Focus Villes & urbanisation
Au marché d’Adjamé, le plus grand d’Abidjan, en juillet 2020.
ALIMENTATION
Comment nourrir les centres urbains
Agriculture intra-muros, réhabilitation des marchés, investissement dans les transports… Il faudra une action concertée et multiforme pour subvenir aux besoins des 760 millions de citadins que comptera l’Afrique en 2030.
ESTELLE MAUSSIONUn marché de 1 000 milliards de dollars : c’est ce que devrait représenter l’économie alimentaire l’ensemble des activités permet tant aux individus de se nourrir en Afriqueàlafindeladécennieselonla Banque mondiale. Vivier de création de richesses et d’emplois, ce secteur, qui génère 35 % du PIB en Afrique de l’Ouest d’après l’Organisation de coopérationetdedéveloppementécono miques (OCDE), joue avant tout un rôle crucial sur le plan de la sécurité etdelasouverainetéalimentaires.Ces dernièresannées,lacroissancedémo graphiqueet l’urbanisation rapidedu continent ont fait des villes les principaux centres de consommation… et lieux de tensions en raison des dif ficultés d’approvisionnement et des prixélevésquiendécoulent.Sinourrir lesvilles(quicomptaient472 millions d’habitants en 2015 selon les Nations unies) est un défi, ce le sera encore davantage à l’horizon 2030, quand le continent comptera quelque 760 millions de citadins, contre environ 600 millions aujourd’hui. Comment le relever? Éléments de réponse.
La question de la gestion alimen taire des villes refait aujourd’hui sur face alors que des menaces pèsent à la fois sur l’offre et sur la demande de biensalimentaires.Côtéoffre,laguerre en Ukraine induit des complications auniveaudesexportationsdecéréales dont plusieurs pays (Égypte, Algérie, Maroc, Nigeria, entre autres) sont dépendants, alors que les sécheresses à répétition réduisent les récoltes locales, en particulier dans l’est (victime en outre d’invasions de criquets) etl’ouestducontinent.Côtédemande, le choc provoqué par la pandémie de Covid-19 et l’inflation généralisée qui enrésulteréduisentlepouvoird’achat de nombreux foyers, contraints de tailler dans leur premier poste de dépenses, l’alimentation, qui représente44 %dubudgetenzoneurbaine sur le continent, selon l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture. Près de 18 millions de personnes sont en situation de grave insécurité alimentaire en Afrique de l’Ouest, un record depuis 2014, a indiqué en mai le Programme alimentaire mondial (PAM).Àcecontextetendus’ajouteun autreécueil:lemanquedeconnexions
entre zones de production et zones de consommation « Laproductionseule ne suffit pas à nourrir les villes, il faut aussi assurer toute la chaîne d’approvisionnement pour lier le champ à l’assiette »,notePhilippHeinrigs,économiste à l’OCDE et spécialiste des systèmesalimentairesouest-africains.
Structurer l’activité marchande
Or, en la matière, les obstacles sont légion : infrastructures de trans port manquantes ou de piètre qua lité, nombre limité de convoyeurs, carences des réseaux de distribution, barrières douanières, insécurité… « Il en résulte des coûts de transport élevés, répercutés sur le tarif des produits, ce qui explique que les denrées alimentaires en Afrique de l’Ouest sont parmi les plus chères du monde à niveau équivalent de revenus par habitant », constate Gaëlle Balineau, économiste à l’Agence française de développement (AFD) et experte des filières agroalimentaires Face à cette réalité,latâchedesvillesestcolossale, leurréponsenepouvants’inscrireque dans une politique globale incluant: soutien à la production, investisse ment dans les transports, régulation des points de vente, mise en œuvre de normes sanitaires et lutte contre le gaspillage. Cette approche, qui se double de la nécessité d’entretenir le dialogue avec l’ensemble des acteurs, est celle portée par le Pacte de Milan, une initiative engagée en 2015 et réu nissant 200 villes dans le monde, dont 35 en Afrique, en faveur d’une politiquealimentaireurbainedurable.
Outre les bonnes pratiques, ce pacte promeut une série de projets de consolidation des systèmes alimentaires locaux : microjardins assurant un revenu aux habitants les plus pauvres de Dakar, formation des vendeurs informels d’Abidjan à des standards de qualité afin de moderniser l’activité marchande Les deux villes ont été, avec Nairobi, membres du comité de pilotage du Pacte entre 2019 et 2021 Pour beaucoup, la solution réside aussi dans l’essor de l’agriculture urbaine, c’est-à-dire le fait de cultiver (principalement des fruits et des légumes frais) au sein des villes ou à leurs portes C’est déjà le cas à Casablanca, Abidjan, Lomé et Ouagadougou, entre autres. Si la
pratique des jardins urbains suppose que l’on résiste à la pression des promoteurs immobiliers, elle est béné fiqueàplusieurstitres :ellepermetde fournirdesproduitsàvaleurajoutéeà desconsommateursendemande,tout en assurant un moyen de subsistance àdescultivateursurbainsdéfavorisés. Sans oublier qu’en augmentant et en diversifiant la production agricole
vise à générer des recettes à travers la fiscalisation des vendeurs peut néanmoins aider à réguler les flux de marchandises, à améliorer la qualité des produits, à structurer l’activité marchande et à réduire les pertes.
Rôle positif de la Zlecaf
nationale, elle contribue à réduire les importations. « Si les pouvoirs publics peuvent aider en investissant notammentdanslachaînedufroid,la grande distribution, en faisant le lien entreproducteursetclients,aaussiun rôlecléàjouerpourstimulerl’agriculture urbaine », avance Ollo Sib, analyste du PAM pour l’Afrique centrale et l’Afrique de l’Ouest.
Plusieursautresvilles dontAbuja, Bouaké et Cotonou mettent encore l’accent sur la modernisation des marchés, rappelant qu’ils demeurent le principal lieu d’achat des produits alimentaires (pour plus de 90 % de la nourriture dans les villes ouest-afri caines, selon l’OCDE). Si, seule, elle ne suffit pas, cette stratégie qui
Autrementdit,c’estencoreunmoyen de consolider l’économie alimentaire premier pourvoyeur d’emplois avec 66 % du total en Afrique de l’Ouest selon l’OCDE en la formalisant et en la professionnalisant. Cette action est souvent menée de pair avec un renforcement des normes d’hygiène. « Le Ghana a fait beaucoup d’efforts sur ce point, comme en témoignent les nombreux contrôles menés dans plusieurs villes, dont Accra et Koumassi », reprend Ollo Sib, déplo rant toutefois le peu de progrès sur ce voletdanslamajoritédesautresvilles ouest-africaines.
Destendancesdefondjouentenfin de façon positive. La Zone de libreéchange africaine (Zlecaf), en levant les obstacles aux échanges trans frontaliers, ne pourra que faciliter l’approvisionnement des marchés. Les nouvelles technologies, utilisées pour la production, la distribution et la commercialisation, permettent déjà de connecter plus rapidement et à moindre coût les zones rurales aux zones urbaines. Les investisse ments annoncés dans la chaîne du froid ouvrent la voie à une consolidation des filières agricoles. Autant de solutions à combiner et à décliner au niveau local.
HASSAN OU AZZANI POUR JA La grande distribution a la capacité de stimuler l’agriculture urbaine. Ici, à l’AnfaPlace Mall de Casablanca.« La production seule ne suffit pas. Il faut assurer toute la chaîne d’approvisionnement pour lier le champ à l’assiette.»
L’hydrogène renouvelable permet de proposer des solutions énergétiquespropres pour répondreaux besoins de l’Afrique dès maintenant. Hydroma développe actuellement plusieurs projets de mobilité urbaine basés sur l’hydrogène vert et naturel.
LES DÉFIS DE L’URBANISATION EN AFRIQUE
Selon les statistiquesdes NationsUnies, le processusd’urbanisation en Afrique connaît un développement accéléré. La part de la population résidant dans les villes devraitpasser de 44 %en2021 à59% en 2050.L’Afrique est le continent quienregistreactuellementla plus forte progression de sa population urbaine(+3 %par an).
Ce processus d’urbanisation accélérés’accompagne d’une série d’impacts négatifs sur l’environnement :congestion, pollution sonore, hausse des émissions de CO2,etc. La mise en place de solutions de développement àfaible émission de carbone est indispensable pour améliorer la vie des populations et contribuer àla solution de la crise climatique.
On estime que 90 %delapollution dans les villes africaines est liée aux émissions des véhicules. Lessolutions de transport en communs innovants et durables constituent un élément clé pour répondreàces enjeux. Pour fairefaceaux défisdes villes Africaines, Hydroma mise sur la mobilité hydrogène vert et naturel dans le cadredeson West African Big Green Deal (W.A.B.G.D.).
UN ACTEUR AU SERVICE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
Hydroma est un développeur de projets d’hydrogène vert et naturel en Afrique et au Canada. Pionnier de la découverteetdelavalori sationdel’hydrogène natureldanslemonde, Hydromadéveloppe activementdes projetsdeproduction, transport et distribution d’hy drogène vert pour le marchélocalafricainetà l’international
Avec sonAfrican Big Green Deal, une initiative accélératrice de la transition énergétique, Hydroma veutnon seulementproduirede l’hydrogèneetdel’ammoniac renouvelables,maisaussi dévelop per de nouveaux secteurs industriels tels que la production d’acier et d’engraisvert. De même, Hydroma comptetransformer lesvilles du continent via l’hydrogène vert et naturel comme nouveautype de carburant durablepour la mobilité.
La mobilité hydrogène, c’est tout d’abordune mobilité électrique avec un temps de remplissage et une autonomie similaires aux véhicules àcombustion diesel. C’est aussi une solution technique qui se décline àplusieurs niveaux d’utilisation :berlines, bus, bennes àordures ménagères, trains, camions, mais aussi péniches, bateaux et avions.
Cela représente in fine une meilleurequalité de l’air avec l’élimination complète de la pollution sonoreetdes émissions de carbone (CO2)ainsi que d’oxydes d’azote (NOX).Lamobilitéhydrogène aunimpact positif direct sur la qualité de vie et la santé publique des citadins mais c’est également un nouveau secteur d’activité avec des perspectives de créations d’emplois sur toute la chaîne de valeur :transport, fournitured’hydrogène, services après-vente, maintenance, etc.
UN ATOUT POUR LES VILLES AFRICAINES
Lesprojets d’Hydroma, en Afrique de l’Ouest ou de l’Est, se concentrent sur divers usages de mobilité :
•Les bus et bennes àordures ménagères. De nombreuses villes d’Afrique subsaharienne soit ne disposentpas de flotte d’autobus ou de système de collecte des déchets, soit ont un parcvétuste et limité.Lamobilité hydrogène permet dès maintenant de structurer le secteur avec lesdernières technologies durables.
•Letrain. Avec l’hydrogène, l’Afrique alapossibilité de développer des trains électriques sans infrastructuredetransmission d’électricité associée, ce qui facilite considérablement la pertinence de cette solution. Hydroma étudie actuellement la remise en marche de la ligne Bamako-Dakar grâce àuntrain àhydrogène.
•Les solutions de mobilité durable àl’hydrogène considérées par Hydroma en Afrique s’étendent au-delà des villes et concernent également le secteur minier et portuaire, avec plusieurs équipements de manutentions àhydrogène en développement.
Avec l’hydrogène vert et naturel, Hydroma propose des solutions durables pour les villes africaines
ENVIRONNEMENT
La finance durable, une aubaine pour les villes?
SSINE GAIDI/ANADOL U AG ENCY VIA AFPEntre les battements rythmés des éoliennes se dresse Biofos, le centre de traitement et de valorisation énergétique des eaux usées de Copenhague. Venus des quatre coins d’Afrique, une vingtaine de représentantsdemunicipalitéslèventlesyeux vers ses hautes cuves métalliques. Ils ont été invités à la fin de septembre par la Banque africaine de développement (BAD) à découvrir les innovations de la capitale danoise en matière de transition environne mentale et climatique.
«UnpaysrichecommeleDanemark peut faire payer ses citoyens pour un service aussi onéreux, mais le niveau de vie en Afrique ne permet pas ce luxe », constate Kamel Ben Amara, maire de Bizerte, en Tunisie. La ville fait partie des cinq bénéficiaires du Fonds de développement urbain et municipal(UMDF),unprogrammede renforcement des capacités et d’aide au montage de projets lancé en 2020 par la BAD.
Aux côtés d’Antananarivo (Madagascar), de Conakry (Guinée), deDodoma(Tanzanie)etdeLibreville
(Gabon), la métropole du nord de la Tunisie a obtenu, en 2021, un financementpourréaliserlediagnosticdes besoins pour réaménager son centreville, réorganiser sa circulation et construire une cité nouvelle. Tout celasurfondderésilienceclimatique.
Assainissement économique
La même année, Bizerte a fait évaluer sa situation financière, estimée à B+ par l’agence de notation PBR Rating. « Cette note n’est pas extraordinaire, mais nous savons désormais où nous en sommes au
CAMILLE LAFRANCE, ENVOYÉE SPÉCIALE À COPENHAGUEDe nouveaux mécanismes de financement et de développement de projets sont désormais à la portée des municipalités du continent, invitées à s’inspirer du modèle nordique de transition verte.YA
moment d’aborder les bailleurs de fonds potentiels. Il est temps de réfléchir à la viabilité financière de nos villes en Afrique, c’est la clé pour accéder aux financements », poursuit l’édile. En attendant, les équipes de Kamel Ben Amara voient grand pour améliorer l’empreinte carbone de la cité balnéaire : de la création d’un centre de compos tage à des projets de traitement des déchets ménagers et d’électrification des transports publics.
Sur l’ensemble de ces chantiers, Copenhague fait figure de devancier
et de modèle. Mais tout n’a pas toujours été rose pour la métropole danoise, qui a frôlé la faillite dans les années 1980, avant qu’un sauvetage par le gouvernement central ainsi que diverses cessions d’actifs muni cipaux, notamment immobiliers, permettent la relance de l’économie locale et des finances de la ville. Un exempled’assainissementfinancierà suivre pour les villes africaines?
Décentralisation
Logement, assainissement, gestion des déchets… Avec ses 4,5 millions d’habitants et ses 100000 nouvelles arrivées annuelles, la capitale écono mique du Cameroun ne compte plus ses défis. « Nous sommes venus ici pour chercher des soutiens car nos besoins sont immenses », constate Roger Mbassa Ndine, son maire. Si, contrairement à d’autres, la communauté urbaine de Douala (CUD) a pu réaliser des emprunts auprès, entre autres, de United Bank for Africa (UBA) au Cameroun et des investis seurs de la zone de la Communauté économiqueetmonétairedel’Afrique centrale (Cemac), « cette capacité d’endettement n’est pas illimitée et nous souffrons de l’insuffisance des investissements », déplore Roger Mbassa Ndine La CUD est égale ment « l’organisme d’exécution » du projet de Bus Rapid Transit de Douala, financé par la Banque mondiale.
Elle aimerait rejoindre le très sollicité réseau de l’UMDF, qui s’étendra à quinze villes en 2023. Ce fonds est doté d’une enveloppe de 50 millions de dollars, censés financer pendant cinq ans la préparation et le montage des projets en amont de la sollicitation des financements bancaires. Ses promoteurs espèrent débloquer ainsi jusqu’à 5 milliards de dollars d’investissements bancaires dans les projets urbains africains.
«Nousaidonsaussilesvillesàamé liorer la gestion de leurs ressources et de leurs revenus propres et à négo cier avec les autorités centrales pour obtenir des transferts nationaux plus stables », commente Marcus Mayr, coordinateur de l’UMDF. Encourager lespartenariatspublic-privé(PPP)fait égalementpartiedesaxespromus.«Il existe un secteur privé compétitif et
très dynamique en Afrique, qui se révèle prêt à investir, ajoute-t-il, reste à aider les villes à l’encadrer. »
Pour faire face à une population de plus de 2,5 milliards de personnes sur le continent, majoritairement urbaine à l’horizon 2050, les finance mentsdisponiblesàl’échellelocalese sont multipliés ces dernières années. Et une forme de décentralisation a déjà été lancée dans certains pays. « Notre “Climat Change Act” permet aux villes de mobiliser des fonds et de gérer leur finance climatique, le processus s’institutionnalise », détaille Robert Sangori, directeur adjoint du développement urbain au sein du gouvernement kényan.
Le réseau de l’UMDF s’étendra à quinze villes en 2023. Ce fonds est doté d’une enveloppe de 50 millions de dollars.
Les obstacles demeurent toutefois nombreux « Les seuils minimums d’investissement fixés par les bailleurs de fonds restent souvent bien plus élevés que les capacités d’em prunt et d’investissement des villes africaines », regrette Jean-François Habeau, directeur exécutif du Fonds mondial pour le développement des villes (FMDV), basé à Paris. Cette alliance recherche des financements pour les collectivités locales et aide lesÉtatsàrenforcerleurscapacitésde négociation et d’obtention de financements en regroupant les portefeuilles de projets de plusieurs villes.
« La plupart des bailleurs ont créé des fonds d’appui à la préparation de projets comme l’UMDF afin de permettre aux villes d’atteindre la maturité nécessaire pour envisager des financements, poursuit cet ancien directeur de l’Institut des métiers de la ville d’Antananarivo. Ce sont de bonnes initiatives, mais qui n’ont pas encoresuffisammentd’impact.Ilfaut aussi encourager une démarche plus systémique en aidant les pays à créer les conditions d’investissement dans des villes secondaires. »
MAROC
Quand Agadir s’éveillera...
Depuis 2020, le royaume engage des moyens colossaux pour faire de la Perle du Souss un pôle économique compétitif, à l’instar de Casablanca, Rabat et Tanger.
BILAL MOUSJIDA«gadir est en train de changerdevocation», s’enthousiasmed’emblée le consultant en stratégie d’un cabinet en vue du chef lieu de la région Souss-Massa, à propos des chantiers engagés ces dernières années. À commencer par le Bus à haut niveau de service, pour un coût de 110 millions d’euros, qui permettra dès 2024 le transport quo tidiendequelque600000voyageurs, à travers une trentaine de Trambus. Autre chantier d’envergure : la voie decontournementnord-estduGrand Agadir.Longuede29kilomètrespour un investissement total de 770 mil lions de dirhams (70 millions d’euros), cette rocade optimisera le temps de trajet entre les infrastructures les plus importantes : le port, l’aéroport Al Massira, le grand stade, la station balnéaire de Taghazout ou encore la zone franche industrielle. Reconstruiteaprèsleséismedévas tateur de 1960, la deuxième destination touristique du pays n’avait
été que peu touchée jusque-là par l’essor économique dont ont béné ficié d’autres grandes villes. La contribution de cette région au PIB du royaume est de 79 milliards de dirhams, ce qui la place en sixième position, loin derrière Casablanca, Tanger et Rabat.
Création de 24 000 emplois Mais la donne a changé depuis novembre 2019. « Il est inconce vable qu’en dépit de la centralité géographique d’Agadir, de ses ressources, de ses potentialités, certaines infrastructures de base se cantonnent à Marrakech », s’était ému Mohammed VI. Dès 2020, un nouveau Programme de dévelop pement urbain (PDU) était amorcé pour impulser le décollage de la Perle du Souss. Son coût : 6 milliards de dirhamspourunesoixantainedeprojets (transport, formation, industrie, culture), dont des dizaines ont déjà vu le jour Objectif tel que défini par le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi
Laftit : faire de la ville côtière « un véritable pôle économique, attractif et compétitif ». « Le développement d’Agadir et de la région Souss-Massa va soulager la pression exercée sur des villes comme Casablanca, qui continuent d’accueillir des jeunes à la recherche d’un emploi », analyse pourJA unconsultantquiacollaboré au PDU.
Outre les moteurs que constituent le tourisme, l’agriculture et la pêche, la région dispose depuis 2018 de sa propre stratégie industrielle, la toute première déclinaison régionale d’un vaste plan national. De l’offshoring aux matériaux de construction, en passant par la plasturgie et l’industrie du papier, plusieurs filières s’imposent dans la zone, portées par des entreprises de premier rang, notamment dans le BTP (Ciments du Maroc, Holcim ex-LafargeHolcim –, Sadet, Vetcam), l’emballage (SGIPS) ou encore les services clients (Webhelp). Selon le gouvernement, cesprojetsindustrielsdevraientcréer 24 000 emplois.
Agadir, qui compte environ 500 000 habitants (2,7 millions dans la région Souss-Massa), est également au cœur de la stratégie de l’Office national des chemins de fer La ligne à grande vitesse qui doit la relier à Marrakech attise déjà les appétits de géants comme Siemens, Alstom ou encore le chinois CRCC. La région vise un PIB de 60 milliards d’euros à l’horizon 2046 Une ambi tion qui nécessitera un investisse ment de 20 milliards d’euros dans les infrastructures, les transports, les énergies renouvelables, la santé et l’enseignement, durant un quart de siècle, si l’on en croit le Schéma régio nal d’aménagement du territoire.
OKLA MICHAL/AP/SIPUNEEXPÉRIENCE ET UN MODÈLE DE PARTENARIATPUBLIC-PRIVÉ (PPP) RÉUSSI
Présent en Côte d’Ivoire, précisément sur le terrain des solutions numériques appliquées au système du transport routier,Quipux Afrique réalise une «succes story »qui se dessine àgrands traits. L’entreprise adéjà remporté des batailles qui forcent le respect. D’abord pour la mise en place d’un Système de Gestion Intégrée (SGI) de l’ensemble des activités du transport routier avec l’État, àtravers un Partenariat public-Privé (PPP) jusqu’ici réussi.
DES INVESTISSEMENTS DE PLUS DE 21 MILLIARDS DE FCFA
Dès 2014, année du début effectif de ses activités, Quipux Afrique ainvesti un peu plus de 12 milliards de FCFA dansles équipements et le dispositif nécessaire pour la mise en place de procédures informatisées de traitement et de délivrance des documents administratifs du transport routier.Ysont inclus, la construction de Centres de gestion intégrée (CGI), implantés dans presque tous les chefs-lieux de régions améliorant ainsi l’accessibilité àl’administration des transports. Lesinvestissements sur la période 2013-2022 s’élèvent à 21 milliards de FCFA (32 millions d’euros). Cette innovation aabouti àplus d’efficacité et de célérité dans le traitement des dossiers, la production de statistiques fiables, le suivi opérationnel et la coordination sur l’ensemble du territoire.
L’autre acquis de ce partenariat aété la plateforme technologique qui apermis la mise en place d’un véritable écosystème de services et de solutions de mobilité.
Aujourd’hui, cette base de données permet l’automatisation de la gestion des infractions et l’implantation de systèmes de transport intelligents.
LE BIEN-ÊTRE DES POPULATIONS EN LIGNE DE MIRE
Au plan des potentialités humaines, les défis sont importants. Le dernier rapport de la Banque mondiale paru en 2019 a révélé que ce sont plus de 4milliards de FCFA(environ 6,9 millions de dollars) qui sont dépensés quotidiennement par les Abidjanais (en coût monétaire et d’opportunité), soit la troisième dépense des ménages (après la nourriture et le logement) et l’équivalent d’environ 5% du PIB national en 2017
C’est dans ce contexte que Quipux Afrique acontribué àlacréation de 1000 emploisdirects et 2500 emplois indirects. La mise en place de cette innovation majeure constitue le premier dispositif issu des Systèmes de Transport intelligent (STI ou Intelligent Transport System –ITS en anglais) en Afrique Subsaharienne. Objectif,renforcer la sécurité routière, sauver des vies et mettre en œuvre un véritable programme de digitalisation dans un secteur marqué par l’informel.
UN PARTENARIAT BÉNÉFIQUE ÀL’ÉTAT
Derrière l’exécution d’un cahier des charges fourni, l’opérateur marque de son empreinte la bonification et la sécurisation des recettes tirées par l’Etat ivoirien de la modernisation du transport. Depuis le lancement de ses activités,
c’est plus de 100 milliards FCFA (153 millions d’euros) de ressources générées dont la moitié réinjectée dans l’économie sous diverses formes. L’État y gagne.
Beaucoup ne l’attendaient pas àuntel niveau d’impact pour l’entreprise de droit privé ivoirien partie d’un capital de 500 millions à3milliards de FCFA aujourd’hui. Sans prétendre réinventer la roue, l’équipe du Directeur Général Ibrahima KONE refusedestagner dans les eaux des acquis et compte tirer profit de la dynamique managériale couplée àla jeunesse de son effectif (35 ans de moyenne d’âge) et ancré dans l’innovation technologique.
Quipux Afrique prévoit un certain nombre d’activités pour ses dix ans de présence en Côte d’ivoire, en 2023. Ces festivités seront couplées avec une ambition clairement affichée : celle d’un Champion National
Un futur de plus en plus urbain
Un nouveaurapport consacré àlamobilité éclaire sur les défis liés àl’urbanisation galopante du continent.Etillustreincidemment l’immensité des efforts àfournir pour les relever
Dans «Bâtir lesvilles durablesdedemain », l’Africa CEO Forum (ACF) et le cabinetdeconseil OkanPartnerssepenchent sur l’un desplus gros casse-têteauxquels sont confrontéesles autorités publiques ainsi que lespopulations africaines:les mobilités urbaines. Uneétude qui regorgededonnées, de témoignagesetd’exemples édifiants. Elle exploredifférents challenges que le continent devra affronter,alorsqu’il accueillera 900 millionsdenouveauxurbains surune durée de trenteans.C’est une fois et demieleurnombre actuel et une progressionplusdedeux foissupérieure àcelleenregistrée entre1990et2020.
La sidérante croissancedes popu lations urbainesafricainesaucours destrois dernièresdécenniesa déjà entraîné un maelströmdediffi cultés.Comme le souligne le rapport ACF-Okan, alors qu’enmoyennele continent ne compteque 42 voitures pour 1000 habitants, contre176 en Amérique latine,ilabritequelques unesdes villes qui présentent lesplus forts tauxdecongestion urbaine au monde.L’étude souligne que,auGhana, lespertesdeproduc tivitéduesaux embouteillages représentent jusqu’à 8%duPIB. Cettesituationpourrait s’aggraverà l’avenir,avecunnombredevoitures susceptible de doubler,voirede décupler,d’icià2050,avertit le rapport.Plus problématiqueencore, seulement 5% destrajetsurbains quotidiens sont effectuésen« trans portscollectifs institutionnels» (métros,tramways,etc.), contre 10-20% en Amérique latineetplus de 40 %enEuropedel’Est. Joël Té-Léssia Assoko
Évolution de la population urbaine en Afrique
15 ANS D’EXISTENCE COMME DÉVELOPPEUR DE PROJETS D’INFRASTRUCTURE EN AFRIQUE
Le groupe ABD estundéveloppeur de projets axésur l’Afrique. Les projets d’infrastructuredugroupe ABD ont permis d’investir plus de 2,5 milliards de dollarssur le continent. Les projets concernent lessoins de santé, le transport, l’eau, leseaux usées, l’enseignement supérieur, l’énergie et l’agriculture.
ABD Group aété fondé il ya15ans par John Nevergole et Mohamed Keïta. Après avoir mené àbien plusieurs transactions transfrontalièresensemble, John basé aux États-UnisetMohamed basé au Mali, ont compris qu’ilsavaient développé une compréhension de ce qu’il fallait pour réussir dansunenvironnement multiculturel et international. Ainsi, ABD Group a été fondé avec la mission d’êtreundéveloppeur de projets axésur l’Afrique et un partenairedeconfiance pour lesinvestisseurs, entreprises multinationales et gouvernements africains.
Le DG d’ABD Group, John Nevergole, estmembre du Conseil consultatif du Président des ÉtatsUnis pourles affaires en Afrique (PAC -DBIA), un comité composé de hauts dirigeants d’entreprises américaines qui conseillent le président sur l’engagement commercial avec l’Afrique. Grâceàce rôle,legroupe ABD met àdisposition son expérience, en lien avec d’autresgrandesmultinationales américaines, sur la manièred’accroître leséchanges commerciaux et de servir de pont entreles dirigeants politiques et commerciaux américains et africains.
EXEMPLES DE PROJETS
Côted’Ivoire
Le groupe ABD estlepromoteur d’un projetvisant àfinancer et à construireplus de 100 hôpitaux àtravers le pays, en mettantl’accent sur la santé maternelle. La tailletotaleduprojet estde320 millions de dollarsetlaconstruction estactuellement en cours. Ce projet aété annoncédans le cadredulancement par le présidentBiden du Partenariat pour lesInfrastructures et lesInvestissements Mondiaux au G7 plus tôt cetteannée.
Sénégal
Le groupe ABD estlepromoteur d’un projet de financement et de construction du pont de Ziguinchor et Tobor au Sénégal qui assureralavitalité d’un corridor commercial clé entreleSénégal et ses voisins.Le secrétaireAnthony Blinken aassisté àlasignature d’un protocoled’accord entre ABD Group et le gouvernement du Sénégal lors de sa visiteauSénégal en novembre2021.
Croissancefuture ABD Group aune forteprésenceenAfrique de l’Ouestetprévoit de continuer àdévelopperson activité sur le marché. Dans le même temps, ABD Group se développe actuellementenAngola, au Rwanda et en Tanzanie mais aussiavecdes projets d’expansion, en Ouganda et au Kenyaen2023/2024.
Tribune
Nessan Akemakou
Docteur en sciences politiques et président du think tank L’Afrique desidées
Urbanisation :les dangers du modèlenéolibéral
LaBanque africainede développement (BAD) rappelle que,depuis 1990,lenombredevilles en Afrique adoublé –passant de 3300 à7600 –etque leur population cumuléeaaugmenté de 500 millions de personnes. Des disparitésimportantes demeurent :selon ONU-Habitat, moins de 20 %delapopulation vit en ville en Éthiopie,contre 50%à80%auCameroun.
Mais l’urbanisation en Afrique estsouvent définie comme anarchique (accès intermittent àl’eau etàl’électricité, pollution, embouteillages,logements précaires…) Il estestiméque les bidonvillesabritent jusqu’à 50 % delapopulationurbaine (soit 300 millions d’Africains). Les politiquesurbaines–lorsqu’elles existent –neprofitent souvent qu’à une poignée de privilégiés. Lorsqu’il apparaît dans les «quartierspopulaires»,l’État ne le fait que sous la formede bulldozer ou d’agent en uniforme pour détruireles constructions, majoritairementillégales.
Unemeilleure planification est nécessaire, mais elle ne peut se faireque si les populations, les plus modestes notamment, sont placéesaucœur despolitiques. C’est-à-direconsultées en amont, avec une priseenconsidération claire de leursbesoins de base (santé, éducation, emploi, etc.). L’approche descendante (top
down) manque d’efficacité, car elleest éloignée desréalités des principaux intéressés.Les plans directeursd’aménagement et leur cohorte de normess’élaborent sans impliquerles populations ni songeraubien-être de toutes lescomposantes de la société.
Décentralisation et audace
Les«villesnouvelles »imaginées pour désengorgerles mégalo poless’inscrivent dans la même logique. L’Égypte construitune nouvelle «capitale»,inspirée des smart cities, surune zone désertique de 700km² située entrel’« ancienne ville» et l’entrée du canal de Suez.Ce projet, censédésencombrer Le Caire, surpeuplé,doit abriter desbâtimentsadministratifs, des représentations diplomatiques et deslogements de hauteou moyenne gamme.Celarevient àdireque le tiersdes 20 millions d’âmescairotes,qui vit avec moins de 1,7dollar(1,64 euro) par jour,enseradoncdefacto exclu…Cela illustre leserrances du modèle néolibéral d’urbanisa tion,qui accentueles inégalités socialesetles fractures spatiales.
Uneapproche ascendante (bottom up) apparaît plus indiquée, présentantplusde chancesdesuccès,car elleintègre dèsl’oréedu projetles besoins des populations. Elle s’accompagne souvent d’unedécentralisation
et d’une audacieuse politique infrastructurelle. Lesexpériences asiatiquesréussies(CoréeduSud, Malaisie…) donnentmatière à penser.L’exemple de Diamniadio, au Sénégal, –qui doit déconges tionner Dakar en accueillant à terme 350000 habitants–semble allerdans la bonne direction. Àtravers despartenariats public-privé, l’État aaccordé lesterrains àtitregracieux àdes promoteursimmobiliersqui doivent lesvaloriser, sous réserve d’assurer une mixité sociale et fonctionnelle.
Le projet aété couplé àla construction d’infrastructures d’envergure (aéroport,train régional, etc.). Certes,toutn’est pas parfait. L’indemnisation adéquatedes paysanspour la réduction desterres agricoles estunsujet majeur. Mais lespremières observations sont positives. L’avenir nous dira si Diamniadio évitera le piège de la ville-dortoir,dans lequelest tombée l’ivoirienne Yamoussoukro.
Il estplusindiqué d’intégrerdès l’orée du projet lesbesoins despopulations.
FINANCER LES VILLES, C’EST FINANCER LE DÉVELOPPEMENT
L’Afrique est le continent qui connaitactuellementleprocessus d’urbanisation le plus rapide. Mais cette croissanceurbaine n’est pas accompagnée des infrastructures nécessaires. Pourtant, des solutions existent. Que fait UNCDF ?
Faciliter les transferts intergouvernementaux La décentralisationconfèreaux autoritéslocales de larges responsa bilités. Maiselles ont besoin des fi nancementsdel’État. Cestransferts doivent êtreprédictibles, inconditionnelsetsubstantiels. Ils doivent aussipouvoir êtreconjuguésà d’autressources de financement servant ainsi àlamobilisation de ressources additionnelles auprès du secteur privéoudefonds Lesautorités localessontaussi en première ligne de la lutte contrele changement climatique.
En s’appuyant sur ces systèmes de transfertdéjà établis, le mécanisme de financement de l’adaptationauchangement climatique au niveau local -LoCAL -aide àaccéder aux financements,ausoutien techniqueetaurenforcement des capacités.Mécanismenormalisé,
internationalement reconnu, conçu et hébergé par UNCDF,LoCAL opère àtravers des subventions pour la résilience climatique basées sur la performance (SRCBP).
Plusde34payssesont engagés, dont 24 en Afrique, grâce notamment àunappuides ambassadeurs LoCAL– ministres des pays affiliés.
Lesfonds adaptés aux villes L’écosystème financier n’estpas adapté aux réalités des collectivi tés locales.Pour changer la donne, l’UNCDF alancé en 2019, en coopération avec Meridiam et CGLU un Fond international d'investissement municipal (IMIF). Plus de 350 millionsd'euros ontété levés sur les marchés financiers.
Le Fonds dispose d’uneFacilité d'assistancetechnique (IMIF-TAF) quiest gérée par l'UNCDF.En 2020-2021,l'UNCDF afourni une assistance technique et accordé un financement àplus de 15 projets d'investissement municipaux, dont leprojetdesystèmedebus rapide (BRT)pour résoudre les embouteillages àKumasi (Ghana).
Un appeld’offre est en cours sur le site https://lnkd.in/epMFcJEa.
Faciliter l’accèsaumarché des capitaux
Lesmarchés decapitaux nationaux restent considérablementsous-développésenAfrique
Le programme Blue Peace apour objectif de faciliter l’accès àdes fi nancementspour les projets liés à l’eau etainsi de construireune paix durable entreles peuples. L’émissiondelapremièreobligation fiscalebleue permettrade financer le secteurdel’eau àtravers un Blue Peace Bond.
Uneobligationverte municipale estaussi en train d’êtremise en placesur le marché financier tanzanien.LeTanga Water Bond, est le résultat d’un appui technique àla Tanga Urban Water Authority and Sanitation(UWASA) pour émettre une obligationsur 15 ans de USD 23,1 Mns. Lesrecettes provenant de l’exploitation de l’eausont affectées au remboursement de l’obligation (principal et intérêts). Finalement, UNCDF accompagne le RoyaumeduMaroc pour mettreen place unsystème de prêt basésur les économies d’énergie. Une première transaction est réalisée avec lamunicipalité de Chefchaouen,
elle doit permettrenon seulement de financer la rénovation du réseau d’éclairage public de la commune àhauteur d’un million d’euros, mais aussi de créer un système de fond revolving, pouvant mobiliserdes financements additionnels auprès des marchés financiers.
Le recours àlagarantie pour les villes
Afindedonner confiance aux investisseurs, la mise en place de mécanismes de garantie est indispensable, cela permettrade développer des mécanismes de partage des risques et promouvoir ainsi des PPP municipaux, un concept encorenaissant en Afrique. La mise àdisposition de garanties doit permettredefaciliter la réalisation des premières transactions et par la même de démontrer la faisabilité des mécanismes, en donnant ainsi confiance auxinvestisseurs. UNCDF travaille ainsi avec ses partenaires européens afindemettreenplace