues français-an glais.
Pour quelles raisons vous êtes-vous lancés dans l’organisation de conférences ? L’Afriqueest confrontéeà un déficit importantenmatière d’infrastructures, un sujet surlequel j’ai travaillé lorsque j’étais dans la banque d’af faires.En2021, le cabinetaorganisé desconférences surledéveloppement desinfrastructuresdanscinqpaysde larégion (Afrique du sud,Côte d’Ivoire, Éthiopie,Rwanda et Sénégal) ainsi que des conférences institutionnelles telles quelaCOP-15.
Durant nos conférences surles in frastructuresnousavonsun«plus»:des masterclassou«étudesdecas»avecla participationd’étudiantsd’universités situées dans lespaysoùsetiennentles conférences. Il nous sembleessentiel de nous adresserà ceux quiserontles décideursdedemain.
Le 3e pilier de votre activité, l’accompagnementdes PME/TPE, se veut également innovant…
Noussommespartis d’un constat :la majoritédesPME/TPEdeCôted’Ivoire ontbesoin d’un accompagnementface auxenjeuxstratégiquesetopérationnelsrencontrés. Créer une entreprise
ne suffitpas si le dirigeant ne maîtrise passon écosystème ou n’est pas correctementstructuré. Nousavons misenplaceunesolutionglobaled’ac compagnement«3en1»
Il s’agit d’un packagecomposé de troisservices :unaccompagnement sur-mesure en fonction des besoins de l’entreprise (business plan, structuration, étudedemarché,recherche de partenaires, formations), une formule de petit déjeuner pour PME, et l’hébergementdansunespace de coworking. Le produit «3en1» a rencontréunvif succès auprès de nos clients.
Quels sont vosprojets pour l’avenir ? Noussouhaitons nous développer en Afrique, notammentenAfrique de l’Est, une zone à fort potentiel de croissance.Par ailleurs, nous souhaitons intensifier les actions de forma tionauprèsdesjeunesetdesfemmes. Nouslefaisons déjà, parexemple,en tant quepartenairedel’Agence Em ploiJeunes quidépend du ministère de la Promotion de la Jeunesse et de l’EmploidesJeunesdeCôted’Ivoireet d’ONU FEMMES. En plus de siéger à plusieursconseilsd’administrationet afindepouvoirêtreunagentdechan gement,jedonneégalementdescours d’entrepreneuriatdansdes universitésinternationales en Côte d’Ivoire. Bâtir l’éliteafricaine de demain fait partiedel’ADNducabinet.
Guillaume Koffi
«Abidjan se construit plus vite que nous ne la pensons »
Économies d’énergie et préservation de l’environnement obligent, cettefigure de l’architectureivoirienne appelle ànepas multiplier les bâtiments de grande hauteur.
NéàGagnoa, fils de fonctionnaire, Guillaume Koffi,63ans,a vécu une enfancesans coupeni croquis, «normale ». Il suit une partie de sa scolaritéàBouaké avant de déménageràAbidjanpourpasserson bac.Son père le rêve en pharmacien, maisl’architectures’imposenatu rellement àlui. «Lelycée se trouvait juste àcôtéde l’hôtelIvoire. J’avais donc déjà desréférents. Je me promenais beaucoup au Plateau, où il y avaitdesvitrineschicsdans de beaux immeubles… J’aimaismebalader aussi danslequartier de Cocody, pour regarder lesvillas modernes, et àTreichville,oùvivait ma nd-mèr
Diplômé de l’École spéciale d’architecturedeParisen1984,iltravaille quelquesannées dans l’agence de JacquesLabro,PrixdeRome, connu pour avoir dessiné la station de ski d’Avoriaz (Haute-Savoie). «Mais il y avait davantage de besoins en Côte d’Ivoire. »Alors Guillaume Koffi rentre àAbidjan en 1985 et fondeson proprecabinet en 1992.Septans plus tard, il s’associe avec un de ses plus talentueux employés,Issa Diabaté, pour créerladésormaiscélèbre agence Koffi &Diabaté.
Récompensépar le World ArchitectureAwardsen2018, GuillaumeKoffi,président de l’ordre desarchitectesde2006 à2014, tàl’origine de la création la premièreécole d’architectured’Abidjan, «pourassurer la relève». Très sensiblesàlapro blématique environne mentale,prochesdes concepts écologiques desBrésiliensMarcio Kogan et Isay Weinfeld ou du Vietnamien Vo Trong hia, Koffi et Diabaté élaborent deshabitats durables, écoresponsables,etdesimmeubles tertiaires aux quatre coins de l’Afriquede l’Ouest,desRésidences Chocolat, àAbidjan, à la Citéministérielle,à Cotonou.Rencontre.
JeuneAfrique:Comment avez-vousvéculesaléasclima tiquesdel’étéquis’achève?
GuillaumeKoffi : Je suis très très inquiet, d’autant plus que nous serons lesplus touchéspar leseffets négatifs du réchauffement climatique.Lasécheresse,lagestion du cycle de l’eau, c’estévidemment un sujetqui touche particulièrement l’Afrique… Nous avons ici un gros déficit d’infrastructures d’assainis sement que le gouvernement tente de résoudre. ÀAbidjan, ellesont été conçuespour1 million et demi d’habitants,alorsque la villeencompte aujourd’hui près de 7millions. Sans parler du défi de l’énergie :jesuis de la génération qui avécusansclimatisation dans lesannées1960, avant que l’on généralise cessys tèmesénergivorespourles édifices publics…
Il esturgentderéfléchir,etdetrouverdes solutions durablesàtoutes cesproblématiques. Àl’époque colo niale, il yavait deshôpitauxsans climatisation, car l’architecturetenait compte de l’aérationnaturelle.Ily a également desréférencesd’architec turetraditionnelle localetellesque lesTata Somba,qui, par leur organisationspatiale toutenrondeuretleur toitureconique,favorisent leseffets de cheminéepour laventilation naturelle… Ça aété d’ailleursune source d’inspiration pour concevoir le Musée international du Vaudou, à Porto Novo,auBénin.
«LesRésidencesChocolat», quevousavezinauguréesen2016 surlaRivieraGolf,àAbidjan,inté graientdéjàlesnouveauxdéfis dudéveloppementurbain,dont larationalisationdel’espaceetle respectdel’environnement…
C’était d’abord une réponse à l’étalement urbain. Vu le prix du foncier, nous avions voulu être efficaces en matièred’occupationdusoletmutualiserleséquipements,letoutdansune architecture durable Depuis, nous avonsengagélaconstructiond’Abatta Village, à trente minutes du Plateau, sorte de smart city sécurisée. C’est un concept similaire aux Résidences Chocolat, à une échelle différente. Il y a eu les résidences Cacao, avec 6 villas, puis Chocolat avec 32 loge ments. Abatta Village possède déjà 216 logements. Abatta II comprendra 600logementssupplémentaires…Ce sontdesécoquartiers,avecunemixité fonctionnelle : l’eau de pluie est stockée et réutilisée pour l’arrosage, les déchets valorisés, et la verdure présente sur plus de 60 % de la zone.
Avez-vousd’autresprojetsdece type?
Nous travaillons actuellement sur le projet d’Ebrah, un petit village lagunaire de la commune de Bassam. C’est unprojet portéparses habitants pour transformer les ambitions individuelles des propriétaires terriens en un projet collectif, structuré et pérenne. Nous évitons ainsi la vente tous azimuts de terrains et permet tons de renouer avec la planification urbaine qui fait tant défaut. Mais il faut une forte implication de l’État pourréduirelescoûtsdecession.C’est unevillenouvellemodernequivapermettreàdifférentesclassessocialesde se loger… 30000 logements sont prévus, dont 90 % d’appartements. Avec delaplacepourl’agricultureurbaine : des potagers partagés.
LesRésidencesChocolattout commeAbattaVillagenesont pasdesbâtimentstrèsélevés. L’architectureverticaleest-elle incompatibleaveclespréoccupationsenvironnementales?
Pas forcément : nous avons des résidences de cinq à six étages pour rester à échelle humaine et éviter
les coûts prohibitifs d’entretien des immeubles de grande hauteur. Dans les années 1970, il est vrai qu’Abidjan ressemblait à une ville sud américaine avec sa concentration d’immeubles de grande hauteur sur le Plateau. Aujourd’hui, il faut favoriser la mixité fonctionnelle des quartiers, qui s’articule autour d’une mobilité plusdouce Certainsdécideursrêvent encore d’un « Dubaï des tropiques ». Personnellement, je ne suis pas féru de ce type d’urbanisme Nous militons pour une ville humaine, avec des espaces verts et des équipements à partager Le beau ne se traduit pas forcément par la verticalité.
développent de façon anarchique, possèdent leur propre centre d’af faires et commercial, fonctionnent en autarcie… Il faudrait de vrais professionnels pour accompagner cette évolution et éviter les accidents de parcours, comme les effondrements d’immeubles. Il faudrait plus d’architectes et d’urbanistes pour conduire la planification et contrôler le développement urbain. Nous ne sommes pas assez nombreux.
Vous-même,oùhabitez-vous?
La société est en pleine mutation. La cuisine, qui était autrefois le cœur de la maison en Afrique, se réduit comme peau de chagrin.
J’habite aux Résidences Chocolat, et bientôt à la résidence Les Flamboyants, conçue par Koffi & Diabaté et en cours d’achèvement. Vous savez, l’architecte est d’abord un animateur social… Nous organisons même des pots entre voisins pour échanger, discuter notamment des problèmes de la résidence… Par exemple,quandonaconçuChocolat, on a prévu une grande esplanade pour que les enfants puissent jouer. Or nous n’avions pas imaginé que la population de la résidence n’aurait pas d’enfants en bas âge…
Legouvernementivoirienalancé unvasteplandeconstructionde logementssociaux:pourquoi n’enconstruisez-vouspasplus?
Nous apportons un appui significatif au programme de logements sociaux à Ouèdo, à Parakou et à Porto Novo, au Bénin. Nous aimerions participer davantage au logement social à Abidjan… Nous restons à l’écoute et àladispositiondes donneursd’ordre. Mais attention, je suis contre les lotis sements « Soweto », ce mitage urbain qui gangrène les villes africaines. Il faut privilégier un style d’habitat intermédiaire, plus dense, et mettre un frein à l’étalement urbain.
Commentvoyez-vousl’évolution récented’Abidjan?
Il faut impérativement la maîtriser. À notre niveau, nous essayons de professionnaliser son développement avec les exemples de Chocolat, d’Abatta et d’Ebrah. La ville se construit malheureusement sans les architectes et plus vite que nous ne la pensons… Certains quartiers se
Nous sommes face à une société en pleine mutation. Les jeunes couples vivent à l’heure de la mondialisation, et cela influence tout. La cuisine, qui était autrefois le poumon de la maison en Afrique, se réduit aujourd’hui comme peau de chagrin. Les gens ne rentrent plus chez eux déjeuner, ils mangent le foutou en livraison. L’architecte doit accompagner ce changement
J’espère que nous contribuons à écrire cette page de l’architecture ivoirienne. Nous n’avons pas encore de commandes sur d’autres continents mais nous espérons que cela viendra… Les architectes africains installés en Afrique ne bénéficient malheureusement pas de la même publicité que les architectes africains installés en Europe… Ça ne m’empêche pas de saluer au passage leur remarquable travail, qui favorise l’émulation et crée des vocations. Ils font notre fierté. Pour l’heure, nous nousconcentronssuruneproduction locale.
Abidjann’est-ellepasentrainde redevenirlacapitaledel’architec turemodernedel’Afrique?
Pouvez-vous nous présenter la société AGROCI?
AGROCI est une société sœur du groupe Kirène, référence dans le sec teur de l’industrie agroalimentaire en Afrique de l’Ouest. La société est installée en Côte d’Ivoire depuis 2020 : elle produit et commercialise, depuis son usine de Bonoua, située à75km d’Abidjan, la marque d’eau minérale naturelle Kirène ainsi que jus de fruits Présséa et les boissons au fruit Prés séa Fresh.
AGROCI ainvesti àcejour plus de 40 millions d’euros, grâce notamment àl’appui apporté par la Société Fi nancière Internationale (SFI). Plus de 1000 emplois directs et indirects ont été créés.
franchissement des frontières en livrant des produits et denrées sûrs et fiables aux consommateurs.
Les avantages de cette certification sont nombreux et concrets.
Cette certification ainsi que d’autres labels similaires nous permettent d’appliquer dans notre entreprise des pratiques et procédures reconnues à l’échelle internationale.
Le respect de la norme nous oblige à définir clairement nos processus opé rationnels, àfixer des objectifs et àles mesurer.Cetravail est essentiel pour construire une entreprise productive et efficace.
C’est un outil de communication inte ractive. La norme est un facteur innovant pour la gestion des risques et la communication structurée et maîtrisée dans toutes les directions, en interne comme en externe, avec nos fournisseurs et clients. Elle garantit une maîtrise efficace des dangers.
mentaires au bénéfice des parties prenantes, internes et externes.
Enfin, elle favorise l’engagement des équipes, notamment en matière de productivité.
Cela impact également les clients et les consommateurs. Ceux-ci ont la garantie que tous nos produits sont sûrs et sont fabriqués en respectant des standards internationaux. C’est une assurance de qualité, de sûreté et de fiabilité
Comment contribuez-vous àla protection de l’environnement ?
Quelle que soit la taille de l’entreprise ou la nature des produits, les producteurs de denrées alimentaires sont responsables de la sécurité de leurs produits et du bien-être des consommateurs. La norme ISO 22 000, relative au management de la sécurité des denrées alimentaires, aide notre entreprise àidentifier et àmaîtriser les risques qui menacent la sécurité alimentaire. Ce label permet de rassurer les acteurs de la chaîne mondiale d’approvisionnement en produits agro-alimentaires et de faciliter le
C’est un engagement qui s’inscrit dans la démarche HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point) et des autres plans de prévention qui garantissent la sécurité des denrées alimentaires.
Elle permet d’accroître la satisfaction des clients en améliorant la gestion des réclamations, le contrôle quali té et le suivi de la satisfaction de la clientèle.
Elle facilite l’accès àdenouveaux mar chés comme, par exemple, les chaînes de fast-food internationales (KFC, Bur ger King, etc.) et les marchés publics qui exigent cette norme.
Elle augmente la transparen matière de sécurité des denré
Àl’instar du Groupe Kirène, AGROCI aunengagement fort en faveur de la protection de l’environnement et du développement durable. Cet engagement se traduit par le financement de projets de valorisation des déchets plastiques, notamment les bouteilles plastiques avec des structures comme COLIBA pour le tri et la collecte et RECYPLAST pour le compactage et la transformation. Environ 200 millions
FCFAont été investis dans la RSE depuis notre adhésion àl’AIVP (Asso ciation Ivoirienne de Valorisation des Déchets Plastiques).
Nous avons récemment investi dans une ligne de production en verre pour la production de l’eau minérale Kirène et de l’eau minérale Kirène gazéifiée.
Cet emballage est recyclable et répond directement aux problématiques d’en vironnement et de qualité.
La tech toujours dans l’attente d’un Startup Act
QUENTIN VELLUETD
ans un bureau de sa villa du quartier chic de Palmeraie, à Abidjan, Ange Frédérick Balma se désespère. « Il y a actuellement trop de promesses non tenues dans l’écosystème tech ivoirien », lance le fondateur de Lifi-Led, une start-up spécialisée dans la connectivité des zones rurales et des villes intelligentes. Pour ce membre engagé de la communauté tech abidjanaise, le remaniement ministériel d’avril 2022, qui a entériné la disparition du portefeuille du Numérique, augure mal de l’adoption d’un Startup Act ivoirien
Ayant très tôt planché sur un projet de loi visant à dynamiser l’entrepreneuriat dans les technologies et l’in novation, le pays d’Afrique de l’Ouest avait pourtant tout pour faire partie des pionniers, aux côtés du Sénégal et de la Tunisie. Le projet a été présenté en Conseil des ministres le 19 octobre 2021. Interrogé par Jeune Afrique en avril 2022, le ministre Roger Adom se montrait confiant : « Les textes sont prêts, il faut avoir une conversation avec le ministère des PME et celui de l’Innovation pour savoir qui mène le projet », confiait-il quelques semaines avant d’apprendre son éviction du gouvernement.
Depuis, et malgré la validation au début de 2022 par Alassane Ouattara d’une feuille de route gouvernementale ouvrant la voie à un plan d’investissement de 3 milliards d’euros
afin de mettre en œuvre « la stratégie nationale de développement du numérique 2021-2025 », le dossier semble au point mort.
En attendant un sursaut des politiques, nombreux sont les porteurs de projet qui tentent d’avancer sans le soutien de l’État. « Ce qui manque, c’est plus l’accompagne ment des jeunes entrepreneurs que les financements », assure un ancien responsable de Taxijet, service pionnier de VTC à Abidjan. Lui qui
ne tiennent pas le même discours « Abidjan dispose des infrastructures suffisantes pour en faire une place attractive, indique Régis Bamba. L’environnement fiscal n’y est pas si lourd, la desserte d’électricité est stable, et la ville héberge une classe moyenne prête à consommer »
Levée de fonds à l’étranger
Si Djamo ne nourrit pas d’attente particulière concernant un futur Startup Act, c’est aussi que, en allant, très tôt, lever des fonds à l’étranger, elle a gagné une indépendance qui fait défaut à beaucoup d’autres En avril 2021, elle a été sélection née pour suivre le programme de Y Combinator, incubateur star de la Silicon Valley.
prône un modèle interventionniste à l’image de ce que la France fait avec Bpifrance estime que « c’est à l’État de mettre à disposition des experts capables de suivre plusieurs entreprises en même temps. Cela rassurerait les banques ». Il souligne aussi la nécessité de mieux former les fonctions support comme les métiers de la finance, du commerce et de la logistique.
D’autres entrepreneurs, comme Régis Bamba et Hassan Bourgui, fondateurs de la fintech Djamo,
Bien que réalisée à distance à cause des restrictions de voyages liées à la pandémie, cette expérience de trois mois lui a permis de se lier à l’écosystème tech américain en présentant notamment son projet à des centaines d’investisseurs des États-Unis. Bénéficiant déjà du soutien financier d’un business angel comme Youcef Es-Skouri, direc teur des produits chez DropBox, la start-up emploie plus de 100 personnes, revendique une croissance mensuelle de 20 % et prépare une première levée de fonds (série A) à six chiffres. Depuis sa création en 2020, Djamo a levé au moins 425000 dollars sans aucun coup de pouce de l’État.
Parmi les entreprises innovantes qui fleurissent dans la capitale économique, deux camps s’opposent.
Les uns réclament un cadre favorisant leur développement, les autres avancent sans rien demander à l’État.
QUESTIONS À…
Marguerite Abouet
Écrivaine, scénariste et réalisatrice« Yopougon n’est plus le petit quartier que j’ai connu dans mon enfance »
JeuneAfrique:Est-cequeles habitantsduquartiersesont appropriéAya?
MargueriteAbouet: Ils vivent Aya! Je suis souvent sur place, à Yopougon. Quand je me présente anonymement, tout le monde s’en moque. Mais lorsqu’ils apprennent que je suis la scénariste d’Aya, les gens me sautent dessus. On me souffle même des idées. Les Ivoiriens sont super fiers, car cette BD est connue dans le monde entier : en France, au Canada, au Brésil, au Sri Lanka, et même en Asie du Sud. Ce personnage fait vraiment école. C’est une ambassadrice, car elle fait des études et veut réussir Aya était un personnage de fiction qui ne l’est plus.
Quelschangementsmajeurs avez-vousobservésàYopougon encinquanteans?
Yopougon n’est plus ce petit quartier ouvert, aéré et propre que j’ai connu dans mon enfance, dans les années 1970. La classe juste n’existe plus. Je ne parle pas de la classe moyenne, mais de celle dont les enfants ne manquaient de rien et mangeaient trois fois par jour. Ceux-là avaient au moins un de leurs deux parents qui travaillait, et ils partaient en vacances au village, chez les grands-parents. Aujourd’hui, ces parents n’ont pas de retraite et doivent installer des baraquements de fortune devant leur maison pour vendre tout et n’importe quoi. Ils vivent avec leurs
enfants et leurs petits-enfants. Des pièces ont été ajoutées à la maison avec les moyens du bord pour accueillir tout le monde Tout cela change la physionomie du quartier.
Qu’est-cequecettepaupérisation traduit-elle?
Que le pays régresse. Une grande partie de la population est marquée par la guerre civile. C’est celle qui occupe les bas-fonds de la ville minés par des trafics en tout genre : drogue, amours tarifés…
Les gens vivent dans la pauvreté et doivent choisir lesquels de leurs enfants iront à l’école, en général les garçons. Les enfants des rues, que l’on appelle « les microbes », disparaissent. Ils sont abandonnés, certains sont tués. On ne s’intéresse
jamais à eux. On pourrait les former et les remettre sur le droit chemin.
Pluslargement,qu’enest-ilde l’évolutiond’Abidjanetdeses infrastructures?
Comme toutes les grandes villes, Abidjan s’étend de plus en plus. Et pas forcément dans le bon sens. Il y a plus de 200 ghettos en Côte d’Ivoire, qui ont été installés en plein cœur d’Abidjan, notamment dans les quartiers chics comme Cocody. Ça vous change une ville. On construit de beaux échangeurs et de jolis ponts, mais la population est lésée. Dès Houphouët, on a vu le petit plateau se créer, ce « petit Manhattan » bien industrialisé, installé là pour ce soit la première chose que les étrangers voient en arrivant à Abidjan. C’était magique à l’époque.
Or, aujourd’hui, ce n’est pas possible de laisser les gens vivre dans ces conditions, où les réseaux de criminalité, comme les narco trafiquants venus du Niger et du Maroc, sont puissants. De petites associations viennent en aide aux enfants délaissés des ghettos, qui sont drogués la plupart du temps et commettent des larcins, mais elles sont dépassées par la situation. Près de la moitié de la population est pauvre, le salaire moyen ne dépasse pas 100 euros par mois, et le chômage est très élevé chez les jeunes. Abidjan est une mégalopole, mais son taux de croissance ne profite pas à tous.
Propos recueillis par Eva Sauphie PA TRICK GAILLARDIN / HANS LU CAS Couverture de l’album de Marguerite Abouet Aya de Yopougonunleadershipàconforter
Fin 2020, Afriland First Bank, la première banque camerounais, aadoptéunprojetd’entreprisedevant activitéentre2021et2025etdontl’opérationnalisatio au nouveau Directeur Général Célestin GuelaSimo. prisedefonctionofficiellele28juillet2022,lenouvea générals’exprimesurlesdéfisquil’attendent
Parvenirausommet est difficile. S’ymaintenirl’estdavantage.Etesvousconfiantenl’avenir? Afriland First Banksemaintient au sommet de la hiérarchie bancaire depuis plus de dix ans grâce àl’innovation permanente. Pour nous, l’activité bancaire n’a jamais consisté àoffrir lesmêmes produitsà tout le monde.Nous recherchons continuellement des solutions adaptéesaux besoins de chaque cible. Dans ce sillage et à titre d’exemple, nous offrons des produitsdefinanceislamiqueàune ciblespécifiquequines’accommode pas des principesdela finance conventionnelle.
Pendant22ans,etàpartirdepostes detravaildifférents,j’aicontribuéà l’accompagnementpersonnalisédes acteurs économiques dontcertains sont devenusdes champions internationaux.Decepointdevue, oui, j’ai confianceenl’avenir.Cet avenir est tracédans notreplan stratégique2021-2025quiconstitue notreboussole.
Le totalbilan d’Afriland First Bank est toujours aussi élevé. Ce leadership dansl’activité bancaire nationaleva-t-il de pair avec la qualitéduportefeuilledecrédit?
Le danger pourtoute banqueest de réaliserledéfi de la solidité au détriment de la maîtrise des risques. Heureusement, pour nous, nos efforts visant la soliditésont combinés àuntravail rigoureux de respect desratios prudentiels édictésparnotrerégulateur.Ils’agit deréaliserdesobjectifsquantitatifs
tout en veillant àlaconform des opérations et àlamaîtr desrisquesliésàl’activité.Cet flexibilité est àmon avis l secretdelapérennité.Afriland FirstBankveutallerloindans l’œuvre de contribution à unecroissanceéconomique sur le plan national et danslazoneCemac.C’est pourquoi nos équipes veillent jour et nuit au respect de ces exigences réglementaires. Toute chose qui nous garantit aujourd’hui une meilleure qualitédeportefeuillecrédit
du marché
guiderson
On constate qu’Afriland First Bank ouvre de nouvelles agences enmêmetempsqu’elleinvestitdans lesproduitsdigitaux. Cela n’est-il pascontradictoire?
Leprofilduclientdenotrecontexte est un profilhybride, certains qualifientcelade«phygical»:àlafois inscritdansunrepèregéographique (point de vente physique)et atteignable par de nouveaux canaux de communication tels que l’ordinateur ou le téléphone. C’est la raison pour laquelle nous allions maillage du territoire et investissementdansledigital.Notre réseaud’agences se densifieaufur etàmesurequenousdéveloppons nos produits de banque àdistance etdelibre-servicebancaire:E.First, Sara Banking, SARAMoney Par ce double investissement,nous optimisons notre contribution àlapolitique gouvernementale d’inclusionfinancière.